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COMPOSITION DEUXIEME TRIMESTRE

Mardi 14 février 2023 Durée = 2H 2e 1

Première partie : question problématisée (sur 10 points) 1h

Question problématisée :

Le Roi de France : territoire, pouvoir et sacralité de Philippe Auguste (1180-1223) à Louis XIV (1643-
1715)

Sujet extrêmement vaste. Il est évident que vous devez vous montrer synthétique et ne pas entrer
dans une liste de rois qui n’aurait guère d’intérêt. C’est un devoir thématique, qui vous demande de
développer les trois problématiques de son pouvoir :

- Passage d’un royaume souvent contesté par les grands barons et son rival anglais à un
royaume unifié sous son ultime autorité,
- Comment s’exerce les pouvoirs du roi, de la monarchie tempérée à la monarchie absolue
- La Sacralité comprend son statut spécifique en Europe parmi les autres rois, son autorité sur
l’Eglise de France à travers ses combats avec la papauté qu’il essaie de contrôler (vous
n’aborderez pas le sujet de la Réforme religieuse et des guerres de religion).

Chaque partie doit contenir entre quinze et vingt lignes ; vous devez ajouter une phrase de transition
entre chaque partie.

Proposition de corrigé. Il est évidemment plus complet que ce qui était attendu des élèves.

Lorsque le duc de France Hugues Capet, reçoit la couronne franque de la part des grands
barons du royaume, il ne se doutait pas qu’il serait à l’origine d’une dynastie qui durerait près de
mille ans. Son domaine seigneurial (donc domaine royal) est alors circonscrit entre Senlis au Nord, et
Orléans au Sud et ses premiers successeurs « les rois à cheval », passèrent près de deux cents années
à défendre ce petit domaine contre des voisins ambitieux (Comte de Flandre, Comte de Bourgogne,
Duc de Normandie -également roi d’Angleterre- par exemple). L’accession au trône de Philippe II
(1180-1223) marque un tournant décisif. Premier roi à se proclamer « roi de France » et non « roi des
Francs », il est au cœur d’une première guerre de Cent Ans entre Français et Anglais (XIIe XIIIe siècle).
Au début de son règne, le royaume de France est occupé dans sa moitié ouest par les Anglais du roi
Plantagenêt (notamment Henri II également duc de Normandie, et qui a récupéré l’Aquitaine en
épousant la duchesse Aliénor, répudiée par Louis VII, père de Philippe Auguste). En usant de ruse et
profitant de la IIIe croisade, Philippe II s’empare successivement de la Normandie, du Maine et de
l’Anjou. Ses successeurs ne sont pas en reste : Louis VIII (1223-1226) récupère le comté de Toulouse
et Philippe IV le Bel (1285-1314) annexe la Champagne.

Le plus grand danger pour la dynastie capétienne fut la deuxième guerre de Cent-ans (1337-
1453), qui voit le roi anglais, Edouard III, petit-fils de Philippe le Bel, profiter d’un vide dynastique
pour réclamer le royaume de France. Le moment le plus critique fut la défaite d’Azincourt (1415), qui
eut pour conséquence le traité de Troyes (1420) : la couronne de France serait transmise au roi
d’Angleterre à la mort de Charles VI de Valois. La « chevauchée » de Jeanne d’Arc permet de rétablir
le Valois Charles VII sur le trône de France et celui-ci met fin définitivement à la menace anglaise
(traité de Castillon 1453), le roi d’Angleterre ne gardant que quelques ports maritimes (Calais). La
marche en avant peut se poursuivre avec le rattachement définitif de la Bretagne à la couronne de

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France en 1532 sous François Ier. Il ne manque plus que la Franche Comté (1678), l’Alsace (1697),
sous Louis XIV, qui en profite pour faire fortifier son « pré carré* » par Vauban
*Zone géographique (pays, région) sur laquelle un État revendique l'exercice d'une influence (politique,
militaire, économique, culturelle) dominante ou exclusive.

Plus tard, Louis XV annexe la Lorraine (1766) et la Corse (1768). La dynastie capétienne a donc réussi
à force de mariages, de ruse, de guerres et d’habileté à faire coïncider son domaine royal avec
l’ensemble du royaume de France, devenue donc, propriété de la couronne jusqu’en 1789.

Il faudra attendre Napoléon III pour que l’annexion du Comté de Nice et la Savoie (1860) permette de
compléter la carte actuelle de la France.

Cette conquête territoriale de huit cents années s’accompagne d’un renforcement de la


puissance personnelle du roi de France, à mesure que s’affaiblit celle de ses puissants vassaux,
notamment anglais.

