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Cours d’Analyse fonctionnelle

par

Justin FEUTO
ISE-Maths

ENSEA
Table des matières

1 Complément de topologie 2
1.1 Espaces métriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.1.1 Distance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.1.2 Topologie sur un espace métrique . . . . . . . . . . . . . . . 3
1.1.3 Suites dans un espace métrique . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.2 Espaces métriques compacts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.3 Applications continues - Homéomorphismes . . . . . . . . . . . . . 12
1.3.1 Continuité en un point . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
1.3.2 Applications continues et homéomorphismes . . . . . . . . 13
1.4 Le théorème de Baire et ses conséquences . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.5 Espaces connexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.6 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

2 Espace vectoriels normés 25


2.1 Généralités sur les espaces vectoriels normés . . . . . . . . . . . . . 25
2.2 Applications linéaires et multilinéaires continues . . . . . . . . . . . 27
2.3 Dual topologique d’un espace normé . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
2.4 Théorèmes de Hahn-Banach . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
2.4.1 La forme analytique du Théorème de Hahn-Banach . . . . . 31
2.4.2 Théorème de Hahn-Banach, forme géométrique . . . . . . . 34
2.5 Bidual d’un espace normé, réflexivité . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
2.6 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

3 Espaces de Banach 40
3.1 Géréralité sur les espaces de Banach . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
3.2 Théorème de Banach-Steinhauss . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
3.3 Théorème de l’application ouverte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
3.4 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

1
TABLE DES MATIÈRES

4 Espace de Hilbert réel 48


4.1 Produits scalaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
4.2 Espaces de Hilbert, orthogonalité, bases . . . . . . . . . . . . . . . . 49
4.3 Théorème de projection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
4.4 Dualité dans les espaces de HILBERT, adjoint d’un opérateur continu 56
4.5 Exercice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

5 Espaces fonctionnels 60
5.1 Convergence simple et convergence uniforme . . . . . . . . . . . . 60
5.2 Théorème d’Ascoli . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
5.3 Théorème de Stone-Weierstrass . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
5.4 Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

J. Feuto 2 ISE-maths-ENSEA
Chapitre 1

Complément de topologie

1.1 Espaces métriques


1.1.1 Distance
Définition 1.1.1 Soit E un ensemble non vide. Une distance sur E est une application
d : E × E → R+ qui vérifie les propriétés suivantes :
1. ∀x ∈ E, ∀y ∈ E, d(x, y) = 0 ⇔ x = y
2. ∀x ∈ E, ∀y ∈ E, d(x, y) = d(y, x) (symétrie)
3. ∀x ∈ E, ∀y ∈ E, ∀z ∈ X, d(x, z) ≤ d(x, y) + d(y, z) (inégalité triangulaire)
L’ensemble E muni de la distance d est appelé espace métrique.

Exemple 1.1.2 1. Distance usuelle sur R ou C : d(x, y) = |x − y|.


2. Les couples suivants
— (Rn , d∞ ) où d∞ (x, y) = max1≤i≤n |xi − yi |,
— (Rn , d1 ) où d1 (x, y) = ni=1 |xi − yi |
P
pP
— (Rn , d2 ) où d2 (x, y) = (xi − yi )2 sont des espaces métriques
3. Etant donné deux espaces métriques (E, d) et (F, d0 ) on défini la distance produit
sur E × F , par δ((x, y), (x0 , y 0 )) = max(d(x, x0 ), d0 (y, y 0 )).
4. Soit (E, d) un espace métrique et A ⊂ E. Alors A est considérée de manière na-
turelle comme un espace métrique pour la distance dA : A × A → R définie par
dA = d|A×A , autrement dit dA (x, y) = d(x, y) pour tout x, y ∈ A. dA s’appelle la
distance sur A induite par celle de E.
5. Ensuite, la distance discrète sur un ensemble E est simplement définie par
(
1 si x 6= y
d(x, y) = .
0 si x = y
La topologie induite correspond alors à la topologie discrète.

3
1.1. ESPACES MÉTRIQUES

Définition 1.1.3 Dans un espace métrique (E, d), on appelle boule ouverte (resp. boule
fermée) de centre a ∈ E et de rayon r > 0, le sous-ensemble :

B(a, r) = {x ∈ E, d(a, x) < r} (resp.Bf (a, r) = {x ∈ E, d(a, x) ≤ r}).

L’ensemble
S(a, r) = {y ∈ E : d(a, y) = r}
est la sphère de centre a et de rayon r.

Définition 1.1.4 Soit (E, d) un espace métrique, A et B deux parties de E


1. On appelle diamètre de A et on note diamA, le nombre (qui peut être infini)

diamA = sup d(x, y)


(x,y)∈A×A

2. On dit que A est borné si le diamètre de A est fini.


3. On appelle distance entre A et B, le nombre

d(A, B) = inf d(x, y)


x∈A,y∈B

1.1.2 Topologie sur un espace métrique


Définition 1.1.5 Soit (E, d) un espace métrique et x un point de E. On dit qu’une partie
V de E est un voisinage de x s’il existe un réel  > 0 tel que B(x, ) ⊂ V . On note V(x)
l’ensemble des voisinages de x.

Proposition 1.1.6 (Propriétés des voisinages) Soit a ∈ E, alors :


v1) a appartient à tout élément de V(a).
v2) Toute partie W de E qui contient un élément de V(a) est aussi un élément de V(a).
v3) Toute intersection finie d’éléments de V(a) est encore un élément de V(a).
v4) Si V ∈ V(a), il existe un élément W ∈ V(a) tel que pour tout b ∈ W , on ait
V ∈ V(b).

On remarque en outre que la propriété suivante est vérifiée : Propriété de sépara-


tion : si a et b sont deux points distincts de E, il existe Va ∈ V(a) et Vb ∈ V(b) tels
que Va ∩ Vb = ∅.
Deux distances sur un même ensemble peuvent définir les mêmes voisinages
de x. On dit alors que les deux distances sont topologiquement équivalentes.

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1.1. ESPACES MÉTRIQUES

Définition 1.1.7 Soit (E, d) un espace métrique. Une partie U de E est une partie ou-
verte de E ( ou un ouvert dans E ) si elle es vide ou bien pour tout x ∈ U il existe rx tel
que B(x, rx ) ⊂ U .

On déduit immédiatement de cette définition et de la notion de voisinage qu’une


partie U de E est une partie ouverte de E, si U est un voisinage de chacun de
chacun de ses points.

Proposition 1.1.8 (Propriétés des parties ouvertes d’un espace métrique) Soit (E, d)
un espace métrique.
(O1) ∅ et E sont des parties ouvertes de E.
(O2) Toute réunion de parties ouvertes de E est encore une partie ouverte de E.
(O3) Toute intersection finie de parties ouvertes de E est encore une partie ouverte de E.

Définition 1.1.9 Soit (E, d) un espace métrique. On dit que A ⊂ E est une partie fermée
de E si {A
E est une partie ouverte de E.

Proposition 1.1.10 (Propriétés des parties fermées d’un espace métrique) . Soit (E, d)
un espace métrique.
(F1) ∅ et E sont des parties fermées de E.
(F2) Toute intersection de parties fermées de E est une partie fermée de E.
(F3) Toute union finie de parties fermées de E est une partie fermée de E.

Elles se déduisent de (O1), (O2) et (O3) par passage au complémentaire

Définition 1.1.11 Soit A une partie de E. On dit qu’un point x ∈ E est intérieur à A si
A contient une boule ouverte centrée en x. L’ensemble des points intérieurs à A s’appelle

l’intérieur de A et on le note A

Proposition 1.1.12 L’intérieur d’une partie A de E est un ouvert de E et c’est le plus


grand ouvert de E contenu dans A.

Preuve : D’après la définition 1.1.11, un point x est intérieur à A s’il existe une
boule ouverte centrée en x contenue dans A et de plus tout point de cette boule

est intérieur à A ; il en résulte que A est une réunion d’ensembles ouverts contenus
dans A et c’est le plus grand ouvert de E contenu dans A. 2

Définition 1.1.13 Soit A une partie de E. On dit qu’un point x ∈ E est extérieur à A s’il
existe un voisinage de x dans E ne rencontrant pas A. L’ensemble des points extérieurs à
A s’appelle l’extérieur de A et on le note ext(A).

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1.1. ESPACES MÉTRIQUES

Définition 1.1.14 Soit A une partie de E. On dit qu’un point x ∈ E est adhérent à A si
toute boule ouverte de centre x dans E rencontre A. L’ensemble des points adhérents à A
s’appelle l’adhérence de A et on le note A.

Proposition 1.1.15 L’adhérence de A est fermée et c’est le plus petit ensemble fermé de
E contenant A. En particulier A est fermée si et seulement si A = A.

Preuve : Si x ∈ / A alors il existe un r > 0 tel que B(x, r) ∩ A = ∅. C’est-à-dire que



z}|{
A
B(x, r) ⊂ {A E , ce qui implique que x ∈ {E , par conséquent A est fermé. De plus
si F est une partie fermée de E contenant A, {FE est un ouvert de E contenu dans

z}|{
{AE , d’où F ⊃ A. 2

Définition 1.1.16 Soit (E, d) un espace métrique.


1. Soient A et B deux parties de E telles que A ⊂ B. On dit que A est dense dans B
si B ⊂ A. On dit que A est partout dense si A = E
2. (E, d) est séparable s’il contient une partie dénombrable et partout dense.

Pour montrer qu’une partie A de E est partout dense dans E il suffit de montrer que tout
ouvert non vide de E rencontre A.

1.1.3 Suites dans un espace métrique


Dans un espace métrique (E, d), une suite est une application de N dans E no-
tée habituellement (xn )n∈N . Les suites jouent un rôle particulièrement important
dans les espaces métriques.

Définition 1.1.17 Soit (E, d) un espace métrique et (xn )n∈N une suite d’éléments de E.
1. On dit que (xn )n∈N converge vers un point x ∈ E si limn→∞ d(xn , x) = 0 ; ce qui
signifie aussi que pour tout  > 0 il existe un entier N tel que, pour tout n > N ,
on ait d(x, xn ) < .
2. On dit qu’un point x ∈ E est une valeur d’adhérence de cette suite si, pour tout
 > 0 et tout entier N , il existe un entier n > N tel que d(x, xn ) < .
3. On dit que (xn )n∈N est de Cauchy si pour tout  > 0 il existe N ∈ N tel que pour
tous entiers p, q > N on ait d(xp , xq ) < 

Proposition 1.1.18 Soient (E, d) un espace métrique et s = (xn )n∈N une suite d’élé-
ments de E. Un point x ∈ E est une valeur d’adhérence de s si et seulement si il existe
une suite extraite de s qui converge vers x.

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1.1. ESPACES MÉTRIQUES

Preuve : Si x est une valeur d’adhérence de s, nous allons construire une suite
strictement croissante (ϕ(p))p∈N vérifiant d(x, xϕ(p) ) < 1/p pour tout p ∈ N∗ . On
définit ϕ : N → N de proche en proche. On pose ϕ(0) = 0 et si ϕ est définie sur les
entiers inférieurs strictement à k, k ≥ 1, on pose
 
1
ϕ(k) = min n ∈ N|n > ϕ(k − 1) et xn ∈ B(x, )
k

Par définition de la valeur d’adhérence, on a


 
1
n ∈ N|n > ϕ(k − 1) et xn ∈ B(x, ) 6= ∅
k

et par conséquent ϕ(k) existe et on a bien d(x, xϕ(k) ) < 1/k. La suite (xϕ(p) )p∈N
converge vers x
Réciproquement, si ϕ : N → N est une application strictement croissante telle
que (xϕ(p) )p∈N converge vers x, alors x est une valeur d’adhérence de s. 2

Proposition 1.1.19 Si A est une partie d’un espace métrique (E, d), les propriétés sui-
vantes sont équivalentes :
i) x ∈ A.
ii) Il existe une suite (xn )n∈N de points de A qui converge dans E vers x.

Preuve : Prouvons que i) ⇒ ii). Pour tout n > 0, on a B(x, 1/n) ∩ A 6= ∅ ?. On peut
"choisir", pour tout n ∈ N∗ , un point xn ∈ B(x, 1/n) ∩ A. La suite (xn )n∈N ainsi
définie converge vers x.
Considérons l’implication ii) ⇒ i). Si (xn )n∈N est une suite d’éléments de A
qui converge vers x ∈ E, alors pour tout  > 0, B(x, ) ∩ {xn |n ∈ N} = 6 ∅, donc
B(x, ) ∩ A 6= ∅. Il en résulte que x ∈ A. 2
Toute suite convergente est de Cauchy.

Définition 1.1.20 Un espace métrique est complet si et seulement si toute suite de Cau-
chy converge.

Proposition 1.1.21 Soit (E, d) un espace métrique. Alors les conditions suivantes sont
équivalentes :
1. E est complet.
2. Pour toute suite (Fn )n∈N de fermés emboîtés (Fn+1 ⊂ Fn ) non vides de E dont le
diamètre tend vers 0, on a ∩n∈N Fn 6= ∅.

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1.2. ESPACES MÉTRIQUES COMPACTS

Preuve : i) ⇒ ii). Grâce à l’axiome du choix, on choisit des points xn ∈ Fn . La


suite (xn )n∈N ainsi obtenue est de Cauchy. En effet :
Soit  > 0. Puisque diam(Fn ) tend vers zéro, il existe N ∈ N tel que pour tout
n > N , diam(Fn ) < . Si p, q sont deux entiers tels que q > p > N alors d’après
l’hypothèse de fermé emboités, Fq ⊂ Fp ; par conséquent xq et xp étant dans Fp ,
d(xq , xp ) ≤ diam(Fp ) < . Suite de Cauchy dans un espace complet, (xn ) converge
vers un point ξ ∈ E. Comme (xp )p>n est une suite d’éléments de Fn , on a ξ ∈ Fn ,
car c’est un fermé, et par conséquent ξ ∈ ∩n∈N Fn .
ii) ⇒ i). Soit (xn )n∈N une suite de Cauchy d’éléments de E et Fn = {xp |p > n}.
On a Fn+1 ⊂ Fn et diamFn → 0 quand n → +∞ ; d’après l’hypothèse, ∩n∈N Fn n’est
pas vide. Soit un point ξ ∈ ∩n∈N Fn .Du fait que d(xn , ξ) ≤ diamFn , on en déduit
que (xn )n∈N converge vers ξ. 2

Proposition 1.1.22 Soient (E1 , d1 ), (E2 , d2 ) deux espaces métriques non vides et E =
E1 × E2 l’espace métrique produit. Les assertions suivantes sont équivalentes :
i) E1 et E2 sont complets.
ii) E est complet.

Preuve : i) ⇒ ii). Soit ((xn , yn ))n∈N une suite de Cauchy de E. Alors (xn )n∈N est
une suite de Cauchy de E1 et (yn )n∈N est une suite de Cauchy de E2 . Par hypothèse
(xn )n∈N converge vers ξ ∈ E1 et (yn )n∈N converge vers η ∈ E2 , donc ((xn , yn ))n∈N
converge vers (ξ, η) ∈ E.
ii) ⇒ i). Soit (xn )n∈N une suite de Cauchy de E1 et y0 ∈ E2 . Alors ((xn , y0 ))n∈N
est une suite de Cauchy de E, elle converge donc vers un point (ξ, y0 ) et par
conséquent (xn )n∈N converge vers ξ. Donc E1 est complet et on procède de même
avec E2 . 2

1.2 Espaces métriques compacts


Définition 1.2.1 Soit (E, d) un espace métrique et A ⊂ E.
1. On appelle recouvrement ouvert de A une famille (Oi )i∈I de parties ouvertes de E
telles que A ⊂ ∪i∈I Oi .
On dit que le recouvrement est fini si l’ensemble I des indices est fini.
On appelle recouvrement extrait du recouvrement (Oi )i∈I de A un recouvrement
(Oi )i∈J de A avec J ⊂ I.
2. On dit que (E, d) est compact si de tout recouvrement ouvert de E on peut extraire
un recouvrement fini. Cette propriété concernant les recouvrements ouvert s’appelle
la propriété de Borel-Lebesgue.

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1.2. ESPACES MÉTRIQUES COMPACTS

Proposition 1.2.2 Soit (E, d) un espace métrique. Alors les assertions suivantes sont
équivalentes :
i) E est compact.
ii) Si (Fi )i∈I est une famille de parties fermés de E telle que ∩i∈I Fi = ∅, il existe J ⊂ I
fini tel ∩i∈J Fi = ∅.

Preuve : i) ⇒ ii). Soit (Fi )i∈I une famille de parties fermés de E telle que ∩i∈I Fi =
∅ si on note Oi = {FEi , Oi est un ouvert de E et on a
(∩ Fi )
E = {E i∈I = ∪i∈I Oi

puisque E est compact, il existe J ⊂ I fini tel que

∪i∈J Oi = E.

En prenant le complémentaire, on obtient


(∪ Oi )
∅ = {E i∈J = ∩i∈J Fi

ii) ⇒ i) La démonstration est analogue 2

Corollaire 1.2.3 Soit (E, d) un espace métrique compact et soit (Fn )n∈N une famille de
parties fermées non vides emboîtées (c’est à dire Fn ⊃ Fn+1 pour tout n ∈ N). Alors
∩n∈N Fn 6= ∅.

Preuve : Supposons le contraire . E étant compact, il existerait alors A ⊂ N fini


tel que ∩n∈A Fn = ∅. A cause de la condition d’emboîtement, on aurait ∩n∈A Fn =
Fsup(A) = ∅, ce qui contredit l’une des hypothèses. 2

Corollaire 1.2.4 Un espace métrique compact (E, d) est complet.

Preuve : Il suffit d’appliquer le Corollaire 1.2.3 2

Théorème 1.2.5 Soit (E, d) un espace métrique. Alors les assertions suivantes sont
équivalentes :
i) E est compact (E possède la propriété de Borel-Lebesgue).
ii) De toute suite de points de E , on peut extraire une sous-suite convergente (Propriété
de Bolzano-Weierstrass).

Pour la preuve, nous aurons besoin de deux lemmes.

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1.2. ESPACES MÉTRIQUES COMPACTS

Lemme 1.2.6 Soit (E, d) un espace métrique possédant la propriété de Bolzano-Weierstrass.


Si (Oi )i∈I est un recouvrement ouvert de E, il existe un nombre réel λ > 0 (appelé le
nombre de Lebesgue du recouvrement) tel que, pour tout x ∈ E il existe i ∈ I vérifiant
B(x, λ) ⊂ Oi .

Preuve : Raisonnons par l’absurde. Si ce n’était pas le cas, il existerait un recou-


vrement ouvert (Oi )i∈I et une suite (xn ) de points de E telle que B(xn , 1/2n ) ne
soit contenue dans aucun des Oi . Soit (xϕ(n) ) une sous-suite extraite de cette suite
et convergeant vers ξ ∈ E. Soit i0 ∈ I tel que ξ ∈ Oi0 ; puisque Oi0 est un ouvert de
E, il contient une boule ouverte non vide B(ξ, ρ) et il existerait un entier N tel que,
pour tout n ≥ N on aurait xϕ(n) ∈ B(ξ, ρ/2). Comme B(xϕ(n) , ρ/2) ⊂ B(ξ, ρ) ⊂ Oi0 ,
on obtient une contradiction dès que ρ/2 > 1/2n > 1/2ϕ(n) . 2

Lemme 1.2.7 Soit (E, d) un espace métrique possédant la propriété de Bolzano-Weierstrass.


Alors pour tout ρ > 0, il existe un ensemble fini {x1 , . . . , xn } de points de E tel que

E = ∪ni=1 B(xi , ρ)

(cette propriété s’appelle la propriété des réverbères).

Preuve : Raisonnons encore par l’absurde. Si ce n’était pas le cas, il existerait ρ > 0
tel qu’on ne puisse pas recouvrir E par un nombre fini de boules de rayon ρ.
Grâce au Lemme de Zorn, il existerait une suite (xn ) d’éléments de E telle que
/ ∪ni=1 B(xi , ρ) pour tout n > 1. D’une telle suite, on ne peut pas extraire une
xn+1 ∈
sous-suite convergente. 2
Preuve du théorème 1.2.5 : i) ⇒ ii). Soit (xn ) une suite de points de E et
posons Fn = {xp |p ≥ n}. On a évidemment Fn 6= ∅ et Fn+1 ⊂ Fn , donc d’après le
corollaire 1.2.3 F = ∩n∈N Fn = ∅. Si ξ ∈ F , alors pour tout  > 0 et tout n ∈ N,
B(ξ, ) ∩ {xp |p ≥ n} 6= ∅, ainsi ξ est une valeur d’adhérence de la suite (xn ), et on
sait qu’on peut dans ce cas extraire de (xn ) une sous-suite qui converge vers ξ.
ii) ⇒ i). Soit (Oi )i∈I un recouvrement ouvert de E. Puisque E possède la
propriété de Bolzano-Weierstrass, le lemme 1.2.6 fournit un nombre de Lebesgue
λ pour ce recouvrement : si x ∈ E, il existe ix ∈ I tel que B(x, λ) ⊂ Oix . D’après
le lemme 1.2.7, il existe des points x1 , . . . , xn ∈ E tels que E soit union des boules
B(xk , λ) et donc E = ∪nk=1 Oixk . On a donc extrait du recouvrement ouvert donné
un recouvrement fini. 2

Corollaire 1.2.8 Tout espace métrique compact E est séparable (c’est à dire contient une
partie dénombrable partout dense).

