Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
ET
APHORISMES
Le monde moderne ne sera pas châtié.
Il est le châtiment.
MAURICE ALLAIS
« Dans son essence, la création monétaire ex nihilo actuelle par le système bancaire est
identique, je n’hésite pas à le dire pour bien faire comprendre ce qui est réellement en
cause, à la création de monnaie par des faux-monnayeurs, si justement condamnée par la
loi. Concrètement elle aboutit aux mêmes résultats. La seule différence est que ceux qui en
profitent sont différents. »
— Maurice Allais, La Crise mondiale d’aujourd’hui (1999), éd. Clément Juglar, 1999, p. 110
« Quant aux fautes contre les coutumes des hommes, il faut les éviter en raison de la
diversité de ces coutumes ; le pacte mutuel scellé par la coutume ou la loi d’une
cité, d’une nation, ne saurait être violé par le caprice d’un citoyen ou d’un
étranger. C’est laid un élément qui ne s’accorde pas au tout dont il fait partie. »
— Saint Augustin, Les Confessions, trad. Joseph Trabucco, éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 1993 (ISBN 9782080700216), p. 59
« Les hommes, dont la vie terrestre est courte, ne sont pas capables d’accorder par la
pensée les raisons des choses, dans les siècles passés et dans d’autres pays dont ils n’ont
pas l’expérience, avec leur expérience particulière. Cependant, dans un même corps, dans
une même journée, dans une même maison, ils peuvent facilement se rendre compte de ce
qui convient à tel membre, à tel moment, à tel endroit, ou à telle personne. C’est pourquoi
ils se scandalisent dans un cas et se soumettent dans l’autre. »
— Saint Augustin, Les Confessions, trad. Joseph Trabucco, éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 1993 (ISBN 9782080700216), p. 58-59
JACQUES BAINVILLE
« Versailles est resté un lieu historique, non seulement pour nous, mais pour
l’Europe entière. Ce palais [...] a été le point que des millions d’hommes regardaient,
l’endroit d’où partait une imitation presque générale. Versailles symbolise une civilisation
qui a été pendant de longues années la civilisation européenne, notre avance sur les autres
pays étant considérable et notre prestige politique aidant à répandre notre langue et nos
arts. »
— Jacques Bainville, Histoire de France (1924), éd. Kontre Kulture, 2012 (ISBN
9782367250045), p. 255
« Toute guerre civile introduit l’étranger dans les affaires d’un pays. Quand une
guerre civile a en outre un principe religieux, elle prend un caractère international. »
— Jacques Bainville, Histoire de France (1924), éd. Kontre Kulture, 2012 (ISBN
9782367250045), p. 164
« Le dixième siècle est probablement le plus atroce de notre l’histoire. [...] Avec la
décadence de l’autorité carolingienne, les calamités recommençaient. Au Sud, les Sarrasins
avaient reparu. Et puis un autre fléau était venu : les Normands, qui après avoir pillé les
côtes, s’enhardissaient, remontaient les fleuves, brûlaient les villes et dévastaient le pays.
L’impuissance des Carolingiens à repousser ces envahisseurs hâta la dissolution générale.
Désormais, le peuple cessa de compter sur le roi. Le pouvoir royal devint fictif. L’État est en
faillite. Personne ne lui obéit plus. On cherche protection où l’on peut.
[...] L’autorité publique s’est évanouie : c’est le chaos social et politique. Plus de Francie ni
de France. Cent, mille autorités locales, au hasard des circonstances, prennent le pouvoir.
Le gouverneur de province, le gouverneur de canton, le duc, le comte, de moindres
personnages, s’établissent dans leurs charges, les lèguent à leurs enfants, se comportent
en vrais souverains. [...]
Ce serait une erreur de croire que les populations eussent été hostiles à ce morcellement
de la souveraineté. Tout ce qu’elles demandaient, c’étaient des défenseurs. La féodalité [...]
naissait de l’anarchie et du besoin d’un gouvernement, comme aux temps de l’humanité
primitive. Représentons-nous des hommes dont la vie était menacée tous les jours, qui
fuyaient les bandits de toute espèce, dont les maisons étaient brûlées et les terres
ravagées. Dès qu’un individu puissant et vigoureux s’offrait pour protéger les personnes et
les biens, on était trop heureux de se livrer à lui, jusqu’au servage, préférable à une
existence de bête traquée. De quel prix était la liberté quand la ruine et la mort menaçaient
à toute heure et partout ?
[...] Ainsi naquit une multitude de monarchies locales fondées sur un consentement donné
par la détresse. »
— Jacques Bainville, Histoire de France (1924), éd. Kontre Kulture, 2012 (ISBN
9782367250045), p. 49-51
« Près de mille ans d’une histoire qui n’est pas finie seront partagés entre la mer et la terre,
entre l’Angleterre et l’Allemagne. Ainsi l’histoire de la France, c’est celle de l’élaboration et
de la conservation de notre pays à travers des accidents, des difficultés, des orages, venus
de l’intérieur comme de l’extérieur, qui ont failli vingt fois renverser la maison ou après
lesquels il a fallu la reconstruire. La France est une œuvre de l’intelligence et de la
volonté. »
— Jacques Bainville, Histoire de France (1924), éd. Kontre Kulture, 2012 (ISBN
9782367250045), p. 21
« [...] la fusion des races a commencé dès les âges préhistoriques. Le peuple français est
un composé. C’est mieux qu’une race. C’est une nation. »
— Jacques Bainville, Histoire de France (1924), éd. Kontre Kulture, 2012 (ISBN
9782367250045), p. 19
« Le sionisme allumera sans doute en Palestine une hideuse guerre de religion : encore un
de ces progrès à rebours que les traités auront valu au genre humain. L’Osservatore
romano signale, parmi les immigrants juifs qui arrivent en nombre, des fanatiques qui
parlent de détruire les reliques chrétiennes. Ce n’est pas tout. Avec la guerre religieuse, le
sionisme apporte la guerre sociale. Les juifs venus de Pologne, de Russie, de Roumanie,
réclament un partage des terres et l’expulsion des indigènes. M. Nathan Strauss, le
milliardaire américain, dit crûment que “les musulmans trouveront d’autres régions pour
vivre”. Admirable moyen de réunir, en Asie Mineure et même plus loin, tout l’Islam contre
l’Occident. »
— Jacques Bainville, « Les effets du sionisme », L’Action française, 20 décembre 1920
HONORE DE BALZAC
« Ceux qui manient ou l’épée ou la plume pour leur pays ne doivent penser
qu’à bien faire, comme disaient nos pères, et ne rien accepter, pas même la
gloire, que comme un heureux accident. »
— Honoré de Balzac, « Les Paysans (1844) », dans Œuvres complètes de H. de Balzac, éd.
A. Houssiaux, 1855, vol. 18, p. 231
« [...] une ville industrielle où l’esprit de sédition contre les doctrines religieuses
et monarchiques a poussé des racines profondes, où le système d’examen né du
protestantisme et qui s’appelle aujourd’hui libéralisme, quitte à prendre
demain un autre nom, s’étend à toutes choses. »
— Honoré de Balzac, « Le Curé de village (1841) », dans Œuvres complètes de H. de
Balzac, éd. A. Houssiaux, 1855, vol. 13, p. 568
« D’abord une jalousie universelle : les classes supérieures seront confondues,
on prendra l’égalité des désirs pour l’égalité des forces ; les vraies supériorités
reconnues, constatées, seront envahies par les flots de la bourgeoisie. »
— Honoré de Balzac, « Mémoires de deux jeunes mariées (1841) », dans Œuvres
complètes de H. de Balzac, éd. A. Houssiaux, 1855, vol. 2, p. 46
« Laisser aller en paix un malfaiteur, n’est-ce pas se rendre coupable de ses crimes
futurs ? »
— Honoré de Balzac, « Le Médecin de campagne (1833) », dans Œuvres complètes de H.
de Balzac, éd. A. Houssiaux, 1855, vol. 13, p. 414
« Placés aux deux extrémités du monde moral, le sauvage et le penseur ont également
horreur de la propriété. »
— Honoré de Balzac, « La Peau de chagrin (1831) », dans Œuvres complètes de H. de
Balzac, éd. A. Houssiaux, 1855, vol. 14, p. 42
« C’était, en effet, Mme Ferjol qui avait, dans le sens le plus strict du mot, élevé Lasthénie.
Elle lui avait appris tout ce qu’elle savait. Il est vrai que c’était peu de chose. Les filles
nobles de ce temps-là avaient pour toute instruction de grands sentiments et de grandes
manières, et elles s’en contentaient. Lorsqu’une fois elles étaient entrées dans le monde,
elles y devinaient tout, sans en avoir rien appris. À présent, on leur apprend tout, et elles ne
devinent plus rien. On leur oblitère toutes sortes de connaissances, et on les dispense ainsi
d’avoir de la finesse, — cette gloire de nos mères ! »
— Jules Barbey d’Aurevilly, Une Histoire sans nom (1882), éd. Flammarion, 1990 (ISBN
9782080705884), p. 67
« Dans ce temps-là, il y avait encore des enlèvements dans le monde, avec la poésie de la
chaise de poste et la dignité du danger et des coups de pistolet aux portières. À présent,
les amoureux ne s’enlèvent plus. Ils s’en vont prosaïquement ensemble, dans un
confortable wagon de chemin de fer, et ils reviennent, après “le petit badinage consommé”,
comme dit Beaumarchais, aussi bêtement qu’ils étaient partis, et quelquefois beaucoup
plus... C’est ainsi que nos plates mœurs modernes ont supprimé les plus belles et les plus
charmantes folies de l’amour ! »
— Jules Barbey d’Aurevilly, Une Histoire sans nom (1882), éd. Flammarion, 1990 (ISBN
9782080705884), p. 60
« Cependant, les crimes de l’extrême civilisation sont, certainement, plus atroces que ceux
de l’extrême barbarie par le fait de leur raffinement, de la corruption qu’ils supposent, et de
leur degré supérieur d’intellectualité. »
— Jules Barbey d’Aurevilly, Les Diaboliques (1874), éd. Gallimard, coll. « Folio
classique », 2003 (ISBN 9782070302758), p. 296
MARICE BARDECHE
« L’Europe qu’on nous prépare ne sera qu’un bastion avancé d’un empire économique
occidental, dont les États-Unis seront le centre. Notre dépendance énergétique nous retire
une grande partie de notre liberté de mouvement. [...]
L’Europe sera ce que nous la ferons. Un ensemble d’États faibles ne donnera qu’une Europe
faible. Il ne faut pas que l’Europe ne soit que le cadre agrandi de notre
impuissance et de notre décadence. Il n’y aura pas de miracle. Chaque pays doit
prendre conscience des conditions de l’avenir européen. »
— « L’Europe de Maurice Bardèche », Francis Bergeron et Bernard Milhaud, Rivarol, 5 avril
1979
« Ce qu’il faut changer enfin, c’est la minorité dirigeante qui incarne la ploutocratie et dont
le pouvoir a jusqu’ici survécu à tous les changements des hommes en place. Tant que
cette minorité dirigeante, essentiellement mercantile et usurière, n’aura pas
abdiqué, aucun régime de propreté, aucune politique constructive ne seront
possibles. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 183
« [...] une des plus grandes catastrophes des temps modernes fut la prise d’Atlanta. [...] La
victoire des Yankees est la victoire d’une certaine morale et avec elle d’une certaine
conception de l’homme et de la vie. C’est le rationalisme qui triomphe et, avec lui, les
grands principes qu’on proclame et qu’on n’applique pas, et, après eux, c’est le dollar dont
le culte s’installe et, avec le dollar, les aciéries et au-delà des aciéries, le fonctionnalisme, et,
à l’horizon de tout cela, la société de consommation, la publicité, le conformisme, la
monotonie, et les longues, les immenses plaines de l’ennui et de l’absurdité. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 116-117
« Les hommes se reconnaissent moins à leurs idées qu’à leur attitude devant la vie.
[...] Chacun de nous répondra à lui-même de ce qu’il aura été. Ceux qui ne
veulent pas vivre, nous ne pouvons pas les forcer à regarder le soleil en face.
Mais les autres, qu’ils puissent se dire qu’ils ont été des hommes. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 103-114
« Une nation compte aujourd’hui par le volume de sa production industrielle, par son
influence et ses positions économiques à l’étranger, par le prestige de sa culture et de ce
qu’elle représente aux yeux des autres. Sa richesse, son travail, sa paix intérieure, son
expérience politique, sa position dans le monde, en un mot, sont beaucoup plus
importants pour sa grandeur et même pour sa sécurité que les divisions précaires qu’elle
peut placer à ses frontières.
[...] nous ne sommes plus au temps de Louis XIV, que les nations ont déposé une part de
leur souveraineté, qu'elles se sont engagées à se conformer à une morale, qu’elles ont
accepté de se soumettre à des lois [...]. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 94
« Avant tout, Sparte est une certaine idée du monde et une certaine idée de
l’homme. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 93
« Ce que j’appelle Sparte, c’est la patrie où les hommes sont considérés en raison de leurs
qualités viriles qui sont mises au-dessus de toutes les autres. Ce que j’appelle les Sudistes,
ce sont les hommes qui s’efforcent de vivre selon la “nature des choses” qu’ils ne
prétendent corriger qu’en y ajoutant de la politesse et de la générosité. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 89
« On perçut brusquement que ce n’était pas seulement l’Aryen blond qui avait été
vaincu en 1945, mais l’homme blanc, la race blanche toute entière. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 77
« Le succès de Mussolini et les campagnes d’Adolf Hitler furent d’abord pour nous de
tonifiants exemples de redressement national. On pouvait donc se débarrasser de cette
démocratie paralysante qui était sur nous comme une malaria. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 72
« Il faut avouer que la guerre de 1914 fut une géniale diversion. Déjà les aventures
coloniales avaient employé très suffisamment un certain contingent d’énergie suspecte. Les
amateurs d’énergie virile et de promotion au choix se firent donc massacrer pendant
quatre ans en l’honneur de la liberté du commerce et des peuples d’Autriche-Hongrie. [...]
Les Quatorze Points du Président Wilson invitaient les “gars de la Mayenne” à s’occuper de
tout autre chose que des affaires du canton. On leur apprenait qu’ils avaient combattu
pour le Droit et la Civilisation. Traduit en langage de la Mayenne, cela voulait dire que les
hommes seraient désormais tous égaux, tous frères, que personne ne serait au-dessus des
autres, que toutes les nations seraient comme un seul bourg géré par une sorte de conseil
municipal, où tout le monde serait chez soi. [...]
Ainsi, le résultat de la guerre de 1914 était déjà le déracinement des nations. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 66-68
« Est-ce que la prospérité est le but suprême pour les hommes et pour les nations ? Est-ce
que la gloire suprême est de beaucoup produire, d’étaler à l’infini [...]. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 63
« Cette analyse était juste, mais incomplète. Ce que les Juifs avaient le malheur de
représenter, c’était le résultat de la civilisation industrielle brusquement dévoilé. Et c’est
pourquoi la conclusion de l’affaire Dreyfus fut la fondation de l’Action Française, église qui
prêchait une Réforme totale. On avait découvert tout d’un coup la morale sur laquelle
débouchait la démocratie. Le marchand, être cauteleux, servile, que toutes les grandes
civilisations avaient tenu à l’écart, était devenu le brahmane de la nôtre. On baisait sa robe,
on lui offrait la fille. On l’admirait et on le montrait aux petits garçons comme le héros qu’il
fallait être. Au-dessus de lui, il n’y avait rien, mais les prêtres et les capitaines balayaient le
sol devant ses pas. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 62
« Beaucoup de banques étaient encore des entreprises familiales, le banquier était une
sorte de notaire. Le protectionnisme maintenait les économies nationales dans leur aire
géographique et freinait la contagion du gigantisme. Ces pénéplaines du capitalisme
composaient un paysage rassurant. Les hiérarchies aristocratiques existaient encore, elles
en imposaient : et la richesse des industriels ne leur donnait pas d’autre droit que
l’espoir d’être admis dans cette société fondée sur autre chose que sur la richesse. [...]
Les affairistes et les parvenus du Second Empire affirmaient déjà assez clairement le
triomphe de l’argent. Mais un régime bonapartiste, malgré ses tares, plaçait
nécessairement le capitaine au-dessus du marchand. Cette suprématie des militaires s’était
effondrée à Sedan. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 60-61
« Un autre caractère de la civilisation mercantile dans laquelle nous vivons est la primauté
de l’économique : à la fois dans notre vie nationale, et aussi dans notre vie professionnelle,
et même dans notre pensée. C’est un symptôme de l’emprise du marchand sur nous : c’est
pour lui qu’on gouverne. Mais c’est aussi une justification dont on se prévaut en faveur du
conformisme qui nous est imposé. Il n’y a plus de prince au-dessus des contrats pour
briser la puissance du riche, atteindre les exploiteurs et les habiles derrière les gabions de
la procédure et rétablir la justice dans les contrats léonins. [...]
La disparition de toute hiérarchie supérieure à celle de l’argent et, par
conséquent, de tout pouvoir supérieur à celui de l’argent, fait peser de tout
leur poids sur nos têtes les nécessités de l’économie. Celles-ci se développent
comme une logique propre qui tend à devenir la seule logique de notre monde. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 41
« Ce qu’on cherche à émouvoir en nous, ce n’est pas ce qui est noble, généreux,
viril, ce sont au contraire nos nerfs, nos pleurnicheries, notre crédulité, notre
niaiserie.
Nous sommes tout heureux d’être si bons, si émus, si touchés aux entrailles
que nous ne percevons pas que le flux de ces bons sentiments a fini par donner
à presque tous les peuples d’Occident une sensibilité et une tournure d’esprit
typiquement féminines. Devenus des réceptacles d’une pensée étrangère, nous
sommes à la fois ouverts, disponibles, tendres, et en même temps dévirilisés, sans ressort,
sans personnalité, et nous nous laissons souiller de toutes les immondices dont il est utile,
à quelque moment, de nous remplir. On devine dès lors comment le discrédit des qualités
instinctives, nobles, fait de nous des instruments passifs de la propagande et, du même
coup, des êtres dociles, malléables, qui se prêtent également à tout ce qu’on veut
entreprendre sur nous sous le prétexte d’améliorer notre sort, celui des autres, la
distribution des biens, l’efficacité de la production etc., toutes préoccupations qui ont pour
objet de nous transformer en unités conditionnées de production. »
— Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes (1969), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 26
« L’échec ne doit pas nous faire oublier que l’image existe, qu’elle reste aussi grande et que
d’autres peut-être la retrouveront un jour sous d’autres noms. Le terme même de fascisme
sombrera sans doute, parce qu’il est trop chargé de calomnies, parce qu’il est perdu dans
une mer de ténèbres entourée de brumes maléfiques. Qu’importe le mot ? L’ordre de
Sparte, l’homme selon Sparte, c’est le seul bouclier qui nous restera, nous le
savons tous, quand l’ombre de la mort se lèvera devant l’Occident. »
— Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ? (1961), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 133
« Il n’y a pas de fascisme véritable sans une idée qui montre à tous les perspectives d’une
œuvre grandiose. Et le fascisme véritable consiste précisément à associer toute la nation à
cette œuvre, à la mobiliser tout entière pour elle, à faire de chacun de ceux qui travaillent
un pionnier et un soldat de cette tâche et à lui donner ainsi cette fierté d’avoir combattu à
son rang. L’esprit du fascisme consiste avant tout à pénétrer chacun de la grandeur de la
tâche accomplie par tous et à donner ainsi à chacun une joie intérieure, une occupation
profonde, un objectif vital qui éclairera et transformera sa propre existence. »
— Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ? (1961), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 127-
128
« Le fascisme n’est pas une doctrine : c’est une volonté obscure et très ancienne
écrite dans notre sang, dans notre âme. S’il est différent pour chaque nation, c’est
que chaque nation a une manière à elle de se sauver. Elle le trouve au plus profond d’elle-
même. »
— Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ? (1961), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 113
« Il naîtra de faux fascismes. Car la démocratie est fourbue. Dans son agonie, elle
aura des sueurs et des cauchemars : et ces cauchemars seront des tyrannies brutales,
hargneuses, désordonnées. Il y aura des fascismes de l’anti-fascisme. Il y aura des
“dictateurs de la gauche”. Et nous verrons s’élever au nom de la défense des républiques,
des régimes qui auront pour maxime de refuser la liberté aux “ennemis de la liberté”. Nous
le savons. Et c’est pourquoi nous savons aussi que c’est mensonge et vanité de définir le
fascisme par des caractères extérieurs. La suppression de la liberté, les arrestations
arbitraires, les camps de concentration, la torture qu’on prétend rejeter sur le fascisme,
sont tout aussi bien et tout aussi souvent le propre des régimes dirigés contre le “danger
fasciste”. »
— Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ? (1961), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 112
« Ce qu’on appelle la mystique des mouvement fascistes, c’est ce réveil des cris de guerre
perdus qui sommeillent au fond de nous, cet instinct obscur que tout pourrait être autre,
avec d’autres vérités et d’autres dieux, des dieux oubliés des temps très lointains, des
serpents à plumes gravés sur de vieilles pierres. »
— Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ? (1961), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 89
« [...] l’empire arabe fut l’empire de la civilisation et de la beauté [...], les princes de leurs
royaumes ne le cédaient en rien aux barons du Nord pour la justice et la courtoisie. Tel
était le royaume des forts, tel était le royaume des guerriers. En ce temps-là, les usuriers
n’étaient pas les maîtres et les légistes baisaient la babouche des émirs. Chaque chose était
à sa place. Et la loi du Coran régnait qui veut qu’on écoute les sages, qu’on respecte la
justice et qu’on honore ceux qui se conduisent comme des hommes pour la défense du
Croissant. »
— Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ? (1961), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 89
« [...] l’État démocratique n’a pas d’autre fonction que d’assister à ce qui se passe et de
compter les coups en s’assurant seulement qu’ils sont joués conformément à une certaine
règle. Il ne dirige pas le destin de la nation, il contemple le développement des forces de
destruction et attend paisiblement qu’elles aient achevé de détruire la nation et la
démocratie elle-même, satisfait seulement de constater que tout se passe selon une
procédure réglementaire. »
— Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ? (1961), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 41
« Les régimes fascistes retirent à bon droit à certains groupements financiers l’usurpation
des monopoles qu’ils ont institués grâce à leurs milliards pour contrôler l’opinion et
imposer leur volonté à l’État. »
— Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ? (1961), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 36
« Le fascisme sera toujours un pari. Mais la vertu du fascisme est dans cette confiance de
toute la nation en un homme dans lequel elle se reconnaît. Le principe de discipline du
fascisme, loin de le regretter et de le renier, nous devons donc, au contraire, le proclamer
comme une des lois les plus nécessaires des temps modernes. Nos nations d’Europe
meurent de la maladie de la discussion et de la défiance, de l’esprit de dénigrement qui
s’est installé dans la pratique de la vie parlementaire. Le civisme n’est plus dès lors qu’une
obéissance réticente et souvent purement formelle à la volonté provisoire d’une majorité
fragile. Ces régimes où tout le monde louvoie, évite les responsabilités, écoute sa Loge, sa
conscience, suppute, spécule, se réfère [...]. »
— Maurice Bardèche, Qu’est-ce que le fascisme ? (1961), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 33
« Cette adultération de nos peuples a produit, comme il a été expliqué plus haut, un
double résultat : elle a atteint la vie et la pensée de nos nations, elle a atteint aussi notre
vie et notre pensée en tant qu’individus.
Nos nations, en tant que nations, sont frappées de paralysie et d’impuissance ; mais
individuellement, chacun de nous est soumis à un déracinement, à un abâtardissement, à
un métissage moral qui a pour but de faire de nous un bétail docile tenu par ses vices, ses
besoins, ses habitudes, ses rêves.
La pensée étrangère a fait sur nous en tant que Nation ce que l’invasion n’avait
jamais réussi ; l’infiltration est en train de faire de nous un peuple sans visage,
une race nouvelle interchangeable, incolore, insipide, matière première idéale
pour un gouvernement mondial de conquérants sans gloire, sans nom et sans
patrie. »
— Maurice Bardèche, Les Temps modernes (1956), éd. Les Sept Couleurs, 1956, p. 177-178
« La lutte contre la misère et pour la liberté demande autant d’héroïsme que le combat par
les armes [...]. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 217
« Nous voulons la liberté en tant que peuple, car c’est la seule manière de l’obtenir réelle
en tant qu’individu. C’est à cette liberté politique que nous donnons la priorité. Ceux qui
nous la refusent au nom d’un mot comme liberté ou démocratie, nous les appelons les
ennemis véritables de la liberté et de la démocratie. Nous croyons que la liberté et la
démocratie commencent avec l’indépendance, en Europe comme ailleurs, et que, hors de
l’indépendance, il n’y a ni liberté, ni démocratie. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 212
« L’Europe est dans l’action, elle est dans la fraternité du travail et dans l’épreuve par le
travail, elle est dans nos jeunesses mêlées, elle n’est pas dans les parlotes, dans les accords
douaniers, dans les contingentements, et dans les pièges à devises, appelés pools, pactes,
conventions. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 200
« Défendre nos nations, c’est donc d’abord redevenir maîtres chez nous. Une armée forte
contre l’étranger du dehors, une législation contre l’étranger de l’intérieur [...]. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 195
« Il faut adorer l’humanité, se mettre au-dessus de toutes les patries. C’est bien commode
pour ceux qui sont sans patrie. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 191-192
« Toutes les nations d’Europe, à des degrés divers, sont en réalité des pays
occupés. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 190
« Laissez l’Europe à son propre génie, laissez-la à sa propre culture, laissez-la trouver dans
son passé et dans son sang, les solutions qui sont les siennes. Ne forcez pas cette image
du monde que Dieu a créé selon son plan et non selon le vôtre. Nous ne sommes pas des
nègres, nous ne sommes pas des jaunes, nous ne sommes pas des sémites, nous ne
sommes pas des Américains. Ne superposez pas votre Babel à la nature. Agissez selon la
nature des choses. La sagesse politique c’est cela. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 171-172
« La carte réelle du monde n’est pas la carte des continents, c’est la carte des densités de
population. Et cette carte ne fait que traduire la véritable réalité géographique et
politique : la carte réelle du monde est la carte des grandes unités ethniques et
culturelles. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 170
« [...] les États-Unis n’ont rien à gagner à cette indépendance de l’Europe. Apparemment,
les États-Unis ont intérêt à se constituer un empire invisible, destiné à leur fournir des
troupes, des instruments politiques et des clients perpétuels. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 167
« C’est l’Atlantique qu’on protège, c’est pour l’Atlantique qu’on se bat, c’est de
l’Atlantique qu’on attend la victoire, c’est l’Atlantique enfin qui est notre
patrie. Eh bien monsieur le Sénateur, dites-vous que des millions d’hommes en Europe
sont comme moi : ils sont des paysans. Ils savent ce que c’est que leur village, ils savent ce
que c’est que leur terre, ils savent ce que c’est que l’invasion, mais ils ne savent pas ce que
c’est que l’Atlantique. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 162
« Je crois à l’Europe, à condition qu’elle soit l’Europe et qu’elle n’obéisse ni à Washington ni
à Moscou. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 159
« [...] la tâche des partis nationaux en Europe, et c’est la plus sacrée de toutes puisqu’elle
est finalement notre suprême moyen pour sauver non seulement nos libertés, mais notre
existence, pour accomplir le plus grave et le dernier de tous les devoirs, celui de sauver la
race. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 158-159
« [...] il est possible qu’il soit nécessaire de faire l’Europe sans l’Angleterre. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 149
« Nous sommes convaincus aussi que la conception du monde qui sera celle de l’Europe
nous permettra de trouver un terrain d’entente avec les nationalistes arabes. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 149
« [...] la communauté européenne doit être nécessairement une unité politique absolument
indépendante. [...] L’Europe ne doit pas être une position avancée des États-Unis dans la
guerre contre l’impérialisme russe. [...] Une Europe démocratique est la prisonnière du
camp démocratique, elle ne peut être qu’un état satellite des États-Unis [...]. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 144-146
« [...] nous sommes tous des paysans de la même terre d’Europe, nous vivons
tous des mêmes souvenirs et les dieux de nos pays sont les mêmes [...]. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 142
« [...] l’Europe ne pourra se sauver qu’en prenant conscience de valeurs nouvelles [...]. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 140
« Nous vivons dans un monde détruit. Ce ne sont pas seulement nos villes qui
sont détruites, ce sont des systèmes entiers de valeurs et de croyances, ce sont
tous les systèmes de valeurs et croyances. Ces ruines sont invisibles, mais elles sont
plus terribles que les ruines visibles. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 139
« Les États nationaux sur lesquels était fondée toute la vie politique d’autrefois sont
aujourd’hui inviables. Ils n’ont pas plus d’existence politique réelle que le grand-duché de
Bade ou le grand-duché de Modène n’en avaient il y a cent ans. Ils ont cessé d’exister en
tant qu’unités politiques parce qu’ils ont cessé d’exister en tant que forces politiques. S’ils
s’obstinent à survivre dans leur état actuel ils sont tous condamnés à devenir des États
satellites. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 136
« [...] des formations politiques comme le parti du général de Gaulle en France ou le parti
de Winston Churchill en Angleterre ne sont pas des forces nationales authentiques. Le
désir, et même, à vrai dire, l’aspiration à la servitude envers l’Amérique, l’influence des
banques juives et des mots d’ordre juifs, ont toujours empêché les états-majors de ces
partis de prendre conscience de leur mission. Et Churchill, aussi bien que de Gaulle,
destructeurs de l’Europe, complices de l’invasion communiste, agents conscients
et forcenés de toutes les forces de destruction, ilotes ivres qui se réveillent devant
l’abime, ne peuvent être aujourd’hui des guides. Leur politique sent le rabbin comme
leur passé. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 124-125
« Ces hommes, les plus jaloux de leur indépendance nationale, connus par leur passé pour
l’intransigeance de leur nationalisme, sont devenus aujourd’hui, dans leurs pays respectifs,
les partisans les plus actifs et les plus décidés de l’unité européenne.
Ces hommes représentent, il faut que vous le sachiez, monsieur le Sénateur, ce qui a fait la
grandeur de nos patries au temps où elles étaient puissantes. Leur conception de l’honneur
est celle du soldat et du féal. Ils pensent que la religion du serment est éternelle et que rien
ne prévaut sur la parole donnée. Ils estiment que le malheur ne délie point, que même la
méchanceté du prince ne délie point. Ils pensent au contraire de vos idéalistes, que les
formes politiques sont transitoires et que le pays seul et l’âme de ce pays sont éternels. Ils
veulent être des hommes et léguer à leurs enfants leurs cités et leurs terres telles qu’ils les
ont reçues de leurs pères, et non point comme des domaines anonymes sur lesquels le
plus bavard est le maître et où l’étranger impose sa loi. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 122
« [...] vous avez voulu introduire la morale dans la politique internationale et dans la
guerre. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 69-70
« Ce véritable socialisme, ce terrible exemple qui tuait l’idéal communiste par son
existence seule, c’était cela qu’il fallait détruire à tout prix. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 31
« L’amour du sol, l’amour des enfants, l’amour du travail, toutes ces qualités paysannes,
toutes ces qualités charnelles de la race française, et non seulement de la race française,
mais de tous les peuples d’Occident, c’était bien là l’ennemi à abattre. Ce n’était pas assez
de parler de liberté et de progrès, il fallait tuer en nous les réflexes de la races, les réflexes
de la vie. Il fallait tuer la vie en nous pour que nous ne risquions pas de découvrir un jour
ce que c’était que la vraie liberté et ce que c’était que la joie. [...] Il fallait empêcher ce
réveil. De là les nègres, de là les naturalisations en masse par ghettos entiers,
l’abrutissement par les quotidiens et la radio, la pornographie, la publicité l’idolâtrie du
riche, l’adoration du clinquant, la béatification du boxeur et de la danseuse nue, toute cette
foire qui sent la poussière et le papier d’Arménie et dans laquelle une génération hébétée
se promène docilement, assourdie par les pick-up et les orchestres des manèges [...]. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 26-27
« Le génie de nos vieux pays d’Occident avait su opposer à la mystique communiste une
mystique également forte. Du ventre fécond de la vieille Europe, mère des lois et des
nations, une nouvelle foi avait surgi. Ce n’était pas un système qui s’élaborait contre un
autre système, c’était notre terre et notre sang qui soudain se retrouvaient. Ce n’était rien
d’abstrait, c’étaient des hommes qui se souvenaient. C’était de très loin dans les âges toute
notre force et tout notre passé qui leur faisaient trouver les mots qui réveillaient les
peuples contre la ruée d’Asie. »
— Maurice Bardèche, L’Œuf de Christophe Colomb. Lettre à un sénateur
d’Amérique (1951), éd. Les Sept Couleurs, 1951, p. 14
« Car telle est, en vérité, la condition de l’homme après la déposition des patries. On
soutient par pression les régimes qui ouvrent largement la cité à l’étranger. On exige que
ces étrangers reçoivent les mêmes droits que les habitants du pays et on condamne
solennellement toute tentative de discrimination. Puis on ne reconnaît pour régulière
qu’une manière d’opiner purement numérique. Avec ce système, quelle cité ne sera pas, en
un temps donné, soumise par une conquête pacifique, submergée par une occupation sans
uniforme et offerte finalement au règne de l’étranger ?
Le point final est atteint ici. Les différences nationales seront peu à peu laminées. La loi
internationale s’installera d’autant mieux que la loi indigène n’aura plus de défenseurs. Les
gérances nationales que nous décrivions tout à l’heure prennent dans cette perspective
leur véritable signification : les États ne seront plus que les arrondissements
administratifs d’un seul Empire. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 145-146
« Cet homme de la terre et des cités, cet homme qui est l’homme depuis qu’il y a des
peuples et des cités, c’est lui précisément que Nuremberg condamne et répudie. Car la loi
nouvelle lui dit : « Tu seras citoyen du monde, tu vas être toi aussi empaqueté et
déshydraté, tu n’écouteras plus le bruissement de tes arbres et la voix de tes cloches, mais
tu apprendras à entendre la voix de la conscience universelle, secoue la terre de tes
souliers, paysan, cette terre n’est plus rien, elle salit, elle embarrasse, elle empêche de faire
de jolis emballages. Les temps modernes sont venus. Écoute la voix des temps modernes.
Le manœuvre polonais qui change d’embauche douze fois par an est le même homme que
toi, le fripier juif qui vient d’arriver de Korotcha ou de Jitomir est le même homme que toi,
ils ont les mêmes droits que toi sur ta terre et sur ta ville, respecte le nègre, ô paysan. Ils
ont les mêmes droits que toi et tu leur feras place à ta table et ils entreront au conseil où
ils t’apprendront ce que dit la conscience universelle que tu n’entends pas encore aussi
bien qu’il faudrait. Et leurs fils seront des messieurs et ils seront établis juges sur tes fils, ils
gouverneront ta ville et ils achèteront ton champ, car la conscience universelle leur donne
expressément tous ces droits. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 144-145
« Les patries ne peuvent enfanter que des hérésies. Elles sont toutes suspectes
d’une malédiction originelle. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 135
« Nous voyons maintenant que ce ne sont pas seulement les nationalismes qui sont mis en
accusation, mais les patries elles-mêmes. Les droits internes sont détrônés par
l’avènement d’un droit supérieur ; les États souverains sont déposés s’ils
n’acceptent pas d’être les serviteurs du super-État et de sa religion. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 134
« Nous ne sommes plus les soldats d’une patrie, nous sommes les soldats de la
loi morale. Nous ne sommes plus les citoyens d’une nation, nous sommes des
consciences au service de l’humanité. Tout s’explique alors. Il ne s’agit pas de savoir si
le maréchal Pétain est le chef légal du gouvernement de la France, la France cela n’existe
pas, la légalité, cela n’existe pas, il s’agit de savoir si le général de Gaulle incarne la morale
internationale plus exactement que le maréchal Pétain : entre la démocratie incarnée par
un comité improvisé à Londres et la France représentée par un gouvernement qui ne
convoque pas les conseils généraux, nous n’avons pas à hésiter : il faut préférer la
démocratie, parce que la morale est nécessairement du côté de la démocratie, tandis que
la France, cela ne représente rien à l’égard de la morale. Nous voilà donc en présence du
paysage intellectuel complet du cerveau de M. de Menthon. Désormais, c’est
la démocratie qui est la patrie, et la patrie n’est plus rien si elle n’est démocratique. Préférer
la patrie à la démocratie, c’est trahir. Quand la démocratie est menacée, le patriotisme est
toujours du côté de la démocratie. Si la patrie est dans le camps contraire, cela ne fait rien :
c’est la résistance qui est la loi suprême, la trahison qui est obligatoire et la fidélité qui est
trahison, c’est le franc-tireur qui est le véritable soldat. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 132-133
« [...] les armées du droit bombardent Dresde avec un sentiment de peine infinie, et quand
nos Sénégalais violent les jeunes filles de Stuttgart, c’est un acte de guerre qui échappe à
toutes qualification pénale [...]. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 124
« [...] nous avons embrassé les nègres dans les rues en les appelant nos libérateurs, et le
maréchal de l’air [britannique] a défilé au milieu de nos vivats. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 118
« Les juifs sont originellement des étrangers, qui ont été d’abord admis dans
notre pays avec prudence, puis en nombre de plus en plus grand à mesure que
certains d’entre eux obtenaient de l’influence. En dépit de cette hospitalité qui leur
était accordée, ils ne se sont pas abstenus de prendre part aux discussion politiques de
notre pays [...]. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 112
« Ce n’est pas le plan Marshall qui menace notre indépendance, ce sont les principes de
Nuremberg. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 65
« [...] vous êtes un fidèle de la religion de l’Humanité. Au fond du sanctuaire est assis un
dieu nègre. Vous avez tous les droits sauf de dire du mal du dieu. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 37
« Nous vivions jusqu’ici dans un univers solide dont les générations avaient déposé l’une
après l’autre les stratifications. Tout était clair : le père était le père, la loi était la loi,
l’étranger était l’étranger. On avait le droit de dire que la loi était dure, mais elle était la loi.
Aujourd’hui ces bases certaines de la vie politique sont frappées d’anathème. Car ces
vérités constituent le programme d’un parti raciste condamné au tribunal de l’humanité. En
échange, l’étranger nous recommande un univers selon ses rêves. Il n’y a plus de
frontières, il n’y a plus de cités. D’un bout à l’autre du continent, les lois sont
les mêmes, et aussi les passeports, et aussi les juges, et aussi les monnaies. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 36
« La condamnation du parti national-socialiste va beaucoup plus loin qu’elle n’en a l’air. Elle
atteint, en réalité, toutes les formes solides, toutes les formes géologiques de la vie
politique. Toute nation, tout parti qui se souviennent du sol, de la tradition, du métier, de la
race sont suspects. Quiconque se réclame du droit du premier occupant et atteste des
choses aussi évidentes que la propriété de la cité offense une morale universelle qui nie le
droit des peuples à rédiger leurs lois. Ce ne sont pas les Allemands seulement, c’est nous
tous qui sommes dépossédés. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 35-36
« La décision de Nuremberg consiste donc à faire une sélection préalable entre les partis.
Les uns sont légitimes et les autres suspects. Les uns sont dans la ligne de l’esprit
démocratique et ils ont le droit en conséquence de prendre le pouvoir [...]. Les autres, au
contraire, n’ont pas le droit au pouvoir et par conséquent il est inutile qu’ils existent : il est
entendu qu’ils contiennent en germe toutes sortes de crimes contre la paix et l’humanité. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 33
« On eut la bonne fortune de découvrir en janvier 1945 ces camps de dont personne
n’avait entendu parler jusqu’alors et qui devinrent la preuve dont on avait précisément
besoin, le flagrant délit à l’état pure, le crime contre l’humanité qui justifiait tout. On les
photographia, on les filma, on les publia, on les fit connaître par une publicité gigantesque,
comme une marque de stylo. La guerre morale était gagnée. La monstruosité
allemande était prouvée par ces précieux documents. Le peuple qui avait inventé cela
n’avait le droit de se plaindre de rien. Et le silence fut tel, le rideau fut si habilement, si
brusquement dévoilé, que pas une voix n’osa dire que tout cela était trop beau pour être
parfaitement vrai. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 17
« Ils se sont emparés de l’épée de Jéhovah et ils ont chassé l’Allemand des
terres humaines. L’écroulement de l’Allemagne ne suffisait pas aux
vainqueurs. Les Allemands n’étaient pas seulement des vaincus, ils n’étaient
pas des vaincus ordinaires. C’est le Mal qui avait été vaincu en eux : on avait à
leur apprendre qu’ils étaient des Barbares, qu’ils étaient les Barbares. Ce qui
leur arrivait, le dernier degré de la détresse, la désolation comme au jour du déluge, leur
pays englouti comme Gomorrhe et eux seuls errants, stupéfaits, au milieu des ruines,
comme au lendemain de l’écroulement du monde, on avait à leur apprendre que c’était
bien fait, comme disent les enfants. C’était une juste punition du ciel. Ils devaient s’asseoir,
eux Allemands, sur leurs ruines et se frapper la poitrine. Car ils avaient été des monstres. Et
il est juste que les villes des monstres soient détruites, et aussi les femmes des monstres et
leurs petits enfants. Et la radio de tous les peuples du monde, et la presse de tous les
peuples du monde, et des millions de voix de tous les horizons du monde, sans exception,
sans fausse note, se mirent à expliquer à l’homme assis sur ses ruines pourquoi il avait été
un monstre. »
— Maurice Bardèche, Nuremberg ou la Terre promise (1948), éd. Kontre Kulture,
2016 (ISBN 9782367250885), p. 11-12
« Vous avez créé des intouchables et des enfants d’intouchables, une postérité
charnelle et spirituelle d’intouchables : vous avez créé à l’intérieur de la
nation des hérétiques et une hérésie. »
— Maurice Bardèche, Lettre à François Mauriac (1947), éd. La Pensée libre, 1947, p. 21
« [...] dans la civilisation moderne, les capitaux, les puissances d’argent tendent
à devenir les puissances suprêmes. »
— Maurice Barrès, Scènes et doctrines du nationalisme (1902), éd. Kontre Kulture,
2015 (ISBN 9782367250717), p. 457
« Les morts ! Ah ! que serait donc un homme à ses propres yeux s’il ne représentait que
soi-même ? Quand chacun de nous tourne la tête sur son épaule, il voit une
suite indéfinie de mystères, dont les âges les plus récents s’appellent la France.
Nous sommes le produit d’une collectivité qui parle en nous. Que l’influence
des ancêtres soit permanente, et les fils seront énergiques et droits, la nation
une. »
— Maurice Barrès, Scènes et doctrines du nationalisme (1902), éd. Kontre Kulture,
2015 (ISBN 9782367250717), p. 96
« (Hélas ! il n’y a point de race française, mais un peuple français, une nation française,
c’est-à-dire une collectivité de formation politique.) Oui, malheureusement, au regard des
collectivités rivales et nécessairement ennemies dans la lutte pour la vie, la nôtre n’est point
arrivée à se définir à elle-même. Nous l’avouons implicitement par ce fait que, suivant les
besoins du moment, pour nos publicistes, nos écrivains, nos artistes, nous sommes tantôt
Latins, tantôt Gaulois, tantôt “le soldat de l’Église”, puis la grande nation, “l’émancipatrice
des peuples”. »
— Maurice Barrès, Scènes et doctrines du nationalisme (1902), éd. Kontre Kulture,
2015 (ISBN 9782367250717), p. 87
« Les juifs n’ont pas de patrie au sens où nous l’entendons. Pour nous, la
patrie, c’est le sol et les ancêtres, c’est la terre de nos morts. Pour eux, c’est
l’endroit où ils trouvent leur plus grand intérêt. Leurs “intellectuels” arrivent ainsi à
leur fameuse définition : “La patrie, c’est une idée.” Mais quelle idée ? Celle qui leur est la
plus utile et, par exemple, l’idée que tous les hommes sont frères, que la nationalité est un
préjugé à détruire, que l’honneur militaire pue le sang, qu’il faut désarmer (et ne laisser
d’autre force que l’argent), etc. »
— Maurice Barrès, Scènes et doctrines du nationalisme (1902), éd. Kontre Kulture,
2015 (ISBN 9782367250717), p. 69
« Cette voix des ancêtres, cette leçon de la terre que Metz sait si bien nous faire entendre,
rien ne vaut davantage pour former la conscience d'un peuple. La terre nous donne
une discipline, et nous sommes le prolongement des ancêtres. Voilà sur quelle
réalité nous devons nous fonder.
Que serait donc un homme à ses propres yeux, s’il ne représentait que soi-même ? Quand
chacun de nous tourne la tête sur son épaule, il voit une suite indéfinie de mystères, dont
les âges les plus récents s’appellent la France. Nous sommes le produit d’une collectivité
qui parle en nous. Que l’influence des ancêtres soit permanente, et les fils seront
énergiques et droits, la nation une. »
— Maurice Barrès, La Terre et les Morts (10 mars 1899)
« On ne fait pas l’union sur des idées, tant qu’elles demeurent des
raisonnements ; il faut qu’elles soient doublées de leur force sentimentale. À la
racine de tout, il y a un état de sensibilité. On s’efforcerait vainement d’établir la vérité par
la raison seule, puisque l’intelligence peut toujours trouver un nouveau motif de remettre
les choses en question. »
— Maurice Barrès, La Terre et les Morts (10 mars 1899)
« [...] nous, Lorrains, nous ne sommes pas Français, parce que la France est la fille “ainée de
l’Église” ni parce qu’elle a fourni au monde la “Déclaration des droits de l’Homme”, nous
n’avons pas adhéré à la patrie comme à un esprit, comme à un ensemble de principes. En
fait, nous sommes venus à la France parce que nous avions besoin d’ordre et de paix et
que nous ne pouvions en trouver ailleurs. Notre patriotisme n’a rien d’idéaliste, de
philosophique ; nos pères étaient fort réalistes. Et pourtant il est bien exact que nous
tendions vers la France plutôt que vers l’Allemagne, parce que celle-là est une nation
catholique, et c’est encore vrai que les conquêtes civiles de la Révolution et les gloires
militaires de l’Empire ont gagné le cœur de notre population. Ainsi, notre patriotisme est
fait de tous les éléments que les dialecticiens s’efforcent de maintenir séparés et en
opposition. »
— Maurice Barrès, La Terre et les Morts (10 mars 1899)
« Hélas ! il n’y a point de race française, mais un peuple français, une nation française,
c’est-à-dire une collectivité de formation politique ; et malheureusement, au regard des
collectivités rivales et nécessairement ennemies dans la lutte pour la vie, la nôtre n’est point
arrivée à se définir à elle-même.
Nous l’avouons implicitement par ce fait que, suivant les besoins du moment, pour nos
publicistes, nos écrivains, nos artistes, nous sommes tantôt Latins, tantôt Gaulois, tantôt “le
soldat de l’Église”, puis la grande nation, “l’émancipatrice des peuples”. »
— Maurice Barrès, La Terre et les Morts (10 mars 1899)
« Cette foule où chacun porte en soi, appropriée à sa nature, une image de Hugo, conduit
sa cendre de l’Arc de Triomphe au Panthéon. Chemin sans pareil ! Qui ne donnerait sa vie
pour le parcourir cadavre ! Il va à l’ossuaire des grands hommes : — au caveau national et
aux bibliothèques. — Ici, une fille légendaire sauva Paris, écarta les Barbares : c’est un
même office qu’ont à perpétuer les écoles de la Montagne ; elles ont toujours à sauver la
France, en lui donnant un principe d’action. Ici la jeunesse hérite de la tradition nationale
et, en même temps, s’initie à l’état de la vérité dans le monde, aux efforts actuels de tous
les peuples vers plus de civilisation. C’est ici, depuis les bégaiements du XIIe siècle, que se
sont composées les formules où notre race a pris conscience et a donné communication
au monde des bonnes choses qui lui sont propres.
Certains esprits sont ainsi faits que deux points les émeuvent dans Paris : — l’Arc de
Triomphe, qui maintient notre rang devant l’étranger, qui rappelle comment nous
donnâmes aux peuples, distribuâmes à domicile les idées françaises, les “franchises de
l’humanité”, — et cette colline Sainte-Geneviève, dont les pentes portent la Sorbonne, les
vieux collèges, les savantes ruelles des étudiants. L’Arc de Triomphe, c’est le signe de notre
juste orgueil ; le Panthéon, le laboratoire de notre bienfaisance : orgueil de la France
devant l’univers ; bienfaisance de la France envers l’univers. Le même vent qui passe et
repasse sous la voûte triomphale court aussi sans trêve le long des murs immenses du
Panthéon, c’est l’âme, le souffle des hauts lieux : nul n’approche le mont de l’Étoile, le mont
Sainte-Geneviève qui n’en frémisse, et pour les plus dignes, ce sera le moteur d’une grande
et durable activité.
De l’Étoile au Panthéon, Victor Hugo, escorté par tous, s’avance. De l’orgueil de la France il
va au cœur de la France. C’est le génie de notre race qui se refoule en elle-même : après
qu’il s’est répandu dans le monde, il revient à son centre ; il va s’ajouter à la masse qui
constitue notre tradition. De l’Arc où le Poète fut l’hôte du César, nous l’accompagnons à
l’Arche insubmersible où toutes les sortes de mérite se transforment en pensée pour
devenir un nouvel excitant de l’énergie française. »
— Maurice Barrès, Les Déracinés (1897), éd. Bartillat, coll. « Omnia », 2010, p. 343-344
« Pour chaque être, il existe une sorte d’activité où il serait utile à la société,
en même temps qu’il y trouverait son bonheur. »
— Maurice Barrès, L’Ennemi des Lois (1893), éd. Perrin, 1893, p. 97
« L’âme qui habite aujourd’hui en moi est faite des parcelles qui survécurent à
des milliers de morts [...]. »
— Maurice Barrès, Un homme libre (1889), éd. Perrin, 1889, p. 223
—
FREDERIC BASTIAT
« [...] dans les sociétés modernes, la spoliation par l’impôt s’exerce sur une
immense échelle. »
— Frédéric Bastiat, « Harmonies Économiques » (1850), dans L’État, c’est toi !, éd. L’Arche,
coll. « Tête-à-tête », 2004, p. 80
« Ce n’est pas parce que les hommes ont édicté des Lois que la Personnalité, la Liberté et la
Propriété existent. Au contraire, c’est parce que la Personnalité, la Liberté et la Propriété
préexistent que les hommes font des Lois. »
— Frédéric Bastiat, « La Loi » (1850), dans Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, éd.
Guillaumin, 1862-1864, t. IV, p.
« [...] la Propriété est un droit antérieur à la Loi, puisque la Loi n’aurait pour objet que de
garantir la Propriété. »
— Frédéric Bastiat, « Propriété et loi » (1848), dans Œuvres complètes de Frédéric Bastiat,
éd. Guillaumin, 1862-1864, t. IV, p.
« Cela est si vrai qu’ainsi qu’un de mes amis me le faisait remarquer, dire que le but de la
Loi est de faire régner la Justice, c’est se servir d’une expression qui n’est pas
rigoureusement exacte. Il faudrait dire : Le but de la Loi est d’empêcher l’Injustice de
régner. En effet, ce n’est pas la Justice qui a une existence propre, c’est l’Injustice. L’une
résulte de l’absence de l’autre. »
— Frédéric Bastiat, « La Loi » (1850), dans Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, éd.
Guillaumin, 1862-1864, t. IV, p.
« L’État, c’est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s’efforce de vivre aux
dépens de tout le monde.
Car, aujourd’hui comme autrefois, chacun, un peu plus, un peu moins, voudrait bien
profiter du travail d’autrui. Ce sentiment, on n’ose l’afficher, on se le dissimule à soi-même ;
et alors que fait-on ? On imagine un intermédiaire, on s’adresse à l’État, et chaque classe
tour à tour vient lui dire : “Vous qui pouvez prendre loyalement, honnêtement, prenez au
public, et nous partagerons.” »
— Frédéric Bastiat, « Journal des débats » (25 septembre 1848), dans L’État, c’est toi !, éd.
L’Arche, coll. « Tête-à-tête », 2004, p. 15
« N’attendez de moi [l’État] que deux choses : Liberté, Sécurité, — et comprenez bien que
vous ne pouvez, sans les perdre toutes deux, m’en demander une troisième. »
— Frédéric Bastiat, « Harmonies économiques » (1850), dans Œuvres complètes de
Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1862-1864, t. VI, p. 113
« Faire intervenir l’État, lui donner pour mission de pondérer les profits et d’équilibrer les
fortunes, en prenant aux uns, sans consentement, pour donner aux autres, sans rétribution,
le charger de réaliser l’œuvre du nivellement par voie de spoliation, assurément c’est bien
là du Communisme. Les procédés employés par l’État, dans ce but, non plus que les beaux
noms dont on décore cette pensée, n’y font rien. Qu’il en poursuive la réalisation par des
moyens directs ou indirects, par la restriction ou par l’impôt, par les tarifs ou par le Droit au
travail ; qu’il la place sous invocation de l’égalité, de la solidarité, de la fraternité, cela ne
change pas la nature des choses ; le pillage des propriétés n’en est pas moins du pillage
parce qu’il s’accomplit avec régularité, avec ordre, systématiquement et par l’action de la
loi. »
— Frédéric Bastiat, « Protectionisme et communisme » (1849), dans Œuvres complètes de
Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1862-1864, t. IV, p. 515
« [...] le plus pressé, ce n’est pas que l’État enseigne, mais qu’il laisse enseigner. Tous les
monopoles sont détestables, mais le pire de tous, c’est le monopole de l’enseignement. »
— Frédéric Bastiat, « Protectionisme et communisme » (1849), dans Œuvres complètes de
Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1862-1864, t. V, p. 93
« Le peuple sera écrasé d’impôts, on fera emprunt sur emprunt ; après avoir
épuisé le présent, on dévorera l’avenir. »
— Frédéric Bastiat, « Journal des Économistes » (15 juin 1848), dans L’État, c’est toi !, éd.
L’Arche, coll. « Tête-à-tête », 2004, p. 37
« La communauté seule doit décider de tout, régler tout : éducation, nourriture, salaires,
plaisirs, locomotion, affections, familles, etc., etc. — Or la société s’exprime par la loi, la loi
c’est le législateur. Donc voilà un troupeau et un berger, — moins que cela encore, une
matière inerte et un ouvrier. On voit où mène la suppression de la Responsabilité et de
l’individualisme. »
— Frédéric Bastiat, « Harmonies économiques » (1850), dans Œuvres complètes de
Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1862-1864, t. VI, p.
« Eh quoi ! est-il donc si difficile de laisser les hommes essayer, tâtonner, choisir, se
tromper, se rectifier, apprendre, se concerter, gouverner leurs propriétés et leurs intérêts,
agir pour eux-mêmes, à leurs périls et risques, sous leur propre responsabilité ; et ne voit-
on pas que c’est ce qui les fait hommes ? Partira-t-on toujours de cette fatale hypothèse,
que tous les gouvernants sont des tuteurs et tous les gouvernés des pupilles ? »
— Frédéric Bastiat, « Harmonies économiques » (1850), dans Œuvres complètes de
Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1862-1864, t. VI, p.
« Dieu a mis aussi dans l’humanité tout ce qu’il faut pour qu’elle accomplisse ses destinées.
Il y a une physiologie sociale providentielle comme il y a une physiologie humaine
providentielle. Les organes sociaux sont aussi constitués de manière à se développer
harmoniquement au grand air de la Liberté. Arrière donc les empiriques et les
organisateurs ! Arrière leurs anneaux, leurs chaînes, leurs crochets, leurs tenailles ! arrière
leurs moyens artificiels ! arrière leur atelier social, leur phalanstère, leur
gouvernementalisme, leur centralisation, leurs tarifs, leurs universités, leurs religions d’État,
leurs banques gratuites ou leurs banques monopolisées, leurs compressions, leurs
restrictions, leur moralisation ou leur égalisation par l’impôt ! Et puisqu’on a vainement
infligé au corps social tant de systèmes, qu’on finisse par où l’on aurait dû commencer,
qu’on repousse les systèmes, qu’on mette enfin à l’épreuve la Liberté, — la Liberté, qui est
un acte de foi en Dieu et en son œuvre. »
— Frédéric Bastiat, « La Loi » (1850), dans Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, éd.
Guillaumin, 1862-1864, t. IV, p. 392-393
« C’est la déplorable manie de notre époque de vouloir donner une vie propre à de pures
abstractions, d’imaginer une cité en dehors des citoyens, une humanité en dehors des
hommes, un tout en dehors de ses parties, une collectivité en dehors des individualités qui
la composent. »
— Frédéric Bastiat, « Harmonies Économiques » (1850), dans L’Etat, c’est toi !, éd. L’Arche,
coll. « Tête-à-tête », 2004, p. 93
« Malheureuse, trois fois malheureuse la nation où les questions se posent ainsi ; où nul ne
songe à faire de la loi la règle de la justice ; où chacun n’y cherche qu’un instrument de vol
à son profit, et où toutes les forces intellectuelles s’appliquent à trouver des excuses dans
les effets éloignés et compliqués de la spoliation ! »
— Frédéric Bastiat, « Harmonies Économiques » (1850), dans L’Etat, c’est toi !, éd. L’Arche,
coll. « Tête-à-tête », 2004, p. 101
« En vérité, réformateurs modernes, quand vous voulez remplacer cet ordre admirable par
un arrangement de votre invention, il y a deux choses (et elles n’en font qu’une) qui me
confondent : votre manque de foi en la Providence et votre foi en vous-mêmes ; votre
ignorance et votre orgueil. »
— Frédéric Bastiat, « Harmonies Économiques » (1850), dans Œuvres complètes de
Frédéric Bastiat, éd. Guillaumin, 1862-1864, t. VI, p.
« Ici je me heurte au plus populaire des préjugés de notre époque. On ne veut pas
seulement que la Loi soit juste ; on veut encore qu’elle soit philanthropique. On ne se
contente pas qu’elle garantisse à chaque citoyen le libre et inoffensif exercice de ses
facultés, appliquées à son développement physique, intellectuel et moral ; on exige d’elle
qu’elle répande directement sur la nation le bien-être, l’instruction et la moralité. C’est le
côté séduisant du Socialisme. »
— Frédéric Bastiat, « La Loi » (1850), dans Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, éd.
Guillaumin, 1862-1864, t. IV, p. 357
« Les socialistes nous disent : puisque la Loi organise la justice, pourquoi n’organiserait-elle
pas le travail, l’enseignement, la religion ?
Pourquoi ? Parce qu’elle ne saurait organiser le travail, l’enseignement, la religion, sans
désorganiser la Justice. »
— Frédéric Bastiat, « La Loi » (1850), dans Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, éd.
Guillaumin, 1862-1864, t. IV, p. 359
« Suffrage universel veut dire : suffrage universel des capables. Restent ces questions de
fait : quels sont les capables ? l’âge, le sexe, les condamnations judiciaires sont-ils les seuls
signes auxquels on puisse reconnaître l’incapacité ?
Si l’on y regarde de près, on aperçoit bien vite le motif pour lequel le droit de suffrage
repose sur la présomption de capacité, le système le plus large ne différant à cet égard du
plus restreint que par l’appréciation des signes auxquels cette capacité peut se reconnaître,
ce qui ne constitue pas une différence de principe, mais de degré. »
— Frédéric Bastiat, « La Loi » (1850), dans Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, éd.
Guillaumin, 1862-1864, t. IV, p. 350
—
CHARLES BAUDELAIRE
« Il s’agit, pour lui, de dégager de la mode ce qu’elle peut contenir de poétique dans
l’historique, de tirer l’éternel du transitoire. [...] La modernité, c’est le transitoire, le
fugitif, le contingent, la moitié de l’art, dont l’autre moitié est l’éternel et l’immuable. »
— Charles Baudelaire, « Le Peintre de la vie moderne » (1863), dans Œuvres complètes, éd.
Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2011, La Modernité, p. 797
« Enfin, mon âme fait explosion, et sagement elle me crie : “N’importe où ! n’importe
où ! pourvu que ce soit hors de ce monde !” »
— Charles Baudelaire, « Petits Poèmes en prose » (1869), dans Œuvres complètes, éd.
Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2011, Any Where out of the world, p. 209
« Mes chers frères, n’oubliez jamais, quand vous entendrez vanter le progrès
des lumières, que la plus belle des ruses du diable est de vous persuader qu’il
n’existe pas ! »
— Charles Baudelaire, « Petits Poèmes en prose » (1869), dans Œuvres complètes, éd.
Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2011, Le Joueur généreux, p. 191
« Malgré les secours que quelques cuistres célèbres ont apportés à la sottise naturelle de
l’homme, je n’aurais jamais cru que notre patrie pût marcher avec une telle
vélocité dans la voie du progrès. Ce monde a acquis une épaisseur de vulgarité qui
donne au mépris de l’homme spirituel la violence d’une passion. Mais il est des carapaces
heureuses que le poison lui-même n’entamerait pas. »
— Charles Baudelaire, « Projets d’une préface pour la seconde édition des Fleurs du
mal » (1861), dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2011, p. 131
JEAN BAUDRILLARD
« Tout ce qui fait événement aujourd’hui le fait contre cette universalité abstraite — y
compris l’antagonisme de l’islam aux valeurs occidentales (c’est parce qu’il en est la
contestation la plus véhémente qu’il est aujourd’hui l’ennemi numéro un).
Qui peut faire échec au système mondial ? Certainement pas le mouvement de
l’antimondialisation, qui n’a pour objectif que de freiner la dérégulation. L’impact politique
peut être considérable, l’impact symbolique est nul. Cette violence-là est encore une sorte
de péripétie interne que le système peut surmonter tout en restant maître du jeu. Ce qui
peut faire échec au système, ce ne sont pas des alternatives positives, ce sont des
singularités. Or, celles-ci ne sont ni positives ni négatives. Elles ne sont pas une alternative,
elles sont d’un autre ordre. Elles n’obéissent plus à un jugement de valeur ni à un principe
de réalité politique. Elles peuvent donc être le meilleur ou le pire. On ne peut donc les
fédérer dans une action historique d’ensemble. Elles font échec à toute pensée unique et
dominante, mais elles ne sont pas une contre-pensée unique — elles inventent leur jeu et
leurs propres règles du jeu. [...]
Il ne s’agit donc pas d’un “choc de civilisations”, mais d’un affrontement,
presque anthropologique, entre une culture universelle indifférenciée et tout
ce qui, dans quelque domaine que ce soit, garde quelque chose d’une altérité
irréductible. Pour la puissance mondiale, tout aussi intégriste que l’orthodoxie religieuse,
toutes les formes différentes et singulières sont des hérésies. A ce titre, elles sont vouées
soit à rentrer de gré ou de force dans l’ordre mondial, soit à disparaître. La mission de
l’Occident (ou plutôt de l’ex-Occident, puisqu’il n’a plus depuis longtemps de valeurs
propres) est de soumettre par tous les moyens les multiples cultures à la loi féroce de
l’équivalence. Une culture qui a perdu ses valeurs ne peut que se venger sur celles des
autres. »
— « La violence de la mondialisation », Jean Baudrillard, Le Monde diplomatique,
novembre 2002
« La vraie question devient alors : ne peut-on plus l’“ouvrir” de quelque façon, proférer
quoi que ce soit d’insolite, d’insolent, d’hétérodoxe ou de paradoxal sans être
automatiquement d’extrême droite (ce qui est, il faut bien le dire, un hommage rendu à
l’extrême droite) ? Pourquoi tout ce qui est moral, conforme et conformiste, et qui était
traditionnellement à droite, est-il passé à gauche ? Révision déchirante : alors que la droite
incarnait les valeurs morales, et la gauche au contraire une certaine exigence historique et
politique contradictoire, aujourd’hui, celle-ci, dépouillée de toute énergie politique, est
devenue une pure juridiction morale, incarnation des valeurs universelles, championne du
règne de la Vertu et tenancière des valeurs muséales du Bien et du Vrai, juridiction qui peut
demander des comptes à tout le monde sans avoir à en rendre à personne. L’illusion
politique de la gauche, congelée pendant vingt ans dans l’opposition, s’est révélée, avec
l’accession au pouvoir, porteuse, non pas du sens de l’histoire, mais d’une morale de
l’histoire. D’une morale de la Vérité, du Droit et de la bonne conscience degré zéro du
politique et sans doute même point le plus bas de la généalogie de la morale. Défaite
historique de la gauche (et de la pensée) que cette moralisation des valeurs. Même la
réalité, le principe de réalité, est un article de foi. Mettez donc en cause la réalité d’une
guerre : vous êtes aussitôt jugé comme traître à la loi morale. La gauche tout aussi
politiquement dévitalisée que la droite où est donc passé le politique ? Eh bien, du côté de
l’extrême droite. Comme le disait très bien Bruno Latour dans le Monde, le seul discours
politique en France, aujourd’hui, est celui de Le Pen. Tous les autres sont des
discours moraux et pédagogiques, discours d’instituteurs et de donneurs de
leçons, de gestionnaires et de programmateurs. »
— « Opposer à Le Pen la vitupération morale, c’est lui laisser le privilège de l’insolence. La
conjuration des imbéciles. », Jean Baudrillard, Libération, 7 mai 1997 (lire en ligne)
« On est tombé dans l’universel consensuel des Droits de l’homme, derrière lequel
s’alimentent des singularités violentes, qui sécrètent de la haine, dans la mesure même où
cet universel est irrecevable, où c’est une utopie qui peut se révéler meurtrière. [...]
La haine est plutôt la réaction violente au fait qu’il n’y a pas de solution, qu’il n’y a pas de
résolution possible de tous les problèmes qu’avait posés l’histoire. »
— « », Jean Baudrillard, Le Magazine littéraire, été 1994
« Toute société doit se désigner un ennemi, mais elle ne doit pas vouloir l’exterminer. Ce fut
l’erreur fatale du fascisme et de la Terreur, mais c’est celle aussi de la terreur douce et
démocratique, qui est en train d’éliminer l’Autre encore plus sûrement que par l’holocauste.
L’opération qui consistait à hypostasier une race et à la perpétuer par reproduction interne
que nous stigmatisons comme abjection raciste, est en train de se réaliser au niveau des
individus au nom même des droits de l’homme à contrôler son propre processus
génétiquement et sous toutes ses formes. SOS-Racisme. SOS-baleines. Ambiguïté : dans un
cas, c’est pour dénoncer le racisme, dans l’autre, c’est pour sauver les baleines. Et si dans le
premier cas, c’était aussi un appel subliminal à sauver le racisme, et donc l’enjeu de la lutte
anti-raciste comme dernier vestige des passions politiques, et donc une espèce
virtuellement condamnée. »
— Jean Baudrillard, Cool Memories II : 1987-1990, éd. Galilée, 1990 (ISBN
9782718603674), t. 2, p. 134
« [...] cette société d’“abondance” est à elle-même son propre mythe [...]. Une
sorte d’immense narcissisme collectif porte la société à se confondre et à
s’absoudre dans l’image qu’elle se donne d’elle-même [...]. »
— Jean Baudrillard, La Société de consommation (1970), éd. Gallimard, coll. « Folio
essais », 2019 (ISBN 9782070323494), p. 313
« Le problème plus général dans lequel s’inscrit celui de cette violence “sans objets”,
encore sporadique dans certains pays, mais virtuellement endémique dans tous les pays
développés ou sur-développés, est celui des contradictions fondamentales de
l’abondance (et non plus seulement de ses disparités sociologiques). C’est celui des
multiples formes d’ANOMIE (pour reprendre le terme de Durkheim) ou d’ANOMALIE, selon
qu’on les réfère à la rationalité des institutions ou à l’évidence vécue de la normalité, qui
vont de la destructivité (violence, délinquance) à la dépressivité contagieuse (fatique,
suicides, névroses) en passant par les conduites collectives d’évasion (dogue, hippies, non-
violence). Tous ces aspects caractéristiques de l’“affluent society” ou de la “permissive
society” posent, chacun à sa façon, le problème d’un déséquilibre fondamental. »
— Jean Baudrillard, La Société de consommation (1970), éd. Gallimard, coll. « Folio
essais », 2019 (ISBN 9782070323494), p. 280
« [...] la Nature n’est jamais si exaltée que depuis qu’elle est partout
détruite [...]. »
— Jean Baudrillard, La Société de consommation (1970), éd. Gallimard, coll. « Folio
essais », 2019 (ISBN 9782070323494), p. 152
HILLAIRE BELLOC
« Ainsi vont les choses. Nous touchons, enfin, aux ultimes conséquences de la catastrophe de jadis, un État social qui se défait,
et une décomposition morale, un désarroi spirituels tels qu’il n’y a plus de corps politique. Les hommes, de toutes parts,
sentent que poursuivre cette route interminable et sans cesse assombrie, c’est accroître une dette inexpiable. Toute
apparence de solution recule devant nous ; nos diverses formes de connaissance vont divergeant de plus en plus. L’Autorité, le
principe même de la vie, perd son sens, et ce majestueux édifice de notre civilisation, dont nous sommes les héritiers, qui est
commis à notre garde, chancelle et menace de crouler. Déjà se dessinent les lézardes. D’un instant à l’autre, il peut
s’effondrer. Et nos yeux verront peut-être sa ruine. Ruine soudaine, mais ruine, surtout, définitive.
En cet instant crucial, la vérité historique nous reste ; cette demeure européenne, la demeure de nos pères, élevée sur les
nobles fondations de l’antiquité classique, ne s’est bâtie, n’existe, n’a de raison d’être et ne subsistera que par l’Église
catholique.
L’Europe retournera à la Foi, ou bien elle périra.
La Foi, c’est l’Europe. Et l’Europe, c’est la Foi. »
— (fr) Hilaire Belloc, L’Europe et la Foi (1920), trad. Maximilien Vox
ALAIN DE BENOIST
« La supériorité des juifs sur les chrétiens, c’est qu’ils ne sont pas judéo-
chrétiens. »
— Alain de Benoist, L’Exil intérieur (2022), éd. Krisis/La Nouvelle Librairie, 2022, p. 228
« Les conservateurs ont le souci du bien commun, les libéraux le seul souci des libertés
individuelles et des droits de l’homme. Aussi longtemps que les premiers s’obstineront à ne
pas voir que le système capitaliste, c’est-à-dire la logique du profit et le système du
marché, est un “fait social total” qui détruit systématiquement tout ce qu’ils veulent
conserver, ils resteront dans l’impasse. »
— Alain de Benoist, Le Nouveau Conservateur, juin 2022
« Le “choc des civilisations” n’est qu’une formule dans laquelle chacun met ce qu’il veut. La
principale faiblesse des explications “culturalistes” des conflits est de faire
l’impasse sur les logiques politiques qui conduisent à ces conflits, et aussi de
faire oublier que l’immense majorité des conflits ont toujours eu lieu (et continuent d’avoir
lieu) au sein d’une même civilisation. »
— « Alain de Benoist : Djihadisme et choc des civilisations ? Une formule fourre-tout »,
Alain de Benoist, Metamag, 15 avril 2016 (lire en ligne)
« L’extrémisme consiste à pousser jusqu’à l’absurde même les idées les plus justes... il est
réducteur, simpliste, borné. [...] La radicalité est tout autre chose. Elle implique de chercher
toujours à comprendre plus loin, en remontant à la racine (radix) [...]. Être radical, ce n’est
pas seulement refuser le compromis, c’est s’intéresser aux causes lointaines [...]. La
recherche des principes premiers, la méditation sur les choses ultimes font partie de la
radicalité. Ce qui exige d’être intellectuellement structuré. »
— Alain de Benoist, Mémoires vives (2012), éd. Fallois, 2012, p. 87
L’ennemi principal n’est pas « celui qu’on déteste le plus, celui dont on se sent plus
éloigné [...], l’ennemi principal est tout simplement celui qui dispose des
moyens les plus considérables pour nous combattre et nous contraindre à sa
volonté, c’est-à-dire celui qui est le plus puissant. De ce point de vue les choses
sont claires : l’ennemi principal, sur le plan politique et géopolitique, ce sont les États-Unis
d’Amérique. »
— « L’Amérique qu’on aime », Alain de Benoist, Éléments, avril 2005
« La publicité n’est pas seulement le vecteur d’une incitation à l’achat. Globalement, elle
sert avant tout à entretenir l’idée que le bonheur, raison d’être de la présence au monde, se
ramène ou se confond avec la consommation. Elle ne vise pas tant à valoriser un produit
particulier qu’à valoriser l’acte d’achat dans sa généralité, c’est-à-dire le système des
produits. La publicité incarne le langage de la marchandise, qui est en passe de
s’instaurer comme le paradigme de tous les langages sociaux. »
— Alain de Benoist, Critiques-Théoriques (2003), éd. L’Âge d’Homme, 2003 (ISBN
9782825117590), p. 130
« La vérité est que l’Occident n’en finit pas de vouloir dominer le monde en imposant des
idées, des techniques, des produits ou des comportements qu’il présente invariablement
comme “universels”, et donc intrinsèquement bons pour tous, avec comme conséquence
inéluctable de faire apparaître comme “archaïques” ou inférieurs tous les autres modes de
vie, tous les autres systèmes de valeurs. Dans le passé, de semblables entreprises de
domination ont été menées au nom de la “vraie foi”, de la “civilisation”, du “progrès” ou du
“développement”. Aujourd’hui, la globalisation occidentalo-libérale diffuse comme modèle
une philosophie de la vie qui donne la priorité absolue au plaisir matériel, à la logique du
profit et à la loi de l’argent. Son point d’aboutissement est la transformation du monde en
parc d’attractions, en supermarché du divertissement ; son mot d’ordre : vivre, c’est
consommer. Hannah Arendt avait bien observé que tout régime totalitaire a besoin de
s’inventer un “ennemi métaphysique”. Le schéma “Occident vs. ce qui n’est pas l’Occident
(ou s’avère non occidentalisable)” est une simple reformulation de la rhétorique de la
guerre froide. Parler en termes d’ennemis quand il s’agit de cultures ou de peuples, c’est
déjà s’engager dans la logique de la croisade néocoloniale. Derrière l’usage abusif fait
actuellement du concept de “choc des civilisations”, on fit sans peine un programme
d’hégémonie occidentale à peine camouflé.
La montée de l’identitarisme convulsif et de la violence terroriste ne sont pas tant le fait
d’une culture particulière que le résultat de la dissolution (ou d’une menace de dissolution)
de toutes les cultures. Le moyen le plus sûr d’enrayer l’hyperterrorisme serait de faire en
sorte que la globalisation cesse d’apparaître pour ce qu’elle est actuellement, à savoir
l’imposition unilatérale d’un mode de vie particulier, d’un modèle allogène et unique de
“civilisation” ou de “développement” qui contredit les identités culturelles du reste du
monde. Jacques Chirac, généralement moins bien inspiré, n’a pas eu tort d’affirmer le 15
octobre 2001 devant l’Unesco que l’Occident doit cesser d’imposer au monde entier sa
culture “essentiellement matérialiste” et “vécue comme agressive”.
Une seule puissance ne peut pas prétendre gérer à elle seule toute la planète. L’Occident
n’est plus depuis longtemps une notion de civilisation — ce n’est plus qu’un
indicateur économique — et il appartient plus que jamais aux Européens qui, au lendemain
du 11 septembre, ont une fois de plus démontré leur absence totale de volonté politique
indépendante, non seulement de ne pas se laisser entraîner dans des guerres dont ils ne
contrôlent ni les modalités ni les objectifs, mais encore de dire clairement que le modèle
“occidental” de civilisation n’est pas nécessairement le leur — et n’est en tout cas pas
exclusif d’autres modèles. Il leur appartient d’œuvrer à une nouvelle multipolarisation des
rapports internationaux, et de ne pas se laisser enfermer dans l’alternative “Djihad ou
McWorld”, c’est-à-dire de refuser la Djihad sans pour autant devenir les instruments de
McWorld.
Il existe aujourd’hui un discours détestable qui consiste à faire croire que ceux
qui contestent le modèle occidental ne peuvent être que des esprits rétrogrades
ou des fous dangereux dont le fanatique Ben Laden, arrivé à point pour les besoins de la
démonstration, serait en quelque sorte la figure archétypique. Ce discours se sert du
terrorisme islamiste comme d’un commode repoussoir, avec comme objectif de relégitimer
dans l’opinion un système générateur d’inégalités, de frustrations et de
désespoir. L’ennemi principal reste aujourd’hui plus que jamais le
déchaînement planétaire de la logique du capital et la marchandisation
intégrale des rapports sociaux. »
— « C’est le 11 septembre 2001 que le XXe siècle s’est terminé », Alain de
Benoist, Éléments, nº 103, décembre 2001
« Le libéralisme naissant, à partir du XVIIIe siècle, a donné lieu à une “critique de droite”,
qui le rappelait à la réalité de la nature humaine, et à une “critique de gauche”, qui le
condamnait au nom des pauvres et des humiliés. Le drame est que ces deux critiques se
sont disjointes — et de façon telle que chacune d’elles, pour triompher de l’autre, a fini par
s’allier à ce qui aurait dû rester leur ennemi commun. J’aurai toute ma vie aspiré à ce que
ces deux critiques n’en fassent qu’une. »
— Alain de Benoist, Dernière Année. Notes pour conclure le siècle (1999), éd. L’Âge
d’Homme, 2001, p. 278
« L’universel, en effet, ne flotte pas dans les airs ; il suppose un énonciateur, qui par là
même le dévoile comme sa chose. Le discours à prétention universelle n’est qu’un discours
qui a la prétention terroriste d’être reconnu comme tel. Cet énonciateur porte un
nom : c’est l’occidentalisme américanocentré. »
— Alain de Benoist, Europe, Tiers monde, même combat (1986), éd. Robert Laffont,
1986 (ISBN 9782221042304), p. 84-85
« [...] le choix doit se porter sur le camp qui, dans la pratique, est objectivement le moins
favorable à l’universalisme, à l’égalitarisme et au cosmopolitisme. [...]
L’ennemi principal, pour nous, sera donc le libéralisme bourgeois et
l’“Occident” atlantico-américain, dont la sociale-démocratie européenne n’est
que l’un des plus dangereux succédanés. »
— Alain de Benoist, Orientations pour des années décisives (1982), éd. Le Labyrinthe,
1982, p. 35
—
NICOLAS BERDIAEV
« Les Russes ignorent le scepticisme raffiné des Français, ils sont croyants, même s’ils
professent un communisme matérialiste et ceux qui non seulement n’ont plus la foi mais
persécutent l’Église orthodoxe, gardent dans le fond du cœur l’empreinte de l’orthodoxie. »
— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 259
« C’est également au nom de la personne que Herzen s’élèvera contre l’esprit petit-
bourgeois occidental. Il vit en Europe l’affaiblissement et, en fin de compte, la mort de
l’individualité. Le chevalier du Moyen Âge a été remplacé par le boutiquier. Aussi est-ce
dans le moujik russe, dans le touloupe gris, qu’il cherchera le salut contre
l’embourgeoisement général. Ce moujik russe a beau être esclave, il a plus de personnalité
que le bourgeois européen. »
— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 68
« Le caractère complexe et contradictoire ; de l’âme russe peut être relié au fait que deux
courants mondiaux s’y heurtent et s’y conjuguent : l’Orient et l’Occident ; le Russe n’est ni
un pur Européen ni un pur Asiatique. La Russie, c’est tout un continent, un énorme
Occidento-Orient, elle relie deux mondes. Et dans l’âme russe, depuis toujours, se sont
affrontés ces deux éléments : l’occidental et l’oriental.' »
— Nicolas Berdiaev, L’Idée russe (1946), trad. Hélène Arjakovsky, éd. Mame, 1970, p. 10
« L’idée d’une société sans classes, basée sur le travail, dans laquelle chacun
travaille pour les autres et pour tous en vue d’un but élevé, n’implique pas la
négation de Dieu ; elle serait au contraire plus conforme au christianisme que
celle sur laquelle est fondée la société capitaliste bourgeoise. »
— Nicolas Berdiaev, Les Sources et le sens du communisme russe (1936), trad. Lucienne
Julien Cain, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1966, p. 307
« [...] au lieu de la Troisième Rome, la Russie va réaliser la Troisième Internationale [...]. Car
ce que Marx ni les marxistes d’Occident n’auraient pu prévoir est arrivé : c’est-à-dire
l’identification des deux messianismes, le messianisme du prolétariat et le messianisme du
peuple russe. [...] Cette conscience messianique, ouvrière et prolétarienne se comporte vis-
à-vis de l’Occident presque de la même manière que se comportaient les slavophiles.
Occident pour lui se confond presque avec bourgeoisie et capitalisme. »
— Nicolas Berdiaev, Les Sources et le sens du communisme russe (1936), trad. Lucienne
Julien Cain, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1966, p. 286-287
« Aucun écrivain russe n’a pu consentir à ce que la Russie suive le chemin tracé
par l’Occident, le chemin bourgeois, rationaliste, libéral et humanitaire. »
— Nicolas Berdiaev, Les Sources et le sens du communisme russe (1936), trad. Lucienne
Julien Cain, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1966, p. 173
« [...] l’actualisme technique détruit l’éternité et entrave de plus en plus l’élan humain vers
elle. L’homme manque de temps pour l’éternité. »
— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions,
2019 (ISBN 9791096562145), p. 48
« Il est pour ainsi dire impossible de conserver dans notre monde moderne une forme de
religion déterminée par des influences héréditaires, nationales, familiales et sociales. La vie
religieuse devient plus personnelle [...]. »
— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions,
2019 (ISBN 9791096562145), p. 47
« [...] cette nouvelle forme d’existence que présente la vie des masses organisées, cette
technisation, détruit la beauté de l’ancienne culture, l’individualisation, l’originalité ; tout y
devient uniformément collectif, toutes choses sont fabriquées sur un gabarit unique
perdant ainsi l’empreinte de la personnalité. C’est l’ère de la production en série, de la
production anonyme. Et non seulement le côté extérieur et plastique de la vie se trouve
dépourvu d’individualité, mais la vie intérieure et émotionnelle subit le même sort. »
— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions,
2019 (ISBN 9791096562145), p. 38-39
« [...] c’est la première foi que l’homme devint seigneur et maître de la terre, voire même de
l’univers entier. Dès lors son attitude à l’égard du temps et de l’espace se transforme
radicalement. De peur d’être écrasé par eux, l’homme se blottissait jadis contre sa mère
— la terre ; mais il ne craint plus de s’en éloigner maintenant qu’il commence à dominer
ces éléments. Si le fait qu’il peut se passer de la sollicitude et de la production maternelles
témoigne de sa maturité, il signifie aussi, pour lui, une lutte plus rude à soutenir, —
contrepartie des bienfaits prodigués par la technique. Car la machine présente toujours
deux traits divergents : d’une part elle assure les commodités et le confort, d’autre part elle
exige une austérité et une témérité. »
— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions,
2019 (ISBN 9791096562145), p. 37
« Pour le grec antique et l’homme du Moyen âge il existait un cosmos immuable, un
système hiérarchique, un “ordo” éternel ; il existait pour Aristote comme pour saint Thomas
d’Aquin. La notion même de l’ordre immuable de la nature était liée au principe de la
téléologie objective. Et voici que la technique, sous la forme où elle triomphe dès la fin du
XVIIIe siècle, détruit la foi en cet ordre éternel, et cela, d’une manière infiniment plus
brutale et plus profonde que l’évolutionnisme. »
— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions,
2019 (ISBN 9791096562145), p. 25-26
« [...] la seule foi que l’homme de la civilisation moderne conserve est celle dont
il entoure la technique, sa puissance et son progrès infini. »
— Nicolas Berdiaev, L’Homme et la Machine (1933), trad. J.P. et H.M., éd. R&N Éditions,
2019 (ISBN 9791096562145), p. 17
« L’entreprise de l’histoire moderne n’a pas réussi, elle n’a pas glorifié l’homme comme elle
le voulait le glorifier. Les promesses de l’humanisme ne se sont pas réalisées. L’homme est
infiniment las et prêt à s’en remettre à toutes sortes de collectivités dans lesquelles
l’individualité humaine disparaît définitivement. L’homme ne peut pas supporter sa
déréliction, sa solitude. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 17-18
« Le catholicisme n’a pas seulement conduit l’homme au ciel, il a créé la beauté et la gloire
ici-bas également. En cela est le sublime mystère du catholicisme : son aspiration au ciel et
à la vie éternelle créé la beauté et fonde la puissance dans la vie terrestre temporaire.
L’ascétisme du monde catholique médiéval a été une bonne préparation pour la création, il
a conservé et concentré les forces créatrices de l’homme. L’ascèse médiévale a été une
école sublime pour l’homme, elle a donné une trempe spirituelle sublime. Et l’homme
européen de l’histoire moderne a vécu de ce qu’il avait spirituellement acquis à cette école,
il est redevable de tout au christianisme. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 24
« Mais au XIXe siècle s’est produite en Europe une des plus terribles révolutions qu’ait
jamais subies l’humanité dans toute son histoire. La machine est entrée en vainqueur
dans la vie humaine et a altéré tout son rythme organique. La machine a
détruit toute la structure séculaire de la vie humaine, structure qui était
organiquement liée à la vie de la nature. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 33
« Il faut à présent sauver la liberté de l’esprit humain. Devant les peuples chrétiens se
dresse à nouveau la question de savoir s’ils prennent au sérieux leur christianisme et s’ils
veulent tendre leur volonté vers sa réalisation. Si les peuples chrétiens n’opèrent pas la
tension la plus extrême de l'esprit pour réaliser la voie chrétienne, s’ils ne manifestent pas
l’activité la plus extrême, alors c’est le communisme athée qui triomphera dans le monde.
L’esprit libre doit, lui, agir indépendamment du fait de savoir quelles forces prédominent et
triomphent. Le christianisme revient à l’état d’avant Constantin et doit à
nouveau conquérir le monde. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 110-111
« La femme est plus liée avec l’âme du monde, avec les forces élémentaires
premières, et c’est par la femme que l’homme communie avec elles. La culture
masculine est trop rationaliste, elle s’est trop éloignée des mystères immédiats
de la vie cosmique et elle y revient à travers la femme. Les femmes jouent un
grand rôle dans le réveil religieux de notre temps. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 80
« Il est spirituellement faux de considérer que la source du mal soit en dehors de moi, que
je sois moi-même le réceptacle du bien. Un fanatisme haineux et méchant naît sur un tel
terrain. Accuser de tous les maux les juifs, les francs-maçons, l’intelligentsia, est une
perversion aussi grande que d’accuser de tous les maux la bourgeoisie, la noblesse,
l’ancien pouvoir. Non, la source du mal est aussi en moi-même et je dois donc en assumer
la faute et la responsabilité. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 86
« Quand tout est ressenti comme périmé et épuisé, quand le terrain s’ameublit, comme
cela se passe à notre époque, quand il n’y a déjà plus d’espoirs et d’illusions, quand tout
est démythifié et démasqué, alors le terrain est prêt pour un mouvement religieux dans le
monde. Il en a toujours été ainsi. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 133
« Dans l’humanisme il y eut trahison de ce qui était le plus sacré et à cause de cette
trahison l’homme paye par son histoire, il subit déception après déception. Aujourd’hui
commence le processus de barbarisation de la culture européenne. Après la décadence
raffinée, c’est l’invasion de la barbarie qui doit se produire sur les sommets de la culture
européenne. Sous ce rapport, la guerre mondiale aura une signification fatidique pour le
destin de l’Europe. L’Europe cultivée et humaniste s’est mise à nu et a perdu toute défense
contre l’invasion de la barbarie extérieure et intérieure. On pouvait entendre depuis
longtemps déjà les bruits sourds de la barbarie souterraine. Mais la société bourgeoise
européenne décadente n’a rien fait pour sauver les vieilles et éternelles valeurs sacrées de
l’Europe, elle a vécu avec insouciance, en comptant sur une prospérité infinie. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 43
« Le surhomme se substitue chez Nietzsche au Dieu perdu. Il ne peut pas et ne veut pas se
maintenir dans l’humain, dans l’uniquement humain. Dans l’individualisme surhumain de
Nietzsche l’image de l’homme périt. De la même façon périt l’image de l’homme dans le
collectivisme surhumain de Marx. Marx est spirituellement sorti de la religion humaniste de
Feuerbach. Chez lui aussi, mais de façon différente, l’humanisme passe à son contraire, il se
dénature en antihumanisme. Marx sent l’individualité humaine comme l’apanage du vieux
monde bourgeois, il exige son dépassement dans le collectivisme. La morale de Marx ne
reconnaît pas la valeur de la personne humaine, lui aussi rompt avec l’esprit d’humanité, lui
aussi prêche la dureté envers l’homme au nom de la collectivité, au nom
du Zukunftstaat socialiste à venir. La collectivité se substitue chez Marx au Dieu perdu. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 31
« L’homme sans Dieu cesse d’être homme : en cela est le sens religieux de la
dialectique intérieure de l’histoire moderne, de l’histoire de l’épanouissement et de la mort
des illusions humanistes. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 41
« Mais aucun tourbillon, aucun déchaînement chaotique d’instincts n’a la force d’éteindre
la lumière de la révélation chrétienne de Dieu, de l’homme, et du Dieu-Homme. Les portes
de l’enfer ne la vaincront pas. C’est pourquoi la source de la lumière restera, quelque fortes
que puissent être les ténèbres qui l’étreignent. Et nous devons nous sentir non seulement
les derniers Romains, fidèles à la Vérité et à la beauté anciennes et éternelles, mais aussi
tournés vers le jour créateur invisible à venir, quand se lèvera le soleil de la nouvelle
Renaissance chrétienne. Peut-être aura-t-elle lieu dans les catacombes et s’accomplira-t-
elle pour quelques-uns seulement, peut-être n’aura-t-elle lieu qu’à la fin des temps. Il ne
nous est pas donné de le savoir. Mais nous savons de façon sûre que la lumière éternelle et
la beauté éternelle ne peuvent être détruites par quelque ténèbre et quelque chaos que ce
soit. La victoire de la quantité sur la qualité, de ce monde limité sur l’autre monde infini est
toujours fantomatique. C’est pourquoi c’est sans crainte et sans abattement que
nous devons sortir du jour de l’histoire moderne pour entrer dans la nuit du
Moyen Âge. Que s’obscurcisse la lumière trompeuse et mensongère ! »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 46
« Mais les formes de nationalisme auxquelles sont arrivés les peuples aux XIXe et XXe
siècles et qui ont engendré la guerre mondiale, signifient la désagrégation de l’humanité,
la séparation de toute unité spirituelle, le retour après le monothéisme chrétien au
polythéisme païen. Les nationalismes français, allemand, anglais et italien de notre temps
sont tout à fait païens, profondément antichrétiens et antireligieux. Le nationalisme français
de la Troisième République est pour une part importante le produit de l’athéisme. La foi
dans le Dieu Vivant s’est éteinte et l’on a commencé à croire en un faux dieu, en la nation,
comme idole, de même que d’autres ont commencé à croire en la plus pernicieuse des
idoles, à l’internationalisme. »
— Nicolas Berdiaev, Le Nouveau Moyen Âge (1924), trad. Jean-Claude Marcadé et Sylviane
Siger, éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 1986, p. 68
« Il serait possible d’établir deux structures, deux types d’âmes, l’un étant
disposé à accueillir l’esprit de Tolstoï, l’autre, celui de Dostoïevski. »
— Nicolas Berdiaev, L’Esprit de Dostoïevski (1923), trad. Alexis Nerville, éd. Stock, 1974,
p. 273
« [...] la destruction de tout hiérarchisme est aussi celle de la personne, car celle-ci est liée à
celui-là. Seule la hiérarchie permet des individualités de qualités diverses. »
— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1918-1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd.
L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 28
« Les expériences d’un paradis sur la terre ont toujours abouti à un enfer [...]. »
— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1918-1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd.
L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 30
« Votre unité abstraite et négative de l’humanité anéantit tous les degrés hiérarchiques de
celle-ci pour en faire une abstraction. Or, dans l’unité concrète de tous, il ne peut y avoir de
contradiction entre la nation et l’humanité. Toutes les nations s’y affirment et y atteignent
leur puissance et leur épanouissement. Dans votre unité abstraite de l’humanité, en
revanche, l’être des nations est supprimé ; il n’y a pas plus d’humanité dans et par les
nations qu’il n’y a de nation dans et par l’humanité. Celle-ci devient une abstraction de
tous les niveaux de l’être individuel concret. Dans l’universalité, la nation et l’humanité sont
indissolublement membres de la hiérarchie cosmique où l’une suppose l’autre. Dans
l’internationalisme, elles s’excluent mutuellement pour disparaître toutes deux en fin de
compte. La notion abstraite de l’homme ou d’une classe vient remplacer la réalité et une
humanité abstraite, détachée de tout ce qui est organique, vivant et individuel, est
substituée à l’humanité concrète. L’internationalisme est opposé non seulement au
nationalisme, mais encore à l’universalité, à l’unité positive de tous ; il est mû par l’esprit du
néant, qui détruit le réel en imaginant des fantômes. »
— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1918-1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd.
L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 79
« L’histoire n’est pas encore terminée. Son dynamisme ne faiblit point, il se renforce. Le
monde ne se rapproche pas de la prospérité ici-bas, du paradis sur terre, de l’idylle de la
paix éternelle. Tout nous force à penser que le monde va vers un conflit terrible, vers des
heurts toujours recommencés des forces historiques, vers de nouvelles épreuves de la
virilité de l’esprit, de sa trempe chevaleresque. La surface de la planète n’est pas encore
organisée. Bien des problèmes historiques attendent leur solution. Il est impossible de
résoudre pacifiquement la question de l’Orient. Et vous, vous voudriez rendre les peuples
intérieurement impuissants à la veille d’une lutte sans merci, alors que les forces de leur
esprit vont être soumises à de terribles épreuves. La négation démocratique et socialiste de
la guerre est un désarmement très astucieux des peuples chrétiens et des vieilles armées,
afin de former la nouvelle armées internationale du royaume terrestre. L’esprit socialiste de
l’internationalisme supplante l’esprit chrétien d’universalité. Le christianisme désire lui aussi
la paix dans le monde entier et la fraternité des peuples. Il veut néanmoins que ce soit une
paix authentique, intérieure, et une fraternité véritable. Dans son monde et au sein de sa
fraternité véritable, le mal sera vaincu. Dans les vôtres, le mal reste à jamais invaincu. Votre
pacifisme est une négation du mal, la volonté de l’ignorer et de s’en accommoder comme
s’il n’existait pas. Aussi n’atteindrez-vous jamais ni la fraternité mondiale ni la paix éternelle.
Et votre pacifisme détruit définitivement les principes chevaleresques, ceux de la lutte
active et virile contre le mal. »
— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1918-1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd.
L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 195
« Il est monstrueusement injuste et cruel d’exiger des conditions égales pour tous les
hommes. »
— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1918-1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd.
L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 169
« Une démocratie pure, abstraite et autocrate, est la tyrannie la plus terrible ; elle tue
l’homme. Le pouvoir illimité de tous est plus effrayant que le pouvoir despotique d’un
seul. »
— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1918-1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd.
L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 142
« Ne vous laissez pas tromper par les apparences, ne cédez pas à des illusions trop
indigentes. Depuis la création du monde, c’est toujours la minorité qui a gouverné, qui
gouverne et qui gouvernera. Cela est vrai pour toutes les formes et tous les genres de
gouvernement, pour la monarchie et pour la démocratie, pour les époques réactionnaires
et pour les révolutionnaires. On ne saurait échapper au gouvernement de la minorité, et
vos efforts démocratiques pour créer le règne de la majorité représentant en fait une
pauvre autosuggestion. [...] En réalité, il n’y a que deux types de pouvoir : l’aristocratie et
l’ochlocratie, le gouvernement des meilleurs ou celui des pires. »
— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1918-1923), trad. Anne et Constantin Andronikof, éd.
L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 104-105
« Le terme libéralisme a depuis longtemps perdu tout son charme, quoiqu’il provienne de
l’admirable mot : liberté. Celle-ci n’est pas quelque chose qui inspire les masses. Elles n’y
font pas confiance, elles sont incapables d’y rattacher leurs intérêts immédiats. En vérité, il
y a dans la liberté quelque chose d’aristocratique plutôt que de démocratique. C’est une
valeur plus précieuse pour la minorité que pour la majorité, car elle s’adresse avant tout à
la personne, à l’individualité. Le libéralisme n’a jamais triomphé dans les révolutions, ni
dans les sociales, ni dans les politiques parce que dans toutes révolution ce sont les masses
qui se soulèvent. Or elles sont toujours mues par la passion de l’égalité, non par celle de la
liberté. C’est le principe de l’égalité et non celui de la liberté qui met en branle les grandes
révolutions. L’esprit libéral, par nature, n’est pas révolutionnaire. Le libéralisme est un
sentiment et une conception du monde propres à la couche cultivé de la société. Il n’y a
pas en lui d’éléments tumultueux, de feu, qui embrase le cœur. Il contient de la mesure et
trop de forme. La vérité du libéralisme est formelle. Elle ne dit rien de positif ni de négatif
quant au contenu de la vie, elle voudrait en garantir un à la personne, quel qu’il soit. L’idée
libérale n’est pas capable de prendre l’apparence d’une religion et ne suscite pas à son
propre égard des sentiments de cet ordre. C’est là sa faiblesse mais aussi son aspect
positif. »
— Nicolas Berdiaev, De l’inégalité (1918-1923), trad. Anne et Constantin Andronikof,
éd. L’Âge d’Homme, coll. « Sophia », 2008 (ISBN 9782825138601), p. 119
—
INGMAR BERGMAN
« Le cinéma en tant que rêve, le cinéma en tant que musique. Aucun art ne
traverse, comme le cinéma, directement notre conscience diurne pour toucher
à nos sentiments, au fond de la chambre crépusculaire de notre âme. »
— Ingmar Bergman, Laterna Magica (1987), trad. Carl Gustaf Bjurström et Lucie Albertini,
éd. Gallimard, coll. « Folio », 2001 (ISBN 9782070383382), p. 103
« Quel est l’objet de l’art ? Si la réalité venait frapper directement nos sens et
notre conscience, si nous pouvions entrer en communication immédiate avec
les choses et avec nous-mêmes, je crois bien que l’art serait inutile, ou plutôt
que nous serions tous artistes, car notre âme vibrerait alors continuellement à
l’unisson de la nature. »
— Henri Bergson, Le Rire (1900), éd. Presses universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2002 (ISBN 9782130530893), chapitre III, p. 115
—
GEOREGS BERNANOS
« L’heure viendra peut-être où il sera de nouveau digne de défendre son âme contre l’État-
robot. Mais l’État-Robot ne se préoccupe même plus de l’âme, il n’en veut maintenant qu’à
la peau, il faut que l’homme sauve sa peau. »
— Georges Bernanos, « Fin de la civilisation humaine ? » (18 juin 1947), dans Scandale de
la vérité, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 1292
« [...] l’État technique n’aura demain qu’un seul ennemi : “l’homme qui ne fait
pas comme tout le monde” — ou encore : “l’homme qui a du temps à perdre”
— ou plus simplement si vous voulez : “l’homme qui croit à autre chose qu’à la
Technique”. »
— Georges Bernanos, « La France contre les robots » (1947), dans Scandale de la vérité,
éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 1099
« J’affirme une fois de plus que l’avilissement de l’homme se marque à ce signe que les
idées ne sont plus pour lui que des formules abstraites et conventionnelles, une espèce
d’algèbre, comme si le Verbe ne se faisait plus chair, comme si l’Humanité reprenait, en
sens inverse, le chemin de l’Incarnation. »
— Georges Bernanos, « La France contre les robots » (1947), dans Scandale de la vérité,
éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 1087
« Une civilisation ne s’écroule pas comme un édifice ; on dirait beaucoup plus exactement
qu’elle se vide peu à peu de sa substance, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus que l’écorce. On
pourrait dire plus exactement encore qu’une civilisation disparaît avec l’espèce d’homme, le
type d’humanité, sorti d’elle. L’homme de notre civilisation de la civilisation française — qui
fut l’expression la plus vive et la plus nuancée, la plus hellénique, de la civilisation
européenne, a disparu pratiquement de la scène de l’Histoire [...]. »
— Georges Bernanos, « La France contre les robots » (1947), dans Scandale de la vérité,
éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 1045
« Un idiot devrait comprendre que le suffrage universel doit devenir rapidement, sous un
régime capitaliste, un trust comme les autres, et, dans un Régime socialiste à tendances
totalitaires, un instrument de puissance au service de l’État — ce qu’il était d’ailleurs en
Allemagne. Car c’est le plébiscite qui a fait Hitler, Hitler est sorti des entrailles du peuple,
les peuples aussi font des monstres, il n’y a même qu’eux, sans doute, qui soient capables
d’en faire. Me permettra-t-on une remarque à ce sujet, même si elle risque de n’être
comprise par personne ? L’égalité prolétarise les peuples, les peuples deviennent des
masses, et les masses donneront toujours des tyrans, car le tyran est toujours l’expression
de la masse, sa sublimation. »
— Georges Bernanos, « La France dans le monde de demain » (Novembre 1944), dans La
Révolte de l’esprit : Écrits de combat (1938-1945), éd. Les Belles Lettres, 2019 (ISBN
9782251446776), p. 372-373
« Certes, nous sommes encore tenus à de grands ménagements envers ce qu’on appelle
l’ordre social, reprit-il sur un ton de confidence, mais que pouvons-nous désormais en sa
faveur, je vous le demande ? Nous ne sommes pas des gendarmes, et notre rôle n’est que
de justifier la misère aussi longtemps que la misère peut l’être. Aucune ne nous fait peur et
nous avons remède à toutes, une seule exceptée, la vôtre. Je veux dire celle que vous avez
inventée. Oui, monsieur, libre à vous d’instaurer un ordre d’où Dieu soit exclu, mais vous
avez ainsi dénoncé le pacte. Oh ! sans doute l’antique alliance ne sera pas rompue en un
jour, l’Église tient à la société, même déchue, par trop de liens ! L’heure viendra cependant
où, dans un monde organisé pour le désespoir, prêcher l’espérance équivaudra tout juste à
jeter un charbon enflammé au milieu d’un baril de poudre. Alors... »
— Georges Bernanos, « Monsieur Ouine (1943) », dans Œuvres romanesques, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1961, p. 1510
« Pour reprendre l’expression qui vous a surpris tout à l’heure, on ne peut nier que Dieu se
soit fait petit depuis longtemps, très petit. D’où l’on conclut qu’il se fera petit demain
comme hier, plus petit, de plus en plus petit. Rien, cependant, ne nous oblige à le croire. »
— Georges Bernanos, « Monsieur Ouine » (1943), dans Œuvres romanesques, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1961, p. 1508
« L’heure vient où sur les ruines de ce qui reste encore de l’ancien ordre chrétien, le nouvel
ordre va naître qui sera réellement l’ordre du monde, l’ordre du Prince de ce Monde, du
prince dont le royaume est de ce Monde. Alors, sous la dure loi de la nécessité plus forte
que toute illusion, l’orgueil de l’homme d’Église, entretenu si longtemps par de simples
conventions survivant aux croyances, aura perdu jusqu’à son objet. Et le pas des mendiants
fera de nouveau trembler la terre. »
— Georges Bernanos, « Monsieur Ouine » (1943), dans Œuvres romanesques, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1961, p. 1494-1495
« La haine du prêtre est un des sentiments les plus profonds de l’homme, il en est aussi
l’un des moins connus. Qu’il soit aussi vieux que l’espèce elle-même, nul n’en doute, mais
notre âge l’a élevé à un degré presque prodigieux de raffinement et d’excellence. C’est que
l’abaissement ou la disparition des autres puissances a fait du prêtre, pourtant si
étroitement mêlé en apparence à la vie sociale, un être plus particulier, plus inclassable
qu’aucun des vieillards magiques que l’ancien monde tenait enfermés au fond des temples,
ainsi que des animaux sacrés, dans la seule familiarité des dieux. »
— Georges Bernanos, « Monsieur Ouine » (1943), dans Œuvres romanesques, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1961, p. 1494
« L’enfance est le sel de la terre. Qu’elle s’affadisse, et le monde ne sera bientôt que
pourriture et gangrène. Pourriture et gangrène, reprit-il d’une voix haute et forte. »
— Georges Bernanos, « Monsieur Ouine » (1943), dans Œuvres romanesques, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1961, p. 1492
« Le diable, qui peut tant de choses, n’arrivera pas à fonder son église, une église qui mette
en commun les mérites de l’enfer, qui mette en commun le péché. D’ici la fin du monde, il
faudra que le pécheur pèche seul, toujours seul – nous pécherons seuls, comme on meurt.
Le diable, voyez-vous, c’est l’ami qui ne reste jamais jusqu’au bout... »
— Georges Bernanos, « Monsieur Ouine » (1943), dans Œuvres romanesques, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1961, p. 1490
« Le monde moderne est là devant nous comme une immense machinerie, et,
sachant ce que celle-ci a gaspillé d’argent et de travail, nous calculons ce qu’il
en coûterait maintenant pour la démolir... »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 498
« Nous ne demandons pas la justice absolue, mais une organisation de l’injustice assez
humaine pour que, toujours écrasante pour la chair et le sang, elle ne soit pas intolérable
aux consciences. Nous ne demandons pas l’égalité, mais une organisation des inégalités
telle que, s’opposant les unes aux autres, elles se compensent dans la mesure du
possible. »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 471-472
« [...] les élites européennes sont menacées de payer très cher le dessein qu’elles
avaient formé de lier à la cause de l’Église celle de la Bourgeoisie. »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 461
« Les peuples ne veulent plus d’un matérialisme camouflé, d’un matérialisme qui, pour se
définir et se justifier, exploite le vocabulaire du Moral et du Spirituel, avec la complicité
d’un grand nombre de chrétiens. Ils préfèrent la misère et la mort à la médiocrité insidieuse
qui recouvre peu à peu notre civilisation comme d’une moisissure, à la médiocrité
polytechnique, à l’affreux néant du confort. »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 459-460
« Les élites ont gardé les titres et perdu la tradition. Les peuples ont la tradition, mais pas
de titres. »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 459
« Méfiez-vous de l’Europe, Américains ! Vous êtes sans doute un peu trop portés à croire
que, au terme de cet horrible cauchemar, la vieille Europe aura épuisé toutes ses réserves
spirituelles, et que vous n’aurez plus qu’à y écouler votre propre stock comme vous la
réapprovisionnerez généreusement en blé ou en pommes de terre. [...] Méfiez-vous de
l’Europe, hommes d’Amérique ! Vous êtes jeunes, elle est peut-être plus jeune
que vous [...]. »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 458-459
« Les dictateurs ne se présentent plus à leur peuple, le fouet au poing ; ils lui
disent : “Nous n’en voulons à rien qui te soit réellement utile, nous n’en
voulons qu’à ton âme. Consens à nous, comme tu consens aux autres nécessités
de la vie, ne discute pas notre droit, laisse-nous juger à ta place du bien et du
mal. Donne-nous ton âme une fois pour toutes, et tu t’apercevras bien vite
qu’il ne t’en a coûté qu’un sacrifice d’amour-propre, qu’elle t’était une charge
au-dessus de tes forces, un luxe ruineux. Renie ton âme et, dispensé ainsi de te
gouverner, nous t’administrerons comme un capital, nous ferons de toi un matériel si
efficace, que rien ne pourra y résister. Les hommes sans conscience, groupés en colonies
comparables à celles des termites, auront facilement raison des autres. La Bête humaine,
industrieuse et sagace, soigneusement sélectionnée, selon les meilleures méthodes, ne fera
qu’une bouchée du pauvre rêveur qu’on appelait autrefois l’homme moral, assez sot pour
payer d’épreuves sans nombre la vaine gloire de se distinguer des animaux par d’autres
qualités qu’une ruse et une cruauté supérieures. Toutes les richesses de la terre
appartiennent d’avance à ceux qui se seront engagés les premiers dans la nouvelle voie,
qui auront les premiers renié leurs âmes.” »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 454-455
« Le diable est le plus grand des logiciens ; il n’y a pas de logique comparable à la logique
de l’Enfer. N’attendez donc aucun secours de la Lettre ; l’Esprit seul peut vous sauver.
Croyants ou incroyants, tout affaiblissement de l’esprit chrétien est une catastrophe pour
chacun de vous. Devant le péril qui nous menace, nous sommes solidaires : nous nous
sauverons ou nous périrons ensemble. Le mot de charité n’a peut-être pas, pour beaucoup
d’entre vous, un sens très précis, n’importe ! Chaque parcelle de la divine charité du Christ
est aujourd’hui plus précieuse à votre sécurité — à votre sécurité, dis-je — que tout le
numéraire enfermé dans les caisses de la Banque Nationale américaine. »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 440-441
« Toute l’histoire militaire française a été faite par les nobles et le peuple. »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 374
« La bourgeoisie a été tout en effet. Elle a détruit notre Monarchie, brisé les
cadres d’une société millénaire, absorbé ou corrompu la petite noblesse
paysanne et militaire dont elle méprisait la pauvreté, sans prévoir qu’elle
portait ainsi un coup fatal, non à quelques braves gens inoffensifs qu’elle
jalousait, mais à la tradition militaire et paysanne qui avait fait la grandeur de
notre nation. Elle s’est emparée de notre ancien domaine, elle l’a hypothéqué au delà de
sa valeur afin de le transformer selon son goût, puis elle a péri de sa propre victoire.
L’actuelle bourgeoisie française n’est plus guère qu’un carrefour où se rencontrent tous les
transfuges du prolétariat, et qui méprisent la classe dont ils sont sortis. »
— Georges Bernanos, « Lettre aux Anglais » (1942), dans Scandale de la vérité, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2019, p. 355
« Que d’hommes qui crurent aussi en avoir fini pour toujours des entreprises
de l’âme, s’éveillèrent entre les bras de leur ange, ayant reçu au seuil de l’enfer
ce don sacré des larmes, ainsi qu’une nouvelle enfance ! »
— Georges Bernanos, « L’Imposture » (1927), dans Œuvres romanesques, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1961, p. 380
—
EDOUARD BERTH
« [...] c’est dans le Travail, substitut de la guerre, et les vertus ouvrières, aussi
hautes que les vertus guerrières, que la nouvelle élite sociale puisera sa force
et sa grandeur. »
— Édouard Berth, Les Derniers aspects du socialisme (1923), éd. Marcel Rivière, 1923,
p. 37
« Ces messieurs, en effet, ne pensent nullement, avec Proudhon, que le guerrier soit l’idéal
de la dignité virile ; tous ces “femmelins”, en raison même de leur féminisme essentiel et de
leur impuissance, détestent a priori ce qu’ils se sentent bien incapables d’avoir ou
d’acquérir : la force, la loyauté, la droiture, le sentiment de l'honneur du soldat, eux les
fourbes et les tortueux, qui préfèrent toujours les voies obliques et les moyens détournés
d’arriver à la puissance, et qui, boursicotiers sur la foire aux Idées, sont comme leurs
compères, les boursicotiers de la Bourse, complètement dénués du sentiment de l’Honneur
et voués éternellement à la Ruse, cette arme des faibles. »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 49
« [...] tout le XVIIIe siècle, ce siècle “spirituel et plat, avec un fond canaille” sera libertin
et déjà pornographique ; c’est le commencement du mercantilisme littéraire ; les
gens de lettres font fortune avec leurs écrits, ils prétendent arriver à
l’indépendance par l’argent, et, soumis à l’opinion, qu’il faut flatter pour
régner, ils écrivent des ordures : la royauté de Voltaire devait aboutir à l’“empire
pornocratique” de Zola ! Bancocratie et pornocratie ont toujours été de pair. »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 51
« Il est étonnant comme les Juifs aiment l’Art, comme ils reniflent avec cette
sensualité particulière à leur race tout ce qui est artistique : Juifs de musique,
Juifs de théâtre, Juifs de restauration gothique et d’almanachs des Galeries Lafayette, ils
sont tous très artistes, très raffinés et très dilettantes : et l’on conçoit qu'un Gohier, en qui
revit toute la rude et mâle franchise d'un Proudhon, leur paraisse un rustre et un
“salaud” ! »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 54
« [...] l’aristocratie véritable, je l’ai déjà dit, n’est nullement constituée par des
qualités purement intellectuelles ; elle est guerrière et héroïque, elle est
traditionnelle, elle est historique ; elle s’appuie sur des réalités charnelles, le
sang, l’hérédité physique, la race : rien de plus anti-intellectuel qu’une
aristocratie digne de ce nom ; et ce qui, historiquement, perd les aristocraties, c’est
précisément lorsque le noble, quittant la Terre pour la Ville et la Cour, et passant du régime
de la guerre à celui du spectacle, devient un intellectuel, un bel-esprit, comme au XVIIIe
siècle ; il se mue alors en un “démocrate” qui, perdant le sens de réalités traditionnelles, se
trouve à la merci de toutes les billevesées et nués idéologiques des sociétés en décadence.
Au surplus, l’aristocratie véritable n’éprouve nullement pour le peuple ce mépris
transcendantal, que nous découvrons toujours chez l’Intellectuel : au contraire, entre le
peuple et l’aristocratie, il y a une véritable confraternité et intelligence réciproques. C’est
lorsque le noble devient un intellectuel et un parasite, que l’on voit se creuser entre lui et le
peuple ce fossé de haine et de mésintelligence qui aboutit aux “aristocrates à la lanterne”
de la Révolution. La démocratie est, au contraire, profondément intellectualiste :
antitraditionnelle, antiphysique, comme dirait Rabelais, antiréaliste, idéaliste échevelée, elle
ne veut connaître que des “esprits purs”, détachés de tout lien historique et naturel,
planant au-dessus du Temps et de l’Espace, perdus dans la contemplation des Idées claire
et distinctes. Et faut-il s’étonner que cette démocratie n’ait rien de populaire ? Qu’y a-t-il,
en effet, de moins accessible au peuple que cet idéalisme transcendantal ? Le peuple,
comme l’aristocratie, est une réalité historique, une réalité charnelle ; ce n’est pas l’Idée
pure qui le constitue, mais le sang, mais des traditions, mais la race, toutes choses
physiques et non intellectuelles. La démocratie intellectualiste moderne, telle que
notre Sorbonne l’incarne avec son rationalisme cartésien et encyclopédiste, est,
comme Proudhon l’avait bien vue, une “aristocratie déguisée”, et, je le répète,
la plus dure, la plus néfaste, la plus ruineuse des aristocraties ; car elle est la
Pédantocratie et le Mandarinat de gens inaptes à la Guerre comme au Travail
et dont le règne ne peut aboutir qu’à la ruine de la Patrie comme de la
Production. »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 58-59
« [...] les Intellectuels, tous ceux qu’on pourrait appeler les bureaucrates de la pensée, et
qui prétendent substituer à la souple et vivante réalité le formalisme raide de règlements
administratifs. »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 63
« [...] nos intellectuels ne comprennent naturellement pas plus la grève que la guerre ;
pacifistes sociaux, comme ils sont pacifistes internationaux, ils rêvent d’arbitrage
obligatoire : pourquoi, en effet, au lieu de combattre, ne pas raisonner, négocier, transiger ?
