Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
OCTOBRE 2016
PANORAMA
Baromètre risque pays 3ème trimestre 2016
Le prix du pétrole, thermomètre des émergents,
à nouveau au cœur des préoccupations
LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE Par les économistes du Groupe Coface
L
les pays de l’OPEP doivent encore se met-
les esprits, tant l’idée d’une planent toujours sur l’économie mondiale. tre d’accord le 30 novembre sur leurs
sortie du Royaume-Uni de La question de la faiblesse du commerce cibles de production d’une part et qu’ils
l’Union européenne (UE) mondial revient au cœur des débats, et doivent ensuite les respecter d’autre part.
semblait improbable. Le choc un rebond vigoureux n’est pas attendu. C’est loin d’être gagné, les besoins de
du Brexit le 23 juin dernier a Par ailleurs, le prix du pétrole ne s’est court terme prenant souvent le pas sur la
fait trembler les marchés financiers mon- pas redressé significativement et peine logique de long terme. Par ailleurs en cette
diaux. Tous les yeux se sont alors tournés à dépasser durablement les 50 USD le fin d’année les yeux seront rivés vers la
vers le Royaume-Uni, mais Theresa May, baril de Brent, ce qui conduit à nouveau à Fed, qui pourrait relever ses taux lors de la
la Première ministre britannique vient des déclassements de plusieurs pays dont réunion du comité de politique monétaire
seulement d’annoncer qu’elle activerait l’activité est étroitement liée à l’évolution de décembre.
l’Article 50 avant fin mars 2017. A partir du paysage pétrolier et des matières pre-
de là sera lancée la procédure de sortie mières plus généralement (Nigéria, Oman, Les bonnes nouvelles toutes relatives
de l’UE, qui doit théoriquement durer Mongolie, Trinité et Tobago). La dernière viennent toutefois du Brésil et de la
deux ans, mais qui pourrait s’avérer en réunion de l’OPEP le 28 septembre dernier Russie. Bien que ces économies conti-
réalité beaucoup plus longue. Sans sur- a mené à un accord sur un niveau de pro- nuent de faire face à une situation très
prise ce choc nous conduit à réviser duction autour de 33 millions de barils par dégradée, le point bas semble être
l’évaluation du pays en A3, tant l’incerti- jour (Mbj). Qualifié « d’historique », cet atteint sur le plan macroéconomique et
tude est grande et pèse sur la confiance accord ne devrait pourtant pas remettre ces pays devraient progressivement
des agents, avec un impact négatif du en cause l’existence des fondamentaux entrer dans une période de convales-
choc potentiellement inquiétant lors de amples qui prévalent sur le marché, et une cence. Cela ne s’est toutefois pas encore
la sortie effective du Royaume-Uni de l’UE. progression seulement modérée du prix traduit par des signes d’amélioration au
du pétrole. Cela est d’autant plus vrai que niveau des entreprises.
Octobre 2016
(1) Etude Coface « Le risque politique va-t-il « gâcher la fête » en 2017 ? », septembre 2016
PANORAMA RISQUE PAYS 3
GROUPE
En outre, les déceptions s’accumulent du côté du de France (3), le ralentissement s’explique, au-delà
commerce mondial comme en attestent les fortes de la diminution des coûts des échanges, par la
révisions à la baisse des dernières prévisions de réduction de la demande de la zone euro et le
l’OMC (Organisation mondiale du commerce) de rééquilibrage de la croissance chinoise vers sa
la croissance du commerce mondial, qui publie demande intérieure (la production répond davan-
désormais une fourchette pour 2017 (+1,7 % en tage aux besoins de la demande interne). Les
2016 et entre +1,8 et +3,1 % en 2017) (2). La révision auteurs considèrent néanmoins que l’élasticité uni-
de plus d’un tiers à la baisse de la croissance du taire du commerce mondial à la croissance de long
commerce mondial interroge. D’après la Banque terme n’est pas remise en cause. Le commerce ne
devrait ainsi redémarrer que de manière progres-
Graphique n° 2
Commerce mondial : Montée du protectionnisme
sive l’an prochain comme le souligne les études du
Ministère de l’économie et des finances français
Ouverture au Barrières
commerce et taxes (DG Trésor) (4) et du FMI (5), et sa croissance ne
(% du PIB) (indices) devrait pas être durablement plus forte que celle
60 8 de l’activité mondiale à court terme. Enfin, comme
le fait remarquer le FMI et CEPII (6), le risque de
protectionnisme resurgit dans ce contexte, les
mesures dans ce sens étant de plus en plus nom-
45 6 breuses même si elles concerneraient une part
limitée des échanges mondiaux pour le moment.
