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CHARLES VILLETTE,
Sur les principaux Evènemens
t
de la Révolution,
.
1792.
AVERTISSEMENT
DE L’ ÉDITEUR.
?
crire pour la cause commune, sans
chercher à venger sa cause per
sonnelle. Mais la Patrie est en dan
ger ; les Prêtres et les Nobles se
coalisent ; le moment est venu de
tirer sur les oiseaux de proie. C’est
la guerre qui convient aux Philoso
phes; et tous les Français sont ar
més pour faire la chasse aux tyrans.
LETTRES CHOISIES
D E
CHARLES VILLETTE.
A M. C ERUTI..
io Septembre 1789.
Vo u s m’avez envoyé Monsieur une
, ,
fort jolie Lettre et un fort bon Livre. Je
n’ai pas voulu vous répondre des compli-
mens ; parce qu’on ne paie point de cette
monnoie un homme de votre mérite.
Je puis dire que j’ai dévoré votre Ou
vrage ; et ce qui ne m’arrive guères , je
l’ai commencé et fini d’une haleine. Je
suis même quelquefois revenu à plusieurs
reprises sur beaucoup d’articles ; et si je
m’étais laissé faire vous m’auriez persuadé
,
sans pouvoir me convaincre. La puissance
des Représentans de la Nation est de créer
des loix : la puissance du Monarque est
de les faire exécuter-
A4
( 8 )
La Constitution une fois faite , je con
sidère la grande machine de l’État comme
une Horloge. Le Rouage , emblème des
Loix, détermine le mouvement, et pres
crit au Pendule l’arc qu’il doit décrire.
Mais comme l’Horloge représente la Na
tion , le Pendule représente le Roi. Si le
Pendule, Balancier, ou Régulateur, avait
un veto , la machine s’arrêterait bien vite.
Ce Pendule par sa nature tend sans
, ,
cesse vers l’inertie , vers la résistance j
mais contraint d’obéir, il anime toute la
machine ; et la perfection de l’ouvrage
consiste en ce que le Régulateur ne puisse
jamais avancer, ni retarder.
Il suit de cette comparaison , qui me
paraît juste dans tous ses points que ni
,
le veto absolu ni le veto suspensif ne
,
doivent être laissés au Roi : puisqu’alors
d’un seul mot, il pourrait arrêter l’orga
nisation du corps politique , paralyser, et
réduire à rien les sublimes résultats de
l’Assemblée Nationale.
Ainsi, Monsieur , rien ne me raccom
mode avec le veto absolu, ni même avec
le veto suspensif
( 9)
Il n’y qu’un veto avoué par le bon
a
sens et les amis de la liberté ; c’est celui
des Américains. Si le Président du Congrès
ne veut pas sanctionner une Loi, son refus
force les Chambres à réexaminer de nou
veau la Loi proposée il faut les deux tiers
5
19 Octobre 1789.
On demande si le Roi peut avoir un
spectacle dans son Palais, et s’il est décent
que le public paie en entrant?
Il me semble que le Roi le peut, si cela
lui convient et convient au public.
Soutenir le contraire, serait favoriser un
préjugé aussi puérile que gênant. De toutes
les libertés certainement une des moins
9
à couvert.
On objectera le danger de l’incendie :
mais on est devenu plus savant que jamais
sur les précautions. Un gros mur élevé
jusqu’au faîte du château et des portes
,
de communication en fer, garantiraient de
toute crainte.
Le résultat se réduit donc à ces derniers
termes. Si le Roi a la bonté de consentir
que des Entrepreneurs établissent un spec
tacle dans la salle de son Palais 011 con
,
serverait à sa Majesté de grandes loges 5
le reste lui devient étranger. Il ne veut
percevoir aucun droit : mais, dût-il même
en exiger les droits payés aux barrières
,
( i5 )
des capitales sont beaucoup moins nobles.
Tout ce qui peut favoriser le séjour du
père de famille au milieu de ses enfans
,
doit-il être mesuré au compas de l’éti
quette? Et cette simplicité de mœurs qui
le caractérise, s’en accommodera sans tant
de cérémonie.
12 Novembre 178g.
Je irai point mission pour écrire mais5
xo Décembre 1789.
C’est
au nom de plusieurs honnêtes
Commerçans de Paris que j’écris ces ré
flexions.
Un deuil annoncé tout-à-coup fait ren
trer dans les magasins , des étoffes qui n’a
vaient de valeur réelle que celle de la
mode, que celle du moment. J’aurais cru
( 32 )
que ce vieil usage de servitude n’aurait pas
plus duré que l’impôt sur le sel ou les an
,
tiques abus de la fiscalité. Quel rapport
peut-il donc y avoir entre la mort d’un
Electeur ou de quelqu’autre Prince de
,
l’Empire ; entre les successions des Cou
ronnes d’Espagne , de Portugal, ou d’An
gleterre et de généreux Citoyens occupés
,
du régime de leur liberté ? Je les vois tout-
à-coup vêtus de noir comme s’ils venaient
de perdre un proche parent, comme s’ils
entraient pour quelque chose dans le con
cours des évènemens qui changent la face
du monde.
Il faudrait un Décret qui enjoignit de
ne porter d’autre deuil que de ses proches.
Ainsi tous ceux de la Cour et de la Ville,
qui 11e prouveraient pas que leur aristo
cratie descend en ligne directe ou collaté
rale des potentats décédés, pourraient sans
inconvénient rester en habit de couleur.
Porter le deuil d’un autre que de ses pa
reils, est une preuve de domesticité. Les
grands Seigneurs et les gens riches noir
cissent leurs valets de la tête aux pieds',
parce qu’ils les habillent : et les Princes
eux-mêmes
( 33 )
eux-mêmes rient en particulier de ce té
moignage public de vassalité, dont ils sont
pourtant bien aises de conserver l’usage.
Quand Louis XV, dans sa jeunesse, vit
pendant un deuil de Cour pour la première
fois tous les Bourgeois de Paris habillés
,
de noir, il s’écria : Je 7ie savais pas avoir
tant de parens.
Il y 6 Janvier 1790.
25 Janvier 1790.
Pourquoi donc toujours se fâcher contre
les aristocrates? et pourquoi n’en pas com
poser plutôt un chapitre de La Bruyère?
N’en aurait-il pas fait un tout neuf sur ce
Robin en Cordon Bleu qui s’enfuit à Basle
,
pour ne pas rester confondu parmi les dé
mocrates de la Révolution qui, dans ses
5
irons
( 65 )
irons chercher à, Sellières celui de FoU
taire , treize ans après sa mort.
