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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.

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- ÉDITION PROVISOIRE -

AVANT PROPOS

e milieu désertique et semi-désertique est une zone de faible peuplement, car hostile à l’homme,

L mais perméable à la pénétration de mouvements et d’échanges. Au trafic d’esclaves et aux rezzous


ont succédé aujourd’hui de nombreux trafics clandestins (d’hommes, de drogues, d’armes…).

Véritable « océan de sable », le désert (particulièrement le Sahara) est ainsi devenu la zone d’action et
parfois le refuge de nombreux acteurs irréguliers dont l’esprit de prédation et les modes d’action peuvent
s’apparenter à ceux des pirates des mers. De nombreux groupes armés, acculturés, rompus à la vie et au
combat dans le désert, sont susceptibles de tirer avantage d’une confrontation avec une force armée dont
l’adaptation à ce milieu hostile exigera des efforts considérables. De plus, les frontières étatiques
n’existent souvent que de façon théorique pour les peuples vivant dans le désert, tandis qu’elles limitent
nécessairement l’action des forces françaises.

Récemment, le ralliement de certains groupes locaux à la cause du terrorisme islamiste a été l’occasion de
redécouvrir certains modes opératoires séculaires des nomades du désert  : le rezzou, la razzia et
l’embuscade.

Ce document s’inscrit dans le cadre de la série des 4 études de milieux spécifiques identifiés et définis
dans le FT-04. Après la publication successive des doctrines d’emploi des forces terrestres en zone
montagneuse (EMP 23.431) et en zone urbaine (EMP 24.422), ce document sera suivi d’une 4e étude sur
l’emploi des forces terrestres en zones boisées.

Plus encore que ces autres milieux (montagne, ville, jungle), il requiert une étroite collaboration
interarmées, notamment avec la composante aérienne et les forces spéciales. En ce sens, il doit être
rapproché du FT-03 (Les Forces terrestres dans la manœuvre interarmées).

Comme il arrive que l’adversaire s’engage souvent, simultanément ou successivement sur plusieurs de ces
zones, il importe lors de la réflexion sur ce milieu, de consulter en complément ces documents disponibles,
pour mieux appréhender la manœuvre d’ensemble, en particulier celle de l’adversaire, dont des phases
majeures se déroulent sur ces terrains complexes. Ainsi le combat pour le contrôle des zones urbaines et
périurbaines (catégorie dans laquelle on peut ranger certaines grandes oasis) peut succéder rapidement
au combat en milieu désertique et semi-désertique à proprement parler. Pour le combattant des zones
désertiques, la ville - centre du pouvoir politique - représente en effet souvent l’objectif final, le terrain
utile. Le désert ne devient alors qu’un terrain d’affrontement transitoire, un préliminaire néanmoins
incontournable.

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INTRODUCTION

n donne le nom de désert à un territoire recevant des pluies très faibles ou nulles, n’ayant en

O conséquence qu’une faible couverture végétale et dont la population est très dispersée, au point
de sembler inexistante. Son immensité, l’absence de points de repères, d’abri, de ressources
vitales et son climat souvent extrême en font un terrain dangereux pour l’homme. Zone refuge favorable
à un adversaire contraint à l’asymétrie, ce milieu particulier et exigeant est à lui seul capable de mettre
en échec une armée mal préparée à y combattre.

En cohérence avec les zones potentielles d’engagement de l’armée française à la périphérie de l’Europe
et en tenant compte des retours d’expérience sur le sujet, cette étude se portera en priorité sur les
zones désertiques d’Afrique du Nord et du Moyen Orient. Les principes décrits ici sont cependant
valables dans toutes les zones désertiques chaudes du globe.

La configuration tactique d’une opération extérieure face à un ennemi irrégulier, combattu aux côtés des
forces de sécurité d’un pays hôte, sera tout particulièrement étudiée comme étant le cas de figure le
plus probable et le plus dangereux dans le cadre des engagements actuels et à venir en zones
désertique et semi-désertique.
Au regard des engagements récents, le schéma d’un affrontement dissymétrique opposant la Force
amie à une armée conventionnelle technologiquement moins avancée peut être considéré comme plus
probable qu’un affrontement de type symétrique.

On ne peut cependant exclure un affrontement en zone désertique contre un ennemi moins évolué
technologiquement mais disposant de capacités conventionnelles évoluées et structurées ainsi que de
stocks d’armes de type NRBC1.

Ayant pour ambition de prendre en compte tout le spectre des menaces auxquelles l’armée de Terre
pourrait avoir à faire face en zone désertique, les schémas d’affrontement symétriques, dissymétriques
et asymétriques seront donc simultanément traités.

1 NRBC : Nucléaire, Radiologique, Bactériologique et Chimique.

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SI VOUS NE DEVIEZ RETENIR QUE CELA

« Ces opérations avaient un caractère semblable à celles de la guerre sur mer, du fait de leur mobilité, de
leur ubiquité, de leur indépendance par rapport aux bases et aux moyens de communication, de leur
ignorance des caractéristiques du terrain, des zones stratégiques, des directions et des points définis. »

T.E. Lawrence, article Guérilla in Encyclopedia Britannica

L’immensité et l’ouverture du milieu apparentent étroitement la manœuvre en milieu désertique à celle


caractérisant le milieu maritime. Cette mer de sable a ses rivages (humains et physiques), ses îles (les oasis et les
zones habitées) et ses routes maritimes (les grandes pistes caravanières), souvent infestées de pirates.
A l’instar d’une escadre navale, un détachement se déplaçant dans le désert doit en effet «naviguer» sans repère
apparent, s’éclairer, se flanc-garder et pouvoir survoler son environnement afin d’assurer sa sûreté ; il ne peut
contrôler le milieu dans lequel il évolue et sa manœuvre vise à surpasser l’adversaire par une approche et un
débordement recherchant la surprise ; enfin, davantage qu’en tout autre milieu, des contraintes logistiques très
lourdes dimensionnent la manœuvre de la Force.

« Le désert est le paradis du tacticien et l’enfer du logisticien. »


Erwin Rommel

On peut résumer ainsi les principes spécifiques à l’action en zone désertique et semi-désertique :
 La logistique prend une importance vitale dès la conception et durant toute la conduite des opérations du
fait des contraintes considérables imposées par le milieu. Elle doit viser systématiquement à optimiser
l’autonomie tactique des forces engagées.
 Par leur aptitude naturelle à échapper à la plupart des contraintes du milieu, les moyens aériens constituent
l’appui indispensable à la manœuvre - dans la mesure où les conditions météorologiques sont favorables à
leur emploi.
 La nature particulièrement dégagée du milieu désertique favorise les vues, les mouvements rapides et les
engagements à grande distance. Cette exposition accrue des détachements engagés doit être compensée
par le camouflage et la déception.
 La mobilité tactique et opérative procure sa liberté d’action à la Force en maintenant le plus longtemps
possible l’ennemi dans l’incertitude sur ses intentions. En réduisant l’empreinte tactique et la vulnérabilité
aux coups, la mobilité est également le gage de la sûreté tactique.
 Le désert est un milieu trop vaste et trop hostile pour pouvoir être totalement contrôlé par une armée. Les
moyens d’acquisition et de renseignement modernes permettent néanmoins d’y exercer une surveillance
efficace contre un adversaire dilué dans le milieu.
 Une force engagée dans la profondeur du désert doit éviter de s’enfermer dans de grandes emprises
statiques qui rendront son action de plus en plus prévisible et de plus en plus vulnérable au harcèlement
de ses axes logistiques. Le meilleur choix est celui de la base avancée temporaire disposant d’une piste
d’aviation.

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TABLE DES MATI È RES

AVANT PROPOS 5

INTRODUCTION 7

SI VOUS NE DEVIEZ RETENIR QUE CELA 9

TABLE DES MATI È RES 11/13

CHAPITRE 1 - LE CONTEXTE ET LES MENACES 15

1.1 Le contexte géostratégique 15


1.1.1 L’arc de crise, de l’Atlantique à l’Océan Indien 15
1.1.2 Un rapport de force favorable difficile à maintenir 15

1.2 Typologie des menaces 16


1.2.1 Face à un adversaire conventionnel 16
1.2.2 Face à l’adversaire irrégulier 17

CHAPITRE 2 - IMPACT DU MILIEU SUR LES PRINCIPES D’ENGAGEMENT EN ZONE DÉSERTIQUE 23

2.1 Un défi physique 23


2.1.1 Un immense milieu naturel hétérogène, semi permissif 23
2.1.2 Une nécessaire adaptation aux contraintes du milieu 24

2.2 Impact sur les principes tactiques 29


2.2.1 La mobilité des unités tactiques, condition du succès 29
2.2.2 Les différents modes de déplacements 30
2.2.3 Le stationnement des unités 32
2.2.4 La base avancée temporaire (BAT), compromis entre mobilité,
protection et contrôle du milieu 33

2.3 Logistique et liberté d’action 37


2.3.1 Une organisation logistique vulnérable 37
2.3.2 Le contrôle des flux 38
2.3.3 Le contrôle et la gestion des ressources 38
2.3.4 Accroitre l’autonomie des unités 39
2.3.5 Des modes de ravitaillement adaptés 40
2.3.6 Problématique du soutien médical 42

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2.4 La supériorité aérienne, facteur de décision 44

2.5 Surveillance et contrôle du milieu 45


2.5.1 Surveillance par les moyens techniques 45
2.5.2 Les patrouilles autonomes de reconnaissance 46

2.6 Coopération avec la population et les forces armées locales 47


2.6.1 Obtenir l’appui des forces de sécurité locales 47
2.6.2 Acceptation par les populations 47

CHAPITRE 3 - ADAPTATION DES MODES TACTIQUES AU TERRAIN D É SERTIQUE 49

3.1 Les phases de la manœuvre 49


3.1.1 La préparation - Acquérir la domination de l’espace
3.1.2 L’effort : déséquilibrer l’adversaire par la concentration des moyens en un point pour
emporter la décision 50
3.1.3 La consolidation - Contrôler la zone d’action 52

3.2 Les modes tactiques adaptés à la zone désertique et semi-désertique 53


3.2.1 L’action offensive 53
3.2.2 L’action défensive 58
3.2.3 La sécurisation - contrôle et influence 60
3.2.4 L’assistance 61

CHAPITRE 4 - ADAPTATION DES FONCTIONS OP É RATIONNELLES 65

4.1 Fonction commandement 65


4.1.1 Un commandement interarmes décentralisé 65

4.2 Fonction appui au commandement 65


4.2.1 Généralités sur les SIC en zone désertique 65
4.2.2 Les liaisons SIC dans la profondeur, un appui indispensable de la manœuvre 67
4.2.3 Le soutien de QG 68

4.3 Fonction renseignement 68


4.3.1 Avant l’opération 68
4.3.2 Pendant l’opération 69

4.4 Fonction contact 70


4.4.1 Combat débarqué : un milieu défavorable imposant un emploi mesuré en offensive
et une forte adaptation au terrain 70
4.4.2 Le combat embarqué, outil adapté au contrôle du milieu 72
4.4.3 Aérocombat 74

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4.5 Fonction appui 77


4.5.1 Appui génie 77
4.5.2 Appuis feux 80
4.5.3 Défense sol-air 83
4.5.4 Appui feu air-sol 84

4.6 Fonction actions sur les perceptions et l’environnement opérationnel 84


4.6.1 La coopération civilo-militaire 84
4.6.2 Les opérations militaires d’influence 84
4.6.3 La communication opérationnelle 85

4.7 Fonction appui à l’engagement 85


4.7.1 Appui mouvement : 85
4.7.2 Appui à la mobilité des blindés 86
4.7.3 NRBC : une menace aux effets accrus en milieu désertique
dont la prise en compte exerce des contraintes majeures sur la Force 87

4.8 Fonction logistique 88


4.8.1 Une planification rigoureuse tant en génération de force que lors
des phases de planification 89
4.8.2 Une logistique « au bon moment et au bon endroit ». 90
4.8.3 Une liberté de mouvement sur les itinéraires de ravitaillement
et les lignes de communication à garantir. 90
4.8.4 Une « surconsommation » qui implique une augmentation
des capacités logistiques de niveau 1 92
4.8.5 Problématique de l’eau 92
4.8.6 L’emploi des unités logistiques de l’armée de Terre en zone désertique
et semi-désertique 95

ANNEXE 1 - ORGANISATION D’UNE BASE AVANC É E TEMPORAIRE (BAT) DE NIVEAU 4 99

ANNEXE 2 - LE « REZZO U » : UNE TACTIQUE MILLÉNAIRE 101


1) Origine historique 101
2) Tour d’horizon des attaques de type « rezzou » parmi les plus représentatives 101
3) Concept d’emploi, et utilisation contemporaine. 102

GLOSSAIRE 105/107

R É F É RENCES ET OUVRAGES COMPL É MENTAIRES 109/110

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CHAPITRE 1 - LE CONTEXTE ET LES MENACES

1.1 Le contexte géostratégique


En dépit de son extrême hostilité, le désert est une zone traversée en permanence par des flux de personnes
et de biens. Mais les Etats souverains ne peuvent généralement exercer qu’un faible contrôle sur ces espaces
arides où les frontières ne sont que théoriques. Il en résulte que de larges surfaces désertiques sont ainsi
devenues des «zones grises» à l’échelle régionale.

1.1.1 L’arc de crise, de l’Atlantique à l’Océan Indien


L’espace sur lequel les forces armées françaises ont reçu mandat a été identifié. Le désert chaud s’étendant
au sud de la mer Méditerranée constitue l’étranger proche d’une Europe qui ne peut prendre le risque de
l’émergence d’une zone de non-droit à ses frontières.

« Cette région ne constitue pas un ensemble homogène. […] Les sous-ensembles régionaux ont chacun
leur logique : celle de la zone sahélienne, de la Mauritanie jusqu’à la Somalie, se distingue nettement
des bordures de la Méditerranée, du Proche-Orient, du golfe Arabo-persique, ou de l’Afghanistan et du
Pakistan. Mais dans cette partie du monde, au voisinage de l’Europe, au cœur des intérêts stratégiques
pour la sécurité mondiale, des évolutions essentielles modifient les données de la sécurité de la France
et de l’Europe. […] L’implantation et la mise en réseau de groupes terroristes sont devenues une donnée
permanente. […] Les problèmes de l’Afrique ont des incidences directes sur nos intérêts : immigration
clandestine, radicalisation religieuse en terrain musulman et développement de sectes fondamentalistes
en terrain chrétien, implantation des groupes terroristes se réclamant d’Al-Qaïda, apparition de
nouvelles routes de la drogue, trafics d’armes illicites, réseaux de prolifération, blanchiment d’argent et
risques sanitaires. La bande sahélienne, de l’Atlantique à la Somalie, apparaît comme le lieu
géométrique de ces menaces imbriquées et, à ce titre, appelle une vigilance et un investissement
spécifiques dans la durée. »
Livre blanc 2008

Pas plus que la mer Méditerranée, «l’océan de sable» ne constitue un rempart pour les Européens. Au
contraire, le Sahara et la bande sahélienne ont toujours été le refuge naturel de tous les trafiquants et groupes
irréguliers de la région et sont devenus récemment la zone refuge d’ennemis asymétriques agissant au plus
près du territoire français.

1.1.2 Un rapport de force favorable difficile à maintenir


Les forces des armées occidentales déployées en milieu désertique ne pourront que tenter de détecter et de
détruire l’ennemi irrégulier, sans parvenir à contrôler le milieu dans la durée. La supériorité en moyens
d’acquisition et de destruction à grande distance rétablit néanmoins localement un rapport de force
acceptable. Par ailleurs, les armées technologiquement avancées peuvent offrir des vulnérabilités aux
attaques d’un ennemi asymétrique dans le désert, en raison de leur empreinte au sol et de leurs liaisons
logistiques terrestres difficiles à protéger, malgré l’appoint des moyens de la 3e dimension qui permettent de
s’affranchir de certaines de ces contraintes.

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1.2 Typologie des menaces


1.2.1 Face à un adversaire conventionnel

Dans le cas d’un affrontement de type symétrique et plus vraisemblablement dissymétrique, face à un
adversaire régulier, la conservation de l’initiative par la mobilité domine la manœuvre terrestre. En raison
des caractéristiques du milieu, l’acquisition de la suprématie aérienne revêt un aspect fondamental pour
emporter la décision.

 Recherche de la mobilité
La motorisation étendue à toutes les unités est un impératif tactique dans le désert. Les unités de la
fonction contact recherchent l’autonomie tactique maximale et une dépendance logistique minimale.

 La suprématie aérienne, atout décisif néanmoins limité dans le temps et l’espace


Le schéma dissymétrique impliquant la suprématie aérienne et informationnelle par la Force s’avère
tactiquement intenable pour l’ennemi, comme l’ont bien montré les deux guerres du Golfe menées en Iraq
par les Américains et dernièrement, l’intervention en Libye. De fait, face à une menace aérienne, les
détachements terrestres sont particulièrement vulnérables sur un terrain n’offrant que peu de masques et
d’abris. Même en cas de supériorité aérienne, la menace aérienne ne doit pas être sous-estimée. Une
attaque aérienne ennemie même de faible volume peut avoir un impact psychologique important. En cas
de menace aérienne avérée, toutes les mesures de sauvegarde antiaériennes passives (camouflage,
dispersion, déception…), notamment à l’arrêt, prennent un caractère vital dans le désert.

 La menace sol air


Le cas d’un ennemi dissymétrique disposant d’un arsenal sol air évolué représente en revanche une
menace d’autant plus redoutable dans le désert qu’il n’y a aucun masque possible pour les aéronefs. Une
couverture sol air même locale, limite en effet considérablement l’exercice de la supériorité aérienne,
comme l’a parfaitement illustré l’échec des attaques aériennes israéliennes initiales pour stopper les
Egyptiens sur le canal de Suez durant la Guerre du Kippour en octobre 1973. La supériorité aérienne
israélienne a en effet buté sur l’excellente couverture sol-air égyptienne alors offerte par les missiles
thermiques SA-6 « Gainful ».

 La menace NRBC
Par le passé, l’armée de Terre a été engagée dans plusieurs opérations de guerre ou extérieures en milieu
désertique ou semi-désertique (Guerre du Golfe). Elle a été opposée à des adversaires qui disposaient
d’armes de destruction massive (ADM) ou du moins d’installations représentant un fort risque industriel.
En conséquence, elle a dû mettre en œuvre des mesures de prévention et de protection dans les domaines
médical (évaluation des risques, moyens de détection et de décontamination, vaccination, prophylaxie) et
de la défense NRBC.

L’étendue du désert peut favoriser la dissimulation des sites de recherche et de développement de


programmes d’ADM (isolement, dispersion, voire enfouissement). Il devient difficile d’en détecter la
présence, d’identifier précisément leur fonction et d’en assurer une surveillance permanente.

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1.2.2 Face à l’adversaire irrégulier

1.2.2.1 Caractéristiques de l’ennemi irrégulier

Toute guérilla mène un combat du faible au fort. A ce titre, l’insurgé recherche systématiquement la
surprise, refuse d’offrir une cible, utilise la déception, concentre son effort sur les points faibles de
l’ennemi conventionnel.

 Tentative de définition
En plus de devoir évoluer et combattre dans un milieu hostile, les forces engagées en milieu désertique en
configuration asymétrique seront confrontées à un adversaire dont les contours demeurent le plus
souvent mal définis. On peut néanmoins tenter de caractériser un tel ennemi par :

- l’absence de tout signe extérieur d’identification (uniforme, coiffure, grade…), le combattant


irrégulier cherchant systématiquement à se camoufler au contact des non-combattants,
essentiellement les civils ;
- l’appartenance à des groupes ou organisations non-étatiques plutôt qu’à un pouvoir légal
détenteur de la force légitime ;
- l’organisation en cellules cloisonnées et autonomes plutôt qu’en structures hiérarchisées et
pyramidales ;
- la prédilection pour des modes d’action de type asymétrique (coups de main, embuscade,
terrorisme) plutôt que pour des procédés de combat conventionnels ;
- le recours à des actes outrageusement contraires au Droit International Humanitaire (DIH), visant
des personnes et des biens protégés plutôt que des objectifs militaires.

e colonel T.E. Lawrence résume ainsi cette stratégie de l’évitement : « la valeur des irréguliers résidait
L peut-être dans la profondeur et non pas dans l’affrontement ». Synthétisant son expérience à la tête
de la révolte arabe de 1916 à 1918 dans le désert du Hedjaz, il distingue 6 facteurs de succès d’une
rébellion :
1. La rébellion doit avoir une base inattaquable ;
2. Elle doit avoir comme adversaire une armée étrangère disposant d’un équipement perfectionné et à
l’effectif trop réduit pour l’espace à contrôler ;
3. Elle doit pouvoir s’appuyer sur une population assez sympathisante pour ne pas informer l’ennemi ;
4. Elle n’a besoin que de 2% d’éléments actifs et de 98% d’éléments sympathisants ;
5. Les rebelles actifs doivent être mobiles, endurants et disposer de voies logistiques indépendantes ;
6. La rébellion doit se déplacer comme un gaz, c’est-à-dire être partout et demeurer invisible.

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1.2.2.2 Un mode d’action ennemi privilégié : le rezzou

e rezzou consiste à attaquer de façon brutale un objectif par surprise, généralement au terme d’un raid
L d’infiltration. Il ne s’agit pas de s’emparer d’une position mais simplement d’infliger le maximum de
pertes à l’ennemi2.
La razzia consiste à capturer ou piller tout ou partie des équipements ou richesses d’une force, d’un
village ou d’une population, après avoir mené une incursion en territoire hostile.

Les modes d’action utilisés avec succès ces dernières décennies par les combattants irréguliers de nombreux
pays en zone sahélienne (front Polisario, rebelles tchadiens, terroristes d’AQMI…) consistent en une
adaptation de l’antique tactique du rezzou. Les pick-up et les roquettes antichars ont simplement remplacé le
dromadaire et le fusil.

En zone désertique/semi désertique, la limite entre adversaires de types asymétrique et dissymétrique peut
d’ailleurs s’avérer ténue.

Les possibilités d’adaptation sont devenues multiples et le véhicule 4x4 doit désormais être considéré comme
un châssis multi-usage et non plus seulement comme un véhicule de transport léger. Ces adversaires mobiles,
difficiles à traiter en raison de leur silhouette basse et de leur mobilité, peuvent obtenir localement un rapport
de force favorable sur un adversaire équipé de matériels plus sophistiqués. Ils compensent en effet la
puissance de feu des véhicules blindés par la combinaison de la vitesse (combat tournoyant) et de
l’imbrication, permettant l’emploi optimal d’armes antichar par destination (canons, missiles) ou adaptées
(par exemple des LRM, ou des pods de roquettes prélevés sur des aéronefs). Enfin, l’effet de saturation obtenu
par le nombre élevé de cibles neutralise les capacités de feu d’unités conventionnelles en combat rapproché.

 Une préparation minutieuse de l’action


- renseignement par la population, coopérante, contrainte ou retournée ;
- reconnaissance et guidage par des guetteurs fondus dans la population locale et agissant à
proximité de l’objectif visé.

 Une recherche systématique de la surprise


- Par de très larges débordements ou des infiltrations en profondeur ;
- par des déplacements de nuit et des bivouacs de jours camouflés en villages nomades (véhicules
sous les tentes et bétail apparent) ;
- par la progression à travers certaines zones réputées infranchissables.

2 Se reporter à l’annexe 2 pour davantage d’information sur le rezzou.

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ntre 1976 et 1978, le mouvement indépendantiste du Sahara occidental - dit Front Polisario - est
E parvenu à former des colonnes d’une centaine de véhicules blindés et équipés d’armes soviétiques
qu’il lança sur la Mauritanie et le Maroc.

Particulièrement audacieuse, l’attaque du 8 juin 1976 contre Nouakchott, qui avait pour objectif le
renversement du gouvernement mauritanien, a été menée au terme d’un raid de 1 500 kilomètres à travers
le désert en pleine saison chaude. La colonne des insurgés comptait 600 hommes, une centaine de Land-
Rover, une dizaine de camions de ravitaillement et un armement lourd comportant des mortiers de 120,
des canons russes de 110 et des rampes anti-aériennes.

 Une attaque brutale suivie d’une exfiltration immédiate


L’ennemi fait violemment irruption dans le camp ennemi en recherchant un effet « boule de feu » et
l’imbrication au corps à corps afin d’infliger le maximum de pertes et de destruction. Cet assaut très bref
est suivi d’un repli immédiat par un itinéraire préalablement reconnu pour échapper aux poursuites.

Attaque du «porte-avions des sables»3 par les Tchadiens d’Hissène Habré le 22 mars 1987.

« Fonçant droit devant eux, à la manière d’une


charge de cavalerie napoléonienne les Tchadiens
pénètrent au cœur du dispositif ennemi, vers le
poste de commandement. Plusieurs Milans
détruisent la tour de contrôle du terrain
d’aviation et le bunker de transmissions hérissée
d’antennes. La colonne remonte alors la piste
d’aviation et encercle les appareils sur les
parkings. Dans le camp, la surprise a fait place à
la panique la plus totale. Toutes les défenses du
camp sont tournées. Des groupes de Toyotas
attaquent les chars embossés par l’arrière, leur
partie la plus vulnérable, les harcèlent au
passage en les arrosant de roquettes antichar
tirées quasiment à bout portant. »

Le Milan au combat, Patrick Mercillon

3 Base aéroterrestre libyenne de Ouadi-Doum, située à 150 kms au nord de Faya-Largeau. La base comprenait 31 postes de combat un redoutable dispositif
anti-aérien –missiles SA6 et ZSU 23_4 de 23 mm) ainsi qu’une piste d’atterrissage de 3 800 mètres, représentant une menace réelle pour N’Djamena.
La base avait été la cible de deux raids menés par l’aviation française du dispositif Epervier (le 16 février 1986 puis à nouveau le 7 janvier 1987).

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1.2.2.3 Le harcèlement par embuscade

Un ennemi irrégulier bien renseigné sur les mouvements adverses et sachant tirer le meilleur parti d’un terrain
favorable tentera naturellement d’user un adversaire mieux armé mais moins adapté aux contraintes du
milieu. La tactique la plus efficace consiste à harceler les unités ennemies par une succession d’embuscades
visant à infliger le maximum de pertes avant de rompre brutalement le contact.

Tchad - L’embuscade de Bedo – 11 octobre 1970

Dans le cadre des opérations menées par la France au nord du Tchad à compter de septembre 1970, aux
côtés de l’ANT4 menacée par les rebelles du FAP5, la CPIMa6 du 6e RIAOM est engagée pour tenter de
localiser et réduire les bandes armés qui harcèlent les postes de la région de Faya. Le 11 octobre, en
rentrant d’une opération de ratissage, 3 commandos de la CPIMa sont pris dans une embuscade montée
par une centaine de rebelles sur environ 800 mètres, à partir des monticules de sable qui dominent la
piste de part et d’autre. 10 hommes sont fauchés sur le coup avant que la colonne puisse réagir. Les
commandos Raffenne et Beaufils réussissent à tourner les positions rebelles. Après 2 heures de combat,
les rebelles s’égayent en laissant 40 tués et 30 blessés. Les commandos comptent 11 tués et 16 blessés
qu’il faut évacuer de nuit par hélicoptère dans des conditions très difficiles.

1.2.2.4 L’autonomie logistique, talon d’Achille des colonnes légère opérant de grands raids

En dépit d’une grande mobilité tactique les rendant capable de créer la surprise très loin de leur base de
départ, les colonnes de combattants sur 4x4 n’ont généralement qu’une capacité de durer au combat très
limitée, en raison de contraintes logistiques difficilement surmontables.

En effet, après avoir effectué leur approche tactique sur parfois plus de 1 000 kilomètres, ces colonnes ne
peuvent compter que sur leur ressources propres pour affronter une armée de type conventionnel disposant
de ressources et d’appuis en quantité. Même déstabilisée, une Force conventionnelle peut alors exploiter la
faible durée de vie au combat de son adversaire en canalisant son effort et en le laissant épuiser ses munitions
et son carburant.

Fidèle à la tactique ancestrale du rezzou, la plupart des forces rebelles ayant mené une incursion armée au
terme d’un long raid jusqu’à une capitale hostile et constituant un objectif trop important pour eux, rompent
prématurément le contact si la décision ne peut être emportée rapidement.

4 ANT : Armée Nationale tchadienne.


5 FAP : Forces Armées Populaires, mouvement rebelle tchadien dirigé par Oueddeï Goukouni alors soutenu par la Libye de Kadhafi.
6 Compagnie parachutiste d’Infanterie de Marine à 146 hommes, composée de 4 commandos.

20
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

e raid des rebelles tchadiens sur N’Djaména en février


L 2008, ou la sensibilité du rezzou aux élongations
logistiques.

Du 28 janvier au 4 février 2008, juste avant le déploiement


prévu des 3 700 hommes de l’EUFOR-Tchad, une coalition
de 3 mouvements rebelles7 tchadiens lança un raid de
1 000 kilomètres à partir du Darfour sur la capitale
tchadienne, N’Djamena.