La grève est une perte de temps, de forces, d’argent : pourquoi tout ce gaspillage, quand
on peut par la dialectique de la Raison pure obtenir les mêmes résultats ! »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 77
« D’où nous vient, en effet, cette conception de la liberté ? Elle nous vient, au fond, — ou
du moins elle a été plus largement socialisée par lui dans le monde moderne — du
capitalisme. L’ordre économique ancien reflétait, avant 89, l’ordre religieux et
métaphysique, dont l’ordre royal lui-même n’était qu’un reflet. L’industrie n’avait pas le
droit d’innover en dehors des règlements ; il fallait une permission royale. Le capitalisme ne
put pas longtemps supporter de telles gênes ; il lui fallut la liberté, c’est-à-dire,
précisément, le droit d’innover en dehors de tout règlement, de toute police, de tout ordre
royal ou autre. La liberté est fille de l’industrie, qui sans cesse innove, invente, cherche du
nouveau. »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 99
« La propriété, en d’autres termes, est devenue abstraite ; elle s’est faite valeur d’échange ;
elle s’est muée en chose urbaine ; elle s’est, en un mot, embourgeoisée. Et l’opposition de
l’échange et de la production se ramène à l’opposition de la ville et de la campagne [...]. La
ville, en effet, c’est éminemment un lieu d’échange ; c’est le marché et c’est la foire ; c’est
aussi le lieu du Gouvernement, de la Cour ou du Parlement ; la ville, c’est la démocratie et
c’est l’État, — la démocratie n’étant, comme l’expérience le prouve chaque jour davantage,
que l’idée de l’État portée à son plus haut degré d’extension et d’expansion ; et c’est enfin
le lieu s’élaborent les idéologies, les idées abstraites ; c’est la patrie des Intellectuels, le
domicile d’élection de l’Intelligence : en un mot, la ville, c’est tout à la fois l’échange, le
concept et l’État ; elle est le lieu de concentration des marchands, des intellectuels et des
politiciens. »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 144-145
« [...] c’est ainsi qu’en réalité la démocratie conçoit la liberté : c’est la liberté de
la monade ou, si l’on aime mieux, la liberté d’Épicure, retiré du monde, dans
la paix de son égoïste et solitaire ataraxie, loin des soucis et des tracas de la vie
publique, libre et souverain dans sa solitude et son néant. »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 178
« [...] nous sommes fatigués de cette sérénité socratique et alexandrine d’un monde tout
logique, qui, au premier contact avec les réalités tragiques, nous laisse si désemparés ; et,
comme Socrate s’exerçant à la musique, nous pressentons qu’il y a, par delà la science, un
monde de l’art, un monde mystérieux et enchanté, le monde du sublime et du beau, enfant
de la Liberté créatrice. Nous ne croyons plus à cette raison cartésienne, pour qui
l’évidence est le critérium de la vérité ; car nous avons appris qu’il y a, comme
dit Proudhon, une raison collective dont les démarches ne sont pas analogues
à celles de notre raison individuelle, ce que le catholicisme exprime en parlant des
desseins impénétrables de la Providence, et Hegel, “des ruses de la Raison” ; et nous
savons que le monde est un phénomène mystique, que nous sommes impliqués dans une
action qui nous dépasse et que le drame, dont nous sommes un instant les acteurs, se
développe sur une scène à la fois si grandiose, si terrible et si magnifique, que nous ne
pouvons que par lueurs, par les ressources d’une intuition, comme dit M. Bergson,
évanouissante, en pressentir et en deviner l’élan vertigineux et la sublime grandeur. »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 236
« La liberté a toujours été odieuse à tous les dogmatistes sociaux, à tous les
intellectualistes, à tous ceux qui rêvent d’enfermer la société dans des cadres figés et qui ne
tolèrent d’autre liberté que celle du bien — le bien décrété par leur despotisme
éclairé. Tous ces gens, fanatiques d’unité, supportent mal l’inévitable variété
des êtres et des choses ; ils voudraient tout résorber dans l’Un. Pourquoi, en effet,
des patries ? Pourquoi des langues diverses ? Pourquoi des classes ? Pourquoi des sexes ?
Pourquoi pas une seule humanité, une seule langue, un seul sexe, une association unique
— sans guerres, sans antagonismes, sans luttes, dans la bienheureuse paix d’une idylle
éternelle ? Tout devrait être interchangeable, les races, les patries, les classes,
les sexes. Mais, voilà, il y a la liberté, c’est-à-dire la capacité d’inventer du nouveau, de
frayer hors des chemins battus, d’ouvrir de nouveaux horizons, d’errer aussi, de tomber, de
trébucher, comme de monter et de marcher droit. Si nous ne parlons pas tous encore
l’espéranto, c’est que nous sommes, malheureusement, des êtres libres, et qu’étant libres, il
nous faut ces langues diverses où s’exprime la diversité de nos âmes nationales. Si nous ne
formons pas encore une seule humanité, c’est encore et toujours parce que nous sommes
libres et que les patries, comme les a très bien définies Georges Valois, ce sont “les
formes diverses de l’expérience humaine”. Si nous ne voulons pas nous laisser absorber
tous par l’État, c’est encore et toujours parce que nous sommes libres, et qu’étant libres,
nous formons des classes diverses invincibles à l’uniformité étatique. Si même il y a deux
sexes, et si cette dualité est invincible à tous les féminismes du monde, c’est encore que
nous sommes libres et que la diversité sexuelle était nécessaire à la formation du couple
conjugal, organe de la Justice. »
— Édouard Berth, Les Méfaits des intellectuels (1914), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250373), p. 243-244
LEON BLOY
« Malheur à celui qui ne pleure pas. »
— Léon Bloy, « Dans les Ténèbres » (posthume, 1918), dans Essais et pamphlets, éd.
Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2017 (ISBN 9782221193303), p. 1314
« Je n’ai pas subi la misère, je l’ai épousée par amour ayant pu choisir une autre
compagne. »
— Léon Bloy, Journal, 6 mars 1917
« Toute grandeur est exilée au fond de l’Histoire et si Dieu veut agir manifestement,
il faudra bien qu’Il agisse de Lui-même, victorieusement comme il y a deux mille ans,
lorsqu’Il d’entre les morts.
J’attends les Cosaques et le Saint-Esprit. »
— Léon Bloy, Au Seuil de l’Apocalypse (1916), éd. Mercure de France, 1935, octobre
1915, p. 350-351
« Les plaisirs de ce monde pourraient bien être les supplices de l’enfer vus à
l’envers dans un miroir. »
— Léon Bloy, Journal, 29 mai 1908
« Tous les bourgeois vous diront qu’il n’y a pas l’épaisseur d’un cheveu entre
les extrêmes. C’est pour cela qu’ils en ont horreur et qu’ils préconisent la
médiocrité, le juste milieu, la bonne moyenne, le fil à couper le beurre [...]. »
— Léon Bloy, « Exégèse des lieux communs » (1902), dans Essais et pamphlets, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2017 (ISBN 9782221193303), p. 717
« Je l’ai déjà dit et je serai bien forcé de le dire encore : préférer ce qui est
noble à ce qui est ignoble et ce qui est beau à ce qui est hideux ; chercher à
comprendre, tenter la conquête de n’importe quoi, en sautant par-dessus
bornes et clôtures ; vouloir vivre enfin ; voilà ce qui tombe sous l’anathème. »
— Léon Bloy, « Exégèse des lieux communs » (1902), dans Essais et pamphlets, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2017 (ISBN 9782221193303), p. 537
« Plus on est semblable à tout le monde, plus on est comme il faut. C’est le
sacre de la multitude. »
— Léon Bloy, « Exégèse des lieux communs » (1902), dans Essais et pamphlets, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2017 (ISBN 9782221193303), p. 531
« À propos du Sacrifice perpétuel sur notre globe où une messe est toujours
célébrée quelque part, à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit : — C’est,
sans doute, ce qui fait tourner la terre, me dit quelqu’un. Parole d’une simplicité
angélique.
— Léon Bloy, Journal, 16 juillet 1899
« Me voyez-vous, moi, Léon Bloy, passant entre deux rangées de voyous à pieds
sales pour aller déposer un papier dans une urne, par-devant un cocu
ceinturonné de tricolore ! Votez ! mais pour qui ? Je vote pour Dieu. Ma règle
est l’obédience enfantine au pape. [...]
I. Je suis pour la Théocratie absolue, telle qu’elle est affirmée dans la Bulle Unam
Sanctam de Boniface VIII.
II. Je pense que l’Église doit tenir en main les Deux Glaives, le Spirituel et le Temporel,
que tout lui appartient, les âmes et les corps, et qu’en dehors d’Elle il ne peut y avoir de
salut ni pour les individus ni pour les sociétés. »
— Léon Bloy, Journal, 19 mai 1897
« Combien en faudra-t-il encore de ces reniements, pour que se décide enfin à chanter le
“Coq” de France ? Car c’est la France qui est désignée par le Texte Saint. La France dont le
Paraclet a besoin ; la France où il se promène comme dans son jardin, et qui est la Figure la
plus expressive du Royaume des cieux ; la France réservée, quand même, et toujours
aimée par-dessus les autres nations, précisément parce qu’elle paraît être la
plus déchue, et que l’Esprit vagabond ne résiste pas aux prostituées ! »
— Léon Bloy, La Femme pauvre (1897), éd. Mercure de France, 1972, p. 195
« [...] la folie des Croisades est ce qui a le plus honoré la raison humaine. »
— Léon Bloy, La Femme pauvre (1897), éd. Mercure de France, 1972, p. 161
« Parlé, avec la sage-femme, de la vaccination, qui est, parait-il, exigée par la loi, car toute
liberté décampe. J’exprime fortement, quoique bien inutilement, mon horreur pour cette
ordure, dont l’humanité s’est si bien passée, jusqu’au dernier siècle, et dont l’Angleterre
nous gratifia. Le courant moderne est, d’ailleurs, aux inoculations de tout genre. On finira
par putréfier les petits enfants de quarante sorte de vaccins. »
— Léon Bloy, Journal, 2 octobre 1895
« L’histoire des Juifs barre l’histoire du genre humain comme une digue barre
un fleuve, pour en élever le niveau. Ils sont immobiles à jamais et tout ce
qu’on peut faire c’est de les franchir en bondissant avec plus où moins de
fracas, sans aucun espoir de les démolir. »
— Léon Bloy, « Le Salut par les Juifs » (1892), dans Essais et pamphlets, éd. Robert Laffont,
coll. « Bouquins », 2017 (ISBN 9782221193303), p. 977
« Je vois très clairement, reprit alors Marchenoir, le mal horrible de ce monde exproprié de
la foi chrétienne, et je ne me connais pas d’autres pensées, quels que puissent être les
mots qui me servent à exprimer celle-ci, que je porte comme un couteau dans la gaine de
ma poitrine. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 291
« On est bien forcé d’avouer que c’est tout à fait fini, maintenant, le spiritualisme chrétien,
puisque, depuis trois siècles, rien n’a pu restituer un semblant de verdeur à la souche
calcinée des vieilles croyances. Quelques formules sentimentales donnent encore l’illusion
de la vie, mais on est mort, en réalité, vraiment mort. Le Jansénisme, cet infâme arrière-
suint de l’émonctoire calviniste, n’a-t-il pas fini par se pourlécher lui-même, avec une
langue de Jésuite sélectivement obtenue, et la racaille philosophique n’a-t-elle pas fait
épouser sa progéniture aux plus hautes nichées du gallicanisme ? La Terreur elle-même,
qui aurait dû, semble-t-il, avoir la magnifiante efficacité des persécutions antiques, n’a servi
qu’à rapetisser encore les chrétiens qu’elle a raccourcis. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 239
« Un homme couvert de crimes est toujours intéressant. C’est une cible pour la
Miséricorde. C’est une unité dans l’immense troupeau des boucs pardonnables, pouvant
être blanchis pour de salutaires immolations.
Il fait partie intégrante de la matière rachetable, pour laquelle il est enseigné que le Fils de
Dieu souffrit la mort. Bien loin de rompre le plan divin, il le démontre, au contraire, et le
vérifie expérimentalement par l’ostentation de son effroyable misère.
Mais l’innocent médiocre renverse tout.
Il avait été prévu, sans doute, mais tout juste, comme la pire torture de la Passion, comme
la plus insupportable des agonies du Calvaire.
Celui-là soufflète le Christ d’une façon si suprême et rature si absolument la divinité du
Sacrifice, qu’il est impossible de concevoir une plus belle preuve du Christianisme que le
miracle de sa durée, en dépit de la monstrueuse inanité du plus grand nombre de ses
fidèles !
Ah ! on comprend l’épouvante, la fuite éperdue du XIXe siècle, devant la Face ridicule du
Dieu qu’on lui offre et on comprend aussi sa fureur !
Il est bien bas, pourtant, ce voyou de siècle, et n’a guère le droit de se montrer difficile !
Mais, précisément, parce qu’il est ignoble, il faudrait quel’ostensoir de la Foi fût
archisublime et fulgurât comme un soleil...
Veut-on savoir comme il fulgure ? Voici. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 237
« Les catholiques déshonorent leur Dieu, comme jamais les juifs et les plus
fanatiques antichrétiens ne furent capables de le déshonorer. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 236
« Il est vrai qu’on a pas encore abattu toutes les croix, ni remplacé les cérémonies du culte
par des spectacles antiques de prostitution. On a pas non plus tout à fait installé des
latrines et des urinoirs publics dans les cathédrales transformées en tripots ou en salles de
café-concert. Évidemment, on ne traîne pas assez de prêtres dans dans les ruisseaux, on ne
confie pas assez de jeunes religieuses à la sollicitudes maternelles de patronnes de
lupanars de barrière. On ne pourrit pas assez tôt l’enfance, on assomme pas un assez grand
nombre de pauvres, on ne se sert pas encore assez du visage paternel comme d’un
crachoir ou d’un décrottoir... Sans doute. Mais toutes ces choses sont sur nous et peuvent
déjà être considérées comme venues, puisqu’elles arrivent comme la marée et que rien
n’est capable de les endiguer. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 234
« Le mal est plus universel et paraît plus grand, à cette heure, qu’il ne fut
jamais, parce que, jamais encore, la civilisation n’avait pendu si près de terre,
les âmes n’avaient été si avilies, ni le bras des maîtres si débile. Il va devenir
plus grand encore. La République des Vaincus n’a pas mis bas toute sa ventrée de
malédiction. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 234
« Jamais, sans doute, dans aucune société, l’héroïsme ne fut aussi généralement cocufié
par la nature humaine. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 233
« Je quitte votre maison dans une ignorance absolue de ce que je vais faire, mais avec la
plus inflexible résolution de ne pas laisser la Vérité sans témoignage. Il est écrit que les
affamés et les mourants de soif de justice seront saturés. Je puis donc espérer une ébriété
sans mesure. Jamais, je ne pourrai m’accommoder ni me consoler de ce que je vois. Je ne
prétends point réformer un monde irréformable, ni faire avorter Babylone. Je suis de ceux
qui clament dans le désert et qui dévorent les racines du buisson de feu, quand les
corbeaux oublient de leur porter leur nourriture. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 202
« Dans cette Légende d’or de l’histoire de France qu’il s’imaginait toujours entendre
chuchoter à son oreille, comme un grand conte plein de prodiges, et qui lui semblait la
plus synthétiquement étrange, la plus centralement mystérieuse de toutes les histoires —
rien ne l’avait autant fasciné que cet énorme, terrible et enfantine épopée des temps
Mérovingiens. La France préludait, alors, à l’apostolat des monarchies occidentales. Les
évêques étaient des saints, dans la main desquels la Gentilité barbare s’assouplissait
lentement, comme une cire vierge, pour former, avec la masse hétérogène du monde
gallo-romain, les rayons mystiques de la ruche de Jésus-Christ. Du milieu de ce chaos de
peuples vagissants, au dessus desquels planait l’Esprit du Seigneur, on vit s’élever, à travers
le brouillard tragique des prolégomènes du Moyen-Age, une candide rangée de cierges
humains dont les flammes dardées au ciel, commencèrent, au sixième siècle, la grande
illumination du catholicisme dans l’Occident. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 179
« Au dix-huitième siècle, qui fut, sans comparaison, le plus sot des siècles, on s’était
persuadé que tous les moines vivaient dans les délices, que l’hypocrite pénombre des
cloîtres cachait de tortueuses conspirations contre le genre humain, et que les murailles
épaisses des monastères étouffaient les gémissements des victimes sans nombre de
l’arbitraire ecclésiastique.
Au dix-neuvième, la bêtise universelle ayant été canalisée d’une autre sorte, cette facétie
lugubre devint insoutenable. L’horreur se changeât en pitié et les criminels devinrent de
touchants infortunés. C’est ce courant romantique qui dure encore. Rien de plus grotesque,
et, au fond, de plus lamentable que les airs de miséricorde hautaine ou de compassion
navrée des gens gavés du monde pour ces pénitents qui les protègent du fond de leur
solitude et sans l’intercession desquels, peut-être, ils n’auraient même pas la sécurité d’une
digestion ! »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 164
« Plus que jamais, il fut un désespéré, mais un de ces désespérés sublimes qui jettent leur
cœur dans le ciel, comme un naufragé lancerait toute sa fortune dans l’océan pour ne pas
sombrer tout à fait, avant d’avoir au moins entrevu le rivage. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 99
« Au fait, que diable voulez-vous que puisse rêver, aujourd’hui, un adolescent, que les
disciplines modernes exaspèrent et que l’abjection commerciale fait vomir ? Les croisades
ne sont plus, ni les nobles aventures lointaines d’aucune sorte. Le globe entier est devenu
raisonnable et on est assuré de rencontrer un excrément anglais à toutes les intersections
de l’infini. Il ne reste plus que l’art. Un art proscrit, il est vrai, méprisé, subalternisé,
famélique, fugitif, guenilleux, et catacombal. Mais, quand même, c’est l’unique refuge pour
quelques âmes altissimes condamnées à traîner leur souffrante carcasse dans les
charogneux carrefours du monde. »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 93-94
« C’est peut-être l’effet le moins aperçu d’une dégringolade française de quinze années,
d’avoir produit ces dominateurs, inconnus des antérieures décadences, qui règnent sur
nous sans y prétendre et sans même s’en apercevoir. C’est la surhumaine oligarchie des
inconscients et le Droit Divin de la Médiocrité absolue.
Ils ne sont, nécessairement, ni des eunuques, ni des méchants, ni des fanatiques, ni des
hypocrites, ni des imbéciles affolés. Ils ne sont ni des égoïstes avec assurance, ni des lâches
avec précision. Ils n’ont pas même l’énergie du scepticisme. Ils ne sont absolument rien.
Mais la terre est à leurs pieds et cela leur paraît très simple.
En vertu de ce principe qu’on ne détruit bien que ce qu’on remplace, il fallait boucher
l’énorme trou par lequel les anciennes aristocraties s’étaient évadées comme des ordures,
en attendant qu’elles refluassent comme une pestilence. Il fallait condamner à tout prix
cette dangereuse porte et les Acéphales furent élus pour chevaucher un peuple de
décapités !
Aussi, la Fille aînée de l’Église, devenue la Salope du monde, les a triés avec une
sollicitude infinie, ces lys d’impuissance, ces nénuphars bleus dont l’innocence ravigote sa
perverse décrépitude ! Si l’Exterminateur arrivait enfin, il ne trouverait plus une âme vivante
dans les quartiers opulents de Paris, rien aux Champs-Élysées, rien au Trocadéro, rien au
Parc Monceau, trois fois rien au Faubourg Saint-Germain et, sans doute, il dé-daignerait
angéliquement de frapper du glaive les simulacres humains pavés de richesses qu’il y
découvrirait ! »
— Léon Bloy, Le Désespéré (1887), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 2010 (ISBN 9782080712561), p. 79-80
« Elle a quinze ans aujourd’hui, notre République, et elle a l’air d’avoir quinze
siècles.
Elle paraît plus vieille que les Pyramides, cette pubère sans virginité, tombée
du vagin sanglant de la trahison.
La décrépitude originelle de cette bâtarde de tous les lâches est à faire vomir l’univers.
Jézabel de lupanar, fardée d’immondices, monstrueusement engraissée de fornications,
toute bestialité de goujat s’est assouvie dans ses bras et elle ressemble à quelque très
antique Luxure qu’on aurait peinte sur la muraille d’une hypogée. »
— « La République des Vaincus », Léon Bloy, Le Pal, nº 3, 25 mars 1885
—
ETIENNE DE LA BOETIE
« Les théâtres, les jeux, les farces, les spectacles, les gladiateurs, les bêtes
étranges, les médailles, les tableaux et autres telles drogueries, c’étaient aux
peuples anciens les appâts de la servitude, le prix de leur liberté, les outils de
la tyrannie. »
— Étienne de La Boétie, Discours de la servitude volontaire (1548), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1983 (ISBN 9782080703941), p. 155-156
« [...] mais les gens asservis, outre ce courage guerrier, ils perdent aussi en
toutes autres choses la vivacité, et ont le cœur bas et mol et incapable de toutes
choses grandes. Les tyrans connaissent bien cela, et, voyant qu’ils prennent ce pli, pour
les faire mieux avachir, encore ils aident-ils. »
— Étienne de La Boétie, Discours de la servitude volontaire (1548), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1983 (ISBN 9782080703941), p. 154
« Toujours s’en trouve il quelques-uns, mieux nés que les autres, qui sentent le poids du
joug et ne se peuvent tenir de le secouer ; qui ne s’apprivoisent jamais de la sujétion et qui
toujours, comme Ulysse, qui par mer et par terre cherchait toujours de voir de la fumée de
sa case, ne se peuvent tenir d’aviser à leurs naturels privilèges et de se souvenir de leurs
prédécesseurs et de leur premier être ; ce sont volontiers ceux-là qui, ayant l’entendement
net et l’esprit clairvoyant, ne se contentent pas comme le gros populas, de regarder ce qui
est devant leurs pieds s’ils n’avisent et derrière et devant et ne remémorent encore les
choses passées pour juger de celles du temps à venir et pour mesurer les présentes ; ce
sont ceux qui, ayant la tête d’eux-mêmes bien faite, l’ont encore polie par l’étude et le
savoir. Ceux-là, quand la liberté serait entièrement perdue et toute hors du monde,
l’imaginent et la sentent en leur esprit, et encore la savourent, et la servitude ne leur est de
goût, pour tant bien qu’on l’accoutre. »
— Étienne de La Boétie, Discours de la servitude volontaire (1548), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1983 (ISBN 9782080703941), p. 151
« Comment a-t-il aucun pouvoir sur vous, que par vous ? Comment vous oserait-il courir
sus, s’il n’avait intelligence avec vous ? Que vous pourrait-il faire, si vous n’étiez receleurs
du larron qui vous pille, complices du meurtrier qui vous tue et traîtres à vous-mêmes ?
Vous semez vos fruits, afin qu’il en fasse le dégât ; vous meublez et remplissez vos maisons,
afin de fournir à ses pilleries ; vous nourrissez vos filles, afin qu’il ait de quoi soûler sa
luxure ; vous nourrissez vos enfants, afin que, pour le mieux qu’il leur saurait faire, il les
mène en ses guerres, qu’il les conduise à la boucherie, qu’il les fasse les ministres de ses
convoitises, et les exécuteurs de ses vengeances ; vous rompez à la peine vos personnes,
afin qu’il se puisse mignarder en ses délices et se vautrer dans les sales et vilains plaisirs ;
vous vous affaiblissez, afin de le rendre plus fort et roide à vous tenir plus courte la bride ;
et de tant d’indignités, que les bêtes mêmes ou ne les sentiraient point, ou ne
l’endureraient point, vous pouvez vous en délivrer, si vous l’essayez, non pas de vous en
délivrer, mais seulement de le vouloir faire. Soyez résolus de ne servir plus, et vous
voilà libres. »
— Étienne de La Boétie, Discours de la servitude volontaire (1548), éd. Flammarion,
coll. « Garnier Flammarion », 1983 (ISBN 9782080703941), p. 138-139
—
LOUIS DE BONALD
« Les partisans rigides de l’égalité absolue ont cru la trouver dans les maximes de
l’Évangile. Sans doute elle existe entre les êtres semblables. Tous les pères de famille entre
eux, et tous les enfants entre eux aussi, considérés en cette qualité, sont égaux, de même
que dans la société religieuse les prêtres entre eux, et les fidèles aussi entre eux ; et, dans la
société politique, les hommes ayant autorité et les sujets sont chacun égaux entre eux,
considérés comme hommes et comme sujets. Mais, considérés sous le rapport des
fonctions, les enfants ne sont pas les égaux des pères, les femmes des maris, les prêtres
des fidèles, les officiers des subordonnés, parce qu’il n’y a pas d’ordre possible dans la
société domestique ou publique, pas même dans un atelier d’arts mécaniques, sans la
distinction et la hiérarchie des fonctions ; mais pour ceux qui ne regardent pas comme un
bonheur personnel des devoirs à remplir envers les autres ; qui estimant les charges et
les offices ce qu’ils sont, c’est-à-dire, des fardeaux et des devoirs, onus, officium,
dédaignent cet éclat extérieur qui impose au vulgaire, et pèsent tout au poids du
sanctuaire ; pour ceux-là, dis-je, le Sauveur du monde va bien plus loin que les partisans les
plus outrés de l’égalité, puisque, loin de prêcher l’égalité entre les grands et les petits, il
donne à ces derniers la supériorité, lorsque après avoir appris au monde que tout pouvoir
n’est qu’un service, il demande “quel est le plus grand de celui qui sert ou de celui qui est
servi ?” Et effectivement, tout, dans la famille, ne se rapporte-t-il pas à l’intérêt des enfants,
et, dans la religion et l’État, au salut des fidèles et au bien-être des sujets ? »
— Louis de Bonald, « Méditations politiques tirées de l’Évangile » (1830), dans Œuvres
complètes de M. de Bonald, éd. Migne, 1859, t. III, p. 640
« Mais déclarer le peuple souverain dans la crainte hypothétique qu’il ne soit opprimé
comme sujet, sans prévoir quel pouvoir on pourra opposer à celui du peuple, ou plutôt
avec la certitude de n’en avoir aucun à lui opposer si, à son tour, il devient oppresseur,
présupposer l’oppression pour justifier la résistance, ériger le désordre en loi pour prévenir
la violation de l’ordre, c’est imiter un insensé qui bâtirait sa maison au milieu d’un torrent
pour avoir l’eau plus à portée en cas d’incendie. »
— Louis de Bonald, « Mélanges littéraires, politiques et philosophiques » (1819),
dans Œuvres complètes de M. de Bonald, éd. Migne, 1859, t. II, p. 626
« [...] depuis l’Évangile jusqu’au Contrat Social, ce sont les livres qui ont fait
les révolutions. »
— Louis de Bonald, « Mélanges littéraires, politiques et philosophiques » (1819),
dans Œuvres complètes de M. de Bonald, éd. Migne, 1859, t. III, p. 957
« Une preuve de plus que le Décalogue a été donné par Dieu même à la première société,
est qu’il n’y a d’injonctions que pour les inférieurs, pour les enfants et non pour les pères,
et par conséquent, comme l’entendent tous les interprètes, pour les sujets et non pour les
rois. Dieu, source et règle de tous les pouvoirs, et dont les pères et les rois ne sont que les
délégués, n’avait garde de se donner des lois à lui-même. Les hommes n’auraient pas agi
ainsi ; ils n’auraient pas manqué, en endoctrinant les chefs, de flatter les subalternes, et de
placer dans leurs lois les droits de l’homme, la responsabilité des agents de l’autorité et la
souveraineté du peuple ; et au lieu de commencer leur Code par ces mots : “Enfant, honore
ton père et ta mère,” ils auraient dit : “Pères et mères, prenez soin de vos enfants.” »
— Louis de Bonald, « Pensées sur divers sujets » (1817), dans Œuvres complètes de M. de
Bonald, éd. Migne, 1859, t. III, p. 1366
« Nous sommes mauvais par nature, bons par la société. Ainsi tous ceux qui, pour
constituer la société, ont commencé par supposer que nous naissons bons, frappés des
désordres que la société n’empêche pas et oubliant tous ceux qu’elle prévient, ont fini,
comme Jean-Jacques, par croire que la société n’était pas dans la nature de l’homme. Ces
écrivains ont fait comme des architectes qui, pour bâtir un édifice, supposeraient que les
pierres viennent toutes taillées de la carrière et les bois tout équarris de la forêt. »
— Louis de Bonald, « Pensées sur divers sujets » (1817), dans Œuvres complètes de M. de
Bonald, éd. Migne, 1859, t. III, p. 1378
« Des sottises faites par des gens habiles ; des extravagances dites par des gens d’esprit ;
des crimes commis par d’honnêtes gens... Voilà les révolutions. »
— Louis de Bonald, « Pensées sur divers sujets » (1817), dans Œuvres complètes de M. de
Bonald, éd. Migne, 1859, t. III, p. 1392
« On ne devrait assembler les hommes qu’à l’église ou sous les armes ; parce
que là, ils ne délibèrent point, ils écoutent et obéissent. »
— Louis de Bonald, « Pensées sur divers sujets » (1817), dans Œuvres complètes de M. de
Bonald, éd. Migne, 1859, t. III, p. 1310
« Toute passion qui n’est pas celle de l’argent, des honneurs ou des plaisirs,
s’appelle aujourd’hui fanatisme et exagération. »
— Louis de Bonald, « Pensées sur divers sujets » (1817), dans Œuvres complètes de M. de
Bonald, éd. Migne, 1859, t. III, p. 1307
« Beaucoup voudraient une religion sans prêtres comme une monarchie sans
nobles. Ils ne voient en tout et pour tout que l’homme et jamais le ministère de
la société. Lorsqu’on offre à quelqu’un en don des choses matérielles, c’est pour que celui
qui les accepte les consomme par l’usage qu’il en fait : ainsi il n’y a pas de don sans
destruction de la chose donnée. Cette vérité développée explique le sacrifice de la religion
chrétienne. »
— Louis de Bonald, Réflexions sur l’accord des dogmes de la religion avec la raison (1817-
1818), éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2012 (ISBN 9782204098106), p. 121
« La religion renferme quelque chose d’élevé dans ses dogmes, de sévère dans
ses préceptes, d’austère dans ses conseils, de magnifique dans ses promesses,
de terrible dans ses menaces, de doux dans ses consolations, qui est
singulièrement propre à former des habitudes graves et des caractères élevés. »
— Louis de Bonald, Réflexions sur l’accord des dogmes de la religion avec la raison (1817-
1818), éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2012 (ISBN 9782204098106), p. 120
« On dit très bien les erreurs de J.-J. Rousseau, on ne peut pas dire les vérités de Bossuet ou
de Leibniz. Pourquoi cela ? Sinon parce que l’erreur est de l’homme et que la vérité n’en est
pas. »
— Louis de Bonald, Réflexions sur l’accord des dogmes de la religion avec la raison (1817-
1818), éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2012 (ISBN 9782204098106), p. 120
« J’ai défendu la sainteté et l’utilité des vœux en général et non tel ou tel ordre en
particulier, et je conviendrai sans peine que quelques institutions qui dans leur temps
avaient rendu de grands services à la religion et aux peuples avaient rendu de grands
services à la religion et aux peuples avaient pu être utilement remplacées par d’autres,
mieux appropriées aux besoins de la société, je ne dis pas aux progrès des lumières car je
ne connais de progrès que dans les sciences physiques étrangères à la morale et même à
la politique, et s’il avait fallu dans ces derniers temps des ordres où il y eut plus de lumières
c’est précisément parce qu’il y en avait moins dans la société. »
— Louis de Bonald, Réflexions sur l’accord des dogmes de la religion avec la raison (1817-
1818), éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2012 (ISBN 9782204098106), p. 110-111
« On ne comprendra jamais assez tout le bien que la religion pourrait produire si les
gouvernements, au lieu de la regarder comme un instrument de leur politique, se
regardaient eux-mêmes comme ses ministres pour conduire les hommes à la vertu et au
bonheur, en secondant de toutes leurs forces l’accomplissement de ses préceptes, en
punissant sévèrement le mal qu’elle défend. »
— Louis de Bonald, Réflexions sur l’accord des dogmes de la religion avec la raison (1817-
1818), éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2012 (ISBN 9782204098106), p. 95
« Je le demande à ceux qui cherchent la vérité de bonne foi mais qui, égarés par de grands
esprits faux, comme les appelle Bossuet, sont prévenus contre la religion chrétienne : est-
ce ainsi que les hommes inventent ? Un homme assez habile pour fabriquer une religion,
assez fou pour l’entreprendre, ne proposerait pas aux hommes des choses si relevées à
croire, pour les conduire à des devoirs pénibles à pratiquer. Il inventerait un Dieu sans
justice et un homme sans passions, il inventerait la liberté absolue, l’égalité générale, la
souveraineté du peuple, et il permettrait le divorce aux voluptueux, l’usure aux hommes
avides, et s’il n’autorisait pas formellement de plus grands désordres, il les tolérerait avec
une extrême indulgence. Il parlerait d’abord à l’imagination et aux sens, et quand il aurait
égaré l’une et enflammé l’autre, il inviterait peut-être la raison à discuter froidement ses
sophismes, sûr d’avance du résultat. Peut-être, s’il était prudent, céderait-il quelque chose
au penchant naturel vers l’ordre et la règle que l’homme, même le plus déréglé, porte au
fond de son cœur, et pour tromper ce sentiment, il lui prescrirait l’observance pénible de
choses innocentes en elles-mêmes, en même temps qu’il lâcherait la bride à ses désirs sur
les points essentiels de la morale, il octroierait des conseils en même temps qu’il affaiblirait
le précepte et, comme Mahommet, il prescrirait les ablutions fréquentes, les prières
continuelles, le pèlerinage de la Mecque ou l’abstinence de vin à un même homme à qui il
permettrait la pluralité des femmes et la plus furieuse haine de tous ceux qui ne seraient
pas ses disciples. Les esprits bornés s’extasieraient sur ces inventions, ils y trouveraient
peut-être des vues profondes et politiques, et il ne faudrait y voir que la déraison de
l’ignorance et les hardies impostures d’un charlatan. »
— Louis de Bonald, Réflexions sur l’accord des dogmes de la religion avec la raison (1817-
1818), éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2012 (ISBN 9782204098106), p. 88-89
« Il faut en revenir à la maxime du Grand Maître : Vous aurez toujours des pauvres au
milieu de vous ; et il est plus important qu’on ne pense de laisser sous les yeux de l’homme
heureux, le spectacle de l’humanité souffrante, et sous les yeux du pauvre, le spectacle de
la richesse bienfaisante. L’administration aura beau faire, elle ne soulagera jamais toutes les
misères individuelles [...]. Bien plus, quand l’administration pourrait soulager toutes les
misères, elle devrait bien se garder d’ôter à la charité particulière un aliment nécessaire, un
puissant moyen de rapprochement entre les diverses conditions. Dans une société où il n’y
aurait personne à soulager, il n’y aurait que des égoïstes, dont le cœur insensible aux
malheurs des autres, ne serait dilaté que par la vue de l’or, ne palpiterait jamais que de la
crainte de le dépenser. »
— Louis de Bonald, « Théorie du pouvoir politique et religieux » (1796), dans Œuvres
complètes de M. de Bonald, éd. Migne, 1859, t. I, p. 858
—
ABEL BONNARD
« Comme l’amoureux ou le libertin, on peut dire que le voyageur est infidèle. Mais on peut
dire aussi qu’il est à la recherche d’une fidélité ; peut-être cherche-t-il le pays d’où il ne
bougerait plus, où il se fixerait, enfin entouré par le cercle léger d’un horizon qu’il ne
voudrait plus franchir. »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi, éd. Dismas, 1991, p. 143
« Le moindre inconvénient de la vie sédentaire, c’est que nous nous confondons avec
quantité de soucis mesquins, de petitesses et de laideurs qui ne sont pas nous-mêmes. Le
voyage nous retire de ces pièges et nous livre à nous hors de nos histoires ; il nous
apprend tout de suite ce que nous avons gardé de jeunesse. »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi, éd. Dismas, 1991, p. 141
« Si l’on considère l’histoire de l’Europe dans une certaine étendue, on ne peut manquer
d’admirer combien les petits États ont favorisé le développement de ce qu’il y a de plus
haut dans l’homme et l’on s’aperçoit qu’ils ont parfois, bien plus que les grands, servi la
civilisation véritable. Les étroites cités de la Grèce antique, pareilles à de maigres arbres
mordus par le vent et brûlés par le soleil, ont donné à l’humanité plus de fruits d’or que
l’énorme chêne romain, tout en branches et en feuillage. L’Italie du Moyen Âge et de la
Renaissance foisonne de républiques et de principautés minuscules qui toutes portent sur
le front la magnifique couronne des arts, comme un signe qu’elles sont parvenues au plus
haut rang des société humaines. Les fières villes des Flandres ont eu les mêmes parures.
Les Provinces-Unies au XVIIe siècle, la république de Venise ont pour gloire les arts qu’elles
ont nourris et il n’est pas jusqu’à l’infime république de Raguse qui ne mérite un souvenir,
elle qui, par la bénignité de ses mœurs autant que par la douceur de son climat, attirait les
savants et les érudits qui venaient s’y réfugier, comme des oiseaux, de toutes les parties de
l’Europe.
Ce qui ressort de la contemplation de l’histoire, c’est que les petits États sont un des
piédestaux de l’homme : ils soutiennent la personne humaine que les grands États
modernes tendent au contraire à écraser. Ce n’est pas assez que l’individu pris dans ces
machines énormes soit soumis à la conscription, écrasé d’impôts, assujetti à des lois dont
le nombre augmente sans cesse et dont les exigences ne peuvent jamais êtres prévues. À
la fin cet État despote, ce monstre de matérialisme demande à l’homme sa pensée et son
âme. Il arrache aux familles les garçons à peine nés, et même les filles, pour les pétrir à son
gré. Il ressemble à ces dieux puniques à qui l’on sacrifiait des petits enfants. Un pareil
développement, tout horizontal, et qui empêche partout l’âme humaine de croître en
hauteur, est ce qu’il y a de plus opposé à la civilisation véritable. L’État n’est pas fait pour
manger l’homme, mais pour le protéger et le soutenir.
L’esprit de civilisation ne subsiste aujourd’hui que dans les petits États et dans ceux qui
sont grands depuis assez longtemps pour n’être pas ivres d’eux-mêmes. Mais ceux-ci
auront besoin de se rendre très puissants s’ils veulent sauver ce qu’ils représentent. Il leur
faudra pour n’être pas vaincus par leurs ennemis, être plus forts que la Force. »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi (24 février 1933), éd. Dismas, 1991, Grands et petits
États, p. 125-126
« Comment s’étonner qu’un pays meure dans son corps quand il meurt dans son âme ? Il
ne naîtra des Français que si une France renaît. Comment s’étonner qu’on n’ait plus
d’enfants quand tout dans les idées, les préjugés et les lois détruit la famille ? »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi, éd. Dismas, 1991, p. 67
« L’individu n’a pas d’enfants, n’a plus d’ancêtres : il s’isole de tous les côtés, il
se retranche du passé comme de l’avenir. Reste le moment, pour la jouissance
ou l’ennui. »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi, éd. Dismas, 1991, p. 67
« On offre une image résumée du monde à l’homme qui n’est plus d’aucun lieu. »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi, éd. Dismas, 1991, p. 55
« Le verbalisme actuel, celui des journaux, de la politique, de l’école : dès qu’on donne à
des choses différentes des noms en -isme, elles deviennent toutes égales. Ainsi étudiées,
toutes les œuvres se valent, les plus médiocres sont examinées aussi sérieusement que les
autres, regardées comme des signes, des tendances ; le sentiment de leur vraie importance
disparaît. Il faut que la critique des mœurs, des livres, ait un langage simple et transparent
pour rester exacte. »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi, éd. Dismas, 1991, p. 52
« Chaque matin, les journaux lâchent un vol immense de mots, qui viennent étourdir un
peuple que la vie des villes séparait déjà de l’univers. Observons que, parmi ces mots, les
termes abstraits deviennent de plus en plus nombreux, et que ceux-ci, quand il ne
résument pas l’essence des choses, ne contiennent même plus cette honnête quantité de
réalité que le moindre mot concret porte jusqu’à nous. »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi, éd. Dismas, 1991, p. 48
« Les intellectuels, jeunes normaliens, croient avoir acquis dans le maniement des
abstractions le droit de régenter les choses. »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi, éd. Dismas, 1991, p. 38
Un homme politique, c’est « un esclave déguisé en chef, qui prend des ordres
avant d’en donner. »
— Abel Bonnard, Ce monde et moi (18 octobre 1933), éd. Dismas, 1991, p. 16
« Vous êtes appelés à créer un type d’homme nouveau. Cet homme sera courtois, souple
sans être mou, énergique sans être brutal, et franc. Vous devez être fiers d’appartenir au
peuple. C’est dans les profondeurs du peuple que se dessinent les hauteurs des nations.
Vous devez être heureux aussi de recevoir un enseignement de valeur. Non seulement cet
enseignement fait de vous de bons ouvriers, mais il vous permet de fortifier vos corps et
de tremper vos âmes. Nous préparerons des élites dans tous les ordres d’enseignement. Il
vous appartient d’en faire partie par vos qualités personnelles. »
— Abel Bonnard, Rassemblement des jeunes des équipes nationales salle Récamier, Le
Petit Parisien, 9 mars 1944
« Camarades, la Révolution ne se fera pas toute seule. Elle se fera parce que nous la ferons,
la Révolution nécessaire, la Révolution sacrée, la Révolution de renaissance. »
— Abel Bonnard, « Discours aux chefs miliciens » (30 janvier 1943), dans Berlin, Hitler et
moi, éd. Kontre Kulture, 2022, p. 152
« L’individu, c’est le dernier produit d’une société qui devient stérile, c’est
l’être humain tombé de la plénitude de l’homme dans l’exiguïté du moi, c’est le
nain arrogant, l’avorton prétentieux qui, toujours content de soi, n’est jamais
content des autres, qui, restant toujours isolé sans être capable de vivre seul, à
la fois dissident et dépendant, est l’atome d’une foule au lieu d’être l’élément
d’un peuple. L’individu vit perpétuellement dans un état de désertion sociale. Il prétend
être entretenu par une société qu’il n’entretient pas, il demande sans apporter, il voudrait
tout recevoir sans rien donner et, dans une société décomposée, il représente un
abaissement et une déchéance qui se retrouvent à travers toutes les classes. »
— Abel Bonnard, « Discours aux chefs miliciens » (30 janvier 1943), dans Berlin, Hitler et
moi, éd. Kontre Kulture, 2022, p. 143-144
« Les hommes croient au Progrès quand ils ne sont plus capables de se battre
avec le Destin ; ils réclament des distributions de bonheur quand ils ont perdu le secret
d’être heureux. »
— Abel Bonnard, « La sommation du destin », Je suis partout, 2 mai 1941
« Il faut que tout se ranime, que les cimetières même se réveillent, que les cathédrales
chantent comme des orgues énormes, pour que la France profonde afflue dans l’Europe
nouvelle. »
— Abel Bonnard, « France ! », Je suis partout, 14 février 1941
« Le Destin n’attend pas ; dans la vie des nations comme dans celle des
individus, il n’y a que de rares moments de choix, dont il faut reconnaître l’insigne
importance, si l’on veut profiter pleinement des chances qu’ils nous offrent. L’Occasion
est une déesse qui ne s’assied pas. »
— Abel Bonnard, « Franchise ou “habilité” ? » (7 décembre 1940), dans Berlin, Hitler et moi,
éd. Kontre Kulture, 2022, p. 120
« Parmi les hommes d’un jour, [le paysan] reste l’homme de toujours. »
— Abel Bonnard, « Morale d’une défaite », La Gerbe, 7 septembre 1940
« [...] depuis 1918, pour ne pas remonter plus haut, la politique française a constamment
dépendu de la politique anglaise, sans que jamais celle-ci ait dépendu de la nôtre. »
— Abel Bonnard, « En écoutant la voix anglaise » (22 août 1940), dans Berlin, Hitler et moi,
éd. Kontre Kulture, 2022, p. 75
« La croyance que la race a vécu dans le passé n’est que l’emblème de la volonté de la faire
vivre dans l’avenir. L’homme n’est pas hors du sang. Le mot d’aryen est un drapeau : celui
de liberté en a bien été un, mais n’a nullement servi à rendre les gens libres. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 45
« Par la croyance qu’on est une race, ayons la volonté de le devenir. C’est la riposte à un
danger de destruction soudain senti : l’Américanisme et le Bolchevisme. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 45
« Quand les juifs disent qu’il n’y a pas de race, cela se conçoit, c’est le meilleur
moyen d’introduire la leur. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 42
« La science moderne, contre le sens commun, tend plus à détruire ce que nous savons
tous par expérience, qu’à y ajouter ce qu’elle a acquis elle-même par les investigations de
l’étude. Nous savons tous qu’aucun groupe humain ne peut résister, dans les qualités qui le
définissent, à un apport, à une quantité qui le définissent, à un apport, à une quantité trop
considérables d’éléments étrangers : à cela, cette science d’arrière-pensées vient opposer
qu’il n’y a pas de races, affirmation abstraite dont la conséquence concrète et voulue est de
permettre à des hommes spécifiquement différents de venir détruire les caractères de
notre groupe. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 36-37
« L’esprit juif est à la recherche d’un pays. Mais il faut convenir que la France a tout fait
pour cela, vidée d’elle-même, emplie par lui. À l’esprit juif, la France était prédisposée par
manque de conscience d’elle. Pleine d’une force qu’elle était plus disposée à perdre qu’à
bien employer, la France devient le soldat d’une des causes où elle est oubliée. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 35
« La race blanche est sur le point de s’abîmer. Il ne s’agit pas de mépriser les autres — il ne
faut détester que le mélange. Toute race a ses qualités, ses charmes même, mais sans
aucun doute le mulâtre est plus bas que le nègre. Chaque race a sa place, mais le mélange
répugne à toutes. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 34
« La force des juifs est qu’ils mettent les idées de l’intelligence au service de
leurs instincts, tandis que les Français se jettent dans les idées pour oublier les
leurs. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 33
« Qui osera nier qu’une nation, quelle qu’elle soit, sera bien vite dénaturée si elle admet en
elle une tourbe d’étrangers trop nombreuse ? Qui osera nier qu’un grand nombre de juifs
implantés dans un service quelconque y répandent un autre esprit, qui détruit celui qui y
régnait avant eux ? À quoi servent les théories prétendues scientifiques ? Dans les
décadences, elles servent à obscurcir des évidences. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 28-29
« Les juifs : pour eux, la politique, c’est la discorde à domicile. Benda dit qu’il voudrait une
affaire Dreyfus éternisée : c’est là un témoignage sans prix du fait que les juifs ont
besoin de la guerre civile. Ce sont les juifs qui introduisirent dans le corps de France,
dans la tour France, une âme étrangère, par le moyen de l’idéologie révolutionnaire, c’est-
à-dire par la faute des Français. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 27
« Tout homme de race, turc, arabe, noir, chinois, indien, a une dignité. Il sait vivre ; il a son
style de vie ; il fait place aux hasards de la vie avec tranquillité, parce qu’il porte en lui de
quoi leur répondre.
L’homme sans race, par contre, est inquiet : pour faire quoi que ce soit, il faut qu’il
raisonne. C’est-à-dire que pour trouver son chemin il doit commencer par divaguer, il se
livre à des philosophes de n’importe où, qui ne devraient jamais commander la vie.
L’homme de race se réfère à ses poètes : ces poètes sont la cime auguste de son génie. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 25-26
« C’est une extrême naïveté que de croire que, parce qu’un juif a perdu sa
religion, il n’a pas gardé sa nature. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 24
« Personne n’oserait soutenir que le génie de la France resterait constant, si l’on introduisait
un élément trop nombreux de population étrangère, et les seuls qui osent prétendre que
ce changement ne se produirait pas sont ceux qui au fond le désirent, les ennemis intimes
de la France des siècles. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 23-24
« Une goutte d’un sang étranger stimule le sang noble, un flot le noie. Le commencement
de la rencontre des sangs crée l’art grec, la fin du mélange de l’Empire romain ne crée
absolument rien du tout. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 18
« Il est tout naturel que les savants juifs disent qu’il n’y a pas de race, ils n’y
ont que trop d’intérêt, et professent ainsi une doctrine que leurs usages
démentent. »
— Abel Bonnard, « La Question juive » (1937), dans Berlin, Hitler et moi, éd. Kontre Kulture,
2022, p. 16
« Ces Français non pas nouveaux, mais renouvelés, remis, pour penser ou agir, en
possession de toute leur valeur virile, c’est une question de savoir s’ils seront assez
nombreux pour sauver leur pays en le refaisant [...]. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 215
« Cette démagogie embourgeoisée ne pouvait durer que dans un pays dont une grande
partie continuait à vivre hors d’elle ; à force d’étendre sa clientèle, les ressources lui font
défaut pour l’entretenir ; la nation manque à ceux qui l’épuisent et la mort du malade
interrompt la prospérité de la maladie. La République répugne aujourd’hui aux Français,
sous un ciel noir [...]. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 207-208
« [...] il s’agit pour tous de maintenir un système de profits, en dépit de la réalité qui
l’étreint, et de nier les difficultés, jusqu’au moment où les désastres arrivent. Ainsi le
régime parlementaire ne se perfectionne que pour s’isoler de toutes les
questions qu’il devrait résoudre, le politicien devient le parasite d’une société
et d’une nation qu’il détruit ou laisse détruire ; il vit de nous sans vivre pour nous
et la démocratie à son comble offre ce contraste singulier, que tout le monde semble
s’inquiéter du sort de l’État, et que personne ne s’en occupe : il y a de la politique partout,
et il n’y a des politiques nulle part. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 206
« Ce n’est point par la raison que les peuples se rattachent à la sagesse, mais par un
ensemble de traditions saintes, d’usages, de mœurs [...]. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 186
« Les modérés sont des libéraux qui n’ont plus foi en eux-mêmes [...]. Ce qu’on reproche
aux libéraux, ce n’est pas d’avoir aimé la liberté, mais de n’avoir pas discerné
les conditions de son existence. Ils ont mal conçu le possible, parce qu’ils ont mal
connue le réel. Convaincus qu’on pouvait désarmer le pouvoir, sans affaiblir l’ordre, ils n’ont
pas vu que la société où ils épanouissaient leurs doctrines ne restait assez solide pour les
abriter que parce qu’elle avait été construite sur des principes opposées aux leurs. Protégés
par les remparts qu’ils allaient abattre, ils ont déployé leur suffisance entre un passé qu’ils
condamnaient sans le comprendre, et un avenir qu’ils amenaient sans le prévoir ; ils ont fait
la roue dans un entracte du drame. Sous prétexte d’assurer la plénitude de la liberté, ils ont
ruiné les vieux régimes qui étaient assez pénétrés de civilisation pour garder le respect de
la personne humaine, et favorisé l’irruption des forces élémentaires qui ne font plus d’elle
aucun cas. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 146-147
« [...] le romantisme nous a léguées, de croire que les révolutions sont favorables à la
manifestation des plus fortes âmes : elles les étouffent au contraire [...]. Les révolutions
sont les temps de l’humiliation de l’homme et les moments les plus matériels de l’histoire.
Elles marquent moins la revanche des malheureux que celle des inférieurs. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 130
« S’il y a chez les Français de tous les partis un préjugé abstrait en faveur des opinions
révolutionnaires, il est confirmé par la prévention qu’on leur a inspirée en faveur des
hommes de la Révolution : tant qu’ils prendront ces personnages pour de grands hommes,
ils seront irréparablement séparés de toute grandeur, et comme ceux qui se trompent dans
leurs admirations sont condamnés à s’égarer dans tout le reste, ils ne sauront même pas ce
qui est noble, honnête ou sensé. Une nation qui veut vivre ne peut tirer de la Révolution
française aucun principe de pensée ni de conduite [...]. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 129
« Quand une société qui ne vit plus que par survivance se désagrège en hommes épars,
qui ne sont sauvés de leur pauvreté intérieure par aucun rapport avec un fonds commun à
tous, sans terroir, sans religion, sans disciplines, fonctionnaires ennuyés de leur emploi,
artisans dépris de leur métier, ouvriers qui n’aiment plus leur besogne et qui ont, trop
souvent, une besogne qu’ils ne peuvent pas aimer, comment ces individus désintégrés
pourraient-ils essayer de revivre autrement que par des opinions révolutionnaires ?
Comment le grain de poussière rentrerait-il dans le drame universel, sinon par la
turbulence des vents ? »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 125-126
« Ainsi des formes sociales aujourd’hui détruites nous encombrent encore des façons
d’être qu’elles ont créées; ainsi quantité de Français nous paraissent tour à tour n’avoir pas
l’âme assez forte pour agir dans le drame où ils sont jetés, et n’avoir pas l’esprit assez
simple pour l’apercevoir. Cette impossibilité d’aller à l’important et au principal,
cette curiosité volage pour toutes les idées qui n’est que l’incapacité d’en
retenir fortement aucune, cette frivolité qui espère encore s’amuser des événements
dont elle s’effraye, cette parodie de l’esprit de finesse qui donne une furieuse envie de
retrouver l’esprit d’épaisseur, cette façon de faire la roue au bord de l’abîme, avant d’y
tomber, cette rage de paraître jusqu’au moment où l’on disparaît, tous ces défauts,
misérables parce qu’on y sent à la fois l’insuffisance de la personne et la suffisance de
l’individu, ce sont, dans une nation que le destin somme de renaître, les
dernières expressions d’une société qui meurt. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 82
« [...] l’âme du pays survit où l’esprit du régime n’a pas pénétré, la France brille
où la République n’est pas. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 71
« Pour garder quelques valeur de sincérité, il faudrait au moins que les élections eussent
lieu le plus brusquement possible, et que chacun de ceux qui ont à voter fût transporté
assez vite de sa vie ordinaire à son action politique pour n’avoir pas le temps de perdre sa
sagesse en route ; les meilleures élections sont assurément les moins préparées. Mais il
n’en va pas ainsi : ce n’est pas l’homme de la vie qui entre pour un jour dans la politique,
c’est l’homme factice de la politique qui, tous les jours et dans chaque individu envahit,
supplante et détruit l’homme du réel. L’agitation frénétique de la période électorale ne fait
que brocher sur l’irritation permanente qu’entretiennent les partis et les journaux. Ainsi on
dénature les hommes à qui l’on s’adresse ; avant de leur demander leur avis, on a
déterminé leur réponse. La démocratie fabrique le peuple qu’elle consulte. Il n’y a
pas de chemin du bon sens à l’urne ; il n’y a pas de voie ouverte à des vœux profonds,
dans ce tumulte où toutes les passions jettent leur cri. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 67-68
« Le malheur de la République est d’être née dans la haine : elle date du moment
où la France s’est divisée. Elle ne pourra jamais devenir sincèrement un régime d’amitié ;
elle ne pourra jamais faire ce qui était si naturel à la monarchie, de prendre la France
entière dans ses bras. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 46
« Ainsi cette Révolution n’est pas une chose faite une fois pour toutes, qui assure des droits
égaux à tous les Français ; c’est un drame qui se continue, l’effort d’un monde qui en veut
remplacer un autre, et le misérable rallié, qui se croyait quitte, s’aperçoit qu’il ne se sera
jamais suffisamment renié, tant qu’il ne se sera pas tout à fait détruit. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 40
« C’est ainsi qu’Aristote et saint Thomas se répondent, que Cicéron pourrait converser avec
Lavoisier, que les plus nobles des Croisés et des Musulmans se renvoient les mêmes rayons
de chevalerie, qu’un jésuite français et un sage chinois, produits par deux mondes presque
sans rapports, se trouvent néanmoins face à face sur le même plan. Ces fraternités
involontaires, au bout d’efforts séparés, cette rencontre suprême de ceux qui ne se sont
pas cherchés, voilà, sans doute, ce que notre espèce peut offrir de plus beau ; si le mot
d’humanité a un sens, c’est quand il tremble comme une lueur autour de cette réunion de
quelques hommes. »
— Abel Bonnard, Les Modérés (1936), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN 9782367250205),
p. 24-25
Le métissage est l’« un des plus grands périls [...] qui menacent aujourd’hui la noblesse
humaine. »
— Abel Bonnard, « Les esprits libres », Journal des débats, 11 novembre 1933
« Une seule chose menace les plus hautes expressions de la nature humaine, c’est une
longue habitude de la médiocrité. La médiocrité croit tout permettre, elle croit même tout
être, et elle ne s’aperçoit pas que, dans son morne climat, les plus nobles façons d’exister
s’étiolent peu à peu. Il est curieux et presque plaisant qu’en un temps où on ne lui parle
que de liberté, l’individu soit près de perdre la plus importante, qui est celle de ne pas vivre
comme tout le monde. Il est évident qu’aujourd’hui la foule voit sans faveur et, autant qu’il
dépend d’elle, cherche à empêcher des genres de vie qui ne sont pas conformes au sien.
C’est ainsi que les ordres religieux sont à peine soufferts, parce que les principes sur
lesquels ils se constituent bravent les préférences et les goûts de la multitude. Cet empire
de la médiocrité va bien plus loin qu’on ne croit. Qu’un homme exceptionnel se présente,
aussitôt le médecin et l’aliéniste ont l’œil sur lui et sont prêts à lui trouver ces dispositions
maladives que seuls les gens médiocres ne présenteront jamais. L’homme moderne a
pris toutes ses précautions contre le sublime. Il en était autrement au moyen âge ;
les hommes y attendaient perpétuellement quelqu’un qui les dépassât. Cela les exposait à
bien des erreurs et à bien des risques, mais il y avait des portes ouvertes là où, maintenant,
il y a des portes fermées. »
— Abel Bonnard, Saint François d’Assise (1929), éd. Flammarion, 1929, p.
« Le sentiment qu’on trouve au fond de certaines amitiés, parmi les plus solides et les plus
réelles, c’est l’avidité d’une âme qui, ne pouvant tout être à elle seule, veut s’augmenter de
ce que sont les autres. Un homme médiocre ne saurait se concevoir une autre vie que celle
qu’il a, et où il épuise tout ce qu’il est : il choisit donc ses amis parmi ses pareils. Dès qu’un
homme arrive, au contraire, à une certaine richesse intérieure, il sent bien que ce qu’il a fait
n’exprime pas toute sa nature et qu’il reste en lui, au-dessous des facultés qu’il discipline et
qu’il organise, tout un fonds confus qui aurait pu fournir leur substance à des personnages
qu’il n’aura pas portés jusqu’au jour. A ces fantômes de lui-même répondent les personnes
de ses amis. C’est par eux qu’il se complète. Ils sont comme nos délégués et nos
remplaçants à tous les genres d’activité que nous n’avons pu exercer et, quand nous nous
trouvons dans leur compagnie, nous annexons leur expérience à la nôtre. Ainsi nous
choisissons nos amis selon ce que nous sommes et selon ce que nous n’avons pas pu être,
selon nos affinités et nos nostalgies. »
— Abel Bonnard, L’Amitié (1928), éd. Éditions du Trident, 2000, p. 31-32
« Maintenant nous pouvons comprendre la vraie fonction de nos amis : ils ne sont pas nos
alliés dans la bataille des intérêts, mais ils le sont dans la bataille des caractères. Ils
prennent la vie comme nous. De là vient que nous supportons aisément qu’ils aient
d’autres idées que les nôtres. Outre que ces dissentiments intellectuels peuvent avoir une
fin, notre ami se rangeant à notre opinion, ou nous à la sienne, ils ne touchent pas au fond
des natures. Mais très libres de différer sur les grands sujets, nous avons absolument
besoin d’être d’accord avec nos amis dans les petites choses. Car les natures se révèlent
dans ces occasions imprévues, nous y pouvons tâter l’étoffe dont chaque homme est fait,
et quand il s’agit de ceux que nous aimons, nous avons besoin de sentir que c’est de la
soie. Qu’un de nos amis s’oppose à nous dans une question de philosophie ou d’art, cela
nous procurera le plaisir de faire de belles armes ensemble. Mais qu’un homme soit dur
avec un pauvre, grossier avec une femme, brutal avec un inférieur, quand même il nous
aurait donné d’autre part toutes les approbations possibles, il n’est pas de notre race, nous
n’avons rien de commun avec lui. Car si les amitiés se développent sur le plan de l’esprit,
elles se forment ailleurs. »
— Abel Bonnard, L’Amitié (1928), éd. Éditions du Trident, 2000, p. 24-25
« Le monde moderne est le monde de l’argent : c’est la plus brève façon de dire
qu’il n’a plus d’âme. »
— Abel Bonnard, L’Argent (1928), éd. Éditions du Trident, 2000, p. 121
« [...] l’homme qui vit dans les mots. [...] le funeste bavard qui ne sait plus rien
respecter ; il parle, pérore, décrète, détruit, il défait les mœurs en faisant des
lois : c’est le barbare artificiel qui est la suprême création du monde
moderne. »
— Abel Bonnard, Éloge de l’ignorance (1926), éd. Pardès, 2019, p. 55
« Apprendre, c’est se séparer. [...]. On coupe toutes les communications tortueuses par où il
recevait de la sagesse. On le condamne à verser un mépris idiot sur ceux dont il est sorti,
et, en excitant sa vanité personnelle, on l’expose à des risques d’erreur et d’égarement
qu’ils n’ont pas courus. Le paysan qui cite un proverbe ne prétend point l’avoir inventé ; il
se borne à présenter, en le contresignant modestement au nom de sa propre expérience, le
diplôme de sagesse où pend le sceau royal de sa race. Mais celui qui se croit instruit
n’accepte plus d’être si modeste. Il lui faut des opinions qui ne soient qu’à lui, et conduit,
pour prouver son indépendance, à prendre le contre-pied de tout ce que ses pères ont
pensé, il ne lui reste bientôt plus d’autres ressource, au lieu d’être sage avec tous les siens,
que d’être sot à lui seul. Un peuple qui, dans sa masse, n’était que bon sens, peut ainsi se
morceler en une quantité de raisonneurs qui déraisonnent. »
— Abel Bonnard, Éloge de l’ignorance (1926), éd. Pardès, 2019, p. 51-52
« L’ignorance, au contraire, fait de grands rêves ; elle croit à la variété des êtres et à la
richesse des choses. [...] Le charme des contes populaires vient précisément de là. [...] Le
Bon Sens et l’Imagination, voilà le couple qui règne sur l’âme populaire [...]. »
— Abel Bonnard, Éloge de l’ignorance (1926), éd. Pardès, 2019, p. 45
« Nous en avons tous connu, de ces ignorants qu’on veut nous forcer à
mépriser, hommes attachés à une terre ou à un outil, vieilles femmes consacrées
aux soins du foyer, comme des prêtresses obscures. Souvent ils ne savaient ni lire ni écrire.
Étaient-ils pour cela hésitants, perdus dans le vaste monde ? Au contraire, fermement
établis à leur place, patriarches et magistrats dans leur famille, maîtres dans leur art, ils
nous apparaissent parmi les personnages les plus imposants que nous ayons rencontrés.
C’est qu’en vérité il est plus d’une manière de se rattacher à l’âme universelle. Ces
ignorants de la science étaient des savants de la vie. »
— Abel Bonnard, Éloge de l’ignorance (1926), éd. Pardès, 2019, p. 41
« [...] le mot de Science est une des idoles du temps. Ce mot reste dans la tête de
ceux à qui l’on n’a précisément rien appris. [...] Ils croient à la Science, sans
rien savoir. »
— Abel Bonnard, Éloge de l’ignorance (1926), éd. Pardès, 2019, p. 40
« [...] regardons un âge finir. Une laideur uniforme s’étend sur toute la terre. La fête de la
vie s’éteint et ce changement s’opère avec une rapidité dont on est saisi. [...] Ainsi s’en va,
maintenant, la beauté du monde. [...] Cette immense décoloration annonce la fin d’une
époque. Ce qui se perd, c’est tout ce que l’homme avait acquis, conquis sur soi-même, tout
ce qui était hiérarchie, mœurs, discipline, et il ne reste, à la place que la monotonie des
appétits. [...] Le monde s’unifie, il ne s’unit pas. Sous une laideur également partagée, les
peuples sont plus défiants et plus jaloux que jamais, mais à présent, chacun ne défend
qu’une âme sans trésors et sans parures. »
— Abel Bonnard, En Chine (1924), éd. Fayard, 1924, p. 341-343
« C’est quand on pouvait douter que l’égalité entre les individus eût relevé la valeur de
l’homme, qu’on voit tous les peuples vouloir être égaux. [...] On croit voir recommencer la
même pièce [la Révolution française], mais jouée par des géants. Alors que les principes du
monde moderne étaient près d’être jugés sur le résultat d’une première épreuve, une autre
expérience s’institue, plus vaste, plus sommaire encore, véritablement effrayante par son
caractère universel. »
— Abel Bonnard, En Chine (1924), éd. Fayard, 1924, p. 339-340
« En même temps qu’il exerçait une politique de domination, l’homme blanc répandait des
idées d’égalité : il fallait qu’un jour ses doctrines vinssent s’opposer à ses actes. [...] Toutes
les races ont été convoquées à l’égalité. »
— Abel Bonnard, En Chine (1924), éd. Fayard, 1924, p. 338-339
« Parmi toutes les causes de faiblesse qui affectent l’action des nations
blanches, la plus profonde, de beaucoup, est de n’avoir pas de doctrine. [...] Sa
faiblesse intime [l’homme blanc], essentielle, est dans son esprit : il manque d’une source
où puiser l’âme de ses actes. C’est seulement lorsqu’il se sera refait une doctrine qu’il sera,
à la fois, plus noble et plus fort. »
— Abel Bonnard, En Chine (1924), éd. Fayard, 1924, p. 278-340
JACQUES BENIGNE BOSSUET
« [...] encore que la nature en nous faisant croître par certains progrès, nous fasse espérer
enfin la perfection, et qu’elle semble n’ajouter tant de traits nouveaux à l’ouvrage qu’elle a
commencé que pour y mettre en son temps la dernière main, néanmoins nous ne sommes
jamais tout à fait formés. Il y a toujours quelque chose en nous que l’âge ne mûrit point ; et
c’est pourquoi les faiblesses et les sentiments de l’enfance s’étendent toujours
bien avant, si l’on n’y prend garde, dans toute la suite de la vie. »
— Jacques-Bénigne Bossuet, « Sermon pour le mardi de la IIe semaine de Carême — Sur
l’Honneur » (1666), dans Œuvres complètes de Bossuet, éd. Louis Vivès, 1862-1875, t.
IX, p. 137
« Le plus grand déréglement de l’esprit, c’est de croire les choses, parce qu’on
veut qu’elles soient, et non parce qu’on a vu qu’elles sont en effet. »
— Jacques-Bénigne Bossuet, « Traité de la connaissance de Dieu et de soi-
même » (posthume, 1741), dans Œuvres complètes de Bossuet, éd. Louis Vivès, 1862-
1875, t. XXIII, p. 69
« C’était le plus grand de tous les crimes, crime jusqu’alors inouï, c’est-à-dire
le déicide, qui aussi a donné lieu à une vengeance dont le monde n’avait vu encore aucun
exemple. [...]
Voilà l’histoire des juifs. Ils ont persécuté leur Messie, et en sa personne et en celle des
siens : ils ont remué tout l’univers contre ses disciples, et ne les ont laissés en repos dans
aucune ville : ils ont armé les Romains et les empereurs contre l’Église naissante : ils ont
lapidé saint Étienne, tué les deux Jacques, que leur sainteté rendait vénérable même parmi
eux ; immolé saint Pierre et saint Paul par l’épée et par les mains des Gentils. Il faut qu’ils
périssent. Tant de sang mêlé à celui des prophètes qu’ils ont massacrés, crie vengeance
devant Dieux [...].
Jérusalem, cité bienheureuse que le Seigneur avait choisie, tant qu’elle demeura dans
l’alliance et dans la foi des promesses, fut la figure de l’Église, et la figure du ciel où Dieu se
fait voir à ses enfants. [...] mais Jérusalem réprouvée, et ingrate envers son Sauveur, devait
être l’image de l’enfer : ses perfides citoyens devaient représenter les damnés ; et le
jugement terrible que Jésus Christ devait exercer sur eux était la figure de celui qu’il
exercera sur tout l’univers, lorsqu’il viendra à la fin des siècles, en sa majesté, juger les
vivants et les morts. »
— Jacques-Bénigne Bossuet, « Discours sur l’Histoire universelle » (1681), dans Œuvres
complètes de Bossuet, éd. Louis Vivès, 1862-1875, vol. I, p. 486-489
« Quand une fois on a trouvé le moyen de prendre la multitude par l’appât de
la liberté, elle suit en aveugle, pourvu qu’elle en entende seulement le nom. »
— Jacques-Bénigne Bossuet, « Oraison funèbre de Henriette-Marie de France » (1670),
dans Œuvres complètes de Bossuet, éd. Louis Vivès, 1862-1875, t. XII, p. 435
« Mais Dieu se rit des prières qu’on lui fait pour détourner les malheurs publics, quand on
ne s’oppose pas à ce qui se fait pour les attirer. Que dis-je ? quand on l’approuve et qu’on y
souscrit, quoique ce soit avec répugnance. »
— À propos de Philippe Mélanchthon, embarrassé en 1531 par la guerre qui s’annonce,
suite à la publication de la Confession d’Augsbourg qu’il a rédigé
— Jacques-Bénigne Bossuet, « Histoire des variations des églises protestantes » (1688),
dans Œuvres complètes de Bossuet, éd. Louis Vivès, 1862-1875, t. XIV, p. 145
« Mes Frères, cet objet lugubre d’un chrétien captif dans les prisons des mahométans, me
jette dans une profonde considération des grands et épouvantables progrès de cette
religion monstrueuse. O Dieu, que le genre humain est crédule aux imposture de Satan ! O
que l’esprit de séduction et d’erreur a d’ascendant sur notre raison ! Que nous portons en
nous-mêmes, au fond de nos cœurs, une étrange opposition à la vérité, dans nos
aveuglements, dans nos ignorances, dans nos préoccupations opiniâtres. Voyez comme
l’ennemi du genre humain n’a rien oublié pour nous perdre, et pour nous faire embrasser
des erreurs damnables. Avant la venue du Sauveur, il se faisait adorer par toute la terre
sous les noms de ces fameuses idoles devant lesquelles tremblaient tous les peuples ; il
travaillait de toute sa force à étouffer le nom du vrai Dieu. Jésus-Christ et ses martyrs l’ont
fait retentir si haut depuis le levant jusqu’au couchant, qu’il n’y a plus moyen de l’éteindre
ni de l’obscurcir. Les peuples qui ne le connaissaient pas, y sont attirés en foule par la croix
de Jésus-Christ ; et voici que cet ancien imposteur, qui dès l’origine du monde est en
possession de tromper les hommes, ne pouvant plus abolir le saint nom de Dieu,
frémissant contre Jésus-Christ qui l’a fait connaître à tout l’univers, tourne toute sa furie
contre lui et contre son Evangile : et trouvant encore le nom de Jésus trop bien établi dans
le monde par tant de martyrs et tant de miracles, il lui déclare la guerre en faisant semblant
de le révérer, et il inspire à Mahomet, en l’appelant un prophète, de faire passer sa doctrine
pour une imposture ; et cette religion monstrueuse, qui se dément elle-même, a pour
toute raison son ignorance, pour toute persuasion sa violence et sa tyrannie, pour tout
miracle ses armes, armes redoutables et victorieuses, qui font trembler tout le monde, et
rétablissent par force l’empire de Satan dans tout l’univers. »
— Jacques-Bénigne Bossuet, « Panégyrique de Saint Pierre Nolasque » (1665),
dans Œuvres complètes de Bossuet, éd. Louis Vivès, 1862-1875, t. XII, p. 94-95
—
RAY BRADBURY
« Montag considéra le fleuve. Nous nous laisserons guider par le fleuve. Il considéra
l’ancienne voie ferrée. Ou nous suivrons les rails. Ou nous marcherons sur les autoroutes
maintenant, et nous aurons le temps d’emmagasiner des choses. Et un jour, quand elles se
seront décantées en nous, elles resurgiront par nos mains et nos bouches. Et bon nombre
d’entre elles seront erronées, mais il y en aura toujours assez de valables. »
— Ray Bradbury, Fahrenheit 451 (1953), éd. Gallimard, coll. « Folio SF », 2001 (ISBN
9782070415731), p. 208
« Nous transmettrons les livres à nos enfants oralement, et les laisserons rendre à leur tour
ce service aux autres. Beaucoup de choses seront perdues, naturellement. Mais on ne peut
pas forcer les gens à écouter. »
— Ray Bradbury, Fahrenheit 451 (1953), éd. Gallimard, coll. « Folio SF », 2001 (ISBN
9782070415731), p. 198
« — Du temps libre, oui. Mais du temps pour réfléchir ? [...] il vous est impossible de
discuter avec les quatre murs du téléviseur. Pourquoi ? Le téléviseur est “réel”. Il est
là, il a de la dimension. Il vous dit quoi penser, vous hurle à la figure. Il doit avoir raison,
tant il paraît avoir raison. Il vous précipite si vite vers ses propres conclusions que votre
esprit n’a pas le temps de se récrier : “Quelle idiotie !” [...]
— Ma femme dit que les livres ne sont pas “réels”.
— Dieu merci ! Vous pouvez les refermer et dire : “Pouce !” Vous jouez au dieu en la
circonstance. Mais qui s’est jamais arraché aux griffes qui vous enserrent quand on sème
une graine dans un salon-télé ? Celui-ci vous façonne à son gré. Il constitue un
environnement aussi réel que le monde. Il devient, il est la vérité. On peut rabattre son
caquet à un livre par la raison. Mais en dépit de tout mon savoir et de tout mon
scepticisme, je n’ai jamais été capable de discuter avec un orchestre symphonique de cent
instruments, en technicolor et trois dimensions, dans un de ces incroyables salons dont on
fait partie intégrante. »
— Ray Bradbury, Fahrenheit 451 (1953), éd. Gallimard, coll. « Folio SF », 2001 (ISBN
9782070415731), p. 116-117
« Et les musées, y êtes-vous jamais allé ? Rien que de l’abstrait. C’est tout ce
qu’il y a aujourd’hui. Mon oncle dit que c’était différent autrefois. Jadis il y
avait des tableaux qui exprimaient des choses ou même représentaient
des gens. »
— Ray Bradbury, Fahrenheit 451 (1953), éd. Gallimard, coll. « Folio SF », 2001 (ISBN
9782070415731), p. 54
ROBERT BRASILLACH
« Quant à l’histoire, elle est écrite pas les vainqueurs, quels qu’ils soient. »
— Robert Brasillach, « Les Frères ennemis » (octobre 1944), dans Œuvres complètes, éd.
Club de l’honnête homme, 1964, vol. 9, p. 138
« Mon pays m’a fait mal par ses routes trop pleines,
Par ses enfants jetés sous les aigles de sang,
Par ses soldats tirant dans les déroutes vaines,
Et par le ciel de juin sous le soleil brûlant.
Mon pays m’a fait mal par tous ses doubles jeux,
Par l’océan ouvert aux noirs vaisseaux chargés,
Par ses marins tombés pour apaiser les dieux,
Par ses liens tranchés d’un ciseau trop léger.
« Ils sont là, en tout cas, et par la force des choses, ils sont jeunes. Certains d’entre eux ont
souffert de la guerre enfants, d’autres des révolutions de leur pays, tous de la crise. Ils
savent ce qu’est leur nation, son passé, ils veulent croire à son avenir. Ils voient miroiter
sans arrêt devant eux le scintillement impérial. Ils veulent une nation pure, une histoire
pure, une race pure. Ils aiment souvent à vivre ensemble, dans ces immenses réunions
d’hommes où les mouvements rythmés des armées et des foules semblent les pulsations
d’un vaste coeur. Ils ne croient pas aux promesses du libéralisme, à l’égalité des
hommes, à la volonté du peuple. [...] Ils ne croient pas à la justice qui
s’épanche dans les paroles, mais ils appellent la justice qui règne par la force.
Et ils savent que de cette force pourra naître la joie. »
— Robert Brasillach, Les Sept Couleurs (1939), éd. Godefroy de Bouillon, 1999 (ISBN
9782841910984), p. 170-171
« Pour moi, mon pays était vaincu, toutes les tentatives de redressement mesquines,
larmoyantes, les socialistes maîtres de la nation, les Juifs partout. Vous n’avez pas connu
Berlin, les pétitions pour autoriser les mariages entre hommes, les femmes en bottes et à
cravache sur le Kurfurstendamm, la morphine débitée presque ouvertement, un mélange
affreux de vice et de ridicule. Et toute la pourriture de la philosophie, de la littérature, de la
musique, du cinéma. »
— Robert Brasillach, Les Sept Couleurs (1939), éd. Godefroy de Bouillon, 1999 (ISBN
9782841910984), p. 113
—
ALBERT CAMUS
« L’humanité, aujourd’hui, n’a besoin et ne se soucie que de techniques. »
— Albert Camus, L’Été (1954), éd. Gallimard, coll. « Folio », 1972 (ISBN
9782070360161), Prométhée aux Enfers, p.
« Il n’y a qu’un problème philosophique vraiment sérieux : c’est le suicide. Juger que la vie
vaut ou ne vaut pas la peine d’être vécue, c’est répondre à la question fondamentale de la
philosophie. »
— Albert Camus, Le Mythe de Sisyphe (1942), éd. Gallimard, coll. « Folio
Essais », 2001 (ISBN 9782070322886), p. 17
« Et moi aussi, je me suis senti prêt à tout revivre. Comme si cette grande colère m’avait
purgé du mal, vidé d’espoir, devant cette nuit chargée de signes et d’étoiles, je m’ouvrais
pour la première fois à la tendre indifférence du monde. De l’éprouver si pareil à
moi, si fraternel enfin, j’ai senti que j’avais été heureux, et que je l’étais encore. Pour que
tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu’il y ait
beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu’ils m’accueillent avec des cris de
haine. »
— Albert Camus, L’Étranger (1942), éd. Gallimard, coll. « Folio », 1971, p. 185-186
« Bien entendu, le véritable amour est exceptionnel, deux ou trois fois par siècle à peu près.
Le reste du temps, il y a la vanité ou l’ennui. »
— Albert Camus, La Chute (1956), éd. Gallimard, coll. « Folio », 1972, p. 62
« Si l’on ne croit à rien, si rien n’a de sens et si nous ne pouvons affirmer aucune valeur,
tout est possible et rien n’a d’importance. Point de pour ni de contre, l’assassin n’a ni tort,
ni raison. On peut tisonner les crématoires comme on peut aussi se dévouer à soigner les
lépreux. Malice et vertu sont hasard ou caprice. »
— Albert Camus, L’Homme révolté (1951), éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 1959, p. 15
ALEXIS CARREL
« Après tout, c’est le développement de la personnalité humaine qui est le but suprême de
la civilisation. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 389
« Les sexes doivent de nouveau être nettement définis. Il importe que chaque individu soit,
sans équivoque, mâle ou femelle. Que son éducation lui interdise de manifester les
tendances sexuelles, les caractères mentaux, et les ambitions du sexe opposé. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 384
« Il est évident que les inégalités individuelles doivent être respectées. Il y a, dans la société
moderne, des fonctions appropriées aux grands, aux petits, aux moyens et aux inférieurs.
Mais il ne faut pas chercher à former les individus supérieurs par les mêmes procédés que
les médiocres. Aussi la standardisation des êtres humains par l’idéal démocratique a assuré
la prédominance des faibles. Ceux-ci sont, dans tous les domaines, préférés aux forts. Ils
sont aidés et protégés, souvent admirés. Ce sont également les malades, les criminels, et
les fous qui attirent la sympathie du public. C’est le mythe de l’égalité, l’amour du symbole,
le dédain du fait concret qui, dans une large mesure, est coupable de l’affaiblissement de
l’individu. Comme il était impossible d’élever les inférieurs, le seul moyen de produire
l’égalité parmi les hommes était de les amener tous au plus bas niveau. Ainsi disparu la
force de la personnalité. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 329
« Certes, les êtres humains sont égaux. Mais les individus ne le sont pas. L’égalité de leurs
droits est une illusion. Le faible d’esprit et l’homme de génie ne doivent pas être égaux
devant la loi. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 328
« [...] la civilisation a pour but, non pas le progrès de la science et des machines, mais celui
de l’homme. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 279
« Nous assistons à notre faillite morale, intellectuelle et sociale. Nous n’en saisissons
qu’incomplètement les causes. Nous avons nourri l’illusion que les démocraties pouvaient
survivre grâce aux efforts courts et aveugles des ignorants. Nous voyons qu’il n’en est rien.
La conduite des nations par des hommes, qui évaluent le temps en fonction de leur propre
durée, mène, comme nous le savons, à un immense désarroi et à la banqueroute. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 224
« L’attitude des touristes qui profanent les cathédrales d’Europe montre à quel
point la vie moderne a oblitéré le sens religieux. L’activité mystique a été bannie de
la plupart des religions. Sa signification même a été oubliée. À cet oubli est liée
probablement la décadence des églises. Car la vie d’une religion dépend des foyers
d’activité mystique qu’elle est capable de créer. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 158
« [...] la plupart des villes et villages de France ont été déshonorés par un hideux
commercialisme. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 156
« Notre vie est influencée dans une très large mesure par les journaux. La publicité est faite
uniquement dans l’intérêt des producteurs, et jamais des consommateurs. Par exemple, on
a fait croire au public que le pain blanc est supérieur au brun. [...] Des sommes énormes
sont dépensées pour la publicité commerciale. Aussi des quantités de produits alimentaires
et pharmaceutiques, inutiles, et souvent nuisibles, sont-ils devenus une nécessité pour les
hommes civilisés. C’est ainsi que l’avidité des individus assez habiles pour diriger le goût
des masses populaires vers les produits qu’ils ont à vendre, joue un rôle capital dans notre
civilisation. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 28-29
« On dirait que la civilisation moderne est incapable de produire une élite douée à la fois
d’imagination, d’intelligence et de courage. Dans presque tous les pays, il y a une
diminution du calibre intellectuel et moral chez ceux qui portent la responsabilité de la
direction des affaires politiques, économiques et sociales. »
— Alexis Carrel, L’Homme, cet inconnu (1935), éd. Plon, 1935, p. 23
—
LOUIS FERDINAND CELINE
« L’agresseur hurle qu’on l’égorge ! Le truc est vieux comme Moïse. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p.
« Ce sont les Juifs qui commandent... Le monde commandé par les Juifs, c’est un
enfer pour les Aryens... sans abus, textuellement un enfer ! avec les flammes !
des crapauds partout ! d’éternelles tortures... des révolutions, des guerres, des
boucheries, à n’en plus finir... les unes dans les autres, et les Juifs toujours au fond de
toute la musique !... toujours en train d’en remettre, délirer, de comploter d’autres calvaires
pour nos viandes... d’autres abracadabrants massacres, d’en puruler ! insatiables ! toujours
agioteurs ! Voyeurs ! Bandocheurs ! effrénément... c’est leur vie !.. leur raison d’être... Ils
crucifient. Voilà, j’ai tout dit, je pense... les Juifs. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 324
« Moi je voudrais bien faire une alliance avec Hitler. Pourquoi pas ? Il a rien dit contre les
Bretons, contre les Flamands... Rien du tout... Il a dit seulement sur les Juifs... il les aime pas
les Juifs... Moi non plus... J’aime pas les nègres hors de chez eux... C’est tout. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 317
« La Terre est le Paradis des Juifs. Ils ont tout. Ils peuvent tout se permettre. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 232
« Les écrivains, comme les écrivaines, pareillement enfiotés de nos jours, enjuivés,
domestiqués jusqu’aux ventricules depuis la Renaissance, n’ont de cesse, s’évertuent,
frénétiques au “délicat”, au “sensible”, à “l’humain”... comme ils disent... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 218-
219
« Amener tous les goyes à bien s’enculer. Pourrir soigneusement leur élite, leur bourgeoisie
par l’apologie de toutes les inversions, les snobismes, les vanités, les énerver, les gangrener,
les ridiculiser de telle manière qu’à la moindre secousse du prolétariat que les Juifs auront
parfaitement, méticuleusement dopé d’avance, farci de haine et d’envie, cette prétendue
élite, bascule tout au fond de son cloaque. Une bonne chasse au sang, et tout sera dit !...
emporté dans l’égout !... un vertige !... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 215
« Pourquoi n’aurais-je pas le droit, dans mon pays, de hurler que je n’aime pas les Juifs ?
Les francs-maçons se gênent-ils pour mener une guerre à mort contre les curés ? Nous
sommes en fascisme juif. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 202
« L’immense astuce des Juifs consiste à enlever progressivement aux foules à standardiser
tout goût pour l’authentique et puis aux artistes autochtones toute possibilité d’exprimer,
de communiquer leur sensibilité à leurs frères de race, de réveiller chez eux quelque
authentique émotion. Les Juifs, revanche des Abyssins ! ont inverti le goût des blancs, à ce
point, si profondément, que les Français préfèrent à présent le faux à l’authentique, la
grimace à la sensibilité, à l’émotion directe le mimétisme imbécile. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 186
« Le Standard en toutes choses, c’est la panacée du Juif. Plus aucune révolte à redouter des
individus pré-robotiques, que nous sommes, nos meubles, romans, films, voitures, langage,
l’immense majorité des populations modernes sont déjà standardisés. La civilisation
moderne c’est la standardisation totale, âmes et corps sous le Juif. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 185
« Le Juif tient tous les gouvernements, il commande toutes les machines à standardiser, il
possède tous les câbles, tous les courants, demain tous les Robots. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 184
« Les Juifs [...] achèvent à présent, en pleine forme, sous le même étendard, leur conquête
du monde, l’écrasement monstrueux, l’avilissement, annihilement systématique et total, de
nos plus naturelles émotions de tous nos arts essentiels, instinctifs, musique, peinture,
poésie, théâtre... “Remplacer l’émotion aryenne par le tam-tam nègre.” »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 170
« Seuls les Juifs, peuvent à toute heure, tout moment, pénétrer, filtrer, s’installer dans tous
les Etats du monde, ils jouissent en tout et partout, des mêmes privilèges exactement que
les citoyens romains d’autrefois à travers tout leur Empire... Les Juifs sont chez eux,
partout... dès lors c’est justice !... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 156
« Une fois retournés chez eux, les mêmes, exactement les mêmes vendus, comment qu’ils
foncent à la police, exiger, supplier qu’on renforce les restrictions, sévérise l’immigration,
tourne la vis ! »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 153
« Il n’existe en tout au monde qu’une seule vraie internationale, c’est la raciale tyrannie
juive, bancaire, politique absolue... Celle-là, est internationale ! on peut le dire ! sans
interruption, sans une défaillance, totale, d’Hollywood, de Wall-Street la youtre, de
Washington [...]. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 152
« Le monde est une Société anonyme, un Trust dont les Juifs possèdent toutes les actions.
Trust à filiales : “La Communiste”... “La Royaliste”... “La Démocratique” et peut-être bien “La
Fasciste”. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 112
« La femme est une traîtresse-chienne née... autant que le Juif est escroc
né... La femme, surtout la Française, raffole des crépus, des Abyssins, ils vous ont des bites
surprenantes ! Ils sont si vicieux, si câlins. Ils comprennent si bien les femmes !... Ah ! cet
Orient !... c’est autre chose !... Cocus des tranchées, pauvre viande “kachère !” vous ne serez
pas oubliés ! vous serez pompés, happés, déglutis, fondus dans la Victoire Juive... On vous
arrangera en pensions pour les veuves bien consentantes !... On se régalera avec vos os...
On ira en cars admirer les lieux où vous fûtes sonnés pour les Juifs, on ira guincher sur vos
tombes, vos épouses chéries et les youtres. Ils viendront sur vos charniers, dégueuler le
dimanche, on s’enculera sur votre martyr. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 89
« On a massacré la moitié de la France, la plus jeune, la plus virile pour ravigoter les basses
moelles de quatre magots anatomiques. Il faut ce qu’il faut ! C’est la gloire ! Tous les
grands vampires durent cent ans ! Et la prochaine ce sera bien mieux ! bien plus implacable
encore, bien plus fignolé, plus saignant, plus torrentiel, ça sera la fin du cheptel. La haine
des Juifs pour les animaux que nous sommes est à ce point virulente, d’une telle ardeur
contenue, concentrée, que nous serons projetés, embrasés, dépiautés, éparpillés dans la
mitraille, tout vifs, avant d’avoir tiqué d’un œil... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 87
« La guerre pour la bourgeoisie c’était déjà bien fumier, mais la guerre maintenant pour les
Juifs ! Je peux pas trouver d’adjectifs qui soient vraiment assez glaireux, assez
myriakilogrammiques en chiasse [...]. [...] Une guerre pour la joie des Juifs ! C’est vraiment
bouffer leur gangrène, leurs pires bubons. Je peux pas imaginer une humiliation qui soye
pire que de se faire crever pour les youtres, je ne vois rien de plus ignoble, de plus
infamant. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 86
« Communisme tant qu’on voudra, mais sans les Juifs, jamais avec les Juifs. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 82
« Aux premières triomphales clameurs saluant “l’affranchissement des masses”, les voilà
qu’eux aussi, tressaillent, s’ébranlent et foncent en trombes sur la France, de partout. Ils
frémissent déjà sahez-le dans les transes là-bas... aux moindres rumeurs. Au signal que la
“Bête est morte !”... Ils laissent tomber Tel-Aviv... Ils s’envolent du Kamtchatka... Ils jaillissent
de Silésie... des tréfonds Bessarabiens... des bords de la Chine, des bourbes d’Ukraine, des
Insulindes, de tous les égouts d’Amérique... Ils pullulent par toutes les routes pour les rats.
Ils se précipitent par myriades... Ils dévalent...ils comblent... Charles Martel n’avait rien
vu !... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 77
« En fait de victimes regardez donc les Juifs un peu à travers les âges... à travers tant et tant
de guerres (une si petite population), ils s’en sont pas trop mal tirés, la preuve, ils ont
jamais trop pâti ils l’ont jamais eue si mauvaise que ces billes d’Aryens. Pleurer ça
conserve !... Ils volent pas beaucoup aux combats. Ils suivent plutôt ça dans les Bourses !
Hécatombes ? Hécatombes ? Reports... Reports... Transferts... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 73
« Les Juifs sont plutôt mal doués pour les arts, biologiquement, du fond même de leur
nature. Ils essayent de faire de l’art, en Europe tout au moins ils y parviennent mal et de
travers... Il faut qu’ils suppléent, qu’ils trichent, qu’ils pillent sans cesse, qu’ils sucent les
voisins, les autochtones pour se soutenir... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 69
« Pour parler du maximum, pour bien illustrer les choses, si Einstein n’était pas youtre, si
Bergson n’était pas coupé, si Proust n’était que breton, si Freud n’avait pas la marque... on
en parlerait pas beaucoup ni des uns ni des autres... ça serait pas du tout ces génies qui
font lever le soleil !... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 66
« Aucun satrape aryen ne dure, ne peut durer. Ils ne brandissent les uns les autres,
pour exalter leurs troupeaux de buffles, que de médiocres mystiques, régionales,
rétriquées, défensives... Vous verrez Hitler ! La mesure du monde actuel, ce sont
des mystiques mondiales dont il faut se prévaloir ou disparaître... Napoléon
l’avait compris. [...]
Napoléon a fait tout son possible, des prodiges, pour que les blancs ne cèdent pas l’Europe
aux nègres et aux asiates. Les Juifs l’ont vaincu. Depuis Waterloo le sort en est jeté. A
présent, le coup n’est plus le même, ils ne sont pas chez nous les Juifs. C’est nous qui
sommes chez eux. Depuis l’avènement de la Banque Rothschild, les Juifs ont repris partout
la forte idée... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 59-60
« Comment se fabriquent, je vous demande, les idoles dont se peuplent tous les rêves des
générations d’aujourd’hui ? Comment le plus infime crétin, le canard le plus
rebutant, la plus désespérante donzelle, peuvent-ils se muer en dieux ?...
déesses ? recueillir plus d’âmes en un jour que Jésus-Christ en deux mille
ans ?... Publicité ! Que demande toute la foule moderne ? Elle demande à se mettre à
genoux devant l’or et devant la merde !... Elle a le goût du faux, du bidon, de la farcie
connerie, comme aucune foule n’eut jamais dans toutes les pires antiquités... Du coup, on
la gave, elle en crève... Et plus nulle, plus insignifiante est l’idole choisie au départ, plus elle
a de chances de triompher dans le cœur des foules... mieux la publicité s’accroche à sa
nullité, pénètre, entraîne toute l’idolâtrie... Ce sont les surfaces les plus lisses qui prennent
le mieux la peinture. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 53-54
« Ils les connaissent eux, dans les coins, les secrets de l’opinion publique les youtres qui
dirigent l’Univers, ils ont toutes les ficelles en mains. Propagande, or, publicité, radio,
presse, “petites enveloppes”, cinéma. D’Hollywood la juive à Moscou la youtre, même
boutique, même téléphone, mêmes agences, mêmes youtres aux écoutes, à la caisse, aux
affaires [...]. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 53
« Le Juif était moins que rien au temps de Néron, il est en passe de devenir tout... En
Russie, ce miracle est accompli... En France, presque... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 50
« Hollywood, ses secrets, ses intentions, ses maîtres, son cosmique battage, son
fantastique bazar d’international ahurissement, [...] capitale de l’Impérialisme
juif [...]. »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 50
« La seule chose grave à l’heure actuelle, pour un grand homme, savant,
écrivain, cinéaste, financier, industriel, politicien (mais alors la chose
gravissime) c’est de se mettre mal avec les Juifs. [...] Faites le clown, l’insurgé,
l’intrépide, l’anti-bourgeois, l’enragé redresseur de torts... le Juif s’en fout !
Divertissements... Babillages ! Mais ne touchez pas à la question juive, ou bien il va vous en
cuire... »
— Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre (1937), éd. Denoël, 1937, p. 49
“Sex! That’s [what] all the fight is about everybody wants to eat everybody else. That is why
they are afraid of the Blacks. He is strong! Full of strength! He will take over. That is why
they are afraid of him it is his time now, there are too many of them, he is showing his
muscle the white man is afraid he is soft. He has been too long on top the smell stinks to
the roof, and the Black, he feels it, he smells it, and he is waiting for the take-over it won’t
be long now.
It is time for the yellow color the black and the white will mix and the yellow
will dominate, that’s all. It is a biological fact, when black and white mix the yellow
comes out strongest, that is the only thing in two hundred years someone will look
at a statue of a white man and ask if such a strange thing ever existed someone
will answer, 'No, it must have been painted on.'
That is the answer! The white man is a thing of the past he is already finished, extinct! It is
time for something new. They all talk here, but they know nothing let them go over there
and then talk, it is another song there, I was in Africa, I know what it is, it’s very strong, they
know where they are going the white man buried his head too long in the womb he let the
church corrupt him, everybody was taken in you’re not allowed to say anything like that
the Pope is watching, be careful say nothing! heaven forbid NO! It is a sin you’ll be
crucified keep it still be quiet be a nice dog don’t bark don’t bite here is your pap shut up!
There is nothing inside them they are like bulls, wave something to distract them; tits,
patriotism, the church, anything in fact, and they will jump. It doesn’t take much, it is very
easy they want always to be distracted nothing matters life is very easy.”
— (en)« A Talk with L.-F. Céline », Robert Stromberg, Evergreen Review, nº 19, juillet-août
1961
« Sexe ! C’est pour ça qu’on se bat... chacun veut manger l’autre. C’est pour
cela qu’ils redoutent les Noirs. Le Noir est fort ! Plein de force ! Il prendra le
dessus. C’est pour cela qu’ils le redoutent... c’est le moment maintenant, ils
sont trop nombreux, il montre ses muscles... le Blanc est effrayé... Il est mou. Il
a été trop longtemps tout en haut... l’odeur pue sur le toit, et le Noir, il la
perçoit, il la sent, et il attend de prendre le dessus... ça ne sera plus long
maintenant.
C’est l’époque du Jaune... le Noir et le Blanc vont se mélanger et le Jaune
va dominer, c’est tout. C’est un fait biologique, quand le Noir et le Blanc se
mélangent, c’est le Jaune qui sort gagnant c’est tout... dans deux cents ans
quelqu’un regardera une statue d’homme blanc et demandera si quelque
chose d’aussi bizarre a jamais existé... quelqu’un répondra : non, ça doit
être de la peinture.
Voilà la réponse ! L’homme blanc est une chose du passé... il est déjà fini,
éteint ! Quelque chose de nouveau va venir. Ils parlent tous ici, mais ils ne
savent rien... qu’ils aillent là-bas et parlent ensuite... c’est une autre chanson
là-bas, j’ai été en Afrique, je sais ce que c’est, ils sont forts, ils savent où ils
vont... l’homme blanc s’est trop longtemps mis la tête sous l’aile, il a laissé
l’Église le corrompre, tout le monde était pris... vous n’aviez pas le droit de dire
quelque chose comme ça... le pape surveille, fais attention, ne dis rien ! Dieu
interdit... Non, c’est un péché... tu vas être crucifié... reste tranquille... ne
bouge pas, sois un bon chien... n’aboie pas... ne mords pas... voilà ta pâtée... ta
gueule !
Ils n’ont rien en eux... ils sont comme des taureaux... pour les distraire, vous
n’avez qu’à agiter quelque chose : des nichons, le patriotisme, l’Église...
n’importe quoi en fait, ils sauteront. Il n’y a pas besoin de grand-chose, c’est
facile... ils veulent toujours être distraits, rien n’a d’importance... la vie est très
facile.
— (fr)« A Talk with L.-F. Céline », Robert Stromberg (trad. Henri
Godard), Evergreen Review, nº 19, juillet-août 1961
« En bas dans la longue cave-dancing louchante aux cent glaces, elle trépignait
dans la poussière et le grand désespoir en musique négro-judéo-saxonne.
Britanniques et Noirs mêlés. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 72
« Ne croyez donc jamais d’emblée au malheur des hommes. Demandez-leur seulement s’ils
peuvent dormir encore ?... Si oui, tout va bien. Ça suffit. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 429
« D’abord la France n’est pas une race. C’est un pays, une nation. A l’heure actuelle, il y a
moins de Français que sous Louis XIV. Quatorze millions au plus sur quarante millions. Le
reste, c’est du métis. C’est de l’italote, de l’espagnote, du germinote, etc. Les genres sont
tellement mêlés qu’on pourrait retrouver à la rigueur une chose qui ressemblerait à une
ethnie au nord de la Loire et encore... »
— Réponse de Céline à une enquête de Paris-Midi en 1943 sur le thème « La race française
court-elle à son déclin ? »
— Louis-Ferdinand Céline cité par Alain Drouard, Une inconnue des Sciences Sociales, la
Fondation Alexis Carrel 1941-1945, éd. Éditions de la Maison des sciences de l’homme,
1992, p. 134
« La grande défaite, en tout, c’est d’oublier, et surtout ce qui vous a fait crever, et de crever
sans comprendre jamais jusqu’à quel point les hommes sont vaches. Quand on sera au
bord du trou faudra pas faire les malins nous autres, mais faudra pas oublier non plus,
faudra raconter tout sans changer un mot, de ce qu’on a vu de plus vicieux chez les
hommes et puis poser sa chique et puis descendre. Ca suffit comme boulot pour une vie
toute entière. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 25
« Tout ce qui est intéressant se passe dans l’ombre, décidément. On ne sait rien de la
véritable histoire des hommes. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 64
« Si les gens sont si méchants, c’est peut-être seulement parce qu’ils souffrent, mais le
temps est long qui sépare le moment où ils ont cessé de souffrir de celui où ils deviennent
un peu meilleurs. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 74
« L’homme n’est pas longtemps honnête quand il est seul, allez ! Vous verrez ! »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 130
« C’est effrayant ce qu’on en a des choses et des gens qui ne bougent plus dans son passé.
Les vivants qu’on égare dans les cryptes du temps dorment si bien avec les morts qu’une
même ombre les confond déjà. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 169
« Quand la haine des hommes ne comporte aucun risque, leur bêtise est vite convaincue,
les motifs viennent tout seuls. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 117
« Tant qu’il faut aimer quelque chose, on risque moins avec les enfants qu’avec les
hommes, on a au moins l’excuse d’espérer qu’ils seront moins carnes que nous autres plus
tard. On ne savait pas. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 242
« Les êtres vont d’une comédie vers une autre. Entre-temps la pièce n’est pas montée, ils
n’en discernent pas encore les contours, leur rôle propice, alors ils restent là, les bras
ballants, devant l’événement, les instincts repliés comme un parapluie, branlochants
d’incohérence, réduits à eux-mêmes, c’est-à-dire à rien. Vaches sans train. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 261
« Il y a un moment où on est tout seul quand on est arrivé au bout de tout ce qui peut
vous arriver. C’est le bout du monde. Le chagrin lui-même, le vôtre, ne vous répond plus
rien et il faut revenir en arrière alors, parmi les hommes, n’importe lesquels. On n’est pas
difficile dans ces moment-là car même pour pleurer il faut retourner là où tout
recommence, il faut revenir avec eux. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 328
« On explique tout ce qu’on veut avec des “raisons et des mots”, on comprend, on se
penche, on excuse et puis finalement on se fait dépecer à la guerre ou enculer de haut en
large pendant la paix. Le Juif n’explique pas tout, mais il catalyse toute notre déchéance,
toute notre servitude, toute la veulerie râlante de nos masses, il ne s’explique lui, son
fantastique pouvoir, sa tyrannie effarante, que par son occultisme diabolique, dont ni les
uns ni les autres ne voulez être conscients. Le Juif n’est pas tout mais il est le diable et c’est
très suffisant. Le Diable ne crée pas tous les vices — mais il est capable d’engendrer un
monde entièrement, totalement vicieux —
Il n’y a d’antisémitisme réel que le racisme, tout le reste est diversion, babillage,
escroquerie (genre A F) noyade du poisson. »
— Louis-Ferdinand Céline, Lettre à Lucien Combelle, 1938
« Personne ne lui résiste au fond à la musique. On n’a rien à faire avec son cœur, on le
donne volontiers. Faut entendre au fond de toutes les musiques l’air sans notes, fait pour
nous, l’air de la Mort. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 297
« Rabelais a vraiment voulu une langue extraordinaire et riche. Mais les autres, tous, ils l’ont
émasculée cette langue, pour la rendre duhamélienne, giralducienne et mauriacienne.
Ainsi, aujourd’hui, écrire bien, c’est écrire comme Amyot, mais ça, c’est jamais qu’une
langue de traduction.
[...]
C’est ça, la rage moderne du Français : faire et lire les traductions, parler comme dans les
traductions. Moi, y a des gens qui sont venus me demander si je n’avais pas pris tel ou tel
passage dans Joyce. Oui, on me l’a demandé ! C’est l’époque... Parce que l’anglais, hein,
c’est à la mode... Moi, je parle anglais parfaitement, comme le français. Aller prendre
quelque chose dans Joyce. Non, je le parle pas, ce putain de langage qui me fait chier...
Comme Rabelais, j’ai tout trouvé en français.
[...]
Il devait pas croire beaucoup en Dieu, mais il osait pas le dire. D’ailleurs, il a pas mal fini : il
a pas eu de supplice. Ca a été après, le supplice, quand on a académisé et égorgé le
français qu’il parlait, pour en faire une littérature de bachot et de brevet élémentaire.
[...]
Même Balzac a rien ressuscité. C’est de l’académisme, plat, plat ! C’est la victoire de la
raison. La raison ! Faut être fou ! On peut rien faire comme ça, tout émasculé. Ils me font
rire. »
— Louis-Ferdinand Céline, Entretien avec Guy Bechtel de 1958
« J’étais profondément contre la guerre et je l’ai faite. J’étais héros comme Darnand,
comme des milliers d’autres. La France d’avant 14 et d’après 14, c’est différent. Avant 14,
c’est des somnambules, après, c’est des analystes.
Alors ils tombent dans la série Sartre, Camus... Ils croient qu’il vaut mieux “penser”. Tandis
qu’en 14, il y avait un devoir, et on le faisait. Des choses que vous n’avez pas connues, vous
êtes trop jeunes. Il y avait la vertu. Les femmes étaient vertueuses, les hommes étaient
braves et travailleurs. Sans ça, c’était des monstres. Il y avait la putain, il y avait le bordel,
on l’a supprimé aujourd’hui J’ai promené à travers le monde, parce que j’ai beaucoup
voyagé, des missions de médecins sud-américains qui étaient bien intelligents et ils me
disaient : “La civilisation de l’Europe tient sur un trépied : un pied, c’est le bistrot, l’autre
l’église et le troisième le bordel !”. Evidemment, un trépied, ça tient. On a supprimé le
bordel, maintenant tout tombe. Alors pourquoi s’arrêteraient-ils en France, les étrangers ? Il
n’y a pas de bordel ! Comme ça on ne respecte plus nos femmes, nos filles. J’ai une fille de
25 ans, j’ai cinq petits-enfants, je suis un vieux bonhomme. J’étais marié, très richement
d’ailleurs, chose curieuse. On ne respecte plus personne. Autrefois, avant 14, on disait :
l’homme est naturellement cochon, il a toutes espèces de fantaisies de cochon ; il va se les
passer, il y a des maisons pour ça ; il respecte sa femme et ses filles, et les autres les
respectent. Maintenant il n’y a plus rien à respecter. Alors voilà, c’est encore une erreur de
la Quatrième, dite République. »
— « Voyage au bout de la haine... avec Louis-Ferdinand Céline », Madelein
Chapsal, L’Express, 14 juin 1957 (lire en ligne)
« La plupart des gens ne meurent qu’au dernier moment ; d’autres commencent et s’y
prennent vingt ans d’avance et parfois davantage. Ce sont les malheureux de la terre. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 36
« Nous sommes, par nature, si futiles, que seules les distractions peuvent nous empêcher
vraiment de mourir. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 204
« A-t-on jamais vu personne descendre en enfer pour remplacer un autre ? Jamais. On l’y
voit l’y faire descendre. C’est tout. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 308
« La vérité, c’est une agonie qui n’en finit pas. La vérité de ce monde, c’est la mort. Il faut
choisir, mourir ou mentir. Je n’ai jamais pu me tuer moi. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 200
« Il n’y a de terrible en nous et sur la terre et dans le ciel peut-être que ce qui n’a pas
encore été dit. On ne sera tranquille que lorsque tout aura été dit, une bonne fois pour
toutes, alors enfin on fera silence et on aura plus peur de se taire. Ça y sera. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 327
« Les chiens ressemblent aux loups quand ils dorment. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 124
« Il y a un moment de la misère où l’esprit n’est plus déjà tout le temps avec le corps. Il s’y
trouve vraiment trop mal. C’est déjà presque une âme qui vous parle. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 224
« C’est peut-être ça qu’on cherche à travers la vie, rien que cela, le plus grand chagrin
possible pour devenir soi-même avant de mourir. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 236
« L’esprit est content avec des phrases, le corps c’est pas pareil, il est plus difficile lui, il lui
faut des muscles. C’est quelque chose de toujours vrai un corps, c’est pour cela que c’est
presque toujours triste et dégoûtant à regarder. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p. 272
« Il faudra endormir pour de vrai un soir, les gens heureux, pendant qu’ils dormiront, je
vous le dis et en finir avec eux et leur bonheur une fois pour toutes. »
— Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit (1932), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972 (ISBN 9782070360284), p.
—
FRANCOIS RENE DE CHATEAUBRIAND
« Les forêts ont été les premiers temples de la divinité, et les hommes ont pris
dans les forêts la première idée d’architecture. »
— François-René de Chateaubriand, Génie du christianisme (1802), éd. Garnier Frères,
1828, t. Partie 3, chap. VIII, Livre I, p. 293
« Fils aînés de l’antiquité, les Français, Romains par le génie, sont Grecs par le
caractère. »
— François-René de Chateaubriand, Génie du christianisme (1802), éd. Garnier Frères,
1828, t. Partie 3, chap. V, Livre III, p. 328
« La Révolution m’aurait entraîné, si elle n’eût débuté par des crimes : je vis la première tête
portée au bout d’une pique, et je reculai. Jamais le meurtre ne sera à mes yeux un objet
d’admiration et un argument de liberté ; je ne connais rien de plus servile, de plus
méprisable, de plus lâche, de plus borné qu’un terroriste. »
— François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe (1848), éd. Garnier, 1910, t.
1, chap. Livre V, p. 234-235
« Tout mensonge répété devient une vérité : on ne saurait avoir trop de mépris pour les
opinions humaines. »
— François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe (1848), éd. Garnier, 1910, t.
4, chap. Livre IX, p. 242
« Les vieillards d’autrefois étaient moins malheureux et moins isolés que ceux
d’aujourd’hui : si, en demeurant sur la terre, ils avaient perdu leurs amis, peu de chose
du reste avait changé autour d’eux ; étrangers à la jeunesse, ils ne l’étaient pas à la société.
Maintenant, un traînard dans ce monde a non-seulement vu mourir les hommes, mais il a
vu mourir les idées : principes, mœurs, goûts, plaisirs, peines, sentiments, rien ne ressemble
à ce qu’il a connu. Il est d’une race différente de l’espèce humaine au milieu de laquelle il
achève ses jours.
Et pourtant, France du XIXe siècle, apprenez à estimer cette vieille France qui vous valait.
Vous deviendrez vieille à votre tour et l’on vous accusera, comme on nous accusait, de tenir
à des idées surannées. Ce sont vos pères que vous avez vaincus ; ne les reniez pas, vous
êtes sortie de leur sang. S’ils n’eussent été généreusement fidèles aux antiques mœurs,
vous n’auriez pas puisé dans cette fidélité native l’énergie qui a fait votre gloire dans les
mœurs nouvelles ; ce n’est, entre les deux Frances, qu’une transformation de vertu. »
— François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe (1848), éd. Garnier, 1910, t.
2, chap. Livre VII, p. 61-62
« 2° Considérer la Turquie, telle qu’elle était au règne de François Ier, comme une puissance
utile à notre politique, c’est retrancher trois siècles de l’histoire.
3° Prétendre civiliser la Turquie en lui donnant des bateaux à vapeur et des
chemins de fer, en disciplinant ses armées, en lui apprenant à manœuvrer ses
flottes, ce n’est pas étendre la civilisation en Orient, c’est introduire la
barbarie en Occident : des Ibrahim futurs pourront ramener l’avenir au temps de
Charles-Martel, ou au temps du siège de Vienne, quand l’Europe fut sauvée par cette
héroïque Pologne, sur laquelle pèse l’ingratitude des rois.
Je dois remarquer que j’ai été le seul, avec Benjamin Constant, à signaler l’imprévoyance
des gouvernements chrétiens : un peuple dont l’ordre social est fondé sur l’esclavage et la
polygamie est un peuple qu’il faut renvoyer aux steppes des Mongols.
En dernier résultat, la Turquie d’Europe, devenue vassale de la Russie en vertu du traité
d’Unkiar Skélessi, n’existe plus : si la question doit se décider immédiatement, ce dont je
doute, il serait peut-être mieux qu’un empire indépendant eût son siège à Constantinople
et fît un tout de la Grèce. Cela est-il possible ? je l’ignore. Quant à Méhémet-Ali, fermier et
douanier impitoyable, l’Égypte, dans l’intérêt de la France, est mieux gardée par lui qu’elle
ne le serait par les Anglais.
Mais je m’évertue à démontrer l’honneur de la Restauration ; eh ! qui s’inquiète de ce
qu’elle a fait, surtout qui s’en inquiétera dans quelques années ? Autant vaudrait
m’échauffer pour les intérêts de Tyr et d’Ecbatane : ce monde passé n’est plus et ne sera
plus. Après Alexandre, commença le pouvoir romain ; après César, le christianisme changea
le monde ; après Charlemagne, la nuit féodale engendra une nouvelle société ; après
Napoléon, néant : on ne voit venir ni empire, ni religion, ni barbares. La civilisation est
montée à son plus haut point, mais civilisation matérielle, inféconde, qui ne peut rien
produire, car on ne saurait donner la vie que par la morale ; on n’arrive à la création des
peuples que par les routes du ciel : les chemins de fer nous conduiront seulement avec
plus de rapidité à l’abîme. »
— François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe (1848), éd. Garnier, 1910, t.
5, chap. Livre XII, Lettre à Madame Récamier, 15 novembre 1828, p. 66-67
« L’Angleterre, d’ailleurs, a toujours fait bon marché des rois et de la liberté des peuples ;
elle est toujours prête à sacrifier sans remords monarchie ou république à ses intérêts
particuliers. Naguère encore, elle proclamait l’indépendance des colonies espagnoles, en
même temps qu’elle refusait de reconnaître celle de la Grèce ; elle envoyait ses flottes
appuyer les insurgés du Mexique, et faisait arrêter dans la Tamise quelques chétifs bateaux
à vapeur destinés pour les Hellènes ; elle admettait la légitimité des droits de Mahmoud, et
niait celle des droits de Ferdinand ; vouée tour à tour au despotisme ou à la démocratie,
selon le vent qui amenait dans ses ports les vaisseaux des marchands de la cité. »
— François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe (1848), éd. Garnier, 1910, t.
5, chap. Livre XII, Lettre à M. le comte de la Ferronnays, 30 novembre 1828, p. 79-80
« Les croisades ne furent des folies, comme on affectait de les appeler, ni dans leur principe
ni dans leur résultat. [...]
Les croisades, en affaiblissant les hordes mahométanes au centre même de l’Asie, nous ont
empêchés de devenir la proie des Turcs et des Arabes. »
— François-René de Chateaubriand, « Itinéraire de Paris à Jérusalem » (1811), dans Œuvres
complètes, éd. Garnier, 1861, t. 5, p. 334-335
« Ceux qui s’applaudissent tant aujourd’hui du progrès des lumières auraient-ils donc voulu
voir régner parmi nous une religion qui a brûlé la bibliothèque d’Alexandrie, qui se fait un
mérite de fouler aux pieds les hommes et de mépriser souverainement les lettres et les
arts ?
