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UNIVERSITÉ ALASSANE OUATTARA

U.F.R : Communication, Milieu et Société


Département de Philosophie
Année académique 2022-2023
Niveau d’étude : Licence 3

SYLLABUS DE COURS

PRÉSENTATION DU COURS
 Intitulé de l’UE : PHILOSOPHIE MODERNE
 Intitulé du cours (ECUE) : HEGEL (Le système hégélien comme procès réflexif
du Concept)
 Nombre de crédits : 3
 Volume horaire : 21 h 30
 Localisation de la salle : Amphi B ou Salle polyvalente (Nouveaux bâtiments Campus 2)

ORGANISATION DU COURS
Les enseignements se dérouleront sous la forme d’un cours magistral. Toutefois, pour une
meilleure intelligence des positions à enseigner aux apprenants, des échanges et discussions seront
privilégiés.
Au chapitre des consignes, les retards de plus de 15 minutes devront être évités. Pendant le
cours, les téléphones portables seront désactivés.

PRÉSENTATION DU PROFESSEUR

 Nom et Prénom : KOUAKOU Antoine (KWAN)


 Grade : Professeur Titulaire
 Spécialité : Métaphysique, Éthique et Philosophie de la religion, Philosophie de la Technique,
Gestion des Conflits
 Fonction : Vice-Président de la Commission Scientifique de l’UFR CMS, Directeur de
Publication de la Revue Internationale de Philosophie RESPETH : www.respeth.org,
Fondateur de l’IRESSH (Institut de Recherches en Sciences Sociales et Humaines
 Bureau : Espace Lycée, Porte 8
 Contacts : Tel : (+225) 0103471175/ 0709626129 / E-mail : k_anthoyne@yahoo.ca
 Jour et Heure de réception : Sur Rendez-Vous.

MODE D’ÉVALUATION DU COURS


L’évaluation des étudiants se déroulera suivant le mode d’une évaluation de groupe lors des TD et
d’un examen individuel sur table. Les sujets se présenteront sous la forme de commentaires de
textes ou de questionnaire portant sur le CM ou sur des textes d’appui.
DESCRIPTION DU COURS

Le système hégélien comme procès réflexif du Concept

Ce cours entre dans le contexte général de l’histoire de la philosophie, vu que son intitulé Hegel fait
mention de l’une des grandes figures de l’histoire de la philosophie. Il (le cours) est en son fond, un
essai de compréhension de la philosophie de ce grand auteur allemand qu’est Hegel. Eu égard à la
densité sinon à la profondeur de son édifice philosophique, notre réflexion se propose de nous y
introduire. Comme telle, il convient de dire que ce cours est une forme d’introduction à la pensée de
Hegel. Dans cette perspective, procéderons-nous par nous familiariser à la terminologie ou aux
vocabulaires spécifiques du penseur, avant de pénétrer, un peu plus à fond, dans l’économie générale
de sa pensée et en apprécier, en fin de compte sa portée.

OBJECTIFS :

- Objectif général
 Amener à une compréhension substantielle de la philosophie de Hegel

- Objectifs spécifiques
 Faire tomber le préjugé de la difficulté à cerner Hegel
 Comprendre des concepts fondamentaux de la philosophie hégélienne
 Avoir une connaissance appréciable du système hégélien

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INTRODUCTION

En amorçant ce cours, qui est un cours d’histoire de la philosophie, nous nous heurtons à deux
préoccupations centrales qui sont les suivantes : qui est Georg Wilhelm Friedrich Hegel et pourquoi
une histoire de la philosophie ? Relativement à la première préoccupation, on pourrait répondre
simplement en ces termes : Hegel est un grand penseur de l’histoire de la philosophie. Si cette réponse
a l’avantage de nous introduire directement à la seconde préoccupation, elle semble quelque peu
lacunaire ; c’est pourquoi il nous faut d’avantage la déployer en indiquant par exemple sa biographie.
À ce propos, écoutons Élisabeth Clément, Chantal Demonque, Laurence Hansen, Pierre Kahn :
« Georg Wilhelm Friedrich Hegel naît à Stuttgart le 27 Août 1770. Il entre en 1788 au Stift en
Tübingen (un séminaire protestant) où il se lie d’amitié avec Hölderlin (1770-1843) et Schelling
(1775-1854). Il travaille ensuite comme précepteur, journaliste, et, dès 1801, commence une carrière
universitaire qui le conduira jusqu’à Berlin, où il occupera la chaire de l’université de Fichte. Il
meurt le 14 novembre 1831 du Cholera. » (Dictionnaire philosophique De A à Z, Paris, Hatier, 2000,
P.190). Il importe, en dehors de Fichte et Hölderlin, que Hegel est contemporain d’Emmanuel Kant
(1724-1804) qui reste bel et bien son devancier. De l’ensemble de son œuvre multiple postérieur à
celle de Kant, classé dans le champ de l’idéalisme allemand, on pourrait noter : Leçon sur l’histoire
de la philosophie, (traduction nouvelle de Gilles Marmasse, Paris, Vrin, 2004, dont la traduction est
de Jean Gibelin, Paris Gallimard 1954) ; Encyclopédie des sciences philosophiques Tome I ; La
Science de la logique, (traduction, présentation et annotation de Bernard Bourgeois, Paris, Vrin
20117) ; Science de la Logique Tome I ; La doctrine de l’Être ( 2 ème édition 1831-1832, traduction
de S. Djantolevitch, Paris, Obier-Montaigne..) ; La phénoménologie de l’esprit ( 1807- traduction de
Jean Hippolithe, Paris, Obier/Montaigne, 1939-1941) ; Principe de la philosophie du droit ou droit
naturel et science de l’État (1821, traduction, présentation et commentaire de Jean-Paul Frick et de
Robert Deratté, Paris Vrin 1993). Il y a bien d’autres ouvrages dont les leçons sur la philosophie de
l’histoire, la raison dans l’histoire. Quand on vient à examiner l’ensemble de ces écrits, on se rend
bien compte non seulement de leur étendu mais encore et surtout de leur profondeur. Hegel n’est-il
pas, d’ailleurs de l’avis de nombre de spécialistes, l’un de ceux qui aura révolutionné la philosophie qu’il
convient de saisir désormais comme un système au sens où tous les éléments qui la constituent sont et
demeurent solidaires de l’ensemble ! Qu’est en effet qu’un système sinon « un ensemble organisé
d’éléments interdépendants » (Élisabeth Clément, et all, Op cit P. 438). Cela revient à dire que la
philosophie de Hegel est à com- prendre, non pas en ces particularités conceptuels, mais elle n’a de
sens que relativement au tout (das ganze) = totalité. Comment comprendre autrement le second terme
de notre préoccupation susmentionné ? Autrement dit, il est ici, exprimé dans une certaine

