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ESPACE VECTORIEL NORME. ESPACE PREHILBERTIEN.

Dans ce chapitre E désigne un espace vectoriel défini sur K = R ou K = C.

1 ESPACE VECTORIEL NORME (E.V.N).

1.1 NORME.

1° DEFINITION 1.1

Une norme est une application de E dans R+, qui associe à tout vecteur x de E un nombre
réel positif ou nul noté ‖x‖ et qui satisfait les trois axiomes suivants:

a) ‖x‖ = 0 ⇔ x = 0E.

b) ‖λ. x‖=|λ|.‖x‖,( λ∈K , x∈E) .

c) ‖x + y‖≤‖x‖+‖y‖.

Lorsque l’axiome a) est remplacé par x = 0E ⇒‖x‖=0 , on dit que l’on a une semi-norme.

2° EXEMPLES

a) Kn est un espace vectoriel sur K. Posons pour

√∑
n
i2
‖x‖= |x |
x = (x1,....,xn)∈ Kn, i=1
n
On peut aussi définir sur K les normes suivants:
n
‖x‖∞= sup |x | ‖x‖1=∑ |xi|
i
1≤i≤n et i =1 .

b) Soit B(E,R) l’espace vectoriel sur R des fonctions numériques réelles définies sur E et
f ↦‖f‖=sup |f (x )|
qui sont bornées sur E. L’application x∈ E est une norme sur B(E,R).

1.2 NORMES EQUIVALENTES.

‖.‖ ‖.‖
Deux normes 1 et 2 définies sur un même espace vectoriel E sont dites équivalentes
lorsqu’il existe deux constantes réelles a et b strictement positives telles que :

∀ x ∈ E ,b‖x‖1≤‖x‖2 ≤a‖x‖1 .
48

Les normes sur Kn dans l’exemple a) sont équivalentes .Plus généralement sur un espace
vectoriel de dimension finie toutes les normes sont équivalentes.
1.3 DEFINITION D’UN E.V.N.

Un espace vectoriel E muni d’une norme ‖.‖ est appelé espace vectoriel normé (en abrégé
E.V.N).
On munit un E.V.N d’une distance en posant :

∀ ( x , y ) ∈ E2 , d ( x , y )=‖x− y‖.

Ainsi on définit sur un E.V.N une structure topologique d’espace métrique.

A deux normes équivalentes sont associées deux distances métriquement équivalentes.

1.4 PRODUIT D’E.V.N.

Considérons n E.V.N : E1,......,En définis sur K. Chaque E.V.N Ei est muni de la norme
‖.‖i , alors l’espace produit E = E1 ×⋯× E n est un E.V.N sur K lorsqu’on le munit de l’une
des normes suivantes:

√∑
n n
‖X‖∞ = sup ‖xi‖i ‖X‖1 =∑ ‖x i‖i
2
‖X‖= ‖x i‖i
Si X =( x 1 ,… , x n )
où x i ∈ Ei , i=1 , 1≤i≤n , i=1

(∑ )
n 1
‖X‖p = ‖x i‖p p
p≥1
, i=1 .

1.5 THEOREME 1.1

La topologie métrique associée à la norme d’un E.V.N est compatible avec le structure
d’espace vectoriel i.e. les applications ( x , y ) ↦ x + y de E×E dans E et ( λ , x ) ↦ λ . x de
K¿ E dans E sont continues .On dit qu’un E.V.N est un espace vectoriel topologique.

Démonstration

 Rappelons que la topologie de l'espace produit E×E est associée à la norme ‖.‖∞ , tandis que
la topologie de K¿ E est associée à la norme
‖( λ ,x )‖∞=sup {|λ|,‖x‖} .

a) La continuité de ( x , y ) ↦ x + y résulte de l'inégalité triangulaire

‖( x + y )−( x 0 + y 0 )‖≤‖x −x0‖+‖y− y 0‖≤2‖( x−x 0 ) , ( y− y 0 )‖∞

Pour établir la continuité de ( λ , x ) ↦ λ . x au point ( 0 0 ) il suffit d'écrire


λ ,x
b)
49

λ . x−λ 0 . x 0 =( λ−λ 0 ) . ( x−x 0 ) + ( λ−λ 0 ) . x 0 + λ 0 . ( x−x 0 )

Alors

( ∀ ε >0 ) , ( ∃α=inf 1 ,
{ ε
1+‖x 0‖+|λ 0| }) tels que

(‖( λ , x )−( λ0 , x 0 )‖∞ < α ) ⇒ (‖λ . x−λ 0 . x 0‖< α ( 1+‖x 0‖+|λ0|) < ε ) .

1.6 SOUS-ESPACE D’UN ESPACE NORME.

On appelle sous-espace d’un E.V.N les sous-espaces vectoriels fermés de E.

2 APPLICATIONS LINEAIRES CONTINUES.

2.1 THEOREME 2.1


Si E est un E.V.N de dimension finie , toute application linéaire f de E dans un E.V.N
quelconque est continue.
Démonstration

 On rappelle que si E est de dimension finie, toute les normes définies sur E sont équivalentes
à la norme ‖.‖∞ . Soit ( ei ) 1≤i≤n une base de E et la norme de E est ‖.‖∞ définie par

n
‖∑ ξi . e i‖∞ = sup |ξi|
i=1 1≤i≤n

pour tout n-uplet ( ξ ,… , ξ ) de scalaires.


1 n

n n
x=∑ ξ e i i
y=∑ ηi e i
Quels que soient les vecteurs i =1 et i=1 de E la linéarité de f
entraîne
n
f ( x )−f ( y )=f ( x− y )=∑ ( ξi −ηi ) ei
i =1
On a donc
n n
‖f ( x )−f ( y )‖≤∑ |ξ i−ηi|.‖f ( ei )‖≤‖x− y‖∞ . ∑ ‖f (e i )‖
i=1 i =1
ce qui prouve que
n
k =∑ ‖f ( e i )‖=const
‖f ( x)−f ( y )‖≤k.‖x− y‖∞ , avec i =1
ceci implique que f est continue et même uniformément continue.
50

2.2 DEFINITION 2.1

Une application f de (E, d) dans (F,δ ) est dite lipschitzienne par rapport à k si pour tout
x, y de E on a: δ ( f ( x ), f ( y ) )≤k . d ( x , y ) , où k est une constante positive. Il est évident que toute
application lipschitzienne est continue.

Toute application linéaire d’un E.V.N de dimension finie dans un autre E.V.N
quelconque est lipschitzienne.

