Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Konda
ARCHIVES
Le Monde
Publié le 11 mai 1970 à 00h00, modifié le 11 mai 1970 à 00h00 • Lecture 5 min.
Offrir l’article
Édition du jour
M. Florent répond ainsi à ces lettres : Daté du samedi 16 décembre
Est-ce une " erreur grave " de dire que les Antilles eurent faim pour la première
fois lors de la deuxième guerre mondiale ? En vérité je n'ai jamais prétendu qu'au
temps de l'esclavage le peuple antillais faisait bombance. Il se trouve que la
prodigalité de la nature lui permettait d'améliorer un ordinaire très insuffisant (et
notamment en protides), mais que les propriétaires d'esclaves n'avaient pas
intérêt à laisser tomber en dessous de la " ration de travail". Eugène Revert, qui Lire le journal numérique
s'est livré à des études approfondies sur l'évolution démographique antillaise,
indique d'ailleurs qu'à cette époque " le déchet naturel dans l'un ou l'autre groupe Lire les éditions précédentes
des Blancs et des gens de couleur pouvait atteindre 1,5 à 2 % chaque année. Il est
intéressant de souligner qu'il résulte de ce tait seul que maîtres et esclaves
payaient pratiquement le même tribut à un climat auquel ils n'étaient pas
PUB L I CI T É
habitués " (1). Ce qui ne rend pas l'esclavage moins odieux. Si les Antillais eurent
faim pendant la guerre, c'est parce qu'ils étaient plus nombreux, qu'ils vivaient
davantage dans les villes, que leurs habitudes alimentaires avaient changé et que
les cultures spéculatives avaient étouffé les cultures vivrières.
Un de mes correspondants a donc parfaitement raison de noter qu'il ne faut pas "
dépendre en totalité des caprices économiques extérieurs ", et un autre que "
l'aide incitatrice à la plantation de la canne va à l'encontre de toute diversification
de la production ". Mais le premier remarque aussi qu'outre la faim or. doit "
satisfaire les nécessités sociales ". Or celles-ci sont nombreuses et coûteuses.
Force est donc de produire et de vendre, et nul n'ignore que, s'agissant de
produits agricoles, vendre n'est pas facile. Le sucre bénéficiant d'une garantie de
prix dans le Marché commun, il serait déraisonnable de ne pas tenter de produire
le quota auquel les Antilles ont droit. Il semble que là se borne, en ce domaine,
l'ambition du gouvernement.
Sensible pour le tourisme, la concurrence des îles et des pays environnants l'est
tout autant pour l'industrialisation. Si insuffisants soient-ils, les salaires sont plus
élevés aux Antilles françaises (et pour l'employeur ils s'alourdissent de charges
sociales). Ce n'est sans doute pas un obstacle infranchissable à l'implantation des
industries, mais ce n'est pas non plus, dans des îles que n'avantage aucune
ressource naturelle particulière, un facteur favorable. Il est exact, par ailleurs, que Les plus lus
les capitaux locaux répugnent à s'investir sur place. Les transferts ne se sont pas
toujours faits en direction de la métropole. Certains grands propriétaires 1 En direct, Israël-Hamas : des
« combats acharnés » dans le
détiennent d'importants intérêts, fonciers le plus souvent, dans le sud des Etats- nord de la bande de Gaza,
Unis et en Amérique centrale. rapporte le Hamas
Le problème de la régionalisation
Le régime colonial attribuait de grands pouvoirs aux gouverneurs et laissait aux 2 Etats-Unis : l’ex-avocat de
Donald Trump, Rudy Giuliani,
îles la disposition des impôts perçus (mais aussi la charge de presque toutes les condamné à payer
dépenses publique, qui, de ce fait, restaient très insuffisantes). Il est certain que la 148 millions de dollars pour
départementalisation s'est accompagnée d'une " structuration centralisatrice " diffamation
qu'il serait souhaitable d'alléger. L'opposition antillaise insiste beaucoup
cependant sur le fait que cet allégement ne devrait pas se traduire par un
accroissement du pouvoir des préfets. Cela pose donc le problème de la 3 La mort de l’acteur Matthew
Perry est un accident causé
régionalisation, dont le rejet du référendum n'a pas rendu, aux Antilles comme par une prise excessive de
en métropole, la solution moins nécessaire. kétamine
Pour que les Antilles puissent constituer un pôle de diffusion dans le monde des
Amériques, il faudrait qu'y soient organisées régulièrement des manifestations
culturelles d'une certaine ampleur. Celles-ci auraient en outre d'heureux effets
sur le développement du tourisme. Mais presque tout reste à faire.
Quant à l'influence exercée par la révolution cubaine sur les Antilles françaises,
elle n'est apparemment pas très forte. Il est vrai que, si critiqué et parfois
critiquable qu'il soit, le statut départemental n'a guère de ressemblance avec le
régime de Batista que renversa Castro. Ce qui ne dispense en rien des efforts
nécessaires pour l'améliorer. Mais est-il améliorable ou faut-il le rendre
responsable de tous les maux, notamment du sous - développement de
l'économie, et le récuser ? Certes, ses vingt - cinq années d'existence n'ont pas
suffi à effacer trois siècles de régime colonial. Les Antilles continuent d'exporter
des produits agricoles et d'importer des produits finis. Mais le fait que plus des
deux tiers des importations soient destinés à la consommation prouve à
l'évidence que les " capitalistes locaux ", même s'ils en prélèvent une part plus
grande, ne sont pas seuls à en bénéficier. Comment nier par ailleurs que les
équipements généraux et l'aide sociale profitent à l'ensemble de la population ?
En vérité ce sont les incontestables succès de l'intégration sur le plan social qui
expliquent pour une bonne part son impuissance à faire " décoller " l'économie.
Et l'émigration est bien davantage un constat qu'une politique voulue. Le moyen
le plus sûr de remédier à cette situation - et de supprimer la mentalité d'assisté -
serait d'orienter résolument les crédits métropolitains vers les investissements
productifs. En raison des droits acquis et des possibilités limitées de l'Etat, cette
conversion ne peut être que lente. Il semble pourtant que le peuple antillais ait
plus à en attendre que d'un bouleversement politique dont aucun de mes
correspondants ne précise les conséquences économiques et sociales.
Le Monde
La morale internationale
LA RELIGION DE RIMBAUD
Cours en ligne, cours du Testez votre culture Mots croisés, sudoku, Gagnez du temps avec
soir, ateliers : développez générale avec la rédaction mots trouvés… Jouez avec notre sélection des
vos compétences du Monde nous meilleurs produits
Jeux-concours abonnés
Contacter Le Monde
• Mentions légales • Charte du Groupe • Politique de confidentialité • Gestion des cookies • Conditions générales • Aide (FAQ)