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Méthodes

scientifiques de
l'archéologie

Les méthodes scientifiques de


l'archéologie incluent des outils
issus des sciences de la nature
permettant à l'archéologue
d'analyser et d’interpréter les
vestiges matériels du passé et
leur contexte, par opposition à
l'historien analysant les sources
écrites.

Fouille archéologique de Gran


Dolina à Atapuerca.

Historique
Fouilles allemandes à Olympie en
1875.

Pendant longtemps, l'intérêt pour


les sociétés du passé s'est
résumé à la collecte d'objets d'art
anciens, que l'on admirait et que
l'on commentait à la façon d'une
dissertation littéraire.
[réf. nécessaire]
Au cours du XXe siècle, les
archéologues se sont attachés à
définir et à expliciter leurs
méthodes, de manière à pouvoir
:
revendiquer un statut de science
pour l'archéologie.

Le travail scientifique commence


par l'observation d'une méthode
stricte dans le travail sur le terrain.
Le matériel dégagé est soumis à
des analyses en utilisant une série
de méthodes scientifiques.
L'interprétation est la synthèse
des résultats.

Comme pour toute discipline


scientifique, le travail doit, in fine,
être validé par une publication
professionnelle.
:
Méthode du travail de
terrain
Les fouilles archéologiques
impliquent, pour mettre au jour les
vestiges, la destruction du reste
de l'information pouvant être
contenue dans les déchets du
chantier : il est impossible de
revenir à l'état initial. Les
prospections sont, au contraire,
non destructives : souvent, elles
précèdent les fouilles.
:
Méthodes de prospection

Prospection au magnétomètre.

La prospection vise à localiser les


sites qui ont été occupés en les
différenciant des espaces vides.
L'observation fine permet de
repérer des anomalies dans le
paysage, telles que de légères
différences visuelles dans la
végétation (indices
:
phytographiques) et dans le
niveau du sol (indices
topographiques). Une
prospection géophysique peut
également être effectuée afin de
mettre en évidence des
différences de résistivité
électrique[1] du sol
(résistivimètre), des légères
différences dans le champ
magnétique terrestre
(magnétomètre) ou encore des
différences dans les
caractéristiques
électromagnétiques du sol
:
(détecteur de métaux).

La prospection pédestre
consistant à un simple ramassage
systématique des débris a par
exemple permis de localiser et de
dater les habitats des premiers
Israélites, sur les hautes terres de
Cisjordanie.

Stratigraphie des fouilles


:
Stratigraphie du site préhistorique
de Coudoulous.

La stratigraphie, au cœur de la
fouille archéologique, est une
méthode inspirée de la géologie
qui permet de comprendre et
d'analyser les données du terrain.
Elle consiste à identifier chaque
strate du terrain correspondant à
la même période. En général, une
:
strate qui en recouvre une autre
est plus récente et les couches
sont d'autant plus anciennes
qu'elles sont plus profondes.
Cette règle n'est cependant pas
absolue. Les fondations d'une
construction, par exemple,
traversent localement des strates
plus anciennes. Des remblais
peuvent ramener un matériau
ancien par-dessus des couches
plus récentes. Une même strate
peut ainsi se trouver morcelée, ce
qui complique l'identification des
niveaux archéologiques.
:
Techniquement, on identifie une
unité stratigraphique pour chaque
événement réel ; on repère les
interfaces entre ces unités ; on
établit la chronologie des unités et
on synthétise le déroulement
temporel dans un diagramme
logique dit diagramme de
Harris [2] conçu
(en) par Edward
Harris.

Méthodes scientifiques
d'analyse
Le matériel fourni par la
:
stratigraphie est soumis à une
série d'analyses qui permettent
de le caractériser.

Classement par type

Fragments de céramique classés


typologiquement.

La typologie, méthode inspirée


des sciences naturelles, consiste
à classer les vestiges selon leur
ressemblance et leur
dissemblance et à les localiser
:
dans l'espace et dans le temps en
les rattachant à un contexte. L'axe
diachronique distingue, dans
l'analyse, l'évolution à l'intérieur
d'une série archéologique. Pour
l'axe synchronique, la
problématique s'oriente vers les
fonctions ou les utilisations des
différents objets. On met alors en
évidence[3] deux types de
structures : la partition (rupture)
ou la sériation (continuité de
proche en proche). Chaque
culture archéologique est,
finalement, périodisée, c'est-à-
:
dire découpée en phases
chronologiques.

