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LES CONSTANTES DE L'ARCHITECTURE COMTOISE :

CLICHÉS, STÉRÉOTYPES ET RÉALITÉS HISTORIQUES

PAR MARIE-JOSÉ LÉMENT

SOUS LA DIRECTION DE
CLAUDETTE DÉROZIER
SOMMAIRE

Avant-propos • p. 1

Introduction - p. 3

I Un consensus sur l'image de l'architecture comtoise p. 4

Un vocabulaire moralisateur

Les architectes aussi p. 5

Un critère de jugement p. 6

Une couleur locale p. 6

Eléments moteurs du Consensus p. 7

II Les publicités des Constructeurs de Maisons Individuelles . . . p. 8

Une publicité pour une clientèle p. 9

Le titre et le sigle : des symboles du Comtois- p. 10

Le discours : une référence comtoise explicite* p. 11

Une même idée : le respect de la tradition régionale p. 12

Une analyse : le discours de "Maison Phénix p.-13

Une tradition régionale p. 21

III La tradition : un mythe ou une réalité p. 23

Une apparence comtoise p. 23

Un code pour une identité culturelle p. 26

Conclusion p. 30

Bibliographie p 31

Liste des annexes . . . p 33


Notre recherche en tant qu'historiens de T a r t sur "les constantes de
l'architecture comtoise : clichés, stéréotypes et réalités historiques"
s'est définie, certes, comme celle d'historiens soucieux de vérité histo-
rique mais plus encore comme celle d'ethnologues, attentifs à la signifi-
cation des pratiques et des productions artistiques.

La conception d'une pratique étroite de l'histoire de l'art aurait


voulu que nous considérions la logique des formes d'une manière univoque ;
les formes, dans un tel contexte, auraient leur histoire propre : uñe his-
toire artistique où l'esthétique serait la seule force motrice des trans-
formations et des évolutions.

La démarche ethnologique nous a conduit à regarder la production ar-


chitecturale comme l'expression d'une vision du monde, en l'occurrence comme
celle des représentations mentales dont nous sommes dépendants. La recherche
de l'identité culturelle et son affirmation faisant partie de ces images
mentales sources des formes architecturales, nous nous sommes préoccupés
de savoir dans quelle mesure la production architecturale et le discours
qui s'y rattachent pouvaient être considérés comme des marqueurs de l'iden-
tité culturelle comtoise.

Si, pour des raisons diverses et encore mal définies, on cherche à pro-
clamer l'existence de la région en soutenant l'identité culturelle régionale,
il semble que cela se fasse en affermissant les caractères de la "Tradition".

En Franche-Comté, on cherchera à redécouvrir les qualités


traditionnelles de l'architecture. La quantité croissante des travaux pu-
bliés sur l'architecture régionale comtoise montre l'intérêt porté à cette
question par les chercheurs et les érudits locaux, par un public amateur
d'histoire, à la recherche de ses racines culturelles.

Cependant, on doit reconnaître que, d'une part»le fondement historique


de l'architecture "considée comme comtoise" n'est que peu mis en doute et
que, d'autre part, la pratique du discours historique constitue certainement
en elle-même le signe de l'intérêt que l'on porte à la recherche de son
identité régionale.
- 2 -

Ne s e r a i t - i l pas logique de s'interroger sur l ' a u t h e n t i c i t é d'une


t e l l e démarche ? Le désir de se donner ou de retrouver une identité r é -
gionale c o n s t i t u e - t - i l une des raisons d'être de l ' h i s t o i r e architecturale
spécifiquement comtoise ?

Ne sera-t-on pas tenté de présenter le caractère comtois t r a d i t i o n n e l ,


s ' i l en est, comme une "donnée" de l ' h i s t o i r e ? Pour les besoins de la cause
- l a bonne, celle de nos racines régionales stables et rassurantes - n ' i r a -
t-on pas jusqu'à le considérer comme immuable, son intemporal i t é ' l u i
conférant l ' a u t o r i t é d'une évidence.

I l est particulièrement intéressant de s'interroger sur les manifes-


tations de cet é t a t , sur ses causes et ses conséquences : ne s e r a i t - i l pas
inventé, soutenu et entretenu par un consensus général diffus de la pensée,
de la pratique et essentiellement de la s e n s i b i l i t é architecturale ?

L'existence manifeste d'un consensus autour de la qualité nécessairement


comtoise de l'architecture de notre région constitue la pierre angulaire de
notre recherche.

Elle nous a permis d'interroger l ' h i s t o i r e sur la r é a l i t é d'une a r c h i -


tecture comtoise ; e l l e nous a i n c i t é à rechercher la ou les significations
de l'usage qui en est f a i t par les différents groupes sociaux constitu-
t i f s de la société comtoise à la découverte de leur i d e n t i t é .

L'architecture - sa production, son u t i l i s a t i o n , sa valeur symbolique -


e s t - e l l e et peut-elle être un moyen de créer e't d'affirmer l ' i d e n t i t é c u l -
t u r e l l e régionale ?
- 3 -

ARCHITECTURE REGIONALE ET IDENTITE CULTURELLE

Le respect des traditions architecturales régionales et la référence


au style comtois dans la construction sont - n'en doutons plus - "un pla-
cement" de notre identité en une valeur sûre, une valeur refuge. Tel serait,
bien le sentiment des comtois pour qui "Faire du comtois" ou "Avoir un toit
comtois"... semble devenir une règle de conduite susceptible de rassurer
l'indécis ; on peut même, lorsque qu'aucun modèle, aucune règle ne convien-
nent, aller s'inspirer des "lignes directrices du panorama de Franche-Comté"
et ne pas faillir à cette nécessité du "comtois" qui rassure.
Dès lors que notre mode de vie n'est plus suffisamment porteur des
signes de notre appartenance sociale à un groupe - la Région - le cadre
bâti (l'individuel plus que le collectif) ne cherche-t-il pas à compenser
ce manque en satisfaisant nos représentations mentales ? Ne peut-il pas,
au même titre que le langage, la cuisine ou les pratiques spécifiques des
communautés, prendre le relaiset se parer de signes referents, fortement
caractéristiques de l'image régionale ?
On est en droit de se demander si l'architecture traditionnelle de la
Franche-Comté est si spécifique ou si singulière ou si richement connotêe
qu'elle soit susceptible d'offrir des stéréotypes architecturaux véhicules
de notre identité culturelle.
La diversité, cependant, des quatre départements constitutifs de la
région franc-comtoise - le Jura, le Doubs, la Haute-Saône et le Territoire
de Belfort - nous offre des modèles architecturaux variés. Certains modèles
sont apparus et apparaissent encore, néanmoins, comme les représentants
quasi uniques de l'ensemble de l'architecture régionale, façonnant ainsi
dans l'esprit de tous une image représentative de ce que doit ou devrait
être notre architecture régionale.
On peut dès lors se demander quels sont les modèles qui ont nourri
l'image de l'architecture comtoise, de quelle manière et pour quelles rai-
sons une seule image a prévalu et prévaut encore aujourd'hui.
- 4-

I - UN CONSENSUS SUR L'IMAGE DE L'ARCHITECTURE COMTOISE.

Il existe bien un consensus général, global,émanant de la grande ma-


jorité de la population régionale au sujet de l'image de l'architecture.

"Un vocabulaire moralisateur"


Une analyse rapide du vocabulaire utilisé le plus couramment pour
définir l'image de l'architecture comtoise montre très bien l'existence
de ce consensus.
Le journal publié par une association de défense et de mise en valeur
du patrimoine bisontin, "La Renaissance du Vieux Besançon", constitue un modèle
très représentatif de ce consensus, employant un vocabulaire typique, dé-
veloppant une "image moraliste" de l'architecture comtoise, tendant à "créer
une conscience artistique locale".
Au sujet de l'inventaire des monuments historiques
le n° 11 de mai 1980 consigne un des soucis de cette association :
"créer une conscience artistique locale qui serait l'aide la plus
sûre pour l'administration et surtout l'un des modes d'accès de la
masse à la culture".

On parle, au n° 14, d'une "superbe t o i t u r e . . . concernant l'annexe B de la


Préfecture de Région. On pourra en apprécier la beauté en passant par l ' a -
venue de la Gare d'Eau. Voilà du t r a v a i l bien f a i t dans le respect des t r a -
ditions locales".

Les termes employés restent cependant approximatifs . On parlera


d"'erreurs à ne pas commettre, de matériaux "non conformes à la t r a d i t i o n " ,
" d ' e f f e t s désastreux", d'"exigences du tissu urbain", de réalisations "plus
esthétiques et plus conformes au style de la v i l l e " , de "respect du cadre
n a t u r e l " , "d'accord avec le s i t e " . . . e t c . .

Cette terminologie est tout à f a i t représentative du consensus général


sur l'architecture régionale.

I l s ' a g i t de "respecter la t r a d i t i o n " a f i n que le "visage de la v i l l e "


ne s o i t pas détérioré par "une mauvaise intégration" dans l'environnement.
- 5 -

L'important semble donc qu'une construction - une restauration ou une


création - porte en son sein l'image comtoise.
On s'aperçoit que toutes catégories et pratiques sociales confondues

concernant l'ensemble de l a région s'accordent pour exprimer la nécessité

de cette image comtoise. De la construction ancienne - ou de la moderne -


une image même floue, même ambiguë doit se dessiner : celle nous procurant
le vague sentiment que l'on aura bien construit pour la Franche-Comté ou
pour les Francs-Comtois.

