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Histoire illustrée de la musique

Histoire illustrée

d e l a m u s i q u e �-

/ 1
par Marc Pincherle ".

Collection de l'OEil / Gallimard


(Ç) 1959 by Librairie Gallimard
Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés
pour tous pays, y compris la Russie
Printed in Switzerland
La musique, en France, ne figure pas dans les dictionnaires
parmi les Beaux-Arts. Ce n'est pas une simple anomalie de langage,
mais l'expression d'une réalité qui pourrait, à vrai dire, n'être plus
celle de demain.
Dans un lointain passé, dès le haut Moyen Age, la musique était
enseignée au même titre que les mathématiques et l'astronomie. Au
XIIIe siècle, l'Université naissante lui donnait place dans le Quadri-
Avant-propos vium, la division supérieure des «arts libéraux ». Nous la voyons
maintenant tombée au rang d'« art d'agrément »—un superflu auquel
l'honnête homme peut renoncer sans encourir le reproche de béotisme:
ou plutôt le pouvait, jusqu'à des temps proches du nôtre.
Car un profond changement est en train de s'opérer. Le dévelop-
pement de la radiodiffusion et de l'industrie phonographique (dont
l'activité a plus que décuplé depuis l'avènement du microsillon), les
mouvements de Jeunesses Musicales, les festivals, d'autres influences
encore, qu'il serait oiseux d'énumérer, font que la musique - toute
espèce de musique - tient dans notre vie quotidienne une place qui
ne cesse de grandir. Et si, pour certains auditeurs, elle n'a que le rôle
modeste d'un fond sonore auquel l'attention ne s'accroche pas, pour
d'autres, chaque jour plus nombreux, elle tend à devenir un besoin de
l'esprit et du cœur. C'est à ces derniers que s'adresse le présent livre,
et plus particulièrement à ceux qui, musiciens d'instinct, croient que la
musique leur est fermée parce qu'ils en ignorent la grammaire (comme
s'il était nécessaire de savoir peindre pour aimer VermeerouCézanne).
J'ai tenté de les guider à travers un immense domaine, non sans m'im-
poser des limites dans le temps et dans l'espace. J'ai renoncé à traiter
de points controversés qui ont de quoi passionner les érudits, mais dont
la discussion serait ici hors depropos: où, quand, comment la musique
est-elle Ttcc? Le rythme a-t-il précédé la mélodie ou inversement?
Dans quelle mesure la polyphonie a-t-elle été connue de l'Egypte des
Pharaons et des Grecs à l'époque classique? etc... J'ai laissé de côté
l'exotisme, aussi bien l'art savant de la Chine et de l'Inde anciennes
que le folklore de peuplades demeurées au stade primitif.
Mon objet précis est la musique occidentale, abordée à partir de
l'époque où elle se relie sans interruption à celle que nous entendons
aujourd'hui, c'est-à-dire au moment où commence de s'organiser le
chant de l'Eglise romaine.
On trouvera çà et là quelques termes techniques dont il était
impossible d'éviter l'emploi. Je me suis efforcé d'expliquer clairement
ceux qui dépassent un degré élémentaire de connaissance.
La nécessité d'être bref a laissé peu de place aux biographies et
à l'anecdote. Si intéressante qu'ait pu être parfois la vie des grands
musiciens - et sur les plus illustres la documentation abonde, acces-
sible à quiconque enserait curieux —, il importait d'abord de mettre en
lumière leurs activités créatrices, le rôle qu'ils ont joué dans l'évolution
de leur art. Tel est bien l'objet de ce livre.
Des origines à l'âge préclassique
Musiques lointaines Par malheur, riches comme nous le
sommes d'iconographie et de documen-
robuste pour s'affirmer. C'est au sortir
de ce tunnel que la musique moderne
tation livresque, nous ne possédons commence son évolution dont le début
La musique se manifeste en Occident, à peu près rien de la substance musicale nous est surtout perceptible dans la
aux premiers siècles de l'ère chrétienne, à quoi tout cela correspond. Rien ne musique sacrée, pour des raisons fort
sous des formes si humbles qu'on serait nous est parvenu de ce que pouvaient simples: il n'appartenait pas aux théo-
tenté de croire à un commencement chanter et jouer les Chaldéens et les riciens, moines pour la plupart, encore
absolu, n'était l'existence dûment éta- Egyptiens : tout au plus a-t-on recons- moins aux Pères de l'Eglise, de nous
blie d'un art déjà évolué, dans l'Orient titué quelques-unes de leurs échelles renseigner sur la musique profane ;
ancien, quelque 35 siècles avant Jésus- mélodiques. d'autre part on ne s'est d'abord appli-
Christ. Quant au fonds hébraïque, s'il est qué à noter que la musique liturgique,
En ces temps reculés, les riverains hors de doute qu'il provient en majeure dont le rôle était primordial. Aussi bien
du Tigre et de l'Euphrate pratiquaient partie de sources très anciennes, il les musiciens populaires, ménétriers et
le jeu d'instruments variés ; des scènes échappe jusqu'à présent à tout essai jongleurs, improvisateurs par excel-
de concerts figurent sur les bas-reliefs de classement chronologique rigoureux, lence, n'avaient-ils ni la science qu'il
chaldéens ; on a même retrouvé, dans et l'époque tardive à laquelle on a com- eût fallu pour consigner par écrit leurs
les fouilles d'Ur, la capitale du pays de mencé de le fixer par écrit ne permet pas inspirations, ni, probablement, le désir
Sumer, des fragments plus ou moins de discerner à coup sûr les éléments de les mettre ainsi à la portée de concur-
bien conservés de harpes, de lyres, et premiers des additions et déformations rents éventuels.
d'une sorte de hautbois double, précur- survenues au cours des siècles. Mais il est de toute évidence qu'une
seur probable de l'aulos des Grecs. Autre chose est de la musique grec- musique profane existait, multiforme :
L'Egypte pharaonique est encore plus que. Les savants traités d'Aristoxène chants de terroir, chants de métiers,
riche en vestiges de cet ordre. A partir de Tarente, Claude Ptolémée, Aristide chants magiques, guerriers, satiriques,
de la IVe dynastie, soit 27 siècles avant Quintilien, etc... nous en ont très exac- bachiques, etc..., issus de sources hété-
Jésus-Christ, apparaissent fréquemment tement livré la théorie, complétée par roclites, dont certaines pouvaient remon-
dans les peintures et bas-reliefs des les philosophes au double point de vue ter à l'antiquité gréco-romaine et au-
sépultures princières des groupes d'exé- de l'éthique et de l'esthétique. Mieux, delà, évoluant au gré des fluctuations
cutants formant jusqu'à de véritables nos hellénistes ont remis au jour et de l'histoire, des migrations et invasions,
orchestres. Les noms et dates biographi- transcrit en notation moderne une des progrès et régressions de la culture,
ques des plus célèbres musiciens de cour douzaine de fragments d'œuvres musi- des caprices de la mode contre lesquels,
nous ont été conservés, témoignant de cales : ils sont trop brefs, trop nus, au IVe siècle, s'irrite saint Basile:
l'importance de leurs fonctions ; et tous trop éloignés de nous pour qu'il soit « Il y a des villes où, du matin au soir,
les musées égyptologiques possèdent en possible de retrouver l'esprit dans lequel on peut assister à toutes sortes de spec-
nombre des flûtes, des cymbales, des ils étaient exécutés, et entendus.1 tacles d'histrions, et force est bien d'ad-
sistres, des harpes de formats divers. mettre que plus le peuple entend de
Au fur et à mesure que se révè- chants lascifs et pernicieux, plus il
lent d'autres civilisations orientales et désire en entendre ». Ceci dit, plusieurs
extrême-orientales, nous voyons la mu- Origines siècles s'écouleront avant que nous
sique y avoir place, tantôt associée au ayons de cette musique profane des