Forte de 300 véhicules légers tout-terrain et d’environ


2 000 hommes, la colonne a pourtant réussi à s’infiltrer
en ambiance vitesse jusqu’aux abords immédiats de la
capitale, déjouant en partie la vigilance de tous les
moyens de surveillance aériens et satellitaires. Après
avoir contourné Abéché par le sud, les groupes rebelles ont en effet profité du couvert végétal
existant au sud du pays pour s’infiltrer.

Après avoir bousculé l’armée tchadienne en terrain ouvert à Massaguet, à environ 50 kilomètres de la
capitale, les 3 mouvements rebelles ne parvinrent pas à coordonner leurs efforts pour l’assaut final sur le
quartier du palais présidentiel, à l’ouest de la ville, où le président Déby s’était retranché. Ce dernier était
certain de parvenir à résister à ce qu’il considérait comme un simple rezzou, une fois celui-ci fragilisé par
l’élongation logistique importante entre le Soudan et la capitale. De fait, ne parvenant pas à l’emporter
rapidement, ayant sérieusement entamé leur potentiel logistique et soucieux de se ménager un repli vers
leur base de départ, les rebelles rompirent brutalement le contact le 4 février sans avoir obtenu de gain
tactique. Aussi habiles à se camoufler et à leurrer les moyens de surveillance que lors de leur infiltration,
ceux-ci parvinrent à se replier rapidement et en bon ordre en évitant le combat et sans perte majeure
jusqu’au Soudan entre le 4 et le 13 février8.

1.2.2.5 Le désert, profondeur stratégique de l’ennemi irrégulier

L’immensité du milieu désertique la complicité au moins passive des populations l’absence de frontières
physiques (ainsi que le respect des frontières administratives par les forces occidentales), voire la
complicité de certains Etats, procurent aux combattants irréguliers, au minimum une zone tampon efficace,
au mieux un sanctuaire sûr.

7 L’union des Forces pour la Démocratie et le Développement (UFDD), ses dissidents arabes de l’UFDD Fondamentale (UFDD-F) et le Rassemblement
pour les Forces du Changement (RFC).
8 Cf. La Rebellion tchadienne de 2005 à aujourd’hui, Cahier de la Recherche doctrinale.

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CHAPITRE 2 - IMPACT DU MILIEU SUR LES PRINCIPES


D’ENGAGEMENT EN ZONE DÉSERTIQUE

2.1 Un défi physique


Les zones désertiques chaudes couvrent environ 30% de la surface des terres émergées du globe.

Le milieu désertique constitue un environnement particulièrement hostile pour l’homme. En ce sens, le


milieu naturel est le premier adversaire que doit affronter une armée qui s’y engage. Pour pouvoir y
combattre, il faut d’abord y survivre.

2.1.1 Un immense milieu naturel hétérogène, semi permissif


2.1.1.1 Principales caractéristiques physiques du milieu

On qualifie de désertique une zone où les précipitations annuelles sont inférieures à 250 millimètres et où il
n’existe pas de cours d’eau permanents. Le sol très sec ne parvient pas à absorber l’afflux d’eau occasionnel,
transformant périodiquement les oueds en torrents furieux.
La végétation, à l’aspect décharné, y est inexistante ou rare (cas du milieu semi-désertique), n’offrant aucun
masque à l’approche des véhicules.
Les amplitudes thermiques journalières très importantes mettent les hommes et les matériels à rude épreuve.
L’immensité de l’espace de manœuvre est une des données principales du combat en zone désertique. Rien
n’empêche un détachement autonome au plan logistique de mener en 2 jours un raid de 1 000 kilomètres dans
la profondeur du désert.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

2.1.1.2 Typologie des principaux reliefs désertiques

Il serait trop restrictif d’imaginer le désert comme une simple mer de sable dénuée d’obstacle. De fait, la
traficabilité y varie considérablement :
- Les plaines et plateaux dégagés de type sahélien (regs) sont aisément franchissables en saison sèche et
autorisent des raids sur de grande distance et l’aménagement rapide de pistes d’aviations de circonstance.
Durant la saison des pluies, ces zones peuvent néanmoins être coupées par des oueds tumultueux.
- Les plaines et plateaux caillouteux (hamadas) - tels celui du Golan - sont perméables à la manœuvre
motorisée, mais les vibrations dues au phénomène de «tôle ondulée» y causent une usure rapide des
hommes et du matériel. Sur terrain volcanique, les pneus des véhicules sont particulièrement vulnérables
aux roches anguleuses. Les véhicules chenillés y sont donc les plus adaptés.
- Les cuvettes salée et argileuses (chott, fech-fech), telles la dépression de Quattara en Libye, ne peuvent
soutenir le passage des véhicules et constituent autant d’obstacles naturels à la manœuvre. Ils peuvent en
revanche permettre à un ennemi très léger de créer la surprise par un débordement inattendu.
- Les massifs montagneux ou volcaniques (par exemple le massif du Tibesti), défavorables à la manœuvre
motorisée sont le refuge naturels des insurgés ;
- Les massifs dunaires (erg) dont la structure est sans cesse modifiée par le vent, forment des réseaux
d’obstacles sableux plus ou moins franchissables.
- Certains points particuliers du terrain, notamment les cols et les défilés, constituent des points de passage
obligés qu’il faut impérativement reconnaitre.

La vitesse moyenne de progression d’un détachement dans le désert demeure très variable en fonction du
terrain et des conditions météorologiques, allant de 8 km/h sur les plaines rocailleuses à 50 km/h sur les
surfaces fermes et planes de sable.
Tout déplacement en zone désertique ne saurait faire l’économie d’une étude terrain et météorologique
approfondie, tant les conditions de déplacement y sont variables, en dépit des apparences.

2.1.2 Une nécessaire adaptation aux contraintes du milieu

2.1.2.1 Se prémunir contre les principaux risques sanitaires

Les principaux risques sanitaires rencontrés sont les pathologies à transmission et les risques
environnementaux.
• Les pathologies à transmission, parmi lesquelles on distingue :
 transmission digestive : Diarrhée des voyageurs, Fièvre typhoïde, Brucellose, Parasitoses intestinales,
Dracunculose, Hépatite A, Poliomyélite ;
 transmission cutanée : Ankylostomiase, Anguillulose, Bilharziose urinaire (vallée du Sénégal, Adrar),
Hantaan, viroses ;
 transmission par vecteur : Paludisme, Leishmaniose cutanée (S.E.), Fièvre de la vallée du Rift ;
 transmission par morsure : Rage (chiens) ;

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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 transmission sexuelle : Toutes les maladies sexuellement transmissibles (MST), dont Hépatite à HBV,
Infection à HIV ;
 transmission respiratoire : Tuberculose, Méningococcies ;

• Les risques liés à l’environnement, parmi lesquels on distingue :


 les risques liés aux boissons : Il faut conserver une grande vigilance concernant le geste d’accueil
traditionnel avec l’eau du puits ainsi qu’avec les boissons alcoolisées de préparation locale (de type
bière de mil). Il faut privilégier les eaux en bouteille - y compris d’origine locale - car régulièrement
contrôlées par les services sanitaires ;
 les risques liés à la nourriture : l’hygiène des marchés, des restaurants et des boutiques doit être
considérée comme mauvaise. Il faut tout particulièrement se méfier des ruptures de la chaîne du froid ;
 les risques environnementaux industriels : le tissu industriel peut présenter des risques élevés (gaz et
pétrole, pipelines, industries minières, risques chimiques, ...).

L’impact des risques environnementaux sur la Force dépend également des moyens disponibles ainsi que des
populations environnantes (demande d’aide, afflux de blessés, de réfugiés, famine, guerre tribales, ...)
Afin de prévenir ces risques, des séances d’éducation sanitaire spécifique devront être réalisées avant l’arrivée
sur le théâtre d’opération. Elles rappelleront les principaux risques rencontrés et les moyens d’y remédier
(tenue, sport, hydratation,...).

Tableau des risques rencontrés localement (en gras potentiellement graves)

Risques Risques Risques Risques Risque Autres


Viraux Bactériens Parasitaires Industriels Animal Risques

Arboviroses Béjel Bilharzioses Déchets Rage AVP


- Chikungunya Brucellose - S. Haematobium biomédicaux Envenimations Baignades
- Zika Charbon - S. mansoni Eaux (pollution) (scorpions, Cassavisme
- OugandaWNV Choléra - S. intercalatum Electricité serpents, Catastrophes
- Bunyamwera Diarrhées Fasciolase Mines araignées,…) naturelles
Dengue Fièvres Filarioses (uranium, or) - Pluies torrentielles
F. Vallée du Rift récurrentes - Dracunculose Energie - Inondations
FHV Fièvre typhoïde - Onchocercose (pétrole, gaz) (crues des oueds)
Fièvre de Lassa IRA Helminthiases Stockages - Vents de sable
FHCC Lèpre Hydatidose des munitions - Tremblements de terre
WNV Maladie de Lyme Leish. Cutanée et des explosifs
Fièvre jaune Méningococcies Paludisme Coup de Chaleur
Fièvre aphteuse MTS Pentastomose Histoplasmose africaine
Gastroenterites Bactériennes Protozooses Mycoses profondes
Grippe A(H1N1) Péril fécal Trichinose Toxicomanies
Hépatites virales Q Fever Trypanosomiase
ABCDE Rickettsioses africaine
IRA Trachome
Rougeole Tuberculose
Sida
Tétanos

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2.1.2.2 Adaptation physique : l’acclimatement préalable

Le milieu naturel est particulièrement agressif envers l’organisme humain : vents de sables et de poussière,
températures et écarts thermiques extrêmes, risque permanent de déshydratation…
La protection individuelle du combattant n’est pas toujours compatible avec ces contraintes. Ainsi, le port du
casque et du gilet pare-balles doit être adapté en fonction de la situation opérationnelle, tandis que le port des
équipements de protections NBC doit être strictement limité aux situations d’exposition avérées.
Combinée avec la chaleur, la fatigue peut faire baisser très rapidement - dès 36 h de privation de sommeil -
l’efficacité des hommes au combat.
Le temps d’acclimatement préalable d’une troupe devant être engagée en zone désertique doit idéalement
être d’au moins un mois pour permettre aux organismes de s’adapter.

2.1.2.3 Adaptation psychologique : compréhension du milieu et de la culture locale


Les hommes engagés en zone désertique doivent en connaitre les contraintes (terrain, climat, faune…), les
risques et les particularismes culturels (compréhension des hommes).

 Difficultés à s’orienter
Le manque de repère et d’axes de communication fixes en zone désertique désoriente l’homme. Le recours
aux systèmes de navigation modernes est inévitable, mais un détachement doit également pouvoir retrouver
sa route par moyens dégradés. Les effets des illusions d’optique par réfraction de la lumière à l’horizon
(les «mirages») doivent être connus de tous.

 Acculturation et compréhension des populations


Les jeux d’alliances entre tribus et ethnies, les croyances, les coutumes, les voies d’approvisionnement sont
autant d’informations essentielles à la planification opérationnelle. Les représentants de la Force doivent
s’efforcer de gagner la confiance des populations au contact desquelles elles se trouvent, en demeurant
néanmoins très prudent sur la qualité des informations recueillies et des informations qu’elles feront circuler.
Dans la plupart des zones désertiques de «l’arc de crise», la population se caractérise par sa faible densité,
son instabilité et son hétérogénéité.
- Des populations diluées et mobiles
En limitant la dilution de l’ennemi asymétrique au sein de la population, la faible densité du peuplement en
zone désertique constitue un atout pour une force conventionnelle. La mobilité des hommes (le nomadisme y
est très répandu) facilite d’autre part la propagation de l’information. De fait, le renseignement humain peut
permettre la localisation et l’identification d’un ennemi conventionnel, mais également de groupuscules
irréguliers tentant de se fondre dans l’environnement humain. Les informations recueillies auprès de la
population doivent cependant toujours être traitées avec la plus grande prudence jusqu’à ce qu’elles soient
recoupées et confirmées.
- Des ethnies versatiles aux traditions guerrières
Une mosaïque d’ethnies aux dialectes souvent incompatibles et aux sensibilités religieuses marquées
caractérise l’essentiel du paysage humain dans le désert. Ces tribus aux traditions guerrières fortes ont des
alliances et des allégeances souvent changeantes. Elles demeurent susceptibles de renseigner et d’aider un
adversaire irrégulier bien intégré localement, notamment en vertu des lois de solidarité religieuses et
culturelles.

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 L’observation des règles de comportement participe de l’acceptation de la Force

Tous les acteurs de la Force se doivent de connaitre et de respecter les codes culturels dominants de leur
environnement opérationnel et d’observer les règles de comportement qui en découlent. Dans un
environnement où toute information se propage rapidement, l’action maladroite d’un simple soldat peut en
effet avoir des conséquences très néfastes.
Le respect de ces codes culturels spécifiques ne saurait être négligé, car il conditionne l’acceptation ou le
rejet de la Force. Et dans un contexte asymétrique, tout faux pas ne manquera pas d’être instrumentalisé par
l’adversaire.

2.1.2.4 Adaptation technique : le compromis vitesse - endurance


La vitesse doit être adaptée au terrain (caillouteux, en «tôle ondulée»…) afin de préserver les véhicules
(amortisseurs, moteurs, pneumatiques…). De plus, la température élevée, la poussière et le sable en
suspension détériorent rapidement les armes, la mécanique, l’électronique et l’optronique. En plus du
ravitaillement en eau, carburant et munitions, des largages par air peuvent permettre la livraison de pièces
détachées au profit des détachements isolés en déplacement.

2.1.2.5 Des mesures de sauvegarde spécifiques

 Reconnaissances et sûreté tactique

En raison du caractère très ouvert du milieu, le chef tactique a en permanence besoin du renseignement sur
l’ennemi et sur le terrain jusqu’à une distance parfois considérable afin d’assurer sa sûreté. Les
reconnaissances aériennes sont très efficaces en détection, mais il faut savoir s’en abstenir afin d’éviter de
trahir l’intention tactique par un survol préalable de la zone d’opération. L’emploi de certains drones
suffisamment furtifs peut permettre de résoudre ce problème.

 Le camouflage, un acte de survie

Dans le désert, un détachement à l’arrêt se trouve particulèrement exposé aux vues et aux coups en
provenance du ciel mais aussi du sol. La mesure de sauvegarde principale consiste à se camoufler en utilisant
au mieux les caractéristiques du terrain. De jour, les pare-brises et toute autre surface brillante renvoient les
reflets du soleil à une très grande distance et doivent donc être masqués. Vue des airs, l’ombre des véhicules
à l’arrêt trahit infailliblement leur présence, que l’on peut dissimuler en utilisant les cassures et les irrégularités
du terrain (ravins, talus, dunes…).

 Les mesures de protection anti-aériennes passives

En cas de menace aérienne existante, le camouflage, la dispersion et la recherche d’abris naturels


constituent des réflexes permanents de survie d’une force déployée dans le désert.
Un objet en mouvement est plus facilement détecté depuis un aéronef qu’un objet fixe. Dès qu’un aéronef
potentiellement hostile est détecté, il est important de stopper rapidement les véhicules en les dispersant
et de les camoufler (filet, bâches, abris…) afin d’éviter les reflets lumineux liés aux optiques de phares et
aux vitres.

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• Conséquences sur la détection et l’identification des combattants

 Cas d’un ennemi symétrique ou dissymétrique

Même arrêtée, une colonne de véhicule est souvent très repérable dans le désert, notamment par les moyens
aériens. En revanche, la discrimination ami/ennemi est rendue difficile par la lumière et les déformations
optiques, au sol comme dans les airs. L’emploi de système d’identification pour les véhicules de la Force
permet de pallier ce problème.

 Cas d’un ennemi asymétrique

Par nature, l’adversaire irrégulier tend à se fondre dans son environnement humain et à en adopter
l’apparence. Dans le désert, le mode de vie nomade lui permet à la fois de se camoufler et d’accroître sa
sauvegarde par une mobilité permanente.

• Adaptation de la formation et des distances

Les nuages de poussière soulevés par les colonnes motorisées aveuglent les véhicules suiveurs. De jour, il est
donc souhaitable de prendre de grands intervalles et surtout de s’éclairer largement vers l’avant. Les
formations en «échelons refusés» permettent à chaque véhicule de voir au loin et d’utiliser ses armes
simultanément et dans toutes les directions.

Formations en échelon refusé

VENT
VENT

Nota  : ces nuages de poussière peuvent aussi être utilisés comme procédé de déception vis-à-vis de
l’adversaire en faisant apparaitre un détachement plus volumineux qu’il ne l’est dans la réalité ou encore en
simulant le choix d’un itinéraire différent de celui emprunté.

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2.2 Impact sur les principes tactiques


2.2.1 La mobilité des unités tactiques, condition du succès

2.2.1.1 Une liberté d’action sans restriction

Les zones désertiques offrent des espaces de manœuvre considérables qui autorisent de larges
débordements, uniquement limités par l’autonomie mécanique des véhicules. La vacuité du milieu impose
un combat non linéaire, similaire par bien des aspects au combat sur mer. Tout comme une escadre navale,
une unité aéroterrestre évoluant dans le désert doit être autonome au plan logistique, être renseignée au
plus loin, préserver ses liaisons de commandement par la mise en place de moyens de communications
adaptés, rester mobile et bénéficier d’appuis de la 3e dimension pour remplir au mieux sa mission.
L’économie optimale des moyens dans l’espace et dans le temps est favorisée par la mobilité des engins
en milieu désertique permettant de conserver en permanence l’initiative tactique, garante de la sûreté
tactique et condition d’obtention de la surprise. Ces qualités d’endurance et de vitesse sont par
excellence celles des unités blindées, qui trouvent dans le désert un champ de manœuvre idéal, à
condition de ne pas se retrouver isolées trop longtemps de leurs appuis interarmes et de leur soutien
logistique.

2.2.1.2 Mobilité et sauvegarde

Heinz Guderian, théoricien de l’emploi des blindés, prétendait que la mobilité tient lieu de sûreté. Ce
principe s’applique tout particulièrement dans le désert où l’absence de masque et de protection rend très
vulnérable un détachement motorisé ou blindé à l’arrêt, notamment face à une force aérienne.
L’autonomie logistique en carburant peut être considérablement accrue par l’emport de jerricans, de fûts
et surtout de citernes tactiques - au prix néanmoins d’une vulnérabilité accrue. Enfin, de nombreuses
possibilités de ravitaillement d’un détachement en déplacement existent : plots logistiques relais (type
FARP9), largage par air, livraison par rendez-vous avec un avion ou un détachement ami.

2.2.1.3 Rythme de la manœuvre et discrétion de l’approche

L’absence presque totale de masques naturels permet - en particulier aux chars et aux engins blindés à
roue - de disposer de champs d’observation et de tir profonds, sous réserve de tenir les principales lignes
du terrain.
Le rythme de la manœuvre est le plus souvent celui de la vitesse maximale autorisée par la mécanique et
par les contraintes du terrain. En raison de la distance à laquelle on peut détecter le nuage de poussière
soulevé par une colonne de véhicules, la vitesse peut être volontairement réduite en journée par souci de
discrétion. Pour préserver la surprise tactique, le déplacement nocturne demeure souvent la meilleure
option, à condition d’être effectué en silence, en raison de l’excellente propagation des sons.

9 Forward Arming and Refueling Point.

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2.2.1.4 Opportunité du moment de l’action

• L’opportunité dictée par les conditions météorologiques


 Les conditions d’éclairage, très changeantes, déterminent le moment de l’action  : l’idéal est
d’attaquer à l’aube ou au soleil couchant, quand le soleil est bas sur l’horizon. L’axe d’approche est
alors essentiel : il faut se présenter à l’ennemi avec le soleil dans le dos de manière à l’aveugler.
 En terrain semi-désertique, le franchissement des coupures durant la saison des pluies doit être
évité en raison du risque important de ravinements, et des cours d’eau rendus brusquement
infranchissables par les pluies torrentielles, comme c’est par exemple le cas dans le sud du Tchad.
 En cas de vent de sable, il est préférable d’attaquer avec le vent dans le dos (donc face au défenseur).

• Privilégier les déplacements tactiques nocturnes


Les colonnes de véhicule en déplacement se repèrent de très loin en journée en raison de la réverbération sur
le métal et des importants nuages de poussière soulevés. La supériorité technologique en moyens de vision
nocturne étant acquise sur l’ennemi, les déplacements de nuit permettent d’accroitre notablement la
discrétion.
La progression d’un détachement de nuit - que ce soit à pied ou en véhicule - s’avère détectable au son et
requiert un entrainement particulier. Enfin, la lunaison a son importance pour le choix du moment de
l’action :
 Les nuits sans lune - très obscures dans le désert – peuvent rendre inopérant les intensificateurs
lumineux mais confèrent au contraire une supériorité totale aux unités équipées IR dont l’approche
sera parfaitement discrète.
 A contrario, la pleine lune compromet en partie la discrétion mais permet des déplacements rapides.
 Chaque fois que possible, la marche de nuit doit être privilégiée pour des raisons de discrétion et
car le sable devient plus porteur par basse température.
 La marche à pieds peut s’avérer plus rapide que le véhicule en cas d’obscurité profonde (nuit
nuageuse et/ou sans lune).

2.2.2 Les différents modes de déplacements

2.2.2.1 Les déplacements par voie aérienne

L’emploi de la troisième dimension permet de se déplacer en s’affranchissant des distances importantes dans
le désert et des difficultés liées au terrain parfois dangereux et difficile.
Cependant les conditions météorologiques de ce milieu et les contraintes logistiques propres aux vecteurs
aériens en limitent les capacités d’emport. De plus, une troupe à pied mise à terre par hélicoptère loin de ses
bases ne dispose que de très peu de capacités de manœuvre et de feu et sa survie dépend en grande partie
des moyens d’appui de la 3e dimension. La facilité d’aérotransport du mortier 120 mm et du SATCP peut
néanmoins procurer une capacité de feux et de protection appréciable.

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2.2.2.2 Les déplacements en véhicule

Tout mouvement par voie terrestre nécessite une préparation logistique et opérationnelle minutieuse.
Nature du sol, conditions météorologiques, végétation, déterminent le rythme de la manœuvre terrestre.
Les zones délicates ou inconnues nécessitent une reconnaissance préalable pour apprécier la traficabilité
de l’itinéraire, les quantités de carburant nécessaires et les possibilités d’emploi des moyens de
télécommunications (présence éventuelle de masques).

2.2.2.3 Les déplacements à pied

La marche dans le désert s’avère rapidement éprouvante pour le combattant - notamment de jour -, autant
à cause des conditions climatiques extrêmes que du terrain accidenté et de la nature du sol.
Néanmoins, une unité peut être amenée à effectuer des marches dans le cas :
 d’une reconnaissance ;
 du ralliement d’un objectif ou de l’exfiltration après action dans le cadre d’une opération héliportée
ou aéroportée ;
 de patrouille au contact de populations.

En raison de l’état particulièrement dégradé de certains terrains (massifs schisteux ou pierreux), le


déplacement à pied peut également présenter moins de risques que le véhicule.
En revanche, ce mode de déplacement limite drastiquement l’emport de matériels, munitions, eau, vivres
et moyens de communications. L’utilisation de bêtes de somme ou de dromadaires pour porter des
charges peut alors constituer ponctuellement une solution d’appoint intéressante sur terrain difficile.

2.2.2.4 Vulnérabilité des déplacements en convois sur de grandes élongations

Les contraintes du milieu désertique accroissent mécaniquement les besoins et les flux logistiques, tandis
que les lignes de communication peuvent se retrouver très étirées, accroissant ainsi leur vulnérabilité aux
attaques. Le soutien des bases ne disposant pas de liaisons aériennes régulières10 ne dépend plus que du
ravitaillement par convoi terrestre. Face à un ennemi asymétrique prompt à exploiter les vulnérabilités de
la Force, les convois logistiques doivent être protégés par des escortes consommatrices en effectifs et en
moyens SIC en zone non-permissive. Dans ces conditions, le nombre des convois logistiques ravitaillant
les bases doit être limité au maximum par une mutualisation des flux.

10 Elles-mêmes vulnérables aux tirs de missiles SATCP (sol-air très courte portée), lors des phases de décollage et d’atterrissage.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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La Formation en carré
« Dans la région de hauts plateaux algériens, la plupart des petits détachements adoptent, pour
la marche, la formation en carré parfait et rigide ; les faces avant et arrière sont en ligne déployées ;
les faces latérales sont en colonne par deux ou par
quatre ; le convoi est au centre. […] Mais dans les régions
avoisinant le Sahara et le Niger, la marche en carré rigide
[…] est très pénible et très lente. Les hommes de la face
arrière respirent un air saturé de sable et de poussière
soulevé par tout le convoi. »

« La Formations en lignes parallèles


Le dispositif [en lignes parallèles]
est de beaucoup préférable  ;
il s’adapte mieux à tous les terrains
et offre peu de prise au feu adverse.
Les avantages qu’elle présentera toutes les fois qu’on ne pourra pas conserver
la formation en carré marchant en ordre de combat avec toutes ses faces
déployées, lui feront donner la préférence. »

Extrait de Tactique des petits détachements - Maroc et Afrique occidentale,


1910, du capitaine Prokos

2.2.3 Le stationnement des unités

2.2.3.1 Sûreté rapprochée et lointaine d’un dispositif statique

« La sûreté doit être le souci constant du commandement en Afrique ; en effet, les colonnes sont
toujours isolées, l’ennemi peut attaquer dans n’importe quelle direction et cherche à se procurer
le bénéfice de la surprise. La recherche du renseignement est extrêmement importante.
Du renseignement dépend la sûreté… Se garder, agir vite, frapper fort, pousser les opérations à fond,
tel est en Afrique le secret du succès. »

Manuel à l’usage des troupes déployées outre-mer, 1925

Dans le désert comme en haute mer, la rareté des obstacles à la progression permet à l’ennemi de
surprendre un élément ami statique ou à l’arrêt qui n’aurait pas assuré sa sûreté éloignée. Le dispositif
défensif rapproché (moyens d’alerte, obstacles) doit ainsi être complété par des reconnaissances à
moyenne et à longue portée (terrestre et aérienne). La notion de front n’étant pas pertinente en milieu
désertique, une troupe à l’arrêt doit systématiquement adopter un dispositif multidirectionnel.

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Le carré à l’arrêt

« La formation de combat du carré est identique à sa formation de


marche. […] Si le terrain n’offre aucune ressource, il faut s’assurer de tous
les côtés d’un champ de vue d’environ 1 000 mètres, avec un champ de tir
d’au moins 400 mètres, permettant d’arrêter, par des feux rapides ajustés
pendant une minute, la cavalerie la plus ardente et la plus fanatique. »

Extrait de Tactique des petits détachements - Maroc et Afrique


occidentale, 1910, du capitaine Prokos

2.2.3.2 Défense temporaire de points clés du terrain

Compte tenu de la quasi absence d’infrastructure routière, le terrain peut parfois canaliser la manœuvre
dans des couloirs de mobilité ou des points de passage obligés. Les cols ou les défilés constituent des
verrous naturels dont la saisie et l’occupation, au moins temporaire, peut se justifier même si cela doit
consommer du temps. S’ils ne peuvent être tenus, ces points clés du terrain doivent être au moins
systématiquement reconnus avant de s’y engager. Les capteurs abandonnés peuvent également
constituer une solution pour surveiller un passage en économisant les effectifs à déployer.
En revanche, une position isolée, aisément contournable, n’aura aucune efficacité défensive sans
capacités de renseignement et d’agression à distance.

2.2.4 La base avancée temporaire (BAT), compromis entre mobilité, protection et contrôle du milieu
2.2.4.1 Inadaptation des dépôts, des bases et des postes avancés

La quasi absence de masques et de protection naturelle rend particulièrement vulnérable aux attaques -
terrestres et surtout aériennes - toute implantation statique dans le désert. La protection permanente des
dépôts et des postes opérationnels peut ainsi représenter un coût humain et matériel disproportionné et
généralement pénalisant pour la Force au regard de la rentabilité tactique réelle de ces derniers. Leur
nombre doit donc se limiter au strict minimum nécessaire et leur défense être soigneusement valorisée.
En contre-rébellion, les postes statiques s’avèrent particulièrement vulnérables dans la durée, comme le
résume le colonel Trinquier : « le dispositif des postes est étalé à livre ouvert sous les yeux de nos ennemis
qui l’observent à loisir. Aucune de leurs activités ne pourra donc leur échapper. »11
Construire une base avancée permanente (de type FOB) dans le désert revient à se fixer, à devenir prévisible,
donc vulnérable sans pouvoir rayonner au loin. C’est le meilleur moyen de cristalliser l’effort de l’ennemi sur
un objectif de prestige et de fédérer les factions pour la réalisation de la « mère de toutes les razzias ».
Les implantations opérationnelles doivent donc, autant que possible, demeurer mobiles et réactives.

