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Transformée de Fourier de la gaussienne

Salim Rostam

29 mai 2014

Ce développement présente trois méthodes de calcul d’intégrale, appli-


quées au calcul important de la transformée de Fourier de la gaussienne.
Tout d’abord, définissons ce de quoi on parle.
Définition. Pour α un réel strictement positif, on définit la gaussienne Gα
2
par ∀x ∈ R, Gα (x) := e−αx .
Définition. Pour f ∈ L1 (R), on définit sa transformée de Fourier par
∀ξ ∈ R, fˆ(ξ) := R f (x)e−ixξ dx.
R

−αx2 e−ixξ
R
Ainsi, ∀ξ ∈ R, G b α (ξ) =
Re dx et c’est cette intégrale que l’on
cherche à calculer.
q
π
Théorème. On a G
bα =
α G 4α
1 .

1

Remarque. En particulier, pour α = 2 on obtient G
b1 = 2πG 1 .
2 2

1 Équation différentielle
Montrons que G b α est de classe C 1 ; on va utiliser le théorème de dérivation
sous l’intégrale.
2
– ∀ξ ∈ R, x 7→ e−αx e−ixξ est (mesurable et) intégrable sur R.
2
– ∀x ∈ R, ξ 7→ e−αx e−ixξ  est2 de classe
 C 1 sur R.
2 2
– ∀x ∈ R, ∀ξ ∈ R, dξ d
e−αx e−ixξ = −ixe−αx e−ixξ ≤ |x|e−αx qui
est indépendant de ξ et intégrable sur R.
0 −αx2 e−ixξ dx (note 1 ).
b α est C 1 sur R et ∀ξ ∈ R, G
R
Ainsi, G α (ξ) = i R −xe
d
On intègre alors par parties (par rapport à x) : pour ξ ∈ R,
1 −αx2 −ixξ iξ ξ b
  Z 
0 2
G
d α (ξ) = i e e + e−αx e−ixξ dx = − Gα (ξ)
2α R 2α R 2α
ξ2 2
b α (0)e− 4α ; comme G −αx dx, on
R
Ainsi, ∀ξ ∈ R, G b α (ξ) = G b α (0) =
Re

obtient (en faisant le changement de variable y = αx) l’égalité G b α (0) =

1. On écrit temporairement G
cα au lieu de G b0α pourrait porter à
bα car la notation G
confusion.

1
R −y2 q q ξ2
√1 π π − 4α
α R
e dy = α (note 2 ). Finalement, ∀ξ ∈ R, G
b α (ξ) =
αe donc
q
π
on retrouve bien le résultat annoncé G
bα =
α G 4α
1 .

2 Théorème des zéros isolés


Commençons par un petit calcul :
Z
2
∀ξ ∈ R, G
b α (ξ) = e−αx e−ixξ dx
ZR
2 + iξ x
= e−α[x α ] dx
R
h i
iξ 2 ξ2
(x+ 2α )
Z
−α +
4α2
= e dx
R
ξ2
Z 2

