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A Jacques et Line,

A Lise, Alain, Sylvie et Marianne,

A tous ceux dont le regard m’a donné la force


d’explorer un terrain nouveau.

(( Croître comme l’arbre

qui ne presse pas sa sève. D


(R.M. Rilke
M Lettres à un jeune poète », 1903)
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de nos nouveaux livres, il vous suffit d'envoyer votre carte de visite à :

LES ÉDITIONS D'ORGANISATION

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J'APPRENDS,
DONC JE SUIS

Introduction à la neuropédagogie
Couverture : Peinture de Georges Brunon

La loi du 1 1 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41,
d’une part, que les (( copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du
copiste et non destinées à une utilisation collective B et, d’autre part, que les analyses
et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, G toute représentation
ou reproduction intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de
ses ayants droit ou ayants cause, est illicite H (alinéa le‘ de l’article 40).
Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constitue-
rait donc une contrefaçon sanctionnée par les alinéas 425 et suivants du Code pénal,
si elle n’était autorisée par l’éditeur ou par le Centre Français d’Exploitation du Droit
de Copie - 6 , rue Gabriel-Laumain - 75010 PARIS.
O Les Éditions d’organisation, 1987.
Achevé d’imprimer en avril 1992
Hélène Trocmé- Fabre

J’APPRENDS,
DONC JE SUIS

Introduction à la neuropédagogie

Préface d’Albert Jacquard


Directeur du Dépa-ment de Génétique
de l’Institut National d’Etudes Démographiques

LES ÉDITIONS D’ORGANISATION


AUX ÉDITIONS D’ORGANISATION

Edward DE BONO
Réfléchir mieux
Tony BUZAN
Une tête bien faite
Alain CARDON
Le manager et son équipe
Alain CARDON, Vincent LENHARDT et Pierre NICOLAS
L’analyse transactionnelle : outil de communication et d’évolution
Olivier CLOUZOT et Annie BLOCH
Apprendre autrement
Olivier CLOUZOT
- Enseigner autrement
- Former autrement : apprentissages intellectuels, langages et struc-
turation des connaissances
Catherine CUDICIO
- Comprendre la PNL
- Maîtriser la PNL
Guy DELAIRE
Commander ou motiver ?
Thomas DEVERS
Communiquer autrement :expression non verbale, attitudes et com-
portements
Jacques DUMONT et Christian SCHUSTER
Jouer à raisonner
Jean FRIANT et Yvon L’HOSPITALIER
Jeux-problèmes : de la logique à l’intelligence artificielle
Charles HAMPDEN-TURNER
Atlas de notre cerveau : Les grandes voies du psychisme et de la
cognition
Malcom S. KNOWLES
L’apprenant adulte : vers un nouvel art de la formation
Linda V. WILLIAMS
Deux cerveaux pour apprendre : le droit et le gauche

ISBN : 2-7081-0860-3
SOMMAIRE

Page
Préface ......................................................... 13

Apprendre à enseigner et enseigner à apprendre .................... 17


Un constat .............................................. 17
Un contrat .............................................. 20
Un vrai langage ......................................... 21
A la recherche d’une passerelle. d’un cadre et d’outils ....... 21

PREMIÈRE PARTIE
NOTRE CERVEAU AUJOURD’HUI
L‘apport des neurosciences ....................................... 29

.
Chapitre 1 Les technologies nouvelles ............................ 31
. Explorer un cerveau humain. normal. en activité .......... 31
- La vie cérébrale prise sur le fait .......................... 32
- Transmission hormonale et molécules cérébrales .......... 35

.
Chapitre 2 Cerveau(x) et information ............................. 39
1. Le trajet de l’information...................................... 40
- De l’environnement à l’homme .......................... 40
- Des sens au cerveau : réception et transmission de l’infor-
mation ................................................ 41
2. Niveaux d’organisation :évolution et maturation du cerveau ..... 45
- Quatre cerveaux en un .................................. 46
- Notre dynamisme sensori-moteur ........................ 50
- Corrélats neurologiques du développement de l’intelligence . 53
8 Japprends. donc je suis
3. Nos deux hémisphères :deux gestions .......................... 60
- L‘asymétrie des deux hémisphères ........................ 63
- L‘équilibre du pouvoir : confrontation ou coopération ? .... 66
- Voir le voir, l’entendre et le dire. et même... le penser et le

vouloir ................................................ 67
4. Mémoires sensorielles et images mentales ....................... 70
- Trois et même quatre dimensions ........................ 71
- Les images mentales .................................... 78
- Un mécanisme commun ................................ 82
.
Chapitre 3 Cerveau(x) et comportements ......................... 83
1. Vigilance. conscience et attention ............................... 84
- Une bonne qualité d’éveil ............................... 85
- La notion de conscience ................................ 85
- L‘attention ............................................. 88
2 . Motivation(s) et changement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
- Modèles homéostasique, dynamique, cognitif. humaniste . 91
3. Perception et personnalité..................................... 93
4. Affectivité et communication .................................. 94
- Au-delà des cultures ? ................................... 95
5. Rythmes cérébraux et communication .......................... 96
- Des rythmes de base universels? ......................... 97

Chapitre 4. L’observateur observé ................................. 99


1. Les mots clés de notre potentiel ............................... 100
2. Quel modèle pour notre cerveau ? .............................. 102
- Ordinateur ou servo-mécanisme? ........................ 103
- Le modèle holographique ............................... 106
- Système ouvert et structure dissipative ................... 107
- Autres modèles ........................................ 109
. Un modèle cybernétique appliqué à l’apprentissage d’une
langue étrangère ........................................ 110
3. Conditions optimales de fonctionnement :hygiène et nourriture
cérébrales ....................................................... 111

Chapitre 5. Quelles perspectives pour la formation ? ................ 117


. La conscientisation de l’apprenant et de l’enseignant ....... 118
. L‘expérience partagée ................................... 118
- Le droit à la différence et à l’intelligence ................. 119
Sommaire 9

DEUXIÈMEPARTIE
APPRENDRE A GÉRER SES RESSOURCES

Vers un apprentissage bionomique ................................ 123

Chapitre 6. Quelle(s) pédagogie(s) pour quel(s) apprentissage(s) ? .... 127


1. Les solutions à rechercher ..................................... 128
2. Éduquer et apprendre :l’itinéraire de l’apprenant ................ 129
3. Trois pôles en inter-relation. ................................... 130
1. Comprendre ........................................... 131
- La réalité cérébrale; tout est relation; l’ancrage; la

complexité ; les différents niveaux ; les conditions opti-


males de fonctionnement ; l’interface cerveau-informa-
tion ; savoir d’où l’on part et où l’on va.
2. Faire .................................................. 136
~

Informer, dire, dialoguer... ; faciliter la prise en charge,


la mémorisation; que faire en cas de dysfonctionne-
ment? développer la mise en relation, les évocations
mentales, la pensée positive, le langage des deux hémi-
sphères, le voyage imaginaire, la représentation graphi-
que, les sens tactile et kinesthésique, l’apprentissage
expérienciel ; éviter les fautes contre le cerveau.
3. Laisser se faire l’itinérance .............................. 148
- Faire confance au potentiel ; respecter la durée ; laisser

la place au choix; faire lâcher prise... ; accepter les


différences.

Chapitre 7. Applications pédagogiques. Trois expériences exemplaires 151


1. Un projet national au Venezuela:<< Développement de l’intelli-
gence» ......................................................... 151
2. Une approche holistique (États- Unis) ........................... 158
3. Un partage inter-culturel (Australie) ............................ 165

Chapitre 8. Nouvelles perspectives pour la formation ............... 171


Une charte pédagogique ......................................... 172

TROISIÈME PARTIE
CONSTRUIRE AUJOURD’HUI AVEC HIER ET DEMAIN

Outils et techniques pour le formateur en formation de neuro-


pédagogie. ...................................................... 175
10 rapprends, donc je suis

En amont, en parallèle et en aval . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ., . , . . . . . . . . 177


Chapitre 9. La spirale de la formation
Dynamique des différentes phases de la formation : un contenu -k
une démarche.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181
1. La Période << T moins 1 >> du formateur :travailler en amont. . . . . . 181
- Attentes, les 4R, image de soi, besoins en formation

2. Transmission d’un contenu et d’une démarche . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188


- Réflexion préalable ; figures et tableaux (cf. liste pages 273-

274).
3. Construire une séquence d’enseignement cohérente avec la démar-
che neuropédagogique . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213
- Construire la conscientisation de l’apprenant ; construire la

prise d’information ; construire le traitement de l’informa-


tion.
- Construire les actes de lecture.

Chapitre 10. Construire un nouveau regard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 229


Apprendre, vous avez dit capprendre >> ? Reconceptualiser . . . ... . . . . 229
Aptitude, attention, attitude, autonomie, changement, communi-
cation, comprendre, connaissance, contexte, créativité, culture,
différences, difficultés, dualité/ dualisme, écriture, entropie, envi-
ronnement, équilibre, erreur, évaluation, évolution, habitude,
image de soi, intelligence, intériorisation, lecture, mots/ langage,
norme, objectif, Occident, performance, processus, réel/ imagi-
naire, réussite/échec, système, temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 1
A la fois marbre et sculpteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . 248
Chapitre 11. Construire pour demain . ... ... ... .. ... .. ... .. ... . . .. 25 I
- La double hélice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 253
- LE contrat.. . .. . . . .... . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . .. .... 255

Références bibliographiques . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . 259

Liste des figures.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . .. .. ... .. .. . . . . . . . . . . . 273

Liste des tableaux . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . ... .. . . 274

Liste des questionnaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 5

Index thématique ............................................ 277

Index des auteurs et noms propres . ..... . . ..... . .... . . ....... . 287
Au lecteur

Le titre de cet ouvrage n’est pas une impertinence envers Descartes.


Cést un plaidoyer pour un retour aux racines biologiques de lappren-
tissage.
Un plaidoyer pour un apprentissage bionomique :qui gère la vie.
Un plaidoyer pour un apprentissage écologique :qui tienne compte des
rapports de I apprenant avec son environnement.
Un plaidoyer pour 1ëmergence de l’être et son dépassement au-delà de
l’existence tout court :nous sommes nés pour apprendre et pour découvrir
notre potentiel dans la durée.
Ce livre est lefruit de nombreuses interrogations, rencontres, interactions.
II est né de la passion d’explorer, de construire, dïnventer. II s’adresse à
tous ceux qui se sentent engagés dans le face-à-face de l’homme et du monde
dans lequel il vit.
II a été conçu pour être un outil et un maillon de li’tinéraire du lecteur,
un témoin de sa propre recherche.
La voie d’accès à la neuropédagogie proposée dans ce livre est la spirale.
Structure de toute énergie et de toute vie organique, la spirale incite le lecteur
à porter un nouveau regard sur l’acquisition des connaissances, puis sur la
formation du formateur à partir des données des neurosciences. Celles-ci ont
été explorées en partant d’interrogations nées de situations d’apprentissage
vécues.
Ce livre est donc construit dans un va-et-vient constant entre la pratique
et la théorie. L’ordre de succession des chapitres correspond à la logique
de notre démarche :les chapitres à dominance théorique mènent le lecteur
pas à pas vers un nouveau regard sur sa pratique de l’information et de
la communication, puis vers une exploration personnelle des concepts sous-
jacents aux notions fondamentales qui sous-tendent toute situation de
formation.
PR ÉFACE

D’Homo à Sapiens.

Étrangement nous apprenons à l’école, nous lisons dans les encyclopédies,


que la nature, au terme provisoire d’une évolution étendue sur quelques
milliards d’années, a fait apparaître, parmi bien d’autres espèces, Homo
Sapiens.. Mais comment imaginer que la nature, à laquelle nous dénions
par hypothèse tout projet, toute capacité de viser un objectif futur, soit
capable de générer de la sagesse?
En toute rigueur l’évolution ne peut avoir abouti qu’à Homo; à ce
substantif il est possible d’adjoindre des adjectifs tels que erectus ou gracilis,
mais certainement pas sapiens ; les premiers correspondent à un constat de
fait sur les caractéristiques naturelles de l’espèce ;le troisième est un jugement
sur ces performances intellectuelles. D’où vient donc ce sapiens ? Si, confor-
mément à la règle du jeu de la science, on refuse l’explication d’un apport
surnaturel, divin, force est d’admettre qu’il vient de Homo lui-même. I1 se
trouve que Homo a reçu de la nature le pouvoir de prendre le relais de la
nature. Celle-ci a fait Homo et Homo a fait Sapiens. Non pas brutalement
comme le fait une mutation génétique, mais progressivement, longuement,
au cours d’une lente émergence qui a permis de compléter l’humanité reçue
d’une humanitude construite.
L‘essentiel de l’homme d’aujourd’hui, ce ne sont pas ses cordes vocales,
mais l’usage qu’il en fait, la parole ; ce ne sont pas les assemblages neuronaux
mais les performances qu’il a su leur faire réaliser, la réflexion sur l’univers
et sur nous-mêmes.
I1 est classique d’affirmer avec des termes bien pédants, que l’ontogenèse
récapitule la phylogenèse. Autrement dit le développement physique d’un
individu, du .stade de l’embryon au stade adulte, passe par des phases
successives qui rappellent les phases de l’évolution de l’espèce, depuis les
lointains ancêtres marins jusqu’à l’état actuel. Le parallélisme n’est à vrai
dire que très approximatif.
Par contre, il est plus rigoureux si l’on évoque non le développement
des organes mais la progression de l’efficacité avec laquelle nous utilisons
l’organe le plus décisif, le système nerveux central.
14 Jhpprends, donc j e suis

A la naissance, cet organe est dans une incapacité quasi totale; pour
l’essentiel les connexions reliant ses éléments sont encore inexistantes ; elles
prolifèrent ensuite dans un foisonnement désordonné qui permet d’attribuer
à leur ensemble comme caractéristiques premières d’être surabondant,
redondant, et le fait d’être aléatoire. Les structures, les réseaux qui permettent
à cet ensemble de fonctionner sont alors à peine à l’état d’ébauche. Elles
seront réalisées peu à peu, en fonction initialement de programmes géné-
tiquement déterminés ; mais le patrimoine génétique paraît dramatiquement
pauvre (quelques dizaines de milliers d’instructions) face à la richesse de la
machine à construire (un million de milliards d’éléments, soit un nombre
dix milliards de fois plus grand que celui des instructions). Interviennent
également dans cette mise en place des structures cérébrales tous les apports
antérieurs qui suscitent la réalisation des innombrables circuits, permettant
par exemple de développer un langage. Mais là encore, ces apports semblent
bien pauvres face à la complexité de l’objet à construire.
L‘«inné )) et 1’« acquis O , même s’épaulant l’un l’autre en une interaction
qui démultiplie l’effet de chacun, ne suffisent guère à expliquer l’aboutis-
sement. I1 faut faire appel à la capacité du cerveau à produire, par son
fonctionnement même, ses propres structures.
Le foie secrète de la bile ;que secrète donc le cerveau ? Certains répondent
(( la pensée »,mais n’est-ce pas mélanger des concepts de natures différentes ?

Il est sans doute plus vrai d’affirmer que, par son fonctionnement, le cerveau
secrète des structures cérébrales.
De même que Homo est devenu, par son propre effort au long des
dizaines de milliers d’années, Sapiens, de même chaque petit d’homme doit
effectuer le long parcours le menant de l’état d’objet fourni par la nature
à celui de sujet capable de prendre son destin en main. Mais ce parcours
ne peut être suivi seul ; pour faire un homme il faut les hommes. 11 n’est
pas excessif de dire que l’objectif de la vie de chacun est de se construire
en participant à la construction des autres.
C’est cela l’éducation ; à la fois donner à un jeune le goût de se créer
lui-même, en se regardant de l’extérieur et en prenant conscience de la
possibilité de choisir un chemin (educere) et lui apporter toute la nourriture
intellectuelle nécessaire pour qu’il puisse réaliser son projet (educure). Le rôle
premier de tout groupe d’hommes, ethnie, nation, humanité dans son
ensemble est de faire des hommes, ou, plutôt de créer des conditions
permettant aux hommes de se faire eux-mêmes.
Hélas, trop d’objectifs occultent cette fonction essentielle ; et nos sociétés
modernes sont des modèles d’aberration. Comment a-t-on pu par exemple
définir les nations comme des communautés de défense, obsédées par la
crainte des agressions de la part des nations voisines ; alors qu’elles sont
d’abord des communautés d’éducation, qui devraient être obsédées par la
nécessité d’accroître sans cesse la richesse humaine qu’elles représentent ?
Cette obsession devrait aboutir à de multiples recherches sur cet acte
essentiel : éduquer. Recherches d’autant plus difficiles que cet acte est
paradoxal, car son aboutissement est un être libre, capable notamment de
refuser l’influence de l’éducateur : (( lorsque tu m’auras compris, tu pourras
Préface 15

me jeter D. Raison de plus pour le multiplier, pour effectuer en permanence


les remises en cause qu’imposent les avancées de disciplines scientifiques
concernées, en premier lieu celles qui étudient le fonctionnement du cerveau.
En fait de telles recherches sont rares. Le travail d’Hélène Trocmé-Fabre
me semble un modèle de ce qui devrait être réalisé; il ouvre en effet la
problématique de l’éducation à l’ensemble des cheminements actuels de la
réflexion scientifique. I1 constitue un apport qui sera précieux pour tous ceux
qui s’efforcent de mieux jouer leur rôle de constructeur de l’humanitude.

Albert Jacquard,
Paris, juin 1987
APPRENDRE A ENSEIGNER
ET ENSEIGNER A APPRENDRE

N Ne vivez pour l’instant que vos questions. Peut-être


simplement, en les vivant, finirez-vous par entrer insensi-
blement, un jour, dans les réponses... Presque tout ce qui
est grave est difficile. ))
... a Ne voyez-vous pas que tout ce qui arrive est toujours
un commencement ? H
R . M . R I L K ELettres
, à un jeune poète, 1903

Un constat

Les enseignants, les formateurs, les responsables d’institutions, les parents


et les apprenants eux-mêmes... prennent peu à peu conscience qu’il existe
une véritable faille, un fossé parfois très important, entre les ressources des
apprenants - jeunes ou adultes - et leurs réalisations ; entre les efforts
fournis et les résultats obtenus ; entre les attentes des uns et des autres, et
les objectifs réellement atteints.
Les causes de ce décalage, dramatique dans certains cas, sont multiples
et de nature diverse. Nous en citerons quatre. La première concerne
l’institution ; la seconde, la conception qu’a l’homme de son équilibre. La
troisième concerne le monde de l’information ; la quatrième, la connaissance
de nos mécanismes.
Lapremière cause est à chercher dans le fait que l’institution et le système
scolaire attachent une importance beaucoup plus grande aux résultats qu’au
processus d’acquisition des connaissances*. La pédagogie scolaire propose

* Les termes (( d’acquisition des connaissances )) et <(d’apprentissage seront employés


indistinctement bien que, dans le contexte de cet ouvrage, le premier se réfère au processus
lui-même, indépendamment de la structure de l’institution, et le second davantage au cadre
dans lequel les activités d’acquisition s’effectuent : scolaire, extra-scolaire, professionnel... Le
terme a apprenant )) est un néologisme emprunté à l’anglais (learner). II est peu satisfaisant
mais il a le mérite d’être plus actif qu’a élève ». Le terme de ((formateur)) est employé,
actuellement, davantage pour la formation continue que pour la formation initiale. I1 n’est
pas non plus satisfaisant mais il est trop tôt pour adopter une autre terminologie.
18 J’upprends, donc je suis
essentiellement des contenus, évaluables quantitativement et (( sommative-
ment D. Les difficultés de mémorisation, de perception, de motivation et tout
problème considéré comme périphérique n’ont qu’à se résoudre ... comme
ils le pourront ! Les exercices demandés aux apprenants sont trop souvent
choisis pour la facilité du contrôle et non pour leur rôle dans la progression
de l’apprenant vers un objectif d’apprentissage. D’autre part, les activités
sont, le plus souvent, à court terme et ponctuelles.
La deuxième cause de la faille est la résistance au changement. Pour
l’illustrer, prenons l’exemple de l’apprentissage d’une langue étrangère. Face
à un nouveau système linguistique, l’apprenant doit accepter de réorganiser
son propre système de représentation du monde extérieur : accepter ce qui
est différent de soi, tout en maintenant sa propre structure. C’est à cet endroit
précis que se place, pour la plupart des apprenants, la plus grande difficulté :
le maintien de l’équilibre de leur propre système dans un environnement
différent. La raison en est peut-être que nombreuses sont les personnes pour
qui le maintien de l’équilibre est synonyme de statisme et de permanence.
Nombreux sont ceux pour qui la résistance au changement est la principale
règle de vie.
Mais la vie est un perpétuel changement.
« O n ne peut descendre deux fois dans le même fleuve)) constatait
Héraclite il y a vingt-six siècles.
Bien des échecs à l’école et dans la vie quotidienne sont la conséquence
d’un refus ou d’une incapacité (acquise) de s’adapter.
L‘organisme vivant, et l’homme plus que tout autre, est fait pour
s’adapter à son environnement. L‘adaptabilité de l’homme est une capacité
innée qu’aucun biologiste ne met en doute: l’homme est en transaction
constante avec le milieu dans lequel il vit. I1 est donc important de rappeler
aux enseignants, aux formateurs, aux parents et aux apprenants eux-mêmes
que l’acte d’apprentissage n’est possible que s’il y a interaction entre
l’organisme et son environnement, et dans le dialogue avec soi-même.
Si l’adaptation est incontestablement possible pour chaque organisme
normalement constitué, elle n’est pas toujours réalisée. Tout organisme
vivant, et l’organisme humain en particulier, doit acquérir à un prix de plus
en plus élevé, la synchronie entre son rythme intérieur et celui de son
environnement. Or, notre environnement est en constante modification.
L‘organisme humain, selon les biologistes, est le résultat et la cause de son
environnement : il ne peut rester figé dans un environnement en évolution
sans créer son propre déséquilibre.
Le paradoxe que nous vivons de façon dramatique est que notre monde
moderne est obsédé par la croissance, le développement, l’innovation : les
applications avancent à grands pas dans le monde technologique, mais elles
n’apparaissent pas -- ou si peu - dans une conception de l’homme qui
continue d’être inspirée par les sciences exactes, quantitatives et mécanicistes.
Ne nous leurrons pas: les valeurs qui régissent les technologies actuel-
lement au service des décideurs ne correspondent pas à la vision du réel née
des progrès de la science moderne, celle qui nous révèle la macrostructure
à laquelle nous participons et dans laquelle nous vivons.
Apprendre à enseigner et enseigner à apprendre 19

Qu’attend le monde de l’éducation pour découvrir, dire et mettre en


application ce que les sciences d’aujourd’hui nous apportent :une nouvelle
dimension de l’homme ?

La troisième cause du décalage observé entre les ressources des appre-


nants et leurs réalisations, est liée à la précédente.
Nous vivons dans ce qu’Alvin Toffler (1) a appelé l’infosphère, caracté-
risée par une explosion d’informations visuelles et auditives, et une nouvelle
orientation des unes et des autres. I1 est impossible que les enseignants, les
formateurs et les responsables de formation ignorent l’évolution du contexte
informationnel dans lequel la formation est donnée.
Les changements survenus depuis les dernières décennies dans les
contextes auditif‘s et visuels - pour ne citer que les deux canaux privilégiés
dans la transmission de l’information - sont d’ordre quantitatif et qualitatif:
Le monde sonore comporte de plus en plus de décibels et de plus en plus
de bruits technologiques continus ; de moins en moins de bruits humains,
naturels, discontinus. (( La société produit un bruit colossal, celui-ci croît avec
celle-là »,écrit Michel Serres (2).
Quant au paysage visuel, il est de plus en plus dense ; les images sont
de plus en plus rapides, déclenchant, grâce à certaines techniques, des effets
hypnotiques comme dans certains vidéo-clips. Les heures de visionnement
devant un écran atteignent des chiffres alarmants par jour et par habitant,
allant jusqu’à cinq heures de visionnement quotidien pour les jeunes enfants
et adolescents aux États-Unis: les images qu’on leur offre sont, pour la
plupart, les représentations des nombreuses formes de violence du monde
actuel (3).
Enseignants et formateurs ne peuvent plus ignorer que le système
perceptif des apprenants est en train d’être modifié profondément par les
moyens de transmission électronique de l’information, comme il l’a été au
cours de l’évolution des moyens d’expression écrite - de l’écriture picto-
graphique à l’écriture syllabique, puis alphabétique.
L‘évolution des supports matériels de l’information a amorcé une véri-
table rupture entre l’homme et ses moyens d’expression. Le contact avec
les outils d’écriture devient de plus en plus distant, l’écriture manuelle de
plus en plus rare : un clavier s’interpose là où la main transmettait directe-
ment la pensée. Le téléphone remplace la lettre; la radio, le journal; le
disque, la partition ou le concert ; la cassette se substitue parfois à la lettre.
L‘outil n’est pas neutre. I1 ne l’a jamais été. Depuis la préhistoire, les
instruments et les outils ont eu une influence marquante sur le comporte-
ment, la pensée et le langage de l’homme. Notre époque n’échappe pas à
la règle. Sachons prendre du recul et voir ce que nous gagnons... et ce que
nous perdons.

( I ) A. TOFFLER,La Troisième Vague, Denoel, 1982.


( 2 ) Cf. SERRES
Michel, Les Cinq Sens, B. Grasset, 1985. Cf. aussi R. MURRAY
SCHAFER,
Le Paysage sonore, Lattés, 1979.
(3) Cf. la revue Ztinérunces no 2, Vaincre la peur, Albin Michel, 1986.
20 Japprends, donc je suis
Une fois encore, nous sommes en plein paradoxe: l’oreille est de plus
en plus sollicitée dans le monde contemporain, alors que le système éducatif
reste essentiellement verbal, visuel, analytique ; il accorde une importance
très grande au quantifiable, au linéaire, au digital. Or, il s’agit là d’un seul
type de gestion de l’information, qui ne correspond pas à la totalité du
potentiel de l’organe de l’apprentissage qu’est notre cerveau, siège de nos
moyens d’apprendre.

Il semble donc indispensable que notre recherche d’un apprentissage


<<écologique N, R bionomique >> au sens étymologique de ce mot (gestion de
la vie) tienne compte des relations de l’apprenant avec son environnement
auditif: visuel et informationnel.

La quatrième cause de la faille constatée ci-dessus rejoint la première.


Elle est due à la méconnaissance de notre potentiel cérébral et du fonction-
nement des mécanismes cérébraux impliqués dans l’acte d’apprendre.
Depuis les dernières décennies, dans diverses disciplines, le renouvelle-
ment des contenus, des matériaux et des approches méthodologiques a tenté
de résoudre les problèmes de l’assimilation des nouvelles connaissances, du
passage à l’acte, de la prise en charge de l’acte d’apprendre, de l’attention,
de la motivation ... Mais tout se passe comme s’il subsistait une face cachée,
non encore explorée, située en amont et en aval des approches pédagogiques
et des méthodologies existantes. Cette face cachée, cette zone d’ombre,
s’étend en deçà du territoire pédagogique traditionnel (ou institutionnel) où
le formateur s’efforce de répondre à la question (( comment mieux ensei-
gner o. Les méthodologies, essentiellement préoccupées par l’acte pédagogi-
que, laissent de côté deux aspects de l’interaction apprenant-enseignant :
d’une part, les processus d’apprentissage (prise d’information, traitement
information, et production d’information) et, d’autre part, le style d’inter-
vention de l’enseignant.
En d’autres, termes, deux questions fondamentales restent à poser :
<< comment apprend-on ?» et <( quelle stratégie pédagogique le formateur
emploie-t-il ? >>
Ces deux questions sont intimement liées l’une à l’autre car la pédagogie
doit s’adapter à la réalité de l’apprentissage: celle de l’apprenant, de ses
ressources et de leur gestion ; son attitude face à l’apprentissage (c’est-à-dire
à lui-même dans la durée): son désir d’apprendre, ses craintes, son refus,
ou même... sa fuite ? ; l’image qu’il a de lui-même, du groupe ; les objectifs
qu’il s’est fixés, etc.

Un contrat

Faire découvrir à l’apprenant comment utiliser ses propres ressources,


comment faire confiance à sa propre perception et, par conséquent, ne plus
dépendre de celle d’un autre, est l’un des tout premiers objectifs pédago-
giques. C’est l’axe fondamental sur lequel élaborer un programme d’inter-
Apprendre a enseigner et enseigner à apprendre 21
ventions pédagogiques permettant d’établir un véritable contrat d’interaction
communicative, mieux, d’inter-relation entre enseignant et apprenant.
Ce contrat passe par une meilleure connaissance des ressources cérébrales
des uns et des autres (apprenants et enseignants), des processus d’appren-
tissage et de l’itinéraire de l’apprenant.
Le besoin de formation se manifeste de plus en plus nettement dans un
domaine qui peut être identifié comme une neuropédagogie à créer, à vivre,
en amont des contenus des diverses disciplines.

Un vrai langage

Le formateur est un communicant. I1 fait appel principalement (croit-


il) au langage verbal pour établir la communication avec l’apprenant, la
maintenir et évaluer la prise d’information : est-il suffisamment conscient de
l’écart qui existe entre les mots et ce qu’ils expriment ? Est-il conscient, selon
l’expression d’Alfred Korzybski(4), de la différence entre ((la carte et le
territoire )), de l’interaction des différents niveaux perceptifs (vision, audi-
tion...)? Est-il conscient du fait qu’il n’y a pas de rupture entre les différents
niveaux d’intégration de l’information, ni dans l’itinéraire de l’information,
celui qui mène des sens au langage? Est-il conscient de ce qu’il transmet
par sa voix, ses gestes, la position de son corps et de tout ce qui véhicule
sa présence à l’autre ... ?
Les physiciens, les neurobiologistes, les psycho-sociologues nous avertis-
sent clairement : entre la réalité et nous, s’interposent plusieurs filtres : celui
de nos expériences passées, celui de nos sens qui informent notre cerveau,
celui de notre environnement socio-culturel, celui de notre imaginaire...
Le formateur et l’apprenant ont, chacun, un langage et un comportement
qui reflètent leur représentation personnelle - et unique - du monde qui
les entoure. Malgré (ou à cause de ?) ces différents codes et ces différentes
gestions, nous sommes appelés à communiquer.
Rendre un apprentissage et une intervention pédagogique efficaces exige,
en premier lieu, de reconnecter le message verbal avec l’expérience sensorielle
sous-jacente : éviter à tout prix l’appauvrissement du (( vécu )) et de son
expression verbale. Ceci implique pour l’enseignant l’utilisation d’outils et
de techniques permettant d’identifier rapidement le (( profil )) d’un apprenant,
sa gestion )) préférentielle, ses stratégies de réussite et d’échec.

A la recherche d‘une passerelle, d’un cadre et d’outils

L‘Occident a jusqu’ici manqué cruellement de passerelles entre savoir et


savoir-faire, entre réalité et imaginaire, entre émotions et expression, entre
monde extérieur et monde intérieur.
Depuis une quinzaine d’années, les neurosciences ont connu un dévelop-

(4) Cf. KORZYBSKIA., Le Rôle du langage dans les processus perceptuels, Int. Non-
Arist., Lib. Publ., 1965.
22 J’apprends, donc je suis
pement fulgurant. Les techniques d’exploration cérébrale permettent actuel-
lement d’explorer un cerveau humain, normal, en activité. Pour comprendre
certains phénomènes mentaux tels que la gestion mentale, la mémoire, la
perception auditive ou visuelle, l’attention, etc., on est actuellement en
mesure d’utiliser des informations, recueillies à partir de cerveaux en
situation normale d’activités telles que la lecture, l’écoute, ou la pensée
intérieure.
C’est donc aux neurosciences et aux leçons magistrales qu’elles sont en
mesure de nous donner sur nous-mêmes et sur le conflit de la vie, que nous
nous adresserons pour chercher une réponse à la question préalable à toute
élaboration d’intervention pédagogique : a Comment apprend-on ?... (et donc
comment être ?) D. L‘interaction de l’organisme et de son environnement -
qui est la définition même de l’apprentissage - doit être repensée à la lumière
des données scientifiques dont nous disposons actuellement. Même si ces
données sont partielles et provisoires, elles suffisent amplement pour que
nous puissions élucider certains des problèmes qui ont résisté aux métho-
dologies nouvelles.
Deux questions fondamentales se posent donc au formateur :
- Comment peut-on enseigner quoi que ce soit sans engager l’apprenant

tout entier dans le processus d’apprentissage ?


- Comment peut-on enseigner quoi que ce soit sans être convaincu(e) que

tous - quels que soient l’âge et le milieu - ont le droit de développer


leur dimension cognitive, c’est-à-dire leur personnalité ?
Ces deux questions se réfèrent à des axes différents, mais reliés. La
première concerne l’axe méthodologique. L‘interrogation porte sur l’ap-
proche et les techniques d’intervention pédagogique. La seconde question
pose l’interrogation du a pour quoi O, de la finalité, de la valeur de l’action
entreprise. Elle est d’ordre éthique.
C’est en changeant d’attitude face à l’acquisition des connaissances que
les adultes d’aujourd’hui garantiront l’avenir des enfants. Rappelons-le une
fois encore: il n’y a pas d’apprentissage possible chez l’homme sans
compréhension de soi ni du monde extérieur, sans harmonie, sans accep-
tance, sans disponibilité à soi-même.
La recherche des réponses aux questions posées passe donc par l’explo-
ration, du terreau de l’apprentissage, de la toile de fond du savoir, en amont
des théories psycho-pédagogiques d’hier et d’aujourd’hui, des contenus
disciplinaires, pour se mettre à l’écoute des récentes recherches sur le cerveau,
l’organe de l’apprentissage (5).
Ce livre tentera :
- D’établir une passerelle entre les Neurosciences et la Pédagogie, c’est-
à-dire de faire le point sur les recherches susceptibles d’éclairer les
problèmes fondamentaux de l’apprenant : ses processus de prise d’infor-

( 5 ) Le terreau de l’apprentissage est une expression de J.-P. CHANGEUX.


La toile
de fond du savoir est une expression née de la lecture de l’Alchimie de la Vie
d’E. GUILLÉ8i C. HARDY.
Apprendre à enseigner et enseigner à apprendre 23
mation, de traitement de l’information, de production, de mémorisation
(rétention, rappel, reconnaissance), et le passage à I ’acte.
- D’établir un cadre de compréhension de l’acte d’apprendre qui soit
cohérent avec la réalité de I ’apprenant et de I’enseignapt, c’est-à-dire
placer l’acte d’apprendre dans son contexte actuel (informationnel et
perceptuel), dans une perspective d’inter-relation de l’apprenant et de
l’enseignant, et d’une meilleure gestion des ressources de l’un et de l’autre.
- De proposer des outils et des techniques pédagogiques compatibles avec
le fonctionnement du cerveau tel qu’on le connaît actuellement.
- De proposer un contenu de formation pour formateurs dans le domaine

de la neuropédagogie.
Une meilleure connaissance des mécanismes cérébraux impliqués dans
l’acte d’apprendre permettra à l’enseignant de jouer pleinement son rôle de
formateur et de catalyseur ; de déceler son propre style d’intervention
pédagogique ; d’entrer en interaction avec l’apprenant par une communica-
tion mieux adaptée.
De son côté, l’apprenant sera davantage en mesure de découvrir ses
stratégies de réussite et d’échec, de développer d’autres stratégies que celles
dans lesquelles il s’enferme trop souvent, d’élargir son champ perceptif et,
selon l’expression d’Albert Jacquard, de (( devenir co-auteur de soi-
même )) (6).
En ce dernier quart du XXe siècle, nous en sommes aux premiers stades
de la (re-?)découverte de la dimension énergétique des mondes extérieur et
intérieur de l’homme, et aux premiers balbutiements d’une approche sys-
témique de l’homme et de son fonctionnement à différents niveaux. Les
pourquoi des problèmes d’apprentissage qui appartiennent aux domaines
familiaux, institutionnels, relationnels, saisonniers, etc. ne seront pas abordés
ici. De très nombreuses études, certaines remarquables, portent sur les
variables pondérables physiologiques, comportementales, émotionnelles ou
cognitives.
Dans ce livre, seul le comment du fonctionnement cérébral est exploré
en relation avec l’acte d’apprendre. Le mécanisme d’apprentissage est analysé
dans son rapprochement avec le pour quoi, c’est-à-dire l’activité finale de
l’apprenant. Ceci, dans une volonté de se placer en amont de toute théorie
psycho-socio-pédagogique ; de ne présenter aucune recette, aucun modèle
unique, mais bien plutôt d’offrir une possibilité de réconcilier contenu et
processus dans le contexte éducatif contemporain.
L‘analyse proposée dans ce livre ne prétend être ni exhaustive ni un
catalogue de certitudes. Elle cherche surtout à éviter le découpage et
l’isolement des problèmes en unités cloisonnées. Un système n’est jamais isolé
et l’objet de l’observation (ici, l’apprentissage) n’est jamais une chose mais
un rapport, et même une série infinie de rapports.
La démarche systémique, proposée par le groupe de Palo Alto aux États-
Unis, est appliquée ici aux relations apprenant-enseignant . Elle fournit un
angle sous lequel réviser certaines notions trop souvent obscures et floues,

(6) JACQUARD
A., Moi et les Autres, Éd. Virgule, Seuil, 1983.
24 Japprends, donc je suis
telles que l’échec, les dons, l’évaluation, l’intelligence, la norme, etc. Elle nous
convainc qu’il devient crucial de porter un nouveau regard sur les phéno-
mènes complexes de l’apprentissage, afin de construire les relations entre
l’apprenant, l’enseignant et l’institution (7).
Quelle que soit la situation de formation dans laquelle nous nous
trouvons, nous ne pouvons ignorer que nous sommes à l’intérieur d’un autre
système qui pèse souvent très lourd, celui de l’institution éducative. Celle-
ci ne changera pas par en haut : les responsables institutionnels sont trop
éloignés de la réalité de l’apprenant. I1 appartient aux personnes impliquées
sur le terrain de convaincre les décideurs qu’il est urgent de construire un
édifice nouveau, qui tienne compte des réalités biologiques de l’apprentissage,
pour que la face du monde éducatif change...
Enfin, il est utile d’insister sur le fait que ce livre s’attaque à des problèmes
pratiques : rendre l’apprenant et l’enseignant plus efficaces - et heureux -
en les éclairant sur leur propre démarche ; le premier sur ses ressources et
leur gestion; le second sur ses interventions pédagogiques au cours de
l’itinéraire de l’apprenant, traduites en termes de stratégies : opérantes... ou
non. Dans un souci de signaler et non de résoudre, certaines notions comme
la compréhension, l’intelligence, l’erreur... sont abordées comme des thèmes
de réflexion et proposées au formateur pour une exploration personnelle à
partir de sa propre pratique pédagogique.
Dans une première partie, l’apport des neurosciences à la compréhension
de notre cerveau aujourd’hui permet de placer l’acquisition des connaissances
aux racines mêmes de l’acte d’apprentissage. Celui-ci est analysé dans les
domaines suivants : la transmission de l’influx nerveux, les différents niveaux
du traitement de l’information (8), les activités du langage, l’affectivité, l’atten-
tion, la mémoire, le comportement, le potentiel, l’hygiène cérébrale.
La deuxième partie tente de dégager les implications en méthodologie
de l’enseignement : vers une meilleure gestion des ressources et des poten-
tialités de l’apprenant et de l’enseignant. La recherche d’une dynamique à
trouver pour le système éducatif à venir se fera autour de trois pôles:
comprendre, faire et laisser se faire ; autour de la relation étroite entre les
caractéristiques et les exigences du fonctionnement cérébral, d’une part, et
les réalités de la situation d’apprentissage, d’autre part.
Des exemples d’expérimentations à l’étranger (l’une, au Venezuela, de
dimension nationale; une autre aux États-Unis, dans le Colorado; une
troisième en Australie) ont été choisis en raison de leur caractéristique
commune : ces réalisations pédagogiques ont été construites à partir d’une
connaissance approfondie des mécanismes cérébraux impliqués dans l’ap-
prentissage. Elles sont peu connues en France, où les expériences pédago-
giques qui tiennent compte de la réalité de l’élève sont l’œuvre courageuse

(7) Cf. l’ouvrage de MARCE. et PICARD,L’École de Pa10 Alto, Retz, 1984.


(8) Les termes de (( saisie », <( traitement », (< stockage », <( transmission », (( pro-
duction )) d’information seront utilisés bien qu’ils ne transmettent qu’imparfaitement
la réalité de la relation entre l’homme et son environnement, et celle de l’homme avec
lui-même.
Apprendre à enseigner et enseigner à apprendre 25
d’enseignants qui luttent encore seuls. Ceux-ci trouveront sans doute, dans
les expériences décrites dans ce livre, confirmation, encouragement, et la
force de poursuivre leur effort.
La troisième partie répond aux besoins en formation souvent exprimés
par des enseignants et des formateurs, en France et à l’étranger. Elle propose
un contenu de formation et un répertoire-exploration destinés à tout
enseignant ou formateur, quels que soient la discipline et le niveau scolaire
auquel il intervient. I1 s’agit d’un matériel testé de nombreuses fois auprès
de publics variés en France et à l’étranger, et qui regroupe les données de
base concernant le potentiel cérébral humain ; l’évolution et la maturation
cérébrales ;la prise, le traitement et la production de l’information ;les deux
hémisphères et leurs gestions spécifiques ; les profils et styles d’apprentis-
sage...
Des exemples de grilles d’observation de l’apprenant et des questionnaires
sont proposés comme schémas de base, pour un approfondissement des
concepts sous-jacents à toute action de formation et de communication. Ces
outils visent aussi à faciliter l’adaptation du formateur/communicant à la
situation spécifique dans laquelle il se trouve.
Un répertoire de concepts à explorer est proposé sous forme de fiches.
I1 s’agit d’une amorce de recherche personnelle (exemples de réflexions, notes
bibliographiques, références..,), incitant chacun à poursuivre son exploration
et à arrimer son enseignement à des bases conceptuelles solides.
Enfin, l’approche neuropédagogique permet d’intégrer l’apprentissage
dans une perspective psychosociale qui tient compte de la totalité de l’être
apprenant.
L’apprentissage et l’enseignement sont, et doivent être, considérés comme
des processus pluriels. C’est la condition essentielle pour que soient respectées
les ressources de chacun et que soit établi, sur des bases solides, le contrat
entre les partenaires de la situation d’apprentissage : apprenant, enseignant
et institution.
PREMIÈRE PARTIE

NOTRE CERVEAU AUJOURD‘HUI

Se savoir Cellule de l’Univers


Se connaître dualité et non dualité

Se savoir pareil et non pareil


à l’autre au milliard d’autres
savoir le Milliard être soi,
et n’être qu’UN

(L’Atelier de la Martinerie,
Hauteclaire, Ports-sur- Vienne,
en Touraine et en France, 1980)
L‘APPORT DES NEUROSCIENCES

Si l’homme a, depuis qu’il est né, cherché à comprendre son origine et


sa destinée, il a mis des siècles à considérer son cerveau comme le siège de
la pensée.
I1 y a 5000 ans, les Égyptiens connaissaient déjà le lien qui existait entre
une blessure à la tête et la paralysie dans l’hémicorps opposé, mais ils n’en
avaient rien déduit d’autre. Aujourd’hui, subsistent encore les restes de
diverses conceptions rigides et erronées sur le fonctionnement du cerveau.
Le cœur désigne toujours le siège des sentiments dans notre vocabulaire et
sur les tee-shirts de nos adolescents... C’est vrai qu’il existe d’illustres
prédécesseurs attachés à cette croyance : les Mésopotamiens, les Hébreux,
Homère, Aristote, pour qui le cerveau était composé de terre et d’eau... et
avait le rôle d’un réfrigérateur pour le corps.
La thèse céphalo-centriste, établissant le siège de la pensée dans le
cerveau, est née avec Platon et Hippocrate. Elle traversera les siècles tant
bien que mal. Les thèses dualistes, proclamant l’immatérialité de l’âme, ont
retardé et, sans doute, fait reculer le moment où l’esprit de l’homme a pu
s’observer lui-même, loin de l’affrontement des diverses doctrines. Les
découvertes en anatomie et en morphologie cérébrale, grâce à des techno-
logies de plus en plus précises, ont apporté la vérification de la thèse
platonicienne.
Depuis le X V I I ~siècle, grâce à l’Anglais Willis d’Oxford, on connaît
l’existence des couches sous-corticales du cerveau. Au début du XïXc siècle,
avec la phrénologie de Gall, on parle à nouveau de localisation cérébrale.
A la fin du siècle, les termes neurones et synapses sont forgés, le premier
par l’Allemand Waldeyer, le second par l’Anglais Sherrington. Les trois
premiers quarts du xxc ont apporté une moisson d’éclaircissements sur l’acte
d’apprendre, la transmission de l’influx nerveux, les différents changements
intervenant dans le système nerveux central au cours de l’apprentissage, et
les divers comportements psychiques résultant de l’interaction de l’homme
et de son environnement.
Depuis les années 1950, ce qui est nouveau ce sont les progrès consi-
30 Notre cerveau aujourd’hui

dérables qu’a fait la connaissance de ce qu’on a appelé l’esprit ; progrès dûs


à la naissance de sciences et de théories nouvelles telles que la cybernétique
d’A. Wiener et de W. McCulloch, la théorie des Systèmes et la Nouvelle
Communication, avec l’École de Palo Alto, la thermodynamique, la physique
quantique et post-quantique, la cosmologie, l’informatique, l’électronique...,
et, depuis les deux dernières décennies, de nouveaux membres dans la grande
famille des neurosciences.
Ces diverses approches des problèmes humains proposent un nouveau
regard sur la nature du modèle et de l’ordre du monde dans lequel nous
vivons, ainsi que sur les problèmes fondamentaux des relations entre
substance et forme.
CHAPITRE 1

LES TECHNOLOGIES NOUVELLES

Depuis une dizaine d’années, la presse s’est fait l’écho des découvertes
et des recherches des paléoneurologues, des neurophysiologistes et des
neurobiologistes sur les localisations cérébrales et la latéralisation des deux
hémisphères ; en particulier, les travaux de Roger Sperry qui reçut le Prix
Nobel en 1981.
Ces recherches ont permis de confirmer que chaque hémisphère cérébral
non seulement reçoit les stimuli transmis par l’hémicorps opposé, mais les
traite de façon spécifique.
L‘intérêt suscité par les sciences d’exploration cérébrale semble partagé
par un large public. Sans doute est-ce l’expression du désir de parvenir à
une meilleure connaissance du monde intérieur de l’homme, à mesure
qu’augmentent les menaces de l’environnement : Socrate serait41 enfin
entendu ? D’autre part, le franchissement des frontières de tous ordres est
devenu - enfin ! - une réalité : d’un pays à l’autre, d’un continent à l’autre,
d’une discipline à l’autre, d’une science à l’autre... les cloisons s’effritent ou
s’abaissent.
Le sens de la globalité, de la complexité et de la relativité naît peu à
peu dans les esprits. Le modèle mécaniste du monde qui a présidé si
longtemps aux conceptions éducatives de notre monde occidental, semble
maintenant ébranlé...

Explorer un cerveau humain, normal, en activité

Les recherches en neurosciences ont connu un développement fulgurant


depuis les années 1970. Elles ont bénéficié tout particulièrement des progrès
réalisés en physique, en électronique, en informatique, en biologie molécu-
laire. Beaucoup d’aspects de la vie cérébrale restent encore inexpliqués, mais
32 Notre cerveau aujourd’hui

on est maintenant en mesure de suivre le fonctionnement d’un cerveau


humain, normal, en activité ; c’est-à-dire que pour tenter de comprendre les
mécanismes fondamentaux de l’acte d’apprendre, il n’est plus besoin de
dépendre seulement d’études de cas cliniques ou pathologiques, ou encore
d’expérimentation en laboratoire sur des rats ou des singes.
I1 est possible actuellement, grâce à ces techniques, de voir en direct les
zones du cerveau activées dans une situation donnée. Des correspondances
entre activités cognitives et activations cérébrales commencent à être discer-
nées. Les technologies mises à la disposition du corps médical permettent
un examen dynamique dufonctionnement des organes. La nature de l’influx
nerveulr‘ étant double (physico-chimique), les techniques d’exploration céré-
brale appartiennent à ces deux domaines. Les technologies modernes sont
en mesure de combiner les différentes techniques.
Les recherches explorant la chimie du cerveau sont en pleine expansion.
Les découvertes de neurotransmetteurs, des endorphines et de nouvelles
molécules apportent un éclairage nouveau à notre compréhension du
fonctionnement cérébral. Les chercheurs nous révèlent à travers les méca-
nismes régulateurs du cerveau hormonal, des concepts d’une importance
capitale pour notre compréhension du traitement de l’information : ce sont
des mots clés indispensables à la compréhension de nos mécanismes de base.
Repérons-les :
Précurseur, récepteur ;reconnaissance, processus de maturation, recap-
ture, stockage, synthèse locale, rétroaction, inhibition, pré-synaptique,
etc. (1).

La vie Cérébrale prise sur le fait

Jusqu’à ces vingt dernières années, l’exploration cérébrale était possible,


essentiellement grâce aux rayons X découverts en 1895 par Roentgen, la
radioactivité naturelle, découverte en 1898 et la radioactivité artificielle,
découverte en 1934. Ces découvertes permirent l’utilisation des radiotraceurs,
puis des radio-éléments.
A partir de 1929 l’électro-encéphalogrammede Hans Berger enregistra
l’activité électrique globale des milliards de neurones du cerveau. Puis, dans
les années 1940, W. Penfield (Canada) explora le cortex par électrodes.
G. Dawson, en 1950, puis Manfred Clynes et Michael Kohn en 1960,
à l’hôpital d’État de Rockland (New York), purent enregistrer l’activité
neuronale correspondant à une perception sensorielle par la technique des
potentiels évoqués (2).
La nouvelle génération de technologies permet de prendre la vie cérébrale

(1) Cf. ENJALBEKT A. et EPELBAUM J., Le Cerveau hormonal, Sciences et Découverte,


Le Rocher, 1986.
(2) Consulter l’article de D. REGAN,Les Émissions électriques du cerveau humain dans
Pour la Science no 28, 1980.
Les technologies nouvelles 33

cortex
aire motrice moteur
supplémentaire cortex somato-sensitif

cortex prémoteur

z visuelle associative

zone auditive

lobe temporal
auditive primaire

. .

cortex orémoteur
cortex moteur
, I cortex sornato-
pariétal
préfrontales

r I o b e

lobe occipital

aire /
motrice supplémentaire

(h.g.i

Figure 1. Les aires cérébrales


En haut, l’hémisphère gauche.
En bas, les deux hémisphères, vus d’en haut.
34 Notre cerveau aujourd’hui
sur le fait. Grâce à l’électronique, les images sont devenues quantitatives.
Elles sont numérisées et enregistrées dans un calculateur. Ces images, traitées
mathématiquement, sont d’une très grande précision.
La caméra à positrons permet, par exemple, de suivre les atomes à la
trace dans notre corps, dans nos organes et nos tissus, et ceci en temps réel,
sans risque pour 1”organisme: le rayonnement émis de l’intérieur du cerveau,
dans les zones en activité qui ont fixé une substance radioactive (inhalée,
et non plus injectée), est suivi par la caméra qui transmet les éléments
permettant de dresser une véritable cartographie du cerveau (3).
L‘exploration de la morphologie cérébrale est réalisée soit indirectement
(par films Rayons X), soit directement par :
- Scanner RX qui permet d’obtenir sans traumatisme des images fidèles

de la structure cérébrale, par tranches successives.


- Stéréotaxie, technique de repérage, permettant de reconstruire une image

cérébrale en trois dimensions.


- Imagerie par résonance magnétique (I.R.M.), ou Résonance Magnétique

Nucléaire (R. M.N.), appelée à l’origine zeugmatographie, capable de


localiser les noyaux des atomes et de les faire résonner dans un champ
magnétique.
L‘exploration fonctionnelle est soit :
- Vasculaire ; ellie utilise l’idéographie cérébrale, et mesure les variations

de débit sanguin grâce à une substance isotope radioactive inhalée par


le sujet. Cette technique permet, à travers le débit vasculaire, de dresser
la carte des structures cérébrales engagées dans la réalisation d’un
comportement : par exemple, les activités langagières ou l’attention
sélective.
- Métabolique ; elle utilise :

La Tomographie d’Émission Positonique (P.E.T.), qui permet la


réalisation d’autoradiographies quantitatives de la distribution céré-
brale de divers substrats métaboliques marqués.
La G Positron Emission Transaxial Tomography D (P.E.T.T.), qui
montre, grâce à un marqueur radioactif isotope, les variations d’ac-
tivité cérébrale et le niveau d’activité fonctionnelle de différentes aires
du cerveau.
~ Électrique ; elle utilise :
L‘électro-encéphalogramme (E.E.G.), qui enregistre sur le scalp les
variations du champ électrique exprimant l’activité des générateurs
bioélectriques cérébraux.
Les Potentiels Évoqués, technique qui met en évidence certaines
activités sensorielles spécifiques et permet l’évaluation objective des
composantes périphériques de la perception.
Les Potentiels lents, dits d’attention et de motivation :
Les E.E.G. quantifiés qui permettent d’obtenir une reproduction
cartographique des différents rythmes cérébraux.

(3) Cf. l’article de D.-B. ISABELLEet A. V E Y R EL’Imagerie


, médicale, La Reche‘rche
no 144, mai 1983.
Les technologies nouvelles 35
- Électro-magnétique : la Magnéto-Encéphalographie (M.E.G.), beaucoup
plus récente et lourde, permet de localiser de façon très précise les régions
cérébrales impliquées dans la vision, l’audition, le toucher et la motricité.
Les champs magnétiques du cerveau, évalués à un milliardième de la force
des champs magnétiques terrestres, peuvent être captés par un scanner
de type spécial (S.Q.U.I.D., Superconducting Quantum Interference
Device). Cette technique est utilisée pour les fonctions cérébrales essen-
tielles, bientôt pour la prise de décision et, comme l’espèrent les cher-
cheurs de l’université de New York, pour découvrir les circuits de la
production langagière.

Transmission hormonale et molécules cérébrales

Le transfert de l’information dans le cerveau utilise une double voie : la


voie neuronale et la voie hormonale. Cette dernière, explorée par l’arsenal
de la neurochimie, se révèle être un domaine où les découvertes sont sur
le point de révolutionner la connaissance du cerveau et de son organisation.
Non seulement les chercheurs sont en mesure d’identifier les substances
chimiques, leurs structures et les récepteurs, grâce à des techniques comme
l’immunocytochimie, l’immunohistochimie, les techniques de coloration
sélective (histo- et immuno-fluorescence), mais il est actuellement possible
de réaliser la synthèse de molécules cérébrales, comme le G.R.E (Human
Growth Hormone Releasing Factor), facteur responsable de la production
de l’hormone de croissance.
Les hormones cérébrales obéissent à deux principes fondamentaux :
l’action à distance et l’autorégulation par rétroaction. Elles modfient
continuellement la perception du milieu intérieur. Elles sont responsables de
notre adaptation.
Les découvertes concernant les neurotransmetteurs dont l’action a pour
effet d’acheminer les messages dans le cerveau, d’exciter et de bloquer
l’activité des neurones, ne cessent d’ouvrir de nouvelles voies et d’offrir de
nouvelles perspectives pour l’exploration des relations du cerveau, du corps
et de son environnement.
Les interactions et les rapports de l’organique et du psychologique sont
fréquemment soulignés par les chercheurs : la neurochimie semble être un
véritable clavier, à l’articulation du neuronal et de ce qu’on appelle encore
le mental. Une révision de la terminologie classique concernant les activités
cérébrales est inévitable : les frontières imposées par la conception mécaniste
et dualiste de l’homme et de l’univers... vacillent. Les rapports de la forme
et de la substance, l’organisation des supports, des significations et du sens
sont à redéfinir. A mesure que les découvertes scientifiquesnous sont révélées,
notre vision de l’homme et de l’univers devient moins linéaire, moins
mécaniciste, moins réductrice.
Les travaux de R. Guillemin sur les neuropeptides, ceux d’Hughes et
Kosterlitz sur les enképhalines, ceux de nombreux biologistes sur certaines
molécules cérébrales dont la sérotonine, de Soloman Snyder sur les récep-
teurs des enképhalines, ceux de A. Bjorlund sur les implants cérébraux,...
36 Notre cerveau aujourd’hui
sont des exemples de l’étendue des domaines explorés et de leurs multiples
implications dans l’étude de la vie mentale et de l’acquisition des connais-
sances.
Ce qui apparaît très nettement, c’est l’intrication des phénomènes céré-
braux, et le fait que - dans ce domaine comme dans celui du monde
physique - rien n’est isolé ; aucun comportement ne correspond à une seule
localisation cérébrale précise et unique. I1 est également très difficile, comme
le remarque J.-D. Vincent, a de faire la part du câblé et de l’hormonal )) (4).
Parmi les domaines récemment explorés par la neurochimie, celui de la
neuromélanine semble être un exemple de la révolution qui se prépare dans
la compréhension des mécanismes cérébraux.
La mélanine est une molécule qui a été longtemps méconnue, avant d’être
re-découverte en 1983 par un chercheur californien, Frank Barr. Cette
molécule absorbe l’énergie électromagnétique de la lumière et la convertit
en vibrations sonores et vice-versa. Elle peut également intervenir dans le
métabolisme. La mélanine est douée d’autosynthèse et d’auto-organisation.
Pour Frank Barr, elle est sans doute la molécule clé, à la base des systèmes
vivants. La mélanine du cerveau, ou neuromélanine, va probablement nous
permettre de comprendre un jour l’évolution, le développement de I’em-
bryon, la régénération des tissus, l’homéostasie, la conscience et les états
modifiés de conscience, etc. : elle semble être au centre de toute l’activité
physiologique et psychologique de l’organisme.
Stockée dans le cerveau sous la forme de lipofuscine, la neuromélanine
crée probablement une sorte defilm holographique pour la mémoire à long
terme, en déposant de minces couches de substance semi-conductrice dans
le cerveau. Elle se: joint sans doute également à l’action des cellules gliales
pour former la matrice de l’organisation mentale.
Cette théorie présente de nombreuses implications non seulement dans
le domaine de la recherche, de la médecine et de la biologie, mais aussi dans
les sciences de l’éducation. Le rôle de la mélanine et, en particulier, de la
neuromélanine dans la mémoire, l’affectivité et la créativité, va être exploré
dans les années à venir par les différentes branches des neurosciences (5).
Tôt ou tard on en viendra à une redéfinition de la science humaine, de
la vie elle-même et de l’évolution.
En effet, il semble qu’avec la découverte des propriétés de la mélanine,
on ait fait un pas de plus vers la compréhension de l’évolution de l’évolution
et en particulier, de l’évolution du mental, et de son lien avec le neural. Tout
se passe un peu comme si, pour reprendre une image employée par Arthur
Young, après avoir décrit l’automobile, puis son accélération, on s’intéressait
maintenant au contrôle exercé par le conducteur: à l’accélération de
l’accélération (6).

(4) J.-D. VINCENT,Biologie des passions, Éditions O. Jacob, Seuil, 1986.


(5) Les recherches de E BARRsont peu connues en France. On en trouvera l’essentiel
dans la revue Medical Hypothesis, 11, 1-140, 1983.
(6) A. YOUNG, interviewé par M.Ferguson, cf. Brain & Mind Bulletin, vol. 8, nos12 et
13, 1 1 July 1983. Dans d’autres branches scientifiques, astronomie, radio-astronomie,
Les technologies nouvelles 37
L‘instrumentation moderne permet d’observer le monde infra-microsco-
pique de la nature humaine, comme elle le fait dans le monde de la physique
moderne, aux niveaux atomique et subatomique. Ce monde infra-atomique
qui, par définition, est très éloigné de notre monde sensoriel et macrosco-
pique, n’est jamais absent de la situation d’apprentissage
G Ce que nous voyons et entendons n’est jamais le phénomène lui-même
mais toujours ses conséquences )) écrit E Capra (7).
Notre observation de l’apprenant va donc devoir en tenir compte.
Le langage avec lequel nous nous adressons à l’apprenant est tiré de notre
expérience sensorielle, directe, individuelle. I1 n’est pas totalement adéquat
pour décrire et communiquer notre pensée, en particulier les phénomènes
sous-jacents à notre observation d’une réalité qui se place au-delà de notre
perception. Plus nous pénétrons la nature des choses de la vie, et en
particulier de l’apprentissage, plus nous devons abandonner d’images et de
notions traditionnellement véhiculées par le langage courant.

Cette réalité sera constamment présente et développée dans les chapitres


suivants.
Ce qui s’offre, non seulement aux chercheurs, mais à tous ceux qui
s’adressent au cerveau de l’homme (pédagogues, formateurs, parents, pro-
fessionnels de la communication et... tout être humain en activité), c’est une
somme immense de potentialités d’exploration et de réflexion sur les richesses
d’un système qui reste si peu connu et, souvent, si mal utilisé dans la vie
quotidienne.
Si le livre du cerveau manque cruellement de certains chapitres et d’une
conclusion, il semble que l’introduction soit en voie d’être écrite et que les
quelques paragraphes existants nous incitent à nous mettre d’urgence à la
tâche.
En 1981,250 O00 travaux de recherche sur le cerveau étaient signalés aux
États-Unis, dont la plupart avaient des implications directes en pédagogie.
Qu’en est-il aujourd’hui, qu’en sera-t-il demain en Europe ?
Dans le contexte éducatif actuel, quelles sont les implications pédago-
giques possibles de ces recherches ?

paléontologie, anthropologie, etc., les découvertes confirment qu’il nous faut changer notre
regard sur les phénomènes cosmiques, la vie organique, l’évolution...
(7) E CAPRA,Le Tao de la physique, Sand, Pans, 1985 ; trad. de The Tao of Physics,
Bentam Books, N.Y., 1977.
CHAPITRE 2

CERVEAU(X) ET INFORMATION

Étant donné le nombre très important des données actuellement dispo-


nibles dans le domaine qui nous intéresse, à savoir les recherches sur le
cerveau susceptibles d’apporter une réponse aux questions que se posent les
pédagogues et formateurs - et nous l’espérons aussi, les apprenants eux-
mêmes - un choix difficile a dû être effectué : il a été fait en fonction
1. de l’importance des données, 2. de l’urgence de la réponse à apporter
à l’attente du monde de la formation.
Pour illustrer le premier choix, ce qu’il est essentiel d’apprendre des
neurosciences, citons les recherches qui nous éclairent sur le processus
d’acquisition et de transmission de l’information ; la vision, et l’audition...
Quant à l’urgence de certains éclaircissements à apporter, il s’agit, par
exemple, des problèmes d’assimilation et de mémorisation de l’information ;
de l’hyperactivité ou de la démotivation des élèves.
Certains des aspects abordés ici correspondent à une demande d’infor-
mation qui n’est pas toujours exprimée consciemment par les formateurs
- bien qu’elle soit, à notre avis, d’une importance capitale. D’autre part,

certaines questions posées par les enseignants et formateurs le sont souvent


sous la pression des exigences de la situation éducative, de l’institution ou
de l’environnement.
L‘important, semble-t-il, est de faire en sorte de cerner, avec les moyens
dont on dispose actuellement, les véritables mécanismes impliqués dans l’acte
d’apprendre ; de répondre, lorsque cela est possible, aux questions qui se
posent, mais aussi de faire naître une interrogation sur certaines pratiques
pédagogiques, tout en restant conscient de la difficulté d’adapter à la
situation artificielle de la classe, la réalité profondément dynamique de notre
vie cérébrale.
L‘ordre dans lequel les réalités cérébrales sont abordées dans ce chapitre,
n’est pas immuable. Il n a ni cloisonnement, ni hiérarchie entre les différents
aspects abordés. Les seuls guides sont la situation d’apprentissage et l’ordre
dans lequel s’instaure le processus d’acquisition des connaissances : l’ordre
40 Notre cerveau aujourd’hui
même suivi par l’information, de l’environnement aux organes sensoriels et
au cerveau; en d’autres termes, le trajet de l’information de la prise au
traitement et à la production de l’information.

1. LE TRAJET DE L‘INFORMATION

De l’environnement à l‘homme

En abordant cet aspect d’un problème qui se pose en permanence à


l’homme, rappelons que ce dernier est en transaction constante avec son
environnement.
Cette transaction est essentiellement un échange d’énergie. I1 s’agit donc
de se pencher sur :
- les constituants en interaction,

- la nature des énergies mises en jeu,

- le transfert des énergies.

En interaction, se trouvent l’organisme humain d’une part, et son


environnement d’autre part. L‘un et l’autre constituent à la fois un support
vibratoire et une source d’énergie vibratoire.
Ces unités fonctionnelles sont interdépendantes. L‘échange d’énergie
apporte signification et sens. L‘interaction de l’homme et de son environ-
nement variera selon la nature du support vibratoire et le niveau énergétique
concerné. Les liens énergétiques de l’homme et du monde qui l’entoure sont
extrêmement complexes. Ce que nous ne pouvons pas ignorer (le formateur
moins que tout autre), c’est le nombre inconnu et certainement élevé
d’énergies - et donc d’influences - actuellement indécelables par l’obser-
vation.
L‘énergie vibratoire est informante et structurante. Les mots-clés qui la
caractérisent - ceci concerne tous les niveaux d’organisation - sont
direction, fréquence, amplitude. Nous retrouverons ces caractéristiques dans
l’analyse des stimuli visuels et auditifs, et lorsque nous chercherons à élargir
notre champ perceptif.
Le mode de circulation de l’énergie est la spirale, et non la ligne droite.
La double spirale de l’ADN devrait être un rappel constant de la structure
fondamentale de notre organisme. D’autre part, la réception vibratoire de
l’homme fonctionne de façon discontinue. I1 n’est plus possible de considérer
un système quelconque - et a fortiori la rencontre de deux systèmes -
comme la somme ou la simple séquence des propriétés des composants.
L’homme est un système ouvert. Son système nerveux central est <( fait
pour agir dans l’espace D (1).

(1) L‘expression est d’Henri LABORIT.D’autres auteurs ont souligné l’importance de


considérer le cerveau humain comme un système ouvert (Pribram, Prigogine...).
Cerveau(x) et information 41

Des sens au cerveau : réception et transmission de l’information*


L‘information extérieure et l’information intérieure arrivent constamment
et simultanément au cerveau. C’est une réalité que les intervenants et
communicants professionnels oublient trop souvent... Ceci explique, pour-
tant, que la réception du message ne soit pas toujours celle que l’on attend ...
Les voies de transmission sont de deux sortes: la voie directe, dite
lemniscale, ponctuelle, et la voie réticulaire, dfluse.
I1 serait bon que les formateurs s’interrogent sur la réception de
l’information qu’ils apportent à l’apprenant. En effet, les activités et tâches
demandées aux apprenants sont étroitement liées à la réception de l’infor-
mation, à la compréhension des consignes, à l’utilisation des diverses voies
de transmission, afférentes et efférentes. A-t-on jamais pensé à s’interroger
sur le rapport à établir entre, d’une part, l’importance et l’étendue des zones
corticales motrices et sensitives (correspondent à la face, à la rétine, au pouce,
à la phonation, etc.) et d’autre part, les types d’activités demandées aux élèves
tout au long de leur développement et... de leur scolarité? On serait étonné,
sans doute, de la permanence de certaines stimulations au détriment
d’autres...
Nos cinq sens fonctionnent ainsi : les longueurs d’ondes, émises par les
stimuli extérieurs, déclenchent le fonctionnement de récepteurs spécifiques
(l’œil, l’oreille, etc.) dans la mesure où la fréquence et l’amplitude émises
correspondent aux caractéristiques de ces récepteurs.
N’oublions pas que certains signaux ne peuvent pas être perçus par nos
organes sensoriels. Ils appartiennent au monde du supra-sensible. Ils sont
bien émis, mais ne peuvent être captés. Ils ne mettent en résonance aucun
récepteur : il n’y a donc pas de perception sensorielle. L‘être humain est
sourd à la musique des sphères )) écrit E. Guillé (2), mais la (( musique )) n’est
pas à nier pour autant.
N’oublions pas, non plus, que nous nous envoyons des messages à nous-
mêmes et que nos images mentales (ce que nous évoquons visuellement,
auditivement, ou encore kinesthésiquement) utilisent une partie des circuits
nerveux desservant la modalité sensorielle correspondante. Chacun de nous
a fait l’expérience qui consiste à tenter de communiquer avec une autre
personne profondément plongée dans ses pensées : celle-ci n’entend pas ce
qu’on lui dit (les circuits sont occupés !). Les recherches nous révèlent que
l’imagerie et la perception reposeraient sur les mêmes mécanismes psycho-
physiologiques (3).
La dynamique de la vie résulterait d’un équilibre entre les influences des
ondes reçues et des ondes émises. Les biologistes ont détecté l’existence de

* Nous conservons pour le moment, le vocabulaire utilisé couramment en biologie,


en informatique et en linguistique : (( prise », w transmission », e réception d’informa-
tion, mais nous devons être conscients que l’information n’est pas une entité en soi.
(2) E. GUILLÉ et C. HARDY,1983.
(3) Cf. l’article de S.M. KOSSLYN, Les Images mentales, La Recherche, vol. 11, no 108,
février 1980.
42 Notre cerveau aujourd’hui
deux forces coexistantes dès le niveau génétique : l’une conservatrice, l’autre
évolutive. Les molécules d’ADN reçoivent et transmettent l’information aux
gènes de structure. I1 est tout à fait remarquable de repérer cette double
fonction dès le niveau cellulaire.
Nous nous arrêterons sur trois aspects de l’information qui concernent
tout particulièrement les formateurs et les apprenants : l’influx nerveux ; le
câblage et codage de l’information ; la perception et le traitement.
a,’ L‘influx nerveux
On sait expliquer maintenant, dans les grandes lignes, la propagation de
l’influx nerveux: le transport axonal et dendritique est un événement
électrique engendré par l’inversion d’un potentiel d’action, lui-même assuré
par l’échange d’ions sodium et d’ions potassium. D’autres processus chimi-
ques se déroulent au niveau des points de contact des neurones, les synapses.
La double nature chimique et électrique de notre vie cérébrale, et donc
de nos moyens de communication, est expliquée en ces termes par
J.D. Vincent :
a Pour qu’il y ait vie, il faut de l’organisation et, pour qu’il y ait
organisation, il faut qu’il y ait communication, c’est-à-dire échanges d’in-
formations entre les cellules et, au sein d’une même cellule, entre les éléments
qui la composent. I1 existe chez les êtres organisés deux modes de commu-
nication, le nerveux et l’hormonal ... ))
Les recherches en neurobiologie, depuis les années 1970, ont apporté une
somme d’informations considérable sur l’interpénétration des mécanismes
électrologiques et neurochimiques.
Une fois encore, ce sont ies caractéristiques essentielles du fonctionne-
ment cérébral qu’il s ’agit de retenir pour rendre cohérente toute intervention
pédagogique :

- -
La polarité est un facteur essentiel de l’échange au cours duquel l’énergie
se transforme d’une forme à l’autre : chimique électrique chimique.
La diversité des neurotransmetteurs et de leur action est la marque
spécifique du mécanisme cérébral fondamental.
La discontinuité est une autre caractéristique de la transmission de
l’influx nerveux.
Les deux traits essentiels de la communication cérébrale sont :
La communication synaptique, locale, immédiate, de brève durée (quel-
ques millièmes de seconde).
La communication hormonale, qui se fait à distance; elle est diffusée
à l’ensemble des cellules cibles et pendant une durée prolongée.
b) Câblage et codage de l’information
Recueillies par les organes des sens, les informations convergent vers le
néocortex après être passées par le relais thalamique. Ce n’est que depuis
une vingtaine d’années que la neuroanatomie et la neurophysiologie ont pu,
grâce aux technologies nouvelles, rectifier certaines notions qui prévalaient
jusque-là telles que l’organisation hiérarchique des systèmes sensoriels, la
localisation des fonctions, et la conception mécaniste du fonctionnement
cérébral.
Cerveau(x) et information 43

D’autre part, les zones sous-corticales étant maintenant mieux connues,


l’information en provenance de ces zones est prise davantage en compte dans
l’étude du codage et du décodage de l’information. I1 était temps. En d’autres
termes, le relais thalamique, dont il sera question en détail plus loin, est enfin
reconnu comme faisant partie intégrante du circuit de l’information.
Pour chaque modalité sensorielle, visuelle, auditive, etc., la propagation
de l’information s’effectue à partir des centres sensoriels, ou aires primaires,
vers les aires associatives, (( véritables mosaïques de blocs correspondant
chacune à une représentation d’une surface sensorielle )) selon l’expression
de J. Bullier (4).
De récentes recherches ont permis d’apporter les précisions suivantes :
le traitement de l’information sensorielle se fait de façon simultanée,
distribuée et non séquentielle à l’intérieur d’une même modalité (visuelle,
auditive...). Une seule modalité est donc représentée par des aires corticales
multiples, ce qui signifierait que chaque aire fonctionnelle analyse un aspect
dgférent de la réalité extérieure. I1 y aurait division du travail, ce qui se
traduirait par uneflexibilité, une plasticité capable de pallier les conséquences
d’un déficit.
Par ailleurs, on sait maintenant que les échanges et les connexions d’une
mosaïque Ll’autre - donc d’une modalité sensorielle à l’autre - se font
dans trois régions de convergence multisensorielle: le lobe temporal et les
deux lobes frontaux. Les aires associatives auraient un rôle non seulement
dans la représentation du monde sensoriel, mais participeraient à l’interpré-
tation du sens.
Enfin, simultanéité et interaction sont également des termes qui, d’après
ces recherches, représentent des caractéristiques fondamentales du fonction-
nement du cerveau.
J.-P. Changeux utilise le terme d’« assemblées de neurones »,forgé par
Herb, pour désigner le type d’activité neuronale(4). Les termes de
(( modules », d’« essaims )> ou de (( feuillets )) sont aussi utilisés pour décrire

le phénomène de groupement et d’orientation dans l’espace neuronal ; ce


phénomène serait une caractéristique essentielle du codage de l’information
dans le cerveau.

Enchaînement, combinaison, interconversion, interconnexion, sont des


mots-clés de la dynamique cérébrale :ils sont, ils devraient être, les clés des
serrures de l’apprentissage.

Une autre donnée concernant le câblage de notre système nerveux central


a été révélée au cours des vingt dernières années et elle est d’une extrême
importance dans l’interprétation de notre réalité cérébrale: il s’agit du
processus de << myélinisation », c’est-àdire du gainage des fibres nerveuses
qui établissent les connexions entre les différentes zones cérébrales. Ce

(4) J. BULLIER,
(( Les cartes du Cerveau », La Recherche, no 148, octobre 1983, vol. 14 ;

J.-P. CHANGEUX,L’homme Neuronal, Fayard, 1983. Cf. aussi H. LABORIT(1973),


R.A. LURIA(1973), H. MAMO(1977), J.-D. VINCENT (1986).
44 Notre cerveau aujourd’hui

gainage consolide les fibres et permet une transmission plus rapide de l’influx
nerveux. Ce processus se déroule dès le huitième mois après la conception
de l’embryon, rendant progressivement les zones auditives, motrices et
visuelles du cerveau, et les connexions entre elles, de plus en plus opéra-
tionnelles. Les fibres acoustiques sont (( celles dont la myélinisation, c’est-
à-dire l’aptitude à fonctionner, retarde le plus )) (5).
Les lobes frontaux, siège de la ré-flexion, de la structuration, et de la
conceptualisation, étant les derniers à être totalement myélinisés, il est de
toute première importance de ne faire accéder l’apprenant à des tâches
d’abstraction qu’à l’âge cérébral correspondant (6).

c) Perception et traitement de l’information


A lui seul, le premier de ces deux termes suffirait à remplir plusieurs
bibliothèques... I1 ne sera question, dans cette section, que de la relation
perception/ traitement de l’information.
La première question qui se pose, est de savoir à partir de quel moment
on peut parler de traitement de l’information. Pour le système visuel, les
neurobiologistes nous disent que le cerveau commence à la rétine. J.-
P. Changeux fait une distinction très nette entre sensation et perception, entre
percept et concept. 11 note (( une parenté neurale, une congruence matérielle,
entre le percept et l’image de mémoire ». Mais, poursuit-& dès qu’on aborde
le thème de la signification et de l’interprétation de la réalité, on entre dans
un domaine où les données biologiques font cruellement défaut )) (7).
Bien que, à notre connaissance tout au moins, les études portant sur la
perception sensorielle aient été essentiellement destinées à apporter une aide
à la détection de maladies et au diagnostic clinique, elles nous offrent une
analyse des caractéristiques fondamentales du processus perceptuel.
Pour ne citer que deux des domaines sensoriels, le visuel et l’auditif,
intervenant en priorité dans le processus d’apprentissage scolaire, il est
particulièrement précieux pour des enseignants et formateurs d’apprendre,
grâce à des recherches récentes, que «la voie visuelle traite le mouvement
et la position dans l’espace dans des canaux parallèles>> ; qu’elle «possède
des canaux spéciJques pour les changements de taille et les stimuli cligno-
tants». Que, d’autre part, «la voie auditive traite l’information le long de
canaux distincts N ; et que <( certains neurones sont activés par des change-
ments d’intensité d’un son mais ne réagissent que peu ou pas du tout à un
son pur continu, alors que d’autres neurones sont fortement stimulés par
un son pur continu >> (8).
Les interactions entre cellules du système visuel, et en particulier les
cellules de la rétine, telles que les ont enregistrées des techniques récentes,
ont révélé une fonction essentielle de la vision : la détection des contrastes

(5) Source : Henri WALLON(1969), citant STERNet FLECHTIG.


(6) Cf. dans la bibliographie GALIND., JOHNSTONE J. et al. (1979). Cf. aussi l’ouvrage
de Britt M. BARTH,L’apprentissage de l’abstraction, Retz, 1987.
(7) CHANGEUX, op. cif., p. 166-167. Cf. aussi COWAN
M. (1981).
(8) Cf. REGAND. (1980).
Cerveau(x) et informat ion 45

lumineux qui permettent de distinguer les contours des objets. La rétine


fournit un bon exemple de la manière dont une partie du système nerveux
fonctionne. A mesure que nos connaissances progressent, elle devient de plus
en plus un modèle pertinent pour comprendre comment se réalise l’intégra-
tion nerveuse dans les centres les plus élevés du cerveau (9).
Les différentes recherches sur les systèmes sensoriels font apparaître les
divers paramètres intervenant dans la perception et le traitement de l’infor-
mation, ainsi que les mots-clés du fonctionnement du cerveau. Ces para-
mètres et ces mots-clés doivent servir de base aux enseignants et formateurs
pour l’élaboration de leurs programmes et contenus de formation.
Un autre exemple à retenir des explorations du fonctionnement de notre
cerveau, est ce que révèle la recherche de Manfred Clynes et sa découverte
de la loi (( Unidirectional Rate Sensitivity )) (U.R.S.). Selon cette loi, l’in-
formation est mieux perçue dans des conditions évolutives que dans des
conditions statiques : nous sommes plus sensibles à des changements d’in-
tensité (augmentation ou diminution) qu’à une intensité constante.
D’autre part, ces changements utilisent un seul canal, unidirectionnel
(fibre, membrane, séquence de réactions chimiques ou hormonales, etc.), car
- affirme Clynes - les molécules ne peuvent ((arriver))qu’en nombre

positif (10).