Les croisades, en affaiblissant les hordes mahométanes au centre même de l’Asie, nous ont
empêchés de devenir la proie des Turcs et des Arabes. »
— François-René de Chateaubriand, « Itinéraire de Paris à Jérusalem » (1811), dans Œuvres
complètes, éd. Garnier, 1861, t. 5, p. 334
« Ce n’est pas dans le premier moment d’une émotion très vive que l’on jouit le plus de ses
sentiments. Je m’avançais vers Athènes avec une espèce de plaisir qui m’ôtait le pouvoir de
la réflexion ; non que j’éprouvasse quelque chose de semblable à ce que j’avais senti à la
vue de Lacédémone. Sparte et Athènes ont conservé jusque dans leurs ruines leurs
différents caractères : celles de la première sont tristes, graves et solitaires ; celles de la
seconde sont riantes, légères, habitées. A l’aspect de la patrie de Lycurgue, toutes les
pensées deviennent sérieuses, mâles et profondes ; l’âme, fortifiée, semble s’élever et
s’agrandir ; devant la ville de Solon, on est comme enchanté par les prestiges du génie ; on
a l’idée de la perfection de l’homme considéré comme un être intelligent et immortel. Les
hauts sentiments de la nature humaine prenaient à Athènes quelque chose d’élégant qu’ils
n’avaient point à Sparte. L’amour de la patrie et de la liberté n’était point pour les
Athéniens un instinct aveugle, mais un sentiment éclairé, fondé sur ce goût du beau dans
tous les genres, que le ciel leur avait si libéralement départi ; enfin, en passant des ruines
de Lacédémone aux ruines d’Athènes je sentis que j’aurais voulu mourir avec Léonidas et
vivre avec Périclès. »
— François-René de Chateaubriand, « Itinéraire de Paris à Jérusalem » (1811), dans Œuvres
complètes, éd. Garnier, 1861, t. 5, p. 178-179
« L’aristocratie a trois âges successifs : l’âge des supériorités, l’âge des privilèges, l’âge des
vanités ; sortie du premier, elle dégénère dans le second et s’éteint dans le dernier. »
— François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe (1848), éd. Garnier, 1910, t.
1, chap. Livre Premier, p. 5
“It is the only thing that frees a man from the degrading slavery of being a child of his age.”
— Gilbert Keith Chesterton, « Why I Am A Catholic » (1926), dans The Collected Works of
G.K. Chesterton, éd. Ignatius Press, 1990, vol. 3, p. 127
« C’est la seule religion qui affranchit un homme de la servitude dégradante
d’être un enfant de son temps. »
— Gilbert Keith Chesterton, « La raison pour laquelle je suis devenu
catholique » (1926), dans L’Église catholique et la conversion, trad. Gérard
Joulie, éd. L’Homme Nouveau, 2010 (ISBN 9782915988352), p.
“We do not want, as the newspapers say, a Church that will move with the
world. We want a Church that will move the world. We want one that will move it
away from many of the things towards which it is now moving; for instance, the Servile
State. It is by that test that history will really judge, of any Church, whether it is the real
Church or no.”
— Gilbert Keith Chesterton, New Witness, October 21, 1921
« Nous ne voulons pas, comme le disent les journaux, d’une Église qui
suive le monde, nous voulons d’une Église qui entraîne le monde. »
— Gilbert Keith Chesterton, New Witness, 21 octobre 1921
“So strong is a tradition that later generations will dream of what they have
never seen.”
— Gilbert Keith Chesterton, « William Cobbett » (1925), dans The Collected Works of G.K.
Chesterton, éd. Ignatius Press,, p.
« Si forte est cette tradition que les générations futures rêveront de choses
qu’elles n’ont jamais vues. »
— Gilbert Keith Chesterton, La Vie de William Cobbett (1925), trad. Marcel
Agobert, éd. Gallimard, 1929, p. 62
« Les Juifs gardaient jalousement, à l’abri de leurs interdits, leur dépôt secret : il est
significatif de l’état social de voir quelques personnages à la mode et surtout des femmes
du monde embrasser le judaïsme. »
— Gilbert Keith Chesterton, L’Homme éternel (1925), éd. Dominique Martin Morin,
2019 (ISBN 9782856522783), p. 173
« En cette agonie du paganisme, vous n’entendrez plus qu’à peine les champs et les bois
résonner de chants et de danses. Les paysans quittent la campagne, la civilisation paysanne
disparaît. L’Empire sur sa fin marche à grands pas vers le système servile qui va
généralement de pair avec l’explosion de l’administration ; il est presque digne de
l’organisation industrielle que nous avons sous les yeux. De cette transformation de la
société paysanne en une populace urbaine à laquelle il fallait tout donner, il est resté une
locution proverbiale, panem et circenses — autrement dit allocations et cinéma car, sous
ce rapport comme sous beaucoup d’autres, l’actuelle régression n’invente rien. »
— Gilbert Keith Chesterton, L’Homme éternel (1925), éd. Dominique Martin Morin,
2019 (ISBN 9782856522783), p. 170
« L’armée cosmopolite de Carthage déferlait et la terre entière enflait son défilé triomphal :
les éléphants dont les pieds lourds ébranlaient le sol, les géants de la Gaule aux armes
barbares, les bruns Espagnols cuirassés d’or, les cavaliers numides, qui tournoyaient sur
leurs chevaux sauvages comme des éperviers, la tourbe tumultueuse des déserteurs, des
mercenaires et des aventuriers. Et devant eux marchait la Grâce de Baal.
[...] notre mercantilisme procède d’une vision du monde qui fut celle de Carthage et
provoqua sa ruine. La chute de la puissance punique s’explique par l’erreur grossière propre
au matérialisme : l’indifférence frénétique aux réalités de l’esprit. [...]
Ce n’est pas un simple concurrent que Rome anéantit, mais un ennemi mortel. Lorsqu’elle
leva, pour le coup de grâce, son bras impitoyable, elle ne songeait plus à ses accords
commerciaux ni à ses protectorats, elle voyait le hideux sourire de Carthage, elle haïssait
l’âme haïssable de Carthage. [...]
À Carthage, l’usure était l’âme même du pouvoir des princes marchands. Jamais
le peuple punique n’a osé élever la voix et les dénoncer comme usuriers. »
— Gilbert Keith Chesterton, L’Homme éternel (1925), éd. Dominique Martin Morin,
2019 (ISBN 9782856522783), p. 155-165
« Aux premiers jours de l’histoire, nous regardons dans le noir. Les ténèbres enveloppent la
terre et cachent les peuples. Çà et là, de rares lumières éclairent quelques manifestations
d’humanité. Deux flammes brillent sur d’antiques hauts lieux : l’une brûle sur les hautes
terrasses de Babylone, l’autre brûle sur les gigantesques pyramides des bords du Nil.
D’autres lumières, qui sont ou paraissent anciennes, surgissent des plaines de la nuit : la
haute et antique civilisation chinoise, les restes des civilisations du Mexique, d’Amérique du
Sud, quelques autres encore [...]. »
— Gilbert Keith Chesterton, L’Homme éternel (1925), éd. Dominique Martin Morin,
2019 (ISBN 9782856522783), p. 79
« Il est paradoxal mais vrai de dire que l’histoire a commencé avant l’histoire. [...]
Nous ne connaissons pas l’histoire du monde avant ces chroniques. Le peu que nous
devinons laisse penser que cela ressemblait beaucoup à ce qui se passe aujourd’hui. Il n’y
aurait rien d’incroyable ni de stupéfiant à ce que ces âges abolis aient vu des républiques
étouffées par la monarchie renaître de leur cendre, des empires étendre au loin leurs
colonies et les perdre avant de disparaître, des royaumes gigantesques se décomposer en
poussière de nations, des classes asservies reconquérir leur liberté les armes à la main.
Qu’elle soit ou non une progression, la longue marche de l’humanité est certainement une
épopée. Mais les premières pages du livre sont arrachées. Nous ne les lirons jamais. »
— Gilbert Keith Chesterton, L’Homme éternel (1925), éd. Dominique Martin Morin,
2019 (ISBN 9782856522783), p. 64
« Nous pouvons dire que la famille est la base de la société et qu’elle en est la
cellule mère. Elle est le temple des vertus domestiques qui distinguent les hommes des
fourmis et des abeilles. La pudeur est le voile de ce temple, et la liberté le rempart de cette
cité ; la propriété n’est que l’enclos de la famille, l’honneur son blason. L’histoire de
l’humanité nous ramène au père, à la mère, à l’enfant comme à un principe. J’ai dit déjà
que si l’on écarte la dimension religieuse du commencement de l’histoire humaine, il faut
au moins admettre quelques principes moraux ou métaphysiques, ou bien elle perd toute
espèce de sens. Nous sommes ici à la croisée des chemins. Si nous n’invoquons pas une
Trinité divine, il nous faudra invoquer une trinité humaine dont le triangle se répète à
l’infini dans la trame de l’univers. Car le plus prodigieux des faits historiques, source et fin
de l’histoire, nous présente ce triangle à la fois renversé et renouvelé, ou plutôt un triangle
nouveau qui, se superposant au premier, forme un pentacle sacré plus terrible aux démons
que celui des magiciens. La trinité ancienne se composait du père, de la mère et de
l’enfant, et c’était la famille humaine. La nouvelle trinité, celle de l’enfant, de la mère et du
père a pour nom la Sainte Famille. Elle n’est pas changée, elle retournée, et le monde
qu’elle transforme demeure le monde de toujours, mais renversé. »
— Gilbert Keith Chesterton, L’Homme éternel (1925), éd. Dominique Martin Morin,
2019 (ISBN 9782856522783), p. 56-57
“The modern world is not evil; in some ways the modern world is far too
good. It is full of wild and wasted virtues. When a religious scheme is shattered (as
Christianity was shattered at the Reformation), it is not merely the vices that are let loose.
The vices are, indeed, let loose, and they wander and do damage. But the virtues are let
loose also; and the virtues wander more wildly, and the virtues do more terrible
damage. The modern world is full of the old Christian virtues gone mad. The
virtues have gone mad because they have been isolated from each other and are
wandering alone. Thus some scientists care for truth; and their truth is pitiless. Thus some
humanitarians only care for pity; and their pity (I am sorry to say) is often untruthful.”
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxy (1908), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 193
« Le monde moderne n’est pas mauvais : à certains égards, il est bien trop
bon. Il est rempli de vertus féroces et gâchées. Lorsqu’un dispositif
religieux est brisé (comme le fut le christianisme pendant la Réforme), ce
ne sont pas seulement les vices qui sont libérés. Les vices sont en effet
libérés, et ils errent de par le monde en faisant des ravages ; mais les
vertus le sont aussi, et elles errent plus férocement encore en faisant des
ravages plus terribles. Le monde moderne est saturé des vieilles vertus
chrétiennes virant à la folie. Elles ont viré à la folie parce qu’on les a
isolées les unes des autres et qu’elles errent indépendamment dans la
solitude. Ainsi des scientifiques se passionnent-ils pour la vérité, et leur
vérité est impitoyable. Ainsi des "humanitaires" ne se soucient-ils que de
la pitié, mais leur pitié (je regrette de le dire) est souvent mensongère. »
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie (1908), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220287), p. 50
“This is why ordinary people have a much more exciting time; while odd people
are always complaining of the dulness of life. This is also why the new novels
die so quickly, and why the old fairy tales endure for ever. The old fairy tale makes
the hero a normal human boy; it is his adventures that are startling; they startle him
because he is normal. But in the modern psychological novel the hero is abnormal; the
centre is not central. Hence the fiercest adventures fail to affect him adequately, and the
book is monotonous. You can make a story out of a hero among dragons; but not out of a
dragon among dragons. The fairy tale discusses what a sane man will do in a mad world.
The sober realistic novel of to-day discusses what an essential lunatic will do in a dull
world.”
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxy (1908), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 179
« C’est pourquoi les gens ordinaires s’amusent beaucoup plus, alors que
les gens bizarres se plaignent sans cesse de la monotonie de la vie. C’est
aussi la raison pour laquelle les romans nouveaux meurent si vite, alors
que les contes de fées sont éternels. Dans un conte de fées, le héros est un
garçon normal ; ce sont ses aventures qui sont étonnantes, et elles
l’étonnent parce qu’il est normal. Dans le roman psychologique moderne,
en revanche, le héros est anormal, et le centre n’est pas central. Ainsi les
aventures les plus abracadabrantes échouent toujours à l’affecter comme
elles le devraient, et le livre est ennuyeux. On peut inventer l’histoire d’un
héros entouré de dragons, mais non pas celle d’un dragon entouré de
dragons. Le conte de fées envisage ce qu’un homme sain d’esprit ferait
dans un monde de fous. Le roman réaliste et prudent d’aujourd’hui
envisage ce qu’un homme essentiellement fou ferai dans un monde
insignifiant. »
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie (1908), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220287), p. 27
“We have not any need to rebel against antiquity; we have to rebel against
novelty. It is the new rulers, the capitalist or the editor, who really hold up the
modern world. There is no fear that a modern king will attempt to override the
constitution; it is more likely that he will ignore the constitution and work behind its back;
he will take no advantage of his kingly power; it is more likely that he will take advantage
of his kingly powerlessness, of the fact that he is free from criticism and publicity. For the
king is the most private person of our time. It will not be necessary for any one to fight
again against the proposal of a censorship of the press. We do not need a censorship of
the press. We have a censorship by the press.”
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxy (1908), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 273
« Nous n’avons aucun besoin de nous rebeller contre l’Antiquité ; il faut
nous rebeller contre la nouveauté. Ce sont les nouveaux dirigeants, le
capitaliste ou le rédacteur en chef, qui exercent réellement leur emprise
sur le monde moderne. Il n’y a pas lieu de craindre qu’un roi ne tente
aujourd’hui d’outrepasser la Constitution : il est plus probable qu’il
l’ignorera pour agir en cachette ; il ne profitera nullement de son pouvoir
royal ; il est plus probable qu’il profitera de son impuissance royal, du fait
qu’elle le soustrait à la critique et à la publicité. Car le roi est la personne
la moins publique de notre époque. Personne ne se trouvera dans la
nécessité de lutter encore une fois contre un projet de censure de la
presse. Nous n’avons pas besoin d’une censure de la presse. Nous avons
une censure par la presse. »
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie (1908), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220287), p. 184
“I have always maintained that men were naturally backsliders; that human virtue tended of
its own nature to rust or to rot; I have always said that human beings as such go wrong,
especially happy human beings, especially proud and prosperous human beings. This
eternal revolution, this suspicion sustained through centuries, you (being a
vague modern) call the doctrine of progress. If you were a philosopher you
would call it, as I do, the doctrine of original sin. You may call it the cosmic
advance as much as you like; I call it what it is — the Fall.”
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxy (1908), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 274
« J’ai toujours soutenu que les hommes étaient naturellement des
récidivistes ; que la vertu humaine tendait, de par sa nature, à se rouiller
ou à pourrir ; j’ai toujours dit que les êtres humains comme tels
deviennent mauvais, surtout les heureux, les orgueilleux et les
prospères. Cette révolution éternelle, cette suspicion maintenue à travers
les siècles, vous l’appelez (en vague moderne) la doctrine du progrès. Si
vous étiez philosophe, vous l’appelleriez, comme je le fais, la doctrine du
péché originel. Vous pouvez l’appeler progrès cosmique autant que vous
voudrez ; je l’appelle par ce qu’elle est : la Chute. »
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie (1908), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220287), p. 185
“Tradition means giving votes to the most obscure of all classes, our ancestors.
It is the democracy of the dead. Tradition refuses to submit to the small and arrogant
oligarchy of those who merely happen to be walking about.”
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxy (1908), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 209
« On pourrait définir la tradition comme une extension du droit de vote
au passé. Elle consiste à accorder le droit de suffrage à la plus obscure de
toutes les classes, celle de nos ancêtres. C’est la démocratie des morts. La
tradition refuse de se soumettre à la petite oligarchie arrogante de ceux
qui ne font que se trouver par hasard sur terre. »
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie (1908), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220287), p. 76-77
“Obviously, it will not do to take our ideal from the principle in nature; for the simple
reason that (except for some human or divine theory), there is no principle in nature. For
instance, the cheap anti-democrat of to-day will tell you solemnly that there is no equality
in nature. He is right, but he does not see the logical addendum. There is no equality in
nature; also there is no inequality in nature. Inequality, as much as equality, implies a
standard of value. To read aristocracy into the anarchy of animals is just as sentimental as
to read democracy into it. Both aristocracy and democracy are human ideals: the one
saying that all men are valuable, the other that some men are more valuable.”
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxy (1908), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 262
« Bien entendu, il ne conviendrait pas de tirer notre idéal du principe dans la
nature, pour la simple raison qu’il n’y a pas de principe dans la nature (hormis
pour quelque théorie humaine ou divine). Par exemple, le misérable
antidémocrate d’aujourd’hui vous dira solennellement que dans la nature
l’égalité n’existe pas. Il a raison, mais il n’en voit pas le corollaire logique. Il y a
pas d’égalité dans la nature, mais il n’y a pas non plus d’inégalité dans la
nature. L’inégalité, comme l’égalité, implique une échelle de valeurs. Voir une
aristocratie dans l’anarchie des animaux relève tout autant du sentimentalisme
que d’y voir une démocratie. L’aristocratie et la démocratie sont toutes deux
des idéaux humains, l’une affirmant que tous les hommes sont d’une même
valeur, l’autre que certains hommes ont plus de valeur que d’autres. »
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie (1908), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220287), p. 164-165
“[...] there are men who will ruin themselves and ruin their civilization if they may ruin also
this old fantastic tale. [...] Men who begin to fight the Church for the sake of
freedom and humanity end by flinging away freedom and humanity if only they
may fight the Church.”
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxy (1908), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 294
« [...] il est des hommes qui se détruiraient et détruiraient leur civilisation
s’ils pouvaient du même coup détruire ce vieux conte fantastique. [...] Les
hommes qui se mettent à combattre l’Église au nom de la liberté et de
l’humanité finissent par liquider liberté et humanité pourvu qu’ils
puissent combattre l’Église. »
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie (1908), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220287), p. 221
“The secularists have not wrecked divine things; but the secularists have
wrecked secular things, if that is any comfort to them. The Titans did not scale
heaven; but they laid waste the world.”
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxy (1908), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 296
« Les laïcs n’ont pas ravagé les choses divines ; ils ont ravagé les choses
profanes, si cela peut les consoler. Les Titans n’on pas escaladé le ciel,
mais ils ont saccagé le monde. »
— Gilbert Keith Chesterton, Orthodoxie (1908), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220287), p. 223
“The globe-trotter lives in a smaller world than the peasant. He is always
breathing, an air of locality.”
— Gilbert Keith Chesterton, Heretics (1905), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p.
« Le globe-trotter vit dans un monde plus étroit que celui du paysan. Il
respire toujours une atmosphère locale. »
— Gilbert Keith Chesterton, Hérétiques (1905), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220294), p.
“All the empires and the kingdoms have failed, because of this inherent and continual
weakness, that they were founded by strong men and upon strong men. But this one
thing, the historic Christian Church, was founded on a weak man, and for that
reason it is indestructible. For no chain is stronger than its weakest link.”
— Gilbert Keith Chesterton, Heretics (1905), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 33-34
« Tous les empires et tous les royaumes se sont effondrés à cause de cette
faiblesse inhérente et perpétuelle, c’est-à-dire pour avoir été fondés par
des hommes forts et sur des hommes forts. Mais cette
communauté, l’Église chrétienne, fut fondée sur un homme faible, et c’est
pour cette raison qu’elle est indestructible. Car aucune chaîne n’est plus
forte que son chaînon le plus faible. »
— Gilbert Keith Chesterton, Hérétiques (1905), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220294), p. 62
“There is only one thing in the modern world that has been face to face with Paganism;
there is only one thing in the modern world which in that sense knows anything about
Paganism: and that is Christianity. That fact is really the weak point in the whole of that
hedonistic neo-Paganism of which I have spoken. All that genuinely remains of the ancient
hymns or the ancient dances of Europe, all that has honestly come to us from the festivals
of Phoebus or Pan, is to be found in the festivals of the Christian Church. If any one wants
to hold the end of a chain which really goes back to the heathen mysteries, he had better
take hold of a festoon of flowers at Easter or a string of sausages at Christmas. Everything
else in the modern world is of Christian origin, even everything that seems most anti-
Christian. The French Revolution is of Christian origin. The newspaper is of Christian origin.
The anarchists are of Christian origin. Physical science is of Christian origin. The attack on
Christianity is of Christian origin. There is one thing, and one thing only, in
existence at the present day which can in any sense accurately be said to be of
pagan origin, and that is Christianity.”
— Gilbert Keith Chesterton, Heretics (1905), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 82-83
« Il y a une seule chose dans le monde moderne qui se soit trouvée face à
face avec le paganisme ; il y a une chose dans le monde moderne qui, en
ce sens, sache tout du paganisme : c’est le christianisme. Ce fait est en
réalité le point faible de tout ce néopaganisme hédoniste dont j’ai parlé.
Tout ce qui nous reste d’authentique des anciens hymnes ou des
anciennes danses de l’Europe, tout ce qui nous est sincèrement parvenu
des fêtes de Phébus ou de Pan, on le retrouve dans les fêtes de l’Église
chrétienne. Si quelqu’un veut tenir l’extrémité d’une chaîne qui remonte
réellement aux mystères païens, il n’a qu’à saisir une guirlande de fleurs à
Pâques ou un chapelet de saucisses à Noël. Tout le reste, dans le monde
moderne, est d’origine chrétienne, même ce qui nous semble le plus
antichrétien. La Révolution française est d’origine chrétienne. Le journal
est d’origine chrétienne. Les anarchistes sont d’origine chrétienne. La
science physique est d’origine chrétienne. Les attaques contre le
christianisme sont d’origine chrétienne. Il y a une seule chose, et
seulement une chose aujourd’hui, dont on puisse dire avec exactitude
qu’elle est d’origine païenne dans tous les sens du terme, c’est le
christianisme. »
— Gilbert Keith Chesterton, Hérétiques (1905), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220294), p. 142
“The modern world is filled with men who hold dogmas so strongly that they
do not even know that they are dogmas.”
— Gilbert Keith Chesterton, Heretics (1905), éd. Faithlife Corporation, coll. « Lexham
Classics », 2017 (ISBN 9781577997894), p. 270
« Le monde moderne est rempli d’hommes qui s’accrochent si fortement
aux dogmes qu’ils ne savent même pas que ce sont des dogmes. »
— Gilbert Keith Chesterton, Hérétiques (1905), trad. Lucien d’Azay, éd.
Flammarion, coll. « Climats », 2010 (ISBN 9782081220294), p. 270
EMIL CIORAN
« J’aimerais tout oublier et me réveiller face à la lumière d’avant les instants. »
— Emil Cioran, « Aveux et Anathèmes » (1987), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1687
« J’escomptais assister de mon vivant à la disparition de notre espèce. Mais les dieux m’ont
été contraires. »
— Emil Cioran, « Aveux et Anathèmes » (1987), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1682
« L’orgasme est un paroxysme ; le désespoir aussi. L’un dure un instant ; l’autre, une vie. »
— Emil Cioran, « Aveux et Anathèmes » (1987), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1663
« N’avoir plus rien de commun avec les hommes que le fait d’être homme ! »
— Emil Cioran, « Aveux et Anathèmes » (1987), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1656
« La liberté est une dépense, la liberté exténue, tandis que l’oppression fait
accumuler des forces, empêche le gaspillage d’énergie résultant de la faculté qu’a
l’homme libre d’extérioriser, de projeter au-dehors ce qu’il a de bon. »
— Emil Cioran, « Écartèlement » (1979), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1502
« La base de la société, de toute société, est un certain orgueil d’obéir. Quand cet orgueil
n’existe plus, la société s’écroule. »
— Emil Cioran, « Écartèlement » (1979), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1462
« Dès qu’on sort dans la rue, à la vue des gens, extermination est le premier mot qui vient à
l’esprit. »
— Emil Cioran, « Écartèlement » (1979), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1456
« Au Zoo. — Toutes ces bêtes ont une tenue décente hormis les singes. On sent que
l’homme n’est pas loin. »
— Emil Cioran, « Écartèlement » (1979), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1452
« Heureux tous ceux qui, nés avant la Science, avaient le privilège de mourir
dès leur première maladie ! »
— Emil Cioran, « Écartèlement » (1979), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1445
« La société d’alors, nous le savons maintenant, était tolérante parce qu’elle manquait de la
vigueur nécessaire pour persécuter, donc pour se conserver. [...]
La Révolution fut provoquée par les abus d’une classe revenue de tout, même de ses
privilèges, auxquels elle s’agrippait par automatisme, sans passion ni acharnement, car elle
avait un faible ostensible pour les idées de ceux qui allaient l’anéantir. La complaisance
pour l’adversaire est le signe distinctif de la débilité, c’est-à-dire de la
tolérance, laquelle n’est, en dernier ressort, qu’une coquetterie
d’agonisants. »
— Emil Cioran, « Écartèlement » (1979), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1416
« Le monde antique devait être bien atteint pour avoir eu besoin d’un antidote aussi
grossier que celui qu’allait lui administrer le christianisme. Le monde moderne l’est tout
autant à en juger par les remèdes dont il attend des miracles. »
— Emil Cioran, « Écartèlement » (1979), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1416
« Dès que les animaux n’ont plus besoin d’avoir peur les uns des autres, ils tombent dans
l’hébétude et prennent cet air accablé qu’on leur voit dans les jardins zoologiques. Les
individus et les peuples offriraient le même spectacle, si un jour ils arrivaient à vivre en
harmonie, à ne plus trembler ouvertement ou en cachette. »
— Emil Cioran, « De l’inconvénient d’être né » (1973), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1354
« Tous ces peuples étaient grands, parce qu’ils avaient de grands préjugés. Ils
n’en ont plus. Sont-ils encore des nations ? Tout au plus des foules
désagrégées. »
— Emil Cioran, « De l’inconvénient d’être né » (1973), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1350
« Un peuple ne fait qu’une seule révolution. Les Allemands n’ont jamais réédité l’exploit de
la Réforme, ou plutôt ils l’ont réédité sans l’égaler. La France est restée pour toujours
tributaire de quatre-vingt-neuf. Également vraie pour la Russie et pour tous les pays, cette
tendance à se plagier soi-même en matière de révolution, est tout ensemble rassurante et
affligeante. »
— Emil Cioran, « De l’inconvénient d’être né » (1973), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1349
« Chaque génération vit dans l’absolu : elle se comporte comme si elle était parvenue au
sommet, sinon à la fin, de l’histoire. »
— Emil Cioran, « De l’inconvénient d’être né » (1973), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1347
« Pourquoi craindre le néant qui nous attend alors qu’il ne diffère pas de celui qui nous
précède [...]. »
— Emil Cioran, « De l’inconvénient d’être né » (1973), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1329
« On ne détruit une civilisation que lorsqu’on détruit ses dieux. Les chrétiens,
n’osant attaquer l’Empire de front, s’en prirent à sa religion. Ils ne se sont laissés persécuter
que pour mieux pouvoir fulminer contre elle, pour satisfaire leur irrépressible appétit
d’exécrer. Qu’ils eussent été malheureux si on n’eût pas daigné les promouvoir au rang de
victimes ! Tout dans le paganisme, jusqu’à la tolérance, les exaspérait. »
— Emil Cioran, « Le Mauvais démiurge » (1969), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1185-1186
« La nostalgie de la barbarie est le dernier mot d’une civilisation ; elle l’est par là même du
scepticisme. »
— Emil Cioran, « La Chute dans le temps » (1964), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 1106
« Plus elle [la Russie] deviendra forte, plus elle prendra conscience de ses racines, dont, en
une certaine manière, le marxisme l'aura éloignée ; après une cure forcée d’universalisme,
elle se rerussifiera, au profit de l’orthodoxie. Du reste, elle a marqué d’une telle empreinte
le marxisme qu’elle l’aura slavisé. Tout peuple de quelque envergure qui adopte une
idéologie étrangère à ses traditions l’assimile et la dénature, l’infléchit dans le
sens de sa destinée nationale, la fausse à son avantage, au point de la rendre
indiscernable de son propre génie. »
— Emil Cioran, « Histoire et utopie » (1960), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 996
« Quelle malédiction l’a frappé [l’Occident] pour qu’au terme de son essor il ne
produise que ces hommes d’affaires, ces épiciers, ces combinards aux regards
nuls et aux sourires atrophiés, que l’on rencontre partout, en Italie comme en
France, en Angleterre de même qu’en Allemagne ? Est-ce à cette vermine que
devait aboutir une civilisation aussi délicate, aussi complexe ? Peut-être fallait-il en passer
par là, par l’abjection, pour pouvoir imaginer un autre genre d’hommes. »
— Emil Cioran, « Histoire et utopie » (1960), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 989
« Une nation s’éteint quand elle ne réagit plus aux fanfares : la Décadence est la mort de
la trompette. »
— Emil Cioran, « Syllogismes de l’amertume » (1952), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 801
« Rousseau fut un fléau pour la France, comme Hegel pour l’Allemagne. Aussi indifférente à
l’hystérie qu’aux systèmes, l’Angleterre a composé avec la médiocrité ; sa “philosophie” a
établi la valeur de la sensation ; sa politique, celle de l’affaire. L’empirisme fut sa réponse
aux élucubrations du Continent ; le Parlement, son défi à l’utopie, à la pathologie
héroïque. »
— Emil Cioran, « Syllogismes de l’amertume » (1952), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 772
« Par la barbarie, Hitler a essayé de sauver toute une civilisation. Son entreprise
fut un échec ; — elle n’en est pas moins la dernière initiative de l’Occident.
Sans doute, ce continent aurait mérité mieux. À qui la faute s’il n’a pas su produire un
monstre d’une autre qualité ? »
— Emil Cioran, « Syllogismes de l’amertume » (1952), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 772
« Notre époque sera marquée par le romantisme des apatrides. Déjà se forme
l’image d’un univers où plus personne n’aura droit de cité.
Dans tout citoyen d’aujourd’hui gît un métèque futur. »
— Emil Cioran, « Syllogismes de l’amertume » (1952), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 769
« C’est en vain que l’Occident se cherche une forme d’agonie digne de son
passé. »
— Emil Cioran, « Syllogismes de l’amertume » (1952), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 769
« Nulle civilisation ne saurait s’éteindre dans une agonie indéfinie ; des tribus
rôdent alentour, flairant les relents des cadavres parfumés... »
— Emil Cioran, « Précis de décomposition » (1949), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 650
« Depuis que l’utilité est apparue dans le monde, le monde n’est plus. N’est plus sous le
charme. Seule l’adoration respecte les choses pour elles-mêmes [...]. »
— Emil Cioran, « Bréviaire des vaincus » (1944), dans Œuvres, trad. Alain Paruit, éd.
Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 542
« Les potions orientales ont embaumé l’homme pendant deux mille ans. Le catholicisme —
judaïsme latin — a saupoudré de suie indélébile l’exubérance de la Méditerranée. »
— Emil Cioran, « Bréviaire des vaincus » (1944), dans Œuvres, trad. Alain Paruit, éd.
Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 525
« Je ne me sens “chez moi” que sur les bords de la mer. Car je ne saurais me
bâtir une patrie que de l’écume des vagues. »
— Emil Cioran, « Le Crépuscule des pensées » (1940), dans Œuvres, trad. Mirella Patureau-
Nedelco et Christiane Frémont, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN
9782070741663), p. 494
« Qu’est-ce qu’un artiste ? Un homme qui sait tout — sans s’en rendre compte. Un
philosophe ? Un homme qui ne sait rien, mais qui s’en rend compte. »
— Emil Cioran, « Le Crépuscule des pensées » (1940), dans Œuvres, trad. Mirella Patureau-
Nedelco et Christiane Frémont, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN
9782070741663), p. 442
« [...] le suicide n’est qu’un hommage négatif que nous rendons à nous-mêmes. »
— Emil Cioran, « Le Crépuscule des pensées » (1940), dans Œuvres, trad. Mirella Patureau-
Nedelco et Christiane Frémont, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN
9782070741663), p. 410
« Quel homme, s’apercevant dans un miroir dans une semi-obscurité, n’a cru rencontrer le
suicidé qui est en lui ? »
— Emil Cioran, « Le Crépuscule des pensées » (1940), dans Œuvres, trad. Mirella Patureau-
Nedelco et Christiane Frémont, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN
9782070741663), p. 361
« Il est des clairières où les anges viennent faire halte : au bord des déserts, j’y
planterais des fleurs pour pouvoir me reposer à l’ombre de ce symbole. »
— Emil Cioran, « Le Crépuscule des pensées » (1940), dans Œuvres, trad. Mirella Patureau-
Nedelco et Christiane Frémont, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN
9782070741663), p. 340
« Tant d’hommes ne sont séparés de la mort que par la nostalgie qu’ils en ont ! La mort s’y
forge un miroir de la vie où elle puisse se contempler. »
— Emil Cioran, « Le Crépuscule des pensées » (1940), dans Œuvres, trad. Mirella Patureau-
Nedelco et Christiane Frémont, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN
9782070741663), p. 339
« Ce qu’il y a de plus sain et de plus pur dans la vie n’est qu’une apothéose de l’éphémère.
L’éternité est une inépuisable pourriture et Dieu un cadavre sur qui l’homme se prélasse. »
— Emil Cioran, « Des larmes et des saints » (1937), dans Œuvres, trad. Sanda Stolojan, éd.
Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 316
« La liberté est un joug trop lourd pour la nuque de l’homme. Même pris d’une
terreur sauvage, il est plus assuré que sur les chemins de la liberté. Bien qu’il la considère
comme la valeur positive par excellence, la liberté n’a jamais cessé de lui présenté son
revers négatif. La route infaillible de la débâcle est la liberté. L’homme est trop faible et
trop petit pour l’infini de la liberté, de sorte qu’elle devient un infini négatif. Face à
l’absence de borne, l’homme perd les siennes. La liberté est un principe éthique d’essence
démoniaque. Le paradoxe est insoluble.
La liberté est trop grande et nous sommes trop petit. Qui, parmi les hommes, l’a méritée ?
L’homme aime la liberté, mais il la craint. »
— Emil Cioran, « Le Livre des leurres » (1936), dans Œuvres, trad. Grazyna Klewek et
Thomas Bazin, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 29
« Je ne connais que deux déchirements : juif et russe (Job et Dostoïevski). D’autres peuples
ont sans doute souffert infiniment ; mais eux n’avaient pas la passion de la souffrance.
N’ont eu une mission que les peuples qui se sont foulés eux-mêmes aux pieds, et ont
réédité Adam. Un peuple qui n’a pas enduré dans son existence historique toute la tragédie
de l’histoire ne peut s’élever au messianisme et à l’universalisme. Un peuple qui ne croit
pas qu’il a le monopole de la vérité ne laissera pas de traces dans l’histoire. »
— Emil Cioran, « Le Livre des leurres » (1936), dans Œuvres, trad. Grazyna Klewek et
Thomas Bazin, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 29
« [...] le vertige abyssal des grandes profondeurs, l’appel d’un infini béant prêt à nous
engloutir et auquel nous nous soumettons comme à une fatalité ? Comme il serait doux de
pouvoir mourir en se jetant dans un vide absolu ! »
— Emil Cioran, « Sur les cimes du désespoir » (1934), dans Œuvres, trad. André Vornic et
Christiane Frémont, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663), p. 29
« [...] l’esprit est le fruit d'un détraquement de la vie, de même que l’homme n’est qu’un
animal qui a trahi ses origines. L’existence de l’esprit est une anomalie de la vie. »
— Emil Cioran, « Sur les cimes du désespoir » (1934), dans Œuvres, trad. André Vornic
et Christiane Frémont, éd. Gallimard, coll. « Quarto », 1995 (ISBN 9782070741663),
p. 51
—
MICHEL CLOUSCARD
« L’État a été l’instance super-structurale de la répression capitaliste. C’est pourquoi Marx le
dénonce. Mais aujourd’hui, avec la mondialisation, le renversement est total. Alors que
l’État-nation a pu être le moyen d’oppression d’une classe par une autre, il devient le
moyen de résister à la mondialisation. C’est un jeu dialectique. »
— « Entretien avec Michel Clouscard », Aymeric Monville, L’Évadé, nº 8, mars-avril 2003
« L’économie politique s’est faite constitutive de la relation du français lepéniste avec le Juif
et l’Arabe. Les racismes disent la relation à la paupérisation et à l’enrichissement. Bien plus
que des boucs émissaires, ils représentent les deux perversités de l’économie du profit. Ils
ne font que cacher une stratégie du capitalisme que la plupart des antiracistes
méconnaissent. Autrement dit, les bons sentiments ne suffisent pas à débusquer la bête
immonde. Certains militants font même le jeu de cette stratégie en défendant la cause de
l’immigrant à l’encontre de la logique de l’immigration, en la réduisant au combat de
l’homme libre contre une administration bureaucratique. »
— Michel Clouscard, Refondation progressiste (2003), éd. L’Harmattan, coll. « Raison
mondialisée », 2003 (ISBN 9782747553070), p. 113-114
« Le Pen nous a appris qu’il fallait au moins deux racismes — divergents, mais
complémentaires — pour faire un populisme, à l’égard du Juif et de l’Arabe, de Rothschild
et de l’immigrant. C’est qu’il y a une logique des racismes. Hitler ne s’en prenait qu’au Juif
en particulier et aux races inférieures en général. Il ne disposait pas de la dimension que
l’Arabe apporte. [...]
La paupérisation menaçante, c’est une race : l’Arabe. La richesse interdite, c’est une race : le
Juif. “On” est désigné comme race. Les états de pauvre ou de riche sont ramenés à un
principe originel, matriciel, général. Le racisme est à double face : il prétend à une
supériorité, mais surtout il est la désignation de l’altérité comme une erreur ontologique
qui associe la contingence et la malfaisance. L’Autre est de trop. Il n’est qu’une excroissance
cancéreuse de la Création. Il n’a rien et il n’est rien : c’est normal, puisqu’il est pure
contingence. Il n’est que la forme vide : une race.
Le pauvre, c’est l’immigrant, l’immigrant c’est l’Arabe. Ainsi se constitue une race, un
homme vide de toute culture, de tout contenu qui n’est plus qu’une forme : un faciès. Le
lepéniste reconnaît la race par le faciès. L’Arabe, dira-t-il, a le faciès de sa race. C’est le signe
extérieur qui ne peut être camouflé, le stigmate, la tache indélébile. Le faciès, c’est l’aveu de
la race. Et ce pauvre, ce faciès, est un envahisseur, incroyable paradoxe. [...]
Si l’envahisseur menace, s’il peut être encore repéré et désigné par la vigilance nationaliste,
l’autre ennemi de l’identitaire a déjà pénétré dans la place : le Juif. Il est l’autre face de
l’altérité. L’identitaire est menacé à la fois par la paupérisation et par la richesse, par les
propres limites du chrématistique. Le Juif a été désigné par l’Église comme l’usurier, le
prêteur, celui qui profite. Mais cette stigmatisation ne suffit pas à expliquer l’antisémitisme.
Il est l’ennemi intérieur qui n’a pu s’enrichir qu’en profitant de l’institution nationale sans
participer aux frais. Corollaire : l’enrichissez-vous est impossible. C’est le Juif qui détient et
qui conserve les moyens du chrématistique, qui dispose des postes de création et de
gestion. Les deux racismes sont complémentaires : l’un à l’égard du pauvre, l’autre à l’égard
du riche. La peur de devenir pauvre s’exaspère de la colère de ne pouvoir devenir riche. »
— Michel Clouscard, Refondation progressiste (2003), éd. L’Harmattan, coll. « Raison
mondialisée », 2003 (ISBN 9782747553070), p. 112-113
« [...] l’art est abstrait quand il ne peut prendre un contenu. Ce n’est pas un style, c’est un
manque. »
— Michel Clouscard, Refondation progressiste (2003), éd. L’Harmattan, coll. « Raison
mondialisée », 2003 (ISBN 9782747553070), p. 86
« La dynamique venue de droite est celle de R. Aron, franche du collier. Elle a liquidé la
vieille droite bête et méchante, conservatrice et même réactionnaire, qui voulait empêcher
le progrès (cette droite, essentiellement des PME venues du CCL, laissées-pour-compte de
la monopolisation et de l’étatisation du capitalisme, est devenue un archaïsme —
poujadiste — aux résurgences modernistes — Le Pen). Ce libéralisme se dit en termes
économiques et politiques. C’est celui du management organisé au sommet : le capitalisme
monopoliste d’État, pouvoir de la grande bourgeoisie déjà “libérale” car ayant joué le
gaullisme contre le pétainisme. Ce libéralisme économique a mis en place le bloc
production de série-consommation de masse, qui est le lieu objectif de la société civile,
lieu commun au libéralisme et à la social-démocratie. »
— Michel Clouscard, Critique du libéralisme libertaire (1986), éd. Delga, 2013 (ISBN
9782915854015), p. 259-260
« [...] cette nature libertaire de la société est la finalité du capitalisme. Avec le libertaire, le
libéralisme accomplit son concept.
[...] la société civile du marché du désir exige des modèles de consommation
libidinale, ludique, marginale d’ordre libertaire. »
— Michel Clouscard, Critique du libéralisme libertaire (1986), éd. Delga, 2013 (ISBN
9782915854015), p. 230
« [...] alors que la bourgeoisie [...] aurait pu devenir conscience politique et proposer de
s’allier à la classe ouvrière, cette bourgeoisie a préféré se convertir en bourgeoisie du
libéralisme libertaire. C’est qu’elle accédait ainsi à de prestigieux statuts sociaux, aux postes
d’encadrement de cette nouvelle société : management et surtout animation. »
— Michel Clouscard, Critique du libéralisme libertaire (1986), éd. Delga, 2013 (ISBN
9782915854015), p. 220
« La doxa n’est que la mise en relation du pouvoir et du sexe, leur témoin à la fois critique
et complaisant.
Le mondain est le concept le plus synthétique, qui permet d’appréhender le jeu commun
du sexe, du pouvoir, de l’opinion. »
— Michel Clouscard, Critique du libéralisme libertaire (1986), éd. Delga, 2013 (ISBN
9782915854015), p. 210-211
« Une nouvelle “élite intellectuelle” a surgi, en totale rupture avec le discours traditionnel
de l’artiste et de l’intellectuel. Elle est issue des deux grandes fonctions régulatrices de
l’ordre libéral : le management et l’animation. »
— Michel Clouscard, Critique du libéralisme libertaire (1986), éd. Delga, 2013 (ISBN
9782915854015), p. 177
« [...] l’appareil d’État [s’est] substitué à l’État pour mieux servir les multinationales. [La
société civile est] un corps organique qui s’est substitué au corps organique de l’État-
nation, mais qui fonctionne dans l’encadrement formel de cet État-nation. »
— Michel Clouscard, La Bête sauvage (1983), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250557), p. 161-164
« La société civile est une nation sans État qui est devenue un marché. »
— Michel Clouscard, La Bête sauvage (1983), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250557), p. 111
« Les GI’s ont été des conquérants-libérateurs. Ils ont triomphé du nazisme — le
débarquement — et importé les premiers produits du rêve américain. L’impérialisme
économique est aussi la paix... américaine. [...]
Par le potlatch du plan Marshall, le capitalisme américain a conquis une
suzeraineté politique sur les nations européennes, et un marché. »
— Michel Clouscard, La Bête sauvage (1983), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250557), p. 82-83
« Le passage du désir au marché peut très facilement se faire, car les deux sont dans la
continuité, l’homogénéité du profit. La consommation transgressive est une forme
désirante déjà constituée par l’économie du profit. »
— Michel Clouscard, La Bête sauvage (1983), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250557), p. 67
« Mais le grand capital ne fait pas les réinvestissements productifs pourtant autorisés par
les surprofits de l’ascendance. D’une part, il va se spécialiser dans des industries d’avant-
garde, qui autorisent les exportations, les nouveaux marchés, la rentrée des devises.
D’autres part, il va exporter ses capitaux, investir ailleurs, produire non français,
abandonner le sol national. »
— Michel Clouscard, La Bête sauvage (1983), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250557), p. 53
« La fin de la philosophie d’Aristote (qui avait proposé l’Un de l’unité grecque) est le
moment où cette problématique apparaît. Deux héritiers : le stoïcisme et l’épicurisme,
proposent des éléments anthropologiques. Quels sont les besoins nécessaires et
suffisants ? Mais la solution débouche sur une aporie : soit la jouissance, soit la privation,
soit l’extinction des besoins, soit leur développement. »
— Michel Clouscard, La Bête sauvage (1983), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250557), p. 35
« Plus de lieu naturel, mais la banlieue anonyme. Tout un acquis de civilisation — le chez
soi même du plus pauvre, l’harmonie de la vie privée et de la vie domestique dans une
nature humanisée par le travail de l’homme, le pas de porte, ouvert sur la vie
communautaire et sur cette nature humanisée (ce que Holderling appelle “le nationel”, qui
est le lieu commun de l’éternelle poésie et de la culture populaire) — a été anéanti peut-
être à jamais. »
— Michel Clouscard, La Bête sauvage (1983), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250557), p. 32
« [...] l’État doit organiser la libéralisation des mœurs qui permettra la meilleure circulation
de la nouvelle marchandise. L’État a besoin d’une société civile qui dénonce... l’État. Aussi,
le dogmatisme, le gauchisme, les nouveaux philosophes sont les fourriers de la société
civile voulue par l’appareil d’État soumis aux multinationales. »
— Michel Clouscard, La Bête sauvage (1983), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250557), p. 23
« [...] le capitalisme a produit la société civile, ce que Hegel appelait “la Bête
Sauvage” : une société qui n’est plus qu’un marché [...]. »
— Michel Clouscard, La Bête sauvage (1983), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250557), p. 11
« [...] la femme a tout à gagner des lois sociales et le phallocrate a tout à gagner du
féminisme. L’émancipation mondaine de la femme non seulement s’accompagne
d’une plus grande garantie d’usage pour le phallo mais encore élargit
extraordinairement son champ de consommation. »
— Michel Clouscard, Le Capitalisme de la séduction (1981), éd. Delga, 2015 (ISBN
9782915854138), p. 167-168
« Le féminisme est cette idéologie qui consacre une nouvelle et terrible ségrégation dans
le sexe féminin. Ségrégation de classe qui organise deux destins de femme.
Celles qui parviennent, arrivent. Qui s’intègrent à la dynamique du système. Celles qui ont
droit aux essais et erreurs. Aux expériences non seulement permises mais recommandées.
Et qui, en définitive, réussissent ou réussiront leurs mariages, leurs enfants, leurs carrières.
Et celles pour qui l’avortement, le divorce, le travail-chômage sont de terribles drames, des
traumatismes irrécupérables, des épreuves insurmontables. [...]
Le système a su gérer magistralement cet échec. Grâce à ses lois “sociales” qui
empêchent ces femmes de s’insurger. Il a su récupérer le négatif par une bonne
gestion de l’échec : un bon avortement, un bon divorce, un bon chômage. Toute
une population féminine est assurée de “réussir” ses échecs. Au prix d’une
insatisfaction profonde. »
— Michel Clouscard, Le Capitalisme de la séduction (1981), éd. Delga, 2015 (ISBN
9782915854138), p. 170-171
« La lutte des sexes n’a de sens que par la lutte des classes. »
— Michel Clouscard, Le Capitalisme de la séduction (1981), éd. Delga, 2015 (ISBN
9782915854138), p. 175
« La seule mesure de l’égalité politique entre l’homme et la femme, c’est l’égalité devant le
travail. C’est l’égalité proposée par le socialisme (celui qui lutte contre la social-
démocratie). C’est la seule manière d’en finir à la fois avec l’Ève éternelle et l’Homme
éternel. Alors plus de phallocrates ni de féministes. Mais un rôle commun, dans le procès
de production et de consommation. [...]
L’émancipation ne peut être que l’émancipation du sexe par le sexe. Alors la contradiction
fondamentale du féminisme — l’égalité des sexes par le sexisme — s’avère
la coquetterie de la femme moderne. »
— Michel Clouscard, Le Capitalisme de la séduction (1981), éd. Delga, 2015 (ISBN
9782915854138), p. 180-181
« Ce n’est pas la société capitaliste qui a récupéré la libido. Mais la société capitaliste qui a
“inventé” la libido. [...]
L’idéologie social-démocrate, à partir du plan Marshall, est devenue l’idéologie de
l’émancipation libidinale, ludique, marginale. Le fonctionnel — acquis par le travail des
autres — devient ludique en même temps que la France se soumet au modèle américain. »
— Michel Clouscard, Le Capitalisme de la séduction (1981), éd. Delga, 2015 (ISBN
9782915854138), p. 220-221
« En ces lieux, chacun se prostitue au succès. L’argent aussi. D’abord l’argent : le producteur
est à la remorque du réinvestissement. Il fait la cour au succès qu’il ne faut pas manquer
sous peine de faillite. Vedette et producteur se font mutuellement la cour. Quant à
Jeunesse et Beauté, elles ne savent plus à qui se prostituer. À la vedette, au producteur, au
metteur en scène, au journaliste, à l’animateur ? Il n’y aura de Beauté que reconnue,
statutaire, codifiée par tous ces entremetteurs du succès. Peut-il y avoir une Beauté si elle
n’est pas mise sur la scène du monde, si elle n’accède pas au pouvoir mondain, si elle n’a
pas le rôle de la Beauté : mannequin, artiste de cinéma, cover-girl, etc. ? Que de
Cendrillons attendent que leur beauté soit reconnue par ces princes charmants. »
— Michel Clouscard, Le Capitalisme de la séduction (1981), éd. Delga, 2015 (ISBN
9782915854138), p. 280
« C’est le rythme du capitalisme : le rock. Le rythme sans le swing est l’essence temporelle
de ce capitalisme. Il est l’expression corporelle de “l’aliénation de l’homme”. La marque du
rythme répétitif, saccadé, fébrile, de la machine. La répétition égoïste et sécurisante du
Même. La volonté de consommer sans rien produire. Et refus de l’échange, du partage. »
— Michel Clouscard, Le Capitalisme de la séduction (1981), éd. Delga, 2015 (ISBN
9782915854138), p. 100
« Ce prétendu swing devient du coup le modèle de la contestation, de la
subversion de la société industrielle et capitaliste. C’est une substance : un lieu, une
race, une essence naturelle. Le Noir swingue et témoigne ainsi d’une pureté ontologique
que le Blanc, par son histoire, a reniée, effacée de son corps, pour se soumettre au gestuel
policé de la civilisation.
Grâce au rock, le Blanc pourrait retrouver cette innocence d’avant la
civilisation (l’antéprédicatif). Ces idéologues diront que le rock libère le corps de son
carcan religieux et moral, du maintien gauche occidental. Alors le corps n’est plus
guindé, honteux de lui-même. Il s’exprime. Le corps modelé par la religion, culpabilisé,
corps du péché, peut se défouler, se libérer des tabous. »
— Michel Clouscard, Le Capitalisme de la séduction (1981), éd. Delga, 2015 (ISBN
9782915854138), p. 102-103
« Les regroupements, je le rappelle, ne se font pas vers les extrêmes mais au contraire vers
le centre. Vers une social-démocratie libertaire qui réalise cette unification au-delà des
clivages politiques consacrés. L’aile droite recouvre le néo-libéralisme venu de la
dynamique ascendante du CME (la “nouvelle société” de Chaban-Delmas, reprise en partie
par Giscard d’Estaing). L’aide gauche recouvre une forte partie de l’actuelle clientèle
électorale du parti socialiste. Une puissante dynamique d’homogénéisation vers le centre
(droit ou gauche, selon l’alternance, selon la liberté social-démocrate), tend à déborder les
encadrements politiques. Tout en conservant les particularismes politiques qui garantissent
les intérêts corporatifs. »
— Michel Clouscard, Le Frivole et le Sérieux (1978), éd. Delga, 2017 (ISBN
9782915854206), p. 206-207
« L’ensemble capitaliste pourrait être considéré selon ces trois moments : le libéralisme
traditionnel, le national-socialisme, le néo-libéralisme (société de consommation). Le
libéralisme classique apporte la croissance, mais la crise remet en question le principe
même de ce libéralisme. Le national-socialisme sauve le capitalisme mais au prix d’un
blocage nationaliste de la croissance. »
— Michel Clouscard, Néo-fascisme et idéologie du désir (1973), éd. Delga, 2017 (ISBN
9782915854534), p. 29
« [...] le but final d’une nation n’est pas la vie. C’est la résurrection. La résurrection des
nations, selon notre rédempteur Jésus-Christ. La création d’une culture, la civilisation ne
sont que des moyens, pour arriver à la résurrection, et non pas des fins en elles-mêmes,
comme on a pu le croire. La civilisation est le fruit des talents que Dieu a semés dans une
nation et dont celle-ci aura à rendre compte. Le temps viendra où toutes les nations
de la terre ressusciteront, avec leurs morts, leurs rois et leurs empereurs.
Chaque nation aura sa place devant le trône de Dieu. [...]
La nation est une entité dont la vie se prolonge au-delà de la terre. Les nations sont des
réalité spirituelles : elles vivent non seulement ici-bas mais aussi dans le règne de Dieu. »
— Corneliu Zelea Codreanu, La Garde de fer (1936), trad. Éditions Prométhée, éd. Éditions
Prométhée, coll. « Omul Nou », 1972, p. 399
BENJAMIN CONSTANT
« Le danger de la liberté antique était qu’attentifs uniquement à s’assurer le partage du
pouvoir social, les hommes ne fissent trop bon marché des droits et des jouissances
individuelles.
Le danger de la liberté moderne, c’est qu’absorbés dans la jouissance de notre
indépendance privée, et dans la poursuite de nos intérêts particuliers, nous ne
renoncions trop facilement à notre droit de partage dans le pouvoir
politique. »
— Benjamin Constant, De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes (1819),
éd. Berg International, 2016 (ISBN 9782370200921), p. 46
« [...] prions l’autorité de rester dans ses limites ; qu’elle se borne à être juste.
Nous nous chargerons d’être heureux. »
— Benjamin Constant, De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes (1819),
éd. Berg International, 2016 (ISBN 9782370200921), p. 46
« Le but des anciens était le partage du pouvoir social entre tous les citoyens
d’une même patrie : c’était là ce qu’ils nommaient liberté. Le but des modernes
est la sécurité dans les jouissances privées ; et ils nomment liberté les garanties accordées
par les institutions à ces jouissances. »
— Benjamin Constant, De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes (1819),
éd. Berg International, 2016 (ISBN 9782370200921), p. 29
« Dans les démocraties républicaines comme monarchiques, les hommes d’État sont des
marionnettes, les capitalistes des tireurs de ficelles : ils dictent [diktieren] les lignes
directrices de la politique, ils dominent les électeurs par le biais de l’achat de l’opinion
publique, les ministres par le biais des relations commerciales et sociétales
[gesellschaftliche].
À la structure sociétale féodale s’est substituée la structure sociétale ploutocrate : ce n’est
plus la naissance qui détermine la position sociale [soziale], mais le revenu. La ploutocratie
d’aujourd’hui est plus puissante que l’aristocratie d’hier : car rien ne se situe au-dessus
d’elle sinon l’État qui est son outil et son complice. »
— Richard Coudenhove-Kalergi, Idéalisme pratique (1925), trad. Adeline A. Gasnier, éd.
Pan-Europa Éditions, 2014, p. 32
LOUNES DARBOIS
« La véritable mission d’Hollywood n’est pas de divertir mais d’influencer les
esprits. »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 174
« C’est fini ! Ils ont plus de religion les Blancs lumière du monde, plus de race, plus de
sacral, plus de folklore, plus de vérité ! »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 166
« Pour vaincre le porno, c’est comme pour la drogue, il faut attaquer l’offre et
non la demande [...], les grandes plate-formes contrôlent [...] 90 % du flux
pornographique mondial. »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 94-108
« Dans le grand choc des civilisations, le Blanc est castré par son culte de la
femme alter-égale déifiée dont il défend servilement les droits, y compris les
droits à le duper, le cocufier, le quitter, le ruiner, lui confisquer ses enfants et le pousser au
suicide. »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 91
« Les années 80-2000 auront vu la succession par milliers de fournées de jeunes actrices
porno caucasiennes appartenant au 99e percentile de l’humanité, le plus beau, le plus
rare. »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 91
« Petit rappel : obtenir la fille la plus innocente, accomplir un souillage maximal, voilà la
“bonne scène”. »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 78
« Il n’y a pas porno bénin. Pourtant c’est l’omerta totale sur la dépendance au porno,
gardée par chacun comme une maladie honteuse, processus qui altère, transforme,
dénature, convertit toujours plus profondément le sujet au porno, à la pensée porno. Oui, à
la fin on pense porno, on veut baiser porno. »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 21
« Quelle armes avons-nous ? Quelles armes ont les garçons pour gérer les pulsions
sexuelles de leurs douze ans, à cet âge les plus fortes car les plus neuves ? L’immense
majorité d’entre eux seront accompagnés par la pornographie, en raison de son caractère
addictif, toute leur vie. »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 17
« [...] le diable a pour mission d’entraîner l’homme en enfer, à une condition bien précise :
avec l’assentiment, avec le libre arbitre, avec le plein gré de l’homme. Quel abaissement
plus librement consenti, quand on y réfléchit deux secondes, que de rentrer chez soi se
branler ? Même si personne ne nous voit ? La pornographie démolit l’image de la
femme qui se prostitue certes, mais aussi, rappelons-le, la dignité de l’homme
qui y succombe. En suscitant à répétition la honte secrète de la masturbation avec
images, la pornographie rabaisse l’estime de soi d’hommes déjà mal aimés des femmes —
raison pour laquelle ils se rabattaient déjà sur la masturbation mentale, penchant que le
porno va exalter par les images. Le recours à la pornographie est la voie de garage des
perdants de la sélection naturelle. Le porno achève d’écrémer les hommes, établissant les
reproducteurs d’un côté qui draguent et baisent, sortent, existent, et les frustrés de l’autre
— ceux-là se branlent, cloîtrés chez eux. »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 16
« Semblable à un pervers qui vous aurait violé quand vous étiez petit,
l’exposition à la pornographie ne peut que forcer, violer l’imagination, car
c’est toujours malgré soi que l’on est excité par une image. »
— Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2017), éd. Kontre Kulture, 2017, p. 12
GUY DEBORD
« Les actuels moutons de l’intelligentsia [...] ne connaissent plus
que trois crimes inadmissibles, à l’exclusion de tout le reste : racisme,
antimodernisme, homophobie. »
— Guy Debord, Lettre à Michel Bounan, 21 avril 1993
« Partout la spéculation est, pour finir, devenue la part souveraine de toute la propriété.
Elle s’autogouverne plus ou moins, selon les prépondérances locales, autour des Bourses,
ou des États, ou des Mafias : tous se fédérant dans une sorte de démocratie des élites de la
spéculation. Le reste est misère. Partout l’excès du simulacre a explosé comme Tchernobyl,
et partout la mort s’est répandue aussi vite et massivement que le désordre. Plus rien ne
marche et plus rien n’est cru. »
— Guy Debord, « “Cette mauvaise réputation...” » (1993), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 2006 (ISBN 9782070773749), p. 1832
« [...] la conduite effective du spectacle ; conduite à tout instant désastreuse et sans retour ;
de la production économique et de sa transformation totale ; de la pollution planétaire et
du désastre de la santé publique ; du remplacement du langage par les ordinateurs mieux
contrôlables ; et finalement de l’espèce humaine par une autre espèce mieux adaptée ; bref
dans toute ce qui se décide et ce qui s’exécute maintenant. »
— Guy Debord, « “Cette mauvaise réputation...” » (1993), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 2006 (ISBN 9782070773749), p. 1826
« L’imprécision du langage est désormais utile aux journalistes, et cela tombe bien,
puisqu’ils seraient presque tous incapables d’écrire mieux. »
— Guy Debord, « “Cette mauvaise réputation...” » (1993), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 2006 (ISBN 9782070773749), p. 1805
« Quand “être absolument moderne” est devenu une loi spéciale proclamée par
le tyran, ce que l’honnête esclave craint plus que tout, c’est que l’on puisse le
soupçonner d’être passéiste. »
— Guy Debord, « Panégyrique » (1989), dans Œuvres, éd. Gallimard, coll.
« Quarto », 2006 (ISBN 9782070773749), p. 1684
« Ils [les spectateurs] sont même séparés de leurs propres enfants, naguère encore la seule
propriété de ceux qui n’ont rien. On leur enlève, en bas âge, le contrôle de ces enfants, déjà
leurs rivaux qui n’écoutent plus du tout les opinions informes de leurs parents, [...]
méprisent non sans raison leur origine, et se sentent bien davantage les fils du spectacle
régnant que de ceux de ces domestiques qui les ont par hasard engendrés. Ils se rêvent les
métis de ces nègres-là. »
— Guy Debord, « In girum imus nocte et consumimur igni » (1978), dans Œuvres, éd.
Gallimard, coll. « Quarto », 2006 (ISBN 9782070773749), p. 1338-1339
LEON DEGRELLE
« Là où Napoléon et Hitler ont échoué, c’est peut-être le fils de l’un de nos
adversaires du Caucase et de Tcherkassy qui réussira en rassemblant autour
de la Russie, guérie du virus communiste, tous les peuples européens pour
entraîner le monde dans une nouvelle marche en avant. »
— « Pourquoi j’ai cru en Hitler », Jean Kapel, Histoire magazine, nº 19, septembre 1981
« Quand je récapitule, je n’ai qu’un sentiment, c’est un immense regret, regret que nous
n’ayons pas réussi, que nous n’ayons pas pu créer ce monde européen qui eut été le maître
de l’univers pour toujours, qui assurait à la race blanche, la première des races, la grande
domination de l’esprit. Et quand nous voyons ce qu’il y a en face, ce que trente ans
de victoire des autres ont donné... Cette anarchie dans le monde... Cette
débandade du monde blanc... Cette désertion à travers l’univers... Quand nous
voyons dans nos propres pays la décomposition des mœurs, la chute de la
patrie, la chute de la famille, la chute de l’ordre social... Quand nous voyons
cet appétit des biens matériels qui a succédé à la grande flamme de l’idéal qui
nous animait... Eh bien, vraiment, entre les deux, nous avions choisi le bon
côté !
La petite Europe misérable d’aujourd’hui, de ce marché commun étriqué, ça peut pas
donner le bonheur aux hommes ! La société de consommation pourrit l’humanité au lieu
de la grandir ! Alors nous autres au moins nous avons rêvé à quelque chose de grandiose,
et nous n’avons qu’un désir, c’est que cet esprit-là renaisse, et, avec mes forces et jusqu’au
dernier moment de mon existence, je lutterai pour cela, pour que ce qui fut notre combat,
notre martyr, soit un jour la résurrection du monde ! »
— Léon Degrelle cité par Jean-Michel Charlier, Léon Degrelle persiste et signe (1976), éd.
Jean Picollec, 1985, p.
« La facilité endort l’idéal. Rien ne le redresse mieux que le fouet de la vie dure ; elle nous
fait deviner la profondeur des devoirs à assumer, de la mission dont il faut être digne. Le
reste ne compte pas. La santé n’a aucune importance. On est pas sur terre pour manger à
l’heure, dormir à temps, vivre cent ans ou d’avantage. Tout cela est vain et sot. Une seule
chose compte : avoir une vie utile, affiler son âme, être penché sur elle à chaque instant, à
surveiller ses faiblesses et à exalter ses élans, servir les autres, jeter autour de soi le
bonheur et la tendresse, donner le bras à son prochain, pour s’élever tous en s’aidant l’un
l’autre. »
— Léon Degrelle, Les Âmes qui brûlent (1964), éd. À la feuille de Chêne, 1964, p.
« Brève ou longue, la vie ne vaut que si nous n’avons pas à rougir d’elle à l’instant où il
faudra la rendre. »
— Léon Degrelle, Les Âmes qui brûlent (1964), éd. À la feuille de Chêne, 1964, p.
« Il y a sur la terre tant de choses médiocres, basses ou laides, qu’on finirait par être un jour
submergé par elles si on ne portait pas en soi le feu qui brûle le laid, le consume et nous
purifie. L’art est notre salut intérieur, notre jardin secret qui sans cesse nous rafraîchit et
nous embaume. Poésie, peinture, sculpture, musique, n’importe quoi, mais s’évader du
banal, s’élever au-dessus de la poussière desséchante, créer le grand, au lieu de subir le
petit, faire jaillir cette étincelle d’extraordinaire que chacun de nous possède, et la convertir
en un grandiose incendie, dévorant, inextinguible. »
— Léon Degrelle, Les Âmes qui brûlent (1964), éd. À la feuille de Chêne, 1964, p.
« Lorsqu’on nie l’existence de Dieu, on nie tout du gouvernement, et on lui refuse jusqu’au
droit d’exister. À ces époques de malédiction surgissent et se propagent avec une
épouvantable rapidité les idées anarchiques des écoles socialistes.
Enfin, lorsque l’idée de la Divinité et celle de la création se confondent dans cette
affirmation que les choses crées sont Dieu, et que Dieu est l’universalité des choses créées,
alors le communisme prévaut dans les régions politiques, comme le panthéisme dans les
régions religieuses, et la justice de Dieu met l’homme à la merci d’abjects et abominables
tyrans. »
— Juan Donoso Cortés, « Lettre au Cardinal Fornari » (19 juin 1852), dans Théologie de
l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013,
p. 178
« [...] le grand empire antichrétien sera un empire démagogique colossal, gouverné par un
plébéien de grandeur satanique, l’homme de péché. »
— Juan Donoso Cortés, « Lettre au Cardinal Fornari » (19 juin 1852), dans Théologie de
l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013,
p. 177
« Ce que toutes ces erreurs sociales ont de monstrueux tient à la profondeur des erreurs
religieuses, où elles ont leur explication et leur origine. Les socialistes ne se contentent pas
de reléguer Dieu dans le ciel ; ils vont plus loin, ils font profession publique d’athéisme, ils
nient Dieu en tout. La négation de Dieu, source et origine de toute autorité, étant admise,
la logique exige la négation absolue de l’autorité même ; la négation de la paternité
universelle entraîne la négation de la paternité domestique ; la négation de l’autorité
religieuse entraîne la négation de l’autorité politique. Quand l’homme se trouve sans
Dieu, aussitôt le sujet se trouve sans roi et le fils sans père. »
— Juan Donoso Cortés, « Lettre au Cardinal Fornari » (19 juin 1852), dans Théologie de
l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013,
p. 176
« Je crois, au contraire, pour ce qui est du droit : que le droit humain n’existe
pas, et qu’il n’y a de droit que divin. En Dieu réside le droit et la concentration de
tous les droits ; en l’homme, le devoir et la concentration de tous les devoirs. Ce que
l’homme appelle son droit n’est que l’avantage qu’il retire de l’accomplissement par autrui
de son devoir, si bien que le mot droit sur ses lèvres est une locution vicieuse. Que,
poussant les choses, il transforme son vice d’expression en une théorie, et cette théorie
n’en finit plus de déchaîner des tempêtes sur le monde. »
— Juan Donoso Cortés, Lettre adressée au directeur du journal El Heraldo, trad. André
Coyné, 15 avril 1852
« En général, les gouvernements qui s’appuient sur les classes moyennes sont plus exposés
que les autres à un abandon complet, ces classes sont incapables, par leur organisation
intérieure, de tout ce qui ressemble au culte, à l’abnégation et au sacrifice. »
— Juan Donoso Cortés, « Ambassade d’Espagne à Paris. Communication n° 24 » (15 avril
1851), dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La
nuit surveillée », 2013, p. 221
« Dieu a laissé un champ libre et étendu aux opinions humaines ; il a assigné un vaste
empire au libre arbitre de l’homme ; il lui a donné le pouvoir de dominer la terre et les
mers, de se révolter contre son Créateur, de faire la guerre au ciel, de conclure des traités et
des alliances avec les puissances infernales, d’assourdir le monde du fracas des batailles,
d’embraser les sociétés des feux de la discorde, de les épouvanter par les redoutables
secousses des révolutions, de fermer son intelligence à la vérité et ses yeux à la lumière,
d’accueillir l’erreur et de se plaire dans les ténèbres ; de fonder des empires et de les
détruire, d’établir des républiques et de les renverser, de se lasser, et des républiques, et
des empires, et des monarchies, de délaisser ce qu’il a voulu, de revenir à ce qu’il a laissé,
d’affirmer tout, jusqu’à l’absurde, de nier tout, jusqu’à l’évidence, de dire : Il n’y a pas de
Dieu, et : Je suis Dieu ; de se proclamer indépendant de toutes les puissances, et d’adorer
l’astre qui l’éclaire, le tyran qui l’opprime, le reptile qui rampe sur la terre, la tempête qui
remplit les airs de ses mugissements, la foudre qui le frappe, la nuée qui passe. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 410-411
« Les théories pénale des monarchies absolues, aux jours de leur décadence, ont donné
naissance aux théories des écoles libérales, et celles-ci ont poussé les choses au point
périlleux où nous les voyons. Derrière ces écoles arrivent les socialistes avec leur théorie
des saintes insurrections et des crimes héroïques ; et ce n’est pas encore la fin : dans les
horizons lointains commencent à poindre de plus sanglantes aurores. Le nouvel évangile
du monde s’écrit peut-être dans un bagne. Le monde n’aura que ce qu’il mérite quand il
sera contraint de subir ces nouveaux apôtres et leur évangile.
Ceux qui ont fait croire aux peuples que la terre peut être un paradis leur ont fait croire
encore plus facilement que la terre doit être un paradis où le sang ne coulera jamais. Ce
n’est pas dans cette illusion qu’est le mal ; mais, au jour et à l’heure où elle serait acceptée
de tous, le sang jaillirait même des rochers, et la terre deviendrait un enfer. Dans cette
basse et obscure vallée, l’homme ne peut aspirer à une félicité impossible sans perdre le
peu de bonheur qui lui était laissé. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 361-362
« Les hommes ne sont pas moins durs les uns pour les autres que la nature ne l’est pour
eux tous : partout où vous les trouvez réunis, vous voyez les faibles subir le joug des forts.
Une femme distinguée par ses talents, voulant donner une preuve de son génie, se
demanda un jour quel pouvait être le plus grand et le plus étrange de tous les paradoxes.
Elle n’en trouva pas de plus grand et de plus étrange que d’affirmer du ton le plus
convaincu que l’esclavage est chose moderne, et la liberté chose antique. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 317
« Croire à l’égalité de tous les hommes, lorsque je les vois tous inégaux ; croire à la liberté,
lorsque je trouve la servitude établie partout ; croire que tous les hommes sont frères,
lorsque l’histoire me les montre toujours divisés, toujours ennemis ; croire qu’il y a une
masse commune de gloires et d’infortunes pour tous les mortels, lorsque je ne puis
découvrir que des infortunes et des gloires individuelles ; croire que j’existe pour
l’humanité, lorsque j’ai la conscience que je rapporte l’humanité à moi-même ; croire que
cette même humanité est mon centre, quand je me fais le centre de tout ; enfin croire que
je dois croire toutes ces choses, lorsque ceux qui me les proposent comme objet de ma foi
affirment que je ne dois croire qu’à ma raison qui les rejette toutes, quelle inconcevable
aberration ! quelle étrange folie !
Ma stupéfaction augmente encore quand j’entends ces mêmes hommes qui affirment la
solidarité humaine, nier celle de la famille : n’est-ce pas affirmer que les ennemis sont
frères et que les frères ne doivent pas l’être ? quand ces mêmes hommes qui affirment la
solidarité humaine nient la solidarité politique : n’est-ce pas affirmer que je n’ai rien de
commun avec mes concitoyens et que tout m’est commun avec les étrangers ? quand ces
mêmes hommes, qui affirment la solidarité humaine, nient la solidarité religieuse : n’est-ce
pas affirmer l’effet et nier la cause ? sans la solidarité religieuse, la solidarité humaine est-
elle explicable ? Je vois donc clairement que les écoles socialistes sont à la fois illogiques et
absurdes [...]. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 314-315
« Le mal, qui, selon votre doctrine, a son principe dans la société, est une essence ou un
accident ; si c’est une essence, il ne suffit pas, pour le détruire, de bouleverser les
institutions sociales, il faut en outre détruire la société même, puisqu’elle est l’essence qui
le produit sous toutes ses formes ; si, au contraire, ce n’est qu’un accident, vous êtes
obligés de faire ce que vous n’avez jamais fait, ce que vous ne faites pas, ce que vous ne
pouvez faire : vous êtes obligé d’abord de m’expliquer en quel temps, par quelle cause, de
quelle manière et en quelle forme est survenu cet accident, et ensuite par quelle série de
déductions vous parvenez à faire de l’homme le rédempteur de la société, en lui donnant
le pouvoir de la guérir de ses souillures, de laver ses péchés. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 253-254
« Les écoles socialistes, abstraction faite des foules grossières qui les suivent, [...]
l’emportent de beaucoup sur l’école libérale, précisément parce qu’elles vont droit à tous
les grands problèmes et à toutes les grandes questions, et parce qu’elles proposent
toujours une solution péremptoire et décisive. Le socialiste n’est fort que parce qu’il est
une théologie ; il n’est destructeur que parce qu’il est une théologie satanique. Étant
donné, d’une part, ce que les écoles socialistes ont de théologique de l’autre ce que l’école
libérale a d’antithéologique et de sceptique, dans la lutte entre le socialisme et le
libéralisme, le socialisme doit triompher ; mais ce qu’il de satanique le fera succomber
devant l’école catholique, qui est à la fois théologique et divine. Sur ce point, du reste,
l’instinct socialiste paraît s’accorder avec nos affirmations, car c’est pour le catholicisme
qu’il réserve ses haines ; pour le libéralisme, il n’a que du dédain. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 223-224
« Quant à l’école libérale, je dirai seulement que, dans sa superbe ignorance, elle méprise
la théologie. Ce n’est pas qu’elle ne soit théologienne à sa manière mais elle l’est sans le
savoir. Cette école n’est pas encore arrivée à comprendre, et probablement elle ne
comprendra jamais quel lien étroit unit entre elles les choses divines et les choses
humaines, quelle est l’affinité des questions politiques avec les questions sociales, et des
unes et des autres avec les questions religieuses, et comment tous les problèmes relatifs au
gouvernement des nations dépendent de ces autres problèmes qui se rapportent à Dieu,
législateur suprême de toutes les associations humaines. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 215
« Elle nous font voir pourquoi, lorsque Pilate lui donna le choix entre Barrabas et Jésus, le
peuple juif livra Jésus aux bourreaux et délivra Barrabas ; pourquoi, ayant à choisir
aujourd’hui entre la théologie catholique et la théologie socialiste, le monde prend la
théologie socialiste et rejette la théologie catholique ; pourquoi les discussions humaines
vont aboutir à la négation de l’évidence et à la proclamation de l’absurde. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 101
« Prenez donc une autre voie ; annoncez que vous avez un argument qui renverse telle ou
telle vérité mathématique, par lequel vous allez démontrer, par exemple, que deux et deux
ne font pas quatre, mais cinq : que Dieu n’existe pas, ou que l’homme est Dieu ; que le
monde jusqu’à cette heure a vécu sous l’empire des plus honteuses superstitions ; que la
sagesse des siècles n’est que pure ignorance ; que toute révélation est une imposture ; que
tout gouvernement est une tyrannie et toute obéissance une servitude ; que le beau est le
laid ; que le laid est le beau suprême ; que le mal est le bien et le bien le mal ; que le diable
est Dieu et que Dieu est le diable ; qu’après cette vie il n’y a ni ciel ni enfer ; que le monde
que nous habitons a été jusqu’à nos jours et est encore un enfer véritable, mais que
l’homme peut en faire et en fera bientôt un vrai paradis ; que la liberté, l’égalité et la
fraternité, sont des dogmes incompatibles avec la superstition chrétienne ; que le vol est
un droit imprescriptible, et que la propriété est un vol ; qu’il n’y a d’ordre que dans l’an-
archie, et que la véritable anarchie c’est l’ordre, etc. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 96-97
« Toute parole qui sort des lèvres de l’homme, et la parole même qui maudit
ou qui nie Dieu est une affirmation de la Divinité. »
— Juan Donoso Cortés, Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le
socialisme (1851), trad. Anonyme, éd. Dominique Martin Morin, 1986 (ISBN
9782856520864), p. 38
« Je ne sais, Messieurs, si je serai seul ; cela est possible ; mais, seul, absolument seul, ma
conscience me dit que je suis très fort, non par ce que je suis, mais par ce que je
représente. Je ne représente pas seulement les deux ou trois cents électeurs de mon
district ; qu’est un district ? [...] Je ne représente pas seulement la nation ; qu’est-ce que la
nation espagnole, ou toute autre, considérée dans une seule génération ou dans un seul
jour d’élections générales ? Rien. Je représente quelque chose de plus grand, de beaucoup
plus grand ; je représente la tradition par laquelle les nations sont ce qu’elles
sont dans toute la durée des siècles. Si ma voix a quelque autorité, ce n’est pas,
Messieurs, parce qu’elle est mienne, c’est parce qu’elle est la voix de vos pères. Vos votes
me sont indifférents ; je ne me suis pas proposé de m’adresser à vos volontés, qui votent,
mais à vos consciences, qui jugent ; je ne me suis pas proposé d’incliner vos volontés vers
moi, mais d’obliger vos consciences à ne pas me refuser leur estime. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la situation de l’Espagne » (30 décembre 1850),
dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit
surveillée », 2013, p. 161-162
« C’est en vain que les philosophes s’épuisent en théories, c’est en vain que les socialistes
s’agitent ; sans l’aumône, sans la charité, il n’y a pas, il ne peut y avoir de distribution
équitable de la richesse. Dieu seul pouvait résoudre ce problème, qui est le problème de
l’humanité et de l’histoire. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la situation de l’Espagne » (30 décembre 1850),
dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit
surveillée », 2013, p. 155
« Ce n’est pas mon opinion, cependant, que l’Europe n’ait rien à redouter de la Russie ; je
crois tout le contraire ; mais, pour que la Russie accepte une guerre générale, pour que la
Russie s’empare de l’Europe, il faut auparavant les trois événements que je vais dire,
lesquels sont, remarquez-le, Messieurs, non seulement possibles, mais encore probables.
Il faut d’abord que la révolution, après avoir dissous la société, dissolve les armées
permanentes. En second lieu, que le socialisme, en dépouillant les propriétaires, éteigne le
patriotisme, parce qu’un propriétaire dépouillé n’est pas et ne peut pas être patriote (dès
que la question est poussée jusqu’à ce terme, jusqu’à cette angoisse, tout patriotisme
meurt au cœur de l’homme). En troisième lieu, il faut que se réalise la confédération
puissante de tous les peuples slaves sous l’influence et le protectorat de la Russie. Les
nations slaves comptent, Messieurs, quatre-vingts millions d’habitants. Eh bien, lorsque la
révolution aura détruit en Europe les armées permanentes ; lorsque les révolutions
socialistes auront éteint le patriotisme en Europe ; lorsque, à l’orient de l’Europe, se sera
accomplie la grande fédération des peuples slaves ; lorsque dans l’Occident il n’y aura plus
que deux armées, celle des spoliés et celle des spoliateurs, alors l’heure de la Russie
sonnera ; alors la Russie pourra se promener tranquillement, l’arme au bras, en Europe :
alors le monde assistera au plus grand châtiment qu’ait enregistré l’histoire. [...]
De plus, Messieurs, la Russie, placée au milieu de l’Europe conquise et prosternée à ses
pieds, absorbera par toutes ses veines le poison que l’Europe a bu et qui la tue ; puis elle
ne tardera guère à tomber, elle aussi, en putréfaction. J’ignore, Messieurs, le remède
universel que Dieu tiendra prêt pour cette universelle pourriture. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la situation de l’Europe » (30 janvier 1850),
dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit
surveillée », 2013, p. 129-130
« Entrons maintenant, Messieurs, dans la période que j’ai appelée négative, révolutionnaire.
Dans cette période, trois négations correspondent aux trois affirmations précédentes.
Première négation, ou bien, comme je l’appellerai, négation du premier degré dans l’ordre
religieux : Dieux existe, Dieu règne, mais il est trop élevé pour gouverner les choses
humaines. Voilà la première négation, la négation du premier degré dans cette période
négative de la civilisation. Et dans l’ordre politique, quelle est la négation qui correspond à
cette négation de la Providence ? Dans l’ordre politique, le parti progressiste, qui répond
au déiste niant la Providence, se présente et dit : Le roi existe, le roi règne, mais le roi ne
gouverne pas. Ainsi la monarchie constitutionnelle progressiste appartient à la civilisation
négative du premier degré.
Seconde négation : Le déiste nie la Providence ; les partisans de la monarchie
constitutionnelle, comme l’entendent les progressistes, nient le gouvernement ; alors, dans
l’ordre religieux, le panthéiste s’avance et dit : Dieux existe, mais Dieu n’a pas d’existence
personnelle, Dieu n’est pas une personne, et, n’étant pas une personne, il ne règne ni ne
gouverne ; Dieu est tout ce que nous voyons, tout ce qui vit, tout ce qui se meut : Dieu,
c’est l’humanité. Voilà ce qui dit le panthéiste ; de sorte que le panthéiste, bien qu’il ne nie
pas l’existence absolue, nie l’existence personnelle, nie le règne de Dieu et la Providence.
Le républicain vient alors et dit : Le pouvoir existe, mais le pouvoir n’est pas une personne ;
et, n’étant pas une personne, il ne règne ni ne gouverne ; le pouvoir est tout ce qui vit, tout
ce qui existe, tout ce qui se meut ; dès lors c’est la multitude, dès lors il n’y a plus d’autre
moyen de gouvernement que le suffrage universel, ni d’autre gouvernement que la
république.
Ainsi le panthéisme, dans l’ordre religieux, correspond au républicanisme dans l’ordre
politique. Une autre négation se présente qui est la dernière : en fait de négations il n’y a
plus rien au-delà. Après le déiste, après le panthéiste, l’athée s’avance et dit : Dieu ne règne
ni ne gouverne ; Dieux n’est ni une personne ni la multitude : Dieu n’existe pas. Et alors,
Messieurs, paraît Proudhon, disant : Il n’y a pas de gouvernement. Ainsi, une négation
appelle une négation, comme un abîme appelle un abîme. Au-delà de cette négation, qui
est l’abîme, il n’y a rien, rien que ténèbres, et ténèbres palpables. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la situation de l’Europe » (30 janvier 1850),
dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit
surveillée », 2013, p. 126-127
« Tous ceux qui ont voyagé en France s’accordent à dire qu’aucun Français n’est
républicain. Je puis témoigner aussi de cette vérité, car j’ai visité la France. Mais, demande-
t-on, s’il n’y a pas de républicains en France, comment la République subsiste-t-elle ?
Personne n’en donne la raison ; je la donnerai. La République subsiste en France, et je dis
plus, la République subsistera en France parce qu’elle est la forme nécessaire du
gouvernement chez les peuples qui sont ingouvernables. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la situation de l’Europe » (30 janvier 1850),
dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit
surveillée », 2013, p. 124
« Messieurs, les réformes économiques ne sont pas un remède suffisant à ce mal ; la chute
d’un gouvernement et son remplacement par un autre gouvernement ne sont pas non plus
un remède. L’erreur fondamentale en cette matière est de croire que les maux que souffre
l’Europe viennent des gouvernements. Je ne nierai pas l’influence du gouvernement sur les
gouvernés ; comment la nierais-je ? qui l’a jamais niée ? Mais le mal est beaucoup plus
profond, beaucoup plus grave. Le mal n’est pas dans les gouvernements, le mal est dans
les gouvernés : le mal vient de ce que les gouvernés sont devenus ingouvernables.
La vraie cause de ce mal grave et profond, c’est que l’idée de l’autorité divine et de
l’autorité humaine a disparu. Voilà le mal qui travaille l’Europe, la société, le monde ; et
voilà pourquoi, Messieurs, les peuples sont ingouvernables. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la situation de l’Europe » (30 janvier 1850),
dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit
surveillée », 2013, p. 123
« Nul homme, entre ceux qui sont arrivés à l’immortalité, n’a basé sa gloire sur la vérité
économique ; tous ont fondé les nations sur la base de la vérité sociale, sur la base de la
vérité religieuse. Cela ne veut pas dire, car je prévois les objections et je vais au-devant
d’elles, cela ne veut pas dire qu’à mon avis les gouvernements doivent négliger les
questions économiques, que les peuples doivent être mal administrés ; je ne suis pas assez
dépourvu de raison et de cœur pour me laisser aller à une semblable extravagance. Je ne
dis pas cela, mais je dis que chaque question doit être mise à son rang, et que le rang de
ces questions est le troisième ou le quatrième, et non le premier : voilà ce que je dis.
Traiter ici ces questions, c’est, a-t-on prétendu, le moyen de vaincre le socialisme. Ah !
Messieurs, le moyen de vaincre le socialisme ! Qu’est-ce donc que le socialisme, si ce n’est
une secte économique ? Le socialisme est le fils de l’économie politique, comme le
vipereau est fils de la vipère, lequel, à peine né, dévore celle qui vient de lui donner la vie.
Entrez dans ces questions économiques, mettez-les au premier rang, et je vous annonce
qu’avant deux années vous aurez toutes les questions socialistes dans le parlement et dans
la rue. On veut combattre le socialisme ? Le socialisme ne se combat pas, et cette opinion,
dont les esprits forts auraient ri il y a quelque temps, ne fait plus rire en Europe ni dans le
monde. Si l’on veut combattre le socialisme, il faut recourir à cette religion qui enseigne la
charité aux riches, aux pauvres la patience ; qui enseigne aux pauvre à être résignés, et aux
riches à être miséricordieux. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la situation de l’Europe » (30 janvier 1850),
dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit
surveillée », 2013, p. 120
« Mes tristes prévisions s’appliquaient à l’Europe en général ; aujourd’hui, par malheur, elles
concernent aussi la nation espagnole. Je crois, Messieurs, je crois avec la conviction la plus
profonde que nous entrons dans une période d’angoisses ; tous les symptômes
l’annoncent à la fois : l’aveuglement des intelligences, l’animosité des esprits, les
discussions sans objet, les luttes sans motif ; mais par-dessus tout, — j’étonnerai sans
doute beaucoup l’Assemblée, — la fureur des réformes économiques. Quand cette fureur
qui vous agite tous emporte les esprits, comme elle le fait à cette heure, on peut y voir le
présage assuré de grandes catastrophes et de grandes ruines. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la situation de l’Europe » (30 janvier 1850),
dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit
surveillée », 2013, p. 115-116
« Pour moi, l’idéal de la vie, c’est la vie monastique. Je crois que ceux qui prient font plus
pour le monde que ceux qui combattent ; et que, si le monde va de mal en pis, c’est
qu’il y a plus de batailles que de prières. »
— Juan Donoso Cortés cité par Arnaud Imatz, « Lettre à Monsieur Albéric de Blanche,
marquis de Raffin » (21 juillet 1849), dans Théologie de l'histoire et crise de
civilisation, trad. Arnaud Imatz, éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013, Introduction, p. 83
« Les sociétés modernes ont conféré à tous le pouvoir d’être journalistes, et aux
journalistes la charge redoutable d’enseigner les nations, c’est-à-dire la charge même que
Jésus-Christ confia à ses apôtres. Je ne veux pas, en ce moment, porter un jugement sur
cette institution, je me borne à vous en faire remarquer la grandeur : votre profession est à
la fois une sorte de sacerdoce civil et une milice. »
— Juan Donoso Cortés, « Lettre ouverte aux rédacteurs d’El País et d’El Heraldo » (16
juillet 1849), dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf,
coll. « La nuit surveillée », 2013, p. 212
« L’homme a voulu être libre ? Il le sera. Il abhorre les liens ? Ils tomberont tous en
poussière à ses pieds. Un jour, pour essayer sa liberté, il a voulu tuer son Dieu. Ne l’a-t-il
pas fait ? Ne l’a-t-il pas crucifié entre deux voleurs ? Des légions d’anges sont-elles
descendues du ciel pour défendre le juste mourant sur la terre ? Eh bien, pourquoi
descendraient-elles aujourd’hui qu’il s’agit, non pas du crucifiement de Dieu, mais du
crucifiement de l’homme par l’homme ? Pourquoi descendraient-elles aujourd’hui quand
notre conscience nous crie si haut que, dans cette grande tragédie, personne ne mérite
leur intervention, ni ceux qui doivent être les victimes, ni ceux qui doivent être les
bourreaux ? »
— Juan Donoso Cortés, « Lettre au comte de Montalembert » (26 mai 1849),
dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit
surveillée », 2013, p. 190-191
« Il s’agit de choisir entre la dictature qui vient d’en bas et la dictature qui vient d’en haut :
je choisis celle qui vient d’en haut, parce qu’elle vient de régions plus pures et plus
sereines. Il s’agit de choisir, enfin, entre la dictature du poignard et la dictature
du sabre : je choisis la dictature du sabre, parce qu’elle est plus noble. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la dictature » (4 janvier 1849), dans Théologie de
l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013,
p. 113
« Les voies sont préparées pour un tyran gigantesque, colossal, universel ; tout
est préparé pour cela. Remarquez-le bien, il n’y a déjà plus de résistance ni morales ni
matérielles. Il n’y a plus de résistances matérielles : les bateaux à vapeur et les
chemins de fer ont supprimé les frontières, et le télégraphe électrique a
supprimé les distances. Il n’y a plus de résistances morales : tous les esprits
sont divisés, tous les patriotismes sont morts. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la dictature » (4 janvier 1849), dans Théologie de
l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013,
p. 109
« J’ai vu, j’ai connu beaucoup d’hommes qui, après s’être éloignés de la foi, y sont revenus ;
malheureusement je n’ai jamais vu de peuple qui soit revenu à la foi après l’avoir perdue. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la dictature » (4 janvier 1849), dans Théologie de
l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013,
p. 109
« C’est un fait historique, un fait connu, un fait incontestable, que la mission providentielle
de la France est d’être l’instrument de la Providence pour la propagation des idées
nouvelles, soit politiques, soit religieuses et sociales. Dans les temps modernes, trois
grandes idées ont envahi l’Europe : l’idée catholique, l’idée philosophique, l’idée
révolutionnaire. Or, dans ces trois périodes, toujours la France s’est faite homme pour
propager ces idées. Charlemagne a été la France faite homme pour propager l’idée
catholique ; Voltaire a été la France faite homme pour propager l’idée philosophique ;
Napoléon a été la France faite homme pour propager l’idée révolutionnaire. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la dictature » (4 janvier 1849), dans Théologie de
l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013,
p. 102
« Les révolutions sont la maladie des peuples riches, des peuples libres. [...]
Non, Messieurs, le germe des révolutions n’est pas dans l’esclavage, n’est pas dans la
misère ; le germe des révolutions est dans les désirs de la multitude surexcitée par les
tribuns qui l’exploitent à leur profit. Vous serez comme les riches, telle est la formule des
révolutions socialistes contre les classes moyennes. Vous serez comme les nobles, telle est
la formule des révolutions des classes moyennes contre les classes nobiliaires. Vous serez
comme les rois, telle est la formule des révolutions des classes aristocratiques contre les
rois. Enfin, Messieurs : Vous serez comme des dieux, telle est la formule de la
première révolte du premier homme contre Dieu. Depuis Adam, le premier
rebelle, jusqu’à Proudhon, le dernier impie, telle est la formule de toutes les
révolutions. »
— Juan Donoso Cortés, « Discours sur la dictature » (4 janvier 1849), dans Théologie de
l’histoire et crise de civilisation, trad. Anonyme, éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013,
p. 100-101
« Je n’ignore pas que la génération actuelle, nourrie au sein de la révolution, affirme tout
ce que je nie et nie tout ce que j’affirme. Je sais qu’elle admet et proclame comme une
chose hors de doute le principe de la perfectibilité indéfinie de la société et de l’homme,
quand je tiens pour vérifié que l’humanité est identique à elle-même dans toute la
continuité des temps [...]. Je sais même davantage ; je sais que les idées que je me propose
de combattre comme fausses, dangereuses, ou absurdes, ont le vent en poupe et
triomphent de tous les obstacles. »
— Juan Donoso Cortés cité par Arnaud Imatz, « Histoire de la Régence de Marie-
Christine » (1843), dans Théologie de l’histoire et crise de civilisation, trad. Arnaud Imatz,
éd. Cerf, coll. « La nuit surveillée », 2013, Introduction, p. 29
« Des siècles passeront et l’humanité proclamera par la bouche de ses savants et de ses
sages qu’il n’y a pas de crimes, et, par conséquent, pas de péché ; qu’il n’y a que des
affamés. “Nourris-les, et alors exige d’eux qu’ils soient “vertueux” ! Voilà ce qu’on inscrira
sur l’étendard de la révolte qui abattra ton temple. À sa place un nouvel édifice
s’élèvera, une seconde tour de Babel, qui restera sans doute inachevée, comme
la première ; mais tu aurais pu épargner aux hommes cette nouvelle tentative
et mille ans de souffrance. Car ils viendront nous trouver, après avoir peiné mille ans à
bâtir leur tour ! [...] Aucune science ne leur donnera du pain, tant qu’ils demeureront libres,
mais ils finiront par la déposer à nos pieds, cette liberté, en disant : “Réduisez-nous plutôt
en servitude, mais nourrissez-nous.” »
— Fiodor Dostoïevski, Les Frères Karamazov (1880), trad. Henri Montgault, éd. Gallimard,
coll. « Folio », 1994 (ISBN 9782070389629), p. 352-353
« Ce n’est pas l’Église qui se convertit en État, notez-le bien, cela c’est Rome et
son rêve, c’est la troisième tentation diabolique. Au contraire c’est l’État qui se
convertit en Église, qui s’élève jusqu’à elle et devient une Église sur la terre
entière, ce qui est diamétralement opposé à Rome, à l’ultramontanisme, à votre
interprétation, et n’est que la mission sublime réservée à l’orthodoxie dans le monde. C’est
en Orient que cette étoile commencera à resplendir. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Frères Karamazov (1880), trad. Henri Montgault, éd. Gallimard,
coll. « Folio », 1994 (ISBN 9782070389629), p. 114
« [...] plus j’aime l’humanité en général, moins j’aime les gens en particulier, comme
individus. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Frères Karamazov (1880), trad. Henri Montgault, éd. Gallimard,
coll. « Folio », 1994 (ISBN 9782070389629), p. 101-102
« Il n’y a pas de péché sur la terre que Dieu ne pardonne à celui qui se repent
sincèrement. L’homme ne peut pas commettre de péché capable d’épuiser
l’amour infini de Dieu. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Frères Karamazov (1880), trad. Henri Montgault, éd. Gallimard,
coll. « Folio », 1994 (ISBN 9782070389629), p. 94
« [...] je déclare (et encore une fois, pour le moment, sans preuves) que l’amour de
l’humanité n’est même pas concevable, compréhensible ni possible sans foi concomitante
en l’immortalité de l’âme humaine. »
— Fiodor Dostoïevski, Journal d’un écrivain (1873-1881), trad. Gustave Aucouturier, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 2007 (ISBN 9782070107322), p. 814
« [...] c’est presque avec certitude qu’on peut dire que dans l’avenir peut-être le plus proche
la Russie se révélera la plus forte de tous en Europe. Cela résultera du fait qu’en Europe
toutes les grandes puissances seront réduites à rien, et par une cause fort simple : elles
seront toutes épuisées et minées par les aspirations démocratiques insatisfaites d’une
énorme partie de leurs sujets des classes inférieures, de leurs prolétaires et indigents. En
Russie, cela ne peut absolument pas se produire : notre dèmos est content, et plus ira plus
ils sera satisfait, car tout va dans ce sens, par une disposition ou mieux
un consensus général. Et c’est pourquoi il ne restera qu’un colosse sur le continent
européen : la Russie. Cela surviendra peut-être même beaucoup plus tôt qu’on ne le
pense. L’avenir de l’Europe appartient à la Russie. »
— Fiodor Dostoïevski, Journal d’un écrivain (1873-1881), trad. Gustave Aucouturier, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 2007 (ISBN 9782070107322), p. 506-507
« Il est notoire que l’Europe ne nous aime pas et ne nous a jamais aimés ; jamais elle ne
nous a considérés comme siens, comme Européens, et toujours comme d’indésirables
intrus. Voilà pourquoi elle aime tant se conforter le cas échéant de l’idée que la Russie est
“pour le moment impuissante”. »
— Fiodor Dostoïevski, Journal d’un écrivain (1873-1881), trad. Gustave Aucouturier, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 2007 (ISBN 9782070107322), p. 505
« [...] c’est à notre porte [...] que viendra frapper l’Europe, et qu’elle nous criera de venir à
son secours quand sonnera la dernière heure de son “ordre actuel de choses”. Et elle
exigera notre secours comme un droit, elle l’exigera sur le ton du défi et du
commandement, elle nous dira que nous sommes aussi l’Europe, que par conséquent nous
avons exactement le même “ordre de chose” qu’elle, que ce ne doit pas être pour rien que
depuis deux siècles nous l’avons imitée et nous nous sommes vantés d’être des Européens,
et qu’en sauvant l’Europe nous nous sauvons donc nous-mêmes. Certes, nous ne serions
peut-être pas très disposés à trancher l’affaire au profit d’une seule des parties, mais
serons-nous de force pour une telle tâche, et n’avons-nous pas perdu depuis longtemps
l’habitude de toute réflexion sur ce qui doit constituer notre véritable “particularisation”
comme nation et notre véritable rôle en Europe ? Non seulement nous ne comprenons
pas, à l’heure qu’il est, ce genre de problèmes, mais nous n’admettons même pas qu’on les
pose, et nous considérons comme sottise et comme arriération de notre part d’y prêter
l’oreille. Et si, effectivement, l’Europe vient à frapper à notre porte pour nous
demander de nous lever pour la sauvegarde de son Ordre, alors peut-être
comprendrons-nous pour la première fois enfin, tous et d’un seul coup, à quel point nous
avons toujours été différents de l’Europe, en dépit de ce désir et de ce rêve deux fois
séculaires — devenir une Europe — que nous avons nourris jusqu’à des transports si
passionnés. Et peut-être bien, même alors, ne comprendrons-nous pas, car il sera trop tard.
Mais dans ce cas nous ne comprendrons pas non plus, bien entendu, quel besoin l’Europe
aura de nous, ce qu’elle nous demandera et en quoi nous pourrions réellement l’aider. Et
n’irons-nous pas au contraire mettre à la raison l’ennemi de l’Europe et de son ordre, nous
aussi, par le sang et par le fer, tout comme le prince de Bismarck ? Oh, alors, dans
l’hypothèse d’un pareil exploit, nous pourrions sans crainte nous féliciter nous-mêmes
d’être pleinement européens. »
— Fiodor Dostoïevski, Journal d’un écrivain (1873-1881), trad. Gustave Aucouturier, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 2007 (ISBN 9782070107322), p. 460-461
« [...] le catholicisme romain a déjà pris de bien autres virages : une fois, quand il l’a fallu, il
a sans hésiter vendu le Christ pour le pouvoir temporel. [...]
Ayant perdu l’alliance des monarques, le catholicisme va sans aucun doute se jeter vers
le dèmos. Il dispose de dizaines de milliers de séducteurs sages et adroits, psychologues et
connaisseurs du cœur humain, dialecticiens et confesseurs, et le peuple est partout et
toujours candide et bon. [...] Tous ces connaisseurs du cœurs et de l’âme vont se lancer
dans le peuple et lui apporter un Christ nouveau, prêt à tout accepter, le Christ qu’a
annoncé l’impie récent Concile du Vatican.
[...] le catholicisme se lancera dans la démocratie, dans le peuple, et qu’il abandonnera les
monarques de la terre pour la peine de l’avoir eux-mêmes abandonné. »
— Fiodor Dostoïevski, Journal d’un écrivain (1873-1881), trad. Gustave Aucouturier, éd.
Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 2007 (ISBN 9782070107322), p. 456-459
« [...] en nous qualifiant fièrement d’Européens, nous avons par là même renié
notre essence russe. Honteux et effrayés d’avoir autant de retard sur l’Europe dans notre
développement intellectuel et scientifique, nous avons oublié que dans les profondeurs et
les tâches de l’esprit russe, nous recelions nous-même, en tant que Russes, la faculté, peut-
être, d’apporter au monde une lumière nouvelle, à la condition de préserver l’originalité de
notre développement. Dans l’enthousiasme que nous mettions à notre propre humiliation,
nous avons oublié la plus intangible des lois historiques, à savoir que sans un
pareil orgueil de notre propre valeur mondiale en tant que nation, jamais nous ne
pourrions être une grande nation et laisser après nous un petit quelque chose d’original
pour le bien de l’humanité tout entière. »
— Fiodor Dostoïevski, Lettre à Alexandre Romanov, trad. Anne Coldefy-Faucard, 10 février
1873
« L’homme a besoin non pas tant de son propre bonheur que de savoir et de
croire à chaque instant qu’il existe déjà quelque part un bonheur absolu et une
paix pour tous et pour tout... Toute la loi de l’existence humaine consiste en la
possibilité pour l’homme de s’incliner devant quelque chose d’infiniment
grand. Si l’on prive les hommes de cet infiniment grand, ils refuseront de vivre et
mourront dans le désespoir. L’infini, l’absolu est aussi indispensable à l’homme que cette
petite planète où il vit... Mes amis, tous, tous ! Vive la Grande Pensée ! La Pensée éternelle,
infinie ! Il est indispensable à tout homme, quel qu’il soit, de s’incliner devant la Grande
Pensée. L’homme le plus bête a besoin de quelque chose de grand. Pétroucha... Oh !
comme je voudrais les revoir tous ! Ils ne savent pas, ils ne savent pas qu’ils renferment en
eux, eux aussi, cette Grande Pensée, cette Pensée éternelle ! »
— Fiodor Dostoïevski, Les Démons (1871), trad. Marthe Robert, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1997 (ISBN 9782070394166), p. 940-941
« Jusqu’ici l’homme n’a fait qu’inventer Dieu pour vivre sans se tuer ; voilà
toute l’histoire du monde jusqu’à nos jours ! »
— Fiodor Dostoïevski, Les Démons (1871), trad. Marthe Robert, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1997 (ISBN 9782070394166), p. 880
« Tous vos efforts doivent tendre à ce que tout s’écroule, l’État et sa morale. Nous resterons
seuls debout, nous qui nous sommes préparés depuis longtemps à prendre le pouvoir en
main. Nous nous annexerons les gens intelligents, et pour ce qui est des imbéciles, nous
monterons sur leur dos. Cela ne doit pas vous troubler. Il nous faudra rééduquer la
génération actuelle pour la rendre digne de la liberté. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Démons (1871), trad. Marthe Robert, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1997 (ISBN 9782070394166), p. 865-866
« Tout peuple n’est un peuple que tant qu’il possède son propre Dieu, son Dieu à lui, et nie
sans admettre nul compromis tous les autres Dieux, tant qu’il croit que grâce à son Dieu, il
triomphera de tous les autres Dieux et les chassera. Telle était précisément la foi de tous les
grands peuples, de tous les peuples du moins qui ont joué un certain rôle dans l’histoire et
ont marché à la tête de l’humanité. Impossible de lutter contre les faits. Les juifs n’ont vécu
que pour attendre le vrai Dieu, et on légué au monde le vrai Dieu. Les Grecs ont divisé la
nature et on légué au monde leur religion, c’est-à-dire la philosophie et la science. Rome a
divinisé le peule dans l’État et a légué aux peuples l’idée de l’État. La France, incarnation du
Dieu romain, n’a fait, tout au long de son histoire, que développer l’idée de ce Dieu romain,
et si elle a fini par le jeter à bas et s’est précipité elle-même dans l’athéisme, qui s’intitule
là-bas provisoirement socialisme, c’est uniquement parce que l’athéisme est, malgré tout,
plus sain encore que le catholicisme romain. Si un grand peuple cesse de croire qu’il
est le seul capable, grâce à sa vérité, de rénover et de sauver les autres peuples,
il cesse aussitôt d’être un grand peuple et devient une simple matière
ethnographique. Un peuple vraiment grand ne se contentera jamais d’un rôle
secondaire dans l’humanité, ni même d’un rôle de premier plan : ce qu’il lui
faut, c’est la toute première place, le rôle unique. Le peuple qui perd cette foi,
n’est plus un peuple. Cependant la vérité est une, et, par conséquent, parmi
tous les peuples il n’y en a qu’un qui détienne le vrai Dieu, si puissants que
soient les Dieux des autres peuples. Le seul peuple “théophore” est le peuple
russe [...]. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Démons (1871), trad. Marthe Robert, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1997 (ISBN 9782070394166), p. 379-380
« Quand les peuples commencent à avoir des dieux communs, c’est signe de
mort pour ces peuples. Quand les Dieux deviennent communs à plusieurs
peuples, les Dieux meurent, ainsi que les peuples et leur foi. Plus un peuple est
fort, plus son Dieu diffère des autres Dieux. Jamais encore, il n’y eut de peuple sans
religion, c’est-à-dire sans notion du bien et du mal. Chaque peuple possède sa propre
notion du bien et du mal, son propre bien et son propre mal. Quand plusieurs peule
mettent en commun leurs notion du bien et du mal, alors ces peuples tombent en
décadence, alors la distinction même entre le bien et le mal s’efface et disparaît. Jamais la
raison n’a été et me sera capable de définir le bien et le mal ou même de séparer le mal du
bien, ne fût-ce qu’approximativement. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Démons (1871), trad. Marthe Robert, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1997 (ISBN 9782070394166), p. 378
« — Celui qui enseignera aux hommes qu’ils sont tous bons, celui-là terminera
l’histoire du monde.
— Celui qui l’enseigna, on l’a crucifié.
— Il viendra et son nom sera le Dieu-Homme.
— L’Homme-Dieu ?
— Le Dieu-Homme, c’est en cela qu’est la différence. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Démons (1871), trad. Marthe Robert, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1997 (ISBN 9782070394166), p. 360
« Un homme nouveau viendra, heureux et fier. Celui auquel il sera indifférent de vivre ou
de ne pas vivre, celui-là sera l’homme nouveau. Celui qui vaincra la souffrance et la terreur,
celui-là sera lui-même Dieu. Quant à l’autre Dieu, il ne sera plus. [...]
Celui qui vaincra la souffrance et la peur, sera lui-même Dieu. Alors
commencera une vie nouvelle, alors paraîtra l’homme nouveau. Tout sera
nouveau... »
— Fiodor Dostoïevski, Les Démons (1871), trad. Marthe Robert, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1997 (ISBN 9782070394166), p. 189
« J’ai observé, me glissa un jour Stépane Trophimovitch, que tous ces socialistes enragés et
ces communistes sont en même temps des êtres avares, et ont des âmes d’acquéreurs, de
propriétaires, si bien que plus ils sont socialistes, plus ils se montrent avides. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Démons (1871), trad. Marthe Robert, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1997 (ISBN 9782070394166), p. 136
« Non seulement vous ne connaissiez pas le peuple, mais vous n’aviez pour lui que le plus
abominable mépris, parce que le peuple pour vous c’était uniquement le peuple français,
et même les seuls Parisiens, et vous étiez honteux de ce que le peuple russe ne leur
ressemblât pas. C’est la vérité pure. Or celui qui n’a point de peuple, n’a point de Dieu.
Sachez que tous ceux qui cessent de comprendre leur peuple, et n’ont plus de contact avec
lui, perdent dans la même mesure la foi de leurs pères, et deviennent des athées ou des
indifférents. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Démons (1871), trad. Marthe Robert, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1997 (ISBN 9782070394166), p. 82
« [...] l’Occident a perdu le Christ (par la faute du catholicisme), c’est pour cela
qu’il chute, uniquement pour cela. »
— Fiodor Dostoïevski, Lettre à Nikolaï Strakhov, trad. Anne Coldefy-Faucard, 18 (30) mai
1871
« Le cercle de l’avenir russe s’élargit, la pensée est fondée non seulement d’un
grand État mais de tout un monde nouveau, destiné à rénover le christianisme
par l’idée orthodoxe panslave et à apporter à l’humanité une pensée nouvelle
lorsque l’Occident commencera à pourrir ; or il pourrira quand le pape aura
définitivement mutilé le Christ et par là même engendré l’athéisme dans l’humanité
occidentale souillée. »
— Fiodor Dostoïevski, Lettre à Apollon Maïkov, trad. Anne Coldefy-Faucard, 15 (27) mai
1869
« Ah ! soyez certains que ce n’est pas quand il a découvert l’Amérique, mais quand
il a été sur le point de la découvrir que Colomb a été heureux. Soyez persuadés
que le moment culminant de son bonheur s’est peut-être placé trois jours avant la
découverte du Nouveau Monde, lorsque l’équipage au désespoir s’est rebellé et a été sur
le point de faire demi-tour pour revenir en Europe. Il ne s’agissait pas ici du Nouveau
Monde, qui aurait pu s’effondrer. Colomb est mort l’ayant a peine vu et sans savoir, au
fond, ce qu’il avait découvert. Ce qui compte, c’est la vie, la vie seule [...]. »
— Fiodor Dostoïevski, L’Idiot (1869), trad. Albert Mousset, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2005 (ISBN 9782070389636), p. 479
« Est-il vrai, prince, que vous ayez dit un jour que la “beauté” sauverait le monde ?
Messieurs, s’écria-t-il en prenant toute la société à témoin, le prince prétend que la
beauté sauvera le monde ! »
— Fiodor Dostoïevski, L’Idiot (1869), trad. Albert Mousset, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2005 (ISBN 9782070389636), p. 464
« Elle est connue : le crime est une protestation contre une organisation sociale anormale ;
voilà tout et rien de plus et ils n’admettent aucune autre raison, pas une...
— En voilà une erreur ! cria Porphyre Petrovitch. Il s’animait peu à peu et riait en regardant
Rasoumikhine dont l’emballement ne faisait que croître.
— Ils n’admettent pas une autre cause, l’interrompit Rasoumikhine avec feu. Je ne me
trompe pas ; je te montrerai leurs livres ; je te montrerai qu’ils disent : “tel individu a été
perdu par son milieu” et c’est tout ; c’est leur phrase favorite. D’où la conclusion que si la
société était organisée de façon normale, il n’y aurait plus de crimes car on n’aurait plus à
protester et tous les hommes deviendraient des “justes”. Ils ne prennent pas en
considération la nature ; ils la suppriment ; elle n’existe pas pour eux. Ils ne
voient pas une humanité qui se développe par une progression historique et
vivante et produit enfin une société normale, mais un système social sorti
d’une tête de mathématicien et qui doit organiser, en un clin d’oeil, la société,
la rendre juste et parfaite avant tout processus historique ; d’où leur haine
instinctive pour l’histoire. Ils disent : “C’est un ramassis d’horreurs et d’absurdités” et
tout s’explique immanquablement par l’absurdité ; d’où également leur haine de ce
processus vivant qu’est l’existence ; pas besoin d’âme vivante, car l’âme vivante a ses
exigences, elle n’obéit pas aveuglément à la mécanique, une âme vivante est méfiante, elle
est rétrograde et celle qu’ils veulent peut puer la charogne, être faite de caoutchouc, en
revanche elle est morte, dénuée de volonté ; c’est un esclave qui n’ira jamais se révolter et
il en résulte que tout leur système est établi sur une superposition de briques : par la
manière de disposer les corridors et les pièces d’un phalanstère ! Ce phalanstère, il est prêt,
mais c’est la nature humaine qui ne l’est point ; elle veut encore vivre, traverser tout le
processus de la vie avant de s’en aller au cimetière. La logique ne suffit pas à permettre ce
saut par-dessus la nature. La logique ne prévoit que trois cas quand il y en a un million. Ce
million, le supprimer et ramener tout à l’unique question du confort ! Voilà la solution la
plus facile du problème. Une solution d’une clarté séduisante et qui rend toute réflexion
inutile, voilà l’essentiel. Tout le mystère de la vie tient dans deux feuilles d’impression... »
— Fiodor Dostoïevski, Crime et châtiment (1866), trad. Doussia Ergaz, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1950 (ISBN 9782070392537), p. 272
« Les hommes aiment bâtir et se tracer des chemins, d’accord. Mais pourquoi
aiment-ils aussi passionnément la destruction et le chaos ? »
— Fiodor Dostoïevski, Les Carnets du sous-sol (1864), trad. André Markowicz, éd. Actes
Sud, 1992 (ISBN 9782868697998), p. 47
« Mais l’homme est à ce point esclave de son système et de ses conclusions abstraites qu’il
est prêt, en toute conscience, à déformer la vérité, prêt à ne plus rien voir, à ne plus rien
entendre, du moment qu’il justifie mieux cette logique. »
— Fiodor Dostoïevski, Les Carnets du sous-sol (1864), trad. André Markowicz, éd. Actes
Sud, 1992 (ISBN 9782868697998), p. 35
« Je n’ai qu’une visée : être libre. J’y sacrifie tout. Mais souvent, souvent, je
pense à ce que m’apportera la liberté... Que ferai-je, seul parmi la foule
inconnue ? »
— Fiodor Dostoïevski, Lettre à Mikhail Dostoïevski, trad. Anne Coldefy-Faucard, 16 août
1839
—
ALEXANDRE DOUGUINE
« La Russie n’est pas la seule cible du Great Reset, même si, à bien des égards, notre pays
est le principal obstacle à l’exécution de leurs plans. Mais c’est notre mission — être
le Katechon, “celui qui retient”, empêchant l’arrivée du mal final dans le monde. »
— Alexandre Douguine, Contre le Great Reset, le Manifeste du Grand Réveil (2021), trad.
Alexandre Kisilev et Sophie Metelkina, éd. Ars magna, 2021, p. 66
La renaissance de la Russie « est inconcevable sans un retour à la mission impériale, inscrite
dans notre destin historique. »
— Alexandre Douguine, Contre le Great Reset, le Manifeste du Grand Réveil (2021), trad.
Alexandre Kisilev et Sophie Metelkina, éd. Ars magna, 2021, p. 66
« L’émergence du pôle européen du Grand Réveil doit passer par la résolution de ces deux
tâches idéologiques : le dépassement définitif de la frontière entre la droite et la gauche
(c’est-à-dire le rejet obligatoire de l’antifascisme artificiel de certains et de
l’anticommunisme artificiel des autres) et l’élévation du populisme en tant que tel —
populisme intégral — à un modèle idéologique indépendant. Sa signification et son
message devraient consister en une critique radicale du libéralisme et de son stade le plus
élevé, le mondialisme, tout en combinant l’exigence de justice sociale et la préservation de
l’identité culturelle traditionnelle. »
— Alexandre Douguine, Contre le Great Reset, le Manifeste du Grand Réveil (2021), trad.
Alexandre Kisilev et Sophie Metelkina, éd. Ars magna, 2021, p. 57
« 1984, la dystopie d’Orwell, n’a pas été incarnée par un régime communiste
ou fasciste, mais s’est réalisée aujourd’hui dans un régime libéral. »
— Alexandre Douguine, Contre le Great Reset, le Manifeste du Grand Réveil (2021), trad.
Alexandre Kisilev et Sophie Metelkina, éd. Ars magna, 2021, p. 54
« [...] les mouvements socialistes et communistes ont été récemment pris en main par des
libéraux et réorientés de la guerre de classe contre le capitalisme vers la protection des
migrants, des minorités sexuelles et la lutte contre les fascistes imaginaires. »
— Alexandre Douguine, Contre le Great Reset, le Manifeste du Grand Réveil (2021), trad.
