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Art La saga tourmentée de l’exceptionnelle
collection de Renault
Europe de l’Est :
Le palais de la Culture et de la Science, offert par l’URSS de Staline à la Pologne communiste, en plein centre de Varsovie, est désormais cerné par les gratte-ciel. Photo Shutterstock et Guillaume Onimus
vingt ans de miracle
économique
l Les dix pays qui ont rejoint l’UE en 2004 ont connu une croissance
hors du commun. l Leur succès a accéléré la désindustrialisation
de la France. l Ils constituent désormais une tête de pont
pour les groupes chinois. // PAGES 6-7
analyses
Détectez
les opportunités Le secret social
de votre marché.
de la Silicon Valley
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vos équipes
au temps d’avance. Par Jean-Marc Vittori
Découvrez nos ofres Entreprises :
« Libérez nos camarades ! » Ce slo-
abo-entreprises.lesechos.fr gan va bientôt être entendu aux
Etats-Unis. Enfermés dans une
cage juridique, des dizaines de
millions de salariés améri-
cains devraient bientôt être libé-
M 00104 -430 - F:3,60
rés. L’Autorité de la concurrence
veut effectivement permettre aux
salariés de changer plus facile-
ment d’employeur. Un système
déjà en place en Californie, où il a
contribué aux prouesses de la
ISSN0153.4831 117e ANNÉE
NUMÉRO 24202 36 PAGES Silicon Valley. Cette petite révolu-
Antilles-Réunion 4,70 €. Belgique 4,20 €. tion pourrait renforcer le lea-
Espagne 5,10 €. Luxembourg 4,40 €.
Maroc 44 DH. Suisse 6,60 FS. Tunisie 9,8 TND.
dership américain. Et rappelle
aux Européens qu’ils doivent, eux
aussi, se poser des questions sur
des entraves néfastes. // PAGE 10
// P. 17 ET L’ENQUÊTE P. 13
Au Brésil, or noir
ou or vert ?
Par Thierry Ogier
Santé, énergie : la
révolution du laser
Par Frank Niedercorn
Iran-Russie, le para-
doxe des sanctions
Par Pascal Perri
Les racines écologi-
ques de la culture
par Etienne Grass
// PAGES 9 À 12
MARDI 30 AVRIL 2024
Vélo Les constructeurs européens divisés
sur les barrières anti-chinoises // PP. 16-17
Nucléaire : pourquoi
EDF persévère
à l’international
ÉNERGIE Le groupe public dépose à
Prague ce mardi son offre pour la
conception et la construction d’un à
quatre réacteurs nucléaires de type
EPR de 1.200 mégawatts. En cas de
succès, ce projet d’ampleur viendrait
s’ajouter à la construction des
six EPR2 déjà prévus en France et aux
deux réacteurs toujours envisagés au
Royaume-Uni pour remplacer les
centrales vieillissantes. En compé-
tition avec le groupe coréen KHNP,
EDF s’engage cette fois à ne pas
apporter de financement français à
ce projet. L’énergéticien tricolore, qui
souhaite « répéter le geste » d’un chan-
tier nucléaire le plus souvent possi-
ble, devrait connaître rapidement le
CTK/Abaca
résultat des courses. Le gouverne-
ment tchèque doit se prononcer cet
été sur le candidat retenu. // PAGE 18
Sciences Po : le
risque de contagion
ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
L’occupation de la Sorbonne, lundi,
par une cinquantaine d’étudiants,
n’aura duré que quelques heures.
Mais l’exécutif est sous pression et
inquiet du risque de contagion dans
les universités, après la mobilisa-
tion propalestinienne à Sciences Po
la semaine dernière. Le modèle de
Houpline-Renard/Sipa
l’établissement, qui lance cette
semaine la procédure de sélection
de sa future direction, est sous le feu
des critiques. // PAGE 2
ET L’ÉDITORIAL DE JEAN-
FRANCIS PÉCRESSE PAGE 14
Et si vos process de recrutement
gagnaient en efficacité ?
Intelligence
artificielle :
les banques
Serviceplan - Crédit photo : iStock - *Ensemble, ouvrons les possibles.
américaines
à l’offensive
BANQUE Les géants de Wall Street
multiplient les projets et les inves-
tissements dans le domaine de l’IA.
Pour Jamie Dimon, le patron de JP Les soluions cloud RH
Morgan, l’intelligence artificielle de Cegid ofrent de nouvelles
est une révolution aussi impor- opporunités pour améliorer
tante que la machine à vapeur. Ses l’expérience de travail,
concurrents fourbissent leurs pour une performance durable
armes, à l’image de Morgan Stanley de l’entreprise.
qui voit dans la France un vivier de www.cegid.com
compétences, alors que la guerre
des talents fait rage. L’avènement
de l’IA se lit aussi sur le front de la
réglementation : partout dans le
monde, les gendarmes de la
finance veulent encadrer son
usage. Les banques américaines Together, make more possible
assurent déjà bien maîtriser ce
genre de risques. // PAGE 26
FRANCE
Gaza : après Sciences Po, l’exécutif veut
éviter l’embrasement des universités
l Alors que le processus de sélection de la direction de Sciences Po commence, l’administrateur provisoire,
avec le soutien du gouvernement, prépare un débat pour calmer le jeu et éviter une contagion de la contestation.
l La police est intervenue lundi après-midi à la Sorbonne pour évacuer une cinquantaine de militants propalestiniens.
ENSEIGNEMENT
SUPÉRIEUR
Marie-Christine Corbier
Le top départ du dépôt des candida-
tures à la tête de Sciences Po Paris
débute cette semaine dans les pires
conditions. L’établissement est en
pleine effervescence, après la mobi-
lisation propalestinienne tendue de
la semaine dernière, qui s’est
conclue par un accord entre les
manifestants et la direction. L’appel
à candidatures doit être publié jeudi
au « Journal officiel ». Les dossiers
seront acceptés jusqu’au 30 juin
avant des auditions prévues en sep-
tembre. Le contexte actuel aura évi-
demment des conséquences pour
la prochaine direction.
Mais tous les regards se tournent
déjà ailleurs, vers le risque d’embra-
sement dans les universités alors
que la police est intervenue à la Sor-
b onne lundi après-midi, à la
demande de Matignon, pour éva-
cuer une cinquantaine de militants
qui avaient installé des tentes dans
la cour du bâtiment historique.
« Jamais de droit
au blocage »
La candidate LFI aux élections
européennes Rima Hassan, porte-
étendard de la cause palestinienne
en France, qui avait appelé vendredi
au « soulèvement » à Sciences Po, a
encouragé le Comité Inter Scien-
ces Po, qui réunit tous les instituts
d’études politiques de France,
« ainsi que toutes les universités de
France à se mobiliser ». L’Union étu-
diante a appelé samedi, « à Sciences
Po comme partout en France, à se
soulever contre la répression et pour
la paix à Gaza ». Dimanche, la
patronne des députés LFI, Mathilde
Panot, a indiqué sur RTL que son
parti « soutiendra » d’éventuels nou-
veaux blocages. Et Manuel Bom-
pard, le leader de LFI, a souhaité
lundi sur Public Sénat que les mobi-
lisations pour Gaza « prennent de
l’ampleur » dans les universités.
Dans ce contexte, la marge de
manœuvre du gouvernement est
Le modèle Sciences Po de nouveau remis en cause
Les idées fusent chez
les politiques, à gauche
comme à droite, pour
réformer l’établissement.
C’est devenu un classique à chaque
crise. Les politiques, de gauche
comme de droite, ont tous leur avis
sur ce qu’il faudrait faire pour
Sciences Po. La mobilisation propa-
lestinienne de vendredi dernier, qui
a rassemblé un peu plus de 200 étu-
diants sur les 15.000 que compte
l’établissement, a fait fuser une nou-
velle fois les propositions.
Il faut « stopper les financements
publics à Sciences Po », a intimé
François-Xavier Bellamy, la tête de
liste LR aux élections européennes.
L’ancien Premier ministre Manuel
Valls a, lui aussi, questionné les sub-
ventions publiques et appelle à la
mise sous « tutelle » de l’école. Le
premier président de la Cour des
comptes, Pierre Moscovici, s’est
opposé à une telle suspension, mais
a suggéré que l’établissement
« repense tout son projet », évoquant
« un besoin de recentrage » de Scien-
ces Po – qui « a beaucoup grossi, est
devenu très universitaire, très inter-
national » – sur sa « vocation »
ancienne, celle de l’Ecole libre des
étroite. « Il n’y aura jamais de droit
au blocage », a martelé Gabriel
Attal, samedi, à l’occasion d’un
déplacement dans la Manche. Le
Premier ministre affiche sa fer-
meté, dans la droite ligne de son
déplacement à Sciences Po, le
12 mars, lorsqu’il avait condamné
« une forme de pente, de dérive, liée à
une minorité agissante et dange-
reuse à Sciences Po ».
Les critiques sont vives, jusque
dans la majorité, sur l’accord
conclu vendredi soir entre la direc-
tion de l’établissement et les étu-
diants propalestiniens. « Je suis
extrêmement gênée face à ce qui
s’apparente à une capitulation, à une
soumission face à une minorité
d’étudiants qui empêchent les autres
d’apprendre », a réagi vendredi soir
la députée Maud Brégeon, porte-
parole du groupe Renaissance à
l’Assemblée nationale.
La direction de l’établissement
s’est engagée à organiser un
« townhall ». L’expression, impor-
tée des Etats-Unis où les universités
ont du mal à reprendre le contrôle
de leurs campus, renvoie à un
débat avec la direction où « toutes
les questions pourront être posées »
et où des discussions concernant
les revendications des étudiants
pourront être « menées ». Une réu-
nion devait se tenir lundi pour défi-
nir les conditions de préparation
d’un débat serein.
Sanctions suspendues
La direction de Sciences Po a par
ailleurs annoncé vendredi « la sus-
pension des saisines de la section
disciplinaire engagées depuis le
17 avril ». En échange, les étudiants
s’étaient engagés à ne plus pertur-
ber les cours, les examens et activi-
tés de l’institution.
A ceux qui jugent que Sciences
Po a cédé aux étudiants, la ministre
de l’Enseignement supérieur, Sylvie
Retailleau, explique qu’il n’en est
rien. « Jamais des sanctions sur
l’antisémitisme ne seront abandon-
nées, a-t-elle insisté dimanche soir
sur BFM TV. Il n’en est pas ques-
tion. » La suspension des sanctions
auxquelles Sciences Po fait réfé-
DÉCRYPTAGE
sciences politiques qu’elle était à sa
création, à la fin du XIXe siècle.
Le modèle économique de Scien-
ces Po sera l’un des sujets sur la
table de la prochaine direction, car
la situation est fragile. Et la situation
actuelle n’arrange rien – la région
Île-de-France vient par exemple de
suspendre ses financements. L’éta-
blissement doit rembourser les
160 millions d’euros de l’emprunt
pour financer le prestigieux cam-
pus de l’Artillerie et disposer des
fonds pour renforcer sa recherche.
Sur un marché mondial de l’ensei-
gnement supérieur extrêmement
compétitif, Sciences Po doit aussi
augmenter le nombre d’ensei-
gnants-chercheurs pour rivaliser à
armes égales avec ses concurrents.
L’ancien directeur, Mathias
Vicherat, voulait en accroître le
nombre de 30 % en cinq ans. Faut-il,
dans ces conditions, arrêter de ver-
ser une subvention publique qui
représente 33 % du budget de l’éta-
blissement ? « La question mérite
d’être posée, pour qu’on arrête enfin
d’avoir un conseil d’administration
Plusieurs dizaines d’étudiants se sont rassemblés lundi à la mi-journée à la Sorbonne. Photo Reuters
rence dans l’accord n’a « pas de lien
avec l’antisémitisme », a assuré la
ministre. De même, « il n’est pas
question de revenir » sur les revendi-
cations des étudiants relatives à
l’appel au boycott académique sur
les liens avec des universités israé-
liennes ou des partenariats, deman-
des qu’elle qualifie d’« illégitimes ».
Plainte contre
Jean-Luc Mélenchon
Sylvie Retailleau a aussi annoncé
que le ministère allait porter plainte
contre Jean-Luc Mélenchon pour
injure publique devant un agent
public. Le leader de LFI avait dressé
un parallèle entre le président de
l’université de Lille et le criminel
nazi Adolf Eichman, après l’annula-
tion d’une conférence sur Gaza.
« L’instrumentalisation de la vio-
composé de rentiers qui se gargari-
sent d’y raconter trois salades dans
une réunion sans enjeu, ose un fin
connaisseur de Sciences Po, sans
vraiment croire que l’Etat puisse
lâcher l’établissement. Mais ce qu’il
faudrait plutôt, c’est changer de gou-
vernance : si l’Etat finance, il ne faut
pas que ce soit un cénacle de copains
qui prend les décisions », il faut sortir
du « bal des ego ».
La place des étudiants
internationaux
« Le poisson pourrit par la tête »,
avait lancé Gabriel Attal, lors de son
intervention surprise au conseil
d’administration de la Fondation
nationale des sciences politiques
« Si l’Etat finance,
il ne faut pas
que ce soit
un cénacle de
copains qui prend
les décisions. »
UN FIN CONNAISSEUR
DE L’ÉTABLISSEMENT
lence est inacceptable », a martelé
Sylvie Retailleau.
Si le propos est ferme, l’ancienne
présidente d’université cherche
aussi l’apaisement par la restaura-
tion du débat, pour éviter un
embrasement universitaire. Sylvie
Retailleau soutient Sciences Po qui
veut « installer un débat », après « le
spectacle désolant » de vendredi. Il
aura lieu jeudi. « On va essayer de
recréer un vrai débat universitaire,
insiste la ministre. Le débat, oui. Le
blocage, non, et surtout l’escalade,
non. » Pour le gouvernement, qui
avait déclaré que « des lignes rouges
[avaient] été franchies », la ligne de
crête est étroite.
Lire l’éditorial de
( Jean-Francis Pécresse
Page 14
(structure qui chapeaute Sciences
Po), le 12 mars. Mais l’exécutif n’a pas
prévu de réformer la gouvernance.
Le Premier ministre avait aussi
mis la question financière sur la
table. Les Français « attendent que,
lorsque de l’argent public est engagé
pour financer les institutions, on
garantisse à 200 % que les principes
républicains soient respectés en tout
lieu et tout le temps dans ces institu-
tions, avait-il souligné. Et donc, il y
aura désormais un lien immédiat qui
sera fait entre les deux. » Cela fera
partie « des éléments dirimants du
futur contrat d’objectifs, de moyens
et de performance », avait souligné
le Premier ministre.
Dans les débats mis sur la place
publique, la place des étudiants
internationaux (50 % des effectifs)
est parfois aussi questionnée, voire
accusée d’être responsable de tous
les maux. De quoi agacer les
meilleurs experts de l’enseigne-
ment supérieur. « Imagine-t-on
LVMH [propriétaire des « Echos »,
NDLR] décider du nombre de Chi-
nois qui devraient acheter ses sacs à
main ? s’agace l’un d’eux. C’est le
marché et le fonctionnement de l’éco-
nomie ! Si le produit de Sciences Po
est bon, il se vend. » — M.-C. C.
Mardi 30 avril 2024 Les Echos
La rampe de lancement
de LFI vers 2027
Les Insoumis brandissent la cause palestinienne,
moins pour gagner des voix aux européennes que
pour marquer les esprits en vue de la présidentielle.
LE FAIT
DU JOUR
POLITIQUE
de Stéphane
Dupont
e bruit et la fureur.
L Une trêve se dessine
dans la bande de Gaza,
le calme revient au moins
provisoirement à Sciences Po,
le gouvernement s’emploie
à éviter un embrasement dans
les universités mais La France
insoumise n’en a cure.
Son coordinateur, Manuel
Bompard, a souhaité lundi que
les mobilisations en faveur
des Palestiniens « prennent de
l’ampleur ». Tandis que
l’avocate franco-palestinienne,
Rima Hassan, candidate
aux européennes sur la liste
LFI, a dit « assumer totalement »
son appel au « soulèvement ».
Les députés LFI se sont succédé
toute la journée de vendredi
à Sciences Po pour soutenir
le blocage de l’établissement.
Appuyés depuis l’Arménie
par Jean-Luc Mélenchon,
qui a multiplié ces dernières
semaines les conférences dans
les facs sur le conflit israélo-
palestinien, quand celles-ci
n’étaient pas interdites pour
des risques de trouble
à l’ordre public.
Les Insoumis ne comptent
pas baisser pavillon dans
les prochains jours. La cheffe
de file des députés LFI, Mathilde
Panot, et Rima Hassan, convo-
quées ce mardi par la police
pour « apologie du terrorisme »,
ont déjà commencé à dénoncer
une grave « atteinte à liberté
d’expression ».
02
Tout ce tohu-bohu ne profite
pourtant guère aux Insoumis
dans les intentions de vote
aux européennes. La liste
de Manon Aubry n’est plus
créditée que de 6 % des voix
dans le dernier baromètre
OpinionWay-Vae Solis pour
« Les Echos ». Les jeunes
et les quartiers populaires,
les plus sensibles à la cause
palestinienne, sont ceux qui
se rendent le moins aux urnes
pour ce scrutin. Et le conflit
entre Israël et le Hamas ne sera
un enjeu le 9 juin que pour 11 %
des Français, selon ce sondage.
Mais qu’importe.
Aux européennes, LFI a pour
seule ambition de faire mieux
qu’en 2019 (6,31 %). L’essentiel
pour les Insoumis est ailleurs :
frapper les esprits, marquer des
points pour la suite. Les jeunes,
les musulmans, la gauche anti-
israélienne, lui seront acquis
pour la prochaine échéance,
celle qui compte, en 2027,
calculent-ils. Le scrutin du mois
de juin est « le premier tour
de la présidentielle », a théorisé
Jean-Luc Mélenchon qui
n’exclut pas d’y concourir. Cette
agit-prop, comme souvent avec
LFI, se fait au prix de nombreux
dérapages et d’une mise en
cause systématique d’Israël. La
Nupes, l’alliance de la gauche,
n’y a d’ailleurs pas résisté.
Mais le leader des Insoumis
s’en moque. Les polémiques à
Dessin Kim Roselier pour « Les Echos »
répétition ne l’ont pas empêché
de recueillir 22 % des voix
à la dernière présidentielle.
Jean-Luc Mélenchon est
convaincu qu’il n’a pas besoin
du reste de la gauche
et qu’il répond à une demande
croissante de radicalité au sein
de la société française.
sdupont@lesechos.fr
03 Les Echos Mardi 30 avril 2024
Le gouvernement
cherche la parade face
au risque de motion de
censure sur le budget
POLITIQUE
Le ministre des Finan-
ces publiques, Bruno
Le Maire, a « tendu
la main » lundi aux
membres des opposi-
tions qui voudraient
participer à la consoli-
dation des comptes
publics.
Renaud Honoré
Est-ce que ce sera en juin à l’occa-
sion de l’examen de la loi de règle-
ment des comptes 2023, opportuné-
ment repoussée d’un mois cette
année par rapport au calendrier
habituel ? Lors de l’examen du
projet de budget pour 2025 à
l’automne ? Ou bien, sans attendre
de fenêtre de tir législative, dès le
mois de mai, si un parti d’opposition
veut tester les nerfs de l’exécutif
avant les élections européennes ?
La question d’une motion de cen-
sure contre le gouvernement de
Gabriel Attal a monopolisé lundi
une grande partie du débat budgé-
taire à l’Assemblée nationale, le RN
agitant la possibilité d’y recourir
d’ici à un mois. Une menace telle
que Bruno Le Maire a fait une offre
d’alliance aux parlementaires de
l’opposition qui veulent « faire le
choix de la responsabilité plutôt que
celui de la censure et du chaos ».
Ton insistant
« Je tends la main » : la même
expression est ainsi revenue au
moins à quatre reprises dans la
bouche du ministre des Finances.
Ce n’est certes pas la première fois –
depuis 2022 et la mise en majorité
relative du camp présidentiel – que
le locataire de Bercy ouvre la porte à
la reprise de propositions des mem-
bres de l’opposition. Mais le ton
était cette fois autrement insistant,
signe d’une certaine nervosité de
l’exécutif face au couperet qui pour-
rait lui tomber dessus.
« Je tends la main à tous les parle-
mentaires des oppositions qui ont la
volonté de faire revenir le déficit
public sous les 3 % en 2027 […] Venez
participer au redressement des
comptes publics, et laissons de côté
les querelles politiciennes qui ne sont
pas dans l’intérêt de la France », a
martelé Bruno Le Maire. Malgré le
dérapage des finances publiques
l’an dernier, le ministre affirme res-
ter fidèle au sérieux budgétaire.
Renvoyant à leurs turpitudes sup-
posées « cette cohorte de parlemen-
taires qui réclamaient toujours plus
d’argent naguère et exigent toujours
plus d’économies maintenant ».
Sous son bras, un gros parapheur
rouge parmi les dix qu’il avait
amené avec lui à l’Assemblée, ras-
semblant les 2.500 courriers reçus
de députés de tout parti et « exi-
L’Alsace se donne un mois pour négocier
sa sortie de la région Grand Est
COLLECTIVITÉS LOCALES Le président (LR) de la Collectivité euro-
péenne d’Alsace (CEA) s’est donné lundi un mois pour négocier avec
l’Etat la sortie de l’Alsace de la région Grand Est, alors qu’Emmanuel
Macron refuse « un grand jeu institutionnel ». Lors d’un déplacement
vendredi à Strasbourg, le président de la République s’est prononcé
pour des transferts de compétences accrus en direction de la CEA,
fusion des conseils départementaux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin
depuis 2021. Mais il a rejeté la demande du président de la CEA d’une
sortie de la région Grand Est, fusion en 2015 de l’Alsace, de la Lorraine
et de la Champagne-Ardenne.
FRANCE
geant plus de dépenses publiques 49.3. Si au terme de ces trente jours le
dans tous les domaines ». gouvernement persiste à ignorer le
Il y a pourtant visiblement des Parlement, le groupe déposera alors
opposants qui trouvent grâce à ses une motion de censure », a averti le
yeux. Pas ceux de LFI « qui se sou- député Jean-Philippe Tanguy. Une
cient comme d’une guigne de la dette menace qui s’ajoute à une similaire
publique », ni ceux du RN qui « sous brandie par LFI.
les habits de la rigueur proposent un Certes, une telle initiative a peu de
programme communiste de dépense chances d’aboutir. Mais Marine
généralisée ». Mais tous ceux qui Le Pen ne se cache pas de viser avant
« ont des propositions d’économies tout à fracturer LR. « Nous assu-
supplémentaires » : « Nous sommes mons et nous assumerons nos res-
ouverts », a-t-il affirmé. ponsabilités devant les Français, il est
Mais y aura-t-il quelqu’un pour temps pour les collègues LR d’assu-
saisir la main tendue ? Pas au Parti mer les leurs », a lancé Jean-Philippe
socialiste en tout cas : le président Tanguy, invitant les élus du groupe
de son groupe à l’Assemblée, Boris de droite à déposer leur propre
Vallaud, a tapé fort sur « l’incompé- motion « qui sera alors soutenue par Lundi à l’Assemblée, Bruno Le Maire a brandi des parapheurs contenant 2.500 courriers de dépenses
tence » et les « mensonges » du gou- le groupe RN ». n nouvelles rédigés par des parlementaires des oppositions. Photo Alain Jocard / AFP
vernement. Le député des Landes a
mis en avant son propre projet en
forme de « quatre quarts » : des
recettes nouvelles (soit 38 milliards
obtenus en taxant les grandes fortu-
nes et les gros héritages, les super
profits et en renonçant à la suppres-
sion de la CVAE), des économies pri-
MARTIN EST
ses sur les aides directes et indirec-
tes aux entreprises, la hausse du
pouvoir d’achat en augmentant le
SMIC et les minima sociaux et une
relance des investissements.
EFFICACE
Le Rassemblement
national veut
en déposer une
d’ici à la fin mai.
Pas au sein du groupe Liot non
plus pour le moment, son représen-
tant Charles de Courson ayant
avant tout critiqué des prévisions
gouvernementales « pas crédibles ».
Il reste Les Républicains, le prin-
cipal espoir d’un gouvernement qui
espère rallier à lui quelques mem-
bres d’une troupe divisée sur cette
question des finances publiques.
L’oratrice du groupe, Véronique
Louwagie, s’est bien gardée de pren-
dre position. Ne se privant pas de
lancer des attaques contre la politi-
que budgétaire d’un gouvernement
qui a « répondu avec désinvolture »
aux propositions d’économies de
LR dans le passé.
Le RN veut fracturer LR
Mais ajoutant également que son
parti « laissait du temps » au gouver-
nement « pour s’engager dans une
correction de trajectoire ». « Ressai-
sissez-vous vite car la cote d’alerte est
atteinte en ce qui nous concerne »,
a-t-elle ajouté. Une façon de calmer
le jeu et de renvoyer une censure
éventuelle à l’automne et à l’examen
du projet de loi de finances
pour 2025.
Le Rassemblement national est
toutefois bien décidé à bousculer
les troupes de LR. Le RN « demande
qu’un projet de loi de finances rectifi-
cative soit soumis au Parlement d’ici
à trente jours, et que la discussion
budgétaire arrive à son terme, sans POUR SES SALARIÉS(1), IL A CHOISI
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FRANCE
L’écart se resserre entre Valérie
Hayer et Raphaël Glucksmann
POLITIQUE
La liste du RN menée
par Jordan Bardella
reste largement en tête
dans le baromètre
OpinionWay-Vae Solis
pour « Les Echos ».
Pour la deuxième
place, a liste PS-Place
publique menace celle
de Renaissance.
Isabelle Ficek
Le premier match semble perdu.
L’autre se tend. Dans la campagne
pour les élections européennes, la
liste de la majorité présidentielle
menée par Valérie Hayer est désor-
mais très largement distancée par
celle du RN, tirée par Jordan Bar-
della. Dans le baromètre Opi-
nionWay-Vae Solis pour « Les
Echos » et Radio classique – qui
devient hebdomadaire, jusqu’au
scrutin – la liste du parti d’extrême
droite reste sur ses cimes, avec 29 %
des intentions de vote, stable depuis
la dernière vague du 22 avril.
Lors des manifestations du 1er Mai, les syndicats
vont défiler en ordre dispersé
SOCIAL
Les organisations
ont lancé des mots
d’ordre disparates,
« contre l’austérité »,
pour la paix ou encore
une Europe « plus
protectrice ».
RETROUVEZ DOMINIQUE SEUX
DANS L’ÉDITO ÉCO
À 7H45
DU LUNDI AU VENDREDI
La liste Renaissance, elle, re -
cueille 18 % des intentions de vote, en
baisse de 1 point. C’est son niveau le
plus bas depuis le début du baromè-
tre. A l’inverse, la liste PS-Place pu-
blique emmenée par Raphaël
Glucksmann progresse,
elle, de 1 point, à 14 %. Elle
est en hausse de 5 points
ÉL
depuis la première
mesure du baromètre,
EU
en novembre dernier. RO
L’écart avec la majorité se
resserre, c’est l’autre match
de cette campagne.
« Dynamique Glucksmann »
« L’enjeu, à un peu plus d’un mois du
scrutin, cela va être cette deuxième
place, avec une interrogation sur la
dynamique Glucksmann, réelle, et qui
est le seul fait notable jusqu’ici, relève
Bruno Jeanbart, vice-président
d’OpinionWay. Depuis cinq mois, on
a gardé le même ordre mais avec des
écarts différents, et deux listes en
deuxième et troisième positions qui se
rapprochent mais sont très distancées
par la première », constate-t-il.
Bruno Jeanbart explique la per-
cée de Raphaël Glucksmann « très
clairement et avant tout par une
capacité à déclencher une concentra-
tion des votes de gauche vers lui, plu-
Après l’union sacrée de l’an dernier
contre la réforme des retraites, les
syndicats reviennent à leurs habi-
tudes : les mots d’ordre pour les
manifestations du 1er Mai seront
variés, « contre l’austérité », pour la
paix ou encore une Europe « plus
protectrice ».
En 2023, les huit principaux syn-
dicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC,
CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) avaient
SUR
tôt qu’une fuite de l’électorat
d’Emmanuel Macron. Et cette pro-
gression se fait avec un total de la gau-
che relativement stable ».
Dans le détail, ce sont toutefois
12 % des électeurs d’Emmanuel
Macron au premier tour de
la présidentielle de 2022
ECTION qui se prononcent en
faveur de la tête de liste
PS-Place publique, mais
S
2024
NE
un tiers de ceux de Jean-
PÉEN Luc Mélenchon et un
tiers également de ceux de
Yannick Jadot. « Si on reste sur
ce schéma de concentration des élec-
teurs de gauche sur Raphaël Glucks-
mann, la marche est assez haute
pour décrocher la deuxième place.
Sinon, s’il a la capacité d’aller décro-
cher d’autres électeurs, chez Emma-
nuel Macron, ce qui n’est pas la ten-
dance, alors cela peut changer la
donne », estime Bruno Jeanbart.
Le sondeur note quelques écueils
sur la route de Raphaël Glucks-
mann, par ailleurs lui-même très
prudent sur sa dynamique. La
sûreté du choix est plus faible chez
lui que pour Renaissance, et les
débats télévisés vont aussi s’intensi-
fier. « Il y a un petit risque, comme il
devient le candidat à abattre à gau-
che, que les critiques des Verts et de
défilé ensemble, du jamais-vu
depuis près de quinze ans. La mobi-
lisation, en forme de 13e journée
intersyndicale contre la réforme des
retraites, avait été bien au-delà d’un
1er Mai classique. La police avait
dénombré près de 800.000 manifes-
tants (contre quelque 116.000
en 2022) et la CGT 2,3 millions
(contre 210.000 en 2022). La journée
avait été marquée par des heurts
parfois violents dans plusieurs villes
de France, principalement à Paris,
Nantes et Lyon.
Un « engouement
très relatif »
Cette participation s’annonce
impossible à battre cette année,
d’autant que les syndicats n’ont pas
prévu de rapprochement pour cette
journée internationale des tra-
vailleurs. Au niveau national,
« moins de 150.000 personnes » sont
attendues, selon une source poli-
cière, qui pronostique « un retour
aux mobilisations traditionnelles des
Jean-Luc Mélenchon se concentrent
sur lui, cela peut entraver sa dynami-
que », prévient le sondeur.
Du côté de la majorité, qui a long-
temps nié toute dynamique de la
liste de Raphaël Glucksmann,
l’ambiance est à la mobilisation
générale. Après le discours d’Em-
manuel Macron à la Sorbonne
(dont ce baromètre ne peut mesu-
rer l’impact, l’enquête de terrain
s’étant achevée la veille du dis-
cours), vu comme le premier étage
de la fusée, indispensable pour
reparler d’Europe à son électorat,
les réunions publiques, débats et
actions de terrain vont se multiplier.
Surtout, la liste ainsi que le pro-
gramme seront dévoilés respective-
ment ces vendredi et lundi avant le
prochain grand meeting de la majo-
rité, le 7 mai à Paris. De quoi, espère-
t-on en interne, enfin mettre la cam-
pagne sur orbite et aller rechercher
ces électeurs d’Emmanuel Macron
en 2022 qui n’ont pas encore prévu
de se déplacer le 9 juin. Gabriel Attal
a fini aussi par se décider à débattre
avec Jordan Bardella, probable-
ment vers la fin mai. Le Premier
ministre va multiplier les déplace-
ments sur le terrain, en particulier
dans l’ouest de la France, un bastion
de la macronie trop peu mobilisé. n
dernières années », avec donc un
« engouement très relatif » dans des
cortèges où la fonction publique,
notamment les enseignants, pour-
rait fournir le gros des troupes.
La CGT, FSU et Solidaires ainsi
que des organisations de jeunesse,
dont l’Unef (Union nationale des
étudiants de France), la Fage (Fédé-
ration des associations générales
étudiantes) ou le MNL (Mouve-
ment national lycéen), ont lancé un
appel commun « contre l’austé-
rité », pour l’emploi et les salaires
ou encore la paix.
A l’approche des élections euro-
péennes du 9 juin, la CFDT appelle à
« rejoindre les cortèges organisés par-
tout en France, pour revendiquer une
Europe plus ambitieuse et plus pro-
tectrice pour les travailleurs et les tra-
vailleuses ». Sa cheffe, Marylise
Léon, sera à Nancy où elle partici-
pera à un débat sur ce thème de
l’Europe, selon son entourage.
FO se mobilisera « sur ses propres
positions et revendications » et son
Mardi 30 avril 2024 Les Echos
CPF : déjà
100 millions d’euros
mobilisés pour
le permis moto
FORMATION
PROFESSIONNELLE
Avant la publication
du décret limitant
le recours au
compte personnel
de formation pour
financer le permis
moto, le nombre
de demandes
a battu un record
durant la semaine
du 15 avril.
Alain Ruello
Ça se bouscule aux portes des
moto-écoles avant qu’elles ne se
referment en partie. Près de
18.000 demandes de finance-
ment du permis deux-roues via
le compte personnel de forma-
tion (CPF) ont été validées
durant la semaine du 15 avril,
pour un total de 15 millions
d’euros. Soit plus du double du
précédent record hebdoma-
daire, il y a un mois, selon les der-
niers chiffres disponibles, aux-
quels « Les Echos » ont eu accès.
Eligible au CPF depuis début
janvier, le permis moto a connu
un engouement exceptionnel :
au 21 avril, on en était à 100 mil-
lions d’euros validés par la
Caisse des Dépôts, qui gère le
dispositif, soit à peine 17 mil-
lions de moins que le permis
voiture. La somme est loin
d’être anodine quand on la com-
pare aux 2,2 milliards de budget
prévus par France compéten-
ces cette année pour le CPF.
Un permis, pas deux
Pour rappel, le CPF est financé
par une taxe employeur, mais la
collecte ne suffit pas, obligeant
l’Etat à combler le manque. La
crainte de la sortie de route fi-
nancière est telle que le minis-
tère du Travail a dû engager un
freinage d’urgence. Un décret,
présenté récemment aux par-
tenaires sociaux, prévoit que si
le titulaire dispose déjà du per-
mis voiture, alors il lui sera
impossible de se servir de son
compte pour passer le permis
moto. Et réciproquement. S’il
n’en a aucun, alors il lui faudra
en choisir un.
chef de file, Frédéric Souillot, sera à
Montauban, en Occitanie. Quant à
l’Unsa, elle appelle à défiler en poin-
tant « le pouvoir d’achat en berne » et
« la stigmatisation des chômeurs et
des plus pauvres ».
Une situation sociale
« très dégradée »
C’est un 1er Mai « sans unité large » et
« un peu à géométrie variable », cons-
tate Murielle Guilbert, codéléguée
de Solidaires, tout en n’excluant pas
« une petite surprise » en termes de
mobilisation. « Cela n’a pas été vu par
certains syndicats comme nécessitant
absolument une unité sur cette jour-
née », observe la syndicaliste, mais
150.000
PERSONNES
Le nombre maximum de
manifestants attendus au niveau
national, selon la police.
04
Reste à savoir quand le décret
s’appliquera. Il faut pour cela
que le texte soit publié et que la
Caisse ait fini de mettre à jour
les logiciels, Web et application.
Arguant que le décret n’est pas
encore publié, une porte-parole
de l’établissement financier n’a
pas souhaité s’engager sur une
date, renvoyant vers le minis-
tère du Travail, lequel n’a pas
répondu non plus.
L’autre décret attendu, celui
qui instaure un reste à charge
forfaitaire de 100 euros pour
tout achat via son CPF, quelle
que soit la formation, doit être
publié ce mardi au plus tard
pour une mise en œuvre début
mai, comme prévu. A condi-
tion, là encore, que l’informati-
que soit prête.
Le décret
instaurant un reste
à charge forfaitaire
doit être publié
ce mardi
au plus tard pour
une mise en œuvre
début mai.
Indexé sur l’inflation chaque
année, ce reste à charge ne sera
pas exigible en cas d’abonde-
ment par l’employeur, selon la
version du texte envoyée pour
avis au Conseil d’Etat. Il pourra
aussi être pris en charge par
l’une des treize entités habili-
tées, opérateurs de compéten-
ces OPCO entre autres.
La mise en œuvre de ce reste
à charge, qui a mis longtemps à
déboucher, a-t-elle provoqué
un afflux de demandes en
amont pour y échapper tant
qu’il est encore temps ? Interro-
gée, la Caisse des Dépôts a ren-
voyé au même argumentaire
– décret non encore publié –
pour ne pas répondre.
Les chiffres montrent pour-
tant un pic de consommation
ces derniers jours sans que l’on
puisse l’attribuer à une raison
précise. La semaine du 15 avril,
10.805 demandes d’inscription à
une formation ont été formulées
en moyenne par jour, dont 7.738
ont été validées, un record
depuis au moins trois ans. n
« on a intérêt à avoir un beau 1er Mai »
au vu des sujets du moment, comme
les salaires ou la paix dans le monde.
Même si « ce sera différent de l’an
dernier », Céline Verzeletti, secré-
taire confédérale CGT, s’attend à
« un 1er Mai important en mobilisa-
tion », sur fond d’« atteintes aux
libertés », y compris syndicales, et
d’une situation sociale « très dégra-
dée ». La centrale de Montreuil
recense plus de « 215 points de ras-
semblement sur tout le territoire » :
on est donc « sur des bases hautes »,
dit-elle à l’AFP.
A Paris, le cortège doit s’élancer à
14 heures de la place de la Républi-
que vers la place de la Nation. Dans
une unité assez large, puisque la
CFDT et l’Unsa en seront avec la
CGT, FSU et Solidaires. Selon une
source policière, entre 15.000 et
30.000 personnes sont attendues
dans la capitale, dont quelques cen-
taines de manifestants radicaux.
Mais les autorités ne s’attendent pas
à de grandes tensions. — Les Echos
 MONDE
05 Les Echos Mardi 30 avril 2024