2. NIVEAUX D’ORGANISATION : ÉVOLUTION ET MATURATION


DU CERVEAU

L‘évolution phylogénétique et le développement ontogénétique du cer-


veau nous apportent un éclairage très précieux sur nos capacités à traiter
l’information à plusieurs niveaux.
Notre cerveau de la fin du xxesiècle est la résultante d’une évolution
qu’il est essentiel de prendre en compte si l’on veut parvenir à la compré-
hension du fonctionnement cérébral.
Pour Jean Charron, (( nous sommes nés il y a 15 milliards d’années D.
Quel que soit l’ancêtre de l’homme auquel on se réfère: l’homo erectus
(35 O00 ans), l’Australopithèque (4 millions d’années), le singe anthropo-
morphe (70 millions d’années), le mammifère primitif (200 millions d’années),
les reptiles (300 millions d’années), ou les poissons (450 ou 500 millions...),
il faut, pour expliquer l’origine de l’homme, remonter au début même de
la vie sur la terre ; car l’homme, même s’il l’oublie aujourd’hui, fait partie
intégrante du Cosmos. La Physique moderne est heureusement là pour nous
le démontrer (1 1).
Sans entrer dans la polémique des diverses théories portant sur les

(9) Cf. l’article de D. HUBELet T. WIESEL,Les mécanismes cérébraux de la vision, in


Pour la Science, Belin, 1981.
(10) M. CLYNESest un chercheur australien, dont les découvertes et inventions sont un
exemple frappant de pluridisciplinarité : neurophysiologiste, musicien, psychophysiologiste,
il est aussi ingénieur en biocybernétique. Cf. son ouvrage Sentics, p. xiii.
(1 1) Cf. bibliographie, A. GRIBENSKI (1980).
46 Notre cerveau aujourd’hui
relations de la phylogenèse et de l’ontogenèse, il est bon de rappeler la grande
ressemblance des premiers stades de développement des différents fœtus, de
la tortue à l’homme, signalés par Hæckel en 1874.
Le cerveau est une structure biologique complexe. On l’oublie trop
souvent, surtout lorsqu’on est apprenant ou enseignant. Dans le système
éducatif traditionnel, on est tenté de ne s’adresser qu’à un seul de ces niveaux,
le plus noble dans l’optique occidentale : (( l’intellectuel », le cortical, le plus
récent dans l’évolution phylogénétique et dans le développement de l’em-
bryon.
En fait, tout se passe comme si nous avions à notre disposition trois types
de ressources. Tout d’abord, un memento de poche, prêt à parer au plus
pressé. La deuxième ressource est notre bibliothèque comportant plusieurs
ouvrages de référen.ces et l’album-photo de la famille. Et, lorsque ces deux
ressources se montrent insuffisantes, nous nous référons à une troisième
ressource de la taille d’une banque de données ; mais cela demande beaucoup
plus de temps...

Quatre cerveaux en un

La théorie des trois cerveaux de MacLean, du National Institute of


Mental Health, Bethesda, Maryland (États-Unis) est relativement peu
connue en France. Certains la considèrent comme une simplification trop
grande d’une réalité infiniment plus complexe. L‘erreur que l’on commet
souvent est de considérer cette théorie comme un modèle fonctionnel alors
qu’il s’agit essentiellement d’un modèle structural (12).
Pour MacLean, il s’agit de faire (( une rétrospective au-delà de Freud o.
Les trois cerveaux correspondent à trois types de traitement et d’organisation
de l’information. Le modèle proposé par MacLean (structural, rappelons-
le) est extrêmement utile pour expliquer certains comportements d’appre-
nants (et pourquoi pas, de formateurs).
Le premier niveau, le cerveau reptilien ou complexe-R, comporte la plus
grande partie du tronc cérébral (le système réticulaire, le cerveau moyen et
les ganglions de la base). I1 est constitué de cellules disposées en amas et
non en couches, comme c’est le cas dans le cortex. Le cerveau reptilien est
riche en récepteurs d’opiacés et on y trouve une grande concentration de
dopamine.
MacLean a recensé vingt-quatre comportements ou conduites typique-
ment primales, qu’il regroupe en cinq conduites interopératives :
a) l’isopraxie ou imitation d’un modèle ou de prototypes,
b) les penchants, tendances, impulsions,
c) la routine, la recherche d’une jurisprudence, les rituels, actes supers-
titieux,
d) les tropismes,
e) les stratégies de feintes.
Le cerveau reptilien est rempli de savoir et de mémoire ancestrale. I1

(12) Cf. MCLEANP, (1964).


Cerveau(x) et information 47

prend des décisions de survie et défend le territoire. I1 est très attaché aux
habitudes, et se charge de nos automatismes. Ses réponses aux stimuli sont
immédiates et il ne sait pas faire face aux situations nouvelles. I1 ne sait pas
innover, et il accepte mal qu’un autre soit différent de lui. Dans la classe
de langue étrangère, il est ... à rude épreuve ! I1 est - très probablement -
le grand responsable des résistances qui se traduisent, chez certains appre-
nants, par des difficultés quasi insurmontables lorsqu’il s’agit de changer de
code linguistique ou d’habitudes.
L‘autistique souffrira d’une incapacité à imiter ; au contraire l’enfant
retardé, lui, trouvera dans l’imitation une possibilité d’apprentissage, même
limité.
Le système limbique, ou cerveau mammifère, appelé encore cerveau
émotionnel (et même viscéral), est, comme le terme limbique l’indique,
construit autour du premier. MacLean le décrit comme ayant trois divisions :
l’amygdale, le septum, et les noyaux thalamiques antérieurs.
Le cerveau limbique marque le commencement de l’émancipation du
super-ego ancestral. Grâce à lui, nous sommes capables de jouir d’une plus
grande liberté de décision.
II joue un rôle primordial dans notre comportement émotionnel et notre
mémoire, et donc, dans la structuration de notre identité ; il y contribue par
son aptitude à apprendre à partir d’expériences nouvelles qu’il classe en
gratifiantes (donc à recommencer), ou désagréables (donc à éviter ou fuir).
Encore étroitement lié au stimulus, il sait généraliser les réponses apprises.
I1 est vital pour la mémoire à court terme et, a fortiori, pour la mémoire
à long terme ; mais s’il lui est nécessaire, il n’est pas suffisant. D’autres zones
cérébrales sont impliquées dans la mémorisation.
Nous lui devons, enfin, notre sens du groupe et pour une grande part,
notre altruisme.
L‘apprenant, l’enseignant, le formateur, le parent.. . doivent savoir que
ce cerveau est un véritable relais : tous les stimuli sensoriels (sauf olfactifs)
passent par son (( étage H.
II est parfaitement capable de bloquer une information montante (ou
descendante) si l’environnement lui paraît menaçant, 1atmosphère déplai-
sante, si un choc affectif survient, ou encore si une image mentale trop
prégnante est déclenchée...
Cette formation cérébrale veille à la survie de l’organisme et de l’espèce.
Les deux cerveaux reptilien et limbique sont intimement imbriqués l’un
dans l’autre, et si étroitement reliés que certains biologistes les considèrent
comme ne faisant qu’un. Ils ont en commun de combiner les informations
intérieures et extérieures, un peu comme si, sur leur écran, les deux types
d’information étaient confondues. On comprend mieux que, dans les situa-
tions où ces deux cerveaux sont «aux commandes)), il soit difJicile de
distinguer entre une information extérieure et intérieure, du domaine du
ressenti ou de l’imaginaire. C’est le cas, lorsque une émotion bloque notre
compréhension, freine ou interdit une décision.
Ni le cerveau reptilien, ni le cerveau limbique ne possèdent le moyen de
s’exprimer verbalement.,,. d’où l’inutilité d’argumenter sur la motivation avec
48 Notre cerveau aujourd’hui

un apprenant qui n’est pas motivé !... Paul MacLean compare ces deux
cerveaux primitifs l’un à un (( reptile en laisse n et l’autre à (( un cheval sans
cavalier ». Le cavalier est à l’étage au-dessus (figure 2).
C’est le néo-cortex.
Pour traiter les données reçues par les organes sensoriels, les images
mentales et nos mémoires diverses, pour transmettre les réactions cérébrales
en langage verbal, il faut l’aide du néocortex.
Celui-ci s’est développé massivement, si massivement qu’il lui a fallu se
replier en profondeur pour loger ses 22 dm2 dans la boîte crânienne ! I1 a
permis à l’homme la production d’un langage symbolique et des activités
complexes comme la lecture, l’écriture, et l’arithmétique.
(( Mère de l’invention )) et père de la pensée abstraite D selon MacLean,
le néocortex permet la production et la préservation des idées. I1 raisonne
froidement, et ne connaît pas les émotions... I1 est un écran beaucoup plus
fin de la réalité extérieure grâce à ses capacités de traitement de données.
I1 est capable d’analyser, d’anticiper, de prendre des décisions, de résoudre
des problèmes, de conceptualiser...

On trouve chez MacLean une explication originale de la localisation du langage dans


l’hémisphère gauche : les chasseurs, plus tard les hommes d’armes, tenaient leur bouclier
de la main gauche pour protéger plus efficacement leur cœur d’éventuelles blessures. Ils
devaient donc tenir leur arme de la main droite, accompagnant leurs gestes défensifs ou
offensifs de vocalisations, directement liées à l’action... ce qui aurait contribué au dévelop-
pement de l’hémisphère gauche.

Les lobes frontaux représentent la dernière poussée cérébrale et peuvent


être considérés comme un quatrième cerveau. Ce cortex préfrontal est en
effet très différent du néocortex en ce qu’il semble être le siège privilégié
de l’empathie, de l’identification avec l’Autre, de la ré-flexion.
Le front de l’Homme de Néanderthal s’est redressé pour devenir plus
droit, plus grand et loger le cortex préfrontal que de nombreuses études ont
discerné comme étant indispensable à la planification, à la réflexion, à la
projection d’un avenir qui nous concerne, nous et les autres. Fortement relié
au système limbique, il est décrit par MacLean comme étant la seule partie
du cortex capable d’altruisme, de (( regarder à l’intérieur D et d’échapper à
la loi implacable de la lutte pour la vie. MacLean signale, avec d’autres
biologistes, que cette partie du cerveau continue à se développer après
l’adolescence.
Le rôle des lobes frontaux a été également souligné par A. Luria, le grand
neurologue russe. Le cortex préfrontal possède ce que Luria appelle la
(( barrière fonctionnelle ». C’est grâce aux lobes frontaux que nous avons un

moyen d’échapper à la boucle stimulus réponse, en retardant le moment de


la réaction et en donnant le temps à l’information de parvenirjusqu’au cortex
préfrontal qui traitera cette information. Retarder la réaction pour prendre
du recul, évoquer les conséquences, en un mot : penser (1 3).

(13) Cf. A.R. LURIA(1973b).


Cerveau(x) et information 49

Figure 2. Nos 3 cerveaux

Paul MacLean compare notre triple structure cérébrale à un reptile en laisse,


un cheval sans cavalier ; le cavalier est à l’étage au-dessus (dessin de D. Blondiaux).
50 Notre cerveau aujourd’hui
La théorie de MacLean a été prolongée par William Gray (du Newton
Center, Massachusetts, États-Unis) dans sa théorie de 1’« Emotional Cogni-
tive Structure )) (E.C.S.), qui tend à démontrer que toutes nos pensées sont
codées par des tonalités affectives. Nos pensées naissent de nos émotions.
Un autre théoricien, Paul La Violette (de Portland, Oregon, États-Unis)
démontre que le processus de base de notre fonctionnement cérébral est un
processus bottom up, c’est-à-dire de bas en haut, et non, comme on le croit
souvent top-bottom, c’est-à-dire de haut en bas. En d’autres termes, notre
activité mentale va du limbique au cortical.
C’est également cet aspect du cheminement de l’information que souligne
Henri Laborit, à savoir le passage obligatoire des stimuli sensoriels par le
système nerveux primitif et - sauf en ce qui concerne les réactions réflexes
- le passage par le relais du système limbique des informations conduites

vers le néocortex (14). Certains comportements - comme l’agressivité -


s’expliquent par la prise de pouvoir de l’un des cerveaux. La défense du
territoire peut devenir la préoccupation première de l’organisme ;l’affectivité
peut intervenir dans la transmission de l’information à l’étage cortical, soit
pour la favoriser, soit pour la bloquer. L‘équilibre entre les trois étages est
fragile et il est loin d’être constant, une fois atteint.
Toute interventionpédagogique devra tenter de réconcilier le cognitif avec
sa base affective sous-corticale et ménager un contexte non-menaçant,
enrichissant et chaleureux, dans lequel l’apprenant se sent interpellé tota-
lement.
Là se trouvent les conditions d’un apprentissage efficace.

Notre dynamisme sensori-moteur

Le développement ontogénétique de notre système sensori-moteur est


l’illustration même du dynamisme cérébral, celui d’un organisme ouvert en
perpétuelle recherche de son propre équilibre et de son expression, en
échange constant avec l’environnement. Et ceci... depuis l’origine de
l’homme, à travers les 200000 générations d’hommes qui ont abouti à la
nôtre.
Capteurs, véhicules et transformateurs de l’énergie interne et externe à
l’organisme, nos cinq systèmes sensoriels et notre motricité sont beaucoup
plus qu’un assemblage de pièces détachées. L‘ontogénèse, le développement
de l’individu depuis la fécondation jusqu’à l’âge adulte, démontre à quel point
nos systèmes sensoriels sont imbriqués les uns dans les autres, dépendent
les uns des autres et coopèrent bien avant la naissance du nouveau-né pour
construire l’unité et la complexité de l’individu.
Notre multisensorialité a souvent été chantée par les poètes ou les
musiciens. Écoutons Claudel : (( Celui qui ne regarde pas l’azalée n’entendra
pas le torrent )) et Richard Wagner : a l’œil s’adresse à l’homme extérieur
et l’oreille à l’homme intérieur D.
Le dynamisme de notre architecture et de notre organisation sensorielle

(14) Cf. bibliographie GRAYW. (1979); LA VIOLETTE H. (1981).


P. (1979) ; LABORIT
Cerveau(x) et information 51

peut être représentée par un seul chiffre : le poids du cerveau augmente de


35 % après l’âge de deux ans (15). Cette augmentation se traduit sous trois
formes :
- l’allongement des fibres (axones et dendrites des neurones) ;

- la myélinisation des fibres (processus de gainage de fibres) (16) ;

- l’apport d’énergie et de substance nutritive (par la multiplication des

cellules gliales et le développement de la circulation artérielle).


Les trois sources d’accroissement du poids cérébral s’accompagneraient
pour certains auteurs d’une multiplication du nombre des synapses (leur
nombre passerait de 200 milliards à la naissance à 10 puissance 14 ou 15
à l’âge adulte).
Pour d’autres, au contraire, la maturation fonctionnelle du cerveau serait
liée à l’élimination synaptique et (( à l’acquisition d’une efficacité synaptique,
plus grande, au niveau moléculaire )) (1 7).
Cette période de la vie humaine est d’une importance cruciale pour la
mise en place des structures responsables du développement de l’individu :
augmentation de la complexité et de la rapidité des connexions intercellu-
laires, consolidation du reseau neural qui deviendra de plus en plus fiable,
non-continuité et non-linéarité des changements qui surviennent au cours du
développement.
Chaque système, visuel, audit$ moteur, a sa propre histoire, son
orientation, sa fonction.

Notre système auditif


Le système auditif est plus primal que le système visuel, mais il se
structure plus lentement ; le nerf auditif est moins puissant que le nerf
optique. I1 faudra entre cinq et sept ans à l’enfant pour être en mesure de
gérer le langage, ou plutôt sa langue. Les recherches sur l’acquisition du
langage chez l’homme nous rkvèlent que les nouveaux-nés perçoivent et
imitent des sons qui n’existent pas dans leur langue maternelle, puis perdent
- dès trois mois - cette capacité perceptive très large pour se réduire aux

fréquences, rythmes et intonations de la langue maternelle. Le petit d’homme


organisera son langage autour des concepts et des catégories qu’il rencontre
dans son exploration du monde.
L‘audition est considérée comme le système sensoriel le plus discriminat$
La transmission de l’onde sonore s’effectue selon des modalités exception-
nelles en neurophysiologie sensorielle : à travers des cavités aériennes et
liquidiennes jusqu’au cortex. De plus, le système auditif est doublé d’une

(15) Cf. bibl. DOBBINGJ. and SANDS J. (1973).


(16) Pour certains auteurs, la myélinisation est le facteur principal de maturation
cérébrale (YAKOVLEV et LECOURS).D’autres attribuent l’accroissement du cerveau à
l’augmentation de l’A.D.N. (HYDEN).Un autre facteur de maturation pourrait inter-
venir : la synthèse de protéines à laquelle l’A.R.N. participe (EPSTEIN).
(17) Cf. RAKICet al, Concurrent overproduction of Synapses in Diverse Regions of
the Primate Cerebral Cortex », Science, vol. 232, Ap. 1986, pp. 232-4.
52 Notre cerveau aujourd’hui

fonction de régulation du tonus antigravitaire et joue un rôle dans l’équilibre


du sujet, grâce a l’appareil vestibulaire.

Notre système visuel


La vision, de son côté, est la source la plus importante d’informations
que nous recevons du monde extérieur ; et ceci semble vrai dans toutes les
cultures.
(( L‘image qui se forme au fond de l’œil n’est que le point de départ de

la perception visuelle. Elle est codée sous forme d’impulsions électriques,


transmises jusqu’aux aires visuelles cérébrales où elles sont analysées en
termes de recorinaissance des formes, des couleurs, des mouvements,
etc. (1 8) ))
Dans ces quelques lignes, les enseignants et formateurs peuvent, une fois
encore, trouver de précieux mots- clés représentant les paramètres sur
lesquels construire un enseignement : reconnaissance, formes, couleurs,
mouvements.
Le phénomène visuel s’opère à plusieurs niveaux : au niveau perceptif,
par la capacité d’interpréter des images, identifier des formes. A un niveau
plus complexe, la vision implique la catégorisation, la mémorisation et
l’attention.
Le nerf optique est un faisceau d’un million de fibres nerveuses. C’est
une voie puissante de transmission de l’information.
Le développement du système visuel est foudroyant de rapidité : il faut
cinq mois environ à l’enfant pour contrôler le même champ visuel que
l’adulte.
Les voies optiques ont une double fonction ; la fonction visuelle propre-
ment dite et la fonction du regard (19). L‘une et l’autre correspondraient
respectivement aux aires 17 et 18 de Brodmann. Sans entrer dans une analyse
approfondie, il \faut toutefois signaler la distinction fondamentale qui doit
être faite entre la vision focalisée et la vision ambiante ou visuo-spatiale.
Ces deux types de vision se complètent .
Selon M. Jeannerod «un sujet ayant une vision focale sans la vision
ambiante serait aussi inBrme que celui qui tenterait d’examiner un tableau
dans une pièce obscure avec un mince pinceau lumineux)).
Vision focalisante et vision visuo-spatiale sont à rapprocher des deux
gestions cérébrales dont il sera question plus loin, lorsque seront décrits nos
deux hémisphères cérébraux, le gauche et le droit. Nos deux types de vision
correspondent également à deux types de lecture de l’écrit : les écritures
alphabétiques et syllabiques d’une part, et les écritures pictographiques
d’autre part.
Des recherches récentes portant sur la durée et l’orientation du regard

(18) M. IMBERT(1983) et (1984); cf. aussi FAING.L. (1979).


(19) Cf. H. MAMO (1977).
Cerveau(x) et information 53
font apparaître le rôle du contact oculaire en tant que principal régulateur
de la communication. Les variables (durée du maintien du contact, nombre
de changements de la direction du regard, rôle de locuteur/récepteur,
échange face à face ou en groupe...) semblent varier d’une culture à l’autre
mais confirmerit le rôle primordial du comportement visuel dans l’évolution
de l’individu et des rapports sociaux (20).

Notre motricitë
La motricité, la troisième modalité sensorielle dont le développement sera
suivi ici en parallèle avec celui de l’audition et de la vision, intervient très
tôt dans le développement de l’embryon. La motricité est indissociable de
toute sensorialité et de toute réalité cognitive et mnémonique. Pour Marcel
Jousse, c’est le geste et la mémoire qui font l’homme. Pour Georges Brunon,
à qui nous devons l’arbre magnifique dont nous avons fait le symbole du
titre de ce livre, le geste est véhicule, moyen, voie. I1 est porteur de
créativité (21).
Goethe n’est pas démenti par l’embryogenèse, lorsqu’il fait dire à Faust :
(( Im Anfang war die Tat )), rétorquant aux disciples de Platon qui donnaient

la priorité à la pensée sur l’acte : (( Au commencement était l’Action. ))


Pour C. Jung : (( Les actions n’ont jamais été inventées. Elles ont été
accomplies(22). )) Pour Piaget, également, le mouvement est au commence-
ment.

Corrélats neurologiques du développement de l’intelligence

Le développement de l’intelligence tel que le décrivent les psychologues,


et en particulier Piaget et Inhelder, s’opère au cours de différents stades:
sensori-moteur ; pré-opératoire ; opérations concrètes ; opérations formelles.
Certains auteurs ajoutent un stade ultérieur d’opérations post-formelles,
et apportent la preuve que le développement du cerveau se poursuit au-delà
de l’adolescence.
Le parallélisme entre les stades piagétiens et les périodes de croissance
neurologique a été étudié par plusieurs auteurs qui concluent, dans leur
ensemble, à une croissance discontinue par palier. Alors que les premières
études des neurophysiologistes et des neuropathologistes, soulignant cette
particularité du développement cérébral, datent des années 1920 et 1930, les
programmes scolaires continuent à être construits comme si l’enfant pro-
gressait d’année en année régulièrement, comme s’il était capable d’une
production quantitativement identique au cours de chaque année scolaire...
Chercheurs en neurologie et psychologues le montrent, pourtant, clai-

(20) Cf. les recherches de Patricia WEBBINK, auteur de The Power of the Eyes (1986),
Springer, 536 Broadway, N.Y.C., 10012.
(21) G. BRUNON, L’Art et le Vivant, Éd. Dangles, 1982.
(22) C. JUNG(1983).
54 Notre cerveau aujourd’hui

rement : le développement cérébral de l’enfant se fait par poussées et paliers.


I1 est marqué de périodes d’accélération et de ralentissement dont les systèmes
éducatifs doivent tenir compte.
Les périodes de pointe sont trois, sept, onze et quinze ans. Entre ces
poussées, pendant les (( périodes creuses », il serait bon d’éviter un appren-
tissage intensif car le cerveau a une capacité réduite de réflexion et de
créativité. A quinz,e ans, un apprenant mettra quatre fois moins de temps
à acquérir les mêmes données qu’à treize ans. I1 vaudrait mieux, dans ces
conditions, retarder certains apprentissages et utiliser les périodes de ralen-
tissement pour assurer la consolidation des acquisitions antérieures, proposer
des activités concretes, et encourager l’apprentissage expérienciel.

Si un programme éducatif se veut efficace, il doit s’adapter au dévelop-


pement des zones cérébrales et s’adresser aux capacités mentales correspon-
dant aux fonctions devenues opérationnelles, grâce ù la maturation progres-
sive du cerveau.
I1 est aberrant de demander à un mécanisme quelconque d’opérer une
fonction pour laquelle il n’est pas prêt. Pourquoi les formateurs et les
enseignants oublient-ils, dans leur grande majorité, cette réalité essentielle ?
En 1972, H.T. Epstein, psychologue de l’université Brandeis, à Waltham,
Massachusetts (États-Unis), publiait une synthèse des travaux existant sur
les changements chronologiques du poids du cerveau et du corps, en relation
avec la mesure de la circonférence du crâne de la naissance à l’âge de dix-
sept ans. I1 donnait à sa théorie le nom de phrénoblysie (du grec : (( crâne ))
et ((poussée »). I1 découvrait une différence marquée entre le crâne des
garçons et celui des filles après la dixième année, et une nouvelle poussée
cérébrale après l%gede quatorze ou quinze ans, fixée par Piaget comme étant
le dernier des stades de développement de l’adolescent.
Patricia Arlin confirmait, dans une étude portant sur des étudiantes de
dix-neuf à vingt et un ans, que le développement du cerveau continuait après
l’adolescence. Ce nouveau stade correspond à la capacité de recherche du
problème qui, elle-même, ne doit pas être confondue avec la capacité de
résoudre le problème. Les autres aptitudes de ce dernier stade serait le
raisonnement inductif, la pensée créative ou divergente.
Les implications de ces découvertes en méthodologie de l’apprentissage
sont considérables. Le concept même d’intelligence doit être révisé à la
lumière des donnkes recueillies auprès des neurophysiologistes. En effet, le
cerveau se développe comme s’il était composé d’une série d’organes
différents, qui se développeraient chacun à son propre rythme, certains
atteignant la maturité avant les autres (23).

La mesure de l’intelligence doit être établie en tenant compte d’unfacteur


supplémentaire et significatiJI Ù savoir l’aptitude ù développer de nouvelles

(23) P. ARLIN(1975) ; cf. aussi D. ROSE (1982).


Cerveau(x) et information 55
compétences à un âge mental donné, et non pas la seule référence à un savoir
ou à un savoir-faire donné.
Les capacités en langage, calcul et raisonnement semblent atteindre un
sommet vers l’âge de onze ans ; alors que les années entre treize et quinze
ans correspondent à une baisse de niveau dans ces trois domaines pendant
que, parallèlement, s’effectue la maturation affective et sexuelle.
Les périodes d’entrahement intellectuel intensif ne devraient-elles pas
correspondre aux périodes de poussée cérébrale ? Les programmes scolaires
n’auraient-ils pas plus de chance d’être efficaces (et l’échec scolaire serait sans
doute beaucoup plus rare) si, comme l’ont recommandé depuis longtemps
des auteurs comme Alfred Whitehead ou Lee S. Vygotsky, ils tenaient
compte des périodes de développement de l’enfant ?
Ce qui semble plus grave encore dans l’erreur que commettent les
systèmes éducatifs, c’est qu’en imposant à des enfants des tâches qui ne
correspondent pas à leur développement cérébral - et donc à leurs capacités
cérébrales, des attitudes de blocage et de rejet risquent de se cristalliser, même
après la mise en place des structures mentales.
Nous en arrivons donc à nous poser la question suivante :
De quelles données essentielles les pédagogues devraient-ils disposerpour
construire des programmes adaptés au développement cérébral ?
I1 semble qu’un minimum de connaissances de base devraient précéder
(et présider à) l’élaboration de toute intervention de formation :
1) Le système nerveux se développe de bas en haut :
- la moelle épinière (le système nerveux autonome) est formée avant le
cerveau (le système nerveux central) ;
- les couches internes (sous-corticales) se développent avant les couches

externes (corticales) ;
- les extrémités (lobes frontaux) se développent en dernier, et leur déve-
loppement se prolonge jusqu’à l’âge adulte (24).
Pour certains apprenants, l’itinéraire vers l’abstraction est trop rapide.
Un retour vers le concret permet de résoudre certaines de leurs difficultés,
en particulier lorsque est repris le chemin de la motricité (25).
II est donc nécessaire d’observer une hiérarchisationdes tâches en relation
avec la maturité du cerveau, seul décideur de la progression: de l’acte
perceptif concret, sécurisant, à I ’acte conceptuel, abstrait.
2) La différenciation progressive des champs corticaux se ferait par la
myélinisation des analyseurs sensoriels, l’arborisation dentritique et la mul-
tiplication synaptique, dans l’ordre suivant :
- analyseurs primaires (myélinisés dès le stade foetal) ;

- analyseurs secondaires ou zones d’association (myélinisés dès les pre-


mières semaines et les premiers mois de la vie) ;
- en dernier, les zones tertiaires ou zones de recouvrement.

(24) Cf. YAKOVLEVet LECOURS, op. cit.


(25) Cf. les recherches de FROSTIGet MASLOW(1979) ; COULTER
(1981).
56 Notre cerveau aujourd’hui

Les zones de recouvrement, d’une importance capitale, sont les lobes


frontaux et la zone infra-pariétale postérieure. Elles sont à la limite des zones
visuelle, auditive, vestibulaire, cutanée et proprioceptive. Ces zones multi-
sensorielles sont capables d’intégrer des informations de modalité sensorielle
différente simultanément.
Prenons pour exemple le cortex visuel.
Les neurones de la zone primaire sont doués de sélectivité d’orientation
et sont capables de reconnaître des formes et des contours. Les neurones
de l’aire secondaire jouent un rôle dans l’analyse de la couleur, du mou-
vement, du relief; ceux de l’aire tertiaire jouent un rôle essentiel dans la
conversion de la pensée concrète en pensée abstraite qui procède toujours
sous la forme de schèmes internes. La zone tertiaire joue également un rôle
dans la mémorisation de l’expérience, c’est-à-dire non seulement dans la
réception et le codage de l’information, mais aussi dans son stockage
(figure 3).

Quand, dans leurs actes pédagogiques, les formateurs font-ils intervenir


un objectlf qui tienne compte de la réalité cérébrale muhisensorielle ?

3) Le corpus callosum, ou corps calleux, qui relie les deux hémisphères,


est totalement myélinisé vers la dixième année. I1 joue un rôle très important
dans la fine coordination des mouvements des membres.
La myélinisation commence à l’extrémité postérieure du corps calleux,
dans l’aire visuelle, et se propage d’arrière en avant, vers les lobes frontaux.
Ce n’est que lorsque le processus est suffisamment avancé pour relier les
deux hémisphères dans leur totalité que les tâches complexes d’abstraction
pourront être réalisées.
Le processus peut être plus lent chez certains enfants (26). La différence
entre un enfant dit a retardé )) et un enfant dit (( doué )) consiste dans le temps
qu’il faudra à chacun pour assimiler une information et l’accommoder. Ce
temps peut vari‘er de trois mois (pour l’enfant doué) à un an et demi, et
même deux ans, pour l’enfant retardé(27). D’autre part, les filles et les
garçons à onze ans n’ont pas la même poussée cérébrale : les filles auraient
une poussée de croissance cérébrale deux fois plus forte que les garçons. A
quinze ans, ce serait l’inverse.
I1 s’agit donc d’adapter les contenus des programmes et les pédagogies
pour qu’aucune catégorie d’apprenants ne se décourage ou ne se démobilise
face à des activités scolaires qui ne correspondent pas à leurs aptitudes. De
même, puisque le développement cérébral ne se déroule pas de façon régulière
mais par poussées suivies de paliers, la pédagogie devrait s’adapter aux
périodes de ralentissement pour consolider les connaissances, développer un
apprentissage expérienciel, un enseignement par tutorat, etc.
II est donc essentiel de tenir compte du fait que le développement

(26) Cf. LURIA(1973).


(27) Cf. WABER(1982) et EPSTEIN(1978).
Ceweau(x) et information 57

pariétal

lobe occipital

/”
1 . Rétine Transmission de l’information
2. Corps genouillé latéral
3. Cortex visuel primaire Perception des éléments simples (lignes,
taches de couleur ... )
4a. Cortex visuel associatif Perception des formes complexes et couleurs
4b. Cortex pariétal Relations spatiales, position d’un objet dans
l‘espace
4c. Cortex temporal Traitement de l’information dans son ensemble

L‘architecture cérébrale représentée ci-dessus ne doit pas faire oublier la complexité des
mécanismes cérébraux, en particulier le rôle des couches sous-corticales et du cerveau hormonal
dans le traitement de l’information.

Figure 3. Le chemin de l’information visuelle au niveau cortical


(d’après Mishkin et Appenzelle, 1987)
58 Notre cerveau aujourd’hui
neurologique de 1’apprenantest un critère indispensable sur lequel construire
une pédagogie, et que le stade de développement, à un âge donné, peut varier
d’un enfant à l’autre.

4) Les stades du développement neurologique sont (28) :

- Le stade sensori-moteur, de O à 18 ou 24 mois, qui correspond au passage


d’une activité réflexe à une activité volontaire. Neurologiquement, c’est
une période d’activité intense.
Les changements neurologiques correspondant à l’évolution du compor-
tement pendant ceis deux premières années consistent essentiellement en une
poussée du lobe préfrontal et des zones associatives permettant à l’enfant
de relier certaines perceptions entre elles - en particulier d’identifier
l’orientation d’un son, de reconnaître la voix de sa mère et de discriminer
les sons verbaux des sons non-verbaux. Le développement du corps calleux
est très rapide: composé de 13 O00 fibres à la dixième semaine fœtale, il
en comporte ... 144 millions à l’âge de cinq mois ; cette croissance est liée
au développernent des structures avoisinantes. La myélinisation de ce
puissant faisceau de fibres se poursuit tout au long du premier stade
piagétien, reliant des zones associatives visuelles et motrices, et permettant
la coordination de l’œil et des mains. L‘action combinée du lobe préfrontal
et des zones associatives permet l’intériorisation des moyens d’action dont
Piaget date le début vers le quinzième mois.

- Le stade pré-opératoire, de 2 à dans: caractérisé par les fonctions


sémiotiques et l’utilisation des signifiants - aussipar signes ou symboles,
mais l’incapacité de maîtriser des opérations réversibles.
Neurologiquement, de deux à six ans, on note plusieurs changements
importants. Le lobe préfrontal (utile pour l’anticipation des gestes et leurs
conséquences), et les zones de réception auditive se développent de façon
considérable. Le faisceau arqué, reliant la zone de Wernicke (compréhension
du langage) et celle de Broca (production du langage) est myélinisé.
Le cortex n’est pas seul à se développer ; les couches sous-corticales, et
en particulier les noyaux thalamiques, continuent à se développer et permet-
tront à l’enfant d’affiner sa motricité.
Mais, ne nous y trompons pas: la biologie de l’acquisition du langage
reste un mystère presque total. Si l’anatomie et la physiologie des systèmes
nerveux périphérique et central correspondant à la réception et la production
du langage sont mieux connues, il n’en reste pas moins que personne,
actuellement, n’est encore en mesure de dire comment les deux domaines
sont reliés l’un à l’autre.
Le modèle fonctionnel qui pourrait expliquer l’itinéraire du neurone à
la phrase (ou vice versa) reste encore à construire. Comme le suggère un

(28) Cf. PIAGETet INHELDERpour la description des différents stades. Cf. aussi, dans
la troisième partie, le tableau du développement chronologique du cerveau humain et des
activités cérébrales correspondantes.
Cerveau(x) et information 59
auteur, les fonctions cérébrales ne correspondent sans doute pas à nos
concepts ou à notre vocabulaire (29)...

- Le stade des opérations concrètes: (ce sont des actions intériorisées,


réversibles, qui s’articulent en systèmes d’ensemble et portent sur des
objets) correspond à la tranche d’âge de huit à douze ans. I1 est caractérisé
par une capacité de l’enfant à objectiver, a maîtriser les opérations logico-
mathématiques et la sériation; un peu plus tard, il maîtrisera les
opérations infra-logiques.
Neurologiquement, ce développement correspond à un enrichissement
des zones associatives visuelle, auditive et motrice et à un développement
plus lent, mais continu, des lobes frontaux. Ceux-ci, à la fin de leur
développement, occuperont un quart de volume du cerveau (30).
Le changement biologique intervenant dans cette période - il est l’objet
de théories divergentes parmi les biologistes et les psychologues - joue
indéniablement un rôle important dans la façon dont l’enfant bénéficiera de
l’expérience et de son interaction avec l’environnement.

- Le stade des opérations formelles et de la pensée hypothético-déductive


(I I / 12 ans à 14 ou 15 ans) est pour Piaget le dernier stade de dévelop-
pement cérébral.
Tous les adultes ne parviennent pas à ce stade. Aux États-Unis, 30 %
de la population adulte atteindraient ce niveau de développement men-
tal (31).
Les raisonnements déductifs ou inductifs, les opérations portant sur des
abstractions ou des énoncés généraux sans support matériel feraient appel
presque exclusivement aux zones cérébrales non spécifiques associatives (qui
couvriraient 80 % du cortex) et très peu aux zones dites de projection, c’est-
à-dire primaires.
Les structures correspondant à la programmation et la vérification des
informations seraient localisées dans les régions antérieures des deux hémis-
phères, antérieurement au gyrus précentral, et dans les zones pariétales.
Le système de planification serait relié au cortex moteur (aire 4 de Brod-
mann), lui-même relié à la moelle et aux muscles.
L‘explication de l’arrêt du développement cognitif chez certains adultes
serait la suivante : la construction d’un cerveau d’adolescent par-dessus un
cerveau d’enfant dont le développement ne s’est pas déroulé normalement,
ne peut que mener à une situation de sous-développement cognitif, «car
chaque stade est préparé par le précédent (32) ».
A ceci, il faut ajouter la contribution de la neuro-endocrinologie qui nous
indique que la sécrétion d’hormones intervient pour une large part dans le
développement du cerveau et de sa maturation. Les différences individuelles

(29) Cf. BULLOCK(1965).


(30) Cf. LURIA(1973a).
(31) Cf. EPSTEIN(1978).
(32) C’est la thèse d’EPSTEIN et de PIAGET, a laquelle n’adhère pas WALLON.
60 Notre cerveau aujourd’hui

seraient établies très tôt dans la vie de l’individu: les âges de un et quinze
ans étant cruciaux pour les garçons, et ceux de un, neuf et onze ans pour
les files (33).
Le développement harmonieux des fonctions supérieures corticales de
l’apprenant dépend donc du déroulement harmonieux des étapes anté-
rieures ;étapes que les systèmes éducatqs devraient établir en toute cohérence
avec le fonctionnement cérébral.
Plusieurs recherches récentes semblent confirmer que le développement
cérébral ne s’arrêle pas à l’adolescence mais se poursuit au-delà du stade
des opérations formelles.
Un symposium sur les opérations post-formelles à l’université de Harvard
en 1981, a posé les bases d’une révision de la notion de cognitivité,
d’abstraction, et de système général de pensée chez l’adulte, Cette recherche
pourrait contribuer à une meilleure compréhension du fonctionnement de
l’individu dans le monde d’aujourd’hui (34).

3. NOS DEUX HÉMISPHÈRES : DEUX GESTIONS

La distance qui sépare la carte des aires corticales établie par Brodmann
en 1909 et les soixante cartes contenues dans l’admirable ouvrage de
Hampden-Turner en 1981, illustre l’évolution non seulement des techniques
d’observation et d’analyse, mais aussi celle des conceptions et des théories
relatives à la nature de la pensée.
D’un côté, on lit sur la carte de Brodmann la fragmentation, la réduction,
la compartimentation très nette des aires et des fonctions cérébrales. De
l’autre, l’accent est mis sur la cohérence, la connectivité, la structuration et
l’organisation complexe du cerveau. D’une représentation bidimensionnelle
de la réalité cérébrale qui, nous le savons maintenant, est multidimension-
nelle, on passe, chez Hampden-Turner, à une toute autre conception des
fonctions cérébrales ; le niveau physiologique n’étant qu’un parmi les neuf
niveaux d’interprétation que l’auteur distingue (35).
On assiste à une redéjhition de la notion de fonction, qui devient globale
et implique une grande variété de composantes.
Les premières expériences portant sur les deux hémisphères furent
réalisées à partir de cas pathologiques (lésions, tumeurs, traumatismes) et
conclurent à une relation très nette entre l’hémisphère gauche et le langage
d’une part, et entre l’hémisphère droit et les relations spatiales d’autre part.
L‘appellation hémisphères dominant et non-dominant est révélatrice du rôle
attribué au langage verbal (36).

(33) Cf. FALKER


F., cité par WABER,op. cit.
(34) Cf. COMMONSet al. (1984).
(35) Cf. HAMPDEN-TURNER (1990).
(36) L‘hémisphère droit a été considéré, en Occident, comme passif et inférieur à
l’hémisphère gauche jusqu’aux recherches de l’équipe de Roger SPERRYsur les cerveaux
dédoublés. Cf. JAKOBSON R. et WAUGHL. (1980), p. 45 et suiv.
Cerveau(x) et information 61

Peu à peu, on réalisa des expériences destinées à déceler le fonctionne-


ment mental dans l’un et l’autre hémisphères: les activités de calcul,
l’écriture, la parole, la catégorisation, la discrimination, la sélection, la
compréhension sémantique. .. sont généralement reconnues comme étant
spécifiques de l’hémisphtre gauche. Lorsque celui-ci est endommagé, des
troubles de syntaxe, de dénomination, de perception de séquences apparais-
sent. Cet hémisphère serait lié à un type de pensée linéaire, orientée vers
l’avenir (37).
Le langage stéréotypé, les sons non-verbaux, les mélodies, les bruits, les
rythmes, les relations spatiales, la compréhension intuitive... sont les carac-
téristiques de l’hémisphère droit, telles qu’elles furent révélées par les
expériences de laboratoire et les opérations chirurgicales de commissurec-
tomie (section du corps calleux) sur des sujets occidentaux.
Lorsque l’hémisphère droit est endommagé, on note soit la disparition
des troubles de la perception périphérique, de l’intonation, de l’orientation
spatiale, ou des changements d’humeur.
Diverses recherches confirment l’autonomie fonctionnelle et la spéciali-
sation des deux hémisphères et, surtout, Z’intégration de l’un et l’autre
hémisphères dans diverses fonctions cérébrales (38). Aussi intéressantes et
révélatrices que soient les recherches portant sur le cerveau (( dédoublé ))
(«split brain ))),il faut admettre que ces observations sont effectuées sur un
cerveau dont on a provoqué une inactivation temporaire et partielle.
De même, les recherches portant sur des cas cliniques et les cas de
dysfonctionnement ne peuvent établir avec certitude, et par déduction, le
fonctionnement d’un cerveau normal. Heureusement, d’autres techniques
permettent actuellement d’explorer un cerveau normal, in vivo et in situ.
Depuis quelques années, les préoccupations des chercheurs en neuros-
ciences concernent le développement et la régénération des connexions
neuronales ; l’ontogenèse des comportements et la neuropsychologie ; les
approches comportementales du fonctionnement cérébral ; l’évolution du
concept neuronique et synaptique ; les effets des neurotransmetteurs ; les
implants et la récupération fonctionnelle ; la neurobiologie de la cognition ;
la distribution de l’activité du cortex cérébral liée à l’activité mentale, etc.
Les recherches récentes, dans leur ensemble, permettent d’aborder d’au-
tres aspects du fonctionnement du cerveau, en particulier de préciser
l’asymétrie cérébrale, de a réhabiliter )) le cerveau droit, de souligner la
complémentarité des deux hémisphères ~ et non plus leur opposition
(figure 4) - de faire apparaître la connexion de diverses aires pour une
activité donnée et l’imbrication des couches sous-corticales et corticales.
Ces aspects seront étudiés ici. Les activités langagières seront prises
comme exemple significatif des deux gestions spécifiques de l’hémisphère
gauche et de l’hémisphère droit.

(37) Cf. DEGLIN


V.L. (1976).
(38) Cf. SPERRY
R.W. et GAZZANIGA
M.S. (1967).
62 Notre cerveau aujourd’hui

Figure 4. Les deux hémisphères vus par l’hémisphère droit de l’auteur


Chaque hémisphère contient le germe de l’autre. Ils sont complémentaires et
non opposés. Comme dans le symbole du Tai Chi, les zones claire et sombre sont
en interrelation dynamique l’une par rapport à l’autre. La dominance de l’un
équivaut à la suppression de la différence et à la négation de la réalité.
La représentation ci-dessus de la complémentarité de nos deux hémisphères et
des aspects de notre gestion mentale est inspirée de l’ouvrage de C. Hampden-Turner
où l’auteur trace une cartographie historique du psychisme et de la cognition.
Cerveau(x) et information 63

L‘asymétrie des deux hémisphères


Cette caractéristique du cerveau humain est connue depuis longtemps.
La première communication faite publiquement sur le sujet est celle de Marc
Dax, à un Congrès médical, à Montpellier, en 1836. Mais cette contribution
de Dax n’eut aucun retentissement à l’époque.
Après un long intérim, on a assisté à un renouveau des recherches sur
l’asymétrie anatomique des deux hémisphères entre les années 1970 et 1980.
La question à laquelle les neurophysiologistes ont tenté de répondre, a
essentiellement été celle de savoir si l’asymétrie anatomique était la cause
ou l’effet de l’asymétrie fonctionnelle. On se doute qu’à l’origine de ce
questionnement se plaçait l’éternelle question de découvrir la part de
l’hérédité dans les différences entre individus...
Trois hypothèses tentent d’apporter une explication : l’une anatomique,
une autre génétique, une autre relationnelle.
La première, l’hypothèse anatomique, semble confirmée, et de nom-
breuses variations individuelles sont attestées en relation avec la prédomi-
nance manuelle. Les cellules de l’hémisphère gauche seraient plus différen-
ciées, auraient tendance A se connecter directement, les fibres connectrices
étant moins nombreuses.
Dans l’hémisphère droit, les cellules seraient moins diversifiées et les amas
de cellules reliés par des faisceaux de fibres isolées. L‘asymétrie interhémi-
sphérique est plus accentuée chez les hommes que chez les femmes, ainsi
que l’asymétrie de la vascularisation. Certains esprits ont cru pouvoir
conclure à des différences dans les capacités cognitives entre les deux sexes...
Certaines différences dans le développement des filles et des garçons devraient
certes rendre les éducateurs attentifs. A l’âge adulte, le jeu des influences
environnementales, probablement, aplanit ou accentue les différences.
Dans les couches sous-corticales, est signalé (( le peu de différence entre
le cerveau de l’homme et de la femme: un petit noyau hypothalamique,
apanage du mâle, quelques neurones contenant de la vasopressine )) (39)...
La seconde hypothèse, l’hypothèse génétique, est peu convaincante. Un
ouvrage publié conjointement par un généticien de l’évolution, un neuro-
biologiste et un psychologue, permet de faire le point sur la ((montée du
déterminisme biologique )) et ses dangers (40).
On sait que l’asymétrie structurale existe avant la naissance, qu’elle se
forme durant la gestation et qu’elle est sous-tendue par l’asymétrie des
rythmes de croissance. Mais rien ne permet d’affirmer ce que signifient les
différences observées dans les fonctions de l’un et l’autre hémisphères. I1
semble surtout évident qu’en ce qui concerne le langage, on puisse surtout
parler d’une actualisation post-natale d’un programme génétique de prédis-
position langagière et que (( l’inné, en l’occurrence, n’exclut pas la nécessité
d’un apprentissage )) (41).

(39) Cf, GESCHWINDN. (1974); WITELSONS. (1980) ; GURet al. (1980).


(40) Cf. LEWONTINR.C. et al. (1985).
(41) Cf. GALABURDAA.M. (1985); ROCH-LECOURS et al. (1984).
64 Notre cerveau aujourd’hui
L’hypothèse relationnelle, selon laquelle la latéralisation des fonctions
cérébrales se développe en fonction de l’environnement dans lequel vit
l’enfant, est de plus en plus largement admise.
Pour le monde de la formation, cela signifie que le type sensoriel et le
style d’apprentissage se développent en fonction des influences éducatives
reçues. L‘un des facteurs environnementaux essentiels est le langage, et en
particulier l’écriture. Des expériences faites par A. Roch-Lecours (Montréal)
et ses collaborateurs sur des sujets illettrés non-scolarisés et des sujets
scolarisés ont permis d’étudier les différents scores des deux hémisphères,
chez des êtres sains neurologiquement et chez d’autres dont l’hémisphère
droit ou gauche était lésé.
La dominance cérébrale gauche semblerait se confirmer dans l’ensemble,
avec un écart moins grand pour certains aspects de la fonction linguistique,
comme l’accès au lexique. Les auteurs, toutefois, font une remarque
d’importance sur le lien entre scolarité, analphabétisme et malnutrition. (( I1
n’est pas exclu qu’une maturation cognitive générale liée à la scolarisation
soit, plus que le phénomène spécifique lui-même de l’alphabétisation, en
cause dans l’actualisation des latéralisations fonctionnelles cérébrales ; il n’est
pas exclu, par ailleurs, que la malnutrition puisse interférer avec le dérou-
lement de certains programmes génétiques. ))
Sandra E Witelson, qui a étudié la très abondante littérature sur l’asy-
métrie cérébrale, conclut que, dans presque tous les cas, il y a corrélation
entre l’asymétrie morphologique et l’asymétrie fonctionnelle. L‘asymétrie est
moins prononcée ou inversée chez certains gauchers, mais la difficulté devant
laquelle on se trouve pour définir la gaucherie de façon catégorique rend
les études chiffrées sans portée générale. Witelson estime, malgré tout, que
l’hypothèse selon laquelle l’asymétrie neuro-anatomique est un substrat de
l’asymétrie fonctionnelle, est en grande partie démontrée.
D’autres recherches ont examiné les domaines suivants :
- les relations entre la prédominance de la main gauche, la dyslexie, le

bégaiement et les désordres du système immunitaire et hormonal ;


- les avantages des gauchers dans le traitement des stimuli auditifs et

musicaux ;
- les différences au niveau du métabolisme dans les deux hémisphères

pendant des activités cognitives, chez les droitiers, les gauchers, hommes
et femmes.
D’après ces recherches, il semblerait exister une tendance à une moindre
différenciation entre les deux hémisphères chez les femmes et les gauchers
et, chez les gauchers, un corpus callosum plus épais, reliant ainsi plus
fortement les deux hémisphères, suggérant une répartition différente des
activités dans l’un et l’autre hémisphères, et une représentation bihémisphé-
rique plus importante (42). D’autres recherches font apparaître la non-
spécificité des diffkrences de taille et de forme du corps calleux (cf. A. Kertesz
et al.).

(42) Sur l’asymétrie hémisphérique entre homme et femme, cf. aussi ZAIDEL D.W.
(1984) ; chez les gauchers, WITELSONS. (1980).
Cerveau(x) et information 65
En ce qui concerne le traitement des stimuli audit$., qu’il s’agisse de mots
ou de syllabes sans signification, la recherche confirme et précise l’implication
de l’hémisphère gauche pour les sons du langage et pour les stimuli familiers.
I1 semble, d’après Kimiira, que la ((rivalité)) des deux hémisphères se
placerait davantage au niveau perceptif qu’au niveau de la réponse (43).
La disposition asymétrique du cerveau humain serait très ancienne dans
l’évolution phylogénétique et dans le développement ontogénétique : Les
mécanismes de production sonore et les fonctions auditives de l’hémisphère
droit se révèlent beaucoup plus anciens que leurs équivalents dans l’hémi-
sphère gauche, lesquels assurent l’articulation du discours et la discrimination
des sons du langage à partir des traits distinctifs )) (44).
La dominance de l’oreille droite (hémisphère gauche) ou de l’oreille
gauche (hémisphère droit) a été étudiée par le professeur Tsunoda (Tokyo)
pour déterminer à quelles caractéristiques linguistiques chaque hémisphère
réagit de façon spécifique. Les résultats firent apparaître une latéralité de
la perception des sons chez les Japonais différente de celle des Occidentaux :
les voyelles, par exemple, sont perçues par l’hémisphère droit occidental et
par l’hémisphère gauche japonais ou polynésien. Ceci peut paraître surpre-
nant; mais il ne faut pas omettre de remarquer que les voyelles, dans la
langue japonaise, ont un poids sémantique en soi et sont significatives,
caractéristique qu’elles n’ont pas dans une langue occidentale où elles sont
le centre d’une syllabe. L‘influence de la langue maternelle sur la latéralisation
hémisphérique fut donc établie par Tsunoda, dont la recherche fit également
apparaître que les fonctions affectives avaient leur siège dans l’hémisphère
verbal pour les Japonais, au même titre que les fonctions logiques. Le lien
entre affectivité et langage est, d’après lui, spécifique des cultures japonaise
et polynésienne, alors que les cultures occidentales séparent les fonctions
logiques des fonctions affectives.
L‘aspect le plus remarquable de ces recherches est d’avoir souligné le rôle
de la langue maternelle dans la structuration de l’architecture cérébrale.

Réception et production de l‘intonation


Pour Elliott Ross, de l’université du Texas, l’hémisphère gauche est
responsable de ce que l’on exprime, et l’hémisphère droit de la façon dont
on s’exprime.
La perception des émotions, d’après les recherches de Ross, est contrôlée
par le lobe temporal supérieur droit, correspondant, dans l’hémisphère
gauche, à la zone de perception de la parole (Wernicke). L‘expression des
émotions est contrôlée dans le lobe frontal inférieur droit, correspondant,
dans l’hémisphère gauche, à la zone de production de la parole (Broca).
Les émotions sont transmises dans le langage par la mélodie, l’intonation,
le rythme, la hauteur, le tempo et les autres paramètres auditifs non verbaux.
La découverte de Ross est donc d’une importance capitale pour les ensei-

(43) Cf. KIMURAD. (1967).


(44) D’une hypothèse émise par deux chercheurs russes, Balonov et Deglin, cités par
JAKOBSON R. et WAUGHL. (1980).
66 Notre cerveau aujourd’hui

gnants de langues en particulier et, plus généralement, pour toute personne


impliquée dans une situation communicative.
Maintenant que les bases biologiques de l’affectivité commençent a être
mieux connues, on peut espérer que l’affectivité ne sera plus considérée
comme un phénomène à contempler de l’extérieur, ni comme un élément
de subjectivité souvent jugée peu crédible.. .
L‘affectivité, en tant qu’état réceptif et expressif, a sa place et son rôle
dans l’apprentissage comme nous le verrons plus loin.
La voie est ouverte à une conception générative de l’apprentissage. La
recherche suggère qu’un nouveau regard soit porté par les formateurs sur
leurs propres interventions méthodologiques.
De nombreux auteurs insistent sur la coopération hémisphérique (45).

<< L‘équilibre du pouvoir : confrontation ou coopération ? >>


C’est en ces termes que Justine Sergent de l’université McGill à Montréal,
présente le problkme de la latéralisation et de la spécificité des fonctions
cérébrales. Elle apporte un éclairage nouveau à l’étude des deux hémisphères,
en recadrant le problème de façon à tenir compte de l’influence des
caractéristiques des stimuli et de la méthode utilisée.
Elle suggère clue les études précédentes n’ont sans doute pas posé le
véritable problèm’e car l’opposition analytique/ holistique est un épbhéno-
mène, résultant d’’aspectsfondamentaux de l’entrée sensorielle et du traite-
ment cortical des stimuli. En effet, la mesure des réactions aux stimuli est
fonction de paramètres tels que la fréquence spatiale, la durée d’exposition
du stimulus et le type de tâche demandée au sujet.
Sergent démontre que les deux hémisphères sont capables de reconnaître
les visages (ce que la plupart des études précédentes réservaient à l’hémisphère
droit). Les deux hémisphères analysent. Les deux hémisphères sont en
mesure de percevoir les ensembles...
Où réside donc la différence?
D’après les expérimentations portant sur plusieurs modalités (vision,
audition, toucher), la différence fondamentale entre les deux hémisphères se
situe dans la sensibilité aux différents paramètres spatio-temporels de
l’information à traiter, et dans les aptitudes sensori-motrices à décoder
l’information.
L‘hémisphère droit traiterait l’information brève, l’image pauvre et/ ou
de grande dimension. I1 se chargerait des opérations plus élémentaires et
nouvelles (non familières). I1 servirait de cadre aux opérations de l’hémi-
sphère gauche qui, lui, se chargerait du traitement des détails, des informa-
tions plus petites, plus complexes, familières, et exigeant un temps de
traitement plus long (46).

(45) Cf. les recherches de BAKANP. (1969) ; BOCENJ. et al. (1972) sur I’hémisphéricité ;
COHEN R. (1969) slur les styles et profils d’apprcntissage; HARNETI D. (1974) sur
l’apprentissage d’une langue étrangère ; WITTROCKM.C. (1977) sur la mémoire, etc.
(46) Cf. aussi les recherches de KIMURAD. qui insiste sur les notions de coopération
et dominance complémentaire des deux hémisphères ; cf. GARDNER H. (1987).
Cerveau(x) et information 67

Souligner 1importanc.e des procédures méthodologiques et de la prise en


compte des caractéristiques de l’information donnée et du type d’activité
demandée, c’est ouvrir une voie essentielle à la réflexion pédagogique. Non
seulement est confirmée la nécessité d’aller du global à l’analytique, du
contexte au détail, du général au particulier, mais lesformateurs sont invités
à construire un programme de plein emploi pour le cerveau, sur la base de
la coopération des deux hémisphères.
La véritable relation entre les deux hémisphères est une relation de
complémentarité - et non d’opposition. La richesse de notre cerveau, et sa
vocation première, est d’apprendre à gérer la pluralité de nos ressources face
à celle du monde qui nous entoure ; ce monde qui nous construit, et que
nous construisons.
La notion de complémentarité n’est pas récente. (( Contraria sunt com-
plementa)) est la devise que Niels Bohr a choisie, après avoir découvert le
parallélisme entre la pensée orientale et la physique des quantas qu’il avait
élaborée.
Nous sommes équipés, grâce à notre cerveau, pour nous permettre de
vivre le cercle des changements infinis dont la réalité nous est révélée par
la science moderne, la science de l’infiniment subtil et de l’interdépendance
des éléments. Cet équipement, cet héritage, nous en sommes responsables.
Qu’en faisons-nous ? Ce questionnement - qui nous paraît fondamental -
sera présent tout au long de cet ouvrage.

Voir le voir, l‘entendre et le dire, et même... le penser et le vouloir

Grâce à une technique utilisant des isotopes radio-actifs, une équipe de


chercheurs danois et suédois a pu observer directement la topographie des
zones fonctionnelles du cerveau humain. Ils ont obtenu des idéogrammes
à partir de zones corticales de fixation et d’élimination du radio-isotope
Xénon 133.
Les images obtenues non seulement confirment la corrélation entre
certaines aires corticales et certainesfonctions cérébrales, mais donnent un
reflet assez exact de l’activité cérébrale pendant des activités langagières
courantes : écouter, lire, parler, compter...

Un fonctionnement dénsemble
Une des constatations frappantes que l’on peut faire à partir de ces
images, est que les deux hémisphères sont activés par les activités de langage,
et que l’hémisphère droit est loin d’être muet ou inactif lorsque le sujet parle,
écoute ou lit.
Les expérimentateurs ont constaté que la partie de l’hémisphère droit
correspondant à la zone de Broca dans l’hémisphère gauche, était activée
lorsque le sujet exprimait une idée, (( ce qui indique qu’elle contribue (même
de façon accessoire) à la synthèse finale et à la réalisation du langage parlé. ))
Autre constatation : la lecture dite (( silencieuse )) active l’aire de Broca
(production du langage) et l’aire motrice supplémentaire. Pour cette activité,
68 Notre cerveau aujourd’hui

comme pour toutes, plusieurs aires corticales sont donc activées, confirmant
les conclusions du ,grand neurologue russe, A. Luria : les processus complexes
de comportement ne sont pas vraiment localisés, mais répartis dans le
cerveau, et il s’agit essentiellement d’un fonctionnement de l’ensemble du
système (47).

Repos sensoriel et pauses structurantes


I1 est également surprenant de constater que, dans un état de repos
sensoriel, c’est-à-dire sans stimulation auditive, visuelle, ni tactile, et dans
une position de détente, on note une augmentation d’activation de la partie
frontale du cerveau de l’ordre de 20 à 30 % au-dessus de la valeur moyenne,
et de 50 % au-dessus de l’activation des zones occipitales et postérieures. Ceci
représenterait, d’après les auteurs, un état de vigilance ou de a conscience
éveillée O , permettant la programmation et la sélection des différents schémas
de comportement, - au détriment, en quelque sorte, des aires motrices et
sensorielles qui seraient même, sans doute, a inhibées ».
Que peut signifier une telle découverte pour ceux qui se préoccupent de
l’acquisition et de l’intégration des connaissances ? Sans doute, une réflexion
et une interrogation sur le rythme auquel sont soumis les apprenants, les
auditeurs, les spectateurs... lorsque l’information est donnée, envoyée, infli-
gée, sans que la moindre pause ne soit ménagée, sans que le moindre temps
d’intégration, de structuration, d’évocation ne soit prévu. Or - ce sera l’un
des éléments intégré dans le modèle pédagogique proposé dans les derniers
chapitres de ce livre - les pauses structurantes sont indispensables à la
formation des images mentales qui contribuent à la constitution de nos
systèmes de références et de valeurs.
Le silence est l’écrin de la pensée. La pause est indispensable à l’ancrage
de l’expérience dans le présent, le passé et l’avenir. Elle contribue à la mise
en relief de nos perceptions et à la densité de notre être.

Lëcoute prépare la parole


Les perceptions sensorielles, visuelles, auditives, tactiles, modifient l’idéo-
gramme cérébral et l’on obtient des images différentes selon que le sujet
regarde une image: mobile ou fixe, entend des mots ou un son neutre. Selon
les idéogrammes obtenus par l’équipe danoise, la seule écoute de mots active
non seulement la zone de la réception de la parole (Wernicke), mais
également la zone oculo-motrice, bien que le sujet ait les yeux fermés. Plus
les stimuli verbaux entendus sont complexes, plus la zone de Broca
(production de la parole) est activée.
Cette observation confirmerait l’importance d’étendre considérablement
les périodes d’écoute et de stockage de l’information, puisque les fonctions
de réception et de production de la parole sont physiologiquement reliées
et que l’audition n’est pas sans influencer la parole.

(47) Les expériences citées sont celles de N.A. LASSENet de ses collaborateurs à
Copenhague (cf. bibliographie) ; cf. aussi LURIAA.R. (1973b, p. 67 et suiv.).
Cerveau(x) et information 69

Rythme et motricité font vivre


Les chercheurs de Copenhague ont réalisé l’idéogramme de l’hémisphère
gauche d’un homme âgé dont le débit sanguin était faible, en-dessous du
débit normal. Le sujet reçut l’ordre (oralement) d’agripper rythmiquement
des objets avec sa main droite : en plus de l’augmentation d’activation des
zones corticales correspondant à l’audition et à la main, on a constaté une
augmentation du débit sanguin dans le cerveau tout entier.
Beaucoup l’ont déjà dit, mais il reste encore à l’intégrer dans la pratique
éducative et la règle de vie quotidiennes: rythme et motricité sont deux
facteurs indispensables pour notre organisme. Notre société moderne oublie
cet axe sur lequel notre équilibre se construit ou se reconstruit (48).

<< Neural >> et << mental ))

Les chercheurs de Copenhague ont également obtenu une image du


langage intérieur, révélant l’activité des régions frontales, notamment celle
de l’aire motrice supplémentaire. L‘expérience a été réalisée à partir d’un
langage automatique: pendant que le sujet compte de un à vingt, les aires
de production et de réception de la parole ne sont pas activées. I1 s’agirait
donc de la représentation d’un phénomène purement mental.
L‘effort fourni pour réaliser des opérations mentales de raisonnement ou
de mémorisation entraîne, toujours d’après les recherches de Niels Lassen
et de ses collaborateurs, une augmentation de l’activité cérébrale globale de
10 % environ.
Les recherches sur l’attention, poursuivies par P.-E. Roland, tendent à
prouver qu’il existe un mécanisme cortical de discrimination sélective qui
se manifeste lorsque le sujet est stimulé visuellement, auditivement, ou
kinesthésiquement. Ce mécanisme d’attention est anticipatoire, indépendant
de l’intensité et de la fréquence du stimulus, et dépend de la tâche accomplie.
L‘activité corticale d’attention serait localisée dans la partie préfrontale
supéromésiale du cortex. Toujours d’après ces recherches, l’hémisphère droit,
lors d’une tâche discriminative, manifesterait une plus grande augmentation
d’activité que l’hémisphère gauche (49).
Les mêmes recherches notent que la douleur, résultant d’une stimulation
moyenne, entraînerait une augmentation de 20 % du débit sanguin et de la
consommation d’oxygène - donc une augmentation de l’activité cérébrale
~ dans l’hémisphère controlatéral et dans les lobes frontaux.
D’autres recherches poursuivies à Copenhague, en Australie, en Alle-
magne, aux États-Unis, permettent de penser qu’il existe une base anato-
mique de l’intention : l’aire motrice supplémentaire s’activerait une seconde
et demie à deux secondes avant que le mouvement n’ait lieu. Cette découverte

(48) Cf. les travaux de P. GUBERINA (1985) sur l’importance du rythme dans le domaine
de la perception de la parole et des langues étrangères ; les fondements de la méthodologie
structuro-globale audio-visuelle in RENARDR. et VAN VLASSELAAER (1976) ; RENARDR.
(1970) ; cf. aussi JOUSSEM. et FRAISSE P.
(49, Cf. ROLANDP. (1982).
70 Notre cerveau aujourd’hui

est capitale aux yeux de J. Eccles, prix Nobel 1963, car elle révèle (( l’interface
entre l’esprit et le cerveau », l’endroit où les événements mentaux déclen-
chent des événements neuronaux D. Cette interprétation est - on peut s’en
douter - au centre du débat portant sur les relations du monde physique
et mental : l’activité mentale est-elle une force qui s’ajoute à celles que l’on
peut détecter par des mesures physiques, ou est-elle un aspect interne de
l’activité totale de l’homme, (( dont l’activité cérébrale (et corporelle) est
l’autre aspect, externe et complémentaire )) (50).
I1 faut, enfin, préciser que la cartographie cérébrale dont il vient d’être
question, reflète les réactions corticales sans être actuellement en mesure
d’explorer les couches plus profondes, c’est-à-dire les réactions émotionnelles
du sujet. Or, l’affectivité, comme la mémoire, est une réalité cérébrale totale,
c’est-à-dire qu’elle mobilise - comme le rythme - le cerveau tout entier.
Nous aiirons l’occasion d’y revenir.

4. MÉMOIRES SENSORIELLES ET IMAGES MENTALES

Enlevez la Mémoire et il n’y a plus d’homme. D


((

L‘homme ne vaut que par ce qu’il a mémorisé. D


((

(Marcel Jousse)
La mémoire, chacun en fait l’expérience constamment, est liée à l’identité
de la personne. Les pertes ou les troubles de la mémoire sont des facteurs
profondément dé-structurants pour la personnalité.
Apprentissage, mémoire et images mentales sont indissociables. Leurs
relations sont extrêmement complexes : certains apprentissages, devenus
automatiques, ne déclenchent plus une mémoire consciente ; d’autres, plus
élaborés, ne pourraient pas prendre place sans l’aide de la mémoire et le
rappel de situations ou d’expériences antérieures.
S’il est difficile - dans l’état actuel des recherches - de connaître
exactement la nature et le fonctionnement de la mémoire ainsi que ses
interactions avec d’autres processus mentaux, il n’est plus possible,
néanmoins, que des formateurs et enseignants ignorent encore un certain
nombre de recherches concernant les processus de mémoire déclenchés par
l’acte d’apprendre..
Les différentes études de la mémoire sont nombreuses et variées - aussi
variées que les définitions de l’acte mnémonique : philosophique, anatomi-
que, physiologique, moléculaire, pathologique, psychologique, sociologique,
etc.
L‘étude dynamique de la mémoire a plus de cinquante ans. Elle a
commencé avec K.S. Lashley dont les recherches révélèrent que la mémoire
était répartie dans le cerveau tout entier.
Vingt années plus tard, le physicien britannique Gabor découvrit l’ho-
logramme, et permit à Karl Pribram, de l’université de Stanford, puis à Paul
Pietsch, de l’université d’Indiana, de construire une théorie de la mémoire

(50) Cf. ECCLESJ., Sir (1983) ; cf. aussi GOLDBERG


G. (1985).
Cerveau(x) et information 71
d’après le modèle holographique dont il sera question à propos des images
mentales.
Des recherches récentes apportent un éclairage nouveau sur les définitions
de la mémoire neuronale et hormonale, ainsi que sur les différents processus
du codage, du stockage et du rappel d’actes mentaux (51).
Il s’agit ici de répondre, dans un premier temps, aux interrogations que
les formateurs et enseignants se posent et à celles qu’ils devraient se poser :
les différentes mémoires que l’apprenant utilise pour acquérir des connais-
sances nouvelles, à plus ou moins long terme ; les phases du processus : la
saisie, la rétention, le rappel; la double nature électro-chimique de la
mémoire ; l’oubli ; les facteurs favorisant ou inhibant la mémorisation ; la
consolidation, l’habituation, 1’entraînement à la mémorisation ; les compo-
santes affectives et culturelles de la mémoire.
En un deuxième temps, l’accent sera mis sur l’importance de connaître
le lien qui existe entre les mémoires sensorielles - visuelle, auditive, et
kinesthésique - et les images mentales : leur nature, leur formation et leur
rôle dans la vie mnémonique du sujet et, en particulier, de l’apprenant.

Nos mémoires : a trois et même a quatre dimensions

Le mot mémoire devrait toujours être employé au pluriel car la mémoire


dépend de la capacité qu’a une personne de combiner son expérience
extérieure et intérieure, et ceci, depuis sa naissance - et, sans doute, même
avant sa naissance.
Non seulement chacun d’entre nous code, stocke et déclenche ses propres
images ou son langage intérieur selon une stratégie qui lui est particulière,
mais chaque souvenir peut être considéré comme totalement nouveau, même
s’il se répète, car il appartient à tout un système de connexions qui ne peut
jamais être identique à ce qu’il a été. La mémoire est liée à l’identité de
chacun : à celle de l’apprenant aussi.
Cette simple réalité cérébrale, si elle était mieux connue, et s’il en était
tenu compte - pour soi-même et pour les autres - serait un élément de
libération pour beaucoup de ceux qui se croient prisonniers de leurs souvenirs
ou de ce qu’ils appellent leur manque de mémoire.

Mémoires et durées
Les recherches portant sur la localisation et le mode de structuration des
souvenirs font apparaître essentiellement trois types ou formes de mémoire,
correspondant à des durées de rétention différentes : durée immédiate, à court
terme, et à long terme.
Avant d’aller plus loin, une remarque importante doit être faite: la

(51) Cf. LURIAA.R. (1969 et 1973); POSTMANL. & KEPELG. (1970); FLORÈSC.
(1972); LABORITH. (1973 et 1981); CHAUCHARD P. (1974); RICATEAUM. (1976);
ROZENSWEIC M.R. (1976) ; BROWNM.E. (1977) ; PRIBRAM K. (1977) ; WITTROCK
M.C.
(1977) ; LORAYNEH. (1978); YOUNGJ.Z. (1978) ; LIEURY A. (1980) ; CHANCEUX
J.-P.
J.D. (1986)...
(1983) ; VINVENT
72 Notre cerveau aujourd’hui
mémoire ne peut être étudiée isolément de ce que Robert Ornstein a appelé
l’expérience temporelle, c’est-à-dire le sens qu’a l’individu de la durée, le
temps psychologique qu’il faut distinguer du temps physique de l’hor-
loge (52).
Ornstein distingue quatre types d’expérience temporelle :
- Le premier est le contact immédiat avec le monde, la succession des
(( maintenants D, selon l’expression de William James, la perception,

l’appréhension immédiate du moment qui passe.


Dans cet intervalle très court (3 à 4 secondes au maximum), les
informations sensorielles sont perçues, mais peu d’informations sont traitées.
Le sujet perçoit les intervalles, donc le rythme. Ornstein relie cette expérience
du temps présent à la mémoire à court terme.
- Le deuxième type est l’expérience de la durée, liée au souvenir du passé,

à la rétrospection. Cette expérience est plus cognitive que la précédente ;


elle est basée sur le traitement de l’information et reliée à la mémoire
à long terme.
- Le troisième type d’expérience temporelle correspond à l’expérience

individuelle et elle est déterminée socialement.


C’est une notion éminemment culturelle, également influencée par l’in-
terprétation philosophique, intellectuelle du sujet. Elle est reliée au (( deve-
nir D. L‘Occident, d’une part, et les cultures orientales ou indiennes, d’autre
part, sont à l’opposé les unes des autres dans cette catégorie: le premier
découpant le temps en unités précises, linéaires et définies. Les secondes,
moins orientées vers la technique, choisissent des unités de temps en rapport
avec leur rythme de vie («le temps de faire cuire un bol de riz n... ou G avant
le coucher du soleil D).
- La quatrième dimension temporelle est celle de la simultanéité et de la

succession. Mais que veut dire (( en même temps )) ?


Tout dépend de notre système de référence, répond Ornstein.
Les recherches, depuis une vingtaine d’années, semblent confirmer l’exis-
tence d’une unité dt: base de 0,l seconde qui pourrait servir de substrat neutre
au moment présent et, par conséquent, nous autoriser à parler de simul-
tanéité (53).
Cette conception du temps est à rapprocher des différentes formes de
mémoire discernées par les neurophysiologistes.
La rétention pendant une courte durée (une minute) correspond à la
mémoire immédiate. Elle est très réduite également quantitativement (7 ou
8 items).
La mémoire à court terme (M.C.T.) est de l’ordre de quelques minutes.
Certains auteurs ajoutent une mémoire à moyen terme (quelques heures).
La mémoire à long terme (M.L.T.) se mesure en jours, semaines ou
années.

(52) Cf. ORNSTEINR.E. (1975).


(53) Cf. STROUDJ.M. ; BYERSP. et CONDONW.S.
Cerveau(x) et information 73

Le formateur a surtout besoin de savoir qu’aucunefrontière n’existe entre


ces différentes mémoires et que très logiquement
~ l’une mène à l’autre.
~

De multiples opérations entrent en jeu dans la formation de la mémoire.


Selon l’hypothèse de McGaugh, chaque type de mémoire garantirait le rappel
pendant une période donnée, et la continuité apparente de la mémoire serait
assurée par des systèmes qui ne seraient pas liés les uns aux autres, mais
se chevaucheraient dans le temps (54).

La mémoire est partout et elle est changement


Ce que le formateur ne peut ignorer non plus, c’est ce que dévoilent
l’anatomie et la biologie de la mémoire. En effet, les chercheurs nous révèlent
d’une part que les couches sous-corticales et corticales sont impliquées dans
le processus mnémonique : la mémoire est distribuée ou dispersée ; d’autre
part, que les changements intervenant dans le cerveau, sont provoqués par
un double processus :
- Électrique, qui semblerait caractériser la mémoire à court terme (c’est

la seule à être affectée par l’électrochoc).


- Chimique, caractérisant la mémoire à long terme.

H. Laborit décrit longuement les (( circuits réverbérants )) (fermés et rétro-


actifs) qui caractérisent la mémoire à court terme, (( mémoire dynamique et
fonctionnelle »,processus (( plus biophysique )) ; alors que la mémoire à long
terme serait (( plus biochimique D, liée à la synthèse protéique.
Le système limbique joue un rôle fondamental dans l’établissement de
la mémoire (55). Luria, le célèbre neurologue russe qui a largement contribué
à mieux faire connaître la nature de la mémoire, a étudié pendant plus de
quarante ans les différents aspects du processus mnésique, au niveau
cellulaire, moléculaire et morphophysiologique. I1 opta pour un concept plus
précis que celui de la trace mnésique, à savoir la structure de l’activité
mnésique. Luria confirma le rôle du système limbique et en particulier de
l’hippocampe dans le stockage et la consolidation des impressions corticales
et dans le maintien des impressions provenant de l’expérience directe. I1 nous
éclaire surtout sur le rôle des aires corticales dans la structure de l’activité
mnésique :
- Le cortex hémisphérique gauche conserve les informations verbales.

~ Le cortex hémisphérique droit est responsable de la restitution des


informations spatiales et visuelles.
- La zone temporale gauche est spécifique de la modalité sensorielle audio-

verbale (audition des sons phonémiques, des séries de mots, des structures
verbales, etc.).

(54) Cf. LABORIT J.L. (1966).


H. (1981) pour les différents types de mémoire ; MCGAUCH
(55) Le système limbique comprend l’hippocampe (un (( lieu de passage P), l’amygdale,
l’aire septale, le tubercule olfactif, les noyaux antérieurs du thalamus, les corps mammillaires
de l’hypothalamus, le gyrus cingulaire, le gyrus hippocampique, le cortex enthorinal et le
lobe pyriforme; cf. LABORIT H. (1981).
74 Notre cerveau aujourd’hui
- La zone pariéto-occipitale gauche pour les synthèses simultanées (ce que
Luria appelle une activité (( gnostique »), et la nominalisation.
~ Le lobe occipital gère les souvenirs visuels.
- Le lobe pariétal est responsable de la motricité.
~ Les lobes frontaux sont indispensables à l’intention, la mémoire volon-
taire, la vérijkation et la réactivation des souvenirs (zones latérales de
l’aire préfrontale), l’orientation dans l’espace, la sélectivité, la conscience
(zones médianes).
L‘enseignant el. le formateur peuvent retenir avec profit la différenciation
des formes de mémoire et d’activités mentales liées à la mémorisation.
Les indications données par les neurologues devraient devenir des mots
clés pour construire une pédagogie d’exploration, de renforcement, de
consolidation, et d’entraînement de la mémoire.
Quant aux changements survenant dans le cerveau pendant une activité
mnémonique, ils sont de plusieurs natures: changements dans le taux de
l’ARN, dans la synthèse des protéines ; changements de structure des circuits
neuroniques : les dendrites et épines dendritiques se modifient ; changements
au niveau synaptique et post-synaptique.
Le message pour le formateur est essentiellement celui de la plasticité
du cerveau humain qui ne reste pas insensible aux influences et aux effets
des chocs, du stress, de la fatigue, du bruit, des médicaments ou de la
(ma1)nutrition ; plasticité d’un cerveau qui n’est jamais le même, quoi qu’on
pense des blocages, des incapacités et des stagnations de certains appre-
nants ...

Les étapes de la mémoire


Les responsables de formation et de l’information bénéficieront grande-
ment d’une vue claire sur les différentes phases de la mise en mémoire.
Les étapes de la mémoire : encodage, stockage, rappel et reconnaissance,
sont intimement liées au processus de l’apprentissage (prise d’information,
traitement et production). Les désordres de l’une vont toujours de pair avec
les désordres de l’autre.
Pour les non-spécialistes en neurobiologie, formateurs, enseignants et
parents, il est important de savoir que le substrat anatomique de la mémoire
appartient aux couches profondes du cerveau et aux couches plus récentes
(la mémoire est partout et nulle part). Les deux systèmes fonctionnels : axial
hippocarnpo-mamillaire-thalamique-hypothalamique, d’une part, et cortical
hémisphérique, d’autre part, interviendraient à des niveaux différents de
structuration du processus de mémoire :
- Formation et rappel (hippocampe et structures temporales).

- Stockage (cortex cérébral et formation réticulaire).

- Encodage (modifications post-synaptiques).

