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A Brigitte Engerer,

magicienne des pianos, disparue avant le temps

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© Paris, Libella, 2014
ISBN : 978-2-283-02723-3

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UN DINER
en musique
Recettes de Michel Portos
Texte de Nathalie Krafft
Photographies de Hervé Lefebvre

Préface de Michel Blanc

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Avant-propos
de Nathalie Krafft

Voici la chose : créer des recettes inspirées par les habitudes alimentaires et
les goûts culinaires de dix compositeurs. Les créer, et non tenter l’impossible
en les reconstituant dans le style de l’époque, comme le font les marchands du
temple à Salzbourg qui proposent aux touristes ingénus des menus comme au
temps de Mozart.

Si la musique, à mon sens, n’a rien à faire avec la cuisine, les compositeurs
ont tout à faire avec ce qui les nourrit, tout simplement parce que ce sont des
hommes. Ainsi, découvrir leurs goûts et leurs habitudes alimentaires dans
leurs correspondances et leurs écrits, c’est ouvrir une porte sur l’espace le plus
quotidiennement familier de leurs existences, c’est quitter la sphère de leurs
destins pour celui de leurs cuisines, c’est, mutatis mutandis, les entrapercevoir
sous un profil qui n’a été que très peu dessiné.

Nourri d’éléments culinairement biographiques, le chef Michel Portos, étoilé


et mélomane, a donc imaginé trente recettes autour de Bach, Mozart, Beethoven,
Schubert, Rossini, Chopin, Verdi, Moussorgski, Satie, Dutilleux, revisitant à sa
manière les knoedel aux foies, le plat favori de Mozart enfant, les huîtres rôties
chères au palais de Beethoven, ou les gnocchis sucrés que servait George Sand
à Chopin tandis que lui-même se plaisait à cuisiner des pâtés en croûte, sa folie.

Lui avait-on raconté enfant l’histoire de cet énorme pâté en croûte d’où
jaillit, un jour de 1454, un orchestre de vingt-huit musiciens qui jouèrent fort
probablement quelques airs de Gilles de Binchois et Guillaume Dufay, ses

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confrères ? Ce fantasme de gourmet mélomane eut une réalité lors du Banquet
du faisan, un festin grandiose qui se tint à Lille sous l’autorité de Philippe Le
Bon, le duc de Bourgogne, afin de sceller un accord politique. Rossini aurait
adoré aussi ce pâté en croûte orchestral, lui qui a conçu sa Petite Messe solennelle
en deux parties afin de pouvoir dîner à l’entracte. À l’entracte… Je laisse la parole
à Michel Blanc, comédien, scénariste et réalisateur mais aussi connaisseur de
musique avéré et fin gastronome.

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Preface
de Michel Blanc

Chère Nathalie,

Tu m’as demandé quelques mots pour préfacer ton essai. J’en suis très
flatté. Musique et gastronomie, joli menu !

Beaucoup de compositeurs de génie ont été accros à d’autres pianos


qu’à ceux de Pleyel. J’ai découvert que l’excellent restaurant italien du coin de
ma rue était le lieu de rencontre favori d’Henri Dutilleux et de mon ami Éric
Tanguy. Deux générations de compositeurs pensant la musique entre antipasti
et carbonara, quelle belle image !

Oui, mais bémol : il est délicieux de parler en dînant du concert dont


on sort. Mais écouter Bizet la bouche pleine, c’est très impoli. Cette obligation
de supporter un flot ininterrompu de musique anxiolytique dans la plupart des
restaurants est extrêmement agaçante. « Quand on n’en met pas, les couples
n’ont rien à se dire », t’a répondu un gargotier, chère Nathalie. Que de divorces
évités grâce au concerto d’Aranjuez !

Il y a plusieurs catégories de moquettes musicales. Tout simplement la


radio dans le bar-tabac prolo, le mixé-branché dans les cantines à bobos, et
enfin le « classique » dans les auberges à haute prétention. Les Quatre Saisons au
synthétiseur en dessous de deux fourchettes et à partir de l’étoile, on grimpe
en gamme proportionnellement au nombre de « macarons ». On mastique sur
Gluck, on déglutit sur Purcell. Quasi impossible d’y échapper.

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Bien sûr, vous allez me répondre : « Et Louis XIV, il se gênait peut-
être ? » Certes, les goinfreries des monarques dégoulinaient de Tafelmusik.
Mais d’une part, ces œuvres dînatoires ne sont pas ce qu’on a composé de
mieux (ça n’engage que moi), d’autre part, ils étaient le plus souvent mariés
à des étrangères. Ça limitait la conversation. Il fallait bien combler les temps
morts. Donc pour assurer l’harmonieux mélange des dynasties, les Telemann,
Delalande et leurs prédécesseurs ont dû inventer la lounge music (encore la
faute à l’Europe tout ça !)… Franchement, se retrouver quelques siècles plus
tard avec FIP sur le croque-monsieur, ça justifie la prise de la Bastille.

Alors puisqu’il semble impossible d’échapper à cette malédiction,


permets-moi, chère Nathalie, une suggestion : Pourquoi ne pas créer des
« musiqueliers » ? Des sommeliers de la musique en quelque sorte. Ils pourraient
venir nous conseiller la cantate qui va bien avec les ris de veau.

MUSIQUELIER
Avec le tartare de dorade et langoustines de Madame, on pourrait partir sur un
Mozart un peu frais, un Rondo de jeunesse par exemple…

LA CLIENTE
Oui… Moi j’avais pensé à l’ouverture de Coriolan…

MUSIQUELIER
Je déconseille Beethoven sur le poisson…

LA CLIENTE
Vous croyez…

MUSIQUELIER
Oui Madame. Trop de longueur en oreille. D’une manière générale Beethoven
écrase les fruits de mer. Monsieur a pris des asperges. Rien ne va comme on le
dit sur les asperges. Je proposerais à Monsieur un silence pendant son entrée
s’il est d’accord. À la rigueur, un bruit d’eau de rivière s’il faut quelque chose.

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LA CLIENTE
Je vous fais confiance.

MUSIQUELIER
Pour les truffes et girolles de Madame, nous avons un très bon Dialogue des
carmélites de chez Monsieur Poulenc, et pour Monsieur qui a pris le lièvre à la
royale, je verrais bien un Freischütz.

LA CLIENTE
Von Weber m’assomme un peu… Vous n’auriez pas quelque chose de plus
digeste ? Un Verdi par exemple ?

MUSIQUELIER
Nous avons une Force du destin bien faite, si Monsieur préfère. Sa vivacité
réveillera le lièvre.
Pour les desserts nous avons deux soufflés, je crois ? Je conseillerais un
Reynaldo Hahn un peu sucré… Le côté liquoreux mettrait bien en valeur le
chocolat amer…

LA CLIENTE
Parfait.

MUSIQUELIER
Eh bien merci. En attendant avec les amuse-bouches, un apéritif peut-être ?
une Veuve joyeuse d’une bonne production de chez Monsieur Lehár ?

LA CLIENTE
Après tout, c’est ton anniversaire chéri… Deux Veuves joyeuses. Merci.

Voilà chère Nathalie.


Je t’embrasse et souhaite à tes lecteurs « une excellente dégustation ».

Michel Blanc

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UN DINER AVEC ...

Jean-Sebastien

BACH
1685-1750

Les mains dans la farine, la tête près des étoiles, c’est d’un tel pétrin qu’a surgi
Jean-Sébastien Bach, vingt-quatrième d’une fabuleuse lignée de musiciens. Veit,
le premier Bach connu, est boulanger. Mais un boulanger pas tout à fait comme
les autres : il pétrit la pâte en musique et moud le blé au rythme d’un cistre,
comme Jean-Sébastien, son arrière-arrière-petit-fils, le peint quand il écrit la
généalogie de sa famille : « Veit avait grand plaisir à jouer d’un petit cistre qu’il
prenait avec soi pour aller moudre le blé et en jouait ce faisant (les deux instru-
ments devaient ensemble sonner joliment !). Telle fut pour ainsi dire l’origine de
ce goût pour la musique chez ses descendants », raconte-t-il. C’est donc au pain,
l’aliment de base, que l’on doit Jean-Sébastien Bach, le compositeur de base qui
nourrit toutes les faims musicales.

Lui-même apprécie la bonne chère et se rend aux banquets qui lui sont offerts.
Salade d’asperges chaudes, poisson au beurre d’anchois, cerises, citrons,
Jean-Sébastien a goûté ces mets, jusqu’aux pommes de terre qui n’avaient pas
encore conquis la France et au café qui lui avait conquis l’Allemagne. Complè-
tement séduit par le breuvage, le Cantor de Leipzig, dont la figure est respectée
dans toute l’Europe, lui rend hommage avec une Cantate légère comme une
soirée d’été dans les jardins du Café Zimmermann.

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Salade d’asperges vertes
tiedes, vinaigrette potagere
POUR 4 PERSONNES
24 asperges vertes 1 branche d’estragon
1 sucrine Quelques feuilles de basilic
1 botte de radis 2 branches de coriandre
1 cuillère à soupe de vinaigre de 2 branches d’aneth
Banyuls 1 gousse d’ail
3 cuillères à soupe d’huile d’olive

Dans de l’eau salée à pleine ébullition, plonger les asperges vertes 7 à 8 min (de préférence
ficelées en botte de 7 à 8 pièces). Réserver.

Rincer et couper la sucrine en 4 dans le sens de la hauteur.

Tailler les radis en fines lamelles. Les plonger dans de l’eau glacée afin qu’elles soient cro-
quantes.

Confectionner la vinaigrette : dans un bol mixeur, mettre le vinaigre, la gousse d’ail, les herbes.
Mixer finement, saler, poivrer et ajouter l’huile.

DRESSAGE
Disposer les asperges encore tièdes dans l’assiette.

Ajouter la sucrine ainsi que les lamelles de radis égouttées.

Napper de quelques cuillères de vinaigrette pour assaisonner le tout.

N.B. : Pour obtenir des asperges bien vertes, après la cuisson plongez-les dans de l’eau glacée.
La vinaigrette ainsi préparée ne restera bien verte que quelques minutes mais on gagnera ainsi en
saveur…

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Filet de sandre,
beurre d’anchois, fricassee de petits pois

POUR 4 PERSONNES
1 sandre d’1,5 kg environ 1 oignon nouveau 20 cl de crème fleurette
1 kg de petits pois frais 1,5 l de fond blanc 1 cuillère à soupe d’huile d’olive
200 g de boquerones 1 gousse d’ail 1 citron
1 oignon 50 g de beurre

Écosser les petits pois, les plonger dans de l’eau bouillante et salée à pleine ébullition. Cuire
5 min. Plonger dans de l’eau glacée afin de les garder bien verts. Réserver.

Faire suer les oignons émincés avec du beurre sans coloration, ajouter la gousse d’ail. Verser le
fond blanc, cuire 10 min à frémissement et ajouter les petits pois.

Poêler à l’huile et au beurre les morceaux de sandre, saler et poivrer. Réserver.

Confectionner le beurre d’anchois : faire suer les boquerones dans un peu d’huile d’olive,
râper un peu d’ail, ajouter le jus de citron, le beurre, la crème et porter à ébullition. Retirer du
feu tout en remuant. Saler, poivrer.

DRESSAGE
Verser la préparation de petits pois dans une assiette creuse.

Disposer le pavé de sandre.

Napper de sauce et décorer de morceaux de boquerones ainsi que de rouelles d’oignons nou-
veaux.

N.B. : Initialement, J.-S. Bach mangeait cette recette avec du brochet qui a été remplacé par du sandre
pouvant être remplacé lui-même par du bar, de la daurade, etc.

Les anchois ont été remplacés par les boquerones que je préfère car ce sont des anchois non pas salés
mais vinaigrés et marinés dans l’huile.

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Tarte au citron cremeuse,
eclats de meringue
POUR 4 PERSONNES
Pâte sablée : Appareil citron : 30 g de Maïzena
125 g de beurre 40 g de beurre 150 g de crème fleurette
1 œuf 3 jaunes d’œufs Meringue (achetée chez votre
250 g de farine 3 citrons boulanger)
100 g de sucre 250 g d’eau
Sel 150 g de sucre

Confectionner la pâte sablée : mélanger la farine et le sucre avec le beurre pommade, ajouter
l’œuf ainsi qu’une pincée de sel. Laisser reposer 2 h.

Confectionner l’appareil au citron : dans une calotte en Inox, mettre le sucre, les jaunes et blan-
chir. Ajouter 5 cl d’eau. Râper les zestes et presser le jus des citrons.

Ajouter la Maïzena dans les jaunes d’œufs ainsi que le jus de citron et 20 cl d’eau, sans oublier
les zestes. Porter à ébullition cette préparation en remuant sans cesse. À la sortie du feu, ajouter
le beurre.

Étaler la pâte dans le fond de tarte, piquer à la fourchette, passer au four à 150° pendant 15 min.

Verser une partie de la préparation citronnée et remettre au four 5 à 6 min à 60°.

Le reste de la crème citronnée sera agrémenté de chantilly faite avec la crème fleurette.

DRESSAGE
Couper la tarte en 4 ou en 8.

Ajouter sur chaque morceau, une belle cuillère de crème citronnée ainsi que des morceaux de
meringue. Zester.

N.B. : Bach adorait le citron et les écorces de citron confites, pourquoi ne pas en rajouter dans la recette
ou sur la tarte…

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UN DINER AVEC BACH

Un solide appetit
Doté d’un tempérament puissant – vingt enfants –, Jean-Sébastien a un solide
appétit. Il aime la nourriture roborative et consistante, et se réjouit chaque fois
que des notables lui envoient du gibier. On ignore ce que lui préparait sa femme
Anna Magdalena à la maison, mais on connaît un menu que les bourgeois de
la ville de Hallé lui ont offert le jour où, accompagné de ses amis les musiciens
Kuhnau et Rolle, il est venu expertiser le grand orgue de la cathédrale.

Un menu formidable
« Menu du dîner du très honorable conseil des églises, à l’occasion
de la réception du nouvel orgue. Hallé, 3 mai 1716 » :

1 pièce de bœuf à la mode (Bäffallemote) Salade d’asperges chaudes


Brochet sauce au beurre d’anchois Laitue
1 plateau de petits pois Radis
1 plateau de pommes de terre Beignets
2 plateaux d’épinards et de chicorée Écorces de citron confites
1 quartier de mouton rôti Cerises en conserve
Rôti de veau Beurre frais
Courge bouillie

Formidable menu de Hallé : à travers la succession incohérente de la multitude


des plats, il raconte les produits qui existaient au temps de Bach et quel genre de
préparation culinaire ils subissaient. Ainsi, Bach a mangé de la pomme de terre,
ce qui fut impossible à François Couperin en France à la même époque puisque
Parmentier ne l’y avait pas encore fait connaître. Ainsi, il a connu la saveur des
asperges dégustées chaudes en salade (avec quelle sauce ?) et la sapidité cra-
quante des écorces de citron confites. Et sur la table, il y avait du beurre frais :
un luxe.

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La carte des vins
Rien d’austère chez Bach, en dépit de la mine sévère qu’empruntent
certains tartuffes jouant sa musique. Le nom de Bacchus, c’est celui
de Bach traduit en latin, remarque plaisamment Philippe Beaussant.
Jean-Sébastien apprécie les repas bien arrosés. Il aime le vin, doux ou
non, l’eau-de-vie, la bière, le schnaps, le cidre. Son neveu Johann Elias
lui offre « une bouteille d’excellente eau-de-vie » et « prie sa sœur très
instamment de préparer dix à douze mesures de vin doux et de les
envoyer par voiturier car j’aimerais beaucoup faire plaisir à Monsieur
notre cousin ». Lequel en prend un soin tout particulier et remercie
« pour le précieux tonnelet de vin » qui lui a été offert. Mais, ajoute-t-il,
« il est bien regrettable que ce tonneau ait trop souffert, soit qu’il ait été
secoué dans le transport, soit pour toute autre raison ; car, après l’ou-
verture, il s’est trouvé vide jusqu’aux deux tiers. Il est donc bien dom-
mage que de ce noble don de Dieu, la moindre goutte ait été perdue ».

Cafe gourmand
Bach adore le café dont il boit trois tasses quotidiennement. Au café
de Gottfried Zimmermann à Leipzig, il dirige tous les vendredis soir,
plus le mardi à l’époque de la grande foire, le Collegium Musicum créé
par son ami Telemann. Pour cet orchestre d’étudiants libre de toute
contrainte institutionnelle, Bach compose la Cantate du café jouée pour
la première fois en 1734.

La Cantate du café met en scène une jeune fille, son vieux barbon de
père, et un narrateur. À son père qui veut l’obliger à choisir entre boire
du café et un fiancé, la jeune fille revendique le droit à la gourmandise :
elle veut les deux, à parts égales.

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La legende des tetes de hareng
Tout jeune encore, Bach a eu faim. Jusqu’à se jeter sur des têtes de hareng
lancées par les fenêtres ouvertes d’une auberge. Bien lui en a pris : dedans,
il y avait des pièces de monnaie avec lesquelles il a pu s’acheter un morceau
de rôti. Le dénommé F. W. Marburg qui rapporte cette fable dans les Légendes
de quelques saints de la musique voulait démontrer que la persévérance est tou-
jours récompensée. À nous, elle apprend juste que le hareng était couramment
consommé vers 1700 et que leurs têtes ne valaient rien, même pas de quoi faire
une soupe. Et puis que Jean-Sébastien aimait la viande rôtie.

Un chou dans les Goldberg


La trentième et dernière variation des Goldberg est un « quodlibet » ( fais ce
qui te plaît), forme musicale pratiquée à l’époque et qui mélange des chansons
populaires. Dans cette variation s’entendent des bribes de mélodies que Bach a
empruntées aux tubes de l’époque.

Tandis que l’une parle d’amour, l’autre évoque la mauvaise nourriture à base de
navets et de choux qui éloigne un fils du foyer de sa mère : « Si seulement ma
mère m’avait cuisiné de viande ! » chante-t-il. Oui, Bach aime la bonne chère au
point d’introduire des légumes dans cette œuvre sublime qui déroule ses trente
variations sur une aria quasiment sacrée.

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Cantate du Cafe
Mmh ! Cette douce saveur du café
Est plus délicieuse encore que mille baisers
Et plus veloutée que celle du vin muscat.
Café, il me faut mon café,
Et si l’on veut me faire plaisir
Alors, que l’on me verse du café !
(1ère strophe)

Variations Goldberg
Quodlibet Variation n° 30
Toujours des navets, toujours du chou
voilà qui m’a fait fuir.
Si seulement ma mère m’avait cuisiné de la viande,
je n’aurais point tant voulu quitter ses pénates

Que ne suis-je pas chasseur !