Les architectes aussi

L'uniformisation de ce discours est aussi valable pour une catégorie


sociale qui, par la place q u ' e l l e occupe dans la société, serait la plus apte
à la réflexion architecturale, car le plus souvent confrontée aux questions
du choix s t y l i s t i q u e : celle des architectes.

Paradoxalement, et indépendamment de la modernité recherchée consciem-


ment dans la création architecturale (on ne se réfère pas expressément à un
vocabulaire issu de l ' a r c h i t e c t u r e t r a d i t i o n n e l l e comtoise), les discours des
architectes correspondant aux oeuvres q u ' i l s présentent vont, dans la grande
majorité des cas, dans le sens du même consensus.

Les discours e x p l i c a t i f s des projets d'école, notamment ceux présentés


lors du diplôme d'architecte , et les discours accompagnant les projets pré-
sentés dans les concours d'architecture appuieront leur argumentation sur
des références historiques j u s t i f i c a t i v e s du bien fondé du choix a r c h i t e c t u r a l .

Ces références sont le rappel de l'existence d'oeuvres historiques no-


toires en Franche-Comté, qui ont contribué à sa renommée c u l t u r e l l e et tou-
r i s t i q u e : c'est le cas des Salines d'Arc-et-Senans, des f o r t i f i c a t i o n s de
Vauban et même parfois des célèbres cours intérieures des hôtels bisontins
du XVIIIe siècle.
Cependant, lorsque la référence historique f a i t défaut, l ' a r c h i t e c t e ,
dans le même but d'être bien en accord avec le consensus ou de montrer q u ' i l
en a conscience et q u ' i l le respecte, f a i t appel au paysage franc-comtois.
- 6 -

Un c r i t è r e de jugement

Dès l o r s , et paradoxalement, le consensus devient par la référence


qui en est f a i t e un des critères du jugement architectural : la conformité
au consensus général sur l'image comtoise de l'architecture devient un é l é -
ment non négligeable dont va dépendre l'acceptation ou le refus d'un projet
par le maître d'ouvrage.

Pour imaginer le poids de ce consensus et la r é a l i t é de son impact,


i l faut se demander de quelle manière serait reçue l'oeuvre architecturale
créée en vue d'un public si l ' a r c h i t e c t u r e ne f a i s a i t pas appel aux images
mentaTes inhérentes à ce consensus. Mais i l faut aussi se demander s ' i l
n'existe pas une opposition fondamentale - de nature - entre le désir de
créer et celui de se conformer à une image. La force de ce consensus est
t e l l e q u ' e l l e met le créateur mal à l ' a i s e : ne se s e n t - i l pas contraint
de construire pour l a Franche-Comté, pour l a reconnaissance de l ' i d e n t i t é
c u l t u r e l l e régionale ?

•'Une couleur locale'

L'image mentale floue de l ' a r c h i t e c t u r e comtoise créée par un consen-


sus ambigu semble donc donner un accord général de ton, une "couleur locale"
faisant même accepter par la population comtoise des oeuvres considérées
objectivement comme totalement indépendantes de la culture comtoise dans
leur forme, leur parti architectural ou le mode de vie qu'elles supposent.
On pourrait dès lors dire qu'en changeant cette couleur locale, cette
"aura imaginaire" que représente le consensus, on change d'architecture,
on change d ' i d e n t i t é .

1*1 nous faut réellement parler d'un consensus, certes ambigu, mais
dont l ' i n c e r t i t u d e a bien une commodité : celle de créer, d'affermir et
de véhiculer dans l'opinion publique une certaine image de l'architecture
de la Franche-Comté.
- 7 -

Eléments moteurs du consensus

Si l'image suscitée par le consensus général sur l'architecture comtoise


reste assez vague et indéfinie pour qu'elle puisse s'accorder indifféremment
aux oeuvres, les origines et les modes de développement de ce consensus sont
en revanche moins incertains qu'il n'y parait.

Il existe sur l'ensemble de la région un faisceau d'éléments actifs


tous ä la fois issus de cet accord général et promoteurs de celui-ci.

Si T o n considère que l'architecture comme tout autre mode d'expression


humaine participe d'un système de communication où les messages émis par
le locuteur doivent être perçus et compris par le récepteur, on comprend
que, de même, la production architecturale comtoise doive, pour être en-
tendue et reconnue comme telle, devenir l'objet du désir d'identité comtoise.

Les éléments moteurs sont certainement à rechercher au premier abord


dans tout ce qui, d'une part,émet, modifie ou contrôle les caractéristiques
de l'image et, d'autre part, dans tous les domaines où la symbolique de cette
image est la plus aisément diffusée.

Ainsi les directives, les conseils et les règlements émanant d'orga-


nismes essentiels, décideurs, pour le processus de la production architec-
turale, pour la conservation ou la restauration de l'architecture ancienne,
les ouvrages et les articles des chercheurs locaux ou nationaux diffusant
des recherches sur les "modalités composantes" de l'architecture comtoise,
la production même des architectes, les publications et la diffusion de ca-
talogues publicitaires des constructeurs de maisons individuelles, enfin à
un niveau autre mais non moindre tous les supports imagés propageant une
certaine idée de l'architecture régionale (tableaux des peintres amateurs,
réclames... e t c . ) , tous sont des éléments à la fois promoteurs et dépen-
dants de cette idée : celle que la multiplication des références régionales
de la maison peut devenir un des moyens premiers - sûr et public - de l'in-
tégration sociale, du souci de se faire reconnaître culturellement comme
comtois.
- 8 -

II - LES PUBLICITES DES CONSTRUCTEURS DE MAISONS INDIVIDUELLES.

La publicité des constructeurs de maisons individuelles constitue


donc pour nous un champ d'investigation très utile à la définition de
l'identité culturelle.
L'importance du nombre des réclames envahissant les journaux locaux
et des prospectus distribués quotidiennement permet de déterminer une image :
celle de la maison "comtoise" recherchée par les acheteurs éventuels et pro-
posée par ces médias.
A plus d'un titre cette publicité compose un lieu de recherche idéal,
s'il en est, grâce aux nombreuses informations qu'elle contient sur la réa-
lité de l'image architecturale comtoise - image mentale et modèle architec-
tural -•
Elle est, en outre, très bien représentée, indépendamment des diffu-
sions des catalogues et prospectus des constructeurs, dans l'ensemble de la
presse régionale, qu'il s'agisse des journaux locaux quotidiens, de jour-
naux spécialisés dans les petites annonces ou bien encore des revues muni-
cipales et régionales mensuelles.
Cette large propagation permet donc d'obtenir un reflet assez précis
de l'impact possible des publicités sur la représentation réelle et mentale
de l'architecture comtoise parmi l'ensemble de la population régionale.
En conséquence, elle nous donne la possibilité, par le répertoire for-,
mel, "sélectif" de l'image de la maison comtoise qu'elle met en avant et
par l'ensemble du discours dont elle s'entoure.de formuler les caractéris-
ques d'une telle image.

L'ensemble exhaustif des publicités n'a pas été retenu ; le choix s'est
porté exclusivement sur celles qui,soit au travers du discoursssoit par les
représentations proposées,faisaient appel à la nécessité de l'identité cul-
turelle ou répondaient à son désir.
Pour la région franc-comtoise n'ont été sélectionnées que celles qui»
par la forme des modèles, par l'environnement choisi pour ce modèle, par
le discours explicatif ou par le titre même de l'entreprise»présentaient
une relation quelconque mais effective avec cette notion d'identité cultu-
relle.
- 9 -

Toutes raisons de choix confondues, une quinzaine de constructeurs


actifs sur la région franc-comtoise ont été retenus. Ce sont :
Les constructions Cerest, La Maison Familiale, Pavillons S.A.F.C., Pavil-
lons SAB, Habitat franc-comtois, Maisons Selam, Maisons Saint-Clair, Mai-
sons Magnenet, Maisons Bouyghes, Maisons Phénix, Maisons Migeons, Pavillons
Comtois, Toits Comtois, Promogym, Gardavaud, Sogerim.

Une publicité pour une clientèle

Si cette forme de publicité, promotrice d'une certaine image comtoise


de 1'architecture»est le fait de constructeurs établis sur le plan local,
il faut noter qu'elle est aussi le fait de constructeurs nationaux ayant
une politique volontairement engagée dans la régionalisation de leur modèle ;
mais il faut encore remarquer que tous les constructeurs de maisons indi-
viduelles ne sont pas promoteurs de cette image. Certains s'engagent dans
une voie originale, plus simplement différente, et jouent la carte de la
modernité résolue.

On peut donc penser qu'il existe une clientèle bien spécifique de ces
constructeurs qui cherchent au travers de cette idée comtoise à retrouver
des racines culturelles ; mais on doit aussi penser à l'existence d'un pu-
blic autre qui, à l'image des constructeurs "modernistes", tente de se
différencier de la masse, de se démarquer des classes sociales inférieures,
ou plus simplement de satisfaire des besoins autres que ceux de la reconnais-
sance sociale par l'intermédiaire d'un cadre de vie â T'aspect comtois. Il nous
semble donc important de faire remarquer que ces publicités vantent des
maisons qui s'adressent à la classe moyenne de la population vivant ou dé-
sirant vivre "à la campagne", là où les traditions et le sentiment comtois
sont théoriquement plus vivaces.

