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UNIVERSITÉ LIBRE DE BRUXELLES

FACULTÉ DE DROIT

TRAVAUX ET CONFÉRENCES

II

ÉTUDES
SUR LE

Remembrement Rural
GÉNÉRALITÉS - FRANCE - SUISSE
p AYS-BAS - BELGIQUE

suivies d' aperçus sur les moyens d' enrayer


le démembrement des biens-fonds
PAR

P. MAHILLON M. VINCHENT
Juge ET Avocat
•• Tribunal de premi~e instance J uge suppléant au Tribunal
de Bruxelles de première instance de Mons

Pré/aee de M. Henri Simont.


Professeur à l'Univeraité Libre de Bruxellc•

·Pllbli6 sous les auspices du Centre d'étu.des avec Ie concours du FONDS RENt MARCO

BRUXELLES
MAISON FERDINAND LARCIER, s. A.
26-28, Rue des Minlme■

1955
PRÉFACE

Voici plus de sept ans déjà que la mort de René Marcq a dou•
loureusement frappé l'Université Libre de Bruxelles et plus spéciale-
ment la Faculté de Droit ou il avait formé aux disciplines scientifi•
ques des générations de juristes auxquels il s' était attaché à donner
le goût du travail, le souci de la per/ection et l' exemple de la
méthode.
Ceux qui furent ses amis et ses admirateurs se sont efforcés par
la création du « Centre d' Etudes » ei du « Fonds » auxquels ils ont
donné son nom, de perpétuer son act ion et de f avoriser les progrès
du droit en groupant les juristes -désireux de participer, sous la
direction de membres de la Faèulié, à des travaux de recherche
scientifique sur des sujets d'ordre· jl,f,ridique.
Rien ne pouvait m'être plus ágr"éable que de répondre au désit
que M• Marguerite Vinchent et M. le juge Mahillon ont eu l'ama•
bilité d' exprimer en me de mandant de rédiger la préface du volume
qui réunit /'ensemble des études qu'ils ont consacrées au cours de
· ces dernières années, au sein de la section de droit privé du Centre
d'Etudes, sous la direction de Mme Madeleine Gevers et la mienne,
à la question du remembrement rural.
Qu'il me soit permis d'en profiter pour féliciter les auteurs d'avoir
eu, en dé pit d' activités professionnelles absorbantes, l' énergie et· la
persévérance nécessaires à l'édification d'une reuvre remarquable
qui constitue le meilleur hommage qu'ils pouvaient rendre à ·ia
mémoire de celui qui fut notre maître commun. Pareil travail •fait
honneur à ses auteurs et à l'Université qui les a formés. · ·
Le « Fonds René Marcq» en accordant le concours nécessaire à
la publication de ce premier volume des travaux du Centre d' Etudes
,,, déjà reconnu le mérite d'une reuvre qui marquera tant par l'in-
térêt qu' elle présente pour les civilistes que par celui qu' elle a sur
le plan de l' actualité et de l'intérêt général.

'3
C est que le problème du remembrement rural appelle en Bel-
gique une solution urgente.
Pays de petite propriété, ou r étendue moyenne des exploitations
agricoles n' est que de cinq à six hectares, le plus souvent constiiués
de parcelles dispersées de superficie parfois inférieure à 20 ares, la
Belgique voit, sous finfluence de la règle du partage en nature
consacrée par les articles 826 et 832 du Code civil, se précipiter un
émiettement des propriétés rurales de plus 'en plus préjudiciable
à une exploitation normale,
Il en résulte pour l' économie agricole du pays des pertes de tous
genres qui rendent la culture onéreuse au point que le cultivateur
en arrive par/ois à laisser ses terres en friche et que, spécialement
en Wallonie, on peut y voir l'une des causes de l'exode qui conduit
à la dépopulation de certaines régions de notre Luxembourg.
Alors que les pays voisins, spécialement la France et les Pays-
Bas, comme d' ailleurs la plupart des pays se trouvant placés en
présence de problèmes analogues, ont institué depuis longtemps
déjà des régimes organisant le remembrement légal en favorisant
le regroupement parcellaire des propriétés suivant un plan déter-
miné, notre pays en est, aujourd'hui encore, au régime du remem•
brement volontaire ou conventionnel institué par la loi du 4 mai
1949, régime que la loi du 26 juillet 1952, modifiant le Code des
droits d' enregistrement, s~est efforcée de faciliter par une réduction
de droits destinée à encourager les échanges d'immenbles ruraux
non btîtis.
L'expérience avait pourtant depuis longtemps démontré à r étran•
ger que pareil régime ne peut donner de résultats appréciables.
Elle s'est une fois de plus vérifiée en Belgique ou le remembre-
ment volontaire des propriétés est pr~tiquement resté lettre
morte, ce qui était inévitable en raison de l' esprit individualiste
de nos populations rurales.
Heureusement le gouvernement a déposé au Sénat, le 24 no-
vembre dernier, un projet dont sont actuellement saisies les com•
missions de la Justice et de r Agriculture.
Le Parlement sera donc vraisemblablement appelé à se prononcer,
à bref délai, sur ce pro jet.
Nos législateurs trouveront dans l'ouvrage que nous préfaçons
aujourd'hui les éléments d'appréciation les plus précieux.
Les auteurs ont tenu, en effet, non seulement à analyser d'une
manière appro/ondie les législations en vigueur dans les pays voi•
sins, tels que la France, la Suisse et les Pays-Bas - dont les institu-
- - - - - - - - - - - -.....,,,...""1"......,7"."."'"""."",""""-:-----,---,-~---' ~,·

tions civiles et politiques présentent avec les nótres tant de simili-


tudes, mais ils se sont attachés à l'étude tant du projet de loi déposé
en Belgique, en mars 1948, par M. Orban, Ministre de f Agriculture,
projet qui fut malheureusement disjoint par les commissions séna-
toriales de f Agriculture et de la ]ustice réunies en raisori des
questions juridiques particulièrement délicates que posait ·le nou-
veau régime envisagé, que du projet nouveau dont vient d'être .,aisi
ré,cemment le Parlement.
Ce n'est pas le moindre de leurs mérites que d' avoir examiné,
d'une manière à la fois claire et systématique, les diverses questions
de droit civil et constitutionnel posées par l'institution du nouveau
régime envisagé, et notamment les améliorations qui pourraient,
dès à présent, être apportées à notre législation successorale en vue
de faciliter la réalisation de l' ob jet poursuivi par la législation
nouvelle et d' empêcher que les propriétés, une f ois remembrées, ,u•
soient immédiatement divisées à nouveau par le jeu des 11nrtages
successl)raux.
Pareil ouvrage montre à nouveau tout Ze profit que Le Gouverne-
ment pourrait retirer de la. collaboration d'universitaires attachés
à f étude de problèmes déterminés, collaboration que la disparition
du Conseil de Législation et de son Comité Permanent a rendu plus
nécessaire que jamais en raison de la mission limitée dévolrrn à la
.~ection de législation du Conseil d' Etat.
Nous sommes convaincus que ce travail rencontrera dans le.~
milieux universitaires, parlemeritaires et juridiques l' accueil le plus
f fotteur et nous fonnons le vreu de voir les auteurs fU!rsévért>r dans
la voie 011. ils ont brillamment réussi.

Henri SIMONT.
Professeur à l'Université Libre de Bruxelles
Ancien hatonnier du Barreau de Cassation.

BIBLIOGRAPHIE

(Les ouvrages et études présentant un intérêt spécifique marqué


sont précédés d'une astérisque).

INTRODUCTION GENERALE
Remembrement rural .
. "'· M. TCHERKINSKY, Le prohlème du rememhrement des terres en Europe,
lnstitut international d.'agriculture (Rome), Bull. mensuel de renseigne-
inents écon. et sociaux, 1942, p. 61 et suiv.
*. Le remembrement des exploitations agricoles, étude de la F. A. 0., préparée
par Sir Bernard 0. BINNS et suivie de communications du Professeur
K. SK0VGAARD, du Collège royal d'agriculture et d'art vétérinaire de
Copenhague et des gouvernements français, irlandais et suisse. -
0rganisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture,
Washington-Rome, .1950.
,. Conference on world land tenure, recueil lpolycopié) puhlié par l'Univer•
sité de Wisconsin, à Madison, Etats-Unis, 1952 : Part 3, Workshop
reports, chapitre consacré aux Land consolidation procedure, comparative
an,alyses.
* Recueil de législation, édité depuis 1952 par l'0rganisation des Nations Unies
pour l'alimentation et l'agriculture (F. A. 0) - Rome (trimestriel) (1).

Démembrement des biens-fonds.


Louis C0IRARD, La familie dans k Code civil (1804-1904), Paris, 1907.
*, M., TCHERKINSKY, L'évolution récente du régime foncier en Europe et
· ses conséquences économiques et sociales, Bull. précité, 1940, p. 333
et suiv., 365 et suiv., 401 et suiv. - L'évolution du régime successoral
des hiens ruraux en Europe, id., 1941, p. 177 et suiv.
Charles, L. STEWART, Foreign provisions for land inheritance : Examples
· · · .of laws and practices in selected countries, in recueil cité supra.
ARMINJ0N, Baron N0LDE et W0LFF, Traité de droit comparé, Paris,
Libr. gén. de dr. et de jurispr., trois vol., 1950 à 1952.

('1) Pour mémoire, Annuaire international de législation agricole, puhlié


jusqu'en 1946 par l'lnstitut international d'agriculture - Rome.

'7
FRANCE
Ouvrages généraux.
Roland MASPETIOL, L'ordre éternel des champs, essai sur l'histoire, l'éco•
nomie et les 11aleurs de la paysannerie, Paris, Librairie de Médicis, 1946.
L. BRASS&BROSSARD, Le destin de l'agriculture française, coli. Que
sais-je ? Paris, Presses Universitaires de France, 1949.
• Communication du gouvernement français à la F. A. 0. in ouvrage cité supra.
Le monde rural dans l'économie moderne, compte rendu in extenso dei!
cours et conférences de la session de Nantes des Semaines sociales de
France, Lyon et Paris, 1951.
Mare BLOCH, Les caractères originaux de l'histoire rurale française, nouv.
· éd" Paris, 1952.
R. SAVATIER, Les métamorphoses économiques et sociales du droit cfoil
d'aujourd'hui, 2• éd., Paris, Libr. Dalloz, 1952.
Daniel FAUCHER, Le paysan et la machine, coli. L'homme et la machine.
Paris, Editions de Minuit, 1954.

Remembrement rural.
F. FOIRET, Commentaire de la loi du 9 mars 1941, Journal des notair ...• et
des avocats, 1941, p. 681 et suiv.
E. BECQUÉ, La loi du 9 mars 1941 sur la réorganisation de la propriété
foncière et Ie remembrement, Juris • cl. pér., 1941, Etude, n.,,. 222
et 222bis.
J. D" Commentaire de la loi du 9 mars 1941, D. crit., 1942, lég., p. 15 et i,qiv.
A. GARRIGOU-LAGRANGE : Le remembrement de la propriété foncière,
Etudes agricoles, 1943, p. 10 et suiv.
E. D., La jurisprudence du Conseil d'Etat en matière de remembrement
agricole, D., 1950, chron., p. 141 et suiv.
• Jean-Marie SCHMERBER, La réorganisation foncière en France : le remeni-
brement rural, Paris, La Maison rustique, 1950.
• M. POIRÉE, Réorganisation foncière et remembrement de la proprihé
rurale -- technique des opérations, Paris, Eyrolles, éd., 1951.
• René MASSOT, Le remembrement, Rev. législ. agric., 1951, p. 108 et dUiv.,
123 et suiv.
• L. SINE, Notions sur Ie remembrement des terrain& agricoles en France --
Extrait du Bulletin de l'lnstitut agronomique et des stations de recherche:,
de Gembloux, t. XIX, n•• 1-2, 1951.
DALLOZ, Nou11eau répertoire de droit, v" Propriété, n"" 349 à 362 (adde:
mise à jour 1954).
* DALLOZ, Répertoire de droit civil, t. IV, 1954, v" Remembrement, par
René Savatier.

Démembrement des biens-fonds.


• Pierre ROBINO, Les lois eontre Ie moreellement de la propriété payaaone,
Aanales de la Faculté de droit de l'Université de Bordeaux, 1950, ·1,>P.
55 et suiv., 105 et suiv.
• DEMARS et LE ROUX, L'exploitation paysanne héréditaire, Paris, tibr.
Dalloz, 1951.
Michel de JUGLART, Droit rural, t. I" : L'exploitation rurale, Paris. Juris•
classeurs, 1949.

8
DALLOZ, Rép. dr. civ., t, l'", 1951, v0 Bien de famille, par J. Larguier.

DALLOZ, Nouv. rép. dr., v0 Bien de fam'ille; v• Succession, 1 646 et 751 et
suiv. (adde : mise à jour 1954).

SUISSE
R.emembrement rural.
E. DISERENS, L'tat actuel des remaniements parcellaires en Suisse et leur
portée pratiqne - Extrait de La Te"e vaudoise.
• P. REGAMEY et L. SINE, Notions sur Ie remembrement des terrains agri..
coles en Suisse et spécialement dans -Ie canton de V aud - Extrait du
Bull. lnst. Gembloux, t. XVII (1948-1949).
' Communication du gouvernement suisse à la F. A. 0., in ouvrage cité supra.
Les réunions parcellaires, par Ie Service cantonal vaudois des amélioration~
foncières - Extrait de La Terre vaudoise, n° 43, du 27 octobre 1951.

Démembrement des biens-fonds.


• FICHES JURIDIQUES SUISSES, Genève, passim, et spécialement n°" 612 it
615, Successions agricoles, l. Généralités, par Otto•K. Kauffmann; II. At-
tribution intégrale de l'exploitation agricole à la valeur de rendement;
sursis au partage, par André Borel; 111. Attribution des accessoires et
des immeubles isolés, par Ie même; IV. Quote•part des cohéritiers au
gain réalisé en cas de revente; morcellement; indemnité pour salaire
au partage, par Ie même - Adde : n" 227, Vente d'immeubles, IV. L'alié-
nation des immeubles agricoles, par Albert Comment.

PA YS-BAS
Remembrement rural.
• A~ F. SCHEPEL, De Ruilverkavelingswet 1938, Alphen sur Rhin, 1938. et
Supplement op de Ruilverkavelingswet 1938, id., 1942 (suivis du texte
des dispositions légales).
J. H. JONAS, De Rnilverkavelingsvereenkomst, W eekbl,ad voor Privaatrecht.
Notarisambt en Registratie, 1938, nr 3582.
L. OOMENS, Ruilverkaveling, W .PJV.R., 1938, n' 3598.
J. VALKHOFF, De jongste wijzigingen van de Ruilverkavelingswet, Ned.
Juristenblad, 1941, pp. 809 et suiv" 829 et suiv.
S. SMEETS, De wijziging der Ruilverkavelingswet 1938, W. P. N. R., n"'
3779 et 3781.
• L. H. BOUWMAN, Ruilverkaveling (ill. de 23 planches), Utrecht, 1951.
Pb. A.N. HOUW'ING, Pacht en ruilverkaveling, De Pacht, 1952, pp. 66 et sniv.

BELGIQUE
Ouvrages généraux.
DE PAGE et DEKKERS, Traité élémentaire de droit civil belge, 2• édit.,
Bruxelles, Bruylant 1939-1949.
Fernand BAUDHUIN, Economie agraire, 5• éd" Louvain, lnst. de recherche;,
écon. et soc. 1953.

Remembrement rural.
Alfred DORCQ, Le remembrement des propriétés, quelques aspects jnridi.
qnes, Rec. gén. 1946, n• 18.578.

9
* F. VANDEN ABEELE, Le projet de loi beige sur Ie remembrement· des
hiens ruraux? Rev. de l' Agriculture, 1948, pp. 871 et suiv.
Projet de loi sur Ie remembrement des hiens ruraux (dossier 847), Travaux
du Comité d'études et de législation de la Fédération des Notaires de
Belgique, ler sem. 1949, pp. 85 et suiv.
A. VERREES, De ruil- en herverkaveling, Tijdschrift voor notarissen, 1950,
pp. 1 et suiv.
R.'· JURDANT, Hoe gaat de vrijwillige ruilverkaveling te werk ? id., 1950,
pp. 11 et suiv.
* Paul PIERRET, Les limitations légales au fractionnemenl de la propriété
foncière, Rev. de dr. intern. et de dr. comp., 1950, ( n° spécial du Congrès
de Londres de l'Académie internationale de droit comparé), pp. 2 et suiv.
* Leo LINDEMANS, Ruilverkaveling en art. 11 van de Grondwet, Rechtsk.
W eekbl., 1949-1950, col. 769 et suiv.
M. VAN DEN DAELE, Grondwettelijkheid van de ruilverkaveling uit kracht
van de wet, id., 1950-1951, col. 5 et suiv.
* Le remembrement des biens ruraux, les exploitations agricoles devant le
problème du remembrement, recueil publié par la Société Nationale de
la Petite Propriété terrienne, Bruxelles, s. d. (1952).
M. JOURNÉE, Le parcellement excessif des terres dans Ie Hainaut exige Ie
remembrement, La Propriété terrienne, 1953, pp. 92 et suiv.
* 0. TULIPPE, Remembrement ou regroupement cultural ( ill. de 18 figures),
Ed. Art. et Technique, Bruxelles, 1953.

Echanges de biens ruraux.


Robert REGIBEAU et Paul GOURDET, La loi du 26 juillet 1952 modifiant
Ie Code des droits d'enregistrement, d'hypothèque et de greffe, en vue
d'encourager les échanges d'immeubles ruraux non batis. Journ. trib.,
1952, pp. 637 et suiv. ·
M. D., Loi du 26 juillet 1952 modifiant le Code des droits d'enregistrement,
d'hypothèque et de greffe, en vue d'encourager les échanges d'immeubles
ruraux non batis, Rec. gén., 1953, n° 19.201.

Démembrement de biens-fonds.
B. Seebohm ROWNTREE, Comment diminuer la misère en Belgique,
Paris, 1910.
René PIRET, Le Statut civil de la familie et du patrimoine /amilial, coli.
Batir, Paris et Tournai, Casterman, 1942.
Idem, L'évolution du droit successoral beige et du droit successoral fran-
çais depuis 1804, Ann. tlè ·droit et de sc. polit., 1948, pp. 107 et suiv.
Proposition de loi n" 173 ( session 194 7-1948) allouant une rémunération
différée à certains collaborateurs des entreprises familiales (dossier 871),
Travaux du Comité tI'études et de législation de la Fédération des Notiii•
res de Belgique, 1er sem. 1949, pp. 98 et suiv.
* Paul PIERRET, étude précitée.

'10
PREMIÈRE PARTIE
Introduction générale

CHAPITRE PREMIER
Définition et caractéristiques
1. Le rememhrement est une notion récente, du moins dans les
pays d'Europe dont Ie droit civil s'apparente au Code Napoléon.
L'on trouve en France des précédents remontant au déhut du
X:VIII' siècle, mais l'idée d'opérations systématiques ne s'y est fait
jour qu'à la veille de la première guerre mondiale.
Le terme même de rememhrement ne figure pas dans Ie Larousse de
1900 (1). Si on parlait - sans desseins hien définis - de « redistri-
hution des parcelles », de « réunions territoriales » ou plus simple-
~ent d' « ahornements généraux », Ie droit positif ne connaissait
pratiquement que !'échange de hiens ruraux, encouragé par un
tarif de faveur à l'enregistrement.
C'est au demeurant à partir de ce concept que s'est développée la
~~organisation foncière. L'expression néerlandaise « ruilverkave-
liqg >> (relotissement par échange) exprime fort hien en quoi consiste
essentiellement l'<>pération. Que les échanges soient devenus multi-
latéraux, d'intérêt public et en quelque sorte ohligatoires, n'y fait
rien. Le principe directeur reste Ie même. Le rememhrement tend,
de façon indéniahle, à se rapprocher de l'expropriation d'utilité pu-
blique; il s'en distingue cependant par Ie role essentiellement inter-
. médiaire joué par les autorités. Celles-ei ne font pas entrer dans
leur. patrimoine les biens rememhrés, lesquels sont réattrihués, sui-
vant une répartition nouvelle, à leurs propriétaires; comme en ma-
tière d'échange, il y a souvent lieu au payement d'une soulte.

(l) Rememhrer n'était encore qu'un synonyme désuet de remémorer (cf.


anglais to remember).
ün verra plus loin qu'en Europe centrale et surtout septentrionale Ie
rernemhrement se pratique depuis près de deux siècles sur une vaste échelle,
.äli point qu'au Danemark il ne présentc plus guère qu'un intérêt historique.

11
Il convient cepéndant de souligner une différence essentielle avec
Ie contrat d'échange. Le nouveau propriétaire tient ses droits en
vertu de l'acte de rèmembrement et non d'une transmission tie
l'ancien propriétaire; il n'a pas à se préoccuper de vices autérieurs
à l'attribution du bien.
L'éventuelle extension du réseau des chemins puhlics à la faveur
de l'opération resterait à notre avis sans influence sur sa nature; -il
ne s'agit là que d'un aspect accessoire.

2. On a donné plusieurs définitions du rememhrement, les une"


plus juridiques, les autres plus techniques. Il nous paraît pt·éfé-
rable de nous en tenir aux traits qui caractérisent l'institution en
droit, nous 1·éservant de revenir sur les résultats qu'il convient ,l'at-
teindre.
On peut définir le remembrement comme la réunion, dans l'in-
térêt de l'agriculture, des biens ruraux non batis d'un territoire dé-
terminé, et leur répartition judicieuse, par éq1Livalent, entre les
propriétaires des biens visés, accompagnée ou non de modifications
au réseau des chemins et f ossés.

3. Il fallait souligner, à notre avis, que Ie remembrement trouvt,


sa justification dans l'intérêt de l'agriculture, point de conjonction
entre l'intérêt général et celui des campagnes. Ce serait une errem·
de n'avoir en vue que les avantages que peuvent retirer les particu-
liers d'un relotissement, comme de ne considérer que Je profit qu'y
trouve l'économie nationale.
Cependant la part des pouvoirs puhlics apparaît de plus en plu"
prépondérante dans l'initiative et la conduite des opérations. Le re-
membrement volontaire ou décidé à la majorité absolue des inté-
ressés, lent et difficile, a dû faire place, dans l'Union indienne aussi
hien qu'en Europe occidentale, à une procédure plus expéditive; le11
remaniements contractuels ne jouent qu'un röle complémentaire.
En revanche, les lois sur Ie rememhrement légal, en dehors du vote
que certaines requièrent, prescrivent de demeurer en contact étroit
avec les propriétaires visés et de tenir compte de leurs vreux'. et
griefs. Les administrations se gardent, dans la pratique, d'user de
tous les pouvoirs qui leur sont conférés. Il y a là un double souci
d'efficacité technique et de respect des personnes qui fait relever la
méthode à la fois du dirigisme accentué et de la démocratie ( 2) •

(2) Schmerber, La réorganisation foncière en France : le remembremenl


rrual, p. 114, estime que la loi française de 1941 offre en mêml'l
temps un caractère autol'itaire si l'on en considère la lettre, et un
caractère libéral, si l'on en dégage !'esprit et si l'on en étudie les applicatiou.
Le titre et !'argument d'une récente pièce de théiitre, citée par la commission
de l'Agriculture de la Deuxième Chambre néerlandaise, font ressortir la né,,es•

12
Le remembrement ~elève du droit administratif; aucune incapa-
cité, aucune lésion ne sauraient Ie remettre en question. Mais il est
généralement admis que les litiges portant sur des droits civils
restent de la compétence exclusive des tribunaux judiciaires
(exemples : la contestation du droit d'un propriétaire sur une par-
celle déterminée; Ie partage d'une succession) .

4. Le hut du remembrement est d'éliminer les inconvénients qui


résultent de l'exiguité, de la dispersion et de l'enchevêtrement des
lerres. Suivant la définition donnée par Schmerber, les parcelles
doivent répondre aux conditions suivantes :
a) être suffisamment étendues et contiguës;
b) présenter une configuration avantageuse pour la culture;
c) être placées dans les conditions les plus favorables pour la cul-
ture quant aux accès et à l'éèoulement des eaux superficielles.
La loi fédérale allemande de 1953 précise que l'opération se
fera en fonction des conceptions actuelles en matière d' économie
Je l'exploitation.
On voit que Ie remembrement est inséparable d'autres améliora•
tions foncières. L'élimination des enclaves, la réduction du nombre
,les parcelles et la rectification de leurs limites entraînent d'impor-
l.antes modifications au réseau des chemins et fossés .
.Aux Pays-Bas en particulier, des travaux de drainage, de défri-
ehement, de nivellement, etc., sont souvent entrepris par la même
occasion; la dépense en est généralement supportée par Ie trésor
public.
Pour donner à la réforme sa pleine efficacité, il faudrait même,
comme Ie préconise Ie rapport au chef de l'Etat précédant la loi
française du 9 mars 1941, et comme Ie pratiquent les pays scandi-
nayes, la compléter par la dispersion d'une partie des batiments
agricoles. Le domaine familial doit offrir les facilités ,que procurait
}adu l'organisation rurale communautaire.

5. L'aide de l'Etat est indispensable. Elle se traduit non seule-


JBent par des exonérations et allègements fiscaux, la gratuité des
transcriptions, voire des actes de mutation, mais aussi par la prise
en charge des frais d'administration et d'une partie du coût des opé•
_rations; des avances, remboursables à long terme, sont sou vent con•
11enties pour Ie surplus.

sité du remembrement et la solidarité qui doit en être Ie leit-motiv : 't mes


moet er in (Il faut y mettre Ie couteau) et : Er komt bij malkander wat bij
malkander hoort ( Chacun s'y retrouve - littéralement : Il leur revient l'un
J'autre ce qui lllur appartient l'un l'autre).

13
. 6. Les propriétaires retrouvent autant que possihle la majeure
partie des hiens qu'ils ont apportés à l'intérieur d'un périmètre dé.
terminé. Il reçoivent pour Ie surplus une compensation en natur~
calculée d'après la valeur de rendement des terres perdues; il est
permis de faire l'appoint par une petite soulte en espèces. On favo-
rise la formation d'unités familiales d'exploitation dont les parcelles,
convenahlement groupées, soient situées dans un rayon de moins
de trois kilomètres des hätiments de la ferme.
Il est à remarqutr que seuls les propriétaires et assimilés sont: ad~
mis à participer aux opérations ( 3). Les fermiers, qui sont d'ailleur&
entendus à différentes phases de la procédure, peuvent demaridèr
le report des haux sur les nouvelles parcelles attrihuées à leurs hail-
leurs. On souhaite, en France, que les intérêts des preneurs soient
plus largement pris en consi.dération et Ie récent projet de. loi hpl-
landais multiplie les garanties quant au report des haux. Ces ques-
tions revêtent une particulière importance en Belgique ou la pro-
portion des terres exploitées par leurs propriétaires est plus faihle
qu'ailleurs (4). · ·
Les intérêts des titulaires de sûretéii réelles sont spécialement p~o:
tégés.

7. Le rememhrement obligatoire, souvent encore semi-obliga,


toire, apparaît comme Ie principal procédé de regroupement des
hiens-fonds (5). Les autres moyens employés sont Ie rememhrement
volontaire, en principe plurilatéral, et !'échange amiahle, généra°Ie-
ment hilatéral. La loi française a prévu en outre la réorganisation
foncière, moyen moins radical, resté sans application, ainsi que Ja
concession, l'expropriation ou la confiscation des parcelles ahaii~
données ou incultes, guère davantàge pratiquées (6). Le canton
de Vaud procède à des « réunions parcellaires », à titre de solutio~
d'attente. ·

8. Il ne sera question que du remembrement rural proprement


dit, dénommé en Suisse << remaniement parcellaire ».
Contrairement à ce qui se passe en cas de réforme agraire, seule

(3) Il en irait autrement selon Ie « regroupement sultural » (cf. in/ra, v. 0 ~ ) .


Voy. aussi note suivante.
(4) Ce pays se dispose à adopter une solution moyenne (in/ra, Belgiqu~,
n° 44). ,:
(5) En général l'initiative de déclencher l'étude préparatoire appartieilt'
concurrement aux propriétaires (souvent aussi aux exploitants non propriétaires)
et aux autorités, locales ou nationales.
Quant à la décision de principe, elle est prise soit par une assemblée de pro-
priétaires, comme en Suisse, soit par les autorités, comme en France.
(6) On verra que la législation française, récemment modifiée, combi~~
désormais les différents procédés.

14
l'assiette du droit de propriété est modifiée, hormis quelques em-
prises minimes. Il arrive toutefois, dans les régions surpeuplées, que
l'on profite de !'occasion pour procédér à une redistrîbution des
terres; les exploitations ne disposant pas d'une superficie minimum
sont supprimées et les paysans éliminés vont coloniser des terres
nouvelles. Les Pays-Bas appliquent cette méthode dans les régions
ravagées par la roer (7) . Un moyen extrême - qui ressortit non plus·
marginaiement mais essentiellement à l'expropriation - consiste ·à
permettre aux pouvoirs publics d'acheter les terres d'une région
déterminée (congested districts d'lrlande) ou d'une commune (en.
Suède notamment), en vue de les répartir en domaines rationnelle-
ment formés (8).
9. Le regroupement cultural, qui a pour objet Ie remembrement
des exploitations, est demèuré étranger jusqu'ici au droit positif, en-.
core que l'on s'efforce de Ie réaliser _concurremment chaque fois que·
Ie remaniement des propriétés Ie permet. -
La question a soulevé d'àpres controverses en France. Elle paraît
définitivement tranchée en faveur du remembrement foncier pour
ce pays ou Ie faire-valoir direct prévaut. La solution est plus dou•
teuse lorsque les fermiers et métayers forment la majorité des
exploitants, d'autant plus que depuis la seconde guerre mondiale
les locataires jouissent généralement d'une stabilité assurée par Ie
bail à durée indéfinie (9).
10. Le 'remembrement urbain, pratiqué surtout dans les villes
sinistrées (10) est étranger à notre matière, bien que l'on puisse
en tirer des enseignements utiles, notamment pour Ie réaménage-
ment des villages.
De plus, il y a un intérêt évident à harmoniser l'application du
rememhrement rural et du plan d'urbanisation autour des agglo-
mérations et même des simples bourgades, qui peuvent être appelées
à des développements inattendus. Il faut éviter que de futures han-
lieues doivent un jour souffrir de tracés défectueux (11).

(7) Herverkaveling (litt. : nouveau relotissement) par opposition au Ruil-


verkaveling du droit commun. Voir supra, n° 1; in/ra, Pays-Bas, n°' 5 et 6.
(8) Voir in/ra, n° 22.
(9) Voir in/ra, France, n° 70 (note 4) et Belgique, n° 21 (note 10).
(10) On cite comme ayant donné lieu à l'un des premiers remembrements
la reconstruction du centre de Bruxelles après le bombardement de 1695 (alors
que le plan de Londres n'avait guère été modifié après le grand incendie
de 1666).
( 11) Dans des quartiers entiers de grandes villes, entre autres Paris, les
rues et les parcelles cadastrales dépendent encore des chemins et des champs
d'autrefois. - Voy. in/ra, France, n° 65, Pays-Bas, n~76 et Belgique, n° 60;
adde: Ruilverkaveling en Stedebouw, rapport d'une commission de l'Institut
néerlandais pour le logement populaire et !'urbanisme, Bestuurwetenschappen,
1949, pp. 153 et s.

15
Quant aux lois foncières, destinées à faciliter les expropriatiom
d'utilité publique sensu lato dans de vastes zones, ellee ne pré-
sentent guère de points communs avec Ie remembrement rural;
elles tendent particulièrement à lutter contre les spéculations sur
les terrains à bätir (12).
En revanche, Ie groupement f orestier, libre, à la majorité des
indivisaires ou forcé, que vient d'instaurer Ie décret-Ioi français du
30 décembre 1954 est comparabie à divers égards à notre matière.
Signaions enfin pour mémoire Ie remembrement minier, qui
s'opère par des échanges entre sièges d'exploitation, favorisés par
des tarifs fiscaux réduits (13) .

(12) Exemple : la loi foncière française du 6 août 1953 (et Ie décret da


8 février 1954) commentés par G. Liet-Veaux. Juriscl. pér., 1954, I, 1190.
03) Voy. pour la France Ie décret du 14 septemhre 1954 (D. 1954.
lég., p. 406).

J6
CHAPITRE II

Nécessité et avantages
ll. Il a fallu la guerre pour que de nomhreux citadins se rendent
compte de l'importance de l'agriculture en Europe occidentale (1).
On a tendance à perdre de vue les difficultés que rencontrent les
exploitants : pénurie de main-d'reuvre, instahilité des prix, moder•
nisation insuflïsante de !'outillage et de l'hahitat.
Le rememhrement contrihue grandement à amélio1·er les condi-
tions d'exploitation et, par· voie de conséquence, à freiner l'exode
rura}. On peut même en attendre la remise en valeur de terroirs
désertés.

12. En effet, si Ie rendement du travail agricole n'est pas propor-


tionné aux efforts foumis, on Ie doit pour une très grande part au
morcellement et au parcellement excessifs.
Il faut entendre par morcellement, au sens Ie plus propre, la divi-
sion de la propriété d'un domaine qui appartenait à une seule per•
sonne (2).
Le parcellement désigne l'état de division des terres qui compo•
sent une exploitation agricole, parfois éparpillée sur des étendues
considérahles ( 3).
En Belgique, par exemple, les « pièces de terres », c'est-à-dire les
ensembles de parcelles appartenant au même propriétaire et dépen-
dant généralement de la même exploitation, sont en moyenne au
nombre de six et dépassent à peine un hectare en moyenne ( 4).

13. La cause de cette situation réside dans les mreurs en même

(1) Même en Belgique, pays on l'industrialisation est très poussée et dont


Ie territoire est pour un quart peu productif ( Ardennes, Campine), l'agriculture
nationale suffit aux hesoins de la population à concurrence de 79 p.c. (en 1952).
Il est vrai que la culture intensive est pratiquée dans de nomhreuses régions.
(2) Au déhut du siècle, Ie c morcellisme » formula les principes qui devaient
servir de base à la plupart des réformes agraires entreprises après la première
p;uerre mondiale.
(3) Voy. Nouveau Larousse agricole, Paris 1952, v" Rememhrement, par
Roche, et Omnium agricole, Paris, s.d., v Morcellement.
0
·
(4) Quant à la parcelle cadastrale, son étendue moyenne n'excède pH
36 ares.

17
temps que dans Ie Code civil, hostile à l'indivision, à l'inégalité entre
les héritiers copartageants et même aux soultes en espèces (art. 815"
826, 832, al. 2, sous les faihles correctifs des art. 827 èt 832, al. l "•
ainsi que des règles relatives au partage d'ascendants ( 5).

14. A vrai dire, l'ancien droit marquait, depuis plusieurs siècles,


les mêmes ten dan ces individualistes ( 6). Les communautés taisihles
avaient quasiment disparu, on avait commencé Ie partage des com•
munaux et la plupart des coutumes, sans toujours prtjhiher les déro-
gations, mettaient tous les héritiers sur Ie même rang ( 7).
« La trop grande suhdivision des pièces de terre, écrivait ·Duha-
mel du Monceau en 1752, cause, dans certaines provinCet!, un grap.~
o.hstacle au progrès de l'agriculture » (8). Pendant les années 'qui;
précédèrent l'adoption du Code Napoléon, de nomhreux mémoi:r~s,
furent consacrés à la question. Mais Ie respect. quasi-religieux. ,~µ,,
drQit de propriété était tel qu'on se horna à envisager un système-
d'échanges de gré à gré hénéficiant d'un tarif fiseal réduit (9). Ön,
ne critiquait d'ailleurs, parmi les causes de l'excès de la division d.~:'
sol, que Ie partage des biens communaux, auquel la RévoltitioQ,:
avait mis un terme ( 10). Une voix isolée demanda l'interdiction d~'
morcellement des fermes dans Ie partage des successions (11). Le
prohlème ne pouvait que gagner en acuité avec la mécanisation ,q~i•.
allait être suivie de la motorisation de l'agriculture.

(5) Voy. aussi infra France, n° 9.


(6) Tendances sur lesquelles la Révolution avait renchéri un moment,;. l.e-
déct·et du 5 mars 1793 abrogeait presque entièrement la liberté de tester et une-
pétition demandant que les biens ne dépassant pas un arpent ne soient· :ni
divisés ni soumis à la licitation, avait été rejetée (Maspétiol;L'ordre éter~
des champs, p. 26 7). La loi du 19 nivose an II ( 8 janvier 1794) interdit de
< faire un aîné ».
. (7) Maspétiol, op. cit., pp. 119 et 120; - Marc Bloch, Les .caractères ori;
ginaux de l'histoire rurale française, pp. 171,172, d'après lequel Ie·
droit d'aînesse, moins impérieux qu'on ne l'a parfois imaginé, étàit
uniquement nobiliaire ( voy. · cependant in/ra, France, n 08 9, en notei · · et
74); - cf. aussi Britz, Code de l'ancien droit belgique, t. Il, p. 766 et comp.
in/ra, Belgique, n° 4.
(8) Cité par Octave Festy, l'Agriculture française sous Ie Consulat dans
Toute l'histoire de Napóléon, n 12-13-14, 1952, p. 38.
08

(9) Id., p. 47. Il ne faut paii"-blier que 1789 fut une révolution de pro--
priétaires et surtout de néo-propriétaires; dans quelques régions des Flandres,
cm sait encore quelles families ont acheté, à cette époque, des < biens noirs ~
c'est-à-dire confisqués au clei·gé. Marat, presque seul, ne reculait pas devan~
un remaniement par la contrainte (Marc Bloch, op. cit., p. 246).
· . (10) La Convention avait décrété à l'unanimité la peine de mort cof!lre
quiconque proposerait une loi agraire ou un texte destructeur du droit de:
propriété (Baudin, l,es lncas du Pérou, Paris 1947, p. 27) •
. (11) Festy, op. cit., p. 4ï, note 1.
Sur les obstacles au 1·emembrement par réunion de domaines, comme-
en Angleterre, voy. G. Lefebvre, Etudes sur la Révolutiori Jrançaise,. 'PP•
266 et 2fi7 et, d'une manière générale, Ie chap. IV : Histoire agraire.
Il fallut attendre l'aube du xx• siècle pour que l'on prît èn Bel-
:gique, puis en France, les premières mesures de protection en.faveur
,des petits héritages, lesquelles - remarquons-le - n'étaient pas par-
ticulières aux biens ruraux.

15. L'examen de l'intérêt que présente la protection de l'unité


familiale d'exploitation excède les limites de notre sujet; la législa-
tion édictée à eet égard dans divers pays est brièvement analysée
dans les appendices aux études qui suivent ( 12).

16, On trouvera dans les ouvrages français et hollandais précités


àinsi que dans Ie recueil édité en 1952 par la Société nationale de
la petite propriété terrienne ( 13), Ie développement des arguments
qui, chiffres à l'appui, plaident en faveur d'une action rapide et
. ~fficace en matière de remembrement.
Les avantages directs de cette dernière opération peuvent se résu-
mer comme suit :
a) accroissement de la surface utile, et même de la superficie
absolue des terres, par la suppression de chemins charretiers,
des servitudes de passage, de nombreuses clotures;
b) réduction des parcours, entraînant économie de temps et cl'ef-
forts, et moindre usure du matériel;
c) parcelles bien groupées, d'ou économie de semences et d'ani-
maux de traits, possibilités nouvelles d'utiliser les machines et
les moteurs.
On remarque en Hollande une nette diminution des litiges entre
.voisins.
Le remembrement provoque une hausse sensible du rendement
(20 p. c.), des bénéfices de !'exploitant (30 à 40 p. c.), de la valeur

02) La législation helvétique en la matière, partie intégrante du Code civil


et du Code des obligations, a toutefois été relevée dans le corps même de
l'étude consacrée à la Suisse;
(13) Schmerber, op. cit., pp. 67 et s.; - Schepel, De ruilverkavelingswet,
1938, pp. 8 et s.; - Les exploitations agricoles devant le problème du remem-
brement, Bruxelles, 1952.
V oici quelques exemples typiques ( dans les tr~is cas les enclaves ont
complètement disparu) :
Staphorst (Pays-Bas) : 1670 propriétaires se partageaient 13.000 parcelles
sur 1.830 hectares. Après remembrement, il ne reste que 1.900 parcelles, d'une
superficie moyenne de 80 ares (au lieu de 14).
En Meurthe-et-Moselle : 12.500 propriétaires de 78 communes possédaient
175.000 parcelles d'une superficie totale de 45.000 hectares. Les remembre•
ments réduisirent de 71 % Ie nombre des parcelles, portant leur superfieie
moyenne de 26 ares à 89 ares.
À Vuitebmuf (Vaud), Ie remaniement parcellaire a réduit Ie nombre de
parcelJes de 480 à 94.

19
vénale (25 p. c.) et de la valeur locative. Dès lors la part des frais
Ïllcombant aux propriétaires est rapidement amortie. Les chiffres
précités sont de source française mais d'autres estimations ont donné
des résultats à peine inférieurs, sauf quant à la valeur vénale.
On -sait d'autre part qu'en Hollande l'exécution de divers travaux
annexes ( et notamment de routes, dont on estime la durée à 600
ans) ne laisse pas de valoriser la région.
Un commentaire allemand souligne que les remaniements par-
cellaires permettent de résoudre les problèmes d'adduction d'eau
créés par l'abaissement de la nappe aquifère et d'empêcher plus
aisément la pollution des eaux. Les pays souffrant d'un manque de
pluie, comme l'Espagne et Ie Maroc, apprécient Jes possibilités
accrues d'irrigation qui en résultent.
Comme Ie constate Schmerber (op. cit., pp. 21, 72 et 86), c'est
surtout la petite culture qui retire profit du regroupement de lopins
souvent très exigus.

17. Le remembrement permet à la fois de réduire les effectifs de


Ia main-d'reuvre agricole et d'occuper des chömeurs pendant une
assez longue période; on estime qu'en Belgique, il donnerait du
travail à 60.000 personnes pour dix ans. Il semhle de toute façon
inéluctahle que Ie nomhre des ouvriers agricoles aille en diminuant
au cours des années à venir.

18. En regard de ces avantages, dont l'étendue réelle peut être


vérifiée chez nos voisins du Nord et du Sud, Ie désagrément de de-
voir renoncer à une partie des terres que l'on tient de ses ancêtres
apparaît d'un faihle poids. Le propriétaire résidant en ville n'aura
pas grand peine à Ie suhir. Quant au propriétaire exploitant, il faut
espérer qu'un sentiment de solidarité et de salut commun suppléera
chez lui à l'éventuelle méconnaissance de ses intérêts majeurs. Une
propagande intelligente et méthodique permet de lever de nom-
hreux préjugés (13bis).
Aujourd'hui dans Benelux, demain dans Ie « plan vert », l'agri-
culture beige se trouve dans une situation inférieure. La recherche
de procédés d'exploitation moins onéreux est sans aucun doute plus
saine qu'un protectionnisme destiné à disparaître dans une Europe
économiquement unie. C'est dire l'urgence d'une réforme qui équi-
vaudrait à l'acquisition d'une province entière, de nature à com-
penser la diminution constante de la superficie cultivahle au héné-
fice de l'hahitat, de !'industrie et des voies de communication.

(13bis) Il est indispensahle, en cas d'expioitation indirecte, que Ie fermage


ooit majoré en fonction des avantages retirés par. Ie fermier et des investis.
iollments imposés au hailleur en matière d'amélioratións foncières.

20
Le remembrement légal - qu'il serail inexact de qualifier de
forcé (14) - ne constitue nullement un pas vers la collectivisation;
Ie projet de loi déposé par Ie gouvernement hollandais pour amé-
liorer la loi de 1938 ne diminue pas les garanties prévues. L'exploi-
tation familiale sort particulièrement renforcée du regroupement de
ses parcelles. On chercherait vainement de nos jours d'autres attein-
tes aux droits du propriétaire qui lui soient aussi directement
profitables (15).

19. Nous avons dit, écrit un ingénieur agronome, que Ie paysan


ne devait être ni brimé, ni hrutalisé, ni brisé; il faut Ie persuader,
Ie convaincre, obtenir sa résignation à défaut de son adhésion totale.
(Brasse-Brossard, Le destin de ragriculture française, p. 103). Rési-
gnation qui ne tarde pas à faire place à une collahoration active,
lorsque les avantages de l'opération ont pu être appréciés de visu.
On trouve des exemples de pareil retournement déjà au Danemark,
à Ia fin du XVIII" siècle; un monument fut élevé en l'honneur des
comtes de ,Bernstorff', promoteurs opiniatres de la réforme.

20. II faut se garder néanmoins de généraliser à l'excès et d'ou-


hlier l'intérêt que présente Ie parcellement dans certains cas. II
arrive que la dispersion des terres soit favorable à la polyculture on
à une juste répartition de zones diversement exposées (régions mon-
tagneuses par exemple) (16).
Le regroupement ne saurait avoir pour effet, d'autre part, d'ame-
ner la suppression de talus, dignes, rideaux d'arbres indispensahles
à la protection des cultures dans les régions maritimes.
Ces légères réserves ne concernent que des hypothèses particu-
lières et laissent tout leur poids aux considérations que l'on peut
faire valoir en faveur du rememhrement.

(14) Même en France. En fait les autorités françaises n'entament jamais


un remembrement sans avoir consulté au moins officieusement les intéressés;
s'en dispenser conduirait à un échec certain. ·
Il n'en va pas différemment en Allemagne,(in/J'a, n° 23).
(15) Sauf peut-être les expériences de planification démocratique comme
la Ten:nusee Valley Authority.
(16) Cf Le remembrement des exploitations agricoles (F.A.0.), p. 6 ,~
Adde : in/Ta, n° 25, Japon.

21
CHAPJTRE III

Droit comparé

21. Il· a paru préférahle de limiter les recherches approfondies


aux trois pays qui se rapprochent Ie plus du notre par Ie. genre «fe
vie et les conceptfons juridiques : la France, à qui nous devons lè
Code civil ; les Pays-Bas, dont Ie droit administratif s'est, comme.
chez nous, nettement inspiré des anciennes trnditions nationales;,
la Suisse, également située aux ·confins du monde germanique et
de la latinité. ·
Pour les autres pays, nous nous en tiendrons à un aperçu.
. Sur le plan qui nous occupe, la politique des Etats reste très
diverse (1), en relation d'ailleurs avec la .variété des conditions et
des conceptions économiques.
a) Pays favorables de longue date (2).
22. La Scandinavie avait déjà achevé la quasi-totalité de son
programme de remembrement lorsque Ie problème fut abordé par
les pays d'Europe ocèidentale. · ·
Au Danemark, des mesures ont été prises dès Ie XVIII• siècle à
la fois en faveur du regroupement et contre Ie morcèllement des
biens ruraux. Le remembrement est actuellement régi par la Ioi
du 25 avril 1949, l'arrêté royaI du 17 novembre 1949 et la circu~•
laire du 9 décembre 1949. Déjà l'ordonnance royale de 1781 encou-
rageait les cultivateurs au moyen de primes à transporter les bati-
ments sur lè sol de leurs nouveau;x domaines; c'est ainsi que Ie

. (1) De fréquents emprunts seront faits au · recueil puhlié par l'Université


de Wisconsin (E.-U.), chapitre consacré aux Land consolidation procedures :
comparative anal.yses. .
L'èxpression land consolidation est iei synonyme de remembrement, eneore
qu'elle puisse viser également l'élimination ou !'arrondissement des entreprisës
trop petites ( on trouve aussi reallotment).
Voy. aussi Tcherkinsky, Le prohlème du rememhrement des terres en Eu-
rope, également cité dans la Bihliographie,supra.
(2) Les premières mesures semhlent avoir été pratiquées dans l'Angleterre
médiévale, en Allemagne du Sud dès Ie milieu du XVI• siècle et dans Ie canton
de Berne en 1591; on trouve des exemples, au XVII" siècle, dans la Haute-Souahe,
concernant non seulement les champs mais l'hahitation (Maspétiol, op. cit., p.
31 et 388).

22
''±e'nîen~brement s'est accompagnê de la dispersion des villages, qui
'1(~~ póursuit encore à l'heure actuelle dans le Jutland méridional (3') .

·•; Unt évolution semblable s'observe en Suède (lois de 1757, de


1827, du 18 juin 1926): Lors de l'entrée en vigueur de la dernière
,:de I ces lois, la réforme avait été appliquée à plus de 20 millions
d'hectares et 85 p. c. des fermes avaient été transportées en dehors
des villages.
Le remembrement est imposé lorsqu'il est nécessaire et économi-
quement avantageux; s'il n'est qu'utile et avantageux, il faut un
·vote, favorable à la double majorité des exploitants et des s:uper-
'nci~s'. · ··
La soulte ne peut excéder 2 p. c.
En vertu de la loi du 30 juin 1947 sur Ie droit de préemption
-de la Couronne, l'Etat est habilité à acquérir ,des biens ruraux
~u'il recède libre d'hypothèques après les avoirs répartis de
, ~iJmère adéquate. C' est à ces :fins · que la quasi-totalité de la com-
mune de Hall, en Gothie septentrionale, a été achetée en 1949
{comp. in/ra, n° 26) - Australie ..
.,. ,_,:}i:,n Autriche, les premiers .efforts ont été tentés au début du
XJXe siècle. Le mouvement s'est développé vers 1875. La loi fédérale
-du 2 août 1932 est toujours d'application. Ce sont des cultivateurs
.assermentés, assistés d'un technicien qui procèdent à la répartition
-Hes parcellès (3) .
,,,·;Ên lrlande, le remembrement est lié au décongestionnement des
.,é~~tés surpeuplés de l'Ouest. Une législation remontant à 1891,
"~aintes fois remaniée, donne des pouvoirs étendus à une commissicin
foncière pour acquérir et remembrer des terres, et établir des colons
',d'atts des régions de population moins dense (4).
''..').'y::·-·,:

·' l23~ En Allemagne, Ie mouvement avait été amorcié au XVIIe


siè<\le et àvait pris de l'ampleur, surtout à partir du XIXe siècle,
-dans plusieurs états (Prusse, Hanovre, Saxe, Bade, Hesse ... ). Plus
-~'un' million ·d'hectares àvaient été remaniés dans Ie royaume de
,Prusse dès 1875. Le régime national-socialiste unifia la législation
par la loi du 26 juin 1936 et l'ordonnance du 16 juin 1937, qui
'..S"ubsistèrent à l'Ouest après la capitulation du Reich, sauf en Bavière

·•:·--(3) _Pour plus de détails, voy. l'exposé du professeur K. Skovgaard, :du


_Çqllège royal d'Agriculture et d'Art vétérinaire de Copenhague in Le remem-
' b'rètnent des exploit11tions agricoles, (Bibliographie, supra), pp. 49 à 65. ·
(3) Cf. H. Kallbrunner, 70 années de remembrement en Autriche, Prop.
~m., .p. 253. Remembrement se dît Flurverfassung en Autriche et Umleggung
en Allemagne.
,. , --(4) Pour plus' de détaHs; voir l'exposé 'émanant du gouvernement de l'Eire
.in Tiè remembremént des exploitations agricoles, op. cit.; pp. 76 à 90.

23
et en Rhénanie-Palatinat. La loi fédérale du 13 juillet 1953, entrée
en vigueur Ie 1er janvier 1954, tient compte de !'autonomie des
Laender (5). On estime que la moitié de la superficie arable de
l'Allemagne occidentale reste à remembrer.
La nouvelle loi comprend 159 articles, répartis dans les titres
suivants:
1) Les bases du remembrement rural;
2) Les intéressés et leurs droits;
3) La réorganisation du périmètre de remembrement;
4) Dispositions spéciales (tendant à la protection des hois en-
clavés et des forêts);
5) La fixation des modalités de remembrement;
6) Les frais;
7) Prescriptions générales sur la méthode à suivre;
8) Les voies de droit (devant des juridictions qui varient suivant
les Laender) ;
9) La cloture des opérations de remembrement;
10) La communauté des participants après la cloture des opéra-
tions;
Il) Dispositions finales et transitoires.
Sont amenés à coopérer : les autorités (les Laender, les com-
munes, les unions intercommunales), les organismes qui représentent
l'agriculture et les propriétaires. Ces demiers, qui élisent un comité
de direction, forment une communauté de droit public, représentée
par Ie président du comité.
Il semble que la loi concilie Ie respect des intérêts de chacun en
permettant aux doléances de s'exprimer et aux recours de s'exercer
utilement, tout en prévoyant des mesures d'accélération comme !'en-
voi en possession par provision. Il est veillé spécialement à l'impar•
tialité de. l'estimation des lots.
Les frais exposés par les services compétents tombent à la charge
du Land intéressé, tandis que les frais résultant de l'exécution du
remembrement incombent à la communauté des propriétaires.
Les remaniements font l'objet d'études préalables, générales et
spéciales. L'Union agricole allemande a établi un schéma qui sert
de base à des cours donnés sur la question. La géographie humaine
y prend autant de place que les problèmes agraires proprement dits.

(5) La loi a été publiée en extraits dans le Rec. lég. F.A.O., 1953, •• 3.
Une analyse en a paru dans le Bulletin de l'Oflice de presse et d"lnJor•
mation du gouvernement fédéral (édité à Bonn, n°" des 5 et 26 novemltre et
3 décembre 1954). Elle est applicable au Land de Berlin-Ouest (art. 158).

24
_ _ _ _ _ _ _""!"_ _ _ _ _-::,_,.....,......,---~-,-,.~~·•·-,·-••(.

Au cours de la dernière phàse d'un rememhrement l'adaptation


des entreprises à la situation nouvelle est f acilitée.
A l'heure actuelle l'Allemagne occidentale rememhre et remanie
annuellement 150.000 hectares. Il reste sept millions d'hectares à
reniembrer.

b) Pays favorables depuis peu.


24. L'Espagne prépare une loi générale sur la « concentración
parcelaria ».
En attendant, la loi du 20 décembre 1952 et les arrêtés des 16
février et 2 juillet 1953 (6) règlent Ie remembrement des exploita.
tions « dans les régions ou Ie morcellement de la propriété rurale
présente un caractère d'exceptionnelle gravité », à titre « essentielle-
ment expérimental » (art. 1"') .

25. Quatre-vingt-cinq millions d'habitants peuplent !'archipel du


Japon, d'une superficie semhlable à celle des îles hritanniques.
l'aire cultivahle ne dépasse pas 14 p. c. Le morcellement, déjà
intense (7), s'est aggravé depuis l'aholition du droit d'aînesse par
la Constitution ,de 1947. La première loi niponne sur Ie rememhre-
ment remonte à 1901; elle fut tenue en échec par les propriétairea
non-exploitants. En applicatiou de la loi sur les améliorations f on•
cières, entrée en vigueur en juin 1949, il était prévu pour la période
1951-1953 Ie rememhrement de 170.000 hectares. L'initiative de la
demande peut être prise par un organisme agricole local appuyé
par la moitié des propriétaires intéressés.
La réforme n'a pas rencontré Ie succès espéré pour les 1·aisons
-suivantes : attachement excessif à la terre ancestrale - difficulté
de trouver des conditions <l'irrigations équivalentes si de nouveaux
canaux ne sont pas creusés - pen d'intérêt pour la mécanisation
dans un pays ou les ressources des paysans ne leur permettent pas
~acquérir des machines - avantages d'un parcellement divisant
les risques en cas de calamités naturelles.
L'Union indienne se préoccupe simultanément de la division des
grands domaines et du rememhrement des petites propriétés. La
législation en ce domaine semhle surtout du ressort des Etats fédé-
rés. Plusieurs de ceux-ci ont adopté des lois sur Ie regroupement
de la propriété et pris des mesurea préventives contre Ie morcelle-

(6) Pnbliés respeetivement dans les n•• 4 de 1952 et 2 de 1953 du Rec.


lég. F.A.O.
(7) Superfieie moyenne des exploitations : 0,8 ha. Etendue moyenne des
pareelles : 6 a. Nombre moyen des lots par exploitation : de 10 à 20. Distanee
&otale, par exploitation. des bitiments aux pareelles : environ 4 km (aller).

25
,u1ent. Une loi de l'Etat de Bombay, promulguée en 1947, interdit
la création de « fragments >), c'est-à-dire de parcelles trop petites
pour être rentables.
: Le remembrement a généralement suhi l'évolution suivante : <\e
facultatif, il est devenu obligatoire sans condition, après avoir.,été
.décidé par la moitié des propriétaires permanents possédant les
.deux-tiers des terres. Dans Ie Madhya Pradesh, 1.008.000 hectares
out été remembrés de 1928 à 1950 dans 2. 700 villages; dans ie
Pendjab, 5 p. c. des terres avaient été remaniés à la fin de 1945.
Résultats jugés insuffisants (8).
Le Maroc fournit un exemple intéressant de remaniement limité
-en principe aux parcelles irrigables d'une région déterminée (Dahir
du 8 mars 1952 relatif au remembrement rural dans la vallée de
l'oued Farerh - Rec. lég. F.A.O., 1952, n° 1) .

.c) Autres pays.


26. A partir du siècle dernier, l'Angleterre a délibérément
négligé l'agriculture au profit de l'industrie et du commerce. Dès
Ja fin du XV• siècle, s'était opéré un remembrement aristocratiq'ue
:du sol, ayant pour effet la réunion des fermes et la destruction des
·villages. Les droits de succession très élevés provoquent depuis la
,deuxième guerre mondiale Ie morcellement de la grande propriété.
La question du remembrement ne se pose pas.
Aux Etats-Unis, il y a très peu de véritahles paysans, sauf daris
,certaines régions comme la Nouvelle-Angleterre. Les problèmes
·humains aussi bien que techniques se présentent de manière toute
autre qu'en Europe (9). Certains industriels ruraux n'hésitent pas
.à changer de culture, de région ou même de métier en cas de modi.
fication des conditions économiques. On n'observe ni concentration
excessive, ni partages incon:Sidérés, les fils de !'exploitant, à l'excep-
,üon d'un seul, allant chercher fortune en ville (10).

(8) M. L. Dantwala, « Les réformes agraires dans !'Inde», Revue inter11a-


tionale du Travail, 1952, p. 487. Relevons en passant que les disciples de
Gandhi ont obtenu en divers endroits que de gros propriétaires se dépouillênt
volontairement.
.. ( 9) La monoculture rend l' entreprise agricole trop sensible aux fluctua•
tions de cours. D'autre part, l'impression que les ressources du continent
américain étaient illimitées. a fait négliger l'entretien des sols; 40 millioris
ii'hectares doivent · être remis en état (cf. Jean Fauchon, « L'Agriculture amé-
.ricaine commence à travailler la tèrre en bon père de familie», Le Monde,
13 janvier 1952,. et Daniel Faucher : Le paysan et la machine, pp. 141 et su.iv.
~ Voy. aussi Programme de conservation du sol de 1953, Rec. lég. F.A.O.,
1952, n• 3 et Carrara, Aspects juridiques de Ia protection du sol, Annuaire
int. lég. agr., 1946, lntrod., pp. XVII et s.
(10) Il arrive - exceptions éonfirmant les règles - què par suite d.e dr-
constances particulières, un remembrement général s'impose dans tel villa!ie
.américain, alors que dans telle paroisse française il· s'est opéré en vertu d'une
..évolution Bpontanée (cf. Henri Mendras, Etudes de sociologie riirale, Paris,
1953; l'auteur compare un village mormon et une localité de l'Aveyron).

26
· En ltalie, Ie Códe civil de 1942 sè horne à prévoir, sous Ie titre
de << reordinamento della propriétà rurale», l'élimination des par-
èêlles inférieures à l'unité cultivahle minima ou leur regroupement
en «consortium» lorsqu'elles sont contiguës (art. 846 à 896). Le
grand problème est la division des latifundia.
Au Chili, les grands propriétaires sont autorisés à parceler leurs
biens-fonds à condition par exemple de les planter d'arbres au
préalable et 'de cónstituer les acquéreurs en coopérative forestière
(voy. Rec. 'lég. F.A.O., 1952, n° 1).
En Argentine, Ie régime péroniste favorise et impose Ie cas
·échéant Ie démembrement des grands domaines.
En Egypte Ie décret royal du 9 septembre 1952 a fixé à 80 hectares
l'étendue maximum des grandes propriétés.
En Australie, différents Etats possèdent une législation sur · ie
« closer settlement », permettant au Gouvernement d'acquérir ou
de reprendre des terres non exploitées pour les redistrihuer ensuite,
en vue d'une colonisation p1us intensive.
Au Viet-Nam, quatre ordonnances du 4 juin 1953 établissent une
réforme agraire; la seconde fixe à 36, 45 ou 100 hectares, selon
les régions, la superficie maximum qu'un propriétaire foncier peut
posséder.

d) Systèmes collectivistes.
27. Le communisme s'est impianté dans des pays ou prévalait
généralement la grande propriété. Le nouveau régime commença
par procéder au partage des terres; il toléra un certain temps, en
Hongrie par exemple, un gouvernement formé par les pètits pro-
ptiétaires. Au cours d'une seconde phase, ceux-ci sont acculés à
~~tr~r dans des coopératives kolkhoziennes, tandis que se déve-
loppent parallèlement les fermes d'Etat (Il) .
. La .constitutîon plus ou moins brutale- de vastes expioitations
agric~Ies placées sous Ie controle de l'Etat contraste avec la pro-
c~1uré winutieuse des rememhrements d'Europe occidentale.

28. On peut imaginer d'autres méthodes de réorganisation fon-


cière collectiviste. La Suède connut jusqu'au XIV• siècle la redis-
tribution périodique des parcelles et dans Ie Jura français il exis-

(11) Sur l'évolution des démocraties populaires, cf. François Honti, Face au
problème de .la terre (Le Monde, 4-5 janv. 1953 et Le Soir, 6 janvier 1953) et
Les ré/ormes foncières en Tchécoslovaquie (Bull. de droit tchécoslovaque, 1949,
p. 29). Evolution sujette à des ralentissements, et même susceptible de retours
en arrière comme l'attèstent les récents événements d'Allemagne orientale et
de Hongrie.

27
tait, à la veille de la Révolution, des prés dont Ie partage était
changé tous les ans (12) . Sous les Incas du Pérou, la propriété
était collective et la jouïssance familiale; !'Indien rècevait, en vertu
d'une répartition annuelle, un nomhre d'unités de culture propor•
tionné à l'importance de sa famille (13). En Israël enfin, la terre
a été déclarée propriété nationale (14) ; elle ne peut être amodiée
que pour un terme maximum de nonante-neuf ans. Le « kwoutza »
et Ie « kihhoutz » constituent des entreprises socialistes ou le travaH
est distribué selon les capacités, et les produits suivant les hesoirn,
de chacun; dans Ie « mochav collectif », les activités secondaire;;
restent familiales (15) .

