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fr
FOCUS
PROGRAMME BARRACUDA
PAGE 26

RENCONTRE
VICE-AMIRAL
CHARLES-HENRI GARIÉ
PAGE 28
LE MAGAZINE DE LA MARINE NATIONALE N°3049 — JUIN 2016
IMMERSION
SUPER ÉTENDARD MODERNISÉ,
LA DER DES DER
PAGE 42

Lutte sous la mer


Les secrets de l’excellence
Publicité
Éditorial

Profondeurs stratégiques

O
n l’oublie souvent – corollaire incontournable – sous les mers et à
en cette période de pouvoir mettre en œuvre à tout moment des moyens
commémorations : de rétorsion face à une menace.
l’emploi de l’arme sous- Depuis la fin de la guerre froide, le nombre de pays
© PASCAL DAGOIS/MN

marine fut la grande dotés de forces sous-marines a été multiplié par


innovation de la Première quatre. La menace, loin d’avoir diminué, n’a fait que
Guerre mondiale. La lutte croître.
sous la mer est dès lors Dans ce maquis maritime, la traque est silencieuse
Capitaine de vaisseau
devenue un pilier du combat naval. Les espaces sous- pour mieux percevoir les signaux émis par une
Didier Piaton marins constituent, depuis plus d’un siècle désormais, menace fugace par nature ou les faibles échos des
Directeur les lieux d’affrontement privilégiés des puissances. sonars. Ne s’y aventurent que les marines disposant
de la publication
Ils sont aujourd’hui essentiels à nos forces armées d’un savoir-faire entretenu, c’est-à-dire la capacité à
comme à notre économie. détecter, identifier, pister et éventuellement attaquer
Notre capacité à garantir l’invulnérabilité de nos des sous-marins. La lutte sous la mer, c’est savoir et
SNLE(1) confère son efficacité à la composante agir sous l’eau. Ce rôle revient à nos frégates anti-
océanique de la dissuasion, « assurance vie de la sous-marines avec leurs hélicoptères embarqués, à
Nation ». Comme le dispositif de lutte anti-sous- nos sous-marins eux-mêmes et à notre patrouille
marine autour de nos groupes aéronaval et amphibie maritime.
assure leur liberté d’action. Que serait par ailleurs la Domaine véritablement passionnant, il exige de nos
mondialisation sans l’aptitude des nations maritimes marins une mobilisation de tous les sens, autant que
à protéger les 90 % des échanges mondiaux qui ruse et esprit combatif. L’ascendant sur la menace
s’effectuent par voie de mer ? À quoi serait réduite la sous-marine n’est possible que grâce à leur expérience
protection du territoire national et de nos approches et leurs compétences. La Marine peut être légitiment
maritimes sans défense face à la menace sous- fière de ce capital humain, aujourd’hui mondialement
marine ? reconnu, qui se construit dans la discrétion et la
Les flux maritimes, tout comme la liberté rigueur du central opérations de nos bâtiments de
de manœuvre de nos forces stratégiques et combat.
conventionnelles, ne sont garantis que par la capacité
(1) Sous-marin nucléaire lanceur d’engins.
de la Marine à savoir ce qui se passe en mer et

LE MAGA ZINE DE L A MARINE NATIONALE


Rédaction : Ministère de la Défense, SIRPA Marine Balard parcelle Est Tour F, 60 bd du général Martial Valin CS 21623 – 75509 Paris cedex 15 Téléphone : 09 88 68 57 17 Contact internet : redaction.sirpa@
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Nathalie Pilant Photogravure : Média Grafik Couverture : Mélanie Denniel/MN 4 e de couverture : Jacques Estonard/MN Imprimerie : Roto France, rue de la Maison Rouge 77185 Lognes. Abonnements :
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ne sont pas rendus, les photos sont retournées sur demande. Pour la reproduction des articles, quel que soit le support, consulter la rédaction. Commission paritaire : n° 0211 B 05692/28/02/2011
ISBN : 00 10 18 34 Dépôt légal : à parution

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Publicité
actus 6 32 vie des unités
Opérations, missions, entraînements quotidiens.
Les unités de la Marine en action

37 RH
• Réserve opérationnelle – Montée en puissance des effectifs
• Rénovation de la concertation – Renouvellement du CFMM et du CSFM

Passion Marine 16
Lutte sous la mer – Les secrets de l’excellence

40 portrait
Maître principal Arnaud L., chargé de la formation au Centex Metoc

42 immersion
Super Étendard Modernisé, la der des der

focus 26
Programme Barracuda – Le type Suffren, un SNA nouvelle génération

rencontre 28
« Le bataillon, c’est comme si l’on avait 17 navires, en permanence en mer »
Vice-amiral Charles-Henri Garié

46 histoire
La guerre de Crimée (1854-1856) : Une victoire forte mais amère

48 loisirs
Toute l’actualité culturelle de la mer et des marins

planète mer 30
La maîtrise des profondeurs toujours recherchée – Fièvre sous-marine en Asie

COLS BLEUS - N°3049 — 5


actus
© MN

6 — COLS BLEUS - N°3049


instantané

VISITE OFFICIELLE DU CEMM


EN AUSTRALIE
Du 9 au 13 mai, le chef d’état-major de la Marine
(CEMM), l’amiral Bernard Rogel, s’est rendu en
visite officielle en Australie où il a rencontré son
homologue, l’amiral Berrett. Le CEMM est intervenu
au National Security College afin de présenter la
position française en termes d’« Enjeux stratégiques
au sein des espaces maritimes ». Les deux CEMM
se sont ensuite réunis pour un dépôt de gerbe
à l’Australian War Memorial, mémorial national
australien consacré à la mémoire de tous les
membres de ses forces armées qui sont morts ou ont
participé aux guerres du Commonwealth d’Australie.
Cette visite officielle est un témoignage de la forte
coopération entre deux nations du Pacifique, axée
sur l’amphibie et le développement des forces
sous-marines de la Royal Australian Navy grâce à un
partenariat stratégique.

COLS BLEUS - N°3049 — 7


instantané

FALCON 50 :
SEARCH AND RESCUE
À la suite de la disparition en Méditerranée du vol
Paris-Le Caire dans la nuit du mercredi 18 au jeudi 19 mai,
la Marine a dépêché dès le jeudi matin un avion de
surveillance maritime Falcon 50, initialement engagé dans
l’opération EUNAVFOR Med Sophia.
Grâce à son expertise dans le domaine de la surveillance
maritime, il apporte une contribution essentielle dans les
recherches aux côtés de moyens navals et aériens grecs,
turcs et américains, sous la coordination des autorités
égyptiennes. D’autres moyens seront susceptibles d’être
mobilisés en fonction des besoins exprimés par l’Égypte.
© CÉLINE POIROT/MN

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COLS BLEUS - N°3049 — 9
actus

Amers et azimut
Instantané de l’actualité des bâtiments déployés

1 3
OCÉAN ATLANTIQUE MANCHE – MER DU NORD

OPÉRATION CORYMBE MISSION HYDROGRAPHIQUE


DONNÉES PHM LV Lavallée • Falcon 50 Mi BH La Pérouse

GÉOGRAPHIQUES PRÉPARATION OPÉRATIONNELLE DÉFENSE MARITIME DU TERRITOIRE


CMT Sagittaire • BRS Antarès • A BRS Aldébaran BRS Cormoran
Source Ifremer
DÉFENSE MARITIME DU TERRITOIRE GUERRE DES MINES
ANTILLES BRS Altaïr • PHM Cdt Blaison CMT Andromède • D CMT L’Aigle • BBPD Vulcain
ZEE : env. 138 000 km 2

MISSION HYDROGRAPHIQUE OCÉAN


BHO Beautemps-Beaupré ARCTIQUE
GUYANE
ZEE : env. 126 000 km2 DÉPLOIEMENT LONGUE DURÉE
B B2M D’Entrecasteaux

CLIPPERTON
ZEE : env. 434 000 km2

MÉTROPOLE
ZEE : env. 349 000 km2 3

NOUVELLE-CALÉDONIE –
WALLIS ET FUTUNA
ZEE : env. 1 625 000 km2
OCÉAN ATLANTIQUE
2
SAINT-PIERRE-ET- 1
MIQUELON
ZEE : env. 10 000 km2
Antilles
TERRES AUSTRALES Clipperton Guyane
ET ANTARCTIQUES
FRANÇAISES
ZEE : env. 1 727 000 km2
OCÉAN PACIFIQUE

POLYNÉSIE FRANÇAISE 5
ZEE : env. 4 804 000 km2
5
LA RÉUNION – MAYOTTE – OCÉAN PACIFIQUE
ÎLES ÉPARSES
MISSION ASIE
ZEE : env. 1 058 000 km2
FS Vendémiaire + Alouette III

Points d’appui
Bases permanentes en métropole,
outre-mer et à l’étranger
Zones économiques exclusives françaises

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actus

29 MISSIONS PERMANENTES
Sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE)
BÂTIMENTS LE 17 MAI 2016 Sous-marin nucléaire d’attaque (SNA)

© FRANCK SEUROT/MN
11 Équipes spécialisées connaissance et anticipation

AÉRONEFS Fusiliers marins (équipes de protection embarquées - EPE)


Commandos (opérations dans la bande sahélo-
A
saharienne opération Barkhane)

2 822 2
MARINS MER MÉDITERRANÉE
OPÉRATION CHAMMAL
Atlantique 2

© MÉLANIE DENNIEL/MN
DÉFENSE MARITIME DU TERRITOIRE
PHM Cdt Birot

PRÉPARATION OPÉRATIONNELLE
FAA Jean Bart + Panther • Patrouilleur Malabar
C FLF Courbet • FASM Jean de Vienne B

MISSION HYDROGRAPHIQUE
BH Laplace

© GEORGES REIG/MN
2 C
OCÉAN PACIFIQUE

4 Wallis Polynésie
et Futuna française
Mayotte

© MÉLANIE DENNIEL/MN
OCÉAN INDIEN

La Réunion

4 D
Nouvelle-
OCÉAN INDIEN Calédonie

MISSION JEANNE D’ARC


Saint-Paul
BPC Tonnerre + 2 Alouette III • FLF Guépratte

TASK FORCE 150


FS Nivôse + E Panther
FLF Aconit + Panther
© SIMON GHESQUIÈRE/MN

Crozet ATALANTE
Falcon 50 MS
Kerguelen
DÉFENSE MARITIME DU TERRITOIRE
FS Floréal + Panther
E
D
D

COLS BLEUS - N°3049 — 11


actus

en
images
1 22/04/2016
GROUPE
JEANNE D’ARC
Dans le cadre de la
mission Jeanne d’Arc
constituée autour du
bâtiment de projection
et de commandement
Tonnerre et de la frégate
de type La Fayette
Guépratte, les deux
bâtiments ont conduit
une série d’entraîne-
ments avec la frégate
de la flotte singapou-
rienne Tenacious. Au
program­me : entraîne-
ment de combat naval,
tirs sur but flottant et
manœuvres aviation.

2 04/2016
GRAND NORD
Le patrouilleur de haute
mer Commandant
L’Herminier a récem-
ment rallié l’Atlantique
nord, au large de la
Norvège, pour assurer la
présence de la France
dans une zone en pleine
évolution. L’adoucisse-
ment des températures
à l’échelle mondiale
devrait bouleverser
la physionomie des
flux commerciaux par
l’ouverture de nouvelles
voies praticables pour
la navigation au Nord.
La Marine se familiarise
donc avec les spécifi-
cités d’un théâtre dont
pourrait prochainement
dépendre une part non
négligeable de son
économie mondiale.

3 23/04/2016
PACIFIQUE
Le commandant de la
zone maritime Asie-
Pacifique (ALPACI), éga-
lement commandant
supérieur des Forces
armées en Polynésie
française (COMSUP
FAPF), le contre-amiral
Bernard-Antoine Morio
de l’Isle, a rendu une
visite officielle au BPC
Tonnerre près du détroit
de Malacca. Il était
accompagné du
vice-amiral Ahmad Bin
Abdulallah, sous-chef
1 opérations de la Royal
© MN

Malaysian Navy.

12 — COLS BLEUS - N°3049


actus

4 29/04/2016
VISITE
MINISTÉRIELLE
M. Jay Weatherill,
Premier ministre de
l’Australie-Méridio-
nale, s’est rendu le
29 avril à bord d’un
sous-marin nucléaire
lanceur d’engins
avec l’amiral Rogel,
CEMM. M.Weatherill
a visité la base
navale de Cherbourg,
spécialisée dans
la construction de
sous-marins. Cette
rencontre s’inscrit
dans le cadre d’un
partenariat maritime
stratégique unique
entre la France et
l’Australie qui opèrent
régulièrement en
océans Indien et
Pacifique.

© CLÉMENT DONADEI/MN
5 27/04/2016
WIND TONIC
Le patrouilleur de
2 service public (PSP)
Cormoran basé à
Cherbourg a participé
à l’entraînement
opérationnel Wind
Tonic, organisé par
l’OTAN au large de la
Grande-Bretagne. Il
s’inscrit dans une suite
d’exercices internatio-
naux de Search and
Rescue (recherche et
sauvetage) appelés
Dynamic Mercy. Le
© PASCAL DAGOIS/MN

patrouilleur a partici-
pé aux recherches
en mer, en assurant
les fonctions de
3 4
© MN

coordinateur aérien.

6 08/05/2016
PRISE D’ARMES
À l’occasion des com-
mémorations du 8 mai
1945, le contre-amiral
Antoine Beaussant,
commandant la zone
maritime de l’océan
Indien, a organisé
une prise d’armes
en présence de
M. Miraillet, ambas-
sadeur de France aux
Émirats arabes unis,
sous le dôme de l’uni-
versité Paris-Sorbonne
Abou Dhabi. Cette
© NICOLAS VISSAC/AA

cérémonie a été le
prélude à une journée
de conférences
intitulée « Regards
5 6 croisés sur l’évolution du
© MN

monde depuis 1945 ».

COLS BLEUS - N°3049 — 13


actus

dixit FREMM Provence Comh@bi


Du bon usage du
«C’est le propre des Premier déploiement réussi ! compte à points
marins d’évoluer dans
un contexte mouvant
et incertain. Cette CHAQUE MARIN DISPOSE
caractéristique les D’UN COMPTE À POINTS à
conduit assez natu- partir duquel il peut acquérir
rellement à observer des effets d’uniforme (voire sous
l’environnement, à
développer leur sens
certaines conditions, des effets
de l’anticipation et à civils) ou faire effectuer des
tenter de déterminer menus travaux de confection.
en permanence ce La dotation de base pour 2016
qui se trouve au-delà est de 270 points. Le détail
de l’horizon.» est accessible sur le site
Amiral Bernard
Rogel, chef d’état-
RH Intramar/Vie du marin/
major de la Marine Conditions de vie et de travail/
dans un entretien Tenue et uniforme.
pour la Revue de • L’acquisition d’effets se fait
la défense nationale. via COMH@BI ou auprès
du magasin habillement. Toute
demande sans rapport avec
© MN

« Les forces sous-


marines et la Force un besoin de recomplètement

L
océanique peut bloquer la délivrance.
stratégique, ce sont E 21 AVRIL, LA FRÉGATE MULTIMISSION PROVENCE A REJOINT • L’émission d’un bon de confec-
3200 personnes, civils BREST, SON PORT-BASE, AU TERME DE CINQ MOIS D’UN tion permet au marin de faire
comme militaires, DÉPLOIEMENT LOINTAIN ET EXIGEANT, QUI L’A CONDUIT galonner ses tenues, effectuer
qui œuvrent dans
l’ombre pour assurer
JUSQU’EN MER DE CHINE MÉRIDIONALE. des retouches sur ses effets mili-
la crédibilité de la Première frégate multimission à franchir le canal de Suez, elle a également été la taires, ou monter ses médailles.
dissuasion nucléaire première à être intégrée à un groupe aéronaval. Américain d’abord en rejoignant Le marin ne peut céder ses
française. Votre filleul, le porte-avions Harry S. Truman aux abords du détroit d’Ormuz, puis français, points et peut être tenu de
le Triomphant fait en escortant le porte-avions Charles de Gaulle engagé dans le golfe Arabo-Persique au restituer ses effets, ces derniers
partie de cette grande sein de l’opération Chammal. restant la propriété de l’État.
machine bien huilée
qui permet à la France
Fin mars, alors qu’elle est intégrée à la CTF 150 (Combined Task Force 150, l’une
d’être depuis 1972 des trois forces de la coalition navale multinationale de lutte contre les trafics
l’une des grandes maritimes), la Provence intercepte un navire au large de la Somalie. La fouille
puissances possédant permet de trouver plusieurs centaines de fusils d’assaut, des fusils de précision,
l’arme nucléaire. À des mitrailleuses et des roquettes antichar.
ce titre, le Triomphant La diversité des activités conduites et la variété des environnements rencontrés
participe comme les
trois autres SNLE que
ont permis de mener à bien la vérification des capacités militaires (VCM) du
sont le Vigilant, le bâtiment. Fil rouge du déploiement, la VCM se décline en expérimentations de
Téméraire et le Terrible l’ensemble des installations et organisations du bord.
à la permanence à la Au cours des 160 jours d’absence, la Provence a croisé dans trois océans,
mer. » quatre mers, embouqué les détroits de Gibraltar, Messine, Bab el-Mandeb,
Vice-amiral Ormuz et Malacca et parcouru plus de 35 000 nautiques.