culte ou aux manifestations guerrières,
tantôt complément nécessaire de la
de la musique chrétienne témoignages notés.
Revenons à la musique sacrée. Elle
poésie, parfois, comme en Chine, liée a surtout, dans l'Eglise naissante, des
à une symbolique aux multiples rameaux Nous nous trouvons donc, au seuil de fins utilitaires. Pour aider les fidèles
qui lui confère, outre sa valeur d'art, le l'ère chrétienne, plus ignorants et plus à prier ensemble, un excellent moyen
pouvoir de régler —ou de dérégler — désarmés qu'en présence de la musique consistait à s'appuyer sur un chant très
les mœurs des individus et de l'Etat, de grecque du temps d'Aristoxène. Les simple, presque une récitation, modulée
refléter le mouvement des astres, d'être quatre premiers siècles nous restent dis- selon des rythmes et des contours mélo-
à la fois un passe-temps, une éthique, simulés sous un voile opaque ; ensuite, diques élémentaires. L'évangélisation
une politique, une cosmogonie. peu à peu, se devineront les linéaments ayant rayonné depuis l'Asie occiden-
Son action sur les âmes est alors si d'une musiqueliturgique qui n'aura pour tale, au voisinage de contrées où la
profonde (elle s'est diluée, depuis lors, nous de réalité sonore qu'au IXe siècle, psalmodie hébraïque était en vigueur,
à proportion de son extension en sur- avec l'apparition d'un système de nota- de nombreux historiens pensent que
face) qu'on lui attribue communément tion rudimentaire, mais déchiffrable cette psalmodie a dû servir de modèle ;
une vertu magique. Les mythes d'Or- moyennant une certaine part d'hypo- de fait, on a relevé entre les liturgies
phée, d'Amphion, d'Arion illustrent cet- thèse. juive et chrétienne des analogies assez
te croyance qui a survécu bien au-delà Après quoi le progrès sera relative- caractéristiques pour indiquer une filia-
du Moyen Age, dans les légendes folk- ment rapide, et surtout d'une impres- tion, sans parler de l'emprunt textuel de
loriques de contrées aussi distantes sionnante continuité. La chronologie des formules d'acclamation telles qu'alléluia
l'une de l'autre que les pays islamiques historiens situe en l'an 1453 une coupure ou amen.
et la Scandinavie. décisive entre deux stades de civilisa- Mais le véritable point de départ de
tion, Moyen Age et Renaissance : en l'évangélisation a été Antioche, ville
.... Stèle dédiée à Hor-Akhti par le chan- réalité, on ne la constate pas plus syrienne de culture hellénique ; c'est
teur Amon. Bois peint. Nouvel Empire en musique que dans la plupart des de là que saint Paul commença sa pré-
Egyptien, XXIIe Dynastie (Xe siècle domaines de l'esprit, ou du moins, pas dication, en langue grecque, et lorsqu'il
avant Jésus-Christ). Paris, Musée du à ce moment. S'il y a eu solution de engageait les fidèles de Colosse ou
Louvre. La harpe représentée ici, avec ses continuité entre deux façons de penser. d'Ephèse à chanter «des psaumes, des
dix cordes et sa caisse de résonance et de sentir, elle s'est produite bien avant hymnes et des cantiques spirituels », on
relativement développée, est déjà un ins- la chute de Constantinople, durant cette peut admettre que le support musical
trument assez évolué par rapport à la période confuse qui va jusqu'à la fin des de ces chants, destinés à des communau-
harpe primitive utilisée dès la qua- invasions barbares, quand la civilisa- tés où dominait l'élément plébéien,
trième dynastie par les Egyptiens et qui tion gréco-romaine s'écroule et que sa devait consister plutôt en timbres popu-
ne comportait que trois ou quatre cordes. remplaçante n'est pas encore assez laires grecs. En présence des diverses
Harpiste et chanteur chironome. Calcaire peint. Ancien Empire égyptien (Vers 2700 av. J.-C.). Paris, Louvre. Le chanteur.
dirige du geste les instrumentistes. Le harpiste utilise un instrument à sept cordes plus rudimentaire que celui de la page 8.
thèses qui s'affrontent au sujet des ori- Ainsi en jugeaient certains Pères de une force d'expansion redoutable, d'au-
gines de la musique chrétienne, il sem- l'Eglise. D'autres, enplus grand nombre, tant que les textes étaient découpés en
ble prudent de rappeler que les pays du réagirent là-contre, et obtinrent gain strophes régulières, le même air conve-
Moyen-Orient qui avoisinaient la Médi- de cause. Bientôt même, le culte du nant à toutes les strophes d'une hymne:
terranée communiquaient entre eux de Christ sorti de la clandestinité après saint Ephrem, et d'autres à son exemple,
toute antiquité. On a cité à ce propos l'édit de Milan (313), les réunions de trouvèrent pour l'Eglise la meilleure
un texte fort intéressant d'Hérodote, fidèles exigèrent des locaux plus vastes, riposte en puisant dans le même fonds
au Ve siècle avant Jésus-Christ: «Les et la psalmodie soliste, coupée seule- musical ou en composant des chants
Egyptiens ont une certaine mélodie ment de brefs répons devint insuffisante d'une structure aussi simple.
qu'on chante aussi en Phénicie, à Chy- pour remplir les nouvelles basiliques.
pre et en d'autres lieux sous des titres On fit davantage appel à la commu- A peu de temps de là, saint Hilaire,
différents dans chacun de ces pays. nauté, admise à chanter tout le psaume. évêque de Poitiers, qui avait été exilé
Elle ressemble tout à fait au chant Peut-être afin de rendre les choses plus en Phrygie où il avait entendu de telles
que les Grecs ont connu sous le nom faciles, la foule fut divisée en deux
de Linos. Je me demande d'où ils ont chœurs alternés, qui s'unissaient seule- hymnes, tenta, à son retour, de propager
ce nouveau style parmi ses compatrio-
eu ce chant — comme je me demande ment pour le refrain. Ce mode d'exécu- tes ; il ne réussit pas à l'imposer. Saint
tant de choses, en Egypte — car il tion, l'antiphonie (d'où le mot antienne, Ambroise, évêque de Milan (397) reprit
semble qu'il ait été en usage dans les paradoxalement employé pour désigner l'idée en la réalisant de façon plus acces-
temps les plus reculés ». le refrain, où justement cesse l'opposi- sible au commun des fidèles. Le succès,
tion des deux chœurs) aurait eu son cette fois, fut tel que le nom d'ambro-
berceau à Antioche, où selon l'historien siennes est resté attaché à toute une
Théodoret, on l'aurait pratiqué vers le catégorie d'hymnes qui ne sont pas de
Chants alternés milieu du IVe siècle. On croit qu'à l'ori- sa composition et sont même versifiées
gine un chœur comprenait les hommes, selon des principes différents des siens.2
l'autre les femmes et les enfants, les deux
Comment étaient exécutés les pre- groupes se répondant à l'octave, (1'anti-
miers chants de l'Eglise chrétienne ? phonie était précisément cet intervalle
A l'origine, que leur mélodie fût simple d'octave dans la théorie grecque). Etait-
ou ornée, elle était dévolue à un soliste, ce à proprement parler une innovation ?
Le chant grégorien
et non à la foule inculte. Mais certains Un texte du troisième millénaire avant
psaumes se terminaient par un alléluia Jésus-Christ fait état de la pratique, Cesinnovations commençaient à peine
ou par un court refrain, facile à retenir : chez les Sumériens, d'un chant exécuté de fleurir qu'une des plus terribles tour-
on prit l'habitude de le faire entonner en antiphonie par deux chœurs féminins. mentes que l'histoire ait enregistrées
par l'ensemble des fidèles. Ainsi s'éta- Une tradition assez répandue veut qu'à déferla sur l'Occident. A partir de
blit la psalmodie responsoriale, dialogue Edesse, en Syrie orientale, à une époque l'an 407, et pendant près de quatre siè-
entre un soliste et un tutti, lointaine et voisine de celle où le chant antiphonal cles, les invasions barbares allaient