Colère des agriculteurs : la Commission

européenne lâche à nouveau du lest
A l’origine, la Commission devait
INSTITUTIONS d’ailleurs faire toutes ces annonces
avant cette réunion pour qu’elles
Bruxelles va proposer puissent y être débattues. Mais cela
de prolonger jusqu’à n’a pas été possible, le commissaire
la fin de l’année, européen à l’Agriculture, Janusz
les aides d’Etat Wojciechowski, n’ayant pas encore
« de crise » grâce donné son feu vert, ce qui bloque la
auxquelles les agricul- décision. Demanderait-il plus ? Sol-
teurs et les pêcheurs licité, son cabinet n’a pas répondu
ont reçu des milliards aux « Echos ». Pourtant, « les mesu-
d’euros ces dernières res vont dans le sens des intérêts des
années. agriculteurs et reflètent un point
d’équilibre entre les quelques Etats
membres qui auraient voulu plus et
Fabienne Schmitt la grande masse qui ne voulait rien »,
— Bureau de Bruxelles pointe un observateur. « Je suis très
favorable à l’extension de l’aide de
Face aux turbulences persistantes minimis, a néanmoins déclaré
qui touchent les secteurs agricoles lundi soir Janusz Wojciechowski
et de la pêche, la Commission euro- lors de la conférence de presse qui a
péenne prend de nouvelles mesu- suivi le Conseil. Nos agriculteurs ont
res visant à alléger leurs charges besoin d’aides d’Etat. »
financières. Alors que se profilent les euro-
Selon nos informations, la vice- Adoptées en 2022, ces aides exceptionnelles devaient prendre fin au 30 juin 2024. Photo Laurent Grandguillot/RÉA péennes et que la colère des agricul-
présidente de la Commission euro- teurs a atteint son paroxysme ces
péenne, la Margrethe Vestager, va pêche ont reçu des milliards continuer à leur fournir des mon- du doigt pour se partager les pour qu’elle les approuve. Alors derniers mois, Bruxelles a apporté
prochainement proposer de pro- d’euros, devaient prendre fin au tants d’aides limités, en cas de meilleures parts du gâteau. qu’elles n’ont pas été réévaluées de nombreux gages, en simplifiant
longer, jusqu’à la fin de l’année, une 30 juin 2024. Mais les chefs d’Etat et besoin. Mais ce n’est pas tout. La Com- depuis 2019 et devaient expirer la politique agricole commune et
partie du cadre temporaire de crise de gouvernement avaient appelé à mission entend aussi parallèlement en 2027, la Commission a décidé de pour renforcer la position des agri-
prévu pour l’agriculture et la pêche, leur prolongation lors de leur Som- Sujet sensible ouvrir plus tôt que prévu les travaux les réexaminer avant l’heure, culteurs dans la chaîne d’approvi-
tout en maintenant leurs plafonds met européen à la mi-avril alors que Le sujet est sensible et il est toujours en vue d’une réévaluation des règles compte tenu de l’inflation. Reste à sionnement alimentaire. D’autres
au même niveau – 280.000 euros les perturbations liées à la guerre de très délicat pour la Commission dites « de minimis » pour l’agricul- voir jusqu’où elle ira, alors qu’une devraient suivre, en particulier
pour l’agriculture et 335.000 pour la Russie contre l’Ukraine conti- d’assouplir les aides d’Etat, car tous ture. Celles-ci permettent aux Etats grande majorité d’Etats membres, dans le cadre du dialogue stratégi-
la pêche. nuent d’affecter profondément ces les Etats membres n’ont pas les membres de fournir rapidement de dont l’Allemagne et la France, lui a que sur l’avenir de l’agriculture
Adoptées en 2022, ces aides secteurs. mêmes capacités de financement. petites quantités de soutien aux réclamé de les augmenter lors du lancé par la Commission et qui doit
exceptionnelles de crise, grâce aux- Cette prolongation doit ainsi L’Allemagne et la France, les plus agriculteurs, c’est-à-dire sans notifi- Conseil des ministres de l’Agricul- donner lieu à un rapport cet été, aux
quelles les secteurs agricole et de permettre aux Etats membres de riches, sont régulièrement pointés cation préalable à la Commission ture qui s’est tenu lundi. dernières nouvelles fin août. n
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MONDE Mardi 30 avril 2024 Les Echos 06

Europe centrale et orientale : les vingt an

d’un incroyable rattrapage économique
l En 2004, l’Union européenne accueillait dix pays dont la plupart appartenaient à l’Europe de l’Est.
l Ce grand élargissement est un succès économique pour eux : le PIB par habitant de la Pologne a ainsi doublé depuis 2004.
EUROPE
Guillaume de Calignon
Il n’est pas certain que tout le monde
s’en rende compte, mais c’est proba-
blement la plus grande réussite de
l’Union européenne. Il y a vingt ans,
dix pays regroupant 75 millions
d’habitants ont rejoint le club euro-
péen : la Pologne, la République
tchèque (Tchéquie), la Slovaquie, la
Slovénie, la Hongrie, Malte, Chypre
et les trois pays baltes. Huit d’entre
eux faisaient partie de l’ancien bloc
de l’Est, membres du Pacte de
Varsovie. Sur le plan économique,
cette intégration au marché unique
est incontestablement un succès
pour eux. Qu’on en juge.
En vingt ans, le PIB par habitant a
doublé en Pologne. En Slovaquie, il
a crû de 75 % et en Hongrie, de 50 %.
La croissance a été moindre en
Tchéquie et en Slovénie, mais ces
deux pays étaient déjà les plus
développés de la région lors de leur
accession. Surtout, le PIB par tête de
la Tchéquie, de la Slovénie et de la
Lituanie atteint aujourd’hui 90 % de
celui de l’Union européenne, en
tenant compte des différences de
prix entre pays. Et il est supérieur à
celui de l’Espagne et du Portugal. La
Pologne, elle, a dépassé le Portugal
et talonne l’Espagne. Bref, l’Europe
de l’Est est plus riche et elle affiche
des taux de chômage parmi les plus
faibles de l’UE.
Le boom avant l’accession
Dans les faits toutefois, « c’est au
moment où les pays d’Europe de l’Est
ont annoncé leur intention de
rejoindre l’UE que les investis -
sements étrangers s’y sont précipités
et que la croissance a été la plus forte.
Le boom a donc eu lieu avant l’acces-
sion », selon Irina Topa-Serry, éco-
nomiste chez Axa IM.
La productivité des anciens pays
communistes était très basse au
début des années 1990. « La libérali-
sation des prix et les privatisations
ont d’abord aidé la réallocation du
capital et du travail à l’intérieur des
économies », explique-t-elle. Puis,
« les investissements étrangers et
l’intégration commerciale dans les
chaînes de valeur européennes ont
permis aux pays de l’Est d’accélérer
leur développement. Celui-ci s’est
appuyé dès le début sur l’industrie. Ce
n’est qu’une fois que les classes
moyennes ont émergé que les services
ont pu décoller en répondant à une
vraie demande de la population
locale ». Proches de l’Allemagne, la
première économie du Vieux
Continent, beaucoup de pays de
l’Est se sont arrimés à l’industrie de
notre voisin et ont largement pro-
fité de son essor ces deux dernières
décennies.
Un bémol : ce succès
économique ne s’est
pas traduit par une
meilleure intégration
politique.
En tout cas, « l’exemple des pays
d’Europe centrale a montré que le
système d’intégration dans l’UE,
c’est-à-dire l’exigence initiale de
réformes, puis le versement de fonds
européens dans le cadre de politiques
communes, permettent le rattrapage
économique. Les pays rentrés dans
l’Union il y a vingt ans sont beaucoup
plus développés sur le plan écono-
mique que ceux qui sont restés à la
porte, comme l’Ukraine. C’est
aujourd’hui l’une des raisons de
l’attractivité de l’UE », considère
Olivier de Boysson, économiste
chez Société Générale.
Selon la banque autrichienne
Erste Bank, les sept plus grosses
économies d’Europe centrale – dont
la Roumanie et la Croatie mais sans
les pays baltes –, auraient reçu
205 milliards d’euros de fonds
européens, nets de leurs contribu-
tions, depuis leur accession. On
comprend l’empressement de pays
comme l’Albanie, la Macédoine ou
le Monténégro à entrer dans le
club.
Avec un bémol : ce succès éco-
nomique ne s’est pas traduit par une
meilleure intégration politique. La
prospérité et la liberté économique
n’entraînent pas nécessairement
l’adhésion aux valeurs de la démo-
cratie libérale. La Hongrie a toujours
Viktor Orban à sa tête, grand pour-
fendeur de l’UE. La Pologne a long-
temps été dirigée par les conser-
vateurs du PiS, très critiques envers
les valeurs véhiculées par Bruxelles.
Et Robert Fico, dont les idées sont
perméables à celles de Vladimir
Poutine, est aujourd’hui le chef du
gouvernement slovaque.
Transition énergétique
douloureuse
Sur le plan économique, l’avenir
s’annonce peut-être un peu plus
difficile. D’abord, l’économie des
pays de l’Est est très carbonée et
dépend plus du gaz russe et du
charbon que celle de l’ouest du
continent. La transition énergé-
tique sera donc plus douloureuse.
Ensuite, ces Etats comptent peu
de multinationales et n’ont aucun
pôle économique de la taille de
Londres, de Paris ou de la Ruhr en
Allemagne, à l’heure où la produc-
tivité forte se concentre dans de tel-
les agglomérations. Enfin, leur
démographie est en berne malgré
l’accueil de millions de réfugiés
ukrainiens. Et leur proximité géo-
graphique avec la Russie est en
train de devenir un problème. C’est
aussi à cela que l’UE va devoir s’atte-
ler à l’avenir. n

