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Traité de Verdun

Traité de 843 divisant l'empire franc entre les petits-fils


de Charlemagne

Traité de
Verdun

Les royaumes francs


après le partage de
Verdun en 843.
Royaume de Charles le
Chauve
Royaume de Lothaire
Royaume de Louis le
Germanique
Type de frontalier
traité
Langues vieux
français et
vieux haut-
allemand[1],
[2]

Signé août 843


(date non
connue
avec
certitude :
cf. la
section de
la page sur
le jour du
traité)
Verdun
(Austrasie)
Parties
Signataires
Charl Loth Louis
es II aire I II de
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Chau (Fran anie
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(Fran médi cie
cie ane) orien
occid tale)
ental
e)

Le traité de Verdun est un traité conclu en août 843[3],[4]


par les trois fils survivants de Louis le Pieux, donc
petits-fils de Charlemagne, qui se partagent ses
territoires appelés Empire carolingien en trois
royaumes. Il est souvent présenté comme le début de la
dissolution de l'Empire unitaire de Charlemagne,
consacrant ainsi sa division, qui se révèlera en fait
définitive (si l'on met de côté une éphémère
réunification sous le règne de Charles III le Gros), et du
même coup l'un des principaux actes fondateurs de ce
qui deviendra la France et l'Allemagne. Ce traité est la
conséquence de l'application de la coutume franque qui
est fondée sur le partage de l'héritage entre tous les fils
héritiers plutôt que son attribution seulement au fils
aîné, en dépit de la règle de primogéniture masculine
(agnatique) appliquée chez les Romains.

Le texte du traité, perdu, ne nous est pas connu. Les


annales de Saint-Bertin[5] et les annales de Fulda
relatent cet événement d'une manière laconique et
imprécise.

C'est à la suite de ce traité que la zone géographique


appelée « Gaule » depuis plus de mille ans est désignée
désormais sous le nom de « Francie occidentale », qui
donnera le terme « France » ultérieurement.

Contexte
À la mort de Louis le Pieux, le 29 juin 840, son fils aîné,
Lothaire, s'arroge sa succession en vertu de l'Ordinatio
Imperii de juillet 817. En 840, Lothaire est en fait en
position de force par rapport à ses deux rivaux Louis et
Charles. Quand le premier doit affronter des troubles
intérieurs dans son royaume de Bavière, le second doit,
lui, reconquérir la confiance des grands de son royaume
d'Aquitaine, qui avaient été séduits par Pépin et
refusaient de reconnaître Charles. Lothaire l'a très bien
compris et profite de la situation pour envoyer des
messagers un peu partout dans l'Empire, mais surtout
dans le royaume d'Aquitaine, afin de récupérer les
partisans de Pépin, décédé en 838[6]. Cette stratégie
fonctionne puisque le fils de Pépin, Pépin II d'Aquitaine,
prend parti pour Lothaire. Louis le Germanique et son
demi-frère Charles le Chauve comprennent vite qu'ils
doivent s'allier pour contrer les ambitions de Lothaire.
Ils battent leur aîné ainsi que Pépin II à la bataille de
Fontenoy-en-Puisaye, le 25 juin 841. En 842, ils
renforcent leur alliance par les serments de Strasbourg.
Lothaire finit par céder et conclut avec ses frères le
traité de Verdun[7].
Le partage de Verdun et les
ajustements ultérieurs
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l'Empire (843) : (855) : la n (870) : (880) :
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. dans le
conflit.

Louis le Pieux (à droite) bénissant la


division de l'Empire carolingien ;
extrait des Chroniques des rois de
France, XVe siècle.

En août 843[8], par le traité dit de Verdun, les trois petits-


fils de Charlemagne, issus de son fils (loi salique), se
partagent les territoires de l'Empire[9] que ce dernier
avait fondé :

Charles le Chauve reçoit la Francie occidentale,


appelée France vers 1200 ;
Lothaire Ier, à qui échoit le titre impérial, reçoit la
Francie médiane, du centre de l'Italie à la Frise ;
Louis le Germanique reçoit la Francie orientale
(communément nommée Germanie, noyau du futur
Saint Empire romain germanique).

