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Soyez Vous Meme Tous Les Autres Sont Deja Pris Gilles Azzopardi
Soyez Vous Meme Tous Les Autres Sont Deja Pris Gilles Azzopardi
SOYEZ VOUS-MÊME
(TOUS LES AUTRES SONT DÉJÀ PRIS)
Une partie des textes de cet ouvrage a fait l’objet d’une première
publication dans les titres suivants de la collection « Résiste ! » aux éditions
First : Y’en a marre de la pensée positive ! et Je suis une super chieuse au
boulot et ça marche !.
ISBN : 978-2-7540-8661-5
ISBN Numérique : 9782412015124
Dépôt légal : mai 2016
Le besoin d’appartenance
Dès notre petite enfance, nous sommes conditionnés pour être comme les
autres, à faire comme les autres. On sait bien que dans les cours d’école, il
ne fait pas bon trop se distinguer. Toutes les différences un peu trop
marquées, physiques, vestimentaires, culturelles, provoquent les rebuffades
et les persécutions. De fait, nous allons tous plus ou moins dans le sens du
vent. Quand tout le monde applaudit, on applaudit. Quand personne ne
bouge en cas d’agression dans le bus ou le métro, on ne bouge pas.
Ce besoin de conformisme est bien connu en psychologie sociale. Au
sens large, le conformisme, c’est l’influence de la majorité sur la minorité,
le fait pour un individu de se fondre dans la masse, quand bien même il doit
pour cela changer d’opinion, de comportement, voire de perception.
De nombreuses expériences ont mis en évidence le fait que nos
comportements sont directement influencés par ceux des autres.
La plus connue a été réalisée par Solomon E. Asch, un psychologue
américain. Au début des années 1950, il a demandé à un groupe d’étudiants
de participer à un prétendu test de vision. Tous les étudiants étaient dans la
combine, sauf un, le « cobaye ».
L’expérience avait en réalité pour objet d’observer comment une
personne donnée va réagir aux comportements des autres. Un groupe de
sept à neuf compères était installé dans une salle, l’étudiant « cobaye »
occupant l’avant-dernière position.
La tâche proposée était simple : comparer une série de segments témoins
à trois autres, parmi lesquels un seul a la même longueur que le segment
témoin et donner son avis à haute voix, un par un. Au début, tout se passe
normalement. Tous les étudiants fournissent la même et bonne réponse.
Mais au troisième essai, patatras, tous les « compères » donnent une
« mauvaise » réponse de manière unanime. Que font les « cobayes » dans
ce genre de situation ? Eh bien, 1 sur 3 se rallie systématiquement à l’avis
de la majorité et plus de 2 sur 3 s’y rallient une fois sur deux ou de temps en
temps, allant contre l’évidence et même leur propre perception.
Pour Asch, un tel conformisme de masse (seuls 25 % des sujets ne se
sont jamais ralliés aux fausses réponses de la majorité) s’expliquerait par
notre besoin d’éviter le conflit en cas d’opinions différentes et d’être
éventuellement rejeté par la majorité. Ce serait plus un suivisme de
complaisance qu’une véritable adhésion. Autrement dit, les « cobayes »
savent que leur opinion est bonne, mais disent comme la majorité.
Le devoir d’obéissance
On ne se construit pas, dans tous les sens du terme, sans obéissance (se
laver les dents tous les jours, apprendre à lire et à écrire, ne pas mordre ses
petits camarades, apprendre à veiller sur les autres, etc.) Obéir, vient du
latin oboedire qui signifie « ouïr », donc écouter. Et exécuter. On se lave les
dents, on apprend à lire et à écrire, etc., parce que « c’est mieux comme
ça ». Et on le fait sans demander pourquoi, en tout cas pas tous les jours.
En psychologie sociale, on parle d’obéissance quand une personne fait
quelque chose qu’elle ne ferait pas spontanément parce qu’une autre
personne, perçue comme une source d’autorité, le lui demande. C’est la
base de tous nos apprentissages, dressages diraient d’autres parce que ce qui
marche avec les petits humains marche aussi avec nombre d’animaux.
Enfant, nous apprenons à obéir. A priori, nous partons du principe que
nos parents, et plus tard nos maîtres à l’école, savent mieux que nous ce qui
est bon pour nous. De toute façon, on ne peut pas faire autrement. On
dépend d’eux pour avoir le ventre plein, les fesses au sec et des câlins.
Partant de là, l’obéissance n’est pas un mal en soi. C’est la
reconnaissance d’une autorité légitime, fondée sur l’expérience, le savoir,
les compétences. Elle permet de progresser individuellement en profitant
des acquis des autres. Elle permet de s’intégrer plus ou moins
harmonieusement au sein d’une hiérarchie, famille, école, société. C’est
ainsi que l’on devient soi.
Quand est-ce que ça dérape, que l’on n’est plus soi ? Lorsque
l’obéissance à l’autorité devient de la soumission. On suit les ordres
aveuglément, en dégageant toute responsabilité personnelle. Comme Adolf
Eichmann qui, lors de son procès à Jérusalem, a justifié sa participation au
génocide nazi par son devoir de fonctionnaire. Ou, comme dans le cas de
Daech, on en appelle à une autorité supérieure pour pratiquer les pires
horreurs.
Des exceptions ? Pas vraiment. La règle veut, au contraire, que nous nous
soumettions un peu trop facilement à l’autorité.
De nombreuses expériences ont montré que nous sommes tous, ou
presque, susceptibles d’obéir à des ordres qui contreviennent au simple bon
sens, à nos valeurs morales habituelles, ou aux règles.
La soumission à l’autorité
L’expérience la plus connue dans ce domaine est due à un psychologue
américain de l’université de Yale, Stanley Milgram. Au début des
années 1960, il a montré à quel niveau d’obéissance peut aller un individu
dirigé par une autorité qu’il pense légitime.
Concrètement, il s’agissait d’amener des gens normaux à infliger des
décharges électriques de plus en plus fortes à un « patient » (en fait un
comédien), qui suppliait d’arrêter, puis criait de douleur et finissait par se
taire, apparemment victime d’un malaise. Le résultat a été assez terrifiant :
deux personnes sur trois ont accepté d’infliger des décharges électriques de
plus en plus intenses et une sur trois l’a fait jusqu’au bout tant que l’ordre
de continuer leur en était donné.
Toujours dans les années 1960, cette expérience, même si elle expliquait
pourquoi la peste du nazisme avait pu se répandre si vite et comment une
foule de braves gens, et pas des plus crétins, avaient pu du jour au
lendemain commettre toutes sortes d’horreurs, avait suscité de nombreuses
interrogations. Pouvait-on vraiment concevoir que dans la vie réelle, des
circonstances normales, sans les bouleversements de la guerre, tant de
personnes puissent obéir aveuglément, prendre la responsabilité de tuer
leurs semblables ?
En 2009, France 2 a diffusé une fausse émission de jeu reproduisant
l’expérience. Dans Zone Xtrême, l’autorité n’est plus la science, mais la
télévision, avec à la clé une somme d’argent à gagner. Et c’est pire !
Suivants à la lettre les injonctions de l’animatrice, en lieu et place d’une
autorité scientifique, 80 % des participants ont bien voulu infliger des chocs
électriques potentiellement mortels à un candidat (là aussi, un comédien) à
chaque mauvaise réponse.
Autant dire que nous sommes presque tous des tortionnaires en puissance
ou, pour le moins, susceptibles d’adopter des comportements parfois à
l’opposé de nos valeurs si la situation s’y prête.
C’est ce qu’a montré Philip G. Zimbardo, un psychologue américain,
avec l’Expérience de Stanford, en 1971. L’idée consistait à prendre des
étudiants, sélectionnés pour leur stabilité psychologique et leur maturité, à
les mettre dans des conditions carcérales et d’assigner (à pile ou face) aux
uns le rôle de gardiens, aux autres celui de prisonniers.
Ça a été catastrophique ! Zimbardo dû arrêter l’expérience au bout de six
jours, au lieu des deux semaines initialement prévues. Se prenant au jeu, un
tiers des « gardiens » firent preuve de comportements sadiques et de
nombreux prisonniers furent traumatisés émotionnellement.
Ça vous rappelle des émissions de téléréalité ? C’est normal. La
mécanique est la même. On donne un rôle à des gens, très rapidement ils ne
distinguent plus le réel, ils deviennent incapables de faire la différence entre
ce qu’ils sont et le rôle joué.
La soumission, c’est dans les gènes ?
Peut-être pas. Mais en tout cas, elle est durable. C’est ce qu’a
montré John Block, professeur de sociologie à Berkeley, qui a
suivi sur plusieurs décennies l’évolution de plus d’une centaine
d’élèves de maternelle. Il a constaté que les enfants très
obéissants d’hier, disciplinés et fayoteurs, étaient le plus souvent
devenus des adultes conservateurs, très attachés aux rôles
traditionnels de l’homme et de la femme. En revanche, la plupart
des enfants débrouillards, confiants et autonomes étudiés par
l’équipe avaient grossi les rangs de la gauche libérale.
La pensée de groupe
Un groupe humain, une famille, une bande d’amis, une entreprise, une
association, un parti politique, une religion, etc., a toujours une dynamique
propre qui excède la volonté de chacun des membres qui le compose.
C’est ce qu’a montré Irving Janis, un psychologue américain, en
analysant les quelques grands fiascos politico-militaires du siècle dernier,
comme le débarquement de la baie des Cochons, à Cuba, par des exilés
cubains soutenus en sous-main par la CIA, en avril 1961.
Dans un groupe, dit Janis, les individus ont spontanément tendance à
rechercher le consensus plutôt qu’à appréhender de manière réaliste la
situation, ce qu’il a appelé le GroupThink, la pensée de groupe.
Le résultat, on a tous connu ça un jour ou l’autre : à plusieurs, on prend
souvent une décision qui ne satisfait personne, car il n’y a pas eu de réelle
concertation, les besoins des uns et des autres n’ont pas été exprimés. Ou,
bien pire, on finit par se mettre d’accord sur une action (irrationnelle,
mauvaise…) que chaque membre du groupe séparément réprouverait.
Bref, dans un groupe, au nom d’une sorte de consensus mou, on finit
souvent par oublier qui on est vraiment, ce que l’on croit ou l’on pense.
Comment savoir si vous êtes encore vous-même ou sous influence ?
Simple. Pour Janis, il y a des signes qui ne trompent pas, huit symptômes de
la pensée unique qui doivent alerter :
Évidemment, tout cela est très subjectif : notre image de soi a souvent
peu à voir avec la réalité. On sait par exemple que les femmes ont
systématiquement tendance à sous-estimer leur apparence physique et les
hommes, comme d’habitude trop sûrs d’eux, à la surestimer. C’est fou le
nombre d’hommes qui se trouvent beaux quand ils se regardent dans une
glace !
