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Cours Théorie du Projet 3ème Année L.M.

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Département d’Architecture -Annaba-

CONCEPTION STRUCTURELLE D’UNE FAÇADE

La façade en tant que composante majeure d'un édifice, joue le rôle d'interface avec le monde
extérieur. Elle véhicule plusieurs types de messages, directs, indirects ou symboliques. Elle est
d'après C.ALEXANDER et ALBERT LEVY «l'enveloppe et l'encadrement d'une structure
composée, elle est définie comme système composé, elle joue un rôle intermédiaire de
médiateur entre le projet et l'observateur, c'est un héritage symbolique». Porteuse d'identité,
elle traduit les valeurs patrimoniales des objets architecturaux (valeur esthétique, historique et
architecturale), et participe à la composition du paysage urbain.

La façade est une composante architecturale d'une grande importance. Ses éléments
constitutifs à savoir: les balcons, les ouvertures et les ornementations, ainsi que sa texture ou
encore sa couleur font partie intégrante de la vie sociale des citoyens et de leur vécu quotidien.
Ce sont des éléments permanents et signifiants qui contribuent fortement à la formation de leur
identité collective.

Définition de la façade:
D'après plusieurs auteurs, la façade occupe une place importante dans la conception
architecturale. Le mot façade vient du mot latin «facies» ou la face qui vient de la «perception»
donc du «regard». L'homme préhistorique utilisait la façade comme support pour ces
représentations avant l'écriture et pour transmettre des messages sémantiques mais aussi, des
représentations de la vie sociale et des projections religieuses 1.

«La façade est chacune des faces verticales en élévation d'un bâtiment, on distingue la façade
principale (qui peut être celle de la porte d'entrée principale) ou la façade sur rue, la façade
arrière (opposée à la façade principale) et les façades latérales (plus souvent appelées
pignons), elle appartient certes au bâtiment privé mais la façade côté rue appartient autant au
patrimoine collectif, aux espaces partagés de la ville et à la rue ; la façade exprime ce que l'on
veut faire voir de soi»2

Fig. 1- Façade urbaine (Front de mer d’Alger)

1 T. Herzog, R. Krippner, W. Lang, « Construire des façades », éditions Détails, presses polyethniques
et universitaires, Romandes.
2 Charte architecturale, «Eléments remarquables du bâti, typologie, proportions et rythmes», 2007.
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Selon Euphrosyne T., «la façade n'est plus un simple mur percé d'ouverture, elle est une
enveloppe, une membrane, le lieu de multiples échanges entre l'extérieur et l'intérieur,
l’environnement naturel et le bâti».

A travers l’histoire de l’architecture, la façade architecturale a subit plusieurs transformations


mais elle demeure le centre d’intérêt des architectes pour l’image du paysage urbain, c’est une
composante importante dans le projet architectural ou urbain. Elle représente le premier
élément qui est en relief portant les premiers caractéristiques, fonctionnelle et d’usage de
l’édifice.

Seuils et limites :
Toute relation entre deux lieux ou entre un intérieur et un extérieur procède de deux aspects de
dépendance. Elle aménage à la fois séparation et liaison ou, en d'autres termes, différenciation
et transition, interruption et continuité, frontière et passage. Les seuils et espaces de transition
deviennent «lieu» à leur tour: «lieu où le monde se renverse» Marches, perrons, avant-toits,
portails, portes, balcons, fenêtres ..., tous sont des régulateurs de ce renversement (figure). Ils
contrôlent la perméabilité d'une limite, confirmant la discontinuité spatiale tout en offrant la
possibilité de la franchir, physiquement ou par le regard. C'est le seuil qui révèle la nature de la
limite. C'est la porte ou la fenêtre qui révèle le mur, sa présence et son épaisseur. Mais les
seuils sont plus encore des indices annonciateurs de la nature des lieux auxquels ils donnent
accès ou qu'ils tendent à représenter.

Fig.2- Le seuil, ce lieu où le monde se renverse.