2.3 THEOREME 2.2

Pour que l’application linéaire de l’E.V.N ( E ) dans l’E.V.N ( F ) soit continue, il


E ,‖.‖ F ,‖.‖
faut et il suffit, qu’il existe une constante positive k telle que pour tout x appartenant à E :
‖f ( x)‖F ≤k .‖x‖E .
Démonstration
 a) La condition est suffisante, car elle entraîne

‖f ( x)−f ( y )‖F=‖f ( x− y)‖F≤k.‖x− y‖E


ce qui prouve que f est lipschitzienne de rapport k donc elle est continue

b) Réciproquement supposons f continue, sa continuité au vecteur nul 0 E entraîne


l'existence d'une constante h> 0 telle que l'inégalité
‖x‖E ≤h implique ‖f ( x )‖F ≤1 . Si x
x
y=h.
est un vecteur non nul quelconque de E le vecteur
‖x‖E vérifie ‖y‖E =h donc
h 1
‖f ( y )‖F = .‖f ( x )‖F≤1 ‖f ( x )‖F ≤ .‖x‖E
‖x‖E . Autrement dit pour tout vecteur x≠0 E , h , de
plus cette inégalité reste vraie même pour x=0 E , car dans ce cas
f ( E)
0 =0 F . Finalement on

1
‖f ( x )‖ ≤k .‖x‖ k=
peut dire que pour tout vecteur x ∈ E , F E , où h .

1° REMARQUE

On notera que la continuité à l’origine d’une application linéaire f entraîne sa continuité


en tout point et même sa continuité uniforme.

2° CONSEQUENCE

Deux normes définissant la même structure topologique sur un même espace vectoriel E
sont équivalentes.
Démonstration.

‖.‖
 Désignons par 1 et par
‖.‖2 deux normes de l'espace E définissant la même structure
topologique sur E , dans ce cas l'application identique de E dans E x → x est une application
51

bicontinue de ( E ,‖.‖1 ) sur ( E ,‖.‖2 ) . Il existe alors deux constantes positives k 1 et k 2 tels que
‖x‖2≤k 1 .‖x‖1 et ‖x‖1≤k 2 .‖x‖2 pour tout vecteur x ∈ E . Les deux normes sont donc
équivalentes.

2.4 ESPACE LC(E,F)

1° DEFINITION 2.2
Les espaces E et F sont deux E.V.N sur un même corps commutatif K, on note Lc(E,F)
l’ensemble des applications linéaires continues de E dans F, il constitue un espace vectoriel sur
K.
2° PROPRIETES

a) On munit Lc(E,F) de la norme |‖.‖|suivante :

‖f ( x )‖F
|‖f .‖|=sup = sup ‖f ( x )‖F
x≠0 ‖x‖E ‖x‖=1
f Lc(E,F), ,
d’où:
b)
‖f ( x)‖F ≤|‖f‖|.‖x‖E .

c) Lorsque E = F, on a : |‖f ∘ g‖|≤|‖f‖|⋅|‖g‖|.


3° DUAL TOPOLOGIQUE
Lorsque F = K (le corps des scalaires de E) l’espace L c(E,K) est appelé le dual
topologique de E et sera noté E’, c’est l’espace des formes linéaires continues sur E
4° PROPOSITION 2.1
Pour qu’une forme linéaire f soit continue sur un E.V.N ,il faut et il suffit , que son noyau
soit fermé.

3 ESPACE DE BANACH.

3.1. DEFINITION.1.1
Un espace de Banach, ou tout simplement un Banach , est un E.V.N complet pour la
distance associée à la norme.
1° PROPRIETES IMPORTANTES

Si E est un espace de Banach pour deux normes ‖.‖1 et ‖.‖2 et si pour tout x de E,
‖x‖1≤k .‖x‖2 (k>0), alors les deux normes sont équivalentes.

2° PRODUIT DE BANACHS
52

Soient n Banachs E1,......,En définis sur K, alors E = E1 ×…× E n est un Banach


défini sur K.

3.2 THEOREME 3.1.

Lc(E,F) muni de la norme |‖.‖| est un Banach lorsque E est un espace vectoriel normé et F
un Banach. En particulier le dual topologique E’ d’un E.V.N E est un Banach.

Démonstration.

 Soit{ f n }n≥1 une suite de Cauchy de Lc(E,F). Alors pour tout ε > 0 il existe N ( ε) tel que
|‖f n−f m‖|<ε dès que n , m > N ( ε ) . On en déduit que la suite numérique positive ou nulle
{|‖f n‖|}n≥1 est convergente donc bornée,
|‖f n‖|≤k ( k > 0 ) et que pour tout x de E on a:
‖f n ( x )−f m ( x )‖F≤|‖f n −f m‖|.‖x‖E<ε .‖x‖E , ce qui signifie que la suite { f n ( x )}n≥1 est de
Cauchy donc convergente car l'espace F est un Banach.
f ( x )= lim f n ( x )
Posons pour tout x de E: n→+∞ et montrons que f est une application
E
linéaire et continue de dans . F
 La linéarité est immédiate:

f ( α . x +β . y )= lim f n ( α . x +β . y )= lim ( α . f n ( x )+β . f n ( y ) ) =α . f ( x )+ β . f ( y )


n→+∞ n→+∞

Pour démontrer la continuité de f , reprenons l'inégalité

‖f n ( x)−f m ( x)‖F <ε.‖x‖E


Comme la norme est une fonction continue, en passant à la limite lorsque m tend vers
+∞ , il vient ‖f n ( x )−f ( x )‖F <ε.‖x‖E . On en déduit

‖f ( x )‖F =‖f n ( x )+ ( f ( x )−f n ( x ) )‖≤‖f n ( x )‖+‖f ( x )−f n ( x )‖< ( k +ε ) .‖x‖E

Etant donné que ε > 0 est arbitraire on obtient ‖f ( x )‖F ≤k , i.e. d'après le théorème
2.2 f est continue.

Il en résulte de même que


|‖f −f n‖|<ε , pour tout n≥N ( ε ) , i.e. la suite { n }n≥1
f
converge vers f .

3.3. THEOREME DE L’APPLICATION OUVERTE


1° DEFINITION 3.2
Soient E et F deux espaces de Banach. On dit qu’une application f de E dans F est
ouverte, si pour tout ouvert O de E l’ensemble f(O) est ouvert dans F. Si f est bijective cette
−1
condition équivaut à la continuité de f , dans ce cas on dit que f est bicontinue.
53

2° THEOREME 3.2.
Soient E et F deux espaces de Banach et f une application linéaire continue de E dans F :

a) Si f est surjective, alors f est ouverte.

b) Si f est bijective, alors f est bicontinue.

Démonstration.

 La propriété b) résulte immédiatement de a).


Montrons a), soit f une application linéaire continue et surjective de E dans F . On note
avec des primes les boules dans F et soit B=B(0 ; 1 ] la boule unité fermée de E . Le nœud de
la démonstration consiste à prouver que:

(1)- il existe r >0 tel que B' (0 ; r [ ⊂f ( B )

Supposons démontrée cette propriété et montrons que f est ouverte. Soit U un ouvert
de E . Pour chaque x dans U , il existe t >0 tel que B( x ; t ]⊂ U et l'on a
f ( x )+t . B ' (0 ; r [⊂ f ( x )+t . f ( B ) .
On en déduit que B ( f ( x ) ; tr [ ⊂ f ( B( x ; t ] ) ⊂ f ( U ) .
'

Donc f ( U ) est voisinage de chacun de ses points et, par suite, f ( U ) est un ouvert.

