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LA VÉRITÉ
SUR LE
SUCRE
La vérité sur le sucre
d’André Marette
est le mille soixante-treizième
ouvrage publié chez
vlb éditeur.
QP702.S85M37 2016 612.3’96 C2016-940369-6
Nous remercions le Conseil des arts du Canada de l’aide accordée à notre programme de
publication.
LA VÉRITÉ
SUR LE
SUCRE
Préface de Luc Tappy, M.D., Ph. D.
A. M. et G. P..
Le fructose n’est pas essentiel pour ces molécules fascinantes que sont le
l’être humain : une alimentation qui en glucose, le fructose et le sucrose. Au fil
serait totalement dépourvue ne serait de son enquête, il jette un éclairage neuf
associée à aucune manifestation patho- sur les fonctions physiologiques des
logique. C’est pourtant un nutriment sucres et leurs nombreux effets sur le
qu’on a pu retracer dans l’alimentation métabolisme. En abordant des éléments
des tout premiers humains, comme de chimie, de physiologie, de médecine,
dans celle de pratiquement tous les de santé publique, mais aussi d’histoire
vertébrés. Notre engouement pour ce naturelle et de zoologie comparée, il
sucre, outre le fait qu’il a très proba- nous fait découvrir les paradoxes de ces
blement constitué une forme d’énergie composés capables de ravir notre palais,
précieuse pour nos ancêtres chasseurs- mais qui favorisent le stockage de leur
cueilleurs, tient à sa saveur particulière impressionnant apport énergétique sous
qui procure un indéniable plaisir, sur- forme de graisses. Sans le diaboliser, il
tout lorsqu’on le consomme en asso- nous fait comprendre en quoi le sucre
ciation avec des aliments acides, amers, est un danger potentiel dans notre ali-
gras ou salés. À certains moments de sa mentation, et comment des connais-
courte histoire, le sucre raffiné a été si sances justes et un peu de bon sens
prisé qu’il a constitué une valeur refuge peuvent nous aider à éviter les excès
comparable à l’or, et a même été l’enjeu auxquels nous invite trop souvent notre
de batailles féroces ! Son attrait est tel mode de vie actuel. Cet exposé nuancé,
que beaucoup d’entre nous ont bien du qui prend en considération les mul-
mal à y résister, et le prix à payer, c’est tiples facettes du problème, est à mon
un apport énergétique qui dépasse nos sens indispensable pour les lecteurs
besoins physiologiques. qui veulent évaluer objectivement les
Dans cet ouvrage, André Marette innombrables assertions nutritionnelles
nous invite à le suivre sur les traces de que les médias véhiculent.
en fructose, si prisé par l’industrie ? Et toutes parts, qu’ils proviennent des acti-
si nous prenions soin d’éviter ce fruc- vistes, des professionnels de la santé ou
tose qu’on dit si menaçant, pourrions- de l’industrie agroalimentaire. Mon idée
nous céder sans remords aux caprices de de départ n’était ni d’absoudre, ni de
notre bec sucré ? De même, serions-nous condamner le sucre, mais plutôt de faire
à l’abri si nous consommions exclusive- la synthèse la plus juste possible des faits
ment le sucre sous une forme naturelle ? scientifiques. Avec tous ces acteurs qui
Et que penser des nombreux édulcorants s’affairent tantôt à le défendre, tantôt à
non caloriques ? Sont-ils vraiment une le mener à l’échafaud, il m’a semblé que
solution de rechange, ou menacent-ils le sucre avait droit à un procès équitable
notre santé ?
Toutes ces questions montrent bien ***
que le sucre est une substance beaucoup
plus complexe qu’on peut l’imaginer, Merci à Denis Gingras pour sa pré-
et qu’il faut absolument mieux le cieuse collaboration et les nombreuses
connaître pour comprendre ses impacts discussions qui nous ont aidés, Gene-
sur la santé. viève Pilon et moi, à façonner le livre.
Parce qu’en tant que chercheur, je Merci également à Angelo Tremblay,
m’intéresse depuis des décennies à Benoit Lamarche, Éliane Picard-Deland,
tout ce qui touche de près ou de loin Mélissa Fernandez, Michel Lucas et
au métabolisme du sucre, j’ai voulu Valérie Dumais, pour leurs suggestions
contribuer à faire la lumière sur les et leurs encouragements tout au long de
discours que je lis et que j’entends de la rédaction.
André Marette
L’ODYSSÉE
DU SUCRE
La première grande vérité sur le sucre,
trop souvent passée sous silence dans
le débat qui entoure son impact sur la
santé, c’est qu’il fait partie du groupe
très sélect des substances absolument
indispensables à la vie. Son importance
repose sur une réaction biochimique
d’une grande simplicité, mais qui a eu
des conséquences extraordinaires sur
l’évolution de la vie sur Terre : la pho-
tosynthèse. On se souvient que ce pro-
cessus bioénergétique est rendu possible
par les plantes et les algues qui transfor-
ment le gaz carbonique (CO2) de l’air
en oxygène (O2), un phénomène qui
est au cœur de l’apparition de toutes
les formes de vies complexes sur la pla-
nète. Ce qu’on oublie parfois, c’est que
l’autre produit de cette transformation
cruciale est nul autre que le sucre !
13
C’est grâce à cet ingénieux système en sorte que notre métabolisme a éla-
de conversion de l’énergie solaire par boré plusieurs mécanismes sophisti-
les plantes que le sucre peut alors inté- qués pour être à même de satisfaire en
grer la chaîne alimentaire et se frayer un tout temps l’appétit de nos neurones.
chemin dans tout le règne animal, qui Soyez donc sans crainte : même si vous
inclut l’être humain. Si nous existons, jeûnez, votre cerveau ne tombera pas
c’est en effet parce que l’alimentation en panne de sitôt, le corps étant capable
de nos lointains ancêtres primates se de convertir à la demande ses réserves
composait majoritairement de plantes, d’énergie en glucose.
de fruits, de tubercules et de racines Le rôle capital joué par le sucre a
riches en sucres provenant directe- fait en sorte que nous sommes biolo-
ment de la photosynthèse. Certains de giquement programmés pour appré-
ces sucres jouent même un rôle essen- cier les aliments qui en contiennent.
tiel dans la reproduction (voir l’encadré Par exemple, dès la naissance, un enfant
p. 15). acceptera spontanément le goût sucré
Plus généralement, l’énergie pro- caractéristique du lait maternel, alors
duite par la dégradation métabolique du qu’il rejettera instinctivement les
sucre est essentielle
au fonctionnement de Fig. 1.1 Le sucre, produit de la photosynthèse
toutes les cellules du
corps, une contribu-
tion particulièrement
importante pour cer-
tains organes comme Gaz
les muscles et le cer- carbonique
veau. Bien que ce der-
nier ne constitue que Rayons UV Sucre
2 % du poids corporel,
il « carbure » essen-
tiellement au sucre
et en consomme à lui Oxygène
seul environ 120 g
par jour, soit près
de trente cuillères à Eau
thé ! L’importance
du sucre dans le
Rayons UV
maintien des fonc- 6CO2 + 6H2O C6H12O6 + 6O2
tions cérébrales fait
Amidon
Glucose et
fructose
GOÛT 17 g de sucre
SUCRÉ /100 g
Récepteur
accessible
Glucose Fructose
animales. De façon générale, les ani- des fleurs, riche en sucre. Ce change-
maux qui mangent régulièrement des ment de régime alimentaire a été rendu
végétaux peuvent détecter le sucre, ce possible par le développement d’un long
qui leur permet d’identifier les bonnes bec incurvé et de la spectaculaire capa-
sources d’énergie. À l’inverse, les car- cité de l’animal à voler de façon station-
nivores exclusifs comme les félins ne naire, laquelle lui permet d’atteindre le
possèdent pas les récepteurs néces- cœur des fleurs. Mais ce n’est pas tout :
saires et sont complètement indif- alors que la quasi-totalité des oiseaux
férents au goût sucré. Inutile donc possèdent des récepteurs de goût sen-
de tenter d’apprivoiser un chat avec sibles aux protéines mais insensibles
des sucreries ! au sucre, ceux du colibri ont acquis
Le colibri est un exemple éclatant par une série de mutations la faculté
du rôle capital joué par les récepteurs de détecter le sucre, ce qui permet
du sucre dans la survie des espèces. de guider l’oiseau vers les meilleures
Au cours de son évolution, cet oiseau sources d’énergie. Il est intéressant de
remarquable a graduellement modifié constater que cette pression évolutive
son alimentation, délaissant les insectes peut aussi s’exercer en sens inverse :
riches en protéines au profit du nectar certains insectes comme les cafards, qui
Les pyréthrinoïdes, des poisons qui une modification des préférences des
s’attaquent au système nerveux des insectes. Quand les exterminateurs uti-
insectes, sont utilisés depuis longtemps lisent le sucre comme appât, certains
pour contrer les invasions de cafards. cafards acquièrent une mutation géné-
Les exterminateurs ont cependant tique qui modifie la structure de leurs
noté que le traitement devenait inef- récepteurs et donne au sucre un goût
ficace quelques années après la pre- repoussant pour les bestioles mutantes,
mière utilisation, comme si les cafards ce qui les tient loin de la menace.
avaient acquis la capacité de résister Puisque les cafards se reproduisent à un
au poison. Or, des études ont plutôt rythme effréné, ce dégoût se transmet
montré que cette résistance n’était pas rapidement aux nouvelles générations,
causée par une adaptation aux effets assurant du même coup la survie de la
toxiques de l’insecticide, mais bien à colonie.