L’attractivité de l’euro en question Les délocalisations creusent le déficit

pour les pays de l’Est
Pour des raisons politiques
ou économiques, certains
pays sont réticents à
rejoindre la monnaie
unique.
L’euro est-il encore attractif pour les
pays d’Europe de l’Est membres de
l’Union européenne ? Certes, la
Slovénie, la Slovaquie, les trois pays
baltes et le dernier arrivé – la Croa-
tie – ont opté pour la monnaie
unique européenne. Mais les autres
– Pologne, Tchéquie et Hongrie en
tête – ne se bousculent pas. Seule la
Bulgarie entend adopter l’euro le
plus vite possible. Ce serait d’ailleurs
théoriquement possible dès le
1er janvier 2025, Sofia respectant les
critères. Mais l’instabilité politique
d u p ay s e t l a p e r s i s t a n c e d e
l’influence russe sont des barrières
pour son accession.
Chaque pays d’Europe de l’Est est
arrivé dans l’euro pour des raisons
diverses. La Croatie voulait faciliter
le tourisme en adoptant la monnaie
unique. Les pays baltes, effrayés par
leur voisin russe, souhaitaient
s’arrimer le plus solidement possi-
ble au projet européen. La Slova-
quie et la Slovénie sont de petites
économies dont la politique moné-
taire n’était de toute façon pas
décidée dans leur capitale mais à
Francfort par la BCE.
Le premier constat, c’est que
« l’appartenance à l’euro n’a pas été
un facteur de rattrapage pour les
pays de l’Est mais elle ne l’a pas non
plus pénalisé », estime Olivier de
Boysson, économiste chez Société
Générale. « La flexibilité du taux de
change peut s’avérer un atout à cer-
tains moments, en cas de choc exté-
rieur. La Pologne a ainsi bénéficié de
la dépréciation du zloty en 2009 pour
afficher une croissance de son PIB
cette année-là alors que tous les
autres membres de l’UE ou presque
voyaient leur PIB plonger après la
crise financière de 2008 », explique
l’économiste.
« Perte d’une politique
monétaire indépendante »
Sans la flexibilité du taux de change,
le seul moyen d’ajuster l’économie à
un choc est de réduire le coût du
travail. Or, il est beaucoup plus
simple de laisser son taux de
change se déprécier que de baisser
les salaires. La France l’a appris à
ses dépens ces vingt-cinq dernières
années. La Grèce et l’Espagne lors
de la crise de 2010 aussi. Même si
tous ces événements diffèrent, ils
montrent que l’appartenance à
l’euro oblige à se caler sur la rigueur
de l’Allemagne, la première écono-
mie du Vieux Continent. Et de cela,
tout le monde ne veut pas.
Dans son rapport annuel de
janvier dernier sur la possible
entrée dans la zone euro, la Banque
centrale tchèque notait que, malgré
les avantages pour le commerce
avec les autres Etats membres,
« l’adoption de l’euro comporte des
risques liés à la perte d’une politique
monétaire indépendante et au rôle
stabilisateur d’un taux de change
flexible. Après l’entrée dans la zone
euro, la politique économique
tchèque disposera de moins d’outils
pour répondre à la situation écono-
mique intérieure ».
Raison politique
L’autre raison est politique. Par
exemple, la Pologne est un Etat
nouveau, dont l’existence a été niée
pendant tout le XIXe siècle, et qui
veut s’affirmer. Son indépendance
est cruciale pour la population. On
retrouve cet enjeu dans le dernier
Euro baromètre, une enquête
réalisée dans tous les Etats mem-
bres du l’UE par la Commission
européenne. A l’automne 2023,
56 % des Polonais se déclaraient
contre l’adoption par leur pays de
l’euro, un chiffre en forte hausse.
C’est la même chose en Tchéquie
où 63 % des répondants refusent
que Prague rejoigne la monnaie
unique, beaucoup craignant la
hausse des prix qui en découlerait.
De façon plus étonnante, les Hon-
grois, eux, y sont favorables. Les
deux tiers des personnes interro-
gées verraient d’un bon œil l’entrée
de leur pays dans la zone euro. La
raison tient probablement au fait
que le pays a connu une période où
l’inflation a bondi en raison d’une
forte dépréciation du forint, la
devise hongroise.
Quant aux Roumains, ils se
montrent divisés, 50 % d’entre eux
espérant que leur pays fasse partie
de la zone euro. Bref, même si la
guerre en Ukraine et le retour de
l’inflation peuvent séduire certains
électeurs de l’Est, le débat risque
encore de durer. — G. C.
commercial français
Les échanges avec les
ex-pays de l’Est, qui
dégageaient un excédent
pour les produits hexago-
naux de 1,5 milliard
d’euros en 2004, sont
désormais déficitaires
de près de 10 milliards.
Nathalie Silbert
« L’élargissement de l’Union euro-
péenne aux pays d’Europe centrale
et orientale en 2004 a stimulé les
échanges intracommunautaires.
La France a elle aussi été concernée
par ces mouvements », explique
Vincent Aussilloux, chef du
département économie finances à
France Stratégie, centre de recher-
che rattaché à Matignon. Mais
cela n’a globalement pas été favo-
rable à l’Hexagone. Certes, les ven-
tes tricolores vers les nouveaux
Etats membres ont fortement
progressé au cours des vingt der-
nières années. Elles sont passées
de 3,5 % du total des exportations
hexagonales en 2004 à aujour-
d’hui 5,5 % selon Maxime Darmet
chez Allianz Trade. Mais ces pays
restent des partenaires commer-
ciaux de second ordre. Ainsi, en
2022, la France n’était que le troi-
sième client de la Pologne et son
sixième fournisseur, loin derrière
l’Allemagne. De même, elle n’était
que le onzième partenaire com-
mercial de la Hongrie, septième
importateur de produits hon-
grois, douzième exportateur vers
le pays dirigé par Viktor Orban.
Surtout, les échanges avec les
ex-pays de l’Est, qui dégageaient
un excédent pour les produits
hexagonaux de 1,5 milliard
d’euros en 2004, ont basculé dans
le rouge. Au fil des ans, le déficit
commercial de la France avec
cette zone, qui s’est progressive-
ment élargie à la Roumanie, à la
Bulgarie et à la Croatie, n’a cessé de
se creuser pour approcher 10 mil-
liards d’euros en 2023, selon la
direction générale du Trésor :
39 milliards d’exportations de
biens, principalement vers la
Pologne et la Tchéquie, mais
49 milliards d’importations.
Important déficit
dans l’automobile
Si les échanges concernent une
grande variété de biens, ils se révè-
lent très déséquilibrés sur quel-
ques produits. En premier lieu,
l’automobile, où le déficit français
s’est élevé à près de 8 milliards
d’euros en 2023, avec des importa-
tions multipliées par dix par rap-
port à 2004. Au premier semestre
2023, plus d’une voiture électrique
sur cinq importée d’Europe dans
l’Hexagone venait de Slovaquie. Le
commerce de biens d’équipement
se solde, lui, par un déséquilibre de
plus de 3 milliards d’euros, et
l’ameublement laisse un trou de
1,5 milliard. Par pays, la Tchéquie
est celui avec lequel la France affi-
che le déficit le plus important
(3,3 milliards), suivie de la Slova-
quie (2,4 milliards) et de la Pologne
(1,9 milliard).
Une bonne partie de la dégrada-
tion des comptes français s’expli-
que par les délocalisations et les
investissements réalisés dans la
région. Devenus la base arrière
industrielle de l’Allemagne, ces
pays ont à la fois tiré parti de la
migration des usines tricolores et
du développement de la sous-
traitance sur leur sol au début des
années 2000, alors que la compéti-
tivité de l’industrie hexagonale se
dégradait. En quête de coûts plus
favorables, l’industrie automo-
bile a été en première ligne.
En 2021, les 3.580 filiales des
entreprises tricolores installées
dans les pays d’Europe centrale et
orientale employaient 570.700
salariés pour un chiffre d’affaires
de 105 milliards d’euros. En Polo-
gne, la France est devenue le troi-
sième employeur et le deuxième
investisseur étranger. En moins de
vingt ans, son stock d’investisse-
ments directs dans cette zone a
presque triplé. Il avoisinait 35 mil-
liards en 2022. Ce renforcement
des relations s’est accompagné
d’un accroissement des échanges
de services, ce qui se traduit par un
solde négatif pour la France (2 mil-
liards d’euros de déficit avec la
Pologne en 2022). En revanche,
cette stratégie de délocalisation lui
permet de rapatrier des dividendes
substantiels. Les revenus tirés des
investissements directs ont ainsi
fait rentrer dans l’Hexagone plus
d’un milliard d’euros de la Pologne,
740 millions de la République tchè-
que et 475 millions de Roumanie. n
 07 Les Echos Mardi 30 avril 2024
ns
Après la Hongrie et la Slovaquie,
la peur d’une dérive « illibérale »
L’émergence de
gouvernements qui ne
respectent plus les valeurs
d’Etat de droit en Europe
centrale inquiète au sein
des Vingt-Sept.
D’autant que certains
d’entre eux entretiennent
un discours ambigu
sur le soutien à l’Ukraine.
Vincent Collen
Si l’intégration économique des
anciens pays de l’Est est une source
de satisfaction pour les leaders de
l’Union européenne, il n’en va pas
de même sur le plan politique et
diplomatique. Le virage « illibéral »
revendiqué par la Hongrie de Viktor
Orban inquiète d’autant plus, à
Bruxelles et dans les capitales euro-
péennes, qu’il risque de s’étendre à
d’autres démocraties d’Europe
centrale et orientale qui ont rejoint
l’Union il y a vingt ans.
L’année 2023 en a été l’illus -
tration. En Pologne, les électeurs
ont mis fin à huit ans de gouver-
nement du PiS, le parti nationaliste
ultra-conservateur qui multipliait
les sujets de conflits à la table des
Vingt-Sept. Soulagement à Bru-
xelles, à Paris, à Berlin. Mais au
même moment, les Slovaques por-
taient à la tête du gouvernement
Robert Fico, qui a glissé en quelques
années de la social-démocratie vers
un populisme teinté de nationa-
lisme et de conservatisme.
Comme son homologue hon-
grois Viktor Orban, Robert Fico s’est
L’Europe centrale, de base arrière de l’industrie continentale
à tête de pont de la Chine
L’élargissement aux pays
d’Europe centrale et
orientale il y a vingt ans
a provoqué un puissant
déplacement de l’outil
industriel européen vers
l’Est. Face au retard pris
par les constructeurs du
Vieux Continent dans la
voiture électrique, l’est de
l’Europe se tourne désor-
mais vers l’Asie.
Ninon Renaud
Quand les pays d’Europe centrale et
orientale rejoignent l’Union euro-
péenne à partir de 2004, c’est une
double opportunité pour les indus-
triels du Vieux Continent. L’ouver-
ture à l’Est leur donne accès à une
centaine de millions de nouveaux
consommateurs, et c’est la pro-
messe d’une main-d’œuvre quali-
fiée avec un coût horaire plus de
cinq fois moindre que la moyenne
européenne. Mais contrairement à
l’entrée en 1986 du Portugal et de
l’Espagne, ce nouvel élargissement
a provoqué un déplacement fort de
l’outil industriel européen. Les nou-
veaux Etats membres sont les seuls,
avec l’Allemagne qui a joué avec eux
la complémentarité, à avoir main-
tenu la part de leur industrie manu-
facturière dans la valeur ajoutée au-
dessus de 20 %. Celle de la France, de
l’Espagne ou encore de l’Italie a
reculé sous les 15 %.
« L a fa i b l e s s e d u c o û t d e l a
main-d’œuvre n’explique pas tout,
souligne Thomas Grjebine, écono-
miste au Cepii. En réduisant au début
des années 2010 les dépenses publi-
ques, les pays d’Europe centrale et
orientale ont comprimé la demande
intérieure et renforcé leur compéti-
tivité nationale », rappelle-t-il. En
Hongrie, la part de la consomma-
tion dans le PIB a été réduite de sept
points entre 2009 et 2015, tandis que
la part de l’industrie manufac -
turière a gagné 4 points. Au cours
de la décennie 2010, la Slovaquie fait
baisser de quatre points ses dépen-
ses publiques et voit la part de son
industrie manufacturière dans le
PIB grimper de 6 points. Même
chose en Pologne où les dépenses
publiques reculent de 2 points alors
démarqué avec des prises de posi-
tion hostiles à l’aide à l’Ukraine. Ses
réformes judiciaires et sa volonté
de réduire l’indépendance des
médias audiovisuels publics lais-
sent craindre que Bratislava prenne
la même direction que Budapest.
Exigences strictes de l’UE
« Il y a des similitudes entre les deux
Premiers ministres, mais Viktor
Orban est dans une position beau-
coup plus forte que Robert Fico pour
l’instant », décrypte Lukas Macek,
de l’institut Jacques-Delors. Le lea-
der hongrois règne sans partage sur
le parlement où son parti, le Fidesz,
jouit de la majorité absolue depuis
près de quinze ans. En Slovaquie au
contraire, Fico gouverne une coali-
tion beaucoup plus fragile.
L’émergence de ces leaders pose
de nouvelles questions au sein des
Vingt-Sept. D’abord parce que
l’Union européenne décide de les
sanctionner pour manquement
aux principes de l’Etat de droit.
Depuis peu, Bruxelles peut même
geler les fonds européens à desti-
nation de ces pays, comme elle l’a
fait pour la Pologne et la Hongrie.
« Cela pose la question du droit de
l’Union européenne à dicter ce qui est
juste à des pays souverains », analyse
Tim Haughton, professeur de
sciences politiques à l’université de
Birmingham. « C’est potentielle-
ment un problème, car l’Union euro-
péenne doit aussi respecter la souve-
raineté des pays membres et des
gouvernements élus au suffrage
universel », reprend Lukas Macek.
MONDE
que la part du secteur manufac-
turier gagne 3 points entre 2013
et 2016. Résultat, au lieu d’acheter
les voitures conçues pour eux,
comme la Dacia Logan produite
par le groupe Renault en Roumanie
dès 2005, les consommateurs de
ces pays ont privilégié l’achat de
voitures d’occasion moins chères.
Le nouvel horizon chinois
Plus de 70 % des véhicules produits
dans les pays d’Europe centrale et
orientale sont ainsi exportés, selon
Bernard Jullien, maître de confé-
rences spécialiste de l’automobile à
l’université de Bordeaux. Faute de
demande domestique suffisante, il
a donc fallu faire des choix d’implan-
tation. « Les usines ultramodernes
installées à l’est sont devenues entre
2005 et 2015 des unités de pure délo-
calisation », conclut l’universitaire.
L’Europe centrale, qui produisait
un peu moins de 1,5 million de véhi-
cules en 2000 selon S&P, en produit
3,6 millions en 2022. La France a
pris le chemin inverse : elle ne pro-
duit plus que 1,4 million de voitures
en 2022, contre 3,3 millions en En acquérant le constructeur tchèque Skoda en 1991, Volkswagen a complété sa gamme
2000. La part de marché de l’Hexa- sans menacer ses sites allemands. Photo Ondrej Deml/AP/Sipa
gone dans la production automo-
bile européenne ne représente plus pays d’Afrique du Nord ou la Turquie Dans un rapport de mai 2020, concurrence sociale de l’UE assure
que 8,9 %, contre 14,2 % pour la se renforce aussi, mais les nou- l’Institut polonais de l’économie une dynamique favorable aux pays
Slovaquie. La France détenait veaux Etats de l’Union ont déve- estimait qu’une relocalisation de la d’Europe centrale et orientale », sou-
encore 13,1 % du marché en 2008, loppé un écosystème industriel production en provenance de Chine ligne Bernard Jullien. Les régimes
date charnière à laquelle son com- solide. Il a rapidement convaincu le pourrait dégager 22 milliards de politiques de ces derniers, moins
merce extérieur automobile a bas- sud-coréen Hyundai-Kia, installé dollars de bénéfices par an dans les regardants sur les questions démo-
culé dans le rouge. en Tchéquie et en Slovaquie. Au pays d’Europe centrale et orientale. cratiques, parfois favorables au pro-
En vingt ans, les coûts salariaux b é n é f i c e d e s n o u ve a u x p ays Base arrière de l’industrie euro- jet de nouvelles routes de la soie,
ont bien augmenté et les compé- membres, « les tensions géopoli- péenne dont les fleurons ont néan- renforcent leur attractivité auprès
tences commencent à se faire plus tiques et les défis logistiques qu’elles moins pris du retard sur la voiture de Pékin. Selon l’expert, l’annonce
rares à l’est. La concurrence avec les provoquent poussent à réduire au électrique, ces pays ont désormais en fin d’année dernière du géant
maximum les chaînes d’approvi- tout intérêt à devenir la tête de pont chinois BYD de l’installation d’une
sionnement », ajoute Nikolaus Lang, de Pékin sur le Vieux Continent. première usine européenne en
directeur associé senior du BCG. D’autant que « la logique de mise en Hongrie n’est qu’un début. n
« Les usines
ultramodernes
installées à l’Est
sont devenues
entre 2005 et 2015 Jeudi avec Les Echos
des unités de pure
délocalisation. »
BERNARD JULLIEN
Série Limitée
Maître de conférences
spécialiste de l’automobile
à l’université de Bordeaux
La seule marque de Luxe
disponible en kiosque
D’un autre côté, les Vingt-Sept ont
des exigences très strictes en
matière d’Etat de droit vis-à-vis des
pays candidats à l’Union comme les
Etats des Balkans occidentaux ou
l’Ukraine. Une position difficile à
soutenir si des Etats eux-mêmes
membres de l’UE ne respectent plus
ces mêmes règles.
ines
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Bus
Tchéquie, Croatie, Bulgarie Hor
loge
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La guerre en Ukraine aggrave la Mod
e
ure
situation, car la Hongrie comme la Cult
de v
ivre
Art
Slovaquie défendent des positions Éva
sio n
hostiles à Kiev, voire favorables à
Moscou. Viktor Orban a toujours
fini par voter les sanctions contre le
Kremlin, les mesures d’aide à
l’Ukraine et même l’ouverture des
négociations avec Kiev en vue d’une
adhésion à l’Union européenne. En
sera-t-il de même s’il est soutenu
par d’autres Etats membres, ce qui
n’était pas le cas jusqu’à présent ?
Après la Slovaquie, les regards se
tournent vers la Tchéquie, où se
tiennent des élections législatives
83 1
l’an prochain. Andrej Babis, un
53 .4
SN 01
autre leader populiste au discours
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ambigu sur l’Ukraine, prépare lui
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aussi son retour au pouvoir. En
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Croatie, les récentes élections ont
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montré qu’une bonne partie de la
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Premier ministre Zoran Milanovic, J
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qui ne veut pas que son pays soit
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« entraîné » dans le conflit ukrainien.
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garie, un pays miné par l’instabilité
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politique et des élections à répéti-
E LI RI
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tion. n
MONDE
Pedro Sanchez a fait son annonce lors d’une simple déclaration, sans la présence de journalistes, sur les marches du palais présidentiel.
Malgré les attaques, Pedro
Sanchez reste au pouvoir
ESPAGNE
Le Premier ministre
espagnol avait pris
cinq jours de réflexion
pour décider
s’il restait en poste
après les accusations
portées contre
sa femme.
Cécile Thibaud
— Correspondante à Madrid
« J’ai décidé de continuer, avec plus de
force encore, si c’est possible. » C’est
ce que Pedro Sanchez a annoncé
lundi lors d’une simple déclaration
sur les marches du palais présiden-
tiel. Il reste au pouvoir après avoir
menacé de démissionner sous la
pression du harcèlement constant
subi par sa famille, sa femme étant
accusée de trafic d’influence dans le
cadre de ses activités professionnel-
les. « Nous allons montrer au monde
comment se défend la démocratie.
Mettons fin à cette boue de la seule
manière possible, avec le rejet collectif
et serein au-delà des couleurs politi-
ques », a lancé le Premier ministre
espagnol, sans annoncer de mesu-
res concrètes pour cette « régénéra-
tion démocratique ».
Ces déclarations ont lieu au
terme de cinq jours de suspense,
alors que le leader socialiste disait
avoir besoin de prendre du recul et
d’ouvrir une période de réflexion
pour savoir « si cela [valait] la peine
de continuer ». Depuis mercredi der-
nier, il s’était retiré dans les apparte-
ments de la résidence officielle du
Palais de la Moncloa pour réfléchir
avec sa femme Begoña Gomez, et
n’avait maintenu qu’un contact
minimum avec son équipe proche,
sans faire état de ses réflexions.
Un « mélodrame »
et de la « frivolité »
« Pedro Sanchez rappelle que la
politique est une activité noble de
service public qui a ses limites », a
commenté le socialiste catalan
Salvador Illa, qui affiche son soula-
gement. Certains alliés du Premier
ministre lui reprochent le « mélo-
drame » et la « frivolité » d’un mou-
vement « insolite qui n’était pas
nécessaire ». Ses détracteurs criti-
quent une « tactique de plus pour
rester au pouvoir ».
Le pays stupéfié par cette menace
de démission inattendue atten-
dait la décision depuis cinq jours.
Les militants socialistes, les alliés
parlementaires, les syndicats et
monde de la culture se sont relayés
tout le week-end pour manifester
leur soutien. Ces déploiements ont
suscité le scepticisme et l’ironie
des dirigeants de droite. Ils dénon-
cent le chantage émotionnel de
Pedro Sanchez pour remobiliser
son électorat, et avertissent d’une
« dérive péroniste ».
Pour le chef de file du Parti popu-
laire, Alberto Nuñez Feijoo, le lea-
der socialiste « a cherché la pola-
risation et la victimisation ». Il lui
reproche « un narcissisme imma-
ture ». « Le show de Sanchez n’est
pas digne d’un dirigeant européen »,
affirme-t-il en dénonçant « les tics
autoritaires du gouvernement ».
Le ministre de la Culture, Ernest
Urtasun, représentant de l’aile gau-
che de l’exécutif, réfute cette idée :
« La majorité de gouvernement n’est
pas construite sur l’adhésion à une
Mardi 30 avril 2024 Les Echos
En Ecosse, la chute
d’une figure
de l’indépendance
ROYAUME-UNI
Humza Yousaf,
Premier ministre
de l’Ecosse,
a annoncé
sa démission,
treize mois après
sa nomination.
Ingrid Feuerstein
— Correspondante à Londres
Albert Gea/Reuters
Humza Yousaf vit ses dernières
heures en tant que Premier
ministre de l’Ecosse. Le leader
indépendantiste écossais a
annoncé sa démission lundi,
à p eine treize mois après
sa nomination au gouverne-
ment d’Edimbourg, en rempla-
cement de la charismatique
Nicola Sturgeon. « Je ne suis
pas prêt à compromettre mes
valeurs pour m’accrocher au
pouvoir, a-t-il déclaré lors
d’une courte allocution. Une
autre personne sera plus à même
de prendre la tête du parti. »
Il restera en poste jusqu’à ce
personne, mais autour d’un pro- qu’un successeur soit nommé.
gramme de progrès et des mesures Humza Yousaf était sous
sociales que nous voulons dévelop- la menace de deux votes de
per », insiste-t-il. défiance cette semaine à Holy-
Après avoir survécu à un putsch rood, le Parlement écossais,
interne du PSOE en 2016 et résisté après la fin de sa coalition avec
aux pressions de Felipe Gonzalez, les Verts. En minorité au parle-
il avait su à la fois reprendre le ment, le « First minister » de
contrôle du parti en 2017 grâce aux l’Ecosse risquait fortement
militants et récupérer le contrôle d’essuyer un vote défavorable.
de la gauche face à la montée de Il a préféré démissionner.
Podemos. « Il est en acier inoxyda-
ble », a dit de lui l’ex-Premier minis- Un père pakistanais,
tre socialiste José Luis Rodriguez une mère kenyane
Zapatero, qui avait lui même subi Agé de trente-neuf ans, Humza
d’intenses campagnes de calom- Yousaf a été élu à la tête du Scot-
nies lors des négociations du tish National Party (SNP), après
processus de fin de l’ETA. la démission surprise de Nicola
En 2018, Pedro Sanchez arrivait Sturgeon, sur fond d’enquête
au pouvoir en gagnant par sur- judiciaire sur les finances du
prise une motion de censure face parti indépendantiste écossais.
à un Parti populaire décrédibilisé Premier musulman à diriger
par une série de scandales de cor- un grand parti britannique, le
ruption. Depuis il avait réussi à dirigeant, né d’un père pakista-
maintenir sa majorité grâce à des nais et d’une mère kenyane,
alliances périlleuses avec les petits incarnait la continuité politi-
partis nationalistes et indépendan- que avec sa prédécesseure,
tistes de tous bords. Disposé à tout mais avait pris les rênes du SNP
pour rester au pouvoir, mais pas dans une passe difficile, alors
forcément à faire souffrir son que la Cour Suprême britanni-
entourage. n que venait d’invalider un nou-
Giorgia Meloni prend la tête de
la campagne des européennes
lons faire en Europe exactement
EUROPE ce que nous avons fait en Italie
le 25 septembre 2022 : créer
La présidente une majorité qui unisse
du Conseil italien veut T
EC NIO
les forces de droite pour
ÉL
mettre sa popularité
renvoyer la gauche dans
au service de son parti l’opposition, même en
EU
pour remporter R O2024
Europe ! » a déclaré la
une victoire éclatante. présidente du Conseil. PÉEN
Elle affirme être leader
des conservateurs européens
Olivier Tosseri qui veulent avoir un rôle décisif
— Correspondant à Rome dans le changement de la politi-
que européenne.
Giorgia Meloni sera la tête de liste
de son parti d’extrême droite, Parmi les priorités, la lutte
Fratelli d’Italia, lors du scrutin contre l’immigration
des 8 et 9 juin prochain. « Je le fais Les derniers sondages créditent
parce que je veux demander aux Fratelli d’Italia de 28,5 % des inten-
Italiens s’ils sont satisfaits du tra- tions de vote – soit 2 points de plus
vail que nous faisons en Italie et qu’en 2022 et quatre fois son score
de ce que nous faisons en Europe », de 2019 lors du dernier scrutin
a-t-elle clamé à l’issue d’un long européen. A l’époque, Giorgia
discours dimanche, vantant ses Meloni comparait le Vieux Conti-
efforts pour défendre la famille nent à un « comité d’entreprises
et les valeurs chrétiennes mais dirigé par les bureaucrates alle-
surtout pour combattre l’immi- mands et français », tout en évo-
gration clandestine. quant un possible « Italexit ».
Elle ne siégera évidemment pas En 2024, elle prône une « Europe
au Parlement européen mais sou- des Etats-nation, une alliance confé-
haite mettre sa popularité au ser- dérale d’Etats souverains, et pas une
vice de son parti pour un véritable Europe fédérale qui transfère tou-
triomphe électoral. « Nous vou- jours plus de compétences à la
08
veau référendum sur l’indépen-
dance. Au sein du parti, frag-
menté depuis l’élection qui
avait suivi le départ de Nicola
Sturgeon, il peinait à susciter
la même adhésion que celle
parfois surnommée la « reine
d’Ecosse ». Son élection à une
courte majorité devant sa rivale
Kate Forbes rendait sa position
fragile. Son avenir a basculé la
semaine dernière, avec la fin
de sa coalition avec les Verts.
Adopté en août 2021, lors des
dernières élections à Holyrood,
l’accord, dit de « Bute House »,
permettait aux deux partis de
dégager une majorité au Par-
lement écossais.
Humza Yousaf
était sous
la menace de deux
votes de défiance
au Parlement.
Humza Yousaf l’a dénoncé
jeudi, alors que l’Ecosse avait
annoncé une semaine plus tôt
qu’elle ne tiendrait pas ses objec-
tifs climatiques, à savoir une
baisse de 75 % les émissions de
gaz à effet de serre d’ici à 2030.
Au grand dam des écologistes,
qui ont crié à la « trahison » poli-
tique. « C’était la bonne chose
pour le pays, a déclaré le Premier
ministre lors de son allocution.
J’espérais continuer à travailler
avec les Verts dans le cadre d’un
accord moins formel. En faisant
ainsi, j’ai clairement sous-estimé
la colère que j’allais déclencher. »
A la suite de cet incident,
Humza Yousaf se trouvait seul
pour se maintenir face à un
parlement où le SNP n’est pas
majoritaire. Sa démission ouvre
la voie à une élection à la tête
du parti pour nommer un suc-
cesseur. Parmi les candidats
possibles figurent Kate Forbes,
candidate malheureuse face à
Humza Yousaf l’an dernier,
ou John Swinney, une figure
historique du parti. Une fois
élu, ce nouveau leader devra se
trouver un allié au sein du parle-
ment d’Edimbourg, sans quoi
une élection à Holyrood n’est
pas à exclure. n
Commission ». Dans son discours
lançant sa campagne électorale,
elle a insisté sur la lutte
contre l’immigration et
la « cancel culture » qui
S
« abjure notre passé et
hait notre civilisation. »
S
NE
Avant même l’officia-
lisation de cette candida-
ture, les affiches électora-
les ont commencé à fleurir
sur les murs de Rome, arborant le
slogan « Avec Giorgia, l’Italie
change l’Europe ». « Je veux que nos
électeurs écrivent mon nom de bap-
tême, Giorgia, sur leur bulletin, a-t-
elle expliqué. Car j’ai toujours
été très fière d’être une personne du
peuple, une personne accessible. »
« Les partis s’identifient à leur
leader car ces derniers jouissent
d’une notoriété bien supérieure
à celle des forces politiques
qu’ils incarnent, explique le
politologue Mattia Diletti. Silvio
Berlusconi l’avait fait avec Forza
Italia. Matteo Salvini avait suivi
la voie en 2019, permettant à la
Ligue d’arriver en tête avec 34 %
des suffrages. »
Un exploit qu’il ne pourra pas
réitérer, le seuil des 10 % étant
désormais difficile à atteindre. n
09 Les Echos Mardi 30 avril 2024
Entre or noir et or vert,
le cœur de Lula balance
Thierry Ogier
— Correspondant à Sao Paulo
Le Brésil a enregistré des progrès
notables dans la lutte contre la
déforestation, considérée à la fois
comme symbolique et hautement
stratégique par la communauté
Le pétrole internationale. La destruction a été
est-il soluble réduite de moitié l’an dernier en
dans le programme de Amazonie par rapport à 2022, et le
président Luiz Inacio Lula da Silva
transition énergétique s’est fixé un objectif de déforesta-
au Brésil ? Sur ce tion zéro à l’horizon 2030. Tout un
symbole…
dossier brûlant, le Son gouvernement a engagé un
président Luiz Inacio vaste programme de transition éco-
Lula da Silva navigue logique. Celui-ci va de la préserva-
tion à la récupération des forêts
entre les impératifs dégradées en passant par la promo-
de la lutte contre tion de la bioéconomie, les nou-
velles énergies renouvelables
les changements comme la biomasse, les biocom-
climatiques et l’usage bustibles (éthanol et biodiesel) les
des combustibles transports urbains non polluants
(bus électrique, métro et tramway),
fossiles. Il a du mal sans parler à terme de l’hydrogène
à trancher et nage vert. Des financements ont été mis
en place. Le Trésor brésilien a levé
dans la plus grande deux milliards de dollars sur les
ambiguïté. marchés internationaux en
novembre dernier afin de financer
ce programme XXL. Il s’agit du pre-
LA
CHRONIQUE
de Pascal Perri
Iran-Russie, les sanctions à l’épreuve de nos faiblesses
e n’est pas le moindre para-
C doxe des sanctions interna-
tionales contre la Russie ou
l’Iran. Elles sont indispensables car
elles sanctionnent des violations du
droit international mais leurs
résultats économiques sont déce-
vants. La Russie, qui sait ce qu’elle
veut, garde le cap d’une croissance
économique en trompe-l’œil
néanmoins robuste. Le monde libre
n’est pas en guerre contre le peuple
russe mais contre ses dirigeants. Et
tout ce qui permettra au régime de
Poutine de garder le contrôle doit
être perçu dans notre camp comme
une défaite. Le Russe de la rue subit
l’inflation de son quotidien. Les prix
des denrées alimentaires ont beau-
coup augmenté et les banques
prêtent à des taux qu’un Européen
de l’Ouest jugerait inacceptables,
jusqu’à 27 %.
L’Iran affronte également une
période de forte inflation qui
mier emprunt souverain « dévelop-
pement durable » réalisé par le Bré-
sil et le ministère des Finances
assure qu’il y en aura d’autres.
Un élan,
mais pas d’unanimité
Toutefois, ce grand élan vert ne fait
pas l’unanimité.
Lula est bien conscient des
enjeux de la lutte contre les change-
ments climatiques, encore renfor-
cés par Emmanuel Macron lors de
sa récente visite en Amazonie.
Dans le même temps, il souhaite
continuer à explorer et à augmen-
ter la production de pétrole, y com-
pris au large du bassin de l’Amazo-
nie. En clair : le Brésil est en faveur
de la transition énergétique et éco-
logique, mais sans prendre des
mesures drastiques ni immédiates
pour réduire l’usage des énergies
fossiles.
Lula a une longue relation avec
l’or noir. Lors de la découverte de
pétrole dans le bassin présalifère
en 2008, il assurait que le Brésil
avait « gagné à la loterie » et que cela
lui garantissait « un passeport pour
l’avenir ». Lui, ancien métallo, a
« toujours été en faveur du pétrole »,
rappelle le sociologue Sergio
déprécie le confort des Iraniens,
toutes classes sociales confondues.
Mais le régime des mollahs et des
Gardiens de la révolution est par-
venu à contourner à son seul profit
les différents paquets de sanctions
internationales américaines ou
européennes.
Dans un monde lisible, unipo-
laire ou au pire bipolaire, les sanc-
tions pouvaient avoir un effet.
L’Union soviétique s’est effondrée
parce qu’elle a épuisé ses ressources
dans une surenchère technolo-
gique avec les Etats-Unis. Dans le
cas de la Russie d’aujourd’hui, les
dirigeants du pays se sont désen-
sibilisés du dollar et se préparent de
longue date à un conflit global
contre l’Occident en cultivant de
nouvelles alliances.
Moscou substitue ses anciens
fournisseurs grâce à la Chine, l’Inde
et la Corée du Nord : des pièces
détachées, de l’électronique, des
Abranches. Le pétrole, comme
l’industrie automobile, est perçu
comme un vecteur de développe-
ment et de l’industrialisation pour
les pays à revenus intermédiaires.
Ce n’est pas un hasard si son pro-
gramme de gouvernement parle
aussi bien de transition écologique
que de réindustrialisation ou de
« néo-industrialisation ».
De fait, le géant latino-américain
est devenu l’un des dix plus grands
producteurs de pétrole au monde.
Il a même été officiellement invité à
rejoindre l’Opep +, une sorte
d’Opep élargie aux partenaires pri-
vilégiés… Mais comme les réserves
de son bassin présalifère devraient
commencer à décliner à partir
de 2030, le Brésil envisage de relan-
cer le programme d’exploration et
production, y compris dans le bas-
sin de l’Amazonie.
Une décision controversée, au
sein même du gouvernement.
Selon le ministre des Mines et de
l’Energie, Alexandre Silveira, le
pétrole a encore de beaux jours
devant lui, et le Brésil doit assurer
sa production durant les quarante
prochaines années. Une partie des
revenus de l’exploration pétrolière
peuvent servir à financer la transi-
fournitures industrielles en prove-
nance des usines chinoises dans des
proportions suffisantes pour
alimenter son appareil de produc-
tion ; des armes et des munitions en
Dans ce monde
dangereux,
l’Europe divisée est
une proie facile.
Elle n’est pas menacée
d’affaiblissement
mais
d’appauvrissement.
provenance de Corée du Nord
contre des denrées alimentaires ; et
un puissant débouché pour ses
hydrocarbures avec la complicité
active et intéressée du régime
tion énergétique pendant plusieurs
décennies, soutient-il.
Mais pour sa consœur du minis-
tère de l’Environnement, Marina
Silva, il importe de mettre un terme
au plus vite à l’ère des combustibles
fossiles pour freiner le réchauffe-
ment climatique. Et surtout, de ne
pas chercher du pétrole dans la
région de l’Amazonie !
Jouer sur les deux tableaux
L’Institut brésilien de l’environne-
ment (Ibama), qui dépend de son
ministère, a déjà rejeté une
demande d’autorisation d’explora-
tion de pétrole dans la région. Tou-
tefois, le ministère de l’Energie a
fait appel de la décision, en affir-
mant que la zone de forage se situe-
rait à 450 km de la côte amazo-
nienne. La bataille fait rage au sein
même du gouvernement…
Lula doit trancher la polémique
et concilier le désir de continuer à
exploiter les ressources du pétrole
« jusqu’à la dernière goutte » et les
impératifs de la lutte contre les
changements climatiques. « La
contradiction existe bel et bien,
relève Mario Astrini, directeur de
l’Observatoire du climat, un collec-
tif d’ONG locales. Mais je pense que
indien. Les sanctions sont d’autant
plus inefficaces que l’Inde nourrit
une ambition revendiquée de
puissance. L’industrie indienne
brûle du charbon comme jamais
mais elle a besoin du pétrole et du
gaz iranien. Téhéran lui offre de
surcroît un accès sécurisé à son port
de Tchabahar pour accéder aux
différents marchés d’Asie centrale.
L’Inde et la Chine sont les princi-
paux blanchisseurs des échanges
avec la Russie.
Les sanctions sont inefficaces
pour une seconde raison qui tient à
nos dépendances. L’Europe n’est
pas taillée pour la compétition bru-
tale dans laquelle le pronostic vital
des plus faibles sera engagé. Elle
dépend de l’extérieur pour 60 % de
ses besoins énergétiques tandis que
les Etats-Unis sont autonomes et la
Chine dépendante pour seulement
20 %. C’est la deuxième raison pour
laquelle les sanctions économiques
IDÉES
Dominiqque Boll pour « Les Echos »
le gouvernement va continuer de
jouer sur les deux tableaux. A savoir
en finir avec la déforestation tout en
encourageant l’usage du pétrole ».
« En apparence, reconnaît-il, ce rai-
sonnement ne tient pas debout. Il
s’agit d’un gouvernement qui pré-
tend être un des leaders dans les
négociations sur le climat, tout en sti-
mulant le plus grand problème lié au
climat. »
Tôt ou tard, le président brésilien
sera amené à arbitrer le conflit
interne à son gouvernement. Cer-
tains observateurs pensent que la
solidarité avec sa ministre de
l’Environnement va l’emporter.
« Lula est une sorte de médiateur. Il
semble qu’il va laisser Marina Silva
l’emporter sur ce point et ne va pas
s’opposer à l’avis des techniciens du
ministère de l’Environnement »,
estime Sergio Abranches.
Toutefois, le Brésil a plus que
jamais besoin de la manne pétro-
lière, notamment pour atteindre
des objectifs budgétaires ambi-
tieux. Et Lula a déjà arbitré en
faveur du grand barrage de Belo
Monte à la fin des années 2000,
contre l’avis de Marina Silva.
L’issue du combat reste incer-
taine… n
sont d’un effet limité : la nécessité.
Pour preuve, nos importations de
GNL russe ont augmenté de 40 %
en 2023.
Dans ce monde dangereux,
l’Europe divisée est une proie facile.
Elle n’est pas menacée d’affai -
blissement mais d’appauvris -
sement. L’Allemagne est obsédée
par le marché chinois, elle est prête
à tous les silences et à tous les
renoncements pour y vendre ses
productions. Les pays aux marges
de l’Union et les petits pays sont
majoritairement convaincus qu’un
sursaut s’impose car la menace
est à leurs portes. L’Union euro-
péenne, même imparfaite, n’est pas
le problème. Elle serait la seule
solution pour peu qu’on lui donne
les moyens d’une ambition réno-
vée.
Pascal Perri est économiste
et géographe.
IDÉES
analyses
Les racines
écologiques
de la culture
L’une des hypothèses les plus audacieuses de la biologie
évolutionniste vient d’être validée par une équipe
de l’université de Louvain.
LA
CHRONIQUE
d’ Etienne Grass
tigmergie ! » Le mot a de quoi vous
S effrayer, sans doute logé quelque part
entre un traité de sciences naturelles
et un livre de science-fiction. Il mérite qu’on
s’y attarde. Cette « stigmergie » désigne une
des hypothèses les plus audacieuses de la
biologie évolutionniste : l’idée selon laquelle
la culture peut exister sans aucune forme
d’apprentissage.
Chacun sait depuis longtemps que les
animaux sont capables d’une coordination
naturelle éblouissante. Leur intelligence peut
fonctionner en essaim. Elle s’est formée dans
une co-évolution entre des déterminants
génétiques et l’accumulation de phénomènes
culturels, les fameux « memes » dont les
linguistes parlent depuis plus de quarante ans
à la suite du philosophe Daniel Dennett. Ces
memes sont les unités de base d’une culture.
Les sous-jacents de la langue. Ils peuvent être
copiés, transmis, mémorisés ou appris. Ils
forment le tissu sur lequel l’intelligence pose
sa trame.
Châteaux de termite
et nids d’abeille
L’avantage comparatif de l’espèce humaine
est de savoir accumuler ces memes. Les
châteaux de termite ou les formes géomé-
triques des nids d’abeille nous fascinent car ils
nous les font apparaître dans leur pureté.
Dans une expérience astucieuse parue le
mois dernier dans « Current Biology », une
équipe de l’université de Louvain, en Belgi-
que, a établi la validité de l’hypothèse de la
stigmergie pour expliquer la formation de ces
memes. L’équipe a testé 400 colonies de Meli-
ponini, une forme d’abeille sans dard dont
une caractéristique est particulièrement inté-
ressante : elle connaît deux traditions dans
l’architecture de ses nids. Une grande
LE LIVRE
DU JOUR
Ecrire sans ChatGPT
LE PROPOS Il a fallu deux ans
pour que Fatie Toko termine l’écriture
de son premier livre. Sur cette
période, la tech a été révolutionnée
comme rarement. Avènement de
l’intelligence artificielle, évolutions
faramineuses en quelques mois et
des outils devenus populaires comme
ChatGPT ; telles sont les évolutions
qui ont bousculé le récit de l’autrice.
Directrice de la transformation et
de l’innovation data & IA du groupe
La Poste, Fatie Toko propose
un récit « techno-optimiste, mais
pas technonaïf » et commence
par une réflexion sur les liens entre
innovation et progrès. Puis viennent
des exemples d’utilisations bénéfiques
de la technologie dans la santé,
l’éducation, l’écologie et l’aide
aux populations vulnérables
avec deux entretiens pour chacun
de ces sujets. Sans oublier les enjeux
écologiques, politiques et inter-
nationaux ni les tensions que les
nouvelles technologies provoquent.
L’INTÉRÊT Chaque outil peut
être utilisé à bon ou mauvais escient.
Les nouvelles technologies
n’échappent pas à cette règle
majorité (95 %) de colonies forme des nids à
l’horizontal ; une architecture alternative en
spirale existe chez une minorité (5 %). Ces
essaims se perpétuent sans explication
évidente, sans qu’aucun facteur génétique
n’intervienne.
Tissu culturel de l’intelligence
Aucune dynamique évolutive ne favorise un
meme sur un autre. En hybridant les essaims,
l’équipe a montré que les abeilles transférées
d’un meme à l’autre basculent de façon
immédiate. Elles s’adaptent sans délai et chan-
gent leur façon de travailler. Surtout, elles le
Une forme de culture
semble exister chez des
abeilles, mais les premiers
artefacts de cette culture
s’enracinent dans
l’environnement, et non
dans des interactions
sociales.
font sans période d’apprentissage. En d’autres
termes, non seulement une forme de culture
semble exister chez ces abeilles – ce que l’on
savait –, mais les premiers artefacts de cette
culture s’enracinent dans l’environnement, et
non dans des interactions sociales.
A la fin de son magnum opus, « From Bac-
teria to Bach and Back », Dennett souligne le
risque pour l’humanité de perdre le fil d’une
compréhension par le bas (« bottom up ») du
tissu culturel de l’intelligence. Alors que nous
sommes brouillés dans un monde d’artefacts,
il nous alerte contre le risque de prolifération
de memes déracinés. « Nous devons préserver
l’espoir que les prothèses cognitives conti-
nueront à être traitées comme des parasites de
l’intelligence, des outils et non des collabo -
rateurs. » Ce grand sage qu’était Daniel
Dennett est décédé le 19 avril à l’âge de 82 ans.
Il va nous manquer.
Etienne Grass est directeur exécutif
de Capgemini Invent en France.
de l’innovation. Malgré des
conséquences négatives possibles
comme la perte d’emplois,
les nouvelles technologies peuvent
être utilisées pour aider, voire sauver
les populations.
LA CITATION « Plutôt que de céder
à la tentation du pessimisme, il ne tient
qu’à nous de reprogrammer nos
imaginaires. Il y aurait mille exemples
pour alimenter des scénarios de fictions
positives, pour passer de la dystopie
à l’utopie. L’usage est la condition
du succès de l’innovation. Et cela tombe
bien, les usages c’est nous. »
—Flavien Delcloque-Le Banner
Et si la tech pouvait sauver
le monde ?
de Fatie Toko. Editions de l’Aube,
216 pages, 21 euros.
Le secret social
de la Silicon Valley
Aux Etats-Unis, l’Autorité de la concurrence veut permettre aux salariés
de changer plus facilement d’employeur. Un système déjà en place
en Californie, où il a contribué aux prouesses de la Silicon Valley.
LA
CHRONIQUE
de Jean-Marc
Vittori
ibérez nos camarades ! » Ce slo-
L gan va bientôt être entendu aux
Etats-Unis. Enfermés dans une
cage juridique, des dizaines de millions
de salariés américains devraient bientôt
être libérés. C’est une vraie petite révolu-
tion, qui pourrait renforcer le leadership
américain. Et rappelle aux Européens
qu’ils doivent, eux aussi, se poser des
questions sur des entraves néfastes.
Outre-Atlantique, 30 millions de
salariés sont soumis à une clause de
non-concurrence. En signant leur
contrat de travail, ils se sont engagés à
ne pas aller travailler chez un concur-
rent juste après avoir démissionné. C’est
un frein majeur à la liberté du travail.
Abuser d’une facilité
Au départ, les entreprises avaient
d’excellentes raisons d’inscrire cette
clause. Un ingénieur peut emporter
avec lui des secrets de fabrication
essentiels à la compétitivité de l’entre-
prise, un commercial connaît des infor-
mations sur les prix de son entreprise
qui peuvent permettre à un rival de la
déstabiliser.
Mais les employeurs ont abusé de
cette facilité. Au pays de la « common
law » et des avocats requins, ils ont
imposé cette règle à des employés de res-
tauration rapide, des infirmières d’hôpi-
taux, des barmen. Leur but n’est plus la
protection de l’entreprise, mais la réten-
tion des salariés. Contre leur gré.
Le sujet est ancien. Dès le XVe siècle,
un juge anglais s’est prononcé sur le cas
d’un apprenti qui voulait changer de
maître ! Ces dernières années, le débat
s’est ravivé dans les pays anglo-saxons
avec la baisse du chômage qui ouvre
davantage d’opportunités aux salariés.
Notamment au Royaume-Uni, où la
situation est encore plus marquée
qu’aux Etats-Unis (un salarié sur quatre
serait soumis à une clause de non-
concurrence contre un sur cinq chez les
Américains).
Aux Etats-Unis, l’Autorité de la
concurrence (Fair Trade Commission,
Mardi 30 avril 2024 Les Echos
ou FTC) est passée à l’action. Cette insti-
tution dirigée par Lina Khan, une jeune
et brillante juriste nommée par Joe
Biden, a publié le 23 avril 2024 une règle
bannissant les clauses de non-concur-
rence. Les seuls salariés encore concer-
nés représentent moins de 1 % des effec-
tifs : les cadres dirigeants qui gagnent
plus de 150.000 dollars par an et pren-
nent des décisions stratégiques.
Peser sur les investissements
Evidemment, les entreprises protes-
tent. La Chambre américaine de com-
merce a aussitôt attaqué la FTC devant
un tribunal du Texas. Elle soutient que
cette autorité indépendante n’est pas
légitime pour créer une règle à carac-
tère général, qui relève du politique.
Les employeurs ont des arguments.
Dans une étude publiée en 2023, Jessica
Jeffers, une professeure associée
d’HEC, a montré que les limitations aux
clauses de non-concurrence décidées
par les tribunaux de certains Etats amé-
ricains ont pu peser fortement sur les
investissements des entreprises. Mais
elle montre aussi que les créations
d’entreprises nouvelles deviennent
alors plus nombreuses.
La loi californienne
prohibe les clauses
de non-concurrence.
L’émulation passe
par la capacité à attirer
très vite les meilleurs.
Un exemple est à cet égard frappant :
la Californie. En 1872, cet Etat s’est en
effet doté d’une loi différente. Son
auteur, le juriste David Dudley Field,
était sensible aux critiques de la « com-
mon law » anglo-saxonne. Il s’est ins-
piré du Code de la Louisiane, écrit
notamment par des juristes français.
Résultat : la loi californienne prohibe
les clauses de non-concurrence (cer-
tains soutiennent que c’était pour
encourager le dynamisme des cher-
cheurs d’or, alors en plein boom). Cette
particularité est le secret social de la Sili-
con Valley : l’émulation passe par la
capacité à attirer très vite les meilleurs.
Un exemple célèbre est Gordon
Moore, l’un des fondateurs de la firme
10
Lucy Nicholson / Reuters
Intel (et l’auteur de la fameuse « loi de
Moore »). Cet ingénieur avait d’abord
quitté le laboratoire Shockley en 1957
pour créer une nouvelle firme, Fair-
child, avec sept collègues (Shockley, qui
était Prix Nobel, les surnomma « les huit
traîtres »). Une décennie plus tard, il réi-
téra l’opération pour créer ce qui devien-
dra Intel. Il n’aurait sans doute pas pu le
faire dans un autre Etat américain.
Aujourd’hui, le mercato reste en per-
pétuelle ébullition autour de San Fran-
cisco. Le quart des salariés de Meta et de
Google viennent d’autres firmes de la
tech. Pour les employeurs, c’est souvent
un casse-tête, parfois un enfer. Ce n’est
pas un hasard si la Chambre de com-
merce dépose plainte aux Texas, car cet
Etat veut devenir la nouvelle Silicon
Valley. Pour les innovateurs, c’est au
contraire un éden.
Protection discutable
L’Europe n’a pas ce genre de souci. Si les
clauses de non-concurrence y existent,
elles sont rares. Les salariés peuvent
changer d’entreprise plus facilement.
Les employeurs s’en accommoderaient
sans doute s’ils n’avaient pas une autre
difficulté : eux peuvent plus difficile-
ment changer de salariés.
Les coûts des licenciements sont bien
plus élevés en Europe, en particulier en
France, qu’aux Etats-Unis. Cette protec-
tion des salariés est légitime pour les
peu qualifiés, qui ont du mal à retrouver
un emploi correctement payé. Elle est
plus discutable pour les très qualifiés,
qui se recasent vite et bien.
En France, les banques américaines
venues s’implanter en force à Paris
depuis le Brexit, soutenues en privé par
leurs consœurs françaises, plaident par
exemple pour un plafonnement des
indemnités de licenciement pour les
traders (à un demi-million d’euros tout
de même !).
Deux entrepreneurs, Yann Coatan-
lem et Olivier Coste, ont une suggestion
du même genre pour les employés de la
tech, qui eux non plus n’ont pas de souci
d’emploi. Ils proposent une réglemen-
tation beaucoup moins protectrice
pour les salariés bien payés. Les obsta-
cles sont nombreux sur la route. Mais
les règles du travail sont essentielles à la
compétitivité d’un pays.
Jean-Marc Vittori est éditorialiste
aux « Echos ».
 11 Les Echos Mardi 30 avril 2024
opinions
LE POINT
DE VUE
de Stéphane Sarrade,
Thibault Cantat
et Bertrand Charmaison
ans les scénarios prospectifs vi-
D sant à élaborer des visions d’un
monde neutre en carbone à l’ho-
rizon 2050, la voie de la séquestration
géologique du CO2 (CCS) est souvent pré-
sentée comme étant une solution de
dernier recours pour des secteurs in-
dustriels qui ne pourraient pas être
décarbonés autrement, notamment via
l’électrification de leurs procédés ou en
utilisant de l’hydrogène bas carbone.
Mais depuis quelques mois, cette voie
CCS est envisagée par ses promoteurs
comme la solution première pour dé-
carboner l’industrie en Europe tout en
préservant les emplois et en évitant les
délocalisations des industries forte-
ment consommatrices d’énergie.
Reposant sur les énergies fossiles, le
CCS permettrait de limiter les investisse-
ments à réaliser sur les sites industriels
existants, en y adjoignant « seulement »
des installations de captage du CO2 émis.
Ces sites seraient raccordés à une infras-
tructure de transport du CO2 à construi-
re, afin de l’acheminer vers des sites d’en-
fouissement dans des couches géolo-
giques profondes, notamment sous la
mer du Nord.
Comme ces technologies d’injection
du CO2 sont déjà utilisées par les compa-
gnies pétrolières pour extraire plus de
pétrole et de gaz, il suffirait de les trans-
poser afin que le CO2 soit injecté dans
des structures géologiques stables qui
devront le séquestrer pour des centai-
nes d’années.
De nombreux projets dans le domai-
ne du CCS émergent en Europe, souvent
portés par des majors pétrolières et ga-
zières, affichant l’ambition de mettre en
place dans la prochaine décennie une
infrastructure industrielle CCS complè-
te avec des cibles de coût autour de
150 euros pour capter, transporter et
stocker une tonne de carbone. Cette pro-
messe paraît suffisamment attractive
LE POINT
DE VUE
de Bernard Meunier
ans son combat contre les dan-
D gers du tabagisme, le Royaume-
Uni va interdire l’achat de ciga-
rettes pour toutes les personnes nées
après 2009. L’addiction à la nicotine,
molécule perturbatrice du système ner-
veux central, étant forte, il est certain
que la vente clandestine de cigarettes va
croître, en offrant aux narcotrafiquants
un élargissement de leur marché déjà
très lucratif.
De manière paradoxale, la restriction
et maintenant l’interdiction de l’accès au
tabac sont mises en place alors que,
dans le même temps, la permissivité et
le libre accès sont favorisés pour les
autres drogues perturbatrices du systè-
me nerveux central. Les mêmes pays
qui mènent le combat contre le tabac
adoptent, ou souhaitent adopter, une lé-
gislation favorable aux drogues « dou-
ces », y compris en allant jusqu’à dépé-
naliser la détention de petites quantités
Dessin Mailys Glaize pour « Les Echos »
de drogues « dures ».
Est-ce à dire que la perturbation du
fonctionnement du cerveau par ces dro-
gues n’est pas un problème de santé pu-
blique ? Les législateurs de nombreux
pays semblent dire oui, en ne focalisant
l’interdit que sur la nicotine.
Le cancer lié au tabagisme est dû à la
combustion de la lignine du tabac dont
la fumée inhalée contient des composés
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Décarbonation :
séquestrer le CO2,
la solution miracle ?
pour de nombreuses parties prenantes
qui soutiennent sa mise en place rapide.
Cette vision « tout-CCS » présente tou-
tefois un certain nombre de risques, qu’il
convient de bien apprécier avant de
prendre des décisions pour le très long
terme. D’abord, cette filière accroît le re-
cours aux énergies fossiles. En effet, le
captage du CO2 sur les sites industriels
conduit mécaniquement à un accroisse-
ment de la consommation d’énergie des
sites industriels, les procédés de captage
demandant de l’énergie supplémentaire.
Nous ne pourrons
malheureusement pas
faire l’économie de
repenser nos modèles
d’organisation.
Les industriels seront donc encore
plus exposés aux variations des prix de
ces énergies, importées en plus d’être
fossiles. Un recours massif au CCS irait
ainsi à l’encontre du souhait de renfor-
cer la souveraineté énergétique euro-
péenne, et éloignerait la France et
l’Union européenne des objectifs pris ré-
cemment lors de la COP28 à Dubaï pour
une transition hors des énergies fossiles.
De plus, des doutes sérieux existent
sur la compétitivité d’une filière euro-
péenne, au regard notamment de solu-
tions CCS envisagées dans d’autres par-
ties du monde. Au Texas notamment, il
existe déjà une infrastructure de pipeli-
nes de CO2 de plusieurs milliers de kilo-
mètres développée par l’industrie pé-
trolière, des structures géologiques
adaptées et accessibles, et une percep-
tion sociétale positive sur les activités de
forage qui permettent d’imaginer pou-
voir enfouir le CO2 à proximité immédia-
te des sites industriels. Les coûts com-
plets envisagés par la filière CCS texane
Tabac et drogues : deux
poids, deux mesures
cancérigènes. Qu’en est-il de la fumée
des « herbes récréatives », la combus-
tion de leur lignine serait-elle inoffensi-
ve ? Il y aurait ainsi la mauvaise fumée
d’un côté et la bonne de l’autre. Quelle
qu’en soit l’origine, l’inhalation des pro-
duits de combustion de la lignine, com-
posé essentiel des plantes, n’est pas re-
commandable pour les poumons.
Les mêmes pays
qui mènent le combat
contre le tabac adoptent
une législation favorable
aux drogues « douces ».
Quant au côté thérapeutique des dro-
gues douces, il n’a jamais été démontré
dans des essais cliniques conduits en
double aveugle. Les effets bénéfiques
sont essentiellement invoqués par dé-
claration des pratiquants, loin des mé-
thodes rigoureuses utilisées dans les
études cliniques permettant de valider
des médicaments.
Ainsi, nous sommes en train d’appli-
quer au tabac la législation des drogues
du siècle dernier et, à l’inverse, nous ac-
cordons aux drogues, y compris dures,
la permissivité accordée au tabac à la
même époque. Le cinéma actuel n’aime
sont de l’ordre de 50 à 60 euros la tonne
de CO2. Comment les productions décar-
bonées via une filière CCS européenne
pourront-elles être compétitives avec un
tel handicap structurel de coût ? Permet-
tront-elles de maintenir une compétiti-
vité européenne comme espéré ?
En réalité, la mise en place d’une in-
frastructure tout-CCS préempte d’autres
solutions plus durables. Au lieu d’être
stocké, le CO2 capté sur les sites indus-
triels pourrait aussi être réutilisé pour
constituer la matière première dans une
approche d’économie circulaire du car-
bone dite CCU (captage et utilisation du
carbone). Cette voie CCU envisage par
exemple de recombiner ces molécules
de CO2, localement, avec de l’hydrogène
bas carbone pour produire des e-fuels
qui réduiront l’empreinte carbone de
l’aviation et du transport maritime.
Il serait aussi possible de synthétiser
des molécules pouvant être à nouveau
utilisées dans des applications indus-
trielles (chimie par exemple). Ces voies
prometteuses pourraient être compro-
mises si une infrastructure de collecte
du CO2 est dédiée exclusivement à son
enfouissement.
Si la voie CCS fait probablement partie
du panel des solutions à développer
pour atteindre la neutralité carbone, elle
ne constitue pas la solution miracle qui
permettra de décarboner nos écono-
mies. Nous ne pourrons malheureuse-
ment pas faire l’économie de repenser
nos modèles d’organisation et de réduire
notre dépendance aux énergies fossiles.
Stéphane Sarrade est directeur
du programme énergies au CEA.
Thibault Cantat est directeur
du programme économie circulaire
du carbone au CEA.
Bertrand Charmaison est directeur
de l’Institut de recherche et d’études
en économie de l’énergie du CEA.
pas montrer des images avec des ciga-
rettes, mais il n’est plus rare de voir ces
dernières remplacées par des « joints ».
Les puissants lobbys de l’industrie du
tabac ont bloqué pendant des décennies
la lutte contre le tabagisme, mais qu’en
est-il pour ceux des drogues dures ? Les
narcotrafiquants ont-ils gagné deux ba-
tailles essentielles pour eux ? Celle de
l’opinion publique qui se laisse persua-
der que seul le tabac est dangereux, et
celle de l’élargissement de sa zone de
chalandise en intégrant le tabac dans les
marchés clandestins.
Le « tabac tue », comme cela est indi-
qué sur les paquets de cigarettes, mais
pourquoi une telle campagne n’intègre-
t-elle pas toutes les autres drogues ?
Deux poids, deux mesures, pour des
produits qui nuisent gravement à la san-
té, pour reprendre le slogan qui ne s’ap-
plique qu’au tabac.
La bataille contre les drogues n’est pas
perdue, mais il faut qu’une partie de
l’opinion des pays occidentaux arrête de
regarder avec une certaine complaisan-
ce les drogues autres que le tabac. Rien
n’est doux dans ces drogues, ni dans leur
consommation ni dans leur trafic.
Bernard Meunier est membre
de l’Académie des sciences et de
l’Académie nationale de pharmacie.
IDÉES
cinéma
La symphonie du marché de l’art
Adrien Gombeaud FILM FRANÇAIS tuels, Pascal Bonitzer préfè-
En 1914, Egon Schiele s’atta-
que aux « Tournesols » de
Le Tableau volé
de Pascal Bonitzer.
Avec Alex Lutz, Léa
re raconter l’impact d’un ta-
bleau sur plusieurs person-
nages. Le chef-d’œuvre de
Van Gogh. Il livrera un « re- Drucker, Nora Hamzaoui. Schiele, victime de la folie
make » superbe et torturé, 1 h 31. des hommes et de leur cupi-
une toile mythique et secrè- dité, peut aussi améliorer
te, vite emportée dans le maelström du leur existence. Ainsi, chacun sortira de cette
XXe siècle et de ses guerres. On crut long-
temps ces tournesols perdus. Et puis, un
jour, les tournesols ont refleuri de façon im-
probable, dans un modeste salon de l’est de
aventure réconcilié avec lui-même et avec
son passé. Prêt à ouvrir une nouvelle page de
sa propre histoire, professionnelle ou senti-
mentale. L’art ne change pas le monde, il
la France. n’empêche pas les guerres, mais il peut aider
A partir de cette histoire vraie, Pascal ceux qui l’approchent à mieux vivre.
Bonitzer construit une fiction fluide, élégan- Le plus bel aspect du film tient peut-être
te et intelligente. André Masson (joué par dans la mise en scène de la toile même. Dans
Alex Lutz), commissaire-priseur doué et re- la façon dont, sous nos yeux, l’objet ressusci-
tors, met la main sur le trésor. Il est épaulé te et dont la lumière qu’il irradie évolue au fil
par Aurore, une jeune assistante mythoma- des séquences. Du salon où le tableau repose
ne (Louise Chevillotte), et par son ex-épouse à la merci d’un jeu de fléchettes à la salle des
Bertina (Léa Drucker). Plus le film avance, ventes, on assiste au réveil d’un géant qui
plus le destin de ces « Tournesols » se précise s’étire en craquant son ossature… jusqu’à
et plus de nouveaux personnages viennent une scène d’enchères spectaculaire, filmée
se greffer autour du tableau de Schiele. comme le concert d’un grand orchestre
symphonique, dirigé par un commissaire-
Le réveil d’un géant priseur virtuose des chiffres. Enfin, au-delà
Dans le large corpus des films sur l’art, « Le du marché, « Le Tableau volé » exprime cet-
Tableau volé » constitue un cas particulier et te belle idée que l’art transporte d’autres va-
remarquable : il ne parle ni de la création leurs. Que la beauté d’un tableau tient dans
d’une œuvre, ni de sa copie par un faussaire, le geste de son créateur, comme dans le re-
ni de son vol dans un musée par un cambrio- gard qu’une époque ou qu’un simple passant
leur. En esquivant tous les schémas habi- viendra poser sur l’œuvre. n
Alex Lutz dans le rôle d’un commissaire-priseur doué et retors,
filmé comme un chef d’orchestre. Photo Pyramide Films
L’Ouest selon Viggo
Olivier De Bruyn FILM AMÉRICAIN Hawks et Anthony Mann
Acteur et personnalité aty-
pique, Viggo Mortensen, la
star du « Seigneur des an-
Jusqu’au bout
du monde
de Viggo Mortensen.
Avec Vicky Krieps, Viggo
dans « Jusqu’au bout du
monde », un western où il
donne libre cours à sa fasci-
nation pour la nature sau-
neaux » et le comédien féti- Mortensen, Solly McLeod. vage et pour les personna-
che de David Cronenberg 2 h 09. ges mutiques et mystérieux.
(« A History of Violence », Mais si le cinéaste, ennemi
« Les Promesses de l’ombre »…), avait signé juré des effets ostentatoires, met en scène
un convaincant premier film en tant réalisa- des territoires et des figures identifiables par
teur en 2020, « Falling », où il examinait les le spectateur dès les premières minutes, il
relations toxiques au sein d’une famille prend également soin d’emprunter des che-
américaine. L’imprévisible Viggo récidive mins de traverse et d’échapper aux repré-
avec « Jusqu’au bout du monde », un wes- sentations convenues.
tern où le classicisme formel est le meilleur
allié de l’audace thématique. Romanesque et douloureux
1860, dans l’Ouest américain. Vivienne, Dans ce western qui n’a rien d’académique,
une jeune femme d’origine canadienne et au Viggo Mortensen s’intéresse en tout premier
tempérament farouchement indépendant, lieu à son héroïne (Vicky Krieps), une femme
rencontre Holger, un immigré danois. Un volontaire qui, provisoirement abandonnée
coup de foudre impose ses lois entre ces par son époux (incarné par le cinéaste) et ar-
deux Américains d’adoption qui décident de mée de son seul courage, affronte la domina-
s’installer dans un coin reculé du Nevada où tion des hommes et une culture de la violen-
ils espèrent trouver un havre de paix. La ce qui ne tolère aucune contestation.
guerre de Sécession brise bientôt cette har- Avec cette histoire romanesque et dou-
monie amoureuse et Holger, parti combat- loureuse, avec ce récit de vengeance qui sur-
tre au front, laisse seule sa compagne dans prend jusqu’à son terme, le cinéaste, sans
un univers où tous les coups sont permis, didactisme, regarde droit dans les yeux cer-
surtout les pires. tains fondamentaux américains immortali-
Viggo Mortensen, 65 ans, a été profondé- sés dans les westerns (la loi du plus fort, la
ment marqué par les grands maîtres du ci- haine de l’étranger, le machisme) et honore
néma américain dans son adolescence. Il des protagonistes émouvants qui, sans un
assume sa dette envers John Ford, Howard mot de trop, s’opposent à l’abjection. n
 IDÉES
prospective
Le design
est-il en crise ?
LA
CHRONIQUE
de Jean-Louis Frechin
epuis 2020, le design semble traverser une
D crise aux Etats-Unis, avec des récents
licenciements chez des acteurs du
numérique comme Accenture, Expedia, IBM ou
Ideo, la firme à l’origine du design thinking. Aux
débuts du numérique, le design était considéré
comme secondaire face aux exigences techniques.
Apple a changé cette perception avec l’iPhone
en 2007, engrangeant près de 26 milliards de dollars
de bénéfices quatre ans plus tard. Concevoir de
beaux produits appréciés des consommateurs
semblait être la clé du succès. Toutes les entreprises
ont alors voulu ressembler à Apple et embrasser la
révolution numérique en cours. La D.School de
Stanford et Ideo ont lancé alors le design thinking,
une méthode centrée sur l’utilisateur et simplifiée à
l’extrême, qui a reçu un engouement mondial.
Aujourd’hui, après dix ans de croissance,
certaines organisations annoncent abandonner
le design, le jugeant inefficace. Pour Robert
Brunner, créateur de l’Apple Design Group et
fondateur de l’agence de design Ammunition,
« nous sommes passés de “waouh, le design peut
sauver le monde” à “mince, c’est difficile” ».
Cette crise peut s’expliquer de plusieurs manières.
Les cycles de croissance et de ralentissement sont
courants dans les secteurs technologiques ou ultra-
financiarisés aux Etats-Unis. Le design reste
incompréhensiblement une variable d’ajustement.
Alors, cette crise est-elle celle du design ou de ses
perceptions par les grandes sociétés de conseil et les
dirigeants d’entreprise ? Le boom du design thinking
a transformé cette activité de conception en un
langage de consultant, dénué de ses forces
créatrices. L’embauche d’un designer, une formation
en design thinking, la recherche utilisateur ne fait
pas d’une entreprise une « design company », ni ne
garantit le succès d’un produit. On assiste aussi à une
« commoditisation » du « design UX » ou du « service
design », disciplines aux contours et aux livrables
flous, aujourd’hui facilement automatisables ou
délocalisables. Le monde a ainsi progressé avec les
mêmes méthodes, très différentes de celles d’Apple,
entraînant les mêmes résultats et les mêmes
déceptions généralisées.
Dimension culturelle
Dans une entreprise, il est toujours ardu pour un
designer manager d’être force de proposition. Le
design est souvent subordonné aux forces
technologiques ou de marketing, comme une
simple fonction. Le numérique, à cet égard, a
beaucoup à apprendre du secteur automobile, où
l’on vend désormais principalement du design et des
sensations plus que des moteurs, comme Renault,
ou de l’industrie, comme Schneider Electric où le
design a accompagné la montée des services.
Pour s’intégrer à l’entreprise, le design subit
également les lacunes des formations initiales des
designers. Ceux-ci doivent renforcer leurs
compétences. Cette crise exprime en définitive la
difficulté des entreprises à comprendre ce qui ne
leur ressemble pas. Elle révèle également leurs
embarras à saisir l’innovation non technologique, la
création de confiance dans la durée, la dimension
culturelle et le rôle essentiel du capital humain dans
la pratique du design. Le design en entreprise doit
être bien positionné. C’est-à-dire porté par une
vision, à l’exemple de celle de l’ancien PDG d’IBM
Thomas J. Watson, « Good design is good business »,
qu’il serait dommage d’oublier.
Jean-Louis Frechin est directeur de Nodesign.
Dessin Mailys Glaize pour « Les Echos »
SUR LE WEB
L’INVENTION Le QR Code de Mayam
vole au secours du vrac
a A lire sur lesechos.fr/idees-debats/
sciences-prospective
Newsletter sciences & prospective
a Abonnement sur lesechos.fr/newsletter
PHYSIQUE // L’Europe s’est dotée d’un laser de 10 pétawatts, une puissance inégalée. Au-delà de la
physique fondamentale, il permet d’envisager de nouvelles applications dans la santé ou l’énergie.
Le laser le plus puissant au monde
Frank Niedercorn
n mur d’écrans et une quinzaine
U d’opérateurs concentrés devant
leurs ordinateurs. Depuis la salle de
contrôle du Extreme Light Infrastructure
Nuclear Physics (ELI-NP), les tirs du laser
sont supervisés comme ceux d’une fusée,
avec un décompte qui égrène les secondes.
La comparaison s’arrête là. Ce grand équipe-
ment scientifique qui peut adopter une ca-
dence d’un tir par minute n’émet ni bruit ni
flamme et seules les informations affichées
sur les écrans confirment que la séquence
est réussie. « C’est si vous entendez quelque
chose qu’il faut vous inquiéter et sortir », sou-
rit Ioan Dancus, le chef du département des
systèmes laser.
Le bâtiment du ELI-NP est situé à Magu-
rele, au sud de Bucarest. Le grand bâtiment
de béton héberge deux lignes laser capables
de délivrer des tirs de 10 pétawatts, soit
10 millions de milliards de watts. Une puis-
sance difficilement imaginable, équivalente
à 10 % de celle apportée par le Soleil sur Terre
ou à 500 fois celle du réseau électrique mon-
dial. Le laser doit sa puissance à l’incroyable
brièveté de son impulsion : 25 femtosecon-
des, soit 25 millionièmes de milliardième de
seconde. « Il y a le même rapport entre une
femtoseconde et une seconde qu’entre cette se-
conde et 30 millions d’années », précise Chris-
tophe Derycke, ingénieur chez Thales, l’en-
treprise qui a construit le laser et en a dévoilé
les coulisses un an après son premier tir
opérationnel.
Salle blanche
A l’origine de cette infrastructure unique au
monde, on trouve le Français Gérard Mou-
rou, prix Nobel de physique en 2018 avec la
Canadienne Donna Strickland. Ce sont leurs
travaux, datant des années 1980, sur l’ampli-
fication à dérive de fréquence qui ont permis
de démultiplier la puissance des lasers grâce
à ces impulsions ultracourtes.
C’est Gérard Mourou lui-même qui,
en 2005 après une carrière scientifique aux
Etats-Unis, propose que l’Europe se dote
d’un laser de 10 pétawatts. La Commission
européenne adopte l’idée et l’intègre dans sa
feuille de route Esfri, qui planifie la cons-
truction des grands outils de recherche.
Quelques années plus tard, l’Europe choi-
sit toutefois de répartir ses efforts en cons-
truisant trois équipements complémentai-
res dans des pays nouvellement arrivés dans
l’Union, pour un montant total proche
du milliard d’euros. « Les trois équipements
offrent un recouvrement thématique mais
sont bien spécifiques car les lasers sont diffé-
rents », explique Victor Malka, directeur
scientifique du ELI-NP et professeur à l’Insti-
tut Weizmann de Tel-Aviv.
A Magurele, les lignes de laser occupent
une immense salle blanche de 2.400 mètres
carrés jouxtant la salle de commande. Do-
per la puissance du faisceau laser, grâce à
l’amplification à dérive de fréquence, exige
de la place. Il faut étirer l’impulsion laser,
puis l’amplifier progressivement et enfin la
comprimer à nouveau.
Un défi technique
Tout se passe à l’abri d’un tunnel de plus de
cent mètres. L’impulsion lumineuse y subit
cinq phases d’amplification successives en
passant à travers des dizaines de systèmes
optiques, notamment des cristaux de sa-
phir. Un défi technique : « Pour la dernière
phase d’amplification, nous avions besoin
d’un cristal de saphir de 20 centimètres de
diamètre que notre fabricant ne savait pas fai-
re à l’époque. Aujourd’hui il n’y en a qu’un
seul au monde et il est ici », explique Christo-
phe Derycke.
Après avoir été à nouveau comprimées,
les impulsions laser sont orientées dans sept
chambres d’expérimentation, pour finir
leur course sur une minuscule cible solide
ou gazeuse placée dans une pièce sous vide.
« Avec un tel équipement, on ouvre de nou-
veaux champs de la connaissance dans le do-
maine de l’interaction ultra-relativiste et de la
physique nucléaire dans des états de la matiè-
re très denses et chauds. Cela restait du domai-
ne de la physique théorique et c’est désormais
Mardi 30 avril 2024 Les Echos 12
Eli Nuclear Physics
Le bâtiment du ELI-NP (Extreme Light Infrastructure Nuclear Physics) est situé à Magurele, en Roumanie.
Les autres accessible à l’expérimentation », résume Vic-
lasers tor Malka. « Le Graal serait de
Selon la focalisation du rayon et l’intensité comprendre comment
les plus atteinte, plusieurs expérimentations sont
performants menées. « Le Graal serait de comprendre
la matière s’est créée au
comment la matière s’est créée au moment du moment du Big Bang. »
Big Bang. Songez qu’avec ce laser on atteint DOMENICO DORIA
•de226 millions
kilomètres.
une pression équivalente à 10 millions de fois Chef du département
des expérimentations du ELI-NP
le poids de la tour Eiffel sur une minuscule ci-
C’est la distance ble en aluminium. Il n’en reste évidemment
que la Nasa vient rien, mais tout est enregistré et mesuré », pré-
de faire parcourir cise Domenico Doria, le chef du départe-
à une vidéo depuis ment des expérimentations. dangereux. Une nouvelle filière sur laquelle
sa sonde Psyche Au-delà de la physique fondamentale, on parie également le projet belge Myrrha.
grâce à son vise d’autres applications notamment dans C’est toutefois le monde de la santé avec la
système de l’énergie. Ainsi Marvel Fusion travaille sur la lutte contre le cancer qui devrait toucher les
transmission par fusion nucléaire inertielle par laser. La start- premiers bénéfices des recherches menées
laser Deep Space up allemande, qui collabore avec Thales, est en Roumanie sur l’accélération d’électrons
Optical même devenue le premier utilisateur privé grâce à l’interaction laser plasma. Si le laser
Communications du laser durant le premier trimestre de cette n’accélère pas les particules, c’est l’onde plas-
(DSOC). année. « Nous sommes assez confiants sur le ma qu’il laisse dans son sillage qui piège les
• 1 million
d’impulsions
fait que cette technologie permette un jour de électrons et leur fait prendre beaucoup de
produire de l’énergie d’avantage qu’elle n’en vitesse sur une très courte distance.
de rayons X émis consomme. On peut espérer arriver à de pre- Une technique potentiellement plus effi-
par seconde, miers résultats industriels d’ici dix à quinze cace que les rayons X et moins coûteuse que
soit 8.000 fois plus ans », estime Bernhard Quendt, directeur la protonthérapie. « La technologie laser per-
que la version technique de Thales. mettrait d’avoir des appareils plus compacts et
précédente. moins chers. Des résultats sont envisageables
C’est le record Lutte contre le cancer à cinq ou dix ans, encore faudrait-il dédier un
battu l’an dernier D’autres, dont Gérard Mourou, voient plus appareil spécifique pour chaque application »,
par le laser LCLS-II loin en pariant sur le laser pour traiter les dé- explique Victor Malka.
de l’université chets nucléaires, voire s’attaquer aux débris Si le démarrage a été lent, après une année
Stanford. de l’espace. Victor Malka reste sceptique : d’utilisation, le laser le plus puissant du
• 2,2 mégajoules.
C’est le nouveau
« La puissance moyenne de ces lasers est beau- monde a trouvé son rythme de croisière et
coup trop faible pour des applications telles les équipes scientifiques se bousculent pour
record en matière que le traitement des déchets ou la destruction lancer leurs expériences. « Nous avons deux
d’énergie envoyée des débris spatiaux. » Le prix Nobel et à trois ans d’avance », sourit Victor Malka.
sur une cible par le d’autres physiciens voient encore plus loin Mis en service l’an dernier aux Etats-Unis, le
National Ignition en estimant qu’un tel laser pourrait jouer un laser Zeus annonce une puissance de 3 pé-
Facility (NIF) du rôle dans la fission nucléaire au thorium, un tawatts. La concurrence viendra de Chine
Lawrence métal lourd plus abondant que l’uranium et avec Station of Extreme Light, un laser pro-
Livermore dont les produits de la fission sont moins mettant… 100 pétawatts. n
National
Laboratory
(LLNL). Une étape
Deux autres lasers pétawatts en Europe
importante pour
la fusion nucléaire.
Les deux autres lasers du projet Extreme Light Infrastructure ont été cons-
truits en Hongrie et en République tchèque. Le premier, ELI-ALPS, va encore
plus loin que ELI-NP en explorant la physique des attosecondes (1.000 fois plus
rapide que la femtoseconde), qui permet d’examiner les phénomènes transi-
toires ultrarapides de la matière, étudiés par les trois prix Nobel 2023 (Anne
L’Huillier, Pierre Agostini et Ferenc Krausz). Le second, ELI-Beamline, utilise
le laser pour créer des faisceaux de particules utiles pour la recherche fonda-
mentale, avec peut-être de futures applications dans l’imagerie médicale.
13 Les Echos Mardi 30 avril 2024