Le discours et les modèles proposés par les publicités ne sont pas les
seuls intérêts de celles-ci.

Les sigles, enseignes et titres des pavillonneurs, tout autant que le


rapport du discours à l'image»sont révélateurs de la recherche de l'identité
culturelle, de l'importance qu'elle prend dans le domaine commercial.
- 10 -

Le titre et le sigle : des symboles du comtois

La relation entre le "fait comtois" et le constructeur et ses proposi-


tions nous apparaît â l'évidence lorsque le titre même et le symbole gra-
phique représentatifs de l'organisme constructeur sont directement liés à
la Franche-Comté.

Les titres "Habitat Franc-comtois", "Toits comtois", "Pavillons comtois"


sont symboliques de la volonté de s'afficher comme tels : Comtois.

On peut voir, par ailleurs, que ces dénominations s'appliquent


. à des constructions collectives ou individuelles : "Habitat franc-
comtois" s'intéresse à la construction de collectifs, "Toits comtois" et
"Pavillons comtois" à la.'construction individuelle.

Les sigles et les enseignes des constructeurs offrent parfois aussi


par le choix de leur graphisme une référence symbolique à l'image comtoise :
la stylisation d'un toit, d'un sapin ou d'un tué évoque nettement la région
pour tous les franc-comtois, indépendamment du fait de la diversité de celle-
ci.

Si le toit peut être imaginé comme faisant partie de la mémoire collec-


tive comtoise en raison de sa quasi-permanence, le sapin, en revanche, ne con-
cerne que la région du Haut-Doubs, du Haut-Jura, à la rigueur celle des
Vosges saônoises. Il n'est donc évocateur que d'une seule partie de la
Franche-Comté : celle des régions montagneuses.

Si les constructeurs ont fait appel à cette mémoire collective par la


représentation symbolique»c'est sans doute que la force de cette évocation
réside dans le fait de sa commune acceptation.

Parfois l'association de deux références - le titre et le symbole gra-


phique - permet d'expliciter ce que l'une ou l'autre pouvait avoir d'indé-
fini dans l'expression. Ainsi aucune ambiguïté n'est plus possible : le cons-
tructeur s'affirme bien comme faisant partie d'une communauté sinon économique,
du moins culturelle, celle de la Franche-Comté.
- 11 -

Le discours : une référence comtoise explicite

Si le titre et/ou l'emblème de l'organisme affichent leur volonté de


se référer à l'idée comtoise, le discours et les modèles architecturaux
semblent apporter de différentes façons une force et une réalité plus
grandes à cette idée.

Le discours publicitaire; est un moyen de soutenir une image défail-


lante ; ainsi là où "l'image comtoise" de la maison n'est pas particulière-
ment explicite (dans le cas de publicités où les modèles peuvent être pro-
mus dans d'autres régions que la Franche-Comté) le discours réaffirme la
relation qui doit exister d'une manière globale entre le modèle proposé et
la Franche-Comté.
Le tableau synoptique que nous avons réalisé pour les publicités dépouil
lées, en mettant en relation les éléments comtois du discours et des mo-
dèles architecturaux, montre bien ce rôle de compensation mutuelle du dis-
cours et de l'image dans le soutien de l'idée comtoise.
Indépendamment du contenu détaillé du discours, l'importance de la ré-
férence de celui-ci au thème de la tradition régionale semble être inverse-
ment proportionnelle à la quantité de références du modèle proposé au voca-
bulaire architectural "comtois".
Ainsi le groupe "Maison Familiale"» dont le discours s'appuie sur la
"Tradition", propose des modèles très peu typés régionalement ou dont l ' a s -
pect peut s'adapter au discours publicitaire se rapportant à une région autre
mais proche : la Bourgogne par exemple...
De même le groupe "Maison Phénix" développe un discours régionaliste
dont le titre résume l'idée principale : "Régionalisme : les maisons aussi".

Le catalogue général de ce groupe présente de nombreux modèles régio-


naux français sans toutefois distinguer le modèle franc-comtois du modèle
lorrain ; il insère cependant le modèle intitulé "comtois" dans un panorama
aux résonnances campagnardes approximativement comtoise.
Le discours, en revanche, définit une politique régionale sérieuse
et consciente :
- 12 -

"(II) restait à ne pas tomber dans la régionalisation à tout prix,


qui, à la hâte, maquille une demeure d'Ile-de-France en mas pro-
vençal!..."

"Pour éviter ce piège, un travail approfondi d'étude des différents


pays architecturaux a été mené dans toute la France..."

En revanche les publicités d'un constructeur implanté seulement en


Franche-Comté» les "Maisons Magnenet" de Pontarlier (Doubs), n'ont aucun
discours régionaliste mais présentent des modèles offrant toutes les ca-
ractéristiques architecturales de la région du Haut-Doubs (région de mon-
tagne: ) .

De même les "Pavillons Selam" proposent des modèles architecturaux


fortement imprégnés du "style comtois" sans avoir recours au discours ré-
gionaliste pour en faire la publicité.

Il semble donc que lorsque le constructeur s'adresse au niveau national,


les références formelles au "style comtois" ne soient pas suffisamment par-
lantes. La nécessité d'étayer la présentation des modèles par un discours
très régionaliste se fait donc plus évidente.

Au contraire lorsque le champ d'action du constructeur est plus réduit


et ne dépasse pas le cadre régional, départemental ou même local, il semble
que le discours soit moins développé, parfois même inexistant ("Maisons
Migeons", autre constructeur régional n'accompagnant sa publicité d'aucun
discours régionaliste). Le titre, le sigle ou l'image du ou des modèles
proposés apparaissent comme suffisants pour expliciter la référence régionale.

Une même idée : le respect de la tradition régionale'

Si tous les discours publicitaires sont différents dans leur forme,


tous affirment en revanche un même contenu>dont l'idée principale est celle
du respect de la tradition, au nom d'une nécessaire recherche de l'identité
culturelle régionale.

Tous ne développent pas, certes, le même raisonnement organisé pour


soutenir cette idée, mais tous se fondent sur lui pour la promotion de leurs
modèles.
- 13 -

Dans son dossier publicitaire sur la maison individuelle, le discours


de "Maison Pénix" présente une argumentation qui semble être la plus com-
plète et la mieux organisée de toutes les publicités étudiées. C'est autour
de cette dernière que nous avons centré notre analyse du discours publicitaire.

Une analyse : le discours de "Maison Phénix"

La rubrique qui intéresse plus particulièrement notre sujet et qui


s'intitule : "Régionalisme : les maisons aussi" ne constitue pas l'ensemble-
du discours soutenant la vente des maisons individuelles : elle s'inscrit,
en effet, dans un ensemble de textes dont il est intéressant de noter le
lien. Ils forment un contexte général offrant au texte spécifique sur le
régionalisme un système de références imp!ici tes,dont celle d'une certaine
image du bonheur familial dans la maison. Ces textes au titre évocateur
("le rêve impossible ?" ; "Le rêve réalisé" ; "Enfants privilégiés, parents
gâtés" ; "A chacun son univers", "faire soi-même sa maison" ; "De la lumière
à l'espace" ; "Sécurité comprise") constituent l'environnement du texte spé-
cifique, soutendant déjà l'idée maîtresse, celle de la tradition et de son
respect.

Le texte sur "le rêve impossible" exprime déjà l'idée qu'une maison
dont on est propriétaire a un rapport profond à l'être que nous sommes et
qu'elle devient, du fait de la dégradation économique actuelle, le seul
refuge possible pour nos valeurs menacées :

"Plus que jamais, la maison individuelle est devenue aujourd'hui


le symbole de l'environnement menacé par la vie contemporaine, le
havre de paix ou T o n existe en famille..."

Cet environnement est aussi constitué par notre culture, nos traditions
que la vie moderne semble vouloir menacer de destruction, d'anéantissement.

L'idée qu'une maison aux aspects régionaux est un moyen fiable de dé-
fendre ces valeurs éternelles, celle de notre culture régionale notamment,
est déjà implicite :

"Trop chargée affectivement, trop ancrée dans notre tradition pour


n'être qu'une mode...",

ou bien encore on regarde la maison comme "la championne des valeurs-re-


fuges", car "les Français semblent avoir de plus en plus de mal a en faire
un pur objet de placement".
- 14 -