Notre image de soi n’est pas non plus nécessairement conforme au
jugement des autres. On peut se trouver très bien physiquement, les
hommes encore, et ne pas plaire pour autant. Ou, au contraire, se trouver
moche, les femmes plus souvent, alors que les autres nous trouvent
physiquement attirant.
Se décomplexer
Nos complexes sont parfois justifiés, mais le plus souvent ils ne reposent
sur rien et sont irrationnels. Ce sont seulement des idées que l’on se fait.
Reste qu’ils peuvent parfois nous pourrir la vie un peu ou beaucoup et nous
empêcher d’aimer et/ou de travailler.
Que faire dans ce cas, lorsque tout paraît souvent trop compliqué ?
Soit on les cache. Ou plutôt, on croit les cacher parce qu’en fait on attire
au contraire l’attention sur eux. Ça fait quand même louche de ne faire
l’amour que dans le noir, de jamais se mettre en robe, de bronzer à moitié
habillée sur les plages, de porter des écharpes par + 30°, des lunettes de
soleil la nuit ou de parler en gardant tout le temps une main devant la
bouche.
Soit on les compense. On a honte de ses fesses, alors on exhibe ses seins
pour détourner les regards. Les séductions ingrates deviennent des intellos
de choc. Les défavorisées du neurone se transforment en sportives de haut
niveau ou développent des dons artistiques.
Ou encore on les surcompense. Par exemple, on s’habille d’autant plus
« moulante » qu’on a honte de ses fesses. On s’écoute d’autant plus parler
qu’on n’a rien à dire. On affecte plus de confiance, jusqu’à l’arrogance,
qu’on en a vraiment.
À cause de nos complexes, on en fait toujours trop ou pas assez. On ne se
sent jamais tout à fait en phase, tout à fait à l’aise. Alors, comment mieux
vivre avec nos complexes, les petits et les grands ? Comment ne plus voir
ses défauts grossis à la loupe, faire avec sans les cacher (on ne peut pas
toujours) ?
Et, au fond, complètement s’en ficher.
Ce qui marche
La méthode Coué parfois. À condition de se répéter inlassablement, pour se
reconditionner, une contre-proposition positive, par exemple : « J’ai un très
beau nez » ou « Je suis très intelligente ». Mais c’est fastidieux et forcément
trop long. On n’efface pas du jour au lendemain une perception souvent
ancrée depuis la petite enfance. Non, le mieux avec nos complexes, c’est de
les socialiser, d’oser en parler et d’encourager les autres à parler des leurs.
Pas pour être rassuré, approuvé ou conseillé. On a vu que ça ne marchait
pas. Mais, dans un complexe, même très localisé, il y a toujours une forte
charge dramatique, affective et émotionnelle. Le simple fait d’en parler, pas
seulement avec ses amis proches, mais vous pouvez commencer par eux,
libère automatiquement une partie de cette charge, des tensions accumulées
par le complexe. Petit à petit, cette décharge émotionnelle redonne aux
choses de plus justes proportions. Le détail « qui tue » redevient un simple
détail. Un complexe, c’est toujours une perception fausse. C’est cela qu’il
faut arriver à changer. La plupart de nos complexes deviennent d’ailleurs
tout à fait vivables dès qu’on arrive à en parler librement.
Le jour J :
4. S’équilibrer émotionnellement
On a tous un jour ou l’autre été submergé par une émotion incontrôlable.
Crise de colère ou de larmes, fou rire, trac… dans tous les cas, nos émotions
fonctionnent comme des soupapes : ce sont des « décharges d’urgence » qui
nous permettent de nous libérer de nos tensions ; et de nous adapter
physiquement et socialement.
Dans leurs formes les plus intenses et brèves, du type grande frayeur ou
grosse colère, nos émotions se réduisent à des réactions instinctives de
défense (fuite ou agression) ou d’approche (repliement sur soi, soumission).
Grâce à elles, nous sommes capables d’agir d’instinct, très vite, sans
réfléchir, et donc de mieux faire face à des dangers potentiels.
Plus subtiles, complexes, discrètes, nos émotions sont aussi essentielles à
la communication avec l’autre, les autres, dans toutes nos relations
affectives, intellectuelles, quotidiennes ; elles nous permettent d’ajuster nos
comportements.
Plus que de simples manifestations de sensibilité, nos émotions jouent
ainsi un rôle important pour notre bien-être, notre équilibre physique et
moral. Même les plus « négatives », la colère ou la peur, même quand elles
nous bouleversent physiquement et moralement, elles ne le font jamais
inutilement.
Et l’on ne peut vraiment être soi sans un bon équilibre émotionnel. Pas si
simple parce que nous avons d’une part tous tendance à réprimer plus ou
moins nos émotions, notamment les plus négatives comme la peur ou la
colère. Et d’autre part, parce que dans nos émotions, il ne s’agit jamais
seulement de soi, mais aussi des autres : nos émotions présentes sont
toujours plus ou moins liées à nos émotions passées, à notre histoire
personnelle, et emmêlées.
Pourtant on peut s’en dépatouiller.
Source : www.washingtonpost.com
La réévaluation cognitive
Beaucoup de nos émotions négatives sont dues à des tricotages de
notre imagination. Pensez à votre patron qui vous jette un œil noir
ou à votre ado qui oublie de vous souhaiter votre anniversaire. Si
vous interprétez ces comportements comme intentionnels, vous
risquez de ressentir de la peur (mon patron m’a dans le
collimateur) ou de la tristesse (mon fils n’en a rien à faire de
moi).
En revanche, en attribuant ces mêmes comportements à un trait de
caractère (votre patron est un grand taciturne, votre fils, très
souvent dans la lune) ou à un problème personnel (votre patron
est harcelé par le fisc, votre fils, par son acné…), vous vous
sentez nettement moins anxieux ou attristé.
La mise en mots
On disait (voir ci-dessus) que certaines personnes ont besoin de
trouver quelqu’un à qui parler en cas d’émotions négatives.
De fait, de nombreuses études montrent que presque tout
événement émotionnel, la naissance d’un enfant comme le dernier
attentat terroriste, positif comme négatif, fait l’objet d’un partage
social.
On en parle le jour même (à 90 %) et souvent à plusieurs reprises
à différentes personnes : famille, amis, conjoints… Et plus
l’émotion est intense, plus elle est partagée.
Des expériences utilisant l’imagerie cérébrale (images de
l’activité du cerveau) semblent confirmer que mettre les émotions
négatives en mots réduit effectivement la détresse. À condition
cependant de bien choisir ses interlocuteurs, disponibles, à
l’écoute, bienveillants, compréhensifs…, et surtout de ne pas
ressasser.
Parler continuellement de sa tristesse, par exemple, ça ne fait que
la renforcer en soi et c’est dissuasif pour les autres. Au début, vos
proches sont sensibles à vos problèmes, à votre détresse, mais au
bout d’un certain temps, ils finissent par se lasser (ils se rendent
compte qu’ils ne peuvent rien pour vous) et par s’écarter. C’est ce
qui arrive très fréquemment avec les déprimés : leur entourage se
met peu à peu à les éviter.
Vous ne pouvez vous empêcher de ressasser ? Écrivez plutôt !
Jeter ses émotions négatives sur du papier est connu pour faciliter
la récupération émotionnelle.
La suppression expressive
C’est la méthode recommandée par Darwin, qui pensait que « La
libre expression d’une émotion quelconque par des signes
extérieurs la rend plus intense. Inversement, les efforts faits pour
réprimer toute manifestation extérieure modèrent l’émotion elle-
même. L’homme qui se laisse aller à des gestes violents augmente
sa fureur, celui qui n’exerce aucun contrôle sur les marques de sa
peur ressent une peur bien plus grande, et celui qui reste inerte
sous le coup d’une grande douleur perd sa meilleure chance de
réagir contre elle. »
Qu’en dire ? Il n’est pas certain que ne pas montrer ce qu’on
ressent diminue la charge émotionnelle. En revanche, cela peut
éviter bien des débordements et des conflits avec les autres.
D’autant que, comme on l’a vu, les émotions négatives sont plus
contagieuses que les positives.
La confrontation volontaire
Face à une émotion dérangeante, une situation anxiogène, nous
avons tous automatiquement tendance à penser à nos soucis et nos
inquiétudes de manière très générale sans rentrer dans les détails.
Par exemple, quand on se sent triste, on pense à toutes les fois où
on a été triste, à sa tristesse, se dire qu’on s’est souvent senti
malheureux.
Ou si on doit parler en public ou se présenter à un concours, on va
penser au tract et aux difficultés qu’on a d’habitude dans ce genre
de situation. On croit qu’en procédant ainsi, en prenant les choses
avec du recul, on diminuera la charge émotionnelle et anxiogène.
Mais en fait, c’est tout le contraire qui se passe : l’émotion et
l’anxiété sont accrues.
En revanche, en se focalisant sur ce qui est spécifique à l’émotion
(pourquoi je me sens triste maintenant, ce qui a provoqué ça, etc.)
ou à la situation (concrètement, comment ça va se passer, je
risque de réagir, au mieux, au pire…), avec le plus de détails
possible, on les dédramatise efficacement.
Ce qui explique sans doute pourquoi on a toujours moins le trac
quand on s’imagine les autres tout nus.
De fait, plus on arrive à comprendre ce qui provoque une
situation émotionnelle, plus on est susceptible de lui donner la
meilleure réponse.
La respiration à 4 temps
C’est bête à dire, mais notre équilibre émotionnel dépend avant
tout d’une bonne oxygénation du cerveau.
En Orient, la régulation des émotions est souvent considérée,
notamment sous l’influence de la philosophie bouddhiste et des
pratiques du yoga, comme un problème plus technique que
psychologique.
Dès la maternelle, on apprend aux enfants à respirer en quatre
temps (contre deux pour nous en Occident). L’inspiration et
l’expiration étant chacune suivie d’une pause où on reste
poumons pleins ou vides d’air. Chaque phase est associée à une
émotion fondamentale : l’inspiration à la tristesse, la phase
poumons pleins à la colère, l’expiration au rire, la phase poumons
vides à la peur.
S’entraîner à respirer de cette manière-là, quelques minutes par
jour, permet de mieux comprendre et moduler ses émotions. Et on
développe rapidement de bons réflexes pour les réguler,
notamment les plus négatives (peur, tristesse, etc.) ou en cas de
crise de colère ou de panique.