Ainsi les seuils jouent trois rôles qu'ils assument à des degrés divers:

- Un rôle utilitaire: passage pour la porte, lumière et aération pour la fenêtre - ce rôle est
toujours présent, Fonctionnel, peut-être, mais ce n'est pas suffisant pour désigner ce
lieu où le monde se renverse: «Qu'est-ce qu'une porte? Une surface plane comportant
des gonds, une serrure définissant une coupure affreusement dure. Lorsque vous
franchissez une telle porte, n'êtes-vous pas divisé? Fendu en deux ! Peut-être ne le
remarquez-vous plus. Pensez seulement à ceci: un rectangle. Quelle horripilante
pauvreté. Est-ce là la réalité d'une porte?»

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- Un rôle protecteur : passage contrôlé pour la porte, sélection de la vue et choix d'être
exposé ou non au regard de l'extérieur pour la fenêtre. L'adéquation de cet
aménagement dépend d'abord de l'écart qui existe entre le monde de l'extérieur et celui
de l'intérieur. Cette différence a deux aspects, l'un physique et l'autre social. Ainsi, afin
de conserver notre intimité, nous empêcherons de pénétrer un extérieur dangereux,
agressif, bruyant, laid ou simplement trop anonyme. Selon les situations urbaines une
priorité est accordée à l'aspect protecteur, comme c'est le cas pour les portes à cinq
serrures des appartements de New York City ou les triples vitrages d'un immeuble sur
une avenue bruyante.

Les pratiques sociales régissent, d'autre part, l'ampleur de la protection selon les particularités
culturelles des habitants et la destination des bâtiments. Fenêtres, portes et dispositifs
d'entrée, ne sont pas les mêmes en pays musulmans ou en Occident. Parfois ces dispositifs
changent par l'importation d'images qui viennent d'ailleurs ou par des pratiques constructives
qui ont leurs raisons propres.

- Un rôle sémantique: passage significatif pour la porte, œil pour la fenêtre - le caractère
et les valeurs de l'univers qui se trouvent «derrière» sont signalés par des éléments
architecturaux ou par la présence d'objets. Les signes d'un lieu sous-tendent, selon les
conventions sociales en vigueur, des comportements spécifiques de part et d'autre de
la limite.

Même dans des sociétés où le niveau de vie est proche du minimum, nous pouvons observer
que le seuil n'est pas qu'utilitaire ou protecteur. Une attention particulière et un surplus de
travail sont consacrés à l'espace d'entrée et à la porte. Historiquement l'espace de transition
est probablement lié à l’existence- d'un rituel. Dès l'instant où le culte est lié à un lieu, le seuil
naît comme moyen de cette préparation. Dans son ouvrage «Le Sacré et le Profane» Mircea
Eliade parle du rituel lié au seuil de la maison:

«Une fonction rituelle est dévolue au seuil des habitations humaines, et c'est pourquoi il jouit
d'une telle considération. De nombreux: rites accompagnent le passage du seuil domestique:
on lui fait des révérences ou des prosternations, on le touche pieusement avec la main, etc. ».

Les ouvertures, l’âme de la façade :


Parmi les composantes de la façade qui ont une très grande influence sur la définition de la
forme ou la physionomie, deux types d’ouvertures : les portes et la fenêtre. En plus de leur
influence sur la forme, elles ont un rôle symbolique pouvant être un miroir de ce qui se passe à
l’intérieur de la bâtisse, se sont des éléments qui assurent la relation et la transition entre
intérieur et extérieur, expression d’inviter, de dicter une direction…. à travers leurs formes et
leurs répartition sur la façade. Au sens étymologique, l’ouverture est un seuil, le mot seuil
renvois aux termes «sandale» ou «semelle», une planche où l’on pose le pied pour franchir la
porte, l’ouverture est un espace servant1. La porte et la fenêtre fonctionnent très différemment
dans la relation entre intérieur/extérieur.

1 Mestelan Patrick, «L’ordre et la règle», Ed. Presses E.P.F.L, Lausanne, 2006.


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Les fenêtres, yeux de la maison :


Pour un passant ou pour un observateur, la fenêtre transmet des messages sémantiques, aller
vite ou ralentir, attire le regard ou l'interdire. Au sens épistémologique, l'œil et l'ouverture ont la
même origine: en latin «oculus» qui signifie œil de bœuf2, Son premier rôle c'est de permettre
la pénétration de la lumière à l'intérieur de la bâtisse et permet de voir depuis l’intérieur, elle
s'appelle l’ornement de la façade, elle a un rôle esthétique.