Nous serions donc animés par "un besoin d'enracinement et "de retour
à des traditions"... lorsque l'inflation joue avec • nos nerfs et que
les placements financiers dissimulent mal notre ' impuissance à sauve-
garder notre patrimoine.....
Plus loin encore, dans la rubrique "Le rêve réalisé", la maison est
aussi présentée comme un lieu de dépôt des souvenirs familiaux, comme un
emblème de la famille, comme un symbole des traditions qui s'y rattachent.
"Provincial depuis toujours, M. V. (monsieur V.est médecin) est
sensible au charme des anciennes maisons familiales, à cet atta-
chement sentimental qu'avaient pour elles-nos ancêtres.
Mais leurs descendants aussi, rectifie un couple d'ouvriers,pro-
priétaires près d'Orange d'une"Verdon" une des maisons provençales
de Phénix."
Et pour finir5ayant défini préalablement la "maison régionale" comme
"le paysage dans lequel on s'épanouit", ou toute une population régionale
peut se retrouver -indépendamment de la classe sociale à laquelle on appar-
tient- on peut penser que la maison sera bien l'expression de la.personnalité
et,mieux encore, le marqueur spécifique de l'identité culturelle propre à
chaque individu puisque :
"Chacun a dans la tête ses paysages choisis."
Avant même l'exposé de l'argumentation en faveur du choix d'une maison
de style régional, cette maison est déjà présentée comme l'expression d'une
recherche, d'un besoin, celui de retrouver ses racines culturelles régionales,
même si paradoxalement celle qui est présentée est une construction neuve,
aux méthodes de construction autres,n'ayant qu'une vague relation avec les
modèles traditionnels vantés.
Le style même du discours permet l'évocation des souvenirs et des rêves
suscités par la vue de sa propre maison. Les nombreux points de suspension
expriment bien cette évocation rêveuse. Mais placés après des termes tels que
"patrimoine"... "retour à des traditions" ils insistent sur l'immensité se-
crète, sur la délicatesse, l'indicible du domaine auquel on fait appel.
Nous sommes ici au coeur même de l'être, dans l'antre secret de la for-
mation, celle de notre patrimoine, de nos racines, de nos gênes culturels,
de notre identité.
- 15 -

Ainsi, après avoir suggéré dans les rubriques précédant celle du ré-
gionalisme l'idée que la maison est l'expression de notre personnalité,
l'émanation de notre identité, la question même du régionalisme se pose
par rapport à l'histoire dont on magnifie le rôle.

Dans ce contexte publicitaire une référence sérieuse à l'histoire de-


vient nécessaire : il est normal de s'en prévaloir puisque "la grande vague
du régionalisme touche aussi la construction" de la même manière qu'un mou-
vement historique imprègne et modifie les objets et les relations que les
hommes entretiennent avec ces objets :

"Alors on a réapprivoisé notre passé, reconquis de haute lutte


les langues mourantes, les us et les coutumes déclinants. Dans
cette nouvelle bataille qui est tout sauf une régression, l'ar-
chitecture tient une place prépondérante."

L'architecture de la maison en tant que marqueur de l'identité cultu-


relle est donc d'emblée placée dans un mouvement historique général dont
elle semble être un acteur premier, un lieu privilégié de lutte.

C'est dire mieux son importance, son rôle social ; c'est accuser aussi
la gravité du lien qui nous y rattache.
L'histoire nous apprend la diversité des cultures et des modes de
vie ; elle nous apprend aussi que nous -les Franc-comtois- sommes différents
des autres Français et qu'à ce titre nous pouvons et nous devons revendiquer
le droit à une architecture originale, à l'image de notre mode de vie spéci-
fique, en accord avec la représentation mentale que nous avons de notre cul-
ture.

..."On n'en finirait pas de parcourir la France et ses paysages,


ses traditions, ses cultures et ses architectures. Car c'est vrai
on ne vit pas de la même façon dans la forêt landaise et sur les
collines rocailleuses de la Haute Provence."

L'histoire ici devient d'autant plus justificative du retour à la tra-


dition que les méfaits culturels de la maison standard, ne respectant pas
les individualités régionales, sont inscrits dans un laps de temps, celui
de la reconstruction des années 50-65, suffisamment court pour ne pas avoir
gommé du paysage les références esthétiques qui s'y rapportent, et suffisam-
ment long pour ne plus être directement tributaire du mode de vie et des
cultures locales, essentiellement issus du monde agricole.
- 16 -

Mais le rappel historique devient d'autant plus j u s t i f i c a t e u r du mou-


vement régionaliste lorsqu-' on réduit ainsi brusquement toute une h i s t o i r e
spécifique de l'architecture de la maison individuelle aux seuls aspects
négatifs de la standardisation : ceux de l'uniformité supposée ou réelle
du paysage architectural quotidien.

L'histoire régionale est donc présentée comme la seule source possible


de la création d'une architecture non dévalorisante, et la maison régionale
comme le dépositaire rare et précieux de l ' i d e n t i t é c u l t u r e l l e régionale :

"La maison standard est morte. Les modèles régionaux v o n t - i l s


prendre la relève ?'1.

Grave question que la recherche et l ' a f f i r m a t i o n de l ' i d e n t i t é pour l a -


quelle l'architecture prend la forme d'un combat et se mesure avec le passé.
Mais l ' h i s t o i r e invoquée se déforme i c i et se joue des tours : si la t r a d i -
tion historique veut que les progrès, les améliorations naissent d'une l u t t e
acharnée contre les habitudes, si l ' h i s t o i r e se d é f i n i t comme une suite de
révolutions, i c i encore l ' h i s t o i r e architecturale f e r a i t une révolution en
s'inspirant des modèles régionaux essentiellementissus d'un monde agricole
séculaire, inadaptés désormais aux immenses possibilités de l a technologie
et aux modes de vie du XXe s i è c l e ,
"Dans cette nouvelle b a t a i l l e qui est tout sauf une régression
l'architecture t i e n t une place prépondérante."

Le constructeur, comme la recherche de l ' i d e n t i t é nous y i n v i t e , nous


engage dans cette l u t t e pour la vie . dont l ' e f f e t fondamental est bien
." d'être assuré d'un bonheur durement conquis. La t r a d i t i o n , dans cet
aspect combatif, s'adresse à l'homme a c t i f et prend donc la valeur d'un
symbole paradoxal de modernité révolutionnaire et déculpabilisante.

Présenté a i n s i , le combat q u ' e l l e propose à l'homme à la recherche de


son i d e n t i t é c u l t u r e l l e régionale permet au c l i e n t comme au constructeur de
se s i t u e r positivement dans l ' h i s t o i r e : i l s deviennent des maillons essen-
t i e l s de la "chaîne architecturale" sans lesquels l ' h i s t o i r e spécifique de
la région ne pourrait s'écrire,donnant à la mission dont i l s sont investis
des résonnances existentielles graves :

" . . . c a r de même que l'on se sent chez soi dans une maison qui nous
ressemble, on se sent bien dans sa région, si e l l e continue de
vivre son histoire p a r t i c u l i è r e . "
- 17 -

A charge donc pour notre maison de ne pas trahir notre région car elle
est considérée comme l'expression directe, évidente,de la culture régionale,
symbole d'une identité dont on ne discute pas le bien-fondé.
On peut.remarquer que si pour un mieux être, un mieux vivre, l'histoire
de notre région doit porter la marque de notre identité culturelle, nous de-
vons délimiter notre territoire de marqueurs architecturaux dont la princi-
pale qualité serait l'authenticité historique du vocabulaire utilisé.
La connaissance de l'histoire architecturale locale et celle du
savoir-faire artisanal sont, avec le sérieux qu'elles apportent, les deux points
essentiels de cette redécouverte des vertus de la tradition.
Gage de sérieux, la référence historique l ' e s t , certes, lorsque ce re-
tour à la tradition se situant dans un contexte combatif et se définissant
en quelque sorte comme une lutte pour l'affirmation de l'identité, est le
fait de connaisseurs, d'hommes avertis des dangers inhérents à ce phénomène..
On prend donc soin d'exprimer l'idée que si "cette bataille est tout
sauf une régression" c'est parce qu'une tradition méconnue ou incomprise
pourrait ne devenir que du folklore :
"Et puis l'uniformisation des cultures, la standardisation des ar-
chitectures nous ont appris la tristesse de la monotonie, la pitié
qu'inspirent les traditions quand elles ne sont plus que du fol-
klore."
La tradition au nom de laquelle, et pour laquelle, il nous faut lutter
comme d'authentiques partisans de notre région; n'est donc pas une affaire
de recette architecturale : elle est issue en réalité d'une connaissance
spécifique, car appronfondie, de la région.
L'histoire locale offre des modèles dont le désir d'identité culturelle
va s'emparer, va s'inspirer, pour la réalisation de maisons.
Mais si la tradition régionale constitue une source authentique et sûre
pour le propriétaire, seule la connaissance de la subtilité régionale, du
rapport des modèles à la technologie, donne l'assurance à l'identité cultu-
relle de ne pas être trompée dans son désir de vérité du retour aux sources :
"Restait à ne pas tomber dans la régionalisation à tout prix qui,
à la hâte, maquille une demeure d'Ile de France en mas provençal!...
Pour éviter ce piège, un travail approfondi d'étude des différents
pays architecturaux a été mené dans toute la France."'
- 18 -

Tout naturellement, avec l'évidence des choses relatives à la nature,


l'acheteur désireux d'affirmer son existence par le développement de son
identité culturelle régionale sera donc amené à s'adapter aux modèles pré-
conisés, sous peine d'être rendu responsable de la destruction de l'équilibre
de son environnement. Car

"Toute maison fait partie du paysage, qu'elle l'enlaidisse ou l'en-


richisse, elle participe à l'image d'une région, au bien-être de
l'habitant, mais aussi au passant."

L'utilisation de la tradition régionale constitue donc bien un moyen


d'affirmer son appartenance culturelle à une région; mais mieux encore, si la
maison comme l'individu appartiennent à une communauté dont ils sont solidaires
et dépendants, cette utilisation du passé est un devoir pour le construc-
teur, indépendamment du désir ou de la volonté de l'acheteur.

•L'expression de l'identité culturelle n'est donc pas le seul fait d'un


individu.