Descartes renversa la philosophie d’A
ristote : Flitaire a renversé le fanatisme
et les préjugés. Le premier, en généralisant
les nombres, invente l’Algèbre, et fournit à
l’esprit humain le fil qui le conduit dans le
labyrinthe des hautes Sciences : le second
devient la lumière de son siècle et fait
,
passer dans les âmes cette tolérance uni
verselle cette haine du despotisme qui a
,
servi de levain à notre glorieuse révolution.
Et quand l’un repose parmi les morts sous
les voûtes ogives d’une Eglise gothique
,
l’autre mérite de recevoir l’hommage des
vivans dans un Temple de gloire, où l’on
admire ces chapiteaux Corinthiens et ces
belles colonnes, image de son immortalité.
Racine, qui mourut à Paris comme Fol-
taire, fut , comme lui, présenté à Saint-
Sulpice, et transporté dans une Abbaye,
( à Port-Royal des Champs ). Après que cette
Eglise fut supprimée et vendue on alla
,
chercher son corps : il fut enfin enterré à
Saint-Étienne-du-Mont, à coté de Pascal.
Racine était Janséniste : mais Louis XIV
E
( 66 )
ne se crut pas moins obligé de recueillir et
rl’honorer la cendre du grand Poète.
La Religion , cette fille de la nature , ne
nous fait pas un pi'écepte de placer les
morts dans une terre sainte. Les champs
de bataille sont jonchés de chrétiens on $
,
de favoriser un semblable projet j combien
il importe de ne pas laisser démolir des
hospices tout créés pour les arts ; et de ne
*$
pas morceler ce qui pourrait devenir un
établissement national.
( 74 )
il»
18 Juillet liai'
fût bâtard.
La race des Rois d’Aragon, sur le Trône
de Naples, était bâtarde.
Le fameux Comte de Danois signait le
bâtard d’Orléans.
Le Duc de Normandie depuis Roi
,
d’Angleterre, a laissé des lettres qui sont
signées Guillainne le bâtard. Mais dans
ce pays de la philosophie et de la liberté,
où les bâtards ont quelquefois monté sur le
Trône, je trouve un abus bien atroce con
tre ceux qui leur donnent le jour. Si quel
qu’un fait un bâtard dans le Bailliage de
Middelton, Province de Kent, ses biens,
meubles et immeubles sont confisqués au
profit du Roi. J’aime à croire que l’on dé
roge souvent à cette coutume barbare, et
que les Anglais sont trop sages aujourd’hui,
pour punir la nature de sa fécondité.
Le chef de la troisième Race de nos
( 7» )
Rois, qui a planté en France l’arbre de la
Féodalité, Hugues Cap et, usurpateur de la
Couronne et de la Souveraineté Nationale,
laissa violer toutes les propriétés. Selon ses
us et coutumes, et les Rescripts royaux de
ses successeurs , lesbâtards ne sont d’au
cune famille et n’ont aucuns parens ; les
bâtards ne succèdent à personne, et per
sonne ne leur succède. MM. les Féodaux
trouvaient leur compte à ces maximes dé
naturées ils confisquaient les biens et les
5
UL
( 82 )
La Municipalité trouverait bien vite
se
remboursée par la seule vente des terreins
environnans. On ne serait plus obligé de
garder le bois de Boulogne avec des gens-
d’armes la police s’y ferait d’elle-même.
$
il Septembre 1790.
O# vient d’dter les quatre bronzes muets
de la place des Victoires. On aurait dû
réformer d’abord les quarante parleurs im
mortels du Louvre. •
5 Octobre 1790.
Une jeune femme est tombée malade. Il
n’y avait aucun danger ; mais par un excès
de zèle apostolique, on lui porte les Sacre-
mens. A cet aspect lugubre, aux mots la
tins prononcés par le Prêtre, elle est tom
bée dans les convulsions et l’on désespère
5
de sa vie.
C’est encore à nos Législateurs qu’il ap
partiendrait de protéger la faiblesse et la
maladie, comme ils ont secouru la pau
vreté. Ils s’occupent en ce moment des
asyles qui lui sont destinés. Ils descendent
jusqu’aux moindres détails d’une bienfai
sance paternelle. Mais les maux de l’esprit
ne sont pas moins dignes de commisération
que les douleurs du corps.
J’ai interrogé à ce sujet un bon Curé j
savant comme Bossuet, et simple comme
Massillon. Voici sa réponse, car je ne veux
rien dire qui ne soit orthodoxe : » Je me
» suis souvent récrié sur cette pratique re-
» ligieuse. L’extrême-Onction n’est pas dans.
»
l’Évangile. Suivant le dogme catholique,
( 9° )
» elle n 7 est pas nécessaire au salut. Une
» religion douce devait abolir, il y a long-
» temps, un usage aussi barbare «.
Ce discours du bon Pasteur in’a con
firmé dans mes sentimens. Je me suis rap-
pellé ce que j’avais entendu dire à Vol
taire : » Quoi î accablé par la maladie , la
» mort sur les lèvres , n’ayant plus dans le
» monde qu’un Médecin consolateur, ma
» famille et mes amis je vois tout-à-coup
7
Il i5 Décembre 1790.
faut enfin répondre à tant de redites
et de pamphlets que les aristocrates em-
ployent éternellement pour justifier les mo
tifs de leur insurrection. Ils ne vous par
lent plus des titres, des privilèges, des
jouissances féodales qu’ils ont perdus. C’est
aujourd’hui le Roi lui seul qu’ils pleurent
?
et dont ils veulent venger la cause.
( 101 )
Et moi je soutiens que jamais il ne fut
plus grand. Si ce même Roi de France et
de Navarre, au moyen de sa certaine scien
ce , pleine puissance et autorité royale, s’é
tait avisé, il y a deux ans, de brûler le
Livre rouge et la liste in-folio des traite-
mens et des pensions ; ces mêmes aristo
crates soldés auraient été ses premiers en
nemis. Ils l’encensaient pour son argent j
et nous l’aimerons pour lui-même. Son
pouvoir n’était réellement fondé que sur
sesprofusions*
On nous parle toujours de la Monarchie :
mais au lieu d’un Monarque nous en avions
sept ou huit. Le Loi de la guerre qui,
tous les deux ans, créait pour son plaisir
quatre-vingts Officiers-généraux, bien plus
habiles à soutenir le despotisme qu’à servir
la Nation. Le Loi de la marine qui tenait
les clefs du commerce, l’urne d’abondance,
et qui nourrissait ou affamait les Isles à sa
volonté. Le Loi des affaires étrangères
qui soufflait dans l’Europe le froid et le
chaud, et pour l’honneur de sa place, fai
sait égorger les peuples comme des trou
peaux à la boucherie. Le Loi de la jus?*
G a
/
( 102 )
tice qui , sans se lever de son siège ina-
movible étendait sa main de chicane sur
7
6 Avril 1791.
C’était sans doute un spectacle bien
étonnant que le convoi de Mirabeau
,
passant sous la statue de Louis XIV. Si
jamais elle fut la Place des Victoires, à
coup sûr c’était hier. Je parle des victoires
de la liberté, du triomphe des Patriotes
?