5. Se détoxiquer la tête
Tous les soirs, les cotons à démaquiller et les cols de chemise sont noirs de
la crasse des villes. C’est pareil pour notre cerveau. Tous les jours, il
s’encrasse un peu plus. Surmenage, stress, problèmes de toutes sortes, la
pollution est d’abord mentale, psychologique.
Au bout d’un moment, nos neurones ressemblent à de grands oiseaux
englués dans le mazout, nos humeurs virent au poisseux. On a du mal à voir
plus loin que le bout de notre nez. On croit vivre, mais on se contente de
survivre et cela consomme l’essentiel de nos énergies. On avance dans la
vie comme des automates, on s’encroûte dans la routine, nos plaisirs
deviennent des cache-misère. Au lieu de nous stimuler, ils nous permettent
à peine de supporter le reste.
Quand le moral s’encrasse, le moteur de la passion se grippe. Les
motivations, les désirs, la volonté s’effilochent. Le pire, c’est que c’est
insidieux, on ne s’en rend même pas compte.
Nous prenons soin de notre peau, de notre corps. Mais que fait-on pour
notre mental ? Rien ou presque. Il est temps de vous y mettre. Surtout si
votre moral est plus souvent proche du zéro que du beau fixe.
L’affirmation de soi
1. Renforcer sa confiance en soi
Pourquoi certains s’imposent-ils sans difficulté, de manière naturelle et cela
en toutes circonstances, et d’autres pas ? Pourquoi certains osent-ils tout et
d’autres, rien ou presque ?
C’est évidemment une question de confiance en soi. Certains en ont plus
que d’autres et parfois trop. Et d’autres moins et souvent pas assez.
Un tiers innée, un tiers conditionnée par l’éducation reçue, un tiers
influencée par les expériences, la confiance en soi est généralement plus
facile à décourager qu’à encourager. La règle : le succès l’augmente,
l’échec la diminue.
C’est vrai qu’une confiance en soi élevée permet d’aborder la vie avec
plus d’assurance et d’optimisme. Mais elle n’est pas sans inconvénients. Ne
serait-ce que lorsqu’on se croit trop fort, on finit toujours par commettre des
erreurs.
Vrai aussi qu’une plus faible assurance fait plus souvent voir le verre à
moitié vide (on est pessimiste à propos de tout, à commencer par soi). Mais
d’un autre côté, on est aussi plus prudent, on prend moins de risque et on
fait moins de bêtises.
Pour autant, même quand on manque de « bravitude », rien n’est joué.
Oh, bien sûr, on ne fera pas d’un Bisounours un chien de guerre, mais il
suffit souvent de modifier légèrement son attitude, de changer quelques
mauvaises habitudes, pour gagner très nettement en assurance.
Il parle sans arrêt, fait les questions et les réponses, rit de ses
propres plaisanteries pendant qu’il les raconte, avant même de
finir ses phrases.
1. Ne pas avoir honte d’avoir honte. C’est normal quand on a fait une
connerie ou qu’on s’est fait dépasser (pas parce qu’on n’a pas la
dernière godasse à la mode…) : ça veut dire qu’on a un surmoi fort,
qui résiste à l’échec.
2. Soigner son look, mais sans exagération (talons, silicone, tatouage,
marques…). Quand on est sûr de soi, on n’a pas besoin d’en
rajouter. Et on assume ses éventuels défauts avec réalisme et
humour.
3. Être capable de demander pardon, de reconnaître ses torts, ses
erreurs et même ses fautes ! Ça veut dire qu’on a une morale. Ceux
qui nient toujours leurs responsabilités sont des immatures ou des
pervers.
4. Rester combatif dans la difficulté, voire être stimulé par l’adversité.
Ne pas se poser systématiquement en « victime » : demander des
comptes, accuser, faire des procès d’intention, des chantages
affectifs, mais rebondir en prenant les « épreuves » comme des
occasions de se renforcer.
5. Reconnaître qu’on est moins bon qu’un autre (pour cette fois). Les
vrais champions quand ils se plantent disent : « Machin était plus
fort ce jour-là », et pas : « Les juges ont triché… » C’est comme ça
qu’on s’améliore pour la prochaine fois.
6. Être capable d’admiration quand ça en vaut la peine, pas des
imposteurs du show-biz ou des escrocs affairistes. Avoir des
« modèles » d’exigence, ça donne envie de se surpasser.
7. Se mettre à la place des autres (même d’un chat !). Un moi fort est
capable d’empathie, de ressentir ce que ressentent les autres et
d’intimité. On n’a pas peur de perdre son identité à la différence des
xénophobes, racistes ou psychopathes.
8. Ne pas être hystérique pour autant : on ne confond pas son désir
avec le désir de l’autre, on n’est pas ce que l’autre attend qu’on soit,
on garde quoi qu’il se passe sa personnalité.
9. Savoir écouter sans interrompre parce qu’on ne se sent pas menacé
par la parole de l’autre.
10. Ne pas (trop) parler de soi en bien ou en mal. C’est un truc de
vantards qui en rajoutent parce qu’ils imaginent qu’on les sous-
estime ou de geignards qui cherchent à inspirer la « pitié » pour
éviter l’affrontement.
11. Ne pas dénigrer les autres, les amis comme les rivaux. Ce n’est pas
parce que quelqu’un est « faible » que ça nous rend
automatiquement plus fort.
12. Rester humble dans le succès. Sinon on se croit trop fort et on finit
par faire des erreurs en sous-estimant les difficultés, ses adversaires,
la contribution des autres, la chance…
2. Apprendre à s’aimer
On passe souvent son temps à tricher pour se montrer aux autres sous le
meilleur jour. On fait un paquet d’efforts pour cacher ses défauts, ses petites
mesquineries, ses mauvaises pensées, en espérant que l’on sera ainsi plus
accepté, plus aimé.
C’est idiot parce que quand on ne s’aime pas, on ne nous aime pas.
Normal. Si vous, qui êtes censé bien vous connaître, vous vous trouvez nul,
pas intéressant, avec plein de défauts, pourquoi voulez-vous que les autres
vous trouvent attirant, sympathique. Si vous pensez que vous n’êtes pas un
cadeau, il n’y a franchement aucune raison pour qu’on vous prenne pour un
cadeau.
Même quand vous vous aimez « plutôt bien », vous ne vous aimez jamais
assez, jamais vraiment, jamais complètement. Et, inconsciemment, les
autres le ressentent. Ils ne s’intéressent pas à vous ou décrochent
rapidement sans chercher à vous connaître vraiment. Ils ont du mal à vous
aimer comme vous avez envie qu’on vous aime. Ils ont du mal à vous dire
qu’ils vous aiment ou vous apprécient et vous ne les croyez qu’à moitié
quand ils vous le disent. Forcément, cela crée souvent des frustrations, des
malentendus dans vos amours ou dans votre job et des complications avec
vos proches ou dans votre couple. Prenez-vous pour un cadeau, ça change
tout. S’aimer plus, s’aimer vraiment, ce n’est pas si difficile. Ça ne consiste
pas à être zéro défauts, à ne jamais faire de faux pas : simplement à vous
voir comme « aimable », digne d’intérêt, d’estime, de respect. Et surtout, le
plus important, de vous comporter toujours comme si vous l’étiez
effectivement, même quand votre amour pour vous varie à la baisse.
Arrêter de se dévaloriser
Quand vous servez des brocolis, ne les présentez pas en disant « Je crois
que je les ai ratés », « Ils sont moins bons que d’habitude », ou, plus
subtilement dégradant : « Ma maman les fait gratiner en béchamel. C’est
autrement bon. » Votre compagnon se demande s’il n’aurait pas mieux fait
d’épouser votre mère. Vos invités se disent qu’ils se sont trompés d’adresse.
Pareil quand on vous fait un compliment : « Oh ! C’est joli ce que tu as
aujourd’hui ! » Ne répondez pas : « Oh ! C’est pas cher » même (et surtout)
si vous avez acheté votre tailleur chez Tati ou « Oh ! J’ai fait une folie. Je
ne recommencerai plus » si vous vous êtes ruinée chez Lagerfeld.
Et quand vous rendez un travail, ne dites pas « J’ai fait ce que j’ai pu. »
En vous dévalorisant, vous dévalorisez les autres. Vous faites passer un
message négatif qui consiste à dire : « Vous êtes vraiment nuls de choisir un
nul comme moi. » Inconsciemment, vous laissez entendre que vous ne
gagnez pas à être connu, qu’on a tort de vous aimer ou de vous faire
confiance. Et vous faites le vide autour de vous. Au contraire, en vous
prenant pour un cadeau, vous valorisez tous ceux qui vous approchent de
loin ou de près. Vous faites passer un message positif : « Vous avez du flair
de m’avoir trouvé. »
Croyez en votre valeur, les autres y croiront aussi. Ils vous écouteront
plus attentivement, vous prendront au sérieux. Vous aurez moins besoin de
ramer dans les dîners pour que votre voisin s’intéresse plus à ce que vous
lui racontez sur Kusturica qu’à votre Wonderbra ; ou dans votre job, quand
vous avez un message important ou une idée à faire passer. Vous deviendrez
automatiquement plus crédible.
Et quand vous demanderez quelque chose, une augmentation, une promo,
un bébé, un coup de main ou qu’on vous fiche tout simplement la paix
pendant une demi-heure, vous l’obtiendrez plus facilement, plus
rapidement.
Respectez-vous, les autres vous respecteront. Votre mec ne vous serinera
plus à longueur d’année « Tu vois, je te l’avais bien dit ! » à chaque fois que
vous faites une gaffe. Et votre patron se déplacera quand il voudra vous
parler. Il ne hurlera plus votre prénom à travers les bureaux.
3. S’accepter pleinement
L’estime de soi est aujourd’hui à la mode. On ne compte plus le nombre de
psychothérapeutes en tous genres, gourous, coaches, etc., qui nous
promettent des lendemains meilleurs si l’on veut bien se donner la peine et
les moyens (par ici la monnaie) de renforcer notre estime de soi.
Car il en faudrait une bonne grosse pour tout réussir, son travail, ses
amours et même le gratin dauphinois. Trop faible, on serait un loser, on
risquerait de pointer très longtemps à Pôle Emploi et sur les sites de
rencontres.
Mais l’estime de soi, c’est d’abord un truc inventé par le système pour
nous forcer à bosser et à consommer plus : la carotte qui fait avancer l’âne.
Et nous, bonne poire, on plonge. Affaire de nombrilisme : ça nous permet
de pleurnicher, « Mais pourtant, je le vaux bien ! » quand on n’obtient pas
ce qu’on veut. Et cela nous sert aussi très souvent à excuser nos mauvais
comportements.