11 Roger Trinquier, La Guerre moderne.

33
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

L’erreur tragique des postes isolés de la guerre du Rif (1927)


près la tragédie espagnole de la retraite d’Anoual (10 à 14 000 morts), le commandement français
A décida d’implanter un réseau de postes militaires pour contenir l’avance des rebelles à la
frontière de la zone tenue par Abdelkrim. Ce dispositif d’avant-postes édifiés sur des pitons rocheux
et reliés entre eux par des pistes muletières s’est vite révélé très difficile à ravitailler et surtout
à défendre dans la durée.
Tirant habilement bénéfice de l’isolement des postes, Abdelkrim les réduisit un à un après avoir
coupé leur voies d’approvisionnement. C’est dans ces circonstances que le sous-lieutenant
Pol Lapeyre choisi de faire sauter son poste, assailli par les Rifains, plutôt que de se rendre.

2.2.4.2 La base avancée temporaire (BAT)

Les élongations importantes et la prégnance des contraintes logistiques ne permettent pas de soutenir
efficacement un détachement important dans la profondeur du désert sans disposer localement d’une
base d’opérations solide. En outre, le besoin de s’adapter à l’impératif tactique de mobilité et à la culture
dominante du milieu (nomadisme) conduit très logiquement à rechercher un type d’implantation non
pérenne et ayant une empreinte logistique minimale. De fait, une base avancée isolée en zone désertique
ne doit pas se fixer pour une durée supérieure au délai nécessaire à l’ennemi pour planifier contre elle une
opération d’envergure.
Le concept de base avancée temporaire (BAT), sorte de base aéroterrestre ad hoc conçue comme une
extension provisoire de la base logistique principale de la Force, répond à ces différentes contraintes.

• Caractéristiques générales d’une BAT :


 Le déploiement d’une BAT doit permettre à une unité tactique (d’un volume estimé allant du SGTIA
au GTIA renforcé) de remplir une mission temporaire dans une zone éloignée de sa base de soutien
logistique. En fonction de la nature de la mission et de sa durée estimée, la BAT se verra alors
renforcée d’une quantité variable de capacités additionnelles.
 La durée d’implantation normale d’une BAT fluctue entre 10 jours - en raison du niveau seuil de
déploiement des moyens logistiques - et 30 jours. Au-delà, le rendement tactique de la base ira
décroissant.
 Celle-ci doit pouvoir être démontée sous préavis de 48 heures. Le mouvement vers la position
suivante peut débuter dès l’achèvement des recomplètements logistiques.
 L’autonomie logistique permanente (stocks d’eau, de vivres de carburant vivres) d’une BAT est fixée
à 48 heures. Ce délai doit permettre de faire face à une rupture temporaire du soutien aérien, sans
compromettre pour autant la nécessaire flexibilité logistique de la base.
 Les capacités indispensables à la mise en place d’une BAT en plus des unités du GTIA sont un
détachement d’hélicoptères, une capacité de traitement chirurgicale, un élément de génie et une
liaison SIC avec la BLIAT ;
 La BAT est commandée par le chef tactique interarmes qui s’y trouve déployé.

34
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

• Choix de l’implantation de la BAT :


 L’emplacement choisi doit éviter la proximité des couloirs et zones d’infiltration naturels (vallées et
fractures du terrain, zones urbanisées, zones verte en saison humide…) favorable aux raids
d’infiltration d’un ennemi par surprise ou à l’observation par un élément de guet ennemi.
 L’existence d’une ancienne piste d’aviation, qu’il suffira alors de réhabiliter, ou l’existence de
conditions favorables à l’implantation rapide d’une piste de circonstance (terrain suffisamment
stable et dégagé) sont essentielles. On ne doit pas passer plus d’1/4 de la durée d’existence de la
BAT à l’aménagement de la piste d’aviation. La piste doit pouvoir être battue en permanence par les
armes de la BAT ; elle sera systématiquement tenue dès lors qu’un aéronef ami est posé.
 Après repérage par les moyens aériens, le site devra faire l’objet d’une reconnaissance terrestre la
plus discrète possible. En effet, l’installation de la Force sur le site doit préserver la surprise le plus
longtemps possible, en ayant systématiquement recours à des mesures de déception pour tromper
l’ennemi sur le dispositif et les intentions amies. Dans ce but, toutes les unités de la Force doivent
converger ensemble sur le site et la BAT doit pouvoir être pleinement opérationnelle dans un délai
de 48 heures.
 L’emplacement de la BAT doit pouvoir être relié à sa BLIAT de soutien par des axes terrestres
praticables (en prenant bien en compte la saison du déploiement).

Surprendre l’ennemi sur son lieu de bivouac

« Le chef devra tout d’abord garder le secret absolu sur la mission à remplir et le but à atteindre. […] Si
le chef veut faire parvenir à l’ennemi un faux renseignement, il le donnera sous forme de conversation ».

Si, par exemple, la direction à suivre comporte l’embranchement d’un chemin menant dans une direction
opposée, le chef donnera, au moment du départ, à haute voix, comme itinéraire à suivre, celui qui conduit
vers cette direction opposée, se réservant de modifier l’itinéraire lorsque la colonne arrivera à
l’embranchement. La colonne doit aller de A à D. Le chef dira : « prenez le chemin AB qui nous mènera
au village C. »

« Cette ruse réussira mieux de nuit que de jour, surtout si la distance AB est telle que les habitants de A
ne puissent pas constater le changement de direction opéré en B et si aucun espion ne suit la colonne. »

Extrait de Tactique des petits détachements - Maroc et Afrique occidentale, 1910, du capitaine Prokos

35
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

La Base avancée temporaire (BAT)


Liaisons ATA/ATT

Zone d’opération future

Piste d’aviation Piste d’aviation


BLIAT
de circonstance 00 Kms
à réactiver 500 à 10

BAT

GAM
AC
MA

FF RAID
RECO O ms
X1
50

K
Km

MAX 150
s

Zone d’opération
en cours

Remarque : Une BAT de niveau 4 (GTIA) est décrite en annexe.

2.2.4.3 Cas de la BAT sans soutien ATT12/ ATA13

Dans les cas où la zone d’action à prendre en compte se trouve à distance de liaison HMA avec la BLIAT
et où l’aménagement d’une piste d’aviation n’est pas possible, une base avancée temporaire soutenue
par des moyens aéromobiles de la Force peut y être implantée. Ce type de BAT allégée, disposant au
minimum d’une AC14 et d’une plateforme hélicoptère doit pouvoir assurer ses liaisons logistiques les plus
sensibles (EVASAN secondaires notamment) par des liaisons HMA.

Des ravitaillements par largage par air peuvent également contribuer à un ravitaillement d’urgence au
profit de la base.

Une partie non négligeable du flux logistique transitera cependant par voie routière, accroissant
mécaniquement l’empreinte logistique terrestre de la Force.

12 ATT : Avion de Transport Tactique. Cette catégorie comprend notamment les C160 Transall, les C130 Hercules et les CASA.
13 ATA : Avion de Transport et d’Assaut. Cette sous-catégorie des ATT inclus notamment les C130 et les C160 auto-protégés, c’est-à-dire équipés de
dispositifs anti-missiles (DAM) plus communément appelés « leurres ».
14 AC : Antenne Chirurgicale.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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BAT sans soutien ATT/ATA

OHP Ravitaillement Convois logistiques



MAX 80 Kms
par air
MAX 50
0 Kms
BLIAT

BAT
GAM
∞ AC
MA

Liaisons HMA
FF RAID
RECO O s
X
150
Km

MAX 150 Km
s

2.3 Logistique et liberté d’action

En raison des élongations considérables dans le désert et de l’importance des ravitaillements à mettre en
place pour y soutenir une force agissant de manière autonome, la manœuvre logistique constitue un défi
permanent et est à ce titre la condition majeure de succès de toute opération dans ce milieu.

2.3.1 Une organisation logistique vulnérable

Le niveau de protection, les capacités d’agression, la mobilité et le rayon d’action d’une force manœuvrant
dans le désert dépendent directement de ses capacités de soutien logistique. Particulièrement
consommatrices en moyens logistique et de protection, les emprises isolées doivent être réduites au
minimum nécessaire.

De même, les convois terrestres, consommateurs en effectifs dédiés à leur protection et vulnérables aux
actions de harcèlement doivent être réduits au minimum. Les flux doivent être mutualisés autant que
possible et tous les moyens de ravitaillement alternatifs existants (points d’eau et sources d’alimentation
locaux, ravitaillement par la 3e dimension…) doivent être explorés.

La mise en place sur le théâtre de capacités logistiques offrant la plus grande autonomie aux unités
déployées doit être prioritaire dans le processus de génération de force et de planification
opérationnelle en milieu désertique.

37
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

2.3.2 Le contrôle des flux

• Protection des zones de poser des vecteurs aériens


Afin de ne pas hypothéquer inutilement les effectifs comptés de la Force et de minimiser le risque
MANPADS15, les livraisons doivent s’opérer de nuit16 et l’aéronef ne doit demeurer sur la zone de livraison
que durant le temps strictement nécessaire aux opérations de d’embarquement/débarquement de
personnel et de chargement/déchargement. En effet, la BAT n’est pas dimensionnée pour assurer une
protection efficace permanente des aéronefs au sol. La protection des appareils en panne doit néanmoins
être envisagée.

• Capacité à livrer par air de jour et de nuit


Le soutien logistique par voie aérienne permet de s’affranchir des contraintes inhérentes aux liaisons
logistiques terrestres. Dans la mesure où la force dispose de la supériorité aérienne, le ravitaillement par
aérotransport ou aérolargage constitue la solution la plus rapide et la moins risquée.

2.3.3 Le contrôle et la gestion des ressources


Par une manœuvre d’usure, les combattants peuvent appliquer les principes du siège : l’ennemi est
neutralisé, voire vaincu, quand il a épuisé ses ressources vitales (eau, carburant, munitions) et que ses
voies d’approvisionnement sont coupées. Au niveau stratégique, c’est l’épuisement des ressources
financières de l’adversaire qui peut être visé.

• L’eau
 Tout détachement se déplaçant dans le désert doit disposer d’au moins 48 heures de stock de
sécurité en vivres et en eau17. La consommation journalière d’eau dans le désert peut varier de 9 à
15 litres18 par homme pour la boisson, l’EDCH19 pour hygiène faisant par ailleurs l’objet de ratio de
ravitaillements différenciés. Par son volume et son incidence sur l’efficacité des combattants, le
ravitaillement en eau potable impactera de toute façon lourdement la manœuvre logistique et la
manœuvre tactique.
 La conquête et le contrôle des points d’eau (puits, oasis) demeure pour la Force - et sans doute
davantage encore pour l’adversaire irrégulier - un élément décisif. La surveillance et ponctuellement
le contrôle des lignes de points d’eau, correspondant généralement aux rares pistes existantes, peut
s’avérer un moyen utile pour contraindre l’adversaire.
 Pour moins vital qu’il soit, l’approvisionnement en EDCH (hors boisson) des emprises, voire des
détachements en déplacement doit néanmoins faire l’objet d’une planification logistique spécifique.

15 MANPADS: MAN Portable Air Defense System.


16 Le décollage de l’aéronef chargé doit se faire plutôt vers la fin de nuit pour des questions de portance et de charge utile, en fonction des distances
l’atterrissage aura ou pas lieu de nuit.
17 A titre d’exemple, ce stock représente 3 containers d’eau en bouteille pour 600 hommes.
18 La consommation par homme en eau potable sera fonction du climat, de la saison, du degré d’acclimatation, et du type de mission.
19 EDCH : eau destinée à la consommation humaine.

38
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

• Les munitions
 Le ravitaillement munitions au contact au profit de certaines fonctions (artillerie tractée) pose
immédiatement le problème du volume logistique. Les fortes élongations avec la base logistique de
soutien amènent à rechercher l’autonomie maximale du détachement engagé, influencer le choix du
chef tactique sur les armes d’appui de la manœuvre. (par exemple l’utilisation de moyens d’artillerie
à très longue portée (c’est-dire plus de 70 kms) à partir des bases opérationnelles avancées.
 Une solution consiste aussi à adapter un sous groupement logistique (SGL), ou à renforcer le GTIA
de vecteurs de transport, pour certaines actions particulières et pour une durée limitée.

• Le carburant
 Les contraintes particulières du milieu génèrent une surconsommation en carburant des véhicules,
et notamment ceux des unités blindées. En effet, la chaleur n’autorise pas le remplissage des
réservoirs à pleine capacité, ce qui entraine l’augmentation de la fréquence des ravitaillements.
 La nécessité de préserver l’autonomie tactique des véhicules pour l’exécution de raids à longue
portée en plein désert amène à calculer l’étape sur la base d’ 1/3 à la moitié de l’autonomie
carburant des véhicules.
 Le ravitaillement d’hélicoptères - directement ou par le biais de plots de carburant de circonstance -
à partir des réservoirs d’un avion tactique s’avère être une solution tactique d’urgence possible sous
certaines conditions. Il est également envisageable d’augmenter l’autonomie en carburant de l’unité
en la renforçant de moyens de transport de carburant tactique.

2.3.4 Accroitre l’autonomie des unités

• Pour un déplacement de longue portée, l’autonomie logistique maximale des unités - notamment blindées
et artillerie - doit être systématiquement recherchée, notamment en eau potable et en carburant. Chaque
véhicule doit détenir une large réserve de carburant sous forme de jerricans (remplis à 18 litres maximum en
raison de la chaleur) ou de futs (200 litres).
• A partir du niveau du SGTIA, l’emport de citernes d’eau et de carburant constitue de loin la meilleure
solution logistique pour conférer au détachement un accroissement substantiel de son autonomie20.
• De même, l’emport d’un bac souple 7 m3 permet le ravitaillement en EDCH « hygiène » pour plusieurs
jours à hauteur de 10l/h/j. Il faudra dans ce cas qu’un élément SDC assure le contrôle et la correction du
taux de chlore.

20 Une CCP de 10 m3 permet de ravitailler au moins une fois un SGTIA sur VBCI, doublant ainsi son rayon d’action.

39
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

2.3.5 Des modes de ravitaillement adaptés

2.3.5.1 Ravitaillement des détachements en déplacement

En complément de leur autonomie initiale vite réduite, les détachements en déplacement peuvent être
ravitaillés en cours de mission essentiellement de 2 manières :

• Par Livraison par air (LPA). Echappant aux contraintes terrestres de rayon d’action et de protection de
convoi, les LPA permettent le ravitaillement d’un détachement en progression par rendez-vous en un
point et à une heure prédéterminés. Plusieurs types de largage existent, permettant de ravitailler une
force à différentes altitudes et précisions :

 Le largage à faible hauteur21 (FH) ;

 le largage à moyenne hauteur22 (MH) ;

 le largage de matériel à très grande hauteur - ouverture basse (LMTGH-OB). Ce procédé permet
notamment de ravitailler une force même par mauvaise visibilité, avec une précision garantie
inférieure à 500 m.

• Par FARP (Forward Armament and Refueling Point). Un FARP est un point de ravitaillement provisoire
isolé, mis en place à un endroit convenu. Il peut prendre différentes formes :

 rendez-vous avec un ATT ou un ATA sur une piste de circonstance ;

 Plot logistique (bacs souples de carburant ou d’eau, dépôts de matériel camouflé…). La Force peut
être amenée ponctuellement à constituer des plots temporaires de carburant, d’eau et de munitions
adaptés aux opérations en cours, sans constituer pour autant de stocks trop importants qui
entraveraient sa mobilité et fixeraient ses effectifs. La mise en place de tels plots se fait
ponctuellement pour soutenir une action donnée au plus près.

 Rendez-vous avec un convoi disposant d’une citerne tactique.

21 De 15 à 150 m d’altitude.
22 De 150 à 750 m d’altitude.

40
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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Ravitaillement d’un détachement en déplacement

R2 - Ravitaillement par air BAT


Piste de circonstance
2/3
oir à3 r voir
é serv /4 R4 - Rdv avec convoi
du rése
r du 3/4
4 du rés à
/ 3 à 3/ erv
oir 2/3
2
R3 - Largage par air
R1 - FARP (plot log)
Objectif mission

2.3.5.2 Ravitaillement des bases avancées

Les BAT peuvent être ravitaillées de multiples manières :

 Par livraison par air (LPA). Les livraisons par air permettent de s’affranchir des contraintes
inhérentes aux liaisons logistiques terrestres. Dans la mesure où la Force dispose de la supériorité
aérienne, la livraison par largage ou par poser d’avion tactique constitue la solution de
ravitaillement la plus rapide et permettant de faire face aux aléas.

 Par HMA si l’élongation logistique abec la base de transit la plus proche le permet (au maximum
l’autonomie HMA - 20’).

 Par convois terrestres.

Soutien logistique d’une BAT


Liaisons ATT/ATA

Ravitaillement
par air BLIAT
Convois logistiques
Piste d’aviation terrestres
AC

BAT

Liaisons HMA

41
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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2.3.6 Problématique du soutien médical

Le soutien médical des forces en opération a pour objet essentiel de sauver le maximum de vies
humaines, de limiter les séquelles potentielles des blessures, de contribuer à l’entretien du moral des
combattants, en leur assurant un suivi médical permanent et en leur donnant l’assurance d’être secourus
le plus rapidement possible, de prescrire les mesures d’hygiène générale et de prophylaxie adaptées au
contexte épidémiologique, et d’assurer l’approvisionnement en fournitures médicales. On rattachera au
soutien médical les pratiques pharmaceutiques, les soutiens dentaire et vétérinaire.

La doctrine française privilégie la « médico-chirurgicalisation de l’avant », qui implique de porter au plus


près des combattants le maximum de moyens mobiles, performants et adaptés aux conditions de
l’engagement.

Sur le théâtre, la chaine du soutien médical inclut :

 un poste médical (PM) par détachement isolé ou en mission ;

 une antenne chirurgicale (AC) ou un ROLE 2 au sein de la base avancée temporaire (BAT), permettant
la stabilisation des blessés graves avant leur évacuation vers un hôpital médico-chirurgical (HMC)
ou un hôpital ami (nation hôte ou pays allié). Le ROLE 3 est généralement situé au sein (ou à
proximité) de la base logistique de théâtre (BLIAT) ;

 un Patient Evacuation Coordination Cell (PECC), intégré au TOC du J3, destiné à coordonner les
évacuations médicales (MEDEVAC23) sur le théâtre ;

 une chefferie avec un COMSANTE intégrée à la base logistique de théâtre, assurant la coordination
et le commandement des différentes structures médicales du théâtre ;

 une unité de distribution en produits de santé (UDPS) intégrée à la base logistique de théâtre
assurant la logistique des produits de santé ;

 une à deux équipes médicales d’évacuation héliportée.

Le soutien par un avion tactique médicalisé venu directement de la base logistique de théâtre peut être
envisagé car il permet le raccourcissement de la chaine d’évacuation (cas où le détachement en mission
opère à proximité d’une piste ATT/ATA opérationnelle).

De même, en fonction du type et de la nature de l’intervention, ces structures médicales peuvent être
renforcées par :

 une unité médicale de transit, située sur une base aérienne, qui assurerait la surveillance et la
réanimation des blessés en attente d’évacuation sur la métropole par voie aérienne (UMT) ;
 une unité médicale de décontamination (UMDA), placée en alerte sur le territoire national et qui
interviendrait si nécessaire ;

 un officier de liaison en cas d’utilisation de structures médicales du pays hôte ou allié.

23 MEDEVAC : Medical Evacuation. Le terme otanien pour désigner l’évacuation médicale d’un blessé est devenu le terme usuel.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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Un blessé non évacué dans le désert voit ses chances de survie décroitre rapidement tandis que ses
besoins en eau augmentent considérablement. L’évacuation et la médicalisation d’un blessé dans un délai
d’une heure (concept américain de « golden hour ») représente l’idéal à atteindre. Le respect d’un tel délai
représente néanmoins une contrainte importante en raison des grandes élongations qui caractérisent les
opérations dans le désert.

En zone désertique ou semi-désertique, l’évacuation par voie aérienne demeure préférable dans tous les
cas. En fonction du risque opérationnel estimé, on peut distinguer trois rayons d’évacuation médicale
(MEDEVAC), c’est-à-dire de rayons d’éloignement de l’antenne chirurgicale de soutien, pour un
détachement isolé :

 rayon MEDEVAC très court. Le respect du principe de « golden hour » ne permet pas alors à un
détachement isolé de s’engager au-delà de 80 kms de sa base de soutien (pour 1 HMA en alerte à
20 minutes) ;

 rayon MEDEVAC court. Le détachement est autorisé à s’éloigner jusqu’à la limite d’autonomie des
HMA en alerte à son profit ;

 rayon MEDEVAC étendu. Si les conditions opérationnelles sont jugées plus permissives, le
détachement sera autorisé à s’éloigner jusqu’à plusieurs centaines de kilomètres, en étant soutenu
par des moyens d’évacuation allant au-delà de l’autonomie des HMA (HMA ravitaillé par plot log,
avion tactique médicalisé…).

Rayon d’action d’un détachement et contraintes MEDEVAC


Tactical MEDEVAC
Strategic MEDEVAC
Forward MEDEVAC

ROLE 3
∞ 500 à 1000 Kms
AC/ROLE 2 BLIAT
PM
∞ BAT
PM R1
R2
R3
PM

Les Rayons d’évacuation sanitaire :


• R1 : Rayon MEDEVAC très court («Golden hour») ;
• R2 : Rayon MEDEVAC court (autonomie HMA) ;
• R3 : Rayon MEDEVAC étendu (au-delà de l’autonomie HMA).

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2.4 La supériorité aérienne, facteur de décision


2.4.1.1 Contraintes sur les moyens 3D en milieu désertique

 En journée, la chaleur peut limiter notablement l’autonomie et la capacité d’emport des aéronefs, en
fonction notamment de la température. En matière de capacité de renseignement image, il faut
également prendre en compte les réductions de performance des caméras thermiques en pleine
journée24. Les reconnaissances aériennes seront donc préférentiellement effectuées en début et en
fin de nuit ;
 les forts vents et les tempêtes de sables, pouvant durer plusieurs jours de suite, dégradent très
fortement la visibilité et peuvent ainsi empêcher de manière prolongée tout emploi des moyens
aériens. Pour cette raison, les bases isolées doivent disposer en permanence d’une autonomie
logistique minimale de 48 heures (eau, vivres, médicaments…) ;
 la vulnérabilité des infrastructures aériennes avancées (pistes d’aviation, stocks de carburants) face
à un ennemi irrégulier implique d’en limiter l’empreinte au sol. L’idéal est de pouvoir activer
rapidement des pistes aériennes de circonstance en appui d’une manœuvre temporaire. Les abords
de la piste n’ont ainsi besoin d’être protégés que ponctuellement.

2.4.1.2 La supériorité aérienne, condition préalable au succès

En milieu désertique et semi-désertique, les moyens aériens à voilure fixe ou tournante, avec ou sans
pilote, agissant depuis l’atmosphère ou l’espace, trouvent toute leur efficacité grâce à leurs capacités à
survoler rapidement les grandes surfaces et à faciliter ou appuyer un engagement presque en tout lieu.
Dans le cas où la Force détient la supériorité aérienne, leur emploi se trouve seulement limité par la nature
de la menace antiaérienne, les élongations, les conditions météorologiques et éventuellement par le
niveau de nuit.

« En juillet des combats acharnés se déroulèrent devant El-Alamein, au cours desquels les attaques
incessantes de la RAF jouèrent un rôle capital. Nous pûmes nous emparer de certaines positions
fortifiées et avancer de quelques kilomètres vers l’Est. Mais notre élan était rompu, et notre
offensive s’arrêta. […] Nous estimions qu’au cours des « Six Jours », 1 300 tonnes de bombes avaient
été déversées sur les emplacements occupés par les unités de choc de l’armée blindée. […] Nous
devions nous attendre à voir l’adversaire mener une guerre d’usure du haut des airs. Tactiquement
parlant, l’ennemi disposerait de bien des avantages. La maîtrise totale de l’air lui permettait
d’obtenir des renseignements extrêmement complets, recueillis par ses appareils de
reconnaissance. Il avait les coudées franches pour lancer ses opérations et il pouvait faire preuve
d’audace dans leur exécution, puisque, à tout moment, son aviation pouvait écraser sous les
bombes les mouvements d’approche ou de mise en place et jusqu’à la moindre initiative de
l’adversaire, ou les retarder en attendant le moment où lui-même serait prêt à lancer des contre-
attaques efficaces ».

Erwin Rommel, La guerre sans haine

24 En raison des forts gradients de température de nuit, les sources de chaleurs y sont plus aisément décelables.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

2.5 Surveillance et contrôle du milieu


L’immensité du désert impose à tout détachement une surveillance tous azimuts pour assurer sa sûreté,
surtout en phase statique. Dans une perspective offensive, la redondance des moyens d’acquisition du
renseignement est primordiale. L’ennemi asymétrique ayant couramment recours à la déception et à la
dissimulation, tout renseignement, notamment d’origine humaine, doit être recoupé et chaque objectif
positivement identifié avant d’être engagé.

2.5.1 Surveillance par les moyens techniques

Les moyens techniques de surveillance permettent de couvrir une parcelle de l’immensité des espaces
lacunaires du désert, au prix néanmoins d’un investissement humain (maintenance, exploitation) et
surtout matériel important.

 Le renseignement d’origine image (ROIM) optique visible et infrarouge25, aéroporté et satellite,


permet une détection efficace et discrète, même s’il faut garder à l’esprit que l’ennemi peut
facilement avoir recours aux leurres. L’imagerie radar satellite présente l’intérêt d’être discrète et de
s’affranchir des accidents de terrain ainsi que des frontières internationales dans la phase de recueil,
de disposer d’un nombre élevé de capteurs qui traitent de larges surfaces avec la même efficacité de
jour et de nuit. Ce capteur, performant en détection n’autorise cependant pas pour le moment la
reconnaissance des matériels ou leur identification. Dans les deux cas, l’exploitation peut être
réalisée sur le théâtre ou en reach back avec la métropole (utilisation de transmission de données
directe pour certains vecteurs aériens ou par axe image pour le reach back ou les drones BTH26).
 Le renseignement d’origine électromagnétique (ROEM) constitue un moyen de détection et de
localisation très efficace contre des combattants irréguliers camouflés dans le milieu humain
environnant.
 Sur le terrain très ouvert que présente la plupart des déserts, les radars s’avèrent très utiles en
détection rapprochée (reconnaissance et sûreté du détachement), sauf à être brouillés par les vents
de sable.
 Les moyens de surveillance aériens interarmées (aviation de reconnaissance, Awacs, ATL2) fournissent
un appoint très appréciable dans la détection au plus loin de formations ou de convois adverses.
 L’emploi des moyens de vision infrarouge et des intensificateurs lumineux procure une réelle
supériorité à une force bien équipée opérant de nuit face à un ennemi qui en serait dépourvu.
 Les capteurs passifs (balises de détection, caméras thermiques, capteurs de mouvement…) peuvent
renforcer utilement le dispositif de protection des emprises.
 Les moyens d’observation embarqués des engins (terrestres et aériens) sont souvent utilisables à
leur portée maximale dans le désert. La complémentarité de ces capacités permet de maintenir une
surveillance complète jusqu’à un rayon de 10 à 15 kilomètres autour d’une unité déployée. La
manœuvre des capteurs et l’exploitation du renseignement seront optimisées par l’emploi d’outils
de fusion du renseignement multi-capteurs.

25 Les moyens de détection thermique doivent être privilégiés de nuit car, en raison des forts gradients de température, les sources de chaleurs sont
plus aisément décelables.
26 Beyond the horizon (BTH).

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2.5.2 Les patrouilles autonomes de reconnaissance

La patrouille légère de reconnaissance constitue un moyen efficace pour détecter, - éventuellement


détruire - un objectif à haute valeur ajoutée ou un ennemi irrégulier dans la profondeur du milieu.

Taillé pour effectuer des raids en autonomie logistique totale ou partielle (ravitaillement par air), ce type
de détachement doit idéalement intégrer des capacités ROEM27 et de guidage aérien (FAC28).

Ne pouvant bénéficier d’un soutien santé de proximité et susceptible de se retrouver imbriqué avec l’ennemi,
ce type de mode d’action est particulièrement exposé et se rapproche de celui des forces spéciales.

L’expérience du Long Range Desert Group (LRDG)

Opposés aux Italiens dès 1940 en Libye avec des forces


inférieures, les Britanniques constatèrent qu’il leur
était difficile de déborder largement les positions
ennemies autrement que par le désert, au Sud. C’est à
cet effet que le commandant britannique Ralph A.
SIWA
Bagnold, proposa en juillet 1940 au général Wavell de
créer ce qui allait devenir le mythique Long Range
Desert Group.

Spécialisés dans l’exécution de raids à très longue


portée sur les arrières ennemis, les commandos du
LRDG devaient partir avec une autonomie logistique leur permettant de survivre et de combattre
dans un milieu particulièrement hostile, sans aide extérieure et dans la durée. Le principal véhicule
utilisé était le Chevrolet 30 CWT (1,5 tonne de charge utile), auquel on pouvait adjoindre quelques
camionnettes légères pour le commandement, voire des camions 60 CWT (3 tonnes de charge utile)
pour emporter, le cas échéant, des pièces d’artillerie.