Alexandre Kisilev et Sophie Metelkina, éd. Ars magna, 2021, p. 51
« Le Grand Réveil contre le Great Reset est la révolte de l’humanité contre les élites
libérales au pouvoir. De plus, c’est la rébellion de l’homme contre son ennemi séculaire,
l’ennemi du genre humain. »
— Alexandre Douguine, Contre le Great Reset, le Manifeste du Grand Réveil (2021), trad.
Alexandre Kisilev et Sophie Metelkina, éd. Ars magna, 2021, p. 50
« La mondialisation entre résolument dans la phase totalitaire. Cela rend plus que probable
la possibilité de nouvelles guerres — y compris un risque accru de troisième guerre
mondiale. »
— Alexandre Douguine, Contre le Great Reset, le Manifeste du Grand Réveil (2021), trad.
Alexandre Kisilev et Sophie Metelkina, éd. Ars magna, 2021, p. 14
« L’atlantisme nie formellement la valeur du peuple qu’il remplace soit par la masse, soit
par l’individu. Il nie la terre vivante et l’enracinement des hommes dans cette terre en
proclamant ce que l’on pourrait nommer un “nomadisme de l’asphalte”.
[...] l’atlantisme constitue notre ennemi absolu. »
— Alexandre Douguine, La Quatrième théorie politique (2009), trad. Valentin Lacombe, éd.
Ars magna, 2016, p. 258-262
« Les pays ayant tenté de s’élever contre ce tableau unipolaire, l’Irak, la Yougoslavie,
l’Afghanistan, ont ressenti dans leur chair ce qu’est le monde post-Yalta et quel est le prix
de la souveraineté dans ce monde. Le fait est que dans les conditions du XXIème siècle,
aucun État-nation n’apparaît capable d’affirmer sa souveraineté dans le cadre d’une
confrontation frontale avec l’empire américain. [...]
Aucun État-nation dans le monde contemporain n’est réellement capable d’affirmer sa
souveraineté face à l’empire global à moyen comme à court terme. Le maximum de ce qu’il
est réaliste de faire se limite à gagner du temps. Mais le retard ne constitue pas une
alternative. »
— Alexandre Douguine, La Quatrième théorie politique (2009), trad. Valentin Lacombe, éd.
Ars magna, 2016, p. 215-216
« Les médias jouent un rôle très important dans la structure moderne des
relations internationales. Ils créent un environnement informationnel
planétaire unifié qui influence de plus en plus les processus
internationaux. Les médias deviennent mondiaux, et au travers le discours médiatique,
ils contribuent au processus de la mondialisation, dans l’intérêt de l’Occident. Les médias
internationaux sont un outil important de l’Occident dans la formation de l’opinion
publique mondiale et sont, en fait, un instrument de la gouvernance mondiale. »
— Alexandre Douguine, Pour une théorie du monde multipolaire (2012), trad. Éric
Goasdoué, éd. Ars magna, 2013, p. 192
« Les sociétés bourgeoises acceptent très bien les inégalités matérielles, mais nient les
autres formes d’inégalité. »
— Alexandre Douguine, L’Appel de l’Eurasie (2013), éd. Avatar, coll. « Heartland », 2013,
p. 99
« [...] les États-Unis favorisent dans l’espace post-soviétique la création de nouveaux États
ethniques, comme le Kosovo et le Monténégro, dont ils savent bien qu’ils ne pourront
jamais jouir que d’une souveraineté minimale, plus minimale encore que celles des États-
nations historiques.
[...] on ne peut dissocier les luttes identitaires des perspectives de la
géopolitique. »
— Alexandre Douguine, L’Appel de l’Eurasie (2013), éd. Avatar, coll. « Heartland », 2013,
p. 88-93
« La guerre contre Carthage n’est pas finie : notre devoir est de combattre le
mal absolu que représentent aujourd’hui les États-Unis. »
— Alexandre Douguine, L’Appel de l’Eurasie (2013), éd. Avatar, coll. « Heartland », 2013,
p. 41
« L’Ordre eurasien est une révolution conservatrice totale, ce grand réveil de la conscience
géopolitique, il est la voie verticale, au lieu des oscillations serpentines de gauche à droite
ou des tentatives de retour en arrière. »
— Alexandre Douguine, Conspirologie (1992), trad. Ars Magna, éd. Ars Magna, 2022, p. 236
« [...] nous devons renvoyer les agents de l’Îles dans leur Île. Nous devons extirper de la
chair politique, culturelle, nationale, du Continent ceux qui nous trahissent, ceux qui ont
trahi nos idéaux, nos entreprises. »
— Alexandre Douguine, Conspirologie (1992), trad. Ars Magna, éd. Ars Magna, 2022, p. 236
« L’agression d’Hitler contre l’URSS fut la grande catastrophe eurasienne. Après la terrible
guerre fratricide entre deux peuples apparentés, géopolitiquement, spirituellement et
métaphysiquement proches, entre deux régimes à l’orientation anti-atlantiste, la Russie de
Staline et l’Allemagne de Hitler, la victoire de l’URSS était en fait équivalente à une défaite
stratégique — puisque toute l’expérience historique démontre que l’Allemagne ne peut
jamais se résigner à une défaite, et que par sa victoire le vainqueur noue déjà le nœud d’un
prochain conflit, semant les graines d’une future guerre. En outre, Yalta entraîna Staline à se
solidariser avec les Alliés, c’est-à-dire avec ces puissances qui ont toujours été les pires
ennemies de l’Eurasie. »
— Alexandre Douguine, Conspirologie (1992), trad. Ars Magna, éd. Ars Magna, 2022,
p. 196-197
« [...] j’aime mieux être européen que vassal de qui que ce soit. »
— Pierre Drieu la Rochelle, La Gerbe, 21 août 1941
« L’homme déçu réfléchit et reconnaît que la liberté n’est pas dans ce qui est séparé et
isolé, mais dans ce qui est uni et lié. Faute d’Église rénovée, il cherche son secours dans
une nouvelle communauté. Nationalisme et socialisme se mettent à travailler dans
le sens opposé au libéralisme et à la sommaire démocratie politique. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Notes pour comprendre le siècle (1941), éd. Pardès, 2020,
p. 122
« Aujourd’hui à quoi servent les mains ? Mains, pauvres mains, qui pendent mortes à nos
côtés. Comment voulez-vous que naissent encore des peintres, alors que les mains sont
mortes ? Ni non plus des musiciens. Ni même des écrivains. Car le style naît pour ceux-ci
comme pour tous les autres de la mémoire de tout le corps. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Notes pour comprendre le siècle (1941), éd. Pardès, 2020, p. 68
« Un homme naît peintre ou musicien. Ce sont les gestes de ses ancêtres qui ont préparé
ses gestes. Un homme naît peintre, il ne le devient pas. Les époques surcivilisées sont
encombrées de fausses vocations qui sont des vues de l’esprit, des velléités imitatives,
parce qu’elles ne sont pas des nécessités imposées par l’hérédité. C’est en vain que de nos
jours, un jeune homme s’éveille parmi les trésors des musées ou des concerts et des
bibliothèques ; s’il a reçu de ses parents des sens engourdis depuis longtemps, son
ambition n’obtiendra que des bafouillements. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Notes pour comprendre le siècle (1941), éd. Pardès, 2020, p. 66-
67
« L’Europe tient au Moyen Âge comme l’être mûr tient à la jeunesse. Tout ce qu’elle a de
dru lui vient de là. Elle doit renouer des liens avec ce qui de cette verge première est
irremplaçable. Ce Moyen Âge n’a pas ignoré le corps. Ce sont les siècles rationalistes qui
l’ont suivi qui ont oublié le corps et qui ont assuré sa destruction, fatale à l’esprit. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Notes pour comprendre le siècle (1941), éd. Pardès, 2020, p. 31
« C’est le mythe du Progrès qui est en question. Mythe étroit, mythe boiteux.
L’homme, au cours de votre Progrès, n’a-t-il pas perdu la moitié de lui-même ?
Ce qu’il a gagné, n’est-il pas largement compensé par ce qu’il a perdu ? »
— Pierre Drieu la Rochelle, Notes pour comprendre le siècle (1941), éd. Pardès, 2020, p. 30
« Les Américains, devant César, avoueront ce qu’ils sont ; un résidu de bagnards évadés, de
transfuges de tout, de planqués – un monde passé directement de la barbarie à la
décadence, comme tous les empires des confins de la civilisation. Il y a tout de même plus
de civilisation dans le séminariste Staline que dans ce sur-Chamberlain mercantile qu’est
Roosevelt. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Journal, mars 1940
« Il faut rester là et crier la vérité, jusqu’à ce qu’on vous assomme. Il ne faut jamais s’en
aller. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Charlotte Corday (1939), éd. Gallimard, 1944, p. 25
« L’homme moderne est un affreux décadent. Il ne peut plus faire la guerre, mais il y a bien
d’autres choses qu’il ne peut plus faire. Cependant, avec son infatuation, son arrogance
d’ignorant, il condamne ce qu’il ne peut plus faire, ce qu’il ne peut plus supporter. C’est
comme l’art. Il est devenu scientifique parce qu’il ne pouvait plus être artiste. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Gilles (1939), éd. Gallimard, coll. « Folio », 1973, p.
« Et cette guerre est mauvaise, qui a vaincu les hommes. Cette guerre moderne,
cette guerre de fer et non de muscles. Cette guerre de science et non d’art.
Cette guerre d’industrie et de commerce. [...] Cette guerre de généraux et non de
chefs. [...] Cette guerre faite par tout le monde, sauf par ceux qui la faisaient. Cette guerre
de civilisation avancée. [...] Il faut que l’homme apprenne à maîtriser la machine, qui l’a
outrepassé dans cette guerre – et maintenant l’outrepasse dans la paix. »
— Pierre Drieu la Rochelle, La Comédie de Charleroi (1934), éd. Gallimard, 1934, p.
« Destruction, destruction. Ce mot était dans sa bouche comme le caillou dans celle de
l’homme qui meurt de soif. Il ne fallait pas avoir peur ; la planète était déjà comble de
ruines et d’ossements ; un tas de plus ou de moins. Voici qu’après le monde méditerranéen
dont il foulait la poussière, le monde de l’Occident avait fait son temps : l’Europe par terre,
ailleurs on planterait sa tente. Il songeait avec un tendre mépris à ses chefs russes, à leur
hâte de rebâtir avec les morceaux épars la maison à demi renversée. Lui, il croyait que la
mort ne pardonne pas, qu’on ne peut pas marchander avec elle. L’Europe était condamnée
de l’Oural à Deauville, mais il restait assez de force à l’Est pour renverser l’Ouest. Après on
verrait. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Une femme à sa fenêtre (1929), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1996, p.
« [...] l’avenir ne nous promet plus qu’un métissage confus. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Le Jeune Européen (1927), éd. Bartilat, 2016, p. 394
« Il ne reste plus à nos yeux, aujourd'hui, de toutes les civilisations d’Amérique, d’Asie,
d’Europe, qu’une seule civilisation planétaire, tout usée. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Le Jeune Européen (1927), éd. Bartilat, 2016, p. 393
« L’homme n’a de génie qu’à vingt ans et s’il a faim. Mais l’abondance de l’épicerie tue les
passions. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Le Jeune Européen (1927), éd. Bartilat, 2016, p. 366
« Nous détruirons. Ne meurt que ce qui veut mourir. Avec une joie amère, nous
abattrons cette civilisation qui est là, au milieu de nous encore debout. Cette
civilisation n’a plus de vêtements, plus d’églises, plus de palais, plus de
théâtres, plus de tableaux, plus de livres, plus de sexes. »
— Pierre Drieu la Rochelle, Le Jeune Européen (1927), éd. Bartilat, 2016, p. 260
« On voit déjà éclater dans les singuliers mouvements de sympathie qu’a provoqués
l’infortune de l’Action française la fraternité qui existe, en dépit des protestations de haine,
entre les athées de l’antidémocratisme et les athées du Capitalisme quand il est conscient
de soi-même, et les athées du Socialisme et du Communisme. Tous ceux-là travaillent à
l’achèvement d’un certain monde moderne, merveilleuse mécanique sévère et dénuée de
tout secours de l’Esprit. Mais un jour viendra où les hommes se révolteront contre
le joug atrocement positiviste des Maurras et des Mussolini, des Lénine et des
Ford. Alors les hommes hurleront un affreux besoin mystique. Vous
réveillerez-vous pour les désaltérer, dieux de l’Orient et de l’Occident ? »
— « Les derniers jours », Pierre Drieu la Rochelle, Revue de Belles-Lettres, nº 8, juillet 1927
« Que soit bénie la foi des hommes qui osent renouveler la figure du monde
selon l’idéal qu’ils chérissent. »
— Pierre Drieu la Rochelle, « À vous, Allemands » (1917), dans Interrogation, éd. La
Nouvelle Revue française, 1917, p.
—
EDOUARD DRUMONT
« La nation française, si renommée jadis par la clarté de son intelligence et
pour son impatience de tout joug, se laisse mener comme un troupeau par une
association secrète, internationale, illégale [...]. »
— Édouard Drumont, La Tyrannie maçonnique (1899), éd. Librairie Antisémite, 1899, p. 56
J’ai un « amour profond et sincère de tous ces humbles, de tous ces pauvres
qui peinent, qui travaillent pour enrichir une poignée de flibustiers
cosmopolites. »
— Édouard Drumont, De l’or, de la boue, du sang (1896), éd. Flammarion, 1896, p. viii
« Que tous ceux qui rêveront de tenter quelque chose d’utile pour leur pays se
souviennent de ce que je leur dis : “Ne croyez jamais aux conservateurs, il n’y a rien
à faire avec eux !” [...]
En réalité il n’y a pas deux partis politiques [la Droite et la Gauche], il y a un régime général,
il y a un système, le système capitaliste et juif auquel sont généralement affiliés les
représentants des partis qui se disputent le pouvoir. À ce système les Républicains plus
avides, parce qu’ils sont plus besogneux, demandent peut-être des satisfactions plus
immédiates ; ils font preuve peut-être de plus d’âpreté et d’impudence, mais les
Conservateurs sont aussi attachés à ce régime que les Républicains : ils ont peut-être plus
d’intérêt qu’eux à sa durée et ils n’entendent pas qu’on y touche.
[...] ce qui les caractérise c’est la fiction, l’imposture, le mensonge général, l’étalage verbal
et scripturaire de sentiments qu’on n’éprouvait pas réellement, la perpétuelle menace
d’accomplir des actes qu’on n’avait nullement l’intention d’exécuter. [...]
Vous ne rencontrerez chez la plupart des Conservateurs influents que des menteurs, des
fourbes, d’éternels chercheurs de voies obliques... »
— Édouard Drumont, Le Testament d’un antisémite (1891), éd. Dentu, 1891, p. 4-12
« Mon erreur fondamentale a été de croire qu’il existait encore une vieille France, un
ensemble de braves gens, gentilshommes, bourgeois, petits propriétaires, fidèles aux
sentiments d’honneur, aux traditions de leur race et qui égarés, affolés par les turlutaines
qu’on leur débite depuis cent ans, reprendraient conscience d’eux-mêmes si on leur
montrait la situation telle qu’elle est et se réuniraient pour essayer de sauver leur pays... »
— Édouard Drumont, Le Testament d’un antisémite (1891), éd. Dentu, 1891, p. 4-5
« Le vaccin se vend [...] et il est devenu un objet de commerce. Les juifs s’en sont
naturellement emparés, comme de toutes les autres denrées, et ils le cultivent sur eux-
mêmes par économie. C’est du virus juif qu’on veut nous inoculer pour nous rendre
semblables à eux. Voilà pourquoi nous nous révoltons contre cet empoisonnement. On
cherche à nous avachir, avec aggravation de mosaïsme. Nous aimons mieux être aggravés
de la petite vérole. [...] Nous inoculer du sang de vache [...] passe encore. Notre race
guerrière est assez solide et ne risque pas de s’avachir. Mais de l’humeur de juif, jamais ! »
— Édouard Drumont, Le XIXe siècle, 4 décembre 1888
« C’est sur les ruines seules de l’Église que s’est élevée cette idole dévorante du
Capitalisme qui, pareille à la divinité monstrueuse d’Astoreth se fécondant elle-même, se
reproduit sans cesse [...]. »
— Édouard Drumont, La France Juive devant l’opinion (1886), éd. Flammarion, 1886,
p. 125
« Par un phénomène que l’on a constaté cent fois au moyen âge et qui s’est affirmé de
nouveau au moment du choléra, le Juif paraît jouir vis-à-vis des épidémies
d’immunités particulières. Il semble qu’il y ait en lui une sorte de peste permanente,
qui le garantit de la peste ordinaire, il est son propre vaccin et, en quelque manière, un
antidote vivant. Le fléau recule quand il le sent !... »
— Édouard Drumont, La France juive (1886), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250199), p. 72
« Le Sémite est mercantile, cupide, intrigant, subtil, rusé ; l’Aryen est enthousiaste,
héroïque, chevaleresque, désintéressé, franc, confiant jusqu’à la naïveté. Le Sémite est un
terrien ne voyant guère rien au-delà de la vie présente ; l’Aryen est un fils du ciel sans cesse
préoccupé d’aspirations supérieures ; l’un vit dans la réalité, l’autre dans l’idéal.
Le Sémite est négociant d’instinct, il a la vocation du trafic, le génie de tout ce qui est
échange, de tout ce qui est une occasion de mettre dedans son semblable. L’Aryen est
agriculteur, poète, moine et surtout soldat ; la guerre est son véritable élément, il va
joyeusement au-devant du péril, il brave la mort.
Le Sémite n’a aucune faculté créatrice ; au contraire l’Aryen invente ; pas la moindre
invention n’a été faite par un Sémite. Celui-ci par contre exploite, organise, fait produire à
l’invention de l’Aryen créateur des bénéfices qu’il garde naturellement pour lui. L’Aryen
exécute les voyages d’aventure et découvre l’Amérique ; le Sémite, qui aurait eu une si belle
occasion de s’arracher fièrement à l’Europe, à la persécution et de démontrer qu’il était
susceptible de faire quelque chose par lui-même, attend qu’on ait tout exploré, tout
défriché, pour aller s’enrichir aux dépens des autres. »
— Édouard Drumont, La France juive (1886), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250199), p. 19
« Toutes les nations de l’Europe, on le voit, se rattachent donc par les liens les plus étroits à
la race aryenne d’où sont sorties toutes les grandes civilisations. »
— Édouard Drumont, La France juive (1886), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250199), p. 17
—
FRIECRIDH ENGELS
« [...] la queue de la classe capitaliste, son aile gauche extrême. »
— Friedrich Engels, L’Origine de la famille, de la propriété privée et de l’État (1884), trad.
Jeanne Stern, éd. Éditions sociales, 1954, p. 158
« Pour établir l’axiome de base que deux hommes et leurs vouloirs sont entièrement égaux
l’un à l’autre et qu’aucun des deux n’a rien à commander à l’autre, nous ne pouvons
nullement utiliser deux hommes quelconques. Il faut que ce soient deux hommes qui sont
tellement affranchis de toute réalité, de tous les rapports nationaux, économiques,
politiques et religieux existant sur terre, de toutes les propriétés sexuelles et personnelles,
qu’il ne reste de l’un comme de l’autre que le simple concept d’homme : c’est alors
seulement qu’ils sont “pleinement égaux”. Deux fantômes intégraux, évoqués par ce même
M. Dühring qui partout flaire et dénonce des démarches “spirites”. Ces deux spectres sont
naturellement obligés de faire tout ce que celui qui les évoque exige d’eux, et c’est
justement pourquoi tous leurs tours de force sont suprêmement indifférents au reste du
monde. »
— Friedrich Engels, Anti-Dühring (1878), trad. Émile Bottigelli, éd. Éditions sociales,, p.
« Et même si nous savons que cet isolement de l’individu, cet égoïsme borné sont partout
le principe fondamental de la société actuelle, ils ne se manifestent nulle part avec une
impudence, une assurance si totales qu’ici, précisément, dans la cohue de la grande
ville. La désagrégation de l’humanité en monades, dont chacune a un principe
de vie particulier et une fin particulière, cette atomisation du monde est
poussée ici à l’extrême. »
— Friedrich Engels, La Situation de la classe laborieuse en Angleterre (1845), trad. Gilbert
Badia et Jean Frédéric, éd. Éditions sociales, 2021 (ISBN 9782353670659), p.
« Vous avez civilisé les extrémités de la terre, mais c’est pour ouvrir des
nouveaux champs d’action à votre basse cupidité. Grâce à vous les peuples sont des
frères ; mais c’est une fraternité de voleurs. Vous avez diminué le nombre de guerres : mais
c’est pour gagner davantage durant la paix, c’est pour porter à son dernier degré l’hostilité
entre les individus et les guerres sans honneur de la concurrence ! »
— Friedrich Engels, Esquisse d’une critique de l’économie politique (1843-1844), trad.
Kostas Papaïoannou, éd. Allia, 1998 (ISBN 9782911188886), p. 19
« On voit que, derrière la fausse humanité des modernes, se dissimule une
barbarie ignorée de leurs prédécesseurs. »
— Friedrich Engels, Esquisse d’une critique de l’économie politique (1843-1844), trad.
Kostas Papaïoannou, éd. Allia, 1998 (ISBN 9782911188886), p. 13
« L’économie prit ainsi un caractère philanthropique. [...] elle a déclaré que le commerce est
un lien d’amitié et d’union entre les nations comme entre les individus. Tout n’est que
noblesse et générosité. Mais ses présuppositions n’ont pas tardé à prévaloir de nouveau.
[...] Elles suscitèrent aussi le système des fabriques et l’esclavage moderne, qui pour la
cruauté et pour l’inhumanité n’a rien à envier à l’esclavage antique. La nouvelle économie,
le système de la liberté du commerce, fondé sur l’Essai sur la richesse des
nations d’Adam Smith, présente la même hypocrisie, la même inconséquence, la même
immoralité qui, maintenant, dans tous les domaines, s’oppose à la libre humanité. »
— Friedrich Engels, Esquisse d’une critique de l’économie politique (1843-1844), trad.
Kostas Papaïoannou, éd. Allia, 1998 (ISBN 9782911188886), p. 10-11
—
JULIUS EVOLA
« Il faut repousser pareillement l’idéal plus général et plus atténué de la “socialité”, qui sert
si souvent de mot d’ordre aujourd’hui, même dans le monde dit libre, après la disparition
de l’idéal de l’État véritable. L’homme différencié dont nous nous occupons se sent
absolument hors de la société, conteste toute justification morale à la prétention de
l’inclure dans un système absurde, et peut comprendre non seulement celui qui est hors de
la société, mais même celui qui est contre la “société” — contre cette société. »
— Julius Evola, Chevaucher le tigre (1961), trad. Isabelle Robinet, éd. Guy Trédaniel,
2021 (ISBN 9782844453501), p. 222
« Venons-en maintenant au domaine social proprement dit. On ne peut pas, ici, ne pas tirer
les conséquences du fait que tou tes les unités organiques se sont dissoutes ou sont en
voie de l’être : caste, lignage, nation, patrie, famille même. Là où ces unités n’ont pas,
presque ouvertement, cessé d’exister, elles ne reposent plus sur une force vive rattachée à
une signification, mais bien sur la simple force d’inerties. Nous l’avons déjà vu à propos de
la personne : ce qui existe aujourd’hui, c’est essentiellement la masse instable des
“individus” privés de liens organiques, masse contenue par des structures extérieu res ou
mue par des courants collectifs informes et changeants. »
— Julius Evola, Chevaucher le tigre (1961), trad. Isabelle Robinet, éd. Guy Trédaniel,
2021 (ISBN 9782844453501), p. 219
« On a rangé le jazz parmi les formes de compensation auquel l’homme d’aujourd’hui a fait
appel parce que son existence est trop pratique, aride et mécanisée ; le jazz lui aurait fourni
les contenus bruts d’un rythme et d’une vitalité élémentaires. Si cette idée contient
quelque chose de juste, on ne peut tenir pour insignifiant que, pour satisfaire ce besoin,
l’Occidental n’ait pas créé de formes originales, ni utilisé les éléments d’un folklore musical
européen offrant, comme par exemple dans nombre de rythmes de l’Europe sud-orientale,
roumains ou hongrois, des ensembles intéressants, riches non seulement de rythmes mais
aussi d’un authentique dynamisme. Il est au contraire allé chercher les thèmes d’inspiration
dans le patrimoine des races exotiques les plus basses, chez les nègres et les métis des
zones tropicales et sub-tropicales. [...]
De même que les danses modernes à musique syncopée dérivent des danses nègres
extatiques, de même une grande partie des stupéfiants utilisés aujourd’hui et élaborés de
façons variées en pharmacopée, correspond à des drogues que les populations primitives
employaient fréquemment dans un but “sacré”, conformément à d’antiques traditions. »
— Julius Evola, Chevaucher le tigre (1961), trad. Isabelle Robinet, éd. Guy Trédaniel,
2021 (ISBN 9782844453501), p. 203-207
« L’un des principaux aspects, et l’un des plus évidents, de la décadence moderne est
précisément l’avènement de l’individualisme, conséquence de l’effondrement et de la
destruction des précédentes structures organiques et hiérarchiques traditionnelles
remplacées, en tant qu’élément de base, par la multiplication atomique des individus dans
le monde de la quantité, autant dire par la masse. »
— Julius Evola, Chevaucher le tigre (1961), trad. Isabelle Robinet, éd. Guy Trédaniel,
2021 (ISBN 9782844453501), p. 133
« La difficulté pouvait être moindre dans les sociétés qui ignoraient individualisme, dans les
sociétés traditionnelles organisées en corps et en castes, où des facteurs liés à l’hérédité, à
la naissance et au milieu, favorisaient un haut degré d’unité intérieure de différenciation
des types, l’articulation naturelle étant ensuite renforcée et soutenue par des coutumes,
une éthique, m droit, quelquefois même par des cultes particuliers, non moins différenciés.
Pour l’homme occidental moderne tout ceci, depuis longtemps déjà, a cessé d’exister, a été
“dépassé” sur la voie de la “liberté” ; aussi l’homme moyen des temps modernes est-il un
homme changeant, instable, dépourvu de toute forme véritable. »
— Julius Evola, Chevaucher le tigre (1961), trad. Isabelle Robinet, éd. Guy Trédaniel,
2021 (ISBN 9782844453501), p. 59
« L’Orient lui-même suit désormais la voie que nous avons prise, il succombe
de plus en plus aux idées et aux influences qui nous ont conduits là où nous
sommes, en se “modernisant”, et en adoptant nos propres formes de vie
“laïque” et matérialiste, si bien que ce qu’il conserve encore de traditionnel et
d’authentique perd de plus en plus de terrain et se trouve repoussé dans une zone
marginale. »
— Julius Evola, Chevaucher le tigre (1961), trad. Isabelle Robinet, éd. Guy Trédaniel,
2021 (ISBN 9782844453501), p. 21
« La formule que nous avons choisie comme titre de ce livre : Chevaucher le Tigre peut
servir de transition entre ce que nous avons dit jusqu’ici et la doctrine en question. Cette
formule extrême-orientale signifie que si l’on réussit à chevaucher un tigre, on
l’empêche de se jeter sur vous et, qu’en outre, si l’on ne descend pas, si l’on
maintient la prise, il se peut que l’on ait, à la fin, raison de lui. »
— Julius Evola, Chevaucher le tigre (1961), trad. Isabelle Robinet, éd. Guy Trédaniel,
2021 (ISBN 9782844453501), p. 17
« Comme nous l’avons dit, les valeurs traditionnelles — ce que nous appelons les valeurs
traditionnelles — ne sont pas les valeurs bourgeoises. Elles en sont l’antithèse. Reconnaître
une valeur à ces survivances, les associer d’une manière ou d’une autre aux valeurs tradi-
tionnelles, les faire cautionner par ces dernières dans le but que nous venons d’indiquer,
reviendrait donc, soit à témoigner d’une pauvre compréhension de ces mêmes valeurs
traditionnelles, soit à les diminuer et à s’abaisser à une forme de compromis à la fois
regrettable et dangereux. Dangereux, car le fait de lier, d’une façon ou d’une autre, les
idées traditionnelles aux formes résiduelles de la civilisation bourgeoise, exposerait celles-
là à subir elles-mêmes l’attaque, à plus d’un égard inévitable, légitime et nécessaire,
actuellement menée contre cette civilisation. »
— Julius Evola, Chevaucher le tigre (1961), trad. Isabelle Robinet, éd. Guy Trédaniel,
2021 (ISBN 9782844453501), p. 14
« Il est claire qu’avec tout ce qui se résume dans la formule d’“antifascisme” il ne peut y
avoir de compromis ni de “colloque” d’aucune sorte. La première désintoxication
européenne devrait s’appliquer à cet “antifascisme”, idée fixe et mot d’ordre
de la “croisade” qui a réduit l’Europe à un champ de ruines. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 246
« À ceux qui disent que les peuples européens ont aujourd’hui une culture
commune et réalisent ainsi une des conditions requises pour en faire une seule nation, il
faut répondre que cette culture est désormais commune, non seulement aux
Européens, mais aussi à une grande partie du monde “civilisé”. Elle n’a pas de
frontières. Des apports européens — livres, artistes, études, etc. — ont été assimilés par
des pays non européens, et inversement ; ce nivellement général de fait (qui s’étend aux
façons de vivre et aux goûts) associé à celui qu’entraînent la science et la technique, sert
d’argument à ceux qui ne veulent pas une Europe unie mais un monde unifié, dans le cadre
d’une organisation ou d’un État mondial. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 245-246
« Il serait, bien entendu, parfaitement utopique de vouloir s’opposer, en fait, à tout ce qui
constitue, sur le plan matériel, la civilisation moderne ; cela impliquerait, entre autres
choses, de renoncer aux armes actuelles d’attaque et de défense. Mais on peut toujours
fixer une distance et une limite. On peut circonscrire ce qui est “moderne” dans un
domaine concret, “physique”, bien contrôlé, sur le plan des simples moyens, en lui
superposant un ordre plus élevé, défendu comme il se doit, là où les valeurs
révolutionnaires-conservatrices devraient être inconditionnellement reconnues. Hier
encore, le Japon avait démontré la possibilité et la fécondité d’une telle solution. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 245
« Dans une Europe unitaire, patries et nations peuvent subsister (les communautés
ethniques ont été respectées, pour une part, même dans le totalitarisme de l’U.R.S.S.). Ce
qui devrait être exclu, c’est le nationalisme (avec son prolongement tératologique,
l’impérialisme) et le chauvinisme, c’est-à-dire l’absolutisation fanatique d’une communauté
particulière. Empire, donc, et non “Europe Nation” ou “Patrie européenne” serait,
doctrinalement, le terme juste. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 238
« [...] jamais il n’y a eu, autant qu’aujourd’hui, d’individus amorphes, ouverts à toutes les
suggestions et à toutes les intoxications idéologiques, au point qu’ils deviennent les
succubes, souvent sans s’en douter le moins du monde, des courants psychiques et des
manipulations engendrés par l’ambiance intellectuelle, politique et sociale dans laquelle
nous vivons. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 164
« Nous nous contenterons de signaler ici la possibilité d’un troisième axe de référence, au
delà de l’intellectualisme comme de l’anti-intellectualisme, pour dépasser la “culture”
d’inspiration bourgeoise. Il s’agit de la vision du monde, — en allemand Weltanschaung. La
vision du monde ne se fonde pas sur une connaissance livresque mais sur une
configuration intérieure et une sensibilité ayant un caractère non pas acquis, mais inné. Il
s’agit essentiellement d’une disposition, et d’une attitude, non de théorie ni d’érudition ;
disposition et attitude qui ne concernent pas seulement le domaine mental, mais
imprègnent aussi l’affectivité et la volonté, modèlent le caractère, se manifestent par des
réactions qui ont la même sûreté que l’instinct, et confèrent un caractère d’évidence à une
signification donnée de l’existence.
Normalement, la vision du monde n’est pas quelque chose d’individuel, mais procède
d’une tradition ; elle est la résultante organique des forces auxquelles un type de
civilisation doit la forme qui lui est propre. En même temps, a parte subjecti, elle apparaît
comme une sorte de “race intérieure”, de structure existentielle. Dans toutes les
civilisations, autres que la civilisation moderne, a existé précisément une “vision du
monde”, et non pas une “culture” [...], qui pénétrait les couches les plus diverses de la
société. [...] Et la vision du monde peut être plus précise chez un homme sans instruction
que chez un écrivain, plus ferme chez le soldat, le membre d’une souche aristocratique ou
le paysan fidèle à la terre, que chez l’intellectuel bourgeois, le “professeur” ou le journaliste.
[...]
Si le brouillard se lève, il apparaîtra clairement que c’est la “vision du monde” qui, au-delà
de toute “culture” doit unir ou diviser les hommes en traçant d’infranchissables frontières
spirituelles ; que, même dans un mouvement politique, cette vision est primordiale, car elle
a seule le pouvoir de cristalliser un type humain déterminé et de conférer ainsi un ton
spécifique à une communauté donnée. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 162-165
« Il convient de dénoncer cette perversion, par laquelle l’universel est mis au service du
particulier. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 154
« [...] quand on voit les catholiques d’aujourd’hui rejeter les prétendus “résidus médiévaux”
de leur tradition, le Concile Vatican II et tout ce qui s’en est suivi instaurer un
“aggiornamento” destructeur, le pape considérer l’O.N.U. — cette association ridicule,
hybride et bâtarde — comme une sorte de préfiguration d’une future œcuménicité
chrétienne vers laquelle l’Église paraît aujourd’hui entraînée, aucun doute ne subsiste, et
l’on ne peut que nier péremptoirement sa capacité de fournir un soutien quelconque à un
mouvement révolutionnaire conservateur et traditionaliste. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 150
« [...] poser l’inégalité signifie dépasser la quantité, admettre la qualité. C’est là que se
différencient les deux concepts d’individu et de personne. On peut concevoir l’individu
comme une simple unité atomique, un simple numéro dans le règne de la quantité. D’un
point de vue absolu, c’est une fiction, une abstraction : mais on peut y tendre, on peut faire
en sorte que les différences qui définissent chaque individu se réduisent à un minimum,
que prévalent des qualité communes et uniformes (entraînant comme conséquence des
voies, des droits, des libertés également uniformes) et considérer cette uniformité comme
une condition idéale et désirable, alors que cela correspond à une dégradation et à une
dénaturation.
Le pur individu, en effet, appartient au monde de l’inorganique plus qu’à celui de
l’organique. [...] L’“individu” atomique, non lié (solutus), “libre”, se trouve donc
sous le signe de l’inorganique et se situe, analogiquement, aux degrés inférieurs de la
réalité. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 47
« [...] l’idée, et l’idée seule, doit représenter la vraie patrie. [...] la fidélité
inconditionnelle à une idée peut servir de bouclier contre la guerre occulte ; quand cette
fidélité fléchit, quand on se plie aux finalités contingentes d’une soi-disant politique
réaliste, le front de la résistance est déjà miné. »
— Julius Evola, Les Hommes au milieu des ruines (1953), trad. Gérard Boulanger, éd.
Pardès, 1984 (ISBN 9782867140044), p. 41-198
« [...] des chefs d’État ont préféré la ruine de l’Europe et le fatal assujettissement de leurs
patries à des peuples étrangers et “barbares” d’Orient et d’Occident, plutôt que de
coopérer à une Europe nouvelle qui visait à dépasser le monde du XIXème siècle et à se
réorganiser sous de nouveaux symboles d’autorité et de socialité. »
— « Sur les conditions spirituelles et structurelles de l’unité européenne », Julius Evola
(trad. Paul Durand), Europa Nazione, janvier 1951
« [...] nous devons avoir en propre le courage des choix radicaux, le non lancé à la
décadence politique sous toutes ses formes, qu’elles soient de gauche ou d’une soi-disant
droite. Et, surtout, voilà ce dont il faut être conscient : on ne pactise pas avec la subversion,
car faire des concessions aujourd’hui signifie se condamner à être totalement vaincu
demain. Intransigeance de l’idée, donc, et capacité de se porter immédiatement en avant,
avec des forces pures, lorsque le moment opportun sera venu. »
— Julius Evola, Orientations (1950), trad. Philippe Baillet, éd. Pardès, 2011 (ISBN
9782867144509), p. 54
« Il est inutile de se faire des illusions avec les chimères d’un quelconque
optimisme : nous nous trouvons aujourd’hui à la fin d’un cycle. »
— Julius Evola, Orientations (1950), trad. Philippe Baillet, éd. Pardès, 2011 (ISBN
9782867144509), p. 41
« [...] nous sommes en guerre contre un front dont le judaïsme international est
l’une des principales forces ! »
— Julius Evola, « À propos du papier imprimé inutile » (1943), dans Essais politiques, trad.
Gérard Boulanger et François Maistre, éd. Pardès, 2016 (ISBN 9782867140464), p. 246
« Or, nous l’avons déjà dit, l’égalitarisme n’est qu’une phase transitoire et un instrument de
subversion : il sert à aplanir les voies. Une fois détruits au nom de la “justice” les
fondements d’un ordre hiérarchique précédent, une fois éliminées les barrières, se forme
un autre ordre, qui est la contrefaçon et l’inversion du premier, comme une pyramide dont
la pointe serait en bas. Outre ce qu’on a déjà indiqué sur la “dictature du prolétariat”,
exprimant un pouvoir qui ne s’est en rien “socialisé” mais qui est devenu le monopole des
couches les plus basses, le cas du judaïsme est éloquent. Le Juif a demandé et obtenu
l’émancipation — lui aussi — au nom de la “justice” et de l’“égalité”. Une fois devenu libre,
loin de s’assimiler et de travailler “d’égal à égal” à côté du non-Juif, il est passé sur son dos
et a occupé, dans de nombreux pays, fût-ce sous une forme parfois invisible, les postes de
commande sociaux, politiques et culturels les plus importants. »
— Julius Evola, « Les limites de la « justice sociale » » (1940), dans Essais politiques, trad.
Gérard Boulanger et François Maistre, éd. Pardès, 2016 (ISBN 9782867140464), p. 196-
197
« Il faut enfin envisager une troisième possibilité. Pour certains, la voie de l’accélération
peut être la plus apte à les rapprocher de la solution. Dans certaines conditions, en effet,
de nombreuses réactions équivalent aux crampes qui ne servent qu’à prolonger l’agonie et
qui, retardant la fin, retardent aussi le recommencement. Il s’agirait d’assumer, en
fonction d’une orientation intérieure particulière, les processus les plus
destructeurs de l’ère moderne pour les utiliser en vue d’une libération : ce
serait une manière de retourner le poison contre lui-même ou de “chevaucher
le tigre”. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 613
« À côté des grands courants de ce monde, il existe encore des hommes ancrés
dans les “terres immobiles”. Ce sont généralement des inconnus qui se
tiennent à l’écart de tous les carrefours de la notoriété et de la culture
moderne. Ils gardent les lignes de crête et n’appartiennent pas à ce monde. Bien que
dispersés sur la terre, s’ignorant souvent les uns les autres, ils sont invisiblement unis et
forment une “chaîne” incassable dans l’esprit traditionnel. Ce noyau n’agit pas : sa fonction
correspond au symbolisme du “feu éternel”. Grâce à ces hommes, la Tradition est présente
malgré tout, la flamme brûle secrètement, quelque chose rattache encore le monde au
supramonde. Ce sont les “veilleurs”, les έγϱηγοϱοι. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 611-612
« La prison de l’homme occidental est l’une des plus terribles, car c’est une
prison sans murs. Il est difficile de se relever lorsqu’il n’y a aucun point qui tienne bon
lorsqu’on s’y appuie pour prendre son élan. Avec l’affaiblissement de plus en plus net de
l’influence effective du christianisme et du catholicisme, l’Occident est en train de rompre
les dernières amarres avec une spiritualité qui n’est pas la sienne ; mais d’autre part, dans
ses formes propres, l’esprit lui fait défaut, et il semble incapable de se donner une
spiritualité. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 609
« C’est seulement grâce au bloc de l’orthodoxie animée d’un tout autre esprit que le
catholicisme, malgré sa nature composite, pourrait peut-être fournir un point de ralliement
à de nombreuses forces dispersées et fractionnées. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 605-606
« [...] chez l’homme moderne, il y a un matérialisme qui, vieux de plusieurs siècles, est
désormais devenu une structure, une donnée constitutive de son être. Sans que la
conscience périphérique s’en aperçoive, ce matérialisme étouffe toute possibilité, dévie
toute intention, paralyse tout élan, réduit tout effort même correctement orienté à une
stérile et inorganique “construction”. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 603-604
« Dans tous les cas de figure, seul un retour à l’esprit traditionnel dans une
nouvelle conscience unitaire européenne pourrait sauver l’Occident. [...] La
Tradition, en ce sens souterrain, a toujours existé, existe encore aujourd’hui et ne sera
certes pas perdue à cause d’une contingence quelconque se rapportant au destin des
hommes. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 602-603
« Convaincus d’avoir une mission universelle, [...] l’Amérique expriment une réalité de fait.
Dans le cadre du plan de la subversion mondiale, [...] lorsque s’accomplira ce destin, toute
cette civilisation de titans, de métropoles d’acier, de verre et de béton, de masses
pullulantes, d’algèbre et de machines enchaînant les énergies de la matière, de
dominateurs de deux et d’océans, apparaîtra comme un monde qui oscille sur son orbite et
tend à s’en détacher pour s’éloigner et se perdre à jamais dans les espaces, là où il n’y a
plus aucune lumière, hormis la lumière sinistre qui naîtra de l’accélération de sa propre
chute. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 599
« [...] il y a encore des gens qui perdent leur temps avec l’idée que la “démocratie”
américaine est le remède contre le communisme soviétique, qu’elle incarne l’alternative du
“monde libre”. En règle générale, on perçoit le danger lorsqu’il se présente sous la forme
d’une attaque brutale, physique, venant de l’extérieur ; on ne le perçoit pas lorsqu’il
emprunte les voies qui passent par l’intérieur. Depuis longtemps maintenant, l’Europe subit
l’influence de l’Amérique, donc de la perversion des valeurs et des idéaux qui est inhérente
au monde nord-américain. Cela est l’effet d’une sorte de fatal choc en retour. En effet,
comme Guénon l’a dit avec raison, l’Amérique n’est autre que l’“extrême Occident”, le
développement jusqu’à l’absurde des tendances fondamentales adoptées par la civilisation
occidentale moderne en général. C’est pourquoi une véritable résistance est impossible
tant qu’on s’en tient aux principes de cette civilisation et, surtout, tant qu’on succombe au
mirage de la technique et de la production. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 598
« [...] dans le monde entier grâce au jazz, phénomène hautement significatif. Dans les
grandes salles des villes américaines où des centaines de couples se secouent de concert
comme des pantins épileptiques et automatiques au son des rythmes nègres syncopés,
c’est vraiment un “état de foule”, la vie d’une entité collective mécanisée, qui se réveille. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 596
« Le fait est qu’aux États-Unis l’inventeur ou le découvreur de quelque engin nouveau qui
multiplie le rendement sera toujours plus considéré que le type traditionnel de
l’intellectuel ; que tout ce qui est profit, réalité et action au sens matériel pèsera toujours
plus lourd sur la balance des valeurs qu’un comportement dicté par la dignité
aristocratique. Certes, l’Amérique n’a pas officiellement banni, comme le communisme, la
vieille philosophie, mais elle a fait mieux : par la bouche d’un Williams James elle a déclaré
que l’utile est le critère du vrai et que la valeur de toute conception, même métaphysique,
doit être mesurée à l’aune de son efficacité pratique, laquelle d’ailleurs, pour la mentalité
américaine, finit toujours par vouloir dire efficacité économique et sociale. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 590
« La fin de la guerre marqua aussi la fin de cette alliance hybride ; elle eut pour véritable
résultat l’élimination de l’Europe comme sujet de la grande politique mondiale, la
disparition de toute forme intermédiaire, et laissa les États-Unis et la Russie face à face, en
tant que représentants supra-nationaux des forces, respectivement, du Tiers et du
Quatrième État. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 576
« Comme peu d’autres guerres, la guerre de 1914-1918 présente tous les traits d’un conflit
entre les idéologies de castes différentes, et non entre États et nations. Ses résultats directs
et voulus furent la destruction de l’Allemagne monarchique et de l’Autriche catholique, ses
résultats indirects, l’écroulement de l’Empire des tsars, la révolution communiste et la
création, en Europe, d’une situation politique et sociale si chaotique et contradictoire
qu’elle renfermait toutes les conditions d’une nouvelle conflagration. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 574
« On tend à une fraternité universelle qui, loin d’abolir l’esprit national avec ses appétits et
ses prétentions, en sera, au fond, la forme suprême. La nation s’appellera l’Homme et Dieu
apparaîtra, sinon comme un ennemi du moins comme une “fiction inopérante”. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 570
« Le sport est un type de travail où l’objet et le but de la production ne comptent plus, qui
est donc voulu pour lui-même, en tant que simple activité. On a pu dire à juste titre qu’il
représente la religion de l’ouvrier. Il est une contrefaçon typique de l’action au sens
traditionnel. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 563
« À l’époque des marchands, l’idéal n’est autre que l’économie pure, le profit,
la prospérité et la science comme instrument de progrès technico-industriel,
garant de production et de profit nouveau au sein de la “société de
consommation”, idéal auquel répond, avec l’avènement des serfs, l’élévation au rang de
religion du principe de l’esclave : le travail. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 555
« La régression quadripartie n’a pas seulement une portée politique et sociale ; elle investit
tous les domaines de la culture. Elle se signale, en architecture, par la transition menant du
thème dominant du temple (première caste) à la forteresse et au château (caste des
guerriers), à la cité communale ceinte de murailles (époque des marchands), à l’usine et
aux édifices sans âme et rationalisés, aux ruches humaines de l’homme-masse. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 554
« Par ailleurs, il n’est pas sans intérêt de souligner que le monde moderne témoigne aussi
d’un retour, sous une forme transposée, des thèmes propres aux antiques cultures
gynécocratiques méridionales. Le socialisme et le communisme, dans les sociétés
modernes, ne sont-ils pas des réapparitions matérialisées et mécanisées de l’ancien
principe tellurique-méridional de l’égalité et de la promiscuité dans la Terre Mère ? »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 547
« On a l’un des exemptes tes plus tangibles à ce propos dans le rôle joué par la franc-
maçonnerie dans les révolutions américaines, de même que dans la préparation
idéologique souterraine de la Révolution française et d’une grande partie des révolutions
qui suivirent (Espagne, Italie, Turquie, etc.). C’est ainsi que s’est formé ce qu’on peut appeler
le front secret de la subversion mondiale et de la contre-tradition : à travers non seulement
des influences générales, mais aussi à travers des centres bien précis d’action concertée
servant de support à ces influences. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 536
« C’est une grave équivoque. La Renaissance n’emprunta au monde antique que des
formes décadentes : non celles des origines, qui étaient pénétrées d’éléments sacrés et
supra-personnels ; ou bien elle négligea totalement ces derniers éléments, orientant ainsi
l’héritage antique dans une direction tout à fait différente. En réalité, au sein de la
Renaissance, la “paganité” servit essentiellement à développer la simple affirmation de
l’homme, à fomenter une exaltation de l’individu, lequel s’enivra des productions d’un art,
d’une érudition et d’une spéculation privés de tout facteur transcendant et métaphysique.
[...]
L’effort médiéval pour reprendre le flambeau que Rome avait reçu de la Grèce héroïque et
olympienne retombe. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 522-523
« On ne conçoit plus comme chef que l’individu puissant, qui ne commande pas en
fonction d’une investiture, de sa nobilitas, ou parce qu’il représente un principe supérieur
et une tradition, mais en son nom propre, se servant de l’astuce et de la violence, des
moyens de la “politique” désormais comprise comme un “art”, une technique sans
scrupules — honneur et vérité ne signifiant rien pour lui —, se servant aussi,
éventuellement, de la religion comme d’un instrument parmi tant d’autres. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 519
« [...] c’est précisément parce que la France fut la première à favoriser ce tournant et à
donner un caractère de plus en plus centralisateur et nationaliste à l’idée d’État, qu’elle fut
aussi la première à assister à l’écroulement du régime monarchique et à l’avènement du
régime républicain en tant que passage net et franc du pouvoir au Tiers État. Un
phénomène qui fit de la France, au sein des nations européennes, le principal foyer du
ferment révolutionnaire et de la mentalité laïque et rationaliste, délétère pour toute
survivance résiduelle de “traditionnalité”.
Un autre aspect complémentaire de la Némésis historique est lui aussi précis et intéressant.
Après que tes États “absolutisés” se furent émancipés de l’Empire, ce fut au tour des
individus souverains, libres et autonomes de s’émanciper de l’État. Une usurpation appela
et annonça l’autre, jusqu’à ce que dans les États atomisés et devenus anarchiques en tant
qu’États souverains nationaux, la souveraineté usurpée de l’État cédât à la souveraineté
populaire. Dans le cadre de celle-ci, toute autorité et toute toi ne sont légitimes qu’en tant
qu’expressions de la volonté des citoyens, individus particuliers seuls souverains : c’est l’État
démocratisé et “libéral”, en attendant la dernière phase, la phase purement collectiviste. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 515-516
« Philippe le Bel est en effet celui qui, d’accord avec le pape, a détruit dans les Templiers
l’expression la plus typique de la tendance à reconstituer l’unité de l’élément guerrier et de
l’élément sacerdotal, tendance qui était l’âme secrète de la chevalerie. C’est aussi lui qui a
entamé le travail d’émancipation laïque de l’État par rapport à l’Église, tâche que ses
successeurs poursuivront sans interruption, tout comme sera poursuivi — surtout par Louis
XI et par Louis XIV — le combat contre la noblesse féodale, et ce sans dédaigner l’appui de
la bourgeoisie, ni hésiter à encourager dans ce but — l’esprit de révolte jusque dans les
couches sociales les plus basses ; c’est encore Philippe le Bel qui favorisera une
culture antitraditionnelle, ses “légistes” étant, avant même les Humanistes de
la Renaissance, les vrais précurseurs du laïcisme moderne. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 514-515
« À mesure qu’on avancera dans l’ère moderne on verra les patries se constituer
ouvertement comme autant de schismes, s’opposer les unes aux autres non seulement en
tant qu’entités politiques et temporelles, mais en tant qu’entités mystiques refusant
d’admettre toute forme d’autorité supra-ordonnée. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 513
« La chevalerie fut le complément naturel de l’idée impériale : elle était à celle-ci ce que le
clergé était à l’Église. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 503
« Dans la féodalité, les rapports de fidélité et d’honneur ressortirent plus qu’à toute autre
époque de l’Occident. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 500
« [...] l’égalitarisme chrétien, avec ses principes de fraternité, d’amour, de communion, finit
par être la base mystico-religieuse d’un idéal social opposé à la pure idée romaine. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 479
« La part occupée par des influences méridionales et non aryennes est également assez
visible dans la morale chrétienne. Le fait que face à un Dieu, et non à une déesse, on ne
reconnaisse, spirituellement parlant, aucune différence entre homme et homme, et qu’on
pose l’amour comme principe suprême — cela pèse d’un poids très lourd. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 479
« Ce qui s’était affirmé, c’était l’idéal d’une religion ouverte à tous, étrangère à toute idée
de race, tradition et caste, donc, concrètement, d’une religion faite pour ceux qui n’avaient
ni race, ni tradition, ni caste. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 475
« Rome naît dans la période critique que traversèrent, un peu partout, les anciennes
civilisations traditionnelles. Et si l’on fait abstraction du Saint Empire Romain — qui fut du
reste, en partie, une reprise nordico-germanique de l’idée romaine antique —, il faut voir
en Rome la dernière grande réaction contre cette crise, la tentative, victorieuse pendant
tout un cycle, d’arracher aux forces de la décadence déjà à l’œuvre dans les cultures
méditerranéennes un ensemble de peuples, pour les organiser et réaliser sous une forme
plus durable et plus grandiose ce que la puissance d’Alexandre le Grand n’avait su faire que
pour une brève période. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 448
« La pensée qui cherche à rendre compte de l’universel et de l’être sous la forme qui lui est
propre — à savoir en mode rationnel et philosophique — et à transcender par le concept,
dans le cadre de la rhétorique, la particularité et la contingence du monde sensible,
constitua la séduction et l’illusion les plus périlleuses, l’instrument d’un humanisme et, par
conséquent, d’un irréalisme bien plus profond et néfaste, qui allait ensuite séduire
l’Occident tout entier. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 446
« La crise de l’ancien régime aristocratique et sacral des cités grecques est presque
contemporaine de l’épidémie dionysiaque. Un ferment révolutionnaire altère les
fondements des vieilles institutions, l’ancienne conception de l’État, de la loi, du droit et de
la propriété. Il sépare le pouvoir temporel de l’autorité spirituelle, reconnaît le principe
électif et introduit des institutions qui s’ouvrent peu à peu aux couches sociales inférieures,
à l’aristocratie contre-nature du cens (caste des marchands : Athènes, Cumes, etc.), et,
enfin, à la plèbe protégée par les tyrans populaires (Argos, Corinthe, Sicyone, etc.). C’est la
naissance du régime démocratique. Royauté, oligarchie, puis bourgeoisie, enfin
dominateurs illégitimes qui tiennent leur pouvoir d’un prestige purement personnel et qui
s’appuient sur le demos, telles sont les phases de l’involution qui se vérifia déjà en Grèce,
qui se répéta dans la Rome antique, avant de se réaliser en grand et en entier dans
l’ensemble de la civilisation moderne.
Or, dans la démocratie grecque il faut voir non pas tant une victoire du peuple grec qu’une
victoire de l’Asie Mineure et, mieux du Sud, sur les ethnies helléniques originelles
dispersées dans leurs forces et leurs hommes. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 439-440
« Moïse lui-même, s’il doit la vie à une femme royale, fut conçu comme un “Sauvé des
Eaux”, et les péripéties de l’“Exode” sont susceptibles de recevoir une interprétation
ésotérique. Si l’on met de côté Élie et Hénoch, il reste que Jacob est un vainqueur d’anges
et, concomitamment, que le terme même d’“Israël” ne signifie rien d’autre que “vainqueur
de Dieu”. Mais il s’agit là d’éléments sporadiques, qui accusent une oscillation curieuse,
typique de l’âme judaïque en général : d’un côté, un sentiment de faute, d’auto-
humiliation, de sacrilège, d’attachement à la chair ; de l’autre, un orgueil et une rébellion
quasi lucifériens. Cela explique peut-être le fait que la tradition initiatique du judaïsme, qui
joua un rôle important au Moyen Age européen sous la forme de la Kabbale, présente elle-
même des aspects particulièrement involués et a parfois l’allure d’une “science maudite”. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 411
« Jusqu’à hier, le Japon a offert un exemple, unique en son genre, de coexistence d’une
orientation traditionnelle avec l’adoption, sur le plan matériel, des structures de la
civilisation technique moderne. Avec la Deuxième Guerre mondiale, une continuité
millénaire a été brisée, cet équilibre a disparu, le dernier État au monde où l’on
reconnaissait encore le principe de la royauté “solaire” de pur droit divin a cessé d’exister.
Le destin de l’“âge sombre”, sa loi en vertu de laquelle le potentiel technique et industriel,
la force matérielle organisée, a un poids déterminant dans l’affrontement des puissances
mondiales, a également marqué la fin de cette tradition, avec l’issue de la dernière
guerre. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 403
« Ayant indiqué ces points essentiels, nous ne reviendrons pas sur la loi de solidarité entre
causes physiques et causes spirituelles appliquée à un plan où l’on peut pressentir une
relation profonde : entre ce qu’on peut appeler, au sens le plus large, la “chute” —
la déviation d’une race absolument primordiale — et la déclinaison physique de l’axe de la
Terre, facteur de changements climatiques et de catastrophes périodiques pour les
continents. Nous indiquerons seulement que depuis que la région polaire est
devenue déserte, on a pu constater l’altération et la disparition progressives de
la tradition originelle, ce qui devait conduire jusqu’à l’âge de fer ou âge sombre, kâli-
yuga, ou encore “âge du loup” (Edda), et, à la limite, jusqu’aux temps modernes
proprement dits. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 334-335
« Avec Thulé se confond donc soit le légendaire pays des Hyperboréens, situé à l’extrême
Nord, d’où les lignées achéennes originelles apportèrent l’Apollon delphique ; soit l’île
d’Ogygie, “ombilic de la mer”, qui se trouve loin sur le vaste océan et dont Plutarque dit en
effet qu’elle est située au nord de la (Grande) Bretagne. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 333
« [...] les Hyperboréens étaient précisément une race mystérieuse qui habitait
dans la lumière éternelle et dont la région aurait été l’habitat et la patrie de
l’Apollon de Delphes, du dieu dorien de la lumière — Φοἱβоς άπόλλου, le Pur, le
Rayonnant —, représenté aussi, d'autre part, comme un dieu “d’or” et un dieu de l’âge
d’or. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 324
« Le rapport avec le surnaturel conçu sous une forme personnalisée (théisme), comme
dévouement, dévotion, renoncement profond à la volonté propre devant cette hypostase
— ce rapport présente, sur son plan spécifique, les traits propres à la voie où peut se
réaliser une nature féminine. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 299-300
« La femme traditionnelle, la femme absolue, en se donnant, en ne vivant pas pour soi,
mais en voulant être tout entière pour un autre être, avec simplicité et pureté,
s'accomplissait, s'appartenait, avait un héroïsme spécifique — et, au fond, s'élevait au-
dessus de l’homme commun. La femme moderne, elle, s'est détruite en voulant vivre pour
elle-même. La “personnalité” tant désirée lui enlève toute personnalité. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 290
« En dehors d’une fidélité seulement conformiste et bourgeoise, l’amour que l’Europe avait
choisi, c’était celui n’admettant pas que l’être aimé n’aime pas. Or, quand une femme, pour
se consacrer à un homme, prétend que celui-ci lui appartienne corps et âme, elle ne se
contente pas d’“humaniser” et d’appauvrir son offrande ; elle commence à trahir l’essence
pure de la féminité pour emprunter, sous cet aspect également, un mode d’être propre à la
nature masculine — et de l’espèce la plus basse : la possession, le droit sur l’autre et
l’orgueil du Moi. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 289
« [...] nous voyons la civilisation moderne se tourner vers le nivellement, vers l’informe, vers
un stade qui, en réalité, n’est pas au-delà, mais en-deçà de l’individuation et de la
différence entre les sexes. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 287
« L’idée, soutenue par Fustel de Coulanges, que l’apparition du “testament” au sens d’une
liberté individualiste laissée aux possédants de diviser leur propriété, de la désintégrer
d’une manière ou d’une autre, de la détacher de l’héritage du sang et des normes
rigoureuses du droit patriarcal et du droit d’aînesse, est un des signes typiques de la
dégénérescence de la mentalité traditionnelle — cette idée est tout à fait juste. Plus
généralement, il faut dire que lorsque le droit de propriété cesse d’être le privilège des
deux castes supérieures et passe aux deux castes inférieures — celles des marchands et des
serfs —, cela entraîne obligatoirement une régression naturaliste virtuelle, cela restaure le
pouvoir des “esprits de la terre” sur l’homme. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 275-276
« [...] dans toute forme supérieure de tradition, la propriété du sol comme propriété privée
fut un privilège aristocratique et sacral : seuls ont droit à la terre ceux qui possèdent des
rites — au sens spécifique, “patricien”, de cette expression.
[...] la propriété tend de plus en plus à passer de individuel au
collectif. Parallèlement à la disparition du droit aristocratique aux terres, remplacé par
l’économie devenue souveraine des terres, on voit surgir d’abord le nationalisme, puis le
socialisme et enfin le communisme marxiste. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 272-276
« [...] l’homme moderne a besoin, comme d’une espèce de stupéfiant, de ces formes
d’action dégradées ou profanées : il en a besoin pour chasser le sentiment de son vide
intérieur, pour se sentir vivre, pour trouver dans des sensations exaspérées le succédané
d’une existence possédant une signification authentique. Une espèce de fébrilité titanique
qui franchit toutes les limites, qui pousse de fièvre en fièvre, qui trouve sans cesse de
nouvelles sources d’ivresse et d’étourdissement : voilà l’une des caractéristiques de l’“âge
sombre” occidental. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 247
« [...] Jérusalem, but de la conquête des croisés, se présentait sous le double aspect d’une
cité terrestre et d’une cité céleste, et la croisade devenait l’équivalent, sur le plan de la
tradition héroïque, du “rite” du pèlerinage et de la “passion” de la via crucis. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 222
« [...] en Amérique la vraie misère des Noirs commença lorsqu’ils furent libérés et se
retrouvèrent dans la situation de prolétaires déracinés au sein d’une société industrialisée.
En tant qu’“esclaves” dans un régime paternaliste, ils jouissaient en général d’une sécurité
économique et d’une protection bien plus grandes. C’est pourquoi certains estiment que la
condition du “libre” travailleur blanc d’Europe fut, à l’époque, pire que la leur [...]. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 198
« [...] l’anarchie des “droits” et des “revendications” n’apparaît que lorsque cesse d’exister
une profonde orientation spirituelle, que lorsque l’action accomplie dans la pureté est
remplacée par la poussée des intérêts matériels et de l’individualisme, par la fièvre vaine et
multiforme due à la mentalité moderne, et par une civilisation qui a fait de l’économie une
démonie et un destin. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 195
« Après le déclin de la chevalerie, la noblesse, elle aussi, finit par perdre en Europe
l’élément spirituel comme point de référence de sa plus haute “fidélité” ; elle devint une
partie de simples organismes politiques — ce qu’illustre précisément le cas des
aristocraties des États nationaux apparus après la civilisation médiévale. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 161
« De toute façon, on est passé, au fil des siècles, à des formes d’anarchie antitraditionnelle
— anarchie qui présente deux aspects : soit celui d'une royauté qui est simple pouvoir
temporel se révoltant contre l’autorité spirituelle ; soit l'aspect d'une spiritualité de type
“lunaire” se révoltant contre une spiritualité incarnée par des monarques se souvenant
encore de leur antique fonction. Des ruines du monde traditionnel, l'hétérodoxie surgira
sous l'une ou l'autre forme. La première voie, c'est celle qui conduira d'abord à la
prévarication politique et à la sécularisation de l’idée d'État, à la destruction de toute vraie
hiérarchie et, pour finir, aux formes modernes d'une virilité et d'une puissance illusoires et
matérialisées, elles-mêmes emportées par la démonie du monde des masses sous ses
aspects plus ou moins collectivistes. La seconde voie courra parallèlement à l’autre, et se
réalisera d’abord avec l'avènement de la “civilisation de ta Mère”, avec la spiritualité
d'inspiration panthéiste ; puis avec les variantes de la religion dévotionnelle au sens propre.
Nous verrons que le dernier grand épisode du conflit aura lieu au Moyen Âge, avec
l'affrontement entre l'universalisme religieux représenté par l'Église et l’idée royale
incarnée, en dépit de certains compromis, par le Saint Empire Romain. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 137-138
« Lorsque c’est au contraire une caste sacerdotale ou une Église qui se présente comme
détentrice exclusive de la force sacrée par laquelle seule le roi peut être habilité à sa
fonction, on se trouve au commencement d’une phase descendante. Il y a une spiritualité
qui, en soi, n’est plus royale et une royauté qui, en soi, n’est plus spirituelle, l’une et l’autre
comme des réalités distinctes. On peut dire aussi qu’il y a, d’une part, une spiritualité
“féminine”, de l’autre une virilité matérielle ; d’un côté une “sacralité” lunaire, de l’autre une
“solarité” matérielle. La synthèse, correspondant à l’attribut royal et primordial de la
“gloire”, feu céleste des “vainqueurs”, est brisée. Le plan de la centralité absolue est perdu.
Et l’on verra que cette scission marque le début de la descente des civilisations sur la pente
qui aura pour limite le monde moderne. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 129
« Dans le divin, le sang θεοι συναιμοι —, dans le divin, la famille, θεοι εγγενεις. État,
communauté, famille, affections bourgeoises, devoirs au sens moderne — à savoir
exclusivement laïque, humain et social : autant de “constructions”, autant de choses qui
n’existent pas, qui sont en dehors de la réalité traditionnelle, qui appartiennent au monde
des ombres. La lumière de la Tradition ne connut rien de tout cela. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 90
« Seul compte, aujourd’hui, le travail de ceux qui savent se tenir sur les lignes
de crête : fermes sur les principes ; inaccessibles à tout compromis ; indifférents
devant les fièvres, les convulsions, les superstitions et les prostitutions sur le rythme
desquelles dansent les dernières générations. Seule compte la résistance silencieuse d’un
petit nombre, dont la présence impassible de “convives de pierre” sert à créer de nouveaux
rapports, de nouvelles distances, de nouvelles valeurs, à construire un pôle qui, s’il
n’empêchera certes pas ce monde d’égarés et d’agités d’être ce qu’il est, permettra
cependant de transmettre à certains la sensation de la vérité — sensation qui sera peut-
être aussi le déclic de quelque crise libératrice. »
— Julius Evola, Révolte contre le monde moderne (1934), trad. Philippe Baillet, éd. Kontre
Kulture, 2019 (ISBN 9782367251400), p. 8
« La thèse que je soutiens : s’il est vrai que les Juifs ont eu un poids et une influence
extraordinaires (par rapport à leur nombre) dans tout l’Occident européen et américain
depuis deux siècles, extrêmement négative pour certains, positive pour d’autres, cette
influence juive est aujourd’hui en plein déclin. Les raisons sont multiples : mauvaise image
de marque d’Israël, perte de puissance économique et financière des communautés juives
en Europe et aux États-Unis, islamisation accélérée de l’Europe, décentrement du monde
au profit de l’Extrême-Orient judéo-indifférent, et bien d’autres choses. »
— Guillaume Faye, La Nouvelle question juive (2007), éd. Éditions du Lore, 2007, p. 147-
148
« Les Européens sont culpabilisés par une maladie intérieure. Les juifs ont peu de choses à
voir là dedans. Donc pour moi, le révisionnisme n’est pas le combat essentiel. »
— « Entretien bidon : Guillaume Faye s’explique », Fabrice Bianco, Novopress, 15 août 2006
(lire en ligne)
« [...] le lobby immigrationniste est très loin d’être dirigé par l’intelligentsia juive ! »
— « Entretien bidon : Guillaume Faye s’explique », Fabrice Bianco, Novopress, 15 août 2006
(lire en ligne)
« Je suggère aussi dans cet essai une autre idée, qui fait suite à mon concept
d’“Eurosibérie” : Septentrion, c’est-à-dire le regroupement de tous les peuples d’origine
européenne de la planète, dans une perspective ethonopolitique et non plus
géopolitique. »
— Guillaume Faye, Le Coup d’État mondial : essai sur le nouvel impérialisme
américain (2004), éd. L’Æncre, 2004, p. Quatrième de couverture
« Cette colonisation du Nord par le Sud apparaît comme un colonialisme mou, sans
franchise, appuyé par des appels à la pitié, à l’asile, à l’égalité. C’est la “stratégie du renard”
(opposée à celle du lion) notée par Machiavel. Mais en réalité, le colonisateur, qui se justifie
par l’idéologie occidentale et “moderne” de sa victime, dont il feint d’adopter les valeurs,
ne les partage nullement. Il est anti-égalitaire, dominateur (en se prétendant dominé et
persécuté), revanchard et conquérant. Belle ruse d’une mentalité restée archaïque. Pour le
contrer, ne s’agirait-il pas de redevenir mentalement archaïque et de se débarrasser du
handicap démobilisateur de l’humanisme “moderne” ? »
— Guillaume Faye, L’Archéofuturisme (1998), éd. L’Æncre, 2011, p. 62-63
L’un « des handicaps de la Nouvelle droite fut une mauvaise interprétation du gramscisme,
par l’adoption de la stratégie du tout-culturel et du tout-intellectuel. [...] Pour être efficace,
une action idéologico-culturelle doit s’appuyer sur des forces concrètes, politiques, dont
elle est le prolongement complémentaire. »
— Guillaume Faye, L’Archéofuturisme (1998), éd. L’Æncre, 2011, p. 24
« Avec quelle stupidité barbare, de prétendus défenseurs des valeurs de l’Occident, de soi-
disant parangons de la virilité perdue de nos nations, couvrent de lazzis ou d’opprobre les
homosexuels. Les beaufs contre les pédés, les tantes, les travestis et les belles de nuit ?
Préférons ces derniers, ne serait-ce que parce qu’ils ont plus d’esprit... L’obscénité se respire
dans les sacristies, les confessions, radiophoniques, les sermons des pères-la-vertu, ou des
freudiens hygiénistes, pas dans les facéties des travestis. »
— Guillaume Faye, Sexe et Idéologie (1983), éd. Le Labyrinthe, 1983, p.
PAUL FEYERABEND
« Ainsi, la science est beaucoup plus proche du mythe qu’une philosophie scientifique n’est
prête à l’admettre. C’est l’une des nombreuses formes de pensée qui ont été développées
par l’homme, mais pas forcément la meilleure. La science est indiscrète, bruyante,
insolente ; elle n’est essentiellement supérieure qu’aux yeux de ceux qui ont opté pour une
certaine idéologie, ou qui l’ont acceptée sans avoir jamais étudié ses avantages et ses
limites. Et comme c’est à chaque individu d’accepter ou de rejeter des idéologies, il s’ensuit
que la séparation de l’État et l’Église doit être complétée par la séparation de l’État et de la
Science : la plus récente, la plus agressive et la plus dogmatique des institutions religieuses.
Une telle séparation est sans doute notre chance d’atteindre l’humanité dont nous sommes
capables, mais sans l’avoir jamais pleinement réalisée. »
— Paul Feyerabend, Contre la méthode — Esquisse d'une théorie anarchiste de la
connaissance (1975), trad. Baudoin Jurdant et Agnès Schlumberger, éd. Seuil, coll. « Points
Sciences », 1988 (ISBN 9782020099950), p. 332
« Une telle présentation rééquilibrée des faits devrait au total nous convaincre qu’il est plus
que temps d’ajouter la séparation de l’État et de la Science à la séparation maintenant tout
à fait courante de l’Église et de l’État. »
— Paul Feyerabend, Contre la méthode — Esquisse d’une théorie anarchiste de la
connaissance (1975), trad. Baudoin Jurdant et Agnès Schlumberger, éd. Seuil, coll. « Points
Sciences », 1988 (ISBN 9782020099950), p. 239
« Les associations libres dans lesquelles chacun agit selon ce qui convient le mieux à ses
talents remplacent les institutions pétrifiées d’aujourd’hui ; aucune fonction ne doit être
autorisée à se fixer [...]. L’enseignement doit être basé sur la curiosité et non sur
l’obéissance, le rôle de l’enseignant est d’accentuer cette curiosité, et non de s’en remettre
à des méthodes fixes. La spontanéité doit régner en maîtresse dans la pensée (perception)
comme dans l’action. Cela dit, l’une des particularités remarquables de l’anarchisme
politique — qui suit le siècle des Lumières — est sa foi en la “raison naturelle”, et son
respect pour la science. Ce respect est rarement la démarche opportuniste qui reconnaît un
allié et le complimente pour lui faire plaisir. Le plus souvent, il est basé sur la conviction
sincère que la science pure et sans mélange donne une image véritable de l’homme et du
monde, et produit des armes idéologiques puissantes dans la lutte contre les impostures
de l’ordre présent. »
— Paul Feyerabend, Contre la méthode — Esquisse d’une théorie anarchiste de la
connaissance (1975), trad. Baudoin Jurdant et Agnès Schlumberger, éd. Seuil, coll. « Points
Sciences », 1988 (ISBN 9782020099950), p. 205-206
« La science étant donnée, le rationnel ne peut pas être universel ; et l’irrationnel ne peut
pas être exclu. Ce caractère particulier du développement de la science est un argument
très fort en faveur d’une épistémologie anarchiste.
Mais la science n’est pas sacro-sainte. Les restrictions qu’elle impose (et de telles
restrictions sont nombreuses, bien qu’il ne soit pas facile d’en faire la liste) ne sont pas
nécessaire pour avoir sur le monde des vues générales, cohérentes et adéquates. Il y a les
mythes, les dogmes de la théologie, la métaphysique, et de nombreux autres
moyens de construire une conception du monde. Il est clair qu’un échange fructueux
entre la science et de telles conceptions non scientifiques du monde aura encore plus
besoin d’anarchisme que la science elle-même. Ainsi l’anarchisme n’est-il pas seulement
une possibilité, mais une nécessité, à la fois pour le progrès interne de la science et pour le
développement de la culture en général. Et la Raison, pour finir, rejoint tous ces monstres
abstraits — l’Obligation, le Devoir, la Moralité, la Vérité —, et leurs prédécesseurs plus
concrets — les Dieux — qui ont jadis servi à intimider les hommes et à restreindre un
développement heureux et libre ; elle dépérit... »
— Paul Feyerabend, Contre la méthode — Esquisse d'une théorie anarchiste de la
connaissance (1975), trad. Baudoin Jurdant et Agnès Schlumberger, éd. Seuil, coll. « Points
Sciences », 1988 (ISBN 9782020099950), p. 196-197
« Tout Allemand qui croit encore être membre d’une nation dont il se fait une idée grande
et noble, en laquelle il espère, pour laquelle il fait preuve d’audace, souffre et subit ce qu’il
endure, doit être enfin arraché à l’incertitude qui caractérise sa foi. »
— Johann Gottlieb Fichte, Discours à la nation allemande (13 décembre 1807), trad. Alain
Renaut, éd. Imprimerie Nationale, coll. « La Salamandre », 1992 (ISBN 9782110811806),
p. 354
« Puissions-nous enfin apercevoir que tous ces dispositifs chimériques sur le commerce
mondial et sur une fabrication destinée à la planète entière font, de fait, le jeu de l’étranger
et appartiennent aux armes dont il dispose pour, depuis toujours, nous combattre, mais
qu’ils ne sont nullement applicables aux Allemands, et qu’associée à l’unité qui doit
s’établir entre eux, leur autonomie intérieure et leur indépendance commerciale
constituent le deuxième moyen susceptible de garantir leur salut, ainsi qu’à travers eux, le
salut de l’Europe. »
— Johann Gottlieb Fichte, Discours à la nation allemande (13 décembre 1807), trad. Alain
Renaut, éd. Imprimerie Nationale, coll. « La Salamandre », 1992 (ISBN 9782110811806),
p. 332-333
« Mais il y a encore un autre amour, celui qui relie l’homme à l’homme et réunit tous les
individus en une communauté rationnelle partageant la même manière de penser. »
— Johann Gottlieb Fichte, Discours à la nation allemande (13 décembre 1807), trad. Alain
Renaut, éd. Imprimerie Nationale, coll. « La Salamandre », 1992 (ISBN 9782110811806),
p. 260
« [...] dès lors que l’Allemagne s’effondre, on voit aussi s’enfoncer tout autant le reste de
l’Europe [...]. »
— Johann Gottlieb Fichte, Discours à la nation allemande (13 décembre 1807), trad. Alain
Renaut, éd. Imprimerie Nationale, coll. « La Salamandre », 1992 (ISBN 9782110811806),
p. 181
« C’est la vraie religion, sous la forme du christianisme, qui fut le germe du monde
moderne, et la tâche d’ensemble de la modernité consista à faire pénétrer cette religion
dans l culture antique déjà existante, et par là à spiritualiser, à sanctifier cette dernière. »
— Johann Gottlieb Fichte, Discours à la nation allemande (13 décembre 1807), trad. Alain
Renaut, éd. Imprimerie Nationale, coll. « La Salamandre », 1992 (ISBN 9782110811806),
p. 178
« [...] en vue de permettre la naissance d’un nouveau Moi et d’une nouvelle époque, un
monde devrait s’offrir à une génération qui a perdu son ancien Moi [...]. »
— Johann Gottlieb Fichte, Discours à la nation allemande (13 décembre 1807), trad.
Alain Renaut, éd. Imprimerie Nationale, coll. « La Salamandre », 1992 (ISBN
9782110811806), p. 53
—
GUSTAVE FLAUBERT
« Dans le règne de l’égalité, et il approche, on écorchera vif tout ce qui ne sera
pas couvert de verrues. »
— Gustave Flaubert, Lettre à Louise Colet, 20 juin 1853
« Il faut, si l’on veut vivre, renoncer à avoir une idée nette de quoi que ce soit. L’humanité
est ainsi, il ne s’agit pas de la changer, mais de la connaître. »
— Gustave Flaubert, Pensées de Gustave Flaubert, éd. Louis Conard, 1915, p. 60
« Celui qui ne dit pas de mal des femmes ne les aime point, puisque la manière la plus
profonde de sentir quelque chose est d’en souffrir. »
— Gustave Flaubert, « Notes de voyages, II », dans Œuvres complètes de Gustave
Flaubert, éd. Louis Conard, 1910, t. V, p. 359
« L’égalité, c’est l’esclavage. Voilà pourquoi j’aime l’art. C’est que là, au moins, tout est
liberté dans ce monde des fictions. »
— Gustave Flaubert, Lettre à Louise Colet, 15-16 mai 1852
« La Magie croit aux transformations immédiates par la vertu des formules, exactement
comme le Socialisme. »
— Gustave Flaubert, Lettre à Du Camp, 1879
« Cela est d’un haut grotesque que de voir ainsi la loi se torturer comme elle peut et se
casser les reins de fatigue, à vouloir retenir l’immense nouveau qui déborde de partout. Le
temps approche où toute nationalité va disparaître. La “patrie” alors sera un
archéologisme comme la “tribu”. Le mariage lui-même me semble
vigoureusement attaqué par toutes les lois que l’on fait contre l’adultère. On le
réduit à la proportion d’un délit. »
— Gustave Flaubert, Lettre à Louis Bouilhet, 19 décembre 1850
« Sans doute par l’effet de mon vieux sang normand, depuis la guerre d’Orient, je suis
indigné contre l’Angleterre, indigné à en devenir Prussien ! Car enfin, que veut-elle ? Qui
l’attaque ? Cette prétention de défendre l’Islamisme (qui est en soi une monstruosité)
m’exaspère. Je demande, au nom de l’humanité, à ce qu’on broie la Pierre-Noire, pour en
jeter les cendres au vent, à ce qu’on détruise la Mecque, et que l’on souille la tombe de
Mahomet. Ce serait le moyen de démoraliser le Fanatisme. »
— Gustave Flaubert, Lettre à Madame Roger des Genettes, 19 janvier 1878
« La notion d’esprit est tout à fait perdue en France. On devient idiot. Il y a ramollissement
de la cervelle publique. »
— Gustave Flaubert, Lettre à Raoul-Duval, Croisset, 30 janvier 1880
« Je n’ai de sympathie pour aucun parti politique ou pour mieux dire je les exècre tous,
parce qu’ils me semblent également bornés, faux, puérils, s’attaquant à l’éphémère, sans
vues d’ensemble et ne s’élevant jamais au-dessus de l’utile. J’ai en haine tout despotisme.
Je suis un libéral enragé. C’est pourquoi le socialisme me semble une horreur pédantesque
qui sera la mort de tout art et de toute moralité. J’ai assisté, en spectateur, à presque toutes
les émeutes de mon temps. »
— Gustave Flaubert, Lettre à Mademoiselle Leroyer de Chantepie, 30 mars 1857
—
MICHEL FOUCAULT
« La recherche d’une forme de morale qui serait acceptable par tout le monde
— en ce sens que tout le monde devrait s’y soumettre — me paraît
catastrophique. »
— Michel Foucault, « Le retour de la morale (entretien avec Gilles Barbedette et André
Scala) » (29 mai 1984), dans Dits et Écrits, éd. Gallimard, 1994, vol. 4, p. 706
« L’héritage le plus pesant qui nous vient du XIXe siècle — et dont il est grand temps de
nous débarrasser —, c’est l’humanisme... [...]
Notre tâche actuellement est de nous affranchir définitivement de l’humanisme, et, en ce
sens, notre travail est un travail politique. »
— Michel Foucault, « Entretien avec Madeleine Chaptal » (1966), dans Dits et Écrits, éd.
Gallimard, 1994, vol. I, p.
« Les sentinelles de l’antifascisme sont la maladie de l’Europe décadente. Ils me font penser
à cette phrase de Rousseau persiflant les cosmopolites, ces amoureux du genre humain qui
ignorent ou détestent leurs voisins de palier. La passion trépidante de l’humanité et
le mépris des gens sont le terreau des persécutions à venir. »
— Michel Marmin, « Conversation avec Julien Freund par Pierre Bérard », dans Liber
amicorum Alain de Benoist (2004), éd. Les Amis d’Alain de Benoist, 2004, p. 23
« Quels que soient les groupements et la civilisation, quelles que soient les
générations et les circonstances, la perte du sentiment d’identité collective est
génératrice et amplificatrice de détresse et d’angoisse. Elle est annonciatrice d’une
vie indigente et appauvrie et, à la longue, d’une dévitalisation, éventuellement, de la mort
d’un peuple ou d’une civilisation. Mais il arrive heureusement que l’identité collective se
réfugie aussi dans un sommeil plus ou moins long avec un réveil brutal si, durant ce temps,
elle a été trop asservi. »
— Julien Freund, Politique et impolitique (1987), éd. Sirey, 1987, p. 138
« Le génie européen a été unique au regard des avantages qu’il a apportés au monde. Il
n’est pas exclu qu’il puisse également exister un génie de la décadence. [...] Ce
ne serait plus une décadence par épuisement, mais par accomplissement de son
destin. »
— Julien Freund, La Décadence (1984), éd. Sirey, 1984, p. 392
« La baisse de la natalité est un des signes du renoncement à la vie, soit pour jouir
égoïstement du présent, soit par peur de l’avenir. En l’occurrence elle est l’expression du
refus de défendre les valeurs de la civilisation à laquelle on appartient. »
— Julien Freund, La Décadence (1984), éd. Sirey, 1984, p. 387
« [...] les hommes se ressembleront tous. Leur taille, leurs traits, leurs habitudes
corporelles, seront semblables. Ils auront même dose de forces physiques, directions
pareilles dans les instincts, mesures analogues dans les facultés, et ce niveau général,
encore une fois, sera de la plus révoltante humilité.
Les nations, non, les troupeaux humains, accablés sous une morne
somnolence, vivront dès lors engourdis dans leur nullité, comme les buffles
ruminants dans les flaques stagnantes des marais Pontins. »
— Arthur de Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines (1853), éd. Didot, 1884,
vol. VI, chap. Conclusion générale, p. 561
« Il me semble voir un Bambara assistant à l’exécution d’un des airs qui lui plaisent. Son
visage s’enflamme, ses yeux brillent. Il rit, et sa large bouche montre, étincelantes au milieu
de sa face ténébreuse, ses dents blanches et aiguës. [...] Des sons inarticulés font effort
pour sortir de sa gorge, que comprime la passion ; de grosses larmes roulent sur ses joues
proéminentes ; encore un moment, il va crier : la musique cesse, il est accablé de fatigue.
[...]
Ainsi le nègre possède au plus haut degré la faculté sensuelle sans laquelle il n’y a pas d’art
possible ; et, d’autre part, l’absence des aptitudes intellectuelles le rend complètement
impropre à la culture de l’art, même à l’appréciation de ce que cette noble application de
l’intelligence des humains peut produire d’élevé. Pour mettre ses facultés en valeur, il faut
qu’il s’allie à une race différemment douée. »
— Arthur de Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines (1853), éd. Didot, 1884,
vol. II, chap. VII, p. 362-363
L’histoire « nous montre que toute civilisation découle de la race blanche, qu’aucune ne
peut exister sans le concours de cette race, et qu’une société n’est grande et brillante qu’à
proportion qu’elle conserve plus longtemps le noble groupe qui l’a créée, et que ce groupe
lui-même appartient au rameau le plus illustre de l’espèce. »
— Arthur de Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines (1853), éd. Didot, 1884,
vol. I, chap. XVI, p. 220
« [...] l’humanité éprouve, dans toutes ses branches, une répulsion secrète pour
les croisements [...]. »
— Arthur de Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines (1853), éd. Didot, 1884,
vol. I, chap. IV, p. 28
« Je pense donc que le mot dégénéré, s’appliquant à un peuple, doit signifier et signifie
que ce peuple n’a plus la valeur intrinsèque qu’autrefois il possédait, parce qu’il n’a plus
dans ses veines le même sang, dont des alliages successifs ont graduellement modifié la
valeur ; autrement dit, qu’avec le même nom, il n’a pas conservé la même race que ses
fondateurs ; enfin, que l’homme de la décadence, celui qu’on appelle l’homme dégénéré,
est un produit différent, au point de vue ethnique, du héros des grandes époques. Je veux
bien qu’il possède quelque chose de son essence ; mais, plus il dégénère, plus ce quelque
chose s’atténue. Les éléments hétérogènes qui prédominent désormais en lui composent
une nationalité toute nouvelle et bien malencontreuse dans son originalité ; il n’appartient
à ceux qu’il dit encore être ses pères, qu’en ligne très collatérale. Il mourra définitivement,
et sa civilisation avec lui, le jour où l’élément ethnique primordial se trouvera tellement
subdivisé et noyé dans des apports de races étrangères, que la virtualité de cet élément
n’exercera plus désormais d’action suffisante. Elle ne disparaîtra pas, sans doute, d’une
manière absolue ; mais, dans la pratique, elle sera tellement combattue, tellement affaiblie,
que sa force deviendra de moins en moins sensible, et c’est à ce moment que la
dégénération pourra être considérée comme complète, et que tous ses effets
apparaîtront. »
— Arthur de Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines (1853), éd. Didot, 1884,
vol. I, chap. IV, p. 24
« Les bourgeois considéraient qu’il était vulgaire et peu distingué de descendre dans la
rue, de manifester et prendre fait et cause pour un idéal. Mais à l’heure actuelle, c’est dans
la rue que se fait la politique moderne. Qui peut conquérir la rue, peut aussi
conquérir les masses, et conquiert ainsi l’État. »
— Joseph Goebbels, Combat pour Berlin (1931), éd. Kontre Kulture, 2019 (ISBN
9782367251349), p. 74
« Le Juif est immunisé contre tous les dangers : on peut l’appeler fripouille, parasite, escroc,
profiteur, tout lui glisse dessus comme de l’eau sur un manteau. Mais appelez-le “juif” et
vous serez stupéfait de la façon dont il recule, à quel point il est blessé,
comment il fait marche arrière : “Je suis découvert”. »
— Joseph Goebbels, Der Angriff, 21 janvier 1929
—
NICOLAS GOGOL
« Oh ! quelle créature rusée que la femme ! C’est seulement maintenant que j’ai compris ce
qu’est la femme. Jusqu’à présent, personne ne savait de qui elle est amoureuse : je suis le
premier à l’avoir découvert. La femme est amoureuse du diable. Oui, sans plaisanter. »
— Nicolas Gogol, Le Journal d’un fou (1835), trad. Sylvie Luneau, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2002 (ISBN 9782070406227), p. 191-192
« Ce n’est point [...] sous les régimes monarchiques que se voient réfrénés les généreux
élans de l’âme ni méprisés les ouvrages de l’esprit, de la poésie, de l’art. Bien au contraire,
seuls les monarques en ont été les protecteurs : les Shakespeare, les Molière se sont
épanouis, grâce à leur appui bienveillant, tandis que Dante ne pouvait trouver dans sa
patrie républicaine un coin où reposer la tête. Les véritables génies se produisent au
moment où les souverains et les États sont dans toute leur puissance, et non
pas dans l’abomination des luttes intestines ni de la terreur républicaine, qui
jusqu’à présent n’ont donné au monde aucun génie. »
— Nicolas Gogol, Le Portrait (1835), trad. Henri Montgault, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2002 (ISBN 9782070406227), p. 147
« Aujourd’hui, l’individualisme est la seule défense qu’il nous reste contre le collectivisme
engendré par l’individualisme d’hier. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 137
« Être de gauche c’est croire que les présages de catastrophe sont augures de prospérité. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 133
« La démocratie est “élitiste”. Elle prétend toujours choisir, bien qu’elle choisisse toujours
mal.
Monarchie et aristocratie acceptent simplement le hasard génétique. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 132
« Il n’existe plus désormais au sein de l’État moderne que deux partis : citoyens et
bureaucratie. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 129
“The progressive Christian’s error lies in believing that Christianity’s perennial polemic
against the rich is an implicit defense of socialist programs.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« L’erreur du chrétien progressiste consiste à croire que la polémique pérenne
du christianisme contre les riches est une défense implicite des programmes
socialistes. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd.
L’Arche, 2009 (ISBN 9782851816979), p. 128
« La réaction n’est rien de plus que la traduction en langage réaliste des principes d’un
Constant, d’un Humboldt, d’un Mill et d’un Tocqueville. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 127
« C’est de la vérité d’une idée dont nous devons nous réjouir, non de son triomphe.
Car aucun triomphe ne dure. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 126
« Dans l’Antiquité, n’existait pas ce que nous appelons aujourd’hui philosophie ; et ce qui
autrefois s’appelait philosophie n’existe plus aujourd’hui. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 122
« Être réactionnaire c’est avoir compris que nous ne devons pas renoncer à une vérité
simplement parce qu’elle n’a aucune chance de triompher. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 122
« Une bureaucratie finit toujours par être plus coûteuse pour le peuple qu’une classe
élevée. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 118
« Le plus important en philosophie, c’est la ligne qui délimite le territoire d’un mystère. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 118
« La seule chose qui garantisse un bon gouvernement c’est une structure politique et
sociale qui ne permette de gouverner que peu. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 103
« Aujourd’hui, le peuple ne se sent libre que lorsqu’il se sent autorisé à ne rien respecter. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 97
« Le moderne a perdu son âme et n’est plus désormais que la somme de ses
comportements. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 97
« Tandis que les contemporains ne lisent avec enthousiasme que l’optimiste, la postérité
relit avec admiration le pessimiste. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 94
« Le geste, plus que le verbe, est le véritable transmetteur des traditions. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 93
« La discussion entre le réactionnaire et le démocrate s’avère stérile car ils n’ont rien de
commun ; par contre, la discussion avec le libéral peut se révéler féconde car ils partagent
divers postulats. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 84
« La médiocrité d’un livre requiert parfois des années avant de devenir manifeste. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 79
« La dignité de l’homme ne se situe pas dans sa liberté, elle se situe dans le genre de
restrictions à sa volonté qu’il accepte librement. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 68
« En découvrant la source d’une œuvre, le critique littéraire croit découvrir son explication
alors qu’il ne fait que se heurter contre son prétexte. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 65
« La société moderne ne surpasse guère les sociétés passées que pour deux choses : la
vulgarité et la technique. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 65
« Pas plus la déclaration des droits de l’homme que la proclamation des constitutions ou
encore l’invocation d’un droit naturel ne protègent contre l’arbitraire de l’État.
Seul le droit coutumier constitue une barrière contre le despotisme. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 53
« Le véhément désir moderne d’originalité fait croire à l’artiste médiocre que dans le simple
fait de différer réside le secret de l’originalité. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 52
« Ceux qui défendent les révolutions citent des discours ; ceux qui les dénoncent citent des
faits. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 51
« La falsification du passé est la façon par laquelle la gauche a prétendu élaborer le futur. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 51
« Lorsqu’il est insuffisamment familier des lettres grecques et latines, le critique assigne
des rangs avec la bienveillance de l’ignorance. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 46
« Demander à l’État ce que seule la société doit faire constitue l’erreur de la gauche. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 39
« Celui qui réclame l’égalité des chances finit par exiger que soit pénalisé celui
qui est bien doté. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 38
« Prolétaire conscient signifie, dans le vocabulaire marxiste, peuple converti aux idéaux
bourgeois. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 38
« La machine moderne est chaque jour plus complexe et l’homme moderne chaque jour
plus élémentaire. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 35
« L’histoire exhibe trop de cadavres inutiles pour qu’une quelconque finalité puisse lui être
attribuée. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 34
« Heine a trahi le secret de la démocratie : wir kämpfen nicht für die Menschenrechte des
Volkes, sondern für die Gottesrechte des Menschen. [Nous ne nous battons par pour que
le peuple accède aux droits de l’homme, mais pour que l’homme accède aux droits
divins.] »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 33
« Certaines proses ne semblent pas être les étapes de l’histoire d’une langue mais les
cristallisations d’une langue hors du temps. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 28
« Lorsque le tyran n’est autre que la loi anonyme, le moderne se croit libre. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 28
« Lorsqu’il s’avère nécessaire de limiter la liberté pour sauver d’autres valeurs, il ne faut pas
agir avec hypocrisie au nom d’une “liberté véritable”.
Il est possible de prendre des mesures antilibérales avec la conscience tranquille, car la
liberté n’est pas la valeur suprême. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 26
« Malgré sa rhétorique rebelle, l’artiste contemporain s’est réconcilié avec son siècle.
L’art moderne se vend parce que l’artiste s’est vendu. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 25
« Les deux pôles sont l’individu et Dieu : les deux antagonistes Dieu et l’Homme. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 24
« Deux critiques littéraires disant la même chose : l’un peut nous paraître illisible et stupide,
l’autre agréable et subtil.
L’art de la critique est indissociable de la personnalité du critique. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 24
“The most notorious thing about every modern undertaking is the discrepancy
between the immensity and complexity of the technical apparatus and the
insignificance of the final product.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« Ce qui est notoire dans toute entreprise moderne c’est le décalage entre
l’immensité, la complexité de l’appareil technique et l’insignifiance du
produit final. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd.
L’Arche, 2009 (ISBN 9782851816979), p. 24
« De celui dont nous disons qu’il est un “homme de son temps”, nous ne faisons que
remarquer qu’il coïncide avec la majorité des imbéciles du moment. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 23
« La presse de gauche fabrique pour la gauche les grands hommes que ni la nature ni
l’histoire ne lui fabriquent. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 22
« L’ennemi d’une civilisation n’est pas tant son adversaire externe que son étiolement
interne. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 11
« C’est dans la réitération des lieux communs anciens que réside la tâche proprement
civilisatrice. »
— Nicolás Gómez Dávila, Carnets d’un vaincu, trad. Alexandra Templier, éd. L’Arche,
2009 (ISBN 9782851816979), p. 11
« N’espérons aucun salut économique tant que les critères des décisions
économiques seront économiques. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 154
« Les eaux de l’Occident sont corrompues, mais leur source est restée pure. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 154
« Les révolutions se font pour changer la propriété des biens et le nom des
rues.
Le révolutionnaire qui ambitionne de changer la “condition de l’homme” finit
fusillé comme contre-révolutionnaire. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 153
« La solitude qui nous glace, ce n’est pas quand nos voisins nous abandonnent, c’est quand
Dieu nous déserte. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 151
« Aussi longtemps qu’on ne le prend pas au sérieux, celui qui dit la vérité peut
survivre dans une démocratie.
Ensuite, la cigüe. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 145
« Dans le monde moderne, ce ne sont pas des idées antagoniques qui s’affrontent, mais
simplement des candidats à la possession des mêmes biens. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 139
« L’asphalte des villes ne produit que des démocrates, des bureaucrates et des putains. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 138
« Jamais l’humanité ne s’est plus laidement habillée qu’en ces temps de liberté
vestimentaire.
Les seuls vêtements décents pour l’homme sont les costumes traditionnels ou les
uniformes. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 136
« Ce que le moderne déteste dans l’Église catholique, c’est son triple héritage :
chrétien, romain et hellénique. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 133
« La gauche ne condamne pas la violence tant qu’elle ne l’entend pas frapper à sa porte. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 124
« Les communications plus faciles ne vivifient pas les régions écartées, elles leur sucent la
moelle. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 117
« À partir du moment où plus rien ne mérite le respect dans notre société, nous devons
nous forger dans la solitude de nouvelles loyautés silencieuses. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 111
« Wir wollen hier auf Erden schon das Himmelreich errichten. » « Nous voulons dès
aujourd’hui fonder sur la terre le royaume céleste. »
« Mais lequel, Heine ?
Le paradis socialiste dont on rêve dans la société de consommation, ou la société de
consommation dont on rêve dans le paradis socialiste ? »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 110
« C’est la disparition du paysannat et des humanités classiques qui a rompu la continuité
avec le passé. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 110
« Les imbéciles ne renoncent jamais à une erreur tant qu’elle ne passe pas de mode. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 97
« Au fond il n’y a que deux religions : celle de Dieu et celle de l’Homme, et une
infinité de théologies. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 91
« Quand elle se met à croire en une vérité, la multitude cesse d’être multitude. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 85
« Le nazisme n’a pas été coupable seulement des atrocités qu’il a commises.
En se prétendant proche de certains nobles thèmes de la méditation germanique, il a en
même temps assassiné l’espérance d’une nouvelle floraison de l’Occident. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 85
« Pauvreté des âmes qui ne se sentent pas avant tout héritières du passé. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 82
« L’acte libre est insurrection ou obéissance. L’homme fonde là-dessus son orgueil
déiforme, ou son humilité de créature. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 82
« Rien de plus dangereux que de heurter les préjugés de qui affirme en avoir aucun. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 81
« Les philosophes actuels sont cernés par plus de tabous que le sorcier
primitif. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 77
« Le clergé régulier est composé d’une aristocratie et d’un peuple : famille bénédictine,
ordres mendiants.
Les Jésuites sont la bourgeoisie de l’Église. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 72
« Ce n’est pas livré au plein vent de l’univers que l’homme meurt de froid, c’est dans le
palais de concepts que bâtit son intellect. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 67
« Tolérer ne doit pas consister à oublier que ce qu’on tolère ne mérite que de la
tolérance. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 56
« Les nations actuelles ne sont pas des peuples, mais des sécessions victorieuses de la
plèbe. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 37
« Dans les sciences humaines on prend la dernière mode pour l’état ultime de la science. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 30
« En effet, même si elle n’est ni nécessité, ni caprice, l’histoire, pour le réactionnaire, n’est
pourtant pas une dialectique de la volonté immanente, mais une aventure temporelle entre
l’homme et ce qui le transcende. Ses œuvres sont des vestiges, sur le sable labouré par la
lutte, du corps de l’homme et du corps de l’ange. L’histoire selon le réactionnaire est
un haillon, déchiré par la liberté de l’homme, et qui flotte au vent du destin. »
— Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2005 (ISBN 9782268053004), p. 21
« Celui qui se respecte ne peut vivre aujourd’hui que dans les interstices de la
société. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 352
« L’humanité est tombée dans l’histoire moderne comme un animal dans une
trappe. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 352
« Les individus, dans la société moderne, sont chaque jour plus semblables les
uns aux autres et chaque jour plus étrangers les uns aux autres.
Des monades identiques qui s’affrontent dans un individualisme féroce. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 349
« Qu’on pût être de sa région sans être provincial fut un des miracles du Moyen Âge. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 349
« L’État moderne réalisera son essence lorsque la police, comme Dieu, sera témoin de tous
les actes des hommes. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 342
« Le monde moderne est arrivé à institutionnaliser avec une telle astuce le “changement”,
la “révolution”, l’“anticonformisme”, que toute entreprise de libération est une routine
inscrite dans le règlement de la prison. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 341-342
« Les idéologies de gauche sont la stratégie par laquelle la petite bourgeoisie s’est
emparée du monde. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 340
« Le raciste s’exaspère, parce qu’il soupçonne en secret que les races sont égales ; l’anti-
raciste aussi, parce qu’en secret il soupçonne qu’elles ne le sont pas. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 325
« Toute droite d’aujourd’hui n’est autre chose qu’une gauche d’hier désireuse
de digérer en paix. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 322
« L’homme se croit perdu parmi les faits, alors qu’il n’est qu’empêtré dans ses propres
définitions. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 289
« On appelle communiste celui qui lutte pour que l’État lui assure une existence
bourgeoise. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 289
« Les historiens de l’avenir auront du mal à faire la différence entre les rêves et les
cauchemars de ce siècle. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 267
« Les idéologies ont été inventées pour que celui qui ne pense pas puisse donner son
opinion. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 250
« Les dieux sont des paysans qui n’accompagnent l’homme que jusqu’aux
portes des grandes villes. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 249
« Aujourd’hui Jésus-Christ n’arriverait pas à se faire écouter comme fils de Dieu, mais
comme fils de charpentier. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 230
« Nous devons accueillir avec courtoisie dans nos âmes toute la beauté du monde.
Sans abandonner notre cœur éternel à cet hôte de passage. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 222
« On aimerait que ressuscitent les “philosophes” du XVIIIe siècle, avec leur génie, leur
ironie, leur audace, pour qu’ils sapent, démolissent, détruisent, les “préjugés” de ce siècle.
Ces préjugés qu’ils nous ont légués. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 216
« Les gens de gauche ne sont pas les représentants des pauvres, mais les délégués des
idées pauvres. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 190
« “Dieu est mort”, s’est exclamé ce Vendredi saint que fut le XIXème siècle.
Aujourd’hui nous vivons dans le silence atroce du samedi. Dans le silence de la tombe
habitée.
En quel siècle se lèvera, sur la tombe désertée, l’aurore du Dimanche pascal ? »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 189
« De nos jours, les cohortes disciplinées des “rebelles” défilent au milieu des
ovations frénétiques de la foule et sous la protection des autorités civiles et
ecclésiastiques, tandis que les “conformistes”, persécutés, s’enfuient pour aller
conspirer en des lieux solitaires. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 185
« Être chrétien à la mode actuelle consiste moins à nous repentir de nos péchés qu’à nous
repentir du christianisme. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 180
« Le chrétien moderne ne demande pas Dieu de lui pardonner, mais d’admettre que le
péché n’existe pas. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 178
« Il n’y a pas d’absurdité en laquelle l’homme moderne ne soit capable de croire, pourvu
qu’il évite ainsi de croire en Jésus-Christ. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 160
« La décadence d’une littérature commence quand ses lecteurs ne savent pas écrire. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 143
« Les activités supérieures de l’esprit paraissent toujours parasitaires aux yeux du sot.
Le degré de civilisation d’une société se mesure au nombre de parasites qu’elle tolère. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 137
« La civilisation n’est pas suite interminable d’inventions, mais devoir d’assurer la pérennité
de certaines choses. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 137
« Pour que la liberté dure, elle doit être le but de l’organisation sociale et non son
fondement. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 120
« La charité de l’homme moderne ne consiste pas à aimer son prochain comme soi-même,
mais à s’aimer soi-même en son prochain. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 117-118
“Modern man does not love, but seeks refuge in love; does not hope, but seeks
refuge in hope; does not believe but seeks refuge in dogma.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« L’homme moderne n’aime pas, il se réfugie dans l’amour ; il n’espère pas, il
se réfugie dans l’espérance ; il ne croit pas, il se réfugie dans un dogme. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard,
éd. Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675),
p. 114
« Le christianisme ne nie pas la splendeur du monde, mais il invite à rechercher son origine,
à s’élever jusqu’à ses neiges immaculées. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 102
« Les sociétés agonisantes luttent contre l’histoire en émettant des lois, comme les
naufragés contre les eaux en poussant des cris. Brefs remous. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 99
« La sagesse, en ce siècle, consiste avant tout à savoir supporter la vulgarité sans se mettre
en rage. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 99
« Dieu une fois mort, les pauvres titans en sont réduits à entreprendre
l’urbanisation de la terre. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 97
« Les marxistes donnent une définition économique de la bourgeoisie pour occulter leur
appartenance à celle-ci. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 27
« Quand la patrie n’est pas le territoire des temples et des tombes, mais une simple somme
d’intérêts, le patriotisme est déshonorant. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 222
« Éduquer les jeunes gens ne consiste pas à les familiariser avec leur époque,
mais à faire en sorte qu’ils l’ignorent le plus longtemps possible. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 288
“Museums are the invention of a mankind that has no place for works of art,
either in its home, or in its life.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« Les musées sont l’invention d’une humanité qui n’a pas de place pour
les œuvres d’art, ni dans ses maisons, ni dans sa vie. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard,
éd. Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675),
p. 272
“Literature does not die because nobody writes, but when everybody writes.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« La littérature ne périt pas parce que personne n’écrit, mais quand tout le
monde écrit. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 257
« Les guerres intellectuelles ne sont pas gagnées par les armées régulières mais par des
francs-tireurs. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 318
“In an age in which the media broadcast countless pieces of foolishness, the educated man
is defined not by what he knows, but by what he doesn’t know.”
— Nicolás Gómez Dávila
« En un siècle où les médias publicitaires divulguent un nombre infini de
sottises, l’homme cultivé ne se définit pas par ce qu’il sait mais par ce qu’il
ignore. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard,
éd. Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675),
p. 144
« Les grands écrivains, depuis le romantisme, sont des prisonniers qui secouent
frénétiquement les barreaux de la geôle qu’est devenu le monde sans Dieu. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 131
« L’âme cultivée, c’est celle où le vacarme des vivants n’étouffe pas la musique
des morts. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 243
« L’individu obéissant à une vocation authentique est réactionnaire. Quelles que soient les
opinions qu’il nourrit.
Est démocrate celui qui attend du monde la définition de ses objectifs. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 233
« Les parlements démocratiques ne sont pas des enceintes où l’on débat, mais où
l’absolutisme populaire enregistre ses edits. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 26
« Dans les démocraties, on appelle classe dirigeante la classe que le vote populaire ne
laisse rien diriger. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 122
« La liberté, pour le démocrate, ne consiste pas à pouvoir dire tout ce qu’il pense, mais à
n’avoir pas à penser tout ce qu’il dit. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 173
« Nous ne blâmons pas le capitalisme parce qu’il fomente l’inégalité, mais pour
favoriser l’ascension de types humains inférieurs. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 78
« Les riches ne sont inoffensifs que là où ils sont exposés au dédain d’une aristocratie. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 265
« Le capitalisme est abominable parce qu’il assure la répugnante prospérité
promise en vain par le socialiste qui le hait. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 220
« Plus les hommes se sentent égaux, plus ils tolèrent facilement qu’on les traite comme des
pièces interchangeables, remplaçables et superflues.
L’égalité est la condition psychologique préalable aux massacres scientifiques et
impassibles. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 181
« Plaignons l’égalitariste.
Quelle tristesse d’ignorer qu’il y a des degrés et des degrés bien au-dessus de notre
médiocrité. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 240
“If men were born equal, they would invent inequality to kill boredom.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« Si les hommes naissaient égaux, ils inventeraient l’inégalité pour tuer
l’ennui. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard,
éd. Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675),
p. 285
« Quand la liberté cesse d’être soumission aux plus hautes valeurs de l’époque
pour se transformer en droit d’exprimer notre insignifiante individualité,
mieux vaut encore la discipline de la caserne socialiste. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 232
« Cette libération de l’humanité qu’a tant chantée le XIXe siècle s’est
finalement résumée au tourisme international. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 239
« La Révolution française paraît admirable à celui qui la connaît mal, terrible à celui qui la
connaît mieux, grotesque à celui qui la connaît bien. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 162
« Toute révolution victorieuse échoue finalement, parce que les vertus du pauvre ne sont
pas propres au pauvre, mais à la pauvreté. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p. 121
« Cela fait deux siècles que le peuple a sur le dos non seulement ceux qui l’exploitent, mais
aussi ses libérateurs. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« Prendre le pauvre sous son aile a toujours été, en politique, le moyen le plus sûr de
s’enrichir. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« Quand les convoitises individuelles se rassemblent, nous avons pris l’habitude de les
appeler nobles aspirations populaires. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« L’homme de gauche se préoccupe autant des problèmes du XIXème siècle qu’il reste
indifférent à ceux du XXème. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« Les civilisations sont l’écho de ces rares instants où l’homme n’assume que ce qu’il se
sent prêt à assumer éternellement. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« Les projets de l’homme manquent d’intérêt. Seule l’histoire est intéressante. C’est-à-dire :
ce que Dieu fait des projets des hommes. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« L’amour païen et l’amour romantique sont aussi innocents l’un que l’autre ; seule est
dépravée la sexualité satisfaite et hygiénique entre égaux. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
“Faith is what allows us to wander astray into any idea without losing the way out.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« La foi, c’est ce qui nous permet de nous égarer dans n’importe quelle idée,
sans perdre de vue le chemin du retour. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard,
éd. Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
“Reason, Progress, and Justice are the three theological virtues of the fool.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« Raison, Progrès, Justice, voilà les trois vertus théologales des imbéciles. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard,
éd. Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« Les opinions révolutionnaires ouvrent la seule carrière, dans la société actuelle, qui assure
une position sociale respectable, lucrative, et paisible. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
“I am like the people: luxury does not upset me except in unworthy hands.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« Je suis comme le peuple : le luxe ne m’indigne que dans des mains
indignes. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard,
éd. Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« Être chrétien à la mode actuelle consiste moins à nous repentir de nos péchés qu’à nous
repentitr du christianisme. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« Dans des sociétés où tous se croient égaux, l’inévitable supériorité de quelques-uns fait
que les autres se sentent des ratés. Inversement, dans des sociétés où l’inégalité est la
norme, chacun s’installe dans sa différence, sans ressentir le besoin, ni concevoir la
possibililté, de se comparer aux autres. Seule une structure hiérarchique a des égards
envers les médiocres et les humbles. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
« Les aristocraties sont les enfantements normaux de l’histoire, les démocraties en sont les
avortements. »
— Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, trad. Michel Bibard, éd. Éditions
du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 9782268044675), p.
“Every rebellion against the order of man is noble, so long as it does not disguise
rebelliousness against the order of the world.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« Toute rébellion contre l’ordre de l’homme est noble, tant qu’elle ne masque
pas une rébellion contre l’ordre du monde. »
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores,
2006 (ISBN 9789588156705)
“There are two symmetrical forms of barbarism: peoples who have nothing but customs
and peoples who respect nothing but laws.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« Il y a deux formes symétriques de barbarie : celle des peuples qui n’ont que
des coutumes et celle des peuples qui ne respectent que des lois. »
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores,
2006 (ISBN 9789588156705)
“A man does not communicate with another man except when the one writes in
his solitude and the other reads him in his own.
Conversations are either a diversion, a swindle, or a fencing match.”