Elle devient, par cette notion de solidarité, sinon un but du moins


un des rôles sociaux du constructeur :

"C'est dire assez la lourde responsabilité des constructeurs,


le rôle pédagogique et incitatif qui doit être le leur . Parce
qu'il est le premier constructeur de maison individuelle en France,
Phénix a décidé de jouer le jeu de la régionalisation architectu-
rale On ne dirait pas une maison Phénix..."

Indépendamment de l'intérêt publicitaire que le gage de sérieux histo-


rique confère au constructeur, le recours à l'identité culturelle régionale
jouant comme moteur d'un système commercial lui confère aussi celui d'être
un pédagogue.

Il participe aussi à sa manière à la "redécouverte de notre passé", à


la construction effective de notre région mais plus encore à l'élaboration
de notre personnalité.

A l'image de l'identité dont on ne peut réduire le rôle à des effets


de vocabulaire architectural, la tâche du constructeur se rapprocherait de
celle d'un thérapeute participant en quelque sorte â 1'eclosión de la per-
sonnalité comtoise qui sommeille en chaque franc-comtois.
- 19 -

Participant avec nous à la recherche de notre bien-être existentiel


-celui d'être régionaux- il lui incomberait donc la lourde responsabilité
de nous accoucher de notre tradition, celle de la mettre au monde en lui
permettant de revivre :

"En Savoie comme en Provence, en Aquitaine comme en Normandie, en


Bourgogne comme en Lorraine, dans chaque région architecturale de
France, Maison Phénix, c'est vrai, rejoint la tradition..."
"Mais une tradition ne vit que si, par définition, elle se trans-
met en l'enrichissant. Plus que de la fascination figée, elle est
faite de progrès, de ce que la science et la technique peuvent
apporter aux hommes".

Pédagogue, connaisseur, le constructeur est aussi un homme compétent


et inventif, celui qui aura "l'imagination en plus".

Aussi, loin d'être monotone, figée et triste»la tradition»grâce aux


qualités d'imagination du constructeur»saura pour respecter l'identité cul-
turelle régionale, la mieux traduire pour le contexte d'aujourd'hui.

Tenant compte des modifications des technologies et des modes de vie


familiaux, il saura faire les adaptations nécessaires au fonctionnement ar-
chitectural de la maison de telle sorte que nous puissions dire ou penser
avec Maison Phénix que "Rien n'a changé", signe d'une continuité certaine
de l'identité. Pari difficile et pour le moins paradoxal que celui-là!

"Paradoxe ? Oui, si l'on fait de la tradition un passé éternelle-


ment présent, un exemple à reproduire jusqu'à la fin des temps...
Mais l'Histoire, alors ne s'arrêterait-elle pas ? Et ne serions
nous pas, en 1982, contraints à nous déplacer en chaise à porteurs
au nom du charme désuet et... finalement traditionnel de ces in-
terminables voyages d'antan ?... Absurde bien-sûr..."

Confrontés à l'obligation de répondre à une double nécessité, celle


d'exprimer une identité culturelle evanescente et celle d'être compétitif
et de proposer des solutions adaptées aux possibilités objectives des tech-
niques de construction locales ou nationales, les constructeurs de maisons
individuelles, dont Maison Phénix, tentent cependant, en gardant cette double
image, de "s'adapter".
- 20 -

"Grâce à sa technologie" le constructeur opère cette gageure de conci-


lier tradition régionale et impératifs de la technologie moderne.

"La technique, justement, semble être le principal atout des


Maisons Phénix dans la difficile partie de la régionalisation".

Mieux encore, cette idée du respect de l'identité culturelle régionale


renforce son impact en tendant à jouer un rôle économique salvateur.

Si les nouvelles découvertes techniques architecturales -celles du


début du siècle néanmoins- (verre, béton, système de construction poteaux-
poutres...) tendent à modifier le processus de la production architecturale
en évinçant la pratique artisanale, la construction individuelle, en re-
vanche, en soutenant et en développant la notion du bénéfique retour au*
sources régionales, soutient et développe aussi ce secteur défaillant de la
production artisanale du bâtiment.

On peut donc dire que l'identitié culturelle régionale joue comme support
économique de la région dans la mesure où son inexistence ou sa timidité
agiraient comme un laisser passer vis-à-vis des technologies autres, dont
les traditions locales ne sont pas issues.

L'appel d'autre part au savoir-faire traditionnel local, qui sert à


l'évidence le système producteur de la construction de maisons individuelles,
sert aussi à l'expression de Videntitié culturelle en accréditant l'idée
d'une action culturelle salvatrice dont elle serait le principal agent.

Le maintien vivant d'un savoir-faire, plus que celui d'une technologie


désuette, faisant partie des traditions orales et familiales contribue en
ce sens à la conservation et â la renaissance des traditions dont la culture
locale est héritière, dont la quête de l'identité culturelle régionale est
friande.
- 21 -

Une t r a d i t i o n régionale-

Les discours dans leur ensemble font donc une très large référence à
la t r a d i t i o n régionale, q u ' i l faut respecter et perpétuer.

Malgré la diversité de termes u t i l i s é s , les constructeurs nationaux


comme ceux du niveau régional ou local abondent dans dans cette association
parfois ambiguë de l a t r a d i t i o n et de l a région.

.11 est désormais convenu que globalement l'image de la région se su-


perpose à celle de la t r a d i t i o n .

Une construction qui se d é f i n i t comme régionale tend à se concevoir et


à être perçue comme une construction fondée sur un vocabulaire architectural
traditionnel et faisant appel à des techniques et des s a v o i r - f a i r e locaux
passés. L'inverse se v é r i f i e aussi : i l serait de mauvais goût d'introduire
en Franche-Comté des technologies, des s a v o i r - f a i r e , des t r a d i t i o n s non r é -
gionaux.

L'organe d'information de la société SAB, constructeur régional, ne se


d é f i n i t - i l pas comme "un journal d'information de la maison individuelle
t r a d i t i o n n e l l e " qui présente "des maisons régionales".

Les notions de t r a d i t i o n et de région ont encore en commun l'idée


qu'elles doivent être préservées e t respectées. On en vient à l ' i d é e que
t r a h i r la t r a d i t i o n c'est t r a h i r la région>car la t r a d i t i o n régionale est
perçue comme une source f i a b l e , comme un trésor q u ' i l faut conserver.

Le groupe "Maison Familiale", constructeur national,1'explique ainsi :

"La t r a d i t i o n : Maison Familiale sélectionne les entreprises e t


les artisans de votre région qui s'engagent dans le respect des
architectures locales et selon des méthodes éprouvées de la ma-
çonnerie t r a d i t i o n n e l l e " .
Le choix de l'homme de l ' a r t l o c a l , de même que l'emploi d'une techno-
logie séculaire»offrent . u n grand avantage à l'acheteur : la sé-
c u r i t é . I l s supposent la passation d'un contrat de confiance et garantisssent
de f a i t au c l i e n t la réalisation d'une maison comtoise "par nature".

La société SAFC s'appuie bien sur cette confiance lorsqu'elle t i t r e sa


publicité : "La confiance en un constructeur Franc-Comtois" et qu'elle ex-
p l i c i t e plus loin :
- 22 -

"Nous sommes f i e r s de ce que nous avons à vous o f f r i r : en e f f e t ,


nous avons véritablement apporté nos pierres à l ' é d i f i c a t i o n de
la Franche-Comté.
Nous ne nous sommes pas adaptés au style franc-comtois....
nous sommes Francs-comtois".

Mais c'est bien le respect de la t r a d i t i o n , de l ' h i s t o i r e architecturale,


régionale qui semblent garantir à la maison une authenticité c u l t u r e l l e r é -
gionale.

C'est l'appel à la pérennité du "sentiment comtois" qui est le point de


départ et l'aboutissement de la maison , un vraie maison ne saurait être que
comtoise, â l'image de notre i d e n t i t é .

Et pour un comtois authentique, "qui se "respecte", i l n'y aurait pas


d'alternative possible.

C'est la SAB qui nous d i t encore que

"A Lons-le-Saunier, région verdoyante et mouvementée SAB est


devenu le constructeur régional . . . symbole d'une réussite, un
label de q u a l i t é , la certitude d'une maison bien de chez nous".

Nous sommes pris dans un système de pensée clos, c i r c u l a i r e , au par-


cours unique et régënérescent du sentiment régional, dans un "système c u l -
t u r e l " où l'image de la maison est un m i r o i r de l ' i d e n t i t é qui entretient
un narcissisme culturel notoire.

La t r a d i t i o n régionale et son respect semblent donc s'entendre au t r a -


vers du discours des p u b l i c i t a i r e s , comme une nécessité pour la survie de
l ' i d e n t i t é régionale, en voie de conséquence de la région, comme une évidence
dont personne de sérieux n'aurait la mauvaise idée de c r i t i q u e r et de contester
le bien-fondé historique.

Cet appel à la nécessité de la t r a d i t i o n n'évite cependant pas la


problématique d'aujourd'hui. Les exigences économiques et une nouvelle tech-
nologie (celle des matériaux u t i l i s é s ) seraient théoriquement incompatibles
avec une survivance de la t r a d i t i o n régionale,mai s la souplesse du sentiment
régional, celui de l ' i d e n t i t é c u l t u r e l l e notamment, est t e l l e que ce s e n t i -
ment peut leur servir de soutien.