Trois beaux fusils, je m’achèterais,
trois beaux fusils, un chien,
et une belle fille aussi ronde que bille…

etc, etc…

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UN DINER AVEC ...

Wolfgang Amadeus

MOZART
1756-1791

Enfant, sans cesse sur les routes, Wolfgang a l’Europe à la bouche. Il en goûte
toutes les nourritures, italiennes, françaises, tchèques, anglaises, hollandaises,
comme il écrit, par-ci, par-là, des mots dans toutes les langues. Les saveurs des
mets salzbourgeois forment alors dans sa mémoire gustative un précipité de
nostalgie. Celle des temps où, dans sa ville natale, manger était facile et à son
goût tandis que l’instabilité des voyages rend la nourriture incertaine et hostile :
il n’est jamais assuré de trouver à manger dans les auberges où le conduisent des
fortunes diverses, et il n’est pas non plus assuré d’apprécier ce qui va lui être
servi dans les villes comme Londres, Milan, Vienne ou Paris, où il réside parfois
de longs mois.

Pourtant, ses goûts sont simples. Ses nanans, ce sont les knoedel au foie de son
enfance ou les langues, de bœuf ou de veau, que son père lui envoie de Salzbourg
alors qu’il vit à Vienne. À condition d’être servi abondamment car il a toujours
faim. Le prix Nobel de médecine 2013, Thomas Südhof, qui a déclaré rêver de
dîner avec Mozart, est prié d’en tenir compte.

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Knoedel de foies de volaille,
potage de legumes
POUR 4 PERSONNES
2 carottes 1 échalote 2 quenelles
1 oignon 1,5 l de fond blanc (achetées dans le commerce)
1 quartier de céleri 80 g de beurre 50 g de pain de mie
1 branche de céleri 100 g de foies de volaille 10 cl de lait
1 pomme de terre ½ bouquet de persil plat 5 cl de cognac
1 courgette 1 cuillère à soupe de paprika

Confectionner le potage : couper en paysanne les carottes, oignon, quartier de céleri, branche de
céleri, pomme de terre, courgette. Cuire le tout avec le fond blanc pendant 1 h à frémissement.
Ajouter le beurre en fin de cuisson et mixer le tout. Réserver.

Confectionner les knoedel : couper les quenelles en morceaux, les mettre dans un cul-de-poule
et mélanger les foies de volaille préalablement sautés et déglacés au cognac. Ajouter le pain de
mie trempé dans le lait (bien égoutté), une échalote ciselée ainsi que le persil concassé et le
paprika. Malaxer la préparation et confectionner ainsi des boules de 5 cm de diamètre. Passer
les boulettes au four à 180° pendant 10 min. Réserver.

DRESSAGE
Verser la soupe chaude dans une assiette creuse, disposer les boulettes encore tièdes harmo-
nieusement.

N.B. : On pourra aussi rouler les boulettes dans de la chapelure pour leur donner une texture
croustillante.

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Langue de veau poelee
tomate relevee aux capres
POUR 4 PERSONNES
2 langues de veau 2 cuillères à soupe de câpres à 1 cuillère à café de concentré de
2 carottes queue tomate
2 oignons 100 g d’oignons grelots Thym, laurier, sel, sucre, poivre,
1 clou de girofle 1 botte d’estragon huile, piment d’Espelette, beurre,
1 tête d’ail 1 kg de tomates fraîches vinaigre d’alcool

Blanchir les langues de veau dans une casserole (départ eau froide). Cuire 5 min à ébullition.
Jeter l’eau et remettre de l’eau froide ainsi qu’une garniture aromatique (1 carotte, 1 oignon,
½ tête d’ail, thym, laurier). Cuire 40 min à frémissement. Retirer les langues du feu et les peler
à chaud. Réserver.

Confectionner la sauce tomate : monder les tomates, couper en deux avant de les épépiner.
Faire suer dans de l’huile d’olive, carotte, oignon, ail, thym et laurier. Y plonger les morceaux
de tomate, ajouter le concentré de tomate et mouiller à mi-hauteur. Ajouter un sucre et laisser
mijoter 30 min à feu doux. Passer la préparation au moulin à légumes. Saler, poivrer et réserver.

Peler les oignons grelots, les cuire dans de l’eau, du beurre et du vinaigre d’alcool. Garder une
texture croquante en fin de cuisson.

DRESSAGE
Poêler les tranches de langue dans un peu d’huile et de beurre (elles doivent être légèrement
colorées). Disposer dans l’assiette.

Dans un cul-de-poule, mélanger les oignons, l’estragon et les câpres à queue. Poser ce mélange
sur la langue.

À côté de celle-ci, ajouter une cuillère de sauce tomate. Saupoudrer d’un peu de piment d’Es-
pelette.

N.B. : La technique de cuisson de la langue en deux temps permet d’avoir moins d’impuretés et
éventuellement de conserver l’eau de cuisson.

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Pana cotta vanille – fraise
POUR 4 PERSONNES
½ l de lait
½ l de crème fleurette
2 ou 3 gousses de vanille
180 g de sucre
1 kg de fraises
5 feuilles de gélatine

Faire chauffer le lait, la crème, le sucre et la vanille, porter à ébullition.

Plonger les feuilles de gélatine dans de l’eau froide afin de les ramollir. Une fois ramollies, les
incorporer dans la préparation encore chaude.

Mixer 500 g de fraises afin d’obtenir un coulis. Sucrer selon la qualité des fraises ! Réserver.

DRESSAGE
Dans un ramequin, couler le coulis de fraise, mettre au congélateur. Une fois le coulis pris,
couler la pana cotta tiède. Laisser prendre au réfrigérateur. On peut renouveler l’opération
plusieurs fois (comme sur la photo).

Couper sur le dessus des morceaux afin d’y apporter un peu de croquant. Déguster !

N.B. : On peut remplacer la fraise par d’autres fruits de saison. C’est un dessert frais et léger…

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UN DINER AVEC MOZART

Le gourmand goulu

Exposé tout petit par son père Leopold devant les cours, présenté au gotha
européen de la musique, Wolfgang parcourt le continent, entre le ravissement
et la répulsion devant les nourritures qu’il avale au gré des pays qu’il traverse.

À Paris, il adore savourer des glaces dans les cafés installés sous les arcades du
Palais-Royal et aime les biscuits fourrés nommés « plaisirs ». Mais il déteste,
comme son père et sa mère, la nourriture française. Sa mère qui décrit ainsi les
repas commandés au traiteur : « de la vilaine viande, du bouillon dégoûtant et du
foie dur comme de la pierre. » Son père qui se plaint de ne rien trouver à manger
qui leur sied.

En Italie, il déguste « les meilleurs figues, melons et pêches » et fait la connaissance


d’un drôle de fruit. « Nous mangeons un fruit que je n’avais jamais vu que
sur des tableaux et qui a le goût du concombre, raconte Leopold à sa femme.
C’est un gros fruit rond avec une écorce verte. Lorsqu’on l’ouvre et le coupe en
deux, c’est très joli car il est rouge à l’intérieur. On le mange avec du sucre et
de la cannelle. » Qu’est-ce ? Une pastèque. Mais à Naples, la nourriture semble
insuffisante à Wolfgang : « Nous dînons, les jours gras, d’un demi-poulet ou un
petit morceau de rôti, les jours maigres, d’un petit poisson », écrit-il à sa sœur
Nannerl.

À Liège, lui et son père sont contents de trouver à l’auberge un « dîner à la hol-
landaise : un chaudron où bouillent, en compagnie de la viande, des carottes et
toutes sortes de choses. » Parfois, ils mangent debout « quelques morceaux de
pot-au-feu » ou du « veau en conserve (fumé, séché, ou saumuré) ».

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Le gout de l’enfance
Wolfgang aime par-dessus tout la nourriture salzbourgeoise, celle de
son enfance. Son plat favori est une spécialité de sa ville natale, « les
knoedel au foie (boulettes) ». Lorsqu’il est à Vienne, il demande à ses
amis et à sa famille de lui faire parvenir des mets salzbourgeois.

Ce goût de l’enfance se traduit par une grande appétence pour le


sucre, avec une prédilection pour la limonade (un luxe à l’époque),
le lait d’amandes, les confiseries, la glace. Mais il n’a jamais mangé de
«Mozartkugeln », car ces célèbres bouchées au chocolat fourrées à la
pistache et vendues à Salzbourg ont été inventées par le pâtissier Paul
Fürst longtemps après sa mort, en 1890.

Très gamin même adulte, Wolfgang plaisante de tout, et donc aussi de


la nourriture. Staiger, le propriétaire d’un café à Salzbourg, devient
ainsi le « patron de la soupe au café, de la limonade moisie, du lait
d’amandes sans amandes et en particulier de la glace aux fraises rem-
plie de glaçons ».

S’amusant avec le mot Schmalz (graisse), il « fait part de son regret


que M. Beurre m’ait reçu si sèchement. Il m’a envoyé une lettre pour
M. Lait, avec un ordre de 50 florins pour ce même M. Fromage ». Et
il envoie des déclarations solennelles à sa mère : « Madame ma mère,
j’aime bien le beurre. »

Un petit air d’estomac


Wolfgang a un « solide appétit » et parfois « un petit air d’estomac »,
comme il nomme le creux à l’estomac. « J’ai faim », écrit-il souvent à sa
sœur. Leporello chantant la bouche pleine du faisan qu’il a dérobé au
plat de Don Giovanni, serait-ce lui ?

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Plutôt grand gourmand que fin gourmet, il prête peu d’attention à ce qu’il mange.
C’est ainsi qu’il ne décrit pas les plats de son repas de noces qu’il qualifie pourtant
de princier : « Tout notre festin de mariage a consisté en un souper que nous offrit
la baronne von Waldstätten, écrit-il à son père, et qui fut en vérité plus princier que
baronesque. »

Il adore le chapon, au point que Leopold utilise la volaille comme un appât pour le
faire revenir à la maison : « Des chapons t’attendent, ils ont été achetés en prévision
de ton retour », lui écrit-il.

Il apprécie l’esturgeon, que l’on pêche alors dans le Danube, les truites, d’après le
témoignage de son fils Franz Xaver, la viande de bœuf accompagnée de « moutarde
piquante », la langue, le faisan, les côtelettes de porc (« Che gusto ! »).

Rendez-vous au cafe
À Salzbourg, la famille Mozart est familière, comme Haydn, du restaurant St-Peter,
réputé pour être un des plus vieux d’Europe. « Papa a déjeuné à St-Peter et y a fait
de la musique » raconte Nannerl dans son journal. Aujourd’hui, on y sert des dîners-
concerts en hommage à Mozart.

Au Café Staiger (le patron de la limonade moisie), Mozart vient déguster des « bois-
sons exotiques », telles que café, chocolat et thé, qu’il adore. Il prend du café pour
son petit déjeuner, mais son père, qui veille, lui intime de changer ses habitudes et de
passer au thé.

À Vienne, il vit près d’une auberge tenue par Joseph Deiner. Devenu son ami, celui-
ci lui prépare des plats et lui apporte du café : « J’ai demandé à Joseph qu’il aille me
chercher du café que j’ai bu en fumant une merveilleuse pipe de tabac ; puis j’ai ins-
trumenté tout le Rondo pour Stadler [le 3e mouvement du Concerto pour clarinette]. »

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Le vin de Don Giovanni
Vin, bière, punch et champagne coulent à flots dans la correspondance de Mozart ainsi
que dans son œuvre. À sa sœur Nannerl, Wolfgang offre du punch pour son anniver-
saire, tout en lui écrivant un poème. La cantate Essen, Trinken, fait l’apologie du char-
donnay, tandis que le champagne pétille dans Don Giovanni. Mais pas seulement : à
la fin du dernier acte, le séducteur, qui festoie en attendant l’arrivée du Commandeur,
demande à Leporello de lui servir du vin, l’Eccelente Marzimino !

Le marzimino existe bel et bien : son cépage est cultivé de nos jours dans la région du
Trentin au nord de Venise.

Retour à la fiction : dans quelques secondes, le Commandeur arrive, Don Giovanni va


mourir. En buvant du marzimino. Vous le trouverez en vente sur la « route des vins »
qui va de Conegliano à Valdobbiadene… Gare à l’ivresse.

POÈME DU PUNCH
Meilleurs vœux
Dans le punch vieux !
Je sortis aujourd’hui sans pourquoi t’avouer.
La raison, je peux bien te le dire,
Était de te faire un tout petit plaisir.
Sans veiller à la dépense, au labeur ou à la peine.
J’ignore certes si mon punch sera en veine,
Oh, ne dis pas – non – mon bouquet n’embaumerait ;
Je pensais : tu aimes les Anglais.
Si tu aimais Paris, des rubans te donnerais,
Un bouquet raffiné,
Des parfums embaumés.
Mais toi, sœur chérie, tu n’es pas une coquette.
Prends donc ce punch, fort et délicieux, sœurette,
Savoure-le, tel est mon seul souhait.

À NANNERL, SALZBOURG, LE 31 JUILLET 1783


W. A. MOZART

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UN DINER AVEC ...

Ludwig van

BEETHOVEN
1770-1827

« Seul un cœur pur peut faire une bonne soupe » : tout Beethoven est dans cette
phrase, un vrai concentré. Pour Ludwig, chaque élément de la vie, domestique
ou spirituelle, doit passer par le crible de la plus haute exigence morale. Même la
soupe, objet de sa part de mille égards et qu’il aime à base d’« un peu de persil,
de céleri et de carottes ».

À Vienne où Beethoven vivra trente-cinq ans, les cafés et auberges sont sa


deuxième maison. Il y rencontre ses amis avec lesquels il dîne le plus souvent.
Pour communiquer malgré sa surdité, il utilise un carnet de conversation sur
lequel sont notés les mille et un petits ou grands riens de la vie quotidienne, dont
les commandes d’huîtres, sa folie, ou de poissons d’eau douce qu’il adore.

Parfois il reçoit chez lui, dans un des soixante-cinq logements qu’il a occupés
dans la capitale autrichienne. Il y cuisine de temps à autre, mais en général les
repas sont préparés par une gouvernante, qui n’est jamais la même : Beethoven,
qui prend un soin sourcilleux au contenu de son assiette et de son verre, sera
tracassé toute sa vie par la quête d’une cuisinière idéale, qui n’existera jamais.

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Soupe de vermicelles
et petits legumes de saison
POUR 4 PERSONNES
300 g de carottes 5 tomates fraîches 300 g de vermicelles
300 g de céleri boule 1 blanc de poireau 1 gousse d’ail
2 branches de céleri 2 l de fond blanc 1 cuillère à soupe d’huile d’olive
1 bouquet de coriandre fraîche 1 collier d’agneau Sel, poivre

Plonger le collier d’agneau dans le fond blanc, cuire pendant 2 h à frémissement. Sortir le
collier. Réserver.

Peler les carottes, le poireau, les tomates, l’ail, les branches de céleri et le céleri boule, tailler
en « paysanne », plonger les légumes dans le fond blanc (qui a servi à cuire le collier), porter à
ébullition. Laisser cuire à frémissement pendant 1 h.

Pendant la cuisson, effeuiller une botte de coriandre. Réserver.

Émietter le collier d’agneau en petits bouts.

Cuire les vermicelles dans le bouillon de légumes.

DRESSAGE
Verser la soupe dans les assiettes creuses. Ajouter les morceaux d’agneau encore tièdes.

Concasser la coriandre fraîche et disposez-la par-dessus.

N.B. : On peut remplacer l’agneau par de la volaille, voire même des crustacés en fonction de son goût.

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Filet de carpe
aux poireaux et au vin rouge
POUR 4 PERSONNES
1 carpe de 2 kg 1 carotte, 1 cuillère à soupe de concentré
4 beaux poireaux ½ tête d’ail, quelques queues de tomate
1 l de vin rouge de persil, 10 cl de vinaigre d’alcool
1 l de jus de veau (1 kg de parures) 1 branche de thym, Un domino de sucre
1 oignon 1 feuille de laurier 100 g de beurre

Lever les filets de poisson, désarêter si possible à la pince à épiler. Plonger dans de l’eau froide
avec le vinaigre pendant 10 min. Sortir et poser sur papier absorbant. Réserver.

Couper les tronçons de poireaux sur 10 cm, les plonger dans de l’eau froide afin de se débar-
rasser de la terre.

Confectionner le jus de veau : faire revenir les morceaux de parures dans un peu de matière
grasse légèrement colorée, ajouter la garniture aromatique coupée en morceaux réguliers
(1 oignon, 1 carotte, ½ tête d’ail, quelques queues de persil, 1 branche de thym, 1 feuille de lau-
rier). Finir de colorer. Mouiller à hauteur avec de l’eau. Ajouter le concentré de tomate. Porter
à ébullition et laisser cuire à frémissement pendant 1 h 30.

Sortir les poireaux de l’eau. Les mettre dans une sauteuse et couvrir de vin rouge. Ajouter un
domino de sucre. Cuire à frémissement pendant 15 min. Retirer les poireaux. Réserver sur
papier absorbant.

Filtrer le vin, le verser dans le jus de veau. Cuire encore 30 min.

Couper les morceaux de carpe, poêler côté peau dans une poêle antiadhésive légèrement hui-
lée. Saler et poivrer. Retirer et poser sur papier absorbant.

DRESSAGE
Disposer les poireaux au fond d’une assiette creuse. Filtrer le jus de veau et le monter au beurre.
Napper de cette sauce les poireaux. Poser les morceaux de carpe dessus.

N.B. : on pourra toutefois prévoir pour les « gros mangeurs » des pommes de terre cuites à l’eau ou à la
vapeur.
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Huitres plates,
cremeux de vin blanc de Moselle
POUR 4 PERSONNES
24 huîtres 30 g de crème liquide
60 g de pousses d’épinard 1 échalote grise
30 cl de vin blanc sec 10 cl de vinaigre de vin
1 œuf Sel, poivre
50 g de beurre

Ouvrir les huîtres en prenant soin de conserver l’eau de celles-ci à part. Décoller la chair et la
replacer dans la coquille. Réserver.

Faire suer légèrement les pousses d’épinard dans une poêle avec un peu de beurre. Réserver
sur papier absorbant.

Cuire l’œuf dans de l’eau et du vinaigre avec sa coquille pendant 4 min. Écaler l’œuf. Mettre
dans le bol mixeur.