A titre d’exemple, le ratio d’ouverture commerciale
(7)
a baissé de 6,6 pts de PIB entre 2007 et 2015 et
le nombre de de taxes sur le commerce ainsi que
30 4
les barrières réglementaires ont augmenté depuis
la crise (cf. graphique n°2).
Graphique n°3
Taux de croissance (%)
10
2015
2016
2017
8 7,5 7,5
7,3
6,9
6,5
6,1
6
4,2
4 3,7
3,2 3,4
3,0
2,3 2,2 2,4
2 1,9 1,8 1,7 1,9
1,6 1,5 1,6 1,7 1,6 1,4
1,5
1,6 1,5
1,1 1,3
0,9 1,0 0,9 0,8 0,8
0,6 0,5 0,5 0,6
-1,0
-2
-3,4
-4 -3,8 -3,7
és uro nc
e ne lie gn
e ni n is nts és
il
ssi
e e ine
nc ee ag Ita e-U po Un rge Br Ind Ch
va on Fra em spa m Ja ts- Ru
ysa Z All E ya
u Eta éme
Pa Ro ys
Pa
Source : Coface
(2) WTO, « Trade in 2016 to grow at slowest pace since the financial crisis », press release, 27 septembre 2016. Les révisions à la baisse ont été marquées en
Amérique Latine, en Asie et aux Etats-Unis.
(3) Banque de France, Rue de la Banque n°30, « Le rôle de la Chine dans le ralentissement des échanges commerciaux », septembre 2016
(4) DG Trésor, Trésor Eco n°166, « Comment expliquer la faiblesse du commerce mondial ? », Avril 2016
(5) Aslam & alii, FMI, « Entretenir les rouages du commerce international », septembre 2016
(6) Sébastien Jean, CEPII, « La croissance du commerce mondial en deçà des attentes de l’OMC. Comme prévu ! », billet du 29 septembre 2016
(7) Calculé comme le rapport de la somme des valeurs des exportations et des importations sur le PIB en dollars.
4 PANORAMA RISQUE PAYS
GROUPE
Encadré n°1
Quel impact des taux négatifs sur les entreprises ?
Quelles banques centrales SR), d’autres ont souhaité limiter les et l’immobilier. L’effet richesse qui en
appliquent un taux négatif ? effets de débordements associés aux découle et l’augmentation du crédit
Alors que la théorie économique laisse politiques monétaires non convention- ont ainsi un impact positif sur la
peu de place à l’idée d’un taux d’inté- nelles dans le but de limiter l’apprécia- demande et l’investissement. Quant au
rêt négatif, voilà que neuf banques tion de leurs devises qui servent de gain de compétitivité-prix des entre-
centrales pratiquent aujourd’hui une valeur refuge (DNB, SNB). prises, le canal du taux de change l’ex-
politique de taux d’intérêt négatif plique. Face à la mise en place dans un
(NIRP). Historiquement pourtant, la Quels sont les canaux pays donné d’un NIRP, l’investisseur
Suisse et la Suède avaient déjà franchi de transmission ? découragé d’investir dans la devise du
le rubicond en appliquant temporaire- En théorie, la mise en place d’un NIRP pays cherchera des rendements supé-
ment un NIRP : dans les années 1970 engendre une augmentation de la rieurs ailleurs. La devise du pays en
pour la première, en 2009 pour la consommation des ménages et de l’in- question perd alors de son attractivité
seconde. Actuellement, les pays prati- vestissement privé et un gain de com- ce qui pèse sur le taux de change qui
quant un NIRP représentent un quart pétitivité-prix pour les entreprises. Le se déprécie, améliorant la compétiti-
du PIB mondial. La banque centrale du premier effet est expliqué par deux vité-prix des entreprises.
Danemark (DNB) a été la première à canaux de transmission : le taux d’in-
en instaurer durablement un en 2012. térêt et le portefeuille d’actifs. L’intro- Est-ce que ces effets sont
Suivi par la BCE en 2014, la Suisse duction d’un NIRP affecte indirec- réellement observés ?