Opérant à partir de l’oasis de Siwa, située aux confins Sud du désert libyen, les commandos du
LRDG ont effectué des missions très variées, allant du renseignement à la destruction d’objectifs
stratégiques sur les arrières de l’ennemi, en passant par la capture puis l’interrogatoire de
prisonniers. Ne négligeant pas le renseignement à obtenir auprès des tribus bédouines, le LRDG
comprenait des équipes de linguistes aptes à comprendre la plupart des dialectes locaux.

27 ROEM: renseignement d’origine électromagnétique.


28 FAC: Forward Air Controller.

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2.6 Coopération avec la population et les forces armées locales


2.6.1 Obtenir l’appui des forces de sécurité locales

• L’étude précise du milieu humain en planification


Les populations, dont la structure tribale hétérogène se retrouve dans la plupart des zones désertiques,
s’allient aux acteurs en présence, au gré de leurs intérêts. En développant des relations privilégiées avec
certains acteurs civils locaux, la Force pourra profiter des rivalités existantes pour se renseigner.

• L’intégration de guides locaux


Les guides civils et militaires doivent être sélectionnés avec soin (contre ingérence, critères culturels
locaux). Ils apportent une contribution significative à la connaissance du milieu : terrain, climat, météo,
population… Leur bonne intégration participe du développement du lien avec la population locale.

• La coopération avec l’armée locale


Dans le cadre de l’assistance militaire opérationnelle (AMO) menée au profit d’une armée locale amie,
celle-ci pourra fournir des guides militaires à la Force.
Le développement de relations et d’activités communes avec les unités d’une armée locale amie sont
susceptibles de faciliter la collecte de renseignement sur le terrain, sur la population et ses allégeances,
voire sur l’ennemi lui-même.
Concernant les actions menées dans le cadre de l’assistance militaire opérationnelle (AMO), se reporter
au chapitre concerné.

2.6.2 Acceptation par les populations

2.6.2.1 Ne pas apparaitre comme une force d’occupation

Les populations du désert constituent rarement un ensemble homogène et soudé contre un acteur
étranger. Dispersées, à la recherche d’un équilibre fragile pour subsister dans un milieu hostile, elles ne
seront pas disposées à se soulever facilement et spontanément. Bien au contraire, certaines chercheront
à tirer avantage de la présence de la Force, sous réserve que celle-ci ne mette pas en danger leur survie et
que son action soit limitée dans le temps.

2.6.2.2 Développer les relations avec la population

Les nomades constituent un précieux vecteur de renseignement pour les belligérants, les informations
circulant rapidement dans le désert au rythme des caravanes. En contrôle de zone ou en patrouilles, il est
indispensable de prendre contact avec les chefs locaux et de s’assurer la collaboration précieuse de
guides locaux intégrés au détachement. Enfin, il est important que la Force limite au maximum l’impact
négatif de sa présence, notamment s’agissant de la préemption de la ressource en eau.

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CHAPITRE 3 - ADAPTATION DES MODES TACTIQUES


AU TERRAIN DÉSERTIQUE

« Rapidité de jugement, capacité à créer des situations nouvelles et des surprises plus vite que
l’ennemi ne peut réagir, absence de dispositions arrêtées à l’avance, telles sont les bases de la
tactique dans le désert. »

Erwin Rommel

3.1 Les phases de la manœuvre

Pour vaincre l’adversaire dans le désert, l’approche indirecte est souvent préférable. L’idéal est de confronter
l’ennemi au milieu en l’usant et en s’attaquant à ses liaisons et ses sources d’approvisionnement. Une fois
isolé et coupé de sa logistique, l’ennemi affaibli sera rendu plus vulnérable à une action directe.

3.1.1 La préparation - Acquérir la domination de l’espace

3.1.1.1 L’acquisition du renseignement

La supériorité informationnelle est déterminante durant les phases de planification, de préparation et de


déploiement. Elle se traduit par :
- l’acquisition d’une base de cartographie et d’images nécessaires au positionnement et la navigation
est une priorité dès la planification ;
- l’emploi des moyens de navigation modernes facteur de rapidité et de discrétion dans le déploiement
des unités ;
- la surveillance quasi permanente du champ de bataille par les moyens aériens garantit la sûreté
tactique lointaine aux unités déployées ;
- la détection et la localisation de l’ennemi à distance par le déploiement de capteurs multiples
(observation, écoute, détection de mouvement…). Un ennemi conventionnel sera généralement
d’abord détecté par les moyens de surveillance interarmées (satellites, drones, avion…), tandis que
l’ennemi asymétrique sera repéré et localisé par l’interception et l’écoute de ses communications.
- la confirmation (ou l’infirmation) des détections opérées par les moyens de surveillance, par la
reconnaissance des point particuliers concernés ;
- le ratissage de zone à partir d’une position centrale. Ce procédé permet de débusquer un ennemi
asymétrique se dissimulant dans son environnement humain.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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3.1.1.2 La préparation logistique

La manœuvre logistique doit être planifiée et conduite avec rigueur jusqu’à son terme, chaque phase ne
devant pas consommer plus que ce qui a été prévu. Les phases de recomplètement doivent être étudiées
et planifiées. Une réserve logistique doit être conservée et sera dévolue à la phase d’exploitation menée
dans la foulée de l’effort, avant que l’ennemi ne se dérobe. L’autonomie doit être optimisée de façon à
garantir la plus grande souplesse face aux contraintes et aléas de ce milieu difficile et imprévisible.

3.1.2 L’effort  : déséquilibrer l’adversaire par la concentration des moyens en un point pour
emporter la décision

3.1.2.1 Concentration des appuis disponibles

Au moment du choc, les unités au contact doivent pouvoir bénéficier de l’appui de toutes les capacités
disponibles. La brigade interarmes, le GTIA et même le SGTIA devront donc être renforcés de manière à
pouvoir assurer le commandement et la coordination des moyens d’appui interarmes et interarmées mis à
leur disposition pour la manœuvre.

3.1.2.2 Déborder et obtenir la surprise

• Le désert constitue un espace ouvert laissé libre à la manœuvre. Dans le contexte d’un affrontement de
type symétrique, c’est donc souvent le plus rapide des adversaires qui parvient à vaincre l’autre. La
rapidité et l’imprévisibilité du mouvement permettent d’obtenir la surprise, facteur décisif de succès.

• Facile à obtenir en terrain désertique quand on est parvenu à préserver la surprise, l’encerclement d’une
unité ennemie permet de lui couper toute retraite et devient vite pour elle une position intenable. Il faut
néanmoins noter que l’obtention de la surprise par des unités terrestres à l’échelle opérative est devenu
aujourd’hui difficile à obtenir face à un ennemi de type symétrique doté de capacité d’observation
longue durée (drone MALE, avions d’observation de type ATL2) ou ayant accès à des capacités de
surveillance satellitaire.

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Le débordement surprise de la ligne de Gazala par Rommel (mai-juin 1942)

e 26 mai 1942, Rommel


L lança une vaste attaque
en coup de faux visant
à contourner par le Sud
la ligne de défense alliée
à hauteur de Gazala et à
couper ainsi la retraite de la
VIIIe armée britannique,
avant d’exploiter ce succès
par la prise du canal de
Suez.

En infériorité numérique,
Rommel réussit néanmoins
à surprendre le général
Ritchie en lançant simulta-
nément une attaque de
diversion sur Gazala et un
large débordement avec le
gros de ses unités blindées
et motorisées, des positions
les moins protégées au Sud
du dispositif britannique.
Seules la résistance
prolongée de la 1ère brigade
française libre du général
Koenig sur le point d’appui
de Bir-Hakeim et les contre-
attaques massives des tous nouveaux chars M3 Grant empêchèrent l’Afrika Korps de mener à bien
l’encerclement de la VIIIe armée. Malgré la prise du port de Tobrouk le 21 juin, Rommel venait de
perdre l’occasion d’une victoire décisive.

• Les raids menés sur des objectif à haute valeur ajoutée dans la profondeur du milieu désertique contre
des zones arrière (ou refuge) ou sur les bases et relais logistiques de l’ennemi aboutissent généralement
à la dislocation du système adverse. Des actions offensives d’une telle portée, menée préférentiellement
par les unités blindées, doivent être bien planifiées et bénéficier de l’effort logistique. Si les itinéraires
le permettent, les unités blindés peuvent également bénéficier de l’action des unités d’appui à la
mobilité des blindés au moins pour une partie de l’itinéraire.

• Ce type de raid implique l’infiltration sur de longues distances au travers du dispositif lacunaire de
l’ennemi en évitant d’engager le combat. Ils peuvent s’effectuer par moyens terrestres ou aéromobiles,
à partir de la mer ou d’une base d’opération avancée mobile.

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• Afin d’obtenir les résultats escomptés, le recueil du renseignement particulièrement actualisé, compte
tenu de la grande volatilité de l’adversaire, est un pré-requis fondamental. Il doit également être préparé
avec beaucoup de soin au plan logistique. Le ravitaillement de la colonne en infiltration peut s’opérer
par livraison aérienne si cela ne compromet pas la discrétion du déplacement.

Le plan de Rommel sur la base logistique alliée de Tebessa

Replié dans le sud tunisien en décembre 1942 après avoir subi la


défaite d’El Alamein, Rommel imagine de lancer, avec l’appoint
des forces allemandes de Tunisie, une vaste offensive dans la
profondeur sur la base arrière logistique des alliés à Tebessa en
Algérie, pour ensuite s’emparer du port de Bône.

Le succès d’une telle offensive, dont la réalisation présentait


néanmoins des difficultés logistiques majeures à l’Afrika Korps,
aurait pu causer la dislocation durable des forces alliées, bien
au-delà de l’effet temporaire que causa l’offensive de portée
tactique menée en février 1943 sur la passe de Kasserine. Mais
Rommel ne pu faire prévaloir à temps ses vues sur celle du
général von Arnim commandant les forces tunisiennes.

3.1.3 La consolidation - Contrôler la zone d’action

• Réduire un adversaire dispersé, voire disloqué, en exploitant l’hostilité du désert, par l’action des
moyens d’interception aéroterrestres.
• Dans le cadre du mode tactique de la sécurisation, des patrouilles légères en contrôle du territoire
peuvent guider et accompagner les frappes aériennes, tout en contribuant à entretenir un climat
d’insécurité pour les forces ennemies résiduelles.
• Une réserve d’intervention dédiée (notamment héliportée ou aéroportée) peut être chargée de la
réduction des résistances isolées.

3.1.3.1 Opérations à partir de bases temporaires dans la profondeur

Pour mettre la pression sur un adversaire dont le mode de culture dominant est le nomadisme et le
mouvement, la Force doit disposer des moyens de le détecter pour aller le détruire dans ses sanctuaires
naturels. Pour autant, de telles opérations de sécurisation ne doivent pas être menées trop longtemps à
partir de la même base et avec les mêmes itinéraires de soutien logistique pour ne pas devenir à leur tour
la proie d’attaques de harcèlement. C’est pourquoi, la Force doit conserver une approche dynamique de
ses opérations de sécurisation afin de préserver sa liberté d’action.

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3.1.3.2 Patrouilles et opérations de présence

La patrouille constitue le procédé d’exécution naturel d’une force déployée dans le désert pour assurer sa
sûreté lointaine et aller chercher le renseigner sur le terrain et l’ennemi. La patrouille de longue durée -
nomadisation ou opération de présence - permet en outre d’exercer l’influence de la Force sur son
environnement humain et de contrôler une zone à stabiliser.

Des détachements aussi autonomes agissant dans la profondeur du milieu doivent disposer au minimum
du renfort d’un poste médical (PM) et d’un FAC.

3.2 Les modes tactiques adaptés à la zone désertique et semi-désertique


3.2.1 L’action offensive

En zone désertique, l’obtention d’un effet tactique sur les forces adverses prime sur le contrôle du terrain.
Ainsi, la destruction ou la désorganisation des bases logistiques et des PC ennemis dans la profondeur
garantit une plus-value tactique optimale et un impact moral décisif.

3.2.1.1 L’offensive dans un combat symétrique ou dissymétrique

• La supériorité technologique comme facteur de succès

L’affrontement dissymétrique face à une armée conventionnelle technologiquement moins avancée assure
les armées occidentales d’une supériorité technique, aérienne et informationnelle.

La supériorité technologique doit être optimisée par l’engagement coordonné des moyens (combinaison
des effets et de la portée des moyens), afin d’affaiblir au maximum l’adversaire à distance, avant le choc.
Toutefois, l’action combinée de la chaleur et du sable sur les équipements de haute technologie constitue
une réelle limite à leur emploi.

Durant toutes les phases de l’opération Tempête du désert, les coalisés ont systématiquement traité
les objectifs repérés, d’abord par les feux d’appui indirects, puis par les moyens de tir directs et
antichar de moyenne portée, avant l’engagement des chars et enfin des fantassins. Cette gradation
des effets a permis de conserver l’initiative sur l’adversaire, de lui imposer le tempo et de limiter
ainsi nettement les pertes amies.

• Déborder, encercler et détruire

Si le terrain est suffisamment pénétrable, la mobilité des unités motorisées et blindées autorise les
manœuvres offensives de grande ampleur dont le gain tactique peut être important. Dans le cas contraire,
l’infiltration jusqu’à proximité de l’objectif peut s’opérer par OHP et mise au sol d’une unité à dominante
infanterie. La mission de destruction peut enfin être confiée à un GAM.

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Le schéma général de cette manœuvre est le suivant :


- large débordement opéré par surprise (approche de nuit de préférence) et mise en place éventuelle
d’une couverture ;
- encerclement de l’unité adverse ;
- attaque dans la foulée avec appui aérien ;
- rupture du contact et dispersion rapide pour ne pas offrir de cible aux éventuels tirs d’appui ennemis
en riposte.

Les unités de manœuvre doivent donc conserver en permanence la mobilité maximale compatible avec les
contraintes de ravitaillement logistique, ce qui permet d’imposer à l’adversaire le terrain et le moment de
l’action.

L’encerclement de la 3e armée égyptienne dans le Sinaï (guerre du Kippour, 1973)

Après avoir lancé le


6 octobre 1973 leur
offensive dans le Sinaï
à l’abri des batteries de
missiles SAM – ce qui eut
pour effet de priver les
troupes israéliennes
d’appui aérien sur leur
front sud – les Egyptiens
réussirent à percer la
ligne Bar-Lev au nord du
canal de Suez puis à
infliger de lourdes pertes
aux colonnes blindées
israéliennes tentant de
contre-attaquer sans
appui interarmes.

Changeant de tactique,
des fantassins de la
division d’Ariel Sharon
réussirent à s’infiltrer le 15 octobre à travers le front égyptien entre les 2e et 3e armées puis à
traverser le canal dans la nuit du 16 au 17 octobre. Exploitant à fond cet avantage, les blindés
israéliens parvinrent à encercler totalement la 3e Armée à l’ouest du canal avec des effectifs pourtant
inférieurs. Au moment du cessez-le-feu le 22 octobre, les Israéliens étaient parvenus à
100 kilomètres du Caire. Le rétablissement inespéré de la situation tactique sur les deux fronts et
notamment le gage tactique de l’encerclement d’une 3e armée égyptienne coupée de son soutien
logistique permirent à Israël de se retrouver en position de force pour les pourparlers.

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• Exploiter l’avantage acquis par la manœuvre

 Une fois la décision obtenue sur l’ennemi, l’exploitation doit-être menée dans la foulée. Les délais
des recomplètements logistiques nécessaires ne doivent pas compromettre la réactivité de la Force
dont dépend le succès final. Si l’ennemi peut disparaitre dans le désert, il reprendra l’initiative par
la suite. Il sera alors particulièrement payant de disposer d’une réserve de théâtre capable de
prendre à son compte l’exploitation immédiate de l’avantage tactique acquis.

« Une fois l’ennemi sérieusement malmené, on doit exploiter l’avantage qu’on s’est assuré en
cherchant à écraser et à détruire le gros des formations désorganisées. Ici, encore, la vitesse est tout.
Il ne faut jamais laisser à l’adversaire le temps de se réorganiser. Il est essentiel de regrouper ses
propres forces avec la vitesse de l’éclair, en vue de la poursuite. L’approvisionnement des éléments
de poursuite est alors primordial. »

Erwin Rommel, La guerre sans haine

 Le couple blindés-hélicoptères constitue l’outil idéal pour exploiter une situation tactique favorable,
particulièrement dans le désert ou les chars comme les engins blindés peuvent donner toute la
mesure de leur puissance, de leur vitesse et de leurs aptitudes au tir à distance.
 Si l’adversaire asymétrique ne peut être détruit par le bouclage et le ratissage, il sera neutralisé dans
la durée par la création de zones de sécurité lui étant interdites, en s’assurant si possible l’appui de
la population. Le contrôle de la zone par des patrouilles légères peut également menacer ses lignes
de communication et maintenir chez lui un climat d’insécurité.

• Conquête de point clé du terrain

Comme en combat en milieu montagneux, le contrôle ou la saisie de vive force de certains verrous naturels
du terrain peut revêtir un aspect essentiel. Ainsi, le contrôle d’un col ou d’un défilé peut devenir l’effet
majeur conditionnant la réussite de la manœuvre. La mission de s’emparer de ce type de point clé incombe
généralement aux unités d’infanterie, appuyée par les unités blindées et aéromobiles.

3.2.1.2 Tactiques offensives face à un ennemi irrégulier

Dans un milieu faiblement peuplé, le contrôle de la population prend une importance moindre qu’en
contre-rébellion classique. L’effort doit porter sur la détection de l’ennemi, la discrimination d’avec la
population qui peut contribuer à le dissimuler, et enfin sa destruction.

L’application d’une juste pression dissuasive29 dans les zones de peuplement potentiellement contrôlées
par l’ennemi contribue à y maintenir un climat d’insécurité tout en participant de la sécurisation des bases
et des liaisons logistiques amies.

29 La pression dissuasive consiste à juxtaposer au quadrillage – dont les capacités sont dédiées aux missions de contrôle - des moyens capables de détruire
les forces rebelles sur le terrain (Doctrine de contre-rébellion).

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• Destruction d’opportunité de zones refuge et de bases logistiques dans la profondeur


 Il s’agit d’inverser la tactique nomade du rezzou en exploitant la supériorité offerte par les moyens
d’acquisition et de mise en place modernes afin de porter des coups à l’ennemi jusque dans son
sanctuaire.
 la synergie de tous les capteurs disponibles doit permettre de détecter dans la profondeur les zones vie,
itinéraires de déplacements, voies logistiques et bases de repli de l’ennemi ;
 la capacité d’intervention très réactive permet d’exploiter sans délai le renseignement acquis, dont la
validité est par nature réduite s’agissant d’un ennemi aussi fugace ;
 une mise en place rapide (par héliportage ou à défaut motorisé) ;
 un appui feux essentiellement air-sol au contact.

Ce mode d’action est sans doute le plus rentable en termes d’économie des forces, mais il implique
l’acceptation d’un risque de pertes plus élevé (port permanent du gilet pare-balles difficile).

Le raid héliporté sur Goubone (massif de l’Ennedi, Tchad, 1970)

Suite à l’embuscade subie par la CPIMa30 du 6e RIAOM le 11 octobre 1970 à Bedo31 au Tchad, les forces
françaises lancèrent le 29 octobre un raid héliporté sur la base arrière rebelle de Goubone, située dans
le massif du Tibesti à 65 kilomètres au nord-est de Zouar. 2 commandos de la CPIMa et 1 section
du 2e REP, déposés au plus près de l’objectif, réduisirent successivement plusieurs positions rebelles au
terme de durs combats.
L’exploitation rapide de renseignements livrés par des prisonniers permit de mener à bien cette
opération audacieuse qui, par son bilan32, réussit à porter un rude coup à l’organisation logistique
du FAP33 de Oueddeï Goukouni.

• Bouclage et ratissage d’une zone refuge

Le bouclage et le ratissage sont deux missions complémentaires du GTIA et du SGTIA.


Il s’agit pour l’unité en bouclage d’établir par surprise et sur renseignement précis un dispositif continu
d’interdiction visant à enfermer un ennemi dans sa zone de stationnement. Une autre unité peut alors se
charger de ratisser méthodiquement la zone pour capturer l’ennemi pris au piège. Ce genre d’opération
requiert en amont un renseignement de qualité et n’est efficace que si la surprise est préservée jusqu’au
bout. Les points clés sont :
 l’organisation éventuelle d’une opération de déception en amont pour détourner l’attention de
l’ennemi ;

30 CPIMa : Compagnie parachutiste d’Infanterie de Marine. D’un effectif de 146 hommes, cette unité d’intervention du 6e RIAOM était articulée
en 4 commandos.
31 11 commandos de la 6e CPIMa perdirent la vie au début de cette embuscade tendue par les rebelles dans la région de Faya Largeau.
32 13 tués et 4 prisonniers chez les rebelles, ainsi que des documents importants récupérés, sans pertes subies dans les rangs français.
33 FAP : Forces Armées Populaires, mouvement rebelle tchadien alors soutenu par la Libye de Kadhafi.

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 l’obtention de la surprise par la rapidité et la discrétion du bouclage (mise en place de nuit et


approche finale à pied) ;
 la prise en compte des lignes du terrain s’apparentant à des chemins d’exfiltration possibles de
l’ennemi ;
 le ratissage de la zone, effectué de jour afin d’éviter les tirs fratricides, en étroite coordination avec
les unités en bouclage ;
 guidage en temps réel des éléments au sol par les éléments aéromobiles et aériens. La dépose
d’unités légères à proximité de l’objectif par HMA, escortés par des HRA garantit le succès de la
phase finale de destruction.

Une variante de la tactique du bouclage/ratissage consiste à rabattre l’ennemi vers un élément


d’interception fixe, placé en embuscade sur l’itinéraire de repli de l’ennemi. C’est la tactique du « sweep
and block », utilisée avec succès par les commandos héliportés des Fire Forces rhodésiennes contre les
insurgés zimbabwéens du ZANLA34 entre 1964 et 1979.

Efficaces, ces deux missions, procédés classiques de la chasse (battue et affut) comportent néanmoins
2 inconvénients :
- reposant sur l’exploitation rapide d’un renseignement d’opportunité dont la validité dans le temps
est souvent limitée, ils s’avèrent difficile à planifier et à conduire dans un contexte nécessairement
interarmes, voire interallié ;
- ils sont par nature très consommateurs en personnel et en moyens de la 3e dimension à maintenir en
réserve d’intervention.

• Forcer l’ennemi au combat classique

Cette tactique permet de pousser le combattant irrégulier à s’exposer dans un combat de type classique
sur un terrain qu’il n’aura pas choisi en annulant le facteur surprise. Si on reprend la métaphore de Mao
Tsé Dung sur l’insurgé évoluant comme un poisson dans l’eau au sein de la population, il s’agit d’obliger
le poisson à sortir de son élément. On distingue essentiellement 3 phases :
 S’assurer du contrôle des principaux points d’eau et oasis qui abritent l’essentiel des populations
autochtones ;
 inciter l’ennemi à attaquer ces points clé avec des moyens lourds, à découvert et sans le bénéfice de
la surprise ;
 intercepter et détruire les colonnes ennemies repérées par une capacité de réaction aéroterrestre
dédiée.

34 ZANLA : Zimbabwe African National Army, bras armé de la Zimbabwe African Natioanl Union de Robert Mugabe.

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• Patrouilles de sécurisation
Si la Force, agissant à partir d’une BAT installée en zone stabilisée, n’a pas suffisamment d’effectifs pour
quadriller étroitement un secteur non permissif, l’engagement continu d’unités en patrouille de
sécurisation contribue à maintenir une pression dissuasive sur les lignes de communication de l’ennemi
et crée ainsi chez lui un sentiment d’insécurité latent. Ces patrouilles sont également susceptibles de
renseigner efficacement sur la localisation et les modes d’action des insurgés.

3.2.2 L’action défensive


L’immensité de l’espace de manœuvre permettant le débordement de la plupart des dispositifs fixes, une ligne
d’arrêt ne peut s’appuyer que contre des obstacles naturels difficilement contournables (massifs rocheux,
dépression, oueds…). Même dans ce cas, la longueur de la ligne à tenir excèdera souvent les capacités des
forces disponibles.
La défense - généralement temporaire - de certains verrous d’interdiction, (tels que points d’eau, couloirs de
pénétration) ou d’emprises statiques servant de point d’appui aux opérations peut s’avérer nécessaire, mais
doit se faire au moindre coût humain et logistique.

3.2.2.1 La défense mobile

Dans le désert, la défense mobile permet d’exploiter au maximum la profondeur du milieu. Ce mode défensif
alterne les coups d’arrêts sur les quelques mouvements de terrain favorables avec des phases de freinage,
associée à des contre-attaques dans la profondeur. On peut ainsi s’opposer efficacement à un adversaire
supérieur et demeurer en mesure de reprendre l’initiative.
Le désert offre plusieurs avantages au défenseur, notamment l’exploitation maximale de la portée des armes
et la surprise obtenue par le camouflage de positions préparées. L’ennemi peut être harcelé par une
manœuvre rétrograde enchainant des embuscades successives sur des positions favorables et valorisées, si
le terrain le permet. La rupture de contact peut être avantageusement masquée par la nuit ou par un vent de
sable opportun.

Embuscade de Bir-Kora par les forces tchadiennes le 19 mars 1987

« Le dispositif adopté fut celui de la classique embuscade d’infanterie, mais jouée en grand. Camouflés
à l’ombre des dunes, recouverts de bâches couleur sable ou de filets, les véhicules tchadiens laissèrent
la longue colonne libyenne s’engager dans la passe de Kora. Puis lancèrent la charge, tirant de toutes
leurs armes pour créer une « boule de feu ». Une pluie de missiles Milan s’abattit sur les chars de tête et
de queue du convoi, bloquant l’accès et la sortie de la passe. Démarrant des dunes, les tout-terrains
foncèrent vers les blindés, tournoyant autour d’eux en soulevant des nuages de poussière. Les Toyotas
chargés de combattant se rapprochaient par groupes de trois ou quatre véhicules, pilaient net pour
débarquer les porteurs de LRAC 89 ou de RPG 7, qui, immédiatement en position de tir, engageaient
blindés et véhicules. »

Le Milan au combat, Patrick Mercillon

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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3.2.2.2 Défense de bivouac

Tout détachement isolé à l’arrêt (bivouac, zone d’attente) doit savoir adopter temporairement une posture
défensive adaptée au milieu.
 La menace étant omnidirectionnelle, les armes doivent prendre en compte toutes les directions et
un élément d’intervention doit être maintenu en réserve au centre. Le dispositif doit être très
resserré pour être plus facile à défendre.
 Une unité à l’arrêt à découvert dans le désert doit systématiquement se camoufler au moins
sommairement des vues (bâches, filets, abris naturels…), en utilisant les éventuelles cassures du
terrain. En revanche, il faut éviter de stationner derrière des masques trop importants (dunes, talus)
pour ne pas compromettre ses liaisons radio.
 S’il recherche la discrétion lors de son déplacement, le détachement doit éviter tout stationnement
à proximité des villages. Le risque de renseignement de l’ennemi sur la présence d’une unité
étrangère par des autochtones est réel. Quelle que soit la solitude apparente du lieu, on constate
presque systématiquement l’apparition d’individus environ 10 mn après l’arrivée d’un détachement.

3.2.2.3 Protection d’emprises

En raison de leur vulnérabilité aux attaques par surprise, de nuit notamment, la défense permanente
d’emprises isolées s’avère consommatrice en effectifs et en moyens. Leur implantation temporaire sur un
site favorable doit répondre à un besoin opérationnel précis et permettre la mutualisation optimale des
capacités (piste d’aviation, dépôts logistiques, base opérationnelle…). C’est bien l’esprit de la BAT, sorte
de plateforme opérationnelle ad hoc, dont le fonctionnement se rapproche de celui d’un porte-avions.

Afin d’optimiser le coût humain de la défense d’une emprise, quelle que soient les conditions
météorologiques (tempête de sable, nuit sans lune), la combinaison de tous les moyens actifs et passifs
de protection et de sûreté disponibles s’avère nécessaire :
 la redondance des moyens de surveillance et de détection (drones, aviation, interception EM,
imagerie, patrouilles…) au profit de la base avancée lui confère une couverture dans la profondeur.
La détection au plus loin de la menace permet d’y parer en réagissant par l’engagement d’un
élément d’interception (terrestre ou aérien) ;
 les moyens d’alerte passifs disponibles (illumination, sonnettes, capteurs…) doivent être mis en
œuvre afin de participer à la détection des intrusions ;
 le dispositif de protection d’une enceinte isolée comprend au minimum une enceinte de protection
et un réseau d’obstacles de couverture (champs de mines antichars, fossés antichar si le terrain le
permet) battus par les armes à tir direct des engins embossés en défilement de tir.

La réalisation de travaux de protection des véhicules et des hommes (embossements et postes de combat)
réduit considérablement leur exposition aux tirs directs et indirects sur un terrain aussi ouvert que le désert.
L’artillerie dispose des moyens d’alerte et de réaction face à des menaces aériennes et terrestres. Elle
participe pleinement à la protection des emprises.