Cuire le vin blanc, porter à ébullition. Faire flamber celui-ci afin de brûler l’alcool. Verser dans
le bol mixeur. Ajouter la crème, le jus des huîtres et le beurre en pommade. Mixer le tout afin
d’obtenir une consistance crémeuse.

DRESSAGE
Disposer les feuilles d’épinard dans les coquilles de chacune des huîtres, ajouter la chair, napper
d’une cuillère à café de sauce vin blanc (encore tiède).

N.B. : Vous avez la possibilité de les passer sous le grill du four ou de les brûler légèrement au
chalumeau.

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UN DINER AVEC BEETHOVEN

Un gourmet
sourcilleux

« Je prends volontiers en compagnie ce que doit absorber la bête humaine


pour produire du spirituel et de l’abstrait. » La compagnie, Beethoven la
trouve quasiment tous les jours dans l’une ou l’autre auberge de Vienne où il
discute, boit et mange avec ses amis tout en pestant contre la mauvaise qualité
de la nourriture et son coût trop élevé chez « ce chien d’aubergiste du Schwan »,
comme il nomme celui qui est pourtant le patron de son café préféré à Vienne.

Quand il mange chez lui, il cherche à se nourrir le mieux possible. Pourtant, il a


la réputation d’être un cuisinier exécrable, connu pour confectionner des repas
immangeables qui culminent en un café alla Beethoven imbuvable. « Vous ne
comprenez rien à l’art culinaire, vous, les messieurs », lui disent les chanteuses
Henriette Sontag et Caroline Ungher, créatrices de l’« Hymne à la joie » de sa
Neuvième Symphonie, après avoir été invitées à déjeuner chez lui. Le lendemain,
elles tombent malades.

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Les produits de la mer
Le vendredi soir chez Beethoven, c’est poisson. Ludwig joint l’utile
– faire maigre – à l’agréable : partager avec ses amis sa nourriture favo-
rite, le poisson, particulièrement quand il est d’eau douce. Auparavant,
il a passé commande à son marchand habituel :

« Je vous prie de m’envoyer une carpe du poids de trois ou


quatre livres, ou, mieux encore, un brochet d’au moins trois livres.
Si vous n’avez aucun poisson de cette qualité, alors, s’il vous plaît,
envoyez-moi un poisson d’un autre genre à peu près du même poids.

Votre très dévoué Beethoven!»

Les grands jours, ce sera du lieu avec des pommes de terre bouillies, un
de ses plats préférés avec les macaronis au parmesan.

Mais la grande affaire de Beethoven, ce sont les huîtres. « Demain


il y a un arrivage de Venise d’huîtres fraîches, lui indique un de ses
amis qui poursuit : Nous les mangerons fraîches et rôties et boirons du
champagne. » À l’auberge elles figurent au menu de dîners tout simples,
comme le raconte cette addition : « Pain, veau, vin Nessmüller, citron,
huîtres », mais aussi de repas de fête : « huîtres, champagne, carpe,
faisan, lièvres ».

Beethoven a-t-il aimé les huîtres au point d’avoir composé une œuvre
en leur hommage, comme l’a fait Rossini avec sa Chanson des huîtres ?
C’est ce que laisse imaginer ce mot laissé sur un des carnets de conver-
sation : « Les huîtres vont même chanter un canon. »

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La liste des courses
Tout le temps à la recherche de la cuisinière parfaite, il en décrit le profil : « Une
gouvernante d’âge mûr, sachant bien faire la cuisine. » Il s’inquiète : « Est-ce
que la cuisinière a bien fait la cuisine aujourd’hui ? », s’exaspère : « Salope de
cuisinière ! »

Parfois, Beethoven mord.

L’une d’elles lui réclame un jour l’argent du ménage par un petit mot laissé dans
l’entrée : « C’est aujourd’hui samedi et j’ai encore besoin d’argent. Il le faut ! (Es
muss sein !) » Ce sont ces mêmes mots, Es muss sein, que Beethoven inscrit sur
les premières mesures du dernier mouvement de son dernier quatuor à cordes.
Aucun rapprochement ne peut raisonnablement être fait entre la note de la
gouvernante et le sublime seizième quatuor. Il n’en reste pas moins, délicieuse
coïncidence, que les termes sont identiques.

Toujours soucieux de bien agir, Beethoven demande conseil à son entourage.


« Dites-moi ce qu’il faut que je fasse pour pouvoir manger et boire correctement
à domicile ! » écrit-il à une de ses amies tandis qu’il note scrupuleusement la liste
des courses pour la cuisinière (« huile d’olive, sucre brun, pommes de terre ») et
la référence d’un livre de recettes : « le Nouveau Grand Livre de cuisine éprouvé
et réputé, 4e édition, corrigée et augmentée de 123 recettes ».

Il ordonne de « ne pas peler les pommes de terre », de faire attention aux « per-
drix espagnoles1 qui ramollissent après la cuisson », vérifie la fraîcheur des œufs
en les cassant lui-même.

Tyran domestique, Beethoven ?

1. Expression viennoise pour désigner les pommes de terre.

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Au menu de tous les jours
Le soir chez lui, la soupe constitue sa nourriture de base et il y attache une grande
importance. Il en donne des recettes, demande à son ami Schindler de « goûter
une soupe divine » préparée par sa cuisinière, change brusquement d’avis et s’em-
porte contre le même Schindler le même jour à propos de la même soupe : « Je ne
prête pas la moindre attention au jugement porté sur la soupe. Elle est mauvaise. »

Beethoven est soupe au lait.

S’il est champion dans la récrimination domestique, en réalité il n’est pas difficile :
il mange de tout. Volaille (dindon, chapon, oie, poularde), poisson frais (sandre,
carpe, brochet, truite, lieu) ou fumé (hareng, anguille, saumon), viande, parti-
culièrement le veau (escalopes, tête de veau, rôti) et l’agneau en gigot, légumes
(épinards, fèves, pommes de terre bouillies ou en purée, chou, châtaignes), gibier
(grive, canard, faisan, poule d’eau, gelinotte), œufs, saucisses. Les saucisses,
motif de ses moqueries envers les Viennois :

« On a emprisonné ici différentes personnes d’importance ; mais je crois qu’aussi


longtemps qu’un Autrichien a sa bière brune et ses petites saucisses, il n’est pas
près de se révolter. »

Il mange de tout, mais sucreries, gâteaux ou autres douceurs ne sont pas de son
goût. C’est une vraie bouche salée.

Quelques préparations qu’il a goûtées : l’oie farcie au pain blanc et cuite bouillie.
Les œufs servis en salade. Le veau préparé « avec un peu de jambon et des lan-
gues ». Les huîtres « fraîches » ou « rôties ».

Quelques menus qu’il a dégustés : « potage succulent ; viande avec sauce ; chou
bleu aux châtaignes ; canard sauvage ou un autre gibier, gelinotte, canard, poule
d’eau ; gigot ; pâtisserie » ; « Friture ; soupe aux nouilles ; viande avec sauce ; épi-
nards avec carbonade ».

Il mange de tout, mais il reste persuadé que ses ennuis de santé proviennent
de la mauvaise qualité de ce qu’il absorbe : « Tant que durera cette alimenta-
tion défectueuse, je serai toujours malade », écrit-il au comte de la Goinfrerie,
comte des Dîners et comte des Soupers, comme il nomme son ami Nikolaus von
Domanovecz.

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La tasse de chocolat
Beethoven a pris une leçon de musique avec Haydn autour d’une tasse
de chocolat. La scène laisse songeur. Le vieux Haydn, le tout jeune
Beethoven, discutant contrepoint en dégustant un nectar plutôt adap-
té à un goûter d’enfants. La tasse n’a pas la parole. Elle nous aurait
raconté si l’onctuosité du chocolat avait édulcoré l’aigreur des exercices
imposés par Haydn à son élève et si ses généreux arômes avaient adouci
les angles, prétendus pointus, entre le maître et l’impétrant.

De toute façon, Beethoven est content : il adore le chocolat. « Faites


préparer le chocolat, s’il vous plaît. Nous en sommes arrivés à la déci-
sion suprême de prendre avec vous le petit déjeuner », écrit-il quelques
années plus tard à un de ses amis. Il raffole aussi du café, sa boisson
habituelle au petit déjeuner, et qu’il prépare lui-même.

La carte des vins


Le chapitre de l’alcool occupe une grande place dans ses préoccupations. Et aus-
si dans celles de certains de ses biographes qui se plaisent à rappeler que Johann,
le père, est mort alcoolique, et que c’est l’abus d’alcool qui aurait tué le fils.
L’intérêt d’une telle assertion ? Nul. Beethoven et ses amis évoquent l’alcool sous
toutes ses formes, mais pas plus que les huîtres, les chapons ou les harengs…

Beethoven aime les vins de Chypre, de Tokay, de Buda, de Moselle et du Rhin,


le moscatel rouge, la bière, le champagne. Son préféré est le tokay, dont il écrit à
Schindler, premier violon dans un orchestre, « qu’il n’est pas fait pour l’été, mais
pour l’automne, et aussi pour un racleur de violon ».

Beethoven est taquin, de temps à autre.

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Derniers repas
En 1827, la dernière année de la vie de Beethoven, son goût pour le bon vin
s’exacerbe tellement il redoute les vins frelatés qui le rendent encore plus malade.
Il supplie ses amis :

« Maintenant je vous adresse une demande pressante. Mon médecin m’ordonne


de boire de l’excellent vin vieux du Rhin. En trouver de non frelaté à Vienne, ce
n’est pas possible. Si j’en recevais un petit nombre de bouteilles, je vous montre-
rais ma gratitude. »

Malade, il devient « comme un enfant qui demande quelque chose », écrit-il à son
ami Pasqualati. « Aujourd’hui, par exemple, je voudrais avoir de la compote de
pêche ou de la compote de cerises, sans citron, toute simple, un entremets léger
et du champagne. »

C’est à Pasqualati aussi qu’est adressée sa dernière lettre connue, datée de


mars 1827 :

« Comment pourrai-je assez vous remercier pour ce champagne excellent ;


comme il m’a restauré et comme il va me restaurer encore ! »

Il meurt le 26. En buvant du champagne dans une coupe ? S’il a déclaré un jour
« préférer la liberté de la cuisine d’une caserne à la table d’un prince », c’est bien
à la façon d’un prince qu’il a pris congé des vivants.

« Je vous demande un peu de compote de cerises, mais sans


citron, toute simple. De même une bouillie légère de farine,
quelque chose me rappelant la purée, me ferait grand
plaisir. Le champagne m’est permis ; je vous prie seulement
de joindre à votre envoi une coupe à champagne… »

AU BARON JOHANN PASQUALITI, VIENNE , MARS


1827 (QUELQUES JOURS AVANT SA MORT)

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UN DINER AVEC ...

Franz

SCHUBERT
1797-1828

L’auteur de La Truite, de La Belle Meunière et du Rôti de noces n’a pas toujours


mangé à sa faim. Une enfance spartiate au pensionnat où il est élève-musicien,
une jeunesse frugale à Vienne, ni maturité ni vieillesse qui auraient pu rattra-
per le temps perdu à mal se nourrir puisque Schubert est mort à trente et un
ans : la pensée d’un estomac quotidiennement bien rempli de mets succulents
restera à jamais un rêve pour lui. De rares revenus, pas souvent de logement,
ni mécènes ni protecteurs, des succès sans lendemain. Mais beaucoup d’amis,
des tas d’amis, avec lesquels il forme la compagnie des « Joyeux Musiciens » et
qui le surnomment le « petit champignon » (Schwammerl). Une allusion à sa
petite taille et à sa silhouette arrondie, la bière étant bonne nourricière. Elle
accompagne les saucisses qui constituent la base de son alimentation, les jours
où Franz peut se les payer. A-t-il fait chanter la truite pour l’éternité, à défaut
de ne pouvoir en manger ? Connaissait-il même l’idée d’un rôti de veau ? Il
importe peu : nous lui offrons un bon repas.

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Choucroute de navet
a la saucisse
POUR 4 PERSONNES
2 navets longs 1 botte de ciboulette
800 g de saucisse 1 cuillère à soupe de genièvre
1 oignon rouge 10 cl de vinaigre d’alcool
25 cl de bière Huile d’arachide, sel, poivre, sucre

Couper en fines lamelles (comme des tagliatelles) les navets longs. Saupoudrer de sel et de
sucre, mettre à dégorger pendant 10 min, égoutter et réserver.

Tailler en quartiers l’oignon rouge, le faire légèrement suer avec un petit peu d’huile dans une
sauteuse et déglacer au vinaigre. Cuire 1 min et retirer.

Faire rôtir la saucisse préalablement découpée en tronçon de 20 cm.

Dans une cocotte, mettre un peu d’huile, ajouter les lamelles de navet, les oignons rouges et
le genièvre concassé. Arroser de bière, laisser cuire à couvert 10 min. Ajouter la saucisse, sau-
poudrer de ciboulette.

DRESSAGE
Afin de garder l’authenticité du plat, on pourra le laisser dans la cocotte et le présenter ainsi
aux convives.

N.B. : Pour ce plat on pourra utiliser tout type de saucisse (Toulouse, Francfort, Bregenwurst,
gendarme).

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Roti de veau et fricassee
de feves a l’anis etoile
POUR 4 PERSONNES
1 rôti de veau de 800 g Thym 1 oignon
1,5 kg de fèves fraîches Laurier 1 tête d’ail
1 kg de parures de veau Ail 3 feuilles de laurier
1 oignon 1 cuillère à café de concentré de 5 anis étoilés
1 carotte tomate Sel, poivre, beurre, huile

Écosser les fèves. Les plonger dans de l’eau fortement salée à pleine ébullition pendant 2 à
3 min. Les ressortir et les plonger immédiatement dans de l’eau glacée. Les peler une à une.
Réserver.

Confectionner le jus de veau : faire revenir les parures dans une sauteuse avec un peu d’huile,
colorer. Ajouter la garniture aromatique : 1 oignon, 1 carotte, thym, laurier, ail, 1 cuillère à café
de concentré de tomate et mouiller à l’eau à hauteur. Laisser cuire durant 1 h à frémissement.
Passer la préparation au chinois en ne conservant que le liquide. Réserver.

Dans une cocotte, faire revenir l’oignon finement émincé, les gousses d’ail, les feuilles de laurier
ainsi que l’anis étoilé. Ajouter les fèves et mouiller avec le jus de veau. Cuire 10 min à feu doux.

Cuire le rôti en le faisant préalablement colorer, saler et poivrer dans un sautoir pendant
environ 30 min à 180°. Laisser reposer.

DRESSAGE
Une fois cuit, positionner le rôti de veau sur le ragoût de fèves. Passer la cocotte au four 15 min
à 180°.

N.B. : Pour cette préparation, j’ai décidé de travailler la fève par goût et par antériorité par rapport aux
haricots qui sont arrivés d’Amérique en Europe avec Lafayette.

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Filet de truite au potiron,
condiments citronnes
POUR 4 PERSONNES
4 filets de truite (150 g environ) 1 oignon
1 citron jaune 1 gousse d’ail
1 morceau de potiron d’1 kg Sel, poivre, huile, beurre
1 oignon tendre

Couper un citron en petits dés. Saler, poivrer, sucrer avec 1 cuillère à moka de chaque. Laisser
reposer le mélange.

Peler le potiron et le cuire dans de l’eau avec du beurre et l’oignon émincé pendant 40 min à feu
doux. Garder un morceau de celui-ci cru, tailler des cubes d’½ cm. Réserver.

Une fois cuit, mixer le potiron, remettre du beurre frais afin d’obtenir l’onctuosité désirée ainsi
que la gousse d’ail.

Faire poêler les cubes de potiron dans un peu d’huile. Réserver.

Dans une poêle chaude, mettre du beurre, plonger les morceaux de truite, les faire légèrement
colorer (3 à 4 minutes de cuisson selon épaisseur).

DRESSAGE
Disposer la purée de potiron dans l’assiette ainsi que les cubes poêlés, ajouter les queues
d’oignon tendre émincées.

Poser le filet de truite. Ajouter les dés de citron par-dessus. Passer en salamandre ou au grill
1 à 2 min.

N.B. : On pourra remplacer la purée de potiron par du potimarron et l’agrémenter d’un peu de
gingembre râpé.

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UN DINER AVEC SCHUBERT

Un convive de reve

Quand ce n’est pas « marée basse », autrement dit lorsqu’ils sont en fonds, les
amis de Schubert organisent des « schubertiades » : au cours de ces fameuses
soirées où ils font de la musique toute la nuit, Schubert étant au piano, la bière
coule à flots. Les saucisses y font office d’entrée, de plat principal, de légumes,
de fromages et de dessert. Et même de divertissements avec les Würstelbälle
(« lancers de saucisses »), un jeu dont on ne sait rien mais qu'on imagine sans
peine.

Le joyeux musicien Franz von Hartmann tient le journal des schubertiades :


« Chez Spaun, Schubert joua un morceau de sa composition, admirable mais
mélancolique. Puis Schwind et Schubert chantèrent les plus magnifiques lieder
de Schubert. À la fin, on soupa splendidement. Tous étaient très animés et très
gais… »

Quelques jours plus tard :

« Je vais chez Spaun où il y a une grande schubertiade. Gahy a joué admirable-


ment à quatre mains avec Schubert, Vogl a chanté près de trente magnifiques
lieder. Le trio de la Cinquième Marche1 m’émut presque aux larmes. Après que
la musique fut achevée, nous ripaillâmes magnifiquement et finalement nous
dansâmes. À une heure au lit. »

1 La Cinquième des Six Grandes Marches et trios op.40 D 819 composés pour piano à quatre mains est
un Andante en mi bémol mineur.

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Le cafe au lait des marees basses
Il a quinze ans, et il déplore déjà la marée basse, qui est le quotidien des
menus du Konvikt où il est interne. « Tu sais toi-même par expérience
qu’on aurait envie de temps en temps d’un petit pain ou de quelques
pommes, écrit-il à un de ses frères, d’autant plus qu’après un déjeuner
médiocre, on ne peut guère compter que sur un maigre souper huit
heures et demie plus tard. »

À Vienne, le petit déjeuner lui tient parfois lieu de déjeuner. Des petits
déjeuners sans suppléments : Kipfel (petit pain) accompagnés de
Melange (café au lait).

« En tout début d’après-midi, je me fis servir un Melange et dévorai une


demi-douzaine de Kipfel, raconte son ami Bauernfeld. Schubert arriva
et fit de même. Nous nous félicitâmes de notre bon appétit, venu si vite
après le repas. “C’est que je n’ai encore rien mangé”, me confia l’ami,
penaud. » Il ne théâtralise pas son impécuniosité. Il en est confus.