La nécessité de l ' i d e n t i t é régionale n'est plus présentée comme un


retour aveugle et sclérosant au passé, mais seulement comme la recherche
d'une image comtoise b i e n f a i t r i c e » u t i l e au bonheur familial,que proposeraient
les modèles traditionnels régionaux.
- 23 -

III - La Tradition : un mythe ou une réalité ?

A lire les publicités, on attend des constructeurs des propositions de


modèles typiques de la Franche-Comté oü l'adaptation spécifique aux diffé-
rentes parties de la région serait bien étudiée* et réalisée- dans un accord
avec la tradition locale de chacune d'elles.. La modicité du vocabulaire com-
tois comme les distorsions historiques que l'on peut constater nous font penser
que la recherche de l'apparence comtoise est l'élément fort de ces proposi-
tions, l'essentiel rappel de l'histoire de ces modèles, le principal marqueur
de l'identité.

Une apparence comtoise

Dans cette recherche de l'apparence comtoise, la symbolique du vocabu-


laire architectural utilisé prend une importance capitale.

La quasi majorité des publicités, notamment celles émanant des cons-


tructeurs locaux (Maisons Magnenet, Migeon...) ou régionaux (Pavillons SAFC,
SAB...) présente des modèles où la référence au style comtois se définit
au travers des.stéréotypes architecturaux tels que le mode de revêtement
(bordages, texture et couleur), les ouvertures et leur traitement, l'agen-
cement volumétrique, enfin et surtout la présence d'un toit dont la forme
et la couleur sont symboliquement représentatives du style comtois.

Le traitement de Vépiderme de la maison semble prendre une grande


place dans l'aspect comtois final de la maison.

Ici l'idée d'intégration au paysage, à l'ambiance colorée de la Franche-


Comté, à ses tons doux dominants, est une des raisons des propositions des
coloris présentés par le constructeur.

Dans les cas d'une plus grande réalité historique, les enduits à la
chaux grasse sont des revêtements typiques fortement préconisés d'ailleurs
les administrations contrôlant l'image finale de la maison (type C.A.U.E ;
Architectes des Bâtiments de France ; Architectes consultants des D.D.E.).

La texture et la couleur du revêtement extérieur ne sont cependant pas


les seuls aspects d'un style comtois retrouvé ; le bardage extérieur semble
être une des références courantes des propositions des publicités.
- 24 -

Issu d'une architecture traditionnelle des pays de montagne (celle du


h:aut-Doubs et du haut-Jura) ce mode de revêtement qui permettait une protec-
tion contre les intempéries et la rudesse du climat de ces régions est pro-
posé, dans un aspect décoratif, pour une image comtoise de la maison.

Il devient donc ici un symbole du comtois : ne s'appliquant que sur la


mi-hauteur du pignon, il assure plus un rôle décoratif qu'un rôle protecteur.

Cependant une démarche quelque peu nouvelle se remarque dans les propo-
sitions des constructeurs : l'aspect comtois de la maison tend désormais à
s'affirmer par un système d'ouverture plus "typique" de la tradition. Le per-
cement de la façade tend à intégrer le système des portes de grange comme
système d'entrée principale. En ce sens, l'effort des modèles SAFC est très
net : une ouverture large en arc de cercle surbaissé rappelle les portes de
granges des fernes comtoises.

A la différence des bâtiments anciens, les nouveaux percements ne cor-


respondent évidemment plus à des nécessités agricoles fonctionnelles (ouver-
tures larges des portes de grange pour laisser passer les charrettes de four-
rage et ouvertures réduites des baies par mesure de protection contre le
froid, entre autres) ; ils répondent non .à une nécessité dictée par le fonction-
nement de la maison mais à celle de produire une image comtoise de la mai-
son.

La recherche de cette image semble si importante dans la conscience col-


lective que certains constructeurs proposent à leur clientèle des modèles
où effectivement l'apparence "agricole" est très nettement conservée.

Les modèles de la société SAFC sont en ce sens très significatifs : la


massivité du bâtiment, la volumétrie des fermes comtoises sont retenues et
contribuent très fortement à l'élaboration d'une image comtoise de la maison.

Cependant si la texture du bâtiment, son épiderme, sa coloration, le


mode de percement et la volumétrie sont des caractères reconnus comme comtois,
ils n'expriment pas aussi clairement l'image comtoise de la maison que ne le
fait "le toit".

Le pouvoir évocateur du t o i t semble f a i r e l'unanimité de tous les pou-


voirs individuels ou c o l l e c t i f s présidant à la formation des images de la
maison.
- 25 -

Autour du t o i t , on se rassemble pour exprimer son attachement aux " t r a -


ditions comtoises". I l peut être défini comme un des points névralgiques de
l ' i d e n t i t é comtoise.

Les masses imposantes, issues de l'image des fermes traditionnelles du


Haut-Doubs et du plateau sont reprises par l'image de l ' a r c h i t e c t u r e dite
comtoise d'aujourd'hui et s'appliquent indifféremment à l ' a r c h i t e c t u r e r u -
rale t r a d i t i o n n e l l e , à l'architecture de lotissement, â celle du c o l l e c t i f
ou de l ' i n d i v i d u e l de type urbain, à la restauration comme à la création
architecturale.

L'image du t o i t comtois s'agrémente selon les constructeurs d'un pana-


chage d'éléments du vocabulaire architectural non nécessairement liés h i s t o -
riquement . Un t o i t imposant, avec ou sans fausse croupe, sur lequel on i n -
troduit des lucarnes (chien-assis) issues de l ' a r c h i t e c t u r e urbaine ou de
l'architecture rurale bourgeoise peut aussi se prolonger par une avancée sou-
tenue par des p i l i e r s de bois ou a r r i v e r très bas vers le sol comme les t o i t s
des fermes du haut-Doubs.

C'est dire que l'image amalgame des éléments du vocabulaire de l ' a r c h i -


tecture rurale des différents secteurs de la région avec des éléments d'ar-
chitecture urbaine.

Clin d'oeil à l ' h i s t o i r e architecturale régionale, l'image de l ' a r c h i -


tecture comtoise contemporaine tend à devenir une reconstitution pastiche
d'une image globale mythique dont l ' i n t é r ê t psychologique e t social s e r a i t
celui d ' u n i f i e r une identité c u l t u r e l l e comtoise morcellée en autant de
fragments que de diversités c u l t u r e l l e s locales.

Si la diversité de l'architecture régionale est cernable par la présence


d'une r é a l i t é historique v e r i f i a b l e , - la publication d'études sur l ' a r c h i -
tecture régionale rurale le démontre - l'image mythique de l'architecture
comtoise forgée par les représentations mentales régionales semble ê t r e ,
e l l e , particulièrement réductrice et unique.

En ce sens d ' a i l l e u r s , la seule présence d'un t o i t á la force d'être


symbolique de toute une région, aussi d i v e r s i f i é e culturellement et économi-
quement que la Franche-Comté. La plaquette "construire et restaurer en Franche-
Comté" (à l ' i n i t i a t i v e du Conseil économique et social) note bien paradoxale-
ment la diversité comtoise.
- 26 -

"Du haut-Doubs au Revermont, de la Bresse aux Vosges, l ' a r c h i t e c -


ture offre une image très diversifiée"t

mais obéissent à l'impact d'une image, reprise par les médias et l'opinion
publique, tendant à d é f i n i r une représentation unique de l'architecture
comtoise :

"Cependant, on retrouve certaines composantes générales à la


Franche-Comté. C'est une construction massive de pierre et de bois
qui recouvre sous une t o i t u r e imposante l ' h a b i t a t i o n des hommes et
des animaux ainsi que le fourrage et le matériel".

La r é a l i t é historique nous apprend cependant la diversité c u l t u r e l l e e t


les différences entre une architecture de montagne, une architecture de
plaine et une architecture de pays de vignobles pour ne c i t e r que les plus
parlantes.

Un code pour une identité c u l t u r e l l e

Que penser désormais de la valeur d ' i d e n t i t é d'une image régionale


s'investissant dans une r é a l i t é architecturale n'ayant de r é a l i t é régionale
4 historique que celle de son apparence ?

Car c'est bien l'expression d'une i d e n t i t é comtoise qui est recherchée


- par le c l i e n t et le passant - dans la construction d'une maison r é g i o n a l e . . .
Les réalités du mode' de vie t r a d i t i o n n e l l e dont la maison serait la transpa-
rence, ses transformations et son inadaptation au contexte socio-économique
d'aujourd'hui sont perçues comme étant tout à f a i t i n u t i l e s à la d é f i n i t i o n
comtoise de l'image de l a maison.

I l semblerait donc que le "respect" d'une certaine image régionale de


la maison procède bien du désir de marquer physiquement son propre t e r r i t o i r e ,
celui de la Région, de signes de reconnaissance c u l t u r e l l e .

Car en d é f i n i t i v e une des raisons de cette recherche de l'apparence


comtoise de la maison est celle du respect d'un paysage, celui de la r é -
gion : l'environnement naturel et humain ( c u l t u r e l ) ne doit pas être pertubé
par des constructions inadaptées aux images du paysage comtois - celui de la
r é a l i t é historique ou celui produit par l'imaginaire c o l l e c t i f - .
- 27 -

Toutes les analyses concordent sur ce point : i l est essentiel de con-


server ä la région son i d e n t i t é c u l t u r e l l e par une "bonne intégration" des
constructions au paysage régional.