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1.2. ESPACES MÉTRIQUES COMPACTS

Preuve : Pour tout n ∈ N, il existe une partie finie An de E telle que E = ∪x∈An B(x, 1/2n ).
L’ensemble A = ∪n∈N An répond à la question. 2

Théorème 1.2.9 Si (E, d) est un espace métrique, les assertions suivantes sont équiva-
lentes :
i) E est compact.
ii) E est complet et possède la propriété des réverbères.

Preuve : i)⇒ii). C’est le corollaire 1.2.4.


ii)⇒i). On commence par prouver que la propriété des réverbères implique
que de toute suite on peut extraire une suite de Cauchy. Soit (xn )n∈N une suite
d’éléments de E. Si on recouvre E par une famille de boules de rayon 1/2, l’une
de ces boules contient xn pour une infinité de valeurs de n et on peut donc extraire
une sous-suite (xϕ1 (n) ) de (xn )n∈N dont tous les points se trouvent à des distances
mutuelle ≤ 1.
Par récurrence sur l’entier p, on construit ainsi une suite (ϕp )p>1 d’applications
strictement croissantes ψ de N dans N telles que

d(xϕ1 ◦...◦ϕp (n) , xϕ1 ◦...◦ϕp (n0 ) ) < 1/p

pour tout n, n0 ∈ N.
Par un procédé diagonal, on construit alors une application strictement crois-
sante : N∗ → N par ψ(n) = ϕ1 ◦ . . . ◦ ϕn (n). La suite (xψ(n) )n∈N est une suite extraite
de (xn )n∈N qui vérifie d(xψ(p) , xψ(q) ) ≤ 1/p si p ≤ q ; c’est donc une suite de Cauchy
dans Equi converge puisque E est complet. 2

Corollaire 1.2.10 Si E et F sont deux espaces métriques compacts, alors E ×F est aussi
un espace métrique compact.

Preuve : Soit ((xn , yn ))n∈N une suite de points de E × F . Il existe une sous-suite
(xϕ(n) ) de (xn ) qui converge dans E. La suite (yψ(n) ) de points de F possède elle
aussi une sous-suite convergente (yϕ(ψ(n)) ). Alors (xϕ(ψ(n)) , yϕ(ψ(n)) ) est une sous-
suite de (xn , yn )n∈N qui converge dans E × F . 2

Proposition 1.2.11 Soit (E, d) un espace métrique compact et (xn ) une suite d’éléments
de E. Les assertions suivantes sont équivalentes :
i) (xn ) est convergente.
ii) (xn ) a une unique valeur d’adhérence.

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1.2. ESPACES MÉTRIQUES COMPACTS

Preuve : i) ⇒ ii). Si (xn ) converge vers `, alors ` est la seule valeur d’adhérence
de (xn ).
ii) ⇒ i). Soit λ l’unique valeur d’adhérence de (xn ). Il faut montrer que pour
tout  > 0, il existe un entier N tel que xn ∈ B(λ, ) pour tout n > N . Si ce
n’était pas le cas, pour un certain  > 0, on pourrait construire une sous-suite de
(xn ) qui ne rencontrerait pas B(λ, ) et extraire de cette sous-suite une sous-suite
convergente (xϕ(n) ) dont la limite, qui est une valeur d’adhérence de (xn ), serait
nécessairement différente de λ. D’où une contradiction. 2

Définition 1.2.12 Soit (E, d) un espace métrique. On dit qu’une partie A de E est com-
pacte si l’espace métrique (A, dA ) est compact.

Proposition 1.2.13 Soit (E, d) un espace métrique. Toute partie compacte A de E est
fermée et bornée.

Preuve : On a vu que tout espace métrique compact est borné, donc si A est une
partie compacte de E, A est bornée.
Soit maintenant ξ ∈ A ; pour tout n ∈ N∗ , B(ξ,
e 1/n) ∩ A est une partie fermée
non vide de A et donc

∅=
6 ∩n∈N B(ξ,
e 1/n) ∩ A = {ξ} ∩ A

2
A ce stade, il est raisonnable de se demander si ces conditions entraînent, en
général, que A est une partie compacte. La réponse est non :

Exemple 1.2.14 Soit E un ensemble infini muni de la distance discrète. Les parties com-
pactes de E sont les parties finies alors que toute partie de E est fermée et bornée.

Définition 1.2.15 On dit qu’un espace métrique (E, d) est localement compact, si tout
élément de E possède un voisinage compact.

Proposition 1.2.16 Soit A un ensemble compact dans un espace métrique localement


compact (E, d). Alors il existe un r > 0 tel que Vr (A) soit relativement compact dans E ;
c’est-à-dire que l’adhérence Vr (A) de Vr (A) est compact.

Preuve : Pour tout x ∈ A, il existe un voisinage compact Vx de x. Les V x
forment un recouvrement ouvert de A, donc il existe un sous ensemble fini {x1 , . . . , xn }

dans A tel que les V xi (1 ≤ i ≤ n) forment un recouvrement ouvert de A. L’en-
semble U = ∪ni=1 Vxi est compact d’après ce résultat et est un voisinage de A. 2

J. Feuto 12 ISE-maths-ENSEA
1.3. APPLICATIONS CONTINUES - HOMÉOMORPHISMES

Proposition 1.2.17 Soit (E, d) un espace métrique localement compact. Les propriétés
suivantes sont équivalentes :
1. Il existe une suite croissante (Un ) d’ensembles relativement compacts dans E tels
que Un ⊂ Un+1 pour tout n et E = ∪n U n .
2. E est réunion dénombrable de sous-ensembles compacts.
3. E est séparable.

Preuve : Il est clair que 1)⇒2) puisque U n est compact.


Si E est la réunion d’une suite (Kn ) d’ensembles compacts, chaque sous-espace
Kn est séparable d’après ce résultat. Si Dn est un ensemble au plus dénombrable
dans Kn , dense par rapport à Kn , alors D = ∪n Dn est au plus dénombrable et
dense dans E, puisque E = ∪n Kn = ∪n D̄n = D̄, d’où 2)⇒3). Supposons enfin que
E soit séparable et soit (Vn ) une base au plus dénombrable pour les ensembles ou-
verts de E. Pour chaque x ∈ E il existe un voisinage compact Wx de x, donc un
indice n(x) tel que x ∈ Vn (x) ⊂ Wx . Il en résulte que ceux des Vn qui sont relative-
ment compacts constituent déjà une base pour les ensembles ouverts de E. Nous
pouvons donc supposer que tous les Vn sont relativement compacts. Définissons
alors Un , par récurrence, de la façon suivante : U1 = V1 , Un+1 est la réunion de Vn+1
et de Vr (Ūn ), où r > 0 a été choisi de façon que Vr (Ūn ) soit relativement compact
(ce qui est possible d’après le second résultat de cette même page) ; il est alors
clair que la suite (Un ) vérifie la propriété 1. 2

Proposition 1.2.18 Dans un espace métrique localement compact, tout sous-espace ou-
vert et tout sous-espace fermé est localement compact.

Preuve : Supposons que A soit ouvert dans E ; pour tout a ∈ E, il existe une
boule fermée B 0 (a, r) qui est compacte, en vertu de la définition d’un espace loca-
lement compact et du fait que dans un compact tout fermé est compact. D’autre
part, il existe r0 ≤ r tel que B 0 (a, r0 ) soit contenue dans A ; comme cette boule est
compacte (fermé dans un compact), A est localement compact. Supposons que A
soit fermé dans E et soit a ∈ A ; alors, si V est un voisinage compact de a dans E,
V ∩ A est un voisinage de a dans A, et il est compact comme sous-espace fermé
d’un espace compact ; cela montre que A est localement compact. 2

1.3 Applications continues - Homéomorphismes


1.3.1 Continuité en un point

J. Feuto 13 ISE-maths-ENSEA
1.3. APPLICATIONS CONTINUES - HOMÉOMORPHISMES

Définition 1.3.1 Soient (E, d) et (E 0 , d0 ) deux espaces métriques et x0 un point de E .


On dit qu’une application f : E → E 0 est continue au point x0 si pour tout  > 0, il
existe η > 0 tel que d(x, x0 ) < η implique d0 (f (x), f (x0 )) < .

Proposition 1.3.2 L’application f : E → E 0 est continue en x0 ∈ E si et seulement si


pour tout voisinage V0 de f (x0 ) dans E 0 , f −1 (V0 ) est un voisinage de x0 dans E.

Preuve : Supposons que f soit continue en x0 ; si V0 est un voisinage de f (x0 ) dans


E 0 , il existe  > 0 tel que B(f (x0 ), ) ⊂ V0 ; alors on a f −1 (V0 ) ⊃ f −1 (B(f (x0 ), )) et
il existe η > 0 tel que f −1 (B(f (x0 ), )) ⊃ B(x0 , η). Il en résulte que f −1 (V0 ) est un
voisinage de x0 .
Réciproquement, prenons V 0 = B(f (x0 ), ) ; si f −1 (V 0 ) est un voisinage de x0 ,
il existe η > 0 tel que f −1 (V 0 ) ⊃ B(x0 , η), autrement dit si d(x, x0 ) < η alors
d0 (f (x), f (x0 )) < . 2

Proposition 1.3.3 Soient (E, d) et (E 0 , d0 ) deux espaces métriques, A une partie de E ,


x0 ∈ A et f une application de E dans E 0 . Si f est continue en x0 , alors f (x0 ) ∈ f (A).

Preuve : Soit V 0 un voisinage de f (x0 ) dans E 0 ; d’après la Proposition 1.3.2,


f −1 (V 0 ) est un voisinage de x0 dans E, il existe donc y ∈ A ∩ f −1 (V 0 ). Donc f (y) ∈
f (A) ∩ V 0 , ce qui prouve que f (x0 ) est adhérent à f (A). 2

Proposition 1.3.4 Soient (E, d), (F, d0 ), (G, d”) trois espaces métriques, f une applica-
tion de E dans F et g une application de F dans G. Si f est continue en x0 et g continue
en y0 = f (x0 ), alors h = g ◦ f est une application de E dans G continue en x0 .

Preuve : Posons z0 = h(x0 ) et soit V un voisinage de z0 . La continuité de g en y0


implique que g −1 (V ) est un voisinage de y0 et la continuité de f en x0 entraîne
que f −1 (g −1 (V )) = h−1 (V ) est un voisinage de x0 . 2

1.3.2 Applications continues et homéomorphismes


Définition 1.3.5 Soient (E, d) et (E 0 , d0 ) deux espaces métriques. Une application f :
E → E 0 est dite
1. continue si elle est continue en tout point de E.
2. uniformément continue si pour tout  > 0, il existe η > 0 tel que pour tout x, y ∈ E
vérifiant d(x, y) < η on a d0 (f (x), f (y)) < .

Théorème 1.3.6 Soient (E, d) et (E 0 , d0 ) deux espaces métriques et f une application de


E dans E 0 . Les assertions suivantes sont équivalentes :

J. Feuto 14 ISE-maths-ENSEA
1.3. APPLICATIONS CONTINUES - HOMÉOMORPHISMES

i) f est continue.
ii) pour toute partie ouverte U 0 de E 0 , f −1 (U 0 ) est une partie ouverte de E.
iii) pour toute partie fermée F 0 de E 0 , f −1 (F 0 ) est une partie fermée de E.
iv) pour toute partie A de E , f (A) ⊂ f (A).

Preuve : i) ⇒ iv) C’est la proposition 1.3.3


iv) ⇒ iii) Soit F 0 une partie fermée de E 0 et F = f −1 (F 0 ).On a par hypothèse
f (F ) ⊂ f (F ) ⊂ F 0 = F 0 , donc F f −1 (F 0 ) = F ⊂ F et par suite F = F , ce qui
prouve que F est fermé.
0
iii) ⇒ ii) Soit U 0 une partie ouverte de E 0 . Comme {UE 0 est fermé dans E 0 ,
0 f −1 (U 0 )
f −1 ({UE 0 ) = {E 0 est donc fermé, autrement dit f −1 (U 0 ) est ouvert dans E .
ii) ⇒ i) Soit x un point de E et V 0 un voisinage de f (x) dans E 0 . Il existe
une partie ouverte U 0 de E 0 contenue dans V 0 et contenant f (x) (par exemple
l’intérieur de V 0 ) ; donc x ∈ f −1 (U 0 ) ⊂ f −1 (V 0 ). Comme f −1 (U 0 ) est une partie
ouverte de E, il en résulte que f −1 (V 0 ) est un voisinage de x dans E. 2

Théorème 1.3.7 Soient E et F des espaces métriques. Si E est compact et si f : E → F


est une application continue, alors f (E) est une partie compacte de F .

Preuve : Soit (yn )n∈N une suite d’éléments de f (E). Il existe une suite (xn )n∈N
d’éléments de E telle que, pour tout n ∈ N, yn = f (xn ). Puisque l’espace E est
compact, on peut extraire une sous suite (xnk )k∈N de la suite (xn )n∈N qui converge.
L’application f étant continue, la suite (ynk = f (xnk ))k∈N est convergente et par
conséquent f (E) est compact. 2

Théorème 1.3.8 Soient (E, d) et (E 0 , d0 ) deux espaces métriques et on suppose que E


est compact. Alors toute application continue f : E → E 0 est uniformément continue.

Preuve : Soit  > 0. Puisque f est continue en tout point de E, pour chaque x ∈ E,
il existe ηx > 0 tel que si y ∈ B(x, ηx ) alors d0 (f (x), f (y)) < /2.
Comme (B(x, ηx /2))x∈E est un recouvrement ouvert de E qui est compact,
il existe des points x1 , . . . , xn ∈ E tels que (B(xk , ηxk /2))1≤k≤n soit encore un
recouvrement de E. Posons η = inf 1≤k≤n (ηxk /2) et soient y1 , y2 ∈ E tels que
d(y1 , y2 ) < η ; il existe un indice k0 ∈ {1, . . . , n} tel que y1 , y2 ∈ B(xk0 , ηxk0 ) et
par suite d0 (f (y1 ), f (y2 )) <  grâce à l’inégalité triangulaire. 2

Théorème 1.3.9 Soit (E, d) un espace métrique et (E 0 , d0 ) un espace métrique complet.


Si A ⊂ E, alors toute application uniformément continue f : A → E 0 se prolonge de
manière unique en une application continue f : A → E 0 . De plus un tel prolongement
est uniformément continu.

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1.3. APPLICATIONS CONTINUES - HOMÉOMORPHISMES

Preuve : L’unicité est immédiate : supposons que f 1 et f 2 soient deux prolonge-



ments de f . Alors x ∈ A|f 1 (x) = f 2 (x) est un fermé de A qui contient A et qui
est donc égal à A. Prouvons maintenant l’existence. Soit x ∈ A et considérons les
ensembles
1
Fn = f (B(x, n ) ∩ A).
2
Ils sont non vides, emboîtés et puisque f est uniformément continue, on a diamFn →
0 quand n → +∞ donc ∩n∈N Fn 6= ∅, car F est complet et a un unique élément que
l’on note f (x). On définit ainsi une application f : A → E 0 . Remarquons que si
x ∈ A on a f (x) ∈ Fn pour tout n, donc f (x) = f (x) ce qui prouve que f pro-
longe f . De plus pour tout x ∈ A et toute suite (xn ) d’éléments de A tels que
d(x, xn ) < 1/2n , on a f (x) = limn→+∞ f (xn). Soient maintenant x, y ∈ A et  > 0 ;
si (xn )n∈N (resp. (yn )n∈N ) est une suite d’éléments de A qui converge vers x (resp.
y), comme f est uniformément continue il existe η > 0 tel que si d(xn , yn ) < η
alors d0 (f (xn ), f (yn )) < /2. Supposons d(x, y) < η, alors pour n assez grand on
aura d(xn , yn ) < η donc d0 (f (xn ), f (yn )) < /2 et par conséquent d(f (x), f (y)) < 
donc f est uniformément continue. 2

Théorème 1.3.10 Soit (E, d) un espace métrique complet et f : E → E une application


contractante, c’est-à-dire telle qu’il existe une constante k ∈ ]0, 1[ vérifiant

d(f (x), f (y)) ≤ kd(x, y)

pour tout x, y ∈ E. Alors il existe un unique point fixe pour f , c’est-à-dire un unique
point ξ ∈ E tel que f (ξ) = ξ.

Preuve : Unicité. Soient ξ1 et ξ2 tels que f (ξ1 ) = ξ1 f (ξ2 ) = ξ2 . On a alors d(ξ1 , ξ2 ) =


d(f (ξ1 ), f (ξ2 )) ≤ kd(ξ1 , ξ2 ). Comme k ∈ ]0, 1[, ceci n’est possible que si d(ξ1 , ξ2 ) = 0
donc ξ1 = ξ2 .
Existence. Soit a un élément quelconque de E . On montre que la suite (xn )n∈N
définie par x0 = a et xn+1 = f (xn ) si n > 0 converge vers un point ξ véri-
fiant f (ξ) = ξ. Comme E est complet, pour montrer que cette suite converge il
suffit de montrer qu’elle est de Cauchy. On montre d’abord par récurrence que
d(xn , xn+1 ) ≤ k n d(x0 , x1 ). C’est vrai pour n = 0 ; d’autre part si c’est vrai pour n,
alors d(xn+1 , xn+2 ) ≤ kd(xn , xn+1 ) ≤ k n+1 d(x0 , x1 ) c’est-à-dire que c’est vrai pour
n + 1.
Maintenant si m < n, on a

d(xm , xn ) ≤ d(xm , xm+1 ) + . . . + d(xn+1 , xn )


≤ (k m + . . . k n−1 )d(x0 , x1 )
km
≤ d(x0 , x1 )
1−k

J. Feuto 16 ISE-maths-ENSEA
1.4. LE THÉORÈME DE BAIRE ET SES CONSÉQUENCES

Comme k m /(1 − k) tend vers 0 quand m tend vers l’infini, pour tout  > 0 il
existe un entier M > 0 tel que si m > M alors k m d(x0 , x1 )/(1 − k) < , donc si
p, q > M on a d(xp , xq ) < . La suite (xn ) est de Cauchy et converge donc vers
un point ξ ∈ E. Comme f est continue la suite (f (xn )) converge vers f (ξ), mais
(f (xn ))n>0 = (xn )n>0 , par unicité de la limite on a donc f (ξ) = ξ. 2

Définition 1.3.11 Une application f d’un espace métrique (E, d) dans un espace mé-
trique (E 0 , d0 ) est un homéomorphisme si elle est bijective et si f ainsi que f −1 sont conti-
nues.

Corollaire 1.3.12 Soit f : E → F une application continue bijective. Si E est compact,


alors f est un homéomorphisme.

Preuve : Notons f −1 l’application réciproque de f . Si G est une partie fermée,


donc compacte de E, alors (f −1 )−1 (G) = f (G) est une partie compacte, donc fer-
mée de F . Ceci démontre la continuité de f −1 . 2

Proposition 1.3.13 Soient (E, d) et (E 0 , d0 ) deux espaces métriques, f une application


de E dans E 0 et a un point de E. Alors les assertions suivantes sont équivalentes :
i) f est continue en a.
ii) Pour toute suite (xn )n∈N qui converge dans E vers a, la suite (f (xn ))n∈N converge
dans E 0 vers f (a).

Preuve : i) ⇒ ii) Essayer de le montrer.


ii) ⇒ i) On prouve que non i) ⇒ non ii). Pour cela on va "construire" une
suite (xn )n∈N qui converge vers a et telle que (f (xn ))n∈N ne converge pas vers
f (a). Comme f n’est pas continue en a, il existe une boule B(f (a), ) telle que
f −1 (B(f (a), )) ne contienne aucune boule ouverte centrée en a ; en particulier
pour tout entier n > 0 on a B(a, 1/2n ) \ f −1 (B(f (a), )) 6= ∅. En prenant un point
dans chacun de ces ensembles, on obtient une suite (xn )n∈N telle que pour tout
n > 0, d(a, xn ) < 1/2n et f (xn ) ∈
/ B(f (a), ). La suite (f (xn ))n∈N ne converge pas
vers f (a). 2

1.4 Le théorème de Baire et ses conséquences

René Baire (1874-1932) démontra ce résultat en 1899


Soit X un espace topologique . Un ouvert U de X est dense dans X si et seule-
ment si le fermé complémentaire U c est d’intérieur vide. Si on a un nombre fini

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1.4. LE THÉORÈME DE BAIRE ET SES CONSÉQUENCES

d’ouverts denses, on vérifie facilement de proche en proche que U1 ∩ . . . ∩ Un est


encore un ouvert dense.
Le théorème de Baire donne un cas où cette propriété triviale d’intersection
finie peut s’étendre aux suites d’ouverts denses.