S’il est parfois saisi d’« appétits de faisan », c’est surtout de « soupe au
pain grillé », de « côtelette » et de « petites saucisses » qu’il se nourrit.
Et quand il va déjeuner chez la mère d’une amie qui leur a préparé de
« vraies nouilles bavaroises », c’est la fête.

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La carte des boissons
À marée basse, la bière est la base. À marée haute, tokay, vin de Moselle, cham-
pagne, malaga et punch pour les « circonstances brillantes ». C'est « autour d'un
verre de punch » qu’il espère « pouvoir sceller de plus près son amitié » avec Josef
Hüttenbrenner à qui il a envoyé son lieder La Truite. Et c’est avec du malaga que
lui et ses amis se souhaitent une heureuse nouvelle année, celle du 1er janvier
1828. Sa dernière.

Schubert « boit voluptueusement du thé » et adore le café, comme Beethoven.


Au point d’avoir composé à l’aide d’un moulin à café, raconte son ami le com-
positeur Franz Lachner, qui décrit la scène que voici : en visite chez Schubert,
celui-ci sort un moulin à café, dose les grains et se met à moudre. Soudain, il
jette le moulin, les grains s’éparpillent. « Ce moulin est une merveille ! s’exclame-
t-il. Les mélodies et les thèmes viennent comme par enchantement ! Écoute un
peu ! » Ce sont les thèmes du quatuor à cordes en ré mineur La Jeune Fille et la
Mort, affirme Lachner. Cette fable est bien évidemment contredite par les faits,
et la musicologue Brigitte Massin la récuse fermement. Pourtant, Lachner n’a
pas dû tout inventer : Schubert s’est certainement amusé à imaginer les pouvoirs
magiques d’un moulin à café musicien.

Dans un clair ruisseau Un pêcheur à la ligne


Filait rapide et joyeuse Était là sur le bord
La truite capricieuse Et voyait d’un œil froid
Comme une flèche. Le poisson frétiller.
Tant que l’onde restera
J’étais sur le rivage Limpide, pensai-je
Regardant sans souci Il n’attrapera pas
Nager le poisson vif La truite au bout de sa ligne.
Dans le ruisseau limpide. Mais le fripon finit

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« Mon reve »
Dans le journal de Schubert s’inscrit le 3 juillet 1822 un texte énigmatique
intitulé « Mon rêve ».

« J’étais le frère de nombreux frères et sœurs, écrit-il. Notre père et notre mère
étaient bons. Une fois mon père me conduisit à un joyeux banquet… Mes frères
y furent très gais, – mais j’étais très triste. Alors mon père s’approcha de moi et
m’intima l’ordre de me régaler des mets succulents… »

Si nous ignorons tout des plats préférés de Franz Schubert, si nous subodorons
qu’il se nourrissait, au mieux, de saucisses et de nouilles bavaroises, au pire de
petit-pain-café au lait, nous savons qu’il a eu faim, lui dont l’œuvre gigantesque
édifiée en si peu de temps pourrait combler à elle seule les appétits musicaux de
toute une vie. Alors, nous lui devons bien ça : réaliser son rêve de « banquet de
mets succulents » en lui préparant un bon repas.

Par trouver le temps long.


Perfide, il trouble l’eau
Avant que je ne comprenne
Sa ligne frémit soudain
La truite s’agite au bout

Tout en émoi, je vis L A TRUITE (DIE FORELLE ), LIED


La pauvrette trahie. D 550 OP. 32
TEXTE CHRISTIAN SCHUBART

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UN DINER AVEC ...

Gioacchino

ROSSINI
1792-1868

« Je cherche des motifs musicaux mais ne me viennent à l’esprit que pâtés, truffes
et choses semblables. »

Dont acte. À trente-sept ans, Rossini s’arrête de composer. Pour manger. Le


pire, c’est que c’est presque vrai. « Le Maestro et moi nous vivons pour man-
ger et nous nous acquittons religieusement de ce devoir », confirme sa femme
Olympe. Le musicien prodige qui composa, en vingt ans, une quarantaine
d’opéras virtuosissimes n’en écrivit plus aucun durant les quarante dernières
années de sa vie. Quarante ans au cours desquels il produit une poignée de
courtes pièces ainsi que quelques œuvres liturgiques. Tout en dévorant.

Passionné par la truffe qu’il nomme le « Mozart des champignons » et le foie


gras, son autre péché gourmand, il les imagine avec des macaronis dont il crée
une recette, mais le fameux tournedos qui porte son nom n’est pas de son fait :
c’est son goût extravagant pour ces deux ingrédients qui a inspiré un cuisinier.
Comme la première à Paris de son opéra Guillaume Tell a suggéré à un pâtissier
l’idée d’inventer une tarte aux pommes éponyme. Curieux de tout, il aime les
produits du terroir qu’il se fait envoyer de l’Europe entière. Tout en restant fidèle
à la gastronomie italienne dont il cuisine lui-même un des fleurons, le risotto à
la moelle.

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Macaronis cremes :
truffe fraiche et foie gras
POUR 4 PERSONNES
300 g de macaronis 30 g de truffe (fraîche de préférence)
30 cl de crème fleurette 150 g de foie gras
2 cuillères à soupe de parmesan râpé Sel, poivre

Cuire les macaronis dans de l’eau et du sel à ébullition : al dente. Réserver.

Dans un sautoir, mettre la crème, porter à ébullition et réduire celle-ci d’un tiers. Ajouter le
parmesan et retirer du feu. Plonger les macaronis.

Faire poêler les morceaux de foie gras, saler, poivrer et disposer sur papier absorbant.

DRESSAGE
Dans une assiette creuse, disposer les macaronis crémés encore chauds, les cubes de foie gras.

Râper au dernier moment la truffe fraîche. Saler, poivrer.

N.B. : Ce plat peut se décliner avec aussi des spaghettis ou des tagliatelles.
Je préfère utiliser la truffe fraîche car elle a plus de goût. Saison : de décembre à mars.

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Risotto a la moelle
POUR 4 PERSONNES
400 g de riz Arborio 4 à 6 os à moelle
1,5 l de fond blanc 2 échalotes
100 g de beurre Sel, poivre, huile
1 botte de ciboulette

Dans un sautoir plat, faire suer sans coloration les échalotes ciselées à l’huile d’olive. Ajouter le
riz. Mouiller petit à petit avec le fond blanc afin que le riz absorbe le liquide doucement (remuer
à la spatule). À mi-cuisson, ajouter les noisettes de beurre frais tout en remuant et en finissant
la cuisson au fond blanc. Ne saler qu’en fin de cuisson !

La veille, plonger les os à moelle dans de l’eau froide avec un peu de gros sel. Laisser dégorger
toute la nuit.

Le lendemain, cuire la moelle dans de l’eau (départ eau froide), porter à ébullition 1 min et
retirer. Mettre à égoutter.

Ciseler finement la ciboulette. Réserver.

DRESSAGE
Verser le risotto dans les assiettes creuses, disposer la moelle taillée en rondelle par-dessus.

Passer les assiettes sous un grill afin de finir la cuisson de la moelle.

Saupoudrer de ciboulette, poivrer avant de servir.

N.B. : On pourra, comme sur la photo, dresser dans un os à moelle.


Je ne mets pas de parmesan afin d’alléger le plat.

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Sable aux pommes
caramelisees, creme glacee vanille
POUR 4 PERSONNES
250 g de beurre pommade 6 g de fleur de sel 6 pommes Canada grises
100 g de jaunes d'œufs 360 g de farine ¼ l de glace vanille
210 g de sucre glace 1 orange Sucre, beurre, sel
10 g de levure chimique 1 citron

Peler les pommes, les évider et les couper en quartiers. Dans une poêle, mettez du beurre et du
sucre, faire blondir. Plonger les pommes, remuer vivement et les faire colorer. Réserver.

Dans un batteur, mettre le sucre glace, la levure chimique, la fleur de sel, la farine, le jus et le
zeste d’une orange et d’un citron. Remuer à petite vitesse, ajouter les jaunes d’œufs ainsi que le
beurre pommade. La pâte ainsi confectionnée devra reposer 2 à 3 h. Étaler celle-ci. Tailler avec
un emporte-pièce de 10 cm de diamètre environ sur une épaisseur d’1 à 2 cm.

Dans un ramequin, mettre un jaune d’œuf et un peu d’eau, remuer au pinceau et badigeonner
cette préparation sur chacun des cercles. Passer au four à 160° pendant 20 min.

Confectionner un caramel, ajouter du beurre frais en fin de cuisson ainsi qu’un peu de fleur
de sel.

DRESSAGE
Mettre le cercle de pâte au centre de l’assiette, disposer les quartiers de pommes encore tièdes.

Arroser de caramel, mettre une boule de glace vanille sur le dessus.

N.B. : Ceci est une version revisitée de la tarte aux pommes.


On pourra même remplacer la glace par du sorbet à la pomme, ajouter éventuellement des amandes…

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e

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UN DINER AVEC ROSSINI

Le gastrolatre
extravagant

Stendhal, qui rencontre le maestro alors qu’il n’a encore que vingt-neuf ans, le
décrit « énorme », « mangeant comme trois ogres » et « avalant vingt biftecks par
jour. » Il était déjà devenu le Calife Pappataci (« Bouffe et tais-toi ») de l’Italienne
à Alger.

Rossini a des circonstances atténuantes : il est victime d’une vocation contrariée.


« J’avais envie d’être charcutier mais ce ne fut pas possible et non par ma faute :
j’ai été mal orienté. » Le voilà donc compositeur. Afin de venger son sort, il tire
la musique, autant qu’il le peut, vers les cuisines. C’est à l’aune de la truffe qu’il
apprécie Don Juan, l’opéra de Mozart : « Je ne connais à Don Juan d’autre terme
de comparaison que la truffe ; l’un et l’autre ont cela de commun que plus on en
jouit, plus on y trouve de charme. » Il compose entre deux plats, comme ce jour-
là, dans une auberge, où il produit un air de Tancrède devenu célèbre, Di tanti
palpiti, le temps de la cuisson de son risi e bisi (risotto aux petits pois). Depuis,
cet air est surnommé l’Aria del risi.

Il n’a pas vraiment la même notion d’une œuvre que ses confrères : à un ban-
quier qui lui commande une partition, Rossini fait envoyer des cochonnailles de
Bologne. « Ce qui m’intéresse bien plus que la musique, c’est la découverte que
je viens de faire d’une nouvelle salade, écrit-il une autre fois à Isabella Colbran :
huile de Provence, moutarde anglaise, vinaigre français, poivre, laitue, et avec
prudence, jus de citron. Le tout bien battu et travaillé. »

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Tournedos Rossini : une farce
Rossini n’a pas créé la recette du tournedos Rossini. Mais sa glouton-
nerie a suscité maintes légendes, dont celle-ci alimentée par son goût
immodéré pour les apprêts à base de foie gras et de truffe. Qui, alors,
en est l’inventeur ? Nul ne le sait. Ou chacun le sait, ce qui revient au
même. Parmi la multitude d’hypothèses, certaines sont plus probables
que d’autres.

Le maestro aurait demandé à Casimir Moisson, le chef de la Maison


Dorée, de lui préparer une viande agrémentée de foie gras et de truffes,
accompagnée d’une sauce de même composition. Pour en garder le
secret, le plat aurait été confectionné « le dos tourné ». Le Larousse
gastronomique propose une variante : « L’origine du tournedos est liée
à l’apprêt commandé par Rossini (au foie gras et aux truffes), si sur-
prenant aux yeux du maître d’hôtel de l’époque que celui-ci fit passer
le plat dans le dos des convives. »

Une autre hypothèse : Antonin Carême, le maître queux de James de


Rothschild, aurait inventé l’appellation « à la Rossini » en l’honneur
du compositeur afin de désigner toutes préparations contenant foie
gras et truffe : œufs brouillés, mollets, omelette, poularde, suprêmes
de volaille, filets de sole, poulet sauté, cannelloni. Des années plus
tard, un de ses élèves aurait confectionné les premiers tournedos à la
Rossini. Chef et compositeur sont très proches. Convié à dîner chez les
Rothschild, Rossini passe d’abord par la cuisine pour saluer Carême,
lequel, après son service, rejoint les invités au salon où se trouve
parfois Chopin.

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L’homme gave frugal. Alors que son hôtesse l’invite
à nouveau, Rossini rétorque : « Bien
Paris n’est pas pour rien dans la
volontiers et même tout de suite. »
folie ogresque de Rossini. Dès
son arrivée, il est accueilli par un Le maestro organise chez lui tous
festin réunissant 150 personnes au les samedis d’opulents dîners. Au
Veau-qui-tète, un restaurant place moment du dessert, la femme de
du Châtelet. Ce jour-là il porte un Rossini, feignant une soudaine
toast à Mozart. Quelques années fatigue, s’éclipse, les invités se
auparavant, un pâtissier avait lèvent : ils ne goûteront jamais les
inventé les « figaros », petits gâteaux fruits disposés sur les plateaux.
ronds à la pâte feuilletée fourrés La supercherie est révélée par un
aux fruits, à la suite de la création domestique : « Madame loue les
parisienne du Barbier de Séville. fruits et doit les rendre après. »
Un autre crée la tarte aux pommes Traité d’égal à égal par les grands
Guillaume Tell : une flèche en sucre chefs, Rossini figure dès son vivant
transperce la pomme qui décore la dans l’histoire gastronomique
tarte. en entrant dans l’Almanach
À portée de sa bouche se trouvent des gourmands de Grimod de
les plus grandes tables d’Europe : la la Reynière. Si la paternité du
Tour d’Argent, la Maison Dorée, le tournedos Rossini n’est pas prouvée,
Café Anglais, Lucas… Sommeliers, les recettes du risotto à la moelle de
maîtres d’hôtel, chefs cuisiniers, il bœuf et des macaronis à la sauce
connaît tout le monde et ne passe à aux truffes sont bien de lui. Il
table qu’après avoir serré la main à cuisine lui-même de gros macaronis
chacun. en les farcissant, un par un, à l’aide
d’une seringue en argent qu’il a
Pourtant c’est à Paris, capitale des
dessinée et fait fabriquer, avec une
festins et des soirées somptueuses,
préparation à base de truffes et de
que se nichent de surprenantes
foie gras.
avarices. Chez une dame fortunée
mais pingre, on lui sert un repas

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D’après Brillat-Savarin, l’un de ses furieux : en lieu et place du jambon
plats préférés – avec les raviolis au de Castille qu’il attend de la part de
parmesan et les macaronis – est la la reine d’Espagne, celle-ci lui fait
dinde farcie aux truffes. Il n’aurait cadeau d’un coffret.
pleuré que trois fois dans sa vie :
Comme Beethoven, Rossini adore
l’une pour le fiasco de son premier
les huîtres. « Un déjeuner sans
opéra, la deuxième en entendant
huîtres, c’est comme un repas sans
jouer Paganini, la troisième
macaronis, une nuit sans lune »,
lorsqu’un panier de pique-nique
aime-t-il à dire. Mais sa passion est
contenant une dinde farcie aux
débordante. Alors qu’il compose
truffes est tombé à l’eau lors d’une
La Pie voleuse à Milan, il accumule
promenade en bateau.
tellement de dettes auprès d’un
Il est un adepte des produits marchand d’huîtres qu’il n’est
du terroir, d’où qu’ils viennent. plus en mesure de les lui régler. Le
D’Italie, il se fait envoyer l’huile commerçant, fan du maestro, lui
d’olive de Buti, la truffe d’Ascoli, le propose d’échanger la dette contre
fromage stracchino de Lombardie, une musique composée sur un de
le gorgonzola et le panettone, fourni ses poèmes.
par son éditeur Ricordi, de Milan,
Pour les huîtres, il a failli refuser
les chapons de Bologne, la moutarde
d’aller à Naples où lui était proposé
de Crémone, les champignons
un engagement très avantageux,
séchés d’un couvent de sœurs en
pour un autre qui l’était moins à
Ligurie, les cochonnailles de la
La Fenice de Venise : il voulait
fameuse charcuterie Bellentani à
vivre auprès du parc à huîtres de
Modène.
la Cité des Doges, le meilleur de
D’Europe, il reçoit du nougat toute l’Italie, celui-là même dont
de Marseille, du fromage stilton venaient les huîtres consommées
d’Angleterre, des sardines du par Beethoven.
golfe de Gascogne envoyées par
le professeur de musique Albert
Lavignac. Il est parfois déçu – et

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La carte des vins
Rossini est un goinfre mais pas un ivrogne. Pour lui les vins sont nécessaires
pour autant qu’ils viennent amplifier les saveurs des plats. Il s’amuse ainsi à
composer un menu, conservé à la bibliothèque Laurent de Médicis à Florence,
où il fait correspondre vins et mets :
– le madère avec les saucisses
– le bordeaux avec les fritures
– le vin du Rhin avec le pâté froid
– le champagne avec le rôti
– le vin d’Alicante et le lacrima avec les fruits et le fromage.
Dans sa cave, des trésors : malaga, madère, marsala, bourgogne, champagne,
un blanc du Domaine de Johannisberg, cadeau de Metternich, du porto offert
par le roi du Portugal. Amateur de grands crus de Bordeaux, il sert à sa table
saint-émilion, saint-estèphe, pauillac. À James de Rothschild qui lui envoie du
raisin, Rossini répond, selon la légende, ne pas apprécier « le vin en pilules ».
Rothschild comprend et lui fait parvenir un tonneau de château-lafite.

Les peches de vieillesse


Alors que Rossini est au crépuscule de sa vie, la musique frappe à nouveau à sa
porte. Rossini l’entrebâille et voilà qu’entrent au catalogue du maestro « Radis »,
« Cornichons » « Anchois », « Beurre », « Hachis romantique », « Sauté », « Petits
pois », autant de piécettes pour piano qui figurent dans le recueil des Péchés de
vieillesse. Et pour digérer le tout, une « Petite valse à l’huile de ricin ».

Au milieu de ces amuse-gueules, une grande œuvre, la Petite Messe solennelle que
Rossini a composée en deux parties pour pouvoir dîner à l’entracte. À la dédica-
taire, la comtesse Alexis Pillet-Will, Rossini offre un ananas. Fidèle à lui-même,
jusqu’au bout. « L’estomac est le maître de musique qui freine ou éperonne le
grand orchestre des passions ; [...] Manger et aimer, chanter et digérer : tels sont
à vrai dire les quatre grands actes de cet opéra-bouffe qu’on appelle la vie et qui
s’évanouit comme la mousse d’une bouteille de champagne. Celui qui la laisse
s’enfuir sans en profiter n’est qu’un fou. »

Il était né un 29 février, il meurt un vendredi 13.