(SNB), la Suède (SR) et la Norvège tement le crédit. C’est en effet à tra- Selon l’enquête Bank Lending Survey
(NB) en 2015 et enfin le Japon (BOJ), vers la baisse du taux interbancaire, (BLS) de juillet 2016 réalisée par la
la Hongrie (MNB), la Bulgarie et la qui entraîne un recul de l’ensemble des BCE, les conditions de crédit aux
Bosnie Herzégovine en 2016. taux, ainsi que des conditions de finan- entreprises se sont à nouveau amélio-
cement sur les marchés obligataires, rées et la demande de crédit continue
L’application du NIRP diverge en que la croissance du crédit s’accélère. de progresser au deuxième trimestre
revanche sur le taux ciblé et la raison Le deuxième effet (portefeuille d’ac- 2016 (cf. graphique n°4). La croissance
de la mise en place de cette politique. tifs) est dû au programme d’achat du crédit aux entreprises s’est ainsi
Dans le cas de la BCE, de la BOJ ou d’actifs par la BCE (ou les autres nettement redressée depuis l’introduc-
encore de la DNB, le taux de dépôt a banques centrales pratiquant un QE). tion du NIRP par la BCE, passant d’une
ainsi été ciblé alors que la SR a, en plus L’achat massif d’obligations souve- contraction de -2,6 % sur un an à fin
du taux de dépôt, fait passer son taux raines abaisse les taux longs et aplatit mai 2014 à une expansion de 1,3 % à
directeur en territoire négatif. Alors donc l’ensemble de la courbe des fin juillet 2016. La BCE a estimé que le
que certaines banques centrales ont taux. Les rendements n’étant plus NIRP a contribué à environ un point de
adopté un NIRP en réponse à la faible suffisamment attractifs pour les inves- pourcentage à la croissance du crédit
demande interne et à un niveau d’in- tisseurs, ceux-ci se reportent sur entreprise depuis juillet 2014 (Rosta-
flation inférieur à leur cible (BCE, BOJ, d’autres actifs, notamment les actions gno (8)). Par ailleurs, l’enquête sur
l’accès au financement des entreprises
Graphique n° 4
Entreprises : conditions d’octroi de crédit et demande de prêts en zone euro
(SAFE) de la BCE de juin 2016 montre
que la disponibilité des sources de
80 Pourcentages nets financement externe des PME s’amé-
liore à nouveau et que les banques
Introduction du NIRP,
sont davantage prêtes à leur octroyer
60 juin 2014
un crédit. L’amélioration de l’environ-
nement macroéconomique en zone
40 euro et l’introduction du NIRP ont eu
un impact positif sur plusieurs com-
20 posantes du PIB. La consommation
des ménages est passée de 1,3 % au
deuxième trimestre 2014 à 2,1 % au
0
premier trimestre 2016, tandis que l’in-
vestissement privé est passé de 1,7 %
-30 à 3,8 % sur la même période. L’impact
sur le taux de change euro face au
-40 Conditions de crédit observées pour le dernier trimestre dollar a également été significatif, il
Demande de prêt anticipée pour le dernier trimestre
Dernières données disponibles : Conditions de crédit observées pour le trimestre à venir s’est déprécié de 18 % entre juin 2014
T2 2016, anticipations pour le T3 2016
Demande de prêt anticipée pour le trimestre à venir et août 2016. La dépréciation de l’euro
-60
semble toutefois profiter, en théorie,
T1 2003
T3 2003
T1 2004
T3 2004
T1 2005
T3 2005
T1 2006
T3 2006
T1 2007
T3 2007
T1 2008
T3 2008
T1 2009
T3 2009
T1 2010
T3 2010
T1 2011
T3 2011
T1 2012
T3 2012
T1 2013
T3 2013
T1 2014
T3 2014
T1 2015
T3 2015
T1 2016
T3 2016
(8) Rostagno and others., 2016, « Breaking through the zero line : the ECB’s negative interest rate policy », Presentation at Brooking Institution “Negative interest
rates: lessons learned… so far”), 6 juin, disponible sur la page internet: https://www.brookings.edu/events/negative-interest-rates-lessons-learned-so-far/
PANORAMA RISQUE PAYS 5
GROUPE
Vers une baisse de la entraînerait une baisse de 7 points de redistribué les ressources des épar-
profitabilité des banques ? base de la marge nette d’intérêt), le gnants nets aux emprunteurs nets.