À LA RECHERCHE DU SUCRE
Des esclaves africains raffinent la canne à sucre sur l’île d’Hispaniola. Gravure de 1595.
Le sucre a été vendu pendant très long- sucre pour ses invités à l’aide d’un des
temps en morceaux de tailles dispa- menaçants outils qu’on utilisait alors
rates, qui étaient le plus souvent bien à cette fin (voir ci-dessus). Pourquoi
trop gros pour les menues tasses de ne pas faire des portions de sucre uni-
thé servies dans les salons chics et les formes, aux dimensions adaptées à une
humbles cuisines. Tout a changé le jour tasse de thé, implora-t-elle ? C’est ainsi
où Juliana Rad, épouse du directeur que naquit, en 1843, le fameux cube
d’une raffinerie de sucre en Moravie, de sucre, une innovation rendue pos-
est sortie de sa cuisine la main ensan- sible grâce à l’invention d’une presse
glantée par la vilaine blessure qu’elle spéciale par Jakub Krystof Rad, l’époux
venait de s’infliger alors qu’elle tentait de Juliana.
de tailler des morceaux dans un bloc de
Dans une étude dirigée par le Dr Serge fut aussi observé avec l’héroïne ! Il
Ahmed, de l’Université de Bordeaux, n’empêche que, pour l’instant, il est dif-
la grande majorité (90 %) des rats ficile de considérer le sucre comme une
exposés à la fois au sucre et à l’auto- drogue. Oui, il occasionne une sécrétion
administration de cocaïne ont manifesté de dopamine, mais après tout, les fris-
une nette préférence pour le sucre. Plus sons ressentis à l’écoute d’une musique
surprenant encore, même chez des rats agréable ou encore les caresses de la per-
déjà dépendants à la cocaïne, la prédi- sonne aimée ont le même effet et ne
lection pour la solution sucrée demeu- sont pas pour autant dénoncés comme
rait incontestable. Le même phénomène sources de dépendances pathologiques...
OBÉSITÉ
ET DIABÈTE :
LE PRIX À
PAYER
C’est l’explosion fulgurante du nombre
d’individus en surpoids observée au
cours des dernières décennies, tant chez
les enfants que chez les adultes, qui
sert de toile de fond au débat actuel
sur les effets du sucre sur la santé. Phé-
nomène autrefois très rare, l’obésité est
en effet devenue le problème de santé
publique de l’heure. Elle est même en
voie de supplanter le tabagisme comme
principale cause de mortalité préma-
turée dans la population de plusieurs
sociétés industrialisées. La liste des
complications médicales qui découlent
31
lentement mais inexorablement chez la glucose sanguin qui obstruent les petits
grande majorité des personnes atteintes. vaisseaux de l’œil et privent la rétine
Malgré les progrès importants réalisés d’oxygène.
au cours des dernières années dans La montée vertigineuse du nombre
notre compréhension des causes du dia- de cas de diabète observée dans les der-
bète de type 2, celui-ci progresse à un nières décennies s’explique en grande
rythme effréné. Selon les plus récentes partie par la fulgurante augmentation
statistiques, 10 à 14 % des femmes et de l’obésité dans notre société. Le dia-
14 à 18 % des hommes âgés de plus de bète de type 2 est en effet intimement
55 ans en sont atteints au Canada, dont lié à la prise de poids (fig. 2.1), surtout
près de 800 000 personnes au Québec lorsque l’excès de graisse s’accumule au
seulement. niveau abdominal, près des viscères. La
Plus inquiétant encore est le nombre graisse viscérale est reconnue pour être
limité de traitements potentiels pour la plus nocive pour notre santé métabo-
contrer la maladie et traiter ses com- lique et le principal facteur de risque du
plications majeures que sont les mala- diabète de type 2.
dies cardiaques et rénales, mais aussi Les travaux de mon éminent col-
les atteintes de l’œil. En effet, le dia- lègue Jean-Pierre Després, de l’Institut
bète est l’une des principales causes de cardiologie et de pneumologie de
de cécité, la rétinopathie diabétique Québec, montrent que la graisse abdo-
étant causée par les fortes quantités de minale est l’un des facteurs clés du
100
Risque de diabète de type 2 (%)
90
80
70
60
50
40
30
20
10
syndrome métabolique, lequel englobe dans les muscles et les tissus adipeux,
les principaux facteurs de risque du soit en favorisant son entreposage
diabète et des maladies cardiovascu- dans le foie. C’est ainsi que le taux de
laires, et joue un rôle prédominant sucre est maintenu à un niveau fonc-
dans le développement du diabète de tionnel. Lorsque les tissus deviennent
type 2. résistants à l’insuline, le taux de sucre
Un des quatre facteurs clés du syn- sanguin reste trop élevé et le pancréas
drome métabolique est la résistance n’a d’autre choix que d’augmenter la
à l’insuline, une anomalie dans les libération d’insuline pour forcer les
effets de cette hormone qui précède tissus à capter et à emmagasiner plus
l’apparition du diabète de type 2. Ce de sucre.
problème survient lorsque les organes Cette surproduction du pancréas
métaboliques ciblés par l’insuline (par peut compenser la résistance à l’insuline
exemple, les muscles et le foie) ne à moyen terme, mais elle ne fait mal-
répondent pas adéquatement à celle-ci. heureusement que camoufler la pré-
En temps normal, après un repas, sence d’un diabète en devenir qui se
l’insuline est sécrétée par le pancréas développe sournoisement, retardant
pour signaler au corps qu’il faut réduire ainsi l’inévitable diagnostic que posera
le sucre en circulation, soit en le captant le médecin des années plus tard, et
Î6
Î5
Risque relatif de mortalité
Î4
Î3
Î2
Î1
INDIVIDU SAIN
Muscles et foie sensibles à l’insuline
Pancréas
RÉSISTANCE À L’INSULINE
Muscles et foie ne répondent
pas correctement à l’insuline
DIABÈTE DE TYPE 2
Pancréas déficient, épuisé de palier
la résistance du foie et des muscles
Taux de sucre
Sous-production élevé, intervention
d’insuline médicale requise
Insuline Effet normal de l’insuline Effet de l’insuline déficien
LE DIABÈTE, MALADIE DU
SYSTÈME IMMUNITAIRE ?
Plus de
84 cm 114 cm 152 cm 152 cm
extrêmes, appuyées la plupart du temps ou nuancés. Pris entre les deux, les
sur des corrélations boiteuses qui ne médias, quant à eux, choisissent géné-
sont pas soutenues par l’évaluation ralement les messages les plus simples
rigoureuse des résultats scientifiques. et les plus frappants. Le résultat, c’est
Cette confusion est savamment entre- que le consommateur se retrouve bien
tenue par certains acteurs importants de souvent avec plus de questions que de
l’industrie alimentaire, dont les revenus réponses, enseveli par l’avalanche de
dépendent largement de la commercia- statistiques et d’affirmations contradic-
lisation d’aliments très sucrés, et qui toires qui polluent le nécessaire débat
excellent dans l’art de brouiller les de fond qu’il est en droit d’attendre sur
cartes. Elle met notamment de l’avant la question.
les études qui jugent que le sucre est Dans les chapitres qui vont suivre,
inoffensif (études qu’ils subventionnent je m’efforcerai donc de remettre les
bien souvent) en négligeant celles qui pendules à l’heure en éclairant par la
documentent ses effets négatifs. De science la question du rôle du sucre dans
même, le camp des « anti-sucre » est la montée fulgurante des cas d’obésité,
parfois tenté de citer des résultats de de diabète et de stéatose hépatique, ces
recherche inquiétants, mais qui mérite- fléaux du XXIe siècle.
raient souvent d’être mis en contexte
LE SUCRE
AJOUTÉ,
ENNEMI PUBLIC
NUMÉRO 1
Il y a une trentaine d’années, une guerre
alimentaire était déclarée. Pour sauver
notre santé, l’ennemi à éliminer était
alors le gras. Au fil du temps, de nom-
breuses études ont fortement ébranlé
ce dogme. Il a ainsi été révélé que cer-
tains gras avaient en fait des effets pro-
tecteurs sur la santé. De plus, alors
qu’on tentait de réduire au maximum
la présence du gras dans l’alimentation,
on compensait cet affront au goût par
l’ajout de grandes quantités de sel et
de sucre. A posteriori, on ne peut que
poser un regard dépité sur les données
47
LA GRANDE FAMILLE
DES GLUCIDES
famille des glucides, laquelle comprend nourrir les bonnes bactéries de l’intestin,
les sucres simples, les sucres complexes contribuant à l’établissement d’une
et les fibres alimentaires. flore intestinale diversifiée, essentielle
La teneur en glucides d’un pro- à une bonne santé. Il faut donc absolu-
duit peut être déterminée en consul- ment garder en tête que même un pro-
tant son étiquette nutritionnelle. Sous duit riche en glucides peut être excel-
la rubrique « glucides » on peut tout lent pour la santé s’il est riche en fibres.