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« L’huître est comme la manne céleste dont les savants rabbins nous content qu’elle a la
propriété de sembler toujours nouvelle au palais et de reprendre le goût que l’on désire.
Un déjeuner sans huîtres c’est comme un repas sans macaronis, une nuit sans lune.
Diem Perdidi ! C’est ce que je dis chaque jour qui passe sans huîtres et sans macaroni ! »

Gioacchino Rossini

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UN DINER AVEC ...

Frederic

CHOPIN
1810-1849

Bien nourrir Frédéric : une idée fixe qui a habité tous ceux qui entouraient
Chopin, de ses parents à George Sand en passant par ses élèves, convaincus
qu’une alimentation saine et roborative le prémunirait contre les menaces que
faisait peser sur lui sa mauvaise santé.

Bien que doté d’un « appétit extraordinaire » joyeusement revendiqué, il est sou-
mis enfant à de strictes règles de diététique, ce qui ne l’empêche pas de « grigno-
ter » les carottes du jardin botanique de Varsovie, de se goinfrer de pain d’épices
ou de « babas ». À Vienne, après qu’il a quitté la Pologne, il continue à manger
polonais grâce à la sollicitude de ses amis qui lui cuisinent des plats de son pays
pour le consoler de son exil. Pour sa part, Frédéric avoue dévorer des « strudels
en grande quantité ».

L’être fragile a du ressort. Et un grand goût pour les nourritures terrestres,


surtout sucrées, comme les gnocchis à la cannelle qu’il découvrira préparés par
George Sand selon sa propre recette. À la table de Nohant, chez Sand dans le
Berry, sont servis des plats traditionnels concoctés avec les produits de la pro-
priété, comme le potage au potiron. Chopin met lui-même parfois la main à la
pâte pour cuisiner sa spécialité, le pâté : voilà qui cadre bien mal avec la légende
du romantique éperdu.

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Veloute de potiron,
gesiers confits et pain d’epices
POUR 4 PERSONNES
1 kg de potiron 40 g de châtaignes
200 g de gésiers confits 1 chou de Bruxelles
1 l de fond blanc 1 poireau
100 g de beurre Sel, sucre, huile, poivre
50 g de pain d’épices

Dans une sauteuse, émincer le poireau, faire suer avec un peu de beurre (sans coloration).
Ajouter les morceaux de potiron, mouiller au fond blanc. Cuire à frémissement pendant
40 min et rajouter le beurre. Mixer la préparation afin d’obtenir une consistance crémeuse.
Saler, poivrer et réserver.

Couper les morceaux de pain d’épices, les poêler dans un peu de beurre. Ajouter les morceaux
de châtaigne. Réserver.

Blanchir le chou de Bruxelles et l’effeuiller. Réserver.

Poêler les gésiers confits préalablement émincés. Réserver.

DRESSAGE
Dans une assiette creuse, verser le velouté encore chaud.

Disposer harmonieusement les gésiers ainsi que les châtaignes et le pain d’épices.

Sans oublier les feuilles de chou de Bruxelles.

N.B. : Cette préparation peut se préparer avec tous autres légumes en velouté. Et, pourquoi pas,
remplacer les gésiers par du foie gras ou des cœurs de volaille.

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Baba au rhum
« a ma facon »
POUR 4 PERSONNES
Pâte à baba : Sirop à baba : Chantilly :
360 g de farine 500 g de sucre ½ l de crème liquide
1,5 cube de levure boulangère 1,5 l d’eau 1 gousse de vanille
6 g de fleur de sel 5 zestes d’orange 40 g de sucre glace
280 g d’œufs entiers 3 zestes de citron
90 g de sucre 190 g de rhum ambré
210 g de beurre

Préparer la pâte : mélanger dans la cuve du batteur au crochet la farine, la levure et le sel.
Ajouter les œufs entiers et pétrir jusqu’à ce que la pâte se décolle des bords. Ajouter le sucre
et pétrir à nouveau jusqu’à ce que la pâte se décolle des bords. Ajouter le beurre fondu froid et
pétrir jusqu’à obtenir une pâte lisse et homogène. Mettre cette préparation dans les moules à
l’aide d’une poche et laisser pousser. Cuire 13 min à 170°.

Préparer le sirop : faire bouillir tous les ingrédients et y plonger les babas à 60°.

Préparer la chantilly : dans le batteur (cuve froide), mettre les ingrédients et mixer le tout à
vitesse régulière afin d’obtenir une préparation onctueuse.

DRESSAGE
Positionner le baba au centre de l’assiette.

Réduire une partie du sirop afin de le glacer.

Ajouter une cuillère à soupe de rhum au moment de servir.

Disposer sur le dessus une quenelle de chantilly.

N.B. : On peut agrémenter cette recette de fruits de saison (ananas, framboise, fruit de la passion, etc.).

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Gnocchi sucre
facon George Sand
POUR 4 PERSONNES
1 l de lait 1 citron 6 cuillères à soupe de sucre en
50 g de farine 2 jaunes d’œufs poudre
50 g de beurre 6 cuillères à soupe de parmesan 3 cuillères à soupe de cannelle en
5 feuilles de gélatine râpé poudre

Confectionner la béchamel : faire fondre dans une casserole le beurre et la farine, ajouter
par-dessus le lait chaud. Cuire jusqu’à épaississement. Y incorporer les jaunes d’œufs. On aura
avant trempé les feuilles de gélatine dans de l’eau froide. Sortir celles-ci et les incorporer à la
béchamel encore chaude. Zester le citron. Verser cette préparation dans une plaque sur ½cm
d’épaisseur, laisser refroidir.

Dans un cul-de-poule, mélanger le parmesan, le sucre et la cannelle. Réserver.

DRESSAGE
Couper en rectangle la béchamel prise. Saupoudrer de la préparation parmesan, sucre, can-
nelle. Et reproduire cette opération sur 4 ou 5 couches.

Au dernier moment, passer quelques secondes à la salamandre. Servir tiède ou froid.

N.B. : Cette recette « très particulière » a été conçue selon les écrits de George Sand, plat fétiche de
Chopin initialement fait avec du gruyère que j’ai remplacé par du parmesan.

On peut aussi remplacer la gélatine par de l’agar-agar.

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UN DINER AVEC CHOPIN

Une fine gueule

Les nombreux et longs étés que Chopin a passés à Nohant, la propriété de


George Sand dans le Berry, sont placés sous le signe de l’authentique. La femme
qui a partagé durant neuf ans sa vie est une fervente du bio avant l’heure et une
adepte du terroir avant les paniers fraîcheur. La maîtresse des lieux y a sa basse-
cour, son verger, son potager. Le pain est fait avec le blé cultivé dans ses champs,
le gibier est tiré sur ses terres, le lait vient de ses vaches.

Tous les matins Frédéric est réveillé par un chocolat chaud – sa chocolatière
est toujours à Nohant – et par les parfums des confitures que prépare George
Sand, avec les prunes, coings, oranges du jardin : « On ne peut pas confier cette
besogne, affirme-t-elle. Il faut la faire soi-même et ne pas la quitter un instant.
C’est aussi sérieux que de faire un livre. »

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Vivre comme les choux et les carottes
L’après-midi, alors qu’il travaille, ce sont les effluves du « poulet rôti à la broche » qui envahissent la
maison, tandis qu’il a tout loisir de boire un bol de « bouillon aux légumes du potager » tenu au chaud
sur la cuisinière à bois. « Ici on vit comme les choux et les carottes », prévient la maîtresse des lieux.

Avant le dîner, servi le plus souvent en plein air et à 18 heures, Chopin, Sand et leurs invités boivent
du champagne frappé. Puis, c’est le repas, sans ostentation. L’authentique n’est jamais très loin, à
Nohant. Chopin y a fait un vrai tour de France gourmand avec tous les plats régionaux qu’il y a dégus-
tés : bouillabaisse, pissaladière, galettes aux pommes de terre, quiche lorraine, confit d’oie, potage au
potiron, clafoutis, châtaignes.

Priorité est donnée aux farces et aux hachis, des mets peu onéreux qui permettent de rassasier la
douzaine de personnes présentes chaque jour à table matin et soir. Au dessert sont servis des gnocchis
sucrés à la cannelle, une recette de George Sand, qui achèvent d’assouvir les gros appétits.

Le gout du lait
À Paris, la même quête d’authentique exacerbe la passion sandienne
qui est comblée par l’arrivage régulier de produits venant de Nohant :
marrons qu’ils « croquent à toutes les sauces », poulets, gibier, pommes,
noix. Près de chez eux, une laiterie où Chopin peut trouver du lait frais
tous les matins. Le lait, porte-drapeau d’une alimentation roborative
et naturelle, est une constante dans les préoccupations des femmes
proches de Frédéric. Marie d’Agoult, la compagne de Liszt, lui promet
du « lait délicieux » pour le faire venir chez elle dans son château de
Croissy, en Ile-de-France, tandis qu’au début de leurs relations George
Sand l’invitait à « partager avec elle un lait excellent ».

Tous ces soins n’empêchent pas cette dernière d’être minée par l’inquié-
tude : « Le matin, dans la hâte de ses leçons, je crains qu’il oublie d’ava-
ler une tasse de chocolat ou de bouillon. » Lorsqu’ils sont loin l’un de
l’autre, elle a peur que Frédéric ne se nourrisse plus et va même jusqu’à
envoyer un ami l’espionner « pour voir s’il déjeune ».

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Le compositeur aux fourneaux
Et pourtant Chopin mange. Ce qu’il aime par-dessus tout, excepté le choco-
lat ? Le pâté. Un goût bien prosaïque pour un être évanescent. Sans doute une
revanche sur les litres de bouillon de légumes du potager et de lait de la ferme
qu’il a ingurgités pour rassurer ceux qui l’aiment. En tout cas, lorsqu’une de ses
élèves, M lle Planat de La Fay, se sert du pâté comme appât pour le faire venir
chez elle en lui en promettant un « excellent », il ne résiste pas.

Très exigeant, il ne se fournit que chez le charcutier Chevet au Palais-Royal


ou bien il les cuisine lui-même. Car Chopin fait la cuisine. « Je t’enverrai mes
pâtés à moi, écrit-il à un ami. Je les ai fabriqués dans ma cuisine enfumée. » Il
montre la même exigence pour son autre péché mignon, le chocolat, qui vient
de Bordeaux : « Il y est préparé spécialement pour moi, sans aucun arôme, chez
des particuliers. »

La Bombance
Chopin n’aurait-il bu que du lait ? Impossible, mais quasiment rien n’est connu
de ses goûts en matière d’alcool. Il y a le vin doux auquel il avait droit de temps
en temps enfant en Pologne, le champagne avec George Sand, les bouteilles de
bordeaux qu’il se fait envoyer en Angleterre par son ami le violoncelliste Fran-
chomme. Sans doute pour oublier les « orchestres [anglais] qui ressemblent à
leur rosbif et à leur potage de tortue : forts, renommés… rien d’autre. »

Pourtant, la Bombance (« Hulanka »), cette mélodie bachique composée sur un


texte de Stefan Witwicki, c’est bien lui qui en a écrit la musique en 1830.

Il avait vingt ans, il allait partir de Pologne pour ne plus jamais y revenir. La
veille de son départ eut lieu avec ses amis un dîner très arrosé où tout le monde
entonna la Bombance. Pendant l’insurrection contre la Russie qui éclata juste
après son exil, la Bombance de Chopin fut chantée par les insurgés et emprunta
d’autres chemins avec de nouvelles paroles.

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La Bombance (Hulanka)
op.74 n°4 en majeur
Faites attention, jolie fille, soyez prudente !
Vous riez tellement
Que vous renversez du vin sur mon manteau !

Je ne vous le pardonne pas ! Je vais vous faire payer ;


Je vais vous embrasser jusqu’à en être épuisé !
Ah, ces yeux brillants, et ces lèvres divines
ont enflammé mon sang !

Allons, espèce de bougon,


Laissons tout ce couvaison aller au diable!
Buvons, ne perdons pas de temps, mon garçon,
Pour ce monde désolé qui a déjà son plein de malheur.

Que faire si vous pouvez à peine marcher ?


Quelle est la honte dans tout cela?
Quand votre femme criera, vous ne pourrez pas
l’entendre ;
Vous serez refroidi sur le plancher !

Avaler ou sentir mon poing.


Hé, jeune fille, ici !
Juste, servez-nous ! Sans nous séduire.
Servez-nous à boire !

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UN DINER AVEC ...

Giuseppe

VERDI
1813-1901

Parfait honnête homme gourmet, Giuseppe Verdi oppose à la bonne chère une
tempérance exemplaire, à faire mourir de honte tous les Falstaff esclaves de leur
panse. Et pourtant, manger l’intéresse au plus haut point : d’une façon ou d’une
autre, il consacre à cet acte tout le temps qu’il ne passe pas à la composition.
Mais voilà, il a planté de strictes bornes qui délimitent le champ de ses passions.

Élevé entre jambon, fromage et épices dans l’épicerie de ses parents à Roncole,
petit village en Émilie-Romagne, Giuseppe ne reniera jamais la rusticité de son
enfance. Bien au contraire : il déteste les mondanités qui accompagnent son sta-
tut de compositeur d’opéra à succès. Pour les fuir, il achète à trente-cinq ans le
domaine de Sant’Agata, situé non loin de Roncole, où il va vivre cinquante ans
comme un prince paysan, marchandant le matin dans les foires les produits de
ses terres et dînant le soir chez lui en frac dans une vaisselle à lisérés vert et or.

Au fil du temps et des acquisitions, Sant’Agata deviendra une magnifique pro-


priété de plus de mille hectares sur lesquels ont germé toutes ses œuvres depuis
Luisa Miller et qui nourrissent le gastronome qu’il est des meilleurs produits,
dont le maïs consommé sous toutes les formes, les fruits du verger dont les
fameuses poires de la région. Et dès qu’il le peut, Verdi se met aux fourneaux où
sa créativité est là aussi reine, inventant, avec sa femme Giuseppina, le tourne-
dos Verdi, goûteux pied de nez à son confrère.

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Le « tout mais » !
POUR 4 PERSONNES
2 cuillères à soupe de pop-corn 200 g de lait 2 échalotes
500 g de maïs en boîte 200 g de crème fleurette Sel, poivre, piment d’Espelette
100 g de lait de coco 2 cuillères à soupe de parmesan
300 g de polenta 1 gousse d’ail

Pour la polenta, la cuire dans le mélange de lait et de crème. Porter à ébullition, finir à frémis-
sement en remuant sans arrêt. Une fois cuite, ajouter une gousse d’ail râpée, les échalotes cise-
lées finement. Sortir du feu et couler la préparation sur une plaque à rebord pour une épaisseur
d’1,5 cm. Laisser reposer.

Préparer la soupe : en mouillant la boîte de maïs égoutté avec le lait de coco et compléter avec
de l’eau. Cuire 30 min à frémissement. À la sortie du feu, mixer, saler, poivrer et passer au
chinois. Réserver.

Tailler en cercle ou en bâtonnet la polenta qui a figé, poêler les morceaux dans une poêle
antiadhésive avec un peu d’huile d’olive : colorer légèrement.

DRESSAGE
Verser la soupe de maïs chaude dans une assiette creuse, accompagner des morceaux de polenta.

Ajouter quelques grains de maïs et quelques pop-corn.

Saupoudrer de piment d’Espelette et servir.

N.B. : On pourra accompagner cette préparation de quelques croûtons aillés pour accentuer le côté
rustique du plat.

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Tranche de poire williams
rotie, copeaux de parmesan et oseille
POUR 4 PERSONNES
4 poires williams
1 morceau de 100 g de parmesan
Quelques feuilles d’oseille
10 cl de crème fraîche
Huile d’olive, sel, poivre, beurre

Peler les poires, les couper en deux dans le sens de la hauteur et les évider. Poêler dans une
poêle antiadhésive avec du beurre, les faire légèrement colorer. Réserver sur papier absorbant.

À l’aide d’un économe, faire des copeaux de parmesan.

DRESSAGE
Positionner la poire encore tiède au milieu de l’assiette.

Mélanger dans un cul-de-poule le parmesan et les feuilles d’oseille (comme une salade). Assai-
sonner avec l’huile, le sel et le poivre. Positionner ce mélange sur la poire.

Ajouter la crème comme sur la photo.

N.B. : La crème fraîche devra se manger en même temps que le reste afin d’arrondir la mise en bouche.

On pourra remplacer l’oseille par d’autres herbes aromatiques (basilic, estragon…).

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Tournedos Verdi
POUR 4 PERSONNES
4 tournedos de bœuf (150 g pièce) 1 citron 20 cl de vin blanc
200 g de polenta 2 tomates 1 oignon
15 cl de lait 2 oignons tendres 20 cl de crème fraîche
15 cl de crème fleurette 1 gousse d’ail Huile, sel, poivre, beurre

Préparer la polenta en la versant en pluie fine dans le mélange crème et lait porté à ébullition.
Remuer jusqu’à épaississement, râper ½ gousse d’ail et le zeste d’un citron. Saler et poivrer.
Une fois cuite, verser la préparation sur une plaque afin d’obtenir une épaisseur de 1 à 2 cm.
Réserver.

Monder et épépiner les tomates afin de les tailler en brunoise. Y ajouter les oignons tendres
finement émincés afin d’obtenir un mélange harmonieux. Réserver.

Dans un sautoir, faire suer l’oignon taillé toujours en brunoise, râper l’autre demi-gousse d’ail
et faire suer sans coloration avec un peu de beurre. Déglacer au vin blanc, réduire de moitié et
crémer. Porter à ébullition durant quelques minutes jusqu’à épaississement. Saler et poivrer.

Poêler les morceaux de viande dans un mélange d’huile et de beurre afin d’obtenir une colora-
tion régulière. Saler et poivrer. Réserver.

Une fois reposée, tailler la polenta en cercle (avec un cercle de diamètre équivalent à celui des
tournedos). Faire un trou au centre de ce cercle. Poêler et légèrement colorer à l’aide d’huile et
de beurre dans une poêle. Réserver.

DRESSAGE
Au fond de l’assiette, mettre la sauce blanche. Disposer le tournedos qui a été repassé au four.

Positionner le cercle de polenta sur le dessus.

Ajouter le mélange tomates-oignons tendres au centre du cercle ainsi que quelques gouttes
d’huile d’olive, fleur de sel et poivre mignonnette.