© MN
d’escadre Louis-
Michel Guillaume,
amiral commandant
les forces sous-marines
et la Force océanique
stratégique à l’occa-
sion de l’escale du
le chiffre
SNLE Le Triomphant à

100
Cholet (Maine-et-Loire).

c’est le nombre
d’années écoulées
depuis la création de
l’École de navigation
sous-marine et des
bâtiments à propulsion
© MN

nucléaire (ENSM-BPN).

14 — COLS BLEUS - N°3049


actus

Ramogepol
Lutte antipollution
enbref 21 avril, à un Navy’s
Exercice for Maritime
Operations (NEMO),
dans le golfe de
UN EXERCICE DE LUTTE D-DAY Guinée. Le principal
ANTIPOLLUTION S’EST WE SHALL objectif de cet exercice
NEVER FORGET(1) multinational était
DÉROULÉ EN MER AU LARGE Le 24 avril, à l’occa- d’entraîner les marines
DE MONACO LE 27 AVRIL. sion d’une escale à riveraines à assurer
Dans le scénario, un navire Plymouth (Angleterre), la sûreté et la sécuri-
pétrolier est percuté par un une cérémonie a sation de leur espace
roulier, occasionnant un déver- été organisée à bord maritime.
sement important d’hydrocar- du bâtiment de projec-
tion et de commande- SNMG2
bures lourds. Cet entraînement ment Dixmude. Neuf L’ADROIT
a consisté à améliorer l’intero- vétérans de la Seconde À L’ŒUVRE
© MN

pérabilité des moyens maritimes Guerre mondiale Du 22 avril au 10 mai,


français, italiens et monégasques. ont été décorés de le patrouilleur hauturier
À terre, il a facilité la fluidité des Morskoul la Légion d’honneur, L’Adroit est intégré à
échanges en activant l’interface en présence du consul la force maritime de

Les chasseurs
honoraire et du maire l’OTAN déployée en
terre-mer, permettant ainsi de Plymouth. En 1944, mer Égée, le Stan-
d’anticiper l’arrivée fictive de ils servaient au sein ding NATO Maritime
la pollution sur les côtes et de
préparer la lutte en frange litto-
rale. La veille, S.A.S. le prince
de mines en action de la Royal Navy,
des Royal Marines,
de la Royal Air Force
Group 2 (SNMG2).
L’Adroit y effectue une
mission de surveillance

M
Albert II de Monaco s’était fait ou de la British Army maritime. Il s’agit, en
et ont participé au coopération avec les
présenter les moyens mis en ORSKOUL S’EST DÉROULÉ AU LARGE Débarquement en autres bâtiments du
place pour l’entraînement DE BREST DU 25 AU 29 AVRIL. Organisé Normandie et à la SNMG2, d’établir une
Ramogepol, accompagné du deux fois par an en mer d’Iroise, il est Libération du territoire image aussi exhaustive
VAE Yves Joly, préfet maritime l’occasion d’effectuer un entraînement français. que possible du trafic
de la Méditerranée. collectif avec des moyens mutualisés, dans le cadre du (1) N’oublions jamais. maritime en mer Égée.
cycle de préparation au combat des unités de la Marine. L’image tactique est en-
VENDÉMIAIRE suite partagée avec la
Les chasseurs de mines tripartites (CMT) Cassiopée et RAVITAILLEMENT Grèce et la Turquie, ainsi
Sagittaire ont ainsi mis à l’épreuve leurs compétences que l’agence Frontex.
et savoir-faire. Dans la nuit du 29 au
V22 sur BPC Dès leur appareillage, les deux CMT sont rentrés dans 30 avril, le patrouilleur
Étape validée ! une phase intense d’entraînements (menace asymé- a effectué des signale-
trique, tirs, actions de guerre des mines, identification ments d’embarcations
LE 2 MAI, AU LARGE DE et récupération de mines). Le Cassiopée a effectué une clandestines aux

© MN
gardes-côtes grecs et
CADIX (Espagne), sous l’égide simulation d’attaque nucléaire, radiologique, biologique turcs qui ont ainsi pu
du Centre d’expérimentations et chimique (NRBC). Le 22 avril, les routes de empêcher leur mise à
pratiques et de réception de Le but étant bien de faire travailler ensemble les bâtiments la frégate de surveil- l’eau.
l’aéronautique navale (CEPA/ de la Marine, le CMT Cassiopée a été remorqué par un lance (FS) Vendémiaire
10S), une étape supplémentaire autre chasseur de mines. Il a également participé à un et du pétrolier-ravitail- INVICTUS GAMES
leur USNS Rainier se sont DES MARINS
dans l’interopérabilité entre les guidage de bâtiment. Quant au Sagittaire, il a remorqué croisées dans le golfe DANS LE JEU
marines américaine et française le bâtiment remorqueur de sonar Aldébaran et à une de Siam (Thaïlande),
a été franchie, à bord du bâti- présentation pour un ravitaillement à la mer. le temps d’un ravitail-
ment de projection et de com- Les activités qui se sont enchaînés ont ainsi permis aux lement à la mer. Dès la
mandement Dixmude. Cette équipages de se réapproprier les bons réflexes, se fin du transfert de car-
campagne d’expérimentation coordonner et planifier dans les domaine de la guerre burant, l’Alouette III du
Vendémiaire a décollé
a été réalisée avec un aéronef des mines, de la sécurité et de la navigation, tout pour une série d’exer-
V22 Osprey des US Marines en progressant dans leurs capacités à opérer en groupe. cices sur le pont d’envol
Corps. Elle a validé le station­ du pétrolier américain. © MN

nement prolongé moteurs Après ce ravitaillement, Le premier maître


tournants pour le chargement/ le Vendémiaire a mis le Sébastien David et
déchargement de matériel, cap sur le Cambodge M. Mickaël Mayali
dans le cadre de sa participent aux Invictus
le ravitaillement en carburant mission de présence en Games d’Orlando, une
de l’aéronef, le pliage intégral, Asie du Sud-Est. compétition interna-
le tractage par les véhicules tionale où s’affrontent
spécialisés du bord et enfin le CORYMBE des militaires blessés en
saisinage sur le pont. L’ensemble NÉMO 16.2 opération ou en service
de ces capacités augmente Déployé dans le cadre en portant fièrement les
de la mission Corymbe, couleurs de la Marine.
encore l’interopérabilité pour le patrouilleur de Le PM David a remporté
le transport de troupes ou le haute mer Comman- une médaille d’argent
ravitaillement logistique. dant Blaison a organisé au tir à l’arc par équipe.
et participé, du 18 au

COLS BLEUS - N°3049 — 15


passion marine

Depuis leur invention et leur usage


au fil du XXe siècle, les sous-marins
sont incontestablement des outils
stratégiques pour le contrôle
des espaces maritimes. De facto, ils
permettent de protéger les flux
maritimes commerciaux comme le
déploiement de forces de projection
ou d’une force de dissuasion. D’où
l’intérêt croissant de nombreux pays
à se doter de forces sous-marines.
Dans pareil contexte, la lutte sous la
mer (LSM) est un domaine dans
lequel toute marine hauturière doit
sans cesse adapter sa doctrine et
ses équipements pour prévenir la
menace sous-marine ou simplement
rester à l’abri du chantage qu’elle
peut exercer. Dans ce domaine de
lutte, la Marine est, depuis longtemps,
à la pointe.
DOSSIER COORDONNÉ PAR L’EV1 PAULINE FRANCO

16 — C O L S BL
B L EU S - N°
N °3 0 3
494
passion marine

Lutte
sous la mer
© MÉLANIE DENNIEL/MN

Les secrets de l’excellence


COLS BLEUS - N°3049
N°2983 — 17
passion marine

ALFAN, ALFOST

La maîtrise
de l’espace
© BRUNO GAUDRY/MN

1
© MN

COLS BLEUS : Amiral, qu’est-ce que


la menace sous-marine aujourd’hui ?
Pourquoi la maîtrise du milieu sous-marin
constitue-t-elle un enjeu pour la Marine ?
VAE LOUIS-MICHEL GUILLAUME, ALFOST :
Il faut replacer cette menace dans une
perspective plus globale. Le centre de gravité
des tensions stratégiques se déplace
vers l’Asie du Sud-Est, c’est-à-dire, pour
la partie maritime qui nous concerne, vers
l’Est de l’océan Indien, le Pacifique ouest,
la mer de Chine... De la Chine à la flotte
russe du Pacifique, en passant par l’Inde, le
Japon ou l’Australie, les forces sous-marines
montent en puissance et se modernisent.
Parallèlement, de nouvelles forces émergent :
© PROVENCE/MN

Malaisie, Vietnam, Taïwan, Thaïlande ou


Singapour se donnent les moyens d’acquérir
des forces sous-marines. Pour autant, nos 2
zones d’intérêt plus habituelles, comme
l’Atlantique nord ou la Méditerranée,
n’échappent pas à des mouvements simi- C. B. : Quels sont les moyens et quelles certitude et de foudroyance mis en avant, il
laires. Dans ce contexte, la France doit savoir sont leurs spécificités respectives ? y a plus de vingt ans, par l’amiral Labouérie.
maîtriser le milieu maritime pour préserver ALFAN : Notre flotte ne cesse de s’adapter Leur propulsion nucléaire leur procure une
ses intérêts stratégiques (invulnérabilité de à des menaces qui évoluent pour pouvoir y mobilité leur permettant de se redéployer
sa Force océanique stratégique, capacité de répondre avec une efficacité accrue. Ainsi, loin, rapidement et sans préavis. Elle leur
projection en tout lieu), politiques (stabilité les frégates anti-sous-marines type F70, apporte également la discrétion nécessaire
géopoliti­que, protection de ses ressortissants) et désormais, les frégates multimissions pour observer leurs divers objectifs.
ou économiques (ressources halieutiques, ap- (FREMM), auxquelles sont associés les
provisionnements énergétiques et commer- moyens de l’aéronautique navale (hélicop- C. B. : Comment un sous-marin
ciaux). Une telle exigence implique donc de tères et avions de patrouille maritime), s’intègre-t-il dans un dispositif aéronaval ?
maintenir au plus haut niveau nos capacités constituent notre réponse face à la multipli- Que lui apporte-t-il ?
en lutte sous la mer, domaine dans lequel la cation des sous-marins dans le monde. Leur ALFOST : Les capteurs et les armes des
France a depuis longtemps une réputation prolifération nous a conduits à prochaine- sous-marins leur permettent de couvrir un
justifiée d’excellence. ment doter les frégates type La Fayette de large spectre de missions. En particulier, une
VAE DENIS BÉRAUD, ALFAN : Le sous- moyens de lutte sous la mer, en les équipant organisation et des liaisons spécifiques per-
marin est toujours un outil prépondérant d’un sonar de coque lors de leur prochaine mettent de les mettre à la disposition directe
et qui compte au niveau international. Les grande rénovation. Les réflexions engagées du commandant tactique, ce qui confère une
grandes puissances en font usage. Il est au sujet des frégates de taille intermédiaire grande réactivité et une grande souplesse
donc capital que nos bâtiments de surface (FTI) vont également dans ce sens. dans leur emploi. Ils peuvent se déployer
s’adaptent à cette prolifération, soient en- ALFOST : Les sous-marins français sont en précurseur pour blanchir des zones et
traînés et armés pour y faire face. C’est un des outils aux capacités multiples, parfaite recueillir du renseignement ou être employés
véritable enjeu pour la décennie à venir. illustration des principes stratégiques d’in- au plus près des unités pour contribuer à leur

18 — COLS BLEUS - N°3049


passion marine

1 Vue du périscope
d’un sous-marin, la Témoignage d’ALAVIA
frégate anti-sous-ma-
rine Latouche-Tréville
Multiplier la puissance
lui faisant face lors de Contre-amiral Bruno Thouvenin,
manœuvres d’entraî­ amiral commandant la Force
nement dans les fjords
scandinaves.
de l’aéronautique navale
Comme j’aime souvent
2 La frégate multi- à le rappeler, la Force
mission Provence a de l’aéronautique
effectué cet hiver navale est un
son déploiement de multiplicateur de
longue durée afin puissance au profit
de tester à la mer des trois autres forces
l’ensemble de ses organiques et son
systèmes. Autant action s’exerce sur
d’occasions de tout l’éventail de leurs
coopérer avec les missions. Cela est
marines des zones d’autant plus vrai en
du déploiement, par lutte sous la mer, où
exemple la Marine la menace noyée dans l’immensité océanique
malaisienne et son est invisible et difficilement prévisible. Une
sous-marin Tun Razak patrouille maritime à caractère océanique
(type Scorpène permet d’intervenir rapidement, loin et
de DCNS). longtemps, pour dissuader, détecter ou pister
les menaces. Elle permet également de
3 Lutter contre la protéger une force navale comme le GAN ou
menace sous-marine un convoi logistique. L’évolution au-dessus
nécessite un dispositif du dioptre permet aux aéronefs de rester au
diversifié de moyens contact en toute discrétion et presque en toute
complémentaires, impunité.
frégates, patrouilleurs Quant aux hélicoptères, dont le dernier-né
de haute mer, sous- Caïman révolutionne la tactique de lutte
marins, aéronefs, qui anti-sous-marine, ils sont les yeux et le bras
se déploient dans armé de la frégate. Leurs senseurs embarqués,
les trois dimensions complémentaires à ceux de la frégate,
maritimes à la fois. permettent par une manœuvre coordonnée
des capacités d’assurer une lutte anti-sous-
marine redoutable.
© MÉLANIE DENNIEL/MN

Comme toujours dans notre Marine, ces


systèmes d’armes sont avant tout des systèmes
d’hommes et de femmes, et en lutte anti-sous-
marine, précision, connaissance et rigueur
forment le trépied nécessaire à leur action :
3 précision dans le pilotage et la délivrance des
armes, connaissance de la doctrine et des
procédures, rigueur dans leur application et
protection. Ils sont aussi capables de mettre des missions de lutte sous la mer vont s’amé- dans le dialogue entre les acteurs, le tout face
en œuvre des forces spéciales, indépendam- liorer, car les unités s’entraîneront avec des à un professionnel sous l’eau.
ment ou au sein d’une opération coordonnée. sous-marins plus discrets : cela validera nos Ce savoir-faire en LSM, long à acquérir, est
également très fragile et l’objet de toutes
ALFAN : L’apport tactique majeur d’un capacités à les détecter et nous « tirera vers le les vigilances. Il est actuellement unique en
sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) au haut ». En ce qui concerne la FREMM, en plus Europe et maîtrisé par un très petit nombre de
sein d’une force s’est encore vérifié au cours de ses capacités intrinsèques, elle forme un marines.
du dernier déploiement du groupe aérona- binôme d’une efficacité remarquable avec le Les marins du ciel, sans cesser de se
val : la présence d’un sous-marin au sein Caïman Marine : ce dernier complète parfai- remettre en question, peuvent légitimement
de son dispositif d’escorte a permis au tement la frégate. Ce tandem dote la France revendiquer cette excellence, fruit d’une
expérience longue et indispensable au succès
porte-avions Charles de Gaulle de voir et de capacités inégalées de lutte sous la mer, que des opérations interarmées et interalliées.
d’entendre dans un rayon décuplé. Même la Marine nationale entretient et développe
effet grâce aux FREMM : l’intégration de à travers des entraînements toujours plus
l’Aquitaine et de la Provence a permis au ambitieux et des déploiements opérationnels
groupe aéronaval de disposer de capacités exigeants.
de détection bien supérieures à tout ce qu’il ALFOST : Relevant les SNA de type Rubis qui
avait été possible de faire jusqu’à présent rendent d’excellents services depuis 1983, les
avec des unités françaises ou étrangères. SNA de type Suffren seront plus discrets et do- missile de croisière naval ajoutera aux capacités
C. B. : Comment voyez-vous l’arrivée des tés de senseurs et d’armes modernisés auxquels des SNA celle de frappe en profondeur contre
Barracuda et du couple Caïman/FREMM ? seront ajoutées de nouvelles capacités. Le Dry la terre. C’est donc un bond technologique qui
ALFAN : Mécaniquement, l’arrivée des Deck Shelter, sorte de hangar posé sur le pont élargira encore le spectre d’emploi de nos SNA
Barracuda est une bonne chose pour nos du sous-marin, décuplera l’efficacité du couple et leur avantage tactique sur un adversaire
unités de surface. Les aptitudes à conduire SNA/forces spéciales. La mise en œuvre du potentiel.