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores, 2006 (ISBN
9789588156705)
« L’homme ne communique avec son semblable que quand l’un écrit dans
sa solitude, et que l’autre le lit dans la sienne. Les conversations sont
divertissement, escroquerie, ou escrime. »
— Nicolás Gómez Dávila, Escolios a un texto implícito, éd. Villegas Editores,
2006 (ISBN 9789588156705)
ANTONIO GRAMSCI
« La crise consiste justement dans le fait que l’ancien meurt et que le nouveau ne peut pas
naître : pendant cet interrègne on observe les phénomènes morbides les plus variés. »
— Antonio Gramsci, Cahiers de prison (1929-1935), trad. Monique Aymard et Françoise
Bouillot, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1996 (ISBN
9782070731978), Cahier 3, §34, p. 283
« Peu de gens se rendent compte que dans une population mélangée, les
éléments d’une fécondité plus grande se substituent rapidement à ceux d’une
fécondité moindre. »
— Madison Grant, Le Déclin de la grande race (1916), éd. L’Homme Libre, 2002 (ISBN
9792912104246), p. 217
« Si nous acceptions les vues des internationalistes et supprimions toutes les barrières
restrictives, c’est notre classe laborieuse, tant native que d’origine étrangère, qui en
souffrirait la première et le plus fortement. Les classes plus riches pourraient
momentanément profiter de l’abondance du travail à bon marché pour les manufactures, la
construction de tout genre, le service domestique ; mais ce serait temporaire et à la longue
toutes les classes supporteraient le fardeau de conditions de vie diminuées. »
— Madison Grant, Le Déclin de la grande race (1916), éd. L’Homme Libre, 2002 (ISBN
9792912104246), p. 213
« Après l’élimination des Goths, la Chrétienté devint donc franque. En l’an 800,
Charlemagne fut couronné à Rome et rétablit l’empire d’Occident, qui engloba toute la
Chrétienté en dehors de l’empire byzantin. Sous une forme ou sous une autre, cet empire
dura jusqu’au commencement du dix-neuvième siècle et, pendant tout ce temps, il forma
la base du concept politique de l’Europe. Ce même concept est aujourd’hui à la racine de
l’idée Impériale. Kaiser, Tsar et Empereur prennent chacun leur nom et prétendent en
quelque manière tenir leur titre de César et de l’Empire. »
— Madison Grant, Le Déclin de la grande race (1916), éd. L’Homme Libre, 2002 (ISBN
9792912104246), p. 156-157
« C’est pourquoi le nomadisme, sous son aspect “maléfique” et dévié, exerce facilement
une action “dissolvante” sur tout ce avec quoi il entre en contact ; de son côté, le
sédentarisme, sous le même aspect, ne peut mener en définitive qu’aux formes les plus
grossières d’un matérialisme sans issue. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 160
« Ainsi, les sédentaires créent les arts plastiques (architecture, sculpture, peinture), c’est-à-
dire les arts des formes qui se déploient dans l’espace ; les nomades créent les arts
phonétiques (musique, poésie), c’est-à-dire les arts des formes qui se déroulent dans le
temps [...]. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 159
« L’activité des nomades s’exerce spécialement sur le règne animal, mobile comme eux ;
celle des sédentaires prend au contraire pour objets directs les deux règnes fixes, le végétal
et le minéral. D’autre part, par la force des choses, les sédentaires en arrivent à se
constituer des symboles visuels, images faites de diverses substances mais qui, au point de
vue de leur signification essentielle, se ramènent toujours plus ou moins directement au
schématisme géométrique, origine et base de toute formation spatiale. Les nomades, par
contre, à qui les images sont interdites comme tout ce qui tendrait à les attacher en un lieu
déterminé, se constituent des symboles sonores, seuls compatibles avec leur état de
continuelle migration. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 158
« Israël cessa d’être nomade, tout au moins pour plusieurs siècles, c’est-à-dire jusqu’au
temps de David et de Salomon et l’on sait que pour construire le Temple de Jérusalem il
fallut encore faire appel à des ouvriers étrangers. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 157
« C’est encore là un aspect particulier de la “solidification” : dans un tel monde, il n’y a plus
de place pour les peuples nomades qui jusqu’ici subsistaient encore dans des conditions
diverses, car ils en arrivent peu à peu à ne plus trouver devant eux aucun espace libre, et
d’ailleurs on s’efforce par tous les moyens de les amener à la vie sédentaire [...]. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 155
« [...] il n’est que trop facile de constater partout, à notre époque, des faits symptomatiques
tels que, par exemple, la manie des recensements (qui du reste se relie directement à
l’importance attribuée aux statistiques), et d’une façon générale, la multiplication
incessante des interventions administratives dans toutes les circonstances de la vie,
interventions qui doivent naturellement avoir pour effet d’assurer une uniformité aussi
complète que possible entre les individus, d’autant plus que c’est en quelque sorte un
“principe” de toute administration moderne de traiter ces individus comme de simples
unités numériques toutes semblables entre elles, c’est-à-dire d’agir comme si, par
hypothèse, l’uniformité “idéale” était déjà réalisée, et de contraindre ainsi tous les hommes
à s’ajuster, si l’on peut dire, à une même mesure “moyenne”. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 154-155
« [...] le terme réel de la tendance qui entraîne les hommes et les choses vers la
quantité pure ne peut être que la dissolution finale du monde actuel. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 122
« [...] non seulement on “estime” un objet d’après son prix, mais aussi un homme d’après sa
richesse [...]. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 121
« [...] l’exemple de la monnaie montre bien que cette “profanisation”, s’il est permis
d’employer un tel néologisme, s’opère principalement par la réduction des choses à leur
seul aspect quantitatif [...]. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 119
« [...] l’homme le plus ignorant de toute philosophie, est au contraire le plus empressé à se
proclamer tel, en même temps qu’il se pare fièrement du titre plutôt ironique de “libre-
penseur”, alors qu’il n’est en réalité que l’esclave de tous les préjugés courants de son
époque. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 109
« L’Occidental moderne ne se contente d’ailleurs pas d’imposer chez lui un tel genre
d’éducation ; il veut aussi l’imposer aux autres, avec tout l’ensemble de ses habitudes
mentales et corporelles, afin d’uniformiser le monde entier dont, en même temps, il
uniformise aussi jusqu’à l’aspect extérieur par la diffusion des produits de son industrie. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 62
« [...] dans la mesure où un homme s’“occidentalise”, quels que soient sa race et son pays, il
cesse par là même d’être un Oriental spirituellement et intellectuellement [...]. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 17
« [...] si nos contemporains, dans leur ensemble, pouvaient voir ce qui les dirige et vers
quoi ils tendent réellement, le monde moderne cesserait aussitôt d’exister comme tel car le
“redressement” auquel nous avons souvent fait allusion ne pourrait manquer de s’opérer
par là même [...]. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 14
« C’est ainsi que, si le monde moderne, considéré en lui-même, constitue une anomalie et
même une sorte de monstruosité, il n’en est pas moins vrai que, situé dans l’ensemble du
cycle historique dont il fait partie, il correspond exactement aux conditions d’une certaine
phase de ce cycle, celle que la tradition hindoue désigne comme la période extrême
du Kali-Yuga [...]. »
— René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps (1945), éd. Gallimard,
coll. « La Nouvelle Revue française », 2015 (ISBN 9782070149414), p. 11-12
« Ceux qui seraient tentés de céder au découragement doivent penser que rien
de ce qui est accompli dans cet ordre ne peut jamais être perdu, que le désordre,
l’erreur et l’obscurité ne peuvent l’emporter qu’en apparence et d’une façon toute
momentanée, que tous les déséquilibres partiels et transitoires doivent nécessairement
concourir au grand équilibre total, et que rien ne saurait prévaloir finalement contre la
puissance de la vérité ; leur devise doit être celle qu’avaient adoptée autrefois certaines
organisations initiatiques de l’Occident : Vincit omnia Veritas. »
— René Guénon, La Crise du monde moderne (1927), éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle
Revue française », 1986 (ISBN 9782070230051), p. 134
« Le désordre moderne [...] a pris naissance en Occident, et, jusqu’à ces dernières
années, il y était toujours demeuré strictement localisé ; mais maintenant il se produit un
fait dont la gravité ne doit pas être dissimulée : c’est que ce désordre s’étend partout et
semble gagner jusqu’à l’Orient. »
— René Guénon, La Crise du monde moderne (1927), éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle
Revue française », 1986 (ISBN 9782070230051), p. 113
« Est-il vrai que les hommes soient plus heureux aujourd’hui qu’autrefois,
parce qu’ils disposent de moyens de communication plus rapides ou d’autres
choses de ce genre, parce qu’ils ont une vie plus agitée et plus compliquée ? »
— René Guénon, La Crise du monde moderne (1927), éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle
Revue française », 1986 (ISBN 9782070230051), p. 108
« Qui dit individualisme dit nécessairement refus d’admettre une autorité supérieure à
l’individu, aussi bien qu’une faculté de connaissance supérieure à la raison individuelle ; les
deux choses sont inséparables l’une de l’autre. Par conséquent, l’esprit moderne devait
rejeter toute autorité spirituelle au vrai sens du mot, prenant sa source dans l’ordre supra-
humain, et toute organisation traditionnelle, qui se base essentiellement sur une autorité,
quelle que soit la forme qu’elle revêt, forme qui diffère naturellement suivant les
civilisations. »
— René Guénon, La Crise du monde moderne (1927), éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle
Revue française », 1986 (ISBN 9782070230051), p. 74
« [...] il semble même que, pour les philosophes, il s’agisse de poser des “problèmes”,
fussent-ils artificiels et illusoires, bien plus que de les résoudre, ce qui est un des aspects
du besoin désordonné de la recherche pour elle-même, c’est-à-dire de l’agitation la plus
vaine dans l’ordre mental, aussi bien que dans l’ordre corporel. Il s’agit aussi, pour ces
mêmes philosophes, d’attacher leur nom à un “système”, c’est-à-dire à un ensemble de
théories strictement borné et délimité, et qui soit bien à eux, qui ne soit rien d’autre que
leur œuvre propre ; de là le désir d’être original à tout prix, même si la vérité doit être
sacrifiée à cette originalité : mieux vaut, pour la renommée d’un philosophe, inventer une
erreur nouvelle que de redire une vérité qui a déjà été exprimée par d’autres. Cette forme
de l’individualisme, à laquelle on doit tant de "systèmes" contradictoires entre eux, quand
ils ne le sont pas en eux-mêmes, se rencontre d’ailleurs tout aussi bien chez les savants et
les artistes modernes ; mais c’est peut-être chez les philosophes qu’on peut voir le plus
nettement l’anarchie intellectuelle qui en est l’inévitable conséquence. »
— René Guénon, La Crise du monde moderne (1927), éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle
Revue française », 1986 (ISBN 9782070230051), p. 69
« [...] prendre pour un “progrès intellectuel” ce qui n’est qu’un développement purement
matériel, borné à l’ordre des sciences expérimentales [...], et surtout de leurs applications
industrielles, c’est bien là la plus ridicule de toutes les illusions. [...] Quant au soi-disant
“progrès moral”, c’est là affaire de sentiment, donc d’appréciation individuelle pure et
simple ; [...] rien n’est moins tolérant en pratique que les gens qui éprouvent le besoin de
prêcher la tolérance et la fraternité. »
— René Guénon, L’Erreur Spirite (1923), éd. Éditions Traditionnelles, 1952, p. 281-282
GEOREGES GURDJIEFF
« “S’éveiller”, “mourir”, “naître”. Ce sont trois stades successifs. Si vous étudiez les Évangiles
avec attention, vous verrez qu’il y est souvent question de la possibilité de “naître”, mais les
textes ne parlent pas moins de la nécessité de “mourir”, et ils parlent aussi très souvent de
la nécessité de “s’éveiller” : “Veillez, car vous ne savez ni le jour ni l’heure...” Mais ces trois
possibilités : s’éveiller (ou ne pas dormir), mourir, et naître, ne sont pas mises en rapport
l’une avec l’autre. Là est cependant toute la question. Si un homme meurt sans s’être
éveillé, il ne peut pas naître. Si un homme naît sans être mort, il peut devenir une “chose
immortelle”. Ainsi, le fait de ne pas être “mort” empêche un homme de “naître” ; et le fait
de ne pas s’être éveillé l’empêche de “mourir” ; et serait-il né avant d’être “mort”, ce fait
l’empêcherait d’“être”. »
— Georges Gurdjieff cité par Piotr Ouspenski, Fragments d’un enseignement
inconnu (1947), éd. Stock, 2003 (ISBN 9782234056251), p. 308
« Fusion, unité intérieure, sont obtenues par “friction”, par la lutte du “oui” et du “non” dans
l’homme. Si un homme vit sans conflit intérieur, si tout arrive en lui sans qu’il s’y oppose,
s’il va toujours avec le courant, comme le vent le pousse, alors il restera tel qu’il est. Mais si
une lutte intérieure s’amorce et surtout si, dans cette lutte, il suit une ligne déterminée,
alors graduellement certains traits permanents commencent à se former en lui ; il
commence à cristalliser. Pourtant, si la cristallisation est possible sur une base juste, elle ne
l’est pas moins sur une base fausse. Par exemple, la peur du péché, ou une foi fanatique en
une idée quelconque, peuvent provoquer une lutte terriblement intense du “oui” et du
“non”, et un homme peut cristalliser sur de telles bases. Mais la cristallisation se fera mal,
elle sera incomplète. Un tel homme perdra ainsi toute possibilité de développement
ultérieur. Pour que la possibilité d’un développement ultérieur lui soit rendue, il devra être
préalablement “refondu”, et cela ne peut s’accomplir sans des souffrances terribles. »
— Georges Gurdjieff cité par Piotr Ouspenski, Fragments d’un enseignement
inconnu (1947), éd. Stock, 2003 (ISBN 9782234056251), p. 57
« L’homme est une organisation complexe. Il est formé de quatre parties qui peuvent être
reliées, non reliées ou mal reliées. La voiture est reliée au cheval par les brancards, le cheval
au cocher par les rênes, et le cocher à son maître par la voix de son maître. Mais le cocher
doit entendre et comprendre la voix du maître, il doit savoir comment on conduit ; et le
cheval doit être dressé à obéir aux rênes.
Quant à la relation du cheval avec la voiture, il doit être correctement attelé. Ainsi, entre les
quatre parties de cette complexe organisation, existent trois relations, trois liaisons. Si une
seule d’entre elles présente quelque défaut, l’ensemble ne peut pas se comporter comme
un tout. Les liaisons ne sont donc pas moins importantes que les “corps”. Travaillant sur lui-
même, l’homme travaille simultanément sur les “corps” et sur les “liaisons”. Mais il s’agit là
de deux sortes de travail.
Le travail sur soi doit commencer par le cocher. Le cocher est l’intellect. Afin de pouvoir
entendre la voix du maître, le cocher, avant tout, ne doit pas être endormi — il doit se
réveiller. Ensuite, il peut arriver que le maître parle une langue que le cocher ne comprenne
pas. Le cocher doit apprendre cette langue. Quand il la saura, il comprendra son maître.
Mais cela ne suffit pas, il doit aussi apprendre à conduire le cheval, à l’atteler, à le nourrir, à
le soigner, et à bien entretenir la voiture — parce qu’il ne servirait de rien qu’il comprenne
son maître, s’il n’était pas en état de faire quoi que ce soit. Le maître donne l’ordre du
départ. Mais le cocher est incapable de démarrer parce que le cheval n’a pas été nourri, il
ne l’a pas attelé, et il ne sait pas où sont les rênes. Le cheval, ce sont les émotions. La
voiture, c’est le corps. L’intellect doit apprendre à commander les émotions. Les émotions
tirent toujours le corps après elles. C’est dans cet ordre que le travail sur soi doit être mené.
Mais notez-le bien : le travail sur les “corps”, c’est-à-dire sur le cocher, le cheval et la
voiture, est une chose. Et le travail sur les “liaisons”, c’est-à-dire sur la “compréhension du
cocher” qui l’unit à son maître, sur les “rênes” qui le relient au cheval, sur les “brancards” et
les “harnais” qui rattachent la voiture au cheval — c’est une tout autre chose. »
— Georges Gurdjieff cité par Piotr Ouspenski, Fragments d’un enseignement
inconnu (1947), éd. Stock, 2003 (ISBN 9782234056251), p. 140
« En même temps, le sexe joue dans le maintien de la mécanicité de la vie un rôle énorme.
Tout ce que font les gens est en liaison avec le sexe : la politique, la religion, l’art, le théâtre,
la musique, tout est "sexe". Croyez-vous que les gens vont à l’église pour prier, ou au
théâtre pour voir quelque pièce nouvelle ? Non, ce ne sont là que des prétextes. Le
principal, au théâtre aussi bien qu’à l’église, c’est que l’on y peut trouver des femmes ou
des hommes. Voilà le centre de gravité de toutes les réunions. Qu’est-ce qui amène les
gens dans les cafés, les restaurants, les fêtes de toutes sortes ? Une seule chose : le Sexe.
Voilà la principale source d’énergie de toute la mécanicité. Tous les sommeils, toutes les
hypnoses en découlent. »
— Georges Gurdjieff cité par Piotr Ouspenski, Fragments d’un enseignement
inconnu (1947), éd. Stock, 2003 (ISBN 9782234056251), p. 359
FRIEDRICH HAYEK
Le socialisme, au départ, est « une réaction contre le libéralisme de la
révolution française [...]. On se souvient rarement aujourd’hui que le socialisme à ses
débuts était franchement autoritaire. »
— Friedrich Hayek, La Route de la servitude (1944), trad. Georges Blumberg, éd. Presses
universitaires de France, coll. « Quadrige », 1993 (ISBN 9782130585411), p. 17
« La tendance moderne vers le socialisme signifie une rupture brutale avec toute
l’évolution de la civilisation occidentale. [...] Nous abandonnons rapidement non seulement
les idées de Cobden, de Bright, de Smith, de Hume, de Locke, de Milton mais encore une
des caractéristiques les plus saillantes de la civilisation occidentale telle qu’elle s’est édifiée
sur les fondations posées par le christianisme, par la Grèce et par Rome. Ce qu’on
abandonne, ce n’est pas simplement le libéralisme du 19e et du 18e siècle, mais encore
l’individualisme fondamental que nous avons hérité d’Érasme et de Montaigne, de Cicéron
et de Tacite, de Périclès et de Thucydide. »
— Friedrich Hayek, La Route de la servitude (1944), trad. Georges Blumberg, éd. Presses
universitaires de France, coll. « Quadrige », 1993 (ISBN 9782130585411), p. 17
« Il est hors de doute que la promesse d’une plus grande liberté est devenue une des
armes les plus efficaces de la propagande socialiste et que les gens croient
authentiquement et sincèrement que le socialisme apporte la liberté. La tragédie est
d’autant plus atroce s’il est prouvé que la route de la liberté promise ne mène qu’à la
servitude. C’est incontestablement cette promesse de liberté qui a entraîné un nombre de
plus en plus grand de libéraux sur la voie socialiste, qui leur a masqué le conflit qui existe
entre les principes fondamentaux du socialisme et ceux du libéralisme et qui a souvent
permis aux socialistes d’usurper jusqu’au nom du vieux parti de la liberté. La plupart des
intellectuels embrassèrent le socialisme comme l’héritier présomptif de la tradition
libérale : aussi n’est-il pas surprenant qu’ils n’aient pu concevoir que le socialisme mène à
l’opposé de la liberté. »
— Friedrich Hayek, La Route de la servitude (1944), trad. Georges Blumberg, éd. Presses
universitaires de France, coll. « Quadrige », 1993 (ISBN 9782130585411), p. 26
« Comme il arrive souvent, la nature de notre civilisation a été plus clairement discernée
par ses ennemis que par la plupart de ses amis : “l’éternelle maladie occidentale, la révolte
de l’individu contre l’espèce” comme disait ce totalitaire du XIXe siècle, Auguste Comte, a
bien été la force qui a construit notre civilisation. »
— Friedrich Hayek, La Route de la servitude (1944), trad. Georges Blumberg, éd. Presses
universitaires de France, coll. « Quadrige », 1993 (ISBN 9782130585411), p. 19
« Il y a infiniment de bonnes choses que nous sommes tous d’accord pour trouver
désirables, mais dont nous ne pouvons espérer atteindre qu’un très petit nombre au cours
de notre vie, et très imparfaitement. C’est parce qu’il voit ses ambitions frustrées dans son
propre domaine que le spécialiste se révolte. Nous souffrons tous de voir inachevées des
choses que tout le monde juge désirables et possibles. Que ces choses ne peuvent être
faites toutes en même temps, et que chacune d’entre elles ne peut être accomplie qu’aux
dépens de certaines autres, c’est ce dont on ne peut se rendre compte qu’en prenant en
considération des facteurs qui échappent à toute spécialisation, qui ne peuvent être
appréciés que par un pénible effort intellectuel, d’autant plus pénible qu’il nous oblige à
envisager sur un plan plus large les objets auxquels s’adresse la plus grande part de nos
peines, et à les comparer à d’autres qui sont situés hors de la sphère de notre intérêt
immédiat. »
— Friedrich Hayek, La Route de la servitude (1944), trad. Georges Blumberg, éd. Presses
universitaires de France, coll. « Quadrige », 1993 (ISBN 9782130585411), p. 45
« C’est parce que la propriété des moyens de production est répartie entre un grand
nombre d’hommes agissant séparément, que personne n’a un pouvoir complet sur nous et
que les individus peuvent agir à leur guise. »
— Friedrich Hayek, La Route de la servitude (1944), trad. Georges Blumberg, éd. Presses
universitaires de France, coll. « Quadrige », 1993 (ISBN 9782130585411), p. 78-79
« Il se peut que ce soit de loin la tâche à la fois la plus difficile, et aussi l’une
des plus importantes, pour la raison humaine, que celle de saisir
intellectuellement ses propres limites. Il est essentiel pour la croissance de la raison
que nous devions, comme individus, nous incliner devant des forces et obéir à des
principes que nous ne pouvons espérer comprendre complètement, et qui conditionnent,
cependant, non seulement les progrès de la civilisation, mais sa survie. »
— Friedrich Hayek, La Route de la servitude (1944), trad. Georges Blumberg, éd. Presses
universitaires de France, coll. « Quadrige », 1993 (ISBN 9782130585411), p. 33
« C’est la soumission de l’homme aux forces impersonnelles du marché qui, dans le passé,
a rendu possible le développement d’une civilisation qui sans cela n’aurait pu se
développer ; c’est par cette soumission que nous contribuons à construire quelque chose
qui est plus grand que nous pouvons le comprendre. »
— Friedrich Hayek, La Route de la servitude (1944), trad. Georges Blumberg, éd. Presses
universitaires de France, coll. « Quadrige », 1993 (ISBN 9782130585411), p. 148
« Les Nazis ne s’opposaient pas aux éléments socialistes du marxisme, mais à ses éléments
libéraux : à l’internationalisme et à la démocratie. »
— Friedrich Hayek, La Route de la servitude (1944), trad. Georges Blumberg, éd. Presses
universitaires de France, coll. « Quadrige », 1993 (ISBN 9782130585411), p.
« Les forces qui influencent le recrutement dans les rangs des intellectuels opèrent toutes
dans la même direction et permettent d’expliquer pourquoi tant des gens parmi les plus
capables penchent vers le socialisme. Il y a bien sûr de nombreuses différences d’opinion
parmi les intellectuels, comme dans tout groupe. Mais il semble vrai qu’en général ce sont
les hommes les plus actifs, les plus intelligents et les plus originaux au sein des intellectuels
qui penchent le plus fréquemment vers le socialisme, alors que ses adversaires sont d’un
calibre inférieur. C’est particulièrement vrai au début de l’infiltration des idées socialistes.
Plus tard, bien qu’en dehors des cercles intellectuels ce soit parfois encore un acte de
courage de professer des convictions socialistes, la pression de l’opinion parmi les
intellectuels sera souvent tellement faveur du socialisme qu’il faudra à un homme plus de
force et d’indépendance pour y résister que pour rejoindre ce que ses collègues
considèrent comme des idées modernes. Par exemple, personne ne peut ignorer, s’il est
familier d’un grand nombre d’universités (et de ce point de vue la majorité des enseignants
de l’université doivent être classés comme intellectuels plutôt que comme experts), le fait
que les professeurs les plus brillants et ayant le plus de succès ont aujourd’hui plus de
chances d’être socialistes, alors que ceux qui ont des idées plus conservatrices sont
fréquemment des médiocrités. C’est évidemment en soi un facteur important qui conduit
la plus jeune génération vers le camp socialiste.
Le socialiste y verra, bien sûr, une preuve que les personnes les plus intelligentes sont
destinées de nos jours à devenir socialistes. Mais c’est loin d’être l’explication nécessaire ni
même la plus probable. La raison principale de cet état de fait est probablement que, pour
l’homme exceptionnellement doué qui accepte l’ordre actuel de la société, s’offrent une
multitude d’autres possibilités pour exercer son pouvoir et son influence. Alors que la
carrière intellectuelle est pour celui qui est mécontent le chemin le plus prometteur pour
exercer influence et pouvoir afin de contribuer à la réussite de ses idéaux. Plus que ça :
l’homme conservateur très doué choisira en général un travail intellectuel (et le sacrifice
matériel qui en résulte d’habitude) seulement si le travail en lui-même lui plaît. Il est donc
plus fréquemment amené à devenir un savant expert plutôt qu’un intellectuel au sens
spécifique du terme. Tandis que, que pour celui qui a des idées socialistes, le travail
intellectuel est le plus souvent un moyen plutôt qu’une fin, un chemin vers la grande
influence exercée par l’intellectuel professionnel. Probablement, la réalité n’est pas que les
plus intelligents soient socialistes, mais qu’une plus grandes proportion de socialistes
parmi les esprits intelligents se destinent aux occupations intellectuelles grâce auxquelles il
obtiennent une influence décisive sur l’opinion publique dans la société moderne. »
— « Les intellectuels et le socialisme », Friedrich Hayek (trad. Hervé de
Quengo), University of Chicago Law Review, 1949
« Un autre phénomène familier est lié à cette idée : il y a peu de raisons de croire que les
très grandes capacités intellectuelles pour créer un travail original soient plus rares chez les
Gentils que chez les Juifs. Pourtant il n’y a pas de doute que la quantité de gens d’origine
juive constitue presque partout un nombre disproportionnellement grand parmi les
intellectuels selon notre définition, c’est-à-dire dans les rangs des interprètes
professionnels des idées. C’est peut-être un don spécial de leur part et c’est certainement
leur meilleur occasion dans des pays où des obstacles leur sont opposés dans d’autres
domaines. Plus que pour toute autre raison, c’est probablement parce que les Juifs
constituent une si grande proportion chez les intellectuels qu’ils semblent être plus
réceptifs aux idées socialistes que les gens d’autres origines. »
— « Les intellectuels et le socialisme », Friedrich Hayek (trad. Hervé de
Quengo), University of Chicago Law Review, 1949
« La plupart des grands accomplissements humains ne sont pas le résultat d’une pensée
consciemment dirigée, encore moins le produit de l’effort délibérément coordonné de
beaucoup de personnes, mais le résultat d’un processus où l’individu joue un rôle qu’il ne
peut jamais pleinement comprendre. »
— Friedrich Hayek, Scientisme et sciences sociales (1952), trad. Raymond Barre, éd. Plon,
coll. « Agora », 1986, p. 135
« C’est en fait la compréhension de ses propres limites qui paraît être la tâche
la plus difficile et la plus importante de la raison humaine. »
— Friedrich Hayek, Scientisme et sciences sociales (1952), trad. Raymond Barre, éd.
Plon, coll. « Agora », 1986, p. 147
—
MARTIN HEIDEGGER
« Pour nous qui vivons aujourd’hui, le grand de ce qui est à penser est trop
grand. Nous pouvons peut-être nous mettre en peine d’un passage : bâtir des
chemins étroits, n’allant pas loin. »
— Martin Heidegger, Réponses et questions sur l’histoire et la politique [Entretien
avec Der Spiegel] (23 septembre 1966), trad. Jean Launay, éd. Mercure de France, 1988,
p. 74-75
« Et qui parmi nous pourrait affirmer qu’un jour en Russie et en Chine ne s’éveilleront pas
de très anciennes traditions d’une “pensée”, qui contribueront à rendre possible à l’homme
une libre relation avec le monde technique ? »
— Martin Heidegger, Réponses et questions sur l’histoire et la politique [Entretien
avec Der Spiegel] (23 septembre 1966), trad. Jean Launay, éd. Mercure de France, 1988,
p. 62
« [...] le mode de pensée de la tradition métaphysique qui s’est achevée avec Nietzsche
n’offre plus de possibilité pour la pensée d’apprendre ce que sont les traits fondamentaux
de l’âge technique qui ne fait que commencer. »
— Martin Heidegger, Réponses et questions sur l’histoire et la politique [Entretien
avec Der Spiegel] (23 septembre 1966), trad. Jean Launay, éd. Mercure de France, 1988,
p. 56
« [...] la philosophie ne pourra pas produire d’effet immédiat qui change l’état
présent du monde. Cela ne vaut pas seulement pour la philosophie, mais pour tout ce
qui n’est que préoccupations et aspirations du côté de l’homme. Seulement un dieu
peut encore nous sauver. Il nous reste pour seule possibilité de préparer dans la pensée
et la poésie une disponibilité pour l’apparition du dieu ou pour l’absence du dieu dans
notre déclin ; que nous déclinions à la face du dieu absent. »
— Martin Heidegger, Réponses et questions sur l’histoire et la politique [Entretien
avec Der Spiegel] (23 septembre 1966), trad. Jean Launay, éd. Mercure de France, 1988,
p. 48-49
« D’après notre expérience et notre histoire humaines, pour autant que je sois au courant,
je sais que toute chose essentielle et grande a pu seulement naître du fait que
l’homme avait une patrie et qu’il était enraciné dans une tradition. La littérature
d’aujourd’hui, par exemple, est largement destructive. »
— Martin Heidegger, Réponses et questions sur l’histoire et la politique [Entretien
avec Der Spiegel] (23 septembre 1966), trad. Jean Launay, éd. Mercure de France, 1988,
p. 47
« La technique dans son être est quelque chose que l’homme de lui-même ne
maîtrise pas. [...] la technique moderne n’est pas un “outil” et n’a plus rien à voir avec des
outils. »
— Martin Heidegger, Réponses et questions sur l’histoire et la politique [Entretien
avec Der Spiegel] (23 septembre 1966), trad. Jean Launay, éd. Mercure de France, 1988,
p. 43-44
« C’est pour moi aujourd’hui une question décisive de savoir comment on peut
faire correspondre en général un système politique à l’âge technique et quel
système ce pourrait être. Je ne sais pas de réponse à cette question. Je ne suis pas
persuadé que ce soit la démocratie. »
— Martin Heidegger, Réponses et questions sur l’histoire et la politique [Entretien
avec Der Spiegel] (23 septembre 1966), trad. Jean Launay, éd. Mercure de France, 1988,
p. 42
« [...] la mort n’est pas la fin du possible, mais elle est l’Abri suprême (la mise à
l’abri qui rassemble) où réside le secret du dévoilement qui nous rappelle. »
— Martin Heidegger, « Moïra » (1951-1952), dans Essais et conférences (1954), trad.
André Préau, éd. Gallimard, coll. « Tel », 2017 (ISBN 9782070222209), p. 310
« C’est seulement quand nous pouvons habiter que nous pouvons construire.
[...] habiter est le trait fondamental de l’être en conformité duquel les mortels
sont. [...]
La véritable crise de l’habitation réside en ceci que les mortels en sont toujours à chercher
l’être de l’habitation et qu’il leur faut d’abord apprendre à habiter. »
— Martin Heidegger, « Bâtir, habiter, penser » (5 août 1951), dans Essais et
conférences (1954), trad. André Préau, éd. Gallimard, coll. « Tel », 2017 (ISBN
9782070222209), p. 192-193
« On cite souvent une phrase de Max Planck : “Est réel ce qu’on peut mesurer.” [...] nous ne
devons pas entendre ce terme au sens rétréci d’opérations faites sur des nombres. Au sens
large et essentiel, calculer veut dire : compter avec une chose, c’est-à-dire la prendre en
considération, compter sur elle. De cette manière toute objectivation du réel est un
calcul. »
— Martin Heidegger, « Science et méditation » (1953), dans Essais et
conférences (1954), trad. André Préau, éd. Gallimard, coll. « Tel », 2017 (ISBN
9782070222209), p. 64-65
« L’homme est sur le point de se jeter sur la terre tout entière et sur son
atmosphère, d’usurper et de s’attacher, sous forme de “forces”, le règne secret
de la nature, et de soumettre le cours de l’histoire à la planification et à
l’ordonnance d’un gouvernement planétaire. Ce même “homme révolté” est hors
d’état de dire en toute simplicité ce qui est, de dire ce que cela est, qu’une chose soit.
L’entier de l’étant est devenu l’unique objet d’une unique volonté de conquête. La
simplicité de l’être est ensevelie en un seul et unique oubli.
Quel mortel se sentirait de force pour penser à fond l’abîme de ce désarroi ? On peut bien
essayer, devant cet abîme, de fermer les yeux. On peut ériger trompe-l’œil après trompe-
l’œil, l’un derrière l’autre. L’abîme est toujours là.
Les théories de la nature, les doctrines de l’histoire ne délient pas le désarroi. Elles
embrouillent tout irrémédiablement, car elles se nourrissent de la confusion qui plane sur
la différence entre être et étant.
Est-il un salut ? Seulement si le péril est. Le péril est lorsque l’être même va à l’ultime et
retourne l’oubli qui provient de lui-même.
Or quoi, si l’être, en son déploiement, maintient l’essence de l’homme ? Si l’essence de
l’homme repose dans le penser de la vérité de l’être ?
Alors la pensée doit prendre dictée à la ruche de l’être. Elle fait entrer l’aube du pensé dans
la proximité de son énigme. »
— Martin Heidegger, Chemins qui ne mènent nulle part (1950), trad. Wolfgang Brokmeier,
éd. Gallimard, coll. « Tel », 2016 (ISBN 9782070705627), Pourquoi des poètes ?, p. 448-
449
« Dans l’âge de la nuit du monde, l’abîme du monde doit être éprouvé et enduré. Or, pour
cela, il faut qu’il y ait certains qui atteignent à l’abîme. [...]
Long est le temps de détresse de la nuit du monde. »
— Martin Heidegger, Chemins qui ne mènent nulle part (1950), trad. Wolfgang Brokmeier,
éd. Gallimard, coll. « Tel », 2016 (ISBN 9782070705627), Pourquoi des poètes ?, p. 324-
325
« Ce n’est que parce que — et dans la mesure où — l’homme est devenu, de façon insigne
et essentielle, sujet, que par la suite doit se poser pour lui la question expresse de savoir s’il
veut, et doit être un Je réduit à sa gratuité et lâché dans son arbitraire, ou bien un Nous de
la Société ; s’il veut et doit être une personne dans le cadre de la communauté, ou bien
être un simple membre du groupe dans le cadre d’un “corps constitué” ; s’il veut et doit
exister comme État, Nation et Peuple, ou bien comme Humanité générale de l’homme
moderne ; s’il veut et doit être le Sujet qu’en tant qu’être moderne, il est déjà. Ce n’est que
là où l’homme est déjà, par essence, sujet, qu’est donnée la possibilité de l’aberration dans
l’inessentiel du subjectivisme au sens de l’individualisme. Mais ce n’est également que là
où l’homme reste sujet que la lutte expresse contre l’individualisme et pour la
communauté en tant que champ et but de tout effort et de toute espèce d’utilité a
seulement un sens. »
— Martin Heidegger, Chemins qui ne mènent nulle part (1950), trad. Wolfgang Brokmeier,
éd. Gallimard, coll. « Tel », 2016 (ISBN 9782070705627), Pourquoi des poètes ?, p. 121
« L’Histoire, c’est l’éveil d’un peuple à ce qu’il lui est donné d’accomplir,
comme insertion de ce peuple dans son propre héritage. »
— Martin Heidegger, Chemins qui ne mènent nulle part (1950), trad. Wolfgang Brokmeier,
éd. Gallimard, coll. « Tel », 2016 (ISBN 9782070705627), Pourquoi des poètes ?, p. 87
« La terre ne surgit à travers le monde, le monde ne se fonde sur la terre que dans la
mesure où la vérité advient comme le combat originel entre éclaircie et réserve. Mais
comment la vérité advient-elle ? Réponse : elle advient en quelques rares modes essentiels.
Un des modes dans lesquels la vérité se déploie, c’est l’être-œuvre de l’œuvre. Installant un
monde et faisant venir la terre, l’œuvre est la bataille où est conquise la venue au jour de
l’étant dans sa totalité, c’est-à-dire la vérité. »
— Martin Heidegger, Chemins qui ne mènent nulle part (1950), trad. Wolfgang Brokmeier,
éd. Gallimard, coll. « Tel », 2016 (ISBN 9782070705627), L’origine de l’œuvre d’art, p. 61
« Dans l’œuvre d’art, la vérité de l’étant s’est mise en œuvre. L’art est la mise
en œuvre de la vérité. »
— Martin Heidegger, Chemins qui ne mènent nulle part (1950), trad. Wolfgang Brokmeier,
éd. Gallimard, coll. « Tel », 2016 (ISBN 9782070705627), L’origine de l’œuvre d’art, p. 41
« Dans l’obscure intimité du creux de la chaussure est inscrite la fatigue des pas du labeur.
Dans la rude et solide pesanteur du soulier est affermie la lente et opiniâtre foulée à
travers champs, le long des sillons toujours semblables, s’étendant au loin sous la bise. Le
cuir est marqué par la terre grasse et humide. Par-dessous les semelles s’étend la solitude
du chemin de campagne qui se perd dans le soir. À travers ces chaussures passe l’appel
silencieux de la terre, son don tacite du grain mûrissant, son secret refus d’elle-même dans
l’aride jachère du champ hivernal. À travers ce produit repasse la muette inquiétude pour la
sûreté du pain, la joie silencieuse de survivre à nouveau au besoin, l’angoisse de la
naissance imminente, le frémissement sous la mort qui menace. Ce produit appartient à
la terre, et il est à l'abri dans le monde de la paysanne. Au sein de cette appartenance
protégée, le produit repose en lui-même. »
— Martin Heidegger, Chemins qui ne mènent nulle part (1950), trad. Wolfgang Brokmeier,
éd. Gallimard, coll. « Tel », 2016 (ISBN 9782070705627), L’origine de l’œuvre d’art, p. 34
« Cet “humanisme” qui s’érige contre tout humanisme antérieur, sans pour
autant se faire le moins du monde le porte-parole de l’inhumain, faut-il l’appeler
encore “humanisme” ? [...] l’opposition à l’“humanisme” n’implique aucunement la
défense de l’inhumain, mais ouvre au contraire d’autres échappées, c’est ce qu’on pourrait
établir en peu de mots. »
— Martin Heidegger, « Lettre sur l’humanisme » (1947), dans Questions III et IV, trad.
Roger Munier, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1990 (ISBN 9782070721306), p. 105-108
« Le fait que la formation de la grammaire occidentale soit due à la réflexion grecque sur la
langue grecque donne à ce processus toute sa signification. Car cette langue est, avec
l’allemande, au point de vue des possibilités du penser à la fois la plus puissante de toutes
et celle qui est le plus la langue de l’esprit. »
— Martin Heidegger, Introduction à la métaphysique (1935), trad. Gilbert Kahn, éd.
Gallimard, coll. « Tel », 1998 (ISBN 9782070204199), p. 67
« La gloire n’est pas pour les Grecs quelque chose qu’on reçoive ou non par-dessus le
marché ; elle est la manifestation de l’être le plus haut. Pour les hommes
d’aujourd’hui la gloire n’est plus depuis longtemps que la célébrité, et par
suite quelque chose de très douteux, un acquêt jeté et distribué ici et là par les
journaux et la radio — presque le contraire de l’être. »
— Martin Heidegger, Introduction à la métaphysique (1935), trad. Gilbert Kahn, éd.
Gallimard, coll. « Tel », 1998 (ISBN 9782070204199), p. 111
« Nous voulons comprendre la scission “être et penser” dans son origine. Elle
est la formule qui répond à l’attitude fondamentale de l’esprit occidental. Il
s’ensuit que l’être se détermine à partir de l’horizon du penser et de la raison. Et cela tout
autant lorsque l’esprit occidental se soustrait à la domination de la raison, en voulant
l’“irrationnel” et en recherchant l’“alogique”. »
— Martin Heidegger, Introduction à la métaphysique (1935), trad. Gilbert Kahn, éd.
Gallimard, coll. « Tel », 1998 (ISBN 9782070204199), p. 152
« Toutes choses sont tombées au même niveau, qui est semblable à la surface
ternie d’un miroir qui n’est plus réfléchissant, qui ne renvoie plus rien. La
dimension prédominante est devenue celle de l’extension et du nombre. [...] Tout
cela s’est accentué ensuite, en Amérique et en Russie, jusqu’à atteindre l’ainsi-de-suite sans
bornes de ce qui est toujours identique et indifférent, cela au point que ce quantitatif s’est
transformé en une qualité spécifique. Désormais la prédominance d’un niveau moyen où
tout est égal et indifférent n’est plus là-bas une chose sans importance et un simple vide
désolant, elle signifie l’invasion de ce qui, par ses attaques, détruit, et fait passer pour un
mensonge, tout ce qui a de la grandeur et toute mentalité engagée dans quelque chose
comme un monde (das welthaft Geistige). C’est l’invasion de ce que nous appelons le
démoniaque (au sens de la malveillance dévastatrice). La montée de cette démonie,
coïncidant avec le désarroi et l’insécurité croissants de l’Europe en face de cette démonie
et en elle-même, se manifeste de façons multiples. »
— Martin Heidegger, Introduction à la métaphysique (1935), trad. Gilbert Kahn, éd.
Gallimard, coll. « Tel », 1998 (ISBN 9782070204199), p. 57
ERNEST HELLO
« Ceux qui ne prennent point part aux combats n’ont pas d’histoire. »
— Ernest Hello, Contes extraordinaires (1879), éd. Victor Palmé, 1879, p. 164
« [...] plus un homme a pénétré dans l’intimité du Seigneur, plus il connaît la défaillance de
la nature créée et déchue ; plus il participe à la force, plus il compatit à la souffrance du
faible. »
— Ernest Hello, L’Homme (1872), éd. Victor Palmé, 1872, p. 257
« Quiconque aime la vérité déteste l’erreur. Ceci est aussi près de la naïveté que du
paradoxe. Mais cette détestation de l’erreur est la pierre de touche à laquelle se reconnaît
l’amour de la vérité. Si vous n’aimez pas la vérité, vous pouvez jusqu’à un certain point dire
que vous l’aimez et même le faire croire ; mais soyez sûr qu’en ce cas, vous manquerez
d’horreur pour ce qui est faux, et à ce signe, on reconnaîtra que vous n’aimez pas la
vérité. »
— Ernest Hello, L’Homme (1872), éd. Victor Palmé, 1872, p. 220
« Le monde, c’est la vieillesse ; il est difficile d’imaginer combien les gens du monde sont
vieux. Les jeunes gens surtout sont remarquables par leur décrépitude, parce qu’elle est en
eux plus monstrueuse, et par là plus éclatante. Tous ces vieillards de vingt ans, sans
enthousiasme et sans désir, qui fuient la face de saint Jean, la fuient lourdement,
lentement, tristement, pitoyablement. Ils se traînent, pour la fuir, dans un chemin où l’on ne
respire pas, sans vue, sans montagne, sans air et sans horizon. Ils se condamnent non pas
seulement à la douleur, mais au désespoir pour fuir la face de saint Jean. Ils tournent le dos
à Dieu, font leurs affaires sans adorer et s’ennuient à jamais. »
— Ernest Hello, L’Homme (1872), éd. Victor Palmé, 1872, p. 116
« Beaucoup de gens confondant le miracle avec l’action satanique, ou plutôt avec l’illusion
humaine, car le diable n’est pour eux qu’une création de notre terreur, représentent très-
bien le signe particulier du XIXe siècle, la confusion de l’Être et du Néant. »
— Ernest Hello, L’Homme (1872), éd. Victor Palmé, 1872, p. 103
« Quand une génération a perdu la foi, on ne sait pas jusqu’où peut aller sa crédulité. Elle
n’a plus d’armure, elle n’a plus de ceinture ; on fait d’elle tout ce qu’on veut.
Quand une génération a perdu la foi, on la ballote, on la manie, on la roule par terre, on la
berne dans une couverture de laine, comme les hôteliers espagnols bernaient Sancho
Pança, et elle se laisse faire sans résistance. »`
— Ernest Hello, L’Homme (1872), éd. Victor Palmé, 1872, p. 90
« Chacun traîne sa vieille chaîne ; le sang ne l’a pas rouillée ; le feu ne l’a pas fondue. »
— Ernest Hello, Le Jour du Seigneur (1871), éd. Éditions du Sandre, 2012 (ISBN
9782358210775), p. 12
« Tu as raison, Loup des steppes, mille fois raison, et pourtant, tu dois disparaître. Tu es
bien trop exigeant et affamé pour ce monde simple et indolent, qui se satisfait
de si peu. Il t’exècre ; tu as pour lui une dimension de trop. Celui qui désire vivre
aujourd’hui en se sentant pleinement heureux n’a pas le droit d’être comme toi ou moi.
Celui qui réclame de la musique et non des mélodies de pacotille ; de la joie et non des
plaisirs passagers ; de l’âme et non de l’argent ; un travail véritable et non une agitation
perpétuelle ; des passions véritables et non des passe-temps amusants, n’est pas chez lui
dans ce monde ravissant... »
— Hermann Hesse, Le Loup des steppes (1927), trad. Alexandra Cade, éd. Le Livre de
Poche, 2021 (ISBN 9782253002932), p. 221
« [...] je suis incapable de comprendre quels plaisirs et quelles joies les hommes
recherchent dans les trains et les hôtels bondés, dans les cafés combles où
résonne une musique oppressante et tapageuse, dans les bars et les music-halls des
villes déployant un luxe élégant, dans les expositions universelles, dans les grandes
avenues, dans les conférences destinées aux assoiffée de culture, dans les grands stades.
Non, je ne suis pas capable de comprendre et de partager toutes ces joies qui sont à ma
portée et auxquelles des milliers de gens s’efforcent d’accéder en se bousculant les uns les
autres. »
— Hermann Hesse, Le Loup des steppes (1927), trad. Alexandra Cade, éd. Le Livre de
Poche, 2021 (ISBN 9782253002932), p. 49
« Hélas, il est bien difficile de trouver cette trace divine au sein de l’existence que nous
menons ; au sein de notre époque tellement satisfaite, tellement bourgeoise, tellement
décérébrée ; face à ces architectures, à ces magasins, à ce monde politique, à ces
individus ! Comment ne pas devenir un loup des steppes et un ermite sans
manières dans un monde dont je ne partage aucune des aspirations, dont je ne
comprends aucun des enthousiasmes ? »
— Hermann Hesse, Le Loup des steppes (1927), trad. Alexandra Cade, éd. Le Livre de
Poche, 2021 (ISBN 9782253002932), p. 48
« Un loup des steppes égaré chez nous, dans les villes où les gens mènent une
existence de troupeau ; aucune autre image ne pouvait représenter de façon plus
pertinente l’homme, son isolement farouche, son caractère sauvage, son anxiété, sa
nostalgie d’une patrie perdue. »
— Hermann Hesse, Le Loup des steppes (1927), trad. Alexandra Cade, éd. Le Livre de
Poche, 2021 (ISBN 9782253002932), p. 32
« “La plupart des hommes ne veulent pas nager avant d’avoir appris à le faire.”
Spirituel, n’est-ce pas ? Naturellement, ils refusent de nager ! Ils sont nés pour évoluer sur
la terre ferme, non dans l’eau. Et naturellement, ils refusent aussi de penser ; ils ont été
créés pour vivre, par pour penser ! En effet, celui qui réfléchit, celui qui confère à la pensée
une importance primordiale, peut certes aller très loin dans son domaine, mais il quitte
alors la terre ferme pour rejoindre l’eau et se noiera un jour. »
— Hermann Hesse, Le Loup des steppes (1927), trad. Alexandra Cade, éd. Le Livre de
Poche, 2021 (ISBN 9782253002932), p. 30-31
—
ADOLF HITLER
« Si l’on avait, au début et au cours de la guerre, tenu une seule fois douze ou
quinze mille de ces Hébreux corrupteurs du peuple sous les gaz empoisonnés
que des centaines de milliers de nos meilleurs travailleurs allemands de toute
origine et de toutes professions ont dû endurer sur le front, le sacrifice de
millions d’hommes n’eût pas été vain. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 542
« [...] ce ne sont plus les princes et les maîtresses des princes qui marchandent les
frontières des États, mais c’est maintenant l’inexorable Juif cosmopolite qui combat pour
la domination des autres peuples. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 519
« L’importance de ce fait ne saurait être surestimée. Le peuple allemand, déchiré par l’excès
d’individualisme, fruit de la diversité des races qu’il enferme, recouvra, grâce à la discipline
de l’armée prussienne, une partie au moins des facultés d’organisation qui, depuis
longtemps, lui étaient devenues étrangères.
Encore dix générations d’Allemands sans le correctif d’une instruction militaire,
abandonnées à l’influence défavorable de la diversité des races et, par suite, des
conceptions philosophiques, et notre peuple aurait réellement perdu le dernier reste d’une
existence indépendante sur cette planète. L’esprit allemand ne pourrait plus apporter son
tribut à la civilisation que par des individus isolés au sein de nations étrangères, sans qu’on
en reconnaisse seulement la provenance. Il ne serait plus qu’un engrais de civilisation,
jusqu’à ce qu’enfin le dernier reste de sang aryen nordique dépérisse et s’éteigne en
nous. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 516-517
« Nous devons encore considérer en première ligne comme États géants les États-Unis,
puis la Russie et la Chine. Il s’agit là de formations territoriales qui, pour partie, ont une
surface plus de dix fois supérieure à celle de l’Empire allemand actuel. La France même doit
être comptée au nombre de ces États. Non seulement du fait qu’elle complète son armée,
dans une proportion toujours croissante, grâce aux ressources des populations de couleur
de son gigantesque empire, mais aussi du fait que son envahissement par les nègres fait
des progrès si rapides que l’on peut vraiment parler de la naissance d’un État africain sur le
sol de l’Europe. La politique coloniale de la France d’aujourd’hui n’est pas à comparer avec
celle de l’Allemagne de jadis. Si l’évolution de la France se prolongeait encore trois
cents ans dans son style actuel, les derniers restes du sang franc
disparaîtraient dans l’État mulâtre africano-européen qui est en train de se
constituer un immense territoire de peuplement autonome s’étendant du Rhin au Congo,
rempli de la race inférieure qui se forme lentement sous l’influence d’un métissage
prolongé. C’est là ce qui distingue la politique coloniale française de l’ancienne politique
coloniale allemande.
Cette dernière était toute en demi-mesures, comme tout ce que nous faisions. Elle n’a ni
agrandi les territoires de peuplement de la race allemande, ni entrepris la tentative —
encore criminelle — de renforcer la puissance du Reich par un recours au sang noir. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 514
« [...] la question la plus importante de notre politique extérieure, à savoir notre attitude à
l’égard de la Russie [...]. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 512
« Les Juifs sont les maîtres des puissances financières des États-Unis. [...]
Avec une perfide habileté, ils pétrissent l’opinion publique et en font l’instrument de leur
grandeur future.
Les meilleurs cerveaux de la juiverie croient déjà voir approcher le moment où sera réalisé
le mot d’ordre donné par l’Ancien Testament et suivant lequel Israël dévorera les autres
peuples.
S’il restait encore, au milieu du grand troupeau des pays dénationalisés et devenus
colonies juives, un seul État indépendant, toute l’entreprise pourrait échouer à la dernière
heure. Car un monde bolchévisé ne peut subsister que s’il embrasse toute le globe.
S’il reste un seul État possédant encore son énergie et sa grandeur nationales, l’Empire
mondial que veulent édifier les satrapes juifs sera vaincu, comme toute tyrannie ici-bas, par
la force de l’idée nationale. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 509
« C’est pour cette raison que la France est, et reste, l’ennemi que nous avons le plus à
craindre. Ce peuple, qui tombe de plus en plus au niveau des nègres, met sourdement en
danger, par l’appui qu’il prête aux Juifs pour attendre leu but de domination universelle,
l’existence de la race blanche en Europe. Car la contamination provoquée par l’afflux de
sang nègre sur le Rhin, au cœur de l’Europe, répond aussi bien à la soif de vengeance
sadique et perverse de cet ennemi héréditaire de notre peuple qu’au froid calcul du Juif,
qui y voit le moyen de commencer le métissage du continent européen en son centre et,
en infectant la race blanche avec le sang d’une basse humanité, de poser les fondations de
sa propre domination.
Le rôle que la France, aiguillonnée par sa soif de vengeance et systématiquement guidée
par les Juifs, joue aujourd’hui en Europe, est un péché contre l’existence de l’humanité
blanche et déchaînera un jour contre ce peuple tous les esprits vengeurs d’une génération
qui aura reconnu dans la pollution des races le péché héréditaire de l’humanité. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 497
« [...] depuis trois cent ans, l’histoire de notre contient a été dominée par les
visées politiques de l’Angleterre ; par l’équilibre des forces qu’elle obtenait, en
opposant les unes aux autres les différentes puissances européennes, elle assurait
indirectement ses derrières et pouvait, en toute sûreté, atteindre les buts poursuivis par la
politique mondiale de la diplomatie britannique. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 488
« Plus une idée est riche et fertile en ferments révolutionnaires, plus ses
propagateurs doivent être actifs, vu que la force subversive d’une telle doctrine
risque d’en éloigner les petits-bourgeois lâches. Ils pourront, dans leur for intérieur,
se sentir des partisans, mais refuseront de le reconnaître ouvertement. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 463
« [...] le Juif détruit ce qui constitue les bases de notre existence en tant que race et, par là,
détruit notre peuple pour toujours. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 447
« Cette contamination pestilentielle de notre sang, que ne savent pas voir des centaines de
milliers de nos concitoyens, est pratiquée aujourd’hui systématiquement par les Juifs.
Systématiquement, ces parasites aux cheveux noirs, qui vivent aux dépens de notre peuple,
souillent nos jeunes filles inexpérimentées et causent ainsi des ravages que rien en ce
monde ne pourra plus compenser. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 445
« Car une doctrine n’est pas tolérante ; elle ne peut être “un parti parmi les autres” ; elle
exige impérieusement la reconnaissance exclusive et totale de ses conceptions, qui doivent
transformer toute la vie politique. Elle ne peut tolérer près d’elle aucun vestige de l’ancien
régime.
C’est la même chose pour les religions.
Le christianisme non plus n’a pas pu se contenter d’élever ses propres autels, il lui fallait
procéder à la destruction des autels païens. Seule cette intolérance fanatique devait créer
la foi apodictique ; elle en était une condition première absolue.
On peut objecter, à juste titre, que ces deux précédents historiques sont spécifiquement
juifs — et même que ce genre d’intolérance et de fanatisme sont foncièrement juifs. Ceci
peut être mille fois vrai et on peut aussi le déplorer profondément ; on peut constater, avec
une inquiétude qui n’est que trop justifiée, que l’apparition de cette doctrine dans l’histoire
de l’humanité y introduisait quelque chose que l’on ne connaissait pas encore ; mais cela
ne sert de rien et il s’agit maintenant d’un état de fait. Les hommes qui veulent sortir notre
peuple allemand de sa situation actuelle, n’ont pas à se casser la tête pour imaginer
combien ce serait beau si telle ou telle chose n’existait pas ; ils doivent recherche et
déterminer comment on peut supprimer ce qui en fait est donné. Mais une doctrine pleine
de la plus infernale intolérance ne sera brisée que par la doctrine qui lui opposera le même
esprit, qui luttera avec la même âpre volonté et qui, par surcroît, portera en elle-même une
pensée nouvelle pure et absolument conforme à la vérité. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 360-361
« [...] notre première tâche n’est pas de créer une forme d’État völkisch, mais de détruire
l’État juif actuel. Comme l’histoire le montre bien souvent, la principale difficulté n’est pas
d’instituer un nouvel état de choses, mais bien de lui faire la place libre. Préjugés et intérêts
s’entremêlent en une phalange serrée et tentent d’empêcher, par tous les moyens, la
victoire d’une idée qui leur est désagréable ou leur paraît menaçante. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 359-360
« L’évolution que nous sommes en train de subir, si elle n’était enrayée, nous mettrait un
jour devant la prophétie panjuive : “Le Juif dévorera effectivement les peuples de la terre et
deviendra leur seigneur.” »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 359
« Car les plus grandes inventions, les plus grandes découvertes, les travaux qui ont le plus
profondément révolutionné la science, les monuments les plus splendides de la civilisation
humaine ne sont pas des cadeaux qu’aurait faits au monde la poursuite de gains matériels.
Tout au contraire, s’il ont vu le jour, ce fut souvent parce que leurs auteurs avaient renoncé
au bonheur matériel que procure la richesse.
Il se peut qu’aujourd’hui l’or soit le dominateur exclusif de la vie ; pourtant il viendra un
jour où l’homme rendra hommage à des dieux plus nobles. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 344
« Mais il est fort à craindre que l’homme, une fois aveuglé, ne continue à abattre les
barrières qui séparent les races, jusqu’à ce que soit définitivement perdu ce qu’il y avait de
meilleur en lui. Il ne restera alors qu’une sorte de bouillie unitaire dont les fameux
réformateurs que nous entendons aujourd’hui font leur idéal ; mais ce mélange informe
signifierait la mort de tout idéal en ce monde. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 317
« [...] quand, au sein d’un peuple, s’unissent, pour poursuivre un seul but, un certain
nombre d’hommes doués au plus haut degré d’énergie et de force active, et qu’ils sont
ainsi définitivement dégagés de la paresse où s’engourdissent les masses, ces quelques
hommes deviennent les maîtres de l’ensemble du peuple. L’histoire du monde est
faite par les minorités, chaque fois que les minorités de nombre incarnent la majorité
de la volonté et de la décision. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 315
« [...] dans un monde métissé et envahi par la descendance de nègres, toutes les
conceptions humaines de beauté et de noblesse, de même que toutes les
espérances en un avenir idéal de notre humanité, seraient perdues à jamais. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 303
« [...] le Talmud n’est pas un livre préparant à la vie dans l’au-delà ; il enseigne
seulement à mener ici-bas une vie pratique et supportable.
La doctrine religieuse des Juifs est, en première ligne, une instruction tendant à maintenir
la pureté du sang juif et un code réglant les rapports des Juifs entre eux, et surtout ceux
qu’ils doivent observer avec le reste du monde, c’est-à-dire avec les non-juifs. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 244-245
« Comme le Juif n’a jamais connu de royaume avec des frontières déterminées et, par suite,
n’a jamais eu de civilisation qui lui fût propre, on a cru avoir affaire à un peuple qui devait
être classé parmi les nomades. C’est une erreur aussi profonde que dangereuse. Le nomade
possède son territoire nettement délimité où il vit ; seulement il ne le cultive pas comme un
agriculteur sédentaire, mais se nourrit du produit de ses troupeaux, avec lesquels il
parcourt son domaine. La raison de ce mode d’existence est le peu de fertilité du sol qui
n’autorise pas d’établissement fixe. Mais la cause réelle est la disproportion existant entre
la civilisation technique d’une époque ou d’un peuple et la pauvreté naturelle d’une région.
Il est des pays où l’Aryen est parvenu, grâce à sa technique, qu’il a perfectionnée au cours
de plus de mille années, à fonder des établissement fixes et à se rendre maître d’un
territoire très étendu d’où il a tiré tout ce qui est indispensable à la vie. À défaut de cette
technique, il lui aurait fallu, ou abandonner ces contrées, ou y mener la vie misérable du
nomade changeant continuellement de résidence, à supposer que la formation qu’il avait
reçue depuis des milliers d’années et l’habitude qu’il avait de la vie sédentaire ne lui
eussent pas rendu insupportable une telle existence. On doit se souvenir qu’au moment où
le continent de l’Amérique s’ouvrît aux colons, de nombreux Aryens gagnèrent
péniblement leur vie comme trappeurs, chasseurs, etc., errant souvent en bandes avec
femmes et enfants, de sorte que leur vie ressemblait complètement à celle des nomades.
Mais, aussitôt qu’ils devinrent plus nombreux et que des ressources plus importantes leur
permirent de défricher le sol et de tenir tête aux indigènes, leurs établissements fixes se
multiplièrent dans ce pays. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 242-243
« Ce que le Juif produit dans le domaine de l’art n’est que bousillage ou vol
intellectuel. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 242
« Le peuple juif ne possède donc pas, malgré toutes les facultés intellectuelles dont il est
doué en apparence, une vraie civilisation, notamment une civilisation qui lui soit propre. Ce
que le Juif possède aujourd’hui de civilisation apparente n’est que le bien des autres
peuples qui s’en en grande partie corrompu entre ses mains. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 242
« C’est pourquoi l’État Juif — qui doit être l’organisme vivant destiné à conserver et
multiplier une race — est, au point de vue territorial, sans aucune limite. Car la délimitation
du territoire d’un État suppose toujours une disposition d’esprit idéaliste chez la race qui le
constitue et notamment une conception exacte de ce que signifie le travail. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 241
« Sitôt que l’égoïsme établit sa domination sur un peuple, les liens de l’ordre se relâchent
et, en poursuivant leur propre bonheur, les hommes sont précipités du ciel dans l’enfer.
La postérité oublie les hommes qui n’ont recherché que leurs propres intérêts et glorifie les
héros qui ont renoncé à leur bonheur particulier. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 239-240
« Le mélange des sangs et l’abaissement du niveau des races, qui en est la conséquence
inéluctable, sont les seules causes de la mort des anciennes civilisations ; car ce ne sont pas
les guerres perdues qui entraînent la ruine des peuples, mais la disparition de cette force
de résistance qui est la propriété exclusive d’un sang pur. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 237
« Tout ce que nous admirons aujourd’hui sur cette terre — science et art, technique et
inventions — est le résultat de l’activité créatrice de peuples peu nombreux et peut-être,
primitivement, d’une seule race. C’est d’eux que dépend la permanence de toute la
civilisation. S’ils périssent, ce qui fait la beauté de cette terre ira avec eux dans la tombe. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 231
« Le règne de l’argent fut malheureusement ratifié par l’autorité qui aurait dû le plus se
dresser contre lui : Sa Majesté l’Empereur eut un geste malheureux quand il attira la
noblesse, en particulier, sous la bannière de la finance. Certes, il faut lui tenir compte de ce
que même Bismarck n’avait pas reconnu le danger menaçant sur ce point. Mais ainsi les
vertus élevées le cédaient en fait à la valeur de l’argent, car il était clair qu’une fois engagée
dans cette voie, la noblesse du sang devrait céder la place à la noblesse financière. Les
opérations financières réussissent plus facilement que les batailles. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 189
« [...] la lutte la plus difficile devrait être menée non contre les peuples ennemis,
mais contre le capital international. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 172
« Car plus l’oeuvre d’un homme est grande pour la postérité, moins les contemporains
peuvent la comprendre ; d’autant plus dure est la lutte et d’autant plus difficile le succès.
Toutefois si, au cours des siècles, le succès favoris un tel homme, il recevra peut-être au
cours de sa vie même quelques pâles rayons de sa gloire future. Il est vrai que ces grands
hommes ne sont que les coureurs de Marathon de l’histoire : la couronne de lauriers des
contemporains n’effleure plus les tempes du héros mourant. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 171
« L’État juif ne fut jamais délimité dans l’espace ; répandu sans limites dans l’univers, il
comprend cependant exclusivement les membres d’une même race. C’est pour cela que ce
peuple a formé partout un État dans l’État. C’est l’un des tours de passe-passe les plus
ingénieux au monde que d’avoir fait naviguer cet État sous l’étiquette de “religion”, et de
lui assurer ainsi la tolérance que l’Aryen est toujours prêt à accorder à la croyance
religieuse. En réalité, la religion de Moïse n’est rien d’autre que la doctrine de la
conservation de la race juive. C’est pour cela qu’elle embrasse aussi presque tout le
domaine des sciences sociales, politiques et économiques qui peuvent s’y rapporter. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 122-123
« [...] on ne saurait trop priser la possibilité de conserver une classe paysanne saine comme
base de toute la nation. Beaucoup de nos maux actuels ne sont que la conséquence
du rapport faussé entre les populations urbaine et rurale.
Une solide couche de petits et moyens paysans fut de tout temps la meilleurs protection
contre les malaises sociaux qui sont aujourd’hui les nôtres. C’est aussi le seul moyen
d’assurer à une nation son pain quotidien dans le cadre d’une économie fermée. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 113
« [...] les races moins dépourvues de scrupules et de plus haute civilisation doivent déjà
réduire, par suite de leur territoire limité, leur accroissement à un moment où des peuples
moins civilisés et plus brutaux de nature, se trouvent, grâce à de vastes territoires de
peuplement, en mesure de se développer en nombre et sans souci de limitation.
En d’autres termes, le monde sera un jour aux mains d’une humanité de moins haute
culture, mais plus énergique. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 111
« Mais, en général, on doit se rappeler que le but suprême de l’existence des hommes n’est
pas la conservation d’un État : c’est la conservation de leur race. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 82
« Toute action de valeur n’est-elle pas ici-bas une offensive prise par le génie contre
l’inertie de la masse ? »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 71
« Dans l’Europe occidentale actuelle, la démocratie est le précurseur du marxisme, que l’on
ne pourrait concevoir sans elle. Elle est pour cette peste mondiale le terrain de culture, sur
lequel peut se propager l’épidémie. Et elle trouve son expression dans le parlementarisme
avorton chez qui toute étincelle divine a malheureusement cessé d’animer la boue dont il
est fait. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 70
« Si le Juif, à l’aide de sa profession de foi marxiste, remporte la victoire sur les peuples de
ce monde, son diadème sera la couronne mortuaire de l’humanité. Alors notre planète
recommencera à parcourir l’éther comme elle l’a fait il y a des millions d’année : il n’y aura
plus d’hommes à sa surface. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 60
« Tandis que j’étudiais l’influence exercée par le peuple juif à travers de longues périodes
de l’histoire, je me demandai soudain avec anxiété si le destin, dont les vues sont
insondables, ne voulait pas, pour des raisons inconnues de nous autres pauvres hommes,
en vertu d’une décision immuable, la victoire finale de ce petit peuple.
Est-ce qu’à ce peuple, qui n’a toujours vécu que pour la terre, cette terre aurait été promise
comme récompense ?
Le droit que nous estimons avoir de lutter pour notre conservation est-il réellement fondé,
ou n’existe-t-il que dans notre esprit ? »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 59
« Ce fut l’époque où se fit en moi la révolution la plus profonde que j’aie jamais eu à mener
à son terme.
Le cosmopolite sans énergie que j’avais été jusqu’alors devint un antisémite fanatique. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 59
« À Linz, il n’y avait qu’une petite minorité de Juifs. Au cours des années, ils s’étaient
répandus dans toute l’Europe et ils ne différaient pas des autres hommes ; je les prenais
même pour des Allemands. Je ne voyais pas le côté absurde de cette illusion, parce qu’il
m’apparaissait que leur religion était la seule chose qui nous séparât. Persuadé qu’ils
avaient été persécutés pour leur croyances, les propos dont on les accablait m’étaient des
plus antipathiques, et parfois allaient jusqu’à l’horreur. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 50
« À la Realschule, je liai bien connaissance avec un jeune Juif, avec lequel nous nous
tenions tous sur nos gardes, mais c’est parce que divers incidents nous avaient appris à
n’avoir dans sa discrétion qu’une confiance restreinte. D’ailleurs, ni camarades ni moi n’en
déduisîmes de conclusions particulières. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André Calmettes,
éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984), p. 50
« Je sais que c’est par la parole beaucoup plus que par les écrits que l’on gagne
les hommes : tous les grands mouvements de l’histoire doivent beaucoup plus
aux orateurs qu’aux écrivains. »
— Adolf Hitler, Mein Kampf (1925), trad. Jean Gaudefroy-Demonbynes et André
Calmettes, éd. Kontre Kulture, 2016 (ISBN 9782367250984
—
MICHEL HOUELLEBECQ
« [...] ce qui se passe en ce moment avec l’agriculture en France, c’est un énorme
plan social, le plus gros plan social à l’œuvre à l’heure actuelle, mais c’est un plan
social secret, invisible, où les gens disparaissent individuellement, dans leur coin, sans
jamais donner matière à un sujet pour BFM. »
— Michel Houellebecq, Sérotonine (2019), éd. Flammarion, 2019 (ISBN
9782081471757), p.
« Le retour du fait religieux est un mouvement mondial, une lame de fond. [...]
L’athéisme est trop triste. Le besoin de sens revient. [...] Je pense que nous
assistons en ce moment à la fin d’un mouvement historique qui a débuté il y a très
longtemps, à la fin du Moyen Age. [...] La seule théorie authentiquement perdante en ce
moment, c’est l’idéologie débutée avec le protestantisme, atteignant son apogée au siècle
des Lumières et aboutissant à la Révolution, fondée sur l’autonomie de l’homme et le
pouvoir de sa raison. »
— « Entretien avec Jean-Marie van der Plaetsen », Jean-Marie van der Plaetsen, Le Figaro
Magazine, 6 janvier 2015
« L’aire de parking était déserte, et je me rendis tout de suite compte que quelque chose
n’allait pas ; je ralentis au maximum avant de rouler, très prudemment, jusqu’à la station-
service. La vitrine avait explosé, des myriades de bouts de verre recouvraient le bitume. Je
sortis de ma voiture, m’approchai : à l’intérieur de la boutique, la vitrine contenant les
boissons fraîches avait elle aussi été fracassée, et les présentoirs de journaux étaient
renversés. Je découvris la caissière gisant sur le sol dans une mare de sang, ses bras serrés
sur sa poitrine dans un dérisoire geste de protection. Le silence était total. Je me dirigeai
vers les pompes à essence, mais leur fonctionnement était bloqué. Elles devaient pouvoir
être remises en marche à partir des caisses. Je revins vers la boutique, enjambai le cadavre
à contrecœur, mais ne découvris aucun mécanisme paraissant commander la distribution
de carburant. Après une brève hésitation, je pris dans les rayonnages un sandwich thon-
crudités, une bière sans alcool et le guide Michelin. »
— Michel Houellebecq, Soumission (2015), éd. Flammarion, 2015 (ISBN
9782290303054), p. 129
« Que l’histoire politique puisse jouer un rôle dans ma propre vie continuait à me
déconcerter, et à me répugner un peu. Je me rendais bien compte pourtant, et depuis des
années, que l’écart croissant, devenu abyssal, entre la population et ceux qui parlaient en
son nom, politiciens et journalistes, devait nécessairement conduire à quelque chose de
chaotique, de violent et d’imprévisible. La France, comme les autres pays d’Europe
occidentale, se dirigeait depuis longtemps vers la guerre civile, c’était une
évidence ; mais jusqu’à ces derniers jours j’étais encore persuadé que les
Français dans leur immense majorité restaient résignés et apathiques — sans
doute parce que j’étais moi-même passablement résigné et apathique. Je m’étais trompé. »
— Michel Houellebecq, Soumission (2015), éd. Flammarion, 2015 (ISBN
9782290303054), p. 116
« Il avait, quelquefois, l’hypermarché pour lui tout seul — ce qui lui paraissait
être une assez bonne approximation du bonheur. »
— Michel Houellebecq, La Carte et le Territoire (2010), éd. Flammarion, 2010 (ISBN
9782081246331), p. 410
« Le dôme de l’Institut avait une vraie grâce, dut-il convenir un peu malgré lui.
Évidemment, donner une forme arrondie à un bâtiment ne pouvait se justifier en aucune
manière ; sur le plan rationnel, c’était simplement de la place perdue. La modernité était
peut-être une erreur, se dit Jed pour la première fois de sa vie. Question
purement rhétorique, d’ailleurs : la modernité était terminée en Europe occidentale depuis
pas mal de temps déjà. »
— Michel Houellebecq, La Carte et le Territoire (2010), éd. Flammarion, 2010 (ISBN
9782081246331), p. 348
« Un hypermarché Casino, une station-service Shell demeuraient les seuls centres d’énergie
susceptibles, les seules propositions sociales susceptibles de provoquer le désir, le bonheur,
la joie. »
— Michel Houellebecq, La Carte et le Territoire (2010), éd. Flammarion, 2010 (ISBN
9782081246331), p. 195
« Qu’est-ce qui définit un homme ? Quelle est la question que l’on pose en premier à un
homme, lorsqu’on souhaite s’informer de son état ? Dans certaines sociétés, on lui
demande d’abord s’il est marié, s’il a des enfants ; dans nos sociétés, on s’interroge en
premier lieu sur sa profession. C’est sa place dans le processus de production, et
pas son statut de reproducteur, qui définit avant tout l’homme occidental. »
— Michel Houellebecq, La Carte et le Territoire (2010), éd. Flammarion, 2010 (ISBN
9782081246331), p. 158
« Dans la génération d’Esther, ces débats eux-mêmes avaient disparu ; le capitalisme était
pour elle un milieu naturel où elle se mouvait avec l’aisance qui la caractérisait dans tous
les actes de sa vie ; une manifestation contre un plan de licenciements lui aurait paru aussi
absurde qu’une manifestation contre le rafraîchissement du temps, ou l’invasion de
l’Afrique du Nord par les criquets pèlerins. Toute idée de revendication collective lui était
plus généralement étrangère, il lui paraissait évident depuis toujours que sur le
plan financier comme pour toutes les questions essentielles de la vie chacun
devait se défendre seul, et mener sa propre barque sans compter sur l’aide de
personne. »
— Michel Houellebecq, La Possibilité d’une île (2005), éd. Fayard, 2005, p.
« Les falaises dominent la mer, dans leur absurdité verticale, et il n’y aura pas
de fin à la souffrance des hommes. »
— Michel Houellebecq, La Possibilité d’une île (2005), éd. Fayard, 2005, p.
« Dans la société où nous vivions, le principal intéressement au travail était constitué par le
salaire, et plus généralement par les avantages financiers ; le prestige, l’honneur de la
fonction tenaient dorénavant une place beaucoup moins grande. »
— Michel Houellebecq, Plateforme (2001), éd. J’ai lu, 2002, p.
« Les enfants, quant à eux, étaient la transmission d’un état, de règles et d’un patrimoine.
C’était bien entendu le cas dans les couches féodales, mais aussi chez les commerçants, les
paysans, les artisans, dans toutes les classes de la société en fait. Aujourd’hui, tout cela
n’existe plus : je suis salarié, je suis locataire, je n’ai rien à transmettre à mon fils. Je n’ai
aucun métier à lui apprendre, je ne sais même pas ce qu’il pourra faire plus tard ; les règles
que j’ai connues ne seront de toute façon plus valables pour lui, il vivra dans un autre
univers. Accepter l’idéologie du changement continuel c’est accepter que la vie
d’un homme soit strictement réduite à son existence individuelle, et que les
générations passées et futures n’aient plus aucune importance à ses yeux. C’est
ainsi que nous vivons, et avoir un enfant, aujourd’hui, n’a plus aucun sens pour un
homme. »
— Michel Houellebecq, Les Particules élémentaires (1998), éd. Flammarion, coll. « J’ai
Lu », 2001 (ISBN 9782290303054), p. 169
« J’ai jamais pu encadrer les féministes... [...]. Ces salopes n’arrêtaient pas de parler de
vaisselle et de partage des tâches ; elles étaient littéralement obsédées par la vaisselle.
Parfois elles prononçaient quelques mots sur la cuisine ou les aspirateurs ; mais leur grand
sujet de conversation, c’était la vaisselle. En quelques années, elles réussissaient à
transformer les mecs de leur entourage en névrosés impuissants et grincheux. »
— Michel Houellebecq, Les Particules élémentaires (1998), éd. Flammarion, coll. « J’ai
Lu », 2001 (ISBN 9782290303054), p. 145-146
« Souvent aussi, il part à vélo dans la campagne. Il pédale de toutes ses forces, emplissant
ses poumons de la saveur de l’éternité. L’éternité de l’enfance est une éternité brève,
mais il ne le sait pas encore ; le paysage défile. »
— Michel Houellebecq, Les Particules élémentaires (1998), éd. Flammarion, coll. « J’ai
Lu », 2001 (ISBN 9782290303054), p. 32
« Le but de la fête est de nous faire oublier que nous sommes solitaires,
misérables et promis à la mort. Autrement dit, de nous transformer en
animaux.
[...] il suffit d’avoir prévu de s’amuser pour être certain de s’emmerder. L’idéal serait donc de
renoncer totalement aux fêtes. Malheureusement, le fêtard est un personnage si respecté
que cette renonciation entraîne une dégradation forte de l’image sociale. »
— « La fête », Michel Houellebecq, 20 ans, 1996
« Je crois maintenant avoir suffisamment démontré pour mon dessein combien est
dangereux tout effort de l’État cherchant à combattre ou seulement à prévenir la
corruption des mœurs, pourvu qu’elle ne porte pas directement atteinte au droit d’autrui ;
combien peu on doit en attendre de conséquences salutaires sur la moralité elle-même, et
combien une pareille action, exercée sur le caractère du peuple, est peu nécessaire, même
pour le seul maintien de la sûreté. »
— Wilhelm von Humboldt, Essai sur les limites de l’action de l’État (1792), trad. Henry
Chrétien et Karen Horn, éd. Les Belles Lettres, coll. « Bibliothèque Classique de la
Liberté », 2004 (ISBN 9782251390369), p. 113
« Le soin de l’État pour le bien matériel des citoyens est nocif aussi parce qu’il s’exerce
nécessairement sur une foule hétérogène, et il nuit ainsi à l’individu en définissant des
règles générales, des règles qui ne s’appliquent à chacun qu’au prix d’erreurs
considérables. »
— Wilhelm von Humboldt, Essai sur les limites de l’action de l’État (1792), trad. Henry
Chrétien et Karen Horn, éd. Les Belles Lettres, coll. « Bibliothèque Classique de la
Liberté », 2004 (ISBN 9782251390369), p. 46
« Chaque âge qui suit doit être en dessous de ceux qui l’ont précédé en termes
de variété ; — et avec quelle rapidité cette décadence ne s’augmentera-telle pas
dans l’avenir ! — Il est en dessous pour la variété de la nature, les immenses
forêts sont défrichées, les marais desséchés, etc. ; pour la variété de l’homme,
elle se détruit par le progrès de communication et d’union dans les œuvres
humaines [...]. »
— Wilhelm von Humboldt, Essai sur les limites de l’action de l’État (1792), trad. Henry
Chrétien et Karen Horn, éd. Les Belles Lettres, coll. « Bibliothèque Classique de la
Liberté », 2004 (ISBN 9782251390369), p. 31
—
SAMUEL HUNITNGTON
« Fondamentalement, le monde est en train de devenir plus moderne et
moins occidental. »
— Samuel Huntington, Le Choc des civilisations (1996), trad. Jean-Luc Fidel et
Geneviève Joublain, Patrice Jorland, Jean-Jacques Pédussaud, éd. Odile
Jacob, coll. « Poches Odile Jacob », 2000, p. 82
« Une civilisation est le mode le plus élevé de regroupement et le niveau le plus haut
d’identité culturelle dont les humains ont besoin pour se distinguer des autres espèces. Elle
se définit à la fois par des éléments objectifs, comme la langue, l’histoire, la religion, les
coutumes, les institutions, et par des éléments subjectifs d’auto-identification. »
— Samuel Huntington, Le Choc des civilisations (1996), trad. Jean-Luc Fidel et Geneviève
Joublain, Patrice Jorland, Jean-Jacques Pédussaud, éd. Odile Jacob, coll. « Poches Odile
Jacob », 2000, p. 40
« L’Asie est le chaudron des civilisations. Rien qu’en Extrême-Orient, on trouve des sociétés
qui appartiennent à six civilisations — japonaise, chinoise, orthodoxe, bouddhiste,
musulmane et occidentale —, plus l’Hindouisme en Asie du Sud. Les États phares de quatre
civilisations, le Japon, la Chine, la Russie et les États-Unis, sont des acteurs de poids en
Extrême-Orient ; l’Inde joue également un rôle majeur en Asie du Sud, tandis que
l’Indonésie, pays musulman, monte de plus en plus en puissance. »
— Samuel Huntington, Le Choc des civilisations (1996), trad. Jean-Luc Fidel et Geneviève
Joublain, Patrice Jorland, Jean-Jacques Pédussaud, éd. Odile Jacob, coll. « Poches Odile
Jacob », 2000, p. 240
HALDOUS HUXLEY
« Sous la férule d’un dictateur scientifique, l’éducation produira vraiment les effets voulus
et il en résultera que la plupart des hommes et des femmes en arriveront à aimer leur
servitude sans jamais songer à la révolution. Il semble qu’il n’y ait aucune raison valable
pour qu’une dictature parfaitement scientifique soit jamais renversée. »
— Aldous Huxley, Retour au meilleur des mondes (1958), trad. Denise Meunier, éd. Pocket,
2021 (ISBN 9782266172455), p. 154
« Les anciens dictateurs sont tombés parce qu’ils n’ont jamais pu fournir assez de pain, de
jeux, de miracles et de mystères à leurs sujets ; ils ne possédaient pas non plus un système
vraiment efficace de manipulation mentale. »
— Aldous Huxley, Retour au meilleur des mondes (1958), trad. Denise Meunier, éd. Pocket,
2021 (ISBN 9782266172455), p. 154
« Toute les appellations traditionnelles, tous les slogans consacrés resteront exactement ce
qu’ils étaient au bon vieux temps, la démocratie et la liberté seront les thèmes de toutes
les émissions radiodiffusées et de tous les éditoriaux — mais une démocratie, une liberté
au sens strictement pickwickien du terme. Entre-temps, l’oligarchie au pouvoir et son élite
hautement qualifiée de soldats, de policiers, de fabricants de pensée, de manipulateurs
mentaux mènera tout et tout le monde comme bon lui semblera. »
— Aldous Huxley, Retour au meilleur des mondes (1958), trad. Denise Meunier, éd. Pocket,
2021 (ISBN 9782266172455), p. 144
« Il est parfaitement possible qu’un homme soit hors de prison sans être libre, à l’abri de
toute contrainte matérielle et pourtant captif psychologiquement, obligé de penser, de
sentir et d’agir comme le veulent les représentants de l’État ou de quelque intérêt privé à
l’intérieur de la nation. »
— Aldous Huxley, Retour au meilleur des mondes (1958), trad. Denise Meunier, éd. Pocket,
2021 (ISBN 9782266172455), p. 142
« Le lavage de cerveau, tel qu’il est pratiqué de nos jours, est un procédé hybride dont
l’efficacité dépend en partie de l’emploi systématique de la violence et en partie de
manipulations psychologiques habiles. Il représente la tradition de 1984 en train de
devenir la tradition du Meilleur des Mondes. Sous une dictature établie de longue date et
bien organisée, nos méthodes actuelles de manipulations semi-violentes sembleront, à
n’en pas douter, ridiculement élémentaires. »
— Aldous Huxley, Retour au meilleur des mondes (1958), trad. Denise Meunier, éd. Pocket,
2021 (ISBN 9782266172455), p. 89
La société « décrite dans Le Meilleur des Mondes est une société mondiale dans laquelle la
guerre a été éliminée et où le premier but des dirigeants est d’empêcher à tout prix leurs
sujets de créer des désordres. Ils y parviennent (entre autres méthodes) par la légalisation
d’un degré de liberté sexuelle (rendu possible par l’abolition de la famille) qui garantit
pratiquement les populations de toute forme de tension émotive destructrice (ou
créatrice). Dans 1984, l’appétit de puissance se satisfait en infligeant la
souffrance ; dans Le Meilleur des Mondes en infligeant un plaisir à peine
moins humiliant. »
— Aldous Huxley, Retour au meilleur des mondes (1958), trad. Denise Meunier, éd. Pocket,
2021 (ISBN 9782266172455), p. 39
« [...] la civilisation industrielle n’est possible que lorsqu’il n’y a pas de renoncement. La
jouissance jusqu’aux limites extrêmes que lui imposent l’hygiène et les lois économiques.
Sans quoi les rouages cessent de tourner. [...] la passion et la neurasthénie, c’est l’instabilité.
Et l’instabilité, c’est la fin de la civilisation. On ne peut avoir une civilisation durable sans
une bonne quantité de vices aimables. [...] la civilisation n’a pas le moindre besoin
de noblesse ou d’héroïsme. Ces choses-là sont des symptômes d’incapacité
politique. Dans une société convenablement organisée comme la nôtre,
personne n’a l’occasion d’être noble ou héroïque. Il faut que les conditions
deviennent foncièrement instables avant qu’une telle occasion puisse se présenter. Là où il
y a des guerres, là où il y a des serments de fidélité multiples et divisés, là où il y a des
tentations auxquelles on doit résister, des objets d’amour pour lesquels il faut combattre
ou qu’il faut défendre, là, manifestement, la noblesse et l’héroïsme ont un sens. Mais il n’y
a pas de guerres, de nos jours. On prend le plus grand soin de vous empêcher d’aimer
exagérément qui que ce soit. Il n’y a rien qui ressemble à un serment de fidélité multiple ;
vous êtes conditionné de telle sorte que vous ne pouvez vous empêcher de faire ce que
vous avez à faire. Et ce que vous avez à faire est, dans l’ensemble, si agréable, on laisse leur
libre jeu à un si grand nombre de vos impulsions naturelles, qu’il n’y a véritablement pas
de tentations auxquelles il faille résister. Et si jamais, par quelque malchance, il se
produisait d’une façon ou d’une autre quelque chose de désagréable, eh bien, il y a
toujours le soma qui vous permet de prendre un congé, de vous évader de la réalité. Et il y
a toujours le soma pour calmer votre colère, pour vous réconcilier avec vos ennemis, pour
vous rendre patient et vous aider à supporter les ennuis. Autrefois, on ne pouvait accomplir
ces choses-là qu’en faisant un gros effort et après des années d’entraînement moral
pénible. À présent, on avale deux ou trois comprimés d’un demi-gramme, et voilà. Tout le
monde peut être vertueux, à présent. On peut porter sur soi, en flacon, au moins la moitié
de sa moralité. Le christianisme sans larmes, voilà ce qu’est le soma. »
— Aldous Huxley, Le Meilleur des mondes (1932), trad. Jules Castier, éd. Pocket,
2020 (ISBN 9782266283038), p. 292-294
« — [...] qu’est-ce que j’éprouverais si je le pouvais, si j'étais libre, si je n'étais pas asservi
par mon conditionnement ? [...]
Vous n’avez pas le désir d’être libre, Lenina ?
— Je ne sais pas ce que vous voulez dire. Je le suis, libre. Libre de me payer du bon temps,
le meilleur qui soit. “Tout le monde est heureux, à présent !” »
— Aldous Huxley, Le Meilleur des mondes (1932), trad. Jules Castier, éd. Pocket,
2020 (ISBN 9782266283038), p. 125-126
« Il n’y a, bien entendu, aucune raison pour que les totalitarismes nouveaux ressemblent
aux anciens. Le gouvernement au moyen de triques et de pelotons d’exécution, de famines
artificielles, d’emprisonnements et de déportations en masse, est non seulement inhumain
(cela, personne ne s’en soucie fort de nos jours) ; il est — on peut le démontrer —
inefficace : et, dans une ère de technologie avancée, l’inefficacité est le péché contre le
Saint-Esprit. Un État totalitaire vraiment “efficient” serait celui dans lequel le
tout-puissant comité exécutif des chefs politiques et leur armée de directeurs
auraient la haute main sur une population d’esclaves qu’il serait inutile de
contraindre, parce qu’ils auraient l’amour de leur servitude. La leur faire aimer —
telle est la tâche assignée dans les États totalitaires d’aujourd’hui aux ministères de la
propagande, aux rédacteurs en chef de journaux et aux maîtres d’école. »
— Aldous Huxley, Le Meilleur des mondes (1932), trad. Jules Castier, éd. Pocket,
2020 (ISBN 9782266283038), Préface Nouvelle de l’auteur de 1946, p. 17-18
—
ERNST JUNGER
« Le mot “conservateur” ne fait pas partie des vocables les plus heureux. Il
recèle un caractère axé sur le temps et se propose de restaurer des formes et
des situations devenues impossibles à maintenir. Aujourd’hui, le plus faible est a
priori celui qui veut encore maintenir quelque chose. Voilà pourquoi il est bon de chercher
à dissocier le mot de la tradition. Il s’agit plutôt de trouver, voire de retrouver ce qui fut et
sera de tout temps à la base d’un ordre sain. Mais c’est là quelque chose d’extratemporel,
auquel nulle régression ni progression ne mène. Les divers mouvements ne font que
tourner autour. Seuls changent les moyen et les noms. En ce sens, il convient d’approuver
la définition d’Albrecht Günther qui comprend pas l’esprit conservateur comme un
“attachement à ce qui fut hier, mais comme une vie faite de ce qui à jamais valable”. Or
seul peut être valable à jamais ce qui a été affranchi du temps. L’extratemporel revendique
aussi son dû. Et alors, d’une façon néfaste, même quand on n’en tient pas compte. La
volonté de maintenir ce qui est advenu inadmissible rend stérile la critique
conservatrice qui est souvent alliée à la beauté et à l’acuité spirituelle. On
pénètre dans les palais à demi écroulés, devenus inhabitables. »
— Ernst Jünger, Rivarol et autres essais (1956), trad. Jeanne Naujac et Louis Eze, éd.
Grasset, 1974, p. 66
« Si l’art des chasseurs des premiers âges nous émeut tant et nous parle un
langage plus fort que celui de l’Orient ancien ou même récent, c’est sans doute
un signe qu’y vivent l’esprit de notre esprit, la liberté de notre liberté. »
— Ernst Jünger, Le Nœud gordien (1953), trad. Henri Plard, éd. Christian Bourgois, 1981, p.
L’homme « d’âge moyen élevé, vacciné, revacciné, débarrassé de ses microbes, habitué aux
médicaments, a moins de chances d’en sortir qu’un autre qui ne sait rien de tous ces
remèdes. La basse mortalité des époques paisibles ne donne pas la mesure de la
santé véritable ; elle peut, d’un jour à l’autre, faire place à son contraire. Il se peut même
qu’elle provoque des maladies encore inconnues. Le tissu des peuples devient fragile. »
— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 549
« Deux qualités sont donc indispensables au rebelle. Il refuse de se laisser prescrire sa loi
par les pouvoirs, qu’ils usent de la propagande ou de la violence. Et il est décidé à se
défendre [...]. »
— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 516
« À supposer même que l’anéantissement triomphe sous la pire de ses formes, une
différence subsiste alors, aussi radicale que celle du jour et de la nuit. D’un côté, le chemin
s’élève vers des royaumes, le sacrifice de la vie, ou le destin du combattant qui succombe
sans lâcher ses armes ; de l’autre, il descend vers les bas-fonds des camps d’esclavage et
des abattoirs où les primitifs concluent avec la technique une alliance meurtrière ; où l’on
n’est plus un destin, mais rien qu’un numéro de plus. Or avoir son destin propre, ou se
laisser traiter comme un numéro : tel est le dilemme que chacun, certes, doit résoudre de
nos jours, mais est seul à pouvoir trancher. »
— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 513
« Quant au rebelle, nous appelons ainsi celui qui, isolé et privé de sa patrie par la marche
de l’univers, se voit enfin livré à l’anéantissement. Tel pourrait être le destin d’un grand
nombre d’hommes, et même de tous — il faut donc qu’un autre caractère s’y ajoute. C’est
que le rebelle est résolu à la résistance et forme le dessein d’engager la lutte,
fût-elle sans espoir. Est rebelle, par conséquent, quiconque est mis par la loi de sa
nature en rapport avec la liberté, relation qui l’entraîne dans le temps à une révolte contre
l’automatisme et à un refus d’en admettre la conséquence éthique, le fatalisme. »
— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 507
« Tout État se doit de créer une utopie, dès qu’il a perdu le contact avec le
mythe. »
— Ernst Jünger, Héliopolis (1949), trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 1988, p. 221
« Nous pouvons nous dérober, mais c’est précisément la raison pour laquelle nous avons,
moins que personne, le droit de penser aux canots de sauvetage. Nous n’avons pas
seulement un héritage, mais aussi une mission. »
— Ernst Jünger, Héliopolis (1949), trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 1988, p. 93-94
« Quand le sentiment du droit et du bien s’évanouit, quand l’épouvante trouble les sens,
alors les forces de l’homme de la rue sont bientôt taries. Mais chez la vieille aristocratie le
sens de ce qui est vrai et légitime demeure vivant et c’est d’elle que sortent les nouveaux
rejetons de l’esprit d’équité. Il n’est pas d’autre raison à la prééminence accordée chez tous
les peuples au sang noble. »
— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll.
« L’Imaginaire », 2005, p. 116
« Mais que faire, si les faibles méconnaissent la loi, et dans leur aveuglement tirent les
verrous qui n’étaient poussés que pour les protéger ? [...] L’ordre humain ressemble au
Cosmos en ceci, que de temps en temps, pour renaître à neuf, il lui faut plonger
dans la flamme. »
— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll.
« L’Imaginaire », 2005, p. 71
« Profonde est la haine qui brûle contre la beauté dans les cœurs abjects. »
— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll.
« L’Imaginaire », 2005, p. 62
« C’est seulement lorsque la démocratie est réalisée que la tendance dissolvante de ses
principes moteurs ressort dans toute sa virulence. C’est alors seulement qu’on voit combien
le monde bourgeois vivait de sentiments reflétés et combien il relevait d’un réflexe de
défense. Les principes de ce monde changent de sens lorsqu’on les prive d’adversaire. La
dissolution a atteint ses dernières limites lorsqu’elle n’est plus confrontée aux vestiges de
l’autorité mais à sa propre image reflétée dans tous les miroirs. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 287
« [...] la société bourgeoise [...] s’est hissée au rang d’exploiteuse de l’État. Le visage de la
démocratie tardive où la trahison et l’impuissance ont gravé leur marque est par trop
connu. Dans cette atmosphère, toutes les puissances de décomposition, tous les éléments
moribonds, étrangers et hostiles ont merveilleusement prospéré ; leur but secret est de
l’éterniser à tout prix. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 275-276
« Dans l’espace libéral, l’idéal n’est pas la suprématie ouverte mais la suprématie masquée
et, corrélativement, l’esclavage masqué ; c’est le concurrent le plus faible qui garantie la
situation générale [...]. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 229
« Partout où l’homme tombe sous la coupe de la technique, il se voit placé devant une
alternative inéluctable. Il s’agit pour lui d’accepter ses moyens particuliers et de parler sa
langue ou de périr. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 202
« L’adoption d’une technique étrangère est un acte de soumission dont les conséquences
sont d’autant plus dangereuses qu’il s’accomplit d’abord en esprit. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 122
« [...] l’état de sécurité idéal auquel le progrès s’efforce de parvenir consiste dans une
Domination mondiale de la raison bourgeoise qui voudrait non seulement réduire les
sources du danger mais les amener finalement à se tarir. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 99
« Tous les grands moments de la vie, les rêves ardents de la jeunesse, l’enivrement de
l’amour, le feu de la bataille, coïncident avec une conscience plus profonde de la Figure, et
le souvenir est le retour magique de la Figure qui émeut le cœur et le persuade du
caractère impérissable des ces moments. Le désespoir le plus amer d’une vie consiste à ne
s’être pas accompli, à n’avoir pas été à la hauteur de soi-même. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 86
« [...] désormais le triomphe de la société sur l’État s’est manifesté sans équivoque comme
une combinaison ininterrompue de haute trahison et de trahison envers la patrie,
perpétrées par le vulgaire, trop vulgaire, à l’encontre de tout ce qui constitue le fond
allemand. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 76
« Est société l’ensemble de la population du globe qui s’offre au concept comme l’image
idéale d’une humanité dont la division en États, nations ou races ne repose au fond sur rien
d’autre que sur une erreur de raisonnement. Cette erreur de raisonnement sera cependant
corrigée au fil du temps par des contrats, par les “lumières”, par une moralisation générale,
ou tout simplement par le progrès des moyens de transport. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 72
« [...] les étroits rapports qui règnent entre la fraternité et l’échafaud, entre les droits de
l’homme et les batailles meurtrières ne sont que trop connus. »
— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de
poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 69
« [...] les guerres dévastatrices sont les portes les mieux faites pour entrer dans
des zones décisives de l’âme, et pour laquelle, lors des nouveaux déploiements
de l’image du monde, lors des révolutions, la donnée brutale du sang qui coule
est plus bouleversante et plus féconde que tout bouleversement spirituel. »
— Ernst Jünger, Le Cœur aventureux (1929), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll.
« L’Imaginaire », 1979, p. 161
« Quand nous escaladerons la barricade, ce ne sera point pour la lutte des classes, mais
pour des biens immatériels. Un abîme nous sépare de ceux qui se battent pour un
bien-être matériel. »
— Ernst Jünger, Le Boqueteau 125 (1925), trad. Théodore Lacaze, éd. Payot, 1998, p. 172
« [...] même le plus colossal affrontement n’est jamais que la balance où l’on
pèse, aujourd’hui comme toujours, le poids des hommes. »
— Ernst Jünger, Orages d’acier (1920), trad. Christian Bourgois (revue par Henri Plard), éd.
Christian Bourgois, 1970, p. 349
« Nous savions que cette fois, nous allions entrer dans une bataille telle que le
monde n’en avait encore jamais vu. »
— Ernst Jünger, Orages d’acier (1920), trad. Christian Bourgois (revue par Henri Plard), éd.
Christian Bourgois, 1970, p. 120
« Élevés dans une ère de sécurité, nous avions tous la nostalgie de l’inhabituel,
des grands périls. La guerre nous avait donc saisis comme une ivresse. C’est
sous une pluie de fleurs que nous étions partis, grisés de roses et de sang. Nul
doute que la guerre ne nous offrît la grandeur, la force, la gravité. Elle nous apparaissait
comme l’action virile : de joyeux combats de tirailleurs, dans les prés où le sang tombait en
rosée sur les fleurs. Pas de plus belle mort au monde... Ah ! surtout, ne pas rester chez soi,
être admis à cette communion ! »
— Ernst Jünger, Orages d’acier (1920), trad. Christian Bourgois (revue par Henri Plard),
éd. Christian Bourgois, 1970, p. 9-10
—
THEODORE KACZYNSKI
« [...] la misère psychique [est] si commune dans les pays supposément heureux
de l’Occident. »
— Theodore Kaczynski, L’Avenir de la société industrielle (1995), trad. Jean-Marie
Apostolidès, éd. Climats, 2009, p. 176
« Les usines devront être détruites, les livres techniques brûlés, etc. »
— Theodore Kaczynski, L’Avenir de la société industrielle (1995), trad. Jean-Marie
Apostolidès, éd. Climats, 2009, p. 174
« La liberté humaine aura disparu, parce que les individus et les petits groupes
n’auront plus aucun pouvoir face aux grandes organisations, fortes d’une
mégatechnologie et d’un arsenal de moyens biologiques et psychologiques pour
manipuler les gens, en plus des instruments de surveillance et de contrainte physique. »
— Theodore Kaczynski, L’Avenir de la société industrielle (1995), trad. Jean-Marie
Apostolidès, éd. Climats, 2009, p. 172
La liberté de la presse est « un instrument trop utile dans la lutte contre la concentration
excessive de pouvoir, puisqu’il permet de contrôler les hommes politiques en révélant
publiquement leurs malversations. Mais la liberté de presse est de peu d’utilité pour le
citoyen moyen, en tant qu’individu. Les médias d’information son généralement entre les
mains d’importants consortiums qui sont partie intégrante du système. »
— Theodore Kaczynski, L’Avenir de la société industrielle (1995), trad. Jean-Marie
Apostolidès, éd. Climats, 2009, p. 127
« [...] pour qu’elle fonctionne de façon efficace, une société technologique EST DANS
L’OBLIGATION d’affaiblir les communautés locales et les solidarités familiales. Dans la
société moderne, l’individu doit d’abord sa fidélité au système, et seulement après à sa
communauté d’origine ; parce que si les solidarités traditionnelles devaient passer en
premier, les intérêts du groupe d’appartenance se développeraient au détriment du
système tout entier. »
— Theodore Kaczynski, L’Avenir de la société industrielle (1995), trad. Jean-Marie
Apostolidès, éd. Climats, 2009, p. 100
« Les conservateurs sont des idiots : d’un côté ils se plaignent du déclin des valeurs
traditionnelles, de l’autre ils soutiennent avec ferveur le progrès technologique et la
croissance économique. »
— Theodore Kaczynski, L’Avenir de la société industrielle (1995), trad. Jean-Marie
Apostolidès, éd. Climats, 2009, p. 99
« Nous réclamons donc une révolution contre le système industriel. [...] Cette révolution ne
sera pas POLITIQUE. Elle n’aura pas pour objet de renverser des gouvernements ; c’est à la
base économique et technologique de la société actuelle qu’elle s’attaquera. »
— Theodore Kaczynski, L’Avenir de la société industrielle (1995), trad. Jean-Marie
Apostolidès, éd. Climats, 2009, p. 72
« Les conséquences de la révolution industrielle ont été désastreuses pour tout le genre
humain. Si cette révolution a sensiblement augmenté l’espérance de vie des habitants des
pays “développés”, elle a par ailleurs déstabilisé la société et rendu l’existence insignifiante.
Elle a fait subir des humiliations aux êtres humains, elle a répandu des souffrances
psychiques sans nombre (qui s’accompagnent dans le tiers-monde de souffrances
physiques) et elle a causé à la nature un dommage irréparable. »
— Theodore Kaczynski, L’Avenir de la société industrielle (1995), trad. Jean-Marie
Apostolidès, éd. Climats, 2009, p. 71
« Les forces sociales sont alors capables d’utiliser la machinerie collective pour imposer
partout leur choix. [...] C’est une façon de restreindre constamment le nombre des
possibilités qu’offre notre monde. Le résultat final sera la création d’un monde consensuel,
fondé sur un seul sytème de valeurs. »
— Theodore Kaczynski, Le Manifeste de 1971 (1971), trad. Jean-Marie Apostolidès, éd.
Climats, 2009, p. 67
« Le choix du désespoir est donc “moi-même” ; car il est bien vrai qu’en désespérant, je
désespère de moi-même aussi bien que de toute autre chose ; mais le moi-même dont je
désespère est un fini comme tout autre fini, le moi-même que je choisis est le moi-même
absolu, ou le moi-même selon sa validité éternelle. Si c’est ainsi, tu comprendras encore
une fois pourquoi je disais, dans ce qui précède, et pourquoi je continue à dire, que le “ou
bien — ou bien” que je posais entre la vie esthétique et la vie éthique, n’est pas
un dilemme complet, puisque au fond il n’est question que d’un choix. Par ce
choix je ne choisis pas au fond entre le bien et le mal, mais je choisis le bien,
— et en choisissant le bien, je choisis co ipso le choix entre le bien et le mal.
Le choix originel est toujours présent dans tout choix suivant. »
— Søren Kierkegaard, Ou bien... ou bien... (1843), trad. Ferdinand et Odette Prior et Marie-
Henriette Guignot, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1984 (ISBN 9782070701070), p. 509
« L’individu dont nous parlons découvre à présent que le soi-même qu’il choisit possède
en lui une richesse infinie, dans la mesure où il a une histoire, une histoire dans laquelle il
reconnaît son identité avec lui-même. Cette histoire est d’espèces différentes, car il s’y
trouve en rapport avec d’autres individus de la famille et avec toute la famille ; cette
histoire contient quelque chose de douloureux, et, cependant, ce n’est que par elle qu’il est
celui qu’il est. C’est pourquoi il faut avoir du courage pour se choisir soi-même ; car au
moment où il semble s’isoler le plus, il pénètre le plus dans la racine par laquelle il se
rattache à l’ensemble. [...] Il ne peut rien abandonner de tout cela, pas même le plus
douloureux, le plus cruel, et cependant, l’expression de cette lutte, de cette acquisition, est
le repentir. Son repentir remonte dans le passé et a pour objet lui-même, la famille, la race,
— et finalement il trouve lui-même en Dieu. Ce n’est qu’à cette condition qu’il peut se
choisir lui-même, et c’est la seule condition qu’il veut, car ce n’est qu’ainsi qu’il peut se
choisir lui-même au sens absolu. »
— Søren Kierkegaard, Ou bien... ou bien... (1843), trad. Ferdinand et Odette Prior et Marie-
Henriette Guignot, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1984 (ISBN 9782070701070), p. 507
« Un vieux philosophe a dit que si on note exactement ce qui vous arrive dans la vie, on
devient, sans s’en douter, philosophe. »
— Søren Kierkegaard, Ou bien... ou bien... (1843), trad. Ferdinand et Odette Prior et Marie-
Henriette Guignot, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1984 (ISBN 9782070701070), p. 323
« Il est révoltant qu’un homme dirige sur des sentiers faux un voyageur ignorant le chemin
à prendre et le laisse ensuite seul dans son erreur. Cependant, n’est-il pas plus révoltant
encore d’amener quelqu’un à se fourvoyer en lui-même ? »
— Søren Kierkegaard, Ou bien... ou bien... (1843), trad. Ferdinand et Odette Prior et Marie-
Henriette Guignot, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1984 (ISBN 9782070701070), p. 240
« Jamais doctrine humaine n’a rapproché en fait comme Dieu et l’homme le christianisme ;
aucune non plus n’en était capable. Personnellement Dieu est seul à le pouvoir, toute
invention des hommes est-elle plus qu’un rêve, qu’une illusion précaire ! Mais jamais
doctrine ne s’est non plus gardée avec tant de soin contre le plus atroce des blasphèmes,
celui, depuis que Dieu s’est fait homme, de profaner son acte, comme si Dieu et l’homme
ne faisaient qu’un [...]. »
— Søren Kierkegaard, Traité du désespoir (1849), trad. Knud Ferlov et Jean-Jacques Gateau,
éd. La Nouvelle Revue française, 1932, p. 230
« Est-il donc surprenant que le monde rétrograde, que le mal se répande de plus en plus,
puisque l’ennui augmente et que l’ennui est la mère de tous les vices ? Dès la création du
monde on trouve des exemples. Adam s’ennuyait parce qu’il était seul, c’est pourquoi Ève
fut créée. À partir de ce moment, l’ennui s’installa dans le monde et crût exactement à
l’échelle de l’accroissement de la population. Adam s’ennuya tout seul, ensuite Adam et Ève
s’ennuyèrent ensemble, ensuite Adam et Ève et Caïn et Abel s’ennuyèrent en famille,
ensuite la population du monde augmenta et les peuples s’ennuyèrent en masse. Afin de
se distraire, ils eurent l’idée de construire une tour si élevée qu’elle s’élançait vers le ciel.
Cette idée est aussi ennuyeuse que la tour était élevée, et elle constitue une preuve terrible
de la primauté de l’ennui à ce moment là. Ensuite ils furent dispersés à travers le monde,
comme on fait aujourd’hui un voyage à l’étranger, mais ils continuèrent à s’ennuyer. Et
quelles conséquences n’a pas entraînées cet ennui ! L’homme d’abord haut placé avait
déchu profondément, premièrement à cause d’Ève, ensuite en tombant du haut de la tour
babélique. Et par ailleurs, qu’est-ce qui a retardé la chute de Rome ? Panis et circences. »
— Søren Kierkegaard, Ou bien... ou bien... (1843), trad. Ferdinand et Odette Prior et Marie-
Henriette Guignot, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1984 (ISBN 9782070701070), p. 223-224
« La question serait ainsi réglée, la réponse serait facile : car le plus malheureux serait celui
qui ne peut pas mourir, heureux celui qui le peut ; heureux serait celui qui meurt dans sa
vieillesse, plus heureux celui qui meurt dans sa jeunesse, plus heureux encore celui qui
meurt au moment de sa naissance ; le plus heureux de tous serait celui qui ne voit jamais le
jour. Mais il n’en est pas ainsi, la mort est le bonheur commun de tous les hommes, et,
puisqu’on n’a pas trouvé le plus malheureux, il faut le rechercher à l’intérieur des limites
ainsi tracées. »
— Søren Kierkegaard, Ou bien... ou bien... (1843), trad. Ferdinand et Odette Prior et Marie-
Henriette Guignot, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1984 (ISBN 9782070701070), p. 172
« Il arriva que le feu prit dans les coulisses d’un théâtre. Le bouffon vint en
avertir le public. On pensa qu’il faisait de l’esprit et on applaudit ; il insista ;
on rit de plus belle. C’est ainsi, je pense, que périra le monde : dans la joie
générale des gens spirituels qui croiront à une farce. »
— Søren Kierkegaard, Ou bien... ou bien... (1843), trad. Ferdinand et Odette Prior et Marie-
Henriette Guignot, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1984 (ISBN 9782070701070), p. 27
« Que les gens sont absurdes ! Ils ne se servent jamais des libertés qu'ils possèdent, mais
réclament celles qu'ils ne possèdent pas ; ils ont la liberté de pensée, ils exigent la liberté
de parole. »
— Søren Kierkegaard, Ou bien... ou bien... (1843), trad. Ferdinand et Odette Prior et
Marie-Henriette Guignot, éd. Gallimard, coll. « Tel », 1984 (ISBN 9782070701070), p. 17
—
CHRISTOPHER LASCH
« La barrière qui sépare le passé du présent — barrière infranchissable,
dans l’imagination de la modernité — est l’expérience du
désillusionnement, qui rend impossible de ressaisir l’innocence des
premiers jours. Nous pourrions dire que le désillusionnent est la forme
caractéristique de l’orgueil moderne, et cet orgueil ne se donne pas moins
à voir dans le mythe nostalgique du passé que dans la version plus
agressivement triomphante du progrès culturel qui écarte le passé sans
regrets. En surface, la nostalgie a une attitude aimante dans sa recréation
du passé, mais elle ne l’évoque que pour l’enterrer tout vivant. En
commun avec la croyance au progrès, à laquelle son opposition n’est que
de surface, elle partage l’ardeur à annoncer que le passé est mort et à nier
que l’histoire ait une emprise sur le présent. Ceux qui pleurent la mort du
passé et ceux qui la célèbrent partent les uns comme les autres de
l’assurance que notre époque est sortie de l’enfance. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 244
“[...] the cultural revolution of the late sixties discredited the idea of committed
public scholarship. The concept of the public became indistinguishable from
the phenomenon of publicity.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 226
« [...] la révolution culturelle des années soixante a discrédité l’idée de
savoir public engagé. Le concept de public est devenu inséparable du
phénomène de publicité. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 229
“The vacuum left by secularization has been filled by a permissive culture that
replaces the concept of sin with the concept of sickness. [...] The psychoanalytic
movement, wellspring o the therapeutic culture, stood in a highly ambiguous relation to
religion, at once complementary and competitive. Psychoanalysis too presented itself as a
cure of souls, a source of moral insight. Its method, introspection, linked it to a long
tradition of speculation in which self-knowledge is seen as the necessary beginning of
wisdom.
Sickness and health replaced guilt, sin, and atonement as the dominant
concerns guiding those who struggled to make sense of the buried life of the
mind.
It did not take people long to see that a therapeutic point of view could be put to social
and political uses. It served to lift the burden of moral failure once associated with poverty
and unemployment, to shift the blame from the individual to “society,” and to justify
policies designed to relieve those who suffered through no fault of their own.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 216-218
« Le vide créé par la laïcisation a été comblé par une culture permissive
qui substitue au concept de péché celui de maladie. [...] Le mouvement
psychanalytique, qui est à la source de cette culture thérapeutique avait à
la religion un rapport extrêmement ambigu, à la fois de complémentarité
et de rivalité. La psychanalyse aussi se représentait comme guérissant les
âmes, offrant un trésor de réflexions morales profondes. Sa méthode,
l’introspection, la reliait à une longue tradition spéculative où l’on perçoit
la connaissance de soi comme le commencement nécessaire de la
sagesse. [...]
La maladie et la santé ont remplacé la culpabilité, le péché et la pénitence
comme soucis dominants de ceux qui s’efforçaient de donner du sens à la
vie enfouie de l’esprit. [...]
Il n’a pas fallu beaucoup de temps pour que les gens voient que l’on pouvait
utiliser un point de vue thérapeutique à des fins sociales et politiques. Il a servi
à lever le poids de la tare morale que l’on associait autrefois à la pauvreté et
au chômage, à faire passer la responsabilité de l’individu sur la “société” et à
justifier des mesures politiques conçues pour soulager ceux qui souffraient
sans qu’il y aille en rien de leur faute. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 219-222
“The separation of church and state, nowadays interpreted as prohibiting any public
recognition of religion at all, is more deeply entrenched in America than anywhere else.
Religion has been relegated to the sidelines of public debate. Among elites it is held in low
esteem—something useful for weddings and funerals but otherwise dispensable. A
skeptical, iconoclastic state of mind is one of the distinguishing characteristics of the
knowledge classes. Their commitment to the culture of criticism is understood to rule out
religious commitments. The elites’ attitude to religion ranges from indifference to active
hostility.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 215
« La séparation de l’Église et de l’État, qui est interprétée aujourd’hui comme
interdisant absolument toute reconnaissance publique de la religion, est plus
profondément enracinée en Amérique que nulle part ailleurs. La religion s’est
trouvée reléguée dans la coulisse du débat public. Chez les élites, elle est peu
estimée — quelque chose qui sert à l’occasion des mariages et des
enterrements, mais dont on peut autrement faire l’économique. L’état d’esprit
sceptique, iconoclaste, est l’un des traits caractéristiques qui distinguent les
classes savantes. Il est compris que leur adhésion à la culture de la critique
exclut tout engagement religieux. L’attitude de ces élites à l’égard de la
religion va de l’indifférence à une hostilité active. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 219
“As Gramsci taught us a long time ago, no ideology could ever achieve “hegemony” if it
served merely to legitimate the interests of a particular class and to “set aside” those of
others. It is their capacity to speak to enduring human needs and desires that makes
ideologies compelling, even though their view of the world is necessarily blind to their own
limitations.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 191
« Comme Gramsci nous l’a enseigné il y a longtemps, aucune idéologie ne
pourrait jamais atteindre à « l’hégémonie » si elle servait simplement à
légitimer les intérêts d’une classe particulière et à “écarter” ceux des autres.
C’est leur aptitude à répondre à des besoins et des désirs humains durables qui
rend les idéologies convaincantes, même si leur conception du monde est
nécessairement aveugle sur leurs propres limitations. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 195
“An insidious double standard, masking as tolerance, denies those minorities the fruits of
the victory they struggled so long to achieve: access to the world’s culture. The underlying
message that they are incapable of appreciating or entering into that culture comes
through just as clearly in the new academic “pluralism” as in the old intolerance and
exclusion; more clearly, indeed, since exclusion rested on fear more than contempt. Thus
slaveowners feared that access to the best of Euro-American culture would encourage a
taste for freedom.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 185
« Un système de critères insidieusement inégaux qui se donne l’apparence de
la tolérance dénie à ces minorités les fruits de la victoire pour laquelle elles se
sont battues si longtemps : l’accès à la culture mondiale. Le message sous-
jacent, selon lequel elles sont incapables de goûter cette culture ou d’entrer
dedans, nous parvient avec tout autant de clarté dans le nouveau “pluralisme”
universitaire que dans l’intolérance et l’exclusion d’autrefois ; avec davantage
de clarté, même, puisqu’alors l’exclusion reposait plus sur la peur que sur le
mépris. C’est ainsi que les propriétaires d’esclaves redoutaient que l’accès aux
chefs-d’oeuvre de la culture euro-américaine n’encourage chez leurs esclaves
le goût de la liberté. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 190
“If we can surmount the false polarizations now generated by the politics of
gender and race, we may find that the real divisions are still those of class.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 113-114
« Si nous pouvons surmonter les fausses polarisations que suscite
aujourd’hui la politique dominée par les questions de sexe et de race,
peut-être découvrirons-nous que les divisions réelles restent celles de
classes. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 122
“The ideology of compassion, however agreeable to our ears, is one of the principal
influences, in its own right, on the subversion of civic life, which depends not so much on
compassion as on mutual respect. A misplaced compassion degrades both the victims,
who are reduced to objects of pity, and their would-be benefactors, who find it easier to
pity their fellow citizens than to hold them up to impersonal standards, attainment of
which would entitle them to respect. We pity those who suffer, and we pity, most of all,
those who suffer conspicuously; but we reserve respect for those who refuse to exploit
their suffering for the purposes of pity. [...]
Compassion has become the human face of contempt. Democracy once implied
opposition to every form of double standard. Today we accept double standards—as
always, a recipe for second-class citizenship —in the name of humanitarian concern. [...]
Democracy in our time is more likely to die o indifference than of intolerance. Tolerance
and understanding are important virtues, but they must not become an excuse for apathy.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 105-107
« [...] l’idéologie de la compassion est en elle-même l’une des influences
principales qui subvertissent la vie civique, car celle-ci dépend moins de la
compassion que du respect mutuel. Une compassion mal placée dégrade aussi
bien les victimes, réduites à n’être que des objets de pitié, que ceux qui
voudraient se faire leurs bienfaiteurs et qui trouvent plus facile d’avoir pitié de
leurs concitoyens que de leur appliquer des normes impersonnelles qui
donneraient droit au respect à ceux qui les atteignent. Nous avons pitié de
ceux qui souffrent, et surtout de ceux qui souffrent de manière bien visible ;
mais nous réservons notre respect à ceux qui refusent d’exploiter leur
souffrance à des fins de pitié. [...]
La compassion est devenue le visage humain du mépris. Autrefois, la
démocratie sous-entendait l’opposition à toutes les formes de normes
inégales. Aujourd’hui, nous acceptons les normes inégales — comme
toujours, elles anticipent la citoyenneté à deux vitesse — au nom du souci
humanitaire. [...]
De nos jours, il y a plus de chances pour que la démocratie meure
d’indifférence que d’intolérance. La tolérance et la compréhension sont des
vertus importantes, mais elles ne doivent pas devenir un prétexte pour
l’apathie. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 113-115
“Early admirers of the market—Adam Smith, for example—believed that selfishness was a
virtue only if it was confined to the realm of exchange. They did not advocate or even
envision conditions in which every phase of life would be organized according to the
principles of the market.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 102
« Les partisans originels du marché — par exemple, Adam Smith — croyaient
que l’égoïsme n’était une vertu que s’il était borné au domaine de l’échange.