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mesure un sens de ce qu’on pourrait entendre par l’histoire de la philosophie. De l’avis de Hegel lui-
même, « l’histoire de la philosophie nous présente la galerie des nobles esprits qui, grâce à l’audace de leur
raison ont pénétré dans la nature des choses, dans celle de l’homme et dans celle de Dieu, qui nous en ont
révélé la profondeur et ont élaboré pour nous le trésor de la connaissance suprême. Ce trésor dont nous
réclamons notre part, constitue la philosophie en générale. » (Hegel, Leçons sur l’histoire de la philosophie,
traduction de Jean Gibelin, Paris, Gallimard, 1954, P.18). Hegel a ainsi une haute considération de la
philosophie. Pour lui, celle-ci s’enracine dans une tradition de continuité ou les pensées présentes,
actuelles s’appuient sur celle du passé pour se construire et ce dans un mouvement dialectique ou
critique ; mouvement de la pensée revenant souvent sur elle-même par abolition ou conservation ou
dépassement que l’auteur traduit lui-même par Aufhebung. Pour Jean- Pierre Lefèvre par exemple « le
terme aufhebung a été fétichisé (…) le plus souvent, le terme se détermine dans un contexte et un
syntagme particulier (…) lorsqu’Hegel ne dit rien, le terme a le sens dominant dans la langue
(abolir) ; dans certains contexte (minoritaire), le terme veut dire à partir d’un sens premier négatif,
‘’retirer une chose de la circulation pour la mettre de côté, la protéger et la destiner à plus tard’’ » (
conférence disponible en ligne : https : //lycée Hnry4.com/ 2020/11/ conférence5/PDF.) Cette
détermination de l’aufheben exprime clairement les relations entre les grands esprits dont parle
Hegel et dont l’édifice philosophique dans leur construction procède souvent par déconstruction à tel
enseigne aucune réflexion ne saurait isolement sortir de terre par elle-même : chaque nouvelle philosophie
est le résultat de travaux antérieur.

S’il est évident que nombreux sont les esprits qui ont œuvré afin que la pensée déployée parvienne
jusqu’à nous qu’est ce qui justifierait le choix singulier porté sur Hegel ? pour quiconque pourrait
s’étonner du choix d’un tel auteur au motif par exemple qui nous importe, en tant que contemporain,
de nous abreuver davantage aux sources de penseurs de notre temps, en abandonnant ainsi ces auteurs
classique du passée, d’un passé révolu, renvoyons le à ces affirmation de Martin Heidegger, lui-même
grand lecteur de Hegel : « Hegel n’est pas pour nous (…) un point d’ancrage choisi arbitrairement
et une occasion parmi d’autres (…) la philosophie hégélienne a pris définitivement sa stature dans
l’histoire de la pensée—ne faudrait-il pas dire de l’Estre —, comme celle qui exige de façon inouïe
et encore incomprise qu’il y’ai explication avec elle — exigence qui s’adresse à toute pensée venant
après elle ou voulant préparer le retour de la philosophie — ou peut-être même étant dans la
nécessité de la préparer. » (Heidegger, Hegel… Paris, Gallimard, 2007 ; P.21). Il s’ensuit que le
philosopher hégélien est digne d’intérêt ; il mérite l’attention de tous. Ainsi nous ne saurions à ce
niveau de notre démarche occulter les questions suivantes : que représente fondamentalement Hegel
au cœur de la philosophie tout entière, c’est-à-dire dans son passée, son présent et son avenir ?