enquête
Martine Robert

e sont des figures majeures de l’art

C d u X X e s i è c l e q u e C h r i s t i e’s
s’apprête à vendre, le 6 juin : Dubuf-
fet, Vasarely, Robert Rauschenberg, Niki de
Saint Phalle, Jean Fautrier, Julio Le Parc,
Henri Michaux… Une soixantaine
d’œuvres de la collection Renault. Mais si le
constructeur s’en sépare, c’est pour se don-
ner les moyens de mieux faire revivre une
aventure qui fera à jamais date dans les rela-
tions entre l’art et l’industrie.
Dès 1967, la firme automobile, en plein
essor, s’engage dans une expérience unique
grâce aux relations privilégiées que Claude
Renard, un cadre de l’entreprise, proche
d’André Malraux, entretient avec les artis-
tes. « Il avait étudié aux Etats-Unis les réalisa-
tions des grandes fondations d’entreprises,
comme Ford ou Rockefeller, et convaincu le
PDG, Pierre Dreyfus, de créer un départe-
ment “Recherches, Art et Industrie” au sein de
la Régie », rappelle François Barré dans son

La collection
ouvrage « Domaine Public : seul on va plus
vite, ensemble on va plus loin ». Claude
Renard persuade le dirigeant de constituer
à partir de 1973 une collection d’art contem-
porain, raconte cet observateur averti,

Renault renaît
passé par Renault, La Villette, le ministère
de la Culture ou encore la présidence du
Centre Pompidou dans les années 1990.
Sur fond de Trente Glorieuses, au cœur
d’une ère pompidolienne avec un président

de la République fou d’art contemporain,
Claude Renard instaure des achats
d’œuvres chez Renault et fait venir les artis-
tes dans les usines, pour qu’ils s’approprient
les moyens de production avec les ouvriers,
sans obligation de résultat.
Du soutien financier à l’accès privilégié
aux ateliers, ce mécénat avant-gardiste fait
écho à l’intérêt naissant des créateurs pour
les matériaux industriels. « On m’a lâché
dans mon magasin de couleurs », dira le pein-
tre, sculpteur et plasticien Arman. Les « invi-
tations » se succèdent : Jean Dubuffet, Erró,
Victor Vasarely, Roberto Matta, Jean
Fautrier, Robert Rauschenberg, Niki de
Saint Phalle, Jean Tinguely, dont l’impres-
sionnant « Requiem pour une feuille morte »
(1967) a un temps été prêté à Beaubourg.
Confirmés ou émergents, les artistes sont
encouragés à produire des œuvres, souvent
monumentales, que le constructeur expose
dans des lieux culturels ou dans ses locaux.
« Sans Renault, Arman n’aurait jamais pu
faire toutes ses célèbres compressions et le
logo au losange dessiné par Vasarely en 1972
ne serait pas devenu l’œuvre d’art la plus dif-
fusée au monde ! Mais ce que l’on ignore, c’est
que déjà Louis Renault, fondateur de l’entre-
prise, avait engagé Robert Doisneau pour réa-
liser les publicités de ses voitures et des repor-
tages dans ses usines : nous avons plus de
200 clichés argentiques », confie Catherine
Gros, à la tête de la Fondation Renault.
Des œuvres monumentales
Avec le déménagement du siège social à
Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine,) au
début des années 1970, Claude Renard en
profite pour intégrer des œuvres incroya-
bles. Arman réalise des bas-reliefs à partir
de culasses sciées, Jean Dewasne une fres-
que dans l’espace informatique, Takis un
diptyque magnétique, Julio Le Parc une frise
géante dans la cafétéria, Vasarely des pan-
neaux miroitants dans les salles à manger,
Jesús-Rafael Soto des jeux optiques au lobby
et au restaurant… Si bien qu’en 2000, quand
le siège sera vendu, il faudra démonter et
préserver pour remonter ce qui peut l’être.
Au fil des ans, Renault se forge une collec-
tion de 550 pièces issues de la scène fran-
çaise et internationale. Pourtant, le ciel va
s’assombrir à mesure que l’économie du
fabricant se tend. En 1974, le constructeur
commande à Dubuffet une sculpture habi-
table de 2.000 mètres carrés pour le parvis
du siège, avant de décider, un an plus tard,
d’arrêter les frais. Dubuffet intente un pro-
« Sans Renault, Arman
n’aurait jamais pu faire
toutes ses célèbres
compressions et le logo
au losange dessiné
par Vasarely en 1972
ne serait pas devenu
l’œuvre d’art la plus
diffusée au monde ! »
CATHERINE GROS
Directrice de la Fondation Renault
de ses cendres
ARTS // Elle aura été la première collection en France
émanant d’une entreprise et, un temps, l’une
des plus importantes au monde. Mais nombre
de ces œuvres, signées par les plus grands artistes
du XXe siècle, ont été détournées au fil des années.
cès à l’entreprise afin de la contraindre à
achever l’œuvre. Après huit ans de procé-
dure, un arrêt de la cour de Versailles validé
par la Cour de cassation lui donne raison,
mais l’artiste n’usera pas de son droit.
Echaudé, Claude Renard prend un peu
de distance et fonde en 1976 L’Incitation à la
création (IAC), une structure associative en
dehors de Renault mais liée à l’entreprise
par un contrat renouvelable et présidée par
son PDG, Bernard Hanon. Au tournant des
années 1980, la collection ne fait plus partie
des priorités du groupe ; à son accession à la
direction de Renault, Georges Besse tire un
trait sur l’art. Claude Renard encourage
alors les artistes à transférer leurs œuvres à
l’IAC avec la garantie que celles-ci ne pour-
ront « en aucun cas » être revendues et cher-
che des financements pour poursuivre
l’expérience. Il se tourne vers le promoteur
immobilier Jean Hamon, qui devient prési-
dent de l’IAC. Ce collectionneur souhaite
créer un musée sur l’île Saint-Germain,
lequel ne verra jamais le jour.
« Tous les artistes sont peu ou prou éton-
nés. Certains refusent et récupèrent leur tra-
vail. D’autres signent une décharge sans bien
comprendre le langage tenu, plus obscur que
jamais », se remémore François Barré. Une
cinquantaine acceptent toutefois, faisant
don de quelque 200 œuvres signées de
John Baldessari, Eduardo Chillida, Ber-
nard Frize, Gottfried Honegger, James
Rosenquist… auxquelles s’ajoutent une
quarantaine de pièces en cours de réalisa-
tion ou en projet.
Rapidement, des rumeurs négatives cir-
culent sur Jean Hamon et à la demande de
Jack Lang, François Barré se rend chez lui.
« Il me propose de me montrer sa collection.
Dans la première salle, je reconnais une
grande toile d’Erró : parsemée de Formule 1 de
Renault, elle était accrochée dans le bureau de
Bernard Hanon. Je le lui dis. Il n’est absolu-
ment pas d’accord et précise qu’Erró aime
faire des séries. Dans la salle suivante est
accroché un magnifique Franck Stella. Je
m’exclame : “Celui-là vient bien de la collec-
tion Renault. Je l’ai vu avec Claude Renard, à
New York, dans l’atelier de l’artiste alors qu’il
était en train de le terminer.” Il est surpris, se
tait, et met fin à notre entretien », raconte-t-il.
Confusion des collections
Soupçonné de confondre sa collection et
celle de Renault, puis de vendre sous le
manteau des œuvres du constructeur, Jean
Hamon sera assigné en justice par plusieurs
artistes ou par leurs ayants droit. « Simon
Hantaï m’écrit son inquiétude », pointe
encore François Barré, qui va alors sensibi-
liser Louis Schweitzer, passionné de cul-
ture, arrivé aux commandes de Renault
en 1992. « Quelles raisons ont pu justifier
qu’une entreprise publique, décidant de se
séparer de sa collection, devenue pour l’art
A g. : « Empreintes de cachets sur toile » (1974), d’Arman (en haut) ; « Le Vaisseau »
(1972), de Dubuffet (en bas). Ci-dessus : Robert Doisneau photographiant
l’aviatrice Hélène Boucher dans un cabriolet Vivasport, dans le parc
de Saint-Cloud (1934) ; « Blue Vega » (1970), de Vasarely. Photos Collection Renault
contemporain la plus importante au monde
avec celle de la Chase Manhattan Bank, la
“donne” à un collectionneur privé aux projets
peu clairs et en perde ainsi la propriété, alors
qu’un musée national l’aurait immédiate-
ment acceptée en offrant toutes les garanties
concernant sa préservation et même en
acceptant un simple dépôt, en attendant des
jours meilleurs ? », demande François Barré
au patron de Renault. « C’est le plus grand
scandale ayant touché une collection d’art »,
confie-t-il aux « Echos ». « Comment se fait-il
que cette collection qui valait des millions et
des millions n’ait jamais figuré dans les actifs
du groupe ? », s’interroge-t-il.
Certes, Renault n’a jamais voulu accumu-
ler, mais expérimenter. Il n’empêche. Aba-
sourdi, Louis Schweitzer nomme dans la
foulée l’historienne de l’art Ann Hindry
conservatrice de la collection. En 1996, c’est
un fonds considérablement amputé qu’elle
inventorie. Des expositions sont montées
en interne pour rendre au personnel la
fierté de cet ensemble qui compte encore
environ 35 artistes et 300 œuvres. D’autres
sont organisées à l’étranger, « au gré des rela-
tions internationales de l’entreprise », expli-
que Ann Hindry. Fin 2018, l’accrochage à la
Fondation Clément, en Martinique, permet
de découvrir des pièces acquises plus
récemment, telle « Body versus Twizy »,
sculpture inspirée à Jean-Luc Moulène par
une Renault. Car les collaborations ont
repris modestement en 2010, en dépit du
peu d’appétence de Carlos Ghosn, à la direc-
tion de Renault de 2005 à 2019.
Quand Catherine Gros arrive à la direc-
tion de la communication de Renault, en
décembre 2019, elle comprend le potentiel
de cette collection qui a déjà survécu à huit
PDG, dont Luca de Meo arrivé en 2020,
grand amateur d’art. En 2023, elle prend les
rennes de la fondation Renault et un fonds
de dotation est imaginé pour redonner un
élan à l’aventure artistique et patrimoniale.
D’où cette vente aux enchères prochaine des
œuvres les moins signifiantes pour Renault,
afin de récolter 5 à 8 millions pour ce fonds.
« Nous allons montrer davantage la collec-
tion, au public, à nos clients, à nos concession-
naires, organiser des expositions thémati-
ques, prêter, par exemple des Dubuffet au
musée du Havre où il est né, ou faire des parte-
nariats, autour de Vasarely avec sa fondation
notamment. Et nous voulons faire venir des
street-artistes dans l’entreprise car le street-
art est un art ancré dans la culture populaire,
à l’image de nos voitures », explique Cathe-
rine Gros. Après Jérôme Mesnager, inter-
venu sur le bâtiment historique de Renault
l’an dernier, Dan Rawlings, qui fait de la den-
telle métallique, est accueilli à l’usine de
Douai pour une création à partir de la R5.
Retrouver des pièces aux enchères
La collection, jusque-là stockée dans des
conditions inadaptées, est placée dans des
entrepôts spécialisés et le groupe se fait
accompagner par Claudia Ferrazzi, ex-con-
seillère culture au cabinet d’Emmanuel
Macron. Renault entend aussi remettre la
main sur certaines pièces si celles-ci pas-
sent aux enchères, comme cela avait été le
cas à Drouot en 2012 et 2013. Jean Hamon
ayant été condamné à verser 16 millions
d’euros dans une affaire de commissions
l’opposant à Total Lubrifiants, une saisie
avait été décidée. Une vingtaine d’œuvres de
Renault étaient passées sous le marteau,
dont un monochrome vert d’Hantaï repéré
par ses ayants droit.
Alain Clément, voyant apparaître six de
ses œuvres en vente, avait lui demandé à
son galeriste, Baudoin Lebon, de les rache-
ter. Le marchand a semble-t-il aidé Jean
Hamon à trouver également des acqué-
reurs de gré à gré, tel Philippe Austruy, à
qui il vendra pour 400.000 euros en 2016
un Soto de Renault.
Aujourd’hui, le vent a tourné : sur l’île
Seguin, un autre promoteur passionné,
Laurent Dumas, a décidé de consacrer
en 2026 l’exposition inaugurale de sa Fon-
dation Emerige à la collection Renault. Un
hommage sur ces terres qu’il considère
comme indissociables de cette facette
méconnue du fleuron français.
Lire nos informations
( Page 17
 « Regard sur les soignants » par Kristelle Rodeia pour « Les Echos »

DERNIÈRE HEURE

Garde à vue levée Basket : Paris Levée des blocages à La Croix-Rouge

pour Depardieu accueillera deux la frontière entre la ne remplacera pas
L’ÉDITORIAL matches des Spurs Pologne et l’Ukraine l’UNRWA à Gaza
VIOLENCES SEXUELLES –
DES « ÉCHOS »
' Nouvelle étape importante
dans les enquêtes pour ' SPORT – Les San Antonio
Spurs du prodige français ' EUROPE – Tous les passages
routiers à la frontière entre ' MOYEN-ORIENT – Le Comité
international de la Croix-
Sciences Po agressions sexuelles visant Gérard
Depardieu : l’acteur, déjà mis en
Victor Wembanyama dispu-
teront deux matches de la pro-
la Pologne et l’Ukraine ont
été débloqués par les agriculteurs
Rouge n’a pas vocation à
remplacer l’agence de l’ONU pour
entre deux maux examen pour viol, a été entendu
en garde à vue lundi toute la jour-
chaine saison régulière de NBA
à Paris, les 23 et 25 janvier 2025,
polonais « pour ne pas rendre plus
difficile » la situation des Ukrai-
les réfugiés palestiniens (UNRWA)
à Gaza, affirme lundi le directeur
née sur des faits dénoncés par au face aux Indiana Pacers, a niens confrontés à des attaques du CICR Pierre Krähenbühl dans
A Sciences Po, les lendemains de chahut moins deux femmes. « La garde à annoncé lundi la Ligue profession- particulièrement intenses de une interview au quotidien suisse
propalestinien risquent d’être brutaux. En vue est terminée. Il n’est plus retenu nelle nord-américaine. « Paris, on l’armée russe. Les transporteurs et « Le Temps ». « Nous avons des
déstabilisant l’institut d’études politiques – et avec lui dans le commissariat », a indiqué à revient ! Et pour deux matches », a agriculteurs polonais ont bloqué mandats totalement différents », a
bien d’autres universités, dont la Sorbonne, comme la presse peu avant 18 h 30 l’un de indiqué la NBA sur son compte X. des mois durant la frontière, pro- souligné M. Krähenbühl, en réac-
on l’a vu lundi –, la France insoumise et ses alliés ses avocats. Une décoratrice, qui Si la capitale française accueillera testant contre une concurrence tion à des élus suisses qui avaient
communautaristes prennent l’énorme responsabilité travaillait dans l’équipe du film pour la troisième année d’affilée déloyale avec notamment l’arrivée évoqué cette possibilité. L’UNRWA
de provoquer un violent retour de bâton culturel, « Les Volets Verts » réalisé par une rencontre de saison régulière dans leur pays de denrées alimen- a reçu son mandat « de l’Assemblée
à l’image de ce qu’il se passe aux Etats-Unis. Jean Becker, l’accuse notamment de NBA, il s’agira d’une première taires en provenance de cet Etat générale de l’ONU, le CICR des
Là-bas, le laisser-aller des autorités académiques de l’avoir agressée en 2021. pour la franchise de « Wemby ». voisin déchiré par la guerre. Conventions de Genève », a-t-il dit.
face au totalitarisme woke a déjà conduit de grands
donateurs à cesser de financer Columbia ou Harvard.
L’acmé de la déliquescence morale d’une partie de LA PHOTO DU JOUR
l’Amérique a été atteint lorsque, en décembre dernier,
auditionnée par des élus républicains à la Chambre,
l’ex-présidente de Harvard, Claudine Gay (elle a
démissionné depuis) fut incapable de dire si appeler
au génocide des juifs était contraire au règlement de
son université. Les
conservateurs américains ont
obtenu d’inquiétantes contre-
victoires, dont l’interdiction
de la discrimination positive,
pourtant un puissant levier
de lutte contre les inégalités
sociales.
Suspension de la « bourse
Par
Fitoussi », appel à couper
Jean-Francis les vivres publics, demande
Pécresse de mise sous tutelle : les
radicalismes se nourrissant
Il ne faut l’un l’autre, une même
pas sous- mécanique mortifère
estimer s’enclenche autour de Sciences
Po. Avec pour danger de
ce dont pénaliser une majorité
Sciences Po silencieuse d’étudiants
est le méritants et de sacrifier une
théâtre autonomie précieuse car
protectrice de l’intervention de
mais y l’Etat. Il n’est pire réaction que
répondre la surréaction : il ne faut pas
avec sous-estimer ce dont Sciences
Po est le théâtre mais y
mesure. répondre avec mesure. Certes,
bien peu d’étudiants bloquent
l’établissement, mais ils sont les idiots utiles d’un
entrisme méthodique de LFI auprès des futures élites.
Ce sont bien elles, ces progénitures le plus souvent
bourgeoises, qui intéressent les Insoumis : le poisson
pourrit par la tête…
Cette bataille culturelle doit être menée avec une
autorité dont ont gravement manqué, jusqu’à présent,
les directions de Sciences Po. C’est pourquoi le
gouvernement a bien fait de revenir sur la levée
indécente des sanctions disciplinaires, et de faire LA SNCF DÉVOILE SA NOUVELLE GÉNÉRATION DE TGV Un train à l’esthétique sobre, tout de blanc vêtu, loin de l’orange tapageur des premiers modèles : la compa-
libérer la Sorbonne lundi. Mais l’autorité doit surtout gnie française des chemins de fer SNCF a présenté lundi la livrée des futures rames du TGV M, son « train du futur » attendu pour le second semestre 2025. Le groupe
être celle de la pensée. Sur le conflit israélo- ferroviaire public a déboursé 3,5 milliards d’euros pour acheter 115 rames de ce train offrant plus de sièges et moins gourmand en énergie que les TGV actuels, et qui
palestinien, le discours abject mais substantiel de seront livrées petit à petit en 2025 et 2026, puis au rythme de 12 par an à partir de 2027. Photo Frédérick Florin/AFP
Mélenchon comble, hélas, un certain vide conceptuel
à droite et au centre.

Lire nos informations

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Mardi 30 avril 2024
www.lesechos.fr

Ukraine : le gouvernement français Ariane 6 étoffe

son carnet
de commandes
hausse le ton avec les industriels SPATIAL
Anne Bauer

DÉFENSE Dans la nuit du 27 au 28 avril 2024,

Face à l’« engourdissement satisfait »
de l’industrie de défense, dénoncée par
Emmanuel Macron mi-janvier lors de ses
vœux aux armées, l’exécutif veut mettre les
bouchées doubles pour que « l’économie de
guerre » devienne une réalité. Et que le sou-
tien de la France à Kiev, à l’heure où ses
armées sont en grande difficulté, monte
enfin en puissance. A commencer par la
livraison de davantage de missiles anti-
aériens, réclamée par l’Ukraine.
« J’ai mobilisé pour la première fois des
pouvoirs de police administrative, ce qui
permet de prioriser un certain nombre de
sous-traitants, où les commandes civiles
doivent désormais passer en second plan,
après les commandes militaires, pour donner
droit à cette priorité pour la gamme Aster »,
a déclaré le ministre des Armées, Sébastien
Lecornu, à l’occasion d’une rencontre
à Calvi avec son homologue italien, Guido
Crosetto.
Le métallurgiste Aubert et Duval, récem-
ment racheté par Airbus, Safran et le fonds
Tikehau Capital, fournisseur de l’aéronauti-
que, de l’énergie, des outils et de l’industrie
ainsi que de la défense, notamment pour
la fabrication des ébauches forgées des
tubes à canon du Caesar, est un de ceux
qui devront répondre de cette obligation,
selon les informations de l’AFP.
Gagner des parts de marché
Les missiles Aster 15 et 30 sont produits
par MBDA, en coopération entre Paris et
Rome. Ils sont utilisés sur le théâtre ukrai-
nien et en mer Rouge contre les drones
des rebelles yéménites houthis. Fin mars,
Sébastien Lecornu avait déjà émis l’idée
d’accorder la priorité aux besoins militaires
par rapport aux besoins civils, et même de
recourir à des réquisitions, affirmant que
« le missilier européen MBDA nous doit
des livraisons rapides ».
Le ministre des Armées déclare avoir ordonné à des industriels contribuant à la fabrication des missiles antiaériens
et antibalistiques Aster d’accorder la priorité de leur production à son fabricant MBDA. Photo MBDA/Abaca
L’objectif étant aussi de gagner des parts
de marché. « J’ai constaté que l’industrie
française avait perdu quelques contrats dans
des pays de l’Europe de l’Est, martelait il y a
quelques semaines le ministre. Or, pour
vendre des armes à l’exportation, il faut être
bon sur les technologies, sur les prix, dans la
diplomatie, mais il faut désormais être bon
aussi sur les délais de livraison. »
MBDA compte bien accélérer la cadence,
en réduisant ses délais de production des
Aster de quarante-deux mois en 2022
à « moins de dix-huit mois en 2026 » et
augmenter dans le même temps la produc-
tion de 50 %, selon son président, Eric
Beranger. Mais la répartition industrielle
entre partenaires français et italiens com-
plique encore un peu plus l’entreprise, avec
des composants du missile devant « fran-
chir les Alpes à plusieurs reprises » au cours
de leur fabrication.
« De ce travail dépend l’avenir du pays »,
prévient Sébastien Lecornu, qui pointe éga-
lement « une urgence de simplification
bureaucratique » avec « des sujets douaniers
entre la France et l’Italie qui peuvent retarder
les productions de missiles ». Dans une lettre
commune à MBDA, les deux ministres
pressent à nouveau le groupe d’« accélérer
les productions […] afin de garantir des pre-
mières livraisons dès cette année 2024 ».
Ils demandent en outre à MBDA d’« intensi-
fier [ses] efforts » pour mettre en place en
Italie une deuxième chaîne de montage du
missile « afin d’augmenter les capacités de
production ». — Ha. V. (avec AFP)
deux nouveaux satellites de la constella-
tion européenne de navigation Galileo
ont été mis en orbite avec succès par
Falcon 9, le lanceur de SpaceX. Conçue
dans les années 1990, la plus grande
constellation de satellites d’Europe a
déjà séduit la moitié de la population
mondiale. Tous les smartphones ven-
dus sur le marché unique de l’Union
européenne sont garantis compatibles
avec cette constellation qui offre une
précision de l’ordre d’une feuille A4.
Mais l’histoire a été partiellement
gâchée par les retards pris par la fusée
européenne Ariane 6. Faute de lanceur
à disposition, la Commission euro-
péenne a été obligée de faire un chèque
imprévu de 180 millions de dollars à
SpaceX pour déployer cette infrastruc-
ture vitale pour l’économie européenne.
Le premier vol s’est déroulé sans
souci et porte à 23 le nombre de satellites
opérationnels sur 28 satellites lancés.
En juillet, Falcon 9 lancera deux autres
satellites supplémentaires. Ensuite, si le
vol inaugural d’Ariane 6 se déroule bien,
la Commission européenne renouvel-
lera sa confiance au lanceur européen.
Bruxelles vient ainsi de signer un nou-
veau contrat avec Arianespace pour le
lancement de quatre nouveaux satellites
de la deuxième génération de satellites
Galileo. La fusée devrait effectuer son
premier vol entre mi-juin et fin juillet, et
comme tout se passe correctement,
l’ESA devrait très vite donner une fenêtre
de tir plus étroite. La fusée avec ce nou-
veau contrat porte son carnet de com-
mandes à une trentaine de tirs.
Bruxelles renoue avec
Arianespace en lui
confiant de nouveaux
contrats pour le
déploiement de Galileo.