COLS BLEUS - N°3049 — 19


passion marine

Précision et coordination

De la stratégie
à la tactique

L
e sous-marin est un instru-
ment de puissance, voire
dans certains cas une réponse

© ALAIN MONOT/MN
© YANN LE LY/MN
du faible au fort. Sa perfor-
mance demeure liée à
la maîtrise de capacités 1 2
industrielles et technolo-
giques de pointe. L’immensité
océanique permet au
sous-marin de s’y diluer,
c’est-à-dire de s’y cacher. Là, il s’y fait
invisible et donc omniprésent, silencieux et
inattendu, foudroyant et donc mortel.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, tant
sur les routes des convois de l’Atlantique
nord qu’autour des flottes du Pacifique,
le sous-marin a été dominant. Ce fut l’arme
de la guerre froide. C’est l’époque qui a vu
la montée en puissance de la lutte sous
la mer (LSM) dans la Marine nationale, en
phase avec l’accession de la France au club
très fermé de puissance nucléaire océanique.
Aujourd’hui, la prolifération des forces
sous-marines fait resurgir une réalité qui
avait semblé aux yeux du grand public
disparaître des rapports de force du temps
© YANN LE LY/MN

de paix. La capacité de lutte anti-sous-marine


est dans ce contexte toujours décisive et vitale,
tout particulièrement pour une puissance 3
disposant de sous-marins nucléaires lanceurs
d’engins (SNLE). La possession de sous-
marins est un levier de puissance et d’affirma- c’est tout un dispositif de frégates, de patrouil- la vue sont aussi d’excellents moyens pour
tion sur la scène régionale voire internatio- leurs de haute mer, d’aéronefs et de sous- détecter un sous-marin en surface ou à l’im-
nale. Si le sous-marin diesel est par excellence marins, qui permet de détecter et de maîtriser mersion périscopique(5).
l’arme du déni d’accès et de la défense des l’adversaire. Le jeu se fait donc à plusieurs
approches, le sous-marin nucléaire d’attaque et il requiert l’utilisation de règles qui font de DÉTECTER LOIN ET PRÉCISÉMENT
par son allonge détient une dimension la LSM un des domaines les plus complets Le sonar (Sound Navigation And Ranging) est
offensive et océanique. La LSM permet, à pour les flottes de combat. Il nécessite un l’instrument principal de détection sous-
l’inverse, à une force aéronavale ou à des flux esprit d’équipage solide, un entraînement marine. Les ondes électromagnétiques utilisées
logistiques d’user librement de la haute mer et poussé, beaucoup de précision, d’habileté et dans l’air pour communiquer (téléphone,
des zones côtières. Elle recouvre également de patience. La tactique du commandant du portable, radar) ou pour détecter des objets
l’ensemble des actions visant à assurer dispositif LSM, désigné par son acronyme (radars) pénètrent très mal dans l’eau, contrai-
la sécurité de ses propres sous-marins. Cette OTAN ASWC(3), peut consister par exemple rement aux ondes sonores qui s’y propagent
diversité des conditions d’emploi nécessite à provoquer les indiscrétions du sous-marin très loin. Tout comme le radar détecte des ob-
des systèmes acoustiques variés et de très (vitesse bruyante, sortie des périscopes ou jets dans l’air, le sonar utilise ainsi le son pour
haute performance pour lutter à armes égales du schnorchel(4)…) ou à le dissuader de toute détecter et situer des objets sous l’eau. Si des
avec des sous-marins, souvent performants, approche. Pour cela, il dispose d’un ensemble transmissions ont cependant lieu entre les mi-
mieux adaptés à l’environnement(1) et de moyens de détection. Il emploie les sonars lieux, le bruit d’un sous-marin est si faible et si
disposant la plupart du temps d’un préavis de coque, remorqués ou trempés, actifs vite amorti dans l’air qu’il ne peut être exploité.
de détection sur leurs adversaires à la surface ou passifs – des sous-marins en soutien, ceux C’est pourquoi, les aéronefs doivent larguer des
du « dioptre »(2). des hélicoptères et les bouées acoustiques bouées munies d’hydrophones ou disposer,
larguées par les avions de patrouille maritime pour les hélicoptères et à l’avenir pour certains
LSM : MODE D’EMPLOI et désormais les Caïman Marine. Plusieurs drones, d’un sonar trempé. En revanche, un
La clé de voute de la LSM est la coordination combinaisons d’utilisation des sonars actifs et sous-marin peut entendre un aéronef bruyant
de moyens agissant de façon complémentaire : passifs sont donc possibles. Mais les radars et à certaines distances. La propagation du son

20 — COLS BLEUS - N°3049


passion marine

dans l’eau varie en fonction de la température, Comprendre


de la salinité et de la profondeur (voir encadré).
Les unités à la mer doivent donc en maîtriser
l’environnement
les fluctuations, qu’elles observent et mesurent La mer n’est pas un milieu homogène –
elle est souvent établie par masses d’eau
en permanence. Les hautes fréquences per-
juxtaposées, ou imbriquées et formant des
mettent la détection de petits objets et peuvent couches aux différences de température
même réaliser de véritables images, mais sont parfois très marquées, appelées thermoclines.
rapidement absorbées par l’eau. Ainsi, les Les ondes sonores peuvent alors être déviées
sonars hautes fréquences permettent de « voir » selon un trajet qui trompe sur la distance et la
précisément mais à des distances faibles. En profondeur réelle, voire parfois sur la direction
de l’adversaire. Ainsi, la thermocline dévie
revanche, plus la fréquence est basse, plus les
une partie de l’onde générée par un sonar
distances de détection sont grandes. La mise ou le bruit rayonné par une machine, jusqu’à
en œuvre d’un sonar actif rend par ailleurs constituer une véritable barrière ! En grande
son porteur détectable et identifiable, puisqu’il profondeur, la température devient constante
émet un son très caractéristique. C’est pour mais les ondes sont soumises à l’influence
cette raison que les sous-marins mettent de la pression. Les ondes sonores ne suivent
1 La frégate multimis- 2 Les patrouilleurs donc pas des trajectoires rectilignes et créent
sion est la nouvelle de haute mer brestois
principalement en œuvre des sonars passifs,
selon les conditions de température des
génération des participent à la situés sur la coque même du sous-marin ou fonds sous-marins (bathythermiques) des
frégates anti-sous- connaissance et à sur une antenne linéaire remorquée (appelée cuvettes de non-détection, véritables refuges
marines. Ses capa­ la sûreté maritime, « flûte ») d’écoute très basse fréquence (ETBF). acoustiques pour les sous-marins. En LSM,
cités de détection du littoral à la haute Ces équipements permettent de déceler une c’est celui qui maîtrise son environnement qui
puis de classification mer. présence à plusieurs dizaines de kilomètres. gagne, d’où l’importance des études et relevés
sont largement effectués par le Service hydrographique
accrues par rapport 3 La prolifération des et océanographique de la Marine (SHOM).
aux générations sous-marins, leur (1) Immergés, les SNA ne subissent pas l’état de la mer et s’adaptent
précédentes. Elle miniaturisation et la plus facilement aux conditions de propagation acoustique.
(2) Terme employé par les spécialistes de la LSM pour désigner la
dispose également diversité des nations surface de la mer.
d’une capacité de les mettant en œuvre (3) Anti Submarine Warfare Commander
tir contre terre dans rend toujours actuelle (4) Tube d’air utilisé par les sous-marins classiques pour permettre
la profondeur avec la menace sous- à leurs générateurs diesel de recharger leurs batteries à l’immersion
le missile de croisière marine. périscopique, soit à quelques mètres sous la surface.
(5) Immersion proche de la surface d’où le sous-marin peut hisser
naval (MdCN). ses mâts au-dessus de l’eau.
© PAUL SÉNARD/MN

COLS BLEUS - N°3049 — 21


passion marine

Excellence et rénovation

Les moyens
de la LSM

L
a Marine dispose d’une
expertise étendue et reconnue
en matière de lutte sous la

© MÉLANIE DENNIEL/MN
mer (LSM). Grâce à ses

© AQUITAINE/MN
moyens sous, sur et au-dessus
de la mer, elle est capable de
couvrir un large spectre 1 2
d’opérations, allant du rensei-
gnement au plus près de la
zone d’action jusqu’au blocus,
en passant par le pistage, l’escorte, l’interdic-
tion, la neutralisation, la lutte antitorpilles.
L’arrivée des frégates multimissions
(FREMM), des Caïman Marine et la
rénovation des ATL2 apporte des perfor-
mances grandement améliorées grâce à des
senseurs et des systèmes de partage de
l’information de nouvelle génération.

LES FRÉGATES, PILIER DE LA CAPACITÉ ASM


Tous les bâtiments de surface disposent
d’une capacité anti-sous-marine (ASM)
plus ou moins développée, car ils sont tous
susceptibles d’être confrontés à cette
menace. Ainsi, même les frégates plus par-
ticulièrement dédiées à la défense aérienne
© ALAIN MONOT/MN

© ALAIN MONOT/MN

(FAA et FDA) disposent d’un sonar de


coque. En outre, conformément au plan
Horizon Marine 2025 défini par le chef 3 4
d’état-major de la Marine (CEMM), les
frégates de type La Fayette (FLF) se verront
dotées de capacités anti-sous-marines, afin de coque et le sonar remorqué. Ce système principalement les bouées acoustiques
de préserver les capacités LSM de la Marine s’appuie sur les très basses fréquences(1) pour actives et passives dont les signaux sont
en attendant les frégates de taille intermé- offrir aux opérateurs une portée de détec- retransmis par onde radio puis analysés par
diaire (FTI). Toutefois, ce sont encore les tion accrue. Le sonar de coque multimode l’aéronef. Quant aux hélicoptères de lutte
frégates anti-sous-marines F70 qui consti- des FREMM peut mettre en œuvre deux anti-sous-marine, ils mettent également
tuent aujourd’hui l’ossature de la capacité canaux actifs pour la lutte anti-sous-marine, en œuvre des sonars actifs dit « trempés » à
de lutte sous-marine de la Marine avant et simultanément des canaux passifs dédiés haute ou basse fréquence, qu’ils immergent
que les frégates multimissions (FREMM) à l’écoute des sous-marins et navires ou à la en restant en vol stationnaire à quelques
ne prennent totalement la relève. Elles sont poursuite des torpilles. mètres au-dessus de la mer.
équipées de sonars passifs et actifs, de coque Le Caïman Marine succède ainsi aux
et à immersion variable (VDS, surnommé L’IMPORTANCE DES AÉRONEFS hélicoptères Lynx à bord des frégates de
« poisson »). Les frégates peuvent l’immerger Mobiles et flexibles (ils passent rapidement dernière génération. Il emporte des bouées
à une profondeur optimale pour s’adapter de la détection à l’attaque), les aéronefs acoustiques actives et passives, ainsi
aux conditions de propagation du son. de LSM disposent d’une grande variété de qu’un système sonar FLASH (Folding Light
moyens : sonar trempé des hélicoptères, Acoustic System for Helicopters), qui est le
NOUVELLES CAPACITÉS SONARS barrages de bouées acoustiques actives ou principal senseur du Caïman Marine pour
DES FREMM passives, instruments de détection infra- la détection et la poursuite des sous-marins.
L’arrivée progressive des frégates multimis- rouge ou électromagnétique et enfin, mise Les deux types d’aéronefs sont équipés
sions dans la Marine participe au renouvel- en œuvre de torpilles (MU90 et MK46). de torpilles MU90, capables de frapper
lement de la capacité anti-sous-marine. Les L’impossibilité pour leur cible de répliquer des cibles sous-marines. Comme le Lynx
FREMM sont équipées d’une « suite sonar » leur confère une forme d’invulnérabilité. avec les FASM, le Caïman Marine conjugue
qui offre de très longues portées de détec- De nombreuses marines cherchent ses capacités avec celles de la FREMM.
tion et des capacités simultanées de défense cependant à se doter de missiles antiaériens Cette association devient progressivement
antitorpilles, réduisant ainsi les risques à changement de milieu. le fer de lance des forces navales françaises
pour le navire. Cette suite associe le sonar Les avions de patrouille maritime utilisent en LSM.

22 — COLS BLEUS - N°3049


passion marine

Témoignages
CV Emmanuel Sagorin,
commandant
la frégate Aquitaine
« L’arrivée des FREMM
représente un bond
technologique
considérable par
rapport à la génération
précédente. Cette
nouvelle unité est
un navire furtif,
polyvalent, endurant
2 et souple d’emploi,
doté d’automatismes
poussés et un
3 Grâce à son sonar équipage à effectif
trempé, le Caïman optimisé. Ses missions sont nombreuses :
Marine dispose le soutien et l’appui des opérations de
de capacités de projection, la frappe de précision dans
détection décuplées la profondeur avec le missile de croisière
par rapport au Lynx. naval et bien évidemment la lutte anti-sous-
Très efficace en re- marine. Elle embarque à ce titre le Caïman
cherche autonome, Marine, hélicoptère de combat multirôle
il peut aussi être qui apporte une capacité accrue dans la
envoyé par la FREMM lutte anti-sous-marine. Le couple FREMM/
pour confirmer ou Caïman est un véritable bond significatif
caractériser au loin dans ce domaine. Enfin, la FREMM embarque
un écho sonar et si l’Ecume, la nouvelle embarcation tactique
nécessaire détruire à des commandos, là encore à la pointe de la
distance de sécu- technologie. La première mission d’escorte
rité une menace du porte-avions réalisée par l’Aquitaine en
sous-marine. situation opérationnelle pendant la mission
Arromanches 2 a confirmé l’excellent potentiel
4 Depuis la plage des FREMM dans l’exécution de cette mission. »
arrière, l’équipage de
© AQUITAINE/MN

la frégate Aquitaine
peut commander la
sortie ou l’immersion CF Bruce L, commandant
5 du sonar et de l’an-
tenne linéaire remor-
le SNA Casabianca,
1 Les frégates
qués de la frégate. équipage rouge
LE SNA, CHASSEUR OU CHASSÉ ? anti-sous-marines « Outre leur participation à la mission de
Par conception, les sous-marins sont très 5 Le VDS de la
sont les piliers de la Provence couram­ dissuasion, les sous-marins français constituent
silencieux : les moteurs et auxiliaires sont capacité ASM de ment appelé « pois- une menace forte vis-à-vis de toute nation
reliés à leur châssis par le biais de plots, la Marine. Grâce à son » permet, grâce ayant des velléités de s’approcher de nos
amortissant les vibrations (donc le bruit). leurs senseurs, leurs à son immersion zones d’intérêt ou de nos approches. La
Les sous-marins font l’objet d’un soin parti- hélicoptères et leurs variable, de limiter discrétion et la mobilité (aller vite, discrètement
armements, elles sont et longtemps, donc loin) du sous-marin lui
culier pour éviter toute vibration par le des acteurs privilé-
les effets de l’inho-
permettent d’agir sans révéler sa position. Il
choix d’équipements intrinsèquement mogénéité de la
giés de traque du propagation acous- utilise les lois de la propagation des sons dans
silencieux, par des formes hydrodynamiques sous-marin. tique (thermocline, l’eau et détermine des trous de détection dans
soignées – qui évitent de générer des pertur- zones d’ombre…). Par lesquels se cacher. Le sous-marin est capable
bations indiscrètes dans l’eau – et par des 2 Les capacités de rapport à celui des d’opérer partout, proche des côtes, loin en mer
hélices étudiés pour être les plus discrètes détection renforcées FASM, il a gagné en et, par sa discrétion, il constitue une menace
du couple FREMM/ diffuse et permanente pour une force navale. »
possible. Un revêtement acoustique externe Caïman Marine
capacité de détec-
est souvent disposé sur la coque extérieure tion et en souplesse
en font un redoutable de mise en œuvre.
pour absorber les sons et/ou diminuer chasseur de sous-
l’écho d’une impulsion d’un sonar adverse. marin. Le Caïman
Si le SNA peut être amené à jouer le rôle Marine donne une
de plastron dans le cadre des exercices allonge essentielle
à la frégate.
LSM des forces de surface, il est avant tout
un chasseur en opérations grâce à ses sonars
passifs et son agilité.
(1) Dans ce domaine (actif très basse fréquence), la France n’est pas
novice puisque la Marine était équipée jusqu’en 2013 de frégates
équipées du SLASM (Tourville désarmé en 2011 et De Grasse
désarmé en 2013). Les marins français disposent donc d’une solide
expérience dans la gamme ATBF.

