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Observatoire pour la Promotion de la Santé en

Afrique
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Réf /N°002 / 09-2023/OPS/PR Lomé, le 28 septembre 2023

Le Président National A
Monsieur le Ministre de la
Santé et de l’Hygiène Publique

Objet : Dénonciation de mauvaises pratiques au sein du CHU-Kara

Monsieur le Ministre,
Dans notre mission de veille sanitaire, nous avons été saisis par une famille sur une
situation qui prévaut au CHU-Kara.
Il s’agit d’un patient admis en soins pour morsure de serpent et dont les parents
estiment être abusés par le corps médical. Des faits que nous jugeons graves et dont
nous portons à votre connaissance.
En effet Monsieur le Ministre, le 20 septembre 2023, un jeune homme a été évacué
au CHU kara pour morsure de serpent et admis en soin à la réanimation.
Le médecin traitant lui a prescrit le sérum antivenimeux Inoserp. La pharmacie du
CHU Kara ne disposant pas de ce sérum, les parents se sont rendus à la pharmacie
LAFIA où ils découvrent que les deux flacons prescrits coûtent 137.750F CFA.
Alors que la famille se concertait à l’hôpital pour réunir les sous et s’en procurer, le
médecin soignant leur propose le produit à 60.000F la boîte, qui contient deux flacons.
Une heure plus tard, après l’analyse de sang, il prescrit le même produit et empoche
encore 60.000F. Voyant l’état du patient se dégradé, il prescrit une troisième fois le
même produit au lendemain. Il a donc soutiré 180.000F à la famille en deux jours
alors que l’état du patient s’empirait. L’agent propose au troisième jour six (6)
flacons. Cette fois-ci avec une réduction de 60.000F, c’est-à-dire que les parents
devraient payer 120.000F
Ne pouvant plus supporter et n’ayant plus d’espoir vu la situation de leur enfant après
trois jours de soins, les parents se sont abstenus.
Nous fûmes alors saisis.
Voyant la gravité de la situation, nous avons aussitôt informé le Directeur du CHU-
Kara qui a réagi promptement en rentrant en contact avec la famille. Grâce à son
intervention le sérum antivenimeux que l’on ne retrouvait pas à la pharmacie de
l’hôpital a été vendu aux parents à 30.000F pour les deux flacons. Nous apprenions à
l’instant que le produit est subventionné par l’Etat et vendu normalement à 15.000F le
flacon dans les hôpitaux. Ce produit est bien différent de celui vendu par le
médecin traitant.
Le Directeur de l’hôpital est resté très préoccupé en suivant de très près l’évolution de
la situation. Chose que nous ne manquerons pas d’apprécier et d’encourager.
L’admission de ce sérum au patient a été une surprise totale pour nous et la famille. Le
patient s’est relevé le même jour alors qu’il a passé trois jours dans un état
d’inconscience. Sa famille s’interroge sur la qualité du produit que le corps médical
utilisait depuis trois jours et les conséquences que cela pourrait avoir sur la santé de
leur enfant.
Monsieur le Ministre, curieusement, nous avons été saisis dans la même salle pour un
cas similaire. Il s’agit d’un homme évacué depuis le canton d’Aouda pour morsure de
serpent également. Là aussi un autre médecin traitant a perçu 120.000F et son
collègue a empoché aussi 60.000F aux services des urgences portes pour le même
produit.
La famille de ce patient nous a fait savoir que le premier jour après prescription du
sérum antivenimeux, ils n’ont pu acheter qu’un flacon à la pharmacie Lafia à 68.875F
Le médecin traitant est venu ensuite leur proposer un produit à 60.000F la boîte. Ils
ont acheté au total trois boîtes à 180.000F.Mais le comportement du soignant ne les
rassurait pas. Non seulement ils ne voyaient pas le produit qu’il administrait à leur
parent, mais aussi le soignant ne laissait pas de trace. Ils n’avaient pas de reçu d’achat
non plus. ils ajoutent qu’ils estiment que le cas qui vient de s’éclater dans la salle
concernant le jeune homme dont nous venons d’évoquer plus haut, aurait précipité
leur libération.
Nous avons aussitôt contacté le médecin. Malgré la fiche de libération que la famille
nous a présentée, il a nié l’acte de libération et nous a rassuré que le patient quittera la
salle de réanimation pour une salle où il sera mis en observation. Ce qui n’était pas
vrai car le patient a fini par quitter l’hôpital. Notre représentant sur le terrain a assisté
à une altercation entre la famille du patient et le médecin sur les produits vendus.
Les plaignants craignaient les conséquences de ces produits douteux sur la santé de
leur parent et réclamaient le remboursement de leur somme. Au médecin de leur
réclamer les produits déjà utilisés avant le remboursement. Un désordre total qui
n’honore pas la profession.
Monsieur le Ministre, nous avons exigé et réussi à avoir les photos des produits