d’abord découvrir la quantité de fibres À condition, bien entendu, de ne pas se
alimentaires. Toutes choses égales par laisser distraire par le contenu en fibres
ailleurs, une quantité de fibres élevée est du produit au point de ne pas voir ses
indicative d’un meilleur produit, car ce défauts… Mettre en avant les fibres est
type de glucides n’est pas digéré dans une tactique de marketing communé-
la partie supérieure de l’intestin ; en ment utilisée, par exemple, pour vendre
conséquence, les fibres arrivent intactes les « céréales bonbons », qui contiennent
dans la partie inférieure, le côlon, où des quantités effarantes d’autres sucres.
l’on retrouve une très grande activité Dans la famille des glucides com-
microbienne. Les fibres viennent ainsi plexes, on retrouve aussi les amidons,
Glucides
No
s n-d
ible ige
est sti
Dig ble
s
Simples Disaccharides
Galactose
REPRÉSENTENT
PRÈS DE 100 %
DES SUCRES
AJOUTÉS
famille des sucres : tous les sucres que d’autres produits transformés. Ces pro-
nous consommons sont soit des sucres duits sont un vecteur très important de
naturels, au sens où ils sont naturelle- sucre alimentaire, et leur omniprésence
ment présents dans les aliments, soit des nous pousse insidieusement à dépasser
sucres ajoutés. Cette distinction peut les limites d’une consommation de
sembler anodine à première vue. Pour- sucre jugée sécuritaire.
tant, elle est cruciale. Mais trop, c’est combien ? Les recom-
Lorsqu’on accuse le sucre d’être mandations des diverses agences de santé
néfaste pour la santé, on ne vise géné- nationales et internationales varient
ralement pas le sucre naturel des fruits grandement, ce qui ne nous aide en
et légumes, ou encore celui des céréales, rien à répondre à cette question impor-
mais plutôt celui qui est ajouté à la pré- tante. Aux États-Unis, par exemple, le
paration des boissons sucrées, des bis- Département de l’Agriculture (USDA)
cuits, des pains, des sauces et de bien recommande de ne pas dépasser la barre
450 40
400 35
350 30
300 25
Obésité (%)
1970 1974 1978 1982 1986 1990 1994 1998 2002 2006 2010
grimpé au même rythme que l’obésité nous aurions avantage à réduire notre
dans les dernières années, on sait que consommation de sucres libres, qui com-
l’Américain moyen en consomme beau- prennent les sucres ajoutés, mais aussi
coup trop, ce qui contribue très pro- ceux des jus de fruits (on y reviendra),
bablement à l’épidémie d’obésité, et à 5 % du total de notre apport calorique,
certainement encore plus au dévelop- notamment pour prévenir la carie den-
pement de certaines complications taire. Cette limite correspond à 25 g
métaboliques comme le diabète et par jour, ce qui est cette fois bien en
la stéato-hépatite. deçà du contenu d’une seule canette de
Au Canada, pour le moment du moins, cola (39 g) ! Il faudrait donc éviter de
la situation semble moins alarmante. s’imaginer qu’on est hors de danger dès
Selon une vaste enquête récente, nous lors qu’on respecte la limite des 10 %.
consommerions en moyenne les 12 cuil- En somme, même si les données
lerées réglementaires par jour. Tout juste scientifiques ne permettent pas de dire
la limite à ne pas dépasser. Mais voilà, que le sucre ajouté est responsable de
c’est une moyenne : une grande partie l’épidémie d’obésité, on sait qu’il est
de la population consomme donc trop une partie importante du problème,
de sucre ajouté. La question cruciale et qu’il a des conséquences autres sur
est ainsi de savoir de quel côté de cette la santé des gens que la seule prise
frontière vous vous situez. Difficile à de poids. Ce qui complique encore
dire, n’est-ce pas, quand les tableaux des les choses, c’est que depuis les années
valeurs nutritionnelles ne font aucune 1970, une importante mutation indus-
distinction entre les sucres ajoutés et les trielle est venue modifier la provenance
sucres naturellement présents dans les du sucre ajouté que nous consommons,
aliments ! et ce, à l’insu de nos papilles.
Il faut aussi noter que l’Organisation
mondiale de la santé (OMS) estime que
LE FRUCTOSE :
LE CAS
COMPLEXE
D’UN SUCRE
SIMPLE
Subtilement, depuis quelques décen-
nies, le sucre blanc tiré de la canne à
sucre ou de la betterave a été en très
grande partie remplacé par le sirop de
maïs à forte teneur en fructose, connu
aussi sous l’acronyme HFCS, de son
nom anglais high fructose corn syrup. Ce
dernier est de plus en plus souvent mis
au banc des accusés, si bien que certains
produits arborent maintenant fièrement
61
« FRUCTOSE-COLA » « GLUCOSE-COLA »
• Meilleur goût • Autant de calories que
• Faible indice glycémique la concurrence !
Un jeune sportif sud-africain sponsorisé par une célèbre marque de boisson sucrée.
glucose, quant à lui, pénètre dans les Qu’arrive-t-il donc à ce fructose qui
cellules de l’intestin par une tout autre séjourne dans le foie ? On estime qu’une
porte, un transporteur appelé GLUT2. large proportion sera transformée en
La « porte 2 » est beaucoup plus étanche glucose, mis en réserve sous forme de
et requiert une dépense d’énergie glycogène, ou remis en circulation pour
pour laisser entrer le glucose. Une fois subvenir aux besoins des autres organes
absorbé, le fructose passera par la veine du corps. Une partie pourra aussi se
porte pour atteindre directement le transformer en lactate, un sel d’acide
foie, où il s’accumulera presque entiè- lactique qui peut être utilisé comme
rement. C’est cette propriété du foie à substrat dans certaines conditions phy-
emprisonner le fructose qui explique siologiques. Enfin, une petite proportion
l’absence d’une montée de sucre du fructose sera convertie en lipides. Or,
dans le sang des testeurs de boissons cette transformation en graisse, bien que
au fructose. minime en théorie, est déterminante
Effet de l’insuline
dans la transformation + +++
de ce sucre en graisse
semble curieux qu’un comité d’éthique déclenche pas les signaux coupe-faim
ait approuvé la réalisation de cette auxquels on devrait s’attendre. Vers la
étude où des effets négatifs sur la santé fin d’un repas, un ensemble d’hormones,
des participants étaient clairement dont l’insuline, s’activent normale-
à prévoir. ment de concert pour signifier à notre
Je ferais un parallèle avec le vin. cerveau qu’il est temps de mettre un
Prendre deux à trois verres de vin terme à l’ingestion de calories. Il serait
par semaine ne vous donnera pas une donc possible, en théorie du moins, que
cirrhose, mais en abuser quotidienne- le fructose, contrairement au glucose,
ment, probablement. À vous donc de n’entraîne pas la réponse hormonale
voir si vous consommez du sucre ajouté qui nous suggère de poser la fourchette.
avec modération ou si vous êtes plutôt Mais les études scientifiques qui ont
du type sucrolique… mis à l’épreuve cette hypothèse n’ont
pu jusqu’à présent prouver que le fruc-
tose influence notre appétit différem-
FRUCTOSE ET APPÉTIT ment des autres sucres. Par ailleurs,
comme on l’a dit, il est bien rare que
Une autre particularité spécifique du l’on consomme du fructose sans qu’il ne
fructose est que sa consommation ne soit accompagné de glucose ou d’autres
BOISSON BOISSON
AU FRUCTOSE AU GLUCOSE
• + 3 livres • + 3 livres
• + résistance à l’insuline
• + mauvais lipides sanguins
• + graisse viscérale
(« mauvaise graisse »)
20 80
18 72
16 64
14 56
Cuillères à thé
Grammes
12 48
10 40
8 32
6 24
4 16
2 8
Source : USDA
SUCROSE HFCS
50 % 50 % 42 % 55 % 3%
libérer le goût, il faut encore couper le biscuits ! Bien que le HFCS se retrouve
« collier » et séparer les perles de glucose. dans la liste des ingrédients d’une mul-
Et comme on sait que le glucose n’a pas titude de produits alimentaires, il est
un pouvoir sucrant aussi prononcé que impossible de se procurer une bou-
le fructose, la transformation se pour- teille de HFCS pur à l’épicerie. Ce pro-
suit par la conversion chimique d’une duit semble réservé à l’industrie… Une
partie du glucose en fructose à l’aide exclusivité qui ne manque d’ailleurs pas
d’une enzyme nommée glucose isomé- d’alimenter le mystère et les soupçons
rase. Finalement, on ajuste la proportion qui l’entourent !