Ils ne défendaient ni même ne prévoyaient des conditions dans lesquelles
toutes les phases de la vie seraient organisées selon les principes du marché. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 110
“[...] our cultural infrastructure needs attention too, and more than just the rhetorical
attention of politicians who praise “family values” while pursuing economic policies that
undermine them. It is either naïve or cynical to lead the public to think that
dismantling the welfare state is enough to ensure a revival of informal
cooperation [...]. Market mechanisms will not repair the fabric of public trust. On the
contrary, the market’s effect on the cultural infrastructure is just as corrosive as that of the
state.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 100-101
« [...] nos infrastructures culturelles nécessitent aussi l’attention et ne
sauraient se contenter de celle, purement rhétorique, de politiciens qui
font l’éloge des “valeurs de la famille” tout en menant des politiques
économiques qui les sapent. Il est naïf ou bien cynique d’induire le public
à croire qu’il suffit de démanteler l’État-providence pour garantir une
résurgence de la coopération spontanée [...]. Les mécanismes du marché
ne répareront pas le tissu de la confiance publique. Au contraire, l’effet du
marché sur l’infrastructure culturelle est tout aussi corrosif que celui de
l’État. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 108-109
“Neighborhoods have been destroyed not only by the market—by crime and
drugs or less dramatically by suburban shopping malls—but also by
enlightened social engineering.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 98
« Les quartiers ont été détruits, non seulement par le marché — c’est-à-
dire, par la criminalité et la drogue ou, de façon moins spectaculaire, par
les centres commerciaux suburbains — mais aussi par la planification
sociale progressiste. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 107
“Even liberal individuals require the character-forming discipline of the family, the
neighborhood, the school, and the church, all of which (not just the family)
have been weakened by the encroachments of the market.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 97
« Même les individus libéraux ont besoin de la discipline formatrice du
caractère que constituent la famille, le quartier, l’école et l’église, tous
affaiblis (et pas seulement la famille) par les intrusions du marché. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 106
“The thinking classes seem to labor under the delusion that they alone have
overcome racial prejudice. The rest of the country, in their view, remains
incorrigibly racist.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 90
« Les classes intellectuelles semblent souffrir de l’illusion qu’elles sont les
seules à avoir triomphé des préjugés raciaux. Selon elles, le reste du pays
demeure incorrigiblement raciste. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 99
“Ideologues of the right and left, instead of addressing the social and political
developments that tend to call conventional pieties into question, prefer to exchange
accusations of fascism and socialism—this in spite of the obvious fact that neither fascism
nor socialism represents the wave of the future.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 81
« Au lieu d’affronter les évolutions politiques et sociales qui tendent à remettre
en cause les idoles conventionnelles, les idéologues de droite et de gauche
préfèrent s’envoyer des accusations de socialisme et de fascisme — ceci en
dépit de la réalité évidente qui ni le socialisme ni le fascisme ne représentent le
mouvement de l’avenir. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 90
“The growing insularity of elites means, among other things, that political
ideologies lose touch with the concerns of ordinary citizens. Since political debate
is restricted, most of the time, to the “talking classes,” as they have been aptly
characterized, it becomes increasingly ingrown and formulaic. Ideas circulate and
recirculate in the form o buzzwords and conditioned reflex. The old dispute between left
and right has exhausted its capacity to clarify issues and to provide a reliable map of reality.
In some quarters the very idea of reality has come into question, perhaps because the
talking classes inhabit an artificial world in which simulations of reality replace the thing
itself.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 80
« L’isolement croissant des élites signifie entre autres choses que les
idéologies politiques perdent tout contact avec les préoccupations du
citoyen ordinaire. Le débat politique se restreignant la plupart du temps
aux “classes qui détiennent la parole”, comme on a eu raison de les
décrire, devient de plus en plus nombriliste et figé dans la langue de bois.
Les idées circulent et recirculent sous forme de scies et de réflexes
conditionnés. La vieille querelle droite-gauche a épuisé sa capacité à
clarifier les problèmes et à fournir une carte fiable de la réalités. Dans
certains secteurs, l’idée même de la réalité est mise en cause, peut-être
parce que les classes qui détiennent la parole habitent un monde artificiel
dans le quel des simulations de la réalité remplacent la réalité proprement
dite. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 89
“Capital and labor flow freely across political boundaries that seem increasingly artificial
and unenforceable. Popular culture follows in their wake. On the other hand, tribal loyalties
have seldom been so aggressively promoted. On the other hand, tribal loyalties have
seldom been so aggressively promoted. Religious and ethnic warfare breaks out in one
country after another [...].
It is the weakening of the nation-state that underlies both these developments—the
movement toward unification and the seemingly contradictory movement toward
fragmentation. The state can no longer contain ethnic conflicts, nor, on the other hand, can
it contain the forces leading to globalization. Ideologically nationalism comes under attack
from both sides: from advocates of ethnic and racial particularism but also from those who
argue that the only hope of peace lies in the internationalization o everything from weights
and measures to the artistic imagination.
The decline of nations is closely linked, in turn, to the global decline of the middle class.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 47-48
« Le capital et le travail circulent librement à travers des frontières politiques
qui semblent de plus en plus artificielles et impossibles à faire respecter. [...]
D’un autre côté, les allégeances tribales ont rarement été mises en avant avec
autant d’agressivité. Les conflits religieux et ethniques éclatent dans un pays
après l’autre [...].
C’est l’affaiblissement de l’État-nation qui sous-tend ces deux évolutions — le
mouvement qui va vers l’unification et le mouvement apparemment
contradictoire vers la fragmentation. L’État ne peut plus contenir les conflits
ethniques, ni d’autre part les forces qui conduisent vers la mondialisation.
Idéologiquement, le nationalisme se trouve attaqué sur deux fronts : par les
défenseurs des particularismes ethniques et raciaux mais aussi par ceux qui
soutiennent que le seul espoir de paix réside dans l’internationalisation de tout,
depuis les poids et mesures jusqu’à l’imagination artistique.
Le déclin des nations est étroitement lié à son tour au déclin mondial de la
classe moyenne. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 59
“[...] segregation of social classes; contempt for manual labor; collapse of the common
schools; loss of a common culture. As Young describes it, meritocracy has the effect of
making elites more secure than ever in their privileges [...].”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 43
« [...] ségrégation des classes sociales ; mépris pour le travail manuel ; déclin
des écoles pour tous ; disparition de la culture commune. Comme le décrit
Young, la méritocratie a l’effet de rendre les élites plus fermement établies que
jamais dans leurs privilèges [...]. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 55
“The recognition that meritocracy is more efficient than heredity was not enough, in itself,
to inspire or justify a “psychological change on the vast scale that the economy required.”
Indeed, “The hereditary principle would never have been overthrown,” continues Young’s
narrator, “... without the aid of a new religion—and that religion was socialism.” Socialists,
“mid- ives of progress,” contributed to the eventual triumph of meritocracy by encouraging
large-scale production, by criticizing the family as the nursery of acquisitive individualism,
and, above all, by ridiculing hereditary privilege and the “current criterion of success.””
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 42
« La découverte que la méritocratie est plus efficace que l’hérédité n’a pas
suffi, en soi, à inspirer ou à justifier “une transformation psychologique à la
vaste échelle dont l’économie avait besoin”. De fait, “le principe héréditaire
n’aurait jamais été détrôné... (poursuit le narrateur de Young) sans l’aide d’une
religion nouvelle — et cette religion fut le socialisme.” Les socialistes, en
“accoucheurs du progrès”, ont contribué au triomphe finale de la méritocratie
en encourageant la production à grande échelle, en critiquant la famille comme
une pépinière de l’individualisme conquérant et surtout en couvrant de ridicule
les privilèges héréditaires et “les critères actuels du succès.” »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 54
“Their loyalties —if the term is not itself anachronistic in this context—are international
rather than regional, national, or local. They have more in common with their counterparts
in Brussels or Hong Kong than with the masses of Americans not yet plugged into the
network of global communications.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 35
« Leurs allégeances — si le terme n’est pas lui-même anachronique dans un tel
contexte — sont internationales plutôt que nationales, régionales ou locales. Ils
ont plus de choses en commun avec leurs homologues de Bruxelles ou de
Hong-Kong qu’avec les masses d’Américains qui ne sont pas encore branchés
dans le réseau de communications mondiales. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 46-47
“Doctors used to marry nurses, lawyers and executives their secretaries. Now upper-
middle- class men tend to marry women of their own class, business or professional
associates with lucrative careers of their own.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 33
« Autrefois, les médecins épousaient des infirmières, les avocats et les cadres
supérieurs leurs secrétaires. Aujourd’hui, les hommes appartenant à la
bourgeoisie aisée tendent à épouser des femmes de leur classe, partenaires
d’entreprise ou de cabinet, poursuivant de leur côté une carrière lucrative. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 45
“[...] feminism, gay rights, welfare rights, agitation against racial discrimination—have
nothing in common, but their only coherent demand aims at inclusion in the dominant
structures rather than at a revolutionary transformation of social relations. [...]
It is the working and lower middle classes, after all, that favor limits on abortion, cling to
the two-parent family as a source of stability in a turbulent world, resist experiments with
“alternative lifestyles,” and harbor deep reservations about affirmative action and other
ventures in large-scale social engineering.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 27
« Non seulement les nouveaux mouvement sociaux — le féminisme, les droits
des homosexuels, les droits au minimum social, l’agitation contre la
discrimination raciale — n’ont rien en commun, mais leur seule exigence
cohérente vise à être inclus dans les structures dominantes plutôt qu’à une
transformation révolutionnaire des rapports sociaux. [...]
Après tout, ce sont les ouvriers et la petite bourgeoisie qui veulent voir limiter
le droit à l’avortement qui se cramponnent à la famille bi-parentale comme
source de stabilité dans un monde agité, qui s’oppose aux expériences de
“modes de vie alternatifs”, et qui nourrissent des réserves profondes sur la
discrimination positive et autres efforts d’ingénierie sociale à grande échelle. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 39
“[...] those who control the international flow of money and information, preside over
philanthropic foundations and institutions of higher learning, manage the instruments of
cultural production and thus set the terms of public debate—that have lost faith in the
values, or what remains of them, of the West. For many people the very term “Western
civilization” now calls to mind an organized system of domination designed to enforce
conformity to bourgeois values and to keep the victims of patriarchal oppression—women,
children, homosexuals, people of color—in a permanent state of subjection.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 25-26
« [...] ceux qui contrôlent les flux internationaux d’argent et d’informations, qui
président aux fondations philanthropiques et aux institutions d’enseignement
supérieur, gèrent les instruments de la production culturelle et fixent ainsi les
termes du débat public — qui ont perdu foi dans les valeurs de l’Occident, ou
ce qu’il en reste. Pour beaucoup de gens, le terme même de “civilisation
occidentale” appelle aujourd’hui à l’esprit un système organisé de domination
conçu pour imposer la conformité aux valeurs bourgeoises et pour maintenir
les victimes de l’oppression patriarcale — les femmes, les enfants, les
homosexuels et les personnes de couleur — dans un état permanent
d’assujettissement. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 37-38
“Once it was the ‘revolt of the masses’ that was held to threaten social order and the
civilizing traditions of Western culture. In our time, however, the chief threat seems to
come from those at the top of the social hierarchy, not the masses.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 25
« Naguère, c’était la “révolte des masses” qui était considérée comme la
menace contre l’ordre social et la tradition civilisatrice de la culture
occidentale. De nos jours, cependant, la menace principale semble provenir de
ceux qui sont au sommet de la hiérarchie sociale et non pas des masses. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 37
“[...] we have lost our respect for honest manual labor. We think of “creative”
work as a series of abstract mental operations performed in an office,
preferably with the aid of computers, not as the production of food, shelter,
and other necessities. The thinking classes are fatally removed from the
physical side of life—hence their feeble attempt to compensate by embracing a
strenuous regimen of gratuitous exercise. Their only relation to productive labor is that of
consumers. They have no experience of making anything substantial or enduring. They live
in a world of abstractions and images, a simulated world that consists of computerized
models of reality—“hyperreality,” as it has been called—as distinguished from the palpable,
immediate, physical reality inhabited by ordinary men and women. Their belief in the
“social construction of reality”—the central dogma of postmodernist thought—reflects the
experience of living in an artificial environment from which everything that resists human
control (unavoidably, everything familiar and reassuring as well) has been rigorously
excluded. Control has become their obsession. In their drive to insulate themselves against
risk and contingency—against the unpredictable hazards that afflict human life—the
thinking classes have seceded not just from the common world around them but from
reality itself.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 20
« [...] nous avons perdu notre respect pour le travail manuel honnête.
Nous avons du travail “créatif” l’image d’une série d’opérations mentales
abstraites, accomplies dans un bureau, de préférence avec l’aide
d’ordinateurs, et non pas celle de la production de nourriture, d’un toit et
des autres nécessités. Les classes intellectuelles sont fatalement éloignées
du côté physique de la vie — d’où leur dérisoire tentative de compenser
cet éloignement en adhérant à un régime astreignant d’exercices
physiques purement gratuits. Leur seul rapport avec le travail productif est
en tant que consommateurs. Elles n’ont pas l’expérience de la création de
quoi que ce soit de substantiel ou de durable. Elles vivent dans un monde
d’abstractions et d’images, un monde virtuel consistant en modèles
informatisés de la réalité — une “hyper-réalité” comme on l’a appelée
— par opposition à la réalité physique immédiate, palpable, qu’habitent les
femmes et les hommes ordinaires. Leur croyance à la “construction sociale
de la réalité” — dogme central de la pensée post-moderne — reflète
l’expérience de leur vie dans un milieu artificiel d’où a été rigoureusement
banni tout ce qui résiste au contrôle humain (ainsi que, c’est inévitable,
tout ce qui est familier et rassurant). Le contrôle est devenu leur
obsession. Dans leur élan pour s’isoler du risque et de la contingence —
pour se prémunir des aléas imprévisibles qui affligent la vie de l’homme —
les classes intellectuelles se sont séparées non seulement du monde
commun qui les entoure mais aussi de la réalité elle-même. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 32
“In practice, diversity turns out to legitimize a new dogmatism, in which rival
minorities take shelter behind a set of beliefs impervious to rational
discussion. The physical segregation of the population in self-enclosed, racially
homogeneous enclaves has its counterpart in the balkanization of opinion. Each group
tries to barricade itself behind its own dogmas. We have become a nation of
minorities; only their official recognition as such is lacking to complete the process.
[...] Opinion thus becomes a function of racial or ethnic identity, of gender or
sexual preference. Self-selected minority “spokespersons” enforce this conformity by
ostracizing those who stray from the party line—black people, for instance, who “think
white.””
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 17-18
« Dans la pratique, la diversité sert à légitimer un nouveau dogmatisme,
dans lequel des minorités rivales s’abritent derrière un ensemble de
croyances qui échappe à la discussion rationnelle. La ségrégation physique
de la population dans des ghettos racialement homogènes et refermés sur
eux-mêmes a pour pendant la balkanisation de l’opinion. Chaque groupe
essaye de se claquemurer derrière ses propres dogmes. Nous sommes
devenus une nation de minorités ; il ne manque que leur reconnaissance
officielle en tant que telles pour achever le processus. [...] L’opinion
devient ainsi fonction de l’identité raciale ou ethnique, du sexe ou de la
préférence sexuelle. Des “porte-parole” auto-désignés de la minorité
appliquent ce conformisme en frappant d’ostracisme ceux qui dévient de
la ligne du parti — par exemple ces noirs qui “pensent blanc”. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 29-30
“Having discredited the dominant world view, minorities are in a position to replace it with
one of their own or at least to secure equal time for black studies, feminist studies, gay
studies, Chicano studies, and other “alternative” ideologies. Once knowledge is equated
with ideology, it is no longer necessary to argue with opponents on intellectual grounds or
to enter into their point of view. It is enough to dismiss them as Eurocentric, racist, sexist,
homophobic—in other words, as politically suspect.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 12-13
« Ayant discrédité la conception du monde dominante, les minorités sont
en position de la remplacer par une qui leur est propre ou du moins de
s’assurer d’un temps de parole égal pour les black studies, des feminist
studies, des gay studies, des Chicago studies, et autres idéologies
“alternatives”. Une fois que l’on a déclaré que savoir et idéologie étaient
équivalents, il n’est plus nécessaire de débattre avec vos adversaires sur
un terrain intellectuel ou d’entrer dans leur manière de voir. Il suffit de les
diaboliser comme étant eurocentriques, racistes, sexistes, homophobes —
autrement dit, politiquement suspects. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 25
“Suburban shopping malls are no substitute for neighborhoods.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 8
« Les centres commerciaux de la périphérie résidentielle ne peuvent se
substituer aux quartiers d’autrefois. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 20
“It shows how confused we are about the meaning of democracy, how far we have strayed
from the premises on which this country was founded. The word has come to serve simply
as a description of the therapeutic state. When we speak of democracy today, we refer,
more often than not, to the democratization of “self-esteem.” The current catchwords—
diversity, compassion, empowerment, entitlement—express the wistful hope that deep
divisions in American society can be bridged by goodwill and sanitized speech. We are
called on to recognize that all minorities are entitled to respect not by virtue of
their achievements but by virtue of their sufferings in the past. Compassionate
attention, we are told, will somehow raise their opinion of themselves; banning racial
epithets and other forms of hateful speech will do wonders for their morale. In our
preoccupation with words, we have lost sight of the tough realities that cannot be softened
simply by flattering people’s self-image. What does it profit the residents of the South
Bronx to enforce speech codes at elite universities?”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 6-7
« Nous voyons en effet combien la signification de la démocratie s’est
brouillée, combien nous nous sommes éloignés des prémisses sur
lesquelles ce pays a été fondé. Le mot en est arrivé à servir simplement de
description à l’État-thérapeute. Aujourd’hui, quand nous parlons de
démocratie, nous renvoyons le plus souvent à la démocratisation de
l’“estime de soi”. Les scies qui ont cours à l’heure actuelle — diversité,
compassion, (re)prise de pouvoir, (re)prise de statut — expriment l’espoir
indistinct que l’on pourra surmonter les divisions profondes de la société
américaine à force de bonne volonté et de discours aseptisé. On nous
demande de reconnaître que toutes les minorités ont droit au respect non
pas en vertu de ce qu’elles on accompli mais de ce qu’elles ont souffert
dans le passé. On nous explique qu’en prêtant attention avec compassion
à ce qu’elles font et disent, nous aboutirons, sans bien savoir comment, à
améliorer l’opinion qu’elles ont d’elles-mêmes ; l’interdiction des épithètes
raciales et autres formes de discours de haine est censée faire des
miracles pour leur moral. Dans cette obsession pour les mots, nous avons
perdu de vue les dures réalités qu’il est impossible d’adoucir en se
contentant de flatter l’image que les gens se font d’eux-mêmes. Quel
avantage les habitants des bas-fonds du Bronx retirent-ils de l’application
stricte des codes de discours sur les campus des universités de l’élite ? »
— (fr) Christopher Lasch, La révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1979), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2010 (ISBN 9782081236813), p. 18-19
“Those who covet membership in the new aristocracy of brains tend to congregate on the
coasts, turning their back on the heartland and cultivating ties with the international
market in fast-moving money, glamour, fashion, and popular culture. It is a question
whether they think of themselves as Americans at all. Patriotism, certainly, does not rank
very high in their hierarchy of virtues. “Multiculturalism,” on the other hand, suits them to
perfection, conjuring up the agreeable image of a global bazaar in which exotic cuisines,
exotic styles of dress, exotic music, exotic tribal customs can be savored indiscriminately,
with no questions asked and no commitments required. The new elites are at home only in
transit, en route to a high-level conference, to the grand opening of a new franchise, to an
international film festival, or to an undiscovered resort. Theirs is essentially a tourist’s view
of the world—not a perspective likely to encourage a passionate devotion to democracy.”
— (en) Christopher Lasch, The Revolt of the Elites and the Betrayal of Democracy (1994),
éd. W. W. Norton & Company, 1996 (ISBN 9780393313710), p. 6
« Ceux qui aspirent à appartenir à la nouvelle aristocratie des cerveaux
tendent à se regrouper sur les deux côtes, tournant le dos au pays profond, et
cultivant leurs attaches avec le marché international par l’argent hyper-mobile,
le luxe, la haute couture et la culture populaire. On peut se demander s’ils se
pensent encore comme Américains. Il est clair en tout cas que le patriotisme ne
se situe pas très haut dans leur échelle de valeurs. D’un autre côté, le
“multiculturalisme” leur convient parfaitement, car il évoque pour eux l’image
agréable d’un bazar universel, où l’on peut jouir de façon indiscriminée de
l’exotisme des cuisines, des styles vestimentaires, des musiques et de
coutumes tribales du monde entier, le tout sans formalités inutiles et sans qu’il
soit besoin de s’engager sérieusement dans telle ou telle voie. Les nouvelles
élites sociales ne se sentent chez elles qu’en transit, sur le chemin d’une
conférence de haut niveau, de l’inauguration de gala d’un nouveau magasin
franchisé, de l’ouverture d’un festival international de cinéma, ou d’une station
touristique encore vierge. Leur vision du monde est essentiellement celle d’un
touriste — perspective qui a peu de chances d’encourager un amour passionné
pour la démocratie. »
— (fr) Christopher Lasch, La Révolte des élites et la trahison de la
démocratie (1994), trad. Christian Fournier, éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2009 (ISBN 9782081236813), p. 18
« La peur d’un homme asservi par ses machines a cédé la place à l’espoir que
l’homme deviendra quelque chose comme une machine à par entière. »
— « The Great American Variety Show », Christopher Lasch, The New York Review, 2 février
1984
“A widespread revolt against reason is as much a feature of our world as our faith in
science and technology. Archaic myths and superstitions have reappeared in the very heart
of the most modern, scientifically enlightened, and progressive nations in the world. [...]
New Age spirituality no less than technological utopianism, is rooted in
primary narcissism. If the technological fantasy seeks to restore the infantile
illusion of self-sufficiency, the New Age movement seeks to restore the illusion
of symbiosis, a feeling of absolute oneness with the world. [...]
New Age spirituality may take strange shapes, but it is a prominent feature of our cultural
landscape, like fundamentalism itself, which has grown steadily in recent years.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1991, p. 245-248
« Notre monde se définit tout autant par une profonde révolte contre la raison
que par notre foi en la science et en la technologie. Des mythes et des
superstitions archaïques ont réapparu au sein même des nations les plus
modernes, les plus éclairées scientifiquement et les plus progressistes du
monde. [...]
Le spiritualisme New Age, tout comme l’utopie technologique, sont
enracinés dans le narcissisme primaire. Si le fantasme technologique
cherche à restaurer l’illusion infantile de l’autonomie, le mouvement New
Age cherche à restaurer l’illusion de la symbiose, le sentiment de ne faire
qu’un avec le monde. [...]
La spiritualité New Age peut prendre d’étranges formes, mais elle est une
caractéristique éminente de notre paysage culturel, tout comme le
fondamentalisme, lequel n’a cessé de progresser ces dernières années. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 303-306
“But at the same time that our society makes it more and more difficult to find
satisfaction in love and work, it surrounds the individual with manufactured
fantasies of total gratification.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1991, p. 231
« La société rend de plus en plus difficile à l’individu de trouver
satisfaction dans l’amour et le travail, mais elle l’entoure simultanément
de fantasmes fabriqués qui sont censés lui procurer une gratification
totale. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 285
“[...] the prolongevity movement (together with futurology in general) itself reflects
the stagnant character of late capitalist culture. It arises not as a natural response
to medical improvements that have prolonged life expectancy but from changing social
relations and social attitudes, which cause people to lose interest in the young and in
posterity, to cling desperately to their own youth, to seek by every possible means to
prolong their own lives, and to make way only with the greatest reluctance for new
generations. [...] the dread of age originates not in a “cult of youth” but in a cult
of the self. Not only in its narcissistic indifference to future generations but in its
grandiose vision of a technological Utopia without old age, the prolongevity movement
exemplifies the fantasy of “absolute, sadistic power” which, according to Kohut, so deeply
colors the narcissistic outlook. Pathological in its psychological origins and inspiration,
superstitious in its faith in medical deliverance, the prolongevity movement expresses in
characteristic form the anxieties of a culture that believes it has no future.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1991, p. 216-217
« [...] le mouvement en faveur de la prolongation de la vie (tout comme la
futurologie en général) est le propre reflet de la stagnation de la culture
du capitalisme finissant. Il n’est pas une réponse naturelle aux progrès
médicaux qui ont prolongé l’espérance de vie. Il provient de l’évolution
des relations et des attitudes sociales, entraînant les hommes à perdre
tout intérêt pour les jeunes et pour leur postérité, à s’accrocher avec
désespoir à leur propre jeunesse, à chercher à tout prix la prolongation de
leur propre vie, et à ne s’effacer qu’avec une extrême répugnance devant
les nouvelles générations. [...] la crainte du grand âge ne provient pas
d’un “culte de la jeunesse”, mais d’un culte du moi. Par son indifférence
narcissique à l’avenir des générations futures, et tout autant par sa vision
grandiose d’une utopie technologique sans vieillesse, le mouvement pour
la prolongation de la vie est un bon exemple du fantasme de “pouvoir
absolu et sadique” qui, selon Kohut, imprègne si profondément la vision du
monde de Narcisse. L’inspiration et les origines psychologiques de ce
mouvement sont pathologiques comme est superstitieuse sa foi dans le
salut par la médecine : il exprime, sous une forme caractéristique, les
angoisses d’une culture qui croit n’avoir d’avenir. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 268-269
“The emergence of the narcissistic personality reflects among other things a drastic shift in
our sense of historical time. Narcissism emerges as the typical form of character structure
in a society that has lost interest in the future. Psychiatrists who tell parents not to live
through their offspring; married couples who postpone or reject parenthood, often for
good practical reasons; social reformers who urge zero population growth, all testify to a
pervasive uneasiness about reproduction—to widespread doubts, indeed, about whether
our society should reproduce it-self at all. Under these conditions, the thought of our
eventual supersession and death becomes utterly insupportable and gives rise to attempts
to abolish old age and to extend life indefinitely. When men find themselves
incapable of taking an interest in earthly life after their own death, they wish
for eternal youth, for the same reason they no longer care to reproduce
themselves. When the prospect of being superseded becomes intolerable, parenthood
itself, which guarantees that it will happen, appears almost as a form of self-destruction.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1991, p. 211
« L’émergence de la personnalité narcissique reflète, entre autres, une
évolution radicale dans notre façon de percevoir le temps historique. Le
narcissisme apparaît comme la forme typique de la structure du caractère
dans une société qui a perdu tout intérêt pour l’avenir. Les psychiatres qui
incitent les parents à ne pas vivre par procuration au travers de leurs
enfants, les couples mariés qui repoussent ou refusent carrément le
moment de devenir parents, souvent pour des raisons pratiques justifiées,
les réformateurs sociaux qui recommandent le degré zéro de la croissance
démographique, tous témoignent d’un malaise général à l’égard de la
reproduction — qui va, souvent, jusqu’à mettre en doute le droit de la
société elle-même à se perpétuer. Dans ces conditions, la pensée de notre
propre évincement et de notre mort devient littéralement insupportable et
suscite des tentatives de suppression de la vieillesse et d’extension
illimitée de la vie. Lorsque les hommes sont dans l’incapacité de trouver
un intérêt quelconque à la vie terrestre qui suivra leur mort, ils rêvent
d’une jeunesse éternelle, et la raison qui les y incite est la même que celle
qui leur fait perdre le goût de se recréer dans leurs enfants. Quand la
perspective de disparaître devient intolérable, le fait même de devenir
parent, qui en scelle le destin ressemble quasiment à de
l’autodestruction. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 262-263
“Democracy and feminism have now stripped the veil of courtly convention from the
subordination of women, revealing the sexual antagonisms formerly concealed by the
“feminine mystique.” Denied illusions of comity, men and women find it more
difficult than before to confront each other as friends and lovers, let alone as
equals.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1991, p. 190
« Démocratie et féminisme ont maintenant arraché le masque et on mis à
nu les antagonismes sexuels jadis cachés par la “mystique
féminine”. Privés des illusions que conférait la courtoisie, hommes et
femmes éprouvent plus de difficultés qu’auparavant à établir des rapports
amicaux ou amoureux, sans même parler de relations entre égaux. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 238
“The decline of childrearing as a major preoccupation has freed sex from its bondage to
procreation and made it possible for people to value erotic life for its own sake.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1991, p. 187-188
« [...] procréation et sexualité ont été dissociées, et la vie érotique s’est
trouvée ainsi libérée et valorisée pour elle-même. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 236
“Society reinforces these patterns not only through “indulgent education” and general
permissiveness but through advertising, demand creation, and the mass culture of
hedonism. At first glance, a society based on mass consumption appears to encourage
self-indulgence in its most blatant forms. Strictly considered, however, modern advertising
seeks to promote not so much self-indulgence as self-doubt. It seeks to create needs, not
to fulfill them; to generate new anxieties instead of allaying old ones. By surrounding the
consumer with images of the good life, and by associating them with the glamour of
celebrity and success, mass culture encourages the ordinary man to cultivate extraordinary
tastes, to identify himself with the privileged minority against the rest, and to join them, in
his fantasies, in a life of exquisite comfort and sensual refinement. Yet the propaganda of
commodities simultaneously makes him acutely unhappy with his lot. By fostering
grandiose aspirations, it also fosters self-denigration and self-contempt. The culture of
consumption in its central tendency thus recapitulates the socialization earlier provided by
the family.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1991, p. 180-181
« La société renforce ces types de comportement, non seulement par
“l’éducation indulgente” et l’attitude permissive qui prévaut, mais aussi par la
publicité, la création des besoins et la culture hédoniste de masse. À première
vue, on pourrait croire qu’une société fondée sur la consommation de masse
encouragerait, chez l’individu, la gratification immodérée de tous ses désirs.
Mais, à y bien regarder, on voit que la publicité moderne cherche à promouvoir
non pas tant la satisfaction que le doute. Elle veut créer des besoins sans les
satisfaire, engendrer des anxiétés nouvelles au lieu d’alléger les anciennes. La
culture de masse entoure le consommateur d’images de la “bonne vie”, qu’elle
associe à la fascination de la célébrité et de la réussite ; elle encourage ainsi
l’homme ordinaire à cultiver des goûts extraordinaires, à s’identifier à la
minorité privilégiée (en prenant parti contre “les autres”), et à partager avec
celle-ci, dans ses fantasmes, une existence de confort exquis et de raffinement
sensuel. Mais, en même temps, la propagande de la marchandise le rend très
malheureux de son sort. En encourageant les aspiration grandioses, elle
favorise du même coup le dénigrement et le mépris de soi. La tendance
primordiale de la consommation de masse est ainsi de récapituler le processus
de socialisation engendré, précédemment, par la famille. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 228
“The parent’s abdication of authority intensifies rather than softens the child’s fear of
punishment, while identifying thoughts of punishment more firmly than ever with the
exercise of arbitrary, overwhelming violence. [...] It is startling for people in a permissive
culture to learn that not to be given pain can be felt as a deprivation. Yet it is more painful
children for some children to bear guilt unpunished than to get a spanking.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1991, p. 180
« L’abdication de l’autorité par les parents intensifie la peur de la punition au
lieu de l’affaiblir ; elle ancre plus fermement que jamais chez l’enfant l’idée que
la punition est un acte arbitraire, d’une violence irrésistible. [...] Dans une
société permissive, les gens sont très surpris d’apprendre que d’être privé
d’une souffrance peut être ressenti comme une frustration. Pourtant, il est
beaucoup plus douloureux, pour certains enfants, d’avoir à porter une
culpabilité impunie que de recevoir une fessée. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 227
“[...] advertising encourages men as well as women to see the creation of the self
as the highest form of creativity.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 86
« [...] la publicité encourage les hommes autant que les femmes à
considérer la création de leur moi comme la plus haute forme de
créativité. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 130
“The degeneration of politics into spectacle has not only transformed policy
making into publicity, debased political discourse, and turned elections into
sporting events in which each side claims the advantage of “momentum,” it has also
made it more difficult than ever to organize a political opposition. When the images of
power overshadow the reality, those without power find themselves fighting
phantoms. Particularly in a society where power likes to present itself in the
guise of benevolence—where government seldom resorts to the naked use of
force—it is hard to identify the oppressor, let alone to personify him, or to
sustain a burning sense of grievance in the masses.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 81-82
« La dégénérescence de la politique en spectacle a transformé les
programmes d’action en publicité, avili le commentaire politique, et
tourné les élections en événements sportifs, chaque parti proclamant que
“l’élan” est de son côté. Elle a aussi rendu plus difficile que jamais
l’organisation d’une opposition politique. Lorsque les images du pouvoir
éclipsent sa réalité, ceux qui sont sans pouvoir se battent contre des
fantômes. Dans une société où le pouvoir aime se présenter sous un aspect
débonnaire — le gouvernement n’ayant que rarement recours à
l’utilisation brutale de la force — il est particulièrement difficile
d’identifier l’oppresseur, plus encore de le personnifier, ou de maintenir
un sentiment brûlant d’injustice dans la population. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 118-119
“The demands of the mass-consumption economy have made the work ethic obsolete
even for workers. Formely the guardians of public health and morality urges the worker to
labor as a moral obligation; now they teach him to labor so that he can partake of the
fruits of consumption.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 73
« Les demandes de l’économie de la consommation de masse ont rendu
caduque la morale du travail, même pour les ouvriers. Auparavant, les gardiens
de la santé et la moralité publiques prêchaient l’obligation morale du travail ;
maintenant, ils pressent l’ouvrier de travailler pour jouir des fruits de la
consommation. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 110
“In a simpler time, advertising merely called attention to the product and extolled its
advantages. Now it manufactures a product of its own: the consumer, perpetually
unsatisfied, restless, anxious, and bored. Advertising serves not so much to advertise
products as to promote consumption as a way of live. It “educates” the masses into
an unappeasable appetite not only for goods but for new experiences and personal
fulfillment. It upholds consumption as the answer to the age-old discontents of loneliness,
sickness, weariness, lack of sexual satisfaction; at the same time it creates new forms of
discontent peculiar to the modern age. It plays seductively on the malaise of industrial
civilization. Is your job boring and meaningless? Does it leave you with feelings of futility
and fatigue? Is your life empty? Consumption promises to fill the aching void; hence the
attempt to surround commodities with an aura of romance; with allusions to exotic places
and vivid experiences; and with images of females breasts from which all blessings flow.
The propaganda of commodities serves a double function. First, it upholds
consumption as an alternative to protest or rebellion. [...] The tired worker instead
of attempting to change the conditions of his work, seeks renewal in brightening his
immediate surroundings with new goods and services.
In the second place, the propaganda of consumption turns alienation itself into a
commodity. It addresses itself to the spiritual desolation of modern life and proposes
consumption as the cure. It not only promises to palliate all the old unhappiness to which
flesh is heir; it creates or exacerbates new forms of unhappiness — personal insecurity,
status anxiety, anxiety in parents about their ability to satisfy the needs of the young.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 72-73
« À une époque moins complexe, la publicité se contentait d’attirer
l’attention sur un produit et de vanter ses avantages. Maintenant, elle
fabrique son propre produit : le consommateur, être perpétuellement
insatisfait, agité, anxieux, blasé. La publicité sert moins à lancer un
produit qu’à promouvoir la consommation comme style de vie. Elle
“éduque” les masses à ressentir un appétit insatiable, non seulement de
produits, mais d’expériences nouvelles et d’accomplissement personnel.
Elle vante la consommation, remède universel aux maux familiers que
sont la solitude, la maladie, la fatigue, l’insatisfaction sexuelle. Mais
simultanément, elle crée de nouvelles formes de mécontentements,
spécifiques de l’âge moderne. Elle utilise et stimule le malaise de la
civilisation industrielle. Votre travail est ennuyeux et sans signification ? Il
vous donne un sentiment de fatigue et de futilité ? Votre existence est
vide ? Consommez donc, cela comblera ce vide douloureux. D’où la
volonté d’envelopper la marchandise d’une aura romantique d’allusions à
des lieux exotiques, à des expériences merveilleuses, et de l’affubler
d’images de seins féminins, d’où coulent tous les bien-faits.
La propagande de la marchandise sert une double fonction.
Premièrement, elle affirme la consommation comme solution de
remplacement à la protestation et à la rébellion. [...] Le travailleur fatigué,
au lieu de tenter de changer les conditions de son travail, cherche à se
revigorer en renouvelant le cadre de son existence, au moyen de
nouvelles marchandises et de services supplémentaires.
En second lieu, la propagande de la marchandise, ou de la consommation de
celle-ci, transforme l’aliénation elle-même en une marchandise. [...] Elle promet
de pallier tous les malheurs traditionnels, mais elle crée aussi, ou exacerbe, de
nouvelles manières d’être malheureux : l’insécurité personnelle, l’anxiété
quant à la place de l’individu dans la société, l’angoisse qu’ont les parents de
ne pas être capables de satisfaire les besoins de leurs enfants. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 109
“In some ways middle-class society has become a pale copy of the black ghetto,
as the appropriation of its language would lead us to believe.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 67
« [...] la société bourgeoise américaine est devenue une pâle copie du
ghetto noir, et l’appropriation de son langage peut paraître une illustration
de cette mutation. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 103
“[...] Robinson Crusoe embodied the ideal type of economic man, the hero of
bourgeois society in its ascendancy [...].
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 53
« [...] Robinson Crusoé incarne le type idéal de l’homme économique,
héros de la société bourgeoise ascendante [...]. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 87
“We live in a swirl of images and echoes that arrest experience and play it
back in slow motion. Cameras and recording machines not only transcribe
experience but alter its quality [...]. Life presents itself as a succession of images or
electronic signals, of impressions recorded and reproduced by means of photography,
motion pictures, television, and sophisticated recording devices. Modern life is so
thoroughly mediated by electronic images that we cannot help responding to others as if
their actions—and our own—were being recorded and simultaneously transmitted to an
unseen audience or stored up for close scrutiny at some later time.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 47
« Nous vivons dans un tourbillon d’images et d’échos qui interrompt
l’expérience et la rejoue au ralenti. Les caméras et les machines à
enregistrer ne transcrivent pas seulement le vécu, elles en altèrent la
qualité. [...] La vie se présente comme une succession d’images ou de
signaux électroniques, d’impressions enregistrées et reproduites par la
photographie, le cinéma et la télévision, et des moyens d’enregistrement
perfectionnés. La vie moderne est si complètement médiatisée par les
images électroniques qu’on ne peut s’empêcher de réagir à autrui comme
si leurs actions — et les nôtres — étaient enregistrées et transmises
simultanément à une audience invisible ou emmagasinées pour être
scrutées plus tard. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 80
“Our society, far from fostering private life at the expense of public life, has
made deep and lasting friendships, love affairs, and marriages increasingly
difficult to achieve. As social life becomes more and more warlike and barbaric, personal
relations, which ostensibly provide relief from these conditions, take on the character of
combat.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 31
« Loin d’encourager la vie privée aux dépens de la vie publique, notre
société fait qu’il est de plus en plus difficile, pour un individu, de
connaître une amitié profonde et durable, un grand amour, un mariage
harmonieux. À mesure que la vie sociale devient plus brutale et barbare,
les relations personnelles qui, ostensiblement, devraient être préservées,
prennent un caractère de combat. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 61
“The contemporary climate is therapeutic, not religious. People today hunger not
for personal salvation, let alone for the restoration of an earlier golden age, but for the
feeling, the momentary illusion, of personal well-being, health, and psychic security. [...]
Having displaced religion as the organizing framework of American culture, the therapeutic
outlook threatens to displace politics as well, the last refuge of ideology.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 7-13
« L’atmosphère actuelle n’est pas religieuse mais thérapeutique. Ce que
les gens cherchent avec ardeur aujourd’hui, ce n’est pas le salut
personnel, encore moins le retour d’un âge d’or antérieur, mais la santé, la
sécurité psychique, l’impression, l’illusion momentanée d’un bien-être
personnel. [...]
Ayant remplacé la religion, comme cadre organisateur de la culture américaine,
la vision thérapeutique menace également de remplacer la politique, dernier
refuge de l’idéologie. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), Préface, p. 33-41
“To live for the moment is the prevailing passion—to live for yourself, not for
your predecessors or posterity. We are fast losing the sense of historical
continuity, the sense of belonging to a succession of generations originating in the past
and stretching into the future. It is the waning of the sense of historical time [...].”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), p. 5
« Vivre dans l’instant est la passion dominante — vivre pour soi-même, et
non pour ses ancêtres ou la postérité. Nous sommes en train de perdre le
sens de la continuité historique, le sens d’appartenir à une succession de
générations qui, nées dans le passé, s’étendent vers le futur. C’est le
déclin de sens du temps historique. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), p. 31
“[...] the devaluation of the past has become one of the most important
symptoms of the cultural crisis to which this book addresses itself, often drawing on
historical experience to explain what is wrong with our present arrangements. A denial of
the past, superficially progressive and optimistic, proves on closer analysis to
embody the dispair of a society that cannot face the future.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), Preface, p. xviii
« [...] la dépréciation du passé est devenue l’un des symptômes les plus
significatifs de la crise culturelle à laquelle ce livre est consacré. Je ferai
souvent appel à l’expérience historique pour expliquer nos errements
présents. Le refus du passé, attitude superficiellement progressiste et
optimiste, se révèle, à l’analyse, la manifestation du désespoir d’une
société incapable de faire face à l’avenir. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), Préface, p. 27
“The new narcissist is haunted not by guilt but by anxiety. He seeks not to
inflict his own certainties on others but to find a meaning in life. Liberated
from the superstitions of the past, he doubts even the reality of his own
existence. Superficially relaxed and tolerant, he finds little use for dogmas of racial and
ethnic purity but at the same time forfeits the security of group loyalties and regards
everyone as a rival for the favors conferred by a paternalistic state. [...] He extols
cooperation and teamwork while harboring deeply antisocial impulses. He praises respect
for rules and regulations in the secret belief that they do not apply to himself.
The narcissist has no interest in the future because, in part, he has so little
interest in the past.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), Preface, p. xvi
« Le nouveau Narcisse est hanté, non par la culpabilité mais par l’anxiété.
Il ne cherche pas à imposer ses propres certitudes aux autres ; il cherche
un sens à sa vie. Libéré des superstitions du passé, il en arrive à douter de
la réalité de sa propre existence. Superficiellement détendu et tolérant, il
montre peu de goût pour les dogmes de pureté raciale ou ethnique ; mais
il se trouve également privé de la sécurité que donne la loyauté du groupe
et se sent en compétition avec tout le monde pour l’obtention des faveurs
que dispense l’État paternaliste. [...] Il prône la coopération et le travail en
équipe tout en nourrissant des impulsions profondément antisociales. Il
exalte le respect des règlements, secrètement convaincu qu’ils ne
s’appliquent pas à lui. [...]
Si Narcisse ne se soucie pas de l’avenir, c’est, en partie, parce qu’il
s’intéresse peu au passé. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), Préface, p. 24-25
“[...] the culture of competitive individualism [...] in its decadence has carried
the logic of individualism to the extreme of a war of all against all the pursuit
of happiness to the dead end of a narcissistic preoccupation with the self.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), Preface, p. xv
« [...] la culture de l’individualisme compétitif [...] dans sa décadence, a
poussé la logique de l’individualisme jusqu’à l’extrême de la guerre de
tous contre tous, et la poursuite du bonheur jusqu’à l’impasse d’une
obsession narcissique de l’individu par lui-même. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), Préface, p. 24
“Many radicals still direct their indignation against the authoritarian family, repressive
sexual morality, literary censorship, the work ethic, and other foundations of bourgeois
order that have been weakened or destroyed by advanced capitalism itself. These radicals
do not see that the “authoritarian personality” no longer represents the prototype of the
economic man. Economic man himself has given way to the psychological man of our
times—the final product of bourgeois individualism.”
— (en) Christopher Lasch, The Culture of Narcissism (1979), éd. W. W. Norton &
Company, 1979 (ISBN 9780393307382), Preface, p. xvi
« De nombreux radicaux s’insurgent encore contre la famille autoritaire, le
moralisme antisexuel, la censure littéraire, la morale du travail et autres
piliers de l’ordre bourgeois, alors que ceux-ci ont déjà été sapés ou
détruits par le capitalisme avancé. Ces radicaux ne voient pas que la
“personnalité autoritaire” n’est plus le prototype de l’homme économique.
Ce dernier a lui-même cédé la place à l’homme psychologique de notre
temps — dernier avatar de l’individualisme bourgeois. »
— (fr) Christopher Lasch, La Culture du narcissisme (1979), trad. Michel L.
Landa, éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2008 (ISBN
9782081218758), Préface, p. 24
GUSTAVE LE BON
« Tout peuple qui se développe avec excès devient fatalement envahisseur et destructeur
des peuples dont la fécondité est moindre. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 112
« Un peuple envahissant progressivement une nation avec ses produits arrive à la dominer
aussi complètement que s’il l’avait conquise par les armes. La dépendance économique
crée vite la dépendance politique. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 104
« La vieillesse d’un peuple commence lorsque, amolli par le bien-être et devenu incapable
d’effort, il substitue l’égoïsme individuel à l’égoïsme collectif, cherche à obtenir un
maximum de tranquillité avec un minimum de travail et se montre incapable de s’adapter
aux nécessités nouvelles que les progrès d’une civilisation font toujours surgir. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 95
« Les peuples dont la civilisation a trop adouci les mœurs et paralysé les
qualités de caractère lutteront toujours difficilement contre des races douées à
la fois de subconscience bestiale, de discipline rigide, du désir de conquêtes et
de l’amour du pillage. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 73
« La mort n’est qu’un déplacement d’individualités. L’hérédité fait circuler les mêmes âmes
à travers la suite des générations d’une même race. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 49
« Les qualités de caractère qui font la grandeur d’un peuple sont l’oeuvre de ses aïeux.
L’âme des vivants est façonnée par celle des morts. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 48
« Défendre la patrie, c’est pour un peuple défendre à la fois son passé, son
présent et son avenir. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 45
« La patrie n’est pas constituée seulement par le sol où nous vivons, mais aussi par les
ombres des aïeux qui continuent à vivre en nous et contribuent à élaborer notre
destinée. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 45
« La race est la pierre angulaire sur laquelle repose l’équilibre des nations. Elle représente
ce qu’il y a de plus stable dans la vie d’un peuple. Des croisements répétés pouvant la
dissocier, l’influence des étrangers est fort dangereuse. De tels croisements détruisirent
jadis la grandeur de Rome. Elle perdit sa puissance en perdant son âme. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 44
« L’âme d’une race régit sa destinée. Il faut des générations pour la créer, et
parfois peu d’années pour la perdre. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 43
« Ce n’est pas avec la raison, et c’est le plus souvent contre elle, que s’édifient les croyances
capables d’ébranler le monde. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 22
« La leçon des faits n’instruit pas l’homme prisonnier d’une croyance ou d’une formule. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 15
« Certains sentiments ne peuvent être combattus que par des sentiments identiques. On
ne domine pas la méchanceté, la violence et la mauvaise foi avec de l’honnêteté et des
scrupules. »
— Gustave Le Bon, Hier et demain (1918), éd. Flammarion, 1918, p. 11
« Ce n’est pas aux lueurs de la raison qu’a été transformé le monde. [...] les systèmes
philosophiques, bâtis sur des raisonnements, n’ont joué qu’un rôle insignifiant
dans la vie des peuples et n’ont eu qu’une existence éphémère. Ils ne proposent en
effet aux foules que des arguments, alors que l’âme humaine ne demande que des
espérances. »
— Gustave Le Bon, Psychologie du socialisme (1898), éd. Les amis de Gustave Le Bon,
1984, p. 16
« Avec la perte définitive de l’idéal ancien, la race finit par perdre entièrement son âme. Elle
n’est plus qu’une poussière d’individus isolés et redevient ce qu’elle était à son point de
départ : une foule. Elle en a tous les caractères transitoires sans consistance et sans
lendemain. La civilisation n’a plus aucune fixité et est à la merci de tous les hasards. La
plèbe est reine et les barbares avancent. La civilisation peut sembler brillante encore parce
qu’elle possède la façade extérieure qu’un long passé a créée, mais c’est en réalité un
édifice vermoulu que rien ne soutient plus et qui s’effondrera au premier orage.
Passer de la barbarie à la civilisation en poursuivant un rêve, puis décliner et
mourir dès que ce rêve a perdu sa force, tel est le cycle de la vie d’un peuple. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 125
« Les inconvénients du suffrage universel sont évidemment trop visibles pour être
méconnus. On ne saurait contester que les civilisations furent l’œuvre d’une petite minorité
d’esprits supérieurs constituant la pointe d’une pyramide, dont les étages, s’élargissant à
mesure que décroît la valeur mentale, représentent les couches profondes d’une nation. La
grandeur d’une civilisation ne peut assurément dépendre du suffrage d’éléments inférieurs,
représentant uniquement le nombre. Sans doute encore les suffrages des foules sont
souvent bien dangereux. Ils nous ont déjà amené plusieurs invasions ; et avec le triomphe
du socialisme, les fantaisies de la souveraineté populaire nous coûteront sûrement
beaucoup plus cher encore. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 111
« Aujourd’hui devant la discussion et l’analyse, toute opinion perd son prestige ; ses angles
s’usent vite, et il survit bien peu d’idées capables de nous passionner. L’homme moderne
est de plus en plus envahi par l’indifférence. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 90
« C’est un symptôme bien curieux de voir de nos jours papes, rois et empereurs, se
soumettre au mécanisme de l’interview, pour exposer leur pensée, sur un sujet donné, au
jugement des foules. On a pu dire jadis que la politique n’était pas chose de sentiment.
Pourrait-on le dire actuellement encore en la voyant prendre pour guide les impulsions de
foules mobiles ignorant la raison, et dirigées seulement par le sentiment ? »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 88-89
« Les révolutions qui commencent sont en réalité des croyances qui finissent. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 84
« C’est toujours avec fureur que les croyants brisent les statues de leurs
anciens dieux. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 82
« Laissons donc la raison aux philosophes, mais ne lui demandons pas trop
d’intervenir dans le gouvernement des hommes. Ce n’est pas avec la raison, et
c’est souvent malgré elle, que se sont créés des sentiments tels que l’honneur,
l’abnégation, la foi religieuse, l’amour de la gloire et de la patrie, qui ont été
jusqu’ici les grands ressorts de toutes les civilisations. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 67
« Avec tous ses progrès, la philosophie n’a pu encore offrir aux peuples aucun idéal
capable de les charmer. Les illusions leur étant indispensables, ils se dirigent d’instinct,
comme l’insecte allant à la lumière, vers les rhéteurs qui leur en présentent. Le grand
facteur de l’évolution des peuples n’a jamais été la vérité, mais l’erreur. Et si le socialisme
voit croître aujourd’hui sa puissance, c’est qu’il constitue la seule illusion vivante encore.
Les démonstrations scientifiques n’entravent nullement sa marche progressive. Sa
principale force est d’être défendu par des esprits ignorant assez les réalités des choses
pour oser promettre hardiment à l’homme le bonheur. L’illusion sociale règne actuellement
sur toutes les ruines amoncelées du passé, et l’avenir lui appartient. Les foules n’ont
jamais eu soif de vérités. Devant les évidences qui leur déplaisent, elles se détournent,
préférant déifier l’erreur, si l’erreur les séduit. Qui sait les illusionner est aisément leur
maître ; qui tente de les désillusionner est toujours leur victime. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 64
« Les hommes de la Révolution, s’imaginant copier les Grecs et les Romains, ne faisaient
que donner à des mots anciens un sens qu’ils n’eurent jamais. Quelle ressemblance pouvait
exister entre les institutions des Grecs et celles que désignent de nos jours les mots
correspondants ? Qu’était alors une république, sinon une institution essentiellement
aristocratique formée d’une réunion de petits despotes dominant une foule d’esclaves
maintenus dans la plus absolue sujétion. Ces aristocraties communales, basées sur
l’esclavage, n’auraient pu exister un instant sans lui. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 61
« Au lieu de préparer des hommes pour la vie, l’école ne les prépare qu’à des fonctions
publiques où la réussite n’exige aucune lueur d’initiative. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 53
« L’idée que les institutions peuvent remédier aux défauts des sociétés, que le progrès des
peuples résulte du perfectionnement des constitutions et des gouvernements et que les
changements sociaux s’opèrent à coups de décrets ; cette idée, dis-je, est très
généralement répandue encore. La Révolution française l’eut pour point de départ et les
théories sociales actuelles y prennent leur point d’appui. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 49
« Les hommes les plus dissemblables par leur intelligence ont des instincts, des passions,
des sentiments parfois identiques. Dans tout ce qui est matière de sentiment : religion,
politique, morale, affections, antipathies, etc., les hommes les plus éminents ne dépassent
que bien rarement le niveau des individus ordinaires. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 12
« Les foules ne veulent plus aujourd’hui des dieux que leurs anciens maîtres ont reniés hier
et contribué à briser. Les fleuves ne remontent pas vers leurs sources.
La science n’a fait aucune banqueroute et n’est pour rien dans l’anarchie
actuelle des esprits ni dans la puissance nouvelle qui grandit au milieu de cette
anarchie. Elle nous a promis la vérité, ou au moins la connaissance des
relations accessibles à notre intelligence ; elle ne nous a jamais promis ni la
paix ni le bonheur. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 3
« L’âge où nous entrons sera véritablement l’ère des foules. [...] Ce n’est plus dans
les conseils des princes, mais dans l’âme des foules que se préparent les destinées des
nations. »
— Gustave Le Bon, Psychologie des foules (1895), éd. Presses Universitaires de France, coll.
« Quadrige », 2013 (ISBN 9782130620624), p. 2
« [...] l’histoire d’un peuple ne dépend pas de ses institutions mais de son caractère, c’est-à-
dire de sa race. »
— Gustave Le Bon, Lois psychologiques de l’évolution des peuples (1894), éd. Kontre
Kulture, 2022, p. 119
« Les plus sublimes éclosions du génie humain ressemblent aux fleurs des arbres qui tirent
toute leur beauté, toute leur fraîcheur, tout leur éclat, des noires racines lointaines, enfouies
dans le sol ténébreux. »
— Gustave Le Bon, Rôle des Juifs dans la civilisation (1888), éd. Kontre Kulture, 2023, p.
« L’inceste, avec sa sœur, avec sa propre mère, le commerce des hommes entre eux et des
femmes entre elles, la bestialité sous toutes ses formes, tels étaient les péchés les plus
habituels de cette race, dont Tacite a remarqué l’insatiable sensualité. »
— Gustave Le Bon, Rôle des Juifs dans la civilisation (1888), éd. Kontre Kulture, 2023, p. 51
« L’usure qui, de tout temps, fut une pratique favorite chez les fils d’Israël vis-à-vis des
étrangers, était rigoureusement interdite entre eux. »
— Gustave Le Bon, Rôle des Juifs dans la civilisation (1888), éd. Kontre Kulture, 2023, p. 49
« Les Israélites demeurèrent, jusqu’aux derniers temps de leur histoire, à un degré très
inférieur de civilisation confinant à la pure barbarie. »
— Gustave Le Bon, Rôle des Juifs dans la civilisation (1888), éd. Kontre Kulture, 2023, p. 43
« Les Juifs n’ont possédé ni arts, ni sciences, ni industrie, ni rien de ce qui constitue une
civilisation. Ils n’ont jamais apporté la plus faible contribution à l’édification des
connaissances humaines. »
— Gustave Le Bon, Rôle des Juifs dans la civilisation (1888), éd. Kontre Kulture, 2023, p. 9
« Les conceptions de l’esprit sémitique ont la tournure grandiose, monotone et vague des
horizons du désert. [...] Beaucoup de peuples civilisés anciens ont plus ou moins adopté
une sorte de monothéisme local, en ce sens que chaque ville reconnaissait généralement
un dieu principal — parfois une trinité comme les Égyptiens à Thèbes ou comme plus tard
les chrétiens — dominant une foule plus ou moins grande de divinités inférieures tout à
fait analogues aux innombrables légions d’anges et de saints du panthéon catholique
[...]. Le monothéisme absolu a toujours répugné à l’ardente imagination
créatrice des Aryens, il est resté le dogme des Sémites nomades, et ce dogme, ils
le font aisément adopter par des populations les plus inférieures parce qu’il n’y en a pas de
plus simple ni de plus aisément compréhensible pour un esprit peu développé. »
— « Rôle des Juifs dans l’histoire de la civilisation », Gustave Le Bon, Revue
scientifique, nº 2e semestre 1888, 29 septembre 1888
—
JEAN MABIRE
« Ils marchent et ils chantent. Ils sont des millions dans la nuit froide de janvier. Mais ils
sont morts. Et nous ne sommes que quelques-uns. Mais nous sommes vivants. Et nous ne
lâcherons pas nos épées et nous n’éteindrons pas nos torches. »
— Jean Mabire, La Torche et le Glaive (1994)
« Nous perdrons si nous nous obstinons à ne pas comprendre où est le champ de bataille :
dans le monde entier et dans le cœur de chaque homme. »
— Jean Mabire, La Torche et le Glaive (1994)
« Je ne vois pas pourquoi il faudrait protéger les races animales et laisser périr les peuples
tels qu’ils ont été façonnés par des milliers d’années de longue patience.
La véritable écologie, c’est de sauvegarder les baleines. Mais aussi les Touaregs
et les Zoulous, les Basques et les Serbes, les Flamands et les Bretons, les
Écossais et les Estoniens. »
— Jean Mabire, La Torche et le Glaive (1994)
« Nous avons perdu notre âme parce que nous avons perdu le sens des valeurs communes
qui formaient l’antique “sagesse” de nos peuples. Il nous faut faire revivre l’âme des
Hyperboréens et “redéfinir” Dieu. Car le sacré ne se trouve pas hors de nous, mais en nous.
Car Dieu n’est pas du Ciel, mais de la Terre. Car il ne nous attend pas après la mort, mais
nous offre la création de la vie. Dieu n’est pas surnaturel et il n’est pas transcendant. Il est,
au contraire, la Nature et la Vie. Dieu reste présent dans les mystères de sa création. Il est
dans le soleil et dans les étoiles, dans le jour et dans la nuit, dans les arbres et dans les
flots. Dieu naît avec les fleurs et meurt avec les feuilles. Dieu respire avec le vent et nous
parle dans le silence de la nuit. Il est l’aurore et le crépuscule. Et la brume. Et l’orage.
Dieu s’incarne dans la Nature. La Nature s’épanouit sur la Terre. La Terre se perpétue
dans le Sang.
Nous savons, depuis Héraclite, que la vie est un combat et que la paix n’est que la
mort. Notre religion se veut d’abord culte des héros, des guerriers et des
athlètes. Nous célébrons, depuis les Grecs, les hommes différents et inégaux.
Notre monde est celui du combat et du choix, non celui de l’égalité. L’univers
n’est pas une fin mais un ordre. La Nature diversifie, sépare, hiérarchise. L’individu, libre et
volontaire devient le centre du monde. Sa plus grande vertu reste l’orgueil — péché
suprême pour la religion étrangère. Dans notre conception tragique de la vie, la lutte
devient la loi suprême. Est un homme véritable celui qui s’attaque à des entreprises
démesurées. Une même ligne de crêtes unit Prométhée à Siegfried. »
— Jean Mabire, Thulé, le soleil retrouvé des Hyperboréens (1978), éd. Pardès, 2009, p. 297
« Les ennemis de Thulé ont remplacé notre foi ancestrale par un rite étranger. Aujourd’hui,
leur triomphe semble absolu. Les laïcs et les clercs parlent le même langage et célèbrent le
même culte ; celui de la foule contre l’individu, celui de l’idéologie contre l’instinct, celui de
l’égalité contre la lutte. On discute même la vie et l’on préfère le suicide au combat.
S’affirmer soi-même, vouloir conserver son héritage et préserver sa culture est devenu le
péché absolu. Ceux qui ne veulent pas du monde indifférencié sont marqués du sceau
infamant des hérétiques. [...]
Désormais, il nous faut revenir au mythe vital par excellence, au mythe du soleil,
au mythe de Thulé. Ce qui va renaître n’est pas un souvenir historique mais la
foi de l’éternelle Hyperborée. Nous retrouverons, dans la certitude et la
fidélité, les gestes de nos ancêtres. Nous annoncerons à tous la bonne nouvelle du
retour du soleil. Nous allumerons les flammes à nos foyers et dresserons les buchers sur les
collines. Quand le destin de nos peuples se caricature dans la société mercantile et dans la
foi égalitaire, nous refuserons la religion de la pleurnicherie et du reniement, pour
retrouver la conscience de notre aventure et de notre unité. »
— Jean Mabire, Thulé, le soleil retrouvé des Hyperboréens (1978), éd. Pardès, 2009, p. 296-
297
« Voici huit mille ans commençait pour nous l’aventure néolithique. Je l’appelais révolution
parce que j’y discernais l’apparition d’un état d’esprit nouveau. La volonté y tenait la
première place et elle n’allait pas cesser de dominer notre monde, jusqu’à l’avènement des
idées suicidaires aujourd’hui à la mode. Passer de la cueillette et de la chasse à l’agriculture
et à l’élevage représente un bond en avant prodigieux. En un sens, dans cette plaine
nordique si cruelle aux paysans aux prises avec un climat impitoyable, c’était un défi qui
rejoignait la légende hellène de Prométhée dérobant le feu aux dieux. »
— Jean Mabire, Thulé, le soleil retrouvé des Hyperboréens (1978), éd. Pardès, 2009, p. 66
« Néanmoins, quiconque, pour se maintenir, ne veut point marcher dans la route du bien
que nous lui avons d’abord indiquée, doit entrer nécessairement dans cette carrière
funeste. Mais la plupart des hommes croient pouvoir s’avancer entre ces deux routes, et
s’exposent ainsi aux plus grands dangers ; car ils ne savent être ni tout à fait bons, ni
tout à fait méchants. »
— Nicolas Machiavel, Discours sur la première décade de Tite-Live (1513), trad. Jean
Vincent Périès, éd. Charpentier, 1855, partie 1, chap. XXVI, p. 205
—
JOSEPH DE MAISTRE
« Mais de tous les monarques, le plus dur, le plus despotique, le plus intolérable, c’est le
monarque peuple. »
— Joseph de Maistre, De la souveraineté du peuple (posthume, 1870), éd. Presses
Universitaires de France, 1992 (ISBN 9782130442172), p. 245
« Il faut qu’il y ait une religion de l’État comme une politique de l’État ; ou,
plutôt, il faut que les dogmes religieux et politiques mêlés et confondus
forment ensemble une raison universelle ou nationale assez forte pour
réprimer les aberrations de la raison individuelle qui est, de sa nature, l’ennemie
mortelle de toute association quelconque, parce qu’elle ne produit que des opinions
divergentes.
Tous les peuples connus ont été heureux et puissants à mesure qu’ils ont obéi plus
fidèlement à cette raison nationale qui n’est autre chose que l’anéantissement des dogmes
individuels et le règne absolu et général des dogmes nationaux, c’est-à-dire des préjugés
utiles. »
— Joseph de Maistre, De la souveraineté du peuple (posthume, 1870), éd. Presses
Universitaires de France, 1992 (ISBN 9782130442172), p. 147-148
« La raison humaine réduite à ses forces individuelles est parfaitement nulle, non
seulement pour la création, mais encore pour la conservation de toute association
religieuse ou politique, parce qu’elle ne produit que des disputes, et que l’homme pour se
conduire, n’a pas besoin de problèmes, mais de croyances. [...]
Il n’y a rien de si important [...] que les préjugés. Ne prenons point ce mot en
mauvaise part. Il ne signifie point nécessairement des idées fausses, mais seulement,
suivant la force du mot, des opinions quelconques adoptées avant tout examen. Or ces
sortes d’opinions sont le plus grand besoin de l’homme, les véritables éléments de son
bonheur, et le Palladium des empires. Sans elles, il ne peut y avoir ni culte, ni morale, ni
gouvernement. »
— Joseph de Maistre, De la souveraineté du peuple (posthume, 1870), éd. Presses
Universitaires de France, 1992 (ISBN 9782130442172), p. 147
« Plus la raison humaine se confie en elle-même, plus elle cherche à tirer tous ses moyens
d’elle-même ; et plus elle est absurde, plus elle montre son impuissance. Voilà pourquoi le
plus grand fléau de l’univers a toujours été, dans tous les siècles, ce qu’on
appelle Philosophie, attendu que la Philosophie n’est que la raison humaine agissant toute
seule, et que la raison humaine réduite à ses forces individuelles n’est qu’une brute dont
toute la puissance se réduit à détruire. »
— Joseph de Maistre, De la souveraineté du peuple (posthume, 1870), éd. Presses
Universitaires de France, 1992 (ISBN 9782130442172), p. 132-133
« [...] il faut nous tenir prêts pour un événement immense dans l’ordre divin,
vers lequel nous marchons avec une vitesse accélérée qui doit frapper tous les
observateurs. Il n’y a plus de religion sur la terre : le genre humain ne peut demeurer dans
cet état. Des oracles redoutables annoncent d’ailleurs que les temps sont arrivés. »
— Joseph de Maistre, « Les Soirées de Saint-Pétersbourg » (1821), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 762
« Le sceptre de la science n’appartient à l’Europe que parce qu’elle est chrétienne. Elle n’est
parvenue à ce haut point de civilisation et de connaissance que parce qu’elle a commencé
par la théologie ; parce que les universités ne furent d’abord que des écoles de théologie,
et parce que toutes les sciences greffées sur ce sujet divin ont manifesté la sève divine par
une immense végétation. »
— Joseph de Maistre, « Les Soirées de Saint-Pétersbourg » (1821), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 740
« [...] il n’y aurait rien de si infortuné qu’un homme qui n’aurait jamais éprouvé
l’infortune : car jamais un tel homme ne pourrait être sûr de lui-même, ni savoir ce qu’il
vaut. »
— Joseph de Maistre, « Les Soirées de Saint-Pétersbourg » (1821), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 690
« Je crois de plus en mon âme et conscience que si l’homme pouvait vivre dans ce monde
exempt de toute espèce de malheurs, il finirait par s’abrutir au point d’oublier
complètement toutes les choses célestes et Dieu même. Comment pourrait-il, dans cette
supposition, s’occuper d’un ordre supérieur, puisque dans celui-même où nous vivons, les
misères qui nous accablent ne peuvent nous désenchanter des charmes trompeurs de
cette malheureuse vie ? »
— Joseph de Maistre, « Les Soirées de Saint-Pétersbourg » (1821), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 689
« Les hommes ne peuvent être réunis pour un but quelconque, sans une loi ou
une règle qui les prive de leur volonté : il faut être religieux ou soldat. »
— Joseph de Maistre, « Les Soirées de Saint-Pétersbourg » (1821), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 685
« La guerre est donc divine en elle-même, puisque c’est une loi du monde. »
— Joseph de Maistre, « Les Soirées de Saint-Pétersbourg » (1821), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 661
« Il y a une règle sûre pour juger les livres comme pour les hommes, même sans les
connaître : il suffit de savoir par qui ils sont aimés, et par qui ils sont haïs. Cette règle ne
trompe jamais, et déjà je vous l’ai proposée à l’égard de Bacon. Dès que vous le voyez mis
à la mode par les encyclopédistes, traduit par un athée et loué sans mesure par le torrent
des philosophes du dernier siècle, tenez pour sûr, sans autre examen, que sa philosophie
est, du moins dans ses bases générales, fausse et dangereuse. »
— Joseph de Maistre, « Les Soirées de Saint-Pétersbourg » (1821), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 634
« Mais les fausses opinions ressemblent à la fausse monnaie qui est frappée d’abord par de
grands coupables, et dépensée ensuite par d’honnêtes gens, qui perpétuent le crime sans
savoir ce qu’ils font. »
— Joseph de Maistre, « Les Soirées de Saint-Pétersbourg » (1821), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 464
« Je ne vis plus qu’à demi. D’autres épines encore s’enfoncent dans mon cœur, mon esprit
s’en ressent : de petit il est devenu nul, hic jacet ; mais je meurs avec l’Europe, je suis
en bonne compagnie. »
— Joseph de Maistre, Lettre au comte de Marcellus, 9 août 1819
« Mais qu’est-ce qu’une nation mon cher ami ? C’est le souverain et l’aristocratie. Il faut
peser les voix, et non les compter. Je ne sais combien tu as de domestiques ; mais
quand tu en aurais cinquante, je prendrais la liberté d’estimer leurs voix réunies un peu
moins que la tienne. Tu me dis un grand mot en me disant : Je sais qu’ils ont des amis
dans la haute classe ; mais c’est précisément dans les hautes classes que résident les
principes conservateurs et les véritables maximes d’État. »
— Joseph de Maistre, Lettre à M. Le Chevalier de Saint-Réal, Saint-Pétersbourg, 22
décembre 1816-3 janvier 1817
« [...] il faut se préparer à une grande révolution, dont celle qui vient de finir (à
ce qu’on dit) n’était que la préface. Le monde fermente, et l’on verra d’étranges
choses : le spectacle, à la vérité, ne sera ni pour vous, ni pour moi [...]. »
— Joseph de Maistre, Lettre à Tadeusz Brzozowski, Saint-Pétersbourg, 22 janvier 1817-3
février 1817
« Jusqu’à présent les nations ont été tuées par la conquête, c’est-à-dire par voie
de pénétration ; mais il se présente ici une grande question : — Une nation peut-elle
mourir sur son propre sol sans transplantation, ni pénétration,
uniquement par voie de putréfaction, en laissant parvenir la corruption
jusqu’au point central et jusqu’aux principes originaux et constitutifs qui
font ce qu’elle est ? C’est un grand et redoutable problème. Si vous en êtes là, il n’y a
plus de Français, même en France ; Rome n’est plus dans Rome, et tout est perdu. »
— Joseph de Maistre, Lettre à M. Le Vicomte de Bonald, Saint-Pétersbourg, 1er
décembre 1814-13 décembre 1814
« On a fait sur cet objet important précisément le même sophisme que sur les institutions
politiques : on a regardé l’homme comme un être abstrait, le même dans tous les temps et
dans tous les pays, et l’on a tracé pour cet être imaginaire des plans de gouvernement tout
aussi imaginaires ; tandis que l’expérience prouve, de la manière la plus évidente,
que toute nation a le gouvernement qu’elle mérite, de manière que tout plan de
gouvernement n’est qu’un rêve funeste, s’il n’est pas en harmonie parfaite avec le caractère
de la nation. »
— Joseph de Maistre, Lettre à Alexeï Razoumovski, juin 1811
« Le plus grand défaut pour une femme, mon cher enfant, c’est d’être un
homme. »
— Joseph de Maistre, Lettre à sa fille Adèle de Maistre, 26 décembre 1804
« On ne s’exprime point exactement lorsque l’on dit que le protestantisme est, en général,
favorable à la république ; il n’est favorable à aucun gouvernement : il les attaques tous ;
mais comme la souveraineté n’existe pleinement que dans les monarchies, il déteste
particulièrement cette forme de gouvernement, et il cherche les républiques où il a moins à
ronger. Mais, là comme ailleurs, il fatigue la souveraineté et ne peut supporter le joug
social. Il est républicain dans les monarchies et anarchiste dans les républiques. [...] l’union
constitutionnelle du sceptre et de la crosse le fait rugir. Il sait bien qu’il ne peut les briser
qu’en les séparant, et c’est à quoi il travaille sans relâche. »
— Joseph de Maistre, « Sur le protestantisme » (1798), dans Œuvres, éd. Robert Laffont,
coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 326
« Les souverainetés surtout n’ont de force, d’unité et de stabilité qu’en proportion qu’elles
sont divinisés par la religion. Or le christianisme, c’est-à-dire le catholicisme, étant le
ciment de toutes les souverainetés européennes, le protestantisme, en leur enlevant le
catholicisme sans leur donner une autre foi, a miné la base de toutes celles qui ont eu le
malheur d’embrasser la Réforme : en sorte que, plus tôt ou plus tard, il doit les laisser en
l’air.
Le mahométisme, le paganisme même auraient fait politiquement moins de
mal, s’ils s’étaient substitués au christianisme avec leur espèce de dogmes et de
foi. Car ce sont des religions, et le protestantisme n’en n’est point une. »
— Joseph de Maistre, « Sur le protestantisme » (1798), dans Œuvres, éd. Robert Laffont,
coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 329
« Qu’est-ce qu’un protestant ? Il semble d’abord qu’il est aisé de répondre ; mais si l’on
réfléchit, on hésite. Est-ce un anglican, un luthérien, un calviniste, un zwinglien, un
anabaptiste, un quaker, un méthodiste, un morave, etc. (je suis las). C’est tout cela, et ce
n’est rien. Le protestant est un homme qui n’est pas catholique, en sorte que le
protestantisme n’est qu’une négation. [...]
Ainsi, le protestantisme est positivement, et au pied de la lettre, le sans-culottisme de la
religion. L’un invoque la parole de Dieu ; l’autre, les droits de l’homme ; mais dans le fait
c’est la même théorie, la même marche et le même résultat. Ces deux frères ont brisé la
souveraineté pour la distribuer à la multitude. »
— Joseph de Maistre, « Sur le protestantisme » (1798), dans Œuvres, éd. Robert Laffont,
coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 329-330
« Louis XIV foula au pied le protestantisme et il mourut dans son lit, brillant de gloire et
chargé d’années. Louis XVI le caressa et il est mort sur l’échafaud. »
— Joseph de Maistre, « Sur le protestantisme » (1798), dans Œuvres, éd. Robert Laffont,
coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 320
« [...] le principe fondamental de cette religion [le christianisme], l’axiome primitif sur lequel
elle reposait dans tout l’univers avant les novateurs du XVIe siècle, c’était l’infaillibilité de
l’enseignement d’où résulte le respect aveugle pour l’autorité, l’abnégation de tout
raisonnement individuel, et par conséquent l’universalité de croyance.
Or ces novateurs sapèrent cette base : ils substituèrent le jugement particulier au
jugement catholique ; ils substituèrent follement l’autorité exclusive d’un livre à celle du
ministère enseignant plus ancien que le livre et chargé de nous l’expliquer.
De là vient le caractère particulier de l’hérésie du XVIe siècle. Elle n’est point seulement une
hérésie religieuse, mais une hérésie civile, parce qu’en affranchissant le peuple du joug de
l’obéissance et lui accordant la souveraineté religieuse, elle déchaîne l’orgueil général
contre l’autorité, et met la discussion à la place de l’obéissance. »
— Joseph de Maistre, « Sur le protestantisme » (1798), dans Œuvres, éd. Robert Laffont,
coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 312
« [...] l’empire est sacré, la religion est civile ; les deux puissances se
confondent ; chacune emprunte de l’autre une partie de sa force, et, malgré les
querelles qui ont divisé ces deux sœurs, elles ne peuvent vivre séparées. »
— Joseph de Maistre, « Sur le protestantisme » (1798), dans Œuvres, éd. Robert Laffont,
coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 312
« La constitution de 1795, tout comme ses aînées, est faite pour l’homme. Or, il n’y a point
d’homme dans le monde. J’ai vu, dans ma vie, des Français, des Italiens, des
Russes, etc., je sais même, grâce à Montesquieu, qu’on peut être Persan :
mais quant à l’homme, je déclare ne l’avoir rencontré de ma vie ; s’il existe, c’est
bien à mon insu.
[...] une constitution qui est faite pour toutes les nations, n’est faite pour aucune : c’est une
pure abstraction, une œuvre scolastique faite pour exercer l’esprit d’après une hypothèse
idéale, et qu’il faut adresser à l’homme dans les espaces imaginaires où il habite. »
— Joseph de Maistre, « Considérations sur la France » (1796), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 235
« Plus on écrit, et plus l’institution est faible, la raison en est claire. Les lois ne sont
que des déclarations de droits, et les droits ne sont déclarés que lorsqu’ils sont attaqués ;
en sorte que la multiplicité des lois constitutionnelles écrites ne prouve que la multiplicité
des chocs et le danger d’une destruction.
Voilà pourquoi l’institution la plus vigoureuse de l’antiquité profane fut celle de
Lacédémone, où l’on n’écrivit rien. »
— Joseph de Maistre, « Considérations sur la France » (1796), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 233
« Qu’on rie des idées religieuses, ou qu’on les vénère, n’importe : elles ne
forment pas moins, vraies ou fausses, la base unique de toutes les institutions
durables. »
— Joseph de Maistre, « Considérations sur la France » (1796), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 227
« Un des plus grands crimes qu’on puisse commettre, c’est sans doute l’attentat contre
la souveraineté, nul n’ayant des suites plus terribles. [...]
Il faut encore faire une observation importante : c’est que tout attentat commis contre la
souveraineté, au nom de la nation, est toujours plus ou moins un crime national [...].
Or, tous les crimes nationaux contre la souveraineté sont punis sans délai et d’une manière
terrible ; c’est une loi qui n’a jamais souffert d’exception. [...] Chaque goutte de sang de
Louis XVI en coûtera des torrents à la France ; quatre millions de Français, peut-être,
payeront de leurs têtes le grand crime national d’une insurrection anti-religieuse et anti-
sociale, couronnée par un régicide. »
— Joseph de Maistre, « Considérations sur la France » (1796), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 204-205
« Chaque nation, comme chaque individu, a reçu une mission qu’elle doit
remplir. »
— Joseph de Maistre, « Considérations sur la France » (1796), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 202
« Enfin, plus on examine les personnages en apparence les plus actifs de la Révolution, et
plus on trouve en eux quelque chose de passif et de mécanique. On ne saurait trop le
répéter, ce ne sont point les hommes qui mènent la révolution, c’est la révolution qui
emploie les hommes. On dit fort bien, quand on dit qu’elle va toute seule. »
— Joseph de Maistre, « Considérations sur la France » (1796), dans Œuvres, éd. Robert
Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (ISBN 9782221095430), p. 202
« Il faut avoir le courage de l’avouer, Madame : longtemps nous n’avons point compris la
révolution dont nous sommes les témoins ; longtemps nous l’avons prise pour
un événement. Nous étions dans l’erreur : c’est une époque ; et malheur aux
générations qui assistent aux époques du monde ! »
— Joseph de Maistre, Discours à Mme la marquise de Costa sur la vie et la mort de son
fils Alexis Louis Eugène de Costa, 1er septembre 1794
—
KARL MARX
« Le pouvoir politique au sens propre est le pouvoir organisé d’une classe pour
l’oppression d’une autre. »
— Karl Marx et Friedrich Engels, Manifeste du Parti communiste (1848), trad. Émile
Bottigelli, éd. Flammarion, coll. « Garnier Flammarion », 1998 (ISBN 9782080710024),
p. 101
« L’émancipation humaine n’est réalisée que lorsque l’homme a reconnu et organisé ses
forces propres comme forces sociales et ne sépare donc plus de lui la force sociale sous la
forme de la force politique. »
— Karl Marx, Sur la Question juive (1843), trad. Jean-Michel Palmier, éd. Kontre Kulture,
2013 (ISBN 9782367250021), p. 57
« Aucun des prétendus droits de l’homme ne dépasse donc l’homme égoïste,
l’homme en tant que membre de la société bourgeoise, c’est-à-dire un individu
séparé de la communauté, replié sur lui-même, uniquement préoccupé de son
intérêt personnel et obéissant à son arbitraire privé. L’homme est loin d’y être
considéré comme un être générique ; tout au contraire, la vie générique elle-même, la
société, apparaît comme un cadre extérieur à l’individu, comme une limitation de son
indépendance originelle. Le seul lien qui les unisse, c’est la nécessité naturelle, le besoin et
l’intérêt privé, la conservation de leurs propriétés et de leur personne égoïste. »
— Karl Marx, Sur la Question juive (1843), trad. Jean-Michel Palmier, éd. Kontre Kulture,
2013 (ISBN 9782367250021), p. 51
« La liberté est donc le droit de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Les limites dans
lesquelles chacun peut se mouvoir sans nuire à autrui sont marquées par la loi, de même
que la limite de deux champs est déterminée par un piquet. Il s’agit de la liberté de
l’homme considéré comme monade isolée, repliée sur elle-même. »
— Karl Marx, Sur la Question juive (1843), trad. Jean-Michel Palmier, éd. Kontre Kulture,
2013 (ISBN 9782367250021), p. 49
« On fait une distinction entre les “droits de l’homme” et les “droits du citoyen”. Quel est
cet “homme” distinct du citoyen ? Personne d’autre que le membre de la société
bourgeoise. Pourquoi le membre de la société bourgeoise est-il appelé “homme”, homme
tout court, et pourquoi ses droits sont-ils appelés droits de l’homme ? Qu’est-ce qui
explique ce fait ? Par le rapport de l’État politique à la société bourgeoise, par l’essence de
l’émancipation politique.
Constatons avant tout le fait que les “droits de l’homme”, distincts des “droits du
citoyen,” ne sont rien d’autre que les droits du membre de la société
bourgeoise, c’est-à-dire de l’homme égoïste, de l’homme séparé de l’homme et
de la communauté. »
— Karl Marx, Sur la Question juive (1843), trad. Jean-Michel Palmier, éd. Kontre Kulture,
2013 (ISBN 9782367250021), p. 48-49
« L’État dit chrétien est l’État, imparfait, et la religion chrétienne est pour lui le complément
et la sanctification de son imperfection. La religion devient donc nécessairement un
moyen ; et c’est l’État de l’hypocrisie. »
— Karl Marx, Sur la Question juive (1843), trad. Jean-Michel Palmier, éd. Kontre Kulture,
2013 (ISBN 9782367250021), p. 40
—
GUY DE MAUPASSANT
« On n’aime qu’une fois ! Le cœur peut s’émouvoir souvent à la rencontre d’un
autre être, car chacun exerce sur chacun des attractions et des répulsions.
Toutes ces influences font naître l’amitié, les caprices, des envies de possession,
des ardeurs vives et passagères, mais non pas de l’amour véritable. Pour qu’il
existe, cet amour, il faut que les deux êtres soient tellement nés l’un pour l’autre, se
trouvent accrochés l’un à l’autre par tant de points, par tant de goûts pareils, par tant
d’affinités de la chair, de l’esprit, du caractère, se sentent liés par tant de choses de toute
nature, que cela forme un faisceau d’attaches. Ce qu’on aime, en somme, ce n’est pas tant
Mme X... ou M. Z..., c’est une femme ou un homme, une créature sans nom, sortie de la
Nature, cette grande femelle, avec des organes, une forme, un cœur, un esprit, une
manière d’être générale qui attirent comme un aimant nos organes, nos yeux, nos lèvres,
notre cœur, notre pensée, tous nos appétits sensuels et intelligents. On aime un type, c’est-
à-dire la réunion, dans une seule personne, de toutes les qualités humaines qui peuvent
nous séduire isolément dans les autres. »
— Guy de Maupassant, Fort comme la mort (1889), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2012 (ISBN 9782070374502), p. 208-209
« [...] les gens qui ont pour unique occupation dans la vie de faire des visites et
de dîner en ville, se trouvent devenir, par une irrésistible fatalité, des êtres
légers et gentils, mais banals, qu’agitent vaguement des soucis, des croyances et
des appétits superficiels.
[...] rien chez eux n’est profond, ardent, sincère, que leur culture intellectuelle étant nulle, et
leur érudition un simple vernis, ils demeurent, en somme, des mannequins qui donnent
l’illusion et font les gestes d’êtres d’élite qu’ils ne sont pas. »
— Guy de Maupassant, Fort comme la mort (1889), éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2012 (ISBN 9782070374502), p. 85
—
CHARLES MAURRAS
« Nous bâtissons l’arche nouvelle, catholique, classique, hiérarchique,
humaine, où les idées ne seront plus des mots en l’air, ni les institutions des
leurres inconsistants, ni les lois des brigandages, les administrations des
pilleries et des gabegies, où revivra ce qui mérite de revivre, en bas les
républiques, en haut la royauté, et, par-delà tous les espaces, la
Papauté ! Même si cet optimisme était en défaut et si, comme je ne crois pas tout à fait
absurde de le redouter, si la démocratie étant devenue irrésistible, c’est le mal,
c’est la mort qui devaient l’emporter, et qu’elle ait eu pour fonction historique
de fermer l’histoire et de finir le monde, même en ce cas apocalyptique, il faut que
cette arche franco-catholique soit construite face au triomphe du Pire et des pires. Elle
attestera dans la corruption éternelle et universelle, une primauté invincible de l’Ordre et
du Bien. Ce qu’il y a de bon et de beau dans l’homme ne se sera pas laissé faire. Cette âme
du bien l’aura emporté, tout de même, à sa manière, et, persistant dans la perte générale,
elle aura fait son salut moral et peut-être l’autre. Je dis peut-être, parce que je ne fais pas
de métaphysique et m’arrête au bord du mythe tentateur, mais non sans foi dans la vraie
colombe, comme au vrai brin d’olivier, en avant de tous les déluges. »
— Lettre de prison à Pierre Boutang, février 1951
— Charles Maurras, Lettres de prison (8 septembre 1944 — 16 novembre 1952), éd.
Flammarion, 1958, p. 225
« On ne choisit pas plus sa patrie — la terre de ses pères — que l’on ne choisit
son père et sa mère. »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 308
« Il est sûr que de quelque façon qu’on s’y prenne, c’est l’Argent qui fait le pouvoir en
démocratie. Il le choisit, le crée et l’engendre. Il est l’arbitre du pouvoir démocratique
parce que sans lui ce pouvoir retombe dans le néant ou le chaos. Pas d’argent, pas de
journaux. Pas d’argent, pas d’électeurs. Pas d’argent, pas d’opinion exprimée. L’argent est le
géniteur et le père de tout pouvoir démocratique, de tout pouvoir élu, de tout pouvoir
tenu dans la dépendance de l’opinion. »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 227-228
« Nous sommes nos ancêtres, nos maîtres, nos aînés. Nous sommes nos livres,
nos tableaux, nos statues ; nous sommes nos paysages [...]. »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 188
« [...] il n’y a point d’État qui puisse durer sans une autorité souveraine. »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 120
« Les philosophes véritables refusent constamment de parler des hommes autrement que
réunis en société. Il n’y a pas de solitaire. Un Robinson lui même était poursuivi et
soutenu dans son île par les résultats innombrables du travail immémorial de
l’humanité. »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 81
« Comment espère-t-on en finir avec le moindre de tous nos maux, si l’on perd
le courage de le nommer ? »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 66
« La démocratie sociale prêche un égalitarisme contre nature d’après lequel le fort doit
insulter au faible, et le faible haïr le fort. »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 51
« Le Nombre démocratique vise a construire une société formée d’unités égales, qui ne
peuvent pas exister. Le Nombre démocratique vise ainsi à détruire la société fondée sur des
groupes inégaux seuls capables de vie et qui existent seuls. »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 45
« [...] même dans les races les mieux douées, Démocratie finit en Médiocratie. »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 25
« L’inégalité des valeurs, la diversité des talents sont les complémentaires qui permirent et
favorisèrent l’exercice de fonctions de plus en plus riches, de plus en plus puissantes. Cet
ordre né de la différence des êtres engendre le succès et le progrès communs. »
— Charles Maurras, Mes idées politiques (1937), éd. Kontre Kulture, 2019, p. 15
« Il y a opposition, contradiction à angle droit entre le marxisme égalitaire international et
la protection de la Nation et de la Patrie. Mais un socialisme libéré de l’élément
démocratique et cosmopolite, peut aller au nationalisme comme un gant bien
fait à une belle main. »
— Charles Maurras, Dictionnaire politique et critique (1932-1934), éd. Fayard, 1932-1934,
Socialisme, p.
« Quand les Français ne s’aimaient pas, ils ne pouvaient rien souffrir qui fût de leur main, ni
de la main de leurs ancêtres : livres, tableaux, statues, édifices, philosophie, sciences. Cette
ingratitude pour leur patrie était si farouche qu’un étranger a pu dire que leur
histoire semblait écrite par leurs propres ennemis. Ni les arts, ni les lettres, ni les
idées ne trouvaient grâce, à moins de venir d’autre part. »
— Charles Maurras, Quand les Français ne s’aimaient pas (1916), éd. Nouvelle Librairie
nationale, 1916, Préface, p. 13
« Il s’agit de savoir si nous sommes chez nous en France ou si nous n’y sommes plus ; si
notre sol nous appartient ou si nous allons perdre avec lui notre fer, notre houille et notre
pain ; si, avec les champs et la mer, les canaux et les fleuves, nous allons aliéner les
habitations de nos pères, depuis le monument où se glorifie la cité jusqu’aux humbles
maisons de nos particuliers. Devant un cas de cette taille, il est ridicule de demander si la
France renoncera aux traditions hospitalières d’un grand peuple civilisé. Avant
d’hospitaliser, il faut être. Avant de rendre hommage aux supériorités littéraires ou
scientifiques étrangères, il faut avoir gardé la qualité de nation française. Or il est
parfaitement clair que nous n’existerons bientôt plus si nous continuons d’aller de ce train.
[...] Ce pays-ci n’est pas un terrain vague. Nous ne sommes pas des bohémiens
nés par hasard au bord d’un chemin. Notre sol est approprié depuis vingt siècles par
les races dont le sang coule dans nos veines. La génération qui se sacrifiera pour le
préserver des barbares et de la barbarie aura vécu une bonne vie. »
— « L’Hospitalité », Charles Maurras, L’Action française, 6 juillet 1912
« Qui [...] érige la vie d’un homme en principe supérieur à toute justice et à
tout ordre arrête la marche du monde. »
— « La Mort ? », Charles Maurras, L’Action française, 12 octobre 1909
« [...] l’État s’applique à prolonger une situation qui maintient le crédit de cette Intelligence,
derrière laquelle il se dissimule, pour mieux dissimuler cet Argent par lequel il est
gouverné. »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 98
« Une seule réalité énergique importe donc en journalisme : l’Argent, avec l’ensemble des
intérêts brutaux qu’il exprime. »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 95
« Par ses subventions, l’État régente ou du moins surveille nos différents corps et
compagnies littéraires ou artistiques. Il les relie ainsi à son propre maître, l’Argent. Il tient
de la même manière plusieurs des mécanismes par lesquels se publie, se distribue et se
propage toute pensée. »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 90
« Heureux donc les peuples modernes qui sont pourvus d’une puissance
politique distincte de l’Argent et de l’Opinion ! »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 89
« Non seulement l’Intelligence ne fit pas son métier d’éclairer et d’orienter les masses
obscures ; elle fit le contraire de son métier, elle les trompa. »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 81
« [...] c’est cette recherche de la denrée intellectuelle sur un marché économique qui fait le
vrai péril de l’Intelligence contemporaine. Péril qui paraît plus pressant quand on observe
qu’elle est aussi demandée de plus en plus et répandue de mieux en mieux sur un autre
marché : le marché de la politique. »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 75
« Mais une race, une nation sont des substances sensiblement immortelles ! Elles
disposent d'une réserve inépuisable de pensées, de cœurs et de corps. Une espérance
collective ne peut donc pas être domptée. Chaque touffe tranchée reverdit plus forte et
plus belle. Tout désespoir en politique est une sottise absolue. »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 17
« L’or, divisible à l’infini, est aussi diviseur immense ; nulle patrie n’y résista. Je ne
méconnais point l’utilité de la richesse pour l’individu. L’intérêt de l’homme qui pense peut
être d’avoir beaucoup d’or, mais l’intérêt de la pensée est de se rattacher à une patrie
libre, que pourra seule maintenir l’héréditaire vertu du Sang. »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 16
« De l’autorité des princes de notre race, nous avons passé sous la verge des marchands
d’or, qui sont d’une autre chair que nous, c’est-à-dire d’une autre langue et d’une autre
pensée. »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 14
« Il faut être stupide comme un conservateur ou naïf comme un démocrate pour ne pas
sentir quelles forces tendent à dominer la Terre. Les yeux créés pour voir ont déjà reconnu
les deux antiques forces matérielles : l’Or, le Sang. »
— Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence (1905), éd. L’Âge d’Homme, 2002, p. 14
« Il n’est pas une idée née d’un esprit humain qui n’ait fait couler du sang sur
la terre. »
— Charles Maurras, La Dentelle du Rempart (1886-1936), éd. Grasset, 1937, p. 183
« Moment terrible que celui où les cités se décomposent, où les normes mêmes de
l’honneur, de la vénération et de la justice sont employées pour détruire l’honneur, la
vénération, la justice [...]. »
— Pierre Boutang, La politique (1948), éd. Les provinciales, 2017, p. 126
« [...] toute vie humaine est close, toute civilisation est une digue contre le devenir qui
anéantit (nos désespérés modernes sont essentiellement des désespérés urbains,
habitants de villes où la détermination est presque perdue ; ils désespèrent,
eux, de n’avoir rien à perdre). »
— Pierre Boutang, La politique (1948), éd. Les provinciales, 2017, p. 112
« Les cités comme l’homme, et parce qu’elles sont l’œuvre des hommes,
contiennent leur mort dont les signes se manifestent à ceux qui savent les
interpréter. »
— Pierre Boutang, La politique (1948), éd. Les provinciales, 2017, p. 109
« Il y a donc une attitude où l’homme accueille l’événement historique avec tout son passé,
recherche et attend de l’histoire ce qui lui est ami, c’est-à-dire ce qui est capable
d’accomplir de très anciennes actions et de très anciens désirs. Et il y a l’attitude contraire
qui commence par le refus du sujet de l’histoire et par une “déclaration d’étrangeté”. Cette
sécession de l’homme (même lorsqu’elle prend la forme provisoire de la sécession d’une
classe) constitue le véritable problème présent. »
— Pierre Boutang, La politique (1948), éd. Les provinciales, 2017, p. 92
Depuis la Révolution française, la « cité n’était plus fondée dans son être. Elle devait, pour
ainsi dire, se justifier à chaque instant par son contenu et par les avantages qu’elle apporte
aux hommes. »
— Pierre Boutang, La politique (1948), éd. Les provinciales, 2017, p. 79
« [...] une grande métropole a d’autant plus de chance de se donner un maire “de gauche”
— ou “écologiste” — que le prix du mètre carré y est élevé [...]. »
— Jean-Claude Michéa, Orwell, anarchiste Tory (2020), éd. Flammarion, coll.
« Climats », 2020 (ISBN 9782080205278), p. 295
« [...] l’appel du Ministère libéral de la Vérité à “déboulonner” toutes les traces non
“américanisables” du passé de chaque nation (cette fameuse cancel culture — complément
indispensable du rouleau compresseur de l’économie libérale de marché — que l’“extrême
gauche” européenne est en train d’importer des États-Unis, sans la moindre analyse
critique, au même titre, en somme, que l’ensemble des autres éléments du bouquet Netflix).
— Jean-Claude Michéa, Orwell, anarchiste Tory (2020), éd. Flammarion, coll.
« Climats », 2020 (ISBN 9782080205278), p. 256-257
« Le fait que l’euro soit aujourd’hui la seule monnaie au monde dont les billets
de banque ne comportent plus la moindre trace d’une figure humaine ou
historique — mais seulement des ponts et des portes (conformément à l’idéologie
libérale du No Border/No Limit) — constitue certainement l’un des symptômes les
plus spectaculaires de la volonté des élites européennes d’effacer jusqu’aux
derniers vestige de cette “subjectivité” humaine qui ne peut, à leurs yeux, que
perturber le bon fonctionnement des mécanismes marchands. »
— Jean-Claude Michéa, Le Loup dans la bergerie (2018), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2019 (ISBN 9782081452053), p. 56
« Il est donc tout à fait illusoire d’imaginer pouvoir résoudre un problème “sociétal” dans
un sens anticapitaliste (donc humainement émancipateur) si l’on ne dispose, pour cela, que
des seuls outils axiologiquement neutre du droit libéral et de son appel contradictoire à
étendre indéfiniment le “droit d’avoir des droits” [...]. »
— Jean-Claude Michéa, Notre ennemi, le capital (2016), éd. Flammarion, coll.
« Climats », 2017 (ISBN 9782081395602), p. 128
« Une société qui aurait aboli toutes les “discriminations” (et dont la vie quotidienne serait
ainsi entièrement gouvernée par les mécanismes “axiologiquement neutres” du droit
libéral) serait forcément une société uniformisée dans laquelle toute notion
de responsabilité morale et de mérite individuel — concepts jugés culpabilisateurs et
“stigmatisants” — aurait définitivement disparu [...]. C’est la même neutralité axiologique,
en somme, qui doit gouverner à la fois l’homo juridicus et l’homo economicus. »
— Jean-Claude Michéa, Les Mystères de la gauche (2013), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2021 (ISBN 9782081313026), p. 100
« Une famille, par exemple, dans laquelle les parents ne songeraient à nourrir leurs enfants
(ou à leur donner une éducation) que parce qu’ils y sont “juridiquement obligés” (ou dans
laquelle ces parents n’envisageraient le “devoir conjugal” que comme une prestation
imposée par le contrat de mariage) cesserait à coup sûr d’être une famille au sens humain
du terme. »
— Jean-Claude Michéa, Les Mystères de la gauche (2013), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2021 (ISBN 9782081313026), p. 94
« [...] pour beaucoup de militants des “nouvelles radicalités” parisiennes, être de gauche,
aujourd’hui, ne signifie plus rien d’autre qu’avoir à se mobiliser en toute circonstance — et
si possible devant les caméras du système — pour défendre ce droit libéral de chaque
monade isolée “à un principe de vie particulier et une fin particulière” [Friedrich Engels]. »
— Jean-Claude Michéa, Les Mystères de la gauche (2013), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2021 (ISBN 9782081313026), p. 38
« Si le capitalisme moderne exerce une telle emprise psychologique sur les individus qu’il a
atomisé et déracinés, c’est donc bien d’abord parce qu’il s’appuie sur les mêmes ressort
affectifs et émotionnels que ceux qui gouvernent l’addiction à la drogue. »
— Jean-Claude Michéa, Le Complexe d’Orphée (2011), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2021 (ISBN 9782081333208), p. 341
« De fait, la civilisation libérale est la première, dans l’histoire de l’humanité, qui tende par
principe à priver le sujet individuel de tous les appuis symboliques collectifs nécessaires à
son humanisation et qui rende ainsi de plus en plus problématique ce décollage
indispensable d’avec la mère, sans lequel il n’est pas d’autonomie personnelle concevable
[...]. »
— Jean-Claude Michéa, Le Complexe d’Orphée (2011), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2021 (ISBN 9782081333208), p. 340
« [...] dans l’intérêt même de l’élite au pouvoir, le vieux système du parti unique doit peu à
peu céder sa place à un forme ou une autre de “régime représentatif”, adoubé par la
“communauté internationale” et désormais fondé — comme tous ses semblables — sur le
principe de l’alternance unique [...] entre une gauche “citoyenne” et moderniste, chargée de
reprendre systématiquement à son compte toutes les transformations morales et
culturelles engendrées par la dynamique capitaliste, et une droite libérale qui doit, à
l’inverse, feindre en permanence d’être “conservatrice” et de défendre les valeurs éthiques
anticapitalistes auxquelles les classes populaires sont encore massivement attachées). »
— Jean-Claude Michéa, Le Complexe d’Orphée (2011), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2021 (ISBN 9782081333208), p. 328
« À l’image du roi Midas qui transformait en or tout ce qu’il touchait, jusqu’à mettre en
péril les conditions de sa propre survie, la dynamique du marché libéral le conduit
inexorablement à soumettre à ses lois l’ensemble des activités humaines, et à
les vider ainsi de tout sens autre qu’économique ou juridique. »
— Jean-Claude Michéa, Le Complexe d’Orphée (2011), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2021 (ISBN 9782081333208), p. 301
« Dans l’ensemble des civilisations humaines, l’idée qu’il existe une différence
fondamentale entre l’enfant et l’adulte se trouve au cœur de tous leurs montages
symboliques et culturels (d’où l’importance qu’elles accordent aux différents “rites de
passages”, destinés à permettre aux nouvelles générations d’accéder à l’âge adulte par
étapes successives). C’est seulement dans la civilisation capitaliste que cette différence a
fini par être pensée comme une “discrimination” inacceptable et que, par exemple,
l’autorité de l’enseignant sur l’élève a pu être présentée par les tenants du “pédagogisme”
comme une négation scandaleuse de l’égalité de tous les êtres humains (la pratique, qui se
généralise dans les pays capitalistes anglo-saxons, d’une notation des enseignants par
leurs élèves ne constituant qu’un cas parmi d’autres de cette inexorable dérive libérale). »
— Jean-Claude Michéa, Le Complexe d’Orphée (2011), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2021 (ISBN 9782081333208), p. 290
« Si donc la loi du progrès est celle qui doit inexorablement conduire des
étouffantes “sociétés closes” à la merveilleuse “société ouverte” — qui oblige, en
d’autres termes, l’ensemble des civilisation existantes (du monde islamique aux tribus
indiennes d’Amazonie) à renoncer peu à peu à toutes ces limitations “arbitraires” qui
fondaient leur identité contingente pour se dissoudre triomphalement dans
l’unité posthistorique — au sens ou l’entendait Fukuyama — d’une société mondiale
uniformisée (unité dont le moteur ne saurait évidemment être que le développement
coordonnée du libre-échange, des “droits de l’homme” et de la culture mainstream) [...]. »
— Jean-Claude Michéa, Le Complexe d’Orphée (2011), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2021 (ISBN 9782081333208), p. 28
« [...] cet impératif de mobilisation générale des individus (ou de nomadisme — au sens où
l’entendent Attali et les différents idéologues du “mouvement migratoire naturel”) qui
constitue la clé fondamentale de tous les équilibres capitalistes : du côté du Marché —
parce que ce mouvement brownien des monades humaines apparaît comme la condition
d’une adéquation optimale de l’offre à la demande ; et du côté du Droit procédural —
parce que cette liberté intégrale de circuler et de s’installer à sa guise sur tous les sites du
marché mondial (du tourisme de masse à l’exil fiscal en passant par les “délocalisations”)
constitue l’un des droits les plus inaliénables de l’individu atomisé. »
— Jean-Claude Michéa, La Double Pensée (2008), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2008 (ISBN 9782081218390), p. 220
« [...] tout pouvoir de classe tend à imposer un usage des mots qui en défigure
méthodiquement la signification originelle (le libéralisme devient ainsi la “démocratie”, la
démocratie devient le “populisme”, le populisme devient le “fascisme”, etc.). »
— Jean-Claude Michéa, La Double Pensée (2008), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2008 (ISBN 9782081218390), p. 181
« Le libéralisme, exclut, par définition, toute idée d’une morale commune [...]. »
— Jean-Claude Michéa, La Double Pensée (2008), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2008 (ISBN 9782081218390), p. 156
« [...] la politique économique mise en œuvre par la junte chilienne — politique dictée
par Milton Friedman et ses Chicago boys — était précisément celle que les différents
gouvernements de gauche (et la Communauté européenne) allaient bientôt devoir imposer
à leurs propres peuple — de façon il est vrai plus pacifique. »
— Jean-Claude Michéa, La Double Pensée (2008), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2008 (ISBN 9782081218390), p. 126
« [...] il faut vraiment vivre dans le monde clos de la gauche universitaire pour imaginer un
seul instant que le “néoconservatisme” et la défense des traditions pourraient être
l’idéologie pratique réelle d’une société fondée sur la croissance illimitée et la
consommation obligatoire [...]. »
— Jean-Claude Michéa, La Double Pensée (2008), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2008 (ISBN 9782081218390), p. 116
« [...] le rôle insolite que joue dans la bonne conscience des classes privilégiées
contemporaines, la compassion philanthropique pour l’“exclu”, qu’il soit SDF, “sans-
papiers”, “jeune des cités” ou autre. C’est que l’exclu, si on lui confère le monopole de la
souffrance légitime, présente un double avantage : d’abord parce qu’il appartient à une
catégorie, par définition, minoritaire (ce qui restreint immédiatement le champ de
l’injustice et, partant, celui de la mauvaise conscience) ensuite, et surtout, parce
qu’il permet de renvoyer d’un seul coup, par sa seule existence, l’ensemble des
travailleurs ordinaires, inclus dans le système d’exploitation classique, du côté
des nantis et des privilégiés. »
— Jean-Claude Michéa, Impasse Adam Smith (2002), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2010 (ISBN 9782081240797), p. 68-69
« À la base de la vie humaine, on constate, en effet, qu’une partie importante des biens ont
toujours tendance à circuler, et des services à se rendre, selon ce que Mauss appelait
le cycle du don, c’est-à-dire selon la triple obligation — à la fois contraignante et
facultative, intéressé et désintéressée — de “donner, recevoir et rendre”. C’est avant tout
cette logique du don, irréductible à tout calcul purement économique, qui explique —
Serge Latouche l’a brillamment montré sur l’exemple africain — pourquoi et comment de
vastes secteurs de l’humanité continuent de mener une vie réelle — quoiqu’invisible aux
“experts” — sous l’écorce officielle des rapports capitalistes. Naturellement, il ne s’agit pas
là d’une particularité propre aux société traditionnelles et qui ne survivrait chez nous, que
sous des formes marginales ou folkloriques. »
— Jean-Claude Michéa, Impasse Adam Smith (2002), éd. Flammarion, coll. « Champs
Essais », 2010 (ISBN 9782081240797), p. 39
—
THOMAS MOLNAR
« Entre les bastions exclusivement économiques et l’internationalisme au nom du marché
planétaire, la nation reste la seule entité authentiquement pluraliste, faisant obstacle à la
fois à l’ancien égoïsme de classe et à l’unité informe, artificielle d’une société de
consommation. Face à l’américanisme, il n’y a pas de place pour une “doctrine
européenne”, par conséquent pour une autre idéologie. Il n’y a que
des nations européennes, en bonne ou mauvaise entente, en prise aux vicissitudes de
l’histoire et à la Providence. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 97
« Le programme des partis de droite dans bon nombre de pays européens est
une copie conforme de celui du conservatisme américain, lequel, entre-temps, s’est
transformé en un “néo-conservatisme”, c’est-à-dire en une idéologie du capitalisme pure et
simple, avec quelques slogans “culturels” en supplément pour faire peau neuve et surtout
pour des raisons de publicité. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 82
« Ces économistes libéraux et leurs partenaires philosophiques affirment que la nation est
une idée vague, que l’homme n’appartient qu’à lui-même, que l’appartenance à une race, à
un langage, à un pays est secondaire (Mises) et que les frontières sont périmées car seule
la mobilité de la marchandise compte. Hayek voit le grand mérite du système du libre
marché dans le fait que celui-ci ne reconnaît aucune finalité [...] autre que le bonheur
personnel. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 63
« Une fois établi que parler d’un modèle pour l’Europe équivaut à son asservissement —
car l’Europe n’est pas une et elle n’a pas besoin de modèles, autre terme pour désigner
l’uniformité [...]. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 62
« Reste l’internationalisme américain dont nous avons dit qu’il allait installer des chevaux
de Troie en Europe qui déverseront des légions d’agents, non pas en une seule nuit mais
sans cesse, au nom de la paix, du libéralisme, des entreprises transnationales, de la
pédagogie modernisée, de la liberté du commerce et autres cadeaux — que l’Europe
n’osera même pas craindre à l’instar des Troyens plus prudents. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 60
« [...] l’internationalisme n’est jamais de bon aloi, il dissimule toujours les intérêts
économiques ou idéologiques d’un peuple momentanément plus puissant que les
autres. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 59
« Dan les siècles passés, l’uniformisation se faisait par la pratique religieuse ; de nos jours,
elle s’effectue par la consommation. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 53
« [...] l’Europe, le XXe siècle, les temps modernes sont devenus “américanomorphes”. On ne
peut scruter la face ouverte ou cachée de l’Occident sans rencontrer à chaque moment une
référence à l’Amérique. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 14
« Nous avons dit ce que les États-Unis ne sont pas. Que sont-ils donc ? D’abord, un
conglomérat d’individus immigrés, ayant coupé leurs racines dans le temps et dans
l’espace, et par conséquent modelables, maniables. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 13
« [...] les États-nations de l’Europe — et cette constatation est valable pour le reste du
monde — ne se sentent pas investis d’une mission, ils ne songent pas, même en fouillant
leur for intérieur, à améliorer l’état moral de l’humanité, et ils se cantonnent,
idéologiquement, à l’intérieur de frontières qui ne ses déplacent que selon l’intérêt
national, tenant forcément compte de l’intérêt national du voisin. »
— Thomas Molnar, L’Américanologie : Triomphe d’un modèle planétaire ? (1991), éd. L’Âge
d’homme, 1991, p. 13
« En deux cents ans, les révolutionnaires ont réussi à couvrir le monde d’un
manteau d’idées fausses. Le monde vit, en conséquence, dans un état de conflit
permanent entre ces idées et la réalité, qui les rejette sans cesse, se révolte
contre elles et les défie. Selon la description de l’historien français Jean-Richard Bloch,
“L’ère des guerres de religion est la nôtre, race contre race, continent contre continent,
philosophie contre philosophie. Ces guerres sont plus cruelles et impitoyables que les
guerres traditionnelles entre les nations. Nous sommes aujourd’hui les témoins d’une
immense guerre civile à l’échelle du monde”. »
— Thomas Molnar, La Contre-révolution (1969), trad. Olivier Postel-Vinay, éd. Union
générale d’éditions, coll. « 10/18 », 1972, p. 275-276
« [...] après 1945 le pouvoir est aux mains des agents de propagande qui
détiennent les moyens communication [...]. »
— Thomas Molnar, La Contre-révolution (1969), trad. Olivier Postel-Vinay, éd. Union
générale d’éditions, coll. « 10/18 », 1972, p. 236
« Les premières générations de contre-révolutionnaires avaient placé leurs espoirs dans la
restauration de la monarchie. Derrière cette aspiration il y avait plus que de la loyauté
envers la personne du monarque et la dynastie ; il y avait, au premier chef, l’option
philosophique pour une société d’ordre, d’ordre parce qu’en un point — en la personne du
monarque — elle communiquait avec une sphère plus élevé que celle de la politique, avec
un principe d’ordre, et finalement avec l’ordre transcendantal. [...]
La génération contre-révolutionnaire d’après 1945, tout en conservant une certaine couleur
monarchique du fait de la piété familiale et de la loyauté de camaraderie, était néanmoins
prête à accepter d’autres voies que la personne d’un roi pour la recherche du sacré. Même
auprès des contre-révolutionnaires monarchistes, un roi remonté sur le trône
de sa famille n’était guère plus considéré comme autre chose qu’une version
renforcée — ou souhaitée telle — de l’“homme fort” qui, bien que sans doute
davantage capable d’occuper le sommet de l’édifice national, était empêché au
départ par son incapacité d’assurer la continuité, et donc la légitimité. Les
contre-révolutionnaires français de 1958 virent dans le comte de Paris une sorte de de
Gaulle de longue durée, et les contre-révolutionnaires espagnols voient en Don Juan, le
prétendant, une possibilité de perpétuer le général Franco. Ceux d’entre les contre-
révolutionnaires français et espagnols qui restèrent opposés à l’idée d’une telle
succession, l’étaient non par hostilité à la monarchie en tant que telle, mais
parce qu’ils comprenaient que ces prétendants, comme d’autres prétendants
(leur nombre va s’amenuisant), pourraient bien se révéler ne pas être des
“hommes providentiels”, mais au contraire se montrer moins contre-
révolutionnaires que les “hommes forts” qui les ont précédés. »
— Thomas Molnar, La Contre-révolution (1969), trad. Olivier Postel-Vinay, éd. Union
générale d’éditions, coll. « 10/18 », 1972, p. 230-232
« Arrivé à ce point, l’État libéral-démocratique est en train d’adopter une nouvelle forme,
que nombre de respectables observateurs politiques affirment n’être ni de “gauche” ni de
“droite” : l’État du “management”, de la “production centralisée », la “société de
consommation”, ou simplement l’“État industriel” de toute manière, neutre sur le plan
idéologique. »
— Thomas Molnar, La Contre-révolution (1969), trad. Olivier Postel-Vinay, éd. Union
générale d’éditions, coll. « 10/18 », 1972, p. 226
« La restauration contre-révolutionnaire a régulièrement échoué, non en raison de quelque
faiblesse intrinsèque dans la philosophie contre-révolutionnaire, mais parce que les
contre-révolutionnaires étaient largement incapables d’utiliser des méthodes
modernes, une organisation, des slogans, des partis politiques et la presse. Le
processus publicitaire était abandonné aux révolutionnaires, si bien que les contre-
révolutionnaires se sont toujours montrés sous une lumière défavorable, quand du moins
ils parvenaient à se faire connaître. »
— Thomas Molnar, La Contre-révolution (1969), trad. Olivier Postel-Vinay, éd. Union
générale d’éditions, coll. « 10/18 », 1972, p. 179
« Ce qui est essentiel, les révolutionnaires ont rapidement compris que bien que 1789 ait
ouvert la porte du pouvoir aux masses, celles-ci ne l’utiliseront jamais pour elles-mêmes,
mais permettront seulement qu’il passe entre les mains de ces nouveaux privilégiés que
sont les entraîneurs de foules, les faiseurs d’opinion et les idéologues. »
— Thomas Molnar, La Contre-révolution (1969), trad. Olivier Postel-Vinay, éd. Union
générale d’éditions, coll. « 10/18 », 1972, p. 119
« Il faut distinguer entre les intellectuels qui forment les concepts révolutionnaires et ceux
qui viennent à leur appui en amplifiant leur voix, en allongeant leurs griffes, en élargissant
leur public, en préparant ce dernier à recevoir des idées qu’il n’aurait autrement
considérées qu’avec méfiance ou indifférence. »
— Thomas Molnar, La Contre-révolution (1969), trad. Olivier Postel-Vinay, éd. Union
générale d’éditions, coll. « 10/18 », 1972, p. 68
« À mesure que les années passaient, les idées proposées par le parti révolutionnaire
paraissaient de plus en plus attrayantes, non pas en raison de leurs mérites intrinsèques,
mais parce qu’elles imprégnaient le climat intellectuel, acquéraient un monopole, isolaient
les idées contraires en arguant de leur modération pour prouver leur impotence. »
— Thomas Molnar, La Contre-révolution (1969), trad. Olivier Postel-Vinay, éd. Union
générale d’éditions, coll. « 10/18 », 1972, p. 59
PAUL MORAND
« “L’Europe viendra réellement frapper à notre porte, pour que nous nous
levions et allions chez elle sauver l’ordre”, dit enfin Dostoïevsky.
Ne nous y trompons pas ; cet ordre ne sera pas celui auquel nous fûmes habitués ; ce sera
un ordre scandaleux ; de même que le prince Myschkine casse le vase, chez le général, de
même, chez Dostoïevsky, l’Esprit brisera la matière, au milieu de la stupéfaction de tous.
Alors se découvrira le monde tel qu’il doit être. Au sentiment de l’humiliation, qui fait les
révolutions, succédera l’humilité, qui fait les religions. Même en Russie, ceux qui ont cru se
servir du Christ n’en auront été que les instruments.
Ainsi sera établi le règne de Dieu.
Nous ne sommes pas encore arrivés à cette heure-là. Il faudra d’abord descendre jusqu’au
fond de notre “conscience nocturne” sous la pression totale du malheur et le poids “de la
force des choses”.
“Si Dieu veut agir manifestement”, a dit, chez nous, l’homme le mieux fait pour
comprendre Dostoïevsky, “il faudra bien qu’il agisse de lui-même”. L’auteur d’Humiliés et
Offensés dirait de Léon Bloy qu’il est digne d’être orthodoxe. Quel étrange malaise
n’éprouvons-nous pas en pensant à ces deux cœurs humiliés, à ces deux vies d’offensés...
Peut-être comprendrons-nous mieux l’avertissement de Dostoïevsky en nous rappelant
les derniers mots de Léon Bloy dans Au seuil de l’Apocalypse : “J’attends les Cosaques et
le Saint-Esprit.” »
— Paul Morand, L’Europe russe annoncée par Dostoïevsky (1948), éd. Pressédition, 1948,
p. 69-70
« [...] il n’y aura plus de politique étrangère car aucun peuple ne sera plus étranger à un
autre. »
— Paul Morand, L’Europe russe annoncée par Dostoïevsky (1948), éd. Pressédition, 1948,
p. 9
« La beauté affreuse de notre époque c’est que les races se sont mêlées sans se
comprendre ni avoir eu le temps de se connaître et d’apprendre à se supporter. [...]