Déjà Hugues Capet jouissait d’une grande considération en Occident : sa famille avait même
occupé par deux fois le trône des Carolingiens (dont son grand-père, Robert Ier). Son domaine royal
est certes petit, mais d’une très grande richesse (abbayes, immenses forêts, grandes terres
céréalières). Au centre de ce domaine, Paris, autrefois Lutèce devient peu à peu le centre névralgique
de la dynastie. Philippe Auguste d’ailleurs fortifie et embellit sa capitale en la dotant de pavés et fait
bâtir la cathédrale Notre-Dame. Premier roi centralisateur, il nomme de hauts fonctionnaires qu’il
envoie dans les différentes provinces de son royaume pour faire appliquer ses décrets et lois (Baillis
au Nord, Sénéchaux au Sud). Les rois capétiens s’entourent de grands ministres, souvent recrutés
dans la haute bourgeoisie marchande, tel Guillaume de Nogaret, un des principaux ministres de
Philippe IV le Bel : Nogaret est à l’origine de la plus grande opération de police de la France
médiévale avec l’arrestation des Templiers sur tout le royaume de France le même jour et la même
heure (vendredi 13 octobre 1307), ce qui est un véritable exploit avec les moyens réduits de
communication que l’époque connaissait. Cette action montre combien le roi était désormais
capable de montrer son autorité sur l’ensemble de son royaume.

Par ailleurs, Louis IX, avec la création de l’Ecu en 1266, impose une monnaie unique sur tout
le territoire français. C’est en 1360 qu’apparaît le premier Franc (le Franc à cheval), monnaie frappée
pour payer la rançon du roi Jean II le Bon, prisonnier des Anglais pendant la guerre de Cent Ans.

De quels pouvoirs le roi capétien dispose-t-il ? En théorie il dispose de pouvoirs considérables en


tant que suzerain suprême, mais son pouvoir est tempéré par un certain nombre de facteurs
coercitifs :

- La religion. La nature divine du pouvoir royal force le roi à respecter la religion chrétienne et
à ménager l'autorité de l'Église catholique. Cela pèse également sur sa politique étrangère :
François Ier fait scandale quand il s'allie avec l'Empire ottoman en 1536.
- Les lois fondamentales. La France n'a pas de Constitution, mais le souverain doit respecter les
lois fondamentales du royaume. La transmission de la couronne repose sur l'hérédité et le
principe de la primogéniture masculine, tandis que le domaine royal demeure inaliénable.

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- Les parlements. À partir du XVIe siècle, le poids des parlements tend à augmenter. Les édits
et ordonnances du roi doivent être inscrits sur leurs registres pour devenir opératoires. Or, ils
peuvent refuser cet enregistrement en formulant des remontrances. En cas de blocage, le roi
convoque alors un lit de justice pour enregistrer de force l'édit ou l'ordonnance.

La période de Renaissance, au XVIe siècle, pose les bases de la problématique du pouvoir


royal avec le débat entre un pouvoir tempéré et limité par des parlements et des Conseils, défendu
par Claude de Seyssel et un pouvoir absolu, prôné par Guillaume Budé. C’est ce dernier qui eut gain
de cause :

En 1661, à la mort de son principal ministre Mazarin, Louis XIV décide de gouverner seul,
alors que depuis les derniers Valois, le roi laissait gouverner un principal ministre. L’épisode de la
Fronde des princes et des Grands du royaume (1648-1653) qui voulaient profiter de la minorité du
jeune roi pour retrouver une indépendance vis-à-vis du pouvoir royal et retrouver le temps d’une
féodalité décentralisée a durablement marqué Louis XIV qui décide de s’installer à Versailles (1683)
et y centraliser autour de son château pharaonique un pouvoir absolu au sein duquel la Haute
Noblesse se voit réduite à un rôle domestique. On est alors à l’apogée du pouvoir absolu.