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Quand n’est-il de son économie de pensée grâce à laquelle il se positionne parmi les grands penseurs
de notre histoire ? Et, en quoi nous faut-il passé par le vocabulaire hégélien pour appréhender son
édifice philosophique si tant est que tous les spécialistes sont unanimes sur la complexité, voire la
difficulté du lexique hégélien ?
I. FAIRE TOMBER LE PRÉJUGÉ DE LA DIFFICULTÉ À CERNER HEGEL
Imaginons un professeur de Philosophie, entièrement versé dans l’histoire de la pensée philosophique,
et surtout pénétré de l’idéalisme allemand, avec, en toile de fond, la pensée de Hegel, l’une des figures
emblématiques de la Philosophie. Ce dernier, arrive dans un espace clos, où sont assemblées plusieurs
personnes, de diverses sensibilités intellectuelles, et sans grande connaissance de la pensée
philosophique que, pour la plupart, nombre d’entre eux ont ouï-dire qu’elle est hermétique et que
ceux qui la dispensent seraient des « fous » ! Que gagnerait-il à faire pour captiver son auditoire et
surtout faire tomber les préjugés discriminatoires au sujet de ce savoir particulier ? De tout point de
vue, il serait absurde de les y introduire par le « disque dur », c’est-à-dire commencer par leur
développer les théories hégéliennes. Tel est le sens de cet énoncé : « Découvrir Hegel par le
concept ». En d’autres termes, parce que le philosophe d’Iéna est reconnu pour la spécificité et
l’herméticité de son philosopher, commencer par plonger les Apprenants – quoique déjà familiers à
la philosophie et, de surcroit, en Licence 3 de philosophie, et qui, cependant, affrontent pour la
première fois un cours sur Hegel – dans le fin fond de l’hégélianisme, pourrait apparaître quelque peu
suicidaire. Encore que, aux cœurs de cette réflexion, l’en-jeu est d’amener les Apprenants à
comprendre la pensée hégélienne ! Dans un tel cas de figure, il importe d’embrasser Hegel par sa
terminologie, ce qui veut dire, se familiariser avec son discours spécifique en ses grandes lignes
fondamentales – vu qu’il est impossible voire vain de vouloir aborder, dans le cadre d’un cours, la
totalité du vocabulaire hégélien– Et dans un tel cas de figure, procédons, pour emprunter un terme
propre à Gérard Lebrun, par « la patience du concept » (G. Lebrun, La patience du concept, Paris,
Gallimard, 1972, 421p.).

Il nous faut chercher à cheminer avec Hegel, entrer en Hegel, lentement et prudemment, en
commençant par nous approprier quelques termes essentiels de sa philosophie. Ce serait ainsi, somme
toute, le plus sûr moyen, la voie idoine de surmonter la difficulté liée au système hégélien ; car il est
évident, certes, que « Hegel est un immense philosophe. Sa pensée est réellement géniale, mais son
œuvre, malheureusement, est probablement, avec celle de Kant, la plus difficile et la plus abstraite
qui soit dans toute l’histoire de la philosophie » (Luc Ferry, Hegel et l’idéalisme allemand : Penser

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l’histoire, Paris, Flammarion, 2012, p. 7). Cette vérité, dans son évidence même, est rejetée par Hegel
lui-même, dans la mesure où, à ses yeux, « tenu pour le créateur de la langue philosophique allemande
(voire européenne), Kant est surtout le fondateur d'un vocabulaire technique caractérisé par son
abondance et sa spécialisation, spécialisation qui va parfois à rebours des significations ordinaires
(ainsi, Kant donne à Anschauung le sens de intuitio). (…) Hegel est fondamentalement hostile à cette
langue et à cette lexification » (Jean-Pierre Lefèbvre, « Traduire Hegel », Conférence, disponible sur
le web : https://lycee-henri4.com/2020/11/conference5.pdf. Consulté le 7 février 2023.) Les plus
proches commentateurs de Hegel, ne partagent pas entièrement que Hegel aurait un langage
entièrement accessible. Ainsi, Bernard Bourgeois peut-il préciser :

Le vocabulaire utilisé par Hegel est, dans ses termes, très simple, composé qu’il est
des mots de la langue la plus populaire. Le penseur l’a d’ailleurs voulu expressément
tel : il combat, en philosophie, l’emploi des termes abstraits, surtout fabriqués par le
philosophe s’imaginant à tort qu’il a à dire autre chose que la vie et, donc, à le dire
par d’autres mots que ceux dont celle-ci se sert. La philosophie vraie’ spéculative,
doit refléter ce qui est, et elle doit l’exprimer dans la langue ordinaire. (…) Aussi, le
vocabulaire hégélien est-il par principe porté par le vocabulaire basique allemand :
Sein (être), Werden (devenir), Etwas (quelque chose), etc. : il promeut des expressions
courantes : an sich (en soi), für sich (pour soi) … [Néanmoins, convient-il de e le
reconnaître], cette grande familiarité lexicale du discours de Hegel fait contraste avec
la non moins grande difficulté que ce discours oppose à sa compréhension. (Bernard
Bourgeois, Le vocabulaire de Hegel, Paris, Ellipse Éditions Marketing, 2000, p. 5).
Pour affronter un tel auteur, une telle pensée qui, aux dires de certains spécialistes, "exige que
le lecteur s’élève aux concepts", seule l’explicitation conceptuelle demeure la pierre angulaire de son
intellection. Tout se passe ainsi comme si, par l’élucidation des concepts – eux-mêmes venant à
s’offrir par une auto-présentation – le lecteur en vient à s’assurer d’un appui gnoséologique. C’est
bien ce qui nous pousse à faire nôtres ces lignes de L. Ferry (Ibidem) : « Je voudrais aujourd’hui faire
en sorte qu’à la fin de cette leçon (…), même si vous n’avez jamais lu une ligne de Hegel, vous ayez
quand même une idée claire et profonde de ce qu’est l’hégélianisme. J’aimerais même que vous
commenciez à pouvoir lire sans difficulté certains passages de son œuvre qui vous permettrons après
d’aller plus loin par vous-mêmes ».