Montrons la propriété (1). Pour cela on montre d'abord qu'il existe r >0 tel que
'
B ( 0 ; r ]⊂ f ( B ) .
 Soit y un élément de F. Comme f est surjective, il existe x dans E avec f(x)=y. Il existe
un entier n tel que ‖x‖≤n , donc les fermés f ( B(0 ;n ] ) pour n≥1 ont une réunion égale à F,
comme F est complet, il résulte du théorème de Baire qu'il existe n≥1 tel que f ( B(0 ;n ] )
contienne une boule B (a ; ρ ] , avec ρ >0 (on a pris les adhérences pour pouvoir appliquer le
'

théorème de Baire).
ρ
r=
Posons n , on va montrer que f ( B ) contienne B' (0 ; r ] . D'abord, comme la multiplication
1
par n est un homéomorphisme
( f ( B ) )= 1 f ( B(0 ; n ])= 1 ( f ( B(0 ; n ] ) ) ⊃ 1 B ' ( a; ρ]=B' (a ; r ]
n n n

1 1
' y= ( y + a ) + ( y− a )
Soit maintenant y ∈ B ( 0 ; r ] , on peut écrire 2 2 , avec
' '
y +a ∈ B ( a ; r ] ⊂ f ( B ) et − y +a ∈ B ( a; r ] ⊂ f ( B ) .
Soit ε > 0 , il existe et x deux éléments de B tels que
'
x

‖y + a−f ( x )‖≤ε '


et ‖− y+ a−f ( x )‖=‖y−a+ f ( x )‖≤ε
'
54

D'après l'inégalité triangulaire, on obtient

1
‖y − f ( x−x )‖=‖y −f
2
' 1
2
( x −x' ) ‖≤ε (
, avec
1
2
'
‖x− x ‖≤1 )
'
donc y ∈ f ( B ) et B (0 ; r ]⊂ f ( B ) .
Il reste à montrer que B ( 0 ; r [⊂ f ( B ) . Soit z ∈ B ( 0; r [ , comme 0=f ( 0 ) , on peut
' '

supposer z≠0 . Puisque ‖z‖< r , on peut écrire ‖z‖=r ( 1−μ ) , avec 0< μ< 1 .
z
y=
Considérons 1−μ . On a ‖y‖=r donc y ∈ B' ( 0 ; r ] , par suite y ∈ f ( B ) et il existe
y 1 ∈ f ( B ) tel que ‖y 1 − y‖≤μ .r .

On va construire par récurrence une suite (


y n )n≥1
de F telle que

y n − y n−1 ∈ μn−1 . f ( B ) et ‖y n− y‖≤μn .r , ( ∀ n≥1 )

Supposons y 0 , y 1 , …, y n construits vérifiant ces propriétés et construisons y n+1 . On a


‖y n− y‖≤μn .r , donc y ∈ B' ( y n ; μn . r ] . Puisque l'application ϕ : z → y n + μn . z est
continue, alors

B ( y n ; μn r ]=ϕ ( B ( 0 ; r ] ) ⊂ ϕ ( f ( B ) ) ⊂ ϕ ( f ( B ) )
' '

y ∈ B ( y n ; μn r ]⊂ y n + μ n f ( B ) .
'
et il en résulte
n n+1
( )
Donc il existe y n+1 dans y n + μ f B tel que ‖y n+1 − y‖≤μ . r . Et y n+1 est
construit. Pour chaque n≥1 , on a alors

y n+1 − y n ∈ μ n . f ( B )=f ( B( 0 ; μ n ] )

Donc il existe une suite (


x n )n≥1
de E telle que

‖x n‖≤μ n et y n + 1 − y n =f ( x n )
pour n≥0

La première condition jointe à μ<1 montre que la série ∑ x n est absolument


convergente dans E donc convergente et sa somme x est telle que
1
‖x‖≤ ∑ ‖x n‖≤ ∑ μn =
n≥0 n≥0 1−μ
Il en résulte que
n n
f ( x )= lim
n→+∞ k =0
∑ f ( x k ) = lim ∑ ( y k +1 − y k ) =n→+∞
n→+∞ k =0
lim y n = y
,
55

d'où f ( (1− μ ) x ) =( 1− μ ) y= z , avec ‖( 1−μ ) x‖≤1 , ce qui montre bien que z ∈ f ( B ) .


'
Donc B ( 0 ; r [⊂ f ( B ) .

3° CONSEQUENCE 1.

Si deux normes sur un espaces vectoriel sont comparables et si E complet pour chacune
d’elle, alors ces normes sont équivalentes.

Démonstration.

 Soient
‖.‖1 et ‖.‖2 deux normes sur E pour lesquelles E est complet. On dit que ces deux

normes sont comparables si l'on a par exemple


‖x‖2≤C .‖x‖1 pour tout vecteur x de E .
L'application identique de ( E ,‖.‖1 ) dans ( E ,‖.‖2 ) est alors continue, donc bicontinue,
d'après le théorème précédent.

4° Conséquence 2. (condition suffisante pour avoir une somme directe topologique).

Soit E un espace de Banach tel que E = F ⊕ G . Si F et G sont des sous-espaces


fermés de E , alors la somme directe est topologique.

Démonstration.

 L'application f : F ×G → E , ( x , y ) → x + y , est linéaire, continue et bijective. Si F


et G sont des sous-espaces fermés de E , alors ils sont des espaces de Banach, par suite F×G
l'est aussi et f est bicontinue, d'après le théorème 3.2.

4 ESPACE VECTORIEL EUCLIDIEN.

4.1. PRODUIT SCALAIRE

Soit E un espace vectoriel réel. On appelle produit scalaire sur E toute forme bilinéaire f
sur E symétrique et définie positive. Le nombre f(x,y) est noté généralement ⟨ x, y⟩ .

4.2. DEFINITION D’UN ESPACE EUCLIDIEN.

Soit E un espace vectoriel réel. Si E est muni d’un produit scalaire, on dit que E est un
espace euclidien.
Un espace euclidien est un espace vectoriel normé en posant pour tout x de E:
‖x‖=√ ⟨x , x⟩ . (4.1)

4.3. BASE ORTHONORMALE.


56

On dit qu’un base B = (ei) de E est orthonormale si pour tout i et j on a :


⟨ei ,e j ⟩=δ ij ,

δ ij est le symbole de Kronecker.

4.4. THEOREME D’ORTHONORMALISATION. 4.1.

Soit E un espace euclidien de dimension finie n, si B = ( i ) 1≤i≤n est une base de E, il


e

existe une base B =( e ' i ) 1≤i≤n de E orthonormale et telle que pour tout entier p ∈ {1 ,… , n } le
'

sous-espace Vect{e1,...., ep} coïncide avec le sous-espace Vect{e’1,...., e’p}.