de glucose et de fructose aux concentra- En remplaçant le sucrose par le
tions désirées, habituellement à 55 % de HFCS, l’industrie alimentaire a donc
fructose. fait un choix entre deux sucres très
Une autre différence importante similaires… mais qui ne sont pas iden-
entre le sucre blanc et le HFCS réside tiques pour autant. Il est ainsi légitime
dans leur disponibilité : bonne chance à de se demander si la forme libre du fruc-
celui ou celle qui désirerait utiliser le tose contenu dans le HFCS pourrait être
HFCS dans sa prochaine fournée de plus néfaste que celle qui est liée au
Des échantillons de sirop de maïs sur le point d’être évalués par un panel de goûteurs
dans les laboratoires d’ADM, une compagnie agroalimentaire basée en Illinois.
glucose dans le sucre de table. Car une du sucre blanc sous une forme corres-
petite modification chimique, bien ano- pondant à une, trois ou quatre cannettes
dine en apparence, peut s’avérer catas- de soda. Aucune différence entre sucres
trophique pour la santé. On n’a qu’à liés et libres n’a alors été observée dans
penser au procédé d’hydrogénation des la gestion du glucose sanguin, ni dans
graisses découvert au début des années les lipides circulants dans le sang. Les
1900, la recette des « gras trans » indus- auteurs en ont conclu que le HFCS et le
triels (voir ci-contre). sucrose sont équivalents, et qu’on aurait
Afin de statuer sur l’importance phy- donc tort de blâmer l’industrie alimen-
siologique du lien chimique présent taire d’avoir favorisé le HFCS au détri-
dans le sucre blanc mais absent dans le ment du sucrose. Mais ce qui reste pour
HFCS, quelques études ont comparé moi le principal constat, encore une fois,
les effets des sucres avec ou sans liaison. c’est que la surconsommation de ces
L’une d’elles a ainsi observé que chez deux sucres est néfaste pour la santé, les
l'animal, un mélange fructose-glucose sujets qui avaient bu quotidiennement
libre induisait après 16 semaines un peu l’une ou l’autre des boissons ayant tous
plus de graisse dans le foie comparative- vu leur poids, leur tour de taille et leurs
ment au sucre blanc, où les molécules lipides sanguins augmenter. Peu importe
de fructose et de glucose sont liées. Par que l’on consomme du sucre blanc ou
contre, d’autres études n’ont pas vu de du HFCS, ce qui est limpide, c’est que
différence en termes de prise de poids le sucre ajouté est synonyme de graisse
ou de métabolisme du glucose entre des viscérale et de désordre métabolique.
animaux nourris avec l’un ou l’autre des Il est à mon avis prématuré de
deux agents sucrants, même après plu- conclure que la substitution graduelle
sieurs semaines. du sucre blanc par le HFCS dans
Chez l’humain, diverses études les produits alimentaires depuis les
n’ont observé aucune différence dans la années 1970 joue un rôle notable dans
consommation de breuvages contenant l’épidémie d’obésité. Une étude récente
du HFCS ou du sucre blanc en termes a tout de même piqué ma curiosité : des
de réponse glycémique, de lipides san- chercheurs ont rapporté que des souris
guins ou d’appétit. Afin de comparer ayant consommé un mélange fructose-
les effets à long terme des sucres ayant glucose sous forme libre (comme le
ou non la fameuse liaison moléculaire HFCS) avaient un taux de mortalité
glucose-fructose, une étude effectuée en significativement plus élevé et une
2014 (et subventionnée par les raffineurs moins bonne fertilité que les souris
de maïs) a suivi pendant 10 semaines exposées au sucre de table. Les effets
une centaine de sujets qui consom- néfastes n’étaient toutefois observés que
maient quotidiennement du HFCS ou chez les femelles, et d’autres expériences
seront requises pour déterminer les actuelle est que le sucre blanc et le
mécanismes en cause. D’autant plus que, HFCS font courir un risque équivalent
à l’instar d’autres équipes de chercheurs, pour la santé. L’excès de sucre, qu’il soit
les auteurs de cette étude ne sont pas sous l’une ou l’autre de ces deux formes,
parvenus à démontrer qu’une forme de est néfaste.
sucre était pire que l’autre au niveau Cependant, le HFCS étant une véri-
de la prise de poids et du métabolisme table aubaine pour l’industrie alimen-
du glucose. taire, il contribue très certainement à
Je ne rejette donc pas l’idée que la profusion d’aliments trop sucrés qui
le lien chimique entre le fructose ont envahi nos supermarchés dans les
et le glucose qu’on retrouve dans le dernières décennies. En cela, on peut
sucre de table, mais pas dans le HFCS, donc certainement dire que ce HFCS
puisse avoir un certain impact sur la est en partie responsable de l’épidémie
santé. Néanmoins, il manque d’études d’obésité, et des nombreuses complica-
précliniques et cliniques pour m’en tions métaboliques qui s’y rattachent.
convaincre vraiment, et ma position
DE
DANGEREUX
BONBONS
LIQUIDES
Un des aspects les plus curieux de
l’histoire des boissons gazeuses est que
ces produits ont été commercialisés à
l’origine comme remèdes. Prenons le
Dr Pepper, la plus vieille boisson gazeuse
en Amérique. Ce soda a été inventé par
Charles Alderton, un pharmacien qui
suggérait que son invention avait des
effets énergisants et tonifiants pour le
cerveau. Aujourd’hui, avec nos connais-
sances sur les effets néfastes de l’abus
de boissons gazeuses, on peut trouver
culotté d’accoler un titre médical à
un tel produit ! La root beer et le ginger
85
« Coca-Cola allège votre fardeau ». Réclame de 1907 qui vante les vertus anti-fatigue du soda du Dr Pemberton.
ale ont eux aussi eu des pharmaciens des médicaments, les boissons gazeuses
comme concepteurs, tout comme le sont au contraire l’archétype de
Coca-Cola, invention du Dr Pemberton. l’aliment industriel bourré de « calories
Désireux de trouver un remède pour vides », de véritables bonbons liquides
vaincre sa dépendance à la morphine, surchargés de sucre ajouté, mais tota-
qu’il utilisait pour apaiser la douleur de lement dépourvus de nutriments. Cela
ses blessures de guerre, Pemberton avait n’empêche pas la grande industrie ali-
eu l’idée de créer une boisson à base mentaire de tenter par tous les moyens
de cocaïne et d’extrait de noix de cola, d’attribuer des vertus aux liquides
deux produits reconnus pour leurs pro- sucrés qu’elle veut nous faire boire à
priétés stimulantes. toute heure de la journée : un grand café
Les connaissances nutritionnelles aromatisé pour se réveiller en route vers
modernes ont dissipé l’aura thérapeu- le bureau, une boisson « multivitaminée »
tique de ce type de boissons. Loin d’être pour compenser notre alimentation
420
380
KCal/J
340
300
260
1977-1978 1989-1991 1994-1998 2005-2006
prétendument carencée, une autre pré- d’association qui montrent tantôt que
paration électrolytique pour s’hydrater les grands consommateurs de boissons
au gymnase et, pourquoi pas, une petite sucrées sont plus à risque d’obésité, de
dose de boisson énergisante pour garder diabète et de maladies cardiovasculaires,
le rythme en soirée... tantôt que le problème n’est pas le sucre
L’offre et la consommation de bois- liquide… La vérité, c’est qu’il faut
sons sucrées sont aujourd’hui phéno- prendre les études d’association pour ce
ménales, avec ce résultat que nous ingé- qu’elles sont : d’excellents indices, mais
rons énormément de calories sous forme pas des preuves.
liquide, beaucoup plus qu’il y a 60 ans à Voyez par vous-même. Les courbes
peine, quand boire de l’eau (tisanes, thé de la figure 5.2 sont tirées des données
et café compris), était la principale solu- de l’USDA et représentent la consom-
tion pour se désaltérer. La consomma- mation de différents breuvages depuis
tion de boissons gazeuses a quintuplé 1970. En vous fondant sur ce graphique,
aux États-Unis depuis 1950, et l’apport comment expliqueriez-vous la hausse
quotidien en calories sous forme liquide de l’incidence de l’obésité ?
a presque doublé depuis la fin des Il y a fort à parier qu’au premier
années 1970. Ce changement profond coup d’œil, la montée de la courbe
dans nos habitudes alimentaires a fait bleue en ferait votre principal suspect.
en sorte que les boissons gazeuses et Pourtant, cette courbe est celle de la
leurs proches cousines sucrées (« énergi- consommation d’eau embouteillée !
santes », « sportives », « vitaminées », etc.) Est-ce que nous devrions conclure à un
sont responsables à elles seules de près lien de cause à effet avec l’obésité ? Bien
de 40 % de l’apport quotidien moyen en sûr que non ! Il faut éviter de sauter aux
sucre ajouté des Américains. Constatant conclusions lorsqu’on tente de démon-
ce tsunami de calories liquides, plusieurs trer un lien de causalité entre deux fac-
chercheurs en épidémiologie ont tenté teurs, surtout quand une corrélation est
d’en comprendre l’impact sur la santé. étudiée sur un grand nombre d’années,
Afin de me faire ma propre opinion, voire des décennies, pendant lesquelles
j’ai décidé d’analyser systématiquement plusieurs autres paramètres peuvent
les innombrables articles scientifiques changer.