Théorème 1.4.1 (théorème de Baire) Soit X un espace métrique (non vide) complet.
Les assertions suivantes sont valide :
i) Si (Un )n≥0 est une suite de parties ouvertes et denses dans X alors ∩n≥0 Un est dense
dans X.
ii) Si (Fn )n≥0 est une suite de parties fermées de X d’intérieur vide, alors ∪n≥0 Fn est
d’intérieur vide.
iii) si X est réunion dénombrable de fermés, l’un au moins de ces fermés contient un
ouvert (non vide).

Preuve : Notons que i) ⇔ ii) et que iii) est une forme faible de ii). Nous montrons
uniquement i). Soit (Un )n≥0 une suite d’ouverts denses de X. Soit V une partie
ouverte non vide de X ; on doit montrer que ∩n≥0 Un rencontre V . Comme U0 est
dense, U0 rencontre V et on peut choisir un point x0 ∈ V ∩ U0 . Comme V ∩ U0
est ouvert, il existe un nombre r0 > 0, que l’on peut choisir ≤ 1, tel que la boule
ouverte B(x0 , 2r0 ) de centre x0 et de rayon 2r0 soit contenue dans V ∩ U0 . Par
récurrence sur n ≥ 0 on construit une suite (xn ) d’éléments de X et une suite
(rn ) de nombres réels strictement positifs tels que rn ≤ 2−n et tels que, pour tout
n ≥ 1, la boule ouverte B(xn ; 2rn ) de centre xn et de rayon 2rn soit contenue dans
Un ∩ B(xn−1 , rn−1 ) : en effet, supposons xn et rn construits ; comme Un+1 est dense,
il existe xn+1 ∈ Un+1 ∩ B(xn , rn ). Comme Un+1 ∩ B(xn , rn ) est ouvert, il existe un
nombre rn+1 tel que 0 < rn+1 ≤ 2−n−1 et tel que la boule ouverte B(xn+1 , 2rn+1 )
soit contenue dans Un+1 ∩ B(xn , rn ) (on notera bien le petit jeu entre rn et 2rn+1 ).
Notons maintenant Bn la boule fermée de centre xn et de rayon rn . On a

Bn+1 ⊂ B(xn+1 , 2rn+1 ) ⊂ B(xn , rn ) ⊂ Bn .

Comme l’espace X est complet, que les ensembles Bn sont fermés, décroissants,
non vides et que leur diamètre tend vers 0, on a ∩n≥0 Bn 6= ∅ ; or, par construction,
T
∩n≥0 Bn ⊂ V ∩ n≥0 Un , ce qui montre que cette dernière intersection est non vide.
2

Corollaire 1.4.2 Soient X un espace métrique complet non vide et (Fn )n≥0 une suite de
S S ◦
parties fermées de X telle que n≥0 Fn = X ; alors n≥0 F n est dense dans X.

J. Feuto 18 ISE-maths-ENSEA
1.5. ESPACES CONNEXES

Preuve : Soit V un ouvert non vide de X ; dans l’espace métrique complet Y = V ,


S
considérons les ouverts (relatifs) Un = V \ Fn . Puisque n≥0 Fn = X, l’intersection
T
n≥0 Un est vide, ce qui entraîne par le théorème 1.4.1 appliqué à Y que l’un au
moins des ouverts Un n’est pas dense dans Y . Il existe donc n0 et un ouvert non
vide U de Y qui soit disjoint de Un0 . Cet ouvert U doit rencontrer V ; on peut donc
trouver x ∈ V ∩ U et r > 0 tels que B(x, r) ⊂ V ne rencontre pas Un0 , c’est-à-dire

B(x, r) ⊂ Fn0 et en particulier x ∈ F n0 . On a ainsi montré que la réunion des
intérieurs des (Fn ) rencontre tout ouvert non vide V donné. 2

1.5 Espaces connexes


Définition 1.5.1 On dit qu’un espace métrique (E, d) est connexe si les seules parties à
la fois ouvertes et fermées de E sont ∅ et E.

Proposition 1.5.2 Soit (E, d) un espace métrique. Les assertions suivantes sont équiva-
lentes :
i) E est connexe.
ii) Si E est union de deux parties ouvertes disjointes, l’une des deux est vide.
iii) Si E est union de deux parties fermées disjointes, l’une des deux est vide.
iv) Toute application continue de E dans l’espace discret {0, 1} est constante.

Preuve : i) ⇒ ii). Supposons que E = U1 ∪ U2 , où U1 et U2 sont deux ouverts


disjoints de E. Comme {UE2 = U1 , alors U1 est ouvert et fermé dans E d’où il
résulte que soit U1 = ∅ soit U1 = E auquel cas U − 2 = ∅.
ii) ⇒ iii). Si E est union de deux fermés disjoints F1 et F2 , alors F1 et F2 sont
aussi des parties ouvertes de E.
iii) ⇒ iv). Soit f : E → {0, 1} une application continue. Alors f −1 ({0}) et
f −1 ({1}) sont deux parties fermées disjointes de E dont l’union est égale à E ;
l’une d’elles est donc vide. Si f −1 (0) = ∅, alors f = 1, sinon on a f = 0.
iv) ⇒ i). Soit A une partie ouverte et fermée de E. La fonction caractéristique
de A, χA : E → {0, 1} définie par
(
1 si x ∈ A
χA (x) =
0 si x ∈ /A

est continue. Elle est donc constante ce qui implique A = ∅ ou A = E . 2

Proposition 1.5.3 Soient (E1 , d1 ) et (E2 , d2 ) deux espaces métriques non vides. Les as-
sertions suivantes sont équivalentes.

J. Feuto 19 ISE-maths-ENSEA
1.5. ESPACES CONNEXES

i) E1 et E2 sont connexes.
ii) E1 × E2 est connexes.

Preuve : i) ⇒ ii). Soit A une partie ouverte et fermée non vide de E1 × E2 . Don-
nons nous un point (x0 , y0 ) ∈ A. L’application ι : E1 → E1 × E2 définie par
ι(x) = (x, y0 ) est continue ; donc ι−1 (A) = {x ∈ E1 |(x, y0 ) ∈ A} est une partie ou-
verte et fermée non vide de E1 d’où ι−1 (A) = E1 , autrement dit E1 × {y0 } ⊂ A.
Si on se fixe maintenant un point x ∈ E1 , on démontre de la même façon que
{x} × E2 ⊂ A. Finalement on a bien A = E1 × E2 .
ii) ⇒ i). Si E1 n’est pas connexe, il existe Ω1 ouvert et fermé non vide dans E1
différent de E1 . Alors Ω1 × E2 = p?1 (Ω1 ) est une partie ouverte et fermée non vide
de E1 × E2 différente de E1 × E2 2

Définition 1.5.4 Dans un espace métrique (E, d), on dit qu’une partie A est connexe si
l’espace métrique (A, dA ) est connexe.

Proposition 1.5.5 Soit (E, d) un espace métrique, (Ai )i∈I une famille de parties connexes
de E telles que ∩i∈I Ai 6= ∅. Alors ∪i∈I Ai est une partie connexe de E.

Preuve : Soit f : ∪i∈I Ai → {0, 1} une application continue. Alors f |Ai est constante
et puisque ∩i∈I Ai 6= ∅, f est constante. 2

Proposition 1.5.6 Soit (E, d) un espace métrique et A1 , . . . , An des parties connexes de


E telles que Ai ∩ Ai+1 6= ∅ pour tout i. Alors A1 ∪ . . . ∪ An est une partie connexe de E.

Preuve : Montrons le résultat par récurrence sur n. Pour n = 1, il n’y a rien à


démontrer. Supposons qu’il soit vrai pour un entier n > 1 ; A1 ∪ . . . ∪ An est
connexe et de plus (A1 ∪ . . . ∪ An ) ∩ An+1 6= ∅, donc A1 ∪ . . . ∪ An+1 est connexe.
2

Proposition 1.5.7 Soit (E, d) un espace métrique et A une partie connexe de E. Si A ⊂


B ⊂ A, alors B est connexe.

Preuve : Soient U1 et U2 deux ouverts disjoints tels que B ⊂ U1 ∪ U2 . On sait que


soit U1 ∩ A = ∅, soit U2 ∩ A = ∅. Supposons par exemple que U1 ⊂ E \ A ; comme
U1 est un ouvert de E, on a U1 ⊂ ExtA et donc U1 ∩ B = ∅. 2

Théorème 1.5.8 Soit (E, d) un espace métrique connexe et f : E → F une application


continue. Alors f (E) est une partie connexe de F .

J. Feuto 20 ISE-maths-ENSEA
1.6. EXERCICES

Preuve : Soient U1 et U2 deux parties ouvertes disjointes non vides de F dont


l’union contient f (E) ; alors f −1 (U1 ) et f −1 (U2 ) sont deux ouverts disjoints de E
qui recouvrent E et par conséquent l’un des deux est vide. Ceci signifie que soit
U1 ∩ f (E) = ∅, soit U2 ∩ f (E) = ∅. 2

Définition 1.5.9 Soit E un espace métrique. On dit qu’une partie A est une composante
connexe de E si c’est une partie connexe maximale de E, autrement dit A est une partie
connexe de E qui n’est contenue strictement dans aucune partie connexe de E.

Lemme 1.5.10 Deux composantes connexes distinctes d’un espace métrique E sont dis-
jointes.

Preuve : Soient A1 et A2 deux composantes connexes de E. Si on a A1 ∩ A2 6= ∅,


alors A1 ∪A2 est une partie connexe de E et par définition on a donc A1 = A1 ∪A2 =
A2 2

Lemme 1.5.11 Soit E un espace métrique et x ∈ E. Il existe une unique composante


connexe de E contenant x, qui s’appelle la composante connexe de x dans E.

Preuve : La réunion de toutes les parties connexes de E contenant x est une partie
connexe de E qui est maximale. 2

Proposition 1.5.12 Tout espace métrique E est la réunion disjointe de ses composantes
connexes.

Preuve : D’après le lemme 1.5.11, E est la réunion de ses composantes connexes


et d’après le lemme 1.5.10 deux composantes connexes distinctes sont disjointes.
2

1.6 Exercices
Exercice 1
Si x et y sont deux nombres réels, on note d(x, y) = |x − y| et δ(x, y) = |Arctanx − Arctany|.
Démontrer que δ est une distance sur R équivalente à la distance naturelle d (équivalence
topologique).

Exercice 2 Montrer que pour tout x, y ∈ Rn ,

d∞ (x, y) ≤ d2 (x, y) ≤ d1 (x, y) ≤ nd∞ (x, y).

J. Feuto 21 ISE-maths-ENSEA
1.6. EXERCICES

Exercice 3 Soit (E, d) un espace métrique, A et B deux parties de E. Montrer les rela-
tions suivantes :
◦ ◦
1. si A ⊂ B alors A ⊂ B

z }| { ◦ ◦
2. A ∩ B = A ∩ B

z }| { ◦ ◦
3. A ∪ B ⊃ A ∪ B
Donner un exemple où la dernière inclusion est stricte.

Exercice 4 Démontrer que si A est une partie d’un espace métrique (E, d). Les propriétés
suivantes sont équivalentes :
1. A est une partie fermée de E.
2. Pour toute suite (xn )n∈N d’éléments de A qui converge dans E vers un point x,
x ∈ A.

Exercice 5 Soit (X, d) un espace métrique. Montrer que s’il existe une partie A de X
non dénombrable, et un réel α > 0 tels que

∀(x1 , x2 ) ∈ A2 , x1 6= x2 ⇒ d(x1 , x2 ) ≥ α,

alors l’espace (X, d) n’est pas séparable.

Exercice 6 Soient X, Y deux espaces topologiques (Y séparé). Soient f et g deux appli-


cations de X dans Y . On considère Γ = {(x, f (x)), x ∈ X}, le graphe de f .
1. Montrer que ∆ = {(y, y) : y ∈ Y } la diagonale de Y × Y est fermée.
2. Montrer que si f et g sont continues alors A = {x ∈ X : f (x) = g(x)} est fermé.
3. Montrer que si f est continue, Γ est fermé dans X × Y .
1
4. Prouver en considérant X = Y = R et f : x 7→ x
si x 6= 0 et f (0) = 0, que la
réciproque est fausse.

Exercice 7 Soit X un espace métrique.


1. Soit A et B deux compacts disjoints dans X. Montrer qu’ils possèdent des voisi-
nages ouverts disjoints (commencer par le cas où B est réduit à un point).
2. Soit K un compact non vide de X et U un ouvert de X contenant K. Montrer qu’il
existe r > 0 tel que pour tout x ∈ X, on ait l’implication :

d(x, K) < r ⇒ x ∈ U .
S
Indications 7 1. Remarquer si Ua est un voisinage de a, alors A ⊂ a∈A Ua .

J. Feuto 22 ISE-maths-ENSEA
1.6. EXERCICES

2. Raisonner par l’absurde et construire une suite (xn ) dont aucun élément n’est dans
U et une suite (yn ) de K. Quitte à extraire une sous-suite se débrouiller pour qu’elle
converge vers la même limite.

Exercice 8 Montrer qu’une suite convergente et sa limite forment un ensemble compact.

Indications 8 Utiliser qu’un ensemble K est compact si et seulement si de toute suite


d’éléments de K on peut extraire une sous-suite convergente vers un élément de K.

Exercice 9 Soient K, F ⊂ Rn des parties non vides, K compact et F fermé. Montrer


qu’il existe a ∈ K et b ∈ F tel que ka − bk = dist(K, F ).

Indications 9 Extraire des sous-suites...

Exercice 10 Soit E un espace compact et soit (F, d) un espace métrique. Soit f : E → F


une application localement bornée, ce qui signifie que, pour tout y ∈ E, il existe un
voisinage Vy de y sur lequel f est bornée. Montrer que f est bornée sur E.

Exercice 11 Soit X un espace métrique.


1. Soit (Fn )n une suite décroissante de fermés de X et soit (xn )n une suite convergente
telle que xn ∈ Fn pour tout n ≥ 0. Montrer que
\
lim xn ∈ Fn .
n→∞
n≥0
T
Donner un exemple pour lequel n≥0 Fn = ∅.
2. Soit maintenant (Kn )n une suite décroissante de compacts non vides de X. Vérifier
T
que K = n≥0 Kn est non vide et que tout ouvert Ω qui contient K contient tous
les Kn à partir d’un certain rang.

Exercice 12 Soit X un espace topologique et f : X × [0, 1] → R continue. Montrer que


R1
l’application g : x ∈ X 7→ 0 f (x, y) dy est continue.

Exercice 13 Soit E un espace normé. Si A et B sont deux parties de E, on note A + B


l’ensemble {a + b ; a ∈ A et b ∈ B}.
1. Montrer que si A est compact et B est fermé, alors A + B est fermé.
2. Donner un exemple de deux fermés de R2 dont la somme n’est pas fermé.

Indications 13 On pourra utiliser la caractérisation de la fermeture par des suites.

J. Feuto 23 ISE-maths-ENSEA
1.6. EXERCICES

Correction 1 1. Pour montrer que A + B est fermé, nous allons montrer que toute
suite de A + B qui converge, converge vers un élément de A + B. Soit (xn ) un
suite de A + B qui converge vers x ∈ E. Alors il existe an ∈ A et bn ∈ B tel que
xn = an + bn . Comme A est compact on peut extraire une sous-suite (aφ(n) ) qui
converge vers a ∈ A. Alors bφ(n) = xφ(n) − aφ(n) est convergente vers x − a. Notons
b = x − a comme B est fermé alors b ∈ B. Maintenant x = a + b donc x ∈ A + B.
2. Soit F = {(x, y) ∈ R2 | xy ≥ 1 et x ≥ 0} , soit G = {(x, y) ∈ R2 | y ≤ 0 et x ≥
0}. Alors F + G = {(x, y) ∈ R2 | x ≥ 0} ∪ {0} × [0, +∞[ qui n’est pas un fermé
(ni un ouvert).

Exercice 14 Soit f : Rn → Rn une application continue. Elle est dite propre si pour tout
compact K ⊂ Rn , l’image réciproque f −1 (K) est compact.
1. Montrer que, si f est propre, alors l’image par f de tout fermé de Rn est un fermé.
2. Établir l’équivalence suivante : l’application f est propre si et seulement si elle a la
propriété :
kf (x)k → ∞ quand kxk → ∞ .

Indications 14 1. Utiliser la caractérisation de la fermeture par des suites.


2. Remarquer que "kf (x)k → ∞ quand kxk → ∞" est équivalent à

”∀M > 0 ∃m > 0∀x ∈ Rn (x ∈


/ B(0, m) ⇒ f (x) ∈
/ B(0, M )).”

Exercice 15 Soit E = {f : [0, 1] → continue }. On munit E de la métrique d∞ (f, g) =


supt∈[0,1] |f (t) − g(t)|. Montrer que la boule unité fermée de E n’est pas compact (on
pourra construire une suite dont aucune sous suite n’est de Cauchy).
Que peut-on dire de la boule unité fermée de l∞ (l’espace des suites bornées muni de
la norme sup) ?

Exercice 16 Soit (X, d) un espace métrique compact et f : X → X une application


vérifiant
d(f (x), f (y)) < d(x, y) pour tout x, y ∈ X , x 6= y .
Le but ici est de montrer que f a un unique point fixe p ∈ X.
1. Justifier que f peut avoir au plus un point fixe.
2. Montrer que les ensembles Xn = f n (X), n ∈ N, forment une suite décroissante de
T
compacts et que Y = n≥0 Xn n’est pas vide.
3. Montrer que Y est un ensemble invariant, i.e. f (Y ) = Y , et en déduire que le
diamètre de cet ensemble est zero.

J. Feuto 24 ISE-maths-ENSEA
1.6. EXERCICES

4. Conclure que f a un unique point fixe p ∈ X et que pour tout x0 ∈ X la suite


xn = f n (x0 ) → p, lorsque n → ∞.

Indications 16 1. ...
2. Utiliser l’exercice 1.6.
3. Montrer f (Y ) ⊂ Y puis Y ⊂ f (Y ).
4. Diamètre zéro implique ensemble réduit à un singleton.

Exercice 17 Soient (E, d) un espace métrique compact et f : E → E une application


vérifiant
d(f (x), f (y)) ≥ d(x, y) pour tout x, y ∈ E .
On se propose de montrer que f est une isométrie surjective. Soient a, b ∈ E et posons,
pour n ≥ 1, an = f n (a) = f ◦ f n−1 (a) et bn = f n (b).
1. Montrer que pour tout  > 0, il existe k ≥ 1 tel que d(a, ak ) <  et d(b, bk ) < 
(Considérer une valeur d’adhérence de la suite zn = (an , bn )).
2. En déduire que f (E) est dense dans E et que d(f (a), f (b)) = d(a, b) (Considérer
la suite un = d(an , bn )).

Exercice 18 On se donne une métrique d sur X = [0, 1] telle que l’identité i : (X, |.|) →
(X, d) soit continue (i.e. la topologie définie par d est moins fine que la topologie usuelle
de X).
1. Montrer que tout sous-ensemble de X compact pour la topologie usuelle est aussi
compact pour la topologie définie par d ; puis montrer cette propriété pour les fermés.
2. En déduire que la topologie définie par d est la topologie usuelle.

J. Feuto 25 ISE-maths-ENSEA
Chapitre 2

Espace vectoriels normés

Nous considérons dans ce chapitre des espaces vectoriels sur un corps K, avec
K = R ou C.

2.1 Généralités sur les espaces vectoriels normés


Soit X un K-espace vectoriel.

Définition 2.1.1 Une norme sur X est une application p : X → R vérifiant :


i) p(x) ≥ 0 pour tout x ∈ X
ii) p(x) = 0 si et seulement si x = 0
iii) p(λx) = |λ| p(x) pour tout λ ∈ K et tout x ∈ X
iv) p(x + y) ≤ p(x) + p(y) pour tout x, y ∈ X (Inégalité triangulaire)

Un espace vectoriel muni d’une norme est appelé espace vectoriel normé (en
abrégé evn).
Si (X, p) est un espace normé, nous en ferons un espace métrique en définis-
sant la distance d sur X par d(x, y) = p(x − y), et nous munirons X de la to-
pologie associée à cette métrique, que nous appellerons topologie de la norme.
Soient x ∈ X et r > 0 ; on appelle boule ouverte de centre x et de rayon r le
sous-ensemble Bp (x, r) = {y ∈ X : p(y − x) < r} de X.
Rappelons que dans la topologie de la norme sur X, les parties ouvertes sont
les réunions de boules ouvertes ; une partie U de X est un voisinage de x ∈ X
si et seulement s’il existe r > 0 tel que B(x, r) ⊂ U . La boule fermée de centre x
et de rayon r > 0 est l’ensemble {y ∈ X : p(y − x) ≤ r}. Par convention, la boule
unité d’un espace normé X sera la boule fermée de centre 0X et de rayon 1 ; on la
notera BX . De l’inégalité triangulaire ci-dessus (propriété (iv)), on déduit :

26
2.1. GÉNÉRALITÉS SUR LES ESPACES VECTORIELS NORMÉS

Lemme 2.1.2 Si p est une semi-norme sur X, on a |p(x) − p(y)| ≤ p(x − y) pour tous
vecteurs x, y ∈ X.