Toutes ces lignes confirment la conviction selon laquelle la philosophie est une activité de
conceptualisation et que, s’il est clair qu’on peut apprendre à philosopher – « : philosopher s’apprend,
n’en déplaise à Kant c’est un travail qui exige de la patience et une érudition patiemment acquise »
(G. Lebrun, Op. cit., p. 13) – la meilleure façon d’y parvenir est par la terminologie, par les concepts
ou notions clefs, c’est-à-dire aussi par le langage. Et du langage, voici ce qu’en dit Martin Heidegger
(Questions IV /Lettre sur l’humanisme, Paris, Aubier-Montaigne, 1987) « Le langage est la maison

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de l’être. Dans son abri, habite l’homme. Les penseurs et les poètes sont ceux qui veillent sur cet abri.
Leur veille est l’accomplissement de la révélabilité de l’Être, en tant que par leur dire ils portent au
langage cette révélabilité et la conservent dans le langage. ». Disons, simplement, que par le mot,
nous accédons au plus intime, celé dans une philosophie. Dans cette assurance, en abordant ces
concepts clés de la philosophie de Hegel, nous aurons à l’esprit le souci de simplicité langagière du
philosophe de la Chaire de Fichte, sans toutefois verser dans une familiarité déconcertante qui
édulcorerait le sens fondamental et contextuel propre à chaque terme.

II. DÉCOUVRIR HEGEL PAR LES CONCEPTS

Avant de nous engager véritablement dans ce travail d’explicitation, il s’impose de clarifier


deux termes qui, de l’essai de problématisation à cette première partie, n’ont cessé de nous
accompagner en chemin : Hégélianisme et Idéalisme. L’hégélianisme, disons- le simplement, est la
doctrine de pensée issue du philosophe Hegel ou née à partir de sa pensée. Il désigne ainsi le
système philosophique qui s’est constitué avec/autour de lui. L’hégélianisme, tout comme les
systèmes de pensées érigés à partir des auteurs – ainsi en est-il du platonisme, de l’aristotélisme, du
thomisme, du cartésianisme, etc. – doit s’entendre de l’intérieur comme de l’extérieur, c’est-à-dire
intrinsèquementtout comme extrinsèquement. Il y a donc Hegel lui-même, tout comme ses disciples
et toute la philosophie qui s’est développée autour de ses théories. En écrivant par exemple « Hegel
et l’hégélianisme », dans les années 1861, environ trente ans après la disparition de Hegel, Edmond
Scherer voulut attirer l’attention de tous sur ces facteurs. Aussi, ses observations en disent-elles long :

On ne juge bien les grands hommes qu'à distance. Pour comprendre leur œuvre, il
faut qu'elle se soit montrée dans toute sa portée (…) Pour comprendre un système
philosophique, il faut qu'il nous soit devenu étranger, et, pour ainsi parler, que nous
puissions le considérer du dehors. Nous connaissons Descartes et Kant, je veux dire
le sens et la valeur de leur œuvre, infiniment mieux qu'on ne les connaissait à l'époque
où l'enseignement de ces philosophes passait pour le dernier mot de la philosophie. Il
en est de même de l’hégélianisme. (Edmond Scherer, « Hegel et l’hégélianisme »,
Revue des Deux Mondes (1829-1971), 15 Février 1861, Seconde Période, Vol. 31, No.
4 (15 Février 1861), pp. 812-856).
Dans la droite ligne de cette observation, les doctrines de pensée, même si elles sont édifiées à partir
de la philosophie des penseurs, demeurent l’œuvre de leurs disciples ou commentateurs. C’est bien
pourquoi, pour ce qui concerne Hegel, allusion est faites aux hégéliens de Gauche et à ceux de Droite.
Il est dit des hégéliens de gauche qu’ils défendaient une critique historique des évangiles, un
réformisme politique, et pensaient leur projet comme l’accomplissement du système hégélien, à
l’opposé, les hégéliens de droite optaient pour une lecture positivisme de la religion, un conservatisme
politique et une défense du système de Hegel. Qu’en est-il de l’Idéalisme ?