WeWork maintient
globalement
sa présence
en Ile-de-France
IMMOBILIER Le spécialiste des bureaux
partagés avec services ou « coworking » a
bouclé les discussions engagées en novem-
bre avec ses bailleurs. Au final, l’entreprise
va conserver douze de ses vingt sites franci-
liens. A Paris, cinq sites multi-entreprises
vont fermer, dans les 8e, 9e, 17e et 19e arron-
dissements, ainsi que trois locaux dédiés à
chaque fois à un client unique. L’espace de
La Défense – seul site français du groupe
hors de Paris – a déjà fermé ses portes fin
décembre. Les 84 salariés de l’entreprise
seront conservés. // PAGE 19
Les épargnants
français sont de plus
en plus friands
de fonds cotés
BOURSE Après avoir conquis les investis-
seurs américains et britanniques, les fonds
cotés, également appelés ETF d’après leur
nom anglais (« exchange-traded funds »),
confirment leur percée auprès des particu-
liers français. Les épargnants sont de plus en
plus nombreux à investir dans ces fonds qui
ont l’avantage d’être facilement échangea-
bles en Bourse et d’afficher des frais ultra-
compétitifs. Plus de 200.000 investisseurs
ont acheté ou vendu des ETF au premier tri-
mestre, un record absolu qui correspond à
une hausse de 36 % en un an. // PAGE 28
Crédit : la BCE contre
le projet de réforme du HCSF
CRÉDIT IMMOBILIER
Edouard Lederer
avec Marion Heilmann
Dans un avis publié lundi, la Banque cen-
trale européenne (BCE), qui supervise les
banques de la zone euro, s’invite dans un
débat franco-français… sans cacher son
scepticisme. Sa cible : la proposition de loi
(PPL) du député Lionel Causse (Renais-
sance) visant à ajuster le fonctionnement
du Haut Conseil de stabilité financière
(HCSF), examinée lundi à l’Assemblée
nationale. « La BCE a décidé, de sa propre
initiative, de rendre un avis », écrit-t-elle
dans cet avis publié sur le site d’informa-
tions juridiques de l’Union européenne.
De quoi hérisser la BCE, attachée à ce
que la surveillance financière ne soit pas
trop politisée. « Ces changements entraî-
nent de facto une dilution de la représenta-
tion des organes techniques au sein du
HCSF, y compris, mais sans s’y limiter,
la Banque de France et l’ACPR [le gendarme
bancaire français, NDLR] », regrette la
présidente de la BCE, Christine Lagarde,
qui signe cet avis consultatif. L’institution
invite donc le législateur français à « pour-
suivre sa réflexion sur la meilleure manière
de conserver l’équilibre des pouvoirs et des
responsabilités au sein du HCSF ».
Clause de revoyure trimestrielle
La Banque centrale ne réserve pas
meilleur accueil au deuxième volet du
texte, qui prévoit notamment une clause
Douze nouveaux satellites Galileo de
deuxième génération sont en produc-
tion, la moitié sous le pilotage d’Airbus
Defense and Space et l’autre moitié sous
celui de Thales Alenia Space. Ariane 6 a
cinq tirs en commande pour mettre en
musique la constellation, dont le lan-
ceur principal était auparavant la fusée
russe Soyouz. Aucun des lanceurs en
cours de développement en Europe ne
devrait être assez puissant pour mettre
en orbite ces satellites de 2 tonnes cha-
cun à plus de 23.000 km de la Terre.
Confiant, le président d’Arianespace,
Stéphane Israël, confirme qu’il y aura
bien deux vols de la nouvelle Ariane 6
cette année. Le premier tir accueille une
vingtaine de minisatellites de démons-
tration, lesquels vont partir en Guyane la
semaine prochaine. Cet hiver, si tout se
déroule comme prévu, Ariane 6 réali-
sera sa première mission sérieuse avec
l’envoi du satellite d’observation mili-
taire CSO3 pour la France. Pour résumer,
le dirigeant rappelle qu’outre les 5 mis-

= LES ENTREPRISES CITÉES La PPL entend réformer le HCSF, une

entité chargée de préserver la stabilité
financière, et qui limite l’endettement
de revoyure trimestrielle sur les critères
encadrant le crédit.
« Le délai très strict de trois mois, conju-
sions pour Galileo, la fusée européenne
a en carnet de commandes 18 tirs pour la
constellation Kuiper d’Amazon, 4 satelli-
Aktid 25 Concord Chorus 23 Intuition 21 Netflix 22
Anglo American 27 Cyclelab 17 JP Morgan 26 Newton Offices 24 immobilier des ménages : sauf déroga- gué à la lourdeur de la procédure de renou- tes pour Eumetsat (météo), 3 satellites
Apollo 23 Cycleurope 17 Kissfilms 22 Philips 34 tion, le remboursement du prêt ne peut vellement, mettrait en péril la mise en pour Intelsat et autant pour Eutelsat.
Atos 23, 34 Deloitte 24 KKR 22 Quad 22 excéder 35 % des revenus. Le texte discuté œuvre effective des mesures relatives aux « Au vu de nos faibles disponibilités, nous
Bank of America 26 Eco-Triporteur 16 LDLC 24 Renault 17, 34 prévoit de faire passer de huit à dix le nom- emprunteurs », estime la BCE, qui relève ne pouvons guère prendre de commandes
BHP 27 Eurécia 24 Leonine Studios 22 Safran 34 bre de membres siégeant au HCSF, aux des délais beaucoup plus longs ailleurs supplémentaires à très court terme, mais
Blackstone 23 Eurofins Scientific 34 Letsignit 24 Tesla 20
côtés notamment du ministre de l’Econo- dans l’Union européenne. Lionel Causse il nous reste de la place pour des missions
Canal+ 22 Europa Group 25 LVMH 34
Carbios 25 Fortuneo 28 Mediawan 22 mie et des Finances et du gouverneur de la évoquait lundi soir, à l’Assemblée, la pos- institutionnelles importantes et nous tra-
Carbonfact 21 Hermès 34 Michelin 34 AVIS FINANCIER Banque de France. Ces deux nouvelles per- sibilité d’adopter un délai de six mois au vaillons sur les commandes au-delà des
Christie’s 17 Hipgnosis 23 Morgan Stanley 26 Apogée Retraite 19 sonnalités seraient des parlementaires. lieu de trois. n trois premières années », a-t-il précisé. n
ENTREPRISES
La filière européenne du vélo électrique
se déchire sur les importations chinoises
l La Commission européenne doit
décider d’ici à la fin de l’année si elle
prolonge ou non les taxes antidum-
ping et antisubventions sur les vélos
électriques en provenance de Chine.
l Deux visions opposées s’affrontent
parmi les industriels du secteur.
DEUX-ROUES
Richard Hiault
C’est un bras de fer qui va se jouer
pendant plusieurs mois. La Com-
mission européenne va devoir tran-
cher une question épineuse : faut-il
maintenir les mesures antidum-
ping et antisubventions, instaurées
en 2019, sur les importations de
bicyclettes électriques et de pièces
essentielles en provenance de
Chine ? Une réunion se tient à
Bruxelles, ce mardi 30 avril, où la
Commission entendra un groupe
ad hoc d’entreprises européennes
de cycles électriques sur le sujet.
Pour l’European Bicycle Manu-
facturers Association (EBMA) qui
rassemble environ un millier de
PME de l’industrie du vélo, du vélo
électrique et des composants dans
23 des 27 Etats membres de l’Union
européenne (UE), il ne fait aucun
doute que ces mesures doivent être
pérennisées.
« Elles ont permis à l’Union euro-
péenne de maintenir une activité de
fabrication de cycles contrairement
au Japon ou aux Etats-Unis dont
l’industrie, leader dans les
années 1970 et 1980, a été laminée par
la concurrence chinoise », indique
Laurent Ruessmann, avocat-con-
seil de l’EBMA.
Mesures protectrices
L’association met en avant la politi-
que de soutien chinoise à l’industrie
des batteries et des moteurs électri-
ques, lesquels bénéficient d’un trai-
tement préférentiel dans le cadre
Angell, la jeune pousse de Marc Simoncini,
prend un nouveau départ
Cinq ans après un lance-
ment compliqué, la marque
de vélo créée par Marc
Simoncini se donne les
moyens d’une seconde
chance.
David Barroux
Cinq ans après sa création, Angell
prend un nouveau départ. Le fabri-
cant de vélos électriques fondé par
Marc Simoncini a un nouveau
patron, de nouveaux actionnaires,
de nouveaux fonds, de nouveaux
modèles, une nouvelle stratégie et…
de nouvelles ambitions.
« Dans le software, on peut se lan-
cer avec un produit qui comporte
Publiez ou consultez
de nombreuses offres de reprise
d’entreprise dans Les Echos
du plan Made in China 2025. L’asso-
ciation disposerait de preuves selon
lesquelles, en cas de suppression de
ces mesures de défense commer-
ciale, le niveau actuel des volumes
d’importations de vélos électriques
par l’Union européenne (UE) aug-
menterait en raison de vastes instal-
lations de production en Chine et de
capacités inutilisées déjà importan-
tes. Il est facile pour les produc-
teurs-exportateurs chinois
d’accroître rapidement leur pré-
sence sur le marché européen, pré-
vient l’EBMA.
Contestation
Tout irait pour le mieux dans le
meilleur des mondes possibles si
une autre association, en l’occur-
rence la Light Electric Vehicle Asso-
ciation-EU (LEVA-EU) ne militait
pas pour la suppression pure et
simple de ces mesures de défense
commerciale.
Revendiquant plus de 70 mem-
bres, LEVA-EU se compose essen-
tiellement des assembleurs de vélos
électriques, trottinettes ou tripor-
teurs. Pour Annick Roetynck, direc-
trice de l’association, « les mesures
de défense commerciale contre les
vélos électriques, combinées aux
mesures sur les composants essen-
tiels des vélos, sont devenues un
enchevêtrement juridique inextrica-
ble qui met en danger l’ensemble du
secteur européen des vélos électri-
ques et constitue une menace pour
l’avenir du secteur ».
Pour faire simple, un assembleur
européen peut être exempté de
payer les taxes antidumping qui
s’étalent de 10 à 70 % selon l’exporta-
encore quelques bugs que l’on corrige
au fil de l’eau. Dans le hardware,
comme un vélo, on ne peut pas se per-
mettre de vendre un produit à
3.000 euros qui ne fonctionne pas
parfaitement », reconnaît John
Mollanger qui, depuis deux ans, a
pris la direction de cette jeune
entreprise qui avait abîmé son
image en commercialisant une pre-
mière génération de deux-roues
marquée par trop de défauts.
Depuis, Angell a appris de ses
erreurs et considérablement amé-
lioré la fiabilité et la finition de ses
vélos. « Nous avons été choisis par le
groupe BMW pour proposer une
gamme de vélos sous la marque Mini.
Nous avons énormément appris de
annonces.lesechosleparisien.fr
01 87 39 70 08
teur chinois de pièces, si son pro-
duit final ne contient pas plus de
60 % de composants chinois ou si
l’assembleur génère 25 % de valeur
ajoutée sur le produit final.
Les assembleurs se sont
d’ailleurs organisés de longue date,
pour importer des pièces de Chine
car il leur était impossible de
s’approvisionner en pièces déta-
chées au sein de l’UE.
Lorsqu’en 2019, la Commission
européenne a instauré ses droits,
leur niveau d’exigence », reconnaît
ce spécialiste du marketing passé
par Nike, Asics, Puma et Bang &
Olufsen.
Les produits s’étant améliorés,
Angell, qui assemble ses vélos en
Bourgogne, a réussi l’an dernier à
convaincre de nouveaux actionnai-
res, comme CMA CGM Ventures et
Bpifrance, de rejoindre SEB et
d’autres dans une augmentation de
capital de 20 millions d’euros. Une
somme qui permet à la jeune entre-
prise de s’engager dans un élargis-
sement de sa gamme.
Deux-roues
sur abonnement
« Nous avons commencé par un seul
modèle, mais même si nous restons
sur le segment des vélos électriques
urbains, il nous faut élargir notre
gamme car les besoins sont divers »,
explique John Mollanger.
Dès le mois de juin, deux nou-
veaux modèles très proches de la
première génération seront com-
mercialisés dans une gamme de
prix plus étendue.
« Même si l’apparence est la même
que notre premier vélo, on a changé
tout ce qui ne se voit pas. Les prochains
modèles qui arriveront l’an prochain
seront de vrais nouveaux modèles
répondant à d’autres besoins »,
détaille le dirigeant. Des vélos plus
c’est tout le secteur européen de
l’assemblage qui a dû revoir sa stra-
tégie et s’adapter. Or, « il n’y a pas
suffisamment de pièces non chinoi-
ses disponibles pour répondre à
l’ensemble de la demande euro-
péenne, et encore moins pour répon-
dre de manière adéquate à une
demande croissante », fustige
Annick Roetynck. Bref, les assem-
bleurs se retrouvent parfois coin-
cés. Certains ont bien essayé de se
tourner vers d’autres pays asiati-
confortables ou dotés d’une plus
grande autonomie ou encore per-
mettant de transporter des sacs ou
des enfants, seront ainsi proposés.
Au départ uniquement vendus
via le site d’Angell, les modèles, qui
sont déjà prop osés dans une
soixantaine de concessions Mini,
seront aussi distribués d’ici peu
dans une cinquantaine de maga-
sins de cycles. « Pour un tel achat, les
clients veulent pouvoir tester, compa-
rer et bénéficier d’un conseil »,
reconnaît le patron d’une entre-
prise qui compte aujourd’hui
autour de 6.000 vélos en circula-
tion. Une offre de location (à
99 euros par mois) va aussi être lan-
cée en partenariat avec Motto, le
spécialiste du vélo sur abonnement.
Ambitieuse mais prudente, la
marque, qui pour l’instant est com-
mercialisée quasi exclusivement en
France et dans les pays limitrophes,
envisage aussi de se vendre en
Asie. n
20
MILLIONS D’EUROS
L’augmentation de capital
réalisée l’an dernier qui permet
à Angell d’élargir sa gamme.
Mardi 30 avril 2024 Les Echos
ques comme Taïwan, la Thaïlande,
la Corée du Sud ou la Turquie pour
importer leurs pièces.
Qu’elles viennent de Chine ou
d’ailleurs, les importations sont
étroitement surveillées par les
douanes de chacun des pays euro-
péens pour détecter d’éventuels
contournements des règles anti-
dumping. Ce qui ne laisse pas de
provoquer l’ire des assembleurs qui
se voient réclamer le paiement des
droits de douane et des pénalités
Les PME piégées par des
Entre les PME pas
toujours à l’aise avec les
règles de défense com-
merciale européennes et
les fraudeurs, les douanes
européennes jouent une
partie des plus délicates.
Au point parfois
de déclencher l’ire
des industriels qui
se retrouvent piégés.
A la tête d’Eco-Triporteur, une
PME française de 6 salariés pour
un chiffre d’affaires d’un million
d’euros, Guillaume Delanoë est
préoccupé par les difficultés que
rencontre l’entreprise en raison
des contraintes douanières.
« Nous ressentons une frustration
similaire à celle des agriculteurs
confrontés aux réglementations
européennes. Notre activité, centrée
sur un marché de niche, le tripor-
teur électrique, est soumise aux
mesures antidumping et antisub-
ventions depuis 2019, ce qui a un
impact significatif sur nos opéra-
tions », dit-il.
Pour assembler ses triporteurs,
il doit trouver châssis, cabines,
ceintures de sécurité, coussins,
batteries… En 2022, il a vendu 300
de ses machines. Compte tenu de
la complexité de son produit, il est
dans l’obligation d’importer des
pièces faute d’alternative en
Europe. Les volumes qu’il produit
n’intéressent en effet pas les quel-
16
pour ne pas avoir respecté scrupu-
leusement ces règles commerciales.
Menaces de fermeture
Résultat : « des entreprises européen-
nes sont non seulement confrontées à
des droits en souffrance, mais aussi à
des amendes très lourdes. Leur affaire
traîne déjà depuis trois à quatre ans et
il leur faudra encore trois à cinq ans
avant de pouvoir espérer une décision
du tribunal. Tout le monde n’y survi-
vra pas », regrette Annick Roetynck.
ques industriels européens qui
pourraient lui fournir certaines
pièces. « Au cours des dernières
années, nous avons dû faire face à
des taxes antidumping totalisant
173.000 euros, ce qui a mis une pres-
sion financière considérable sur
notre entreprise », constate-t-il.
Pénalités
Pour réduire sa dépendance chi-
noise au regard des règles de
défense commerciale et sur les
conseils de son fournisseur local,
la société s’est tournée vers un
fournisseur de Corée du Sud.
Mais, une enquête des douanes
françaises en décembre 2021 a
considéré que ces pièces venaient
bien de Chine et étaient redevables
des droits de douane. Résultat :
« nous avons reçu une pénalité de
500.000 euros, que nous contestons
vigoureusement devant les autori-
tés compétentes. Nous sommes
déterminés à défendre notre bonne
foi dans cette affaire et à nous battre
pour préserver notre activité », indi-
que Guillaume Delanoë.
Avant d’ajouter que « si nous
devions, à terme, supporter ces
charges financières, cela mettrait en
péril l’avenir de notre entreprise.
Nous avons créé Eco-Triporteur
en 2008 à une époque où le tripor-
teur électrique n’était même pas sur
le marché en Europe. Nous avons
trouvé des fournisseurs en Asie et
construit petit à petit une entreprise
 17 Les Echos Mardi 30 avril 2024
s Pour la première fois
A ses yeux, un nombre croissant de
PME finira par réduire l’offre. L’inno-
vation ainsi que la recherche et le
développement finiront par être
limitées. Ce qui, in fine, fera gonfler
les prix et dissuadera les citoyens
d’acheter et d’utiliser des vélos élec-
triques.
Entre les arguments des uns et des
autres, la Commission européenne
devrait rendre son jugement de pro-
longer ou non ces mesures commer-
ciales vers la fin de cette année. n
règles douanières kafkaïennes
viable économiquement, puisque
quinze ans plus tard nous existons
toujours ».
Annick Roetynck, directrice de
la Light Electric Vehicle Associa-
tion, observe que « plusieurs entre-
prises européennes présentes sur le
marché du vélo électrique depuis
des décennies sont au bord de la des-
truction. Il est étonnant de constater
à quel point l’interprétation des ser-
vices douaniers diffère selon les
Etats membres ».
A la Commission européenne,
on reconnaît que la complexité
des règles aboutit effectivement à
certains dysfonctionnements des
douanes qui agissent différem-
ment selon les Etats membres de
l’Union européenne. « Nous som-
mes en discussion pour harmoniser
les règles d’application des mesures
commerciales défensives », indi-
que-t-on à Bruxelles.
Reste que la tâche des doua-
niers n’a rien d’aisé. Car si des PME
sont de bonne foi, d’autres tri-
chent. En novembre 2023, deux
importateurs de vélos électriques
ont été accusés de fraude sur
6,6 millions d’euros de taxes doua-
nières non payées. Ils avaient
importé via la Belgique leurs vélos
électriques en pièces détachées.
S’ils sont reconnus coupables,
les prévenus risquent entre quatre
mois et cinq ans de prison, ainsi
qu’une amende de 5 à 10 fois les
droits de douane éludés. La
Les ventes flanchent
en France
en treize ans, les ventes
de vélos à assistance
électrique qui tiraient le
marché du cycle français
ont chuté de 9 % en 2023
Ninon Renaud
La hausse de 5 % l’an passé du
taux de pratique du vélo en
France et les flots de « vélo taf-
feurs », qui envahissent les rues
de Paris entre domicile et lieu de
travail, pourraient faire penser
que le marché du cycle français
est florissant. Il n’en est rien :
après une première baisse de
7 % des volumes vendus
en 2022, le secteur a subi une
chute de 14 % l’an passé, selon
l’Observatoire du cycle présenté
lundi par l’Union sport et cycle
(USC) à l’occasion du festival
Vélo in Paris au Parc floral de
Vincennes.
Une digue importante est
tombée. Depuis treize ans, les
ventes de vélos à assistance élec-
trique (VAE) tiraient le marché
hexagonal et elles représentent
désormais 30 % des achats de
cycles. Cette montée en puis-
sance explique d’ailleurs que le
marché du cycle n’ait baissé sur
un an que de 8 % en valeur, à
2,2 milliards d’euros. Ce moteur
s’est toutefois enrayé pour la pre-
mière fois l’an dernier.
Dans le sillage des vélos classi-
ques, dont les ventes se sont
effondrées de 16 % en 2023, cel-
les de VAE ont reculé de 9 %,
pour atteindre 671.000 unités
sur un total de 2,23 millions de
vélos vendus en France. « Il va
falloir qu’on se batte », a résumé
Jérôme Valentin, vice-président
de l’USC et président de Cycleu-
rope. L’assembleur et distribu-
teur des vélos Peugeot est lui-
même en difficulté financière,
avec une dette cumulée de plus
de 25 millions selon l’Informé.
La croissance atone et l’infla-
tion forte ont refroidi les ardeurs
des ménages face à un deux-
roues électrique qui coûte en
moyenne 1.967 euros. Les ména-
ges ressortent leurs vieux vélos
de leurs garages et les réparent :
le marché de la maintenance a
Un douanier inspecte l’arrivage de conteneurs
en provenance de Chine. Photo iStock
semaine dernière, dans un com-
muniqué, le parquet européen a
indiqué qu’une personne et deux
entreprises ont aussi été recon-
nues coupables de fraude.
L’enquête a montré que des vélos
entiers avaient été délibérément
importés en pièces détachées, afin
d’éviter le paiement des droits.
L’astuce des conteneurs
Dans les faits, si un importateur
européen recourt à un seul conte-
neur pour la livraison des pièces
détachées d’un vélo électrique
entier, la douane considérera qu’il
s’agit d’un produit fini. L’importa-
teur devra donc s’acquitter des
droits de douane.
bondi de 19 % en 2023 et de 116 %
depuis 2019. Un vrai casse-tête
pour les acteurs du marché qui
se retrouvent étranglés par des
stocks XXL constitués en pleine
euphorie au sortir de la pandé-
mie de Covid, pour éviter de
nouvelles ruptures d’approvi-
sionnement.
Quatre mois de stocks
à éponger
« Il faut éponger une surproduc-
tion de 145 % durant deux ans.
Toute la planète est overdosée »,
souligne Denis Briscadieu, le
patron du groupe Cyclelab. La
production en France s’est adap-
tée, chutant de 24 % l’an dernier
à 645.000 unités. A force de prix
cassés, le marché a éclusé quel-
que 150.000 vélos en surplus en
un an, mais il en restait encore
750.000 fin 2023, soit l’équiva-
lent de quatre mois de stocks. « Il
devrait en rester 200.000 à la fin
de l’année », estime André Ghes-
tem, directeur de la Commis-
sion cycle de l’USC et ancien
patron de Shimano en France
qui commence à voir revenir des
commandes en Europe.
Les professionnels
du secteur veulent
croire à un simple
accident de
parcours lié
à la conjoncture.
L’étau commence surtout à se
desserrer chez les distributeurs ;
les assembleurs et les fabricants
de composants qui sont en
amont de la chaîne de valeur
devraient, selon l’USC, voir le
bout du tunnel début 2025. Les
professionnels du secteur veu-
lent croire qu’une fois cette page
difficile tournée au prin-
temps 2025, elle ouvrira la voie
en 2026 à une nouvelle vague de
croissance portée par les vélos
électriques. Il y va de l’avenir de
la filière industrielle du cycle :
52 % des VAE vendus en France
sont assemblés dans l’Hexa-
gone, contre 18 % des vélos
classiques. n
Pour contourner cette règle,
une astuce consiste à faire venir
la totalité des pièces dans deux
conteneurs distincts et pas livrés
le même jour. Mais, « lorsque
toutes les pièces de vélos électri-
ques sont importées expressément
en deux fois avec une ou deux
semaines de délai, les douanes
considéreront quand même
qu’elles peuvent appliquer des
taxes en invoquant des règles anti-
abus, explique Laurent Ruess-
mann, avocat-conseil de l’Euro-
pean Bicycle Manufacturers
Association. L’abus de droit est un
principe fondamental du droit de
l’Union européenne ».
— R. H.
Dubuffet, Vasarely ou Niki
de Saint Phalle : Renault met
aux enchères son incroyable
collection d’art
ENCHÈRES
Des figures majeures
de l’art du XXe siècle
seront vendues chez
Christie’s le 6 juin
au profit d’un fonds
de dotation de
Renault consacré
à de nouvelles
aventures artistiques.
Martine Robert
Ce ne sont pas des œuvres issues de
n’importe quelle collection d’entre-
prise que Christie’s mettra aux
enchères début juin, mais des piè-
ces appartenant à Renault, pionnier
dans l’art dès la fin des années 1960.
La maison de vente va organiser
deux ventes totalisant une soixan-
taine d’œuvres aujourd’hui déte-
nues par le constructeur automo-
bile pour un montant estimé entre 5
et 8 millions d’euros.
« C’est une sélection signée des
plus grands noms de l’après-guerre,
qui donne la mesure de la collabora-
tion qui unit le constructeur et les
artistes. Originale dès sa création,
cette collection incarne aujourd’hui
encore la vision avant-gardiste de
l’entreprise, rapprochant l’art,
l’industrie et l’innovation », insiste
Paul Nyzam, le responsable du
département art d’après-guerre et
contemporain chez Christie’s
Paris.
Art cinétique
Dubuffet, Vasarely, Rauschen-
berg, Sam Francis, Niki de
Saint Phalle, Jean Fautrier… les
pièces sont exposées du 30 mai au
6 juin dans les locaux de Christie’s,
avenue Matignon, à Paris, peu
avant la foire Art Basel à Bâle qui
attire une clientèle internationale
en Europe. Une œuvre de Jean
Dubuffet, « Fiston la Filoche »,
estimée de 1 à 1,5 million d’euros,
voyagera même du 4 au 15 mai
chez Christie’s New York à Rockfel-
ler Center, pendant les grandes
ventes d’art moderne et contem-
porain, après avoir été présentée à
Hong Kong, fin mars, au moment
de la foire Art Basel Hong Kong.
Seront proposées le 6 juin aux
enchères une trentaine d’œuvres
majeures, créées pour Renault ou
acquises ultérieurement afin de
compléter cette collection centrée
sur des artistes associés à la vie de
l’entreprise.
A l’affiche notamment, trois
peintures de Vasarely, créateur du
à suivre
Vers un retrait de
cote de L’Occitane
BEAUTÉ L e p r o p r i é t a i r e d e
L’Occitane International, Reinold
Geiger, va retirer le groupe fran-
çais de cosmétiques de la Bourse
de Hong Kong, a annoncé, lundi,
la société. L’offre qu’il propose,
avec une prime d’environ 60,83 %,
v a l o r i s e l e f l o t t a n t j u s q u’à
13,91 milliards de dollars de Hong
Kong (1,66 milliard d’euros), soit
une valorisation globale de 6 mil-
liards d’euros. Reinold Geiger et
ses partenaires détiennent
72,64 % des actions en circula-
tion. La cotation du groupe
L’Occitane, dont la marque pèse
sur 75 % de ses revenus, avait été
suspendue à Hong Kong en sep-
tembre 2023 puis à nouveau le
9 avril dernier.
ENTREPRISES
« Escalator » (1983) de Pierre Alechinsky, est estimé
60.000 à 80.000 euros. Photo Christie’s Images Ltd 2024
losange utilisé comme logo par
Renault jusqu’en 1992, estimées de « C’est une
50.000 à 150.000 euros, ainsi que de sélection signée
grands noms de l’art cinétique, tel
« Grand Amarillo » de Jesus Rafael
des plus grands
Soto (180.000 à 250.000), « Volume noms de l’après-
Virtuel » de Julio Le Parc (50.000 à guerre, qui donne
70.000) ou « Composition » de Jean
Dewasne (40.000 à 60.000).
la mesure de
P a r a i l l e u r s , S a m Fr a n c i s la collaboration
(200.000 à 300.000) et Robert qui unit le
Rauschenberg (180.000 à 250.000) constructeur
illustrent, eux, la place que l’art con-
temporain américain joua dans la et les artistes. »
collection. PAUL NYZAM
Christie’s Paris
Des prix abordables
Une seconde vente en ligne, du
30 mai au 7 juin, sera entièrement
consacrée à une trentaine d’œuvres
sur papier d’Henri Michaux propo-
sées à des prix plus abordables de tie’s à New York et Paris », rappelle
3.000 à 8.000 euros, sans prix de l’expert de la maison Pinault.
réserve.
« C’est une collection liée à notre
histoire économique, qui fait rêver,
Une collection qui a connu des
vicissitudes, dispersée en partie,
assoupie jusqu’aux années 1990 et
illustre le goût français et devrait l’arrivée de Louis Schweitzer à la
plaire au marché au-delà de nos fron- direction du groupe, puis de nou-
tières, avec des pièces inédites d’artis- veau endormie sous Carlos Ghosn.
tes connus, sélectionnées avec soin, Ces deux vacations sont organisées
de provenance prestigieuse », pour- au profit d’un fonds de dotation
suit Paul Nyzam. « Les estimations pour l’art et le patrimoine que crée
sont raisonnables et les records pour Renault pour la faire revivre, avec
Dubuffet ont été décrochés par Chris- des street-artistes. n
APOGÉE RETRAITE
Association régie par la loi du 1er juillet 1901 et par le décret du 16 août 1901
Tour Société Générale - 17 Cours Valmy - 92972 PARIS LA DÉFENSE CEDEX
479 126 153 / GP 13
AVIS DE CONVOCATION À L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
L’Assemblée générale ordinaire de l’association APOGÉE RETRAITE se réunira le mercredi
5 juin 2024 à 14h, Tour D2 – 17 bis place des Reflets – 92919 Paris La Défense Cedex, pour
délibérer sur l’ordre du jour suivant :
1. Approbation des comptes annuels du Plan d’Épargne Retraite Populaire ÉPICEA pour
l’exercice 2023 sur le rapport du Commissaire aux comptes de l’entreprise d’assurance,
après avis motivé du Comité de surveillance du PERP ÉPICEA ;
2. Approbation des comptes sociaux de l’exercice clos le 31 décembre 2023, du rapport
d’activité du Conseil d’administration et quitus aux administrateurs ;
3. Approbation du budget 2024 de l’Association, incluant les budgets du PERP ÉPICEA et
celui du PER ACACIA, établi par le Conseil d’administration et détermination des conditions
et limites dans lesquelles le Conseil et les Comités peuvent engager des dépenses au delà
des montants prévus ;
4. Détermination du montant du droit d’entrée pour l’exercice 2025 ;
5. Renouvellement de la délégation de pouvoir faite au Conseil d’administration pour signer
d’éventuels avenants visant à modifier les dispositions non essentielles de l’ensemble des
contrats souscrits par l’association APOGÉE RETRAITE ;
6. Ratification de la cooptation en qualité d’administratrice de Madame Laurence GILLET, en
remplacement de Monsieur Louis DE VARAX, démissionnaire ;
7. Renouvellement du mandat de Monsieur Alain ERNEWEIN en qualité de membre du Comité
de surveillance du PERP ÉPICEA ;
8. Renouvellement du mandat de Monsieur Alain ERNEWEIN en qualité de membre du Comité
de surveillance du PER ACACIA ;
9. Pouvoir pour les formalités.
Les adhérents auront la possibilité de s’exprimer, préalablement à cette Assemblée, en votant
par correspondance. Les documents relatifs à ce vote leur seront adressés sur simple demande
effectuée à l’adresse suivante : association.apogee-retraite@socgen.com.
Ils auront également la possibilité de se faire représenter en retournant le coupon qui leur a été
adressé à cet effet par courrier, en même temps que leur relevé annuel de situation.
Le Président
ENTREPRISES Mardi 30 avril 2024 Les Echos 18

La start-up Jimmy
prête à construire
son mini-réacteur
ÉNERGIE
La jeune pousse
parisienne a déposé
une demande
d’autorisation
auprès de la mission
de sûreté nucléaire
et de radioprotec-
tion.
Le mini-réacteur
de Jimmy se veut
adapté pour servir
les besoins en
chaleur décarbonée
d’un site industriel.
Dans la course de vitesse que
mènent les start-up du nucléaire
pour arriver sur le marché, le
français Jimmy marque un
point. La jeune pousse pari-
sienne a annoncé lundi avoir
déposé une demande d’autori-
sation de création pour son
mini-réacteur auprès de la mis-
sion de sûreté nucléaire et de
radioprotection qui dépend du
ministère de la Transition écolo-
gique.
C’est cette commission qui
sera chargée de transmettre ce
dossier, après instruction, à
l’Autorité de sûreté nucléaire
(ASN) pour un examen appro-
fondi qui pourra durer plusieurs
années. « Le dépôt de ce dossier
marque l’indispensable première
étape qui va nous permettre
d’entrer dans une phase d’ins-
truction de notre projet puis de
concertation avec l’ensemble des
parties prenantes », s’est félicité
Antoine Guyot, le cofondateur
de la start-up.
ANNLEGALECH
D’une puissance thermique
de 10 mégawatts, le mini-réac-
teur de Jimmy se veut adapté
pour servir les besoins en cha-
leur décarbonée d’un site indus-
triel. Le premier de série pour-
rait notamment être branché
sur le complexe industriel du
groupe sucrier Cristal Union,
Cristanol de Bazancourt
(Marne), qui produit de l’alcool
et du bioéthanol.
Combustible Triso
Il utilise une technologie éprou-
vée de réacteur à haute tempéra-
ture (HTR). Refroidi à l’hélium,
le réacteur de Jimmy mise sur
un combustible Triso, réputé
très sûr et tolérant aux acci-
dents. Mais ce dernier ne dis-
pose pas de capacité de produc-
tion à l’échelle industrielle. En
outre, il nécessite un uranium
enrichi à 10 %, voire à 20 %, plus
difficile à acquérir compte tenu
des impératifs de non-proliféra-
tion. Pour son premier réacteur,
Jimmy explique néanmoins
avoir déjà sécurisé son « premier
cœur » grâce à de l’uranium enri-
chi à 10 % issus de sources améri-
caines.
Implantée à Paris et au Creu-
sot, Jimmy emploie déjà 70 per-
sonnes. Créée par un polytech-
nicien et une diplômée d’HEC,
elle a reçu une subvention de
l’Etat de 32 millions d’euros dans
le cadre du plan France Relance
2030. Elle a par ailleurs levé
2,2 millions en février 2022
auprès d’Eren Industries, Noria,
Otium Capital, Polytechnique
Ventures et d’investisseurs pri-
vés. Et 15 millions supplémentai-
res en octobre 2022 auprès des
mêmes apporteurs de fonds et
de nouveaux entrants. — S. W.
Nucléaire : EDF élargit son
offre en République tchèque
l Le groupe public a validé son offre pour la conception et la construction
d’un à quatre EPR de 1.200 mégawatts en République tchèque.
l L’énergéticien CEZ doit choisir entre l’offre du français et celle du coréen
KHNP d’ici l’été.
ÉNERGIE
Sharon Wajsbrot
En difficulté sur son chantier
nucléaire au Royaume-Uni et très
occupé à préparer la relance des
constructions de nouveaux réac-
teurs en France, EDF n’a pas pour
autant enterré ses ambitions à
l’international. Bien au contraire.
A la fin de la semaine dernière,
son conseil d’administration a
validé – selon nos informations –
une offre ferme pour la conception
et la construction d’un à quatre
réacteurs nucléaires de type EPR à
destination de l’énergéticien tchè-
que CEZ et de sa filiale Elektrárna.
L’offre du français doit être remise
officiellement ce mardi à Prague.
Cette offre vient compléter celle
déjà remise par EDF en octobre der-
nier. Car Prague a depuis revu sa
copie. Début février, l’énergéticien
public CEZ avait demandé aux deux
finalistes de son premier appel
d’offres – le groupe EDF et le coréen
KHNP – de lui fournir, d’ici au
15 avril, une proposition non plus
pour un seul réacteur nucléaire
mais pour quatre.
Renouveler la flotte
Ces réacteurs doivent permettre de
renouveler en partie la centrale de Ces réacteurs doivent permettre de renouveler en partie la centrale tchèque de Dukovany
Dukovany mais aussi celle de Teme- (ici en photo). Photo Martin Divisek/Bloomberg
lin, la deuxième centrale du pays,
toutes deux construites sous l’ère réacteur de Flamanville) et dont la Point par exemple. Pour financer ce
soviétique et dont les réacteurs sont construction pourrait démarrer à La République projet, CEZ mise sur le soutien de
vieillissants. l’horizon 2029. tchèque exploite six l’Etat tchèque. Il a déjà validé, avec le
La République tchèque exploite Selon nos informations, le prix réacteurs atomiques gouvernement, un mode de finan-
six réacteurs atomiques au total, initial unitaire proposé par EDF cement pour la construction d’un
au total.