On dit que B’ se déduit de B par orthonormalisation.

Démonstration.

 Posons
k −1
e k − ∑ ⟨e k , ei ⟩. e ' i
'

i=1
e 'k= k −1
e
‖e k − ∑ ⟨e k , ei ⟩. e ' i‖
'
e ' 1= 1
‖e1‖ et i=1 pour k = 2, 3,…,n (4.2)

Il est facile de vérifier que B =( e ' i ) 1≤i≤n est une base orthonormée et que
'

Vect { e 1 ,…, e p }=Vect {e '1 ,…, e 'p } ( ∀ p=1 ,…, n ) .


Ce procédé (4.2) s'appelle procédé d'orthonormalisation de Gramm-Schmidt. 

4.5. REMARQUE
'
Il existe une seule base B déduite de B par orthonormalisation et telle que

'
( ∀ p=1 ,…, n ) , ⟨e p , e p ⟩>0

4.6. ENDOMORPHISME ADJOINT.

Soit E un espace euclidien et u un endomorphisme de E.

1° DEFINITION 4.1
¿
Un endomorphisme u de E est dit adjoint de l’endomorphisme u si
et seulement si:
2 ¿
∀(x, y )∈E ,⟨u(x ), y⟩=⟨x,u ( y)⟩
.

2° THEOREME 4.2.

Si l’adjoint d’un endomorphisme existe, alors il est unique.

3° THEOREME 4.3.
57

Si u et v sont deux endomorphismes de E admettant chacun un adjoint, λ u ( λ ÎR ), u +


v et uo v admettent chacun adjoint et l’on a :

( λ u)* = λ u*, (u + v)*=u* + v*, (uo v)* = v*o u*.

4° THEOREME 4.4.

Si E est de dimension finie, u admet un endomorphisme adjoint et


l’on a:
¿
( u¿ ) =u et det(u*) = det (u).

De plus si A est la matrice de u dans une base orthonormale B de E , la matrice A* de u*


est égale à tA.

5° REMARQUE

On a (idE)* = idE .

4.7. OPERATEUR ORTHOGONAL.

Soit E un espace euclidien de dimension fine et u un endomorphisme de E.

1° THEOREME 4.5.

Les propriétés suivantes sont équivalentes:

2
a) ∀ ( x , y ) ∈ E ,⟨u( x),u( y)⟩=⟨ x, y⟩ .

b) ∀ x ∈ E ,‖u(x )‖=‖x‖
¿
c)
u ∘u=id E

d)
u ∘u¿ =id E .

−1 ¿
e) u est inversible et u =u .

Démonstration.

 Démontrons que b)  a) (pour les autres démonstrations voir théorème 4.2). D'un côté on a:

⟨u( x+ y),u( x+ y)⟩=‖u(x+ y )‖2=‖x+ y‖2=⟨x+ y ,x+ y⟩=


=⟨ x ,x⟩+2⟨ x , y⟩+⟨ y, y⟩=⟨u( x),u( y)⟩+2⟨x , y ⟩+⟨u( y),u( y)⟩
58

De l'autre côté

⟨u( x+ y),u( x+ y)⟩=⟨u( x),u(x )⟩+2⟨u( x),u( y)⟩+⟨u( y ),u( y )⟩


d'où en simplifiant on trouve a).

2° DEFINITION 4.2

Un endomorphisme de E qui vérifie les propriétés précédentes est appelé opérateur


orthogonal.

3° THEOREME 4.6.

Le déterminant d’un opérateur orthogonal est égal à +1 ou à -1.

4.7. MATRICE ORTHOGONALE.

Soit A une matrice carrée à coefficients réels

1° THEOREME 4.7.
Les propriétés suivantes sont équivalentes:
t
a) A⋅A=I n
t
b) A⋅ A=I n
c) A est inversible et A−1 =t A

2° DEFINITION 4.3
Une matrice carrée A qui vérifie l’une des propriétés précédentes est appelée matrice
orthogonale.

3° THEOREME 4.8.

Un endomorphisme d’un espace euclidien E de dimension finie n est un opérateur


orthogonal si et seulement si sa matrice dans une base orthonormale est une matrice orthogonale.
4° THEOREME 4.9.

La matrice de passage d’une base orthonormale de E, espace euclidien, à une base


orthonormale est une matrice orthogonale.

4.8 GROUPE ORTHOGONAL.

Il est facile de voir que les opérateurs orthogonaux de E décrivent un sous-groupe de


GL n ( R ) (groupe des automorphismes de E).
59

En effet : u-1= u* et v-1= v* ⇔ (u∘ v-1)-1= (u∘ v-1)* car


(u∘ v-1)-1= v∘ u-1= (v-1)*∘ u*= (u∘ v-1)*.

1° DEFINITION 4.5

L’ensemble des opérateurs orthogonaux d’un espace euclidien E de dimension finie n est
un sous-groupe de GLn(R) appelé groupe orthogonal et noté O(n).

2° REMARQUE

Les matrices orthogonales d’ordre n décrivent un sous-groupe du groupe des matrices


inversibles Mn(R). Il est isomorphe à O(n).

3° GROUPE DES ROTATIONS DE E.

Si u-1 = u* et det(u) = +1, on dit que u est une rotation. Il est clair que les rotations de E
décrivent un sous-groupe de O(n) appelé groupe des rotations.

L’ensemble des matrices orthogonales A telles que det A = +1 décrivent un groupe noté
O+(n) ou SO(n) isomorphe au groupe des rotations de E.

4.9 OPERATEURS SYMETRIQUES.

E étant un espace euclidien de dimension finie n et u un endomorphisme de E.

1° THEOREME 4.10.

Les propriétés suivantes sont équivalentes:


2
a) ∀ ( x , y ) ∈ E , ⟨u( x ), y ⟩=⟨x ,u ( y )⟩.

b) u = u*.

c) la matrice de u dans une base orthonormale de E est symétrique, i.e.: A = tA.

2° DEFINITION 4.6

Un endomorphisme u de E qui vérifie l’une des propriétés précédentes est appelé


opérateur symétrique.

3° DIAGONALISATION

Un opérateur symétrique u de E possède les propriétés suivantes:

a) Les valeurs propres de u sont réelles.


b) Le sous-espace orthogonal à tout vecteur propre non nul est
stable par u .
c) Les sous-espaces propres associés à deux valeurs propres
distinctes sont orthogonaux.
60

d) u est diagonalisable et il existe une base orthonormée de E formée des vecteurs


propres de u .

Démonstration.

 c) - Soient λ et μ deux valeurs propres distinctes de u , x ∈ Ker ( u− λ . id E ) ,


y ∈ Ker ( u− μ . id E )
. Considérons le produit scalaire ⟨ x,u( x)−u( y)⟩ . On a:
2
⟨ x,u( x)−u( y)⟩= ⟨ x, λ. x−μ. y⟩= λ.‖x‖ −μ⟨ x, y⟩
et
2
⟨ x, u( x)−u( y)⟩= ⟨ x,u( x)⟩− ⟨ x,u( y )⟩=⟨u( x), x⟩−⟨u( y), y⟩= λ.‖x‖ −λ.⟨ x, y⟩ ,

d'où en simplifiant μ.⟨ x , y⟩=λ.⟨ x, y⟩ . Or λ≠ μ , alors ⟨ x , y ⟩=0 .

d) – Démontrons cette propriété par récurrence sur n=dimE .