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En effet, un dispositif de protection anti-aérien peut être mis en œuvre afin de protéger la BAT face à un
ennemi aérien par la mise en place d’une unité SATCP qui grâce à ses radars de détection et ses pièces
pourra à la fois alerter le personnel et traiter l’ennemi.
D’autre part l’artillerie dispose de moyens d’alerte et de surveillance face à une menace de tirs indirects
(SL2A, GA10, COBRA….) ou face à une menace terrestre (Radar de surveillance sol, binôme ballon
captif/observateur d’artillerie) permettant aux personnels de rejoindre une zone sécurisée.
Compte tenu de la rareté des obstacles naturels sur lesquels appuyer la défense, l’efficacité de la
protection des emprises dépend ainsi pour beaucoup des moyens du génie disponibles.
Dans le désert, même les dispositifs s’appuyant sur de grands glacis minés battus par les feux et de
nombreuses positions de combat enterrées résistent rarement, une fois isolés, à l’encerclement et aux
attaques d’un ennemi déterminé. Le salut de l’unité encerclée réside alors essentiellement dans la contre-
attaque et la percée ou l’exfiltration - alors effectuée de préférence de nuit ou par faible visibilité. C’est la
manœuvre délicate que le général Koenig parvint à exécuter à Bir-Hakeim en juin 1942.

3.2.2.4 Défense de points clés du terrain

La défense de certains points clés du terrain, cols, défilés ou mouvements de terrains proéminents, peut
s’avérer déterminante pour la réussite de la manœuvre.
La défense d’une oasis peut aussi se justifier, notamment dans le cadre des opérations de contre rébellion, afin
de couper les insurgés de la population et des ressources d’eau et de ravitaillement qui s’y trouvent.

Les combats acharnés entre Syriens et Israéliens durant la guerre des Six jours de 1967 pour la
possession du Mont Hermon, point haut permettant le contrôle d’une partie de la zone frontière syro-
israélienne témoignent de l’enjeu, à la fois stratégique et symbolique, du contrôle d’une telle position en
milieu désertique.

3.2.3 La sécurisation - contrôle et influence

La nomadisation constitue le meilleur mode d’action, en cohérence avec la culture locale résultant d’une
expérience séculaire. D’une part, ce procédé permet de couvrir la plus grande superficie avec des effectifs
généralement comptés. D’autre part, la Force n’a pas intérêt à créer des emprises statiques qui
deviendraient vite autant d’abcès de fixation de l’effort ennemi et lui faciliteraient le renseignement sur les
mouvements amis.
 Le contrôle des points d’eau et des rares voies de communication contribue à contrôler l’essentiel
des populations. Mais le reste du désert n’est pas vide. La sécurisation consiste également à
entraver les actions d’influence, voire de contraintes exercées sur les populations du désert par un
adversaire asymétrique.
 La libre circulation des populations nomades doit être garantie par une présence discrète et des
capacités d’interception immédiates, afin que leur économie traditionnelle de subsistance ne soit
pas affectée.
 Un dispositif à la fois statique et mobile composé de bases d’opérations et d’unité en nomadisation
permettra la sécurisation par extension progressive (tâche d’huile).

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3.2.3.1 Le quadrillage de zone

Le quadrillage d’une zone insécurisée consiste en son organisation opérationnelle en secteurs, en vue d’y
assurer la protection et le contrôle de la population et d’y favoriser le recueil du renseignement. Ce mode
d’action offensif de la contre-rébellion s’appuie sur un réseau de postes reliés par des axes logistiques et
permet au moins théoriquement le reflux de la rébellion vers des zones tampons. Mais cette tactique
s’avère particulièrement consommatrice en effectifs et les contraintes du milieu désertique ne facilitent
pas le soutien logistique des multiples emprises nécessaires pour assurer le maillage du terrain.

3.2.3.2 Le rayonnement à partir des bases mobiles

En sécurisation du milieu, la crédibilité de la Force repose sur sa capacité à garantir la sécurité des
mouvements de populations nomades. Le rétablissement de ce mode de vie itinérant et commerçant
traditionnel est la précondition du retour à la normale.
Les points d’appui itinérants que constituent les bases opérationnelles avancées mobiles (BAT)
permettent d’affirmer la présence de la Force dans des zones jugées encore peu stables, en y maintenant
le temps nécessaire des capacités de renseignement et d’interception.
Cette action stabilisatrice s’exerce par des opérations de présence et de nomadisation menées à partir de
bases opérationnelles avancées mobiles (les BAT), implantées temporairement le temps nécessaire pour
agir sur une zone d’action. Ces patrouilles de présence doivent s’approprier les savoir-faire de
déplacement et de stationnement proche des modes de vie des tribus nomades (déplacement de nuit
bivouacs tactiques, camouflage, approvisionnement aux point d’eau...).

3.2.4 L’assistance

Le mode tactique de l’assistance peut prendre essentiellement deux formes : l’assistance aux populations
civiles et l’assistance aux forces régulières locales.

3.2.4.1 Assistance aux populations

Bien que dispersées, les populations du désert sont un enjeu pour la Force. L’analyse du milieu humain en
zone désertique fait ressortir un certain nombre de constantes qu’il faut connaitre et prendre en compte :
 La plupart des ethnies ont un esprit guerrier, marqué par la fierté du clan et l’indifférence aux signes
extérieurs de richesse. Ainsi, le rang d’un individu n’est pas toujours en lien avec son apparence et
pauvreté ne signifie jamais soumission. Les actions pour la santé, l’éducation, et le développement
offerts par la Force sont vite rejetées en cas de maladresse ou de mépris affiché35.
 Le respect des codes propres aux tribus ne peut être négligé car celui-ci implique souvent
l’acceptation ou le rejet. Les unités et les patrouilles engagées devront s’investir dans une démarche
d’échanges et de contact. L’intégration d’interprètes aux détachements agissant au contact des
populations contribue à faciliter la compréhension mutuelle.

35 Dans certaines cultures, le simple fait de s’adresser à l’autre avec ses lunettes de soleil peut ainsi être perçu comme du mépris.

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 Les forces armées ne doivent pas hésiter à afficher ponctuellement leur puissance. De telles
démonstrations participent à l’établissement de leur légitimité et de leur crédibilité aux yeux de tous.
 Il peut également être utile de mener des opérations de ravitaillement en eau au profit des
populations.
 L’impact psychologique bénéfique de l’assistance médicale aux populations (AMP) est d’autant plus
efficace dans un milieu où l’essentiel des populations rencontrées se trouvent loin de toute
structure médicale et où l’adversaire irrégulier ne peut nous concurrencer dans ce domaine.

L’aide médicale aux populations a ainsi représenté 38% de l’activité du service de santé durant
l’opération Manta au Tchad, entre août 1983 et février 1986.

3.2.4.2 Assistance aux forces militaires locales36

Cas de figure de plus en plus fréquent au vu des engagements récents, la contribution des forces terrestres
à l’assistance militaire opérationnelle (AMO) à une force armée étrangère locale participe de l’efficacité
opérationnelle, en particulier face à une menace irrégulière. Ce savoir-faire particulier se trouve développé
dans la Contribution des forces terrestres à l’assistance militaire opérationnelle publié en 2013 par le CDEF.
Dans le désert, le développement de liens étroits avec une armée locale présente plusieurs intérêts pour
la Force :
- les forces locales connaissent bien les particularités du milieu (terrain, climat, population) ;
- elles sont capables de proposer et de mettre en œuvre des modes d’action adaptés au combat en
zone désertique ;
- elles sont capables de supporter relativement aisément les contraintes spécifiques du milieu ;
- elles maintiennent un lien utile avec les populations.

Interarmées et interministériel par nature, ce procédé relève de la stratégie nationale davantage que de la
tactique. Cette assistance peut d’ailleurs s’inscrire dans le cadre d’une coalition internationale.
L’AMO est susceptible d’engager des unités allant des petites équipes au bataillon. On peut retenir un
ratio d’encadrement allant de 1 pour 3 à 1 pour 10 en fonction du niveau hiérarchique et de la fonction
opérationnelle considérée. Dans tous les cas, la protection et le soutien logistique (notamment santé) de
la Force déployée ne peuvent être externalisés auprès de la force soutenue.

36 Pour davantage de détail sur les modalités d’exécution de cette forme particulière de l’assistance, il est conseillé de se reporter à Contribution des
forces terrestres à l’assistance militaire opérationnelle (publiée en 2013).

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L’assistance militaire opérationnelle revêt essentiellement 2 aspects :

• L’appui opérationnel

Le détachement d’assistance militaire opérationnelle (DAMO) agit en appui opérationnel d’une unité
étrangère amie. Il peut prendre la forme d’équipes de conseillers opérationnels (de type OMLT37). Leur
mission est alors d’entrainer, voire de conseiller au combat les unités de la force amie.
L’effet final recherché doit en être clairement défini.
Les conditions de soutien du DAMO sont souvent problématiques. Dans le désert en particulier, où les
unités d’assistance opérationnelle seront le plus souvent isolées de leur base de soutien, la génération de
force doit prévoir l’autoprotection et des cellules de soutien médical et logistique minimum pour demeurer
autonome de la force locale assistée.
Dès lors que le DAMO peut bénéficier d’un appui aérien ami, il doit intégrer au minimum un contrôleur
aérien avancé (FAC38).

L’expérience du DAO de Birao déployé en République Centrafricaine au profit des forces locales en
2007 a révélé que les détachements engagés sont parvenus à plusieurs reprises à l’emporter lors
d’accrochages délicats, grâce à l’intervention des 6 Mirages F1 de N’Djamena.

• La formation et l’instruction

Le détachement d’instruction opérationnelle (DIO) instruit une troupe amie en zone permissive. Les contraintes
de soutien sont donc généralement moins problématiques que celle d’un DAMO engagé au contact.

37 OMLT: Operational Mentoring and Liaison Team.


38 FAC: Forward Air Controller.

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CHAPITRE 4 -
ADAPTATION DES FONCTIONS OPÉRATIONNELLES

4.1 Fonction commandement


4.1.1 Un commandement interarmes décentralisé

L’état-major de théâtre est nécessairement interarmées, incluant au minimum des composantes terre, air
et forces spéciales, ainsi que marine le cas échéant.
Au vu des élongations importantes et du caractère lacunaire du milieu, la chaine de commandement de
théâtre se trouve décentralisée, entre un PC de niveau opératif (FHQ39) et des chefs tactiques déployés sur le
terrain avec des capacités leur conférant la plus grande autonomie logistique et opérationnelle possible.
La souplesse d’emploi des moyens de commandement déployés (systèmes SIC notamment) demeure un vrai
enjeu, afin de ne pas compromettre la mobilité tactique inhérente aux bases avancées temporaires (BAT).
Les PC tactiques doivent intégrer une capacité de gestion de la troisième dimension (DLOC40 et CTA41) tant
pour la déconfliction que pour l’optimisation de l’emploi des moyens d’appui feux (sol-sol, CAS, CCA, sol-air).

4.2 Fonction appui au commandement


4.2.1 Généralités sur les SIC en zone désertique

L’engagement de forces en zone désertique comporte plusieurs spécificités en matière de SIC :


- Les élongations y sont généralement très importantes, notamment entre le PC de théâtre et les PC
tactiques ;
- L’isolement logistique et tactique des bases opérationnelles avancées a pour corollaire une
dépendance accrue aux flux d’information.

Dans ce contexte, le « réseau de théâtre » verra généralement la majeure partie des artères gros débits
réalisée par des systèmes satellitaires (liaison métropole-théâtre, liaison intra-théâtre jusqu’au niveau
GTIA, voire SGTIA).

39 FHQ: Force headquarters.


40 DLOC : Détachement de Liaison, Observation et Coordination.
41 CTA : Contrôleur Tactique Air.

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ans le cadre de l’opération EUFOR Tchad-RCA, menée de


D janvier 2008 à mars 2009, les liaisons de théâtre étaient
assurées par un réseau satellitaire reliant les stations
SYRACUSE de N’Djaména et d’Abéché, sous commandement
Epervier, aux stations satellitaires subordonnées des
4 bataillons déployés, placées sous la responsabilité de
l’EUFOR. La France assurait le soutien du réseau.

La zone d’action à couvrir s’étendait sur 760 kms du nord au sud


et 450 kms d’est en ouest.

Les contraintes thermiques et l’action fortemant corrosive propres au milieu justifient la redondance
des moyens de liaisons (doublement des liaisons et recours à une logistique très réactive). Le besoin en
climatisation des stations provoque une hausse de la consommation d’électricité. Les équipements
doivent être très régulièrement entretenus face à l’infiltration de sable et de poussière.

Ces remarques s’appliquent également aux détachements ROEM.

Réseau de bases aéroterrestres

BASE LOGISTIQUE

BASE D’OPERATION
BASE AEROTERRESTRE
PC DE BATAILLON
AVANCEE

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4.2.2 Les liaisons SIC dans la profondeur, un appui indispensable de la manœuvre

Les liaisons SIC constituent un enjeu déterminant pour des détachements isolés opérant en autonomie et
à distance de leur base d’opération de rattachement.

4.2.2.1 Contraintes du milieu sur les SIC

Sur terrain désertique, les moyens de communications VHF subissent une baisse de puissance en raison
de l’absorption des ondes par le sol. La chaleur extrême cause par ailleurs une diminution d’1/3 de la
portée de toutes les émissions et une réduction de l’autonomie des piles au lithium.
Les moyens de communications dits « longue distance », (moyens satellitaires ou radio HF) constituent la
meilleure solution pour des communications ponctuelles.

4.2.2.2 La nécessité de relais

La redondance des équipements et les maillages de relais terrestres et satellites sont nécessaires afin de
garantir la permanence de la liaison.

Les contraintes techniques propres au milieu désertique entrainent la mise en place de relais entre les
unités au contact et la zone des communications :

 relais aérien et satellitaires, que leur souplesse d’emploi amène à privilégier ;

 relais terrestres mobiles dans le cadre d’une opération ponctuelle limitée dans le temps. Le relais
SIC peut également être assuré par une autre unité déployée à mi-distance de l’unité à soutenir ;

 relais terrestres fixes sur un point favorable du terrain. Il faut alors nécessairement protéger - sur
un terrain le plus souvent difficile à défendre - et ravitailler ce nouveau poste isolé, ce qui accroit
d’autant l’empreinte logistique de la Force. Dans toute la mesure du possible, cette solution est
donc à éviter.

4.2.2.3 Importance de la liaison air-sol/sol-air

La manœuvre des forces terrestres au contact est presque systématiquement appuyée par la 3e dimension
(aviation, HRA42, HMA43,, drones). L’obtention de cette liaison et le guidage des aéronefs nécessite
l’intégration d’un FAC au détachement et l’emport du matériel SIC adéquat.

Dans le cas d’opérations menées en coalition, les forces terrestres doivent être dotées de moyens et de
personnel qualifié afin d’être en liaison avec les unités et aéronefs alliés susceptibles de les appuyer.

42 HRA : Hélicoptère de Reconnaissance et d’Attaque.


43 HMA : Hélicoptère de Manœuvre et d’Appui.

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4.2.3 Le soutien de QG
Dans un contexte de recours quasi systématique aux moyens de climatisation (pour les personnes et pour
les systèmes électroniques), la gestion des ressources de fonctionnement du QG (carburant, vivres, eau)
doit être anticipée. L’usage de shelters climatisés pour armer les PC des bases opérationnelles avancées
présente le double avantage de la protection du matériel électronique et de la mobilité tactique.

4.3 Fonction renseignement


4.3.1 Avant l’opération

Une bonne connaissance de l’environnement (physique, humain, culturel, économique…) est primordiale
avant l’engagement de nos forces. Les capteurs spécialisés de renseignement participent pleinement à
améliorer cette connaissance. Ils seront déployés au plus tôt et à tous les niveaux pour apporter les
renseignements suivants :

• Renseignement d’origine Image (ROIM)

Les images satellites de la zone d’intérêt militaire permettent :


- d’aider à la modélisation en 3D de la zone ;
- de détecter les pistes les plus empruntées, la présence de masses métalliques importantes et les
changements de milieu (zones humides ou couvert végétal par exemple) ;
- d’identifier les infrastructures particulières ne figurant pas sur les produits cartographiques (pistes
d’atterrissage de fortune par exemple) ;
- de suivre les mouvements de l’adversaire et préciser le positionnement de ses moyens de transport
et de ses infrastructures, y compris hors des espaces aériens ouverts à nos avions.
Ces images peuvent être complétées par d’autres acquises grâce aux aéronefs équipés de capteurs images.

• Renseignement d’origine électromagnétique (ROEM)

Ces renseignements permettent d’avoir une meilleure connaissance de l’ordre de bataille électronique de
l’adversaire, des positions des protagonistes, de leurs intentions et de leurs actions en cours ou à venir.
Ils peuvent aussi permettre de mieux appréhender la situation générale de la zone d’action, ainsi que l’état
d’esprit des forces en présence et des populations locales.

• Renseignement d’origine humaine (ROHUM)

La recherche humaine, avec ou sans contact permet de mieux comprendre la population locale sur zone. Elle
contribue à mieux connaître la région dans laquelle la Force évolue, des traditions et us et coutumes auxquels
elle devra apporter la plus grande attention, voire le plus grand respect, afin de ne pas susciter d’inutiles
tensions avec la population, voire de s’attirer sa sympathie dans cet effort d’empathie vis-à-vis d’elle.

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4.3.2 Pendant l’opération

Tout en restant préoccupée par la connaissance du milieu, la fonction renseignement doit s’efforcer d’être
proactive plutôt que réactive en se concentrant sur les menaces et les cibles potentielles.
La mission et les objectifs à atteindre déterminent les moyens mis à la disposition du commandant de la Force.
Quelle que soit sa taille, celle-ci sera dotée de capteurs renseignement et d’un organisme dédié à la mission
renseignement (S2 ou G2). Elle pourra en outre bénéficier d’un appui renseignement national, provenant de
capteurs non nécessairement présents sur le théâtre d’opérations ou d’échanges avec ses partenaires.
L’immensité des étendues désertiques et le caractère permanent des besoins renseignement du chef
interarmes nécessiteront de déployer une unité multi-capteurs du niveau tactique. D’autres capteurs des
niveaux tactique, opératif (avions de reconnaissance de l’armée de l’air, hélicoptères ou avions de la marine
nationale), voire stratégique, pourront venir en appui renseignement de la Force (imagerie satellitaire, appui
éventuel d’un DAT, adjonction sous OPCOM d’un DETAE, etc.). Cet appui permettra alors au COMFOR, via son
chef G2/S2, d’orienter efficacement les capteurs interarmes.

4.3.2.1 Rôle du ROHUM, problématique de la langue parlée

En milieu désertique ou semi désertique, le respect de la coutume et l’usage des palabres peuvent s’avérer
plus puissants qu’une attitude offensive pour désamorcer une situation tendue. C’est, entre autres, un des
rôles des capteurs humains, qui seront «dédiés» (équipes de recueil de l’information - RECINF, dont c’est le
métier) ou «non dédiés» (unités ou personnel militaire au travers de leur CRQ44, informations transmises au
cours de discussions avec des représentants d’ONG présentes sur zones, etc.).
En outre, les différentes langues et dialectes parlés posent un problème, toujours délicat à régler pour le
COMFOR, à savoir celui qui va parler dans la langue de l’autre. L’idéal est de parler la langue locale, autant que
possible. C’est là un signe fort pour se faire mieux accepter par une population qui appréciera l’effort d’aller
vers elle. Au sein des forces terrestres, il n’y a pas toujours le locuteur idéal formé au RECINF, ayant les
compétences linguistiques. La seule solution viable reste celle d’en trouver un au sein des unités de l’armée
de Terre, afin de l’employer comme interprète, mais la ressource pour certaines langues et dialectes est plutôt
comptée. Au final, le recrutement local sera parfois la solution retenue, mais en tenant compte du problème
de la confiance à accorder à cette personne, dont on limitera l’action à l’interprétariat et qui répondra à une
enquête menée par les organismes habilités à le faire.

4.3.2.2 Rôle du ROIM

Même si le désert offre peu d’abris aux vues, l’expérience de certains théâtres, notamment le théâtre tchadien,
et les capacités de déplacement rapides offertes par des 4x4 ont démontré à quel point il était parfois difficile
de repérer une troupe en déplacement.
 L’appui imagerie stratégique ne manquera pas d’être utilisé, mais un satellite ne dévie jamais de sa
route initiale et peut mettre plusieurs heures, voire plusieurs jours avant de passer au-dessus d’une
zone suspecte : il est parfois trop tard lorsqu’il est en mesure d’effectuer des prises de vues sur cette
zone. Une manœuvre combinant plusieurs systèmes spatiaux permet en revanche de couvrir de larges
surfaces. Leur plan de charge sera optimisé par anticipation sur les mouvements possibles de l’ennemi.

44 Compte Rendu Quotidien.

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 Les aéronefs, qu’ils soient à voilure fixe ou tournante, donneront alors au commandant de la Force
la souplesse nécessaire pour obtenir au plus tôt l’information dont il pourrait avoir besoin. Cette
information pourra, si nécessaire, faire l’objet d’une confirmation par image satellite, dès que ce
dernier sera idéalement positionné et dans des délais acceptables.
 Les drones peuvent compléter l’acquisition de renseignement, dès lors que les conditions
d’utilisation le permettront (météo favorable, sécurité des personnes préservée).

4.3.2.3 Rôle du ROEM

Identique à celui avant engagement. Permet également d’obtenir du BDA45 ou de connaître le sentiment des
forces en présence et des populations. Il peut ainsi être d’une grande utilité pour les actions d’influences, au
travers par exemple de la connaissance des besoins de la population, et l’évaluation de leur efficacité.

4.3.2.4 La manœuvre des capteurs

Le milieu désertique impose l’emploi simultané de plusieurs capteurs, si le commandant de la Force veut
être en mesure d’être renseigné en permanence sur son adversaire potentiel. Il fait non seulement jouer
l’avantage technologique qu’il peut avoir sur zone, mais il peut également compenser une perte de
capacité en cas de problème météorologique provisoire tel qu’un vent de sable ou une précipitation
intense dans le cadre de la saison des pluies.
La manœuvre de la totalité des capteurs sera optimisée d’autant mieux qu’elle sera conduite au plus près
du niveau d’exploitation multi capteurs.

4.3.2.1 L’appui météo et géographique

Un appui géographique et un appui météorologique peuvent venir compléter l’ensemble des capacités
renseignements à la disposition du COMFOR et donner au G2/S2 la possibilité de gérer au mieux la
manœuvre des capteurs. Un vent de sable, par exemple, pénalise fortement le travail d’un DETAE ou d’un
aéronef. L’appui météo permet ainsi d’anticiper la manœuvre des capteurs.
L’appui géographique des FT n’a pas de spécificité en zone désertique. Il est décrit dans le document de
doctrine de l’appui géographique en cours de parution.

4.4 Fonction contact


4.4.1 Combat débarqué : un milieu défavorable imposant un emploi mesuré en offensive et une
forte adaptation au terrain

Dans un milieu où la dissimulation et la protection sont difficiles à obtenir, le fantassin débarqué et isolé
se trouve très rapidement exposé, d’autant que l’hostilité du milieu diminue nettement sa capacité à durer
sur le terrain dans de telles conditions.

45 Battle Dammage Assesment.

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Plus qu’ailleurs, il doit donc pouvoir compter sur des moyens de transport de proximité et sur l’appui
permanent des moyens interarmes et interarmées. Sa capacité à durer demeure donc étroitement liée aux
capacités associées de déplacement et de soutien.

Le fantassin présente en revanche des qualités qui demeurent précieuses dans le cadre de l’engagement en
zone désertique :
- aptitude à s’emparer de points particuliers du terrain (cols, hauteurs, oasis…) et à les tenir dans la durée ;
- capacité à tenir efficacement des positions défensives, notamment face à un ennemi asymétrique furtif
et mobile recherchant l’imbrication ;
- aptitude à nouer et entretenir des contacts avec les populations locales, notamment dans le cadre des
modes tactiques de la sécurisation et de l’assistance.

4.4.1.1 Les opérations en véhicule léger et à pied

Les opérations menées par l’infanterie sur véhicule de transport de troupe s’inscrivent dans le cadre de la
manœuvre interarmes et interarmées.
N’ayant que peu d’aptitude au combat de rencontre face à une menace blindée, les unités d’infanterie non
blindées agissent essentiellement en soutien de l’action des unités blindées en offensive. Dans ce cadre, elles
se voient naturellement chargés de reconnaitre, de saisir et de tenir le cas échéant des points particuliers de
la manœuvre (cols, défilés, points hauts, zones habitées…).
En défensive, l’infanterie présente d’excellentes aptitudes, notamment à la défense statique, pour peu que le
terrain ait été bien valorisé.
Enfin, l’infanterie débarquée retrouve un rôle prépondérant dans les modes tactiques de sécurisation et
d’assistance où le contact avec les populations est essentiel.

4.4.1.2 Les opérations en VBCI46

Dans le milieu ouvert du désert, le VBCI tire avantage de sa réelle aptitude à la mobilité tactique et au combat
de rencontre, en particulier contre un ennemi asymétrique monté sur 4x4 léger.
Sa haute mobilité et ses capacités d’agression à distance (son canon de 25 mm effectue des tirs précis à
1 500 m) lui permettent en effet de participer à des raids blindés et de débarquer en sécurité des fantassins au
plus près de l’objectif à conquérir.

4.4.1.3 Les opérations héliportées (OHP)

Les opérations héliportées permettent de projeter une force de volume en tout point de la zone d’action sur
court préavis. Les OHP sont donc un moyen idéal pour des actions d’opportunité tactique (interception, force
de réaction ou de secours) sur des objectifs situés à proximité de la zone de dépose. En effet, une fois
débarqués au sol, les fantassins à pied se retrouvent exposés à une menace blindée ou aérienne, sans la
capacité de leurs véhicules d’appui et compte tenu de leur obligation de manœuvrer à pied. L’appui aérien
permanent de l’opération revêt donc un caractère vital pour la troupe engagée au sol.

46 VBCI: Véhicule Blindé de Combat d’Infanterie.

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4.4.1.4 Les opérations aéroportées (OAP)

Le vecteur de projection particulièrement souple et réactif que constitue la composante aéroportée s’avère
ponctuellement très appréciable dans un milieu aussi étendu que le désert, surtout si la supériorité
aérienne est acquise.

Une force aéroportée est notamment en mesure :


- d’intervenir initialement pour la saisie et le contrôle d’un APOD pour l’entrée de théâtre ;
- de saisir et contrôler temporairement des points clés du terrain ou des points aménagés pour la
manœuvre ;
- conduire un raid dans la profondeur sur un objectif éloigné et sur lequel la Force dispose d’un bon
renseignement ;
- réaliser un bouclage soudain, subjuguant l’adversaire, permettant éventuellement de l’intercepter.
Il convient de veiller à :
- la mise à terre de la troupe au plus près de la zone d’opération ;
- disposer d’un appui aérien tactique efficace.

Les limites de l’engagement d’une unité aéroportée sont  initialement au moins, sa faible mobilité
tactique et son autonomie logistique limitée.

opération aéroportée de Timimoun, lancée en novembre 1957 sous les ordres du colonel Bigeard
L’ pour faire cesser les attaques répétées contre les sociétés pétrolières de la région de Colomb-
Béchar, se prolonge en une vaste opération de ratissage pour localiser des méharistes déserteurs
passés dans les rangs de l’ALN. La bataille qui s’ensuit contre le groupe de rebelles repéré se solde par
la capture de 6 prisonniers et la mort de 45 rebelles.
La dimension aéroportée de l’action aura permis la mise en place, en seulement quelques jours, de
1570 parachutistes du 3e RPC et du 1er REP dans une région désertique éloignée et particulièrement
hostile.

4.4.2 Le combat embarqué, outil adapté au contrôle du milieu


4.4.2.1 Capacités des unités blindées en zone désertique
• Les unités blindées se caractérisent par leur :
- capacité à contrôler de vastes espaces et des espaces lacunaires ;
- capacité d’observation tous temps ;
- puissance de feu et portée pratique ;
- réversibilité ;
- aptitude au renseignement.

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• Dans le désert, la cavalerie blindée (CB) combine ses aptitudes naturelles à la mobilité, à l’endurance,
au tir (puissance et précision) et à l’observation pour fournir une palette de solutions tactiques allant du
contrôle de zones vastes à l’exploitation ou à la contre-attaque.

• Même si ces capacités sont partagées par la plupart des engins de la CB (sauf VBL), elles doivent être
nuancées selon le matériel utilisé. De plus, l’empreinte logistique des unités blindées constitue une
contrainte à prendre en compte.

• Il faut souligner également la capacité des EB à prendre en compte, notamment à distance, la menace
représentée par des véhicules adverses très mobiles et présentant une silhouette basse, auxquels leur
armement confère la capacité d’effectuer des tirs tendus de saturation anti-véhicules, voire anti-blindés
sur des portées non négligeables.

4.4.2.2 Vitesse et endurance

• La mobilité des engins blindés, chenillés ou à roues, est un avantage majeur dans un milieu désertique
qui permet souvent d’utiliser presque tout le potentiel de vitesse disponible.