sur le sujet. À la lumière des chiffres Cela dit, les grandes études épidé-
mentionnés plus haut, on pourrait croire miologiques publiées dans des journaux
d’emblée que la conclusion a été facile scientifiques reconnus ne s’en tiennent
à tirer. Eh bien non ! Le rôle des bois- pas seulement à montrer des corréla-
sons sucrées dans l’épidémie d’obésité tions entre deux facteurs. Elles tiennent
demeure controversé. Deux écoles de aussi compte de différents « facteurs
pensée s’affrontent à coups d’études confondants », c’est-à-dire, dans le cas
40
35
30
25
Gallons
20
15
10
Thé Café
Eau en bouteille Boissons diète
Boissons gazeuses Vrais jus de fruits
Boissons à saveur de fruit Alcool
« Tant de sucre va me donner le diabète ! » Des activistes mexicains manifestent contre les normes d’étiquetage
trop laxistes de leur pays. On estime que les ravages du diabète au Mexique font près de 100 000 morts par an.
qui nous occupe, de paramètres exté- autant chez les adultes que chez les
rieurs qui peuvent influencer la rela- enfants.
tion entre la consommation de sucre et L’effet néfaste des boissons sucrées
la propension à développer l’obésité et a été récemment confirmé par les résul-
le diabète : l’alimentation en général, tats d’une gigantesque étude publiée
le niveau de sédentarité et les facteurs dans la prestigieuse revue scientifique
socio-économiques, par exemple. Ces Circulation (Fig. 5.3). Fruit d’une col-
études réalisées par des centres univer- laboration sans précédent entre plu-
sitaires mondialement reconnus pour sieurs centres de recherche dans le
la rigueur de leurs travaux (le départe- monde qui ont recueilli les données de
ment de nutrition et d’épidémiologie plus de 600 000 personnes provenant
de Harvard, notamment) ont récem- de 51 pays, cette étude montre que la
ment démontré une association impor- consommation de boissons sucrées est,
tante et très nette entre la consomma- chaque année, directement responsable
tion des boissons sucrées et l’apparition de plus de 180 000 décès causés par les
de l’obésité et du diabète de type 2, grandes maladies chroniques associées
Les rayons d’un supermarché près de Los Angeles. En 2014, un projet de loi sans équivalent au pays a achoppé
en Californie : il aurait été obligatoire de faire figurer sur l’étiquetage des boissons sucrées une mise en garde
signalant que le sucre contribue à l’obésité, au diabète et à la carie dentaire.
par l’industrie alimentaire. Des ana- des nutritionnistes qui ont déclaré que
lyses montrent en effet une corréla- leurs canettes s’intégraient parfaitement
tion entre les études qui tendent à dis- à un régime équilibré… avouez qu’il y a
culper les boissons sucrées et la source de quoi être suspicieux !
industrielle de leur financement. Nous Mais les chercheurs qui incriminent
sommes donc clairement en droit de les boissons sucrées en conviennent
nous interroger sur la légitimité même eux-mêmes : les études d’association
de ces travaux et, bien entendu, de ou d’intervention doivent être utilisées
soupeser soigneusement leurs conclu- avec discernement. Ils fondent leur ver-
sions. Si l’on ajoute à cela les alléga- dict sur le fait que tous les éléments
tions selon lesquelles certains fabricants de preuve mis ensemble permettent
de boissons gazeuses auraient généreu- selon eux de conclure à la culpabilité
sement récompensé des chercheurs et de ces breuvages hors de tout doute
les dangers d’une carence en poly- de fruit pur. Ce n’est pas parce que le
phénols, en vitamines et en minéraux fruit est meilleur que le jus est néfaste !
l’emportent sur le risque de surcons- Avec le débat sur le sucre qui fait
ommation de sucres simples mais natu- rage actuellement, notamment la chasse
rels qu’on retrouve dans les jus de fruits aux sorcières lancée contre tout ce qui
purs. Même chose pour les breuvages contient du fructose, certains en viennent
de type smoothies, qui sont eux aussi même à craindre de trop manger de
mis sur la sellette malgré leur contenu fruits et à remettre en cause la nécessité
inaltéré en fibres parce que leur forme d’en consommer trois à cinq portions par
liquide n’aurait pas un effet coupe- jour. Sincèrement, je n’aurais jamais cru
faim aussi prononcé. Bien qu’il soit avoir un jour à défendre la place essen-
vraisemblable que mâcher une poignée tielle des fruits dans notre alimentation !
de bleuets, une autre de fraises et une D’innombrables études épidémiolo-
banane aura un impact plus grand sur giques, analyses systématiques et autres
notre sensation de satiété que de boire études d’intervention ont démontré
ces fruits sous une forme liquide, il avec éloquence que leur consommation
ne faut pas bouder notre plaisir ! Évi- réduit le risque de prendre du poids et
demment, croquer dans le fruit entier celui de développer plusieurs maladies
demeure la meilleure option. Ce n’est chroniques associées telles que le diabète,
cependant pas une raison valable pour les maladies cardiovasculaires et certains
occulter les bienfaits d’un verre de jus types de cancer.
LES SUCRES
NATURELS
NON RAFFINÉS
Nous savons maintenant que le HFCS
et le sucre de table sont quasi identiques
et qu’il est préférable d’en réduire la
consommation à un minimum, sachant
qu’ils représentent à eux seuls presque
tout le sucre ajouté dans notre alimen-
tation. On se souviendra aussi que ces
deux types de sucres sont les princi-
paux suspects dans notre enquête sur
les facteurs responsables de l’épidémie
d’obésité et de diabète. Malgré leur simi-
larité, les industries qui les fabriquent
se mènent une lutte acharnée, à grands
coups de batailles juridiques ; l’enjeu
de l’affrontement pour les fabri-
cants de sucrose est de pouvoir se tar-
guer d’offrir un produit « plus naturel »
et « meilleur pour la santé » que son
105
nés par césarienne (et n’ont donc pas l’équilibre de cette communauté bac-
été en contact avec la flore vaginale de térienne, comme c’est le cas pour le miel,
la mère) courent un plus grand risque peuvent donc avoir un impact indirect
de devenir obèses à l’âge adulte. Notre mais majeur pour lutter contre le déve-
relation avec le microbiote est donc clai- loppement de maladies métaboliques
rement essentielle au maintien de notre comme l’obésité et le diabète de type 2.
santé métabolique. Différentes études ont rapporté que
le miel pouvait favoriser la présence
de bactéries bénéfiques. D’une part,
LES BONNES BACTÉRIES l’activité bactéricide des constituants
RAFFOLENT DU MIEL du miel permet de combattre les patho-
gènes, ce qui favorise la croissance des
L’idée que le miel influence le syn- bactéries bénéfiques, notamment lac-
drome métabolique via le microbiote tiques (lactobacilles, bifidobactéries).
peut sembler saugrenue à première vue. Cet effet est d’autant plus marqué que
Jusqu’à tout récemment, j’aurais pro- le miel contient également des fructo-
bablement moi aussi balayé du revers oligosaccharides (FOS, pour faire court),
de la main une telle proposition. Après un groupe de sucres complexes dont les
tout, l’hypertension, l’hyperglycémie bactéries lactiques sont friandes. Des
et le mauvais cholestérol ne sont pas travaux réalisées chez les rongeurs ont
des maladies infectieuses ! Quel rap- montré que l’administration de miel
port pourrait-il y avoir entre elles et les augmentait la proportion de ces bonnes
bactéries de notre intestin ? Mais voilà : bactéries, alors que le sucrose n’a aucun
les travaux de recherche de la dernière effet sur elles.
décennie ont clairement montré que les En somme, les données disponibles
bactéries intestinales qui constituent indiquent que le miel possède bel et
le complexe écosystème connu sous bien un potentiel prébiotique qui lui
le nom de microbiome jouent un rôle permet de favoriser la croissance des
capital, notamment dans la gestion des bactéries bénéfiques. Cette propriété
sucres et le métabolisme des lipides. est importante, car les bactéries lac-
Le microbiome exerce aussi une tiques génèrent des acides gras à courtes
action déterminante sur le système chaînes, essentiels à l’intégrité de la
immunitaire en régulant la produc- fonction intestinale. Mentionnons aussi
tion de molécules inflammatoires dans qu’une alimentation qui favoriserait le
l’intestin, mais aussi dans la circula- miel comme source de sucre pourrait
tion sanguine, atteignant ainsi le tissu également avoir un effet de protection
adipeux, le foie, les muscles et même contre les méfaits sur le foie des myco-
le cerveau. Les agents qui favorisent toxines qui contaminent une proportion
LES SECRETS DU
SIROP D’ÉRABLE
10 %
1% 2% 1% 3% 3%
47 %
49 %
87 %
97 %
ÉRABLE
Acides phénoliques (13,2 %)
Flavanols (1,1 %)
Lignans (85,7 %)
3 500
3 000
2 500
AGAVE
Acides phénoliques (96,15 %) 2 000
ng/ml
Flavonols (3,74 %)
1 500
1 000
500
MIEL
Acides phénoliques (64,04 %) Sirop Miel Sirop
Flavonols (35,43 %) d’érable d’agave
PHYTOHORMONES ET DÉRIVÉS
POLYPHÉNOLS
« sinzibuckwud » par les Algonquins, un Louis XIV (le Roi Soleil étant grand
terme signifiant « tiré du bois », l’eau amateur de sucreries), puis dans la popu-
d’érable jouait un rôle primordial dans lation générale, comme en témoigne la
leur alimentation, puisqu’ils l’utilisaient vente de 30 000 livres de sucre d’érable
littéralement à toutes les sauces. Les produit sur l’île de Montréal en 1705.
