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Introduction
Marivaux, auteur du XVIIIème siècle, est aujourd’hui l’un des dramaturges les plus joués en
France. Il excelle dans les comédies qui mobilisent un comique farcesque et des intrigues virtuoses pour
interroger et dénoncer l’ordre social. Marivaux préfigure en cela les Lumières, à travers des comédies
comme Les Fausses Confidences (1737) ou L’île des esclaves.
L’Île des esclaves est une brève comédie en forme d’utopie antique.
Iphicrate et Euphrosine échouent sur une île avec leurs esclaves respectifs, Arlequin et
Cléanthis.
Mais sur cette île, l’ordre social est inversé: les maîtres deviennent esclaves et les esclaves deviennent
maîtres.
Ce renversement carnavalesque questionne le rapport maître/valet au XVIIIème siècle et la
légitimité de l’aristocratie à dominer.
Entre comique farcesque et répliques tragiques, cette utopie, ou parodie d’utopie, envisage par le biais de la
fiction une société rendue plus égalitaire.
Après avoir fait le portrait moqueur de leurs anciens maîtres dans les scènes 3 et 5, Arlequin et Cléantis, les
esclaves devenus maîtres, imitent dans la scène 6 les mœurs galantes de leurs anciens
maîtres:«“traitons l’amour à grande manière; puisque nous sommes devenus maîtres”».
Problématique
Comment la parodie de la galanterie aristocratique par les anciens esclaves dénonce-t-elle l’hypocrisie des
normes sociales?
Plan linéaire
Dans une première partie, du début à«“Cela est étrange!”», Arlequin et Cléantis parodient
involontairement la galanterie aristocratique.
Mais dans une deuxième partie, de «“riant à genoux» à «Comment trouvez-vous mon
Arlequin?”», les nouveaux maîtres cessent ce ridicule jeu galant.
Enfin, dans une troisième partie, de «“Fort à mon gré”» à la fin, les anciens esclaves
orchestrent un stratagème amoureux pour se rire de leurs anciens maîtres.
L’extrait s’ouvre sur un ordre qu’Arlequin adresse à Iphicrate: «“Qu’on se retire à dix pas.”» Cette
réplique brève au subjonctif présent à valeur d’impératif manifeste l’autorité
Arlequin rit de la réplique de Cléantis: «“riant à genoux. Ah! ah! ah!”» Sa spontanéité dénonce par
contraste l’artificialité des codes galants.
Les anciens esclaves tentent d’imiter les normes galantes mais leur conversation est un échec comique.
Elle révèle combien, chez les aristocrates, le discours amoureux peut être hypocrite et ridicule.
À ce discours artificiel s’oppose la sincérité enthousiaste des esclaves, qui se réjouissent finalement
de ne pas appartenir à l’aristocratie.
Le stratagème amoureux qu’ils mettent en scène entend venger et instruire leurs anciens oppresseurs sous
une autre forme, toujours comique.