• Les données théoriques de vitesse et d’endurance doivent toutefois être corrigées au regard de la qualité
des sols. Ainsi, une surface de sable très fluide et une zone rocailleuse verront des engins se déplacer à
des vitesses différentes, avec un taux d’usure du matériel et une consommation très disparates. Par
ailleurs, en dépit des qualités tous terrains des véhicules de la CB, l’utilisation des pistes favorisera la
vitesse autant que l’endurance.

4.4.2.3 L’autonomie logistique

• La capacité d’emport logistique de chaque véhicule fait tendre les unités blindées vers une relative
autonomie47. Celle-ci confère aux unités de CB une endurance précieuse dans le désert.

• Cette autonomie doit toutefois être entretenue par les ravitaillements. Ceux-ci sont primordiaux pour la
CB, dont les engins sont la raison d’être. Si les ravitaillements font défaut, l’unité blindée se transforme
en handicap, puisque sa dernière position devient un point à défendre.

• Par ailleurs, de façon moins anecdotique qu’il n’y paraît, la présence de climatisation dans certains
véhicules blindés (en particulier le char LECLERC) participe très efficacement de l’endurance des
équipages dans le désert.

47 Mis à part pour le char Leclerc, qui n’a dans son réservoir que de quoi combattre 12 heures.

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4.4.2.4 Intérêts et limites de l’engin chenillé

• Ses chenilles et sa motorisation confèrent au char de bataille (LECLERC) la meilleure capacité tout terrain
dans le désert. Aux chenilles sont associées les capacités d’observation autonome du char et ses
capacités de tir jusqu’à 4 000 mètres (y compris en roulant à 50 km/h). Il faut toutefois noter la
consommation importante du char LECLERC et ses besoins logistiques (réservoir principal de 1 300 l).
S’ajoute qu’un sol pierreux est abrasif pour les chenilles, particulièrement au cours de longs
déplacements.

• Ainsi, l’engin chenillé s’avère particulièrement utile pour exploiter un avantage tactique, pour attaquer
ou contre-attaquer localement. En outre, ses capacités techniques sont des plus appréciables pour le
contrôle d’un secteur vaste aux sols divers.

4.4.2.5 Intérêts et limites de l’engin roue-canon

Plus économe en carburant, l’engin roues-canon AMX 10 RCR possède d’importantes qualités en tous
terrains, même si celles-ci sont moindres que celles d’un LECLERC. Pour autant, l’AMX 10 RCR est le
meilleur compromis pour les longues distances dans le désert. En effet, sa portée de tir de 2 500 mètres
et ses capacités d’observation complètent une mobilité qui s’exprime particulièrement bien sur pistes et
sols fermes. Il est ainsi principalement apte aux bascules d’effort et aux larges débordements, tout comme
au contrôle de zones étendues.

4.4.2.6 L’indispensable complémentarité avec « l’infanterie, l’ALAT et les appuis »

• Comme dans tout autre milieu, la CB n’agit pas seule dans le désert. Sa complémentarité avec
l’infanterie (rares zones habitées, oasis, sûreté immédiate) et avec l’ALAT (vitesse de déplacement,
surveillance de vastes zones, observation et tir au-delà de 3 000 mètres) rend primordial l’emploi
coordonné de ces fonctions de contact. De la même façon, l’appui de l’artillerie et des drones est des
plus précieuses à la CB, dans le désert comme partout, en particulier pour préparer les débouchés
et pour contribuer à fixer ou cloisonner l’ennemi.

4.4.3 Aérocombat

Les capacités opérationnelles de l’aérocombat décrites dans le manuel d’emploi du groupement


aéromobile/groupement tactique interarmes à dominante aéromobile48 s’appliquent également dans le cadre
d’un engagement en zone désertique. Les paragraphes ci-dessous insistent essentiellement sur les
caractéristiques spécifiques à l’emploi dans ce milieu. Ainsi, les unités d’aérocombat y sont en mesure de
réaliser l’ensemble des missions qui leur sont normalement dévolues en théâtres centre Europe.
S’affranchissant des contraintes liées au terrain, s’adaptant aux spécificités géographiques inhérentes à cet
environnement particulier, les unités d’hélicoptères trouvent en milieu désertique des espaces ouverts
propices à la fois aux déplacements de grandes amplitudes, aux observations et aux tirs à longue distance. Ces
caractéristiques, globalement très favorables, font des unités d’aérocombat des éléments indispensables de
la manœuvre aéroterrestre en milieu désertique.

48 ALAT 30.401, juillet 2012.

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4.4.3.1 Forces de l’aérocombat en zone désertique.

En milieu désertique, les unités d’aérocombat bénéficient d’une totale liberté d’action au bénéfice du chef
interarmes auquel elles assurent notamment l’effet de surprise. Elles couvrent rapidement l’ensemble de
la zone d’action sans être contraintes ni par la planimétrie, ni par le nivellement. L’absence d’obstacle
accroît fortement leur sûreté en facilitant la pratique du vol de combat ainsi que leur capacité
d’observation et de tir, contribuant ainsi fortement à conférer brutalité fugacité et réversibilité à la
manœuvre aéroterrestre. Le chef interarmes tirera tous ces avantages de l’emploi des hélicoptères en
milieu désertique par la mise en œuvre de GAM ou de GTIA regroupant l’ensemble du spectres des
capacités de l’aérocombat combinées ou non par des unités de contact ou d’appui et en leur assurant une
certaine autonomie notamment en termes de renseignement.

4.4.3.2 Contraintes de l’aérocombat en zone désertique.

Le milieu désertique comporte certaines contraintes à l’engagement des hélicoptères de combat qui
pourront généralement être surmontées en favorisant les actions de nuit. Le sable et la poussière soulevés
par des phénomènes météorologiques particuliers peuvent entraver les évolutions, les observations et les
tirs. Ils ne sont pas sans effet sur l’usure prématurée des aéronefs dont l’équipement et l’entretien doivent
être adaptés (filtre anti sable). En outre, les nuages de poussière générés par les atterrissages et
décollages d’hélicoptères ou leur prise de postes d’observation en stationnaire peuvent mettre en jeu leur
propre sécurité. Les fortes amplitudes thermiques alliées à l’encrassement des moteurs peuvent dégrader
les performances des HMA et donc leur capacité d’aérotransport. Néanmoins, pourvu que le niveau de nuit
le permette, l’emploi nocturne des unités d’hélicoptères permet de limiter l’influence de ces contraintes
(l’aérologie et les températures nocturnes en milieu désertique sont généralement favorables à la mise en
œuvre des hélicoptères). Enfin la faiblesse des réseaux routiers, d’infrastructure et de végétation
constituent des contraintes pour le ravitaillement et la sûreté des plots de déploiement des unités
d’aérocombat qui devront faire l’objet de protections particulières et être disposés de manière en prendre
en compte l’autonomie des hélicoptères.

4.4.3.3 Principes d’emploi de l’aérocombat en zone désertique.

Pour garantir l’emploi le plus efficace des unités d’aérocombat dans un espace de manœuvre à leur
dimension, la centralisation du commandement des unités d’aérocombat doit être recherchée. Elle permet
d’assurer les bascules d’effort, la concentration des moyens et la parfaite coordination des effets
interarmes et interarmées des actions. Cependant une décentralisation ponctuelle du commandement
sera recherchée lors des phases d’engagement au profit des unités de mêlée. En milieu désertique, les
difficultés de coordination avec les autres unités de mêlée sont moindres du fait de plus grandes
possibilités d’observation et de transmission. En revanche les grandes élongations exigent la mise en
œuvre de moyens de transmission adaptés notamment par la mise en place de relais terrestres, ou
aériens, ou de liaisons satellitaires.

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4.4.3.4 Une capacité de destruction et d’interception dans la profondeur.

Parmi l’ensemble des missions propres à la fonction contact, la sur mobilité des unités aérocombat permise
par leur capacité à s’affranchir des obstacles tout en pouvant utiliser une grande vitesse de déplacement, allié
à leur large spectre de capacités de renseignement et de feu, offre notamment au chef interarmes une capacité
d’interception, de poursuite, de destruction et d’exploitation dans la profondeur particulièrement adaptée au
combat en milieu désertique. Cette capacité sera valorisée par l’emploi de moyens de renseignement adaptés
de type drones tactiques par exemple. Selon la mission et l’éloignement de l’objectif49, il pourra être
nécessaire de mettre en place un dispositif logistique temporaire de circonstance, soit à partir de FARP, soit à
partir d’unités motorisées ou aérotransportées (ravitaillement à partir d’avions, d’hélicoptères ou de drones
de transport tactique posés sur piste sommairement aménagée).

4.4.3.5 Une réserve d’intervention réactive adaptée à la profondeur de la zone d’opération.

La surmobilité des unités d’aérocombat alliée à leur capacité d’aérotransport importante employées en
autonome ou en combinaison d’unités de mêlée ou d’appui permet au chef interarmes de disposer d’une
réserve de théâtre qui pourra assurer une capacité d’intervention rapide et adaptée à la situation. Un SGAM
de HRA, un SGTIA aérocombat aérotranportant des unités d’infanterie, d’artillerie ou du génie pourra
permettre de renverser le rapport de forces et de remporter ainsi la décision.

4.4.3.6 Une capacité de contrôle de zone adaptée

Déployé sur une base avancée plus ou moins protégée en fonction de la permissivité de l’environnement, un
GTIA à dominante aérocombat pourra contrôler une vaste zone. Renforcé et appuyés d’unités d’infanterie ou
de cavalerie, voire de génie, les unités d’hélicoptères de reconnaissance et d’attaque, appuyées par des
drones tactiques conduiront des reconnaissances longues distances. Une réserve d’intervention sera
constituée par un SGTIA à dominante aérocombat composé de modules HRA et HMA et d’unités de mêlée.

4.4.3.7 Un déploiement logistique adapté à l’emploi de l’aérocombat en zone désertique

Du fait des élongations, et selon la taille de la zone d’opération, l’emploi d’unités d’aérocombat pourra
nécessiter l’adoption d’un dispositif comprenant un réseau maillé de bases avancées distantes de plusieurs
centaines de kilomètres50. Dans ces bases, des unités du volume variant du module (2 ou 3 aéronefs) au
SGTIA A (jusqu’à 8 aéronefs) pourront ravitailler simultanément en carburant et munitions. L’infrastructure
de ces bases restera légère et rustique pour rester adaptée aux nécessités et à la dynamique des opérations
aéroterrestres. Cet aménagement devra permettre l’entretien et les mouvements d’aéronefs de jour comme de
nuit en environnement sablonneux ainsi que leur protection contre les tirs directs. Elles devront pouvoir être
elles même ravitaillées régulièrement par voie terrestre ou aérienne.

49 Les hélicoptères de nouvelle génération sont, selon les conditions et la situation, capables d’effectuer des raids jusqu’à une profondeur de 300 kms
avec un soutien logistique autonomes.
50 Les hélicoptères de nouvelle génération ont une autonomie d’au moins 2h30, ce qui leur permet de parcourir des distances d’au moins 450 kms.

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4.5 Fonction appui

4.5.1 Appui génie

En milieu désertique, les principes d’emploi du génie - intégration, coordination et anticipation - revêtent
une importance accrue, en raison des contraintes climatiques extrêmes, de l’hostilité et de l’immensité des
espaces d’engagement.

Trois impératifs d’emploi doivent être mentionnés :

• Besoin en renseignement terrain-milieu à anticiper dès la phase de conception :


- associer aux reconnaissances les qualifications générales du génie que sont l’appui mobilité et le
contre minage.
- associer, systématiquement les spécialistes EOD et EAU.

• Besoin de s’affranchir des élongations tactiques dans la mise en œuvre des moyens du génie. Les
délais d’intervention d’une unité génie au profit d’une autre sont à prendre en compte
impérativement et doivent être planifiés dès la phase de conception ou anticipés en conduite des
opérations. Il est conseillé, en fonction du terrain, d’articuler les unités génie d’appui direct au
combat au plus près des unités de premier échelon.

• Coordination impérative dans l’emploi des moyens : le commandement doit fixer ses priorités dans
l’emploi des moyens génie entre l’appui direct au combat et l’appui général dédié à la Force.

4.5.1.1 Eléments de reconnaissance pour l’appui à la mobilité

La collecte d’informations précises sur le terrain et le milieu d’engagement est essentielle pour anticiper
et déterminer les délais nécessaires à l’engagement des unités du génie mais aussi pour l’élaboration de
la manœuvre. En conséquence, il conviendra d’engager systématiquement des éléments de
reconnaissance du génie soit au profit de l’interarmes, soit en autonome, afin d’évaluer :
 la nature des sols et les conditions de traficabilité du terrain ou des itinéraires ainsi que des
variantements ou contournements nécessaires ;

 les actions d’appui à la mobilité à planifier et exécuter dans l’ouverture des itinéraires de manœuvre
ou le rétablissement des itinéraires, y compris logistique ;

 les actions de contre-minage, dépollution ou de déminage à engager sur les axes ou points clé du
terrain susceptibles d’être minés, pollués ou de faire l’objet de pose d’engins explosifs improvisés.

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4.5.1.2 Contre-mobilité : capacité à s’opposer à la mobilité d’une force par l’emploi d’un
génie terrestre, voire aéromobile

L’emploi du génie en contre-mobilité dans les zones désertiques se singularise par la rareté des obstacles
naturels à la manœuvre et des points de passage obligés (ponts, routes…) sur lesquels appuyer un
dispositif de contre-mobilité, ce qui impose souvent de mettre en place des lignes ou des zones
d’obstacles très étendues.

Malgré cette contrainte, la mise en place d’obstacles du génie (champs de mines, fossés antichars…)
permet d’accroitre la liberté d’action de la Force, soit en flanc-gardant une action offensive, soit en
canalisant l’ennemi dans le cadre d’une défense statique ou mobile.

Compte tenu de la limitation des moyens génie au regard de l’immensité des espaces, on ne doit valoriser
que le terrain qui s’y prête. La capacité du génie à réaliser des opérations de contre-mobilité en zones
désertique ou semi-désertique ne sera efficace que sur des verrous ou des axes d’approche difficilement
contournables. Hormis en défense ferme et dans le cadre de la réalisation de points d’appui ou
d’interdiction à des zones urbanisées, la pose de mines AC peut se concevoir de manière ponctuelle au
titre de la couverture d’une unité. Dans ce cadre, le recours à un détachement aéromobile de barrage
constitue une solution envisageable.

Au titre de la déception, le leurrage par champ de mines factices peut être une solution efficace et
particulièrement économe en temps et en moyens.

4.5.1.3 Protection des bases et postes avancées

L’absence de masque et de protection naturelles rend toute position défensive particulièrement


vulnérable aux vues et aux coups de l’ennemi. Les travaux de protection au profit d’une force stationnée
sur une base ou un poste conditionnent sa survie en cas d’attaque terrestre ou aérienne.

Au titre de la sauvegarde-protection des base et postes, l’action du génie permet :

• de s’installer provisoirement : si l’état physique du terrain, les moyens génie disponibles et la durée
du stationnement le permettent, les travaux de protection sommaires doivent être engagés au profit
des troupes débarquées. Cet aménagement sommaire peut comprendre des travaux de
terrassements (merlons, emplacements de tir ou de surveillance) pour les véhicules ou engins, des
abris sommaires à aménager par le personnel débarqué, voire des installations d’amélioration des
conditions de vie par la fourniture d’eau et d’électricité.

• de s’installer dans la durée : il s’agit de prévoir une organisation cohérente de l’espace dans les
implantations de la Force. Dans ce cadre, les travaux d’infrastructure doivent être planifiés et
nécessitent alors un travail d’étude collaboratif avec le SID (service d’infrastructure de la défense).
Les travaux d’amélioration de l’infrastructure, (réfection ou la construction de bâtiments, mise en
place de centrales électriques, de stations de production d’eau ou d’épuration, plates-formes de
stockage logistique et de stationnement, etc…) pourront nécessiter des moyens spécifiques du
génie ou le recours à des entreprises locales.

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imple croisement de pistes dans un désert


S aride et caillouteux, Bir Hakeim se caractérise
par une absence totale de couvert et d’obstacles
naturels. Vétéran de la grande Guerre, le général
Koenig ordonne dès le début à ses hommes de
creuser au pic et à la barre à mine des abris dans le
sol rocheux.

Toutes les armes de bord des engins sont intégrées


aux défenses. La position est flanquée de vastes
zones minées de densité variables, chargées de
ralentir puis d’arrêter l’ennemi pris sous le feu des
armes à tirs direct et indirect.

4.5.1.4 Appui à l’engagement par des vecteurs aériens : aérodromes et pistes de


circonstance

La relative dureté des sols en milieu désertique ou semi désertique est favorable à la création, par
certaines unités du génie, de plate-forme pour hélicoptères ou aéronefs militaires. Le 17e RGP et le 25e RGA
sont ainsi capables de réaliser des zones de poser sommaires pour tout type d’aéronef (ATT, ATA,
hélicoptères). Les autres formations du génie peuvent, quant à elles, aménager des plots hélicoptères de
circonstance.
La capacité à identifier et aménager rapidement des pistes d’atterrissage de circonstance en plein désert
constitue un atout décisif. Elle permet la mise à terre de troupes loin dans la profondeur et au plus près de
l’objectif. Elle facilite également le ravitaillement logistique immédiat des unités.
Le 25e RGA possède un catalogue de toutes les zones de poser de circonstance reconnues à ce jour. Cet
outil facilite la planification et permet de maintenir l’ennemi dans l’incertitude de nos intentions. Il permet
aussi de projeter un détachement dans la profondeur sur court préavis, et de le soutenir dans la durée.

• Rôles particuliers du 25e RGA et du 17e RGP.

Le 25e RGA possède la capacité de dimensionner, reconnaitre, expertiser et réparer tous les types de zone
de poser (revêtues et non revêtues), pour tous les types d’avions (ATA, ATT, ATS, avions d’armes et avions
de gamme commerciale). Son matériel est aérotransportable.
Le 17e RGP a la capacité de reconnaître et réparer les zones de poser non revêtues. Dans le cadre d’une OAP
sur piste revêtue, il peut aussi autoriser le poser de quelques ATT et ATA, après une analyse de la piste par
le 25e RGA (analyse préalable ou à distance). Le matériel du 17e RGP est aérolargable ou aérotransportable.
Seul le 25e RGA a la capacité d’effectuer des réparations structurelles d’une piste revêtue.

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ors de l’opération Limousin au Tchad en 1972, 21 aérodromes et pistes d’aviation de circonstance


L ont été aménagées sur le territoire tchadien, ce qui a conféré une grande liberté d’action aux
forces françaises en soutien des Tchadiens.

Lors des opérations de l’EUFOR au Tchad et en RCA (2008 - 2010), les principes d’organisation et de
déploiement des troupes au sol ont été en partie réfléchis en fonction de la capacité du 25e RGA à
adapter et entretenir les terrains d’aviation de circonstance du théâtre. La Force a ainsi pu
s’affranchir des contraintes climatiques51, et s’assurer du contrôle tactique et logistique de sa zone
de responsabilité dans la durée.

4.5.1.5 Appui au déploiement

Par définition, l’eau est rare dans le désert. Aussi, la fourniture d’eau de consommation humaine (EDCH) est-
elle une problématique tant logistique que d’appui au déploiement. Les moyens de traitement de l’eau du
génie, type unités mobiles de traitement de l’eau, ne pourront donc être mis en œuvre qu’en zone semi-
désertique, au cours de la saison humide, ou encore en vue de traiter l’eau des puits. Ces moyens ont pour but
de fournir de l’EDCH.

Conformément à la DIA 4.3.2 (« gestion de l’eau en opération extérieure »), la gestion de l’eau comporte des
risques qui devront être évalués par le commandement en raison de leur impact tant sur le plan opérationnel
qu’environnemental. Les sources et centres de production devront être protégés, en lien avec la population
locale, dans le cadre de l’approche globale. Pour les stationnements plus longs, des forages seront
envisageables par l’intermédiaire du SID et sur avis technique d’un hydrogéologue. Le traitement des effluents
doit être pris en compte dès le déploiement, en positionnant les installations polluantes en aval hydrologique
des captages. Un coordinateur eau de théâtre est chargé des liens avec le SID, qui apporte son expertise en
matière de gestion du cycle de l’eau et de protection de l’environnement, et avec le SSA qui contrôle la qualité
de l’EDCH.

Le génie fournit également les moyens de production d’énergie nécessaires au déploiement de la force, hors
systèmes d’arme spécifiques qui, eux, sont autonomes. Ainsi, il dispose de moyens de production d’électricité
de 3 à 160 kW pour appuyer la base avancée temporaire, et jusqu’à 400 kW pour les stationnements prolongés.
Il convient de bien prendre en compte la contrainte logistique de ces moyens de production, consommateurs
en carburant de façon quasi-continue.

4.5.2 Appuis feux

Le plein emploi des appuis feux interarmées (sol-sol, CAS52, CCA53 et AFN54) contribue à la réussite de la
manœuvre des forces terrestres. Leur efficacité repose sur la génération d’une chaîne de commandement et
de contrôle cohérente et intégrée. Au niveau du GTIA, la présence d’un DLOC renforcé de radars de surveillance
du champ de bataille permet cette cohérence et est la garantie de l’intégration des feux à la manœuvre
interarmes. Ce DLOC renforcé offre des capacités de détection tout temps, au contact, dans la profondeur et
tout azimut. Il permet de mettre en œuvre l’ensemble des effets nécessaires au succès de la mission
interarmes.

51 Contraintes réduisant la mobilité terrestre lors de la saison des pluies.


52 CAS: Close Air Support.
53 CCA: Close Combat Attack.
54 AFN : Appui Feu naval.

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4.5.2.1 Emploi des moyens

• En milieu désertique, les feux doivent être en mesure d’appuyer les actions de forces terrestres
dispersées sur des espaces très étendus, menant un combat fluide au sol ou à dominante
aéromobile.
• Des boucles courtes avec les unités de renseignements sont indispensables pour tirer parti de tous
les renseignements d’objectif disponibles y compris dans la profondeur.
• Les 38 km de portée du CAESAR, sa grande mobilité, sa rapidité de mise en batterie permettent des
appuis efficaces et rapides. Les caractéristiques de portée (supérieure à 70 km) et de précision du
LRU, ainsi que sa capacité à agir au contact comme en profondeur sur des cibles protégées
constituent des atouts importants en milieu désertique.
• De même, s’ils sont disponibles, les appuis aériens CAS ou hélicoptères répondent à tout ou partie
des exigences de souplesse, de brutalité et de surprise qui caractérisent les actions en milieu
désertique et doivent être systématiquement pris en compte dans la réflexion tactique des chefs de
la chaine appui feu.
• Le mortier de 120 mm est pénalisé par son allonge dans le désert, mais son faible poids logistique
lui permet de suivre facilement les unités du GTIA et d’accompagner des actions à dominante
aéromobile ou aéroportée.
• La capacité à basculer rapidement l’effort de feu d’une zone à une autre est primordiale, l’ennemi
pouvant arriver de toutes les directions. Il faut privilégier pour cela un commandement centralisé
des appuis feux.

4.5.2.2 Renseignement et acquisition d’objectifs

• Les conditions d’observation et d’acquisition sont généralement excellentes dans le désert en raison
de la bonne visibilité (luminosité du soleil et clarté du temps) sur des espaces de grande profondeur,
libres d’obstacles naturels ou artificiels. Cependant certains phénomènes (tempêtes de sable,
vagues de chaleur) peuvent dégrader ces conditions et doivent être pris en compte.
• Les radars d’acquisition, de tir et de contrebatterie peuvent être utilisés à portée maximale et doivent
être placés et orientés de manière à tirer profit de leur portée.
• L’absence d’éléments de planimétrie marquant rend la localisation des cibles plus complexe. Mais
l’utilisation quasi systématique des systèmes de navigation inertielle et GPS, le recours aux
systèmes de localisation utilisant des télémètres lasers et des gyroscopes permettent de garantir
une précision de localisation autorisant le tir d’emblée. La précision des systèmes drones (SDTI et
DRAC) permet le déclenchement de tir d’artillerie. En vues rasantes l’utilisation de télémètres lasers
est délicate et toutes les mesures doivent être encore plus contrôlées.
• La menace pouvant apparaître tout azimut les zones de déploiements des CAESAR et surtout des
DLOC doivent en tenir compte. Les DLOC doivent être placés dans la profondeur et espacés autant
que possible afin de ne pas être aveuglés et neutralisés simultanément. L’étalement du dispositif
d’observation et de détection en front et en profondeur le rendra plus efficace.

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4.5.2.3 Mise en œuvre des appuis feux

Le manque de camouflage dans le désert et la facilité pour un ennemi symétrique à détecter nos positions
avec des systèmes drones ou radars peut nous obliger à rechercher la dispersion maximale de nos unités
et à utiliser toutes les contrepentes et les oueds que le terrain offre. Mais en revanche cette dispersion
sera inefficace s’il n’est pas possible de concentrer les feux le moment venu, ce qu’ATLAS rend possible.
Les longs champs d’observation combinés à des systèmes de commandement, de détection et de
communication modernes permettent de disperser les lanceurs tout en étant capable de rapidement
concentrer les trajectoires sur des cibles successives et parfois très éloignées les unes des autres.

• Les effets des feux conservent toute leur efficacité sur le type de terrain rencontré en zone
désertique. La faible densité de population permet de réduire le risque de dommages collatéraux
envers la population civile.

• Les obus BONUS F2 restent efficaces dans le désert et permettent d’avoir un effet de destruction
sur un ennemi blindé faiblement mobile.

• La végétation n’offrant pas de masque à la progression des unités, lors des phases offensives des
tirs d’aveuglement doivent être proposés pour masquer cette progression.

• Les changements de température brusques entre le jour et la nuit peuvent nuire à la précision des
tirs. Ils nécessitent plus encore de suivre la température des poudres et les conditions
météorologiques susceptibles d’influencer les trajectoires.

• La portée et le choix des effets des lanceurs de 155 mm leurs confèrent un avantage sur les mortiers
de 120 mm.

4.5.2.4 Manœuvre des matériels

• Dans le cadre d’un combat symétrique ou dissymétrique, l’artillerie doit pouvoir suivre le rythme
rapide de la manœuvre des unités motorisées et blindées. Sa mobilité dépend étroitement du
terrain et cette contrainte conditionne dans une large mesure la manœuvre interarmes.

• Si la manœuvre amie est rapide et atteint de grandes élongations, les batteries CAESAR ne se
mettront pas en batterie et se déplaceront en arrière des GTIA jusqu’au moment où un appui feux
sera nécessaire.

• Les déplacements sont généralement plus longs (progression en terrain sablonneux ou rocailleux).
Si la discrétion des mouvements est vitale pour la sauvegarde de l’unité, l’étude des itinéraires
devra prendre en compte les possibilités de défilement aux vues de l’ennemi. La vitesse devra être
adaptée afin de ne pas générer d’imposants nuages de poussière.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

4.5.2.5 Contraintes logistiques

• Le ravitaillement en munitions de 155 mm est difficile du fait des distances accrues. L’autonomie
logistique (155 mm, eau, vivre, essence) maximale des unités doit être recherchée.

• Si les opérations ont lieu sur de très grands espaces il est vital de choisir les zones ou doit avoir lieu
l’effort de l’artillerie, afin de planifier la manœuvre logistique des munitions de 155 mm.

4.5.2.6 Sauvegarde des unités

Les batteries d’artillerie constituent une cible privilégiée pour un ennemi blindé ou aérien dans le désert.
Du fait du manque de masques naturel, des moyens de camouflage appropriés doivent être utilisés et le
détachement doit rechercher des positions défilées pour protéger les batteries de l’observation et des feux
ennemis.

4.5.3 Défense sol-air

4.5.3.1 Mesures de protections aériennes actives

Le concept d’emploi de la défense aérienne en zone désertique diffère très peu de celui du cadre général.
En effet, les principales contraintes de ce milieu particulier, peuvent impacter techniquement l’emploi de
certains matériels, mais ne restreignent en rien la doctrine générale de la défense sol-air, qui prend
systématiquement en compte l’aspect multidirectionnel de la menace.

4.5.3.2 Face à un adversaire symétrique ou dissymétrique

• Dans cette hypothèse, l’adversaire potentiel dispose de moyens aériens conventionnels.

• Les moyens de défense sol-air à mettre en œuvre en milieu désertique, s’inscriront dans une défense
aérienne globale, avec une chaîne d’engagement et de contrôle des feux centralisée. Cependant, compte
tenu de la nature des sols, il sera préférable de déployer des moyens adaptés à la manœuvre en terrain
difficile et apte à s’affranchir d’importantes élongations, liées à une manœuvre terrestre très mobile.
Ainsi, la multiplication de radars tactiques de type NC1 30 ou 40 de l’armée de Terre, ou de GIRAFE de
l’armée de l’air combinée avec des AWACS permettra un maillage plus souple d’emploi.