annonces judiciaires & légales mais dispose d’un mix électrique pour un seul exemplaire oscillerait nouveau réacteur dans la centrale
qui repose encore à 40 % sur des aux alentours des 10 milliards de Dukovany.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE centrales à charbon. Pour se décar- d’euros. Mais « des effets d’échelle et Pour EDF, le résultat En début d’année, le ministre des
Liberté - Égalité - Fraternité boner, le pays mise sur les énergies d’économies sont attendus sur l’offre des courses devrait Finances tchèque, Zbynek Stanjura,
renouvelables mais aussi large- globale portant sur les quatre réac- a toutefois estimé que ce modèle
AVIS D'ENQUÊTE ment sur le nucléaire. Pour appuyer teurs », explique une source.
être connu très devrait être réexaminé pour enga-
PUBLIQUE UNIQUE l’offre française, Emmanuel rapidement. ger la construction de réacteurs sup-
Protection du forage du puits du Bois situé à Chaussy Macron et Luc Rémont, le PDG Pas de financement plémentaires. Il devra aussi recevoir
Par arrêté 2024-17675 du 10 avril 2024, le préfet du Val-d’Oise, à la demande d’EDF, avaient fait le déplacement à en fonds propres français. Il s’agit d’une offre de l’aval de la Commission européenne.
et au profit du Syndicat Intercommunal d’Alimentation en Eau Potable du Vexin
Ouest (SIAEP du Vexin Ouest), ouvre une enquête publique unique portant sur Prague en mars dernier, plaidant Contrairement à l’offre dont EDF conception, de construction et de Pour EDF, le résultat des courses
la déclaration d’utilité publique de la dérivation des eaux, à l’instauration des pour « fortifier les acteurs et la attend toujours la validation par le fabrication (« Engineering Procure- devrait être connu très rapidement.
périmètres de protection et de servitudes d’utilité publique, à la déclaration loi sur chaîne de valeur européenne ». gouvernement britannique (pour ment Construction Commissio- Le gouvernement tchèque prévoit
l’eau au titre du code de l’environnement, et à l’autorisation sanitaire d’utilisation
d’eau en vue de la consommation humaine au titre du code de la santé publique. Concrètement, l’offre d’EDF porte la construction de deux réacteurs ning » pour les spécialistes). Autre- de départager l’offre française de
Cette enquête se déroulera
des réacteurs d’un nouveau genre : EPR sur le site de Sizewell), celle-ci ment dit, ce type de contrat est celle des Coréens dès cet été pour
du lundi 6 mai 2024 au jeudi 6 juin 2024, inclus (32 jours). d e s E P R d e 1 . 2 0 0 m é g awa t t s ne comporte pas de financement en nettement moins risqué que celui identifier un candidat pressenti à
Pendant ce délai, les personnes intéressées par ce projet pourront prendre (contre 1.650 mégawatts pour le fonds propres de la part du groupe négocié pour le projet d’Hinkley partir de juillet prochain. n
connaissance du dossier en mairie de Chaussy et d’Omerville et consigner
leurs observations sur les registres ouverts à cet effet, aux heures habituelles
d’ouverture au public du bureau, dans le respect des mesures sanitaires en
vigueur.
Elles pourront également transmettre leurs observations par courrier à l’intention
de la commissaire enquêtrice, dans la mairie de Chaussy, qui les annexera aux
Pourquoi le groupe public persévère à l’international
registres d’enquête, ou adresser un courriel à l’adresse suivante : perimetres-
protection-captage-puits-du-bois-chaussy@mail.registre-numerique.fr
Pour être performant, mance dans le nucléaire implique dent, le groupe ne peut plus se le
Le dossier d’enquête dématérialisé pourra être consulté sur le site internet suivant :
https://www.registre-numerique.fr/perimetres-protection-captage-puits-du- EDF mise avant tout sur la DÉCRYPTAGE la répétition du geste dans les usi- permettre. Pour mener tous ces
bois-chaussy et sur un poste informatique mis à disposition du public en mairie réplication de ses chantiers nes et sur les chantiers. « C’est pour projets de front, EDF devra néan-
de Chaussy dans le respect des mesures sanitaires en vigueur. nucléaires en France – mais que tchèque, jusqu’à quatre réac- cela que c’est important d’avoir un moins parvenir à mener une mon-
Mme Annie POIRET est nommée commissaire enquêtrice pour conduire cette aussi ailleurs en Europe. teurs supplémentaires. Le réacteur programme de relance du nucléaire tée en cadence sans précédent
enquête, M. Jean-Luc FREYNE est nommé commissaire enquêteur suppléant.
Le groupe devra parvenir prévu pour le marché tchèque n’est en France qui soit au milieu d’un pro- dans les usines de son équipemen-
Elle se tiendra à la disposition du public afin de recevoir les observations et
propositions du public, dans le respect des mesures sanitaires, aux lieux, dates à une montée en cadence pas sur étagère et nécessitera des gramme européen », a-t-il récem- tier Framatome et dans celles de
et horaires précisées ci-après : sans précédent. centaines d’heures d’ingénierie ment fait valoir. ses sous-traitants.
Mairie de Chaussy - 1, place Charles De Gaulle 95710 CHAUSSY pour voir ses plans finalisés. Les améliorations et les délais Car la mise en chantier d’un
– mardi 07 mai de 09h00 à 12h00 Comment assurer une montée en plus courts observés dans la cons- é ve n t u e l p r o j e t t c h è q u e e s t
– samedi 18 mai de 09h00 à 12h00 cadence sans précédent depuis truction du deuxième réacteur EPR annoncée pour 2029, soit juste
– jeudi 23 mai de 13h30 à 16h00
30 ans de la filière nucléaire fran- La philosophie d’EDF sur le site de Hinkley Point lui don- après le début de la construction
– mardi 28 mai de 09h00 à 12h00
– jeudi 06 juin de 13h30 à 16h00 çaise, tout en tenant les délais pro- sur ses chantiers nent raison. Reste que la philoso- des EPR de Penly (Seine-Mari-
En complément du dossier déposé en mairies et de la rencontre avec mis, les budgets annoncés et en évi- à l’international phie d’EDF sur ses chantiers à time) et juste avant le premier
la commissaire enquêtrice, des informations peuvent être demandées à tant les malfaçons ? Pour s’atteler à l’international a, de gré ou de force, béton dans la centrale de Graveli-
Mme Florence Binaux Le Clech, Présidente du SIAEP du Vexin Ouest, 6 ce défi immense, Luc Rémont, le
a, de gré ou de force, dû largement évoluer. nes (Nord).
rue Eugène Blouin, 95240 Magny en Vexin Tél. : 01.34.67.32.42 / Mél. :
siaep.magny95@orange.fr PDG d’EDF, a choisi, contre toute dû largement évoluer. Pour le moment, la filière
La commissaire enquêtrice dispose d’un délai de 30 jours à compter de la clôture attente, de ne pas tirer une croix sur Une lourde dette française revendique une capa-
de l’enquête pour rédiger son rapport et ses conclusions motivées. les ambitions internationales du La mise en chantier et de nouveaux chantiers cité de production d’un réacteur
Les conclusions émises par la commissaire enquêtrice seront communiquées à groupe, aujourd’hui 100 % public. Désormais, le groupe parle de tous les deux ans et demi. Pour
toute personne concernée, qui en fera la demande à la directrice départementale d’un éventuel projet « vendre une technologie » et non tenir la lourde charge qui
des territoires adjointe du Val-d'Oise ou aux mairies concernées.
Jusqu’à quatre réacteurs tchèque est annoncée plus d’apporter une solution glo- s’annonce, EDF se fixe l’horizon
Elles seront également diffusées sur le site internet de la préfecture du Val-
d’Oise, supplémentaires pour 2029. bale, associant technologie et très ambitieux d’atteindre le
https://www.val-doise.gouv.fr/Actions-de-l-Etat/Environnement-risques-et- Soutenu par l’Etat et indirectement modalités de financement, comme rythme de deux réacteurs par
nuisances/Eau/Consultations-du-public par le contribuable français, EDF se le font certains de ses concurrents an. Avant cela, il lui faudra aussi
EP 24-212 / contact@publilegal.fr dit plus que jamais motivé pour D ’u n e p u i s s a n c e d e 1 . 2 0 0 ou comme il l’a fait lui-même sur le muscler sérieusement ses équi-
convaincre les Britanniques à mégawatts, il est plus adapté aux projet britannique d’Hinkley Point pes d’ingénieurs. Les recrute-
La ligne de référence est de 40 signes s’engager dans un deuxième chan- besoins de l’export mais diffère des dont il est en prime l’opérateur ments annoncés et engagés
en corps minimal de 6 points didot. tier nucléaire d’ampleur (deux EPR2 qui seront construits en chargé de produire puis de vendre ne tiennent pas compte
Le calibrage de l’annonce est établi de filet à filet. réacteurs de type EPR sur le site de France, ou encore des EPR chinois la production d’électricité. Très aujourd’hui de la charge de tra-
Les départements habilités sont 75,78, 91, 92, 93, 94, 95 et 69. Sizewell, dans le Suffolk), mais et britanniques.Mais pour Luc endetté et contraint d’affronter un vail lié à éventuel projet tchèque.
aussi pour construire, en Républi- Rémont, le PDG d’EDF, la perfor- mur d’investissement sans précé- — S.W.
19 Les Echos Mardi 30 avril 2024
La FDJ se
renforce
dans les
services de
proximité
JEUX
Le groupe français
a lancé un service
permettant d’ouvrir
un compte et d’obte-
nir une carte de
paiement.
Yann Duvert
La palette de services proposés
par la Française des Jeux s’élar-
git encore. Déjà omniprésent
dans les paiements du quoti-
dien, le groupe français propose
désormais une carte de paie-
ment, associée à un compte ban-
caire.
Cette offre est en réalité une
extension de l’application Nirio,
qui permet déjà de payer certai-
nes factures ou loyers en points
de vente. Sa version Premio, pro-
posée pour 29,90 euros par an,
doit aller plus loin. Outre une
carte Visa – dont un modèle aux
couleurs de Paris 2024 en vertu
du partenariat avec le géant
américain des paiements – et un
compte domicilié en France, elle
offrira la possibilité de déposer
de l’argent chez son buraliste,
dans une limite de 1.500 euros
par mois. Les retraits, eux,
devraient être autorisés d’ici la
fin de l’année.
Cette offre est
en réalité une
extension de
l’application Nirio.
Elle proposera également des
« outils de gestion budgétaire », à
ses clients. Répartition des
dépenses par catégories (ali-
mentaires, factures, etc.),
tableau de bord, mise en place
d’objectifs et d’alertes : « on offre
une meilleure capacité à piloter
son budget et on renforce la possi-
bilité d’un paiement en bas de
chez soi », résume Raphaël Bot-
bol, président de FDJ Services,
qui chapeaute le dispositif Nirio.
Alors que selon une étude de
Panorabanques datant de 2021,
près d’un Français sur deux est
en découvert au moins un mois
dans l’année, et un sur cinq l’est
tous les mois, ce nouveau ser-
vice vise « ceux qui ont des fins de
mois difficiles. Potentiellement, ce
sont six millions de personnes »,
poursuit le dirigeant.
Ce point fait d’ailleurs office
de principal argument face à la
concurrence de Nickel, néoban-
que filiale de BNP Paribas, qui
rend également possible l’ouver-
ture d’un compte, le dépôt et le
retrait d’espèces en bureau de
tabac.
Commerçants agréés
Pour déployer Nirio Premio, la
FDJ s’est appuyée sur Xpollens,
filiale de BPCE, spécialisée dans
la fourniture de services de paie-
ment en marque blanche. Cette
dernière fait notamment profi-
ter la FDJ de son agrément
auprès de l’Autorité de contrôle
prudentiel et de résolution
(APCR). Elle se rémunère « selon
un modèle de fournisseur logiciel,
c’est-à-dire sur chaque création
de compte, ou utilisation de
carte », résume son président
Jean Guillaume.
Quant aux buralistes, ils per-
cevront une commission lors de
chaque « parrainage », et un
pourcentage sur les dépôts et les
retraits. Aujourd’hui, sur les
10.000 commerçants proposant
le service Nirio, la moitié ont
déjà opté pour la version Pre-
mio. n
WeWork conserve une bonne partie
de ses sites en Ile-de-France
IMMOBILIER
La branche française
de l’entreprise de
coworking a achevé
les négociations
avec ses bailleurs.
Elle va quitter sept
sites parisiens.
Elsa Dicharry
WeWork réduit la voilure à Paris,
mais dans l’intention d’y réussir son
redémarrage. Le spécialiste des
bureaux partagés avec services ou
« coworking » a bouclé les discus-
sions engagées en novembre avec
ses bailleurs. A l’époque où sa mai-
son mère américaine avait été pla-
cée sous la protection du chapitre 11
de la réglementation sur les faillites.
Au final, l’entreprise ne va con-
server que douze de ses vingt sites
franciliens. A Paris, cinq sites multi-
entreprises vont fermer, dans les 8e,
9e, 17e et 19e arrondissements, ainsi
que trois locaux dédiés à chaque
fois à un client unique.
Des sorties parfois
coûteuses
L’espace de La Défense – seul site
français du groupe hors de Paris – a
déjà fermé ses portes fin décembre.
Mais tous les effectifs de l’entreprise
Jus de fruit moins sucrés
et moins purs : Bruxelles
change les règles
ALIMENTATION
Les instances
européennes ont
modifié la directive
jus de fruits pour
la première fois
depuis douze ans.
Marie-Josée Cougard
Le pur jus de fruits ne sera plus
aussi naturel. La réglementation
européenne s’est un peu assouplie,
permettant aux industriels d’en
modifier la teneur en sucres. Jus-
que-là, il leur était interdit de l’aug-
menter ou de la diminuer. Désor-
mais, il sera possible de réduire la
quantité de sucre apportée par les
fruits tout en restant dans la catégo-
rie « pur jus de fruit ».
L’étiquette modifiée précisera
« Contient uniquement les sucres
naturellement présents » au lieu de
« Sans sucre ajouté ». Les consom-
mateurs pourront choisir, comme
dans le cas de la confiture, entre la
version standard et l’allégée (définie
par au moins 30 % de sucre en
moins), qui aura les mêmes pro-
priétés nutritionnelles pour ce qui
est des vitamines et des minéraux.
Des jus d’orange
à l’eau de coco
Diverses techniques « innovantes »
sont autorisées par la nouvelle
directive européenne, pour agir sur
la teneur en sucre de cette catégorie
de boissons, qu’il s’agisse de filtra-
tion membranaire ou de fermenta-
tion par levure. L’adjonction d’eau
de coco, qui dilue la teneur en sucre
et modifie un peu le goût, est égale-
ment possible. C’est une source de
potassium, magnésium et calcium.
En revanche, les édulcorants
sont proscrits. Au passage, les jus
allégés devraient être mieux notés
par le Nutriscore, selon Emmanuel
Vasseneix, président d’Unijus,
l’organisation professionnelle qui
chapeaute le secteur. Mais tout cela
Les bureaux partagés de WeWork situés avenue de France, dans le 13e arrondissement de Paris,
font partie des sites conservés. Wework
160
SITES
de l’entreprise WeWork
devraient fermer leurs portes,
dans plusieurs pays. 170 baux
doivent être renégociés.
aura un coût industriel non négli-
geable de plusieurs millions d’euros
d’investissement dans la technolo-
gie.
La concurrence des sodas
et d’Oasis
La nouvelle directive élargit aussi la
catégorie de protéines végétales uti-
lisables pour clarifier les jus. S’agis-
sant des nectars, qui sont une autre
catégorie de boissons aux fruits à
base de fruits trop pulpeux comme
la banane – ou trop acides comme le
cassis -, pour en faire du jus, le Parle-
ment a abaissé la quantité de sucres
et de miel pouvant être ajoutés.
La France est un gros marché de
jus de fruits. « Le consommateur reste
attaché à son jus d’orange au petit-dé-
jeuner », dit Emmanuel Vasseneix.
Celui-ci pèse d’ailleurs très lourd dans
la catégorie « pur jus de fruits », qui
représente 70 % de l’ensemble des
boissons aux fruits.
Mais les ventes de jus et nectars
ont fortement diminué (-20 %) à
2 milliards d’euros depuis 2015,
selon les données Nielsen. Elles ont
souffert de la concurrence des bois-
sons aux fruits telles qu’Oasis, deux
fois moins chère, et des colas égale-
ment meilleur marché. « En France,
on boit trois fois plus de cola que de jus
de fruit », précise Emmanuel Vasse-
neix.
Le phénomène El Niño a eu un
effet indéniable sur le coût de la
matière première, qui s’est raré-
fiée. C’est particulièrement vrai
pour les oranges qui viennent
pour l’essentiel du Brésil, où les
producteurs ont souvent arbitré
en faveur d’autres cultures elles
que la canne et les céréales jugées
plus rentables. Un oranger ne vit
pas plus de 25 ans. Il faut donc réin-
vestir et renouveler son verger à ce
rythme. Les récoltes d’oranges
sont tombées si bas en 2023 que le
Brésil ne parvenait plus à honorer
ses commandes et avait dû fonc-
tionner par système d’allocations.
Une situation qui n’a pas manqué
d’interpeller les spéculateurs en
bourse. n
– soit 84 salariés – seront conservés, levard de La Villette. « Nous nous
assure sa direction.« Nous avons
quitté les bâtiments qui financière-
ment offraient le moins de perfor-
mances, et pour lesquels la demande
sommes mis autour de la table avec
les bailleurs et nous avons payé, par-
fois très cher, pour nos sorties », pré-
cise la dirigeante, qui se félicite qu’il
était plus faible », explique Rebecca n’y ait eu aucun contentieux.
Nachanakian, directrice générale Les clients qui occupaient les
de WeWork pour la France, l’Espa- bâtiments quittés ont quant à eux
gne et l’Italie. Comme celui du bou- été prévenus plusieurs mois à
ANNLEGALECH
annonces judiciaires & légales
RAPPEL
AVIS D’ENQUÊTE PUBLIQUE
Projet de périmètre de protection et de mise en valeur
des espaces agricoles et naturels périurbains (PPAEN)
sur les communes de Boissy-Saint-Léger, Bonneuil-sur-
Marne, Chennevières-sur-Marne, La Queue-en-Brie, Le
Plessis-Trévise, Limeil-Brévannes, Mandres-les-Roses,
Marolles-en-Brie, Noiseau, Ormesson-sur-Marne, Périgny-
sur-Yerres, Sucy-en-Brie, Santeny et Villecresnes, situées
sur le territoire de l’Etablissement Public Territorial Grand
Paris Sud Est Avenir (EPT GPSEA) et les Communes de
Valenton et de Villeneuve-Saint-Georges situées sur le
territoire de l’Etablissement Public Territorial Grand Orly
Seine Bièvre (EPT GOSB).
Le public est informé qu’une enquête publique est ouverte
par arrêté du Président du Département de Val-de-Marne n°
92 390 du lundi 29 avril 2024 à 9h00 au vendredi 31 mai
2024 à 17h30, soit pendant 33 jours consécutifs, sur le projet
de périmètre de protection et de mise en valeur des espaces
agricoles et naturels périurbains (PPAEN) sur les communes
mentionnées ci-dessus.
Monsieur Claude POUEY, (Ingénieur général retraité), a
été désigné commissaire enquêteur titulaire par décision
de la Vice-présidente du tribunal administratif de MELUN
et M. Daniel TRICOIRE, Ingénieur retraité, en qualité de
commissaire-enquêteur suppléant.
Le siège de l’enquête publique est fixé aux services techniques
départementaux situés dans la Zone Europarc au 10 chemin
des Bassins 94460 Valenton.
Le dossier d’enquête sous format papier sera mis à la
disposition du public pendant la durée de l’enquête, du lundi
29 avril 2024 à 9h00 au vendredi 31 mai 2024 à 17h30, soit
pendant 33 jours consécutifs, au siège de l’enquête, au siège
de l’EPT GOSB (accueil au 2ème étage) situé au Bâtiment
Askia - 11 avenue Henri Farman - BP 748 - 94398 ORLY cédex
et à la Direction des Affaires Juridiques, des Assemblées et
du Patrimoine de l’EPT GPSEA situé dans la zone Europarc
- 14 rue Le Corbusier - 94046 CRETEIL ; ainsi que dans les
16 Communes concernées, aux jours et heures habituels
d'ouverture au public, aux lieux suivants :
Boissy-Saint-Léger; Services Techniques; 3 rue de la
Pompadour – 94470 / Bonneuil-sur-Marne; Centre technique
municipal; 3 route de l'Ouest – 94380 / Chennevières-sur-
Marne; Hôtel de Ville ; 14 avenue du Maréchal Leclerc - 94430
/ La Queue-en-Brie; Hôtel de Ville; Place du 18 juin 1940 -
94510 / Le Plessis-Trévise; Hôtel de Ville - Accueil; 36 Avenue
Ardouin - 94420 / Limeil-Brévannes; Hôtel de Ville; 2 place
Charles de Gaulle - 94450 / Mandres-les-Roses; Hôtel de Ville;
4 rue du Général Leclerc - 94520 / Marolles-en-Brie; Hôtel de
Ville; Place Charles de Gaulle - 94440 / Noiseau; Hôtel de
Ville; 2 rue Viénot - 94880 / Ormesson-sur-Marne; Hôtel de
Ville; 10 avenue Wladdimir d'Ormesson - 94490 / Périgny-sur-
Yerres; Hôtel de Ville; Rue Paul Doumer - 94520 / Santeny;
Espace services citoyen; 1 rue de la Fontaine - 94440 /
Sucy-en- Brie; Hôtel de Ville; 2 avenue Georges Pompidou -
94370 / Valenton; Service Urbanisme; 1 chemin de la ferme
de l'hôpital, 94400 / Villecresnes; Hôtel de Ville; 68 rue du
Lieutenant Dagorno - 94440 / Villeneuve-St-Georges; Hôtel de
Ville; Place Pierre Sémard - 94190
Le dossier d’enquête publique sera également mis en
ligne et consultable pendant toute la durée de l’enquête
sur le site internet du Département https://www.
valdemarne.fr et sur les sites internet de l’EPT GOSB
https://www.grandorlyseinebievre.fr et de l’EPT GPSEA
https://sudestavenir.fr ; ainsi que sur le registre dématérialisé
La ligne de référence est de 40 signes en corps minimal de 6 points didot.
Le calibrage de l’annonce est établi de filet à filet.
Les départements habilités sont 75, 78, 91, 92, 93, 94, 95 et 69.
ENTREPRISES
l’avance, afin de trouver une solu-
tion – rester dans les lieux en
signant en direct avec le bailleur, se
déplacer vers un autre site
WeWork, ou opter pour les bureaux
d’une entreprise de coworking con-
currente. Pour l’heure, « le gros des
clients est resté. Les départs corres-
pondent à 10 % des comptes et 5 % des
bureaux occupés », précise Rebecca
Nachanakian.
Les adresses de prestige
conservées
« Paris a été et restera un marché
prioritaire pour WeWork », insiste
encore la dirigeante. L’entreprise
entend désormais se concentrer
sur ses emplacements les plus
« solides », notamment ses « navires
amiraux », comme les bureaux de la
rue La Fayette, de la rue de Madrid
ou des Champs-Elysées. Et tra-
vailler au mieux sa relation clients.
S’agissant de ces adresses de
prestige, WeWork n’est pas parvenu
à renégocier ses loyers – comme
cela a pu être le cas dans les villes
d’autres pays. Ceci alors que la
demande de bureaux reste forte
dans le centre de la capitale fran-
çaise, avec un taux de vacance au
plus bas.Au niveau mondial,
WeWork a pu conclure des accords
pour renégocier 170 baux. Il a par
ailleurs prévu de quitter plus de 160
sites. Ceci doit se traduire par plus
de 800 millions de dollars d’écono-
mies de loyers annuelles. n
dédié à l’enquête disponible à l’adresse : https://www.
registre-numerique.fr/enquete-publique-ppaen94.
Le public, quelle que soit sa commune de rattachement, pourra
durant toute la période d’enquête consigner ses observations,
propositions et contre propositions :
• Par écrit sur les registres papiers paraphés par le
Commissaire enquêteur et ouverts à cet effet aux horaires
et lieux d’ouverture des mairies de Mandres-les-Roses,
de Limeil-Brévannes, de Villecresnes et de Noiseau, ainsi
qu’au siège de l’enquête.
• Sur le registre numérique https://www.registre-
numerique.fr/enquete-publique-ppaen94.
• Les adresser par correspondance au commissaire
enquêteur à l’adresse suivante : « A l’attention de Monsieur
Claude POUEY, Commissaire-Enquêteur (Projet PPAEN),
DEVP - Services Etudes et Projets, Hôtel du Département -
94054 CRETEIL Cédex »
• Les adresser par courrier électronique envoyé à
enquete-publique-ppaen94@mail.registre-numerique.fr
Monsieur le commissaire enquêteur se tiendra à disposition
du public pendant la durée de l’enquête pour recevoir les
observations écrites ou orales du public aux dates et lieux
suivants :
- Lundi 29 avril de 9h00 à 12h00 à l’annexe de la mairie de
Mandres-les-Roses, située à l’Hôtel de ville 4 rue du Général
Leclerc – 94520 ;
- Mercredi 15 mai de 14h30 à 17h30 au bureau des
permanences de la mairie de Limeil-Brévannes, situé à
l’Hôtel de ville 2 place Charles de Gaulle - 94450 ;
- Samedi 25 mai de 9h00 à 12h00 à la mairie de Villecresnes,
situé à l’Hôtel de ville 68 rue du Lieutenant Dagorno – 94440 ;
- Vendredi 31 mai de 14h30 à 17h30 à la mairie de Noiseau,
situé à l’Hôtel de ville 2 rue Viénot – 94880.
Toute personne peut, sur sa demande et à ses frais, obtenir
communication du dossier d’enquête publique auprès du
Département du Val-de-Marne – Direction des Espaces Verts
et du Paysage/Service Etudes et Projet – Services techniques
Départementaux – Zone Europarc 10, chemin des Bassins
94460 Valenton.
Elle pourra également avoir communication des observations,
propositions et contre propositions versées au registre pendant
toute la durée de l’enquête.
Les informations relatives au dossier et à la procédure peuvent
être demandées auprès de la Direction des Espaces Vert et
du Paysage à l’adresse du siège de l’enquête figurant ci-
dessus ou par voie électronique : Devp-enquetepubPPAEN@
valdemarne.fr
Rapport et conclusions du commissaire enquêteur
Une copie du rapport et des conclusions motivées du
commissaire enquêteur pourra être consultée au Département
(Service études et projets), sur le site dédié à l’enquête
(https://www.registre-numerique.fr/enquete-publique-
ppaen94), ainsi qu’à la Préfecture du Val-de-Marne, pendant
un an à compter de la date de remise du rapport.
Le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur
seront par ailleurs publiés dans les mêmes conditions de
durée sur le site du Département (https://www.valdemarne.
fr) et sur les sites internet de l’EPT GOSB (https://www.
grandorlyseinebievre.fr) et de l’EPT GPSEA (https://
sudestavenir.fr).
En application de l’article R.113-22 du code de l’urbanisme, la
création du périmètre pourra être décidée, postérieurement à
l’enquête publique, par délibération du Conseil Départemental
du Val-de-Marne.
Le Président du Conseil Départemental
EP 24-177 / contact@publilegal.fr
ENTREPRISES Mardi 30 avril 2024 Les Echos 20

Tesla : le fructueux
voyage d’Elon Musk
en Chine
rité des données. Mieux encore, le
AUTOMOBILE constructeur automobile améri-
cain serait en voie d’obtenir l’appro-
Le constructeur bation des responsables gouverne-
américain mentaux pour le déploiement de sa
a notamment obtenu fonctionnalité de « conduite entière-
un important feu vert ment autonome ». Or, Tesla compte
réglementaire des sur ce « Full Self Driving » (ou
autorités chinoises « FSD » en anglais), déjà disponible
en matière de sécurité aux Etats-Unis, pour stimuler ses
ventes dans un pays où la concur-
des données.
rence sur le marché des voitures
électriques fait rage.
Enrique Moreira Le constructeur américain
aurait ainsi surmonté deux des
Une visite éclair qui semble avoir principaux obstacles au déploie-
porté ses fruits. Son charismatique ment de cette technologie en Chine,
patron Elon Musk passe à peine pour lequel il aurait reçu « un accord
plus de 24 heures en Chine – arri- de principe » des autorités locales,
vant dimanche et repartant dès le croit savoir Bloomberg.
lendemain – et Tesla obtient un feu Tesla aurait ainsi conclu un
vert réglementaire décisif des auto- accord de partenariat avec le géant
rités chinoises en matière de sécu- chinois d’Internet, Baidu, pour le
PROFITEZ D’UNE REMISE DE 20% SUR L’ACHAT DE VOTRE TICKET
AVEC LE CODE PROMO ECHOSVT24
développement de la cartographie
et de la navigation, affirme l’agence
de presse américaine.
Enfin, le constructeur a répondu
aux exigences relatives en matière
de sécurité des données et de confi-
dentialité. Dimanche, des modèles
fabriqués en Chine par Tesla ont en
effet été officiellement inscrits sur
la liste des véhicules répondant aux
exigences nationales en la matière.
C’est la levée d’un obstacle régle-
mentaire majeur.
Les enregistrements
des visages testés
L’Association chinoise des cons-
tructeurs automobiles (CAAM)
teste des véhicules depuis novem-
bre 2023, avec l’aide d’un régula-
teur national de la sécurité infor-
matique. L’objectif était de vérifier
comment ces voitures collectaient
Elon Musk a rencontré dimanche le Premier ministre chinois Li Qiang. Photo Wang Ye/AP/SIPA
et traitaient les données. Les tests
portaient notamment sur les infor-
mations personnelles et les enre-
gistrements de visages à l’extérieur
de la voiture. « Parmi les véhicules
testés, 76 modèles de six entreprises
(BYD, Li Auto, Lotus, Hozon Auto,
Tesla et NIO) répondent aux quatre
exigences de conformité en matière
de sécurité des données automobi-
les », a indiqué dimanche la CAAM
dans son communiqué. La Model 3
et la Model Y, produites dans la
méga-usine Tesla de Shanghai,
figurent sur cette liste.
Que ce soit l’approbation sur la
sécurité des données de ses voitu-
res – objets d’un âpre enjeu géopoli-
tique entre les Etats-Unis et la
Chine – ou la rumeur d’un potentiel
accord sur le système FSD, les mar-
chés apprécient ces nouvelles
e n t o u r a n t Te s l a . L e t i t r e d u
constructeur grimpait de 16 %, à la
mi-journée à Wall Street.
Durant sa courte visite, Elon
Musk a notamment rencontré le
Premier ministre Li Qiang.
L’homme qui, en tant que secré-
taire du Parti communiste chinois
à Shanghai, avait aidé Tesla à y
construire sa plus grande usine au
m on d e. « L’immens e marché
chinois sera toujours ouvert aux
entreprises à capitaux étrangers », a
assuré le dirigeant chinois durant
leur rencontre, selon la télévision
publique CCTV.
Mais si la Chine a accueilli en
grande pompe Tesla, la concur-
rence de plus en plus rude des mar-
ques locales de véhicules électri-
ques commence à peser sur le
constructeur américain. Sa part
sur le plus grand marché automo-
bile du monde est passée de 10,5 %
au premier trimestre 2023 à 6,7 %
en fin d’année dernière. n

LE PLUS GRAND ÉVÉNEMENT STARTUP ET TECH EN EUROPE

L’Allemagne va rénover
ses infrastructures
ferroviaires vieillissantes
TRANSPORT
Le pays investit
16,4 milliards d’euros
pour moderniser
les voies ferrées
et les aiguillages,
notamment.
Emmanuel Grasland
— Correspondant à Berlin
L’Allemagne veut mettre un coup
d’arrêt à la dégradation de ses
infrastructures ferroviaires. Le pre-
mier opérateur du pays, la Deuts-
che Bahn, a annoncé lundi qu’elle
allait rénover cette année 2.000
kilomètres de voies, 2.000 aiguilla-
ges, 150 ponts et un millier de gares,
dont celles de Dresde, Munich ou
Duisbourg. Un vaste chantier, qui
s’appuiera sur l’embauche de 5.500
personnes dans le développement
et la maintenance, en plus des
61.000 employés déjà actifs dans le
CHARLES MICHEL MEREDITH WHITTAKER YANN LECUN pôle infrastructures.
PRÉSIDENT DU CONSEIL PDG VICE-PRÉSIDENT & Financée par l’entreprise, l’Etat
EUROPÉEN SIGNAL FOUNDATION SCIENTIFIQUE EN CHEF DE L’IA fédéral et des Länder, la facture
META devrait s’élever à 16,4 milliards
d’euros en 2024. « Pour la première
fois depuis de nombreuses années,
nous allons stopper le vieillissement
environ un tiers des trains arrivent
en retard en Allemagne. Une situa-
tion qui pèse sur le quotidien des
Allemands et fait désormais figure
de sujet de plaisanterie.
Dans le dernier rapport sur l’état
du réseau ferroviaire, le « besoin de
rattrapage lié à l’âge » était évalué par
la Deutsche Bahn à 103,4 milliards
d’euros. Plus de la moitié des lignes
ferroviaires du pays doivent être
remises en état. Surtout, les besoins
de modernisation sont importants
pour les ponts et les viaducs (60 mil-
liards d’euros). La Deutsche Bahn en
a plus de 25.000, sous sa responsabi-
lité, en Allemagne.
A l’automne dernier, la coalition
dirigée par Olaf S cholz avait
annoncé 40 milliards d’investisse-
ments dans les infrastructures fer-
roviaires d’ici à 2027. Mais depuis le
jugement de la Cour constitution-
nelle de Karlsruhe et la crise budgé-
taire qui a suivi, le financement de
ces investissements est devenue
une question compliquée.
Même constat en France, où
l’Etat, la SNCF, les régions et les col-
lectivités ont théoriquement prévu
d’investir 100 milliards d’euros dans
le ferroviaire à l’horizon 2040, pour
construire de nouvelles voies ou
rajeunir les liaisons existantes.
Outre -Rhin, cette vague de

RÉSERVEZ VOTRE BILLET SUR de l’infrastructure ferroviaire », a

déclaré le patron de DB InfraGO, le
grands travaux démarrera le
15 juillet prochain, avec la rénova-

WWW.VIVATECH.COM pôle infrastructures de la Deutsche

Bahn, Philipp Nagl.
Environ un tiers des trains
en retard chaque année
Pour mener à bien ce chantier, la
CO-ORGANISATEURS PARTENAIRES FONDATEURS Deutsche Bahn a regroupé en fin
d’année les divisions chargées du
réseau ferroviaire et des gares sous
un même toit. « Nous vivons le plus
grand changement d’époque pour le
PARTENAIRES MÉDIAS
rail en Allemagne depuis la réforme
des chemins de fer », expliquait à
cette occasion, Richard Lutz, le pré-
sident du directoire de l’opérateur.
« L’infrastructure ferroviaire est trop
vieille, trop sujette aux pannes et, à de
nombreux endroits, au-delà de la
limite de charge. » Chaque année,
tion de la ligne entre Francfort-sur-
le-Main et Mannheim. Ce qui
entraînera sa fermeture pendant
cinq mois. Il s’agit de la première
étape d’une série de 40 grands
chantiers, prévus d’ici à 2030, afin
de rénover le plus vite possible
4.000 kilomètres de « corridors fer-
roviaires » très fortement utilisés.
Le 16 juillet, ce sera au tour de la
liaison entre Francfort et Cologne
d’être fermée pendant un mois, tan-
dis que celle entre Berlin et Ham-
bourg suivra en 2025. En Allema-
gne, plus de 50.000 trains circulent
chaque jour sur le réseau de 33.400
kilomètres de la Deutsche Bahn . En
France, le réseau de la SNCF s’étend
sur 27.500 kilomètres. n