CONCLUSION

29. Presque tous les états ou prédomine la petite propriété --


à la notahle exception de notre pays - ont introduit Ie remem-
hrement légal dans leur législation agricole.
L'expérience a démontré que son application systématique est
nécessaire, urgente et rentable dam de vastes régions. A défaut de
l'appui financier des pouvoirs publics, il serait vain de compter sur
des résultats de quelque importance, d'autant plus que d'autrt>.s
améliorations foncières doivent être entreprises en corrélation.
L'intervention des autorités peut se concilier parfaitement avec Ie
respect des droits des intéressés et des tiers.

(12) Maspétiol, op. cit., pp. 32 et 231.


(13) .Cf. Louis Baudin, op. cit., passim. L'unité était calculée d'après Ie ren•
dement présumé du sol, variable suivant les régions. Elle pouvait être consti-
tuée par des parcelles différentes se prêtant à des cultures diverses. L'lndien
devait en outre cultiver gratuitement les terres de l'Inca, du dieu Soleil et
des membres de la communauté se trouvant dans l'impossibilité de travaiUer
(pp. 69 et 70).
(14) Les polders du Zuyderzee asséché sont également domaines nationaux.
(15) Cf. Joseph Shapira, La colonisation agricole ouvrière, in Synthèses;
numéro spécial sur Israël, 1952, p. 234. La différence avec Ie système soviéti-
que réside dans la libre acceptation, dès l'origine, des méthodes collectivi~tes
et dans Ie fait qu'il existe des fermes familiales ( « mochav >) à coté des entre-
prises précitées. Quant à !'empire péruvien, il était fondé sur l'obéissance
passive de la masse socialisée.

28
APPENDICE
Ohstacles légaux au démemhrement
Liminaire
30. Tandis que se poursuit un peu partout Ie remaniement par-
cellaire, on se préoccupe dans •différents pays, ,d'une part de sta-
biliser les résultats acquis et d'autre part de. réduire les cau&es
d'émiettement (1).
En outre, les états qui pratiquent la colonisation intérieure
(Espagne, Italie, Pays-Bas, Portugal... ) ont établi des règles spé-
ciales pour les régions ainlli mises en culture.

t1) Interdiction de redémembrer.


31. Une première mesure, a vrai dire élémentaire, consiste à sou-
mettre à un controle la division des terres remembrées (2).
Plusieurs législations interdisent à titre préventif soit Ie morcel-
lement des exploitations moyennes et petites (jusqu'à 20 hectares
au Danemark) ou de l'unité familiale minima (Code civil italien
de 1942, art. 846 et suiv.), soit la formation de trop petites parcelles
{Code civil suisse de 1907, art. 616 - Inde). D'autres vont jusqu'à
introduire Ie controle de la vente de tous les biens ruraux (Japon;
loî hollandaise du 7 août 1953; proposition de loi beige).
Plusieurs états ont institué un droit d'emption ou de préemption
pour l'exploitant (France; Norvège; Espagne ... ), qui a comme effet
indirect de renforcer la cohésion de l'exploitation (3).

b) Droit successoral.
32. La constitution de biens de familles et les dérogations aux
luis successorales de droit commun semblent plus efficaces encore
1,our prévenir ou arrêter Ie démembrement des exploitations agri-

(1) Voy. Tcherkinsky, études citées dans la Bibliographie et Charle, L.


~tewart, op. cit.
(2) Cf. infra, France, n° 50; on pourrait multiplier les exemples.
(3) Voy. notamment : La loi espagnole du 15 juillet 1954 snr Ie règlement
des baux rnraux spéeialement protégés, par A. Ballarin. Rev. lé((. 11gr .•
1954,. p. 220.

29
coles. On note une évolhtion des idées qui tend, selon l'expression
du professeur Charles-L. Stewart, à « de-emphasize equal sharing >>
(découronner Ie partage égal) .
En Norvège, pays cependant très démocratique, !'ancien droit
d'aînesse s'est perpétué jusqu'à nos jours. Dans les hasses terre;; de
Ia Suède, ou ce droit a disparu de la. législation, les paysans ont
continué à l'appliquer, de même que les suhstitutions, par imita-
tion de la noblesse.
Une loi danoise de 1934 permet au propriétairc d'une exploita-
tion rememhrée de la léguer à celui de ses enfants qui lui paraît
Ie plus capahle de la reprendre.
Le Code civil suisse de 1907 favorise la reprise de l'exploitation
1·urale par un seul héritier, permettant notamment à celui-ci de
dédommager ses cohéritiers sur base de la valeur de rendement et
non suivant la valeur vénale (3bis).
Le Code civil italien de 1942 attrihue en principe à l'héritier
ayant la plus grande part l'immeuhle non commodément part~-
geahle (art. 720).
A partir de 1874, diverses lois rétahlirent en Prusse notamment
l'indivisihilité de la ferme et Ie droit de l'héritier privilégié. Les.
autorités occidentales d'occupation ont ahrogé en 1947 la Reich-
serbhofgesetz (ordonnance d'Empire sur les hiens ruraux hérédi-
taires) du 29 septemhre 1933 et les ordonnances suhséquentes. La
législation nationale-socialiste rendait incessihles, sans autorisation,
les trois-quarts des exploitations agricoles allemandes et en assurait
la transmission à un seul héritier; les autres héritiers se voyaient
attrihuer uniquement des droits alimentaires.
Outre son esprit autoritaire, ce système avait pour inconvénient
que les agriculteurs ne trouvaient plus facilement des crédits.
L'Espagne crée des hiens de famille à la faveur de la colonisation
intérieure (loi du 25 juillet 1952, Rec. lég. F.A.O., 1952, 11° 3 et
arrêté du 27 mai 1953, id., 1953, n° 2).

33. L'Angleterre se home à protéger les droits des veuves et des-


enfants mineurs. On sait d'autre part que Ie droit anglo-saxon ne·.
connaît pas la réserve.
Le homestead existe aux Etats-Unis depuis plus d'un siècle; c'est
une institution comparahle à l'asile de famille du Code civil suisse·

(3bis) Voy, in/ra, Suisse, n'" 12 et suiv.


Au Danemark, l'héritier rnprenant achète souvent l'exploitation à un prix.
de faveur. D'autre part des prêts accordés par Ie Trésor facilitent l'arrondis5e-
ment des héritages.

30
(art. 349 et suiv.} et au hien de famille prévu par la loi française:
du 13 juillet 1909 (4). Le homestead est insaisissahle.

34. Parmi les pays subissant l'influence du Code Napoléon, les


uns, tels l'Argentine et surtout Ie Brésil, s'en tiennent à l'égalité•
entre les héritiers; les autres, et notamment la France, s'ácheminent
vers l'exploitation paysanne héréditaire, favorisée tant par Ic droit
civil que par les lois fiscales.
Il est à noter que la solution du fidéicommis, qui pourrait jouer
rin role transitoire ne connaît pas de regain de faveur. On ne la
rencontre plus guère qu'en Scandinavie, à titre de survivancè.

c) Conclusions .
.'·35~ On ne saurait tirer une conclusion unique d'expériences faites·
dans des ·conditions et des circonstances très dissemhlahles. ·
Comment comparer en effet !'immense Brésil, aux po~sihHités ~
peu près illimitées, et un pays de culture intensive comme la Hol-
lande? Quelle commune mesure trouver entre l'lnde qui s'efforce
d'occuper Ie plus de main-d'reuvre possible aux champs et la Bel.,.
giq11e · ou la pénurie d'ouvriers agriooles s'accentue d'année en
année? Il faut tenir compte, souvent même à l'intérieur d'un même
pays, des différences de mentalité et de traditions (5).
Au surplus on constate dans tous les pays on la population pay-
sanne est acquise à l'idée du remembrement des terres, une ten~
dance spontanée à éviter de nouveaux ,démemhrements.
·• Il sèmhle préférable que la loi consacre plutot qu'elle ne pré-:
cède pareille orientation. On Ie conçoit sans peine pour ·les restric-
tio:Ó~ aux aliénations. La remarque vaut également pour la trans--
mission à un seul enfant de l'entreprise agricole familiale, mesurê
indispensable si l'on veut préserver la petite et la moyenne entre-
prise. Le partage inégal - l'expérience française Ie prouve - n'est
pratiqué que dans les milieux quine l'avaient pas ahandonné; il ne
se généralisera que Ie jour ou on découvrira derrière son apparente
injustice, une acceptahle nécessité. Encore faut-il trouver des
débouchés (6) pour les enfants écartés de l'exploitation,' de manière
que leurs revendications ne pèsent pas trop lourdement sur celui
qui la reprend. Conformément aux conceptions travaillistes-
actuelles, il convient de prévoir l'indemnisation des memhres de la

(4) Voy. in/ra, Suisse, n° 24 et Fi-ance, n" 67.


(5) Cf. in/ra, France, n° 74. Les législations suisse et ilalienne out expres•
sément égard aux différences régionales.
( 6) Généraleruent industrielle depuis que l'émigration et la colonisation ne
11ont plus choses aisécs.

31
famille dont Ie labeur n'a pas été rémunéré; la France a suivi la
Suisse dans cette voie.

36. Dans une récente chronique, M. René Savatier, professeur


à la Faculté de droit de Poitiers et lui-même agriculteur, attirait
l'attention sur l'originalité et l'importance du droit agraire contem-
porain (7) . Depuis que les ruraux ne forment plus la majorité de
la population, il n'y a plus confusion, comme en 1804, entre leurs
intérêts et ceux qu'entend régir en ordre principal Ie droit com-
mun (8). Il faut souhaiter que l'autonomie du droit agraire soit
plus nettement reconnue et que l'on pufase envisager la synthèse
de dispositions éparses.

(7) Du particularisme du droit agraire et de la nécessité de son en•


seignement (D., 1954, chron" pp. 91 et suiv) - Cons. Sur le droit successoral
du Code civil suisse, é.dité par Ie Secrétariat suisse des paysans, Broug, Argo-
Yie, à paraître au printemps 1955) et Michel de Juglan, Droit riiral, t. I :
L'exploitation rurale, Paris, 1949.
(8) Pourcentage de la population agricole :
1926-1941 1940.1952
Allemagne occ. 27 23
Belgique 17 (recens. 1929) 12 (recens. 1947)
Danemark 29 23
Etats-Unis 19 11
France . 36 36
Grande-Bretagne 6 5
ltalie 48 39
Pays-Bas 21 19
Suisse . • . . . . • . . 21 20
(d'après l'Annuaire de statistiques agricoles et alimentaires de la F.A.O" 1953).
La chute est paniculièrement fone aux Etats-Unis et en Belgique; daue
ee dernier pays la proportion était de 21,6 p.c. en 1910.
Sur l'évolution des populations rurales, cons. Villes et campagnes, civUi-
~ation urbaine et civilisation rurale en France, recueil publié sous la direc•
tion de Georges Friedmann, Paris, Armand Colin, 1953.

32
DEUXIÈME PARTIE
Du remembrement rural en France

LEGISLATION EN VIGUEUR
Lol DU 3 NOVEMBRE 1884 concernant les droits :fiscaux à percevoir
sur les échanges d'immeubles ruraux (D.P., 1885, 4, 17).
Lo1 DU 9 MARS 1941, sur la réorganisation de la propriété foncière
et Ie remembrement (Journal 0/ficiel du 18 avril, p. 1658;
Dalloz anal., 1944, lég., 206; Sirey, lois ann., 1941, 389).
D.ÉCRET DU 7 JANVIER 1942, portant règlement d'administration
publique pour l'application de la loi du 9 mars 1941 sur la
réorganisation de la propriété foncière et Ie remembrement
(J. 0., 29 janvier, p. 408; Dalloz anal., 19'42, lég., 57; Sirey, lois
ann., 1942, 918).
LOI DU 29 AVRIL 1944, relative à la mise en reuvre de la loi du 9 mars
1941 sur la réorganisation de la propriété foncière et Ie remem-
brement (J. 0., 3 mai 1944, p. 1214; Dalloz anal., 1944, lég., 61)
ÛRDONNANCE DU 4 OCTOBRE 1944, sur Ie rememhrement des pro-
priétés dont les limites ont été confondues du fait de la guerre
(J. 0., 14 octohre 1944, p. 936; Dalloz anal., 1944, lég., 120).
ÜRDONNANCE N° 45 - 1488 DU 7 JUILLET 1945, relative à la valida-
tion des actes dits loi du 9 mars 1941 sur la réorganisation fon-
cière et Ie rememhrement et décret du 7 janvier 1942 pour son
applieation (J. 0., 8 juillet 1945, p. 4162; Dalloz, 1945,
lég., 164).
LOI DU 10 MARS 1948, introduisant (sous quelques réserves) dans les
départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, la
loi du 9 mars 1941, validée par l'ocdonnance du 7 juillet 1945,
sur la réorganisation de la propriété foncière et Ie rememhre-
ment (]. 0., 11 mars, p. 2436; Dalloz, 1948, lég. 119), et décret
d'application du 17 mars 1949 (J. 0., 18 mars, rectificatif J. 0.,
l"' avril: Dalloz, 1949, lég., 190).
DtcRET DU 20 DÉCEMBRE 1954, tendant à accélérer l'aménagement
foncier agricole et Ie rememhrement (J. 0., 22 décemhre 1954,
Dalloz, 1955, lég., 9, précédé de !'exposé des motifs).

33
CHAPITRE PREMIER

Origines

a) XVIII" et XIXe siècles

1. Le rememhrement rural opérê dans la commune de Rouvres-


( Cote d'Or) , vers 1700, paraît être Ie plus ancien exemple dont on
ait gardé souvenir (1). Au déhut du XIX~ siècle, Mathieu de Dom-
hasle ohtint quelques résultats intéressants en Lorraine; mais trop:
souvent Ie célèhre agronome se heurta à l'opposition de quelques
récalcitrants, et l'expérience n'eut pas de suites sérieuses (2).
Il convient de rappeler également les « ahornements généraux·•<
pratiqués notamment dans les départements de la Moselle
et de la Meurthe-et-Moselle entre 1860 et 1914 (2bis).
Quelques lois particulières tendirent à remédier au morcelle~ent
et à la dispersion des terres :
Loi du 21 juin i865 (D. P., 1865, 4, 77) et du 22 décemhre 1888'
(D.P., 1889, 4, 4) sur les associations syndicales agricQles;
Loi du 3· no:vemhre 1884 (D.P., 1885, 4, 17, avec commentaire),.
sur les échanges d'immeuhles ruraux, prévoyant un tarif de faveur
pour les mutations de ces immeuhles, à la condition cependant
qu'ils soient situés dans la même commune ou dans des commune.&.
limitrophes (art. rr, § r'); ou que l'un des immeuhles échangés'
soit contigu et que ]es hiens aient été acquis depuis plus de deux
ans ou recueillis par héritage (art. l"', § 2). Le transfert des droits-
réels n'était pas prévu;
Loi du 17 mars 1898 sur la révision du cadastre (D.P., 1898, 4, 38).~·

(1) J.D., D. crit., 1942, lég., p. "15. Toutefois Bloch (op. cit., p. 19) signale
qu'au XVII• siècle, les terres de villages dévastés par la guerre furent remem•
hrées. Dans les textes du XVIII~ siècle déjà, on trouve l'expression c: redistri-
hution des parcelles » (A.J. : c: Le rememhrement », L'Actualité juridique,
1946, p. 170). Le mouvement physiocratique suscita des rememhrements en
Lorraine et en Bourgogne aux environs de 1775 (Maspétiol, op. cit., p. 229) •.
On a dit également « réunion territoriale ». ,.
(2) Massot, Rev. lég. agr. 1951, p. 108.
(2bis) Poirée, Réorganisation foncière et remembrement de la propriété--
rurale, pp. 42 et suiv. ·

34
h) 1916 - 1939
2. Dès 1916, Ie Parlement français, dans Ie hut de pallier Ie défi-
cit de la production ~gricole dû aux destructions et au manque de
main-d'reuvre, prépara deux mesures de ·portée générale, l'une
applicahle à l'ensemhle du territoire, l'autre aux zones dévastée~-
Ce furent les lois du 27 novemhre 1918 et du 4 mars 1919.
L'attention avait été attirée sur la « pulvérisation » du sol fran•
çais; elle entraînait cette coïncidence que de riches régions co~me
la Limagne n'étaient plus exploitées complètement, les paysans
laissant en friche les parcelles difficiles d'accès ou trop exignës.
Dans Ie département des Ardennes, 8.619 propriétaires possédaient
179.819 parcelles dont 53.348 enclavées (superficie moyenne : 27
ares). On a pu citer récemment Ie cas d'un métayer de la Loire
Inférieure qui doit parcourir 72 kilomètres avec ses breufs pour
ramasser une récolte de 15 tonnes de hetteraves.
Ces deux exemples, qu'on pourrait multiplier, dénotent une {H.-
vision et une dispersion qui atteignent parfois les limites de l'ahsurde.

l°) Loi du 27 novembre 1918 et Décret-loi du 30 octobre 1935.


3. La première, dite loi Chauveau, {D. P., 1920, 4, 166, avec com-
mentaire; décret d'application du 5 juillet 1920, id., 167), avait
pour ohjet de « faciliter Ie rememhrement de la propriété rurale ».
En voici les grandes lignes :
- Il s'agit de rememhrements collectifs, portant sur des
immeuhles non hätis (art. l°') ;
- Le hut exclusif est famélioration de fexploitation agricole des
hiens qui y sont soumis (art. 1••, al. 2);
- Echanges en nature, la soulte n'étant prévue qu'à titre excep-
.tionnel (art. 3) ;
- L'opération est réalisée par des associations syndicales lihres
(formées spontanément) ou autorisées (suscitées par Ie préfet), dont
les décisions, prises à la majorité, lient les propriétaires qui se sont
ahstenus d'en faire partie aussi hien •que la minorité (art. 4);
- Les différends sont arhitrés et l'accord est homologué par une
commission (3) statuant en dernier ressort, présidée par Ie juge de
paix et composée de trois fonctionnaires, un notaire désigné par Ie
préfet et quatre propriétaires élus (dont deux forains) (art. 4);
- Outre Ie rememhrement proprement dit, des travaux d'amé-
lioration foncière connexes peuvent être décidés (art. 5);
- Les droits réels et les actions réelles sont transportés de plein

(3) Sur la nature juridique de la commission et Ie recours au Conseil


d'Etat, voy. in/ra, note 5.

35
droit, avec les mêmes modalités, sur les immeubles attribués; toute-
fois les tiers peuvent présenter leurs dires et observations devant
Ja commission (art. 6).

4. La loi de 1918 fut remplacée par Ie décret-loi du 30 octobre


1935 (D.P., 1935, 4, 533, avec commentaire; décret d'application du
l" septembre 1936, ]ourn. Off., 5 septembre 1936). Les innovations
tenaient compte des leçons de l'expérience.
Caractéristiques :
- Il est précisé que certaines catégories d'immeubles ne sont
pas obligatoirement incorporées (vergers et jardins, etc.) (art. r•);
- C'est la valeur de productivité qui est retenue pour les
échanges (art. 2);
- La faculté de délaissement contre indemnité est supprimée
(entrave sérieuse pour des associations syndicales sans grandes res-
sources);
- Les pouvoirs et la composition de la commission sont quelque
peu élargis (les propriétaires conservent la majorité, malgré l'adjonc-
tion de l'ingénieur en chef du génie rural (4) , ou de son délégué et
du greffier de la justice de paix; d'autre part ils doivent désormais
n'avoir aucun intérêt à l'entreprise) (5);
- Est supprimé Ie vote final de l'assemblée générale du syndicat
agricole, qui pouvait annihiler les résultats acquis (cf. art. 4, 2°,
in fine);
- Le transfert des baux est prévu (avec possibilité pour les fer-
miers et métayers de présenter leurs observations) (art. 6);
- En cas de partage ultérieur, les subdivisions devront conserver
des accès équivalents (art. 6 in fine), ce qui restera aisé, Ie remem-
hrement s'accompagnant de l'aménagement d'un réseau serré de
chemins aménagés.

5. Environ 54.000 hectares furent remembrés en vertu des lois


de 1918-1935 (6).

(4) Fonctionnaire dont Ie róle ira grandissant.


(5) La loi du 27 novembre 1918 et Ie décret-loi du 30 octobre 1935 ne don-
nèrent lieu qu'à un contentieux pen abondant devant Ie Conseil d'Etat (E. D"
op. cit.). Les quelques décisions intervenues s'inspirèrent des mêmes principes
(Jlle les arrêts rendus à propos de la loi du 4 mars 1919 (cf. infra, n" 7.
C'est ainsi que fut reconnu à la commission arbitrale Ie pouvoir d'apprécier
eouverainement les faits (arrêts des 25 mars 1936 et 19 janvier 1938, cités dans
l'étude mentionnée).
(6) Sine, Noticms sur le remembrement des terrains agricoles en France
p. 187; - Schmerber, op. cit., p. 51.

36
II faut y ajouter les échanges qui ont été opérés en vertu de la
loi de 1884 (7).

2°) Loi du 4 mars 1919.


6. D'autre part, la loi du 4 mars 1919 sur la délimitation, Ie lotis-
sement et Ie remembrement_ des propriétés foncières dans les
l'.égions dévastées par Ie fait de la guerre (D.P., 1920, 4, 425, av~
commentaire; décret d'application du 10 septembre 1920, ul., 427)
trouva une plus large application puisque, dans une aire relative-
ment limitée, elle regroupa 570.000 hectares (8).
- C'est au préfet que revient, a·près avis du maire, d'ordonner
Ja reconstitution foncière. La commission communale créée à eet
effet est présidée par Ie juge ,de paix; les propriétaires, désignés
par Ie préfet sur une liste établie par les autres membres, y détien-
nent une faible majorité (6 sur 11).
- La commission peut, de même que les propriétaires visés,
demander un nouveau lotissement au préfet qui prend un arrêté
après avis d'une commission départementale présidée par un magis-
trat et composée de neuf propriétaires (sur 13, memhres).
- Il n'est prévu de recours devant la commission départemen-
tale que si le nouveau lotissement est effectué par la commission
communale et non par les intéressés, réunis en association syn-
dicale.

7. La loi du 4 mars 1919 a été la source d'un intércssant


contentieux (cf. E.D. : La jurisprudence devant le Conseil d'Etat
en matière de rememhrement agricole, loc. cit.) à propos de la
procédure, ·de la nature de la commission départementalc et de la
portée de certaines dispositions.
L'article 51 du décret du 10 septembre 1920 édictait : « Les déci-
sions rendues ... soit par la commission communale (après renvoi
ordonné par la commission départementale), soit par celle-ci, sont
définitives à l'égard de tous les intéressés, sauf recours au Conseil
d'Etat pour incompétence, excès de pouvoir ou violation de la loi. »
Une jurisprudence constante décida que la commission départe-
mentale, et elle seule en principe, avait Ie caractère d'une juri-
diction. Le Conseil d'Etat siégeait comme juge de cassation, avec
toutes les conséquences qu'on en devine sur la présentation et la
nature des moyens.

(7) De 1919 à 1929, ces échanges, au nomhre de 916.829, ont porté sur
447.855 hectares (Massot, loc. cit.).
(8) Sine, loc. cit., - Schmerher indique un total de 700.000 hectares (p. 56).
(9) J. D., loc. cit. Dans la Somme, l'application de la loi de 1919 permit de
ramener Ie nomhre de parcelles de 220.000 à 40.000 (A. J., loc. cit.). - Maspé-
tiol cite d'autres exemples aussi concluants (op. cit., p. 417).

37
Le Conseil d'Etat tira du fait que la Commission départementale
constituait une juridiction, la conséquence qu'elle était tenue de
respecter les règles générales de procédure compatibles avec son
objet comme les règles spéciales qui la régissaient (secret des déli-
hérations - obligation de motiver - obligation de statuer sur les
moyens de droit - respect des droits de la défense).
Enfin, Ie Conseil d'Etat précisa l'interprétation que devaient
recevoir différentes prescriptions légales. Il décida par exemple
que la commission départementale ne pouvait, à l'occasion des
opérations de rememhrement, procéder au partage judiciaire des
hiens indivis; elle devait attrihuer des parcelles indivises en rem-
placement de celles qui sont apportées sous ce régime (deux arrêts,
cités dans l'étude susmentionnée). D'autre part, la loi n'accordant
pas à celui qui avait acquis des parcelles postérieurement à la loi
plus de droits que n'en tenait son auteur, l'acquéreur ne pouvait
prétendre qu'on doive tenir compte en vue du regroupement de
ses terres, à la fois de ce qu'il a acquis par succession postérieure-
ment à la loi et de ce qu'il possédait en propre avant 1914.

8. On verra que Ie législateur de 1941-1945 s'est largement inspiré


des lois antérieures.

38-
CHAPITRE II

Depuis 1939
a) Situation en 1939
9. A la veille du dernier conflit, les services compétents consiclé-
raient que 22 p.c. du territoire cultivable, soit 10 millions d'hectares,
:SOuffraient encore d'un morcellement excessif (la superficie totale
de la France est de 55 millions d'hectares) (1).
Les causes de eet état de choses se trouvent dans les tendances
·individualistes et égalitaires consacrées par la Révolution, reprises
par le Code civil et d'ailleurs suivies jusqu'à nos jours par les
idées et les mreun (2). Comme la règle du partage égal s'applique
très souvent à de petites propriétés, il était fatal que les exploita-
.tions se composent toujours davantage de terres éparpillées et
exiguës (3). On a qualifié Ie Code Napoléon de « machine à
hacher Ie sol ».
La dépopulation et spécialement la politique de !'enfant unique
-avaient réduit Ie nombre des partages. Un regroupement systéma-
tique ne s'en avérait pas moins nécessaire et urgent. L'agriculture
moderne, mécanisée, s'accommode mal en effet de l'émiettement
des exploitations (4) .
Le vote à la majorité simple .des propriétaires visés avait sou-
vent fait obstacle au remembrement. Si depuis 1935 il ne pouvait

( I) L'estimation actuelle est de 14 millions d'hectares, soit 4't} p.c. du te1·•


-i·itoir.e agricole français .
.. . (?) Dans « Une enquête sur l'application du droit dans la pratique • la
situation juridique de l'enfant > (Rev. trim. de droit civil, 1950, p. 22), Ie
professeur Houin signale toutefois la survivance du dróit d'aînesse en Béarn et
chez certaines families nohles de Saintonge, et l'hahitude dans d'autres régions
de « faire un aîné » d'un fils pourvu, du consentement de ses cohéritiers, d'une
part entamant même la réserve (comp. in/ra, n" 74).
Ces exceptions ne font que confirmer la règle de plus en plus générale de
l'égalité. Toutefois, il arrive fréquemment qu'un mouvement continue de
s'étendre, alors qu'une réaction peut-être irrésistible est déjà amorcée.
·.·_. (3) Il faut reconnaître que Ie morcellement a parfois ses avantages (voy.
~upra, lntroduction gén" n° 20).
( 4) Cf. Daniel Fancher, Le paysan et la machine, et spécialement Ie chapitre
"intitulé « La machine agricole dans les démocraties agraires : l'exemple de
la France». ·

39
remettre en question les opérations dont Ie principe avait été
admis, il n'en constituait pas moins une entrave sérieuse. Les résu:l-
tats pratiques demeuraient dérisoires en regard de l'immensité de
la täche. Il fallut envisager un régime moins lihéral, sans toutefois
négliger l'assentiment et les desiderata des intéressés.

b) Législation de guerre et d'après-guerre


10. Le ministère de l'Agriculture prépara un projet de loi dans
ce sens. Les événements empéchèrent Ie Parlement de l'examiner.
Le gouvernement de Vichy Ie mit en application. Ce fut la loi
(!'acte dit « loi ») du 9 mars 1941 (5), complétée par Ie décret du
7 janvier 1942 et la loi du 29 avril 1944.
La loi de base et Ie décret d'application, ainsi que les a1·ticles r",
2 et 5 de la loi du 29 avril 1944, furent validés par l'ordonnance
du 7 juillet 1945. De légères modifications furent apportées au
texte de 1941; elles se ramènent, à peu de chose près, au rem pla-
cement de l'intervention des organismes corporatifs créés sous Ie
régime de l'Etat français par celle de nouveaux organismes d'action
agricole.
L'introduction de la loi de 1941 en Alsace-Lorraine s'est faite
sous de légères réserves, tenant compte notamment de l'ëxis-
tence dans les trois départements du « livre foncier » et de l'insti-
tution du juge du livre foncier (loi du 10 mars 1948 (6).

ll. Il faut souligner que la loi du 9 mars 1941 tend non seule-
ment à réduire Ie nomhre de parcelles mais aussi leur dispersion.
« Il est tout à fait impossihle, déclare Ie rapport au chef de l'Etat,
de concevoir la disparition du morcellement dans une commune ou
les hîitiments de tous les cultivateurs resteront rassemhlés en un
seul point. » La réunion des parcelles exige par conséquent la dis-
persion des hätiments agricoles (d. art. 10, 11, 17, 20, 21 de la loi
et 22, 38, 39 du décret du 7 janvier 1942).

12. La loi de 1941-1945 a ahrogé celles de 1919 et de 1935, ainsi


que leurs décrets d'application (art. 38), sous réserve de disposi-
tions transitoires (art. 36 et 3,8). De même Ie décret ,du 7 janvier
1942 a ahrogé ceux du 10 septemhre 1920 et du l"' septembre
1936 (art. 56).
A l'heure actuelle, il faut tenir compte des modifications appor-
tées par Ie décret du 20 décembre 1954 - que suivant l'usage nous

(5) Les trois premiers cbapitres de cette loi sont insérés au livre f"• du
Code rural, sous Ie titre < De l'aménagement foncier » et y forment l'actuel
titre VI (art. 39).
(6) Voy. < Le remembrement de la propriété et Ie livre foncier », Rev. lég.,
doctr. et jur. du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la MoseUe, 1947, 57 -
Cf. in/ra, n" 20, note 6).

40
qualifierons de décret~loi; Ie règlement d'administration puhlique
édicté par décret du 7 janvier 1942 sera adapté en conséquence.
13 .. La loi du 3 novemhre 1884 est demeurée en vigueur. Elle
n'est pas sans effet. Les échanges qu'elle favorise, auxquels il faut
ajouter les incorporations de terres, voire de petits domaines par
les exploitations grandes et moyennes, ont amené une nette dimi-
nution du nomhre des parcelles au cours de ces dernières années (7) .
Il va sans dire que cette concentration relative - que va activer
l'application du décret-loi - ne saurait justifier un ralentissement
du programme de rememhrement (8) .
14. Le décret-loi contient un titre II consacré aux « encourage-
ments exceptionneis aux échanges amiabies » effectués dans les con-
ditions de la loi de 1884 et approuvés par la commission départe-
mentale de réorganisation foncière et de rememhrement. Il est prévu.
selon les termes de l'exposé des motifs :
a) Des avantages généraux accordés aux échanges, consistant en
l'exemption de droits, Ie remboursement de cinq ans d'impots
fonciers et une participation de l'Etat aux frais d'échange (art. 3
et 4);
h) La création de « comités d'échanges amiables », pouvant être
créés jusqu'au 31 décemhre 1958 à la diligence du préfet, sur propo-
sition d'éiéments représentatifs de la profession ou des services
compétents (art. 5, 7, 8 et 9) ;
c) La limitation des avantages dans le temps. Ceux-ci ne s'appli-
quent qu'aux échanges réalisés soit dans les deux ans de l'institution
du comité d'échanges amiables, soit, à défaut, avant Ie 31 décemhre
1958 (art. 6, 7 et 9) .
En outre, dans Ie cadre d'opérations de rememhrement, les échan-
ges amiahles pourront avoir hien dans les périmètres ou les com-
missions de rememhrement les auront jugés suffisants (art. 7) (9).
15. Il y a lieu de signaler en passant une ordonnance du 4 octo-
hre 1944, sur Ie rememhrement des propriétés .dont les limites ont
été confondues du fait de la guerre (Dall., Rec. an., 1944, lég., 120) .
Elle prescrivait une redistrihution provisoire, préliminaire au
rememhrement, de parcelles dont les limites ont été houleversées
ou confondues, à la suite des hostilités, sans mutation de pro-
priété.
(7) D. Faucher, op. cit., pp. 224 et suiv.
(8) Le décret-loi prescrit d'ailleurs d'envisager Ie remembrement chaque
.fois que les résultats obtenus par un comité d'échange auront été insuffi-
sants ( art. 6, al. 3 ) .
(9) Sur l'importance que peuvent prendre les échanges, voy. supra, n° 5,
note 7.

41
CHAPITRE III

Du remembrement des exploitations rurales ·

a) Introduction
16. La loi de 1941-1945 comporte trois chapitres principaux res-
pectivement intitulés : Des commissions communales et départe-
mentales de réorganisation foncière et ,de rememhrement (art. r•
.à 6). - De la réorganisation de la propriété foncière agricole
(art. 7 à 16). - Du rememhrement des exploitations rurales
(art. 17 à 32). Un dernier chapitre contient des « Dispositions
.diverses » et notamment les mesures ahrogatoires et transitoires
(art. 34 à 40).
Le décret du 20 décembre 1'954 n'a pas modifié ce plan.
Comme la seconde partie était restée lettre morte et Ie restera
jusqu'à la mise en application effective de ce décret, nous étudie-
rons tout d'abord les chapitres I et 111 de la loi, nous attachant à
mettre en relief les idées neuves introduites tant en 1941 qu'en 1954.

l°) Loi de 1941-1945.


17. Hormis les dispositions relatives ·à la réorganisation foncière,
Jes principales innovations portèrent sur ce qu'on a appelé les méca-
nismes juridiques et sur la procédure. A eet égard, Ie législateur
r;'est inspiré de la loi de 1919 plutöt que du décret-loi de 1935.
Il a préféré un système autoritaire, plus nettement intervention-
niste. Aux échanges est substituée la formation d'une « masse >
rnivie d'une nouvelle distrihution.
Au lieu d'une association syndicale supervisée par une commis-
Üon arbitrale, il est prévu une commission communale (ou inter-
.communale) unique composée en majorité ,de fonctionnaires. Les
.décisions ne dépendent plus au premier chef des propriétaires inté-
ressés, ni même de leurs délégués; c'est l'administration qui mime

(1) Dans la suite de ce chapitre, L. désigne la loi de 1941-1945, D. Ie décret


d'application du 7 janvier 19·12 (qui n'est plus cité que sous réserve de pro-
.chaines modifications) et D.-L. Ie décret-loi du 20 décemhre 195•1, édicté en
vertu de la loi du 14 août 1954, antorisant Ie gouvernement à mettre en rouvre
un programme d'équilihre financier, <l'expansion économique et de progrès
social.

42
les opérations, sous la haute main du préfet. En revanche, plusieurs
voies de recours verticales sont instituées : commission départemen:.
t~le, ministre de l'Agriculture, Conseil d'Etat.
. Les « associations foncières » n'ont qu'un role limité, postérieur
à l'achèvement des opérations (L., art. 25).
,La loi tend non seulement à mieux grouper les exploitations
existantes, mais à en créer de nouvelles et à favoriser Ie rehoise-
111ent (L., art. 21, al. 2 - cf. aussi art. 10, 11 et 12).
Il faut signaler encore qu'un role est désormais attrihué aux
fermiers et métayers (L., art. l"', notamment).
Enfin des mesures sont prises pour éviter Ie morcellement ulté-
rieur des exploitations remembrées ou créées (L., art. 31).

2") Décret-loi de 1954.


18. Le décret institue en premier lieu, sous la présidence du mi-
nistre de l'Agriculture, un Comité supérieur consultatif d'nménage-
nie~t foncier, chargé de susciter et de coordonner toutes les actions
devant contribuer à la réalisation des opérations de rememhrement,
de réorganisation foncière et d'échanges amiahles de biens fonciers.
Sa composition est fixée par décret.
Le role du· comité est semhlahle à celui de la Commission centrale
de techniculture des Pays-Bas (2) .
· Sur sa proposition, le ministre de l'Agriculture désigne les com-
münes <lans lesquelles la commission communale doit être ohliga-
toirement constituée (art. 2), ce qui accentue Ie caractère autoritaire
de la législation et, il faut en convenir, renforce sou efficacité.
Nous avons vu que Ie décret encourage les échanges amiahles.
Enfin, diverses mesures relatives au rememhrement rural tendent
à rendre les opérations plus rapides et plus complètes. C'est ainsi
notamment qu'au cours de celles-ci il est désormais interdit aux
propriétaires de modifier l'état des lieux, sous peine de sanctions,
et que tout projet de mutation de propriété entre vifs peut se
tro~1ver arrêté si la mutation envisagée est susceptihle d'entraver
la réalisation du nouveau lotissement (D.-L., art. 25, introduisant
un article 30bis) .
.Il est tenu compte davantage des intérêts des exploitants.
Dorénavant les possibilités offertes par les trois procédés : re-
:rnemhrement, réorganisation foncière et échanges amiables, sont
utilisées simultanément.

I 2) Cornp. in/ra, Pays-Bas, n° 13.

43
b) Organismes
l ") Commissions communales.
19. A la base se trouve la Commission comm,male de réorganisa-
tion foncière et de remembrement (L., art. rr, mod. par D.-L.,
art. Il) (3).
Elle peut être instituée par arrêté du préfet dans toute commune
ou l'utilité en a été signalée (4).
Sont qualifiés ·pour adresser une demande à eet effet : les set·-
vices intéressés - les propriétaires - les exploitants, sans compte1·
l'intervention du ministre de l'Agriculture (supra, n° 18).
Depuis Ie décret-loi, la commission est tenue de veiller à l'amé-
nagement de l'ensemhle des propriétés rurales non ha.ties d'une
commune; les échanges doivent être opérés dans la zone non remem-
hrée; l'aménagement peut être étendu à des parties de communes
limitrophes, si la commission estime que les propriétaires ou les
exploitants de ces territoires y trouvent avantage.
Il suffit semhle-t-il qu'un seul propriétaire ou fermier inter-
vienne pour que se déclenche, si les autorités (5) Ie jugent utile,
une opération dès lors inéluctahle. Certes les intéressés dispose-
ront de divers moyens de se faire entendre et de plusieurs voies de
recours, mais seulement en ce qui concerne les modalités et la pro-
cédure - et non sur Ie principe même du rememhrement. Régime
qui rappelle heaucoup plus celui de la loi de 1919 sur Ie remem-
hrement des régions dévastées que celui, encore démocratique, de
la loi de 1918-1935. On est loin de l'association de propriétaires,
maîtresse de l'entreprise, qu'avait prévue la loi de 1918.

20. La commission communale est ainsi composée (L., art. 2,


mod. par D.-L., art. 12) :
Le juge de paix, président, ou, à son défaut, Ie juge de paix de
l'un des cantons voisins, désigné par Ie premier président de la
Cour d'appel (6);
Le délégué de l'ingénieur en chef du génie rural;
Le délégué de l'ingénieur en chef, directeur départemental
des services agricoles;

(3) Sur Ie róle, capital, de la sous-commission communale, voy. infra, n° 35.


(4) L'arrêté est puhlié dans la commune par voie d'affiche (D., art. 3).
( 5) En l' occurrence Ie préfet du département, fonctionnaire dé pendant du
pouvoir centra! dont les pouvoirs sont sensihlement plus étendus que ceux
de nos gouverneurs de province, qui doivent compter avec la députation per-
manente.
C'est l'ingénieur en chef du génie rural du département qui instruit les
demandes (D., art. l "). Il joue en quelque sorte Ie role de ministère public.
(6) En Alsace-Lorraine, Ie juge du livre foncier fait également partie de
la commission.

44
Le délégué du directeur départemental des contrihutions directes
et du cadastre;
Le délégué du conservateur des eaux et forêts;
Le maire ou l'un des adjoints désigné par lui ;
Trois propriétaires exploitants de la commune (pouvant être rem-
placés, à leur défaut, par des exploitants non propriétaires) choisis
par Ie préfet, après avis de l'ingénieur en chef, directeur des ser-
vices agricoles, sur UDe liste d'au moins huit noms présentée par la
ehamhre d'agriculture. Peut-être vaudrait-il mieux désigner des
propriétaires non intéressés personnellement dans l'évaluation des
terres (7).

21. Somme toute neuf membres, dont UD magistrat de l'ordre


judiciaire, président (8) - quatre fonctionnaires - un magistrat
eommunal - trois propriétaires desquels il est exigé qu'ils soient
exploitants (9) et aient été proposés par UDe organisation agri-
cole. On aura remarqué que, depuis 1954, les exploitants non
propriétaires peuvent éventuellement faire partie de la commis-
sion (10).
Le secrétariat est assuré non plus par Ie greffier de la justice de
paix (avant 1941) mais par UD fonctionnaire du génie rural, désigné
par l'ingénieur en chef (L., art. 2, avant-dernier alinéa), qui ne
prend pas part aux votes semhle-t-il.
La commission peut appeler, à titre consultatif, toute personne
dont il lui paraît utile de provoquer l'avis.

22. Les memhres de Ia commission communale, comme de la


eommission départementale d'appel, doivent être Français, majeurs,
et jouir de leurs droits civils (D., art. 15). Les memhres de l'une
ne peuvent appartenir à l'autre (ûl., al. 2). Une indemnité est en
prin5pe allouée (art. 17).
Devant les commissions, les intéressés ont la faculté de se faire
représenter, soit par leurs fermiers ou métayers, soit par leurs

(7) Sine, op. cit., p. 170.


Il faut dire que désormais Ie préfet choisit en outre sur la même liste deux
suppléants appelés à siéger, soit en cas d'ahsence d'un titulaire, soit anssi
Jorsque la commission délihère sur une réclamation oii l'un des memhres
titnlaires est intéressé ( art. 2 nouveau, al. 9).
(8) A parité de voix, celle du président est prépondérante (D., art. 4, al. 3).
(9) Il n'est plus question de notaire. Le professeur Becqué Ie déplore
(étude citée dans la Bibliographie, n° 18)
(10) Il est vrai que dans l'état présent du droit positif, un fermier est préfé-
rahle à un propriétaire non exploitant, dont les prérogatives ne cessent d'ail-
Jeurs de s'amenuiser.

45
parents ou alliés jusqu'au 6• degré, soit par un avocat ou par un
àvoué, dispensé de procuration (D., art. 14) (Il).

2°) Commissions intercommunales.

23. A la demande de commissions de communes limitrophes, Ie


périmètre peut englober des terres ressortissant à ces communes eQ
vue d'un même remembrement (art. 6) . · ·
Dans ce cas, il est institué une commission intercommunale, ayant
les mêmes pouvoirs que les commissions communales.
L'appel est porté, s'il s'agit de communes appartenant à des
départements différents, devant la commission du département ou
se trouve la plus grande étendue de terrains intéressés par l'opé-
ration (id., in fine). Il n'existe donc pas de commission interdépar-
tementale.

3°) Commissions départementales


24. La commission départementale est ainsi composée (L., art. 5.
mod. par art. 15 D.-L.) :
Un magistrat de l'ordre judiciaire, président, désigné, à la
demande du préfet, par Ie premier président de la Cour d'appel;
L'ingénieur en chef du génie rural;
L'ingénieur en chef, directeur des services agricoles;
Le directeur départemental des services agricoles;
Le conservateur des eaux et forêts;
Le directeur des contrihutions directes et du cadastre;
Le directeur de l'enregistrement et des domaines (on les délégués
de ses chefs de service) ;
Le président de la chamhre d'agriculture ou son représentant;
Le président de la fédération départementale des syndicats d'ex•
ploitants agricoles ou son représentant;
Cinq propriétaires, dont quatre exploitants au moins, choisis par
Ie préfet, après avis de l'ingénieur en chef, directeur des services
agricoles, sur une liste d'au moins quinze noms, présentée par la
chamhre d'agriculture (12). Un fonctionnaire du service du génie
rural rempJit les fonctions de secrétaire.
La commission peut appeler, à titre consultatif, toute personne
dont il lui paraît utile de provoquer l'avis.

( 11) Il semhle hien que seuls les avocats ou avoués soient dispensés de
justifier de leur mandat par écrit.
(12) En outre cinq suppléants, choisis par Ie préfet sur cette liste sont
appelés à siéger dans les mêmes circonatances que les suppléants des com•
missions communales, (supra, note 7).

46
. 25. Il incomhe à la comm1ss1on départementale tout d'abord,
sur Ie plan administratif, d'émettre un second avis sur l'opportunité
du rememhrement, ensuite, de garantir les droits des intéressés e-0:
connaissant de l'appel des décisions des commissions communales.
Il lui appartient également de statuer sur les demandes de muta-
tions de propriété entre vifs (D.-L., art. 2·5) •

4°) Autres interventions.


26. Nous serons amenés à prec1ser d'autre part Ie role clu
ministre de I'Agriculture, du Comité consuhatif et du Conseil
d'Etat (13).
On a vu d'autre part l'importance des attrihutions du préfet,
organe exécutif, et de l'ingénieur en chef du génie mral, qui fait
office de ministère public.
Enfin on ne saurait attacher trop d'importance au géomètre,
dont les qualités morales et techniques sont indispensahles au
succès de l'opération (in/ra, n° 35).

c) Fonctionnement
1°) Mise en oouvre.
27. La commission communale n'a plus à exercer d'option entre
la réorganisation foncière et Ie remembrement, mais à combiner·
ces opérations et à les compléter par des échanges amiables (L., art.
3 nouveau, D.-L., art. 13).
Elle détermine Ie ou les périmètres à l'intérieur desquels elle est
d'avis d'employer chacun de ces procédés.

28. L'avis de la commission communale est porté à la connais-


sance des intéressés en des formes encore à édicter.
S'il est confirmé par la commission départementa1e et si l'ingé-
nieur en chef du génie rural ne s'y oppose pas, Ie préfet fixe par
arrêté les différents périmètres et ordonne les opérations.
En cas de divergence entre l'avis de l'une et l'autre commission,
ou d'op,position du fonctionnaire susdit, Ie préfet doit soumettre
la question au ministre de l' Agriculture, qui se prononce après
avis, s'il y a lieu, du Comité consultatif.
L'arrêté du préfet doit être conforme, selon Ie cas, soit à l'avis
concordant des commissions communale et -départementale, soit à
la. décision du ministre (L., art. 3, in fine). Il est affiché
(13) Sur Ie Comité supérieur consultatif d'aménagement foncier, voy. supra,
n" 18 •
.· -Sur Ie transfert de compétence du Conseil d'Etat (qui devient juridiction
du second degré) aux trihunaux administratifs, voy. infra, note 16.

47
à la mairie de la commune intéressée et aux mairies des communes
limitrophes, et publié dans un journal du département (D., art. 19,
al. 2).
2°) Décisions et recours.
29. Au cours des opérations de remembrement, les propriétaires,
préalablement à toute décision, intéressant leurs propriétés, doi•
vent être avertis et mis en demeure de présenter leurs observations,
à peine d'annulation pour procédure irrégulière (14).
Les décisions prises par la commission communale (15) peuvent
être portées par l'ingénieur en chef du génie rural devant une
commission départementale (16), dans les quinze jours de la noti-
fication ou Ie mois de la publication (L., art. 4, al. r• et 2).
La commission départementale statue dans Ie délai de deux mois.
Elle a qualité pour
modifier Ie remembrement
ou en provoquer la modification
fixer l'ordre des travaux de remembrement.

30. Le préfot (et non plus l'ingénieur en chef précité, qui fait
partie de la commission) peut porter devant Ie ministre de l'Agri-
culture les décisions de la commission départementale. Le ministre
se prononce dans un délai de trois mois, après avis du Comité
consultatif.
Passé ce délai, la décision sur laquelle il n'a pas été statué est
exécutoire (L., art. 4, mod. par D.-L., art. 14).

31. Les décisions de la commission départementale peuvent en


outre être attaquées - par tous les intéressés semble-t-il - devant
Ie Conseil d'Etat (16), mais seulement pour :
incompétence (16)
excès de pouvoir
vice de forme
ou violation de la loi (L., art. 4).
(14) Conseil d'Etat, arrêt Legrand, S., 1950, 3, 41 et note. - En revanche,
la commission est maîtresse de son instruction; Ie juge de l'excès de pouvoir
se horne à exiger que l'intéressé ait Ie temps matériel de répondre à la convo-
cation ( arrêt Sergent, 1•• mars 1950).
(15) D'après la jurisprudence du Conseil d'Etat, ces décisions doivent être
motivées (arrêt Billard, S., 1950, 3, 41 et note - solution implicite pour les
décisions des commissions communales). Mais il n'est pas requis que les motift
soient notifiés (arrêt, 18 oct. 1946, S., 1947, 3, 49 et note G. Liet-Veaux).
(16) Ceci dit sous réserve de la réforme du contentieux administratif par
Ie décret du 30 septemhre 1953, entré en vigueur Ie 1" janvier 1954, attrihuant
en principe une compétence de droit commun, au premier degré, aux anciens
conseils de préfecture, remaniés et dénommés désormais < trihunaux admi-
nistratifs > (sur les règles de compétence, voy. la chronique de M. Pierre
Chailley, D., 1954, p. 65).

48
Le recours n'est pas suspensif (Dalloz, Nouv. Rép., v° Conseil
d'Etat, n° 50) .

32. On sait que les comnuss1ons départementale et arbitrale


créées par les lois de 1918-1935 et 1919 avaient le caractère de
juridictions (supra, n°" 4, note 5, et 7).
L'analyse était plus délicate en ce qui concerne les commissions
instituées par la loi de 1941-1945, à raison du pouvoir d'interven-
tion de l'administration. Dans des conclusions prises en cause
Legrand (Sir., 1950, 3, 41), Ie commissaire du gouvernement Letour-
neur a dégagé Ie caractère des commissions de rememhrement.
Il s'agit d'organismes administratifs, mais liés par une procédure
à suivre, de nature quasi-juridictionnelle, ce qui induit à les qua-
lifier de « parajuridictionnels ». Leurs décisions ne sont donc pas
des actes discrétionnaires (l6bis).
Le Conseil d'Etat lui-même, après avoir tenu la commission dépar-
tementale pour une juridiction, a fini par la considérer comme
un organisme administratif de caractère collégial dont les déci-
sions relèvent du controle du juge de l'excès de pouvoir (17).
De toute manière, la commis1tion doit laisser aux trihunaux judi-
ciaires Ie soin de trancher préalahlement une question touchant à
la détermination du ou des propriétaires d'une parcelle (arrêt
Godot, 24 février 1950, Dall., 1950, somm. 76). Elle ne peut modi-

(l6bis) Néanmoins, en !'absence de disposition légale ou réglementaire


le prescrivant, les délibérations de la commission communale ne sont pas
pnbliques (Réponse des ministres, Gaz. Pal., 9-12 mai 1953).
(17) Cf. E.D" D., 1950, chron., p. 141 et suiv. et les références citées.
Cet auteur fait remarquer que Ie recours en cassation et le recours pour
excès de pouvoir ont de nombreux traits communs.
C'est ainsi que les requérants ne sont pas recevables à invoquer pour la
première fois dans la requête par laquelle ils défèrent au Conseil d'Etat la
décision de la Commission départementale, des moyens qu'ils n'ont pas sou-
Jevés devant ladite commission (arrêt du 18 octobre 1946, précité • jurispru-
dence constante, cf. étude précitée). Le recours au ,Conseil d'Etat n'est pas
0uvert contre les décisions des commissions communales (arrêt Robin, 23 déc.
1949, id.).
En déterminant Ie nombre, "la composition et !'emplacement des parcelles
à attribuer à un propriétaire et leur équivalence en productivité par rapport
aux anciennes parcelles, les commissions départementales se livrent à une
appréciation des faits qui ne peut être discutée devant Ie Conseil d'Etat (arrêt
Legrand, loc. cit.) ; elles sont à eet égard souveraines (jurisprudence constante;
- comp. supra, n° 4, note 5.
Mais on ne saurait parler de recours en cassation, les commissions dépar•
lementales ne statuant pas en dernier ressort (Schmerber, op. cit., p. 112; -
contra ; Liet-Veaux, « Les associations syndicales de propriétaires », S., 1947,
p. 187). D'après Schmerber, ces commissions sont des établissements puhlics.
des personnes morales soumises, d'une part, à la tutelle administrative et,
d'autre part, au recours pour excès de pouvoir devant Ie Conseil d'Etat (p.
113; - voy. aussi pp. 104 et s.).

49
fier la consistance des droits d'un usufruitier (arrêt Siméon et:
Beauchet, 20 octobre 1950), et il lui serait interdit de procéder àu
partage judiciaire de hiens indivis (arrêt Féquant, 26 décembre-
1925, Rec. Cons. d'Etat, p. 1072 - cf. supra, n° 7 et in/ra, note 39) ..

d) Opérations
l°) Définition et buts.
33. Sous sa forme- actuelle, Ie remembrement rural stricto sensu
est une opération collective, applicable aux propriétés non baties-
dans un périmètre déterminé, réalisant au moyen d'une redistribu-
tion obligatoire, dans Ie hut exclusif d'améliorer l'exploitation-
agricole des biens qui y sont soumis, Ie regroupement des parcelles
morcelées et dispersées (cf. L., art. 17) (18).
« Il doit tendre à constituer des exploitations rurales d'un seul
tenant ou à grandes parcelles bien groupées. Le nouveau lotisse-
ment doit rapprocher des batiments d'exploitation les terres qui
constituent l'exploitation rurale» (id., in fine).
Il convient de souligner que la loi vise non seulement à réduire-
le nombre des parcelles isolées, mais à favoriser la reconstitution
de domaines d'une exploitation plus commode.
L'artide 21 précise qu'en principe il n'est créé qu'une seule · par-
celle par propriétaire et que, pour les terres arahles, aucun lot ne-
doit être attribué s'il est, en moyenne, situé à plus de 3 kilomètres
du centre de l'exploitation.

2°) Exemptions.
34. Déjà dans Ie décret-loi du 30 octobre 1935, Ie législateur
avait déterminé les hiens qui n'étaient « pas obligatoirement incor-
porés dans Ie périmètre à remembrer » (art. r•, in fine).
La loi actuelle, plus précise, exige l'assentiment des propriétaires-
pour l'incorporation des immeubles suivants :
a) terrains à bàtir (19) ;
b) terres entourant les.batimente;
c) mines, minières, carrières, etc.;

(18) Voici d'autre part la définition concise donnée par Ie Vocabufoire:


j11ridique, de Capitant :
< Opération consistant à reconstituer des domaines généralement agricoles,.
d'une certaine étendue et dont on estime l'exploitation plus aisée que celle des
parcelles morcelées à l'excès >.
Comp. in/ra, n° 56, la définition donnée par Schmerher.
(19) Le moyen doit être rencontré par la commission devant laquelle il
est soulevé. Il ne suffit pas, pour une commission départementale, de constater,
que l'avantage retiré par l'attribution d'une autre parcelle compense large-
ment la perte de celle qui est visée dans la réclamation ( Conseil d'Etat. arrêt.
Billard, loc. cit.).

50
d) sources d'eaux minérales;
e) propriétés doses de murs;
/) « Et d'une façon générale, tous immeubles qui ne peuvent,
en raison de leur utilisation spéciale, bénéficier de l'opération de
remembrement » (L., art 18, mod. par D.-L., art. 17) (20).

3°) Déroulement.
35. Il est d'ordinaire créé une sous-commission dont Ie rûle est
de procéder au classement et à l'estimation des parcelles, et à
l'étude de la nouvelle répartition, avec Ie concours d'un géomètre
proposé par Ie Génie rural et accepté par la Commission commu-
nale (21). Elle se compose généralement du maire, président, d'un
délégué de l'ingénieur en chef du Génie rural, des propriétaires
membres de la commission communale, et de quatre ou cinq exploi-
tants ou anciens exploitant qualifiés, propriétaires ou non (Schmer-
ber, op. cit., p. 102 - Sine, op. cit., p. 172).
C'est à cette sous-commission qu'est confié Ie soin de déterminer
Ie périmètre des terres à remembrer et d'en exclure certains biens
(cf. supra, n° 27). Elle n'a cependant aucun pouvoir propre et ses
décisions doivent être confirmées par la commission communale
(Schmerber, loc. cit.).

36. Il y a lieu, au préalable, de prec1ser la nature et l'étendne


des droits et de déterminer !'apport de chacun des intéressés
(D., art. 29, al. 1"').
Une copie de la matrice cadastrale, avec mention des parcelles
lui appartenant, est adressée à chaque propriétaire, qui doit la
renvoyer à la mairie en signalant les erreurs relatives à la liste
des parcelles ou à leur contenance. C'est en principe la superficie
cadastrale (ou Ie plan, ou Ie procès-verbal de bornage) qui est pris
en considération (id.) (22).

(20) Il va de soi que dans Ie périmètre déterminé, d'autres hiens sont, Ie


plus souvent, exclus du rememhrement, soit que l'opération est inutile en ce
qui les concerne (propriété d'un seul tenant), soit qu'elle comporterait à leur
égard trop de difficuhés (vignes, terrains maraîchers, jardins, ahords immé-
diats des hourgs, etc.) (Massot, loc. cit.).
Le Conseil d'Etat a décidé qu'aucune disposition de la loi du 9 mars 1941
ne s'oppose à ce qu'une parcelle de terre de culture soit comprise dans les
opérations de rememhrement dans Je cas on elle serait en friche ou incuhe à
l'époque des dites opérations (arrêt Legrand, précité).
(21) Massot, loc. cit., article d'un grand intérêt pratique, auquel nous ferons
de fréquents emprunts encore dans cette partie de notre étude.
La technique des opérations, et en particulier Je role du géomètre, sont
minutieusement étudiés par Poirée, op. cit.
(22) Le Conseil d'Etat a décidé que la disposition des statuts d'une asso-
ciation syndicale de rememhrement, prévoyant que la surface de l'état de sec•
tion du cadastre sera ·prise comme base de la répartition parcellaire, n'a pas
pour effet d'interdire aux propriétaires intéressés de faire la preuve de l'inexac-
titude des énonciations cadastrales (arrêt Godot, précité).

51
30. Ensuite vient Ie classement et Vestimation des terres à remem-
hr~r (D., art. 29, al. 2) .
La nouvelle distrihution doit se faire par nature de culture
(L., art. 19). La loi de 1918 se hornait à exiger l'attrihution d'une
« surface de terre proportionnellement équivalente, soit en éten-
due, soit en qualité » (art. 2).
Sous Ie régîme de la loi de 1941, la « valeur culturale » est Ie
facteur décisif. Il convient donc de répartir les terres en un cer-
tain nomhre de classes, cinq ou six généralement, et d'étahlir une
valeur conventionnelle à !'hectare pour chaque catégorie (23) , au
moyen de parcelles-étalons.
De la sorte, il sera aisé d'attribuer à chaque propriétaire, selon
Ie vreu de la loi, une superficie de terre équivalente en valeur de
productivité réelle à celle des terres qu'il possédait, en tenant
compte des conditions locales (art. 19) (24) (25).
Il est toutefois opéré un prélèvement, sans indemnité, pour les
ouvrages collectifs, chemins, fossés et caetera (art. 23) et pour la
constitution d'une « masse commune » permettant de faire face
aux réclamations justifiées de la dernière heure (1 à 2 p. c. en sur-
face) (26). Le sort des chemins supprimés, maintenus, modifiés ou
créés est réglé par l'article 24 de la loi. Les modifications apportées
aux articles 23 et 24 de la loi de 1941 par Ie décret-loi de 1954 ont
eu pour hut, entre autres, de préciser Ie röle respectif de la com-
mission communale et du conseil municipa] quant aux chemins et

(23) La comm1ss1on doit tenir compte des apports de chaque propriétaire


par type ou nature de culture; mais elle n'est ohligée de respecter Ie principe
d'équivalence qu'à l'intérieur de chaque catégorie, quitte à compenser par des
attrihutions supplémentaires dans une classe de qualité donnée les pertes éven-
tuelles supportées dans une autre classe de qualité (arrêt Malcor et BariHet,
23 décemhre 1949).
Il a été décidé d'autre part que Ie principe de l'équivalence en produc-
tivité devait être hien entendu à l'intérieur de chaque catégorie de culture et
non suivant la productivité d'ensemhle de l'exploitation avant et après Ie
rememhrement (arrêt Chareydon, l°' mars 1950).
Sur les difficultés d'estimation, voy. Poirée, op. cit., p. 69.
(24) La commission a un pouvoir d'appréciation, les dispositions de l'arti-
cle 19 étant moins impératives que directives (arrêt Chadeyron, précité).
(25) Il faut faire intervenir également - innovation de la loi de 1941 -
les servitudes non éteintes par application de l'article 703 du Code civil, pour
la fixation de la valeur d'échange du fonds dominant et du fonds servant (L.,
art. 29, § 2). L'avantage résultant du désenclavement n'entre pas en ligne de
compte, mais en définitive, on s'efforce de rendre des parcelles regroupêes
situées à la même distance moyenne de la ferme que les anciennes (Sine,
op. cit., p. 174).
(26) Mais la commission ne peut attrihuer à l'association foncière la gestion
cultnrale d'nn reliquat qui n'anrait pas été destiné à des chemins on antres
travanx collectifs. Décision qui prive malencontrensement ces associations du
plus clair de lenrs ressources (Conseil d'Etat, 27 mai 1949, en canse Bruant,
cité par Sine, op. cit., p. 185).

52
aux cours d'eau non navigables ni 6.ottables, ainsi que les obliga-
tions financières de l'Etat et de la commune.

37. L'estimation sert d'autre part au calcul des soultes en espèces.,


admises, à titre exceptionnel, dans deux cas seulement (L., art. 19,
al. 2) :
a) impossihilité d'étahlir l'équivalence prévue sans appoint en
espèees;
b) indemnisation du propriétaire dépossédé des plus-
values transitoires (clotures, arbres, fumures, ensemencements et
antres) (28).
Le montant de la soulte ne sera versé ,directement an bénéficiaire
que si l'immeuble qu'il cède est libre de toutes charges réelles
(L., art. 19, in fine). Les droits des titulaires de droits réels « et des
créanciers » (29) sont reportés, à due concnrrence, sur Ie montant
de la sonlte {art. 28, in fine). Dans la pratiqne tout règlement en
espèces est éliminé en Menrthe-et-Moselle par exemple (Sine,
op. cit., p. 174); il en va de même dans l'Aisne.

38. Lorsque la commission a étahli les projets de classement ou


d'évalnation des immeubles, et de détermination des parcelles
ahandonnées ou incnltes à exproprier, les ingénienrs du génie rnral
controlent la constitution du dossier d'ènquête; ce dossier doit com-
prendre les plans, états et pièces énumérés à l'article 30 du décret
d'application.
Il est sonmis à enquête (D., art. 30, al. 2 et 3) accompagnée de
diverses mesnres de puhlicité, dont notamment la notification à
chacun des intéressés du dépot des pièces à la mairie et un avis à
la Chambre des notaires, relativement an transfert des droits réels
(D., art. 31, al. 5).