Il n’existe pas d’original ni de copie du traité de Verdun.


Toutes les informations sont fournies par Nithard, un
des deux petits-fils de Charlemagne issus de sa fille et
exclus de la succession (loi salique)[10].

Ce partage « des quatre fleuves » (Escaut, Meuse,


Rhône et Rhin) soulève des problèmes quant aux
langues parlées dans les différents États : des
populations de langue romane se trouvent dans une
entité germanique (Wallons), et, inversement, la Flandre,
de langue germanique, se trouve rattachée à la future
France[11]. De même dans les déplacements au sein
des États (il faut près de trois semaines pour rallier
Rome à Aix-la-Chapelle).
Conséquences
Le traité fut un compromis qui affaiblissait
considérablement la portée de l'idée impériale. L'identité
qui avait existé sous Charlemagne et Louis le Pieux
entre l'Empire et l’État franc disparaissait. L'unité
impériale ne subsistait plus qu'en théorie ; son
universalité cessait de correspondre à la réalité puisque
l'empereur ne gouvernait plus en fait que le tiers de la
chrétienté occidentale[12].

« Ce traité de hasard a déterminé tout le


destin de l'Europe. En effet, par suite de la
faiblesse de nos derniers Carolingiens puis
de nos premiers Capétiens, les rois de
Germanie purent annexer sans grande
difficulté toute la fameuse zone médiane, à
savoir en 880, la Lotharingie, puis en 1034,
le royaume d'Arles, sans parler de l'Italie
que leur livrait juridiquement leur
accession au trône impérial. »
— René Grousset

La Francie médiane disparaît rapidement. Dès la mort


de Lothaire en 855, par le traité de Prüm, elle est
partagée entre ses trois fils : l'aîné, Louis II a la partie
sud, le royaume d'Italie, et le titre impérial, Lothaire II a
la Lotharingie partie nord et Charles le centre, le
royaume de Provence. L'empereur n'était plus qu'un
souverain secondaire, beaucoup moins puissant que
ses oncles Louis le Germanique et Charles le Chauve.

À la mort de Charles de Provence en 863, ses


possessions sont partagées entre ses deux frères.
Après la mort de Lothaire II (869), la Lotharingie est
divisée entre ses oncles Louis le Germanique et Charles
le Chauve (traité de Meerssen, 870). En 875, Charles le
Chauve, roi de Francie occidentale, récupère le royaume
d'Italie à la suite de la mort de son neveu Louis II. En
879, c'est Charles le Gros, roi de Francie orientale, qui
récupère l'Italie. En 880, par le traité de Ribemont,
Louis III et Carloman II, petits-fils de Charles le Chauve,
abandonnent la Lotharingie au roi de Germanie Louis III
le Jeune. Par ce traité, la Francie occidentale retrouve
approximativement les frontières qui avaient été fixées
au traité de Verdun.

Beaucoup d'historiens ont considéré ce traité comme


l'acte de naissance des nations française et allemande,
mais, à cette époque, les peuples compris dans les
différents royaumes n'avaient pas un sentiment
d'appartenance envers ces derniers. Les royaumes sont
constitués de peuples qui ne partagent pas la même
langue et la même culture, et qui ne seront unis que
plus tardivement. En réalité, cette hypothèse s'inscrit
dans les historiographies nationalistes des Michelet et
Thierry, à une époque où l'on défendait l'idée d'une
France existant depuis toujours[13].

En effet, les petits seigneurs étaient encore trop


puissants, trop nombreux et trop éparpillés pour que les
peuples se sentissent les alliés d'un unique et grand
souverain sur une vaste étendue de terre[14].
Jour du traité

Mémorial du traité de Verdun,


Fontenoy, (Bourgogne-Franche-
Comté).

