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Liban/Patrimoine : Notre-Dame d’Illige à Mayfouk


Par Marie Josée Rizkallah - 1 mai 2022

En ce mois de mai, traditionnellement dédié à la Vierge


Marie, nous allons partir à la découverte d’un trésor du
patrimoine pictural libanais, Notre-Dame d’Ilige, à
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Mayfouk. Nous apprendrons un peu plus sur l’icône de
Notre-Dame d’Ilije, et nous contemplerons la belle nature
entourant le couvent situé dans la commune de Mayfouk,
localisée dans le district de Byblos, caza du Mont-Liban.
Sur une terre carrefour de diverses cultures et spiritualités, dans un monastère qui fut le
siège du patriarcat maronite, érigé sur un éperon rocheux séparant deux vals, une icône de la
Vierge, celle pour qui la gloire du Liban a été donnée, repose. Au sein d’un sanctuaire qui lui a
été spécialement conçu, l’icône de Notre Dame d’Illige s’offre au regard des fidèles qui
viennent demander son intercession, reliquat d’un art sacré s’inscrivant dans la tradition syro-
maronite, résumant une période iconographique allant du VIe siècle jusqu’à nos jours,
illustrant le style syro-maronite authentique.

L’origine de ce Tableau de la Mère de Dieu est inconnue. Aucun document ne vient attester
les circonstances dans lesquels ce Tableau a été peint, ni son auteur ou son sanctuaire
originel. Ce qui est sûr, c’est que ce tableau de Notre-Dame, réputé pour son pouvoir
miraculeux, est venu s’établir dans l’église du monastère d’Illige qui a été mis sous sa
protection. Résidence des patriarches maronites de 1121 jusqu’en 1440, le monastère d’Illige
passe en 1766 aux mains de l’ordre Antonin Baladite, aujourd’hui l’Ordre Libanais Maronite,
grâce à l’émir Youssef Chehab.
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L’icône de Notre-Dame d’Illige était censée remonter au XVIIIe siècle, jusqu’au jour où, en
1985, en raison de son état délabré, les moines du monastère, suite à la permission du
Généralat de l’Ordre, décide de la confier au Carmel de la Théotokos et de l’Unité à Harissa
pour qu’elle soit restaurée. C’est là que débute une traversée scandée par des découvertes
surprenantes concernant la datation de ce Tableau.

Grâce aux examens préliminaires effectués, l’atelier de restauration de Harissa a pu déduire


que ce Tableau censé être une production du XVIIIe siècle n’est en réalité que la dernière
couche d’une kyrielle d’aplats dont la plus ancienne date du Xe siècle. Avec l’appui du R. P.
feu Antoine Lammens, spécialiste en restauration des icônes et de la chimie des couleurs, et
travaillant pour le musée du Louvres, les travaux de restauration et de reconstitution du
tableau se sont étalés sur trois années consécutives, et ont abouti à la découverte d’un
tableau complètement différent de celui qui était arrivée à l’atelier en 1985. Il est cependant
difficile d’attester que la peinture actuelle est effectivement celle du Xe siècle, en raison de
l’absence d’une description scientifique détaillant les différentes étapes de la restauration du
Tableau. Le seul document restant est un rapport rédigé par l’atelier de Harissa, qui explique
d’une manière succincte la démarche suivie pour restaurer cette œuvre – et fort
malheureusement, le Père Lammens n’est plus de ce monde pour fournir son précieux
témoignage sur les phases de cette restauration.