Autochtones firent connaître cette « eau Aujourd’hui, le sirop d’érable québé-
qui fortifie » à Jacques Cartier et à ses cois représente environ 72 % de la pro-
compagnons fraîchement débarqués duction mondiale et est distribué dans
dans le Nouveau Monde, et les colons 54 pays, principalement aux États-Unis,
français ont par la suite perfectionné la mais aussi au Japon, qui importe à lui
technique de fabrication du sirop. seul 8 % de la production québécoise.
C’est au début du XVIIe siècle, grâce Ne soyez donc pas étonnés si lors d’une
à la débrouillardise d’Agathe de Repen- visite au pays du Soleil levant vous
tigny, une commerçante de Montréal, retrouvez cette saveur bien de chez
que le sucre d’érable fit son entrée nous dans un festin de sushis : les chefs
en France, tout d’abord à la cour de japonais aiment bien marier son goût à
O
HO
OH
O
OH
Québécol
UN POLYPHÉNOL
D’HONNEUR POUR
LE QUÉBEC
celui du poisson. Le Japon est en outre est bien connue comme étant béné-
un pays soucieux de son alimentation, et fique pour la santé du cœur en raison
ce concentré brut de la sève d’un arbre de son action antioxydante et de son
y est perçu comme une alternative plus impact positif sur les niveaux de choles-
saine aux sucres raffinés. térol. Cependant, des études montrent
Cette perception est d’ailleurs plei- que cet impact positif est encore plus
nement justifiée. Une portion de 60 ml prononcé pour les huiles d’olive vierges
représente 37 % de la valeur quoti- et extra-vierges, qui contiennent des
dienne recommandée de riboflavine quantités appréciables de polyphénols
(vitamine B2), 100 % de l’apport en présents dans le fruit à l’état brut. À ce
manganèse ainsi que des valeurs non jour, peu de travaux ont étudié les bien-
négligeables de plusieurs autres miné- faits métaboliques potentiels du sirop
raux : zinc (8 %), magnésium (7 %), d’érable. Malgré tout, les résultats pré-
calcium (5 %), potassium (5 %). Qui liminaires sont très prometteurs et sug-
plus est, le sirop d’érable est un produit gèrent qu’encore une fois, nous aurions
d’une grande complexité, qui contient tort de nous limiter à son contenu
aussi des acides aminés, des phytohor- en sucre (presque exclusivement du
mones et des oligosaccharides. sucrose) pour le juger.
Plus intéressant encore, la sève Les premiers indices d’un effet
d’érable ayant la double fonction de positif du sirop d’érable proviennent
nourrir et de protéger les cellules végé- d’études montrant que l’ajout de cet
tales, elle contient une grande variété de agent sucrant peut inhiber la prolifé-
polyphénols (lignanes, coumarines, stil- ration de cellules cancéreuses incu-
bènes), des molécules reconnues pour bées en laboratoire, notamment celles
avoir plusieurs effets positifs sur les cel- du poumon, du côlon, du sein, de la
lules humaines. Des études récentes ont prostate et du cerveau. Quoique dignes
repéré la présence de quelque 63 com- d’intérêt, ces résultats ne signifient évi-
posés polyphénoliques et autres dans le demment pas que la consommation de
sirop d’érable, dont l’un, bien particu- sirop d’érable puisse prévenir ou guérir
lier, qui a de quoi nous rendre fiers (voir le cancer. Les concentrations de molé-
ci-contre) ! cules potentiellement anticancéreuses
La présence de polyphénols est susceptibles d’atteindre une tumeur
d’autant plus intéressante que des études après une consommation normale de
réalisées auprès d’autres produits dérivés sirop d’érable sont bien loin de celles
de végétaux indiquent que ces molé- qui sont efficaces sur des cellules isolées
cules peuvent augmenter les bénéfices en laboratoire. Néanmoins, ces travaux
associés à la consommation de certains ont permis de révéler la bioactivité de
aliments. L’huile d’olive, par exemple, certaines molécules présentes dans ce
pur. (Voir les taches blanches sur les sirop d’érable sur la santé métabolique
coupes de foie de la figure 6.2). en est encore à ses premiers balbutie-
Cet effet du sirop d’érable sur le ments et il est trop tôt pour conclure
foie a aussi été rapporté par un second que les mêmes effets seront observables
groupe de chercheurs japonais, qui ont chez l’humain. Il est toutefois intéres-
eux aussi noté qu’une alimentation sant de noter qu’une récente découverte
contenant du sirop d’érable plutôt que réalisée à l’aide d’un extrait concentré
du sucrose donnait aux rats une meil- de polyphénols de sirop d’érable pour-
leure fonction hépatique, et ce, en seu- rait, une fois de plus, nous mettre sur
lement 11 jours. Ces résultats suggèrent la piste du microbiote. Une chercheure
que la substitution du sucrose ajouté par de Montréal a en effet démontré qu’en
du sirop d’érable pourrait diminuer le mettant un tel extrait en présence de
risque de développer la stéato-hépatite bactéries résistantes aux antibiotiques,
chez les grands consommateurs de sucre ces dernières perdaient le gène qui les
ajouté. protégeait contre cette classe de médi-
La compréhension des mécanismes caments. Le sirop d’érable pourrait
impliqués dans les effets bénéfiques du donc s’avérer un allié précieux pour
LES FAUX
SUCRES :
MIRACLE OU
MIRAGE ?
Comme les effets hallucinogènes du
LSD, découverts par un scientifique
qui avait négligé de porter ses gants
de protection, l’identification du pre-
mier « faux sucre » a elle aussi été le
résultat de l’imprudence d’un cher-
cheur. Au XIXe siècle, un chimiste du
nom de Constantin Fahlberg qui tra-
vaillait à l’Université Johns Hopkins de
Baltimore oublia un jour de se laver les
mains avant de prendre son dîner, et
fut très étonné du goût anormalement
sucré de son pain. Curieux de savoir
d’où provenait cette saveur, il retourna
125
sur-le-champ à son laboratoire pour blanc, seule une toute petite quantité est
goûter à ce qu’il venait de manipuler. nécessaire pour faire réagir nos papilles.
C’est ainsi qu’il découvrit le sulfinide On les retrouve dans plus de 6 000
benzoïque, un dérivé de la houille de produits – desserts, céréales, gomme
charbon, mieux connu sous le nom de à mâcher – ainsi que dans plusieurs
saccharine. Le « sucre de houille » fut produits pharmaceutiques, comme les
presque immédiatement commercialisé, pastilles et les sirops. Compte tenu de
mais son usage devint courant durant la la mauvaise réputation des boissons
Seconde Guerre mondiale, à cause du gazeuses, il n’est guère surprenant de
rationnement du véritable sucre. constater qu’elles constituent le prin-
Ce premier édulcorant artificiel a été cipal marché des édulcorants artificiels
suivi de bien d’autres, et aujourd’hui, (fig. 7.1). À San Francisco, l’Université
stimulé entre autres par les campagnes de Californie a même lancé récemment
anti-sucre et contre l’obésité, le marché un programme pour éliminer de son
des faux sucres a le vent dans les voiles. campus les boissons sucrées au profit
Ceux-ci ayant un pouvoir sucrant de des boissons « diète ». De telles initiatives
100 à 1000 fois plus intense que le sucre ont contribué à ce que la proportion
600
500
Cannettes par personne
400
300
200
100
de consommateurs de bois-
sons diète passe de 21 à 25 %
chez les adultes, et double
chez les enfants dans la der-
nière décennie !
Si on vous demandait
de nommer les édulco-
rants autorisés au Canada,
l’aspartame, la saccharine
et le sucralose vous vien-
draient probablement à
l’esprit. En réalité, la liste
comprend plusieurs autres
molécules. Si vous ne prêtez
pas une attention très par-
ticulière à la liste des ingré-
dients des produits que vous
consommez, il est donc fort
possible que vous en ingurgi- INGRÉDIENTS : acacia, acésulfame de potassium, D&C
tiez sans le savoir. Tentez, par jaune nº 10, néotame, gomme de base, oxyde de magné-
exemple, d’identifier les faux sium, huile de menthe poivrée, polysorbate, carbonate de
sucres qui se dissimulent sodium, dioxyde de titane, xylitol.
parmi les ingrédients de la
gomme à mâcher ci-contre.