Proposition 2.1.3 Soit (X, p) un espace normé ; l’application p : X → R+ est continue


pour la topologie de la norme.

Cela résulte immédiatement du lemme 2.1.2. En effet, si la suite (xn ) ⊂ X tend


vers y, on aura
|p(xn ) − p(y)| ≤ p(xn − y) = d(xn , y) → 0.
En général, nous noterons kxk la norme d’un vecteur x ∈ X, ou bien kxkX s’il y a
un risque de confusion.
La topologie et la structure d’espace vectoriel d’un espace normé sont com-
patibles, autrement dit, un espace normé est un espace vectoriel topologique au
sens suivant :

Définition 2.1.4 Un espace vectoriel topologique est un espace vectoriel X sur K muni
d’une topologie pour laquelle les deux applications (x, y) 7→ x + y de X × X dans X et
(λ, x) 7→ λx de K × X dans X sont continues.

Proposition 2.1.5 Un espace normé, muni de la topologie de la norme, est un espace


vectoriel topologique.

Preuve : Soit X un espace normé. Démontrons la continuité de l’application (x, y) 7→


x + y. Puisque la topologie provient d’une métrique, nous pouvons utiliser des
suites convergentes. Soient donc (xn ) une suite qui converge vers x et (yn ) une
suite qui converge vers y ; on aura

d(xn + yn , x + y) = kxn + yn − x − yk ≤ kxn − xk + kyn − yk

qui tend bien vers 0. La continuité de l’application (λ, x) 7→ λx se démontre de


façon analogue : si (λn ) converge vers λ ∈ K et si (xn ) converge vers x ∈ X, on
écrira

d(λn xn , λx) ≤ d(λn xn , λn x) + d(λn x, λx) = |λn | kxn − xk + |λn − λ| kxk

qui tend vers 0 (noter que la suite (λn ) est bornée puisqu’elle est convergente). 2

Lemme 2.1.6 Soit Z un espace normé de dimension n ; pour tout  ∈ ]0, 1[, on peut
trouver dans la boule unité de Z une famille A d’au moins −n points dont les distances
mutuelles sont  : si x, y ∈ A et x 6= y, alors kx − yk ≥ , et cardA ≥ −n .

J. Feuto 27 ISE-maths-ENSEA
2.2. APPLICATIONS LINÉAIRES ET MULTILINÉAIRES CONTINUES

Preuve : Soit A une famille maximale de points de la boule unité BZ de Z dont les
distances mutuelles soient ≥ , alors les boules de rayon  centrées aux points de A
recouvrent BZ : en effet, si x ∈ BZ et x ∈
/ A, on ne peut pas, d’après la maximalité
de A, ajouter le point x à la famille A pour former une nouvelle famille A0 de
points à distances mutuelles ≥  ; cela signifie qu’il existe un point y ∈ A tel que
d(y, x) < , donc x est bien contenu dans une boule de rayon  centrée en un point
y de A. Soit V le volume de BZ , puisque Z est de dimension n, les boules de rayon
 ont un volume égal à n V (dans le cas des scalaires réels), et puisque les boules
de ce rayon centrées aux points de A recouvrent BZ , on a (cardA)n V ≥ V , d’où
le résultat. 2

Théorème 2.1.7 Si la boule unité d’un espace normé X est compacte, alors X est de
dimension finie.

Preuve : Si la boule unité de X est compacte, on peut la recouvrir par un nombre


fini N de boules Bα de rayon < 1/4. Si X était de dimension infinie, on pourrait
choisir un sous-espace Z ⊂ X d’une dimension finie n telle que 2n > N , il exis-
terait alors dans la boule unité de Z une famille d’au moins 2n points tels que
kzi − zj k ≤ 1/2. Mais alors chacune des boules Bα contiendrait au plus un des
points (zi ), donc N ≥ 2n, contradiction. 2

Proposition 2.1.8 (Une application du théorème de Baire) Un espace vectoriel normé


complet (E, k·k) (sur les réels ou les complexes) ne peut pas avoir une base algébrique in-
finie dénombrable.

Preuve : Par l’absurde : si (e0 , e1 , . . .) est une telle base, considérons l’espace En de
dimension n + 1 engendré par e0 , . . . , en . L’espace vectoriel normé (En , k·k) est de
dimension finie, donc il est nécessairement complet. Tout sous-espace métrique
complet d’un espace métrique est automatiquement fermé dans celui-ci. Donc
En est fermé. Par le théorème de Baire, si E = ∪En était complet, l’un des En ,
disons EN serait d’intérieur non vide. Il existerait donc x ∈ EN et  > 0 tel que
ky − xk <  ⇒ y ∈ EN . Soit z ∈ E avec kzk < . Alors x + z est dans EN donc z
l’est aussi. Donc EN contient la boule ouverte de rayon  > 0, centrée en le vecteur
nul, et par dilatation, EN contient toutes les boules ouvertes centrées en 0. Donc
EN = E, ce qui est faux. 2

2.2 Applications linéaires et multilinéaires continues


Soient X et Y deux espaces vectoriels normés.

J. Feuto 28 ISE-maths-ENSEA
2.2. APPLICATIONS LINÉAIRES ET MULTILINÉAIRES CONTINUES

Définition 2.2.1 On dit qu’une application T : X → Y est linéaire si elle vérifie les
propriétés suivantes :
1. T (x + y) = T (x) + T (y), ∀x, y ∈ X
2. T (λ · x) = λ · T (x), ∀(λ, x) ∈ K × X

Soient p ∈ N∗ , E1 , . . . , Ep , F des espaces vectoriels sur K.

Définition 2.2.2 Une application f : E1 × . . . × Ep → F est dite p-linéaire ou multili-


néaire (si p = 2, on dit bilinéaire) si elle est linéaire par rapport à chacune des variables
(les autres variables étant fixees), c’est-à-dire si pour tout i = 1, . . . , p, on a :

f (x1 , . . . , xi + ti x0i , . . . , xp ) = f (x1 , . . . , xi , . . . , xp ) + ti f (x1 , . . . , x0i , . . . , xp )

où chaque xj est dans Ej (et x0i ∈ Ei ), et ti ∈ K.

Théorème 2.2.3 Soient X et Y deux espaces normés et T : X → Y une application


linéaire ; les propriétés suivantes sont équivalentes :
1. l’application T est continue sur X,
2. l’application T est continue au point 0X ,
3. il existe un nombre M ≥ 0 tel que, pour tout x ∈ X on ait

kT (x)kY ≤ M kxkX .

Preuve : Il est clair que (1)⇒ (2). Si T est continue en 0, il existe un nombre δ > 0
tel que pour tout u ∈ X, la condition dX (u, 0) ≤ δ implique dY (T (u), T (0)) < 1,
autrement dit, kukX ≤ δ implique kT (u)kY ≤ 1. Etant donné un vecteur x non nul
quelconque dans X, le vecteur u = δ kxk−1 X x vérifie kukX ≤ δ, donc kT (u)kY ≤ 1,
−1
ce qui revient à dire que kT (x)kY ≤ δ kxkX . On a ainsi montré que (3) est vraie,
avec M = δ −1 . Enfin, supposons (3) vérifiée ; si une suite (xn ) de X tend vers un
vecteur x ∈ X, on aura

d(T (xn ), T (x)) = kT (xn ) − T (x)kY = kT (xn − x)kY ≤ M kxn − xkX → 0,

ce qui montre que T est continue au point x, et ceci pour tout x ∈ X. 2


Soient p et q deux semi-normes sur un espace vectoriel X ; on dit que p et q sont
équivalentes s’il existe deux nombres réels m > 0 et M ≥ 0 tels que mp ≤ q ≤ M p.

Corollaire 2.2.4 Deux normes p et q sur un espace vectoriel X définissent la même


topologie si et seulement si elles sont équivalentes.

J. Feuto 29 ISE-maths-ENSEA
2.2. APPLICATIONS LINÉAIRES ET MULTILINÉAIRES CONTINUES

Soient X et Y deux espaces normés et S, T deux applications linéaires continues


de X dans Y ; on sait que l’application S + T , qui associe à tout x ∈ X l’image
S(x) + T (x) ∈ Y , est linéaire. Vérifions rapidement sa continuité en 0 : si (xn ) tend
vers 0 dans X, alors (S(xn )) et (T (xn )) tendent vers 0 dans Y donc (S + T )(xn ) =
S(xn ) + T (xn ) tend vers 0 par la propriété d’espace vectoriel topologique.
L’ensemble des applications linéaires continues de X dans Y est donc un sous-
espace vectoriel noté L(X, Y ) de l’ensemble des applications linéaires de X dans
Y . On appelle aussi opérateur borné une application linéaire continue entre deux
espaces normés. Dans le cas où Y = X, on note simplement L(X) l’espace des en-
domorphismes continus de X. Soit T : X → Y une application linéaire continue ;
d’après le théorème 2.2.3, il existe une constante M telle que kT (x)kY ≤ M pour
tout vecteur x de X tel que kxkX ≤ 1. On peut donc considérer la quantité (finie)

kT k = kT kL(X,Y ) = sup {kT (x)kY : kxkX ≤ 1}

qui s’appelle la norme de l’application linéaire T .

Proposition 2.2.5 Soient X et Y deux espaces normés et T : X → Y une application


linéaire continue ; on pose

kT kL(X,Y ) = sup {kT (x)kY : kxkX ≤ 1} .

Pour tout x ∈ X, on a
kT (x)kY ≤ kT kL(X,Y ) kxkX .
La constante kT kL(X,Y ) est le plus petit nombre M tel que l’inégalité kT (x)kY ≤ M kxkX
soit vraie pour tout x ∈ X. L’application T 7→ kT kL(X,Y ) est une norme sur L(X, Y ).

Preuve : Vérifions que T 7→ kT kL(X,Y ) est une norme. Il est d’abord évident que
kT kL(X,Y ) = 0 implique que kT (x)kY = 0 pour tout x ∈ X, c’est à dire T (x) = 0Y
pour tout x ∈ X puisque Y est normé, donc T est l’application nulle. Mon-
trons ensuite que T 7→ kT kL(X,Y ) est une semi-norme ; il est facile de vérifier que
kλT kL(X,Y ) = |λ| kT kL(X,Y ) pour tout λ ∈ K, ensuite, pour tout x tel que kxkX ≤ 1,
k(S + T )(x)kY = kS(x) + T (x)kY ≤ kS(x)k + kT (x)k ≤ kSkL(X,Y ) + kT kL(X,Y ) d’où
l’inégalité kS + T kL(X,Y ) ≤ kSkL(X,Y ) + kT kL(X,Y ) , obtenue en passant au sup sur
x dans la boule unité de X. 2

Exemple 2.2.6 1. Si X est un espace normé non nul, on a toujours kIdX k = 1.


2. Soit f ∈ C([0, 1]) fixée, on définit un endomorphisme Mf de C([0, 1]), l’application
de multiplication par f , en posant Mf (g) = f g pour toute g ∈ C([0, 1]). On montre
que kMf k = kf k∞ .

J. Feuto 30 ISE-maths-ENSEA
2.3. DUAL TOPOLOGIQUE D’UN ESPACE NORMÉ

Proposition 2.2.7 Soient X, Y et Z des espaces normés, S : X → Y et T : Y → Z des


applications linéaires continues ; on a

kT ◦ Sk ≤ kSk kT k

Preuve : Soit x un vecteur de X ; on peut écrire

k(T ◦ S)(x)kZ = kT (S(x))kZ ≤ kT k kS(x)kY ≤ kT k kSk kxkX ;

ce qui entraîne l’inégalité voulue. 2

P
Proposition 2.2.8 Soit uk une série convergente de vecteurs dans l’espace normé X
P
et soit T : X → Y une application linéaire continue. Alors la série T (uk ) converge
dans Y et

! ∞
X X
T uk = T (uk )
k=0 k=0

Preuve : La suite des sommes partielles Un = nk=0 uk converge dans X vers la


P

somme U de la série, on a T (Un ) = nk=0 T (uk ) par linéarité de T , et T (Un ) tend


P

vers l’image T (U ) de U , par la continuité de T . 2

2.3 Dual topologique d’un espace normé


Rappelons que K désigne le corps R ou C.

Définition 2.3.1 Soit X un espace normé sur K. On appelle dual (topologique) de X et


on note X ∗ l’espace X ∗ = L(X, K).

Exemple 2.3.2 Si x = (xn ) est un élément de `1 , on lui associe une forme linéaire conti-
nue fx sur c0 en posant

X
∀y = (yn ) ∈ c0 , fx (y) = xk y k .
k=0

De plus, la norme de fx dans le dual de c0 est égale à la norme de x dans `1 . L’application


x 7→ fx est donc une application linéaire isométrique de `1 dans (c0 )∗ . Elle est aussi
surjective, donc bijective. D’une certaine façon, le dual de c0 "est" égal à `1 .

J. Feuto 31 ISE-maths-ENSEA
2.4. THÉORÈMES DE HAHN-BANACH

Soit X un espace normé complexe ; c’est, en particulier, un espace normé réel.


Il y a deux notions distinctes de dual pour X : le dual en tant qu’espace réel
XR∗ = LR (X, R) et le dual en tant qu’espace complexe XC∗ = LC (X, C). En fait, on
peut identifier ces deux espaces. Notons < : C → R l’application R-linéaire qui à
un nombre complexe a + ib associe sa partie réelle a (pour a, b ∈ R).

Proposition 2.3.3 L’application g 7→ < ◦ g est une bijection isométrique de XC∗ sur
l’espace XR∗ .

Preuve : Soit g ∈ XC∗ ; alors x 7→ <g(x) est R-linéaire, et |<g(x)| ≤ |g(x)| pour tout
x ∈ X, donc k< ◦ gk ≤ kgk. Par ailleurs, pour tout x dans la boule unité de X, il
existe λ ∈ C tel que |λ| = 1 et λg(x) = |g(x)|, donc

|g(x)| = λg(x) = g(λx) = (< ◦ g)(λx) ≤ k< ◦ gk ,

par conséquent kgk = k< ◦ gk. Par ailleurs, soit ` ∈ XR∗ , notons g : x → `(x) −
i`(ix), on vérifie sans peine que g est C-linéaire, et <g = `. On a donc prouvé
que g 7→ < ◦ g est surjective ; comme elle est isométrique, elle est injective donc
bijective. 2

2.4 Théorèmes de Hahn-Banach


2.4.1 La forme analytique du Théorème de Hahn-Banach
La forme analytique du Théorème de Hahn-Banach est un théorème permet-
tant de prolonger des formes linéaires définies sur un sous-espace vectoriel, en
gardant un contrôle sur le prolongement quand il y en avait un sur la forme de
départ, en particulier si l’espace est normé et la forme linéaire est continue, on
peut la prolonger en une forme linéaire continue sur tout l’espace, et en gardant
la même norme.
Soit X un espace vectoriel réel. On dit que q : X → R est sous-linéaire si elle
est positivement homogène et sous-additive, c’est à dire qu’elle vérifie
1. pour tout x ∈ X, on a q(λx) = λq(x) pour tout λ ≥ 0
2. pour tous x, y ∈ X, on a q(x + y) ≤ q(x) + q(y).

Théorème 2.4.1 (Hahn-Banach forme analytique) Soient X un espace vectoriel réel,


Y un sous-espace vectoriel de X et q une fonction sous-linéaire sur X ; pour toute forme
linéaire f sur Y , telle que f (y) ≤ q(y) pour tout y ∈ Y , il existe une forme linéaire fe
sur X qui prolonge f , c’est-à-dire telle que fe(y) = f (y) pour tout y ∈ Y et telle que
fe(x) ≤ q(x) pour tout x ∈ X.

J. Feuto 32 ISE-maths-ENSEA
2.4. THÉORÈMES DE HAHN-BANACH

Pour la preuve nous aurons besoin d’un lemme sur les ensembles ordonnés. Soit
E un ensemble muni d’une relation d’ordre partielle notée ≤.
(a) Si F ⊂ E alors
(i) F est totalement ordonné, si pour tout couple (a, b) ∈ F × F , on a au
moins l’une des relations a ≤ b ou b ≤ a.
(ii) Un élément c ∈ E est un majorant de F si pour tout x ∈ F on a x ≤ c
(b) m ∈ E est un élément maximal de E si pour tout x ∈ E tel que m ≤ x, on a
m=x
(c) E est inductif, si tout sous-ensemble totalement ordonné de E admet un ma-
jorant.
Nous admettons le résultat suivant :

Lemme 2.4.2 (Lemme de Zorn) Tout ensemble ordonné, inductif, non vide admet un
élément maximal.

Lemme 2.4.3 Soient Z un sous-espace vectoriel de X et g une forme linéaire définie sur
Z, telle que g(z) ≤ q(z) pour tout z ∈ Z ; soit x ∈ X tel que x ∈ / Z ; il existe une forme
linéaire ge sur Z + Rx telle que ge prolonge g et ge ≤ q sur Z + Rx.

Preuve : Bien entendu, prolonger g à Z + Rx demande seulement de définir


γ = ge(x). Pour que le prolongement soit convenable, il faut (et il suffit) que
ge(z) + teg (x) = ge(z + tx) ≤ q(z + tx) pour tout nombre réel t et tout z ∈ Z.
C’est automatique si t = 0, et nous allons découper la propriété voulue en deux,
selon le signe de t 6= 0 : g(z) + λγ ≤ q(z + λx), g(z 0 ) − µγ ≤ q(z 0 − µx) pour tous
z, z 0 ∈ Z et λ, µ > 0. En utilisant l’homogénéité de q (et celle de g, qui est linéaire)
on peut faire entrer les facteurs positifs λ−1 et µ−1 à l’intérieur des expressions, et
on obtient ainsi les conditions équivalentes

g(z1 ) + γ ≤ q(z1 + x), g(z2 ) − γ ≤ q(z2 − x)

pour tous z1 ; z2 ∈ Z (z1 remplace λ−1 z et z2 remplace µ−1 z 0 ). Le nombre γ doit


donc vérifier les deux inégalités

sup {g(z2 ) − q(z2 − x) : z2 ∈ Z} = S ≤ γ ≤ I = inf {q(z1 + x) − g(z1 ) : z1 ∈ Z} .

Notons que I n’est pas +∞, parce que l’infimum porte sur un ensemble non vide
de valeurs finies, et de même S n’est pas −∞. Pour que le choix de γ soit possible,
il faut et il suffit que S ≤ I, ce qui garantira que I et S sont finis, et il suffira de
prendre pour γ n’importe quel nombre réel compris entre le sup et l’inf (bien sûr,
si S = I on n’a pas le choix : il faut prendre pour γ la valeur commune). Il reste

J. Feuto 33 ISE-maths-ENSEA
2.4. THÉORÈMES DE HAHN-BANACH

donc à vérifier que g(z2 ) − q(z2 − x) ≤ q(z1 + x) − g(z1 ) pour tous z1 , z2 ∈ Z. On


réécrit la propriété voulue sous la forme

g(z1 + z2 ) = g(z1 ) + g(z2 ) ≤ q(z1 + x) + q(z2 − x)

et il est alors clair que cette propriété est vraie :

g(z1 + z2 ) ≤ q(z1 + z2 ) = q ((z1 + x) + (z2 − x)) ≤ q(z1 + x) + q(z2 − x).

Le lemme est donc établi. 2


Preuve du théorème 2.4.1 : On désigne par G l’ensemble des couples (Z, g)
où Z est un sous-espace vectoriel de X tel que Y ⊆ Z, et g une forme linéaire sur
Z qui prolonge `, et telle que g(z) ≤ q(z) pour tout z ∈ Z.
On définit l’ordre sur l’ensemble G par (Z, g) 4 (Z 0 , g 0 ) si Z ⊆ Z 0 et si g 0 est un
prolongement de g à Z 0 . Le lemme 2.4.3 dit que si (Z, g) est un élément maximal
de G, alors Z = X : sinon, si Z 6= X, on peut choisir x ∈ / Z et considérer l’exten-
0 0 0
sion (Z , g ) à Z = Z + Rx donnée par le lemme 2.4.3, qui est un majorant strict de
(Z, g). Cela signifie que l’existence d’éléments maximaux dans G implique qu’on
a réussi à prolonger ` à l’espace X tout entier, avec une extension linéaire m qui
vérifie m ≤ q sur X. Il reste à vérifier que l’ensemble G vérifie l’hypothèse du
lemme de Zorn : si (Zi , gi ) est une famille totalement ordonnée dans G, on verra
que Z = ∪i Zi est un sous-espace vectoriel et qu’il y a une façon naturelle de défi-
nir g sur Z, qui prolonge toutes les gi . Ainsi l’ensemble (Zi , gi )i admet le majorant
(Z, g) dans G. 2

Corollaire 2.4.4 Soit E un espace vectoriel sur K = R ou C, et soit p une semi-norme


sur E. Soit G un sous-espace vectoriel de E et ϕ : G → K une forme linéaire telle que :

|ϕ(x)| ≤ p(x), ∀x ∈ G.

e : E → K prolongeant ϕ et telle que :


Alors il existe une forme linéaire ϕ

|ϕ(x)|
e ≤ p(x), ∀x ∈ E.