D’ailleurs, les criminels les plus odieux justifient ainsi leurs actes, au
nom d’une cause, d’un engagement, ou bien de la nécessité (l’autre l’a bien
cherché, je n’ai pas pu faire autrement, etc.) pour préserver leur amour-
propre.
De même, on sait que les gens qui ont une haute estime de soi deviennent
souvent très désagréables et sont plus fréquemment susceptibles
d’agressivité ou d’actes de violence, quand les autres ou les événements
menacent leur ego, remettent en question leurs opinions, croyances ou
valeurs, autrement dit en cas d’atteinte à l’amour-propre.
Et, paradoxalement, ce sont d’ailleurs ceux qui paraissent ne jamais
douter d’eux-mêmes, à qui tout semble réussir, qui s’effondrent (dépression,
alcool, drogue…) souvent après un échec particulièrement cuisant ou une
simple mise à la retraite.
Alors qu’en revanche, une estime de soi plus faible permet fréquemment
d’avoir une meilleure appréciation des situations. On se fixe des objectifs
accessibles, on se prépare mieux parce qu’on ne mésestime pas les
difficultés. Et l’on minimise d’autant les risques d’échec.
S’exprimer en clair
Chaque fois que vous attendez que votre conjoint ou vos amis vous
devinent en partant du principe « S’ils m’aiment vraiment, je n’ai pas
besoin de dire les choses pour qu’ils comprennent », vous êtes mal barré.
Comme tout le monde ou presque en fait autant de son côté, cela peut très
vite se traduire en attentes déçues, voire dégénérer en mini drame
domestique.
Il vaut toujours mieux ne pas mesurer l’amour ou l’affection des autres à
leur capacité de jouer les Madame Irma. Vous avez envie de faire l’amour :
demandez. Vous êtes fatigué, vous voulez qu’on vous fiche la paix : dites-
le. Vous avez besoin de sortir pour vous changer les idées : proposez. Lundi
prochain, c’est votre anniversaire : rappelez-le.
Il est toujours préférable de dire en clair aux autres ce qu’on attend
d’eux, quitte à s’entendre dire non. Plus on s’exprime, plus on réduit les
risques d’incompréhensions, de malentendus, voire de conflits avec les
gens. Cela est vrai dans son couple, sa famille, mais aussi avec ses amis ou
dans son job.
Par exemple, avec votre patron. Vous avez des exigences. C’est normal.
Il vous apprécie (espérons-le !), il veut les satisfaire. C’est normal aussi.
Mais, forcément, si vous ne demandez rien, il peut imaginer que vous avez
des exigences dont il n’a pas les moyens. Et que vous allez lui en vouloir
terriblement s’il ne vous accorde pas vos mercredis en vous gardant au
même salaire, s’il ne vous offre un mois de vacances pieds dans l’eau dans
un palace aux Bahamas pour vous récompenser de vos bons résultats ou s’il
ne vous augmente pas d’emblée de 20 % alors que vous le méritez. D’un
autre côté, certaines exigences qui vous semblent tout à fait raisonnables
peuvent lui paraître tout à fait irréalistes. En abordant franchement le
problème avec lui, vous désamorcez les a priori négatifs et vous multipliez
vos chances de trouver un terrain d’entente (et des avantages conséquents).
Arrêter de se comparer
Quand on vit en société, on se compare forcément.
Parfois, cette comparaison est en notre faveur. Par exemple, nous avons,
plus ou moins tous, tendance à penser que ce qui ne va pas chez nous est
largement partagé, mais que tout ce qu’on a de bien l’est beaucoup moins.
Ça nous sert souvent de justification morale quand on fait des bêtises ou
en cas de comportements déviants : on fume des pétards, on brûle les feux
rouges, on touche des pots-de-vin, etc., on croit que tout le monde en fait
autant. Ou à expliquer nos petites bizarreries : on adore manger des fruits à
moitié pourris, parler à son ordinateur ou porter des lunettes de soleil la
nuit.
Inversement, dès qu’on est doué pour quelque chose, le poker ou le golf,
le dessin ou la guitare, si on marche sur les eaux, on a tendance à imaginer
que peu de personnes ont le même talent, alors qu’en réalité, elles sont cent,
mille, dix mille fois plus nombreuses.
Mais souvent aussi, on n’en ressort pas grandi, la comparaison se fait à
notre désavantage. On se sent un peu minable ou l’on éprouve de la
jalousie. Qui ne s’est jamais dit « Pourquoi lui et pas moi ? » en regardant
un jeune crétin au volant d’une grosse voiture ou « Pétasse ! », en voyant
une plus jolie femme que soi monopoliser l’attention dans une soirée ?
Et ces sentiments de jalousie nous font casser du sucre sur les dos ! On
rabaisse, on dénigre, on diffame, on calomnie : « C’est l’argent de papa, la
promotion canapé, il n’est pas très net, elle est prête à tout… ».
Pourquoi il ne faut pas se croire trop fort
Vous vous croyez très fort ? Vous ne l’êtes sans doute pas
vraiment. Car nous avons tous tendance à surestimer nos
capacités. C’est le Better-than-Average-effect (littéralement,
l’effet meilleur que la moyenne), un biais cognitif qui nous
pousse à nous croire supérieur aux autres, et inversement à sous-
estimer nos défauts. Une étude menée par David A.
Dunnigmontre montre en effet que plus les gens sont compétents
et performants, moins ils la ramènent. Ils ont spontanément
tendance à minimiser leurs réussites, à leurs yeux et à ceux des
autres. Les moins bons ou plus mauvais ne réalisant pas leurs
erreurs (ils ne sont justement pas assez compétents pour les
reconnaître) ont, au contraire, tendance à se vanter. Bref, la vraie
loi du plus fort, c’est la modestie. Et ainsi, on est plus à même
d’apprécier nos succès et digérer nos échecs.
Mais se rendre compte que les autres ont aussi des moments
difficiles aide heureusement à atténuer sa propre mélancolie.
Arrêter de tricher
Aujourd’hui, il faut assurer. Pas question de se laisser aller dans son boulot
ou sa vie privée. Les états d’âme, les coups de blues, de déprime, les petites
mines, sont mal vus. Dans une France frileuse, le moindre signe de faiblesse
fait peur. Ça vous déstabilise une équipe, une famille, un couple.
En quelques années, les grandes peurs économiques, communautaires, la
recherche de la performance à n’importe quel prix, ont contaminé
l’ensemble des rapports sociaux et affectifs. « Le monde est cruel pour les
faibles », prophétisait Mitterrand au début des années 1980. Presque
quarante ans plus tard, les choses se sont aggravées.
On se veut fort, solide, compétitif et on veut que les autres le soient.
Quitte à faire semblant, à encaisser plus qu’on ne peut supporter. On se dit
que si on montre ses défaillances, on ne sera plus aimé. Nos amis, nos
amours, nos chefs nous retireront leur crédit, leur confiance. Alors, on
triche, on prend sur soi, on se dope comme on peut, pour tenir le coup.
Les Français sont souvent sur le podium mondial des « pilules du
bonheur » et du pessimisme. Le prix à payer pour assurer, continuer à
donner de soi une image forte.
Aujourd’hui, heureusement, tout le monde fatigue. On en a marre
d’afficher le sourire du succès, de faire comme si on était indestructible, de
jouer les blindés. Avec la fin des années « bling bling », le retour aux
valeurs, on se rend bien compte que le bonheur passe par un peu plus de
simplicité et d’authenticité. On a envie de pouvoir craquer quand ça ne va
pas sans que ça fasse un drame. On a envie de pouvoir faire des erreurs sans
se sentir affreusement coupable, avant ou après, parce que pour une fois on
a raté son coup ou on n’a pas été à la hauteur.
Le désir de l’autre
1. Rester soi à deux
Quand on aime, on est forcément dépendant, on a besoin de l’autre : c’est
normal, sinon à quoi bon vivre ensemble ? Là où ça se gâte, c’est quand il y
a un trop grand décalage entre les partenaires. Quand l’un, par manque de
confiance en soi ou par crainte de l’abandon (les deux principales causes de
la dépendance), vit complètement suspendu au désir et à la volonté de
l’autre.
Pour autant, plus ou moins inévitable, plus ou moins grave, la
dépendance n’est cependant pas une fatalité. On peut rester soi-même
quand on est deux. C’est bête à dire, mais le moyen le plus sûr pour ne pas
être dépendant ou l’être moins est d’être indépendant et de le rester, ou en
tout cas de faire comme si.
* Les peace and peace. Ces derniers évitent à tout prix les
conflits et ne se disputeront jamais. Face à une divergence,
l’écoute ne sera jamais suivie d’un effort de persuasion de l’autre.
Les fusionnels
Les « fissionnels »
3. Fluidifier le quotidien
Au moment d’une rencontre, on projette énormément sur l’autre, on le pare
de toutes les vertus et c’est bien normal. Quand on désire, on aime, on a une
image d’autant plus valorisante de la splendeur venue illuminer notre vie
qu’elle nous valorise. On se raconte toujours une histoire dont l’autre est le
héros. Et chacun se raconte sa propre histoire, celle qui lui est indispensable
pour aimer. On ne se trompe pas forcément sur ce que l’autre peut nous
apporter, surtout quand l’amour est réciproque.
Mais souvent, en se racontant une histoire, on se met à se raconter des
histoires sur l’autre, pour le faire coller à notre propre histoire. Et
régulièrement, on oublie que celui ou celle qu’on aime est réel. Avec des
besoins, des habitudes, des désirs et des priorités qui ne collent pas
nécessairement avec les nôtres et qui sont potentiellement des sources de
conflit.
En effet, lorsque l’on vit en couple, les motifs d’agacement ne manquent
pas, même quand le quotidien ronronne. Et ils sont encore plus nombreux
en cas d’événements. Mais parfois, les tensions s’accumulant, on perd
chaque jour un peu plus de sa bonne humeur. Comment ménager ses nerfs
sur le moment et sa relation à long terme ? En prenant les bons réflexes
pour désamorcer le conflit dans l’œuf ; ils valent dans son couple comme
dans la plupart des relations affectives.
On se remet en cause
Vous étiez charmant, facile à vivre, et puis, au fil des mois, des années,
votre bonne humeur s’est émoussée. Tout ce que l’autre fait, ou ne fait pas,
vous énerve prodigieusement. Vous ne supportez même plus, parfois, le voir
tourner benoîtement sa cuillère dans son café. Forcément, vous surréagissez
souvent et vous avez de plus en plus l’impression de virer à l’horrible
mégère ou tyran domestique. Êtes-vous trop perfectionniste (il n’y a qu’une
bonne manière de faire les choses : la vôtre) ? Trop exigeant (tout ce que
fait l’autre n’est jamais assez bien) ? Que cachent tous ces énervements ?