39. Le dossier étant complété par les observations et desiderata


des intéressés, Ie géomètre dresse sonvent nn avant-projet. Après
enquête officiense, la commission communale arrête nn projet qui
est déposé à la mairie; un avis annonçant ce dépot est affiché et

(27) Signalons encore qu'à défaut de remembrement intercommunal, l'arti,


cle 20 permet d'attribuer des terres situées aux limites communales à des
propriétaires de communes limitrophes, en contre•partie de terres plus centrales.
De plus, les limites territoriales des communes peuvent être modifiées en
·liaison avec un remembrement par simple arrêté préfectoral (L., art. 20, al. 2,
nouveau, D.-L., art. 18).
(28) Les commissions ne peuvent indemniser Ie propriétaire par l'attribu-
tion d'un droit d'usufruit sur les arbres, au lieu d'une soulte ( Cons. d'Etat, 20
octobre 1950, S., 1951, 3, 12 et note), solution pourtant fort commode.
(29) Addition inutile (Becqué, 'loc. cit., n~ 52).

53
notifié aux proprietaires intéressés (D., art. 32 et 33). Les limites
des nouveaux lots sont reportées provisoirement sur Ie terrain.
La protection des signaux et repères est assortie de sanctions
civiles et pénales (D.,-L., art. 28).
Après enquête officielle, la Commission, aidée de la sous-com-
mission, statue sur les doléances. Les intéressés sont avertis par
avis affiché à la mairie, qu'ils peuvent prendre connaissance des
décisions prises et disposent ,d'un mois pour interjeter appel,
auprès de la Commission départementale (D., art. 34) (30). Remar-
quons que celle-ci a Ie devoir, avant de ,statuer, de consulter un
propriétaire non réclamant qu'une modification demandée affec-
terait en ses hiens (Conseil d'Etat 27 janvier .1950 et 23 juin 1950,
cités par Sine, op. cit.).

40. Quand les opérations ont pris fin, par absence de recours
<levant la Commission départementale ou décision de celle-ci, un
arrêté préfectoral ordonne Ie dépöt à la mairie du plan de
rememhrement devenu définitif; avis du dépöt est donné par affi-
chage. L'arrêté est inséré au Recueil des actes administratifs de la
préf ecture (L., art. 22; et D., art. 35).

e) Conséquences
1°) Transfert.
41. Le transfert de la propriété se réalise au jour ou se clöturent
les opérations de remembrement. Le juge de paix, président de la
commission communale, requiert Ie conservateur des hypothèques
de procéder à la transcription en lui adressant Ie plan des opéra-
tions (31). ·
Li;t date de clöture des opérations est celle du dépöt en mairie
du plan définitif (L., art. 27, mod. par D.-L., art. 23).
Les règles de forme et de publicité seront modifiées par décret
après la réforme du régime hypothécaire (D.-L., art. 29), réforme
que vient d'opérer Ie décret-loi du 4 janvier 1955 sur la publicité
foncière.

2°) Ca.dastre.
42. Les résultats du remembrement sont incorporés dans les
documents cadastraux (L., art. 26 et D., art. 44 à 47), les mesures
de détail étant réglées par arrêtés des ministres de l'Agriculture..,
et des Finances (D., art. 47).

(30) Sur les pouvoirs de la commission départementale et les autres voies


de recours, cf. supra, n"• 24 et s.
{31) J.D., loc. cit. On aura remarqué que les mutations immobilières se
font sans intervention notariale.

54
.:3°) Droits et actions.
43. Les immeubles échangés ne sont plus soumis qu'à l'exercièe
·des droits et actions nés du chef du nouveau propriétai~e
,(L., art. 27).
· -Dans l'hypothèse oii des droits civils ont été méconnus parce
qu'ils n'ont pas été invoqués en temps utile, il n'y a pas lieu à révi-
.sion du remembrement, mais Ie cas échéant à une indemnité en
.argent sur base d'enrichissement sans cause (Dalloz, Rép. dr. civ.,
· v 0 Remembrement, par Sava tier, n ° 38) .

4°) Droits réels.


44. Les droits réels autres que les servitudes s'exercent sur les
immeubles attrihués (32) .
La publicité foncière légale antérieure au transfert de propriété
-conserve ses effets à l'égard des immeubles attribués si elle est re-
nouvelée dans un délai encore à fixer, en ce qui concerne les d.roits
i-éels autres que les privilèges et hypothèques.
'Ceux-ci conservent leur rang antérieur si la publicité est elle-
même renouvelée dans un délai également à fixer par un décret.
En cas d'échange de ,plusieurs parcelles grevées séparément de
"droits réels contre une parcelle unique, ces droits sont lotis sur Ie
hien attrihué (D., art. 51).
Rien n'interdit au propriétaire de concéder des hypothèques au
cours même des opérations (33 bis) .

.5°) Servitudes.
45. Les servitudes existant au profit ou à l'encontre des fonds
•compris ,dans Ie rememhrement suhsistent sans modification si elles
n'ont été éteintes par application de l'article 703 du Code
--0ivil (34) (L., art. 29).

·6°) Baux.
46. Désormais Ie fermier ou métayer a Ie choix entre deux solu-
·tions : ou d'ohtenir Ie report, jadis automatique, des effets du hail
•sur les parcelles acquises en échange, ou d'obtenir la résiliation
(32) ·Cons. Foiret. loc. cit., p. 687. Cet auteur estime que nonobstant l'ab-
sence, dans la loi nouvelle, d'une disposition à ce sujet, les créanciers hypo•
·tbécaires et privilégiés tirent du droit commun Ie droit de se faire entendre
de la commission si l'échange projeté lèse leurs intérêts.
Les mesures d'exécution sont reportées sans frais (L" art, 28, mod. par
D.-L" art 24).
(33) Quant aux soultes, voy. supra, n° 37, in fine,
(33bis) Dalloz, Rép. dr. civ., v" cit" n" 33
(34) c Les servitudes cessent lorsque les choses se trouvent en un tel état
-qu'on ne peut plus en user >. Idem en droit beige.

55
totale ou partielle du hall, sans indemnité, dans la mesure ou
l'étendue de sa jouïssance est diminuée par l'effet du remembre-
ment (L., art. 30). Il n'y a plus· report d'office comme sous !'empire
de la loi de 1935 (art. 6).
La même option est offerte au métayer ou colon partiaire
(L., art. 30, al. 2) .

7°) Principe
47. Il semble qu'il faille appliquer Ie principe de la subrogtJtion
réelle toutes les fois qu'il est possible, en dehors même des consé-
quences expressément prévues par la loi. « Ainsi, estime M. René
Savatier, Ie droit de retour de l'ascendant donateur s'exercera sur
les biens remembrés au lieu d'avoir pour assiette les biens aban-
donnés en échange ».
f) Coût
48. L'Etat assure Ie règlement des dépenses, dont l'ingénieur en
chef du génie rural est Jiordonnateur (L., art. 17, complété par
D.-L., art. 16).
Les documents nécessaires (plans et états divers) sont établi!' aux
frais de l'Etat (L., art. 16) . A cette exception près, les opérations,
soit de réorganisation foncière, soit de remembrement, sont è'trèc-
tuées aux frais des propriétaires, et sont réparties d'après la su-
perficie des terres apportées par chacun. L'Etat intervient dans des
conditions qui seront fixées par un arrêté concerté du ministre de
l'Agriculture et du ministre des Finances (L., art. 17, complété) (35).
La part de chacun est recouvrée en une fois en cas de réorga-
nisation foncière et en deux fois en cas de rememhrement
(D., art. 43) (36).

(35) L'Etat prend à sa charge 80 p. c. des frais et la part restant au compte


du propriétaire s'élevait en moyenne de 800 à 1.200 francs par hectare en 1954
- sans compter Ie prélèvement de 1 à 2 p. c. de la superficie, sans indemnité,
au profit de la masse commune (Le Monde, 24 août 1954).
La cotisation due par Ie propriétaire est déductihle du revenu brut des
propriétés rememhrées pour l'application de la taxe proportionnelle et de la
surtaxe progressive (Rev. lég. agr., 1954, p. 135).
Les crédits de l'Etat, de 25 millions en 1943, de 852 millions en 1947, avoi-
sinent 2 milliards depuis 1948, avec tendance à diminution. ·
( 36) La part des dépenses de rememhrement incomhant aux propriétaires
présente Ie caractère d'une taxe assimilée aux contrihutions directes. Les Iitiges
y relatifs dépendent du conseil de préfecture promu au rang de « trihunal
administratif > départemental ( cf. supra, note 16).
Une exploitation agricole dont les terres sont groupées, et qui ne profite
du rememhrement que pour une superficie minime ne doit être comprise dans
Ie périmètre à rememhrer que pour cette superficie et non pour sa superficie
totale; Ie propriétaire ne participe aux dépenses que pour la partie remem•
hrée (Cons. préf. Versailles, 12 mars 1951, Dall., 1951, jur., 375; Gaz. Pal.•
1951, 1). ·

56
g) Associations foncières
49. Une association foncière est constituée dans les quinze jours
de l'arrêté préfectoral qui met Ie point final aux opérations. Elle
comprend tous les propriétaires des parcelles remembrées et pos-
eède Ie statut d'établissement public (L., art. 25, mod. par D.-L.,
art. 21).
Elle a pour objet la prise en charge (et non plus l'exécution), la
gestion et l'entretien des chemins et autres travaux d'amélioration
foncières connexes au remembrement (37).
Il peut se former des unions d'associations foncières.
Il est désormais loisible aux associations foncières, pour éviter
un vain parallélisme, d'exécuter des travaux du ressort des asso-
ciations syndicales prévues par les lois de 1865-1898 (L., art. 25 bis.
D.-L., art. 22) .
Des facultés d'expropriation leur sont reconnues (id., in fine) (38).

h) Remorcellement
50. En vue d'éviter Ie morcellement ultérieur des exploitatÎ!)ns
rurales remenibrées ou créées, toute division de parcelles comprises
dans Ie périmètre ou a eu lieu Ie remembrement devra être auto-
risée par la commission départementale (L., art. 31 (39).
Il n'appartient plus à celle-ci de rejeter la demande, mais
elle doit procéder elle-même au lotissement de manière telle que
les nouvelles parcelles créées se trouvent dans des conditions d'ex-
ploitation comparables à celles de l'immeuhle divisé, notamment
quant aux accès (D.-L., art. 26).
Tous actes contraires au présent article sont déclarés nuls (40).

(37) Sur les limites de la compétence des associations foncières, voy. supra,
note 26.
(38) Dans la mesure ou l'association exécute exclusivement les travaux
pour Ie compte des propriétaires des parcelles remembrées et non pour son
propre compte, il ne s'agit pas de travaux publics, ouvrant un droit à répa-
ration en cas de dommages aux biens sans que la victime ait à démontrer
aucune faute (Trib. adm. Grenoble, 13 janv. 1954, Dall., 1954, jur., 464 et note).
(39) Cette disposition s'applique au partage en cours, a décidé la Cour
d'appel d'Orléans (30 juin 1953, Rev. lég. agr., 1954, p. 115 et note), réformant
sur ce point civ. Pithiviers, 27 oct. 1949, ]uriscl. pér., 1949, II, 7345 et note
Becqué), après avoir confirmé que Ie nouveau partage qu'avait entraîné un
remembrement, après tirage au sort des lots, devait être l'reuvre du juge et
non des services de réorganisation foncière.
(40) Nullité d'ordre public puisqu'elle est édictée non en faveur de telles
personnes déterminées, mais par suite de eonsidérations d'intérêt général et
public, fait observer Foiret, loc. cit., p. 688, n° 8.

57
CHAPITRE IV
De la réorganisation foncière

a) Objet
51. La réorganisation foncière tend à des fins plus modestes. Il
-s'agit de réadaptations limitées et non ,d'un bouleversement. Le
,chapitre Il: de la loi du 9 mars 1941 permet d'imposer :
1• l'incorporation à des exploitations limitrophes - par voie
-d'échange ou de concession - des parcelles abandonnées ou
incultes (L., art. 9) et si eet état remonte à plus de deux ans,
leur expropriation en vue -de constituer ,des. lots suffisants
pour former des exploitations paysannes familiales (L., art. 10
et 11);
.2° l'expropriation des parcelles abandonnées ou incultes en vue
du reboisement, ou du moins l'obligation pour les proprié-
taires de rehoiser dans un certain délai (L., art. 12, modifié
en 1945);
:3° l'incorporation des enclaves - par voie d'échange ou de dé-
possession avec indemnité (L., art. 13) ;
4° des échanges, généralement bilatéraux, étant entendu que des
échanges ou remembrements amiables sont ,d'autre part pro-
voqués. Ces opérations, imposées ou amiables, se font suivant
les modalités de la loi du 3 novemhre 1884; elles sont ohli-
gatoires notamment lorsque la création de chemins ou fosséa
devait entraîner fa division des parcelles, ou lorsque des
échanges de cultures sont pratiqués (L., art. 14) (1);
5° la création, la modification ou la suppression des chemins
ruraux (L., art. 15).
Nous avons signalé que les dispositions de la loi du 9 mars 1941
-n'avaient pas subi de modifications jusqu'ici. L'exposé des motifs
.du décret du 20 décemhre 1954 en annonce la refonte, différée dans

(1) Sur une difficulté relative au transfert des droits réels, cf. ]ourn. not"
1951, p. 547.
La loi de 1884 ne prévoyait pas Ie report des droits réels.
l'attente des mesures à intervenir concernant la mise en valeur dea
terres abandonnées et la constitution d'exploitations familiales.

h) Organismes
52. Les organes de décision et de controle sont les mêmes que
pour les opérations de rememhrement.
D'ailleurs réorganisation foncière, rememhrement et échanges
amiahles vont de pair désormais, !'accent restant mis sur la seconde
formule toutefois (cf. supra, n° 27) (2).

c) Portée
53. En fait Ie chapitre II, qu'il nous a paru inutile d' analyser
de façon détaillée, était resté à peu près inappliqué (3).
Il est certain que l'on peut beaucoup attendre de la réforme
de 1954 (4).

(2) Sur les échanges amiables, voy. supra, n° 14.


(3) Pour Ie commentaire détaillé du chapitre II de la loi de 1941, voy.
Schmerber, op. cit., pp. 150 à 174 et Poirée, op. cit., pp. 41 à 52.
(4) Sur les regroupements des forêts en vue d'assurer la rentabilité de
l'exploitation forestière et Ie reboisement, voy. supra, n° 10.

S9
CHAPITRE V
Considérations générales

54. La loi de 1941-1945 a instauré un système durahle et effi-


cace parce qu'au hénéfice d'un long mûrissement psychologique et
technique.
Le décret-loi de 1954 s'est borné à la parfaire et à développer les
procédés préparatoires ou complémentaires.

a) Phases successives
55. Les lois de 1865 et de 1889 datent de la période indivi-
dualiste.
Celles de 1888, 1898, 1918 et 1935 sont fondées .sur Ie principe de
la majorité.
Le régime actuel, développement de celui qu'avait instauré la
loi de 1919, se situe dans la phase collective, justifiée par l'intérêt
public autant que par l'intérêt privé.

b) Définition
56. Dans son remarquahle ouvrage (p. 124), SchmerheF propose
la définition suivante :
« Le rememhrement s'analyse comme une opération d'expropria-
tion d'utilité puhlique a·ppliquée à !'ensemble des propriétés rurales
non häties d'un territoire déterminé; elle a pour hut de donner en
compensation, à chaque propriétaire dépossédé, une propriété per•
mettant à l'exploitation agricole de s'exercer avec Ie maximum de
facilité sur des parcelles répondant aux conditions suivantes :
a) être suffisamment étendues et continues;
b) présenter une configuration avantageuse pour la culture;
c) être placées dans les conditions les ·plus favorahles pour cette
culture au point de vue des accès et de l'écoulement des eaux super-
ficielles. »
Cette définition nous paraît exacte et complète sous cette réserve
que nous dirions simplement qu'il s'agit d'une opération d'utilité
puhlique. Nous nous sommes ralliés, au cours de !'examen du droit

60
hollandais en la matière, à !'opinion-de Schepel, excluant Ie concept
,J'expropriation (1).

c) Maîtres-traits
57. L'opération porte sur la PROPRIÉTÉ (voy. in/ra, n° 60).
Elle a un caractère DÉFINITIF, qu'il serait souhaitahle de consacrer
par l'introduction du livre f oncier qui existe déjà en Alsace-Lor-
raine (voyez cependant Ie décret-loi du 4 janvier 1955).
Elle est QUASI OBLIGATOIRE', A eet égard, il semhle que l'adminis-
tration française, s'inspirant de Lyautey, n'a demandé de grands
pouvoirs que pour n'avoir pas à s'en servir. Elle agit par la persua-
sion, un peu comme les meilleurs fonctionnaires du despotisme
éclairé qui, eux, luttaient pour Ie partage des hiens communaux (2) .
C'est ainsi que dans Ie département de l'Aisne, deux rememhre-
ments seulement ont dû être mis en branie par les pouvoirs puhlics,
et que Ie nomhre actuel des demandes ne permet •pas d'y donner
suite sans déiai (3). La loi est donc autoritaire de conception et
lihéraie d'appiication.
ll convient d'insister sur la grande souplesse de la législation
française et sur !'empirisme de la pratique. On a vu que la sous-
commission communale a pu naître des nécessités sans qu'aucun
texte Ja prévît : il a suffi que la loi ne Ie défendît point.

d) Procédés accessoires
58. A cöté du rememhrement stricto sensu, Ie droit français con-
nait d'autres procédés de « regroupement foncier » :
- l'échange amiahle, largement pratiqué en attendant Ie remem-
hrement ou pour compléter une opération achevée (4) ;
- la réorganisation foncière, demeurée sans application jusqu'à
prèsent, mais renflouée par Ie décret-loi de 1954.

(1) Cf. cette étude, n° 10. Il nous faut reconnaître ·qu'on se trouve à la
limite de l'expropriation. D'autre part, les propriétaires de trop petites parcelles,
selon Ie nouveau projet de loi néerlandais, ne recevront qu'une indemnité en
espèces; ceux-là seront purement et simplement expropriés.
Schmerber, devançant peut-être l'évolution de l'institution, en est venu ii
eonsidérer qu'elle trouve sa raison d'être dans l'intérêt public (cf. p. 137 à 141);
le Plan Monnet en fait mention. Est-ce ,ii dire que l'intérêt privé soit devenu un
élément secondaire ? La pratique prouve Ie contraire. ( cf. supra, n° 49, note 38).
(2) Cf. Pierre Recht : « Les biens communaux des Namurois et leur par-
tage à la fin du XVIII• siècle» (Bruxelles, Bruylant, éd. 1950).
(3) Cf. Ann. not. et enr., 1952, p. 333.
(4) Ces échanges sont exempts depuis 1918 de tous droits au profit de l'Etat,
~auf toutefois de ceux qui sont afférents aux soultes et plus•values.
L'exemption est complète lorsque !'échange tombe sous l'application du
décret,loi de 1954, sans compter d'autres avantages (supra, n"' 14).

61
- la concession, l'expropriation ou la confiscation des parcelle&
abandonnées ou incultes, qui doivent faire l'objet de nouvelles
dispositions législatives.

e) Critiques - Idées nouvelles


59. Il est reproché au législateur de n'accorder que des crédits
insuffisants pour mener à hien les rememhrements nécessaires et au
gouvernement de n'avoir pas encore pris d'arrêté concernant les
travaux connexes. Contrairement aux Pays-Bas, la France n'a pas-
jusqu'ici, amélioré en même temps les chemins ruraux (cf. Schmer-
ber, op. cit., p. 145 et 146).
Quant au fonctionnement interne de la loi, on pouvait regretter
d'une part que l'intervention des organisations syndicales ne soit
pas prévue et d'autre part que les exploitants non propriétaires n'y
soient pas associés plus expressément et plus largement. Le décret
de 1954 tend à porter remède à ces imperfections.

60. D'aucuns voudraient aller plus loin et suhstituer au remem-


brement des propriétés Ie « regroupement cultural », autrement dit
la réorganisation foncière des exploitations.
Schmerher consacre la troisième partie de son ouvrage à l'examen
de la proposition de loi en ce sens, déposée par Ie groupe socialiste
de l'Assemblée Nationale. Il l'estime inutile et compliquée; ses in-
convénients dépassent ses avantages, à moins que la propriété 1·urale
ne soit complètement aholie (5). Or, en France, 54 p.c. des surfaces
cultivées sont exploitées par leur pr.opriétaire et 80 p. c. des exploi-
tante sont propriétaires de tout ou partie des terres qu'ils occu-
pent (6).
Il y a lieu de préciser qu'en fait les auteurs d'un rememhrement
évitent de démemhrer une exploitation d'un seul tenant mais grou-
pant des parcelles appartenant à des propriétaires différents; d'au-
tre part ils tiennent compte dans la mesure du possihle des deside-
rata des fermiers.
f) Accueil
61. Il va de soi que Ie rememhrement ne peut réussir que si la.
bonne volonté des propriétai.res visés est acquise. On estime généra-
lement que la part de la psychologie et de la diplomatie est de 2/3
à 3/4, Ie reste étant fait de technique (7).

(5) Comp. in/ra Belgique, n°• 44 et 77.


(6) En Belgique, ces proportions, d'ap1·ès Ie recensement de 1950, sont de-
32 p.c. et de 71 p.c. respectivement, hormis les agriculteurs occasionnels des
c coins de terre », voy. in/ra, Statistiques.
( 7) Paul Arène n'affirmait•il pas dans c Jean des Figues> qu'il fallait, dans
Ie Midi, d'infinies négociations pour pouvoir racheter à un parent la pièee,
d'une maison qui lui était échue dans un partage ?

62
L'opinion puhlique commence à se rendre compte de la nécessité-
d'un vaste remaniement parcellaire. Stimulée par les spécialistes et
par la presse, elle en réclame l'accélération (8). •
« Il est indispensahle que la réalisation du rememhrement soit
poursuivie avec persévérance et énergie », écrivait Maspétiol en.
1946 (op. cit., p. 495).
« Il est donc indispensahle de procéder au rememhrement des
petites parcelles dans les régions parcellées », enseignait aux Semai-
nes sociales de 1950 Ie professeur Coutin, à propos de l'utilisation
des machines modernes dans l'agriculture.
Les intéressés oot de leur cöté cessé de se montrer réticents. Lè-
nomhre de géomètres spécialisés est insuffisant pour répondre aux
appels qui leur sont adressés. On a calculé que seulement trois
propriétaires sur mille ont eu recours au Conseil d'Etat, qui ne leur
a donné raison qu'une fois sur six.

g) Résultats
62. Au 1., octohre 1953, on comptait 1.390.000 hectares remem~
hrés, 4.626 communes en cours d'opération, 1.476 demandes satis-
faites. La cadence des travaux tend à fléchir (9).
Il faut se rappeler que les premiers résultats de la nouvelle lor
ne remontent pratiquement qu'à 1945.
La réalisation du programme total - 14 millions d'hectares -
demandera prohablement près d'un demi-siècle, délai que l'on
pourra· abréger en accroissant Ie nombre des échanges préalahles
et en augmentant les crédits budgétaires.
On estime que l'accroissement des bénéfices dus au rememhre-
ment s'élève en moyenne à 25 p.c. (10). Il est vrai que dans trente-
neuf communes de Seine-et-Marne, pour ne citer qu'un exemple, le-
nombre des parcelles a été réduit de 115. 781 à 1.604.

(8) Outre les sources déjà citées, toutes favorables au remembrement cf. :
René Courtin, « De mon jardin à l'Europe », Ré/orme, 7 octobre 1950; Pierre
Coutin, < Les transformations techniques du monde rural », in Le Monde rural
dans l'économie moderne, p. 120; Y. Lorelle, « Lavancia,Opération pilote de re-
groupement rural dans Ie Jura », Réforme, 15 décembre 1951; « L'Agriculture
dans !'Economie française », Bulletin mensuel du bureau politique du Comte
de Paris, n° 41, 27 mars 1952.
Dans son livre sur « Le protestant français >, Ie professeur Léonard note-
que parmi ses coreligionnaires la situation du petit et du moyen propriétaire-
cultivant son sol est menacée, « du fait que s'imposeraient à lui, comme à tous-
aes semblables de la terre française, et l'achat d'un matériel coûteux et Ie re-·
membrement de ses multiples parcelles. » (Paris, 1953, p. 99).
(9) Le Monde, 24 août et 21 septembre 1954. Il n'a été achevé que 172.00&
llectares en 1953 contre 434.000 en 1949.
(10) Idem pour la valeur vénale suivant une enquête faite en Lorraine-
(Schmerher, op. cit., p. 73).
Quant à l'économie de temps, elle peut atteindre 30 p.c. sur les lahours,
la fenaison et les moissons.

63-
Conclusions

63. L'exemple français est d'un grand intérêt pour la Belgique.


L'histoire, Ie droit, la structure, la psychologie des deux pays pré-
sentent suffisamment de similitudes pour que l'on tire enseignement
de l'expérience française. Mais on ne saurait s'engager dans les voies
aussi impératives qu'un pays dont Ie droit administratif a gardé
l'empreinte du régime napoléonien.
Il semble bien que !'individualisme intransigeant - voire
outrancier - est demeuré plus vivace dans nos campagnes. Pour
éviter Ie risque de voir entraver une réforme indispensable, il con-
viendra d'éclairer les agriculteurs, qui n'auront pas été préparés,
comme en France, par une succession de lois de plus en plus pres-
santes.
L'exemple français montre aussi qu'il faut constituer un corps
de géomètres spécialisés (1).

64. Nous terminerons par trois remarques :


a) Le remembrement volontaire accompagne et complète plutöt
qu'il ne précède Ie remembrement légal. On peut attendre de
bons résultats d'une législation favorisant les échanges de
biens ruraux; encore- faut-il que l'cxonération fiscale soit suf-
fisamment tentante et que les échanges soient organisés;
b) Le remembrement est devenu un problème politique, lato
sensu; aussi convient-il que ce soit un organe à la fois admi-
nistratif et politique, plutöt que judiciaire, qui exerce la haute
main sur l'opération (Ie préfet en France, la députation per-
manente aux Pays-Bas);
c) Il est indispensable que les regroupements fonciers soient sti-
mulés et suivis, sur Ie plan technique par un organisme cen-
tra! spécialisé tel que la France vient d'en créer après la
Hollande.

(1) Il en est près d'un millier en France.


APPENDICE
Obstacles légaux au démembrement

Liminaire
65. On a vu que Jes terres rememhrées ne peuvent plus être divi-
sées que par la commission départementale (L., art. 31, supra, n° 50).
En vertu d'autre part de la loi d'urhanisme du 15 juin 1943 (art.
82 et 92), les notaires doivent demander l'autorisation de lotisse-
ment, en cas de morcellement de propriétés rurales dans les zones
ou l'urhanisation est prévue ou prohahle (voy. Dall., 1953, suppl.,
p. 4, réponses des ministres).

66. Sur un plan plus général, Ie législateur français a pris deux


séries de mesures tendant à favoriser Ie maintien de la petite exploi-
tation agricole et, Ie cas échéant, sa transmission intégrale à l'un des
héritiers de !'exploitant.

a) Bien de familie
67. La première remonte à la loi du 12 juillet 1909, modifiée et
amplifiée en 1928 et 1931 notammènt (1). Elle a instauré Ie « hien
de famille » indivisihle et attrihuahle dans des conditions proches
de celles que prescrit la loi beige du 16 mai 1900 sur les petits héri-
tages (voir Dalloz, Nouv. Rép. et Rép. dr. civ., v 0 Bien de familie).
Il convient de noter ici deux différences : d'une part Ie hien de fa-
mille doit avoir fait l'ohjet d'une constitution (par déclaration de-
vant notaire, testament ou donation); d'autre part Ie maintien de
l'indivision peut être demandé dans des cas ou il ne se trouve pas
de mineurs parmi les descendants. Ces dispositions ont été rendues
récemment applicahles aux hiens dont la valeur n'excède par 5 mil-
lions (L., 7 juill. 1948 et 12 mars 1953).
Elles ont été étendues mutatis mutandis à divers territoires de
J'Union française (aux Etahlissements de l'Océanie par Ie décret du
24 octohre 1952 notamment).

(I) Le décret du pr mars 1808 sur les majorats tendait uniquement à per•
mettre à des families nohles de tenir leur rang ( cf. Maspétiol, op. cit., p. 300
et De Page, op. cit., t. VIII, n° 1738).

65
b) Exploitation agricole familiale
1) Généralités.
68. Le décret-loi du 17 juin 1938 et les lois subséquentes, « mo-
difiant les articles 815, 822, 827, 832, 859, 866, 1075, du Code civil »
ont réformé plus profondément Ie régime successoral (2) .
Certaines de ces modifications avaient déjà fait l'objet d'un
projet de loi du gouvernement impérial, en 1870, et de propositions
de loi au cours des premières années de la TIi" République.

69. La réforme, dont certains aspects visent également des biens


non ruraux, est axée sur les innovations suivantes (elles ne consti-
tuent, remarquons-le, que des facultés) :
1 ° Maintien de l'indivision par décision de justice en ce qui con-
cerne l'exploitation agricole familiale (art. 815, al. 3 et 4).
2° Attrihution de l'exploitation agricole familiale au conjoint
survivant ou à un héritier copropriétaire (art. 832, al. 3 et 4).
3° Aménagement, en faveur du donataire ou du légataire d'un
immeuhle ou d'une exploitation agricole, des règles relatives
au rapport et à la réduction en nature (art. 866, nouveau) (3).
4° Abandon de l'égalité en nature dans Ie partage d'ascendant
(art. 107·5, al. 2 et 3 (2bis).

2) Caractéristiques et droit comparé.


70. L'examen même succinct de ces dernières dispositions excé-
derait les limites de la présente étude (4).
Il paraît cependant nécessaire de souligner les différences entre
d'un cöté l'indivision forcée et l'attribution préférentielle prévue
par la loi française du 17 juin 1938, et de l'autre Ie régime de la loi
française de 1909 et celui de la loi beige de 1900, précitées.

(2) Voy. en appendice dans Demars et Le 'Roux, L'exploitation paysanne


héréditaire, les différents états, depuis 1938, des articles modifiés. Cf. éga•
lement Maspétiol, op. cit., pp. 514 et suiv. et Michel de Juglart, op. cit.
(2bis) Voy. in/ra, note 13 - La loi de 1938 a réduit d'autre part les possi•
hilités d'action en annulation, en rescision et en lésion (art. 1077 à 1080
nouveaux).
(3) On songe à la clause dite d'enfant chéri (lief kind) de l'ancien droit
flamand.
L'attribution préférentielle prévue par l'article 866 modifié ne s'exerce qu'en
faveur d'un seul enfant (Cass. fr., 18 janv. 1954, Dall., 1954, jur., p. 325 et note
Ponsard; ]uriscl. pér., 1954, Il, 7962), jurisprudence vivement critiquée par
M. René Savatier, qui l'explique par une hantise anachronique de l'indivision
(Rev. trim. dr. civ., 1954, p. 334).
(4) II devrait s'y ajouter d'ailleurs un aperçu du statut du fermage et du
nouveau régime des aliénations de hiens ruraux Oois des 17 octobre 1945 et
13 .avril 1946 attribuant un droit de préemption au fermier) ; Ie bail à ferme
est devenu semi-perpétuel.

66
71. La loi de 1938 exige que l'attrihutaire soit copropriétaire de
l'exploitation; qu'il y habite lors de !'ouverture de la succession;
qu'il la cultive ou participe effectivement à sa culture.
Les lois de 1909 et 1900, qui ne sont pas particulières aux hiens
ruraux, ne requièrent intégralement que la première condition.
L'héritier qui se propose d'occuper Ie hien ne jouit d'aucun droit
de préférence (Cass. h., 6 déc. 1945, Pas., 1945, I, 284; J. T., 1946,
124 et note Pirson).
Selon la loi de 1938, il appartient au juge de désigner J'attrihu-
taire (5) si plusieurs héritiers remplissent les conditions voulues
(Cass. fr., 7 juin 1950, Dall., 1950, 143 et note Lenoan), tandis que
les lois de 1909 et de 1900 étahlissent un ordre légal de préférence
oà. figure l'expédient du tirage au sort, peu rationnel lorsque des in-
térêts économiques importants sont en jeu.
D'après les lois de 1938 et de 1900 l'indivision doit avoir son ori~
gine dans un décès et non dans une donation (Besançon, 19 avril
1951, J. C. P., 1951, 2, 6306 et note Savatier). Les règles instaurées
en 1938 permettent à l'époux séparé de corps - ou divorcé - de
demander l'attrihution de l'exploitation agricole commune hien que
Ie texte de l'article 832 nouveau du Code civil ne semhle envisager
que l'indivision créée par la mort du propriétaire (Cass. fr., 9 et
non 2 nov. 1954, Dall., 1954, jur., 749, et note contra de Savatier -
pro : Esmein, Divorce et agriculture, Gaz. Pal. r• févr. 1955).

72. Il faut reconnaître qu'à une époque de monnaie fondante, Ie


prohlème des soultes à paiement échelonné - modalité souvent
indispensable - est d'une solution difficile. Demars et Le Roux
n'hésitent pas à Ie qualifier de crucial pour l'application de la loi
de 1938 (op. cit., n° 89). Le financement au moyen d'un crédit agri-
cole ad hoc a été organisé dans différents pays (voy. aussi infra,
n° 78).
La Cour de cassation de France a décidé que si une estimation
doit être faite au jour de !'ouverture de la succession pour apprécier
si la condition relative à Ia limite légale est remplie, une seconde
estimation doit être faite à la date du partage ou pratiquement à
la date la plus proche possihle de Ia jouïssance divise (9 févr. 1954,
Rev. l,ég. agr., 1954, p. 122 - jurisprudence constante).

73. Quant au maintien forcé de l'indivision, la loi de 1938 permet,


comme celle de 1909, de Ie demander à certaines conditions lors
même que Ie défunt ne laisse pas de descendants mineurs; il faut

(5) Sauf dévolution testamentaire (Demars et Le Roux, op. cit., n° 87).

67
que Ie conJomt survivant ou l'héritier ait hahité Ie bien lors du
décès et en soit copropriétaire (6).

3) Portée.
74. Les mesures prévues par la loi de 1938 ont fait l'oh_jet de
nombreuses décisions judiciaires (7).
Néanmoins la réforme n'a rencontré qu'un accueil réservé selon
Ie professeur Robino (loc. cit., pp. 129 ets.), sauf dans les régions oû
les anciennes coutumes avaient survécu au Code civil en cette ma-
tière (Basses-Pyrénées, Auvergne, Alpes, Basse-Bretagne) (8). Les
mreurs, l'histoire, la dépréciation rapide des parts fixées en valeur,
ont nui à la popularité des modifications nécessafres au régime suc-
cessoral du Code civil.
A l'heure actuelle, les dispositions ajoutées aux articles 815 et
832 sont applicables aux exploitations ne dépassant pas 12 millions
en valeur (arr., 7 févr. 1952) et un maximum de superficie de 15 à
30 hectares suivant les départements (arr., 22 juill. et 12 déc. 1944).

75. 11 est à noter que les règles de procédure relatives au maintien


d'un bien de famille en indivision semhlent devoir s'appliquer mê-
me si Ie bien de familie constituait, en même temps, une exploita-
tion agricole susceptihle de hénéficier de l'article 815 du Code
civil modifié par la loi du 15 janvier 1943 (Dalloz, Rép. dr. civ.,
v 0 cit .. n ° 127).

c) Mesures diverses
76. Le statut du fermage instauré par l'ordonnance du 17 octobre
1945, modifiée par la loi du 13 avril 1946, reconnaît au bailleur UD
droit de reprise sur UD domaine ou des parcelles qu'il destine à se
confondre avec une exploitation qu'il a déjà (Dalloz, Rép. dr. civ.,
v 0 Louage, haux ruraux, n°• 475 et suiv.). Il n'est pas exigé que les
terres reprises soient d'UD seul tenant avec celles à grouper dans la
même exploitation (Cass. fr., 22 déc. 1948, Rev. fermages, 1949,
188). Ce droit peut s'exercer successivement sur plusieurs exploi-
tations ou plusieurs lots de terre (Cass. fr., 8 mai 1951, id., 1951,
392).
Par un mécanisme inverse, mais tendant également à la pro-
tection de l'unité d'exploitation, Ie statut du fermage (art. 45bis,

( 6) La doctrine reproche au législateur d'avoir laissé l'indivision juridique-


ment inorganisée.
( 7) Cf. les chroniques sur les successions et lihéralités que puhlie Ie pro-
fesseur René Savatier dans la Revue trimestrielle de droit civil et du même
auteur : Propriété et exploitation, in Le monde rural dans l'économie moderne.
(8) Etant supposé que ces coutumes faisaient exception à l'égalitarisme mar-
qué de l'ancien droit successoral, que l'on confond souvent avec les règles de
suceession féodale1.

68
modifié par la loi du 15 juin 1949) avait temporairement prescrit Ie
redémembrement · et l'amodiation de certains domaines réunis
depuis 1939 (9).
Maspétiol (op. cit., p. 508) souhaite que la concentration exces-
sive de la terre soit prohibée, comme d'ailleurs Ie morcellement
d'une unité culturale en lots insuffisants à la vie d'nne famille pay-
depuis 1939 (9).

77. L'attrihutaire de tous les biens meuhles ou immeubles com-


posant une exploitation agricole unique, d'une valeur inférieure à
3 millions de francs (jadis 1 million), échappe aux droits de soulte
et de retour si, lors de !'ouverture de la succession, il habitait Je
domaine et participait effectiveinent à la culture; l'attributaire doit
s'engager à la continuer personnellement pendant cinq ans (art.
710, al. l"', du Code général des impots, modifié par l'art. 58 de la
loi du 7 février 1953).

78. Le contrat de travail à salaire dif féré, institné par les articles
63 à 74 du décret-loi du 29 juillet 1939, confère au fils àl):é de plus
de dix-huit ans qui (CUVre dans l'exploitation familiale nne créance
opposable au fisc et aux cohéritiers (Il).
Cette innovation est de nature à alléger les charges snccessorales
de l'héritier attributaire sans préjudice à l'exonération fiscale men-
tionnée ei-avant (n° 77).

79. Il sied de rappeler enfin les ressources que le Code civil a ton-
jours offertes aux paysans soucieux d'éviter Ie morcellement incon-
sidéré de leur héritage (12). Il pourrait être recouru davantage à
l'institution contractuelle, an régime dotal, aux suhstitutions, au

(9) ,Cf. Dalloz, Nouv. Rép., mise a Jour 1954, v 0 Louage, n° 807.
(10) La notion d'unité familiale d'exploitation se retrouve notamment dans
les lois des 30 avril et 20 juin 1941 sur l'assainissement de la Crau et de la
Sologne (Maspétiol, op. cit., p. 515, en note).
Le Code civil suisse de 1907 porte en son article 616 que les cantons ont le
droit de prescrire que les biens,fonds ne pourront être morcelés au delà d'un
minimum de contenance fixé pour les différentes espèces de culture ( voy. aussi
Ie Code civil italien de 1942, art. 846 et 856).
(11) .Dalloz, Nouv. Rép., v 0 Succession, n°" 762 et suiv. La transmission suc•
cessorale de cette créance est exempte de tous droits (id. n° 1013; Code général
d96 impots, art. 81, 3° et 157, 4°).
L'article 63 du Code de la famille vient d'être légèrement modifié pat· Ie
décret-loi du 8 décemhre 1954 (D., 1955, lég., p. 2).
(12) Il faut dire que, jusqu'à ces dernières années tout au moins, Ie droit
successoral français était encore plus égalitaire dans la pratique que dans les
textes (cf. G. Ripert, Le régime démocratique et le droit civil moderne, Paris,
2' éd., 1948, n°' 52 et 53).

69
legs de residuo, au partage d'ascendant... (13), voire à la constitution
de sociétés de familie (14).

(13) La jurisprudence française a longtemps exigé que les partages d'ascen•


dant tiennent compte des prescriptions de l'article 832 du Code civil, alors que
les tribunaux belges ont toujours admis la libre composition des lots ( cf.
De Page, t. VIII, n° 16%; Dalloz, Rép. dr. civ., v Partage d'ascendant,
0

n°• 146 et suiv.),


La Cour de cassation française a décidé qu'est licite la donation-partage aux
termes de laquelle un domaine est donné à l'un des enfants contre Ie verse•
ment par lui de sommes d'argent à ses frères et .sreurs (8 déc. 1948, Dall., 1949,
jur., 145).
La faculté donnée par l'article 832, al. 3 et 4, du Code civil, à un héritier
de se faire attribuer Ie domaine rural ne peut s'exercer que dans Ie partage
de la succession, et sur des biens dont Ie défunt n'a pas lui-même, usant de son
droit de disposition, déjà réglé d'une façon précise l'attribution (Grenoble,
19 mars 1947, id., 1947, 420 - Voy. Voirin, La transmission intégrale de l'ex•
ploitation familiale depuis la loi du 7 février 1938 sur les partages d'ascendants.,
Dali. hebd" 1938, Chron., 29).
(14) A propos des divers questions abordés dans eet appendice, cons.
V illes et campagnes, civilisation urbaine et civilisation rurale en France,
précité, et spécialement : Séance X. - Structures familiales comparés; R.
Savatier, Propriété et exploitation, in : Le monde rural dans l'économie mo-
derne, p. 91 et suiv.; M. de Juglart op. cit., et Les réformes qui s'imposent en
vue de mieux assurer la transmission intégrale des exploitations rurales dans
les partages, Rev. lég. agr., 1951, pp. 97 et suiv.
M. Savatier souhaite que la loi permette à l'un des indivisaires d'opposer
une demande de bail (de la famille entière à son membre exploitant) à toute
demande de partage forcé émiettant l'exploitation (id., pp. 99 et 100).
Voy. aussi Ie décret du 30 décembre 1954 sur Jes groupements forestiers
qui introduisent une nouvelle forme de propriété collective.

70
TROISIÈME PARTIE
Du rememhrement rural en Suisse
LEGISLATION FEDERALE.
Code civil suisse de 1907, entré en vigueur en 1912 (C. c. s.)
Code des Ohligations de 1881, révisé en 1911 et 1936 (C.O.).
Loi fédérale du 12 décemhre 1940 sur Ie désendettement agricole,
entrée en vigueur Ie rr janvier 1947.
Loi fédérale du 12 juin 1951 sur Ie maintien de la propriété
foncière rurale, entrée en vigueur Ie r• janvier 1953 (Rec. lég.
F. A. 0., 1952, n° 1).
Loi fédérale du 3 octohre 1951 sur l'amélioration de l'agriculture
et Ie maintien de la population paysanne (en ahrégé : Loi sur
l'agriculture) entrée en vigueur Ie 1•r janvier 1954, (ibid.).
N. B. - Pour la législation vaudoise, voy. n°' 30 et 71.

CHAPITRE PREMIER
Générali tés
l. Avant d'ahorder l'étude de la législation suisse en cette ma•
tière, il nous paraît souhaitahle de rappeler brièvement les aspects
de la structure politique de la confédération helvétique ainsi que
les caractères de son agriculture (1).

(1) En droit suisse, les expressions remaniement parcellaire et réunion


parcellaire, seules employées, sont considérées comme équivalentes.
Cependant la première est réservée, dans la pratique, aux opérations de
rememhrement rural entraînant des travaux annexes coûteux (modifications au
réseau des routes et chemins, honifications foncières, colonisations rurales ... ),
tandis que la seconde tend à ne plus désigner que des améliorations moins
poussées, comparahles à ce que Ie droit français dénomme < réorganisation
foncière».
Dans les textes fédéraux, < réunion parcellaire » ne revêt pas de sens parti-
culier, alors que la législation vaudoise l'entend dans l'acception nouvelle
(voy. infra, n°" 7 et s.).

71
Structure politique
2. Les vingt-cinq cantons et demi-cantons composant la confédé-
ration sont souverains en ce sens que leur souveraineté n'est pas
limitée par la Constitution fédérale, et qu'ils exercent tous les droits
qui ne sont pas délégués au pouvoir fédéral (art. 3 de la Constitution
fédérale du 29 mai 1874).
Les cantons sont tenus de demander à la Confédération la garan-
tie de leurs constitutions (art. 6) .
Ils jouissent en matière politique d'une large autonomie. Chacun
d'eux possède une chamhre des députés ou Grand conseil et un or-
gane de gouvernement proprement dit : Ie Conseil d'Etat.
L'initiative laissée aux cantons pour organiser les conditions d'ap-
plication et notamment la procédure du rememhrement a, pensons-
nous, facilité et simplifié l'exécution de ces mesures. Les lois
cantonales ont souvent précédé et préparé l'élaboration des disposi-
tions fédérales en matière d'améliorations foncières.

Situation agricole de la Suisse


3. La superficie totale de la Suisse est de 41.300 km2 ; sa popula-
tion est de 4.300.000 hahitants. Sur cette superficie, 32.000 km 2
constituent sa surface productive, forêts et paturages compris.
12.600 km 2 seuls, sont susceptihles d'être lahourés. En 1940, la sur-
face effectivement lahourée était de 1.800 km 2 ; elle a atteint
4.000 km 2 en 1945.
Les agriculteurs représentent 20 p. c. de la population totale.
Comme dans tous les autres pays, cette proportion suhit une régres-
sion constante.
L'agriculture suisse doit pourvoir aux hesoins de la population;
cette exigence a déterminé Ie gouvernement fédéral à pratiquer une
politique de suhventions, destinée notamment à favoriser les amé-
liorations foncières.

4. La Suisse, comme la Belgique, est un pays de petite propriété


et d'exploitation familiale. La surface moyenne des exploitations
est de 8 ha environ. 75 p. c. des terres cultivées appartiennent aux
cultivateurs, alors qu'en Belgique, 32 p.c. des terres sont cultivées
en faire valoir direct, 68 p. c. sont exploitées par des locataires.

5. La Suisse a subi, tout comme les autres pays de l'Europe occi-


dentale, Ie morcellement et Ie parcellement des terres. Mais ce phé-

(2) Pour l'ensemhle de la Suisse, on comptait en 1939 une moyenne appro-


ximative de 10 parcelles par entreprise (parties hoisées non comprises).

72
nomène présente pour elle une importance particulière étant donné
Ie relief du pays qui impose déjà un compartimentage des exploita-
tions et la diversité extrême de la nature du sol et du sous-sol qui
accentuent ce caractère.
Un exemple impressionnant est celui du Val Blenio ou, pour deux
communes on a dénombré 88.000 parcelles sur une superficie de
2.200 ha appartenant à 656 propriétaires; ce qui représente en
moyenne 134 parcelles d'une grandeur de 250 m 2 par propriétaire.
De telles situations se rencontrent aussi dans les cantons des Grisons
et du Valais (2).
L'étendue des terres cultivables qui se révèle depuis longtemps
insuffisante, ne peut pratiquement plus être accrue. Cette surface
est de plus, réduite constamment par l'industrialisation, l'extension
des agglomérations urbaines et Ie développement des voies de com-
munications. Ces prohlèmes sont communs à la généralité des pays.
!Depuis 1905, 33.000 exploitations ont disparu; l'agriculture suisse
perd chaque année deux ou trois mille hectares de ses meilleures
terres.
Les améliorations foncières parmi lesquelles en ordre principal
vient Ie remaniement parcellaire, sont donc pour la Suisse un pro-
blème vital. On estime que 46 p. c. au moins des exploitations agn-
coles doivent encore être remembrées.

73
CHAPITRE II

Aperçu bistorique de la législation

6. Lorsque la radiation de toutes les servitudes communautaires


permit la libre disposition des hiens-fonds et que Ie partage effectif
des terres se généralisa au XIX• siècle, la partie la plus éclairée de
la population se rendit compte du danger que présentait Ie morcel-
lement et essaya d'y remédier avec l'aide des autorités cantonales.
Jusque vers 1880, la législation relative aux améliorations fon-
cières dépendit exclusivement de l'initiative des cantons. Il est inté-
ressant de noter que dans l'état fédératif suisse, presque toutes les
täches qui ont trait au développement de l'agriculture sont princi-
palement du ressort des autorités cantonales qui, en toute liberté,
ont arrêté leurs mesures d'encouragement.

7. Avant la création de l'Etat fédératif en 1848, sous l'influence


des Etats du sud de l' Allemagne, plusieurs lois cantonales relatives
au rememhrement de la propriété foncière furent promulguées. A
titre de documentation, nous citons la loi de 1808 édictée par Ie
canton de Lucerne.
Cette loi, qui fut revisée en 1837, ne prévoyait pas la contrainte
de la minorité opposante et resta sans effets.
Schaffhouse promulgua en 1846 une loi sur la mensuration ca-
dastrale qui obligeait les propriétaires fonciers à participer à une
entreprise de regroupement des hiens-fonds. En 1857, cette loi fut
revisée et exigea l' assentiment de la moitié des propriétaires possé-
dant au moins la moitié des terres visées par Ie projet de remem-
hrement.
D'autres législations organisèrent la participation obligatoire des
propriétaires aux travaux d'améliorations foncières; Bale-Campagne
en 1895; Neuchätel dès 1899; Ie Tessin dès 1902; Fribourg et Vaud
en 1907; Zurich en 1911.
Toutes ces lois restèrent cependant sans grande efficacité, tant à
cause de l'insuffisance de l'appui financier des pouvoirs public,;,
qu'en raison des difficultés rencontrées par les groupements.

74
8. La première intervention de la Confédération fut un arrêté de
1884 remplacé Ie 22 décemhre 1893 par la loi fédérale relative à
l'amélioration de l'agriculture.
Cette loi autorise pour la première fois la Confédération à accor-
der des suhsides pour faciliter l'application des mesures tendant à
stimuler l'agriculture, en précisant que les suhventions ne seront
accordées qu'à des entreprises ayant pour hut d'améliorer Ie sol ou
d'en faciliter l'exploitation. Ces suhventions peuvent atteindre 40 à
50 p. c. de la dépense totale et sont toujours proportionnelles aux
prestations cantonales. Aux autorités cantonales était laissée la régle-
mentation des questions d'ordre technique légal et administratif.

9. Au déhut de la dernière guerre, Ie Conseil fédéral, usant du


pouvoir qu'il possédait d'édicter des mesures prévoyant des amélio-
rations foncières extraordinaires en vue d'augmenter la production
des denrées alimentaires, promulgua les arrêtés des 11 février 1941
et 20 mars 1942. Ces dispositions fixaient à 50 p. c. Ie taux des suh-
sides fédéraux et autorisaient les gouvemements cantonaux à modi-
fier par voie d'ordonnance la législation cantonale pour les amélio-
rations foncières (1).

(I) Voy. et comp. in/ra, n° 75.

75
CHAPITRE 111
Le Code civil suisse

AMELIORATIONS FONCIERES
10. Le Code civil du 10 décemhre 1907 entré en vigueur en 1912
traduit les préoccupations qui se manifestèrent d'ahord sur Ie plan
cantonal.
Dans Ie livre des Droits réels, au titre de la Propriété foncière,
l'article 702 réserve expressément à la Confédération, aux cantons
et aux communes, le droit d'apporter, dans l'intérêt public, certaines
restrictions à la propriété foncière, notamment en ce qui concerne
les améliorations du sol, Ie morcellement des fonds, les réunions
parcellaires.
L'article 703 précise la portée de cette restriction en décrétant Ie
principe suivant : « Lorsque des améliorations du sol (corrections
de cours d'eau, desséchements, rehoisements, chemins, réunions
parcellaires de forêts et de fonds ruraux, etc.), ne peuvcnt être réa1i-
sées que par une communauté de propriétaires et que les ouvrages
nécessaires à eet effet sont décidés par la majorité des intéressés
possédant plus de la moitié du terrain, les autres sont tenus
d'adhérer à cette décision. Les propriétaires intéressés qui ne pren-
nent pas part à la décision seront réputés y adhérer. L'adhésion
sera mentionnée au registre foncier.
» Les cantons règlent la procédure. Tls doivent, en particulier pnur
les réunions parcellaires, édicter des règles détaillées.
» La législation cantonale peut alléger les conditions auxquelles
Ie présent code soumet l'exécution de ces travaux et implique pa1·
analogie les mêmes règles aux terrains à hätir » (1) .
Qu'advient-il du hail à ferme ? L'article 296 du Code des ohliga-
tions dispose : « Si des hie~s-fonds affermés sont compris dans
une réunion parcellaire, et que leur exploitation suhit de ce fait
une modification notahle, chacune des parties a Ie droit de résilier
Ie contrat pour la fin de l'année de hail courante.
» La résiliation a lieu sans indemnité » (2).
( 1) Les passages en italique ont été introduits par l'article 121 de la Loi
sur l'agriculture du 3 octobre 1951, entrée en vigueur Ie 1 er janvier 1954.
(2) Voy. Fiches jur. suisses, v0 Bail à ferme VI.

76
ll. ·La loi du 3 octobre 1951, précitée, exige une autorisation ,de
l'autorité cantonale compétente pour morceler à. nouveau des
terres comprises dans une rév.nion parcellaire, volontaire ou non
(art. 86).
Le Code civil contient d'autre part divèrses dispositions tendant
à éviter Ie morcellement des héritages (2bis).

Attribution préférentielle

12. Les articles 620 et 621 permettent à l'autorité compétente,


désignée par la loi cantonale, d'attrihuer à un seul héritier la tota-
lité de l'exploitation agricole. Il faut que celle-ci offre « des moyens
d'existence suffisants » : la protection d'entreprises agricoles. non
viahles ou accessoires ne présente pas d'intérêt pour la collectivité;
Ie partage peut toutefois être opéré lorsque l'entreprise se prête à
one division en plusieurs domaines viables (art. 62lter) (3).

13. Le requérant doit être héritier au sens de la loi (4), et paraî-


tre capable de se charger de l'entreprise, sans que l'exploitation di-
recte soit imposée.
Si plusieurs candidats se trouvent eri présence, on ohserve la hié-
rarchie établie par l'article 621, interprété par de nomhreux arrêts
rio Trihunal fédéral (5) : l'héritier - homme on femme - qui M-
sire faire valoir personnellement Ie domaine doit être préféré à tout
autre, Ie fils prime la fille et celle-ci les autres héritiers. Les usages
locaux et, à défaut, la situation personnelle de tel candidat décide-
ront des conflits qui suhsisteraient après l'application des deux pre-
miers critères (6).

(2bis) Ce sont les articles 616 à 625 et 633, complétés et partiellement modifiés
par l'article 94 de la loi fédérale sur Ie désendettement des domaines agricoles,
du 12 décemhre 1940, entrée en vigueur Ie 1er janvier 1947 et par la loi fédérale
du 12 juin 1951 sur le maintien de la propriété foncière rurale, entrée en
vigueur Ie 1~r janvier 1953.
On en déplore Ie caractère « dispositif » à l'égard des héritiers, ceux-ci étant
lihres de convenir d'un autre mode de partage (Fiches jur. suisses, v 0 Succes.
sions agricoles, I). Il faut y ajouter les articles 218bis et 218ter du Code des
ohligations (infra, n~ 22).
(3) D'autre part, il est loisihle aux rnntons de restreindre Ie droit légal à
l'attrihution intégrale dans les régions montagneuses on de propriété morcelée
(art. 62lquater modifié par l'article 49 de la lQi fédérale du 12 juin 1951,
précitée); les héritiers pourront ainsi, lorsque l'occasion s'en présente, arrondir
leurs propres biens.
(4) La notion d'héritier est plus large en droit suisse qu'en droit français;
elle comprend l'enfant naturel reconnu, de même que Ie conjoint survivant
s'il n'a pas simple qualité d'usufruitier, et l'héritier institué.
(5) Fiches jur. suisses, v 0 Successions agricoles, II.
(6) La loi hernoise reconnaît Ie privilège du cadet ou minorat (pour l'an-
cienne partie du canton seulement).

77
En cas d'injustice évidente résultant de la stricte application de
ces règles, Ie Tribunal fédéral admet qu'il y soit dérogé (7).

14. Le hénéficiaire peut exiger que Ie bétail, Ie matériel et les


approvisionnements servant à l'exploitati~n lui soient également
attribués à la valeur qu'ils représentent pour celle-ci (art. 620, al. 2
nouveau) ; les industries accessoires sont estimées à la valeur vénale
(art. 625 modifié par la loi du 12 décembre 1940).

15. Le prix du domaine est fixé à la valeur de rendement aux fins


de prévenir l'endettement excessif de l'attributaire (8). L'article 6,
alinéa r•, de la loi fédérale précitée, définit cette valeur comme
snit : « la somme qui, l'intérêt étant de 4 p. c. et l'exploitation con-
forme aux conditions usuelles, a pu être retirée en moyenne du do-
maine ou hien-fonds pendant une assez longue période avant l'esti-
mation » (9).
C'est la valeur de rendement au moment du partage qui doit être
recherchée.

16. Les héritiers sont libres de convenir d'un prix d'attribution


supérieur; mais en ce cas, de même que dans l'hypothèse ou il n'a
pas été recouru aux experts officiels, la validité du contrat est subor-
donnée à la ratification par l'autorité compétente. Conformément
à l'arrêté du Conseil fédéral du 19 janvier 1940, contre la spécula-
tion sur les terres (complété par les arrêtés du 7 novemhre 1941 et
du 20 décemhre 1940), la ratification sera refusée si Ie prix dépasse
Ie maximum admis (valeur de rendement augmentée de 30 p. c. au
plus); elle Ie sera également si, par exemple, la proposition des
héritiers tend à un morcellement des terres ou porte atteinte à la
viabilité de l'exploitation (10).

17. Lorsque tout ou partie d'un immeuhle attrihué à un héritier


pour un prix inférieur à sa valeur vénale est vendu, ou échangé (11),

(7) Arrêt puhlié par Ie ]ournal des Tribunaux (suisse) de 1917, p. 146.
(8) L'article 621quater, al. 2, édictait que les cantons peuvent déterminer
certaines régions à caractère urbain on l'attrihution est autorisée à un prix dé;
passant la valeur du rendement. Une autre formule a été adoptée récemment
(cf. in/ra, note 12).
(9) A défaut d'accord snr la valeur de rendement et si elle n'est pas suf•
fisamment connue, elle est réputée égale aux trois-qnarts de la valeur vénale
(art. 618).
(10) Ces raisons peuvent être invoquées par l'autorité compétente pour refu-
ser la ratification de toute aliénation ou acquisition de terres ( voy. Fiches jur.
suisses, "-o Vente d'immeuhle, V).
(11) L'application de cette dispositiou est normalement exclue lors de
réunions parcellaires sur pied de l'article 703 du Code civil, ou à l'occasion
d'échanges spontanés de terrains avec des voisins pour arrondir l'exploitation
(Fiches jur. suisses, v<> Successions agricoles, IV).

78
ou constitué en apport en société dans les quinze années (dix autre-
fois) à compter du partage, les cohéritiers ont Ie droit de réclamer
leur quote-part du gain; il faut que ce droit ait été annoté au re-
gistre foncier lors du partage (art. 619, al. r•, modifié) (12).
Les cohéritiers ne peuvent toutefois rien recevoir au delà de ce
qu'ils auraient obtenu dans Ie partage si l'immeuble avait été attri-
bué pour un prix égal à sa valeur vénale (al. 2) .
Si aucun des héritiers ne demande l'attribution de toute l'exploi-
tation agricole ou qu'une requête tendant à sou attribution totale
est rejetée, chacun des membres de la « communauté héréditaire »
peut exiger qu'elle soit vendue comme un tout (art. 625bis, modifié
par la loi du 12 juin 1951).

Sursis au partage
18. Les articles 622 à 624 organisent Ie sursis au partage. En pareil
cas, les cohéritiers de l'attrihutaire sont contraints d~ former avec
lui une indivision en participation, dont ils pourront demander la
dissolution lorsque ce dernier aura acquis les moyens de liquider
sa situation sans grever ses hiens à l'excès (art. 623, al. Ier); sauf
convention contraire, l'attrihutaire est autorisé à demander en tout
temps la dissolution de l'indivision (al. 2).
Ces articles sont restés pratiquement lettre morte, les agriculteuri!I
préférant une solution nette et définitive (13).

Minimum de contenance
19. En vertu de l'article 616, les cantons out Ie droit de prescrire
que les hiens-fonds ne pourront être morcelés au delà d'un mini-
mum de contenance fixé pour les différentes espèces de culture. La
plnpart des cantons ont fait usage de cette disposition (14). Les ter-
mes généraux dans lesquels elle est conçue permettent de l'appli-
quer en toutes circonstances, bien qu'elle figure au titre « Du par-
tage » (15) .

(12) Depuis 1953 les cantons peuvent prolonger jusqu'à vingt-cinq ans
dans les régions à caractère urhain Ie délai pendant lequel les cohéritiers ont
Ie droit de réclamer leur quote-part (art. 62Iquater, al. 2, modifié par la loi du
12 juin 1951, et al. 3).
(13) Il faut dire que Ie Code ne prévoyait Ie sursis au partage qu'en cas
de danger de surendettement. La Loi fédérale précitée en a étendu l'applica-
tion contre des réalisations forcées nuisibles à l'économie > (concordat, sursis
rement à reprendre l'exploitation en entier (art. 62Ibis du C. civ. s.).
D'autre part la loi du 12 juin 1951 a instauré diverses « mesures de protec-
tion contre des réalisations forcées nuisibles à l'économie » { Concordat, sursis
- art. 28 à 43).
{14) Le minimum fixé oscille entre 18 et 40 ares.
(15) Voy aussi supra, n"' 16, in fine et note 10.
Sur l'application de l'article 616 dans Ie canton de Vaud, voy. in/ra, n"' 68.

79
Salaire diff éré
20. L'article 633 dispose : « Les enfants majeurs qui, faisant mé-
nage commun avec leurs parents, ont consacré leur travail ou leurs
revenus à la famille, peuvent réclamer lors du partage une indem-
nité équitable, à moins qu'ils n'y aient expressément renoncé ».
Cet article termine Ie chapitre « Des rapports » et institue, en
quelque sorte, selon l'expression de Borel, un rapport en sens in-
verse. Le droit qu'il confère a exclusivement Ie caractère d'un droit
successoral et n'est pas sujet à prescription jusqu'au partage. Les
parents ne peuvent en priver !'enfant. Le pécule ainsi constitué
facilitera l'acquisition par celui-ci de l'exploitation familiale.

21. Par indemnité équitable, on entend, en principe, l'équivalent


des sacrifices effectivement consentis par !'enfant, calculés dans la
pratique suivant des normes régionales. Ce montant est sujet à ré-
duction lorsq1;1e, par exemple, il absorberait l'actif net de la suc-
cession.
Il se déduit du caractère exclusivement successoral de l'indemnité
qu'elle ne pourra jamais être prélevée au détriment des créanciers
de la succession. D'autre part, Ie cohéritier ayant accepté purement
et simplement ne sera pas tenu de compléter de ses deniers Ie solde
manquant, si l'indemnité excède les forces successorales.

lnaliénabilité temporaire
22. En vertu de l'article 218 du Code des obligations, les immeu-
hles agricoles ne peuvent être aliénés, ni en entier, ni par parcelles,
pendant dix ans à compter de leur acquisition. Cette disposition
ne s'applique pas aux terrains à bätir, ni aux immeuhles administrés
par un tuteur ou réalisés par voie de poursuite ou de faillite.
En outre, de justes motifs permettent d'obtenir dérogation à
cette règle, ainsi Ie dessein d'arrondir un domaine, de liquider une
succession ou d'empêcher une réalisation forcée (art. 218bis et
218ter, intercalés en 1942 (16) et modifiés en 1947).