Il y en a trois : l’acésulfame de potas- en calories ». Mais le seul fait que
sium, le néotame et le xylitol. Au Santé Canada leur accorde sa bénédic-
Canada, les faux sucres autorisés dans tion nous permet-il de les consommer
les produits alimentaires en fonction de aveuglément ?
doses journalières maximales sont les
polyols (dont le xylitol), la saccharine,
l’aspartame, l’acésulfame de potassium, MÉFIANCE, MÉFIANCE...
le néotame, les glycosides de stéviol,
l’extrait de fruit de moines, le sucralose Il faut admettre qu’il est difficile de
et la thaumatine. Les doses permises parler des faux sucres sans éveiller les
étant assez élevées, vous ne devriez soupçons. D’abord, leur nature intrin-
normalement pas dépasser cette limite, sèque y contribue. Des molécules éla-
même si vous êtes un adepte des pro- borées ou purifiées par des chimistes
duits étiquetés « sans sucre » ou « réduits possédant un pouvoir sucrant parfois
des centaines de fois plus fort que celui Twin et Sweet’n Low, a été suspecté
du sucre, et souvent, sans la moindre d’augmenter les risques du cancer de
calorie, ça semble trop beau pour être la vessie chez le rat et de provoquer
vrai. Il faut dire aussi qu’au fil des ans, l’atrophie des testicules chez la souris.
des accusations portées contre nombre Toutefois, d’autres études chez le
de ces molécules ont obligé les instances singe, où de fortes doses quotidiennes
de santé à en réévaluer constamment ont été administrées pendant de nom-
l’innocuité, ce qui n’a rien pour nous breuses années, ont contredit les pre-
rassurer. mières études. C’est ainsi que désor-
Le cas de la saccharine est un bon mais, il vous est possible d’opter pour le
exemple. Dans les années 1970, des petit sachet rose pour sucrer votre café.
études réalisées chez le rat ont démontré Seule contrainte, il vous faudra d’abord
que ce faux sucre pouvait être à l’origine « en parler à votre médecin », comme
de cancers. Conséquemment, le Canada doivent l’indiquer les petits caractères
l’a retiré de la liste des additifs autorisés au dos du sachet…
au pays. Et puis, d’autres études ont sou- Mais dans toute cette grande famille,
tenu l’idée que les effets observés chez le mouton noir le plus connu reste
l’animal ne pouvaient pas être transpo- l’aspartame. C’est d’ailleurs pourquoi
sables chez l’humain, ce qui a convaincu certaines compagnies affichent désor-
Santé Canada de réintroduire le produit mais sur leurs produits vedettes la men-
en 2014. Toutefois, Santé Canada exige tion « sans aspartame ». Pour éviter de
que, lorsque la saccharine est utilisée tomber dans le piège des accusations
comme édulcorant de table, donc sous sa non fondées – car elles abondent sur
forme pure et non incorporée à un pro- l’internet –, j’ai entrepris de regarder
duit alimentaire, on doit y mentionner de plus près les risques réels possi-
que « l’utilisation continue de la saccha- blement associés à la consommation
rine peut être néfaste pour la santé et d’aspartame. Le produit étant main-
[que] ce produit ne doit pas être uti- tenant considéré comme sans danger
lisé par les femmes enceintes, sauf sur par la FDA, Santé Canada, l’EFSA
avis d’un médecin. » Encore là, rien pour (l’Autorité européenne de sécurité des
nous mettre l’eau à la bouche… aliments) et l’OMS, j’ai cru que l’affaire
Le cyclamate, qui fut lui aussi serait vite réglée. Erreur ! La controverse
découvert par un scientifique impru- autour de l’aspartame semble plus vive
dent (voir ci-contre), a aussi contribué que jamais.
au climat de méfiance qui entoure les C’est en 1965 que James Schlatter,
faux sucres. Ce produit qu’on retrouve encore un chimiste imprudent, a décou-
dans différentes formulations com- vert l’aspartame dans le cadre de ses tra-
merciales, telles que Sucaryl, Sugar vaux pour la compagnie pharmaceutique
Searle. Schlatter fut d’abord incrédule des études récentes ont remis le feu aux
en constatant par accident le goût sucré poudres. Le groupe du cancérologue
de ce simple dipeptide composé de deux Morando Soffritti, de l’Institut Ramaz
acides aminés, soit l’acide aspartique et zini, en Italie, a réalisé une colossale
la phénylalanine. En effet, les acides étude chez plus d’un millier de rats aux-
aminés, qui sont les composantes de quels on a administré quotidiennement
base de protéines, sont plutôt reconnus des doses d’aspartame comparables ou
pour leur amertume. L’aspartame a été inférieures à celles jugées sécuritaires
approuvé par la FDA en 1974, mais pour l’humain. L’expérience a été
sa mise en marché fut suspendue à la menée durant la vie entière des animaux,
suite de sérieuses mises en gardes du jusqu’à leur mort naturelle. On a observé
docteur John Olney, un professeur spé- que les lymphomes, les leucémies et les
cialisé dans l’étude des effets néfastes tumeurs malignes du pelvis et des nerfs
de surdoses d’acides aminés. Ce der- périphériques étaient significativement
nier estimait que l’aspartame pouvait plus nombreuses parmi les animaux qui
causer des dysfonctions endocriniennes avaient reçu de l’aspartame que dans
et neurologiques, et même des tumeurs les groupes témoins. Ces constats ont
au cerveau. une certaine résonance chez l’humain,
Après plusieurs années de débats et puisqu’une étude d’association sur une
d’études analysées par les experts de large cohorte a observé que les risques
la FDA, l’interdiction fut finalement de myélome multiple et de lymphomes
levée, principalement sur la base que non hodgkiniens étaient plus impor-
les concentrations d’acides aminés ingé- tants chez les hommes qui consom-
rées sous forme d’aspartame étaient de ment plus d’une boisson « diète » par
loin inférieures à celles que le Dr Olney jour. Il est cependant important de
estimait délétères. En 1981, la voie était noter qu’aucun risque chez la femme
donc libre pour la commercialisation de n’a été observé et que d’autres études
l’aspartame, au grand dam de ses oppo- animales n’ont pas relevé de lien entre
sants, mais au grand bonheur de Donald l’aspartame et le développement
Rumsfeld ! En effet, l’ex-secrétaire à la de cancers.
Défense du président Ford, qui était Le D r Soffritti jouit d’une excel-
membre de la garde rapprochée de lente réputation et les travaux de
Ronald Reagan, était alors aussi PDG l’Institut Ramazzini ont permis par le
du groupe Searle, un double emploi qui passé de découvrir le potentiel can-
a fait couler beaucoup d’encre chez les cérogène de plusieurs substances de
opposants de l’aspartame… la vie courante. Néanmoins, les diffé-
Mais, alors qu’on croyait cette polé- rentes instances en santé (EFSA, FDA,
mique tombée aux oubliettes, voilà que Santé Canada) ont décidé de ne pas les
Le Dr Morando Soffritti a dirigé dans les années 2000 une vaste étude avec la Fondation Ramazzini pour véri-
fier les possibles effets cancérogènes de l’aspartame sur les rongeurs. Il est arrivé à la conclusion que ces effets
étaient incontestables.
s’accumuler, il faut
80 se méfier des conclu-
60 sions précipitées ! Il
40
fallait notamment
considérer que les
20
consommateurs de
1965 1977 1990 1999 2001 2003
faux sucres mangent
généralement moins
bien, et sont donc
Source : Mattes et al.
35
1980 : arrivée massive
30 des édulcorants artificiels
25
Prévalence (%)
20
15
10
plus susceptibles d’accumuler les kilos Ainsi, on peut se sentir moins coupable
en trop. Il ne faut pas oublier que les per- de céder à la tentation en passant devant
sonnes qui ont une propension à prendre un fast-food si l’on sait qu’une boisson
du poids sont les mêmes qui seront ten- « diète » accompagnera notre repas. Ou
tées de consommer les produits « diète ». encore, on peut succomber plus facile-
Certaines études ont justement pris soin ment à l’appel d’une brioche à la can-
de corriger leurs analyses en fonction de nelle toute chaude parce qu’on choisi
l’indice de masse corporelle des partici- du cyclamate pour sucrer notre café…
pants afin de limiter autant que possible Mais notre manque de discipline
ce biais. La conclusion n’a pas changé : la ne serait pas la seule explication de
consommation de faux sucres était asso- l’inefficacité des faux sucres. On peut
ciée à une plus grande prise de poids. tromper sa conscience, mais le corps, lui,
Les études épidémiologiques ne sont n’est jamais dupe ! Regardons de plus
pas des pièces à conviction, mais plutôt près les réactions de notre organisme à
d’excellents indices, il faut donc pousser ces molécules.
l’investigation plus loin. C’est ainsi que Si les édulcorants ont un goût sucré,
plusieurs études d’intervention ont été c’est forcément qu’ils se lient aux récep-
entreprises pour résoudre l’énigme des teurs sur notre langue qui ont pour fonc-
édulcorants accusés de faire grossir. Les tion de nous faire apprécier cette saveur.