Vous devez d’abord prendre le temps de faire votre autocritique. Ensuite,
efforcez-vous d’être toujours positif pour avancer. Chaque fois que vous
êtes agacé, demandez-vous « Qu’est-ce que je peux faire ? » au lieu de
critiquer (« Il est vraiment insupportable »), d’accuser (« C’est de sa
faute »), ou de regretter (« C’était mieux avant »).
Ménages à deux
À rebrousse poil de toutes les idées reçues, car tous les psys de
couple sont pour le dialogue, Yvon Dallaire, un thérapeute du
Québec, estime comme La Rochefoucauld qu’ « on est souvent
plus heureux par les choses qu’on ignore que par celles que l’on
sait ». Selon lui, les couples heureux : (1) Ne croient pas en la
toute-puissance de la communication. (2) Ne mettent pas en
doute la bonne foi de leur partenaire. (3) Respectent la
susceptibilité et les sentiments de leur partenaire. (4) Acceptent
d’être incompris par l’autre. (5) Ne cherchent pas à trouver le
coupable. (6) Ne forcent pas la communication. (7) Attendent le
moment propice pour échanger. (8) Respectent les différences.
(9) Communiquent souvent en silence. (10) Communiquent leurs
besoins plutôt que leurs griefs. (11) Expriment leurs émotions de
façon positive. (12) Ne critiquent jamais, même
« constructivement ».
Tout cela est plutôt bien vu, mais reste que le manque de
communication est tout de même le principal motif de rupture
dans les couples, bien avant l’incompatibilité des partenaires et
les priorités qui changent en cours de route.
On apprend à s’excuser
Pas facile de revenir à son niveau de bonheur initial après un clash ! On a
dépassé les bornes, on se sent coupable ou victime, et souvent on en fait
trop, trop vite, ou pas assez. Savoir se réconcilier est tout un art. Cynthia
Frantz et Courtney Bennigson, deux psychologues de l’Université
d’Amherst dans le Massachusetts, ont montré que : (1) Il ne faut pas
s’excuser trop tôt après une dispute. Des excuses faites trop rapidement
laissent un sentiment de frustration, en revanche, celles qui viennent plus
tard sont plus réconciliatrices. (2) Il faut d’abord laisser le temps à l’autre
d’exprimer sa colère, son ressentiment et sa frustration. Les excuses ne sont
vraiment efficaces (réparent, réconcilient) que si l’on reconnaît ses torts ou
ses erreurs. Mais il faut d’abord « encaisser » les remarques hostiles de la
« victime » pendant tout le temps nécessaire, plus ou moins long en
fonction du degré de l’offense ressentie, avant de présenter ses excuses.
4. Se soucier de soi
Socialement, ça la fiche mal d’être égoïste. Cela ne fait pas « gentil ». On se
dit que ce n’est pas moral, pas sympa. Moi d’abord, cela va à l’encontre de
tout ce qu’on a appris à la maison ou à l’école. « Il n’y a pas que toi »,
« Pense aux autres », « Sois gentil avec ton petit frère ». Ce n’est pas très
flatteur pour son image perso.
Même quand on ne fait pas grand-chose pour les autres, on aime tous
s’imaginer qu’on est capable de désintéressement, de dévouement. Égoïste,
on ne s’en vante pas, sauf pour signer un parfum des années 1980, les
années de naissance de l’individualisme forcené et de la course au fric.
En plus, l’égoïsme, c’est contraire à tout ce qui fait que la vie n’est pas
une jungle, au terrorisme de la nature (la survie, la loi du plus fort) : la
civilisation, la culture, la démocratie, l’humanisme…
Du coup, au prétexte de gentillesse, de solidarité, on n’ose pas, on n’ose
plus dire « je ». On met une croix sur ses envies. Ou on se culpabilise à
chaque fois qu’on se fait un plaisir solo. Et on se laisse souvent marcher sur
les pieds pour ne pas être montré du doigt dans son job ou son milieu social,
se retrouver étiqueté égoïste par les gens que l’on fréquente si on la joue
trop perso.
Pourtant, quoi de plus normal que d’être attaché à soi-même et de
rechercher son plaisir et son intérêt personnels ? Mieux, même si l’égoïsme
n’est pas une grande vertu comme l’amour, la générosité, la tolérance ou la
bonne foi, il n’est pas sans vertu. Pas seulement pour soi. Pour les autres
aussi.
Vous pouvez vous dire « Ah, mais c’est vilain d’être égoïste. L’ego, c’est
pas bien, voyez dans le bouddhisme, les philosophies indiennes, on nous
apprend à abandonner notre ego ». Mais bon, vous avez tout faux. Vrai,
selon eux il s’agit de sacrifier son ego. Sauf que si l’ego est un tout petit
truc riquiqui, le sacrifice vaut des clopinettes. Avant de perdre son ego, il
faut d’abord en avoir un.
Car c’est tout bête, pour pouvoir donner, il faut avoir quelque chose à
donner. Vous avez déjà vu un grand dépressif s’investir dans une œuvre
humanitaire ? Non, évidemment. Quand on est mal dans sa peau, noyé dans
ses problèmes, quand on ne peut pas grand-chose pour soi, on ne peut rien
pour les autres.
Au contraire, la générosité est la contagion du bonheur. Osez l’égoïsme,
vous verrez que le bonheur des uns ne fait pas forcément le malheur des
autres. Ce qui est bon pour vous peut être un bien pour les autres.
L’égoïsme, non seulement vous en avez le droit, mais c’est souvent aussi un
devoir.
Bien sûr, il ne s’agit pas d’en faire un mode de vie du matin au soir, de
pratiquer le chacun pour soi en écrasant les autres. Non, l’égoïsme est
quelque chose qui se dose, une générosité bien ordonnée qui commence par
soi-même.
Réapprendre à dire « Je »
Avec sa maman, quand on veut quelque chose, on emploie naturellement le
mode « Tu » parce que c’est elle qui décide et qui fait les choses. On dit :
« Maman, tu peux me donner un verre de Yop ? » ou « Maman, tu veux
bien m’acheter la Barbie avec le gros ventre qui a un bébé ? ».
Mais votre conjoint, votre patron, vos collègues ou votre banquier ne sont
pas votre mère. Avec eux, le moyen le plus rapide d’améliorer les relations,
d’obtenir ou de dire les choses, surtout quand elles peuvent être
désagréables à entendre, c’est d’employer le « Je » au lieu du « Tu » ou du
« Vous ».
Cela passe mieux, par exemple, quand on dit à quelqu’un : « J’ai toujours
eu du mal à être à l’heure » ou « Je pense que le moment est venu de
reparler de mon augmentation » ou encore « Je sais que je t’agace,
j’aimerais bien qu’on s’entende mieux ». L’autre ne se sent pas, en tout cas
moins, mis en cause ou menacé dans son autorité.
En revanche, vous réactivez tous ses instincts défensifs quand vous lui
dites : « Vous êtes vraiment trop strict avec les horaires » ou « Vous m’aviez
promis une augmentation, vous avez oublié » ou encore « Tu t’énerves
facilement avec moi, tu pourrais être plus patient, ça irait mieux. »
Le « Je » est aussi un bon moyen pour vous assurer que vous êtes sur la
même longueur d’onde. Par exemple : « Ai-je raison de penser que vous ne
voulez pas parler de ma promo pour le moment ? » ou « Je t’ai bien entendu
dire que tu t’en occuperais ? »
Prenez l’habitude de parler de vos problèmes en disant « Je ». Cela vous
aidera à penser les situations du point de vue de vos propres responsabilités
et à trouver vos propres solutions. Et cela encouragera les autres à trouver
les leurs.
Attention tout de même. Certains « Je » sont trompeurs. Ils cachent des
« Vous » ou des « Tu » et déclenchent presque toujours des réactions
défensives. Si vous dites à votre patron : « J’ai l’impression que vous ne me
dites pas tout sur le projet X », forcément, il vous reproche de ne pas lui
faire confiance. Pour en faire une véritable affirmation, vous devez dire :
« Je me sens mal à l’aise parce que je ne connais pas vos intentions sur le
projet X. »
Cesser de se sacrifier
Tous les jours, au nom de l’autre, vous faites des sacrifices. Vous renoncez à
des plaisirs. Vous oubliez vos intérêts personnels. La plupart du temps, ce
n’est pas très important. Cela n’a rien de dramatique si vous n’achetez pas
le petit-ensemble-Prada-qui-vous-va-à-ravir en pensant que votre gamine a
besoin d’un manteau neuf. Si vous ne prenez pas une semaine de vacances
pour ne pas abandonner votre conjoint bloqué par son job. Ou si vous
acceptez de partir en thalasso avec votre maman alors que vous savez
pertinemment qu’au bout de trois jours elle vous tape sur les nerfs. Mais,
parfois, vous renoncez à des choses plus essentielles. C’est le cas quand
vous abandonnez votre personnalité pour être plus conforme à l’image que
les autres ont de vous. Quand vous mettez une croix sur vos propres
passions, vos projets et vos aspirations pour mieux correspondre aux
attentes de votre conjoint. Ou quand vous restez avec quelqu’un que vous
n’aimez plus parce que vous avez des enfants avec lui et qu’une illusion de
famille vaut mieux qu’un divorce.
Dans ce genre de situation, vous pensez que le sacrifice en vaut la peine.
Vous le justifiez, vous le supportez, en faisant appel à vos bons sentiments.
Vous devez bien ça à votre maman, votre conjoint, ou à vos enfants. Vous
vous trompez. Pour plusieurs raisons. D’abord, ce qui est bien pour les
autres, vous n’en savez rien. Peut-être que votre gamin a moins besoin d’un
manteau neuf que d’une maman bien dans sa peau. Peut-être que si votre
maman partait seule en thalasso, elle rencontrerait un monsieur pour égayer
ses longues soirées d’hiver. Peut-être que quelques jours sans vous feraient
le plus grand bien à votre compagnon ou compagne.
Ensuite, un égoïsme bien dosé consiste aussi à renvoyer chacun à ses
problèmes. Surtout qu’à moins d’être un saint, à chaque fois que vous faites
preuve d’abnégation, vous culpabilisez toujours un peu ou beaucoup les
autres.
On ne peut pas tricher avec les frustrations. Quand on est malheureux,
nos proches le sentent même si on fait tout pour le leur cacher. En plus,
c’est humain, on a tous plus ou moins tendance à reprocher à ceux qu’on
aime tout ce qu’on fait pour eux et qui nous coûte trop. De fait, chaque fois
que vous vous sacrifiez, vous négligez aussi ce qui fait le déclic de
l’altruisme et de la générosité. « Aime ton prochain comme toi-même »,
c’est d’abord une injonction à l’amour de soi. Parce ce qu’on ne peut pas
vraiment aimer les autres sans d’abord s’aimer soi-même.