primitive ébauche du style concertant. venait de naître, ou de renaître, à An- balayer presque tout ce que la Grèce
D'après de récentes découvertes, cette tioche, le diacre et grand poète saint et Rome nous avaient légué de culture,
opposition d'un soliste et d'un chœur Ephrem ait instruit des femmes à chan- en tous domaines — sauf un, celui
avait déjà cours dans l'ancienne Egypte ter selon cette méthode les psaumes précisément qui nous occupe, la musi-
pharaonique. La réacclimatation de qu'il adaptait à des mélodies populaires, que sacrée.
cette pratique chez les premiers chré- à l'imitation de l'hérésiarque Bardesane.
tiens n'alla pas sans lutte ; les ascètes Comme Arius et d'autres chefs de sectes
des IIe et IIIe siècles s'y opposaient, hérétiques, Bardesane se servait de la Musiciens militaires (tympanon, harpe- ►
craignant que le chant collectif ne musique pour véhiculer sa doctrine. Il lyre, cymbales). Bas-relief d'albâtre. Pa-
devînt trop agréable, au détriment de ajustait ses textes à des chants connus lais d'Assurbanipal à Ninive. VIle siècle
l'austérité. de tous, ce qui donnait à sa propagande av. Jésus-Christ. Paris, Musée du Louvre.
C'est que, dans un monde bouleversé à Grégoire Ier, pape de 590 à 604. a probablement été l'initiateur. Il fallait
où s'effondraient les royaumes tempo- On tend aujourd'hui à lui assigner un d'abord reviser le répertoire préexistant,
rels, l'Eglise catholique demeurait la rôle moins décisif: son nom aurait sur- en bannir les éléments troubles, pour
seule autorité à peu près stable, le seul tout servi, après sa mort, à donner les autres fixer la leçon la meilleure,
élément de continuité. Et cette Eglise autorité à des réformes amorcées par lui, disposer le tout de manière à consti-
était déjà en possession d'une musique mais parachevées bien au-delà de son tuer un corpus qui contiendrait, dans
animée d'une vitalité puissante : en elle pontificat. l'ordre du calendrier, les antiennes et
coexistaient en effet tout ce qui avait La diversité du répertoire liturgique, répons destinés à toutes les solennités
survécu de l'ancienne musique grecque, sa richesse croissante, la variété des de l'année ecclésiastique. Ainsi fut éla-
et ce fonds de chants d'une veine plus interprétations qu'en pouvaient donner boré l'Antiphonaire de l'Eglise romaine,
moderne et plus populaire, venus en des chanteurs de toutes races et de tous qu'on dit avoir été placé sur l'autel de
grande partie des communautés de degrés de culture, présentaient un réel saint Pierre, retenu par une chaîne d'or.
Syrie et d'Asie Mineure. danger de désordre, voire d'anarchie. Une autre légende veut que, Milan
Toujours est-il que la période des Des plaintes s'élevaient ici et là contre contestant au nom du rite ambrosien
grandes invasions coïncide avec une la disparité des liturgies locales, contre l'autorité de ce corpus, on ait, au
véritable floraison, et surtout avec la l'excessive complication de certaines ville siècle déposé sur l'autel de saint
première organisation du chant sacré mélodies, contre le caractère sensuel Pierre les deux livres, l'ambrosien et le
dans sa forme la plus pure, le chant de voix au timbre trop séduisant. Un grégorien, comme pour les soumettre au
grégorien, ainsi dénommé parce qu'on lourd travail d'unification et d'épura- jugement de Dieu, et tous deux se
en a longtemps attribué la création tion s'imposait, dont saint Grégoire seraient ouverts en même temps.
Restait à fixer des principes d'inter-
prétation; ce pourquoi l'on réorganisa
de fond en comble l'école romaine de
chant, la Schola Cantorum, pépinière de
missionnaires qui furent envoyés dans
! toute la catholicité pour propager la
règle officielle.
Pour définir sommairement ce chant
(dont les théoriciens du Moyen Age
; avaient établi les bases avant la mise
[ en ordre opérée par saint Grégoire) il
? nous faut nous reporter à la musique
1 grecque, sa lointaine inspiratrice, en
dépit de tout ce qui les sépare.
Les musiciens grecs classaient leurs
échelles mélodiques selon le genre et le
, mode auxquels elles étaient assujetties,
le genre déterminant l'amplitude des
intervalles employés, le mode fixant
l'ordre dans lequel on les disposait.
Grosso modo, ils distinguaient trois
genres : le genre diatonique, qui n'admet-
tait que deux sortes d'intervalles, cor-
respondant à peu près à notre ton et
à notre demi-ton ; le chromatique, mar-
qué par l'usage de petits intervalles
conjoints, de l'ordre du demi-ton ; l'en-
harmonique, où entraient des intervalles
de l'ordre du quart de ton.
Or, au début de l'ère chrétienne, sous
l'influence des néo-pythagoriciens, une
secte assez mystérieuse qui, dans Rome,
avait édifié un système religieux, philo-
sophique et social où la musique était
réglementée, le chromatique et l'enhar-
monique furent proscrits comme trop
efféminés. Ne subsistèrent que les inter-
valles, relativement simples, du ton et
du demi-ton, sur lesquels allaient reposer
le chant de l'Eglise et toute la musique
occidentale jusqu'au début du siècle où
nous vivons.
Le chant grégorien ne conserva donc,
des modes grecs, que ceux qui se récla-
maient du genre diatonique. Il n'y a pas
lieu de s'étendre ici sur la façon dont
l'héritage hellénique fut transmis à l'Oc-
cident. C'est une histoire confuse, au
terme de laquelle les désignations grec-
ques des modes, dorien, phrygien, éolien,
etc... furent appliquées à des modes
d'Eglise qui ne correspondaient nulle-
ment aux prototypes anciens.3
Le chant grégorien à l'état pur est
monodique, que son exécution soit con-
fiée à un soliste ou partagée entre soliste
et chœur ou entre deux chœurs alternés.
Quant à la forme, il comporte : des réci-
tatifs syllabiques, avec occasionnelle-
ment des figures de plusieurs notes sur
une seule syllabe ; des variations du réci-
tatif, plus ou moins ornées; enfin des
vocalises ornementales comme celles de
l'alleluta, qui prendront une importance
Joueur de crwth (ou crouth) et notation
neumatique. Tropaire de Saint-Martial
de Limoges. Milieu du XIe siècle (Neû-
mes sans ligne). Paris, Bibliothèque Nat.
Le crwth est une sorte de cithare à archet,
populaire surtout au Pays de Galles.
singulière un peu plus tard, lorsqu'elles Les premiers neumes —du grec neu- pour ajoutés ultérieurement). Ce sont
engendreront la séquence. ma, que dom Sufiol, l'un des plus émi- de petits signes, traits, points, crochets,
A l'époque où nous nous sommes nents spécialistes de la notation grégo- etc., disposés au-dessus du texte, et qui
arrêtés — le début du VIle siècle — rienne, traduit par figure, ou signe du avaient pour objet de fournir au chan-
le répertoire, déjà très considérable, du maître de chœurà ses chanteurs —appa- teur une sorte de sténographie, très som-
chant d'Eglise se transmet par tradition raissent dans les manuscrits liturgiques maire, de musiques qu'il était censé
orale. à la fin du VIIIe siècle ou au début connaître déjà.
Pourquoi, en Occident, l'Eglise chré-
tienne des premiers siècles n'a-t-elle pas
recouru à la notation alphabétique en
usage chez les anciens Grecs ? Oubli ?
Abandon volontaire d'une méthode que
sa précision hellénique adaptait mal à
ce que les psalmodies venues de l'Orient
avaient d'indéterminé ? Ouencore, rejet
de cette méthode en raison de ses
attaches avec des genres profanes,
danse, théâtre, chant populaire ? On en
discute encore, comme on le fait du sens
à donner à cette déclaration, pourtant
nette, d'Isidore de Séville au VIle siècle
dans ses Etymologies, 111.15.2: «Amoins
d'être retenus de mémoire, les sons péris-
sent, car on ne peut les écrire ».