N.B. : Initialement, la recette de Verdi était à base de semoule de blé. Je l’ai remplacée par de la polenta,
plus goûteuse à mon goût.

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UN DINER AVEC VERDI

Le gastronome
« Si le public savait comment Giuseppe compose un risotto alla milanese”,
quelles ovations lui pleuvraient alors sur le dos ! » s’exclame Giuseppina Streppo-
ni à quelqu’un qui lui rapporte le dernier triomphe de Verdi. Pour Giuseppina,
que Verdi appelle « petit pâté », succulent surnom qu’elle lui adresse à son tour,
son mari est le « maestro du risotto » qu’il prépare dans le respect des traditions.

C’est un risotto au safran et à la moelle de bœuf auquel il ajoute parfois des restes
de volailles ou de gibier, de foies de volaille, des lamelles de cèpes ou de truffes.
Il tient à l’observance de certaines règles : la cuillère doit être en bois, le riz du
Piémont, le vin « blanc, naturel et doux », le fromage du parmesan râpé et les
truffes en fins copeaux parsemés sur le risotto juste avant de servir.

Ses goûts sont enracinés dans l’enfance et son terroir : il apprécie les mets riches,
les sauces épaisses, comme c’est la tradition de la cuisine en Émilie-Romagne,
faites au beurre et à la crème fraîche, et non à l’huile d’olive et au citron.

Il aime par-dessus tout les raviolis alla genovese farcis de pesto au basilic, ainsi
que la spalla cotta (jambon), spécialité de Rocca San Secondo qu’il prépare lui-
même : c’est un travail au long cours, le salage et le trempage durant plusieurs
jours et la cuisson plusieurs heures. Il en fait profiter ses amis : « Vous allez
recevoir par le train une caisse contenant deux petits jambons de San Secondo
pour vous et pour la famille Ricordi » (son éditeur milanais), écrit-il à la soprano
Teresa Stoltz.

De l’enfance aussi il garde le goût des douceurs : panacotta, crème de ricotta,


pere cotte (poires cuites au vin) qu’il achète sur les marchés, torroni, confiseries
bourrées de sucre, de miel, d’amandes, de noisettes, de pistaches, de chocolat,
de figues sèches…

Et il obéit aux coutumes culinaires qui rythment les fêtes traditionnelles : cha-
pon et spongata (gâteau de la région) à Noël, agneau et panettone à Pâques,
faisan au Nouvel An.

bien tempere
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Le repas comme œuvre d’art
L’ordonnancement des repas à Sant’Agata est strictement défini par le
maestro. Il se change pour l’occasion et conduit Giuseppina à son bras
jusqu’à la salle à manger où la table est mise : verres en cristal, vaisselle
verte et blanche filetée d’or, couverts en argent gravés du V et du double
G des petits pâtés Giuseppe et Giuseppina.

À sa table, amis, musiciens, collaborateurs ou hommes d’État. Il


connaît les goûts culinaires de chacun et partage avec eux « l’amour de
la conversation et surtout de la bonne nourriture », raconte son libret-
tiste Giuseppe Giocosa. Il y est interdit de parler affaires.

« C’est un homme discipliné et c’est la raison pour laquelle il pense


que chaque fonction de la vie doit avoir son moment favori, témoigne
Giocosa. C’est un artiste et c’est la raison pour laquelle il considère,
avec raison, que le repas est une œuvre d’art. »

Hors-d’œuvre, risotto, pâtes ou raviolis, plat de viande bouillie, friture,


rôti, pâtisserie, fromage, desserts composent les menus. Après le déjeu-
ner, le café qu’il fait lui-même est servi dans la salle de billard. Quand il
travaille à l’écriture d’un opéra, il ne déjeune pas et se contente de café
dont il se fournit dans les meilleures boutiques. Les chanteurs venus
travailler avec lui ont droit à un potage.

L’emploi du temps de sa journée est immuable : à l’aube, petit déjeuner


léger avant de se mettre à rédiger sa correspondance, nouveau petit
déjeuner plus copieux, puis inspection de son domaine.

Les jours de marché à Crémone, il part tôt le matin marchander veaux


et vaches, puis déjeune à l’auberge Albergo del Sole où il commande
une « côtelette milanaise » qu’il réclame avec « beaucoup de beurre ».

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Un gourmet en autarcie
À Sant’Agata, les Verdi vivent en quasi-autosubsistance : le domaine les nourrit.

Que ce soit avec le gibier chassé par le maître, la viande des troupeaux, les poissons de
l’étang, le vin des vignes, les volailles et œufs de la basse-cour, le maïs consommé en pain,
gâteau, polenta ou en épis bouillis et recouverts de beurre, le riz sous forme de risotto,
soupe, gâteau, tous les légumes, courges, tomates, asperges, épinards, blettes, salade (que
Giuseppe assaisonne à merveille).

Il devient riche, il dépense peu : il déteste le gâchis. Avec Giuseppina, il invente le


« tournedos Verdi », réponse agreste aux fastes rossiniens : la préparation qui accompagne
la viande est composée de semoule, tomates, parmesan, madère, oignons, des produits
simples et peu onéreux.

La propriété est aménagée pour assurer la conservation des produits. Elle comprend trois
laiteries (lait, beurre, fromages), une fruiterie, un moulin, un garde-manger, une glacière
creusée dans la terre derrière la maison, la glace prise en hiver sur l’étang en garantissant
la fraîcheur.

Il n’apprécie que ce qui vient de chez lui, au sens large. En voyage à l’étranger ou lors
de séjours à Gênes, il se fait envoyer du parmesan de Sant’Agata qu’il déguste avec des
poires, une coutume de la région, du salami da Felino, une saucisse maigre affinée au vin
blanc de Felino, des tranches de Culatello di Zibello (littéralement « petit cul de Zibello »),
un jambon salé produit dans certains villages de la province de Parme, dont Roncole.

La cuisine, qui « ressemble, selon Giuseppe Giocosa, à l’antre d’un alchimiste pan-
tagruélique » et qui « mériterait l’honneur des scènes », est équipée afin de préparer et
transformer les produits.

Les réserves de la propriété sont énormes : conserves de fruits ou légumes, toutes sortes
de salaisons et venaisons, dont son préféré, le Culatello di Zibello.

S’il boit volontiers le lambrusco de ses vignes et de l’asti spumante avec le dessert, ce
connaisseur fait venir des vins de toute l’Italie et aussi de France, avec une prédilection
très nette pour le bordeaux et le champagne.

Son vin préféré reste le chianti, dont la réputation à l’époque est d’être le meilleur de la
production vinicole italienne. Il aime particulièrement celui du baron Bettino Ricasoli,
un homme politique et vigneron de grande classe qui en a trouvé la formule au bout de
trente ans de recherches.

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Le dernier repas
En 1901, Giuseppina, le « petit pâté » avec lequel
Giuseppe a vécu cinquante-sept ans, est morte depuis
quatre ans. Lui a quatre-vingt-huit ans et il est bien
vivant.

Et il déjeune, ce 7 janvier, à Milan. Au menu : risotto à la


chartreuse ; bar à la mayonnaise ; rôti de bœuf ; côtelette
d’agneau ; viande au parmesan ; rôti de dinde ; salade ;
pâtisserie ; fruits ; glace au rhum.

Quelques jours plus tard, le 20 janvier, il déjeune dans


le bel Hôtel Milano qu’il aime tant. Sept jours avant
sa mort. Au menu : bouchées de légumes en julienne ;
truite grillée du chef ; filet de bœuf jardinière ; asperges ;
dindonneau à la broche ; glace à la framboise ; pâtisserie
et desserts.

Le dernier repas « œuvre d’art ». Viva Verdi.

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M

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UN DINER AVEC ...

Modeste

MOUSSORGSKI
1839-1881

« Parfois je m’élance, mais non, stop ! mon cuisinier intérieur me dit que la
soupe a beau bouillir, il est encore trop tôt pour la servir à table ! Peut-être
conviendrait-il d’y ajouter encore quelques légumes ou un peu de sel ? » s’ex-
clame Modeste Moussorgski alors qu’il travaille à son opéra La Khovanchtchina.

Le compositeur russe précède de quelques décennies Marcel Proust dans l’uti-


lisation rémanente de la métaphore culinaire pour exprimer la substantifique
moelle de l’acte créateur. Le premier sert la soupe, le second le bœuf mode de
Françoise, la cuisinière paradigmatique de la Recherche du temps perdu : « Ne
ferais-je pas mon livre de la façon dont Françoise faisait ce bœuf mode, et dont
tant de morceaux de viande ajoutés et choisis enrichissaient la gelée… » (Proust,
in Le Temps retrouvé).

Pourtant Moussorgksi est plus connu pour être un boit-sans-soif impénitent


qu’un gourmet averti qui aime la botvinia ou la bisque d’écrevisses. Il l’est néan-
moins et son goût pour les bons petits plats comme les pâtés en croûte s’en-
tremêle intimement à la préparation/composition de ses œuvres. C’est toute sa
singularité, culinairement parlant.

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Bisque d’ecrevisses,
creme de raifort
POUR 4 PERSONNES
1 kg d’écrevisses 1 bouquet d’estragon 3 cuillères à soupe d’huile d’olive
1 oignon 1 l de crème fleurette 1 carotte
½ tête d’ail 1 cuillère à moka de concentré de 2 cuillères à soupe de crème de
15 cl de cognac tomate raifort

Dans une poêle antiadhésive, mettre un peu d’huile d’olive, faire chauffer, plonger les écre-
visses encore vivantes, remuer vivement et asperger de cognac. Retirer du feu. Décortiquer en
séparant la tête et la queue.

Dans un sautoir, mettre de l’huile d’olive, faire revenir oignon, ail et carotte coupés grossiè-
rement. Ajouter les têtes d’écrevisse préalablement concassées. Mouiller à la crème fleurette
et ajouter le bouquet d’estragon ainsi que le concentré de tomate, cuire pendant 1 h à frémis-
sement. Passer la préparation au chinois, mixer la bisque pour la rendre homogène.

Décortiquer les queues d’écrevisse, les passer au four afin de les tiédir.

DRESSAGE
Verser la bisque chaude dans une assiette creuse.

Disposer les queues ainsi qu’une écrevisse entière.

Ajouter quelques gouttes de crème de raifort.

Décorer avec des salicornes.

N.B. : Cette préparation peut ainsi se préparer avec toutes sortes de crustacés (homard, langoustine,
etc.).

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Botvinia
POUR 4 PERSONNES
80 g de feuilles de betterave 1 concombre 1 cuillère à soupe de paprika
80 g d’oseille 1 cuillère à soupe de moutarde 1 l de fond blanc
80 g d’aneth 1 citron 50 g de beurre
4 oignons verts 20 g de raifort râpé 250 g de saumon

Dans une sauteuse, faire revenir betterave, oseille, aneth, oignon et ½ concombre au beurre
sans coloration. Ajouter la moutarde ainsi que le jus de citron. Mouiller au fond blanc déjà
chaud. Cuire 10 min et mixer aussitôt. Ajouter le paprika et le raifort. Réserver.

Couper le saumon en cubes, passer au four à 180° pendant 3 min afin de le saisir. Saler, poivrer.

Faire des billes de concombre à l’aide d’une cuillère à racine ou pomme parisienne.

DRESSAGE
Verser la soupe dans une assiette creuse (chaude ou froide).

Disposer les cubes de saumon.

Agrémenter de feuilles de betterave et de billes de concombre.

N.B. : Afin de garder la soupe bien verte, une fois mixée la verser dans un récipient qui sera lui-même
posé sur un lit de glace.

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Pate en croute
POUR 4 PERSONNES
Pour la pâte : 2 g de poivre 2 échalotes
450 g de farine Pour la farce : ½ oignon
200 g de beurre pommade 150 g d’échine de porc 10 cl de cognac
5 cl de lait 100 g de chair de veau 2 œufs
6 g de sel 100 g de foie gras Sel, poivre, thym, laurier, sucre

La veille, préparer la pâte : mélanger tous les ingrédients afin d’obtenir une boule, puis laisser
reposer.

La veille également, préparer la farce : passer au hachoir (grosse grille) le porc, le veau, l’écha-
lote et l’oignon. Arroser le tout de cognac, saler, poivrer sans oublier le thym et le laurier.

Le lendemain, beurrer un moule rectangulaire, étaler la pâte au rouleau d’½ cm d’épaisseur.


La disposer dans le moule.

Ajouter à la farce les œufs.

Incorporer cette farce dans le moule en prenant soin d’ajouter en son centre (sur la longueur)
le foie gras préalablement salé et poivré.

Recouvrir la terrine d’un morceau de pâte. Coller celle-ci à l’eau, napper d’une dorure. Sans
oublier de faire une cheminée (faire un trou de 4 mm de diamètre, disposer un morceau de
papier de cuisson roulé positionné à la verticale. Cette technique permet d’évacuer le trop-plein
d’humidité en cours de cuisson).

Mettre au four à 200° pendant 30 à 40 min.

DRESSAGE
Le lendemain de la cuisson, une fois reposé, couper des tranches, les disposer sur l’assiette.

Agrémenter de crème de raifort, de feuilles d’oseille, d’oignon tendre, de cornichon, etc.

N.B. : Cette recette peut aussi se décliner avec de la pâte feuilletée, de toutes les sortes de viandes
(blanches de préférence) et pourquoi pas d’un peu de truffe.

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UN DINER AVEC MOUSSORGSKI

Le bambocheur
esthete
Les abyssales beuveries dans lesquelles pouvait sombrer Moussorgski lui ont
fabriqué une réputation de pochard qui a traversé les siècles. Il faut bien dire
qu’excepté cet élément massif, on ne connaît de lui que les quelques miettes
d’une existence de fonctionnaire, sans cesse en butte au manque d’argent ou de
toit. Malgré tout, la chose culinaire exsude dans maints de ses propos et l’inté-
resse au plus haut point. Car composer pour Moussorgski, c’est cuisiner.

La lecon du pate
Moussorgski adore les pâtés en croûte. Au point de les imaginer mesurant « cent
verstes de long » et de construire une esthétique à partir d’eux. Comme Kant
dans la Critique de la faculté de juger élaborant sa théorie à partir du vin des Cana-
ries, Moussorgski part du pâté.

« S’il existe une chose que je ne peux supporter, c’est lorsqu’une maîtresse de
maison se mêle d’expliquer à propos d’un délicieux pâté en croûte, au moment
où l’on est en train de le manger, les millions de livres de beurre, cinq cents
œufs, une plate-bande de choux, cent cinquante poissons » qu’il a fallu à sa
préparation. Cela suffit à trouver le « pâté moins goûteux », car on se représente
« la cuisinière, toujours sale, la tête tranchée d’une poularde, un poisson vidé
sur un autre. Dans les œuvres d’art accomplies, il y a aussi cet aspect de chaste
pureté qui fait que si l’on se met à les manipuler avec des pattes sales, cela devient
répugnant ».

En un mot : comme pour le pâté en croûte, il vaut mieux ne pas révéler les secrets
de composition d’une œuvre d’art afin de préserver le mystère de sa gestation et
d’en garder tout le goût.

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S’empiffrer de blinis
Moussorgski mange-t-il autre chose que du pâté en croûte ? Oui. Sou-
vent l’été, de la botvinia, une soupe froide servie pendant les chaleurs
estivales et qui représente un mets important dans la tradition culinaire
russe. Il ne manque pas ainsi de prévenir le compositeur Mili Balakirev
qu’il a « dégusté une excellente botvinia dans un restaurant à Moscou
où il y avait des loufiats dans leurs impeccables chemises blanches ».
Préparée avec des feuilles de betterave et des oignons, la botvinia est à
base de kvas, une sorte de bière de ménage faiblement alcoolisée faite
à partir de seigle fermenté et dans laquelle sont cuits des morceaux de
poisson, le plus souvent du saumon.

En hiver, il déguste de la bisque d’écrevisses dans la datcha du compo-


siteur César Cui où, se plaint-il, il « pèle de froid ». C’est précisément
sous le nom « Écrevisse » qu’est désigné César Cui dans « l’Écrevisse
et Cie », un projet de satire contre ses détracteurs. Et en toute
saison dès qu’il peut, il savoure du caviar avec des blinis dont il rêve de
« s’empiffrer ».

Cuisine-t-il lui-même de temps en temps ? La seule trace d’un de ses


passages aux fourneaux se situe durant un été qu’il passe à la campagne
avec le groupe des Cinq – Borodine, Balakirev, Cui, Rimski-Korsakov
et lui-même – où « il fait des confitures et confectionne des marinades »
tandis que les autres travaillent assidûment. « Elles sont délicieuses » se
vante-t-il auprès de la sœur de Glinka. Une tradition dans la famille :
sa mère préparait des confitures pour Balakirev.

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Un etat de pate a pain
Son vocabulaire est farci de nourriture. En langage moussorgskien, compo-
ser facilement une œuvre, cela se dit la « cuisiner rapidement » et s’inspirer
des tableaux de Viktor Hartmann pour concevoir ses propres Tableaux d’une
exposition, c’est « se goinfrer ».

Les jours où il est indolent, il se sent dans « un état de pâte à pain* ». Quand
un air d’opéra est réussi, il le juge « très goûteux* ». Il surnomme le dra-
maturge Pavel Fiodorov « Pain d’épice » et compare la vanité d’auteur « à
du beurre fondu qui coule dans la panse ». Sans compter les innombrables
beignets et pâtés qui surgissent sans arrêt sous sa plume pour désigner amis,
amies, amours.

Il sait assaisonner ses confrères comme il faut. Il décrit Tchaïkovski « pre-


nant l’aspect de quelque pâte à crêpe à l’écoute de Boris Godounov ». Puis
il remarque chez lui « une tendance prononcée à l’aigreur, j’attendais la fer-
mentation ; en effet, la pâte s’est mise à fermenter, à fermenter, et les bulles
crevaient avec un bruit sourd, mou et vilain ».

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Et mêle dans la même aversion cuisine et musique allemandes : « Les pommes
de terre, les soupes aux cerises, soupe au lait et soupe au cassis n’ont pas une
influence particulièrement favorable sur le sentiment artistique. Pour mon
goût personnel, depuis la semelle cuite dans de la graisse de porc jusques y
compris les opéras de Wagner qui durent sept heures, les Allemands n’offrent
rien qui m’attire. »

S’il est loquace sur la nourriture, il est quasiment muet sur l’alcool qui le noie.
Mais peut-être pensait-il à lui-même en écrivant la musique et le texte de Ah,
maudits ivrognes (La Khovanchtchina, Acte III) !