Le cas où X est un espace vectoriel réel, est une conséquence imméqdiate du


théorème de Hahn-Banach forme analytique. Pour le cas complexe, posons g0 =
Ref0 et considérons X en tant qu’espace vectoriel sur R. Alors : X0 est un sous-
espace vectoriel (réel) de X, g0 est une forme R-linéaire sur X0 et est majorée par
p qui est une forme positivement sous-linéaire sur X. Donc d’après le théorème

J. Feuto 34 ISE-maths-ENSEA
2.4. THÉORÈMES DE HAHN-BANACH

de Hahn-Banach dans un espace vectoriel réel, il existe une forme R-linéaire g sur
X prolongeant g0 et majorée par p.
remarquons que pour tout x ∈ X0 , on a

g0 (x)−ig0 (ix) = Ref0 (x)−iRef0 (ix) = Ref0 (x)−iReif0 (x) = Ref0 (x)+iImf0 (x) = f0 (x)

Posons pour tout x ∈ X, f (x) = g(x) − ig(ix). Il est aisé de voir que f applique
X dans C, est C-linéaire et prolonge f0 . En plus, pour tout élément x de X tel que
f (x) 6= 0, nous avons :

|f (x)| = e−iθ f (x) où θ = Argf (x)

|f (x)| = Re e−iθ f (x) = Ref (e−iθ x) = g(e−iθ x) ≤ p(e−iθ x) = p(x).


 

Donc f est dominée par p.

Théorème 2.4.5 Toute forme linéaire continue sur un sous-espace G de E se prolonge


en une forme linéaire continue sur E tout entier, avec la même norme.

Preuve : Soit ϕ0 ∈ G∗ et C = kϕ0 kG∗ . Il suffit d’appliquer le Théorème de Hahn-


Banach avec la semi-norme p(x) = C kxkE . 2

Théorème 2.4.6 Pour tout x ∈ E, non nul, il existe ϕ ∈ E ∗ telle que kϕk = 1 et
ϕ(x) = kxk.

Preuve : Il suffit de prendre p(x) = kxk, G = Kx et ϕG (λx) = kxk λ. 2

Corollaire 2.4.7 On a :
kxk = sup |ϕ(x)|
kϕkE ∗ ≤1

Preuve : C’est une conséquence immédiate du Théorème 2.4.6. 2

2.4.2 Théorème de Hahn-Banach, forme géométrique


Théorème 2.4.8 (théorème de séparation de Hahn-Banach) Soient X un espace normé
réel, A un convexe ouvert non vide et B un convexe non vide tels que A et B soient dis-
joints. Alors il existe une forme linéaire continue f sur X et un nombre réel α tels que :

∀(a, b) ∈ A × B f (a) < α ≤ f (b)

J. Feuto 35 ISE-maths-ENSEA
2.4. THÉORÈMES DE HAHN-BANACH

Preuve :
1. Considérons un point a0 de A et un point a1 de B − a0 . Posons

C = A − B + a1 = {a − b + a1 /(a, b) ∈ A × B} .

C est un sous-ensemble convexe et ouvert de X. En plus, (a0 , a1 +a0 ) ∈ A×B


et donc 0 = a0 − (a1 + a0 ) + a1 ∈ C, et A ∩ B = ∅ et par suite 0 ∈
/ A − B. Or
a1 ∈
/ C ; donc jC (a1 ) ≥ 1. Considérons

f0 : Ra1 → R
ta1 7→ f0 (ta1 ) = tjC (a1 )

Remarquons que : Ra1 est un sous-espace vectoriel de X et f0 une forme


linéaire sur Ra1 vérifiant : ∀t ∈ R f0 (ta1 ) ≤ jC (a1 ). jC est une forme posi-
tivement sous-linéaire sur X (voir exercice). Donc, d’après le théorème de
Hahn-Banach dans un espace vectoriel réel, il existe une forme linéaire f
sur X vérifiant :

∀t ∈ R f (ta1 ) = f0 (ta1 ) = tjC (a1 ) et ∀x ∈ X f (x) ≤ jC (x).

Donc f (x) ≤ jC (x) ≤ 1 ≤ jC (a1 ) = f (a1 ) pour tout x ∈ C. Par conséquent,


pour tous (a, b) ∈ A × B,

f (a)−f (b) = f (a−b) = f (a−b+a1 −a1 ) = f (a−b+a1 )−f (a1 ) ≤ 1−f (a1 ) ≤ 0.

Il vient alors que

∀(a, b) ∈ A × B f (a) ≤ f (b) + (1 − f (a1 )) et 1 − f (a1 ) ≤ 0.

D’où sup f (A) ≤ inf f (B) + 1 − f (a1 ) ≤ inf f (B).


2. Posons α = sup f (A).
— Remarquons que V = A − a0 est un voisinage de 0 dans X et que :

∀v ∈ V tel que v = a−a0 avec a ∈ A et donc f (v) = f (a)−f (a0 ) ≤ α−f (a0 )

−V = {−v/v ∈ V } est aussi un voisinage de 0 dans X tel que :

∀w ∈ W |f (w)| = max(f (w), −f (w)) ≤ α − f (a0 )

Par conséquent, d’après Proposition I, f est continue.


— Supposons qu’il existe un élément â de A tel que f (â) = α. Rappelons
que f (a1 ) = f0 (a1 ) = jC (a1 ) ≥ 1 et remarquons que t 7→ â + ta1 est une

J. Feuto 36 ISE-maths-ENSEA
2.5. BIDUAL D’UN ESPACE NORMÉ, RÉFLEXIVITÉ

application linéaire continue de R dans X et A un voisinage de â dans


X. Donc il existe un nombre réel  > 0 tel que

∀t ∈ [−, ] â + ta1 ∈ A

et par suite
∀t ∈ [−, ] α + tf (a1 ) = f (â + ta1 ) ≤ α
la dernière proposition est fausse. Par conséquent, nous avons

∀a ∈ A f (a) < α
2

Corollaire 2.4.9 Si C est un sous-ensemble convexe fermé non vide d’un espace normé
réel E, alors C est l’intersection de demi-espaces affines fermés.

Preuve : Soit C un convexe fermé non vide d’un espace normé réel E. On va
montrer que pour tout x ∈ / C, il existe un demi-espace affine fermé Dx tel que
C ⊂ Dx et x ∈ / Dx . Il suffira ensuite d’observer que C = ∪x∈C/ Dx .
Pour tout x ∈ / C, on peut trouver une boule ouverte A = B(x, r) disjointe de
C. D’après le théorème de séparation il existe une forme linéaire continue x∗ telle
que x∗ (a) < inf x∗ (C) pour tout a ∈ A, et en particulier x∗ (x) < inf x∗ (C). On voit
donc que si on pose d = inf x∗ (C) et Dx = {y ∈ E : x∗ (y) ≥ d} on aura C ⊂ Dx
mais x ∈/ Dx . 2

2.5 Bidual d’un espace normé, réflexivité


Définition 2.5.1 Soit E un espace vectoriel normé. Le dual du dual E ∗ de E s’appelle le
bidual de E et se note E ∗∗ .

Pour x ∈ E notons JE (x) : E ∗ → K la forme linéaire sur E ∗ qui à x∗ ∈ E ∗ associe


x∗ (x),
∀x∗ ∈ E ∗ , JE (x)(x∗ ) = x∗ (x).
Pour tout x∗ ∈ E ∗ , on a |JE (x)(x∗ )| = |x∗ (x)| ≤ kx∗ k kxk, donc JE (x) ∈ E ∗∗ et
kJE (x)k ≤ kxk. On dit que JE ∈ L(E, E ∗∗ ) est l’application (injection) canonique
de E dans son bidual.

Corollaire 2.5.2 L’injection canonique :

JE : E → E ∗∗
x 7→ x
e
e(ϕ) = ϕ(x), pour tout ϕ ∈ E ∗ , est une isométrie.
où x

J. Feuto 37 ISE-maths-ENSEA
2.5. BIDUAL D’UN ESPACE NORMÉ, RÉFLEXIVITÉ

JE est donc en particulier injective. Par contre, elle n’est pas surjective en général ;
nous verrons un peu plus tard quand elle l’est.
Preuve : On a :
def
ke
xkE ∗∗ = sup |ϕ(x)| = kxk
kϕkE ∗ ≤1

La dernière égalité découlant du corollaire 2.4.7. 2

Définition 2.5.3 Un espace vectoriel normé E est dit réflexif si l’application canonique
JE : E → E ∗∗ est bijective.

Autrement dit, un espace vectoriel normé E est réflexif lorsque toute forme
linéaire x∗∗ continue sur le dual E ∗ provient d’un vecteur x de E de la façon
expliquée précédemment,

∀x∗ ∈ E ∗ , x∗∗ (x∗ ) = x∗ (x).

Proposition 2.5.4 Si X est réflexif, alors X ∗ est réflexif.

Preuve : Posons Z = X ∗ . Si z ∗∗ = x∗∗∗ est une forme linéaire sur le dual Z ∗ = X ∗∗


de Z = X ∗ , elle définit une forme linéaire continue z = x∗ = x∗∗∗ ◦ JX sur X.
Il reste seulement à vérifier que z définit la forme z ∗∗ , au sens précédent. Soit
z ∗ ∈ Z ∗ = X ∗∗ ; puisque X est réflexif il existe x ∈ X tel que z ∗ = JX (x). Alors

z ∗∗ (z ∗ ) = x∗∗∗ (JX (x)) = x∗ (x) = JX (x)(x∗ ) = z ∗ (z),

ce qui montre bien que z ∗∗ provient du vecteur z ∈ Z. 2

Proposition 2.5.5 Si X est réflexif, tout sous-espace fermé Y de X est réflexif.

Preuve : Soit π l’application de restriction définie de X ∗ sur Y ∗ (surjective par


le théorème de Hahn-Banach). Soit y ∗∗ une forme linéaire continue sur Y ∗ . Alors
x∗∗ = y ∗∗ ◦ π est une forme linéaire continue sur X ∗ , donc il existe x ∈ X tel
que x∗∗ (x∗ ) = x∗ (x) pour tout x∗ in X ∗ . Il suffit de voir que x ∈ Y pour pouvoir
conclure assez facilement ; si on avait x ∈ / Y , on pourrait trouver d’après le corol-
laire ?? une forme linéaire x ∈ X telle que x∗ (x) = 1 mais x∗ (y) = 0 pour tout
∗ ∗

y ∈ Y . On aurait alors π(x∗ ) = 0, donc x∗∗ (x∗ ) = y ∗∗ (π(x∗ )) = 0, ce qui contredit


x∗∗ (x∗ ) = x∗ (x) = 1. 2

J. Feuto 38 ISE-maths-ENSEA
2.6. EXERCICES

2.6 Exercices
Exercice 19 Soit E un evn et C un ouvert convexe contenant 0. On définit
n x o
jC (x) := inf t > 0 : ∈ C , ∀x ∈ E.
t
1. Montrer jC (x) ∈ R.
2. Montrer que JC est sous-linéaire.
3. Montrer que
C = {x ∈ E : jC (x) < 1} .

4. En déduire que JC est une semi-norme si C est symétrique.

Exercice 20 Une fonction f fait partie de l’espace S = S(R) lorsqu’elle est indéfiniment
dérivable, et si f et toutes ses dérivées sont à décroissance rapide, c’est-à-dire que leur pro-
duit par une fonction polynôme quelconque est borné à l’infini. Les fonctions appartenant
à S(R) sont dites déclinantes.
Pour deux entiers α, β on pose pour tout f ∈ S

pα,β (f ) = kxα f (β) k∞ .

de sorte que
S(R) = {f ∈ C ∞ (R) | ∀(α, β), pα,β (f ) < +∞} .
Montrer que
1. L’espace S est stable par addition interne et par dérivation.
2. L’espace S est stable par multiplication interne.
3. Il est stable par multiplication par une fonction polynomiale.
4. S est un espace vectoriel.
5. Pour tout α, β ∈ N pα,β est une semi-norme sur S.

Exercice 21 Montrer que pour tout espace vectoriel normé E, le dual E ∗ sépare les points
de E.

Exercice 22 Soient E un espace normé et Y un sous-espace vectoriel fermé ; soient x ∈


/ Y.
1. Montrer que r = dist(x, Y ) > 0.
2. Montrer qu’il existe une forme linéaire continue x∗ ∈ E ∗ telle que : x∗ est nulle sur
Y , kx∗ k = 1 et x∗ (x) = r.

Exercice 23 Montrer que pour 1 < p < ∞, les espaces `p (Z) sont des espaces reflexifs.

J. Feuto 39 ISE-maths-ENSEA
2.6. EXERCICES

Exercice 24 Si C est fermé, K compact, C et K convexes non vides et disjoints d’un


espace normé X, montrer qu’il existe une forme linéaire continue x∗ ∈ X ∗ telle que
sup x∗ (C) < min x∗ (K).

Exercice 25 Soient X un espace normé et q une fonction sous-linéaire sur X. Montrer


que q est continue sur X si et seulement s’il existe une constante M telle que |q(x)| ≤
M kxk pour tout x ∈ X.

J. Feuto 40 ISE-maths-ENSEA
Chapitre 3

Espaces de Banach

Nous considérons toujours des K-espaces vectoriels, avec K = C ou R.

3.1 Géréralité sur les espaces de Banach


Définition 3.1.1 Un espace de Banach est un espace vectoriel normé, complet pour la
distance associée à la norme.

Si F est un sous-espace vectoriel fermé d’un espace de Banach E, il est lui aussi complet
pour la norme induite par celle de E, donc F est un espace de Banach
P
Une série de vecteurs uk dans un espace normé X est dite convergente dans X si
la suite des sommes partielles (Un ) est convergente dans X, où la somme partielle Un est
définie pour tout n ≥ 0 par
Xn
Un = uk ∈ X
k=0

Si la série converge dans X, la somme de la série est un vecteur de X, qui est la limite de
la suite (Un ), et on note
X∞
uk = lim Un ∈ X.
n→+∞
k=0
P
On dit que la série uk est absolument convergente ou bien normalement conver-
P
gentes si kuk k < ∞.
Nous avons la caractérisation suyivante des espaces de Banach.

Proposition 3.1.2 Soit X un espace normé ; pour que X soit complet, il faut et il suffit
P P
que pour toute série uk de vecteurs de X, la condition kuk k < ∞ entraîne que la
P
série uk est convergente dans X.
P
Preuve : Supposons que X est un espace de Banach. Soit uk est absolument conver-
P P
gente ; c’est-à-dire kuk k < ∞. Le reste de la série des normes rn = k>n kuk k est une

41
3.1. GÉRÉRALITÉ SUR LES ESPACES DE BANACH

suite numérique qui tend vers 0 quand n → +∞, et on peut écrire pour tous `, m ≥ n,
en supposant ` < m pour fixer les idées

Um − U` = u`+1 + . . . + um ,
X
kUm − U` k ≤ ku`+1 k + . . . + kum k ≤ kuk k = rn ,
k>n

ce qui montre que la suite (Un ) est alors de Cauchy. L’espace X étant complet, nous avons
P
la convergence dans X de la série uk .
Réciproquement, nous suppososons que toutes série absolument convergente converge
dans X. Soit (xn ) une suite de Cauchy de vecteurs de X ; pour tout entier k ≥ 0, on peut
trouver un entier Nk tel que kxm − xn k < 2−k pour tous entiers m, n ≥ Nk , et on peut
supposer que Nk+1 > Nk .
Posons alors u0 = xN0 et uk+1 = xNk+1 − xNk pour tout k ≥ 0. Par construction,
on a kuk+1 k < 2−k , donc la série
P
uk converge dans X d’après l’hypothèse. Mais les
sommes partielles (Uk ) de cette série sont égales aux vecteurs (xNk ), donc la sous-suite
P
(xNk ) converge vers le vecteur U ∈ X somme de la série uk . Puisque la suite (xn ) est
de Cauchy, on en déduit facilement que la suite entière (xn ) converge vers U , donc X est
complet. 2

Proposition 3.1.3 Soient n espaces de Banach, E1 , . . . , En . Le produit cartésien E =



E1 × . . . × En est un espace de Banach pour la norme kuk = max kukE1 , . . . , kukEn ,
où u = (u1 , . . . , un ), uj ∈ Ej . Une telle norme est appelée norme produit et définit sur E
la topologie produit.
Les projections πk : E → Ek , πk (u) = uk sont des applications linéaires, continues,
de norme ≤ 1.
Toute application T , n-linéaire, de E dans un espace vectoriel normé G, est continue
si et seulement s’il existe C > 0 telle que pour tous uj ∈ Ej , 1 ≤ j ≤ n,

kT (u1 , . . . , un )kG ≤ C ku1 k1 . . . kun kn

Preuve : Exercice 2
P
Notons que lorsque la série uk converge dans X, on a l’inégalité
X X
uk ≤ kuk k

en convenant que la somme de la série des normes vaut +∞ lorsqu’elle est divergente.
Cette inégalité est obtenue en passant à la limite dans la suite des inégalités triangulaires
n
X n
X
uk ≤ kuk k
k=0 k=0

J. Feuto 42 ISE-maths-ENSEA
3.1. GÉRÉRALITÉ SUR LES ESPACES DE BANACH

Proposition 3.1.4 Soient X et Y deux espaces normés ; si Y est un espace de Banach,


l’espace L(X, Y ) est un espace de Banach.
P
Preuve : Supposons que Y soit un espace de Banach. Soit k uk une série normalement
convergente dans L(X, Y ) ; pour tout vecteur x ∈ X, on a kuk (x)k ≤ kuk k kxk, donc la
P
série k uk (x) est normalement convergente dans Y . Puisque Y est complet, cette série
converge dans Y et on peut poser pour tout x ∈ X, U (x) = ∞
P
k=0 uk (x) ∈ Y .
l’application ainsi définie de X dans Y est linéaire, et de plus pour tout x ∈ X on a
kU (x)k ≤ ∞
P P∞
k=0 kuk (x)k ≤ ( k=0 kuk k) kxk, ce qui montre que U est continue et


X
kU k ≤ kuk k (3.1)
k=0

Il reste à voir que U est la limite dans L(X, Y ) de la suite (Un ) des sommes partielles. On
a ∞
X X
(U − Un )(x) = uj (x) = vk (x)
j>n k=0
P
où on a posé vk = un+k+1 pour tout k ≥ 0 ; en appliquant l’inégalité (4.2) à la série vk
on obtient kU − Un k ≤ ∞
P P
k=0 kvk k = k>n kuk k, et cette quantité tend vers 0 lorsque
n → ∞. 2

Lemme 3.1.5 Soient X un espace normé, X 0 un sous-espace vectoriel de X, dense dans


X et F un espace de Banach ; si (Tn ) est une suite d’applications linéaires de X dans F ,
telle que M = supn kTn k < +∞ et telle que limn→+∞ Tn (x) existe dans F pour tout
x ∈ X 0 , alors T (x) = limn→+∞ Tn (x) existe dans F pour tout x ∈ X, et l’application T
est linéaire continue de X dans F , avec kT k ≤ M .

Lemme 3.1.6 Soient X un espace normé, X 0 un sous-espace vectoriel de X, dense dans


X et F un espace de Banach ; toute application linéaire continue T : X 0 → F se prolonge
de façon unique en application linéaire continue Te : X → F , et Te = kT k.

C’est par ce procédé que l’on définit par exemple la transformée de Fourier sur X =
F = L2 (R), à partir de sa définition intégrale sur le sous-espace dense X 0 = L1 ∩ L2 .
Preuve : Soient x ∈ X et n ≥ 0 ; d’après la densité de X 0 dans X, l’ensemble

An (x) = y ∈ X 0 : ky − xk < 2−n




est non vide ; si y, y 0 ∈ An , on a ky 0 − yk ≤ ky 0 − xk+ky − xk ≤ 2−n+1 , donc le diamètre


de An (x) tend vers 0 Puisque T est linéaire bornée, la suite (T (An (x))) est une suite
décroissante de sous-ensembles non vides de F , de diamètres tendant vers 0. Précisément,
on déduit de ce qui précède que si v, w ∈ T (An (x)), on a kv − wk ≤ kT k 2−n+1 . Puisque

J. Feuto 43 ISE-maths-ENSEA
3.2. THÉORÈME DE BANACH-STEINHAUSS

F est complet, on sait que ∩n∈N T (An (x) contient exactement un point. Appelons S(x)
cet unique point.
Soit (yk )k ⊂ X 0 une suite quelconque telle que yk → x, et soit n0 quelconque ; on aura
0 0
yk ∈ An pour tout k ≥ k 0 , donc kT (yk ) − S(x)k ≤ 2−n +1 kT k pour k ≥ k 0 ; ceci montre
que S(x) = limk T (yk ) pour toute suite (yk ) ⊂ X 0 telle que x = limk yk .
Il est facile de vérifier que x 7→ S(x) est linéaire de X dans F , à partir de cette
remarque (prendre yk → x et yk0 → x0 ). On a aussi

kS(x)k = lim kT (yk )k ≤ kT k lim kyk k = kT k kxk ,


k k

ce qui montre que S est continue et kSk ≤ kT k. Si x ∈ X 0 , il est clair que T (x) est
l’unique point commun aux ensembles T (An (x)), donc S(x) = T (x) dans ce cas, ce qui
montre que S prolonge T ; il en résulte que kT k ≤ kSk, donc kT k = kSk. Si S1 est une
autre application continue qui prolonge T , on aura S1 (x) = limk S1 (yk ) par continuité
de S1 , mais S1 (yk ) = T (yk ) par hypothèse, donc S1 (x) = limk T (yk ) = S(x) pour tout
x ∈ X, ce qui montre l’unicité de S. Il nous suffit pour finir de prendre Te = S. 2

3.2 Théorème de Banach-Steinhauss


Nous passons maintenant à une autre conséquence du théorème de Baire, le théorème
de Banach-Steinhaus ; ce théorème admet plusieurs variantes .