Humbles débuts de la notation


en Occident
A défaut d'une écriture musicale on
pouvait essayer d'aider la mémoire des Manuscrit musical à neumes. Début du XIe siècle. Bibliothèque d'Autun.
chanteurs. Telle semble avoir été, au
début, la très modeste ambition des du IXe (il s'en trouve dans des manus- On dérive communément ces neumes
neumes. crits du VIle siècle, mais on les tient des accents qui, dans la prosodie grec-
que, commandaient les mouvements de
la voix vers l'aigu ou le grave4. Nous
constaterons leur prompte diffusion à
partir du IXe siècle, en de nombreux
pays où chaque centre religieux de
quelque importance les modifie à sa
façon.
Toutes ces notations ont comme élé-
ments premiers deux accents : la virga,
un trait qui s'élève obliquement de gau-
che à droite, dans le sens de l'écriture ;
son inverse, le punctum, un trait descen-
dant, plus tard réduit à un point —ces
accents signifiant, l'un que la voix doit
monter, l'autre qu'elle doit s'abaisser,
sans toutefois préciser l'intervalle à par-
courir.
Bientôt, pour caractériser des figures
mélodiques élémentaires de deux, trois
ou quatre sons, on fut amené à inven-
ter des neumes composés, auxquels
s'adjoignirent des signes de ponctuation
et d'interprétation dont le sens ne nous
est pas toujours très clair.
Puis, au Xe siècle, commença de se
dessiner un progrès lourd de conséquen-
ces. Jusqu'alors, les neumes étaient
juxtaposés à peu près horizontalement,
au-dessus du texte, chaque signe indi-
quant une inflexion de détail, sans rien
Musiciens (instrument à percussion et
olifant). Dessins illustrant un traité du
XIIesiècle. Paris, BibliothèqueNationale.
tre correspondant à la note qu'elle repré-
sentait. De ces lettres dériveront les
clefs qui rendront superflu le coloriage
des lignes.
On a longtemps attribué l'ensemble
de ces découvertes à Gui d'Arezzo, l'un
des plus célèbres théoriciens du Moyen
Age. Il suffit à sa gloire de les avoir
systématisées et propagées, et d'avoir
probablement inventé la solmisation,
une méthode de solfège à la vérité
assez primitive, mais qui a conduit
à l'élaboration de notre solfège.
Depuis le VIle ou le VIlle siècle, on
désignait par des lettres les six premières
notes de la gamme. Il eut l'idée, non de
remplacer les lettres mais d'adjoindre
à chacune d'elles la syllabe initiale d'un
vers de l'hymne à saint Jean-Baptiste :
Ut queant laxis Resonare fibris Mira
gestorum Famuli tuorum Solve polluti
Labii reatum.
Chaque vers de cette hymne étant
chanté un ton plus haut quele précédent,
sauf le quatrième, distant du troisième
seulement d'un demi-ton, le chanteur
bénéficiait d'un excellent moyen de
retenir la place respective des tons et du
demi-ton dans la série ut ré mi fa sol la.
C'est sur la série de six notes, ou
hexacorde, qu'est basée la solmisation
(de sol-mi, les notes extrêmes de l'hexa-
corde de sol).5
Resterait à parler de la rythmique
du chant grégorien, mais c'est un ter-
rain encore mouvant. Plusieurs doctri-
nes s'affrontent, conciliables, peut-être,
si l'on n'étendait pas outre mesure les
règles édictées par les Bénédictins de
Solesmes pour l'exécution du plain-
chant, cantus planus, «chant uni, aux
valeurs égales » qui est spécifiquement
grégorien. Ses récitatifs et ses chants
sont composés sur des textes en prose.
La rythmique qui lui est propre convient
moins bien, tant aux hymnes versifiées
au IVe siècle sur des rythmes de couplets
profanes, qu'aux cantiques et proses du
XIIe siècle, monuments d'un art posté-
David, jouant de la harpe, et ses musiciens, avec un carillon, un olifant, une vièle rieur de trois siècles à l'âge d'or du
et un orgue. Bible d'Etienne Harding. Début du XIIe siècle. Bibliothèque de Dijon. véritable grégorien (Ve-VIIIe siècles).6
qui pût donner idée du dessin d'ensem- répertoire connu de tous, transmis par
ble de la mélodie. Des copistes, italiens tradition orale, répertoire au demeurant Charlemagne
à ce qu'on croit, imaginèrent de suggé- assez simple, et dont une partie —les
rer les intervalles mélodiques en les
rapportant à une ligne idéale qui corres-
débuts et les finales des antiennes les
plus courantes —était déjà cristallisée
impose le grégorien
pondait à une note-pivot, située dans le en formules qu'on savait par cœur.
médium de la mélodie, les sons plus On n'en chercha pas moins à perfec- L'effort accompli par saint Grégoire
graves s'inscrivant en dessous dela ligne, tionner la représentation des interval- pour codifier le chant romain et en im-
les aigus au-dessus, à des distances pro- les : en traçant matériellement la ligne poser l'usage à toute la catholicité avait,
portionnées à l'intervalle à parcourir. auparavant imaginaire, puis en lui en en son temps, répondu à une nécessité
Ainsi la courbe vocale était représentée adjoignant une seconde, à intervalle de impérieuse. Pour l'avenir, il comportait
visuellement, saisissable au premier coup quinte, puis une troisième et une qua- de graves périls : la limitation du chant
d'oeil : ce n'était ni plus ni moins que le trième — ces lignes diversement colo- liturgique à un corpus assemblé une fois
principe de la notation diastématique riées, le fa presque toujours en rouge, pour toutes excluait les possibilités
(de diastema, intervalle), auquel notre l'ut en jaune. d'évolution d'une musique sacrée accor-
écriture
d'hui. musicale obéit encore aujour- Vers la fin du XIIe siècle, on disposait dée avec son époque ; à être ainsi con-
d'une portée de quatre lignes, à inter- damné à ne plus progresser, ce réper-
Sans doute le système était peu précis, valle de tierce l'une de l'autre, chacune toire courait grand risque de s'atrophier
mais rappelons qu'il s'appliquait à un d'elles désignée à son début par une let- et de se corrompre.
Charlemagne intervint à point nommé l'exécutant (chanteur ou joueur d'ins- à Hucbald (Commemoratio brevis, etc.)
pour le revigorer. En profond politique, trument) et il conclut : décrit «les citharèdes, joueurs de flûte,
il se rendit compte de ce qu'il pouvait Nam qui facit quod non sapit diffinitur chanteurs profanes étudiant de tout leur
attendre de la religion, et plus particu- bestia — car celui qui fait ce qu'il ne zèle ce qui se chante ou se joue, pour
lièrement du chant sacré, pour parfaire sait pas (dont il ne connaît pas la théo- la délectation des auditeurs ». Il nous
l'unification de la mosaïque de peuples rie) est une bête, par définition. On est dit que Charlemagne écoutait parfois
qui composait son empire. De toute son retrouve, après des siècles, ce souverain de telles musiques au cours des repas,