• L’emploi complémentaire des systèmes d’armes sol-air moyenne portée (SAMP) et très courte-portée
(SATCP) sera privilégié. Le SAMP assurera la couverture sol-air dans le cadre de la défense de zone au-
dessus des forces terrestres. Le SATCP remplira les missions de défenses de sites particuliers, ou de
défense d’unité (fixe ou en mouvement), en complémentarité ou prolongement du SAMP.

• Peu détectables, les pièces SATCP sont particulièrement adaptées au milieu désertique. Pour leur
permettre de durer lorsqu’elles sont déployées sur position (sur des points hauts et dégagés), il
conviendra de les doter de filet anti-chaleur afin de préserver l’équipage et de protéger les munitions
à poste des très fortes températures.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

4.5.3.3 Face à un ennemi asymétrique

• Dans ce cas précis, la menace aérienne est difficilement identifiable, car des groupes d’insurgés
disposent très rarement d’aéronef de combat. Cependant, cette menace ne peut être négligée, car
elle peut se révéler dans l’emploi détourné de petits appareils civils (petits avions privés,
hélicoptères civils, ballons, ULM…). De tels appareils ne pourront disposer que de capacités de vol
très réduites, d’un armement de bord rudimentaire ou artisanal et de facultés d’observation et de
communications réduites (radio, téléphonie satellitaire, jumelles…).

• Evoluant à très basse altitude et à des vitesses faibles, cette menace sera difficilement détectable
par des radars d’infrastructure ou des radars moyenne portée de l’armée de l’air situés en zone
arrière. En revanche les AWACS ou les radars tactiques type NC1 de l’armée de Terre ou GIRAFE de
l’armée de l’air pourront détecter cette menace et alerter les unités au sol.

• L’interception des objectifs relèvera davantage de moyen LATTA (armement de bord) mais des
moyens sol-air MANPADS pourront éventuellement être adaptés à l’unité.

4.5.4 Appui feu air-sol

Compte tenu de la prégnance du soutien par les moyens de la 3e dimension, les GTIA et SGTIA au contact
doivent systématiquement intégrer des contrôleurs aériens avancés (CAA ou FAC) dûment qualifiés.

4.6 Fonction actions sur les perceptions et l’environnement opérationnel

L’assistance militaire opérationnelle (AMO) est traitée plus haut en tant que procédé du mode tactique de
l’assistance.

4.6.1 La coopération civilo-militaire

Des actions de type civilo-militaire, par exemple de fourniture d’eau ou d’aide médicale aux populations,
peuvent être menées de manière ciblée pour faire mieux accepter la présence de la Force par certaines
populations. Dans un milieu de pénurie, de telles actions doivent viser à la plus grande visibilité possible,
mais ne peuvent être menées à bien sans un minimum de stabilité.

4.6.2 Les opérations militaires d’influence

Compte tenu de la culture orale dominante, facteur de grande propagation de l‘information et des
dissensions traditionnelles entre tribus nomades, la Force dispose généralement du terrain favorable pour
mener des opérations d’influence particulièrement efficaces.

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4.6.3 La communication opérationnelle

De par la dilution humaine qui le caractérise, le milieu désertique s’avère peu favorable au suivi de
l’information et à l’existence de véritables médias locaux.
Pour davantage de détail sur les APEO, se reporter à la Doctrine des actions sur les perceptions et
l’environnement opérationnel des forces terrestres au niveau tactique (EMP 23.231).

4.7 Fonction appui à l’engagement


4.7.1 Appui mouvement :
4.7.1.1 Emploi des unités d’appui mouvement

• En zone désertique, compte tenu des élongations très importantes et de l’état des itinéraires, les
unités de circulation routière peuvent être utilisées de manière privilégiée pour renseigner sur la
traficabilité des axes et pour appuyer les mouvements des unités d’appui à la mobilité des blindés
engagées au profit des GTIA.

• Compte tenu de l’importance des contraintes logistiques et des différents modes d’actions
envisagés, ces unités seraient plus particulièrement employées dans des missions d’escortes de
convois et de sécurisation des axes logistiques. Elles contribuent également à la sûreté de
dispositifs ou de plots logistiques, en réalisant notamment des missions de surveillance sur les
itinéraires et dans les intervalles ou zones lacunaires.

• En l’absence de repère et de signalisation, les unités de circulation peuvent également appuyer les
mouvements de traversées de dispositifs, notamment dans le cadre de contre-attaques ou de recueil
réalisés par les GTIA, et appuyer les mouvements de leur échelon logistique.

• Enfin, elles sont en mesure d’intervenir pour signaler ou interdire l’accès des axes logistiques ou
zones contaminées par des attaques NRBC, ou faire prendre des mesures de protection à l’entrée de
ces zones ou itinéraires.

4.7.1.2 Capacités du peloton de circulation routières.

• L’articulation des pelotons de circulation routière (PCR) en 4 patrouilles de 2 VAB et les moyens
radios dont ils disposent leur confèrent souplesse, réactivité et capacités de coordination. Un PCR
est en principe adapté à un GTIA ou un SGTIA.

• Le VAB (et son successeur) équipant ces unités leur apporte la capacité de feux et la protection
indispensables à la réalisation de missions d’escorte. Selon le niveau de menace, le PCR peut
escorter un convoi de 10 à 15 véhicules de transport.

• La capacité d’emport des VAB leur permet notamment, au sein d’un convoi, de réaliser le transport
d’un équipage dont le véhicule est détruit.

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4.7.1.3 Missions du peloton de circulation routière (PCR)

Le peloton de circulation routière est la plus petite unité d’emploi. Il peut se voir confier les missions
suivantes :

- Appuyer les mouvements des opérations d’appui à la mobilité des blindés ;

- escorter un convoi ou des éléments logistiques ;

- participer à la sécurisation des itinéraires logistiques ;

- renseigner sur les axes logistiques ;

- appuyer les mouvements de prise de déploiement opérationnel, les débouchés et les recueils
des GTIA ;

- interdire un itinéraire ou une zone polluée ou contaminée, afin d’éviter que nos forces ou la
population ne s’y engagent.

4.7.2 Appui à la mobilité des blindés

4.7.2.1 Emploi des unités d’appui à la mobilité des blindés

• Dans un milieu comportant de vastes zones d’engagement et des élongations très importantes, avec
des modes d’actions basés sur le mouvement, les unités d’appui à la mobilité des blindés sont
particulièrement adaptées pour acheminer des unités blindées sur de grandes distances, à grande
vitesse, tout en préservant les potentiels des équipements et des équipages ainsi que l’autonomie
logistique en carburant.

• Elles peuvent être employées pour les déploiements initiaux, les redéploiements, ainsi que pour les
raids dans la profondeur ou toute opération de bascule de moyens pour obtenir un rapport de force
localement favorable et un effet de surprise.

• Compte tenu des caractéristiques de ces unités, elles doivent utiliser des axes routiers adaptés et
bénéficier d’appui aux mouvements ainsi que de protection.

4.7.2.2 Capacité des unités d’appui à la mobilité des blindés :

• Un escadron de transport de blindés, suivant le type de porte-chars dont il est doté, a la capacité
d’enlèvement instantané d’un GTIA dont l’échelon blindé serait constitué d’une quarantaine
d’engins blindés sur 500 kilomètres en 24 heures.

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• Un peloton de transport de blindés (PTB), suivant le type de porte-chars dont il est doté, a la capacité
d’enlèvement instantané d’un SGTIA ou d’une quinzaine d’engins blindés sur 500 kilomètres en
24 heures.

• Compte tenu du volume important des unités d’appui à la mobilité des blindés sur les itinéraires, il
indispensable lors des phases d’appui aux GTIA, d’appuyer leurs mouvements. Un peloton de
circulation routière appuie jusqu’à 2 PTB (hors escorte).

4.7.3 NRBC : une menace aux effets accrus en milieu désertique dont la prise en compte exerce
des contraintes majeures sur la Force

4.7.3.1 Les menaces et risques55

• Le désert présente selon la configuration du terrain (piste, défilé) des points de passage obligés et
impose aussi la création de points isolés (ravitaillement, maintenance) en raison des élongations
que la manœuvre génère. Il concentre pour l’adversaire un certain nombre de cibles privilégiées et
faciles à identifier. L’emploi d’ADM est d’autant plus favorisé que les effets collatéraux sur la
population et les agglomérations clairsemées sont réduits. La possibilité de cloisonner le terrain en
usant de l’arme chimique est donc élevée et la contamination des axes logistiques peut obérer
durablement la liberté d’action du commandant de la Force.

• La concentration des ressources et l’exploitation des matières premières (puits de pétrole,


gisements et installations chimiques) constituent des cibles à haute valeur ajoutée pour l’adversaire.
Leur destruction représente un risque élevé pour la Force ou l’environnement. Ce risque s’applique
au stockage, à la production, au transport et à la distribution de matières dangereuses.

• L’instabilité créée par une période de conflit augmente l’occurrence d’un incident voire d’un accident
sur ces infrastructures. Ainsi, les effets des armes conventionnelles sur les installations existantes,
visées intentionnellement ou non, peuvent avoir des effets tactiques identiques à l’emploi d’armes
chimiques.

En 2003, l’entrée en Irak des forces de la coalition fut perturbée par le sabotage de pipelines qui a
entraîné d’épaisses fumées noires et gêné le vol des aéronefs.

• La volonté affirmée de certains groupes non étatiques de disposer d’ADM ou de matière NRBC,
représente une menace sérieuse. Une action terroriste (contamination des points d’eau, destruction
de sites industriels) générant un incident NRBC aurait des conséquences lourdes pour la Force :
gestion du personnel contaminé (blessé ou indemne), incrémentation du niveau de protection et
restriction de mouvement, affaiblissement de la capacité opérationnelle de la force.

55 Selon la PIA 3.8(A) NRBC, le risque NRBC représente un potentiel de danger matériel ou immatériel dont le déclenchement ou la propagation peuvent
être non-intentionnels. La menace en revanche, correspond à l’acquisition, à la possession, à la possibilité d’emploi et la volonté d’utilisation d’armes
ou de matières NRBC de façon malveillante ou à des fins d’agression par un adversaire.

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• La météorologie particulière à cet environnement crée parfois des vents de sable avec formation de
nuages de poussières qui, combinés à un incident NRBC quel qu’il soit, augmentent
considérablement les risques de propagation de la contamination.

• Enfin, parmi la faune désertique, il y a des animaux redoutables capables de secréter naturellement
des toxines d’une extrême dangerosité : scorpions, serpents, araignées.

4.7.3.2 Des contraintes fortes pour la Force sous ambiance NRBC

• L’utilisation en milieu désertique d’ADM dans le cadre d’un conflit symétrique n’appelle aucune
remarque particulière par rapport à leur emploi sur d’autres terrains : les principes généraux liés à
la protection de la Force, les missions de la défense NRBC spécialisée, la mise en œuvre de contre-
mesures, les savoir-faire et les réactions TTA face à un incident NRBC restent identiques. Cependant,
les contraintes que le milieu exerce sur la Force sont très importantes lors d’un incident NRBC.

• Le port permanent des équipements de protection individuelle altère singulièrement la capacité


opérationnelle du personnel y compris celle du personnel spécialisé au cours des opérations de
décontamination notamment. Cette situation est d’autant plus accentuée par la chaleur du désert
qui accroît considérablement les pertes sudorales et in fine la déshydratation. En milieu désertique
chaud, les déplacements de nuit doivent donc être privilégiés pour le combat débarqué sous menace
NRBC.

• La grande variabilité des conditions météorologiques (vents, amplitude thermique, hygrométrie)


rend difficile la prévisibilité de l’efficacité et de la persistance d’une attaque NRBC. Les produits et
agents hors matières radioactives se dégradent plus rapidement dans les déserts chauds où ils
subissent plus l’influence des éléments (durée de vie moindre des bactéries et virus, effet du
rayonnement UV) contrairement aux milieux confinés et fermés.

4.8 Fonction logistique


La logistique dans le milieu désertique conditionne largement la réussite de la mission assignée et
l’efficacité tactique d’une unité. Il s’agit pour le logisticien de concilier :

 la nécessaire mobilité et fluidité de la manœuvre interarmes, de ses mouvements et de ses


déploiements successifs ;

 la permanence du soutien (en particulier le soutien médical) et sa fiabilité dans l’espace et dans le
temps ;
 l’absence d’infrastructures à caractère logistique  (lignes de communication rares, zones de
déploiement austères) ;
 l’équilibre subtil entre un déploiement logistique incontournable (niveau de stocks à maintenir,
déploiement de structures médicales) au sein de groupements de soutien (GS) et une mobilité réactive
(structures de circonstance, déploiement de plots,…) en fonction des actions conduites par la Force.

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4.8.1 Une planification rigoureuse tant en génération de force que lors des phases de
planification

Afin de dimensionner au mieux le soutien, la logistique, dans cet environnement spécifique, répond à une
planification rigoureuse.

Plusieurs critères guident la réflexion du logisticien.

• L’anticipation.

En raison des délais nécessaires à toute action logistique, le logisticien doit disposer d’un maximum de
temps. Il ne le trouvera qu’en étant associé étroitement au travail collaboratif des différentes cellules de
planification.

• La disponibilité.

Il s’agit de déterminer la disponibilité du personnel logistique, des matériels spécifiques (véhicules de


transport, moyens aériens) et de la ressource (niveau des stocks).

• L’adéquation.

Le soutien conçu doit être cohérent avec la manœuvre et ses besoins, être compatible avec les moyens et
les ressources disponibles et répondre au principe de stricte suffisance pour éviter le gaspillage et
l’alourdissement irraisonné d’un échelon logistique.

• Les élongations.

Elles doivent être mesurées en distance et surtout en temps. La durée des boucles a un impact
déterminant sur l’organisation du soutien (effet logistique recherché/nombre de vecteurs disponibles).

• La stabilité.

Un rythme de manœuvre trop élevé n’offre pas la stabilité requise par les différentes zones fonctionnelles
et diminue d’autant le rendement des moyens logistiques.

• L’efficience du soutien.

Cette efficience se retrouve dans :

 une organisation nécessairement modulaire et réversible. Les moyens humains et matériels seront
déployés à titre permanent ou temporaires ;

 une optimisation de la gestion des ressources et des moyens. Elle se traduit concrètement par un
niveau d’autonomie initiale adapté à la mission de chaque unité et à ses conditions particulières
d’engagement.

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4.8.2 Une logistique « au bon moment et au bon endroit ».

Le nécessaire équilibre entre la préservation de la mobilité des unités tactiques et la permanence du


soutien s’inscrit dans la notion de flux « tirés ».
Confrontée à la spécificité du milieu désertique, à la rareté des lignes de communication, aux difficultés de
stockage de la ressource (conditions de conservation, constitution des stocks,…), le système
d’approvisionnement par flux tirés est parfaitement adapté à ce cas de figure.
Dans ce système d’approvisionnement, le déclenchement d’une opération de ravitaillement ou de « ré-
équipement » repose sur l’expression du besoin par le destinataire. La demande doit être faite de façon à
ce que la ressource soit livrée exactement au moment et au lieu où elle est nécessaire. Le demandeur doit
donc intégrer dans son calcul :

- le délai nécessaire au traitement de la demande et à la livraison ;


- la consommation au niveau de son unité de la dite ressource pendant ce délai ;
- le niveau à détenir pour l’exécution de la phase à venir de la manœuvre ;
- sa capacité d’emport ou de stockage de la ressource considérée.

L’objectif du concept de flux tirés est de faire en sorte d’éviter le déficit aussi bien que l’excédent pour
toutes classes de ressources ou pour tout équipement. Il permet de garantir la mobilité de la Force en
optimisant ses capacités et le système logistique déployé.
La pertinence de ce concept repose, par ailleurs, sur le déploiement des systèmes d’information
logistiques. Ces derniers conditionneront l’efficacité de l’ensemble de la chaîne logistique. Liées à l’info
valorisation, leurs fonctions de traitement, recouvrant actions de maintenance (diagnostic, voire
réparation), de contrôle et d’approvisionnement (comptabilité, saisie de données,…), et de soutien
médical (téléconsultation) se développent fortement. Ces fonctions de traitement contribuent à réduire le
volume des tâches à accomplir aux différents échelons déployés et donc à réduire le volume de ressource
humaine et matérielle à déployer.

4.8.3 Une liberté de mouvement sur les itinéraires de ravitaillement et les lignes de
communication à garantir.

4.8.3.1 Le convoi logistique

• Les caractéristiques du milieu désertique, cumulent les contraintes des zones lacunaires (fortes
élongations, absence de forces déployées en permanence et y assurant la sûreté) et celles d’un
milieu extrême (grands écarts thermiques entre le jour et la nuit), très éreintant pour les équipages
et usant pour les véhicules.
• Le convoi logistique, véritable cordon ombilical, doit bénéficier de l’ensemble des appuis et soutien
nécessaires à l’exécution du mouvement compte tenu de sa vulnérabilité.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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• Doté en propre de moyens de géo localisation, de transmissions à moyennes et longues portées, il


assure son propre soutien logistique (forte autonomie en munitions, eau et vivres, soutien santé et
maintenance) augmentant sa densité et réduisant ses capacités de transport. Le convoi doit
également disposer de véhicules de réserve de chaque type afin d’être en mesure de poursuivre la
mission avec la totalité de la ressource en cas de panne.
• Le déploiement d’un poste de soutien de convoi (PSC), à partir d’un groupement de soutien, peut être
envisagé afin de réduire des élongations par trop importantes.

4.8.3.2 La logistique « tridimensionnelle56 »

• L’utilisation en logistique de la troisième dimension s’avère indispensable tant pour les opérations
d’acheminement, de ravitaillement que pour celles de soutien médical. Le soutien par voie aérienne
(aéroportage et largage) permet la livraison de ressources aux unités déployées ou en progression
avec un bon niveau de fiabilité (précision d’atterrissage, état de la ressource,…).
• Dépendant du réseau existant de pistes de circonstances, l’aéroportage permet de livrer du fret et du
matériel loin du groupement de soutien.
• Ce ravitaillement par air doit être étudié et planifié en amont en fonction des ZMT possibles. Une
ressource conditionnée et prête à être livrée doit être constituée en cas d’urgence. Dans le cadre des
évacuations sanitaires, l’utilisation de l’hélicoptère est à privilégier afin de répondre aux critères du
soutien médical en opérations définis par le MED 3.00157.

Durant l’opération « DAGUET», sur les 39 hélicoptères de transport de type Puma, 14 furent réservés
de façon permanente au soutien médical.

4.8.3.3 Les déploiements logistiques

• Des déploiements permanents

La constitution et le déploiement des groupements de soutien sont étroitement liés à la manœuvre et aux
élongations. L’échelonnement du soutien sur un théâtre « désertique » comprendra au minimum et dans
tous les cas, un niveau logistique théâtre au GSIAT et un niveau logistique à chaque GTIA ou élément
organique engagé.

Dans un souci de rationalisation de l’espace terrestre, les éléments de soutien peuvent être déployés au
sein d’une base avancée temporaire. Cependant, il est impératif dans ce cas de figure de prendre en
compte les délais incompressibles de mise en place et surtout de redéploiement (structures hospitalières,
structures de maintenance, structures de stockage).

56 Terme utilisé par les américains lors de l’opération « Iraqi Freedom » et désignant l’emploi de la troisième dimension.
57 Les différents délais de prise en charge d’un blessé sont : Les « 10 minutes vitales » dans le cadre du sauvetage au combat, les « 30 minutes »
nécessaires à la médicalisation du blessé, « l’heure d’évacuation médicalisée » (la «golden hour ») durant laquelle le blessé est évacué et, enfin, les
« 2 heures chirurgicales » avant lesquelles le blessé doit avoir été transféré au sein d’une unité médico-chirurgicale opérationnelle.

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• Des déploiements temporaires

La mobilité des unités engagées peut conduire à déployer des structures logistiques temporaires afin de
pallier à des élongations trop importantes ou constituer des stocks « tampon » sur roues (munitions,
carburant, eau,…). De plus, dans le cadre d’une action autonome ou décentralisée, un SGL peut-être
adapté à un GTIA, ce qui lui permet d’accroitre son autonomie logistique de façon temporaire pour la durée
de son action.

Le déploiement de plots logistiques de circonstance (FARP,…) constitue une solution viable dans le cadre
d’opérations de soutien (recomplètement en carburant, munitions,…). Toutefois, elle doit être mesurée à
l’aune du dispositif de sûreté nécessaire à son exploitation.

4.8.4 Une «surconsommation» qui implique une augmentation des capacités logistiques de niveau 1

Les contraintes techniques (surconsommation en carburant des véhicules, dispositifs de climatisation,…),


climatiques (surconsommation en eau de boisson) et géographiques (usure prématurée des matériels)
contraignent les opérations de soutien dans le milieu désertique.
En conséquence, jusqu’au plus petit échelon tactique, il importe de prendre en compte la nécessaire
« augmentation» de l’autonomie logistique de l’unité afin de pallier tout retard ou difficulté dans les
opérations de ravitaillement (en général augmentation d’un jour de vivres au niveau TC1 et TC2).
D’un point de vue matériel, les véhicules de transport doivent être équipés de bras hydraulique permettant
de réaliser des opérations de manutention de faible ampleur (munitions d’artillerie).

Enfin, les moyens de production d’électricité à partir de l’énergie solaire peuvent représenter un appoint
intéressant afin de réduire la consommation en carburant.

4.8.5 Problématique de l’eau

« L’eau est une ressource comptée, parfois rare en opération extérieure, qui conditionne en partie
l’aptitude opérationnelle des forces projetées, dont l’approvisionnement constitue une préoccupation
constante58 ». Cet état de fait est encore plus marqué dans le désert. La gestion de cette ressource doit
répondre à un haut niveau d’exigence de qualité et de disponibilité.

Vitale pour le combattant, la manœuvre de l’eau doit garantir un niveau d’approvisionnement suffisant
sans toutefois préempter cette ressource au détriment des populations locales. De plus, le poids
logistique important de l’EDCH non conditionnée pour une force engagée en milieu désertique impose de
réviser les standards quantitatifs communément admis. Enfin, la nécessaire mobilité de la BAT compromet
le concept de stock tampon tel que mis en œuvre hors zone désertique. Il est en revanche possible
d’envisager un soutien basé sur une permanence des flux logistiques (flux tendu) et d’assurer plusieurs
jours de stock d’avance.

58 PIA 4.3.2 relative à la gestion de l’eau en OPEX.

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4.8.5.1 La décontamination NBC

La défense NRBC spécialisée dans ses missions de décontamination du personnel et du matériel sera un
acteur et un consommateur dimensionnant pour la manœuvre logistique.

Type de décontamination Durée Consommation d’eau

30 personnes protégées et entraînées


1 heure 1 200 litres
aux procédures

Véhicule léger 15 à 25 minutes 300 à 320 litres


Poids lourd 20 à 30 minutes 500 à 550 litres

Char lourd 40 à 60 minutes 800 à 850 litres

Ordres de grandeur décontamination/temps/consommation

Le non-respect des normes de qualité de l’eau peut entraîner d’importantes conséquences sanitaires et
environnementales. Dans la mesure du possible, l’eau utilisée pour la décontamination NRBC approfondie
du personnel militaire français doit être une EDCH (eau destinée à la consommation humaine).
Cependant, dans des situations d’urgence opérationnelle justifiée, une analyse de risque effectuée par
l’unité de défense NRBC spécialisée ainsi que la possibilité offerte par les équipements d’injecter du
chlore dans l’eau permettent l’utilisation d’une eau non qualifiée comme EDCH, sous la responsabilité du
chef de l’unité de défense NRBC.
On peut considérer comme acceptable d’entretenir un stock de 70 m3 d’EDCH destinée à la
décontamination de 300 personnels et d’une centaine de véhicules dont 40 blindés.

La non-prise en compte ou la gestion non maîtrisée de l’étape de traitement et de rejet des effluents ainsi
que l’absence de politique de protection de l’environnement peuvent provoquer un risque de pollution
accidentelle des captages. À ce titre, une attention particulière doit être apportée au positionnement des
chaînes de décontamination NRBC (proximité de puits ou d’oasis), dont le rejet des effluents, lorsqu’il
n’est pas maîtrisé, peut provoquer une contamination de la ressource.

4.8.5.2 EDCH59 nécessaire aux modules santé :

Les besoins en EDCH liés au déploiement de l’AC sont estimés à hauteur de 1 à 1,5 m3/jour.

59 EDCH : Eau Destinée à la Consommation Humaine.

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4.8.5.3 EDCH nécessaire à l’hygiène :

Considérant que la BLIAT serait implantée à proximité de lieux d’activité locale, un soutien « tous moyens
réunis » est envisageable au niveau du soutien du combattant. Sur le dispositif d’entrée de théâtre, les
unités de traitement du linge en campagne (UTLC), les RD 3 000 et les cabines sanitaires, voire les
bungalows sanitaires pourraient être déployés. Ces moyens sont consommateurs d’EDCH et si la ressource
est disponible en quantité suffisante, l’approvisionnement peut être réalisé normalement sur un ratio
d’environ 70 l/h/j. L’implantation en BLIAT autorise donc l’usage des douches, cuisines et buanderies de
campagne.

Au niveau des BAT, l’impératif de mobilité allié aux difficultés d’approvisionnement (élongations
importantes) impose un soutien dégradé en EDCH à hauteur de 30 l/h/j tant que l’élongation avec la BLIAT
le permet. Ce ratio permet au personnel stationné en BAT de pouvoir utiliser la douche de campagne une
fois par jour. Lorsque l’élongation entre la BAT et le point de production d’eau devient trop important, le
ravitaillement est réduit jusqu’au minimum de 10 l/h/j. Cette quantité d’eau nécessaire à l’hygiène permet
de réaliser des ablutions sommaires.
A l’avant des BAT, la quantité d’eau peut être fixée à 10 l/h/j. Cette quantité correspond en moyenne à
l’emport d’une citerne 1 500 l pour une compagnie.

Pour ce qui concerne l’eau de boisson, le standard actuel consiste à effectuer le ravitaillement en
bouteilles. Ce conditionnement facilite le transport et autorise le mode d’acheminement par voie aérienne.
En revanche, les groupes de combat engagés au contact ne disposent pas de moyens organiques leur
permettant d’emporter une quantité de 8 l/h/j. Le commandement doit donc veiller à prévoir les moyens
d’allégement nécessaires au niveau des TC1.

4.8.5.4 Manœuvre de l’eau dans la profondeur :

Le transport d’EDCH non conditionnée par voie aérienne est possible mais les volumes sont restreints. En
effet, il n’est pas possible de transporter plus de deux bacs souples 3,5 m3 sur palette par aéronef. Il
convient de réserver l’emploi de l’acheminement par voie aérienne aux ravitaillements d’urgence. De
même, l’emploi de bacs souples 1500 litres héliportables est possible mais offre un faible rendement
coût/efficacité.

De plus, les élongations envisagées (500 à 1 000 km entre BLIAT et BAT) ne permettent pas
l’acheminement par voie routière en un jour. Cette situation oblige à planifier les mouvements
d’approvisionnement de la BAT sur deux jours, donc d’acheminer deux jours de stock par le même convoi.
Il faut par ailleurs éviter la stagnation de l’eau, en particulier par forte chaleur car le taux de chlore libre
dans l’eau diminue rapidement.
La mobilité de la BAT constituant un impératif, tous les stocks sont conservés sur roues.
Ainsi, pour 600 hommes on entretient un stock correspondant aux données suivantes :

hygiène à 30 l/h/j = 18 m3/j. Stock hygiène pour deux jours = 36 m3.


A cela s’ajoute 1,5 m3/j pour les besoins de l’AC, donc pour deux jours, 3 m3.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

Avec les 70 m3 dédiés au stock de décontamination, on obtient un total de 109 m3 sur roues au sein de la
BAT, soit 16 TRM 10 000 équipés de bacs souples 7 m3 ou 5 VTL-R+1 VTL équipés de citernes 10 m3 si l’état
des pistes autorise l’emploi de VTL.
A chaque rotation, on n’entretient que le flux mis en consommation, soit 39 m3 (6 TRM 10 000 équipés de
bacs 7 m3 ou 2 VTL-R équipés de citernes 10 m3) toutes les 48 h. Il est donc nécessaire de disposer d’un
parc de 22 TRM 10  000 ou de 8 VTL en simultané, entièrement dédié à l’approvisionnement et au
ravitaillement en EDCH hors eau de boisson.

4.8.6 L’emploi des unités logistiques de l’armée de Terre en zone désertique et semi-désertique

4.8.6.1 Unités du train

Dans le domaine du soutien logistique en milieu désertique et semi désertique, l’arme du Train réalise le
soutien aux ravitaillements par voie aérienne et par voie terrestre.

Le soutien aux ravitaillements par voie aérienne.


Le soutien aux ravitaillements par voie aérienne des troupes au sol est assuré par le 1er RTP, régiment
unique dans l’armée de Terre. Ce régiment réalise l’ensemble des opérations de conditionnement, de
chargement, déchargement ou largage d’équipements ou de ravitaillements acheminés par voie aérienne.
Il réalise en outre toutes les opérations nécessaires à la mise à terre du personnel et des équipements
dans le cadre d’une OAP.
Il réalise également le conditionnement de fardeaux à transporter sous élingue et de colis à larguer dans
le cadre d’un ravitaillement d’urgence par hélicoptères.