Alors, arrêtez de vous sacrifier sur le thème « sois gentil ». Penser à soi,
c’est le premier pas à faire pour pouvoir vraiment penser aux autres.
N’oubliez jamais que le plus beau cadeau que l’on puisse faire à ceux que
l’on aime, c’est d’abord d’être heureux et de leur montrer. Même si parfois,
sur le moment, ils râlent parce que cela leur crée des problèmes. À terme,
c’est de toute façon toujours plus avantageux pour tout le monde.
Passer en premier
Nombre de nos difficultés personnelles et relationnelles viennent du fait
que, spontanément, on imagine que les autres, surtout ceux qui nous sont
proches, sont comme nous. On a toujours du mal à admettre qu’ils ne
pensent pas ou n’agissent pas comme on le fait, que les plaisirs ou les
intérêts puissent être différents.
Le fait est que quand nos désirs ne collent pas, on a souvent tendance à
faire passer ceux des autres en priorité. On se dit : « Je les aime, je veux les
rendre heureux. »
Chez les femmes, c’est un vieux réflexe « deuxième sexe ». Vous avez
été conditionnée par quelques siècles d’éducation patriarcale pour passer
après les autres. Les cinquante dernières années de féminisme n’ont pas
changé grand-chose à ce niveau. Au nom de l’amour, vous continuez la
plupart du temps à vous effacer. Vous pensez que c’est mieux pour votre
couple, que de cette manière vous faites le plus grand bien à l’homme que
vous aimez. Vous avez tort. À chaque fois que vous faites passer votre
plaisir ou votre intérêt après les siens, vous lui donnez automatiquement le
mauvais rôle. Vous faites peser sur lui une responsabilité insupportable
(surtout s’il n’est pas très égoïste). Si vous n’êtes pas heureuse, cela devient
de sa faute. Et, forcément, heureuse, vous ne l’êtes jamais complètement.
Parce que même si c’est un homme merveilleux, il ne peut pas mieux savoir
que vous ce qui est bon ou plus important pour vous. Même s’il vous donne
beaucoup, il ne peut vous donner que ce qu’il a.
Au contraire, en vous faisant passer en premier, quand vous prenez en
main vos plaisirs et vos intérêts, vous lui évitez de culpabiliser ou de
s’angoisser sur le thème « Si ça ne va pas, elle va me quitter. » Vous ne lui
reprochez plus, ou beaucoup moins, de manquer d’attention, de ne pas
s’occuper assez de vous. En somme, vous le rendez plus heureux et donc
plus amoureux.
Pour les hommes, c’est un peu plus complexe. C’est vrai, la plupart s’en
fichent, ne sont pas très attentifs aux besoins, à la demande et aux priorités
de leur partenaire. La plupart tracent leur route, « qui m’aime me suive »,
mais de plus en plus d’hommes veulent néanmoins bien faire (pas juste être
beauf). L’embêtant, c’est qu’ils ne savent pas comment et leur bonne
volonté tombe souvent à plat. Du coup, les femmes leur reprochent de ne
pas faire leur job d’homme. On n’entend souvent « Il n’y a plus
d’hommes ! ».
Là, à nouveau, c’est assez simple. Il faut juste être soi et ne pas se
prendre la tête sur le thème « Ah, si je fais ça, qu’est-ce qu’elle va
penser ? ». La règle est de se focaliser sur soi, ses propres sentiments,
comportements, et ne pas fabuler sur ce qu’il y a dans la tête de la femme
que l’on a en face de soi. Vous n’en savez rien, alors faites ce que vous
pensez être juste, ce qui colle à la personne que vous êtes (en vrai). Ensuite,
vous verrez bien.
Apprendre à décrocher
Comme tout le monde, vous avez le sentiment de faire des concessions, des
compromis, d’avaler votre part de couleuvres. Pourtant, vous ne cédez ni
aussi souvent que vous le devriez ni, surtout, assez tôt. On a tous tendance à
« s’accrocher ». C’est un réflexe animal. On protège instinctivement son
territoire, ses acquis, ses privilèges. Certains sont prêts à se faire tuer pour
défendre leurs racines, leurs traditions ou leur lopin de terre. Plutôt mourir
qu’accepter de perdre, s’adapter à des réalités nouvelles.
Ce réflexe joue à tous les niveaux dans notre vie quotidienne. Il joue pour
des choses essentielles, quand on est émotionnellement très impliqué. On se
cramponne à un amour, même s’il est déjà mort. On s’accroche à un job,
même s’il n’est pas fait pour soi. Mais aussi pour des riens, alors qu’on
n’est pas vraiment concerné.
Dans une discussion, par exemple, il suffit souvent que quelqu’un ne soit
pas d’accord pour qu’on s’obstine. Parfois on préfère se fâcher plutôt que
lâcher du lest, reconnaître : « Tu sais, au fond je m’en fiche, tu as peut-être
raison. » On s’accroche par réflexe, mais aussi par amour-propre. Fort de sa
vérité ou de ses droits, on met souvent à mal sa tranquillité d’esprit ou
l’harmonie de ses relations.
Bien sûr, il est contrariant de se faire doubler dans une file d’attente.
Mais ça l’est moins quand on laisse filer, quand on évite l’altercation. Bien
sûr, c’est agaçant que la personne qui partage votre vie fasse sans cesse des
caprices d’enfant gâté. Mais ça l’est toujours moins si vous n’en faites pas à
chaque fois une occasion de reproche.
Apprenez à décrocher, à lâcher prise. C’est un art de vivre qui demande
de respecter quelques règles.
Faire seulement ce pourquoi on est fait
Si vous n’êtes pas « vie à deux », « jardin d’enfants », évitez. Vous n’êtes
pas obligé de faire « comme tout le monde ». Quand vous devez faire
quelque chose, faites-le pour vous, pas en fonction du regard ou des
pressions des autres. Idem si vous n’êtes pas doué pour le piano ou le
jogging. Laissez tomber. Ne vous butez pas au prétexte que ça fait chic, que
c’est à la mode ou bon pour la santé. Vous avez sans doute d’autres talents
ailleurs, moins laborieux, plus naturels.
Les choix, les choses, doivent se faire avec affection, avec passion, sinon
ils sont mauvais et mal faits. Laissez parler vos sentiments et vos intuitions.
Soyez souple, fluide. En amour ou dans le travail, rien de ce qui s’obtient à
l’arraché n’est tenable, durable. Une affection, une position, un avantage
conquis par la force de la volonté ou de la séduction au prix d’une
compétition acharnée, ne sont jamais garantis dans la durée. Ils demandent
encore plus d’énergie et d’efforts pour être gardés que pour se gagner. Ils
sont générateurs d’angoisses à l’idée de les perdre et de stress pour les
préserver. Plus le temps passe et plus ils sont difficiles à gérer et à défendre.
Décrocher systématiquement en cas de problème
D’abord, limitez les sources de conflits. On a tous suffisamment de
problèmes comme ça pour ne pas s’en créer d’autres. Cela signifie fuir
autant que possible les relations problématiques, bien choisir ses
fréquentations, s’entourer de gens dont on partage les mêmes valeurs, les
mêmes idéaux ou le même style de vie ; cela facilite les choses. Les motifs
de désaccord sont plus rares, moins durables.
Mais, même avec ses proches (surtout avec eux), il faut esquiver, refuser
les affrontements. Comme disaient nos grands-mères : « On ne parle pas
politique ou religion à table. » Ne défendez pas à n’importe quel prix votre
territoire ou votre point de vue. Si vos idées, vos projets ne conviennent
pas, laissez tomber. Au moins provisoirement. Si votre style, vos manières
ne plaisent pas, allez les « vendre » ailleurs. En amour ou en amitié, les
choses doivent se faire naturellement. Si vous devez ramer en permanence,
ça n’en vaut pas la peine.
À l’extérieur, dans votre job, souvent vous ne pouvez pas faire autrement,
vous êtes obligé de « faire avec ». Mais le principe reste le même :
décrocher pour ne pas envenimer les situations, les relations. Louvoyer avec
le vent en gardant en tête son objectif, sa terre promise.
La plupart des problèmes qu’on peut avoir les uns avec les autres se
règlent d’eux-mêmes quand on n’en fait pas un fromage. D’un jour à
l’autre, les esprits se calment, les rapports évoluent, les choses se
relativisent.
Ne pas faire de tout un problème personnel
Quand on s’accroche avec quelqu’un, on ne sait pas faire la part des choses.
Une réflexion, une critique, un reproche, qui nous semblent déplacés,
injustifiés, et on part au quart de tour. On n’imagine pas un seul instant que
la personne qui nous « agresse » a ses propres difficultés, ses états d’âme.
La plupart du temps, quand vous êtes « accroché », au bureau ou à la
maison, vous n’y êtes pour rien. Vous écopez simplement parce que vous
avez la malchance d’être là au mauvais moment. C’est toujours désagréable
de servir d’exutoire, mais c’est difficile de reprocher aux autres ce qu’on
fait parfois aussi soi-même. Accordez-leur et accordez-vous le droit à la
mauvaise humeur, aux dérapages. Ne vous sentez pas systématiquement
concerné. Prenez du recul. Entraînez-vous à ignorer, à concentrer votre
attention sur autre chose. En ne renvoyant pas la balle, en restant
émotionnellement distant, vous désamorcez.
Résister à la tentation de jouer les justiciers
C’est une tentation qu’on ressent tous à un moment ou un autre. Parce
qu’on a raison ou parce qu’on est dans son droit, on se croit obligé ou on se
permet de pousser l’autre qui a tort dans ses derniers retranchements. On
prend un malin plaisir à dénoncer ses faiblesses, ses fautes ou ses
aveuglements. Au nom de la vérité, de la morale, on oublie le droit à
l’erreur ou à la défaillance.
Lâcher prise, c’est aussi apprendre à se montrer plus tolérant. On oublie
que la tolérance consiste d’abord à admettre chez les autres des manières de
penser ou d’agir différentes de celles que l’on a, à ne pas interdire ou exiger
alors qu’on le pourrait.
Bons à garder…
Sur le plan affectif
La mère-amie qui vous traite d’égal à égal, qui sait être présente
quand il faut, mais aussi vous remonter les bretelles, sans pour
autant chercher à s’immiscer dans votre vie privée.
Le père valorisant qui vous dit fréquemment combien il est fier
d’avoir un enfant comme vous (intelligent, drôle, astucieux,
sérieux, responsable), qui s’aperçoit et apprécie chaque fois que
vous faites quelque chose de bien. Celui qui célèbre vos succès
(scolaires, professionnels) et qui vous les rappelle chaque fois que
vous vous plantez.