(*) En français dans le texte.

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UN DINER AVEC ...

Erik

SATIE
1866-1925

« Doué d’un bon appétit, je mange pour moi, mais sans égoïsme, sans bestialité.
Autrement dit, je me « tiens mieux à table qu’à cheval » – bien que je sois assez
bon cavalier. » Voilà, c’est Erik Satie, en une phrase : le pied de nez absurde, qui
vient dérégler des propos presque sensés.

Erik Satie mange, il aime, et il le dit : surprenant de la part d’un homme qui se
dissimule derrière de multiples masques, dont celui de la dérision qui explose
jusqu’à sa musique. Mais sur ce sujet-là précisément, il montre le plus souvent
un grand bon sens. Non seulement il mange, mais il écrit des textes sur l’art
culinaire, s’inspire de la gastronomie pour certaines de ses œuvres et s’entretient
de ses goûts avec Debussy chez qui il déjeune de temps à autre.

Pourtant, dans le logement en déshérence où il vit à Arcueil, il mène une exis-


tence d’un extrême dénuement qui lui interdit d’assouvir ce plaisir autant qu’il
en rêverait. Mais Erik Satie rêve-t-il ? Il cauchemarde plutôt, jusqu’à inventer un
menu blanc avec moisissures et autres ignominies. Ce qui incite à en imaginer
un autre, blanc aussi mais tout ce qu’il y a de plus appétissant.

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Matelote d’anguilles
POUR 4 PERSONNES
800 g d’anguilles 50 cl de crème fleurette
150 g d’oignons grelots 30 cl de vin blanc sec
150 g de champignons de Paris Carotte, oignons, bouquet garni,
2 branches de persil sel, poivre
50 g de beurre

Couper en tronçon de 5 cm les anguilles préalablement pelées.

Confectionner 1,5 l de court-bouillon avec carotte, oignons, bouquet garni, sel, poivre. Porter
à ébullition pendant 10 min. Plonger les tronçons d’anguille pendant 10 min à frémissement.
Retirer délicatement avec une écumoire. Poser sur papier absorbant. Réserver.

Dans une russe, faire fondre le beurre sans coloration. Plonger oignons grelots et champi-
gnons coupés en morceaux, remuer délicatement. Mouiller au vin blanc et faire réduire de
moitié. Rajouter la crème, porter à ébullition et laisser frémir pendant 10 min afin d’obtenir
une consistance onctueuse. Ajouter les morceaux d’anguille encore 10 min. Retirer du feu et
rectifier l’assaisonnement.

DRESSAGE
Disposer dans les assiettes le poisson et les légumes.

Rajouter du persil concassé ainsi qu’un peu de poivre.

N.B. : Choisir de préférence des petites anguilles pour ce type de plat. Il pourra être accompagné de
pâtes ou de pomme de terre.

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Boudin blanc et crosnes
a la creme de moutarde a l’ancienne
POUR 4 PERSONNES
4 boudins blancs 1 cuillère à soupe d’amandes
400 g de crosnes ½ l de crème fraîche
4 cuillères à soupe de moutarde à 1 gousse d’ail
l’ancienne

Peler les crosnes. La technique consiste à placer le légume dans un torchon avec du gros sel
et de les frotter afin d’ôter la peau sans abîmer la forme initiale du légume. Rincer à l’eau.
Réserver.

Dans une sauteuse mettre à chauffer la crème. Râper la gousse d’ail et ajouter la moutarde à
l’ancienne. Porter à ébullition, plonger les crosnes et laisser frémir 15 min. Saler, poivrer.

Poêler le boudin à l’huile et au beurre afin de lui donner une jolie coloration.

DRESSAGE
Dans une assiette, disposer les crosnes crémés.

Ajouter le boudin blanc, quelques graines de moutarde ainsi que les amandes.

N.B. : Cette préparation pourra aussi accompagner les viandes blanches (veau, volaille, etc.).

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Brousse comme
une cervelle de canut
POUR 4 PERSONNES
400 g de brousse 1 botte de ciboulette
4 cuillères à soupe de vinaigre de 4 figues sèches
vin vieux Poivre mignonnette, fleur de sel
2 échalotes
4 cuillères à soupe d’huile d’olive

Démouler la brousse dans un plat creux, écraser à la fourchette.

Confectionner la vinaigrette : mélanger les échalotes ciselées finement, sel, poivre, vinaigre de
vin vieux et l’huile d’olive. Ajouter la ciboulette.

DRESSAGE
Napper de quelques cuillères à soupe de vinaigrette la brousse écrasée.

Couper de fines lamelles de figues sèches, les disposer harmonieusement.

N.B. : Cette préparation d’origine lyonnaise pourra se confectionner avec aussi bien de la brousse de
vache que de brebis ou de chèvre suivant les saisons et votre goût.

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UN DINER AVEC SATIE

Tout pour le bec


« Je ne mange que des aliments blancs : des œufs, du sucre, des os râpés ; de la
graisse d’animaux morts ; du veau, du sel, des noix de coco, du poulet cuit dans
de l’eau blanche ; des moisissures de fruits, du riz, des navets ; du boudin cam-
phré, des pâtes, du fromage (blanc), de la salade de coton et de certains poissons
(sans la peau). »

Paradigme de toutes ses bizarreries , le menu blanc a concouru à sa façon à


la célébrité d’Erik Satie, comme les titres fantaisistes – et alléchants – de ses
œuvres : la Valse du chocolat aux amandes, Lui manger sa tartine, Le Chant guerrier
du roi des haricots, Trois Morceaux en forme de poire…

Il surgit dans La Journée du musicien, un texte où Satie décrit minute par minute
ses activités quotidiennes, toutes plus absurdes les unes que les autres : « Je
déjeune à 12 h 11 et quitte la table à 12 h 14 », « Le dîner est servi à 19 h 16 et
terminé à 19 h 20 », ou encore « Je fais bouillir mon vin, que je bois froid avec
du jus de fuchsia ». Morceau de bravoure dans cet emploi du temps loufoque, le
menu blanc est l’équivalent gastronomique d’une blague de Toto.

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A table !
Satie écrit dans la Revue musicale, qui publie « La journée du musicien »,
mais aussi dans l’Almanach de Cocagne « dédié aux vrais gourmands
et aux francs-buveurs, utile et nutritif, où l’on trouvera les lunes, les
éclipses et mes sauces » : telle est la profession de foi de ce périodique
où se côtoient les plus insolents des artistes traînant à Paris dans les
années vingt, Cocteau, Max Jacob, Mac Orlan, Raoul Dufy, et Erik
Satie, le seul compositeur de cet aréopage narquois.

Dans le texte « À table », Satie dit sa « vive admiration, nullement miti-


gée, pour l’art culinaire. » Et il confie : « Les plaisirs de la table sont
loin de me déplaire – au contraire ; et j’ai pour la “table” une sorte de
respect – plus, même. […] Pour moi, manger est un devoir – un devoir
agréable – de vacances, bien entendu ; et je tiens à accomplir ce devoir
avec une exactitude et une attention soutenues. » Comme d’habitude,
Satie raille, mais pour alléger le propos en le nimbant d’un pschitt de
fantaisie.

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Le regard de l’anguille
Ce qu’il n’aime pas ? Les plats « où se dépensent une virtuosité calculée, une science avisée car ils
ne sont pas ceux qui retiennent le plus mon attention “dégustatrice”. En art, j’aime la simplicité ; de
même, en cuisine », affirme-t-il.

Ce qu’il aime ? « Un gigot bien à point », qu’il préfère « au subtil ouvrage d’une viande dissimulée sous
les “fards savants d’un maître de la sauce”. »

Ainsi, comme il a aboli les barres de mesure dans ses partitions, Erik Satie abolit les sauces, théorisant
sans le savoir et bien avant l’heure la cuisine de produit.

Mais il n’a pas souvent l’occasion de la savourer, vivant le plus souvent dans une grande misère qu’il
cache à ses amis. Il dépense toutefois le peu qu’il a dans la nourriture : « Pour moi, tout pour le bec »,
déclare-t-il. Il achète alors de la viande qu’il demande à faire cuire dans un café où il a ses habitudes
car il préfère ne pas manger seul. Il prend parfois de l’anguille, qu’il apprécie particulièrement : « Je
vais me mettre à table pour faire mon repas de midi : l’anguille est sous roche et me regarde amicale-
ment, avec une sorte de tendresse émue. Je l’aime surtout froide », écrit-il à Jean Cocteau.

Il adore aussi le gâteau saint-honoré, un grand classique. Il se sert chez le même pâtissier qui le sur-
nomme « mon client saint-honoré. » Quand il « est en finances », il en consomme un entier et s’achète
des cigares qu’il choisit avec le plus grand soin.

Les cotelettes de Debussy


Pendant plusieurs années et pratiquement chaque semaine, Erik Satie est invité à déjeuner chez Claude
Debussy. Il gardera « toujours à l’esprit le souvenir de ces charmants repas » et de ces « gentils déjeu-
ners, » écrit-il à Emma, la femme de Debussy.

Le repas se compose le plus souvent d’œufs et de côtelettes de mouton mais « quels œufs et quelles côte-
lettes ! s’exclame Satie. Je m’en lèche encore les joues – intérieurement – vous le devinez », poursuit-il.

Debussy, qui les prépare lui-même, garde au sujet de ses recettes le secret le plus absolu. Le repas est
arrosé d’un « délicieux bordeaux blanc dont les effets étaient touchants et disposaient convenablement
aux joies de l’amitié et à celles de vivre loin des “double veaux”, des “momifiés” et autres “vieilles
noix” ».

Mais ceci est une autre histoire.

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Un Diner a l’Elysee
d’Erik Satie
La Marseillaise ! Hymne vraiment français
(voix et piano) ou française !
Paroles de Vincent Hyspa
Mais subitement les liquides manquèrent
( on était au gigot aux haricots)

Le président, d’une façon fort civile, avait Le Président dit à son fils : Ventre à terre !
invité nos grands peintres français Cours chez notre bistrot de la rue Duphot
à venir goûter sa cuisine à l’huile. On me chercher douze bouteilles de bons
raconte que ce fut vraiment parfait. vieux litres de choix,
Après la soupe, radis et caviar, presque Dis-lui bien que c’est pour moi !
comme par hasard ...
Ça sentait bon et le moment était suprême
Ça sentait bon et le moment était suprême
et la musique du soixante-quatorzième de
et la musique du soixante-quatorzième de ligne jouait, ne vous déplaise,
ligne jouait, ne vous déplaise,
La Marseillaise ! Hymne vraiment français
La Marseillaise ! Hymne vraiment français ou française !
ou française !
Après le café, ce grand noircisseur
La conversation avait été fort maigre d’âmes,
jusque-là,
ces messieurs assurèrent sérieusement
quand l’épouse du Président, qui avait à notre Président (Auguste pour les dames),
sa gauche ce sale Leygues,
et sa dame de leur profond dévouement
et à sa droite Monsieur Jean Paul Laurens, puis ils se retirèrent tranquillement et
Dit, tout à coup, au ministre des Beaux- tout en borborygmant.
Arts Ça sentait bon et le moment était suprême
« En voulez-vous du z’homard ? » Ça et la musique du soixante-quatorzième de
sentait bon et le moment était suprême ligne jouait, ne vous déplaise,
et la musique du soixante-quatorzième de La Marseillaise ! Hymne vraiment français
ligne jouait, ne vous déplaise, ou française !

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UN DINER AVEC ...

Henri

DUTILLEUX
1916-2013

Comment ? Cet être délicieux qui a écrit une des musiques les plus raffinées qui
soient ne pensait qu’à « boulotter », comme disait parfois, mi-sérieuse mi-rieuse,
sa femme, la pianiste Geneviève Joy ? Certes, Henri Dutilleux était un bon
vivant pour qui manger était un acte précieux. Mais pour lui les repas n’étaient
pas destinés qu’à « boulotter », ils étaient les points d’orgue de ses journées :
moments de détente ou de récompense après le travail, ils étaient soumis à des
rituels invariables, selon les jours de la semaine ou les fêtes du calendrier.

Très gourmand et gros mangeur, Dutilleux n’a jamais pris du poids, rejetant aux
enfers l’image d’un Rossini soufflé par les kilos. Le secret ? Un appartement au
deuxième étage sans ascenseur, dont il montait et descendait les marches pour
un rien, un goût immuable pour la marche à pied, et une simplicité dans ses
appétits qui le poussait à apprécier la cuisine ni trop riche, ni trop guindée, ni
trop mode : une pintade aux choux, des maquereaux au vin blanc, une bouil-
labaisse, des œufs à la tomate qu’il cuisinait lui-même, le comblaient. Exquis
Henri.

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Bouillabaisse simplifiee
POUR 4 PERSONNES
1 kg de soupe de poissons de roche 2 branches de fenouil 200 g de lotte
1 oignon L’écorce d’1 orange 4 tartines de pain
1 tête d’ail 4 oursins 4 cuillères à café de rouille
10 cl de pastis 1 vive (200 g) 5 g de safran
1 cuillère à soupe de concentré de 1 rouget (200/300 g) 3 g de piment d’Espelette
tomate 200 g de loup Sel, huile d’olive et poivre

Dans une cocotte, faire suer à l’huile d’olive les oignons et l’ail. Ajouter les poissons de roche,
le concentré de tomate, le safran, le pastis, le fenouil ainsi que les écorces d’orange. Mouiller à
hauteur à l’eau froide. Porter à ébullition puis finir de cuire 1 h à frémissement. Passer le tout
au moulin à légumes. Réserver.

Ouvrir les oursins délicatement.

Lever les filets de poissons et les portionner. Cuire les morceaux dans une plaque avec un peu
de soupe en les passants au four à 200° pendant 10 min.

DRESSAGE
Disposer les morceaux de poissons harmonieusement dans l’assiette creuse ainsi que l’oursin.

Finir en toastant les tranches de pain, les frotter à l’ail. Napper de sauce rouille.

N.B. : Cette recette est une recette simplifiée de la bouillabaisse traditionnelle. On pourra y rajouter de
la daurade, du congre, de la rascasse, etc.

Se référer à la charte de la bouillabaisse afin d’obtenir la liste complète des ingrédients.

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Brouillade d’œufs
« a l’italienne »
POUR 4 PERSONNES
10 œufs ½ bouquet de persil plat
100 g de beurre Huile, sel, poivre
12 quartiers de tomates confites
2 gousses d’ail

Dans un cul-de-poule, casser les œufs et les battre. Ajouter sel et poivre.

Dans une russe, faire fondre 20 g de beurre, ajouter les œufs et mettre sur le feu. Remuer
jusqu’à ce que l’œuf cuise et reste crémeux en incorporant des morceaux de beurre frais.

Dans de l’huile à 80°, plonger de fines tranches d’ail frais pendant 3 à 4 min. Retirer et mettre
sur papier absorbant. Renouveler la même opération avec le persil.

DRESSAGE
Verser dans chaque bol, la brouillade crémeuse.

Disposer les quartiers de tomates confites tiédis ainsi que l’ail et le persil.

Rectifier l’assaisonnement et ajouter un trait d’huile d’olive.

N.B. : On pourra substituer le basilic au persil selon la saison.

Choisir des tomates semi-confites qui seront plus moelleuses ou les faire soi-même !

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Supreme de pintade roti
et chou braise
POUR 4 PERSONNES
4 suprêmes de pintade 1 carotte 1 cuillère à café de concentré de
1 chou frisé 2 tranches de jambon cru tomate
1 oignon 30 g de graisse de canard Thym, laurier, huile, sel, poivre,
1 gousse d’ail 1 carcasse de pintade beurre

Dans une poêle, faire chauffer un peu d’huile et disposer côté peau les suprêmes de pintade.
Ajouter une noisette de beurre, cuire doucement et garder rosé. Réserver.

Couper en julienne le chou, le faire blanchir dans de l’eau salée à pleine ébullition 3 à 4 min.
Égoutter et réserver.

Dans une cocotte, faire revenir la graisse de canard, disposer la carotte taillée en brunoise,
l’échalote émincée et la feuille de laurier. Ajouter le chou, finir de le cuire sans coloration.

Mixer la gousse d’ail avec 10 cl d’eau, verser celle-ci dans la cocotte.

Concasser la carcasse de pintade, la faire revenir dans un sautoir avec un peu d’huile afin d’ob-
tenir coloration. Ajouter le thym, le concentré de tomate et mouiller à l’eau à hauteur. Cuire à
frémissement pendant 45 min. Passer au chinois et monter le jus au beurre.

DRESSAGE
Dans l’assiette, disposer le chou et l’assaisonner.
Ajouter les tranches de jambon taillées en julienne.
Disposer le suprême de pintade par-dessus.
Napper de la sauce.

N.B. : Cette recette est une version simplifiée du « chou braisé ».


On pourra remplacer la pintade par toute autre volaille ou viande blanche.

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UN DINER AVEC DUTILLEUX

Le sybarite exquis
Henri Dutilleux n’était pas sectaire , c’était là son moindre défaut. Il aimait tout :
poissons, crustacés, fruits de mer, volailles, viandes, fromages, vins, alcool… Il
aimait tout, sans modération, mais avec un brin de tempérance, juste ce qu’il
fallait pour continuer à apprécier la suite du repas et de l’existence. Ses papilles
étaient comblées si la fête s’accompagnait de rituels qui ajoutaient aux plaisirs
présents les souvenirs des joies passées.

Ainsi, dans sa maison en Touraine à Candes-Saint-Martin, le déroulement de


son petit déjeuner était immuable : levé à 7 heures, Dutilleux prenait son pre-
mier repas, composé de thé, tartine grillée, beurre doux et confiture, seul, mais
en compagnie des oiseaux : « Il n’y a pas que Messiaen qui s’intéresse à eux »,
disait-il en riant. Il ne voulait pas qu’on le dérange, il ne voulait pas parler : juste
écouter et regarder les oiseaux, nombreux sur la petite plage au pied de la maison
située au confluent de la Loire et de la Nièvre, et qu’il attirait en leur jetant des
miettes de pain.

Puis il remontait dans sa chambre où il répondait à son courrier. Vers 10 h 30,


il appelait dans l’escalier : « Réunion au sommet ! Alors, qu’est-ce qu’on mange
à midi ? »

Il passait souvent Noël à Candes, et le menu du réveillon ne variait pas : huîtres,


caviar, boudin blanc avec pommes en l’air, coquilles saint-jacques à la sauce
champagne. Dutilleux s’amusait à jeter dans le feu de la cheminée les coquilles
d’huîtres qui explosaient et mettaient des éclats partout. À la fureur de sa femme,
Geneviève Joy. Aucun rituel en revanche ne venait marquer le jour de l’An : lui et
Geneviève, parfaitement insensibles à l’événement, se couchaient avant minuit.