Droit de préemption
22bis. L'article 682 du Code civil attrihue un droit de préemp•
tion au copropriétaire contre tout tiers acquéreur d'une quote-part
de l'immeuble indivis.

(16) Ces articles ont été modifiés en dernier lieu par l'article 50 de la loi
du 12 juin 1951.
Ajoutons que ladite loi autorise les cantons à instituer une procédure d'op-
position à la vente de biens-fonds lorsque l'acheteur est suspect de desseins
de spéculation, d'accaparement ou de simple cumul (art. 18 à 21).

80
Sans préjudice de cette disposition, la loi du 12 juin 1951 con-
fère pareil droit en cas de vente d'une exploitation agricole ou de
parties importantes de celles-ci aux proches parents du vendeur,
ainsi que, si Ie droit cantonal Ie prévoit et sous certaines conditions,
au fermier et aux personnes liées au vendeur par un contrat de
travail (art. 6 à 17) .
Diverses exceptions sont prévues et l'acquisition de la propriété
au cours d'enchères forcées est réservée (art. 6 et 10).
S'il se présente plusieurs candidats, un ordre légal semblable à
celui de la hiérarchie existant en matière d'attrihution préféren-
tielle doit être observé (comp. supra, n° 13).

Biens de familie
23. Pour éviter Ie morcellement des hiens de familie, il est per-
mis aux parents de créer une indivision, prévue pour un terme dé-
terminé ou sans terme. Dans ce dernier cas, la convention d'indivi-
sion peut être dénoncée par chaque indivisaire moyennant un aver•
tissement préalable de six mois. S'il s'agit d'une exploitation agri-
cole, la dénonciation n'est admissible que pour Ie terme usuel du
printemps ou de l'automne (art. 336 et s. du C. civ. s.).

24. Enfin, Ie Code civil permet aux cantons de prévoir I'asile de


famille dans leurs législations (art. 349 et s. du Code civ. s.).
Les hiens-fonds, à destination agricole notamment, peuvent être
constitués en asiles de famille, sous Ie controle des autorités et avec
faculté d'opposition pour les tiers qui se prétendraient lésés. L'im-
meuble faisant l'objet de cette mesure devient inaliénable et insai-
sissable. « L'autorité compétente peut obliger Ie propriétaire à don-
oer asile à ses parents en ligne ascendante et descendante, ainsi qu'à
ses frères et sreurs, lorsque leur position l'exige et qu'ils n'en sont
pas indignes » (art. 355 du C. civ. s.) (17).

(17) Il n'est pas sans intérêt de noter que Ie Code civil suisse est favora-
ble à la substitution fidéicommissaire (art. 488 à 490), ainsi qu'anx pactes suc-
cessoranx ayant pour objet l'institution d'un héritier, on la renonciation - à
titre gratuit on onéreux - d'un héritier (art. 494 et suiv.).

81
CHAPITRE IV

Les législations cantonales


en matière de remaniement parcellaire

25. La majorité des cantons avaient allégé les conditions prévues


par l'article 703 du Code civil suisse en exigeant seulement l'adhé-
sion de la moitié des propriétaires (1). Certaines législations vont
même jusqu'à assimiler les abstentionnistes aux adhérents (2).
Le canton de V aud possède en cette matière une réglementation
très perfectionnée dans Ie cadre de laquelle des réalisations · nom-
breuses ont été faites.
C'est cette réglementation que nous nous proposons d'étudier
en détail.
Bien que la procédure varie de canton à canton, les différences
ne portent que sur des détails et les phases principales d'un rema-
niement parcellaire sont communes à toutes les législations.

26. L'initiative des opérations émane soit d'un nombre suffisant


de propriétaires soit des autorités communales.
Dans tous les cantons, Ie remaniement parcellaire implique la
constitution de syndicats. L' assemblée des propriétaires est à la base
de toute entreprise de ce genre, elle désigne les organes qui s'occu-
peront des opérations parmi lesquels, Ie comité de direction qui a
généralement une fonction de simple gestion, et la commission
d'estimation appelée dans Ie canton de Vaud, commission de classi-
fication et qui a dans_ les opérations de remembrement, Ie role prin-
cipal. ·
C'est l'assemblée qui arrête les statuts ou sont fixés les droits et
obligations des intéressés et détermine Ie périmètre des terres à re-
membrer.
Lorsque Ie Conseil d'Etat a approuvé les statuts et éventuellement
Ie projet, l'entreprise acquiert la personnalité.

(1) On se rappelle que Ie libellé primitif de l'article 703 du Code eivil


prévoyait comme norme la majorité des deux tiers (supra, n° 10).
(2) Voy. aussi supra, n° 19.

82
27. La mise à !'enquête publique e;t commune à toutes les législa-
tions; les délais prévus pour l'introduction des réclamations sont
assez brefs.
Les recours introduits par les propriétaires, ne sont pas déférée
aux trihunaux ordinaires. Les Suisses estiment que l'examen de ces
réclamations doit. être rapide et qu'une connaissance approfondie
des questions agricoles est indispensahle. Ce sont des organes dési-
gnés par les syndicats qui tranchent les litiges en premier ressort.
L'appel de ces décisions èst porté devant un service administratif
(autorité communale de district ou cantonale) ou hien devant un
trihunal arbitral composé de spécialistes désignés pour chaque en•
treprise, ou nommés par Ie gouvernement pour tout Ie canton.
L'institution de commissions centrales dont les memhres sont
nommés par Ie Conseil d'Etat s'est révélée particulièrement heu•
reuse.
La procédure des cantons suisses est plus simple, plus rapide que
celles qui ont été adoptées par la France et par la Hollande. Le
fait d'écarter l'intervention des trihunaux ordinaires ne peut cepen-
dant se concevoir que dans un pays ou, à l'échelle cantonale, les
ressortissants ont l'hahitude d'être consultés sur la gestion de leurs
intérêts communs.

28. Nous terminerons eet aperçu de la procédure hahituellement


suivie en Suisse, en citant une opinion de MM. P. Regamey et L.
Sine sur les rememhrements dans ce pays (3) :
« L'idée de rememhrement d'une contrée résulte souvent de l'ini-
tiative des municipalités intéressées, parfois des idées progressistes
de quelques propriétaires. On a constaté que cette idée avait beau•
coup de chances de succès lorsque les propriétaires intéressés ont eu
l'occasion de visiter des remembrements déjà effectués dans d'au-
tres communes. lls sont généralement favorahlement influencés par
les résultats ohtenus. Lors de l'exécution des premiers rememhre•
ments il était nécessaire de faire de la propagande parmi les milieux
ruraux pour réunir les majorités requises par la loi. A l'heure ac-
tuelle et devant les résultats acquis, la mentalité des agriculteurs
suisses a fortement évolué et il est remarquahle de constater que la
propagande n'est plus nécessaire. Le service des améliorations fon-
cières ne peut satisfaire, faute de crédits suffisants, à toutes les de-
mandes de remembrement qui lui parviennent » (4).

(3) « Notions sur Ie remembrement des terrains agl'icoles en Suisse et spé-


cialement dans Ie Canton de Vaud », p. 152.
( 4 J Sur les réunions parcellaires volontaires, voy. in/ra, n°' 72 et 73.

83
CHAPITRE V

La législation vaudoise
en matière de remaniement parcellaire

SECTION I. - Législation
29. Elle comporte : une loi du 21 mai 1907 sur les améliorations
foncières, modifiée Ie 13 mai 1931; un règlement du 4 janvier 1916
pris par Ie Conseil d'Etat pour l'exécution des remaniements parcel-
laires <lans Ie canton de Vaud; un arrêté du 27 décembre 1944
complétant Ie précédent, et la loi du 31 mai 1949 modifiant et com-
plétant celles des 21 mai 1907 et 13 mai 1931 sur les améliorations
foncières.

30. D'autre part, Ie règlement du 4 janvier 1916 cite comme appli-


cables aux entreprises de remaniement parcellaire, les dispositions
du Code civil suisse se rapportant au morcellement, à l'organisation
des entreprises en vue des améliorations foncières, au régime des
hypothèques grevant des biens soumis à remaniement parcellaire.
Dans Ie paragraphe relatif au Code civil, nous avons mentionné
les premières de ces dispositions; celles organisant Ie transfert des
droits d'hypothèques en cas de cession de hiens-fonds réalisée dans
Ie cadre des remaniements, seront examinées plus loin.

SECTION II. - Principes et définitions

31. Le hut principal de la loi est d'encourager les entreprises ten-


dant à améliorer Ie sol ou à en faciliter l'exploitation (art. l er) .
Parmi les améliorations visées se trouvent en premier ordre, les
remaniements parcellaires; viennent ensuite des travaux nomhreux
tels la construction de chemins, les assainissements, drainages, irri-
gations et colmatages, les entreprises colleètives d'adduction d'eau
aux fermes isolées, etc.
Il nous paraît intéressant de citer deux dispositions de cette loi
qui soulignent I'importance accordée au problème du remembre-
ment et mettent en évidence Ie caractère cohérent et efficace de la
législation suisse.

84
La construction de chemins n'est prévue qu'en terrains agricoles
non morcelés (art. 1 er, litt. A, 2") . Les divers travaux d' améliora-
tions en terrains agricoles ou viticoles, en plaine et dans les régions
de montagne, ne hénéficieront de suhventions, s'ils s'appliquent à
des terrains morcelés, que lorsque Ie remaniement parcellaire sera
réalisé (art. l°', litt. A, IOQ).
En principe, les entreprises d'améliorations foncières ne peuvent
être subventionnées par l'Etat que lorsque les terrains intéressés
appartiennent à des communes, hameaux, collectivités ou syndicats
de propriétaires constitués selon Ie vreu de la loi.

32. La définition du remaniement est donnée dans l'article 1•• du


règlement d'exécution du 4 janvier 1916. Cette opération a pour
hut d'étahlir un système de dévestiture, répondant aux exigences de
l'exploitation agricole intensive; de répartir judicieusement la pro-
priété foncière en lots réguliers, disposés favorahlement en vue
d'une exploitation rationnelle; de grouper des parcelles dans la me-
sure compatible avec les conditions d'exploitation (5).

Biens pouvant être compris dans une opéraiton


de remembrement.
33. La loi n'exclut pas les bätiments, cours, enclos, jardins atte-
nants aux habitations, ou situés à leur proximité immédiate, mais
ceux-ci doivent être traités conformément aux principes techniques
des remaniements parcellaires de terrains à bätir.

SECTION 111. - Etude d'un remaniement parcellaire


34. Nous nous proposons d'examiner d'abord les opérations pré-
liminaires qui, partant de la convocation de l'assemblée des pro•
priétaires, aboutissent à la constitution du syndicat et des divers
organes qui procéderont aux opérations de rememhrement.
Nous examinerons alors les différentes opérations de remembre-
ment proprement dites, dans Ie cadre des diverses compétences.
Dans un chapitre séparé, nous verrons les conséquences du rema-
niement en ce qui concerne Ie transfert des droits de propriété et
Ie report des autres droits réels et personnels.

A. - Opérations préliminaires. - Constitution des différents


organes qui y participent
I. lnitiative d'un remembrement.
35. Une opération de rememhrement est souvent due à l'initiative
de quelques propriétaires. Elle peut aussi être ordonnée d'office par

( 5) La dévestiture correspond au réseau de chemins agricoles destinés à


donner l'accès aux champs. C'est un synonyme romand de < desserte ».

85
Ie Conseil d'Etat pour tout ou partie du territoire d'une commune,
dans les cas suivants : lorsque Ie morcellement justifie cette opéra-
tion; lorsque la rénovation du plan cadastral s'impose; lorsque des
projets de construction ou de correction de voies publiques, chemins
de fer ou canaux, sont présentés (art. 4 bis de la loi du 31 mai 1949,
modifiant celles des 21 mai 1907 et 13 mai 1931).
Dans ce der11.ier cas, il appartient à l'Etat et aux communes de
faire étudier, en même temps que ces projets, les remaniements
parcellaires et dévestitures qui seraient rendus nécessaires par ces
entreprises. Dans cette hypothèse, l'Etat ou les communes, selon
l'appartenance des voies de communication, disposent d'une voix
dans les assemblées de propriétaires (art. 22 de la loi de 1949).

2. L' assemblée des propriétaires.


36. Elle peut être convoquée par Ie ou les initiateurs de l'entre-
prise ou par la municipalité (art. 4 de la loi de 1949).
Les propriétaires sont invités par lettre recommandée.
Lorsque la moitié des propriétaires, possédant au moins Ja moitié
de la surface des terrains compris dans Ie périmètre, ont donné leur
adhésion à l'entreprise, celle-ci devient obligatoire pour tous les
propriétaires des fonds compris à l'intérieur du périmètre ainsi que
pour les titulaires de droits réels sur les dits fonds (art. 3 de la loi
de 1949).
Cette obligation, précise l'article 3, constitue une restriction légale
de la propriété au sens des articles 702 et 703 du Code civil suisse.
Elle est dispensée d'inscription mais doit être indiquée au registre
foncier par une mention. Cette obligation ne peut en principe
exister que pour des fonds contigus formant un groupement naturel,
c'est-à-dire, limités par des routes, rivières, voies ferrées, forêts, etc.
(art. 3, al. 2, de la loi).

37. Dès que les majorités légales sont constatées, Ie syndicat est
constitué et l'assemblée procède à l'élaboration des statuts, nomme
son bureau et sa commission de classification.
Avant la convocation de l'assemblée générale, des conférences ex-
plicatives sont données par un représentant des améliorations fon-
cières sur les avantages et les charges d'une opération de remembre-
ment. Cette pratique qui est née de l'expérience, sans être prévue
par les lois ou règ1ements, nous parait excellente car elle est de
nature à faciliter considérablement les premiers contacts des pro-
priétaires au sein de l'assemblée et à rendre plus aisées et plus ra-
pides les décisions qu'ils sont appelés à prendre.

86
« Au cours de ces conférences », écrivent MM. Regamay et Sine
(op. cit., p. 153) « les idées générales se précisent et on prévoit or-
dinairement la constitution d'un comité provisoire ainsi que les
limites approximatives du périmètre à rememhrer. On fait alors
circuler une formule par laquelle les propriétaires signa!aires s'en•
gagent à adhérer à l'entreprise. L'assemhlée constitutive peut être
convoquée dès que les majorités légales sont atteintes. Le fait que
les propriétaires ont signé ne signifie pas !'engagement d'exécution
des travaux. Ceci est du ressort de l'assemhlée générale. Cette assem-
blée constitutive, à laquelle sont convoqués par lettre recommandée
tous les propriétaires, fixe alors de façon définitive les divers points
nécessaires à la mise en route de l'opération de rememhrement ».

3. Le syndicat.

38. Le rememhrement est l'reuvre du syndicat des propriétaires.


Ces syndicats sont constitués par arrêté du Conseil d'Etat dès que
la majorité requise par la loi est atteinte, c'est-à-dire, lorsque 18
inoitié des propriétaires, possédant au moins la moitié de la surface
des terrains compris dans Ie périmètre, ont donné leur adhésion à
l'entreprise (art. 3 de la loi de 1949).
Nous avons vu précédemment que ces syndicats étaient ohligatoi-
res dans toutes les entreprises d'améliorations foncières; c'est une
condition mise par la loi à l'ohtention de suhsides de la part de
l'Etat.
Le Conseil d'Etat peut par voie d'arrêté, conférer à ces syndicats,
la personnalité juridique dans les limites de leur destinatión et
selon les normes à fixer dans Ie règlement d'exécution (art. 4, al. 2,
de la loi de 1949) . Il a Ie pouvoir de les dissoudre quand ils ont
atteint leur hut et rempli leurs ohligations.

4. Les statuts.
39. Dès que Ie syndicat est formé, il procède ·à la discussion des
statuts.
Un projet type est généralement communiqué à tous les proprié-
taires par les soins du service des Améliorations foncières.
Les statuts, qui constituent la charte de l'entreprise, déterminent
Ie périmètre provisoire des terres soumises au projet de rememhre•
ment,. les organes du syndicat et leurs attrihutions, les moyens finan-
ciers de l'entreprise, et toutes autres dispositions qui poµrraient être
ptoposées par les memhres de l'assemhlée, pour autant qu'elles
soient dans Ie cadre de la loi.

87
5. Bureau ou direction du syndicat.
40. La direction du syndicat comprend 3 à 9 memhres, propr1e-
taires, représentant les intérêts de la région. Ils sont élus par l'as-
semhlée pour une durée déterminée et sont rééligihles.
Ils ont fa gestion administrative et :6.nancière de l'entreprise. MM.
Regamey et Sine (op. cit., p. 154), estiment qu'il y a souvent intérêt
à introduire dans cette direction des propriétaires hostiles à l'idée
d'un rememhrement, a:6.n que l'avis de l'opposition soit envisagé.
Bien souvent, remarquent ces auteurs, au fur et à mesure de l'avan-
cement des travaux, ces opposants deviennent des partisans.

6. La Commission de dassification.
41. Son röle est très important; il lui incomhe notamment d'esti-
mer les parcelles (d'ou parfois son nom de commission d'estimation);
c'est elle qui statue en premier ressort sur les réclamations intro-
duites par les propriétaires. C'est d'elle que dépend en majeure
partie Ie succès de l'entreprise.
Elle est nommée par l'assemhlée des propriétaires, qui choisit ha-
hituellement des personnalités complètement étrangères à l'opé-
ration, mais ayant la con:6.ance de l'assemhlée; ce sont de préférence
des agriculteurs des villages voisins qui connaissent les t:raditions
du milieu rural (5bis).
Le secrétaire a uniquement un röle de technicien, il tient les
procès-verhaux, conseille et renseigne les memhres, de la com-
mission. C'est celle-ci qui prend les décisions; Ie secrétaire n'a pas
voie délihérative.

7. La Commission de gestion.
42. Cet organisme véri:6.e la comptahilité et la gestion de la direc-
tion du syndicat et dresse Ie rapport à présenter à l'assemhlée gé-
nérale.

8. Aspect financier.
43. Dès la constitution du syndicat, l'ensemhle des terres com-
prises dans Ie projet de remaniement, sont grevées d'une
hypothèque. La direction du syndicat s'adresse alors à un étahlisse-
ment bancaire pour ohtenir l'argent nécessaire à la mise en route
de l'entreprise. L'ensemhle des terres constitue la garantie de ce
prêt.

(5bis) Ce système paraît préférahle à celui que propose Ie projet de loi


beige consistant à ne recourir qu'à des personnes de l'endroit pour composer
la commission consultative (in/ra, Belgique n° 68).

88
Les propriétaires peuvent effectuer anticipativement des verse•
ments afin de réduire au minimum les frais d'intérêts; l'Etat, dans
un hut d'encouragement, effectue de son cöté des versements pro-
portionnés aux sommes versées par les intéressés.

9. Le service des Améliorations foncières.


44. Nous avons noté son intervention dans les conférences préli-
minaires organisées avant la réunion de l'assemhlée, ainsi que dam
la communication de projets de statuts. Ce service représente Ie
gouvernement et est chargé dans les opérations de remembrement
d'une mission de conseiller et de collaborateur. Il doit veiller à l'ob-
servation des lois, mais ne dispose d'aucun droit dans la conduite de
l'entreprise.

B. - Opérations de remembrement
45. Dans leur ordre successif elles se présentent de la manière
suivante :
1 ° Etablissement d'un plan général à l'éche1le 1/1000" du terri-
toire compris à l'intérieur du périmètre déterminé dans Ie~
statuts du syndicat, avec l'état de propriété de toutes les par•
celles;
2° Estimation des tertes suivant leur nature et leur valeur;
3° Mise à l'enquête du tableau d'estimation des terres;
4° Report des travaux collectifs (canaux et chemins), détermina•
tion de Ia valeur de l'entreprise et de celle des terres à répartir
à chaque propriétaire;
5° Etablissement du plan de nouvelle répartition des parcelles,
avec l'application des nouvelles taxes cadastrales, c'est-à-dire
projet de remaniement parcellaire avec tableau des mutations
d'hypothèques et autres droits, y compris les modifications de
servitudes;
6° Examen des plans et tableaux d'estimation et de répartition
par Ie département de l'agriculture;
7° Mise à l'enquête de ces plans et tableaux;
8° Requête du Conseil d'Etat, sollicitant l'inscription d'office au
bureau du registre foncier compétent (art. 3 du Règlement du
4 janv. 1916).

l. Etablissement du périmètre de l' entreprise.


46. Nous avons vu que les statuts déterminaient Ie périmètre pro-
visoire des terres soumises à rememhrement.
L'établissement du périmètre définitif est l'reuvre de la commis-

89
sion de classification. Si Ie périmètre provisoire devait subir des
modifi.cations, il y aurait lieu de s'assurer du maintien des majorités
légales à l'intérieur du nouveau périmètre.
Lorsque Ie périmètre est défi.nitivement établi, Ie géomètre, secré-
taire de la commission, dresse à l'échelle 1/1000", Ie plan général
du territoire compris à l'intérieur du périmètre, avec l'état de pro-
priété des parcelles.
Cet état de propriété est donné par Ie tableau des propriétaires
qui doit correspondre aux données du cadastre, mis à jour à l'épo-
que de l'établissement du plan général (art. 11 du Règlement). Les
parcelles doivent être numérotées (id.).
Dans l'accomplissement de sa täche, Ie géomètre doit se confor-
mer aux dispositions législatives en vigueur, au règlement d'exécu•
tion, au cahier des charges ainsi qu'aux directions du département
de l'agriculture (art. 4 du Règlement).
Le périmètre, Ie tableau des propriétaires et Ie plan des parcelles
sont alors soumis à !'enquête publique.
Après l'accomplissement de cette formalité, Ie syndicat des pro-
priétaires se voit accorder la personnalité juridique par Ie Consei]
d'Etat.

2. Estimation des terres.

47. La commission de classification procède alors à l'estimation


des terres qui est une des phases les plus délicates de l'opération de
remembrement.
La commission établit Ie tableau comparatif des terrains suivant
leur nature et leur valeur. Selon Ie vreu de la loi du 21 mai 1907,
l'estimation de chaque parcelle doit se faire sur la base de son re-
venu en tenant compte de son exposition, de son éloignement, de sa
dévestiture et de la nature du sol (art. 12, litt. a).
Les arbres, semences, engrais, l'état d'entretien, les installations
et améliorations agricoles font l'objet d'une estimation spéciale et
d'une compensation en argent (art. 12, litt. b).
La loi distingue donc :
1 ° Les valeurs permanentes.
2° Les valeurs passagères.

1° LES VALEURS PERMANENTES.

48. Deux méthodes ont été appliquées danli Ie canton de V aud


pour l'estimation des valeurs permanentes.

90
a) La méthode généralement adoptée consiste à répartir les ter-
rains compris dans Ie périmètre, en différentes classes de valeurs
diverses, dont Ie nomhre oscille entre 20 et 100.
Dans l'estimation de leur valeur, on tient compte des éléments
ayant un caractère permanent, intrinsèque, tels : l'origine du sol,
sa composition et sa formation géologique, sa teneur en eau, les pos-
sihilités d'exploitation, la topographie.
MM. Regamey et Sine affirment que les commissions de classifi-
cation composées d'agriculteurs, parviennent généralement à ré-
partir avec heaucoup d'exactitude les terrains dans ces diverses clas-
ses. On estime alors la valeur de la classe la plus élevée, par rap•
port à laquelle sont alors estimées les autres classes (1) .
Les limites sont d'ahord déterminées sur Ie terrain et reportées
ensuite sur Ie plan par Ie géomètre, au fur et à mesure des décisions
de la commission de classification.
Les classes et les parcelles ne coïncident pas nécessairement; il
arrive souvent en Suisse ou les terrains varient sur des distances
très courtes, qu'une seule parcelle comporte des parties situées dans
des classes différentes.
L'essentiel, disent MM. Regamey et Sine, est d'arriver à des « esti-
mations proportionnelles exactes les unes par rapport aux autres,
puisque Ie rememhrement n'envisage que !'échange de parcelles» (2).
La pratique a démontré qu'il est de heaucoup préférahle d'estimer
plutöt bas que trop haut; la répartition des parcelles se fait alors
plus aisément.
b) L'autre méthode consiste à déterminer directement la valeur
de chaque terrain sans recourir à la division en classes. Cette mé-
thode qui, à première vue, paraît heaucoup plus simple, présente
dans son exécution des difficultés heaucoup plus grandes.
L'on comprend aisément que lorsque, pour un périmètre donné,
une classification des terrains a été faite, hasée uniquement sur leur
nature et leur valeur intrinsèque, indépendamment de tout lien de
droit, il soit plus facile par après de se servir de ces classes pour
évaluer les terrains appartenant à tel ou tel propriétaire.

2° LES VALEURS PASSAGÈRES.

49. Celles-ei comprennent l'état des cultures, l'entretien, engrais,


servitudes, plantations. Elles sont estimées directement en espèces
et sont portées à l'actif ou au passif des propriétaires.

(1) Op. cit., p. 156. En Autriche également ce sont des agriculteurs qui
~ont chargés de ces taches (cf. supra, lntrod. gén., n° 21, in fine).
(2) Op. cit., p. 157.

91
50. L'estimation terminée, Ie plan général avec la désignation de;i
limites des classes, Ie tableau des variations passagères de valeur,
Ie tableau d'estimation des arbres, sont soumis au département de
l' agriculture.
Le géomètre-secrétaire doit également joindre à ces pièces Ie pro-
cès-verbal des opérations de la commission, notamment l'indication
des principes qui ont servi de base à l'estimation (art. 12 du Règle-
ment).

3. Travaux collectifs : Chemins et canaux.


51. Tous les propriétaires inté1·essés sont tenus de céder, gratui-
tement et proportionnellement à la valeur totale des parcelles qu'ils
possèdent dans Ie périmètre de l'entreprise, l'équivalent du ter•
rain nécessaire à la création des chemins et canaux (art. 15 du Rè-
glement).
Quant aux terrains qui ne sont pae exactement intéressés à l'en-
treprise, mais qui sont néanmoins nécessaires à l'exécution des tra-
vaux collectifs, c'est la commission de classification qui a compé-
tence pour procéder à leur estimation, sous réserve de recours de Ia
part des intéressés.
La construction des chemins représente une des grosses dépenseil
de l'entreprise. Le réseau en est établi par Ie géomètre avec l'accord
du service des Améliorations foncières, de la direction du syndicat
et de la commission de classification.
Les principes appliqués en Suisse veulent que chaque parcelle
soit desservie par au moins un chemin empierré et un chemin en-
herbé à l'autre extrémité de la parcelle, de façon à éviter toutes ser.
vitudes entre propriétaires notamment lors des lahours.

4. Projet de remaniement parceUaire proprement dit : Répartition


des nouvelles parcelles.
52. Cette opération constitue la phase la plus importante de l'en:-
treprise de rememhrement; elle a pour préliminaires ou phase pré-
paratoire, l'estimation des parcelles et Ie tableau des travaux collec-
tifs. Ces trois opérations sont l'reuvre de la commission de classifi-
cation aidée par Ie géomètre-secrétaire. Elles sont soumises à des
enquêtes puhliques.
PRINCIPE.

53. Chaque propriétaire intéressé doit recevoir, en échange des


parcelles qu'il ahandonne, autant que possible des terrains de même
nature et de même valeur (art. 12, litt. C, de la loi de 1907).

92
Si l'opération ne permet pas de donner à un propriétaire l'équi-
valent des parcelles qu'il doit céder, il a droit à une compensation
équitable soit en terrain, soit exceptionnellement en argent (art. 12,
litt. D).
Les terrains gagnés par suite de la suppression d'anciens chemins,
ruisseaux ou fossés, sont attribués aux propriétaires bordiers, sous
réserve des compensations et indemnités auxquelles ils peuvent être
tenus (art. 13 de la loi de 1907).

BASES DE LA RÉPARTITION.

54. Le géomètre et la commission de classification devront tenir


compte, pour l'établissement du nouveau plan, des dispositions de
la loi de 1907 visées ci-dessus, des revendications des propriétaires
émises lors de !'enquête sur l'estimation des terres, des propositions
de la commission de classification ou de la direction du syndicat,
du tableau d'estimation des terres, des décisions de la commission
centrale prises sur les recours introduits par les propriétaires, ainsi
que des règles relatives aux travaux collectifs (art. 18 du Règle-
ment).
Le Règlement prévoit en outre certaines règles dont doivent s'ins-
pirer la commission de classification et Ie géomètre.
Ces règles ne sont pas impératives, elles sont destinées unique-
ment à « guider l'étude du projet de répartition », selon l'expres-
sion même du règlement (art. 19).
En effet, une fois les principes de base établis pour garantir les
droits des intéressés, il est quasi impossible en cette matière d'édic-
ter des règles de détail ayant force obligatoire. Les remembremente
présentent une grande diversité; chacun a son individualité qui dé-
pend d'éléments nombreux et imprévisibles pour Ie législateur. Ce
caractère ne rend pas souhaitable une réglementation trop rigou-
reuse qui, si elle devait être obligatoirement respectée dans touteE!
seF dispositions, donnerait lieu à des recours excessifs de la part
de propriétaires de mauvaise foi qui pourraient, uniquement par
des moyens de procédure, retarder et enrayer la solution à laquelle
~e serait ralliée la plupart des intéressés (1).
La souplesse de la législation vaudoise paraît excellente, en ren-
rlant impératives des règles garantissant les droits essentiels des

(1) On verra cependant que la nouvelle loi hollandaise, si elle apporte


quelques simplifications au système antérieur, est encore plus détaillée que la
loi de 1938 et ne comporte pas moins de ] 34 articles.

93
propriétaires et en attribuam d'autre part une valeur de conseil,
de « guide », à d'autres règles qui ne peuvent être appliquées ri-
goureusement da.ns tous les cas. Elle laisse de plus aux responsa-
bles des opérations une certaine liberté dans Ie choix et la htérar-
chie des règies de répartition.

55. Voici comment se présentent ces règles


Le périmètre de l'entreprise sera divisé en un certain nomhre de
sections correspondant aux divisions naturelles du territoire. Cette
règle se justi:fie complètement pour la Suisse ou Ie relief est très
tourmenté.
On essayera de grouper, dans une section, des fonds dont Ie sol
et l'exposition sont semhlables; les terres reçues en échange seront
groupées en un nombre minimum de parcelles de formes régulières
et situées de préférence dans la zone ou se trouvaient Ie plus grand
nomhre des anciennes parcelles. La commission tiendra compte éga-
Iement dans l'appiication de cette dernière règle, de l'intérêt géné-
raI du groupement, des conditions locales d'expioitation; il se peut
que Ie centre d'exploitation d'un propriétaire exige un autre regrou-
pement.
La surface moyenne des parcelles doit en principe être augmentée
au fur et à mesure qu'on s'éloigne de la localité ou de la ferme. Les
parcelles devront avoir autant que possihle des limites parallèles.
Les surfaces irrégulières résultant de la répartition seront attrihuées
au syndicat ou au propriétaire du fonds adjacent sur la base d'une
estimation de la commission de classification.

Echanges.
56. Il est toujours permis à deux ou plusieurs propriétaires d'opé-
rer des échanges avec des parcelles situées à l'extérieur du péri-
mètre lorsque ces échanges ont pour résultat un groupement plus
intense des fonds soumis au remaniement parcellaire. Ces échanges
sont soumis à la commission de classification qui constate les trans-
ferts immohiliers.
L'ensemble de ces dispositions s'insère logiquement dans Ie ca-
dre de la définition du remaniement parcellaire donné par Ie règle-
ment d'exécution de 1916, définition que nous avons reproduite
précédemment (n° 32) et dont nous rappelons ici encore les élé-
ments : répartition judicieuse de la propriété foncière en lots régu-
liers, disposés favorahlement en vue d'une exploitation rationnelle;
groupement des parcelles dans la mesure compatible avec les con-
ditions d'exploitation; Ie hut finaI étant une exploitation agricole
intensive.

94
Elles constituent d'une part une garantie des droits des parties, et
permettent d'autre part d'atteindre Ie hut économique projeté en
assurant l'équilihre entre l'intérêt du groupement et l'intérêt des
particuliers, sans que ce dernier soit sacrifié au premier.

5. Répartition des charges frais d'exécution et frais d'enlretien.


Principes.
57. Les propriétaires sont tenus de participer aux dépenses, dé-
duction faite des subsides, proportionnellement aux avantages pro•
curés par les travaux (art. 8 de la loi du 13 mai 1931 modifiant la
loi de 1907) .
C'est donc la plus-value acquise par Ie fait du remembrement qni
sert de base à l'établissement et la répartition des frais.

Exécution.
58. La commission de classification apprécie la plus-value de cha-
que parcelle; elle étahlit la plus-value totale pour l'ensemble des
exploitations et répartit alors les frais proportionnellement aux plus.
values particulières.
Ce calcul se fait en considération des deux éléments suivants :
a) la plus-value acquise par la parcelle elle-même;
b) la plus-value acqui~e par Ie groupement et Ie rapprochement
du centre d'exploitation.
Le tableau des frais est rendu public par l'enquête, ce qui permet
à chaque propriétaire de connaître à la fois sa part de frais et celle
de ses voisins.
Cette évaluation directe a été adoptée après d'autres méthodes et
est Ie résultat d'une évolution imposée par l'expérience. Elle a
donné toute satisfaction, étant donné les procédés employés pré-
cédemment, consistant à répartir les frais d'après la surface des
parcelles.

Propriétaires tenus de participer aux charges.


59. 1. Les propriétaires des terres remembrées.
2. Les propriétaires de hiens-fonds ne faisant pas partie de l'entre-
prise mais qui retirent un avantage des travaux exécutés, pourront
être tenus de participer dans une mesure équitable aux frais d'exé-
cution et d'entretien de ces travaux.
Dans cette dernière hypothèse, en cas de contestation, Ie Conseil
d'Etat est seul compétent pour décider s'il y a ou non plus-value.
Dans l'affirmative, la quotité de celle-ci est fixée par arhitres confor-

95
mément au Code de procédure civile (art. 6, al 3 et 4 de la loi de
1907, modifié par la loi du 13 mai 1931).
La commission de classification n'est compétente que pour con-
naître des recours introduits par les propriétaires de terrains faisant
partie de l'entreprise de remaniement.
En règle générale, les travaux et ouvrages occasionnés par un re-
membrement passent dans Ie domaine public des communes et sont
entretenus par celles-ci (art. 43 de la loi de 1907 modifié par la loi
du 13 mai 1931).

6. Subsides.

60. Le subside cantonal peut s'élever jusqu'à 40 p. c. des frais


d'étude et d'exécution des travaux de remembrement.
En montagne ou les exploitations sont moins importantes et les
frais d'entreprise plus élevés, les subsides (fédéral et cantonal) peu-
vent aller jusqu'à 80 p. c. Les subventions ne sont accordées que
pour des ouvrages entièrement neufs à l'exclusion des transforma-
tions ou réparations.
Leur taux est déterminé en tenant compte du degré d'intérêt
public des travaux projetés, de leur rentabilité et des difficultés plus
ou moins grandes de leur exécution.

Remarque.

61. L'octroi d'un subside n'entraîne pas la responsabilité de l'Etat,


dans l'entreprise, ni à l'égard des membres des syndicats, ni à l'égard
des tiers.
Si par après les biens-fonds pour lesquels des subsides ont été
attribués, sont soustraits de l'exploitation agricole normale, l'Etat
peut exiger Ie remboursement de tout ou partie des subsides canto-
naux et fédéraux.
Cette obligation de remboursement cesse après l'expiration d'un
délai allant de 15 à 25 ans à compter de l'achèvement des travaux.

7. Remboursement des subsides et payement des frais.


62. l) L'obligation pour les propriétaires de rembourser les suh-
sidei;; de l'Etat et de la Confédération constitue une charge foncière
de droit public dispensée d'inscription mais primant toutes les au-
tres charges.
Cette obligation sera indiquée au registre foncier par la mention
« Améliorations foncières », mention que Ie syndicat devra solliciter
dès sa constitution.

96
63. 2) Le payement des frais d'exécution des travaux est garant!
par une hypothèque légale qui est dispensée d'inscription. Ceue hy-
pothèque prend naissance à la constitution du syndicat et s'éteint
avec Ie payement de la contribution du propriétaire.
Elle a Ie même rang que les autres hypothèques légales de droit
public et prime toutes les autres charges (art. 48 de la loi de 1907
modifié par la loi du 13 mai 1931).
Lorsque Ie tableau de répartition des frais a été soumis à enquête
et lorsqu'il a été statué définitivement sur les réclamations intro•
duites par les intéressés, Ie tableau vaut titre exécutoire pour Ie
payement des frais, sous réserve de l'accomplissement de certaine11
formalités. (Il doit être certifié exact par Ie président et Ie secré-
taire de la commission de classification, approuvé par Ie président
et secrétaire du syndicat et visé par Ie D.épartement de l'agricul-
ture).
Un délai de 10 ans au maximum peut être donné aux propriétaires
pour Ie payement qui s'effectue par annuités.
La rentrée des contributions se fait de la même façon que la per-
ception de l'impot.

8. Mutations d'hypothèques, des servitudes et autres charges.


Principes.
64. Les immeubles reçus en échange sont soumis aux droits d'hy•
pothèque qui grevaient les parcelles dont Ie débiteur a fait !'aban-
don (art. 16 de la loi de 1907).
Les créanciers hypothécaires doivent retrouver des sûretés égales
et de même rang que celles qu'ils avaient précédemment (art. 17,
al. 1"'}.
Si un fonds unique est substitué à plusieurs parcelles qui ne
sont pas toutes grevées, ou qui sont grevées différemment, toutes
les hypothèques passent, avec leur rang, sur Ie fonds unique
(art. 18).
Dans Ie cas, ou une soulte est due à un propriétaire dont les im-
meubles sont grevés, Ie montant de cette somme doit être consigné
par la direction du syndicat entre les mains du receveur de l'Etat
et mis à la disposition des créanciers hypothécaires (art. 19).
Les charges autres que l'hypothèque subissent les mêmes muta•
tions (art. 20).
Ces mutations ne rendent pas exigible Ie remboursement de la
dette (art. 17, al. 2).
Ajoutons encore que les mutations et les inscriptions au bureau
des droits réels sont faites d'office et sans frais.

97
Il suffit de déposer Ie tableau définitif portant les différentes opé-
rations du remaniement au bureau des droits réels. C'est la direc-
tion du syndicat, qui a - dans les opérations de remaniement -
UD role de gestion, qui se charge de ce dépot.

L'inscription des mutations est faite sans frais sur les titres qui
doivent être présentés au conservateur des droits réels dans · un
délai de rigueur (20 jours).
Les mutations et inscriptions de servitudes se font aussi d'office
et sans frais.

9. Enquêtes.
65. Les décisions de la commission de classification relatives aux
principales phases de l'entreprise, sont soumises à des enquêtes pu-
bliques. Ce sont : l'estimation des parcelles, Ie projet des travaux
collectifs, la répartition des nouvelles parcelles, la répartition des
charges, les mutations d'hypothèque et autres charges. -
Durée : Ces enquêtes ont en général une durée minimum de 10
jours, à l'exception des enquêtes relatives à la répartition des nou-
velles parcelles, dont la durée minimum est fixée à 20 jours (art. 14
de la loi de 1907 modifiée par la loi de 1949).
Procédure : Les propriétaires intéressés sont avertis individµelle-
ment par lettre recommandée et invités à formuler leurs réclama-
tions par écrit, dans un délai déterminé.
Lors de la mise à !'enquête du tableau portant les mutations de
droits d'hypothèques et autres charges, les créanciers hypothécaires
et les ayants droit de servitudes, sont avisés de la même manière.
De plus, dans Ie hut de donner Ie plus de garantie possible à l'en-
treprise, la direction du syndicat invite par publication et par affi.
chage dans les communes intéressées, tous ceux qui s'estimeraient
lésés par l'exécution des projets à présenter leurs réclamations dans
Ie délai prescrit.

10. Contestations. Recours.


66. Nous avons vu précédemment que les lois suisses avaient re-
jeté toute idée de recours aux tribunaux ordinaires, pour statuer
sur les réclamations introduites par les propriétaires intéressés.
C'est la commission de classification qui juge en première in-
stance. Les appels contre ses décisions sont portés devant la Com-
mission centrale, composée de 3 membres nommés par Ie Conseil
d'Etat.
Un mémoire est adressé au Département de l'agriculture dans un
délai de 10 jours à dater de la communication de la première dé-

98
cision. Le département transmet ces recours, à bref délai, à la Com-
mission centrale. Celle-ci après avoir examiné la recevabilité de
l'appel, procède aux mesures d'instruction : inspectión locale, audi-
tion du « recourant », audition de témoins. La décision de la Com-
mission centrale est définitive (art. 26 du Règlement; art. 15 de la
loi de 1907).
Beaucoup de réclamations tombent devant les explications du
géomètre et des membres de la Commission de classification; les
recours à la Commission centrale sont exceptionnels. La persistance
des recours dépend de la manière dont Ie remembrement a été
exécuté.
Quant aux propriétaires qui ne font pas partie de l'entreprise
mais qui sont invités à faire connaître leurs oppositions, ils doivent
introduire leurs réclamations directement devant Ie Conseil d'Etat.

ll. Prise de possession. Trans/ ert des droits de propriété.


67. Dès que les enquêtes sont terminées, et les recours épmses,
Ie Département de l'agriculture autorise la prise de possession des
nouvelles parcelles (art. 22 du Règlement). C'est à ce moment que
s'opère Ie transfert des droits de propriété.

12. lnterdiction du morcellement excessif du sol.


68. Le Code civil suisse en a établi Ie principe en donnant expres-
sément aux cantons Ie droit de prescrire que les biens-fonds ne pour-
ront être morcelés au delà d'un minimum de contenance fixé pour
les différentes espèces de culture (art. 616 du C. civ. s.).
La loi vaudoise de 1907 interdit tous fractionnements de fonds
de terre qui auraient pour effet de créer des parcelles d'une super-
ficie inférieure à 2 ares pour les vignes et à 20 ares pour autres
fonds. C'est la Commission centrale qui est appelée à statuer sur les
cas d'application douteux (art. 33).
Le non-respect de cette disposition entraîne la nullité de la dis-
position prohibée et une amende de 20 à 200 fr. (suisses) à charge
des propriétaires et officiers publics qui auront procédé à la di-
vision.

69. Il est intéressant de noter les remarques de MM. Regamey et


Sine sur l'état d'esprit des cultivateurs suisses. Ceux-ci spontané-
ment, s'arrangent pour éviter Ie morcellement qu'ils considèrent
souvent comme la destruction d'une reuvre (1).

f 1) Op. cit., pp. 170 et 171.

99
Dans Ie même ordre d'esprit, ces auteurs affirment que les deman-
des de remembrement « affluent au service des améliorations fon-
cières, qui doit freiner les réalisations par suite des crédits insuffi.
sants dont il dispose ».
Ces tendances des intéressés eux-mêmes, démontre à suffisance les
qualités de la législation suisse et les résultats favorables apportés
par des remaniements exécutés d'une façon rationnelle.

SECTiON IV - Résultats
70. La loi de 1907 a permis la réalisation de plus du tiers du
programme de remembrement pour Ie pays de Vaud (30.000 hecta-
res sur 90.000 en 1951).
En y incluant les travaux d'assainissement inséparables d'un re-
maniement parcellaire bien compris, la dépense est de 1500-1800
francs suisses par hectare.
Les moyens financiers du canton et de la Confédération n'autori-
sent pas l'espoir d'en terminer avant Ie début du siècle prochain.
Aussi Ie législateur vaudois a-t-il été amené à prendre l'initiative
d'une nouvelle méthode de remaniement que nous allons examiner
succinctement.

100
CHAPITRE VI

La législation vaudoise
en matière de "réunion parcellaire"

71. Le canton de Vaud s'est inquiété de la lenteur inéluctable


du remaniement parcellaire.
Aussi a-t-il promulgué la loi du 22 mai 1951 sur les réunions par-
cellaires (1) .
Nous avons vu que cette expression devait être entendue dans
un sens particulier, distinct de celui que lui donne Ie Code civil
et les lois fédérales (2). En effet, elle désigne en droit vaudois un
procédé complémentaire et transitoire, destiné aux aires agricoles
qui ne pourront être remaniées avant un certain temps. On ne
!'applique que dans les régions pourvues d'un minimum de moyens
de « dévestiture » (3).

72. La loi du 22 mai 1951 ne compte que douze articles; pour


Ie surplus elle réfère à de nombreuses dispositions de la loi de 1907.
Il s'agit, d'après Ie Service cantonal des améliorations foncières,
de « réaliser à pen de frais Ie groupement des parcelles des pro-
priétaires sur la base des anciennes limites, sans prévoir de réseau
de chemins et sans établir de nouveaux plans cadastraux ni exé-
cuter de travaux techniques (construction de chemins, de canalisa-
tions, de collecteurs, etc.) ».
.
73. Le syndicat et la commission de classification sont constitués,
les études, enquêtes, réclamations et recours se font suivant les
règles édictées par la loi de 1907.
Il incombe à la commission de fixer Ie périmètre général de
l'entreprise et de déterminer, à l'intérieur de c«:i périmètre, les par-
celles qui seront l'objet de la réunion parcellaire (art. 3, al. 1'.. ).

(1) Voy. Les réunions parcellaires, par Ie Service cantonaI vaudois des
améliorations foncières ( texte IégaI et commentaire, suivis des statuts type
d'un syndicat de réunion parcellaire et d'indications diverses).
(2) Cf. supra, n° 1, note 1.
(3) Sur Ie sens de ce mot, cf. supra, n° 35, note 5.

101
Chaque parcelle est évaluée sur base des indications cadastra-
les (4). Il est attribué à chaque propriétaire un ou plusieurs
« mas » (5) constitués par des parcelles cadastrales anciennes,
d'une valeur totale équivalente à celles qu'il possédait.
Si la valeur globale des hiens attribués est supérieure ou infé-
rieure à !'ensemble des anciennes, la commission peut décider Ie
fractionnement d'une parcelle cadastrale.
Les arbres font l'objet d'une estimation spéciale et d'une com-
pensation en argent.
Les soultes sont exigibles dans un délai d'une année à daler de
la prise de possession des parcelles (art. 6).

7 4. Au début de 1954, 17 entre prises de réunions parcellaires


étaient au travail et 23 autres allaient se mettre à l'reuvre, sur 14.000
hectares.
On a estimé à un minimum d'une douzaine d'années Ie temps
nécessaire pour regrouper par cette méthode les 40.000 à 50.000
hectares ou elle peut être employée.
Le coût de l'opération ne dépasse pas 50 francs par hectare (7).
Les frais sont supportés par Ie canton, après déduction des subven-
tions fédérales, à l'exception des frais de piquetage et d'aborne-
ment des limites maintenues ou redressées à la demande des pro-
priétaires (art. 9).

(4) Lors de la mise à l'enquête un propriétaire peut demander Ie redres-


sement d'une limite défavorable (art. 3, al. 2).
(5) On entend par là une parcelle d'une certaine étendue, formant îlot
d'exploitation.
(6) D'après le Semeur vaudois du 13 mars 1954.
( 7) Elle est !'occasion de l'introduction du registre foncier fédéral pom·
!'ensemble du territoire d'une commune (art. l'"', litt. b).

102
CHAPITRE VII
Procédés complémentaires
(Législation fédérale)

75. La loi fédérale sur l'agriculture du 3 octobre 1951, entrée


en vigueur Ie l"' janvier 1954, contient un titre cinquième consacré
aux « améliorations foncières ».
Parmi celles-ci figurent l'amélioration des limites des terres et
la réunion parcellaire volontaire. La première peut être demandée
unilatéralement, la seconde suppose l'accord des propriétaires
intéressés.

a) Amélioration des limites.


76. Lorsque les limites d'un immeuble agricole situé dans une
région rurale sont défavorables, Ie propriétaire peut exiger de son
voisin un échange de parcelles, dans la mesure nécessaire, ou la
cession de cinq ares de terrain au plus (art. 81 de la loi précitée).
Une forme authentique simplifiée, avec émoluments modérés, est
d'application en cas de règlement amiable.
Le juge statue sur les contestations relatives à la fixation des
nouvelles limites et également sur les droits de gage se rapportant
au terrain cédé.
La législation cantonale peut faciliter encore l'exécution de cette
mesure.

h) Réunions parcellaires volontaires.


77. Lorsqu'une réunion parcellaire générale est impossihle, plu-
sieurs propriétaires fonciers peuvent convenir par écrit de procéder
à nne réunion volontaire (art. 82) .
La procédure en est réglée par les cantons, que la Confédération
supplée en cas de défaillance (art. 119).

78. On sait que tout nouveau morcellement des terres comprises


dans une réunion parcellaire est suhordonné à l'autorisation de
l'autorité cantonale compétente (art. 86).

103
79. Le Conseil fédéral subventionne les améliorations foncières
qu'il a approuvées dans une proportion qui peut atteindre quarante
pour cent, voire cinquante pour cent, dans les régions de montagne
notamment (art. 91).
Des subsides sont accordés aux colons qui s'établissent à l'occa-
sion de réunions parcellaires (art. 92).
En général, semble-t-il, les cantons sont tenus d'accorder des
subventions au moins égales à celles de la Confédération (art. 102) .

104
QUATRIÈME PARTJE
Du rememhrement rural aux Pays-Bas

Législation
Lo1 DU 31 OCTOBRE 1924 (Staatsblad, n° 481), portant des disposi-
tions en matière de rememhrement.
Lo1 DU 20 MAi 1938 (Staatsblad, n° 618), portant de nouvelles dispo-
sitions en matière de remembrement (Ruilverkavelingswet,
1938) (Annuaire intern. de Législ. agric., 1938, pp. 763 et suiv.).
ARRÊTÉ DU 2 JUILLET 1938 (Staatsblad, n° 669), en vue de l'exécu-
tion de l'article 8 de la loi de remembrement 1938.
ARRÊTÉS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL du département de l'Agricul-
ture et de la Pêche du 19 juillet 1941 (Stafftscourant, n° 139)
et du 19 septemhre 1941 (id., n° 183), modifiant la loi du 20
mai 1938 (1).
Lm DU27 NOVEMBRE 1947 (Staatsblad, n° H.400) relative au relotÎS•
sement de Walcheren (Herverkavelingswet Walcheren) (1).
Lo1 DU 7 AOUT 1953 (Staatsblad, texte n° 444), portant dispositions
concernant la reconstruction agraire et Ie relotissement (Her-
verkaveling) de territoires de la province de Zélande en relation
avec les inondations de février 1953.
Lo1 DU 7 AOUT 1953 (Staatsblad, texte n° 446) réglementant certains
actes juridiques concernant l'aliénation des terrains agricoles
(Rec. lég. F.A.O., 1953, n° 3 - Errata : 1953, n° 4).
ARRÊTÉ DU 18 DÉCEMBRE 1953 (Staatsblad, texte n° 446) portant
règlement d'administration générale visé à l'article 6 de la loi
concernant 'l'aliénation des terrains agricoles (Rec. lég. F.A.O.,
1953, n° 4).
Lo1 DU 3 NOVEMBRE 1954, portant de nouvelles dispositions en ma-
tière de rememhrement (Staatsblad, 1954, texte n° 510).

105
Liminaire
a) Généralitée
l. La Hollande est un pays d'environ 35.000 km 2, peuplé de 10 1/2
millions d'hahitants (Belgique : 30.500 km 2 et 8 3/4 millions d'ha-
hitants) (1).
Ses agriculteurs, qui doivent lutter sur les marchés étrangers, ne
négligent aucun moyen d'améliorer ou de faciliter la production.
Cependant, du fait d'un individualisme traditionnel, Ie rememhre-
ment rural (2) n'a pas hénéficié au départ d'un préjugé favorahle.
Le mouvement n'a de plus pas été stimulé, à !'origine, par les néces-
sités de la restauration après une guerre dévastatrice, comme en
France. En revanche des organisations agricoles se sont très töt in-
téressées à la réorganisation foncière et ont considérahlement aidé
les pouvoirs puhlics par une active propagande (3).
Il ne semhle pas que les Pays-Bas aient suivi au XIX" siècle
l'exemple de l'Allemagne, on de nomhreux rememhrements furent
réalisés avec succès.

2. Rappelons qu'après a-voir été soumis au Code Napoléon, les


Hollandais ont adopté en 1838 un Code civil resté proche du droit
français, favorisant notamment Ie· partage illimité des terres.
Un exemple de division jusqu'à !'absurde est demeuré célèhre.
Dans Ie village de Staphorst, on la terre est de qualité inégale en
profondeur, les parcelles avaient fini par ne plus compter que 5 mè-
tres de large sur plusieurs kilomètres de long. Certaines avaient mê.
me été suhdivisées de façon que chaque propriétaire possède un
lopin des différentes espèces de sol. Au delà, il avait été convenu que
les coïndivisaires d'un hien matériellement impartageahle Ie. culti-
veraient à tour de röle.

(1) L'agriculture occupe 68 p.c. du territoire (Belgique: 60 p.c.).


(2) En néerlandais ruilverkaveling.
(3) Il faut ajouter qu'au cours du dernier quart de siècle Ie dirigisme d'Etat
a profondément marqué l'économie agricole néerlandaise; l'administration char"
gée de réglementer l'agriculture ne comprend pas moins de 40.000 agente
(Baudhuin, Economie agraire, p. 183).

106
Il convient · d'ohserver que certaines reg1ons sont parcellées do
manière satisfaisante. Ainsi, les îles et Ie littoral frisons, Ie oord de
la Gueldre et une grande partie des provinces de Hollande septen-
trionale, de Hollande méridionale et d'Utrecht (4). C'est surtout
dans Ie sud, dans l'est et aux confins des provinces de Frise et de
Groningue que des mesures s'imposent (5).
On considère que 1.500.000 hectares, soit 3/7 du territotre et 3/5
de 1a surface cultivahle, doivent être remembrés.

b) Evolution législative
3. Les premiers essais - volontaires - de remembrement ne re·
montent guère qu'au déhut de ce siècle. Il fallait ohtenir Ie con-
sentement de tous les propriétaires.
En 1910, une commission désignée par Ie Nederlandsch Land-
bouw-Comité (Ligue agricole néerlandaise) rédigea un projet de
loi. Un projet déposé par Ie Gouvernement en 1923 ahoutit à la loi
du 31 octohre 1924.
La pratique fit apparaître la nécessité d'amender cette première
loi, d'application trop lente. Vers 1936 moins de 10.000 hectares
(sur 500.000 seion l'estimation de I'époque), avaient été remaniés.

4. La loi du 20 mai 1938 rendit les opérations plus faciles et ac-


crut Ie pouvoir des autorités en la matière; elle contient des dis-
positions entièrement nouvelles sur Ie rememhrement volontaire (6) .
Un arrêté du secrétaire général de l'Agriculture et de la Pêche,
du 19 juillet 1941 (7) a modifié en différents points la loi du 20
mai 1938 (8) .

( 4) Situation due en partie au fait que dans diverses régions, la Frise mari-
time et le Harlemmermeer par exemple, le domaine familial est attribué en
principe au fils aîné.
(5) Le ministère de l'Agriculture a fait dresser en 1951 une carte des régions
ou Ie rememhrement est estimé urgent, assez urgent ou moins urgent (repro-
duite par Bouwman, Ruilverkaveling, fig. 5).
En 1953, 480,000 hectares ont été classés dans la catégorie « très urgent » et
525.000 dans la catégorie « urgent ».
(6) La loi comporte 107 articles, plus du double de la loi française de 1941-
1945; en revanche l'unique arrêté d'application est d'ohjet très limité.
( 7) Modifié en ses dispositions transitoires par l'arrêté du 19 septembre
1941, annulé par arrêté-loi de Londres, puis maintenu temporairement en vigueut
par arrêté-loi du 5 septembre 1945.
(8) Les arrêtés de 1941 ont été maintenus en application jusqu'à l'entrée
en vigueur de la loi du 3 novemhre 1954.
Il sera fait mention, au passage, des changements qu'a apportés l'arrêté du
19 juillet 1941 (voy. aussi in/ra, n" 30, en note).

107
5. Une loi spéciale du 27 novemhre 1947 s'applique à la redistri-
hution des terres, appelée herverkaveling, dans l'île de Walcheren
qui fut presque entièrement immergée à l'automne 1944. Nous de-
vons nous horner à faire mention de ce procédé plus radical, justifié
par des circonstances exceptionnelles (9) , étendu par la loi du 7 août
1953 aux parties de la Zélande inondées à la suite du raz de marée
du 1e• février de la même année.
.
La loi du 3 novemhre 1954 tend notamment à accélérer la procé-
dure et à offrir des garanties aux fermiers (10). Nous en donnons
un aperçu (in/ra, n° 76) et signalons au passage les principales in-
novations qu'elle apporte (11).

(9) Cette loi contient 108 articles. La superficie minima de toute exploitation
a été fixée à 10 ha. Les paysans sacrifiés se sont vu attribuer des terres dans Ie
polder Nord-Est du Zuyderzee. C'est avec l'Irlande (supra, Introducûon géné-
rale, n° 22) Ie seul cas dont nous ayons connaissance ou une législation s'écarte
du principe de l'attribution intégrale de la masse constituée aux propriétaires
intéressés.
Herverkaveling signifie littéralement : « nouveau relotissement ».
(10) Voy. et comp. in/ra, n"" 51 et 76.
Sous Ie régime de la loi de 1938, il n'était pas permh d'imposer un fermier
à un propriétaire qni n'était pas son bailleur avant les opérations de remem-
brement; mais la naissance d'une convention de bail se déduisait de !'absence
de griefs formulés- sur ce point par Ie bailleur contre Ie plan de remembrement
(Cass. 17 septembre 1953, N.J., n° 739; civ. Arnhem, 1•• novembre 1951, NJ.,
n~ 344).
(11) La nouvelle loi entrera en vigueur à une date qui sera fixée par
arrêté royal (art. 134).

108
CHAPITRE PREMIER

Du rememhrement légal

lntroduction.
7. La loi du 31 octohre 1924 reposait sur Ie consensus des intéres-
~és. Il fallait acclimater une idée nouvelle et il ne servait de rien
de vouloir l'imposer avant que les esprits n'en puissent ~omprendre
les bienfaits.
Une double majorité était exigée pour l'acceptation du plan :
d'après Ie nomhre des propriétaires et d'après les superficies en jeu.
Une seule suffit actuellement; de plus les pouvoirs puhlics ont été
armés pour faire prévaloir Ie cas échéant l'intérêt général, même
contre la majorité des intéressés.
En 1938, Ie dernier rejet remontait à 1936 (1).

8. Au préalable la demande de remembrement devait être faite


par Ie quart au moins des propriétaires. Cette quotité a été réduite
au cinquième et certaines personnes morales ont été admises à in-
tervenir (in/ra, n° 14). De plus, pour décourager les opposants, la
nouvelle loi interdit aux mandataires de représenter plus d'un man-
dant à l'assemhlée devant décider de l'acceptation ou du rejet de
l'opération (les absents sont censés d'accord) (2).
Nous aurons l'occasion de mentionner d'autres innovations intro•
duites par la loi de 1938. Elle comporte notamment une partie rela-
tive au remembrement volontaire.

SECTION I. - Principes et définition

9. La nouvelle loi, pas plus que 1.'ancienne, ne donne de défini-


tion. Celle de la Commission de 1910 est toujours valable. On entend
par rememhrement : La réunion des terres dans l'intérêt de l'agri-
culture suivant un plan déterminé et leur nouvelle division, accom-
(1) Schepel, De ruilverkavelingswet 1938, p. 18. Le cas doit être demeuré
rare.
(2) < Arithmétique hollandaise » ahsolument nécessaire en la matière. En
France, les intéressés ne sont même plus consultés sur Ie principe du remem-
hrement (cf. supra, France, n° 19).

109
pagnée ou non de l' établissement ou du déplacement de chemins et
voies d' écoulement.
L'expression néerlandaise « ruilverkaveling » (relotissement par
échange) marque hien la nature de l'opération. Elle ne semhle s'ap·
pliquer qu'au rememhrement rural (3).

10. Schepel démontre à la suite du Gouvernement qu'en droit


hollandais (comme en droit beige) Ie rememhrement ne saurait être
assimilé à l'expropriation pour cause d'utilité publique (4). Il fait
ressortir (pp. 20 à 24) :
I O
que l'expropriation ne se conçoit pas sans contrainte (5), alorll
que Ie rememhrement ne perd pas son caractère en cas d'adhé-
sion spontanée d'un propriétaire non visé ou de recours à la
procédure volontaire;
2° qu'en cas de remembrement chaque propriétaire reçoit non
une indemnité, mais une parcelle dont la valeur dépassera
celle de son apport (6);
3° qu'il n'est pas de partie expropriante lors d'un remembre-
ment, et d'autant moins qu'un propriétaire peut parfaite-
ment se voir attribuer son propre hien;
4° qu'on objecterait vainement que les propriétaires ne recou-
vrent pas les parcelles destinées aux chemins et voies d'écou-
lement. En effet, ces travaux sont effectués au premier chef
dans l'intérêt des participants; Ie fait que ces voies sont attri•
buées à un organisme public n'y change rien. Toutefois, il y
aurait abus à prendre prétexte d'un remembrement pour faire,
contre la volonté des propriétaires, des travaux justifiés par
des considérations différentes; en ce cas, 'les autorités doivent
user de la procédure d'expropriation (cf. infra, n° 55, note, et
73; comp. n° 45, 4° note).

(3) L'expropriation dans l'intérêt de la reconstruction dans les régions sinis-


trées, avec redistrihution des parcelles aux anciens propriétaires, a ahouti à des
résultats similaires tout en visant principalement à des fins différentes.
(4) Constitution des Pays-Bas, art. 158. Voy. et comp. in/ra, Belgique, n°'
22 et suiv.
(5) Certes les pouvoirs publics peuvent tonjours acquérir Ie hien suivant
les règles du droit civil; mais en ce cas l'opération revêt un caractère juridique
différent. Autre exemple : cession volontaire d'un bien à l'Etat sans payement
de sa contrevaleur.
(6) Les modifications apportées à l'article 12 sous l'occupation ont rendu
possihle Ie rachat d'une portion supérieure à 5 p.c. contre la volonté du pro-
priétaire; mais dans des circonstances exceptionnelles qui laissent intacte la
différence avec l'expropriation (Schepel, Supplément, p. 1). Cf. in/ra, n" 76, 6).
Comp. Schmerher, La réorganisation foncière en France, Le Remembrement
rural, p. 124 et 1ui..-.

IIO
SECTION II.
Caractéristiques de la loi de 1938

ll. Nous avons vu que la loi du 20 mai 1938, qui n'est qu'une ver-
1'ion améliorée et complétée de celle de 1924, a pour hut de rendre
plus facile - voire même plus inéluctable - les remembrements
reconnus nécessaires et, par Ie fait même, d'accélérer la procédure.