L’ami de vos parents qui ne vous prend ni pour une
demeurée (« Alors, on a bien joué avec Barbie aujourd’hui ! ») ni
pour un ovni – objet violent non interné (« Ta pauvre mère, je me
demande comment elle arrive à te supporter ? ») et vous traite en
adulte.
Le conjoint qui vous apprécie tous les jours et pas seulement pour
votre physique, vos petits plats ou vos performances sexuelles,
qui vante vos qualités (intelligence, humour, tolérance,
générosité, etc.) et vous redore l’ego chaque fois qu’il s’écaille.
Le prof qui vous convoque en privé pour savoir ce qui se passe
quand vous avez une baisse de régime, celui qui vous encourage à
faire des choix ambitieux : « C’est de la graine de concours, ça,
Madame ! ».
Le patron exigeant qui montre qu’il a confiance en vous (sinon,
pourquoi vous avoir engagé ?) et vous confie des tâches à la
hauteur de vos c ompétences. Celui qui n’est pas toujours sur votre
dos, qui vous félicite devant tout le monde quand vous faites bien
et vous prend entre quatre yeux quand il a des reproches à vous
faire.
Bons à jeter…
Sur le plan affectif
Désamorcer l’hostilité
Les flatteurs
Ce sont tous ceux qui passent leur temps à vous dire combien
vous êtes exceptionnel ou merveilleux. Ils ne vous contrarient
jamais, ils se montrent toujours d’accord même quand ils pensent
que vous avez tort. C’est un signe qui ne trompe pas. Devant
vous, c’est « Ma petite chérie, tu as une mine superbe ! »
Derrière : « Tu as vu sa gueule de déterrée, elle ferait mieux
d’arrêter l’alcool ! »
Les débiteurs
Ennemis potentiels aussi, tous ceux qui vous doivent quelque
chose. Vous leur avez rendu service, vous les avez aidés quand ils
étaient en panne d’idées, hors délais ou en pleine déconfiture
morale. Ils sont rarement reconnaissants. Neuf fois sur dix, ils ont
une dent contre vous. Vous les avez connus sous un mauvais jour,
en état de faiblesse. Leur ego ne s’en remet pas.
Les faux jetons
Il y a aussi tous ceux qui vous ont déjà lésé dans vos droits ou vos
intérêts, blessé dans votre amour-propre. Il est dans la nature
humaine de haïr ceux à qui l’on a fait du tort. Cela permet de
garder bonne conscience. Tous ceux qui vous ont fait du tort
d’une manière ou d’une autre ne sauraient vous le pardonner.
Autant en faire des ennemis. Même si ce n’est souvent pas facile,
car vos futures ennemis ou ceux qui vous détestent déjà n’ont pas
envie que ce soit dit. Comme vous, ils répugnent à déclarer les
hostilités. Ils préfèrent en rester à une inimitié larvée, à continuer
à jouer les faux jetons.
Les « biens intentionnés »
Parfois, certains se leurrent sur les sentiments qu’ils ont pour
vous. Ils sont persuadés d’être de vrais amis. Lorsqu’ils vous font
du mal (vous sapent auprès du patron, « égarent » un dossier
important), c’est « sans faire exprès », ils vous veulent du bien.
Ça aussi, c’est dans la nature humaine. En général, quand on fait
une crasse à quelqu’un, c’est toujours avec de bonnes raisons.
Pour son bien ou par légitime défense (il l’a bien cherché !).
Personne n’a envie de se regarder dans une glace et de se dire :
« Toi, ma vieille, tu es une hyène, un franc salaud ». C’est
toujours plus confortable, moralement et socialement, de se dire
qu’on aime les gens plutôt que le contraire. On se préfère victime
que bourreau.
Les ex
Quand ce sont eux qui nous quittent, on ne veut plus en entendre
parler. Notre amour-propre en prend un coup. Quand c’est nous
qui les quittons, on s’acharne à les conserver comme amis. La
grandeur d’âme, l’amour voudraient pourtant le contraire.
Pardonner quand on est plaqué, pour déculpabiliser l’autre.
Condamner (comme on condamne une porte) quand on plaque
pour ne pas entretenir l’autre dans la nostalgie de ce qu’il a perdu
ou l’illusion d’un come-back possible. Tous ceux qu’on a
abandonnés peuvent ainsi faire de bons ennemis.
Les « bien pensants »
On peut aussi se faire efficacement des ennemis en parlant vrai.
Le beauf qui vous bassine tous les jours au bureau avec ses
plaisanteries sexistes, à la limite du graveleux, ou la « bonne
copine » qui vous sape en faisant des commentaires insidieux sur
votre façon de vous habiller ou de travailler, on n’en tire rien en
se montrant compréhensif. Dites-leur leurs quatre vérités. La
plupart des gens, particulièrement les grands hypocrites, n’en
supportent même pas une. Une inimitié déclarée vaut toujours
mieux qu’une fausse amabilité. Au moins, les rapports sont clairs.
Les parasites
Vous pouvez aussi vous faire facilement de nouveaux ennemis en
disant simplement « non » (chaque fois que vous le pensez) au
lieu de « oui, avec grand plaisir » ou « oui, c’est une bonne
idée ». La plupart des gens non plus ne supportent pas d’être
frustrés dans leurs bonnes, ou leurs mauvaises, intentions. Dire la
vérité, savoir dire non ou se fâcher nécessite évidemment un
minimum de courage que vous n’avez peut-être pas. On ne se fait
pas des ennemis du jour au lendemain quand on a pris l’habitude
d’être aimable, charmant, accommodant avec tout le monde. Vous
ne pouvez pas tout d’un coup, du jour au lendemain, muer en
dragon. Les autres n’y croiront pas. Ils diront : « Elle/il a sa crise,
ça va lui passer. »
Les opportunistes
Si vous avez donné l’habitude aux autres de ne jamais dire non et
d’abuser de votre bonne volonté ou de votre docilité, dans ce cas,
il faut la jouer plus sournoise. Dire « oui » à tout et ne jamais
donner suite. Faire tout plein de promesses que vous ne tiendrez
pas. Dans votre job par exemple, vous pouvez tout remettre au
lendemain de telle sorte que les délais ne soient jamais respectés.
Ou vous faites avec une lenteur délibérée ou mal tout ce que vous
n’avez pas vraiment envie de faire (ça marche aussi à la maison).
En salopant le travail, en vous défilant sur le thème « Oups, j’ai
oublié », vous vous ferez vite quelques ennemis tenaces.
Les chronophages
Autre moyen également pour qu’on vous fiche la paix, arriver
systématiquement en retard avec un grand sourire. Ça finit par
agacer les plus indulgents. Terriblement efficaces les rencontres
proposées en fin de journée ou le samedi au prétexte de boucler
un dossier, régler un problème. « Ça t’ennuie pas de rester un peu
ce soir (ou de passer samedi), je serai là vers 18 h 30 - 19 h au
plus tard (11 h - 11 h 30 le samedi), on en aura pour une petite
demi-heure. » Et vous arrivez vers 22 h (14 h le samedi) ou,
mieux, vous appelez pour dire que finalement ce n’est pas
possible, vous êtes bloqué, vous ne pouvez pas passer. Quand on
dira de vous : « le nombre de soirées ou de week-ends qu’elle
(qu’il) m’a pourris », vous aurez gagné un nouvel ennemi.
Idem pour les dîners de boulot. Acceptez toutes les invitations et
décommandez à la dernière minute (avec une excuse béton)
quand tout le monde est sur le point de passer à table.
Cela dit, ce n’est pas tout de se faire des ennemis, encore faut-il les
garder. Alors soyez fidèle à vos ennemis, ils vous serviront longtemps.
Soyez clément aussi. Il suffit de l’emporter sur ses ennemis, c’est trop
dommage de les perdre.
Comment ça va bien ?
La vie ressemble parfois à une mauvaise réalité. Tous les jours, nous
sommes aussi confrontés aux petites et grandes mauvaises humeurs des uns
et des autres. En prenant les bons réflexes, vous pouvez les désamorcer
dans l’œuf. Ce ne sera peut-être pas le Paradis, mais vous ferez des heureux
(à commencer par vous).
« Bonjour », « Comment ça va ? », « Alors, la forme ? », « Je ne
vous dérange pas ? », « Merci, au revoir »… Respectez les
convenances, les règles de politesse, les rituels sociaux. Nos
petites phrases rituelles, loin d’être inoffensives, ont un effet
positif. Par exemple, quelqu’un qui répond qu’il se sent bien, se
sent obligé de se montrer « bien ».
Prenez des nouvelles (surtout le lundi ou au retour des vacances) :
« Alors, ce week-end s’est bien passé ? », « Votre fils a eu son
bac ? », « Et le chien, il n’est plus constipé ? » Demandez à
quelqu’un comment ça va et enchaînez : « Ah, je suis heureux de
l’apprendre » si c’est positif ou « Oh, je suis désolé de
l’apprendre » si c’est négatif, cela renforce la sympathie.
Respectez scrupuleusement les hiérarchies (ne posez pas vos
fesses sur les bureaux de vos chefs) et les territoires (n’entrez pas
dans un bureau, même ouvert, sans un signe), et n’interrompez
pas les conversations (par exemple, en commençant à parler alors
que votre interlocuteur est déjà au téléphone), même si cela doit
faire violence à votre sensibilité trop « démocratique ».
Regardez les gens dans les yeux quand vous leur parlez. Plus on
regarde quelqu’un, plus il nous trouve sociable, généreux,
honnête, digne de confiance et, pour tout dire, aimable.
Parlez avec les gens des sujets qui les intéressent. Du Mondial de
foot avec un fan, même si vous trouvez que courir derrière un
ballon est fondamentalement idiot, de tauromachie avec un
aficionado, même si vous pensez que c’est très cruel d’aller
asticoter un monstre de 500 kilos qui a la bave aux lèvres. Et
montrez-vous bon public, surtout quand ça n’est pas drôle.
Hochez la tête quand on vous parle. Vos interlocuteurs se
livreront davantage, se sentiront plus satisfaits de la conversation
et vous trouveront nettement plus sympathique.
Laissez croire aux autres que c’est vous qui pensez comme eux et
pas eux qui pensent comme vous. Employez systématiquement le
« nous » plutôt que le « je ». Et, quand vous avez de mauvaises
pensées, gardez-les pour vous, ne dénigrez pas les gens qui vous
insupportent, surtout en public.
Soyez souriant autant que possible, sauf avec les paranos qui
peuvent mal le prendre. Une personne souriante est toujours
perçue comme plus amicale, plus gentille, plus sincère, et,
curieusement, plus intelligente et compétente.