La plus ancienne chanson française, écrite entre Pâques et Noël 1144 (neumes sur lignes). Bibliothèque d'Erfurt.
autorité, aidé par son ministre Alcuin, mépris de l'interprète chez certains alternant avec la lecture de récits d'his-
usant au besoin de la manière forte, il compositeurs contemporains, en parti- toire. On commençait dès ce temps
s'appliqua à imposer le grégorien. culier chez Stravinsky. à composer de la musique sur des textes
Le rôle d'Alcuin dans la diffusion de latins relatifs à de grands événements
L'un des résultats les plus tangibles la science musicale fut considérable. d'actualité (l'un des premiers dont on
de son action fut l'ampleur donnée dans Venu d'York, où il avait été l'élève des ait gardé trace allait précisément être le
les monastères à l'enseignement de la meilleurs maîtres d'Angleterre, il ensei- Planctus Caroli, une déploration funèbre
musique, et non seulement de sa prati- gna surtout à Saint-Martin de Tours sur la mort de l'Empereur d'Occident).
que, mais de sa théorie, qui seule avait (de 796 à 804, avec quelques interrup- Par ailleurs, Charlemagne s'était appli-
droit au nom de musica. En des vers tions) et en fit la plus importante école qué à sauvegarder les poèmes de langue
souvent cités, Gui d'Arezzo a mis en française de son temps. franque où étaient célébrés d'anciens
évidence la supériorité du musicus, le La musique profane n'était pas non exploits guerriers, maintenant ainsi
théoricien ou compositeur, sur le cantor, plus négligée. Un des traités attribués une lyrique populaire d'où sortiraient,
trois siècles plus tard, les chansons de
geste.
A sa mort, l'effondrement de son
empire n'eut pas pour le développement
de l'art musical les conséquences qu'on
en pouvait redouter. Si, pendant un
demi-siècle, aucun nomde musicien créa-
teur ne s'impose, la théorie et la pratique
ne cessent d'avancer. La notation neu-
matique, en se précisant comme il a été
dit, (non sans anticiper quelque peu sur
les événements) donne à l'expression de
la pensée musicale des facilités nouvelles.
Mais c'est la pensée même qui va
s'épanouir à partir de deux innovations
d'une portée considérable, touchant
l'une, à l'enrichissement de la mélodie,
par la séquence et le trope, l'autre au
chant simultané de deux ou plusieurs
mélodies : la polyphonie.