/
( 10 7 ).
de cet élan sublime de Famé qui, par un
assentiment universel , élève un simple
citoyen au-dessus de tous les Rois.
Que ce Louis-le-grand était petit! vai
nement les arts Font entouré de trophées,
Font couvert de palmes ; la Renommée qui
couronne Mirabeauimprime au souvenir
de cet homme le sceau de la véritable im
mortalité. Auteur de l’organisation civile
et religieuse, il s’est occupé de la chose
publique jusqu’à son dernier soupir. Il est
mort emportant avec lui l’assurance de l’a
chèvement très-prochain de la Constitution.
Froiite serenâ fortis et adhuc sublimia curans.
J’ai assisté à son éloge funèbre. Un sa
vant Professeur de morale a préconisé les
vertus civiques de ce grand homme. L’É
glise était décorée avec une pompe où l’on
n’avait rien négligé.
J’aurais été bien satisfait, et mon cœur
eût vivement joui, si, au lieu des chants
latins et des hymnes barbares, j’eusse en
tendu l’orchestre nombreux des Musiciens,
chanter en chœur des hymnes françaises.
Avec quel transport les assistans auraient
uni leurs voix à ce concert de louanges !
( i°B )
Cela ne vaudrait-il pas mieux que cette in
vention des Prêtres, cette prière des morts ïel
bien faite pour épouvanter les vivans? Que
veulent dire ces paroles : Dies ilia dies
,
ircie, calamitatis et miseriae; dies magna
et amara valdè, qui nous annoncent des
jours de colère, de calamité et de misère?
Laissons aux fanatiques effrénés aux
,
ignorans crédules, ces hideuses cérémonies.
Lorsque l’on prononce l’éloge, lorsque l’on d
fait, en quelque sorte, l’apothéose de ceux
qui ne sont plus ; pourquoi demander au
Ciel qu’ils soient délivrés des peines de
l’enfer, du lac profond, de la gueule du
lion de peur que le tartare ne les englou
5
i5 Avril 1791.
Frères et amis, j’ai pris la liberté d’ef
facer à l’angle de ma maison, cette ins
,
cription : Quai des Théa tins ; et je viens
d’y substituer : Quai de Voltaire. C’est
chez moi qu’est mort ce grand homme. Son
souvenir est immortel comme ses ouvrages.
Nous aurons toujours un Voltaire, et nous
n’aurons jamais de Théatins.
Je ne sais si les Municipaux, les Voyers,
les Commissaires de quartier trouveront
illégale cette nouvelle dénomination puis
,
qu’ils ne l’ont pas ordonnée : mais j’ai
pensé que le Décret de l’Assemblée Na
tionale qui décerne les honneurs publics à
J^oltaire, était, pour cette légère innova
tion, une autorité suffisante.
Cet exemple sera sans doute imité. La
rue Plâtrière portera le nom de J. J. Rous
seau. Il importe aux cœurs sensibles, aux
âmes ardentes de songer, en traversant
cette rue, que Rousseau y habitait au troi
sième étage mais5
il n’importe guères de
savoir que jadis on y faisait du plâtre.
Il reste cinq encoignures depuis la rue
de Seine jusqu’au pont-Royal. Le nom
bizarre quai Malaquai disparaîtra. Le
quai d’Orcai; loin de recevoir le nom de
CondÉ qu’on lui préparait, placé sur le
chemin du Champ de Mars, sera baptisé
QUAI DE LA FÉDÉRATION.
; Je me transporte en idée à ces tems de
lumière, à dix ans d’ici, où les noms Van
dales de nos rues seront changés. Nous
n’aurons plus, de grande TruaJiderie, ni
( in )
de grand Heurleur $ de Géojfroi Lange-
vin , ni de Géoffroi VAsnier; de Bertin
Poirée, ni d’Hillerin Bertin. Les noms
des Saints seront relégués dans les Alma
nachs et dans les Eglises. Cette fameuse
,
rue Saint-Honoré sera la rue de la Cons
titution 5
celle Saint-Antoine, rue de
la Lieertéj celle de la Barillerie, rue
de la Justice ; celle Saint-Jacques, qui
conduit au Panthéon Français, rue des
Grands Hommes. Elles est étroite et es
>;üî
carpée, comme le chemin de la gloire.
Alors Paris, d’un bout à l’autre ne sera
,
véritablement aux yeux de l’Europe que le
grand livre des Droits de l’Homme.
10Œ
r rère
T?
et ami, nous avons lu avec un
plaisir la lettre
vrai que vous adressez à
vos Concitoyens. Nous vous félicitons sur
le changement que vous avez fait à la dé
nomination du superbe quai que vous ha
bitez, et nous sommes sûrs que tous les
( 112 )
braves Parisiens l’approuveront : cette dé
nomination nouvelle rappellera à nos ne
veux les sentimens de reconnaissance et
d’admiration dûs aux talens et à la mé
moire de Voltaire. Ainsi doivent être ho
norés les services rendus à la Patrie et à
l’humanité par ces hommes précieux qui ,
bravant le despotisme et ses fureurs ont
,
eu le courage d’allumer le flambeau de la
raison et de la philosophie, et de le placer
sur le haut de nos Cités , comme un fanal
salutaire.
Mais si ces honneurs sont une dette, il
,
doit paraître également juste de vouer à
l’opprobre universel, par des aj)pellations
caractéristiques, ces êtres obscurs, escla
ves soudoyés du despotisme expirant, qui,
par leurs écrits impurs et fangeux, cher
chent à égarer le civisme de nos frères, et
à détourner les influences d’une révolution
qui doit faire le bonheur des Français.
Nous regardons comme juste de donner
aux égouts de notre ville les noms des
JVbalet-du-Pan Abbé Roy ou, Durosoy
, ,
Pelletier , Gauthier JMeude - Monpas
, ,
Rivarol et consorts j et de porter même
cette
( )
Avril 1791.
Il 20
faut espérer que la France perdra bien
tôt cette routine orgueilleuse de salarier
des Ambassadeurs permanens dans toutes
les Cours de l’Europe.
En effet, d’après notre déclaration so-
lemnelle de renoncer à tout esprit de con
quêtes la science diplomatique est à-peu-
,
près réduite à zéro. Les affaires conten
tieuses de l’Europe ne nous regardent plus*
Les Commerçans qui détaillent sont les
vrais Ministres de l’intérieur. Les Négo-
cians millionaires, les Facteurs du Levant,
ceux des Isles, ceux des Indes, sont nos
grands Ambassadeurs.