Le jour exact du traité n’est pas connu. Toutefois, le


10 août, un certain Baudry, vendeur, et Erchambert,
évêque de Freising et signataire pour Notre-Dame de
Freising, signent un acte à Dugny (à quelques
kilomètres de Verdun) et cet acte indique qu’il a été
effectué « dans un lieu portant le nom de Dugny situé
près de la ville de Verdun où fut réalisée l’entente des
trois frères, Lothaire, Louis et Charles, et où eut lieu la
division de leur royaume » (en latin : in loco noncupante
Dungeih quod est iuxta civitate Uiriduna ubi trium fratrum
Hludharii, Hludouuici et Karoli facta est concordia et
division regni ipsorum). Le traité a donc pour certains
auteurs été conclu au plus tard le 10 août[15] : soit le
8 août[16],[17] ou le 10 août[18]. Malgré tout, le 11 août est
souvent cité[19],[20],[21], car, si le traité avait été décidé
dans ses grandes lignes avant le 10, il n’avait peut-être
pas encore été conclu dans ses détails. Avec moins de
précisions, le traité est quelquefois daté « au début du
mois d’août »[22] ou même en « juillet-août »[23]. La
simple mention du mois d’août reste le plus courant.

Notes et références
1. H G Koenigsberger, Medieval Europe 400 - 1500 (htt
ps://books.google.fr/books?id=QCasAgAAQBAJ&pg
=PT75&dq=%22treaty+of+verdun%22+%22old+frenc
h%22+-strasbourg&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwilkK-0
4Y_aAhVCXRQKHRdDDmMQ6AEIRTAE#v=onepage
&q=%22treaty%20of%20verdun%22%20%22old%20fr
ench%22%20-strasbourg&f=false) [archive],
Routledge, 14/01/2014
2. Eric Solsten, Germany: A Country Study (https://boo
ks.google.fr/books?id=vnocWI0_fywC&pg=PA8&lpg
=PA8&dq=The+eastern+Frankish+tribes+still+spoke
+Germanic+dialects;+the+language+of+the+wester
n+Frankish+tribes,+under+the+influence+of+Gallo-L
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=bl&ots=2_XSgQ_yYT&sig=3n8_ru9HjjQ5slLNd_gkX
7qC2Zw&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwiY496i34_aAhW
LmLQKHbhPBW0Q6AEIJzAA#v=onepage&q=The%2
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had%20to%20be%20written%20in%20two%20langu
ages.&f=false) [archive], DIANE Publishing, 1999
3. (fr) Joseph Calmette, Trilogie de l'histoire de France -
Le Moyen Âge (https://books.google.fr/books?ei=w
W5ZTNiPFpOk4QblyaWKDQ&ct=result&id=96_RAAA
AMAAJ&dq=trait%C3%A9+Verdun+843+texte+perdu
+date&q=%2210+ao%C3%BBt+843%22) [archive],
Fayard, 1952, p. 109
4. Comme le texte officiel du traité est
malheureusement perdu, la date exacte de ce traité
diffère selon les écrits s'y rapportant (cf. la section
de la page sur le jour du traité).
5. (fr) Voir l'année 843 dans les Annales de Saint-Bertin
(http://remacle.org/bloodwolf/historiens/anonyme/
annales.htm) [archive]
6. Pierre Riché1997, p. 182
7. Jean-Charles Volkmann, Chronologie de l'histoire de
France (https://books.google.fr/books?id=RXgneeiL
YJYC&pg=PA17&dq=%22%22842,+14+f%C3%A9vrie
r%22%22&hl=fr&ei=XotZTMSUMo6V4Aa5vtWZDg&s
a=X&oi=false) [archive]
8. (fr) Robert Parisot, Le royaume de Lorraine sous les
Carolingiens (843-923) (https://books.google.fr/boo
ks?ei=qr1aTJvHJYKB4Qbjof2GAg&ct=result&id=ZtA
AAAAAMAAJ&dq=%22ao%C3%BBt+843&q=%22co
mmenc%C3%A9es+en+juin%22) [archive], A. Picard
et fils, 1898, p. 16
9. (fr) Bibliothèque de l'École des chartes (https://book
s.google.fr/books?id=2LdmAAAAMAAJ&q=%22part
age%22%22ao%C3%BBt+843%22+%22Trait%C3%A9
+de+verdun%22++%22empire+de+Charlemagne%22
&dq=%22partage%22%22ao%C3%BBt+843%22+%22
Trait%C3%A9+de+verdun%22++%22empire+de+Cha
rlemagne%22&hl=fr&ei=cF2kTNHlMNHGswaB4IC7C
A&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=8&ved=
0CEcQ6AEwBw) [archive], Impr. de Decourchant,
1921, p. 316
10. Le traité de Verdun (http://www.verdun.fr/Terre-d-Hi
stoire/2000-ans-d-Histoire/Le-traite-de-Verdu
n) [archive], Mairie de Verdun, site de la
Communauté de communes de Verdun et de la ville
de Verdun, non daté
11. (fr) Université de Nancy II, Verdun - La société
verdunoise du xiiie au xixe siècle - Journées d'études
meusiennes, 5-6 octobre 1974, Université de Nancy,
p. 114
12. Henri Pirenne, Histoire de l'Europe des invasions au
xvie siècle, Alcan-N.S.E., Paris-Bruxelles, 15e éd.,
1939, p. 77
13. Pierre Riché1997, p. 188-189
14. La Dynamique De L'Occident. Norbert Elias
15. La succession de Charlemagne et le traité de
Verdun de Ph. Pouzet et E. Leroux, 1890.
16. Histoire de France : des origines à l’an 2000,
Éditions Tallandier, 1998.
17. Lugdunensis historiæ monumenta de Jean-Baptiste
Montfalcon, 1855.
18. Couples franco-allemands d’autrefois de Bernard
Boulengier, 2013.
19. Histoire d’Allemagne, depuis les temps les plus
reculés jusqu’à l’année 1838 de Friedrich
Kohlrausch, 1838.
20. L’Empire germanique, du traité de Verdun (11 août
843) à la chute du nazisme (8 mai 1945) de Gabriel
Cassin, 2008.
21. « 11 août 843 : le partage décisif du Regnum
Francorum par le Traité de Verdun » (http://connaitr
elawallonie.wallonie.be/fr/histoire/timeline/11-aout-
843-le-partage-decisif-du-regnum-francorum-par-le-t
raite-de-verdun#.V-PPKEaukik) [archive] sur le site
officiel de la Wallonie.
22. [clif.over-blog.com/article-le-traite-de-verdun-
125654050.html]
23. [1] (http://verdunlavie.free.fr/html/histoire.ht
m) [archive]