COLS BLEUS - N°3049 — 23


passion marine

Histoire d’une détection

La LSM,
des forces
en dispositifs

L
oin des face à face suggérés
au grand public par le
cinéma de l’après-guerre, la
lutte sous la mer est un
domaine de lutte nécessitant 1
© MN

plusieurs acteurs. Il s’agit de


détecter, identifier et, le cas
échéant, détruire. La
tactique repose sur la
manière dont est combiné
l’emploi des unités et des équipements pour
détecter le sous-marin ou le pousser à
commettre une indiscrétion. C’est l’en-

© GABRIEL DEBERGUES/DGA
semble d’une force qui chasse un sous-ma-
rin ou protège une unité précieuse.
Nouvelle méthode de détection, le multi­
statisme consiste à exploiter les émissions
sonar d’une seule unité (bateau, bouée,
aéronefs…) à partir d’une ou plusieurs
autres unités silencieuses équipées de récep­
teurs passifs. Il offre un grand avantage
tactique : il minimise les émissions et donc
diminue l’indiscrétion tout en maximisant
la performance de réception, décuplant
ainsi la capacité du dispositif. La Marine
dispose déjà d’une capacité de multista-
tisme grâce aux bouées du Caïman Marine.
La rénovation en cours de l’ATL2 prévoit
© CINDY LUU/MN

également cette capacité qui devrait doter


aussi à terme les FREMM et, en réception
seulement, les FDA. 2

SCÉNARIO FICTIF : ASSURER


LA DÉFENSE D’UNE UNITÉ PRÉCIEUSE
Un entraînement typique de LSM met Loin des duels suggérés au grand public par le
en scène un bâtiment de projection et de
commandement (BPC) en transit vers une cinéma de l’après-guerre, la lutte sous la mer est
zone d’opérations amphibies avec une
présence potentielle de sous-marin intrus un domaine de lutte nécessitant plusieurs acteurs.
(SM). Il est escorté d’une FREMM, avec son
Caïman Marine, et bénéficie à ce moment
du soutien d’un avion de patrouille mari-
time ATL2. Une frégate de défense aérienne POSSUB (c’est-à-dire « sous-marin pos- Caïman Marine. Les deux aéronefs confir-
(FDA), une frégate de type La Fayette (FLF), sible ») par la FREMM. Décollage sur alerte ment qu’il s’agit d’un sous-marin ennemi.
une frégate anti-sous-marine F70 (FASM) du Caïman Marine : l’ATL2 est trop loin Obligé d’accélérer et donc de diminuer sa
accompagnent également le BPC. Un SNA, sur l’arrière et il ne faut pas lui faire inter- discrétion, il est pris au contact passif par
en soutien de la force, évolue dans « une rompre sa veille de bouées pour une éven- le SNA de la force. Le dispositif manœuvre
boîte » (son périmètre de sécurité nautique) tuelle fausse alerte. L’écran de protection pour éloigner la menace du BPC, mais le
sur l’avant du groupe. L’ATL2 est en barrage se réorganise pour protéger l’unité précieuse sous-marin adverse tire un missile, tout de
fictif sur l’arrière. Autour du BPC, les fré- et interposer les frégates. L’hélicoptère suite intercepté par un missile ASTER de la
gates sont disposées en écran, en émission se met en station sonar et prend le contact. FDA. Le Caïman Marine puis l’ATL2 tirent
radars coordonnées. Soudain, sur l’avant et L’ATL2 se met, quant à lui, sur ordre une torpille MU90. La seconde torpille, tirée
non loin du SNA, contact sonar ! Il est classé du commandant de lutte pour épauler le par l’ATL2, coule le sous-marin adverse.

24 — COLS BLEUS - N°3049


passion marine

1 Les torpilles sont 3 Les torpilles MU90


par excellence les ont la capacité de
armes de la lutte changer de milieu :
anti-sous-marine. tirées depuis
Elles peuvent atteindre des aéronefs, leurs
n’importe quel bâti- cibles sont bien
ment en étant tirées sous-marines.
d’un aéronef, d’un bâ-
timent de la force ou
bien, dans certaines
marines, au moyen
d’un missile porteur.

2 La coopération entre
les marines française
et britannique permet
à chacune d’elles
de renforcer ses
capacités en lutte
sous la mer grâce au
partage des bonnes
pratiques. Le Lynx
du HMS Kent récupère
le commandant
de la FASM Jean de
Vienne et ses experts
© GABRIEL DEBERGUES/DGA

pour la passation de
suite de protection
anti-sous-marine du
porte-avions Charles
de Gaulle lors
du déploiement
3 Arromanches,
le 18 avril 2015.

Entraînement « Charlie 5 (C5) »


CV Jean-Marin d’Hébrail, commandant
la FASM Primauguet
hélicoptère. Il s’agit de vérifier qu’aucun intrus traçante, qui garde la mémoire des différents
ne vient repérer ou gêner le sous-marin avant sa mouvements, témoigne de la recherche
dilution dans l’immensité des océans. C’est aussi continue de garder une cinématique cohérente
l’occasion d’entraîner l’équipage du sous-marin mais suffisamment imprévisible pour le sous-
à se rendre indétectable, en dépit de moyens marin. Aucune détection, pourtant, jusqu’à
importants pour le trouver. Enfin, lorsque la zone présent. Tout juste parfois des alertes qui se
est sûre, il part. Incognito… Jusqu’à son retour de sont révélées être la plupart du temps un câble
patrouille, où l’on déroulera le scénario inverse. sous-marin ou une épave, comme il en existe
Une mécanique bien huilée depuis 44 ans de tant. L’étau se resserre pourtant, nous le savons.
tenue continue de la dissuasion océanique. Le sous-marin n’est pas loin et il nous faut le
Tout a commencé par un travail collectif et contraindre pour le pousser à la faute. Il faut être
minutieux. Sous l’autorité de l’officier de lutte prêt. Soudain, la voix du chef de PC de lutte sous
anti-sous-marine (OLASM), chaque opérateur la mer s’élève : “Contact sonar”, le klaxon retentit
au CO de la frégate a apporté son expertise : au CO. Un des opérateurs vient d’apercevoir un
étude de l’environnement en-dessous et point se détachant sur son écran. Puis, quelques
au-dessus de la mer, des caractéristiques des secondes plus tard, double coup de klaxon de la
capteurs adverses, de la portée des senseurs de classification “contact bon”. Le temps s’accélère
© MN

la force, des potentiels d’emploi des différents brutalement. Les ordres fusent. Changement
outils, notamment aériens. Tout a été pensé, d’immersion du VDS, décollage de l’hélicoptère,
« La LSM est garante de l’invulnérabilité soupesé, combiné pour échafauder une nouvelle tâche pour l’avion de patrouille
de la dissuasion. Un sous-marin nucléaire idée de manœuvre tactique, débattue, puis maritime, évolution du dispositif des bâtiments
lanceur d’engins n’a pas vocation à naviguer validée par le commandant. Dès lors, depuis de surface… L’OLASM déroule les actions réflexes
en surface et en vue des côtes, mais bien maintenant presque 48 heures, la partition prévues pendant que le commandant est
caché, en immersion profonde. Dès lors, se joue, en continu. Les avions de patrouille appelé. Il faut très vite “monter la classif”, c’est-à-
son appareillage et sa sortie nécessitent un maritime ont déployé leurs bouées acoustiques, dire essayer de recueillir davantage de preuves
dispositif de protection jusqu’à ce qu’il puisse l’hélicoptère est en alerte sur le pont d’envol, qu’il s’agit réellement d’un sous-marin adverse.
plonger en toute discrétion. Cela commence, prêt à décoller en quelques minutes, tandis que, L’hélicoptère arrive sur zone, descend son sonar
à l’appareillage, par une surveillance des à bord, le sonar remorqué (VDS) est immergé et corrobore les informations collectées par
côtes à terre. Puis, par une escorte rapprochée à une profondeur constamment réévaluée de les différents senseurs. C’est bien un sous-marin.
afin de le protéger de toute embarcation. En façon à compléter au mieux le dispositif. Au CO, Il faut désormais le “tenir”, c’est-à-dire garder
s’éloignant des côtes, les moyens de haute les équipes de quart se sont relayées, les yeux le contact, voire, si tels sont les ordres, simuler
mer prennent le relais : patrouilleur de haute rivés sur les écrans, se passant au fil des relèves une attaque torpille. Il ne va pas se laisser faire.
mer, avion de patrouille maritime, frégate et l’évolution de la situation tactique. La table Le vrai combat commence… »

COLS BLEUS - N°3049 — 25


focus

Programme Barracuda
Le type Suffren, un SNA nouvelle génération
Le SNA de type Suffren dispose de capacités renforcées par rapport au SNA de type Rubis, dont l’excellence opérationnelle repose déjà
sur la discrétion, l’armement, le système de combat, la manoeuvrabilité, la mise en œuvre de forces spéciales, l’autonomie et l’endurance.
Il répond aux enjeux du Livre blanc : pour défendre ses intérêts nationaux, la France doit projeter ses forces loin, longtemps et de façon
performante.

CARACTÉRISTIQUES

SOUS-MARIN NUCLÉAIRE SOUS-MARIN NUCLÉAIRE

?
D’ATTAQUE (SNA) D’ATTAQUE (SNA) LE
TYPE RUBIS TYPE SUFFREN SAVIEZ
VOUS
LES NOMS PRÉVUS DES 6
Longueur : 73 mètres Longueur : 99 mètres SOUS-MARINS DU PROGRAMME
SUFFREN
Déplacement en plongée : Déplacement en plongée : DUGUAY TROUIN
2 600 t 5 300 t TOURVILLE
DE GRASSE
Vitesse : supérieure à Vitesse : supérieure à RUBIS
23 noeuds (42 km/h) 25 noeuds (46 km/h) CASABIANCA

Immersion : supérieure à Immersion : supérieure à


300 mètres 300 mètres

Équipage : jusqu’à 68 marins Équipage : jusqu’à 63 marins

Équipement : Équipement :
2 radars, 1 sonar multifonction, Des équipements similaires en nombre
1 sonar remorqué d’écoute très au Rubis mais avec des capacitées accrues
basse fréquence, 1 sonar d’évi- (mâts optroniques, antenne de flancs
tement de mine, 1 détecteur de allongée, systèmes de combat SYCOBS
radar, système de transmissions (Système de combat commun Barracuda
Patrouilleur
par satellite, système de combat SNLE) modernisés, système d’interception de
maritime ennemi
TITLAT (Traitement de l’informa- communication intégré, liaison de données
tion tactique - lancement des tactiques, 1 sas nageur, 1 capacité d’emport
armes tactiques), 2 périscopes d’un hangar de pont)

Armement : Armement :
Torpilles F17, Missiles Torpilles F21, Missiles antinavire SM-39,
antinavire SM-39, Missiles de croisière navals (MdCN),
Mines FG 29 mines

LE DÉPLOIEMENT DISCRET DES FORCES SPÉCIALES

Hangar de départ

Sous-marin nucléaire
d’attaque de type Suffren (SNA)
© PAUL SÉNARD/MN

Mise en œuvre du vehicule sous-marin Navigation des forces spéciales S


commandos à partir du SNA type Suffren avec le véhicule sous-marin so

26 — COLS BLEUS - N°3049


focus

UNE ACTION CONTRE LA TERRE QUI CHANGE D’ENVERGURE


DÉPLOYÉ
2 X OPÉRATIONS SPÉCIALES & LITTORALES 2 X
PLUS LONGTEMPS Le Suffren bénéficie de capacités accrues
de mise en œuvre discrète de forces spéciales, PLUS RAPIDE
notamment grâce à son sas nageurs et l’emport A VITESSE TACTIQUE
optionnel d’un hangar de pont.
PROPULSION
HYBRIDE VAPEUR / ÉLECTRIQUE SYSTÈME DE COMBAT OPTIMISÉ
Une propulsion tout électrique permet Mâts optroniques, capacités DSM,
de conserver la discrétion du sous-marin système de navigation sont intégrés au
jusqu’à une vitesse tactique élevée. système de combat SYCOBS commun
aux SNLE NG.

ÉQUIPAGE OPTIMISÉ
La conduite centralisée et
l’automatisation des équipements
permettent d’optimiser l’équipage.

BARRE EN X
L’appareil à gouverner
améliore la manœuvrabilité AUTONOMIE
et la tenue de l’immesion. La capacité de stockage de vivres
(70 à 90 jours, contre 45 à 60 jours
pour les SNA de type Rubis) CAPACITÉ DE FRAPPE
permet d’allonger la durée
de déploiement opérationnel.
CONTRE TERRE - MdCN
La discrétion du Suffren fait peser
une menace sur l’adversaire jusqu’au DISPONIBILITÉ ET ENDURANCE
moment où le sous-marin va frapper Une redondance accrue des
des cibles dans la profondeur. installations vitales et une maintenance
optimisée augmentent la capacité
du Suffren à durer à la mer et à
conserver ses capacités de combat.
UN OBJECTIF DE
DISCRÉTION ACCRUE
2 X PLUS
D’ARMES

Radar
cible Bâtiment
cible

À TERRE

POUR PLUS D’INFORMATIONS SUR LE MdCN


retrouvez l’infographie du magazine
C o l s B l e u s N°3040 d e ju i n 2015
sur colsbleus.fr
Stationnement du véhicule Déploiement des commandos
sous-marin ou retour au SNA pour action sur la terre

COLS BLEUS - N°3049 — 27


rencontre

« Le bataillon, c’est comme


si l’on avait 17 navires,
en permanence en mer »
Vice-amiral Charles-Henri Garié,
Commandant le bataillon de marins-pompiers de Marseille et l’école des marins-pompiers de la Marine.

Le bataillon de marins-pompiers de Marseille (BMPM) constitue une unité singulière


de la Marine qui sort de ses frontières habituelles et se projette en mer ! De nouveaux
défis se présentent pour un bataillon en pleine mutation.

organisation et des marins placés pour em- porte-avions Charles de Gaulle (le chef de
ploi sous l’autorité du maire de Marseille. la brigade sécurité du PA et son adjoint sont
Au total, 2 477 marins-pompiers, dispo- des marins-pompiers du BMPM). Le com-
nibles 365 jours par an, opérationnels mandant du BMPM commande également
24 heures sur 24, intervenant chaque jour l’école des marins-pompiers de la Marine
plus de 334 fois au secours des Marseillais, (EMPM), qui forme les marins-pompiers
de la ville et de son environnement. Une de Marseille (MAPOM), mais aussi
flottille de 17 casernes et plus de 10 autres les marins-pompiers de ports (MARPO).
emprises (sites d’entretien techniques, Prochaine autre casquette, celle de COMAR
état-major, centres de formation, écoles…) Marseille à compter du 1er septembre 2016.
permettent d’assurer la permanence de la
mission. Imaginez : le bataillon, c’est comme CB : Quels sont les métiers exercés au BMPM ?
si l’on avait 17 navires, en permanence en Comment recrutez-vous ?
mer, toujours en opérations, sans jamais VA C.-H. G. : Un pompier doit savoir agir
d’escale ni d’arrêt technique, avec des sur les interventions à caractère sanitaire
© BMPM/MN

équipages qui se relaient en permanence. (secourisme) et les feux urbains. Mais


Sacré challenge pour la « Marine Rouge ». chaque marin-pompier à Marseille doit
Les marins-pompiers disposent d’un aussi savoir lutter contre les feux de forêts
COLS BLEUS : Quelles sont les spécificités savoir-faire unique en France, alliant les et les feux de navires. À ceci s’ajoute des
du BMPM ? compétences spécifiques de pompiers et savoir-faire particuliers, pour lesquels il est
VA CHARLES-HENRI GARIÉ : Le bataillon celles de marins experts en feux de navires, spécialement formé : recherche en milieux
de marins-pompiers de Marseille est dans une ville rassemblant la quasi- périlleux, risques technologiques, dépol-
une unité singulière dans le paysage intégralité des risques recensés par la sécurité lution, interventions héliportées, risques
de la Marine. Sa mission est unique : civile. « Quasi » car à ce stade le risque aquatiques, sauvetage et déblaiement.
assurer la sécurité de la 2e ville de France, d’avalanche de neige ne nous inquiète pas Le BMPM a aussi besoin des métiers que
de son port, de son aéroport et des trop à Marseille ! Pour parfaire cette exper- l’on retrouve partout dans la Marine
860 000 Marseillais. Cette mission implique tise, le bataillon échange sans cesse avec (ressources humaines, soutien, finance,
un fonctionnement spécifique avec une le reste de la Marine et assure la sécu­rité du formation…) pour assurer la permanence

28 — COLS BLEUS - N°3049


rencontre
©CHRISTIAN VALVERDE/BMPM/MN

© PHILIPPE SOLA/BMPM/MN
La mission des marins-pompiers de Marseille, assurer la sécurité de la 2e ville
de France, de ses habitants et de son environnement. Ici, une embarcation Le jeudi 5 février 2015, boulevard Vintimille, Marseille 15ème arr. 6 pompiers
d’incendie et de sauvetage (EIS) partie pour intervention, sous le regard bien- blessés dont 2 gravement, par l’explosion de bouteilles de gaz lors d’une inter-
veillant de la Bonne Mère de Marseille vention pour feu d’appartement.