Qu’un Duc de Parme , ou de Saxe-
Gotha qu’un Evêque de Wirtzbourg, de
y
Spire, ou de Porentrui 5 que la peuplade
usurière de Genève se donne des airs Mi
nistériels, on le conçoit.
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages.
Tout Bourgeois veut bâtir comme les grands Seigneurs.
Tout petit Prince a des Ambassadeurs.
Tout Marquis veut avoir des Pages.
( m5 )
Mais cette Légation de France auprès
du Prélat de Liège, on est un peu scan
dalisé des mille louis dont on vient de la
doter ) somme que l’on n’eût jamais osé
accorder sous le régime déprédateur.
Pendant tout son règne , le fastueux
Louis XIV n’eut jamais de Ministre à
Liège. Seulement après les guerres de
Flandres, en 1747? Louis XV consentit
d’en envoyer un, parce qu’on persuada au
bon-liomme Puisieuæ qu’il était séant que
la France eût un Résidant à Liège. On
aurait également pu lui proposer d’en en
voyer un dans la République de Lucques,
de Raguse, de Saint-Marin.
M. de Beauckamp qui, en 1748, rem
plissait cette fonction n’avait pour tout
,
traitement que huit cents livres.
L’Empereur, malgré les rapports natu
rels du Brabant avec Liège, n’y a point de
missionnaire honorifique. Un simple Avo
cat du pays se charge de suivre le petit
nombre d’affaires qu’il peut avoir à traiter
avec ce noble Chapitre et ses appointe-
5
i5 Mai 1791.
L’Histoire ne présente guère de révolu
tion qui n’ait été l’ouvrage de quelques
chefs de parti5 c’est-à-dire, que les peu
ples n’avaient qu’à opter entre le choix des
tyrans. Ce n’est pas pour un Cromwel, ce
n’est pas pour les maisons d’Yorck ou de
Lancastre, pour les Guelfes ou les Gibe
lins, pour les Guises ou les Bourbons, que
nous forgeons des armes. Les chefs invisi
bles et célestes qui conduisent chez nous la
marche des évènemens, ce sont la justice,
la raison la sainte égalité. Voilà nos
,
guides voilà nos dogmes et nos Dieux.
y
Les Ecrivains philosophes en ont été les
missionnaires. Si Jean-Jacques a fait en
prose une Constitution, Voltaire a fait la
Révolution en vers. Il serait aisé de pré
senter ce grand homme avec toutes les cou
leurs nationales. Il est presque à chaque
page, un vrai démagogue. Il a publié sous
toutes les formes qui charment l’esprit, les
vérités éternelles qui servent aujourd’hui
de base à nos Décrets.
( 126 )
S’il a caressé les Rois et les Grands,
c’est qu’il avait besoin de leur appui contre
la haine des fanatiques des tartuffes et
,
des sots il en avait besoin pour renverser
5
'1
d’être venu fixer son asyle dans le Paradis
fe
i terrestre de l’Europe. C’est-là s’écrie-t-il ? ?
S Mai 1791.
3
Enfin mes vœux sont exaucés. Les
Grands hommes de la Patrie resteront ait
milieu de nous. Un sentiment religieux
m’a conduit vers cette superbe Basilique
*
En la voyant, on reste en extase. Je me
suis écrié : non, Paris ne sent pas assez
ce qu’il doit à la mémoire de l’Architecte
sublime qui a pu concevoir une si riche
pensée! Je veux bien croire que St-Pierre
de Rome est la merveille des Arts : mais
T
certainement, il offre moins de perfection
dans les détails, et peut-être moins d’accord
dans l’ensemble.
Il faut pourtant le dire. O11 souffre un
peu de voir que nos Administrateurs, ces
Représentans de la Cité la plus éclairée
du monde, aient osé, sans examen, livrer
à l’abandon l’achèvement de ce majestueux
édifice. L’architecture est finie il s’agit
5
6 Juin
M. Judith se plaint de la clôture du
1791.
k
nement. On eût dit que c’était une forêt
ambulante. Le char et son cortège ressem
blait au bois sacré de l’Hélicon, aux bos
quets d’Amathonte.
Si-tôt qu’il arrivait dans une ville, ou
dans un bourg ; on voyait s’avancer des
quadrilles de jeunes personnes habillées de
blanc : des fleurs fraîchement cueillies pa
raient leurs têtes les unes tenaient des
5
suprême :
Si Dieu n’existait pas, il faudrait l'inventer.
Une femme portait une pique sur laquelle
était écrit :
La dernière Raison du Peuple.
Cette pompe attendrissante et sublime
( 188 )
électrisait les esprits \ et redoublait dans
tous les cœurs le feu sacré du patriotisme.
Le fracas multiplié des tambours annonçait
qu’un cortège de cent mille hommes défi
laiten présence de 600 mille spectateurs.
Sur autant de brancards chargés de ri
ches carreaux de velours, 011 voyait porté
le Buste du brave Désilles, celui de Rous
seau, celui de Mirabeau $ le plan de la
Bastille en relief des cuirasses, des bou
5
3 Août 1791.
Otf citait des paroles mémorables de
Joseph secojid. Des Auditeurs philoso
phes soutenaient que cet Empereur et
,
le grand Frédéric, auraient établi notre
Constitution chez eux et qu’ils se se
,
raient accommodés d’un trône inamovible,
inviolable, héréditaire, et décoré de 3o
millions. Ils ont trouvé le paragraphe sui
vant écrit de la propre main du Salomon
du Nord.
» Je suisRoi, j’incline pour la Monar
chie mais j’ai bien souvent gémi, quand
5
llLr
aristocratie : mais la Providence ne paraît
pas être de son côté. Les plus belles mois
sons se préparent jusques sur la lisière des
i<fa
,
O11 parle toujours de l’impuissance de plaît-
O
( 210 )
n’entendant pour ce déroger en façon quel
conque à ses titres et quartiers, la très-
haute très-ignorante et très - insolente
,
Comtesse.
On paie ici franchement les impôts ; il
n’y a que les malveillans, les ennemis de
l’Etat qui puissent chercher à les éluder.
Il me semble qu’il y aurait un moyen très-
simple de faire payer les contributions na
tionales et d’y forcer même l’avarice. Les
,
impôts une fois assis^ la répartition une
fois fixée, suivant les valeurs foncières,
locatives ou mobiliaires, je voudrais que
le 3i Janvier de chaque année, chaque
citoyen reçût I’Avertissement de sa quote-
part individuelle; et que l’on fit une re
mise d' un demi pour centpar mois à qui
)
O 3
C 2l5 )
ma jolie maison, les beaux arbres que j’a
vais plantés, le bien être et tous les agré-
mens que j’avais disposés pour mes amis <c.