Si n=1 , u a une valeur propre λ , il lui correspond un vecteur x≠0 E propre de u , le
x
b=
vecteur ‖x‖ est une base de E et b est un vecteur propre de u tel que ‖b‖=1 .
Si n >1 supposons que pour tout opérateur symétrique u d'un espace euclidien de dimension
n−1 il existe une base orthonormée formée de vecteurs propres de u . Puisque u est un
endomorphisme de E et que dimE=n , alors u possède n valeurs propres réelles d'après la
propriété a). A l'une d'elles λ 1 on peut associer un vecteur propre b 1 tel que
‖b 1‖=1 .
Considérons le sous-espace F orthogonal à F =Vect {b1 } . Comme le produit scalaire est une
¿

¿
forme bilinéaire non dégénérée, alors F ⊕ F= E .
Il existe une base orthonormée de F { b2 ,… , bn } , il est évident que { b1 , b2 , …, bn } est une
¿ ' ' ' '

¿
base orthonormée de E . D'après la propriété b) F est stable par l'endomorphisme u , on peut
'
donc définir l'endomorphisme u =u|F induit par u sur F , qui est aussi un opérateur
¿
¿

'
symétrique. De même tout vecteur propre de u est vecteur propre de u . En appliquant
l'hypothèse de récurrence il existe pour F une base orthonormée { b 2 ,… ,b n } formée de
¿

vecteurs propres de u donc de u et, par suite, { b 1 , b2 , …, bn } est une base orthonormée de
'

E formée par les vecteurs propres de u .

4° FORME BILINÉAIRE SYMÉTRIQUE DANS UN ESPACE EUCLIDIEN.

Soit f une forme bilinéaire symétrique sur un espace euclidien E


t
de dimension finie n et A la matrice de f dans une base orthonormée B de E , on a A= A .
Considérons l'endomorphisme u de E dont la matrice dans la base orthonormée B est A
, alors

( ∀ ( x , y ) ∈ E2 ) , ( f ( x , y )=⟨u ( x ), y ⟩=⟨ x ,u( y )⟩ )


61

 En effet f ( x , y )=t Y × A×Y =⟨u (x ), y ⟩ .

11° RÉDUCTION DES FORMES QUADRATIQUES RÉELLES.

Soit f une forme bilinéaire symétrique sur un espace euclidien E de dimension finie n
et A la matrice de f ou de l'opérateur symétrique u dans une base orthonormée quelconque de
E , on a:

( ∀ ( x , y ) ∈ E2 ) , ( f ( x , y )=⟨u ( x ), y ⟩=⟨ x ,u( y )⟩ )


Dans une base orthonormé formée des vecteurs propres associés respectivement aux
valeurs propres λ 1 ,…, λ n de la matrice A , on aura
n n
f ( x , y )=∑ λ i x y q ( x )=f ( x , x )=∑ λ i . ( x i )
i i 2

i=1 , i=1

Si rang f =r , en échangeant au besoin le numérotage de la base on obtient


r r
f ( x , y )=∑ λ i x y q ( x )=f ( x , x )=∑ λ i . ( x i )
i i 2

i =1 , i =1 , (4.3)
avec λ i≠0 ( 1≤i≤ r ) .

5 ESPACE HÉRMITIEN

5.1. PRODUIT SCALAIRE HÉRMITIEN

Soit E un espace vectoriel complexe. On appelle produit scalaire hérmitien toute application f
de EE dans C vérifiant pour tout vecteur x, x’, y, y’ de E et pour tout scalaire  de C :

a) f ( x +x ', y )=f ( x , y ) +f ( x ', y ), f ( λ. x , y )=λ . f ( x , y )


b) f ( x , y+ y ' )=f ( x , y ) +f ( x , y ' ), f ( x , λ. y )=λ.f ( x, y )
c) f ( x, y)=f ( y , x)
d) f(x, x)  0 et f(x, x) = 0, si et seulement si, x = 0.
Dans la suite on notera aussi f ( x, y)=⟨x , y⟩
5.2. DÉFINITION

Un espace vectoriel complexe E muni d’un produit scalaire hérmitien est appelé espace
hérmitien.

5.3. NORME ASSOCIÉE AU PRODUIT SCALAIRE

A) INÉGALITÉ DE CAUCHY SCHWARZ

Soit E un espace hérmitien, on a pour tout x de E et pour tout y de E


62

|⟨x, y⟩|2≤‖x‖.‖y‖ (5.1)

Cette inégalité est appelée inégalité de Cauchy Schwarz.

Démonstration

1° Si y = 0 l’inégalité est évidente


2° Supposons y  0, pour tout C on a :
2
0  ⟨ x+ λy , x+ λy ⟩ = ⟨ x , x ⟩+λ ⟨x , y ⟩+λ ⟨ x , y ⟩+|λ| ⟨ y, y⟩
⟨ x , y⟩ |⟨x , y ⟩|2
λ=− ⟨ x , x ⟩− ≥0
en particulier pour ⟨ y , y ⟩ , on obtient ⟨ y , y⟩ , d’où le résultat.

B) NORME ASSOCIÉE

La norme associée au produit scalaire hérmitien est la norme définie


par :

xE, ‖x‖= √ ⟨x ,x⟩ (5.2)

5.4. EXEMPLES

A) ESPACE L2
L’espace complexe l2 des suites de nombres complexes x = (xn)n0
Vérifiant la condition :
+∞
∑ |x n|2 <+ ∞
n=0 (5.3)

et le produit scalaire hérmitien est défini par :


+∞
⟨ x , y ⟩= ∑ x n y n
x=(xn)n0 , y=(yn)n0, n=0 (5.4)

B) ESPACE L2(G)

L’espace L2(G) des fonctions complexes, f, définies sur un domaine GR, s’appelle l’espace
des fonctions de carré intégrable sur G ; i.e. :

f ∈ L2 (G)⇔∫|f ( x)|2 dx<+ ∞


G (5.5)
Muni du produit scalaire hérmitien

⟨f , g⟩=∫ f (x )g( x )dx


fL2(G),gL2(G) ; G (5.6)
L2(G) est un espace hérmitien.
63

5.5. VECTEURS ORTHOGONAUX

Deux vecteurs x et y d'un espace hérmitien E sont dits orthogonaux si leur produit
scalaire est égal à 0 , i.e. ⟨ x, y⟩=0 .