des opérations et la disponibilité des CB : Quels sont les enjeux et défis à venir ? CB : Comment qualifieriez-vous
hommes et des moyens. Avec toutefois une VA C.-H. G. : Le premier des défis, de taille, ce commandement ?
différence : c’est la ville de Marseille est celui de l’été 2016, qui va cumuler VA C.-H. G. : C’est un commandement
qui est sa base de défense (BdD) ! le risque multi-attentats, la saison des passionnant, opérationnel – car à tout
Le recrutement s’effectue dans les centres feux de forêts et l’Euro 2016. Il va falloir moment la crise majeure peut interrompre
d’information et de recrutement des forces protéger les 67 000 spectateurs du stade le quotidien – et vraiment humain, avec des
armées (CIRFA), avec pour les Marseillais, Vélodrome, mais aussi les 80 000 personnes marins-pompiers qui font mon admiration.
un bureau d’accueil à l’état-major du de la « fan-zone ». Pas moins de 800 marins- Le tout au sein d’une grande ville, atypique
bataillon. Certains critères d’aptitude sont pompiers seront mobilisés les soirs de et attachante, et avec des interlocuteurs poli-
spécifiques, comme le haut niveau sportif matchs, soit un tiers de l’effectif total. Aux tiques et administratifs qui ne sont
ou l’insensibilité au vertige. postes de combat ! pas ceux habituels de la Marine. Je n’oublie
2016 verra aussi la création d’une capacité pas que s’il fait partie des symboles de
CB : Quels ont été les faits marquants de 2015 ? nationale de lutte contre les sinistres Marseille, au même titre que la Bonne-mère
VA C.-H. G. : Le bataillon a bien entendu été à bord des navires, dont le bataillon et l’Olympique de Marseille, selon le séna-
marqué par les terribles attentats qui ont frappé constituera le pivot. C’est une avancée teur-maire Jean-Claude Gaudin, le bataillon
notre pays. Après le recueillement et l’admira- majeure qui permettra aux marins-pompiers reste une unité de la Marine à part entière.
tion pour nos frères d’armes sapeurs-pompiers d’offrir leurs compétences au-delà propos recueillis par ev1 clémence festal
de Paris, il a fallu se mettre en ordre de bataille de Marseille, d’abord au profit des préfets
pour s’organiser face à ce nouveau risque maritimes et « terrestres » de métropole,
d’une ampleur jamais connue (7 attentats, puis à terme en Europe. Sans oublier
des centaines de blessés par armes de guerre). la réflexion en cours sur cette capacité de
Notre centre opérationnel a alors été réorganisé projection outre-mer. Le BMPM sera capable
en poste de combat (PC) multisites, un peu de mettre en alerte, en moins de 2h,
comme un PC de force navale, nos moyens de
secourisme ont été renforcés, et 171 marins-
40 marins-pompiers entraînés aux feux de
navires, projetables par les avions de la sécu-
Le BMPM en chiffres
pompiers sont désormais en alerte, en plus rité civile de Marignane. Par exemple, nous • 375 000 appels au COSSIM (Centre
des 400 qui veillent 24h/24 sur les Marseillais. pourrons aérocorder à bord d’un paquebot opérationnel des services de secours
La formation et l’entraînement ont aussi été 9 médecins et infirmiers urgentistes, ca- et d’incendie de Marseille).
durcis : exercices quotidiens en caserne, entraî- pables de traiter 30 blessés en toute autono- • 122 000 interventions annuelles.
• 133 interventions pour 1 000 hab
nement d’état-major et exercices majeurs sur le mie pendant 24h. Parmi les enjeux futurs (record national).
terrain ! Et dans la masse des 122 000 interven- figure également la réduction du nombre • 334 interventions/jour.
tions de l’année dernière, je n’oublierai pas celle d’interventions (qui ne cesse de croître). • 83% de l’activité relève du secours aux
du 5 février 2015, au cours de laquelle deux Pour inverser la tendance, le bataillon mise personnes.
marins-pompiers ont été gravement blessés par sur les adultes de demain en allant, dans les • 10 min : délai d’intervention.
l’explosion d’une bouteille de gaz lors d’un feu écoles, former chaque année les 7 000 CM2 • Une flottille de 17 casernes opérationnelles
H24, 365j/an.
dans un immeuble du centre-ville. Le métier marseillais. Enfin, le bataillon poursuit la • 2 477 marins-pompiers experts (sanitaire,
de marin-pompier est dangereux, il nous a déjà consolidation de la sécurité incendie du feux de navires, urbains et de forêts).
coûté 35 morts. Il nécessite une vigilance et un grand port maritime, notamment à Fos-sur- • 6 sections opérationnelles spécialisées –
professionnalisme sans relâche. Mer, où il va remplacer son bateau-pompe. SOS (GRIMP, AQUA, RT, SD, DIH, DEPOL).

COLS BLEUS - N°3049 — 29


planète mer

La maîtrise des profondeurs


toujours recherchée
Fièvre sous-marine en Asie

L’Asie du Sud-Est s’enflamme pour l’arme sous-marine, cette arme discrète et dissuasive
qui peut être dotée d’une propulsion anaérobie(1) et de missiles à changement de milieu.
Une nouvelle donne stratégique et un sujet d’inquiétude pour l’économie mondiale dont
les principales routes traversent la région.

L
e monde de la lutte sous la mer reste
inquiétant et alimente encore de
nombreux fantasmes. Il excite aussi
les convoitises par le montant des
contrats industriels qu’il peut générer.
Alors revenons aux faits. Contraire-
ment aux idées reçues, le nombre de sous-ma-
rins dans le monde n’augmente pas. Au cours
des trente dernières années, de la fin de la guerre
froide à aujourd’hui, il a même baissé de plus de
30 %. Si on exclut les sous-marins de poche, aux
capacités réduites, et les sous-marins nucléaires
lanceurs d’engins dévolus à la mission de dis-
suasion, le nombre de sous-marins d’attaque est
passé de 566 en 1985 à 387 en 2015.

BATEAUX NOIRS SOUS MER JAUNE


Seuls quelques pays, parfaitement identifiés
et manifestement co-localisés, ont vu leurs
flottilles s’agrandir : la Corée du Sud, passée de
© DCNS

0 à 14 sous-marins (des types 209 et


214 allemands fabriqués localement) ; l’Inde,
Lancé en avril 2015, INS Kalvari, le premier Scorpène indien, devrait entrer en service avant la fin de l’année.
passée de 8 à 15 unités (Kilo russes, 209 alle-
mands et un SNA loué à la Russie) ; le Japon,
passé de 15 à 20 sous-marins (type Oyashio recevra à partir de 2020 ses premiers sous- Taïwan, les Philippines, la Thaïlande, le
et Soryu) ; la Malaisie, passée de 0 à 2 unités marins neufs, 2 type 218SG allemands ; le Bangladesh et le Myanmar ont également
(Scorpène français) ; Singapour, passé de Pakistan a commandé 8 sous-marins chinois manifesté leur intention de se doter de l’arme
0 à 6 sous-marins (Sjöormen et Västergötland en complément de ses 3 Agosta ; et l’Australie, sous-marine.
suédois) et le Vietnam, passé de 0 à bientôt guère plus éloignée, envisage de remplacer
6 unités (type Kilo russes). Une tendance qui 6 unités vieillissantes par 12 sous-marins POURQUOI FAIRE ?
devrait se poursuivre puisque l’Inde admettra modernes (« le contrat du siècle » pour lequel Principale explication à cet engouement
bientôt au service le premier de 6 – au moins – le constructeur français DCNS est entré asiatique : le voisin chinois fait peur. Non
bâtiments de type Scorpène ; Singapour en phase de négociation exclusive). Enfin, pas à cause de ses propres sous-marins (leur

30 — COLS BLEUS - N°3049


planète mer

conception allemande ; Singapour avec ses


2 Västergötland suédois et les 2 futurs 218 SG alle-
mands ; et le Pakistan qui a doté ses Agosta 90
du système Mesma français. DCNS devrait
aussi équiper d’un système AIP de nouvelle
génération les cinquième et sixième Scorpène
indiens. Les autres opérateurs de sous-marins
AIP sont européens : la Suède et l’Allemagne,
naturellement, ainsi que leurs clients, Grèce,
Portugal, Italie et bientôt Turquie. La Russie
se lance à son tour, mais avec beaucoup de
retard. Ses premiers sous-marins Lada ne sont
pas encore opérationnels ; ce qui ne l’empêche
pas de proposer le type à l’export, notamment
pour le prochain programme indien.

ET LE NUCLÉAIRE ?
© O. BLATRIX

Dans le même temps, l’Inde cherche à


rejoindre le club très fermé(2) des concepteurs
et utilisateurs de sous-marins nucléaires
Les sous-marins chinois de la classe Yuan sont les premiers équipés d’une propulsion AIP. d’attaque (SNA). La réception imminente du
Au moins vingt unités sont prévues.
SNA Arihant constitue un premier pas sans
qu’on puisse dire aujourd’hui si les futurs
nombre est passé de 101 à 61 sur la même par trois ou quatre, donnent aux sous-marins SNA indiens seront de conception locale ou
période), mais plutôt en raison du dévelop- classiques une autonomie en plongée beau- étrangère (on parle notamment de l’installa-
pement rapide de sa flotte de surface et de ses coup plus longue : jusqu’à trois semaines, tion d’un réacteur nucléaire sur une coque de
revendications sur les îles et îlots de la mer contre quelques jours pour le diesel-électrique. Scorpène).
de Chine. Face aux porte-avions, destroyers D’où un gain considérable en discrétion et De son côté, la Chine, qui a mis en service
et bâtiments de projection de la Marine en furtivité. ses premiers SNA (type Han) dans les
de l’Armée populaire de libération, le sous- Aujourd’hui, seules dix marines mettent en années 80, n’aligne aujourd’hui que 5 unités
marin, doté de missiles de croisière et de œuvre des sous-marins à propulsion indé- opérationnelles (bientôt 6). Ce qui relativise sa
missiles antinavires, apparaît comme un pendante de l’air (AIP). Cinq sont asiatiques : puissance vis-à-vis des États-Unis, alliés des
moyen dissuasif à l’échelle régionale. D’autant la Chine avec le type Yuan (une vingtaine principaux pays riverains de la mer de Chine
plus avec le développement et la banalisation d’unités prévues) ; le Japon dont les Soryu et notamment de Taïwan.
des systèmes de propulsion anaérobies qui, sont équipés du système Stirling de Kockums Néanmoins, c’est bien de cela qu’il s’agit :
au prix d’une distance franchissable multipliée (Suède) ; la Corée du Sud avec ses 9 type 214 de la Chine cherche à empêcher toute interven-
tion d’une flotte de surface étrangère
dans ce qu’elle considère comme sa zone de
Évolution du nombre de sous-marins souveraineté. Et elle « montre ses muscles »
en Asie du Sud-Est depuis 1985 en envoyant ses SNA de plus en plus
loin et de plus en plus longtemps. Réponse
101
américaine : 60 % des sous-marins de
Chine
92 l’US Navy sont basés côté Pacifique, dont
61
18 SNA (soit 30 %) à Pearl Harbor (Hawaï)
8
et 3 à Guam (îles Mariannes), au plus près de
Corée du Sud
14 Taïwan et de la mer de Chine.
8 Pour les États-Unis, comme pour les autres
19
Inde
15 puissances nucléaires, le contrôle de l’expan-
15
sionnisme chinois n’est pas, tant s’en faut, la
Japon
18 seule vocation de l’arme sous-marine. Le sous-
20
marin nucléaire est aujourd’hui le meilleur
moyen d’aller sur l’avant pour se renseigner,
Malaisie
2 frapper ou infiltrer. Et il permet de patrouiller
dans des zones maritimes très sensibles ou
Singapour
4
6 1985 convoitées comme l’Arctique.
cc (r) stéphane gallois
2 2000
4
Taiwan
4 2015
© PAUL SENARD/MN

Vietnam (1) Propulsion anaérobie : système de propulsion pour les sous-


5
marins leur permettant de fonctionner en plongée sans utiliser
d’air extérieur pendant de longues périodes, ce qui leur évite de
0 20 40 60 80 100 120 rester en surface ou de sortir leur tube d’air et limite de facto leur
vulnérabilité.
(2) États-Unis, Russie, Chine, Royaume-Uni, France.

COLS BLEUS - N°3049 — 31


vie des unités
Griffin Strike 2016 En route vers le futur
Manche-mer du Nord La Marine sauve des vies !

UN SCÉNARIO
COMPLET
Dragonia et Avalon
sont deux pays
Griffin Strike 2016 imaginaires qui
En route partagent une
frontière commune.
vers le futur Une enclave
avalonienne,
située en territoire

L
de Dragonia,
a France et la Grande-Bretagne représente la
ont organisé l’entraînement source de tensions
interarmées Griffin Strike 2016 qui dégénèrent en
affrontements inter-
qui s’est déroulé du 14 au 22 avril au
communautaires.
Royaume-Uni. Cet exercice de niveau Cette situation
opératif et tactique a permis d’aboutir délétère conduit le
à la validation du concept de la Force Conseil de sécurité
expéditionnaire franco-britannique de l’ONU à voter
dans la totalité de ses composantes une résolution
qui décide de
(terrestre, maritime et aérienne). donner un mandat
La France y a exercé le commandement pour l’interven-
de la composante maritime, confié tion d’une force
© MN

au contre-amiral Éric Chaperon, franco-britannique.


commandant le HRF (la Force d’action Le BPC Dixmude a travaillé tout au long de Griffin Strike avec les hélicoptères de combat Ce scénario, qui
et de transport de troupes Dauphin, Merlins, Wildcats et Chinook. a servi de cadre
rapide de la Marine), secondé par
à l’entraînement
le capitaine de vaisseau britannique Griffin Strike, s’est
Dave Beatties. atouts spécifiques. Lorsque ces derniers sante maritime et faisait également joué entre la
Conformément aux accords de Lancas- sont ajoutés, ils permettent d’offrir un partie du groupe amphibie commandé Cornouailles britan­
ter House conclus en 2010, la France outil de puissance combinant l’action par le Commodore Connel. Ce dernier nique et le Pays de
et le Royaume-Uni travaillent à la mise amphibie, les missiles de croisière naval se composait des HMS Bulwark, Galles. Il visait à
valider le concept
sur pied d’une force expéditionnaire et le groupe aéronaval, afin de conduire HMS Ocean et RFA Lyme Bay. Le du Combined Joint
commune interarmées, la Combined une action décisive depuis la mer. HMS Sutherland ainsi que trois avions Expeditio­nary Force
Joint Expeditionary Force (Force de patrouille maritime Atlantique 2 y (CJEF).Il doit être
expéditionaire commune interarmées VOLET MARITIME participaient également. Pour les ma- capable d’assurer
- CJEF). Six années de coopération La partie maritime de Griffin Strike rins embarqués sur les unités de la Task la protection des
étroite, jalonnées d’entraînements était celle jouée de la manière la plus Force franco-britannique, plusieurs intérêts nationaux
de la France et du
conjoints, ont permis d’améliorer l’in- réaliste. Plus de 2 000 marins et neuf phases d’entraînement et de méca- Royaume-Uni, mais
teropérabilité des forces franco-britan- navires de guerre français et britan- nisation se sont enchaînées. Le point aussi de s’intégrer
niques et d’œuvrer à la maximisation niques participaient à cet entraînement d’orgue a été l’assaut amphibie lancé à une opération
de leurs capacités. Pour la partie mari- majeur. La France a déployé cinq sur les plages du Pays de Galles sous mandat de
time du CJEF, les marines française et navires : le bâtiment de projection et le 18 avril. l’ONU(1), l’Otan(2),
l’Union européenne
britannique sont interopérables depuis de commandement (BPC) Dixmude, ou encore au sein
longtemps. Le défi était d’évoluer de la frégate antiaérienne (FAA) Cassard, COMBINED JOINT d’une coalition
l’interopérabilité vers l’intégration la frégate anti-sous-marine (FASM) EXPEDITIONARY FORCE (CJEF) internationale.
complète des moyens. C’est-à-dire La Motte-Picquet, le sous-marin Pour l’occasion, le scénario faisait évo-
(1) Organisation des
passer d’actions en parallèle à une nucléaire d’attaque (SNA) Perle et luer en permanence la situation pour Nations unies.
combinaison en commun des moyens le bâtiment de commandement et de permettre aux unités participantes de (2) Organisation du
traité de l’Atlantique
pour produire un effet supérieur. ravitaillement (BCR) Var. Le Dixmude s’entraîner sur un spectre très large de nord.
Chacune des deux marines possède des accueillait l’état-major de la compo- menaces : sous-marines, aériennes,