La terre cesse d’être un drapeau aux couleurs violentes : c’est l’âge sale du Métis. »
— Paul Morand, Rien que la Terre (1926), éd. Grasset & Fasquelle, coll. « Bibliothèque
Grasset », 2006, p
—
PHILIPPE MURAY
« Voilà la crise dans son ensemble et en détail : la volonté de chacun d’avoir des opinions,
la décision de chaque sujet de se montrer indépendant, la libre pensée ne faisant jamais
rien d’autre dans sa recherche de la liberté que remplacer l’ancienne religion par la
superstition, c’est-à-dire des bouts de croyance choisis pour leur commodité subjective et
remontés dans un ordre qui paraît naturel. »
— Philippe Muray, Le XIXe siècle à travers les âges (1984), éd. Denoël, 1984, p. 279
« [...] nous sommes la classe laborieuse en lutte pour la vie et la mort, contre le
capitalisme. Nous sommes les révolutionnaires en quête d'un ordre nouveau. Dès
lors, invoquer l'aide de la bourgeoisie en agitant le péril rouge est une absurdité.
L'épouvantail authentique, le véritable danger, la menace contre laquelle il y a lieu de lutter
sans relâche, vient de la droite. Cela ne nous intéresse en rien d'avoir la bourgeoisie
capitaliste comme notre alliée contre la menace du péril rouge, car, même dans le meilleur
des cas, celle-ci serait une alliée infidèle, s'efforçant d'obtenir que nous servions ses fins,
comme elle l'a déjà fait plus d'une fois avec un certain succès. »
— Benito Mussolini, Manifeste de Vérone (22 avril 1945), éd. Kontre Kulture, 2020, p. 29
« Le fascisme nie que le nombre, par le seul fait d’être le nombre, puisse diriger la société
humaine ; il nie que ce nombre puisse gouverner au moyen d’une consultation périodique ;
il affirme l’inégalité irrémédiable, féconde et bienfaisante des hommes, qui ne peuvent
devenir égaux par un fait mécanique et extrinsèque tel que le suffrage universel. »
— Benito Mussolini, La Doctrine du fascisme (1938), trad. Charles Belin, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 25-26
« La guerre, seule, porte au maximum de tension toutes les énergies humaines
et imprime une marque de noblesse aux peuples qui ont le courage de
l’affronter. »
— Benito Mussolini, La Doctrine du fascisme (1938), trad. Charles Belin, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 23
« Le fascisme est une conception religieuse, qui considère l’homme dans son
rapport sublime avec une loi supérieure, avec une Volonté objective qui
dépasse l’individu comme tel et l’élève à la dignité de membre conscient d’une
société spirituelle. »
— Benito Mussolini, La Doctrine du fascisme (1938), trad. Charles Belin, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 10
« La vie, par conséquent, telle que la conçoit le fasciste, est grave, austère, religieuse : elle
est vécue tout entière dans un monde que soutiennent les forces morales et responsables
de l’esprit. Le fasciste méprise la vie commode. »
— Benito Mussolini, La Doctrine du fascisme (1938), trad. Charles Belin, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 9
« Le fascisme veut que l’homme soit actif et engagé dans l’action avec toutes ses énergies :
virilement conscient des difficultés réelles et prêt à les braver. Il conçoit la vie comme une
lutte, il estime qu’il appartient à l’homme de conquérir une vie vraiment digne de lui, en
créant, avant tout, en lui-même, l’instrument (physique, moral, intellectuel) pour la
construire. »
— Benito Mussolini, La Doctrine du fascisme (1938), trad. Charles Belin, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 8
JACQUES NECKER
« Le règne de la violence et le règne de l’égalité ont ensemble un étroit rapport.
Les idées d’égalité absolue, en multipliant à l’infini les prétentions, obligent à multiplier de
même et les fonctions publiques et les parts à l’exercice de l’autorité [...]. »
— Jacques Necker, « Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793) », dans Œuvres
complètes, éd. Auguste Louis baron de Staël-Holstein, 1821, t. 10, p. 399
« On ne veut pas le voir ; mais il faut oser le dire, il n’y a d’égalité que pour le néant et la
mort [...]. »
— Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793), éd. Les Belles Lettres,
coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2005 (ISBN 9782251390406), p. 141
« La grande masse des hommes a besoin d’être circonscrite dans ses vœux et dans son
ambition. Les prétentions illimitées ne peuvent s’accorder avec la mesure de ses lumières et
avec les lois immuables de la nature. Cependant l’effet immédiat de l’égalité absolue est de
détruire la multitude innombrable de compartiments introduits dans la société par la
distinction des états, des rangs et des fortunes ; et nomme se trouve alors dans un espace
ouvert de toutes parts et dont il ne peut garder les différentes avenues.
Comment d’ailleurs lui parler de ses devoirs lorsqu’on l’occupe à tout moment de ses
droits ? Comment lui parler de réserve et de retenue, lorsqu’aucune barrière, aucun terme
ne se présentent à sa vue ? Comment lui parler de sacrifices obscurs, lorsque la société
entière n’est plus qu’un théâtre ? Comment lui parler enfin d’indulgence et de générosité,
lorsque pour soutenir son crédit et pour assurer son avancement politique, il a besoin de
se prêter à toutes les irritations de la multitude ? »
— Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793), éd. Les Belles Lettres,
coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2005 (ISBN 9782251390406), p. 121-122
« Étrange bizarrerie de l’homme ! Il fait la route de la vie au milieu de tous les genres
d’inégalités ; disparités de beauté, d’esprit et de talent ; disparités de lumières, de mémoire
et de prévoyance ; disparités de fortune et d’éducation ; disparités enfin de force et de
santé : il se soumet, il se résigne au moins à ces différences réelles, et il ne veut pas
supporter la supériorité la plus idéale celle des rangs et des conditions ; il ne le veut pas, et
pour la détruire, il expose l’ordre public, il compromet la liberté, il ébranle tous les
fondements de l’harmonie sociale ; et se jouant des leçons de l’expérience, c’est pour une
chimère qu’il est prêt à troubler le repos du monde.
On l’a dit de tout temps, et cependant on ne le sait pas encore ; les degrés de bonheur ne
sont point déterminés par le rang qu’on occupe dans l’ordre social. Nous marchons tous
vers un but, et quand nous y sommes parvenus, nous en cherchons un autre. Je serai
content si je puis arriver là, disent presque tous les hommes au moment où ils disposent en
imagination du domaine de l’avenir ; mais ce terme n’est point un gîte permanent, un lieu
de satisfaction et de repos : nous le croyons tel à distance ; mais quand nous y sommes
arrivés, nous voyons que c’est une simple hôtellerie, et après une courte halte, nous
demandons des chevaux pour aller plus loin. »
— Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793), éd. Les Belles Lettres,
coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2005 (ISBN 9782251390406), p. 108
« Une égalité d’intérêt, une égalité de position, une égalité d’éducation, une égalité enfin
qui n’exista jamais, pourraient seules autoriser l’attribution du droit de souveraineté à la
pluralité des suffrages ; mais aucune disposition législative, aucun acte de violence, aucune
tyrannie n’établiront un nivellement durable. C’est donc la nature qui nous créant inégaux
en esprit, en force et en talents, nous a défendu de consacrer au milieu de nous la
souveraineté du nombre : c’est elle qui nous l’a défendu dans son immuable sagesse ; et
nous ne pouvons désobéir à cette éternelle loi, sans nous exposer à une guerre intestine et
sans renoncer pour toujours aux avantages généraux et communs qui naissent de l’union
des hommes en société. »
— Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793), éd. Les Belles Lettres,
coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2005 (ISBN 9782251390406), p. 83
« Quoi qu’il en soit, on nous a bien trompés en nous présentant la liberté et l’égalité
comme deux principes inséparables ; ils ne sont unis, ils ne sont alliés qu’à titre
d’abstractions et par leur parentage métaphysique ; mais en réalité la liberté et l’égalité,
introduites ensemble sur un vaste théâtre, seront constamment en opposition. »
— Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793), éd. Les Belles Lettres,
coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2005 (ISBN 9782251390406), p. 71
« C’est par une fiction, c’est par un abus de l’idée attachée à un nom collectif, que les
adulateurs de la multitude espèrent de nous tromper. Ils nous disent bénignement que le
peuple étant la volonté générale personnifiée, il ne peut jamais devenir un tyran. Mais le
peuple n’est un être collectif que par abstraction, son unité disparaît dès qu’il veut agir : on
ne voit plus alors que ses passions et tous les mouvements irréguliers qui en font l’effet
nécessaire. Ainsi l’égalité absolue qui crée, pour ainsi dire, à l’instant, la toute-puissance du
nombre ; l’égalité absolue qui anéantit l’autorité morale, cette autorité la plus ingénieuse et
la plus utile des idées sociales ; l’égalité absolue amène forcément un despotisme
aveugle et sans frein, et dont, l’action universelle se manifeste dans tous les
sens et sous toutes les formes ; un despotisme encore, qui, loin d’être un despotisme
unique, un despotisme simple, s’exerce tour à tour, et par le peuple en tumulte, et par les
hommes instruits dans l’art de dominer la multitude, dans l’art de lui donner et de lui
choisir des passions. Quel maître cependant, quel maître à servir ou à ménager qu’une
hydre à vingt millions de tètes ! Et serait-ce aux pieds d’un tel maître que la liberté pourrait
exister ? Serait-ce environnée de tant de volontés menaçantes et dans l’abaissement d’un
sentiment craintif qu’elle pourrait conserver son noble caractère ? Certes, pour la rassurer
cette liberté au milieu d’une situation si critique et si périlleuse, il lui faut une autre
garantie, il lui faut une autre sauvegarde que des maximes hypocrites et des promesses
philosophiques. »
— Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793), éd. Les Belles Lettres,
coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2005 (ISBN 9782251390406), p. 68-69
« Quelle est cependant la vérité, si l’on ose la dire ? C’est que le peuple, contenu dans une
circonscription de vœux et d’intérêts, proportionnée au petit cercle de ses idées, aura,
comme autrefois, la morale et l’esprit de sa situation ; mais quand on le sort de sa sphère
pour l’associer en grande masse aux controverses ou aux opinions politiques, il ne mérite
et ne peut mériter aucun des éloges que la flatterie lui prodigue ; il n’est alors, il n’est le
plus souvent, ni juste, ni reconnaissant, ni doux, ni généreux, ni sage, ni clairvoyant, ni tel
enfin que ses courtisans le dépeignent. Ce n’est pas la faute de sa nature ; mais privé des
recours de l’éducation, toutes ses perceptions, toutes ses facultés intellectuelles se
ressentent de ce premier abandon. Il n’a jamais eu le temps non plus de s’éclairer lui-
même ; il n’a jamais eu le loisir d’étudier, de considérer même l’organisation sociale ; il est
quelquefois un bon juge à grande distance, parce que les différentes idées de
gouvernement se convertissent, après un long cours, dans un petit nombre de résultats
simples et à la portée du plus grand nombre des esprits ; mais ces idées, dans leur
principe, sont trop mixtes, trop composées pour devoir être soumises au tribunal du grand
nombre ou à son influence impérieuse ; et c’est pour le véritable intérêt du peuple, qu’il
faut écarter son intervention journalière.
Et peut-on ignorer encore que ses habitudes grossières l’éloignent de tous les sentiments
de modération ? Peut-on ignorer, peut-on se dissimuler que les regards fixés sur l’instant
présent, et voyant passer devant lui tous ces fantômes de bonheur qui suivent la fortune, il
doit penser que l’état social et un système d’injustice ? Il ne peut pas connaître que les
différences de propriété sont le résultat inévitable et des lois de la nature et des lois de
réunion qui ont permis aux hommes de se mêler et de vivre en communauté sans
querelles ; il peut encore moins apercevoir que l’échelle du bonheur est absolument
distinct des gradations de rangs et de richesses, et il doit prendre ses nombreux
sentiments d’envie comme autant de dénonciateurs d’une félicité parfaite à laquelle il n’a
point de part. »
— Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793), éd. Les Belles Lettres,
coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2005 (ISBN 9782251390406), p. 66-67
« Examinons cette égalité dont on entretient les hommes, cette égalité dont la chimère ne
sert qu’à les tromper et à les rendre injustes.
Elle est incompatible avec l’ordre public ; elle contrarie essentiellement la liberté ; elle est
encore en opposition avec la morale ; elle ne s’accorde pas même avec le bonheur
individuel. Voilà les vérités que je me propose de développer. »
— Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793), éd. Les Belles Lettres,
coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2005 (ISBN 9782251390406), p. 33
« Virgile nous dit qu’Éole, pour satisfaire l’orgueil et la vengeance d’une déesse outragée,
frappa de son sceptre de fer la voûte souterraine où tous les vents demeuraient enfermés.
Ils virent leur prison entrouverte ; et aussitôt s’échappant avec furie, ils agitent, ils
renversent tout sur leur passage, les temples, les palais et les plus anciens ouvrages des
hommes. Les mers s’élevèrent au-dessus des rivages, la terre parut changée dans une vaste
plaine liquide, et Neptune alors prononça ce Quos ego devenu depuis si célèbre dans
l’histoire de la fable.
Ces images poétiques semblent l’allégorie du temps présent.
Nos rois des vents, les philosophes en métaphysique, ont servi la haine et l’envie, en
répandant, en propageant partout les idées théoriques et les maximes spéculatives,
détenues jusqu’à nos jours dans les obscures retraites de l’école, ou soumises, dès l’instant
de leur action, au joug de la sagesse et de la raison. »
— Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l’égalité (1793), éd. Les Belles Lettres,
coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2005 (ISBN 9782251390406), p. 31
ERNST NIEKISCH
« Quand la bourgeoisie célèbre le culte de la nation, elle sacrifie secrètement à sa véritable
idole, le dieu Mammon. »
— Ernst Niekisch, Die dritte imperiale Figur (1935), trad. Imke Mieulet, éd. Widerstand,
1935, p.
« Le peuple russe fait preuve de cet héroïsme exceptionnel, dont les autres peuples ne sont
plus capables. »
— Ernst Niekisch, « Considérations sur un voyage en Russie » (1932), dans Écrits
Nationaux-Bolcheviks, trad. Imke Mieulet, éd. Pardès, 1991, p. 265
« Je leur veux parler de ce qui est le plus méprisable ; or c’est le dernier homme. [...]
Et de la sorte parlait au peuple Zarathoustra :
Le temps est venu pour l’homme de se fixer sa fin. De sa plus haute espérance le temps est
venu pour l’homme de semer le grain.
Riche assez est encore pour cela son terreau. Mais pauvre un jour et domestiqué sera ce
terreau et lors n’en pourra naître arbre de haute stature.
Malheur ! Arrive le temps où l’homme au-dessus de l’homme plus ne lancera la flèche et le
temps où de vibrer désapprendra la corde de son arc !
Je vous le dis, pour pouvoir engendrer une étoile qui danse il faut en soi-même encore
avoir quelque chaos. Je vous le dis, en vous-mêmes il est encore quelque chaos.
Malheur ! Arrive le temps où de l’homme ne naîtra plus aucune étoile.
Malheur ! Arrive le temps du plus méprisable des hommes, qui lui-même plus
ne se peut mépriser.
Voyez ! Je vous montre le dernier homme.
“Qu’est-ce qu’amour ? Qu’est-ce que création ? Qu’est-ce que nostalgie ? Qu’est-
ce qu’étoile ?” — ainsi demande le dernier homme, et il cligne de l’œil.
La Terre alors est devenue petite, et sur elle clopine le dernier homme, qui
rapetisse tout. Inépuisable est son engeance, comme le puceron ; le dernier homme vit
le plus vieux.
“De l’heur nous avons fait, la découverte”, — disent les derniers hommes, et ils clignent de
l’œil.
Ils ont abandonné les régions où dur était de vivre, car de chaleur on a besoin. On aime
encore le voisin et l’on se frotte à lui, car de chaleur on a besoin.
Maladie et méfiance sont à leurs yeux péché ; on les aborde précautionneusement. Bien
fou celui que font encore broncher pierres ou hommes !
Ça et là de poison une petite dose, ce qui fait agréablement rêver. Et, à la fin,
force poison, pour agréablement mourir.
Encore l’on travaille, car le travail distrait. Mais on prend soin que distraction ne soit
fatigue.
On ne devient plus pauvre et riche ; les deux sont trop pénibles. Qui encore veut
commander ? Qui encore obéir ? Les deux sont trop pénibles.
Pas de pasteur, un seul troupeau ! Chacun veut même chose, tous sont
égaux ! Qui sent d’autre manière, à l’asile des fous il entre de plein gré !
“Jadis tout le monde était fou” — disent les plus fins, et ils clignent de l’œil.
On est prudent, et l’on sait tout ce qui est advenu ; sans fin l’on peut ainsi railler. Encore on
se chamaille, mais vite on se réconcilie — sinon l’on gâte l’estomac.
Pour le jour on a son petit plaisir, et pour la nuit son petit plaisir, mais on vénère la santé.
“De l’heur, nous avons fait la découverte” — disent les derniers hommes et ils clignent de
l’œil. »
— Friedrich Nietzsche, « Ainsi parlait Zarathoustra » (1883–1885), dans Œuvres
philosophiques complètes, trad. Maurice de Gandillac, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle
Revue française », 2019 (ISBN 9782070280315), p. 27-28
Le « grouillement des mal venus, des malades, des épuisés qui commencent à
infester l’Europe [...]. »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 240
« L’aversion maladive, le fossé que la folie nationaliste a créés et crée encore entre les
peuples européens, les politiciens au regard myope et aux décisions promptes qui se sont
élevés à la faveur de cette aversion et qui ne soupçonnent pas à quel point leur politique
de division constitue simplement un intermède, tous ces facteurs et bien d’autres dont il
n’est pas encore possible de parler aujourd’hui font qu’on ne veut pas voir ou qu’on
interprète arbitrairement et mensongèrement les signes indubitables où se manifeste le
désir d’unité de l’Europe. Tous les hommes vastes et profonds de ce siècle aspirèrent au
fond, dans le secret travail de leur âme, à préparer cette synthèse nouvelle et voulurent
incarner, par anticipation, l’Européen de l’avenir : les “patries” ne furent pour eux qu’un
prétexte et ils ne leur appartinrent qu’aux heures de faiblesse, par exemple dans leur
vieillesse ; devenir des “patriotes” n’a été pour eux qu’une manière de se reposer d’eux-
mêmes. Je songe à des hommes comme Napoléon, Goethe, Beethoven, Stendhal, Heinrich
Heine, Schopenhauer ; qu’on ne m’en veuille pas si je joins à leurs noms celui de Richard
Wagner, sur le compte duquel les malentendus qu’il a lui-même créés ne doivent pas nous
égarer, — des génies comme le sien ont rarement le droit de se comprendre eux-mêmes.
[...] Ils sont fondamentalement consanguins dans leurs aspirations les plus hautes et les
plus profondes : dans leur art complexe et tumultueux, c’est l’âme de l’Europe, de l’Europe
tout entière qui se presse, s’élance, aspire... »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 177
« La femme veut s’émanciper, et pour cela elle a entrepris d’éclairer les hommes sur “la
femme en soi” : c’est là un des pires aspects de l’enlaidissement général de l’Europe. »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 151
« Comme le cavalier sur une monture qui s’emballe, nous lâchons les rênes
devant l’infini, nous autres modernes, nous autres semi-barbares, et nous ne
goûtons notre béatitude qu’au moment où notre péril est à son comble. »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 143
« Aimer ses ennemis ? Je crois que cet enseignement a été bien appris : de nos jours on
l’applique de mille manières, en grand et en petit ; déjà même il se produit parfois quelque
chose de plus haut et de plus sublime : nous apprenons à mépriser ce que nous aimons,
surtout ce que nous aimons le mieux, mais tout cela inconsciemment, sans bruit, sans
ostentation, avec cette pudeur et cette retenue de la bonté qui interdit de prononcer des
paroles pompeuses et des formules vertueuses. Aujourd’hui la pose morale nous
dégoûte. »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 136
« [...] le plus grand sera celui qui saura être le plus solitaire, le plus impénétrable, le plus à
l’écart, l’homme par-delà bien et mal, l’homme maître de ses vertus, en qui surabonde
l’énergie du vouloir ; il nommera grandeur le pouvoir d’unir la totalité à la multiplicité,
l’ampleur à la plénitude. Et, demandons-le encore une fois : la grandeur est-elle
aujourd’hui possible ? »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 133
« Peut-être ne faudra-t-il pas seulement des guerres aux Indes et des imbroglios en Asie
pour délivrer l’Europe du plus grand danger qui la menace, mais des bouleversements
intérieurs, l’éclatement de l’empire russe en une mosaïque de petits États et avant tout
l’introduction de l’imbécilité parlementaire jointe à l’obligation pour chacun de lire son
journal au petit-déjeuner. Ce n’est pas que je souhaite une pareille évolution, je souhaite
plutôt le contraire, une telle aggravation de la menace russe qu’elle contraigne enfin
l’Europe à devenir tout aussi menaçante, à se forger sa propre volonté, par le moyen d’une
nouvelle caste régnant sur l’Europe, une volonté redoutable et à longue portée capable de
se fixer des buts pour des millénaires. Ainsi l’Europe en finirait une bonne fois avec
la comédie trop prolongée de sa division en petits États et de ses velléités
divergentes, dynastiques ou démocratiques. Le temps de la petite politique est
passé : le siècle prochain déjà apportera la lutte pour la domination
universelle — l’obligation d’une grande politique. »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 127
« Les Juifs — peuple “né pour l’esclavage”, comme dit Tacite et avec lui toute l’Antiquité,
peuple “élu parmi les nations”, comme ils le disent et le croient eux-mêmes — les Juifs ont
réussi ce prodigieux renversement des valeurs qui, pour quelques millénaires, a donné à la
vie terrestre un attrait nouveau et dangereux : leurs prophètes ont fondu en une seule
notion celles de “riche”, “impie”, “méchant”, “violent”, “sensuel” et pour la première fois ont
donné un sens infamant au mot “monde”. Ce renversement des valeurs (qui veut aussi que
“pauvre” soit synonyme de “saint” et d’“ami”) fait toute l’importance du peuple juif : avec
lui commence dans l’ordre moral la révolte des esclaves. »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 108
« Ce qui est fait par amour s’accomplit toujours par-delà bien et mal. »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 92
« [...] le bilan total montre que les religions existantes, les religions souveraines, ont
contribué dans une large mesure à maintenir le type “homme” à un niveau inférieur, car
elles ont conservé trop d’êtres qui devaient périr. [...] tandis qu’ils consolaient les affligés,
réconfortaient les opprimés et les désespérés, soutenaient les débiles, offraient aux
individus atteints dans leur santé mentale et aux furieux le refuge des cloîtres ou des asiles,
que durent-ils faire au surplus, pour travailler par principe et avec bonne consciences à la
conservation de tous les êtres malades et souffrants, c’est-à-dire, en fait et en vérité, à la
détérioration de la race européenne ? »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 77
« La foi chrétienne est essentiellement un sacrifice, sacrifice de toute liberté, de toute fierté,
de toute confiance de l’esprit en soi-même ; elle est en même temps asservissement et
dépréciation de soi-même, mutilation de soi-même. Il entre de la cruauté et du phénicisme
religieux dans cette foi qui se propose à une conscience fatiguée, complexe et blasée ; elle
implique que la soumission de l’esprit soit inexprimablement douloureuse, que tout le
passé et les habitudes d’un tel esprit se rebellent contre le comble d’absurdité qui s’offre à
lui sous le nom de “foi”. Les modernes, devenus insensibles à toute la terminologie
chrétienne, ne ressentent plus la suprême horreur que comportait, pour le goût antique, le
paradoxe du “Dieu sur la croix”. Jamais et nulle part on n’avait vu un retournement aussi
prodigieux, jamais on n’avait rien conçu d’aussi effroyable et qui soulevait autant de
problèmes : cette formule annonçait le renversement de toutes les valeurs antiques. C’est
l’Orient, le profond Orient, c’est l’esclave orientale qui se vengeait ainsi de Rome et de sa
tolérance aristocratique et frivole, de la romaine “catholicité” de la foi : en tout temps ce ne
fut pas la foi, mais le détachement de la foi, cette insouciance mi-stoïque mi-souriante à
l’endroit du sérieux de la foi qui indigna les esclaves et les dressa contre leurs maîtres. La
philosophie “éclairée” indigne : l’esclave veut de l’absolu, il ne comprend que ce qui est
tyrannique, en morale comme ailleurs, il aime comme il hait, profondément, jusqu’à la
douleur, jusqu’à la maladie ; ses souffrances nombreuses et cachées se révoltent contre le
goût aristocratique qui semble nier la souffrance. Le scepticisme à l’égard de la souffrance,
simple attitude, au fond, de la morale aristocratique, n’a pas peu contribué à susciter la
dernière grande révolte d’esclaves qui a commencé avec la révolution française. »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 64-65
Ce « goût de l’“hospitalité”, péril par excellence des âmes nobles et riches qui
sont prodigues et comme insoucieuses d’elles-mêmes et portent jusqu’au vice la
vertu de générosité. On doit savoir se garder ; c’est la plus forte preuve
d’indépendance. »
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 59
« Les livres pour tout le monde sentent toujours mauvais ; une odeur de petites gens
s’élève de leurs pages. Là où le peuple mange et boit, même là où il adore, l’air
s’empuantit. N’entrez pas dans les églises si vous voulez respirer un air pur.
— Friedrich Nietzsche, « Par-delà bien et mal » (1886), dans Œuvres philosophiques
complètes, trad. Cornélius Heim, éd. Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue
française », 2019 (ISBN 9782070279456), p. 50
—
JOSE ORTEGA Y GASSET
« La raison en est évidente : l’architecture n’est, ne peut, ne doit pas être un art
exclusivement personnel. C’est un art collectif. L’architecte authentique est tout
un peuple. Il donne les ressources pour la construction, lui donne sa finalité et son unité.
Imaginons une ville construite par des architectes “géniaux”, mais laissant libre cours,
chacun de leur côté, à leur style personnel. Chacun de ces bâtiments pourrait être
magnifique, l’ensemble n’en resterait pas moins bizarre et désagréable. Dans de telles
circonstances, on accuserait inconsidérément et à grands cris une composante de tout art
sur laquelle nous ne nous sommes pas assez arrêtés : ce qui relève du caprice. La
capriciosité se manifesterait nue, cynique, indécente, intolérable. »
— José Ortega y Gasset, Le Mythe de l’homme derrière la technique (5 août 1951), trad.
Frédéric Bourgeois, Claire Mélot et Mathias Rollot, éd. Éditions Allia, 2016 (ISBN
9791030400687), p. 28-29
« [...] quelle force réelle a produit cette communauté de millions d’hommes sous la
souveraineté d’un pouvoir public que nous appelons France, Angleterre, Espagne, Italie ou
Allemagne ? Cette force ne fut pas une préalable communauté de sang, puisqu’en chacun
de ces corps collectifs coulaient des sangs très divers. Ce n’a pas été non plus l’unité
linguistique, puisque les peuples aujourd’hui réunis en un État parlaient ou parlent encore
des idiomes différents. L’homogénéité relative de race et de langue dont ils jouissent
— à supposer que ce soit une jouissance — est le résultat de la préalable unification
politique. Par conséquent, ni le sang, ni l’idiome ne font l’État national ; au
contraire, c’est l’État national qui nivelle les différences originelles des
globules rouges et des sons articulés. Et il en fut toujours ainsi. Rarement, pour ne pas
dire jamais, l’État n’aura coïncidé avec une identité préalable de sang et de langage. Pas
plus que l’Espagne n’est aujourd’hui un état national parce qu’on y parle partout
l’espagnol, l’Aragon et la Catalogne ne furent des État nationaux, parce qu’un certain jour,
arbitrairement choisi, les limites territoriales de leur souveraineté coïncidèrent avec celles
du parler aragonais ou catalan. [...] toute unité linguistique qui embrasse un territoire de
quelque étendue est presque sûrement le précipité de quelque unification politique. L’État
a toujours été le grand truchement. »
— José Ortega y Gasset, La Révolte des masses (1929), trad. Louis Parrot, éd. Les Belles
Lettres, coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2010 (ISBN 9782251390512),
p. 240-241
« Dans les chapitres précédents, j’ai tenté d’esquisser un nouveau type d’homme qui
prédomine aujourd’hui dans le monde ; je l’ai appelé l’homme-masse, et j’ai fait remarquer
que sa principale caractéristique consiste en ce que, se sachant vulgaire, il proclame le droit
à la vulgarité, et se défend de se reconnaître des instances supérieures. »
— José Ortega y Gasset, La Révolte des masses (1929), trad. Louis Parrot, éd. Les Belles
Lettres, coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2010 (ISBN 9782251390512),
p. 209
« L’homme masse actuel est en effet un primitif qui s’est glissé par les coulisses sur la vieille
scène de la civilisation. »
— José Ortega y Gasset, La Révolte des masses (1929), trad. Louis Parrot, éd. Les Belles
Lettres, coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2010 (ISBN 9782251390512),
p. 157-158
« [...] le monde d’alors était si rudement organisé que les catastrophes y étaient fréquentes,
et qu’il n’y avait en lui rien de sûr, rien d’abondant ni de stable. Mais les masses nouvelles
se trouvent devant un paysage plein de possibilités et, de plus, sûr, et tout préparé, tout à
leur disposition, sans qu’il leur en coûte quelque effort préalable, de la même manière que
nous trouvons le soleil sur les hauteurs, sans que nous ayons eu à le monter sur nos
épaules. »
— José Ortega y Gasset, La Révolte des masses (1929), trad. Louis Parrot, éd. Les Belles
Lettres, coll. « Bibliothèque classique de la liberté », 2010 (ISBN 9782251390512),
p. 132
“The new aristocracy was made up for the most part of bureaucrats, scientists,
technicians, trade-union organizers, publicity experts, sociologists, teachers,
journalists, and professional politicians. These people, whose origins lay in the
salaried middle class and the upper grades of the working class, had been shaped and
brought together by the barren world of monopoly industry and centralized government.”
— George Orwell, Nineteen Eighty-four (1949)
« La nouvelle aristocratie était constituée, pour la plus grande part, de
bureaucrates, de savants, de techniciens, d’organisateurs de syndicats,
d’experts en publicité, de sociologues, de professeurs, de journalistes et de
politiciens professionnels. Ces gens, qui sortaient de la classe moyenne
salariée et des rangs supérieurs de la classe ouvrière, avaient été formés
et réunis par le monde stérile du monopole industriel et du gouvernement
centralisé. »
— George Orwell, 1984 (1949), trad. Amélie Audiberti, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2001 (ISBN 9782070368228), p. 291
“Every record has been destroyed or falsified, every book rewritten, every
picture has been repainted, every statue and street building has been renamed,
every date has been altered. And that process is continuing day by day and
minute by minute. History has stopped. Nothing exists except an endless
present in which the Party is always right.”
— George Orwell, Nineteen Eighty-four (1949)
« Tous les documents ont été détruits ou falsifiés, tous les livres récrits,
tous les tableaux repeints. Toutes les statues, les rues, les édifices, ont
changé de nom, toutes les dates ont été modifiées. Et le processus continue
tous les jours, à chaque minute. L’histoire s’est arrêtée. Rien n’existe
qu’un présent éternel dans lequel le Parti a toujours raison. »
— George Orwell, 1984 (1949), trad. Amélie Audiberti, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2001 (ISBN 9782070368228), p. 221
“[...] it was not easy to make a journey by yourself without attracting attention. For
distances of less than a hundred kilometers it was not necessary to get your
passport endorsed, but sometimes there were patrols hanging about the railway
stations, who examined the papers of any Party member they found there and asked
awkward questions. However, no patrols had appeared, and on the walk from the station
he had made sure by cautious backward glances that he was not being followed.”
— George Orwell, Nineteen Eighty-four (1949)
« Il n’était pas facile en outre, de voyager seul sans attirer l’attention.
Pour des distances inférieures à une centaine de kilomètres, il n’était pas
nécessaire de faire viser son passeport, mais il y avait parfois des
patrouilles qui rôdaient du côté des gares, examinaient les papiers de tous
les membres du Parti qu’elles rencontraient, et posaient des questions
embarrassantes. Cependant, aucune patrouille n’était apparue et, sorti de
la gare, il s’était assuré en chemin, par de prudents regards jetés en
arrière, qu’il n’était pas suivi. »
— George Orwell, 1984 (1949), trad. Amélie Audiberti, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2001 (ISBN 9782070368228), p. 158
“‘Don’t you see that the whole aim of Newspeak is to narrow the range of
thought? In the end we shall make thoughtcrime literally impossible, because
there will be no words in which to express it. Every concept that can ever be
needed, will be expressed by exactly one word, with its meaning rigidly defined
and all its subsidiary meanings rubbed out and forgotten. [...] the process will still
be continuing long after you and I are dead. Every year fewer and fewer words, and the
range of consciousness always a little smaller. Even now, of course, there’s no reason or
excuse for committing thoughtcrime. It’s merely a question of self-discipline, reality-
control. But in the end there won’t be any need even for that. The Revolution will be
complete when the language is perfect. [...] By 2050 earlier, probably — all real knowledge
of Oldspeak will have disappeared. The whole literature of the past will have been
destroyed. Chaucer, Shakespeare, Milton, Byron — they’ll exist only in Newspeak versions,
not merely changed into something different, but actually changed into something
contradictory of what they used to be. Even the literature of the Party will change. Even the
slogans will change. How could you have a slogan like ”freedom is slavery” when the
concept of freedom has been abolished? [...] In fact there will be no thought, as we
understand it now. Orthodoxy means not thinking — not needing to think. Orthodoxy is
unconsciousness.’”
— George Orwell, Nineteen Eighty-four (1949)
« “Ne voyez-vous pas que le véritable but du novlangue est de restreindre
les limites de la pensée ? À la fin, nous rendrons littéralement impossible
le crime par la pensée car il n’y aura plus de mots pour l’exprimer. Tous
les concepts nécessaires seront exprimés chacun exactement par un seul
mot dont le sens sera délimité. Toutes les significations subsidiaires
seront supprimées et oubliées. [...] le processus continuera encore
longtemps après que vous et moi nous serons morts. Chaque année, de
moins en moins de mots, et le champ de la conscience de plus en plus
restreint. Il n’y a plus, dès maintenant, c’est certain, d’excuse ou de raison
au crime par la pensée. C’est simplement une question de discipline
personnelle, de maîtrise de soi-même. Mais même cette discipline sera
inutile en fin de compte. La Révolution sera complète quand le langage
sera parfait. [...] Vers 2050, plus tôt probablement, toute connaissance de
l’ancienne langue aura disparu. Toute la littérature du passé aura été
détruite. Chaucer, Shakespeare, Milton, Byron n’existeront plus qu’en
versions novlangue. Ils ne seront pas changés simplement en quelque
chose de différent, ils seront changés en quelque chose qui sera le
contraire de ce qu’ils étaient jusque-là. Même la littérature du Parti
changera. Même les slogans changeront. Comment pourrait-il y avoir une
devise comme « La liberté c’est l’esclavage » alors que le concept même
de la liberté aura été aboli ? [...] En fait, il n’y aura pas de pensée telle que
nous la comprenons maintenant. Orthodoxie signifie non-pensant, qui n’a
pas besoin de pensée, l’orthodoxie, c’est l’inconscience.” »
— George Orwell, 1984 (1949), trad. Amélie Audiberti, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2001 (ISBN 9782070368228), p. 79-81
« Jour par jour, et presque minute par minute, le passé était mis à jour. »
— George Orwell, 1984 (1949), trad. Amélie Audiberti, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2001 (ISBN 9782070368228), p. 62
« Si tous les autres acceptaient le mensonge imposée par le Parti — si tous les rapports
racontaient la même chose —, le mensonge passait dans l’histoire et devenait
vérité. “Celui qui a le contrôle du passé, disait le slogan du Parti, a le contrôle
du futur. Celui qui a le contrôle du présent a le contrôle du passé.” »
— George Orwell, 1984 (1949), trad. Amélie Audiberti, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 2001 (ISBN 9782070368228), p. 54
“All animals are equal, but some animals are more equal than others.”
— George Orwell, Animal Farm (1945)
« Tous les animaux sont égaux mais certains sont plus égaux que
d’autres. »
— George Orwell, La Ferme des animaux (1945), trad. Jean Quéval, éd.
Gallimard, coll. « Folio », 1993 (ISBN 9782070375165), p. 144
BLAISE PASCAL
« Comme la paix dans les États n’a pour objet que de conserver les biens des peuples en
assurance, de même la paix dans l’Église n’a pour objet que de conserver en assurance la
vérité qui est son bien, et le trésor où est son cœur. Et comme ce serait aller contre la
fin de la paix que de laisser entrer les étrangers dans un État pour le piller,
sans s’y opposer, de crainte d’en troubler le repos (parce que la paix n’étant juste et
utile que pour la sûreté du bien elle devient injuste et pernicieuse, quand elle le laisse
perdre, et la guerre qui le peut défendre devient et juste et nécessaire), de même, dans
l’Église, quand la vérité est offensée par les ennemis de la foi, quand on veut l’arracher du
cœur des fidèles pour y faire régner l’erreur, de demeurer en paix alors, serait-ce servir
l’Église, ou la trahir ? serait-ce la défendre ou la ruiner ? »
— Blaise Pascal, Petit écrit de M. Pascal touchant l’obligation de défendre la vérité (1670),
éd. Brunschvicg 949 — Lafuma 974, 1670, Copie d’un fragment joint au Recueil RC2, p. 611
« Jésus sera en agonie jusqu’à la fin du monde : il ne faut pas dormir pendant ce
temps-là. »
— Blaise Pascal, Pensées (1670), éd. Flammarion, coll. « Garnier Flammarion », 1993 (ISBN
9782080702661), p. 198
« L’homme n’est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l’ange
fait la bête. »
— Blaise Pascal, Pensées (1670), éd. Flammarion, coll. « Garnier Flammarion », 1993 (ISBN
9782080702661), p. 151
« L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature ; mais c’est un roseau pensant. Il
ne faut pas que l’univers entier s’arme pour l’écraser : une vapeur, une goutte d’eau, suffit
pour le tuer. Mais, quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que ce qui
le tue, parce qu’il sait qu’il meurt, et l’avantage que l’univers a sur lui ; l’univers n’en sait
rien.
Toute notre dignité consiste donc en la pensée. C’est de là qu’il faut nous relever et non de
l’espace et de la durée, que nous ne saurions remplir. Travaillons donc à bien penser : voilà
le principe de la morale. »
— Blaise Pascal, Pensées (1670), éd. Flammarion, coll. « Garnier Flammarion », 1993 (ISBN
9782080702661), p. 149-150
« Il est juste que ce qui est juste soit suivi. Il est nécessaire que ce qui est le
plus fort soit suivi. La justice sans la force est impuissante : la force sans la
justice est tyrannique. La justice sans force est contredite, parce qu’il y a toujours des
méchants ; la force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la
force ; et pour cela faire que ce qui est juste soit fort, ou que ce qui est fort soit juste.
La justice est sujette à dispute, la force est très reconnaissable et sans dispute. Ainsi on n’a
pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice, et a dit qu’elle était
injuste, et a dit que c’était elle qui était juste. Et ainsi ne pouvant faire que ce qui est juste
fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste. »
— Blaise Pascal, Pensées (1670), éd. Flammarion, coll. « Garnier Flammarion », 1993 (ISBN
9782080702661), p. 137
« Mahomet s’est établi en tuant ; Jésus-Christ en faisant tuer les siens. Mahomet en
défendant de lire ; Jésus-Christ en ordonnant de lire. Enfin cela est si contraire, que si
Mahomet a pris la voie de réussir humainement, Jésus-Christ a pris celle de périr
humainement. Et, au lieu de conclure, que puisque Mahomet a réussi, Jésus-Christ a bien
pu réussir ; il faut dire, que puisque Mahomet a réussi, le Christianisme devait périr s’il n’eût
été soutenu par une force toute divine. »
— Blaise Pascal, Pensées (1670), éd. Port-Royal, 1670, p. 133-134
« Les hommes ont mépris pour la religion ; ils en ont haine et peur qu’elle soit
vraie. »
— Blaise Pascal, Pensées (1670), éd. Flammarion, coll. « Garnier
Flammarion », 1993 (ISBN 9782080702661), p. 101
—
PIER PAOLO PASOLINI
« [...] Le refus a toujours été un geste essentiel. Les saints, les ermites, mais aussi les
intellectuels, les rares qui ont fait l’histoire sont ceux qui ont dit non, pas les
courtisans et les assistants des cardinaux. »
— Pier Paolo Pasolini, « Nous sommes tous en danger » (1er novembre 1975),
dans Entretiens (1949-1975), trad. Marie-Ange Patrizio, éd. Delga, 2021, Interview accordée
à Furio Colombo le 1er novembre 1975, publiée par Tuttolibri (supplément culturel du
quotidien La Stampa), 8 novembre 1975, p. 130
« [...] la Démocratie chrétienne est un néant idéologique qui tient tout à fait de la mafia :
une fois perdue la référence à l’Église, elle peut se mouler elle-même, telle une cire
malodorante, dans les formes exigées par une référence plus directe au Pouvoir
économique réel, c’est-à-dire au nouveau mode de production (caractérisé par l’énorme
quantité et par le superflu) et à son idéologie hédoniste implicite (qui est à l’exact opposé
de la religion). »
— Pier Paolo Pasolini, Lettres luthériennes (1975), trad. Anna Rocchi Pullberg, éd. Seuil, coll.
« Points », 2002 (ISBN 9782020533041), p. 90
« Hors d’Italie, dans les pays “développés” — surtout en France — les jeux sont
faits depuis déjà un bon bout de temps. Il y a longtemps que le peuple n’existe
plus, anthropologiquement. Pour les bourgeois français, le peuple est formé de
Marocains ou de Grecs, de Portugais ou de Tunisiens. Et ceux-ci, les pauvres diables, n’ont
qu’à apprendre au plus vite à se comporter comme les bourgeois français. C’est ce que
pensent les intellectuels aussi bien de gauche que de droite, tout à fait pareillement. »
— Pier Paolo Pasolini, Lettres luthériennes (1975), trad. Anna Rocchi Pullberg, éd. Seuil, coll.
« Points », 2002 (ISBN 9782020533041), p. 85
« Entre les deux il y a eu justement la fin d’un univers. Des millions et des millions de
paysans et même d’ouvriers — dans le Sud et dans le Nord —, qui depuis un temps bien
plus long certainement que les deux mille ans du catholicisme étaient restés égaux à eux-
mêmes, ont été détruits. Leur “qualité de vie” a changé radicalement. D’une part ils ont
émigré en masse vers les pays bourgeois, de l’autre ils ont été atteints par la civilisation
bourgeoise. Leur nature a été anéantie par la volonté des producteurs de marchandise. »
— Pier Paolo Pasolini, Lettres luthériennes (1975), trad. Anna Rocchi Pullberg, éd. Seuil, coll.
« Points », 2002 (ISBN 9782020533041), p. 76
« On peut dire sans hésitations que le vrai fascisme, c’est le pouvoir de cette
société de consommation. »
— Pier Paolo Pasolini, Rai, 7 février 1974
« Et puis cette société impose une précocité génératrice de névroses. Gamins et gamines à
peine pubères ont — dans l’espace obligé d’une permissivité qui rend la normalité
paroxystique — une expérience du sexe qui leur enlève tout exaltation dans ce domaine,
toute possibilité de sublimation dans les autres. »
— Pier Paolo Pasolini, Écrits corsaires (1973-1975), trad. Philippe Guilhon, éd. Flammarion,
2009 (ISBN 9782081226623), p. 175
« Et les mariages : autrefois, c’était des fêtes, et leur caractère d’institution — si stupide et
sinistre — était moins fort du fait qu’il était institué par, précisément, un processus heureux
et joyeux. Aujourd’hui, [...], les mariages ressemblent à de hâtifs rites funèbres. »
— Pier Paolo Pasolini, Écrits corsaires (1973-1975), trad. Philippe Guilhon, éd. Flammarion,
2009 (ISBN 9782081226623), p. 148
« La légalisation de l’avortement est, en effet — c’est indubitable — une énorme
commodité pour la majorité. Surtout parce qu’elle rendrait encore plus facile le coït —
l’accouplement hétérosexuel — pour lequel il n’y aurait pratiquement plus d’obstacles.
Mais cette liberté du coït du “couple” ainsi qu’il est compris par la majorité — cette
merveilleuse permissivité à son égard ! — qui l’a tacitement voulue, tacitement
promulguée et faite entrer, de façon désormais irréversible, dans les habitudes ? Le pouvoir
de la consommation, le nouveau fascisme. Il s’est emparé des exigences de liberté, disons,
libérales et progressistes et, en les faisant siennes, il les a rendues vaines et en a changé la
nature.
Aujourd’hui, la liberté sexuelle de la majorité est en réalité une convention, une obligation,
un devoir social, une anxiété sociale, une caractéristique inévitable de la qualité de vie du
consommateur. Bref, la fausse libération du bien-être a créé une situation tout aussi folle et
peut-être davantage que celle du temps de la pauvreté. En effet :
1° Le résultat d’une liberté sexuelle “offerte” par le pouvoir est une véritable névrose
générale. La facilité a créé l’obsession ; parce qu’il s’agit d’une obsession “induite” et
imposée, qui dérive du fait que la tolérance du pouvoir concerne uniquement l’exigence
sexuelle exprimée par le conformisme de la majorité. »
— Pier Paolo Pasolini, Écrits corsaires (1973-1975), trad. Philippe Guilhon, éd. Flammarion,
2009 (ISBN 9782081226623), p. 145
« C’est possible, mais ceci est certain : si les fautes de l’Église ont été nombreuses et
graves dans sa longue histoire de pouvoir, la plus grave de toutes serait
d’accepter passivement d’être liquidée par un pouvoir qui se moque de
l’Évangile. Dans une perspective radicale, peut-être utopiste ou, c’est le moment de le
dire, millénariste, ce que l’Église devrait faire pour éviter une fin sans gloire est donc bien
clair : elle devrait passer à l’opposition et, pour passer à l’opposition, se nier elle-
même. Elle devrait passer à l’opposition contre un pouvoir qui l’a si cyniquement
abandonnée en envisageant sans gêne de la réduire à du pur folklore. Elle devrait se nier
elle-même, pour reconquérir les fidèles (ou ceux qui ont un “nouveau” besoin de foi) qui
l’ont abandonnée à cause justement de ce qu’elle est.
En reprenant une lutte qui d’ailleurs est dans sa tradition (la lutte de la papauté contre
l’empire), mais pas pour la conquête du pouvoir, l’Église pourrait être le guide, grandiose
mais non autoritaire, de tous ceux qui refusent (c’est un marxiste qui parle, et justement en
qualité de marxiste) le nouveau pouvoir de la consommation, qui est complètement
irreligieux, totalitaire, violent, faussement tolérant et même, plus répressif que jamais,
corrupteur, dégradant (jamais plus qu’aujourd’hui n’a eu de sens l’affirmation de Marx
selon laquelle le Capital transforme la dignité humaine en marchandise d’échange). C’est
donc ce refus que l’Église pourrait symboliser, en retournant à ses origines, c’est-à-dire à
l’opposition et à la révolte. Faire cela ou accepter un pouvoir qui ne veut plus d’elle, ou
alors se suicider. »
— Pier Paolo Pasolini, Écrits corsaires (1973-1975), trad. Philippe Guilhon, éd. Flammarion,
2009 (ISBN 9782081226623), p. 121
« Quand je dis que le récent petit discours de Castelgandolfo est historique, j’entends faire
référence à tout le cours de l’histoire de l’Église catholique, c’est-à-dire de l’histoire
humaine (eurocentrique et, c’est déjà ça, culturocentrique). Paul VI a en effet admis
explicitement que l’Église a été vaincue par le monde ; que le rôle de l’Église
est soudain devenu incertain et superflu ; que le Pouvoir réel n’a plus besoin de
l’Église et l’abandonne donc à elle-même ; que les problèmes sociaux trouvent leurs
solutions au cœur d’une société dans laquelle l’Église n’a plus de prestige : que n’existe
plus le problème des “pauvres”, c’est-à-dire le problème le plus important pour l’Église, etc.
[...] ces aveux marquent en effet la fin de l’Église ou, tout au moins, la fin du rôle
traditionnel que l’Église a tenu de façon ininterrompue pendant deux mille ans. »
— Pier Paolo Pasolini, Écrits corsaires (1973-1975), trad. Philippe Guilhon, éd. Flammarion,
2009 (ISBN 9782081226623), p. 118-120
« En vérité, nous avons eu une attitude fasciste envers les fascistes (je parle surtout des
jeunes) : nous avons hâtivement et impitoyablement voulu croire qu’ils étaient prédestinés
à être fascistes par leur race et que, face à cette détermination de leur destin, il n’y avait
rien à faire. »
— Pier Paolo Pasolini, Écrits corsaires (1973-1975), trad. Philippe Guilhon, éd. Flammarion,
2009 (ISBN 9782081226623), p. 81
« La tradition, c’est une grandeur qui peut s’exprimer d’un geste. Mille pères l’ont vu, et à
travers eux, au cours des siècles, il est devenu pur comme un vol d’oiseau, élémentaire
comme le mouvement d’une vague. Mais seule la Révolution sauve le Passé. »
— Pier Paolo Pasolini, La Rage (1963), trad. Patrizia Atzei et Benoît Casas, éd. Nous,
2020 (ISBN 9782370840868), p. 75
« Une nation qui recommence son histoire restitue avant tout aux hommes
l’humilité de ressembler avec innocence aux pères. La tradition ! »
— Pier Paolo Pasolini, La Rage (1963), trad. Patrizia Atzei et Benoît Casas, éd. Nous,
2020 (ISBN 9782370840868), p. 75
« La joie de l’Américain qui se sent identique à un autre million d’Américains dans l’amour
de la démocratie : voilà la maladie du monde futur ! Quand le monde classique sera
épuisé — quand tous les paysans et les artisans seront morts — quand
l’industrie aura rendu inarrêtable le cycle de la production et de la
consommation — alors notre histoire prendra fin. »
— Pier Paolo Pasolini, La Rage (1963), trad. Patrizia Atzei et Benoît Casas, éd. Nous,
2020 (ISBN 9782370840868), p. 70
« Mais, avec la vieille Europe qui se réinstalle dans ses gonds solennels, naît
l’Europe moderne :
le Néo-capitalisme ;
le Marché Commun, les États-Unis d’Europe, les industriels éclairés et
“fraternels”, les problèmes des relations humaines, du temps libre, de
l’aliénation.
« Tradition et marxisme. Oui, j’y insiste : seul le marxisme sauve la tradition ; seuls les
marxistes aiment le passé. »
— Pier Paolo Pasolini, « Vie nuove » (22 novembre 1962), dans Dialogues en public (1960-
1965), trad. François Dupuigrenet Desroussilles, éd. Éditions du Sorbier, 1980, p. 130
“Another struggle has been the struggle to keep the value of a local and
particular character, of a particular culture in this awful maelstrom, this
awful avalanche toward uniformity. The whole fight is for the conservation of the
individual soul.”
— « Ezra Pound, The Art of Poetry No. 5 », Donald Hall, The Paris Review, Summer-Fall
1962 (lire en ligne)
« C’était encore un combat que de maintenir certaines valeurs locales et
particulières, une culture à part dans ce terrible maelström, cette terrible
avalanche vers l’uniformité. Le combat se ramène à la préservation de
l’âme individuelle. »
— « Ezra Pound, The Art of Poetry No. 5 », Donald Hall, The Paris Review,
Été-Automne 1962 (lire en ligne)
“Well, if I ain’t worth more alive than dead, that’s that. If a man isn’t willing to take
some risk for his opinions, either his opinions are no good or he’s no good.”
— As quoted after his arrest for treason by the U.S. Army in Genoa in May 1945
— (en)« The Cheerful Outlook », Ezra Pound quoted by Henry Robinson Luce, Time, June
11 1945
« Si un homme n’est pas prêt à affronter un risque quelconque pour ses
opinions, ou bien ses opinions ne valent rien, ou bien c’est lui qui ne vaut
rien. »
— Cité après son arrestation pour trahison par l’armée américaine à Gênes en
mai 1945
— (fr)« The Cheerful Outlook », Ezra Pound cité par Henry Robinson
Luce, Time, 11 juin 1945
« L’Internationale de l’or trônant au-dessus des limbes célestes, assiste avec des yeux
étincelants de cupidité et d’avidité aux agitations démentes de l’humanité. Et le temps
approche où l’humanité tout entière servira enfin complètement le veau d’or, comme une
esclave de l’intérêt. »
— Gottfried Feder, Manifeste pour briser les chaînes de l’usure (1919), éd. Lire rend libre,
2021, p. 63
« Le veau d’or est l’empire macabre, invisible, mystérieux des grandes puissances
financières. Mais le veau d’or est aussi un état d’esprit ; c’est l’adoration de ces puissances
financières par tous ceux qui sont contaminés par le poison du veau d’or. »
— Gottfried Feder, Manifeste pour briser les chaînes de l’usure (1919), éd. Lire rend libre,
2021, p. 16
« Le seul remède, le seul moyen radical pour guérir l’humanité, c’est de briser les chaînes
de l’usure. »
— Gottfried Feder, Manifeste pour briser les chaînes de l’usure (1919), éd. Lire rend libre,
2021, p. 6
« La religion du veau d’or est la maladie grave qui embrasse tout et prospère
en toutes choses, religion dont souffrent notre monde civilisé actuel et même
l’humanité tout entière. Elle est semblable à une épidémie dévastatrice, un
poison dévorant qui afflige tous les peuples de la terre. »
— Gottfried Feder, Manifeste pour briser les chaînes de l’usure (1919), éd. Lire rend libre,
2021, p. 5
« [...] vous avez détruit l’idéal, auquel vous avez substitué la fantaisie ; vous avez éliminé la
justice : voici maintenant que vous niez les collectivités, les existences générales, et par
suite les idées générales, les lois générales, ce qui veut dire, la nature même et la société. »
— Pierre-Joseph Proudhon, La Pornocratie (1875), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250250), p. 86-87
« Le renoncement à l’idéal est un signe de notre décadence. »
— Pierre-Joseph Proudhon, La Pornocratie (1875), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250250), p. 83
« Notre décomposition sociale marche à vue d’œil ; plus j’en étudie les
symptômes, plus je découvre que les libertés publiques ont pour base et pour
sauvegarde les mœurs domestiques ; que les mêmes maximes par lesquelles on
détruit les droits des peuples sont celles par lesquelles vous et vos coryphées vous
renversez l’ordre des familles ; que toute tyrannie, en un mot, se résout en prostitution, et
que la prostitution, étudiée dans son principe, est précisément ce que vous, mesdames,
appelez [...] affranchissement de la femme ou amour libre. »
— Pierre-Joseph Proudhon, La Pornocratie (1875), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250250), p. 12
« Un homme qui travaille à assurer sa dynastie, qui bâtit pour l’éternité, est
moins à craindre que des parvenus pressés de s’enrichir et de signaler leur
passage par quelque folie d’éclat. »
— Pierre-Joseph Proudhon, De la Création de l’Ordre dans l’Humanité (1843), éd. A.
Lacroix et Cie, 1873, p. 372
« Juifs. Faire un article contre cette race, qui envenime tout, en se fourrant partout, sans
jamais se fondre avec aucun peuple. Demander son expulsion de France, à l’exception des
individus mariés avec des françaises ; abolir les synagogues, ne les admettre à aucun
emploi, poursuivre enfin l’abolition de ce culte. Ce n’est pas pour rien que les chrétiens les
ont appelés déicides. Le juif est l’ennemi du genre humain. Il faut renvoyer cette
race en Asie, ou l’exterminer... Par le fer ou par le feu, ou par l’expulsion, il faut que le
juif disparaisse... Tolérer les vieillards qui n’engendrent plus. Travail à faire. Ce que les
peuples du Moyen Age haïssaient d’instinct, je le hais avec réflexion et irrévocablement. »
— Pierre-Joseph Proudhon, Carnets, 26 décembre 1847
—
CHARLES PEGUY
« On oublie trop que le monde moderne, sous une autre face, est le monde
bourgeois, le monde capitaliste. C’est même un spectacle amusant que de voir
comment nos socialistes antichrétiens, particulièrement anticatholiques, insoucieux de la
contradiction, encensent le même monde sous le nom de moderne et le flétrissent, le
même sous le nom de bourgeois et de capitaliste. »
— Charles Péguy, « De la situation faite au parti intellectuel devant les accidents de la
gloire temporelle » (1907), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle
Revue française, 1916-1955, t. 3, p.
« Le monde moderne avilit. Il avilit la cité, il avilit l’homme. Il avilit l’amour ; il avilit la
femme. Il avilit la race ; il avilit l’enfant. Il avilit la nation ; il avilit la famille. Il avilit même, il a
réussi à avilir ce qu’il y a peut-être de plus difficile à avilir au Monde : il avilit la mort. »
— Charles Péguy, « De la situation faite au parti intellectuel devant les accidents de la
gloire temporelle » (1907), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle
Revue française, 1916-1955, t. 3, p.
« [...] en ce monde moderne tout le monde [est] moderne et même ceux qui
combattent le moderne et encore plus ceux qui sont investis pour le combattre
et qui ne le combattent pas. »
— Charles Péguy cité par Joseph Lotte, « Entretien du samedi 27 septembre 1913, de 5 à 7
heures du soir », dans Lettres et entretiens, éd. L’Artisan du livre, 1927, p. 196
« Comme je l’ai mis tant de fois dans ces cahiers, du temps qu’on ne me lisait pas, le débat
n’est pas proprement entre la République et la Monarchie, entre la République et la
Royauté, surtout si on les considère comme des formes politiques, comme deux formes
politiques, il n’est point seulement, il n’est point exactement entre l’ancien régime et le
nouveau régime français, le monde moderne ne s’oppose pas seulement à l’ancien régime
français, il s’oppose, il se contrarie à toutes les anciennes cultures ensemble, à tous les
anciens régimes ensemble, à toutes les anciennes cités ensemble, à tout ce qui est culture,
à tout ce qui est cité. C’est en effet la première fois dans l’histoire du monde que
tout un monde vit et prospère, paraît prospérer contre toute culture. »
— Charles Péguy, « Notre Jeunesse » (1910), dans Œuvres complètes de Charles Péguy,
éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 4, p. 47
« Aussitôt après nous commence le monde que nous avons nommé, que nous ne
cesserons pas de nommer le monde moderne. Le monde qui fait le malin. Le monde des
intelligents, des avancés, de ceux qui savent, de ceux à qui on n’en remontre pas, de ceux à
qui on n’en fait pas accroire. Le monde de ceux à qui on n’a plus rien à apprendre. Le
monde de ceux qui font le malin. Le monde de ceux qui ne sont pas des dupes, des
imbéciles. Comme nous. C’est-à-dire : le monde de ceux qui ne croient à rien, pas même à
l’athéisme, qui ne se dévouent, qui ne se sacrifient à rien. Exactement : le monde de ceux
qui n’ont pas de mystique. Et qui s’en vantent. »
— Charles Péguy, « Notre Jeunesse » (1910), dans Œuvres complètes de Charles Péguy,
éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 4, p. 46
« [...] c’est une question de savoir si nos fidélités modernes, je veux dire nos fidélités
chrétiennes baignant dans le monde moderne, assaillies, battues de tous les vents, battues
de tant d’épreuves, et qui viennent de passer intactes par ces deux siècles d’épreuves
intellectuelles [...] n’en reçoivent pas une singulière beauté, une beauté non encore
obtenue, et une singulière grandeur aux yeux de Dieu. [...] Nos fidélités sont des citadelles.
Ces croisades qui transportaient des peuples, [...] qui jetaient des continents les uns sur les
autres, [...] elles ont reflué chez nous, elles sont revenues jusque dans nos maisons. [...] Le
moindre de nous est littéralement un croisé. [...] nous sommes tous des îlots battus d’une
incessante tempête et nos maisons sont toutes des forteresses dans la mer. »
— Charles Péguy, « Un Nouveau théologien » (1911), dans Œuvres complètes de Charles
Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 13, p. 101-105
« Il y a quelque chose de pire que d’avoir une mauvaise pensée. C’est d'avoir une pensée
toute faite. Il y a quelque chose de pire que d’avoir une mauvaise âme et même de se faire
une mauvaise âme. C’est d’avoir une âme toute faite. Il y a quelque chose de pire que
d’avoir une âme même perverse. C’est d’avoir une âme habituée. »
— Charles Péguy, « Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie
cartésienne » (posthume, 1914), dans Œuvres complètes de Charles Péguy, éd. La
Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 9, p. 96
« Le dernier des serfs était de la même chrétienté que le roi. Aujourd’hui il n’y
a plus aucune cité. »
— Charles Péguy, « Notre Jeunesse » (1910), dans Œuvres complètes de Charles Péguy,
éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 4, p. 210-211
« Le triomphe des démagogies est passager. Mais les ruines sont éternelles. On
ne retrouve jamais tout. En pareille matière il est beaucoup plus facile de perdre que de
retrouver. »
— Charles Péguy, « Les Suppliants parallèles » (17 décembre 1905), dans Œuvres
complètes de Charles Péguy, éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 2, p. 470
« On ne saura jamais tout ce que la peur de ne pas paraître assez avancé aura
fait commettre de lâchetés à nos Français. »
— Charles Péguy, « Notre Patrie » (1905), dans Œuvres complètes de Charles Péguy,
éd. La Nouvelle Revue française, 1916-1955, t. 2, p. 322
—
JEAN RASPAIL
« Quand on représente une cause (presque) perdue, il faut sonner de la
trompette, sauter sur son cheval et tenter la dernière sortie, faute de quoi l’on
meurt de vieillesse triste au fond de la forteresse oubliée que personne
n’assiège plus parce que la vie s’en est allée ailleurs. »
— Jean Raspail, Le Roi au-delà de la mer (2000), éd. Albin Michel, 2000 (ISBN
9782226114310), p.
« On peut juger une race sur l’allure de ses femmes. C’est le meilleur test. »
— Jean Raspail, Journal peau-rouge (1975), éd. Robert Laffont, 1975, p. 169
« Est-ce que le mot de racisme aura encore une signification quelconque pour eux ? De
mon temps, il prenait déjà des sens si divers que ce qui n’était pour moi que la simple
constatation de l’incompatibilité des races lorsqu’elles se partagent un même
milieu ambiant, devenait aussitôt, pour la plupart de mes contemporains, un appel à la
haine et un crime contre la dignité humaine. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 387-388
« J’y relève la présence d’un nombre considérable de femmes blanches, mais toutes
mariées, comme Élise, à des hommes d’autre race. Elles furent très écoutées, avec
enthousiasme chez la plupart, avec un certain malaise chez la Blancs plus réticents, car tous
avaient conscience qu’elles symbolisaient la mort de la race blanche. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 369
« Lydie mourut misérablement, putain pour Hindous à Nice, dégoûtée de tout et d’elle-
même. Chaque quartier d’immigrants possédait alors son cheptel de femmes
blanches, dont chacun pouvait user. Violée dès le lundi de Pâques au milieu de ses
draps blancs qu’elle avait étendus en signe de bienvenue, Lydie avait suivi, à moitié
consentante dans l’errance du début, une troupe d’Hindous vigoureux qui se l’étaient
adjugée en copropriété, car elle était très belle, et sa peau très blanche. Plus tard, l’ordre
revenu, quand les bandes s'étaient fixées, on l’avait enfermée dans une villa, à Nice, en
compagnie d’autres filles qui avaient subi le même sort. Un gardien les nourrissait et
ouvrait la porte à qui voulait. Ainsi les femmes blanches perdirent vite l’orgueil de leur
peau. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 344-345
« [...] c’est que jamais la multitude ne sembla prendre conscience que ce pays où
elle débarquait pût appartenir à d’autres. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 338
« Une cascade de corps dont le mouvement ininterrompu paraissait liquide. Les bateaux se
vidaient de toute part comme une baignoire qui déborde. Le tiers monde dégoulinait
et l’Occident lui servait d’égout. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 333
« Ce fut sans nul doute la guerre totale la moins meurtrière de toute l’histoire
du monde. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 332
« Au surplus, a toujours vécu dans un recoin de l’esprit cet espoir étrange d’une
destruction totale, seul remède à l’ennui qui consume l’homme moderne. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 310
« Telle fille qui se sentait suivie et guettée chaque jour — petite maladie urbaine courante
— cette fois rencontra la mort sous l’effroyable visage de la folie sexuelle. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 307
« L’ennemi, le vrai, se trouve toujours derrière les lignes, dans votre dos,
jamais devant ni dedans. Tous les militaires savent cela et combien, dans toutes les
armées de tous les temps, n’ont pas été tentés de laisser tomber l’ennemi désigné pour se
retourner sur l’arrière et lui régler son compte une bonne fois ! »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 291
« Deux camps se font face. L’un croit aux miracles. L’autre n’y croit plus. Celui
qui soulèvera les montagnes est celui qui a conservé la foi. Il vaincra. Chez
l’autre, le doute mortel a détruit tout ressort. Il sera vaincu. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 172
« Quant à nous, fils spirituels des Grecs, des Latins, des moines judéo-chrétiens
et des Barbares de l’Est, peut-être, pour achever l’œuvre d’art, fallait-il
entrouvrir notre porte [...], ne serait-ce que pour équilibrer le matérialisme
contemporain ? »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 146
« “C’est la guerre ! Voici la carte du front.” “Évidemment, c’est la guerre”, dit Marchefer,
“mais qui nous croira ? Une guerre où l’ennemi désarmé perd des morts tous les jours à
plusieurs milliers de kilomètres d’ici ! On a bien trop endormi la population pour qu’elle
possède encore la force d’imaginer d’autres formes de guerre que celles que l’on
commémore bêtement chaque année.” »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 142
« Il n’y a plus de tiers monde, voilà un mot que vous aviez inventé pour garder vos
distances. Il y a le monde tout court, et ce monde-là sera submergé par la vie. Mon pays
n’est plus qu’un fleuve de sperme qui vient brusquement de changer de lit et
roule vers l’Occident. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 85
« Vous êtes allés trop loin [...] et vous l’avez fait volontairement car vous pensez
profondément tout ce que vous faites. [...] Tout cela en pariant sur la sensibilité que vous
avez dévoyée des braves gens de chez nous, en leur inculquant je ne sais quel remords
pour plier la charité chrétienne à vos étranges volontés, en accablant nos classes moyenne
prospères de complexes dégradants. [...] Vous avez crée de toutes pièces au cœur de
notre monde blanc un problème racial qui le détruira et c’est là votre but.
Aucun de vous n’a la fierté de sa peau blanche et de ce qu’elle signifie. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 66
« Votre univers n’a aucune signification pour eux. Ils ne chercheront pas à
comprendre. [...] ils feront du feu avec votre porte de chêne. Ils couvriront de caca
votre terrasse et s’essuieront les mains aux livres de votre bibliothèque. Ils cracheront votre
vin. [...] Assis sur leurs talons, ils regarderont flamber vos fauteuils. »
— Jean Raspail, Le Camp des Saints (1973), éd. Robert Laffont, 2011 (ISBN
9782221123966), p. 51
ANTOINE DE RIVAROL
« Le commerce rapproche les espaces et le crédit rapproche les temps. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1458
« Il y a deux grandes traditions dans l’antiquité qu’on n’a pas assez remarquées : Satan, le
premier des anges, veut détrôner son bienfaiteur : le fruit de la science du bien et du mal
donne la mort. L’une enseigne que l’ingratitude est inhérente à tout être créé, l’autre que
les lumières ne rendent pas les peuples heureux. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1441
« Femmes. La dévote croit aux prêtres, l’indévote aux philosophes ; mais toutes deux sont
également crédules. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1432
« L’idée fondamentale de la religion juive, c’est que Dieu a préféré les juifs à tous les
peuples. Par cette idée seule, Moïse éleva un mur d’airain entre sa nation et toutes les
nations ; il fit plus, il dévoua ce malheureux peuple à une véritable excommunication de la
part de l’univers, et ce qui est admirable, c’est que, par cette haine universelle, il lui assura
l’immortalité. L’amour ou même l’indifférence des autres peuples auraient fait disparaître
les juifs depuis longtemps, puisqu’ils se seraient fondus par les mariages, par l’effet des
conquêtes, par les dispersions ; mais cette haine du genre humain les a conservés, et c’est
par elle qu’ils sont effectivement impérissables. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1432
« Quand le peuple est plus éclairé que le trône, il est bien près d’une révolution. C’est ce
qui arriva en 1789, où le trône se trouva éclipsé au milieu des lumières. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1430
« Comme roi, Louis XVI mérita ses malheurs, parce qu’il ne sut pas faire son
métier ; comme homme, il ne les méritait pas. Ses vertus le rendirent étranger
à son peuple. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1425
« On peut comparer la société à une salle de spectacle : on n’y était aux loges que parce
qu’on payait davantage. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1409
« La guerre est le tribunal des rois, et les victoires sont ses arrêts. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1405
« Les souverains ne doivent jamais oublier que, le peuple étant toujours enfant, le
gouvernement doit toujours être père. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1404
« Un peuple sans territoire et sans religion périrait, comme Antée, suspendu entre le ciel et
le terre. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1404
« Le plus grand malheur qui puisse arriver aux particuliers comme aux
peuples, c’est de trop se souvenir de ce qu’ils ont été et de ce qu’ils ne peuvent
plus être. Rome moderne se donna des tribuns et des consuls. Le temps est comme un
fleuve, il ne remonte pas vers la source. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1403
« Les peuples les plus civilisés sont aussi voisins de la barbarie que le fer le plus poli l’est de
la rouille. Les peuples, comme les métaux, n’ont de brillant que les surfaces. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1399
« Les droits sont des propriétés appuyées sur la puissance. Si la puissance tombe, les droits
tombent aussi. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1398
« La souveraineté est la puissance conservatrice. Pour qu’il y ait souveraineté, il faut qu’il y
ait puissance. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1398
« Les Grecs jouissent d’une universalité qu’ils ne perdront pas de sitôt puisque les nations
éclairées la transmettent à la postérité. C’est qu’avec leur mythologie ils ont baptisé toutes
les passions ; et avec leur philosophie tous les systèmes. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1394
« Le malheur du monde est qu’on ne met pas autant d’esprit à ses actions qu’à ses
paroles. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1391
« L’invention de l’écriture diminua la multitude des dialectes comme les grands corps
politiques la multitude des petits peuples. »
— Antoine de Rivarol, « Pensées », dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1389
« Les vrais représentants d’une nation, par exemple, ne sont pas ceux qui font
sa volonté du moment, mais ceux qui interprètent et suivent sa volonté
éternelle ; cette volonté qui ne diffère jamais de sa gloire et de son bonheur. »
— Antoine de Rivarol, « Discours préliminaire du Nouveau dictionnaire de la langue
française » (1797), dans Œuvres complètes, éd. Robert Laffont, coll.
« Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 1263
« [...] une nation n’a point de droits contraires à son bonheur [...]. »
— Antoine de Rivarol, « Journal politique national » (1789), dans Œuvres complètes, éd.
Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 862
« Le français, par un privilège unique, est seul resté fidèle à l’ordre direct [...] ; la syntaxe
française est incorruptible. C’est de là que résulte cette admirable clarté, base éternelle de
notre langue. Ce qui n’est pas clair n’est pas français. »
— Antoine de Rivarol, « De l’universalité de la langue française » (1783), dans Œuvres
complètes, éd. Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2018 (ISBN 9782221144992), p. 528
—
ALFRED ROSENBERG
« [...] le sionisme a conjugué sa politique mondiale à la politique mondiale de
l’Angleterre et l’a menée à bien. [...] l’Anglais a depuis toujours témoigné d’une
prédilection envers l’Ancien Testament, une des causes spirituelles qui a eu un effet
retentissant au cours du temps sur la politique mondiale, fait distinctement authentifié par
la personne même de Disraëli et par ses œuvres. [...]
Ainsi, main dans la main, par cette politique judéo-anglo-saxonne, s’est engagé le
processus de destruction de l’Allemagne et de la Russie. »
— Alfred Rosenberg, Le Congrès de la grande conjuration de Bâle (1927), trad. C.E.A, éd.
Éditions du Lore, 2009, p. 59-61
« Le puissant mouvement révolutionnaire qui parcourt les peuples de couleur, est une
conséquence directe de la guerre mondiale. Les chefs des puissances de l’Entente portent
la lourde responsabilité de ce crime monstrueux : avoir mobilisé des noirs et des métis
contre le peuple allemand et les avoir engagés, en insultant l’Allemagne pendant des
années, dans une guerre contre un empire de race blanche. La plus grande faute incombe
indubitablement à la France. Même après la guerre, elle envoya des gens de couleur
occuper la Rhénanie, le berceau de la culture de l’Europe ; cette France dont les plé-
nipotentiaires militaires déclarèrent très ouvertement devant le parlement que les Français
étaient un “peuple de cent millions” d’âmes ne disposant pas de deux armées, une blanche
et une de couleur, mais bien d’“une seule”. Par cette déclaration, véritable programme, la
politique française a mis la race noire à égalité avec la blanche et, comme cent quarante
ans plus tôt la France introduisit l’émancipation des juifs ; elle est aujourd’hui la
première responsable de la souillure de l’Europe par les nègres. Si cela
continue, on ne pourra plus la considérer comme un État européen, mais
plutôt comme une colonie de l’Afrique, dirigée par des juifs. »
— Alfred Rosenberg, Le Mythe du vingtième siècle (1930), trad. Adler von Scholle, éd.
Avalon, 1986, p. 603-604
« Un peuple est perdu en tant que peuple, il est mort en tant que tel, si,
regardant son avenir, il refuse d’y voir la continuité de son passé. Il ne s’agit pas
de savoir quel fut ce passé : si une nation en arrive à renier véritablement et réellement les
symboles de son premier éveil, elle a alors rejeté les racines de son être et de son devenir
et elle s’est condamnée à la stérilité. L’Histoire n’est pas le développement d’un rien en
quelque chose, ni même la transformation de quelque chose d’insignifiant en quelque
chose de grand ; ce n’est pas non plus la mutation d’un être en un autre tout différent,
mais le récit d’un réveil racial et populaire à travers des héros, des dieux ou des poètes, qui
servent de modèles pour toujours. »
— Alfred Rosenberg, Le Mythe du vingtième siècle (1930), trad. Adler von Scholle, éd.
Avalon, 1986, p. 631
—
ERNST VON SALOMON
« Nous ne luttons pas pour que le peuple devienne heureux. Nous luttons pour
lui imposer une destinée. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 276
« Ah ! oui, dans les sagas de l’Islande. Les réprouvés de ce temps-là étaient des
hommes qui ne voulaient pas se plier aux règlements des castes et des familles
et qui pour cette raison furent chassés des régions de l’ordre. Ils avaient le
droit de conserver leurs armes, mais tous ceux qui étaient plus forts qu’eux pouvaient
impunément les tuer. C’étaient toujours les hommes les plus guerriers qui refusaient de
s’incliner devant les misérables convenances et qui pour cette raison furent mis hors la loi.
Mais peu à peu les honnis devinrent les honnisseurs, les tribus dépérirent parce qu’elles
s’étaient amputées de leurs forces les plus combatives ; puis un jour les réprouvés
sortirent des bois où ils s’étaient réfugiés et finalement ils furent quand même
les maîtres du pays. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 396-397
« Pour se défendre contre l’ouest, le Russe ne lui a-t-il pas aujourd’hui encore
emprunté une théorie qui, bien que destinée à combattre les tendances
actuelles de l’ouest, est l’enfant de celui-ci. C’est chasser le diable
“Capitalisme” par le Belzébuth “Marxisme”. Mais enfin ce qui importe c’est que ce
Belzébuth s’est coiffé du bonnet d’astrakan et que sous sa tyrannie le Russe est devenu
plus fort qu’il ne l’a jamais été. Ce qui importe c’est qu’une attaque contre le bolchevisme
est une attaque contre la liberté nationale des Russes. C’est parce que chez eux les
contrastes étaient plus marqués qu’autre part qu’ils ont trouvé aussi une solution plus
violente. La Russie a trouvé dans le bolchevisme, dans l’Union des républiques soviétiques
— qui sont d’ailleurs une union de républiques nationales pourvue d’une structure
rigoureusement hiérarchique — la forme d’État qui lui convenait, tandis que l’Allemagne ne
l’a pas trouvée avec sa république de Weimar.
— Ces étranges nationalistes parlent de révolution mondiale.
— Ils parlent de révolution mondiale et veulent dire : Russie. Le rayonnement d’un peuple
s’étend aussi loin que s’étend sa force et aussi loin également rayonne son idée
maîtresse. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 273
« Leur plus grande ambition est d’entrer comme égaux dans le système des grandes
puissances de l’Europe de l’Ouest. Et quand je dis de l’ouest je pense à ces puissances qui
se sont soumises à la tyrannie des lois économiques parce que sous elles elles ont pu se
développer. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 272
« Depuis longtemps déjà nous ne nous occupions plus de ce qui se passait officiellement,
et nous faisions fi des soucis des élus et des électeurs. Les délibérations des parlements, les
décrets des ministres, les conférences des puissances, malgré leur bruant charivari, ne
parvenaient pas à pénétrer jusqu’à nous. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 242
« Il y avait là quelque chose qui voulait vivre d’une vie plus résolue. Un grand nombre
d’hommes étaient sans patrie, beaucoup se sentaient encore dépourvus d’une mesure
d’évaluation, beaucoup étaient prêts à reconnaître que de nouvelles vertus avaient besoin
pour croître d’un nouveau sol et que les désirs les plus profonds ne pouvaient plus se
réaliser par le seul progrès. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 186
« Puis vint un groupe de nègres conduits par un caporal blanc. Les nègres avaient des
jambes maigres, toute droites, sur lesquelles les bandes molletière glissaient, et ils
marchaient avec le bout des pieds tourné à l’intérieur. Ils ricanaient sous leur casque plat
en montrant de larges dents luisantes, ils regardaient insouciants, de tous côtés, et se
délectaient visiblement du sentiment d’une supériorité imprévue. C’était donc là “les
représentants de l’humanité et de la démocratie !” On les avait ramassés dans tous les
coins du globe pour venir nous châtier, nous les barbares. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 181
« Dans les provinces baltiques, à cette époque, les soldats chantaient une chanson de
marche qui commençait par ce vers : “Nous sommes les derniers hommes allemands qui
sont restés devant l’ennemi.” À ce moment nous nous sentions les derniers Allemands tout
court. Nous étions presque reconnaissants au gouvernement de ce qu’il nous excluait de
l’Allemagne, car les liens étant ainsi officiellement brisés, nous n’avions plus à nous
inquiéter des soucis que notre activité pouvait donner au Reich. De toute manière nous
aurions agi comme nous agissions à présent. Nous ne pouvions plus nous sentir engagés
envers la patrie, parce que nous croyions ne plus pouvoir la respecter. Nous ne pouvions
plus respecter la patrie parce que nous aimions la nation.
[...] Ne pouvons plus être des Allemands, nous étions devenus des Russes.
Cette devise “contre le bolchevisme”, nous ne la prenions pas du tout au sérieux. Nous
avions suffisamment eu l’occasion d’apprendre à qui une telle lutte profiterait. La première
lutte nous l’avions gagnée pour l’Angleterre. Dans cette deuxième lutte nous voulions
frustrer les Britanniques du profit de la première. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 111-114
« Mais nous qui luttions sous les anciennes couleurs, nous avons sauvé la
patrie du chaos. Que Dieu nous pardonne, ce fut notre péché contre l’esprit.
Nous avons cru sauver le citoyen et nous avons sauvé le bourgeois.
Le chaos est plus favorable au devenir que l’ordre. La résignation est l’ennemie de tout
mouvement. En sauvant la patrie du chaos nous fermions la porte au devenir et nous
ouvrions les voies à la résignation. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 106
« Nous semblions nous reconnaître d’après un signe secret, nous nous retrouvions loin du
monde des normes bourgeoises, ne comptant sur aucune récompense, n’étant conscients
d’aucun but. Plus de choses s’étaient anéanties pour nous que les seules valeurs que nous
avions tenues dans la main. Pour nous s’était aussi brisée la gangue qui nous retenait
prisonnier. La chaîne s’était rompue, nous étions libres. Notre sang, soudain en
effervescence, nous jetait dans l’ivresse et l’aventure, nous jetait à travers l’espace et le
péril, mais il poussait aussi l’un vers l’autre ceux qui s’étaient reconnus parents jusqu’au
plus profond de leurs fibres. Nous étions une ligue de guerriers, imprégnés de toute la
passion du monde, farouches dans le désir, joyeux dans nos haines comme dans nos
amours. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 78-79
« Ils constituaient des foyers de troubles dans leurs compagnies ; la guerre habitait encore
en eux. C’est elle qui les avait formés : elle avait fait jaillir leurs plus secrets penchants
comme des étincelles, elle avait donné un sens à leur vie et sanctifié leur enjeu. Ils étaient
des revêches, des indomptés, des hommes rejetés du monde des normes bourgeoises, des
dispersés qui à présent se rassemblaient par petites bandes pour chercher leur front de
combat. Il ne manquait certes pas de drapeaux autour desquels ils pouvaient se rallier.
Lequel flottait au vent le plus fièrement ? Il y avait encore beaucoup de châteaux forts à
prendre à l’assaut et nombre de bandes ennemies qui campaient un peu partout. Ils étaient
des lansquenets, mais quel était le pays dont ils étaient les serviteurs ? Ils avaient reconnu
la grande duperie de cette paix et ils ne voulaient pas y participer. Ils ne voulaient pas
participer à ce confortable ordre social qu’on leur vantait en termes mielleux. Ils étaient
restés sous les armes, obéissant à un instinct infaillible. Ils tiraient à droite et à gauche
parce tirer les amusait, ils traversaient le pays de-ci de-là parce que les horizons lointains
leur apportaient sans cesse de nouveaux et dangereux souffles, parce que de tous côtés
l’odeur de mâles aventures les appelait. Et cependant chacun d’eux cherchait quelque
chose d’autre, et donnait à ses recherches d’autres raisons ; on ne leur avait pas encore
passé le Mot. Ils le présentaient ce mot et même ils le prononçaient et il avaient honte de
l’entendre sonner comme une monnaie usée, et ils le tournaient et le retournaient, pleins
d’une angoisse secrète et ils le bannissaient du cours de leurs mille conversations et
malgré cela il ne cessait de planer sur eux. Enveloppé de ténèbres compactes il était là
debout, ce mot, rongé par l’usure des siècles, enchanteur, plein de mystère, rayonnant de
force magique ; on le sentait et pourtant on ne le reconnaissait pas, on l’aimait et pourtant
on ne le prononçait pas. Ce mot c’était : Allemagne.
Où était l’Allemagne ? À Weimar ? À Berlin ? Une fois elle avait été au front, mais le front
s’était désagrégé. Puis nous avions cru la trouver à l’intérieur du pays, mais le pays nous
trompait. — Il était plein de chants et de paroles, mais qui sonnaient faux. Où était
l’Allemagne ? Était-elle chez le peuple ? Mais le peuple réclamait du pain et rien ne lui
importait que d’avoir le ventre rempli. Était-ce l’état ? Mais l’État bavard cherchait sa voie
parmi les mots et la trouvait dans la résignation.
L’Allemagne brûlait sourdement dans quelques cerveaux hardis. L’Allemagne
était là où on luttait pour elle ; elle se montrait là où des ennemis en armes voulaient
s’emparer de ses biens, elle brillait d’un éclat radieux là où ceux qui étaient pénétrés de son
esprit risquaient pour elle le dernier enjeu. L’Allemagne était à la frontière. Les articles de la
paix de Versailles nous disaient où était l’Allemagne. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 69-70
« Tout suants et essoufflés par la marche, nous percevions le son des mélopées nègres qui
s’échappait des bars et des boîtes où l’on s’amuse, nous croisions des profiteurs et des
grues ivres et tapageurs, nous voyions les bourgeois que nous nous étions chargés de
protéger assis dans des cabarets chics avec des filles qu’ils enlaçaient étroitement devant
des tables couvertes de bouteilles et de verres étincelants [...]. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 47
« Au milieu de décembre les troupes allemandes rentrant du front traversèrent notre ville.
Ce n’était qu’une division qui venait de la région de Verdun. [...]
Les unes après les autres les compagnies passaient, des groupes d’une petitesse pitoyable,
mais qui apportaient avec eux un souffle redoutable, une atmosphère de sang, d’acier, de
matières explosives et de décisions immédiates. Haïssaient-ils la révolution, marchaient-ils
contre elle ? Se rangeront-ils, eux, ouvriers, paysans, étudiants, dans notre monde,
deviendront-ils tels que nous, adopteront-ils nos soucis, nos volontés, nos luttes et nos
buts ?
Et soudain la lumière se fit en moi : allons donc, ceux-là n’étaient pas des ouvriers, des
paysans, des étudiants, ils n’étaient pas des artisans, des employés, des commerçants, des
fonctionnaires, ils étaient des soldats ! Non pas des hommes déguisés, non pas des
hommes qui obéissaient à un commandement, non pas les délégués d’autres hommes, ils
étaient des hommes qui obéissaient à un appel intérieur, à l’appel secret du
sang et de l’esprit, ils étaient des volontaires d’une façon ou d’une autre, des hommes
qui avaient appris une rude fraternité et appris à connaître ce qu’il y a derrière les choses et
qui avaient trouvé dans la guerre une patrie. Patrie, peuple, nation. Voilà de grands mots,
mais quand nous les prononcions, ils sonnaient faux. Et c’était pour cela qu’ils ne voulaient
pas être des nôtres, pour cela cette entrée muette, imposante, fantomale.
Car la patrie était en eux et en eux la nation. Ce que nos voix proclamaient, ce dont nous
nous vantions devant le monde, avait revêtu chez eux un sens secret ; c’était pour cela
qu’ils avaient vécu, c’était pour cela qui leur avait commandé de faire ce que nous plaisions
à appeler le devoir. Subitement la patrie était en eux, elle avait changé de place, elle avait
été saisie par le tourbillon gigantesque des dernières années et emportée au front. Le
front, c’était leur pays, c’était la nation, la patrie. Et jamais ils n’en parlaient. Jamais
ils n’avaient cru aux paroles, ils ne croyaient qu’en eux-mêmes. La guerre les tenait, la
guerre les dominait, la guerre ne les laisserait jamais échapper et jamais ils ne pourraient
revenir ni nous appartenir tout à fait. Ils auront toujours la guerre dans le sang, la mort
toute proche, l’horreur, l’ivresse et le fer. Ce qui se passait maintenant, ce retour, cette
rentrée dans le monde paisible, ordonné, bourgeois, c’était une transplantation, une fraude
et qui ne pouvait pas réussir. La guerre est finie ; les guerriers marchent
toujours. Et parce que la masse est ici debout, que la foule est ici debout, qu’ici le peuple
allemand est en voie de réorganisation, en fermentation, maladroit, composé de mille
petits désirs, de mille petits courants, contenant tous les éléments, c’est pour cela qu’eux
les soldats marcheront pour la Révolution, pour une autre révolution, qu’ils le veuillent ou
non, fouettés par des forces que nous ne pouvons prévoir. De simples mécontents s’ils se
dispersent, une dynamite formidable s’ils restent unis. La guerre n’a pas apporté de
réponse, elle n’a amené aucune décision ; les guerriers marchent toujours. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 34-43
« Maintenant il n’y avait plus de victoires, maintenant les drapeaux avaient perdu leur
radieuse signification, maintenant, à cette heure trouble où tout s’écroulait, la voie à
laquelle j’avais été destiné était devenue impraticable, maintenant je me trouvais, sans
pouvoir m’en saisir, en face de choses nouvelles, en face de choses qui accouraient de
toutes parts, de choses sans forme, où ne vibrait aucun appel clair, aucune certitude qui
pénétrât irrésistiblement le cerveau, sauf une pourtant, celle que ce monde où j’étais
enraciné, que je n'avais eu ni à accepter ni à adopter, et dont j’étais une parcelle, allait
s’effondrer définitivement, irrévocablement, et qu’il ne ressusciterait pas, qu’il ne renaîtrait
jamais. »
— Ernst von Salomon, Les Réprouvés (1930), trad. Andhrée Vaillant et Jean Kuckenburg,
éd. Omnia, coll. « Omnia poche », 2016 (ISBN 9782841006076), p. 16-17
CARL SCHMITT
« Jusqu’à la fin des temps, la doctrine augustinienne des deux cités séparées
sera sans cesse replacée devant les deux points de la question qui reste
ouverte : quis judicabit ? quis interpretabitur ? Qui résoudra in concreto,
pour l’homme agissant dans son autonomie de créature, la question de ce qui
est spirituel et de ce qui est temporel [...]. »
— Carl Schmitt, Théologie politique (1969), trad. Jean-Louis Schlegel, éd. Gallimard, coll.
« La Nouvelle Revue française », 1988 (ISBN 9782070713776), p. 165
« Notre société présente est progressiste au sens d’un progrès débridé, qui
associe une scientificité dénuée de valeurs, la liberté d’exploitation industrielle
et la libre croissance de la consommation ; elle implique en outre le pluralisme des
groupes sociaux, qui signifie un pluralisme généralisé des valeurs [...]. »
— Carl Schmitt, Théologie politique (1969), trad. Jean-Louis Schlegel, éd. Gallimard, coll.
« La Nouvelle Revue française », 1988 (ISBN 9782070713776), p. 105
« Pour l’instant, le partisan représente encore une parcelle de vrai sol ; il est l’un
des derniers à monter la garde sur la terre ferme, cet élément de l’histoire
universelle dont la destruction n’est pas encore parachevée. »
— Carl Schmitt, Théorie du partisan (1963), trad. Marie-Louise Steinhauser, éd. Flammarion,
coll. « Champs Classiques », 2009 (ISBN 9782081228733), p. 278
« La guerre sur mer est dans une large mesure une guerre commerciale ; en regard de la
guerre sur terre, elle dispose de son propre espace et de ses concepts propres d’ennemi et
de butin. »
— Carl Schmitt, Théorie du partisan (1963), trad. Marie-Louise Steinhauser, éd. Flammarion,
coll. « Champs Classiques », 2009 (ISBN 9782081228733), p. 233
« Les théologiens tendent à définir l’ennemi comme quelque chose qui doit être anéanti »
— Carl Schmitt, Ex Captivitate Salus (1950)
« Qui est mon ennemi ? Celui-là est-il mon ennemi qui me donne ma pâture dans la
cellule ? Il m’habille et me loge même. La cellule est l’habit dont il me fait don. Je me
demande donc : Qui peut enfin être mon ennemi ?...
Qui puis-je donc reconnaître enfin comme mon ennemi ? Manifestement celui-là seul qui
me met en question. En tant que je le reconnais comme mon ennemi, je reconnais qu’il me
met en question. Mais qui peut véritablement me mettre en question ? Il n’y a que moi-
même. Ou encore mon frère. C’est cela. L’autre est mon frère. L’autre se trouve être mon
frère, et mon frère se trouve être mon ennemi. Adam et Eve avaient deux fils, Caïn et Abel.
Ainsi commence l’histoire de l’humanité. C’est ainsi que nous apparaît le père de toutes
choses. C’est là la tension dialectique qui maintient l’histoire du monde en mouvement, et
l’histoire du monde n’est pas encore parvenue à son terme.
Sois donc prudent et ne parle pas à la légère de l’ennemi. On se classe d’après son ennemi.
On se situe d’après ce que l’on reconnaît comme son ennemi. Ils sont vraiment inquiétants
les exterminateurs qui se justifient par le fait qu’il faut exterminer les exterminateurs. Mais
toute extermination n’est qu’une auto-destruction. L’ennemi par contre, c’est l’autre.
Souviens-toi des belles phrases du philosophe : la relation à moi-même par l’autre
constitue ce qui est véritablement infini. La négation de la négation, dit le philosophe, n’est
pas une neutralisation, mais tout ce qui est véritablement infini en dépend. Ce qui est
véritablement infini est le concept fondamental de la philosophie : L’ennemi est la figure de
notre propre question.
Malheur à celui qui n’a pas d'ami, car son ennemi sera là pour le faire passer en jugement.
Malheur à celui qui n’a pas d'ennemi, car je serai son ennemi le jour du jugement dernier. »
— Carl Schmitt, Ex Captivitate Salus (1950)
« L’évolution planétaire avait depuis bien longtemps conduit à un claire dilemme entre
univers et plurivers, entre monopole et polypole, c’est-à-dire à la question de savoir si la
planète [est] mûre pour le monopole global d’une seule puissance, ou si c’est un pluralisme
de grands-espaces, de sphères d’intervention et de zones culturelles ordonnés en eux-
mêmes et coexistants qui allait déterminer le nouveau droit des gens de la terre. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 241
« L’idée d’une économie mondiale libre n’impliquait pas seulement le dépassement des
frontières politiques des États. Elle comportait aussi comme présupposé essentiel un
standard de la constitution interne de chacun des membres de cet ordre juridique
international ; elle présupposait que chaque membre introduisît chez lui un minimum
d’ordre constitutionnel. Ce minimum consistait en la liberté, c’est-à-dire en la séparation
d’une sphère publique relevant de l’État et du domaine du privé, et se ramenait donc avant
tout au caractère non étatique de la propriété, du commerce et de l’industrie. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 233
« [...] la doctrine européenne du droit des gens de la fin XIXe siècle a perdu la conscience
de la structure spatiale de l’ordre qui avait été jusqu’alors le sien. Avec une naïveté parfaite,
elle a pris un processus d’universalisation toujours plus ample, toujours plus extérieur et
toujours plus superficiel pour une victoire du droit des gens européen. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 231
« [...] l’Europe n’était plus le centre sacral de la terre [...]. C’est dans cette dans confusion
que se liquéfiait l’ancien nomos de la terre déterminé à partir de l’Europe. [...]
Il devenait impossible d’arrête le déclin du Jus publicum Europaeum dans un droit mondial
indistinctement universel. La dissolution dans l’universel général était en même temps la
destruction de l’ordre global existant de la terre. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 225
« La séparation entre terre ferme et mer libre était la caractéristique fondamentale du Jus
publicum Europaeum. Cet ordre spatial n’est pas issu pour l’essentiel de prises de terres
intra-européennes et de mutation territoriales, mais de la prise par les Européens d’un
nouveau monde non européen, en conjonction avec une prise de la mer libre par
l’Angleterre. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 182
« Seule l’Angleterre réussit à passer d’une existence médiévale, féodale et terrienne, à une
existence maritime, qui, purement marine, contrebalançait l’ensemble du monde terrien.
L’Espagne resta trop terrienne et ne put se maintenir comme puissance maritime malgré
son empire d’outre mer. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 172
« C’est ainsi que l’ordre mondial européo-centrique apparu au XVIe siècle s’est divisé
en deux ordres globaux distincts, terrestres et maritime. Pour la première fois dans
l’histoire de l’humanité, l’opposition entre terre et mer devient le fondement universel d’un
droit des gens global. Désormais il ne s’agit plus de mers intérieures comme la
Méditerranée, l’Adriatique ou la Baltique, mais du globe terrestre entier mesuré
géographiquement, et de ses océans. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 172
« [...] seuls les saints seraient pleinement en mesure de réaliser l’union entre amour
intérieur et lutte extérieure qui appartient à l’essence de la guerre juste. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 156
« [...] c’est là que réside le nouveau concept de guerre, qui a cessé d’être discriminatoire et
permet de traiter les États belligérants comme égaux devant le droit des gens, c’est-à-dire
comme situés tous les deux sur le même plan juridique et moral en tant que justi hostes et
de tenir séparées les notions d’ennemi et de criminel. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 149
« [...] des notions humanitaires neutres, telles que l’“Humanité” prise dans son ensemble et
la civitas maxima ; sur le plan pratique concret et à l’intérieur de l’État, cela revint à ériger
en standard constitutionnel mondial l’État de droit bourgeois et la société individualiste
bourgeoise. »
— Carl Schmitt, Le Nomos de la Terre (1950), trad. Lilyane Deroche-Gurcel et Peter
Haggenmacher, éd. Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2012 (ISBN
9782130608691), p. 135
« Le monde a changé, l’Angleterre est devenue trop exiguë, elle n’est plus “île” au sens où
elle l’avait été jusque-là. Les États-Unis d’Amérique, en revanche, sont l’île parfaitement
adaptée à son époque. [...] Le caractère insulaire des États-Unis permettra de maintenir et
de développer sur une base élargie la domination des mers. L’Amérique est la “plus grande
île”, celle à partir de laquelle la maîtrise britannique des mers se perpétuera, sur une
échelle plus vaste, sous la forme d’un condominium maritime anglo-américain. »
— Carl Schmitt, Terre et Mer (1942), trad. Jean-Louis Pesteil, éd. Éditions Pierre-Guillaume
de Roux, 2017 (ISBN 9782363712059), p. 186
« Les adversaires en présence sont les armées : la population civile, non combattante, reste
en dehors des hostilités. Elle n’est pas l’ennemi, et n’est d’ailleurs pas traitée comme tel
aussi longtemps qu’elle ne participe pas aux combats. La guerre sur mer, par contre, repose
sur l’idée qu’il faut atteindre le commerce et l’économie de l’adversaire. Dès lors, l’ennemi,
ce n’est plus seulement l’adversaire en armes, mais tout ressortissant de la nation adverse
et même, finalement, tout individu ou État neutre qui commerce avec l’ennemi ou
entretient des relations économiques avec lui. La guerre terrestre tend à l’affrontement
décisif en rase campagne. La guerre maritime n’exclut pas le combat naval, mais ses
méthodes privilégiées sont le pilonnage et le blocus des côtes ennemies et la capture de
navires de commerce ennemis et neutres selon le droit de prise. Par essence, ces moyens
privilégiés de la guerre sur mer sont dirigés aussi bien contre les combattants que contre
les non-combattants. »
— Carl Schmitt, Terre et Mer (1942), trad. Jean-Louis Pesteil, éd. Éditions Pierre-Guillaume
de Roux, 2017 (ISBN 9782363712059), p. 174
« C’est ainsi que la lutte pour la possession du Nouveau Monde devint une lutte entre la
Réforme et la Contre-Réforme, entre le catholicisme mondial des Espagnols et le
protestantisme mondial des huguenots, des Néerlandais et des Anglais. »
— Carl Schmitt, Terre et Mer (1942), trad. Jean-Louis Pesteil, éd. Éditions Pierre-Guillaume
de Roux, 2017 (ISBN 9782363712059), p. 165-166
« La France, elle, n’a pas suivi le grand élan maritime lié au protestantisme
des huguenots. Par sa tradition spirituelle, elle resta en fin de compte un pays
romain et en prenant parti pour la catholicité contre les huguenots (nuit de la
Saint-Barthélemy en 1572 et conversion d’Henri IV au catholicisme), elle choisit par là
même la terre contre la mer. Certes, son potentiel maritime restait considérable et
aurait pu, même sous Louis XV, tenir tête à celui de l’Angleterre. Mais lorsqu’en 1672, le roi
français congédia Colbert, son grand ministre du commerce et de la Marine, le choix en
faveur de la terre devint irréversible. »
— Carl Schmitt, Terre et Mer (1942), trad. Jean-Louis Pesteil, éd. Éditions Pierre-Guillaume
de Roux, 2017 (ISBN 9782363712059), p. 143
« [...] ce furent les Anglais qui, finalement, surclassèrent tous leurs rivaux et
s’assurèrent une suprématie mondiale fondée sur la domination des océans. [...]
Certes, les grands empires coloniaux d’autres peuples européens continuèrent d’exister :
l’Espagne et le Portugal, par exemple, conservèrent d’immenses possessions outre-mer ;
mais ils perdirent le contrôle des mers et des voies de communication. »
— Carl Schmitt, Terre et Mer (1942), trad. Jean-Louis Pesteil, éd. Éditions Pierre-Guillaume
de Roux, 2017 (ISBN 9782363712059), p. 142
« Sans la baleine, les pêcheurs n’auraient jamais quitté les côtés ; c’est elle qui
les émancipa des rivages et les attira vers le large. C’est elle qui nous fit découvrir
les courants marins et la route du Nord. C’est elle qui nous a guidés. »
— Carl Schmitt, Terre et Mer (1942), trad. Jean-Louis Pesteil, éd. Éditions Pierre-Guillaume
de Roux, 2017 (ISBN 9782363712059), p. 126-127
« L’homme est un être terrestre, un terrien. La terre ferme est le lieu où il vit,
se meut, se déplace. Elle est son sol et son milieu. C’est elle qui fonde ses
perspectives, détermine ses impressions, façonne le regard qu’il porte sur le
monde. Né sur la terre, évoluant sur elle, l’homme en tire non seulement son horizon,
mais son allure, sa démarche, ses mouvements, sa silhouette, sa stature. C’est pourquoi il
appelle "terre" l’astre sur lequel il vit bien que la surface du globe soit constituée, on le sait,
aux trois quarts d’eau et d’un quart seulement de terre ferme et que même les plus vastes
continents ne sont que d’immenses îles flottantes. Et depuis que nous savons que notre
terre a une forme sphérique, nous parlons tout naturellement de "globe terrestre".
Imaginer un "globe marin" nous paraîtrait étrange.
Toute notre existence d’ici-bas, notre bonheur, nos malheurs, nos joies et nos peines, sont
pour nous la vie "terrestre", c’est-à-dire, selon les sujets, un paradis ou une vallée de
larmes. On comprend donc que dans nombre de mythes et de légendes qui expriment les
souvenirs et les épreuves les plus lointains et les plus intimes des peuples, la terre
apparaisse comme la mère primitive des hommes. Il est établi qu’elle est la plus ancienne
de toutes les divinités. Les livres sacrés nous racontent que l’homme, issu de la terre,
retournera à la terre. La terre est son socle maternel puisqu’il est lui-même fils de la terre. »
— Carl Schmitt, Terre et Mer (1942), trad. Jean-Louis Pesteil, éd. Éditions Pierre-Guillaume
de Roux, 2017 (ISBN 9782363712059), p. 103-104
« En tant que réalité historique, le libéralisme n’a pas plus échappé au politique que
n’importe quel mouvement humain de quelque importance [...]. Les libéraux de tous les
pays ont fait de la politique comme les autres hommes, et ils ont conclu de multiples
alliances avec des idées et des éléments non libéraux sous forme de national-libéraux, de
social-libéraux, de conservateurs libéraux (Freikonservative), de catholiques libéraux, etc.
[...] si la négation du politique impliquée dans tout individualisme conséquent commande
une praxis politique de défiance à l’égard de toutes les puissances politiques et de tous les
régimes imaginables, elle n’aboutira toutefois jamais à une théorie positive de l’État et du
politique qui lui soit propre. Il s’ensuit qu’il existe une politique libérale sous forme
d’opposition polémique visant les restrictions de la liberté individuelle par l’État [...]. [...] il
n’y a pas de politique libérale sui generis, il n’y a qu’une critique libérale de
la politique. Le système théorique du libéralisme [...] fournit une série de méthodes
propres à freiner et à contrôler cette puissance d’État au profit de la liberté individuelle et
de la propriété privée, à faire de l’État un compromis [...]. [...]
Cette défiance critique à l’égard de l’État et de la politique s’explique aisément par les
principes d’un système qui exige que l’individu demeure terminus a quo et terminus ad
quem. L’unité politique doit exiger, le cas échéant, que l’on sacrifie sa vie. Or,
l’individualisme de la pensée libérale ne saurait en aucune manière rejoindre ou justifier
cette exigence. »
— Carl Schmitt, La Notion de politique (1927), trad. Marie-Louise Steinhauser, éd.
Flammarion, coll. « Champs Classiques », 2009 (ISBN 9782081228733), p. 114-115
« Ce serait une stupidité de croire qu’un peuple sans défense n’aurait que des amis, et il
serait bas et malhonnête de compter que l’ennemi se laisserait peut-être attendrir par la
non-résistance. Personne n’ira croire que les hommes puissent, par exemple, changer le
monde et y créer une situation de moralité pure en renonçant à toute productivité
esthétique ou économique ; combien moins encore un peuple renonçant à toute décision
politique saurait-il placer l’humanité dans une situation où régnerait la moralité pure ou
l’économie pure. Qu’un peuple n’ait plus la force ou la volonté de se maintenir
dans la sphère du politique ce n’est pas la fin du politique dans le monde. C’est
seulement la fin d’un peuple faible. »
— Carl Schmitt, La Notion de politique (1927), trad. Marie-Louise Steinhauser, éd.
Flammarion, coll. « Champs Classiques », 2009 (ISBN 9782081228733), p. 94-95
Si un peuple « accepte qu’un étranger lui dicte le choix de son ennemi et lui dise contre
qui il a le droit ou non de se battre, il cesse d’être un peuple politiquement libre et il est
incorporé ou subordonné à un autre système politique. »
— Carl Schmitt, La Notion de politique (1927), trad. Marie-Louise Steinhauser, éd.
Flammarion, coll. « Champs Classiques », 2009 (ISBN 9782081228733), p. 91
« Exiger des hommes, en toute sincérité, qu’ils tuent d’autres hommes et qu’ils soient prêts
à mourir pour que le commerce et l’industrie des survivants florissants et pour que le
pouvoir d’achat de leurs arrière-neveux soit solide, c’est une atrocité, c’est de la
démence. Maudire la guerre homicide et demander aux hommes de faire la
guerre, de tuer et de se faire tuer pour qu’il n’y ait “plus jamais ça”, c’est une
imposture manifeste. »
— Carl Schmitt, La Notion de politique (1927), trad. Marie-Louise Steinhauser, éd.
Flammarion, coll. « Champs Classiques », 2009 (ISBN 9782081228733), p. 90
« Un monde d’où l’éventualité de cette lutte aurait été entièrement écartée et bannie, une
planète définitivement pacifiée serait un monde sans discrimination de l’ami et de l’ennemi
et par conséquent un monde sans politique. »
— Carl Schmitt, La Notion de politique (1927), trad. Marie-Louise Steinhauser, éd.
Flammarion, coll. « Champs Classiques », 2009 (ISBN 9782081228733), p. 73
« L’ennemi ne saurait être qu’un ennemi public, parce que tout ce qui est
relatif à une collectivité, et particulièrement à un peuple tout entier, devient de
ce fait affaire publique. Ennemi signifie hostis et non inimicus au sens plus
large ; πολέμιος et non ἐχθρός. À l’instar de certaines autres langues, la langue
allemande ne fait pas de distinction entre l’ennemi privé et l’ennemi politique, ce qui rend
possibles bien des malentendus et des falsifications. Le passage bien connu : "Aimez vos
ennemis" (Matth. 5, 44 ; Luc 6, 27), signifie diligite inimicos vestros, ἀγαπᾶτε τοὺς ἐχθροὺς
ὑμῶν et non : diligite hostes vestros ; il n’y est pas question d’ennemi politique. Et dans la
lutte millénaire entre le christianisme et l’Islam, il ne serait venu à l’idée d’aucun chrétien
qu’il fallait, par amour pour les Sarrasins ou pour les Turcs, livrer l’Europe à l’Islam au lieu
de la défendre. L’ennemi au sens politique du terme n’implique pas une haine personnelle,
et c’est dans la sphère du privé seulement que cela a un sens d’aimer son ennemi, c’est-à-
dire son adversaire. La citation biblique ci-dessus fait encore moins allusion à
l’antagonisme politique qu’elle ne tend, par exemple, à faire disparaître l’opposition du bien
et du mal ou celle du beau et du laid. Elle ne signifie surtout pas que l’on aimera les
ennemis de son peuple et qu’on les soutiendra contre son propre peuple. »
— Carl Schmitt, La Notion de politique (1927), trad. Marie-Louise Steinhauser, éd.
Flammarion, coll. « Champs Classiques », 2009 (ISBN 9782081228733), p. 67-68
« Rien n’est plus moderne aujourd’hui que la lutte contre le politique. Financiers
américains, techniciens de l’industrie, socialistes marxistes et révolutionnaires anarcho-
syndicalistes unissent leurs forces avec le mot d’ordre qu’il faut éliminer la domination non
objective de la politique sur l’objectivité de la vie économique. Il ne doit subsister que des
tâches techniques, organisationnelles, économiques, sociologiques, les problèmes
politiques sont censés disparaître. D’ailleurs, le type de pensée économique et technique
qui domine aujourd’hui est incapable de percevoir une idée politique. L’État moderne
semble être réellement devenu ce que Max Weber voit en lui : une grande entreprise. En
général, une idée politique n’est comprise qu’à partir du moment où l’on réussit à mettre
en évidence le cercle des personnes qui a un intérêt économique plausible à s’en servir à
son avantage. »
— Carl Schmitt, Théologie politique (1922), trad. Jean-Louis Schlegel, éd. Gallimard, coll.
« La Nouvelle Revue française », 1988 (ISBN 9782070713776), p. 73
« Tous les concepts prégnants de la théorie moderne de l’État sont des concepts
théologiques sécularisés. »
— Carl Schmitt, Théologie politique (1922), trad. Jean-Louis Schlegel, éd. Gallimard, coll.
« La Nouvelle Revue française », 1988 (ISBN 9782070713776), p. 46
« L’ère de l’État est à son déclin. [...] L’État, modèle de l’unité politique, et investi d’un
monopole étonnant entre tous, celui de la décision politique, l’État, ce chef-d’oeuvre de la
forme européenne et du rationalisme occidental, est détrôné. »
— Carl Schmitt, Théologie politique (1922), trad. Jean-Louis Schlegel, éd. Gallimard, coll.
« La Nouvelle Revue française », 1988 (ISBN 9782070713776), p. 42-43
ROGER SCRUTON
“Populisme” sert à désigner ce que veut le peuple, sans l’aide des intellectuels
de gauche pour le définir. »
— « Roger Scruton: «En France, l’intellectuel de gauche est un prêtre sans Dieu» », Eugénie
Bastié, Le Figaro, 12 mars 2019 (lire en ligne)
« Il faut introduire dans le cerveau des français l’idée que l’État n’est qu’une association de
bureaucrates qui ne s’occupent, à la fin, que de leurs intérêts à eux. Ce sont les initiatives
civiles qui comptent. »
— « Entretien avec Roger Scruton. Au royaume du conservatisme », Thomas
Hennetier, Éléments, nº 163, décembre 2016
« La laideur vient d’un désir de profanation. Avec la perte des rites de passages et de la
culture religieuse, les hommes sont perdus. Ils commencent alors à vouloir se venger des
anciens idéaux qui les ont trahis. »
— « Entretien avec Roger Scruton. Au royaume du conservatisme », Thomas
Hennetier, Éléments, nº 163, décembre 2016
“Conservatism starts from a sentiment that all mature people can readily share: the
sentiment that good things are easily destroyed, but not easily created. This is especially
true of the good things that come to us as collective assets: peace, freedom, law, civility,
public spirit, the security of property and family life, in all of which we depend on the
cooperation of others while having no means singlehandedly to obtain it. In respect of
such things, the work of destruction is quick, easy and exhilarating; the work of creation is
slow, laborious and dull. That is one of the lessons of the twentieth century. It is also one
reason why conservatives suffer such a disadvantage when it comes to public opinion.
Their position is true but boring, that of their opponents exciting but false.
Because of this rhetorical disadvantage, conservatives often present their case in the
language of mourning.”
— (en) Roger Scruton, How to Be a Conservative (2014), éd. Bloomsbury, 2014 (ISBN
9781472924001), p. viii-ix
« Le point de départ du conservatisme est ce sentiment que toutes les
personnes d’âge mûr partagent sans mal : le sentiment que les choses bonnes
peuvent être aisément détruites, mais non aisément créées. C’est
particulièrement vrai de ce qui se présente à nous comme des biens collectifs :
la paix, la liberté, le droit, la civilité, l’esprit public, la protection de la propriété,
la famille, tous domaines où nous dépendons de la coopération des autres tout
en n’ayant aucun moyen de l’obtenir sans leur aide. Concernant ces biens,
l’œuvre de destruction est rapide, aisée et exaltante ; l’œuvre de création
lente, laborieuse et maussade. C’est une des leçons du XXe siècle. C’est aussi
une raison pour laquelle les conservateurs subissent un tel désavantage quand
il s’agit de l’opinion publique. Leur position est vraie mais ennuyeuse ; celle de
leurs adversaires enthousiasmante mais fausse.
En raison de cet inconvénient rhétorique, les conservateurs défendent souvent
leur cause dans la langue du deuil. »
— (fr) Roger Scruton, De l’urgence d’être conservateur (2014), trad. Laetitia
Strauch-Bonart, éd. L’Artilleur, 2016 (ISBN 9782810007103), p. 15-16
“Take any aspect of the Western inheritance of which our ancestors were
proud, and you will find university courses devoted to deconstructing it. Take
any positive feature of our political and cultural inheritance, and you will find concerted
efforts in both the media and the academy to place it in quotation marks, and make it look
like an imposture or a deceit. And there is an important segment of political opinion on the
left that seeks to endorse these critiques and to convert them into policies.
It is to this ‘culture of repudiation’, as I call it, that we should attribute the recent attacks on
the nation state and the national idea. But conservatism is a culture of affirmation. It is
about the things we value and the things we wish to defend.”
— (en) Roger Scruton, How to Be a Conservative (2014), éd. Bloomsbury, 2014 (ISBN
9781472924001), p. 40
« Prenez n’importe quel aspect de l’héritage occidental dont nos ancêtres
étaient fiers, et vous trouverez des cours, à l’université, consacrés à sa
déconstruction. Prenez n’importe quel caractère positif de notre héritage
politique et culturel, et vous trouverez des efforts concertés, à la fois dans
les médias et l’université, pour le placer entre guillemets et lui donner l’air
d’une imposture ou d’une supercherie. Or un important segment de
l’opinion politique, à gauche, cherche à promouvoir ces critiques et à les
transformer en actions politiques.
C’est à cette “culture de la répudiation”, comme je la nomme, que nous
devrions attribuer les récentes attaques contre l’État-nation et l’idée nationale.
Le conservatisme est quant à lui une culture de l’affirmation. Il concerne ce à
quoi nous accordons de la valeur et que nous souhaitons défendre. »
— (fr) Roger Scruton, De l’urgence d’être conservateur (2014), trad. Laetitia
Strauch-Bonart, éd. L'Artilleur, 2016 (ISBN 9782810007103), p. 73
“It is not an arbitrary cultural imperialism that leads us to value Greek philosophy and
literature, the Hebrew Bible, Roman law, and the medieval epics and romances, and to
teach these things in our schools. They are ours, in just the way that the legal order and the
political institutions are ours: they form part of what made us, and convey the message
that it is right to be what we are.”