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-En un sens général parlant, l’idéalisme est un concept philosophique, qui ramène l’être à la pensée
et les choses à l’esprit. Il s’oppose ainsi au Matérialisme. En nous exprimant ainsi, il apparaît
loisible de mentionner Karl Marx (matérialiste) qui, de sa gauche hégélienne, en est arrivé à
renverser tout le système hégélien fondé sur l’idéalisme. Si avec l’idéalisme, il est possible
d’affirmer que c’est l’idée ou la raison qui mène le monde, dans la logique matérialiste, ce sont les
conditions matérielles d’existence qui déterminent l’histoire des hommes. Parce que l’Idée chez
Hegel fonde toute chose, l’on parle d’un Idéalisme absolu. En effet « Hegel, de fait, revendique lui-
même, la dénomination ‘’d’Idéaliste’’, mais c’est précisément à ce titre qu’il prétend rendre compte
de ce qui est le plus concret. » (Elisabeth Clément, et all, Op cit 191.)

L’Idée, apparemment abstrait, puisqu’elle ne relève pas du tangible, prends, chez Hegel la forme de
la chose la plus concrète. Ne sommes-nous pas ainsi ramenés à l’Idéalisme platonicien dans lequel le
monde sensible ou réel n’est que le monde des apparences ; alors que celui des Idées en est le réel,
le vrai. Comment élucider ce paradoxe ? « Ce paradoxe s’éclaire si l’on considère les fondements
théoriques de sa philosophie. Les rapports entre la pensée et l’être, l’intériorité spirituelle et
l’extériorité matérielle, le sujet connaissant et l’objet connu ont longtemps été conçu comme un face
à face, une dualité. » (Elisabeth Clément Ibidem). Ce primat de l’Idée dans la philosophie
hégélienne, laquelle demeure la chose la plus concrète, donne à penser à cette affirmation devenue
classique ou connu de tous chez cet auteur : tout ce qui est rationnel est réel, tout ce qui réel est
rationnel. De l’Idée à la raison et de la raison à Dieu, n’est-ce pas là le système hégélien en
déploiement et dont les termes se contenaient sans aucun fétichisme ni fixité. Cela nous autorise, en
saisissant l’Absolu à faire un clin d’œil à Dieu et à la raison.

-L’Absolu, il se dit en allemand das absolute. Dans la philosophie hégélienne, et cela de l’avis de
Bernard Bourgeois duquel nous déterminerons l’essentiel de conceptualisation « l’absolu, en tant
qu’il doit exprimer Dieu dans le sens et dans la forme de la pensée (…) ne peut cependant pas être
saisi comme étant en rapport avec ce qui serait radicalement autre que lui, ainsi que la religion se
représente parfois Dieu. Car il désigne ce qui est absous, délié, sans lien ou relation avec quoi que ce
soit d’autres qui le limiterait ou délimiterait. » (Bernard Bourgeois, Le vocabulaire de Hegel, Paris,
Ellipses, éditions Marketing, 2000, P 5.) L’Absolu ou Dieu est l’indéterminé pur, ce qui ne renvoie
qu’à soit même, sans aucune autre détermination ainsi que l’ajoute Bourgeois « il ne peut donc pas
être déterminé, river à une détermination (…) il n’est donc lui- même que s’il a en lui toutes les
déterminations, et toutes les déterminations qu’il totalise activement en lui, en les

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maîtrisant, en les relativisant. » (Op.cit., P.6). Dans son Encyclopédie des sciences philosophiques,
Hegel nous dit que la meilleure façon d’approcher l’Absolu est d’en parler en terme d’Esprit : « La
plus haute définition de l’Absolu n’est pas seulement qu’il est Esprit, mais qu’il est Esprit
absolument manifeste, conscient de soi, infiniment créateur »
-De la raison, comme précédemment exprimé dans le cours de notre réflexion, à savoir que toute
nouvelle pensée s’édifie sur celle des autres, Hegel ne peut que s’appuyer sur le rationalisme
kantien, mais avec une certaine différenciation. En effet, « Hegel, dans sa conception de la raison,
s’inscrit formellement dans l’héritage kantien, tout en en renversant le contenu (…) Hegel en fait le
principe de toute réalité véritable (…) en tant que totalisation effective, c’est-à-dire identité de
l’identité (traditionnellement attribué à ‘’la raison’’) et la différence renvoyer ordinairement à la
réalité la raison hégélienne se présente comme aussi bien idéal, aussi bien objective, subjective.
Principe ainsi universelle de tout sens et de tout être, puisqu’elle assure l’identité du sens et de
l’être, la raison conjoint en elle la différenciation de l’identité et l’identification de la différence. »
(Bernard Bourgeois, Op.cit. P. 53-54). Il faut ainsi le reconnaitre, le rationalisme hégélien en son
objectivité et subjectivité, en tant que rationalisme absolu (confère l’énoncé fondamentale de la
préface de la philosophie du droit, ‘’ce qui est rationnel est effectif, et ce qui est effectif est
rationnel’’), est loin du criticisme kantien.