Un effet négatif pourrait toutefois seuil à partir duquel le NIRP devient Comme les derniers ont une propen-
apparaître si l’environnement de taux contre-productif est proche. Pour limi- sion marginale à consommer supé-
négatifs devait se prolonger dans le ter l’impact négatif du NIRP sur la pro- rieure aux premiers, ceci supporte la
temps, dans la mesure où les prêts aux fitabilité des banques, la BCE et les consommation de l’économie. Toute-
entreprises et aux ménages dépen- autres banques centrales ont adopté fois, ce même effet pourrait à l’inverse
dent de la profitabilité des opérations plusieurs mesures. L’augmentation du contraindre certains épargnants à
de prêts, qui est en baisse. L’introduc- QE et la mise en place d’un TLTRO 2 accroître leur épargne pour compen-
tion du NIRP aplatit la courbe des par la BCE en mars 2016 ; l’introduc- ser la perte de la rémunération de leur
taux. C’est ce phénomène qui réduit la tion d’un système de taux de dépôt à capital, réduisant ainsi leur consom-
marge nette d’intérêt (9) de la banque plusieurs niveaux (taxant ainsi seule- mation. Enfin, le NIRP pourrait avoir à
et qui mène donc à une baisse de la ment les dépôts excédentaires) pour terme un impact sur la stabilité finan-
profitabilité. La perte de confiance la BoJ, la DNB ou encore la SNB. En cière. Les banques pourraient en effet
des investisseurs et de volonté des outre la BoJ s’est engagée à pour- vouloir accroître leur exposition au
banques d’octroyer des crédits pour- suivre les achats d’obligations d’Etat risque en abaissant la qualité des
rait engendrer un ralentissement de la afin de conserver le taux souverain contreparties exigées lors d’une
croissance des prêts. L’enquête BLS 10 ans proche de 0 % pour la BoJ. Les demande de prêt, ou en augmentant
montre en effet que 80 % des banques banques commerciales ont en effet pu les prêts à destinations des PME
interrogées estiment que le NIRP contrebalancer l’effet négatif du NIRP (comme le suggère l’enquête SAFE)
contribue à la baisse de leur revenu jusqu’à présent via une hausse du afin de générer davantage de revenu.
net d’intérêt (10). Par exemple, la Com- volume des prêts même s’ils restent Or historiquement, les PME enregis-
merzbank a quantifié le coût du NIRP limités par la réglementation, la baisse trent des taux de défaut supérieurs
sur ses revenus liés aux prêts bancaire des dépenses d’intérêt et du risque de aux ETI et aux grandes entreprises. Par
à 161 millions d’euros. Le FMI estime provision et des gains en capital. ailleurs, le risque lié à l’émergence
que même si le NIRP a jusqu’à présent d’entreprises « zombies », dont l’acti-
un faible impact sur la marge d’intérêt D’autres effets négatifs vité pourrait être maintenue grâce à
nette des banques (une baisse de à venir du NIRP ? des financements à taux artificielle-
50 points de base du taux d’intérêt La faiblesse des taux d’intérêt a surtout ment bas, est aussi à surveiller (11).
(9) Différence entre le taux d'intérêt auquel prête une banque et le taux d'intérêt auquel elle se refinance sur les différents marchés de capitaux.
(10) Mesure la rentabilité d’une banque. Solde entre les crédits et les dépôts.
(11) Banque de France, Rue de la Banque n°29, « Des entreprises insolvables survivent-elles grâce à des crédits à taux trop bas ? », septembre 2016
6 PANORAMA RISQUE PAYS
GROUPE
Graphique n° 5
Royaume-Uni : vers une augmentation du niveau des défaillances
La croissance a affiché une modeste performance
9,0%
Défaillances
2,5% en zone euro au 2ème trimestre (+0,3 % au T2 après
PIB (ED) +0,6 %), en lien notamment avec l’atonie de la
demande domestique. Les résultats ont cepen-
dant été disparates : l’Allemagne et l’Espagne ont
4,5% 2,0%
bien résisté et devraient ainsi afficher cette année
des taux de croissance légèrement plus élevés que
prévu précédemment, tandis que la France ou
0,0% 1,5%
encore l’Italie ont affiché une croissance proche de
zéro et les prévisions sont restées stables ou en
baisse.
politique fragile ne semble pas avoir d’incidence spéculative constitue toutefois une source
négative forte sur l’activité économique du pays d’inquiétude pour le pays. Dans ce contexte les
pour le moment, et le pays a eu droit à un délai investisseurs pourraient devenir plus méfiants et
supplémentaire jusqu’en 2018 pour faire passer le des fuites de capitaux pourraient se matérialiser.
déficit public sous le seuil des 3 % du PIB (13).