Si Louis XIV a pu incarner la quintessence de la royauté, il le doit aussi à la mystique qui s’est
construite autour de la royauté française. Le roi de France n’était-il pas réputé avoir le pouvoir
de guérir les écrouelles ? « Le roi te touche, Dieu te guérit » ; cette croyance reposait dans cette
position, unique en Europe, d’un roi qui ne tient son pouvoir que de Dieu, à qui le relie la cérémonie
si particulière du Sacre accompagnant le couronnement. Le roi de France est avant tout l’héritier de
Clovis dans la mythologie de l’histoire de France construite sur des siècles. « France, fille aînée de
l’Eglise », depuis le baptême catholique de ce petit roi Franc qui régna cinq ans après la chute de
l’Empire romain d’Occident, seul roi germanique à s’être fait catholique dans un monde barbare qui
s’était converti à une forme hérétique du christianisme, l’arianisme - condamné par le concile de
Nicée dès 325 ap JC- Les victoires de Clovis sur ses voisins prestigieux (Wisigoths, Burgondes ), et son
occupation quasi complète de la Gaule permettent d’associer à jamais monarchie française et
catholicisme gallo-romain. Ainsi, Pépin le Bref Maire du Palais d’Austrasie, et devenu roi par la grâce
du pape Zacharie en 751 fut le premier depuis Clovis à avoir unifié l’ancienne Gaule. Il fut donc
décidé de renouveler l’acte de Clovis en le sacrant, c’est-à-dire en lui déposant sur le front une goutte
de l’huile -le Saint Chrême- qui servit à baptiser le fondateur de la dynastie mérovingienne, en 754.
Depuis cette date, tous les rois carolingiens, puis capétiens bénéficieront de cette onction qui plaçait
le roi à un niveau bien plus haut que la plupart des rois en Europe y compris l’empereur germanique.
Ce n’est pas par hasard que le roi Louis IX, chrétien exemplaire, soit devenu le seul roi de toute la
chrétienté à devenir « saint » environ vingt ans seulement après sa mort.

A ce titre, le roi de France estime être le chef naturel de l’Eglise de France. Ainsi se développe
dès Philippe Auguste, un gallicanisme, forme étatique du catholicisme français, car le roi nomme les
évêques et les abbés. De nombreux papes furent des papes français (ils sont 15, de Sylvestre II en
999 à Grégoire XI, mort en 1378), et le prestige du roi de France ne leur facilitait pas la tâche.
Philippe IV le Bel alla même jusqu’à provoquer indirectement la mort de Boniface VIII -attentat
d’Anagni-, s’attaquer aux Templiers, pourtant protégés par le pape, et installer la papauté à Avignon
(les papes y resteront de 1309 à 1378), certes terre de l’Eglise, mais en territoire français. Cette

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assignation à résidence en France provoqua d’ailleurs un Schisme et une grande crise de l’Eglise qui
finit par couper les ponts avec la France : depuis 1378, aucun pape français ne fut plus jamais élu.

Enfin, c’est le plus grand des Bourbons, Louis XIV, qui poussa le plus loin son rapport à Dieu,
en se représentant lui-même en roi soleil, en divinité solaire (Apollon) et en faisant de la monarchie
une représentation continuelle dans le décor somptueux et figé de Versailles.

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euxième partie : analyse de documents (sur 10 points) 1h

Analyse de documents : L’Edit de Nantes et sa révocation de 1598 à 1685

A l’aide des documents suivants, répondez à la problématique suivante : Quelles sont les
évolutions de l'attitude du pouvoir royal à l'égard du protestantisme ? (40 lignes environ)

Doc. 1 Paix et liberté de conscience

Art. 2. Défendons à tous nos sujets, de quelque état et qualité qu'ils soient, d'en renouveler la
mémoire, s'attaquer, ressentir, injurier, ni provoquer l'un l'autre par reproche de ce qui s'est passé.
[…]

Art. 3. Ordonnons que la religion catholique […] sera rétablie en tous lieux et endroits de notre
royaume […] pour y être paisiblement et librement exercée.

Art. 6. Avons permis et permettons à ceux de la religion prétendue réformée(1) de vivre et demeurer
par toutes les villes […] de notre royaume […] sans être enquis, vexés, molestés ni astreints à faire
chose pour le fait de la religion contre leur conscience.

Art. 22. Ordonnance qu'il ne sera fait aucune différence entre les religions pour être admis dans les
universités, collèges et écoles, dans les hôpitaux.

Édit de Nantes, 1598.

(1). Les protestants.

DOC 2 : Henri IV pacifie le royaume

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Anonyme, Henri IV s'appuyant sur la religion pour donner la paix à la France, fin XVIe siècle, huile sur
toile, 33 x 25,5 cm, musée national du château de Pau.

Les protestants du Béarn ont refusé d'appliquer l'édit de Nantes. Louis XIII, contre l'avis du Conseil du
roi, décide en 1620 de faire respecter l'édit. Dans cette région majoritairement huguenote, le roi
rétablit le catholicisme. Traduction du revers : « Apprenez la justice de celui qui en est éclairé ».