Le fait que ces systèmes ne sont pas exclusivement utilisés pour des
activités mnémoniques permet d’expliquer les (( interférences N et les
phénomènes d’oubli dus à des causes extérieures : chocs, situations
Cerveau(x) et information 75
nouvelles, stimulations nouvelles, ingestion de substances chimiques, ou
internes : émotions, déclenchement de souvenirs.
Les recherches en biochimie, bien que très spécialisées, peuvent
fournir aux non-spécialistes intéressés par les processus d’apprentissage
dds indications précieuses. Des arguments scientifiques semblent apporter
la preuve que l’inscription d’un événement ou d’un objet dans la vie
cérébrale a comme support un codage moléculaire et des modifications
chimiques.
Sans entrer dans les détails de l’augmentation du métabolisme de
1’ARN et des protides, il est important de souligner les facteurs chimiques
concomitants de l’apprentissage et de la mémoire, à une époque où les
interventions de nature chimique dans notre vie quotidienne et, en
particulier dans notre alimentation, augmentent dans des proportions
inquiétantes : certaines substances chimiques contenues dans les médica-
ments ou l’alimentation peuvent bloquer des récepteurs d’acides aminés
et bloquer également la transmission synaptique (56).

Qu‘est-ce que l’oubli ?


Les solutions que l’on peut suggérer pour résoudre les difficultés que
rencontrent les apprenants (et leurs maîtres), se trouvent dans une analyse
des problèmes eux-mêmes : l’oubli, quelles en sont les causes possibles ?
Comment consolider la mémorisation ? Quelle est la part des facteurs affectifs
et culturels dans la mémorisation ?
Les causes d’oubli sont à rechercher au niveau de chacune des étapes
mentionnées ci-dessus :
- La perception est insuffisante, la saisie de l’information incomplète, floue,

trop rapide. Des interférences peuvent avoir eu lieu: entre canaux


sensoriels (voir et entendre), ou dans une même modalité (écouter tout
en parlant).
~ L‘information est détériorée, non analysée, (( flottante », sans contexte,
non rattachée au système de connaissances ou de valeurs de l’individu.
Elle peut avoir reçu une connotation négative, jugée, inutile, sans intérêt.
- L‘«adresse» est erronée: le rappel, la récupération ne se fait pas.
L‘information n’a pus été connectée. On ne retrouve pas les conditions
d’enregistrement.
- L‘information n’a pas été re-connue.

- Un choc, une émotion très forte, un blocaze émotionnel (peur, stress,

angoisse...) a oblitéré, effacé la stimulation reçue.


I1 existe certainement de nombreuses autres causes : la créativité humaine
est incroyablement développée dans le domaine des oublis volontaires... ou
non.

(56) Cf. LYNCHG . et BAUDRYM. (1984) ; cf. aussi pour l’action de certaines substances
sur les cellules nerveuses, le glucose par exemple, l’article de CERAMIA. et al., Glucose
and aging, in Scientific American, vol. 256, no 5 (1987).
76 Notre cerveau aujourd’hui

Consolider la mémoire
La consolidation de la mémoire commence dès le premier contact avec
l’information. Plus la prise d’information est claire, précise, attentive,
motivée, orientée vers un but précis, plus l’analyse de l’information par le
sujet est profonde, et plus la rétention à long terme risque d’être grande.
Deux conditions essentielles sont à respecter : le temps et la méthode.
I1 appartient au formateur d’établir une suite d’interventions de conso-
lidation multiphase. Cela demande des méthodes efficaces, structurées,
progressives, programmées. Le neurobiologiste nous prévient que la simple
reproduction n’a pas grand effet...
C’est l’avis d’Henri Laborit, qui évalue à 30 % les neurones d’attention
qui ((ne répondent pas D, si le stimulus est répété sans variation. La
consolidation ne peut avoir lieu quand il y a habituation.
J.D. Vincent explique, de son côté, que (( lorsqu’un messager, hormone
ou neurotransmetteur, est libéré en excès ou de façon ininterrompue, les
récepteurs perdent leur aptitude à répondre: il se produit une désensibili-
sation o.
La mémoire à court terme est améliorée par la fréquence d’utilisation
et les répétitions mentales : les évocations ou images mentales dont il sera
question plus loin. Elle est entravée par les interférences, les similitudes dans
les catégories phonétiques et sémantiques.
La mémoire à long terme est améliorée par des pauses, des réactivations
à des moments favorables, les redondances, plusieurs points de vue, un
environnement agréable. Elle est entravée par les répétitions identiques,
l’anxiété, le stress, un environnement menaçant.
La mémorisation sera d’autant meilleure que l’information aura interpellé
le cerveau tout entier, sous-cortical et cortical, 1’être affect$ et cognitif:

La libération du souvenir
Le rappel, ou libération du souvenir, est un tout autre mécanisme que
celui de la saisie, de l’encodage et du stockage d’une information.
Les expériences de laboratoire, très éloignées des situations scolaires que
connaissent les apprenants et les enseignants, ne peuvent donner qu’une
indication ou une orientation, mais elles ne peuvent pas apporter de réponse
aux questions que se posent apprenants et formateurs devant le phénomène
de (( l’oubli scolaire »,du non-apprentissage et de la non-utilisation du savoir.
Citons pour mémoire les travaux de Paivio sur l’imagerie et son rôle dans
les différentes étapes de la mémorisation : encodage, stockage, rappel ; et de
nombreuses autres recherches soulignant l’effet positif des images vives et
claires dans le rappel ;l’impact de la charge sémantique du mot sur le rappel ;
la distinction des composantes spatiales et verbales dans l’acte de rappel,
l’interaction de l’image avec d’autres disciplines cognitives.
L‘importance du lieu où l’information est prise et stockée est connue
depuis l’Antiquité. Les orateurs grecs et romains utilisaient l’interaction
fructueuse des systèmes visuel et verbal pour se souvenir de leurs discours.
Nous avons gardé, dans notre langue quotidienne l’expression (( en premier
Cerveau(x) et information 77
lieu, en deuxième lieu : )) : c’est un reste de ce moyen mnémotechnique dit
méthode des (( loci ».
Les expériences d’Alan Baddeley, chercheur au Medical Research Coun-
cil de Cambridge (G.B.), ont confirmé l’importance que revêt le contexte
ou l’environnement dans lequel l’information est codée pour retrouver cette
information: le rappel est facilité si la personne retrouve les mêmes
conditions et le même contexte dans lesquels elle a encodé l’information.
Les récits de personnes qui ont été emprisonnées démontrent la façon
dont ces personnes ont surmonté l’épreuve terrible de la vie carcérale, grâce
à leur faculté remarquable de faire revivre les images du passé au moyen
de toute leur sensorialité : Henri Charrière, l’auteur de Papillon,
A. Soljenitsyne, le pianiste argentin Miguel A. Estrella, et bien d’autres
encore... Estrella raconte comment il a retrouvé par la mémoire motrice (celle
de ses doigts sur un clavier muet qu’on lui avait fait parvenir en prison),
le premier mouvement de la deuxième sonate de Chopin : a Tout d’un coup,
mon problème de mémoire avait disparu. Je pouvais reconstruire des œuvres
en entier par la mémoire digitale )) (57).

Le moule culturel
Le rôle des différents systèmes, visuel, auditif, moteur ou verbal, varie
selon les cultures.
Une étude menée en Australie, parallèlement auprès d’enfants aborigènes
et d’enfants de culture occidentale de six à seize ans, a fait apparaître une
différence de trois ans en faveur des aborigènes dans des épreuves de mémoire
spatiale. Alors que les enfants aborigènes réalisaient en silence le test - qui
consistait à replacer des objets fabriqués (ciseaux, dé, clé, etc.) ou naturels
(cailloux, plume, feuille...) - les enfants de culture occidentale nommaient
les objets et se parlaient à eux-mêmes. Leurs performances furent très
inférieures à celles des enfants aborigènes.
Judy Kearins, qui a mené l’expérimentation, semble confirmer l’existence
de deux systèmes séparés pour la mémoire visuelle et le raisonnement verbal.
Elle indique également l’influence du milieu et du langage sur le mode de
pensée et la mémoire. Elle précise, en effet, que les enfants aborigènes sont
élevés très librement, et qu’ils ne reçoivent qu’un nombre limité d’instructions
et de consignes verbales de la part des adultes... Ils utilisent dans une très
large mesure leurs stratégies visuelles et leurs facultés d’observation. On
n’exige d’eux ni qu’ils parlent, ni qu’ils écoutent. L’environnement familial
ne fait pas un usage intensif de procédés linéaires comme le langage (58).

(57) Cf. les travaux de Michel DENIS,chercheur au C.N.R.S. ; KOSSLYNS.M. (1980);


effet positif des images vives : SHEEMAN P.H. et NEISSERP.W. (1969) ; la charge sémantique
du mot : TULVING E. er al. (1965) ; les composantes spatiales et verbales dans le rappel :
BROOKL.R. (1968) et WITTROCK M.C. (1977) ; même condition et contexte : cf.
ESTRELLA M.A. (1983).
(58) GILLINGD. et BRIGHTWELL R. (1982).
78 Notre cerveau aujourd’hui

Les images mentales

Il sera question dans cette section de trois aspects concernant les images
mentales: leur nature, les conditions requises pour leur formation et leur
maintien ; leur rôle dans l’évocation mentale.

Nature des images mentales


Physiologiquement, on ne peut localiser l’imagerie mentale dans telle ou
telle partie du cerveau, mais on pense que l’image mentale utilise une partie
des circuits nerveux desservant la modalité sensorielle correspondante : la
motricité, la vision, l’audition, etc. (59).
I1 est donc important de bien connaître les domaines et les paramètres
correspondant aux canaux sensoriels de communication empruntés, ou
évités, de façon à être en mesure de les entretenir et de les élargir sans cesse
pour qu’ils ne s’affaiblissent ou ne s’atrophient pas.
Le domaine kinesthésique recouvre : les expressions faciales (mimiques),
corporelles (gestuelle), posturales, motrices, émotionnelles (externes et inter-
nes), tactiles.
Les paramètres kinesthésiques, importants à connaître afin d’être en
mesure de les développer, sont :
- densité, texture, malléabilité, élasticité, flexibilité, température, séche-

resse, humidité, viscosité, poids, pression, volume, forme, taille, nombre,


étendue, mouvement, inertie, statisme, dynamisme, absence, présence,
durée, intensité, leurs variations et inter-relations.

Le domaine auditif verbal comprend la voix et le langage structuré


(lexique, syntaxe, phonétique). Le domaine auditif non-verbal, souvent
délaissé dans le monde de l’éducation, comprend les bruits environnemen-
taux.
Les paramètres auditifs sont :
- amplitude, durke, rythme, hauteur, fréquence, tonalité, timbre, résonance,
tempo, continuité, discontinuité, association/ dissociation, position, dis-
tance, contraste, proximité, éloignement, nombre, symétrie, extériorité,
intériorité, mono/ stéréophonie... et leurs variations et inter-relations.

Le domaine visuel comprend une partie verbale (le code linguistique


lexical et morpho-syntaxique) et une autre partie non verbale (représentation
iconique, eidétique, picturale).
Les paramètres visuels sont :
- volume, taille, formes, couleurs, ombre, lumière, intensité, position,

orientarion, perspective, contexte, premier plan, arrière-plan, cadre,


distances, proportions, contrastes, mouvement, association/ dissociation,
stabilité, opacité, transparence, brillance, matité, netteté, symétrie... et
leurs variations, et inter-relations.

(59) Cf. SEGAL V. (1970); BOWERG.H. (1972); FINKE


S.J. et FUSELLA R.A. (1986).
Cerveau(x) et information 79

L‘une des caractéristiques des images mentales est qu’elles ont lieu après
laprise d’information, ou après l’événement capté par nos sens. Elles peuvent
être l’évocation d’une absence, ou de la transformation, d’un souvenir. Elles
peuvent être également déclenchées par un ensemble de facteurs externes
et/ou internes. L‘imagerie mentale a une structure et elle est structure. Elle
n’est pas le résultat d’une conscience existentielle. Elle est construite par un
processus cérébral complexe.
La comparaison ou l’analogie qui semble se rapprocher le plus du
processus de formation de l’image mentale est actuellement l’holographie,
inventée par Denis Gabor vers 1948. Dans cette technique de photographie
sans lentille, fondée sur la propriété d’interférence des ondes courtes, l’image
est obtenue grâce à un filtre optique qui gèle l’onde visuelle. La structure
obtenue est lue, c’est-à-dire reconstruite, grâce à une source lumineuse
cohérente. Pour K. Pribram, la perception et l’imagerie mentale font appel
à une information distribuée », selon un processus tel que chaque partie
ou élément contient la totalité de l’information, quelle que soit sa localisation.
I1 est intéressant de noter que le physicien David Bohm utilise l’analogie
avec l’hologramme pour expliquer la notion d’ordre (( impliqué », selon
lequel le monde réel (pour Bohm, le ((non manifeste))), est un tout
(( enveloppé )) dans chacune de ses parties (60) .

La formation des images mentales


Pour que l’imagerie se forme, il faut que certaines conditions intervien-
nent : la première est - naturellement - l’absence, l’éloignement de l’objet
dans le temps et dans l’espace.
Proche de cette première condition, est le facteur temporel : pour
produire une image mentale, une certaine durée est requise, qui variera selon
les sujets, les stimuli, le mode de présentation du stimulus, etc.
Une autre condition est que le sujet ait conscience que les images ne sont
pas la réalité (sauf dans le rêve où elles seraient confondues avec la réalité).
Les images se forment, pour la plupart d’entre nous, lorsque nos yeux sont
fermés, et que l’activité d’éveil ou l’attention sélective diminue. L‘état de veille
passif ou de relaxation, qui se traduit par un comportement occipital au
rythme d’amplitude moyenne de type alpha, est un état favorable pour la
formation d’images mentales.
La synergie est un autre facteur facilitant l’évocation mentale: une
sensorialité en déclenche une autre. L‘expérience de Marcel Proust est bien
+
connue : à partir d’une sensation gustative (madeleine thé), il retrouve des
images visuelles, auditives, kinesthésiques, des émotions, des pensées, et une
joie (( extra-temporelle ».
I1 semble également qu’une passerelle, un lien biologique entre l’image
et la réalité, soit établi. Ce lien est celui de l’affectivité. Les émotions, les
sentiments interviennent pour que l’individu re-connaisse, identifie, associe,
son expérience nouvelle et son expérience passée.

(60) Cf. PRIBRAM


K. (1977), p. 384 ; cf. CAPRAF. (1985), citant BOHMet WEBERR.
(1988).
80 Notre cerveau aujourd’hui
(( Pour imaginer, il faut avoir déjà une expérience (...) pour associer

différemment ce que vous avez déjà appris )) écrit Henri Laborit.


I1 n’y a pas d’images mentales sans coloration affective, car dans
l’imagerie, les associations appartiennent à l’individu qui en dispose libre-
ment, sans l’intervention des (( lois )) de l’analyse consciente. Serait-ce là
l’explication de l’appartenance propre à chacun de nous de son imagerie
mentale qu’on ne peut partager qu’avec celui qui se trouve dans la même
modalité? Un auteur que l’on apprécie est celui avec lequel on partage non
seulement des convictions, une argumentation, une démonstration, mais
surtout l’imagerie. Chez Mark Twain, les images spatiales que le lecteur
reconnaîtra seront essentiellement visuelles et auditives. L‘espace chez Kafka
est (( ressenti D ; il appartient au domaine kinesthésique. Quant à l’imagerie
de Saint-Exupéry, elle est tout à la fois spatiale kinesthésique, tactile,
olfactive, auditive...
La formation ou la (( génération )) des images mentales évoque d’autres
aspects du monde de l’imagerie: la durée du maintien et la prégnance de
certaines images. Dans ce domaine où les interactions sont extrêmement
nombreuses, la recherche est en mesure d’apporter déjà de précieuses
indications, par exemple sur les corrélations entre la nature du texte lu,
l’activité d’imagerie du lecteur, et son temps de lecture (61).

Rôle des images mentales


A cause des similitudes existant avec les mécanismes perceptifs corres-
pondants, l’imagerie mentale peut servir à modifier la perception.
Certaines techniques de visualisation utilisent les images mentales pour
permettre à la personne de découvrir et de mieux gérer ses propres ressources.
I1 est, par exemple, possible de changer la tonalité d’une image auditive
interne ou de varier la taille d’une image visuelle interne et de changer du
même coup l’émotion, l’attitude ou le comportement correspondants. Une
image plus nette, plus vive produira des sentiments plus forts ; inversement,
des paroles qu’on se répète ou qu’on entend intérieurement de plus en plus
bas deviendront rnoins obsessionnelles et moins (( conscientes )) ou pré-
sentes (62).
L‘importance des images mentales dans notre vie quotidienne est indé-
niable. Chacun de nous, s’il est quelque peu attentif, partage l’expérience
proustienne quotidiennement, plus ou moins fugitivement, plus ou moins
intensément. I1 semble qu’aucun être humain ne puisse vivre sans images
mentales, mais celles-ci prennent parfois, chez certaines personnes, une
importance plus grande que les expériences sensorielles elles-mêmes en
provenance de l’environnement qu’elles remplacent, oblitèrent ou déforment.
(( Nous vivons et mourons de nos images )) écrit C. Singer.

Au-delà de son rôle structurant pour la personnalité et l’identité,


l’imagerie mentale a donc un rôle fonctionnel d’aide à la mémorisation. Les

(61) Cf. PROUSTM. (1954), p. 234 ; LABORIT


H. (1980) ; DENISM. (1982).
(62) BANDLER R. (1985).
Cerveau(x) et information 81

procédés mnémotechniques, rappelons-le, sont entièrement basés sur l’ima-


gerie mentale, visuelle ou auditive, plus rarement kinesthésique.
Allan Paivio a souligné trois aspects des images mentales susceptibles de
faciliter le rappel :
- une image interactive associant deux mots ou plus ;
- l’aspect concret des mots ;

- la représentation imagée de l’objet ou du concept.

D’autres expérimentateurs ont souligné que :


- plus l’image est vive et claire, colorée, précise, meilleur est le rappel,
- l’organisation contextuelle facilite l’association des éléments entre eux,

- l’organisation subjective, par le sujet lui-même, des paramètres de


l’information (signification et clarté) est aussi un élément favorisant le
rappel.

Une autre fonction des images mentales est celle de permettre l’exercice
mental, en utilisant à la fois le processus de rétroaction (feedback) et celui
de proaction (feedforward) : on se représente de manière vivante une scène,
une action que l’on a décrite ou que l’on va vivre. Les images sont parfois
plus efficaces dans le raisonnement que le langage verbal.
Le facteur spatial de l’imagerie apporte une aide précieuse à la résolution
de problème, en permettant de construire, par exemple, une déduction
logique ou de résoudre des problèmes d’inclusion de classe.
Selon H.J. Jerison, chercheur à l’université de Californie, au cours de
l’évolution de l’espèce humaine, le langage se serait développé non pas pour
contribuer à la communication mais à l’imagerie. Pour Jerison, le langage
est un système (( supersensoriel 1). (( C‘est dans l’imagerie partagée )) (un cri,
un bruit, une voix évoquent un lieu, un événement, une situation, un objet),
(( plutôt que dans la communication dans le sens où on l’emploie habituel-

lement, que j’identifierais le commencement de la parole et du langage...


Plutôt que de diriger leurs actes, nous avons besoin du langage et nous
l’utilisons pour faire des récits et faire naître des images complexes chez nos
lecteurs et nos auditeurs H (63).
Mais surtout, les images mentales jouent un rôle fondamental dans la
créativité. Einstein, interrogé sur la façon dont il procédait dans sa pensée
mathématique, répondit qu’il formait des images de type visuel, quelques-
unes de type (( musculaire )) (kinesthésique), et (( les mots, pour autant qu’ils
interviennent », purement auditifs (64).
Quant au chimiste Kekulé, ce serait en voyant dans un rêve l’image d’un
serpent qui se mordait la queue, qu’il aurait découvert la structure de la
chaîne fermée du benzène.

Soulignons, enfin, une autre caractéristique des images mentales : c’est


d’avoir (( la vie dure ))...Voici450 ans que Copernic nous a appris que la Terre

(63) JERISONH.J. (1976).


(64)HADEMARDJ. (1954).
82 Notre cerveau aujourd’hui
tournait autour du soleil... et nous parlons encore du ((lever)) et du
(( coucher )) du soleil...

Serait-ce... que nous préj2rons les images à la réalité 3..

Un mécanisme commun

Mémoires et images mentales semblent résulter de mécanismes voisins


ou communs : association ou connectivité.
Les unes et les autres ont une structure et elles sont structures.
Elles sont une représentation dans l’organisme d’un élément ou d’un
phénomène qui provient de l’environnement.
Elles ont une double dimension :spatio-temporelle.
Elles ont un rôle essentiel dans la constitution de l’identité, de l’être.
Ce sont donc des domaines (ou un seul domaine?) dans lequel les
formateurs devraient s’engager par priorité.
Images et mémoires peuvent collaborer mais - c’est là où le formateur
doit être particulièrement vigilant - les phénomènes d’interférences existent
sur lesquels il conviendra de revenir, en particulier lorsque sera abordée
l’activité de lecture.
CHAPITRE 3

CERVEAU(X) ET COMPORTEMENTS

Si le cerveau de l’homme était uniquement neuronal, on pourrait se


risquer à tenter une définition approximative du comportement humain en
termes structuraux ou fonctionnels.
Mais notre cerveau est également hormonal. I1 est soumis non seulement
à l’action du milieu, aux rythmes externes, diurnes, saisonniers, solaires,
sidéraux, mais également aux processus de rétroaction des hormones qu’il
fabrique lui-même. Comportements et métabolismes sont étroitement liés.
L‘enseignant et le formateur ne devraient jamais l’oublier.
La description des différents comportements humains a évolué et évoluera
encore avec les techniques d’analyse et les progrès de la connaissance des
mécanismes fondamentaux de l’homme.
La neurochimie, rappelons-le, apporte une somme considérable de
données sur l’activité du cerveau provoquée et maintenue par les sensations
visuelles, auditives, tactiles à la surface et à l’intérieur du corps.
La recherche effectuée dans le domaine de la conscience, pour ne prendre
qu’un seul exemple, a été considérablement compliquée et entravée par les
efforts des chercheurs pour appliquer des mesures objectives à une expérience
subjective. La conscience était, jusqu’à une quinzaine d’années, une donnée
dont les variations et anomalies étaient analysées, certes, mais rarement
explorées en rapport avec ce que l’on sait des fonctions cérébrales. Depuis
la révolution de la conscience, provoquée par les techniques nouvelles
d’exploration cérébrale et également par les recherches en biofeedback dans
les années 1970, les choses ont changé.
L‘approche neurobiologique des comportements, et en particulier de
l’attention, confirme le rôle de pôle de convergence et de divergence d’une
structure cérébrale essentielle : celle de la formation réticulée, véritable reluis
de l’intégration et de l’activation cérébrale.
Parmi les très nombreuses études traitant des comportements humains,
le choix s’est porté plus particulièrement sur les recherches récentes utilisant
1’électro-encéphalographie. Les données recueillies grâce à cette technique
84 Notre cerveau aujourd’hui
sont susceptibles d’apporter un éclairage nouveau sur l’apprenant in vivo
et in situ, dans des domaines qui intéressent l’apprenant et le formateur :
- le niveau de vigilance, de conscience et d’attention auquel il est possible

de se référer pour améliorer l’acquisition des connaissances,


- la compréhension de la personnalité et de certains comportements selon

le mode perceptuel du sujet,


- la compréhension de l’uffectivité ou des émotions, et le rôle de l’affectivité

dans l’interaction communicative.

1. VIGILANCE, CONSCIENCE ET ATTENTION


La littérature abonde en études neurophysiologiques portant sur la
mesure des ondes cérébrales de sujets dans différents états de conscience
perceptive. Deux. cents à trois cents chercheurs dans le monde étudient
spécifiquement les mécanismes de l’éveil, du sommeil et du rêve. Ce dernier
n’appartient à la trilogie des états cérébraux que depuis 1960 seulement. I1
y sera fait référence, dans le cadre de cette recherche, dans la mesure où
le rêve participe ii l’équilibre biologique de l’apprenant.
La notion d’éveil ou de vigilance, connue depuis longtemps, est liée à
l’arrivée des influx au cerveau et à la désynchronisation corticale. Le
comportement d’éveil dépend de l’activité de la région médiane du tronc
cérébral, la formation réticulée, vers laquelle converge le flux des stimulations
sensorielles. L‘endormissement correspond au désamorçage de la source
d’activation.
La notion d’activation a émergé dans les recherches neurobiologiques
dans les années 1950, grâce aux travaux de Moruzzi et Magoun et leur
découverte du rôle du système réticulaire.
L‘état de vigilance ou état de veille actifest mesurable grâce à l’électro-
encéphalographie: (E.E.G.). I1 correspond à un comportement cérébral réparti
sur toutes les régions du cerveau (frontale, temporale, pariétale et occipitale)
et à la fréquence de trente oscillations par seconde (rythme bêta, rapide et
de faible amplitude).
Un autre état de veille, passif ou de répit cérébral, apparaît chez la plupart
des adultes, lorsque les yeux sont fermés. I1 correspond h deux comporte-
rnenls cérébraux : l’un frontal, traduit par des rythmes bêta, rapides ; l’autre
occipital, d’amplitude moyenne (rythme alpha).
Toutefois, une même qualité d’éveil peut se refléter en électro-encépha-
lographie par des tracés d’intensité différente. On a affaire à deux types de
tracés pour une population de sujets normaux : les sujets introvertis, riches
en imagerie visuelle (alpha d’intensité plus importante) ; et les sujets extra-
vertis, plus réactifs à l’environnement (alpha d’intensité plus faible). Pierre
Étévenon indique qu’un même tracé E.E.G. peut sous-tendre différents états
de vigilance, comme plusieurs tracés E.E.G. différents peuvent sous-tendre
un même état de vigilance.
Des différences, non pas seulement intra-hémisphériques mais inter-
hémisphériques existent également, les aires antérieures présentant moins
d’alpha et plus de bêta que les aires postérieures.
Cerveau(x) et comportements 85

D’après Grey Walter, la gestion des images mentales visuelles, auditives


ou kinesthésiques dépendrait du type d’activité cérébrale du sujet : les
personnes dont l’activité cérébrale alpha persiste lorsque leurs yeux sont
ouverts, gèrent leur imagerie mentale auditivement et kinesthésiquement
plutôt que visuellement. Les personnes dont l’activité cérébrale ne révèle pas
de rythme alpha, qu’elles aient ou non les yeux fermés, ont une gestion
mentale uniquement visuelle.

Une bonne qualité d’éveil

La connaissance et l’entretien d’une bonne qualité d’éveil concernent


directement les apprenants et les enseignants. L‘éveil nécessite - surtout dans
le contexte de la vie moderne actuelle et de ses contraintes d’éveil - (( soit
des stimulations, soit une motivation particulière, tout au moins pour 80 96
des gens )) (1). L‘éveil demande surtout une bonne hygiène et compréhension
des comportements cérébraux selon les heures de la vie cérébrale. C’est la
condition pour un bon fonctionnement de la mémoire et un apprentissage
efficace.
Or, les troubles de l’éveil apparaissent de plus en plus nombreux chez
les apprenants, dus sans doute à une dissociation entre l’horloge biologique
et le temps réel, provoquée par le rythme de plus en plus artificiel de la vie
moderne et la multiplicité des informations sensorielles auxquelles l’orga-
nisme est soumis (ce que Michel Jouvet appelle ((l’assaut de l’environne-
ment ))).Les chronobiologistes expliquent cette inadéquation par la présence
d’apposition de phases entre rythmes de sécrétion hormonale dans le sang
et de neuromédiateurs dans le cerveau.

La notion de conscience

De la notion de vigilance ou d’éveil, les neurobiologistes passent insen-


siblement à celle de conscience.
I1 faut noter que peu de mots ont donné lieu à une aussi grande variété
de définitions et de théories que le mot conscience.
Notion profondément culturelle, elle ne revêt pas la même signXication
dans la pensée occidentale et la philosophie orientale. Pour cette dernière,
elle désigne l’expérience immédiate de la réalité, obtenue et atteinte sans
l’écran de la pensée conceptuelle. Son rôle est de créer l’espace et le temps
car, sans la conscience spéczfiunte, ni le temps ni l’espace n’auraient
d’existence réelle.Cette conception de la conscience est à rapprocher de celle
de la relativité des choses et des événements, telle que l’a révélée la physique
moderne ;car qu’est-ce que la réalité quand on sait que le soleil qu’on regarde
est tel qu’il était huit minutes plus tôt ?...

(I) Cf. JOUVET M. (1980) ; cf. aussi BOUTONJ. (1982) ; P.-E. ÉTÉVENON
dans La Caverne
de Platon (film 16 mm couleurs) présente une cartographie E.E.G. dynamique d’une nuit
de sommeil et de rêves. Documents C.N.R.S., I.N.S.E.R.M., Specia, Biocom (1986).
86 Notre cerveau aujourd’hui
Le langage occidental quotidien emploie couramment le mot conscience
dans le sens de connaissance ou de re-connaissance de la réalité, qu’elle soit
extérieure ou intérieure à l’homme.
Psychologues et philosophes parlent d’intentionnalité ou de conscience
de soi, de conscience d’exister (Sartre), de système perception-pulsions-
conscience (Freud), etc.
Les cliniciens occidentaux décrivent plusieurs niveaux ou états de
conscience, alors que la terminologie orientale parle de mouvements
(((vritti~).Les uns et les autres observent, vérifient, testent des réponses
verbales ou instrumentales.
Les enregistrements électro-corticaux apportent des indications sur les
fluctuations de la vigilance - (( frontières mobiles et indéfinissables », selon
les termes de Pierre Étévenon - et les niveaux d’attention ou de l’activité
cérébrale du sujet. Ce sont :
- les rythmes cérébraux spontanés recueillis par E.E.G., informatisés et

quantifiés,
- les potentiels évoqués, qui rendent compte qualitativement et quantita-

tivement des réponses des zones cérébrales sensorielles à des stimulations


extérieures (visuelles, auditives, tactiles ou somesthésiques).
Les composantes tardives permettent de déceler une notion fondamentale
dans l’acquisition des connaissances, celle de la disponibilité du sujet, son
degré d’attention et son attitude face à la tâche demandée. Les travaux de
J. Paty font apparaître que (( l’onde d’expectative est particulièrement sen-
sible aux interférences émotionnelles (...), qu’elle varie selon l’attitude du
sujet, sa présence perceptive, la préférence qu’il accorde à son expérience
intérieure ou à la tache que lui demande l’expérimentateur)): autant de
concepts essentiels dont il faudrait tenir compte dans une approche péda-
gogique.
- le potentiel continu cérébral, qui varie avec le degré de vigilance du sujet :
(( I1 s’élève en fonction du degré d’activation globale et s’abaisse lors de

détente ou. de somnolence. D


La concomitance d’événements physiologiques et des modifications de
conscience est largement admise et reconnue, sans que l’on puisse déterminer
de façon catégorique le lien de causalité à l’intérieur de l’unité psychoso-
matique. Dans ce domaine, plus que dans aucun autre, les liens de causalité
linéaire n apparaissent plus valables.
Les différentes techniques de modification volontaire de la conscience
(training autogène de Schultz, sophrologie, eutonie, yoga, biofeedback...) ont
donné lieu à des examens mesurant les indices périphériques (rythme
cardiaque, respiratoire, tonus musculaire, tension artérielle) et centraux
(rythmes cérébraux). Dans ces techniques, les études ont signalé une
amplification du rythme alpha, qui est diffusé vers les régions antérieures
(lobes frontaux) pendant les exercices de respiration et de détente, les yeux
étant fermés. Si l’on ajoute que ce résultat est accompagné d’une diminution
des réactions d’habituation, et d’une diminution des différences inter-
hémisphériques, on voit tout l’intérêt que l’apprenant et l’enseignant peuvent
retirer de pratiques pédagogiques intégrant les moments de pauses structu-
Cerveau(x) et comportements 87
rantes, ainsi que d’un travail sur les modalités sensorielles en évocation
mentale, en concentration multi-modalitaire, ou encore d’une adaptation de
la méthode de fixation somesthésique (2).
Que dit, de son côté, le biologiste?
Pour Henri Laborit (( c’est parce qu’il est capable de répondre de façon
originale à un problème posé par l’environnement, problème auquel il
pourrait répondre de façon réflexe ou automatique, que l’Homme est
conscient... La conscience se révèle ainsi comme la conséquence du fonc-
tionnement le plus complet, le plus intégré de toutes les aires et fonctions
cérébrales ».
Pour E. Guillé, les différents états de conscience spécifiques correspon-
dent à différents niveaux vibratoires, puisqu’un état de conscience peut être
défini par un ensemble de caractéristiques énergétiques. L‘inconscient est une
forme originelle du psychisme : il enregistre des états vibratoires et possède
un langage aussi logique et ordonné que le langage conscient, mais dans un
ordre différent : c’est le langage des énergies mises en jeu au niveau des
émotions. Les deux forces sont complémentaires.
Karl Pribram a introduit dans son étude de la conscience (« awareness D)
la notion d’image... I1 distingue la conscienceperceptive et la conscience de
soi. Cette dernière serait un phénomène identifiable, indépendant par rapport
à d’autres formes de conscience sans intentionnalité.
(( Les contenus de la conscience perceptive ordinaire impliquent des

intérêts vers les événements et les objets. Les contenus de la conscience de


soi comportent des intentions et des intentionnalités, soit des processus de
la pensée cognitive qui se distinguent aisément des sentiments émotionnels
ou motivationnels, des perceptions d’événements ou d’objets... D
Les deux types de conscience définis ci-dessus concernent l’apprenant :
il ne peut faire l’économie ni de l’une, ni de l’autre. En prise sur l’information,
il doit mettre en forme les représentations de l’environnement, celles qui lui
viennent de l’extérieur et celles qu’il possède déjà dans son stock de
connaissances. Neurologiquement, cela signifie que le cerveau organise ou
réorganise la structure - on peut même dire la structuration ~de systèmes
neuraux, selon un état de conscience donné.
On se souvient qu’au début du siècle, William James distinguait trois
types de processus :
- processus sélectif : certaines choses sont perçues, d’autres pas,

- processus intensif: plus ou moins d’effort est fourni,

- processus de maintien : pour soutenir l’effort.

Edward Hall, anthropologue, aborde le problème de la conscience en


lui donnant la dimension communicative que Freud ne lui avait pas donnée.
Cette approche nous intéresse tout particulièrement, car il n a pas >
d’apprentissage ni d’enseignement en dehors d’une théorie de la communi-
cation. Hall estime que trois types de conscience existent, correspondant aux

(2) PATYJ. (1984 et 1985) ; cf. aussi PECAND


G. (1979), dont l’ouvrage collectif est une
approche neurocybernétique du comportement humain.
88 Notre cerveau aujourd’hui
trois types d’apprentissage qu’il discerne : formel, informel (ou hors
conscience), et technique. A chacune de ces catégories correspondent un
(( affect )) (ou émotion) et une attitude~formelle, informelle et technique ~

face au changement.

L‘attention

Depuis les travaux de Moruzzi et Magoun, les mécanismes cérébraux


impliqués dans l’attention ont fait l’objet de nombreuses études.
I1 semble maintenant admis que l’attention est indissociable de l’état de
conscience de soi et qu’elle s’organise à partir de la perception. Elle fait partie
des stratégies et des facultés d’auto-organisation du cerveau humain. Selon
l’expression de J.-P. Changeux, l’attention (( gère les relations du cerveau avec
l’environnement ».
Pribram distingue trois processus principaux de régulation :
- la mise en éveil de l’attention (arousal),

- la réponse au stimulus (readiness) et

- le processus dit d’effort.


I1 distingue également deux mécanismes de régulation : l’un de rétroac-
tion (feedback), l’autre de proaction (feedforward), mécanismes auxquels il
rattache la distinction entre conscience perceptive ordinaire et conscience de
soi.
L‘apprentissage, sans aucun doute, met en jeu des processus de rétroac-
tion (feedback), de nature essentiellement émotionnelle et motivationnelle,
et correspondant à la conscience perceptive ; il déclenche aussi des processus
de proaction (feedforward) de nature cognitive, correspondant à la
conscience de soi.
L‘apprentissage impliquerait donc l’organisation de l’information par
l’intermédiaire d’états de conscience différents. Ceci rejoint l’idée émise par
Illya Prigogine : les fluctuations sont une loi universelle. L‘alternance entre
les moments de prise d’information et les moments de pause sensorielle ou
de répit cérébral serait la condition optimale de l’apprentissage.
Rappelons les recherches de Copenhague et les ressources de l’idéogra-
phie cérébrale, en particulier les recherches de P. Roland sur l’attention :
l’attention est un processus d’anticipation, dépendant de la tâche à accomplir
et non du stimulus.
L‘électro-encéphalographie a révélé des corrélations entre l’apparition
d’ondes dites d’activité (tracé bêta) et le processus de fixation de l’attention
(et aussi celui de déshabituation). L‘apparition d’ondes dites de repos ou
d’habituation (tracé alpha) correspond aux périodes où l’attention s’ame-
nuise.
La psychobiologie de l’attention explore les supports biologiques des
fonctions cognitives et tente d’établir les composantes et les formes d’atten-
tion sélective, discrimination et prise de décision; les temps de réaction;
choix de la réponse, etc. L‘hypothèse d’une organisation hiérarchique des
stades de traitement de l’information semble se préciser. Notre cerveau
émettrait des ondes précoces correspondant au traitement du signal et à la
Cerveau(x) et comportements 89

sélection du canal (auditif, somato-sensoriel), et des ondes tardives lorsqu’il


élaborerait une réponse. En d’autres termes, un potentiel endogène serait
émis par notre cerveau pendant une opération mentale.
La psychophysiologie cognitive apporte des éléments précieux dans des
domaines intéressant directement les formateurs :
- Le profil individuel: chaque individu a une stratégie et un degré de

résistance à la saturation qui lui est propre ...


~ Les interférences inter et intra-modalité (auditive, visuelle...) : la pertur-
bation de l’attention est plus grande lorsque les signaux concurrents
appartiennent à la même modalité (un signal auditif perturbant une tâche
de discrimination ou réaction auditive).
- Priorité des tâches de détection visuelle sur les tâches de rapidité.

- Les zones cérébrales impliquées au cours d’une activité attentive diffèrent

chez les gauchers et chez les droitiers. Les régions frontales sont
davantage impliquées chez les gauchers (3).
Le neuro-endocrinologue signale le rôle des lobes frontaux, de la
formation réticulée, et l’action de la dopamine dans le processus attention-
ne1 (4).
Henri Laborit, quant à lui, distingue deux sortes de réaction d’attention :
l’une K tonique », persistante, diffuse et sensible à l’habituation : la répétition
d’un stimulus peut l’inhiber ; l’autre «phasigue », permettant une attention
plus sélective et discriminative. L‘une et l’autre formes d’attention dépen-
draient de zones distinctes dans le cerveau et pourraient même être anta-
gonistes. C’est ainsi que serait expliquée la difficulté que l’on ressent pour
fixer son attention dans certains états d’émotion ou d’excitation.
Selon Laborit, 30 % des neurones des cortex visuel et auditif seraient des
neurones d’attention qui ne répondraient pas à des stimuli répétés mais
seulement à une nouvelle sonorité ou à un renforcement de l’information
visuelle.
Pour les yogis, l’attention dépend d’une disposition intérieure à se laisser
traverser par des ondes sonores et visuelles.
Des recherches en biofeedback semblent indiquer le rôle de l’hémisphère
dominant dans l’état d’attention. D’après L. Fehmi, du Centre de Recherche
en Biofeedback de Princeton, l’hémisphère gauche contrôle une focalisation
étroite D, tandis que l’hémisphère droit permettrait une (( focalisation large
et ouverte)) (ce que Fehmi appelle l’état ((into-it D). Sur ces notions de
(( fermeture D et (( d’ouverture D, Fehmi construit quatre types d’attention :

- objective et ouverte : utilisée pour l’intégration d’une masse d’informa-

tions,
- subjective (into-it) et ouverte : utilisée dans l’écoute,

- objective et étroite : dans la résolution de problèmes,

- subjective et étroite : dans l’expérience sensorielle.

(3) Cf. BEATTY J. (1977) ; VANDERHAEGEN CI. (1982) ; PATYJ. (1984) ; HILLYARD
S.A.
(1985) ; J.-P. CHANCEUX (op. cit., p. 193-196).
(4) Cf. VINCENT J.-D. (1986).
90 Notre cerveau aujourd’hui
(( Nous sommes déformés par notre culture )) remarque Fehmi. a Nous

pensons que l’objectivité ne peut être que la conséquence d’une focalisation


étroite. ))
D’autres recherches, portant sur le dysfonctionnement de l’attention dans
le domaine visuel, nous révèlent la complexité du processus : l’orientation
peut être automatique ou intentionnelle, interne ou externe, distribuée ou
concentrée. Le mécanisme, pour être complet, doit comprendre plusieurs
étapes : le détachement du point d’ancrage antérieur, la sélection d’une
nouvelle cible et le mouvement attentionnel vers cette cible, la fixation sur
le nouvel objectif (5).
Les mêmes stades du mécanisme attentionnel concernent le domaine
auditif. Le terrain à explorer par les formateurs est immense :
II est important que tout formateur ou informateur veille à renouveler
les formes sous lesquelles l’information est donnée :qu’il évite les répétitions
consécutives et identiques;qu’il sache que l’attention est étroitement liée à
la motivation, aux rythmes de l’individu, à son expériencepassée, à sa gestion
intérieure, et, enfi. et surtout - qu 11se souvienne que l’attention est fonction
de l’utilité de l’activité proposée.
A ces éléments, il faut en ajouter un autre: la motivation, ou, comme
nous allons le preciser, les motivations.

2. MOTIVATION(S) ET CHANGEMENT

Le mot motivation est apparu dans la langue française il y a à peine


un siècle. Depuis quelques années, il est employé très souvent dans les milieux
de formation pour exprimer la préoccupation essentielle des enseignants. On
entend souvent poser la question : (( Comment motiver les élèves ? )) et aussi
souvent ce commentaire : (( Ils sont démotivés D...
Il semble que la motivation soit un comportement qui tende à la fois
à atteindre un objectif désirable et à éviter un événement futur désagréable,
en mettant en œuvre la coopération de la personne (6). Une fois encore, le
domaine est beaucoup trop vaste pour qu’il lui soit fait justice dans le cadre
de cet ouvrage. De très nombreux corrélats ou facteurs de la motivation
exigeraient d’être soigneusemen‘t définis : objectif/ but ; croyance(s) ;valeurs ;
choix, préférences ; besoins, etc. Seuls seront retenus ici les points intéressant
directement les formateurs, les enseignants, les parents et les responsables
de formation.
Un rapide parcours diachronique à travers les diverses théories permet
de suggérer d’une part, que le mot motivation soit, comme le mot mémoires,
employé au pluriel ; d’autre part, qu’il existe au moins quatre modèles de
motivation.
K.B. Madsen, de l’École Royale des Sciences de l’Éducation de Copen-
hague, relie les trois premiers modèles à une structure cérébrale spécitique

(5) GAINOTTI
G. (1987).
(6) LASZLO
E. (1975).
Cerveau(x) et comportements 91

(en plus du système réticulaire auquel tous les modèles de motivation sont
reliés), et examine ensuite les possibilités de changement contenues dans
chaque catégorie : changements d’objectif, de valeur, de mobile.
Les formateurs savent que le véritable nœud des difficultés de l’apprenant
réside dans la résistance au changement. Aussi, l’étude de la motivation telle
que la présente Madsen revêt un intérêt tout particulier et elle sera présentée
en détail. Les hypothèses, ou postulats, concernant la motivation peuvent
être classées en quatre catégories :

Le modèle homéostasique
D’après la théorie de W. Cannon (1915), elle-même inspirée de la
conception du milieu intérieur de Claude Bernard, ce modèle est proche de
la conception de Freud. Selon ce modèle, le comportement, comme tout
processus biologique, est déterminé par la recherche d’équilibre dans l’or-
ganisme. Les psychologues l’expriment ainsi : l’équilibre rompu crée un
besoin (faim, soif, sexe) qui, à son tour, détermine un dynamisme, qui, à
son tour, détermine un comportement pour réduire ou satisfaire le besoin
et rétablir l’équilibre (Freud, Hull, Murray, Freeman...).
Madsen relie les motivations représentées par ce modèle à la structure
cérébrale de l’hypothalamus, et détermine les mobiles de cette catégorie
comme étant (( organiques », (( homéostasiques 1) ou a hypothalamiques D.
Dans ce modèle, les possibilités de changement sont réduites car les mobiles
sont organiques. La seule possibilité de changement semble être celle que
Freud a désignée comme (( l’objet )) de l’instinct auquel on peut substituer
un autre objet. La publicité de nos pays industrialisés ne s’en prive pas ...

Le modèle dynamique
En 1953, lorsque le premier symposium sur la motivation eut lieu, dans
le Nebraska, le modèle homéostasique fut élargi à d’autres domaines de la
biologie, en particulier à la visualisation.
Le nouveau modèle tenait compte de l’effet des stimuli extérieurs,
véritables stimulants, capables de mobiliser l’énergie et de déclencher un état
d’activation. Ces stimulants sont de deux sortes: primaires, avec un effet
dynamisant interne et inné (selon la théorie (( hédoniste D de P.T. Young, et
d’Hebb, Tinbergen, etc.) ; ou secondaires, acquis, dont l’effet dynamique
s’accroît selon le jeu complexe de facteurs comme l’habitude, le potentiel
de réaction, etc.
Le modèle dynamique est défendu par Atkinson, Miller, Lewin, Skinner,
McClelland, etc. I1 a été adapté à l’apprentissage par Spence.
Madsen relie ce modèle à une autre structure cérébrale: le système
limbique. Les mobiles de cette catégorie de motivation sont d’ordre (( émo-
tionnel D, (( social )) ou (( dynamique ».
Les possibilités de changement sont plus nombreuses dans cette catégorie,
car les stimulants (punitions, récompenses) deviennent des objectifs à attein-
dre et les conduites peuvent être apprises. L‘éducation en fait un grand usage.
92 Notre cerveau aujourd’hui
Le modèle cognitif

I1 est contenu implicitement dans de nombreuses théories des processus


perceptifs et cognitifs (la Gestalt par exemple). Peu à peu l’idée gagne selon
laquelle les processus cognitifs ont une motivation intrinsèque, suggérant que
la base même de la motivation est dans l’interaction avec l’environnement.
Madsen relie ce modèle au cortex. Les mobiles de cette catégorie de
motivation sont d’ordre cognitif, ou cortical.
Les possibilitis de changement sont beaucoup plus vastes que dans les
autres modèles, car les variables cognitives comme l’attente, le système de
valeurs, les croyances, peuvent entrer en jeu; de même, les moyens de
persuasion verbaux, oraux et écrits, qui utilisent la logique et des moyens
que les autres modèles ne possèdent pas (systèmes éducatifs et communi-
cation).
Le modèle cognitif peut s’appliquer à la (( socialisation secondaire ».
Madsen entend par là la formation, l’éducation institutionnelle, les médias.
Ce modèle est le seul qui puisse déclencher un changement de mobiles chez
l’adulte (non impliqué dans des situations thérapeutiques), alors que les deux
premiers modèles, homéostasique et dynamique, se limitent dans leur
application à la (( socialisation primaire D, à savoir l’éducation des enfants
par leur famille.
A ces mobiles d’ordre divers, Madsen ajoute ceux émanant de la
formation réticulée : ils sont d’ordre intrinsèque ; ce sont des mobiles
d’activation.

Le modèle humaniste

Moins défini, parce que multiréférant et beaucoup plus vaste que les
précédents, il est représenté par A. Maslow, Allport, Rogers et quelques
autres. I1 n’est rattaché à aucune structure cérébrale particulière autre que
la formation réticulaire. Sans doute fonctionne-t-il en faisant intervenir des
mobiles émanant de l’être tout entier.

La motivation, dans le système éducatif, n’est qu’un aspect d’un domaine


beaucoup plus vaste, à la dimension de la société dans laquelle s’inscrit
l’école. Un programme de formation et de développement des diverses
motivations, de type homéostasique, dynamique, global, ou humaniste,
pourrait s’inspirer des analyses qui existent depuis... plus de trente ans.
Celles-ci devraient être exhumées des bibliographies, pour que les idées
qu’elles contiennent soient mises en œuvre et induisent des changements,
lorsque ceux-ci s’avèrent nécessaires.
I1 semble que, dans le domaine de la motivation plus que dans tout autre,
l’information et la prise de conscience de son propre fonctionnement et de
ses propres structures soient la méthode la plus efficace pour induire le
changement chez 1’être socialisé (apprenant ou enseignant).
Cerveau(x) et comportements 93

3. PERCEPTION ET PERSONNALITÉ

Ici encore, un choix sera fait pour illustrer, par des exemples précis, ce
que peuvent nous apporter les neurosciences dans un domaine beaucoup trop
vaste pour être exposé dans son ensemble.
Des recherches réalisées par le National Institute of Mental Health
(Bethesda, Maryland, États-Unis) à partir de Potentiels Évoqués, ont permis
de déceler :
- des différences marquées dans les réponses obtenues à des stimuli visuels
et auditifs chez des hommes, des femmes, des sujets hyperactifs, des sujets
normaux, plus ou moins sensibles à la douleur, plus ou moins attentifs
~ une dynamique sous-jacente aux comportements humains et à l’influence
de l’environnement sur nos réactions comportementales.
Ce type de recherche est extrêmement utile pour équiper en outils
d’observation les professionnels de la communication et de l’interaction que
sont les formateurs . En effet, l’hétérogénéité des groupes d’apprenants pose
toujours le problème de la réception de l’information et des différents niveaux
de compréhension d’une même information.
En s’appuyant sur la recherche d’une psychologue britannique, le Dr
A. Petrie, qui répartissait les sujets réalisant une tâche perceptuelle en deux
types (les augmmteurs : ceux qui estimaient le stimulus au-dessus de sa valeur
et les réducteurs : ceux qui sous-estimaient le stimulus), les Dr Buchsbaum
et Silverman firent l’hypothèse que les réducteurs étaient très sensibles à des
stimuli d’intensité réduite (quasi subliminale). Ils découvrirent, en outre, que
les réducteurs toléraient mieux que les augmenteurs un environnement
pauvre.
Les Potentiels Évoqués fournirent une autre donnée : l’amplitude (ou
différence en microvolts entre le sommet de la courbe PI et le creux NI)
varierait pour un homme et une femme; elle serait une indication de la
personnalité du sujet, de sa sensibilité émotionnelle... et même de sa gestion
mentale. Ces tendances augmentrice et réductrice semblent, d’après les
auteurs, revêtir un rôle soit de protection contre des stimulations potentiel-
lement excessives, soit d’adaptation à l’environnement. Elles traduiraient
l’attitude de l’individu face au monde qui l’entoure: certains se laissent
envahir par des sensations provoquées par de hautes fréquences et sont
insensibles aux fréquences basses ; d’autres, hypersensibles aux stimulations
de basses fréquences se protégeraient en se coupant des sensations qui
menaceraient leur survie neurophysiologique.
Les êtres humains se répartiraient ainsi en deux groupes, selon leur
tendance à s’adapter à l’une ou à l’autre solution. Les femmes montreraient
une tendance à réagir en augmentrices. Les enfants Ayperactifs seraient un
exemple d’adaptation excessive à la tendance augmentrice. Les schizophrènes
représenteraient la tendance opposée : une adaptation excessive à la réduc-
tion (probablement par souci non-conscient de protection contre un envi-
ronnement menaçant).
Rappelons que les mesures qui démontrent des réactions variant d’un
94 Notre cerveau aujourd’hui

groupe à l’autre et à l’intérieur d’un groupe, sont prises à partir d’un même
stimulus.
On a constaté des variations entre les différents sujets normaux mais elles
ne sont pas encore élucidées. Elles refiètent sans doute les différences de
traitement de l’information sensorielle, qui devraient être prises en compte
par les formateurs lorsqu’une information est présentée et une interprétation
demandée en vue d’une évaluation.
Les Potentiels Évoqués d’enfants hyperactifs de 6-12 ans révèlent les
mêmes caractéristiques que celles d’enfants normaux plus jeunes, mais leur
temps de latence est plus court ; pour ces enfants, l’amplitude et le temps
de variance sont modifiés plus fréquemment d’un stimulus à l’autre, tradui-
sant l’instabilité et soulignant l’importance d’une pédagogie de l’attention
(écoute et observation).
La technique des Potentiels Évoqués telle que l’a pratiquée le Dr
Buchsbaum a codirmé également que la réponse cérébrale reflète ce que
l’on s’attend de voir et non ce que l’on voit : croire, c’est voir.
Les tracés ont révélé que l’état mental intérieur était prédominant sur
la perception du stimulus : ce qui compte pour le sujet est plus fort que ce
qu’il perçoit en réalité. C’est la preuve que nous ne percevons pas de façon
mécanique mais mec notre subjectivité.
La personnalité d’un être humain se révèle et se mesure dans ses
comportements en situation d’apprentissage et de communication. Plusieurs
variables se combinent, comme le besoin d’entrer en interaction, la fréquence,
le rythme, la durke des interactions et, comme nous allons le voir, la capacité
à se synchroniser avec soi-même et avec l’Autre (7).

4. AFFECTIVITÉ ET COMMUNICATION

Notre affectivité gère nos rapports avec le monde extérieur (étymologi-


quement : elle nous (( met dans tel ou tel état ») et elle fonde notre réalité
existentielle.
Nos émotions (terme utilisé plus couramment que affectivité et impli-
quant la notion de mouvement), sont des actions-conduites, liées aux
différents rythmes de notre organisme : rythme respiratoire, cardiaque, etc.
et à l’activité organique, viscérale et glandulaire. Pour Henri Wallon, qui
observe des affinités fondamentales entre émotions et fonctions proprement
organiques et posturales, (( l’émotion, quelle que soit sa nuance, a toujours
pour condition fondamentale des variations dans le tonus des membres et
de la vie organique D.
Anatomiquement, les lobes frontaux et le système limbique sont reconnus
comme jouant un rôle essentiel dans la vie affective de l’homme. Mais ce
serait une erreur de penser que seul le lieu ou le siège d’une fonction est
suffisant pour qu’elle s’exerce : la substance, en l’occurrence les hormones
et les neurotransmetteurs du cerveau hormonal, intervient à tout instant dans

(7) Cf. ROSENFELD


A.H. et S.A. (1975).
Cerveau(x) et comportements 95

l’état central fluctuant O , notion proposée par J.-D. Vincent qui la considère
(t
plus moderne et plus exacte que celle d’homéostasie.
La situation d’apprentissage est fondamentalement déstabilisante, en ce
qu’elle exige l’assimilation de nouvelles données et l’adaptation à une
situation nouvelle, donc une rupture avec des habitudes. Elle fait appel au
cerveau hormonal, car il est, selon les termes de J.-D. Vincent, le grand
maître )) qui organise le désordre grâce auquel le fonctionnement des t( grands
ensembles neuronaux )) peut être modulé.
On a vu que parmi les différents états affectifs de l’apprenant, il en est
un que tous les formateurs et enseignants attendent, espèrent et appellent
à l’aide : c’est la motivation ou le désir d’apprendre ..., état sous-jacent
indispensable et intermédiaire entre le besoin d’apprendre et la satisfaction
d’avoir agi, donc d’avoir acquis. Les mesures E.E.G. prises sur les régions
frontales révèlent une onde négative qui accompagne la phase précédant
l’action (8). Ceci nous confirme que ce serait une grave erreur de considérer
l’acte d’apprendre comme une manifestation seulement neuronale.
L’apprentissage est une ouverture au monde : il ne peut s ?effectuersans
que le désir lui soit associé.
Biologiquement, un comportement désirant requiert l’association de
l’affectivité et de l’anticipation de l’acte, et il se traduit par des sécrétions
hormonales.

Au-delà des cultures ?

Une des découvertes les plus étonnantes dans le domaine de l’affectivité


nous révèle qu’à chacune des émotions de base (colère, douleur, amour,
haine, respect...) correspond un tracé cérébral caractéristique et universel,
indépendant de la culture.
C’est ce que Manfred Clynes, ingénieur et musicologue australien, appelle
(( sentics D. I1 s’agit de la forme biologique des émotions qu’il a discernée

dans des cultures aussi diverses que celles du Mexique, du Japon, des États-
Unis, et de Bali.
Pour Clynes, les émotions sont des formes spatio-temporelles : chacune
possède des caractéristiques de durée et de configuration ; ces formes sont
révélées dans des tracés et existent donc à l’émission. I1 recommande que
soit entrepris un apprentissage permettant de mieux connaître, de discriminer
ses propres émotions, de les reconnaître, donc de les contrôler et de mieux
les utiliser pour communiquer.
Les émotions, affirme Clynes, forment avec leur expression une unité
existentielle, un système. La façon de ne pas être leur jouet est de les bien
connaître. Clynes énumère les caractéristiques des états émotionnels, de leurs
expressions et de leur formation :
~ Les états émotionnels sont tous uniques. A chacun correspond un schéma
cérébral. Chaque état émotionnel présente une inertie caractéristique : il

(8) Cf. WALLON M., op. cit. ; VINCENTJ.-D.,


H. (1949), pp. 50 et 55 ; cf. aussi CLYNES
op. cit., pp. 13, 151 et suiv.; LIBETB. (1985).
96 Notre cerveau aujourd’hui

persiste - en termes de processus cérébraux et corporels, pendant une


certaine durée. Des changements hormonaux et vasculaires surviennent
avec l’état émotionnel. La mémoire et les processus inconscients influen-
cent les fonctions de contrôle des états émotionnels. Différents facteurs
influencent les; émotions, comme l’âge, le sexe, les rythmes biologiques,
l’hérédité...
- L‘expression des émotions est un aspect fondamental de leur nature. Les

émotions ont besoin de s’exprimer, comme tout système de contrôle


réagissant à l’entrée d’une information. Le fait d’exprimer une émotion
a un effet sur son intensité, soit en l’augmentant, soit en la diminuant.
- La formation des émotions: elles naissent de la perception d’un chan-

gement dans les circonstances de l’existence, dans nos relations aux


autres, dans l’environnement, dans le cours de nos projets, etc. Elles
peuvent aussi naître de notre perception d’une émotion chez d’autres
personnes, ou tout simplement de notre imagination, de nos souvenirs,
d’une situation, etc. Elles peuvent se former après l’absorption de
drogues, de médicaments, ou de toxiques, ou encore être provoquées par
des stimulations électriques du cerveau. Elles peuvent être affectées par
l’habituation et l’adaptation, dans certains cas.
Pour analyser les émotions, on dispose de différents indices et variables
corporels, tous mesurables. Ce sont : le rythme cardiaque, le rythme respi-
ratoire, la durée de l’inspiration et de l’expiration, la consommation d’oxy-
gène, la position du corps, le regard, l’activité musculaire.
Les formateurs, les parents - et pourquoi pas, les apprenants eux-mêmes
- tireraient un grand profit d’une lecture de ces indices chez l’autre et ...

en eux-mêmes.

5. RYTHMES CÉRÉBRAUX ET COMMUNICATION

De nombreuses études ont paru sur les rythmes de l’enfant, de l’ado-


lescent et de l’adulte. Toutes soulignent la difficulté dans laquelle se trouve
celui qui tente de cerner cette notion dont la complexité ne cède pas... Nous
rappellerons la définition de Platon: le rythme, c’est l’ordre dans le
mouvement. Nous sommes donc, une fois encore, devant une structure, une
organisation, une dynamique.
Les études de chronopsychologie mesurent les effets des diverses variables
temporelles et spatiales sur les performances de l’individu, homme et femme,
jeune et moins jeune ... selon que telle ou telle tâche est précédée ou suivie
de telle autre et effectuée à tel ou tel moment de la journée. Une étude réalisée
à San Diego, en Californie, a étudié l’effet des rythmes circadiens sur la
compréhension et la rapidité de lecture. Elle a effectivement pu conclure à
une amélioration de la compréhension dans l’après-midi et dans les premières
heures de la soirée, et une plus grande rapidité de lecture dans la matinée.
Les résultats obtenus nous semblent difficilement généralisables. Trop de
variables interviennent ; les rythmes circadiens font osciller les sécrétions
hormonales et le jeu cérébral des hormones est encore insondable. ..
Cerveau(x) et comportements 97
Seules seront mentionnées ici celles des études récentes qui soulignent
les rythmes de base du cerveau humain en relation avec le langage et la
communication. Comme le remarque Edward Hall il y a toujours eu une
grande cohérence dans la nature ... il existe une unité sous-jacente à l’extrême
diversité des phénomènes naturels D et, citant W.S. Condon : (( Le rythme est
la caractéristique essentielle de l’organisation naturelle... I1 existe une cohé-
rence profonde dans ce que nous percevons et ce que nous pensons. D Ceci
semble vrai pour le cerveau plus que pour toute autre structure. Nos rythmes
sont d’abord des processus de synchronie interne. Ils varient avec et selon
tout ce que nous faisons: notre perception visuelle ou auditive, notre
sommeil, nos rêves, notre repos, etc.
Condon a associé les cinq différentes activités électriques du cerveau Ù
la structuration des énoncés langagiers ;
-- Le rythme delta (1-3/sec.) correspond à l’énonciation des phrases.
- Le rythme thêta (4-7/sec.) aux mots.

- Le rythme alpha (8-131sec.) aux mots courts et aux phonèmes.

- Le rythme bêta I (14-24/sec.) aux phonèmes courts.

- Le rythme bêta II (25-40/sec.) aux phonèmes.

A chacun de ces différents niveaux de rythmes hiérarchiques, Condon


associe un mouvement corporel, synchronisé avec l’émission du langage.
D’autres recherches suggèrent que la fréquence delta d’une seconde
correspond au rythme fondamental du comportement humain.
Des rythmes de base universels 7
D’après Paul Byers, de Columbia University (New York), il existerait
deux rythmes de base dans le cerveau humain : l’un de 7 c/ s, l’autre de 10 c/ s,
dont le rôle serait d’intégrer l’activité motrice et d’informer sur la qualité
des échanges entre individus.
La communication humaine serait un processus fonctionnant sur un
rythme sous-jacent de 10 c/s. Une communication réelle serait possible dans
une relation rythmique partagée, dans la synchronisation des rythmes de base
de l’un et l’autre communicants. Signalons que Byers, comme Clynes,
constate que les résultats des expérimentations sont identiques dans des
cultures très différentes (Esquimaux, Désert de Kalahari, Nouvelle-Guinée),
et que la communication n’est possible que si les locuteurs sont en
synchronie.
La capacité à rester synchrone (et nous ajouterons la capacité à rechercher
la synchronie) est, selon Edward Hall, innée. Mais chaque culture crée ses
propres rythmes, qui sont portés et transmis par la langue, acquis avec elle,
très tôt. C’est sans doute la raison pour laquelle les rythmes culturels
par aissent innés.
L‘universalité des émotions de base et des rythmes de la communication
humaine, telle qu’elle apparaît dans ces recherches, est une interrogation
grave que le choc des cultures semble nier. C’est pourtant un facteur
d’encouragement pour le développement des échanges et de la compréhen-
sion au-delà des frontières de l’histoire, de l’espace et des cultures. Nous y
voyons un moyen de parvenir à ((échanger entre nous du sens (...), nous
98 Notre cerveau aujourd’hui
rapprocher ou apprivoiser ou nous tourner vers un sens commun)) selon
l’expression de Michel Serres.
Et ce besoin de synchronie, intact au fond de chacun de nous, quelle
que soit notre culture, ne rejoindrait4 pas, en partie tout au moins, d’autres
concepts qui apparaissent ou ré-apparaissent dans notre monde moderne
pour l’interpeller par leur profond mystère : l’homogénéité structurale de
Karl Popper; le concept de synchronicité de Carl Jung; la causalité
formative de Rupert Sheldrake, pour n’en citer que quelques-uns ? (9).

(9) Pour l’étude de la chronopsychologie, cf. ENGLUND C.E. (1981) ; CONDONcité par
HALL(1984b) ; BYERSP. (1976) ; cf. Michel SERRES(op. cit., p. 130), (( avant d’échanger
entre nous du sens (...), avant de bâtir ensemble du neuf (...) nous devons former ces
universaux )) ; POPPERK. (1976) ; SHELDRAKE R. (1985).
CHAPITRE 4

L‘OBSERVATEUR OBSERVÉ

Lorsqu’on aborde le domaine de la compréhension des mécanismes


cérébraux, en particulier le cerveau face à l’information, il ne faut jamais
oublier que l’observateur est l’observé. I1 est donc limité dans son exploration
par sa propre structure, par son organisation et ses dimensions. I1 ne peut
être décrit qu’en termes de probabilité, dans sa tendance à exister et à
survenir.
Le cerveau de l’homme de la fin du xxesiècle, en se tournant vers le
monde des atomes et des noyaux, découvre la nature dynamique de l’Univers
dont ilfait partie. I1 lui est impossible de ne pas remettre en question certaines
doctrines, en particulier celles qui cherchent à identifier des entités séparées
ou isolées, indépendantes et élémentaires.
La doctrine du neurone, unité indépendante et contiguë, doit être
abandonnée aujourd’hui et remplacée par la reconnaissance du processus
double :
+
neurone jonction (synapse)
participant à la fois à un état neuronal et hormonal, fonctionnant grâce à
l’influx nerveux, généré lui-même par le neurone et influencé par l’état
jonctionnel neuronique ei hormonal.
De ce phénomène attesté par la science, nous pouvons tirer un ensei-
gnement sur l’une des caractéristiques essentielles de notre cerveau, à savoir
le processus de complémentarité dans la dualité, vérifiable à tous les niveaux
de l’activité cérébrale.
Dans la présente section, nos potentialités et les caractéristiques du
fonctionnement de notre cerveau seront abordées dans la perspective de
dégager et de souligner les bases sur lesquelles un apprentissage (et donc
un enseignement ou une formation) doivent s’appuyer pour être cohérents
et compatibles avec l’organe de l’apprentissage. Des mots-clés souligneront
les traits spécifiques du fonctionnement cérébral et préciseront la notion de
complémentarité dont l’importance vient d’être signalée.
Mieux connaître nos ressources, c’est être en mesure de les gérer et de
1O0 Notre cerveau aujourd’hui

les développer. C’est également la voie (et la voix) de l’autonomie, la voie


et la voix de la oompréhension de soi et des autres.

1. LES MOTS CLÉS DE NOTRE POTENTIEL

Les chiffres de notre potentiel cérébral commencent à être mieux connus.


Ils restent modifiables à mesure des découvertes quotidiennes des chercheurs
du monde entier, et grâce aux possibilités remarquables mises à leur
disposition par les technologies nouvelles. Les domaines d’exploration sont
sans cesse élargis.
C’est ainsi que le nombre de neurones, qui est resté longtemps le chiffre
capable de donner une idée de l’étendue spectaculaire de nos potentialités
- (10, 30, peut-etre 100 milliards) - doit être accompagné d’une informa-

tion concernant les cellules gliales, si nombreuses qu’il est impossible, pour
le moment, de les dénombrer. Ces cellules jouent un rôle extrêmement
important dans le développement de la vie cérébrale. Elles constituent 90 %
de la masse cérébrale. On a découvert que leur nombre augmentait au cours
de l’apprentissage car, à la différence des neurones, elles ont la capacité de
se diviser, donc de se reproduire, et par conséquent, de jouer un rôle
réparateur. Elles secrètent et captent le G.A.B.A., principal neurotransmet-
teur inhibiteur et elles ont un autre rôle, tout aussi important: celui de
participer au processus de myélinisation, gainage des fibres nerveuses.
Des chercheurs de l’université de Californie (Berkeley) découvrirent que
l’hémisphère gauche d’Albert Einstein contenait 73 de cellules gliales
supplémentaires par neurone, par rapport au cerveau d’un homme doué
d’une intelligence moyenne. Ces cellules supplémentaires se trouvaient dans
les zones associatives(1).

L‘exigence d‘oxygène

Le cerveau est l’organe le plus vascularisé : pas une cellule nerveuse ne


se trouve éloignée de plus d’un demi-centième de millimètre d’un capillaire
sanguin (2). Notre cerveau est un grand consommateur d’oxygène : à lui tout
seul, il consomme 20% de l’oxygène du corps, soit 0,8 litre de sang par
minute, alors qu”i1ne pèse que 2 % du poids du corps. Depuis les travaux
de John Bancroft, de l’université de Cambridge, en 1914, on sait qu’un tissu
organique en activité augmente sa vitesse de consommation d’oxygène,
l’énergie utilisée par l’organisme provenant de la dégradation d’une molécule-
réservoir, 1’ATP (adénosine-triphosphate), en ADP (adénosine-diphos-
phate) ; la régénération de 1’ATP étant obtenue par une réaction nécessitant
de l’oxygène et du glucose (phosphorylation oxydative).
Comment peut-on exiger une activité cérébrale efficace d’un groupe

(1) Cf. DIAMOND M. (1985).


(2) Cf. VINCENT
J.-D. (1986, p. 59).
L’observateur observé 101

d’apprenants, ou de candidats à un examen (ou tout simplement de


personnes qui communiquent), lorsqu’ils se trouvent pendant plusieurs
heures dans le même espace clos? On est en droit de se questionner sur la
valeur de la performance demandée : évaluation des savoir et savoir-faire ou ...
épreuve d’endurance à l’anoxie ?
L‘architecture neuronale est également représentée par le chiffre tradui-
sant la surface corticale : 22 dm2. Une indication importante concernant la
représentation somatotopique des différents organes révèle que l’amplifica-
tion de cette représentation est relative à l’importance de la fonction de
l’organe. La représentation de la fovéa, par exemple, est 10000 fois plus
étendue au niveau du cortex qu’au niveau de la rétine.
Les possibilités de connexions sont de 1 O00 à 10 O00 par neurone, ce
qui porte à IO puissance 14 le nombre probable de synapses, donc de
connexions possibles à chaque instant.
Autre chiffre stupéfiant : les zones associatives représentent 80 % de
l’écorce cérébrale.
Le réseau de fibres est gigantesque. Un chiffre permet d’évaluer le rôle
joué par le milieu extérieur : 0,02 % des neurones corticaux constituent les
voies d’entrées ou de sortie, et sont utilisées pour transmettre des informations
fournies par les sens, ou des ordres pour exécuter une tâche motrice. Tout
le reste, soit 99,98 %, représente les circuits intermédiaires du gigantesque
centre de calcul qui stocke et traite les informations (3).
A lui seul, le nerf optique compte un million de fibres. Rappelons que
les deux hémisphères sont reliés par un faisceau de 2 ou 300 millions de
fibres : le corps calleux. Le langage du corps calleux (4millions de messages
à la seconde !) ne reçoit pas suffisamment d’attention dans le monde médico-
pédagogique. Cette voie de connexion semble être utilisée davantage par les
gauchers que par les droitiers: il faut le dire aux intéressés qui, dans un
monde occidental fait pour les droitiers, reçoivent encore une étiquette qui
les gênent... Le corps calleux est la voie par laquelle passe une information
déjà traitée : c’est ce qu’avait découvert, en 1892, le neurologue français
J.-J. Déjerine (4).
Nous possédons une réserve énorme, illimitée, de possibilités, de codi-
gurations, de connexions, d’états mentaux qui n’ont jamais eu lieu ou qui
n’auront pas lieu. Cette réalité cérébrale traduit la richesse, la diversité, et
l’unicité du cerveau humain. Que les formateurs (et les parents) ne l’oublient
jamais : il ne peut exister deux cerveaux semblables dans toute l’humanité.
Une autre caractéristique du cerveau, qui découle des chiffres cités ci-
dessus et de la simple observation d’une microphotographie de neurones,
est la complexité des microcircuits neuronaux et des règles impératives
d’associativité et d’interconnectivité. Cette complexité est tout particulière-
ment illustrée par la structuration du système visuel, capable de coder et
de gérer la luminance, la couleur, la forme, le mouvement, le relief ...
Aucune partie, aucune activité cérébrale n’a lieu isolément.

(3) Cf. NAUTAW. et FREITAGM. (1981).


(4) Cf. GARDNERH. (1974).
102 Notre cerveau aujourd’hui

La non-linéarité, spécifique du fonctionnement cérébral, est une autre


caractéristique du transfert de l’information et ceci est particulièrement
frappant dans le système auditif: c’est la distorsion non linéaire qui crée les
harmoniques.
La non-linéai-ité est la condition de la créativité.
Toutformateur devrait se répéter sans cesse que compartimenter le savoir
et ignorer la complexité du cerveau, c ’est 1’appauvrir.
Aux caractéristiques déjà citées, il faut en ajouter une autre, qui découle
également des précédentes et de la richesse extraordinaire du cerveau : c’est
sa plasticité. I1 semble que les recherches nous autorisent à penser que
lorsqu’on aborde le domaine des mécanismes cérébraux, on se trouve en
présence d’un ensemble pré-établi qui réclame une validation par l’expé-
rience ;une actuulisation sans laquelle on assisterait, non pas à une évolution,
mais à une involution (5).
L‘évolution phylogénétique et le développement ontogénétique du cer-
veau apportent une autre précision : le cerveau fonctionne de la façon dont
il s’est constitué, à partir de données génétiques (innées) et de données
(acquises) en provenance de l’expérience. Nous construisons notre câblage.
Un processus interne de structuration permet au réseau initial d’utiliser
les événements successifs pour se modifier. La lente et longue maturation
du cerveau à travers les âges («Nous sommes nés il y a 15 milliards d’années D
dit J. Charron) nous indique qu’il fonctionne en structure et selon un principe
de non-séparativité. Nous avons gardé l’héritage du passé : un cerveau ancien,
primitif, auquel de nouvelles structures, beaucoup plus complexes, se sont
ajoutées et qui nous ont permis d’être sous un contrôle génétique moins
étroit. L‘extraordinaire histoire de la croissance du cerveau, de la différen-
ciation en cellules, tissus, organes et organisme de la matière vivante
originelle, pose la question de la nature de l’ordre biologique et de la
communication entre les cellules nerveuses de notre cerveau: de quelle
analogie peut-on se servir pour étendre notre compréhension de l’organe de
l’apprentissage ?

2. QUEL MODÈLE POUR NOTRE CERVEAU ?

De tout temps, les hommes ont tenté de trouver une analogie pour
représenter la réalité physiologique de la pensée.
Au cours des siècles, les découvertes techniques et physiques en matière
de transmission cle l’information ont très nettement influencé les conceptions
et théories sur la nature de nos mécanismes mentaux : on est passé du modèle
mécaniste (pour La Mettrie «le cerveau a ses muscles pour penser comme
les jambes pour marcher))), au modèle hydraulique de Descartes. Ce fut
ensuite le tour dui modèle électrique de Glisson, Von Haler, Galvani et Du
Bois-Reymond, qui fut adopté quand les découvertes en électro-chimie

( 5 ) Cf. ROBERT.J.-M. (1982).


L’observateur observé 103

complétèrent les connaissances précédentes. Le moment venu, on se servit


aussi du modèle du bureau télégraphique central pour expliquer que le
cerveau donne et fait attendre la communication.
La deuxième moitié du xxesiècle propose des modèles inspirés des
techniques contemporaines, électronique et informatique, et des découvertes
en neurobiologie.
Les enseignements, tirés de la durée de vie des modèles qui nous ont
précédés, nous obligent à émettre prudemment l’idée que les modèles ci-après
ne peuvent être que provisoires... Tout modèle de l’activité cérébrale révèle,
en filigrane, une conception sous-jacente de l’homme, de l’Univers et de leurs
interactions. Certains modèles empruntent ou oscillent encore entre l’une ou
l’autre de ces positions :
- l’empirisme, partisan du développement passif des capacités par accu-

mulation d’expériences ;
- le nativisme pour lequel les formes innées se révèlent progressivement

au contact de l’environnement ;
- le constructivisme pour qui le sujet construit progressivement sa repré-

sentation du réel, en agissant sur l’environnement...


Les axes autour desquels se réalisent l’activité de l’organisme humain et
sa représentation du monde sont, pour les uns, la motricité de l’acte physique
et son cadre restreint, pour d’autres, un cadre beaucoup plus vaste: celui
du système dans lequel l’homme évolue.
I1 n’est possible ici que d’évoquer quelques noms qui nous indiquent les
nouveaux horizons que nous ouvre la science : Bateson, Wilden, Guillé,
Capra, Stapp, Sheldrake, Prigogine, de Rosnay... Présenter, même briève-
ment, leurs théories ne leur ferait pas justice. Elles se complètent et donnent
de la réalité un aspect différent, selon l’éclairage choisi.

Ordinateur ou servo-mécanisme ?

Les neurobiologistes expliquent que le cerveau sélectionne, filtre, établit


des circuits. Des programmes se créent peu à peu : ce que le langage courant
appelle des habitudes et les formateurs des savoir-faire.
On utilise souvent l’analogie entre le cerveau et l’ordinateur pour
expliquer les phénomènes de codage et de décodage, et le triple processus
de prise, de traitement et de production de l’information. L‘ordinateur,
comme le cerveau, a la capacité d’extraire l’ordre du désordre, de traiter
l’information, de la mettre et la garder en mémoire. Son nom, un néologisme
introduit en 1956 par I.B.M., est donc particulièrement bien choisi (en
français tout au moins !) puisqu’il met l’accent sur la notion d’ordre.
Cerveau et ordinateur reconnaissent les différences et les similitudes. Ils
fonctionnent grâce à des programmes et des sous-programmes, suites
ordonnées et hiérarchisées d’instructions.
Pourtant, ce serait une erreur de penser, comme on l’a longtemps fait,
que le cerveau fonctionne selon le schéma suivant :
I04 Notre cerveau aujourd’hui

entrée
(input) -b
(( boîte noire D t- sortie
(output)

Dans le schéma ci-dessus, l’acquisition est considérée comme étant la


différence entre l’entrée et la sortie.
Ce schéma est l’illustration de la pédagogie de l’impatience... et ne
convient pas, pour deux raisons. D’une part, lorsque le cerveau est en contact
avec des stimuli (extérieurs, il s’agit beaucoup plus d’une (( prise D d’infor-
mation (intake) que d’une entrée passive (input). En effet, rappelons-nous,
les organes des sens sont desfiltres, comme le langage, comme la motivation
(ou la dé-motivation...), comme les expériences passées, comme les projets
futurs et bien d’autres facteurs, stimulants ou inhibiteurs. En second lieu,
l’organisation du cerveau est davantage celle d’un servo-mécanisme, fonc-
tionnant par un double processus de rétro-action (feedback) et de pro-action
(feedforward).
La figure 5, adaptée de Karl Pribram, rend beaucoup mieux que ne le
fait le schéma précédent, la propriété d’auto-régulation, qui est l’une des
caractéristiques de notre cerveau :

prise .- -- ____---- sortie


d’informatiori i
I
rétroaction I
I

+
l
!

fonctionnement

4
rétroaction

Figure 5. Le micanisme d’auto-régulation du cerveau (d’après K. Pribram)

Du point de vue du neurobiologiste, l’originalité du cerveau réside dans


ce qu’« il ne distingue pas le software du hardware )) (6). En effet, les points
suivants :

J.-P. (op. cit., p. 161).