-L’Aliénation, (se dit en allemand entäusserung, =dehors, entfremdung) dans le vocabulaire


hégélien, elle traduit le devenir autre d’une réalité ce qui veut dire, « l’action de se dessaisir (ent) de
quelque chose en le rendant extérieur (äusserung) ou étranger (fremdung) à soi.» (Bernard
Bourgeois Op.cit. P.10). l’intellection simplifier de ce terme hégélien, nous oblige à tourner le
regard sur la finitisation de l’infini et l’infinitisation du fini, expression de l’aliénation de Dieu dans
le salut de Dieu. Ph 2, 5b-8 « le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement
le rang qui l’égalait à Dieu mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant
semblable aux hommes. Reconnu homme à son aspect il s’est abaissé devenant obéissant
jusqu’à la mort et la mort de la croix. » Cette référence biblique est confirmée par l’analyse que
Bourgeois fait de ce concept. Selon lui en effet, « Hegel généralise le concept d’aliénation et en fait
un moment nécessaire essentiel de l’existence spirituelle de l’esprit (…) dans la mesure où
l’universalisation de la notion d’aliénation s’accompli en ce sens qu’elle est inséré dans l’absolu
lui-même— expression spéculative du terme chrétien du Dieu qui meurt pour ressusciter - , le
problème se pose du sérieux même de l’affirmation par Hegel d’une telle notion : dire de Dieu, qui
ne peut mourir, qu’il meurt, n’est-ce pas simplement faire mourir la mort elle-même, annulé
l’aliénation qu’elle achève ? » (Bernard Bourgeois Op.cit. P.7-8) De l’idée d’esprit précédemment
évoqué se pose cette interrogation : faut-il comprendre l’esprit comme il en est de l’âme ? Comment
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saisir l’âme chez Hegel ? Voici ce qu’en dit le spécialiste Bernard Bourgeois : « l’âme est un
moment, simplement un moment, et le moment immédiat, primaire, non concret de l’esprit »
(Bernard Bourgeois Op.cit. P.8). Cette saisie de l’âme est claire : en tant que moment de l’esprit quien son
objectivité se fait absolu ou Dieu, elle participe de lui.
Le concept (begriff) ; pour Bernard B., il convient de saisir qu’on ne saurait confondre dans le
philosopher hégélien, l’entente ordinaire du terme concept, sinon le sens qu’on lui attribue en général
: notion, terme ou élément fondamental dans le contenu spéculatif d’un auteur. Par exemple chez
Heidegger le concept d’Etre, chez Platon celui du Bien. Aussi affirme-il : « si la philosophie
hégélienne, qui expose l’Etre comme le tout peut se présenter comme la philosophie du concept, donc
du tout comme concept de lui-même, c’est qu’elle ne réduit pas le concept à sa définition courante de
représentation d’un sens général abstrait » (Bernard Bourgeois Op.cit. P.16). Dans l’ordre du
philosopher hégélien en effet, en dehors de la saisie du concept comme vie de la totalité, il convient
de savoir aussi que le concept désigne aussi la vérité d’une chose sinon la chose parvenue à son
effectivité. Ainsi par exemple, quand Hegel parle de religion achevée ou religion accomplie, il veut
dire ce qui suit : « la substance (quand on parle de substance, on parle d’essence, vérité d’une chose)
de la religion [qui est] le concept - c’est-à-dire ce qu’elle est véritablement : elle est la vraie religion,
vraie au sens où elle correspond à son concept, c’est-à-dire correspond à celui-ci non pas pour nous,
mais, à l’intérieur de la conscience de soi. » (Hegel, Leçon sur la philosophie tomt2, Paris, Vrin 2010
? P.33). Mais que faut-il entendre ici par conscience de soi chez Hegel ?

La conscience (Bewusstsein) : « la conscience, au sens strict du terme, est le deuxième moment de


l’esprit, en sa constitution subjective d’esprit se sachant tel en tout ce qu’il sait. Elle suppose
l’âme.» (Op.cit. P.18). Pour plus de précision, il faut encore savoir que « la conscience, [est le] lieu
de l’opposition, de la scission, et de l’objet, dont de l’épreuve—du malheur—qu’est, au fond
l’expérience. » (P.19). Il s’ensuit que le champ de l’expérience est celui de l’épreuve de la
conscience qui dans sa distanciation vis-à-vis de l’objet peut manquer de prise ou d’emprise sinon
de savoir.
-Contradiction : la philosophie de Hegel pourrait-on affirmer est le lieu où se vit la contradiction, le lieu où la
contradiction elle-même est la vie sinon donne vie ; ainsi que le signifie clairement B.B, « si l’entendement
courant limite la contradiction au dire, aux pensées, (…) la raison hégélienne affirme que tout être la contient
en lui : "où que ce soit, il n’y a absolument rien, en quoi la contradiction c.-à-d. des déterminations opposées,
ne puisse et ne doive être montrée" ( voire science de la logique,§89, P,335) » (B.B p.30). Cette idée
d’opposition ou de contradiction ne présuppose-t-elle pas le concept de dialectique dans la philosophie de
Hegel ? Qu’en est-il réellement ?