«
Malgré ces revers, que j’étais loin de
prévoir, je sens que j’aurais le courage
d’aimer la Constitution, si, dans mes vieux
jours je n’étais forcé d’aller à pied «.
,
«L’Assemblée Nationale qui nous fait
tant de chagrin, devrait bien nous donner
une indemnité qui ne lui coûterait que la
peine d’un Décret ; c’est le mariage des
Prêtres «.
«Le lendemain de cette loi sage, j’irais
voir mon ancienne amie, qui vient d’a
cheter mon Prieuré. Je ferais ce qu’on
appelle un mariage de conscience ; et
beaucoup de mes confrères sont précisé
ment dans le même cas «.
« Oh ! le beau sujet à traiter ! qu’il se
rait bien digne de nos Législateurs philo
sophes ! Eux seuls ont le droit d’abattre
y
pour jamais, un préjugé aussi stupide que
barbare «.
«Une partie de ma famille habite Lon
dres et Genève. Plusieurs sont des Mi
nistres du saint Évangile j et je les vois
O 4
( )
entourés de leurs enfans dont Ils sont les
heureux précepteurs. Ce tableau de la na
ture m’a souvent ému jusqu’aux larmes «.
Il serait difficile de ne pas être de l’avis
du bon homme. En effet, s’il est vrai que
le sacerdoce doive donner l’exemple en
même-tems que le précepte, qu’y a-t-il de
commun entre l’honnête négociant, l’utile
cultivateur, le père de famille, livrés à
des soins, des affaires, des travaux qui
tournent à l’avantage de la chose publi
que , et le Prêtre Romain qu’un régime
absurde isole et retranche dans l’égoïsme
de son état? Si, comme les autres hommes,
il était soumis à tous les devoirs de la so
ciété il pourrait offrir le modèle du bon
,
citoyen ; comme ses enfans, celui de la
bonne éducation.
Tous les esprits raisonnables se deman
dent aujourd’hui : Quel rapport y a-t-il
entre l’Évêque de Rome et le Curé d’une
paroisse de France? Que répondre au digne
Pasteur qui dirait : Je sers l’Etat toute la
journée j’ai besoin le soir d’une com
5
5 Octobre 1791.
Nous
avons enfin une Constitution» Pour
quoi dans une circonstance si glorieuse
, ,
ne voit-on que des âmes tièdes, des mé-
contens ; et si peu d’enthousiastes ?
Cependant, quel est le patriote sincère
qui n’aurait pas reçu à genoux, il y a trois
ans, une Constitution pareille à celle de
l’Angleterre? Celle qui vient de nous ré
générer, est assise sur des bases bien plus
durables. Les Droits de l’homme 11e re
montent pas à la loi Salique, ils sont éter
nels comme la nature.
E11 Angleterre, fut le Ptoi qui voulut
ce
bien accorder une charte à la Nation. Chez
nous, c’est la Nation seule qui a fait l’acte
Constitutionnel, l’a présenté au Roi, et lui
a mis le marché à la main.
Les Anglais sont sujets du Prince, et le
servent à genoux. Les Français sont soumis
à la Loi, et ne sont sujets de personne. Ils
se rangent sur le passage de Louis XVI 7
et ne sont pas meme obligés de lui oter le
chapeau.
( 232 )
En Angleterre, il y a deux Chambres 7
une Noblesse héréditaire, des blazons, des
titres et des livrées. Nous n’avons qu’une
seule assemblée dans le corps Législatif :
elle est indivisible ; et nous avons balayé
tous les hochets de la,Féodalité.
En Angleterre , il faut qu’un citoyen
paye plus de 5o gainées d’impositions fon
cières pour être Député. Ici, l’homme à
talent peut le devenir, en payant 3 livres.
Le Parlement Britannique dure sept an s,
et le Roi peut, à sa volonté, le proroger
ou le dissoudre. La Législature Française
sera toujours de deuoc ans. Le Roi n’a point
d’influence sur sa durée.
En Angleterre , le Clergé est riche et
propriétaire de biens fonds. Chez nous il
,
11’a qu’une aisance honnête, et nous le te
milices.
En Angleterre, le droit de nommer des
( 2.7)0 )
Représentais est mal réparti. Tel bourg
qui compte à peine quelques centaines
d’habitans en nomme plusieurs 5 et des
,
villes, comme Birmingham, qui ont plus
de 60 mille âmes, n’en ont qu’un. En
France, la répartition est égale, et par
tout proportionnée au territoire, à la po
pulation à l’imposition directe.
,
En Angleterre, le Monarque peut ap
prouver ou rejetter les Bills, sans les dis
cuter et sans donner de motif. Ici, le vœu
de trois Législatives devient loi, malgré
la volonté du Prince, et rend nul son veto
provisoire. Et puis 11’avons-nous pas les
Conventions nationales ce remède uni
,
versel pour tous les maux de l’Etat? Les
Anglais n’ont aucun moyen légal pour se
faire entendre en Souverain.
Je ne pousserai pas plus loin la com
paraison. Mais il faut être de bien mau
vaise humeur pour ne pas s’accommoder
de ce nouveau régime et pour ne pas
,
combler de bénédictions les sages Repré
sentans auxquels nous devons le plus bel
ouvrage qui soit encore sorti de la main
des hommes.
Le Sillon. j3 Octobre 1791.
Je dirai point ed io son Pittore, et
ne :
moi aussi je suis Peintre. Je laisse aux
savans Professeurs le langage technique de
la science. Mais l’amour, le sentiment des
arts, voilà mes guides voilà les maîtres
5
personne.
Au pittoresque du pinceau, l’ingénieux
Robert joint encore le piquant de son es
prit. L’aveugle qui demande l’aumône à
des perroquets ; le Pindicateur qui, après
avoir endormi son auditoire, cueille des
cerises et les mange $ le Chartreux à ge
noux devant un christ, et le chat dans la
niche; il faut avoir bien de la gaieté dans
le caractère pour en répandre sur un sujet
si triste.
Heureux Peintre qui sait, d'une touche légère,
Passer du grave au doux, du plaisant au sévère.
Dans l’un de ces beaux paysages que
l’on ne se lasse pas d’admirer, je vois
Ulysse implorer le secours de Nauzicaa ;
j’y
( 34l )
j’y retrouve une page entière de l’Odyssée.
Cet attelage antique, ces femmes qui la
vent des robes, tout s’y montre à sa place.
Mais je demanderais pourquoi le sage
Ulysse est-il nud comme Adamet n’a-t-
il autour des reins qu’une ceinture de feuil
les? Je sais bien que le Roi d ltaque ne
jouissait pas d’une liste civile fort consi
dérable et que les amans de Pénélope
,
avaient apporté quelque déficit dans son
trésor ; mais dans ses voyages, il était
,
pauvre, et jamais nud. Une Princesse bien
élevée comme Nauzicaa aurait songé plu
tôt .à le fuir, qu’à l’accueillir.