A l’issue de la lecture de ce rapport sommaire, il est possible d’en dégager les synthèses
suivantes :
Plusieurs remaniements et repeintes
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Il y a eu cinq remaniements importants et huit repeintes ou retouches ponctuelles au moins,


pour enfin arriver à la composition originale :

–XIe s.: Des repeintes au niveau des visages et autres parties détériorées. La composition
originale est respectée.
–XIIe-XIIIe s.: Au Moyen-âge; remaniement complet de la composition. Influence byzantine.
Les pigments utilisés et la technique révèlent un milieu monastique encore habitué aux
enluminures.
–XIVe s.: Nouveau remaniement. On constate une technique locale et une ignorance de la
tradition propre.
–XVe-XVIe s.: Quelques repeintes disséminées, sans doute pour restaurer des endroits
détériorés.
–XVIIe s.: Nouveau remaniement pour conformer la composition avec la Madonna Salus
Populi Romani.
–Fin du XVIIe s.: Quelques repeintes pour restaurer des endroits détériorés, essai de
conformité avec la Madonna Della Strada.
– XVIIIe s.: Remaniement entier de la composition suivant un goût local occidentalisé.
Influence géorgienne.
–Fin du XVIIIe s. – début du XIXe: Quelques repeintes.

Il est à noter également que la toile est endommagée par endroits, en raison de brûlures, de
découpage ou d’altérations intentionnelles avec des instruments tranchants.

Bien que l’histoire de l’icône de Notre-Dame d’Illige demeure vague, elle porte en elle
néanmoins l’Histoire du peuple maronite. Le visage de Notre-Dame d’Illige a inspiré la prière
à nos ancêtres, qui, aux moments des persécutions, ont demandé son intercession.
D’ailleurs, la restauration de cette icône atteste qu’elle a à son tour, pris part à la souffrance
des Maronites au fil de l’Histoire, et qu’elle a même subi une latinisation de ses traits jusqu’à
effacer sa réelle face sous l’épaisseur des couches picturales. L’énigme que propose cette
icône cependant nous pousse à nous interroger : pourquoi est-elle la seule œuvre conservée
de son époque ? Quel périple a-t-elle suivie pour arriver à Illige ? Qui en est son auteur ?
Existe-t-il encore des documents pouvant donner davantage de détails sur son origine ? Des
questions qui resteront probablement sans réponses, mais qui valent la peine d’être posées.

Par Marie-Josée Rizkallah

Références
BADWI Abdo, « Le tableau de Notre-Dame d’Ilige » in Mélanges offerts au Prof. P. Louis Hage à
veut montrer
l’occasion de son 70e anniversaire, Kaslik, PUSEK, 2008. vos notification

Brochure en langue française sur l’icone de N.D. d’Ilije, s.d., s.l.

DUCHET-SUCHAUX Gaston, PASTOUREAU Michel, La Bible et les Saints, Flammarion, Paris, 1994.

FAHED Boulos, Présences de la mère de Dieu au liban : icônes, tableaux et textes choisis, O.M.M.,
2003.

LAMMENS Antoine, Les minitatures syriaques du Codex Rabula, Etude iconographique, Université
Saint Esprit de Kaslik, 1974-1975.

SENDLER Egon S.J., Icônes byzantines de la Mère de Dieu, Desclée de Brouwer, Paris, 1992.

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Marie Josée Rizkallah


http://mariejoseerizkallah.com

Marie-Josée Rizkallah est une artiste libanaise originaire de Deir-el-Qamar. Versée dans le domaine de l’écriture depuis
l’enfance, elle est l’auteur de trois recueils de poèmes et possède des écrits dans plusieurs ouvrages collectifs ainsi que
dans la presse nationale et internationale. Écrivain bénévole sur le média citoyen Libnanews depuis 2006, dont elle est
également cofondatrice, profondément engagée dans la sauvegarde du patrimoine libanais et dans la promotion de
l'identité et de l’héritage culturel du Liban, elle a fondé l'association I.C.H.T.A.R.
(Identité.Culture.Histoire.Traditions.Arts.Racines) pour le Patrimoine Libanais dont elle est actuellement présidente. Elle
défend également des causes nationales qui lui touchent au cœur, loin des équations politiques étriquées. Marie-Josée est
également artiste peintre et iconographe de profession, et donne des cours et des conférences sur l'Histoire et la Théologie
de l'Icône ainsi que l'Expression artistique. Pour plus de détails, visitez son site: mariejoseerizkallah.com son blog:
mjliban.wordpress.com et la page FB d'ICHTAR : https://www.facebook.com/I.C.H.T.A.R.lb/

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