La Dialectique chez Hegel s’entend comme le mouvement tripartite inscrite aux cœurs des choses
en un sens général, elle se saisie comme l’affirmation, la négation de l’affirmation et le
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dépassement de la négation, moments qu’il est convenue de nommer sur la forme de la thèse,
antithèse la synthèse, et dans la pensée hégélienne, il convient de distinguer le dialectique de la
dialectique. Que faut-il en retenir ? Qu’est ce qui est à distinguer entre le dialectique et la
dialectique ? « Le dialectique constitue l’un des trois moments, l’une des trois dimensions signifiant
essentiels, de tout ce qui a sens et être. Toute chose est, d’abord identique à elle-même (…) mais
une telle identité pour elle-même abstrait, n’est celle de telle chose, d’une chose déterminé,
différencié en elle-même et, par-là, réellement de tout autre, que pour autant que la chose est non-
identité, différence d’avec elle-même, en elle-même, donc, en vérité, contradictoire, ou identique à
son opposé, telle est son moment dialectique ( A est non A, soit B) : " le moment dialectique
est la propre auto-suppression des détermination fini et leur passage dans leurs opposés" (SL §81
p.43.) » (B.B, P.22) exemple : moment dialectique de la graine qui est enfouie dans le
sol et en sort une fleur…) pour comprendre la dialectique, il nous faut revenir au présupposée
d’affirmation, de négation et du dépassement de la négation. Cela montre « A est nié en non A ou B,
lui-même nié en non B ou A [ce qui] établit par là même est ce qui nécessairement, c’est la
négation de ces deux auto-négation réciproque, leur identité positive, soit C (…) le dialectique est
le moment moteur de la dialectique. » (ibidem, p.23)

En examinant le concept de la dialectique, surtout en son moment dialectique, nous semblons tout
proche d’un autre concept hégélien qui est l’en-soi et le pour-soi (en et pour soi = an sich et fûr
sich). De façon général, l’en soi désigne la chose elle-même en son immédiateté. C’est pourrait-on
dire l’être-là ; il faut le rappeler, dans une philosophie postérieure à Hegel, J.P Sartre se saisissait
pour désigner la chose d’une part et de l’autre, la réalité humaine. Cependant chez Hegel, le pour-
soi est loin de désigner la réalité humaine mais plutôt il ramène à la conscience de soi de toute
chose, de tout être. Et lorsque ces deux termes sont associés (exemple l’état est le rationnel en soi et
pour soi), cela renvoi à la plus haute perfection (de l’état). C’est cela qui fait dire B.B ce qui suit :

« tout ce qui est, idéalement ou réellement, est d’abord son être en soi, de façon enveloppé, en
germe, potentiellement (…) puis dans un deuxième moment, l’identité simple de cet être se déploie
dans un milieu extérieur à elle (…) : elle existe, est là (da sein), mais une telle activité qui la fait
s’extérioriser en elle-même, et exalte ainsi son pour-soi, dissocie ce que son en soi réunissait. Le
troisième moment du processus de tout ce qui est, constitue alors la réconciliation de l’en-soi et du
pour-soi, l’être en-et-pour-soi. » (B.B, op.cit., P.26).

Ce parcours d’élucidation conceptuelle, apparaît de fond en comble comme une découverte de la


philosophie hégélienne elle-même. Peu à peu, les concepts abordés nous ont introduit dans certains
pans du philosopher hégélien qui est une forme de conceptualisation. En claire, « les pensées vraies
et la pénétration scientifique peuvent seulement se gagner par le travail du concept. Le concept seul
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peut produire l’universalité du savoir, laquelle n’est ni l’indétermination ordinaire et l’indigence
du sens commun, mais bien une connaissance informée et accomplie (…), la vérité parvenu à sa
forme authentique. » (Hegel, phénoménologie de l’esprit tome1, Paris, Gallimard, 1941, P.60).
Mais comment élucider l’essentiel de la philosophie hégélienne ?

III- DE L’ÉCONOMIE DE LA PENSÉE DE HEGEL POUR UNE APPRÉCIATION DE SON


SYSTÈME

Penseur de la totalité, Hegel résume la philosophie comme un système ou un savoir encyclopédique.