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« Nouveaux missionnaires envoyés par ordre de Louis le Grand par tout le royaume de France pour
ramener les hérétiques à la foy catholique », gravure protestante, v. 1683, musée de la Réforme
protestante, Genève. Les dragonnades sont des persécutions mises en place dans le sud et le sud-
ouest du royaume dès 1681.

Doc. 5. Révocation et exil

Art. 1. Faisons savoir, que Nous, […] de notre certaine science, pleine puissance, et autorité Royale,
avons par ce présent édit perpétuel et irrévocable, supprimé et révoqué, l'édit du Roi notre dit aïeul,
donné à Nantes au mois d'avril 1598 […].

Art. 2. Défendons à nos dits sujets de la Religion Prétendue Réformée (R.P.R.) de ne plus s'assembler
pour faire l'Exercice de ladite Religion en aucun lieu ou maison particulière, sous quelque prétexte que
ce puisse être […].

Art. 4. Enjoignons à tous les ministres (1) de ladite R.P.R. qui ne voudraient pas se convertir et
embrasser la Religion Catholique de sortir de notre royaume et terres de notre obéissance, quinze
jours après la publication de notre présent édit […].

Art. 7. Défendons les écoles particulières pour l'instruction des enfants de ladite R.P.R. […].

Édit de Fontainebleau, 1685. (1). Prêtres.

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Doc 6 : l’exil des Huguenots.

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Proposition de corrigé :

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Je vous rappelle que vous aviez plusieurs jours pour préparer ce devoir, ce qui aurait dû vous
permettre de vous renseigner, et trouver les éléments nécessaires pour développer un commentaire
détaillé.

Présentation critique des documents :

Les deux textes organiques encadrent ce corpus de documents, avec les articles essentiels de l’Edit
de Nantes (doc1) et le contre édit de Fontainebleau (doc 5). Trois représentations allégoriques
accompagnent ces deux textes et évoquent chacun des trois rois concernés :

- Une toile célébrant la mémoire d’Henri IV qui rétablit la paix religieuse en France
- Une pièce de monnaie frappée sur ordre de Louis XIII, célébrant l’imposition de l’Edit de
Nantes dans le Béarn protestant.
- Une gravure représentant un dragon en 1681 menaçant un protestant et le forçant à la
conversion, suite à la décision du roi Louis XIV.

Enfin une carte indiquant les départs des protestants du royaume de France vers d’autres horizons
plus propices.

On peut regretter l’absence d’un document montrant Richelieu assiégeant la Rochelle, qui aurait
permis de compléter la période.

Contexte de départ :

Après trente-six années de guerres de religions (1562-1598), et quelques massacres comme


celui de la Saint Barthélémy le 24 août 1572 qui vit le parti catholique tuer environ 3 000 protestants
venus à Paris célébrer le mariage d’Henri de Navarre (futur Henri IV), chef du parti protestant et de
Marguerite de Valois (sœur du roi Charles IX) à l’instigation de Catherine de Médicis qui voulait
réconcilier les deux partis, la voie semble désormais ouverte à une réconciliation : aux Valois succède
la branche cadette des Capétiens, les Bourbons, dont le représentant n’est autre que Henri de
Navarre. Devenu Henri IV en 1589, il se voit obligé de se convertir définitivement au catholicisme en
1593 afin de légitimer sa position. Cinq ans plus tard, il propose les bases d’une coexistence pacifique
entre les deux formes de christianisme français.

En effet, l’article 2 interdit toute « provocation » mutuelle et toute rente mémorielle


concernant les massacres passés et l’article 6 permet aux protestants de vivre « selon leur
conscience » sans être inquiété ; d’autre part l’article 22 leur promet une totale indifférence à leur
religion pour leur cursus scolaire ou pour être soignés. En revanche il est à noter que la religion
catholique quant à elle est chez elle partout (article 3), y compris donc en terre protestante. Par
ailleurs, on peut noter que le protestantisme n’est jamais cité. On parle de « Religion Prétendue
Réformée », ce qui indique en quel mépris les protestants sont tout de même encore tenus.

Il n’est pas étonnant que la célébration picturale de cet édit de tolérance (doc 2), soit
conservée au château de Pau, haut lieu du protestantisme historique (La ville de Pau est aujourd’hui
« cité européenne de la Réforme »). Sur cette peinture anonyme, on peut voir le bon roi Henri IV

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entourée de deux femmes, figures allégoriques : la femme à gauche représente la France en
mouvement et celle de droite, assise, posée et sage désormais, représente la religion chrétienne sur
laquelle s’appuie le roi pour offrir cet édit dont il tient la plume.