Les Vieillards de l'Apocalypse tenant des


rebecs. Eglise de Moissac (Tarn-et-Ga-
ronne). Tympan du portail sud. V. 1130.
Séquences et tropes dont il dit avoir emprunté l'idée à une festations chez des peuples demeurés
église française des bords de la Loire, à un stade d'évolution très primitif;
amorce du drame liturgique Fleury. Il explique: «Tandis qu'on chan- et l'on est de moins en moins certain
te la troisième leçon, que l'un des quatre que l'Antiquité n'ait connu que la
moines s'approche du sépulcre et s'as- monodie.
Séquence et trope ont en quelque seye silencieusement, une palme à la Il est probable que les premiers siè-
sorte constitué l'antidote contre la para- main. Quand on chante le troisième ré- cles de notre ère ont connu des essais
lysie qui menaçait le chant sacré à la pons, trois autres moines entrent, et plus ou moins rudimentaires de poly-
suite de la réforme grégorienne. En sta- doivent,marchantprécautionneusement, phonie. On en a la quasi-certitude dès
bilisant le répertoire, en le limitant avec comme s'ils cherchaient quelque chose, le VIle siècle, mais ce n'est qu'au IXe
rigueur, saint Grégoire avait paré au s'approcher du sépulcre. Ces choses se qu'une théorie est exposée en plusieurs
plus pressé, puisqu'il s'agissait de frei- font à l'imitation de l'ange assis au sé- chapitres dans le fameux Musica en-
ner une liberté anarchique dans laquelle pulcre et des femmes venues avec des chiriadis attribué naguère au théoricien
tout risquait de sombrer ; mais l'immo- aromates pour oindre le corps de Jésus. Hucbald, erronément, paraît-il, mais qui
bilisme qu'il imposait eût été, à la Quand celui qui est assis remarque l'ap- est à coup sûr d'un de ses contemporains.
longue, tout aussi néfaste. Un expé- proche des trois autres, il doit, douce- Il définit une polyphonie à deux voix,
dient de fortune fournit aux musiciens ment et à mi-voix, commencer à chan- l'organum, dont l'espèce la plus simple
le moyen de concilier le respect des ter Quemquaeritis (qui cherchez-vous ?). procède par quintes parallèles. Le thème
textes de l'Antiphonaire avec le besoin Et quand il l'a chanté jusqu'à la fin, les liturgique, point de départ de la com-
de renouvellement sans quoi toute trois répondent à l'unisson: Ihesum naza- position, s'appelle vox principalis (on le
forme d'art s'étiole et meurt. renum (Jésus de Nazareth). » désignera un peu plus tard du nom de
L'usage s'était institué, venu des Cette action rudimentaire, ce n'était cantus firmus ou teneur) ; la voix qui
Eglises d'Orient, de donner à certaines ni plus ni moins que l'amorce du drame l'accompagne à la quinte inférieure est
pièces, en particulier à l'Alléluia un liturgique dont une riche floraison allait le duplum ou vox organalis :
prolongement (sequentia) en brodant s'épanouir sans tarder. Ses thèmes ? Les
sur la dernière syllabe une longue voca- mystères de la Nativité et de la Résur-,
lise de jubilation. Afin de retenir plus rection, les vies des saints et les miracles
facilement le contour mélodique de ce par eux accomplis. D'autres espèces, plus évoluées, recou-
jubilus, des moines de l'abbaye de A ses débuts fidèle et simple illus- rent au mouvement oblique entre les
Jumièges imaginèrent de mettre un tration de la liturgie, le théâtre devait voix, et admettent l'intervalle de quarte
texte syllabique (une syllabe par note) promptement étendre son domaine, en et, passagèrement, celui de tierce.
sous la mélodie. Lorsque Jumièges fut s'annexant au besoin des éléments pro- On a renoncé à dériver le nom de
brûlée par les Normands, un des moines fanes. l'organum de celui de l'instrument
qui s'en étaient enfuis trouva refuge en Des manuscrits des XIe-XIVe siècles orgue. Il est pourtant à remarquer que
Suisse, au monastère de Saint-Gall. Là nous ont conservé, texte et musique, de les orgues médiévales faisaient entendre
son confrère Notker le Bègue (Notker nombreuses pièces, dans lesquelles on ces mêmes suites de notes parallèles,
Balbulus) s'enthousiasma pour le pro- peut, à l'exemple de Combarieu, dans à la façon des jeux de mutation composés
cédé et le développa au point qu'on lui son Histoire de la Musique, entrevoir de l'orgue moderne. Chaque levier
en attribue souvent la paternité. Après l'ébauche de plusieurs genres dramati- (tenant lieu de nos touches) commandait
sa mort (912) d'autres, à Saint-Gall et ques: drame symbolique (Les Vierges non pas une seule note, mais plusieurs,
ailleurs, continuèrent dans cette voie. sages et les Vierges folles), mélodrame étagées en quintes et en octaves. Dans
La vocalise d'allure orientale s'était avec enlèvement et retour final d'un l'orgue monstre de Winchester, cons-
transformée, entre temps, en un chant enfant (Le fils de Gédron), drame à grand truit vers 950 (400 tuyaux, 26 soufflets
de coupe symétrique, et versifié: la spectacle (Daniel), féerie (Miracles de actionnés par 70 hommes, deux orga-
séquence ou prose (ce dernier mot né saint Nicolas), comédie lyrique (Le juif nistes attelés chacun à un clavier de
peut-être d'une confusion: dans l'abré- volé). vingt leviers, au dire du moine Wulfstan,
viation pro s", pro sequentia, on aurait Ces pièces, à l'origine, étaient jouées mort en 963) un seul levier mettait en
lu prosa). dans l'église même, avec un plus ou vibration 10 tuyaux sonnant à la fois
Le trope était sensiblement de même moins grand luxe d'accessoires ou même quintes et octaves redoublées et super-
essence, mais au lieu de faire suite de décors. Plus tard elles s'installeront posées. C'était là un instrument excep-
à un chant liturgique, il y était encastré, sur le parvis. tionnellement puissant et barbare, mais
interpolé. Entre deux mots d'un texte Les Mystères deviendront des specta- il devait en rester de cette sorte lorsque
sacré, on ajoutait soit des épithètes cles composites, mêlés de sacré et de deux siècles plus tard, de notables pro-
laudatives, soit un véritable commen- profane, de texte parlé, de chant soliste, grès accomplis entre temps, Aelred, abbé
taire. Dans les épîtres, il arrivait que ces de chœurs, de danses, de cortèges. de Rievaulx, dans le Yorkshire, fulmine
ajoutages empruntent la langue vulgaire, L'histoire littéraire les étudie d'assez contre l'abus des instruments à l'église,
afin que les fidèles pussent suivre plus près pour que nous y renvoyions le et particulièrement des orgues : «Pour-
facilement. Ces épîtres étaient dites lecteur désireux de plus d'information. quoi, je vous prie, cette terrible souffle-
«farcies ».7 rie, évocatrice des coups de tonnerre
Les tropes, comme les séquences, se bien plutôt que de la suavité des voix !»
multiplièrent avec une extrême rapidité, Dans l'organum des IXe et Xe siècles,
engendrant des variétés innombrables.
Par eux, des rythmes et peut-être des
Débuts de la polyphonie l'intervalle de tierce, considéré comme
dissonant, n'était toléré qu'à titre de
thèmes profanes vinrent voisiner avec transition. C'est seulement en Angle-
le chant grégorien.8 Au plus beau temps de la monodie terre que, de très bonne heure, on l'ad-
Mieux: l'habitude s'établit de dialo- grégorienne (IXe siècle), commençait met: mieux, il est à la base d'un système
guer certains tropes, et même d'en accen- d'apparaître une technique musicale fort harmonique appelé gymel (cantus gemel-
tuer l'expression par une véritable mise différente, celle de la musique à plu-
en scène. Voici celle que Saint-Ethelwold sieurs voix simultanées, la polyphonie. Les Vieillards entourant l'Agneau (vie- ►
prescrit, environ 970, aux Bénédictins Que c'en fût le début absolu, on a cessé les et rebecs). Miniature de «L'Apoca-
de Winchester, pour le trope de Tutilon de l'admettre, depuis surtout que les lypse de Jean Audrez ». XIIIe siècle.
préfaçant l'introït pascal Resurrexi, et ethnologues en ont découvert des mani- Paris, Bibliothèque Nationale.
On a émis l'idée que le gymel avait
pu être le point de départ d'une autre
sorte d'harmonisation, le faux-bourdon,
caractérisé par la prédominance de
chaînes de sixtes parallèles.9
L'origine anglaise du faux-bourdon
est parfois contestée de nos jours. Il n'en
est pas moinsvrai quela culture musicale
s'était propagée de bonne heure dans
les Iles Britanniques. Peu après l'évan-
gélisation par saint Augustin de Kent,
au début du VIle siècle, la musique était
enseignée à Canterbury, à Malmesbury,
York, etc. ; au IXe siècle, le philosophe
irlandais Jean Scot Erigène, dans son
De Divisione Naturae, en traitait som-
mairement, et dès cette époque l'Irlande,
le Pays de Galles, l'Ecosse avaient des
instrumentistes et des chanteurs dont
le renom allait vite gagner le continent.
C'étaient des moines irlandais qui
avaient fondé le monastère de Saint-
Gall. Au début du XIe siècle, le recueil
de tropes de Winchester, bien qu'écrit
en neumes, avec l'imprécision que cela
suppose, fait apparaître un notable
assouplissement de l'organum où déjà
le mouvement contraire est admis.10
Dès la fin du XIe siècle, le théoricien
John Cotton écrit un ouvrage qui a long-
temps fait autorité. Au XIIIe siècle
viendront, plus importants encore, Jean
de Garlande, ex-étudiant d'Oxford, qui
ouvre une école à Paris vers 1212, rue
de Garlande (plus tard rue Gallande)
d'où le pseudonyme sous lequel il est
entré dans l'histoire, et Walter Odington,
de qui le Despeculatione musices apporte
des lumières particulièrement intéres-
santes sur la rythmique médiévale.11
Dès le XIe siècle un organum plus
libre, que l'on appellera aussi déchant,
a succédé à l'organum note contre note
(point contre point, d'où le mot contre-
point, en usage depuis environ 1300, qui
désigne —abusivement —tout un mode
decompositionbasésurl'évolution simul-
tanée de plusieurs parties mélodiques).12
Le Charivari. Miniature du «Roman de Fauvel ». XIVe s. Paris, Bibl. Nationale. C'est en France que l'art contrapun-
Cet orchestre burlesque réunit bêtes etgens. La plupart jouent de véritables instruments, tique va d'abord se développer de la
tambourins, vièle, clochette et cymbales, tandis qu'un autre frappe sur une marmite. façon la plus brillante ; des manuscrits
en provenance de l'abbaye de Saint-
lus), qui consiste à accompagner la voix d'être cité, tant pour sa fraîcheur que Martial de Limoges renferment un choix
principale à la tierce supérieure. En pour la fermeté avec laquelle s'y affirme précieux de pièces écrites entre l'extrême
un sens tonal moderne déjà fréquent, fin du XIe siècle et le milieu du XIIe,
s'affinant, ce procédé donnera des œu- dans lesquelles on peut suivre son ra-
vres comme cet Edi Beo (Happy be à l'époque, dans les formes influencées pide enrichissement. Mais les premières
thou) d'environ l'an 1280, qui mérite par la chanson populaire:
réalisations définitives seront le fait de L'organum de Pérotin donne une im-
l'Ecole de Notre-Dame, à Paris, au cours pression d'unité rythmique et de puissan-
de la seconde moitié du XIIe siècle. ce telles qu'on le voit fort bien associé
La position des maîtres de l'Ecole de au cérémonial d'une solennité d'aujour-
Notre-Dame est probablement sans ana- d'hui, dans une cathédrale dont les carac-
logues dans l'histoire de la musique. téristiques, robustesse, élan, défi à la pe-
Nous avons d'eux des œuvres monu- santeur sont à tout prendre, les siennes.