La une de Colojine et du temple des
Euménides pourrait se passer de figures.
Ces Coloniales que l’on voit à mi-corps et
qui sortent d’un trou, ne font pas un effet
heureux. Pour offrir une scène dramati
que , prise de l’histoire, ou de la fable,
une scène digne de l’Opéra, il ne faut pas
des personnages grands comme le petit
Poucet. Ce magnifique tableau dénué d’ac
cessoires, placerait le nom de Ualeîiciennes
à côté de Claude Lorrain,
On reste en extase devant des tableaux
Q
( ^42 )
de fleurs. L’imagination est rafraîchie par
cette touche transparente , cette magie de
la rosée. V^an-Spaendonc est le désespoir
de l’art et de la nature.
Le talent de faire des oiseaux de bois est
tout neuf. C’est la difficulté vaincue. Je me
rappelle ce Grec qui trouva le secret d’en
fermer l’Iliade dans une coquille de noix.
Je demanderai pourquoi ces ailes à
l’Angé dans le retour de Tobie? Si l’en
voyé des cieux avait eu de longues ailes à
ses épaules en cheminant côte à côte de
lui, l’illusion était finie. Mais l’Ange eut
grand soin de garder le plus parfait in
cognito ; il ne déploya ses ailes, qui for
maient ses lettres de créance, qu’en pre
nant congé du pèlerin.
L’éducation d’Achille est digne de Ra
phaël. Mais pourquoi faire voltiger sur le
dos du Centaure un grand manteau verd,
un véritable manteau de chasseur? Il n’y
manque que le galon.
Et cet énorme rocher noir?
C’est encor pour faire valoir.
Le génie et le talent sont au-dessus de
toutes les corporations académiques.
( *43 )
Le célèbre Greuse a produit le plus bel
ouvrage cpii soit sorti de ses savantes mains.
J’invite le lecteur sensible à se rassasier de
plaisir en allant voir Sainte IMarie Egvp-
tienne. Ce n’est pas un tableau qu’il trou
vera c’est un être animé, c’est la beauté
5
3o Octobre 1791.
L’Assemblée Constituante
a décrété des
secours et des encouragemens pour les
beaux - arts Peinture Sculpture, Archi
, ,
tecture. ne dit pas un mot de la Musi
O11
,
manque absolu de police ) c’est le génie (I
\f
municipal qui ordonne que par la nuit la
,
plus noire, les réverbères soient éteints à
onze heures , et quelquefois avant. On ne
du
I
fort étroite. L’un de ces Soldats profite de
t
*
( 27 3 )
pour se battre «.
5)
Lorsque sa Majesté appellait Villeroi
son Gouverneur, et lui disait : M. le Ma-
( 2 77 )
réchall celui-ci répondait : Oui, Sire ?
avant de savoir ce qu’on lui voulait, tant
il avait peur de lui refuser quelque chose «.
» Le grand Coudé entre un jour dans le
cabinet du Roi qui étudiait. Comme l’en
fant Royal se tenait découvert : Sire lui
,
il
dit-il , faut que 'votre Majesté se
couvre; c’est bien assez irons faire d’hon
neur, quand elle daigne nous saluer «.
On trouve mille traits pareils dans la
Chronique de l’enfance de Louis JCIK.
Faut-il s’étonner qu’il ait été le plus igno
rant et le plus orgueilleux des hommes ; et
qu’après avoir commencé par faire le valet,
il ait fini par devenir le plus insolent des
Maîtres? Il n’appartenait qu’à lui seul
d’oser se faire peindre tenant à la main les
foudres de Jupiter, et foulant aux pieds
les peuples et les villes sous la ligure de
femmes éplorées-
Revenons à notre jeune Prince, et fai
sons des vœux pour qu’on lui inspire l’a
mour de ses devoirs qu’il fasse de la
5
^ *—
( 278 )
Il y a
io Décembre
maintenant 5ooo Terres vendre
à
1791.
ginquo reverentia.
Au reste, je ne parlerai pas plus long-
terns d’un plaisir auquel il faut que je re
nonce. Les jouissances de l’esprit sont un
peu contrariées par les peines du corps. Je
voyais, autour de moi, beaucoup de per
sonnes se plaindre de ce que les banquettes
n’ont
( 289 )
îl’ont pas de dossier. Pour que le théâtre
soit un délassement, il 11e faut pas qu’il
tienne le corps des spectateurs trois heures
de suite dans une attitude droite et péni
ble. Sans doute l’entreprise qui tiendrait le
parterre debout, serait une véritable im
pertinence mais payer plus ou moins cher,
5
Il n’y a presque
28 Décembre 1791.
point d’années où la
Rage n’emporte quelques victimes. N’y
aurait-il point de remède efficace contre
cette horrible maladie ?
En 178^, un chien enragé entra dans un
attelier où l’on faisait de l'huile j il lit trois
morsures aux jambes d’un ouvrier qui, en
fuyant, se précipita dans une chaudière a
moitié pleine d’huile. Son camarade vint à
son secours ; il assomma le chien : mais dans
le combat il fut mordu sans tomber dans
l’huile, ainsi qu’avait fait l’autre. Il en
mourut, et le premier n’en fut seulement
pas malade. Le chien avait mordu d’autres
chiens. Leur maladie se manifesta quelques
jours après et ils la communiquèrent à
,
plusieurs habitans. Un Médecin tira parti
de l’aventure des deux ouvriers il pensa
5
2 Janvier 1792.
Je vois tous les jours d’excellens citoyens,
assidus observateurs de l’Assemblée Na
tionale qui regrettent de ne pas entendre
,
de ces discours improvisés, et dont il sem
ble qu’un Orateur reçoit tout-à-coup le
sentiment, comme l’effet du magnétisme.
On 11e manque pas de citer les discussions
du Parlement d’Angleterre \ et l’on croit
bonnement que les phrases arrondies, telles
qu’on les trouve dans le journal d’un ré
dacteur ont été débitées comme elles sont
,
écrites.
La nation Anglaise s’est illustrée dans
la Philosophie, dans les sciences exactes et
la Littérature mais elle ne compte que
,
très-peu d’hommes qui se soient distingués
dans la carrière de l’éloquence. Elle n’a
pas encore à la tribune un Orateur qui
puisse honorer sa patrie. On sera surpris
d’apprendre qu’un discours étudié ne réus
sirait pas au Parlement : et l’on se prévien
drait contre un homme qui déroulerait un
cahier, et lirait sa motion. Burke, élevé à
T 4
( 296 )
Saint-Omer, nourri d'études collégiales,
en plaçant dans ses discours des figures de
Rhétorique, ennuyait sans persuader. Ou
préfère une discussion motivée, à l’arti
fice, à la préparation du style. Le Ministre
évangélique qui prêche la morale, en ré
citant le plus beau sermon, ferait vaine
ment usage de tout ce que le talent de la
parole a de plus sublime il n’aura pas le
5
tA
laient votre langage, la paix serait bientôt .
qu’il 5*
\
i5 Février 1792.