Montrez-vous aimable avec tout le monde, votre boulanger, mais
aussi votre banquière, l’homme de ménage, les employés ou les
patrons. Et encore plus sympa avec les seniors (surtout les
grincheux). Souvent, ce sont des « chefs » et même quand ils ne
le sont pas, ils ont toujours un gros « pouvoir d’ambiance ».
Créez du « lien tactile ». Poignées de mains, grandes claques dans
le dos, contacts de quelques secondes sur l’épaule ou sur l’avant-
bras, toucher et être touché, c’est la première forme de
communication chez les êtres vivants. Cela procure un sentiment
de sécurité (sauf chez les paranos) et entretient la confiance.
Ne dites jamais « non » quand on vous demande un service, mais
défilez-vous gentiment si ça vous gave : vous avez trop de boulot,
un travail urgent à finir, un supérieur qui vous demande de lui
rendre service, qui vous attend.
Calquez vos comportements sur ceux de votre entourage et
adoptez leur langage, par exemple en repérant les mots qu’ils
utilisent le plus souvent et en les ressortant dans la conversation.
Gestes, jeux de physionomie, intonations, tics de langage,
attitudes, façons de s’habiller… Nous préférons tous les gens qui
nous ressemblent. On se sent plus à l’aise, plus en sécurité et dans
de meilleures dispositions d’esprit avec eux.
Félicitez les gens chaque fois qu’ils font quelque chose bien,
même une toute petite. Et minimisez quand ils se plantent,
trouvez-leur des excuses : « C’était vraiment compliqué… », « Je
n’aurai pas mieux fait », « La prochaine fois, ça se passera
mieux »…
Ne soulignez jamais les désaccords, cela ne fait que renforcer les
gens sur leurs positions, leurs préjugés. Efforcez-vous toujours de
rapprocher les points de vue, de trouver un terrain d’entente,
quitte à faire preuve de beaucoup de mauvaise foi.
Évitez les mouvements d’humeur et ignorez ceux des autres.
Relativiser les réflexions, les critiques, les reproches au lieu d’en
faire un problème personnel et de répondre du tac au tac en cas
d’attaque.
Noter chaque jour trois choses qui ont été bénéfiques dans la
journée et se demander pourquoi, quelle a été notre propre
contribution pour que cela se produise. On se rend très vite
compte, notamment quand on est un peu déprimé, que le tableau
est rarement si noir qu’on l’imagine et qu’on peut avoir des
initiatives positives.
Écrire un témoignage de gratitude et le remettre personnellement
à quelqu’un. Ou au moins se poser trois bonnes questions :
« Qu’ai-je reçu de… ? », « Qu’ai-je donné à… ? », « Quels
ennuis et difficultés ai-je causé à… ? »
Des études récentes démontrent que la gratitude augmente le
niveau de satisfaction et de bonheur au quotidien. Notamment, en
focalisant notre attention sur les aspects positifs de la vie et en
améliorant l’image que l’on a de soi.
Utiliser ses qualités personnelles afin de passer des moments
agréables : aller passer une heure ou deux dans un musée quand
on apprécie l’art, découvrir des nouveaux lieux quand on est
curieux, etc. Les expériences de vie procurent plus de plaisir
durable et de satisfactions que l’achat de biens matériels et
contribuent à notre équilibre émotionnel.
Le manipulateur de service
Entre ceux qui disent oui à tout, mais qui n’en pensent pas moins et n’en
font pas plus, plutôt moins ; ceux qui font croire qu’ils n’ont jamais le
temps : « Tu comprends, Machin m’a demandé un mémo pour midi, c’est
prioritaire » ou les moyens : « Mon disque dur est planté, le temps de
retrouver les fichiers, j’en ai bien pour la journée. » ; ceux qui passent leur
temps à se défiler en jouant les distraits : ils oublient les rendez-vous, les
engagements, arrivent continuellement en retard, « perdent » des dossiers…
ou les imbéciles : « Ah bon, on avait dit ça ? », « Je n’ai pas été
informé », etc. ; ou encore ceux qui font toujours de la résistance passive,
de l’obstruction, voire parfois du sabotage en sous-main, sapent la
créativité, les idées nouvelles, les changements… On n’est pas vraiment pas
aidé.
Comment riposter ?
Pas simple, d’autant qu’un vrai manipulateur évite autant que faire se peut
les confrontations directes, prétendra toujours que ses propos ou ses actes
auront été mal interprétés et niera toute arrière-pensée.
Ne pas tomber dans le piège qui consiste à le démasquer, car il
bloque d’autant plus qu’on lui met le nez dans son caca.
Ne pas faire son procès, par exemple en jouant les adultes qui
sermonnent un enfant sur le thème « On ne peut jamais compter
sur toi ! » Ça ne sert à rien. Sur le moment, il vous promettra tout
ce que vous voudrez, mais une fois la porte passée, il continuera à
n’en faire qu’à sa tête.
Ensuite, une seule technique simple, mais terriblement efficace :
la technique du « disque usé », qui consiste à répéter
inlassablement votre demande en gardant le même ton monotone
(ni énervé ni découragé). Exemple : « Je comprends très bien que
vous soyez occupé, que votre disque dur est fragmenté…, que je
vous demande beaucoup, mais nous avons absolument besoin
de… » Fastidieux, bien sûr, c’est comme répéter sans cesse à son
gamin de se laver les dents deux fois par jour, mais un fainéant
finit toujours par céder à l’usure, ne serait-ce que pour qu’on lui
fiche la paix.
Formulez toujours vos demandes de manière précise et limitée,
par exemple : « Occupe-toi de ce dossier, s’il te plaît » et pas :
« Ça serait bien qu’un jour tu t’occupes de ce dossier. »
Et, inversement, vos critiques en termes généraux : « Qu’est-ce
qui ne va pas ? », « Comment on peut faire avancer les choses ? »
plutôt que sous la forme de reproches personnels : « Pourquoi tu
n’as pas fait ton boulot ? »
Ne le laissez pas non plus se poser en victime, ou reporter la faute
sur les autres, pour justifier son incapacité et ses résultats
médiocres. Renvoyez-le systématiquement à ses propres
responsabilités.
Le crétin prétentieux
Petit chef tyrannique, client despotique, créatif « génial »… La « je-me-la-
pète » attitude est un travers fréquent chez tous ceux qui détiennent, ou
croient détenir, un pouvoir, un savoir ou un talent incontournable. Il vous
regarde de haut, vous traite plus ou moins délibérément avec mépris et, en
général, ne vous adresse la parole que lorsqu’il a quelque chose à vous
demander. Il se vexe ou s’énerve chaque fois que vous soulevez une
objection ou que vous lui reprochez son attitude. Évidemment, il se montre
aussi très jaloux de vos succès, même les petits (il ne peut y avoir qu’une
star, lui !) et les déprécie systématiquement (vous avez eu de la chance).
Comment riposter ?
La langue de vipère
Il prêche le faux pour savoir le vrai, il vous donne de fausses informations
pour vous pousser à la faute, fait courir des rumeurs, Untel est alcoolique,
Unetelle a eu sa promo parce qu’elle a couché… En face, il peut se montrer
tout gentil : « C’est formidable de bosser avec une fille comme toi ! C’est
fou ce que tu apportes à l’équipe ! », se soucie de vous : « Ce n’est pas
sympa ce qu’ils t’obligent à faire… » Dans votre dos, il se répand, il
déforme tout ce que vous lui dites et l’utilise contre vous. Par exemple, il
vous dit que Martin va partir, vous demande si vous êtes éventuellement
intéressé par son poste et, ensuite, va raconter à Martin, qui n’a jamais eu le
projet de lâcher son fauteuil, que vous voulez prendre sa place. Au fond,
c’est une espèce de pervers narcissique qui essaie de cacher tant bien que
mal son jeu.
Comment riposter ?
Le parano de service
Il vous regarde tout le temps comme si vous aviez l’intention de lui piquer
son fauteuil, son assistante, sa place de parking ou de partir avec le fichier
clients. Il imagine toujours des significations cachées, des intentions
menaçantes, dans les moindres de vos propos et vos actes les plus anodins.
Quand son ordinateur bugue, il vous soupçonne d’avoir balancé un virus sur
son disque dur ou s’il n’y a plus de chocolat, que vous l’avez planqué. Et si
vous oubliez de le mettre en copie d’un mail, c’est que vous lui cachez des
informations et que vous cherchez à le piéger.
Comment riposter ?
7. Jouer « gagnant-gagnant »
On peut difficilement être soi, vrai, dans un monde où les autres ne le sont
pas ou si peu. D’où l’intérêt de s’entourer de bonnes personnes (voir
page 210).
Sauf que l’on ne choisit pas les gens qu’on rencontre ni ceux que l’on
doit fréquenter pour diverses raisons, notamment professionnelles.
On a vu comment il fallait s’y prendre dans un certain nombre de
situations et avec différents types d’interlocuteur, mais quelles sont les
règles de base ? Comment s’y prendre avec les autres dans un monde
d’égoïstes où chacun ne pense qu’à ses intérêts personnels en se fichant
souvent de toute considération morale, d’honnêteté, de générosité ou de
respect ? Cela peut sembler mission impossible lorsqu’on ne s’entend pas a
priori et qu’on ne veut pas les mêmes choses.
Pourtant, même quand les intérêts et les objectifs sont incompatibles,
voire éventuellement conflictuels, rien n’est perdu. La solution consiste à
considérer les autres comme des nations souveraines et à leur montrer qu’ils
ont tout intérêt, autant que soi-même, à miser sur la coopération et la
réciprocité plutôt que sur le chacun pour soi.
C’est ce qu’a démontré Robert Axelrod, un chercheur en sciences
politiques de l’université du Michigan. Il a demandé à des spécialistes,
psychologues, sociologues, mathématiciens, etc., de définir toutes les
stratégies possibles dans les différentes situations qui peuvent se présenter.
Par exemple, l’agressivité est une stratégie, la soumission en est une
autre, comme « seul contre tous », « aléatoire », etc. En tout, soixante-trois
stratégies différentes, certaines très complexes, ont été caractérisées.
Axelrod a ensuite organisé un tournoi informatique où chacune de ces
stratégies jouait contre toutes les autres, et aussi contre elle-même. Au bout
du compte, c’est la stratégie « gagnant gagnant », qui consiste à coopérer au
premier coup puis à imiter le comportement de l’autre joueur au coup
précédent, qui l’a emporté haut la main.
La stratégie « gagnant-gagnant » privilégie quatre comportements
individuels :
Z-Access
https://wikipedia.org/wiki/Z-Library
ffi
fi