(6) CHANGELJX
L’observateur observé 105

- +
l’unité de base (le neurone jonction),
- l’énergie utilisée (électro-chimique),
- la circulation de l’information (plusieurs organes effecteurs, plusieurs

niveaux de complexité croissante...),


- le processus (non linéaire et simultané),
- les langages (plusieurs codes simultanément : verbaux, non verbaux ...

moléculaire, abrégé, etc.),


- les mémoires (évolutives, non localisées, liées à l’affectivité...),
- l’auto-régulation, l’anticipation, l’autonomie, la croissance,

- la conscience,
- l’affectivité,

- la créativité, etc.,

sont autant de facteurs qui séparent pour le moment plus qu’ils ne les
rapprochent, le cerveau de l’outil. Celui-ci, aussi perfectionné soit-il, ne peut
être que le prolongement des gestes cérébraux de l’homme et il présupposera
toujours un organisme humain : (( un arc dans un circuit plus grand )) comme
le décrit G. Bateson, celui de l’homme et de son environnement.
Un exemple de l’action rétroactive d’une activité cérébrale sur la structure
cérébrale est l’impact de l’écriture sur la latéralisation hémisphérique. En
effet, il semble que le code écrit, pictographique, alphabétique ou syllabique,
soit à la fois le produit et le moteur de sélectivités fonctionnelles, pertinentes
dans un milieu culturel donné. I1 est trop tôt pour que se confirment les
hypothèses de la recherche neuro-culturelle menée à Toronto, au Canada.
Mais il est certain que l’exploration de l’apprentissage de l’écriture et des
langues étrangères à la lumière des connaissances neurobiologiques, permet-
tra un développement nouveau des méthodologies dans ces deux
domaines (7).
L‘avenir devrait faire cohabiter le potentiel illimité du cerveau humain
et les capacités de vitesse, précision, et stockage de l’ordinateur. C’est l’avenir
que conçoit la synergétique, théorie élaborée pour explorer les possibilités
d’auto-ré-organisation de certains systèmes, et J. de Rosnay pour l’homme
sym-biotique, capable d’explorer directement la mémoire de l’ordinateur sans
faire appel aux organes des sens.
11 est essentiel et urgent que l’investigation des actes mentaux, des
mécanismes qui les sous-tendent et les progrès accomplis dans le domaine
de l’Intelligence Artificielle soient menés en étroite collaboration. Ceci ne
sera possible que si les moyens accordés a l’exploration de l’Intelligence
Artificielle le sont également à l’exploration de l’Intelligence Naturelle ; et
si tous, neuroscientifiques, chercheurs, praticiens, éducateurs collaborent et
apprennent à franchir des cloisons inventées au cours des siècles pour séparer
des domaines qui ne le sont ni dans notre macrocosme, ni dans notre
microcosme. L‘avenir de l’une et de l’autre formes d’intelligence dépend
essentiellement, comme le suggère Seymour Papert, de la compréhension de
l’outil informatique : un outil dont il est vain de fixer les limites et qui doit

(7) Cf. ROCH-LECOURS


(1984) et de KERCKHOVE
(1984).
106 Notre cerveau aujourd’hui
nous aider à rendre moins prégnantes les nombreuses séparations dont nous
avons encombré nos débats philosophiques (8).

Le modèle holographique

Karl Pribrarri a développé l’hypothèse holographique (du grec : holos,


le tout), avancée par K. Lashley en 1950. La perception et l’imagerie mentale
feraient appel à une information distribuée, selon un processus tel que chaque
partie contient la totalité de l’information, quelle que soit sa localisation.
Pour Pribrarn, les impulsions nerveuses sont semblables à des trains
d’ondes. Les structures nerveuses étant toutes connectées entre elles, direc-
tement ou indirectement, une modification de fréquences d’impulsion se
répercute comme les rides qui interfèrent à la surface d’une mare où l’on
a jeté un caillou., puis un autre. Le cerveau ne stockerait pas les cailloux,
mais les rides.
L‘holographie, inventée par Gabor en 1948, est fondée sur le codage de
domaines de fréquences et sur la propriété d’interférence des ondes courtes.
L‘holographie permet d’obtenir des images grâce à un filtre optique qui gèle
l’onde visuelle. L,’image est lue grâce à une source lumineuse cohérente, le
laser en l’occurrence.
Le cerveau et les processeurs optiques faisant usage d’hologrammes ont
en commun plusieurs propriétés : celle de reconnaitre instantanément un
objet connu, ou un objet déformé (la tolérance aux défauts) ; celle d’une
mémoire associative, récupératrice d’un élément grâce au lien qui existe entre
cet élément et Uri autre ; celle de restituer la totalité à partir d’un fragment
infime (9).
En plus de la notion de récupération fonctionnelle et de dé-localisation
de la mémoire, le modèle holographique rend compréhensible le phénomène
de transfert d’apprentissage. I1 existerait un mécanisme cérébral qui distribue
l’apprentissage : on peut écrire un mot avec la main, le pied, l’épaule ou...
le nez, bien que la partie du cortex moteur correspondant aux différentes
parties du corps autres que la main n’ait jamais été entraînée à le faire.
Pribram cite l’exemple du système visuel : quand 80 % du champ visuel
est rendu invisible par une lésion du cortex, le processus de reconnaissance
et d’identification est rendu possible grâce aux 20 % restants. I1 en est de
même pour la rétine.
J.G. Roedereir, chercheur à l’université de l’Alaska, donne une explication
équivalente dans le domaine auditif concernant la perception de la musique :
les signaux neuraux, correspondant spatialement et temporellement à l’ex-
citation locale de la membrane basilaire de la cochlée, s’organisent de façon
tonotopique ; puis, on passe de la représentation photographique point par
point à une représentation hologique au niveau cortical, dans laquelle
l’activité d’un point de la membrane basilaire correspond à l’activité d’un
ensemble étendu et diffus de neurones.

(8) Cf. aussi SIMONS G.-L., Les ordinateurs de demain, Masson, 1985 ; RÉMYC1. (1986).
(9) PRIBRAM K. (1977).
L’observateur observé 107

Le stockage et le rappel associatif sont également des processus pour


lesquels il n’est pas nécessaire de re-vivre l’événement, mais seulement une
partie, ou un aspect, un moment de l’événement original. Roederer cite les
quatre notes du célèbre (( ta-ta-ta-taaa )) de la 5“ Symphonie de Beethoven
pour décrire l’aptitude à reconnaître des structures et ensembles d partir de
quelques éléments partiels, sans que l’on ait besoin, comme dans un système
de mémoire photographique (livres, bandes magnétiques, disques, films...)
de retrouver l’adresse, le nom et l’objet lui-même tout entier.
Des recherches menées à Londres par un jeune chercheur italien ont
apporté un éclairage supplémentaire sur l’analogie entre holographie et
holophonie. D’après Hugo Zuccarelli, l’oreille émet une tonalité de référence.
L‘information spatiale est fournie au cerveau par l’interférence entre les sons
extérieurs et la tonalité de référence générée par l’oreille. Zuccarelli enregistre
des sons variés, accompagnés par un spectre de tonalités pratiquement
inaudibles, mais perceptibles dans certaines circonstances. I1 incorpore des
tonalités de références, ce qui fait générer par le cerveau un deuxième faisceau
de référence qui joue le même rôle que le rayon laser, à savoir créer une
interférence entre l’objet et l’onde réfléchie ; l’objet est reconstitué en relie$
L‘effet produit est non seulement que les sons entendus sont plus réels que
la réalité : ils semblent se mouvoir librement dans la pièce et parfois même,
être à l’intérieur du cerveau ; mais une synesthésie surprenante a lieu : odeurs,
images sont perçues même dans l’obscurité, sensations tactiles, émotions,
sont ressenties par le sujet. Les malentendants disent être sensibles à
l’expérience. Les malvoyants décrivent des expériences visuelles très fortes.
I1 semble que l’expérience faite par Zuccarelli, en faisant appel à la
caractéristique holographique du cerveau, produise un état de conscience
rnodij2.
Le c h a m p d’application de l’approche h o l o g r a p h i q u e o u
holograrnmorphique, selon la terminologie adoptée au colloque sur les
Approches holoscopiques et hologrammorphiques de la Pensée (IO), est très
vaste :
~ la pensée hologrammorphique permet à chacun de respecter les lois du
fonctionnement cérébral,
- dans la recherche, l’approche linéaire et toute attitude réductrice cèdent
la place au décloisonnement des connaissances,
- le monde de l’apprentissage et de la formation bénéficient d’une approche
à la fois heuristique et précise, synthétique et analytique.

Système ouvert et structure dissipative

Selon l’une des théories les plus récentes, celle d’Illya Prigogine pour
laquelle il a reçu le Prix Nobel en 1977, les ondes cérébrales sont expliquées
en terme de structures dissipatives temporelles. La théorie de Prigogine non

(10) Approches holoscopiques et hologrammorphiques de la pensée, Actes du Colloque


sur la logique holoscopique, 7 et 8 novembre 1980, Université Paul-Valéry, Montpellier.
108 Notre cerveau aujourd’hui
seulement réunit la biologie et la physique, mais comporte de nombreuses
implications en psychologie, sociologie, et sciences de l’éducation.
Dans l’univers, affirme Prigogine, l’ordre naît de l’entropie, et non
malgré elle. Les structures, nées de l’entropie, sont associées à un principe
d’ordre entièrement différent, que l’on pourrait appeler ordre parfluctuation.
Elles sont créées et maintenues grâce aux échanges d’énergie avec le monde
extérieur, dans des conditions de non-équilibre.
Le cerveau essaie constamment d’atteindre l’équilibre au moyen d’oscil-
lations et par la création de nouvelles structures. L‘oscillation est une activité
spontanée du neurone. Elle ne peut apparaître que dans un système ouvert
qui, comme on l’a vu, correspond à la définition du système nerveux central.
L‘oscillation ne se développe que lorsque le système est hors équilibre, mais
dans un état stable: c’est ainsi que se constitue une structure dissipative.
Lorsque les oscillations atteignent un état cahotique - comme dans les cas
de conflit psychologique - le cerveau se réorganise. I1 génère de nouvelles
structures, plus cohérentes.
Quant aux re1,ationsentre les flux de matière et d’énergie que le système
échange avec le monde extérieur, elles sont non linéaires, comme l’est le
déclenchement explosif de l’influx nerveux ; comme le sont les interactions
des neurones dans le cerveau.
Pour Prigogine, les fluctuations du système qui représentent le hasard,
et l’instabilité du système qui représente la nécessité, coopèrent et ne
s’opposent pas. Lorsqu’un nouvel état se crée, il possède un plus grand
potentiel de changement. A chaque nouveau niveau de complexité corres-
pondent de nouvelles règles. I1 est intéressant de rapprocher ces termes de
ceux du neurophysiologiste : (( Un organisme vivant est en état de déséqui-
libre permanent et il est plus vrai de parler d u n état central fluctuant que
d’une constance du milieu intérieur N (1 1).
La théorie de Prigogine possède d’immenses implications dans le
domaine de la compréhension du fonctionnement cérébral et de la
conscience. Elle implique, par exemple qu’aucun changement ne peut avoir
lieu tant que l’état de conscience reste immuable. Notre état normal de
conscience est dominé par une activité cérébrale rapide (ondes bêta), mais
de faible amplitude, pendant laquelle nous sommes attentfs aux stimuli
extérieurs et non à notre expérience intérieure. Des états de conscience
modifiés, tels que la relaxation et la méditation, se caractérisent par une
augmentation de l’amplitude des ondes cérébrales au rythme plus lent (ondes
alpha) : ces états de conscience augmentent les fluctuations et produisent un
changement significatif, une pénétration plus grande de la réalité que ne le
fait notre état de conscience quotidienne et donc un apprentissage plus
efficace.
La musique, les images mentales, la méditation, la respiration rythmée,
les techniques de relaxation, les pauses structurantes, sont des facteurs
permettant l’augmentation de l’amplitude des ondes cérébrales ; c’est-à-dire,

( i l ) VINCENTJ.-ID. (op. cit., p. 152).


L’observateur observé 109

le passage en ondes alpha, par conséquent la naissance de nouvelles


structures, et l’émergence de flash de compréhension.
Ce qu’il ne faut pas oublier d’ajouter, c’est qu’il est essentiel de respecter
les fluctuations du système, c’est-à-dire, de veiller 2 l’alternance des deux
états de conscience : une prise d’information directe sur le monde extérieur,
alternant avec des moments d’intériorisation. La pédagogie oublie souvent,
dans son obsession du contenu et sa poursuite de l’efficacité, de ménager
ces moments de pause, les seuls capables de respecter l’alternance et de
permettre aux fluctuations de la pensée de faire leur œuvre.

Autres modèles

I1 paraît essentiel de souligner que tout modèle de fonctionnement qui


se veut conforme à la réalité neurobiologique doit être dynamique. Ce qu’il
s’agit d’affirmer - et de redire souvent, dans le monde de l’éducation et
de la communication plus que dans tout autre - c’est que ni le Temps ni
l’Espace ne sont des entités distinctes : l’un et l’autre forment un continuum
quadridimensionnel et ils sont intimement liés. Un modèle pédagogique qui
se veut cohérent doit tenir compte de ce que la physique quantique nous
a révélé de l’Espace-Temps.
Nos organes des sens, avec l’aide de notre cerveau, peuvent observer
les représentations en deux et trois dimensions mais ils ne peuvent expéri-
menter l’Espace à quatre dimensions. Notre cerveau, lui, peut compren-
dre la réalité en quatre dimensions : c’est là l’un de nos paradoxes. La
question qui se pose - et s’impose - est de savoir comment nous allons
intégrer cette réalité dans notre représentation du monde ; comment nous
allons la transmettre et l’enseigner ou, plus vraisemblablement la ré-enseigner
à l’enfant et à l’ancien enfant qu’est l’adulte socialisé et (< enculturé D (12).
Notre cerveau occidental a une très nette tendance à donner la pré-
dominance à l’objet et à son observation. Dans notre poursuite de l’objec-
tivité, nous nous identifions à l’objet perçu et nous oublions que, sans nous,
c’est-à-dire sans notre système perceptuel, l’objet n’aurait ni forme, ni
dimension, ni profondeur, ni couleur: la flamme de la bougie, le coucher
de soleil... existent tant qu’un système visuel les capte. Dès que nous quittons
la scène, seuls les phénomènes physiques subsistent et nous ne pouvons
qu’imagines leur forme et leur nature...
Grâce aux découvertes scientifiques, et à une meilleure connaissance de
l’homme transmise par certaines traditions depuis des millénaires (mais si
rarement entendue en Occident), nous avons les moyens, aujourd’hui, de
découvrir ce que veut dire faire l’expérience du monde concret sans dissoudre
le ressenti dans l’objet observé. Nous avons les moyens - et il est urgent
de les mettre en œuvre -- de (re-)donner à l’observateur les clés de sa propre

(12) Cf. THÉVENIN P. (1980).


110 Notre cerveau aujourd’hui
nature, de son identité, de la conscience de soi, en l’éclairant sur son propre
processus, son système, sa structure.

Un modèle cybernétique, appliqué à l‘apprentissage d‘une langue


étrangère

L‘apprentissage des langues étrangères a fourni le cadre d’une approche


qui nous paraît correspondre à l’exigence décrite ci-dessus : elle a été définie
par James R. Nord comme une synthèse cybernétique et s’applique à la
méthodologie de 1 ’écouteet de la prise de parole.
L‘approche cybernétique de l’apprentissage d’une langue étrangère tient
compte de la révolution scientifique décrite par Thomas Kuhn, dont les
remous n’ont pas encore atteint tous les rivages... Les événements, et en
particulier les événements de parole, sont réintégrés dans la trajectoire d’un
temps non réversible. Un cadre nouveau et de nouvelles bases de perception
de l’acte de compréhension et d’expression sont posées.
En didactique ties langues étrangères, la controverse a porté pendant des
années (et sans doute portera encore) sur le rôle et l’ordre dans lequel
enseigner les différents savoir-faire : réception et expression des codes oral
et écrit. Pour certains, s’exprimer oralement est la meilleure façon d’appren-
dre à écouter. D’autres ont adopté une attitude diamétralement opposée,
recommandant que l’écoute précède largement la prise de parole. D’autres
insistent sur la valeur communicative du langage et l’importance de pratiquer
dès les premiers instants de l’apprentissage l’interaction de l’écoute et de la
prise de parole.
La théorie cybernétique réintroduit le concept de cause finale, et plus
particulièrement celui d’objet intentionnel, comme élément légitime d’expli-
cation du comportement. La durée par l’intermédiaire du processus de rétro-
action, devient partie intégrante de l’acte. Le comportement est déterminé
non plus par l’environnement mais par l’individu lui-même, attesté système
de contrôle auto-organisateur qui génère sa propre activité pour contrôler
sa propre perception. C’est un réajustement constant que l’organisme opère.
Appliquer le principe de rétroaction à l’activité langagière permet de
découvrir que la prise de parole est contrôlée par une aptitude préalable à
l’écoute, un (( appareillage préexistant de vérification et de guidage des
perceptions de l’individu D (13).
Les implicatioris de cette théorie interpellent le système éducatif tout
entier, car le contrôle de l’acte ne peut désormais appartenir qu’à l’apprenant.
Ses performances dans la langue étrangère sont construites à partir de ses
attentes des structures langagières, elles-mêmes élaborées à partir de ce qu’il
a appris par l’écoute. Le rôle du formateur a changé : observer si l’indicateur
du résultat désiré (réussite) est présent ou non. Dans l’apprentissage de la
langue étrangère, l’erreur est un indicateur d’une écoute défectueuse et sera

(13) J. NORD(1983 et 1986); cf. aussi KUHNT.(1962).


L’observateur observé 111
corrigée non pas directement, mais à partir d’une nouvelle écoute d’un type
approprié, c’est-à-dire en tenant compte de la stratégie que l’apprenant a
utilisée pour parvenir au résultat observé.
L’apprentissage devient celui de la perception, et le rôle du formateur
est d’élargir le champ perceptif de l’apprenant.
Le monde de l’éducation et de la communication ne peut ignorer les
conséquences d’un changement de paradigme. Le modèle cybernétique est
moins simple et moins immédiatement rentable qu’un modèle analytique et
une approche orientée sur le comportement extériorisé de l’apprenant.
Mais, pour reprendre une image utilisée par A. Maslow, si le seul outil dont
vous disposez est un marteau ... vous aurez tendance à tout traiter comme
un clou ... Tant que les formateurs et enseignants estimeront que leur rôle
réside dans le contrôle de résultats observables, ils seront tentés de restreindre
leur action à la boucle stimulus-réponse.
L‘approche cybernétique permet à une activité comme l’écoute de jouer
pleinement son véritable rôle de préparation à l’expression en respectant à
la fois l’intégralité du système d’organisation cérébrale et celle du langage.

3. CONDITIONS OPTIMALES DE FONCTIONNEMENT :


HYGIÈNE ET NOURRITURES CÉRÉBRALES
L‘hygiène cérébrale doit tenir compte des facteurs qui conditionnent ce
fonctionnement. Ce sont :
en premier lieu, l’oxygénation. On l’a vu, le cerveau consomme à lui tout
seul 20 % de l’oxygène du corps. Nous consommons chaque jour environ...
15 kg d’air, soit 4 kg d’oxygène !
L‘insuffisance d’oxygénation du cerveau a des conséquences catastrophi-
ques. L‘hypoxie provoque une véritable souffrance cérébrale. En l’absence
d’oxygène, un déficit d’énergie se produit, une perturbation de la microvas-
cularisation cérébrale, qui peut conduire à la mort neuronale.
Donner de l’oxygène au cerveau, l’aérer, renouveler l’air de l’espace clos
dans lequel il se trouve, apprendre à respirer (ce que bien peu d’occidentaux
savent faire), contrôler et adapter la respiration selon les tâches à accomplir...
semblent des recommandations superflues et pourtant. .. ! ceci demande
qu’un effort soit fait pour réorganiser la vie quotidienne, dans les familles
et les écoles, et les entreprises.
Mais il existe un autre aspect du problème : les ions négatifs, véritables
vitamines de l’air, s’associent à l’oxygène de l’air, et assurent une meilleure
oxygénation des cellules. Ils permettent une élimination plus facile des
toxines.
Les effets de l’ionisation négative sont l’objet de plus de 5 O00 recherches
effectuées dans le monde entier. Ces études concluent à la diminution des
ions négatifs en milieu urbain, dans les pièces peu ou artificiellement
ventilées, dans le voisinage des écrans d’ordinateur, dans les lieux enfumés
par le tabac ou comportant des matériaux plastiques et synthétiques, des
équipements électriques et électroniques, etc.
112 Notre cerveau aujourd’hui
Les effets de l’ionisation sur les facultés intellectuelles ont été étudiés dans
une recherche pilote en milieu scolaire, auprès d’enfants de onze ans, aux
Pays-Bas, en 1984. Les paramètres étudiés étaient la concentration et le
rythme de travail.
Les résultats de la recherche concluent aux effets suivants de l’ionisation
négative de l’air (effectuée par ioniseurs) :
- amélioration des résultats scolaires,

- amélioration de la capacité de concentration,

- amélioration du rythme de travail.


On sait maintenant qu’il existe une relation entre ionisation et production
de sérotonine, une hormone qui règle l’activité du cerveau. Les ions négatifs
font baisser le taux excessif de l’hormone, ce qui permettrait à l’organisme
de mieux utiliser l’oxygène. Ils accroissent le nombre des hématies et leur
teneur en oxyhémoglobine ; ils font baisser une tension artérielle trop élevée ;
ils améliorent la ventilation pulmonaire.
L‘effet de l’ioniisation sur l’E.E.G. est une diminution de la fréquence des
ondes alpha et une augmentation de leur amplitude, ce qui signifierait une
activité cérébrale alccrue et plus structurante (14).
Les Orientaux savent, depuis des millénaires, que les activités mentales
et la respiration sont liées. Le prana vayu, ou respiration physique, régularise
le cœur et les poumons. Le mot prana en sanskrit veut dire constance (pra)
et mouvement (na). Le prana est une force en perpétuel mouvement. La
respiration physique, seule prise en compte par l’occident, a une double
réalité pour la pensée orientale: le souffle a, en plus de sa dimension
physique, une réalité non manifeste, cosmique ; il est la compagne de lame :
on naît avec lui et on meurt lorsqu’il disparaît.
Les recherches actuelles, en Occident, confirment ce que les Upanishads
enseignent depuis des millénaires, à savoir que le rythme de la respiration
change à intervalle régulier, comme le rythme cardiaque. Ce que les yogis
connaissent depuis longtemps, à savoir que l’homme respire par une narine
pendant un cycle de deux ou trois heures, puis par l’autre narine, la science
l’a découvert récemment.
La proportion des fibres du système nerveux autonome étant vingt fois
plus grande dans les cavités nasales que dans les autres parties du corps,
on comprend que la respiration ait une influence indéniable sur les fonctions
contrôlées par ce système : rythme cardiaque et circulation sanguine.
I1 reste encore beaucoup à découvrir dans le domaine des correspon-
dances entre les différents types de respiration et leurs effets sur les corps
physiques et psychiques. Le swara yoga (a swara )) signifie en sanskrit le son
de son propre sot&!e et «yoga» signifie union) relie chaque type de
respiration à une activité et à une énergie différente :
- la respiration par la narine gauche est liée à l’énergie et à l’activité

mentales,
- la respiration par la narine droite est liée à l’énergie et à l’activité
physiques,

G. (1984) ; cf. aussi LOUISJ.-C., ANGLARD


(14) VAN KEZSTERECN P. et al. (1986).
L’observateur observé 113

- la respiration par les deux narines a la fois est liée a l’énergie et l’activité
spirituelles.
I1 est donc de la plus grande importance d’équilibrer, d’ajuster, d’adapter
le rythme respiratoire à l’activité poursuivie (15).
Le travail sur la respiration est l’une des premières pratiques a introduire
dans une pédagogie cohérente et compatible avec lefonctionnement cérébral.
Un autre facteur intervenant dans l’hygiène cérébrale est la lumière
naturelle : elle facilite la production de la neuromélanine, molécule
indispensable à l’organisation cérébrale, probablement la clé pour com-
prendre l’évolution et le développement embryologique, la réparation des
tissus endommagés, la régulation homéostasique, et la modification des
états de conscience.
Autre facteur d’une importance capitale pour un cerveau en bonne santé :
une nourriture variée et riche en lécithine, phosphore, calcium, vita-
mine BI, B6, B9, B12, protéines ...
Les graisses poly-non-saturées auraient un effet bénéfique pour l’appren-
tissage. L‘accord semble se faire sur :
- l’effet calmant des hydrates de carbones (une étude néerlandaise a même

conclu a une amélioration des troubles psychiques chez des patients


schizo-affectifs),
- l’amélioration du contrôle de la fine musculature grâce à de fortes doses

de vitamines B1, B6 et B12.


Mais les effets des différentes substances varient suivant les individus, les
moments de la journée ou les saisons... et très probablement aussi, les lieux
et contextes.
Les pires ennemis du cerveau sont, avec l’anoxie, la privation d’aliments
et la malnutrition. Un cerveau d’enfant affamé est un cerveau mutilé. Si la
malnutrition survient pendant la vie intra-utérine ou dans les quatre pre-
mières années de la vie, les dégats seraient irréversibles (16).
Un autre atout pour un cerveau sain est une vie d’alternance sommeil-
/ veille ; activité/ repos et relaxation ; projets/ réalisations, etc. Rappelons,
pour un apprentissage efficace, l’importance de l’alternance d’activités
cérébrales (ondes bêta et alpha) correspondant à une augmentation des
fluctuations des états de conscience. Une bonne qualité d’éveil se prépare
pendant le sommeil et une bonne qualité de sommeil se prépare pendant
l’état de veille : quand donc les parents des jeunes enfants, les adolescents
et les adultes que nous sommes comprendront-ils cette réalité toute
simple ?
De nombreuses techniques autogènes (Schultz, Alexander, yoga nidra,
sophrologie, musicothérapie...) ou instrumentales (électro-stimulation crâ-
nienne, bio-feedback...), proposent des moyens d’atténuer le stress, la
fatigue ou la douleur. Les électro-encéphalogrammes des personnes qui
pratiquent la Méditation Transcendantale révèlent une activité cérébrale

(15) SATYANANDAS. (1983) ; LUCEG. (1970) ; FLAKM. et DE J. (1985).


COULON
E.A. (1976).
(16) Cf. SHNEOUR
114 Notre cerveau aujourd’hui
plus cohérente des deux hémisphères et une meilleure qualité de mise en
éveil pendant l’apprentissage, plus de flexibilité, plus de cohérence et de
calme devant une information ou une situation nouvelle ou incongrue.
Nourrir le cerveau signifie également lui donner des nourritures
affectives er la possibilité d’exprimer son affectivité.
I1 semble que dans ce domaine également, une période critique existe
jusqu’à trois ans, pendant laquelle les lobes frontaux se développent paral-
lèlement à un sens de l’empathie et de l’altruisme. Certains auteurs en voient
la raison dans les nombreuses connexions entre les lobes frontaux et le
système limbique (17).
L‘état grabataire de l’affectivité chez certains adultes peut s’expliquer par
une carence affective dans les premières années de la vie. Les exemples de
blocage, d’inhibition, de dysfonctionnement cognitif, malheureusement fré-
quents dans les situations d’apprentissage scolaire, sont souvent dus à un
état émotionnel, un choc ou un rejet affectif qui date, parfois, de la petite
enfance.
Le cerveau a besoin d’une troisième sorte de nourriture : la connaissance,
ce que l’homme de la rue appelle (( l’instruction ».En particulier, le cerveau
a besoin de s’exprimer, et pour cela, il a besoin de langage@).
De nombreusles expérimentations ont été faites pour évaluer l’impact du
langage sur les aptitudes et performances de sujets analphabètes d’une part,
et alphabétisés d’autre part.
La recherche neuro-culturelle, due à des études poursuivies au Canada
depuis 1982, n’est pas encore une science reconnue. I1 semble urgent de lui
donner un statut et de l’écouter, car elle porte sur les conditions et effets
de l’interaction entre le système nerveux et les objets culturels. Ces travaux
ont l’intérêt d’explorer essentiellement les liens entre individus et environ-
nement social et culturel, en particulier les moyens de communication, dont
le langage et ses supports.
C’est dans ce cadre qu’André Roch-Lecours de l’université de Montréal,
tente de déterminer dans quelle mesure l’alphabétisation est liée à une
maturation cognitive du cerveau. Cette recherche (en cours) souligne que
les notions d’alphabétisation et de scolarisation sont en chevauchement
absolu, ainsi que celles d’analphabétisme et de malnutrition. I1 est extrê-
mement difficile et risqué d’avancer des conclusions sur la représentation
cérébrale du langage chez les illettrés et, de là, sur le rôle de la langue écrite
sur la latéralisation fonctionnelle.

L‘âge du cerveau
Personne n’est à l’abri de pannes, de déficits, d’accidents... ni responsable
de ses éventuelles malfaçons cérébrales. Par contre, la maintenance est la
responsabilité de chacun ; elle consiste à retrouver ou à conserver l’écosys-

(17) Cf. LURIAA.R. (1973); RABINOWICZT. (1978); cf. aussi les recherches de
DILLBECK M. & VESELYS. (Iowa), in International Journal of Neurosciences, 1986, 29, 45-
55.
L’observateur observé 115
tème dans lequel le fonctionnement cérébral est optimal («éco- )) vient du
mot grec oikos = maison), à respecter les rythmes fondamentaux de
l’organisme, et à rechercher l’équilibre des facteurs endogènes et exogènes
qui participent à la vie cérébrale.
Le vieillissement cérébral n’est pas inéluctable. Le cerveau est un organe
qui, comme les autres organes, a besoin qu’on lui donne ce dont il a besoin
et qu’on évite ce qui lui est nocif: l’alcool, le tabac, les drogues hallucino-
gènes, les dépresseurs et tranquillisants. ..
L‘opinion largement répandue attribuant à l’alcool des vertus de stimu-
lation provient d’une méconnaissance totale et de surcroît - dangereuse
~

- de ses effets : l’alcool est un dépresseur et ses effets sont cumulatifs. Les

centres corticaux supérieurs - qui contrôlent le raisonnement et le jugement


- sont les premiers à être inhibés. Le système limbique - siège de nos

émotions ~ est alors libéré de toute contrainte. Centres de l’équilibre, de


la coordination, de la conscience, et de la respiration, le cervelet et la
formation réticulée sont affectés à leur tour.
Les pires ennemis du cerveau sont aussi la démission, l’absence de projet,
la solitude (1 8).

(18) L‘Institut National de Recherche sur la Prévention du Vieillissement Cérébral, à


l’Hôpital Bicêtre, est dirigé par Mme Le Poncin Lafitte. L‘1.N.R.P.V.C. pratique l’éveil
cérébral et a pour objectif de lutter pour la préservation d’une autonomie de qualité ; cf.
aussi les recherches de M. Perlmutter, à l’University du Michigan, Cognitive Potential
Throughout Life in Birren J.E. & Bengston V.L. (Eds) Theories of Aging Psychological and
Social Perspectives on Erne, Serf and Society (à paraître) ; cf. aussi une revue des théories
sur le vieillissement dans l’article de HAYFLICK L., 7heories of biological Aging in Expe-
rimental Gerontology, vol. 20, pp. 145-159 (1985) ; cf. aussi l’article de CERAMI A. et al.
(1987).
CHAPITRE 5

QUELLES PERSPECTIVES POUR LA FORMATION ?

Les réflexions qui précèdent ont tenté de souligner ce qui, dans la réalité
cérébrale, nous semble donner lieu à une étude approfondie.
Les intervenants du monde de l’éducation et de la communication,
enseignants, formateurs, parents, responsables d’institutions ont à leur
disposition une base de données capable de leur fournir des réponses aux
questions qu’ils se posent pour organiser leurs interventions de formation
de façon plus cohérente et compatible avec le potentiel et le fonctionnement
cérébraI.
Le modèle mécaniste du monde et en particulier de l’homme apprenant,
qui a présidé pendant des siècles aux conceptions éducatives, semble être,
enfin ! suffisamment ébranlé pour que les intuitions des géants de la psycho-
pédagogie qui ont précédé la découverte d’un monde différent, subtil et
infiniment complexe, soient confirmées et ré-ensemencées.
I1 s’agit donc aujourd’hui de recommander au monde de l’éducation et
de la communication de prendre plusieurs actions.
La première est d’établir des passerelles entre les données de la science
et les besoins des éducateurs. Ceci pour éviter que soient commises desfautes
contre le cerveau.
Bien que les domaines qui restent à explorer soient immenses, nous
sommes actuellement suffisamment équipés pour tenir compte des lois
cérébrales et des règles de base du fonctionnement cérébral. Mais une
condition est nécessaire : que les cloisons entre les disciplines disparaissent,
et que l’union des neurosciences et des sciences de l’éducation (et de la
communication) s’établisse.
Des mots clés ont été dégagés tout au long du chapitre précédent. I1 reste
à les voir à l’œuvre : ce sera l’objectif de la deuxième partie de ce texte.
La deuxième action à prendre est de fixer des relations claires entre
savoir, savoir-faire et savoir-être. Cela signifie s’interroger sur ce qui se passe
en amont et en aval du savoir, c’est-à-dire mettre le projecteur non pas
118 Notre cerveau aujourd’hui
seulement sur les contenus mais aussi sur le processus, le (( comment apprend-
on », et sur l’objectif, le (( pour quoi apprend-on ».
Toute recherche en neuropédagogie doit partir des aspects fondamentaux
de l’apprentissage tels qu’on peut les définir actuellement :
O La finalité de l’apprentissage : vers quel objectif?
O La nature de l’apprentissage : quel contenu? quels types? quels
facteurs ? quelle progression ? quel itinéraire : d’où partir ? où aller ?
à quel rythme?
O La toile de fond de l’apprentissage : quel environnement ? quelle
attitude de l’apprenant face à son apprentissage ?
O Le processus d’apprentissage : quelles stratégies ? quels moyens ?
quels obstacles ? quelles réussites ? quels blocages ? quelles
contraintes ?
O L‘évaluation de l’apprentissage : qu’est-ce qu’une erreur ? une réus-
site ? un échec ? quels sont les critères, les conditions de succès ?...

Parmi les moyens capables d’établir les relations entre le savoir, le savoir-
faire et le savoir-être, nous en citerons trois :

La Conscientisation de l’apprenant et de l’enseignant


Apprenant et enseignant construisent ce que les neurobiologistes appel-
lent leur cûblage, c’est-à-dire les moyens d’interaction avec l’environnement
et de gestion de l’information.
La science nous apprend que nous sommes responsables de notre
équilibre : pour nous préserver, nous organisons et délimitons notre milieu
intérieur dont nous assurons nous-même la constance. C’est à ce prix que
nous gagnons notre autonomie.
En ce qui concerne l’apprentissage, il en va de même : si le savoir n’est
pas en constante maintenance avec le milieu, il se perd. Mais un aspect de
la conscientisatiori doit être clarifié: contrairement à ce que l’on croit
généralement, la prise de conscience ne peut intervenir en premier. Elle ne
peut que suivre un changement de comportement. Edward Hall l’explique
clairement : (( Quand le comportement change, la perception change, et
lorsque la perception change, alors il en résulte une prise de conscience. )) (1)
Nous avons sans doute, dans cette remarque, une clé pour comprendre
les difficultés et les lenteurs de l’évolution des systèmes éducatifs.

L‘expérience partagée
Transformer les relations du savoir et du savoir-faire en leur donnant
la dimension du sa.voir-être ne peut se réaliser qu’en établissant une situation
de co-expérience entre apprenant et enseignant.

(I) Cf. HALLE.(1981).


Quelles perspectives pour la formation ? 119
Comprendre et faire ont longtemps été les seuls liens entre l’élève et le
maître. Aujourd’hui, les conditions dans lesquelles l’information est enregis-
trée et conservée par notre cerveau sont mieux connues. I1 nous est possible
- et indispensable - d’ajouter un troisième volet : celui que A. Luria appelle

la barrière fonctionnelle, que les neurologistes appellent la latence, les


naturalistes la dormance, et le langage courant, tout simplement... la
patience ;ce que nous appellerons le laisser-se-faire, avec ce qu’il a de positif :
le respect du rythme de l’autre.

Le droit à la différence et à l’intelligence

Un troisième moyen de construire des liens solides entre ce que nous


savons, ce que nous savons faire et ce que nous sommes, est de pratiquer,
de vivre le droit à la différence que bien des poètes et écrivains ont proclamé
avant même que la science, aujourd’hui, nous en démontre la réalité.
Saint-Exupéry écrivait ((Si je diffère de toi, loin de te léser, je t’aug-
mente. D Notre connaissance du potentiel cérébral donne les moyens au
maître de dire à l’élève, et à l’élève de dire a l’élève : (( Si tu diffères de moi,
loin de me léser, tu m’augmentes ».
A l’heure où l’hétérogénéité des groupes d’apprenants rend la tâche des
formateurs de plus en plus ardue, il est urgent que cette vision de la différence
soit répandue, entendue, pratiquée.
De ce droit à la différence découle un autre droit : le droit à l’intelligence,
dans une invitation à suivre la longue marche, le Tao de l’apprentissage.
Chacun, quel que soit son âge, son origine, son hérédité, son passé, son
avenir... a un droit fondamental: celui de développer son intelligence, sa
faculté de comprendre, le monde qui l’entoure et ce qu’il est.
I1 faut le répéter sans relâche : la nature nous a équipés pour apprendre,
pour capter ce que nous voyons, entendons, et ressentons ;mais le mécanisme
ne fonctionne bien que si nous ne sommes pas encombrés par ce que nous
croyons savoir...
L‘apprentissage est une naissance qui doit être menée sans précipitation,
à son rythme et à son heure.
DEUXIÈME PARTIE

APPRENDRE A GÉRER
SES RESSOURCES

<<Touteâme a en elle la faculté d’apprendre et un


organe à cet usage. L’éducation est l’art de tourner cet organe
vers la lumière et de trouver pour cela la méthode la plusfacile
et la plus efficace>>
PLATON, La République (livre VII)
K Il faut des dizaines d’années, voire des siècles pour qu’un
nouveau regard apporté par la science soit adopté par tous... >>
A. JACQUARD, Moi et les Autres
VERS U N APPRENTISSAGE BlONOMlQUE

Les systèmes éducatifs, en général, reflètent la société pour laquelle ils


forment les citoyens. Cette société est elle-même l’image de la culture qu’elle
sécrète et qui l’a sécrétée.
Quant à la culture, elle s’est formée au cours de millions d’années
s’enracinant dans le vieux cerveau mammifère de l’homme. Peu à peu se
forme ce qu’Edward Hall appelle la culture inconsciente, la culture cachée
ou encore l’infra-culture qui moule, forme (et déforme), et dont la force est
d’autant plus grande qu’elle est sous-jacente.
Les facteurs qui différencient les cultures entre elles sont nombreux. Ceux
qui semblent peser le plus lourdement sont les concepts de Temps et
d’Espace. Ils déterminent, par exemple, plus qu’aucun autre, les différences
entre les langues, tant du point de vue syntaxique que phonétique et lexical.
La structure des méthodes d’éducation, beaucoup plus que leur contenu,
influence les processus mentaux, emprisonne la pensée dans un moule et la
coule dans le béton des contraintes conceptuelles et perceptuelles. L‘intel-
ligence est souvent confondue avec la conformité aux normes et la capacité
d’adaptation au système...
Les notions d’apprentissage et d’éducation sont profondément marquées
par les différences culturelles. Pour les uns, il s’agit d’imiter un modèle ;pour
d’autres, appliquer un savoir ou un savoir-faire ; répondre à un stimulus ;
pour d’autres encore, démontrer, agir, mémoriser par cœur, donner la
réponse juste, etc. A l’intérieur d’une même culture, la diversité des concep-
tions de l’apprentissage est tout aussi grande. Selon que l’on est psychologue,
biologiste, sociologue, linguiste ou mathématicien... on aura sa propre
définition de l’apprentissage et de la pédagogie.
Le formateur se trouve dans la situation paradoxale de reconnaître que
l’organe de l’apprentissage, le cerveau, d’une part obéit à des règles fonda-
mentales propres au système nerveux central, et d’autre part organise
l’information et la représentation du monde extérieur d’une façon spécifique
A chacun. Le rôle d’un formateur et, plus généralement, d’un système
éducatif, est de trouver et faciliter le lien et l’équilibre entre les ressources
de l’organisme et sa fonction afin de permettre à l’organisme de développer
124 Apprendre à gérer ses ressources

et surtout de gérer ses potentialités : bios et nomos, ensemble, ne constituent


pas encore une s’cience en cette veille du troisième millénaire... Ne serait-
ce pas le rôle des éducateurs et des formateurs de contribuer à l’émergence
d’une science indispensable à l’homme et aux hommes, la bionomie ?

Mieux gérer ses ressources n’est possible que si on les connaît


La connaissarice des potentialités et des ressources cognitives, affectives,
et physiques de l’homme n’est pas innée. L‘homme doit acquérir cette
connaissance. L‘environnement s’en charge quelquefois, mais pas toujours
(et même, sans doute, de moins en moins).
Les facteurs intervenant dans cet état de fait sont trop nombreux pour
être tous mentionnés et examinés ici. L‘un des éléments importants est la
spécialisation de plus en plus poussée des technologies qui contribue à
augmenter la distance entre l’homme et le réel. La technologie coupe
l’homme de sa seinsorialité. De plus en plus, les machines s’intercalent entre
la main de l’homme, son toucher, sa motricité et la destination de son effort,
la réalisation de son projet.
Ceci est particulièrement flagrant dans les relations de l’homme et de
son écriture: le support du code écrit s’éloigne de la main de celui qui la
crée.
Face à une situation où l’équilibre des forces intérieures et extérieures
à l’homme est de ]dus en plus difficile à trouver, la question se pose de savoir
d’une part, comment élaborer une méthodologie de 1>enseignementet les
interventions de formation qui soient cohérentes, compatibles avec le
fonctionnement de l’organe de l’apprentissage, et qui visent à développer les
ressources que tout être humain possède en lui, d’autre part, quels outils
et techniques utiliser pour atteindre ce but. Ces deux points seront évoqués
plus loin. Les réponses proposées sont le fruit de nombreuses années de
réflexion et d’expkrience pédagogique ;elles en constituent la synthèse. Cette
mise en forme d’une pratique qui a longuement mûri se veut être essentiel-
lement une contribution à ce que d’autres ont déjà dit ou fait. I1 s’agit
d’ajouter ici une pierre, là un accent ; d’étayer ici, de consolider là...
Des expériences pédagogiques, proposant des applications des données
scientifiques, existent déjà. Les exemples choisis l’ont été hors de notre
contexte éducatif français. Ces expériences ont quelques années d’avance sur
notre réflexion, et peuvent apporter un éclairage nouveau et nous encourager
à porter un autre regard sur l’acquisition des connaissances et les concepts
sous-jacents.
Nous donnerons trois exemples de réalisations pédagogiques. L‘une,
poursuivie au Venezuela, est de dimension nationale ; l’autre, dans le
Colorado, aux État-Unis, est plus restreinte mais solidement étayée par une
recherche en neurophysiologie. La troisième représente un effort remarqua-
ble de prise de conscience des facteurs culturels intervenant dans la situation
d’apprentissage et une volonté, de la part des expérimentateurs, d’instaurer
un partage au niveau des significations (« shared meanings »). Elle a été
menée en Australie auprès des Aborigènes.
Vers un apprentissage bionomique 125

Les exemples cités ne doivent pas faire oublier que de nombreuses


expériences pédagogiques sont menées en France, courageusement, malgré
les difficultés provoquées par la mouvance des décisions au niveau institu-
tionnel ... et, paradoxalement, l’inertie des structures. I1 est bien évident que
ces efforts restent présents à notre esprit tout au long de notre analyse.
La deuxième partie de ce livre est destinée à poser les bases d’une
approche méthodologique dont le contenu sera concrétisé dans la troisième
partie, plus particulièrement destinée à ceux qui se battent déjà sur le terrain,
ou qui aimeraient rejoindre ceux qui ont déjà commencé le combat.
CHAPITRE 6

QUELLE(S) PÉDAGOGIE(S)
POUR QUEL(S) APPRENTISSAGE(S) ?

Établir les bases d’une pédagogie cohérente et compatible avec le


fonctionnement cérébral est non seulement, une nécessité, mais une priorité.
En effet, malgré les efforts, l’énergie, le temps, les moyens employés et
déployés par les différents partenaires de la situation d’apprentissage, de
nombreuses solutions restent encore à trouver pour que l’acquisition des
connaissances soit plus efficace, plus heureuse, plus rentable. Ces solutions
sont d’autant plus urgentes que les hommes et les femmes de la fin du
Xxe siècle ont plus que jamais besoin de comprendre leur époque et la période
de transition dans laquelle ils vivent.
Avec les technologies nouvelles, et tout spécialement celles qui président
à la communication de l’information, on s’achemine progressivement vers
un système dans lequel l’information ne sera plus simplement traitée par le
récepteur mais sélectionnée, choisie, triée.
Le présent se prépare à partir du futur. Plus que jamais, le cerveau des
générations de demain doit être prêt à prendre l’information et à la traiter.
Le paradoxe est que l’évolution du contexte informationnel se fait
précisément dans le sens d’une surabondance d’informations visuelles et
auditives ; mais l’mil et l’oreille, saturés d’informations, ne sont plus ce qu’ils
étaient.
L‘homme occidental, tout spécialement s’il est de langue française, adhère
et s’identifie à sa fonction et à son rôle social. I1 dira, pour définir sa fonction :
<<Jesuis médecin. N I1 fait corps avec ses émotions : (( Je suis en colère. )) I1
possède ses sensations : K J’ai faim.)> Cet homme occidental est particuliè-
rement vulnérable à une (r)évolution d’un environnement aux multiples
facettes, car il s’identifie aux instruments mêmes de la connaissance : le corps
et la pensée. Ce qui lui manque, sauf s’il s’y entraîne par des techniques,
c’est la distanciation vis-à-vis du ressenti, et l’équilibre du corps et du mental ;
il lui faut (ré ?)-apprendre à être témoin et spectateur des états passagers qui
constituent son je, et développer la réalité permanente d’un soi.
128 Apprendre a gérer ses ressources

Dans l’acquisition des connaissances, comme dans d’autres domaines de


l’existence, le corps et le mental se contrôlent mutuellement et l’équilibre
de l’un entraîne celui de l’autre. Ceci est aussi vrai de leur déséquilibre.
En cette veille du troisième millénaire, que signifie une pédagogie
compatible avec le fonctionnement cérébral ? Elle vise essentiellement à :
Éviter de commettre des fautes contre le cerveau, cést-à-dire contre
I ’équilibrede l’organisme.
Déchiffrer la grammaire cérébrale de l’apprenant et de l’enseignant :
comprendre le fonctionnement des mécanismes cérébraux.
Aider I apprenant à connaître et gérer ses ressources, les diagnostiquer
et les développer.
Construire des interventions pédagogiques basées sur I ’acte d’appren-
tissage :partir de la réalité de l’apprenant.
Adapter les objectifs pédagogiques aux objectifs d’apprentissage (et
non l’inverse).
Pratiquer une telle pédagogie, c’est déjà la mettre au pluriel. I1 n’y a pas
à chercher de recettes, mais des outils et une solide base de références. Trop
de variables et d’impondérables entrent en jeu dans la situation d’appren-
tissage, dans le temps et l’espace pédagogiques, pour que ce qui a réussi a
l’un convienne à l’autre. Par contre, nous avons besoin de construire un cadre
dans lequel poser clairement les données du problème à résoudre. Ce cadre
est fourni, d’une part, par les solutions à rechercher et, d’autre part, par
une conception claire du rôle des responsables dans le système d’éducation
et une idée précise de ce qu’est l’acte d’acquisition d’un cerveau qui apprend.

1. LES SOLUTIONS A RECHERCHER


Parmi les domaines les plus souvent cités par les enseignants et les
formateurs, les difficultés suivantes sont considérées comme de redoutables
barrières dans la progression des élèves :
- L’hétérogénéité des rythmes, des profils, des styles d’apprentissage des
groupes.
- Le manque d’attention et de concentration.
- L‘agressivité et l’intolérance.

- L‘hyperactivité:.

- Les difficultés d’accès au sens et de compréhension des consignes.

- L‘image négative de soi, le découragement.

- Le dé-centrage et le manque d’intériorité.

- La faible mémorisation.

- Les difficultés de passage à l’acte.

- Le manque de ré-flexion.

- Un sens inexistant ou faible des relations :

entre le support et la signification,


entre les éléments et le contexte.
- L‘absence de système de référence, de valeurs.

- L‘absence de créativité.

- etc.
Quelle(s) pédagogie(s)... ? 129
Ces différents points sont tous, plus ou moins, étroitement reliés les uns
aux autres par un facteur commun, qui est l’absence d’intériorité, de
connaissance de soi et de confiance en soi.
(( I1 n’y a pas de connaissances extérieures sans connaissance de soi )) disait

Paul Valéry. D’autres parleront de présence à soi-même, de verticalité ou


de silence intérieur, d’autres encore de re-centrage

2. ÉDUQUER ET APPRENDRE : L‘ITINÉRAIRE DE L‘APPRENANT


On entend souvent dire que le mot éduquer vient du mot latin ex-ducere :
((Tirer de, mener hors de... U, ce qui peut suggérer que le maître tire l’élève
du ... marécage de son ignorance. Cette étymologie semble faire l’affaire de
beaucoup, car elle donne le pouvoir au maître et consacre la dépendance
de l’élève vis-à-vis du maître.
I1 existe un autre verbe latin educare qui signifie nourrir, et qui évoque
une image beaucoup plus positive de l’apprenant, car elle tient compte de
son potentiel et de ses ressources que l’école a le devoir de développer.
Cette voie (et cette voix) nous rapproche du vieil adage chinois qui nous
dit que le meilleur moyen de nourrir un homme n’est pas de lui donner un
poisson mais de lui apprendre à pêcher. Et si un esprit chagrin évoque le
dicton cher au monde anglo-saxon selon lequel on ne mène pas à l’abreuvoir
un cheval qui n’a pas soif, le monde de l’éducation et de la formation peut
sans doute s’interroger avec profit sur la qualité de la boisson offerte et les
moyens de donner soif: quelques crackers salés et poivrés, offerts au
préalable, ne déclencheraient-ils pas la soif?
L‘acquisition des connaissances ne peut pas faire l’économie de ce que
Marguerite Yourcenar décrit comme une descente en soi et une sortie hors
de soi-même. D’où l’importance de parler d’apprentissages au pluriel,
d’adaptation à l’environnement et d’itinéraire de l’apprenant.

L‘adaptation à l’environnement
Apprendre, c’est s’adapter.
Rappelons qu’historiquement, le premier acte d’apprentissage pourrait
être vieux de cent millions d’années et dater du moment où notre ancêtre
mammifère est devenu un animal à sang chaud. Son organisme dut s’adapter
pour survivre, apprendre à reconnaître et identifier les facteurs de réchauf-
fement et de refroidissement survenant dans l’environnement pour agir en
conséquence : faire une tanière, émigrer, hiberner, etc.
A la veille du X X I ~siècle, l’adaptation à l’environnement est une nécessité
tout aussi vitale qu’il y a cent millions d’années. La connaissance des
mécanismes de nos actes mentaux et de notre vie cérébrale peut contribuer
à mettre de l’ordre en nous et autour de nous, à reconnaître le contexte et
nous apprendre à nous protéger contre les agressions de l’environnement.
Pour Michel Jouvet, le sommeil et le rêve devraient nous permettre de
(( résister à l’assaut de l’environnement )) et il nous appartient, non seulement

de le savoir, mais de lutter (( pour que l’homme continue à rêver ».


130 Apprendre a gérer ses ressources

De même qu’il n’y a pas une seule façon de pêcher, il n), a pas une
seule façon d’apprendre. Pour Gregory Bateson, prétendre qu’il n’y a qu’une
seule façon d’apprendre (( revient à affirmer que le seul moyen de faire rôtir
le cochon c’est de mettre le feu à la maison ». I1 distingue quatre contextes
d’apprentissage positif : 1. pavlovien classique 2. instrumental de récom-
pense ou de fuite 3. instrumental d’évitement 4. sériel et routinier.
L‘approche neuropédagogique tient compte, pour différencier les types
d’apprentissage, de deux aspects : d’une part la réalité cérébrale de l’appre-
nant et ses niveaux d’organisation de l’information et, d’autre part, le
cheminement de l’information : prise, traitement et production. En effet,
l’apprenant révèle ses stratégies dès ses premiers contacts avec l’information
et tout au long di: son (( itinéraire ».

L‘itinéraire de l’apprenant

Dans l’acquisition des connaissances, il y a un point de départ, un


parcours et un point d’arrivée.
Quel que soit l’itinéraire, celui qui l’a parcouru n’est plus le même à
l’arrivée: il a chamgé, il s’est enrichi. La plupart des apprentissages qui ne
réussissent pas, khouent parce que le parcours n’est pas évident pour
l’apprenant : le point de départ, l’itinéraire, ou l’objectif à atteindre sont
flous.
La faute, l’erreur de l’apprenant aux yeux de l’enseignant, est - devrait
être - essentiellement un repère sur l’itinéraire, un indice de la stratégie
utilisée ou évitée pour atteindre l’objectif, et non un point de non-retour
marqué de rouge.

3. TROIS POILES E N INTER-RELATION: COMPRENDRE,


FAIRE, LAISSER SE FAIRE

Les implications des données scientifiques qui concernent l’acte d’appren-


tissage recouvrent un domaine immense. Elles seront regroupées autour de
trois pôles, dans un va-et-vient entre trois types d’actions pédagogiques
fondamentales, toutes les trois reliées l’une à l’autre dans une relation bi-
directionnelle.
Les trois pôles sont :

Commendre

Ces trois pôles sont étroitement reliés au contenu scientifique de la


première partie. Ils sont abordés ici sous l’angle pédagogique. I1 est bien
Quelle(s) pédagogie@)... ? 131

évident qu’il est nécessaire de faire de nombreuses références aux données


des neurosciences.

Comprendre
C’est d‘abord lire et écouter la réalité cérébrale
Les enseignants doivent s’adresser au cerveau de l’élève en sachant qu’il
est un système ouvert, une structure dynamique, ce que J.-D. Vincent appelle
très justement (( un état central fluctuant ».
Les fluctuations sont la caractéristique du vivant, en perpétuelle recherche
d’harmonie et d’équilibre entre son milieu intérieur et son environnement.
Les fluctuations créent nos rythmes. L‘un des rythmes les plus importants
à connaître par les enseignants et formateurs est le B.R.A.C. (Brain Rest
Activity Cycle), rythme ultradien intervenant toutes les quatre-vingt-dix
minutes environ pendant l’état de veille et pendant le sommeil.
I1 semble confirmé que l’activité et l’efficacité de chacun des deux
hémisphères alternent et oscillent selon un cycle régulier. L‘augmentation
d’activité cérébrale constatée dans la performance d’une tâche verbale, par
exemple, est accompagnée par la diminution de la performance d’une tâche
spatiale (1).
Ilya Prigogine nous rappelle qu’aucun changement ne peut avoir lieu
tant que l’état de conscience reste immuable. L’apprentissage est plus efJicace
lorsque les fluctuations cérébrales augmentent : lorsque notre activité céré-
brale passe en ondes alpha.
La musique, les images mentales, la respiration rythmée et adaptée à la
tâche (de discrimination ou de raisonnement), les techniques de relaxation,
les pauses (telles qu’elles ont été déjà définies) sont des facteurs permettant
l’augmentation de l’amplitude des ondes cérébrales et la naissance de
nouvelles structures.
Comprendre que tout est relation
L‘unité de base est le neurone f la synapse.
D: ns le cerveau, pas plus que dans l’univers, il n’y a d’unité indépendante
ou contiguë. Les procédés actuels de photographie permettent le grossisse-
ment de neurones et de synapses jusqu’à quatre mille fois leur dimension
normale, et font apparaître nettement l’enchevêtrement des neurones et la
fente synaptique.
I1 est donc important de tenir compte que, d’une part tout est relation,
connexion, association, et, d’autre part, que la transmission de l’influx
nerveux est la résultante d’un double processus : neuronal et hormonal, c’est-
àdire que les facteurs de nature électrique et chimique (stress et médicaments,

(1) Cf. KLEINR. et ARMITAGER. (1979). Le cycle R.E.M./N.R.E.M. (Rapid Eye


Movement/Non Rapid Eye Movement) serait la manifestation du B.R.A.C. (Brain Rest
Activity Cycle) pendant le sommeil.
132 Apprendre à gérer ses ressources

drogues, alimentation) peuvent interférer avec la transmission de l’influx


nerveux.
Les mots-clés du fonctionnement cérébral ont déjà été cités. Rappelons
qu’ils doivent constituer une base pour construire les matériaux et les activités
pédagogiques proposés aux apprenants : quelle part faisons-nous dans notre
pédagogie à la COMPLEXITÉ, ASSOCIATIVITÉ, DYNAMISME, ADAPTABILITÉ,
NON LINÉARITÉ, SÉLECTIVITÉ, MULTIMODALITÉ?
D’autres leçons sont à tirer du regard porté sur notre réseau de neurones.
En pédagogie, comme dans la vie courante, personne ne devrait être
considéré comme une table rase, un débutant total. Même le nouveau-né
sait déjà beaucoup de choses. Son cerveau a enregistré, traité, produit de
l’information bien avant sa naissance. Celui qui apprend une langue étran-
gère, avant même d’avoir commencé son apprentissage, possède quelques
idées sur la langue qu’il va apprendre, quelques notions sur le pays, ses
habitants, sa cultiure, son climat... Son apprentissage va dépendre de la force
de ce substrat et des connexions qu’il établira entre ces idées préconçues
(souvent des stéréotypes) et les informations nouvelles.

Comprendre qu‘ïl ne peut y avoir d’acquisition sans ancrage,


puisque tout est relation et système. Sans contexte, il n’y a ni signification
ni sens.
L‘information, pour être assimilée, a besoin de différents types d’ancrage :
- Ancrage dans leprésent :la prise d’information doit être claire et précise,

indexée dans l’ici et maintenant de l’apprenant et l’enseignant doit


développer une pédagogie de l’observation et de l’écoute, et s’adresser
à l’apprenant dans un langage qu’il peut comprendre, c’est-à-dire lui
permettre l’accès à l’information dans sa gestion mentale préférentielle
(visuelle, auditive, kinesthésique).
- Ancrage dans l’expérience de l’apprenant :l’information nouvelle doit se
rattacher aux connaissances antérieures. Une information (( flottante D se
perd. I1 est indispensable que les formateurs entraînent les apprenants
à établir une connexion entre ce qu’ils découvrent et ce qu’ils savent déjà.
Ces connexioiis peuvent être de plusieurs nature : cognitives, affectives,
sensorielles.
- Ancrage dans un projet, au sens étymologique de cjeter en avant ». C’est
une garantie d’attention, de motivation, de mémorisation. Le projet peut
être personnel1 ou collectif, immédiat ou à longue échéance, présenter
plusieurs étapes, donner lieu à d’autres projets, etc. De plus, les meilleurs
projets semblent être bâtis sur l’axe (( donner-recevoir »,c’est-à-dire que
dans son projet, et grûce Ù son projet, l’apprenant participe à une
communication authentique, à un échange véritable, à une réalisation
commune. Son cerveau connaît alors des conditions optimales de
fonctionnement.
Autre leçon encore : la caractéristique du cerveau d’opérer par sélection
(«stabilisation sélixtive D)a pour conséquence la formation d’habitudes, de
tendances, de (( profils )) et de styles préférentiels. Une fois qu’une démarche
Quelle(s) pédagogie(s)... ? I33
a réussi, on s’y tient par sécurité... Ces profils sont à la fois opérationnels
et susceptibles de devenir un frein, car ils oblitèrent la perception qui tend
à se cantonner dans une seule modalité sensorielle.
Il s’agit donc pour l’enseignant d’apprendre à identifier les profils et à
développer les modalitées restées muettes.
Comprendre que <<lesmarches de la complexité se gravissent lente-
ment >> (2)
I1 est indispensable de comprendre que la maturation d’un cerveau
d’apprenant se réalise par poussées suivies depaliers, et que ceci ne se produit
pas aux mêmes moments pour les filles et les garçons.
I1 est indispensable de comprendre également que le palier entre treize
et quinze ans est celui où le cerveau est très occupé à développer le corps.
Le témoignage d’un homme de quatre-vingt-dix ans, dans une émission de
télévision sur les ((presque centenaires )) nés au début du siècle, était
particulièrement émouvant lorsqu’il expliquait qu’il avait dû quitter l’école
à douze ans et devenir ouvrier verrier (( parce que ça ne rentrait pas. Ah !.. D,
a-t-il ajouté, a si j’avais pu retourner en classe à quinze ans ! à cet âge-là,
je comprenais tout, jaurais p u gravir toute 1’échelle... ))
Le rôle des formateurs est donc de ne pas manquer le rendez-vous avec
le cerveau de leurs élèves. Comme pour tous les rendez-vous, il faut de la
patience, savoir écouter, s’attendre à l’inattendu, s’adapter aux circonstances
et être prêt à puiser dans une grande boîte à outils )): ceux de la
multisensorialité et des différentes approches pédagogiques.

Comprendre que nous avons différents niveaux d’organisation, de moti-


vation, d’apprentissage
C’est le prix payé pour nos quatre cerveaux.
Quels que soient le lieu et le moment où nous envoyons ou apportons
une information, elle a une forme, un contenu.
En face de nous, se trouve l’apprenant et son système d’organisation:
qui est aux commandes ? Quelle réaction allons-nous déclencher ? L‘infor-
mation va-t-elle passer à l’étage supérieur pour être décodée ou sera-t-elle
bloquée à l’étage affectif? La communication, la compréhension, la réflexion,
l’expression vont-elles pouvoir s’établir ?
I1 est bien évident qu’une pédagogie cohérente doit s’adresser aux
différents niveaux d’organisation cérébrale et aux deux hémisphères sous
peine d’être réductrice, appauvrie et appauvrissante. Rappelons que loin
d’être dans une relation de concurrence ou d’opposition, nos différents
niveaux et nos deux hémisphères opèrent dans une relation de complémen-
tarité. L‘enseignant et le communicant auront donc pour rôle d’interpeller
totalement l’apprenant, l’interlocuteur, et s’adresser à leur être tout entier.
Comme on le verra, des techniques existent pour agir dans ce sens.
I1 est essentiel que l’enseignant conserve constamment présent à l’esprit

(2) L‘expression est d’Hubert REEVES.


134 Apprendre à gérer ses ressources

l’énumération des différentes gestions hémisphériques pour vérifier qu’il ne


cantonne pas ses, interventions à quelques courts circuits.. .

Comprendre 9we les conditions optimales de fonctionnement doivent


être constamment présentes
L‘enseignant et le formateur doivent aménager sans relâche les conditions
optimales de fonctionnement car elles ne peuvent être établies une fois pour
toutes. Est-ce si difficile de donner au cerveau ce dont il a besoin, comme
on le fait pour les autres organes?
L‘hygiène cérébrale doit faire partie de la pédagogie. Rappelons pour
mémoire, que ncius consommons chaque jour 15 kg d’air et 4 kg d’oxygène.
Sur ces 4 kg, le cerveau en consomme à lui tout seul 20%... Lumière
naturelle, alimentation, alternances, pauses, affectivité, vie relationnelle,
connaissances, langage(s) sont des nourritures indispensables à la vie céré-
brale et doivent etre intégrées dans une démarche pédagogique cohérente.

Avoir une vue claire de l’interface du cerveau et de l’information :il s’agit


d‘un parcours
Le cerveau ne prend que ce qu’il sélectionne. Rappelons-nous: il s’agit
d’intake et non ,d’input. Nous ignorons encore comment l’information est
traitée, mais nous savons (un peu) comment faciliter (un peu) l’acquisition
et la rétention. I1 est essentiel de comprendre que notre intervention
pédagogique doit commencer en amont et être poursuivie en aval de ce qui
est fait habituellement. Nous devons nous préoccuper du processus de la
démarche, et non pas seulement du contenu à acquérir ou du résultat obtenu.
Les vrais résultats sont à longue échéance. L‘évaluation ne peut plus rester
ce qu’elle est trop souvent : sommative, placée à la fin du parcours ; et
normative, exigetant la conformité à une norme, la même pour tous, sans
tenir compte des critères et des conditions d’évaluation. Au lieu de l’unique
crayon rouge, nous devrions avoir au moins trois crayons de nuances
différentes: le vert, l’orange et le rouge. Nous devrions utiliser le crayon
clignotant beaucoup plus fréquemment, et, surtout, employer très souvent
le crayon vert : la couleur du passage et de la voie libre, celle de l’autonomie.
Les tâches que nous demandons à l’apprenant sont trop souvent
ponctuelles : elles morcellent le parcours, elles cachent le projet.
Etre en mesuire d’intervenir au niveau du comment, du processus, de la
démarche, signifile que le formateur sait repérer les causes d’erreur tout au
long du parcours.. Ces causes sont de nature variée, et elles sont nombreuses.
Elles peuvent prcivenir de :
a) Une idée préconçue (le plus souvent négative) sur soi-même, les autres,
la tâche à accomplir, ou la stratégie à suivre.
b) Une prise d’information floue et peu précise.
c) Un stockage insuffisant ou inexistant.
d) Un rappel qui ne se fait pas.
e) Une reconnaissance qui ne se fait pas (souvent liée à b).
Quelle(s)pédagogie(s)... ? 135

-- Ji!-@--
-
, O
’I \

Figure 6 . L’apprenant, vu par lui-même (dessin de D. Blondiaux)

Dans le premier dessin, l’auteur (qui était étudiant à l’époque) a représenté


l’image qu’il avait de son apprentissage de l’anglais au lycée... apprentissage
douloureux, brutal, sans objectif apparent. Les sources d’information sont silen-
cieuses, le livre est fermé, la mappemonde réduite à une très petite dimension...
L‘apprenant est seul, statique. I1 s’assène lui-même les coups et il souffre... Le second
dessin est né en réponse à la question : (( comment aimeriez-vous être en apprenant
l’anglais ? ». Cette fois-ci, l’apprenant est détendu, dynamique, dans un contexte
authentique, culturel et vivant. Le soleil brille ... Big Ben et les Horse Guards
témoignent de l’histoire et de la culture de la langue apprise. L‘environnement est
présent. Des silhouettes d’hommes et de femmes témoignent d’un contexte dont
l’apprenant est conscient et dont il attend sans doute quelque chose.
136 Apprendre à gérer ses ressources

f) La démarche utilisée n’est pas valable (exemple : démarche visuelle


alors qu’elle devrait être verbale ; ou démarche arithmétique au lieu d’être
visuelle, etc.).
g) Le passage à l’acte ne se fait pas : le savoir n’est pas utilisé ; la relation
au concret est vague, inexistante (cf. h).
h) L‘objectif est inconnu ou méconnu.
De cette liste., qui est loin d’être exhaustive, il ressort qu’une grande part
de la réussite ou de l’échec se décide avant le début du parcours, dans une
période que l’on peut appeler (( T - 1 )) (T moins 1). Cette action
pédagogique (et communicative) est à intégrer - et souvent à réinjecter -
dans la séquence pédagogique au même titre que le contenu d’information.

Comprendre que I b n ne peut aller nulle part si l’on ne sait où l’on va...
ni... qui Ibn est
I1 s’agit donc de faire le point sur :
1) Les attentes de l’apprenant : celles-ci peuvent être statiques ou dyna-
miques (il attend qu’on lui apporte l’information ou il s’attend à participer
à la recherche d’information).
2) Les attitudes : l’apprenant se sent-il en position positive ou négative
par rapport à soln apprentissage (figure 6), au groupe, à l’enseignant : un
poing fermé ne pleut rien recevoir... Un verre plein ne peut plus rien contenir
d’autre ...
3) Le lien avec les connaissance déjà acquises.
4) La comprkhension des consignes et de l’objectif:
5) La connaissance de son potentiel et de ses ressources.
6 ) La connaissance de sa gestion préférentielle, de ses stratégies.
L‘enseignant peut utiliser divers moyens pour obtenir l’information
concernant les différents points de la période (( T - 1 )) :
- questionnaires, checks-lists, tests projectifs (points 1 et 2).

- tests traditionnels (points 3 et 4 ).


~ I1 doit, pour le point 5 ) apporter l’information à partir de cas concrets.
- Le point 6) nécessite qu’il ait reçu une formation pour être en mesure

de diagnostiquer d’abord sa propre gestion, puis celle des apprenants.


I1 lui appartiendra ensuite de développer les gestions faibles, ou
inutilisées.

Faire

Les actions A prendre autour du pôle faire découlent de ce qui est


regroupé autour du pôle comprendre.

Faire veut d’abord dire :informer, dire, dialoguer, montrer, écouter


En d’autres termes: rendre l’apprenant conscient de ses propres res-
sources, sa gestion, les stratégies qu’il utilise et celles qu’il évite, les conditions
de fonctionnemerit qu’il impose à son cerveau.
On y parvienit par l’observation, mais surtout par le dialogue pédago-
Quelle@)pédagogie(2).., ? 137

gique. L‘écoute du vocabulaire employé par l’apprenant donne une indica-


tion de la modalité sensorielle qu’il utilise de préférence : (( Je ne vois pas... ))
(modalité visuelle), (( Dis-moi )) (modalité auditive), ((Je crois, je pense... ))
(termes neutres, sans lien direct avec une modalité sensorielle) etc.
Une technique adaptée de la Programmation Neuro-Linguistique
(P.N.L.) consiste à poser une question neutre a l’apprenant, noter et analyser
ce qu’il dit : l’élève en difficulté aura, en général, un langage qui se révélera
essentiellement dans une modalité sensorielle. Mais il aura surtout un langage
restreint à une catégorie de mots : verbes, adjectifs, noms (concrets ? abs-
traits ?). Les repères spatiaux-temporels sont rares, en général. Les articu-
lations qui dépassent le niveau descriptif (le (( pourquoi D, le (( pour quoi ))
et le (( comment )) au-delà du (( quoi D, du (( qui n...) sont souvent pauvres ou
inexistantes. On notera soigneusement (après enregistrement) les éléments
de la phrase que l’élève utilise dans telle ou telle modalité : les adjectifs
(traduisant l’affectivité), les verbes (traduisant l’action), les substantifs
concrets ou abstraits ... se répartissent-ils selon plusieurs modalités (auditive,
visuelle, kinesthésique) ou une seule ? L‘observation ainsi menée donne une
indication rapide sur le système de représentation de l’apprenant et la
structuration de son expression.
I1 est inutile d’espérer rejoindre un apprenant et lui apporter une aide
quelconque si l’on n’utilise pas son accès à la réalité. Par contre, en se servant
de son cliché de langage tel qu’il a été recueilli, on peut l’aider efficacement
à développer les modalités que son langage n’explore pas encore.
La direction du regard, et surtout la durée du contact oculaire sont les
premiers régulateurs de la communication. Les recherches dans ce domaine
ont tout juste vingt ans. I1 existe des schémas culturels: les Américains
maintiendraient le contact oculaire pendant une conversation entre trente
et soixante secondes, de façon discontinue ; chaque amorçage dure entre une
et sept secondes. Au cours d’un échange, la durée et les changements de
regard varieraient selon que l’échange se passe entre deux personnes ou dans
un groupe, et selon que la personne est le locuteur ou le récepteur : lorsque
l’échange se fait entre deux personnes, le récepteur regarde le locuteur deux
fois plus. En groupe, les locuteurs recherchent le contact oculaire 70% du
temps de parole et les auditeurs 50 %.
Les ruptures dans la communication peuvent avoir pour cause un
manque de synchronisation du contact oculaire entre communicants. Selon
les cultures, les contacts oculaires traduisent la répartition du pouvoir dans
les relations sociales, les chefs recherchant moins le contact que les subor-
donnés qui, par le regard, pensent qu’ils peuvent manifester leur respect ou
leur approbation (3).
Une observation efficace de l’attitude d’une personne réalisant une tâche
de discrimination ou de raisonnement, doit porter sur les points suivants :
- La position du corps : près, loin de la source de lumière naturelle?

près, loin de l’informant ?

(3) Cf. Recherches de Patricia WEBBINK,psychologue dans le Maryland, E.-U,, auteur


de ï h e Power of the Eyes (1986), Springer, 536 Broadway, N.Y.C. 10012.
I38 Apprendre à gérer ses ressources

- L‘attitude face à la source d’information visuelle, auditive, kinesthé-


sique : avant, pendant, après l’exercice ?
-- La posture : tendue? relâchée?
- La respiration : régulière ? profonde ?
Cette observaiion doit donner des indices sur certaines modifications à
apporter à des composantes de la situation et du contexte de l’apprentissage,
éléments qui passent inaperçus et qui, pourtant, ont un rôle important dans
l’intégration de l’information ou l’acquisition des connaissances.
En effet, les &lèves- ou les interlocuteurs - hyperactifs et agités qui
ne peuvent fixer leur attention pendant les tâches de discrimination, se
comportent physiologiqueent à l’inverse de ce qu’ils devraient :
- Leur rythme cardiaque est accéléré au lieu d’être ralenti.

-- Leur respiration est peu profonde et rapide au lieu d’être régulière


et profonde.
- La musculature est tendue au lieu d’être relâchée.

Ces élèves, ou ces interlocuteurs, se comportent comme s’ils avaient une


décision à prendre, une action à réaliser alors qu’il s’agit de retarder l’action
pour être ouvert let présent aux stimuli, et de rester vigilant pour rassembler
un maximum d’information.
Ces élèves ont besoin d’être entraînés régulièrement à :
- Contrôler leur souffle.

- Se détendre.

- Synchroniser leur respiration et leurs gestes.

- Et surtout, se re-centrer par des exercices de perception auditive et

visuelle allant de la périphérie à l’espace intérieur (4).


Le coloriage d’un mandala est tout particulièrement recommandé dans
ce cas et dans celui des personnes, même adultes, qui désirent se donner
un moyen de se re-centrer (c’est un moyen qu’a utilisé Carl Jung dans une
période difficile de sa vie).
Pour les enfarits à tendance autistique, l’inverse est recommandé : il s’agit
de les inciter à porter leur attention du centre vers la périphérie.

Faire veut aussi dire faciliter


Une précision est nécessaire: la véritable relation d’aide consiste à ne
pas faire plus de 50% du chemin... Au-delà, la personne qu’on veut aider
est dévalorisée, A ses propres yeux comme à ceux du formateur ou de
l’enseignant.
L‘importance de l’image que l’apprenant a de lui-même, a déjà été
signalée. Si cette image est négative, tous nos efforts seront vains. Pour qu’elle
devienne positive, il faut évidemment qu’il y ait volonté de changement, non
pas un changement d’état mais de comportement. Paul Watzlawick illustre
la différence entre ces deux types de changement par l’analogie de l’auto-
mobile dont la vitesse peut augmenter de deux façon: au moyen de
l’accélérateur, c’est-à-dire en agissant directement sur l’apport d’énergie, ou

(4) Cf. FLACKM. et de COULONJ.


Quelle(s)pédagogie(s). .. ? 139

en changeant de vitesse, c’est-à-dire en utilisant l’énergie à l’intérieur d’un


certain régime et en établissant une relation efficace entre l’énergie et la
consommation d’énergie (5).
Pour le pédagogue ou le communicant, le choix est soit d’agir sur le flot
d’informations et d’instructions, soit de s’adresser au moteur, c’est-à-dire a
l’aptitude de l’apprenant à utiliser ses propres ressources et à faire un certain
chemin. Ce deuxième type de changement constitue, nous le savons tous,
un changement plus efficace que le premier - mais aussi plus difficile, car
il exige davantage d’engagement de la part de l’apprenant.

Faciliter la prise en charge


L‘intériorité de l’apprenant, sa verticalité, est à développer à partir de
son corps et l’enseignant d’éducation physique ne devrait pas être le seul
à s’en préoccuper. L’apprenant est un tout :lorsqu’il écrit, ou lorsqu’il lit,
la position de son dos est aussi importante que lorsqu’il marche. Sa colonne
vertébrale est son mât, son axe. I1 en est de même de sa respiration: c’est
un mât mental et même, pour certains, un mât spirituel.
I1 est important d’aider l’apprenant à ne pas confier son apprentissage
à son seul cortex, sous prétexte qu’il s’agit d’activités cognitives. La tâche
du formateur est de l’aider à prendre conscience du rôle de son corps pour
qu’il fasse confiance à la sensorialité qui est la sienne, et qu’il ne dépende
pas de celle d’un autre, fusse-t-elle celle du maître ou d’un parent. Ce travail
de prise de conscience doit être celui de tous les enseignants, quelle que soit
leur discipline, et naturellement aussi de l’institution et des parents.
Non seulement le travail doit continuer à se faire dans les cinq modalités
sensorielles (on en abandonne trois sur cinq trop tôt, pour ne garder que
la vision et l’audition et une motricité réduite à deux heures d’éducation
physique par semaine !), mais l’apprenant s’enrichirait considérablement s’il
savait être le témoin de ce qu’il voit, entend, ressent, etc... I1 apprendrait
à être moins vulnérable, et son esprit critique augmenterait.
Un moyen puissant d’aider l’apprenant dans sa prise d’information
sensorielle est de varier les sources d’information en donnant la même
information sous différentes formes. Des ateliers sont organisés dans le
groupe, offrant l’information sous forme de textes, d’images ou de diapo-
sitives, de cassettes enregistrées, ou d’instructions pour un mime ou une
manipulation d’objets.
L‘apprenant choisit l’atelier par lequel il aborde l’information sous la
forme qu’il préfère, mais il sait qu’il devra passer dans les autres ateliers.
L‘accès à l’information est ainsi dédramatisée pour ceux qui redoutent une
source d’information qui les a rebutés jusqu’alors (ceci est fréquent dans la
classe de langue étrangère où certains apprenants redoutent les enregistre-
ments oraux). Les apprenants découvrent très Vite... que la réalité n’est pas
pire que leur fiction. La tâche à réaliser dans chaque atelier doit être
spécifique et orientée vers un but précis. Elle doit entrer dans un schéma

(5) Cf. WATZLAWICK


et al. (1975), p. 27.
140 Apprendre à gérer ses ressources

de communication : rapport oral à partir d’une source écrite ; résumé ou mise


en dialogue à paitir d’un texte oral ; dramatisation à partir d’un texte oral
ou écrit, etc.
L‘objectif final est une compréhension multi-dimensionnelle. L‘informa-
tion ayant été priise sous différents angles, les modalités se sont croisées et
complétées,et les objectifs ont varié. L‘apprenant aura ainsi les possibilités
de développer ses modalités faibles sans traitement spécial... et sans s’en
apercevoir, le plus souvent.