Graphique n° 7
Turquie : Arrivées de touristes
Les émergents, (g.a)
40%
des nouvelles mitigées
Le Brésil montre des signes de progrès même s’il 30%
demeure englué dans une situation économique
encore difficile. En effet l’activité ralentit toujours, 20%
avec -0,6 % au T2 sur un trimestre (après -0,4 %
10%
au T1), mais à des rythmes bien inférieurs à ceux
de l’an dernier (-1,5 % en moyenne par trimestre).
0%
Néanmoins la situation reste fragile comme en
atteste la dernière publication de l’indice produc-
-10%
tion industrielle qui a chuté de 3,8 % en août sur
un mois, soit la plus forte chute depuis janvier 2012 -20%
et un chiffre bien plus négatif qu’anticipé par le
consensus. Le contexte politique se clarifie pro- -30%
gressivement avec l’approbation par le Congrès le
31 août dernier de la destitution de Dilma Rousseff. -40%
L’ancien président Lula devrait aussi être jugé dans Dernière donnée disponible: Juillet 2016
le cadre du scandale de corruption Petrobras. Ainsi -50%
les perspectives semblent s’améliorer lentement 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016
avec un redressement des indicateurs financiers
Source : Turkstat
depuis le début d’année (change, bourse, spreads),
et un repli de l’inflation qui laisse suggérer une
baisse prochaine du taux directeur, d’où un léger
redressement de la croissance à attendre l’an pro- En Asie, du côté de la Chine, la situation écono-
chain (+0,6 % de croissance en 2017 après 3,4 % mique s’est stabilisée au 1er semestre (+6,7 % de
selon nos estimations). La Russie semble égale- croissance) mais les déséquilibres ne se corrigent
ment avoir également atteint un point bas dans toujours pas, notamment au vu de la poursuite de
un contexte de stabilité du prix du pétrole depuis la croissance du crédit. Dans ce contexte le der-
ces six derniers mois et partant du rouble. nier rapport de la BRI en septembre confirme nos
craintes concernant la situation bancaire: le rap-
En Turquie, en plus de la répétition d’attentats, la port met en évidence la surchauffe financière du
tentative de coup d’Etat a provoqué une purge et pays avec un « credit to GDP gap » qui s’établit à
le secteur touristique (autour de 4 % du PIB et la 30,1 soit un niveau de risque très élevé (le plus
part relative du tourisme dans la création d’em- élevé des 23 pays étudiés), un niveau de 10 signa-
plois sur 2009-2013 était supérieure à 16 %) a été lant qu’une crise bancaire est probable ces 3 pro-
considérablement affecté par cet accroissement chaines années. Ce niveau est également haut
de l’insécurité. Les arrivées de touristes ont baissé comparé par exemple au Japon (4,1) ou d’autres
jusqu’à 40 % en juillet dernier (cf. graphique n°7). pays émergents comme le Brésil à 4,6.
La consommation privée, moteur de la croissance,
semble commencer à montrer des signes de fai- En Inde, la situation reste également délicate et
blesse (ventes au détail en baisse de 2,7 % en g.a à surveiller même si le dernier rapport de la BRI
en juillet, mois de la tentative de coup d’Etat). ne met pas en évidence un risque élevé. La
Cela nous conduit à réviser à la baisse nos prévi- réforme bancaire est positive et devrait assainir
sions de croissance à 3,0 % en 2016 et 2017. Le les bilans. La première loi concernant les faillites
pays devant faire face à un important besoin de adoptée en mai 2016 devrait aider les créditeurs
financement extérieur, l’évolution du taux de dans ce process puisqu’il autorise les banques à
change méritera d’être surveillée (d’autant plus prendre le contrôle des entreprises défaillantes.