5.6. BASES ORTHONORMÉES.

Si E est un espace vectoriel hérmitien de dimension finie n, E admet une base


B=( e1 )1≤i≤n
orthonormée et

n
x=∑ ⟨ x ,e i ⟩. e i
(∀ x ∈ E ), i=1 (5.7)

5.7. ENDOMORPHISME ADJOINT.

Soit E un espace hérmitien et u un endomorphisme de E.

A) DÉFINITION.
¿
Un endomorphisme u de E est dit adjoint de u si, et seulement si,

¿
( ∀ ( x , y ) ∈ E ) , ⟨u( x), y⟩=⟨x ,u ( y)⟩
B) THÉORÈME 4.11.

Si l'adjoint d'un endomorphisme existe, il est unique.

C) THÉORÈME 4.12.

Si u et v sont des endomorphismes de E qui admettent chacun un adjoint, λ . u (C),


u + v , u ∘ v admettent un adjoint est

( λ . u )¿ =λ .u ¿ , ( u+ v )¿=u ¿ + v ¿ , ( u ∘ v )¿ =v ¿ ∘ u¿

D) THÉORÈME 4.13.
¿
Si E est de dimension finie, u admet un endomorphisme adjoint u et l'on a:

¿
( u¿ ) =u , det ( u ) =det ( u¿ )

De plus si A est la matrice de u dans une base orthonormée B de E , la matrice A¿


¿
de u dans la base B est
¿
A =t A .
64

E) REMARQUE.
¿
On a : ( id E ) =id E .
5.8. OPÉRATEUR UNITAIRE.

Soit E un espace hérmitien de dimension finie n et u un endomorphisme de E.

A) THÉORÈME 4.14.

Les propriétés suivantes sont équivalentes:

 ( ∀ ( x, y ) ∈ E ) , ⟨u( x),u( y)⟩=⟨ x, y⟩ .


2

 ( ∀ x ∈ E ) , ‖u(x )‖=‖x‖.
¿

u ∘u=id E ¿

¿

u ∘u =id E .

¿
 u est inversible et u =u−1

B) DÉFINITION

Un endomorphisme u de E qui vérifie l'une des propriétés précédentes est appelé opérateur
unitaire.

C) THÉORÈME 4.15.

Le déterminant d'un opérateur unitaire est un nombre complexe de module 1.

D) THÉORÈME 4.16.

L'ensembles des opérateurs unitaires est un sous-groupe de ( GL C ( E ) ,∘) , appelé groupe


unitaire.

E) THÉORÈME 4.17.

B=( ei )1≤i ≤n
Si u est un endomorphisme et si est une base orthonormée de E, u est un
opérateur unitaire, si et seulement si, ( u ( e i ) )1≤i≤n est une base orthonormée de E.

8° MATRICES UNITAIRES.

Soit A une matrice carrée à coefficients complexes.

A) THÉORÈME 4.18.
65

Les propriétés suivantes sont équivalentes

t
 A×A=I

 A×t A=I

 A est inversible et A−1 =t A .


b) DÉFINITION.

Une matrice A , qui vérifie l'une des propriétés précédentes, est appelée matrice unitaire.

C) THÉORÈME 4.19.

Un endomorphisme d'un espace vectoriel hérmitien de dimension finie E, est un opérateur


unitaire, si et seulement si, sa matrice dans une base orthonormée de E est unitaire.

6 ESPACE PRÉHILBERTIEN

6.1. DÉFINITION

Un espace euclidien ou un espace hérmitien est appelé espace pré- hilbertien.


Un espace préhilbertien est donc un espace vectoriel normé et, par suite, un espace métrique.

6.2. NORME CARACTÉRISANT UN PRODUIT SCALAIRE

Pour qu’un espace vectoriel normé ( E ,‖‖) soit un espace pré- hilbertien, il faut et il
suffit, pour tous vecteurs x et y de E, on ait la loi du parallélogramme.
‖x + y‖2 +‖x − y‖2 =2 (‖x‖2 +‖y‖2 ) (6.1)

Démonstration

La condition (1.18) est nécessaire. En effet


‖x + y‖2 +‖x − y‖2 = ⟨ x+ y , x + y ⟩+ ⟨ x− y , x− y ⟩ =
= ⟨ x , x ⟩+⟨ x , y ⟩+⟨ y , x ⟩+⟨ y , y ⟩+⟨ x , x ⟩−⟨ x , y ⟩−⟨ y , x ⟩+⟨ y , y ⟩ =
=2 ⟨ x , x ⟩+2 ⟨ y , y ⟩ =.
Démontrons que cette condition est suffisante et pour cela supposons que E soit un espace
vectoriel complexe. Posons :
1
ϕ ( x , y )=
4
[ (‖x+ y‖2−‖x − y‖2 )−i (‖ix+ y‖2−‖ix− y‖2 ) ]
(6.2)
et démontrons que  est un produit scalaire hérmitien.
Vérifions la propriété c), d’après (1.19) :
66

1
ϕ ( x , y )=
4
[ (‖y +x‖2−‖ y−x‖2)−i (‖iy +x‖2−‖iy−x‖2 ) ]
=
1
[ (‖ x+ y‖2 −‖x− y‖2 ) −i (‖y−ix‖2 −‖ y+ix‖2 ) ]
=4 =

1
4
[ (‖ x+ y‖2−‖x− y‖2) −i (‖ix− y‖2−‖ix + y‖2 ) ]
= =

1
[ (‖ x+ y‖2 −‖x− y‖2 ) +i (‖ix+ y‖2−‖ix− y‖2 ) ]
=4 = ϕ( x , y )

On démontre que :
(x, y)2 et x’, (x + x’, y) + (x - x’, y) = 2(x, y),
d’où
(x + x’, y) + (x - x’, y) = 2(x, y)
(x’ + x, y) + (x’ - x, y) = 2(x’, y)

et en faisant la somme on vérifie la propriété a) :

(x + x’, y) = (x, y) + (x’, y)

Démontrons l’homogénéité de . Pour cela fixons x et y et considérons la fonction :

f() = (x, y) - (x, y), pour C

Remarquons que les restrictions de f à R et à iR sont respectivement des fonctions


continues de R à R et de iR à iR. De plus f est linéaire.
D’après (1.19) on a : f(0) = f(-1) = 0 car (-x, y) = -(x, y), d’où pour tout entier n on a :
(nx, y) = sgn(n)n(x, y) = n(x, y), i.e. nZ, f(n) = 0.