«Summer is icumen in». Canon en notation romaine à notes carrées. XIIIe ou XIV- s. I
mentales, à leur propos les témoignages En dehors des organa, Pérotin a écrit
de la haute admiration qu'on leur por- dans la forme, alors récente, du conduit
tait de leur vivant. Sur leur carrière, sur polyphonique. A l'origine, on appelait
leur identité rien, si ce n'est leurs noms, «chants de conduite » (conductus) des
Léonin et Pérotin, qui sont plutôt des monodies qui accompagnaient les allées
prénoms familièrement déformés, et et venues des personnages dans les pre-
l'épithète «excellent organiste »dont on miers drames liturgiques (Daniel, vers
ne saurait décider s'il y est fait allusion 1140), puis ceterme a désigné des chants
au jeu de l'orgue ou à la composition qui servaient de préface à une lecture,
des organa ; car on n'a aucune mention ou ceux qui introduisaient le Benedica-
précise d'orgue à Notre-Dame avant le mus domino à la fin de l'office divin.14
XIVe siècle —encore s'agit-il d'un petit Tandis que Pérotin et son école ame-
instrument qui servait à la maîtrise, naient l'organum et le conduit à leur plus
pour l'enseignement. haut degré de développement, une autre
Pendant longtemps, on a été réduit forme naissait, qui allait dominer l'art
à admirer de confiance Léonin et Péro- polyphonique pendant deux siècles avec,
tin, sur la foi de documents anciens, au-delà, d'importants prolongements : le
et c'est seulement à la fin du siècle motet.
dernier qu'on a retrouvé dans diverses Il viendra un temps où, sous ce vo-
bibliothèques étrangères des copies des cable, on désignera presque toute poly-
compositions qui formaient le Magnus phonie vocale de style élaboré : à l'origi-
liber organi de graduali et antiphonario ne le motet est simplement une partie
de l'Ecole de Notre-Dame. On a identi- accompagnante, superposée au thème
fié avec certitude un certain nombre de liturgique (teneur), mais qui a son pro-
pièces de Pérotin ; pour celles de Léonin, pre texte, différent de celui du teneur
on ne peut que conjecturer.13 (d'où motet, petit mot, petit poème).
Car, le motet, devenu un genre musi-
Jongleurs et Jongleresses. Miniatures cal, s'est tôt enrichi d'une troisième et
du «Roman d'Alexandre ». XIIIe siècle. parfois d'une quatrième voix, combinées
Paris, Bibliothèque Nationale. On recon- selon les principes d'une complexité
naît, page ci-contre, une harpe à demi croissante. Sur la base de la teneur en
sortie de son fourreau. Ci-contre, de haut valeurs longues, les parties surajoutées
en bas, joueuses de cornemuse, de vièle, sont écrites en valeurs plus brèves, cha-
d'orgue portatif, de psalterion et de rebec. cune ayant son.rythme propre. La par-
tie supérieure, l'équivalent du dessus ou cle, pourtant, Isidore de Séville étudie, d'autres venues d'Angleterre et des
superius dans le quatuor vocal de la sous le titre Musica organica, les instru- pays scandinaves (la harpe, leur ins-
Renaissance, est habituellement la plus ments à vent, trompettes, flûtes, orgue, trument par excellence, passée par on
ornée. Notons qu'en matière de chant, etc... et sous celui de Musica rythmica ne sait quels cheminements de l'Egypte
le quatuor semble être, dès le XIIIe siè- les instruments à cordes et à percussion ; ancienne à l'Occident, apparaît en
cle, considéré comme l'effectif idéal. or on sait que l'Eglise en ce temps-là ne Irlande, en Ecosse, au Pays de Galles
Dans le motet à trois et quatre voix, les admettait pas volontiers, et certains avant qu'on n'en trouve la trace sur
chacune a son propre texte, en général d'entre eux étaient de toute évidence le continent).
commentaire de l'idée exprimée par le destinés aux divertissements des laïcs.
teneur. Par exemple, sur le teneur «In Autre preuve de la puissance d'expan-
Bethleem » le duplum chante: «In Be- sion de la musica cwilis : tout ce qui,
thleem Herodes iratus » et le triplum :
«Chorus innocentium sub Herodis stan-
dans une certaine zone de la musique
sacrée — hymnes des premiers siècles,
Des troubadours
cium Feritate nato rege gloriae ». plus tard, les ambrosiennes, plus tard aux chanteurs de laude
Il en va ainsi pendant la première encore les séquences et les tropes —
moitié du XIIIe siècle. Mais, sous l'in- atteste l'influence d'une rythmique sim-
fluence d'un art profane qui a notable- pliste venue d'elle à coup sûr. En revan- Vint un moment, à la fin du XIIe siè-
ment évolué, comme on le verra un peu che, nombre de chants populaires se sont cle, où ces ménestrels assumèrent un
plus loin, le motet ne tarde pas à s'éman- nourris de plain-chant et formés sur ses rôle plus important et, par chance,
ciper de curieuse façon. On donne aux modes.15 beaucoup mieux connu que le colpor-
parties-supérieures des paroles en langue C'est à la fin du XIe siècle que la tage des chansons de geste. C'est surtout
vulgaire, le teneur demeurant, pour musique profane prend, en Occident, un par eux, en effet, qu'a été propagé l'art
quelque temps encore, fidèle à son essor décisif. Son accélération s'explique des Troubadours et des Trouvères, magni-
origine liturgique. Bien vite, cependant, par diverses causes dont l'une des prin- fique floraison suscitée par l'exaltation
on en arrive à une liberté qui frise cipales est le développement, à l'époque de l'esprit chevaleresque né des Croisa-
l'anarchie. Les compositeurs prennent carolingienne, d'une lyrique latine dont des, et de ce qu'elles entraînèrent
plaisir à multiplier contrastes et dispa- on commence à mesurer l'extrême d'émotions guerrières, de déchirements
rates, non plus seulement dans les ryth- importance : d'abord tout un répertoire sentimentaux, de dépaysements, de dé-
mes et les langages employés, mais dans de chansons profanes ou semi-profanes, couvertes de tous ordres, parmi lesquel-
l'esprit des textes appelés à être chantés les versus dont l'abbaye Saint-Martial les certains érudits accordent une réelle
ensemble. On verra, par exemple, super- de Limoges avait réuni un abondant importance à celle de la lyrique arabe,
posés à un teneur latin d'esprit religieux, florilège ; puis ainsi qu'il a déjà été prolongée et approfondie grâce aux
trois textes français, une sentence mora- indiqué, les séquences et les tropes, où contacts des provinces du sud-ouest
le, un chant d'amour, une chanson à se rejoignent le profane et le sacré. avec la civilisation maurisco-andalouse.
boire. De là au motet profane d'où le On discute aussi de l'influence possible En effet, contrairement à l'idée cou-
latin sera banni, et qui ne craindra pas, des chansons que promènent à travers ramment admise, le berceau des Trou-
pour autant, de braver l'honnêteté, la l'Europe les Goliards, moines et clercs badours n'est pas la Provence, mais
distance sera vite franchie. itinérants, plus ou moins compromis l'Aquitaine, qui englobe alors le Limou-
Cependant, le motet n'est pas un dans la compagnie des jongleurs (voir sin, où l'activité musicale est grande,
genre populaire. Sa complexité le destine plus loin), et généralement en révolte autour de l'abbaye de Saint-Martial.
à une élite cultivée. Environ 1300, un contre l'Eglise officielle, qui ne les Le premier troubadour dont le nom
théoricien de renom, Jean de Grouchy ménage guère. Enfin il apparaît que les soit resté dans l'histoire est un très
(Johannes de Grocheo) déclare à son musiciens les plus cultivés s'essayaient haut personnage, Guillaume IX, duc
propos : «Ce chant n'est pas fait pour volontiers à mettre en musique les d'Aquitaine, qui vécut de 1071 à 1127.17
être offert au vulgaire, qui n'en com- poètes latins, soit classiques, Horace, Un chroniqueur, presque son contem-
prend pas les finesses et n'éprouve aucun Virgile, soit relativement modernes pour porain, Orderic Vidal, nous le dépeint
plaisir à les entendre : il s'adresse aux l'époque, tels Cassiodore et Boèce. homme d'action, vaillant, à son ordi-
lettrés et à ceux qui recherchent la En langue vulgaire, voici les Chansons naire jovial, franc bourdeur «fort porté
finesse dans les arts. C'est dans les fêtes de geste, interminables poèmes de 5000, à la plaisanterie, et surpassant par ses
organisées par eux qu'on accoutume de 10 000 vers et plus, où la musique avait facéties innombrables les plus farceurs
chanter les motets, comme les cantilè- un rôle qu'à vrai dire nous connaissons des histrions ». Les héroïnes de ses poè-
nes et rondels trouvent leur place dans mal. On pense que tous les vers de mes sont traitées sur le même pied que
les réjouissances du vulgaire ». Sa Theo- chaque «laisse », ou couplet, qui en celles des contes de Boccace. Ce n'est
ria définit une série de formes vocales pouvait comprendre 50, se chantaient qu'exceptionnellement qu'il renonce aux
et instrumentales de la musique profane sur un même thème, comme des litanies, histoires gaillardes pour se laisser aller
(musica civilis), parvenue à ce moment sauf le dernier, qui concluait en manière au sentiment pur : alors on pressent, à
à un point particulièrement intéressant de cadence. Il est probable que les inter- travers telle strophe inspirée, l'art plus
de son histoire, et qu'il est temps de prètes soutenaient leur chant par quel- délicat et plus profond qui sera celui de
prendre en considération. ques notes de harpe ou de vièle, ou Jaufré Rudel, de Marcabru, de Gaucelm
quelques battements de tambourin. Faidit, Raimbaud d'Orange, Guiraut
Peut-être aussi ravivaient-ils l'attention Riquier, de Bernard de Ventadour, leur
de leurs auditoires par de petits inter- maître à tous.
Essor de la musique profane ludes instrumentaux : l'iconographie mé-
diévale appuie cette hypothèse.16
Le mouvement dont les troubadours
avaient été les initiateurs devait, en
Les propagateurs ordinaires des chan- moins d'un demi-siècle, se propager au
Sur les conditions d'existence de cette sons de geste sont les jongleurs, loin-
musique profane jusqu'au XIe siècle, tains descendants des baladins de la
nous n'avons, répétons-le, aucune lu- décadence romaine, troupe bigarrée où Les musiciens Guillaume Dufay et Gilles ►
mière précise. Sa vitalité nous est sur- se mêlent des races et des classes diver- Binchois. (Orgue portatif et harpe.)
tout attestée par les réactions, le plus ses, des gens en rupture d'Eglise (go- Miniature du «Champion des Dames »,
souvent défavorables, qu'elle suscite de liards) et des ignares, où se heurtent de Martin Lefranc. XVe siècle. Paris,
la part des Pères de l'Eglise. AuVIle siè- des influences françaises, bretonnes, Bibliothèque Nationale.
Ce livre a été établi avec la collaboration
de l'équipe de l'Œil
sous la direction de Georges et Rosamond Bernier .