Proposition 3.2.1 Soit E un espace vectoriel muni d’une distance d, telle que (E, d) soit
complet, et telle que les opérations (x, y) 7→ x + y et (λ, x) 7→ λ · x soient continues de
E × E dans E et K × E dans E respectivement ; soient d’autre part Y un espace normé
et A une famille d’applications linéaires continues de E dans Y . Si pour tout x ∈ E la
famille {T (x) : T ∈ A} est bornée dans Y , il existe un voisinage W de 0E tel que

∀T ∈ A, ∀x ∈ W, kT (x)k ≤ 1.

Preuve : Remarquons d’abord que pour tout x0 ∈ E la translation y 7→ x0 + y est


un homéomorphisme de E ; de même, pour tout λ 6= 0 l’homothétie y 7→ λ · y est un
homéomorphisme. Il résulte du premier point que tout voisinage W de x0 est de la forme
x0 + V , où V est un voisinage de 0E , et du second point que λ · V est aussi un voisinage
de 0E . Pour tout entier n ≥ 1, posons Cn = {x ∈ E : ∀T ∈ A, kT (x)k ≤ n}. Comme Cn
est l’intersection des ensembles fermés CT,n = {x ∈ E : kT (x)k ≤ n} (lorsque T varie
dans A), c’est un fermé de E. La réunion des Cn est égale à E : ceci n’est que la traduction
de l’hypothèse supT ∈A kT (x)k < +∞ pour tout x ∈ E.

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3.3. THÉORÈME DE L’APPLICATION OUVERTE

Puisque (E, d) est métrique complet, il existe par le corollaire 1.4.2 un entier n0 ≥ 1
tel que Cn0 soit d’intérieur non vide. On peut donc trouver un point x0 ∈ Cn0 et un
voisinage V de 0E tels que x0 + V ⊂ Cn0 . Posons M = supT ∈A kT (x0 )kY . Soient v ∈ V
et T ∈ A quelconques ; puisque x0 + v ∈ Cn0 , on a kT (x0 ) + T (v)kY ≤ n0 , ce qui donne
kT (v)kY ≤ n0 + kT (x0 )kY ≤ n0 + M par l’inégalité triangulaire. Pour terminer, on
prend le voisinage W = (n0 + M )−1 V . 2

Théorème 3.2.2 (théorème de Banach-Steinhaus) Soient E un espace de Banach, Y


un espace normé et A une partie de L(E, Y ) telle que sup {kT (x)k : T ∈ A} < +∞
pour tout x ∈ E ; alors on a aussi sup {kT k : T ∈ A} < +∞.

Preuve : On peut appliquer la proposition précédente. Il existe un voisinage W de 0E tel


que kT (x)k ≤ 1 pour tout x ∈ W et tout T ∈ A. Il existe r > 0 tel que B(0, r) ⊂ W .
Par homogénéité, pour tout x ∈ B(0, 1) et tout T ∈ A, on a kT (x)k ≤ 1/r ; on a donc
montré que pour tout T ∈ A, on a kT k ≤ 1/r. 2

Corollaire 3.2.3 Soient E un espace de Banach (ou bien un espace vectoriel (E, d) com-
plet comme dans la proposition 3.2.1), Y un espace normé et (fn ) une suite d’applications
linéaires continues de E dans Y ; on suppose que, pour tout x ∈ E, la suite (fn (x))
converge dans Y ; notons f (x) sa limite. Alors f est linéaire et continue.

Preuve : D’abord, il est évident que la limite f est linéaire. Soit x ∈ E ; comme la suite
(fn (x)) est convergente, elle est bornée ; par le théorème 3.2.2, la suite (kfn k) est alors
bornée. Il existe alors un nombre M > 0 tel que, pour tout x ∈ E et tout entier n ≥ 0 on
ait kfn (x)k ≤ M kxk. Passant à la limite on trouve kf (x)k ≤ M kxk, pour tout x ∈ E.
2

Corollaire 3.2.4 Soient E un espace de Banach (ou bien un (E, d) complet comme dans
la proposition 3.2.1), Y un espace normé et (uk ) une suite d’applications linéaires conti-
P
nues de E dans Y ; on suppose que, pour tout x ∈ E, la série k uk (x) converge dans Y ;
notons T (x) sa somme. Alors T est linéaire et continue.

3.3 Théorème de l’application ouverte


On dit qu’une application f : X → Y est ouverte lorsque l’image de tout ouvert de
X est ouverte dans Y . Notons que la composition de deux applications ouvertes est une
application ouverte.

J. Feuto 45 ISE-maths-ENSEA
3.3. THÉORÈME DE L’APPLICATION OUVERTE

Théorème 3.3.1 (théorème de l’application ouverte) Soient E et F deux espaces de


Banach. Toute application linéaire, continue, surjective f de E sur F est ouverte ce qui
équivaut (par linéarité) à dire

∃C > 0, BF (0, 1) ⊂ f (BE (0, C)).

Preuve : On introduit les fermés suivants :

Fn = f (BE (0, n))

Comme f est surjective, on dispose de l’égalité :


[
F = Fn
n∈N

F est métrisable et complet, en particulier il vérifie la propriété de Baire, donc un de ces


fermés, FN est d’intérieur non vide : il contient une boule BF (y, η).
Le fermé F2N contient donc la boule BF (0, η). Par homogénéité de f , on dispose ainsi
d’un entier M tel que : BF (0, 1) ⊂ f (BE (0, M )) Il ne reste plus qu’à faire « sauter la
barre », et c’est ici que l’hypothèse supplémentaire suivant laquelle E et F sont des espaces
de Banach intervient. Par homogénéité de f , on déduit du résultat qui précède que :

∀n ∈ N, BF (0, 1/2n ) ⊂ f (BE (0, M/2n ))

Montrons que BF (0, 1) ⊂ f (BE (0, 2M )). Pour cela, donnons-nous un z ∈ BF (0, 1) Il
existe x0 de norme inférieure (strictement) à M tel que z1 = z − f (x0 ) soit de norme
inférieure à 1/2. Il existe x1 de norme inférieure à M/2 tel que z2 = z1 − f (x1 ) soit de
norme inférieure à 1/4.
On construit par récurrence une suite (xn ) de points de E telle que kxn k ≤ M/2n et
zn = z − f (x0 + · · · + xn ) soit de norme inférieure à 1/2n+1 .
P
La série xn est absolument convergente, donc comme E est un espace de Banach,
elle converge. De plus,
+∞ +∞ +∞
X X X 1
xn ≤ kxn k < M = 2M
n=0 n=0 n=0
2n

et, par passage à la limite :


+∞
!
X
z=f xn ∈ f (BE (0, 2M )),
n=0

ce qu’il fallait démontrer. 2

J. Feuto 46 ISE-maths-ENSEA
3.4. EXERCICES

Corollaire 3.3.2 (théorème des isomorphismes) . Soient E et F deux espaces de Ba-


nach. Toute application linéaire continue bijective de E sur F est un isomorphisme ; c’est-
à-dire est bicontinue.

Le graphe d’une application continue d’un espace topologique dans un espace topologique
séparé est toujours fermé. La réciproque n’est en général pas vraie. Cependant, on a :

Théorème 3.3.3 (théorème du graphe fermé) Soient E et F deux espaces de Banach.


Toute application linéaire de E dans F dont le graphe est fermé dans E × F est continue.

Preuve : Soit f une application linéaire de E dans F dont le graphe G ⊂ E × F


est fermé ; alors G est un espace de Banach. Tout point z du graphe G est de la forme
z = (x, f (x)) pour un certain x ∈ E unique ; notons p : G → E l’application défi-
nie par p(z) = p(x; f (x)) = x ∈ E. Il est clair que p est linéaire, continue et bijective
(l’inverse-algèbrique-étant l’application x 7→ (x, f (x)) de E dans G). D’après le théo-
rème des isomorphismes, cet inverse x 7→ (x, f (x)) est continu de E dans G ; il en résulte
que x 7→ f (x) est continue de E dans F . 2

Corollaire 3.3.4 Si E est un espace de Banach et si E ∗ est réflexif, alors E est réflexif.

En effet E ∗∗ est alors réflexif et E est isomorphe à un sous-espace fermé de E ∗∗ .

3.4 Exercices
Exercice 26 Soient E un espace de Banach et F un espace normé. On désigne par
L(E, F ) l’espace vectoriel des applications linéaires continues de E dans F muni de la
norme
k|u|k := sup ku(x)kF .
kxkE ≤1

Soit U une partie simplement bornée de L(E, F ). Pour tout entier n ≥ 1, on pose
 
An = x ∈ E : sup ku(x)kF ≤ n
u∈U


1. Montrer que E = ∪n An et en déduire que A1 6= ∅.
2. Montrer que l’origine O est point intérieur à A1 . En déduire qu’il existe r > 0 tel
que la boule B(0, r) ⊂ A1 et U est fortement borné dans l’espace normé L(E, F ).

Indications 21 Pour (1), appliquer le théorème de Baire à la suite (An ) dans l’espace
métrique E.

Exercice 27 Soit X un espace vectoriel sur K, montrer que :

J. Feuto 47 ISE-maths-ENSEA
3.4. EXERCICES

1. si p est une semi-norme sur X alors

|p(x) − p(y)| ≤ |x − y| , ∀x, y ∈ X

2. si (pn ) est une suite de semi-normes séparantes alors l’application d définie sur
X × X par

X
d(x, y) = 2−n min(pn (x − y), 1)
n=0

est une distance sur X.

Exercice 28 Montrer que : L’espace C [0, 1] (réel ou complexe) des fonctions scalaires
continues sur [0, 1], muni de la norme uniforme,

kf k∞ = max |f (t)|
t∈[0,1]

est un espace de Banach.

Exercice 29 Montrer que : Montrer que les espaces `p (N) sont des espaces de Banach
pour 1 ≤ p ≤ ∞.

J. Feuto 48 ISE-maths-ENSEA
Chapitre 4

Espace de Hilbert réel

4.1 Produits scalaires


Définition 4.1.1 Soit X un espace vectoriel réel. On appelle produit scalaire sur X une
application B : X × X → R telle que,
i) B est bilinéaire,
ii) Pour tout x, y ∈ X, B(x, y) = B(y, x) (on dit que B est symétrique)
iii) Pour tout x ∈ X, B(x, x) ≥ 0 (on dit que B est positive)
iv) Pour tout x ∈ X, B(x, x) = 0 ⇔ x = 0X (on dit que B est définie).

Proposition 4.1.2 (identité de polarisation) Soit X un espace vectoriel réel et B un


produit scalaire sur X. Pour tous x, y ∈ X on a

4B(x, y) = B(x + y, x + y) − B(x − y, x − y).

Le plus souvent, nous noterons les produits scalaires (x, y) 7→ hx|yi.

Proposition 4.1.3 (inégalité de Cauchy-Schwarz) Soit X un espace vectoriel muni


d’un produit scalaire. Pour tous x, y ∈ X on a

|hx|yi|2 ≤ hx|xi hy|yi .

Preuve : Soit x, y ∈ X.
Si hx|yi = 0, il n’y rien à démontrer.
Supposons alors que hx|yi = 6 0 et posons u = |hx|yi|
hx|yi
∈ R. Pour t ∈ R, le produit
scalaire hux + ty|ux + tyi est positif. Or hux + ty|ux + tyi = hux|uxi + 2t hux|yi +

49
4.2. ESPACES DE HILBERT, ORTHOGONALITÉ, BASES

t2 hy|yi = hx|xi + 2t |hx|yi| + t2 hy|yi . Ce polynôme du deuxième degré en t est


positif pour tout t ∈ R, donc son discriminant est négatif ou nul. Cela donne
|hx|yi|2 ≤ hx|xi hy|yi ≤ 0. 2

Corollaire 4.1.4 Soit X un espace vectoriel réel muni d’un produit scalaire ; l’applica-
1
tion x 7→ hx|xi 2 est une norme sur X.

Preuve : Pour tous x, y ∈ X, on a

hx + y|x + yi = hx|xi + hy|yi + 2 hx|yi


≤ hx|xi + hy|yi + 2 |hx|yi| ≤ (hx|xi1/2 + hy|yi1/2 )2

par la proposition 4.1.3. 2


Relation du parallélogramme,

hx + y|x + yi + hx − y|x − yi = 2 (hx|xi + hy|yi)

Définition 4.1.5 On appelle espace préhilbertien un espace vectoriel réel X muni d’un
produit scalaire.

Tout espace préhilbertien sera considéré comme espace normé, muni de la norme
ci-dessus, qui sera notée simplement kxk désormais.

Proposition 4.1.6 Soit X un espace préhilbertien. Pour tout vecteur y ∈ X la forme


linéaire `y : x 7−→ hx|yi est continue de X dans R. L’application y 7−→ `y est linéaire et
isométrique de X dans X ∗ .

Preuve : Pour x ∈ X on a |`y (x)| ≤ kxk kyk d’après l’inégalité de Cauchy-Schwartz,


donc l’application linéaire `y est continue et k`y k ≤ kyk. Or kyk2 = `y (y) ≤
k`y k kyk. d’où l’on déduit que kyk = k`y k. On vérifie sans peine que l’applica-
tion y 7→ `y est linéaire. 2

4.2 Espaces de Hilbert, orthogonalité, bases


Définition 4.2.1 On appelle espace de Hilbert un espace vectoriel H muni d’un produit
scalaire (x, y) 7→ hx|yi tel que la H soit complet pour la norme définie par le produit
scalaire.

Définition 4.2.2 Soit H un espace de Hilbert

J. Feuto 50 ISE-maths-ENSEA
4.2. ESPACES DE HILBERT, ORTHOGONALITÉ, BASES

1. On dit que les vecteurs x et y de H sont orthogonaux si hx|yi = 0.


2. Soit (xn )n≥0 une suite infinie de vecteurs de H ou bien (x1 , . . . , xN ) une suite finie ;
on dit que la suite est orthogonale si les xn sont deux à deux orthogonaux, c’est-à-
dire si hxm |xn i = 0 lorsque m 6= n et on dit que c’est une suite orthonormée si de
plus, pour tout n, on a kxn k = 1.

Si x est orthogonal à y1 , . . . , yn , alors x est orthogonal à toutes les combinaisons


linéaires de y1 , . . . , yn , d’après la linéarité du produit scalaire par rapport à sa
première variable. Le vecteur x est donc orthogonal au sous-espace vectoriel en-
gendré F = Vect(y1 , . . . , yn ).
Si x est orthogonal à tous les vecteurs d’un ensemble A, alors x est aussi or-
thogonal à l’adhérence de A (parce que l’application a 7→ ha|xi est continue).

Lemme 4.2.3 Soient (u1 , . . . , un ) des vecteurs deux à deux orthogonaux d’un espace de
Hilbert H. On a :
n 2 n
X X
uk = kuk k2
k=1 k=1

En particulier, des vecteurs orthogonaux non nuls sont linéairement indépendants.

Preuve : Le résultat s’obtient en developpant le carré scalaire h nk=1 uk | nk=1 uk i


P P

Lemme 4.2.4 Soit (e1 , . . . , en ) une suite orthonormée finie dans un espace de Hilbert H.
Posons F = Vect(e1 , . . . , en ), pour tout vecteur x ∈ H, le vecteur y = nk=1 hx|ek i ek
P

est la projection orthogonale de x sur F , c’est à dire que y ∈ F et que le vecteur x − y est
orthogonal à F .

Preuve : Il est évident que y ∈ F , et il est clair que hy|ek i = hx|ek i pour tout
k = 1, . . . , n, donc x − y est orthogonal à tous les (ek ), ce qui implique que x − y
est orthogonal à F . 2

Lemme 4.2.5 (inégalité de Bessel) Soient H un espace de Hilbert et (en )n≥0 une suite
orthonormée dans H. Pour tout x ∈ H la série numérique n |hx|en i|2 est convergente
P

et X
|hx|en i|2 ≤ kxk2
n

J. Feuto 51 ISE-maths-ENSEA
4.2. ESPACES DE HILBERT, ORTHOGONALITÉ, BASES

Preuve : Il suffit de montrer le résultat pour une suite finie e1 , . . . , en . On a vu


que si on pose y = nk=1 hx|ek i ek , le vecteur x − y est orthogonal au sous-espace
P

F = Vect(e1 , . . . , en ), donc x − y est orthogonal à y ∈ F . Puisque x = y + (x − y)


on aura n
2 2 2 2
X
kxk = kyk + kx − yk ≥ kyk = |hx|ek i|2
k=1

d’où le résultat. 2

Lemme 4.2.6 Soit (un )n≥0 une suite orthogonale dans un espace de Hilbert H ; la série
de vecteurs n un converge dans H si et seulement si n∈N kun k2 < ∞, et dans ce cas
P P

2
X X
un = kun k2
n∈N n∈N
P
Si (en )n≥0 est une suite orthonormée, la série de vecteurs k ck e k converge si et seulement
si k |ck |2 < ∞, et dans ce cas on a
P

2
X X
ck ek = |ck |2
k k

Pn
Preuve : Posons Un = i=1 ui . Si m < n on a par orthogonalité

n 2 n
2
X X
kUn − Um k = ui = kui k2 .
i=m+1 i=m+1

Il vient alors que la suite (Un )n∈N est de Cauchy dans H si et seulement si la série
numérique k∈N kuk k2 vérifie le critère de convergence de Cauchy. D’après le
P
2
lemme 4.2.3, nous avons pour tout n ∈ N, k nk=1 uk k =
P Pn 2
k=1 kuk k . D’où en
passant à la limite, nous obtenons le résultat. 2

Lemme 4.2.7 Soit (en )n≥0 une suite orthonormée dans H et soit F le sous-espace vecto-
riel fermé engendré par la suite (en )n≥0 ; pour tout vecteur y ∈ F , on a y = ∞
P
k=0 hy|ek i ek .

Preuve : Posons cj = hy|ej i pour tout j ≥ 0, et z = ∞


P
k=0 ck ek . Cette série converge
d’après les lemme 4.2.5 et 4.2.6, et z ∈ F . Pour tout j ≥ 0, on voit en passant à la li-
mite grâce à la continuité de l’application x 7→ hx|ej i hz|ej i = limn→∞ h ni=1 ci ei |ej i =
P

cj = hy|ej i ce qui montre que y − z est orthogonal à chacun des vecteurs ej , donc
y − z est orthogonal à F . Puisque y − z ∈ F , il en résulte que y − z = 0H , d’où le
résultat. 2

J. Feuto 52 ISE-maths-ENSEA
4.2. ESPACES DE HILBERT, ORTHOGONALITÉ, BASES

Définition 4.2.8 On dit que (en )n∈D est un système total dans H si

{en , n ∈ D}⊥ = {0H } .

Autrement dit si x ∈ H est tel que hx|en i = 0 pour tout n ∈ D, alors x = 0.

Définition 4.2.9 On appelle base hilbertienne d’un espace de Hilbert séparable H de


dimension infinie une suite orthonormée (en )n≥0 qui est de plus totale dans H. On dit
aussi base orthonormée de H.

Certaines bases hilbertiennes sont naturellement indexées par un ensemble dé-


nombrable spécifique, par exemple I = Z, plutôt que par l’ensemble N. Du point
de vue théorique, il n’y a pas de différence et nous écrirons les preuves avec I = N.

Proposition 4.2.10 Supposons que (en )n≥0 soit une base orthonormée de l’espace de Hil-
bert séparable H de dimension infinie. Pour tout vecteur x de H, on a

X ∞
X
x= hx|ek i ek et kxk2 = |hx|ek i|2 .
k=0 k=0

Preuve : Par définition d’une base orthonormée, la suite (en )n≥0 est totale dans
H, ce qui signifie que le sous-espace vectoriel fermé F engendré par cette suite
est égal à H. Il suffit d’appliquer le lemme 4.2.7 pour obtenir la première partie
de la conclusion, et le lemme 4.2.6 pour la seconde. 2

Théorème 4.2.11 Pour tout espace de Hilbert séparable H de dimension infinie, il existe
une base orthonormée (en )n≥0 .