21 Les Echos Mardi 30 avril 2024
Family offices et entrepreneurs,
moteurs des capital-risqueurs
CAPITAL-RISQUE
Environ 26 % des fonds
levés par les acteurs
français du capital-
risque et du « growth »
proviennent de
ces investisseurs,
selon une étude
de France Invest.
Charlie Perreau
Pas de surprise. Les levées des
acteurs français du capital-risque et
du « growth » ont baissé en 2023,
après trois années hors du com-
mun. D’après une étude de France
Invest, 3,6 milliards d’euros ont été
levés par les sociétés de gestion de
ces deux segments, soit 35 % de
moins qu’en 2022 et 50 % de moins
qu’en 2021. Mais c’est 32 % de plus
qu’en 2019, année pré-Covid. Le
« growth » est celui qui a le plus
souffert, avec 50 % de collecte en
moins (–21 % pour le capital-risque).
Cette baisse globale s’explique
principalement par la baisse des
levées supérieures à 100 millions
d’euros. « Toutefois, les levées de
moins de 300 millions se maintien-
nent à des niveaux élevés en mon-
tants collectés et en nombre de
fonds », soulignent les auteurs de
Carbonfact fait le pari de la spécialisation de la mesure carbone
MODE
La start-up française
dresse le bilan carbone
et l’analyse de cycle de
vie des produits
d’environ 150 marques
d’habillement.
Elle lève 15 millions
de dollars et mise sur
les avancées réglemen-
taires pour accélérer.
Camille Wong
La French Tech regorge de solu-
tions logicielles de comptabilité
carbone à destination des entrepri-
ses. La première vague était très
généraliste, à l’instar de Sweep ou
de Greenly, qui vient de lever 51 mil-
l’étude, qui observent également un
essor de nouveaux fonds. « Ce sont
des sociétés qui ont lancé des straté-
gies spécifiques, sur un secteur par
exemple, et qui ont donc fait des
levées plus petites », explique Simon
Ponroy, directeur des études écono-
miques et statistiques chez France
Invest.
Surprise en revanche du côté des
investisseurs des fonds, les « LP »
dans le jargon. En 2023, les princi-
paux souscripteurs ont été les per-
sonnes physiques fortunées (dont
une majorité d’entrepreneurs) et les
family offices, avec 26 % des levées,
soit 960 millions d’euros. Ils ont
dépassé le secteur public (22 % des
levées, 794 millions d’euros).
Les engagements
des industriels en recul
« Les family offices et entrepreneurs
sont de plus en plus attirés par le
monde du capital-investissement. Le
monde de l’entrepreneuriat dans la
tech est dynamique et a connu de bel-
les aventures. Les entrepreneurs
sont contents de réinvestir dans leur
propre écosystème », indique Ber-
trand Rambaud, président de
France Invest.
Pour le quatrième fonds d’amor-
çage de Partech, clôturé à hauteur
de 120 millions d’euros, 100 entre-
preneurs de la tech – dont 35 finan-
cés par Partech – ont mis au pot.
lions de dollars. La seconde se veut
spécialiste, comme Carbonfact. La
start-up, spécialisée dans l’indus-
trie de la mode, annonce lever sa
série A de 15 millions de dollars avec
Alven, son investisseur historique,
Headline et Y Combinator. L’ambi-
tion : automatiser le bilan carbone
(scopes 1, 2 et 3) des entreprises et
les analyses de cycle de vie (ACV)
des produits manufacturés (vête-
ments, chaussures).
En faisant le pari de la verticalisa-
tion, Carbonfact s’inscrit dans la
lignée d’autres start-up qui ciblent
des secteurs en particulier, comme
la finance, la construction ou
encore l’automobile. Un moyen
pour toutes ces jeunes entreprises
d’avoir notamment accès à des don-
nées plus précises (entreprises,
fournisseurs, etc.) dans leur secteur
en jouant sur les effets de réseaux.
« En grandissant, nous avons fait le
« Les Américains sont depuis long-
temps dans le “give back”. C’est un
phénomène qu’on retrouve désor-
mais en Europe », avait déclaré à
l’époque Romain Lavault, directeur
associé chez Partech, aux « Echos ».
Les engagements des industriels
et des fonds de fonds ont, quant à
eux, connu une forte baisse en 2023
(respectivement –64 % et –63 % par
rapport à 2022). Et les souscriptions
des assureurs ont représenté seule-
ment 7 % des levées en 2023 (455 mil-
lions d’euros), contre 13 % en 2022.
Les mutuelles et compagnies
d’assurances seront attendues à
l’avenir avec l’initiative Tibi 2 qui a
permis d’engager 7 milliards
d’euros, contre 6 milliards pour Tibi
1. Les fonds, qui seront déployés sur
trois ans, seront investis en « late
stage » et dans l’« early stage ».
« Nous sommes confiants. C’est un
programme qui est devenu une réfé-
rence. Même s’il y a un effet un peu
label, cela va soutenir dans la période
2025-2026 », estime Alexis Dupont,
directeur général de France Invest.
Manque de fonds
de « growth »
Les capitaux levés à l’étranger par
les fonds français de capital-risque
et de « growth » ont diminué de moi-
tié l’année dernière, tout comme
leur part dans les levées totales (17 %
en 2023, versus 21 % en 2022, et 38 %
choix d’ajouter l’empreinte de l’entre-
prise, et plus seulement celle du pro-
duit, qui représente d’ailleurs 90 % de
leur bilan. C’était une demande de
nos clients, en quête d’une plate-
forme unique », précise Marc Lau-
rent, cofondateur.
Moteurs réglementaires
Cet ancien cofondateur du fonds
Kerala Ventures, passé de l’autre
côté du miroir, bénéficie de deux
réglementations porteuses. D’une
part, la directive européenne CSRD
(Corporate Sustainability Reporting
Directive) sur la publication d’infor-
mations en matière de durabilité
par les entreprises contraint depuis
cette année certaines entreprises à
dévoiler leurs risques climatiques et
leurs émissions pour 2025. Une
révolution dans le reporting extra-
financier qui touche aussi les socié-
tés étrangères opérant en Europe.
en 2021), en lien avec l’absence de
levées de grande taille.
« Ce qui nous manque vraiment
aujourd’hui, ce sont les fonds de
growth plus gros. Car sur l’early
stage, il y a une vraie offre de finance-
ment », estime Bertrand Rambaud.
C’est pour combler ce trou dans la
raquette que cinq Etats membres
de l’Union européenne ainsi que le
groupe BEI, composé de la Banque
européenne d’investissement (BEI)
et du Fonds européen d’investisse-
ment (FEI), ont mobilisé 3,75 mil-
liards en 2023 pour un nouveau
fonds de fonds. Objectif : atteindre
10 milliards d’euros dont 5 milliards
provenant d’investisseurs privés
(assureurs, banques…). Mais il s’agi-
rait d’une goutte d’eau par rapport
aux Etats-Unis, qui comptent une
quarantaine de fonds de capital-ris-
que « growth/late stage » ayant une
taille moyenne de fonds de 2 mil-
liards de dollars.
Autre manque dans l’écosystème
selon France Invest : les fonds
secondaires, qui permettent d’assu-
rer de la liquidité aux investisseurs.
« Quand les capitaux américains
étaient très présents en 2021, il y
avait plus de liquidités possibles.
Quand ils ne sont pas là, c’est plus
compliqué », souligne Bertrand
Rambaud, qui espère également
que les sociétés de gestion misent
plus sur la deeptech et en régions. n
D’autre part, le gouvernement
français a dévoilé il y a quelques
semaines le futur « écoscore » des-
tiné à afficher une note environne-
mentale sur les vêtements vendus en
France. La publication d’un décret
est prévue en mai, et sa mise en place
pourrait être effective à l’automne.
Une initiative similaire est aussi pro-
chainement attendue au niveau
européen. « Notre moteur principal
reste la CSRD dans la mesure où l’affi-
chage environnemental est encore un
40 %
DES REVENUS
de l’entreprise se font
aux Etats-Unis avec des
marques comme New Balance,
Columbia ou Carhartt.
START-UP
Intuition
mise sur les applis
grand public
FONDS
Hugo Amsellem,
ancien de The Fa-
mily, et Etienne
Boutan, entrepre-
neur et business
angel, lancent un
premier véhicule
ciblé à 15 millions
d’euros.
Le paysage du capital-risque a
bien changé en dix ans. Une
vague de nouveaux fonds a
émergé ces dernières années
avec à leurs têtes des anciens
entrepreneurs de la tech. Des
profils qui séduisent les
start-up, même si leurs thèses
d’investissement ne sont pas
très différentes de leurs aînés
(beaucoup de logiciels pour
entreprises). Le fonds Intuition,
quant à lui, a fait le pari de se
spécialiser dans les applica-
tions grand public, le « consu-
mer », dans le jargon.
« Personne ne veut toucher au
“consumer” en Europe car c’est
volatil, alors qu’il y a énormé-
ment d’opportunités », estime
Hugo Amsellem, cofondateur
d’Intuition. Cet ancien de The
Family, célèbre incubateur
français, s’est associé à Etienne
Boutan, cofondateur d’Heex
Technologies (big data) et busi-
ness angel très actif dans la
French Tech (Sorare, Wethe-
new, Kinetix, Drop, Twin
Labs, etc.), pour lancer un pre-
mier véhicule dont la taille cible
est de 15 millions d’euros. Un
premier closing, dont le mon-
tant n’est pas révélé, a été réa-
lisé. Les investisseurs du fonds
sont un mix de sportifs, dont le
footballeur Raphaël Varane
– qui a récemment arrêté sa car-
rière internationale et investit
dans des start-up –, mais aussi
des entrepreneurs, des fonds de
fonds et des family offices.
Intuition, qui est un fonds
suiveur, injectera des tickets
entre 100.000 et 500.000 euros
dans une quarantaine de
start-up en Europe et aux Etats-
Unis. Pour dénicher des pépites
outre-Atlantique, les deux asso-
ciés s’appuient sur trois « ven-
ture partners » : Axel Toupane
(joueur de basketball), Eliott
Kessas (cofondateur de Daring,
qui produit des alternatives
à la viande de poulet) et Erika
Batista (ex-The Family et asso-
ciée d’On Deck Runway Fund).
peu flou. Il sera au début non contrai-
gnant, mais nous avons des clients
dans l’Hexagone avec lesquels nous
commençons à le déployer », poursuit
l’entrepreneur, qui a contractualisé
avec Sézane, Celio, Promod ou
encore Fusalp en France.
La start-up, composée d’une quin-
zaine de salariés, cherche surtout à
recruter et vise une quarantaine
d’employés d’ici à 2025, tout en fai-
sant croître son pool de 150 clients.
« Une cinquantaine d’entre eux
dépensent environ 50.000 dollars par
an chez nous, une centaine de petites
marques dépensent, elles, entre
10.000 et 12.000 euros », détaille Marc
Laurent. Soit des revenus annuels
récurrents estimés entre 3,5 et 4 mil-
lions de dollars.
Environ 40 % de ses revenus se
font aux Etats-Unis, avec des mar-
ques comme New Balance, Colum-
bia ou Carhartt. Le pays connaît
Intuition a déjà réalisé des
premières opérations, encore
secrètes, au Royaume-Uni, en
France et aux Etats-Unis. « La
France n’a pas à rougir par rap-
port aux Etats-Unis. Nous avons
à la fois des acteurs historiques,
comme LVMH [propriétaire du
Groupe Les Echos – Le Parisien,
NDLR], et des entreprises dans la
tech, comme Amo, Yubo [deux
réseaux sociaux, NDLR], Ledger
ou encore Sorare », souligne
Etienne Boutan, qui regardera
avec attention les start-up dans
l’IA mais aussi la santé et la per-
formance dans le sport.
Les fonds spécialisés permet-
tent évidemment de développer
une expertise, ce qui peut être
recherché par des entrepre-
neurs, mais c’est aussi un pari
risqué pour une société de ges-
tion. « Dans le consumer, 95 % des
deals, c’est de l’échec. Mais quand
ça marche, ça donne un fonds
ultra-performant », estime un
investisseur en capital-risque.
Le consommateur,
moteur de l’économie
Intuition n’est pas le seul à
miser sur le BtoC. L’américain
Forerunner Ventures (2,3 mil-
liards de dollars sous gestion) a
développé une forte thèse sur ce
segment et a notamment misé
sur BirchBox, Glossier ou
encore la néobanque Chime.
« Nous avions l’idée de créer une
entreprise centrée sur le consom-
mateur, car c’est lui qui est le
moteur de la majeure partie de
l’économie », expliquait la fon-
datrice du fonds, Kirsten Green,
à Fortune, quelques mois après
le closing d’un véhicule de 1 mil-
liard de dollars.
En Europe, Felix Capital, qui a
levé 600 millions de dollars en
juin 2022, a multiplié les paris
dans le consumer et le « lifes-
tyle » avec Ami, Dott, Frichti,
Heetch ou encore Ledger.
D’ailleurs, le fonds britannique
organisera en mai prochain un
événement avec Intuition qui
réunira des fondateurs et des
investisseurs.
Cette rencontre fait partie
d’une tournée d’événements
d’Intuition à travers le monde : à
Berlin avec Interface Capital, à
Stockholm avec EQT Ventures, à
New York avec Andreessen
Horowitz et 35V, à Los Angeles
avec Greylock, et à San Fran-
cisco avec General Catalyst. Et
un événement totem aura lieu à
Station F en septembre pro-
chain. — C. Pe.
deux récentes propositions de loi en
la matière. Le Fashion Act, dans
l’Etat de New York, s’il est adopté,
imposera ainsi de mesurer l’impact
social et environnemental de cette
industrie. Et en Californie, une pro-
position de loi votée obligera les
grandes entreprises, tous secteurs
confondus et actives dans l’Etat, à
dévoiler chaque année leurs émis-
sions de gaz à effet de serre directes
et indirectes. Sur le continent, la
start-up américaine (généraliste)
Watershed a d’ailleurs levé il y a
quelques semaines 100 millions de
dollars pour une valorisation de
1,8 milliard.
En France, d’autres jeunes pous-
ses s’engouffrent dans la brèche de
l’affichage environnemental, à l’ins-
tar de Waro. La start-up, qui a levé
1 million d’euros il y a quelques mois,
cible les entreprises du textile, mais
aussi celles de l’ameublement. n
HIGH-TECH&MEDIAS
Le producteur Quad veut doubler de taille
l Le groupe audiovisuel a notamment
produit deux séries événement de
Canal+, « La Fièvre » et « Terminal ».
l Avec environ 60 millions de chiffre
d’affaires, Quad n’est pas dans le trio
de tête du secteur mais est rentable.
AUDIOVISUEL
Stéphane Loignon
Quad trace sa route. Le groupe
audiovisuel indépendant fondé il y a
trente ans par Nicolas Duval Adas-
sovsky et François Brun surfe sur
une vague de succès sur petit et
grand écrans. Installée à Clichy
(Hauts-de-Seine), l’entreprise de
150 salariés (350 équivalents temps
plein en comptant les intermittents)
est notamment derrière « La Fiè-
vre », la série événement de l’auteur
de « Baron Noir », Eric Benzekri.
Saluée par la critique, la production,
récemment diffusée sur Canal+,
a inspiré par son flair politique une
note à la Fondation Jean-Jaurès.
Dans un autre genre, c’est aussi
Quad, allié à la maison de produc-
tion de Jamel Debbouze, Kissfilms,
qui coproduit une autre série phare
du moment, la sitcom « Terminal »,
toujours sur Canal+. Réussite là
encore : « Terminal » a réalisé le
meilleur lancement pour une créa-
tion originale Canal+ sur MyCanal
depuis deux ans. Côté documen-
taire, via Quad Box, l’une de ses filia-
les, c’est toujours Quad qui s’apprête
à sortir mi-juin la seconde saison de
la série « Tour de France : au cœur
du peloton », sur Netflix, après un
premier opus couronné de succès
(Top 10 dans 15 pays sur la plate-
forme). Quad Box était également
derrière la série documentaire
« L’Affaire Bettencourt », qui s’est
glissée deux semaines de suite dans
le Top 10 mondial de Netflix.
Croissance organique
Détenu en quasi-totalité par ses
deux cofondateurs, ce groupe indé-
pendant a le vent en poupe et prouve
la validité de ses choix et de son
modèle de développement fondé sur
la croissance organique, en contre-
point de celui de conglomérats qui
multiplient les acquisitions comme
Banijay, Federation ou Mediawan.
fusions // acquisitions // cessions // partenariats
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La dataroom sera accessible,
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confidenialité, aux candidats
manifestant leur intérêt auprès de :
RETROUVEZ UNE SÉLECTION D’ANNONCES SUR :
« On essaie de construire une alter-
native à ces grands groupes », déclare
Nicolas Duval Adassovsky.
Avec environ 60 millions d’euros
de chiffre d’affaires annuel, Quad
reste un petit poucet face à ces
géants, mais se développe à son
rythme et en restant rentable. Pré-
sent dans la postproduction et la
production publicitaire, son métier
historique qui apporte près de 50 %
de ses revenus, Quad est aussi
actif dans la production d’émission
télévisée, avec le format original
« Les Rencontres du Papotin », sur
France Télévisions, animé par des
journalistes porteurs de troubles du
spectre autistique.
Le producteur historique d’Oli-
vier Nakache et d’Eric Toledano
produit en outre environ cinq films
pour le cinéma chaque année, dont
« Frères », avec Mathieu Kassovitz
et Yvan Attal, qui a bien démarré
en salle mercredi dernier. Réunies
dans le même immeuble à Clichy,
les 13 filiales – créées en interne au fil
de l’histoire du groupe – peuvent
facilement partager leurs expertises
et leur réseau, tout en restant « très
indépendantes dans leur ligne édito-
riale et leur choix de gestion », précise
Nicolas Duval Adassovsky. « Il y a de
moins en moins de frontières entre les
métiers, qui s’influencent les uns les
autres », considère-t-il.
Quad est également
actif dans
la production
d’émission télévisée.
L’entité dédiée au documentaire,
lancée il y a cinq ans sous la houlette
de Yann Le Bourbouac’h, a su trou-
ver un ton et un mode de narration
innovant, proche de celui des séries
de fiction, notamment sur les sujets
sportifs. « Notre boulot, c’est de plan-
ter les champions comme des person-
nages à part entière », résume le pro-
ducteur associé chez Quad Group et
Maître Franck MICHEL
Administrateur Judiciaire
3, rue des Croix de Bois
45000 Orléans
duralex@ajassocies.fr
reprise-entreprise.lesechos.fr
Mardi 30 avril 2024 Les Echos 22
La série « La Fièvre », diffusée sur Canal+, a été saluée par la critique. Photo Thibault Grabherr/Quad+Ten/Canal+
cofondateur de Quad Box, afin qu’un
spectateur puisse insensiblement
passer d’une série à suspense à une
Mediawan met la main
série documentaire. « Nous voulons
nous développer sur ce savoir-faire. Ce sur l’allemand Leonine Studios
travail auprès des plateformes est
désormais aussi reconnu par les diffu- Déjà présent au capital du de Mediawan seul à près de 1,5 mil- stratégie. De nouvelles mesures
seurs plus classiques », se réjouit celui producteur et distributeur liard. « C’est la plus grosse opéra- réglementaires s’appliqueront par
qui vient d’achever la production allemand, le groupe audio- tion de l’histoire de Mediawan », ailleurs en Allemagne à partir
d’un documentaire sur la course visuel français met la main confirme Guillaume Izabel, le de 2025, imposant aux plate -
Paris-Roubaix, pour un « prime sur la totalité de celui-ci. directeur de la stratégie du groupe. formes des obligations d’investis-
time » sur France Télévisions. Devant le rachat de Plan B en 2022 sement dans la production locale,
En augmentant la voilure côté Le couple franco-allemand res- et de Lagardère Studios en 2020. comme en France. « Le marché
production (notamment en docu- serre ses liens dans l’audiovisuel. L’acquisition doit encore obtenir allemand va connaître un fort
mentaires) en 2025, Quad veut Le groupe Mediawan, fondé par l’autorisation des autorités de la appel d’air, il n’y a pas d’acteur
continuer de grandir, tout en amé- Pierre-Antoine Capton, Xavier concurrence, ce qui ne devrait pas mieux positionné que Leonine
liorant sa rentabilité. « Nous som- Niel et Matthieu Pigasse, annonce poser de problème, Leonine opé- pour profiter de cette demande »,
mes très ambitieux et visons 100 % de le rachat de la société allemande rant avant tout dans les pays ger- juge Guillaume Izabel. « Nous
croissance d’ici dix ans », indique Leonine Studios, dont il détenait manophones, où Mediawan est nous positionnons de manière à
Nicolas Duval Adassovsky, qui déjà 25 % et qu’il possédera à 100 % peu présent. Elle doit aussi faire produire du contenu allemand, que
espère développer la composante une fois l’opération finalisée, a l’objet d’une notification auprès du nous pourrons ensuite déployer à
numérique du groupe. En gardant priori début juin. régulateur audiovisuel allemand. l’international. »
la même méthode : « Nous avons Le montant de l’opération n’est Dans cette opération financée Sorte de cousin allemand de
toujours grandi par croissance orga- pas dévoilé. Le « Financial Times » en titres, Mediawan reprend les Mediawan, Leonine présente un
nique, jamais externe, et je pense que évo que une valorisation de parts de Leonine qui étaient déte- modèle proche de sa nouvelle mai-
ça continuera », glisse l’entrepre- 500 millions d’euros pour Leo- nues par le fonds américain KKR son mère, en étant présent à la fois
neur, qui se dit avant tout animé par nine. Fin 2022, certaines estima- (soit 75 % du capital). Ce fonds, qui dans la production et la distribu-
le plaisir de « construire ». n tions évoquaient une valorisation est également l’un des principaux tion de cinéma et de télévision et
actionnaires de Mediawan, avec les les licences, aussi bien en fiction
fondateurs, voit en retour sa part qu’en animation, documentaire ou
dans le capital de l’entreprise fran- émissions de flux.
çaise augmenter. Selon nos infor-
mations, celle-ci restera inférieure
à 50 % du capital de Mediawan ; le
Profil financier solide
Mediawan et Leonine partagent
contrôle et la majorité des droits de donc le même type de clients et
VOUS SOUHAITEZ PARAÎTRE DANS CETTE RUBRIQUE - SARAH MEDARD 01.87.39.74.94
vote du groupe resteront aux pourront mettre en commun leurs
mains des trois fondateurs. formats et leurs histoires (proprié-
« L’équilibre de gouvernance ne tés intellectuelles ou « IP ») pour
change pas », assure Guillaume Iza- les valoriser sur les différents mar-
bel. Un élément important, car les chés du groupe. La société alle-
sociétés contrôlées par des capi- mande affiche par ailleurs un pro-
 Fabriqué en France taux extra-européens ne peuvent fil financier solide, avec un très
La fabricaion des produits Duralex® garanit une qualité pas bénéficier des aides du CNC ou faible endettement et une généra-
supérieure de producion et souient l’industrie française. de l’Union européenne. Leonine tion importante de flux de trésore-
s’était vu refuser une aide euro- rie, indique Mediawan.
 Résistance aux chocs
Fabriqués en verre trempé, ce qui les rend plus résistants péenne en 2018 en raison de la Constitué en 2019 par KKR
aux chocs que les autres produits en verre. nationalité extra-européenne de quand le fonds a repris Tele Mün-
son propriétaire KKR, ce que la chen Group – auquel se sont ajou-
 Durabilité société a contesté en vain en vain tées d’autres sociétés comme Wie-
Réputés pour leur durabilité et leur longévité, ce qui en fait
un choix plus économique à long terme. devant la justice européenne. demann & Berg –, Leonine (ou les
L’acquisition par Mediawan sociétés qu’il a rassemblées) a
 Résistance boisson chaude et froide devrait logiquement rendre possi- notamment produit les films « La
Les produits Duralex® sont résistants à la chaleur, ce qui les
rend adaptés à la préparaion de vos boissons chaudes ou à ble l’accès à ces aides. Vie des autres », oscarisé en 2007,
l’usage au micro-ondes. « L’Œuvre sans auteur », nommé
Un géant aux oscars en 2019, ou la série de
 Facilité d’entreien
Les produits Duralex® sont faciles à netoyer et peuvent « paneuropéen » science-fiction « Dark », succès
être lavés au lave-vaisselle. Pour Mediawan, l’opération s’intè- international sur Netflix.
gre dans sa stratégie de constitu- Leonine, dont le management
tion d’un géant européen de reste en place, compte environ
Maître Benjamin TAMBOISE l’audiovisuel. « Nous n’étions pas 500 salariés, contre 1.100 perma-
Administrateur Judiciaire
176, avenue Charles de Gaulle présents directement en Allemagne, nents côté Mediawan. Son chiffre
92200 Neuilly-sur-Seine deuxième marché audiovisuel d’affaires annuel avoisinerait les
hbx-duralex@hbx.eu d’Europe, où Leonine est un des pre- 500 millions d’euros, selon nos
miers acteurs indépendants. Cette informations, ce qui porterait celui
opération complète notre position- du nouvel ensemble à environ
nement d’acteur paneuropéen, dans 1,3 milliard d’euros. A titre de com-
la lignée de la stratégie menée depuis paraison, le rival Banijay (groupe
sept ans avec une présence forte FL Entertainment) a réalisé envi-
dans tous les territoires du conti- ron 3,3 milliards d’euros de chiffre
nent », souligne le directeur de la d’affaires en 2023. — S. Lo.
23 Les Echos Mardi 30 avril 2024
L’addition d’Atos
s’alourdit encore, à près
de 5 milliards d’euros
INFORMATIQUE
A quatre jours de la
remise des offres, les
scénarios d’affaires de
l’ex-fleuron informati-
que virent au rouge.
Le groupe doit effacer
3,2 milliards d’euros
de dette et a besoin
de 1,7 milliard
d’argent frais.
Anne Drif
L’addition flambe pour les créan-
ciers d’Atos. Plus de sacrifices
sont nécessaires, a alerté lundi l’ex-
fleuron informatique, plombé par
4,8 milliards d’euros de dette. L’offre
de l’Etat, de 700 millions à 1 milliard
d’euros sur ses actifs souverains, ne
suffira pas à le sauver. Désormais,
Atos juge qu’il doit effacer près
de 70 % de sa dette, soit 3,2 mil-
liards d’euros. Il y a seulement
quinze jours, il n’était question que
de la moitié – et, en fin de semaine
dernière même, les projections
tournaient plutôt autour de 3 mil-
liards. Pour survivre et garder une
notation crédible, sa dette doit peser
moins que deux années d’Ebitda, au
lieu de trois années précédemment.
Atos veut aussi beaucoup plus
d’argent frais : pas moins de 500 mil-
lions en plus, soit 1,7 milliard
d’euros. Au total, l’addition va
donc frôler l’équivalent de sa dette
d’aujourd’hui, à près de 5 milliards
d’euros ! La cause ? Atos a dégradé
d’un coup tous les indicateurs de
son plan d’affaires pour ses trois
divisions (numérique, cyber et info-
gérance). Jean-Pierre Mustier, le
président, a dû taper du poing sur la
Hipgnosis : la bataille
boursière s’intensifie
MUSIQUE
Le pionnier des rachats
de catalogues de
musique est valorisé
1,6 milliard de dollars.
Blackstone a révélé sa
seconde contre-attaque
face à Concord,
financé par Apollo.
Nicolas Madelaine
Le géant du private equity Black-
stone semble bien décidé à ne pas
laisser filer les actifs d’Hipgnosis, le
fonds lancé par Merck Mercuriadis
qui, après son introduction à Lon-
dres en 2018, avait initié une vague
de rachats de catalogues de stars de
la musique à coups de centaines de
millions de dollars pour profiter des
taux bas et de la croissance du strea-
ming. En perte de vitesse depuis la
remontée des taux qui réduit la valo-
risation de ce type d’actifs, Hipgno-
sis, qui détient des titres de Blondie,
Shakira ou Neil Young, est égale-
ment convoité par son concurrent
Concord Chorus qui a lancé les hos-
tilités et est financé par un autre
géant américain de l’investissement
dans le non coté, Apollo.
Blackstone est revenu lundi avec
une seconde contre-offre sur celle
de Concord et valorise cette fois le
catalogue d’Hipgnosis 1,57 milliard
de dollars (1,04 livre par action), loin
de ses plus hauts, mais mieux que le
1,4 milliard proposé initialement mi-
avril par son compétiteur. Comme à
chaque fois qu’il reçoit une offre
HIGH-TECH & MEDIAS
table en conseil d’administration en ment l’annonce de Bercy du week-
fin de semaine dernière pour exiger end. « C’était anticipé, c’est de l’argent
la pleine transparence sur l’avenir qui rentre, donc une bonne nou-
du groupe, dans l’attente des offres. velle. » Message aussi bien reçu
Finalement, les revenus vont en Bourse, où le titre a bondi de
baisser en 2024 de 3,3 %, au lieu de l’ordre de 20 % en début de séance
2 %. A moyen terme aussi, les pers- lundi, malgré la nette dégradation
pectives sont moins brillantes que du plan d’affaires.
prévu : +2,3 %, contre +3,1 % antici- La proposition de l’Etat est de fait
pés début avril. Dans l’infogérance, tombée à point nommé alors
Atos évoque même un « risque plus qu’Atos a reporté en fin de semaine
élevé de résiliation de contrats ». La dernière de quelques jours son tom-
rentabilité baisse et dans le numéri- bereau de mauvaises nouvelles. De
que, les frais de restructuration vont quoi s’éviter un choc trop violent.
être plus élevés l’an prochain Pour Mais pour le reste, ajoute cette
noircir encore le tableau, d’ici source chez les créanciers, « on fera
à 2027, les flux de trésorerie de l’ex- une offre à nos conditions et comme
fleuron de l’informatique vont fon- on a envie de la remettre ». Prochain
dre de 500 millions d’euros supplé- verdict le 3 mai, à la remise des plans
Kermalo/RÉA
mentaires, soit 800 millions d’euros. de sauvetage.
« Pire que Casino » Lire « Crible »
Du côté des créanciers, on est plus
agacés qu’affolés. « Qu’est-ce que ça
( Page 34 Atos a dégradé d’un coup tous les indicateurs de son plan d’affaires pour ses trois divisions.
change ? Les chiffres bougent toutes
les semaines, c’est pire encore que
Casino, commente un proche des
discussions. Toute la question est :
est-ce qu’on peut légitimement rester
confiant dans la direction générale ? »
Les hedge funds et les obligatai-
res, qui portent la moitié de la dette
de l’ex-fleuron, accueillent positive-
er
Le Parisien, 1 sur la vidéo
sur YouTube
ÉCOUTEZ NOTRE
PODCAST LA STORY
Atos: fleuron de l’informatique
en sursis dans « La Story », le
podcast d’actualité des « Echos ».
58,8 millions
48,9M
31M
mieux-disante, le conseil d’Hipgno-
sis a déclaré soutenir ce projet.
Blackstone et Hipgnosis sont liés 30,8M
depuis 2021 et avaient affiché de
grandes ambitions ensemble. Ils
ont lancé un autre fonds, Hipgnosis
Songs Assets, de 1 milliard, financé
23,3M
par Blackstone. Merck Mercuriadis
et Blackstone contrôlent aussi Hip-
gnosis Song Management, l’entité 18,1M
gérant cet autre fonds et la société
cotée, Hipgnosis Songs Fund (HSF),
de son nom complet. Cette structure 14,4M
de gestion a une option pour rache-
ter le catalogue de HSF si on met un
terme à son contrat. Cette option 12,7M
pourrait compliquer les discussions
dans cette bataille boursière.
8,4M
Dissolution
HSF avait tenté de se vendre en
partie l’an dernier à Blackstone et 3,7M
Merck Mercuriadis, mais cela avait
été bloqué par ses actionnaires qui
avaient décidé en octobre de dissou-
dre la société dans sa forme actuelle. Source : Wizdeo. Vidéos vues sur Youtube, mars 2024
La régularité des revenus des
catalogues de droits (surtout les
droits d’auteur, mais également les
droits de la musique enregistrée) a
toujours attiré la finance. Mais le
potentiel des catalogues plus
anciens sur les plateformes de strea-
ming a redoublé leur intérêt ces
dernières années, avec l’entrée de
fonds de private equity comme
Blackstone. Ce qui a permis à des
Découvrez toutes les vidéos du Parisien
stars du rock d’assurer leur retraite
en vendant cher leurs titres. sur YouTube.com/LeParisien
Cependant, la hausse des taux
d’intérêt renchérissant le coût de
financement des achats de cata-
logues a conduit à une révision
des valorisations de ces derniers,
notamment celui d’Hipgnosis. n
PME&REGIONS
Les PME rivalisent d’imagination
pour retenir leurs salariés
l Après la vague de « quiet quitting » post-Covid, le butinage professionnel inquiète les entreprises.
l Les ressources humaines vont parfois loin pour tenter de conserver des talents en quête de sens.
RH
Paul Molga
— Correspondant à Marseille
Les entreprises ont du mal à recru-
ter, mais elles ont aussi du mal à
conserver leurs talents. Dans le
monde, presque un quart des nou-
velles recrues abandonne leur em-
ploi dans les 45 premiers jours et
84 % des salariés envisagent de quit-
ter leur entreprise pour une autre
ayant meilleure réputation, selon
une étude de l’expert américain en
ressources humaines Josh Bersin,
qui sert aussi de référence à la pro-
fession en France.
« Pour retenir ses talents, une en-
treprise doit désormais se présenter
comme un produit, le meilleur qui
soit sur le marché », explique Mat-
thieu Borel, cofondateur de la socié-
té ZeOF Academy. Cette jeune en-
treprise d’Aix-en-Provence s’est
spécialisée dans le conseil à l’élabo-
ration de marques employeurs
pour les start-up et PME, premières
victimes du « job hopping », ce buti-
nage professionnel consistant à
changer régulièrement et fréquem-
ment d’entreprise pour multiplier
les expériences.
Ambiance antistress
Le phénomène est tel (il y a encore
eu l’an dernier 2,7 % de démissions,
soit une moyenne de 500.000 par
trimestre, un record « depuis
15 ans », selon la Dares) que les pa-
trons surenchérissent pour retenir
leurs nouvelles recrues. Le produc-
teur d’aliments bio Bjorg, Bonne-
terre et Compagnie a, par exemple,
dépensé une dizaine de millions
d’euros dans un nouveau siège so-
cial à Saint-Genis-Laval, dans la
métropole de Lyon (Rhône), cons-
truit pour cocooner et favoriser le
bien-être au travail de ses 300 colla-
borateurs.
Rien ne manque dans cette « ru-
che » de 6.000 mètres carrés ainsi
baptisée pour « sa fonction rassu-
rante et protectrice » par le directeur
général de l’entreprise, Laurent
Huynh : larges espaces et ouvertu-
res respectant le rythme circadien
de l’organisme, contrôle des
éblouissements, système acousti-
que pour la réduction de bruit, es-
pace forme, salle de sieste, jardins
Potager, pétanque et espaces de parole :
le management original de Eurécia
Près de Toulouse, l’éditeur
de logiciels de ressources
humaines a aménagé ses
bureaux dans une ancienne
ferme pour le bien-être
de ses collaborateurs.
Laurent Marcaillou
— Correspondant à Toulouse
C’est peu dire que l’éditeur de logi-
ciel de ressources humaines Euré-
cia a investi dans ses locaux pour
l’épanouissement de ses collabora-
teurs. Son président Pascal Gré-
miaux, qui l’a fondé en 2006, a réno-
vé une ancienne ferme en briques à
côté du canal du Midi, à Castanet-
Tolosan, près de Toulouse, en-
tre 2015 et 2018. Il a rajouté une ver-
rière entre les bâtiments en 2020
pour totaliser 1.200 mètres carrés
de bureaux dans un parc de deux
hectares qui comprend un jardin
potager cultivé par les salariés, des
ruches, des nichoirs, un terrain de
zen sur le toit, épicerie garnie de
centaines de références maison, et à
l’extérieur des ruches, des moutons
et des promenades. Le turnover y
serait inférieur à 3 % selon l’entre-
prise, un record dans l’industrie
agroalimentaire.
Chez LDLC, leader français de l’e-
commerce informatique, c’est le
passage à la semaine des quatre
jours, sans réduction de salaire, qui
a achevé de transformer le cadre du
millier de collaborateurs déjà chou-
choutés par un nouveau siège so-
cial, près de Lyon, taillé pour « la
productivité sans stress », selon les
mots de son fondateur, Laurent de
la Clergerie. « C’est une magie qui a
opéré avec des collaborateurs plus re-
posés, productifs et créatifs », expli-
que-t-il, trois ans après la mise en
place de cette mesure. Dès 2021, le
chiffre d’affaires a bondi de 40 %
avec un temps de travail globale-
ment réduit de 8,6 %. Le taux d’ab-
sentéisme est passé de 6 % à 5 % et le
nombre de départs volontaires a été
réduit à néant.
« Un terreau »
On trouve plus étonnant encore.
Par exemple chez le loueur d’espace
de travail Newton Offices, à Mar-
seille, référencé « pet friendly ».
« Les animaux humanisent », est
persuadé Guillaume Pellegrin, le
président fondateur de ce groupe
de 70 personnes créé en 2016. « La
présence d’un chien réduit le stress,
favorise les échanges et stimule fina-
lement la productivité. C’est une si-
gnature pour notre marque em-
ployeur », décrit-il en caressant son
labrador, Salsa.
« La présence
d’un chien réduit
le stress, favorise
les échanges et
stimule finalement
la productivité.
C’est une signature
pour notre marque
employeur. »
GUILLAUME PELLEGRIN
Président de Newton Offices
pétanque, 5.000 plantes et des ta-
bles de pique-nique. « Les collabora-
teurs ont envie de travailler à l’exté-
rieur dès qu’il y a un rayon de
soleil ! », se félicite le dirigeant.
A l’intérieur, Pascal Grémiaux a
réutilisé des anciens matériaux
(parquet en noyer, tommettes…). Il
a chiné des vieux objets pour la dé-
coration et affiché des photos des
anciens propriétaires pendant la
Résistance. « C’est un lieu superbe
qu’on a ouvert aux Journées du pa-
trimoine. Les salariés sont fiers de le
montrer à leurs conjoints et il contri-
bue à l’attractivité de l’entreprise »,
s’enorgueillit-il. Pour le bien-être,
l’entreprise a aménagé une salle de
sieste, une salle de gym et de yoga,
un coin Baby-foot et une cafétéria.
Turn-over
Mais ce campus bucolique n’a pas
suffi à absorber la croissance de
l’entreprise, passée de 50 à 200 sala-
riés depuis 2018. Eurécia, qui vend
Le loueur d’espace de travail Newton Offices, à Marseille, est référencé « pet friendly ». Photo Romain Dancre
Même intérêt pour les bienfaits
de la nature chez Europlastiques,
primé pour ses barquettes biodé-
gradables produites en Mayenne.
Sur cinq hectares disponibles
autour du siège, le patron, Benja-
min Barberot, a créé de grandes
parcelles potagères dont il a confié
l’exploitation à une entreprise loca-
le d’insertion. Leur production, bio,
est gratuite pour les collaborateurs.
« C’est un terreau pour notre culture
d’entreprise, un socle de sens indis-
pensable pour mobiliser nos équi-
pes », juge-t-il.
Cette quête de sens est aussi l’ob-
session de Deloitte, où le turnover
flambe chez les plus jeunes recrues
tout juste sorties d’école. Le cabinet
conseil, situé dans le quartier de la
Défense, dans les Hauts-de-Seine, a
dédié une équipe de 20 personnes à
la recherche de conditions plus
propices à la stabilité profession-
nelle. Au programme : des forma-
ses logiciels à 3.500 clients dans
66 pays, a augmenté son chiffre d’af-
faires de 35 % par an depuis deux
ans, à 22,5 millions d’euros en
mars dernier. En attendant d’éten-
dre le campus, il a pris en janvier
2.000 mètres carrés de bureaux
dans la ville voisine de Labège, où il
a aussi ouvert une salle pour les
massages et le yoga.
Pour garder ses collaborateurs,
l’éditeur mise beaucoup sur le ma-
nagement collaboratif. Il a instauré
des « espaces de paroles pour chan-
ger de pratiques par la formation »,
afin que chacun s’épanouisse. « Une
vingtaine de managers sont coachés,
comme moi, pour qu’ils soient à
même de responsabiliser leur équi-
pe », dit Pascal Grémiaux. La PME
favorise le transfert de compéten-
ces en formant 80 % des salariés
en 2023, obtenant le label d’entre-
prise apprenante. Sa forte croissan-
ce permet à des consultants d’évo-
luer vers des postes de managers ou
tions continues, du développe-
ment personnel, des opérations ci-
toyennes… « Je reste parce qu’on me
permet de progresser au-delà de
mon métier », témoigne Laura
Prieur, senior manager employée
depuis sept ans par le cabinet
d’audit. Cette trentenaire dit avoir
consacré l’an dernier pas moins de
« 400 heures » de son temps libre
pour ces à-côtés bénévoles organi-
sés par l’entreprise, comme le mé-
cénat de compétence, les marau-
des ou le ramassage des déchets.
« C’est indispensable pour trouver
du sens et de l’énergie pour le reste »,
explique-t-elle.
Gare, toutefois, aux mirages du
« happy washing ». « Les entreprises
doivent aller plus loin que la salle de
sport en cherchant les conditions du
plaisir à travailler plus que du bien-
être au travail », prévient le sociolo-
gue et psychologue du travail, Oli-
vier Bachelard. n
de marketing. La société est aussi
passée d’un à deux jours de télétra-
vail par semaine après le Covid.
Si 85 % des salariés se disent con-
tents de travailler chez Eurécia, se-
lon l’index Happy at Work 2023, l’en-
treprise subit un important turn-
over, de 15 à 20 % par an. « Le Covid a
créé des mouvements dans l’équipe de
R&D et on a eu une phase de structu-
ration », explique le dirigeant, con-
vaincu que les locaux et le manage-
ment collaboratif ont réduit les
départs. Le marché informatique,
très tendu, incite les informaticiens
à changer souvent d’entreprise.
Eurécia recrute beaucoup, lui
aussi : 60 personnes en 2023 et
80 prévues en 2024. Pour séduire les
salariés, l’éditeur a instauré sept se-
maines de congés payés en 2023, au
lieu de cinq semaines, et des jours
selon la performance auparavant. Il
a également accordé une journée
pour le mécénat d’entreprise et ob-
tenu le label « Engagé RSE ». n
Mardi 30 avril 2024 Les Echos
Letsignit offre douze jours
de congé pour plus
de productivité
L’éditeur de logiciel
marseillais explique
vouloir offrir à ses
salariés le droit à décom-
presser quand ils le
souhaitent et prévenir
ainsi les burn-out.
C’est une décision qui a surpris les
salariés de l’éditeur de logiciel
marseillais Letsignit. Sans rien
demander à leur direction, ils se
sont vus offrir, en 2023, douze
jours de congé supplémentaires
par an, quels que soient leur poste
et leur ancienneté dans l’entrepri-
se. « Ce sont des droits à la décon-
nexion pour tous qui doivent per-
mettre à ceux qui en ont besoin,
quand ils en ont besoin, de prendre
un peu de distance et de repos », ex-
plique Capucine Roche, présiden-
te de cette entreprise de 80 colla-
borateurs créée il y a dix ans.
La société opère dans la tech
avec un système de gestion des
signatures de mails qu’elle valori-
se comme vecteur d’image et outil
de communication. Elle compte
4.200 clients, de S ephora à
Bpifrance, et près de 1 million
d’utilisateurs qui relayent les ac-
tualités pouvant intéresser leurs
destinataires : un nouveau pro-
duit, un Salon professionnel, un
engagement sociétal dont l’entre-
prise est fière… Avec ce service,
elle a réalisé 6,3 millions d’euros
de chiffre d’affaires en 2023, en
hausse de 40 %.
Epanouissement
personnel
« Nos talents sont des actifs pré-
cieux », mesure la patronne.
D’autant que 40 % de ses effectifs
sont des développeurs informati-
ques très disputés par le secteur.
Sur fond de surenchère salariale,
leur turnover dépasse souvent
25 %. « On doit créer les bases d’un
24
épanouissement personnel et affi-
cher de sincères valeurs pour les
garder », poursuit Capucine Ro-
che. Une rémunération confor-
me à la grille du marché et de
beaux bureaux avec terrasse en
centre-ville ne suffisent pas. « Il
faut un subtil mélange de confort,
de liberté, de sens et… de tendres-
se », décrit-elle.
Le « care management » que
défend la jeune patronne (en fran-
çais, le fait de prendre soin, de se
soucier) ambitionne de reprodui-
re au travail l’effet des « hugs », ces
étreintes qui stimulent la produc-
tion d’hormones du bonheur, en
manageant avec plus de bien-
veillance. Selon les experts, il per-
mettrait aux collaborateurs de se
sentir compris, écoutés, valorisés
et soutenus, avec pour résultat un
meilleur équilibre entre vie pro-
fessionnelle et personnelle, et un
engagement plus positif. Le psy-
chologue américain, Carlos
Mora, en a mesuré les effets dans
une étude qui fait toujours réfé-
rence : selon lui, les collabora-
teurs qui en bénéficient sont deux
fois moins malades, six fois
moins absents, neuf fois plus
loyaux, 31 % plus productifs et
55 % plus créatifs.
Letsignit n’a pas mesuré avec
autant de précision les bienfaits
de sa stratégie, mais elle en a tiré
des bénéfices certains, assure-t-
elle. L’an passé, cinq personnes
seulement ont quitté volontaire-
ment l’entreprise malgré la très
forte pression imposée par son
rythme de croissance, soit un
taux de turnover de 6 % qui n’a
touché aucun poste dans le dé-
partement informatique. « Cette
stabilité nous permet d’envisager
une croissance équivalente cette
année et une première année renta-
ble », anticipe la manager.
— P. M.
25 Les Echos Mardi 30 avril 2024
Presse médicale : Europa Group
se renforce avec APM International
OCCITANIE
Le leader européen
des congrès médicaux
rachète une agence
de presse médicale.
Le fonds Abenex
devient majoritaire
au capital pour
préparer la transition
des dirigeants.
Laurent Marcaillou
— Correspondant à Toulouse
Leader européen des congrès médi-
caux, le toulousain Europa Group
se renforce dans l’information en
rachetant l’agence de presse médi-
cale APM International à Paris au
groupe d’information britannique
Wilmington plc. Celui-ci l’a vendue
26 millions d’euros à Philia Medical
Editions, filiale d’Europa Group.
« APM International était la seule
participation de Wilmington en
France et il a préféré se recentrer sur
ses activités au Royaume-Uni », ex-
plique Marc Doncieux, le président
d’Europa Group.
Première agence de presse médi-
cale en France, APM International a
réalisé un chiffre d’affaires de
9,6 millions d’euros au 30 juin 2023,
avec un bénéfice avant impôt de
2,3 millions.
Cette société fondée en 1989 em-
ploie 60 personnes, dont 40 journa-
listes. Elle vend les informations
aux journaux, aux industriels et
aux institutions, en totalisant plus
de 500 clients en France et à l’étran-
ger avec ses fils d’actualité en fran-
çais et en anglais. Elle suit l’actualité
de la médecine, de la pharmacie et
de la politique de santé en France et
en Europe sous tous ses angles, et
Déchets : Aktid décroche un gros contrat à Chambéry
AUVERGNE-
RHÔNE-ALPES
L’entreprise de Savoie
vient d’être désignée
mandataire pour
la construction
d’un centre situé à côté
de son siège.
Florian Espalieu
— Correspondant à Grenoble
Le prochain chantier se jouera qua-
siment à domicile. Le groupe sa-
voyard Aktid vient de récupérer un
important marché : le nouveau cen-
tre de tri de déchets de collecte sélec-
tive à Chambéry, à moins d’un kilo-
Un centre unique de simulation des catastrophes à Toulouse
/ INNOVATEURS
La sirène de l’usine retentit après
l’explosion et les secouristes prodi-
guent les premiers soins aux bles-
sés dans des odeurs de gaz et un dé-
cor d’usine chimique projeté sur les
murs… Cet entraînement rappelant
l’explosion de l’usine AZF en 2001 a
été préparé par le nouveau Centre
de simulation environnementale et
neurosensorielle (Sens) du CHU de
Toulouse.
Ce centre unique au monde,
conçu par le Samu 31 et Cegelec Dé-
fense, va entraîner les urgentistes à
intervenir dans les conditions sen-
sorielles et émotionnelles ressen-
ties en situation de crise. Il ne s’agit
propose plusieurs services d’infor-
mation en ligne.
Europa Group s’est diversifié
dans les médias en rachetant
en 2017 le leader français de l’édition
médicale Philia Medical Editions,
qui compte 35 revues, sites web et
blogs pour les praticiens hospita-
liers, les médecins et les dentistes.
Puis le groupe a racheté début 2023
la société parisienne 1Health dirigée
par Julien Kouchner, qui regroupe
21 médias pour les professionnels
de santé et les propriétaires d’ani-
maux dont « Le Moniteur des phar-
macies », « La Semaine Vétérinaire »
Les médias représentent désormais plus de 40 % du chiffre d’affaires d’Europa Group. Photo Europa Group
mètre de son siège. Pour ce site où
sont prévus 7.900 mètres carrés de
bâtiments à construire et aménager,
Aktid collaborera avec le lyonnais
Legendre Construction et SW archi-
tecture. La société savoyarde doit ré-
cupérer « moins de la moitié » de
l’enveloppe globale de 35 millions
d’euros, indique une porte-parole
de l’entreprise, sans donner plus de
précisions. Les travaux ont com-
mencé en mars et la livraison du
centre est prévue pour fin 2025.
Spécialiste de la conception et de
la réalisation d’installations « clés
en main » de tri et de valorisation
des déchets, Aktid est devenu un
poids lourd de ce secteur, en forte
progression du fait, notamment,
des besoins croissants en tri sélectif
des collectivités. La société a réalisé
pas de réalité virtuelle mais d’une si-
mulation environnementale. Le
centre met en scène avec les soi-
gnants et des étudiants en médecine
un scénario de crise en utilisant des
sons, des lumières, des fumées, des
odeurs, des vibrations, de la pluie ou
de la neige, afin de reproduire les
conditions d’intervention pendant
les catastrophes industrielles, les
accidents, les attentats ou les guer-
res. « Il existe des centres qui simulent
une seule situation comme un trem-
blement de terre, mais c’est le seul au
monde qui peut simuler toutes les ca-
tastrophes », se félicite Benoît Viault,
responsable du projet et médecin
urgentiste au Samu 31.
Le centre Sens a été inauguré en
ouverture des deuxièmes Rencon-
tres internationales de réponse à la
et « 30 Millions d’Amis ». Les médias
représentent désormais plus de
40 % de son chiffre d’affaires de
160 millions d’euros en 2023.
Opération de LBO
Le groupe a aussi racheté, en mars,
l’agence de communication en san-
té Bosphore Sense à Lyon, qui a réa-
lisé 3 millions d’euros en 2023. Cette
société de 15 salariés travaille pour
les laboratoires pharmaceutiques et
dermatologiques. Ce rachat com-
plète celui de l’agence de communi-
cation santé AGM (20 personnes), à
Clermont-Ferrand en 2023, pour
l’année passée un chiffre d’affaires
de près de 100 millions d’euros, en
incluant les 20 millions d’euros de
sa filiale italienne acquise fin 2023.
S es effectifs appro chent des
200 personnes – dont 60 en Italie.
Un chantier à Toulouse
A Chambéry, du fait du fonctionne-
ment – peu commun – en régie de
Savoie Déchets, syndicat mixte de la
quasi-totalité du département,
Aktid a été désigné mandataire,
c’est-à-dire le coordinateur et l’in-
terlocuteur privilégié de la collecti-
vité. Un cas particulier et, de fait, le
plus gros marché pour la société
dans cette configuration : le centre
de Chambéry doit à terme être ca-
pable de traiter 40.000 tonnes an-
nuelles de déchets.
catastrophe, la semaine dernière au
CHU de Toulouse, qui avait consti-
tué un centre de réponse à la catas-
trophe avec les pompiers et l’ARS
en 2019. Le Samu 31 et Cegelec Dé-
fense ont ensuite créé, en 2020, une
unité médicale mobile sur un ca-
mion qui se déploie en une demi-
heure.
Troubles post-traumatiques
Le centre de simulation neurosen-
sorielle est conçu lui aussi pour être
mobile : Cegelec Défense l’a cons-
truit en assemblant 11 containers
maritimes sur une surface de
364 mètres carrés. Le site com-
prend une zone de simulation im-
mersive de 147 mètres carrés où
s’entraînent les urgentistes avec les
véhicules de secours. Il y a une zone
créer un pôle de services aux entre-
prises. Enfin, le groupe vient d’ac-
quérir la start-up lyonnaise Smart
Data Power, fondée comme Bospho-
re Sense par Philippe Birken. Cette
société de cinq salariés est spéciali-
sée dans l’analyse des données pour
les laboratoires pharmaceutiques.
En même temps, Europa Group
vient de faire une opération de LBO
pour préparer la transition des diri-
geants. Le fonds d’investissement
Abenex est passé de 30 % à 55 % du
capital, tandis que les fondateurs
Marc et Florence Doncieux sont des-
cendus de 60 % à 35 %, tout en gar-
L’entreprise savoyarde a néan-
moins déjà équipé de plus gros si-
tes. « Nous avons réalisé deux des
trois plus importants en France,
Lyon et Rennes avec 60.000 tonnes,
mais nous n’étions alors pas manda-
taires », s’enorgueillit-on chez
Aktid. En outre, commencera à par-
tir de cet été son plus grand chan-
tier : le centre de tri de Toulouse,
La date
2025
La livraison du centre.
Les travaux ont commencé
en mars.
de supervision à l’étage pour com-
mander les équipements, filmer et
observer les scènes pour la forma-
tion et la recherche.
« La médecine de catastrophe com-
prend des gestes simples, mais qui
sont difficiles à effectuer en situation
de stress, souligne Benoît Viault.
Nous voulons former les équipes
dans les conditions les plus proches
du réel. Nous pourrons aussi prévenir
les troubles post-traumatiques en
préparant mieux les intervenants. »
Le site permettra également de dé-
velopper des protocoles de recher-
che. Le centre Sens est équipé d’une
machinerie de pointe. Le système
informatique contrôle la climatisa-
tion de –5 à 35 degrés, les simula-
tions météo de pluie, de neige et de
vent, la sonorisation jusqu’à 95 déci-
dant la direction. Les 10 % restants
sont détenus par les managers. Cette
évolution est une première étape de
la transition avec l’arrivée de Louis
Verdier à la direction générale et la
nomination de Julien Kouchner à la
présidence du pôle Média Santé.
Avec le soutien d’Abenex, Europa
Group, qui emploie 530 salariés,
veut doubler de taille d’ici à cinq ans
en faisant des acquisitions en Euro-
pe. Il organise 200 manifestations
internationales dont 70 congrès
médicaux par an, et des formations,
qui forment 55 % de son chiffre d’af-
faires. n
amené à traiter 70.000 tonnes an-
nuelles. Tout en gérant en parallèle,
en 2025, des projets plus modestes
dans le Nord, en Seine-et-Marne,
dans le Gers ou à Périgueux, en Dor-
dogne.
Les contrats avec les collectivités
constituent l’activité principale
d’Aktid. Ceux avec les sociétés pri-
vées p our les déchets indus-
triels peuvent toutefois peser, selon
les années, entre un tiers et la moitié
de son chiffre d’affaires, dans des
secteurs où la demande est aussi
forte. De quoi rendre sereine l’entre-
prise, qui vise une croissance « à
deux chiffres » dans les années qui
viennent. Après un premier pied
mis à l’international l’an passé,
d’autres opérations de croissance
externe sont déjà envisagées. n
Il a dit
« C’est le seul centre
au monde qui peut
simuler toutes
les catastrophes. »
BENOÎT VIAULT Responsable
du projet et médecin urgentiste
au Samu 31.
Photo Laurent Marcaillou
PME & REGIONS
Carbios
construit
sa première
usine
de recyclage
AUVERGNE-
RHÔNE-ALPES
L’entreprise investit
230 millions d’euros
dans ce site situé
en Moselle.
Françoise Sigot
— Correspondante à Lyon
Annoncée en 2022, l’usine de
biorecyclage de Carbios de Lon-
glaville (Meurthe-et-Moselle)
prend forme. Un investisse-
ment de 230 millions sécurisés
par un partenariat avec le
thaïlandais Indorama Ventu-
res, des levées de fonds en-
tre 2021 et 2023, l’appui du plan
France 2030 et de la région. Le
projet, monté en un temps re-
cord, permettra à l’entreprise
spécialiste du recyclage des
plastiques à partir d’enzymes
de produire dès 2025. « Après
un temps de rodage, nous de-
vrions servir nos premiers
clients en 2026 », explique Em-
manuel Ladent, directeur géné-
ral de Carbios.
La pépite auvergnate, dont le
siège est à Clermont-Ferrand, a
installé une équipe chargée de
suivre les travaux en Meurthe-
et-Moselle. Elle annonce 70 sa-
lariés en phase de croisière et
autant d’emplois indirects.
Entre Clermont-Ferrand et
Longlaville, Carbios – qui ne
donne pas son chiffre d’affaires
– emploie 150 personnes.
Barquettes en PET
Dans un premier temps, ce site
transformera principalement
des barquettes en PET, ainsi
que des bouteilles. « Nous avons
sécurisé 70 % de nos approvi-
sionnements en matières à recy-
cler grâce à un partenariat avec
Citeo. Nous avons également
scellé un accord avec l’Allemand
Landbell qui nous confiera des
barquettes et des déchets cosmé-
tiques », indique le dirigeant.
Les enzymes viendront du da-
nois Novozymes, avec lequel
l’entreprise a conclu un accord.
Très vite, le site lorrain de-
vrait s’ouvrir au recyclage de dé-
chets textiles, en premier lieu
les polyesters. « Le déchet textile
est moins cher que le PET et il est
aujourd’hui presque intégrale-
ment incinéré. Il ouvre des voies
extraordinaires », fait valoir Em-
manuel Ladent, qui a déjà pris
attache avec de grands noms du
textile, parmi lesquels Salomon
et Patagonia. A terme, l’usine de
Longlaville pourrait dédier aux
textiles près de la moitié de sa
capacité de transformation, qui
est de 50.000 tonnes de déchets
par an. n
bels, les odeurs de sang ou de soufre
et le décor projeté sur trois murs.
Les vibrations par infrasons repro-
duisent les tremblements, les explo-
sions et l’effet de blast.
Le coût de ce centre s’élève à
3,5 millions d’euros, dont 3 millions
du fonds européen Feder mobilisé
par la région Occitanie. Il sera mis à
la disposition d’autres Samu et for-
mera les équipes médicales, les
pompiers, les médecins en milieu
isolé, l’armée, les associations hu-
manitaires, les agences de l’OMS,
voire des astronautes. Le Samu 31,
qui a monté un partenariat avec le
programme de médecine de catas-
trophe de l’université de Harvard, a
déjà réalisé deux scénarios d’acci-
dent chimique et d’attentat.
— L. M.
FINANCE&MARCHÉS Mardi 30 avril 2024 Les Echos 26