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Les fruits de mer du dimanche
Le dimanche soir, chez les Dutilleux, c’était fruits de mer et crustacés. Henri se
fournissait au Pied de Cochon, dans les Halles : huîtres Gillardeau, praires, oursins
pour Geneviève, bulots pour son ami Robert Nadjar qui partageait très souvent leurs
repas, petites crevettes grises qu’il mangeait sur une tartine beurrée, pinces de crabe
avec mayonnaise, le tout arrosé de muscadet. Sur les huîtres, une goutte de citron. Le
plateau de fruits de mer était suivi de linguine alla vongole.

Puis Henri a fait ses courses au Daguerre Marée, rue Daguerre, dans le 14e arron-
dissement de Paris. C’était toujours Momo qui s’occupait de lui et ouvrait les huîtres.
Momo qui l’accueillait avec ces mots : « Alors, qu’est-ce qui va prendre aujourd’hui,
le papy ? », ce qui faisait beaucoup rire Dutilleux. Aujourd’hui, Momo se souvient
parfaitement de ce papy qui « savait exactement ce qu’il voulait : des gillardeau, du
haddock, des soles, parfois du homard ou de la langouste… »

Le pot-au-feu du samedi
Les journées d’Henri Dutilleux étaient invariablement rythmées par trois repas, dont
le petit déjeuner. Déjeuner et dîner comportaient entrée, plat et fromage. Même s’il
appréciait le caviar que des amis lui rapportaient parfois de voyage, ses goûts étaient
magnifiquement simples : en entrée, maquereaux au vin blanc, harengs, radis beurre,
soupe de poissons agrémentée de croûtons aillés. En plat principal, pintade aux
choux, poulet rôti, haddock, chateaubriand dans le filet, côtelettes d’agneau. Aucun
repas ne se concluait sans fromage. Il n’appréciait que le fromage de vache, avec un
penchant pour le maroilles, le comté, le camembert et le saint-nectaire. Le tout arrosé
de bordeaux, car si Dutilleux n’était pas un expert, il savait quand un vin était bon et
quand un texte évoquant l’ivresse l’était aussi : il avait choisi le poème de Baudelaire
« Enivrez-vous » pour son cycle Le Temps l’horloge composé pour la soprano Renée
Fleming.

S’il n’était pas très sucré, il aimait bien les sorbets de chez Berthillon qu’il choisissait
en fonction des couleurs, et non des parfums, juste pour que ce soit joli, l’association
cassis/fruits de la passion étant sa préférée.

Dès que l’hiver arrivait commençait le rituel du pot-au-feu du samedi soir, dont Gene-
viève était la grande prêtresse. C’était un pot-au-feu traditionnel servi avec le bouillon
dégraissé, des cornichons, du gros sel et les trois viandes, macreuse, gîte, plat de côte.
Et forcément un os à moelle, lequel était dégusté sur du pain grillé.

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Le compositeur aux fourneaux
Son goût pour la nourriture s’accompagnait souvent de sa préparation,
comme tous les authentiques gourmands. Henri Dutilleux était un as de la
mayonnaise qu’il préférait bien épaisse. Pour la faire, il s’enfermait dans la
cuisine et refusait la présence de tout témoin. Quand il la ratait, fait rarissime,
il était furibond. Il aimait aussi préparer les œufs brouillés selon la règle, au
bain-marie. Avec le temps, sa recette a évolué et il les a cuits à la poêle agré-
mentés de tomates et d’ail.

Les Dutilleux préféraient recevoir à dîner des gens qui aimaient bien man-
ger, comme Brigitte Engerer, Mstislav Rostropovitch qui lui commanda
le concerto pour violoncelle Tout un monde lointain, Germaine Mounier,
Myriam Soumagnac, Jean Roy. Ils servaient alors le fameux gigot Dutilleux.

C’était un travail à deux : lui achetait la viande à la boucherie Gardil rue


Saint-Louis-en-l’île, pelait les gousses d’ail, faisait des entailles dans l’agneau
qu’il farcissait de morceaux d’ail. Elle, Geneviève, mettait l’huile et le beurre,
saupoudrait d’herbes de Provence. Ils ne dérogeaient jamais à un grand prin-
cipe : sortir le gigot du réfrigérateur longtemps avant de l’enfourner. L’agneau
était servi rosé avec des haricots verts frais et des flageolets en boîte. Henri
avait un faible pour les entames et le gigot froid qu’il mangeait le lendemain
avec sa mayonnaise.

Certains ne venaient que pour l’apéritif, comme Anne-Sophie Mutter ou sa


« petite fiancée » Renée Fleming, comme il l’appelait. La raison étant que
Geneviève et lui avaient un peu honte de leur appartement dont les peintures
s’écaillaient. Henri prenait alors une Suze cassis ou un whisky Perrier – mais
pas de pur malt, trop tourbé à son goût – accompagné de petites crêpes four-
rées au cheddar et de pistaches.

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Monsieur Henri
Tout en évitant soigneusement le style guindé, Henri Dutilleux aimait aller
au restaurant et il avait ses habitudes dans différents établissements. Comme
à la Brasserie de l’île Saint-Louis où on l’appelait monsieur Henri et où il
mangeait des choucroutes. Ou au Dôme, boulevard du Montparnasse, où sa
photo était accrochée au mur. C’est là qu’il invitait des personnalités musi-
cales, comme Seiji Ozawa. Ou au Petit Niçois, dans le 7e arrondissement, où
il venait pour la bouillabaisse, un plat qu’il adorait.

Ses goûts étaient sans frontières : il aimait les couscous et les tajines de l’Atlas,
un Marocain à côté de la Tour d’Argent, les pâtes de Caruso, un Italien rue
de Turenne dont « il connaissait toute la carte », se souvient Éric Tanguy, le
poisson de Isami, un Japonais de l’île Saint-Louis.

Ils étaient sans frontières et libres. Quand il faisait une thalassothérapie à


Belle-île, au Castel Clara, il s’échappait du restaurant diététique pour goûter
à des bonheurs interdits : un homme qu’aucun carcan n’a jamais pu enfermer.

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PISTES DISCOGRAPHIQUES
Les enregistrements qui suivent concernent les œuvres citées dans les textes.

JEAN-SÉBASTIEN BACH
CANTATE DU CAFÉ (SCHWEIGT STILLE , PLAUDERT NICHT ) BWV 211
Emma Kirby, David Thomas, Academy of Ancient Music, Christopher
Hogwood (direction). Oiseau Lyre
VARIATIONS G OLDBERG BWV 988
Pierre Hantaï (clavecin). Mirare
Nicholas Angelich (piano). Erato

MOZART
ESSEN, TRINKEN, CANON À 3 VOIX K.234
Chorus Viennensis. Philips (vol.12 de l’édition complète Mozart)
DON GIOVANNI
Mirella Freni, Martina Arroyo, Richard van Allan, Ingvar Wixell, Royal Opera
House Orchestra, Colin Davis (direction). Philips
CONCERTO POUR CLARINETTE ET ORCHESTRE K.622
Sharon Kam (clarinette), Haydn Philharmonie. Berlin Classics

BEETHOVEN
SYMPHONIE N °9 AVEC CHOEUR OP.125
Choeur et Orchestre du Festival de Bayreuth, Wilhelm Furtwängler
(direction). Warner Classics
QUATUOR À CORDES N °16 OP.135
Quatuor de Budapest. Sony

SCHUBERT
L A TRUITE (LIED DIE FORELLE ) D.550
Ian Bostridge (ténor), Julius Drake (piano). Warner Classics
L A BELLE MEUNIÈRE D.775
Jonas Kaufmann (ténor), Helmut Deutsch (piano). Decca
L E RÔTI DE NOCES (DER HOCHZEITSBRATEN ) D. 930
Marlis Petersen (soprano), Werner Güra (ténor), Konrad Jarnot (basse),

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Christoph Berner (piano). Harmonia Mundi
QUINTETTE « L A TRUITE » POUR PIANO, VIOLON, ALTO, VIOLONCELLE ET
CONTREBASSE D.667

Frank Braley (piano), Renaud Capuçon (violon), Gérard Caussé (alto),


Gautier Capuçon (violoncelle), Aloïs Posch (contrebasse). Erato
QUATUOR À CORDES « L A JEUNE FILLE ET LA MORT » D.810
Jerusalem Quartet. Harmonia Mundi
SIX GRANDES M ARCHES ET TRIOS OP.40 D.819 (PIANO À QUATRE MAINS)
Christoph Eschenbach et Frantz Justus. Warner

ROSSINI
L’ITALIENNE À A LGER
Ruggero Raimondi, Agnes Baltsa, Enzo Dara, Orchestre philharmonique
de Vienne, Claudio Abbado (direction). Deutsche Grammophon
TANCRÈDE
Marilyn Horne, Lella Cuberli, Ernesto Palacio, Nicola Zaccaria, Orchestre
de la Fenice, Ralf Weikert (direction). Sony
L A PIE VOLEUSE
Ileana Cotrubas, Carlos Feller, Nucci Condo, Orchestre Güzernich de
Cologne, Bruno Bartoletti (direction). Arthaus
GUILLAUME TELL
Gerald Finley, John Osborn, Malin Bystrom, Marie-Nicole Lemieux, Frédéric
Caton, Orchestre de l’Académie Sainte Cécile, Antonio Pappano (direction).
Warner Classics
L ES PÉCHÉS DE VIEILLESSE : QUATRE HORS -D’OEUVRE ET QUATRE MENDIANTS
Alessandro Marangoni (piano). Naxos
L A PETITE MESSE SOLENNELLE
Cecilia Gasdia, Bernarda Fink, Vincenzo La Scola, Ensemble vocal de
Lausanne, Michel Corboz (direction). Erato

CHOPIN
HULANKA (L A BOMBANCE) OP.74 N °4
Urszula Kryger (soprano), Charles Spencer (piano). Hélios.

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MOUSSORGSKI
BORIS G ODOUNOV
Samuel Ramey, Anatoly Kotcherga, Serguei Larine, Philippe Langridge,
Marjan Lipovsek, Orchestre philharmonique de Berlin, Claudio Abbado
(direction). Sony
L A K HOVANCHTCHINA, (A H MAUDITS IVROGNES ! ACTE 3)
A. Ognitvtsev, Irina Arkhipova, Alexei, Krivtchenia, Vladislav Piavko, Victor
Nietchipailo, Alexeï Maslennikov, Chœur et Orchestre de l’Académie d’État du
Bolchoï, Boris Khaikine (direction). Melodya

VERDI
FALSTAFF
Bryn Terfel, Thomas Hampson, Daiil Shtoda, Adrienne Pieckzonka,
Orchestre philharmonique de Berlin, Claudio Abbado (direction). Deutsche
Grammophon

SATIE
TROIS MORCEAUX EN FORME DE POIRE , L E CHANT GUERRIER DU ROI DES HARICOTS,
VALSE DU CHOCOLAT AUX AMANDES, LUI MANGER SA TARTINE , L E P IQUE-NIQUE ,
TROIS P ETITES P IÈCES MONTÉES
Aldo Ciccolini (piano). In Intégrale de l’œuvre pour piano. Warner Classics
UN DÎNER À L’É LYSÉE
Gabriel Bacquier (voix), Paolo Santos (piano). In Album Erik Satie. Reader’s
Digest Music

DUTILLEUX
L E TEMPS L’HORLOGE
Renée Fleming, Orchestre national de France, Seiji Ozawa (direction). Decca
CONCERTO POUR VIOLONCELLE TOUT UN MONDE LOINTAIN
Mstislav Rostropovitch, Orchestre de Paris, Serge Baudo (direction). Warner
Classics
HYMNE À LA NUIT
Brigitte Engerer, piano. Œuvres de Schubert et de Liszt
(En souvenir de Brigitte Engerer, proche amie de Henri Dutilleux)

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BIBLIOGRAPHIE
À LA TABLE DE GEORGE SAND, PAR GEFFRAY, DE L’ÉDITION DE LA
CHRISTINE SAND, FLAMMARION, FONDATION I NTERNATIONALE
2002. MOZARTEUM SALZBOURG,
FLAMMARION, 1986-1999.
À LA TABLE DE VERDI, PAR EVA
GESINE BAUR, CHÊNE, 2003. CORRESPONDANCE DE
MOUSSORGSKI, PRÉFACE D’A NDRÉ
A LMANACH DES GOURMANDS, TEXTE L ISCHKE, FAYARD, 2001.
INTÉGRAL DES HUIT ANNÉES (1803-
1812), PAR A LEXANDRE GRIMOD DICTIONNAIRE DU DÉSIR DE LA
DE LA R EYNIÈRE. P RÉFACE JEAN- BONNE CHÈRE , ASSOCIÉ AUX
CLAUDE BONNET, M ENU FRETIN, RECETTES MUSICALES DU FESTIN
2012. JOYEUX DE J. L EBAS (1738), PAR
A LAN JONES, ÉDITIONS HONORÉ
L’A RT DE LA CUISINE FRANÇAISE CHAMPION.
AU XIX E SIÈCLE, PAR A NTONIN
CARÊME, PAYOT, 1994. HISTOIRE DE LA VIE ET DE L’ŒUVRE
DE BEETHOVEN, PAR A NTON
BACH EN SON TEMPS, PAR GILLES SCHINDLER, H ACHETTE /BNF,
CANTAGREL , FAYARD, 1997. 1864.

L ES CAHIERS DE CONVERSATION L ETTRES DE BEETHOVEN.


DE BEETHOVEN (1819-1827), L’INTÉGRALE DE LA
TRADUITS ET PRÉSENTÉS PAR J. G. CORRESPONDANCE 1787-1827,
PROD’HOMME. CORRÉA, 1946. PRÉFACE DE R ENÉ KOERING, ACTES
SUD, 2010.
CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC
CHOPIN, EN 3 VOLUMES, R ICHARD M ANGEZ BAROQUE ET RESTEZ
M ASSÉ, 1993. MINCE, PAR P HILIPPE BEAUSSANT,
BABEL , 2007.
CORRESPONDANCE DE MOZART, EN
7 VOLUMES, ÉDITION FRANÇAISE ET
TRADUCTION PAR GENEVIÈVE

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MÉMOIRES D’UN AMNÉSIQUE. ERIK
SATIE, PRÉSENTÉ PAR R AOUL
COQUEREAU, ÉDITIONS OMBRES,
2010.

MOUSSORGSKI, PAR X AVIER


L ACAVALERIE. ACTES SUD, 2011.

PHYSIOLOGIE DU GOÛT, PAR JEAN-


A NTHELME BRILLAT-SAVARIN,
FLAMMARION, 2009.

PRÉLUDES, FOUGASSES ET
VARIATIONS, PAR P HILIPPE
BEAUSSANT, ACTES SUD, 2004.

ROSSINI, LES PÉCHÉS DE


GOURMANDISE, PAR THIERRY
BEAUVERT, P ETER K NAUP, PARIS,
ÉDITIONS P LUME , 1997.

FRANZ SCHUBERT, PAR BRIGITTE


M ASSIN, FAYARD, 1993.

SCHUBERT RACONTÉ PAR CEUX QUI


L’ONT VU, STOCK, 1997.

VIE DE ROSSINI, PAR STENDHAL ,


ÉDITION DE P IERRE BRUNEL ,
GALLIMARD, 1992.

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Merci à Nicholas Angelich, Olivier Bellamy, André Berelowitch,
Henri Demarquette, Marianne Gaussiat, Alix de Saint-Venant, Éric Tanguy.
Et tout particulièrement à Robert Nadjar, qui a partagé la table
d’Henri Dutilleux si souvent.

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Table
UN DINER AVEC JEAN-SEBASTIEN BACH p.11

MENU
Salade d’asperges vertes tièdes, vinaigrette potagère p.12
Filet de sandre, beurre d’anchois, fricassée de petits pois p.14
Tarte au citron crémeuse, éclats de meringue p.16
UN SOLIDE APPÉTIT

UN DINER AVEC WOLFGANG AMADEUS MOZART p.23

MENU
Knoedel de foies de volaille, potage de légumes p.24
Langue de veau poêlée, tomate relevée aux câpres p.26
Pana cotta vanille – fraise p.28
LE GOURMAND GOULU

UN DINER AVEC LUDWIG VAN BEETHOVEN p.35

MENU
Soupe de vermicelles et petits légumes de saison p.36
Filet de carpe aux poireaux et au vin rouge p.38
Huîtres plates, crémeux de vin blanc de Moselle p.40
LE GOURMET SOURCILLEUX

UN DINER AVEC FRANZ SCHUBERT p.49

MENU
Choucroute de navet à la saucisse p.50
Rôti de veau et fricassée de fèves à l’anis étoilé p.52
Filet de truite au potiron, condiments citronnés p.54
LE CONVIVE DE RÊVE

UN DINER AVEC GIOACCHINO ROSSINI p.61

MENU
Macaronis crémés : truffe fraîche et foie gras p.62
Risotto à la moelle p.64
Sablé aux pommes caramélisées, crème glacée vanille p.66
LE GASTROLÂTRE EXTRAVAGANT

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UN DINER AVEC FREDERIC CHOPIN p.75

MENU
Velouté de potiron, gésiers confits et pain d’épices p.76
Baba au rhum « à ma façon » p.78
Gnocchi sucré façon George Sand p.80
L’AMATEUR ÉCLAIRÉ

UN DINER AVEC GIUSEPPE VERDI p.87

MENU
Le « tout maïs » ! p.88
Tranche de poire williams rôtie, copeaux de parmesan et oseille p.90
Tournedos Verdi p.92
LE GASTRONOME BIEN TEMPÉRÉ

UN DINER AVEC MODESTE MOUSSORGSKI p.99

MENU
Bisque d’écrevisses, crème de raifort p.100
Botvinia p.102
Pâté en croûte p.104
LE BAMBOCHEUR ESTHÈTE

UN DINER AVEC ERIK SATIE p.111

MENU
Matelote d’anguilles p.112
Boudin blanc et crosnes à la crème de moutarde à l’ancienne p.114
Brousse comme une cervelle de canut p.116
TOUT POUR LE BEC

UN DINER AVEC HENRI DUTILLEUX p.123

MENU
Bouillabaisse simplifiée p.124
Brouillade d’œufs « à l’Italienne » p.126
Suprême de pintade rôti et chou braisé p.128
L’EXQUIS SYBARITE

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Achevé d’imprimé
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