Les méthodes statistiques sont


de plus en plus utilisées. L'analyse
factorielle des données, par
exemple, permet de mieux
encadrer les facteurs subjectifs,
en définissant des axes
factoriels[4] au sein des nuages
de données et en hiérarchisant
leur importance dans les
ressemblances ou les
dissemblances entre ces
données. Cette analyse est une
:
science expérimentale qui se
fonde sur des référentiels
actualistes et qui part toujours
d’une question archéologique.
Lors de l’analyse fonctionnelle,
chaque fonction doit être
recensée, caractérisée, ordonnée,
hiérarchisée et valorisée grâce à
l’analyse de résidu présent sur
l’objet. On détermine aussi, les
fonctions principales, les
fonctions secondaires et les
fonctions contraintes d’un vestige.
Il est important de faire ce
recensement afin d’effectuer un
:
dimensionnement correct des
caractéristiques de l’objet
archéologique. Ces analyses
permettent ainsi de vérifier la
compatibilité entre des
observations expérimentales et
archéologiques. Pendant l’analyse
il est important de définir la dureté
de la matière travaillée, la
cinématique de même que l’angle
d’attaque du tranchant.

Datation par type

Le style des poteries est


:
beaucoup utilisé, pour les cultures
de l'âge du bronze et de l'âge du
fer, afin d'obtenir une première
datation à partir de débris de
poterie contenus dans une unité
stratigraphique.

Datation par le carbone 14

Le carbone 14, produit par les


rayons cosmiques, se trouve
intégré aux organismes vivants
par le cycle du dioxyde de
carbone. À la mort de l'organisme,
du fait de la radioactivité qui le
:
caractérise, l'abondance de cet
isotope par rapport au carbone 12
décroît au cours du temps. La
mesure de cette abondance, au
moyen d'un compteur ou d'un
spectromètre de masse, permet
de déterminer le temps écoulé
depuis la mort de l'organisme.
Cependant, l'abondance initiale a
légèrement varié au cours du
temps, ce qui impose de procéder
à une correction, appelée
étalonnage[5], désormais prise en
compte. La spectrométrie de
masse permet désormais de
:
travailler sur de très petites
quantités de matériaux
organiques, telles qu'un noyau
d'olive ou quelques graines. De
plus, un traitement statistique
sophistiqué de plusieurs
prélèvements indépendants
permet d'affiner le résultat. Pour
les datations à l'âge du bronze ou
à l'âge du fer, la marge d'erreur
est désormais de l'ordre de +/- 20
ans[6], de l'ordre d'une génération,
ce qui rend désormais la datation
par le carbone 14
particulièrement appréciée[7].
:
Le dosage entre le carbone 14 et
le carbone 12 permet des
datations jusqu'à 40 000 ans. Le
dosage entre l'uranium et le
thorium permet de dater des
échantillons de 10 000 à
350 000 ans, celui entre le
potassium et l'argon au-delà de
500 000 ans (surtout utilisé en
géologie).

Autres méthodes de
datation absolue

Article connexe : Datation


:
absolue.

Observation d'un échantillon pour


une étude dendrochronologique.

La dendrochronologie fournit la
courbe de calibration du carbone
14[8]. L'observation des cernes de
croissance du bois permet de
définir des séquences
caractéristiques, pour une
essence donnée et une même
contrée. On recale ainsi, avec des
arbres de plus en plus anciens,
l'ordre des cernes, jusqu'à 7000
:
ans pour le chêne en Allemagne
ou en Irlande ou pour le pin en
Californie. La date fournie est celle
de l'abattage de l'arbre, avec une
précision de 1 an.

La thermoluminescence permet
de mesurer l'énergie stockée au
cours du temps dans des
éléments initialement chauffés
tels que pierres de foyers,
céramiques, traces d'incendies,
etc. Pour ce faire, on chauffe à
nouveau le matériau et on mesure
la lumière émise lors du
:
dégagement des électrons piégés
au cours du temps. Ce piégeage,
dans des pièges cristallins, se
produit au cours du temps sous
l'action de la lumière ambiante.