Annexes

Bibliographie

René Grousset, Bilan de l'Histoire, Plon, 1946


Pierre Riché, Les Carolingiens, une famille qui fit
l'Europe, Paris, Hachette littérature, 1997 (1re éd.
1983), 490 p. (ISBN 2-01-278851-3)
Articles connexes

Annales de Saint-Bertin
Liste de traités de droit international

Liens externes

Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies


généralistes : Britannica (https://www.britannica.co
m/event/Treaty-of-Verdun) [archive] · Gran
Enciclopèdia Catalana (https://www.enciclopedia.cat/
EC-GEC-0070110.xml) [archive] · Universalis (https://
www.universalis.fr/encyclopedie/traite-de-verdu
n/) [archive]
Notices d'autorité :
BnF (http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb16734735c)
(
données (http://data.bnf.fr/ark:/12148/cb16734735c)
) · IdRef (http://www.idref.fr/175887780)
Le Traité de Verdun (site de la ville de Verdun) (http://
www.verdun.fr/Ville-universelle/2000-ans-d-Histoire/
Le-traite-de-Verdun) [archive]
Le Traité de Verdun selon les annales de Saint-Bertin
(843) (http://sourcesmedievales.unblog.fr/2008/04/1
2/le-traite-de-verdun-selon-les-annales-de-saint-bertin
-843/) [archive]

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