Pour p et q entiers, avec q0 on a :

ϕ ( qp x , y)= p . ϕ ( 1q x, y )= pq qϕ ( 1q x, y )= qp ϕ ( x , y )
d’où pour tout Q,x, y) = (x, y) et, par suite, Q, f() = 0.
Or la fonction f étant continue sur R, alors f()  0 pour tout R.
D’après (1.19) on a f(i) = 0 et comme dans le cas des nombres réels , on démontre aussi
que pour tout réel , f(i) = 0, d’où en vertu de la linéarité de f pour tout C f()  0.
On a donc démontré que la fonction jouit de toutes les propriétés d’un produit scalaire
hérmitien.
On laisse à titre d’exercice la démonstration du cas, où E est un espace euclidien.
67

6.3. CONSÉQUENCE

La loi du parallélogramme induit ce que l’on convient d’appeler la formule de la


médiane

y+z 2 1 1
‖x− ‖ + ‖y−z‖2 = (‖ x− y‖2 +‖x−z‖2 )
∀ x , y∈ E , 2 4 2 (6.3)

6.4. IDENTITÉS DE PYTHAGORE.

On appelle ainsi les identités suivantes :

{‖x+ y‖2=‖x‖2 +‖y‖2 +2.Re ⟨ x, y⟩, x , y∈ E ( cas complexe )


‖x+ y‖2 =‖x‖2 +‖y‖2 +2.⟨x , y⟩, x, y ∈ E ( cas réel ) (6.4)

6.5. THÉORÈME 1.1

Soit M une partie convexe de l’espace préhilbertien E (i.e. si x et y appartiennent à M, x


+ (1 - )y  M, pour tout  réel tel que 0    1). Si M est complet, il existe un vecteur unique c
de M, tel que pour tout vecteur x de E :

‖x−c‖=d (x , M )= inf ‖x− y‖


y∈ M (6.5)

Le vecteur c est appelé la projection orthogonale du vecteur x sur M et sera noté c = p M ( x ) .

Démonstration

α= inf ‖x− y‖
et soit {
y n}
 Soit y∈ M une suite d’éléments de M pour laquelle
lim ‖x− y n‖=α
n→+∞ .

Montrons que { n } est une suite de Cauchy.


y
 En effet, d’après la règle du parallélogramme

‖( x− y n ) + ( x− y m )‖2 +‖( x− y n ) −( x− y m )‖2 2 (‖ x− y n‖2 +‖x− y m‖2 )


=

‖2 x− y n − y m‖2 +‖y n− y m‖2 = 2 (‖ x− y n‖ +‖x− y m‖ ) .


2 2
i.e.
Or
68

y n+ y m y n+ y m
‖2 x− y n − y m‖ 2 4‖x− ‖≥4 α 2 ∈M
= 2 , car 2

Si n et m sont très grands, on a :

2 ε2 2 2 2 ε
2
‖x− y n‖ ≤α + ‖x− y m‖ ≤α +
4 et 4 , où  > 0
d’où
ε2
‖y n− y m‖ ≤4 α + =ε 2
2
4 ( 2
)
ce qui est équivalent à
‖y n− y m‖≤ε

par suite (
y n)
est une suite de Cauchy.
lim y n
Puisque M est complet, il existe c = n→+∞ appartenant à M, ce qui implique que
lim ‖x− y n‖=‖x−c‖
n→+∞ =  et l’existence est démontrée.
Démontrons maintenant l’unicité de c. Supposons qu’il existe encore c’c tel que
‖x−c'‖= inf ‖x− y‖=α
y∈ M , alors de nouveau d’après la règle du parallélogramme :

‖c−c'‖2=2 (‖x−c‖2+‖x−c '‖2)− 2‖x−c−c'‖2≤4 α2−4 α2=0 ,


d’où ‖c−c'‖=0 et c = c’.

6.7. VECTEURS ORTHOGONAUX

Deux vecteurs x et y d’un espace préhilbertien E sont dits orthogonaux si leur produit
scalaire est nul, i.e. ⟨ x , y ⟩=0 .
¿
Soit M un sous-ensemble de E. On désigne par M l’ensemble de tous les vecteurs x
orthogonaux aux vecteurs de M.

M ⊥= { x ∈ E ; ⟨ x| y ⟩=0 , ∀ y ∈ M } (6.6)

Il est facile de démontrer que M  est une variété linéaire, i.e. pour tout y 1 et y2 de M,
pour tout 1 et 2 de C 1y1+2y2 appartient à M.

6.8. SYSTÈME ORTHOGONAL

Un système de vecteurs (
u n ) n≥1
d’un espace préhilbertien E est dit orthogonal si l’on a :

∀ i≠k ⟨ui , u k ⟩=0


69

Si de plus, pour tout i


‖u i‖=1, le système ( u n ) n≥1 est dit orthonormé ou orthonormal.

7 ESPACE DE HILBERT

7.1. DÉFINITION 1

Un espace préhilbertien , noté H, de dimension infinie, complet au sens de la métrique


∀ x , y∈ H , d(x, y)=‖x−y‖=√ ⟨x−y ,x−y ⟩
s’appelle espace de Hilbert.
Un espace de Hilbert est donc un espace de Banach.
Par exemple les espaces l2 et L2(G) sont des espaces de Hilbert.

7.2. INDÉPENDANCE LINÉAIRE DANS UN ESPACE DE HILBERT.


SÉRIE DE FOURIER.

1° THÉORÈME 7.1.

Les vecteurs u1 , u2 ,…, uk d’un espace préhilbertien E sont dits linéairement dépendants
si, et seulement si, le déterminant suivant, appelé déterminant de Gramn, est nul

⟨u1 , u1 ⟩ ⟨u1 ,u 2 ⟩ ⋯ ⟨u 1 ,u k ⟩
⟨u , u ⟩ ⟨u2 ,u 2 ⟩ ⋯ ⟨u 2 , uk ⟩
| 2 1 |
⋯ ⋯ ⋯ ⋯
D ( u1 , u2 ,…, uk ) ⟨uk ,u1 ⟩ ⟨u k ,u 2 ⟩ ⋯ ⟨u k , uk ⟩
= (7.2)

Démonstration
 Supposons que u1 , u2 ,…, uk soient linéairement dépendants dans E, alors il existe des
1
scalaires α , α 2 ,…, α k non tous nuls tels que :
α 1 .u 1 +α 2 .u 2 +⋯+α k . uk =0

dans E. Faisons les produits scalaires de cette somme par u1 , u2 ,…, uk successivement et
l’on obtient le système d’équations:

⟨u1 , u1 ⟩α 1 +⟨u 1 ,u 2 ⟩ α 2 + ⋯ ⋯ + ⟨u1 ,u k ⟩ α k =0


⟨u2 , u1 ⟩α 1 +⟨u 2 , u2 ⟩ α 2 + ⋯ ⋯ + ⟨u2 ,u k ⟩ α k =0
⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯ ⋯ ⋯ ⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯
⟨uk , u1 ⟩α 1 +⟨u k , u2 ⟩ α 2 + ⋯ ⋯ + ⟨u k ,u k ⟩ α k=0 (7.3)

Cer système peut être considéré comme un système de k équations à k inconnues


α 1 , α 2 ,…, α k . Ce système doit contenir une solution non nulle, car les scalaires
70

α 1 , α 2 ,…, α k ne sont pas tous nuls et ceci est possible si et, seulement lorsque,
D ( u1 , u2 ,…, uk )
, qui est le déterminant de (2.3), est nul.