Maquette de Robert Delpire

Photographies en couleurs

Hermann Claasen: page 44 — Conzett &Huber: page 185 —Fleming: pages 24-25, 33, 91, 118-119
Giraudon: pages 21, 38, 58-59, 69, 75, 83, 97, 115, 123, 160, 170, 172, 207
Gleixner: page 131 — Hinz: pages 48, 51, 55, 175, 190, 193, 198 — Luc Joubert: page 211
Archives Knœdler: page 177 — Frank Lerner: page 86
Services photographiques de la Bibliothèque Nationale, Paris: pages 12, 27 —De Schutter: page 30

Photographies en noir
A.C.L. — AFI — L'Adriatica — Alinari-Giraudon — Anderson-Giraudon
Archives Photographiques — Archives Wildenstein —Ashmolean Museum, Oxford
Bayerische Staatsbibliothek, München — Bibliothèque d'Autun — Bibliothèque d'Erfurt
Bildarchive der Osterreichischen National-Bibliothek — British Museum — Bulloz
Camera Press — Colombia Records — Conservatoire musical G.B. Martini
Robert Doisneau —Walter Drâyer —Editions du Seuil — Galerie Maeght
Germanisches National-Museum Nürnberg —Giraudon —Hanfstaengl —Harlingue —Fritz Herrle
Historisches Museum der Stadt Wien — Lipnitzki
Metropolitan Museum of Art —Claude Michaelides —Musée d'Albi —Musée de Hambourg
Musée Municipal de La Haye — Musée Plantin, Anvers — National Gallery, Londres
Foto Julius Oppenheim — Philips
Photo-Harder —Fred Plaut —Rapho — Services photographiques de la Bibliothèque Nationale
Services photographiques du Musée du Louvre — Adrian Siegel
Soprintendenza alle Gallerie di Firenze — Roger Viollet

L'auteur tient à remercier ses éminents confrères: Mlle Solange Corbin, MM. Jacques Chailley,
Roland-Manuel, André Verchaly, qui ont bien voulu relire les épreuves des chapitres afférents à
leur domaine, ainsi que les conservateurs et bibliothécaires des principaux fonds musicaux français,
Bibliothèque du Conservatoire, Bibliothèque de l'Opéra, Département de la Musique à la Bibliothèque
Nationale, et les conservateurs des fonds étrangers, pour l'aide qu'ils ont apportée à l'établissement
de l'iconographie. A cet égard, l'assistance de Mlle Henriette Boschot et de MM. F. Lesure et
V. Fédorov a été particulièrement précieuse. Nous remercions également: Mmes Gilberte Cournand,
Léon Tézenas, MM. Man Ray, Adrian Siegel, Moulène, Editions Heugel, Editions Durand,
Columbia Records.

Achevé d'imprimer le 15 octobre 1959


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