Nous
sommes forcés à la guerre} mais il
est absurde de prétendre que nous serons
battus. On nous suppose comme dans l’an-
cien régime rangés en bataille avec une
,
aile droite et une aile gauclie, un centre et
des Régimens immobiles tirant sans fin
,
ni cesse jusqu’à ce qu’ils n’aient plus de
munitions. Cette froide et ridicule tirail
lerie n’est pas la guerre que nous ferons }
c’est une partie de jeu entre des Généraux
opposés, et non des ennemis} c’est un pari
calculé sur des barils de poudre. Chaque
Roi joue une centaine de mille hommes,
et quelques centaines de millionsj et quand
il a tout perdu, il va se coucher : ce qui
s’appelle faire un Traité de paix.
Mais la guerre d’un Peuple libre est un
combat à mort de Nation à Nation. Il joue
son tout. Les Rois qui l’attaquent sont in
sensés parce qu’ils ne peuvent jouer que
,
quelques parties, et non pas toute leur
Nation et tout leur argent. Il faut qu’ils
s’arrêtent, sous peine de faire révolter leurs
ya
( 3o8 )
Sujets qui s’eimuyent à la lin d’être tués
pour ces jeux de Princes, qui ne plaisent
qu’à ceux qui les font.
Quant à l’Art militaire, jamais une Na
tion entière ne se déplace pour aller à l’en
nemi ; mais aussi l’ennemi ne la déplace
jamais. Lorsque les armées sont en pré
sence , il est nécessaire que le Soldat soit
discipliné, soit astreint à toute la rigueur
de l’exercice Hessois ou Prussien. Les di
verses légions sont des masses d’un grand
tout qui, par leur poids, écrase et renverse
tout ce qu’il rencontre. C’est l’Etna qui
s’avance contre le Vésuve, et couvre de
feu cent lieues de pays. C’est ainsi que nos
braves troupes de ligne feront la guerre au-
deliors.
Mais si l’ennemi victorieux avait le
malheur de pénétrer dans l’intérieur du
Royaume, il 11e faut plus de cette mesure
pour lui couper les vivres pour le har
5
son universelle.
( OU ) V
Les Belges sont persuadés, comme nous
7
que ce sont les soi-disant Souverains qui
sont en révolte contre les Nations, et non
pas les Nations qui réclament enfin leurs
droits contre les usurpateurs.
Si les Allemands tentaient de venir en
France nous attaquer les habitans des
,
Pays-bas se promettent bien de les suivre
pour leur couper les jarrets. La haine de
la tyrannie ne s’éteindra jamais à Gand.
On y voit encore le spectacle de plus de
deux cents maisons à demi-ruinées et ren
versées depuis que l’infâme Alton, ren
,
fermé dans la citadelle, les a foudroyées à
boulets rouges.
Ici les Valets des Rois crient à la pro~
pagandel Eh ! oui, la propagande. Quoi !
nous voulons rebâtir notre Gouvernement7
établir nos Finances, chasser la tyrannie j
nous en sommes les maîtres, car le char
bonnier même l’est chez lui ; et les Des
potes se réuniront contre nous ! et ils vou
dront se mêler de nos affaires qui ne les
regardent pas ! et ils amèneront chacun
cent mille idiots pour nous tuer ou pour
les faire tuer î ils veulent nous faire une
V4
( 312 )
guerre Royale ! et nous rie leur ferions pas
une guerre Populaire ?
Emigrans titrés, mitrés, crossesj Che
valiers errans Dom-Qidchotes de l’uni
,
vers , réunissez-vous ; car nous sommes
prêts et debout.
T/prasington chargé de soutenir les droits
>
des Américains, voulut, avant de com
battre les Anglais, tenter dans le Canada
une expédition d’un nouveau genre mais5
1 er Mars 1791.
On fait chaque jour l’Assemblée Na
à
tionale des pétitions pour demander une
Loi qui autorise le Divorce 5 mais il sem
ble qu’il faut demander d’abord s’il y a
une loi qui le défende et s’il n’existe au
5
20 Mars 1792.
s’occupe aujourd’hui de l’adjudication
au rabais des travaux à faire pour l’entre
tien des routes.
Il serait digne d’une sage administration ,
je dirai même, il est indispensable d’ag-
grandir cette chaussée de pierres cette
,
ligne de pavés qui, semblable aux rayons
d’un cercle, part de Paris et fuit, dans
,
tous les sens , vers la circonférence du
Royaume. Deux pieds ajoutés à sa largeur,
sauveraient les voitures d’un danger con
tinuel et de tous les accidens de ren
,
contre. Alors plus d’ornières; partant plus
de querelles. Ce qui faisait dire à un An
glais, gâté par les routes faciles et veloutées
de son pays : Quelle magnificence! quelle
grande route pour un si petit chemin !
Les chemins publics doivent être entre
tenus par ceux qui les usent. Placez-y des
barrières à distance avec un impôt par
chaque cheval, qui serait nul pour les pié
tons : ces péages s’affermeraient au plus
offrant, et la perception n’en coûterait rien
( 32 9 î
à l'Etat. De cette manière, on ajouterait
à la police des routes. On serait sûr, à
toutes les heures de la nuit, d’y trouver
lumière et secours.
Il faudrait, en même-tems, planter un
second rang d’arbres en dedans, à chaque
coté des routes, et défendre d’ébranclier.
Ce serait une faveur de la Révolution pour
le commerçant qui voyage, pour le soldat
qui rejoint sa garnison ou regagne ses
foyers, pour le cultivateur à ses heures de
repos, de trouver quelqu’ombrage contre
l’ardeur du soleil, ou quelqu’abri contre
les averses, les bourasques de la tempête.
Ce qui est enlevé à l’agriculture se trou
verait compensé par l’immense quantité de
bois qui en résulterait dans 20 ans, et de
viendrait une ressource pour la France
pr ête d’en manquer.
Les ormes qu’Henri IV
et Sully avaient
autrefois plantés dans tout le Royaume,
que l’on appellait des Ronys , et dont on
voit encore grand nombre au pays de Gex,
n’étaient pas élagués comme des quilles.