Preuve : Soit H un espace de Hilbert séparable de dimension infinie. Supposons


que (vn )n≥1 est un sous-ensemble dénombrable qui est dense dans H. On peut,
sans perdre la généralité, supposer que pour tout k ∈ N∗ , {v1 , v2 , . . . , vk } est li-
néairement indépendant. En posant Ek les sous-espaces engendrés par le système
{v1 , v2 , . . . , vk }, la suite (En )n≥0 est une suite croissante de sous-espaces de dimen-
sion finie de H, telle que dimEn = n pour tout n ≥ 0 et telle que ∪n∈N En soit dense
dans H. On construit la suite orthonormée par récurrence de façon que pour tout
n ≥ 1, la suite (e1 , . . . , en ) soit une base orthonormée de En . On commence en
prenant pour e1 un vecteur de norme un dans E1 . Supposons e1 , . . . , en définis,
de façon que (e1 , . . . , en ) soit une base orthonormée de En . Puisque En+1 6= En ,
on peut choisir un vecteur xn+1 ∈ En+1 qui n’est pas dans En . Soit y la projec-
tion orthogonale de xn+1 sur En . On a xn+1 6= y puisque xn+1 ∈ / En . Le vecteur

J. Feuto 53 ISE-maths-ENSEA
4.3. THÉORÈME DE PROJECTION

z = xn+1 − y est non nul et orthogonal à En . On prend pour en+1 un multiple de


norme un du vecteur z. Par construction (e1 , . . . , en , en+1 ) est une suite orthonor-
mée dans En+1 , donc une base de En+1 (puisque dimEn+1 = n+1). La suite (en )n≥0
est totale dans H puisque l’espace vectoriel qu’elle engendre contient la réunion
∪n≥0 En qui est dense dans H. 2

4.3 Théorème de projection


Théorème 4.3.1 (théorème de projection) Soient H un espace de Hilbert et C une
partie convexe fermée non vide de H ; pour tout x ∈ H, il existe un et un seul point y0 de
C en lequel la fonction y 7→ ky − xk atteint son minimum sur C. On a de plus

hx − y0 |y − y0 i ≤ 0 ∀y ∈ C. (4.1)

Preuve : En translatant le convexe C, on peut se ramener au cas où x = 0H . Notons


alors
d = inf {d(y, 0H ) : y ∈ C} = inf {kyk : y ∈ C}
la distance de 0H à C. Si y et z sont deux points de C, on a (y + z)/2 ∈ C puisque
C est convexe, donc k(y + z)/2k ≥ d ; de plus la relation du parallélogramme

k(y + z)/2k2 + k(y − z)/2k2 = (kyk2 + kzk2 )/2

implique pour tous y, z ∈ C

0 ≤ k(y − z)/2k2 ≤ (kyk2 + kzk2 )/2 − d2 . (4.2)

Pour tout entier n ≥ 1, posons

Cn = y ∈ C : kyk2 ≤ d2 + 1/n .


L’ensemble Cn est une partie fermée non vide de H ; d’après la relation (4.2), on a
k(y − z)/2k2 ≤ 1/n pour tous y, z ∈ Cn . Le diamètre de Cn est donc inférieur ou

égal à 2/ n, et il tend donc vers 0. Comme l’espace H est complet, l’intersection
des fermés emboîtés Cn qui est égale à {y ∈ C : kyk = d}, contient un et un seul
point, qui est le point y0 cherché. Compte tenu de notre translation simplificatrice,
la relation à démontrer ensuite devient (h−y0 |y − y0 i) ≤ 0 pour tout y ∈ C ; pour
t ∈ [0, 1], on a y0 + t(y − y0 ) ∈ C, donc ky0 + t(y − y0 )k ≥ ky0 k, ce qui donne en
développant le carré de la norme

2t(hy0 |y − y0 i) + t2 ky − y0 k2 ≥ 0

J. Feuto 54 ISE-maths-ENSEA
4.3. THÉORÈME DE PROJECTION

pour 0 ≤ t ≤ 1 ; pour finir on divise par t > 0 que l’on fait ensuite tendre vers 0,
et on obtient (hy0 |y − y0 i) ≥ 0. 2

Définition 4.3.2 Soient H un espace de Hilbert et C une partie convexe fermée non vide
de H. Pour tout x ∈ H, on appelle pojection de x sur C l’unique élément y0 ∈ C qui
vérifie
kx − y0 k = min kx − yk .
y∈C

On note
y0 = PC (x).

Proposition 4.3.3 Soit C ⊂ H un convex fermé non vide. Alors nous avons

kPC (x) − PC (y)k ≤ kx − yk ∀x, y ∈ H

Preuve : Posons u = P − C(x) et v = P − C(y). Nous avons

hx − u|z − ui ≤ 0 ∀z ∈ C (4.3)

et
hy − v|z − vi ≤ 0 ∀z ∈ C. (4.4)
Prenons z = v dans (4.3) et z = u dans (4.4). En additionnant les inégalité obte-
nues, nous avons
ku − vk2 ≤ hx − y|u − vi
Il s’ensuit que ku − vk ≤ kx − yk 2

Corollaire 4.3.4 Soit F un sous-espace vectoiel fermé de H et x ∈ H. u = PF (x) si et


seulement si
u ∈ F et hx − u|zi = 0 ∀z ∈ F (4.5)
En plus PF est une application linéaire appelée projection orthogonal.

Preuve : Nous avons


hx − u, z − ui ≤ 0 ∀z ∈ F
d’après (4.1). Donc
hx − u, tz − ui ≤ 0 ∀z ∈ F, ∀t ∈ R
Il s’ensuit (4.5). 2

J. Feuto 55 ISE-maths-ENSEA
4.3. THÉORÈME DE PROJECTION

Corollaire 4.3.5 Soient H un espace de Hilbert, F un sous-espace vectoriel fermé sépa-


rable de H, et (en )n≥0 une base hilbertienne du sous-espace F . Pour tout vecteur x ∈ H,
la projection orthogonale de x sur F est donnée par

X
PF (x) = hx|ek i ek .
k=0

Définition 4.3.6 On dit que des parties A et B d’un espace de Hilbert H sont orthogo-
nales si tout élément de A est orthogonal à tout élément de B. Soit A une partie de H ; on
appelle orthogonal de A l’ensemble A⊥ des éléments de H orthogonaux à A.

Il est clair que A⊥ est un sous-espace vectoriel fermé de H.

Proposition 4.3.7 Soient H un espace de Hilbert et F un sous-espace vectoriel fermé de


H ; on a PF + PF ⊥ = IdH . Il en résulte que F ⊕ F ⊥ = H et (F ⊥ )⊥ = F .

Preuve : Commençons par une évidence : par définition, tout vecteur de F est
⊥
orthogonal à F ⊥ , donc F ⊂ F ⊥ . Soit maintenant x ∈ H quelconque. Puisque
x = PF (x) + (x − PF (x)), nous avons x − PF (x) ∈ F ⊥ , d’après les propriétés de
la projection orthogonale sur le sous-espace vectoriel F , et de plus la différence
x − (x − PF (x)) = PF (x) ∈ F est orthogonale à F ⊥ . Cela montre que x − PF (x)
est la projection orthogonale de x sur F ⊥ , c’est à dire que PF ⊥ = IdH − PF . La
relation IdH = PF + PF ⊥ implique évidemment que H est la somme de F et F ⊥ .
On vérifie ensuite que la somme est directe : si x ∈ F ∩ F ⊥ alors hx|xi = 0 donc
x = 0H .
⊥
Pour finir, si on a un vecteur x ∈ F ⊥ , il est orthogonal à F ⊥ par dé-
finition, donc 0H est sa projection orthogonale sur F ⊥ et la relation PF (x) =
(IdH − PF ⊥ )(x) = x montre que x ∈ F . 2

Corollaire 4.3.8 Soit H un espace de Hilbert.


1. Pour toute partie A de H, l’ensemble (A⊥ )⊥ est le plus petit sous-espace vectoriel
fermé de H contenant A.
2. Si Y est un sous-espace vectoriel de H, on a (Y ⊥ )⊥ = Y .

Preuve : Montrons le point (1). Soit F le plus petit sous-espace vectoriel fermé de
H contenant A. On sait que tout vecteur y orthogonal à A est aussi orthogonal
à l’espace vectoriel Y engendré par A (par linéarité du produit scalaire), puis à
l’adhérence F = Y de ce sous-espace (par continuité du produit scalaire). Inver-
sement tout vecteur orthogonal à F est évidemment orthogonal à A. On a donc
A⊥ = F ⊥ , donc (A⊥ )⊥ = F ⊥⊥ = F . Le point (2) découle de (1), puisque le plus
petit sous-espace fermé de H contenant Y est l’adhérence Y . 2

J. Feuto 56 ISE-maths-ENSEA
4.4. DUALITÉ DANS LES ESPACES DE HILBERT, ADJOINT D’UN OPÉRATEUR CONTINU

4.4 Dualité dans les espaces de HILBERT, adjoint d’un


opérateur continu
A tout vecteur y ∈ H on a associé la forme linéaire continue `y définie par

∀x ∈ H, `y (x) = hx|yi (4.6)

et on a vu que k`y k = kyk.

Proposition 4.4.1 Soit H un espace de Hilbert. L’application isométrique linéaire y 7→


`y de l’équation (4.6) est une bijection de H sur le dual H ∗ . En d’autres termes, pour
toute forme linéaire continue f sur H, il existe un vecteur yf ∈ H unique qui représente
la forme linéaire f au sens suivant :

∀x ∈ H, f (x) = hx|yf i

Preuve : Soit f ∈ H ∗ , si f = 0 il suffit de (et il faut) prendre yf = 0H . Si f 6=


0, notons F son noyau (fermé). Puisque F 6= H, on peut choisir un vecteur z
orthogonal à F et tel que f (z) = 1. Tout vecteur x ∈ H peut s’écrire

x = (x − f (x)z) + f (x)z = x0 + f (x)z

avec x0 = x − f (x)z qui est dans F puisque f (x0 ) = f (x) − f (x)f (z) = 0. On a pour
tout x ∈ H, puisque x0 ⊥z

hx|zi = hf (x)z|zi = hz|zi f (x)

ce qui montre que f = kzk−2 `z . Il suffit de prendre yf = kzk−2 z pour obtenir le


résultat voulu. 2

Proposition 4.4.2 Tout espace de Hilbert est réflexif.

Preuve : Soient H un espace de Hilbert et x∗∗ ∈ H ∗∗ ; pour tout vecteur y ∈ H soit


`y ∈ H ∗ la forme linéaire sur H définie par `y (x) = hx|yi, l’application y 7→ x∗∗ (`y )
est une forme linéaire et continue sur H. Par la proposition 4.4.1, il existe x ∈ H
tel que, pour tout y ∈ H on ait x∗∗ (`y ) = hy|xi. D’après la proposition 4.4.1, toute
f ∈ H ∗ est de la forme f = `y pour un certain y ∈ H, donc on a x∗∗ (f ) = x∗∗ (`y ) =
hx|yi = f (x), c’est à dire que x∗∗ est l’image de x par l’application canonique de
H dans H ∗∗ , qui est donc surjective. 2

J. Feuto 57 ISE-maths-ENSEA
4.4. DUALITÉ DANS LES ESPACES DE HILBERT, ADJOINT D’UN OPÉRATEUR CONTINU

Proposition 4.4.3 Soient E et F deux espaces de Hilbert et T ∈ L(E, F ). Il existe un


unique T ∗ ∈ L(F, E) tel que pour tout x ∈ E et tout y ∈ F on ait hT (x)|yiF =
hx|T ∗ (y)iE . On a de plus kT ∗ kL(F,E) = kT kL(E,F ) .
Preuve : Pour tout y ∈ F , l’application x 7→ hT (x)|yiF est une forme linéaire
continue de E. Il existe donc, d’après la proposition 4.4.1, un unique élément
T ∗ (y) ∈ E tel que pour tout x ∈ E on ait hT (x)|yiF = hx|T ∗ (y)iE . On vérifie
facilement que T ∗ (y) + λT ∗ (z) vérifie la propriété caractéristique de T ∗ (y + λz),
pour tous y, z ∈ F et λ ∈ K, d’où l’on déduit que T ∗ est linéaire. On a, par
définition de kT k et par les définitions équivalentes de la norme d’une application
linéaire entre espaces de Banach, nous avons
kT ∗ kL(F,E) = sup {kT ∗ (y)k : y ∈ BF } où BF désigne la boule unité ouverte dans F
= sup {hx|T ∗ (y)i : x ∈ BE , y ∈ BF }
= sup {hT (x)|yi : x ∈ BE , y ∈ BF } = kT k .
2

Définition 4.4.4 Soient E et F deux espaces de Hilbert et T ∈ L(E, F ). L’unique


application linéaire T ∗ ∈ L(F, E) tel que pour tout x ∈ E et tout y ∈ F on ait
hT (x)|yi = hx|T ∗ (y)i est appelée adjointe de T .
Regroupons dans la proposition suivante quelques propriétés des adjoints.
Proposition 4.4.5 Soient E et F deux espaces de Hilbert.
1. L’application T 7→ T ∗ est linéaire et isométrique de L(E, F ) sur L(F, E).
2. Pour tout T ∈ L(E, F ) on a (T ∗ )∗ = T et kT ∗ ◦ T k = kT k2 .
3. Pour tout espace de Hilbert H, tout S ∈ L(E, F ) et tout T ∈ L(F, H), on a
(T ◦ S)∗ = S ∗ ◦ T ∗ .

Preuve : Montrons que kT ∗ ◦ T k = kT k2 . On a kT ∗ ◦ T k ≤ kT ∗ k kT k = kT k2 . De


plus, pour tout x ∈ E tel que kxk ≤ 1 on a
kT (x)k2 = hT (x)|T (x)i = hx|T ∗ ◦ T (x)i ≤ kT ∗ ◦ T k
grâce à l’inégalité de Cauchy-Schwarz, d’où résulte kT k2 ≤ kT ∗ ◦ T k et l’égalité
cherchée. 2

Proposition 4.4.6 Soient E et F deux espaces de Hilbert et soit T ∈ L(E, F ), alors


kerT ∗ = (T (E))⊥ et l’adhérence de T ∗ (F ) est (kerT )⊥ .
Preuve : Si y ∈ F , on voit que y ∈ kerT ∗ si et seulement si pour tout x ∈ E, on
a 0 = hT ∗ (y)|xiE = hy|T (x)iF , clairement, ceci équivaut à dire que y ∈ (T (E))⊥ ,
d’où la première assertion. Il en résulte que T (E) = (kerT ∗ )⊥ , d’où la deuxième
assertion en remplaçant T par son adjoint. 2

J. Feuto 58 ISE-maths-ENSEA
4.5. EXERCICE

4.5 Exercice
Exercice 30 Opérateur diagonal dans une base orthonormée (hn ) de H : soit α = (αn )
une suite bornée de scalaires et définissons ∆α sur H par

X ∞
X
2
∀c = (cn ) ∈ ` , ∆α ( cn hn ) = cn αn hn
n=0 n=0

1. Montrer que ∆α est un opérateur continu, et calculer sa norme.


2. Déterminer l’adjoint de ∆α .
3. Justifier que les opérateurs ∆α sont normaux.

Exercice 31 Soit f est une fonction complexe, mesurable bornée sur (Ω, µ), on définit
l’opérateur de multiplication Mf par Mf (g) = f g pour toute g ∈ L2 (Ω, µ).
1. Montrer que Mf est un opérateur borné sur L2 (Ω, µ).
2. Déterminer l’adjoint de Mf .
3. Vérifier que Mf est normal.

Exercice 32 Shift S sur H = `2 (Z) ou bien H = `2 (N). Pour tout vecteur x ∈ H on


définit un nouveau vecteur Sx obtenu par décalage à droite, défini par (Sx)n = xn−1
pour tout n dans le cas Z et dans le cas N, on pose (Sx)n = xn−1 pour tout n ≥ 1, et
(Sx)0 = 0.
1. Déterminer dans le cas de `2 (Z) l’opérateur adjoint de S.
2. Montrer que S ∗ S = SS ∗ = Id.
Que peut-on dire dans le cas de `(N) ?

Exercice 33 Soient H un espace de Hilbert, P ∈ L(H) un projecteur orthogonal. Mon-


trer que P est auto-adjoint et positif.

Exercice 34 On considère l’espace de Hilbert `2 (Z) des suites de carré sommable indexées
sur Z. Pour k ∈ Z, n ∈ Z, on pose ukn = δk,n .

1. Montrer que uk k∈Z est une base hibertienne de `2 (Z).
2. Montrer que ek (x) = e2iπkx , k ∈ Z est une base hilbertienne de L2 ([0, 1])

Exercice 35 On considère l’espace de Hilbert sur R, L2 ([−1, 1]), pour la mesure de Le-
besgue et la suite un (t) = tn , n ∈ N.
1. Montrer que la suite {un }n∈N est totale dans L2 ([−1, 1]).
2. Appliquer le procédé de Schmidt pour construire une base orthormée de L2 ([−1, 1])
constituée le polynôme pn (t) (appelés polynômes de Legendre).

J. Feuto 59 ISE-maths-ENSEA
4.5. EXERCICE

3. Montrer que les polynômes déterminé ci-dessus sont de la forme

dn (x2 − 1)n
Ln (x) = cn
dxn
où les cn sont des constantes réelles arbitraires.
Déterminer cn pour que
Z1
|Ln (x)|2 dx = 1
−1

J. Feuto 60 ISE-maths-ENSEA
Chapitre 5

Espaces fonctionnels

5.1 Convergence simple et convergence uniforme


On considère E un ensemble quelconque et (F, d) un espace métrique

Définition 5.1.1 On dit qu’une suite (fn )n∈N d’applications de E dans F converge sim-
plement sur E si pour tout x ∈ E la suite (fn (x))n∈N admet une limite.

En désignant cette limite par f (x), on détermine une application f : E → F qui


est appelée limite simple de la suite (fn )n∈N .

Définition 5.1.2 On dit qu’une suite (fn )n∈N d’applications de E dans F converge uni-
formément sur E, si il existe une application f : E → F telle que la suite de terme général
un = supx∈E d(f (x), fn (x)) converge vers 0.

Soit (fn )n∈N une suite d’applications de E dans F .


1. (fn )n∈N converge simplement vers f sur E signifie

(∀x ∈ E)(∀ > 0)(∃N ∈ N)(∀n ∈ N)(n ≥ N ⇒ d(fn (x), f (x)) < )

2. (fn )n∈N converge uniformément vers f sur E signifie

(∀ > 0)(∃N ∈ N)(∀n ∈ N)(∀x ∈ E)(n ≥ N ⇒ d(fn (x), f (x)) < )

On remarque facilement que la convergence uniforme implique la convergence


simple, mais la réciproque est fausse.
Néanmoins il y a un cas important où la réciproque est vraie :

Lemme 5.1.3 Soit E un espace topologique compact et soient fn , n = 1, 2, 3, . . ., et f


des applications continues de E dans un espace métrique F . Si pour tout x ∈ E la suite
des distances d(f (x), fn (x)) est décroissante et tend vers 0, la convergence de la suite
(fn )n∈N∗ vers f est uniforme.

61
5.2. THÉORÈME D’ASCOLI

Preuve : Pour tout  > 0, En = {x ∈ E|d(f (x), fn (x)) ≥ } est une partie fermée de
E (Cela résulte de la continuité de la distance et de la continuité des fonctions f
et fn ), la suite En est emboîtée et ∩n∈N∗ En = ∅. Comme E est compact, il existe n0
tel que En0 = ∅ par conséquent pour tout n > n0 et tout x ∈ E d(f (x), fn (x)) < 
et la suite (fn )n∈N∗ converge donc uniformément vers f sur E. 2

Corollaire 5.1.4 (Théorème de Dini) Soit E un espace topologique compact et (fn )n∈N
une suite de fonctions continues de E dans R. On suppose que la suite (fn )n∈N estmono-
tone et qu’elle converge simplement vers f ∈ C(E, R), alors elle converge uniformément
vers f sur E.

Preuve : C’est une conséquence immédiate du lemme précédent. La décroissance


de la suite et sa convergence simple vers f assurent que, pour tout x de E , la
suite de terme général |f (x) − fn (x)| tend vers zéro en décroissant. 2

5.2 Théorème d’Ascoli


Définition 5.2.1 Soit X un R-espace vectoriel. Une norme sur X est une application de
p : X → R vérifiant :
i) p(x) ≥ 0 pour tout x ∈ X
ii) p(x) = 0 si et seulement si x = 0
iii) p(λx) = |λ| p(x) pour tout λ ∈ K et tout x ∈ X
iv) p(x + y) ≤ p(x) + p(y) pour tout x, y ∈ X (Inégalité triangulaire)

Exemple 5.2.2 Soit E un espace métrique compact, on considère C(E, R) l’espace vec-
toriel des applications continues de E dans R. L’application k·k∞ définie sur C(E, R)
par
kf k∞ = sup |f (x)|
x∈E

est une norme sur C(E, R) .