32 — COLS BLEUS - N°3049


vie des unités

majeure qui a été franchie pour la force


expéditionnaire franco-britannique,
car les opérations amphibies sont
adaptées aux crises modernes. C’est
ce que les ministres de la Défense
français, M. Jean-Yves Le Drian, et son
homologue britannique, M. Michael
Fallon, ont voulu souligner en se ren-
dant à bord du BPC Dixmude à la fin
de l’entraînement.
Les forces françaises et britanniques
poursuivent leur coopération en vue
de leur possible emploi dans le cadre
d’opérations bilatérales ou menées au
sein d’une coalition. Face aux défis
© MN

d’aujourd’hui et de demain, cette


Entraînement des équipes de visite françaises. capacité maritime crédible, construite
dans le cadre du CJEF, offre aux
L’assaut amphibie,
lancé sur les plages gouvernements français et britannique
du Pays de Galles une option de réponse immédiate et
le 18 avril, a été le puissante avec une empreinte terrestre
point d’orgue de
l’entraînement.
limitée.
lv thierry maguet

Interview
CV Éric Lavault
Commandant le bâtiment de projection et de commandement
(BPC) Dixmude, bâtiment amiral pendant Griffin Strike
© MN

naire. Même les


diffusions de quart
et de branle-bas
asymétriques, cyber-attaques… en s’ef- déployées. Une fois la phase la plus étaient doublées
forçant de recréer toutes les situations critique de l’opération en voie d’atté- en anglais.
tactiques dans lesquelles la composante nuation, elle pourra au besoin veiller à
maritime du CJEF pourrait être ame- l’application d’embargos, concourir au Quels défis
née à évoluer. La composante maritime besoin logistique et médical des forces le Dixmude a-t-il
offre au commandant du CJEF de terrestres projetées ou bien encore relevés pendant
Griffin Strike ?
nombreuses options capacitaires adap- offrir des capacités d’évacuation de res- Le Dixmude a
tées aux opérations. Dans l’urgence, sortissants et fournir une aide humani- fait face à deux
elle offre par exemple une capacité de taire d’urgence. principaux défis.
réaction immédiate par l’envoi d’un Les coopérations
groupe aéronaval (simulé dans cet BILAN POSITIF POUR LA CJEF amphibies et aéro-
entraînement) et/ou amphibie, capable Même si les marins français et britan­ nautiques pour les-
quelles il a effectué
par sa puissance de dissuader l’adver- niques travaillent ensemble depuis
© MN

des manœuvres
saire, d’affirmer la détermination de la longtemps sur certaines opérations, avec tous les
force et si nécessaire d’être engagée en cet entraînement mutuel s’est révélé Un entraînement niveau de pratique types d’engins de
premier sur le théâtre. Une fois l’opé- enrichissant pour tous. Au sein de opérationnel de la langue de débarquement de
ration commencée, son rôle principal l’état-major par exemple, où un niveau de cette ampleur Shakespeare avec la Royal Navy, dont
est de garantir la capacité d’entrée sur élevé d’intégration est toujours recher- est-il une première 40 Britanniques le Maxi-Flot, et de
pour un BPC ? insérés au sein du nombreux hélicop-
le théâtre de la composante terrestre. ché, chaque poste était occupé indiffé- Le BPC est coutu- Maritime Compo- tères britanniques.
Elle doit aussi veiller à la maîtrise et à remment en fonction des compétences mier de ce type nent Command Mais également
la sécurisation des espaces maritimes requises par un marin français ou d’exercice compte (MCC – comman- la coopération
concomitants, qui permettront de un britannique. L’emploi de procédures tenu de ses capa- dement de la com- sur le plan des sys-
s’inscrire dans la durée en maintenant communes au sein de l’Otan facilite cités opération- posante maritime) tèmes d’informa-
un flux logistique capable de soutenir les échanges. Comme le souligne nelles amphibies, et une compagnie tion et de commu-
aéronautiques, de 120 Royal nication, voie de
les troupes déployées. Pendant toute l’amiral Chaperon, les générations médicales et d’ac- Marines, durant la perfectionement
cette période, elle continue à assurer actuelles de marins français sont plus cueil d’état-major phase d’assaut, pour les prochains
une projection de puissance et de force familières avec la langue anglaise que tactico-opératif. En est une situation entraînements
depuis la mer, en soutien des troupes les précédentes. C’est donc une étape revanche, un tel sortant de l’ordi- communs.

COLS BLEUS - N°3049 — 33


vie des unités

Manche-mer du Nord
La Marine
sauve des vies !

E
n France, sur les 5 800 km de côtes
métropolitaines, le quotidien de
plusieurs milliers de marins est
rythmé par le dispositif de surveillance
© BRUNO PLANCHAIS/MN

et d’intervention en mer. En Manche-


mer du Nord, comme sur les autres
façades maritimes, la Marine veille
et intervient pour sauver des vies, de
jour comme de nuit, sous l’égide du
préfet maritime, garant de la recherche
La façade Manche – mer du Nord compte 14 sémaphores, actifs 24h/24 tous les jours de l’année.
et du sauvetage des personnes en
détresse dans sa zone de compétences.
En 2015, près de 3 500 personnes y ont ALERTE Enfin, la compagnie des marins-
été secourues. INCENDIE ! pompiers de Cherbourg peut être proje-
Le CROSS reçoit tée à bord de navires pour apporter
LA MANCHE-MER DU NORD, l’alerte : un incendie son expertise ou combattre un feu.
UNE ZONE DANGEREUSE s’est déclaré à bord
La Manche-mer du Nord est une zone d’un navire de UNE ACTION PRÉVENTIVE
pêche. L’équipage
très difficile avec l’un des plus impor- de 3 personnes est
L’action de la Marine ne se limite
tants trafics maritimes au monde et encore à bord et pas aux opérations d’assistance ou
un flux ininterrompu de navires à ne parvient pas à de sauvetage au large des côtes. Tout
passagers et de navires de commerce. À éteindre le feu. Une au long de l’année, le Groupe de
ce trafic s’ajoute l’ensemble des activités équipe d’interven- plongeurs-démineurs (GPD) Manche,
maritimes qui donnent bien souvent tion de marins-pom- les trois patrouilleurs de service
piers est projetée
lieu à des interventions d’assistance public (PSP) stationnés à Cherbourg
© AUDREY AGOSTINELLI/MN

par hélicoptère
et/ou de sauvetage en mer : la pêche avec le matériel et la Gendarmerie maritime œuvrent
professionnelle, la plaisance, les loisirs nécessaire pour cir- de manière préventive pour assurer
nautiques. Tout cela dans une mer im- conscrire l’incendie. la protection du territoire national
prévisible, soumise aux effets des vents, Le sémaphore le et des usagers de la mer. Les 870 km
des courants et des marées. plus proche veille de côtes s’étalant du Mont-Saint-
au bon déroule-
Naufrages, personnes isolées par la ment de l’opération
Michel à la frontière belge ont connu
marée, kite-surfeurs emportés au large, À la suite d’une infection à la main, un marin et rend compte de les deux grands conflits du XXe siècle.
hommes à la mer, blessés graves sur un pêcheur est hélitreuillé, aidé par le plongeur
la situation : « Arrivée Aujourd’hui encore, il reste des
hélicoptère de bord du Caïman Marine.
navire à passagers… nombreuses sont des marins-pom- quantités considérables de munitions,
les personnes qui sont sauvées, chaque piers à bord. Les découvertes au gré des marées et
semaine, par des unités de la Marine. mer. C’est pourquoi il est nécessaire pêcheurs ont pu des tempêtes. Le GPD Manche est en
embarquer sur leur
Lors d’opérations de sauvetage, les de disposer de moyens de sauvetage charge de l’importante mission de
radeau de survie
centres régionaux opérationnels de capables de couvrir une large zone d’in- et viennent d’être
dépollution des fonds marins et
surveillance et de sauvetage (CROSS) tervention et de rallier les lieux en un récupérés par un de sécurisation des activités mari-
mobilisent et coordonnent les moyens temps record. En 2015, 57 vies ont ainsi chalutier. » Un pa- times, dont la pêche, permettant ainsi
de sauvetage mis à la disposition été sauvées en Manche-mer du Nord. trouilleur de service de garantir d’avantage de sécurité en
du préfet maritime pour assurer ses Les sémaphores de la Marine jouent public est alors dé- mer et sur les plages.
missions. C’est le cas des deux hélicop- également un rôle essentiel. En plus de routé pour apporter Au lendemain des attentats de 2015,
son concours en
tères de la Marine, l’EC-225 stationné leur mission militaire, ils contribuent à arrosant le navire
la défense maritime du territoire a été
à Maupertus (Manche) et l’hélicoptère la sauvegarde de la vie humaine par une à l’aide de son renforcée. Pour rendre les approches
de service public Dauphin, basé au surveillance permanente du plan d’eau, canon à eau. Après maritimes encore plus sûres et surveil-
Touquet (Pas-de-Calais), qui tiennent l’écoute des fréquences de détresse et le plusieurs heures de ler les sites sensibles du littoral, les
une alerte H-24, 365 jours/an. Lors- guidage des unités de secours. Véri- lutte, l’incendie est PSP et les gendarmes maritimes font
qu’une vie est en jeu, l’engagement tables vaisseaux de pierres, leur veille maîtrisé et le navire partie intégrante d’un dispositif
est remorqué vers le
de tels moyens aériens s’avère indis­ constante sur des points dangereux port le plus proche
organisé en couches successives de
pensable : les courants forts et la pour la navigation et à l’entrée des ports par un moyen nau- la terre (14 sémaphores implantés sur
température de l’eau souvent très basse de commerce d’intérêt majeur en font tique de la SNSM. la façade) à la haute mer. 
réduisent considérablement la durée un élément indispensable du dispositif ev ophélia patry
de survie d’une personne tombée à la de sauvetage.

34 — COLS BLEUS - N°3049


Publicité
RH

Réserve opérationnelle 1

Montée en
puissance
des effectifs

© MN
« Autonomie
© MN

Depuis les attentats de janvier puis de novembre 2015, le président


de la République a exprimé le souhait que la réserve opérationnelle
et polyvalence »
contribue plus largement à la protection du territoire national. QM2 Lise-Amélie H., réserviste
Cette décision inscrite dans la loi de programmation militaire
actualisée implique une montée en puissance de ses effectifs. Comment avez-vous intégré la Marine en tant que réserviste ?
cv benoît courau
Lors de l’Armada de Rouen 2013, j’ai entendu parler des
préparations militaires (PMM). Vivre cette aventure m’a
immédiatement intéressée. Après la formation à la PMM
de Rouen, j’ai suivi la formation militaire initiale de réserviste
comme marin-pompier. Affectée à ALFAN, j’ai complété ma
formation au centre d’instruction naval (CIN) de Saint-Mandrier
La réserve opérationnelle : avant d’être affectée sur des bâtiments basés à Brest.

comment ça marche ? Quelle est votre fonction ?

L
En tant que réserviste je peux occuper une place dans une
a réserve opérationnelle a voca- en collaboration avec les structures équipe de service et ainsi contribuer à la protection du
tion à renforcer les armées dans interarmées (délégué interarmées des bâtiment à quai. En mer, au même titre que les autres marins
toutes leurs missions : opérations, réserves - DIAR) et interministérielles de l’équipage, mes journées sont rythmées par les quarts,
protection défense, soutien, (Conseil supérieur de la réserve militaire le maintien en condition du matériel et les entraînements
formation, recrutement, rayonnement, - CSRM) et s’appuie sur les bureaux quotidiens pour maintenir la réactivité et les compétences
sous forme de renfort permanent, ou de gestion de la réserve militaire en matière de sécurité.
ponctuellement en cas de pic d’acti- Marine (PM3) et des effectifs (EFF)
vités. Elle est composée de volontaires de la Direction du personnel militaire Comment voyez-vous la suite de votre carrière
ayant signé un engagement à servir de la Marine (DPMM) pour prendre dans la Marine ?
dans la réserve (ESR) et des anciens ses décisions. Actuellement je prépare le concours d’entrée à l’École de
militaires d’active soumis à disponibilité La Marine emploie 4 900 réservistes santé des armées. J’espère revenir dans la Marine en tant
pendant les cinq années qui suivent opérationnels sous contrat, qui effec- que médecin ! La vie en équipage m’a donné confiance
leur départ de l’institution. tuent une moyenne de 26 jours d’activi- en moi et m’a appris la patience, l’autonomie et la polyva-
Le délégué aux réserves (DRES) pilote té chaque année et viennent renforcer lence. Avoir pour la première fois des responsabilités est une
la politique des réserves de la Marine la quasi-totalité des formations. réelle fierté. Je sais que ce métier est mon objectif de vie.

36 — COLS BLEUS - N°3049


RH

« Montée en puissance de la réserve opérationnelle :


quel impact sur les marins ? »
CV Benoît Courau, chef du bureau « réserve militaire » (PM3)

2015, pour recruter 250 jeunes supplémentaires. de la Marine et des précieuses préparations
Le DRES, le capitaine de vaisseau Nicolas Bezou, militaires marine (PMM) dans leur zone.
et le bureau Effectif/Réserves de la DPMM Plus de 220 postes de jeunes réservistes vont être
veillent au maintien de ces budgets. créés pour le filtrage, la protection opération-
La plupart des forces ne peuvent plus remplir nelle des bâtiments, la surveillance des façades
leurs missions sans le renfort de réservistes expé- maritimes ou la cyberdéfense.
rimentés. Mais elles ont aussi besoin de jeunes,
notamment pour les fonctions de protection les Comment la Marine va-t-elle former
moins sensibles. Les anciens marins expérimen- ces jeunes ?
tés sont également bienvenus dans les missions Il est effectivement délicat d’organiser l’intégra-
de protection au sens large. tion d’une population dont on ne connaît pas en-
core le volume. Les écoles de la Marine sont très
Pensez-vous que les jeunes ciblés se sollicitées, donc la formation initiale des jeunes ne
présenteront effectivement dans les CIRFA et les sera dispensée qu’à partir des modules déjà exis-
APER (antennes pour l’emploi des réservistes) ? tants. La Marine a fait le choix d’une formation de
La Marine fait tout pour ! Le service de recrute- spécialité succincte des guetteurs et des fusiliers,
ment de la Marine (SRM) et PM3 ont conjugué pour un emploi rapide, les réservistes étant inté-
leurs efforts pour informer les jeunes, soit directe- grés dans une équipe mixte active-réserve. Les
ment (sites internes SIREM(1) et etremarin.fr, jeunes employés dans les brigades de protection
LinkedIn, flyer dédié, présence de l’APER aux ou dans les postes de filtreurs et rondiers, seront
salons étudiants), soit par l’intermédiaire des formés par compagnonnage dans leur unité.
marins (information relayée par le correspon-
© MN

dant du personnel officier et les majors conseil- Pensez-vous que la réserve soit vraiment une
lers), par Intramar et Intradef. opportunité pour les proches des marins ?
Commandant, si la réserve opérationnelle doit Enfin, les employeurs de réservistes ont été infor- Si votre neveu ou le fils de votre voisine trouve
intégrer des jeunes pour participer à la défense més des évolutions, au cours d’une visioconfé- dans la réserve un job d’été, situé près de chez
du territoire, n’y aura-t-il pas moins de crédits rence Brest-Paris-Toulon en avril. lui, payé 60€ par jour en étant souvent nourri et
pour les réservistes anciens marins ? logé, qui lui fasse découvrir la Marine où il pourrait
Non, car cette nouvelle ressource est complé- Comment pensez-vous employer ces jeunes ? ensuite s’engager, c’est une belle opportunité de
mentaire de la réserve actuelle et fait l’objet Le DPMM a sollicité les besoins des grands partager du temps au service de la France avec
d’un financement supplémentaire : le budget employeurs – commandants d’arrondissements des marins d’active.
2016 est estimé à 14,8 M€, soit 15 % de plus qu’en maritimes responsables des emprises militaires (1) Site interarmées de la réserve militaire.