résultats obtenus sont mitigés. Alors Quand ils sont activés, ces récepteurs de
que certaines équipes ont pu observer goût envoient au cerveau l’information
une légère perte de poids à la suite de qui nous permet de savourer pleine-
consommation de faux sucres, d’autres ment notre brioche. Pour curieux que
n’ont vu aucune différence. Si je consi- cela puisse paraître, ces récepteurs de
dére l’ensemble des indices disponibles, goût ne sont pas limités à nos papilles
je conclurais que les produits « diète » gustatives. On en retrouve dans nos
ne font peut-être pas engraisser, mais poumons, dans nos cellules adipeuses,
qu’il y a peu de chance qu’ils fassent dans notre pancréas et sur la surface
maigrir… de notre muqueuse intestinale ! Sans
Plusieurs chercheurs ont tenté de comprendre le rôle exact de tous ces
comprendre comment ces produits récepteurs disséminés dans notre corps,
pouvaient nous faire grossir autant on sait néanmoins que ceux de notre
que leur version originale calorique. intestin relaient des informations à notre
La première explication serait le fac- organisme afin d’assurer que nous puis-
teur psychologique : sans en être tou- sions bien gérer les aliments qu’on vient
jours conscients, les gens qui consom- de consommer. Comme on s’en doute,
ment des produits dits légers auraient les récepteurs de goût de l’intestin
tendance à s’accorder des récompenses. n’enverront pas le signal de la saveur
de saccharine reconnue comme accep- tarder leur opinion sur l’innocuité des
table par la FDA. Au terme d’une faux sucres. Pour ma part, étant de plus
semaine seulement, quatre d’entre eux en plus convaincu du rôle crucial d’un
avaient vu leur métabolisme du glucose microbiote équilibré pour le maintien
et les bactéries de leur intestin altérés… d’une santé optimale, il va de soi que
Les trois autres s’en sortirent indemnes : je vous invite à prendre très au sérieux
pas de perturbations métaboliques et un le bien-être de vos bactéries intestinales
microbiote épargné par les effets délé- et donc à ne pas abuser des faux sucres.
tères de l’édulcorant. Les auteurs de Même si dans les prochaines années
l’étude poussèrent l’audace encore plus la recherche démontrait hors de tout
loin. Ils procédèrent à une transplanta- doute les risques associés aux faux
tion fécale de l’homme vers la souris ! sucres actuellement disponibles, il ne
Les rongeurs ainsi contaminés par le faudra pas s’attendre à ce que l’industrie
microbiote des sujets dont le métabo- laisse tomber un filon aussi lucratif…
lisme avait été débalancé par la saccha- Et en fait, c’est plutôt souhaitable, en
rine héritèrent de la même perturbation autant que des progrès puissent être réa-
de leur glycémie. À l’inverse, les souris lisés avec la collaboration rigoureuse des
ayant reçu le microbiote des sujets qui chercheurs pour offrir éventuellement
n’avaient pas été affectés par le faux des édulcorants non caloriques sans
sucre demeurèrent dans un état stable. aucun danger pour notre santé.
Cette étude révolutionnaire nous
amène à nous interroger sur une des
définitions classiques des maladies SUCRER SANS SUCRE :
métaboliques comme le diabète, celle AUTRES PISTES
qui nous fait les considérer comme
des maladies non transmissibles. Bien À ce chapitre, le stevia pourrait être
que le diabète ne soit pas une maladie prometteur. Notamment parce que la
infectieuse à proprement parler, il n’en plante de stévia, ou chanvre d’eau, est
demeure pas moins que ces travaux consommée comme édulcorant depuis
suggèrent qu’il peut se transmettre par des siècles par les Guaranis du Brésil
l’entremise de bactéries, ce qui remet en et du Paraguay, il plane autour de ce
question un dogme profondément ancré faux sucre une aura « naturelle » rassu-
dans le monde médical ! rante. Sachez cependant que, même si
Si, au terme d’études cliniques sup- une canette arbore fièrement une feuille
plémentaires, ces effets pernicieux de d’un vert vibrant évoquant ses origines
la saccharine et d’autres édulcorants végétales, ce n’est dans les faits qu’une
artificiels se confirment, il faudra que classe de molécules purifiées, les glyco-
les instances de santé réévaluent sans sides de stéviol, qui est ajoutée à titre
d’édulcorant. On est donc loin de la même le bilan lipidique. Il faut donc lui
plante intacte. Mais si le stevia que accorder, pour le moment du moins, le
nous consommons n’est donc pas aussi bénéfice du doute.
naturel qu’on voudrait nous le laisser Beaucoup moins connus, les « sucres
croire, il semble bien que sa consom- rares » font aussi l’objet de recherches
mation ne soit pas associée à une aug- afin de trouver une relève aux faux
mentation du risque de cancer. Il y a sucres actuels. Même si, pour des rai-
bien, comme on l’a mentionné plus sons d’ordre économique, on les produit
haut, une étude qui démontre que chez en laboratoire, ce ne sont pas à propre-
le rat, le stevia occasionne une prise de ment parler des faux sucres puisqu’ils
poids plus importante que le sucre blanc, sont présents en très faibles concentra-
mais tant que le phénomène n’est pas tions dans différents aliments. Le taga-
confirmé chez l’humain, il est préma- tose, par exemple, est approuvé par la
turé de s’en alarmer. Les études tendent FDA depuis 2003 et se retrouve dans le
plutôt à démontrer des effets bénéfiques lait. Il possède un pouvoir sucrant simi-
du stevia. On a ainsi rapporté que sa laire à celui du sucre, mais il est beau-
consommation pouvait réduire la pres- coup moins calorique. Quelques essais
sion artérielle, améliorer la glycémie et cliniques limités mais prometteurs ont
147
mauvais, mais tout définir en termes de boissons sucrées ne sont que la pointe
grammes de sucre et de calories relève de l’iceberg.
d’un obscurantisme nutritionnel qui ne La surconsommation de sucre ajouté
mène nulle part. est le symptôme du problème beaucoup
Quelles solutions s’offrent à nous en plus large d’une alimentation trop axée
tant que société ? Devrions-nous suivre sur les produits transformés. Faire porter
l’exemple de la France et du Mexique, au sucre tout le blâme pour l’épidémie
qui ont instauré une taxe sur les bois- grandissante d’obésité et de diabète, c’est
sons sucrées ? Au Mexique, au terme de chercher un bouc émissaire à un mode
la première année d’application de cette de vie malsain. L’excès de sucre est un
taxe, la vente de boissons sucrées avait coupable, oui, mais ce n’est pas une
chuté de 6 % au profit de produits sans raison de négliger le rôle d’autres fac-
sucre. Pour encourageant que puisse teurs importants comme l’excès de gras
paraître ce résultat, je doute fort que saturés, le manque de fibres dans notre
la solution mexicaine soit une panacée. alimentation et, bien entendu, la séden-
Bien entendu, pour les raisons que tarité. Je préfère l’éducation et la promo-
j’ai énoncées, il faut faire particulière- tion de bonnes habitudes de vie à la voie
ment attention à ce qu’on boit, mais les fiscale pour induire des changements en
pas emboîter le pas aux pays de plus en industriels, pourraient bientôt être incri-
plus nombreux qui imposent un code minés dans l’implacable progression de
de couleurs sur l’emballage des produits, l’obésité et des maladies associées. Et
indiquant un contenu faible, raisonnable c’est sans compter qu’en plus de la
ou élevé en sucre ajouté ? sédentarité, d’autres aspects du mode
On a vu par ailleurs que l’OMS de vie moderne comme la pollution, le
affirme que nous aurions tous avan- manque de sommeil ou la prescription
tage à réduire à 5 % de notre apport inappropriée d’antibiotiques sont aussi
calorique total celui qui provient des pointés du doigt. La santé est un combat
sucres libres, dans une définition qui qu’on doit mener sur plusieurs fronts,
inclut, rappelons-le, les sucres ajoutés, durant toute notre vie.
mais aussi ceux que contiennent les jus Les méthodes absolutistes et sim-
de fruits purs. Cette proportion repré- plistes (pas de ceci, seulement cela,
sente quotidiennement environ 25 g de toujours) ne sont pas la solution. Pour
sucre. Sachant qu’une demi-tasse de nous aider à faire le tri dans l’avalanche
jus de pruneau en contient 24 g, com- actuelle d’informations controversées, et
ment penser que cette recommandation souvent peu documentées, sur le sucre,
pourrait être suivie par la majorité de il faut encourager les professionnels de
la population ? Le danger des conseils la santé et les chercheurs experts en
irréalistes, c’est qu’au final, ils font en nutrition à transmettre leurs connais-
sorte que les gens se découragent et se sances. C’est ainsi que l’on donnera au
désintéressent du problème. public les outils nécessaires pour mieux
Gardons aussi en tête que d’autres évaluer sa consommation réelle de sucre,
éléments de notre alimentation, tels et particulièrement de sucres ajoutés,
que les colorants, émulsifiants et autres ainsi que les risques qui y sont associés.
additifs que nous consommons dans J’espère humblement que cet ouvrage a
de nombreux produits alimentaires pu y contribuer.
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CRÉDITS ICONOGRAPHIQUES
PRÉFACE .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
AVANT-PROPOS .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
À la recherche du sucre .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
La ruée vers l’or blanc .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
Un monde fou du sucre .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
Le sucre est-il une drogue ? .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
VERDICT .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147
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