L'archéomagnétisme est la
détermination du champ
magnétique terrestre (orientation
et intensité) grâce à l'oxyde de fer
des argiles, fossilisés lorsqu'ils ont
été chauffés à plus de 680 °C
(soles de foyers retrouvés telles
quelles à l'endroit où elles ont été
utilisées)[9]. La précision est de
:
20 ans pour le dernier millénaire.

Techniques de fabrication

La connaissance détaillée des


techniques de fabrication
(approvisionnement, outillage,
transmission du savoir-faire) est
essentielle pour comprendre les
sociétés du passé, car la
conception de la technique est
étroitement liée au social. On
identifie l'origine des matières
premières (silex, argile, cuivre,
étain pour le bronze, fer). Les
:
traces d'utilisation sur les outils
(usure des surfaces) permettent
de reconstituer leur usage. Les
traces de résidus alimentaires,
soumises à des analyses
physico-chimiques, fournissent
des informations chrono-
culturelles.

L'expérimentation vient compléter


l'analyse. La technologie de la
taille des silex est comprise et
reconstituée. La reconstitution de
maisons du Néolithique permet
d'évaluer la quantité de matériaux,
:
la main-d’œuvre et le temps
nécessaires[10].

Caractérisation des
matériaux

On sait déterminer la provenance


exacte de chaque argile
(minéralogie et chimie) et
reconstituer son mode détaillé de
cuisson à partir des
transformations que ses
composants (quartz, calcium,
feldspaths) ont subies. Les
observations de la microstructure
:
des métaux permettent
d'identifier les procédés de
formage, de reconstituer la chaîne
de fabrication et d'évaluer la
qualité du savoir-faire
technique[11].

Caractérisation
environnementale

L'étude du paléoenvironnement
concerne la reconstitution des
paysages et des actions
humaines (fumures, brûlis etc.), le
climat, l'archéobotanique (pollens,
:
graines et fruits de semences,
sélection des plantes, gestion
forestière) et l'archéozoologie
(évolution des espèces,
domestication, gestion des
troupeaux, techniques de
découpe bouchère).

On étudie également
l'archéologie funéraire, la
démographie, l'état sanitaire des
populations et la paléobiologie[12]
(détermination du régime
alimentaire par analyse isotopique
à partir de l'étude des os,
:
génétique à partir de l'ADN).

Notes et références
1. Demoule et al. 2009, p. 52-
54.
2. Demoule et al. 2009, p. 71.
3. Demoule et al. 2009,
p. 155.
4. Demoule et al. 2009,
p. 169.
5. L'étalonnage peut se faire
sur une autre strate
exactement datée par
ailleurs, choisie aussi
proche que possible de la
:
proche que possible de la
mort de l'organisme.
6. Voir par exemple « Ladder
of Time at Tel Rehov », A.
Mazar et al. (http://www.reh
ov.org/Rehov/publications/
Chapter13%20Ladder%20
of%20Time%20at%20Tel%
20Rehov%20-Mazar%20et
%20al.pdf) [archive], dans
The Bible and Radiocarbon
Dating : Archæology, Text
and Science, edited by
Thomas E. Levy and
Thomas Higham, éditions
Equinox, 2005.
:
Equinox, 2005.
7. Voir La Bible dévoilée et
Israël Finkelstein,
bibliographie sur les
récentes datations par le
carbone 14.
8. Demoule et al. 2009, p. 92-
93.
9. Le champ magnétique
terrestre varie au cours du
temps et
l'archéomagnétisme permet
la datation à partir de
l'histoire de cette variation.
10. Demoule et al. 2009,
p. 126-128.
:
p. 126-128.
11. Demoule et al. 2009,
p. 125-126.
12. Demoule et al. 2009,
p. 120-125.

Voir aussi

Bibliographie

Jean-Paul Demoule, François


Giligny, Anne Lehoërff et Alain
Schnapp, Guide des méthodes
de l'archéologie, Paris, La
Découverte, coll. « Grands
Repères / Guides », 2009,
:
3e éd., 330 p.
(ISBN 978-2-7071-5825-3)
Philippe Jockey, L'Archéologie,
éditions Belin, 1999
(ISBN 2-7011-1938-3)
Stéphanie Thiébault, Pascal
Depaege, L'Archéologie au
laboratoire, éditions La
découverte, 2013
(ISBN 2-7071-7648-6)

Articles connexes

Archéologie| Archéologie
préventive| Institut national de
recherches archéologiques
:
préventives
Archéologie numérique
Études d'archéologie en France

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