12. De multiples garanties et recours assurent l'exécution impar-


tiale et équitable de mesures au principe desquelles il est de moins
en moins possible de s'opposer.
De nombreux organes sont appelés à intervenir :
La Commission centrale de techniculture (voir infra, n° 76).
La Commission locale.
La Députation permanente (7).
L'assemblée des propriétaires.
Le président de cette assemblée (un député permanent).
Le Tribunal d'arrondissement (8).
Le juge-commissaire désigné en son sein.
Le bourgmestre et Ie juge de paix (9).
Le ministre des Affaires économiques (10).
Sans compter les recours extraordinaires à la Cour de cassation, à
la Couronne, au Parlement même, l'intervention du Conseil d'Etat et
les taches de propagande assumées par la Nederlandse Heidemaat-
schappij (Société néerlandaise des bruyères) (IObis).

SECTION III - Phase préparatoire

13. · Préparation. - C'est la « Centrale cultuurtechnische Com-


missie », siégeant à Utrecht, qui généralement repère les étendues à
remembrer et prend contact avec les autorités locales. Elle peut re-
quérir du bourgmestre ou du juge de paix ( « kantonrechter ») une
ordonnance l'habilitant à opérer des mesurages et poser des jalons

(7) < Gedeputeerde Staten> (députation des états provinciaux) secondés en


la matière par Ie Cultuur consulent ( conseiller agricole provincial).
(8) Correspondant au Tribunal de première instance.
(9) <Kantonrechter>. Il est à noter que Ie bourgmestre en tant que tel
et Ie juge cantonal n'interviennent qu'à titre épisodique (cf. infra, n•• 13, 33
et 35).
(10) Actuellement Ie ministre de l'Agriculture, de la Pêche et du Ravitail-
lement. Sans compter les ministres des Finances (cf. in/ra, n•• 33 et 61 et suiv.)
et de la Défense nationale (cf. in/ra, n° 18).
(IObis) On trouvera en annexe au document n° 14, session 1954-1955, Pre•
mière Chambre (Ned. Juristenblad, 1954, n° 36) une description détaillée des
organes et services appelés à fonctionner sous Ie régime de la loi qui va bien•
tot entrer en vigueur.

lll
nonobstant la résistance des propriétaires. Ceux-ci sont indemnisés
par Ie Trésor des dommages éventuellement subis, suivant décision
du juge cantonal siégeant en dernier ressort (art. 20 - devenu l'ar-
ticle 29 de la nouvelle loi, moyennant de légères modifications).
La Commission centrale ne cessera d'avoir la haute surveillance
des opérations. Elle conseille Ie ministre (cf. in/ra, n° 76, note 4).

14. Demande. - II suffit désormais que Ie 1/5 des propriétaires


introduise la demande. II s'agit des propriétaires suivant cadastre,
sans autre vérification.
En outre, la demande peut être faite d'une part par les associa-
tions agricoles (Il) qui possèdent la personnalité juridique, et d'au-
tre part par certaines personnes de droit public (Etat, provinces,
communes, etc., art. 22, 3°). II vaut cependant mieux laisser l'initia-
tive aux propriétaires eux-mêmes, dont Ie vote sera décisif (12).
Quoique la loi ne Ie dise pas à eet endroit, son commentateur es-
time (p. 33) que chaque copropriétaire doit être considéré comme
une unité; peuvent également intervenir les titulaires de droits de
superficie, emphytéose, bail perpétuel, usufruit, usage ou habitation.

15. La demande, accompagnée d'une carte, est adressée par écrit


à la Députation permanente des états provinciaux. Celle-ci la trans-
met à la Commission centrale à Utrecht (13) pour avis. La Commis-
sion vérifie l'ohservation des conditions légales et apprécie l'oppor-
tunité du remembrement envisagé. La Députation permanente ne
possède qu'un pouvoir négatif sans possihilité d'introduire des amen-
dements. L'arrêté accueillant la demande ne peut faire l'objet d'au-
cun recours.

16. En cas de décision favorable, qui doit être adressée en copie


à la Commission centrale et aux cinq premiers requérants, chacun
de ceux-ci et tout intéressé disposent d'un délai de 30 jours pour en
appeler à la Couronne. Le Conseil d'Etat doit émettre un avis après
avoir entendu les parties en audience puhlique.

(11) Ce chapitre a été à peine modifié par la loi de 1954 (art. 29 et sq,Ïv.).
(12) Il faut dire que Ie commentateur de la loi, revenant sur cette opinion
dans son supplément (p. 4) estime que l'initiative d'une personne de droit
public prête moins à frictions que celle d'un cinquième des propriétaires. De
toutes manières, la demande est précédée d'une campagne de propagande et de
réunions de notahles; un film au moins a été édité par la Nederlandse Heide-
maatschappij.
(13) En fait déjà au courant. Le dossier comprend souvent des photographies
aériennes, une carte des niveaux (pour Ie système hydraulique) et un relevé de
la nature des sols et sous-sols (De Boer, 21 juin 1952).

112
Sont compris dans les « intéressés », les propriétaires de terres
jouxtant Ie «bloc», c'est-à-dire l'ensemble des biens compris dans
Ie remembrement.

17. T errains pouvant être inclus. - En principe, tous ceux qui


sont affectés à l'agriculture (y compris l'horticulture, la sylviculture,
l'élevage, les tourbières).
Exceptions absolues (art. 10) (14) :
1 ° les cimetières;
2° les monuments et terrains attenant~;
3° les aires bäties;
4° certains terrains à bätir.
Exceptions sauf consentement du propriétaire (art. 11)
1 ° bätiments;
:2° parcs (mais non les jardins) ;
3° terrains sans affectation agricole au sens large;
4° réserves naturelles.
Il est permis de passer outre au refus du propriétaire, lorsque
l'exclusion de ces derniers terrains compromet Ie remembrement à
l'étude (cf. in/ra, n° 48). Les propriétaires de ces terrains ne parti-
cipent cependant pas aux frais (Schepel, op. cit., p. 42).
Ce sont la Députation permanente et finalement Ie président de
l'assemblée des propriétaires - sans appel - qui déterminent les
limites du bloc.

18. Les terrains servant à des fins militaires ne peuvent être in-
clus qu'avec l'autorisation du ministre de la Défense (art. 9).

SECTION IV.
Deuxième phase : détermination provisoire du bloc
et des chemins et voies d'écoulement

19. La Députation permanente, si elle ne rejette la demande, dé-


termine provisoirement par arrêté :
a) Ie bloc à remembrer;
b) les chemins et voies d'écoulement à établir.
La Commission centrale est consultée (art. 25, al. 1•r). La modifi-
cation d'une voie d'écoulement qui apporte la force motrice à une
entreprise donne lieu à réparation du dommage éventuel (art. 18).

(14) Les exceptions absolues ont été réduites aux sépultures par la loi
de 1954 (art. 9).

113
Le même arrêté indique les chemins et voies d'écoulemeni à pren·
dre en considération pour une exécution par provision, dès que Ie
remembrement sera décidé (art. 25, al. 2 - alinéa supprimé par l'ar-
rêté de 1941).

20. Aucun recours n'est prévu. Les intéressés peuvent néanmoim1


faire connaître leurs objections, dont tiendra compte ultérieure-
ment Ie président de l'assemblée délibérante, qui statuera à titre
définitif (art. 33, infra, n° 27).
S'il s'avère que l'exécution de tels travaux ne se justifie pas par
provision, il appartiendra• à la Commission locale de ne pas l'or-
donner (Schepel, op. cit., p. 46).

21. La Commission centrale prépare une carte du remembrement


tel qu'il a été arrêté provisoirement. Les chemins et voies d'écoule-
ment à exécuter par provision y sont indiqués (art. 26, al. 18') (15).
Elle dresse une liste des propriétaires suivant les données cadas-
trales (al. 2). Copie de ces pièces est envoyée à la Députation per-
manente (al. 3), qui en dépose à son tour oopie, accompagnée de
l'avis exprimé par la Commission centrale, au secrétariat des com·
munes intéressées; ces documents peuvent y être consultés sans
frais (al. 4).
Les propriétaires suivant cadastre sont avertis du dépöt sous une
forme non précisée; un avis dans au moins deux journaux (16) et
une affiche apposée aux maisons communales complètent la publi-
cité (al. 5). Tous les intéressés sont censés être au courant et aucun
recours n'est ouvert (al. 6).
Le délai pour adresser les griefs, par écrit, à la Députation per-
manente est d'un mois à partir de !'affichage (art. 27).

SECTION V.
Troisième phase : la décision du remembrement
22. La loi prévoit trois manières de décider un remembrement :
a) par une décision de l'assemblée des propriétaires; c'est Ie
mode normal, maintenu par la loi de 1954;
b) par un arrêté ministériel, en cas d'urgence (idem);
c) par une loi, en cas d'extrême urgence (supprimé en 1954).

(15) L'exécution par provision a été supprimée par l'arrêté de 1941; elle
est devenue inutile du fait que, sous ce régime, il peut être passé à l'ex~cution
définitive dès après l'arrêté décidant Ie remembrement. (Idem loi 1954).
(16) Lesquels ne doivent pas être des quotidiens, la loi usant du_ terme
c nieuwsbladen >.

114
a) Déctsion de l'assemblée des propriétaires.
23. Après l'expiration du délai d'un mois prévu pour l'introduc-
tion des griefs, la Députation permanente réunit au plus töt l'assem-
blée des propriétaires révélés par Ie cadastre (art. 28, al. 1" et 2) ;
la convocation se fait par lettre recommandée avec mention des con-
séquences que la loi attache à l'abstention au vote (al. 3); en outre
la réunion est annoncée par avis dans deux journaux au moins et
par affiche (al. 4). Nul n'est censé l'ignorer (al. 5).

24. On peut comparaître en personne ou par mandataire. Nul ne


peut représenter plus d'une personne, disposition nouvelle destinée
à entraver les oppositions massives.
La procuration doit être écrite si Ie président l'exige (17) et Ie
mandat doit avoir été signalé à la Députation permanente par Ie
mandant deux jours au moins avant la réunion (art. 29). Une pro-
curation générale ne serait pas admise (18).

25. L'assemblée est présidée par un député permanent; un fonc-


tionnaire du greffe provincial fait office de secrétaire.
La Commission centrale est représentée (art. 30). Les bourg·
mestres sont généralement présents.

26. Tous les intéressés peuvent formuler verbalement leurs objec-


tions à l'assemblée (art. 31). On entend par intéressé non seulement
les propriétaites et titulaires de droits réels, mais aussi les fermiers
par exemple (cf. infra, n° 36; comp. n° 28).

27. C'est Ie président de l'assemblée qui détermine définitivement


et sans appel Ie périmètre du bloc. Il statue sur les griefs invoqués
et les requêtes introduites comme il l'estime convenable. S'il peut
réduire les dimensions du bloc, il ne peut les étendre, car ce fai-
sant il engloherait des fonds dont les propriétair.es n'ont pas été con-
sultés (Schepel, op. cit., p. 56) .
Après décision prise, la Commission centrale pourra encore modi-
fier les limites du bloc, mais seulement avec l'accord des propriétai-
res intéressés. En pareil cas, la Commission centràle avise la Dépu-
tation permanente, Ie juge-commissaire, la commission locale et les
propriétaires intéressés (art. 42) .

28. Seuls les propriétaires et titulaires de droits réels sont hahi-

(17) Mais elle ne doit être ni timhrée ni enregistrée (art. 101).


(18) Schepel, op. cit., p. 54. Depuis l'arrêté de 1941, Ie président peut refu-
ser comme mandataires les mineures et les personnes sous curatelle. Il en va
de même sous la loi de 1954 (art. 38).

115
lités à voter. On ne tient pas compte des parcelles dont par exemple
Ie nu-propriétaire est d'un autre avis que l'usufruitier (19).
Chaque copropriétaire dispose d'une voix au vote par tête (20),
et, pour Ie vote par snperficies, est censé propriétaire d'une fraction
de J'.ensemble correspondant à sa part virile (Schepel, op. cit., pp.
59 et 60) (Loi de 1954, art. 42, al. 1 à 3, ancien art. 34).
Les absents sont présumés d'accord. D'autre part, les voix des
propriétaires de fonds voisins qui, huit jours à !'avance ont de-
mandé à participer à la réunion, s'ajoutent aux votes positifs. Il
est à noter que ces derniers ne sont pas admis à présenter des
objections; ils ne peuvent que plaider leur cause et émettre un vote
affirmatif (Loi de 1954, art. 40, ancien art. 32).

h) Arrêté ministériel.
29. En cas devote négatif, Ie ministre de l'Agriculture peut néan-
moins, sur proposition de la Commission centrale, ordonner l'exécu.
tion du remeinbrement comme s'il avait été décidé par les pro-
priétaires. Il faut que la moitié au moins de l'une des majorités né-
cessaires ait été acquise et que l'intérêt général requière d'urgence
l'opération (art. 36) (21).

c) Loi.
30. Si l'intérêt général l'exige de manière « très urgente », Ie mi-
nistre prend l'initiative de communiquer à la Députation perma-
nente une carte comportant Ie bloc à remembrer; la procédure suit
son cours comme à partir d'une demande ordinaire approuvée par
la Députation (art. 37, référant aux art. 25 à 32 et 35). Le ministre
dépose un projet de loi.
Le Parlement décide du remembrement et en fixe Ie périmètre
par une loi.
Ce moyen est superflu et mal approprié aux cas « très urgents » à
résoudre, estime Ie commentateur (p. 51). C'est au cours des travaux
préparatoires de la loi de 1938 que « la Couronne » avait été rem-
placée par « la loi » (22) (supprimé par la loi de 1954).

(19) Exemple : bloc de 200 ha, dont 190 ha en pleine propriété et 10 ha


grevés d'usufruit. Divergence entre nu-propriétaires et usufruitiers. Les 10 ha
sont écartés et les propriétaires de plus de' 95 ha l'emportent.
(20) Sans inconvénient depuis qu'une seule majorité suffit.
(21) Selon la loi de 1954 il faut les trois-quarts de l'une de ces majorités,
avec possibilité de recours à la Couronne ( art. 44).
(22) Un arrêté pris en application de cette disposition, pendant la guerre,
par Ie secrétaire,général du département de l'Agriculture et de la Pêche a été
reconnu valable comme constituant une « décision d'occupation » (bezettings-
beslissing) et non une « réglementation d'occupation » (bezettingsregeling) (Civ.
Arnhem, 29 avril 1948, N. J., 1949, n° 19).

116
SECTION VI.
Quatrième phase : publication de la décision;
désignation de la commission locale et du juge commissaire;
exécution par provision

31. En cas de rejet, la Députation permanente remet toutes les


pièces concernant la demande et l'assemhlée à la Commission cen-
trale (art. 38).
En cas d'adoption, la Députation fait connaître la décision par
avis dans deux journaux et affichage aux maisons communales (art.
26; cf. supra, n° 21) ; une copie de la décision est adressée à la Com-
mission centrale.

32. Dès lors, il est interdit aux propriétaires et usagers de hiens


immohiliers compris dans Ie bloc de se livrer à aucune opération
qui diminuerait la valeur de ces hiens; sauf autorisation à accorder
par la Commission locale.
Le fait de passer outre - considéré comme une contravention (23)
- est puni d'une amende de 1,000 florins au plus (24) (art. 40).

33. Les memhres de la Commission locale sont nommés par la


Députation permanente après consultation de la Commission cen-
trale, des hourgmestres des communes intéressées et généralement
des organisations agricoles locales. lls sont au nomhre de trois (25) ,
dont un président et un président suppléant, plus deux memhres
suppléants. L'un des memhres est désigné comme secrétaire.
La täche de la Commission locale, fort importante, exige beau-
coup de doigté. C'est souvent un hourgmestre ou un échevin qui est
appelé à présider ce collège, qui est d'autre part assisté par Ie géo-
mètre du cadastre que lui adjoint Ie ministre de l'Agriculture après
en avoir référé à son collègue des Finances. En cas de hesoin, la
Commission centrale peut désigner d'autres experts (par exemple un
ingénieur agricole ou hydraulique).
La Commission centrale rédige des instructions à l'intention de
la Commission locale (art. 44, al. 3) . Elle peut attrihuer une rému-
nération aux memhres de cette dernière (arr. 2 juill. 1938, art. 12).

34. La Députation permanente adresse également une copie de


la décision au trihunal d'arrondissement dans Ie ressort duquel est

(23) Du fait de la division des infractions en deux catégories seulement, les


contraventions, en droit pénal hollandais comprennent une grande partie des
délits des droits belges et français.
(24) Sauf péréquation d'après-guerre; Ie florin vaut actuellement environ
13 francs belges.
(25) Cinq, et point de membres suppléants (arr. de 1941 et loi de 1954).

117
11itué Ie bloc, ou sa majeure partie. Le tribunal désigne en son sein,
dans les trente jours, un juge-commissaire (art. 43).
La Députation transmet les pièces du dossier à celui-ci qui lea
transmet à son tour après examen à la Commission locale (art. 45).
Le role du juge-commissaire est moins important qu'on ne Ie
supposait; presque tous les différends sont résolus avant qu'il en
puisse être saisi (Schepel, op. cit., p. 65) . Il incombe à ce magistrat
d'aplanir les différends en conciliation (26), à défaut de quoi Ie
litige est tranché par Ie tribunal, statuant en dernier ressort.

35. Une fois Ie remembrement décidé, il peut être passé immé-


diatement à l'établissement (ou l'amélioration disait l'arrêté) des
chemins et voies d'écoulement dont l'exécution par provision a été
prévue (art. 41, al. l"') (27).
Le dommage qui en serait la suite directe doit être réparé (al. 2).
Les propriétaires et usagers sont obligés de souffrir les travaux
(al. 3). Le cas échéant, une ordonnance du bourgmestre ou du juge
de paix en permettra l'exécution, au besoin avec l'aide de la force
publique.

SECTION VII.
Cinquième phase: détermination des droits de chacun
et estimation des parcelles

36. La Commission focale arrête la liste, aussi complète que pm•


sible, de tous les ayants droit, avec mention de la nature et de l'éten-
due des droits de chacun (art. 46, devenu l'art. 55).
Il faut entendre par ayants droit non seulement les propriétaire•
et titulaires de droits réels, mais aussi les fermiers et locataires
(Schepel, op. cit., p. 67) .

37. La même Commission désigne des estimateurs, dont Ie nombre


a été fixé par la Commission centrale. lls ont pour mission d'évaluer
les fonds sous sa direction (art. 47, article 56 de la loi de 1954).
Les experts, auxquels la Commission locale confie Ie travail, opé-
reront toujours en nombre impair (id., al. 2).

( 26) Sous Ie régime de l'arrêté de 1941, seuls les intéressés ayant introduit
une réclamation sont convoqués devant Ie juge-commissaire. D'ou gain de tempi.
Idem sous la loi de 1954 (art. 66).
(27) On a vu (supra, n° 21, note) que les routes, etc. peuvent dès lors être
exécutés à titre définitif sous l'arrêté de 1941; il en va de même de divers amé-
nagements (bornage, drainage, défrichement et même érection ou démolition de
batiments). Les experts doivent estimer séparément les modificationa de valeur
qui en résultent ( art. 69bis). Cf loi de 1954, art 54.
38. C'est la Commission centrale qui établit un projet de classi-
fication de la terre et fixe pour chaque classe la valeur par hectare
(art. 48 devenu l'article 57 de la nouvelle loi) (28).
Les experts divisent la terre suivant ce tableau et marquent lei
limites des classes sur Ie terrain.
lis calculent Ie coefficient de majoration ou de réduction dont
doit être affectée la valeur à !'hectare fixée, et ce en fonction de
l'état de la culture du fonds (id., al. 3) (29)
Les bätiments, travaux et plantations font l'objet d'une estimation
distincte Ie cas échéant (id., al. 4).

39. Les estimations sont consignées dans un registre qui - de


même que la liste des ayants droit et la carte des limites de classes
- doit être approuvé par la Commission centrale. Ces trois · pièces
sont ensuite déposées aux secrétariats des communes intéressées ou
elles peuvent être consultées sans frais. Avis dans au moins deux
journaux, affiches aux maisons communales, lettres recommandées
aux ayants droit (dont la non-réception n'ouvre aucun recours) assu-
rent la publicité nécessaire.

40. On sait que les dimensions du bloc ne peuvent dès lori


plus être modifiées que par la Commission centrale et de l'accord
des propriétaires des terrains intégrés on exclus (supra, n° 27).

41. Les intéressés disposent d'un délai de quatorze jours à par-


tir de l'envoi de la lettre recommandée pour faire connaître leun
griefs à la Commission locale (30). Tous ceux qui estiment avo1r
été omis à tort de la liste des ayants droit peuvent encore réclamer
endéans eet ultime délai, qui est fatal. La perte du droit de propriété
qui résulte de !'absence de réclamation, unique en droit néerlandais,
ne se peut comparer qu'à la péremption du droit d'hypothèque en
cas de non-renouvellement de l'inscription (L., 5 juin 1878) (31).
Ohservons qu'il est loisible au créancier de procéder à un renouvel-

(28) Il ne s'agit pas de la valeur vénale, mais d'une approximation aus!Î


exacte que possihle de la valeur relative des terres entre elles lors de leur
échange (Civ. Zwolle, 25 juin 1941, N.J., 1942, n° 67).
(29) C'est de la productivité qu'il y a lieu de tenir compte. Ni l'état
d'entretien, sous réserve de ce qui est dit plus loin, ni la situation ne sont pri■
en considération. Exemples, antérieurs à la guerre, de l'éventail des classes : de
800 à 400 florins à Nieuwlesen; de 1600 à 150 florins !'hectare à Staphorst
(N.B. - à !'époque Ie florin valait environ 16 francs). Cette disposition a été
supprimée par l'arrêté de 1941. On ahoutit au même résultat par un nomhre de
classes plus grand.
(30) Une fois les estimations fixées définitivement par l'expiration de ee
délai, aucun grief ne peut plus être admis ( Civ. Ruremonde, 13 mai 1943, N. ] .•
1943, n° 889).
(31) Comp. loi beige du 16 déeemhre 1851, art. 90.

ll9
lement tardif prenant rang au jour de la réinscription (32). lei au
eontraire la disparition de tous droits est radicale et générale, y com-
pris les droits du locataire et du fermier (33). Il va de soi que Ie
droit de créance même n'est pas affecté par la péremption de l'hy-
pothèque.

42. En ce qui concerne les réclamations introduites en temps


utile, la Commission locale s'efforce de conclure un arrangement
avec les impétrants.
A défaut d'entente, Ie différend est soumis en conciliation au
juge-commissaire et, au hesoin, au trihunal d'arrondissement. Cette
juridiction prend !'affaire avant toute autre, litiges d'expropriation
exceptés; son jugement peut faire l'ohjet d'un pourvoi en cassa-
tion {34). La loi prévoit des procédures accélérées, admissihles lors-
que Ie litige ne porte que sur les estimations, critiquables quand
des questions de propriété sont en jeu (art. 56 à 68; cf. Schepel,
op. cit., pp. 72 et 73).

SECTION VIII.
Sixième phase : Ie remembrement proprement dit
43. Après fixation immédiate ou par justice des droits de chacun
et de la valeur de chaque parcelle, on peut passer à la phase la plus
importante : établir et exécuter la nouvelle répartition. Ce travail
repose en pratique presque entièrement sur la Commission locale
et Ie géomètre.

a) Détermination définitive des chemins et voies d'écoulement.


44. Il incomhe à la Commission locale de présenter un plan de
chemins et voies d'écoulement. Après avis de la Commission cen-
trale, Ie plan est arrêté par la Députation permanente.
La Commission locale fait exécuter Ie réseau, dont une grande
partie l'aura généralement été par provision. Les propriétaires doi-
vent subir les travaux et sont, Ie cas échéant, indemnisés par l'en-
semble des intéressés (Loi 1938, art. 69 • comp. supra, note 15).

b) Règles de la répartition nouvelle.


45. Les règles auxquelles la Commission locale doit se soumettre
à eet égard sont de la plus haute importance; elles forment la ga-
rantie des intéressés.

(32) Comp. id., art. 37.


(33) Chamhre foncière centrale, 16 février 1947, De Pacht, n° 1336.
(34) Uniquement dans l'intérêt de la loi lorsqu'il s'agit d'estimations (art.
67) et sur requête du procureur général près la Cour de cassation (Hoge Raad).

120
46. Première règle : Chaque propriétaire est en droit de recevoir
en propriété, superficie, emphytéose, hail perpétuel, usufruit, usage
ou hahitation, une valeur en parcelles qui, par rapport à l'ensemble
de la valeur des hiens rememhrés, est identique (35) à celle de ses
hiens inclus dans Ie rememhrement proportionnellement à la valeur
de l'ensemhle des immeuhles y compris (art. 12, al. ler) (36).
Il ne peut être dérogé à ce principe que si son application fait
ohstacle à un rememhrement rationnel. La soulte ou Ie supplément
ne peut toutefois excéder 5 p. c. de ce que Ie propriétaire eût dû
recevoir, sauf consentement de celui-ci et des éventuels titulaires
des droits ci-dessus énumérés (37). L'intervention du créancier hy-
pothécaire et du titulaire d'une rente foncière est également requise
pour l'acceptation de parcelles d'une valeur proportionnelle infé-
rieure à 95 p. c. (art. 12, al. 2 et 3).
La soulte est compensée avec la part de frais, Ie surplus étant
payé comptant (38) . Le prix du supplément est ajouté aux frais et
avancé par l'Etat, que Ie propriétaire remboursera en 30 ans, en.
versant un faible intérêt.

47. Deuxième règle : Il est attribué à chaque propriétaire des


biens de même nature et de même af f ectation et, de préférence, pro·
venant en tout ou en partie des biens originaires (art. 14).
La loi indique une réserve : pour autant que l'intérêt du remem-
hrement ne s'y oppose. Toutefois, on ne peut s'écarter de cette deu-
xième règle contre la volonté du propriétaire dans l'hypothèse ou
la dérogation entraînerait, nécessairement, un changement radical
de la nature de son métier (art. 14, al. 2 - disposition supprimée
par l'arrêté de 1941 et non rétahlie en 1954, cf. art. 14).

48. Troisième règle : On sait que certains terrains ne peuvent


être inclus dans Ie bloc que du consentement du propriétaire (cf.
supra, n° 17). Ces hiens doivent être attrihués à leur propriétaire,
à moins que l'intérêt du rememhrement s'y oppose (art. 15).

(35) Autant que possible (zo dicht mogelijk), a ajouté l'arrêté de 1941 (non
retenu par la nouvelle loi).
(36) Environ 5 p.c. du bloc sont consacrés aux chemins et voies d'écoulement.
Il eonvient d'observer que l'échange entraîne une perte de superficie, mais en
général un gain de surface utile.
(37) L'arrêté de 1941 a rendu possible, lorsque l'intérêt général l'exige, de
dépasser la marge de 5 p.c. et même d'attribuer une indemnité entièrement en
espèces, à condition de ne pas mettre en péril la viabilité d'aucune entreprise,
ni d'en changer la structure. Schepel (Suppl., p. 13) émet des réserves au sujet
de l'arrondissement de petites entreprises par ce moyen, qui dès lors se rap-
procherait de l'expropriation (comp. la loi de 1954, infra, n° 76, 6).
(38) Lorsque Ie bénéficiaire de la soulte n'est pas connu, la somme est
Tersée en consignation dans les caisses de l'Etat.

121
49. Quatrième règle : Enfin, toute parcelle doit avoir accès à un
chemin (ou à une voie d'eau - particularité hien hollandaise) (art.
16, al. Je' devenu l'article 15 de la nouvelle loi).
En outre les parcelles doivent être pourvues, s'il est « nécessaire
et possihle >, de voies d'écoulement appropriées (id., al. 2).

c) Contenu du plan de remembrement.


50. Le plan de rememhrement doit contenir, suivant l'article 71
1 ° Ie lotissement;
2° l'attrihution des parcelles;
3° les montants qui reviennent à chaque propriétaire à titre de,
soulte ou d'indemnité;

51. 4° Ie règlement (39) relatif à tous les droits réels, tous Ie!!
droits de hail à ferme ou à loyer et toutes les charges qui peuvent
reposer sur les hiens immohiliers du hloc, ainsi que Ie rachat des
dîmes, droits de chasse et frais de rememhrement (40) (art. 19 et
71, 4°). L'Etat avance les deniers nécessaires pour que puissent être
rachetés certains droits et charges.
Les hypothèques sont transférées, avec leur rang, sur les lots ou
parties de lot qui remplacent ceux qu'elles grèvent.
Contrairement au droit commun (art. 1209 du Code civ. néerlan-
dais - art. 41 de la loi hypothécaire beige), l'hypothèque peut grever
des parties des nouveaux lots. Disposition logique qui a pour hut,
d'une part, de ne pas agrandir Ie gage du créancier et, d'autre part,
d'éviter qu'un rang inférieur ne doive lui être conféré sur l'ensemhle
de la nouvelle parcelle. En cas de difficulté sur Ie choix du lot de
transfert, recours est ouvert devant Ie juge. Une matrice cadastrale
distincte est généralement prévue pour la partie du lot grevée d'hy-
pothèque (41).
Les saisies conservatoires et les saisies-exécutions sont également
transportées sur les nouvelles parcelles; elle s'étendent aux soultes.
Les baux sont généralement maintenus tels quels, avec simple-
ment un changement d'ohjet (42). Il est conseillé - mais non exigé
par la loi - de prescrire dans Ie plan de rememhrement Ie trans-

(39) L'arrêté de 1941 a dû également envisager la levée de ces droits, dtt


fait que certains propriétaires peuvent être entièrement indemnisés en espèces.
( 40) Pour Ie cas, exceptionnel, ou un remembrement précédent aurait eu lieu.
(41) Sous l'arrêté de 1941, en cas d'indemnité exclusivement en espèces, le
eréancier hypothécaire est désintéressé en premier lieu.
(42) Les tribunaux n'ont pas Ie pouvoir de faire naître et d'imposer aux
parties de nouveaux baux; la mention de l'existence de nouveaux baux à ferme
ne lie pas les intéressés si elle ne se fonde sur un accord de volontés. La loi
ne prévoit pas l'obligation de contracter à eet égard, contrairement à l'article 14

122
fort des baux; Ie propriétaire est alors en droit de faire connaître
ses objections et en cas de litige Ie juge tranchera. C'est également
au juge qu'il appartient de mettre fin aux différends relatifs aux
fermages (43).
Le fermier a d'autre part Ie droit de porter devant Ie juge, qui
statue en dernière instance, ses griefs contre l'acceptation par Ie
bailleur de lots moindres.

52. 5° Les diverses-- indemnités (concernant les chemins et voies


d'écoulement, etc., art. 18, 20, 41 et 69, et 69bis sous l'arrêté de 1941).
6° Les modes dérogatoires de répartition des frais ne tombant pas
à la charge de l'Etat et des indemnités prévues par les articles 18,
20, 41 et 69, ainsi que les lots sur lesquels ils portent.
7° Les dispositions concernant l'entrée en possession (toujours
fixée à l'automne).

53. On voit que Ie plan de remembrement est un document con-


eidérable. D'autres indications peuvent y être incluses, ainsi que la
i,olution donnée à des contestations diverses entre propriétaires du
bloc et de terres voisines.

d) Fixation du plan de remembrement.


54. Le plan projeté par la Commission locale doit être approu-
'\'é par la Commission centrale (art. 73). Le plan adopté peut être
consulté pendant 14 jours à la maison communale - suivant avis
par les voies habituelles. En outre, les limites des nouvelles par-
eelles auront été marquées sur place.
Les intéressés disposent d'un déiai de 30 jours pour introduire une
réclamation écrite auprès de la Commission locale. S'il en est dé-
posé, la procédure est la même que pour les estimations : tentative
d'arrangement amiable, puis .de conciliation devant Ie tribunal qui
i,tatue en dernier ressort - sans préjudice à cassation dans l'intérêt
de la loi.
Le juge-commissaire est la dernière autorité qui puisse modifier
la répartition des parcelles (art. 77, al. 5 et 80, al. 5). Le tribunal ne

de la loi de 1947 sur Ie rememhrement de Walcheren (Chamhre foncière een•


trale, 25 juillet 1949, NJ., 1949, n° 769. - Voy. aussi supra, n• 6, note 10).
Le hail reporté ne constitue pas une nouvelle convention ( Ch. foncière du
Brabant septentrional, 8 juillet 1949, De Pacht, n° 1338. - Contra, Ch. foncière
de Zélande, 7 janvier 1948, id., n° 1337).
Comp. loi de 1954, infra, n° 76.
(43) D'après Schepel (p. 85), les diepositions de la loi aur Ie rememhre-
ment ne doivent pas être comhinées avec celles de la loi sur les haux à ferme
de 1937, loi plus ancienne et plus générale.
Les dispositions relatives au sort des haux à ferme ont été profondément mo-
difiées par la loi de 1954 (art. 18 à 27 - cf. in/ra, n• 76).

123
peut plus qu'attribuer une indemniié en espèces au propriétaire
lésé (44).

e) Propriété, etc., des nouveaux chemins publics et voies d' eau.


55. Il revient à la Députation permanente, sur proposition de la
Commission centrale, d'attribuer par arrêté la propriété des nou·
veaux chemins, voies d'écoulement et ouvrages d'art y afférant à un
organisme de droit public (commune, « waterschap », province) (45) .
L'organisme désigné dispose d'un délai de 30 jours pour interjeter
appel; la Couronne décide après procédure contradictoire devant Ie
Conseil d'Etat.
Le conservateur des hypothèques peut dès lors transcrire l'arrêté
dans les registres publics, sans attendre que soit passé l'acte qui règle
Ie transfert de propriété pour les au tres parcelles (art. 17 et 82) .

SECTION IX.
Septième phase : l'acte; les transferts de propriété

56. Une fois Ie plan arrêté, on peut passer à l'établissement d,e


l'acte de remembrement.
Le notaire est désigné par la Commission locale (art. 84) (46).
La loi prévoit la dispense du timbre et des droits d'enregistrement
proportionnels. La transcription dans les registres de la conservation
des hypothèques se fait sans frais (art. 101).

57. L'acte mentionne les soultes et indemnités (art. 12), Ie règle-


ment relatif aux droits réels, aux baux et aux charges (art. 19) (47),
les indemnités à payer en vertu des articles 18, 20, 41 et 69 (48).

( 44) Le trihunal ne peut faire figurer dans Ie plan de rememhrement d!'S


éléments qui ne sont pas mentionnés aux articles 71 et 72. Encore moins pour-
rait-il modifier Ie lotissement (Civ. Arnhem, 29 avril 1948, loc. cit.).
(45) Le plan des chemins et voies d'écoulement ne fait pas partie du remem-
hrement, mais est étahli définitivement par la Députation permanente, sans
l'intervention des intéressés et sans possihilité de recours. Aussi Ie trihunal ne
peut-il tirer de conséquences ohligatoires de la constatation qu'un prélèvement
a été opéré illégalement par l'Etat sans apport de terres en contrepartie, en vue
de la construction d'une route, hut sans rapport avec l'agriculture ou l'intérêt des
propriétaires de la zone rememhrée. Du moins en pareil cas, l'indemnité payée
aux intéressés ne viendra-t-elle pas en déduction des suhsides éventuels de l'Etat
(Civ. Arnhem, 29 avril 1948, loc. cit.).
(46) Aux Pays-Bas, l'acte notarié n'est pas de règle pour les mutations immo-
hilières (cf. in/ra, n° 67).
Souvent Ie notaire passe l'acte gratuitement ou moyennant des honoraires
forfaitaires peu élevés.
(47) L'arrêté de 1941 a ajouté : la levée des droits réels.
( 48) Le sort du legs qui porte sur une parcelle changeant de propriétaire est
controversé. Selon les uns, dont Ie professeur Meijers, il s'agit d'une révocatiqp

124
Seules, les signatures du juge-commissaire et des memhres de la
Commission locale sont requises. Une carte portant les nouveaux
numéros cadastraux est annexée à l'acte.

58. Le transfert de propriété s'opère par la transcription. Les an•


ciens actes deviennent sans valeur. Les inscriptions d'hypothèques
ne figurant pas dans l'acte de rememhrement doivent être rayées
d'office (49).

59. Le juge-commissaire est hahilité à délivrer des ordonnances


contre les propriétaires et usagers récalcitrants (art. 86). A la re-
quête de la Commission centrale, il peut ordonner l'envoi en posses-
sion dès l'étahlissement du plan (art. 83).

60. Sous la nouvelle loi s'effectue alors une seconde estimation


tenant compte de tous les éléments ayant affecté les biens et de
toutes les idemnités dues depuis Ie dé hut des opérations (art. 98 et
suiv.).

SECTION X - Les frais


61. L'Etat supporte la majeure partie des frais administratifs
(Commission centrale, assistance du cadastre, géomètre, puhlicité... ,
art. 87; Schepel, op. cit., p. 94) et des salaires de la main-d'reuvre.
Lorsque Ie projet de rememhrement est ahandonné, les frais restent
à la charge du Trésor.

62. Les autres frais (Commission locale, notaire, évaluateurs, dom-


mages et intérêts, matériel ... ) sont avancés par l'Etat. Les dettes en-
vers l'Etat (ruilverkavelingsrenten), qui portent un intérêt inférieur
à 3 p. c., peuvent être apurées en trente versements annuels égaux.
Il s'agit donc d'annuités plutot que de « rentes ».
La rente est perçue de la même manière que la contrihution fon-
cière (avec recours auprès de la Députation permanente) ; toutefois
la rente de rememhrement n'est pas susceptible de réduction.
Elle est due par celui qui a la jouïssance du bien à titre de pro•
priétaire ou de titulaire d'un droit réel. Mais Ie propriétaire, lors-
que par exemple l'usufruit a pris fin, est tenu de rembourser ce qui
aura été payé en principal; Ie calcul se fait sur base d'un intérêt
de 3 p.c.

et il faut vérifier si Ie testateur a voté pour on contre Ie rememhrement. Selon


les autres Ie legs devient tout simplement caduc ( Oomens, Ruilverkaveling,
W.P.N.R., n° 3598). De toutes manières, Ie notaire fera hien d'attirer l'at-
tention du disposant sur la difficulté.
(49) Ainsi que les transcriptions de saisies conservatoires et saisies-exécu•
tions, a ajouté l'arrêté de 1941, (idem, L. 1954, art. 96, al. 4).

125
Si la parcelle grevée est divisée, la rente est également scindée,
proportionnellement à la superficie ou à la qualité des sous-parcel-
les. En cas de réunion de parcelles, la sûreté porte sur l'ensemhle.

63. Il y a deux moyens de purger à eet égard Ie hien grevé


a) Ie paiement en nature, c'est-à-dire en moins-prenant
b) Ie rachat de la rente, intérêts à courir décomptés.
Le paiement en nature doit être offert avant qu'il soit procédé à
l'étahlissement du plan. La demande est adressée à la Commission
centrale qui y défère après autorisation du Ministère de l' Agricul-
ture (50). Si les frais ont été sous-évalués à ce moment, il y aura lieu
à complément calculé en « rente ». Dans l'hypothèse inverse Ie pro-
priétaire reçoit une indemnité en espèces.
Les terres auxquelles il est ainsi renoncé sont attribuées aux. prn-
priétaires qui désirent arrondir leurs hiens, ou à l'Etat, en vue de
l'installation d'exploitations modèles.

64. Les frais sont répartis sur tous les lots d'après leur valem·
avant Ie remembrement, calculée suivant la classification (51).
La Commission centrale est compétente pour prescrire un autre
mode de répartition en faveur des parcelles qui n'ont pratiquement
pas retiré d'avantage du remembrement (art. 89, al. 2).
Il n'est pas tenu compte de l'état de culture des terres, ni de la
valeur des bätiments et plantations, afin que l'agriculteur laborieux
et diligent ne soit pas en quelque sorte pénalisé (52) .

65. Quid si les frais ont été sous-estimés ? Le cas ne se présente


pas souvent - ou du moins était peu fréquent avant la guerre -
sauf exécution de travaux complémenatires.
Néanmoins la crainte que Ie coût des travaux projetés ne dépasse
les prévisions nuit au remembrement. Il avait été proposé au cours
des travaux préparatoires de la loi de 1938 que l'Etat prenne Ie
supplément à sa charge au delà d'une certaine marge. Le ministre

(50) On peut éviter cette procédure en convenant d'une sous-attribution,


même supérieure à 5 p.c., avec la commission locale (art. 13 • Schepel, op. cit.,
p. 100). L'arrêté de 1941 a prévu que la sous-attribution peut être imposée, lors-
qu'elle ne dépasse pas 5 p.c. et ne met pas en danger là viabilité de l'entreprise
du propriétaire. ( voy. aussi L. 1954, art. 10 et 12).
(51) D'après leur étendue, prescrit l'arrêté de 1941. Idem, L. 1954 (laquelle
a fort peu modifié ce chapitre).
(52) D'après Schepel (loc. cit), il vaudrait mieux encore - théoriquement -
répartir les frais d'après l'accroissement de valeur de chaque terre. Mais Ie"
frais d'évaluation supplémentaires qui en résulteraient seraient considérables.

126
objecta très justement qu'il n'est pas possihle d'accorder la garantie
du Trésor pour des travaux décidés non par l'administration, mais
par les commissions locales, émanations des propriétaires eux-mê-
mes. Il y aurait danger d'ahus, auxquels il ne pourrait être mis fin
qu'en portant atteinte au caractère de ces organismes (53).

(53) Quelques chiffres antérieurs à 1938, avant que l'Etat ne prît en charge
la majeure partie des frais administratifs Oes prix ont subi depuis une hausse
d'environ 200 p.c.) : Remembrement à Beek et Donk 80 p.c. de subsides pour
les salaires de la main-d'reuvre, 109,40 florins de frais à !'hectare pour les pro•
priétaires - Helden : 100 p.c. et 85,70 florins - Nuland : 90 p.c. et 58,30
fiorins - Ex-île d'Urk : 100 p.c. et 20 florins.
A l'heure actuelle, on estime Ie coût moyen d'un remembrement (avec travaux
annexes) à 1.250 florins, soit 16.000 francs belges par ha, non compris les frais
éventuels de défrichement, de nivellement ou de drainage. L'Etat prend à sa
charge Ie supplément résultant de l'emploi de main•d'reuvre en surcroît ou bien
de machines, pour lutter contre Ie chomage (De Boer, loc. cit.).
Les subsides doivent intervenir à concurrence de 70 à 75 p.c. pour rendre
Ie rememhrement suffisamment attrayant aux yeux des intéressés (ibid.).

127
CHAPITRE II

Du rememhrement conventionnel

a) Généralités
66. Le rememhrement volontaire n'était pas ahordé par la loi de
1924 (1). Les articles 3 à 7 de la loi de 1938 qui en traitent n'ont
pas fait l'ohjet de modification en 1941 et sont devenus les articles
4 à 8 de la loi de 1954 moyennant de légères modificat.ions.
Les conventions de rememhrement jouent, ou du moins pour-
raient jouer, un röle adjuvant nullement négligeahle (2).

h) Définition et forme
67. Par convention de rememhrement, dit l'article 3, il faut en-
tendre un contrat en vertu duquel trois ou plusieurs personnes
s'ohligent par écrit à rassemhler des hiens spécialement désignés,
dont elles sont propriétaires suivant Ie cadastre, à relotir la masse
et à les répartir entre elles par un acte de rememhrement, de la ma-
nière indiquée dans la convention.
Celle-ci doit déterminer en outre qui est hahilité à étahlir et
signer l'acte.
On voit que la convention elle-même, comparahle à l'arrêté de la
Députation permanente, ne contient qu'un accord de principe.
La convention peut être faite sous seing privé, mais suivant Sche-
pel (1938, p. 106), l'acte doit être passé par devant notaire (3).
Les droits réels attrihués par l'acte ne sont acquis que par la tran-
script.ion dans les registres puhlics (4).

(1) On se rappelle que les premiers exemples de rememhrement sont du


à l'initiative de particuliers (supra, n° 3). Il semhle n'exister aucune jurispru•
dence puhliée sur le rememhrement volontaire.
(2) De 1942 à 1953, il s'est conclu 21 conventions de rememhrement entre
plus de trois propriétaires, portant sur une superficie totale de 1.303 ha.
(3) Si des hiens compris dans Ie rememhrement ont fait l'ohjet de legs. Ie
notaire devra attirer l'attention des testateurs sur la caducité des dispositions
(cf. supra, n° 57, note 3). La loi de 1954 exige l'acte notarié (art. 4).
(4) Oomens, loc. cit., se demande si l'article 1302 du Code civil néerlandais
(semhlahle à l'article 1184 du Code Napoléon) est applicahle en l'occurrence.

128
c) Véritables propriétaires
68. La convention et son exécution restent valables à l'égard des
véritables titulaires des droits de propriété, s'il apparaît que certains
contractants étaient erronément indiqués comme propriétaires au
cadastre (art. 4) (5).

d) Adhésions
69. Il est permis d'adhérer à une convention de remembrement
pour y apporter des lots contre espèces ou de l'argent contre des
biens immeubles (art. 5).

e) Référence au remembrement légal


70. Les parties peuvent décider que des dispositions déterminées
du titre 111 de la loi seront applicables en tout ou en partie.
L'approhation du ministre, la Commission centrale entendue, est
nécessaire; elle peut être suhordonnée à certaines conditions en
vue notamment soit de préserver les droits de tiers dont il n'aurait
pas suffisamment été tenu compte (6), soit de faciliter l'adhésion de
voisins, souhaitahle dans un intérêt général.

71. Moyennant quoi les intéressés peuvent ohtenir exemption des


droits de timbre et d'enregistrement et l'aide gratuite du cadastre;
ils peuvent également recevoir de l'Etat l'avance des frais, rem-
boursable en trente ans; enfin ils peuvent s'assurer l'assistance de
la Commission centrale, notamment pour l'estimation des parcelles.

72. Dans Ie cas, rare semble-t-il, ou les parties ne se réfèrent aux


dispositions légales que pour autant qu'elles aient trait à leurs rap-
ports réciproques, l'approbation ministérielle est une simple for·
malité.

f) Liberté des conventions


73. Les limitations et exclusions légales ne s'appliquent pas en
I'occurrence.
D'autre part des intéressés non-propriétaires peuvent prendre part
,au rememhrement conventionnel, et rien n'interdit la restitution en
argent d'un apport en nature et vice-versa.

(5) Jonas, De Ruilverkavelingsovereenkomst, W. P. N. R., n° 3582, fait oh-


server que Ie rememhrement conventionnel est une source d'insécurité juridi•
que lorsqu'il reste privé (comp. in/ra, n° 70).
(6) Schepel admet que la lettre de la loi ne s'oppose pas à ce que les inté-
ressés décident par exemple Ie transfert des hypothèques grevant les anciennes
parcelles sur les nouvelles. En pareil cas, Ie ministre veillera à ce que les
tiers ne soient pas lésés.

129
Il est loisible à l'Etat ou à toute autre personne de droit public
d'adhérer à un remembrement volontaire dans Ie hut de s'appro-
prier Ie terrain nécessaire pour tracer une route par exemple.
Schepel rappelle utilement, au terme de son excellent manuel,
que Ie remembrement rural - fût-il conventionnel - ne trouve sa
justification que dans l'intérêt de l'agriculture. L'établissement d'un
chemin qui n'est pas commandé par les nécessités agricoles doit
donc rester à l'arrière-plan, encore qu'il puisse donner Ie branie à
un remembrement souhaitable (7) .

(7) Comp. supra, n° 55, note.


Toutefois, un remembrement provoqué par la construction d'une grand route,
avec Ie minimum de chemins de traverse, est admissible. Il est de l'intérêt des
exploitations de parer au découpage qu'entraîne la voie nouvelle (Schepel,
Suppl., p. 1).

130
CHAPITRE IIl
Considérations générales et conclusions

a) Législations successives
74. La loi de 1924 était fondée sur Ie principe de la majorité. La
loi de 1938 et surtout l'arrêté de 1941 relèvent plus nettement du
dirigisme, malgré l'introduction du remembrement conventionnel à
titre complémentaire.

b) Maîtres-traits du régime actuel


75. Comme en droit français, l'opération porte sur la PROPRIÉTÉ,
bien que l'on tienne compte autant que possible des intérêts des
fermiers; les droits de ceux-ci seront mieux protégés par la loi à
venir.
Le remembrement a également un caractère DÉFINITIF en Hol-
lande. (1)
En revanche, !'aspect SEMI-OBLIGATOIRE du remembrement légal

(1) Le professeur Houwing, Pacht en ruilverkaveling De Pacht, 1952, pp.


66 et suiv., reproche au système actuel de négliger les intérêts légitimes des
fermiers. Il énonce notamment les griefs suivants :
a) Ie fermier omis à tort de la liste des ayants droit (supra, n° 40) voit son
hail anéanti s'il n'a pas introduit un recours devant la commission locale dans
le délai de quatorze jours; mode de cessation d'une location rurale exorbitante
du droit commun. II faut dire que les risques courus par les propriétaires et
titulaires de droits réels ·ne sont pas moindres;
b) il n'est pas tenu compte de l'aspect nouveau des droits du fermier depuis
qu'une législation spéciale Ie protège; c'est ainsi que la loi ne reconnaît pas
au fermier évincé un droit à indemnisation intégrale et ne formule aucune règle
de droit quant à la détermination de l'indemnité (supra, n° 51);
c) les litiges relatifs aux baux à ferme sont soustraits à la compétence de
Ieurs juges naturels (pachtkamers et grondkamers), tout au moins en grande
~~; .

d) si les fermiers sont admis à formuler leurs ohjections au moment ou


est prise la décision de procéder à un remembrement (supra, n° 26), il n'ont
pas droit de vote (supra, n° 28).
Suivant la loi de 1954, il est prévu l' « enregistrement » des baux à la com-
mission locale, endéans un délai de trente jours, non fatal; il n'y aura en
principe plus de fermiers évincés; les juridictions ad hoc connaîtront des con-
testations portant sur Ie hail même; cependant Ie fermier n'est pas appelé à
prendre part au vote sur Ie principe du remembrement (cf. L. 1954, art. 42).

131
y apparaît moins accusé qu'en France (2). C'est toujours la majo-
rité ou du moins une certaine majorité des propriétaires qui doit
appuyer la demande, puis _accepter ou rejeter Ie rememhrement
envisagé. Diverses dispositions facilitent la f ormation des majorités
nécessaires et de plus les autorités peuvent agir motu proprio en
cas d'urgence. Il n'en reste pas moins qu'une importance considé-
rahle est attachée en droit aussi hien qu'en fait au consentement
des propriétaires visés.
En ce qui concerne les GARANTIES ET VOIES DE RECOURS, les
täches assumées en France par la Commission locale et la Com-
mission départementale, sous Ie controle du Conseil d'Etat, se
répartissent principalement aux Pays-Bas entre les Commissions lo-
cale et centrale, la Députation permanente des états provinciaux et
Ie trihunal d'arrondissement. Les commissions ne constituent pas ici
des juridictions administratives ad hoc. Le législateur a préféré lais-
ser à un trihunal administratif existant et à l'instance judiciaire de
droit common Ie soin de trancher les litiges. L'intervention conci-
liatrice et Ie controle du juge·commissaire ne sauraient être ouhliés.
Il semhle que Ie système hollandais, plutot compliqué à première
vue, ait heureusement réparti les röles entre les propriétaires et les
pouvoirs puhlics, entre les autorités centrales ayant acquis une
grande expérience et les organismes locaux plus aptes à compren-
dre les hesoins de la région remaniée, et enfin entre les juridictiom;
administratives et les trihunaux judiciaires.

c) Loi de 1954.
76. La loi du 3 novemhre 1954 ne reprend pas toutes les innova-
tions introduites par l'arrêté de 1941 (3).
Elle a fait l'objet de longs travaux à la Deuxième Chamhre et,
après de nomhreuses modifications, a été adoptée par celle-ci qui
seule possède Ie droit d'amendement (4).
Voici les innovations principales que comportent ses 134 articles :

1) Accélération de la procédure.
Il s'agit de réduire Ie plus possihle Ie délai entre Ie vote de l'as-
semhlée des propriétaires et la prise de possession; en effet l'exploi-

(2) Sauf pour Walcheren ou les ravages causés par la mer en 1944 avaient
créé une situation particulière (voy. supra, n° 5 et in/ra, n° 76 in fine) qui s'est
reproduite en 1953.
(3) Voy. supra, n°" 12, note 10 bis, 46 en notes et 75, note l, ainsi que infra,
n" 77 in fine.
(4) Un arrêté du 4 février 1955 à réglé, en application de nouvelle loi, la
composition, les táches et l'action de la ,Commission centrale de techniculture.
L'arrêté entrera en vigueur à la même date que la loi.

132
tant a tendance à négliger les terres qu'il devra quitter. Dans ce hut,
Ie plan de rememhrement est scindé en un plan de distrihution et un
relevé des règlements pécuniaires, de telle sorte que les opérations
ne soient plus entravées par des différends relatifs au calcul des in-
demnités. Une mise en possession provisoire pourra même interve-
nir avant la répartition. Toutefois certains recours nouveaux sont
ouverts, qui augmentent les garanties offertes aux intéressés.

2) Baux à ferme.
Une procédure minutieuse garantit les droits des fermiers à un
hail portant sur des terres autant que possihle équivalentes. Au he-
soin il pourra être imposé à un hailleur de contracter avec un autre
fermier que Ie preneur d'avant Ie rememhrement. L'exposé des mo-
tifs précise que Ie propriétaire qui ne donnait pas ses hiens à hail
ne sera pas contraint de Ie faire (Voy. art. 18 et suiv.).

3) Urbanisme.
L'augmentation de la population a amené de nomhreuses commu-
nes à étahlir des plans d'urhanisation. La loi prévoit une coopé~
ration qui permettra, notamment, de donner l'assurance à l'agricul-
teur qu'après un rememhrement il ne sera plus porté atteinte à son
exploitation avant de longues années.

4) Travaux accessoires.
L'exécution simultanée de travaux tels que Ie placement de con-
duites électriques est favorisée.

5) Paysage.
Diverses dispositions ont trait à la beauté du paysage qui jusqu'ici
n'a toutefois pas été négligée en fait (5). L'administration des forêts
dresse un plan à l'occasion de chaque rememhrement (art. 9 et 79).

6) Divers es modifications sont inspirées de la loi spéciale prise en


1947 pour l'île de Walcheren, étendue aux régions récemment in-
ondées.
C'est ainsi que la Commission locale, moyennant approhation de
la Commission centrale, est hahilitée à désintéresser intégralement
en espèces Ie propriétaire dépossédé d'une parcelle trop petite pour
être exploitée convenahlement, à moins qu'il ne justifie d'un intérêt
raisonnahle à ohtenir une autre parcelle semblable (art. 12, al. 2) (6).

(5) Les opérations, beaucoup plus complètes en Hollende qu'en France,


modifient jusqu'à !'aspect de la région (M.D.V., Propr. terr. 1952, p. 248).

133
d) Accueil
77. Le paysan hollandais en est venu à seconder, et même à sol-
Iiciter l'action des autorités; il s'-est laissé convaincre par une habile
propagande, fondée sur des succès incontestables.
L'exécution de travaux connexes par l'Etat, et notamment l'amé-
lioration du réseau des chemins, a grandement favorisé cette évo-
lution.
Les auteurs de la nouvelle loi oot veillé à ne pas ruiner la confian-
ce accordée par les milieux ruraux.

e) Résultats
78. A la fin de l'année 1950, près de 43.000 hectares avaient été
remembrés (7). Les travaux en cours portaient sur 80.000 hectares
et les demandes à l'étude sur 300.000 hectares. On espère porter de
15.000 à 20.000 hectares Ie programme de réalisations annuel.
La loi de 1954 permettra sans aucun doute d'activer Ie
rythme des opérations; plutöt lent jusqu'ici; la durée moyenne est
présentement de 5 ans (8). D'après Ie ministère de l'Agriculture,
la productivité s'accroît de 20 à 25 p. c.

Conclusions ·
79. Le droit beige est largement trihutaire du système juridique
français. Sur Ie plan administratif cependant, il a conservé, comme
la Hollande, mainte tradition de !'ancien droit. L'autonomie locale
est demeurée une réalité.
Griice au röle dévolu à la Députation permanente, il se forme au
sein de celle-ci des spécialistes dont l'expérience peut se manifester
dans les rememhrements de toute une province.
La compétence techmque et les vues générales sont apportées par
la Commission centrale, qui conseille et surveille les commissions
locales. lnstitution extrêmement précieuse, et sans doute plus effi-
cace que Ie Comité supérieur, simplement consultatif, qui vient
d'être crée en France (9).

(6) D'autre part, la marge 4;1.e 5 p.c. attribuable en espèces, peut être dépassée
avec l'accord du propriétaire ou du titulaire soit d'une hypothèque, soit d'une
rente foncière ( art. 12, al. 3). _
(7) Au 31 décembre 1953 on estimait le total à 76.000 hectares (en c~urs :
155,000 ha., y compris Walcheren; en préparation : 422.000 ha.).
(8) Il ressort d'un tableau officiel que certains remembrements, ralentis il est
vrai par la guerre, ont duré plus de dix ans ( non 8ompris la période prépara•
toire antérieure au vote). En France, on procède plus rapidement, mais il
s'avère que des remembrements insuffisants devront être repris.
(9) Supra, France n° 18.

134
Enfin, le législateur hollandais n'a prévu qu'une intervention ac-
cessoire du juge cantonal. Avec raison, semble-t-il, il a con:fié au
tribunal d'arrondissement et plus particulièrement à un juge-com-
missaire appartenant à cette juridiction, la tache de résoudre et de
prévenir la plupart des conflits. Le ressort des juges de paix est trop
peu étendu pour que les enseignements tirés des premières opéra-
tions puissent servir ultérieurement ( 10).

(10) Comp. in/ra, Belgique, n° 181; dans ce dernier pays l'extension cons•
tante de la compétence du juge de paix, spécialement en matière de bail à
ferme et de petits héritages, militent cependant en faveur de l'attribution à ce
magistrat du controle des opérations.
Voy. d'autre part la planche, infra, p. 204 : Un village néerlandais avant et
après Ie remembrement.

135
APPENDICE
Obstacles légaux au démembrement

a) Polders de !'ancien Zuyderzee.


80. Les terres reconquises constituent des domaines nationaux,
lotis en exploitation de 20 ha que l'Etat se borne à amodier par
haux emphytéotiques.

b) Loi concernant l'aliénation des terrains agricoles.


81. La loi du 7 août 1953 réglementant certains actes juridiques
concernant les terrains agricoles a instauré un controle minutieux
des mouvements qui peuvent affecter la propriété agricole. Un
arrêté du 18 décembre 1953 en assure l'application.
L'article 3 de la loi impose l'approbation de la Chambre foncière
(Grondkamer) pour la cession d'un bien agricole ainsi que pour
la constitution, la modification, la prolongation ou la cession d'un
droit réel qui Ie grève. La juridiction susdite vérifie si Ie prix
n'excède pas les normes fixées par voie réglementaire (art. 9). (1)
L'approbation peut d'autre part être refusée lorsque l'opération
entraîne par exemple l'une des conséquences suivantes :
1 ° un morcellement désavantageux ou une situation désavanta-
geuse par rapport aux bätiments de l'exploitation;
2° la réduction de l'étendue d'une exploitation au point qu'elle
ne suffit plus à ahsorber toutes les forces de !'exploitant;
3° une utilisation de la terre pour obtenir des revenus supplé-
mentaires indépendamment de ceux qui servent à la satisfac-
tion des besoins propres de l'acquéreur;
4° la séparation inopportune de parcelles des bätiments dont elles
dépendent.
Ces mesures ont pour hut d'empêcher que Ie nombre d'exploita-

(1) La chambre foncière est composée d'un juge de paix et de deux asses-
seurs laïcs. Une chambre foncière d'appel siège à Arnhem; ses décisions ne
sont pas susceptibles de pourvoi en cassation.

136
tions d'un rendement peu économiques ne s'accroisse; et de faciliter
Ie développement des exploitations trop petites (2).

82. Sauf Ie cas de motifs sérieux (acquisition par un proche


parent ou par les pouvoirs publics, fermier mauvais cultivateur... ),
Ie fermier jouit d'un droit de préférence s'il offre le prix maximum
autorisé (art. 9, 3° et 18, 1° et 2°).

83. La Chambre foncière doit également donner son autorisation


préalable à une vente publique - accordée sans autre examen
lorsqu'il s'agit d'une vente effectuée en vertu d'une disposition
légale, d'une vente judiciaire, d'une vente-exécution ou d'une vente
opérée en vertu d'une clause visée à l'article 1223, par. 2, du
Code civil (2).

84. Sauf circonstances spéciales, les propriétaires indivis ne sont


pas tenus d'observer Ie prix maximum (art. 19).

85. Des dispositions pénales sanctionnent les infractions à la


loi du 7 août 1953, qui cessera d'avoir effet Ie r• janvier 1959 (3).

c) Droit suc~ssoral.
86. La susdite loi n'apporte aucun frein aux partages successo-
raux (4). D'une manière générale, on constate dans les régions re-
membrées, que les propriétaires évitent de remorceler les terres; ils
sont même enclins à poursuivre les regroupements.

(2) Dans les régions sahlonneuses, ou domine la petite propriété, fait ohserver
!'Exposé des motifs, les mesures proposées ne suffiront. pas à agrandir ces
exploitations, faute de domaines plus vastes susceptihles d'ahandonner une
partie de leurs terres.
(3) L'arrêté sur l'aliénation des hiens immeuhles (Verordeningsblad, n°
49 de 1942) avait été maintenu en vigueur provisoirement, sous une forme plu-
sieurs fois modifiée.
(4) Le Code civil néerlandais de 1838 n'a pas repris l'article 832 du Code
Napoléon, lequel favorise l'égalité à tous égards dans les partages.
Dans son rapport provisoire sur Ie projet de loi amendant la législation eu
matière de rememhrement, la Commission de l'agriculture de la Deuxième
Chamhre a attiré l'attention du Gouvernement sur l'utilité d'une réforme du
droit successoral (N. ]. B., 2 mai 1953, suppl., p. 41).

137
CINQUitME PARTIE
Du rememhrement rural en Belgique

LEGISLATION
LOI DU 4 MAi 1949, tendant à encourager Ie rememhrement volon-
taire des hiens ruraux (Moniteur belge, 2 juin; Rec. gén., 1949,
n° 18.809; Rev. pr. notariat, 1949, p. 168; Tijdschr. voor not.,
1949, p. 109).
Lm DU 26 JUII..LET 1952, modifiant le Code des droits d'enregistre-
ment, d'hypothèque et de greffe, en vue d'encourager les
échanges d'immeubles ruraux non bàtis. (Moniteur, 30 août
1952; Rec. gén., 1953, n° 19.201; Rev. pr. not., 1952, p. 247;
Tijdschr. voor not., 1952, p. 175).
PROJET DE LOi sur Ie remembrement légal des hiens ruraux (Doe.
parlem., Sénat, n° 27, session 1954-1955, reproduisant en annexe
l'avis du Conseil d'Etat), déposé Ie 24 novembre 1954 (1).
PROJET DE LOi modifiant la loi du 16 mai 1900 apportant des mo•
difications au régime successoral des petits héritages (dernier
Doe. parlem. publié : Sénat, n° 74, session 1954-1955).