Faciliter la mémlorisation

La mémoire commence dès la prise d’information, et souvent même avant


le premier contact avec l’information, puisque l’attitude qu’on a envers une
tâche à accomplir prépare déjà l’encodage et la future compréhension.
La prise d’information est affinée par un travail systématique sur les
paramètres visuel, audit6 kinesthésique tels qu’ils ont été énumérés dans la
première partie. I1 revient à chaque enseignant de créer des exercices ad hoc
pour développer ces très nombreux paramètres dont certains restent étouffés,
inconsciemment effacés par des habitudes routinières ou un environnement
réducteur. I1 faut ]préciserque le travail sur les paramètres sensoriels est aussi
enrichissant pour l’enseignant que pour les apprenants... car l’enseignant
n’est pas protégé à vie contre l’ensablage de ses facultés ! La prise d’infor-
mation multisensorielle est en soi une aide puissante à la mémorisation.
Un outil de mémorisation, très efficace, est d’établir des liens et des
relations entre l’information nouvelle, la tâche à accomplir, les connaissances
que l’on a déjà acquises, le cadre dans lequel on se trouve, et certains traits de
l’information : les couleurs, les dimensions, les formes, les consonances, les
similitudes etc.
Les nombreux ouvrages qui ont été écrits sur la mémoire proposent des
moyens mnémotechniques qui sont tous basés sur le principe d’associativité
et de mise en relation. On peut regretter que ces procédés soient souvent
proposés pour des activités qui ne sont ni fondamentales, ni essentielles : se
souvenir de listes de mots, de nombres, etc., est une activité assez éloignée
de la mémorisation dont les apprenants ont besoin au cours de leur scolarité.
LRs mémoires, souvenons-nous, sont variées et nombreuses et demandent
qu’une relation aux intérêts réels de l’apprenant soit établie de façon moins
systématique et plus personnalisée que celle qu’offrent ces différents manuels.
Nous devrions tous, depuis l’âge de sept ou huit ans, être initiés a la
technique des schémas heuristiques (du grec : heuréka, (( j’ai trouvé D). Les
schémas en étoile, ou en arbre, et les mandalas sont des structures dans
lesquelles le passage, la successivité et la séquence d’une idée à une autre
sont facilités par le graphisme et les relations visuelles. Ces schémas, par leur
structure, reproduisent ce que l’on pressent de l’organisation cérébrale qui
fonctionne par enchaînement et intégration de concepts clés et qui est
essentiellement non-linéaire. La technique des schémas heuristiques permet
des combinaisons dynamiques entre les concepts et des interactions récipro-
ques sur un modèle proche du câblage de la machine cérébrale. Cette
Quelle(s) pédagogie(s)... ? 141

technique peut être utilisée non seulement pour une prise de notes, mais aussi
pour une recherche d’idées et toute démarche créative. Elle présente l’intérêt
immense de mener de front l’analyse et la synthèse. Le rappel, ou déclen-
chement du souvenir, est facilité par cette mise en relation préalable.
La mémorisation est consolidée par des réactivations à des moments
favorables qu’il est bon de connaître : dix minutes après la prise d’informa-
tion, puis un jour, une semaine, un mois, six mois plus tard. Ces réactivations,
convenablement programmées, prennent des formes variées :résumé, relecture
de notes, mise en schéma, classement, discussion, rapport, etc. Elles
demandent très peu de temps (cinq-dix minutes chacune) ; le calcul est facile :
six fois cinq minutes. Elles permettent, en ne mobilisant qu’à peine plus d’une
demi-heure, d’envoyer une information dans la mémoire à long terme (6).

Que faire en cas de dysfonctionnement... ?


L‘enseignant doit avoir à sa disposition quelques indications sur la façon
de procéder, pour faire face à un déficit ou un dysfonctionnement de l’un
des deux hémisphères. Il doit être capable d’amorcer l’hémisphère faible ou
bloqué.
Une faiblesse de l’hémisphère gauche est repérée ou traduite par défauts
d’articulation, de syntaxe, des difficultés de rappel lexical, de compréhension
d’instructions ou ‘d’explications. I1 est recommandé, dans ce cas, d’utiliser
un matériel visuel pour établir des associations d’images qui, elles, sont bien
gérées et de mots qui, eux, sont gérés avec difficulté. On peut également
utiliser un code de couleurs, faire lire à voix haute et écrire simultanément :

-
Langage Motricité Vision.-
c’est-à-dire renforcer les circuits et associations Vision - Audition -
Rappelons l’expérience faite par Luria: des enfants à qui l’on avait
permis de prononcer les mots de leur dictée ont fait six fois moins de fautes
d’orthographe que le groupe d’enfants qui avaient dû écrire la dictée sans
remuer les lèvres.
Pour palier le déficit de l’hémisphère droit, qui se manifeste par la gestion
faible des analogies, métaphores, synthèses, séquences..., il est recommandé
d’utiliser un matériel verbal, de faire écouter des histoires, de faire verbaliser
toutes les activités, d’entraîner la perception en séquence par des activités
motrices, de développer l’imagerie (visuelle, auditive, kinesthésique, tactile)
en la rapprochant systématiquement des descriptions verbales correspon-
dantes ; d’ajouter le geste au verbal... Par exemple : faire écrire les mots sur
le dos de la main, ou devant soi avec le nez, le coude, l’épaule, le pied ;
guider la main de l’enfant, qui garde les yeux fermés, en prononçant le mot
pour lui, etc.
D’autres précieux conseils sont donnés par certains auteurs pour traiter
en synesthésie les dysfonctionnements de discrimination auditive ou les
difficultés de dénombrement des éléments d’une structure complexe, phrase

(6) Cf. BUZANT. (1984), pp. 95-126 ; WILLIAMS


L.V., op. cit.
142 Apprendre a gérer ses ressources

ou image (7). On devine que, pour ces auteurs, l’intelligence est aménageable
et qu’aucun enfant ne devrait être condamné, exclu, rejeté par un système
éducatiJ:
La règle d’or dans le domaine de la pédagogie est de ne jamais négliger
l’entraînement et le développement des fonctions de base : association,
connectivité, synesthésie (nous retrouvons les mots-clés du fonctionnement
cérébral), et les deux axes du Temps et de l’Espace autour desquels toute
la structure de notre organisme est construite. Et surtout ne jamais oublier
le rôle de l’affectivité.

Faire veut aussi dire :développer


I1 s’agit ici d’une intervention pédagogique un peu plus directive que la
précédente, (( faciliter o.

Développer la mise en relation


Le rôle de l’enseignant est de développer systématiquement la mise en
relation dans tous les domaines de la réalité spatiale et temporelle, et à tous
les niveaux d’organisation de l’information : les quatre cerveaux et les deux
hémisphères.
Ceci est possible quelle que soit la discipline enseignée. Notre enseigne-
ment est en général beaucoup trop ponctuel, délimité et à court terme ... parce
qu’il est orienté vers le contenu et le résultat. Les apprenants gardent
rarement le sens de l’ensemble lorsqu’ils s’adonnent à l’analyse et c’est pour
cette raison que lies schémas heuristiques sont un outil très utile pour
développer le sens des relations.
Un exemple d’un entraînement à la mise en relation est l’expression écrite
telle que la proposent Gabriele Lusser Rico et Mary Frances Claggett, de
l’université de Californie. Cette approche de l’écriture permet l’équilibre des
deux gestions hémisphériques. L‘hémisphère droit est sollicité par la mise
en schéma des idées, l’utilisation de la couleur, la pensée métaphorique, le
rythme et le dessin dans des exercices de pré-écriture. L‘hémisphère gauche
est interpellé par des exercices séquentiels, effectués pas à pas ;par exemple,
des exercices de coinpréhension, de mise au point de transitions, et un travail
d’édition.
Cette approche repose sur une triple conception de l’expression écrite,
recouvrant trois concepts complémentaires :

transactionnelle f---- expressive -b poétique

L‘écriture transactionnelle est la seule évaluable parce qu’elle correspond


à une gestion de l’hémisphère gauche. Le très grand intérêt de l’approche
de Rico et Claggett semble résider dans la recherche d’équilibre et de

(7) Cf. FROSTIG D.J. (1981) ; PRESSLEY


et MASLOW(1979); COULTER et al. (1979).
Quelle(s) pédagogie(s). .. ? 143

correspondance à établir entre l’outil, la tâche et les mécanismes cérébraux


en jeu.
La mise en relation est également à la base de la Synectique, méthode
élaborée par W.J.J. Gordon & T. Poze depuis plus de 40 ans. Pour Gordon,
apprentissage et créativité sont complémentaires (figure 7) :

processus d’acquisition

iissances

processus d’innovation
Figure 7. Apprentissage et créativité (d’après K-J.-J.-Gordon)

Le processus d’apprentissage établit une relation entre des faits nouveaux


à apprendre et des faits déjà appris. Le processus d’innovation ou de
créativité fait l’inverse : la relation s’établit entre les faits déjà connus vers
des faits nouveaux.
L‘approche synectique préconise un travail sur l’analogie et la métaphore.
I1 existe deux types d’analogie : un type d’analogie directe, qui sous-entend
un certain recul par rapport à l’objet : on reste au niveau de la description.
L‘autre type est l’analogie personnelle dans laquelle la personne s’implique
et s’identifie à l’objet. Le travail se fait à partir de ces deux types d’analogie.
Le travail sur les relations, existant entre les différentes modalités
sensorielles, s’adresse à tous les apprenants, quel que soit leur degré de
réussite. Non seulement ce travail permet le déblocage des ressources
perceptives et évocatives chez certains apprenants, mais il élargit et enrichit
considérablement le champ percept$ L‘enseignant qui pratique cette
approche est le premier à s’en apercevoir.

Développer les évocations mentales


Autre domaine à développer : les évocations mentales, pratiquées lorsque
l’apprenant ferme les yeux. Cet outil est à utiliser largement, et n’est pas
exclusivement réservé à la rééducation de l’orthographe pour laquelle il fait
merveille, pour la lecture, et bien d’autres activités scolaires (8).

(8) Cf. aussi DILTsR.B. (1983); de la GARANDERIE (1980); HOUSTONJ. (1983);


WILLIAMS L.V., op. cif., et le long et patient travail de la méthode Freinet.
144 Apprendre à gérer ses ressources
Le travail sur les paramètres visuel, auditif et kinesthésique se fait en
visualisation interne. Ici encore, des exercices ad hoc doivent être créés par
l’enseignant et le formateur, selon les besoins du groupe et la progression
de l’apprenant sur son parcours. Les évocations mentales sont à adapter selon
l’objectif visé : fixer une information, la transférer d’une modalité à l’autre,
la transformer, etc.
Ce travail suppose qu’un diagnostic des profils d’apprentissage soit fait.
La grille proposées par A. de la Garanderie a l’avantage de permettre un
rapprochement des gestions visuelle et auditive avec les différents niveaux
d’appréhension du réel, adaptés de la théorie de Bachelard, à savoir : 1. la
réalité concrète, 2. le niveau verbal, 3. les relations et la mise en structure,
4. le prolongement du réel (créativité, innovation).
Le grand avantage de savoir diagnostiquer un profil d’apprentissage est
d’obtenir des éléments pour élargir le champ perceptif et établir des ponts
entre d’une part les gestion visuelle et gestion auditive, et d’autre part entre
les différents niveaux d’appréhension du réel. A. de la Garanderie a eu le
mérite d’intégrer la notion de projet à l’évocation mentale et de souligner
l’importance du projet dans l’assimilation des connaissances. Les relations
entre l’imagerie mentale et la perception visuelle commencent à être mieux
connues. Les recheirches suggèrent qu’elles ont en commun certains processus
et peuvent agir l’une sur l’autre (9).

Développer la pensée positive


Parallèlement à. l’évocation mentale, un travail sur les pensées positives
doit être mené. Apprendre a évoquer des images ou des pensées abstraites,
les susciter, les chasser, faire le vide... est un outil précieux et libérateur.
L‘enseignant doit, évidemment, maîtriser la technique avant de l’enseigner
s’il désire mener l’apprenant au seuil de lui-même. Cette technique s’apprend
dans les milieux pratiquant le yoga ou la méditation tantrique et elle est
aussi recommandée par A. de la Garanderie. Elle peut paraître insolite ou
superflue à des yeux occidentaux. Ils ont tort, car la maîtrise de la pensée
et des images facilite considérablement l’acquisition des connaissances. De
plus, la maîtrise des images mentales est une des conditions nécessaires pour
permettre à l’imagination et à la créativité de trouver en nous espace et durée.

Développer le langage des deux hémisphères


Pour développer le langage des deux hémisphères et, en particulier celui
de l’hémisphère droit, plusieurs outils existent.
La métaphore est un outil très efficace et tout à fait remarquable pour
placer le concept ou centre du royaume du concret. Elle est donc tout
particulièrement recommandée pour présenter un concept nouveau dans
l’expérience même de l’apprenant. De nombreux exemples de l’utilisation

(9) Cf. FINKE


R.A., (( Mental Imagery and the Visual System », Scientific American,
March 1986.
Quelle(s)pédagogie(s)... ? I45
de la métaphore, dans diverses disciplines et à différents niveaux d’appren-
tissage, se trouvent dans le livre de Linda V. Williams, accompagnés d’une
méthodologie d’utilisation. Cet auteur décrit les résultats obtenus après un
entraînement systématique de la métaphore dans l’apprentissage de la lecture,
dans une classe de cours Préparatoire: les progrès ont été de 286% en
compréhension orale, de 1038 % en lecture de mots lexicaux, de 163 % en
lecture de phrases structurées.
D’autres expériences pédagogiques, utilisant également la métaphore
pour l’apprentissage de la lecture confirment ces résultats spectaculaires :
amélioration très nette dans les quatre domaines suivant (par ordre décrois-
sant) : compréhension, exactitude, rapidité, mémorisation. Les résultats se
maintiennent un an après l’enseignement qui dure neuf semaines. Les auteurs
du projet, tout en laissant une certaine marge de liberté aux utilisateurs,
tiennent à ce que les six points suivants soient respectés :
1) L‘enseignant doit être convaincu que l’enfant est capable de lire.
2) La lecture silencieuse précède la lecture à haute voix.
3) La méthode s’applique à des non-débutants qui connaissent les lettres
de l’alphabet.
4) Très peu de mots sont utilisés en lecture silencieuse (des mots-clés
suffisent). Un carton recouvre les lignes lues, de haut en bas de la page.
5) Une image mentale est formée pendant que les mots-clés sont lus
silencieusement.
6 ) Pour encourager la lecture à haute voix, les mots sont découverts
progressivement de gauche à droite juste avant qu’ils ne soient prononcés.
La méthodologie, qui s’adapte à des groupes comme à l’apprenant seul,
se déroule en 10 étapes.

Développer la représentation graphique


Parmi les autres techniques faisant appel à la gestion de l’hémisphère
droit, la représentation graphique fait intervenir non seulement la motricité
mais aussi la gestion de l’espace et l’imagination.
Les applications sont nombreuses : dessins, figures, tableaux, cartes,
graphiques, schémas etc. Une application peu répandue en Occident est le
mandala qui est particulièrement stimulant pour l’imagination et la créativité,
tout en ayant une action de recentrage très efficace (10).
La représentation graphique devrait être utilisée aux différents stades du
processus d’apprentissage : au stade préalable, pendant la recherche d’idées,
pendant la mise en ordre, la structuration, la synthèse.

... et le voyage imaginaire


Le voyage imaginaire, ou rêve éveillé, est un autre outil pédagogique
précieux, permettant à l’apprenant de se rendre là où il lui est impossible
d’aller dans les circonstances présentes. C’est un moyen d’avoir une expé-

(10) Mandala )) veut dire (( cercle )) en sanskrit. C’est un diagramme géométrique, centré
autour d’un axe, orienté et symbolique.
146 Apprendre à gérer ses ressources
rience personnelle, signifiante et directe d’une réalité étrangère et différente :
l’intérieur d’une plante, la circulation sanguine, le métabolisme de la cellule,
le cosmos... Cette technique, peu employée encore dans notre pays cartésien,
donne pourtant d ’excellents résultats auprès d’apprenants récalcitrants aux
méthodes linéaires et dites objectives.
Le voyage imaginaire offre les fruits de l’activité du cerveau droit et
procure les ressources verbales de l’hémisphère gauche. La technique est donc
très complète, mais elle doit être menée avec dextérité et précision. Elle
permet à l’apprenant d’être en état de relaxation attentive et de réceptivité
de ses propres images.
Cette technique est d’autant plus importante qu’elle permet de jouer sur
la gamme entière des modalités sensorielles :vision, audition, motricité, sens
tactile, olfaction, goût. De plus, selon l’entraînement des apprenants et leur
degré d’implication, il est possible de les aider à passer de l’observation à
l’identification et à une compréhension intégrée.

... et les sens tactile et kinesthésique


Les sens tactile et kinesthésique sont deux très importantes voies d’accès
à la mémorisation. Ces deux types d’apprentissage sont indispensables
lorsqu’on rencontre une résistance à l’abstraction : chez certains élèves, les
représentations doivent encore se construire àpartir de leur sensorialité. C’est
ainsi qu’aux État-Unis, des enseignants ont retrouvé la méthode du boulier
japonais qui permet d’impliquer certains élèves, grâce à une approche des
mathématiques par les canaux tactile, kinesthésique et visuel.
Les techniques pédagogiques faisant intervenir la danse, le mime, les jeux
et l’intégration de: la gestuelle au langage (et inversement) sont des auxiliaires
pédagogiques puissants qui ne devraient pas être réservés aux classes
enfantines ou artistiques. Elles permettent à la motricité de jouer pleinement
son rôle et s’appuient sur la réalité cérébrale, tenant compte d’une synesthésie
valable non seulement pour l’enfant mais aussi pour l’adulte ; la synesthésie
et l’associativité sont l’une et l’autre la base de nos fonctions cérébrales.
L‘immobilité pour certains apprenants - même adultes - gèle littéra-
lement l’activité mentale. Le niveau énergétique de certains élèves - et en
particulier ceux qui sont en difficulté - est tel qu’il leur faut entrer en
mouvement pour déclencher la réflexion ou la communication.

Développer I apprentissage expérienciel


L‘apprentissage expérienciel est connu de nombreux enseignants.
I1 est stimulant et développe toute une gamme de stratégies, démarches,
explorations que les manuels scolaires ne peuvent pas aborder. L‘expérience
vécue est irremplaçable : observations, expériences en laboratoire,enquêtes
sur le terrain, rencontres, interviews, jeux de rôle, simulations, etc., la liste
n’est jamais close.
Quelle(s) pédagogie(s).,. ? 147

Les fautes contre le cerveau


Une erreur pédagogique (ça existe...) serait, par exemple, de croire que
la liste ci-dessus peut être close.
Que pourrait-on mettre dans la rubrique (( Ne pas faire D si elle existait
dans un cursus de formation de formateurs (ou de professionnels de la
communication)? I1 semble qu’il y ait quatre fausses manœuvres à éviter
à tout prix et à classer dans les fautes contre le cerveau :
- Présenter l’information passivement.
Une information passive est une information morte, isolée, sans relation
avec un contexte présent, passé ou futur ; sans lien avec d’autres événements,
hommes, cultures, etc.
L‘information restera objective et vivante si la mise en relation est
préservée. C’est le rôle de l’enseignant de le faire.
- Combattre (consciemment ou inconsciemment) le type de représen-

tation (visuel, auditif, kinesthésique, H.G., H.D.) de l’apprenant, au lieu de


s’en servir pour rejoindre l’apprenant, et le guider vers un élargissement de
sa gestion.
- Utiliser une seule stratégie, un seul canal, une attitude unique, et

exclusive.
Expliquer vingt fois de suite la même chose, de la même façon (oralement
ou en démonstration, par écrit) est non seulement totalement inutile mais
bloque la prise et le traitement de l’information car le canal d’accès s’est
fermé chez certains apprenants.
De plus, la répétition identique déclenche un phénomène d’habituation
et de désensibilisation qui est à l’opposé de l’objectif recherché.
~ Oublier que l’être humain, enfant ou adulte, quel que soit son âge,
est un-tout-dans-un-environnement.
Séparer les différents niveaux perceptifs de la connaissance (vision,
audition.. .), revient à provoquer artificiellement une rupture dans le proces-
sus normal d’interaction et d’intégration de l’information. Il n’y a pas,
comme le constate Korzybski, de perception sans interpolation et interpré-
tation.
Les troubles et le dysfonctionnement du code écrit chez certains appre-
nants s’améliorent lorsque la démarche suivie avec eux tient compte des
niveaux sensoriel et affectif qui précèdent, dans le cheminement de l’infor-
mation, le giveau abstrait du langage. Le processus, ne l’oublions pas,
remonte de bas en haut.
Cette courte liste d’erreurs à ne pas commettre n’a rien d’exhaustif.
Chaque situation d’apprentissage génère ses propres conditions optimales,
liées à l’objectif poursuivi, à la source d’information disponible, à la tâche
à réaliser, aux partenaires en présence, à la durée de l’apprentissage, etc.
I1 s’agit donc, une fois encore - on ne le redira jamais assez - d’ajuster
et de réajuster sans cesse l’approche pédagogique, en prenant la juste mesure
148 Apprendre a gérer ses ressources

des éléments en présence. Disposer d’outils de mesure, de diagnostic,


d’interventions et de pratiques variées... se révèle une nécessité urgente pour
le monde éducatif d’aujourd’hui.

Laisser se faire I‘itinérance

La notion de parcours a été déjà mentionnée plusieurs fois: elle est


fondamentale car elle est dynamique et suggère un changement et une
évolution, un but à atteindre. A la notion de parcours, s’ajoute une autre,
aussi fondamentale : celle de l’inattendu auquel tout itinéraire devrait laisser
une place, si nous tenions compte de ce que la science moderne de l’homme
nous enseigne. L’actualisation, c’est-à-dire le choix d’une possibilité, la
tendance de certains phénomènes à se produire, est la réalité du fonction-
nement cérébral.
Ceci est vrai pour l’apprentissage plus que pour toute autre chose. Étant
donné la complexité du cerveau, notre organe de l’apprentissage et de la
communication, son potentiel illimité, ses ressources et ce que l’on sait de
son fonctionnement, rien, dans le parcours de l’apprenant ne devrait être
totalement déterminé ni par l’enseignant, ni par l’apprenant lui-même.
D’après l’hypothèse (en cours de vérification) des a champs morphogé-
nétiques )) et de la (( causalité formative )) proposée par Sheldrake, nous
acquérons des comportements plus facilement - et plus vite - si d’autres
organismes vivants en ont déjà fait l’apprentissage.
Pour Gregory Bateson, l’apprentissage est un processus (( stochastique D,
dans lequel (( uri courant d’événements aléatoires se conjugue avec un
processus de sélection qui, lui, ne se fait pas au hasard D ( I 1).
Le parcours devient donc itinérance. L‘enseignant pratique alors une
attitude de laisser se faire, ce qui ne signifie évidemment pas qu’il laisse faire
à l’apprenant ce que bon lui semble. Bien au contraire, le formateur découvre
et s’investit de son véritable rôle de personne ressource, référent, guide,
régulateur. Dans cette optique, laisser se faire signifîe :

Faire confiance au potentiel, au fonctionnement de l’organe de l’ap-


prentissage, à la recherche d’équilibre qui est à la base de tout organisme
vivant.
C’est peut-être la tâche la plus difficile à demander à un enseignant, à
un formateur, car il est beaucoup plus facile de prévoir, diriger, planifier,
poser des rails, kmettre des règles, apporter l’information, décider du sens,
etc. Ce point est étroitement lié au suivant.

(11) BATESON(3. (1984), p. 153 ;


Ztinérunces est le titre d’une revue dont le premier numéro N L’Éveil du cœur », paru en
mai 1986, propose de (( restituer un souffle à la perception globale du réel (...) dans un langage
qui résonne au cœur du quotidien )) (éd. Albin Michel) ; cf. aussi SHELDRAKE R. (1987).
Quelle(s) pédagogie(s)... ? I49

Respecter la durée :celle de maturation et de structuration, car le temps


est déjà présent au niveau de la cellule. C’est même une composante de la
cellule. On ne peut pas agir sans tenir compte de ce partenaire.
Souvenons-nous que les images d’un cerveau en repos sensoriel souli-
gnent l’importance du temps de structuration : celui dont les lobes frontaux
ont besoin pour mettre en ordre l’information et pour que s’instaure la
barrière fonctionnelle, le moyen que possèdent les humains de se libérer de
la boucle stimulus-réponse...

Laisser la place au choix et à la coopération des deux hémisphères, et


ceci à toutes les étapes du processus dacquisition :
- Au moment de la prise d’information, le choix du canal d’accès à
l’information.
- Le choix de la stratégie à suivre.

- Le choix de l’objectif à atteindre.


- Et aussi le respect et le choix du rythme et de la durée nécessaire à chacun

pour que maturation et structuration se réalisent.. .


Le rôle de l’enseignant est de proposer un éventail raisonnable de choix
a l’apprenant, puis d’établir un dialogue pédagogique à l’occasion de ce
choix. Un exemple de méthodologies faisant intervenir le choix à plusieurs
niveaux est donné plus loin.

Faire lâcher prise a la linéarité


Une censure logique, analytique et critique exercée trop ôt, barre la route
à la vision globale et synthétique.
La troisième voie, pratiquée si rarement, recommande ’approche oulet,
le pourquoi pas?, le recadrage... et de nombreux autres outils destinés à
amorcer une prise d’information du contexte. Elle permet é alement d’amor-
cer la pensée latérale, la créativité, l’innovation... La condition de cette
troisième voie est 1. que soit reconnue la complexité de notre nature telle
qu’elle a été soulignée dans les premiers chapitres et 2. que nous ne nous
contentions pas exclusivement de solutions a court terme, analytiques ou
hiérarchiques, car ce sont les signes d’une approche réductionniste.

Accepter les différences


Nos différences sont sources de complémentarité et d’enrichissement.
Lorsqu’un enseignant pratique des techniques de pédagogie différenciée et
une méthodologie adéquate pour animer le travail en sous-groupes, il ne
redoute plus l’hétérogénéité : au contraire, il l’espère et en tire profit.

Réussir dans un apprentissage et un enseignement linéaire donne de la


satisfaction. Réussir dans un apprentissage et un enseignement qui s ’adres-
sent au cerveau tout entier donne - en plus - la joie de la découverte :
celle du sens d’une réalité qui nous appartient en propre tout en nous reliant
à beaucoup plus grand que nous.
CHAPITRE 7

APPLICATIONS PÉDAGOGIQUES
TROIS EXPÉRIENCES EXEMPLAIRES

Parmi les pays où des tentatives ont été réalisées pour appliquer à la
méthodologie de l’enseignement les connaissances actuelles sur le fonction-
nement cérébral, le Vénézuela donne l’exemple d’un projet mené à l’échelle
nationale, et mérite que l’on s’interroge sur le modèle qu’il représente et la
finalité qu’il propose.
La pédagogie concue par Dee Joy Coulter, dans le Colorado, aux États-
Unis, paraît exemplaire en ce qu’elle possède le caractère rare d’appliquer
le conseil de Paracelse (1493-1541) : faire naltre la théorie de fa pratique,
et non l’inverse.
Quant à l’expérience australienne d’enseignement de l’anglais aux Abo-
rigènes, elle paraît être un courageux témoin de la volonté d’enseigner dans
le respect de f’Autre. I1 s’agit, selon les expérimentateurs, d’« un domaine
d’interrogation et d’un défi permanent ».

1. U N PROJET NATIONAL: LE PROJETVÉNÉZUELIEN D U DÉVE-


LOPPEMENT DE L‘INTELLIGENCE

Ce projet a été conçu et réalisé par le Dr Luis Alberto Machado, nommé


de 1979 à 1984, ministre d’État chargé du Développement de l’Intelligence
par le Président Luis Herrera Campina. Celui-ci fit de l’Éducation l’objectif
prioritaire de son gouvernement.
Pour la première fois sans doute dans l’histoire, un projet éducatif de
développement des capacités intellectuelles concernant toute une population
recevait une dimension politique. Le Gouvernement suivant celui de Luis
Herrera Campina, en 1984, décida de poursuivre la tâche entreprise.
La démocratisation de l’intelligence passe par la démocratisation de la
science. Selon les termes employés par Luis Alberto Machado ((toute
152 Apprendre à gérer ses ressources

connaissance scieintifique pouvant contribuer à développer l’héritage géné-


tique de l’être humain, doit être mise à la disposition de tous )).
Le développement de l’intelligence signifie, pour le concepteur du projet,
le développement de toutes les aptitudes humaines et l’implication de tous
les contextes (familiaux, scolaires, culturels, professionnels, services publics,
etc.).

Objectifs du projet

L‘un des objectifs les plus urgents à atteindre a été la réforme du système
éducatif dans son ensemble.
La recherche ii été orientée dans trois directions :
- L‘approfondissement des connaissances du processus relationnel ensei-

gnant-apprenant, et les implications sur le développement des savoir-faire


cognitifs.
- L‘utilisation de méthodologies variées tendant à développer et faciliter

une interaction plus riche entre l’être humain et son environnement.


~ L‘encouragement de création de projet destinés à toute la population
vénézuélienne, visant à augmenter les aptitudes à la réflexion.

Principes directeurs

1) Les programmes sont destinés à toute la population, et, plus spécia-


lement, aux classes défavorisées - qui ont, plus que tout autre, besoin de
participer à la vie sociale et culturelle pour parvenir à la réalisation de leur
personnalité.
2) La science aujourd’hui nous confirme que nos aptitudes intellectuelles
peuvent se développer à tout âge. La vie se réalise à travers l’acquisition
de savoir-faire qu’il n’est jamais trop tôt ni trop tard de développer.
3) Tous les programmes ont une base scientzjkpe rigoureuse et sont
construits sur des données récentes de la recherche scientifique.
4) Le programme de développement de l’intelligence est totalement
distinct de tout pr’ojetet propagande politiques. Des chercheurs et éducateurs
de toutes tendances politiques et idéologiques ont pris part au projet sans
discrimination aucune.
5 ) Toutes les actions ont été réalisées par l’intermédiaire des services des
ministères de l’Éducation et de la Santé, avec l’aide d’organisations nationales
et régionales et des institutions privées.
6) L‘une des caractéristiques les plus nettes du projet est son budget
restreint, grâce à l’utilisation des services administratifs et des structures déjà
existantes et à la coopération gratuite des mass-média.
7) Chaque projet a été réalisé en tenant compte des réalités vénézué-
liennes. Les méthodologies utilisées ont été adaptées systématiquement aux
besoins locaux. De plus, des chercheurs et formateurs vénézuéliens ont été
encouragés à développer des méthodes nouvelles et des projets de dévelop-
pement de l’intelligence humaine.
8) Dès l’origine, les programmes ont été conçus dans une dimension
Applications pédagogiques 153

internationale. La création d’une (( Alliance Internationale pour le Dévelop-


pement de l’Intelligence )) a été encouragée afin que toutes les nations, sans
discrimination d’aucune sorte, puissent participer et contribuer à une coopé-
ration au niveau des ressources scientifiques sur le plan mondial.

Programmes en application

1. Le programme familial (pré-nataljusqu ’à six ans)


Ce programme s’appuie sur les recherches portant sur le développement
de la sensori-motricité et son importance pour accroître le potentiel bio-
psycho-social et cognitif de l’enfant. Le développement et le fonctionnement
du cerveau du petit enfant dépendent de la qualité et de la quantité
d’interactions de l’enfant et de son environnement, le cerveau du nouveau-
né étant caractérisé par son immaturité et sa plasticité.
L‘objectif de ce projet, destiné aux familles et, à travers elles, aux enfants,
de la naissance jusqu’à l’àge de six ans, est la formation des parents et des
adultes entourant l’enfant, afin qu’ils contribuent au plein épanouissement
de l’être dynamique, fonctionnel, culturel et historique qu’est l’enfant.
Les fondements théoriques du projet sont un modèle multifactoriel, dans
lequel les principes éducatifs et les techniques (qui incluent différentes
variables telles que la nutrition, la santé et les facteurs de stimulation), sont
groupées en une seule unité d’action. I1 a semblé aux réalisateurs de ce projet
que le choix multifactoriel convenait mieux qu’un modèle unidirectionnel,
étant données la situation économique et la pauvreté dans lesquelles se trouve
une grande partie de la population vénézuélienne.
La nécessité d’intégrer à un programme de développement de l’enfance
sous-alimentée d’autres facteurs que la nutrition (tels que la stimulation
affective et cognitive) était apparue, à Caracas, en 1981, au premier
Symposium International sur la Nutrition et l’Intelligence. Le projet familial
tient compte de l’aspect affectif, considéré comme un facteur vital et décisif
pour le développement cognitif de l’enfant. Dans l’esprit des responsables
de ce projet, l’objectif de prévention vient s’ajouter à l’objectif thérapeutique
ou de réparation.
Les parents ayant suivi les exercices du projet ont, d’après les termes
du rapport sur la démocratisation de l’intelligence rédigé par Luis Alberto
Machado, changé leur attitude face aux problèmes de l’enfant et de leur
environnement : ils ont amélioré leur capacité d’observation, leurs relations
affectives, leur propre créativité, leur imagination et trouvé des situations
stimulantes pour l’enfant. L‘aptitude de celui-ci à échanger et s’intégrer dans
le groupe familial s’est également améliorée.
(( Pour la première fois dans l’histoire des idées politiques, les relations

affectives entre parents et enfants sont devenues partie intégrante d’un


programme politique, destiné à rendre la cellule familiale l’outil principal
du changement de sociétt; (1).

( I ) Luis Alberto MACHADO(1985). Les italiques sont nôtres


154 Apprendre à gérer ses ressources

2. Programmes d’éducation (système scolaire)


Les processus mentaux nécessaires à l’acquisition des connaissances sont
des pré-requis m,ak ne sont pas appris spontanément; ils nécessitent un
apprentissage et une pratique systématiques.
(( Les contenus changent mais les systèmes restent », écrit L.A. Machado.

(( L‘objectif le plus important est d’apprendre à apprendre ». Le projet

ministériel comporte donc l’apprentissage des techniques et des pratiques de


savoir-penser.
Parmi les da-érents programmes de formation, celui de L’Éducation
visuelle destiné aux enfants de quatre à six ans, a été inspiré par Jaacov
Agam, artiste et concepteur parisien. Ce programme tend à développer les
relations de la pensée par la visualisation, la perception et la mémoire. La
méthode utilisée développe les processus d’interprétation, d’identification et
de reproduction de l’information visuelle, tout en développant les aptitudes
à la communicatilon (2).
Un autre prog,ramme officiel est le Programme du Jeu d’Échecs, destiné
à tous les âges. Il encourage la formulation et l’application de stratégies de
remplacement et leur transfert à la résolution de problèmes.
Le programme Apprendre à penser (six à dix ans) est inspiré des travaux
de Edward de Bono et a été mis au point après une étude préalable auprès
de trente enseignants et neuf cents élèves des faubourgs de Caracas et de
Maracaïbo. Une fiois adapté à l’identité vénézuelienne et expérimenté, il servit
à former 1 300 enseignants correspondant à une population scolaire de 40 O00
élèves. Par la suite, 40 O00 enseignants furent formés, atteignant une popu-
lation de 1200000 élèves de neuf, dix et onze ans. En 1985, on comptait
que 117 O00 enseignants avaient reçu une formation dans cette méthodologie.
Le programme est destiné à développer chez l’apprenant les capacités
d’adaptation à son environnement, et à lui apprendre également à (ré-)agir.
Quarante processus mentaux, représentant des outils pour l’organisation de
la pensée, la prise de décision, la communication, la créativité, etc., sont
enseignés dans ce programme, dont les effets, comme on peut l’imaginer
facilement, vont bien au-delà du périmètre scolaire.
On a remarqué, en effet, chez les apprenants qui ont suivi ce programme,
une augmentation de la capacité à trouver des solutions aux problèmes, à
prendre des décisions, à organiser, abstraire, repérer les points importants,
manipuler les variables, établir des relations. Les résultats obtenus ont décidé
le Ministère à inclure cette méthodologie dans les programmes officiels
scolaires.

3. L‘enrichissement instrumental
Ce projet est destiné à développer les processus mentaux qui n’ont pas,
ou pas assez, reçu d’attention au cours du développement de l’enfant. I1

(2) Le matériel comporte 36 livrets et autant pour l’élève couvrant les années d’école
maternelle jusqu’à l’entrée dans le premier cycle
Applications pédagogiques 155

s’appuie sur la théorie du Dr. R. Feuerstein, de l’université Bar Ila (Israël),


selon laquelle un agent médiateur agissant entre le sujet et le stimulus peut
intervenir pour augmenter le développement intellectuel et les aptitudes à
apprendre de l’enfant.
Le programme comporte cinq cents exercices groupés autour de quinze
instruments, dont chacun est destiné à développer ou renforcer un savoir-
faire spécifique et l’acquisition d’autres pré-requis du processus d’appren-
tissage.
Les résultats obtenus signalent des progrès importants dans les domaines
suivants : orientation spatiale, comparaison, perception analytique, classifi-
cation, illustration et organisation des relations temporelles.
D’autre part, le coefficient intellectuel des enfants a sensiblement aug-
menté, leur image de soi s’est améliorée, ainsi que leur compétence à évaluer
leurs propres résultats, leur capacité à être maîtres de leur comportement
spontané, à s’adapter aux exigences du travail scolaire.
Les enseignants, de leur côté, ont amélioré leur capacité à diagnostiquer
le comportement de leurs élèves, identifier les déficits et être en mesure d’y
faire face, ce qui se traduisit par un changement de la relation enseignant-
apprenant.

4. Le projet du Développement de l‘Intelligence (1 1 à 14 ans)


Ce programme a été mis au point par des chercheurs vénézuéliens, en
collaboration avec l’université d’Harvard, et avec l’aide de la Bolt, Beranek
and Newman Consulting Firm. Dans ce projet, l’accent est mis sur le
développement des aptitudes directement reliées à l’intelligence et susceptibles
d’être évaluées. Elles appartiennent aux six domaines suivants :
1) Les fondements du raisonnement dont le but est d’entraîner l’appre-
nant à percevoir, associer et interpréter consciemment l’information en
exerçant un esprit critique et systématique, afin de parvenir à un degré de
complexité élevé dans ses processus mentaux.
2) La compréhension du langage, programme destiné à développer une
compréhension approfondie de la nature complexe des significations impli-
cites et explicites des mots, ainsi que de leurs inter-relations, de la structure
et de l’organisation du langage - le langage étant considéré comme un
véhicule et un produit des processus mentaux ainsi qu’un moyen efficace
de communication et une source de créativité.
3) Le raisonnement, visant à développer la maîtrise de la forme, la
vérification et l’expression de concepts, et la représentation adéquate de la
réalité.
4) La résolution de problèmes dont l’objectif est de combiner les
différentes stratégies acquises précédemment et les appliquer à de nouvelles
situations.
5 ) La prise de décision, programme mettant en jeu les différentes options
à soumettre à l’introspection et à l’analyse en vue d’une sélection réfléchie
et adaptée au contexte.
6 ) La pensée créatrice, programme permettant d’initier l’apprenant à
156 Apprendre à gérer ses ressources
l’analyse, 1’évalua.tion et l’élaboration de changements dans l’approche
créative (concrète et abstraite).

5. Méthodes et systèmes de pensée (niveau secondaire)


L‘objectif est tie développer et mettre en œuvre des méthodologies spé-
cifiques qui leur permettront d’augmenter leur potentiel intellectuel :
développement de stratégies pour la résolution de problèmes, prise de
décision, etc. Dans ce projet, plusieurs éléments contenus dans d’autres
projets (a Apprendre à penser », (( Enrichissement instrumental D...) sont
adaptés à l’enseignement secondaire lorsque les savoir-faire fondamentaux
n’ont pas été mis en place dans un stade antérieur.
En 1983, l’université Metropolitana a signé un accord avec l’université
de Yale en vue de l’élaboration d’un projet visant à développer les aptitudes
au raisonnement inductif et la compréhension verbale : deux éléments
constitutifs de l’intelligence.
D’autres projets, comme celui de la K Stimulation des zones cérébrales
opératoires», ont pour but de faciliter l’accession de l’apprenant à une pensée
créatrice et à la conscience de ses potentialités.
L‘intégration de ces diverses méthodologies dans les programmes sco-
laires, à différents niveaux du système éducatif, non seulement permet aux
institutions de mieux répondre à leur vocation de formation de la pensée
chez l’homme, mais aussi constitue une démarche originale qui n’avait jamais
encore été entreprise, et dont la portée dépasse infiniment le cadre institu-
tionnel.

6. Développement de la représentation de Iéspace chez l‘enfant


L‘objectif de ce programme est de développer le concept de l’espace en
tant que réalité mesurable, homogène et objective. I1 fournit le moyen de
corriger le déficit du système de référence par la pratique de savoir-faire
cognitifs qui contiribueront à la coordination et à la représentation d’objets
dans l’espace euclidien et l’espace projectif.

7. Méthodes et systèmes de penske (niveau universitaire)


Ce programme propose le développement des stratégies de résolution de
problèmes et de prise de décision et insiste particulièrement sur I’appren-
tissage des processus mentaux. Les méthodologies nouvelles sont combinées
aux structures traditionnelles de pensée (logique...). Ce programme constitue
également un cadre de référence pour la recherche et la méthodologie de
l’enseignement.
Un accord entre 1’Universidad Metropolitana et l’université de Yale, en
1983, porte sur l’daboration d’un projet d’enseignement du raisonnement
inductif et de la compréhension verbale, ces deux savoir-faire appartenant
à ce que l’on peut qualifier l’intelligence guide.
Applications pédagogiques 157
8. Programme de formation dadultes
Le Programme de développement des mécanismes de la pensée est un
programme de formation permanente, destiné aux adultes, en dehors du
cadre de l’institution scolaire. Son objectif est l’entraînement systématique
aux savoir-faire cognitifs tels que la science moderne nous les enseigne.
Les principes sous-jacents à ce programme sont :
- Tout homme, femme, enfant, adolescent, personne âgée a le droit de

développer son intelligence et sa personnalité.


~ La priorité donnée par le gouvernement du Vénézuela à l’éducation
concerne tous les citoyens, indépendamment de leur âge et de leur origine
sociale.
~ L‘avenir des enfants d’aujourd’hui et de demain dépend du changement
d’attitude des adultes d’aujourd’hui.
~ Chaque être humain doit pouvoir, en permanence, se développer et
devenir en conséquence plus autonome, non dépendant, libre et capable
de penser et de créer sans qu’un autre ne se substitue à lui.

La mise en place et l‘évaluation du projet national


La mise en place et l’évaluation du projet sont évidemment les premières
questions que l’on se pose et sur lesquelles plusieurs pays, intéressés par le
projet, se sont penchés.
La révolution sans précédent que le projet a représenté pour le Venezuela
a exigé plus de cinquante séminaires dans tout le pays, cinq spots télévisés
chaque soir sur les chaînes de la télévision nationale et un cadre de quarante
mille volontaires.
Les résistances, on peut s’en douter, n’ont pas manqué, même au sein
du gouvernement. Le projet fut même qualifié de minable odyssée. Démo-
cratiser l’intelligence ne convient pas à tous ... et, même cela, représente un
danger puisqu’il s’agit de partager ce qui, pour l’instant, est le privilège d’une
minorité.
Les connaissances dont on dispose actuellement, grâce aux progrès
scientifiques, doivent être appliquées d’urgence aux méthodologies de l’ap-
prentissage. Le concept d’intelligence, tel qu’il est présenté dans le projet,
est élargi considérablement par rapport au cercle étroit des capacités verbales
auquel il a été restreint pendant des siècles. I1 s’agit maintenant de ne pas
atteler... un moteur à réaction à une charrette à bœuf ... !

Évaluation du projet
Une évaluation objective du projet vénézuélien a pu être faite par
l’université d’Harvard et par les missions d’experts envoyés par des pays
étrangers (Colombie, Suede, Bulgarie, Corée du Sud, Cuba, Etats-Unis et
par l’Unesco).
La meilleure évaluation est sans doute celle qu’ont pu faire des membres
du gouvernement qui étaient, au départ, peu convaincus. Voulant tester eux-
mêmes le résultat de trois mois de formation aux techniques de dévelop-
158 Apprendre à gérer ses ressources

pement de l’intelligence, ils se sont rendus dans une classe primaire (8-11
ans) et ont posé aux enfants une question difficile : (( Quel serait dans le pays
l’impact d’une decision du gouvernement de transférer la capitale Caracas
dans un autre lieil ? ))
Un enfant de neuf ans répondit : a Excusez-moi, Monsieur, mais votre
question est mal posée. Pour que nous vous donnions une réponse intel-
ligente, il faut que vous nous apportiez deux informations supplémentaires :
1. a Pourquoi voulez-vous transférer la capitale ? )) et 2. (( Où voulez-vous
la mettre ? ))
Un autre enfant, prenant le relais, ajouta : (( Si la raison du transfert est
la pollution de C,aracas, il nous faut savoir si vous avez aussi l’intention de
transférer les industries. Si c’est le cas, il n’y a pas de raison de changer
l’emplacement de Caracas... ))
L‘interlocuteur de ces enfants fut immédiatement convaincu de leur
capacité à raisonner, mais surtout, il fut impressionné par la confiance qu’ils
avaient en leur propre jugement. Ce deuxième point est, également, l’un des
objectifs du projet: libérer l’enfant et l’apprenant de la peur inutile de
l’uutorité (3).

2. UNE APPROCHE << HOLISTIQUE : DEE JOY COULTER (CO~O-


>)

rado, États-Unis)

Les expériences réalisées aux États-Unis pour appliquer les résultats des
recherches en neurosciences sont nombreuses et variées : l’approche péda-
gogique de Leslie Hart, dans le New Jersey, fondée sur la cohérence de
l’apprentissage et de l’enseignement ; celle de Linda V. Williams à Berkeley,
Californie; le projet Synectics de Gordon & Poze sur l’écoute; le projet
Developmental-Innovative de 1’Escondido Union School District Board of
Education sur la lecture ; le projet de l’université de Californie, à Berkeley,
sur l’écriture, et bien d’autres encore.
L‘expérience pédasogique de Dee Joy Coulter a été choisie en raison de
son originalité et de l’illustration qu’elle présente d’une pédagogie compatible
avec le fonctionnement cérébral, intégrée, et s’adressant à l’apprenant tout
entier. Dee Joy Coulter est Docteur en Sciences de l’Éducation de l’université
du North Colorado. Elle a enseigné de nombreuses années à des enfants
dits retardés, handicapés, en rupture de scolarité ou de société. Elle est
également consultante et chargée de formation de formateurs. Sa recherche
sur les processus d’apprentissage et son orientation pédagogique datent du
jour où elle décida qu’elle ne pouvait plus ignorer les questions qu’elle se
posait à elle-même : comment fonctionne le cerveau ? Comment peut-on
enseigner tant qu’on ignore les mécanismes de l’apprentissage ? Quels sont

(3) Cf. le rapport de l’Unesco sur l’expérience vénézuélienne : (( Évaluacion de los


programas de desarrollo de la intelligencia D por R.E Ballesteros, S. Genovese, G. Mialaret,
H. Osorio Melendez, F.M.R/ ./ E.D./S.C.M./ 170, Paris, 1984.
Applications pédagogiques 159

les nouveaux paradigmes qui émergent des recherches récentes en physique,


biochimie, neurologie, psychologie, médecine, etc. ?
Des questions, note-t-elle, qui contiennent le risque de voir la vision du
monde que l’on possède se transformer brutalement.
De nombreuses intuitions qu’eut Dee Joy Coulter comme enseignante,
furent confirmées par ses recherches sur les deux hémisphères et le rôle du
cerveau droit dans l’approche globale ou holistique de l’information :
utilisation de métaphores, d’analogies, d’images mentales pour enseigner les
mathématiques et la géométrie à des enfants incapables de suivre des
stratégies linéaires ou de gérer temporellement leurs activités. Peu à peu, elle
construisit une pédagogie de la lecture, de l’orthographe, de l’attention, de
la motivation, permettant aux enfants hyperactifs ou passifs de sortir de leur
situation d’échec.

La lecture

Selon D. J. Coulter, il y a trois types de lecteurs faibles: (a) ceux qui


peuvent visualiser mais ne peuvent pas maîtriser l’aspect phonique, (b) ceux
qui peuvent maîtriser l’aspect phonique mais qui sont incapables de créer
les images mentales correspondantes, susceptibles d’apporter une significa-
tion aux mots lus, (c) ceux qui ne peuvent ni visualiser, ni maîtriser l’aspect
phonique.
L‘analyse phonique est une opération de l’hémisphère gauche. La
visualisation interne peut être une opération de l’hémisphère droit ou
gauche : ce dernier construit l’image totalement à partir de la description
orale ; l’hémisphère droit s’appuie sur ce qu’il connaît déjà : soit il re-connaît
et identifie, soit il lui faut percevoir l’image (concrètement) avant de la
visualiser (en évocation) correctement.
I1 y a donc un moyen d’aider l’enfant qui a des difficultés à visualiser :
- En lui présentant des images avant la lecture du récit.

- Ou en lui montrant les objets concrets qui sont décrits dans le texte.
~ Ou encore en lui décrivant des images réelles ou imaginées avant de
commencer la lecture.
Certains enfants ont des performances de lecture très irrégulières. D’après
D.J. Coulter, cela correspond à une baisse de niveau lexical dans leurs
échanges et conversations. Aussi, décide-t-elle de donner à ces enfants des
sessions d’échauffement,les soumettant à un feu roulant de questions portant
sur la dénomination des objets qu’elle montre à un rythme très rapide. Après
une énumération de dix objets, ces enfants retrouvent une certaine aisance
en lecture.
Un autre moyen d’amorcer l’hémisphère gauche est de faire compter
l’enfant à reculons, de 25 à 1, de 3 en 3.
Dans l’un et l’autre cas, ces techniques sont efficaces parce qu’elles
incitent l’hémisphère gauche à fonctionner dans un cadre qu’il connaît bien :
dénomination et traitement séquentiel.
160 Apprendre a gérer ses ressources

Orthographe

Les difficultés en orthographe viennent d’une gestion séquentielle faible.


D.J. Coulter propose que le mot soit écrit en accentuant les syllabes ou les
combinaisons de lettres jugées difficiles avec des couleurs différentes. Puis
le mot est chantonné en modulant les formes, mais les lettres ne sont
prononcées ni intérieurement, ni séparément. Les enfants alternativement
regardent le mot, puis ferment les yeux pour évoquer les formes dans leur
tête, sur leur écran intérieur. Quand le mot est net, ils ouvrent les yeux et
ils dessinent le mot sur leur cahier.
On fait de même pour une quinzaine de mots, puis on recommence une
deuxième fois. Lii troisième fois, les enfants ferment les yeux et attendent
que le mot se forrne sur leur écran intérieur lorsqu’ils entendent l’enseignant
le prononcer. Quand ils estiment qu’ils peuvent le dessiner, ils ouvrent les
yeux et l’écrivent.
D.J. Coulter recommande (comme le font aussi les théoriciens de la
Programmation NeuroLinguistique), que le mot soit placé en haut à gauche
du champ visuel interne qui est, pour les droitiers, directement connecté avec
l’hémisphère droit.

Les difficultés d’apprentissage et de développement de l‘enfant

D.J. Coulter rapproche les lenteurs du développement et de la maturation


du cerveau et la llenteur de certains apprenants à accomplir une tâche.
Le processus de myélinisation que nous avons déjà évoqué, ne se déroule
pas de façon identique et au même rythme chez tous les enfants. L‘écart
peut être de un à trois ans. La relation entre intelligence et myélinisation
dépend de la rapidité avec laquelle le processus se déroule et se met en place.
Si les tâches proplosées à l’enfant font appel à un traitement de l’information
exigeant des stratégies neurales pour lesquelles l’enfant n’est pas équipé, celui-
ci choisira de répondre avec les stratégies dont il dispose, mais restreintes
et moins efficaces que celles des couches supérieures.
I1 faut donc éviter de donner des tâches abstraites avant l’âge cérébral
correspondant, mais, par contre, il faut s’adresser au système nerveux déjà
myélinisé, le systkme protopathique ou spinothalamique qui sait gérer les
messages de survie, de protection et de défense. Ce système, qui est le seul
système sensori-m.oteur achevé fonctionnant jusque l’âge de sept ou huit ans
pour toutes les activités n’est pas très bien adapté à la vie scolaire, remarque
D.J. Coulter, car les fibres nerveuses de cette formation n’atteignent pas le
cortex, ce qui signifie que leur stimulation n’implique pas une ré-flexion.
La prise d’information est alors étroitement liée Ù la motricité.
En terme d’intervention pédagogique, ceci signifie que 1apprentissage ne
peut avoir lieu sans qu’intervienne sous une forme ou une autre la motricité.
Le stade sensori-moteur de Piaget a donc une base neurologique, ainsi
que toutes les pédagogies faisant appel à l’apprentissage expérienciel et à
la manipulation d’objets concrets. La chronologie du développement neu-
rologique de l’enfant est unique pour chaque enfant. La période entre six
Applications pédagogiques 161

et huit ans devrait être celle où les enseignants n’abandonnent en aucun cas
la motricité comme véhicule de l’acquisition du savoir.

Difficultés de comportement : agressivité, dépression, dé-motivation

Même lorsque le système nerveux est fonctionnellement plus développé


que dans les situations décrites ci-dessus, il arrive que dans des situations
de stress, l’organisme ne fonctionne plus que par son mécanisme d’urgence
qui traite uniquement les informations sensorielles et les réponses motrices.
Les apprenants qui fonctionnent de cette façon sont souvent agressifs,
sur la défensive, agités, distants du groupe et de l’enseignant. D.J. Coulter
découvrit que ces enfants se ((sentaient très vulnérables de dos» et qu’ils
avaient besoin de voir ce qui se présentait à eux ; donc, il ne convenait pas
de les placer au premier rang ... mais au contraire, au fond de la classe, le
dos protégé par le mur, et dans une position qui leur permettra de surveiller
ce qui pourrait, à tout moment, envahir leur territoire. D.J. Coulter s’est
inspirée d’études faites sur des comportements de violence. Ces recherches
révélent que les personnes violentes exigent un espace vital deux fois plus
grand et en forme d’ellipse (plus d’espace exigé par derrière), alors que les
sujets testés non violents demandent un espace cylindrique plus restreint :
une bulle de deux mètres quarante de diamètre dans le premier cas, au lieu
d’un mètre dans le second.
L’agressivité, tout comme l’incapacité à se concentrer si l’enseignant se
déplace dans la classe et sort du champ visuel, correspond à une conscience
exacerbée de la périphérie. Le besoin de perception périphérique s’étend aussi
à l’audition: D.J. Coulter annonce sa venue avant de pénétrer dans
le territoire de l’élève; un mètre au moins est nécessaire pour que l’élève
puisse se préparer à l’invasion. Si l’enseignant a l’intention de toucher
l’enfant, il faut laisser celui-ci prévoir le geste et voir la main s’approcher
de lui. I1 est surtout important que cette main ne le surprenne pas de dos,
car immédiatement une réaction de défense est la réponse d’un cerveau qui
se sent menacé ; il est alors incapable de traiter une information abstraite
ou de prendre une décision ré-fléchie. D.J. Coulter remarque très justement
que le cerveau sous-cortical est trop souvent de service chez certains
apprenants, ceux-là même qui ont particulièrement besoin d’être rassurés,
protégés, et calmés pour être en mesure de ré-Jéchir. Mais, par leur conduite
anxieuse et agressive, ils sont des éléments de perturbation dans le groupe.
En plus des précautions à prendre par l’enseignant au niveau relationnel,
D.J. Coulter recommande de disposer le mobilier et les places des élèves
dans la classe en tenant compte des échanges d’énergie entre les apprenants :
elle donne l’exemple du mur d’énergie qu’elle constitue autour d’un enfant
déprimé, hostile et sur la défensive, grâce à certains de ses camarades, calmes,
chaleureux et non menaçants. Ces trois éléments : mur, mobilier, énergie
positive, permettent de créer des îlots dans la classe où l’énergie négative
est alors neutralisée. Mais il est essentiel de laisser à ces enfants un champ
visuel périphérique suffisant car leur comportement, rappelons-le, révèle un
besoin de voir et prévoir ce qui peut représenter le danger.
162 Apprendre à gérer ses ressources
L’hyperactivité émane de signaux émis par le système nerveux autonome
directement relié à l’hypothalamus, et indirectement, par ce relais, à toutes
les zones cérébrales. Une très grande tension musculaire est un facteur qui
interfère négativeiment dans l’acquisition des connaissances.
Les résultats obtenus par biofeedback ont prouvé que certaines fonctions
que l’on croyait automatiques comme le rythme cardiaque, la tension
musculaire, la circulation sanguine, etc., pouvaient être contrôlées par la
conscience. La terision musculaire, au niveau du muscle frontal en particulier,
révèle un état de tension générale ; en réduisant cette tension, par biofeedback
ou par un entraînement à des techniques de recentrage(4), on parvient à
faire diminuer la tension et l’hyperactivité des enfants, et, en particulier, on
obtient de meilleurs résultats en lecture.
La technique proposée par D.J. Coulter pour lutter, avec l’aide de
l’enfant, contre son propre état d’agitation est de passer un contrat avec lui.
Une échelle de 1 à 10 représente le système de notation que l’enfant lui-
même utilise pour annoncer son état : (( Je suis à 9... )) (( Je suis très agité )) ;
((Je suis à 1 ou 2 )) signifie ((Je suis calme )) (et sous-entendu, ((Je peux
supporter de faire une activité qui m’ennuie ))). Lorsque l’enfant se déclare
être (( à 9 O, il trouve un endroit dans la classe où il se calmera jusqu’à ce
qu’il s’estime être redescendu à (( 3 ou 4 ».
Manque d’attention et dé-motivation : le système nerveux autonome joue
un rôle vital dans le processus et l’état d’attention dans la motivation au
cours des activitlés d’apprentissage. L‘école exige des apprenants qu’ils
soutiennent longtemps leur attention et il semble qu’elle ait de bonnes raisons
pour le faire. En effet, on peut comparer ce qui se passe pour le mental
à ce qui se passe pour le corps : le mental a besoin d’un second souffle pour
dépasser la sensation d’inconfort provoquée par l’effort physique que l’on
ressent dans les vingt à quarante premières minutes au début d’un appren-
tissage. Puis la sensation pénible disparaît, le sens du temps qui s’écoule
s’estompe, et on ressent un renouveau d’énergie, un second souffle: un
rythme régulier s’établit avec, parfois, un sentiment agréable d’euphorie ou
de profonde satisfaction.
D.J. Coulter i i remarqué que le sentiment d’inconfort, d’indécision ou
d’ennui qui survient dans les vingt ou quarante premières minutes où l’on
entreprend un travail nouveau, est un obstacle à ne pas négliger par les
enseignants. Ils ont en effet la délicate besogne de maintenir un équilibre
fragile entre ce qui suscite l’intérêt chez l’apprenant et ce qui risque de les
décourager de suivre. D.J. Coulter a, en ce qui la concerne, construit une
pédagogie de la tolérance à l’ennui et aux dijjficultés, estimant que le rôle
d’un enseignant est d’aider l’apprenant à se mesurer aux difficultés au lieu
de les simplifier pour lui. Faire émerger l’ordre du chaos est une façon
d’enseigner la complexité (réelle) des choses et, en plus, cela développe la

(4) Le a recentrage )) est un procédé et un état d’esprit. Plusieurs techniques (yoga nidra
et swara yoga, sophrologie, programmation neuro-linguistique, relaxation ...) permettent, en
faisant appel au système nerveux autonome pour prendre les commandes, d’atteindre, de
rétablir ou de maintenir un état d’équilibre mental.
Applications pédagogiques 163
confiance en soi. La tolérance à l’ennui est un savoir-faire extrêmement utile
qu’il faut enseigner, car c’est ainsi que l’élève parvient à se concentrer sur
un matériel à approfondir sans se laisser distraire. Un matériel assez
conséquent d’exercices traditionnels et de textes de lecture relativement longs
est nécessaire : il est demandé aux apprenants de garder à portée de la main
une fiche sur laquelle ils inscriront un signe chaque fois que leur esprit se
laissera distraire ;puis ils reprendront leur tâche. On fixe d’abord des sessions
de cinq ou dix minutes ; puis, lorsque le but est atteint, on augmente la durée
de l’exercice : dix à quinze minutes pour des élèves du primaire ; vingt à
vingt-cinq minutes pour les élèves de onze à treize ans. Une fois que l’on
a atteint le second souffle, entre vingt et quarante minutes, le sens du temps
qui passe s’est estompé et la véritable concentration commence.
Dans le second cycle de l’enseignement secondaire, les apprenants
devraient être capables de franchir le seuil des vingt premières minutes et
atteindre d’emblée des niveaux de concentration avancée. Cet état de
concentration est indispensable pour atteindre le stade de la pensée formelle
décrite par Piaget. En fait, les recherches révèlent que moins de la moitié
des apprenants ayant suivi un cursus scolaire normal, aux États-Unis,
atteignent le stade de la pensée formelle que leur cerveau, pourtant, serait
tout à fait capable de gérer. Mais l’entraînement, de plus en plus nécessaire
dans le contexte informationnel actuel, n’a pas eu lieu.
En fait, le défaut d’attention est remarqué chez deux types d’apprenants :
d’une part les hyperactifs, qui ne peuvent trouver l’équilibre entre leur
mécanisme de réponse aux stimuli extérieurs et leur mécanisme d’inhibition :
ils réagissent à toute stimulation ; d’autre part ceux qui abandonnent et se
découragent, dont le mécanisme de réponse est sous-entendu par l’inhibition
de l’action. Pour remédier à cette seconde attitude et en se référant à l’analyse
de Pribram sur l’attention, D.J. Coulter s’est d’abord attachée à analyser
les deux types d’activités que l’école demande aux élèves.
La première est la discrimination ou la catégorisation qui déclenche une
réaction d’éveil ( a arousal D) qu’il s’agit de maintenir tant que dure l’activité.
Cette réaction d’éveil nécessite la mise en action du système nerveux
autonome qui se charge de régulariser la respiration, ralentir le pouls et
relâcher la musculature -- une réponse motrice n’étant pas l’objectif.
L‘autre type d’activité est le raisonnement ou la résolution de problème,
dont le mécanisme est très différent. L‘état à maintenir est celui de vigilance
interne ; au cours du processus, la respiration devient moins profonde, le
pouls s’accélère. La situation dans laquelle on se trouve pendant une tâche
de raisonnement rend la personne vulnérable en ce qu’elle s’est coupée de
l’environnement. C’est ainsi que D. J . Coulter explique la difficulté que
l’on rencontre à faire accéder des délinquants à des tâches de raisonnement.
Les attitudes d’abandon et de découragement ont été analysées en détail
par D.J. Coulter. Elle en a tiré une pédagogie destinée à aider les apprenants
qui manquent totalement de motivation, et qui ont renoncé à réagir à toute
stimulation.
Dans les tâches discriminatives pour lesquelles il faut retarder la réponse
164 Apprendre à gérer ses ressources

motrice et rester ouverts aux stimuli externes, ces apprenants échouent parce
qu’ils se laissent distraire par des stimuli périphériques, sans pouvoir fixer
leur attention. Leur système nerveux autonome les fait réagir à l’inverse d’une
réaction de discrimination: on observe une accélération du pouls, une
respiration irrégulière, une tension des muscles.. .
Dans les tâches de raisonnement où il s’agit de prolonger l’état de
vigilance et écarter la prise de toute nouvelle information tant que le
problème n’est pas résolu, le système nerveux autonome de ces sujets se
comporte également à l’inverse de ce qui leur permettrait de se concentrer :
ils manifestent uri ralentissement du rythme cardiaque, un relâchement de
la musculature, une respiration lente et régulière...
Certaines situations de classe, il faut l’avouer, favorisent une attitude
de découragement : en particulier la lecture, et les activités de raisonnement
abstrait, lorsqu’elles sont exigées avec insistance chez des apprenants qui
n’ont pas atteint le niveau de développement cérébral requis pour établir un
lien entre le code ticrit et le code oral. Ces apprenants se réfugient alors dans
une attitude d’apathie ou un refus qui est interprété comme un manque de
motivation. Certains d’entre eux, après plusieurs échecs, transfèrent l’échec
sur leur relation avec l’enseignant, ou même sur l’école tout entière qui leur
devient alors insoutenable.
D.J. Coulter propose, pour aider ces enfants, un changement de
contexte : la salle de classe, la matière enseignée, la méthode peuvent changer
d’apparence. Ainsi, la lecture se fait avec des marionnettes: si les enfants
ne savent pas lire, les marionnettes le peuvent ! Et l’expérience le prouve :
les enfants lisent pour la marionnette.
I1 s’agit avant tout de décontaminer ce qui revêt à leurs yeux un aspect
menaçant. Immuniser contre l’anxiété et le découragement, pour résister à
l’envie d’abandonner est une solution qui, pour D.J. Coulter, se traduit par
une série d’activités réalisables par l’apprenant avant de le confronter à
l’activité qu’il redoute. I1 aura rencontré plusieurs succès (il aura été forcé
de réussir) et repris confiance en lui lorsque la tâche qu’il estime difficile
lui sera demandée:. Mais il est certain que l’énergie nécessaire pour réparer
et rassurer un organisme qui résiste parce qu’il est effrayé et se sent menacé,
est considérablement plus importante que celle qui serait suffisante si
l’activité était acceptée d’emblée ou si aucun dégât n’avait eu lieu.
La force et l’efficacité des techniques pédagogiques utilisées par D.J.
Coulter naissent d’un double enracinement :dans la priorité absolue donnée
à l’apprenant, d’me part, et dans une connaissance approfondie de la
physiologie cérébrale, d’autre part.
Sa conception profondément humaniste de l’apprentissage et du rôle de
facilitateur de l’enseignant permet à D.J. Coulter de faire de l’acquisition
des connaissances une véritable praxie, dans laquelle les sources d’informa-
tion, les activités, les stratégies et les objectifs sont en parfaite cohérence et
compatibles avec le substrat auquel l’école s’adresse : le cerveau humain dans
sa totalité physique, physiologique, psychologique, et sociale.
Nul doute que pour exercer un telle pédagogie, l’enseignant doit trouver
Applications pédagogiques 165

en lui, comme le dit si justement Francis Huster au sujet du rôle de l’acteur,


la graine de ce qui restera chez l’apprenant (5).

3. U N PARTAGE INTERCULTUREL: L‘ENSEIGNEMENT DE L‘AN-


GLAIS AUX ABORIGÈNES (Australie)

Pour introduire ce programme de formation, il est nécessaire de tracer


rapidement le cadre dans lequel il s’inscrit, et en particulier de rappeler le
contexte de l’apprentissage de l’anglais par des Aborigènes adultes, à Alice
Springs, dans le centre de l’Australie.
L‘Etat d’Australie Centrale, plus que les autres États australiens, est
caractérisé par l’interface des deux cultures occidentale et aborigène. La
période de colonisation est relativement récente (elle a 200 ans en 1988) ;
et ce n’est que depuis i peine vingt ans qu’un mouvement d’auto-détermi-
nation a vu le jour, se concrétisant par la création d’organismes dirigés par
des Aborigènes dans les domaines de la santé, de l’habitat, de l’éducation,
des services juridiques et fonciers.
Les adultes aborigènes ont encore présents à l’esprit la terrible période
des massacres, la destruction des récoltes, du gibier, des réserves d’eau, etc.
Depuis quelques années, les rapports entre les deux communautés ont
changé et les responsables des projets éducatifs cherchent à contribuer au
développement de l’auto-gestion et à la responsabilisation des Aborigènes.
Dans cette perspective, l’enseignement de l’anglais, langue seconde, doit avoir
un autre objectif que celui d’enseigner une compétence communicative. En
particulier, Carol Scott et Russell Goldflam, auteurs d’un matériel pédago-
gique dont le nom est révélateur Get the Message, précisent que le processus
d’apprentissage doit contribuer à développer l’esprit critique et favoriser ainsi
une prise de conscience des structures sociales et des relations aux pouvoirs
politique et économique. L‘enseignement de l’anglais est, aux yeux des
auteurs, un moyen concret de donner aux Aborigènes le moyen d’agir
socialement, économiquement et politiquement.
La méthode d’apprentissage de l’anglais dont il est question ici, a été
construite après une profonde réflexion portant sur les concepts de com-
munication et de culture tels qu’ils sont compris par les apprenants auxquels
la méthode s’adresse. C’est dans ce sens que les auteurs parlent du besoin
de développer chez le formateur et l’apprenant le partage des signzjkations
avant d’entreprendre l’apprentissage proprement dit («shared meanings with
the learner before embarking on a learning task D).
La culture aborigène traditionnelle est orale et ceci... depuis 40 O00 ans !
«Our history is never read, but the black man keeps it in his head)) dira
un porte-parole aborigène (vous ne trouverez pas notre histoire dans les
livres ; l’homme noir la garde dans sa tête). L‘enseignement se fait par une
communication face à face, par la parole, le geste, le comportement, les

(5) (( L‘acteur doit trouver en lui la graine de ce qui restera chez le spectateur. ))
166 Apprendre à gérer ses ressources
silences, l’écoute. La terre est un livre, une bibliothèque vivante qui raconte
l’héritage culturel du peuple aborigène a We live by the land ; the land is
sacred D (la terre nous fait vivre, la terre est sacrée).
La société aborigène est grégaire, construite autour du groupe que scellent
les croyances en l’origine de l’homme et de la nature, que scelle aussi le
combat pour survivre (( Our greatest victory was to hang on our humanacy D
(Notre plus grandie victoire ? celle d’avoir sauvegardé notre humanitude).
La production des biens et des services est partagée entre les membres
de la communauté, comme l’est la connaissance, considérée comme faisant
partie du capital économique de la communauté. Le savoir est révélé. Le
droit au savoir est entre les mains des anciens.
Les notions d’alphabétisation et d’instruction n’ont donc pas le même
sens pour les Aborigènes que pour les Occidentaux ; car le fait de ne pas
savoir lire ni écrire n’est pas un signe d’ignorance ni de sous-développement
intellectuel comme c’est le cas dans les sociétés occidentales. Dans l’optique
occidentale, l’alphabétisation est un bien de consommation à acquérir pour
parvenir à l’égalité des chances dans la société. Pour les Aborigènes,
l’alphabétisation let la connaissance de l’anglais est uniquement un moyen
d’échapper à la dépendance dans laquelle ils se trouvent pour régler leurs
problèmes économiques, sociaux ou juridiques.
Le système éducatif mis en place par les Blancs a échoué, par manque
de concertation et l’ignorance du contexte culturel aborigène. La méthode
d’apprentissage de l’anglais Get the Message a été conçue par ses auteurs
selon les principes suivants :
1. L‘éducation n’est pas une démarche neutre. Elle implique un processus
de transmission culturelle. Pour les colonisés, l’école signifîe l’obligation
d’apprendre le système de valeurs du colonisateur, avec en plus, au meilleur
des cas, l’exclusion de leur propre réalité culturelle. Dans la plupart des cas,
la culture indigène a été activement dénigrée.
2. L‘accession aux ressources et aux décisions politiques est plus souvent
un rêve qu’une réalité. Le modèle qui se rapproche le plus de l’interface des
deux cultures aborigène et occidentale est selon les auteurs le suivant :

alors qu’il pourrait (et devrait) être celui d’une approche bi-culturelle :
Applications pédagogiques 167

3. Si l’apprentissage d’une langue est le moyen de développer l’esprit


critique et la réflexion, alors la méthodologie utilisée doit permettre à
l’apprenant d’analyser la langue de façon à discerner les structures linguis-
tiques véhiculant des éléments d’oppression (comme dans la propagande
politique).
4. Les apprenants apportent par leur expérience une immense somme
de connaissance qui est, en elle-même, une source de richesse. Prendre ce
connu comme point de départ permet d’élargir la connaissance et la prise
de conscience.
Tous les thèmes de Get the Message ont été proposés par les apprenants
eux-mêmes. Les auteurs ont considéré que leur rôle était de permettre à leurs
élèves de trouver une réponse à leurs problèmes et d’explorer ces différents
domaines en profondeur.
5. Lorsque la situation d’apprentissage implique un formateur apparte-
nant à la culture colonisatrice et un groupe d’apprenants issus de la culture
colonisée, certains principes d’interaction inter-culturelle doivent être respec-
tés :
a) Le formateur doit être capable de s’engager totalement dans la
situation et les valeurs culturelles des apprenants. Ensemble, formateur et
apprenants engagent un dialogue sur la réalité sociale à laquelle ils participent
dans le but de se libérer du poids des structures de l’institution.
b) Le formateur doit inspirer un esprit de recherche et d’exploration dans
le groupe. Ceci implique une collaboration étroite entre formateur et
apprenants.
c) Le formateur doit respecter l’aptitude de l’apprenant à produire et
analyser son savoir. I1 doit contribuer à développer la responsabilisation des
apprenants dans le contrôle d’une action sociale future.
Ces principes résonnent dans le contexte australien tout autrement qu’en
Europe ... Les auteurs ont été influencés par la pensée de Paulo Freire et
les cinq principes méthodologiques auxquels il se réfère : objectivité ; histo-
ricité ; pertinence ; point de vue holistique et problématique.
Les auteurs ont également été influencés par l’approche structuro-globale
audio-visuelle et la place accordée à Z’affectivité dans l’apprentissage (6).

(6) I1 s’agit de la Méthode d’apprentissage de l’Anglais (( All’s Well »,Dickinson, Lévêque,


Sagot, Trocmé (1975) Didier, Paris.
168 Apprendre à gérer ses ressources
Les treize dossiers représentant le contenu de (( Get the Message )) sont
des thèmes d’actualité aborigène :
I) Dire ce que 1”onveut dire et donner un sens à ce que l’on dit ...
- (( Comment les gens utilisent le langage pour fuir leur problème.

Que faire ? ))
2) L‘alcool
- (( Pourquoi y a-t-il des problèmes d’alcoolisme ?

Que faire ? ))
3) Les Aborigènes et la loi
- G Comment faire pour que le système juridique fonctionne aussi pour

les Aborigènes ? ))
4) Les lieux sacrés
- (( Comment préserver les lieux sacrés des Aborigènes ? D

5) L‘éducation des enfants aborigènes


-- (( Comment donner aux parents aborigènes le contrôle de l’éducation

de leurs enfants ? ))
6) L‘achat d’une voiture d’occasion
- (( Comment faire pour que l’acheteur ne se fasse pas duper? ))

7) La politique de l’opposition
- (( Comment les Aborigènes peuvent-ils s’opposer publiquement à

l’injustice ? ))
8) Dites-le en musique
- (( comment faire passer un message par la musique ))

9) Une question d’équilibre


- (( comment on peut lire les médias entre les lignes ))

10) Langue et culture


- ((comment votre communauté peut parvenir à protéger sa langue

et sa culture ))
11) La santé
- (( comment une organisation aborigène œuvre pour la communauté

aborigène ))
12) Loisirs
- (( comment l’industrie du tourisme attire ses clients ))

13) Compagnies minières et communautés aborigènes


- (( comment les communautés aborigènes peuvent protéger leurs

intérêts contre les compagnies minières D


Ces dossiers sont construits autour de documents authentiques, écrits et
oraux. Les voix ties récits enregistrés sont des voix aborigènes au timbre
caractéristique, qui n’a rien du timbre (( British )) ou (( Aussie ».
Les activités proposées aux apprenants développent les quatre (( savoir-
faire )) langagiers : lire, écrire, écouter, parler. Ils utilisent les différents canaux
sensoriels, en particulier la motricité. Les apprenants sont impliqués dans
toutes les situations auxquelles ils doivent participer activement.
Cette méthode d’apprentissage de l’anglais est considérée par ses auteurs
comme le commencement d’un travail destiné à encourager la communauté
des formateurs à s’engager dans une vaste recherche vers d’autres thèmes
d’intérêt local et d ’actualité.
Applications pédagogiques 169

Ce travail nous semble porteur d’un message pour l’Europe et son


système éducatif. La recherche qui la sous-tend est un levain, car elle tente
de créer le devenir de l’apprenant, tout en faisant, selon les termes d’A.
Jacquard, (( reculer l’hypocrisie du système )) (7).

(7) A. JACQUARD,(1984), p. 171.


CHAPITRE 8

NOUVELLES PERSPECTIVES
POUR LA FORMATION

Les conditions d’un apprentissage d guichet ouvert, sans exclusion


d’aucune sorte, ni de ressources ni de personnes, nous semblent être celles
d’un combat et d’une vigilance rappelant les exigences de la pratique de l’art
martial tel que le décrit Sun Tsé, grand stratège chinois :
Si tu ignores à la fois ton adversaire et toi-même
Tu ne compteras tes combats que par des défaites.
Si tu ignores ton adversaire et que tu te connais toi-même
Les chances de perdre et de gagner sont égales.
Si tu connais ton adversaire et te connais toi-même,
Eussiez-vous cent combats à soutenir,
Cent fois tu seras victorieux.

Les principaux adversaires, dans ce combat de l’apprentissage, sont le


réductionnisme, la restriction, l’immobilisme, la désertification du potentiel
humain ...
Les combats à mener? Ils sont livrés contre la peur, les doutes, l’oubli,
l’aveuglement, la surdité, l’incompréhension ...
Les victoires? Celles de l’apprenant : chaque fois qu’il a créé, inventé,
découvert, ou tout simplement exploré, cherché, attendu, recommencé,
identifié, compris, ajouté, ré-fléchi...
Celles de l’enseignant ? ne serait-ce pas de savoir espérer encore, et encore,
et encore...
Espérer ... quoi ?
... Que l’apprenant s’éveillera, que son itinérance le mènera au seuil de
lui-même, que le petit d’homme s’inventera, découvrira ses outils pour
décoder le monde dans lequel il vit, et qu’il découvrira, aussi, que la durée
est sa nourriture originelle.
... Que lui, enseignant, saura être cohérent dans sa gestion de la situation
172 Apprendre à gérer ses ressources
d’apprentissage à laquelle il préside ... Cohérent ? efficace ? il lui faut, alors,
tenir compte des ressources et du potentiel du cerveau humain, du sien et
de celui de l’apprenant, de son fonctionnement, de ses mécanismes et tenter
d’en faire la traduction en termes pédagogiques.

Une charte pbdagogique

Une charte énlonce des principes directeurs.