— (en) Roger Scruton, How to Be a Conservative (2014), éd. Bloomsbury, 2014 (ISBN
9781472924001), p. 91
« Ce n’est pas un impérialisme culturel arbitraire qui nous conduit à apprécier
la philosophie et la littérature grecques, la Bible hébraïque, le droit romain et
les épopées et romans d'amour médiévaux, et de les enseigner dans nos
écoles. Ils sont nôtres, exactement de la même façon que l’ordre juridique et
les institutions politiques sont les nôtres : ils font partie de ce que nous a faits,
et portent le message que nous avons raison d’être ce que nous sommes. »
— (fr) Roger Scruton, De l’urgence d’être conservateur (2014), trad. Laetitia
Strauch-Bonart, éd. L’Artilleur, 2016 (ISBN 9782810007103), p. 148
“But the relentless desire to erase the sacred face persists almost every city now has its
equivalent of Paris’s Centre Pompidou, implanting a facetious playground among vistas of
order and grace. From that centre of start, for a new kind of city — the city of
unbelief, in which meanings will be openly satirized in mirror glass. All across
Asia and the Middle East we see the building of this new kind of city — a city
without corners, without shadows, without secrets. We Europeans resist the
disease as best we can, knowing that the loss of the city will be a loss too far. And we are
surely right: for we are fighting for the home that we love against those who profit from
destroying it.”
— (en) Roger Scruton, How to Be a Conservative (2014), éd. Bloomsbury, 2014 (ISBN
9781472924001), p. 178
« Mais le désir inlassable d’effacer le sacré persiste : presque chaque ville
a sa version du Centre Pompidou parisien, une aire de jeu facétieuse
implantée au milieu d’un panorama d’ordre et de grâce. Depuis ce centre
de profanation irradie l’appel du Corbusier à la démolition totale, à un
nouveau départ, à une nouvelle forme de ville, la ville de l’incroyance où
le sens sera ouvertement tourné en dérision dans le miroir. Partout en
Asie et au Moyen-Orient, nous assistons à l’érection de cette nouvelle
forme de ville, sans recoins, sans ombres, sans secrets. Nous Européens
résistons à cette maladie du mieux que nous pouvons, sachant que la
perte de la ville sera la perte de trop. Et nous avons sûrement raison : car
nous nous battons pour le foyer que nous aimons, contre ceux qui
profitent de sa destruction. »
— (fr) Roger Scruton, De l’urgence d’être conservateur (2014), trad. Laetitia
Strauch-Bonart, éd. L’Artilleur, 2016 (ISBN 9782810007103), p. 273
“We tell ourselves comforting stories about the innocence of former times, and
cherish the ambition to curl up in the past — but a doctored past, from which
the grim bits have been carefully excised. And then, when we wake up, we
mourn the loss of a dream.”
— (en) Roger Scruton, How to Be a Conservative (2014), éd. Bloomsbury, 2014 (ISBN
9781472924001), p. 173
« Nous nous racontons à nous-mêmes des histoires réconfortantes sur
l’innocence des temps anciens, et caressons l’ambition de nous pelotonner
dans le passé — un passé enjolivé, dont la grisaille a été ôtée avec
précaution. Alors, quand nous nous réveillons, nous pleurons la perte
d’un rêve. »
— (fr) Roger Scruton, De l’urgence d’être conservateur (2014), trad. Laetitia
Strauch-Bonart, éd. L’Artilleur, 2016 (ISBN 9782810007103), p. 265
“From time to time, egalitarians have sought to make the public schools illegal, so that all
education is subsumed by the state. But the wiser among them have recognized that this
will not change things very much. If you compel all children to attend state schools, then
wealthier parents will compensate through private tuition, through reading at home, and
through all the advantages that parents naturally and defiantly pass on to their children out
of love. Plato’s solution was to regard children as property of the state, to be raised in
collective farms under the rule of impartial guardians. But there is a resilience in parental
affection that defeats all attempts to extinguish it, and the middle classes will always
manage to pass on their advantages, as they did under communism [...].”
— (en) Roger Scruton, How to Be a Conservative (2014), éd. Bloomsbury, 2014 (ISBN
9781472924001), p. 122-123
« Plusieurs fois dans le passé, les égalitaristes ont cherché à faire interdire les
écoles privées, de sorte que l’éducation soit assumée entièrement par l’État.
Mais les plus sages d’entre eux ont reconnu que cela ne changerait pas grand-
chose. Si l’on oblige tous les enfants à fréquenter les écoles publiques, les
parents contrebalanceront cette obligation par des cours particuliers, des
séances de lecture à la maison et tous les avantages que les parents
transmettent naturellement et jalousement à leurs enfants par amour. La
solution de Platon était de considérer les enfants comme des biens de l’État, à
élever dans des fermes collectives sous la direction de gardiens impartiaux.
Mais la résilience de l’affection parentale vainc toutes les tentatives de
l’éteindre, et les classes moyennes réussissent toujours à transmettre leurs
avantages, comme elles l’ont fait sous le communisme [...]. »
— (fr) Roger Scruton, De l’urgence d’être conservateur (2014), trad. Laetitia
Strauch-Bonart, éd. L’Artilleur, 2016 (ISBN 9782810007103), p. 193
ALEXANDRE SOLJENYTSINE
« Je rappellerai que l’effroyable totalitarisme qui s’est manifesté sur cette
terre, mettons à quatre reprises, n’a jamais été sécrété par un régime
autoritaire, mais toujours pas des démocraties impuissantes [...]. Une grande
majorité d’États, au cours de l’histoire universelle, ont possédé des régimes d’autorité, et
nul d’entre eux n’a jamais donné naissance au totalitarisme. »
— Alexandre Soljenitsyne, L’Erreur de l’Occident (1980), trad. Nikita Struve, Geneviève et
José Johannet, éd. Grasset & Fasquelle, coll. « Les cahiers rouges », 2006 (ISBN
9782246094920), p. 101-102
« Les fatales erreurs de l’Occident dans son comportement à l’égard du communisme ont
commencé dès 1918, quand les gouvernements occidentaux n’ont pas su voir le danger
mortel qu’il représentait pour eux. En Russie, toutes les forces qui s’étaient jusque-là
combattues — des soutiens de l’État existant jusqu’aux Cadets et aux socialistes de droite
— firent alors front commun contre le communisme. Sans rejoindre leurs rangs ni s’unir
dans l’action, c’est par des milliers de soulèvements paysans et par des dizaines d’émeutes
ouvrières que toute l’épaisseur du peuple manifesta son opposition. Pour constituer
l’Armée rouge, il fallut fusiller des dizaines de milliers de réfractaires. Mais cette
résistance nationale au communisme ne fut pas soutenue par les puissances
occidentales. »
— Alexandre Soljenitsyne, L’Erreur de l’Occident (1980), trad. Nikita Struve, Geneviève et
José Johannet, éd. Grasset & Fasquelle, coll. « Les cahiers rouges », 2006 (ISBN
9782246094920), p. 21
« Ce discours russophobe trouva d’autant plus de crédit qu’il était attesté par des témoins
jugés irréfutables : ceux de la dernière émigration, à savoir celle autorisée exclusivement
aux Juifs d’URSS, conformément aux accords de troc passés entre Washington et Moscou,
le libre départ des uns conditionnant le plein rétablissement des échanges commerciaux
entre les deux pays. Beaucoup gagnèrent Israël, un certain nombre, parmi les intellectuels,
préférèrent s’établir auprès des éditeurs et des médias du Vieux et du Nouveau Continents.
Là, ils ne ratèrent pas une occasion de vilipender la conscience nationale russe tout en
s’abstenant de dénoncer les risques d’une coopération dont ils avaient été les bénéficiaires.
On vit même, au-delà de cette diaspora, des séparatistes ukrainiens transplantés outre-
Atlantique faire adopter par le Congrès américain une motion stipulant que ce n’était pas
le communisme qui tenait une large partie du monde en esclavage, mais les Russes ! »
— Alexandre Soljenitsyne, L’Erreur de l’Occident (1980), trad. Nikita Struve, Geneviève et
José Johannet, éd. Grasset & Fasquelle, coll. « Les cahiers rouges », 2006 (ISBN
9782246094920), p. 13-14
WERNER SOMBART
« Autrefois, la richesse était toujours d’origine politique ; la puissance
conduisait à la richesse ; aujourd’hui la richesse conduit à la puissance, tandis
que son origine est dans l’économie [...]. »
— Werner Sombart, Le Socialisme allemand (1934), éd. Pardès, 1990, p. 38
« Parallèles au début, les courants finissent par se réunir, et, à partir d’un moment
donné, l’entrepreneur capitaliste incarne en sa personne à la fois le héros, le
marchand et le bourgeois. Mais, à mesure qu’il avance, le courant se dépouille
de plus en plus de son élément héroïque, pour ne conserver que les deux
autres. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 515
« [...] depuis les temps de Salomon, une des occupations préférées des Juifs et, pendant
tout le Moyen Âge, leur occupation à peu près unique, a été une des raisons pour
lesquelles les Juifs se sont si facilement et si rapidement, adaptés au capitalisme, dès ses
premières manifestations. Je maintiens cette manière de voir et je persiste à affirmer que le
prêt d’argent a été une des sources auxquelles s’est alimenté l’esprit capitaliste, et cela à
une époque où partout autour régnait encore le régime de l’économie naturelle, fondée
sur la catégorie de la qualité. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 488
« Ajoutons encore ceci : ce qui caractérise l’esprit du bourgeois de nos jours, c’est, nous
l’avons vu, son indifférence complète pour le problème de la destinée de l’homme.
L’homme est à peu près totalement éliminé de la table des valeurs économiques et du
champ des intérêts économiques : la seule chose à laquelle on s’intéresse encore, c’est le
processus, soit de la production, soit des transports, soit de la formation des prix, etc. Fiat
productio et pereat homo ! »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 477-478
« La frénésie capitaliste d’une entreprise moderne ne se concevrait pas sans les miracles
accomplis par la technique. C’est seulement sous la poussée des forces techniques que
l’homme économique a créé toutes les organisations qui devaient lui permettre de
s’acquitter des formidables tâches qui ont surgi devant lui. Et l’effort qu’ils ont fait pour
résoudre les problèmes que les progrès de la technique ont fait naître, a allumé dans l’âme
de nos grands entrepreneurs une flamme qui les consume et qui nous consume avec eux.
[...]
La technique moderne est, en outre, responsable de toute l’orientation d’esprit de l’homme
économique de nos jours, de sa manière purement quantitative d’envisager le monde. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 468-473
« Si les Juifs représentent le type le plus achevé du peuple marchand, il faut en voir une des
causes, et certainement non des moindres, dans leur destinée historique qui les avait
condamnés à vivre pendant deux mille ans en dehors de toute activité militaire, ce qui eut
pour effet l’élimination complète de toutes les variantes guerrières que pouvait renfermer
leur groupe ethnique. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 413-414
« Or, il est incontestable que depuis la fin de la première période capitaliste les forces
morales avaient subi, dans nos communautés chrétiennes, une éclipse marquée. Et, à partir
de cette époque, l’esprit capitaliste a pris un essor formidable et opéré dans notre vie des
transformations radicales qui n’ont été possibles que grâce à la désuétude dans laquelle
étaient tombées, dans les pays tant catholiques que protestants, les doctrines morales du
christianisme; transformations qui ont eu pour condition préalable la rupture de toutes les
barrières par lesquelles le catholicisme et le protestantisme avaient voulu endiguer et
canaliser l’activité de l’homme économique ; transformations qui ne se sont effectuées
qu’en conformité avec une seule morale : avec la morale juive. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 402
« Mais ce qui a permis à la religion juive d’exercer une action vraiment décisive, c’est le
traitement particulier qu’elle appliquait aux étrangers. La morale juive était une morale à
double face, et ses lois différaient selon qu’il s’agissait de Juifs ou de non-Juifs. On
rencontre sans doute une double morale chez tous les peuples, au début de leur histoire;
mais étant données les vicissitudes particulières de l’histoire du peuple juif, la double
morale a subsisté chez lui pendant de longs siècles et n’a cessé, jusqu’en ces derniers
temps, d’inspirer les principes auxquels les Juifs se conformaient dans leurs relations
d’affaires. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 382
La religion juive « a joué, elle aussi, un rôle de premier ordre pendant les premières phases
du capitalisme et imprimé à la vie une orientation toute particulière [...]. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 337
« Deux âmes coexistent dans la poitrine du parfait bourgeois : une âme d’entrepreneur et
une âme de bourgeois proprement dit, ces deux âmes formant par leur réunion l’esprit
capitaliste. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 288
« Mais notre époque, inaccessible à tout ce qui est vraiment grand, n’apprécie précisément
que cette puissance extérieure, s’en réjouit comme un enfant, voue un véritable culte à
ceux qui la possèdent. C’est pourquoi les inventeurs et les millionnaires inspirent aux
masses une admiration sans bornes. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 258
« C’est un fait incontestable que l’Allemagne et les États-Unis sont aujourd’hui les deux
seuls pays qui rivalisent pour la réalisation complète, pour l’expression achevée de l’esprit
capitaliste. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 212
« [...] le bourgeois est pour moi un type humain, plutôt que le représentant d’une classe
sociale. »
— Werner Sombart, Le Bourgeois (1913), trad. Samuel Jankélévitch, éd. Kontre Kulture,
2020, p. 158
—
ALAIN SORAL
« La féminisation est consubstantielle à la tertiarisation. »
— Alain Soral, « Soral a (presque toujours) raison — À l’Université d’été d’E&R 2021 ! »,
juillet 2021
« Je lisais quelque part l’autre jour, c’était une très bonne définition, que la
démocratie c’est ce qui permettait de faire libérer Barabbas et crucifier
Jésus. »
— Alain Soral, « Soral répond ! — Vingt-quatrième fournée », 15 février 2021
« Je pense que tant que nous n’aurons pas nommé l’ennemi, tel qu’il doit l’être
et qu’on passera par des périphrases ou qu’on tapera autour [...]. Tant qu’on
ne nommera pas cette oligarchie parasitaire et prédatrice et qu’on ne la
décrira pas exactement pour ce qu’elle est, sur quoi elle s’appuie en terme de
textes fondateurs, quelle est sa stratégie, quel est son passé et son passif,
quelle est sa vision, quelles sont ses actions au quotidien, tant qu’on ne la
nommera pas, on ne sera pas entré dans la phase de subversion réellement
active, on sera encore en train de tourner autour du pot et pour d’autres
d’enculer les mouches, c’est-à-dire à chaque fois de s’en prendre soit aux
ennemis secondaires, soit à des ennemis qui sont, en fait, des golem de
l’ennemi principal. On est très peu à avoir le courage de le faire, vous voyez que même
quand je le fais, je le fais par périphrases parce que c’est un procès à chaque fois [...]. Tant
qu’on n’aura pas le courage de le faire, on ne sera pas encore dans le combat, or si on
mène ce combat, on le gagnera, parce que nous sommes les plus nombreux, nous sommes
légitimes et nous avons le peuple derrière nous [...]. Aujourd’hui tout règne par la terreur, le
mensonge et le diviser pour régner. Il faut qu’on sorte du “diviser pour régner”, il faut qu’on
sorte de la peur et il faut qu’on se libère du mensonge. Dès lors qu’on aura fait ces trois
choses-là [...], le combat peut être assez vite gagné et même je dirais même assez
pacifiquement. J’ai pu vérifié parce que j’étudie l’histoire que quand ces gens-là savent
qu’ils ne peuvent plus gagner, ils se transforment très vite de loups en agneaux. Et en
général, ils se taillent. Ils dégagent et moi, à la limite, je n’exige pas plus. Je leur demande
simplement de partir, de partir et de nous rendre notre pays, qui est un pays riche, où le
peuple français, dans toutes ses composantes, pourrait vivre très heureux simplement s’il
se libérait de ces parasites, prédateurs, pervers et satanistes. »
— Alain Soral, « Réflexions sur le couillonavirus », 25 mars 2020
« Qu’est-ce que c’est qu’un Juif ? C’est un bourgeois qui croit en Dieu, ce qui lui
fait un atout de plus, alors que le bourgeois ne croit qu’en sa rente. »
— Alain Soral, Conférence d’Alain Soral & Gabriele Adinolfi à Nice, 26 mars 2013
« [...] l’Église a plus profité des efforts qui tendaient à la séparer du monde que
des alliances conclues entre les papes et les princes. »
— Georges Sorel, La Décomposition du marxisme (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 461
« Lors donc que beaucoup de nos plus fins et de nos plus aristocrates écrivains montrent
tant de zèle pour vanter les bienfaits de l’enseignement populaire, il ne faut pas admirer
leur amour pour les humbles, mais la grande perspicacité avec laquelle ils comprennent
l’art de se créer une clientèle. »
— Georges Sorel, Les Illusions du progrès (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 292
« Pour nos démocrates, comme pour les beaux esprits cartésiens, le progrès ne consiste
point dans l’accumulation de moyens techniques, ni même de connaissances scientifiques,
mais dans l’ornement de l’esprit qui, débarrassé des préjugés, sûr de lui-même et confiant
dans l’avenir, s’est fait une philosophie assurant le bonheur à tous les gens qui possèdent
les moyens de vivre largement. »
— Georges Sorel, Les Illusions du progrès (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 258
« [...] les héroïques efforts des prolétaires russes méritent que l’histoire les récompense, en
amenant le triomphe des institutions pour la défense desquelles tant de sacrifices sont
consentis par les masses ouvrières et paysannes de Russie. L’histoire, suivant Renan, a
récompensé les vertus quiritaires en donnant à Rome l’Empire méditerranéen ; en dépit
des innombrables abus de la conquête, les légions accomplissaient ce qu’il nomme
“l’œuvre de Dieu” ; si nous sommes reconnaissants aux soldats romains d’avoir remplacé
des civilisations avortées, déviées ou impuissantes par une civilisation dont nous sommes
encore les élèves pour le droit, la littérature et les monuments, combien l’avenir ne devra-t-
il pas être reconnaissant aux soldats russes du socialisme ! De quel faible poids seront pour
les historiens les critiques des rhéteurs que la démocratie charge de dénoncer les excès
des bolcheviks ! De nouvelles Carthages ne doivent pas l’emporter sur ce qui est
maintenant la Rome du prolétariat.
Et voici enfin ce que je me permets d’ajouter pour mon compte personnel : maudites
soient les démocraties ploutocratiques qui affament la Russie ; je ne suis qu’un vieillard
dont l’existence est à la merci de minimes accidents ; mais puissè-je, avant de
descendre dans la tombe, voir humilier les orgueilleuses démocraties
bourgeoises, aujourd’hui cyniquement triomphantes ! »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), Appendice III Pour Lénine, p. 230
« C’est précisément lorsqu’ils n’eurent plus de patrie que les Juifs arrivèrent à donner à leur
religion une existence définitive ; pendant le temps de l’indépendance nationale, ils avaient
été trop portés à un syncrétisme odieux aux prophètes ; ils devinrent fanatiquement
adorateurs de Iahvé quand ils furent soumis aux païens. »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), Appendice I Unité et multiplicité, p. 213
« C’est à la violence que le socialisme doit les hautes valeurs morales par
lesquelles il apporte le salut au monde moderne. »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 196
« Les socialistes ont longtemps eu de grands préjugés contre la morale, en raison de ces
institutions catholiques que de grands industriels établissaient chez eux ; il leur semblait
que la morale n’était, dans notre société capitaliste, qu’un moyen d’assurer la docilité des
travailleurs maintenus dans l’effroi que crée la superstition. La littérature dont raffole la
bourgeoisie depuis longtemps décrit des mœurs si déraisonnables, ou même si
scandaleuses, qu’il est difficile de croire que les classes riches puissent être sincères quand
elles parlent de moraliser le peuple. »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 172
« Le christianisme théorique n’a jamais été une religion appropriée aux gens
du monde ; les docteurs de la vie spirituelle ont toujours raisonné sur des
personnes qui peuvent se soustraire aux conditions de la vie commune. »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 162
« Peu à peu la nouvelle économie a créé une nouvelle indulgence extraordinaire pour tous
les délits de ruse dans les pays de haut capitalisme.
Dans les pays où subsiste encore aujourd’hui l’ancienne économie familiale, parcimonieuse
et ennemie de la spéculation, l’appréciation relative des actes de brutalité et des actes de
ruse n’a pas suivi la même évolution qu’en Amérique, qu’en Angleterre, qu’en France ; c’est
ainsi que l’Allemagne a conservé beaucoup d’usages de l’ancien temps et qu’elle ne ressent
point la même horreur que nous pour les punitions brutales ; celles-ci ne lui semblent
point, comme à nous, propres aux classes les plus dangereuses. »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 149-150
« [...] la force a pour objet d’imposer l’organisation d’un certain ordre social
dans lequel une minorité gouverne, tandis que la violence tend à la destruction
de cet ordre. »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 133
« Il faut juger les mythes comme des moyens d’agir sur le présent [...]. »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 97
« [...] nous pouvons, par analogie, nous représenter ce qui résulterait d’une révolution
donnant aujourd’hui le pouvoir à nos socialistes officiels : les institutions demeurant à peu
près ce qu’elles sont aujourd’hui, toute l’idéologie bourgeoise serait conservée ; l’État
bourgeois dominerait avec tous ses anciens abus ; la décadence économique s’accentuerait
si elle était commencée. »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), p. 72
« [...] toutes les perturbations révolutionnaires du XIXe siècle se sont terminées par un
renforcement de l’État. »
— Georges Sorel, Réflexions sur la violence (1908), éd. Kontre Kulture, 2014 (ISBN
9782367250441), Lettre à Daniel Halévy (15 juillet 1907), p. 24
« [...] en face du danger, le happy end d'une existence vide, dont l’ennui s’accompagne de
la musique de jazz et des danses nègres qui sonnent la marche funèbre d’une vieille
culture. »
— Oswald Spengler, Années décisives (1933), trad. Raïa Hadekel-Bogdanovitch, éd.
Copernic, 1980, p. 243-244
« En Afrique, les Nègres, avec leur immense fécondité, s’accroîtront bien davantage depuis
que la médecine européenne a “fait irruption” chez eux, et qu’elle empêche la grande
sélection par les maladies. »
— Oswald Spengler, Années décisives (1933), trad. Raïa Hadekel-Bogdanovitch, éd.
Copernic, 1980, p. 240
« [...] le simple fait que l’on réfléchit au nombre d’enfants désirés ou redoutés, prouvent que
l’instinct de la durée s’éteint ; — et on ne peut le réveiller par les écrits et les discours. Le
mariage originel — ou tout autre institution profondément enracinée que la coutume
populaire connaît et pratique pour sanctifier la conception — n’est rien moins que
sentimentale. L’homme veut avoir de bons fils, pour faire croître et durer son nom et son
œuvre au-delà de sa mort, comme lui-même se sent héritier de la réputation et de l’activité
de ses ancêtres. C’est la conception nordique de l’immortalité. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 239
« Il est temps que le monde “blanc” et l’Allemagne en premier lieu se rendent compte de
ces faits. Car derrière les guerres mondiales et la révolution mondiale prolétarienne non
encore achevée surgit le plus grand de tous les périls, celui des races de couleur, et pour lui
faire face on aura besoin de tout ce que les peuples blancs possèdent encore comme
“race”. »
— Oswald Spengler, Années décisives (1933), trad. Raïa Hadekel-Bogdanovitch, éd.
Copernic, 1980, p. 221
« L’industrie fuit chez les peuples de couleur, et dans les pays blancs on ne paie encore que
les inventions et les procédés destinés à économiser la main-d’œuvre parce que ceux-ci
diminuent la pression des salaires. »
— Oswald Spengler, Années décisives (1933), trad. Raïa Hadekel-Bogdanovitch, éd.
Copernic, 1980, p. 198-199
« Les vieilles et dignes formes de l’État sont aujourd’hui en ruines. Elles ont été remplacées
par le parlementarisme amorphe, décombres de l’autorité, de l’art de gouverner et de la
sagesse politique de jadis, où les partis, ces hordes de politiciens-hommes d’affaires, se
disputent le butin. La souveraineté héréditaire a été remplacée par des élections qui
mettent au pouvoir des foules toujours nouvelles d’incapable. »
— Oswald Spengler, Années décisives (1933), trad. Raïa Hadekel-Bogdanovitch, éd.
Copernic, 1980, p. 173-174
« Les nations véritables sont des idées, même de nos jours. Mais ce que le nationalisme
entend depuis 1789 est déjà suffisamment caractérisé par le fait qu’il confond la langue
maternelle avec la langue écrite des grandes villes où chacun apprend à lire et à écrire,
donc avec la langue des journaux et des revues qui apprennent à chacun le “droit” de la
nation et la nécessité de sa libération de quelque chose. Les véritables nations ont, comme
tout organisme vivant, une riche hiérarchie intrinsèque ; elles sont, par leur existence
même, une espèce d’ordre. »
— Oswald Spengler, Années décisives (1933), trad. Raïa Hadekel-Bogdanovitch, éd.
Copernic, 1980, p. 71-72
« C’est l’orgueil de l’esprit citadin, déraciné, qui n’est plus guidé par quelque puissant
instinct, et qui considère avec mépris la cruelle pensée de jadis et la sagesse des vieilles
familles paysannes. C’est l’époque où chacun sait lire et écrire et s’imagine avoir pour cela
le droit à la parole et à la critique. Cet esprit est dominé par les concepts — ces nouveaux
dieux de notre époque — et il critique le monde entier : il ne vaut rien, nous pouvons faire
mieux, allons-y, établissons le programme d’un monde meilleur. »
— Oswald Spengler, Années décisives (1933), trad. Raïa Hadekel-Bogdanovitch, éd.
Copernic, 1980, p. 45
« Mais l’Allemagne n’est pas une île. Aucun autre pays n’est à ce point mêlé au destin du
monde, que ce soit pour agir ou pour souffrir ; elle y est condamnée par sa situation
géographique même, par l’absence de frontières naturelles. »
— Oswald Spengler, Années décisives (1933), trad. Raïa Hadekel-Bogdanovitch, éd.
Copernic, 1980, p. 40
« Existe-t-il aujourd’hui un seul homme de race blanche qui se rende compte de ce qui se
passe autour de lui dans le monde entier ? qui comprenne toute l’étendue et l’imminence
du danger qui plane sur cette race ? Je ne parle pas des masses, cultivées ou incultes, de
nos villes, ces lecteurs de journaux, cette chair à élections, où toute différence entre les
électeurs de journaux, cette chair à élections, où toute différence entre les électeurs et ceux
qui sont élus a disparu depuis longtemps ; je veux parler des classes dirigeantes des
peuples blancs, tant qu’elles ne sont pas encore détruites, des hommes d’États, tant qu’il en
existe encore, des vrais chefs de la politique et de l’économie, des armées et du monde des
idées. »
— Oswald Spengler, Années décisives (1933), trad. Raïa Hadekel-Bogdanovitch, éd.
Copernic, 1980, p. 39
« Nous sommes nés dans ces temps et devons suivre vaillamment et jusqu’à son terme la
voie qui nous a été tracée. Il n’y en a pas d’autre. Être comme la sentinelle sacrifiée, sans
espoir, sans salut, est un devoir. Persévérer comme ce soldat romain dont on
retrouva les ossements devant une porte de Pompéi, et qui périt parce qu’on
avait oublié de le relever lorsque le Vésuve entra en éruption. Voilà de la
grandeur, voilà ce qu’on appelle être racé. Cette fin loyale est la seule que l’on ne
puisse pas retirer à l’homme. »
— Oswald Spengler, L’Homme et la Technique (1931), trad. Christophe Lucchese, éd. R&N
Éditions, coll. « Du Rouge et du Noir », 2016 (ISBN 9791096562039), p. 71
« [...] la seule vision du monde qui soit digne de nous est celle [...] d’Achille :
mieux vaut une courte vie pleine de faits et de gloire qu’une longue sans
contenu. »
— Oswald Spengler, L’Homme et la Technique (1931), trad. Christophe Lucchese, éd. R&N
Éditions, coll. « Du Rouge et du Noir », 2016 (ISBN 9791096562039), p. 71
« L’histoire, quant à elle, est hier comme aujourd’hui l’histoire des guerres. »
— Oswald Spengler, L’Homme et la Technique (1931), trad. Christophe Lucchese, éd. R&N
Éditions, coll. « Du Rouge et du Noir », 2016 (ISBN 9791096562039), p. 51
« Le sens du socialisme ne réside pas dans une opposition entre riche et pauvre mais dans
le rang qui, conféré par le travail et les compétences, domine la vie. Telle est notre liberté :
c’est elle qui nous affranchit du joug de l’individualisme et de son économie arbitraire. »
— Oswald Spengler, Prussianité et Socialisme (1919), trad. Eberhard Gruber, éd. Actes Sud,
1986, p. 135
« Les Russes sont la promesse d’une culture à venir au moment où les ombres
du soir s’allongent sur l’Occident. »
— Oswald Spengler, Prussianité et Socialisme (1919), trad. Eberhard Gruber, éd. Actes Sud,
1986, p. 127-128
« L’esprit romain existait encore alors que les vrais Romains, déjà, avaient disparu. »
— Oswald Spengler, Prussianité et Socialisme (1919), trad. Eberhard Gruber, éd. Actes Sud,
1986, p. 119
« [...] ces instincts, qui se manifestent dans la froideur intellectuelle de notre civilisation
moderne avancée, nous viennent des premiers hommes doués d’intuition qui conquirent, à
l’époque gothique, les marais de la Marche par le glaive et la charrue [...]. »
— Oswald Spengler, Prussianité et Socialisme (1919), trad. Eberhard Gruber, éd. Actes Sud,
1986, p. 118
« Une véritable Internationale n’est possible qu’avec la victoire sur toutes les autres de
l’idée défendue par une race, et non pas par la dissolution de toutes les opinions dans une
masse incolore. [...] Il n’y a qu’une issue à la lutte éternelle, la mort. La mort de l’individu, la
mort des peuples, la mort d’une culture. La nôtre est encore loin devant nous, dans l’ombre
incertaine du prochain millénaire. Nous, Allemands, plongés dans ce siècle, liés de façon
existentielle à la civilisation faustienne, nous portons en nous des possibilités riches et
intactes, et devant nous se dessinent des tâches prodigieuses. Nous contribuons à
l’Internationale — qui se prépare irrévocablement —, par notre idée d’organisation du
monde, d’État mondial ; les Anglais y contribuent, par leur idée de trusts internationaux et
d’exploitation mondiale ; les Français, par rien. C’est nous qui sommes les garants de toute
cela, non pas avec des discours mais avec notre existence. Toute prussianité repose sur
l’idée d’un socialisme authentique, hérité de l’Ordre teutonique. »
— Oswald Spengler, Prussianité et Socialisme (1919), trad. Eberhard Gruber, éd. Actes Sud,
1986, p. 117-118
« Malgré tout, les deux grandes idées universelles continuent à s’affronter : la dictature de
l’argent et la dictature de l’organisation ; un monde-butin et un monde-État ; la richesse et
l’autorité ; le succès et le métier. Il est temps que les deux partis socialistes d’Allemagne
s’unissent contre cet adversaire de leur idée commune, c’est-à-dire contre cette “Angleterre
de l’intérieur”, ce libéralisme du Capital et du Parlement. »
— Oswald Spengler, Prussianité et Socialisme (1919), trad. Eberhard Gruber, éd. Actes Sud,
1986, p. 94
« [...] l’esprit prussien, était un héritage des Ordres de chevalerie de l’époque gothique et
qui, avant lui, résuma dans la formule “Le Trône et l’Autel” une idée universelle. »
— Oswald Spengler, Prussianité et Socialisme (1919), trad. Eberhard Gruber, éd. Actes Sud,
1986, p. 92
L’Anglais « est, depuis deux siècles, l’inventeur de toutes les doctrines qui liquident
l’indépendance intérieure, inventeur, pour finir, du darwinisme selon lequel tout état
psychique dépend de facteurs matériels de causalité et qui [...] est devenu la conception du
monde du petit-bourgeois allemand. »
— Oswald Spengler, Prussianité et Socialisme (1919), trad. Eberhard Gruber, éd. Actes Sud,
1986, p. 62
« Il existe, dans le socialisme, des traits plus anciens, plus forts, plus profonds que la
critique sociale de Marx ; ils étaient là avant lui et ont continué à se développer sans lui et
contre lui. Ils ne sont pas inscrits sur le papier, mais dans le sang. Et seule le sang dévide de
l’avenir. [...]
Telle est bien notre tâche : il s’agit de libérer le socialisme allemand de Marx. »
— Oswald Spengler, Prussianité et Socialisme (1919), trad. Eberhard Gruber, éd. Actes Sud,
1986, p. 18
« Existe-t-il aujourd’hui un seul homme de race blanche qui se rende compte de ce qui se
passe autour de lui dans le monde entier ? qui comprenne toute l’étendue et l’imminence
du danger qui plane sur cette race ? Je ne parle pas des masses, cultivées ou incultes, de
nos villes, ces lecteurs de journaux, cette chair à élections, où toute différence entre les
électeurs de journaux, cette chair à élections, où toute différence entre les électeurs et ceux
qui sont élus a disparu depuis longtemps ; je veux parler des classes dirigeantes des
peuples blancs, tant qu’elles ne sont pas encore détruites, des hommes d’États, tant qu’il en
existe encore, des vrais chefs de la politique et de l’économie, des armées et du monde des
idées. »
« C’est en prenant connaissance de l’écriture et de la lecture liée au Verbe... qu’on
commence à “se cultiver”, soit qu’on les pratique soi-même, soit qu’on fasse écrire et qu’on
se fasse lire l’écrit. C’est ainsi que la conscience dispose du trésor, établi par l’écriture,
modelé par l’esprit, de la culture réalisée et devenue héréditaire. La chose écrite est la
mémoire de toutes les hautes cultures, que l’individu assume au cours de son existence et
dans la mesure fixée par le rang de sa personnalité… Celui qui, spirituellement, ne vit que
dans le jour présent et ne pense que selon ses opinion — celui-là n’a pas de culture. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 209
« De nos jours, on ne sait plus lire. Ce grand art, que pratiquait encore l’époque de Goethe,
est mort. On parcourt “en masse” ce qui s’imprime, et, en règle générale, le lecteur dégrade
moralement le livre. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 209
« Par ses méthodes intellectuelles, le commerce est plus proche de la diplomatie... que
l’industrie et l’agriculture, plus proches de tout ce qui est administration et organisation. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 194
« Toute noblesse authentique, au sein d’un peuple, est “race” à l’état pur [...]. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 192
« Un roi est l’expression visible d’une volonté d’État. Là où l’État n’a pas de
volonté, il n’y a pas de roi. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 180
« La santé d’un corps vivant, c’est la fécondité. La fécondité est puissance politique. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 170
« Une ethnie est en général, mais non toujours, une unité de sang. Un peuple est toujours
l’unité d’une idée. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 169
« Connaître l’histoire, c’est entrevoir le destin. Écrire l’histoire, c’est composer une
tragédie. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 160
« L’histoire universelle, c’est l’image du monde vivant, au tissu duquel l’homme se voit mêlé
par sa naissance, par ses ascendants et ses descendants, et qu’il tente de comprendre à
partir de son sentiment du monde. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 158
« L’histoire universelle a été faite par des ethnies mobiles ; non par une paysannerie
sédentaire, mais contre elle. La liberté de la plaine, la liberté de la mer ont produit les
créateurs des peuples et des États et les grands hommes d’action. La
paysannerie subit l’histoire, qui passe au-dessus d’elle ; ce sont le cavalier et le navigateur
qui la font. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 139
« Pour l’essentiel, la volonté est identique à la force vitale. Les hommes sans race sont sans
volonté. »
— Oswald Spengler, Écrits historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd.
Copernic, 1980, p. 137
« La paix est un souhait, la guerre est un fait, et l’histoire des hommes ne s’est
jamais souciée des souhaits ni des idéaux humains. La vie est un combat entre les plantes,
les animaux et les hommes, un combat entre les individus, les classes de la société, les
peuples et les États, qu’il se déroule sous des formes économiques, sociales, politiques ou
militaires. C’est une lutte pour le pouvoir d’imposer sa volonté, son avantage, ou sa
conception de l’utile ou du juste, et quand d’autres moyens manquent leu but, on aura
toujours et sans cesse recours au moyen ultime, la violence. [...] Il y a un fait dangereux :
c’est qu’aujourd’hui, les peuples blancs sont seuls à parler de paix mondiale, et non les
peuples de couleur, qui représentent beaucoup plus d’êtres humains. Tant que des
penseurs et des idéalistes isolés le font — comme ils l’ont fait de tout temps —, ces
discours n’ont aucune conséquence. Mais quand des peuples entiers deviennent pacifistes,
c’est là un symptôme de sénilité. Les races robustes et en pleine possession de leurs forces
ne le sont pas. Et c’est un renoncement à l’avenir, car l’idéal pacifiste revient à un état final
contraire au fait de la vie. Tant qu’il y aura une évolution humaine, il y aura des guerres.
Mais si les peuples blancs devaient se lasser de la guerre au point que leurs
gouvernements ne puissent plus, quoi qu’il advînt, l’obtenir d’eux, le monde succomberait
sous les coups des peuples de couleur, de même que l’Empire romain est tombé au
pouvoir des Germains. [...] Le pacifisme restera toujours un idéal, la guerre un
fait, et si les peuples blancs sont résolus à ne plus jamais y entrer, ce sont les
peuples de couleur qui le feront et qui régneront sur le monde. »
— Réponse télégraphique à une enquête américaine
— Oswald Spengler, « La paix mondiale est-elle possible ? » (1936), dans Écrits historiques
et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd. Copernic, 1980, p. 113-114
« La mer a toujours mis les cultures et les populations primitives en rapport les unes avec
les autres ; la forêt vierge les a séparées. »
— Oswald Spengler, « Projet d’un nouvel atlas de l’antiquité » (2 octobre 1924), dans Écrits
historiques et philosophiques (1918-1936), trad. Henri Plard, éd. Copernic, 1980, p. 67
« Le Troisième Reich est l’idéal germanique, une aurore éternelle, à laquelle tous les grands
hommes depuis Dante jusqu’à Nietzsche et Ibsen ont relié leurs existences. »
— Oswald Spengler, Le Déclin de l’Occident (1918-1922), trad. Mohand Tazerout, éd.
Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1948 (ISBN 9782070260478), t.
1, p. 509
« Non moins titanique est l’assaut de l’argent contre la puissance spirituelle. L’industrie
aussi est encore liée à la terre comme la paysannerie. Elle a son lieu d’origine et ses sources
de matière jaillissant du sol. Seule la haute finance est tout à fait libre, tout a fait
insaisissable. Les banques et aussi les bourses se sont développées depuis 1789 (grâce au
besoin de crédit de l’industrie croissant à l’infini) en une puissance propre et veulent être,
comme l’argent dans toutes les civilisations, la puissance unique. La lutte originelle entre
l’économie productive et l’économie conquérante s’élève à une silencieuse lutte titanique
des esprits, qui se décide sur le sol des villes mondiales. C’est la lutte désespérée de la
pensée technique pour sa liberté menacée par la pensée financière.
La dictature de l’argent progresse et se rapproche d’une apogée naturelle, dans la
civilisation faustienne comme dans toutes les autres. Et il se produit alors une chose, qui ne
peut être comprise que par celui qui a sondé la nature de l’argent. S’il était une chose
concrète, son existence serait éternelle ; comme il est une forme de la pensée, il s’éteint
dès qu’il a pensé jusqu’au bout le monde économique, et ce par manque de substance. Il a
envahi la vie du paysage rural et mis le sol en mouvement ; il a transformé les affaires de
chaque artisanat ; il pénètre aujourd’hui en vainqueur dans l’industrie pour faire également
son butin du travail productif des entrepreneurs, des ingénieurs et des ouvriers. La
machine avec son armée humaine, véritable maîtresse du siècle, est en danger de tomber
sous une puissance plus forte. Mais ainsi l’argent arrive au bout de ses succès, et le dernier
combat commence, qui donnera à la civilisation sa forme définitive : le combat de l’argent
et du sang.
L’avènement du césarisme brise la dictature de l’argent et de son arme
politique, la démocratie. Après un long triomphe, de l’économie de la ville
mondiale et de ses intérêts, sur la force plastique politique, le côté politique de
la vie ne se révélera pas moins le plus fort. L’épée vaincra l’argent, la volonté
du seigneur s’assujettira à nouveau la volonté du pirate. Si on appelle ces forces
de l’argent le capitalisme, et si le socialisme est la volonté de faire naître, par delà tous les
intérêts de classe, une puissante organisation politico-économique, un système du souci et
du devoir supérieur, qui consolide l’ensemble pour la lutte décisive de l’histoire, cela sera
en même temps une lutte entre l’argent et le droit. Les puissances
économiques privées veulent frayer la voie à leur conquête des grandes fortunes. Aucune
législation ne leur barrera la route. Elle veulent légiférer dans leur intérêt et se servent,
pour ce faire, de l’instrument qu’elles se sont créé elles-mêmes : la démocratie, le parti
qu’elles paient. Le droit a besoin, pour parer à cet assaut, d’une tradition supérieure, de
l’ambition des fortes familles qui trouvent leur satisfaction non dans l’accumulation des
richesses, mais dans les devoirs de l’autorité authentique, par delà tous les avantages
financiers. Une puissance ne peut être détruite que par une autre, non par un principe, et il
n’y en a point d’autre contre l’argent. L’argent ne sera dominé que par le sang et
supprimé par lui. »
— Oswald Spengler, Le Déclin de l’Occident (1918-1922), trad. Mohand Tazerout, éd.
Gallimard, coll. « La Nouvelle Revue française », 1948 (ISBN 9782070260478), t.
2, p. 465-466
ANDREI TARKOVSKI
« L’Orient était plus proche de la vérité que l’Occident. Mais la civilisation occidentale a
englouti l’Orient avec ses prétentions matérielles. »
— Andreï Tarkovski, Le Temps scellé (1986), trad. Anne Kichilov et Charles-Hubert de
Brantes, éd. Philippe Rey, 2014 (ISBN 9782848763842), p. 279
« Il me semble que dans sa lutte pour les libertés politiques, sans doutes très
importantes, l’homme moderne a perdu cette liberté dont il avait toujours
disposé : celle d’être capable de se donner en sacrifice au nom de l’autre et de
la société. »
— Andreï Tarkovski, Le Temps scellé (1986), trad. Anne Kichilov et Charles-Hubert de
Brantes, éd. Philippe Rey, 2014 (ISBN 9782848763842), p. 214
« Et ceux qui ne ressentent plus un besoin de beauté et de spiritualité, ne font plus dès lors
que consommer des films comme des bouteilles de Coca-Cola... »
— Andreï Tarkovski, Le Temps scellé (1986), trad. Anne Kichilov et Charles-Hubert de
Brantes, éd. Philippe Rey, 2014 (ISBN 9782848763842), p. 212
« Aujourd’hui l’artiste attend une récompense immédiate pour ce qui relève du domaine
de l’esprit. Dans ce contexte, la figure de Kafka est tout à fait étonnante, car non
seulement il n’a rien publié de son vivant, mais il chargea de plus son exécuteur
testamentaire de brûler tous ses écrits. L’univers moral de Kafka appartenait au passé. Sa
souffrance immense provenait de son incapacité à s’accorder avec son époque. Ce qui
passe pour être de l’art, de nos jours, n’est souvent qu’une mise en avant de soi-même. Or
c’est une erreur de croire que la méthode puisse passer pour le sens et le but de l’art. La
plupart des artistes contemporains pourtant s’adonnent, avec un exhibitionnisme effréné, à
la démonstration de leurs méthodes. »
— Andreï Tarkovski, Le Temps scellé (1986), trad. Anne Kichilov et Charles-Hubert de
Brantes, éd. Philippe Rey, 2014 (ISBN 9782848763842), p. 115-116
« Je pense qu’un des aspects les plus tristes de notre temps est la destruction
dans la mentalité des hommes de tout ce qui avait un lien conscient avec le
beau. La culture de masse, destinée à des “consommateurs”, dans notre civilisation toute
en prothèses, rend nos esprits infirmes. Elle nous empêche de nous tourner vers les
questions fondamentales de l’existence et de nous assumer en tant qu’êtres spirituels.
Pourtant, un artiste ne peut rester sourd à l’appel de la vérité qui, seule, forge, organise sa
volonté créatrice, et le rend capable de transmettre sa foi aux autres. Un artiste qui n’a pas
la foi : autant parler d’un peintre qui serait aveugle de naissance. »
— Andreï Tarkovski, Le Temps scellé (1986), trad. Anne Kichilov et Charles-Hubert de
Brantes, éd. Philippe Rey, 2014 (ISBN 9782848763842), p. 54-55
« L’artiste nous ouvre à son univers, et il ne tient qu’à nous d’y croire ou de le rejeter
comme un objet inutile. L’image d’un auteur dépasse toujours sa pensée, qui devient
insignifiante face à une vision émotionnelle du monde reçue comme une révélation. Car la
pensée est limitée, mais l’image absolue. C’est pourquoi il y a bien un parallèle, chez un
être spirituellement réceptif, entre l’émotion qu’il ressent devant une œuvre d’art et celle
qu’il connaît dans une expérience purement religieuse. »
— Andreï Tarkovski, Le Temps scellé (1986), trad. Anne Kichilov et Charles-Hubert de
Brantes, éd. Philippe Rey, 2014 (ISBN 9782848763842), p. 53
« L’art existe et s’affirme là où il y a une soif insatiable pour le spirituel, l’idéal. Une soif qui
rassemble tous les êtres humains. L’art contemporain a fait fausse route quand il a
remplacé la quête du sens de la vie par l’affirmation de l’individualité pour
elle-même. Cette prétendue création prend un air suspect avec sa proclamation de la
valeur intrinsèque de l’acte personnel. Car l’individualisme ne s’affirme pas dans la
création artistique. Elle est au service de l’idéal. L’artiste est un serviteur,
éternellement redevable du don qu’il a reçu comme par miracle. Mais l’homme
contemporaine ne veut pas du sacrifice, alors qu’il est l’unique vrai moyen de s’affirmer. Il
l’a oublié et perd de ce fait peu à peu le sens de sa vocation d’être humain. »
— Andreï Tarkovski, Le Temps scellé (1986), trad. Anne Kichilov et Charles-Hubert de
Brantes, éd. Philippe Rey, 2014 (ISBN 9782848763842), p. 49
« Je considère que notre civilisation mourra du progrès matériel, à cause non pas de
conséquences physiques, mais bien plutôt des conséquences spirituelles qui en résultent.
Même en cas de guerre les perturbations sur la terre ou dans le cosmos ne seraient pas
graves car il ne s’agirait que de dégâts matériels. On peut survivre à cela, mais pas au
socialisme généralisé. Regardez la Suède par exemple : aucune vie spirituelle, aucun intérêt
pour rien. Ils ont tout et pourtant ils sont vides. Cette idée que tous sont égaux : le
boulanger, le vendeur de bière, le cinéaste, tous pareils devant l’impôt, etc... C’est pour cela
que Bergman est parti. En France, c’est différent, mais tôt ou tard ce sera la même chose.
Les Français ont un tempérament plus artistique, mais ce n’est qu’une question de temps...
Nous ne sommes égaux que devant Dieu, mais pas aux yeux des autres. »
— « À propos du Sacrifice », Annie Epelboin, Positif, mai 1986
« Pour moi, l’art des masses est absurde. L’art est surtout d’esprit aristocratique. »
— « Une lueur au fond du puits ? », Thomas Jonhson, Nouvelles Clés, 28 avril 1986
—
GUSTAVE THIBON
[...] la plupart des réalités du monde moderne, en effet, et en particulier les
chefs-d’œuvre de la technique, ne sont pas poétisables. »
— Philippe Barthelet, Entretiens avec Gustave Thibon (1988), éd. Desclée de Brouwer,
2016 (ISBN 9782220081434), p. 144
« [...] les légendes héroïques et divines, même si elles sont fausses dans l’ordre de
l’événement, restent vraies dans l’ordre de la beauté et de l’amour. Les hommes ont
transposé naïvement dans le passé des réminiscences de l’éternel (comme aujourd’hui ils
les transposent dans l’avenir) [...]. »
— Gustave Thibon, L’Ignorance étoilée (1974), éd. Fayard, 1974 (ISBN 9782213000350),
p. 139
« L’esprit philosophique consiste à préférer aux mensonges qui font vivre les vérités qui
font mourir. »
— Gustave Thibon, L’Ignorance étoilée (1974), éd. Fayard, 1974 (ISBN 9782213000350),
p. 45
« Il est malaisé de composer avec le monde sans se laisser décomposer par le
monde. »
— Gustave Thibon, L’Ignorance étoilée (1974), éd. Fayard, 1974 (ISBN 9782213000350),
Avant-propos, p. XXI
« Il y a infiniment plus d’intelligence et de sagesse dans l’âme d’un vieux paysan, riche de
ses traditions ancestrales et de son expériences personnelle, qui met tant d’esprit dans ses
travaux matériels que dans tel intellectuel gonflé de science assimilée qui accomplit
matériellement sa tâche spirituelle... »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, p. 270
« Le tyrans d’autrefois affamaient le peuple, les tyrans modernes trouvent plus habiles de
lui gâter l’estomac ; les premiers le privaient de pain, les seconds lui dépravent l’appétit. »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, p. 227
« Rien n’est plus inhumain que de ne voir que l’homme dans l’homme. »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, p. 227
« [...] ces enfants à qui on n’a rien à demander et rien à donner, comment ne serait-il pas
tenté de les laisser dans le néant ? »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, p. 75
« Les jeunes ménages du hameau songent d’abord à se prémunir contre les risques de la
vie et les besoins de la vieillesse, soit en faisant des économies au lieu de faire des enfants,
soit en émigrant vers l’état social qui, par sa nature même, est le moins propice à la
natalité : le fonctionnarisme. »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, p. 74
« C’est d’ailleurs la même hâte devant toute jouissance et le même effroi devant toute
peine, stigmates de l’être coupé de ses sources, qui expliquent, dans tous les domaines,
l’absence de ces entreprises de longue haleine, par où l’individu se dépasse et s’éternise.
Une époque qui recule devant l’enfant n’est pas capable non plus d’inspirer la Divine
comédie ou la politique des Capétiens ou de faire jaillir les cathédrales du sol. »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, p. 72
« [...] les mythes libéraux, matérialistes et démocratiques ont eu pour effet d’arracher
l’individu aux grandes continuités cosmiques et sociales (le sol, le métier, la famille, la
patrie…) qui sont les cadres normaux de sa vie intérieure et de activité, en bref de réduire
l’homme à lui-même. »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, p. 64-65
« Notre mal le plus profond gît dans l’irréalisme de la pensée et de la conduite. Cet
irréalisme procède du relâchement ou de la rupture des liens vitaux. L’homme qui vit en
contact avec le réel, qui travaille sur du réel, a nécessairement le sens du réel : il sait
d’instinct ce qui est possible, ce qui est fécond. Ce qu’on appelle le bon sens n’est pas autre
chose que cet équilibre que crée dans la pensée et les actes la communion au
réel. L’homme de bon sens est toujours un homme relié. L’isolé, le déraciné au
contraire — si intelligent qu’il puisse être — n’a pas de bon sens, et l’absurdité
éclate dans ses propos et dans ses gestes. »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, p. 41-42
« [...] ce qui importe par-dessus tout, c’est de substituer à la société atomisée dont nous
souffrons une société organisée, dont la vie paysanne offre le plus pur modèle. »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, p. 17-18
« Nous préférons le vieux paysan illettré qui puise sa rude sagesse dans le contact direct
avec la réalité que Dieu a faite au déraciné farci de vaines lectures, qui, comme chante
Mistral “ne connaît plus l’heure au soleil et à qui les vieux chemins ne disent rien”. Dans
tous les domaines, nous préférons les plus humbles réalités en qui nous
sentons une âme aux plus hautes apparences qui n’en ont pas. »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, Avant-propos, p. xviii-xix
« Nous sommes pour l’unité qui rassemble contre le nombre qui disperse. En
toute chose, nous voulons subordonner l’avoir à l’être. Il ne nous suffit pas que
chacun ait une place, nous voulons encore que chacun soit à sa place. »
— Gustave Thibon, Retour au réel (1943), éd. Lardanchet, 1946, Avant-propos, p. xv
JEAN THIRIART
« L’Occident dont se gargarisent les droitiers français ce n’est que ça : l’aire
d’expansion de la limonade américaine. [...] Cet Occident nous le vomissons. Et
nous vomissons les gens qui s’en font les complices [et idolâtrent les USA] premier
État juif du monde. »
— Jean Thiriart, La Nation européenne, 15 mars-15 avril 1966
« Malgré tous les risques que cela peut comporter, il faut tendre à tout prix à l’éviction des
Américains d’Europe.
La puissance tutélaire, les États-Unis, a créé en Europe des habitudes de sécurité, de facilité
et de fil en aiguille, de renoncement à l’initiative personnelle et enfin de sujétion. [...]
L’atlantisme est un opium pour l’Europe politique, l’américanisme est une
morphine qui nous abrutit et nous enlève toute personnalité. »
— Jean Thiriart, Un Empire de quatre cents millions d’hommes, l’Europe (1964), éd. Avatar,
2007 (ISBN 9780955513244), p. 194-196
« Les hasards de l’Histoire ont fait qu’une Europe vénitienne, puis une Europe portugaise,
ensuite les Europe hollandaise et surtout anglaise, nous ont donné l’habitude des relations
maritimes et nous ont détournés de notre réelle vocation qui est continentale.
Nous avons ainsi négligé l’Europe de l’Est au profit d’aventures océaniques et avons
construit des empires maritimes qui se sont révélés, plus tard, extrêmement fragiles. »
— Jean Thiriart, Un Empire de quatre cents millions d’hommes, l’Europe (1964), éd. Avatar,
2007 (ISBN 9780955513244), p. 138
« Certains rêvent d’une Europe socialiste, d’autres d’une Europe catholique, certains d’une
Europe latine ou d’une Europe germanique. En attendant, tous ces rêveurs acceptent
servilement une Europe américaine. »
— Jean Thiriart, Un Empire de quatre cents millions d’hommes, l’Europe (1964), éd. Avatar,
2007 (ISBN 9780955513244), p. 46
« La race légendaire d’Agamemnon et d’Ulysse n’est pas morte. Les offenses qui
nous ont été faites ont toujours été vengées et notre histoire n’a été qu’une
suite d’Iliades. »
— Jean Thiriart, Un Empire de quatre cents millions d’hommes, l’Europe (1964), éd. Avatar,
2007 (ISBN 9780955513244), p. 42
ALEXIS DE TOCQUEVILLE
« Quant à moi, qui pense que notre occident est menacé de tomber tôt ou tard sous le
joug ou du moins sous l’influence directe et irrésistible des tsars, je juge que notre premier
intérêt est de favoriser l’union de toutes les races germaniques, afin de l’opposer à ceux-
ci. »
— Alexis de Tocqueville, Souvenirs (posthume, 1893), éd. Calmann Lévy, 1893, p. 383
« La vérité est, vérité déplorable, que le goût des fonctions publiques et le désir de vivre de
l’impôt ne sont point chez nous une maladie particulière à un parti, c’est la grande et
permanente infirmité de la nation elle-même ; c’est le produit combiné de la constitution
démocratique de notre société civile et de la centralisation excessive de notre
gouvernement ; c’est ce mal secret, qui a rongé tous les anciens pouvoirs et qui rongera de
même tous les nouveaux. »
— Alexis de Tocqueville, Souvenirs (posthume, 1893), éd. Calmann Lévy, 1893, p. 44
« La Révolution française ne sera que ténèbres pour ceux qui ne voudront regarder qu’elle ;
c’est dans les temps qui la précèdent qu’il faut chercher la seule lumière qui puisse
l’éclairer. »
— Alexis de Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1993 (ISBN 9782080705006), p. 298
« [...] des entrailles mêmes d’une nation qui venait de renverser la royauté on
vit sortir tout à coup un pouvoir plus étendu, plus détaillé, plus absolu que
celui qui avait été exercé par aucun de nos rois. »
— Alexis de Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1993 (ISBN 9782080705006), p. 297-298
« Ce n’est pas toujours en allant de mal en pis que l’on tombe en révolution. Il arrive le plus
souvent qu’un peuple qui avait supporté sans se plaindre, et comme s’il ne les sentait pas,
les lois les plus accablantes, les rejette violemment dès que le poids s’en allège. Le régime
qu’une révolution détruit vaut presque toujours mieux que celui qui l’avait immédiatement
précédé, et l’expérience apprend que le moment le plus dangereux pour un mauvais
gouvernement est d’ordinaire celui où il commence à se réformer. »
— Alexis de Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1993 (ISBN 9782080705006), p. 266
« Qui cherche dans la liberté autre chose qu’elle-même est fait pour servir. Que
manque-t-il à ceux-là pour rester libres ? Quoi ? Le goût sublime de l’être. »
— Alexis de Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1993 (ISBN 9782080705006), p. 259
« On croit que les théories destructives qui sont désignées de nos jours sous le nom de
socialisme sont d’origine récente ; c’est une erreur : ces théories sont contemporaines des
premiers économistes. Tandis que ceux-ci employaient le gouvernement tout-puissant
qu’ils rêvaient à changer les formes de la société, les autres s’emparaient en imagination du
même pouvoir pour en ruiner les bases.
Lisez le Code de la Nature par Morelly, vous y trouverez, avec toutes les doctrines des
économistes sur la toute-puissance de l’État et sur ses droits illimités, plusieurs des
théories politiques qui ont le plus effrayé la France dans ces derniers temps, et que nous
nous figurions avoir vues naître : la communauté de biens, le droit au travail, l’égalité
absolue, l’uniformité en toutes choses, la régularité mécanique dans tous les mouvements
des individus, la tyrannie réglementaire et l’absorption complète de la personnalité des
citoyens dans le corps social.
“Rien dans la société n’appartiendra singulièrement ni en propriété à personne, dit l’article
1er de ce Code. La propriété est détestable, et celui qui tentera de la rétablir sera renfermé
pour toute sa vie, comme un fou furieux et ennemi de l’humanité. Chaque citoyen sera
sustenté, entretenu et occupé aux dépens du public,” dit l’article 2. “Toutes les productions
seront amassées dans des magasins publics, pour être distribuées à tous les citoyens et
servir aux besoins de leur vie. Les villes seront bâties sur le même plan ; tous les édifices à
l’usage des particuliers seront semblables. A cinq ans tous les enfants seront enlevés à leur
famille et élevés en commun, aux frais de l’État, d’une façon uniforme.” Ce livre vous paraît
écrit d’hier : il date de cent ans ; il paraissait en 1755, dans le même temps que Quesnay
fondait son école : tant il est vrai que la centralisation et le socialisme sont des produits du
même sol ; ils sont, relativement l’un à l’autre, ce que le fruit cultivé est au sauvageon. »
— Alexis de Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1993 (ISBN 9782080705006), p. 254-255
« Le passé est pour les économistes l’objet d’un mépris sans bornes. [...] il n’y a
pas d’institution si vieille et qui paraisse si bien fondée dans notre histoire, dont ils ne
demandent l’abolition, pour peu qu’elle les incommode et nuise à la symétrie de leurs
plans. »
— Alexis de Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1993 (ISBN 9782080705006), p. 249-250
« Vers le milieu du siècle, on voit paraître un certain nombre d’écrivains qui traitent
spécialement des questions d’administration publique, et auxquels plusieurs principes
semblables ont fait donner le nom commun d’économistes ou de physiocrates. Les
économistes ont eu moins d’éclat dans l’histoire que les philosophes ; moins qu’eux ils ont
contribué peut-être à l’avènement de la Révolution ; je crois pourtant que c’est surtout
dans leurs écrits qu’on peut le mieux étudier son vrai naturel. Les philosophes ne sont
guère sortis des idées très-générales et très-abstraites en matière de gouvernement ; les
économistes, sans se séparer des théories, sont cependant descendus plus près des faits.
Les uns ont dit ce qu’on pouvait imaginer, les autres ont indiqué parfois ce qu’il y avait à
faire. Toutes les institutions que la Révolution devait abolir sans retour ont été l’objet
particulier de leurs attaques ; aucune n’a trouvé grâce à leurs yeux. Toutes celles, au
contraire, qui peuvent passer pour son œuvre propre, ont été annoncées par eux à l’avance
et préconisées avec ardeur ; on en citerait à peine une seule dont le germe n’ait été déposé
dans quelques-uns de leurs écrits ; on trouve en eux tout ce qu’il y a de plus substantiel en
elle.
Bien plus, on reconnaît déjà dans leurs livres ce tempérament révolutionnaire et
démocratique que nous connaissons si bien ; ils n’ont pas seulement la haine de certains
privilèges, la diversité même leur est odieuse : ils adoreraient l’égalité jusque dans la
servitude. Ce qui les gêne dans leurs desseins n’est bon qu’à briser. Les contrats leur
inspirent peu de respect ; les droits privés, nuls égards ; ou plutôt il n’y a déjà plus à leurs
yeux, à bien parler, de droits privés, mais seulement une utilité publique. Ce sont pourtant,
en général, des hommes de mœurs douces et tranquilles, des gens de bien, d’honnêtes
magistrats, d’habiles administrateurs ; mais le génie particulier à leur œuvre les entraîne. »
— Alexis de Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1993 (ISBN 9782080705006), p. 248-249
« J’arrête le premier Américain que je rencontre, soit dans son pays, soit ailleurs, et je lui
demande s’il croit la religion utile à la stabilité des lois et au bon ordre de la société ; il me
répond sans hésiter qu’une société civilisée, mais surtout une société libre, ne peut
subsister sans religion. Le respect de la religion y est, à ses yeux, le plus grande garantie de
la stabilité de l’État et de la sûreté des particuliers. Les moins versés dans la science du
gouvernement savent au moins cela. Cependant il n’y a pas de pays au monde où les
doctrines les plus hardies des philosophes du dix-huitième siècle, en matière de politique,
soient plus appliquées qu’en Amérique ; leurs seules doctrines antireligieuses n’ont jamais
pu s’y faire jour, même à la faveur de la liberté illimitée de la presse. »
— Alexis de Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1993 (ISBN 9782080705006), p. 244
« Une nation fatiguée de longs débats consent volontiers qu’on la dupe, pourvu qu’on la
repose, et l’histoire nous apprend qu’il suffit alors pour la contenter de ramasser dans tout
le pays un certain nombre d’hommes obscurs ou dépendants, et de leur faire jouer devant
elle le rôle d’une assemblée politique, moyennant salaire. »
— Alexis de Tocqueville, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1993 (ISBN 9782080705006), p. 236
« Je remonte de siècle en siècle jusqu’à l’Antiquité la plus reculée ; je n’aperçois rien qui
ressemble à ce qui est sous nos yeux. Le passé n’éclairant plus l’avenir, l’esprit
marche dans les ténèbres. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 399
« Dans les siècles d’égalité, chaque individu est naturellement isolé ; il n’a
point d’amis héréditaires dont il puisse exiger le concours, point de classe dont
les sympathies lui soient assurées ; on le met aisément à part, et on le foule
impunément aux pieds. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 391
« J’affirme qu’il n’y a pas de pays en Europe où l’administration publique ne soit devenue
non seulement plus centralisée, mais plus inquisitive et plus détaillée ; partout elle pénètre
plus avant que jadis dans les affaires privées ; elle règle à sa manière plus d’actions, et des
actions plus petites, et elle s’établit davantage tous les jours, à côté, autour et au-dessus de
chaque individu, pour l’assister, le conseiller et le contraindre. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 372
« L’éducation, aussi bien que la charité, est devenue, chez la plupart des peuples de nos
jours, une affaire nationale. L’État reçoit et souvent prend l’enfant des bras de sa mère pour
le confier à ses agents ; c’est lui qui se charge d’inspirer à chaque génération des
sentiments, et de lui fournir des idées. L’uniformité règne dans les études comme dans tout
le reste ; la diversité comme la liberté en disparaissent chaque jour. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 371
« Dans les sociétés démocratiques, la centralisation sera toujours d’autant plus grande que
le souverain sera moins aristocratique : voilà la règle. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 368
« Les hommes qui vivent dans les siècles d’égalité aiment naturellement le pouvoir central
et étendent volontiers ses privilèges [...]. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 367
« Les peuples démocratiques haïssent souvent les dépositaires du pouvoir central ; mais ils
aiment toujours ce pouvoir lui-même. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 362
« Comme, dans les siècles d’égalité, nul n’est obligé de prêter sa force à son semblable, et
nul n’a droit d’attendre de son semblable un grand appui, chacun est tout à la fois
indépendant et faible. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 360
« Il existe une loi générale qui a été faite ou du moins adoptée, non pas seulement par la
majorité de tel ou tel peuple, mais par la majorité de tous les hommes. Cette loi, c’est la
justice.
La justice forme donc la borne du droit de chaque peuple.
Une nation est comme un jury chargé de représenter la société universelle et d’appliquer la
justice qui est sa loi. Le jury, qui représente la société, doit-il avoir plus de puissance que la
société elle-même dont il applique les lois ? »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 348
« Il y a deux choses qu’un peuple démocratique aura toujours beaucoup de peine à faire :
commencer la guerre et la finir. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 329
« Lorsque l’esprit militaire abandonne un peuple, la carrière militaire cesse aussitôt d’être
honorée, et les hommes de guerre tombent au dernier rang des fonctionnaires publics. On
les estime peu et on ne les comprend plus. Il arrive alors le contraire de ce qui se voit dans
les siècles aristocratiques. Ce ne sont plus les principaux citoyens qui entrent dans l’armée,
mais les moindres. On ne se livre à l’ambition militaire que quand nulle autre n’est permise.
Ceci forme un cercle vicieux d’où on a de la peine à sortir. L’élite de la nation évite la
carrière militaire, parce que cette carrière n’est pas honorée ; et elle n’est point honorée,
parce que l’élite de la nation n’y entre plus. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 328
« Ce qui détourne surtout les hommes des démocraties de la grande ambition, ce n’est pas
la petitesse de leur fortune, mais le violent effort qu’ils font tous les jours pour l’améliorer.
Ils contraignent leur âme à employer toutes ses forces pour faire des choses médiocres : ce
qui ne peut manquer de borner bientôt sa vue et de circonscrire son pouvoir. Ils pourraient
être beaucoup plus pauvres et rester plus grands. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 301
« Dans les pays aristocratiques, les grands possèdent d’immenses privilèges, sur lesquels
leur orgueil se repose, sans chercher à se nourrir des menus avantages qui s’y rapportent.
Ces privilèges leur étant arrivés par héritage, ils les considèrent, en quelque sorte, comme
une partie d’eux-mêmes, ou du moins comme un droit naturel et inhérent à leur personne.
Ils ont donc un sentiment paisible de leur supériorité ; ils ne songent point à vanter des
prérogatives que chacun aperçoit et que personne ne leur dénie. Ils ne s’en étonnent point
assez pour en parler. Ils restent immobiles au milieu de leur grandeur solitaire, sûrs que
tout le monde les y voit sans qu’ils cherchent à s’y montrer, et que nul n’entreprendra de
les en faire sortir. [...]
Lorsque au contraire les conditions diffèrent peu, les moindres avantages ont de
l’importance. Comme chacun voit autour de soi un million de gens qui en possèdent de
tout semblables ou d’analogues, l’orgueil devient exigeant et jaloux ; il s’attache à des
misères et les défend opiniâtrement.
Dans les démocraties, les conditions étant fort mobiles, les hommes ont presque toujours
récemment acquis les avantages qu’ils possèdent ; ce qui fait qu’ils sentent un plaisir infini
à les exposer aux regards, pour montrer aux autres et se témoigner à eux-mêmes qu’ils en
jouissent ; et comme, à chaque instant, il peut arriver que ces avantages leur échappent, ils
sont sans cesse en alarmes et s’efforcent de faire voir qu’ils les tiennent encore. Les
hommes qui vivent dans les démocraties aiment leur pays de la même manière qu’ils
s’aiment eux-mêmes, et ils transportent les habitudes de leur vanité privée dans leur vanité
nationale. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 278
« Parce qu’une classe est basse, il ne faut pas croire que tous ceux qui en font partie aient
le cœur bas. Ce serait une grande erreur. Quelque inférieure qu’elle soit, celui qui y est le
premier et qui n’a point l’idée d’en sortir, se trouve dans une position aristocratique qui lui
suggère des sentiments élevés, un fier orgueil et un respect pour lui-même, qui le rendent
propre aux grandes vertus et aux actions peu communes. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion, coll.
« Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 222
« Dans les siècles démocratiques, les hommes se dévouent rarement les uns
pour les autres ; mais ils montrent une compassion générale pour tous les
membres de l’espèce humaine. »
— Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (1835-1840), éd. Flammarion,
coll. « Garnier Flammarion », 1981 (ISBN 9782080703545), t. 2, p. 208-209
—
ALPHONE TOUSSENEL
« Que le peuple français, soi-disant affranchi par la révolution de 89 du joug
de la féodalité nobiliaire, n’a fait que changer de maîtres [...]. »
— Alphonse Toussenel, Les Juifs, rois de l’époque (1845), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250274), p. 273
« Et qui dit juif, dit protestant, sachez-le. L’Anglais, le Hollandais, le Genevois, qui
apprennent à lire la volonté de Dieu dans le même livre que le juif, professent pour les lois
de l’équité et les droits des travailleurs le même mépris que le juif. Il y a même dispute
entre ces races pour savoir à laquelle revient le prix de l’avarice et de la cupidité. »
— Alphonse Toussenel, Les Juifs, rois de l’époque (1845), éd. Kontre Kulture, 2013 (ISBN
9782367250274), p. 26
« J’appelle, comme le peuple, de ce nom méprisé de juif, tout trafiquant d’espèces, tout
parasite improductif, vivant de la substance et du travail d’autrui. Juif, usurier,
trafiquant sont pour moi synonymes. »
— Alphonse Toussenel, Les Juifs, rois de l’époque (1845), éd. Kontre Kulture,
2013 (ISBN 9782367250274), p. 23
—
BARON VON UNGERN STERNBERG
« Je sais que seule la restauration de la monarchie sauvera l’humanité
corrompue par l’Occident. Comme la terre ne peut exister sans le ciel, les
peuples ne peuvent vivre sans roi... »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Érik Sablé, Ungern (2001), éd. Pardès, coll. « Qui
suis-je ? », 2006 (ISBN 9782867143823), p. 76
« La bourgeoisie n’est capable que de parasiter l’État et c’est elle qui a conduit
le pays à ce qui lui arrive aujourd’hui. Le tsar doit s’appuyer sur l’aristocratie
et la paysannerie. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Érik Sablé, Ungern (2001), éd. Pardès, coll. « Qui
suis-je ? », 2006 (ISBN 9782867143823), p. 77
« Les hommes sont devenus avides, mesquins, menteurs, [...] ils ont perdu la
foi et le sens du vrai, il n’y a plus de rois, il n’y a plus de bonheur. Ils chercheront
la mort sans la trouver ; ils désireront mourir, mais la mort les fuira. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Léonid Youzéfovitch, Le baron
Ungern (2001), trad. Élisabeth Mouraviova, éd. Éditions des Syrtes, 2001 (ISBN
9782845450363), p. 195
« Vous savez qu’actuellement en Russie le frère se bat contre le frère, le père contre le fils,
le vol est général, tout le monde souffre de la faim, on a oublié le Ciel. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Léonid Youzéfovitch, Le baron
Ungern (2001), trad. Élisabeth Mouraviova, éd. Éditions des Syrtes, 2001 (ISBN
9782845450363), p. 31
« Une campagne sérieuse est menée avec grand succès pour l’unification de la Mongolie
Extérieure et Intérieure et pour rassembler toutes les tribus de la Mongolie Occidentale et
Orientale dans le bercail de la “plus grande Mongolie” et je suis sûr des efforts du
Bogdikhan et des miens. À ce moment l’attention principale est attirée par les provinces
orientales de la Mongolie qui doivent nous servir de barrière sûre contre l’agression de la
Chine révolutionnaire. Ensuite des mesures seront prises afin d’annexer la Mongolie
Occidentale. D’après les plans approuvés, les provinces annexées ne seront pas soumises
au pouvoir du conseil des ministres d’Ourga, mais elles conserveront les droits inviolables
de l’indépendance des “aimaks” » ; leurs propres tribunaux et lois, leur propre structure
administrative et leurs coutumes sociales ne formant qu’une unité militaire, financière et
économique dans une alliance défensive sous la bénédiction du Bogdikhan. Le but de cette
alliance est double : elle doit d’une part offrir à toutes les tribus d’origine mongole
l’occasion de se grouper autour du même centre, d’autre part elle doit servir à la défense
militaire et morale contre l’Occident pourri qui se trouve sous l’influence de la folle
révolution, ainsi que contre la dépravation des mœurs dans toutes ses manifestations,
physiques et spirituelles. Quant aux régions de Kobdo et d’Ouriankhai, je suis tranquille.
Les habitants de ces districts se joindront facilement à nous, puisqu’ils ont essuyé eux-
mêmes le joug de la République chinoise et la lourde main des communistes
révolutionnaires chinois et des bolchevistes. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Érik Sablé, Ungern (2001), éd. Pardès, coll. « Qui
suis-je ? », 2006 (ISBN 9782867143823), p. 123
« Mon temps est venu... je mourrai... mais le monde n’a jamais vu une terreur et une mer de
sang comme il en verra maintenant. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Érik Sablé, Ungern (2001), éd. Pardès, coll. « Qui
suis-je ? », 2006 (ISBN 9782867143823), p. 117
« Je lutte contre le Mal absolu. Pour moi, il n’y a pas de choix : ou le triomphe des masses,
ou celui de l’individu. Peu m’importent les doctrines. Le bolchevisme, c’est ce que d’autres
en Europe nomment l’américanisme. Les commissaires et les marchands sont de la même
race. Ils surgissent des ghettos d’Europe centrale pour partir à la conquête du monde. Par
l’or ou par le sang. Les Protocoles des sages de Sion avaient depuis longtemps prévu tout
cela. Même si ce document est un faux, fabriqué par la police tsariste, tout ce passe
pourtant comme s’il existait quelque part un plan juif. L’ennemi, c’est Trotski. Avant
Lénine. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Jean Mabire, Ungern — Le Dieu de la
Guerre (1973), éd. Art et Histoire d’Europe, coll. « Action », 1987 (ISBN
9782906026100), 11 août 1920, p. 57
« Contre la révolution rouge qui veut transformer toute l’humanité en une masse
indifférenciée — ce vieux rêve chrétien — nous rendrons à chacun sa personnalité. Jamais
un Bouriate ne sera un Kalmouk, ni un Blanc un Jaune. Et pourtant ils peuvent se battre
côte à côte, justement pour faire régner dans le monde la différence nécessaire entre les
peuples et entre les hommes. C’est cela le sens de mon combat : la revanche de l’individu.
Je hais l’égalité. C’est le mensonge des prophètes. Pas un peuple ne ressemble à un autre
peuple. Pas un homme à un autre homme. J’aime les étrangers justement parce que ce
sont des étrangers. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Jean Mabire, Ungern — Le Dieu de la
Guerre (1973), éd. Art et Histoire d’Europe, coll. « Action », 1987 (ISBN
9782906026100), 12 novembre 1920, p. 102
« En Estonie, vivent encore de vieux païens qui ont échappé à toutes les persécutions. Ils ne
forment pas une église, pas même une secte. Ils haïssent les prêtres. Le loup n’a pas besoin
de pasteur, ou alors il serait un mouton. Curieux symbolisme que celui des animaux. Les
premiers chrétiens avaient choisi le poisson qui se déplace en bancs. Belle image de la
foule indifférenciée des fidèles. Puis ce fut l’agneau, inséparable de son troupeau bêlant...
L’aigle solitaire, lui, est païen. Pas besoin de secte pour retrouver la communion avec les
forces de la nature. Je laisse les faibles au bercail et je marche seul. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Jean Mabire, Ungern — Le Dieu de la
Guerre (1973), éd. Art et Histoire d’Europe, coll. « Action », 1987 (ISBN
9782906026100), 12 novembre 1920, p. 120
« Les temples enferment Dieu. Pour le trouver, il faut briser les murailles. Le soleil. Le vent.
La forêt et l’océan. La glace. Nos ancêtres connaissaient les messages de la terre.
Superstition, tu es sagesse. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Jean Mabire..., Ungern — Le Dieu de la
Guerre (1973), éd. Art et Histoire d’Europe, coll. « Action », 1987 (ISBN
9782906026100), 10 janvier 1921, p. 121
« Je crois que l’Europe n’interviendra plus. Elle contiendra tant bien que mal l’Armée Rouge
aux frontières polonaises. Elle refuse de voir qu’une autre guerre a commencé en 1917. Si
cela va trop mal sur le vieux continent, les patrons briseront les grèves et les généraux
prendront le pouvoir. Mais ce sera pour recommencer les erreurs des bourgeois et des
officiers de la Russie impériale. La Réaction ne peut à elle seule triompher de la la
Révolution. Il faut opposer à cette force une autre force, à cette idée une autre idée, à ce
rêve un autre rêve. Tout se trouve en Asie. L’Europe devient sénile, incapable de
vivre une grande aventure. Elle a eu sa chance au XVIII° siècle et l’a perdue avec
Napoléon. Elle est vouée à la balkanisation confortable. Le XIX° a été celui de l’Amérique.
Le XX° sera celui de l’Asie. Tout peut se jouer ici. L’Asie est jeune, violente, pure. Il faut
créer deux bastions de résistance entre la subversion russe et le chaos chinois : la Mongolie
et la Mandchourie. Deux peuples ressuscités prouveront à l’Internationale qu’il existe
encore des patries. Ici doivent régner l’ordre, c’est-à-dire la différence et la hiérarchie. Puis
nous rallierons les Bouriates et les Kirghizes, nous pousserons vers le Turkestan, le Tibet, la
Corée, le Cachemire... Je vais sonner le grand réveil des peuples qui se joindront à nous
pour rester libres, pour devenir eux-mêmes, pour conserver leur héritage et leur foi. Face à
l’Internationale de Moscou, je veux fonder l’Internationale d’Ourga ! »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Jean Mabire, Ungern — Le Dieu de la
Guerre (1973), éd. Art et Histoire d’Europe, coll. « Action », 1987 (ISBN
9782906026100), 9 avril 1921, p. 178
« Les rouges veulent la lutte des classes. Je leur prépare la seule riposte possible, la lutte
des races. Si je parviens à réveiller l’Asie — même si un jour elle doit se dresser contre
l’Europe — je restituerai l’ordre naturel. En créant la Grande Mongolie, je ne suis pas un
réactionnaire et un conservateur comme tous ces généraux blancs disparus dans les
coulisses de l’exil, je suis un libérateur et un prophète. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Jean Mabire, Ungern — Le Dieu de la
Guerre (1973), éd. Art et Histoire d’Europe, coll. « Action », 1987 (ISBN
9782906026100), 10 avril 1921, p. 179
« On ne compose pas avec le Bolchevisme. C’est la lutte à mort. Eux ou nous. Ce progrom
que j’ai toléré ne va pas arranger ma réputation. Mais il faut bien que mes Cosaques aient
quelque distraction. Est-ce ma faute à moi si, pour ces âmes simples, le Rouge et le Juif se
confondent si souvent ? Trotski s’appelle Bronstein, Kamenev Rosenfeld, Radek Sobelsohn
et Zinoviev Apfelbaum. Staline par contre n’est pas juif. Il n’est pas russe non plus. Il finira
peut-être par mettre un peu d’ordre dans la baraque. Se méfier, pourtant : c’est un ancien
séminariste géorgien. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Jean Mabire, Ungern — Le Dieu de la
Guerre (1973), éd. Art et Histoire d’Europe, coll. « Action », 1987 (ISBN
9782906026100), 6 février 1921, p. 148
« Mes Cosaques, qui ont besoin de la protection de la Vierge Marie pour fusiller les
Rouges, étriper les Chinois et pendre les Juifs, ignorent que le christianisme est l’ancêtre du
bolchevisme. Le pope rouge avait raison. En se faisant communiste, il est revenu à
l’origine : le soviet des apôtres. Avec le Juif saint Paul comme grand maître de l’agit-prop,
comme on dit à Moscou. Personne n’a encore compris cette évidence en Occident. Il m’a
fallu venir au cœur de l’Asie, avec le terrible recul du désert et de la solitude, pour
comprendre le mécanisme d’une révolution qui dure depuis deux mille ans. Il est temps de
restaurer la vraie religion. Pas chez les Cosaques, à qui je peux laisser sans danger leur
aumônier et ses icônes. Ce vieil ivrogne de Jenissov ne me dérange pas puisqu’il
n’empêche personne de se battre. La religion pure de nos ancêtres païens doit d’abord
renaître chez les nobles, chez les chefs. C’est par la force des meilleurs et des plus braves
que le peuple reviendra dans le droit chemin. S’il y a un Dieu, il est sur la terre et non dans
le ciel. Il est en nous et non hors de nous. Les Japonais savent cela mieux que moi. C’est ici,
en Mongolie, que vont se rencontrer et se reconnaître l’Extrême-Orient et l’Extrême-
Occident, sous le même signe du soleil. Avant, il faut gagner la guerre. »
— Roman von Ungern-Sternberg cité par Jean Mabire, Ungern — Le Dieu de la
Guerre (1973), éd. Art et Histoire d’Europe, coll. « Action », 1987 (ISBN
9782906026100), 7 février 1921, p. 148
GEORGES VACHER DE LAPOUGE
« On frémit en pensant aux hécatombes humaines que l’avenir réserve. La lutte entre les
prétendants à la domination universelle sera longue, et nécessairement sans merci. »
— Georges Vacher de Lapouge, L’Aryen, son rôle social (1889-1890), éd. Ars Magna,
2016 (ISBN 9791096338115), p. 596
« Il en sera de même quand les populations noires de l’Afrique, douées d’une si grande
fécondité et que nous empêchons de s’égorger, rempliront notre continent de leurs masses
compactes et fardées de civilisation. »
— Georges Vacher de Lapouge, L’Aryen, son rôle social (1889-1890), éd. Ars Magna,
2016 (ISBN 9791096338115), p. 576
« Dès que les Juifs ont été livrés en toute liberté à l’exercice de leurs instincts, dans une
société où les intérêts économiques sont considérés en première ligne, leurs aptitudes
majeures à l’accumulation des capitaux les ont désignés comme les hauts barons de
l’aristocratie du capital. C’est par l’acquisition des richesses que commencent toutes les
aristocraties, mais la leur a cela de particulier qu’elle s’est fondée sur une acquisition
pacifique et dépourvue de risques. Ils se sont emparés de l’argent par la force des instincts
ataviques, et l’argent leur donnera bientôt sans doute la suprême puissance, parce qu’il est
aujourd’hui seul Dieu et seul roi.
Les Juifs clairvoyants ont pris conscience de ce rôle. L’idée d’une conquête possible du
pouvoir, et de son exploitation raisonnée, devient peu à peu courante dans Israël. Il se
constitue, par la force des choses, une puissance gouvernementale qui ne
connaît pas de frontières, et qui peut conduire, s’il n’arrive point d’accident, à
la constitution de ces États-Unis d’Europe, subordonnés à une oligarchie juive,
dont j’ai parlé déjà comme d’une hypothèse admissible. »
— Georges Vacher de Lapouge, L’Aryen, son rôle social (1889-1890), éd. Ars Magna,
2016 (ISBN 9791096338115), p. 570-571
« Le Juif est de nature incapable de travail productif. Il est courtier, spéculateur, il n’est pas
ouvrier, pas agriculteur. Organisé pour s’emparer habilement du fruit du travail d’autrui, le
Juif ne peut exister sans une population bien plus nombreuse d’inférieurs qui sèment,
récoltent, tissent et construisent pour lui. [...]
Chez nous plus que partout il faut comparer le nombre des Juifs à celui des bourgeois et
non à celui de l’ensemble de la population. Ce qui tend sans cesse à faire exagérer encore
l’importance si grande de l’élément juif, comme de l’élément protestant c’est qu’on oublie
qu’ils représentent des état-majors sans soldats. »
— Georges Vacher de Lapouge, L’Aryen, son rôle social (1889-1890), éd. Ars Magna,
2016 (ISBN 9791096338115), p. 561-565
« Au-dessus des classes et des partis, la révolution nationale dresse l’État national.
L’État national apparaît sous la figure d’un chef.
Le chef n’est point l’homme d’un parti ou d’une classe. Il est le chef national, le chef en qui
tout homme reconnaît ses propres traits.
Il est le Chef sur qui aucun groupe, aucune classe, aucun parti ne peut exercer de pression,
et qui est l’incarnation de l’intérêt national. Il est l’Unité, unité de pensée, unité de
direction, unité de commandement.
Il est le Combattant qui tient l’épée, le haut justicier, le défenseur de la paix civile. Son
premier attribut est l’épée, parce que l’État n’est pas un simple administrateur des choses,
mais un être qui doit vivre selon les vertus héroïques, qui agit sur nos passions, qui doit
être prêt à chaque instant à défendre notre pensée, nos personnes et nos biens. Il porte
l’épée, pour rappeler à tous qu’il est le symbole de l’héroïsme et non le représentant de
l’argent, maître actuel de l’État libéral. »
— Georges Valois, La Révolution nationale (1924), éd. La Nouvelle Librairie, 2021, p. 185
Le Parlement « est une institution qu’il faut détruire, car c’est par elle que l’esprit mercantile
et juridique du bourgeois a dissocié les forces nationales. »
— Georges Valois, La Révolution nationale (1924), éd. La Nouvelle Librairie, 2021, p. 175
« [...] la paix bourgeoise, la paix des financiers, qui rejette l’Europe tout entière dans la
corruption de l’argent. »
— Georges Valois, La Révolution nationale (1924), éd. La Nouvelle Librairie, 2021, p. 157
« [...] une des plus grandes causes de la diminution de l’influence catholique, une des
grandes causes de la faiblesse de la pensée catholique au XIXe siècle, c’est
l’embourgeoisement d’une partie du clergé. »
— Georges Valois, La Révolution nationale (1924), éd. La Nouvelle Librairie, 2021, p. 145
« Le bourgeois libéral représentait l’Argent, mais recouvert d’un voile pieux ; le bourgeois
national représentait l’Argent, mais avec un petit morceau du drapeau tricolore ; le
bourgeois radical représente l’Argent nu et obscène. »
— Georges Valois, La Révolution nationale (1924), éd. La Nouvelle Librairie, 2021, p. 132
« Quand le bourgeois veut être le premier dans l’État, c’est un destructeur, ou un chef qui
s’abandonne, c’est Étienne Marcel, c’est Guizot, c’est M. Thiers, c’est M. Raymond Poincaré.
Quand le bourgeois consent à servir, c’est un grand serviteur du Prince et du Peuple, c’est
Colbert. »
— Georges Valois, La Révolution nationale (1924), éd. La Nouvelle Librairie, 2021, p. 93
« Que les bourgeois, s’ils conservent leur cité, s’accommodent volontiers du nouveau
maître de la terre et des routes. Leur bien, c’est leurs affaires et leurs franchises, et non de
battre la campagne pour chasser l’envahisseur. »
— Georges Valois, La Révolution nationale (1924), éd. La Nouvelle Librairie, 2021, p. 86
« Avec l’État libéral, la nation est une juxtaposition de citoyens dont la règle individuelle est
la loi de l’argent, qui ne se différencient que par l’argent. Avec l’État national, la nation est
une organisation de familles, qui font corps avec les régions et les métiers. Au régime des
assemblées irresponsables, est substitué le régime des chefs responsables. La nation est
une hiérarchie de chefs, qui va du chef de famille au chef de l’État ; une élite organisée la
pénètre, laissant à chaque classe de citoyens le soin de défendre ses intérêts propres, mais
faisant vivre partout les valeurs nationales. Enfin la grandeur privée n’est plus fondée sur
l’argent ; elle repose sur les services rendus à la nation, sur l’apport fait à la grandeur
nationale. »
— Georges Valois, La Révolution nationale (1924), éd. La Nouvelle Librairie, 2021, p. 69
« La Famille, pierre angulaire de la Cité, est niée par l’État lui-même, dont toutes les lois la
disloquent, la dispersent, la ruinent, dont aucun ne la reconnaît comme la cellule mère de
la nation. La Cité n’est officiellement qu’une assemblée de citoyens sans liens entre eux, ni
familiaux, ni corporatifs. Les citoyens sont abandonnés à une liberté qui ne profite qu’aux
plus mauvais d’entre eux. »
— Georges Valois, La Révolution nationale (1924), éd. La Nouvelle Librairie, 2021, p. 65-66
« La révolution est moins la prise du pouvoir que son utilisation pour la construction de la
nouvelle société. »
— Dominique Venner, Pour une critique positive (1962), éd. IDées, 2013 (ISBN
9791092148060), p. 25
« Les “nationaux” s’attaquent aux effets du mal, pas à ses racines. Ils sont
anticommunistes mais oublient que le capitalisme et les régimes libéraux sont les
principaux artisans de la propagation du communisme. Ils étaient hostiles à la politique
algérienne du gouvernement, mais oublient que cette politique était le produit d’un
régime, de son idéologie, de ses intérêts, de ses maîtres réels financiers et technocrates,
comme de ses structures politiques et économiques. »
— Dominique Venner, Pour une critique positive (1962), éd. IDées, 2013 (ISBN
9791092148060), p. 18
—
MAX WEBER
« [...] il faut concevoir l’État contemporain comme une communauté humaine
qui, dans les limites d’un territoire déterminé [...], revendique avec succès
pour son propre compte le monopole de la violence physique légitime. »
— Max Weber, Le Savant et le Politique (1919), trad. Julien Freund, Eugène Fleischmann
et Éric de Dampierre, éd. Union Générale d’Éditions, coll. « 10/18 », 1963 (ISBN
9782264031594), p. 125
« Abraham ou les paysans d’autrefois sont morts “vieux et comblés par la vie”
parce qu’ils étaient installés dans le cycle organique de la vie, parce que celle-ci
leur avait apporté au déclin de leurs jours tout le sens qu’elle pouvait leur
offrir et parce qu’il ne subsistait aucune énigme qu’ils auraient encore voulu résoudre. Ils
pouvaient donc se dire “satisfaits” de la vie. L’homme civilisé au contraire, placé dans le
mouvement d’une civilisation qui s’enrichit continuellement de pensées, de savoirs et de
problèmes, peut se sentir “las” de la vie et non pas “comblé” par elle. En effet il ne peut
jamais saisir qu’une infime partie de tout ce que la vie de l’esprit produit sans cesse de
nouveau, il ne peut saisir que du provisoire et jamais du définitif. C’est pourquoi la mort est
à ses yeux un événement qui n’a pas de sens. »
— Max Weber, Le Savant et le Politique (1919), trad. Julien Freund, Eugène Fleischmann
et Éric de Dampierre, éd. Union Générale d’Éditions, coll. « 10/18 », 1963 (ISBN
9782264031594), p. 91
« C’est un fait que, dans l’Antiquité, “l’antisémitisme” était universellement répandu. Mais
aussi que ce rejet des juifs, qui ne se développa d’abord que progressivement, alla de pair
avec un rejet croissant, de la part des juifs eux-mêmes, de la communauté avec des non-
juifs. [...] Ce fut bien plutôt l’attitude de rejet des juifs eux-mêmes qui, dans ces rapports
mutuels, représenta le facteur décisif. [...] Si l’on va au fond des choses, le reproche ultime
et déterminant qui était fait aux juifs concernait leur “haine des hommes” : leur rejet de
principe du connubium, de la commensalité et de toute forme de fraternisation ou de
communauté étroite, de quelque type que ce fût, y compris dans le domaine des affaires,
mais aussi — l’importance de ce facteur ne doit pas non plus être sous-estimée — le
soutien extrêmement puissant que leur confrérie apportait à tous les juifs pharisiens, en
vertu de la hevra — un facteur dont les effets économiques ne purent échapper à
l’attention de leurs concurrents païens. L’isolement social des juifs, ce “ghetto” au sens le
plus intime du terme, fut d’abord absolument choisi et voulu par eux, et il le fut toujours
davantage. »
— Max Weber, Le Judaïsme antique (1917-1918), trad. Isabelle Kalinowski, éd. Flammarion,
2010, « Les pharisiens », p. 651-652
« Toutefois, ce n’est pas au judaïsme palestinien de l’époque où ont été composés les
textes de l’Ancien Testament qu’il faut penser, mais au judaïsme tel qu’il est peu à peu
devenu, après des siècles d’éducation formaliste, légaliste et talmudique, et encore est-il
nécessaire de se montrer extrêmement prudent devant un tel parallèle. L’esprit du judaïsme
primitif, porté à une valorisation [Schätzung] naïve de la vie en tant que telle, était
dépourvu des caractères propres au puritanisme. De même il était fort éloigné — il
convient de ne pas l’oublier — de l’éthique économique du judaïsme médiéval et moderne,
et des caractéristiques qui ont déterminé les positions du judaïsme et celles du puritanisme
au cours du développement de l’éthos capitaliste. Le judaïsme s’est tenu du côté du
capitalisme “aventurier” [Abenteurer-Kapitalismus], orienté vers la politique
et la spéculation ; en un mot, son éthos était celui d’un capitalisme
de parias [Paria-Kapitalismus] ; le puritanisme soutenait l’éthos de
l’entreprise [Betrieb] bourgeoise rationnelle et de l‘organisation rationnelle
du travail. Il n’a emprunté à l’éthique juive que ce qui pouvait l’y aider. »
— Max Weber, L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme (1905), trad. Jacques
Chavy, éd. Pocket, coll. « Agora », 1991 (ISBN 9782266034029), p. 201
—
SIMONE WEIL
« L’ordre du monde, c’est la beauté du monde. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 346
« La science, avec la technique qui n’en est que l’application, est notre seul titre à être fiers
d’être des Occidentaux, des gens de race blanche, des modernes. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 292
« Une partie des Français peut se dire hostile au christianisme ; mais avant comme après
1789, tous les mouvements de pensée qui ont eu lieu en France se sont réclamés de la
raison. La France ne peut pas écarter la raison au nom de la patrie.
C’est pourquoi la France se sent mal à l’aise dans son patriotisme, et cela bien qu’elle-
même, au XVIIe siècle, ait inventé le patriotisme moderne. Il ne faut pas croire que ce qu’on
a nommé la vocation universelle de la France rende la conciliation entre le patriotisme et
les valeurs universelles plus facile aux Français qu’à d’autres. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 209
« [...] depuis longtemps l’enseignement n’est plus, aux yeux des parents comme des
enfants, qu’une machine à procurer des diplômes, c’est-à-dire des situations. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 186
« L’État est une chose froide qui ne peut pas être aimée ; mais il tue et abolit tout ce qui
pourrait l’être ; ainsi on est forcé de l’aimer, parce qu’il n’y a que lui. Tel est le supplice
moral de nos contemporains. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 179
« Les Français n’avaient pas autre chose que la France à quoi être fidèles ; et quand ils
l’abandonnèrent pour un moment, en juin 1940, on vit combien peut être hideux et
pitoyable le spectacle d’un peuple qui n’est lié à rien par aucune fidélité. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 178
« [...] il est contre nature que la terre soit cultivée par des êtres déracinés. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 145
« Si notre culture était proche de la perfection, elle serait située au-dessus des classes
sociales. Mais comme elle est médiocre, elle est dans une large mesure une culture
d’intellectuels bourgeois, et plus particulièrement, depuis quelque temps, une culture
d’intellectuels fonctionnaires. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 134
« L’avenir ne nous apporte rien, ne nous donne rien ; c’est nous qui pour le construire
devons tout lui donner, lui donner notre vie elle-même. Mais pour donner il faut posséder,
et nous ne possédons d’autre vie, d’autre sève, que les trésors hérités du passé et digérés,
assimilés, recréés par nous. De tous les besoins de l’âme humaine, il n’y en a pas
de plus vital que le passé. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 120
« Le déracinement est de loin la plus dangereuse maladie des sociétés humaines, car il se
multiplie lui-même. Des êtres vraiment déracinés n’ont guère que deux
comportements possibles : ou ils tombent dans une inertie de l’âme
équivalente à la mort [...], ou ils se jettent dans une activité tendant toujours à
déraciner, souvent par les méthodes les plus violentes, ceux qui ne le sont pas
encore [...]. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 116-117
« La Renaissance a partout provoqué une coupure entre les gens cultivés et la masse ; mais
en séparant la culture de la tradition nationale, elle la plongeait du moins dans la tradition
grecque. Depuis, les liens avec les traditions nationales n’ont pas été renoués, mais la Grèce
a été oubliée. Il en est résulté une culture qui s’est développée dans un milieu très restreint,
séparé du monde, dans une atmosphère confinée, une culture considérablement orientée
vers la technique et influencée par elle, très teintée de pragmatisme, extrêmement
fragmentée par la spécialisation, tout à fait dénuée à la fois de contact avec cet univers-ci
et d’ouverture vers l’autre monde. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 115
« Puis, de par sa durée, la collectivité pénètre déjà dans l’avenir. Elle contient de la
nourriture, non seulement pour les âmes des vivants, mais aussi pour celles d’êtres non
encore nés qui viendront au monde au cours des siècles prochains.
Enfin, de par la même durée, la collectivité a ses racines dans le passé. Elle constitue
l’unique organe de conservation pour les trésors spirituels amassés par les
morts, l’unique organe de transmission par l’intermédiaire duquel les morts
puissent parler aux vivants. Et l’unique chose terrestre qui ait un lien direct avec la
destinée éternelle de l’homme, c’est le rayonnement de ceux qui ont su prendre une
conscience complète de cette destinée, transmis de génération en génération. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 82
« Un homme qui serait seul dans l’univers n’aurait aucun droit, mais il aurait des
obligations. »
— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs
Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 77
« Quand on écoute du Bach ou une mélodie grégorienne, toutes les facultés de l’âme se
tendent et se taisent, pour appréhender cette chose parfaitement belle, chacune à sa
façon. L’intelligence entre autres : elle n’y trouve rien à affirmer et à nier, mais elle s’en
nourrit.
La foi ne doit-elle pas être adhésion de cette espèce ?
On dégrade les mystères de la foi en en faisant un objet d’affirmation ou de
négation, alors qu’ils doivent être un objet de contemplation. »
— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN
9782266045964), p. 208
« D’où nous viendra la renaissance, à nous qui avons souillé et vidé tout le
globe terrestre ?
Du passé seul, si nous l’aimons. »
— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN
9782266045964), p. 198
« La seule chose qui puisse faire de la légitimité pure, idée absolument dépourvue de
force, quelque chose de souverain, c’est la pensée : cela a toujours été, cela sera toujours.
C’est pourquoi une réforme doit toujours apparaître, soit comme retour à un passé qu’on
avait laissé dégrader, soit comme adaptation d’une institution à des conditions nouvelles,
adaptation ayant pour objet non pas un changement, mais au contraire le maintien d’un
rapport invariant, comme si l’on a le rapport 12 sur 4 et que 4 devienne 5, le vrai
conservateur n’est pas celui qui veut 12 sur 5, mais celui qui de 12 fait 15. »
— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN
9782266045964), p. 195
« La force d’âme des communistes vient de ce qu’ils se portent, non seulement vers ce
qu’ils croient être le bien, mais vers ce qu’ils croient qui va inéluctablement et
prochainement se produire. Ainsi, ils peuvent, sans être des saints — il s’en faut de
beaucoup — supporter des dangers et des souffrances que seul un saint supporterait pour
la justice toute seule.
À certains égards, l’état d’esprit des communistes est très analogue à celui des premiers
chrétiens. »
— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN
9782266045964), p. 185
« L’art n’a pas d’avenir immédiat parce que tout art est collectif et qu’il n’y a plus de vie
collective (il n’y a que des collectivités mortes), et aussi à cause de cette rupture du pacte
véritable entre le corps et l’âme. L’art grec a coïncidé avec les débuts de la géométrie et
avec l’athlétisme, l’art du Moyen Âge avec l’artisanat, l’art de la Renaissance avec les débuts
de la mécanique, etc. Depuis 1914, il y a une coupure complète. »
— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN
9782266045964), p. 172
« Ce monde est la porte fermée. C’est une barrière. Et, en même temps, c’est le passage.
Deux prisonniers, dans des cachots voisins, qui communiquent par des coups frappés
contre le mur. Le mur est ce qui les sépare, mais aussi ce qui leur permet de communiquer.
Ainsi nous et Dieu. Toute séparation est un lien. »
— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN
9782266045964), p. 164
« Prométhée, le dieu crucifié pour avoir trop aimé les hommes. Hippolyte, l’homme puni
pour avoir été trop pur et trop aimé des dieux. C’est le rapprochement de l’humain et du
divin qui appelle le châtiment. »
— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN
9782266045964), p. 105
« La chair n’est pas ce qui nous éloigne de Dieu, elle est le voile que nous mettons devant
nous, pour faire écran entre Dieu et nous. »
— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN
9782266045964), p. 71
« Le malheur rend Dieu absent pendant un temps, plus absent qu’un mort,
plus absent que la lumière dans un cachot complètement ténébreux. Une sorte
d’horreur submerge toute l’âme. Pendant cette absence il n’y a rien à aimer. Ce qui est
terrible, c’est que si, dans ces ténèbres où il n’y a rien à aimer, l’âme cesse d’aimer, l’absence
de Dieu devient définitive. Il faut que l’âme continue à aimer à vide, ou du moins à vouloir
aimer, fût-ce avec une partie infinitésimale d’elle-même. Alors un jour Dieu vient se
montrer lui-même à elle et lui révéler la beauté du monde, comme ce fut le cas pour Job.
Mais si l’âme cesse d’aimer, elle tombe dès ici-bas dans quelque chose de presque
équivalent à l’enfer. »
— Simone Weil, Attente de Dieu (1942), éd. Seuil, coll. « Livre de vie », 1977, p. 81
« Le mot de révolution est un mot pour lequel on tue, pour lequel on meurt,
pour lequel on envoie les masses populaires à la mort, mais qui n’a aucun
contenu. »
— Simone Weil, Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression
sociale (1934), éd. Gallimard, coll. « Folio essais », 1955 (ISBN 9782070404421), p. 39
—
OTTO WEININGER
« L’idée que la science est une affaire ferait honneur à toute nation de commerçants. C’est
d’ailleurs chez les Américains et les Juifs qu’elle a été accueillie avec le plus
d’enthousiasme. »
— Otto Weininger, Des fins ultimes (posthume, 1904), trad. Jacques Le Rider, éd. L’Âge
d’Homme, 1981, p. 219
« [...] la science devenait ainsi la fin suprême (une science conçue, il est vrai, comme
augmentation du nombre des connaissances et comme leur uniformisation) [...]. »
— Otto Weininger, Des fins ultimes (posthume, 1904), trad. Jacques Le Rider, éd. L’Âge
d’Homme, 1981, p. 218
« Il n’y a de problèmes que pour les hommes qui réfléchissent pour eux et sur eux, et non
pas pour une idole, quand bien même cette idole s’appellerait Science. »
— Otto Weininger, Des fins ultimes (posthume, 1904), trad. Jacques Le Rider, éd. L’Âge
d’Homme, 1981, p. 218
« Voilà le mot qui résume le travail actuel de l’usine à savoir, où les responsables des
grands laboratoires et séminaires remplissent à merveille les fonctions des gros
industriels. »
— Otto Weininger, Des fins ultimes (posthume, 1904), trad. Jacques Le Rider, éd. L’Âge
d’Homme, 1981, p. 217
« Or, de ce fait, on voit se développer une conception de la science qui n’a vraiment plus
grand-chose à voir avec le besoin de connaître. La science devient un mot d’ordre, un but
non pas en tant que savoir proprement dit, mais en tant que sommes, aussi grandes que
possible, des connaissances “positives”. »
— Otto Weininger, Des fins ultimes (posthume, 1904), trad. Jacques Le Rider, éd. L’Âge
d’Homme, 1981, p. 217
« Les mécènes ont changé de protégés. Si, jadis, leurs soins allaient à l’artiste
et au philosophe (Platon, Aristote, Descartes, Grotius, Spinoza, Leibniz, Voltaire), ils sont
consacrés, de nos jours à la science. Il est vrai que ce n’est plus l’aristocrate qui détient
l’argent. Le grand capitaliste décide, et il opte pour la science. »
— Otto Weininger, Des fins ultimes (posthume, 1904), trad. Jacques Le Rider, éd. L’Âge
d’Homme, 1981, p. 215-216
« Les Juifs n’avaient pas conçu que leur Dieu fût le père de l’humanité. Pour eux, il était le
Seigneur, et eux ses serviteurs, qu’il blâmait ou récompensait selon leurs actes. »
— Otto Weininger, Des fins ultimes (posthume, 1904), trad. Jacques Le Rider, éd. L’Âge
d’Homme, 1981, p. 61
« Le Juif rejette la faute sur les autres (sur le christianisme) ; aucune humilité ! Le diable est
l’homme qui rejette la faute sur le croyant (sur Dieu). Dans cette perspective, le judaïsme
est le mal radical. »
— Otto Weininger, Des fins ultimes (posthume, 1904), trad. Jacques Le Rider, éd. L’Âge
d’Homme, 1981, p. 10
« [...] les femmes et les Juifs sont des entremetteurs ; leur but est de confirmer
l’homme dans son péché. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 452
« Notre temps, qui n’est pas seulement le plus juif, mais le plus féminin de tous
les temps [...]. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 452
« Le Christ est le plus grand des hommes parce qu’il s’est mesuré à
l’ennemi le plus grand. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 450
« La judaïté représente une sorte d’état antérieur à l’être, une éternelle errance aux portes
de la réalité. Le Juif ne peut s’identifier à rien, ni mettre vraiment sa vie au service d’aucune
cause. Ce ne sont pas les zélateurs, c’est le zèle qui lui manque : il ignore l’indivision, le
tout. Ce qui lui fait défaut, c’est la simplicité de la foi, et c’est parce qu’il n’a pas cette
simplicité-là qu’il paraît plus adroit et échappe plus élastiquement que l’Aryen à toutes les
oppressions. Je le répète : l’ambivalence est le lot du Juif comme la clarté et la simplicité
est celui du chrétien. La question juive est celle même qu’Elsa pose à Lohengrin, celle de
l’incapacité de croire à aucun témoignage des sens ou de l’esprit, c’est-à-dire finalement à
aucun être. [...]
Comme il n’accorde foi à rien, il cherche refuge dans les choses matérielles ; de là sa soif de
l’argent : ce qu’il cherche dans l’argent est quelque chose d’enfin réel, il veut se convaincre
de l’existence du monde en “faisant des affaires”, la seule valeur qu’il reconnaisse devenant
ainsi l’“argent gagné”. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 443-445
« Toute foi est héroïque : or le Juif ne connaît ni le courage, ni la crainte, comme sentiment
de la foi menacée ; il n’appartient ni au royaume de la lumière, ni à celui de l’ombre. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 442
« [...] le peuple le plus pieux du monde, les Grecs, ce peuple dont la piété a fait la culture
grecque, qui est la plus grande qui ait existé, n’a pas connu de fondateur de religion (il n’en
avait pas besoin). »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 441
« Un autre fait semblerait montrer l’existence d’un lien étroit entre le Juif et la femme, c’est
qu’aucune femme au monde ne représente mieux, même aux yeux des Aryens,
l’idée de la femme que la femme juive [...]. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 436
« Il ne fait en effet pas de doute que de tous les peuples germaniques, ce sont les Anglais
qui se rapprocheraient le plus des sémites. Leur orthodoxie, leur stricte observance du
sabbat, le montre déjà. La religiosité des Anglais est souvent proche de la fausse dévotion,
leur ascétisme, de la pruderie. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 433
« [...] les Juifs n’ont jamais donné au monde aucun grand homme véritable, pourquoi, en
d’autres termes, le génie ne se rencontre pas plus chez le Juif que chez la femme, qu’il lui
est pour ainsi dire refusé. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 431
« [...] le Juif est l’effaceur de limites par excellences. Il est par là l’opposé
même de l’aristocrate. C’est un communiste-né, qui en toutes circonstances veut la
communauté. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 424
« Ce qui manque à la femme comme au Juif est la grandeur tant dans le bien que dans le
mal. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 421
« Quiconque a réfléchi à la fois sur la femme et sur les Juifs aura pu constater
non sans étonnement combien le Juif est pénétré de cette féminité dont on a
vu plus haut qu’elle n’est rien de plus que la négation de toutes les qualités
masculines. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 416
« La femme ne veut pas être traitée comme un sujet, son but est la passivité, qui ne fait
qu’un avec la féminité même ; elle veut pouvoir sentir qu’une volonté est dirigée sur elle et
se soucie peu qu’on la craigne ou qu’on la ménage : elle ne veut pas compter. Son besoin
est d’être désirée comme un corps, possédée comme un bien [...]. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 397-398
« La sexualité se sert de la femme comme d’un moyen de parvenir au plaisir et d’avoir des
enfants ; l’érotisme l’utilise comme un moyen de se hausser au niveau des valeurs et en vue
de la création, c’est-à-dire de l’enfant spirituel. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 333
« L’amour et le désir sont deux états si différents, qui s’excluent à tel point l’un l’autre, qui
sont si opposés, qu’aux instant où un homme aime vraiment, l’union physique avec l’être
aimé lui est un idée impensable. [...] Qui prétendrait aimer une femme qu’il désire ment, ou
n’a jamais aimé. C’est pourquoi également parler d’amour dans le mariage apparaît
presque toujours comme une hypocrisie. L’attraction sexuelle croît avec la proximité
physique, l’amour a besoin de l’aliment de la séparation et de la distance. [...] Pour l’homme
supérieurement différencié, le grand esprit, la femme qu’il aime et la femme qu’il désire
sont deux êtres totalement différents.
L’amour “platonique” existe donc bel et bien, ou mieux encore, il n’y a d’amour que
“platonique”. Tout le reste est bestialité. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 320-321
« [...] il n’est pas possible d’avoir vraiment réfléchi sur les femmes et de continuer de s’en
faire une haute idée ; il n’y a que deux catégories d’hommes : ceux qui méprisent la femme
et ceux qui ne se sont jamais posé de questions à son sujet. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 318
« [...] les mères sont la racine permanente de l’espèce, ce rhizome sans fin, ce fond
duquel l’homme se détache en tant qu’individu pour prendre conscience de son caractère
éphémère. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 299
« La maternité est un phénomène aussi général que la sexualité et elle présente autant de
nuances. Elle n’attend pas que l’enfant soit là pour s’exprimer, mais se révèle dans tout le
comportement. Il est extrêmement intéressant de voir à cet égard comment la jeune fille
maternelle est avec l’homme qu’elle aime. Celui-ci est en effet pour elle déjà un enfant. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 298-299
« Mon propos n’est que de rappeler que le mariage est une institution de droit et que tout
ce qui est du domaine du droit vient de l’homme, la femme n’étant à l’origine que d’un
grand nombre de mœurs [...]. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 297
« Schopenhauer a fait la remarque qu’un homme devrait dater à strictement parer son
existence du jour où son père et sa mère se sont épris l’une de l’autre. Je ferais pour ma
part remonter la naissance de l’enfant au moment où sa mère aperçoit pour la première
fois son père ou en entend pour la première fois la voix. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 293-294
« On ne peut parler de la mère sans parler également de son opposé exact, la courtisane.
La femme est mère ou courtisane, et non mère ou amante. [...]
L’idée d’une polarité maternité-prostitution s’impose déjà naturellement à l’esprit du fait
que la “bonne mère” a toujours davantage d’enfants que la femme entretenue et que la
péripatéticienne est la plupart du temps stérile. [...]
Mère absolue, courtisane absolue, sont deux tempéraments, répartis chez la femme selon
des proportions à chaque fois différentes : il n’existe aucune femme dépourvue de toute
tendance à la prostitution, ni aucune femme dénuée de sentiment maternel, bien que
l’approximation presque parfaite du type de la courtisane soit beaucoup plus fréquente
que celle du type de la mère. L’essence de la maternité consiste en ce que la mère a pour
but principal de sa vie l’enfant. Seul l’enfant compte pour la mère absolue, tandis que la
courtisane ne s’intéresse qu’à l’homme. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 292-295
« Sans justice, il n’y a pas de société, et l’envie est la passion antisociale par excellence.
Aussi la femme est-elle absolument antisociale. La femme n’a le sens ni de l’État, ni de la
politique, ni du compagnonnage, et les cercles de femmes dont les hommes sont exclus se
désagrègent rapidement. La famille est enfin, loin d’être une figue sociale, l’institution
antisociale par excellence ; les hommes qui se marient se retirent pas là même déjà des
sociétés auxquelles ils appartiennent. Les recherches toutes récentes d’Heinrich Schurtz
montrent, à partir d’un matériel ethnologique très riche, que c’est bien dans les liens entre
hommes et non dans la famille qu’il faut chercher l’origine de la société. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 279
« D’où vient cette vanité proprement féminine ? Elle coïncide avec la manque d’un moi
intelligible, à quoi donner toujours et de façon absolue une valeur positive ; elle s’explique
par l’absence chez la femme d’une valeur propre. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 274
« La vanité de la femme s’exprime ainsi d’une part dans une sorte de plaisir permanent
qu’elle éprouve à la pensée de son propre corps [...] et d’autre part dans le besoin de se
sentir admirée, enviée et désirée, besoin si fort que souvent sa satisfaction supprime tous
les autres. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 273-274
« À la question de savoir ce qu’il en est de la pudeur des femmes, [il faut] se demander s’il
est encore possible, devant le zèle naïf que toutes les femmes mettent à se déshabiller sitôt
que les y autorisent les conventions sociales, de parler de la pudeur comme d’une vertu
qui leur serait innée, cela me semble parfaitement inutile [...]. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 271
« Geindre et pleurer sont pour la femme une manière de s’adresser aux autres, par laquelle
elle implore leur pitié. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 270
« La femme n’aime pas la vérité, c’est pourquoi elle n’est pas sérieuse, et ne s’intéresse pas
aux pensées. Il y a quantité de femmes écrivains, mais on ne trouve de pensées dans
aucune de leurs œuvres, et cet amour de la vérité (objective) est chez elles si inexistant
qu’elles ne prennent le plus souvent même pas la peine de donner l’impression qu’elles
pensent. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 263
« Alors que je connais bon nombre d’hommes qui en fait, psychiquement, sont des
femmes, j’ai vu beaucoup de femmes aux traits masculins, mais aucune qui ne fît
fondamentalement femme, aussi cachée cette féminité restât-elle même à ses propres
yeux. »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 256
« Les hommes qui ne sont que des hommes d’esprit sont des hommes non-religieux, qui
ne sont pas pénétrés par les choses et ne prennent pas à elles un intérêt véritable et
profond. Ils se soucient de ce que leur pensée brille et étincelle, non de ce qu’elle mette en
lumière un contenu ! »
— Otto Weininger, Sexe et Caractère (1903), trad. Daniel Renaud, éd. Kontre Kulture,
2012 (ISBN 9782367250137), p. 109