(I) On trouvera Ie texte du pro jet de loi in/ra, pp. 191 et suiv.

139
Liminaire
a) Généralités.
l. En Belgique Ie rememhrement des hiens ruraux (en néerlan-
dais ruilverkaveling) n'éveille d'intérêt que depuis quelques années.
Les prohlèmes créés par la multiplication des parcelles et leur
forme défectueuse existent cependant de longue date. Au milieu
du siècle dernier, il était devenu apparent que Ie morcellement
illimité, après avoir favorisé l'accession à la propriété de la main-
d'ireuvre mercenaire, finissait par nuire à la petite propriété
paysanne. En effet Ie morcellement entraîne Ie parcellement.
« C'est un inconvénient, constatait un peu plus tard Beernaert,
que de voir les terres ou les pätures dépendant d'une même exploi-
tation trop éparses. Il en résulte une augmentation des frais; une
perte de temps pour Ie personnel, d'inutiles fatigues pour Jes
animaux ». On peut ajouter à cette énumération la réduction de
la surface cultivahle par les chemins, fossés, clötures en surnom-
bre (1), les litiges amenés par l'enchevêtrement, voire l'enclave-
ment des terres et enfin les ohstacles, de plus en plus dommageahles,
à la mécanisation et Ja motorisation (2).
2. Des conceptions à la fois individualistes et conservatrices, si
souvent conjuguées dans l'histoire de nos provinces, détournaient
Ie législateur beige de s'inspirer d'expériences étrangères concluan-
tes et de s'engager dans la voie du remaniement parcellaire.
On répondait, avec Benjamin Constant, que Ie morcellement
s'arrête toujours au point au delà duquel il deviendrait funeste (3).

(1) Sans compter les pertes de temps causées par les multiples « dérayures »
(sillons de hordure).
(2) Devenues de plus en plus nécessaires, ne serait•ce que du fait de la
pénurie de main-d'reuvre. Il y avait 217.000 ouvriers agricoles en 1880; on
comptait 28.000 cotisants de cette catégorie à la Sécurité sociale en 19á0.
(3) Travaux préparatoires de la loi du 17 juin 1887 (infra, n"' 5) Doe.
parlem., 1886-1887, pp. 121 et 122.
« Si l'influence, disait plus prudemment l'exposé des moiifs de la loi du
1 er juillet 1869 ( infra, n"' 5), qne nos lois civiles peuvent exercer sur Ie mor-
cellement des héritages ruraux a fait naître quelque préoccupation, les docu•
ments que Ie Gouvernement a sous les yeux se prononcent, au moins pour Ie
présent, contre Ie remède consistant à rendre ohligatoires dans des conditions
déterminées, comme cela s'est pratiqué en d'autres pays, des échanges ou des
partages dont Ie résultat serait de recomposer des masses ou de faciliter. l'ex-
ploitation des parcelles » (Pasin., 1869, p. 311).

140
Il semhla suffisant et particulièrement adéquat de favoriser 1es
échanges par des allègements :fiscaux (~) .
3. Les faits ont démenti ces vues optimistes. En moyenne, l'ex-
ploitation agricole s'étend de nos jours sur moins de 7 hectares et
se compose de dix-neuf parcelles réparties en six ou sept « pièces
de terres » d'un seul tenant (5).
La Société nationale de la petite propriété terrienne vient d'en•
treprendre une enquête portant notamment sur les points suivants :
a) nomhre de lots dépendant de chaque exploitation;
b) distance entre les diverses pièces de terre et les hätiments
de ferme;
c)nomhre d'enclaves;
d) de comhien de propriétaires différents chaque cultivateur
tient-il en location des parties de son exploitation ?
A en juger d'après les premiers résultats, Jes conditions d'exploi-
tation sont généralement difficiles et exigent que des mesures radi-
cales soient prises. Il s'avère par exemple que, parmi les pièces de
terres occupées par les agriculteurs ayant rempli Ie questionnaire,
15 p.c. sont enclavées.
4. Le Code civil, hostile à l'indivision et à l'inégalité dans les
partages, a incontestahlement contrihué à la division excessive des
hiens ruraux. Comme pour la France, il faut dire que les mreurs
s'accordaient et s'accordent encore avec les règles fixées sous Ie
Consulat. Les clauses en faveur d'un enfant de prédilection (lief
kind) étaient contrariées par les coutumes (6). On signale déjà au
XVIII• siècle un morcellement poussé de la propriété (7) , source
de progrès à l'époque, et l'exploitation des grands domaines par
petites fermes (8). Il est d'autre part de l'intérêt du propriétaire
foncier de répartir sa fortune sur plusieurs lots dont Ie loyer et la

(4) Il s'était effacé des mémoires que panni les commissions départemen-
tales instituées en 1808 pour donner leur avis sur la codification des lois rurales,
celle de Bruxelles s'était prononcée avec cinq autres en faveur des réunions
forcées, décidées à la majorité (cité par Ie D' Chauveau, Le remembremimt et
la propriété rurale, Paris, 1918, p. 37).
(5) D'après Ie recensement de 1950, la majorité des exploitations comptant
de 2 à 9 « pièces de terre» (c'est-à,dire lot~ d'un seul tenant, appelés en France
« îlots de culture»), et seulement 3t,.OOO ( sur 252.000) n'en comportent
qu'une seule.
(6) Britz, Code de l'ancien droit belgique, t. II, p. 766.
( 7) « ,Cette soif de la propriété foncière qui saisit Ie petit cultivateur beige
à la fin de l'ancien régime, dit Mme Tassier, explique Ie remarquable moreel•
Jement de la propriété qui se constate surtout en Flandre, mais aussi en Cam•
pine et ailleurs à partir de 1750. Les bourgeois, propriétaires de terres, se
laissent tenter par les hauts prix, vendent des parcelles et placent l'argent obtenu
en hypotbèques (Suzanne Tassier, ldées et profils du XVIIr siècle, Bruxelles,
1944, pp. 13 et 14).
(8) Henri Pirenne, Histoire de Belgique, éd. ill" t. 111, p. 144.

141
valeur marchande seront relativement plus élevés. L'actuel déve-
loppement des voies de communication, s'ajoutant à ces facteurs,
ne laisse pas de porter atteinte à l'unité des exploitations (9).
L'attitude indifférente des autorités, et surtout de la population,
à l'égard de la réorganisation foncière n'a pour ainsi dire pas varié
jusqu'à ces dernières années (10).
b) Evolution de la législation ; iscale en matière d' échanges
5. La première mesure prise en faveur du regroupement par
échanges fut la loi du rr juillet 1869, qui ramena Ie droit d'enre-
gistrement à 0,60 p. c. sur Ie moindre lot; Ie taux ordinaire sur les
ventes était applicable sur Ie retour ou sur la plus-value. Le 'droit
de transcription était fixé à 0,30 p. c. (1,25 p. c. sur Ie retour ou la
plus-value) (11).
La loi du 17 juin 1887 réduisit à 0,10 p.c. Ie droit d'enregistre•
ment sur les échanges de biens ruraux non bätis situés dans une
même commune ou dans une commune limitrophe, pour autant
que la valeur vénale n'excédät point cent cinquante fois Ie revenu
cadastral; en cas d'inégalité des lots, Ie droit de soulte était i:éduit
à 1 p. c.; il fallait toutefois que la soulte ne dépassät pas Ie quart
de la valeur du moindre lot, si la moitié ni la contenance de tous
les biens compris dans ce lot n'excédait pas 20 ares. Des majora-
tions furent édictées à plusieurs reprises après la première guerre
mondiale. L'exposé des motifs du Code des droits d'enregistre~ent
qualifia de dérisoire les taux de 25 centimes et 2 francs qui étaient
en vigueur en 1939 (12); la législation nouvelle fixa Ie droit d'é-
change réduit à 2 p.c. sur Ie moindre lot, la soulte étant passible
du droit ordinaire de 11 p. c. qui, depuis 1919, pesait sur les échan-
ges aussi bien que sur les ventes (art. 72 et 73 du Code) (13).
Le hut visé en 1887 avait été oublié, semble-t-il. Non seulement Ie
(9) Cf. Forget, Le parceUement des terres, in Les exploitations agricoles
devant Ie problème du remembrement, pp. 6 et suiv.
(10) C'est ainsi que la loi du 15 novembre 1919 qui autorisait Ie gouverne-
ment à procéder au regroupement des terres comprises dans Ie périmètre des
régions dévastées ne reçut guère d'application (Pierret, Les limitations légal!ls
au fractionnement de la propriété foncière, Rev. de dr. intern. et de dr. comp.,
1950, pp. 2 et suiv.)., n° 10). L'occasion était bonne pourtant de tenter ,une
expérience.
(11) Jusqu'à 1939, un droit de transcription (de 1,25 puis de 2 p.c.) était
perçu en outre lorsque la convention était constituée par acte authentique. Le
Code des droits d'enregistrement unifia les deux impots.
(12) Auxquels il fallait ajouter, Ie cas échéant, un droit de transcription qui
était sauf erreur de 0,35 et 1,25 p. c. Les échanges ne portaient que sur 300 à
400 ha. par an à cette époque (La propr. terr" 1951, p. 253), alors que la
moyenne, vers 1860, était de l.500 ha. (Pasin, 1869, p. 315).
(13) La loi de 1887 avait ramené les honoraires notariaux à l p. c. de la
valeur du moindre lot avec un minimum de 5 francs. En vertu de l'arrêté
royal du 16 décembre 1950, Ie tarif, actuellement dégressif, est de 3 p.c., avec
un minimum de 200 francs (cf. infra, n° 7, note).

142
législateur ne s'orientait pas vers la recherche de remèdes radi-
caux, à l'instar de l'étranger, mais il achevait soudain d'énerver une
mesure déjà insuflisante.

6. Dès 1941, la hausse des valeurs vénales, sans augmentation


correspondante des revenus cadastarux, ota toute portée pratique
aux articles précités.
Aussi la limite légale fut-elle élevée par la loi du 23 août 1947
à deux cents fois et par la loi du 11 juin 1951 à trois cent cinquante
fois Ie revenu cadastral, jusqu'à la mise en vigueur des revenus qui
seront fixés à la suite de Ja prochaine révision cadastrale.

c) Loi du 26 juillet 1952.


7. Enfin la loi du 26 juillet 1952, qui ahroge les précédentes,
accentua cette heureuse réaction (14). Le nouveau régime est plus
favorahle même que celui de la loi de 1887.
Le droit fixe de 40 francs est appliqué aux échanges d'immeuhles
ruraux non hatis dont la valeur vénale pour chacun des lots
n'excède pas six cents fois Ie revenu cadastral (15).
En cas d'inégalité de lots, il est perçu un droit de 11 p. c. sur Ja
différence de valeur ou sur la soulte si celle-ci est supérieure à
cette différence. Ce droit est réduit à 6 p. c. si la différence de
valeur ou la soulte n'excède pas Ie quart de valeur du moindre lot.
IJ n'est plus exigé que les immeuhles échangés soient situés dans
la même commune ou dans des communes limitrophes.
Des sanctions sont prévues en cas de fraude (16) .
Enfin, l'ohligation d'exploiter soi-même la petite propriété rurale
ayant hénéficié d'un taux réduit peut être reportée sur Ie hien
acquis en échange; la suhstitution vaut également pour l'interdic-
tion d'ouvrir un déhit de hoissons.

8. Cette dernière loi a considérahlement réduit l'intérêt pratique


du rememhrement volontaire, introduit entretemps dans notre
lêgislation.
Elle semhle n'avoir pas eu d'effets appréciahles. IJ en restera ainsi
tant que les échanges ne seront pas stimulés, comme en France,
par des dégrèvements fiscaux et des suhsides (17) .

(14) Voy. aussi les circulaires interprétatives du 2 sept. 1952 (Rec. gén.,
1953, p. 8), et du 9 août 1954 (Rec. gén., 1955, p.57) - et la décision du 20 oc-
tobre 1953 (id., p. 56).
( 15) Limite qui sera ramenée à deux cent cinquante fois, après la péréqua•
tion cadastrale annoncée.
(16) Cf. les commentaires signés Robert Regibeau et Paul Gourdet (J. T.,
1952, pp. 637 et 638) et M. D. (Rec. gén., 1953, n° 19.201).
(l't) Cf. supra; France, n• 14.

143
CHAPITRE PREMIER

Du rememhrement volontaire

a) Généralités.
9. La loi du 4 mai 1949, tendant à encourager Ie rememhrement
volontaire des biens ruraux, constituait la première partie d'un
projet présenté au nom du Gouvernement Ie 10 mars 1948 par Ie
ministre Orban.
La deuxième partie avait trait au remembrement obligatoire
ou rememhrement légal. Cette demière ayant soulevé des objec-
tions d'ordre juridique et technique de la part des commissions de
la justice et de l'agriculture du Sénat, celles-ci décidèrent à l'una-
nimité de scinder Ie projet et de ne retenir que la première partie.
En agissant ainsi, les commissions donnaient immédiatement au
problème une solution partielle, mais qui ne heurtait pas les tra-
ditions du monde rural puisqu'il s'agissait d'un simple échange de
biens librement consenti. Elles estimaient qu'une pratique généra-
lisée des remembrements volontaires, pourrait créer un climat plus
favorable à l'application du remembrement légal (1).
L'auteur de la proposition, les commissions du Sénat et de la
Chamhre, les memhres des chambres législatives, reconnurent la
nécessité de poursuivre sans désemparer l'étude du rememhrement
légal.
Le projet voté par Ie Sénat ne fut pas amendé par la commission
de l' agriculture de la Chambre ; il fut voté Ie 27 avril 1949 llt
obtint une majorité de 173 voix sur 174 volants.

10. Le remembrement volontaire eut, chez nous, Ie même sort


que dans les autres pays; il connut très pen d'adeptes En Hollande,
ou il existe depuis 1938, les résultats sont demeurés modiques (2bis).
C'est la Société Nationale de la Petite Propriété Terrienne, qui, en
Belgique, s'est vu confier Ie soin de procéder aux enquêtes sur les
demandes de remembrement.

(1) Doe. parl., Sénat, 48-49, n° 171, p. 10; Ann. parl., Sénat, 48-49, n° 936.
(2 bis) Voy. supra, Pays-Bas, n° 66, note 2.

144
Au cours des deux années qui suivirent l'entrée en vigueur de la
foi,. il y eut 48 demandes introduites auprès du ministre de
I'.i\griculture.
Le département des Finances en a rejeté 38 parce qu'elles ne réu-
nissaient pas les conditions exigées par la loi.
Actuellement sur 60 demandes introduites, 3 ont été acceptées,
2 sont encore à l'examen, dont 1 portant sur une étendue de
75 hectares.
b) But de la loi.
ll. Le hut de la loi est d'encourager les remembrements ruraux
en accordant aux intéressés des avantages fiscaux et Ie concours
gratuit des services publics (bornage, mesurage, etc ... ) lorsque les
conditions impératives fixées par la loi se trouvent réunies et que
le caractère d'intérêt général de l'opération est reconnu par l'Etat.
12. Une opération de remembrement est introduite à la requête
d'au moins deux propriétaires. Elle est réalisée sous l'autorité et
Je controle de l'Etat, en la personne du ministre de l'Agriculture
et de celle du ministre des Finances. Celui-ci assure, sous certaines
conditions, Ie financement de l'opération, accorde des allègements
fiscaux et Ie conco.urs de l'administration du cadastre.
Un regroupement parcellaire ne se conçoit évidemment pas sans
unè rectification cadastrale. Dans !'exposé des motifs, Ie ministre
Orban insista sur Ie role qu'étaient appelés à jouer, dans cette
réforme agraire, les géomètres du cadastre, aux cotés des services
techniques de l'agriculture.
Dans beaucoup de pays, Ie géomètre du cadastre est Ie réalisateur
par excellence des rememhrements (2).
c) Avantages légaux.
13. Ces avantages légaux sont de deux ordres :
1. Le concours gratuit des services publics est accordé pour les opé-
rations de mesurage et de bornage, la confection des plans, les
. études relatives à la création de chemins, des voies d'écoulement
· d'eau et de tous autres · ouvrages nécessités par Ie regroupement
parcellaire et l'amélioration des exploitations (art. 5).
Restent valables, les règles régissant la voirie publique et les
.cours d'eau non navigables.
2. Les avantages fiscaux :
Les actes portant remembrement de biens ruraux sont exemptés
du droit proportionnel et soumis au droit fixe général, s'il n'est pas
stipulé de soulte ou indemnité.

(2) Doe. parl., Sénat, 47-48, n" 263, p. IL

145
Pour celles-ci, un droit de 6 % est perçu sur leur montant total.
Les actes portant cession de bail de biens ruraux faisant l'objet
d'une convention de remembrement sont soumis au droit fixe 'gé-
néral, à condition :
1 ° que la cession soit concomitante au remembrement ou ait
lieu dans l'année de celui-ci;
2° que Ie nom du propriétaire des biens et la date de l'arrêté
d'approbation soient mentionnés dans l'acte (art. 7).

d) Biens pouvant être inclus.


14. La loi du 4 mai 1949, tout comme Ie projet sur Ie remembre-
ment légal, a entendu limiter son champ d'application aux biens
ruraux seuls'. Tout immeuble qui n'a pas d'utilisation agricole ou
qui ne présente pas Ie moindre profit pour Ie progrès agricole (3)
est exclu du bénéfice de la loi.
Tel est Ie principe général qui fut posé par Ie gouvernement
dans Ie projet initia! (4).
Si des fonds ruraux, sujets à remembrement, ont comme acces-
soires des batiments ruraux isolés, ceux-ci pourront être compris
dans l'opération de remembremeJ,lt à la condition de ne pas consti-
tuer une annexe de l'installation principale.
Les exemples cités par l'article 4, 5°, permettent de préciser la
pens~e du législateur.
Sont exclus expressément du bénéfice du remembrement :
1) les batiments ou les terrains faisant corps avec eux et appar-
tenant au même propriétaire;
2) les propriétés closes de murs;·
3) d'une façon générale les immeubles qui ne peuvent, en raison
de leur utilisation ou destination spéciale, bénéficier de l'opération
de remembrement.
La disposition contenue dans l'article 4, 5°, de la loi du 4 mai
1949 était insérée dans Ie projet initia! sous Ie chapitre 1" qui
traite des notions générales, applicables au remembrement volon-
taire et au remembrement légal.
Au sujet des batiments et des terrains faisant corps avec eux et
appartenant au même propriétaire, !'exposé des motifs conseille
cependant, s'il s'agit d'une exploitation agricole, de tendre dans
Ie projet de remembrement à grouper autour de ce siège les par-
celles dispersées ou éloignées.

(3) Exposé des motifs, Doe. parl., Sénat, 47-48, n• 263, p. 12,
(3) Doe, parl., Sénat, 48-49, n" 171, p. 3.

146
Un abri pour hétail, par exemple, peut être englohé dans Ie
projet de rememhrement s'il constitue une grange dépendant d'une
ferme. L'article 4, 5°, exclut les propriétés closes de murs.
L'exposé des motifs précise qu'il faut entendre par là des do-
maines d'une certaine étendue. Un enclos de peu d'importance
pourrait suivant les circonstances être compris dans Ie périmètre
d'un rememhrement. Pour ces cas exceptionnels, Ie propriétaire
sera indemnisé selon Ie système prévu à l'article 4, 4°, pour les
plus-values · transitoires.
La nouvelle institution s'applique par excellence non seulement
aux terrains affectés à l'agriculture mais aussi aux terrains d'une
productivité insuffisante ou nuJle qui sont susceptihles d'être
améliorés par des travaux rendus impossihles par la dispersion
des parcelles.

e) Demande.
15. L'arrêté ministériel est pris à la requête collective des pro-
priétaires intéressés au projet de rememhrement (art. 2, al. 1).
Comme nous l'avons dit précédemment, il s'agit d'une opération
d'échange par laquelle deux ou plusieurs propriétaires décident
lihrement de réaliser un regroupement de leurs hiens ruraux. Deux
propriétaires suffisent. Les memhres des commissions du Sénat ont
estimé judicieusement que Ie caractère d'intérêt général n'est pas
fonction du nomhre de propriétaires intéressés, mais est plutöt
fonction de la superficie et de la situation des parcelles faisant
J'ohjet du projet de rememhrement (5).
Les rememhrements décidés par deux propriétaires devaient, d'a-
près M. Derhaix, rapporteur au nom de la Commission de la Jus-
tice du Sénat, être les plus usités.

f) Titulaires de droits réels, locataires et exploitants.


16. Si une ou plusieurs parcelles comprises dans Ie projet sont
grevées de droits réels, ou font l'ohjet de droits personnels, la re-
quête portera en outre la signature des titulaires de ces droits pour
accord (art. 2, al. 2) (6).
En associant les fermiers, la loi assure la réalisation de son oh-
jectif principal : l'intérêt de l'exploitation agricole.
Le hut poursuivi n'est pas « la valorisation des hiens ruraux au
profit des propriétaires fonciers, mais hien Ie seul intérêt de l'cx-
ploitation qu'il s'agit de rendre plus aisée, plus économique et

( 5) Doe, parl., 48-49, n° 171, p. 11; Ann. parl., Sénat, séance. du 16 mars
1949, p. 937.
(6) La loi sur Ie remembrement conventionnel ne s'occupe pas du repo1·t
des droits réels et des baux relatifs aux biens remembrés.

147
plus rentahle. Il en résultera d'ailleurs indirectement un avantage
incontestahle pour les propriétaires intéressés par une plus-value
de leurs hiens en capita} et en revenu». Ainsi s'exprimait devant
Ie Sénat, M. Derhaix, rapporteur du projet au nom de la commis-
sion de la justice (7) .
Partant de ces considérations, les commissions réunies estimè-
rent qu'il était indispensahle d'associer Ie fermier locataire à l'o-
pération de rememhrement chaque fois qu'il y aurait des hiens
exploités en faire valoir indirect. Le projet initial fut amendé dans
ce sens, en étendant l'intervention, pour accord, à tous les titulaires
de droits réels et personnels (créanciers hypothécaires, usufruitiers,
etc... )
g) Conditions de forme (art. 3).
17. A la requête, doivent être annexés les documents suivants
1 ° un extrait du plan cadastral indiquant Ie périmètre des pro-
priétés à rememhrer;
2° un plan indiquant le regroupement parcellaire projeté;
3° la liste, par noms et adresses, des propriétaires et des autres
personnes intéressées visées à l' article 2;
4° éventuellement, une note spécifiant les soultes et indemnités
dont Ie· payement est prévu dans l'opération de rememhrement,
ainsi que Ie nom des personnes qui doivent la supporter ou qui
l'ohtiennent.
h) Conditions de fond.
18. Le projet de rememhrement doit avoir pour effet de rempla-
cer les parcelles constituant des lots séparés par un nombre de lots
moins élevés; les nouveaux lots doivent, autant que possihle, être
continus et réguliers, jouir d'accès indépendants et être aussi rap•
prochés que possible du siège d'exploitation (art. 4, 1°).
i) lndemnisation des propriétaires.
19. La nouvelle distribution des parcelles doit assurer, autant
que possihle, à chaque propriétaire intéressé, l'équivalence en na-
ture de culture, en qualité, en superficie et en valeur, des terrains
qu'il a cédés (art. 4, 2° b).
Si cette équivalence ne peut être réalisée, une soulte sera versée.
Toutefois, en aucun cas, celle-ci ne pourra dépasser 10 % de la
valeur des hiens appartenant au propriétaire débiteur de la soulte.
Ainsi que nous l'avons indiqué, Ie projet de rememhrement doit
spécifier et Ie montant des soultes et Ie nom des propriétaires qui la
doivent ou qui l'obtiennent (supra, n° 13).

( 7) Ann. parl., Sénat, 48-49, 936.

148
20. Les clötures, plantations, arhres et tous travaux quelconques
se rapportant aux hiens compris dans Ie projet de rememhrement (8)
sont indemnisés séparément. Le montant de ces indemnités ainsi que
Ie nom des indemnitaires et déhiteurs, doivent, selon Ie vireu de la
loi, :figurer dans Ie projet (art. 4, 4°).

j) Arrêté ministériel et aète de remembrement.


21. Lorsque les conditions exposées ci-dessus et prévues par les
articles 2 à 4 de la loi sont réunies, un arrêté ministériel, pris con-
jointement par Ie ministre de l'Agriculture et Ie ministre des Fi-
nances, constate et consacre Ie caractère d'intérêt général du projet
et assure aux propriétaires intéressés Ie héné:fice des avantages
prévus par la loi (9).
L'acte de rememhrement est dressé par un notaire choisi par
les propriétaires intéressés.
Cet acte règie Ie transfert des droits de propriétés, et éventuelle-
ment Ie transfert des droits réeis et personneis.
Une expédition de l'arrêté ministériel, l'extrait du plan cadastral
reiatif aux propriétés à rememhrer sont annexés à l'acte (10).

(8) Ce que la loi nomme : les plus•values transitoires.


(9) Voy. supra, n~• 11 et 16._
(10) La loi du 7 juillet 1951 sur le hail à ferme a admis comme motifs de
mettre fin à la convention, notamment la volonté du hailleur de joindre une
ou plusieurs parcelles louées à une autre exploitation, également donnée à hail
par lui, et l'échange de parcelles entre deux ou plusieurs fermiers du hailleur,
en vue de constituer des exploitations rememhrées ( art. 1775 nouveau du Code
eivil, 3• et 4.. ).
Cette loi a instauré le hail semi-perpétuel.

149
CHAPITRE II

Le remembrement légal et la Constitution

22. L'article 11 de la Constitution dispose : Nul ne peut être


privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les
cas et de la manière établie par la loi, et moyennant une juste et
préalable indemnité.
Le législateur n'a pas manqué de se conformer à ces règles (1)
chaque fois qu'il est intervenu en matièrè d'expropriation propre-
ment dite.
Il faut se garder de donner à l'article 11 de la Constitution une
portée exagérée. Les articles 537 et 544 du Code civil suhsistent. On
réclamerait en vain, signalait déjà Thonissen (2), des indemnités
pour des restrictions à l'exercice du droit de propriété qui n'en-
traînerait pas la perte de la propriété elle-même. Une « servitude
légale », suivant une dénomination impropre, ne donne lieu à in-
demnisation que si la loi qui l'institue Ie prévoit (Rép. pr. dr. b ..
v 0 Expropriation, n ° 12) .

23. Il est clair que Ie rememhrement coriventionnel ne soulève


·aucun prohlème; il s'analyse en effet comme un échange volon-
taire, sanctionné et suhsidié par les autorités.
Le rememhrement légal se présente au contraire comme une opé-
ration obligatoire, s'il peut être décidé motu proprio par les pou-
voirs publics, ou semi-obligatoire s'il requiert l'accord de la majorité
des propriétaires intéressés; c'est ce dernier système qui sera vrai-
semhlablement retenu par Ie législateur belge.
Deux questions peuvent se poser à l'égard des propriétaires con-
traints de céder tout ou partie de leurs hiens : ceux-ci sont-ils pri-
vés d'un droit de propriété au sens de l'article 11 de la Constitu-
tion ? Dans l'affirmative, les conditions exigées par eet article
sont-elles réunies?

(1) lnspirées de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et d11


citoyen et de l'article 164 de la Loi fondamentale de 1815; elles se retrouvent
dans l'ancien droit helgique (Thonissen, La Constitution belge annotée, 2"
é"d., sub. art. 11).
(2) Op. cit., n° 58.

150
24. En ordre principal, l'exposé des motifs du projet de loi
déposé en 1948 (3) considérait Ie remembrement rural comme une
institution sui generis, apparentée aux limitations légales de la
propriété prévues par l'article 544 du Code civil, aussi hien qu'à
rexpropriation pour cause d'utilité publique.
· A titre subsidiaire, Ie Gouvernement ajoutait que Ie remembre-
ment sè concilie parfaitement avec les prescriptions constitution-
nelles prérappelées (4).
Il convient de sè demander tout d'abord quelle est la nature
juridique du remembrement légal.

25. En France, la plupart des civilistes Ie rangent parmi les res-


trictions d'intérêt public ou d'ordre administratif au caractère
absolu du droit de propriété, en relation avec l'article 544 du Code
civil (5). D'après M. Laborde-Lacoste (t. 1.. , n° 2067), il s'agit d'une
Hmitation dans un intérêt privé.
Poussant plus loin l'analyse, Ie traité de Beudant estime qu'on
se trouve en présence d'une « sorte d'expropriation forcée », se
différenciant toutefois par deux traits de l'expropriation propre-
ment dite; d'une part, elle intéresse de façon plus immédiate et plus
directe les propriétaires impliqués dans l'opération; d'autre part,
I'indemnisation se fait en nature (6).
La doctrine française n'a pas à se préoccuper d'un problè~e
d'ordre constitutionnel. Les constituants de 1946 n'ont pas fait
mentfon du droit de propriété; ils se sont contentés de renvoyer à
la Déclaration de 1789, texte de portée plutot morale que vérita-
hlement juridique, de même que la Déclaration universelle des
droits de l'homme adoptée en 1948 par l'assemblée générale d~s
Nations Unies (7).
(3) Doe. parl., Sénat, 1947-1948, n° 263.
(4,) Comme l'a fait ohserver M. Lindemans (Ruilverkaveling en art. 11 van
de Grondwet, R. W., 1949-1950, col. 769 ~t suiv.), c'est la première fois que le
Gouv-emement était amené à prendre attitude à eet égard. En effet, le rapport
au Régent précédant l'arrêté-loi du 7 septemhre 1946, édicté en matière de re•
memhrement urhain, précisait que la question de la constitutionnalité ne se
pose pas lorsque, comme en l'espèce, les propriétaires refusant de participer à
l'opération peuvent soit délaisser leurs hiens sous réserve de leurs droits à
indemnité, soit être expropriés par les pouvoirs puhlics ou par les associations
de propriétaires (Rec. gén., 1946, p. 312).
(5) Beudant, 2• éd., par R. Beudant, Lerehours-Pigeonnière et Voirin, t. IV,
n°" 290 et suiv.; Savatier, t. I, n° 684; Planiol 5e éd., t. I, 11° 29·79; Planiol
et Ripert, 2° éd., n°" 427 et suiv.; Colin et Capitant, refondu par Julliot
de la Morandière, t. Ier, n° 1593.
(6) Contra : Schmerher (op. cit., p. 124) qui voit dans Ie rememhrement
une expropriation d'utilité puhlique avec compensation en nature.
( 7) Cf. les articles 17 de ces Déclarations.
En 1948, l'Assemhlée consultative européenne de Strashourg a expressément
refusé d'inscrire Ie droit à la propriété parmi les droits fondamentaux de
l'homme (Mélanges Ripert, t. Il, p. 4).

151
26. Aux Pays-Bas, il semhle acquis que Ie remembrement légal,
n'étant pas une expropriation, ne se trouve pas visé par l'article
158 de la Constitution, semblable à l'article 11 de notre charte (8).
Le législateur hollandais se home à demander une plus grande
séparation des deux domaines, de telle sorte que les pouvoirs pu-
blics ne puissent s'approprier à bon compte les biens sur lesquels
ils ont jeté leur dévolu (9).

27. Le commentateur de la loi hollandaise, M. Schepel, indique


plusieurs arguments en faveur de la thèse admise dans son pays (10) ;
ils ont été longuement combattus par M. Lindemans (11).
Pour ce dernier, Ie fait que Ie remembrement peut aussi s'opérer
par convention n'a pas plus de signification que Ia coexistence de
l'expropriation forcée et de Ia cession volontaire; les notions de
remembrement obligatoire et d'expropriation ne se trouvent pas
séparées pour autant. Cette proposition peut assurément . se sou-
tenir.
Nous ne Ie suivons. pas lorsqu'il conteste que les propriétaires
des hiens remaniés bénéficient d'une plus-value. En admettant
même que l'Etat beige - qui paraît enclin à la parcimonie en l'oc-
currence - déduise la plus-value dans Ie calcul des subsides, il n'en
reste pas moins les avantages impondérables, qui sont nombreux et
définitifs. Le profit sera plus sensible pour Ie propriétaire-exploitant;
mais n'est-ce pas à celui-ci que vont toujours davantage les faveurs
du législateur ?
C'est également à tort, selon nous, que M. Lindemans affirme qu'il
y a une partie expropriante. S'il est vrai que Ie remembrement,
décidé par les propriétaires suivant Ie projet de 1948, doit être
ordonné par arrêté royal, on n'aperçoit pas que les pouvoirs pu-
blics ou la masse constituée soient un seul instant propriétaires
des biens remembrés, hormis bien entendu les nouvelles voies
d'accès. Tel bien n'est retiré à un propriétaire que parce que tel
autre lui est attribué.
Il nous paraît erroné d' assimiler Ie remembrement légal à une
expropriation pour cause d'utilité publique au sens de la loi du
17 avril 1835.
28. Nous convenons en revanche que dans l'état actuel du droit

(8) Cf. Valkhoff, loc. cit.


(9) Cf. Ie « Rapport provisoire> étahli au nom de la Deuxième Chambre,
session1952-1953, n° 2063, p. 5.
00) Voy. supra, Pays-Bas, n° 10.
(Il) Loc. cit.

152
positü beige, on peut difficilement justifier l'opération par une in-
terprétation extensive de l'article 544 du Code civil (12).
Le marquis de Vareilles-Sommières a démontré dans une étude
restée célèbre (13), que Ie trait caractéristique du droit de propriété
« c'est d'être un droit général » et non absolu; mais il ajoutait :
« aux services d'une chose». Lorsque cette chose est remplacée
par une autre, n'y a-t-il pas une atteinte essentielle à la propriété
(14) ? Nous pensons que oui.
Il y a lieu de se montrer d'autant plus circonspect que Ie Congrès
national a tenu à faire un texte fondamental d'une disposition qui
figurait en termes équipollents à l'article 545 du Code civil, abrogé
par Ie fait même.

29. On ne saurait donc soustraire Ie remembrement obligatoire,


ou semi-obligatoire, au prescrit de l'article 11 de la Constitution.
Observons que eet article ne vise pas expressis verbis l'expropria-
tion. Il est dit « Nul ne peut être privé de sa propriété ... ». Cette
formule n'accule pas à considérer comme expropriée au sens étroit
toute personne qui s'en pourrait prévaloir.

30. Nous nous séparons à nouveau de M. Lindemans lorsqu'il


soutient que Ie projet de loi de 1948 était inconstitutionnel.
Le susdit article 11 n'exige pas que l'intérêt public soit exclusif
de l'intérêt privé. On peut admettre que l'un et l'autre se conju-
guent du moment que l'intervention des autorités ne masque pas
les spéculations de particuliers. La chose est d'autant moins à re•
douter que toutes les garanties sont prévues pour que chacun des
participants retrouve des biens d'une valeur égale à ceux qu'il pos-
sédait, proportionnellement à }'ensemble des terres remembrées
Il est certain que Ie remembrement, tel que l'organise Ie projet
de loi, n'a d'autre cause que I'ritilité publique et que la privation
de propriété ne s'opère que dans les cas et de la manière prévue
-par la loi, au v<eu de la Constitution.

31. Quant à l'indemnité, il est exact que la jurisprudence en


matière d'expropriation l'a toujours fixée en e'lpèces. C'est la ma-
nière la plus équitable dès lors que l'on attribue des dommages et

(12) « La propriété est Ie droit de jouir et de disposer des choses de la


manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les
lois ou par les règlements ».
(13) La définition et la notion juridique de la propriété. Rev. trim. dr. civ.,
1905, pp. 443 et suiv.
(14) Josserand cite cependant Ie remembrement à propos de la délimitation
de la propriété, sans émettre d'objection (3° éd., t. J••, n° 1441).

1.53
intérêts; ceux-ci ne constituent cependant pas l'unique forme que
peut revêtir l'indemnité.
Si l'on ad.met que Ie rememhrement, loin de relever d'un quasi-
délit ou d'un fait du prince, est conçu dans l'intérêt •du propriétaire
visé tout autant que pour Ie hien de l'Etat, il faut écarter la notion
de réparation d'un préjudice.
L'immeuhle offert en échange n'est pas exposé à des actions sus~
ceptihles de rompre l'équivalence. Le nouveau propriétaire ne tient
pas ses droits de !'ancien mais de l'acte même de rememhrement.
Par conséquent, l'indemnité en nature nous paraît juste; elle est
même la seule qui soit vraiment adéquate.

32. Enfin, sans conteste, l'indemnité est préalable, puisqu'à au-


cun moment Ie propriétaire visé ne se trouve privé de la propriété
ou de la possession de tout hien. Il est sans relevance que l'entrée
en possession du propriétaire succédant précède la passation de
l'acte de trartsfert de propriété (15).

33. Nous nous rallions à l'idée émise par M. Van den Daele dans
sa réponse à M. Lindemans (loc. cit.), à savoir que Ie rememhrement
légal se situe entre l'expropriation d'utilité puhlique et une insti-
tution comme les polders· et wateringues, oà. se rencontrent égale-
ment intérêts généraux et particuliers.
Vouloir Ie remplacer par de vastes expropriations conduirait pa-
radoxalement à l'iniquité et à !'arbitraire. Selon quels critères les
biens seraient-ils redistribués ? Les anciens propriétaires auraient
perdu tout droit sur les terres de la zone visée, tandis qu'en matière
de rememhrement rural on s'efforce de réattribuer à chaque. parti-
cipant la plus grande partie possible des hiens qu'il possédait (16) .
*
**
34. Les considérations qui précèdent ont été écrites avant que
ne soit déposé Ie projet de loi du 24 novembre 1954, analysé plus
loin.
Elles peuvent être appliquées à ce dernier projet, qui n'apporte
d'innovation essentielle que sur un point : il concerne aussi bien les
exploitations que les propriétés.

(15) L'indemnité n'est au fond pas préalahle, en matière d'expropriation


proprement dite, lorsqu'est ordonné l'envoi en possession Ooi de 1835, art. 12).
(16) Préférer l'expropriation au rememhrement légal ahoutirait ainsi à des
résultats inverses de ceux que l'évolution du droit a consacrés en matière de
haux à ferme. Si les trihunaux vont jusqu'à scruter les intentions du hailleur
qui a donné congé, c'est parce qu'une réparation en espèces, en cas de motif
non réalisé, compense inadéquatement la privation de la terre qu'occupait
Ie fermier.

154
35. Le Conseil d'Etat a estimé que toutes les conditions qu'im-
pJique l'article 11 de la Constitution sont respectées, sauf une, à
savoir la possihilité d'ohtenir une indemnité en espèces (17).
Sans nul doute les constituants de 1831 n'ont eu en vue que Ie
versement d'une somme d'argent, mais Ie texte ne Ie dit pas. De
plus on ne saurait être lié par une interprétation qui date d'une
époque ou l'argent était devenu Ie facteur essentie! d'affranchisse-
ment. Il n'y a pas de meilleur moyen d'indemniser Ie propriétaire
rural dépossédé que l'attribution d'une autre terre, équivalente et
prohahlement plus avantageuse pour la culture.
Les législations étrangères ,ne prévoient des soultes importantes
ou Ie désintéressement intégral en espèces (ce qui signifie pour l'ex-
p]oitant l'élimination) dans des circonstances exceptionnelles.

36. Le Conseil d'Etat suggérait d'accorder aux propriétaires Ie


choix entre les deux formes d'indemnité.
Le gouvernement n'a cru devoir entrer dans cette voie. L'Etat
serail amené à exproprier des biens qu'il lui faudrait revendre
pui~qu'ils ne sont pas destinés à un service public; il jouerait un
röle étranger à sa mission normale. D'autre part rien n'interdit au
propriétaire de vendre les nouvelles parcelles qui lui échoient (18).

(17) Doe. parlem., Sénat, 1954-1955, n° 27, pp. 38 à 40.


(18) Idem, pp. 10 et ll. Voy. aussi in/ra, n° 94 bis. II faut reconnaître que
dans Ie système proposé par Ie projet de Ioi de 1954 l'intérêt du propriétaire
non exploitant et négligé. Evolution inévitable et compensée partiellement par
la possibilité de majorer Ie fermage, Ie càs échéant (cf. in/ra, n° 90, note 37 bis).

155
CHAPITRE 111

Du remembrement légal ou obligatoire

lntroduction. - Evolution législative.


37. Nous avons vu précédemment que la discussion du projet
relatif au rememhrement légal avait été suspendue en 1949, parce
que des ohjections d'ordre juridique et de fait en compromettaient
Je vote dans un délai rapproché.
De la déclaration faite à ce moment à la Chamhre des Représen-
tants par M. Ie ministre Orhan, il ressort que, déjà à cette époque,
!'urgente nécessité d'une telle législation était reconnue, et qu'à la
veille du vote de la loi du 4 mai 1949 sur Ie rememhrement volon-
taire, on n'accordait à l'efficacité de cette loi qu'une confiance toute
relative. L'exemple fourni par la Hollande ne permettait pas de
penser autrement.

38. Le développement des marchés internationaux, la constitu-


tion des communautés européennes de production, ont rendu né-
cessaire la réorganisation des différents secteurs de notre économie.
Nous sommes au stade du groupement des forces de production
et personne ne songe plus à discuter cette réalité économique;
D'autre part, depuis la dernière guerre, la F.A.O. (Organisation
des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture, créée en
1945) s'est préoccupée d'étudier la situation alimentaire mondiale.
Les statistiques étahlies par eet office ont permis de tirer des con-
clusions qui sont peu rassurantes quant à l'avenir du monde au
point de vue des ressources alimentaires.
Une organisation de la production agricole s'impose donc.
Le chapitre II de l'introduction générale au présent ouvrage,
qui a trait aux avantages du rememhrement, a examiné les consé-
quences de cette opération au point de vue rendement agricole et
économique en général (1). Nous ne reviendrons donc pas sur ces
considérations.

(1) Voir supra, pp. 17 et suiv.

156
Nous avons souligné l'évolution des législations en France et·
dans les Pays-Bas. Plus lihérales à leur naissance, elles ont par après
réduit Ie pouvoir des opposants et renforcé l'intervention des pou-
voirs puhlics. Ainsi, en Hol1ande, la loi du 31 octohre 1924 exigeait
pour l'acceptation du plan de rememhrement une double majorité
d'après Ie nomhre des propriétaires et d'après les superficies des
terres à rememhrer. La loi de 1938 n'exige qu'une seule majorité.
En France, la loi Chauveau du 27 novemhre 1918 avait pour ohjet
de « faciliter Ie rememhrement de la propriété rurale », opération
décidée à la majorité des propriétaires intéressés.
La législation postérieure à 1940, validée par l'ordonnance du 7
juillet 1945, et modifiée par Ie décret-loi du 20 décemhre 1954,
tout en conciliant l'intérêt général et l'intérêt particulier, renforce Ie
pouvoir des autorités puhliques. Loi autoritaire de conception et
lihérale d'application, 011 la demande d'un seul propriétaire ou
fermier suffit pour déclencher l'opération de rememhrement si les
autorités (en l'espèce Ie préfet du département) Ie jugent utile.
Nous ne hénéficions pas en Belgique du mûrissement psycholo-
gique qui existait dans ces deux pays au moment 011 leurs législa-
tions ont été modifiées et rendues plus efficac~s et plus rapides.
Mais il ne peut être question pour nous de ménager cette grada-
tion. Au stade 011 nous sommes, la loi doit d'emhlée avoir sa pleine
efficacité.

39. Depuis Ie projet de loi déposé au Sénat Ie 10 mars 1948, une


proposition de loi signée par M. Chalmet a été déposée à la Cham-
hre Ie 1•• avril 1952 (2). Le texte en est fort succinct.
Le hut de cette proposition de loi était de réaliser une concen-
tration des exploitations, parallèlement au rememhrement des ter-
res cultivahles. Mais les exploitants, convoqués à l'assemhlée au mê-
me titre que les propriétaires et titulaires de droits réels, n'ont pas
le droit de vote. Cette proposition de loi prévoit que lorsque l'inté-
rêt général l'exige impérieusement, Ie consentement d'un tiers des
propriétaires suffit.

40. Le Gouvernement vient de déposer au Sénat Ie projet de loi


attendu depuis 1949 (3). Le projet est actuellement soumis à l'exa-
men des commissions de l'Agriculture et de la Justice de la Haute
Assemhlée. On en trouvera Ie texte infra, pp. 188 et suivahtes

(2) Doe. parlem., Chamhre, 1951-1952, n° 330, - La même proposition de


loi a été déposée Ie 10 juin 1954, (Doe. parlem., Chamhre, n° 74 (S.E. 1954)
n" 1). Ces propositions de loi n'ont pas été prises en considération.
(3) Doe. parlem., Sénat, session 1954-1955, n° 27.

157
La nécessité d'une législation sur Ie rememhrement des terres
rurales ne peut être mieux indiquée que par les exemples de dis-
persion des terres agricoles, cités par l'exposé des motifs.
Dès 1910, B. Seehohm Rowntree, qui effectuait une enquête sur
la misère existant en Belgique (4), releva notamment Ie cas d'une
ferme d'environ 11 ha formés de 32 lots séparés, Ie plus grand de
1 ha 20 et Ie plus petit de 4 ares. De plus, certaines parcelles se
trouvaient à 35 minutes du siège d'exploitation.
La Station d'Economie rurale de Gand fit en 1948 une enquête
sur la situation de 266 exploitations de la zone sahlonneuse, sahlo-
limoneuse et poldérienne. Le nombre moyen des parcelles d'une
exploitation est de 13. Outre l'état d'enclavè de plusieurs d'entre
elles, une parcelle sur ·5 est située à plus d'un kilomètre du siège
d'exploitation et parfois même à plus de 5 kilomètres.
Enfin, en 1952, la Société Nationale de la Petite Propriété Ter-
rienne, examinant la situation de 16.800 exploitations dans 950
communes, relève un nomhre moyen de pièces de terre évalué à
7, parmi lesquelles 16 p.c .sont enclavées.

41. Les résultats de la loi du 4 mai 1949 sur les remembrements


volontaires démontrent d'une façon éloquente l'inefficacité de ce
système. Sur 60 demandes introduites, 3 ont pu être accueillies. Deux
demandes portant sur des opérations de remembrement proprement
dit sont encore à l'étude et en voie de réalisation.
L'accord unanime d'un grand nomhre de propriétaires est quasi
impossihle à réaliser, et de ce fait les échanges de terres ne portent
que sur des surfaces restreintes (5).
D'autre part, la loi du 26 juillet 1952 (modifiant Ie Code des droits
d'enregistrement, d'hypothèque et de greffe) qui accorde, en vue
d'encourager les échanges d'imme~les ruraux, l'exemption du
droit proportionnel d'enregistrement, a, depuis sa promulgation,
réduit à néant la portée déjà fort restreinte de la loi du 4 m11i
1949 (6).

SECTION I. - But et caractéristiques du projet de loi de 1954.


42. L'article l'°", en soulignant Ie caractère d'intérêt général de
cette législation, en définit Ie hut : assurer une exploitation plus

(4) Exposé des motifs, pp. 2 et suiv.


B. Seebohm Rowntree : Comment diminuer la misere en Belgique.
(5) L'échec de la loi sur Ie remembrement volontaire en Hollande fut
sensiblement Ie même que celui de notre loi de 1949 (cf. .mpra, Pays-Bas,
n°" 66 et suiv.).
(6) Voy. supra, n° 7.

158
économique des biens ruraux par Ie remembrement des terres
morcelées et des terres dispersées (7) .
l..e projet de la loi vise les deux aspects de la division des terres
agricoles (8) .
D'une part, Ie morcellement ou la division de la superficie
agricole en un nombre considérable de petites exploitations dont
la grandeur moyenne en Belgique est d'environ 6 ha. Cette division,
tout en assurant au point de vue social une répartition plus équi-
table de la richesse nationale, peut nuire à l'intérêt privé et à
l'intérêt général si l'émiettement atteint un point tel que les terres
morcelées ne sont plus rentahles.
Dans la mesure, dit l'exposé des motifs, ou cette division des
terres laisse subsister des exploitations économiquement viables,
Ie législateur n'a pas à intervenir (9).
L'autre aspect est Ie parcellement des terres, ou la dispersion des
terres appartenant au même propriétaire.
Les conséquences de cette situation sont particulièrement préju-
diciahles. Ce sont en effet les petits exploitants qui souffrent Ie plus
de cette dispersion des parcelles, souvent éloignées de la ferme, et
souvent enclavées.
C'est à eet état de fait fort grave en Belgique que Ie projet tend
en ordre principal à remédier.
L'opération de rememhrement tend à constituer des parcelles
continues, jouissant d'accès indépendants et aussi rapprochées que
possihle du siège de l'exploitation.
Elle peut être accompagnée de la création et de l'aménagement
de chemins et voies d'écoulement d'eau et de travaux d'amélioration
foncière (irrigation, assèchement, défrichement) (art. rr, al. 2 et 3).
Le projet de loi ne prévoit Ie rememhrement légal que pour des
biens compris dans un bloc recouvrant une superficie de 50 ha
au moins (art. r·, al. 4) .

43. C'est Ie pouvoir exécutif qui a l'initiative d'un projet de re-


membrement. C'est lui qui en décide l'exécution et exerce, pendant
la durée des opérations, la direction et la surveillance. Nous verrons
les applications de ces principes en examinant plus loin les diffé-
rentes phases d'un rememhrement.

(7) J. Forget : Ie Parcellement des Terres, in recueil publié par la Société


Nationale de la Petite Propriété Terrienne.
(8) Voy. sur les causes, les exposés des motifs précédant les projets de loi
de 1948 et de 1954.
(9) Exposé des motifs du projet de 1954, p. 2.

159
44. Le consentement au projet doit être donné par les propne-
taires, usufruitiers, exploitants et locataires, réunis en assemblée
générale sous la présidence d'un délégué désigné par Ie minis~re
de l'Agriculture.
Le projet actuel tente de réaliser parallèlement au remembrement
des terres rurales Ie remembrement des cultures. Dans ce hut, il as-
socie directement les locataires et exploitants aux opérations de
rememhrement, au même titre que les propriétaires et autres déten-
teurs de droits réels. Le projet leur reconnaît Ie droit de vote.
A ce point de vue, Ie projet actuel diffère du projet déposé au
Sénat en 1948. Cette participation effective accordée aux locataires
est de première importance en Belgique ou Ie faire valoir indirect
représente 68 p.c. de l'étendue des terres cultivées (10).

45. La procédure organisée par Ie projet de loi prévoit, comme


en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, la soumis-
sion à des enquêtes administratives, du projet, des plans de lotisse-
ment, d'évaluation et de répartition des parcelles.
Les contestations portant sur des droits civils peuvent être défé-
rées au juge de paix. Le seul recours prévu contre les décisions de
ce magistrat cantonal est Ie pourvoi en cassation dans l'intérêt de
la loi et au profit exclusif du Procureur général près la dite Cour.

SECTION Il. - Généralités.


a) Organes et autorités appelés à intervenir.
46. Ce sont :
1. Le Roi, à qui appartient la décision du rememhrement sur
proposition du ministre de l'Agriculture.
2. Le ministre de l'Agriculture.
3. Les ministres des Finances et des Travaux publics.
4. Le ministre ayant !'Urbanisme dans ses attributions.
5. La Société Nationale de la Propriété Terrienne.
6. Le collège des Bourgmestre et Echevins.
7. Le comité.
8. La commission consultative.
9. La Cour des comptes.
10. Le juge de paix.
ll. La Cour de cassation.
12. La Caisse des dépots et consignations.
13. Le Comité d'acquisition pour Ie compte de l'Etat.

(10) En France, en Hollande et en Suisse, seuls les propriétaires et -déten•


teurs de droits réels ont droit de vote à l'assemblée.

160
b) La Société Nationale de /,a Propriété Tèrrienne.
47. Un arrêté royal du 27 février 1935, con:firmé par la loi du
4 mai 1936, a institué la « Société Nationale de la Petite Propriété
Terrienne » dont Ie hut était de développer la petite propriété
foncière. Cet étahlissement public qui remplit, dans Ie do:m,aine
rural, une mission pareille à celle de la Société Nationale des Hahi-
tations à Bon Marché, voit actuellement sa mission s'étendre à la
propriété rurale en général. C'est pour cette raison que Ie projet
de loi, en son article 3, al. 7, prévoit la modification de la dénomi-
nation de cette société de droit public qui a joué et continue à
jouer, dans l'économie rurale du pays, un role dont il faut souligner
l' envergure et la qualité.
Cet étahlissement public assume Ie secrétariat des comités de
reniemhrement.
ll ~st comptahle des dépenses et des recettes décidées par les
èomités. C'est lui qui consent les avances de fonds· destinées à cou-
·vrir les dépenses ordonnées par les comités (art. 13).

c) Termes employés dans le projet de loi.


· 48. Suivant une technique hahitueJle en Angleterre et aux Pays-
Bas, notamment, Ie projet définit un certain ·nomhre de termes
dont il use dans une acception particulière
1°) « propriétaire » : ce terme vise les propriétaires et nu-pro-
priétaires;
2°) « exploitant» toute personne qui occupe à un titre quel-
conque et dans un hut agricole une parcelle comprise dans Je
«bloc»;
Il résulte de l'exposé des motifs que n'est pas exploitant celui qui
n'a que Ie droit de chasse.
D'autre part, si Ie terrain n'est pas donné ~n location, c'est Ie
propriétaire ou l'usufruitier qui sera considéré comme. exploitant,
même dans Ie cas ou la parcelle serait momentanément à l'état
inculte (U) ;
3°) « ancienne parcelle » : toute parcelle comprise dans Ie bloc
àvant Ie remembrement;
4°) « nouvelle parcelle » : toute parcelle du nouveau lotisse-
ment, sans avoir égard au fait qu'elle soit ou non une modifica-
tion d'une ancienne parcelle;
5°) « juge » : Ie juge de paix du canton sur Ie territoire duquel
est situé Ie «bloc» ou la majeure partie du «bloc».

( 11) Exposé des motifs, p. 8. Signalons à ce propos que la proposition de


loi Chalmet excluait du vote les propriétaires dont les terres étaient incnltes.

161
d) Bkns sujets à remembrement.
49. Les biens suivants sont exclus en principe d'une opération
de rememhrement (art. 2) :
1°) les propriétés appartenant au domaine public.
N'entrent pas dans cette exclusion les terres appartenant au do-
maine privé de l'Etat, des Provinces et des Communes et des Eta-
blissements puhlics;
2°) les bätiments et les terrains faisant corps avec ceux-ci, excepté
les bätiments ruraux isolés qui apparaissent comme l'accessoirè
du fonds;
3°) les propriétés doses de murs;
4°) d'une façon générale, tous immeubles que Ie mm1stre de
l'Agriculture décide d'exclure en raison de leur utilisation et de
leur destination spéciale.
Il est laissé au ministre de l'Agriculture un pouvoir d'apprécia-
tion, qui est nécessaire dans les opérations de rememhrement, au
cours desquelles des cas extrêmement divers peuvent se présehter,
et qui, de plus, se présentent sous des aspects très différents,
L'exposé des motifs cite, comme exemple, les bois et forêts (12).
Ceux-ci sont en principe exclus du bloc à rememhrer. Toutefois, un
boqueteau isolé parmi les terres de culture pourrait être englobé
dans Ie projet de rememhrement.
Quül des terrains à bätir ? Leur destination agricole est précaire,
dit l'exposé des motifs, et leur valeur notablement plus élevée que
les terres agricoles proprement dites. Leur incorporation ou leur
exclusion au cours de l'opération de rememhrement fera l'objet
d'une appréciation in specie.

SECTION III. - Phase préparatoire.


ENQUtTE ET ASSEMBLÉE DES INTÉRESSÉS

1. ENQUÊTE.

50. C'est au ministre de l'Agriculture qu'il appartient de décider,


après consultation du ministre ayant !'urbanisme dans ses attribu-
tions, qu'il sera procédé à une enquête sur l'utilité du rememhre-
ment d'un bloc de terrains qu'il délimite (art. 4). ·
Celle-ci se déroule conformément aux enquêtes de commodo et
incommodo pratiquées en matière d'expropriation pour cause d'uti-
lité publique (art. 6).

(12) La loi hollandaise énumère avec plus de precmon les biens qui sont
exclus du remembrement (supra, Pays-Bas, n° 17). Voy. aussi France, n• 34.

162
Les documents déposés à la maison communale des communes
dans lesquelles sont situés les hiens à remembrer sont les suivants :
1 °) un plan parcellaire du bloc.
2°) un tableau comportant, au regard de chaque parcelle, l'i-
dentité des propriétaires, usufruitiers, bailleurs et exploitants.
3°) Ie cas échéant, un avant-projet des travaux à effectuer avec
estimation des dépenses et des charges qu'ils comportent (art. 5, 2°).
Le dépöt de ces documents dure 15 jours; il est rendu public par
voie d'affiches et par la voie des publications officielles.
Les propriétaires, usufruitiers et exploitante repris au tableau sont
avertis du dépöt par écrit et individuellement.

51. Exploitants. L'alinéa 3 du 1 ° de l'article 5 dit qu'en vue de


l'établissement du tableau, les propriétaires, usufruitiers ou bailleurs
sont tenus, à la demande du ministre de l'Agriculture ou de son
délégué, de communiquer les noms et adresses des exploitants et
les surfaces occupées par chacun d'eux. L'exposé des motifs souli-
gne qu'il importe avant tout de connaître l'occupant réel des terres,
et ajoute que les propriétaires ou les bailleurs qui omettraient de
signaler Ie nom de leurs exploitants encourraient une responsabilité
civile (13).
Ne serait-il pas plus efficace de prévoir, dans les avis individuels
de dépöt adressés aux propriétaires et usufruitiers, qu'ils seront
privés du droit de vote à l'assemblée dans Ie cas ou, dans un délai
à déterminer, ils auraient omis de faire connaître Ie nom du ou
des exploitants de leurs terres.
Cette sanction plus radicale aurait l'avantage d'attirer l'attention
des propriétaires sur l'importance du renseignement qui leur est
demandé et éviterait par la suite de délicats procès en responsa-
bilité.

52. L'enquête est faite par les soins du collège des bourgmestre
et échevins qui est chargé de consigner dans un procès-verbal les
déclarations des intéressés.
Le procès-verbal est clos à l'expiration du délai de 15 jours. Tou-
tès les pièces sont alors communiquées, par les soins des mêmes
autorités, au ministre de l'Agriculture, qui décide alors s'il y a lieu
de convoquer l'assemblée générale des propriétaires, usufruitiers et
exploitants.
Dans l'affirmative, il désigne un délégué chargé de convoquer
l'assemblée et de la présider en son nom (art. 7, al. 1 et 2).

(13) Exposé des motifa : p. 9.

163
-Remarque : A ce stade préparatoire de la procédure, nous esti-
mons qu'il serait souhaitable de prévoir la délégation d'une per-
sonne compétente en matière de remembrement et qui pourra, tout
en consignant les déclarations des intéressés, les éclairer sur la
portée de l'opération. De cette façon, les délibérations de l'assem-
blée au moment du vote en seront grandement facilitées.

2. ÁSSEMBLÉE ET VOTE DU PROJET.

a) Personnes appelées à y participer.


53. Le projet de 1948. ne prévoyait parmi les votants que les pro-
priétaires et détenteurs de droits réels. On l'avait à juste titre cri-
tiqué sur ce point, estimant que Ie remembrement des terres pouvait
s'accompagner bien souvent en Belgique d'un écartèlement des
exploitations.
Le projet actuel a Ie mérite, comme nous l'avons relevé précé-
demment, de viser à réaliser Ie remembrement des cultures paral-
lèlement au remembrement des propriétés.
Dans ce hut, tout exploitant, qu'il soit propriétaire, locataire · ou
sous-locataire, est admis au vote.

b) Convocation.
54. Les intéressés sont convoqués individuellement 15 jours au
moins avant la date :6.xée pour la réunion de l'assemhiée. Cette con-
vocation se fait par les soins du collège des hourgmestre et échevins
(art. 7, al. 3).
En outre, } 'annonce de l'assemhlée est rendue publique par
affichage et par la voie des puhlications officielles (art. 7, al. 3).

c) Mandataires.
55. Tout propriétaire, usufruitier ou exploitant peut se faire re-
présenter par un mandataire spécial. Le mandat doit être écrit. Un
mandataire ne peut représenter plus de 1./10 des memhres de l'as-
semhiée (art. 7, al. 4).
Nous ne comprenons pas pourquoi Ie gouvernement n'a pas suivi
Ie système adopté par la loi hollandaise, qui ne prévoit pour chaql].e
mandataire que Ie pouvoir de représenter une seule personne (14).

d) Tenue de l'assemblée et modalités du vote.


56. L'assemhiée est constituée en fait de deux groupes : ceiui des
propriétaires, nu-propriétaires, usufruitiers, et celui des exploi-
tants. Ces groupes votent séparément (art. 9, al. rr) .

(14) Cf. supra, Pays-Bas, n° 24.

164
Certains propriétaires ou usufruitiers pouvant être en même
temps exploitants (art. 3), les deux groupes pourront comprendre
partiellement les mêmes personnes.
èhaque propriétaire, chaque nu-propriétaire, chaque usufruitier
et chaque exploitant présent ou représenté a une voix (art. 9, al. ler).
Le projet de loi exige pour l'adoption du projet u:ne double ma-
jorité, dans chacun des groupes :
1 °) majorité des voix émises;
2°) majorité des surfaces représentées par les voix émises.
Le 1 ° n'offre pas de difficultés.
Pour Ie calcul de la seconde majorité, il faut tenir compte des
éléments suivants :
Dans Ie premier groupe, on ne tiendra pas compte des voix des
usufruitiers. Si l'usufruitier a la qualité d'exploitant, son vote inter-
viendra pour Ie calcul des surfaces, au sein du second groupe.

57. Quid des parcelles possédées ou exploitées en commun?


Les indivisaires ou les exploitants en commun sont censés occuper
ensemble toute la surface. Ils sont également censés posséder ou oc-
cuper chacun une part égale de cette surface (15).
Ex. : une parcelle est la propriété de 4 indivisaires. Si 3 indivi-
saires émettent un vote favorahle, ils interviendront pour
3 voix dans Ie calcul de la première majorité et pour 3/4
de la surface occupëe pour Ie calcul des majorités des.
surfaces.
Si ces propriétaires indivis ont également la qualité d'ex-
ploitants, Ie même calcul s'opèrera dans Ie deuxième grou-
pe de votants.

58. Par majorité, dit l'exposé des motifs, on entend la majorité


des voix émises; il n'est pas tenu compte des ahstentions (16).
La loi hollandaise considère que ceux qui ne prennent pas part
au vote sont censés accepter Ie remembrement (17).
Nous estimons qu'une telle disposition s'impose dans une loi
d'intérêt général.
Le fait de ne ·pas tenir compte des abstentions ne nous paraît
pas suffisant pour éviter tout obstacle systématique à une opération
de rememhrement, étant donné l'exigence du vote par surfaces.