utilisés sur les patients depuis trois jours sans effets escomptés. Il s’agit de SNAKE
VENOM ANTISERUM AFRICAN. Ces produits nous paraissent comme des
médicaments de rue, rien que par leur emballage. Notre organisation proteste
vigoureusement et exige un test de laboratoire pour confirmer leur qualité.
Le premier agent mis en cause nous a confié qu’il achète ces produits auprès de son
collègue et la commande se fait au Benin. Il nous précise que ce produit est
régulièrement utilisé depuis longtemps au CHU Kara et « parfois ça marche », tels
sont ses propos qui nous surprennent. Nous nous étonnons qu’un agent de santé
ignore l’effet Placebo dans le traitement des patients.
Les deux autres agents que nous avons interrogés ont aussi avoué avoir vendu le
produit avant de s’accuser mutuellement sur celui qui a encaissé les sous.
Nos investigations nous ont permis de savoir que le livreur est un aide-soignant
précédemment morguier du CHU Kara. Les mêmes sources nous renseignent que ce
dernier reçoit ces produits auprès d’une femme, elle-même personnel du même centre.
Tout porte à croire que c’est un vaste réseau de trafic illicite de produits.
Les deux victimes qui ont formulé une plainte auprès de notre organisation ont été
invitées le 26 septembre 2023 par les agents mis en cause. Ces derniers ont invité un
collaborateur d’un huissier pour leur rédiger une note de retrait de plainte. Ils ont
réussi à faire signer la deuxième victime à qui ils ont remboursé les 180.000F avec des
témoins.
Malgré la réticence de la première victime à retirer sa plainte, sa somme lui a été
remboursée avec une décharge. Tout ceci en présence de notre représentant. Des actes
dont nous avons copie.
Monsieur le Ministre, ces faits graves nous révèlent un vaste réseau bien organisé de
vente parallèle de médicaments douteux au sein du CHU Kara exposant
dangereusement les vies de nos populations. Nous ne saurions nous taire face à ce
danger.
Nous vous prions de prendre des dispositions qui s’imposent pour démanteler ce
réseau, poursuivre et sanctionner les auteurs sans préjudice d’une action portée
devant le tribunal de la localité afin de décourager ce genre de pratiques dans
nos hôpitaux.
Les patients qui estiment, que leurs corps ont servi d’expérimentation d’un sérum
dont l’origine est douteuse attendent impatiemment de connaître la suite de cette
affaire pour se rassurer que leurs vies ne sont pas en danger.
Nous sommes disposés à collaborer et à apporter des preuves complémentaires, pour
que lumière soit faite et rassurer les usagers.
Monsieur le Ministre, nous ne saurons finir sans vous inviter à agir promptement
pour doter suffisamment nos centres de santé du sérum Inoserp qui est un
casse-tête pour le personnel soignant en ces moments de pluie. Au-delà des cas
sus-cités d’autres patients sont dans le besoin actuellement. Un dispositif devrait
être mis en place pour permettre au corps médical d’alerter en cas de pénurie du
sérum antivenimeux dans les formations sanitaires.
Aussi faut-il préciser que le manque de ce sérum est parfois dû à ce système de vente
parallèle de produits par le corps médical. Selon une source crédible et responsable du
CHU-Kara, le personnel soignant achète le sérum Inoserp une fois disponible à la
pharmacie au prix subventionné et le revend plus cher aux patients et autres
formations sanitaires.
Ces pratiques qui constituent une violation des droits des patients sont récurrentes
dans les formations sanitaires au Togo. Non seulement elles exposent la vie des
citoyens mais aussi saignent les pauvres populations qui ont du mal à joindre les
deux bouts pour se faire soigner. Pour exemple, lors de notre tournée de
sensibilisation en Avril 2023 à Dapaong, un paysan s’est fait soutirer 30.000F au CHR
Dapaong, par un personnel de santé au bloc opératoire de la maternité contre deux
produits : Vicryl N°2 et Compresse abdominale. Les deux produits que nous avons
renseignés sont vendus respectivement dans les pharmacies à 2.200F et 3.700F soit un
total de 5.900F. Ces comportements sont inacceptables. Des mesures fortes et
sanctions disciplinaires doivent être appliquées pour éviter d’exposer la vie de nos
populations.
Dans l’espoir que notre cri retiendra votre attention, je vous prie d’agréer Monsieur le
Ministre, l’expression de ma profonde considération.
Ci-joint :
-les noms des patients
-les noms du personnel mis en cause
-Photos du produit vendu
-la décharge de remboursement des frais des produits vendus et retrait de plainte

Le président,

AGOUZOU Aklèsso
Ampliation :
-Ministre de l’Accès Universel aux Soins
-Ministre de la Justice
- Directeur du CHU-Kara
-Préfet de la Kozah
-Maire de la commune de Kozah1
-ODDH

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