Les partenaires architecturaux dont on a parlé (construction, adminis-


t r a t i o n . . . ) oeuvrent d ' a i l l e u r s en ce sens e t produisent une somme de con-
seils tendant à mettre en valeur les paysages par des systèmes contrôleurs
de protection (cahier des charges des documents d'urbanisme, a c t i v i t é s de
contrôle des Architectes des Bâtiments de France, i n s c r i p t i o n et classement
des monuments par les Monuments Historiques...)

Mais i l est d i f f i c i l e de savoir,qui du désir d ' i d e n t i t é régionale ou


du processus de la création architecturale,est le point de départ du besoin
d'exprimer son identité par une redécouverte e t une transformation de l ' a r -
chitecture dite t r a d i t i o n n e l l e .

Un f a i t semble certain : une image quasi-unique de l'architecture est


reconnue comme celle de l ' a r c h i t e c t u r e comtoise.

Malgré la diversité des architectures vernaculaires que les siècles


passés ont produit sur l'ensemble du t e r r i t o i r e régional,une seule typologie
semble avoir marqué les représentations mentales des constructeurs, des ache-
teurs.

L'architecture du haut-Doubs et celle des plateaux semblent avoir


prévalu j u s q u ' i c i , malgré quelques tentatives de connaissances historiques
et d'adaptation locale d'éléments du vocabulaire architectural sous la pres-
sion des recommandations des pouvoirs publics.

I l n'empêche que l'image comtoise au travers de laquelle un comtois se


d é f i n i t comme tel est bien encore déterminée par la massivité du t o i t et des
volumes. Dans cette image le t o i t prend une valeur symbolique très importante
q u ' i l est mal venu de contester. I l est devenu en quelque sorte une "seconde
nature" des Franc-comtois contre laquelle chaque acte architectural qui ne
serait pas en accord avec e l l e , qui n'en serait pas l'émanation, devrait mener
un combat d i f f i c i l e , insoutenable.

Aussi, si on ne l u t t e pas pour affirmer la valeur du t o i t comme symbole


d ' i d e n t i t é , l'importance de cette valeur dans l'inconscient c o l l e c t i f comtois
se mesure à la b a t a i l l e d i f f i c i l e à laquelle se l i v r e n t ceux qui ne la recon-
naisse pas comme une valeur d ' i d e n t i t é .
- 28 -

Une étude sur la "politique régionale d'amélioration des matériaux de


couverture en Franche-Comté",menée en 1979 par les services de la Direction
Régionale de l'Architecture et de l'Environnement de Franche-Comté,nous dit
encore l'importance du toit dans la mentalité comtoise ::

"En Franche-Comté, le paysage est deux fois par les toits ; le


relief accidenté les souligne aux vues, leurs dimensions exception-
nelles sont la signature de la région".
..."Cette évolution (celle de l'utilisation de matériaux de cou-
verture non conformes à la tradition) dangereuse pour l'identité
régionale, néfaste pour l'usager, n'a apporté aucun avantage à
l'économie des quatre départements".

Ainsi le toit devient une des références


dans le jugement d'une architecture s'affichant comme comtoise.

Le désir et la volonté de conserver l'identité régionale au travers de


l'architecture sont, malgré l'objectivité apparente du domaine auquel ils
s'adressent, à la fois déterminés par un code moral et générateurs de ce code.

La recherche de l'apparence comtoise, comme celle d'un savoir-faire tra-


ditionnel, doivent obéir - au nom du respect de l'identité régionale - au
code du bien construire comtois.

Il s'agit, en quelque sorte, de construire à la manière d'un "comtois


éclairé" c'est-à-dire conscient de la lourde responsabilité qui lui incombe :
celle de perpétuer une tradition sans faillir à son identité, et inversement.

En ce sens le consensus général sur l'image comtoise, sur l'image de la


maison dont le toit est un symbole, le développement des catalogues des pu-
blicités, leurs discours et leurs modèles, les conseils divers émanant d'as-
sociations ou d'administrations sont autant d'éléments tendant à définir une
éthique du bien-construire comtois. On doit réaliser une "sensibilisation aux
caractéristiques de l'architecture et des paysages franc-contois, l'énoncé
d'un certain nombre de règles de nature à éviter les erreurs les plus répan-
dues"... (plaquette "construire et restaurer en Franche-Comté").

Le ton général est donné et chacun, émut par les caractéristiques de


l'identité de la région, tente au nom de sa propre identité culturelle de
se soumettre aux régies de ce code, de respecter cette éthique.
- 29 -

La généralisation et la reconnaissance de ce "code du bien construire com-


tois" par l'ensemble de la population,et plus particulièrement par l'ensemble
des acteurs du consensus défi ni, organisent de fait l'exclusion de la communau-
té comtoise de celui qui,pour une raison quelconque,refuserait ou oublierait
ce code.

Et si l'anathème n'est pas jeté objectivement sur cet "original", la


non-concordance de sa production avec l'image comtoise édictée par ce code
le fera distinguer de la communauté régionale.

En ce sens on pourrait arriver à conclure que le paysage comtois, en •


soi, impose sa propre règle et qu'il ne reconnaît pas comme "de son terri-
toire" une construction ne repectant pas les règles du jeu régional.

Aussi celui qui veut appartenir à la région, soit en y retrouvant la


terre de ses ancêtres, soit en la reconnaissant comme sa nouvelle "patrie",
est amené, plus que par un retour à un parler spécifique ou à des coutumes
dépassées par un mode de vie autre, à affirmer son identité culturelle par
la production d'une image architecturale de la maison, image aux résonnances
comtoises.

On peut donc dire, qu'aujourd'hui l'architecture des maisons individuel-


les, en priorité, participe et peut participer à l'expression d'une identité
culturelle régionale.

C'est ce que signifie profondément cette remarque dans l'étude sur


"Construire et Restaurer en Franche-Comté" :

"Il existe des solutions Franc-comtoises à votre problème"...

Véritable gageure : la construction d'une maison individuelle moderne-


et franc-comtoise
- 30 -

Aussi l'architecture régionale d'aujourd'hui, celle des maisons i n d i -


viduelles surtout, peut-elle être considérée comme un marqueur important de
l ' i d e n t i t é c u l t u r e l l e comtoise ; mais que peut-on penser de l ' a r c h i t e c t u r e
passée, de sa valeur d ' i d e n t i t é ?

Les attitudes mentales envers l ' h i s t o i r e de l ' a r c h i t e c t u r e ne sont-


elles pas négatives lorsque la r é a l i t é historique encourt le risque d'être
déformée par des vues régionalistes ayant la volonté de trouver au coeur
même de la région des signes visuels d'une culture spécifique, inventant
même les signes de cette culture.?

La s i g n i f i c a t i o n des oeuvres architecturales dans ce contexte "psycho-


logique" prend une valeur autre : en affirmant l'aspect rëgionaliste le con-
sensus sur l'image comtoise de l'architecture ne b r a v e - t - i l pas une r é a l i t é
historique autre, sans l i e n avec une "mode" régionale

I l semble bien que cette idée régionaliste a i t une source.historique


autre que la r é a l i t é , car même l e paysage comtois romantique d é c r i t par
Cl. Nicolas Ledoux pour la Saline d'Arc"et"Senans prend des libertés avec
la Comté du Pays de Chaux boisé et p l a t .

L ' h i s t o i r e de l ' a r c h i t e c t u r e régionale n'est-elle"pas aussi née de la


recherche d'une i d e n t i t é c u l t u r e l l e désireuse d'être s i g n i f i é e objectivement
par le cadre bâti ?

La charge ou la non-charge de l ' i d e n t i t é c u l t u r e l l e conférée à un monu-


ment modifiera donc considérablement sa valeur de témoin historique : à sa
valeur architecturale intrinsèque s'ajoutera désormais sa valeur c u l t u r e l l e
d'identité.
- 31 -

Bibliographie spécifique

- Découvrir la France région par région . Ed. Larousse,n° 50, fëv. 1973
(n° spécial : la Franche-Comté).

- Construire et restaurer en Franche-Comté . Réalisation de l'Etablissement


public régional de Franche-Comté, 1977.

- Qualité du cadre de vie . Ministère de la Culture et de l'Environnement.


—STÏÏ:

- N'abîmons plus la France.. Ed. par la Fédération Nationale de Sauvegarde


des sites et ensembles monumentaux. S.D.

- Politique régionale d'amélioration des matériaux de couverture en


Franche-Comté . Ed. par la Délégation régionale de l'architecture et
de 1'environnement , avril 1979 et mai 1981.

- Toits pour la Franche-Comté . Ed. par la D.R.A.E. 1979.

- Ville-Campagne - Région . Ed. par le C.R.D.P., Besançon 1979 "Pour une


compréhension des paysages urbains et ruraux et une sensibilisation
aux problèmes d'aménagement".

- La maison rurale dans les régions doloises et salinoises . Mémoire de


Maîtrise de C. Boucon, Faculté des Lettres et Sciences Humaines,
Besançon, 1969.

- La maison rurale comtoise traditionnelle à tué . Mémoire de Maîtrise de


J.P. Gresset, Faculté des Lettres et Sciences Humaines, Besançon, 1972.

- GARNERET (Jean), La maison rurale en Franche-Comté. Editions du Folklore


Comtois, Besançon, 1968.