O11ne remarque pas sans intérêt que
ces espèces d’ormes bien choisis, sont peut-
( 33o )
être les végétaux qui soutiennent la plus
longue durée, et résistent le plus aux élé-
mens. Ils restent cent ans à grandir, à
pousser des rameaux souples et robustes 5
cent ans y sans un changement sensible y
ils conservent toute la vigueur de l’exis
tence et restent cent ans à dépérir, à
5
er Mai 1792.
La 1
3 Mai 1791.
Faut-il dire aux peuples la vérité, toute
la vérité, rien que la vérité? Oui, sans
doute en supposant qu’ils soient assez
,
éclairés pour l’entendre, assez sages pour
l’aimer. On en peut juger par le trait sui
vant que nous garantissons.
Le Curé constitutionnel d’un gros vil-
( 336 )
Iage
, au Pas-de-Calais , venait de rem
placer le réfractaire le plus hypocrite et le
plus rafîné. Celui-ci avait accaparé l’igno
rance et la crédulité de presque tous ses
paroissiens. Il avait mis en crédit une
sainte Vierge de plâtre, laquelle, à certains
jours de fêtes, au récit de certaines prières,
miraculeusement répandait des larmes
,
sur-tout en faveur des femmes enceintes ;
ce qui était d’un heureux présage pour la
grossesse.
Le nouveau Pasteur, tant soit peu phi
losophe a négligé ces ruses virginales, et
,
s’en est tenu aux devoirs paternels de son
ministère. Bientôt les réfractaires ne man
quent pas d’exciter contre lui les dévotes
et les enfans, et sur-tout les filles et fem
mes grosses pour lesquelles la bonne Vierge
ne faisait plus rien. Notre Curé se dispo
sait à déserter le village, lorsqu’un excel
lent patriote, marguiller en exercice, vint
le trouver et lui dit : » Vous êtes par trop
honnête homme, Monsieur le Curé ; il ne
faut pas si vite fronder les préjugés j il ne
faut pas s’obstiner à dire toute la vérité à
des imbécilles conduits par des frippons.
Croyez-moi
?
( 33; )
Croyez-moi dites après-demain votre
,
grand’messe de l’Annonciation ; composez
bien votre visage mettez toute l’onction
5
Y 2
c’est un sauveur
Qui des cieux entr’otiverts fend la voûte profonde.
,
Alors une foule de patriotes marchent
en liâte au-devant du bon pasteur. A peine
a -1 - il fait quelques pas , la pluie s’arrête ;
et le tems reste serein. Mais , dès qu’ils
sont à couvert, les averses recommencent
de plus belle. Ils veulent partir, le soleil
reparaît. Ils entrent dans l’Église du faux-
bourg nouvelle ondée. L’Évêque prend
j
ses habits pontificaux ; il atteint la Cathé
drale par le plus beau tems du monde. Il
entre une nappe d’eau couvre Perpignan
5
et ses environs.
Oh ! pour cette fois l’enthousiasme est à
son comble. C’est à qui témoignera sa joie,
bonheur de posséder si digne Évê
son un
que. Hommes, femmes, enfans, tous lui
baisent les mains, et demandent sa béné
diction. Pressé, caressé, arrosé de larmes,
il serre dans ses bras les tendres mères et
les petits enfans. Et celui qui raconte ce
trait vraiment patriarchal, pleure lui-même
en l’écrivant.
Mais on a beau se pénétrer de l’esprit de
l’Evangile 5 on a beau suivre avec simpli-
( 34i )
Cité les maximes d’une Religion qui ne
compte parmi ses enfans que les liumbles
de cœur • l’intérêt, l’amour de l’or vient sou
vent empoisonner les objets les plus dignes
de notre vénération. Auri sacra famés!
Un Juif à Strasbourg, par spéculation,
avait entrepris une manufacture d’eau bé
nite par des Prêtres réfractaires. Le débit
s’en faisait assez rondement. Elle se col
portait dans les rues, comme ces Cocos
que nous voyons le long des quais pro
mener leur tisane sur le dos. JNTe voilà-t-il
pas que des patriotes de mauvaise humeur
vont dénoncer au District les porteurs, la
fabrique et les fabricans. Grande rumeur
dans le quartier. On invoque les Droits de
l’homme, et l’on prétend que cette eau
bénite ne fait de mal à personne. La plainte
en dernier ressort parvient à la Municipa
lité et sur ce délit religieux, on procède
5
tp’and nombre.
A force de marchander, on les obtint
par forfait à 3 sols l’une dans l’autre ce 5
A Pierre Evrard.
Il est
4 Août i 7g2
difficile de s’engouer du Scioto,
.
TABLE.
A VAuteur de la Pétition du
Tiers-Etatr
page 1
Révolution de ijSg 3
A AT. Céruti. Veto absolu, 'veto
suspensif. 7
Ouvrir une Salle de Spectacle aux
Tuileries 12
A AT. Besn 1er. Ornemens d’Eglise
à la monnaie 15
Réponse 17
Lettre du Curé de Saint-Sulpice. . 20
Réponse 21
Adopter un nouveau Costume
Français 23
Conversation et conversion d’un
Aristocrate 25
Deuil de Cour
. .
3i
Les femmes oubliées dans la Consti
tution 33
A ristocratie Ordres
des
, des
Titj'es et des Caractères 42
A M- le Clërcq. Remise des E)?'oits
Féodaux 54
( 3 64 )
Libellâtes et Spadassins . .
58
Motion pour' transporter Voltaire
à Paj is %
62
Petite Lorette à Issy. Fondation
d’une Ville 68
ENFANS-NATURELS
Bâtir de jolies Bastides au Bois de
Boulogne 81
Les quarante Immortels du Louvre. 86
.
Enterrement de Charité. Liturgie
Française 89
Lettre du Chapelier de Voltaire. 97 .
Réponse 99
Les Ministres tout-puiss an s. La
Trinité des Bois 100
Pompe funèbre de Mirabeau.
Bues et Quais débaptisés
... 106
109
Lettre des Habitués du Café Pro-
cope-Zoppy 111
Réponse 118
»
Ambassades ridicules. Plus d’Am-
b assadeurs 114
Dialogue.- 118
Suppression des barrières et des
entrées 122
Voltaire, grand démocrate. . . .
125
( 366 )
Police de Paris. Jeux publics. 208
. . .
Décoration 'vajiiteuse des Juges ,
de Paix. 583
Anecdote du massacre de Na/zci. 265
.
Le Maire de Paris et le Maire de
Lojidf'es. 269
Education
t
. . . ,
dœ Louis JCIV. '
273
Ce qui se passe à Rome 278
L’Heure des Spectacles 285
Remèdes contre la Rage 290
Eloquence die la Tribune 290
Vendre les biens de l’Ordre de
JVLalthe 3oo
A certain Emigré
/ 302
La Guerre 007