Les types de fenêtres dans le mur sont basés sur trois (03) variantes la fenêtre verticale, la
fenêtre horizontale et la fenêtre centralisée (fig.3) mais la fenêtre verticale était le type le plus
utilisé au cours de l'histoire, premièrement pour la pénétration maximale de la lumière et parce
que la fenêtre représente l'homme à la position debout avec une certaine statue1.

Fig.3- La forme de la fenêtre et ses mouvements

Au 19ème siècle en France, la fenêtre verticale fût le type généralement utilisé, le type horizontal
est particulièrement utilisé dans le mouvement fonctionnaliste au début du 20 ème siècle, La
fenêtre centralisée est moins déterminée par les facteurs techniques par rapport à la verticale
et il l'horizontale. Les proportions de ces ouvertures pour longtemps étaient inespérées par la «
divine proportion», intégrant le nombre d'or. L'expression de la fenêtre dépend de la forme et
des motifs décoratifs utilisés :

- La fenêtre verticale lance des mouvements positifs comme un mur vertical, elle exprime
légèreté, exemple une tour dépend de la forme et des motifs décoratifs utilisés,
- La fenêtre horizontale encourage le mouvement latéral, compact et comprimé,
- La fenêtre centralisée donne l'expression d'un trou traversé par un mouvement direct de
l'intérieur.

Le message sémantique de la fenêtre se transmet aussi par l'ornementation utilisée,


décorations sur l'appui de fenêtre, cette dernière peut même montrer si la maison est habitée

Les portes :
La porte est une composante de la façade chargée de mystère, elle ferme lm espace, le
protège, le cache ou au contraire l'ouvre aux regards pour ce qui sombre, secret inconnu. C'est
un lieu de passage entre deux mondes ou deux états, l'inconnu et le connu, le public et le
privé, le profane et le sacré (clans le domaine religieux).

2 Ahier Patrick, «Dimensions écologiques des fenêtres et des baies vitrées dans le bâtiment
d’habitation», certificat international d’écologie humaine, Toulouse, Lisbonne, Bruxelles, 2008
1 Lencolos Dominique et Lencolos Jean Philippe, «Fenêtres du monde», Ed. Le Moniteur, Paris 2001.
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La porte présente une importance dans l'esthétique de la façade, elle marque l'entrée à la
maison, elle est à l’image des ses occupants, ses proportions, sou dessin, son matériau, sa
couleur et son décor sont les éléments variant en fonction de la culture du lieu, du savoir-faire
de l'artisan, de l'époque et de son style. La porte et sa direction d'ouverture expliquent la
relation du mouvement entre l'intérieur/l’extérieur.

• La porte qui tourne vers l'extérieur apporte l'espace intérieur vers nous;
• La porte qui tourne vers l'intérieur mène l'extérieur vers l'intérieur ;
• La porte coulissante s'ouvre entre nous et l'intérieur1.

Fig.4- La direction et l’expression de la porte

Donc la porte est un ouvrage architectural d'une très grande importance avec une portée
sémantique et symbolique. Exemple dans les villes Mozabites en Algérie, les frontons de la
porte sont ornés du croissant emblème de la religion musulmane.

Rapport plein/vide, l'âme de la bâtisse :


Les murs de façades sont opaques, cette opacité est diminuée à laide des ouvertures (portes
et fenêtres), le rapport entre ces ouvertures et la surface du plein du mur de façade varié selon
les style et la période de construction et selon l'expression voulue par l'architecte, les façades à
la période gothique sont légères et souples alors le vide occupait plus d'espace par rapport au
plein.

Il existe d'autres espaces de transition entre l'intérieur et l'extérieur au niveau de la façade en


plus de la fenêtre et de la porte: le balcon, l'avant toit, loggia ..., se sont des espaces jouant un
rôle sociologique important dans la façade, espaces privés et au même temps permettent à
l'habitant d'être associé au spectacle de la rue. En Italie traditionnellement à l'intérieur de leur
théâtre ya eu représentation d'une rue de la ville avec ses balcons 2.

1 Lê Minh NGÔ. «les murs de façades des maisons de quartier Bai Th Xuan à Hanoi: relation entre les
organisations constructives formelles et spatiales et le mode d'appropriation de la façade».
2 David Paul Henri, «Le double langage de l’architecture», Ed. l’Harmattan, Paris, 2003.
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