Réciproquement supposons D ( u1 , u2 ,…, uk ) =0 , alors le système (7.3) contient une


solution non triviale, i.e. non nulle (d’ailleurs il contient une infinité de solutions). Désignons par
α 1 , α 2 ,…, α k une de ces solutions et considérons le vecteur :
1 2 k
v=α .u1 +α .u2 +⋯+α .u k .

On démontre que ⟨ v , v ⟩=0 , ce qui veut dire que v=0 .

En effet on a :

⟨u1 , v ⟩=⟨u1 ,u1 ⟩α 1 +⟨u1 , u2 ⟩α 2 + ⋯ ⋯ +⟨u1 , uk ⟩α k =0


⟨u2 , v ⟩=⟨u2 ,u1 ⟩α 1 +⟨u2 , u2 ⟩α 2 + ⋯ ⋯ +⟨u2 , uk ⟩α k =0
⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯ ⋯ ⋯ ⋯⋯⋯⋯⋯⋯⋯
⟨uk , v ⟩=⟨uk ,u 1 ⟩ α 1 +⟨uk ,u 2 ⟩ α 2 + ⋯ ⋯ +⟨u k , uk ⟩α k =0 ,

d’où en faisant la somme :

⟨v , v ⟩=⟨v , u1 ⟩ α 1 +⟨v ,u2 ⟩α 2 +⋯+⟨v , uk ⟩α k =0 .

2° THÉORÈME 7.2

Les vecteurs u1 , u2 ,…, uk sont linéairement indépendants si, et seulement si, le


déterminant de Gramn-Schmidt (7.2) D ( u1 , u2 ,…, uk ) est non nul.

3° DÉFINITION 7.1.

On dit qu’un système de vecteurs { ei }i ∈ I d’un espace préhilbertien E est linéairement


indépendant si toute partie finie { e j } j∈ J , où J ⊂ I et J une partie finie, est linéairement
indépendante, i.e. le déterminant de Gramn ( j
D e ; j∈ J )≠0
, pour toute partie finie J de I .
Un système orthogonal d’un espace préhilbertien est donc linéairement indépendant.

4° THÉORÈME 7.3

Soit (
ei ) 1≤n≤+∞
un système orthonormé dans un espace de Hilbert H. Alors la série :
+∞
∑ an en
n=1 , (7.4)
71

n
où a sont des scalaires, converge dans H si, et seulement si, la série :
+∞
∑ |an|2
n=1 (7.4’)
converge.
Démonstration

 Par définition la série (7.4) converge dans H, si et seulement si, la suite des sommes partielles

{ }
n
S n= ∑ a k e k
k =1 n≥1
converge dans H.
Puisque H est complet, la suite {
S n }n≥1
converge, si et seulement si, elle est de Cauchy, i.e. si et
seulement si,

lim d ( S n , S m ) = lim ‖S n −S m‖=0


n , m→+∞ n, m →+∞

De même la série (7.4') converge, si et seulement si, la suite numérique des sommes

{ }
n
σ n = ∑ |ak|2
k =1 n≥1
partielles est de Cauchy.
Pour la démonstration du théorème 2.4, il suffit donc de démontrer que la suite ( n ) n≥1
S

est de Cauchy dans H, si et seulement si, (


σ n ) n≥1
est de Cauchy dans R.
Supposons m > n , alors

m n m
2 2
‖S m−S n‖ =‖∑ a e k − ∑ a e k‖ =‖ ∑ ak e k‖ =
2 k k

k=1 k=1 k=n+1


m m m
=⟨ ∑ k
a ek , ∑ k
a e k ⟩= ∑ |ak|2 =|σ m−σ n|2
k =n+1 k =n+1 k =n+1 ,

d'où (
S n ) n≥1
est de Cauchy dans H, si et seulement si, (
σ n ) n≥1
est de Cauchy dans R.

5° THÉORÈME 7.4.
x+ y

Si A est un sous-ensemble convexe (i.e. si x , y ∈ A, alors 2 A) et fermé d'un espace
de Hilbert E, alors pour tout vecteur x de E il existe un vecteur unique y ∈ A le plus près de x.

Démonstration.
72

d= inf ‖x− y‖
 Soit y∈ A , i.e. la distance du vecteur x à l'ensemble A et soit ( y n ) une suite
lim ‖x− y n‖=d
d'éléments de A, pour laquelle n→+∞ . Montrons que la suite ( y n ) est une suite de
Cauchy. Pour cela on aura besoin de l'identité de parallélogramme:

‖x+ y‖2 +‖x− y‖2 =2 (‖x‖2 +‖y‖2 )

Il suffit d'utiliser cette identité pour x− y n et x− y m . On a:

‖2 x− y n − y m‖2 +‖y n− y m‖2 =2‖x− y n‖2 +2‖x− y m‖2

Or
2 y n+ y m 2 y n+ y m
‖2 x− y n − y m‖ =4‖x− ‖ ≥4 . d 2 ∈A
2 car 2 .

Si n et m sont très grands, alors

ε ε
‖x− y n‖2≤d 2 + ‖x− y m‖2 ≤d 2 +
4 et 4,
d'où

(
‖y n− y m‖2 < 4 d 2 +
ε
4)−4 d 2 =ε

y= lim y n
i.e. ( y n ) est une suite de Cauchy et, par suite il existe n→+∞ qui est un élément de A
car A est fermé, ce qui implique que
lim ‖x− y n‖=‖x− y‖=d
n→+∞

l'existence est démontrée.


'
Démontrons l'unicité. Soit y et y deux vecteurs les plus proches du vecteur x, alors

' ' '


‖y− y ‖2=2‖x−y‖2+2‖x− y ‖2−‖2x− y− y ‖2≤4 d 2−4d 2=0 .
6° THÉORÈME 7.4’.

Si M est un sous-ensemble convexe et fermé d’un espace de Hilbert H, il existe un


vecteur unique cM, tel que pour tout xH

inf ‖x− y‖
‖ x−c ‖ = d(x, M) = y ∈M (7.1)
c’est la projection orthogonal de x sur M.
73

7° THEOREME 7.5.

Soit E un espace de Hilbert, F un sous-espace fermé de E, alors


¿
F⊕ F =E.
Démonstration.

 Soit x ∈ E et x 1 ∈ F le vecteur le plus proche de x. Posons x 2 =x−x 1 et montrons que


¿
x2 ∈ F .
En effet, soit y ∈ F , on sait que la fonction de la variable t

ϕ ( t )=‖x−x 1 +ty‖2 =‖x2 −ty‖2


'
atteint la valeur minimale pour t =0 , donc ϕ ( 0 )=0 ,

or
' ‖x 2 −ty‖2−‖x 2‖2
ϕ ( 0 )=lim =2 ⟨ x 2 , y ⟩
t→ 0 t ,
¿
d'où
⟨ x2 , y ⟩=0 x ∈ F et x 2 + x 1 = x , puisque F et F ¿ sont orthogonaux, alors
et, par suite, 2
F∩F ¿= { 0 } , d'où E=F ⊕ F ¿ .

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