dans un contexte de possible resserrement de la Le risque qui pèse sur les entreprises est lié seule-
politique monétaire américaine). La dégradation ment aux grandes entreprises publiques, surtout
de l’environnement institutionnel et du climat des dans les secteurs des infrastructures et des matières
affaires devrait commencer à affecter l’investisse- premières. Néanmoins les PME pourraient aussi
ment. Néanmoins la livre ne s’est pas écroulée vis- souffrir davantage de la situation car même si leurs
à-vis du dollar lors de la tentative de coup d’Etat, bilans est plus sain, elles peuvent être en affaire
et le rapprochement en cours avec la Russie, avec les grandes compagnies.
l’Egypte et l’Israël sont de nature à favoriser à nou-
veau les échanges commerciaux. La récente Le Nigéria a été caractérisé par une récession
dégradation de l’agence Moody’s de la notation au premier semestre. La situation reste très délicate
souveraine du pays en septembre en catégorie pour le pays malgré le faible poids du secteur
(13) Etude Coface « Le risque politique va-t-il « gâcher la fête » en 2017 ? », septembre 2016
8 PANORAMA RISQUE PAYS
GROUPE
pétrolier dans le PIB au vu de l’importance du poids parallèle persiste, en lien notamment avec la
des hydrocarbures d’un point de vue des recettes persistance de mesures de restrictions d’alloca-
d’exportations (90 % du total) et budgétaires (75 % tions de devises, ce qui explique notre décision
du total). La croissance du pays devrait ainsi être de déclasser le pays.
négative car le Nigéria subit une double peine, avec
d’une part la chute du prix du baril et son maintien A l’inverse les perspectives en Europe centrale
à un niveau bas et d’autre part une forte baisse de demeurent toujours plus positives que dans les
la production de pétrole en lien avec les tensions autres zones. La croissance atteindrait 3 % cette
dans le delta du Mend. Sa décision de flexibiliser son année et l’an prochain, notamment en raison de
taux de change en juin a mené à une chute du naira facteurs conjoncturels favorables mais aussi de l’ab-
mais l’écart avec le taux de change sur le marché sence de déséquilibres marqués (cf. Encadré n°2).
Encadré n°2
L’Europe centrale affiche-t-elle de si bonnes performances ?
L’Europe centrale se compare monétaire accommodante est facilitée 7 prochaines années. Dans ce contexte
avantageusement à la zone euro par une inflation faible ou négative, d'intégration étroite, le sentiment anti-
et aux autres régions émer- ainsi que les déficits budgétaires européen dans de nombreux pays
gentes modérés. Les ventes sur les marchés d'Europe centrale et orientale, ali-
La croissance des pays membres de d'Europe occidentale se tiennent bien. menté par la crise migratoire et
l'UE d'Europe centrale (3,4 % en 2015) Les pays fortement intégrés dans la aggravé par le vote du Brexit et le dis-
se compare avantageusement avec chaîne de production allemande cours populiste et nationaliste des poli-
celle de la zone euro (1,6 %), de l'Amé- comme la République tchèque, la ticiens locaux, est un mauvais signal
rique latine (-0,7 %), des pays arabes Hongrie et la Slovaquie bénéficient de pour les investisseurs. La réforme du
(2,6 %) et de l'Afrique subsaharienne la vigueur de la consommation des système d'asile européen et de la
(3,0 %), mais est restée bien en dessous ménages allemands et des perfor- directive sur les travailleurs détachés
de celle de l'Asie émergente (6,6 %). Le mances satisfaisantes des exportations fait l’objet d’une vigoureuse opposition
déficit public régional était proche de allemandes. Les mêmes pays ainsi que dans la plupart des pays, alors que la
celui de la zone euro (2,4 % du PIB la Roumanie, en raison de la forte Commission européenne critique l'Etat
contre 2 %), mais a été plus faible que présence de l'industrie automobile, de droit en Pologne et en Hongrie.
dans toutes les autres régions émer- profitent de l’essor du marché euro- Néanmoins, le risque d'être condamné
gentes (3,7 % dans les pays émergents péen de la voiture de tourisme et du à une amende ou de perdre le droit de
d'Asie, 7 % en Amérique latine, 11,2 % véhicule utilitaire. Les exportations réa- vote, sans parler de l'exclusion d'une
dans les pays arabes et 4,1 % en Afrique lisent aussi de bonnes performances Union plus étroite, d'un côté, et l'im-
sub-saharienne. Sa dette publique sur les marchés d'outre-mer grâce au portance de la région pour les fabri-
(50,2 % du PIB) était beaucoup plus fai- faible niveau de l'euro avec lequel les cants européens (allemands), de
ble que celle de la zone Euro (93,2 %) monnaies locales, pour les pays qui ne l'autre, pourraient conduire à des com-
et proche de celles des autres régions font pas encore partie de la zone euro, promis.