Info
Vous souhaitez rejoindre la réserve opérationnelle ?
Toutes les informations relatives aux formalités à accomplir, les postes disponibles
et les coordonnées des antennes pour l’emploi des réservistes (APER) sont dispo-
nibles sur le site interarmées de la réserve « SIREM » et le site du SRM « etremarin.fr ».
• Vous êtes encore d’active et bientôt radié des contrôles de l’activité ?
Renseignez le bulletin de volontariat fourni par le BARH ou le SAP/GSBdD.
• Vous êtes ancien marin ? Contactez votre APER de rattachement.
• Vous êtes civil ? Contactez le CIRFA de votre région.
© FRANÇOIS BOGAERT/MN

Contacts
APER Brest : 02 98 14 97 65 - aper_brest@marine.defense.gouv.fr
APER Paris : 01 41 93 30 51 - aper_paris@marine.defense.gouv.fr
APER Toulon : 04 94 16 29 70 - aper_toulon@marine.defense,gouv.fr

COLS BLEUS - N°3049 — 37


RH

Rénovation de la concertation
Renouvellement
du CFMM et du CSFM

Condition de vie et de travail, solde, reconnaissance,


réforme des retraites… autant de sujets qui concernent
tous les marins et qui sont au cœur du dialogue interne.
Celui-ci s’articule autour de la représentation (présidents
de catégories), de la participation (CPU(1), CPP(2))
et de la concertation (CLFMM(3), CFMM, CSFM). Cette
© LISA BESSODES/MN

année, le Conseil de la fonction militaire de la Marine


(CFMM) et le Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM)
se rénovent et sont renouvelés intégralement. L’appel
à candidatures est lancé !
CC DESEUCHE

ReNOU
DU CFMMV e l l e m e N t

L
et DU CS
e CFMM est présidé par le ministre 2 officiers mariniers supérieurs (OMS), FM
de la Défense. Le chef d’état- 2 officiers mariniers (OM) et

SUJETS V
major de la Marine (CEMM) en 1 quartier-maître ou matelot seront élus
est le vice-président et en assure pour 2 ans par les membres du CFMM,
la présidence effective. D’un format parmi tous les marins candidats. Il n’est
S
LE
tn So cIA
d’aCHaFantS
Ac tIo

POuvOIr eS en
plus resserré qu’aujourd’hui, il comptera, plus nécessaire d’être membre du DeS jeUn Ogue
garDe oyAncE d I a L e
CE

itaiR
OU
N mUil
dE Prév
FondS
après le renouvellement de 2016, CFMM pour être candidat au CSFM.
COaN DitgiO ra ph iq
e Hé be rg
eM en t
eS
136 membres, dont 40 titulaires. Repré- Dates limites pour se porter candidat : g éO
S é F O r sOlDe
M
r ati O n r iNDiCes De L E S
C él ib t
S CONC
D é C O ti IL
sentant tous les groupes de grades et • CFMM : 22 juillet 2016 (tirage au sort : p r O te C
O n
oyAncE
FAM
B L E S S éviSe privée-
t
d’aCHa
dE Prév
statuts, ils seront tirés au sort parmi tous septembre 2016) ; FondS
POuvOIr
PEn SIo nS
S je Un eS
en Fa nt
S
ncE
rD e De
oyA
les marins candidats pour un man- • CSFM 15 septembre 2016 (élection
ga
at iO n
CO nC ili dE Pr év
Fo n dS SI o n S SO lD e
el le
eS SiO nn
vi e pr OF va IL
PE n
de tra
On S nS tr a it e
dat de 4 ans. La priorité sera toutefois CSFM : octobre 2016). CO nd ItI
e n t LIE
LOISIrS
re
lO g e M
IS o L é
pr ivé e-
tiO n vie

M A r In is sa N C e a bi ll em eN t
CO nC ilia iO nn ell e
donnée aux détenteurs ou anciens N N a de ré SId en Ce H
vie pr OF
eSS

R eC Oge pr iM eS
détenteurs depuis moins de 8 ans d’un RÔLE ET TRAVAUX DU CFMM Me nt rI d Iq uE
E

CH an
tI o n ju LI E n S
statSoULdtE
Pr o tE c
RN
mandat de président de catégorie ET DU CSFM ENT
ou de membre du CFMM, afin de tirer Leur rôle commun est de conseiller les
le meilleur parti de leur expérience au hautes autorités de la Marine et du mi-
service de leurs camarades. nistère. Les membres titulaires du CFMM, SOYeZ C
a N D i Da
Le CSFM est également présidé par le
ministre de la Défense. Il devient perma-
ou en cas d’absence les suppléants,
se réunissent au moins deux fois par an
t!
PO
nent. Ses 61 membres seront dédiés à en session d’une semaine. Ils étudient iNtRaDeF UR PlUs D’iNFO
: site RH Rm
CO Ur rie maRiNe/ atiONs :
ONglet
temps plein à la concertation. Il comp- toutes les questions relatives aux condi- tél ép hO
ne : 09
l : cfm m.
ld. lst@ int
88 68 49 rad
DialOg
ef. go uv .fr Ue
64 - PNia
841 168
tera 6 marins, 36 représentants des tions de vie, d’exercice du métier 49 64

autres armées, directions et services, de marin ou d’organisation du travail Date s li


m it es D
CFMM 22
juillet 201 e Ca N D
3 retraités et, à terme, 16 représentants et peuvent émettre un avis sur les sujets 6 à minu
it et iDa
CSFM 15 tU R e :
septembre
2016 à mi
nuit
des APNM(4). Les 6 marins (1 officier, qui relèvent du CSFM.

38 — COLS BLEUS - N°3049


RH

Témoignages

« Faire entendre sa voix »


PM Mickaël Diverres, concertant au
CFMM et au CSFM

«D
ans la Marine depuis 1994, je me dat(s) du marin
suis engagé dans la concertation concerné.
dès 2004 alors que j’étais second Ces années
maître. Actuellement titulaire au de concerta-
CFMM et au CSFM, c’est pour moi une opportunité tion m’auront
unique de faire remonter directement les problé- permis de
© LAURENT BOUILLON/MN

matiques de condition du personnel rencontrées et rencontrer


de donner mon avis sur la condition militaire auprès des militaires
des états-majors et du ministre de la Défense. et civils de la
De l’organisation et du temps : voilà ce qu’il faut Défense de
au concertant pour conjuguer ces deux fonctions, grande quali-

© MN
exercer à la fois son mandat et son métier de té, désintéres-
militaire sans que cela ne soit préjudiciable ni au sés et investis
Concentré sur toutes les questions gé- dialogue interne, ni à son unité. Un certain nombre pour le bien de la communauté militaire. Vous
nérales relatives à la condition militaire, de moyens sont prévus pour aider les concertants êtes concernés, n’hésitez plus, foncez ! Cela vaut
le CSFM est obligatoirement saisi des mais cela suppose que le commandement local vraiment le coup, vous en retirerez une expérience
projets de textes qui concernent les s’investisse pour faciliter l’exercice du ou des man- unique. »
militaires dans les domaines statutaire,
indiciaire et indemnitaire. Ses membres,
entièrement dédiés à la concertation
même s’ils restent administrativement
affectés dans leur formation d’origine,
« Le dialogue se modernise »
partagent leur emploi du temps entre CV Olivier Bodhuin, chef du bureau condition
leurs travaux à Paris et le dialogue avec
les marins dans les ports.
du personnel militaire

«D
Ces deux conseils ont largement contri-
bué à la création de la Journée du epuis plus de 45 ans, les militaires aux recommandations du CFMM et du CSFM.
marin, sensibilisé les autorités à l’héber- français peuvent, par l’intermé- Avec la création récente des Associations
gement des militaires, à l’habillement, diaire de leurs représentants, signi- professionnelles nationales de militaires (APNM)
à la revalorisation des grilles indiciaires, fier directement aux plus hautes et pour tenir compte des évolutions de la socié-
aux problèmes de solde, et donné leur autorités militaires et au ministre de la Défense, leurs té, le dialogue se modernise. Le CSFM devient
avis sur de nombreux textes : logement, inquiétudes et leurs attentes sur les sujets relatifs une instance permanente et ses membres, dès
congé du blessé, fonds de prévoyance, à leur condition et à leur statut. Les résultats sont la fin de l’année 2016, seront dédiés à la concer-
reconversion, réforme des retraites. là : le droit tation. Lorsqu’elles seront reconnues représen-
(1) Commission participative d’unité. d’accès à un tatives, les APNM pourront également siéger au
(2) Commission participative du port. second em- CSFM. Les marins du futur CSFM demeureront af-
(3) Conseil local de la fonction militaire de la Marine.
(4) Association professionnelle nationale militaire. ploi après la fectés dans leur formation d’origine et siègeront
retraite, la régulièrement en commissions.
campagne Ils pourront compter sur l’aide du commande-
double en ment et le soutien de l’ensemble des membres
Afghanistan, du CFMM. L’enjeu est de taille pour ces militaires
la préser- qui devront concilier les principes fondamen-
vation des taux du statut général (discipline, disponibilité,
retraites, le loyalisme et neutralité) et la défense des intérêts
congé du collectifs. C’est une chance pour la Marine qui
blessé, les peut renforcer encore son efficacité.
dons de per- Vous avez le sens de l’intérêt général, vous êtes
Info missions sont sensible aux conditions de vie et d’exercice du
quelques- métier de marin ? Soyez candidat ! »
Pour en savoir plus sur le CFMM et
le CSFM et connaître les conditions
unes des
nécessaires pour se porter candidat, nombreuses
rendez-vous sur le site RH Marine/onglet évolutions ob-
© MN

dialogue ! tenues grâce

COLS BLEUS - N°3049 — 39


portrait

Maître principal
Arnaud L.
Chargé de la formation au Centre
d’expertise opérationnel météorologique
et océanographique de la Marine
(Centex Metoc)

Son parcours Meilleur souvenir


1998 : Entrée à l’école de Déploiement à bord du Prairial
Maistrance. Dès ma deuxième affectation
2002 : Participation à l’opération (au pool renfort du Centex Metoc, à
Enduring Freedom. l’été 2002), j’ai eu la chance d’être
2005 : Brevet supérieur Metoc désigné pour la frégate de surveil-
à l’École nationale de la lance (FS) Prairial lors de sa mission
météorologie (Toulouse). en Asie au cours de l’hiver 2003.
2007 : Embarquement sur la Outre le dépaysement incroyable
frégate de défense aérienne Forbin qu’offre cette expérience, en tant
alors en armement. que jeune Metoc, c’était l’occa-
2011 : Chef de la station sion de m’évaluer en opérations
météorologique de la base et mettre à l’épreuve mes connais-
© BENJAMIN PAPIN/MN

d’aéronautique navale de sances. J’étais très autonome :


Lann-Bihoué après l’obtention du chargé de conseiller au mieux le
brevet de maîtrise Environnement- commandement, j’ai également
Météorologie-Opérations apprécié le travail au sein d’un
(CIN Saint-Mandrier). équipage optimisé.
© FLORIAN LEDOUX/MN

40 — COLS BLEUS - N°3049


portrait

Focus
Le Centex Metoc
L
e Centex Metoc est le centre permet aux marins d’acquérir une
d’expertise opérationnel expérience solide. En liaison avec
météorologique et océano- les bureaux chargés du suivi du
graphique de la Marine. Il est un matériel et du retour d’expérience,
multiplicateur d’efficacité. Une le responsable de la formation
de ses missions prioritaires est organise avec l’appui des services
d’assurer le soutien permanent des hydrographiques et océanogra-
forces sous-marines et de CECLANT. phiques de la Marine (SHOM) des
Il est également chargé d’entrete- stages de formation qui ont pour
nir un pool de marins qui viennent objectif de maintenir les compé-
armer les unités de premier rang tences Metoc de toutes les unités
de la Marine quand elles sont de la Marine. Les Metoc, comme
déployées en zones équatoriales, les marins des unités, contribuent à
tropicales ou Grand Nord. Cela la réussite des opérations.

© FLORIAN LEDOUX/MN
© FLORIAN LEDOUX/MN

«L
es bateaux gris , j’en ai parallèle, les stages en formation
entendu parler depuis continue et des cours (BS, CSUP)
toujours ; par la famille, suivis au sein de Météo France et du
les amis de la famille. Les premiers, SHOM me permettent de rester au
je les ai aperçus lors de courts contact des évolutions techniques
séjours à Toulon ou à Brest. Sans le du domaine. Dans les langues, les
savoir, c’est peut-être ce qui m’a certificats proposés me poussent
encouragé à poursuivre des études à approfondir les connaissances
scientifiques et m’a conduit à acquises. Dans le sport aussi.
hésiter, plus tard, entre une carrière Le relief varois me donne en 2008
de médecin des armées et la soif du trail, discipline que je
celle d’officier marinier. » Au final, pousse maintenant jusque dans
c’est le désir de s’engager rapide- sa version “ultra”, c’est-à-dire
ment qui l’emporte et fait de lui un au-delà de 80 km. » En 2014, le
marin Metoc. MP Arnaud répond à l’invitation du
Ses premiers mois à la mer à bord chef d’état-major de la Marine
de la frégate anti-sous-marine et participe à la 38e édition du
De Grasse l’amènent à participer à marathon de Paris sous les couleurs
la conduite et à la planification des de la Marine aux côtés de
opérations. Ensuite, en quatre ans 41 000 coureurs. En 2015, il participe
à bord d’unités différentes, du au championnat Marine de voile.
De Grasse au Charles de Gaulle, en « Nous étions des marins motivés et
passant par le Prairial, la Jeanne de tous niveaux. En six mois nous
d’Arc et le pool Centex Metoc, il avons appris à nous connaître et
prend conscience de l’importance à fonctionner dans un environne-
de sa fonction de conseil avec des ment infiniment variable. Je ne
besoins en prévisions météorolo- m’arrêterai pas en si bon chemin
giques et océanographiques de et je compte profiter de toutes les
plus en plus fins, en particulier pour opportunités que m’offre la Marine,
© BENJAMIN PAPIN/MN

les avions de chasse ou peut-être dans l’instruction… et bien


les sous-marins. La greffe a pris ! sûr, je prépare les épreuves pour
« Les affectations successives sur accéder au grade de major ! »
des unités opérationnelles m’offrent lv olivier bouzemane
de nombreuses opportunités. En

COLS BLEUS - N°3049 — 41


immersion

Super Étendard
Modernisé:
la der des der
Après 40 ans de bons et loyaux services, le Super Étendard Modernisé, qui équipe
la flottille 17F de la base d’aéronautique navale de Landivisiau, va être retiré du service
actif à l’été 2016. La composante chasse de l’aéronautique navale passera ainsi au tout
Rafale. Pendant plus de 40 ans, le Super Étendard a été engagé dans la plupart des conflits
internationaux auxquels la France a participé (Afghanistan, Libye, Irak, Syrie…).
Retour sur son dernier déploiement : la mission Arromanches 2.
ASP MARIUS CHIUMINO

2
© MN

1
© MN

1 Initialement conçu 2 Sur le pont, les


pour l’assaut mer, armuriers fixent les
le Super Étendard munitions au mât
Modernisé (SEM) est d’emport sous l’aile
capable de mener de l’avion. Plusieurs
un large panel de configurations d’arme-
missions (lutte antina- ments répondent
vire, assaut contre des aux différents types
objectifs à terre, pro- de mission. Le Super
jection de puissance, Étendard peut em-
reconnaissance…). Au porter le missile AM39
centre de préparation pour une mission
de mission (CPM), un antinavire ou comme
officier renseignement ici des bombes
briefe un pilote avant GBU 49 à guidage
son départ en vol. dual laser/GPS pour
une frappe contre 3
© MN

des objectifs terrestres.

42 — COLS BLEUS - N°3049


immersion

3 Guidé par les chiens


jaunes, un pilote
attend que le pan-
neau déflecteur de jet
s’abaisse pour aligner
son appareil dans
l’axe de la catapulte.
L’élingue qui relie
le SEM au croc de
lancement est fixée
puis mise en tension.
Une fois le drapeau
vert de l’officier
de lancement levé,
le pilote met pleins
gaz. Une fois le
drapeau abaissé,
l’avion est catapulté.

4 Armés de bombes à
guidage laser GBU 49
et GBU 58, deux SEM
sont catapultés
du porte-avions.
Propulsés à près de
250 km/h en seule-
ment quelques se-
condes, les chasseurs
partent assurer des
missions d’appui aé-
rien dans le cadre de
l’opération Chammal.

5 Après avoir tran-


sité vers leur zone
d’opération, les Super
Étendard Modernisé
patrouillent au-dessus
du théâtre. En soutien
aux troupes irakiennes
présentes au sol,
les chasseurs de
l’aéronautique navale
se tiennent prêt à déli-
vrer leur armement.

4 5
© MN

© MN

COLS BLEUS - N°3049 — 43


immersion

1 Pour accroître leur


autonomie, les pilotes
s’approvisionnent
en carburant durant
leur vol. Ici, les
Super Étendard
Modernisé se
ravitaillent sur un
tanker de la coalition.

2 Fin de mission tir


pour les SEM qui
rallient le Charles de
Gaulle. Les pilotes
tournent au-dessus
du porte-avions en
suivant un circuit très
précis qui cadence le
rythme des appon-
tages. Un par minute
de jour et toutes les
deux minutes de nuit.
« Trains, volets, crosse »
sont sortis, les avions
vont pouvoir apponter.

1
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3 4
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2 5
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44 — COLS BLEUS - N°3049


immersion

3 Concentration maxi- 6 Après 38 années


male. Après un vol de service, les Super
pouvant durer jusqu’à Étendard Modernisé
six heures, les pilotes ont achevé le 16 mars
doivent apponter. 2016 leur dernier
Une manœuvre déploiement
requérant une extrême opérationnel. À tout
vigilance. À l’arrière seigneur tout honneur,
du porte-avions, les le SEM n°1, premier à
officiers d’appontage être entré en service,
veillent à ce que les a également été le
pilotes soient alignés dernier à être cata-
et aient la bonne pulté du Charles de
incidence pour ac- Gaulle avec le com-
crocher l’un des trois mandant de la flottille
brins qui arrêteront aux commandes.
leur avion sur à peine L’événement a éga-
90 mètres. lement été marqué
par un défilé aérien
4 Une fois à bord, pour le plus grand
les chasseurs sont plaisir de l’équipage.
descendus au han- À l’honneur, les SEM
gar. Les techniciens ont survolé le porte-
vont œuvrer toute la avions en formation,
nuit pour entretenir escortés par six Rafale
et reconfigurer les et un E-2C.
aéronefs pour les mis-
sions du lendemain. 7 Première et dernière
Sollicités quotidienne- flottille à mettre en
ment tout au long du œuvre le SEM, la 17F
déploiement, les SEM basée à Landivisiau
ont affiché un taux de (Finistère) sera dotée
disponibilité proche du Rafale M à partir
de 90 %. de l’été 2016.