(15)' Cf. supra, Pays-Bas, n° 28.


(16) Exposé des motifs, p. 9.
(17) Cf.supra, Pays-Bas, n° 28 in fine. Idem en Suisse, supra, n" 10.

165
e) Désignation des représentants de l'assemblée au comité.
59. Si Ie projet est admis, chacun des deux groupes désigne en
son sein un memhre effectif et un membre suppléant au comité
chargé de l'exécution du remembrement.

SECTION IV. - Exécution du remembrement.


1. - DÉCISION DU REMEMBREMENT.

60. Lorsque l'assemhiée a admis Ie principe du remembrement.


il appartient au Roi de décider, sur proposition du ministre de
l'Agricuiture et du ministre ayant !'urbanisme dans ses attrihu-
tions, s'il y a lieu de donner suite au projet voté par l'assemhlée
(art. 11, al. 1er) •
Deux ohservations s'imposent :
1) Malgré Ie vote favorahle de l'assemhlée, Ie ministre de l'Agri-
cuiture peut ahandonner Ie projet.
2) En cas de vote négatif et quels que soient les motifs d'intérêt
général qui militent en faveur du pro jet, Ie ministre de l'Agriculture
ne peut Ie proposer à la décision royale.
La loi hollandaise prévoit qu'en cas de vote négatif de l'assem-
blée, Ie ministre de l'Agriculture peut, s'il y a urgence et à condition
qu'une des majorités soit acquise, ordonner l'exécution du remem-
hrement (18).
Ce droit accordé au pouvoir exécutif se justifie parfaitement dans
une loi inspirée par l'intérêt général, et nous nous demandons si
semhlahle disposition ne serait pas souhaitahle dans Ie projet
actuel (19).
2. - COMITÉ.

61. Composition. Le Comité, à qui est confiée par arrêté royal


l'exécution du rememhrement, est composé de 5 memhres dont 3
sont désignés par Ie Roi respectivement sur proposition du ministre
de l'Agricuiture, du ministre des Finances et du ministre des Tra-
vaux puhlics.

(18) Cf. supra, Pays-Bas, n° 29.


(19) Nous mettons cette remarque en rapport avec l'ohservation formulée
par Ie Conseil d'Etat (p. 40, n"' 11) : c,quels que soient les motifs d'intérêt
général qui militent en faveur du rememhrement rural, celui-ei pourra être
mis en échec par un seul des deux groupes qui composent l'assemhlée générale
des propriétaires et exploitants si une majorité d'un de ces groupes s'oppose
à la proposition du ministre de l'Agriculture de procéder au rememhrement
d'un «bloc» de terres dispersées (art. 9, al. 2). Il suffit même de l'opposition
d'un seul propriétaire ou d'un seul exploitant qui posséderait ou occuperait
à lui seul plus de la moitié de la surface cadastrale du « bloc » ( art. 9, al. 3) ».

166
Les deux autres memhres sont .désignés respectivement par Ie
groupe des propriétaires et usufruitiers et par Ie groupe des exploi-
tante. Les memhres suppléants sont désignés de la même manière.
La fonction de président est exercée par Ie membre désigné sur
proposition du ministre de l'Agriculture.
Le secrétaire est désigné par la Société Nationale de la Propriété
Terrienne.
Les noms des membres du comité et du secrétaire sont publiés
au Moniteur belge.

62. Nature juridique et fonctions du comité. Le comité jouit de


la personnalité juridique (art. 12, al. r') (20).
Le comité délibère et statue à la majorité de ses memhres sur tout
ce qui concerne l'exécution du rememhrement (art. 12, al. 2). Il Ie
fait souverainement, sauf veto des ministres, et sauf recours des in-
téressés devant la juridiction civile en cas de contestation portant
sur des droits civils.
En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante.

63. C'est Ie comité qui établit, après avis de la commission con-


sultative, les plans de lotissement et de redistribution; c'est à lui
qu'incombe l'évaluation des parcelles, l'établissement des travaux

etc ... ).
. .
connexes d'amélioration foncière (chemins, voies d'écoulement d'eau,

Le projet de loi lui reconnaît Ie droit de procéder à l'exécution


de ces travaux, nonobstant l'opposition de quiconque (art. 22).
L'exposé des motifs déclare qu'en vue de l'exécution de ces tra-
vaux, Ie comité est, à tout moment, en droit de prendre possession
des terrains situés à l'intérieur du bloc. Ce droit existe dès la paru-
tion de l'arrêté royal décrétant l'exécution des opérations (2,1).
Tout remembrement implique une dépossession provisoire des
intéressés. C'est une des raisons pour lesquelles les formalités préa-
lables doivent être accomplies avec un maximum d'information et
de garantie pour les intéressés, de façon à accélérer la procédure
d'exécution qui précède la répartition des nouveaux lots.

64. Le comité, entiié juridique distincte à la fois de l'Etat et des


propriétaires et exploitants intéressés, intervient à titre personnel

(20) Dans Ie projet de 1948, Ie comité, tout en jouissant d'une compiète au-
tonomie, était déclaré agir au nom de l'Etat.
Le statut qui lui est conféré par Ie projet actuel est conforme aux fonctions
qu'il est appeié à rempiir.
Cf. avis du Conseil d'Etat : p. 41 et suiv. « Nature juridique du comité».
( 21) Exposé des motifs, p. 14.

167
dans les actes pnves et dans les instances judiciaires. Les assigna-
tions et notifications au comité sont valablement remises au prési-
dent, au secrétaire ou à la Société Nationale de la Propriété ter,
rienne.
Le comité a qualité pour passer les conventions relatives à des
propriétés situées en dehors du « bloc » en vue de la création ou de
la suppression de servitudes actives ou passives (art. 24).
Lorsque l'exécution de travaux en dehors du «bloc» est néces-
saire, Ie comité peut être autorisé par arrêté royal à faire les em-
prises nécessaires par voie d'expropriation pour cause d'utilité pu-
blique (art. 22 in fine) .

65. Le comité peut, au même titre que les administrations publi-


ques subordonnées, faire application des dispositions réglementaires
organisant la mise au travail des chömeurs (art. 40 in fine) .

66. Le comité est l'ordonnateur des dépenses et des recettes rela-,


tives aux opérations .du rememhrement.
La Société Nationale de la Propriété terrienne en assure la comp-
tabilité, exécute les ordres du comité et fait l'avance des fonds.
La Cour des Comptes arrête les comptes ouverts pour chaque
comité et est chargée de recueillir à eet effet tous renseignements et
toutes pièces comptables,. nécessaires (art. 13).

67. Droit de veto. Les ministres de l'Agriculture, des Finances


et des Travaux publics peuvent, chacun en ce qui Ie concerne, s'op-
poser à toute décision du comité (art. 12, al. 4). A eet effet, chaque
membre du comité nommé par Ie Roi peut prendre sou recours
auprès du ministre dont il dépend. Le veto du ministre compétent
doit intervenir dans les 15 jours du recours (art. 12, al. 4).
Ce droit de veto est une innovation du projet de loi susc1tee,
pensons-nous, par les observations du Conseil d'Etat au sujet de
l'autonomie des comités de remembrement (22).
On comprend que Ie gouvernement ait voulu, dans une opération
d'intérêt général et de cette envergure, garantir à l'Etat qui, pour
une grande part, supporte les frais d'exécution, un pouvoir de con-
trole efficace. Cependant, il nous paraît souhaitable que Ie gouver-
nement soit appelé à s'expliquer au sujet de l'exercice de ce droit

(22) « Si Ie Gouvernement entendait conférer de manière expresse la person•


nalité jnridique aux comités et, partant, en faire des étahlissements puhlics,
l'avant-projet devrait être complété. La tutelle, notamment, en devrait être orga-
nisée, ainsi que Ie controle de la Cour des comptes ». (Avis du Conseil d'Etat :
ohservations générales, 111, p. 43).

168
de veto, qui existe uniquement au profit de l'Etat, et qui ne peut
être considéré comme un recours contre les décisions du comité.
L'exposé des motifs ne donne, à eet égard, aucune explication.
Trois ministres interviennent dans l'exécution d'un remembre-
ment. Il suffirait d'un veto du ministre des Finances pour paralyser
l'activité du comité. Or, nous venons de voir qu'il importe d'accé-
lérer l'exécution des remembrements, étant donné que, durant cette
phase, les parcelles comprises dans Ie bloc peuvent faire l'objet de
diverses mesures qui auront pour conséquence de paralyser toute
activité agricole.

3. - LA COMMISSION CONSULTATIVE.

68. Elle est composée de 3 membres au moins et de 10 membres


au plus. Ses membres sont choisis, sur la proposition du comité, par
Ie ministre de l'Agriculture, parmi les personnes de l'endroit spé-
cialement compétentes en matières rurales (art. 14). Elle se réunit
à la demande et sous la présidence du président du comité ou de
son délégué.
Y a-t-il intérêt à s'en tenir aux personnes de l'endroit ?
Assurément, pour Ie classement des terres et la détermination
de zones de valeur, la compétence des gens de l'endroit est néces•
saire. Mais ne serait-il pas préférable de permettre au comité de
joindre éventuellement à ces personnes d'autres compétences qui ont
déjà l'expérience du remembrement, même si ces personnes n'habi-
tent pas la région ?
Les conclusions des pays voisins nous apportent la conviction que,
dans les opérations de remembrement, la pratique joue un role
de première importance. La commission consultative peut interve-
nir à n'importe queI moment Iorsque Ie comité Ie juge utiie. Mais
elle intervient obligatoirement dans des questions particulièrement
délicates : Ie classement des terres et l'évaluation des parcelles,
l'établissement des plans de lotissement et de répartition des nou-
velles parcelles (art. 16 et 23), la répartition des frais d'exécution
entre les divers intéressés (art. 26) .
Etant donnée son intervention dans des questions aussi graves de
conséquences, il est souhaitable de prévoir dans sa composition des
personnes quine sont pas uniquement de l'endroit

lndemnisation des membres du comité et de la commission.


69. Les membres désignés par l'assemblée générale et les mem-
bres de la commission peuvent se voir accorder des jetons de pré-
sence et des indemnités pour frais de déplacement (art. 14).

169
)

4. - ÛPÉRATIONS DE REMEMBREMENT.

a) Plan de lotissement et évaluation des parcelles.


70. Le projet de 1948 prévoyait l'évaluation de chaque parcelle
par Ie comité, avec l'aide éventuelle d'experts.
Le projet actueI adopte un procédé d'évaluation par classement
des terres d'après leur valeur culturale et d'exploitation. Ce procédé,
analogue à celui qui est pratiqué en Hollande et en Suisse, permet
au comité d'avoir, dès Ie début des opérations, une base d'évalua-
tion stable qui lui servira lors du relotissement des parcelles et de
leur répartition finale.
Les terres de même classe, groupées en « zones de valeur », sont
dessinées sur Ie plan de lotissement. L'évaluation d'une parcelle est
obtenue en faisant la somme des valeurs de cette parcelle dans
chaque zone de valeur (23).
Pour l'établissement des zones de valeur, Ie comité doit faire
abstraction des éléments étrangers à la valeur culturale et d'expfoi-
tation proprement dite, tels les clötures, les arbres, les droits de
bail, les servitudes, Ie mauvais entretien du sol. Ces éléments, con-
sidérés comme plus-values ou moins-values temporaires, sont estimés
séparément. et portés au compte de chaque intéressé à la fin des
opérations (24).
Le comité dresse les tableaux ou sont repris les noms des pro-
priétaires, usufruitiers et exploitants, avec, en regard, l'évaluation
des parcelles qu'ils possèdent ou occupent (art. 16, 2°, 3°, 4°).

71. Ces plan et tableaux sont soumis à enquête.


Après avoir pris connaissance des observations formulées, Ie co-
mité arrête Ie plan de lotissement et les tableaux.
Ces documents, qui constituent la base des opérations de remem-
bremerit proprement dites, restent déposés à la maison communale
pendant toute la durée des opérations. Tout intéressé peut en
prendre connaissance.

Chemins, voies d' écoulement d' eau et ouvrages connexes.


72. Une opération de remembrement provoque la création de
nouveaux chemins et voies d'écoulement d'eau, la rectification ou
la suppression des chemins et voies d'écoulement d'eau existants.
C'est Ie comité qui en établit Ie plan.

(23) Exposé des motifs, p. 12.


(24) Les législations étrangères excluent également les valeurs passagères de
l'évaluation des parcelles.

170
Le plan des nouveaux chemins et des nouvelles voies d'écoulement
d'eau, ainsi que celui des ouvrages connexes, doit être approuvé
par arrêté royal sur proposition du ministre de l'Agriculture et du
ministre des Travaux puhlics, après avis du Conseil communal et
de la Députation permanente intéressés.
La suppression des anciens chemins et voies d'écoulement d'eau,
la désaffectation des ouvrages connexes et leur incorporation dans
1'ensemhle des terres à remembrer, doit être ordonnée également par
arrêté royal (art. 21).
L'arrêté royal d'approbation ou un arrêté séparé règle Ie statut
des nouveaux chemins et voies d'écoulement d'eau, ainsi que l'attri-
hution des ouvrages connexes aux administrations puhliques qui
en ont la gestion et l'entretien.

73. L'arrêté royal d'approbation dont parle eet article n'est


nécessaire que pour régler Ie statut des nouveaux chemins et voies
d'écoulement d'eau destinés à faire partie du domaine public (25).
Si les chemins créés ou supprimés font partie du domaine privé,
Ie comité en règle Ie sort souverainement.

7 4. Exécution des travaux. - A l'intérieur du « bloc » à


remembrer, Ie comité peut, à tout moment, ordonner l'exécution
des travaux de création et d'aménagement des chemins et voies d'é-
coulement d'eau dont il est question au paragraphe précédent.
Sa décision est souveraine et nul ne peut s'opposer à l'exécution
des travaux (26) .
Si les travaux causent des dégäts aux cultures ou nuisent de quel-
que façon à la jouïssance des terres, une indemnité peut être allouée
à !'exploitant. Cette indemnité doit être réglée immédiatement par
Ie comité, et n'est pas portée au compte de l'intéressé (27).
Si la réalisation du projet de remembrement requiert l'exécu-
tion de travaux en dehors du « bloc », Ie comité, peut, à défaut
d'accord amiable, être autorisé par arrêté royal à faire les emprises
nécessaires par voie d'expropriation pour cause d'utilité puhlique
/art. 22, al. 4).

(25) Avis du Conseil d'Etat : art. 20, p. 54.


(26) « Le comité est en droit de prendre à tout moment possession des
terrains situés à l'intérieur du bloc en vue de l'exécution des travaux ». Exposé
des motifs, p. 14.
(27) Le terme «exploitant» est pris ici dans son sens hahituel et non plus
dons l'acception particulière définie dans l'article 3.

171
b) Plan de relotissement et attribution des nouvelles parcelles aux
propriétaires, usufruitiers, exploitants (art. 23 à 30).
75. Ce plan est établi par Ie comité avec l'aide de la commissiori
consultative (art. 23). Les zones de valeur du plan de lotissement
sont réparties sur ce nouveau plan. Le comité procède à la répar-
tition des nouvelles parcelles.
Le principe qui préside à l'attribution des nouveaux lots est
l' équivalence de valeurs entre les lots anciens et les lots nouveaux
attribués en remplacement.
Des règles différentes sont toutefois établies pour l'attribution
aux propriétaires, nu-propriétaires et usufruitiers d'une part, aux
exploitants et locätaires d'autre part.

76. 1 °) Propriétaires et usufruitiers. - La valeur globale des


nouvelles parcelles qui leur sont attribuées doit être proportion-
nellement égale à la valeur globale des anciennes parcelles. Dans
cette évaluation, on tient compte de la valeur des terres prélevées
sur l'ensemble du bloc pour l'exécution des travaux d'amélioration.
Si l'équivalence totale n'est pas possible, Je plan de répartition
peut prévoir une soulte en espèce qui ne peut toutefois dépasser
pour chaque intéressé 5 p. c. de la valeur qui devait lui être attri-
buée (art. 25) .
Cette limite s'applique également à la soulte dont les proprié-
taires et usufruitiers seraient éventuellement redevables pour l'excé-
dent de valeur de terrain qu'ils auraient reçu (28).

77. 2°) Exploitants. - La répartition doit se faire de mamere


à ce que chaque exploitant reçoive autant que possible des terres
de même qualité, de même superficie et propres aux mêmes cul-
tures (29).
Une indemnité pour perte de jouïssance pourra être allouée à
!'exploitant lorsque la valeur globale des parcelles qui lui sont at-
tribuées, est proportionnellement inférieure à la valeur globale des
anciennes parcelles. ·
Cette indemnité pourra s'ajouter à la soulte dans Ie cas ou les
propriétaires et usufruitiers exploitent eux-mêmes leurs terres (30) .

(28) Exposé des motifs, p. 15.


(29) Exposé des motifs, p. 16. « Dans l'attrihution des parcelles aux exploi-
tants, Ie comité devra veiller, non seulement à l'équivalence des parcelles, mais
à l'assolement et à tous les autres éléments dont dépend l'équilihre de l'ex-
ploitation ».
(30) Exposé des motifs, p. 16.

172
Les articles 1777 et 1778 du Code civil sont applicahles aux ex-
ploitants entrants et sortants (art. 38') .

78. 3° Locataires. - Lorsque !'exploitant est locataire, Ie comité


doit en plus tendre à attrihuer à celui-ci des parcelles appartenant
aux mêmes hailleurs (art. 27) .
Pour les locataires, l'indemnité pour perte de jouissance équivaut
à une indemnité pour rupture de hail (31).

79. Documents qui doivent être établis par le comité. - En plus


'du plan de relotissement prévu à l'article 23, l'article 31 du projet
ênumère les tahleaux qui doivent être dressés par Ie comité. Ceux-ci,
'au nomhre de 5, comportent l'identification des parcelles attrihuées
àux propriétaires, usufruitiers et exploitants; l'indication des surfaces
et valeurs, la détermination des soultes, des plus-values, moins-values,
des indemnités pour perte de jouïssance; Ie report des droits réels,
privilèges et hypothèques, commandements et saisies et généralement
toutes charges qui affecteraient les parcelles.

80. Enquête. - Les plans de répartition et les tahleaux les complé-


tant, (art. 23 et 31, l°, 2°, 3°, 4°), sont soumis à l'ohservation des in-
téressés par voie d'enquête. Celle-ci se déroule comme les enquêtes
précédentes.
Les documents constatant Ie report des droits réels, prévus par
l'article 31, -5° et 6°, sont soumis à l'examen des propriétaires et usn-
fruitiers intéressés, par voie d'enquête séparée, au siège du comité,
ou sont déposées les pièces à consulter (32) .

81. Bornage des nouvelles parcelles. - Le comité y procède lors-


que les plans de relotissement et les tahleaux y annexés sont devenus
définitifs.

82. Soldes actifs ou passifs. - Le comité ouvre, au déhut des opé-


rations de rememhrement, un compte au nom de chaque propriétaire,
usufruitier et exploitant. Ces comptes individuels se clöturent à la fin
des opérations de rememhrement par des soldes actifs ou passifs (33).
Les comptes comportent, pour les propriétaires et usufruitiers, les
éléments suivants :

(31) Exposé des motifs, p. 16. - Il serait souhaitable que !'exposé des motifs
e'explique plus amplement à ce sujet.
(32) Le gouvernement estime que les hypothèques et autres charges qui
grèvent les immeubles ne doivent pas être divulguées ( exposé des motifs, p. 17).
(33) Il s'établit une compensation entre Ie comité et les propriétaires et
usufruitiers, de sorte que seul Ie solde actif ou passif des soultes, indemnités et
frais, devra être réglé (exposé des motifs, p. 17).

173
1°) les soultes actives ou pa88ivee.
2<>) les indemnités pour plus-values ou moins-values.
3°) leur part contributive pour les frais.
Les comptes des exploitants comprennent les indemnités pour
perte de jouïssance.
L'usufruitier doit Ie solde passif qui Ie conceme et ne peut invo-
quer l'application de l'article 609 du Code civil.
Les soldes actifs dus aux propriétaires et usufruitiers, doivent être
versés avant la passation de l' acte de remembrement. Le Comité
ordonne Ie versement à la Caisse des dépöts et consignations, des
sommes nécessaires à leur paiement. Toutefois ce versement ne peut
être fait qu'après la production par les propriétaires et usufruitiers
d'un certificat délivré par Ie conservateur des hypothèques, consta-
tant, conformément à l'article 127 de la loi du 17 décembre 1851,
qu'il n'existe point d'inscription ou de transcription relative aux
biens attribués à ces propriétaires ou usufruitiers (art. 35, al. 2).
Le comité ordonne Ie règlement des indemnités dues aux exploi-
tants pour perte de jouïssance (art. 27), et du chef de travaux exé-
cutés au cours du bail par Ie fermier (art. 29).

83. Les indemnités dues aux intéressés sont réglées grace aux
avances consenties par la Société Nationale de la Propriété Terrien-
ne. Ces avances s~nt remboursées par l'Etat à charge du budget du
département de l'Agriculture.
Quant aux soldes passifs, leur sort est réglé dans l'acte de remem-
brement qui fixe les conditions et délais de paiement arrêtés par Ie
ministre de l'Agriculture. ·

c) Frais d'exécution du remembrement.


84. Répartition. Principe. - Le comité, assisté de la commission
consultative, assure la répartition des frais d'exécution entre pro-
priétaires et usufruitiers, en proportion de la surface des nouvelles
parcelles attribuées.
Le projet prévoit que si l'état des travaux ou Ie règlement de cer-
tains comptes litigieux risquent de retarder la réalisation du remem-
brement et l' occupation des nouvelles parcelles, Ie comité peut, avec
l'approbation du ministre de l'Agriculture, comprendre dans les
frais à répartir une provision pour frais à liquider (art. 26, al. 3).
L'exposé des motifs (34) cite comme exemple d'obstacle à l'établis-
sement définitif du montant des frais, l'existence d'un procès oppo-
sant Ie comité et un entrepreneur chargé de l'exécution des travaux.
Pour ne pas retarder l'entrée en jouïssance et l'occupation des

(34) Exposé des motifs, p. 16.

174
nouvelles parcelles, Ie gouvernement propose la fixation d'une som-
me forfaitaire provisionnelle pour frais à liquider.
La différence entre Ie montant réel des frais et cette somme for-
faitaire sera comptabilisée au profit ou à charge de l'Etat lors de
la cloture des comptes.
Toutefois cette règle proportionnelle pourra être abandonnée
dans Ie cas ou certaines parcelles seraient plus que d'autres avan-
tagées par les opérations de rememhrement et l'exécution des tra-
vaux connexes (art. 26) (35).
L'article 40 prévoit la participation de l'Etat dans les dépenses
occasionnées par les travaux de création et d'aménagement des
chemins et voies d'écoulement d'eau ainsi que par les autres tra-
vaux d'amélioration foncière.
Le projet ne détermine pas Ie pourcentage de cette interven-
tion, qui est fixé par Ie ministre de l'Agriculture.

85. Frais à charge de l'Etat. - Sont totalement à charge de


l'Etat, les frais d'administration du comité, les frais de procédure
qoels qu'ils soient, les frais d'acte de remembrement, les frais de
bomage, les formalités hypothécaires (art. 40) .

86. Financement de l'opération de remembrement. - C'est la


Société Nationale de la Propriété Terrienne qui fait l'avance des
dépenses nfcessitées par l'exécution d'un rememhrement. Le mi-
nistre des Finances fixe les modalités de ces avances (art. 41).

d) Acte de remembrement.
87. L'acte de rememhrement est passé par Ie comité d'acquisition
d'immeuhles pour compte de l'Etat (art. 35 et 36).
Il forme titre pour la propriété et les droits réels et de créance
dont il règle Ie report (art. 37).
Il sort ses effèts et est opposable aux tiers à dater de sa trans-
~ription au bureau des hypothèques de la situation des biens
(art. 45). Il fixe les dates et conditions d'occupation des nouvelles
parcelles (art. 38).

e) Report des droits réels.


88. Le rememhrement a pour effet de substituer à l'ensemhle des
anciennes parcelles d'un propriétaire, les nouvelles parcelles qui
lui sont attrihuées par Ie comité (art. 42) .

(35) En Suisse, la législation vaudoise, notamment, prévoit que les propr1e•


taires participent aux frais proportionnellement aux avantages qu'ils retirent
de l'application du remembrement.
En Hollande et en France la répartition des frais se calcule d'après la super•
ficie des terres apportées par chacun.

175
Si les droits réels ne grevaient que certaines parcelles d'un pro-
priétaire ou usufruitier, Je comité détermine .l'assiette de ces droits
dans l'ensemhle des nouvelles parcelles attribuées aux intéressés.
Les privilèges et hypothèques, les commandements et saisies, les
actions immobilières, sont reportés sur !'ensemble des nouvelles
parcelles et sur les soldes actifs qui sont dus aux propriétaires ou
aux usufruitiers.
Les droits d'usufruit sont reportés selon les mêmes principes.

89. Le juge peut être appelé à désigner les nouvelles parcelles


sur lesquelles reposeront les droits réels, dans Ie cas oit, à la suite
de contestations, les titulaires définitifs de ces droits ne seraient
connus qu'après la passation de l'acte de remembrement (art. 44).
Les plans de lotissement et les tableaux y annexés, constituent
la base des opérations de rememhrement (art. 16).
Les mutations de droits réels, qui interviennent après l'établis-
sement définitif de ces documents, ne doivent donc pas être prises
en considération par Ie comité.
Il y a lieu de mettre cette disposition en rapport avec Ie com-
mentaire de l'article 16 dans !'exposé des motifs : « Ces documents,
quelque importants qu'ils soient, puisqu'ils serviront de base à
l'acte de reinembrement, ne sont cependant pas attributifs de
droits. Les contestations relatives à la propriété ou à des droits
réels et personnels ne peuvent donc empêcher Ie comité d'arrêter
les tableaux, et Ie refus du comité d'acter aux tableaux des droits
que certains prétendraient avoir ne peut donner lieu à recours
<levant Ie juge. Le juge ne pourra donc recevoir une demande de
modification du tableau en ce qui concerne la surface ou la valeur
des parcelles, par exemple, basée sur une contestation de titres
de propriété ou d'occupation » (36).

f) Report des baux.


90. Le hut du projet, ainsi que nous l'avons souligné précédem-
ment, est de réaliser Ie regroupement rationnel et des exploitations
et des terres.
Le fermier loue de préférence des terres qui se trouvent à pro-
ximité de la ferme. Par l'effet de la suhstitution réelle des nouvelles
parcelles aux anciennes, les droits d'un locataire pourront être
reportés sur des parcelles plus éloignées du centre d'exploitation.

(36) Exposé des motifs, p. 13.

176
· L'application automatique du report des droits de hail risque
d'amener, parallèlement au regroupement des terres, un écartè-
lement des cultures (37) .
Pour remédier à eet inconvénient Ie projet de Ioi a organisé Ie
système suivant :
En principe, les droits qu'un fermier exerce sur l'ensemhle des
anciennes parcelles ou sur une ancienne parcelle d'un bailleur,
sont reportés sur l'ensemhle des nouvelles parcelles ou sur une
nouvelle parcelle de ce bailleur indiquée par Ie comité.
Toutefois, dans l'intérêt d'une bonne exploitation et en vue de
réaliser Ie remembrement cultural, Ie comité, assisté par la com•
mission consultative, peut assigner à un fermier un nouveau bail-
leur, soit qu'il maintienne Ie fermier sur les terres qu'il exploite,
soit qu'il lui attribue de nouvelles terres (art. 28).
Les conditions du nouveau bail sont fixées soit par les parties,
et dans ce• cas leur accord est constaté par Ie comité •et annexé à
l'acte de remembrement, soit par Ie juge (37bis). Dans ce dernier
cas, Ie comité invite les parties à saisir Ie juge du litige.
S1 dans Ie délai d'un mois à partir du jour oû Ie comité a constaté
Ie désaccord des parties, aucune de celles-ci n'a saisi Ie juge, Ie
comité assigne les parties intéressées aux fins de voir fixer les con-
ditions du nouveau bail (art. 29).

91. Remarques. - Par sa décision, Ie comité résilie un bail et


oblige les parties à en contracter un nouveau, dont les conditions,
quant au prix et la durée, seront fixées, à défaut d'accord des par-
ties, par Ie juge.
Les parties doivent-elles s'incliner devant la décision du
comité?
Le texte du projet de la loi est muet sur ce point, mais d'après
l'exposé des motifs, la réponse semble devoir être affirmative (38).
L'innovation la plus surprenante est Ie droit du comité, qui est
un tiers par rapport aux bailleurs et fermiers, d'assigner ceux-ci
devant Ie juge aux fins de voir fixer les conditions du nouveau bail.

· (37) Ce danger avait été souligné par les auteurs du projet de 1948 : « Le
sort du droit de hail sur les hiens rememhrés ne laisse pas de soulever de
sérieuses difficultés ». (Exposé des motifs du projet de 1948).
(37bis) Il est tenu compte, pour la fixation du fermage, d'éventuelles amé-
liorations foncières (Exposé des motifs du projet de 1954, p. 17).
(38) « Il faut que l'exploitation qui formait un bloc avant Ie rememhrement
reste unie après cette opération et il faut aussi que les exploitations morcelées
soient, autant que possihle, rememhrées. Pour atteindre ce hut il sera souvent
inévitahle de résilier les haux en vigueur et d'assigner aux hailleurs de nou-
veaux locataires et vice versa. Il y a Iieu dans ce cas de régler les relations
locatives entre ces nouveaux partenaires .» (id., p. 16).

177
Notons que la nouvelle loi hollandaise prévoit la possihilité d'im-
poser à un hailleur de contracter avec un autre preneur.
Notre projet de loi actuel adopte donc Ie même principe qui
constitue une protection des droits des fermiers et se situe dans la
tradition consacrée par la loi du 7 juillet 1951 sur les haux à ferme
(39).
RECOURS EN JUSTICE.

92. Un recours devant Ie Juge de paix est prévu pour les con-
testations portant sur des droits civils (art. 20).
Le juge de paix compétent est Ie magistrat du canton sur Ie ter-
ritoire duquel est situé Ie bloc ou la majeure partie du bloc à re-
memhrer (art. 3, al. 6).
Sa compétence s'étend aux contestations portant sur les surfaces
et valeurs portées sur Ie plan de Iotissement établi par Ie comité;
aux contestations relatives aux indemnités pour trouhles de jouïs-
sance dues aux exploitants lors de l'exécution des travaux par Ie
comité (art. 20, al. 1 ; art. 22, al. 3) .
C'est Ie juge de paix qui est appelé à fixer Ie montant des indem-
nités pour perte de jouïssance.
Son intervention est prévue, lors de l'établissement des plans et
tableaux relatifs à l'attribution des nouvelles parcelles, pour tran-
cher les litiges relatifs à l'attribution et à l'évaluation des nouvelles
parcelles, au montant des indemnités pour plus-values ou moins-
values, à Ia répartition des frais d'exécution, au report des droits
réels (40).
Enfin, Ie juge de paix peut être appelé à fixer les conditions des
nouveaux haux imposés par Ie comité (art. 29, al. 3) (41).
Une procédure rapide est organisée (art. 20 et 34).
Le juge de paix est saisi par une requête qui doit lui être adres-
sée dans un délai déterminé (art. 20, al. 4 et 34, al. 4).
Le juge rend alors une ordonnance désignant expert.

(39) Les dispositions de la présente loi relatives au hail s'appliquent à l'em-


phytéose (art. 30).
(40) Tout intéressé, au sens Ie plus large, peut contester les déterminations
des surfaces et les évaluations des anciennes parcelles et des nouveaux lots ( art.
20 et 34), à condition que la revendication ne soit pas hasée sur une contes-
tation de titre de propriété on d'occupation. (voir supra, n" 89). Ces recours
existent donc au profit les intéressés non repris aux tableaux. (Exposé des
motifs, p. 13).
· (41) Comme en matière de baux commerciaux Ooi du 30 avril 1951), il
incombe au juge, cbargé normalement de l'interprétation d'un contrat, de /aire
les parties de la convention sur lesquelles les « contractants » ne parviennent
pas à s'accorder.

178
La requête et l'ordonnance ·sont n·otifiées conjointement avec la
citation à comparaître sur les lieux dans un délai déterminé.
Le jugement doit être rendu dans les trois mois de la citation.
Ce jugement n'est susceptihle d'aucun recours, sans préjudice
du droit du Procureur Général près la Cour de cassation d'exercer
Ie pourvoi dans l'intérêt de la loi, prévu à l'article 14 de la loi
du 25 février 1925 (20, al. 9).

FIN DES OPERATIONS.


93. La fin des opérations de rememhrement est décrétée par Ie
Roi sur proposition du ministre de l'Agriculture.
Cet arrêté royal entraîne la dissolution du comité (art. 39).

Liquidation des comptes.


94bis. La liquidation des comptes est assurée par la Société Na-
tionale de la Propriété Terrienne, qui succède à cette fin aux droits
et ohJigatiom! du comité (art. 39, al. 2).
Nous avons vu que la Société Nationale assumait la comptahilité
des dépenses et des recettes ordonnées par les comités (42) •
Les comptes ouverts pour chaque comité sont arrêtés par la Cour
des Comptes (art. 13, al. 2).
La Société Nationale fait l'avance des dépenses nécessitées par
l'exécution des rememhrements (43) Ces avances lui sont remboursées
par l'Etat à charge du budget du Département de l'Agriculture
(art. 39, _al. 2) (44).
Pour garantir Ie payement des sommes dues par les propriétaires
et usufruitiers, une hypothèque est stipulée dans l'acte de remem-
brement au profit de la Société Nationale (art. 36, al. 2).
Cette hypothèque ne sera inscrite qu'après Ie délai d'un mois à
dater de la communication, par Ie comité d'acquisition d'immeuhles
pour compte de l'Etat, de l'extrait de l'acte de rememhrement au
propriétaire ou à l'usufruitier (45).

(42) Cf. supra, n° 47.


(43) Cl.supra, n° 86.
(44) ·Cf. supra, n" 84. L'exposé des motifs (p. 18) fait observer que les eoldes
actifs des soultes, indemnités et frais dus aux propriétairee sont versée avant
Ie passation de l'acte de remembrement (article 35) alors qne pour les soldes
paesifs, dont les propriétaires sont redevables, des facilitée de paiement sont
prévues dans l'acte de remembrement. De la sorte le prescrit constitutionnel
de l'indemnité préalable est observé aussi bien pour ·la source éventuellement
attribuable que pour l'équivalent en nature.
( 45) L'acte de remembrement et ees annexes sont conservés par Ie comité
d'acquisition d'immeubles pour compte de l'Etat (art. 36, al. 4).

179
Dispositions fiscales.
95ter. Les art. 46 à 49 du projet exonèrent de tous droits et taxes,
les actes, jugements et arrêts relatifs à l'exécution de la loi sur Ie
remembrement légal des hiens ruraux.
CHAPITRE IV

Considérations générales et conclusions

a) Evolution législative.
94. La loi de 1949, au lieu de servir de test, n'a apporté qu'une
preu:ve négative : l'inutilité de compter sur un mouvement spontané
de regroupement foncier. Il est possihle cependant que Ie remem-
hrement volontaire et les échanges prennent quelque ampleur, à
titre complémentaire, lorsqu'on aura pu constater les bienfaits de
rememhrements légaux réussis. L'exemple français permet de Ie
présumer.

b) Maîtres-traits du projet de loi de 1954.


95. Le projet déposé par M. Lefebvre reprend en grande partie
celui de M. Orban. Il a été longuement préparé et a intégré pour
ainsi dire toutes les suggestions présentées par Ie Conseil d'Etat.
Il fallait tenir compie de la situation particulière de la Belgique
en matière de faire-valoir. Peu de pays connaissent une aussi forte
proportion de fermiers, dont Ie nombre s'est encore accru de 1929
à 1950 (1). On ne pouvait songer à s'en tenir au regroupement cul-
tural que d'aucuns proposent en France, formule qui ne donne que
des résultats précaires, (à moins d'abolir la propriété) et qui ne .
facilite aucunement d'autres améliorations foncières telles qu'un
nouveau tracé des chemins (2).
La solution envisagée est adaptée aux circonstances. Le remem-
hrement porie sur la PROPRIÉTÉ, ce qui permet de donner un

., ,
propnetes. .
.
caractère DÉFINITIF à l'opération. Mais Ie regroupement prescrit
évite de disloquer les exploitations sous prétexte de réunir les

Le caractère SEMI-OBLIGATOIRE du remembrement rapproche le

(1) Le problème est d'autant plus important que depuis la loi du 7 juillet
1951 Ie fermier jouit d'un bail à durée indéfinie ou semi-perpétuel (De Page,
Compl., vol. IV, p. 445).
( 2) Relevons que, lorsque deux fermiers échangent des terres dont ils ont
respectivement la jouïssance, il y a contrat innomé (De Page, ibid., p. 436).

181
projet de loi beige du système hollandais, dans lequel la colla-
horation pes intéressés est plus sollicitée que sous Ie régime français,
du moins en droit.
c) Nécessité.
96. Nous avons déjà exposé les raisons pour lesquelles la réforme
s'impose en Belgique comme ailleurs.
Les rendements agricoles de ce pays sont excellents (3). Et
pourtant les prix restent trop élevés, à cause notamment de frais
de production excessifs. Le rememhremeni rural permettra de les
réduire.
De pair avec la bonification foncière (4), il palliera d'autre part
la diminution constante de la surface cultivable qui n'était plus
que de 1.826.000 hectares en 1950, au lieu de 1.997.000 en 1929.

d) Accueil.
97. Le succès des diverses journées d'études sur Ie remembre-
ment organisées par la Sociêté Nationale de la Petite Propriété Ter-
rienne, avec Ie concom.-s des autorités provinciales, suffirait à dé-
montrer que des mesures législatives sont attendues par Ie monde
agricole (5). Des réserves sont émises çà et là, qui ne seront levées
que par des réalisations convaincantes (6).
Il n'y a pas lieu de craindre que Ie remembrement soit défavora-
ble à la petite exploitation; l'expérience des pays voisins est con-
cluante à eet égard. Mieux groupé, Ie petit· domaine pourra lutter
d'autant plus efficacement et utiliser les machines clont seule la
grande propriété avait jusqu'ici Ie plein emploi.

( 3) Le rang de la Belgique en Europe, sur Ie plan de la productivité, est


Ie premier pour les céréales panifiables, Ie deuxième pour les céréales secon-
daires, les betteraves sucrières et Ie tabac, Ie troisième pour les pommes de terre
(campagne 1950-1951).
(4) La bonification foncière consiste à mettre en valeur des terres incultes
ou à rendement insuffisant et à régulariser Ie régime des eaux en cas de pé-
nurie ou d'excès.
(5) Voy. notamment Ie compte rendu des journées de Bruxelles et de
Mons, Ann. not. et enreg., 1952, pp. 65 et 333.
(6) Voy. notamment : Travaux du Comité d'études et de législation de la
Fédération des notaires de Belgi4ue, 1949, t. rer, pp. 85 et suiv., qui préconi-
sent la simple réorganisation des exploitations; 0. Tulippe, Remembrement ou
regroupement cultural, qui préfère pour les terrains ou domine Ie faire-valoir
indirect un remodèlement agraire par « procès-verbaux de bornage » consacrant
les échanges en jouïssance; E. P. Fouss, Sur la structure agraire et le paysage
rural de Torgny, Virton, 1951, qui souligne les difficultés causées par la topo-
graphie particulière d'un village gaumais.
Dans un sens favorable au remembrement : J. C., Pour accroître la pro-
ductivité des biens ruraux, Rev. Cons. écon. wallon, 1953, n• 2, pp. 27 et suiv.;
Journe, Le parcellement excessif des terres dans Ie Hainaut exige Ie remem-
brement légal, Prop. terr., 1953, pp. 92 et suiv.

182
Conclusions.
98. Le projet de loi actuel reprend dans ses grandes lignes Ie
projet de 1948 (7).
La décision de remembrement appartient au Roi sur proposition
du ministre de l'Agriculture après consultation et avis favorable des
intéressés. Ceux-ci gardent, au cours du déroulement des opéra-
tions, un droit d'observation et de réclamation qui leur est garanti
par les enquêteR administratives.
Le principe éonstitutionnel de l'indemnité juste et préalable est
respecté. Un recours judiciaire en assure l'application. Toutes les
indemnités doivent être liquidées avant la passation de l'acte de
remembrement.
Les opérations de remembrement sont l'omvre de comités mixtes
compMés de fonctionnaires désignés par les ministres intéressés et
de propriétaires et exploitants désignés par les assemblées des pro-
priétaires et exploitants.
Ces comités, institués par l'arrêté royal qui décide l'exécution
du rememhrement, ont sur Jes biens compris dans Ie bloc à remem-
brer un droit de possession qu'ils exercent jusqu'à la fin des opéra-
tions, décidée également par arrêté royal. 11 importe de souligner
que pendant cette période, les biens sujets. à remembre~ent ne
sont pas frappés d'indisponibilité et que toutes transactions im-
mobilières sont possibles.
Les comités de remembrement, dotés de la personnalité juridique,
apparaissent comme des établissements publics doués d'un pouvoir
de décision souverain quant à l'exécution des opérations de remem-
brement proprement dites, sauf veto des trois ministres intéressés.
Comme nous l'avons dit précédemment nous souhaiterions
qu'au cours des débats parlementaires Ie gouvernement soit ap-
pe]é à s'expliquer au sujet de l'exercice de ce droit de veto.

99. Le recours judiciaire n'est accordé aux intéressés que pour


les contestations portant sur des droits civils. Le projet de loi
actnel, tout comme Ie projet de 1948, attribue la connaissance de
ces litiges aux juges de paix. Cette nouvelle attribution de compé-
tence aux magistrats cantonaux se justifie par leurs connaissances
des problèmes régionaux, par leur compétence en matière de baux
à ferme et par Ie caractère rapide de la procédure devant leur
juridiction. Rappelons à ce sujet que la loi hollandaise attribue
la connaissance de ces recours aux tribunaux d'arrondissement et

( 7) Nous ne reprendrons pas, dans ces conclusions générales, les sngges•


tions émises an cours de l'examen du projet.

183
specialement à un juge commîssaire qui exerce Ie röle de conci-
liateur. Ces causes hénéficient d'un droit de priorité.
Le seul recours contre les décisions des juges de paix e~t Ie
pourvoi en cassation dans l'intérêt de la loi et au profit exclusif
du Procureur Général près la Cour Suprême. Ni Ie projet de· loi
ni !'exposé des motifs ne disent comment ces décisions des juges de
paix seront portées à la connaissance du Procureur Général.

100. Le mérite principal du projet de loi actuel est d'avoir


assuré d'une manière positive, parallèlement au regroupement ra-
tionnel des propriétés rurales, Ie regroupement eultural.
L'importance du faire-valoir indirect en Belgique devait amener
Ie gouvernement à porter une attention toute spéciale sur eet as-
pect du prohlème, à défaut de quoi Ie hut d'intérêt général pour-
suivi par la loi n'eûi pu être atteint.
Le projet garantit à la fois aux fermiers-locataires Ie groupement
des terres lomfes autour du siège d'exploitation et la stahilité. de
leurs exploitations.
Les fermiers locataires sont, au cours des différentes phases du
remembrement, mis sur un pied d'égalité avec les propriétaires.
Ils participent au vote de l'assemblée sur Ie projet de remembrem~nt
et sont invités à faire valoir leurs ohservations au cours des 'enquêtes.
Mais pour atteindre Ie double hut du regroupement cultural et
de la stahilité des cultures, Ie pro jet de Ioi a dû reconnaître ·aux
comités Ie pouvoir d'imposer éventuellement de nouveaux Hens
contractueis.
Rappelons à ce propos que Ie projet de loi hollandais actuel per•
met d'imposer à un hailleur de contracter avec un autre fermier
que Ie preneur avec qui il était lié avant Ie rememhrement.
Cette nouvelle incursion dans Ie domaine de l' autonomie de la
volonté, source traditionnelle des contrats, est une conséquence
inévitahle du rememhrement qui a pour effet de suhstituer réeUe-
ment les nouveaux lots aux anciennes parcelles.
Cette conséquence devait, spécialement dans notre pays, être
aménagée pour respecter Ie hut d'intérêt général de la loi.
La garantie des droits des fermiers au sein des opérations de
rememhrement apparaît comme une nouvelle consécration des no•
tions d'intérêt social et économique qui ont présidé depuis 1929
à l'élahoration des législations sur les haux à ferme.

101. Le projet de loi actuel reste dans les traditions de notre


droit politique lato sensu, en conciliant l'intervention du pouvoir
exécutif avec l'expression de la volonté des particuliers, dont les
intérêts civils sont garantis par Ie recours judiciaire.

184
APPENDJCE
Ohstacles légaux au démemhrement

a) Principe du Code civil (1).


102. Sous Ie régime du Code civil, Ie droit de tout indivisaire
au partage est consacré par une disposition fondamentale (art. 815) ;
la convention d'indivision ne peut être conclue que pour une durée
de cinq ans au plus et moyennant l'accord de tous les communistes
(id., al. 2).
En vertu de l'article 826, chacun des héritiers peut demander sa
part en nature des meuhles et immeuhles de la succession. Il con-
vient, précise J'article 832, de faire entrer dans chaque lot, s'il se
peut, la même quantité de meuhles, d'immeubles, de droits ou
de créances de même nature et valeur (2).

b) Correctifs insérés dans Ie Code civil.


103. L'application de ces règles conduit inévitahlement au mor•
cellement et au parcellement des biens-fonds (3).
Certes Ie Code civil y a apporté deux correctifs : « Si les immeu-
bies ne peuvent se partager commodément, il doit être procédé à
la vente par licitation devant Ie tribunal » (art. 827); et : « Dans
la formation et la composition des lots, on doit éviter, autant que
possible, de morceler les héritages et de diviser les exploitations »
(art. 832, al. 2).
La première mesure ne garantit pas la pérennité de l'entreprise;
(1) Cf. Ie clair exposé de M. Paul Pierret, Les limitations légales au frae-
tionnement de la propriété foncière, loc. cit. - Voy. aussi supra, France,
n"'" 59 et suivants.
(2) De Page et Dekkers font ohserver (Traité élém. de dr. civ., t. IX,
n° 1037) : « En vérité, l'article 832 se justifiait peut-être à !'époque ou Ie
législateur luttait eontre l'affeetation exelusive de eertains hiens à certains
héritiers (majorats, suhstitutions, fiefs). Mais l'article 832 ne se justifie
plus aujourd'hui. Nous voulons que les lots soient égaux en valeur : il im-
porte pen qu'ils soient en outre égaux en nature ».
( 3) Lorsque se trouvent des incapahles parmi les indivisaires la situa-
tion est aggravée par l'ohligation de recourir au partage judiciaire Ooi du
12 juin 1816).

185
en effet l'héritier qui se propose de la reprendre n'aura souvent
pas les liquidités nécessaires pour acquérir Ie bien.
Quant à la disposition finale de l'article 832, elle est rédigée en
termes si hésitants (les termes « autant que possihle » énervant
l'injonction formulée) que les tribunaux n'en ont guère tenu
compte (4).

104. Le partage d'ascendant (art. 1075 à 1080 du Code civil)


n'exige, du moins d'après la doctrine et la jurisprudence belges (5),
qu'une égalité en valeur des lots composés par Ie chef de famille.
Il aurait pu constituer un remède adéquat s'il n'y avait de nom-
breux risques d'invalidation; c'est ainsi que l'on considère aujour-
d'hui que, même en cas de donation-partage, l'évaluation des
biens doit se faire au jour du décès pour Ie calcul de la lésion (6).

105. La loi du 20 novembre 1896 a établi au profit du conjoint


eurvivant, auquel est échu une quotité en usufruit de la succession.
la faculté, dans les limites de son usufruit, de se faire attribuer la
maison d'habitation. Palliatif momentané et dans bien des cas
insuffisant.
106. La loi du 16 mai 1900, modifiée par la loi de 1935, a
introduit des dérogations plus sensibles et plus efficaces au régime
de droit commun, en faveur des « petits héritages » (7).
Elle étend les prérogatives de l'époux survivant (art. 2) et permet
de prolonger l'indivision jusqu'à ce que Ie dernier héritier mineur,
descendant du de cujus, ait atteint sa majorité (art. 3).
D'autre part, un droit de reprise est accordé aux héritiers en
ligne directe et au conjoint survivant. On peut regretter qu'aucun
critère d'ordre professionnel ne soit pris en considération dans les
moyens subsidiaires de désigner l'héritier reprenant (8).

( 4) Pierret signale cependant quelques décisions récentes plus souplea


I loc. cit., p. 6, note 2).
(5) Cf. De Page, op. cit., t. VIII, n° 1696.
( 6) De Page, op. cit., t. VIII, n° 1716 - Cass. b" 6 octobre 1944, Pas.,
1945, I, 6 et note. Jadis controversé.
( 7) Bibliographie : Donnay, Le régime successoral des petits héritages,
Bruxelles, 1950; Dezegher, Erfregeling der kleine nalatenschappen, Turnhout,
1951; Rép. pr. dr. b., v 0 Successions, n"'' 2900 et suiv.; S. Cattier, Des suc-
cessions (1951 et 1952), Ann. not. et enr., 1953, pp. 97 et suiv.; Piret et
Pirson, examens de jurisprudence dans la Revue critique de Jurisprudence
belge.
(8) Celui des héritiers qui se propose d'occuper les biens ne jouit d'au•
cun droit de préférence, n'a pu que constater la Cour de cassation (6 déc.
1945, Pas., 1945, 1, 284; J. T" 1946, p. 124 et note de R. Pirson; J. J. P"
1946, p. 204 - Cf. aussi René Piret : Le droit de reprise des petits héri-
tages, dans la jurisprudence récente de la Cour de cassation. Rev. pr. not.,
1950, p. 149, n° 6 - Voy. la critique du tirage au sort par De Page et
Dekkers, op. cit., t. IX., n°" 1038 in fine et 1048, note 6.

186
c) Suggestions.
l 07. Il est de fait que, dans les pays voisins, les agriculteurs ont
accoutumé de· ne plus diviser les terres rememhrées, ou plus exac-
tement de laisser intacts les lots, formés au cours d'un remanie-
ment. D'aucuns en ont déduit que la m:odification des lois succes-
sorales était inutile (9). A quoi on peut répondre que la tendance
signalée évite Ie reparcellement, mais non point Ie morcellement des
exploitations. Au surplus, elle ne concerne que les régions ou. des
rememhrements réussis ont été· opérés.
Le remaniement parcellaire, dans notre pays, n'a pas encore dé-
passé, pratiquement, Ie stade primitif de l'échange bilatéral. Il
serait dès lors prématuré de songer à des réformes radicales en
matière de successions et de partage; elles heurteraient des habitu-
des séculaires et risqueraient de rester sans application.
Il n'en demeure pas moins que diverses améliorations pourraient
être apportées immédiatement au régime actuel, ainsi que quelques
prudentes innovations.

108. 1) Petits héritages. - Il conviendrait de prévoir un régime


particulier pour les entreprises agricoles et d'élever, pour celles-ci,
tout au moins, Ie revenu cadastral maximum, qui est de 4.200 francs
depuis 1935 (10).
En second lieu, la prolongation de l'indivision ne devrait plus
être soumise à la condition que Ie conjoint survivant ait l'usufruit
des biens auxquelles elle se rapporte (11).
Enfin, un critère d'ordre professionnel devrait être introduit
dans les modes de désignation de l'héritier reprenant et l'attribu-
tion judiciaire devrait remplacer Ie tirage au sort (12).

109. Un projet de loi, modifiant la loi du 16 mai 1900, fait ac-


tuellement la navette entre les Chambres législatives.
Le texte, adopté par la commission de la justice du Sénat, ne
tend qu'à supprimer la spéculation en cette matière.

(9) Voy. notamment Creplet, Le remembrement des terres et pra1nes en


Belgique, ]ournal de la Société centrale d'agriculture de Belgique, 1948.
(10) Ce tau:x devra de toute manière subir une réadaptation après la
révision cadastrale en cours. Des propositions de loi en vue d'une ntajora-
tion sont restées sans suite (cf. Rép. pr. dr. b., v cit., n° 2900).
0

01) Piret, Le statut civil de la famille et du patrimoine familial, p. 135.


(12) M. Ie professeur Piret avait proposé l'extension du régime spécial
au:x indivisions entre majeurs, sous Ie controle du juge (loc. cit.). L'article
624 du Code civil suisse, conçu dans ce hut, n'a guère reçu d'application,
les intéressés eux-mêmes, préférant une situation nette ( cf. supra, Suisse,
n° 18).

187
En cas de non-occupation du bien dans les trois mois de la re-
prise ou de la cessation de l'occupation dans les trois ans, Ie repre-
nant sera tenu de verser une indemnité forfaitaire aux anciens cÓpro-
priétaires ou à leurs ayants droit. Si la revente s'effectue par a~lju-
dication publique, l'indemnité se limite à la répartition propor-
tionnelle du hénéfice éventuel.
Aucune indemnité n'est due lorsque, Ie droit de reprise ayant
été exercé par plusieurs personnes, l'une de celles-ci occupe le bien
dans les délais indiqués ci-dessus.

2) Partage d' ascendant.


110. En Belgique, il est fort peu .r:ecouru à cette institution,
du fait sans doute des aléas qu'elle comporte.
Il y aurait lieu de s'inspirer des réformes introduites à eet égard
par la loi française du 7 février 1938. C'est ainsi que d'une part
l'observation des articles 826 et 832 du Code civil ne s'imposerait
plus à !'ascendant (13) et que d'autre part Ie succès d'une action
en rescision serait subordonnée désormais à une lésion de plus
, d'un quart suivant la valeur au moment de la donation-partage.

3) Conjoint survivant.
111. Il est presque unanimement souhaité que les droits du
conjoint survivant soient élargis (14).
Ce n'est pas ici Ie lieu de rechercher la meilleure formule. Disons
seulement qu'en cas de concours avec d'autres successeurs que les
ascendants et les descendants légitimes, Ie conjoint devrait au moins
disposer d'un droit d'usufruit sur la totalité de la succession (15).

4) Droit de reprise sur prisée.


112. La clause par laquelle -Ie de cujus désigne lui-même celui de
ses héritiers qui jouira du droit de reprendre certains hiens de sa
succession se rencontre fréquemment.
Au terme d'un minutieux examen de la question, MM. De Page
et Dekkers concluent (t. IX, n° 1065) :

(13) M. Piret attire l'attention sur la nécessité de donner des garanties


hypothécaires aux cohéritiers, au cas oit des délais de quelque importance
seraient accordés à l'attributaire en nature ( op. cit., p. 140).
(14) Cf. De Page et Dekkers, op. cit., t. IX, n° 403; Baugniet, De la: ré-
forme du droit successoral du conjoint survivant, Rev. pr. not., 195,
pp. 321 et suiv.
(15) Lui attrihuer la pleine propriété sur Ie tout, ne reviendrait-il pas,
généralement, en l'absence de descendants à favoriser les collatéranx du survi-
vant plutot que ceux du disparu ?

188
}1>) La clause de reprise sur pnsee, contenue dans un testament,
est licite, à moins qu'elle n'aboutisse à contraindre un héritier ré-
servataire à se défaire de sa réserve en nature;
2) Contenue dans un contrat de mariage, la clause de reprise
sur prisée est illicite en tout cas, comme pacte de succession future.
Et ils font observer que ces règles semhlent bien rigoureuses, eu
égard à l'utilité pratique de la clause de reprise : Ie législateur
devrait les abolir. On ne saurait mieux dire.

5) Valeur de rendement.
113. On pourrait s'inspirer utilement, semble-t-il, des dispositions
d11 Code civil suisse, prévoyant l'estimation des immeubles ruraux à
leur valeur de rendement, qui est réputée être des trois-quarts de la
valeur vénale (art. 617 à 620) (16).

6) Salaire diff éré.

114. L'attribution d'un salaire différé allège également les char-


ges de l'héritier reprenant. Il s'agit là, non seulement d'une me•
sure de justice distributive, mais comme on l'a dit, « d'une étape
vers la transmission héréditaire de l'exploitation agricole ».
Une proposition de loi en ce sens avait été déposée à la Chambre
des Représentants (17). Il était prévu que, pour Ie droit de reprise
édicté par la loi du 16 mai 1900, Ie bénéficiaire de la rémunération
différée viendrait en troisième ordre. Bien que cette proposition
soit devenue caduque, son contenu fait l'objet d'une enquête. Cer-
tains ont objecté qu'il suffirait aux membres d'une même familie
travaillant ensemble' de constituer une société; on se demande ce-
pendant combien d'enfants réussissent à obtenir l'adhésion de leurs
parents à semblable projet ?

Conclusions.
115. Les correctifs suggérés prépareraient les esprits à accepter,
et peut-être même à désirer, une véritable refonte du régime des
suocessions rurales.
Toutefois, à la suite de M. Piret (18), nous ne croyons pas sou-

(16) Voy. supra, Suisse, n° 15.


(17) Proposition de loi allouant une rémunération différée à certains·
collaborateurs des entreprises familiales (Doe. parl., n° 173, session 1947-
1948). - Comp. supra, France, n° 78 et Suisse, n° 20.
(18) Op. cit., n° 40. Nous ne pouvons que signaler ici la controverse entre
M. Savatier et M. Dabin, lequel, comme M. Piret, estime qu'il n'y a pas
de personne familiale (René Savatier, Les métamorphoses économiques et
sociales du droit civil d'aujourd'hui, 2• éd., Paris, 1952, pp. 125 et suiv.).

189
haitahle que l'on s'achemine vers Ie bien de famille insaisissahle et·
inaliénable, source d'asservissement et de difficultés de crédit (19).
Il est heureusement des moyens plus souples de favoriser l'ex:-
ploitation paysa:nne héréditaire, aux parcelles convenablement re-
groupées.

116. On aura remarqué d'autre part que Ie projet de loi. de 1954


sur Ie remembrement rural, au contraire des législations française
et hollandaise, ne prévoit pas la limitation du droit de remorceler
les terres réunies (20) .

(19) Signalons encore une proposition de M. Chalmet, non prise en con-


sidération par la •Chambre, < organisant l'accession des cultivatéurs à la
propriété terrienne > (Doe, parlem., Ch., n° 75, session extraord. 1954).
Deux mesures étaient préconisées : interdiction de vendre des terres con-
sacrées à l'agriculture à d'autres que des cultivateurs et droit de préemption
pour Ie fermier. La première paraît difficilement applicable.
On peut se demander au surplus s'il est souhaitable d'inciter les fermiers
à acquérir les terres qu'ils cultivent au détriment d'investissements de matériel;
d'autant plus que depuis la loi de 1951 ils jouissent du bail perpétuel en fait
sinon en droit (De Page, Compl., vol. IV, p. 426), sauf circonstances strictement
définies par Ie législateur.
Quant au droit de préemption, il fournirait un moyen de défense précieux
au locataire menacé ( voy. Savatier : Les métamorphoses économiques et sociales
du droit civil d'aujourd'hui, n°" 235 et 245).
(20) En ce qui conceme les baux à ferme, voy. supra, n° 21, en note.

190
Projet de loi sur Ie remembrement légal
de biens ruraux

BAUDOUIN,
Roi des Belges,
A tous présents, et à venir, SALUT.
Sur la proposition de Notre Ministre de l'Agriculture, de Notre Ministre des
Finances et de Notre Ministre des Travaux publics et de la Reconstruction,
Nous avons arr~té et arr&ons :
Notre Ministre de l'Agriculture, Notre Ministre des Finances et Notre Ministre
des Travaux publics et de la Reconstruction sont chargés de présenter, en Notre
nom, aux Chambres législatives, Ie projet de loi dont la teneur suit :

CHAPITRE PREMIER
Notions générales.

ARTICLE PREMIER. - Afin d'assurer dans I'intérêt général une exploitation


plus économique des biens ruraux, il peut être procédé, conformément aux dispo-
sitions de la présente loi, au remembrement de terres morcelées et de terres disper-
sées.
Le remembrement tend à constituer des parcelles continues, régulières, jouis-
sant d'accès indépendants et aussi rapprochées que possible du siège de l'exploita-
tion.
Le remembrement peut être accompagné de la création et de l'aménagement
de chemins et voies d'écoulement d'eau et de travaux d'amélioration foncière,
tels des travaux d'assèchement, d'irrigation, de nivellement et de défrichement
Les biens faisant l'objet d'une opération de remembrement !égal doivent être
compris dans un bloc couvrant une superficie de 50 hectares au moins.
ART. 2. - Ne peuvent être comprÏ.<! parmi les biens à remembrer:
1° les propriétés appartenant au domaine public;
2° les bätiments et les terrains faisant corps avec ceux-ci.
Cette di.<!position ne s'applique pas aux bätiments ruraux isolés qui apparaissent
comme l' accessoire du fonds ;
3° les propriétés doses de murs ;
4° d'une façon générale, tous immeuhles que le Ministre de l'Agricu1ture
décide d'exclure de l'opération de remembrement, en raÏ.<!on de leur utilisa-
tion et de leur destination spéciale.
ART. 3. - Dans la présente loi, on entend par :
- • propriétaire », tout propriétaire ou nu-propriétaire ;
- • exploitant », toute personne qui occupe à un titre quelconque une parcelle
comprise dans Ie bloc ;

191
- « ancienne parcelle ", toute parcelle comprise dans Ie bloc avant Ie remembre-
ment;
- • nouvelle parcelle "• toute parcelle du nouveau lotissement, constituant ou non
une modification de l'ancien lotissement, changeant ou non de propriétaire ou
d'exploitant;
« juge "• Ie juge de paix du canton sur Ie territoire duquel est situé Ie bloc ou la
majeure partie du bloc.
En raison de l'extension de son objet aux missions qui lui sont confiées par la
présente loi, la dénomination de la Société Nationale de la Petite Propriété Terrienne,
instituée par l'arrêté royal n° 120 du 27 février 1935, est modifiée et remplacée
par celle de : << Société Nationale de la Propriété Terrienne n.