émergentes (46,4 % dans les pays fluctuent en tandem.
émergents d'Asie, 56,4 % en Amérique Mais la politique économique ne
latine, 37,6 % dans les pays arabes et Une intégration étroite dans pourra pas soutenir la demande
38,4 % dans les pays d'Afrique sub- l'industrie manufacturière interne indéfiniment
saharienne). Son solde courant a enre- européenne, en particulier Les cadeaux fiscaux et sociaux, si pro-
gistré un excédent de 0,6 % du PIB, allemande longés, pourraient entraîner une dété-
ce qui est mieux que l'Amérique latine Avec généralement plus de 50 % des rioration de la situation budgétaire et
(-3,6 %), les pays arabes (-4,5 %), exportations se dirigeant vers la zone remettre en cause les progrès réalisés
Afrique subsaharienne (-5,9 %), mais en euro et plus de 25 % vers l’Allemagne, depuis la crise. Ce risque a été mis en
dessous de la zone Euro (3 %) et de et avec des exportations représentent évidence par le FMI en particulier dans
l'Asie émergente (2 %). près de 50 % du PIB pour la Pologne le cas de la Roumanie et de la Pologne
et la Roumanie, mais le double en Slo- où le déficit se rapproche de 3 % du
Croissance élevée en Europe vaquie, en Hongrie et en République PIB, niveau au-delà duquel il est consi-
centrale : la demande intérieure tchèque, la dépendance à l'économie déré comme excessif par l'UE. Selon le
s’ajoute aux exportations de l'Europe occidentale est élevée. Les pacte de stabilité et de croissance
La consommation des ménages est liens sont particulièrement développés de l'UE, le Conseil européen peut,
fermement soutenue par la hausse des dans l’automobile et l’électroménager alors, décider une amende et une
salaires, la progression de l'emploi, les où l'intégration dans la chaîne de pro- suspension partielle des finance-
réductions d'impôts, et, éventuelle- duction allemande est évidente. La ments européens. La politique moné-
ment, de nouvelles allocations sociales. présence de l'Europe occidentale est taire régionale accommodante est
L'investissement privé compense la également forte dans les secteurs de permise par la baisse récente des
baisse de l'investissement public due à vente au détail et de la banque. Les prix de l'énergie, ainsi que l'attitude
la transition entre deux programmes fabricants européens sont attirés par la de la FED et de la BCE. Si l'un de ces
de financement européens grâce au proximité géographique et culturelle, deux facteurs change, les autorités
crédit subventionné et aux réductions ainsi que la main-d'œuvre bien formée monétaires locales devraient proba-
d’impôts (Hongrie, Roumanie), à l'in- qui contribue à la compétitivité régio- blement resserrer afin de ne pas voir
vestissement direct étranger (Slova- nale. En outre, les fonds de cohésion leurs monnaies se déprécier face à
quie) et à un effet de rattrapage de l'UE représenteraient en moyenne l'euro, de maintenir les entrées de
(Bulgarie). La politique budgétaire et 2,7 % du PIB régional au cours des capitaux et de freiner l'inflation.