Il est à noter qu’outre les principes de tolérance religieuse, les Protestants reçoivent
également un certain nombre de places fortes qu’ils peuvent administrer à leur guise : en effet, le roi
autorise les protestants à conserver, pendant une durée de huit ans, toutes les places, villes et
châteaux qu'ils tenaient à l'été 1597 ; privilège renouvelé en 1606 et 1609. Marie de Médicis le fait
au nom de Louis XIII en 1615.

Par ailleurs, certaines régions protestantes refusaient d’appliquer l’édit de Nantes, comme
par exemple le Béarn. Le roi Louis XIII y réintroduit de force le catholicisme, comme le montre le
document 3, pièce de monnaie commémorative qui affirme la volonté royale « Apprenez la justice de
celui qui en est éclairé ». L’émotion des protestants est énorme. Réunis à la Rochelle, les chefs
protestants décident la création d’un Etat protestant en France. Cette rébellion de 1620 crée ainsi un
quasi-État protestant à l’ouest de la France (on peut voir sur la carte du document 6 leur présence
massive dans ces régions) et amène Louis XIII à leur faire la guerre entre 1621 et 1629, jusqu'à la paix
d'Alès qui supprime tout pouvoir politique aux protestants ainsi que leurs places de sûreté. Notons le
rôle décisif de son principal ministre, le cardinal de Richelieu, véritable chef de guerre, qui reprend
aux protestants le port de la Rochelle après un long siège (1627).

Louis XIII et son fils Louis XIV, rois très catholiques, ont développé une conception absolutiste
du pouvoir royal, à tel point que l’absolutisme est bientôt lié au caractère catholique du régime :
ainsi, il n’est pas étonnant que la dynastie anglaise des Stuart, catholique, ait voulu à son tour
développer l’absolutisme en Angleterre, provoquant la Révolution de 1642.

Louis XIV désire unifier son « pré-carré » (voir question problématisée) en imposant le
catholicisme à tous ses sujets. Poussé par son épouse morganatique, Madame de Maintenon, il
décide d’user d’abord de persuasion -en fait de terreur- dans les foyers protestants, en envoyant dès
1681 en province des « missionnaires », en fait des soldats brutaux (les « Dragons » de cavalerie) qui
s’installent chez l’habitant et force les familles en usant de violence -voir le document 4- de signer
leur conversion au catholicisme ou bien à faire leur valise.

Le point final de cette reprise en main catholique est la signature en 1685, de l’édit de
Fontainebleau qui révoque l’Edit de Nantes (Article 1) et interdit la pratique de la religion réformée
(Article 2), ainsi que l’accès à l’instruction (il ferme les écoles protestantes, article 7). Enfin, il ordonne
aux pasteurs de se convertir sous les « quinze jours » sous peine d’exil forcé (Article 4).

NB. A noter une erreur dans le document 5 : un « ministre » ici n’est pas un prêtre mais un pasteur
chez les protestants.

Ce contre édit provoque le plus grand exil jamais vécu par une population française. Sur un
million de protestants vivant en France, entre 25 et 30 %, soit près de 300 000 protestants s’exilèrent
entre 1680 et 1700, d’abord dans des pays voisins spécifiquement protestants (Suisse, Provinces

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Unies, Etats du Nord du Saint Empire germanique). Près d’1/4 des départs se fait dans l’Angleterre
protestante. De façon plus éparse, certains gagnent l’Amérique du Nord pour rejoindre les colons
puritains anglais, d’autre l’Afrique du Sud où résident de nombreux colons Hollandais, et même dans
la Russie orthodoxe ! (document 6).

Conclusion :

Les conséquences économiques de cet exil sont désastreuses.

Les historiens s’accordent pour considérer que cette décision politique est l’une des plus grosses
erreurs du règne de Louis XIV. Il est intéressant de remarquer que, dans une France où les
catholiques applaudissent cette révocation, Vauban est le seul, dans un mémoire adressé à Louvois,
alors ministre de la guerre, à en souligner les effets négatifs sur le plan économique, regrettant le
départ d’une main d’œuvre qualifiée ainsi que la fuite des capitaux. Beaucoup de protestants en
effet, furent les initiateurs du capitalisme d’entreprise et avaient fondé de nombreuses
manufactures. Ces exilés issus de la bourgeoisie laborieuse vont faire la fortune de leur pays d'accueil
et leur départ va appauvrir la France en la privant de nombreux talents. Ils vont aussi nourrir à
l'extérieur les ressentiments contre la France et son monarque.

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