b α (ξ) = e− 4α
∀ξ ∈ R, G e−α(x+ 2α ) dx (1)
R


donc on aimerait bien faire le changement de variable y = x + 2α dans cette
dernière intégrale. Malheureusement, le changement de variable n’est pas
réel donc on n’a pas le droit !
Dans l’optique d’utiliser le théorème des zéros isolés, on va donc cal-
culer cette intégrale pour iξ ∈ R. Ainsi, posons, pour z ∈ C, F (z) :=
R −αx2 −xz
Re e dx et montrons que cette fonction est holomorphe :
2
– ∀z ∈ C, x 7→ e−αx e−xz est mesurable sur R ;
2
– ∀x ∈ R, z 7→ e−αx e−xz est holomorphe sur C ;
2 2 2
– ∀M > 0, ∀x ∈ R, ∀|z| ≤ M, |e−αx e−xz | = e−αx e−xRe z ≤ e−αx eM |x|
qui est indépendant de z et intégrable sur R ;
donc par le théorème d’holomorphie sous l’intégrale, la fonction F est holo-
morphe sur C. On calcule à présent F sur R : par le même calcul qui a été
t2 R t 2
mené en (1), on trouve : ∀t ∈ R, F (t) = e 4α e−α(x+ 2α ) dx. Ainsi, on peut
R
t
faire notre changement de variable y = x + 2α pour obtenir :
r
t2 π t2
Z
−αx2
∀t ∈ R, F (t) = e 4α e dx = e 4α
R α
t2
Ainsi, les fonctions F et t 7→ e 4α coïncident sur R : elles sont holomorphes
sur C donc par le théorème des zéros isolés elles coïncident sur C. En
particulier : r r
π (iξ)2 π − ξ2
∀ξ ∈ R, F (iξ) = e 4α = e 4α
α α
q
π
et comme ∀ξ ∈ R, G
b α (ξ) = F (iξ) on retrouve G
bα =
α G 4α
1 .

2
e−y dy.
R
2. Je rappelle dans l’annexe A une méthode pour calculer R

2
3 Intégrale d’une fonction holomorphe
On va maintenant calculer G
b α (ξ) sans montrer la régularité d’une certaine
fonction.
Fixons ξ ∈ R et reprenons l’égalité (1) :
2
Z 2
ξ iξ
b α (ξ) = e− 4α
G e−α(x+ 2α ) dx
R

Comme la fonction z 7→ e −αz 2


est holomorphe sur C, son intégrale
surR tout contour fermé C 1 par morceaux est nulle. En particulier, ∀R >
2
0, γR e−αz dz = 0 où γR est le chemin défini dans la figure 1.


γR

−R R

Figure 1 – Définition du chemin γR (illustration pour ξ > 0)

Ainsi :
Z R Z ξ Z R
2α iξ 2
−αx2 2
∀R > 0, 0 = e dx + e−α(R+it) i dt − e−α(x+ 2α ) dx
−R 0 −R
Z ξ
2α 2
− e−α(−R+it) i dt (2)
0

et on Ra :
R→+∞ R
2 2
q
R
– −R e−αx dx −−−−−→ R e−αx dx = απ ;
iξ 2
R→+∞ iξ 2 ξ2
RR −α(x+ 2α ) R −α(x+ 2α )
– −R e dx −−−−−→ Re dx = e 4α G
b α (ξ) ;
ξ
2 R→+∞
e−α(R+it) i dt −−−−−→ 0 car on a la majoration suivante :
R 2α
– 0

Z ξ Z ξ Z ξ
2α 2 2α 2 2α 2 −t2 )
e−α(R+it) i dt ≤ eRe(−α(R+it) ) dt = e−α(R dt
0 0 0
Z ξ

−αR2 2
=e eαt dt
0

(note 3 ), la dernière intégrale étant une constante (finie) indépendante


de R et α > 0 ;
3. Je n’ai pas majoré à l’intérieur des valeurs absolues, c’est juste que ξ peut être
négatif.

3
ξ
2 R→+∞
e−α(−R+it) i dt −−−−−→ 0 par la même majoration que précédem-
R 2α
– 0
ment.
Finalement, en faisant tendre R vers +∞ dans l’égalité (2) on obtient
q ξ 2 q
π π
α = e 4α G
b α (ξ) i.e. G
bα =
α G 4α
1 .