Elle pose des règles à suivre.
Elle distingue les mesures licites des mesures interdites : nous avons déjà
parlé du droit à Il’intelligence, du droit à la différence et de fautes contre
le cerveau.
Une charte construit et prévoit des procédures de règlement dont le
respect assure le fonctionnement pacifique de l’organisme : nous avons parlé
d’équilibre dynamique, d’hygiène cérébrale.
La charte pédagogique ci-dessous est la synthèse des différents jalons et
repères qui ont été signalés précédemment dans cet ouvrage. Elle prendra
la forme suivante :
I) Définir clairement les objectgs d’apprentissage
C’est-à-dire préciser les critères de réussite, les conditions de réussite et
les moyens d’évaluation.
2) Etre K branché externe >>
C’est-à-dire diagnostiquer et faire prendre conscience à l’apprenant de
ses attentes, de son attitude face à son apprentissage, des ressources dont
il dispose, de celles qu’il utilise ou qu’il évite, de sa gestion préférentielle,
de son profil et de son style d’apprentissage.
3) Déterminer une stratégie pédagogique
- Varier et alterner les prises d’information (visuelle, auditive, kinesthési-

que).
- Varier et alterner les activités de traitement de l’information (reproduc-

tion, transformation, itinéraires d’une modalité à l’autre, d’un traitement


à l’autre).
- Repérer le stade du processus d’apprentissage : perception, traitement,

production.
- Adresser l’information : la relier à des repères temporels et spatiaux.

- Individualiser l’information : l’ancrer dans les expériences et connais-

sances passées., la projeter dans l’avenir de l’apprenant.


- Évoquer l’infcrmation en représentations mentales, dans les diverses
modalités sensorielles auditive, visuelle, kinesthésique.
4) Interpeller lotalement l’apprenant
- S’adresser à ses quatre cerveaux: à son besoin d’automatismes, son
besoin d’affectivité, de discrimination, d’organisation.
- Faire coopérer ses deux hémisphères: l’holistique et le linéaire, le
synthétique et l’analytique, l’analogique et le digital.
5 ) Ménager
- Un environnernent multisensoriel et non menaçant.

- Les conditions d’hygiène cérébrale.


Nouvelles perspectives pour la formation 173
- Des pauses structurantes et d’intériorisation.
- Des réactivations pour une mémorisation à long terme.
6) Poser les termes d’un contrat d apprentissage
- Le contrat portera sur les points 1, 2 et 3. I1 est à négocier en début
de séquence pédagogique et peut prendre plusieurs formes, du simple
protocole au véritable contrat engageant les partenaires de la situation
d’apprentissage : l’apprenant, l’enseignant et l’institution. Une proposi-
tion de contrat est faite dans le dernier chapitre.
TROISIÈME PARTIE

CONSTRUIRE AUJOURD’HUI
AVEC HIER ET DEMAIN

OUTILS ET TECHNIQUES
POUR LE FORMATEUR EN FORMATION
DE NEUROPÉDAGOGIE

<< Si Ibn comprend la manière dont l’arbre se concentre


dans la graine, on comprend le déploiementfutur de la graine
en arbre. >>
Yi KING, Le livre des Transformations

<< On ne peur rien enseigner :on ne peut que faciliter les


moyens d’apprendre.N
L A . MACHADO, Le Droit à l’Intelligence(1982)
EN AMONT, EN PARALLÈLE ET EN AVAL

I1 serait tout à fait illogique de concevoir qu’une formation de formateurs


dans le domaine de la neuropédagogie puisse s’établir dans un cadre unique,
au singulier, c’est-à-dire en n’envisageant qu’un seul type de formation.
Si la nécessité d’un apprentissage différencié découle de la réalité cérébrale
telle qu’on la connaît aujourd’hui, dans sa diversité et son adaptabilité, celle
d’une formation différenciée s’impose tout naturellement (1). La formation
en neuropédagogie devrait, semble-t-il, montrer l’exemple d’une formation
au pluriel et poser dès l’abord, le principe de la diversification des formations
pour des enseignements en vue d’apprentissages au pluriel, la diversification
portant sur les paramètres entrant en jeu dans toute situation de formation.
La formation des formateurs n’échappe pas aux questions fondamentales
qui se posent dans toute formation : quoi enseigner et comment se former
a la neuropédagogie? Mais aussi, et en préalable, à qui s’adresse la
formation ? Par qui doit-elle (ou peut-elle) être dispensée ? Ù quel moment
du cursus de formation ? dans quel cadre ? et, surtout quelle en est lafinalité ?
Étant donné l’intérêt relativement récent manifesté - en Occident tout
au moins - par les milieux éducatifs et le grand public pour l’exploration
de l’univers intérieur de l’homme, les réponses proposées ici ne peuvent
qu’être des suggestions pour une action à venir... mais combien urgente !
Une connaissance du potentiel et des mécanismes cérébraux devrait
concerner tous les enseignants et les professionnels de la formation ... et de
la communication. Elle devrait être conduite en amont, en parallèle et en
aval des formations disciplinaires, c’est-à-dire, dépasser largement le cadre
de la formation initiale.
Aucun contenu ne peut être acquis, retenu et utilisé suns une démarche,
des outils et des techniques qui tiennent compte du terreau de l’acquisition :
la réalité cérébrale de celui qui apprend et de celui qui enseigne. Leur

( I ) Cf. Les approches de A. de PERETTI,Organisation de l’enseignement et structurations


diffërenciées, Cahiers Pédagogiques no 244-5, mai-juin 1986 ; B. Schwartz et A. de Blignières
Legeraud, Pour une stratégie nouvelle de la formation, Oct. 1981 (U. Pans Dauphine) ; cf.
O. CLOUZOT-A.BLOCH(1981) ; cf. G. RACLE(1983).
178 Construire aujourd’hui avec hier et demain
interface, leur interaction, leur inter-relation tissent la trame de la situation
d’apprentissage.
Plus le monde des supports, des apports, des actants, des variables sera
connu, plus l’apprentissage sera efficace, et moins l’échec sera à redouter.
La véritable .finalité d’une formation en neuropédagogie, c’est l’auto-
nomie, au sens étymologique du terme : la gestion du Soi, et la co-naissance
(naissance avec) ; c’est aussi donner le moyen au formateur - qui, en le
vivant, le transmettra à l’apprenant - de se mieux connaître.
La force d’unie telle formation doit résider dans sa démarche. Contrai-
rement à une formation classique visant à l’acquisition d’un contenu
disciplinaire, la formation en neuropédagogie doit être le reflet de ce qui est
enseigné, uneformation à vivre : elle doit, plus que toute autre, créer le besoin
d’information, dkblayer le terrain au préalable (période T moins 1), dyna-
miser l’itinéraire de l’apprenant, depuis la source d’information jusqu’à la
production de la tâche, et stimuler un questionnement permanent sur les
concepts fondamlentaux impliqués dans la situation d’apprentissage.
L‘évaluation d’une telle formation ne peut être faite qu’au niveau de la
pratique pédagogique : elle ne peut être immédiate ; elle s’inscrit dans la
durée. La durée est une des composantes essentielles de toute situation de
formation. Les quelques années d’expériences pendant lesquelles une forma-
tion en neuropéoiagogie a été dispensée jusqu’ici à divers groupes d’ensei-
gnants, de futurs enseignants, de formateurs et de professionnels de la
communication, ne permettent pas encore, à l’heure actuelle, de dire autre
chose que - pêle-mêle : le soulagement des uns, l’enthousiasme des autres,
les incertitudes Ide certains, le renouvellement des techniques, l’apport
d’oxygène dans la structure institutionnelle, la découverte par les apprenants
qu’ils peuvent mieux mémoriser, créer davantage, rédiger mieux, comprendre
et appliquer davantage, s’exprimer mieux, réfléchir mieux, etc., et la
découverte par les responsables de formation qu’ils ont changé de regard
sur l’acte d’apprendre.
L‘évaluation d’une formation en neuropédagogie sera donc à construire
dès que l’expérience aura une durée de vie suffisante. Elle devra montrer
la voie et consolider une évaluation formative qui cherche à s’instaurer, non
sans difficulté.
Reste la question : par qui la formation peut-elle être donnée ?
La solution qui vient en premier à l’esprit, et semble à la fois raisonnable
et efficace, serait de commencer par établir des passerelles entre le monde
des neurosciences et celui de la formation. Deux mondes qui, jusqu’ici, se
sont ignorés presque totalement. Deux mondes cloisonnés, mais dont cette
recherche a tenté de percer la rigidité, les obligeant au dialogue. Le dialogue
doit se faire au moyen - non pas d’interventions ponctuelles - mais de
groupes de travail et de recherche autour de thèmes précis et concrets issus
de la situation d’apprentissage telle qu’elle existe sur le terrain, et non en
laboratoire : accès au sens, décodage, concentration, mémorisation, analyse
des résistances, des besoins ... Peu à peu, les membres de ces groupes de travail
pourront devenir les animateurs d’une formation en neuropédagogie.
Le dialogue semble déjà amorcé. Ne le laissons pas s’éteindre. Comme
En amont, en parallde et en aval 179

dans tout dialogue, le processus de compréhension fait appel aux différentes


zones de sens des uns et des autres. Le moment est venu de s’engager
ensemble dans la construction de ce qui sera le fondement d’un énoncé
commun.
Le but de cette troisième partie est de suggérer tout d’abord un contenu
minimal de connaissances de base, intégrées dans une démarche dont les
étapes suivent le même parcours que celui de l’apprenant : conscientisation,
prise d’information, traitement de l’information. Des tableaux rassemblent
les principales données sous une forme concise et, dans la mesure du possible,
facilement utilisable au rktroprojecteur.
En second lieu, est proposée l’amorce d’une recherche personnelle que
l’enseignant en formation est invité à poursuivre tout au long de sa vie
professionnelle. I1 s’agit du questionnement qu’il est le seul à pouvoir mener
vis-à-vis de lui-même, de ses collègues, de l’institution, des apprenants, des
parents, des décideurs...
CHAPITRE 9

LA SPIRALE DE LA FORMATION :
DYNAMIQUE DES DIFFÉRENTES PHASES,
UN CONTENU UNE DÉMARCHE +
Le contenu de ce chapitre est le résultat d’une réflexion issue d’expé-
riences de formation menées depuis 1972 auprès de divers publics d’ensei-
gnants et de responsables de formation, tant en France qu’à l’étranger.
Les problèmes des rapports entre le contenu et la démarche, de lénga-
gement des formateurs au cours de leur formation, de l’interface du
formateur et des formés, etc., se sont posés sous différents éclairages et dans
différentes cultures ; ils ont permis d’élaborer la synthèse qui est présentée
ici.
De même que les adeptes de l’aïkido se présentent en bon état sur le
dojo..., un sas de déconditionnement, de silence, de réflexion devrait être
la règle préalable à toute formation - qu’elle soit celle de l’apprenant ou
du formateur. Le parcours de l’enseignant en formation en neuropédagogie
commence, comme celui de l’apprenant, en amont de la prise d’information,
par une période de conscientisation que le formateur devra expérimenter
avant de l’utiliser par la suite dans ses propres interventions pédagogiques.

1. PÉRIODE « T MOINS 1 B D U FORMATEUR : TRAVAILLER EN


AMONT

L‘enseignant en formation n’est pas exempt de l’effet Pygmalion. I1 a


besoin que les termes du contrat, explicite ou implicite, soient clairs entre
lui et le formateur.

Les attentes
Dès les premiers instants de la formation en neuropédagogie, comme
dans toute autre formation, il est bon de déceler les attentes. Celles-ci sont
(trop) souvent statiques : le stagiaire vient chercher une information sur le
182 Construire aujourd’hui avec hier et demain

cerveau. I1 attend que le formateur la lui apporte et son rôle, pense-t-il, se


borne à prendre des notes, visionner un document ou écouter un exposé,
voire discuter ; mais lorsque, en début de formation, la question est posée :
(( qu’apportez-vous au stage ? », l’étonnement est grand.

Dans une formation, les jeux se jouent très tôt. Le formateur doit poser
dès les premiers instants les éléments du contrat de formation dans des termes
semblables à ceux-ci :
1) a) qu’attendez-vous de moi ?
a’) que m’apportez-vous ?
2) b) voici ce que j’attends de vous
b’) voici ce clue je vous apporte.

Les4 R
Ce double contrat de départ est l’occasion pour le formateur de poser
non seulement le: problème de la participation du stagiaire, mais celui de
son attitude face à son propre parcours, jusqu’à l’objectif. En agissant ainsi,
le formateur a la possibilité de souligner qu’enseigner c’est échanger,
partager, dialoguer.
I1 prend l’occasion, également, de donner les clés d’un enseignement
efficace : les 4 R (Respect - Responsabilité - sens de la Réalité - être
à l’écoute pour Répondre).
- Respecter le rôle de chacun. Respecter le stagiaire dans son individualité,

son expérience passée, ses projets.


- Responsabiliser le stagiaire en lui demandant une participation, un

apport de lui-même.
- Encourager le sens de la Réalité en encourageant un véritable dialogue,

une véritable communication à partir de l’expérience des stagiaires.


- Être à l’écoute pour Répondre aux questions qui se posent et non aux

questions que le formateur aimerait qu’on lui pose ...


Pour être en mesure de faire de vraies réponses, il faut que le formateur
sache se taire et écouter. I1 s’agit donc de permettre aux stagiaires de
transformer leurs attentes statiques en attentes dynamiques d’échange et de
partage. L‘équilibre du cerveau est dynamique, et c’est déjà l’occasion de
le souligner.
L‘image de soi
Un autre facteur sur lequel travailler dès le début d’une formation est
l’image de soi face au groupe, face à l’apprentissage ou à la formation.
Un test projectif qui consiste à demander aux enseignants de se dessiner,
en une minute, en train d’enseigner est en général révélateur de la conception
qu’a l’enseignant de son rôle et de la place qu’il affecte aux d@érentes
composantes de la situation d’apprentissage : la source d’information, l’ap-
prenant et l’enseignant.
Même maladroits, les dessins font apparaître clairement les relations de
l’enseignant et de:s apprenants : à quelle distance de lui place-t-il les élèves ?
dans quelle position ? sont-ils statiques ? dynamiques ? Quant à la source
La spirale de la formation 183

d’information, la filtre-t-il avant de la donner à l’apprenant ou laisse-t-il celui-


ci accéder à la source, la sélectionner, la traiter avant d’intervenir? Est-il
un catalyseur ? Utilise-t-il plusieurs formules ? etc.
Dans la figure 8a, le formateur peut retrouver, entre les différents types
de relations, celle qu’il pratique le plus souvent : dans quelles circonstances ?
(S = source d’information ; A = apprenant ; E = enseignant)

1. S - A - E
2. A - - - b S - - - + E
3. E - A - - - - + S
4. A- S

1
E
(il y a, bien sûr d’autres relations possibles).
En 1, la source est reçue par l’apprenant qui la rapporte ou la reproduit vers
l’enseignant.
En 2, l’apprenant est auteur ou explorateur de la source et la transmet à
l’enseignant.
En 3, l’enseignant dirige l’apprenant vers la source.
En 4, l’enseignant a un rôle de catalyseur.
Figure 8a. Les composantes de la situation d’apprentissage

La figure 8b propose un autre type d’analyse de l’attitude de l’enseignant.


L‘outil d’analyse est emprunté à l’Analyse Transactionnelle (1).
L‘attitude positive (+) ou négative (-) de l’enseignant face à son
enseignement qu’il considère comme positif (+) ou négatif (-) donne les
quatre positions ou attitudes suivantes :
1) (+ -) : signifie ((je me sens supérieur à la tâche que je fais.
2) (+ +) : signifie a je m’accepte et j’accepte cette tâche D.
3) (- +) : signifie (( cette tâche me dépasse ».
4) (- -) : signifie (( il n’y a plus rien à faire, rien ne va plus ».

La position 2 (+ +), la plus constructive, représente une attitude active,


productive. Elle n’est pas acquise une fois pour toutes et demande un effort pour
être maintenue, mais il est bien évident que les autres attitudes, lorsqu’elles se
manifestent dans une session de formation, demandent à être analysées et travaillées,
qu’elles soient d’agressivité (position l), d’effacement (position 3), ou de résignation
et de profond découragement (position 4).
Figure 8b. Attitudes de l’enseignantface à son enseignement

(1) Cf. CARDONA. et al. (1979) ; ENST K. (1972) ; Bob DUFF(1972) : Dansactional
Analysis for Teachers, Transactional Publ. P.O. Box 3932 Rincon Annex, San Francisco,
CA 941 19 ; JAOUIG. (1979).
184 îonstruire aujourd’hui avec hier et demain

Comme dans le cas des apprenants, un dialogue pédagogique, puis un


travail sur le potentiel cérébral et les objectifs de formation permettent aux
formateurs de clarifier certaines de leurs positions et de faire basculer les
signes négatifs en signes positifs. Mais, n’oublions pas l’une des composantes
essentielles de la situation de formation: la durée... Les changements de
comportement s’effectuent à des rythmes différents, à des niveaux différents,
et varient selon les personnes et les moments...
Savoir ce que l’on sait, d’où l’on part et où Ion va, connaître les outils
dont on se sert, ceux dont on a besoin.
Dans le travail de conscientisation s’inscrit également le recensement des
connaissances des stagiaires quant à :
- leur connaissance ou leur compréhension de l’objectif de la formation
en neuropédagogie, sa finalité,
- l’état de leurs connaissances dans le domaine des mécanismes cérébraux,
perception, mkmorisation, etc.
- la connaissance de leurs propres gestions et styles d’intervention.
I1 s’agira de compléter ce qui est apparu dans les tests projectifs par une
réflexion sur les différents modes de communiquer l’information et sur la
gestion des modalités sensorielles de chacun.
Une amorce de ce vaste domaine peut être faite avec un court question-
naire sur les moyens que nous utilisons de préférence :
Exercice : Corriplétez ces phrases en cochant ce qui vous paraît représenter
le mieux votre réaction habituelle :
1) On peut deviner mes émotions en interprétant
- ce que je dis ( )
- ma voix ( )
- ma gestuelle, mes mimiques ( )
2) Je me tiens au courant de l’actualité en
- lisant les jourriaux ( )
- écoutant la radio et regardant la T.V. ( )
- discutant avec d’autres personnes ( )
3 ) Pour exprimer un message, important, j e préjère
- écrire ( )

- utiliser le téléphone ( )
- une rencontre face à face ( )
4) Quand j e demande mon chemin, je préjère
- qu’on me fasse un plan ( )
- qu’on m’explique la direction ( )
- qu’on m’accornpagne ( )
5) Quand j’assiste à une réunion, je préfire
- lire l’ordre du jour ( )
- écouter ( )
- observer le comportement des participants ( )
- intervenir en prenant la parole ( )
6 ) Si j’ai assisté à un accident, pour en rendre compte fidèlement,
- j’écrirai ou je dessinerai ( )
Lu spirale de la formation 185

- je ferai un récit ( )
- je mimerai ( )
etc.
L‘intérêt de ce questionnaire, en début de formation, est de rendre les
enseignants conscients de la diversité des réponses et/ou de la permanence
d’une tendance visuelle, auditive ou kinesthésique dans leurs réponses. Le
travail sur les modalités perceptives est à reprendre à plusieurs moments du
parcours, car, pour la plupart des stagiaires, il s’agit d’un domaine nouveau
et d’une exploration d’eux-mêmes à laquelle ils n’ont pas été habitués... et
que certains redoutent.
D’autres outils et exercices permettent d’observer, d’identifier, d’évaluer
le canal dominant : certains mouvements des yeux, certains termes utilisés
dans un récit spontané, certaines postures. En effet, nous utilisons, lorsque
nous parlons, des termes appartenant aux domaines visuel, auditif, kines-
thésique, ou des expressions non spécifiques lorsque nous restons neutres
dans notre représentation du réel (2).
Les techniques de repérage doivent être pratiquées en soulignant que leur
véritable intérêt n’est pas de mettre une étiquette sur qui que ce soit, mais
de le rejoindre dans son mode de fonctionnement, et de l’aider à se mieux
connaître pour qu’il soit en mesure :
1) d’élargir les gestions qu’il utilise peu ou pas du tout
2) d’enrichir les interactions communicatives en développant la connais-
sance de l’Autre.

Une autre prise de conscience, à faire progressivement et avec précaution


(car elle touche des couches profondes et sensibles de la personnalité) est
la découverte de sa propre voix, l’outil numéro un que l’enseignant utilise
pour la transmission de l’information. Un travail en sous-groupe, avec
un partenaire choisi et accepté, se fera en enregistrant sur magnétophone
des paroles et textes choisis par le stragiaire (il ne faut rien imposer dans
ce domaine).
Les aspects suivants de la voix ont un rôle dans la communication :
- le tempo (élocution lente, rapide, hésitante)

- le volume (fort, faible, contrasté)


- la longueur des phrases, les pauses, les hésitations, les silences

- les consonances, les onomatopées...

- la hauteur de la voix, intonation, le rythme.

La vidéo est un moyen remarquablement fidèle pour obtenir une image


de soi en direct, et - si ce moyen est accepté (là aussi, ne jamais imposer
l’exercice à un stagiaire) ~ l’intéressé découvrira :
- sa gestuelle (mimique du visage, contact oculaire, gestes des mains, bras,

épaules, yeux, etc., et la coordination de ces différents gestes)


- la position de son corps (droit, penché en avant, en arrière, d’un côté...)

(2) Cf. CAYROL


A. J. (1984) ; cf. TROCMÉH. (1984b).
et SAINT-PAUL
186 Construire aujourd’hui avec hier et demain
- la tension - ou son manque de tension que traduisent la gestuelle et
la respiration (rapide, lente, irrégulière, soupirs...)
- la relation du geste et de la parole

- l’espace, la distance à l’Autre...

- et bien d’autres facettes de lui-même.

Un autre point à élucider par le stagiaire (qui n’a pas besoin de le faire
connaître au groupe ni au formateur) est sa technique personnelle defreinage.
Chacun fait preuve d’une très grande créativité dans ce domaine. I1 est bon,
en apprentissage comme dans la vie courante, d’être conscient de ses propres
freins et des indicateurs qui les annoncent.
S’inscrit également dans cette période « T moins 1 », le recensement des
besoins en for.mation dans le domaine des mécanismes mentaux et des
processus d’apprentissage.
Une check-list est distribuée aux stagiaires. Son véritable objectif est
essentiellement lai découverte par le stagiaire de l’étendue du domaine à
explorer en neuropédagogie, et l’amorce d’un nouveau dialogue entre le
formateur et les stagiaires concernant les priorités.
La liste ci-dessous a été conçue également pour poser les bases d’un
programme de formation et d’auto-formation en neuropédagogie.
Besoins en formation dans le domaine des mécanismes cérébraux et les
processus d’apprentissage
Si l’on part d’une réalité très simple, à savoir que le processus d’acqui-
sition passe par : I) une prise d’information, 2) un traitement de l’informa-
tion, 3) l’utilisation/ la production d’information.
I1 est possible de grouper les différents éléments sous les rubriques
suivantes :
(Les rubrique:; sont à évaluer de I à 5 selon le degré de priorité qu’elles
représentent pour vous
I = prioritaire ;5 1peu urgent).

1. La prise d’information
I. 1. Utilisation du matériel et des moyens de transmission de l’in-
formation
1.1.1. visuel
I. 1.2. auditif et sonore
1.1.3. autres
1.2. Discerner les attitudes et comportements des élèves face a
1.2.1. la source d’information
1.2.2. la discipline enseignée
1.2.3. la tâche a accomplir
1.2.4. l’objectif d’apprentissage
1.2.5. le groupe
I .2.6. lui-même
1.2.7. l’enseignant
1.2.8. l’institution
1.2.9. autre
La spirale de la formation 187

1.3. Aider l’élève à prendre conscience de son acquis, avant d’abor-


der un domaine nouveau
1.4. Aider l’élève à prendre conscience de ses ressources, de sa ges-
tion, de son profil
1.5. Autre

2. Le traitement de l’information
(I1 est artificiel de séparer cette phase de la précédente car le traitement
de l’information commence dès la prise d’information, mais les besoins de
l’analyse exigent une certaine simplification).
2.1. Mieux connaître le processus/ le fonctionnement de
2.1.1. l’attention
2.1.2. la mémoire
2.1.2.1. immédiate et à court terme
2.1.2.2. à long terme
2.1.3. l’appropriation des connaissances
2.1.4. la motivation
2.2. Réfléchir sur le processus de ré-flexion, le raisonnement, la
résolution de problèmes
2.3. Mieux connaître les techniques de créativité, et faire appel a
toutes les ressources du cerveau
2.4. Discerner les stratégies employées et évitées par les élèves
2.4.1. stratégies linéaires et analytiques
2.4.2. stratégies globales et holistiques
2.5. Discerner et évaluer les blocages, les freins...
2.6. Évaluer en cours de parcours et réorienter l’élève (avant que les
jeux ne soient faits)
2.7. Autre.

3. Utilisation,production, reproduction et transformation de l’information


3.1. Évaluer les stratégies d’apprentissage utilisées par l’élève pour
parvenir à l’objectif
3.2. Évaluer les résultats de l’élève par rapport à l’objectif d’appren-
tissage
3.3. Évaluer les techniques et stratégies pédagogiques utilisées par
l’enseignant pour aider l’élève à atteindre l’objectif d’apprentis-
sage à partir d’une source donnée (visuelle, auditive, etc.)
3.4. Autre.

Cet inventaire a été soumis à divers publics de stagiaires, enseignants ou


futurs enseignants en formation initiale ou continue. Une exploitation
systématique des résultats n’a pas donné d’indication significative sur les
priorités ... car toutes les rubriques ont été notées 1, 2 ou 3 ! Le but véritable
de ce questionnaire, qui était de déclencher une réflexion sur l’étendue du
domaine à découvrir et, d’autre part, de créer le besoin d’information, semble
avoir été atteint : le dialogue, après le travail de repérage, a été amorcé.
188 Construire aujourd’hui avec hier et demain

2. TRANSMISSION D’UN CONTENU ET D‘UNE DÉMARCHE

Ce serait contraire à l’esprit dans lequel l’analyse précédente a été faite


et aux conclusions qui ont été tirées, de transmettre le contenu de la
formation en neiiropédagogie ex cathédra sans une méthodologie adaptée
à la situation de formation des stagiaires et au message transmis.
Dans la mesure du possible, les tableaux seront établis sur transparents
pour rétroprojecteur et l’information présentée visuellement et auditive-
ment (3).

Réflexion prbalable

Tout en gardant en mémoire la nécessité de revenir constamment au


travail amorcé dans les domaines signalés au niveau de la période (( T moins
1 », la transmission de l’information sur le fonctionnement des mécanismes
cérébraux sera précédée d’une période de réflexion sur les points suivants :
1) le fossé qui existe entre :
les réalisations des apprenants... et ... leurs ressources
les acquisitions.............. et ... les attentes
les résultats obtenus .............. et ... les efforts fournis
l’importance accordée aux résul-
tats.. . et ... aux processus
les interventions pédagogiques et ... les connaissances sur les méca-
nismes cérébraux

2) la recherche des causes de ce fossé


(La liste reste, bien sûr, ouverte ; elle est d’abord soumise aux stagiaires).
La réflexion s’orientera autour des résistances au changement, de l’évo-
lution de l’environnement audio-scripto-visuel, et du manque de connais-
sances des données en neurosciences (potentiel cérébral, fonctionnement de
la perception, mémoire, etc.).
3) << qu ’est-ce qu ’apprendre aujourd’hui N
Définir la conception que chacun a de l’apprentissage dans le contexte
actuel fait également partie de l’introduction à une formation en neuro-
pédagogie.
L‘apprenant e!jt un système ouvert (figure 9). On proposera aux stagiaires
de construire le schéma des relations qui existent entre l’apprenant, placé
au centre de la situation, et les différents systèmes, autre que l’école, avec
lesquels il est en interaction :

(3) L‘utilisation du rétroprojecteur présente l’avantage de permettre au formateur de faire


face au groupe et de ne pas rompre le contact oculaire, donc la communication, avec les
stagiaires.
La spirale de la formation 189

U hier
1 U demain

t
\t __ école

-
projets

rêves...
autre ...

Figure 9. Approche systémique de 1 ’apprenant :


(l’upprenant est un système ouvert)

Les flèches (bidirectionnelles) seront traduites en termes clairs : quelles


sont les interactions, l’incidence sur l’apprentissage de la présence ou de
l’absence de relation.. .
La réflexion portera également sur le dépassement de la relation linéaire
causale dans le comportement de l’apprenant et sur le jeu complexe
d’implications, interactions, rétroactions, pro-actions ...

Théories et découvertes

Replacer l’intérêt récent pour les neurosciences dans l’évolution des


théories et découvertes sur le cerveau sera l’étape suivante.
Cela permettra de souligner l’explosion récente en Occident des connais-
sances sur l’organe de l’apprentissage, grâce aux technologies nouvelles. La
démarche suivie sera adaptée au public de stagiaires, et une recherche
d’information demandée aux participants, modulée selon le temps dont on
dispose, est indispensable. Le rôle du formateur surtout dans ce domaine
~

précis de I;évolution des idées et conceptions de l’homme - est de créer


le besoin d’information. Le sujet constitue un excellent thème de recherche
en groupe et des sujets de Mémoires très riches.
Une rapide synthèse prend la forme du tableau 1 :
190 Construire aujourd’hui avec hier et demain

....
Égypte (papyrus, 3 O00 av. J.-C.) : localisations cérébrales.
Mésopotamie, Hébreux, Grecs: le cœur est le siège de l’intelligence et des
sentiments.
Socrate et Précurseurs (Pythagore, Démocrite, Hippocrate, vï-~vesiècle av.
J.-C.) et P!laton (” 428-- 348 av. J.-C.) : thèse céphalo-centrale.
Aristote (-384-322 av. J.-C.): le cœur est le siège des sensations, des
passions, de l’intelligence. Le cerveau = un réfrigérateur.
Du IF siècle (ap. J.-C.) au Moyen Age et la Renaissance (L. de Vinci) progrès
considérables ; pourtant, la doctrine officielle reste celle de l’immatérialité
de l’âme.
xvue siècle
Descartes R. (1596-1650) : théorie dualiste (esprit/corps). Âme : immatérielle
et immortelle.
Willis Th. (Oxford, G.-B., 1621-1675) : découverte des centres sous-corticaux.
xvIw siècle
Galvani L. (It., 1737-1798) : contraction du muscle par courant électrique.
Rolando L. (S,ard., 1773-1798) : cerveau, actes volontaires ; cervelet, actes
involontaires.
X I X ~siècle
Gall F.J. (All., 1758-1828) : Phrénologie.
Flourens P. (Fr., 1838-1871) : différentes fonctions selon les zones.
Purkinje J.E. (Tch., 1787-1869) : découvre les grandes cellules.
Helmholtz H.L..E von (All., 1821-1894) : vitesse de l’influx nerveux.
Broca P. (Fr., 1824-1888) : aire de la production du langage.
Wernicke (All., 1848-1905) : aire de la compréhension du langage.
Charcot J.-M. (Fr., 1825-1893) : correspondance entre zones cérébrales,
paralysie et épilepsie.
...début X P siècle
Golgi C. (It., 1844-1926) : coloration des neurones.
Cajal y S.R. (E:jp., 1852-1934) : coloration de neurones.
Waldeyer W. (All., 1836-1931) : invention du mot neurone, 1894.
Freud S. (Autr.., 1856-1939) : psychanalyse.
Jackson J.H. (G.B., 1835-191I) : épilepsie focale et aphasie.
Pavlov I.P. (U.R.S.S., 1849-1936) : réflexes conditionnés.
Elliott T.R. (G.15.) : transmission chimique de l’influx nerveux.
Binet A. (Fr., 11357-191I) : premiers tests d’intelligence.
Brodmann K. (,411.) : carte du cortex (52 aires) en 1906.
Watson J.B. (E.-U., 1878-1958) : comportementalisme.
Sherrington C.S. (Br., 1857-1952) : invention du mot synapse.
xx’siècle
Penfield W.G. (Can., 1891-1976) : exploration du cortex par électrodes.
Berger H. (All., 1873-1941) : premier encéphalogramme, 1929.
Piaget J. (C.H., 1876-1980) : stades chronologiques du développement céré-
bral.
Skinner B.F. (E,-U., 1904-) : conditionnement ; machines à enseigner.
Papez J.W. (Br.,,): invention du mot systéme limbique, 1937.
Hyden H. (Su.) : apprentissage = changement dans l’ADN
Luria A.R. (U.R.S.S.,1902-1977) : correspondance blessures/ déficiences céré-
brales ; mémoire/ lobes frontaux.
La spirale de la formation 191

Hodgkin A.I. (Br.), ... 1952... : transmission de l’influx nerveux.


Huxley A.F. (Br.), ... 1952... : transmission de l’influx nerveux.
Eccles J.C., Sir (Austr.), ... 1963... : transmission de l’influx nerveux.
Harris G. (G.B.), ... 1965 : sexualité et hypothalamus.
Pribram K . (U.S.), ... 1976... : structure hologrammorphique.
Ungar G. (E .-U.), ... 1970 : apprentissage = formation de peptides.
Sperry R. (E.-U.), ... 196 1 : latéralisation et spécialisations hémisphériques.
Hubel D. (E.-U.) ,... 1959... : système visuel
Wiesel T. (Su.) ,... 1959... : système visuel
Imbert M. (Fr.) ,... 1979... : système visuel
Jouvet M. (Fr.)... 1967... : sommeil paradoxal et rêve.
Laborit H. (Fr., 1914-),... 1951... : bio-psycho-physio-sociologie.
Changeux J.-P. (Fr.) : (( l’homme neuronal »,... 1982.
Lassen N.A., Ingvar D. et Skinhoj E. (Dan.), ... 1977... : idéographie cérébrale.
Vincent J.-D. (Fr.) : l’homme (( hormonal »,... 1986.
....
(Les dates représentées entre deux séries de pointillés (... X ...) sont celles aux-
quelles la recherche a été reconnue ou publiée. I1 faut environ une vingtaine d’années
à un chercheur pour vérifier son hypothèse et faire connaître sa recherche.)
Tableau 1. Évolution des théories et découvertes sur le cerveau

La famille des neurosciences compte, parmi ses principaux membres, la


neuroanatomie, la neurophysiologie, la neuroendocrinologie, la neurochimie,
la neuropsychologie, la neuropédiatrie ... Les neurosciences appartiennent à
une famille plus grande encore, celle des sciences de la bioévolution: la
paléontologie, l’anthropologie, l’ethnologie, la génétique, l’éthologie...
Quant aux technologies d’exploration du cerveau, le tableau suivant
énumère les principales techniques qui - en 1987 - permettent d’étudier
un cerveau in vivo, et il rappelle leurs capacités respectives :

Pour la morphologie : Rayons X,


Scanner,
IRM
Pour la physiologie : exploration vasculaire,
métabolique (PETT)
électrique (EEG, ERP),
électro-magnétique (MEC).

Tableau 2. Techniques d’exploration cérébrale

L‘évolution du cerveau
Deux types d’information sont à apporter ici. D’une part, l’évolution du
volume cérébral au cours des millénaires, montre que l’évolution semble
ralentie depuis que les lobes frontaux de l’homo (( sapiens sapiens )) ont atteint
un certain volume (figure 10) ; d’autre part, la théorie de Paul MacLean,
telle qu’elle a été exposée dans la premiere partie (pp. 46 et sv. et ta-
bleau 3, p. 192).
192 Construire aujourd’hui avec hier et demain

2 400 cc
1 200 cc
1 O00 cc
800 cc
450 cc vi
O
-c
ui *U “Jl c 8
V i c O

g.3 r
r.
o r
D
2 //
Figure 10. Évolution du volume cérébral au cours des millénaires
(adapté de <Y The Brain :a user5 manual, the Diapram Group, 1982)

reptilien

limbique

Cortex reptilien : 200 millions d’années


= décisions de survie

-
= sens du territoire
apprentissage : imitation
= fonctionnement : boucle stimulus - réponse

Cortex ümbique : 60 millions d’années


= émotions, empathie
= adaptation à l’environnement

- appartenance au groupe
mémoire : relais

Néocorîex : très récent (quelques millions d’années)


C2 exploration, interprétation, vérification
C2 discrimination sensorielle
C2 pensée rationnelle
C2 décision, planification, mémoire...

Tableau 3. Trois cerveaux en un (adapté de la théorie de Mackan)


La spirale de la formation 193

Le développement du cerveau.

Le développement des différents systèmes sensoriels de l’enfant est


analysé, dans son dynamisme, dans la première partie. Le tableau 4, ci-
dessous, adapté de D.J. Coulter, facilitera la prise d’information, surtout si
le formateur associe des couleurs différentes aux diverses modalités senso-
rielles dont on suivra, grâce à ce repérage, le développement par poussée.
I1 est bien évident que ce tableau ne peut être qu’un raccourci: le cerveau
existe dès la formation de la plaque neurale, dès les troisième et quatrième
semaines après la conception de l’embryon.
Tableau 4. Corrélation entre développement cérébral et comportement
(tableau chronologique)
(V = vision ; A = audition ; M = motricité ; L F = lobes frontaux)

Ages et étapes Activité


Avant la naissance :
-- 3 mois: dév. du système A ; les permet l’audition de l’environne-
fibres M atteignent le thalamus ; les ment, mouvementsltoucherlsensibi-
cellules neurales se multiplient lité/douleur

~ 1 mois: fin de la multiplication


cellulaire ; début myélinisation
NAISSANCE

2 semaines : multiplication des cel- dév. des comportements de base


lules gliales ; dév. des L F et aires A,
dév. aires V (rapide)
dév. aires V (rapide)
2 mois :connexions M moelle-thala-
mus renforcées
4 mois :dév. continu des systèmes A, atteinte et saisie d’objets
V et LF
- myélinisation d u corpus call.
(zone postérieure) fin multiplic. des
cell. gliales
5 mois :fin d u dév. zone V capacité champ V adulte
6 mois: fin dév. L F 2 ans
ralentissement du dév. des
- = 1 fois et demie le nombre adulte:
connexions neurales disparition du surplus

moelle -
10 mois: fin myélinisation fibres M
thalamus saisie d’objets plus précise, explora-
tion
15 -
poussées
24 mois :croissance lente, sans marche

24 mois: nouveau dével. syst. A et

-
L F myélinisation d u faisceau arqué
(relie Wernicke Broca)
-
le langage se structure ;passage com-
préhension expression ;identifica-
tion des structures
194 Construire aujourd’hui avec hier et demain
4 ans: myélinisation du corpus cal- coordination sensorimotrice amélio-
losum a u niveau d u cortex sensori- rée
moteur, connexions aires associatives actions coordonnées complexes M +
+
AfV-I-M
Connexions M moelle - LF V A reproduction/planification/i-
mitation
6 ans: fibres formation réticulée
zones assoc. postérieures
- poussée générale (plusieurs zones)

7 ans :croissance du crâne moment optimal pour commencer


maths/ lecture
8 ans : ralentisslement de la croissance augmentation jàcultés de raisonne-
du crâne ment concret, tâches de réversibilité-
/ conservation/ construction/ vo-
cab./langue étrangère
8-10 ans : corpus call. commence
myélinisation dans LF I dév. logique et abstraction

11 ans : croissance du crâne et cer-


veau
b -:-
13-14 ans croissance physique
15 ans :fin myélinisation région asso- fonctions se consolident, pensée abs-
ciative occip. ; poussée croiss. crâne traite augm. ;résolution de problème,
démarche inductive
16 ans: dernikre poussée de crois-
sance du crâne (taille adulte)
22 ans :nouv. poussée LF empathie, altruisme, complexité

-
30 ans :myélini,sation des fines fibres
M des LF egtrémités
maîtrise et précisions des gestes et
mimiques
40 ans: fin du dév. des LF K intelligence biologique N (symbole
+ +
lang. transform.)
75 ans :remplacement par nouv. cell. pas de détérioration notable chez
des anciennes adultes sains
Sénilité ? = oxygénation réduite et réduction du renouvellement cellulaire
Les sources, pour chacune de ces données, se trouvent dans Coulter D.J., 1981.
Cf. aussi Bloïov~kiD. (1986) pour l’étude parallèle de la maturation des structures
nerveuses et du comportement (BueIl S.J. & Coleman P.D., 1979) et pour l’étude
du vieillissement cérébral ; cf aussi Cerami A. et M. (( Glucose et vieillissement )) in
Pour la Science, No 117, Juillet 1987, pp. 72-79.

Potentiel et fonctionnement cérébral

Les stagiaires seront invités à construire seuls, puis en sous-groupe, un


schéma en arbre ou en grappe, représentant le cerveau au centre et, issues
de ce centre, les principales fonctions cérébrales telles qu’ils se les représen-
tent.
La figure 11 est une suggestion de schématisation, énumérant les diverses
activités cérébrales classées selon les trois phases : prise d’information
(percevoir), traitement et production (ou re-production), auxquelles s’ajou-
LA spirale de la formation 195

tent les activités de la vie et de la survie quotidiennes qui - ne - cessent -


pas - pour - autant - que - l’on - s’assied - sur - les - bancs - de - l’école...
Un schéma de ce type (on peut en profiter pour enseigner la technique des
schémas heuristiques) a l’avantage de faire apparaître et souligner les
relations entre les éléments et l’ensemble. I1 fait également apparaître l’activité

-
sensori-motrice d’une part (0,02 9%) et le traitement de l’information d’autre
part (99,98 %) au niveau cortical (4).

(Re)produire

oralement
- #
O@% Percevoir

visuellement
auditivement
kinesthésiquement
visuellement
+ + +
gust. olfact.
motricité + combinaisons
+ combinaisons CERVEAU

Traiter l’information
99,98 %

Plus :

coordonner
juger, décider
gérer
organiser
créer, parler
imaginer.. .
I
avoir faim, soif
aimer, grandir
être en équilibre
analyser
reconnaître
stocker
rappeler
interpréter...

Figure 11. Le cerveau, organe de t’apprentissage

Les tableaux 5 et 6 sont destinés à servir de base à une recherche


pédagogique et à l’élaboration d’interventions pédagogiques qui tiennent
compte des chiffres et des caractéristiques cérébrales. Ils sont donc destinés
à être traduits en termes d’activités pédagogiques le long de l’itinéraire de
l’apprenant, depuis la prise d’information, jusqu’à la production, en passant,
bien entendu, par la phase de traitement de cette information.

(4) Cf. p. 101.


196 Construire aujourd’hui avec hier et demain

30 à 100 milliards de neurones


16 O00 km de: fibres
+ des cellules gliales en nombre illimité
lOI4synapses
-
10 O00 mises a feu possibles par seconde
vitesse d’influx nerveux 250 mjs.
0,8 litre de sangjmn
20 % de l’oxygène du corps
80 % de l’écorce cérébrale = zones associatives
99,98 % neurones de traitement niveau
0,02 % neurones pour l’entrée et la sortie de l’information
double nature du fonctionnement : physico-chimique

Tableau 5. Quelques chgres de notre potentiel

COMPLE~XITÉ~INTERACTION
CONNECTIVITÉI ASSOCIATIVITÉ
COMPLÉ~MENTARITÉ~ COOPÉRATION
DYNAMHSME / ADAPTABILITÉ
SÉLECTIVITÉ
SYNERGIE/ MULTISENSORI ALITÉ

Tableau 6. 1 2 s mots-clés représentant les caractéristiques du cerveau

Gestions, stratégies et profils

Le travail sur le traitement de l’information par les deux hémisphères


est d’autant plus important qu’il permet :
1) de mieux comprendre les différentes gestions par les apprenants d’une
même information.
2) de faire apparaître la gamme des savoir-faire de notre cerveau.
Les implications pédagogiques de cette information sur l’hémisphère
gauche (HG) et 1”hémisphèredroit (HD) seront d’abord explorées avec les
stagiaires, puis orientées vers deux directions essentielles :
a) construire Ides interventions pédagogiques faisant appel à la capacité
globale du potentiel cérébral.
b) apprendre à discerner les styles dominants et les profils dans lesquels
tout un chacun se cantonne (ou se réfugie?). Mais il est essentiel d’avertir
les stagiaires en formation du risque qui réside dans une interprétation
mécaniste de la latéralisation comme c’est trop souvent le cas dans les
théories des profir’s,déduites des découvertes de R. Sperry.

Deux hémisphères, deux gestions


Il existe deux façons de présenter les caractéristiques des deux hémi-
sphères : une présentation (( type HG )) : constituée de deux listes (tableau 7)
et une présentation (( type H D », représentant graphiquement la gestion
analytique de l’HG et la gestion holistique de 1’HD (figure 4,page 62).
LA spirale de la formation 197

Hémisphère gauche Hémisphère droit

détecte les caractéristiques, détails, intègre, organise en structure,


composantes, catégories ensemble
analyse synthétise, met en relation
traite en séquence, en série traite simultanément
découpe le temps linéairement perçoit les relations dans l’espace
code/ décode les langages : verbal, code/ décode les analogies, méta-
maths, musique, etc. phores, images, mélodies...
le sens: A, a la forme : A, a

Tableau 7. Représentation linéaire des 2 gestions hémisphériques

Le tableau 7 peut servir à repérer certaines démarches d’apprenant :


- démarche I (dominance de 1’HG): compte, additionne, multiplie vers
l’avant, pas à pas, élément par élément (1 + 1 -t 1+ ...) ; préfère des
(( recettes )) ; (( l’arbre cache la forêt n ; les éléments sont plus importants

que l’ensemble ; la démarche se déroule (( en dehors »...


- démarche 2 (dominance de 1’HD) : compte, soustrait, divise h rebours,

en partant de la solution ; (( la forêt cache l’arbre ; réponses spontanées,


correctes sans pouvoir expliquer pourquoi ; se sert de schémas, des trois
dimensions ; comprend l’objectif... ; impatience, et imprécision.
La figure 4 (p. 62) sera plus accessible aux personnes qui préfèrent une
information imagée, la discussion au sein du groupe de stagiaires peut être
très fructueuse : à partir de cette expérience, apparaîtront la nécessité et le
bénéfice de donner l’information sous une forme verbale et sous une forme
imagée. C’est une leçon essentielle à retirer des théories de la spécialisation
hémisphérique : la complémentarité des deux hémisphères et non leur
opposition ; convergence et divergence ; l’un contient les germes de l’autre ;
ils ne font qu’un...
Ici peut se placer un exercice d’exploration par les stagiaires de leur
propre représentation des deux hémisphères : s’ils avaient à les comparer,
que feraient-ils ? Quelle image, quelle analogie ? ou quelle description ?
Outre son degré de connaissance du sujet, chacun découvre qu’il n’y a
pas de réponse juste ou fausse mais simplement l’exploration d’un sujet au
sein même d’une expérience personnelle.

Les stratégies
Une autre information concernant les deux hémisphères doit être rap-
pelée, celle que révèlent les recherches de J. Sergent. En tenant compte des
différents paramètres intervenant dans la prise d’information, à savoir la
durée, la nature de l’information, la tâche à accomplir, le rôle des deux
hémisphères apparaît sous un angle nouveau, celui de leur coopération,
I’H. D. constituant le cadre des opérations de I’H. G. (tableau 8). L‘enseignant
198 Construire aujourd’hui avec hier et demain

peut utiliser cette i n f o r m a t i o n pour organiser e t diriger la d é m a r c h e d e s


a p p r e n a n t s , veiller à ce que l a d u r é e d’exposition au stimulus c o r r e s p o n d e
bien à l a tâche à accomplir (analyse, synthèse).

U
Paramètres HG HD

fréquences hautes basses


4-b

durée longue brève


4-b

image riche pauvre


4-b

dimensions petites grandes


U

nature de l’opération fine, complexe premier contact


stade initial

Tableau 8. Coopération des 2 hémisphères (d’après J. Sergent)

HG HD
observer si
défauts d’articulation gestion faible des analogies, méta-
de syntaxe phores, synthèses, séquences, rela-
tions
difficultés de rappel séquences, relations
vocalique
difficultés de cornpréhension (instruc-
tions, explications)

STRATÉGIES A A D O P T E R
Utiliser
matériel visuel, imagé matériel verbal : histoires
associer mot +image consignes, explications en associa-
tions multi-sensorielle, utiliser des
associations, skquences, relations, écouteurs *
repérages
associer la couleur (V) développer ensemble la perception, la
lecture auditive (V + +
A) écriture motricité, l’imagination, l’analyse de
(K) structures

(métaphore = image 4-verbal)


* Suggéré par Frositig et Maslow (1979).

Tableau 9. Déficits de l’hémisphère gauche et de l’hémisphère droit


La spirale de la formation 199

compenser, stimuler, susciter...


Un pas supplémentaire doit être fait pour clarifier les mesures à prendre
dans les cas de déficit ou dysfonctionnement de l’un ou l’autre hémisphère.
I1 est possible de compenser certaines faiblesses ou paresses de l’une des
deux gestions (logique/ verbale, ou globale/ imaginative) en suscitant ou
stimulant d’autres fonctions situées dans l’autre hémisphère et en établissant
un (( pont )) entre elles.
Le tableau 9 suggère un repérage des difficultés d’apprentissage et une
indication d’actions pédagogiques à prendre.

Observer les stratégies en action


Dans un groupe, quel qu’il soit, on trouvera au moins trois grands types
ou profils d’apprenants :
- ceux qui préfèrent avoir sous les yeux des documents, schémas, textes ... ;

- ceux qui préfèrent recevoir une explication orale (avec gestes, le plus

souvent) ;
- ceux qui préfèrent se rendre compte eux-mêmes, expérimenter, toucher,

manipuler, bouger.
II y a, bien sûr, aussi, ceux qui se contentent de ce qu’on leur donne ;
que la murce d’information soit visuelle ou auditive, ils la reçoivent. Ceux-
là ne posent pas de problème: ce sont, en général, «les bons élèves)) qui

P A R T I C I P A N T S

Figure 12. Profil d’un groupe


Chaque participant (A, B, C, D...) classera les quatre activités de 1 à 4
par ordre de préférence (I = premier choix)
200 Construire aujourd’hui avec hier et demain
maintiennent leurs résultats d’une année sur l’autre, quels que soient
l’enseignement eit le cadre. Ils s’adaptent.
I1 est utile d’aborder le problème des profils avec le groupe d’apprenants,
dès le début de la séquence d’apprentissage, en recensant les attentes dans
le groupe par raipport aux activités et aux moyens utilisés pour accéder à
l’information.
La figure 12 représente le document qui circulera dans la classe. Les
apprenants (A, E!, C, D,...) classeront les activités proposées (écoute, lecture,
visionnement de film, expérimentation) de 1 à 4 (1 = jugé très efficace ; 4
= jugé moins efficace).
Ici encore, l’expérience a prouvé que ce questionnaire est une occasion
d’entamer un di(a1oguepédagogique en profondeur avec les intéressés, sur
les sources d’information, la transmission, et l’objectif à atteindre. Pour les
enseignants, les préférences révélées par ce profil du groupe indiquent surtout
les attentes avec lesquelles il faudra compter. Cette démarche stimule chez
l’enseignant une recherche au niveau de la transmission de l’information.

Comment naissent /es profils 7


Pourquoi un son déclenche-t-il chez l’un une image visuelle, chez l’autre
une image sonore, chez un autre une sensation, chez un autre encore plusieurs
images sensorielles ?
L‘explication avancée généralement est que, très tôt, nous prenons, grâce
à notre entoura.ge, des habitudes de gestion et d’organisation du réel.
L‘explication neuro-physiologique invoque la stabilisation sélective et la
mémoire d’expériences gratifiantes, donc à réitérer...
Pour discerner les profils d’apprentissage nous disposons de plusieurs
outils. Certains aippartiennent à des théories comme la P.N.L. (Programma-
tion Neuro-Linguistique) ou les profils pédagogiques d’A. de la Garanderie.
Ce dernier a établi quatre niveaux d’appréhension du réel (ou (( paramètres D)
qu’il a adaptés de la théorie du profil épistémologique de G. Bachelard. Ce
sont :
niveau 1 : la réalité concrète (les êtres, les choses, les lieux)
niveau 2 : le langage, représentant le codage verbal du niveau 1
niveau 3 : toute mise en relation ou structure
niveau 4 : tout prolongement de la réalité (le (( Pourquoi pas ? )))
Si l’on rapproche de ces quatre niveaux, les gestions visuelles (V) auditive
(A) et kinesthésique (K), on obtient une grille de comportements représentés
dans le tableau 10 et la figure 13 ci-dessous :

Pro$l visuel ( V )
V 1 préfère voir la scène, la situation, le film, les images du livre
V 2 préfère lire le texte du manuel
V 3 demande à faire des exercices, des applications, mettre (( au clair ))
V 4 prolorige les paramètres visuels, formes, etc.
La spirale de la formation 20 1
Profil auditif (A)
A 1 est sensible à l’environnement sonore
A2 préfère une situation d’écoute à la lecture d’un document
A3 aime les raisonnements, les démonstrations prolonge, crée à partir
des paramètres auditifs : hauteur, amplitude, durée, fréquences
A4 prolonge, crée d partir de paramètres auditifs : amplitude, durée,
fréquences

Profil kinesthésique (K)


K 1, K 2 préfèrent l’expression non verbale
K 3, K 4sont des «metteurs en scènes», des réalisateurs

Tableau 10. Profils visuel et auditif

L‘apprenant à dominante visuelle cherche la précision, enregistre les


exemples, recherche les applications, reproduit les modèles. I1 est, en général,
rapide ; il sait discriminer, induire. 11 s’intéresse davantage au comment.
L‘apprenant à dominante auditive ne gère pas bien l’espace, mais il gère
le temporel dans la durée ; il repère les associations, les rapprochements. I1
déduit. I1 est sensible au climat, recherche l’harmonie, il est conciliant. I1
s’intéresse davantage au pourquoi.
L‘apprenant à dominante kinesthésique est malheureux à l’école. I1 a
besoin de bouger pour apprendre avec son corps dans l’espace. Le mou-
vement (externe et (( le ressenti )) interne) lui est absolument nécessaire. Le
priver de mouvement et de rythme revient à le priver de ses moyens, à le
mutiler de son énergie.
Précisons une fois encore, qu’une grille comme celle-ci n’a d’intérêt que
si elle fait apparaître les types de gestion qui ne sont pas pratiqués et pour
lesquels il s’agit d’entraîner l’apprenant. I1 n’est évidemment pas question
d’enfermer qui que ce soit dans une catégorie, mais de rejoindre l’apprenant
là où il se trouve dans sa progression et d’amorcer son cheminement à partir
de la gestion qu’il utilise, puis de l’amener à en pratiquer d’autres.
Jamais on ne dira assez le grand avantage de savoir diagnostiquer un
profil d’apprentissage et de savoir rétablir des ponts entre les différentes
gestions (car ces ponts existaient dans la petite enfance).
202 Construire aujourd’hui avec hier et demain

Gestions
Visuel1.e Auditive

+
w******************
9
+
précise fluide
logique flou
statilque
organisée
discriminative combinatoire
systkmatique relationnelle
lente rapide
gère l’Espace gère le Temps

ne SI: remet pas Peu


facilement d’esprit critique
en question

Figure 13. Les caractéristiques des gestions V et A (verbales et non verbales)

Demandez à une personne de faire un récit et notez les expressions qu’elle


emploie dans l’une ou l’autre (ou plusieurs) catégorie :
Visuel Auditif Kinesthésique

Verbes
voir, regarder, mon- entendre, écouter, par- sentir, toucher, aller,
trer, clarifier, éclairer, ler, dire, questionner, venir, tomber, tenir,
examiner dialoguer, résonner ... jeter ...

Adjectifs
clair, lumineux, som- mélodieux, harmo- concret, ferme, tendre,
bre, coloré, brillant, nieux, musical, discor- solide, mou, chaleu-
vague, flou, net, bru- dant, calme ... reux, froid, dur...
meux ...

Substantifs
perspective, scène, pay- s o n , b r u i t , tonalité, pression, tension, com-
sage, spectacle... rythme, accord, désac- bat ...
cord ...

Tableau 11, Éléments pour établir un K cliché linguistique >>


La spirale de la formation 203
Le tableau 1 1 donne l’amorce d’une analyse des repères linguistiques
permettant de discerner le système dominant de représentation dans lequel
s’exprime quelqu’un.
En croisant les modalités sensorielles avec les catégories syntaxiques de
la langue, on peut obtenir un cliché linguistique révélant l’organisation
des éléments de la langue chez cette personne, les faiblesses ou au contraire,
les richesses d’une gestion, ou d’une catégorie syntaxique.
Pour développer une gestion faible, on travaillera sur les paramètres
visuel, auditif, kinesthésique (Cf. liste p. 78).
Si chaque enseignant, dans sa discipline, développait systématiquement
les paramètres sensoriels, le visage de l’école changerait. Elle deviendrait
l’école de la perception et de la découverte du monde sensoriel, et de sa
richesse injhie.

Idéographie cérébrale : les leçons à tirer

L‘intérêt des techniques d’exploration cérébrale par idéographie a déjà


été signalé. 11 convient maintenant de se pencher sur ce que les images d’un
cerveau en activité de lecture, parole, écoute... révèlent à des enseignants (5).
Rappelons rapidement la technique utilisée : une substance radio-active
injectée (ou inhalée) dans la carotide interne permet, grâce à une caméra
à positron reliée à un ordinateur, de suivre l’apparition, la répartition et la
disparition de la radio-activité dans des zones cérébrales pendant une activité
donnée.
L‘activité d’un cerveau qui lit, écoute, parle.. . provoque une augmentation
de consommation d’oxygène et de glucose dans les zones activées par la
tâche, ce qui se traduit par une augmentation du débit sanguin local. On
peut donc localiser et évaluer l’activité cérébrale en mesurant l’augmentation
du débit sanguin.
Les idéogrammes de Lassen ont été décrits précédemment (p. 67 et sv.).
Seules les leçons à tirer de ces recherches seront rappelées (la figure 1, (( Les
aires cérébrales D, page 33, permettra de suivre les explications données ici) :

7. le repos sensoriel total, pendant un état de conscience éveillé, permet


la programmation et la structuration de l’information.
Ces images plaident pour que le temps d’apprentissage et - par voie
de conséquence - le temps pédagogique ménagent des pauses structurantes
et respectent l’alternance des moments de prisr d’information (( en direct ))
avec des moments d’intériorisation, d’évocation et de silence intérieur.
Savons-nous demander à nos élèves de fermer les yeux et d’évoquer ce
qu’ils ont lu, entendu, ce qu’ils ont acquis la veille, la semaine dernière, ce
qu’ils vont faire, dire, etc. ?

(5) On trouvera dans le numéro spécial sur le Cerveau, édité par BELIN(1981), les
magnifiques images des cartes cérébrales obtenues par LASSENet ses collaborateurs. Même
si la technique utilisée par LASSEN
est maintenant dépassée par les techniques qui permettent
d’obtenir des images dynamiques, ces images nous enseignent encore de nombreuses leçons.
204 Construire aujourd’hui avec hier et demain

11existe, à l’heure actuelle, une convergence suffisante des recherches dans


ce sens (Lassen, Luria, Prigogine, etc.) pour que cette loi fondamentale du
fonctionnement cérébral soit imposée et respectée par tous les partenaires
de la situation d’,apprentissageet de communication.

2. Perception viwelle
Lorsqu’un su-jet suit des yeux un objet en mouvement, le cortex visuel
primaire et associatif, la zone oculo-motrice et la zone motrice supplémen-
taire entrent en activité. L‘image cérébrale est différente si l’objet est
immobile ; d’où l’intérêt de varier les types d’images : fixes et mobiles, et
ne pas se cantonner dans un seul type d’intervention.
L‘activation du cortex associatif, en plus du cortex primaire, fait dire aux
expérimentateurs que, pour être reconnu et identifié, chaque stimulus perçu
doit être comparé aux expériences précédentes. La mémoire intervient donc
dans le processus de perception sensorielle.
On comprend1 l’intérêt de travailler avec les apprenants 2 partir de ce
qu’ils savent, de leur expérience.

3. Perception auditive
L‘activité cérébrale est différente lorsque le sujet entend des sons neutres,
dépourvus de signification, et lorsque les sons entendus sont des mots.
Les images d’es chercheurs confirment que les activités langagières de
compréhension et d’expression sont liées. Cette réalité cérébrale indiscutable
plaide en faveur de longues périodes de stockage auditif, ce que James Nord,
chercheur à l’université du Michigan, appelle (( listening fluency n (la maîtrise
de l’écoute).

4. La parole
Lorsque le sujet parle, plusieurs zones sont en activité dans chaque
hémisphère: l’aire de la bouche, du larynx et de la langue, l’aire motrice
supplémentaire et le cortex auditif.
L‘hémisphère droit est aujourd’hui totalement réhabilité... après avoir été
considéré comme muet ou non-dominant. Mais il ne l’est pas encore dans
le monde éducatiif, ni dans les pratiques de gestion de l’information.
On attache, dans l’étude de la langue, une place prépondérante au lexique
et à la syntaxe allors qu’une très grande partie du message est transmise au
moyen de procédés dits non verbaux, la voix, l’intonation, le rythme, le
tempo, et les relations des divers paramètres auditifs, spatiaux, temporels.
Les deux hémisphères sont des partenaires indissociables et complémen-
taires dans les activités de parole comme dans tout autre activité, d’ailleurs.
La différence entre les deux hémisphères, d’après les images des chercheurs,
réside dans une relation dijjférente des zones somato-sensitives et du cortex
auditif: ils sont partiellement confondus dans l’hémisphère droit ; l’aire
motrice supplémentaire, probablement reliée à l’intention, est plus active
dans l’hémisphère: gauche.
La spirale de la formation 205
Rappelons qu’il n’est plus possible de parler de traitsprosodigues comme
s’il s’agissait d’éléments surajoutés au lexique ou à la morphosyntaxe. Les
composantes du langage sont neurophysiologiquement intriquées les unes
dans les autres. Les zones de réception et de production de l’intonation ont
été localisées dans l’hémisphère droit (6) qui, rappelons-le, est relié au système
limbique.
S’il n a dans le cerveau ni cloisonnement ni aucune zone s’activant seule,
pourquoi fractionnons-nous, comme nous le faisons si souvent, les activités
d’upprentissage en tâches ponctuelles et isolées ?

5. Lectures :la lecture dite silencieuse et la lecture à haute voix


La lecture dite silencieuse met en activité un nombre de zones bien
supérieur aux seules zones visuelles. Même le centre du langage (Broca) est
activé bien que le sujet ne parle pas. Serait-ce une indication suffisante pour
interpréter la subvocalisation comme une réalité neurophysiologique ?
Les études neurophysiologiques de l’acte de lecture révèlent trois points
importants (7) :
1) trois pôles sont en interaction : analyse visuelle, prononciation et la
signification.
2) les mécanismes de lecture diffèrent selon le matériau écrit : les lettres
et les léxèmes syntaxiques sont lus par médiation phonologique ; les mots
par mediation sémantique ; les phrases utilisent les deux médiations.
3) le mécanisme de lecture n’est pas un acte homogène. I1 subit une
évolution durant l’apprentissage.
La lecture à haute voix fait intervenir quatorze zones cérébrales: sept
dans chaque hémisphère. I1 s’agit donc d’une activité cérébrale très riche.
Que pouvons-nous faire d’une information de ce type dans notre
approche de l’écrit ?

6. Langage silencieux, intention


L‘image d’un cerveau qui compte silencieusement de O à 20 (langage
automatique) est différente de celle d’un cerveau qui se parle en structurant
des phrases complexes.
La zone motrice supplémentaire, qui est activée par le langage intérieur
ou silencieux, est aussi celle qui a été repérée par plusieurs chercheurs comme
étant la zone de l’intention, s’activant une à deux secondes avant l’aire
motrice, dans le cas d’un geste volontaire.
Ceci souligne à quel point il est important, en apprentissage comme en
pédagogie, de déterminer clairement l’objectif et de laisser le temps à
l’apprenant de projeter une stratégie vers l’objectif: Cela confirme - s’il en
était besoin encore - la nécessité d’une pédagogie de projet, mieux de
contrat, afin que les partenaires puissent prévoir, anticiper, projeter une
stratégie d’apprentissage et d’intervention pédagogique.
(6) Cf. Ross E. (1982).
(7) DELEPLANQUE B. (1986).
206 Construire aujourd’hui avec hier et demain

7.Activation globale
L‘activation générale du cerveau est, rappelons-le, en rapport avec un
mouvement rythmé et peut intervenir dès que le sujet se donne à lui-même
l’ordre d’accomplir ce mouvement.
Voilà de quoi ébranler sérieusement notre système... d’évaluation !
En plus des différentes remarques ou interrogations suscitées par les
images de l’idéographie cérébrale, il semble possible de retirer trois leçons
essentielles de ces idéogrammes de l’activité corticale :
Tout d’abord, l’interdépendance des activités cérébrales : pas de cloison-
nement des tâches réceptives et expressives.
Puis, un nouveau regard sur l’information (= mise en forme), sur la durée
et sur l’équilibre entre les moments de prise et de traitement de l’information.
Puis, le respect du temps d’intégration et de la multisensorialité indis-
pensable à la vie cérébrale.
Mémoires et évocation mentales
Comme cela a été souligné auparavant, les deux termes mémoire et
&vocation sont inséparables.
I1 sera bon de le faire découvrir aux stagiaires par un exercice très simple,
fait en dyade, au cours duquel A fait un récit (d’un événement positif, si
possible), et B en note les termes principaux : ces termes appartiendront à
une ou deux modalités, et traduiront en mots les images internes nourrissant
le récit (cf. tableau 11, page 202). Rares sont les récits dont tous les termes
sont non spécifiques d’une modalité sensorielle (penser, croire, comprendre,
etc.). Rares aussi sont les récits qui utilisent toutes les modalités.
Il s’agit d’insister dès les premiers instants sur l’importance du rôle des
évocations mentales et de les développer, quelle que soit la discipline
enseignée, dans toutes les modalités et la gestion interne de la représentation
du réel.
En l’état actuel des connaissances, le phénomène de la mémoire reste
mystérieux. Mais ce qu’on en sait, suffit largement pour donner des
indications très précieuses à ceux dont le rôle est de guider l’apprenant dans
les différentes ph,ases de l’acquisition des connaissances.
L‘un des premiers constats à faire établir par des formaleurs est d’une
part la diversité d‘es causes d’oubli (tableau 12), et d’autre part l’impossibilité
de parler de la mémoire au singulier. Il existe des mémoires et, par
conséquent, plusieurs voies pour l’entraîner ou la conserver. I1 n’existe pas
de siège anatomique de la mémoire : elle est partout. On se servira également
de la théorie de MacLean (figure 2 page 49 et tableau 3 page 192) pour
souligner que les régions sous-corticales sont déterminantes dans l’établis-
sement du souvenir.
La démarche consiste d’abord à repérer :
I) la cause
2) la phase du processus dans laquelle l’oubli intervient, et
3) les relations avec la source d’information qui a été donnée au départ
(V?, A?, K?).
La spirale de la formation 207

Rappel : les 3 phases du processus cérébral de base sont


1. L’« enregistrement )) de l’information.
2. Le (< stockage »/rétention (*).
3. Le rappel ou la reconnaissance.
L’oubli peut survenir par :
a) Perception insuffisante (A faible ?, V ?, K ?).
b) Détérioration de l’information (laquelle?).
c) Dé-motivation (quel niveau ?).
d) Non-reconnaissance (quels éléments ?).
e) Non-rappel, adresse erronée (moment ? lieu ?).
f) Blocage affectif, choc (physique ? chimique ?).
g) Autre.

Tableau 12. Les causes d’oubli

Pour cela, les formateurs ont besoin d’outils: un outil efficace est le
dialogue pédagogique qui a surtout l’avantage de faire ré-fléchir l’apprenant
sur sa gestion mentale et ses stratégies habituelies. Dans un dialogue de ce
genre, les questions doivent rester neutres et ne pas induire une réponse dans
une modalité sensorielle.
Exemple de question non-spécifique : (( est-ce que tu penses... ? )) ;
(( crois-tu... ? )) ; <( tu comprends que ... ))

Exemple de question orientée auditivement : (( dis-moi si... ))


Exemple de question orientée visuellement (( est-ce que tu vois ce que
je veux dire ? ))
S’il s’agit de la cause signalée en (b), l’information doit être prise à
nouveau, sans doute dans une autre modalité, et en consolidant les relations
avec d’autres éléments déjà acquis (une information flottante se perd
facilement) : relations de taille, forme, couleur, consonance, analogie,
contraste ; relation avec des faits déjà connus, vécus, etc.
S’il s’agit de dé-motivation (c), l’outil est, naturellement, d’une toute autre
nature : l’objectif est à préciser ou ... à négocier, ce qui est ni impossible, ni
dramatique. Souvent, le seul fait de laisser un choix possible entre deux ou
trois activités permet de résoudre la difficulté.
La non-reconnaissance (d), provient souvent d’une prise d’information
floue, non orientée, non motivée. Un travail régulier sur les paramètres
sensoriels et l’évocation mentale est une source d’amélioration rapide (cf.
page 78).
Lorsque le déclic d’un souvenir ne se produit pas (e), c’est souvent que
les conditions d’enregistrement ou le fil conducteur (relations, liens) ne sont
pas retrouvés. C’est en remontant la série ou la succession d’actes ou
d’événements, en retrouvant les conditions et le contexte de la prise
d’information, ou en passant d’une image à l’autre que l’on peut retrouver

(*) Les guillemets indiquent qu’une précaution est nécessaire dans l’emploi de ces
termes empruntés à l’informatique. Le phénomène de mémoire est essentiellement une
mise en relation. Cf. note (*) page 23.
208 Construire aujourd’hui avec hier et demain

ce souvenir. Des exercices systématiques d’entraînement à l’établissement de


liens (même illogiques ou absurdes) imagés, colorés, affectifs, améliorent le
rappel de façon sensible.
Dans le cas d’une perception insuffisante (a), et, d’une manière générale,
pour toutes les causes d’oubli signalées ci-dessus, les techniques d’organi-
sation de l’information pendant la prise d’information et de réactivation
après la prise d’information sont très efficaces :
- Pendant la prise d’information :
I1 revient à l’enseignant de présenter l’information de façon marquante,
originale, par plusieurs canaux d’accès, de varier les angles, les points de
vue ; de ménager des pauses pour permettre l’évocation mentale, etc.
I1 revient à l’apprenant (et il a besoin d’y être entraîné) de prendre -
au sens littéral du mot - l’information, de l’ancrer dans ses connaissances
antérieures, dans son système de références, dans ses projets, ses objectifs ;
de l’évoquer dans des pauses ménagées à cet effet; de l’adresser; de
l’organiser ; de la mettre en relation avec d’autres significations, etc.
Dans l’apprentissage, comme dans la vie, mieux voir, intérioriser ce que
l’on reçoit du monde extérieur, relier les perceptions à l’expérience anté-
rieure... c’est fournir une banque de données à l’imagination et à la mémoire,
c’est retarder la réaction immédiate, c’est transformer le réflexe en réflexion,
c ’est s ’enrichir.
La technique cies schémas heuristiques déjà exposée est recommandée
pour organiser l’information dans son propre champ vertical et horizontal,
mener la synthèse et l’analyse de front, garder une vue d’ensemble tout en
s’occupant des détails.
- Après la prise d’information : si aucune mesure n’est prise ... l’oubli
est assuré, pour 80 % de l’information reçue !
Par contre, si une réactivation est faite à certains moments précis,
l’architecture de la mémorisation est en place (8).
Certains auteurs parlent en termes de mémoire à court terme (M.C.T.)
et de mémoire à long terme (M.L.T.). D’autres, pensent que la distinction
est à réviser (9).
Le tableau 13 présente, en termes simplifiés, une réalité beaucoup plus
complexe. I1 permet toutefois de souligner quelques traits essentiels de la
mémoire.

(8) Cf. BUZANT. (1984).


auteur d’un best-seller, Memory, Meaning und
(9) C‘est l’opinion #deE.W. STEWICK,
Method.
La spirale de la formation 209

MCT MLT
- quelques secondes - nature chimique (modifications
~ 7-8 items niveau synaptique)
- dynamique, fonctionnelle - 4 dimensions :
- mécanisme bioélectrique sémantique
(niveau membranaire) syntaxique physique
- plus phonétique que sémantique linguistique
- localisée cortex - localisée : sous-corticale, amyg-
temporal sup. (A) et inf. dale, hippocampe, thalami.
(V) cortex: LF, temporaux et parié-
occipital (v> taux
pariétal (K) - condition essentielle : affectivité

- améliorée par : - améliorée par :


fréquence d’utilisation pauses
répétitions mentales redondances (diff. points de vue)
réactivations
- entravée par : entravée par :
interférences, similitudes (phoné- anxiété, stress, environnement
tiques, catégories sémantiques) menaçant

Tableau 13. Mémoire à court terme (MCT) et Mémoire à long terme (MLT)

Motivations et attention

Ce domaine est très vaste, et les problèmes rencontrés très variés. Les
actions à prendre sont nombreuses et de longue haleine.
Une approche efficace des motivations et de l’attention tient compte des
différents niveaux d’organisation (c’est une bonne occasion de réactivation
de la théorie des trois cerveaux). Rappelons que l’attention est un état et
un processus anticipatoire qui dépend de la tâche à accomplir (et si les tâches
étaient captivantes ? et si on lisait pour ...? et si on écrivait pour... ? et si on
écoutait pour... ? et si on cherchait pour... ? autant de questions qui permet-
traient peut-être à l’apprenant de s’éveiller...).

Entraînement à l‘attention
Les exercices doivent porter régulièrement sur les points suivants :
- coordination de la respiration et du geste,
- re-centrage et intériorisation (permettant à l’enfant dé-motivé de concen-
trer son attention sur ce (( lui-même D dont il ne sait que faire).
- exercices d’orientation externe/ interne
- travail de concentration sur un point/sur la périphérie, en alternance
- travail systématique sur le (( d / m/ f D : détachement de l’ancrage antérieur,
puis mouvement vers une cible nouvelle, puis fixation sur un nouvel
objectif (les trois phases de l’attention) :
210 Construire aujourd’hui avec hier et demain
Exemple d‘exercice visuel
Proposer, en introduisant l’élément temporel (compter à haute voix (( un,

(détachement -
mouvement de balayage -
deux, trois )) en variant les durées des différentes phases), des séquences
fixation), de droite à gauche,
de gauche à droite, de haut en bas, de bas en haut, etc.
3 2 1

NNNNNNNNNN t «((((««((««(((( t
ou 1 2 3
vvvvvvvvvv + ))»))))»»»))»» 9 DDDDDD

1 = détachement ; 2 = balayage ; 3 = fixation.


Combiner les séquences, les durées de fixation, les orientations. Varier les modalités :
+
visuelle/auditive/kinesthésique. Combiner les modalités : V A, A +
I(,K +
V, etc.

Repérer les attitudes corporelles


Le formateur doit aussi apprendre à discerner les deux attitudes corpo-
relles correspondant aux deux types d’attention, selon que les tâches à
accomplir sont des activités de discrimination ou de raisonnement.
L‘un des facteurs responsables des difficultés de certains apprenants pour
fixer leur attention est leur posture physique. Elle est, en général, à l’opposé,
de ce qu’elle devrait être pour accomplir la tâche demandée.
Le tableau 14 permet de comprendre et de souligner la différence entre
l’attention automatique et intentionnelle en situation de discrimination.
Celle-ci a pour condition le prolongement d’un état d’éveil et de réceptivité
à une information nouvelle.

Discrimination Efficace Inefficace

a) Attitude contrôlée par le système nerveux autonome


Rythme cardiaque ralenti accéléré
Respiration régulière irrégulière
lente rapide
profonde peu profonde
Musculature détendue tendue

b) Efforts conscients
vers stimuli per@h. accrus incapacité de se détacher
de l’ancrage antérieur
Mouvements fréquents agitation, sursauts
flexibilité

Tableau 14. Facteurs physiques de l’attention discriminative


La spirale de la formation 21 1

Pendant le raisonnement, l’état de vigilance doit être maintenu pendant


que les diverses solutions sont examinées, et les stimuli extérieurs ignorés
jusqu’à la prise de décision. Le tableau 15 indique les facteurs qui intervien-
nent dans les tâches de raisonnement.

Raisonnement Efficace Inefficace

- musculature (le penseur de tendue, corps ra- relâchée


Rodin) massé
- respiration . . . . . . . . . . . . . . . . peu profonde lente, régulière
- rythme cardiaque.. . . . . . . . . . rapide tension artér
basse

Tableau 15. Facteurx phYsQues de l’attention pendant des tâches de raisonnement

Observer l’apprenant
L‘observation de l’apprenant en difficulté, dont les réactions physiques
sont à l’inverse de ce qu’elles devraient être, peut s’établir autour des éléments
proposés dans la grille du tableau 16.
Ce tableau propose au formateur une grille d’observation des différents
paramètres qui peuvent servir de repère pour aider l’apprenant à trouver
l’adéquation ou l’équilibre entre sa posture physique et ses mécanismes
d’apprentissage. I1 est tenu compte des différents facteurs : relationnel,
temporel (moment et durée), spatial, stade de l’itinéraire...
212 Construire aujourd’hui avec hier et demain

1. Situation de l’apprenant dans la salle de classe


- Près/loin de la source de lumière (naturelle)?
- Près/loin de la porte (entrée et sortie de l’espace clos)?
- Près/loin de l’enseignant (source d’autorité, de savoir) ?
Placer I’a,vprenant sur ce schéma, dans son espace pédagogique

2. Attitude de l’apprenant
Positive (+) ou négative (-) par rapport à l’activité
+ activité acceptée (-) activité refusée
a) Avantl‘exercice ................................................
b ) Pendant l’exercice ..............................................
c) Après l’exercice ................................................
Noter :
1. L a position (+ -) sera traduite par des mots comme :
(( J e pourrais si .je voulais, mais ça ne m’intéresse pas. D

(( C’est nul ... », etc.

2. L a position ( - +) :
( ( J e ne suis pas capable, mais ça m’intéresse. ))
C’est trop diffiicile pour moi », etc.
3. L a position (+ +) :
( ( J e vais essayer, ça m’intéresse. ))
a J’y arriverai, ça vaut la peine ... », etc.
4. L a position (--) ;
((je ne suis pas capable et ça ne vaut pas la peine. ))
H J’ai une très mauvaise mémoire. n
a On m’a toujours dit que j’avais un mauvais accent ... », etc.