- ROYER (Claude), Architecture paysanne et habitat rural en Franche-Comté,


in Corpus de l'architecturale en France, Musée des Arts et Iradltions
Populaires, Berger-Levrault, Paris.

Revue de l'Association La Renaissance du Vieux Besançon .


- 32 -

Catalogues et Publicités

- La maison i n d i v i d u e l l e - , Dossier Maison Phénix, oct. 1982 (Enquête conçue


e t réalisée par la Maison individuelle»en collaboration avec Maison
Phénix )

- Les Maisons SAFC, 1982 : Pavillons SAFC, La confiance en un constructeur


Franc-Comtois .

- Catalogue Pronogym 1978

- Catalogue Maisons Bouygues1"Une maison de maçons", 1984

- Dépliant Habitat Franc-Comtois

- Vivre à la Combe-Sarragosse. Edité par EDF, réalisation SEDD, Besançon

- Catalogue Maisons Selam.

- Le Bâtisseur , le journal d'information de la maison individuelle tra-


ditionnelle, n° 2 (Journal de la société S.A.B.)

- Catalogue Maisons Comtoises : "La mélodie de votre région"

- Catalogue de la S.C.I. "Les Vernes" à Devecey, Mars 1982

- Prospectus Maison Migeon (Emagnyf Doubs)

- Prospectus Maison Magnenet (Pontarlier, Doubs)

- Publications régulières des publicités dans les journaux d'annonces


locales (GAB, GAV, 70, 25...)
- 33 -

LISTE DES ANNEXES

1) "Régionalisme : les maisons aussi", E x t r a i t de l'Enquête sur la maison


individuelle réalisée par Maison Phénix.

2 et 3) Modèle des pavillons SAB.

4) Champ d'action de la Société SAB et reproduction des modèles t r a d i t i o n -


nels franc-comtois.

5) Modèle des Maisons Migeon.

6 et 7) Modèle "Le Comtois" de la Société SAFC.


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ANNEXE 2

MODÈLE DES PAVILLONS SAB


ANNEXE 3

MODÈLE DES PAVILLONS SAB

NUITS-ST-GEORGES
21. rue du Général-da-Gaulle
21700 NUITS-ST-GEORGES - Tél. : (80) 61.25.26

CHALÓN
11. me da Beifort
71100 CHALÓN - Tél. : (85) 41.65.28

FERNEY-VOLTABŒ
nFernim» 28. Grande-Rue
01210 FERNET-VOLTAIRE - Tél. : (50) 40.52.97

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son expérience, saura vous conseiller au mieux de vos intérêts.
Nous vous remercions vivement de l'accueil que vous voudrez
bien réserver à notre Attaché Commercial.

La Société S.A.B.
ANNEXE 4
.* Une ENTREPRISE
# Des AGENCES
* Des MAISONS,
régionales
70

CHAMP D ACTION DE LA SOCIETE S,A.B. ET REPRODUCTION


DES MODÈLES TRADITIONNELS FRANC-COMTOIS.
ANNEXE 5

MODÈLE DES MAISONS MIGEON


ANNEXE 6

MODÈLE "LE COMTOIS" DE LA SOCIÉTÉ S.A.F,C.


ANNEXE 7

MODÈLE "LE COMTOIS" DE LA


SOCIÉTÉ S.A.F.C, -
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La grande vague du que du folklore... fait partie d'un paysage. Qu'elle
Alors, on a réapprivoisé notre passé, l'enlaidisse ou l'enrichisse, elle
régionalisme touche reconquis de haute lutte les langues participe à l'image d'une région, au
aussi la construction. mourantes, les us et coutumes
déclinants. Dans cette nouvelle
bien être de l'habitant, mais aussi du
passant. Car de même que l'on se
La maison standard bataille qui est tout sauf une sent « chez soi » dans une maison qui
est morte. Les modèles régression, l'architecture tient une nous ressemble, on se sent bien dans
sa région, si elle continue de vivre son
place prépondérante. Toute maison
régionaux sont-ils
prêts pour la relève ?
SjMRff#<t»fekjf*»ii^j9»!ll»

Si, de loin, les maisons bretonnes


semblent de granit, offrant à tous les
vents leur sévère façade de pierre,
c'est que l'on trouve là-bas des
carrières et que le métier de tailleur
de pierres se transmettait, jadis,
comme une tradition.
Si, plus au Nord, les fermes
normandes nous attendrissent sous
leurs lourds bonnets de chaume et
que, sur leurs murs les colombages
dessinent de sombres dessins de bois,
c'est que le pays ici est boisé,
champêtre, rustique. Et si vous
remarquez, sur le devant, un curieux
avant-toit, vaste sous ses piliers, ne
songez pas à l'inutile ou à un simple
souci d'esthétisme... Non : c'était
tout simplement la place réservée à
la charette...
Des toits pentus des chalets de
montagne sur lesquels glisse la neige,
aux mas pastels écrasés d'un soleil
provençal, en passant par cette
étrange attirance des Bourguignons
pour les maisons à étage, on n'en
finirait pas de parcourir la France et
ses paysages, ses traditions, ses
cultures et ses architectures.
Car c'est vrai : on ne vit pas de la
même façon dans la forêt landaise et
sur les collines rocailleuses de Haute-
Provence.
Si tous deux ont à combattre les
intempéries, avouez que le pêcheur
breton a peu de traditions communes
avec le montagnard de Haute-
Savoie ! On l'avait oublié...
Et puis l'uniformisation des cultures,
la standardisation des architectures
nous ont appris la tristesse de la
monotonie, la pitié qu'inspirent les
traditions quand elles ne sont plus
histoire particulière. constructeur de maisons plutôt... attendant les premières.
Une maison est comme un être individuelles en France, Phénix a neiges de la saison.
vivant : bien dans sa peau quand elle décidé de jouer le jeu de la En Savoie comme en Provence, en
est bien dans son environnement. régionalisation architecturale. Aquitaine comme en Normandie, en
C'est dire assez la lourde « On ne dirait pas une maison Velars-sur-Ouche : à gauche (partie grisée sur le
responsabilité des constructeurs, le dessin) la me ancienne ; à droite, les maisons
rôle pédagogique et incitatif qui doit Phénix »...
conçues pour s "intégrer à l'habitat originel par
être le leur. Parce qu'il est le premier Les amis en visite chez M. Tissot, architecte, pour Phénix Bourgogne.
M. et Mme D. ont raison. Un chalet,
Retrouver l'esprit... de chaque région
Bourgogne comme en Lorraine, dans A partir d'un principe original de
chaque région architecturale de construction ayant fait ses preuves, il
France, Maison Phénix, c'est vrai, a été très vite possible de proposer de
rejoint la tradition. nombreuses maisons très différentes
Paradoxe ? Oui, si l'on fait de la par leurs architectures et leurs plans
tradition un passé éternellement d'habitation. Restait à ne pas tomber
présent, un exemple à reproduire dans la régionalisation à « tout prix »
jusqu'à la fin des temps... Mais qui, à la hâte, maquille une demeure
l'Histoire, alors ne s'arrêterait-elle d'Ile de France en mas provençal !...
pas ? Et ne serions-nous pas Pour éviter ce piège, un travail
contraints, en 1982, à nous déplacer approfondi d'étude des différents
en chaise à porteur au nom du pays architecturaux a été menédans
charme désuet et... finalement toute la France en liaison étroite avec
traditionnel, de ces interminables une centaine d'architectes, de
voyages d'antan ?... Absurde, bien nombreux prescripteurs et en suivant
sûr. Une tradition ne vit que si, par les recommandations des services de
définition, elle se transmet en l'Equipement.
s'enrichissant. Plus que de Les grandes caractéristiques
fascination figée, elle est faite de architecturales recensées ont permis
progrès, de ce que la science et la de retrouver l'esprit de chaque
technique peuvent apporter aux tradition, de chaque mode de vie.
hommes. Ainsi sont nées l'Armançon en
Bourgogne, avec son grand pignon et
S'ADAPTER OU RENONCER^ son escalier massif, l'Alba en Corse,
toute de plain-pied avec une façade
La technique, justement, semble être en décrochement, ou la Tradition
le principal atout des maisons Phénix en Provence couverte de tuile roses
dans la difficile partie de la découpées en auvent.
régionalisation. On dit qu'en leurs vastes demeures
La réglementation publique est de ou modestes chaumières, nos
plus en plus draconnienne, la ancêtres aimaient à recevoir. Que de
politique de l'octroi des permis de sa maison, roturière ou seigneuriale,
construire est de plus en plus chacun était fier. En visite chez l'un
sourcilleuse, et les constructeurs d'eux, c'est tout un univers, que vous
n'ont plus que le choix de s'adapter auriez découvert.
ou... de renoncer ! Ainsi confronté à Rien n'a changé.
des exigences toujours plus
clairement formulées, le 1. Toiture en pente, bardages de bois en pignon,
constructeur le plus compétitif sera à c'est le modèle t Pinède » en Aquitaine. 2. Pour
coup sûr aujourd'hui celui qui aura la Bretagne, couverture ardoise et souche de
« l'imagination en plus ». C'est une cheminée en pignon. 3 et 4. Un aménagement
avance que, grâce à sa technologie, fonctionnelpour la chambre d'enfants, un espace
confortable pour le séjour coin-repas. 5. La
Maison Phénix possède depuis version Rhône-Alpes du modèle t Accueil t peut
bientôt quarante ans. recevoir de nombreuses annexes.
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