Partons de l’affirmation de Merleau Ponty dont nombre de spécialiste hégélien aiment à évoquer «
Hegel est à l’origine de tout ce qui s’est fait en philosophie » ces fleurs lancés au philosophe de l’État
prussien, ne sont point arbitraire, puisque l’économie de pensée du philosophe embrasse, dans son
encyclopédicité la totalité du savoir. On y découvre la phénoménologie qui va de pair avec la
psychologie, la psychanalyse voir même psychiatrie (cf. la phénoménologie de l’esprit) la logique,
l’épistémologie ou la science elle-même (cf. la science de la logique / encyclopédie des sciences
philosophiques), le droit ou la philosophie politique (cf. principe de la philosophie du droit), la
religion ou la théologie (cf. leçons sur la philosophie de la religion / foi et savoir), sans oublier le
vaste champ de la philosophie elle-même, avec la métaphysique, l’éthique, etc.
Au plan métaphysique, Hegel distingue l’encyclopédie philosophique de l’encyclopédie au sens
ordinaire. Celle-ci est selon lui « un agrégat des sciences qui sont accueillies de façon contingente et
empirique ». Il s’agirait d’une simple collection de sciences ou de connaissances puisqu’ici il s’agit
d’une simple collection de sciences rassemblées de façon extérieure. En conséquence, l’unité ne peut
être qu’extérieure. À l’inverse, comme le souligne Bernard Bourgeois « l’encyclopédie
hégélienne, bien loin d’être une somme de connaissances fort pauvres en pensée, est un Tout de la
pensée démontrant ses propres richesses ». La philosophie est encyclopédie en ce que la philosophie
est pensée de la vie, pensée de la totalité qui est identiquement totalité de pensée. Avec Hegel,
l’Absolu est vie et la vie c’est le mouvement infini consistant à s’efforcer elle- même vers le maximum
d’elle-même depuis sa détermination la plus pauvre jusqu’à la réalité spirituelle. Comme l’écrit
Hegel, « la vie pure est l’Être » et « le divin est pure vie ».
De cette approche de l’Être, en faisant une incursion au plan politique et social la philosophie
hégélienne soutient que l’État est l’incarnation du divin. Il n’est pas autre chose que l’incarnation de
l’Esprit lui-même dans la réalité, le Dieu réel, le terrestre divin. Il est la condition suffisante favorisant
la liberté de l’homme. Autrement dit, le droit de l’État reste toujours supérieur au droit particulier des
individus dans la mesure où l’homme doit "tout ce qu’il est" à l’État. Mieux, vis-à-vis de l’individu,
l’État incarne de façon souveraine la vie éthique ou encore la morale absolue. Ainsi dans Principes de la
philosophie du droit il souligne que « le droit et la moralité et la réalité juridique et morale se conçoivent
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à travers des pensées, se donnent la forme rationnelle, c’est-à-dire universelle et déterminée au moyen
de la pensée. C’est cela qui constitue la loi, et cette sentimentalité qui se réserve l’arbitraire, qui fait consister
le droit dans la conviction subjective a bien raison de considérer la loi comme son pire ennemi. » (Hegel,
Principes de la philosophie du droit, Préface, Paris, Gallimard,1940, p.34). Cette philosophie de la moralité
objective ou de l’éthicité est explicitée à travers une stratification à trois dimension en l’occurrence la famille, la
société civile et l’État.
Enfin, culturellement et historiquement, Hegel montre comment le triomphe de chaque peuple et civilisation
demeure celui du progrès de l’Esprit lui-même incarné dans l’État. En ce sens, « l’État renferme en lui le besoin
d’une culture et d’une intelligence plus profondes, et en exige la satisfaction de la science ; de plus, ce genre de
pensée va d’elle-même, quand elleconsidère le droit, la moralité et le devoir aux principes qui, dans chacune de
ses sphères, constituent précisément l’erreur superficielle, les principes des sophistes que nous avons appris chez
Platon, principes qui font reposer le droit les buts et les opinions subjectifs, sur le sentiment et la conviction
particuliers, principes d’où il résulte aussi bien la destruction de la moralité intérieure, de la conscience
juridique, de l’amour et du droit entre personnes privées que celles de l’ordre public et des lois de l’État. »
(Principes de la philosophie du droit,Op. cit., p. 35.)
À partir du principe de la liberté de l’Esprit, Hegel construit aussi l’histoire du monde dans la perspective d’une
fin atteinte. Les étapes capitales de la libération de l’Esprit par lui-même sont, dans sa philosophie de l’histoire,
le commencement à l’Est et la fin à l’Ouest. L’histoire du monde commence avec les grands empires orientaux
de la chine, de l’inde et de la perse, elle se poursuit, du fait de la victoire décisive des grecs sur les perses, par la
formation des états grecs et romains au bord de la méditerranée et elle s’achève avec les empires chrétiens
germaniques de l’Europe de l’ouest. La liberté, qui appartient en propre au monde chrétien germanique, n’est plus
l’arbitraire d’un despote isolé, elle n’est pas non plus la liberté des grecs et des romains nés libres, liberté qui
suppose l’esclavage, mais elle est la liberté de chaque chrétien. L’histoire de l’orient représente l’enfance de
l’évolution universelle, celle des grecs et des romains est son adolescence et sa maturité, tandis que Hegel lui-
même – à l’ultime fin du monde chrétien-germanique – et pense « dans la vieillesse de l’esprit ». Toutefois, à y
voir de près, seule l’Afrique est exclue de cette histoire universelle selon Hegel.

CONCLUSION
En somme, Hegel est le philosophe de la totalité du savoir et, de toutes ses œuvres, l’encyclopédie se
présente comme l’une de ses œuvres maitresses. André Léonard, dans la structure du système hégélien
(In Revu Philosophique de Louvain, 4eme série, tome 64, N-4, 1971, P. 495-524) n’en dit pas le
contraire. Parlant de l’encyclopédie, il affirme ce qui suit « elle est en effet l’œuvre culminant de
Hegel, en laquelle il a voulu déposé la forme achevée de sa pensée. » Hegel est un grand penseur de
la philosophie, de la profondeur de sa penser à l’ampleur des regionalités scientifiques abordés, (cf.
Esthétique, éthique, moral, histoire, etc.) Sa philosophie quoi que critique en certains aspects reste
actuelle. La preuve en est qu’aujourd’hui, il continue d’intéresser la pensée contemporaine qu’elle
n’a cessé d’influencer.
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