CHAPITRE IJ
Des formalités préalables.
ART. 4. - Le Ministre de l'Agriculture, après consultation du Ministre ayant
l'urbanisme dans ses attributions, peut décider qu'il sera procédé à une enquête
sur l'utilité du rememhrement d'un bloc de terrains qu'il délimite.
ART. 5. - L'enquête s'ouvre sur un projet comprenant:
1° Un plan parcellarre du bloc.
A ce plan est annexé un tableau indiquant, en regard de chaque parcelle, selon
les indications cadastrales : Ie nom et l'adresse du propriétaire, de l'usufruitier, la
surface de la parcelle et, Ie cas échéant selon les renseignements fournis par Ie pro-
priétaire, l'usufruitier ou Ie bailleur, Ie nom et l'adresse des exploitants avec indica-
tion des surfaces exploitées.
En vue de l'établissement de ce tableau, les propriétaires, usufruitiers ou bail-
leurs sont tenus, à la demande du Ministre de l' Agriculture ou de son délégué,
de communiquer les nom et adresse des exploitants et les surfaces occupées par
chacun d'eux;
2° Le cas échéant, un avant-projet des travaux à effectuer, avec une estimation
des dépenses et des charges annuelles pour frais d'exploitation, d'entretien et de
surveillance des ouvrages permanents.
ART, 6. - Ces documents sont déposés pendant quinze jours à la maison com-
munale des communes sur Ie territoire desquelles s'étendent les terres comprises
dans Ie plan.
Le dépöt est annoncé par voie d'a:ffiches et dans les autres formes usitées pour
les publications o:fficielles dans les communes intéressées.
Les propriétaires, usufruitiers et exploitants mentionnés au tableau, sont
avertis de ce dépöt par écrit, individuellement et à domicile.
L'enquête est faite dans chaque commune par les soins du collège des bourg-
mestre et échevins. Ce collège ouvre à eet effet un procès-verbal destiné à recueillir
les déclarations des intéressés ; celles-ci sont signées par les déclarants. Le collège
annexe au procès-verbal les observations écrites reçues au cours de l'enquête.
A l'expiration du délai de quinze jours, Ie procès-verbal est clos par Ie bourgmestre
on l'échevin délégué.
Les pièces relatives à }'enquête, accompagnées d'un certificat du collège consta-
tant l'accomplissement des formalités prescrites, sont commu~iquées au Ministre
de I' Agriculture.
ART. 7. - Après la cloture de !'enquête, Je Ministre décide s'il y a lieu de réunir
une assemblée générale des propriétaires, usufruitiers et exploitants.
Dans ce cas, il désigne un délégué chargé de la convoquer et de la présider en
son nom.
Quinze jours au moins avant la date fixée, les propriétaires, usufruitiers et
exploitants mentionnés au tableau sont convoqués par écrit, individuellement et

192
à domicile, par les soins des collèges des bourgmestre et échevins. L'annonce de
cette assemblée est, en outre, affichée et puhliée dans les .formes usitées pour les
publications officielles.
Tout propriétaire, usufruitier ou exploitant, peut Re faire représenter à rassem-
hlée générale par un mandataire spécial. Le mandat est écrit. Toutefois, un manda-
taire ne peut représenter plus deun dixième des membres de l'a~semblée générale.
ÁRT. 8. - Aux jour, heure et lieu fixés, Ie président, après avoir constaté que
l'assemblée générale est régulièrement réunie, expose Ie projet, communique les
observations présentées au cours de !'enquête et entend les observations iles pro-
priétaires, des usufruitiers et des exploitants présents ou représentés.
ART. 9. - Le projet est soumis successivement au vote des propriétaires et
u6ufruitiers et au vote des exploitants. Chaque propriétaire, chaque usufruitier
tit chaque exploitant présent ou représenté a une voix.
Le projet est rejeté si, dans l'un ou dans l'autre groupe, la majorité s'y oppose.
Le projet est encore rejeté si les propriétaires et usufruitiers ou les exploitants
qui s'y opposent possèdent ou occupent ensemble, chacun dans son groupe, plus
de la moitié de la surface cadastrale du bloc.
Pour Ie calcul de la surface dans Ie premier groupe, il n'est pas tenu compte
des voix des usufruitiers. Lorsqu'une parcelle est possédée en indivision ou exploitée
en commun, les indivisaires ou les personnes qui exploitent la parcelle en commun,
présents ou représentés, sont censés posséder ou occuper ensemble toute la surface
de la parcelle. Ils sont également censés posséder ou occuper chacun une part égale
de cette surface.
ÁRT. 10. - Si Ie projet est admis, Ie groupe des propriétaires et des usufrni-
tiers et celni des exploitants désignent chacun en son sein un membre effectif et
un membre suppléant du comité prévu à l'article ll.
Le président rédige Ie procès-verbal de l'assemblée ii;énérale.

CHAPITRE III
Des opérations de remembrement,
ART. ll. - Le Roi décide, sur proposition du Ministre de l'Agriculture et du
Ministre ayant l'urbamsme dans ses attributions, s'il y a lieu de donner suite au
projet admis par l'assembli\e génfrale. Dans l'affirmative, il charge un comité de
son exécution.
Ce comité est composé de cinq membres dont trois sont désignés par Ie Roi,
respectivement sur proposition du Ministre de l' Agriculture, du Ministre des Fi-
nances et du Ministre des Travaux publics, et dont deux sont désignés respective-
ment par Je groupe des propriétaires et usufruitiers et par Ie groupe des exploitants
intéressés. Des membres suppléants sont désignés de la même manière.
Le membre du comité désigné sur proposition du Ministre de l'Agriculture
exerce les fonctions de président.
Le secrétaire de chaque comité est Msigné par la Société nationale de la pro•
priété terrienne. ·
Les noms des memhres du comité et du secrétaire sont publiés au Moniteur
Belge.
ÁRT, 12. - Le comité jouit de la personnalité juridique.
Il délibère et statue sur tout ce qui concerne l'exécution du projet de rememhre•
ment.
Il ne statue valablernent que si la majorité des membres, éventuellement rem-
placés par leurs suppléants, sont présents. En cas de partage des voix, celle du préoi•
dent est prépondérante.
Les Mmistres, visés à l'article 11, peuvent, chacun en ce qui le concerne, s'op-
poser à toute décision du comité. A eet effet, chaque membre, nommé par Ie Roi,

193
peut prendre son reC'ours auprès du Ministre dont il dépend. Ce recours doit être
pris dans les quinze jours de la décision et Ie veto du Ministre doit intervenir dans
les quinze jours du recohrs. Passé ce délai, la décision devient définitive.
Le président et Ie secrétairc exécutent les décisions du comité ; ils représentent
Ie comité dans tous les actes publics et sous seing privé, ainsi que dans les actions
judiciaires, sans devoir justifier de la décision du comité. Les assignations et noti-
fications au comité sont valablement remises au président, au secrétaire ou à la
Société nationale de la propriété terrienne.
ART. 13. - La Société nationale de la propriété terrienne ouvre un compte pour
l'activité de chaque comité. Ceux-ci peuvent ordonner des dépenses qui seront
exécutées par les soins de cette société sur des avances de fonds consenties par elle.
La société est comptable des dépenses et des recettes décidées par les comités.
La Cour des Comptes· arrête les comptes ouverts pour chaque comité et est
chargée de recueillir à eet effet tous renseignements et toutes pièces comptables
nécessai res,
ART. 14. - Le comité est assisté d'une commission consultative composée de
trois membres au moins et de dix membres au plus, choisis sur la proposition du
comité, par Ie Ministre de l'Agriculture, parmi les pnsonnes de l'endroit, spéciale-
ment compétentes en matière rurale.
La commission consultative se réunit à la demande et sous la présidence dn
président du comité ou de son délégué.
ART. 15. - Le mandat de memhre du comité et de la commission consultative
est gratuit ; des jetons de présence et des indemnités pour frais de déplacement
peuvent, toutefois être accordés aux membres de la commission consultative ainsi
qu'aux membres du comité, désignés respectivement par les propriétaires et usu-
fruitiers et par les exploitants.
ART. 16. - Le comité, après avoir pris l'avis de la commission consultative,
établit :
1° Ie classement des terres d'après leur valeur culturale et d'exploitation au
moyen d'un plan figurant le lotissement existant. Sur ce plan sont dessinées les
" zones de valeur " formées par Ie groupement des terres de même classe. Ces zones
sont piquetées sur Ie terrain ;
2° un tableau indiquant, en regard de chaque parcelle du plan de lotissement,
Ie nom du propriétaire, de l'usufruitier et de !'exploitant, les surfaees dans chaque
zone de valeur, la surface globale et les valeurs correspondantes;
3° un tableau indiquant, en regard de chaque propriétaire et usufruitier, les
parcelles qu'il possède avec les totaux des surfaces dans chaque zone de valeur, des
surfaces globales et des valeurs correspondantes ;
4° un tableau indiquant, en regard de chaque exploitant, les parcelles qu'il
occupe avec les totanx des surfaces dans chaque zone de valeur, des surfaces glo-
bales et des valeurs correspondantes.
ART. 17. - Pour I' établissement du classement des terres, Ie comité ne doit
tenir compte ni d'éléments étrangers à la valeur culturale et d'exploitation de la
terre, tels la présence de clötures, d'arbres ou de baies, l'existence d'm• bail, d'une
servitude de passage, d'un droit d'usage oude superficie, Ie mauvais état d'exploita-
tion du sol, ni d'éléments sans rapport avec la destination agricole du bien, tels la
nature du sous-sol, la destination du bien comme terrain à bitir ou la possibilité
d'une affectation industrielle.
Ces éléments, considérés comme plus-values ou moins-values des parcelles,
sont estimés séparément après l'attribution des nouvelles parcelles.
ART. 18. - Le plan de lotissement et les tableaux font l'objet d'une enquête
conformément à l'article 6.
ART. 19. - Après la clöture de !'enquête, Ie comité examine les observations
qu' elle a suscitées.

194
Il arrête Ie plan de lotissement et les tableaux et les dépose à la maison commu-
nale, ou tout intéressé est admis à en prendre connaissance pendant toute la durée
des opérations.
Chaque propriétaire, chaque usufruit.ier et chaque exploitant est averti par
écrit, individuellement et à domicile de ce dépót.
ART. 20. - Tout intéressé peut contester la détermination des surfaces ou des
valeurs en citant Ie comité devant Ie juge.
La citation est donnée à comparaître sur les lieux dans un délai de huit jours
au moins et de quinze jours au plus.
Le jour et l'heure de la comparution sout fixés par ordonnance du juge sur la
requête du demandeur. Cette requête et l'ordonuance du juge sout conjointement
notifiées en tête de la citation.
La requête doit être adressée au juge, sous peiue de forclusiou, dans les treute
jours de l'avertissement prévu à l'article 19 et au plus tard dans les deux mois du
dépót des documents à la maison communale.
L'ordounance du juge comporte la désignation d'un expert, lequel est couvoqué
sur les lieux par lettre recommandée du greffier.
L'expert dépose sou rapport dans les trente jours de la visite sur les lieux.
Dès que Ie rapport de l'expert est déposé, Ie juge convoque sans délai les parties
et l'expert par lettre recommandée à l'audience dont il fixe la date; une copie du
rapport est jointe à la convocation.
Le juge rend sou jugement dans les trois mois de la citatiou.
Son jugement n'est susceptible d'aucun recours, saus préjudice du droit du
Procureur général près la Cour de Cassation d'exercer Ie pourvoi dam l'iutérêt de
la loi prévu à l'article 14 de la loi du 25 février 1925.
Le comité apporte aux plan et tableaux les corrections qui découleut des juge-
ments.
ART. 21. - Le comité établit Ie plan des nouveaux chemins et des nouvelles
voies d'écoulement d'eau ainsi que des ouvrages connexes.
Ce plan indique également, Ie cas échéant, les chemins, voies d'écoulement
d'eau et ouvrages connexes existants à supprimer.
Le plan des nouveaux chemins et des nouvelles voies d'écoulement d'eau ainsi
que des ouvrages connexes est approuvé par arrêté royal sur proposition des Mi-
nistres de l'Agriculture et de& Travaux publics, après avis du conseil communal et
de la députation permanente intéressés.
L'arrêté d'approhation ou un arrêté royal séparé détermine la voirie à laquelle
les nouveaux chemins appartiendront et classe, s'il y a lieu, les nouvelles voies
d'écoulement d'eau dans une des catégories prévues à l'article 2 de la loi du 15 mars
1950 modifiant la législation relative aux cours d'eau non navigahles.
L'arrêté royal indique les administrations puhliques au domaine desquelles
les nouveaux ouvrages connexes sont attribués. Ces administrations out l'obligation
de gérer ces ouvrages conformément à leur destination et aux lois et règlements
sur la matière.
L'arrêté royal d'approhation on un arrêté royal séparé décrète également la
suppression des chemins et voies d'écoulement d'eau et des ouvrages connexes
désaffectés et leur incorporation dans l'ensemble des terres à remembrer.
L'arrêté royal ordonne, Ie cas échéant, des modifications à apport.er aux plans
généraux ou particuliers dressés conformément à l'arrêté-loi du 2 décemhre 1946
concernant l'urbanisation, à l'atlas des chemins vicinaux et aux tableaux descrip-
tifs dressés en exécution de la loi du 7 mai 1877 sur la police des cours d'eau non
navigables et non flottables et de la loi du 15 mars 1950 modifiant la législation
relative aux cours d'eau non navigables.
ART. 22. - Le comité fait procéder aux travaux de création et d'aménagement
rlP chemins et voies d'écoulement d'eau et aux travaux d'amélioration foncière.
Nu! ne peut s'opposer à l'exécut,on des travaux.

195
Une indemnité est due éventuellement aux exploitants pour dégAts aux cu1tu-
res ou lorsque les travaux nuisent à la jouis5ance des terres. Le comité fixe immé-
diatement cette indemnité de commun accord avec l'intéressé ; en cas de contesta~
tion, elle est fixée par Ie juge. L'indemnit est aussitot l:quidée.
Lorsque l'exécution du projet de rememhrement requiert l'exécution de tra-
vaux en dehors du b1oc, le "om1té peut, à défaut d'accord amiable, être autorisé
par arrêté royal à faire les emprises nécessaires par voie d'expropriat..on pour cause
d'utilité publique.
ÁRT. 23. - Le comité, assisté de la commission consultative, procède à l'éta-
blissement du plan de relotissement. Les 2'0nes de valeur du plan de lotissem1mt
prévu. à l'article 18 sont reportées sur ce plan.
Le comité, assisté de la comm1Rsion consultative, attribue les nouvelles par-
celles aux propriétaires, aux usufrmtiers et aux exploitants.
Le nouveau lotissement est piqueté sur Ie terrain.
ART. 24. -- La comité a quali<:é pour passer des conventions relatives à des
propriétés s;tuées en dehors du bloc en voe de la création ou de la suppression de
servitudes actives ou passives.
ÁRT. ?5. - L attribution aux propriétaires, et aux usufruitiers se fait de ma-
nière à leur attribuer des parcelleR d'une va1eur globale proportionnellement ée:ale
à celle des parcelles qu'ils possédaieut avant Ie remembrement, compte tenu de la
valeur des terres prélevées sur ]'ensemble pour nouveaux chemins, voies d'écoule-
ment d'eau et ouvrages connexes, et de cel]e des tnres incorporées dans l'ensemble,
provenant des chemins, voies d'écoulement d'eau et ouvrages connexes désaffectés.
Le plan peut prévoir une soulte lorsqu'il n'est pas possible d'étabHr cette équi-
valence sans un appoint ou une ristourne en espèces. Cettf' soulte ne peut toute-
fois, pour aucun propriétaire ou usufruitier. dépasser 5 p. c. de la valeur en parcelles
qui aurait dû lui être attribuée.
ART. 26. - Le comité, assisté de 1a commfasion consultative, répartit Ie~ frais
d'exécution du projet sur les nouvelles parce.les sur la ba&e de leur surface.
Lorsque certaines parcelles profitent plus que d'autres de, travaux réalisés à
l'occasion du remembrement tels les travaux d'améhoration foncif're, la création de
nouveaux chemin@ ou voies d'écoulement d'eau, Ie comité peut en tenir compte
dans la répartitlon de~ frais.
S'il est à prévoir que l'état des travaux ou Ie règlement de certains comptes
litigieux risquent de retarder la réalisation du remembrement et l'occupation des
nouvelles parcelles, Ie comité peut, sous l'approbation du M'n:stre de l'Agriculture,
comprendre dans les frais à répartir une provision pour fra'.s à liquider.
ART. 27. - La répartition des parcelles entre les explo.itants se fait de manif're
à attribuer autant que possible à chaque exploitant des t!"rreo de même qualité,
de même superficie, propre~ aux mêmes cultures, et. pour les parcelles exploitées
en location, appartenant aux mêmes bailleurs.
Une indemnité pour perte de jouïssance est due à !'exploitant lorsque la valeur
globale des parcelles qui lui sont attribuées est proportionnellement inférieure à la
valeur globale de 8es anciennes parcelles.
ART. 28. - Les droits qu'un fermier exerce sur !'ensemble des anciennes par•
celles ou sur une ancienne parcelle déterminée d'un bailleur, sont reporté• sur !'en-
semble des nouvelles parcelles ou sur une nouvelle parcelle <le ce bailleur indiquée
par Ie comité. Dans l'intérêt cependant d'une bonne <-Xploitation et en vue de réali-
ber Ie remembrement cultural, Ie comité. assisté de la commission consultative,
peut as•igner à un ferm1er un nouveau bailleur, ooit qu'il maintienne Ie fermier sur
Ie~ terres qu'il exploitait précédemment, soit qu'il lui attribue de nouvelles terres.
ART. 29. - Lorsqu'il y a lieu de fixer de nouvelles conditions de bail, notam-
ment Ie fermage et la durée du bail, et, Ie cas échéant, les indemnités dues aux fer-
miers conformément à l'article 1778, § Jer, du Code civil, Ie comité convoque les
in, éressés et leur fait des proposit;ons propres à rallier leur accord.

196
· En cas d'accord entre les parties, Ie comité constate eet accord dans un.docu•
ment signé par les parties, qui sera annexé à l'acte de rememhrement comme il ést
dit à l'article 36, 1°.
En cas de désaccord, Ie comité invite Ie~ partie~ à saisir Ie juge du litige. Si
dans Ie délai d'un mois à partir du jour ou Ie comité a l'onstaté Ie désaccord des
parties, aucune de celles-ci n'a saisi Ie juge, Ie comité saisit lui-même ce dernier en
assignant les parties :.Utéressées.
Les dispositions des alinéas 8 et 9 de l'article 20 sont applicahles à cette action
en justice.
ART. 30. - Les dispositions de la présente loi relatives au bail s'appliquent à
l'emphytéose.
ART. 31. - Le comité dresse :
1° un tableau indiquant, en regard de chaqne nouvelle parcelle, Ie nom du
propriétaire, le nom de l'usufruitier, le nom de !'exploitant, les surfaces dans «-haque
zone de valeur, la surface globale, les valeurs correspondantes et la part contributive
du propriétaire et de l'usufruitier dans les frais prévus à l'article 26;
2° un tableau indiquant les indemnités pour plus-values ou moins-values et
les propriétaires et usufruitiers qui y auront droit ou qui les devront ;
3° un tableau indiquant, en tegard de chaque propriétaire et de chaque usu-
frnitier, les parcelles qui lui sont attribuées, les surfaces dans chaque zone de va-
leur, les surfaces globales et les valeurs correspondantes, la soulte, les indemnités
pour plus-values ou moins-values et les frais, ainsi que Ie solde actif ou passif des
souhe, indemnités et frais.
4° un tableau indiquant, en regard de chaque exploitant, les parcelles qui lui
s,ont attribuées, les surfaces dans chaque zone de valeur, les surfaces globales, les
valeurs correspondantes et l'indemnité pour perte de jouïssance;
5° un plan de lotissement sur lequel figurent les anciennes parcelles affectées
à des privilèges ou hypothèques ou fa1sant l'objet de commandement.s, sa;_.;es ou
actions immobilières et un plan de lotissement sur lequel figurent les no.ivelles
parcelles ou parties de nouvelles parcelles qui seront affectées à ces privilèges et
hypothèques ou qui feront l'objet de commandements, saisies ou actions immobi-
lières;
6° un tableau mentionnant, en regard de chaque propriétaire et de chaque
usufruitier, les privilèges. hypothèques, commandements, saisies et actions immo•
bilières, avec indication des parcelles anciennes et des nouvelles parcelles ou parties
de nouvelles parcelles qui s'y substituent.
ART. 32. - Les plans et les tableaux prévus aux articles 23 et 31, 1°, 2°, 3° et
4°, font l'objet d'une enquête; les prescriptions de l'article 6 sont applicahles à cette
enquête.
Après clöture de l'enquête, Ie comité examine les observations présentées et
arrête les plans et tahleaux prévus aux 1°, 2°, 3° et 4°. Il les dépose à la maison
communale ou tout intéressé peut en prendre connaissance.
Chaque propriétaire, usufruitier et exploitant est averti par écrit, individuelle-
ment et à domicile, de ce dépöt.
ART. 33. - Le comité invite par lettre recommandée à la poste les proprié-
taires et les titulaires de droits réels intéressés à prendre connaissance des plans et
tahleaux prévus à l'article 31, 5° et 6°.
Ces documents sont déposés pendant quinze jours au siège du comité.
Le comité ouvre un procès-verbal destiné à recueillir les obsei:vations des
intéressés. Celles-ei sont signées par les déclarants. Les observations écrites sont
annexées au procès-verbal. A l'expiration du délai de quinze jours !'enquête est
clöturée.
Le comité examine les observations présentées et arrête les plans et tahleaux
qu'il conser've à son siège.
Les propriétaires de biens grevés et les titulaires de droits réels sont avertis

197
par écrit, in.dividuellement et à domicile, de cette décision. lis sont admis à prendre
connais8ance des documents.
ART. 34. -Tout intéressé peut contester les décisions du comité non conformes
aux prescriptions de l'article 25. Il peut également contes!er Ie montant des in-
clemnités pour plus-values ou moins-values, la répartition des frais, Ie montant de
findemnité pour perte de jouissance et Ie report des droits réels, en citant l'Etat
représenté par le comité <levant lil juge.
La c1tation est donnée à comparaître sur les lieux dans un délai de huit jours
au moins et de quinze jours au plus.
Le jour et l'heure de la comparution sont fixés par ordonnance du _iuge sur la
requête du demandeur. Cette requête et l'ordonnance du juge sont conjointement
notifiées en tête de la citation.
La requête doit être adressée au juge, sous peine de forclusion, dans les trente
jours de l'avertissement prévu à l'article 32 et, au plus tard, dans les deux mois
du dépöt des documents à la maison communale. Lorsque la contestation est rela-
tive au report des droits réels, la requête doit être adressée dans les trente jours
de l'avertissement prévu à l'article 33.
Les dispositiom des alinéas 5, 6, 7, 8 et 9 de l'article 20 sont applicahles à ces
actions en justice.
Le comité apporte aux plans et. tahleaux les corrections qui découlent des juge-
ments.
ART. 35. - Lorsque les plans de relotissement et les tahleaux sont devenus dé-
:tinitifs, Ie comité procède au hornage des nouvelles parcelles, ordonne Ie versement
à la Caisse des dépöts et consignatioris des sommes nécessaires au paiement des
soldes actifs mentionnés à l'article 31, 3°, ordonne Ie règlement des indemnités dues
aux exploitants conformément aux articles 27 et 29, et charge de la passation de-
l"acte de rememhrement Ie comité d'acquisition d'immeuhles pour compte de l'Etat.
La Caisse des dépöt~ et consignations ne peut délivrer les fonds aux proprié-
taires. ou usufruitiers intéressés que sur la production d'un certificat délivré par
1e conservateur des hypothèques, constatant, conformément à l'article 127 de la
1loi du 16 décemhre 1851, qu'il n'existe point d'inscription on de transcription rela-
-tive aux biens attrihués à ces propriétaires on usufruitiers.
ART. 36. - L'acte de rememhrement contient:
1° la constatation des droits et ohligations tels qu'ils découlent des plans de
:relotissement, des tahleaux et des nouvelles conditions de hail mentionnés aux arti-
cles 16, 23, 29 et 31. Ces plans, tahleaux et conditions de hail sont annexés à l'acte;
2° la mention du certificat du dépöt effectué en conformité de l'article 35;
3° les conditions et délais de paiement à la Société Nationale de la propriété
terrienne des soldes passifs mentionnés à l'article 31, 3°. Ces conditions et délais
sont arrêtés par Ie Ministre de l'Agriculture.
Une hypothèque est stipulée en faveur de cette société, pour sûreté de ces
sommes et des intérêts, sur les hiens attrihués aux propriétaires ou usufruitlers qui
les doivent. Cette hypothèque prend rang à compter de l'inscription; l'inscription.
est prise au plus tot un mois après la communication de l'extrait de l'acte de re•
memhrement au propriétaire ou à l'usufruitier.
A la demande du propriétaire ou de l'usufruitier, Ie juge peut désigner tel hien
dont la valeur est jugée suffisante pour garantir la créance de la Société nationale
de la propriété terrienne;
4° les dates de l'entrée en jouïssance et de l'occupation des nouvelles parcelles;
ces dates sont déterminées par Ie comité, en égard à l'usage des lieux. .
L'acte de rememhrement et ses annexes sont conservés par Ie comité d'acquisi•
tion d'immeuhles pour compte de l'Etat.
ART. 37. - L'acte de rememhrement forme titre pour la propriété et les droits.
réels •et de créance dont il règle Ie sort.
Après l'accomplissement des formalités hypothécaires, Ie comité d'acquisition
d'inimeuhles pour compte de l'Etat délivre un extrait certifié conforme de l'acte

198
de remembrement à chacun des intéressés. Les extraits délivrés anx intéressés qui
occuperont les nouvelles parcelles sont revêtus de la formule exécutoire.
Ensuite de l'acte d.e remembrement Ie comité est crédité des soldes passife
mentionnés à l'article 31, 3°.
ART. 38. - L'occupation des nouvelles parcelles se fait aux dates et conditions
prévues dans l'acte de remembrement. Les dispositions des articles 1777 et 1778,
§ 2, du Code civil, sont applicables aux exploitants sortants et entrants.
ART. 39. - Sur la proposition du Ministre de l'Agriculture, Ie Roi décrète la
fin des opérations de remembrement. Cet arrêté royal entraîne la dissolution du
comité.
La liquidation des comptes est assurée par la Société Nationale de Ia propriété
terrienne, qui succède à cette fin aux droits et obligations du comité. L'Etat est
débiteur du solde éventuel envers la Société Nationale de la propriété terrienne.

· CHAPITRE IV
Des frais d'exécution du projet.

ART. 40. - Les frais d'administration du comité, y compris les jetons de pré-
sence et les indemnités pour frais de déplacement accordés aux membres du comité
et de la commission consultative, tous frais de procédure quels qu'ils soient, les
frais de l'acte de remembrement, des formalités hypothécaires et du certificat de
liberté hypothécaire pour Ie retrait des sommes déposées à la Caisse des dépöts
et consignations ainsi que les frais de bornage sont à charge de l'Etat.
Le Miuistre de I'Agriculture détermine, en outre, la part d'intervention de
l'Etat dans les dépenses pour les travaux de création et d'aménagement de chemins
et de voies d'écoulement d'eau et pour les travaux d'amélioration foncière.
Les dispositions réglementaires organisant la mise au travail des chömeurs
sont applicables aux travaux que requiert l'exécution d'un projet de remembre-
ment.
ART. 41. - La Société Nationale de la propriété terrienne fait l'avance des
dépenses que nécessite l'exécution des opérations de remembrement.
Le Ministre des 'Finances en fixe les modalités.

CHAPITRE V
Du report des droits réels,
ART. 42. - Par l'effet du remembrement, !'ensemble des parcelles nouvelles
attribuées à un propriétaire est substitué réellement à !'ensemble des anciennes
parcelles de ce propriétaire.
L'usufruit relatif à !'ensemble des anciennes parcelles d'un propriétaire est
reporté sur l'e:nsemble des nouvelles parcelles de ce propriétaire.
Les privilèges et hypothèques, les commandements et saisies, et les actions
immobilières relatifs à !'ensemble des anciennes parcelles d'un propriétaire ou d'un
usufruitier sont reportés sur !'ensemble des nouvelles parcelles et sur les soldes actifs
qui sont dus à ce propriétaire ou usfruitier conformément à l'article 31, 30.
ART. 43. - Lorsqu'un usufruit grève une ou certaines des anciennes parcelles
d'un propriétaire, Ie comité détermine sur les nouvelles parcelles de ce propriétaire
!'emplacement ou ce droit est reporté.
Lorsque; des privilèges et hypothèques, des commandements et saisies, et des
actions immobilières grèvent une ancienne parcelle d'un propriétaire ou usufruitier,
Ie comité fixe la nouvelle parcelle ou partie de nouvelle parcelle et la partie des
soldes actifs mentionnés à l'article 31, 3°, de ce propriétaire ou usufruitier sur la-
quelle ces droits seront reportés.

199
ÁRT. 44. - Lorsque, par suite d'erreurs ou d'omissions dans l'acte de rememhr~
ment, ou à la suite d'annulation, de résiliation oude révocation de droits surveiiiies
depuis la passation de l'acte de rememhrement, des proptiétaires ou autres titulaires
de droits réels font valoir sur des anciennes parcelles des droits dont il n'a pàs été
tenu compte, Ie juge, à la demande des intéressés, détermine les parcelles nouvelles
ou les parties de parcelles nouvelles et la partie du solde actif mentionné à l'article
31, 3°, sur lesquels ces droits seront reportés. :
Dans ce cas, le·juge peut, à la demande des intéressés, fixer à nouveau, s'il y à
lieu, les ohligations envers la Société Nationale de la propriété terrienne.
ART. 45. - L'acte de rememhrement sort ses effets et est opposahle aux- tiers
à dater de sa transcription au bureau des hypothèques de la situation des hiens.
Le conservateur des hypothèques opère d'office l'émargement des privilèges et
hypothèques, des commandements et saisies et des actions immohilières qui son,t
reportés.
Par dérogation à l'article 12 de la loi du 13 octohre 1913 apportant des modi-
fications à la loi hypothécaire, Ie comité d'acquisition d'immeuhles pour compte
de l'Etat, peut certifier Ie nom, les prénoms, Ie lieu et la date de naissance des pro-
priétaires, usufruitiers et hailleurs, d'après les indications reprises aux tahleaux
annexés à l'acte.

CHAPITRE VI
Des dispositions fiscales.

ART. 46. - L'article 61', alinéa 2, introduit dans Ie Code des droits d'enregistre•
ment, d'hypothèque et de greffe par l'article 4 de la loi du 26 juillet 1952, est rem-
placé par la disposition suivante :
« La même suhstitution s'opère en cas de rememhrement volontaire ou légal
de hiens ruraux ».
ART. 47. - 1° L'intitulé du § 6bis, introduit dans Ie Titre Jer, Chapitre 1v;
Section première, du même Code, par l'article 7 de la loi du 4 mai 1949, est rem-
placé par Ie suivant : « Rememhrement volontaire de hiens ruraux ».
2° L'article 73 2, alinéa premier, introduit dans Ie même Code par l'article 7
de la loi précitée, est remplacée par la disposition suivante :
« Les actes portant rememhrement volontaire de hiens ruraux sont exemptés
du droit proportionnel et soumis au droit fixé général s'il n'est pas stipulé de soulte
ou indemuité ».
ART. 48. - Il est ajouté à l'article 161 du même Code un 6° ainsi conçu:
« 6° Les actes, iugements et arrêts relatifs à l'exécution de la loi sur Ie re-
memhrement légal de hiens ruraux ».
ART. 49. - Dans l'article 59 du Code des droits de timbre, il est introduit,
après Ie 5°, un 5°bis ainsi conçu :
« 5°bis Les actes dressés ou délivrés pour l'exécution de la loi sur Ie remembre-
ment légal de hiens ruraux ».
Donné à Bruxelles, Ie 20 novembre 1954.
BAUDOUIN.
Par le Roi :
Le Ministre de l'Agriculture,
R. LEFEBVRE.
Le Ministre des Finances,
H. LIEBAERT
Le Ministre des Travaux publiu
et de la Reconstruction,-
A. VAN GLABBEK.E.

200
ANNEXE
Statistiques comparées
(France - Belgique - Pays-Bas)

I. - STATISTIQUES AGRICOLES GENERALES

A) Nomhre des exploitations.


F. (1) B. (2) P.B. (3)
1 à 5 ha. 615.000 159.300 102.000
5 à 10 ha. 503.000 58.300 64.000
10 à 20 ha. 539.000 32.500 49.000
20 à ·50 ha. 380.000 11.400 24.500
50 à .100 ha. 77.500 1.783 2.016
100 ha. et + . 26.100 310 117

totaux arrondis 2.140.000 263.000 241.000

B) Superficie des exploitations.

F. (1) B. (2) P.B. (3)


:-1 à 5 ha. 1.665.000 378.000 262.000
5 à 10 ha. 4.622.000 412.000 466.000.
10 à 20 ha. 7.520.000 445.000 682.000
20;à 50 ha. 11.196.000 304.000 705.000
50 à 100 ha. 5.110.000 121.000 181.000
100 .ha. et + . 5.245.000 40.000 (50 ha et+)

totaux arrondis 35.360.000 1.720.000 2.296,000

··o) Recensement de 1946. Un nouveau recensement agricole est en cour&


(dêcret du 2 sept. 1954) .
.·(2) Recensement de 1950 (en pàrtant de 0 ha). Il existe en Belgique 710.000
< coins de terre» et même 16.000 exploitations sans terre (non inclus).
(3) Source principale : Ministère de l'Agriculture des Pays-Bas.

201
C) Superficies moyennes
Surface moyenne des parcelles :
F. B. (4) P.-B.
35 a. 36 a.
Surface moyenne des îlots d'exploitation (pièces de terre)
F. B. (5) P.-B. (6)
85 a. 1 ha. 07 a. 2 ha. 43 a.
Etendue moyenne des exploitations de plus de 1 ha.
F. B. (7) P.-B.
14 ha. 6 ha. 83 a. 9 ha. 52 a.

D) Proportion du faire valoir direct.


F B P.-B.
1 à 5 ha. 40 49,6
5 à 20 ha. 34,5 49,3
20 à 30 ha. 27 45,3
30 à 50 ha. 21 32,9
50 à 100 ha. 12 47,5
100 ha. et + 17 (50 ha et+)
moyenne : 53,9 % 32,2 (9) 42,7.
Proportion des exploitants propriétaires
de tout ort partie des terres qu'ils occupent (en %)
F. (8) B. (9) P.-B. (10)
80 71,1 47,6
de tout 50.000 cultivateurs
de partie 137.000 »
néant 76.000 fermiers
(4) Recensement de 1950 - Soit 19 par exploitation en moyenne.
(5) Soit 6 par exploitation en moyenne. Total du nombre d'îlots : 1.593.000.
(6) Soit en moyenne 3,9 îlots par exploitation. (De 98 a. en moyenne póur
les exploitations de 1 à 5 ha. à 17 ha. 51 a. pour celles de 50 ha. et plus).
Total du nombre d'îlots : 943.000.
(7) Recensement de 1950 (de 4 ha. 77 a. en Flandre Orientale, à 10 ha.
99 a. dans la province de Namur).
Moyenne pour Ie pays en 1929 : 6 ha. 39 a. L'augmentation est insignifiante,
(8) 62,2 p.c. des exploitations (recensement de 1946). Dans diverses ré-
gions de la France et notamment dans l'Ouest, Ie faire-valoir indirect est
exercé en grande partie par des métayers. ,
(9) Recensement de 1950 (de 22,07 p.c. en Flandre occidentale, à 52.46 p.c.
dans Ie Luxembourg). En 1929 : 40,5 p.c. pour Ie pays. En Belgique, Ie mé-
tayage est pratiquement inconnu.
(10) D'après Ie ministère de l'Agriculture des Pays-Bas : La proportion rela-
tivement peu élevée des exploitants propriétaires de tout ou partie des terres
qu'ils occupent, s'explique par Ie fait que la statistique néerlandaise a rangé
panni les fermiers les agriculteurs qui ne possèdent que moins de la moitié
des terres qu'ils travaillent.
La Hollande ne connaît pas Ie métayage.

202
ll. - REMEMBREMENT RURAL
A) Superficies à rememhrer.
F. (11) B. (12) P.-B. (13)
14. millions ha. 1 millfon ha. (?) 1,5 htillion ha.
(31 p.c. aire cultivable) (56 p.c. id.) (60 p.c. id.)

B) Superficies remembrées.
F. (11) B. (12) P.-B. (13)
1.390.000 ha. (14) 20 ha. 76.000 ha.

C) Rememhrements en cours,
F. (11) B. (12) P.-B. (13)
857.000 ha. 106.000
(4.626 communes)

D) Rememhrements en préparation ou à l'étude.


F. (11) B. (12) P.-B. (13)
1 million ha. env. 75 ha. 422.000 ha.

E) Coût moyen du rememhrement (par hectare).


F. Canton de Vaud P.-B.
5.000 f. f. (15) 1.500 à 1.800 f. s. (16) 1.200 fl. (17)

(11) Au 1~r octobre 1953.


(12) Au 1u octobre 1954.
(13) Au 31 décembre 1953.
(14) Adde les regroupements par échanges (450.000 ha. de 1919 à 1929).
(15) Soit 750 fr. b. En france, les travaux annexes d'amélioration foncière sont
réduits au minimum.
(16) Soit de 18.000 à 21.500 fr. b. environ (y compris d'importants travaux
annexes). Coût d'une simple réunion parcellaire : de 40 à 50 fr. s.
(17) Soit 16,000 fr. b. environ (y compris d'importants travaux annexea).
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Nieuwe Toestand
igendom • Propriété
Situation Nouvelle

après le remembrement.

20S.
INDEX
Les chiffres renvoient aux pages.
La ment-ion (n) signijie que le sujet n'a été abordé qu'en note.

.Accès: 4, 36, 57, 85, 101, 122, 148. Batiments : 50, 113, 118 (n), 146, 162•
.Acte de rememhrement : 124, 128, 149, Biens exclus : 50, 51, 113, 146, 162.
175, 179. Bien de famille : 29, 30, 67, 81.
Actions : 55. Bloc : voy. Périmètre.
AJiénation de hiens ruraux : 29, 31,
Bonification foncière : 180.
136, 137, 190 (n).
Allègements fiscaux (ou exonération) : Bornage : 51, 173.
13, 30 (n), 41, 56 (n), 61 (n), 69, 140, Bourgmestre : 111, 115, 117, 163. -
14.2, 145, 146, 180. Voy. aussi : Maire.
Allemagne: 22 (n), 23 à 25, 27 (n), 30, 106. Brésil : 31.
Amélioration des limites : 103,
Améliorations foncières : 13, 35, 76, 84, Cadastre : 34 (n), 45, 46, 51, 54, 80, 145.
118 (n), 159, 167, 177. Canton (suisse) : 71, 72, 74, 76, 77, 79,
Ancien droit : 82, 103, 104.
- belgique : 18 (n), 66, 141, 150. Chamhre :
- français : 18, 39, 68 (n). - d'agriculture : 45, 46.
Angleterre : 22 (n), 26, 30. - foncière : 136.
Arhrcs : 53, 90, 113, 149, 162, 170. - foncière centrale : 136.
- des notaires : 53 .
.Argentine : 27, 31.
Asile de familie : 81. Chemins : 12, 36, 52, 57, 58, 62, 76, 85,
86, 92, 101, 113, 120, 110, 171.
.Assemhlée des propriétaires : 86, 87, 88,
lll, 113, 114, 116. Chili : 27.
Assemhlée des propriétaires et exploi- Cimetière : 113, 133.
tants : 164 à 166. Classes - classement : 52, 91, 119, 169.
Association : Clöture des opérations : 54, 178.
- agricole : 112. Code civil :
- foncière : 49, 52 (n), 57. - originaire : 18, 39, 52 (n), 106,
- syndicale : 35, 36, 37, 46, 49 (n), 57. 141, 185, 186.
Attrihution préférentielle : 77 à 79, - modifié: 65 à 68, 187, 188.
66 (n). Colonisation intérieure : 29.
Avant-projet : 53. Comité :
Australie : 27. - de direction : 24, 82 .
.Autriche : 23, 91 (n). - d'échanges amiables : 41.
Avocat : 46. - de rememhrement : 166 à 168, 177.
Avoué : 46. - supérieur consultatif d'aménage-
ment foncier : 43, 47.
:Bail : Commission :
- à ferme : 14, 29, 36, 55, 56, 66 (n), - arbitrale : 35, 42.
68, 70 (n), 76, 108, 122, 123, 131 (n), - centrale de techniculture : 83, 99,
133, 149, 154 (n), 176, 177, 178 111, 112, 115, 116, 117, 119, 129,
- perpt'-tuel : 112. 132.

207
- de classification : 88. - de l'enregistrement et des domat•
- communale : 37, 4,2, 43, 44, 45, nes : 46.
47, 51, 52, 53. Dispersion des batiments agricoles : 13,
- consultative : 169. 22, 40.
- départementale : 37, 43, 46, 47, 48, Domaine public : 162, 171.
49, 54. Droit :
- de gestion : 88. - agraire : 32.
- intercommunale : 42, 46. - d'aînesse : 25, 28 (n), 30, 39 (n),
- locale: 111, 115, 117, 118, 124, 125. 107 (n).
Communauté des participants : 24, 76. - de chasse : 161.
- civil : 13, 55, 57 (n), 119, 120, 178,
Commune : 53, 86, 102 (n), 114.
183.
- limitrophe : 53 (n). - d'enregistrement : 124, 129, 14~
Confédération suisse : 96, 103. 143, 144, 145 (voy. aussi : Allège-
Confiscation : 62. ments fiscaux).
Conjoint survivant : 68, 186, 188. - de gage : 103,
- d'hahitation : 112, 121.
Conseil d'Etat : - de pr_éemption : 23, 29, 80, 13-7,
Belgique : 155, 166 (n), 167, 168.
190 (n).
France : 37 ~t 38, 47, 48 et 49, 63, 124. - réel : 35, 53, 55, 108, 115, 128,
Pays-Bas : 112, 124. 147, 164, 175, 176.
Suisse : 72, 82, 86, 87, 89. - de reprise sur prisée : 188, 189. · · ·
Conseil fédéral (suisse) : 75, 104. - successoral : 29 à 31.
Conseil de préfecture : 48 (n). - de superficie : 112; 121.
Conservateur : - de timbre : 124, 129, 142, 143~
- des eaux et forêts : 45. 144, 145.
- des hypothèques : 54, 124, 175. - de veto : 168, 169.
Constitution : Echanges : 8, 12, 34, 35, 37, 41, 43, 4_4.
- beige : 110 (n), 150 à 155, 179. 55, 61 (n), 94, 103, 142, 143. ·
,c.;_ fédérale suisse : 72.
· ~ française : 151. Egypte: 27.
- néerlandaise : 110 (n). Emphytéose : 112.
Cour de cassation : Enclave : 13, 19 (n), 52, 141.
~ Belgique : 93, 178, 184. Enclos : 51, 85, 146, 147, 162.
- France : 37, 66 (n), 67, 70 (n). Enquête : 98, 162 .à 164, 173.
- Pays-Bas: 108 (n), 111, 120, 136 (n). Enregistrement. Voy. : Droits d'enre-
Cour des comptes : 168, 179. gistrement.
Couronne : 112, 124. Envoi en possession : 125.
Cours d'eau : 53, 76. Espagne : 24, 30.
Coût (du remembrement) 56, 90, 100, Estimation : voy. Evaluation. .
102. Etat (intervention de l') : 12, 13, 53; 56.
Coutumes : 141. - Voy. aussi : Subventions.
Etats-Unis : _22 (n), 26, 30.
Danemark : 21, 22, 29, 30. Evaluation : 52, 53, 90 à 92, 118, 125~
Décision (de rememhrement) : 115, 166. 169, 170, 178.
Déclaration : Exploitant : 43, 44, 45, 46, 51, 161, 163.
- des droits de l'homme : 150 (n), 151. Exploitation familiale : 13, 14, 19, 66 à
- universellé des droits de l'homme : 68, 69 (n). ·
151. Expropriation : 57, 58, 61 (n), 62, IiO"
Délaissement : 36. 151 à 155, 168.
Demande (de remembrement) : 44, 112, Fermier : 14, 44, 45, 108, 112, 116, 117"
147. 131, 147, 148, 192. .
Députation permanente : 111, 112, 113, Fidéicommis : 30, 31, 81.
114, 115, 116, 117, 118, 120, 124, 128. Fossé : 12, 52, 125.
Dérayure : 139 (n). Frais :
Dévestiture : voy. Accès. - de remembrement : 13, 24, 55.,
Directeur : 88, 89, 95 à 97, 113, 121. 123"
- des contributions directes et du 125 à 127, 168, 173, 174, 175.
cadastre : 45, 46. - d'entretien : 95.

208

.,

Gêomlitre : 47, 53, 90, 93, 117, 145. - France : 44, 47, 48, 54, 55, 56.
- Pays-Bas : ll6, 126, 129.
Herverkaveling : 15 (n), 108. Ministre de la Défense nationale : 113.
Ilomestead : 30. - des Finances : 54, 55, 56, 145, 166,
Hongrie : 27. 168, 175.
Hypothèque : 55, 88, 97, 119, 121, 122, - des Travaux publics : 166, 168.
125, 129, 134 (n), 141 (n), 173 (n). - Minorat : 77 (n).
Voy. aussi Conservateur. Monuments : 113.
Inaliénabilité temporaire : 80. Morcellement :
•1ncas : 28. - avantage : 21, 141.
- dé:6.nition : 17.
Inde : 25, 29, 31. - exemples : 19 (n), 73, 106, 141.
lndemnité : 53 (n), 55, 61 (n), 112, 118, - inconvénients : 19, 20, 39, 140.
123, 148, 172, 17 4, 178. Morcellisme : 17 (n).
Indivisaire - Indivision : 10, 66, 67, 112, Motivation : 38, 48 (n).
116, 137, 165.
Ingénieur en chef Nederlandse Heidemaatschappij 111,
- des services agricoles : 44, 45, 46.
ll2 (n).
- du génie rural: 36, 44, 46, 47, 51, 56.
Noblesse : 18 (n), 30, 39 (n), 65 (n).
Irlande : 20, 108 (n).
Israël : 28. Norvège : 29, 30.
Italie : 27, 29, 30. Notaire : 35, 45, 54, 65, 103, 124, 125,
128, 149, 182 (n).
Jalon : voy. Piquetage. Nu-propriétaire : ll6, 161, 164.
Japon : 25, 29.
Jardins : 36, 51 (n), 85. Ordre public : 57 (n).
Juge : 103, 161.
- cantonal (ou de paix) : 35, 37, Pacte successoral : 81 (n).
. 44, lll, ll7, 135, 161, 176, 177, Parcellement :
178. - dé:finition : 17.
- commissaire : lll, 114, ll5, 117, - exemples : 19 (n), 35, 73.
118, ll9, 122, 123, 125. - inconvénients : 139, 182 (n).
- du livre foncier : 40.
Partage : 30, 57 (n), 137.
Legs : 18 (n), 67, 124, 128 (n), 189. - des communaux : 18, 61.
- d'une exploitation rurale : 30, 66. - égal: 39.
- inégal : 30, 66.
Lief kind : 66 (n), 141. - judiciaire : 13, 38, 50, 57 (n).
Livre foncier : 40. - des terres : 27.
Loi : 114, 116. Partage d'ascendant : 70, 186, 188.
- foncière : 16.
- fondamentale : 150 (n). Pay3age : 133.
Périmètre : 47, 51, 86, 89, 90, 101, 113,
Maire : 37, 45, 51. Voy. aussi Bourg- 114, 115, 119, 162, 171.
mestre. Petits héritages : 65, 186, 187, 188.
Majorat : 65 (n). Piquetage : 54, 102, ll2.
Majorité (vote) 35, 86, 109, 116, 157, 165, Plan:
Mandataire : 45, 109, 115, 164. - de remembrement : 89, 122, 123,
Maroc : 20, 26. 148, 170, 173.
Mas : 102. - de distribution : 133.
Masse : 42, 52, 108. Plus-value : 53, 95, 149.
Métayage : 36, 45, 56, 192 (n). Polder : 154.
Mine : 16, 50. Préfet : 35, 37, 44, 45, 46, 47, 54.
Mineur (d'äge) : 79. Prélèvement : 52, 124, 172.
Minimum de contenance : 79, 99, 108. Président (de l'assemblée des proprié-
taires) : 111, ll4, 115.
Ministre de l' Agriculture :
- Belgique : 145, 162, 166, 167, 168, Principes généraux du droit : 38.
175, 178. Prise de possession : 99, 123.

209
Propriétaires : 36, 37, 44, 112, 113, 115, Statistiques : 32, 63, 72, 73, 107, 182"
161, 173, 175. 134, 145. - Voy. anssi !'annexe.
- ahsents : 109, 116, 165. Suhrogation réelle : 56, 143.
- exploitants : 45, 161, 173. Suhsides. - Snhventions : 13, 56, 75, 85,
. - non exploitants : 25. 96, 104, 124, 125, 127.
Puhlication - puhlicité : 47, 48, 53, 54, Suède : 23, 27.
55, 98, 114, 117, 119, 125, 163, 170.
Suppléants: 45 (n), 117 (n), 166, 167.
Rapport : 66. Surendettement agricole : 79 (n).
Rehoisement : 10, 43, 58, 59, 70, 76. Sursis an partage : 79.
Recours : 24, 35, 37, 38, 43, 48, 49, 54, Syndicat :
63, 98, 99, 114, 117, 122, 132, 178. - agricole : 35, 36, 37, 46.
Redémemhrement : 29, 30, 57, 99, 137. - de propriétaires : 82, 86, 87, 101.
Redistrihution des terres : 15, 27, 28. Tennessee Valley Authority : 21 (n).
Réduction : 66. Terrain :
Réforme agraire : 14, 17 (n), 18 (n), 26 - à hatir : 50, 76, 80, 85, 113, 162.
(n), 27. - militaire : 113.
Régions dévastées : 17, 34 (n), 37, 41, Terres en friches ou incultes : 51 (n),
108, 142. 53, 58, 62.
Registre foncier : 86, 102. Testament : voy. Legs.
Regroupement cultural : 15, 62, 182 (n). Transcription : 124, 128.
Remaniement parcellaire : 14, 72 (n), Trihunal administratif : 48 (n).
82 et s. Trihunaux judiciaires :
Rememhrement minier : 16. - trihunal de première instance (ou
Rememhrement rural : d'arrondissement) : 13, 38, 49, 50,
- aristocratique : 18 (n), 26. 111, 120, 122, 124 (n), 178.
- avantages : 19 et 20. Urbanisme : 113, 133, 166. - Voy. aussi:
- hut : 13, 35, 50, 130, 158. Rememhrement urhain.
- conventionnel : voy. volontaire.
- définition : 11 et 12, 50, 60, 85, 109. Usufruit. - Usufruitier : 50, 53 (n), 112,
- facultatif : voy. volontaire. 116, 121, 161, 170, 172, 173, 175, 176.
- volontaire : 26, 35 et 36, 107, Valeur:
128 à 130, 144 à 149. - culturale : 52.
Rente (de rememhrement) 125. - passagère : 91.
Réorganisation foncière : 47, 56, 58, 59. - permanente : 90, 91.
Répartition (nouvelle) : 92 à 94, 120 à - de productivité (oude rendement):
122, 148, 172, 173. 36, 52, 78, 189.
- vénale : 78, 119 (n).
Responsahilité (de l'Etat) : 57, 96.
Vente : voy. Aliénation.
Réunion parcellaire : 72 (n), 101, 102,
103. Verger : 36.
Révolution française: 18, 39, 150 (n), 151. Viet-Nam : 27.
Voie d'eau : 122.
Saisie : 122. Voies d'écoulement : 110, 113, 120, 122,
Salaire différé : 69, 80, 189. 170, 171.
Sanctions: 54, 57, 99, 117, 118, 143. Vote : 35, 36, 39, 40, 76, 86, 116, lM,
à 166.
Servitude : 55, 97.
Société nationale de la (petite) propriété Walcheren: 15 (n), 108, 132, 133, 134.
terrienne : 19, 141, 144, 158, 161, 167, W ateringue : 154.
168, 174, 179, 182.
Soulte : 35, 37, 53, 67, 97, 102, 121, 124, Zélande : voy. Walcheren ..
129, 134, 142, 143, 145, 148, 173, 174. Zone de valeur : 169, 170.
Sons-commission : 51, 61. Zuyderzee : 28 (n), 108, 136.

210
Table des Matières

Page
Préface • • • . • • . • 3

PREMIERE PARTIE
lntroduction générale.
Numéro:s
CHAPITRE PREMIER. - Définition et caractéristiques 1 à 10
CHAPITRE II. - Nécessité et avantages • 11 à 20
CHAPITRE III. - Droit comparé 21
a) Pays favorables de longue date) 22 à 23
b) Pays favorables depuis peu . 24 et 25
c) Autres pays 26 à 28
Conclusion 29

APPENDICE
Obstacles légaux au démembrement
LIMINAIRE . . . . 30
a) Interdiction de redémemhrer 31
b) Droit successoral • 32 à 34
c) Conclusion 35 et 36

DEUXIEME PARTIE
Du remembremenl rural en France. Page
LÉGISLATION 33
CHAPITRE PREMIER. - Origines : Numéros
a) XVIII e et XIX e siècles • 1
b) 1916-1939 . . . . . . . 2
1° Lois de 1918 et 1935 . 3 à 5
2° Loi de 1919 . . . . . 6 à 8
CHAPITRE II. - Depuis 1939 :
a) Situation en 1939 . . . . . . 9
b) Législation de guerre et d'après-guerre. 10 à 15
CHAPITRE III. - Du remembrement des exploitations rurales :
a) Introduction . . . . 16
1° Loi de 1941-1945. . . . . 17
2° Décret-loi de 1954 . . . . 18
b) Organismes :
1° Commissions communales . 19 à 22
2° Commissions intercommunales 23
3° Commissions départementales 24 et 25
4° Autres interventions . • . . . 26

211
Numéros
-c) Fonctionnement:
1° Mise en ceuvre 27 et 28
2° Décisions et recours 29 à 32
d) Opérations :
1° Définition et buts 33
2° Exemptions 34
3° Déroulement 35 à 40
.e) Conséquences :
1° Transfert . . 41
2° Cadastre . . 42
3° Droits et actions 43
4° Droits réels 44
5° Servitudes 45
6° Baux 46
7° Principe . 47
f) Coût . . . . 48
g) Associations foncières . 49
h) Remorcellement • . • 50
CHAPITRE IV. - De la réorganisatiortfoncièrè:
a) Objet . . . 51
b) Organismes . . . . . . . . • • 52
c) Portée. . . • . . . . . . . . • 53
:CHAPITRE V. - Considérations gén.érales 54
a) Phases sU:ccessives 55
b) Définition 56
c) Maitres-traits 57
d) Procédés accessoires 58
e) Critiques. - ldées nouvelles 59 et 60
f) Accueil •. 61
g) Résultats 62
Conclusions 63 et 64
APPENDICE
Obstacles légaux au démembrement
.LIMINAIRE . . . . 65 et 66
a) Bien de familie • • • • • • • • • • 67
b) Exploitation agricole familiale :
1° Généralités . . • . . . • • • . 68 et 69
2° Caractéristiques et droit comparé 70 à 73
3° Portée . . . 74 et 75
c) Mesures diverses . 76 à 79

TROISIEME PARTIE
Du remembrement rural en Suisse.
Page
<Législation fédérale . . . • • . . . . 71
Numéros
CHAPITRE PREMIER. - Généralités • 1
Structure politique . • . • . • • 2
Situation agricole de la Suisse 3 à 5
CHAPITRE II. - Aperçu historique de la légialation 6 à 9
· CHAPITRE III. - Le Code civü suisse :
Améliorations foncières. . 10
Attribution préférentielle 12 à 17
Sursis au partage 18

:212
Numéros
Minimum de contenauce 19
Salaire différé 20 et 21
Droit de préemption 22bis
Biens de familie - • . 23 et 24
CHAPITRE IV. - Les législations cantonales 25 à 28
CHAPITRE V. - La législation vaudoise:
Section I. - Législation . . . . . . . . 29 et 30
Section II. - Principes et définition 31 et 32
Section III.-' Etude d'un remaniement parcellaire 33
A. -- Opérations préliminaires. - Constitution des différents
organes qui y participent :
i O lnitiative d'un rememhrement 35
2° Assemhlée des propriétaires 36 et 37
3° Le svndicat. . . . . . . . . 38
4° Les ;tatuts . . . . . . . . . 39
5° Bureau ou direction du svndicat. 40
6° La Commission de classification 41
7° La Commission de gestion . . . 42
8° Aspect financier . . . . . . . 43
9° Le service des améliorations foncières 44
B. -- Opérations de rememhrement . . . . . 45
1° Etablissement du périmètre de l'entreprise 46
2° Estimation des terres . . . . . . . . . 47 à 50
3° Travaux collectifs : chemins et canaux 51
4° Projet de remaniement parcellaire proprement dit :
Répartition des nouvelles parcelles . . . . . . . 52 à 56
5° Répartition des charges : frais d'exécution et frais
d'entretien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57 à 59
6° Suhsides . . . . . . . . . . . . , . • • • • • • 60
7° Remboursement des suhsides et payement des frais . 62 et 63
8° Mutations d'hypothèques, des servitudes et autres
charges . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
9° Enquêtes . . . . . . . . . . . . . . . . . • • 65
10° Contestations. - Recours . . . . . . . . . . . . . 66
11° Prise de possession. Transfert des droits de propriété. 67
12° lnterdiction du morcellement excessif du sol. 68 et 69
Section IV. - Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
CHAPITRE Vl. - La législation vaudoise en matière de« réunion par-
cellaire » • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 71 à 74
CHAPITRE VII. - Procédés complémentaires (législation (édérale) 72
a) Amélioration des limites 76
b) Réunions parcellaires volccteires . . . . . . . 77 à 79

QUATRIEME PARTIE
Du remembrement rural aux Pays-Bas. Page
Législation . 105
LIMINAIRE: Numéros
a) Généralités . 1 et 2
b) Evolution législative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 à 6
CHAPITRE PREMIER. - Du remembrement légal :
lntroduction. - Loi de 1924 • . . . . . . . . 7 et 8
Section I. - Principes et définition . . . . . 9 et 10
Section II. - Caractéristiques de la loi de 1938 11 à 13

213
Numéros
Section III. - Phase préparatoire . . . . . . . . . . . . • . 13 à 18
Section IV. - Deuxième phase : détermination provisoire du bloc
et des chemins et voies d'écoulement . . . . . . 19 à 21
Section V. -Troisième phase : la décision de rememhrement 22
a) Décision de l'assemhlée des propriétaires 23 à 28
b) Arrêté ministériel . . . . . . . . . . . . . 29
c) Loi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
Section VI. - Quatrième phase : puhlication de la décision. Dé-
signation de la commission locale et du juge-commis-
saire. Exécution par provision . . . . . . . . . . 31 à 35
Section VII. - Cinquième phase : détermination des droits de cha-
_cun et estimation des parcelles . . . . . . . . . . 36 à 41
Section VIII. - Sixième phase: Ie rememhrement proprement dit. 42
a) Détermination définitive des chemins et voies d'écoulement. 43
b) Règles de la répartition nouvelle . . 44 à 49
c) Contenu du plan de remembrement . . . . . . . . . . . 50 à 53
d) Fixation du plan de remembrement . . . . . . . . . . 5'1
e) Propriété etc., des nouveaux chemins publics et voies d'écou-
lement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
Section IX. - Septième phase : l'acte, les transferts de prnpriété. 56 à 60
Section X. -· Les frais . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 à 65

CHAPITRE Il. -- - Du remembrement conventionnel :


a) Généralités. . . . . . 66
b) Définition et forme 67
c) Véritables propriétaires 68
d) Adhésions . . . . . . 69
e) Référence au remembrement légal 70 à 72
f) Liberté des conventions 73

CHAPITRE 111 : Considérations générales et conclusio,is :


a) Législations successives . . . 74,
b) Maîtres-traits du régime actuel 75
c) Projet de loi 76
d) Accueil . 77
e) Résultats 78
Conclusions 79 et 80

APPENDICE
Moyens d' éviter le remorcellement
a) Polders de !'ancien Zuyderzee . . . . . . . . 80
b) Loi concernant l' aliénation des terrains agricoles 81 à 85
c) Droit successoral . . . . . . . . . . . . . 86

CINQUIEME PARTIE
Du rememhrement rural en Belgique.
Page
Législation . 139
Lll\UNAIRE: Numéros
a) Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 à 4
b) Evolution de la législation fiscale en matière d'échanges . 5 à 8

214
Nnmêro~
CHAPITRE I. --· Du remembrement volontaire ;
a) Généralités . . . . 9
b) But de la loi . . . . . . 10 et 11
c) Avantages lép;aux 12
d) Biens pouvant être inclus 13
e) Demande . . . . . . . H
f) Titulaires de droits réels, locataires et exploitants 15
g) Conditions de forme . . . . . 16
h) Conditions de fond . . . . . . . . . . . 17
i) lndemnisation des propriétaires. . . . . . 18 et 19
j) Arrêté ministériel et acte de rememhrement 20

CHAPITRE II. - Le remembrement légal et la Constitution . 2) à 35

CHAPITRE III. --- Du remembrement légal et obligatoire:


lntroduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . :l6 à 41
Section I. -- Bnt et caractéristiques dn pro.iet de loi de 1954 •t2 à t5
Section II. Généralités :
a) Organes et autorités appelés à intervenir -it1
b) La Société Nationale de la Propriété Terrienne . 4,7
c) Termes employés dans Ie projet de loi . -18
d) Biens sujets à rememhrement . . . . . . . . ,1,9
Section III. -- Phase préparatoire:
1° Enquête . . . . . . . . so à 52
2° Assemblée et vote du projet :
a) Personnes appelées à y participer 53
b) Convocation . . . . . . . . . 54
c) Mandataires . . . . . . • . . 55
d) Tenue de l'assemblée et modalités du vote 56 à 58
e) Désignation des représentants de l'assemblée an comité S9
Section IV. - Exécution du remembrement :
1° Décision de remembrement 60
2° Le Comité . . . . . . . . . 61 à 67
3° La Commission consultative . 68 et 69
4° Opérations de remembrement :
a) Plan de lotissement et évaluation des parcelles . . . . . 70 à 74
b) Plan de relotissement et attribution des· nouvelles parcelles
aux propriétaires, usufruitiers, exploitants . 75 à 83
c) Frais d'exécution du remembrement 84 à 86
d) Acte de remembrement 87
e) Report des droits réels 88 et 89
f) Report des baux . 90 et 91
g) Recours en justice 92
h) Fin des opérations 93

CHAPITRE IV. - Considérations générales et conclusions:


a) Evolution législative . . • . . . . . 94
b) Maitres-traits du projet de loi de 1954 95
c) Nécessité . 96
d) Accueil •. 97
Conclusion 98 à 101

215
AP~ENDICE
Obstacles lé,aux an remembrement
Numéros
a) Principes du Code civil . . i · . . 102
b) Correctifs insérés dans Ie Code civil 103 à 106
c) Suggestions . . . . . 107
1° Petits héritages . . 108 et 109
2° Partage d'ascendant 110
3° Conjoint survivant 111
4° Droit de reprise sur prisée 112
5° Valeur du rendement 113
60 Salaire différé . 114
Conclusion . . . . . . . . 115 et 116
Page11
Te.ete : Projet de loi beige (1054) 191
4nnexe : Statistiques comparées (France-Belgique-Pay~-Bas) 201
I. Statistiques agricc,les génfrale~.
II. Remembrement rural.
Planrhe : un vi1lage néerlandais avant et après Ie rememhrement . 204
Index 207
Table 211

216

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