3. Posture physique
discrimination raisonnement
a) Musculature
Tendue ..........................................................
Relâchée ........................................................
b) Respiration
Rapide ..........................................................
Lente ...........................................................
Profonde ........................................................
Peu profonde ....................................................
Régulière ........................................................
Irrégulière .......................................................
Tableau 16. Grille d’observation d’un apprenant
La spirale de la formation 213

3. CONSTRUIRE UNE SÉQUENCE D’ENSEIGNEMENT COHÉ-


RENTE AVEC LA DÉMARCHE NEUROPÉDAGOGIQUE

+ +
Un apprenant un enseignant = 2 hémisphères gauches 2 hémisphères
+
droits 4 lobes frontaux 4-2 cerveaux limbiques f 2 cerveaux reptiliens...
Cela semble une évidence et pourtant ... tous les problèmes de commu-
nicaiion et d’interrelations sont contenus dans cette équation !
Voici deux cas de figure (schématisés, bien sûr).
1) L‘enseignant donne l’information par écrit uniquement : il s’adresse
essentiellement à 1’H.G. de l’apprenant. La tâche à accomplir fait appel à
l’imagination, au dessin : l’apprenant aura à réaliser des transformations,
transferts, conversions d’information entre l’hémisphère gauche et l’hémi-
sphère droit.
2) L‘enseignant donne l’information sous une forme à la fois verbale et
imagée (texte, dessin, schéma, métaphore, etc.). La tâche qu’il demande est
la rédaction d’un texte. L‘apprenant sera évalué sur la performance finale
de son H.G., mais non sur la démarche qui lui aura été demandée et qui,
pourtant, aura exigé une coordination des deux hémisphères.
I1 existe de nombreux autres exemples de problèmes posés par les
relations entre la tâche accomplir et l’information donnée au départ.
L‘enseignant complique (involontairement) le trajet de l’apprenant s’il ne
tient pas compte de la nature des stimuli qu’il donne et de leurs relations
avec la tâche à accomplir. Son rôle est d’entraîner l’apprenant à gérer
différentes transformations et stratégies.
Plusieurs situations peuvent se présenter, selon que l’enseignant s’adresse
oralement, par écrit, par gestes (?), ou en combinant ces diverses sources.
La situation la plus complète est représentée par la figure 14 :

Figure 14. Une interpellation totale de la gestion cérébrale

Dans cette situation, l’enseignant demande aux deux hémisphères de


recevoir et de produire l’information qui sera présentée sous forme de textes,
images, graphiques, symboles, enregistrements sonores, bruitages, rythmes,
chansons, mélodies, gestes, mimiques, simulations, manipulations, expéri-
214 Construire aujourd’hui avec hier et demain
mentations, etc. simultanément, ou consécutivement, ou en évocation, ou en
combinaison, etc.
D’autres schkmas comme celui de la figure 15 soulignent l’importance
de présenter l’information par différents canaux pour faciliter une prise
optimale de l’infiormation dans le groupe :

(1) (2) (3)


A K A K

V V V

(1) Seul le canai auditif est utilisé.


(2) Les canaux auditif et visuel sont utilisés (beaucoup de visuel, un peu
d’auditif).
(3) O n a privilégié le canal kinesthésique et fait appel (un peu) a la visualisation
et à l’audition.

Figure 15. Les canaux d’accès à l’information. Trois situations

Ces schémas, traduits en termes pédagogiques, posent la question de


savoir quelles situations d’apprentissage permettent une utilisation maximale
des différentes ressources perceptives.
Dans la forrnation en neuropédagogie, une place importante doit être
laissée à une recherche en commun - interdisciplinaire - sur le thème des
différentes sources d’information. Certaines situations apparaîtront artifi-
cielles, car elles ne correspondent pas à un objectif d’apprentissage.
La construction d’une séquence d’enseignement se fera en suivant les
étapes suivantes :
- Conscientisaition.

~ Prise d’inforimation.
- Traitement de l’information.

- Production.

Construire la conscientisation de l’apprenant

Dans chaque discipline, les questions à poser aux apprenants dès le début
de l’itinéraire sont :
1. <( Qu’est-ce, d’après vous, qu’un bon élève (en maths, en langue...) ?»
a) recherche individuelle ( 3 minutes) : verbale (écrite) ou non (dessin,
graphique...)
b) échange oral avec le voisin (3 minutes)
c) accord sur une réponse commune (3 minutes)
La spirale de la formation 215
d) rapport en plénière sur la réponse au sous-groupe commune (15-
20 minutes). Discussion et décision.
2. Croyez-vous que tous les élèves peuvent apprendre... (la discipline en
question) ?
même démarche
3. Quelles sont, d’après vous, les causes d’erreur ?
même démarche
Le temps consacré à chaque phase doit être annoncé et scrupuleusement
respecté.
Lorsque ces trois questions ont été posées, le dialogue pédagogique est
amorcé : le quoi apprendre, le comment, le pourquoi sont abordés par les
apprenants eux-mêmes, souvent maladroitement mais les vraies réponses ne
peuvent naître que progressivement. L‘itinéraire de l’apprenant est une
longue marche, hasardeuse et jalonnée de changements en route.

Construire l’itinéraire de l’apprenant

Le schéma ci-dessous représente la démarche suivie par tout apprenant.

PROCESSUS

Prise d’information - Traitement - Utilisation

- Dans cet ordre, (c’est-à-dire en évaluant le résultat ?)

+ ou dans cet ordre-là,+


-

+ U

c’est-à-dire en évaluant également le processus, la démarche ?

Construire la prise d’information

La synthèse de toutes les données qui ont été analysées jusqu’ici, et en


particulier les relations entre les deux hémisphères au niveau de la prise
d’information, peut être représentée sous cette forme :
216 C’onstruireaujourd’hui avec hier et demain

Le contexte et Res éléments

quelle saisie quoi saisir


I re étape 1 ) le contexte
rapide (H.D.) ) la configuration
simultanée ) le cadre

2‘ étape 1 focalisante (H.G.)


discriminative ) qui ))
((

séquentielle ) «quoi»
linéaire ) (( où D
analytique ) ((quand))

3‘ étape :
gestions H.G. -
Va - et - vient entre les deux
H.D.
pour la prise du
(( comment )) et du

(( pourquoi O

Ce schéma souligne l’importance de placer l’apprenant devant la nécessité


de saisir le contexte avant d’aborder l’analyse des éléments, et de prévenir
ainsi la tendance, fréquente chez les apprenants français, de démarrer
l’analyse trop tôt.
Un questionnaire destiné à repérer ses propres habitudes perceptives
(périphériques ou focalisantes) peut prendre la forme suivante (10).

Que se passe-t-il quand... ?


- Tu lis un livreiune revue :
vois-tu le livre et le reste de la pièce?
vois-tu le livre seulement ?
comment lis-tu? : O par phrase
O plusieurs phrases à la fois?

O mot à mot?

- Tu écris:
vois-tu le papier, le crayon, la table, la pièce?
vois-tu le papier, le crayon, la table?
vois-tu seulement le papier et le crayon?
- Tu parles ou tu écoutes quelqu’un te parler :
vois-tu le visage, le corps de cette personne et ce qui vous entoure?
vois-tu le visage et le corps de cette personne?
vois-tu seulement le visage de cette personne?

(10) Adapté de Wiener H., 1977.


La spirale d e la formation 217

- Tu regardes la télévision :
vois-tu l’image sur l’écran, le récepteur T.V. et le reste de la pièce?
vois-tu l’image et le récepteur?
l’image seulement ?

La prise d‘information multisensorielle


La gamme des supports d’information est très riche (même si l’école est
pauvre). Mais à quoi sert cette richesse si l’information n’est pas prise p a r
l’apprenant ?
L‘observation de la saisie de l’information par l’apprenant, par exemple
en situation de lecture, fait partie du savoir-faire pédagogique.
La grille ci-dessous facilitera le diagnostic :

Situation Réaction de l’enfant


(il prend) (il résiste)
(+I (3
Visuelle:
a. Un texte ......................................................
b. Des chiffres ...................................................
c. Une image fixe.. ...............................................
d. Images mobiles ................................................
e. Un schéma ....................................................
f. Autre .........................................................
g. Combinaison d’éléments (lesquels ?) ...............................
Auditive:
a. Explication orale, seule. .........................................
b. Musique, rythmes ..............................................
c. Bruitages. .....................................................
d. Autre ........................................................
e. Combinaison de plusieurs sources .................................
(lesquelles ?)
Visuelle f Auditive : quelle combinaison ?
................................................................
Kinesthésique : (+I (-1
a. Manipulation d’objets. ..........................................
b. Manipulation de quantités .......................................
c. Contact avec un objet (toucher). ..................................
d. Découverte par le corps .........................................
e. Autre ........................................................
f. Combinaison (laquelle ?) .........................................

- Quel apprentissage multisensoriel ((réussit>> à cet apprenant ? (dater


1’0 bservat ion).

Tableau 17. Observation de la saisie de l’information


218 Construire aujourd’hui avec hier et demain
@ Construire le traitement de l’information

Cette phase est souvent confondue avec celle de la compréhension et


réduite à une explicitation verbale (écrite ou orale). Elle est plus rarement
non verbale : picturale (images ou schémas) ;auditive (musique ou bruitages).
Une combinaison des différents types d’explicitation (multisensorielle, et
multi-média) est un moyen plus sûr de s’assurer que l’information sera
traitée. L‘explicitation devrait intervenir après une phase d’évocation men-
tale. En effet si, dans le système éducatif occidental, l’enseignant est souvent
maître de la source et de l’activité finale, l’apprenant est le maître (souvent
inconscient) de sa gestion: un texte entendu peut déclencher des images
visuelles chez l’apprenant A, ou déclencher l’écho d’autres paroles dont se
souviendra l’apprenant B, ou encore une sensation ou un sentiment chez
l’apprenant C, une pensée abstraite chez l’apprenant D, etc.
Pendant la phase de traitement de l’information, il existe différentes
possibilités de croisement entre les modalités sensorielles :

externes pri:se d’information visuelle (V“),


auditive (Ae)
kinesthésique (Ke),
internes images mentales visuelles (Vi),
auditives (Ai)
kinesthésiques (Ki).

On peut se trouver dans la situation suivante :


- une information auditive externe (Ae) évoque chez l’apprenant, un
souvenir visuel (Vi) ou un souvenir auditif (Ai) ou un sentiment (Ki)...
Cette information doit servir à rédiger un texte (Ke +
Ve). Les cas
suivants peuvent se présenter :

Ae -- --
par exemple, à partir d’une source sonore :
Vi Ke i- Ve (une image Visuelle a été évoquée)

Ae - -
Ae A i Ke -- Ve (une image Auditive a été évoquée)
Ki Ke + Ve (un sentiment - Kinesthésique a été déclenché)
~

Lequel de ces parcours sera le plus opérationnel ?


Quel apprenant réussira le mieux ? :probablement, celui dont le parcours
est resté dans la même modalité sensorielle. L‘apprenant qui se sera servi
de l’image auditive interne (Ai) aura prolongé le modèle d’une durée
suffisante pour s‘y référer pour accomplir la tâche demandée.
Les croisemervltsdes modalités expliquent, en effet, bien des difficultés
et blocages, des surdités, des aveuglements, des situations de non-commu-
nication: l’inforrnation a été donnée, mais elle a été transformée dans un
autre canal. Pour la récupérer en vue d’une activité appartenant à une autre
modalité, un entiraînement est nécessaire. Ceux qui réussissent se sont déjà
familiarisés avec cet entraînement.
Selon la tâche à accomplir, le parcours sera plus ou moins facile. Les
La spirale de la formation 219

différents parcours de l’information : voilà la réalité quotidienne, non


seulement dans la classe, mais dans la vie courante. I1 est donc essentiel que
l’enseignant qui apporte une information en vue de faire accomplir une tâche,
soit conscient que chez certains apprenants, l’itinéraire est plus difficile que
pour d’autres.
Le tableau 18 donne les éléments qui sont à prendre en compte dans
l’élaboration d’une séquence d’enseignement, selon que la source est orale
ou écrite, verbale ou non verbale, selon que l’activité est une tâche de
production ou de reproduction.

La source La tâche à accomplir


Reproduire Transformer

I. a. verbale -b 2 a) réciter -+ 3 a) raconter


ex : écouter

I. b. non verbale 2 b) reproduire -+ 3 b) interpréter


ex : situation la situation la situation
bruitée bruitée bruitée

püËEËl
II. a. verbale -b 4 a) copier le texte -...-.+ 5 a) rédiger
ex : texte écrit composer
résumer

II. b. non verbale 4 b) reproduire -b 5 b) adapter


e x : image le dessin transformer
l’image

Tableau 18. Parcours pluriels

Certains des parcours ci-dessus sont couramment demandés aux appre-


nants :
--
Ia 2a (on écoute un texte et on le récite)
IIa 3a (on lit un texte et on le raconte)

-Certains ne sont jamais ou rarement pratiqués :


IIb 2b : le bruitage d’un tableau ou d’une image.
etc.
Un travail de recherche en sous-groupe, pendant la formation, consistera
à discerner les différents types de parcours possibles pour parvenir plus
sûrement a un objectif donné, sans perdre de vue, une fois encore, que tout
220 Construire aujourd’hui avec hier et demain

l’intérêt de travailler à partir des gestions mentales est de multiplier les


occasions de développer celles qui restent faibles.
Aider le formateur à construire la phase de traitement de l’information
à partir de la réalité du groupe, c’est l’éclairer sur le moyen d’observer et
d’évaluer sa propre démarche.
Exemples de questionnaire à construire par le formateur :

Auto-questionnatirede l‘enseignant sur sa démarche dans une séquence


d’enseignement

A. 1. Quelle source d’information ai-je apportée ?


-- Visuelle ? - Auditive ? - Kinesthésique ?

2. A quel moment de la séquence?


3. Avec quel objectif?
B. 1. Comment j’aide les élèves à observer ?
2. Comment j’aide les élèves à chercher ce qu’il faut observer ?
3. Comment j’aide les élèves à interpréter ce qu’ils voient, entendent ?
Quels indices, quels repères je leur donne.
4. Comment j’aide les élèves à passer du savoir au savoir-faire ?
C. Est-ce que j’évalue régulièrement :
1. les capacités d’observation/ d’écoute des élèves pour déterminer ceux
qui ont des difficultés ? Comment ?
2. les démarches qu’ils suivent/ évitent ?
3. le résultat en relation avec les deux phases qui précèdent
Les auto-réponses à cet auto-questionnaire de l’enseignant ne sont pas,
bien évidemment, destinées à une censure quelconque (même une auto-
censure !). Elles devraient être des repères de ré-orientation ou de confirma-
tion d’une démarche pédagogique.

Questionnaire destiné à l’élève sur SA/SES stratégies :avant, pendani


ou après un exeficice (à adapter selon l’âge)
Objectif: rendre l’élève conscient de sa démarche préférée et de celle(s)
qu’il évite.
1. Comment as-tu fait (fais-tu ? feras-tu ?) pour (résoudre un problème ? faire
cet exercice ?)

1.1. Tu crées des images dans ta tête ?


1.2. Tu entends dans ta tête un mot, une phrase ? ta voix ? la tienne ?
celle de. ?
,.

1.3. Tu dessines?
1.4. Tu écris ?
1.5. Tu te l’expliques à toi-même ?
2. As-tu utilisé (utilises-tu ; vas-tu utiliser ?) une seule démarche, plusieurs ?
3. Quelle démarche te fait réussir?
4. Quelle démarche te bloque?
5. Que fais-tu quand une démarche n’aboutit pas?
La spirale de la formation 22 I

5.1. Tu t’arrêtes ?
5.2. Tu recommences ?
5.3. Tu en cherches une autre?
5.4. Tu en cherches plusieurs autres?
6. Quand (ou si) tu évites une démarche,
6.1. Tu penses que tu n’en as pas besoin?
6.2. Tu n’en es pas sûr?
6.3. Tu as d’autres raisons?
7. Qu’est-ce qui te donne confiance?
8. Qu’est-ce que tu réussis?
8.1. Peux-tu dessiner quelque chose qui ressemble à ce que tu fais
quand tu réussis?
8.2. Peux-tu l’expliquer avec des mots?
8.3. Peux-tu l’expliquer avec une comparaison (un objet, un
événement, une situation, un animal, une plante ... ) ?
9. Qu’est-ce que tu trouves difficile?
9.1. Peux-tu dessiner ce qui ressemble à ce qui te semble difficile ?
9.2. Peux-tu l’expliquer avec des mots ?
9.3. Peux-tu le comparer à un objet, etc. ?
IO. Quand tu cherches une solution, comment fais-tu?
IO. 1. Un pas, puis un pas,... vers l’avant ?
10.2. Tu devines la solution et tu cherches ensuite?
Ce questionnaire destiné à l’élève fait partie intégrante de la démarche
pédagogique.
I1 sera sans effet s’il ne déclenche pas un dialogue entre l’enseignant et
l’élève sur les autres démarches que la sienne.

Pour construire les actes de lecture


I1 faut préciser, tout d’abord, que l’interface du cerveau et du code écrit
diffère selon la structure de représentation du système d’écriture : idéogra-
phique ou syllabique/ alphabétique.
L‘écriture n’est pas un support neutre. Elle établit un rapport entre le
corps (physique et social) et le langage. Elle a eu - et aura encore - un
rôle très important dans la régulation des structures cognitives et sociales.
L‘écriture n’est pas un acte naturel : c’est l’acte d’une civilisation.
De plus, l’acte de lecture est multiple. I1 doit se mettre au pluriel : l’acte
sémantique (accès au sens) est accompagné d’un acte grapho-phonologique
(accès au signe écrit et à son corrélat sonore) et d’un acte syntactique (accès
à la structure et à la fonction).
Les préalables
- Faire comprendre le pour quoi du code écrit
Ici, plus que jamais, une période de prise de conscience (((T moins 1 »)
est nécessaire et doit être vécue avec les candidats à la lecture : surtout avec
ceux qui se heurtent à cette invention millénaire des hommes qui les ont
précédés. Ceux-là ont besoin qu’on se penche avec eux sur le grand pour
222 Construire aujourd’hui avec hier et demain
quoi de l’écriture : la distance jusqu’à cette abstraction, qui leur semble si
éloignée de leur expérience sensorielle, leur paraîtra moins infranchissable
et moins redoutable.
Avec l’écriture, la communication devient brutalement et exclusivement
sous le contrôle dle la vision. Que les formateurs acceptent de comprendre
le désarroi de ceux qui possèdent d’autres moyens de communiquer (et dans
certaines cultures, depuis des millénaires, la communication a lieu sans
l’écriture). Le passage de la communication orale à la communication écrite
est une véritable rkvolution : la pensée est prolongée ;les messages deviennent
durables, matérialisés, moins individuels ; ils échappent à leur auteur ; ils
restent avec l’autre.
- Repérer les caractéristiques du système d ëcriture
Le système d’kcriture alphabétique des occidentaux est phonétique (1 1).
Le signe reprisente une unité abstraite qui ne signifie rien sans ce qui
la précède ou ce qui la suit. La structure de représentation est fondée sur
la séquence. Dans ce système, les signes doivent être décodés dans l’ordre
de leur apparition, sinon ils ne donnent aucune information. Les systèmes
phonétiques alphabétiques sont orientés de gauche à droite et se déroulent
horizontalement. L’approche est rigoureusement séquentielle et les difficultés
commencent pour certains...
Parce que la lecture d’une écriture alphabétique dépend de la contiguïté
immédiate des syllabes, le processus mental de décodage est analytique, ce
qui n’est pas le cas des écritures où l’image prédomine: hiéroglyphes,
idéogrammes. Le décodage des signes idéographiques est le résultat d’une
saisie optique globale de l’ensemble de l’aire visuo-spatiale.
Les recherches portant sur les mécanismes biophysiques sous-jacents au
veto-synaptique O , au niveau de la rétine (non-transmission du message),
ne permettent pas encore d’émettre l’hypothèse selon laquelle l’orientation
de l’écriture de gauche à droite gênerait le décodage chez certains lecteurs.
On connaît mairitenant la sensibilité de la rétine à l’orientation et au
mouvement mais la course entre signaux stimulateurs et inhibiteurs pour le
contrôle de l’information garde encore son secret.
La contiguïté provoque des phénomènes defusion. C’est le cas en français
du groupe graphique «-tion». A l’oral, la voyelle placée au centre de la
syllabe reçoit l’influence de la consonne qui la précède et de celle qui la suit,
et, réciproquement ; les consonnes (C) pré- et post vocaliques sont modifiées
par la nature de la voyelle (V).
fin
C&C
Ceci indique que l’apprentissage de la lecture doit tenir compte de la
réalité de la syllabe entière (12).
( I 1) Cf. D. de KERCKHOVE (1984).
(12) Cf. TROCMÉH. (1975). On s’aperçoit de l’influence de la voyelle sur la consonne
qui la précède en fakant un exercice très simple : on se prépare à dire ma, puis mi... mo ...
mu, etc. et on s’aperçoit que les lèvres dessinent la voyelle avant même que la syllabe ne
soit émise. La programmation de l’émission de la syllabe semble donc se faire selon un
processus de pro-action
La spirale de la formation 223
- 1’acte neurophjisiologigue de lecture
La danse des yeux qui lisent a été décrite par de nombreux auteurs et
il n’en sera question ici que pour rappeler que ce sont les saccades, les
fixations oculaires et la durée de ces fixations qui permettent de capter les
signaux.
Mais - pour quII y ait lecture - il reste encore à transmettre ces
signaux, les recevoir et les décoder.
La lecture est un acte total, qui fait intervenir bien d’autres mécanismes
que la prise d’information visuelle, en particulier la transmission de l’infor-
mation par le relais limbique (capable de tout bloquer si l’équilibre affectif
n’est pas atteint) et le décodage ou accès au sens qui fait intervenir tout le
cerveau et l’être lecteur tout entier.
L‘acte de lecture commence par une identification des signes graphiques
mais il requiert, au préalable, la mise en mémoire de ces signes, et la
combinaison de divers types de relations.

I I

Représentation t-- - - -
$I - -
Signe graphique
phonique

Le formateur doit être conscient que l’acte de lecture n’est pas un acte
mental homogène, et qu Il évolue durant l’apprentissage.

- tous les mots du langage n’ont pas le même statut et ne reçoivent pas
le même traitement.
Les théories divergent sur la nature exacte du décodage.
Dans une langue alphabétique, la lecture des lettres isolées et de certains
segments (dépourvus de sens, mais d’usage fréquent et régulier) se ferait par
médiation phonétique, par la relation :
-
graphème phonème.
La lecture des mots (noms, verbes, adjectifs) se ferait par médiation
lexicale, par la relation : -
graphie sens.
Mais les lexèmes syntaxiques (prépositions...) seraient traités par média-
-
tion phonétique, par la relation : signe son.
La lecture des phrases fait intervenir l’effet du contexte lexical (les mots
proches) et syntaxiques (la structure) dans lequel le lecteur puise des repères,
des indices, et prend une décision sémantique. Quand les indices sont
insuffisants pour que la reconnaissance soit possible, le lecteur devine. Mais
il est extrêmement difficile de savoir comment il s’y prend et dans quelle
mesure la médiation phonologique et la médiation sémantique l’ont guidé.
224 Construire aujourd’hui avec hier et demain
Les relations de l’une et de l’autre, leur inter-dépendance, des phénomènes
de rétro-action et de pro-action ont certainement lieu.
I1 semble impossible de considérer la lecture comme un acte qui puisse
être assuré par une seule médiation pour les raisons suivantes :
1) les mots it ’ont pas de statut unique ; pour le lecteur, leur fréquence
d’emploi, leur catégorie grammaticale et leur contenu sémantique ne font
qu’un avec leur forme
2) les mécanismes cérébraux sous-jacents à l’acte d’apprentissage de la
lecture d’une langue alphabétique (donc phonétique) ne peuvent appartenir
à un seul domaine ; dès qu’il y a eu apprentissage du code graphique par
médiation phonktique (reliant le signe - lettre ou syllabe - au son), il ne
peut y avoir de lecture purement sémantique (reliant le signe au sens).
L‘apprentissage de la lecture par les enfants sourds fait intervenir la
médiation kinest hésique (relation geste -signe). L‘apprentissage est plus
lent, plus laborieux, surtout lorsque les mots abstraits sont abordés.

Le parcours du lecteur
L‘itinéraire diu lecteur se prépare avec lui, surtout s’il redoute l’échec.
Quel que soit son âge, enfant ou adulte, un questionnement (un auto-
questionnaire pour commencer, si possible) peut ouvrir l’horizon.

- Lire.. . quoi ?
(faire dresser une liste de ce qu’on peut lire, puis comparer les listes dans
le groupe. Les différents domaines : histoire, politique, science-fiction brico-
lage... ; les différentes sources : livres, affiches, revues,... ; des chiffres, des
règles de jeux, des graphiques ... ; des gestes, des visages, des objets... ; des
images mentales, des (( souvenirs ))...)

- Lire... pour quoi ?


(faire recherclher les buts poursuivis : se former, s’informer, se distraire,
se faire plaisir,... communiquer (ou ne pas communiquer), rêver...)

- Lire... où et quand ?
(la figure 16 suggère quelques idées !)

- lire... comment ?
(à quelle vitesse ... ? à voix haute ...? mentalement ... ? en revenant en
arrière quelquefois... ? souvent ? jamais ? toujours ?... en sautant des pages ?
lisez-vous la fin du livre avant de commencer? la préface? la table des
matières ? les têtes de chapitres ?...)
La spirale de la formation 225

II I

Figure 16. Lire quoi ? Pourquoi ? où et quand ? Comment ? (D. Blondiaux)


226 Construire aujourd’hui avec hier et demain
Les facteurs intervenant dans la lecture

1, Au niveau du code linguistique, les variables observables et les facteurs


qui semblent jouer un rôlefacilitateur dans l’apprentissage sont, dans l’ordre :
- le caractère concret d’un mot (plus facile qu’un mot abstrait)
- la catégorie grammaticale: nom > adjectif > verbe > lexème
syntaxique (le plus résistant à la saisie)
- le potentiel d’imagerie du mot
- la fréquence d’occurrence du mot dans le lexique (du lecteur et de
la langue)
-la régularité de la correspondance signe son -
- la longueur du mot (et sa structure : préfixe, racine, suffixe)

- la valeur communicative...
2. Les perforimances du lecteur semblent dépendre de ses capacités a
établir des relations, repérer des séquences, mémoriser du sens et des formes,
anticiper.
En tenant compte de ces deux types de facteurs et des préalables énumérés
auparavant, il est possible de dessiner les lignes de force d’une pédagogie
de la lecture compatible avec le fonctionnement cérébral.

Apprendre à être un lecteur efficace

1) (Faire) comprendre pour quoi on lit (en général et dans le cas


particulier du lecteur).
2) (Faire) cornprendre la diversité des supports (livres, affiches, auto-
collants...) et faire choisir et apporter par l’apprenant des sources et supports
aussi variés que possible. Travailler systématiquement la recherche d’infor-
mation et la sélection d’un, deux ou plusieurs éléments d’information.
3) Alterner les moments de mise en commun et les explorations person-
nelles (on lit pour ...)
4) Alterner les moments de lecture proprement dite et les prises d’in-
formation portant sur les formes, les relations et les dqférents paramètres
entrant dans les actes de lectures.
-
5) Travailler systématiquement la relation objet représentation (repré-
sentation sonore ct graphique).
- Faire des sessions d’échauffement lexical (désigner

- Repérer toutes sortes de relations: forme

orientation - - - - nommer).
dimension position
séquence... (et ceci dans les domaines visuel, auditif et
-
kinesthésique).
6) Travailler :systématiquement les rythmes de lecture : lent, rapide,
ralentissement, accélération... ; travailler les pauses, les re-démarrages, les
suspensions de séance où il-faut-être-attentipour-reprendre au signal, etc.
7) Travailler les différentes façons de lire (comme un tel, comme papa,
(( comme le maître ... », (( comme si j’étais en colère D, (( comme si vous étiez

sourd ... n, (( comme si vous étiez fatigué, loin, sur le point de partir... D, etc.).
8) Travailler systématiquement l’intériorisation : faire évoquer (les yeux
fermés) ce qu’on a lu. Non seulement l’apprenant apprend à accueillir en
La spirale de la formation 227
lui ce qu’il a découvert, mais il construit son stock de langage et d’images
mentales (visuelles, auditives ou kinesthésiques). Elles contribueront à
construire sa mémoire... et son identité.

Améliorer, libérer

Ne pas savoir lire, lire mal, lire peu, ne jamais lire un livre ou un journal
dans nos sociétés occidentales, c’est asphyxier le cerveau. L’information
orale et gestuelle ne peuvent suffire à l’homme occidental pour appartenir
à son environnement. D’autre part, un face à face difficile, pénible ou nul
avec l’écriture n’est pas une tare: c’est un indice, un message, parfois un
cri.
L‘erreur que les enseignants et formateurs risquent de commettre est de
penser qu’il y a une stratégie valable pour tous les lecteurs. I1 est important
que la recherche d’une solution pédagogique aux difficultés de lecture tienne
compte de l’interaction des facteurs qui ont été énumérés et en particulier
de trois facteurs essentiels :
~ l’interface du système qu’est le lecteur (les interactions au centre des-
quelles il se trouve) et du système du code écrit : quelle attitude a le
lecteur ?
- ses stratégies (comment s’y prend-il?)

- la nature du matériau de lecture.

Alors seulement le formateur pourra proposer une ou des stratégies


permettant d’améliorer la lecture.
La gamme est extrêmement variée :
- évoquer des images à partir du texte

- grouper les mots par groupes de sens

- intercaler une feuille transparente de couleur verte ou bleue entre les yeux

et la page ;
-- utiliser la médiation d’une marionnette ;
- se servir de l’apport d’un fond musical, etc.

- jusqu’a des techniques plus élaborées visant à développer la gestion faible

ou manquante : traitement séquentiel, mise en relation, exploration des


éléments descriptifs (qui, quoi, quand, où)... des couches plus complexes
du langage et de la pensée (pourquoi et pour quoi, comment),
- et enfin, poser la question : «et moi, qu’est-ce que je pense ?»

L‘approche neurophysiologique de la dyslexie (et des cas d’alexie)


apporte aux pédagogues de précieuses informations sur les mécanismes de
lecture dans les cas de dysfonctionnement ou de dégradation (13). Elle fait
surtout apparaître l’existence de la dyslexie au pluriel: là encore, il nous
faut reconnaître et pratiquer le droit à la différence et à l’intelligence, c’est-
à-dire, le droit à développer les ressources de chacun en tenant compte de
ce qu’il est.

(13) Cf. Deleplanque B. (1986) (( Les Alexies, approche cognitiviste D, Thèse pour le
Diplôme de Docteur en Médecine, Université de Bordeaux II, UER Sciences Médicales.
CHAPITRE 10

CONSTRUIRE UN NOUVEAU REGARD

APPRENDRE ? VOUS AVEZ DIT, APPRENDRE ?


RECONCEPTUALISER

Ce chapitre est, comme les précédents, à la frontière de la recherche, de


la théorie et de la pratique.
A l’enseignant en formation (et quel enseignant n’est pas en permanence
en formation ?), il est suggéré maintenant de se constituer un catalogue-
répertoire d’exploration autour des principaux concepts sous-jacents à
l’apprentissage et impliqués dans l’interface enseignant-apprenant-informa-
tion.
Le but de ce répertoire est de permettre au formateur de préciser, pour
lui-même et pour ceux auxquels il s’adresse, les notions qui sont à la base
de leur inter-relation, quel que soit le cadre dans lequel l’enseignement a lieu.
Le répertoire est un moyen puissant de capter l’énergie reçue de lectures,
de rencontres, de réflexions, d’expériences, etc. C’est un manuel de ressources
pour qui veut creuser et approfondir certains paramètres d’une réalité qui
est la sienne. C’est un filet de sécurité pour les a trapézistes )) du monde de
l’éducation et de la communication, car les fiches s’ouvrent, se rejoignent,
se confirment, s’interrogent et interrogent ...
C’est aussi un réseau de connexions et de communication silencieux mais
efficace pour se sentir moins seul(e) dans la grande marche.
La neuropédagogie s’expérimente et se découvre sur le terrain. Elle naît
de la rencontre avec les problèmes réels mais, surtout, d’un regard constam-
ment renouvelé sur l’homme et ses ressources.
Elle est à la croisée de nombreux chemins. Aussi, la conception du
répertoire est essentiellement flexible.
Les suggestions, qui sont faites tant au niveau du choix des concepts que
de la trame des fiches, doivent être considérées comme de simples propo-
sitions dont le modèle ne saurait être imposé.
Les concepts d’une portée générale (((apprentissage », (( éducation n,
230 Construire aujourd’hui avec hier et demain

(( enseignement »...) et ceux qui ont été traités de façon spécifique (mémoire,

perception ...) ne sont pas insérés dans le répertoire.


Chaque fiche aborde un concept important et est classée par ordre
alphabétique.
Chaque concept sera étudié au point où l’on en est; c’est-à-dire, on
prendra un repère (la date par exemple) pour marquer le début de
l’exploration, donner sa propre définition du moment, afin d’être en mesure
- un jour, plus tard, le moment venu - d’évaluer le chemin parcouru et

les étapes franchies.


La fiche peui. ensuite recueillir l’exemple d’une expérience vécue, d’une
citation, d’une rkférence bibliographique ; elle peut s’enrichir d’autres réfé-
rences, d’autres citations relevées au cours de lectures, conférences, ou
contacts divers ; elle peut comporter des suggestions quant à des pratiques,
des solutions à apporter, etc.
Le répertoire sera très vite opérationnel si chaque indication est datée,
les références soigneusement notées et les connexions avec d’autres notions
indiquées clairement.
Exemple : (( norme ))
Ce que je croyais (... date) : notion qui peut être catastrophique, surtout
quand elle est utilisée dans le système éducatif.
... (autre date) : notion à déraciner chez l’apprenant, le formateur,
l’institution (et les parents !)
... (autre date): concept à aborder dès le premier jour avec un groupe
de formateurs ou d’apprenants. Par exemple, à partir d’un exercice de
perception auditive ou visuelle ; faire apparaître la diversité des perceptions
individuelles, et respecter la différence.
Auteurs :
R.C. LE WONT IN,^. ROSE & L.J. KAMIN L.J. : (( les normes sont le produit
artificiel des techniques statistiques : elles n’ont pas de réalité biologi-
que ». (Nous ne sommes pas programmés, 1984, Éd. de la découverte,
p. 114).
JACQUARDA. : Le système éducatif, au lieu d’être le domaine privilégié
où chacun prend conscience de ses possibilités (...) est organisé le plus
souvent de façon à inciter chacun à couper ses propres ailes. Au lieu
de favoriser le développement de personnalités contrastées, on s’efforce
de produire en série des individus conformes aux normes D. (Inventer
l’Homme, 1984, Éd. Complexe, p. 168).
...
Cf:aussi Différences Système
Les exemples tie fiches qui sont donnés ci-dessous ne constituent en rien ...
une norme ! Leur nombre n’est pas limité aux exemples choisis. Certains
concepts seront développés, d’autres simplement mentionnés pour mémoire.
Ce répertoire doit être considéré comme une amorce de recherche et de
dialogue avec les apprenants et/ ou avec des collègues, sans oublier l’insti-
tution dont la réflexion est trop souvent éloignée du terrain et du terreau
de l’apprentissage.
Construire un nouveau regard 23 1

,Une recherche qui ne débouche pas sur un échange est une recherche
morte.

Aptitude(s)

Ce que je crois = l’aptitude à apprendre est la seule aptitude vraiment


innée. Les autres se développent si les conditions optimales sont recherchées.
On ne peut pas ne pas apprendre ... Le dés-apprentissage ou le non-
apprentissage révèle surtout une inadéquation entre les ressources, les
motivations, les contextes et les méthodes.

Auteurs :
C.’G. AZÉMAR: Vers une étho-pédagogie, I.N.S.E.P. no4, 1979.
J.-P. CHANGEUXet A. DANCHIN:((Les aptitudes à apprendre se
transforment dès la naissance... Elles sont liées aux périodes critiques...
et aux stimulations de l’environnement ». (Apprendre par stabilisation
sélective de synapses en cours de développement in L‘Unité de l’Homme,
Paris, Seuil, 1974).
’ C A. JACQUARD : Inventer l’Homme, Éd. Complexe, 1984.
Paul KLEE: ((the sense of form and tone are man’s primordial heritage ))
(((le sens de la forme et de la tonalité sont l’héritage le plus important
que l’homme ait reçu)) (Pedagogical Sketchbook, intr. et trad. by S.
MOHOLY-NAGY, FABER& FABER,1977. - Édition française: Paul
KLEE: Théorie de l’Art Moderne, trad. P.-H. GONTHIER,Éditions
Denoël Gonthier, 1977).
’ C aussi intelligence

Assimilation Cf: Processus

<( Attention >>

Ce que je crois = état de vigilance, processus de focalisation. Persévérance


dans la perception, dans le traitement, dans la production (plusieurs types).
Auteurs :
CJ J. BEATTY: Activation and Attention in the human Brain in WITTROCK
M.C., ed. ï h e Human Brain, Prentice Hall, 1977.
Cf:M. FLAKet de COULON: Des enfants qui réussissent, Epi, 1985.
CJ S.A. HILLYARD : Electrophysiology of human selective attention TINS,
sept. 1985.
’ C H. LABORIT : Inhibition de l’Action, Masson, 1981, p. 21 et suiv.
Cf: P. ROLAND:Cortical regulation of selective attention in man, J. of
Neurophysiology, vol. 48, no 5, 1982.
CJ K. PRIBRAM : Languages of the brain, Brandon House, N.Y., 1977.
WILLIAMSL.V. : Deux cerveaux pour apprendre, Les Éditions d’Organi-
sation, 1986.
...
Cf:aussi Mémoire Motivation
232 Construire aujourd’hui avec hier et demain

Attitude(s)

Ce que je crois = l’importance de l’attitude dans l’acquisition des


connaissances esi: fondamentale. Les échecs sont dus à une attitude négative
plus qu’à une incapacité intellectuelle,
- Cf. les outils et techniques de l’analyse transactionnelle, de la program-
mation neurolinguistique, de la sémantique générale, du Yoga Nidra,
utiles pour désamorcer les pensées négatives, recadrer, réamorcer l’éner-
gie...

Autonomie

Ce que je crois = autonomie ne veut pas dire indépendance totale, mais


non-dépendance
- de très nombreuses expériences pédagogiques ont lieu pour dévelop-

per l’autonomie de l’apprenant (cf. Colloque A.D.M.E.S., Grenoble, mai


1986, sur (( Apprentissage autonome et apprentissage de l’autonomie dans
l’enseignement supérieur O).

Auteurs :
E. GUILLÉ: (( autonome ne veut pas dire sans relation ... )) (L’alchimie de la
Vie, 1983, Éd. du Rocher, p. 142).
CJ E. de BONO: Réfléchir mieux, Éd. d’organisation, 1985.
CJ A. KOESTLER : Janus, Calmann-Lévy, 1979, et la théorie de l’holisme.
C. SINGER: (( l’enfance est le temps de l’adhérence au monde... Si ce solide
soubassement vient à manquer, c’est le drame de la dépendance,
l’adhésion fatale aux systèmes préfabriqués )) (Les âges de la Vie, A.
MICHEL,1983, p. 81).
CJ E VARELA: Autonomie et Connaissance, Essai sur le vivant »,Seuil,
a x

1989.
Cf:aussi Système

Changement

Ce que je crois = accepter et vivre le changement comme une (re)source,


de vie, d’équilibre.
Auteurs :
Cf: A. de PERETTI: Du Changement Ù l’Inertie, Dunod, 1981.
A. KORZYBSKI:«nous n’avons pas besoin de nous aveugler avec le vieux
dogme qui veut que la nature humaine ne peut être changée, car nous
découvrons qu’elle peut être changée (si nous savons commmt). Nous
devons commencer à réaliser nos potentialités en tant qu’être humains,
et alors nous aborderons le futur avec quelque espoir D (Ce que j e crois,
Institute of G.enera1 Semantics, Lakeville, 1979, trad. S. SCHAEFFER et
J.-C. DENIS).
Cf:WATZLAWICI; P. : un changement de comportement mène à un chan-
Construire un nouveau regard 233

gement de perception, et un changement de regard (Changements,


WATZLAWICK, WEAKLAND & FISCH,Seuil, Points, 1979).
YI KING,Le Livre des transformations : l’incessante transformation de toute
chose, de toute situation (Librairie de Medicis, 1973).
...
cf: aussi Évolution

Communication

Ce que je crois = la communication est beaucoup plus que le simple


transfert d’information. Elle donne du sens à l’information. Elle implique
l’autre personne. Elle est échange. Elle tient compte du retour de l’infor-
mation et de la projection de ce qui est dit. Elle se construit à deux, à
plusieurs.

Auteurs :
Cf:R.L. BIRDWHISTELL et E. HALL: il n’y a pas d’opposition entre le corps
et le langage. Le courant communicationnel est un processus pluriel
permanent, un système dans lequel les interlocuteurs s’engagent.
<( On ne peut pas ne pas communiquer D... (LaNouvelle Communication,

Seuil, 1981).
C1. HAGÈGE: ((Paroles et langues ne peuvent constituer de domaines
autonomes D, (L’homme de paroles, Fayard, 1986, p. 228).
J. RUESCH& G. BATESON: (( La communication est la matrice dans laquelle
sont enchâssées toutes les activités humaines )) (Communication. The
Social Matrix of Psychiatry, N.Y., Norton, 1968, p. 13).
Cf: P. WATZLAWICK et al. Une logique de la Communication, Seuil, Points,
1972.
...
Cf: aussi Mots Système

Comprendre

Ce que je crois = comprendre, c’est donner du sens. Chercher et trouver


en soi un écho de l’autre (objet ou personne) et aussi de soi.

Auteurs
Cf: PIAGET = inventer ou reconstruire par réinvention (oùva l’éducation ?,
Gonthier, Paris, 1972).
Cf:L.V. WILLIAMS= comprendre, c’est parvenir à l’intention derrière le
message.
E GUILLÉ& C . HARDY: (( Ce sont ceux qui ont eu dans leurs études de
grandes difficultés à comprendre, qui se révèlent les plus aptes à expli-
quer aux étudiants les différentes étapes de la compréhension D (L’Alchi-
mie de la Vie, éd. du Rocher, 1983, p. 224).
...
’ C aussi Connaissance
234 Construire aujourd’hui avec hier et demain

Connaissance

+
Ce que je crois : co-naître = savoir savoir-faire + savoir-être. Connaître
c’est nourrir le cerveau, c’est ouvrir la porte.
Auteurs :
CJ SOCRATE : je sais que je ne sais rien.
CJ LAOTSEU: mieux vaut ne pas savoir que l’on sait.
CJ E CAPRA: le système abstrait de la pensée conceptuelle ne peut décrire
ni comprendre totalement la réalité du monde naturel, multidimension-
nel, dans sa simultanéité, sa non-successivité (Le Tao de la Physique,
Sand, Paris, 1985).
H. LABORIT(( nos raisons de vivre? c’est la connaissance )) (Entretien avec
J.-L. Servan-Shreiber, 8 sept. 1980, T.F.1.).
CJ A. MASLOW:we have a need to know and a fear of knowing (nous
avons besoin de connaître, mais nous en avons peur).
...
Contenu O Cf. @Processus

Contexte
Ce que je crois = Pas de message sans contexte. Pas de signification sans
contexte. Pas de sens sans contexte. Pas de contexte sans contexte.
Ce que je crois aussi = la pratique pédagogique ferait un bond en avant
si les formateurs concevaient leurs interventions dans une recherche, une
perspective et une analyse contextuelle : spatiale et temporelle.
Auteurs :
G. BATESON: ((chaque morceau de savoir n’a de sens et d’utilité que par
rapport aux autres morceaux )) (Vers une Écologie de l’Esprit, Seuil,
1977, p. 41).
R. BIRDWHISTELL : (( Une définition succincte du “contexte” est qu’il s’agit
d’un ici et maintenant ethnographique vérifié. Ce n’est pas un environ-
nement, ce n’est pas un milieu. C’est un lieu d’activité dans un temps
d’activité )) (Entretien avec R.B., in Lu Nouvelle Communication, Seuil,
1981).
CJ BUCKMINSTER FULLERR. : Synergetics, Macmillan, N.Y., 1975.
E. GUILLÉ& C . HARDY: a (la morphologie) de l’homme, ses émotions,
‘ ses diverses aptitudes, sa sensibilité, sa physiologie, ses modes de pen-

sée (...), vont donc être influencés à toutes sortes d’échelles par les
propriétés de ses constituants de base, les qualités de ses sphères éner-
gétiques à ce moment, mais aussi par tout ce qui a été subi par tou-
tes les sphères qui l’entourent et qui, à des moments décisifs de son
développement, ont contribué à structurer ses supports vibratoires
(L’Alchimie de la Vie, éd. du Rocher, 1983, p. 131).
...
CJ aussi Évoiuition
Construire un nouveau regard 235

Créativité

Ce que je crois = la créativité, c’est la voix et la voie de l’autonomie


et de l’équilibre. Pour créer, établir de nouvelles connexions. Trouver les
conditions, l’environnement, le moment, la durée qui facilitent la mise en
connexion. Laisser la place à l’inattendu.

Auteurs (parmi une myriade) :


CJ PLATON 1 La création, c’est l’acte de mettre en forme des idées nouvelles,
elle dépend du comment on approche la réalité. La passerelle entre l’idée
et la forme. Tient compte de l’inconnu et du particulier.
M. CLYNES: (( l’expression et la production des émotions sont une passerelle
biologique pour combler le fossé entre l’imaginaire et la réalité, entre
l’art et la vie )) (Senties, the touch ofemotions, Doubleday, N.Y., 1978,
p. 63).
CJ H. JAOUI:CréaPrut. Épi, Paris, 1979.
C. JUNG : un aperçu nouveau, inattendu, inspiration soudaine provenant de
l’inconscient, cf. l’expérience de Poincaré, Kékulé, Descartes, R.L.
Stevenson... (Essai d’exploration de l’inconscient, in L’Homme et ses
symboles, Laffont, 1983).
...

Culture

Ce que je crois = nous sommes culture, codage culturel, hérité, construit,


sécrété. La rencontre d’une autre culture, c’est La Rencontre. La voir,
l’entendre ; la regarder, l’écouter ; donner, recevoir.

Auteurs (parmi une myriade) :


E. HALL: (( En 1959, je proposai le terme infra-culture... pour les manifes-
tations comportementales qui ont précédé la culture mais que l’homme
a élaborées pour parvenir à la culture )) (Proxémique,dans La Nouvelle
Communication, Seuil, 1981, p. 196).
E. HALL: nous sommes modelés par l’Espace et le Temps (Les Rythmes
culturels dans La Danse de la Vie, Seuil, 1984, p. 95 et suiv.).
H. LABORIT:la culture est l’action des autres sur soi et notre action
sur les autres. Robinson sur son île avait emporté sa culture avec lui
(entretien avec J.-L. Servan-Schreiber, T.F.1., 8.09.8 1).

aussi Contexte

Différence(s)

Ce que je crois = les vraies différences entre les individus sont celles qui
existent entre lagestion de leur potentiel et leur potentiel réel... Nous sommes
riches de nos différences, (toutes : artistiques, génétiques, intellectuelles,
236 Construire aujourd’hui avec hier et demain
sexuelles), et de :notre unicité. Le droit à la différence s’enseigne, s’apprend,
se conquiert.
...
Auteurs :
A. JACQUARD : <:(il ne s’agit pas de nier les différences, mais de s’en enrichir,
de s’en enchanter, et pour cela de les regarder en face, d’en préciser la
nature et d’en comprendre l’origine )) (Préface de Moi et les Autres, Seuil,
Point Virgule, 1983 ;cf. aussi L’Éloge de la différence, Point, Seuil, 1978).
CJ C. LEWONTINet al. : la différence sexuelle commence dans la vie
embryonnaire (op. cité).
L.A. MACHADO:«la différence entre un homme primitif et un homme
civilisé n’est pas biologique mais éducative )) (Le droit a l’Intelligence,
p. 13, Écono.mica, 1982).
CJ A. THÉVENIN : Enseigner les différences, (Éd. Études vivantes, Montréal,
1980).
...
Difficultés

Ce que je crois = elles sont créées, secrétées par l’environnement socio-


culturel et les nombreux filtres entre le réel et nous: notre système
linguistique, écrit ou oral est un exemple d’occasion de confusions, additions,
élisions. Les causes des difficultés d’apprentissage sont à rechercher dans la
totalité de la situation : manque de motivation, sens des relations spatiales
faibles ou inexistant, image de soi négative, gestion du temps inexistante,
etc.

Auteurs :
CJ G. RACLE: La Véritable Dyslexie: un problème neurologique in
Communication et langages, no 67, 1986.
Cf.A.M. GALAIIURDA : La dyslexie et le développement du cerveau, La
Recherche, vol. 16, no 167, juin 1985.
C j LEWONTINR. et al. : Le dysfonctionnement cérébral léger, (op. cit.
p. 223-228).
CJ E VELLUTINO: La dyslexie, Pour la Science, no 115, mai 1987.
...

Dualité/Dualisme

Ce que je crois = il faut voir dans la dualité la complémentarité et non


l’opposition (distinction très difficile pour l’occident).

Auteurs :
BATESONG. : ((personne, après tout, n’a jamais vu ou expérimenté une
matière indistincte et sans forme )) (Vers une Écologie de l’Esprit, Seuil,
I, 1977, p. 21)l.
Construire un nouveau regard 237

Cf- la devise de Niels BOHR: (( Contraria sunt complementa ».


CJ E CAPRA: l’opposition visible/ invisible, sensible/ suprasensible, ration-
nel/ irrationnel est dépassée (op. cit.).
Gilbert RYLE: (( le dualisme cartésien est une “erreur de catégorie”. Imaginez
un visiteur à qui l’on montre des amphithéâtres, des laboratoires et des
bibliothèques,... et qui demande mais où est l’université ? L‘esprit,
comme l’université, est dans tout ce que l’on voit et dans le regard que
l’on porte sur soi-même. 11 est le lien entre connaître et être connu, le
sujet et l’objet, et toutes les relations que cela implique. Nous ne sommes
pas soit libres ou soumis au déterminisme : nous sommes l’un et l’autre
puisque l’esprit, à travers notre langage, est multiple )) (notre trad.,
cité par Hampden-Turner L’Atlas de notre cerveau, Les Éd. d’Orga-
nisation, 1990.
CJ Francisco VARELA: propose que dans les dualismes ou les oppositions :
(( contenu/processus U, (( corps/esprit D, (( tout/partie D, (( contexte-

/ texte »,(( territoire/ carte )), (( être/ devenir »,(( intuition/ logique )), etc. la
barre oblique soit lue : (( considérer les deux aspects de... )) (Not one, not
two in Coevolution Quaterly, Fall 1976, Sausalito, California).

Écriture

Ce que je crois = il est indispensable de replacer le problème de l’écriture


et de la langue dans leurs contextes, vertical et horizontal : 1. dans l’évolution
du code écrit et 2. par rapport au rôle que l’écriture et le langage ont
aujourd’hui dans le monde de l’information et de la communication.

Auteurs :
E. GUILLÉ& C. HARDY: les alphabets sont des symboles qui émettent
des ondes de forme. <( Ces énergies peuvent être reçues s’il y a le bon
récepteur et s’il est fonctionnel, transmis s’il y a le bon ordre topolo-
gique... )) (op. cit., p. 220).
Cf- D. de KERCKHOVE : Effets cognitfs de l’alphabet in Pour comprendre
1984, Corn. Can. pour l’U.N.E.S.C.O., Ottawa, 1984.
Cf:Paul KLEE: l’homme a su peindre et danser très longtemps avant qu’il
n’apprenne à écrire et construire (op. cit.).
D. LABBÉ : les rapports de l’homme et de l’écriture ont changé (( ... Et si
nous écrivions sur des tablettes de cire avec un stylo ? N dans L’écriture
et ses outils, Humanisme et entreprise, no 142, déc. 1983.

Entropie

Ce que je crois = notion indispensable pour comprendre toute mani-


festation d’organismes vivants : communication, évolution, changements. A
explorer dans chaque situation pour la comprendre dans sa totalité.

Auteurs :
E. GUILLÉ& C. HARDY: (( le support vibratoire ne peut évoluer que si
238 Construire aujourd’hui avec hier et demain
les énergies vibratoires qui l’animent diminuent au point de disparaî-
tre momentanément )) (op. cit. p. 238).
Cf:1. PRIGOGINE & I. STENGERS : La Nouvelle Alliunce, Gallimard, 1979.
Cf: aussi Évolution Équilibre

Environnement

Ce que je crois = l’environnement est à prendre en compte dans toute


analyse.
Ce que je crois (autre date) = notre paysage sonore et visuel change.
Il devient de: plus en plus artificiel, technologique, de moins en moins
naturel. Danger pour l’oreille, pour l’œil, pour le cerveau, pour l’équi-
libre.

Auteurs :
E. HALL: L‘homme et son environnement se façonnent réciproque-
ment )) (La Nouvelle Communication, Seuil, 1981, p. 197).
R. LEWONTIN et al. : ((Tout environnement est en constante modifica-
tion à cause de l’activité de tous les organismes qui s’y trouvent D (op.
cité, p. 30).
Cf: R. MURRAYSCHAFER: l’environnement sonore change qualitati-
vement et quantitativement (Le Paysage Sonore, Lattès, Paris, 1979).
...
Cf: aussi Changement, Contexte, Entropie, Système

Équilibre

Ce que je crois = l’équilibre est l’objectif «numéro un» de toute


formation, c0mm.e de tout individu. Ses synonymes (avec des nuances) sont :
cohérence, harmonie, homéostasie...
Ce que je crois aussi : l’équilibre est une notion dynamique qui se place
entre connaître et adhérer.

Auteurs :
J. PIAGET : l’équilibre est atteint quand l’adolescent comprend que la
fonction propre de la réflexion n’est pas de contredire mais de prévoir
et d’interprétler le monde de diverses manières ; ce qu’il faut désormais,
c’est le transformer )) (Six études de Psychologie, Gonthier, Paris, 1964).
I. PR~GOGINE & I. STENGERS : (( l’équilibre résulte d’une compétition entre
les facteurs énergétiques et entropiques )) (La Nouvelle Alliance, Galli-
mard, 1979, p. 141).
Cf:Hans SELYE: l’organisme réagit non pas au stimulus de l’environnement
mais de façon à garder l’équilibre. (Émission post mortem A.2, 28.10.85,
1.
Cf.N. TINBERGEN
: permettre la réalisation de (( chaînes d’action )) (Curious
Naturalists, Rasic Books, N.Y., 1958).
J.-D. VINCENT: (( l’état central est, par définition, fluctuant )) et la définition
Construire un nouveau regard 239

de cet (( état central fluctuant )) : (( c’est notre représentation du monde,


et la projection fusionnée de trois dimensions : la dimension corporelle,
données physico-chimiques du milieu interne ; la dimension extracorpo-
relle, à la fois espace sensoriel et espace de mouvement ; la dimension
temporelle, occupée par les traces accumulées au cours du développe-
ment de l’individu... )) (Biologie des Pussions, Seuil, 1986, p. 156).
...
Erreur

Ce que je crois = notion à réviser totalement par les éducateurs et les


parents. L‘erreur est un indice, un repère de la démarche suivie ou évitée.
I1 faut distinguer plusieurs causes ou types d’erreur : on ne voit pas l’objectif,
l’utilité de la tâche; on gère mal son temps; on ne voit pas les relations
entre les éléments ; on utilise une stratégie unique, etc., etc.

Auteurs :
G. BATESON: (( ...nous pouvons procéder à une mise en ordre des processus
d’apprentissage en fonction d’une classification hiérarchisée des types
d’erreurs qui sont à corriger au cours des divers processus d’apprentis-
sage )) (Vers une Écologie de l’Esprit, I, Seuil, 1977, p. 260).
D. DESCOMPS: (( l’erreur peut ne pas être considérée comme un produit
fini ou un aboutissement, mais comme une dynamique de production
de sens D, ((La dynamique de l’erreur D, Actes du Colloque, 1986, Le
Cerveau et ses Implications Pédagogiques et Sociales, G.E.R.I.P., Vil-
leneuve-sur-Lot.
...
CJ Performance Réussite

Évaluation

Ce que je crois = pour évaluer une performance, il faut plusieurs images


complémentaires, et l’inscrire dans la durée.

Auteurs :
A. BINET: (( il faut dénoncer le grossier pessimisme qui consiste à dire que
l’intelligence d’un individu est une grandeur fixe )) (Les idées modernes
sur les enfants, 1911).
E. de BONO:aucune idée n’est 100% vraie ou 100% fausse. L‘esprit très
intelligent semble préférer penser (( en réaction )) et non (( en projection ».
Se méfier du (( piège de l’intelligence )). (( L‘évaluation de l’intelligence (...)
ne m’intéresse pas spécialement. (...) Je m’intéresse davantage à la
conception d’outils de réflexion et de méthodes de formation qu’a
l’évaluation des capacités naturelles (...). Des gens très intelligents
peuvent se révéler plutôt mal doués pour réfléchir. )) (Réfléchir mieux,
Éd. d’organisation, 1985, pp. 15 et 16).
CJ E CAPRA: l’observation implique toujours l’observateur (op. cit., p. 144).
240 Construire aujourd’hui avec hier et demain

CJ Ph. MEIRIEU
: un objectif valable de l’évaluation : faire atteindre une
capacité (L’école mode d’emploi, E.S.F., 1985, p. 68).
A. SCHEFLEN : (( comment pouvons-nous dire que l’information a été
transmise et perçue ? Théoriquement, nous pouvons mesurer la quantité
d’information transmise en déterminant l’exécution idéale du pro-
gramme par évaluation des avertissements, des retards, et des défail-
lances )) (La Nouvelle Communication, Seuil, 1981, pp. 156-157).
cj:I. N. R.f? Recueil d’instruments et de Processus d’Évaluation Formative,
tomes I et II, juin 1980.
...
Cf: 0 Objectif Performance Intelligence

Évolution

Ce que je crois = s’il existe une erreur fondamentale, c’est pour le


formateur, le parent, l’apprenant. .. d’oublier, d’ignorer leur appartenance à
la lignée des êtres vivants...

Auteurs :
CJ T. BUZAN4% T. DIXON: The Evolving Brain (David & Charles,
Vancouver, 1978).
E. GUILLÉ & C. HARDY: (( De l’interaction des deux types de forces
opposées (gravitationnelle et électromagnétique d’origine cosmique), il
va résulter un équilibre dynamique, évolutif (. ..) qui est responsable
de la forme typique de chaque organe et chaque organisme. Ainsi sur
le plan physique, la présence de ces deux aspects : l’un qui introduit
de la répétition et l’autre qui introduit du changement, est le facteur
essentiel d’évolution D (op. cit., p. 192).
CJ A. JACQUARD : le don de l’évolution est la capacité à imaginer un projet.
Intervenir au-iourd’hui pour construire demain (op. cit.).
H. REEVES: (( Nous avons été engendrés dans l’explosion initiale, au cœur
des étoiles et Idans l’immensité des espaces intersidéraux )) (Patience dans
l’Azur, Seuil, 1981, p. 19).
Cf: P. RUSSEL : ï‘he awakening earth, our next evolutionary leap, Routledge
and Kegan Paul, 1982.

Habitude

Ce que je crois = se servir de l’habitude... tant qu’elle ne devient‘pas


une prison. Lui demander de gérer ce qui peut être rendu automatique sans
risque (si le mille-pattes se demande quelle patte il avance avant et après
la 97e... il restera cloué sur place).

Auteurs et sources :
CJ G. AZÉMAR:l’habitude ne se définit pas par l’acte extérieur mais par
Construire un nouveau regard 24 1
la subordination de l’acte à une nouvelle organisation (Vers une étho-
pédagogie, I.N.S.E.P., nO4, 1979).
Pour les changements d’habitudes: cf. les auteurs de l’École de Palo Alto
(G. BATESON,E. HALL,P. WATZLAWICK, etc.) et certaines techniques
de la Programmation NeuroLinguistique :
Cf.CAYROL& SAINT-PAUL, Derrière la magie, InterÉditions, Paris, 1984.
.’ R. BANDLER: trad. Un cerveau pour changer, InterÉdition, 1990.
C
...

Image de soi

Ce que je crois : pour avoir une image positive de soi et du monde, il


faut que les besoins fondamentaux soient satisfaits (affection, sécurité,
communication).
(Autre date) : un visage reflété sur la surface de l’eau n’est réfléchi que
si la surface est calme.
(Autre date) = l’image est positive si l’on a confiance en sa propre
perception.

Auteurs et sources :
G. BATESON& A.E. SCHEFLEN:«Les règles mêmes de la perception de
soi, les règles qui gouvernent la formation d’une image de soi, sont
modifiées par la façon dont les autres reçoivent nos messages. )) (La
Nouvelle Communication, Seuil, 1981, p. 134).
Les techniques d’Analyse Transactionnelle;
Cf. A. CARDON: Jeux pédagogiques et analyse transactionnelle, les Éditions
d’organisation, 198I.
’ C G. JAOUI: Le Triple Moi, Laffont, 1979.
CJ M. JAMES 8z D. JONGWARD : m e People Book, TransactionnelAnalysis
for students, Addison Wesley Publ. Company, 1975.
C.’ V. LENHARDT : L’Analyse transactionnelle, concepts et procédures...,
Retz, 1980.
Les techniques de la Programmation Neuro-Linguistique :
Cf: A. CAYROLet J. de SAINT-PAUL, op. cit.
Cf. R. DILTS: Applications of Neurolinguistic Programming, MetaPubli-
cations, 1983.
...
Inné, cf. Intelligence

Intelligence

-
Ce que je crois = revenir à l’étymologie : (( inter-legere )) : discerner
comprendre apprécier.
-
+ +
(Autre date) : intelligence = potentiel maîtrise des outils expérience.
La technique est imbriquée dans l’outil.
(Autre date) : notion essentiellement dynamique.
242 Construire aujourd’hui avec hier et demain

(Autre date) : combattre l’idée qu’on peut mesurer l’intelligence et la


chiffrer... ! Toute la situation doit être mise sous le projecteur de l’évaluation :
la durée, la source, l’objectif, le point de départ, les actants, le moment, le
lieu, la démarche, les ressources, le contrat, etc.
(Autre date) : mot à mettre au pluriel : des intelligences.

Auteurs: une myriade d’approches par les géants de la psychologie, de la


psycho-pédagogie, et des neurosciences.
CJ E. de BONO: Réfléchir mieux, Éd. d’organisation, 1985.
H. GARDNER: Frames of Mind, Paladin, Londres, 1985.
E. HALL: (( L’int’elligence a joué un rôle éminent dans la survie de plusieurs
espèces )) (Au-delà de la Culture, Seuil, 1979, p. 169).
A. JACQUARD : (( Les possibilités intellectuelles manifestées par l’individu
sont le résultat d’une grande aventure. Méfions-nous de mots tels que
les “dons”. Ils se vident de tout sens dès que l’on cherche à les analyser ))
(Le Monde, 28.12.82 ; cf. aussi Moi et les Autres et ses autres ouvrages).
M. JOUSSE : (( L‘intelligence n’est pas une géométrie “tailleuse de solides”
qui ne se sentirait à l’aise que parmi les pierres de taille. L‘intelligence
est vie qui se prend en conscience D (L’anthropologie du geste, Gallimard,
1974, p. 212).
Cf: J.-M. ROBERT: Comprendre notre cerveau, Seuil, coll. Sciences, 1982.

Intériorisation

Ce que je crois : l’occident a perdu la voie (la voix) de l’intériorisation.


I1 en paie le prix actuellement ... cruellement.

Auteurs et sources :
Cf: les techniques de méditation, relaxation, concentration, yoga.
Cf: Miguel ESTRELLA : être disponible pour recevoir le message.
Cf: P.R. ETÉVENON : LES aveugles élouis, A. Michel, Paris, 1984.
Cf: M. FLAKet J. de COULoN : Des enfants qui réussissent, É,pi, 1985.
SATYANANDA S. : Yoga Nidra, Satyanandashram, Paris, 1980.
...
Lecture

Ce que je crois: la lecture est un acte de communication. Les lecteurs


faibles considèrent sans doute que lire est réservé à une élite. Ils ne se sentent
pas concernés.
(Autre date) : les rapports entre le support et le code écrit changent. Les
écritures mécaniques n’établissent pas les mêmes relations entre la pensée
et le support : autres supports, autres rythmes, autres contenus, autres
valeurs ?
(Autre date) : apprendre (enseigner) à lire en deçà et au-delà du texte.
Chercher à comprendre ce qu’est l’acte de lecture autour des concepts de
rythme, relations, système...
Construire un nouveau regard 243
MotsIlangage
Ce que je crois: le mot a la force de l’étiquette: une fois que nous
pouvons nommer quelque chose, nous pensons pouvoir comprendre et nous
arrêtons là notre exploration.
Ce que je crois aussi (autre date) : le même mot a une réalité différente
selon qu’il est reçu, prononcé, lu, écrit. I1 existe quatre lexiques, comme il
existe quatre syntaxes, quatre sémantiques... Quand donc nous en aperce-
vrons-nous ?
Ce que je crois encore (autre date): la comparaison de la langue
maternelle avec des langues étrangères fait apparaître le véritable visage de
sa propre langue et l’esprit de sa propre culture.
exemple : les mots en chinois (cité par E Capra) : l’esprit chinois n’est pas
enclin à la pensée abstraite et a développé un langage dans lequel l’enchaî-
nement est déterminé par le contenu émotif. Le mot chinois classique est
un symbole sonore, évocateur d’images et d’émotions. Le locuteur cherche
à émouvoir et influencer plus qu’à démontrer, Le caractère écrit est un
modèle organique, (( une forme préservant la complexité des images et le
pouvoir suggestifdu mot D (op. cit., p. 106).
G. BATESON:((le langage ne met généralement l’accent que sur un seul
côté de l’interaction ... Les choses ne peuvent pénétrer dans le monde de la
communication et de la signification que par leur nom, leurs qualités et leurs
attributs (c’est-à-dire par des discours tenus sur leurs relations et leurs
interactions internes et externes) »,(La nature et la pensée, Seuil, 1984, p. 69).
Cf: E. DE BONO: Word Power, Pierrot Publ. Ltd, 1977.
A. KORZYBSKI : (( la plupart d’entre nous réagissent comme si nos expres-
sions verbales étaient le “ça”de l’événement H (Le Rôle du langage dans les
processus perceptuels, The International Non-Aristotelian Library. Publ.
Co., N.Y., Oct. 1965).
Cf:MENDELSOHN : la musique est plus précise que les mots.

C M. SAUCET: La sémantique Générale Aujourd’hui, Courrier du Livre,
Paris, 1987.
Cf:J.-P. SARTRE: Les Mots, Paris, 1964.
M. YOURCENAR:((Les mots traduisent l’opinion que le troupeau se fait
des choses n (L’ceuvre au noir, Gallimard, 1968, p. 285).

Objectif
Ce que je crois : l’objectif est inséparable de la source (nature, instruc-
tions), des conditions, des critères d’évaluation, du comportement. Faire
atteindre une disponibilité, une capacité est plus important que de faire
atteindre une performance.
Auteurs : très nombreux depuis B.S. Bloom (1969) :
Cf: R. MAGER: Comment définir les objectqs pédagogiques, Gauthier
Villars, 1971.
Cf: G. LANDSHEERE : Définir les objectgs de l’éducation, P.U.F., 1975.
244 Construire aujourd’hui avec hier et demain

CJ D. HAMELINE : Les objectgs pédagogiques en formation initiale et en


formation continue, E.S.F., 1979.
CJ Ph. MEIRIEU: L’école mode d’emploi, E.S.F., 1985.
...

Occident

Ce que je crois : la culture occidentale est sa propre victime. La vision


fragmentaire et mécaniste qu’a l’homme occidental du monde l’a mené très
loin dans la croissance technologique mais lui a fait perdre le contact avec
ses racines. I1 ne retrouvera l’équilibre que dans une prise de conscience et
la (re)découverte de son appartenance intégrale à un système.

Auteurs (parmi beaucoup d’autres)


Cf: F. CAPRA: (( Notre culture a.,. favorisé l’analyse au détriment de la
synthèse, le rationnel au détriment de la sagesse intuitive, la science au
détriment de la religion, la compétition au détriment de la préservation
conservatrice, etc. Ce développement à sens unique a désormais atteint un
niveau alarmant : une crise aux dimensions sociale, écologique, morale, et
spirituelle )) (op. cit., p. 12).
H. REEVES(interviewé par M. Cazenave le 24.04.85) : Ça a été le grand mal
de notre Occident que d’avoir développé cette idée d’une vérité que l’on
découvre, que l’on possède et que l’on impose aux autres (Ztinérances,
numéro 1, mai 1986, A. Michel, Paris ; cf. ses autres ouvrages, dont L’heure
de s’enivrer, Seuil, 1986).
La Science face aux confins de la Connaissance, Colloque International de
Venise, Éditions du Félin, Paris, 1987.
Sciences et Symboles, Colloque de Tsukuba, présenté par M. Cazenave,
Albin Michel/ France Culture, 1986.

Performance (tâche)

Ce que je crois: la performance commence avant même le premier


contact avec l’information, lorsque celle-ci est donnée en vue d’accomplir
une tâche. L‘attente de la performance est déjà performance. Le regard et
l’écoute sont déjà performance.
Ce que je crois aussi : les performances scolaires sont des prises de parole,
des prises de plume, des prises de sens (écoute et lecture), des prises de
décision.
Ce que je crois aussi : l’enseignant n’a pas le droit d’ignorer la complexité
des mécanismes impliqués dans la performance, même si celle-ci lui semble
simple (ce qui est une erreur de sa part).
Cf: Objectif.
Construire un nouveau regard 245

Processus
Ce que je crois : le processus est sans doute la notion la plus essentielle
à (re?)découvrir par l’enseignant. Un processus est tout à la fois énergie,
évolution, progression, temps et espace.
Les auteurs :
L‘École de Palo Alto reprend, d’une part, certains aspects de la théorie de
Freud (seuls certains aspects du processus de la communication humaine
peuvent accéder à la conscience ; l’élaboration des messages s’effectue par
le truchement de processus primaires). Elle analyse, d’autre part, de nouvelles
approches (digitales et analogiques) ainsi que l’aspect interactionnel ou
interpersonnel.
G. BATESONet SCHEFLEN:((la plupart des processus mentaux (y
compris, en particulier, le processus de perception lui-même) ne peuvent être
contrôlés par la conscience. L‘inconscience est une nécessité de l’économie
des organisations hiérarchiques )) (La Nouvelle Communication, Seuil, 198I,
p. 121-2).
Cf: A. WILDEN: System and Structure Tavistock Publ., 1980.
Réel & réalitéAmaginaire
Ce que je crois : le cylindre éclairé d’en haut projette un cercle d’ombre ;
éclairé latéralement, l’ombre a la forme d’un rectangle. Deux représentations
pour le même objet : où est la réalité ? (Cf. Hampden-Turner, 1981, p. 9).
Ce que je crois encore: toute idée générale et unique sur la réalité est
vaine.
Auteurs :
C
’ HAMPDEN-TURNER C . : L’Atlas de notre cerveau, les Éd. d’Organi-
sation, 1990.
M. CLYNES: (( Without Time, matter cannot exist )) (Sentics, Anchor press,
Doubleday, 1978, p. 199).
Cf: G. EPSTEIN(Psychologue à 1’Institute for the advancement of Health,
N.Y.) : l’imaginaire est concret, directement appréhendé par nos sens tournés
vers l’intérieur par un acte volontaire. L‘imaginaire n’est pas soumis aux
mêmes lois que la réalité physique. La réalité physique se déroule dans le
temps. L‘image n’a ni passé ni futur, elle n’est pas liée au temps. (( Pas de
réalité physique )) signifie (( pas de temporalité ». Nous n’avons pas de rêves,
ou d’images, nous les vivons ou les habitons.
C . E. MORIN: il n’y a pas de frontière entre le réel et l’imaginaire.
C. SINGER : ((la réalité est confondue avec l’échafaudage compliqué des
impératifs économiques et de la législation sociale )) (Les ages de la Vie, A.
Michel, 1983, p. 47).
Cf:P. WATZLAWICK : La réalité de la réalité. Confusion, Désinformation,
Communication, Seuil, 1978.
’ C aussi le mythe de la Caverne dans la République de Platon, œuvres
complètes, trad. L. Robin, 2 vol. La Pléiade, Gallimard, (1940-2).
...
246 Construire aujourd’hui avec hier et demain

Réussite/échec

Que répondre à la question posée par un enfant de huit ans : (( réussir?


réussir quoi ? ))
... si ce n’est : (( ... réussir à te construire D ?
Ce que je crois: la réussite n’est sûrement pas ce que l’on croit qu’elle
est pour l’autre. Son échec non plus. La réussite à l’école n’est pas synonyme
de réussite de G !soi D. On sort de l’école un jour, mais on ne s’habite pas
pour autant...
Ce que je crois aussi : l’échec n’a pas plus de réalité en soi que l’obscurité,
qui est absence de lumière, mais qui n’a pas de réalité physique.

Auteurs :
Cf:R. BANDLEF:: croire en l’incapacité d’apprendre, c’est se baser sur des
théories anciennes et sur la pathologie du cerveau. Maintenant, on sait que
le cerveau est beiiucoup plus flexible qu’on ne le pensait. I1 s’adapte remar-
quablement trad. Un cerveau pour changer, InterÉdition, 1990.
Cf:M. FLAKet J. DE COULON : Des enfants qui réussissent, Épi, 1985.
Cf:A. DE PERBITI: Taille de la classe, résultats et vie scolaire in École et
Socialisme, no 29, déc. 1983.
Cf:M. CHERKAOUI : Les paradoxes de la réussite scolaire, P.U.F., 1979.
Cf:R. ROSENTHAL& L. JACOBSON: Pygmalion Ù l’École, Casterman,
Paris, 1973.
Cf:L.V. WILLIAMS: Deux cerveaux pour apprendre, Les Éd. d’organisa-
tion, 1986.
...
Cf:aussi performance

Système

Ce que je crois: tout est système. La vie est synonyme d’échange. La


mort est synonyme de non-échange. Appliquer en éducation des principes
de la cybernétique, c’est orienter les actions, utiliser le feedback, ouvrir.

Auteurs
E. MARC et D. PICARD: « u n système est un ensemble d’éléments en
interaction, tels qu’une modification quelconque de l’un d’eux entraîne une
modification de tous les autres )) (L’école de Palo Alto Retz, 1984, p. 21).
E. GUILLÉ & C . HARDY: (< l’homme, toute comme le cosmos, est sou-
mis à un système complexe de champs électromagnétiques susceptibles d’inte-
ragir entre eux H (p. 129). << Un système est défini par la nature et le nombre
de ses composants et par toutes les interactions susceptibles d’exister à un
moment donné entre les composants de ce système D (op. cit., p. 175).
A. KORZYBSKI : «je fus amené à fonder mon analyse sur la conception
bien plus complexe de l’organisme-comme-un-tout-dans-un-environnement n
Construire un nouveau regard 247

(Ce que je crois, Int. of Gen. Semantics, 1979, trad. S. Schaefer & J.C.
Denis).
R. LEWONTIN et al. ((un organisme vivant (humain par exemple) est un
assemblage de particules subatomiques, un assemblage d’atomes, un assem-
blage de molécules, un assemblage de tissus et d’organes. I1 n’est pas d’abord
un ensemble d’atomes, ensuite un ensemble de molécules, puis un ensemble
de cellules : il est tout cela à la fois )) (op. cit., p. 347).
Cf:I. PRIGOGINE, La thermodynamique de la vie in La Recherche, vol. 3,
24juin 1972.
J. DE ROSNAY: ((la cellule d’un organisme vivant peut être considérée
comme un système ; elle constitue une totalité qui obéit à des règles précises
(...). La cellule apparaît comme un système auto-régulé, transformateur
d’énergie, capable à tout moment d’équilibrer sa production en fonction de
sa consommation interne et de l’énergie dont elle dispose )) (Le macroscope,
Seuil 1975).
C’ L. VON BERTALANFFY : un système ouvert est régi par les principes
de totalité, rétroaction, homéostasie, équifinalité (= le système parvient à
un état temporellement autonome, indépendant des conditions initiales et
déterminé uniquement par les paramètres du système) (Théorie Générale des
systèmes, Dunod, 1973).
...

Temps

Ce que je crois: si la conception occidentale du temps ne change pas,


s’il reste celui de l’horloge, ... le monde ne changera pas, l’Occident moins
que tout autre.
Ce que je crois aussi : la durée est une des composantes fondamentales
de la cellule (entretien avec J.D. Vincent, juin 1986).
Auteurs :
F. CAPRA: (( selon la théorie de la relativité, toutes les mesures de l’espace
et du temps sont relatives (...) Puisque l’espace et le temps sont désormais
réduits au rôle subjectif d’éléments du langage qu’utillise un observateur
particulier pour décrire les phénomènes naturels, chaque observateur décrira
les phénomènes d’une façon différente. )) (Op. cit., p. 171).
D. HUEBNER : (( ni le passé ni le futur n’existent en dehors de l’existence
de l’être temporel qu’est l’homme. Cela signifie que la vie humaine ne se
fixe jamais mais qu’elle naît constamment de la rencontre du passé et de
l’avenir qui forment l’horizon d’un présent )) (notre trad.- Curriculum as
concern for Man S temporality in Curriculum Theorizing : the reconceptua-
lists, ed. W. Pinar, McCutchan Pubrs, 1975).
R. MURRAY-SCHAFER: ((le temps est dans le monde chrétien en fuite
perpétuelle et les cloches des horloges le ponctuent D (Le Paysage Sonore,
J.C. Lattès, 1979).
I. PRIGOGINE : (( le temps dynamique constitue non seulement une mesure
du devenir, mais le devenir dynamique lui-même )) (op. cit., p. 70).
248 Construire aujourd’hui avec hier et demain
M. TOURNIER *K Le temps est l’une des dimensions essentielles de cette
machine vertigin.euse aux milliards de rouages enchevêtrés qui est aussi
mémoire. (...) Oui, le cerveau est mémoire, et donc temps. I1 a besoin de
temps pour se faire, et le temps le ronge. )) (Des clés el des serrures, Ed.
du Chêne, 1983, p. 52.
Cf: P. LAVIOLETTE(auteur d’une nouvelle théorie organique (( subquan-
tique )) de l’espace) suggère que le Temps et l’Espace ont précédé la formation
de la Matière, aru lieu d’en être issus. (International Journal of General
Systems, special issue, vol. 11, n. 4, jan. 1979).
J.D. VINCENT la dimension temporelle nous amène au rôle de l’appren-
tissage dans l’acquisition du stock individuel d’objets de plaisir. Le plaisir
et l’aversion s’aplprennent... )) (Biologie des Passions, Seuil, 1986, p. 196).