PANORAMA RISQUE PAYS 9
GROUPE
BAROMETRE
Octobre 2016
AUTRICHE
ÉVALUATIONS COFACE
A1 Pays
Environnement
A1 des affaires
RISQUE Cotation
TRÈS ÉLEVÉ moyen terme
COLOMBIE
ÉVALUATIONS COFACE
A4 Pays
Environnement
A4 des affaires
RISQUE Cotation
MODÉRÉ moyen terme
ESPAGNE
ÉVALUATIONS COFACE
A4 Pays
Environnement
A1 des affaires
RISQUE Cotation
TRÈS ÉLEVÉ moyen terme
GABON
ÉVALUATIONS COFACE
C Pays
Environnement
C des affaires
RISQUE Cotation
ASSEZ ÉLEVÉ moyen terme
INDE
ÉVALUATIONS COFACE
A4 Pays
Environnement
B des affaires
RISQUE Cotation
ASSEZ FAIBLE moyen terme
ITALIE
ÉVALUATIONS COFACE
A3 Pays
Environnement
A2 des affaires
RISQUE Cotation
TRÈS ÉLEVÉ moyen terme
NIGÉRIA
ÉVALUATIONS COFACE
D Pays
Environnement
D des affaires
RISQUE Cotation
ASSEZ ÉLEVÉ moyen terme
ROYAUME-UNI
ÉVALUATIONS COFACE
A3 Pays
Environnement
A1 des affaires
RISQUE Cotation
TRÈS ÉLEVÉ moyen terme
RUSSIE
ÉVALUATIONS COFACE
C Pays
Environnement
C des affaires
RISQUE Cotation
MODÉRÉ moyen terme
Turquie, prolongé jusqu’à fin 2017, devraient main- stable et un environnement des affaires
toujours déficient Importations de biens, % du total
tenir le niveau prix des biens importés, notamment
alimentaires, relativement élevé. La popularité de V. Poutine au niveau national s’est 29%
renforcée au moment de l’intervention russe en Cri-
Dégradation du solde budgétaire mée en mars 2014. Le mécontentement existe pour-
et du solde courant tant au sein de la population et les tensions pourraient
Le déficit budgétaire devrait se creuser légèrement en s’accentuer dans un contexte de ralentissement éco-
2016. Les prix bas du pétrole devraient continuer à nomique. Le durcissement du régime, se traduisant
peser sur les recettes provenant des hydrocarbures (50 notamment par un contrôle renforcé de l’Etat sur les 18%
% du total) alors que la faiblesse de l’activité contrain- medias et internet, limite toutefois considérablement
dra les revenus hors pétrole. Le projet de budget 2016, les capacités d’organisation et d’expression des mou-
établi sur la base d’un cours du pétrole de 50 USD/baril, vements d’opposition. Les élections législatives de
prévoit une lente progression des pensions de retraite septembre 2016 ont confirmé la prédominance du
(4 %) et le gel des salaires publics, en vue de limiter la parti présidentiel, Russie Unie (54 % des voix) mais
dégradation des finances publiques et l’endettement avec une faible participation (48% contre 60 % en
de l’Etat. Le budget de la défense devrait continuer à 2011). 7%
augmenter modérément. L’Etat dispose cependant de Les lacunes en matière de protection des droits de 4% 4%
confortables réserves pour y faire face, grâce aux fonds propriété, la faiblesse de la gouvernance et le manque
(de réserve et souverain), déjà sollicités en 2015, mais de transparence des entreprises affaiblissent forte-
totalisant encore près de 105 milliards d’USD (9 % du ment l’environnement des affaires. Malgré des pro-
PIB) en août 2016. Le gouvernement a lancé début grès, la Russie est classée au 168ème rang (sur 215) Zone Chine Etats- Biélorussie Japon
juillet 2016 le programme de privatisation avec la vente selon l’indice de gouvernance de la Banque Mondiale euro Unis
de 11% du capital du producteur de diamant Alrosa en matière de lutte contre la corruption, qui reste un
mais a suspendu en septembre 2016 la vente de parti- point faible récurrent.
cipation dans le producteur de pétrole Bashneft et la Points faibles
compagnie navale Sovcomflot. Points forts
L’excédent courant devrait se stabiliser en 2016. Les l Accentuation du caractère rentier de l’économie
exportations, largement dominées par les hydrocar- l Abondantes ressources naturelles (pétrole, gaz l Manque de compétitivité du secteur industriel
bures (2/3 des revenus), devraient rester contraintes et métaux) l Secteur bancaire privé fragile
par le bas niveau des prix. La faible compétitivité des l Main d’œuvre qualifiée
l Faiblesse des infrastructures
produits russes pourrait en outre limiter les exporta- l Faible endettement public et réserves de change
tions hors pétrole, malgré la baisse du rouble. Une l Démographie déclinante
demande intérieure déprimée, le maintien des sanc- confortables l Lacunes persistantes dans l’environnement
tions et des mesures d’embargo sur certains produits l Puissance régionale et énergétique affirmée
des affaires
européens et turcs, devraient néanmoins limiter les
19
TURQUIE
ÉVALUATIONS COFACE
B Pays
Environnement
A4 des affaires
RISQUE Cotation
MODÉRÉ moyen terme
COFACE SA
1, place Costes et Bellonte
92270 Bois-Colombes
France
www.coface.com