4 Et plus si affinités. . .
Généralisation à α ∈ C, Re α > 0. On a montré la chose suivante :
r
π − ξ2
Z
−αx2 −ixξ
∀α > 0, ∀ξ ∈ R, e e dx = e 4α
R α
Fixons ξ ∈ R ; on va encore utiliser le théorème des zéros isolés, pour
montrer que cette égalité (a un sens et) est valable pour α ∈ {Re > 0}. Pour
cela, en considérant la détermination principale du logarithme on peut poser
√ 1
q ξ2
α := e 2 log α d’où le membre de droite α 7→ απ e− 4α est holomorphe sur
{Re > 0}. Pour l’autre membre on utilise le théorème d’holomorphie sous
l’intégrale :
2
– ∀ Re α > 0, x 7→ e−αx e−ixξ est intégrable sur R ;
2
– ∀x ∈ R, α 7→ e−αx e−ixξ est holomorphe sur {Re > 0} (cette fois sans
difficulté) ;
2 2 2
– ∀ε > 0, ∀x ∈ R, ∀ Re α ≥ ε, e−αx e−ixξ = eRe(−αx ) ≤ e−εx qui est
indépendant de α et intégrable sur R. q
π
On peut donc conclure que la formule G bα =
α G 1 se généralise à 4α
1
Re α > 0 (on a bien également Re 4α > 0) 4 .

Généralisation à Rn . Soit n ∈ N∗ et soit A ∈ Mn (C) une matrice


diagonalisable en base orthonormée 5 avec Sp(A) ⊆ {Re > 0}. On définit
alors GA (x) pour x ∈ Rn de la façon suivante :
GA (x) := e−hAx,xi
Comme la matrice A est diagonalisable en base orthonormée (pour h·, ·i),
en notant (λj ) les valeurs propres de A et (xj ) les coordonnées de x dans une
base d’orthodiagonalisation (la coordonnée xj correspondant à un vecteur
2
propre associé à λj ) on a GA (x) = nj=1 e−λj xj = nj=1 Gλj (xj ) donc GA ∈
Q Q

L1 (Rn ). Ainsi, G
b A est bien définie et on a :
Z
n
∀ξ ∈ R , G
b A (ξ) = GA (x)e−ihx,ξi dx
Rn
Z n  
Gλj (xj )e−ixj ξj
Y
= dx (3)
Rn j=1

4. On étend la définition de Gβ à Re β > 0, qui reste alors une fonction L1 .


5. C’est-à-dire une matrice normale, i.e. AA∗ = A∗ A.

4
R Qn −ixj ξj dx =
D’après le théorème de Fubini–Tonelli, Rn j=1 Gλj (xj )e
Qn Qn q  
π
7→ nj=1 Gλj (xj )e−ixj ξj
R Q
j=1 R Gλj (xj ) dxj = j=1 λj < +∞ donc x
est un élément de L1 (Rn ) donc
d’après le théorème de Fubini, on peut
permuter les intégrales dans (3) pour trouver :
n Z
Gλj (xj )e−ixj ξj dxj
Y
n
∀ξ ∈ R , G
b A (ξ) =
j=1 R
Yn
= G
b λ (ξj )
j
j=1
n s ξ2
Y π − 4λjj
= e
j=1
λj
ξj
π n/2
Pn
− 14 ξ
j=1 λj j
= qQ e
n
j=1 λj
n/2
b A (ξ) = √π
∀ξ ∈ Rn , G
1 −1
e− 4 hA x,xi
det A
n/2
autrement dit G
bA = √π G 1 −1 .
det A 4 A
Remarque. Pour α ∈ {Re > 0} et A := αIn on obtient que la transformée
2 n/2 − 1 kξk2
de Fourier de x 7→ e−αkxk est ξ 7→ απ e 4α .

A Calcul de l’intégrale de Gauss


−x2 dx. Pour cela, on va calculer I 2 en passant
R
On désire calculer I := Re
en coordonnées polaires :
Z
2 +y 2 )
I2 = e−(x dx dy (par le théorème de Fubini–Tonelli)
R2
Z 2π Z +∞
2
= e−r r dr dθ
0 0
1 −r2 +∞
Z 2π  
= − e dθ
0 2 0
Z 2π
1
= dθ
0 2
I2 = π

donc on a bien I = π.

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