Le soutien aux ravitaillements par voie terrestre.

Le soutien aux ravitaillements par voie terrestre est réalisé par les unités de transport et de ravitaillement
des régiments du Train. Ces unités assurent les opérations d’acheminement, de manutention, de
réallotissement, de livraison ou distribution de carburant, munitions, matériels et matériaux divers au
profit des GTIA soutenus.
Elles sont déployées au sein des groupements de soutien logistiques et le cas échéant constituent tout ou
partie d’un sous groupement logistique adapté à un GTIA en assurant le transport de ressources afin
d’augmenter leur autonomie logistique. Plus rarement elles peuvent fournir ponctuellement des capacités
de transport additionnelles pour augmenter l’autonomie des GTIA en munitions ou carburant.
Les chefs de peloton de transport assurent le commandement de convois logistiques.

4.8.6.2 Unités de soutien du combattant


• En milieu désertique, comme dans toute opération, une composante SDC mise sur pied avec tout ou
partie du RSC conduit les soutiens dans les domaines suivants :
- approvisionnement en vivres de combat (vivres et eau conditionnés) et compléments alimentaires
éventuels ;

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

- approvisionnement en matériels du SCA ;


- participation aux affaires mortuaires ;
- maintenance du matériel chaud et froid, en particulier les climatiseurs et matériels utilisant de l’eau ;
- ravitaillement en EDCH non conditionnée ;
- participation aux éventuelles actions CIMIC (distribution d’eau aux populations).

• Cependant, les caractéristiques du milieu désertique impliquent des contraintes particulières :


- surconsommation d’eau de boisson ;
- transports d’EDCH non conditionnée plus dimensionnant, impliquant que le DET SDC dispose de
moyens de transport adaptés et en nombre suffisant ;
- l’usure prématurée de certains équipements nécessite également un nombre important de matériels
ou de pièces de rechange en particulier pour les effets balistiques (mentonnières et coiffes de casques,
GPB…) ;
- importance de la maintenance des matériels froid, qu’il s’agisse des conteneurs frigorifiques
dédiés aux vivres, qu’aux systèmes de climatisation ou bien évidemment de conteneurs morgues.

• La maitrise de la chaine de l’eau de bout en bout est également un facteur vital pour la force. Dans ce
cadre et en liaison avec le génie, le SID et le service de santé, une attention particulière sur la qualité
de l’eau devra être consentie dans le cadre de la production et du transport de l’eau. Le DET RSC
détient cette expertise et met en œuvre les procédures de traçabilité adaptées. La planification amont
et la génération de force devra ainsi dimensionner le DET SDC à l’aune des besoins réels.

• Au titre de l’emploi, le DET SDC agira principalement à partir de la base avancée dont l’implantation
devra se faire à proximité des sites de production d’EDCH organisés par le Génie et le SID.

• Le DET SDC participe aux convois de la base avancée et aux FARP, et arme les ilots relevant de sa
responsabilité, au sein des bases ou adaptés aux unités.

4.8.6.3 Unités du matériel

L’agressivité du milieu désertique (chaleur, piste et hors-piste, sable, rocaille, tempêtes, pluies, insécurité
liée à la nature même du terrain, ..) envers le personnel et les équipements impose de dimensionner au
plus juste les moyens déployés hors de la zone fonctionnelle maintenance en BLIAT.
Si les élongations sont importantes, la fréquence des rotations, les délais et la disponibilité des vecteurs
d’acheminement de la ressource nécessaire deviennent alors des critères prépondérants dans le choix du
mode d’action maintenance. Les unités engagées en 1er échelon doivent disposer d’une autonomie
maintenance permettant de pallier cette contrainte sans pour autant remettre en cause leur mobilité.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

Le soutien maintenance des unités de 1er échelon se fait normalement en priorité par échange de matériels
complets, notamment dès que le délai d’intervention devient trop important. La mise en place éventuelle
d’un parc de maintenance avancée doit être étudiée avec le plus grand soin afin de trouver le meilleur
compromis entre les délais de levée d’indisponibilité et le rythme d’engagement/désengagement. Que ce
parc soit déposé à terre ou sur véhicule porteur (VTL-R, PEB, ..), il est important qu’il puisse être protégé des
éléments (agressions du soleil, du sable, du vent, …) par la mise sous bâches protectrices.

Afin de limiter au maximum les durées de réparation voire l’utilisation du parc de maintenance avancée, le
recours à des procédés de réparation de fortune prend toute son importance  ; cependant, tout en
demeurant dans un cadre réglementaire très strict (en cours d’étude), sur ordre du commandement et en
position sécurisée.

La maintenance des matériels dans la durée repose également sur la reconstitution de la ressource à partir
des moyens déployés en zone sécurisée (BLIAT notamment) ; l’évacuation des matériels indisponibles est
donc inéluctable et devra être prise en compte par la Force. Pour le cas où l’évacuation d’un matériel n’a
pas été jugée utile ou s’avère impossible, ce dernier devra alors être détruit, sur ordre du commandement,
après récupération des sous-ensembles sensibles le constituant.

Une attention toute particulière est à apporter, dès le début de l’engagement, au rythme de travail des
équipes de réparation afin de s’inscrire dans la durée (plage de travail plus réduite / rotation plus
fréquente, lorsque les conditions climatiques sont les plus sévères).

Un rappel des consignes tant d’utilisation que d’entretien des matériels, dans le cadre du milieu
désertique concerné, devra être réalisé avant l’engagement et intégré à la rédaction de l’OAL.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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ANNEXE 1

ORGANISATION D’UNE BASE AVANCÉE TEMPORAIRE


(BAT) DE NIVEAU 4

A partir de la base avancée temporaire (BAT), le GTIA peut rayonner dans une zone d’action éloignée
à la recherche d’un adversaire qu’il a la capacité de déceler, d’identifier et de détruire, avant de se
redéployer dans une autre zone d’action après remise à niveau de son potentiel logistique.

Point d’appui essentiel à la manœuvre, ce type d’implantation demeure néanmoins coûteux en hommes et
en moyens de soutien à consentir. La BAT demeure en particulier fortement dépendante des capacités
logistiques de la 3e dimension. Son fonctionnement nominal demeure notamment conditionné par la
détention de la supériorité aérienne. Afin de disposer de l’autonomie logistique indispensable, la BAT doit
donc idéalement inclure les capacités suivantes :

 1 PC interarmes de niveau 4 aux ordres du FHQ ;


 1 structure sanitaire (type AC ou ROLE 2) permettant la stabilisation des blessés grave ;
 la capacité de transport pour emporter l’autonomie initiale en munitions, carburant, vivres et eau ;
 1 capacité travaux, et des moyens de production d’eau et d’électricité ;
 1 détachement hélicoptère doté de capacités de reconnaissance, d’appui destruction, de transport
(dont EVASAN et SAR ou PR) ;
 1 capacité de déconfliction 3D : 1 DLOC (dont 1 CTA) et de guidage (1 FAC par SGTIA) et 1 station
météo ;
 1 capacité de défense sol-air adaptée à la menace aérienne ennemie ;
 1 détachement SIC afin d’assurer les communications logistiques et tactiques avec la base arrière
(station sol satellite de type HDTAC) ;
 1 capacité de défense de la base (1 unité de protection et 1 capacité de réaction immédiate ;
 1 capacité d’intervention immédiate (type QRF) capable d’exploiter sans délai le renseignement
obtenu sur l’ennemi ;
 1 piste d’aviation pour ATT/ATA. A défaut, les liaisons 3D (évacuations sanitaires secondaires
notamment) devront être assurées uniquement par HMA, réduisant d’autant la distance entre la BAT
et la BLIAT ; 1 détachement de drones tactiques.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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Organisation type d’une BAT de niveau 4


(avec son dispositif de sûreté rapproché)

SURV

RECO
BLIAT GAM
M QRF
P
PC
GE
SURV RENS
tii
Piste d’aviation

Opérations à partir d’une BAT


SURV

OHP

RECO
RENS ZONE NON

GAM
AC GE
PERMISSIVE
RAID

100
Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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ANNEXE 2 – LE « REZZOU » :
UNE TACTIQUE MILLÉNAIRE60

1) Origine historique
Le Rezzou, terme dérivé de l’arabe razzia, désigne l’attaque d’une troupe de pillards lancée contre une
tribu, une oasis ou une bourgade, afin d’enlever les troupeaux, les récoltes, ou capturer des esclaves.
Cette pratique purement offensive, se retrouve dans les espaces sahariens et sahéliens, du Sahara
occidental au Soudan. Cependant, le terme est quelquefois employé pour évoquer les attaques ou contre-
attaques (on parle aussi de contre-rezzou) des unités méharistes françaises en poste dans les protectorats
du Levant (Syrie et Liban).

2) Tour d’horizon des attaques de type « rezzou » parmi les plus représentatives
• Le GSPC en Mauritanie.
e 4 juin 2005 à 5 heures du matin, une patrouille mauritanienne (soixante hommes et dix véhicules),
L qui nomadise sur le plateau désertique d’El-Hank, est brusquement attaquée par deux colonnes de
véhicules lourdement armées. Cent cinquante combattants, appartenant au groupe salafiste pour la
prédication et le combat (GSPC algérien), débarquent de camions militaires immatriculés en Algérie et
chargent les soldats mauritaniens regroupés autour du point d’eau de Lemgheity (nord-est de la
Mauritanie). Le combat fait quinze morts et dix-sept blessés. Victorieux, les islamistes repartent avec les
véhicules mauritaniens ainsi que leurs moyens de transmission radio. Ils revendiquent aussitôt ce coup
d’éclat, qu’ils baptisèrent « opération Badr ». Cette « attaque éclair » est considérée, par le GSPC, comme
un important succès tactique ainsi qu’une démonstration de force et de mobilité.

• Le MJE au Soudan.

« Le Soudan accuse le Tchad d’avoir soutenu l’attaque de Khartoum par des rebelles du Darfour ». Cet
intitulé sans équivoque se trouve sous la plume du journaliste Jean-Philippe Rémy, rédacteur d’un
article très complet paru dans Le Monde du 13 mai 2008. C’est dans ce contexte et sur fond de crise au
Darfour, que le samedi 10 mai 2008, les hommes du Mouvement pour la justice et l’égalité (MJE) de Khalil
Ibrahim, principal groupe de l’opposition armée du Soudan, lance une attaque surprise qui n’est
repoussée qu’à la hauteur d’Omdourman, la ville-jumelle de Khartoum, séparée de la capitale par le Nil.
Depuis leur camp situé à la frontière tchadienne, les colonnes de véhicules traversent à très vive allure les
parties désertiques du Soudan pour tenter, par une sorte de «blitzkrieg des sables », de prendre d’assaut
la capitale soudanaise. Cette attaque des rebelles, à première vue strictement endogène, a failli être la
cause d’une guerre entre les deux États. Rentré d’Arabie Saoudite, le Président Béchir était d’ailleurs
apparu à la télévision pour une courte allocution au cours de laquelle il avait agité la menace d’une
intervention militaire contre le Tchad.

60 Extrait de La Rébellion tchadienne de 2005 à aujourd’hui, Cahier de la Recherche doctrinale du 11 février 2009.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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• Le Front Polisario : phase mauritanienne.

près les accords de Madrid (1975), la guerre dans le Sahara occidental oppose essentiellement le Front
A Polisario aux forces armées mauritaniennes. Les forces rebelles comme leurs adversaires mauritaniens
s’affrontent dans le cadre traditionnel du rezzou et du contre-rezzou. Même si le méhari (dromadaire) a
rapidement laissé la place aux véhicules tout-terrains, la forme même du combat n’évolue pas : il s’agit
toujours d’actions ponctuelles, brèves, aux objectifs limités. Les combattants du Front Polisario optent,
en effet, pour des formations de combat légères du niveau de la katiba (100 à 150 hommes), en général
montées sur des Toyota armées de mitrailleuses. Les unités sahraouies s’infiltrent dans le désert
mauritanien à la faveur de la nuit et attaquent généralement aux premières heures du jour, avant une
exfiltration rapide par des itinéraires reconnus. Leur légèreté, leur rapidité, l’aspect rudimentaire de leur
logistique ainsi que leur excellente connaissance du désert, autorisent les combattants du Front Polisario
à multiplier avec succès, leurs opérations contre les objectifs économiques vitaux de la Mauritanie. En
face, faute de renseignements61 et malgré une bonne connaissance du désert, l’armée mauritanienne se
révèle nettement inférieure à un adversaire aux effectifs peu nombreux (peut-être 10 000 hommes).

Faute d’anticipation, compte tenu de l’immensité du désert et de l’élongation des distances entre les
unités en poste et les unités réservées, les forces mauritaniennes perdent leur liberté d’action en diluant
leurs moyens dans l’espace et, par conséquent, gaspillent leurs ressources militaires.

3) Concept d’emploi, et utilisation contemporaine.


Le rezzou, un combat dissymétrique en zone désertique et semi-désertique.

u Tchad, le terme rezzou évoque les raids, à grande vitesse, des colonnes de pick-up rebelles contre
A des villes, villages ou garnisons militaires. Les modes d’action actuels de cette guérilla s’appuient sur
les expériences du Front Polisario, dans le Sahara occidental, mais aussi, sur les combats menés par les
Tchadiens contre l’armée libyenne dans les années 1980. Cette tactique a largement fait ses preuves et a
permis d’importants succès.

Au Tchad, ces raids se déclenchent souvent en pleine saison sèche, en février et avril, au moment où les
conditions de traversée du territoire sont optimales :

Dans la plupart des cas, ces raids partent de l’est (régions de Goz-Beida ou d’Abéché) et visent la
destruction de structures militaires afin d’affaiblir la présence gouvernementale. Cela se traduit aussi par
l’occupation temporaire de villes ou villages, ce qui permet politiquement d’affirmer le pouvoir de la
rébellion, et économiquement, de subvenir aux moyens des mutins (ravitaillement en vivres, matériels et
munitions). Les attaques de juin 2008, où certains éléments rebelles ont ouvert le feu sur des unités de
l’EUFOR, appartiennent à ce type de raid.

61 Le Front Polisario privait l’armée mauritanienne de renseignements, appliquant une implacable loi du silence et vidant de ses bergers les zones semi-
désertiques du nord-est.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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Cependant, ces raids peuvent viser directement la capitale, Ndjamena. Deux attaques majeures ont eu lieu
ces trois dernières années, à chaque fois sous le commandement de leaders bénéficiant du soutien de
Khartoum : Mahamat Nour Abdelkerim en avril 2006, et Mahamat Nouri Allatchi en février 2008. Certains
dirigeants politiques soudanais pourraient directement être à l’origine de ces attaques.

Trois phases caractérisent le rezzou :

• La préparation.

es objectifs choisis sont souvent stratégiques (oasis, piste d’aviation, axe routier), politiques à fort
L impact médiatique (résidence ou bâtiments du pouvoir, intérêts étrangers), économiques (pipe-line,
usine, raffinerie) ou militaires (dépôt logistique, garnisons faiblement défendues, etc.).

L’action est soigneusement préparée grâce au renseignement obtenu par la population ou par des
éléments retournés. Des guetteurs sont aussi systématiquement employés dans la profondeur, en
amont, de manière à éviter la traversée de places fortes ou d’éventuels terrains défavorables à une
progression rapide de la colonne.

La discrétion est très importante car les véhicules, qui dégagent d’importants nuages de poussière, sont
très vulnérables à la menace aérienne offensive (Mi-24 tchadiens ou avions Pilatus) ou renseignement
(Mirage F1 français). Les déplacements se déroulent donc majoritairement de nuit, l’objectif étant de se
rapprocher au maximum de l’unité ou garnison à attaquer. La journée, un bivouac est dressé : les
véhicules sont dissimulés sous les tentes et quelques animaux mis au pacage. Vu d’avion, on ne
distingue pas ce campement rebelle des autres ferrik autochtones (village nomade). De plus, le sable étant
beaucoup plus porteur par basse température, le déplacement de nuit ou à l’aube réduit
considérablement le risque d’ensablement (technique empruntée aux caravaniers).

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

Néanmoins, il peut arriver que, pour des raisons de vitesse, les déplacements s’opèrent aussi de jour
(comme en février 2008). Dans ce cas, la colonne s’étire sur plusieurs kilomètres et tend à se scinder en
plusieurs rames. Dans tous les cas, les trajets sont effectués sans carte ni boussole - ce qui montre la
parfaite connaissance de la région - avec utilisation possible de téléphones satellite ou de Cibie, tout ceci
à vitesse maximum.
Il peut aussi arriver que les rebelles cherchent à exécuter de très larges débordements ainsi que des
infiltrations profondes de plusieurs centaines de kilomètres n’hésitant pas à utiliser d’autres itinéraires
que ceux déjà existants. Il n’est pas rare d’ailleurs qu’ils ouvrent des routes et arrivent par des endroits
réputés impraticables.
Dans tous les cas, l’effet de surprise est véritablement l’effet recherché dans cette première phase.

• L’action.

a manœuvre tactique est toujours très simple et le chef commande jusqu’au contact en participant
L souvent directement au combat. L’objectif est d’attaquer l’ennemi, généralement très tôt dès l’aube,
en une, deux voire trois colonnes, de manière rapide et inattendue en concentrant le maximum de feux
sur un objectif limité. A défaut de protection (il n’y a souvent pas de blindés, hormis les Eland-90 et le
récents RAM-2000 de l’ANT), les assaillants cherchent à surclasser leurs adversaires en pénétrant leur
dispositif à pleine vitesse et en les saturant sous un déluge de tirs à très courte distance, de préférence,
à l’arme lourde : mitrailleuses de 12,7 mm et de 14,5 mm, tirs de canon, rafales de RPG-7. D’une façon
générale, les Tchadiens, qu’ils soient loyalistes ou rebelles, n’utilisent pas les armes d’appui ou celles à
tir courbe.
Cette brutalité dans l’action forme une « boule de feu » dirigée vers l’ennemi, souvent surpris qui peine à
réagir, ce qui se traduit souvent par, au mieux une riposte instinctive, au pire une retraite désorganisée.
Les assaillants recherchent l’imbrication et le combat à bout portant, tournoyant autour du dispositif
ennemi sans débarquer, une fois encore pour éviter les tirs d’appui. Ces combats sont généralement très
meurtriers du fait de la pugnacité des belligérants. L’attaque se poursuit jusqu’à anéantissement ou fuite
des défenseurs qui peuvent éventuellement être capturés puis tués.

• La retraite.

i le raid réussit, un pillage quasi systématique s’ensuit. En cas d’échec de l’attaque, les assaillants
S rompent le contact et s’exfiltrent vers leurs positions de départ où ils retrouvent leur logistique et
peuvent soigner leurs blessés. Cette exfiltration, souvent immédiate et par des itinéraires préalablement
reconnus de manière à soustraire l’élément d’assaut aux troupes ou aux moyens aériens envoyés pour
l’intercepter.
A l’inverse, si le commandement ordonne le stationnement sur zone, celui inclut, de facto, la destruction
et la mise hors service des moyens (matériels, infrastructurels, etc.), et des combattant adverses. Les
Tchadiens ne font généralement pas de prisonniers.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

GLOSSAIRE

AC Antenne Chirurgicale.

Dans le cadre de la manœuvre tactique, transport par voie aérienne


Aéroportage
du personnel ou du matériel dans un environnement hostile.

Cordons dunaires, élevés et parallèles qui présenteront toujours un


Barkane
col franchissable.
BAT Base avancée temporaire.
Mission consistant, par l’établissement d’un dispositif continu, à isoler une
Boucler portion de terrain déterminée, en vue d’interdire, ou au minimum de signaler,
tout franchissement de cette ligne par l’adversaire.
Chott Etendue d’eau salée.

CAA Contrôleur Aérien Avancé. Equivalent de FAC (Forward Air Controller).

CAS Close Air Support.


CCA Close Combat Attack.
CTA Contrôleur Tactique Air.

Zone désertique hyperaride recevant moins de 50 mm de précipitations par


an, se trouvant au cœur des plus vastes espaces continentaux : Tanezrouft
Désert absolu
dans le Sahara, Arabie, dans les bassins ou cuvettes d’abri : Vallée de la mort,
Iran, Turkestan et dans les désert littoraux.

Zone désertique aride recevant 50 à 150 mm de précipitations par an. Ils se


Désert aride trouvent essentiellement en Afrique : Sahara, et en Asie : déserts de Thar au
Pakistan, du Lut en Iran. Ils ceinturent les déserts absolus.

Déserts se trouvant à l’abri ou «sous le vent» de hautes chaînes de montagne qui


empêchent l’advection des masses d’air maritimes humides. Certains d’entre eux
Désert d’abri voient leur aridité renforcée par l’existence de vents desséchants de type foehn.
Ce sont des déserts azonaux dont les climats dépendent de leur localisation et du
relief.

Zone désertique située aux marges des zones arides recevant de 150 à
Désert semi-aride 250 mm de précipitation par an. Ils occupent de grandes surfaces en Australie
et en Amérique du Nord.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

Déserts qui résultent de la subsidence de l’air sous l’effet des


anticyclones permanents qui se produisent entre 25° et 35° de latitude.
Ce sont les déserts les plus étendus avec l’ensemble qui, dans
l’hémisphère Nord, s’étire du Sahara jusqu’au Sind (Inde) en passant par
l’Arabie, l’Iran, le désert de Thar, et avec, dans l’hémisphère Sud, le désert
Déserts subtropicaux
du Kalahari et le désert australien. Chauds et ensoleillés (plus de trois
mille heures d’insolation par an), avec des hivers tièdes, ils connaissent
de grands contrastes de température entre le jour et la nuit. On a
enregistré plus de 50° C à l’ombre à Tamanrasset, 52,5° C dans le désert
de Thar, 48,5° C en Australie.

Désert dont l’aridité est liée à leur position au cœur des continents,
trop loin des océans pour en recevoir les effluves. C’est le cas des
déserts d’Asie centrale qui en raison de leur latitude, appartiennent au
domaine tempéré, mais qui sont des déserts froids du fait des très
Désert continentaux
basses températures hivernales, ce qui n’exclut pas des été torrides à
basse altitude. Là, s’observent les plus grandes amplitudes
thermiques puisque la température peut monter jusqu’à 50°C en été
alors que la période de gelée dure de cinq à sept mois.

DLOC Détachement de Liaison, Observation et Coordination.

DSA Défense Surface Air.

Dunes chaotiques Massifs puissants et élevés parfois de plusieurs centaines de mètres,


et cordons enchevêtrés ou les voies sans issue abondent, infranchissables en véhicule.

Dunes mortes Dunes fixées par la végétation qui présentent une ondulation molle.

Dunes vives Dunes se déplaçant sous l’action du vent.

Dunes dont un côté a été emporté par le vent, présentant un abrupt


Dunes sous le vent
très dangereux.
Eau Destinée à la Consommation humaine. Cette notion inclut l’eau
EDCH
de boisson et l’eau à usage hygiénique.
Erg Vaste étendue sableuse.
Forward Arming and Refuelling Point. Il s’agit d’un plot de
FARP
ravitaillement logistique (mis en place à l’avance ou par rendez-vous).

Fech - fech Terrain pulvérulent d’aspect verdâtre ayant la consistance de la cendre.

Foehn Vent desséchant.

Gara Plaine pierreuse.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
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GTIA Groupement Tactique Interarmes.

Hamada Plateau pierreux

Livraison par air. Opération consistant à ravitailler des unités


LPA déployées dans une zone d’opération en recourant à un transport par
voie aérienne suivi d’un largage ou d’un poser.

MEDEVAC MEDical EVACuation.

Oued Lit asséché de cours d’eau occasionnel.

Le quadrillage est un dispositif plus ou moins dense, aménagé en


Quadrillage secteurs à partir d’un réseau de postes reliés par des lignes de
communication principales.

Reg Vaste plaine pierreuse.

Mission consistant à rechercher méthodiquement sur un secteur ou


Ratisser dans une zone spécifique toutes forces ennemies, tous équipements,
documentations, caches ou moyens de subsistance s’y trouvant.

Après une incursion en territoire hostile, capturer ou piller tout ou


Razzia partie des équipements ou richesses détenues par une force, un
village ou une population.

Le rezzou consiste à attaquer de façon brutale un objectif par surprise,


généralement au terme d’un raid d’infiltration. Il ne s’agit pas de
Rezzou
s’emparer d’une position mais simplement d’infliger le maximum de
pertes à l’ennemi.

Salines Cuvettes salées ou argileuses.

SGTIA Sous Groupement Tactique Interarmes.

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Doctrine d’emploi des forces terrestres en milieu désertique et semi-désertique - EMP 20.440
- ÉDITION PROVISOIRE -

RÉFÉRENCES ET OUVRAGES COMPLÉMENTAIRES

1. Concept et doctrine

 CIA 01 : Concept d’emploi des forces, du 11 janvier 2010 ;


 DIA 01 : Doctrine d’emploi des forces, du 12 juillet 2011 ;
 DIA 3 : Commandement des engagements opérationnels, du 30 juillet 2010 ;
 CIA 4 Soutien des engagements opérationnels, du 30 juillet 2012
 PIA 4.3.2 : Gestion de l’eau en opération extérieure ;
 CIA 321 : Concept interarmées des OAP, du 12 janvier 2005 ;
 DIA 321 : Doctrine interarmées des OAP, du 27 mars 2006 ;
 PIA 03-331 : mémento d’application de la doctrine des OAP, du 22 août 2006 ;
 PIA 3231 (livrets 1 et 2) relative au règlement interarmées sur la mise à terre des TAP.

2. Documents de doctrine « Forces Terrestres »

 FT-01 : Gagner la bataille, conduire à la paix ; janvier 2007 ;


 FT-02 : Tactique générale, juillet 2008 ;
 FT-03 : Contribution des forces terrestres aux opérations interarmées (à paraitre) ;
 FT-04 : Les fondamentaux de la manœuvre interarmes, juin 2001 ;
 FT-05 : L’exercice du commandement en opérations pour les chefs tactiques, novembre 2010 ;
 EMP 20.902 Doctrine de soutien logistique des forces terrestres en opérations extérieures, du 25 mai 2011.

3. Manuels d’emploi
 Manuel des petits détachements – Maroc et Afrique occidentale, Capitaine Georges Prokos, 1910.

4. Notices spécifiques
 Manuel à l’usage d’une troupe déployée en milieu désertique, EMSOME.

5. Ouvrages civils
 Le Sahara et la France, Jacques Frémeaux, 2010.

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6. Articles militaires
 Notre action dans le grand désert : considérations militaires, Revue scientifique, 1891 ;
 Méharistes du désert, Henri Farion, Revue historique des armées, juin 1951 ;
 L’emploi des feux dans la guerre du Rif, lieutenant-colonel Gémeau, Revue militaire française, janvier
1927, n° 27, vol 23 ;
 Un contre-rezzou au Hoggar, lieutenant Guillo-Lohan, Renseignements coloniaux, supplément du
Bulletin du comité de l’Afrique française, 3 articles d’aout à octobre 1903 ;
 Exploration du Sahara, Journal des sciences militaires, janvier et février 1888, vol 29
 Les oasis et les nomades du Sahara oriental, Renseignements coloniaux, supplément du Bulletin du
comité de l’Afrique française, janvier et février 1910 ;
 Bouclage et ratissage, Guerre d’Algérie magazine, articles de mars-avril et de mai-juin 2002 ;
 Patrouilles et convois, Guerre d’Algérie magazine, article de janvier-février 2002.

7. Rapports et colloques
Néant

8. Publications du CDEF et articles


 Les Rébellions touarègues au Sahel, étude de Mériadec Raffray, Cahier de la recherche doctrinale,
 La prolifération des groupes islamistes en somalie : obstacle à la stabilisation régionale, Cahier de la
recherche doctrinale du 20 octobre 2010 ;
 La Rébellion tchadienne de 2005 à aujourd’hui, Cahier de la Recherche doctrinale du 11 février 2009 ;
 Les armées du chaos, étude sur les évolutions des guérillas en Irak (mai 2003-0ctobre 2004), Cahier
du RETEX du 28 octobre 2004 ;
 Opérations en Afrique centrale, Epervier et Boali, Cahier du RETEX du 25 mars 2008 ;
 Opération EUFOR Tchad - RCA (janvier 2008 - mars 2009), Cahier du RETEX du 9 juillet 2009 ;
 Répertoire typologique des opérations, tome 2, Afrique, CDEF/DREX.

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Ce document est réalisé par le centre de doctrine d’emploi des forces.
Graphisme : Couverture & schémas pages : 19, 28, 36, 37, 41, 43, 46, 66 et 100 : Nanci FAUQUET
Maquette : Christine VILLEY

Impression & Diffusion : EDIACA – 76, rue de la Talaudière – BP 508 – 42007 Saint-Étienne Cedex 01

La version électronique de ce document est disponible sur le site http://www.beat.terre.defense.gouv.fr (intraterre).


Contact : CDEF/Division doctrine - téléphone : 01 44 42 48 89

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