A LA FOIS MARBRE ET SCULPTEUR

(( L‘homme est à la fois le marbre et le sculpteur )) disait le Dr Alexis

Carrel.
C’est vrai de l’enseignant, c’est vrai de l’apprenant.
Leurs deux marbres ne prendront forme que s’ils se sculptent eux-mêmes.
Alors leur dialogue sera riche.
Une enquête menée en 1985 a révélé que si quelques (rares) finalités
cognitives sont tenues pour prioritaires à la fois par les élèves, les parents
et les enseignants, les uns et les autres considèrent que lesfinalités affectives
ne sont pas prises en compte par le système éducatif. Les enseignants et les
parents placent la tolérance à la huitième place (sur 40), mais les élèves ne
considèrent pas cet objectif comme très important. Et pourtant ... dès la
Maternelle, l’intolérance fait des ravages à l’école ! (1)
Les conclusions de cette enquête rejoignent celles d’une enquête effectuée
quinze ans auparavant, en Belgique (2). Les auteurs estimaient que (( l’on peut
affirmer, sans crainte de se tromper, que le domaine des objectifs affectifs
constituera l’un des objectifs prioritaires de la recherche en éducation au
cours des prochaines décennies ».
Où en est-on aujourd’hui ? I1 semble urgent d’intégrer la dimension affective
dans l’interventicm pédagogique. La neuropédagogie peut y contribuer en
soulignant que l’harmonie entre le cognitif et l’affectif est indispensable à
un apprentissage efficace.
Les pages qui précèdent ont tenté de montrer ce que peut être un itinéraire
lorsque l’être hurnain, qu’il soit apprenant ou formateur, choisit de croître
pour s’accomplir. se réaliser - selon les termes d’Erich Fromm - (( opter
pour devenir une personnalité productive ». Ces pages ont aussi tenté de

(1) Cf. Initiative et Formation no 46, 1985.


(2) Landsheere G r . et Y. (1975).
Construire un nouveau regard 249

montrer que pour comprendre et se comprendre l’apprenant et l’enseignant


doivent se rapprocher, s’engager, s’impliquer :

Se rapprocher de l’Autre, en connaissant mieux la réalité des mécanismes


cérébraux, c’est éviter bien des distorsions de sens, bien des errements, bien
des contre-sens.

S’engager, c’est réduire la distance entre soi et ce qu’on apprend ; c’est


apprendre/enseigner avec ce que l’on est, avec tout son être.

S‘impliquer c’est donner du sens à l’Autre et à ce que l’on fait; c’est


(r)établir les rapports entre l’apprenant et l’enseignant sur l’axe donner-
recevoir : le cerveau ne fait pas autre chose lorsqu’il fonctionne en harmonie.

Les propositions de formation contenues dans la troisième partie de ce


livre sont destinées essentiellement à déclencher une réflexion et une
recherche personnelle de la part du formateur. Elles suggèrent également
qu’au modèle traditionnel de la formation, celle du maître ou de l’élève où
l’apport extérieur est pris comme un remède, il est possible de substituer
la logique de l’organisme. Un système éducatif est critique et libérateur si
ses racines plongent dans une étude claire et systématique de la réalité de
l’acte d’apprendre et de celui d’enseigner.
L‘apprentissage est un comportement.
Le non-comportement n’existe pas : le comportement de l’élève qui refuse
d’apprendre ou qui ne parvient pas à apprendre est un message: nous
pensons que le formateur doit être en mesure de le capter et de le décoder.
I1 le fera s’il est in-formé, s’il a reçu et mis enforme les données actuellement
disponibles pour comprendre les mécanismes cérébraux corticaux et sous-
corticaux impliqués dans la situation d’apprentissage.
De même qu’on ne peut pas ne pas communiquer, on ne peut pas ne
pas apprendre parce qu’on ne peut pas ne pas ETRE.
Un élève qui ne réussit pas a appris à ne pas apprendre, c’est-à-dire à
ne pas changer. I1 a donc appris. I1 a appris quelque chose de très difficile :
a résister à l’aptitude (innée) à s’adapter.
Nous avons, en tant qu’êtres humains, la capacité de dépasser (trans-
cender) ce que nous sommes pour devenir autre.
Nous participons aussi, que nous le voulions ou non, aux structures et
à la continuité du monde dans lequel nous vivons. Si nous refusons de croître
et de nous construire, nous nous privons d’être. Le non-apprentissage,
comme le non-changement, nous interpelle tous : apprenants et formateurs,
parents, responsables institutionnelles, décideurs... La langue anglaise a forgé
le mot (( teacher n (enseignant) du gothique (( taiku »,qui veut dire (( signe D.
L‘enseignant est l’interprète des signes ; sa mission est d’observer ce qui n’est
pas remarqué par la multitude, et de révéler ce qu’il a découvert.
Le formateur de formateurs a la même mission.
Les questions qui restent actuellement sans réponse sont nombreuses ;
celles que le cerveau se pose sur lui-même ne datent pas d’aujourd’hui: le
250 Construire aujourd’hui avec hier et demain

cerveau est (beaucoup) plus vieux que l’école. I1 est le seul à pouvoir répondre
aux questions qu’il se pose. Mais les réponses n’apparaîtront pas tant que
nous traînerons derrière nous le fantôme de certaines théories, celles qui font
de l’homme un être duel, divisé et figé dans le temps.

L‘homme-apprenant s’inscrit dans la durée.


CHAPITRE 1 1

CONSTRUIRE POUR DEMAIN

K L’avenir du monde est suspendu au sot.@‘e des enfants qui vont à l’école»
(Le Talmud)

Toute personne qui s’est engagée dans une recherche connaît le vertige
et l’angoisse qui s’emparent d’elle lorsque le moment est venu de commu-
niquer ses conclusions, et qu’elle mesure l’étendue de son ignorance, l’absence
des données dont elle aurait eu besoin pour parfaire sa tâche, ou, à l’opposé,
l’abondance des informations qui arrivent chaque jour de toutes parts,
risquant d’ébranler ou de neutraliser ce qui a été construit...
I1 faut des années d’analyse pour une heure de synthèse, rappelait Fustel
de Coulanges. Cette heure est venue et le vertige se manifeste, certes (mais
non l’angoisse): la tâche à accomplir est immense, et les ressources à
mobiliser sont considérables.
Vertige.. . accompagné d’espoir, car les ressources existent.
Le domaine de la réalité cérébrale, plus qu’aucun autre sans doute, exige
que des précautions infinies soient prises mais, aussi, que de nouveaux outils
de précision soient forgés pour qu’à un âge nouveau, correspondent des
savoir-faire nouveaux.
I1 aura fallu des siècles pour rouvrir le statut de l’observateur de Maitre
cerveau (1). Non seulement il tient encore dans ses plis son mystère, mais,
pour beaucoup, il reste haut perché, inaccessible.
Notre civilisation n’en est pas à un paradoxe près: à notre époque de

( I ) Paul VALÉRY n’a écrit que les deux premiers vers d’une fable parodique :
Maître Cerveau sur son arbre perché
((

Tenait en ses plis son mystère >>


252 Construire aujourd’hui avec hier et demain

deuil des croyances, on trouve normal de tout gérer... sauf les ressources
cérébrales !
La première partie de ce livre a tenté de montrer qu’il était possible
d’établir une passerelle entre les neurosciences et la pédagogie, et que l’apport
des unes et les exigences de l’autre peuvent et doivent se rencontrer de toute
urgence, pour entamer un dialogue qui ne s’est fait que trop attendre.
L‘apprentissage rie doit pas être coupé de sa propre biologie, pas plus que
la biologie ne s’arrête à la naissance d’un organisme, ou n’est limitée à l’état
de santé de l’individu. Un potentiel qu’on ignore est un potentiel perdu. I1
n’y a pas d’abîme insurmontable entre les potentialités d’un apprenant et
ses espoirs de réalisation.
Nous vivons dans une société malade qui conditionne l’homme et le
détourne de lui-même : il nous faut donc inventer des rapports plus normaux
entre l’homme-apprenant, ce qui l’entoure et ce(1ui) qui l’enseigne. I1 nous
faut créer. Créer cles outils et des techniques transformatrices. Créer à l’école,
mais aussi et surtout dans le quotidien, car le quotidien renouvelé (avant
l’école) envahira 1ôt ou tard l’école.
Dans la deuxième partie, les bases d’une méthodologie cohérente avec
le fonctionnement du cerveau ont été placées autour des trois pôles consti-
tuant l’architecture d’une pédagogie compatible avec un apprentissage
bionomique. Dans cette pédagogie, la gestion des ressources de l’apprenant,
devient la priorité de ceux qui ont charge éducative. Comprendre, faire,
laisser-se-faire : trois pôles, trois piliers mais un seul mouvement et un seul
rythme, celui qu’impose une pédagogie différenciée dont la réalité neurophy-
siologique n’est plus à démontrer.
Face aux différences réelles, l’appel est à construire, se construire, en
s’adressant aux ériergies qui animent l’individu et son contexte, en se libérant
des appréhensions d’un inconnu désormais mieux connu. Lorsqu’on
abandonne la vision linéaire et mécanique de l’homme et de la vie, le parcours
devient plus vaste, les rencontres plus riches.
Certains mots n’ont plus de sens : (( supérieur )), (( inférieur », (( fort D,
(( faible D, (( dons ». D’autres mots font vivre : (( voir », (( entendre )), (( décou-

vrir D, (( échanger )). D’autres, encore, enseignent à respirer et être : (( durée D,


(( dormance », projet », (( objectif »,(( ressources o. ..

La troisième partie, essentiellement destinée à poser les questions plus


qu’à les résoudre, ouvre des voies de recherche, donne des exemples et
suggère de placer la formation de formateurs, non pas à un moment T du
temps, mais en amont, parallèlement et en aval de l’enseignement lui-même,
et sur des bases nouvelles: celles d’une formation à construire et non ù
consommer.
Le questionnaire de l’enseignant en formation doit être une caisse de
résonance dans laquelle il trouvera l’écho du questionnaire qu’il adressera
à son tour à ses élèves: il comprendra, parce qu’il le recevra ainsi, que
résoudre un problème est moins important que de le placer dans un cadre
plus vaste où il sera l’élément d’une construction future, personnelle. Alors,
les formateurs seront en mesure de remplir pleinement leur fonction nour-
ricière et constitut we de l’apprentissage.
Construire pour demain 253

Un problème résolu, un obstacle surmonté n’est pas une fin en soi mais
un exemple et un tremplin pour résoudre d’autres problèmes, pour aller plus
loin, pour faire de nouvelles découvertes.

APPRENDRE ET ÊTRE

Depuis des siècles, l’homme occidental s’est identifié à sa pensée, au lieu


de considérer l’ensemble de sa réalité : son organisme appartient à un système
beaucoup plus vaste, l’univers.
Les conséquences ? Les Occidentaux les paient chaque fois que l’esprit
(la conscience diront certains) se donne la mission de contrôler le corps,
chaque fois qu’esprit et corps sont pris comme deux entités séparées. Quand
donc les désignera-t-on d’un seul mot pour consacrer leur unité ?
La vision fragmentée qu’a l’homme de lui-même reflète celle qu’il a du
monde dans lequel il vit. L‘institution éducative est le miroir très exact du
cloisonnement dont on se plaint souvent, mais derrière lequel on se protège
aussi.
Rien n ’est linéaire dans la vie, dans la nature, dans l’organisme. La double
fonction de la cellule est l’assimilation et lautocréation dans la durée :
structure, fonction et fonctionnement sont intimement liés. Peut-il, pourrait-
il y avoir appropriation du savoir indépendamment du savoir-être et du
savoir-faire ?

DEUX PROPOSITIONS

Avant de refermer ce livre - pour que d’autres s’ouvrent - deux


propositions seront faites.
La première est d’intégrer l’apprentissage dans la double hélice de la
(( cybernétique )) de l’existence (figure 17), reprenant, en partie, l’analogie de

la double hélice de l’ADN qui contient et transmet, grâce à I’ARN, des


instructions codées pour tout l’organisme (2).
Adapté à la dimension neuropédagogique de notre recherche pour
rejoindre la dimension psychosociale de l’apprentissage, ce modèle représente
la synthèse de ce qui a été décrit tout au long de ce livre. De plus, c’est
un plaidoyer pour que les pratiques pédagogiques (( ne cassent pas l’ADN ))
(si l’hypo- et l’hyper-oxygénation sont l’une et l’autre dangereuses pour
l’ADN, bien des interventions le sont aussi pour l’apprenant).
Les dix étapes ou éléments de la double hélice, sont en interdépendance
et constituent un ensemble :

(2) Le modèle de la double hélice a été inspiré par la lecture de l’admirable livre de
HAMPDEN-TURNER (1990), lui-même influencé par la pensée de Silvan TOMKIN, Marie
JAHODA, HEGEL,A. KOESTLER, BUCKMINSTER-FULLER.. .
Confirmation
Dépassement de soi Mise en synergie

Participation Expérimentation
à l’environnemenit (risques)

Perception
Mon identité
individuelle

Fig. 17. La double hélice


Construire pour demain 255

Dans cette double hélice, la personne existe librement (1), grâce à sa


propre perception(2) et la force de son identité(3), qui se rejoignent pour
former son expérience, sa compétence (4), ce qui lui permettra de s’engager
dans l’environnement (9,d’expérimenter en prenant des risques (6). Son
engagement et son expérience lui donnent les moyens et la force de réduire
la distance aux autres (7), de se confirmer et de se dépasser (8), de résoudre
les oppositions et dichotomies et d’atteindre la synergie(9) pour que la
grande mise en ordre de l’information en retour (feedback) enrichisse son
espace de vie (10) qui se projette à nouveau (feedforward) dans la durée...
Ce modèle fait apparaître clairement que perception et identité sont des
sous-ensembles d’un ensemble plus grand, que la défaillance ou le renfor-
cement d’un élément affecte tout l’ensemble.. ., que la synergie réconcilie des
aspects de la personnalité considérés, généralement, comme opposés ou
dissociés.
Lorsque deux personnes A et B sont en inter-relation, la combinaison
de leurs ressources peut être optimale :
--
perception de A (2) perception de B (2),
compétence de A (4) compétence de B (4),
ou bien la synergie (9) peut ne pas se réaliser à l’intérieur du système :
engagement de A (5) W/GC perception de A (2) ;
ou entre les systèmes :
identité chez A (3) dépassement chez B (8).
I1 y a alors déstabilisation du système et désynchronisation dans la
communication : l’approche pédagogique en tient-elle compte ?

La deuxième proposition tente de clarifier les relations entre les parte-


naires de la situation d’apprentissage, en les intégrant dans un contrat qui
respectera l’individualité de chacun, apprenant (a), enseignant (e) et insti-
tution (i).
Tout apprentissage ou formation déclenche chez le formé un système de
relations nouvelles avec lui-même (et sa temporalité), avec les autres et avec
son environnement.
Chacun des trois partenaires (nous nous limiterons à 3), est non seulement
en relation avec les deux autres :
256 Construire aujourd’hui avec hier et demain
mais aussi en relation avec... une partie de lui-même qui n’est pas totalement
engagée dans la situation d’apprentissage ou de formation (figure 18).
- L‘Apprenant (a) a une identité (A) qui ne coïncide pas totalement avec
-
son rôle scolaire. La relation a A dépasse le cadre scolaire.
- L‘Enseignant (e), n’est pas totalement représenté par sa fonction profes-
sionnelle. I1 ((existe)) (E) en dehors de l’école et la relation e
recouvre pas toute la vie professionnelle de l’enseignant.
- E ne

- L‘institution locale (i) fait partie d’un ensemble plus vaste (1) : Académie

- Rectorat - Ministère, ou Service de Formation - Service du Personnel


- Entreprise., etc. : la relation i -I doit être également prise en compte.
Les relations des partenaires sont donc mieux représentées par ce
diagramme qui délimite les espaces de l’apprentissage et de la pédagogie.

I e l
l I

Figure 18. Relations et espaces pédagogiques

Les différents contrats proposés dans une formation en neuropédagogie

-
concernent essentiellement les relations A -
a, E - -
e, a e. La relation
I i sera simplement mentionnée ici, car elle dépasse le cadre de cet ouvrage.
Deux étapes successives sont suggérées :
I) une prise de conscience préliminaire au niveau de
A-a
E-e
et une négociation au niveau de 1 i -
Construire pour demain 257

-
2) des contrats a e, a i, e i.
.+ -
Le contenu de ces contrats sera esquissé, sans qu’il soit nécessaire
d’aborder ici les modalités : elles sont spécifiques de chaque situation.

A a :Prise de consciencepar l’apprenant de :


.+

- son passé pédagogique (l’outil peut être un questionnaire fourni par


l’enseignant)
- son attitude face à l’apprentissage (outils : évaluation projective, entretien,

dialogue pédagogique)
- freins, préjugés (outil : check-list)

- ses ressources cérébrales (recherches personnelles, questionnaire, lectures,

émissions T.V.)
- ses objectifs professionnels, familiaux, sociaux, de développement per-

sonnel (outils : questionnaires, check-lists...)


- ses attentes : sécurité ? contirmation ? acquisition ? identité ? sens ? (expli-
cation par différents moyens, écrits, oraux, simulations, jeux de rôles...).

-
-
E e :prise de consciencepar l’enseignant de :
sa conception de son rôle (test projectif, questionnaire, check-list)
- son attitude face à la pratique (id.)

- ses ressources et son fonctionnement cérébral


- la gestion de ses ressources

- ses critères d’évaluation

- ses objectifs de recherche, développement, aide...

- ses besoins en formation ...

I.+ i : déterminera (ou devrait déterminer), à ce niveau, les finalités de


l’éducation culturelle et, par exemple, les relations Université-Industrie.

-
-
Le contrat e a portera sur :
les étapes de l’itinéraire (prise d’information, traitement, production)
- les stratégies de l’apprenant (le (( comment »)

- la définition des objectifs

- l’évaluation de la progression (qui? quoi?, comment? pour quoi?

quand? où?)
- le rôle de chacun, la relation d’aide,...

-
-
Le contrat e i portera sur :
la formation de formateur
- la recherche
- les conditions matérielles d’enseignement
- le statut, la carrière...

- le recrutement
-
Le contrat a i portera sur :
- le règlement
258 (Construireaujourd’hui avec hier et demain

- l’évaluation, lles diplômes


- l’insertion professionnelle.. .

L‘idée de contrat didactique n’est pas neuve. Elle mûrit lentement depuis
des années. Le m.ot plus que la chose effraie certains. On lui préférerait, sans
doute, protocole ou projet. Mais les concepts d’engagement, de responsa-
bilisation, d’organisation, et surtout le respect de la durée (le temps de
l’autre. ..) sont précisément ce dont le monde d’aujourd’hui a le plus besoin.
Pour que le monde ait enfin un avenir, un véritable avenir, il faut lui porter
un vrai regard: un regard à quatre dimensions dans lequel la dimension
temporelle ajoute au relief la dynamique de l’Énergie contenue dans le vivant.
Ce regard, il est urgent que le formateur le porte sur l’enfant, I’appre-
nant et, auparavant, sur lui-même.
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LISTE DES FIGURES

Pages
1. Les aires cérébrales ......................................... 33
2. Nos trois cerveaux (D. Blondiaux) ........................... 49
3. Le chemin de l’information visuelle ........................... 57
4. Les 2 hémisphères : complémentarité et non opposition ........ 62
5 . Le mécanisme d’auto-régulation du cerveau ................... 104
6. L‘apprenant vu par lui-même (D. Blondiaux) .................. 135
7. Apprentissage et créativité ................................... 143
8a. Les composantes de la situation d’apprentissage ............... 183
8b. Attitudes de l’enseignant face à son enseignement .............. 183
9. Approche systémique de l’apprenant .......................... 189
10. Évolution du volume cérébral au cours des millénaires ......... 192
11. Le cerveau, organe de l’apprentissage ......................... 195
12. Profil d’un groupe .......................................... 199
13. Caractéristiques des gestions visuelle et auditive ............... 202
14. Une interpellation totale de la gestion cérébrale ................ 213
15. Les canaux d’accès a l’information ........................... 214
16. Lire quoi ? pour quoi ? où et quand ? comment ? (D. Blondiaux) 225
17. La double hélice ............................................ 254
18. Le contrat : relations et espaces pédagogiques ................. 256
LISTE DES TABLEAUX

Pages
1. Évolution des théories et découvertes sur le cerveau ......... 189-191
2. Techniques d’exploration cérébrale ......................... 191
3. Trois cerveaux en un (MacLean) .......................... 192
4. Corrélation entre développement cérébral et comportement . . 193-194
5 . Les chiffres dle notre potentiel ............................. 196
6. Les mots-cléa représentant les caractéristiques du cerveau .... 196
7. Les deux gestions hémisphériques (représentation linéaire) ... 197
8. Coopération des 2 hémisphères ............................ 198
9. Déficits des hémisphères gauche et droit .................... 198
10. Profis visuel et auditif .................................... 200-201
11. Éléments pour établir un a cliché linguistique )) .............. 202
12. Les causes d’oubli ........................................ 207
13. Mémoire à court terme et mémoire à long terme ............ 209
14. Facteurs physiques de l’attention discriminative ............. 210
15. Facteurs physiques de l’attention pendant des tâches de raison-
nement .................................................. 211
16. Grille d’observation d’un apprenant ........................ 212
17. Grille d’observation de la saisie d’information ............... 217
18. Parcours pluiiels ......................................... 219
LISTE DES QUESTIONNAIRES

Pages
Discerner sa gestion préférentielle ................................. 184
Évaluer ses besoins en formation ................................. 186
Discerner ses habitudes perceptives (périphériques/focaIisantes) ...... 216
Auto-questionnaire de l’enseignant sur sa démarche ................ 220
Questionnaire destiné à l’élève sur sa/ ses stratégie(s) ................ 220
Questionnaire du lecteur ......................................... 224
INDEX THÉMATIQUE

Abstraction, 44, 48, 55, 56, 59-60, 144, 249 ; attentes, 136, 181, 200, 257 ;
146, 154, 160, cf. concret. attitudes, 86-7, 114, 118, 129, 135
Actualisation, 102, 148. (fig. 6), 136, 186, 212 (tabl. 16), 227 ;
Acquisition, I l , 17, 39, 54, 68, 71, 84, bionomique, 11, 20, 123 ; blocages,
86, 104, 124, 127-130, 132, 134, 143 55, 74, 114, 210, 218, 223, cf. diffi-
(fig. 7), 154, 162, 206. cultés ; concepts sous-jacents, 11,
Adaptation, 18, 25, 35, 55, 56, 93, 95-6, 23-4 ; conditions favorables/optima-
113, 123, 129-30. les, 50, 88, 13, 133, 141, 147 ; con-
ADN, 40, 190, 253. tenu, 22, 118, 134, 142, 154, Partie
Adolescence, 48, 53-4, 60, 96. III ; contexte, 22, 129, 137 ; contrat,
Adulte, 50, 52, 59-60, 96, 138, 146-7, 20-1, 25, cf. contrat ; contrôle, 110-1,
153, 157. 155 ; définitions, 22, 123 ; démarche,
Affectivité, 24, 36, 47, 50, 66, 70-1, 76, 136, cf. partie III ; différencié, 177,
79-80, 84, 88, 94-6, 105, 114, 124, cf. différences ; difficultés, 160, 162,
133, 136, 141, 147, 153, 167, 207, 199, 210, cf. blocages ; disponibilité,
248, cf. cerveau, lobes frontaux et cf. potentiel ;efficacité, 85, 92, 100,
système limbique. 108, 178, 210, 218-9, 226, 248, cf.
Agressivité, 50, 128, 161, 183. conditions favorables, cf. performan-
Aide (relation d’), 138-140, 146, 159, ces ; erreur, (causes d’), 130, 134,
163, 185, 257. 215 ; évafuation, 18, 34, 118, 155, cf.
Alcool, 115, 168. résultats ; expérienciel, 146-7 ; fina-
Alphabet, 52 ; -isation, 64, 114, 166, cf. lité, 23, 118, 257 ; freins, 186, cf.
analphabétisatisme. obstacfes, difficuftés ; gestion, 22-3,
Alternance, 112-3, 203, 209, 226 ; 132, 136, 147, 185, 196-7 (tabl. 7),
cf. fluctuations. 200, 202 (fig. 13), 213, 218 ; inhibi-
Amont (en), 20, 22-3, 117, 134, 177 et tion, 104, 114, cf. affectivité, filtres,
sv., 181, 252. (dé)motivation ; intégration, 68, 153,
Analogi(qu)e, 102 et sv., 107, 129-30, itinéraire, parcours, 21, 129-30, 136,
141, 143, 159, 172, 197, 207, 253 ; cf. 144, 148, 178, 213, 215, 218-9
métaphore. (tabl. 18), 224, 257 ; langue étrangère,
Analphabétisme, 64, 114. 18, 110-1, 165-9, cf. anglais ; méca-
Analyse, 48, 60, 66, 80, 107, 141-2, 155, nismes, 158, cf. processus ;modèle,
159, 167, 172, 216, 221-2, 251. 117, cf. cerveau ; modèle; objectif,
Anglais, 135, 151, 165-6, 249. 91, 118, 128, 134, 139, 147, 154, 172,
Applications, cf. pédagogie. 207-8, 214, 257 ; observation, 25, 37,
Apprentissage(s), 11, 17, 54, 70, 87, 91, 136, 146 ; organe, 22 cf. cerveau ;
94-5, 147, cf. conscientisation ; acte, partenaires, 25, 173, 204-5, 255, cf.
18, 20, 22-4, 29, 32, 39, 47, 70, 95, situation, et contrat ;potentiel, 129,
100, 123-4, 127 et sv., 129-30, 138-9, 151 et sv., cf. cerveau ; processus, 20,
278 J’apprends, donc je suis
22, 39, 88, 118, 134, 143, 145 ; p r o - 32, 69, 83-4 ; 86, 91-2, 203 et sv.,
fil, 25, 64, 128, 144, 147, 196, 200-2 206 ; activités, 32, 35, 61, 70, 99,
(tabl. lo), cf. pédagogie, diagnostic ; 100, 105, 112-3, 145 et sv. ; âge céré-
projet ; 132, 134, cf. objectif; res- bral, 44, 114 ; aires, 43, 55-6 ; cf.
sources (et gestion), 23-4, 121 et sv., zones ;analogies, 102 et sv. ; associa-
128-9, 257, cf. cerveau, performan- tivité, 59, 82, 101, 140, 146 ; asymé-
ces ; résultats, 112, 134, 142, 145, trie, 61, cf. différences ; câblage, 42
155 ; réussite/échec, 23, 130, 136, et sv., 51, 102, 118 ; capacités, carac-
149, 159, 164 ; rythmes, 68, 118-9 ; téristiques, 54-5, 99-115, 151 ; carto-
situation, 24, 39, 95, 128, 137, 168, graphie, 34, 70, 203 ; chimie, 32, 36,
171, 182 ; stades, cf. processus ; stra- 83 ; complémentarité, 70, 99 ; com-
tégies, 23, 77, 111, 130, 146, 154, plexité, 50, 101, 133 : comportements,
159, 187, 213, 257, tâches, 88-9, 134, (relation...), 45 et sv., 83 et sv. ; con-
197, 209, 213 ; transfert, 106, 154; nectivité (inter-), 51, 60, 61, 81, 101 ;
types, 87, 129, 133 ; variables, 23, 66. corpus callosum, 56-58, 101 ; cortex,
Aptitudes, 55, 152, 231, cf. apprentis- 32, 41-2, 46, 48-50, 55, 58, 89, 139,
sage, ressources. 204 ; dendrites, 55, 74 ; développe-
ARN, 74, 75. ment phylogénétique, cf. évolution
Assimilation, 20, 95, cf. acquisition. ontogénétique, cf. maturation ; diffé-
Attention, 20, 22, 24, 34, 52, 69, 76, 84, rences ; 59, 84, 86 ; dynamisme, 39
86, 89-90, 93, 94, 108, 128, 132, 137, et sv., 5 0 ; ennemis, 113, 115, 226;
162-3, 209, 210 (tabl. 14), 211 évolution, 25, 45 et sv., 65, 102, 113,
(tabl. 15), 231 ; mécanismes, 88-90 ; 190-1 (tabl. 1 ; fig. 10, tabl. 3), 192 ;
sélective, 34, 69, 79 ; types, 89 et sv. exploration, 22, 31 et sv., 61, 83, 191
Attitude, 93, 137, 1140, 157, 232, 182 -3, (tabl. 2), 203 ; fautes contre le, 117,
209, 257, cf. alpprentissage. 127, 147 ;femmes, 64, 93 :fonction-
Audition, 35, 39, 41,48, 65, 68, 73, 139, nement, 20, 23-4, 32 et sv., 68, 92,
141, 143, 146, cf. système auditif. 117, 142, 151, 15 ; conception méca-
autisme, 47, 138. niste, 31, 35, 42 ; conception multi-
Automatismes, 47, 48, 70, 87, 90, 205, dimensionnelle, 102-115 ; conditions
209. optimales, cf. hygiène cérébrale ;for-
Autonomie, 47, 61, 100, 105, 118, 134, mation réticulée, 93-4, 90, 92, 115 ;
157, 178, 232. gliales (cellules), 114-5 ; hémisphères,
Auto-(ré)organisatim, 36, 105, 110. 25, 31, 60-70, 101, 105, 114, 133,
Auto-régulation, 35, 104, 105. 141-5, 149, 159, 172, 196-7 (tabl. 7),
Aval (en), 20, 117, 134, 177 et sv., 252. 204, 213 ; coopérationicomplémenta-
rité/équilibre, 66-7, 197-8 (tabl. 8 et
Barrière fonctionneille (cerveau), 48, 119, 9), 204 ; déficit/faiblesse, 198-9
149. (tabl. 9) ; hormones, cf. hormones,
Biofeedback, 83, 86, 89, 113, 162. neurotransmetteurs ; hygiène céré-
Biochimie, 159. brale, 111-115, 134, 172 ; influx ner-
Biologi(qu)e, 11, 24, 3 1, 41, 44, 46, 48, veux, 24, 29, 99, 108, 131 ; latérali-
58-9, 63, 65, 79, 84-5, 87, 91, 95, sation, cf. hémkphères ; limbique, 47
102, 108, 109, 123, 252. et sv. 73, 114, 123, 192 ; lobes fron-
Bionomi(qu)e, 11, 20, 75, 124, 252. taux, 44, 48-50, 5 5 , 58-60, 68, 69, 74,
Biophysique, 222. 86, 89, 94-5, 114, 149, maturation, 45
Biopsychosocial, 153. et sv., 50, 60-65, 102, 113-4, 133,
Blocage, 75, cf. apprentissage, difficul- 149, 193-4 (tabl. 4 ) ; stades, 45, 51,
tés, informationi. 53, 58-9 ; mécanismes, 36, 41-2,
BRAC, 131. 99-115, 128, 143, cf. fonctionnement ;
modèle(s) fonctionnel, mécaniste,
Calcul, 48, 54, 61, 67, 101. structural, 23, 31, 58-61, 102, 115 ;
Capteur(s), 41, 50, 171. myélinisation, 43-4, 50-1, 55-6 ; 58,
Catégories, catégorisation, 51, 52, 61, 100, 160 ; néo-cortex, cf. cortex;
90-2. neurone ; 25 et sv. 95, 100 et sv.,
Cellule, 44, 46, 63, 111, 149, 253 ; cel- 106, 108, 131 ; non-Iinéarité, 51, 102,
lules gliales, 36, 51, 100. 105, 107, 140 ; ondes cérébrales, 79,
Cerveau, 31-82, 130-136, 142 ; activation, 84, 86, 88-9, 107-8, 112, 131 ; orga-
Index thématique 279

nisation, 113, 133, 140, cf. structure ; Compréhension, 58, 60, 62, 93, 96-7,
plasticité, 43, 74, 102, 153 ; poids, 100, 102, 109-110, 119, 133, 139,
51, 54 ; potentiel, 11, 20, 24-5, 89, 140-5, 155, 178-9, 221, 233, 249.
99-115, 117, 194-5 (fig. 11) et Concentration, 112, 162, 178, cf.
(tab]. 5) ; processus, 23, 50, 73-4, attention.
123, 131, cf. mécanismes, fonctionne- Concepts (redéfinition des), 11, 25, 35,
ment rétroaction proaction, régénéra- 59-60, 61, 86, 124, 144, 155, 229 et
tion, 61 ; reptilien, 46-7, 91, 192 ; sv., cf. apprentissage, Temps,
ressources (et gestion des), 46, 67, 80, Espace ; concepts-clés, 25, 32, 140,
cf. potentiel ; rythmes, 34, 54, 68, 229.
85-6, 96-8, cf. ondes, chronobiologie ; Conceptualisation, 44, 48.
sélectivité ; 56, 61, 74, 103 ; structu- Concret, 54-5, 109, 136, 144, 159-60,
ration, 60, 149 ; cf. évolution, struc- 226, cf. abstraction.
tures, 45, 49, fig. 2 ; synapse, 51, 55, Connaissance(s), 87, 109, 127, 166-7,
74, 101, 131 ; zones associatives, 234 ; de soi, 87, 129, 136.
58-9, 100-1 ; corticales, 60, 67-8, 73 ; Conscience (sens multiples), 36, 74, 83,
motrices, 67-9 ; oculo-motrices, 68 ; 84-88, 105, 108, 115, 162, 210 ; états,
primaires, 59 ; sous-corticales, 43, 58, niveaux de, 86, 88, 161, 203 ; de soi,
61, 63, 73, 161, 206 ; visuelles, 68. 87, 88 ; modifications, 86, 107-9,
Champ perceptif (visuel...), 23, 40, 52, 113 ; perceptive, 88, 161 ;
143-4, 161. cf. vigilance.
Changement(s), 18 et sv., 24, 29, 44-5, Conscientisation, 92, 118, 139, 167, 172,
51, 54, 58, 61, 67, 73-4, 80, 88, 181, 184 et sv., 214, 256-8.
90-92, 96, 108, 118, 131, 138-9, 148, Contenu, 181 et sv., 233, cf. apprentis-
153, 155-6, 164, 184, 232, 249 ; atti- sage, pédagogie.
tude/résistance face au, 18, 22, 47, Construire, 24, 52, 55, 67, 102-3, 128,
91, 164. 132, 178, 213 et sv., 252.
Charte pédagogique, 172. Contexte(s), 19, 22, 36, 50, 77, 81, 113,
Chimie (bio-, neuro-), 35 et sv., 42, 74-5. 127, 132, 147, 149, 152, 155, 163-5,
Choix, 149, 207, cf. cerveau, sélectivité. 188, 207, 216, 234, 252.
Chronobiologie, 85, cf. rythmes. Contrat, 20-1, 25, 162, 173, 181-2, 205,
Chronopsychologie, 96. 255-8, cf. apprentissage.
Cliché linguistique, 137. Coopération, 90, 108, 152, cf. cerveau,
Code, 52 : codage, 106 ; décodage, complémentarité.
222-3, 226. Corps, 21, 35, 54, 96, 127-8, 133, 137,
Cognition, 53, 61, 63, 248 ; activités 139, 162, 201, 209-12, 221, 253.
cognitives, 32, 58-60, 64, 139, 151 et Cortex, cf. cerveau.
sv. ; dimension cognitive ; 22, 60, 72, Couleur, 52, 56, 81, 101, 109, 140-1,
76, 153 ; modèle cognitif (motiva- 142, 160, 207.
tion), 92 ; potentiel cognitif, 124 ; sti- Créativité, 36 53-4, 75, 81, 102, 105, 128,
mulation cognitive/développement, 140, 143-5 ; 149, 153-5, 186, 235,
59, 152 ; structures, 221. 252.
Commissurectomie, 61. Culture (influence), 51, 53, 65, 71, 77,
Communication, 11, 21, 41-2, 53, 66, 78, 85, 89, 95-8, 109, 123-4, 137, 147,
81, 84, 87, 92, 94-6 ; 98, 102, 109, 152, 165-6, 168, 222, 235 ; cachée,
111, 114, 117, 127, 132-3, 137, 139, 123 ; interculturel, 165.
147, 154, 185, 204, 213, 221, 224, Cybernétique, 30, 110, 253.
233, 249 ; compétence communica-
tive, 165 ; hormonale, 35, 42 ; neu- Déblocage, 143.
ronale, 102 ; synaptique, 42. Débit sanguin, 69, 203.
Complémentarité, 61, 67, 70, 87, 99, Décisions, prise de, 47, 48, 138, 154-5,
133, 143, 149, cf. cerveau. 161.
Complexité, 31, 50, 51, 96, 108, 133, Découvertes, 31, 35, 81, 100, 102, 103,
149, 162, cf. cerveau. 109, 149, 189.
Comportement(s), 24, 29, 34-5, 46, 50, Délinquants, 163.
53, 58, 61, 68, 80, 83-98, 110, 118-9, Dénomination, 61, 159.
138, 148, 155, 161, 165, 184, 249, cf. Désir, 95, cf. motivation ; affectivité.
cerveau. Dessin, 142, 145, 160, 183, 213, 220-1.
280 J’apprends, donc j e suis
Développement, 51, cf. cerveau, 140, 153, 163, 227, 238, 255 ; adap-
maturation. tation, 154 ; influences, 20, 47, 63,
Dialogue (pédagogique), 178, 248, 252. 64, 76, 77, 93, 103 ; interaction, 59,
Différences, 47-59-63, 66, 84, 97-123, 114, 152 ; sonore, 18-20 ; visuel,
235 ; droit à h, 119. 18-20.
Difficulté(s), 18, 47, 55, 75, 90, 128, 136, Équilibre (dés-, non-, hors), 18, 41, 50,
141, 159, 161, 236, cf. apprentissage. 68, 84, 91, 108, 113, 115, 118, 123,
Discontinuité, 40, 42, 53, 89, 95, 131. 124, 127-8, 131, 142, 148, 162, 167,
Discrimination, 58, 61, 65, 69, 137-8, 170, 182, 206, 238, cf. harmonie,
141, 163, 201, 210-212, cf. opérations erreur ; pédagogie.
mentales. Espace, 85, 97, 109, 123, 142, 144, 155,
Divergente (pensée), 54. 156, 201 ; vital, 161.
Diversité, 42, 97, cf. différences, cerveau. Espace-temps, 109.
Dons, 56, cf. innC. Ethique, 22.
Douleur, 69, 92, 113. Evaluation, 18, 34, 94, 101, 114, 134,
Drogues, 96, 115, 131-2. 142, 148, 155-6, 157, 172, 178, 187,
Dualité, 236, 250. 239, 206, 215, 230, 257, 258 ; cf.
Durée, 11, 42, 56, 66, 72, 94, 96, 110, apprentissage ; auto-, 220.
137, 144, 147, 149, 171, 178, 184, Éveil, 84-85, 163, cf. vigilance, veille ;
197, 206, 250-3, 258. mise en, 114.
Dynamisme, 50, 91, 99, 109, 140, 148, Évocation(s) mentale(s), 68, 76, 79, 86,
cf. cerveau. 143, 203, 206-8, 214, 218.
Dynamique(une), 41, 92, 93, 96. Évolution, 36, 42, 53, 81, 102, 148, 205,
Dysfonctionnement, 61, 141-2, 147, 227. 223, 240 ; contexte, 18-19 ; techni-
ques, conceptions et théories, 60 ;
Échange (s), 40, 43, 50, 97, 108, 132, moyens d’expression, 19 ; systèmes
137, 153, 181, cf. partage. éducatifs, 18-20, 24, 36.
Échec (scolaire), 55, cf. apprentissage, Expériences (et CO-),103, 104, 118, 124,
erreur. 132, 141, 144, 145, 197, 204, 208,
Echecs, jeu d’, 154. 230. 254-5.
Ecoute, 22, 67, 68, 94, 110, 111, 136-7, Expérimentation (pédagogique), 114, 145,
166, 182, 199-200, 204. 151, 158.
Écriture, 19, 48, 61, 63, 105, 124, Expression, 50, 65, 111, 133 ; écrite, 19,
139-142, 158, 237, 216, cf. alphabet, 142, cf. écriture, langage ; verbale,
alphabétisation, expression écrite. 21, 47.
Éducation, 123, cf. préface, apprentis-
Famille, 153 et sv.
sage, pédagogie.
Éduquer, cf. préface, 129. Fatigue, 113, cf. hygiène cérébrale.
Efficacité, 24, 51, 54. Filtres, 21, 103, 104.
Finalité, 22, 151, 177 et sv., 184, 248,
Electro-encéphalographie (EEG), 32, 83,
257, cf. apprentissage, formation.
84, 85, 86, 8% 95, 112, 113.
Électronique, 30, 31, 32, 103. Fluctuation, 113, 131, cf. rythme.
Emotions, 21, 47-40, 65, 75, 79, 88, 91, Fonction(s), 52, 123, 127, 162, 252, 256 ;
94, 95-6, 107, 115, 184, cf. de base, 142 ; sémiotique ; 58.
Formation, 11, 17, 21, 24, 39, 40, 41,
affectivité.
Empathie, 48. 42, 44, 45, 46, 47, 52, 54, 63, 67,
Energie(s), 23, 36. 40, 42, 50, 91, 105, 70-1, 74, 76, 82, 83, 84, 89, 90, 93,
108, 112, 161, 201, 229, 252 ; défi- 94, 96, 101-2, 103, 107, 111, 117-9,
123, 124, 128-140, 143, 146-8, 152,
cit, 111 ; niveou énergétique, 87.
Enfant, 51, 59, 93-4, 96, 109, 112, 113, 154-5, 177 et sv., 181 et sv. ; besoins,
186-7 ; contenu, 24 ; démarche/stra-
114, 141, 142, 146-7, 153, 154 et sv.,
tégie, 177 et sv.
158-165, 168, 258, cf. cerveau,
Forme (reconnaissance de), 52, 56, 95,
maturation.
101, 109, 140, 155, 160, 207, 248.
Enseignement, cf. pédagogie.
Fossé, 17 et sv., 188.
Entropie, 108, 23’7. Frontières, 31, 35, 73, 97.
Environnement, I I , 18-9, 21, 31, 35, 39
et sv., 50, 76, 80, 84, 85, 87, 88, 93, GABA, 100.
96, 105, 108, 118, 119, 124, 129-130, Gaucherie, 64-5, 89, 101.
Index thématique 28 1
Génétique, 41, 42, 151. 146, 149, 159, 200, 204 ; auditive,
Gestion(s), 85, 93, 99, 132, 136, 144, visuelle, cf. modalités sensorielles ; de
200, 213, cf. apprentissage, ressour- soi, 128, 138, 155, 182-3, 227, 241.
ces, cf. information, potentialités ; de Images mentales, 41, 48, 68, 70-1, 76,
l'espace, 145. 78-82, 84, 8 5 , 106, 108, 131, 141,
Geste(s), 21, 53, 58, 141, 146, 161, 165, 143-4, 145, 159 ; formation, 79-80,
209, 213, 227, cf. corps, motricité. 226 ; nature, paramètres, 78-9 ; rôle,
Gliales (cellules), 100, cf. cerveau. 81-3.
Globalité, 31, 60, 67, 92, 149, 159, cf. Imaginaire, 21, 47, 109, 247 ; voyage,
synthèse. 145.
GRF, 35. Imagination, 96, 109, 144, 145, 153, 208,
Groupe, 119, 137, 139, 143, 145, 149, 213.
161, 166, 167, 185, 189, 199 (fig. 12), Imitation, 46-7.
214-5, 219-220. Implications, 24, 54, 108, 110, 130, 152,
cf. apprentissage ; méthodologie ;
Habitude(s), 47, 91, 95, 103, 140, 200, neurosciences ; pédagogie.
216, 240. Influx nerveux, 24, 29, 32, 42, 99, 108,
Habituation, 76, 86, 88, 89, 96, 147. cf. cerveau.
Harmonie, 22, 60, 131, 201, 248-9, cf. Information, 92, 127, cf. signification,
équilibre, homéostasie. cf. note (*) p. 24 ; acquisition, 39 ;
Hémisphères cérébraux, 25, 31, 60-0, ancrage, 132-3, 172, 208, 210; assi-
105, cf. cerveau ; asymétrie, 163-7 ; milation, cf. intégration ; besoin
complémentarité, coopération, 6 I , (créer le), 178, 189 ; blocage, 47, 50 ;
65-7. câblage et codage, 42, 56 ; canaux,
Hérédité, 63, 119, cf. don, inné. circuits, parcours, , 43, 104-5, 147,
Hétérogénéité, 119, 128, 149. 214, cf. trajet ; distribuée, 106 ; ges-
Heuristique, 107 ; schémas, 140, 142, tion, 118, 148, 204, 207 ; intégration,
195, 208. 45, 5 5 , 56, 147, 206 ; multirnédia,
Holistique (approche), 66, 159, 167, 172. 218 ; organisation, 88, 123, 130, 142,
Holographie, 36, 70-79, 106-7, cf. 208 ; passive, 147 ; programmation,
modèle. 59 ; saisie, 217 (tabl. 17) ; sélection,
Holophonie, 107. 127 ; sensorielle, 161, cf. sensorialité ;
Homéostasie, 36, 91, 92, 95, 113 ; cf. stockage, 56, cf. mémoire ; trajet
équilibre, harmonie. (prise/saisie/réception, transmission,
Homo, homme, cf. préface, 18, 19, 35, perception...), 19, 24, 25, 35, 39 et
50-1, 53, 60, 70, 83, 103, 105, 109, sv., 43, 50, 52, 57 (fig. 3), 75, 79,
117, 124, 129, 152, 177, 189. 93-4, 97, 100 et sv., 127, 130, 137-9,
Hormones, 32, 35 et sv., 42, 59, 64, 76, 147, 160, 172, 186-7, 203, 214-221 ;
83, 8 5 , 94-5, 96, 99, 112 ; cf. traitement, 24, 32, 42-5, 46, 48, 66,
neurotransmetteurs. 72, 159-60.
Humanisme, 164 ; modèle humaniste, 92. Informatique, 30, 31, 103, 105.
Humanitude, cf. préface. Inhibition, 68, 100, 104, 115, 163, cf. dé-
Hygiène cérébrale, 24, 85, 171. motivation ; filtres.
Hyperactivité, 39, 93, 94, 128, 137, 159, Inné, 63, 91, 97, 103, 124, 249, cf. créa-
162-5. tivité, dons, hérédité, intelligence.
Innovation, 47, 143, 149, cf. créativité.
Idée(s), 48, 67, 140, cf. abstraction, Institution, 17, 24, 39, 125, 139, 152,
pensée. 167, 178-9, 253, 255-6, cf. système
Identification, 58, 106, 109, 127, 129, éducatif.
143, 145, 154, 159, 204. Intelligence, 54, 105, 123, 142, 151 et sv.
Identité, 47, 70, 71, 80, 82, 110, 227, 160, 241 ; développement, 53, cf. cer-
254-6. veau, maturation, cf. Venezuela (Pro-
Idéographie, 88, 203 et sv., 206, 222, cf. jet...), 155 ; droit à, 119, 157, 227 ;
cerveau, cartographie, cf. mesure, 54-5.
technologies. Intelligence artificielle, 105.
Illétrisme, 64, 114, cf. alphabet ; alpha- Intention, 87, 204-5, 210 ; base anatomi-
bétisation ; langage ; écriture. que, 69, 210.
Image, 52, 68, 77, 106, 129, 142, 144, Intentionalité, 86, 87, 90, 110, 210.
282 J'apprends, donc j e suis
Interaction(s), 18, 20, 21, 22, 23, 29, 35, Mathématiques, 81, 123, 159.
40, 44, 81, 94, 103, 108, 110, 114, Médicament, cf. drogues.
140, 152, 167, 205, 227. Méditation, 108, 113, cf. yoga.
Interculturel, cf. culture. Mélanine, 36.
Intériorisation, 58, 59, 109, 172, 203, Mémoire(s), 22, 24, 36, 44, 46 et sv., 53,
208-9, 226, 242. 70-77, 97, 105, 106, 140, 154, 200,
Intériorité, 128, 139, cf. re-centrage. 204-209 (tabl. 13), 227 ; consolida-
Inter-opérativité, 46. tion/entraînement, 71, 74, 76 ;
Interprétation (du sens), 43, 44, 104 << court terme », 47, 208 ; entraves,
(fig. 4), 154. interférences, 76, 82 ; étapes, cf. pro-
Intonation, 51, 61, 65-6, 204-5. cessus ; << localisation >> (dé-), 73,
Intuition, 61 ; cerveau, limbique ; 106 ; << long terme », 47, 208 ; oubli,
créativité. (causes), 74-5, 206-7 (tabl. 12) ; pro-
Invention, 48, cf. créativité. cédés mnémotechniques, 77, 81 ; pro-
Ionisation, 112, 1 i3. cessus, 70, 74 ; rappel, 77, 81 ; réac-
Intolérance, 128. tivations, 76, 206-208 ; reconnaissance
IRM, 34. (visages), 66 ; rétention ; 72 ; senso-
rielles, 70-1, 74-77 ; spatiale, 77 ;
Je, 127. stockage », 71, cf. étapes ; théories,
Kinesthési(qu)e, 78, 80, 81, 84, 137, 141, 36 ; troubles, 70 ; types et durées, 70
143, 146, 185, 200-1, 218, 224, cf. et sv.
gestuelle, motricité. Mémorisation, 22, 39, 47, 52, 56, 69, 74,
75, 76, 80, 128, 132, 140-1, 145-6,
Langage@), 21, 37, 48, 51, 60, 61, 63, 173, 178, 207-8.
64-5, 81, 87, 97, 104, 105, 114, 123, Mental, 35, 36, 69, 70, 127-8, 139.
136, 155, 200, 204, 221, 227, 243 ; Métabolisme, 36, 83.
activités langagières, 24, 34, 35, 61, Métaphore, 141, 412, 143, 144, 159, 213.
67, 69 ; acquisition, 58 : automatique, Méthodologies, 20, 22, 24, 66, 105, 110,
69 ; codes, 105, 164 ; dysfonctionne- 124-5, 145, 154, 157, 167.
ment, 141-2 ; émission, 97 ; intérieur, Mnémotechnique, 140.
69-205 ; réceptioniproduction, 58, cf. Modalités sensorielles, 43, 66, 75, 86,
écoute, parole ; repères (clichés) lin- 139-140, 145, 172, 203, 206-7, 209,
guistiques, 137, ,202 (tabl. i l ) , 203-4 ; 218.
silencieux, 205. Modèle@), 23, 31, 46, 90, 102-11, 117,
Langue@) ; 51, 97, 123, 168, 204 ; alpha- 123, 151, 201, cf. norme ; mécaniste,
bétique, 223 ; anglaise, cf. anglais ; 117 ; multijacoriel ; 153 ; unidiection-
étrangère, 18, 66, 105, 132, 167 ; nel, 153.
compréhension/expression, 110, cf. Mort (neuronale), 111.
fréquences, intonation, rythme ; Motivation(s), 18, 20, 24, 47, 85-6, 88,
didactique, 1101 ; française, 127 ; 90-92, 104, 132-3, 163-4, cf. atten-
japonaise, 65 ; maternelle, 65 ; occi- tion ; dé-motivation, 39, 161, 164-5,
dentale, 65. 207, 209.
Lectureb), 22, 48, 67, 80-2, 96, 139, 141, Motricité, 35, 41, 43, 50, 53, 55, 58, 69,
143, 145, 159, 163-4, 200, 242, 205, 74, 78, 97, 101, 103, 124, 139, 141,
216, 217, 221. 145-6, 160-1, 168.
Limbique, cf. cerveau ; système. Mots-clés, 32, 40, 43, 45, 52, 74, 99,
Linéarité (et non-), 61, 77, 88, 102, 105, 117, 132, 142, 196 (tabl. 6).
108, 172, 189, 253. Mouvement, 52, 53, 56, 69, 94, 96, 97,
Localisation(s), 36, 42, 48, cf. cerveau, 101, 112, 201, 209, 222, cf. motricité.
hémisphères. Multi-factoriel (choix), 153.
Logique, 65, 81, 8'7, 92, 156, 249. Multi-sensorialité, 43, 50, 55, 133, 140,
Lumière, 36, 113, 137. 172, 206, 217.
Musique, 106, 108, 131, 168.
Main, 69, 106, 124, 141, 161, cf. Myélinisation, 43, 44, 51, 55, cf.
gaucher. cerveau.
Malnutrition, 64.
Mandala, 138, 145. Naissance, 132, cf. cerveau, maturation.
Mass-média, 152, 157. Neural, 36, 69.
Index thématique 283
Neurone, cf. cerveau. Paradoxe, 18, 20, 109, 123, 125, 127,
Neuropédagogie, 11, 21-23, 25, 118, 130, 251.
175-248. Paramètres, 45, 5 , 65, 66, 78, 81, 112,
Neurosciences(neur0-bilogie, physiolo- 140, 144, 177, 197, 200, 203, 204,
gie...), 11, 21, 22, 24, 29, 30, 31, 36, 207, 226, 229.
39, 42, 44, 53-4, 59, 61-3, 72, 74, 76, Parole, 61, 65, 67, 68, 81, 110, 127, 165,
83, 84, 93, 103, 105, 117, 118, 119, 204, cf. langage.
124, 131, 158, 178, 189, 190-200, 223, Passage à l’acte, 20, 22, 128, 136.
251 ; implications, 35, cf. pédagogie. Passerelles, 21, 22, 117, 178, 201, 252.
Neuroculturel, 105, 114. Pauses, 68, 76, 131, 208 ; structurantes,
Neuromélanine, 113. 68, 86, 108, 173, 203.
Neurotransmetteurs, 32, 35, 36, 61, 76, Pédagogie (à construire), 22, 23, 104,
85, 100. 127, 139, 140, 141, 151, Partie III,
Niveaux, de conscience, cf. conscience ; 251, cf. conscientisation ; actes, 56,
d’interprétation, 60 ; intégration, trai- 130 ; activités, 41, 132 ; adaptée, dif-
tement, 21, 24, 52 ; d’organisation, férenciée, 55-56, 147, 149, 177 et sv.,
40, 45 et sv., 144. 252 ; bases, 99, cf. formation ;
Norme, 123, 134, 230, cf. évaluation. charte, 172-3 ; cohérente et compati-
Notions (redéfinir), 23, 24, 42, 60. ble, 21, 23, 42, 99, 109, 113, 117,
Nouveau (regard), 229 et sv. 124, 128, 133-4, 158-165, 171, 213 et
Nourriture, 134, cf. éduquer. sv. 226, 252 ; contenu, 45, 109, 142 ;
Nutrition (et mal-), 113, 132. cf. partie III ; démarche, 124, 220 ;
diagnostic, 128, 136, 143, 155, 172,
199, 201 ; dialogue, 136, 167, 182,
Objectifs, 18, 151 et sv., 243, 248, cf. 184, 186, 200, 207, 215 ; efficacité,
apprentissage, pédagogie. 24, 50, 92, 109 ; erreurs, 92, 164,
Objectivité, 90, 109, 146, 167. 172, 227, cf. cerveau, faute contre le ;
Observation, 37, 40, 60, 77, 94, 99, 109, expériences, 24, 124, cf. expériences ;
136, 153, 199, 210-212 (tabl. 14, 15 nouveau regard, 24, 30, 66, 124, 229
et 16), 217 (tabl. 17) ; grilles, outils et sv. ; objectif(s), 20, 128, 139, 143,
d’, 25, 93, 136. 153, 205, 257 ; observation, 136, 211,
Occident, 21, 65, 72, 77, 85, 86, 101, cf. observation ; outils, 21, 23, 124,
109, 112, 127, 144, 145, 165-6, 177, cf. techniques ; perspectives, 117 et
222, 221, 244, 253. sv. ; pratiques, 39, 253, 257 ; straté-
Odeur, 107, cf. olfaction. giedstyles d’intervention, 20, 21, 22,
CEil, 41, 52, 101, 106, 127, 137, 222, cf. 24, 147, 172, 182 et sv. ; techniques,
champ visuel ; vision. 21, 136-149, cf. outils.
Olfaction, 80, 146. PEI (Programme d’Enrichissement lns-
Ondes, 106, 107, cf. cerveau ; trumental), 154-5.
holophonie. Pensée, 14, 37, 50, 53, 56-60, 68, 87,
Ontogenèse, cf. cerveau, maturation. 102, 109, 123, 127, 144, cf. cerveau,
Opérations mentales, 5 8 , 60,66, 69, 200, cognition, mental, réflexion, ; for-
cf. cerveau, processus ; cognition. melle, 59, 163 ; latérale, 149, 154,
Oreille, 19, 20, 41, 65, 106, 107, 127. 156, 227.
Organisation (niveaux de), 42, 60, 81, Penser, 48 ; apprendre à, 156.
87, 96, 106, 133. Perceptifs, 21, 52, 65.
Orient, 72, 85, 112. Perception, 18, 22, 35, 37, 41, 44 et sv.,
Orthographe, 142, 160. 51, 5 5 , 65, 68, 72, 75, 84, 88, 93-4,
Oscilations, 108, 131, cf. équilibre ; fluc- 97, 107, 110, 154, 204, 207, 254-5 ;
tuations ; rythme. entraînement/élargissement, 40, 111 ;
Oubli, cf. mémoire. modifcation, 80 ; périphérique, 6 1.
Outils, 11, 19, 23, 25, 105, 111, 128, Performance, 41 et sc., 77, 92, 93, 96.
133, 140-1, 142-6, 149, 153, 171, cf. 101, 114, 131, 159, 244, cf. appren-
Partie III, 251. tissage ; tâche.
Oxygène, 69, 96, 100, 111-2, 134, 178, Personnalité, 93, 152, 157, 255.
203, 253. PET, 34.
Photographie, 106, 107, 131, cf.
Paradigmes, 111, 159. représentation.
284 J’apprends, donc j e suis
Physique, corporalité, 112, 124 ; science, Regard, i l , 30, 52, 96, 121, 132, 137,
30, 31, 37, 45, 67, 85, 108, 159. 178, 206, 258.
Pluriel (concept), 25, 90, 129, 177. Régulation, 52, 53, 88, 104 (auto-), 113,
Positives (images, pensées), cf. image de 137, 163, 221.
soi. Relation(s), 24, 30, 128-130, 131, 143,
Potentiel, potentialités, 11, 24, 37, 144, 153, 189, 204, 207, 226, 233-4 ;
99-115, 124, 136, 25, cf. cerveau. apprenant-enseignant, 23, 24, 152,
Potentiels évoqués, 32, 34, 86, 93, 94. 155, 161, 164, 181-2 ; mise en, 140-2,
Pro-action, 81, 88, 104 (fig. 4), 189, 255. 143, 200.
Problème (résolution de,), 47-48, 54, 81, Relaxation, 108, 113, 131, 146, 162.
87, 128, 154-5, 163, 167-8, 171, 253. Répertoire-exploration (concepts), 25,
Processus, cf. apprentissage, cerveau. 22-09 et sv.
Profils, 64, 89, 128, 184 et sv. 196, Repos sensoriel, 68, 97, 203-4, cf. pau-
200-202, cf. apprentissage ; épistémo- ses structurantes.
logique, 200. Représentation(s), 21, 82, 87, 103, 109,
Programmation Neuro-Linguistique 114, 123, 146-7, 156, 172, 203, 222,
(PNL), 137, 162, 200. 226, cf. système.
Programmes (éducatifs, scolaires), 54-5, Résistances, 178, 226, cf. changement.
67, 153 et sv. 165, 186 ; modèle uni- Respiration, 86, 96, 108, 111-2, 115, 131,
directionnel/muitifactoriel, 15 3. 137-9, 163-4, 209, 210-212, 252, cf.
Progression, 18, 55. oxygène.
Projet, 104, 115, 124, 144, 151, et sv., Ressources, 25, 99, 124, 136, cf. appren-
165 et sv. 205, 208, cf. programme, tissage ; cerveau ; potentiel.
pédagogie. Rétro-action, 35, 81, 83, 88, 104, 105,
Psychisme, 87, 112, 113. 110, 189, 255.
Psychologi(qu)e, 25, 53, 59, 86, 91, 123, Rêve, 84, 97, 129, 166.
159. Révolution, scientifique, 110 ; environne-
Psychophysiologie, 89. ment, 127.
Psychosociale (perspective), 25, 153, 253. Rythme(s), 18, 61, 65, 68-70, 72, 83, 85,
86, 90, 94, 96-8, 115, 119, 128, 131,
137, 142, 184, 201, 204, 226 ; cf.
Questionnaire(s), 136, 184, 186-7, cf. apprentissage ; BRAC ; cerveau,
évaluation. ondes, rythmes, cf. chronobiologie,
Questionnement (auto-), 179, 224. synchronie ; cardiaque, 163-4, 210,
cf. oscillations ; de travail, 112 ; res-
Radioactivité, 32, 34, 67, 203. piratoire, 1 12-3.
Radio-isotope, 67.
Raisonnement, 54-5., 59, 69, 77, 81, 115,
131, 137, 155 et sv., 163, 210, 211 Savoir, savoir-faire, savoir-être, 117, 118,
(tabl. 15), 212. 123, 151, 158, 167-8, 253.
Rayons X, 32. Scanner, 34.
Réalitéhéel, 21, 79, 81, 85, 86, 103, 107, Schémas heuristiques, 140, 142, 208.
108, 124, 144, 145, 155, 200, 206, Schèmes, 56.
245, 253, cf. imaginaire. Schizophrénie, 93.
Réactivation, 208, cf. mémoire. Science(s), 67, 99, 103, 112, 117, 118,
Re-cadrage, 149. 119, 121, 124, 151-2, 157, cf. physi-
Re-centrage, 129, 137, 145, 162, 209. que ; de l’éducation, 108, 117.
Recherche, 25, 152, 178-9 et sv., 229, Sélectivité, 56, 61, 74, 103.
249, 251, 252, 2.57. Sémantique, 76, 221, 224, cf.
Reconnaissance, 106, 107, 129, 159, 204, signification@).
207, cf. identification ; cf. mémoire, Sensorialité, 21, 34, 37, 41, 42, 47-8, 50
rappel. et sv. 77, 83, 104, 105, 124, 136, 139.
Réductionnisme, 14’3, 171. Sensori-moteur, 58, 88, 153, 160.
Réflexe, 50, 48, 87, 208, cf. autonomie, Sexe, 46, 96.
habitudes. Signification(s), 40, 44, 97, 128, 159,
Réflexion, 44, 48, 54, 128, 133, 152, 178, 204 ; partage des, 124, 165.
160-1, 167, 181, :!O& cf. information, Silence, 68, 166, 181, 203, 229, cf. pau-
traitement. ses, repos sensoriel.
Index thématique 285
Social, 53, 72, 91, 114, 123, 127, 137, Tabac, 115.
152-3, 157, 165, 166, 167, 221. Techniques, 67, 83, 127, 133, 145, 185,
Socialisation, 92, 109. cf. pédagogie, outils, techniques.
Sociologie, 108, 123. Technologies, 19, 31, 32, 100, 124, 127,
Sommeil, 84, 113, 129, 131. 189, 190 (tabl. 2).
Sophrologie, 86, 113, 162. Télévision, 217.
Spatio-temporel, 82, 95, 136. Temps, 72, 79, 85, 109, 110, 123, 142,
SQUID, 35. 155, 201, 247, 250, cf. durée,
Stéréotaxie, 34. Espace-temps.
Structuration, 40, 44, 47, 74, 80, 87, Test, 136, 182, 184, cf. évaluation.
112, 137. Théories, 30, 35, 110.
Structure(s), 11, 40, 51, 79, 82, 92, 96, Thermodynamique, 30.
98, 102, 107, 110, 140, 141, cf. cer- T-1, 136, 178, 181, 187, 188, 221.
veau ; dissipatives, 107, 108 ; nouvel- Tolérance, 106, 162-3, 248.
les, 108, 109, 131. Toucher, tactile, 35, 124, 146.
Structure-global, 167. Tradition, 109.
Styles, cf. apprentissage, profil, cf. péda- Transition, 142.
gogie, stratégies et styles.. .
Survie, 46-7, 91, 93, 160. Unité, 50, 95, 97 ; d’action, 153 ; de
Symbole, 58, 213. base, 72, 95, 97 ; psychosomatique,
Symbiotique, 105. 86, 253.
Synapse, cf. cerveau.
Synchronie, 18, 94, 97-8. Univers, 35, 99, 103, 108, 131.
Synchronisation, 137, 138 ; dé-, 84, 255. Universalité, 97.
Synectique, 143.
Synergétique, 105. Valeurs, 91, 167, cf. système.
Synergie, 79, 255. Validation, 102, cf. évaluation.
Synesthésie, 107, 141-2, 146, Variables, 53, 92, 94, 96, 128, 158-4,
Synthèse, 74, 107, 141, 171, 172, 189. 226, cf. paramètres.
Système@), 23, 24, 40, 103, 110, 132, Veille (état de), 131, cf. vigilance, éveil.
227, 246, 255 ; auditif, 51 et sv., 76, Vérification, 104 (fig.. 4), 110.
77, cf. audition ; écriture, 221-2 ; Vidéo, 185-6.
éducatif, 17, 18-20, 24, 45, 54-5, 60, Vie, 18, 22, 36, 37, 41, 42, 45, 48, 51,
110, 118, 123, 124, 128, 141, 148, 111, 255 ; rythme, 72.
152, 154, 156, 166, 169, 230, 249; Vigilance, 68, 79, 84, 86, 87, 113, 163,
limbique, 47 et sv., 73, 91, 114, 115 ; 211, cf. éveil, conscience.
ouvert, 108-9, 131, 188-9 (fig. 9) ; Vision, 35, 39, 44, 45, 67, 78, 94, 139,
nerveux autonome, 58, 162, 163-4, 141, 145, cf. système visuel ; du
210 ; nerveux central, cf. cerveau ; monde, 159 ; visuo-spatiale, 52.
percepfif, 19, 109, cf. perception ; Visualisation, 143, 154, 159, 180, 204, cf.
références, de, 68, 72, 128, 156, 208 ; images mentales.
représentation, 18, 136 ; sensoriel, Vitamines, 111, 113.
45 ; cf. sensorialité ; valeurs, de, 68, Voix, 21, 100, 129, 168, 185.
90,92, 128, 166 ; visuel, 51-53, 76-77, Volontaire (activité), 58, 74, 205.
101, 106, 109, cf. vision.
Systémique (approche), 23, 30, 60, 189. Yoga, 86, 112, 144, 162, cf. méditation.
INDEX DES AUTEURS ET NOMS PROPRES

Aborigènes, 151, 165, 169 et sv. Bogen J., 65.


Admes, 232. Bohm D., 79.
Agam J., 154. Bohr N., 67, 237.
Alexander G., 113. Bolt, Beranek and Newman Consulting
Allemagne, 69. Firm, 157.
Allport G.V., 92. Bono de, E., 154, 232, 239, 242, 243.
Anglard P., 112. Bouton J., 85.
Antiquité, 76. Bower G.H., 78.
Appenzelle, 57. Brighwell R., 77.
Aristote, 29, 190. Broca P., 33, 58, 65, 67, 68, 190, 205.
Arlin P.K., 54. Brodmann K., 52, 58, 60, 190.
Atkinson J.W., 91, 131. Brook L.R., 77.
Australie, 69, 77, 165-169. Brown M.E., 71.
Azemar G., 231, 240. Brunon G., 53.
Buchsbaum M.S., 93, 94.
Bachelard G, 144. Buckminster Fuller R., 234, 253.
Baddeley A., 77. Bue11 S.J., 194.
Bakan P . , 66. Bullier J ., 43.
Bali, 95. Bullock, 59.
Balonov L., 65. Buzan T., 141, 208, 240.
Bancroft J., 100. Byers P., 72, 97, 98.
Bandler R., 80, 241, 246.
Bar Ila (Univ.), 155. Cajal Ramon, y, 190.
Barr F., 35. Californie (Université de), 158.
Barth B.M., 44. Campina L.H., 151.
Bateson G., 103-4, 148, 233, 234, 236, Canada, 32.
238, 241, 243, 245. Cannon W., 91.
Baudry M., 75. Capra F., 37, 79, 103, 234, 237, 239,
Beatty J, 89, 231. 244, 247.
Belgique, 248. Caracas, 153-4, 158.
Berger H., 32, 190. Cardon A., 177, 241.
Bernard Claude, 91. Carrel A., 248.
Bertalanffy L. von, 247. Cayrol A., 185, 241.
Binet A., 190, 239. Cazenave M., 244.
Birdwhistell R.L., 233, 234. Cerami A., 75, 115, 194.
Bjorlund A., 35. Changeux J.P., 22, 43, 44, 71, 88, 89,
Blignières Legeraud A. de, 177. 104, 191, 231.
Blondiaux D., 49, 135. Charcot J., 190.
Blozovski D., 194. Charrière H., 77.
288 J’apprends, donc j e suis
Charron J., 45, 102. France, 24, 25.
Chauchard P., 71. Freinet C., 143.
Cherkaoui M., 246. Freud S., 46, 87, 91, 190.
Chopin F., 77. Fromm E., 248.
Claggett M.F., 142. Frostig M., 5 5 , 142.
Clynes M., 32, 45, 95, 97, 235, 245. Fusella V., 78.
Cohen R. 66.
Coleman P.D., 194. Gabord D., 70, 79, 106.
Colorado, 24. Gainotti G., 90.
Commons M.L., 60. Galaburda A.M., 63, 236.
Condon W.S., 72., 97, 98. Galin D., 44.
Copenhague, 69, 88. Gall F.J., 29, 190.
Coulon J. de, 113, 138, 231, 242, 246. Galvani L,., 102, 190.
Coulter D.J., 5 5 , 142, 151, 158-165, Garanderie A., de la, 143-4, 200-1.
193-4. Gardner H., 66, 101, 242.
Gazzaniga M.S., 61.
Danchin A., 231. Geschwind N., 63.
Dax M., 61. Gestalt, 92.
Deglin V.L., 61, 6 5 . Gilling D., 77.
Dejerine J.J., 101. Clisson F., 102.
Deleplanque B., 205, 227. Goethe J.W., 53.
Denis M, 77, 80. Goldberg G., 70.
Descartes, 11, 102., 190, 235. Goldflam R., 165.
Descomps D. 239. Golgi C., 190.
Diagram Group, 192. Gordon W.J.J., 143, 158.
Diamond M., 100. Gray W., 50.
Dillbeck M., 114. Grecs, 189.
Dilts R., 143, 241. Gribenski A., 45.
Dixon T., 240. Guberina P., 69.
Dobbing J., 51. Guillé E., 41, 87, 103, 232, 233, 234,
Du Bois-Reymond, 102. 237, 240, 246.
Guillemin R., 35.
Eccles J. Sir, 69, 190. Cur R.C. et R.E., 63.
Egyptiens, 29, 190.
Einstein A., 81, 100. Hademard J., 8 1.
Elliott T., 190. Haeckel E., 46.
Englund C.E., 98. Hagège Ci., 233.
Enjalbert A., 32. Haler von, 102.
Epelbaum J., 32. Hall E., 87, 97, 118, 123, 233, 235, 238,
Epstein H.T., 51, .54, 56, 59, 245. 242.
Ernst K . , 183. Hameline D., 244.
Escondido Union School District Board Hampden-Turner C., 60, 237, 245, 253.
of Education, 158. Hardy C., 41, 233, 234, 237, 240, 246.
Estrella M.A., 77, 242. Harnett D., 66.
Esquimaux, 97. Harris G., 190.
Etats-Unis, 24, 59, 69, 95, 146, 158. Hart L., 158.
Etevenon P.R., 85, 242. Harvard University, 60, 155, 157.
Hayflick L., 115.
Fain G.L., 52. Hebb D., 91.
Falkner F., 60. Hébreux, 29, 189.
Fehmi L., 89, 90. Hegel G.W.F., 253.
Ferguson M, 35. Helmoltz H.L.F. Von, 190.
Feuerstein R., 155. Hillyard S.A., 89, 231.
Finke R.A., 78, 144. Hippocrate, 29.
Flak M., 113, 138, 231, 242, 246. Hodgkin A . , 190.
Flores C., 71. Homère, 29.
Flourens P., 190. Houston J., 143.
Fraisse P., 69. Hubel D., 45, 191.
Index des auteurs et noms propres 289
Huebner D., 247. Le Poncin Lafitte M., 115.
Hugues J., 35. Lewin K., 91.
Huster Francis, 165. Lewontin R.C., 63, 230, 236, 238, 247.
Huxley A.F., 191. Libet B., 95.
Hyden H., 50, 190. Lieury A., 71.
Lorayne H., 71.
IBM, 103. Louis J.C., 112.
Imbert M., 52, 191. Luce G., 113.
Inhelder B, 53, 58. Luria A., 43, 48, 56, 59, 68, 71, 73, 74,
INRP, 240. 114, 119, 141, 190, 204.
Isabelle D.B., 34. Lynch G., 75.

Jackson H., 190. Machado L.A., 151, 153-44, 175, 236.


Jacobson L., 246. MacLean P., 46-50, 191-2, 206.
Jacquard A., 13-5, 23, 121, 169, 230, Madsen K.B., 90-92.
231, 236, 240, 242. Mager R., 243.
Jakobson R., 60, 65. Magoun H., 81, 88.
James M., 241. Mamo H., 43, 52.
James W., 71. Maracaibo, 154.
Jaoui G., 183, 241. Marc E., 24, 246.
Jaoui H., 235. Martinerie, Atelier de la, 27.
Japon, 97. Maslow A., 92, 111, 234.
Jeannerod M., 52. Maslow P., 5 5 , 142.
Jerison H.J., 81. McClelland D.C., 91.
Johnstone J., 44. McCulloch W., 30.
Jongward D., 241. McGaugh, 73.
Jousse M., 69, 70, 242. Mendelsonhn, 243.
Jouvet M., 85, 129, 191. Meirieu P . , 240, 244.
Jung C., 53, 98, 138, 234. Mésopotamie, 29, 189.
Metropolitina (université), 156.
Kafka F., 80. Mexique, 95.
Kalahari, désert de, 97. Miller C.A., 91.
Kamin L.J., 203. Mishkin M., 57.
Kearins J., 77. Morin E., 245.
Kekule von Stradonitz A., 81, 235. Moruzzi G., 84, 88.
Kerckove D. de, 105, 222, 237. Murray Schaffer R., 19, 238, 247.
Kimura D., 65-6.
Klee P . , 231, 237. Nauta W., 101.
Klein R., 131. Neisser P.W., 77.
Koestler A., 232, 253. Nobel, prix, 31, 107.
Kohn M., 32. Nord J., 110, 204.
Korzybski A., 21, 147, 232, 243, 246. Nouvelle-Guinée, 97.
Kosslyn S.M., 41, 77.
Kosterlitz H., 35. Ornstein R., 71, 72.
Kuhn T., 110. Oxford, 29.

Labbe D., 237. Paivio A., 76, 80.


Laborit H., 40, 43, 50, 71, 73, 76, 80, Palo Alto, 23, 24, 30, 241, 245.
87, 89, 191, 231, 234, 235. Papert S., 105.
La Mettrie, 102. Papez J.W., 190.
Landsheere G., 243, 248. Paracelse, 151.
Lao Tseu, 234. Paty J., 86, 87, 88.
Lashley K.S., 70, 106. Pavlov I., 190.
Lassen N., 68, 191, 203-4. Pegand G., 87.
Laszlo E., 90. Penfield W., 32, 190.
La Violette P . , 50, 248. Peretti A. de, 177, 232, 246.
Le Cours A.R., 50, 5 5 . Perlmutter M., 115.
Lenhardt V., 241. Petrie A., 93.
290 J’apprends, donc j e suis
Piaget J., 53, 54, 58, 59, 190, 233, 238. Sheldrake R., 98, 103, 148.
Picard D., 24, 246. Sherrington C.S., 29, 190.
Pietsch P., 70. Shneour E.A., 113.
Platon, 29, 96, 121, 235, 245. Simons G.L., 106.
Popper K., 98. Singer C., 180, 232, 245.
Postman L., 71. Skinhoj E., 191.
Poze T., 143, 158. Skinner B.F., 91, 190.
Pressley M., 142. Snyder S., 35.
Pribram K., 40, 70, 71, 79, 87, 88, 104, Socrate, 31, 190, 234.
106, 163, 191, 231. Soljenitsyne A., 77.
Prigogine I., 40, 103, 107-8, 131, 204, Spence K.W., 91.
238, 247. Sperry R.W., 31, 61, 190, 194.
Proust M., 79, 80. Stengers I., 238, 247.
Purkinje E., 190. Stevick E.W., 208.
Stroud J.M., 78.
Rabinowicz T., 114.
Racle G., 236. Tai-Chi, 62.
Rakic, 51. Talmud, 251.
Reeves H., 133, 240, 244. Thevenin A., 109, 236.
Regan D., 32, 44. Tinbergen N., 91, 238.
Remy C1. 106. Toffler A., 19.
Renard R., 69. Tomkin S., 253.
Ricateau M., 71. Toronto, 105.
Rico G. Lusser, 142. Tournier M., 248.
Rilke M.R., 17. Trocmé H., 185, 222.
Robert J.M., 102, 242. Tsunoda T., 65.
Roch-Lecours A., 63, 64, 105, 114. Tulving E., 77.
Roederer J.G., 106-7. Twain M., 80.
Roentgen, 32.
Rogers C., 92. Unesco, 158.
Roland P.E., 69, i38, 231. Ungar G., 191.
Rolando L., 190.
Rose S., 54, 230. Valéry Paul, 129, 251.
Rosenfeld A.H., er S.A., 94. Vanderhaegen Cl., 89.
Rosenthal R., 246. Van Vasselaer, 69.
Rosenzweig M.R., 71. Varela F., 232, 237.
Rosnay J. de, 103., 105, 247. Vellutino F., 236.
Ross E., 65, 205. Venezuela, 24, 151-158.
Ruesch J., 233. Vesely S., 114.
Russel P., 240. Veyre A., 34.
Ryle G., 237. Vincent J.D., 35, 42, 43, 71, 76, 89, 95,
Slan Diego, Cal., !36. 100, 108, 131, 238, 247, 248.
Saint-Exupery A., 80, 119. Vinci, Leonard0 da, 190.
Saint-Paul de J., 185, 241. Vygotsky L.S., 5 5 .
Sands J., 51.
Sartre J.P., 243. Waber D.P., 56, 60.
Satyananda S., 113, 242. Waldeyer W., 29, 190.
Saucet M., 243. Wallon H., 44, 59, 95.
Scheflen A., 240, 2!41, 245. Walter G., 85.
Schultz, 113. Watson J., 190.
Schwartz B., 177. Watzlawick P., 138, 139, 232, 233, 245.
Scott C., 165, 169. Waugh L., 60, 65.
Segal S.J., 78. Webbink P., 1137.
Selye H., 238. Wernicke C., 33, 58, 65, 68, 190.
Sergent J., 66-7, 197-8. Whitehead A.N., 5 5 .
Serres M., 19, 98. Wiener A., 30.
Servan-Schreiber J.L., 235. Wiener H., 216.
Sheeman P.H., 77. Wiesel T., 45, 191.
Index des auteurs et noms propres 29 1
Wilden A., 103, 245. Yi King, 175, 233.
Williams L.V., 141, 143, 145, 158, 231, Young A., 35.
233, 246. Young J.Z., 71.
Willis T., 29, 190. Young P.T., 91.
Witelson S . , 63, 64. Yourcenar M . , 129, 243.
Wittrock M.C., 66, 71, 77.
Yakovlev P.I., 51, 5 5 . Zaidel E., 64.
Yale University, 156. Zuccharelli H., 107.

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