Dans la suite, nous considérons E un espace métrique compact et C(E, R) muni


de la norme k·k∞ . On se propose de caractériser les parties compactes de C(E, R).
Soit A une partie de C(E, R), si A est compacte alors A est fermée et bornée mais
ces conditions ne sont pas suffisantes comme le prouve l’exemple suivant : Consi-
dérons E = [0, 1] et A = {fn : x 7→ xn , n ∈ N∗ }, A est borné car A ⊆ B(0, 1), A est
fermé mais A n’est pas compact car la suite (fn )n∈N ne possède pas de sous suite
convergente.

J. Feuto 62 ISE-maths-ENSEA
5.2. THÉORÈME D’ASCOLI

En effet la suite (fn )n∈N converge simplement vers χ{1} définie par χ{1} (x) = 0
si x ∈ [0, 1[ et χ{1} (1) = 1, donc toute sous suite (fϕ(n) )n∈N converge simplement
vers χ{1} . Par conséquent (fϕ(n) )n∈N ne peut pas converger uniformément vers une
fonction continue.

Définition 5.2.3 On dit que A ⊂ C(E, R) est équicontinue en x0 ∈ E si pour tout


 > 0, il existe η > 0 tel que pour toute f ∈ A, si d(x, x0 ) < η alors |f (x) − f (x0 )| < .

Exemple 5.2.4 L’ensemble Λk = {f ∈ C(E, R)| |f (x) − f (y)| ≤ kd(x, y)} est équicon-
tinu.

Théorème 5.2.5 (Théorème d’Ascoli) Soit E un espace métrique compact, alors les
assertions suivantes sont équivalentes :
i) A est une partie compacte de C(E, R)
ii) A est une partie fermée, bornée, équicontinue de C(E, R).

Preuve : i) ⇒ ii). A étant compacte, elle est évidemment fermée et bornée, il reste à
prouver qu’elle est équicontinue. Soit  > 0, comme A est compacte, elle a la pro-
priété des réverbères, il existe donc f1 , . . . , fn ∈ A telles que A ⊂ ∪1≤i≤n B(fi , /3).
Soit x0 un point de E, comme chaque fi est continue en x0 , il existe ηi > 0 tel que
si d(x, x0 ) < ηi alors |fi (x) − fi (x0 )| < /3. Posons η = mini=1,...,n ηi . Si f ∈ A, il
existe alors fi telle que kf − fi k∞ < /3 et par conséquent si d(x, x0 ) < η, on a

|f (x) − f (x0 )| ≤ |f (x) − fi (x)| + |fi (x) − fi (x0 )| + |fi (x0 ) − f (x0 )|

et donc
|f (x) − f (x0 )| ≤ 2 kf − fi k∞ + /3 < 
ii)⇒ i). Comme C(E, R) est complet, A est une partie complète, il suffit donc de
prouver que A possède la propriété des réverbères. Fixons  > 0. L’espace E étant
compact on peut le recouvrir par un nombre fini de boules ouvertes B(x1 , ηx1 ), . . .
où les ηxi sont associés aux xi par l’équicontinuité de A, i.e. pour toute f ∈ A, si
d(x, xi ) < ηxi alors |f (x) − f (xi )| < /4. Comme A est bornée, pour chaque x ∈ E,
{f (x)|f ∈ A} a une adhérence compacte dans R et donc l’ensemble des valeurs
des éléments de A aux points x1 , . . . , xn a une adhérence compacte dans R, on
peut donc le recouvrir par un nombre fini de boules ouvertes de centres y1 , . . . , yp
et de rayon /4.
Soit Γ l’ensemble des applications de {1, . . . , n} dans {1, . . . , p}, c’est un en-
semble fini. Pour tout γ ∈ Γ, soit Aγ l’ensemble des f ∈ A telles que

f (x1 ) − yγ(1) < /4, . . . , f (xn ) − yγ(n) < /4

J. Feuto 63 ISE-maths-ENSEA
5.3. THÉORÈME DE STONE-WEIERSTRASS

Par construction les Aγ recouvrent A. il reste seulement à démontrer que pour γ


fixé, Aγ est contenu dans une boule de rayon . Soient f et g appartenant à Aγ et
x dans E, il existe xi tel que d(x, xi ) < ηxi et par conséquent

|f (x) − f (xi )| < /4 et |g(x) − g(xi )| < /4.

De plus
f (xi ) − yγ(i) < /4 et g(xi ) − yγ(i) < /4
d’où

|f (x) − g(x)| ≤ |f (x) − f (xi )|+ f (xi ) − yγ(i) + yγ(i) − g(x − i) +|g(x − i) − g(x)| < .

Ceci étant vrai pour tout x ∈ E, on a |f − gk∞ < . 2


Dans le théorème d’Ascoli on peut remplacer R par un espace métrique com-
plet F , et dans ce cas il faut remplacer l’hypothèse "A bornée" par "pour tout
x ∈ E l’ensemble des f (x) où f parcourt A a une adhérence compacte dans F ".

5.3 Théorème de Stone-Weierstrass


Le but de ce paragraphe est de prouver que si une famille de fonctions conti-
nues sur un espace topologique compact E à valeurs réelles est assez riche et est
stable par certaines opérations, elle est dense dans (C(E, R), k·k∞ ), c’est-à-dire que
toute fonction continue sur E à valeurs réelles peut-être approchée uniformément
sur E par des fonctions de la famille.

Lemme 5.3.1 Soit X un espace topologique compact et H une partie de C(X, R) possé-
dant les propriétés suivantes :
(i) Si u ∈ H et v ∈ H, alors sup(u, v) ∈ H et inf(u, v) ∈ H.
(ii) Si x et y sont des points de X et si α et β sont des nombres réels (avec α = β si
x = y), il existe u ∈ H telle que u(x) = α et u(y) = β.
Alors toute fonction de C(X, R) est limite uniforme d’une suite de fonctions de H.

Preuve : Soit f ∈ C(X, R) et  > 0. Il s’agit de construire g ∈ H telle que kg − f k∞ <


 i.e f −  < g < f + .
a) Soit x0 ∈ X. Montrons qu’il existe une fonction u ∈ H telle que u(x0 ) = f (x0 )
et u > f ?.
Pour tout y ∈ X, il existe uy ∈ H telle que uy (x0 ) = f (x0 ) et uy (y) = f (y).
L’ensemble Vy des x ∈ X tels que uy (x) > f (x) −  est un ouvert et y ∈ Vy , donc

J. Feuto 64 ISE-maths-ENSEA
5.3. THÉORÈME DE STONE-WEIERSTRASS

(Vy )y∈X est un recouvrement ouvert de X. Puisque X est compact, on peut en


extraire une recouvrement fini (Vyi )1≤i≤n . Soit u = sup(uy1 , . . . , uyn ) ∈ H. On a
uyi (x0 ) = f (x0 ) pour tout i, donc u(x0 ) = f (x0 ). Si x ∈ X, il existe un indice i
tel que x ∈ Vyi et alors u(x) > uyi (x) > f (x) − .
Ainsi u vérifie les conditions annoncées.
b) La fonction u construite en a) dépend de x0 . Pour tout x ∈ X, définissons de
même vx ∈ H telle que vx (x) = f (x) et vx > f −. L’ensemble Wx des z ∈ X tels
que vx (z) < f (z)+ est ouvert et on a x ∈ Wx ; donc X est recouvert par les Wx .
De la compacité de X on déduit l’existence d’un recouvrement fini (Wxj )1≤j≤p
de X. Soit g = inf(vx1 , . . . , vxp ) ∈ H.
On a vxj > f −  pour tout j = 1, . . . , p, donc g > f − . Soit x ∈ X, il existe un
indice j tel que x ∈ Wxj et donc g(x) ≤ vxj (x) < f (x) + .
2


Lemme 5.3.2 La fonction t sur [0, 1] est la limite uniforme d’une suite de polynômes
en t à coefficients réels.

Preuve : Définissons les polynômes p0 , p1 , . . . sur [0, 1] par récurrence de la ma-


nière suivante : pour t ∈ [0, 1]
(
p0 (t) = 0
pn+1 (t) = pn (t) + 12 (t − pn (t)2 )

Les fonctions pn , n ∈ N, sont des polynômes. Montrons par récurrence sur n que
pour tout t ∈ [0, 1] on a

0 ≤ p0 (t) ≤ p1 (t) ≤ . . . ≤ pn (t) ≤ t.

Il en est bien ainsi pour n = 0, supposons donc que c’est encore le cas pour n.
Comme t ≥ pn (t)2 on a pn+1 (t) ≥ pn (t) et de plus
√ √ 1
t − pn (t)2

pn+1 (t) − t = pn (t) − t +
2
√ 1 √
 
= pn (t) − t 1 − ( t + pn (t))
2
√ √ √ √ √
or pn (t) + t ≤ 2 t, donc 1 − 12 pn (t) + t ≥ 1 − t ≥ 0 et pn (t) − t ≤ 0 et

par suite pn+1 (t) − t ≤ 0. Pour tout t ∈ [0, 1] la suite (pn (t))n∈N est croissante

et majorée par t, elle a donc une limite finie f (t) ≥ 0 qui vérifie f (t) = f (t) +
1

2
(t − f (t)2 ). Par conséquent f (t) = t. La suite (pn )n∈N étant croissante, il résulte
alors du théorème de Dini qu’elle converge uniformément vers f sur [0, 1]. 2

J. Feuto 65 ISE-maths-ENSEA
5.3. THÉORÈME DE STONE-WEIERSTRASS

Théorème 5.3.3 (Théorème de Stone-Weierstrass) Soit X un espace métrique com-


pact, H une partie C(X, R) qui vérifie les propriétés suivantes :
i) Les fonctions constantes appartiennent à H.
ii) Si u, v ∈ H, alors u + v ∈ H et uv ∈ H.
iii) Si x, y ∈ X sont deux points distincts de X, il existe u ∈ H telle que u(x) 6= u(y).
Alors toute fonction de C(X, R) est limite uniforme d’une suite de fonctions de H, i.e
H = C(X, R).

Preuve : Soit H l’adhérence de H dans C(X, R) pour la norme k·k∞ . On va montrer


que H satisfait les hypothèses du lemme 5.3.1, ce qui entraînera que H = H =
C(X, R).
a) Si u, v ∈ H, on a u + v ∈ H car il existe des suites (un )n∈N et (vn )n∈N d’éléments
de H qui convergent respectivement vers u et v dans (C(X, R), k·k∞ ) ; il en
résulte que (un + vn )n∈N converge vers u + v qui appartient donc à H. De même
uv ∈ H et si λ ∈ R on a λu ∈ H.
Donc tout polynôme en u, c’est-à-dire toute fonction de la forme λ0 + λ1 u +
. . . + λn un , où λ0 , . . . , λn ∈ R, appartient à H.
b) Prouvons que |u| ∈ H. La fonction u est continue sur X donc bornée. En la
multipliant par une constante convenable, on peut se ramener au cas où −1 ≤
u ≤ 1. Alors 0 ≤ u2 ≤ 1. Soit  > 0 ; d’après le lemme 5.3.2, il existe un

polynôme p(t) à coefficients réels tel que |p(t) − t| <  pour tout t ∈ [0, 1].
p
Alors p(u(x)2 ) − u(x)2 <  pour tout x ∈ X, i.e

p(u2 ) − |u| ∞
< .

Or p(u2 ) ∈ H d’après a), par conséquent |u| ∈ H.


c) Si u, v ∈ H, on a compte tenu de a) et b) sup(u, v) = 12 (u + v + |u − v|) ∈ H,
inf(u, v) = 12 (u + v − |u − v|) ∈ H.
d) Soient x et y des points distincts de X et α, β ∈ R. Il existe v ∈ H tel v(x) 6= v(y).
Posons
1
v0 = (v − v(y)).
v(x) − v(y)
On a v 0 ∈ H et v 0 (x) = 1, v 0 (y) = 0. Soit maintenant u = β + (α − β)v 0 , on a
u(x) = α et u(y) = β.
2

Corollaire 5.3.4 Soit X un espace topologique compact et H un ensemble de fonctions


continues sur X à valeurs complexes qui vérifie les conditions suivantes :

J. Feuto 66 ISE-maths-ENSEA
5.3. THÉORÈME DE STONE-WEIERSTRASS

(i) Les fonctions constantes complexes appartiennent à H.


(ii) Si u, v ∈ H , alors u + v ∈ H, uv ∈ H et u ∈ H.
(iii) Si x, y ∈ X sont deux points distincts de X, il existe u ∈ H telle que u(x) 6= u(y).
Alors toute fonction de C(X, R) est limite uniforme d’une suite de fonctions de H.

Preuve : Soit H0 l’ensemble des fonctions de H à valeurs réelles. Alors H0 vérifie


les conditions (i) et (ii) du théorème 5.3.3. Si x et y sont deux points distincts
de X, il existe u ∈ H telle que u(x) 6= u(y) ; alors soit Re(u(x)) 6= Re(u(y)) soit
Im(u(x)) 6= Im(u(y)). Or
1 1
Re(u) = (u + u) ∈ H0 et Im(u) = (u − u) ∈ H0 ,
2 2i
donc H0 vérifie aussi la condition (iii) du théorème 5.3.3.
Soit g ∈ C(X, C). On a g = g1 + ig2 avec g1 , g2 ∈ C(X, R). D’après le théorème
5.3.3, g1 et g2 sont limites uniformes de fonctions de H0 donc g est limite uniforme
de fonctions de H. 2

Corollaire 5.3.5 Soit X une partie compacte de Rn et f ∈ C(X, C). Alors f est limite
uniforme sur X d’une suite de polynômes en n variables à coefficients complexes.

Preuve : Soit ℘ l’ensemble des polynômes en n variables à coefficients complexes.


Ce sont des fonctions continues sur Rn dont les restrictions sur X forment une
partie H de C(X, C) satisfaisant aux conditions du corollaire 5.3.4. 2

Corollaire 5.3.6 Soit f une fonction continue sur R à valeurs complexes, de période 1.
Alors f est limite uniforme sur R d’une suite de polynômes trigonométriques (c’est-à-dire
de fonctions de la formes t 7→ nr=−n ar e2iπrt où les ar sont des constantes complexes).
P

Preuve : Soit U = {z ∈ C||z| = 1}. L’application ϕ : R → U définie par ϕ(x) =


2iπx
e est continue. Puisque f est de période 1, il existe une fonction g définie sur
U telle que f (x) = g(ϕ(x)) et de plus gest continue (La fonction ϕ est un ho-
méomorphisme local, i.e. au voisinage de chaque point x0 de R, ϕ possède une
application réciproque continue. La fonction g s’exprime alors localement comme
la composée de deux fonctions continues).
Maintenant U est une partie compacte de C = R2 . Si on se donne un  > 0, il
existe un polynôme p,q ap,q xp y q en x et y à coefficients complexes tel que
P

X
g(x + iy) − ap,q xp y q < 
p,q

J. Feuto 67 ISE-maths-ENSEA
5.4. EXERCICES

pour x + iy ∈ U. Par suite, pour tout t ∈ R on a

X
g(e2iπt ) − ap,q (cos 2πt)p (sin 2πt)q < 
p,q

Comme cos 2πt = 21 (e2iπt + e−2iπt ) et sin 2πt = 2i1 (e2iπt − e−2iπt ), la fonction
X
ap,q (cos 2πt)p (sin 2πt)q
p,q

est un polynôme trigonométrique. 2

5.4 Exercices
Exercice 36 1. Soit k > 0 et F l’ensemble des fonctions différentiables f : [a, b] → R
telles que |f 0 (t)| ≤ k pour tout t ∈]a, b[. Montrer que F est une famille équiconti-
nue.
2. Si L > 0 et fn : Rn → Rn est une suite d’applications L−lipschitziennes avec

kfn (0)k = 2, alors montrer que l’on peut extraire une sous-suite convergente de
(fn ).

Correction 2 1. Pour f ∈ F, par le théorème des accroissements finis, pour tout


t0 , t ∈ [a, b] il existe c ∈]t0 , t[ tel que

|f (t) − f (t0 )| = |f 0 (c)| |t − t0 |



Donc |f (t) − f (t0 )| ≤ k |t − t0 |. Fixons t0 ∈ [a, b]. Soit  > 0, soit η = k
alors
∀t ∈ [a, b] |t − t0 | ≤ η ⇒ |f (t) − f (t0 )| ≤ k |t − t0 | ≤ .
Ce qui est exactement l’équicontinuité de F en t0 . Comme nous pouvons prendre
pour t0 n’importe quel point de [a, b] alors F est équicontinue.
2. (a) Notons H = {fn /n ∈ N}. Pour x0 , x ∈ Rn , kfn (x) − fn (x0 )k ≤ L kx − x0 k.
Donc en posant η = L comme ci-dessus on prouve l’équicontinuité de H en
x0 , puis partout.

(b) Notons H(x) = {fn (x)/n ∈ N}. Alors par hypothèse, H(0) ⊂ B(0, 2).

Donc H(0) est un fermé de B(0, 2) qui est compact (nous somme dans Rn ),
donc H(0) est aussi compact, d’où H(0) relativement compact.
Maintenant nous avons kfn (x) − fn (0)k ≤ L kx − 0k. Donc kfn (x)k ≤
√ √
L kxk + 2. Donc pour x fixé, fn (x) ∈ B(0, L kxk + 2) ce qui implique
que H(x) est relativement compact.

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5.4. EXERCICES

(c) Comme Rn n’est pas compact on ne peut pas appliquer directement le théorème
d’Ascoli. Soit
BR = B(0, R) qui est un compact de Rn . Notons HR = {fn |BR /n ∈ N} la
restriction de H à BR .
Alors par le théorème d’Ascoli, HR est relativement compact. Donc de la suite
(fn |BR )n on peut extraire une sous-suite convergente (sur BR ).
(d) Pour R = 1 nous extrayons de (fn )n une sous-suite (fφ1 (n) )n qui converge
sur B1 . Pour R = 2, nous extrayons de (fφ1 (n) )n une sous-suite (fφ2 (n) )n
qui converge sur B2 . Puis par récurrence pour R = N , nous extrayons de
(fφ( N −1)(n) )n une sous-suite (fφN (n) )n qui converge sur BN . Alors la suite
(fφn (n) )n converge sur Rn . C’est le procédé diagonal de Cantor. En effet soit
x ∈ Rn et soit N > kxk. Alors x ∈ BN donc (fφN (n) (x))n converge vers f (x),
mais (fφn (n) )n > N est extraite de (fφN (n) )n donc (fφ1 (n) (x))n converge égale-
ment vers f (x). Nous venons de montrer que (fφn (n) )n converge simplement
vers f sur tout Rn .

Exercice 37 Soient (E, d) un espace métrique et H une famille équicontinue d’applica-


tions de Edans R. Établir :
1. L’ensemble A des x ∈ E pour lesquels H(x) est borné est ouvert et fermé.
2. Si E est compact et connexe et si H(x0 ) est borné pour un point quelconque x0 ∈ E,
alors H est relativement compact dans C(E, R).
p
Exercice 38 On considère la suite de fonctions fn (t) = sin( t + (4nπ)2 , t ∈ [0, +∞[.
1. Montrer qu’il s’agit d’une suite de fonctions équicontinues convergent simplement
vers f ≡ 0.
2. La suite (fn ) est elle relativement compacte dans (Cb ([0, ∞[), k·k∞ ), l’ensemble des
fonctions continues et bornées ? Que dit le théorème d’Ascoli ?

Exercice 39 Soit K : C([a, b]) → C([a, b]) donné par

Zb
(Kf )(s) = k(s, t)f (t)dt,
a

k ∈ C([a, b] × [a, b]), et soit (fn ) une suite bornée de X = (C([a, b]), k·k∞ ).
1. Rappeler pourquoi k est uniformément continue.
2. En déduire l’équicontinuité de (Kfn ).
3. Montrer que (Kfn ) contient une sous-suite convergente dans X.

J. Feuto 69 ISE-maths-ENSEA
5.4. EXERCICES

Exercice 40 Soit f ∈ C([a, b], R) telle que

Zb
∀n ∈ N f (t)tn dt = 0.
a

Montrer que f est la fonction nulle.

Exercice 41 Soit E un espace compact. Soit fi , i = 1, . . . , n une famille de n élements de


C(E, R) qui sépare les points de E. Montrer que E est homéomorphe à une partie de Rn .

Exercice 42 Soient X et Y deux espaces métriques compacts. Soit A l’ensembles des


combinaisons linéaires finies f ∈ C(X × Y, R) de la forme :
X
f (x, y) = λi ui (x)vi (x),
i∈I

avec ui ∈ C(X, R), vi ∈ C(Y, R), λi ∈ R, I fini.


Montrer que toute fonction de C(X × Y, R) est limite uniforme de suites d’éléments
de A.

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Bibliographie

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