5 Les pilotes, mais


aussi l’ensemble
de l’équipage, sont
entraînés pour tenir un
rythme opérationnel
intense. Les Super
Étendard Modernisé
sont catapultés du
pont du porte-avions
de jour comme de
6 nuit.
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7
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histoire

La guerre de Crimée (1854-1856)

Une victoire forte mais amère


© GALLICA/BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE

Mars 1854, la France de Napoléon III forme une coalition avec l’Empire ottoman, dans la mer d’Azov, où les dépôts ennemis
le Royaume-Uni et le royaume de Sardaigne pour s’opposer aux troupes du tsar Nicolas Ier. sont abondants.
La guerre de Crimée sera le premier combat mené conjointement par les Britanniques Au printemps 1855, des canonnières, des
chaloupes porte-mortiers, des bombardes
et les Français après sept siècles de conflits. Au terme de terribles batailles en mer Noire et des vapeurs bien armés sont rassemblés
et en mer Baltique, la coalition triomphe des Russes mais le bilan est en demi-teinte côté pour former l’avant-garde des escadres
français. Gros plan sur un conflit oublié, que les spécialistes considèrent comme où les navires de ligne servent d’escorteurs
la première guerre moderne du fait des armes et des moyens de propagande utilisés. et de transport de troupes. Parallèlement,
la construction de batteries flottantes

D
cuirassées est engagée. Pour parer à cette
ans la rade de Sinope, au nord DES COMBATS TOUS AZIMUTS menace, les Russes associent aux moyens
de la mer Noire, la Turquie subit Pour briser ce potentiel naval, le bombarde- de défense classiques, tels les milices,
une cinglante défaite navale en ment des arsenaux de la Baltique et des armes nouvelles et fort peu efficaces :
novembre 1853. Pessimistes, les de la mer Noire s’impose, mais cette offen- les premières mines sous-marines.
Franco-Britanniques passent de sive n’est pas engagée avant la fin de l’été En Baltique, le fort de Sveaborg est écrasé
l’interposition à la guerre le 27 mars 1854. et échoue. Après l’échec de l’assaut du sous les bombes les 9, 10 et 11 août 1855,
Les côtes de la Crimée sont le principal 17 octobre 1854, le siège en règle de tandis que les côtes de la mer Blanche
théâtre d’une lutte de deux années, me- Sébastopol s’impose en plein hiver. Les sont harcelées. En mer Noire, les flottilles
née également en mer Baltique, en mer flottes alliées, dont les équipages participent alliées, forçant le détroit de Kertch, passent
Blanche et sur les côtes russes du Pacifique aux combats d’artillerie à terre, assurent en mer d’Azov dont elles ravagent les côtes.
nord. Les mois suivants, les marines alliées surtout des missions logistiques, ponctuées Les opérations dans le Pacifique nord
verrouillent le Bosphore et croisent en mer d’accidents et de pannes. s’avèrent en revanche aussi décevantes qu’en
Noire. En juin 1854, les bâtiments alliés Dans la mer Baltique, où la Marine impé- 1854. Moins ravitaillée et soumise à des
projettent 50 000 hommes à Varna, en Bul- riale est tout au plus l’auxiliaire de la Royal assauts répétés, la garnison de Sébastopol
garie. L’offensive terrestre fait toutefois long Navy, la prise de Bomarsund, le 16 août finit par évacuer la base en septembre 1855.
feu. Devant les menaces autrichiennes, les 1854, est le seul grand succès des alliés que Le 17 octobre, les forces navales, ayant
troupes russes ont évacué les principautés les épidémies comme le scorbut déciment. intégré trois chalands cuirassés français,
danubiennes. La flotte russe de la Baltique L’hiver venant, il leur faut quitter ces eaux ont raison du fort de Kinburn, qui protège
se retire dans Kronstdadt, l’avant-port de septentrionales. Les leçons des échecs et des la base de Nikolaiev. Le bombardement
la capitale, tandis qu’une partie de la flotte succès sont tirées. Les marines program- de cet arsenal, bien défendu, est toutefois
de la mer Noire se saborde pour verrouiller ment au printemps des raids côtiers en mer suspendu. La mort du tsar Nicolas Ier, la
l’entrée du port de guerre de Sébastopol. Blanche, sur le littoral finlandais comme chute de Sébastopol et l’état calamiteux

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histoire

1860, la mise en chantier de premières


frégates cuirassées renforce le prestige du
pays et ses exportations militaires.
Mais la Marine n’a pas mené la guerre
d’escadre ou de frégates qu’elle espérait. Ses
missions logistiques ont été mal reconnues.
Nombreuses certes, les « descentes »
(à terre) n’ont donné lieu à aucun fait
d’armes aussi mémorable que la bataille
de l’Alma. Enfin, la Marine a servi d’autres
intérêts. Imposées par le traité de Paris,
la neutralisation de la mer Noire et
l’interdiction de la guerre de course,
bénéficient d’abord aux Britanniques.
Autant de déceptions et de frustations
auxquelles doivent faire face les officiers
de marine, d’autant plus perplexes que la
supériorité navale française est manifeste.
© GALLICA/BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE

patrick louvier
Maître de Conférences - Université Paul-Valéry
Auteur de La Puissance navale et militaire britannique
en Méditerranée, 1840-1870
Service historique de la Défense, 2006

2
© GALLICA/BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE

La guerre de Crimée
en 6 dates
• 27 mars 1854 : Pour soutenir l’Empire ottoman
menaçant d’être défait, le Royaume-Uni
et la France déclarent la guerre à la Russie.
© GALLICA/BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE

• 14 septembre 1854 : Débarquement des


3 alliés en Crimée. Retranchés sur les hauteurs
de la rivière de l’Alma, les Russes sont
décidés à leur couper la route de Sébastopol.
des finances encouragent le nouveau tsar, • 25 mai 1855 : Offensive amphibie alliée en
Alexandre II, à négocier. Le spectre d’une mer d’Azov.
• 8 septembre 1855 : À terre, le général
attaque amphibie contre sa capitale, voire français Mac Mahon parvient à s’emparer
d’un assaut contre Nikolaiev, contribue de la position fortifiée Malakoff, prononçant
à la sortie de crise. Le tsar et ses troupes la phrase devenue fameuse : « J’y suis,
capitulent, mieux les Russes ratifient en j’y reste. » Trois jours plus tard, les Russes
avril 1856 le traité de paix de Paris qui enté- 4 évacuent Sébastopol après avoir détruit ses
rine la fin de ce conflit. fortifications.
• Octobre 1855 : Outre les offensives terrestres,
1, 2, 3 et 4 Engagée en 1852 contre la Russie ce conflit a aussi été une bataille navale
UN BILAN EN DEMI-TEINTE dans une rivalité sourde au Proche-Orient, dans la mer Baltique où est déployée
La Marine française du Second Empire la France assiste l’année suivante à la rupture une flotte franco-britannique qui pratique
sort forte, mais amère de cette guerre. des relations russo-ottomanes. Le pays une guerre dite « de canonnier ». Les armes
De longues navigations dans des mers va ainsi se lancer dans une guerre contre modernes (mines et torpilles) sont mises en
difficiles ont amélioré les capacités les troupes du tsar Nicolas Ier au sein d’une œuvre pour la première fois.
coalition rassemblant l’Empire ottoman, • 30 mars 1856 : Ratification du traité de Paris
manœuvrières de ses officiers. Accélérée le Royaume-Uni et le royaume de Sardaigne. qui met fin de la guerre de Crimée. Victoire
par le conflit, la généralisation de la vapeur Des gravures racontent, avec ferveur et un militaire et diplomatique de la coalition.
sur les navires de ligne est achevée dans nationalisme exacerbé, cette guerre tombée L’empire français réapparait clairement dans
les eaux européennes. Au début des années aujourd’hui dans l’oubli. le jeu politique des grandes nations.

COLS BLEUS - N°3049 — 47


loisirs
Musique Livres Cinéma Expos Spectacle STÉPHANE DUGAST

La guerre des futurs


Stratégie et incertitude le saviez-
vous ?
Matelot (épisode 1)
Au fil des siècles, notre
langue s’est nourrie de mots
empruntés d’abord aux fiers
conquérants grecs, latins, La revue maritime
arabes puis hollandais. 200 ans : toujours vaillant !
Dans le plat pays, le terme
« Matenoot » désigne le LA REVUE MARITIME FÊTE CETTE
« compagnon de couche », ANNÉE SON BICENTENAIRE.
soit la personne avec qui Le périodique, descendant
on partage sur un navire direct des Annales maritimes et
son hamac (ou « branle »). coloniales, s’inscrit dans l’histoire
En français, le terme va en tant que véritable témoin
d’emblée définir un « homme du patrimoine maritime
d’équipage associé à un français. De la division navale
autre pour assurer alternati- du vice-amiral Penaud en
vement un service ». Dans la 1863 au dirigeable américain
pyramide des grades, ce mot Shenandoah et son convoyeur
désignera le premier grade, spécialisé le Patoka, aucune
un jeune marin souvent peu évolution, aucune invention
LA DÉSTABILISATION DU PROCHE ET DU MOYEN-ORIENT, expérimenté. Sur un voilier, n’auront échappé à la Revue
L’EXTENSION DU PHÉNOMÈNE DJIHADISTE EN AFRIQUE, le matelot accomplira des Maritime. Depuis deux siècles,
LA CRISE MIGRATOIRE EN MÉDITERRANÉE… Le monde est tâches plus nobles comme ses publications sont nombreuses
en mutation tout en étant sujet à bien des paradoxes. La violence, celle consistant à faire et surtout variées. Près de
la souffrance et la peur envahissent nos écrans plats, tandis que les des nœuds ou des épissures, 1 500 numéros ont ainsi été
conflits entre États sont devenus rares. La guerre froide s’est achevée s’occuper de la voilerie. publiés depuis 1861. Malgré
depuis plus d’un quart de siècle. Il serait pourtant trop simpliste Autant de savoir-faire que l’on les restrictions d’après-guerre
d’écarter des réflexions le sujet des conflits tant il est essentiel d’en continue de désigner par le et les sempiternels projets de
saisir toutes les dimensions modernes. Une mission dont se sont terme « matelotage ». Quant à suppression, ce journal a toujours
parfaitement acquittés seize officiers français (dont les capitaines de son tricot rayé, son cols bleus, réussi à garder le cap, et surtout
vaisseau Jacques Fayard et Christophe Lucas), mais aussi des officiers son bâchis et son légendaire su se maintenir à flots. Une
de trois autres armées européennes, tous auditeurs du Centre des pompon rouge, ils vont longévité saluée par Cols Bleus,
hautes études militaires (CHEM), sous la houlette de son directeur. construire la renommée du proche « cousin » quant à lui
Un livre de réflexion pour comprendre les guerres dernière génération « mataf’ ». Un sobriquet à l’ori- septuagénaire.
de plus en plus variées, « hybrides », asymétriques et terroristes. gine difficilement vérifiable. ASP Marie Morel
Des « guerres caméléons » – chères au stratège Clausewitz mais S’agit-il du « matafion », le nom et ASP Élisa Philippot
dans une version 2.0 – qui se jouent des frontières, des nationalités, donné à un petit cordage
des règles et même de la politique. Un ouvrage pour réfléchir et mieux utilisé autrefois sur les galères
cerner ce phénomène de « pulvérisation de la violence » si déroutant ou du mot « matafian » em-
pour les armées conventionnelles. prunté à l’italien matafione
pour désigner un matelot ? Retrouvez
La Guerre par ceux qui la font – Stratégie et incertitude,
Collectif sous la direction du général Benoît Durieux, Éditions du Rocher, (À SUIVRE) la Revue Maritime
365 pages, 22 €. en 9 dates clés !

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loisirs

Rimbaud, Darwin & Cie


Que d’aventures !
« Sans les explorateurs, le monde
serait une tache blanche », aime
à rappeler Christian Clot, aventu-
rier-conférencier, vice-président
de la Société des explorateurs
Le dernier panache français et initiateur de cette
100 % Puy du Fou collection de BD dédiée à l’esprit
d’aventure. Derniers albums
Jamais le Puy du Fou n’avait vu parus : un consacré à Rimbaud,
si grand ! Sa dernière création un autre à Darwin, deux figures
© AUGUSTE MAYER

originale est un spectacle à 360° illustres du XIXe siècle. Deux destins


dédié au glorieux destin d’un racontés à travers des facettes
officier de marine, héros de la méconnues de leurs personnali-
guerre d’indépendance améri- tés. Dépaysant !
caine, dont la vie va basculer en
Rimbaud - L’Explorateur maudit,
Passion marine 1793 dans un ultime combat.
L’occasion de s’immerger dans
Philippe Thirault (scénario), Thomas
Verguet (dessin).
Toute une histoire les batailles navales de la Darwin - Tome 1 / À bord du Beagle,
Christian Clot (scénario) et Fabio
guerre d’Amérique aux côtés Bono (dessinateur). Glénat BD,
L’HISTOIRE DE LA MARINE FRANÇAISE, DES ROIS de La Fayette et de l’amiral de Collection Explora, 56 pages, 14,95 €
CAPÉTIENS À NOS JOURS, C’EST LA SOMME (500 PAGES!) La Motte-Picquet. Quant aux par album.
QUE VIENT DE PUBLIER LE CONTRE-AMIRAL (2S) RÉMI moments phares de la vie de ce
MONAQUE. En fin connaisseur de l’histoire de « l’armée de mer », héros, dénommé Charette, ils
l’auteur embrasse tous les aspects de la question, qu’ils soient défilent sous vos yeux dans une
politique, technique ou stratégique. Il dessine les grandes lignes multitude de décors réels et
de sept siècles d’histoire narrant aussi bien les hauts que les bas numériques, tout en mettant en
de la Marine royale devenue nationale. Si la défaite de Trafalgar scène une trentaine d’acteurs en
ou le sabordage de la flotte à Toulon en 1942 sont des épisodes chair et en os. Du grand spectacle.
douloureux, l’auteur ne manque pas de mettre en lumière des Haletant, épique et émouvant.
réussites incontestables, comme celles initiées par Richelieu ou La nouveauté 2016 d’un parc
Napoléon III. Fort de ses 37 années passées dans l’institution, d’attractions historiques à la
l’auteur nous raconte aussi avec faconde les évolutions marquantes renommée désormais mondiale.
du XXe siècle, dont le développement de l’aéronavale et la place Le dernier panache au Puy du Fou
centrale de la Marine dans la dissuasion nucléaire. Une synthèse fort (Vendée). Infos et réservations
complète pour bien et mieux connaître ses racines. sur www.puydufou.com/fr/ Vagabond
Une histoire de la marine de guerre française, Rémi Monaque, Les paradis blancs
Éditions Perrin, 526 pages, 26 €.
Vagabond : c’est la « maison-
Tara pacific sur-l’eau-ou-la-banquise » d’Éric
Les avocats des récifs Brossier, de France Pinczon du Sel
et de leurs deux filles. Moins
Deux ans de navigation, 30 pays médiatique que Tara, ce voilier de
visités, 70 escales, 100 000 km 13 mètres (mouillant actuellement
à parcourir, 70 scientifiques, dans le Grand Nord canadien)
40 000 échantillons, 18 institutions et a pourtant accueilli depuis plus
laboratoires de recherche… Ces de dix ans nombre de scienti-
chiffres donnent une idée de fiques, d’artistes et de journalistes
l’ampleur de la prochaine expédi- venus pour explorer les régions
tion de Tara. Du canal de Panama polaires. Sans prétention littéraire,
au Japon (2016-2017), puis de la ni pression médiatique, mais avec
Nouvelle-Zélande jusqu’en Chine un naturel très touchant, ce récit
(2017-2018), la goélette scientifique écrit à quatre mains raconte la vie
va arpenter le Pacifique, un océan d’Éric et France, deux marins-
où se concentre plus de 40 % des explorateurs confondant d’humili-
récifs coralliens de la planète. Une té. Un récit profondément humain
mission pour la science, la défense et humaniste.
de l’environnement et des océans.
Vagabond : une famille, la banquise
Pour plus d’information, et des rêves, Éric Brossier et
site web de Tara Expéditions à France Pinczon du Sel,
http://oceans.taraexpeditions.org/ Le passeur Éditeur, 240 pages, 19 €.

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loisirs

Mots mêlés Saurez-vous retrouver les mots en rapport avec la Marine qui se cachent dans la grille  ?

50 — COLS BLEUS - N°3049


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