Intelligence artificielle : les banques

américaines à l’offensive
l JP Morgan, Bank of America et Morgan Stanley multiplient les initiatives et les investissements.
l Pour le patron de JP Morgan, la technologie peut être aussi transformante que l’invention de la machine à vapeur.
BANQUE
Romain Gueugneau
avec Edouard Lederer
Comme dans beaucoup de sec-
teurs, l’intelligence artificielle (IA)
promet de transformer en profon-
deur la façon de faire de la banque.
Pas question pour les géants de la
finance de passer à côté du phéno-
mène. Dans sa lettre aux actionnai-
res, publiée le 8 avril, le patron de JP
Morgan, Jamie Dimon, en fait « l’un
des principaux défis » auxquels la
première banque mondiale (par la
taille de ses actifs) doit faire face.
« Les conséquences seront extraor-
dinaires et peut-être aussi transfor-
mantes que certaines des plus gran-
des inventions des siècles derniers,
comme l’imprimerie, la machine à
vapeur, l’électricité, l’informatique ou
encore internet », écrit-il dans un
chapitre dédié au sujet. Pour en pro-
fiter, le groupe, qui dit utiliser des
technologies d’IA depuis plus de dix
ans, a d’ores et déjà engagé d’impor-
tants moyens. Il emploie plus de
2.000 experts IA et « data scien-
tists », et assure travailler sur « envi-
ron 400 cas d’usage » dans des
domaines aussi divers que « le mar-
keting, la gestion des risques et la
fraude ».
Recommander
des transactions
JP Morgan n’est pas la seule grande
banque américaine à l’offensive. Sa
rivale Bank of America multiplie les
initiatives en la matière. En 2023, le
groupe, qui dépense 12 milliards de
dollars par an dans la tech, a enre-
gistré un nombre record de brevets
(644) aux Etats-Unis, dont une part
croissante relève d’innovations
dans l’IA. Au total, la banque gère
un portefeuille de 6.600 brevets,
dont plus de 800 liés à l’IA. « L’intel-
ligence artificielle doit être un moyen
pour nous de mieux servir nos
clients », déclarait récemment le
directeur informatique de Bank of
America, Aditya Bhasin. La techno-
logie alimente déjà l’assistant vir-
tuel de la banque, Erica, qui alerte
les clients sur leurs habitudes de
consommation et leurs transac-
tions financières.
Le géant américain Morgan
Stanley explore également les pos-
sibilités offertes par l’IA, via un
département de recherche dédié,
avec une vingtaine de doctorants. Il
a développé des outils capables de
recommander des transactions
financières adaptées à chaque
client, ou bien de fixer un prix pour
des actifs financiers peu liquides.
Goldman Sachs n’est pas en reste.
Pour son patron David Solomon,
interrogé lors de la présentation des
résultats trimestriels, l’IA va susci-
ter des besoins en financement
« franchement sans précédent » et, en
interne, « d’énormes opportunités
pour des gains de productivité ».
Les grandes banques américai-
nes l’assurent : les technologies d’IA
leur permettent déjà de générer des
revenus, et les investissements
qu’elles réalisent, notamment dans
l’IA générative, popularisée par
ChatGPT, doivent permettre d’accé-
lérer cette croissance. « En clair,
avec l’IA, nous allons être plus effica-
ces », déclare aux « Echos » Yuryi
Nevmivaka, responsable du dépar-
tement de recherche en IA de Mor-
gan Stanley. Selon le cabinet d’étu-
des McKinsey, la technologie
pourrait à elle seule générer entre
200 et 340 milliards de dollars de
valeur supplémentaire, soit 3 % à
5 % des revenus dans l’industrie
bancaire, grâce à un accroissement
de la productivité.
La technologie
pourrait à elle seule
générer entre 200
et 340 milliards de
dollars de valeur
supplémentaire.
De l’autre côté de l’Atlantique, le
discours est moins offensif. Les
grandes banques françaises utili-
sent déjà les technologies d’IA et de
« machine learning » pour faire
fonctionner les « chatbots » et les
« callbots », ou épauler les équipes
de conformité grâce à l’analyse de
données. Crédit Mutuel profite par
ailleurs de son partenariat avec IBM
pour développer de nouveaux cas
d’usage. Elles sont toutefois moins
disertes sur le sujet. « Ce sentiment
que les banques américaines sont en
première ligne peut se comprendre
dans la mesure où elles sont parties
plus tôt que les européennes, et que
beaucoup d’acteurs de l’IA sont amé-
ricains », justifie Jérôme Barrué,
directeur exécutif, responsable du
secteur bancaire chez Accenture.
« Mais cette communication des
banques a aussi une dimension cultu-
relle, liée à la pression des analystes
financiers, qui cherchent à mesurer et
quantifier l’impact de l’IA. En Europe,
on affiche sans doute plus de pru-
dence », ajoute-t-il. Néanmoins, dans
Morgan Stanley explore les possibilités offertes par l’IA,
via un département de recherche dédié, avec une vingtaine
de doctorants. Photo Shutterstock
la présentation de ses résultats tri-
mestriels, publiés la semaine der-
nière, BNP Paribas mentionne une
« accélération du déploiement de cas
d’usage » de l’IA dans le cadre de
mesures d’économies. Enthousias-
tes et à l’offensive, les banques amé-
ricaines savent néanmoins fixer des
limites à l’exploitation de ces nouvel-
les technologies. Interrogé récem-
ment par Bloomberg sur la possibi-
lité qu’un chatbot dopé à l’IA puisse
donner des conseils sur « comment
devenir riche vite », Jamie Dimon a
coupé court : « J’espère qu’il vous
répondra que vous êtes fous. » n
Les gendarmes
de la finance veulent
encadrer l’usage de l’IA
Des textes sont en prépara-
tion, mais les établisse-
ments financiers assurent
déjà connaître ce type
de risques.
Intelligence artificielle (IA) et régle-
mentation bancaire vont-elles faire
bon ménage ? Le gouverneur de la
banque d’Espagne, Pablo Hernan-
dez de Cos, vient de lancer un pavé
dans la mare en appelant les ban-
ques à anticiper les risques en
matière d’IA et de « machine lear-
ning » (« apprentissage automati-
que »). Le banquier central préside
actuellement le Comité de Bâle,
sorte d’ONU de la finance où se pré-
parent les régulations bancaires.
Ces risques « doivent être incorpo-
rés dans la gestion des risques au
quotidien et dans la gouvernance des
établissements », a-t-il prévenu le
17 avril dernier, alors que le Comité
s’apprête à sortir du bois. L’instance
doit prochainement publier un rap-
port consacré à la digitalisation de
la finance et ses implications sur la
régulation et la supervision. Ce qui
donnera le « la ».
Sans attendre de savoir à quelle
sauce elles vont être mangées, les
banques américaines – en pointe en
matière d’IA – sont d’ores et déjà
montées au créneau. Début avril, le
Bank Policy Institute (BPI), l’asso-
ciation qui porte leur voix en
matière de régulation, a commencé
à déminer.
Préjudices pour la sécurité
ou la démocratie
« L’IA et ses nombreuses adapta-
tions existent au moins depuis les
années 1940 (sic), et de ce fait, bien
des garanties sont déjà en place et
permettent une adoption responsa-
ble de l’IA », écrit le BPI dans une
note. L’association se montre tou-
tefois « engagée à coopérer avec les
régulateurs dans le domaine ». De
façon classique, plusieurs ques-
tions reviennent dans la supervi-
sion de l’IA : la capacité à expliquer
les modèles et donc leurs déci-
sions ou encore la question de la
responsa-bilité des décisions pri-
ses, en particulier lorsque l’IA
implique un prestataire externe.
Autre point d’attention, la capacité
à adapter les règles à chaque cas
d’usage, qui peut être plus ou
moins sensible.
Ces préoccupations peuvent
entrer en conflit avec le travail des
banques, qui cherchent à mieux
cibler leurs offres, leurs risques, et à
gagner en productivité. Prenant de
l’avance sur les Etats-Unis, l’Union
européenne a déjà adopté fin 2023
son propre « IA Act ». Le texte n’est
pas spécifique aux risques finan-
ciers, mais les banques – qui bras-
sent des milliards de données – se
trouvent aux avant-postes.
Le texte insiste notamment sur
les systèmes d’IA jugés à « haut ris-
que » entraînant des préjudices
pour la santé, la sécurité, les droits
fondamentaux ou la démocratie,
pour lesquels une analyse d’impact
doit être réalisée avant la mise sur le
marché. Certains systèmes d’IA
sont même carrément interdits
(sauf exception), par exemple les
systèmes catégorisant les person-
nes en fonction d’opinions politi-
ques, religieuses, ou encore d’ori-
gine ou d’orientation sexuelle.
L’Europe en avance
Avec ce petit temps d’avance,
l’Europe pourrait-elle servir de
modèle aux Etats-Unis ? « Comme
pour les données (avec la réglementa-
tion RGPD), les Européens se sont sai-
sis du sujet de la réglementation de
l’IA en premier. Et comme pour
RGPD, il se peut que l’approche euro-
péenne inspire ensuite les Etats-Unis
pour une raison simple : les questions
de base que pose l’IA seront les mêmes
des deux côtés de l’Atlantique.
L’Europe a ainsi posé un cadre struc-
turant », estime Jérôme Barrué,
directeur exécutif, responsable du
secteur bancaire chez Accenture.
Côté américain, les autorités
fourbissent leurs armes. En octobre
dernier, un décret présidentiel a
permis à l’administration Biden de
fixer des principes généraux, char-
geant une série d’agences fédérales
de prendre des mesures. Plus
récemment, un groupe de travail
bipartisan a été mis sur pied à la
Chambre des représentants pour
étudier l’impact de l’IA sur les servi-
ces financiers et immobiliers.
— E. Le.

« La France est pour nous un vivier de compétences »

Propos recueillis par E. Le.
Quelle est la dimension
de votre laboratoire ?
Nous avons une vingtaine de cher-
cheurs titulaires de doctorats dans
notre centre de recherche, dont la
plupart sont basés à New York. Il
s’agit d’un véritable département de
recherche dont l’objectif est de créer
des cas d’utilisation de l’IA : c’est une
recherche extrêmement exigeante.
Certains de ces résultats sont claire-
ment propriétaires et nous ne les
partageons pas. D’autres sont plus
ouverts et publics. C’est un monde
où l’on ne peut pas être totalement
fermé, car on peut aussi avoir un
intérêt à utiliser des éléments
découverts ailleurs. Vous prenez,
mais vous devez aussi donner.
A quel point recruter est difficile
dans les métiers de l’IA ?
C’est toujours difficile, mais mainte-
nant que nous avons un noyau de
chercheurs reconnus, l’embauche
est beaucoup plus facile. La pre-
mière chose que veut un candidat,
c’est savoir qui fait partie de l’équipe.
Ensuite, il veut bénéficier d’une cer-
taine liberté académique. Enfin, il a
besoin de savoir de quelles ressour-
ces il disposera. En venant ici, ces
personnes vont publier des travaux
de recherche, mais elles savent aussi
ce que nous attendons d’elles. Parmi
les viviers de candidats, nous voyons
la France comme une source de
compétences techniques.
Quels types d’usage avez-vous
développés ?
YURYI NEVMIVAKA
Directeur du dépar-
tement de recherche
Machine Learning
chez Morgan Stanley
Netflix sait quels films vous allez
aimer, et Amazon sait quels pro-
duits vous aimeriez acheter. Tout
cela fonctionne grâce au machine
learning. Il s’agit d’une matrice
pleine de blancs (espaces vides), qui
peut être remplie sur la base des
similitudes entre les clients. Notre
approche est un peu différente.
Nous sommes en mesure de recom-
mander une transaction. L’outil
s’adresse aux clients et peut donner
des recommandations (hautement
personnalisées). Il s’agit d’un équili-
bre entre « vous avez déjà acheté
ceci, voici des articles similaires » et
« vous n’avez jamais acheté ceci,
mais vous pourriez l’aimer ». C’est
une question d’exploration et
d’exploitation. Un autre cas d’utilisa-
tion consiste à fixer le prix d’une
obligation ou d’une action sur
laquelle il y a peu de transactions.
Dans ce cas, l’IA peut trouver des
comparables, comme la plateforme
immobilière Zillow, capable d’éva-
luer de façon précise la valeur d’une
maison. Trouver le bon prix pour un
actif déclenche un cercle vertueux :
c e l a g é n è r e p l u s d e vo l u m e s
d’échanges, et plus de liquidité pour
des actions qui avaient été laissées
de côté.
Avec le développement de
nouveaux cas d’usage, vos traders
craignent-ils pour leur emploi ?
J’ai travaillé dans un desk, il m’est
donc facile de parler à mes anciens
collègues. Quand on leur parle de
fixer le prix d’un dérivé, ou d’une
classe d’actifs, c’est très simple de se
comprendre. Ce sont des gens très
pragmatiques, qui ont besoin pour
être convaincus que nous soyons
très pragmatiques : en clair, avec
l’IA, nous allons être plus efficaces.
Comment abordez-vous la ques-
tion des risques réglementaires ?
Nous disposons d’une solide pre-
mière, deuxième et troisième lignes
de défense et nous nous engageons
activement avec les régulateurs sur
le sujet de l’IA. Une des questions
classiques touche à l’explicabilité
[ou traçabilité] des décisions prises
par une IA. Dans le cas où elle propo-
serait des actions en dehors des
paramètres habituels, il y aurait des
garde-fous et des alertes, comme
c’est le cas aujourd’hui. Fondamen-
talement, je pense qu’à un certain
point, l’explicabilité reste une vue de
l’esprit. n
« Une des
questions touche
à l’explicabilité
[ou traçabilité] des
décisions prises
par une IA. »
27 Les Echos Mardi 30 avril 2024 FINANCE & MARCHÉS

Cuivre : Pékin aura son mot à dire

sur le rachat d’Anglo American
l La Chine veille à préserver le pouvoir de négociation de ses groupes.
l Les autorités chinoises de la concurrence pourraient obliger BHP à modifier
l’opération de rachat d’Anglo American.

MATIÈRES
PREMIÈRES
Etienne Goetz
Pour mettre la main sur Anglo
American, BHP ne devra pas seule-
ment convaincre les actionnaires
du groupe britannique aux racines
sud-africaines ou les régulateurs
australiens. Il devra aussi, et c’est
plus surprenant, obtenir le feu vert
des autorités chinoises. Or cette
opération à près de 40 milliards de
dollars pourrait faire tiquer le prin-
cipal client du futur groupe : la
Chine, qui s’invite régulièrement
dans ce genre de mégadeal.
La compagnie minière austra-
lienne BHP, la plus importante au
monde en termes de capitalisation
boursière, a proposé 39 milliards de
dollars pour racheter Anglo Ameri-
can, notamment ses mines de cui-
mondial du métal rouge. La pro-
duction combinée des deux géants
représente environ 10 % de l’offre.
Ce type de configuration risque fort
de déplaire à Pékin qui veille à pré-
server le pouvoir de négociation des
groupes chinois face aux masto-
dontes occidentaux.
Les autorités chinoises ont régu-
lièrement exigé des concessions
avant de valider de telles opéra-
tions. En 2013, elles avaient par
exemple obligé Glencore à céder un
projet de cuivre majeur au Pérou
avant de donner leur feu vert à la
fusion à 30 milliards de dollars avec
Xstrata. Pékin avait aussi contrarié
les ambitions de BHP quand il vou-
lait racheter Rio Tinto pour près de
150 milliards de dollars à la fin des
années 2000, avant que le projet soit
abandonné.
Conséquences pour
l’industrie chinoise
Firm, qui accompagne des clients
ayant affaire aux autorités chinoi-
ses de la concurrence.
Le régulateur chinois chargé de
la concurrence demandera un avis
au ministère de l’industrie et de
l’information, il consultera con-
sommateurs, industriels et repré-
sentants des filières. Compte tenu
de la domination chinoise dans les
technologies bas carbone et de
l’importance du cuivre dans cette
industrie, les régulateurs seront
très attentifs aux conséquences
potentielles du rachat pour la
chaîne de production chinoise.
Scepticisme
en Afrique du Sud
BHP devra bien sûr aussi vaincre les
réticences de l’Afrique du Sud. Le
ANNLEGALECH
ministre des mines sud-africain
Gwede Mantashe a d’ores et déjà fait
part de son opposition au projet.
BHP envisage de scinder le groupe
et de ne pas intégrer Anglo Plati-
num et les mines de fer de Kumba
Iron Ore dont les actifs sont en Afri-
que du Sud.
Après une première réponse
négative de la part d’Anglo Ameri-
can, le groupe australien réfléchit à
une offre plus généreuse pour les
actionnaires d’Anglo American. La
banque UBS serait en train de son-
der des gérants, selon les informa-
tions de Reuters. Certains ont con-
fié à l’agence être prêts à accepter
une offre revue à la hausse. A la
Bourse de Londres, le titre d’Anglo Une mine exploitée par BHP en Arizona. Les autorités chinoises
American a ouvert en hausse de ont régulièrement exigé des concessions avant de valider de telles
2,16 %. n opérations. Photo John Collins Rudolf/NYT

vre en Amérique latine. Cette pre- « Pour la production de cuivre, le

mière offre a été rejetée par les
actionnaires d’Anglo American,
mais tout le monde attend que le
groupe surenchérisse.
Si une nouvelle offre finissait par
emporter l’adhésion des actionnai-
res, BHP deviendrait le numéro un
Pourquoi la ruée
marché chinois dépend largement de
l’offre internationale. Ma première
impression, c’est que ce dossier sera
examiné dans le cadre de la procé-
dure dite normale », a expliqué
auprès de Bloomberg Ying Song,
partenaire chez Anjie Broad Law
annonces judiciaires & légales
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Liberté - Égalité - Fraternité
PRÉFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS
Direction de la coordination des politiques publiques
et de l’appui territorial
AVIS D’ENQUÊTE
PUBLIQUE
unique regroupant l’enquête préalable
à la déclaration d’utilité publique du projet
Une version numérique du dossier est également
consultable sur Internet à l’adresse suivante :
https://www.registre-numerique.fr/prolongement-
tram-t8-idfm
Chacun peut également adresser ses observations
écrites à la présidente de la commission d'enquête au
siège de l'enquête précisé ci-dessus, par courrier libellé
comme suit :
Mme la présidente de la commission d'enquête relative
à la demande de déclaration d'utilité publique
Prolongement du T8 Sud
Hôtel de ville
120 bis rue Henri Barbusse - 93300 Aubervilliers
Le samedi 22 juin 2024 De 09h00 à 12h00
Le mardi 25 juin 2024 De 14h00 à 17h00
Villetaneuse
Hôtel de Ville
1 place de l’Hôtel de Ville - 93430 Villetaneuse
Le samedi 8 juin 2024 De 09h00 à 12h00
Le mercredi 19 juin 2024 De 14h00 à 17h00
Mairie du 18e arrondissement de Paris
1 place Jules Joffrin - 75877 Paris cedex 18

vers « l’or rouge »

de prolongement du T8 Sud de Saint-Denis-Porte Préfecture de la Seine-Saint-Denis Le jeudi 6 juin 2024 De 16h00 à 19h00
de Paris à la gare RER E Rosa Parks Direction de la coordination des politiques publiques Le lundi 24 juin 2024 De 14h00 à 17h00
à Paris, emportant mise en compatibilité du et de l’appui territorial
plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) de Mairie du 19e arrondissement de Paris

ne fait que commencer

La demande en métal rouge
va exploser avec la transi-
tion énergétique. Malgré
des cours à 10.000 dollars,
les groupes miniers
n’investissent pas assez
pour couvrir tous les
besoins de l’industrie.
Dans quelques décennies, les histo-
riens retiendront peut-être la fin
avril 2024 comme la semaine mar-
quant le début de l’âge du cuivre.
Non seulement le mastodonte BHP
a lancé une offre de rachat sur un
autre géant de la mine, Anglo Ame-
rican, pour devenir le numéro un
mondial du cuivre, mais à quelques
jours près, les cours du métal rouge
sont remontés à 10.000 dollars la
tonne, au plus haut depuis 2022,
portés par les craintes de pénuries.
Les prix ont été portés par « l’anti-
cipation d’une reprise mondiale de la
demande cette année, en particulier
pour les énergies vertes, et le resserre-
ment de l’offre après les revers subis
par le secteur minier », expliquent les
analystes d’ING. De leur côté, les
compagnies minières cherchent
par tous les moyens à augmenter
leur production de métal rouge
pour surfer sur la flambée des
cours.
Hausse des taux,
baisse des teneurs
Le cuivre est incontournable dans
les technologies bas carbone. Selon
les prévisions de l’Agence interna-
tionale de l’énergie, la consomma-
tion de cuivre va doubler à 40.000
tonnes par an pour atteindre la neu-
tralité carbone. « En théorie, l’offre de
cuivre nécessaire pour atteindre les
objectifs de neutralité carbone pour-
rait être disponible, explique Ber-
nard Dahdah, analyste matières
premières chez Natixis. Mais en pra-
tique, il sera très difficile de couvrir
nos besoins. »
L’expert de la banque française
rappelle que cela nécessitera des
dépenses d’investissement colossa-
estime à 150 milliards de dollars les
investissements nécessaires
entre 2025 et 2032 pour répondre
aux besoins en cuivre de l’industrie.
Les groupes miniers ont toutefois
de plus en plus de mal à exploiter de
nouveaux gisements de cuivre,
notamment en raison des condi-
tions de financement dégradées par
la hausse des taux directeurs. De
plus, « en dépit de l’argument de la
transition énergétique et d’une pers-
pective solide de demande de cuivre à
long terme, le secteur minier aurifère
attire toujours davantage de flux
d’investissement », relève Bernard
Dahdah. L’or est un métal dont le
prix est moins volatil que le cuivre
ou d’autres métaux industriels,
explique l’expert.
De manière générale, l’industrie
minière fait face à une explosion de
ses coûts de production en raison de
la baisse des teneurs en cuivre ainsi
que des coûts de la main-d’œuvre et
du matériel. Par ailleurs, les projets
miniers suscitent de plus en plus
l’opposition des populations locales,
comme en témoigne la fermeture
forcée au Panama de l’une des plus
grandes mines de cuivre au monde.
BHP a d’ailleurs opté pour la solu-
tion de simplicité : racheter un con-
current pour augmenter sa produc-
tion de métal rouge, une opération
qui ne va pas permettre de mettre
davantage de cuivre sur le marché.
Dans ce contexte, les prix ne sont
pas près de s’arrêter de grimper.
Bank of America a revu ses prévi-
sions : la tonne de cuivre pourrait
monter jusqu’à 12.000 dollars d’ici
à 2026. Il s’agit du niveau à partir
duquel les compagnies seront inci-
tées à ouvrir des mines, estime Oli-
via Markham, cogérante du Black-
Rock World Mining Fund. — E. Go.
La date
2026
Le prix du cuivre pourrait attein-
l’établissement public territorial (EPT)
Plaine commune
A du siège de l'enquête et seront consultables sur place
SAINT-DENIS, AUBERVILLIERS, VILLETANEUSE
PARIS 18E ET 19E ARRONDISSEMENTS
Par ARRETE INTER-PREFECTORAL Nº 2024-1177
du 16 avril 2024, Il sera procédé du mardi 21 mai 2024
à 9h00 au mardi 25 juin à 17h00 inclus, soit une durée
de 36 jours consécutifs, sur le territoire des communes
de Saint-Denis, Aubervilliers, Villetaneuse, du 18e et
19e arrondissements de Paris et au siège de l’EPT
Plaine Commune, à une enquête publique unique régie
par le code de l’environnement et regroupant :
• une enquête préalable à la déclaration d'utilité
publique (DUP) du projet de prolongement du T8 Sud
de Saint-Denis-Porte de Paris à la gare RER E Rosa
Parks à Paris ;
• une enquête pour la mise en compatibilité du plan
local d’urbanisme intercommunal (PLUi) de l’EPT
Plaine commune ;
Cette enquête est conduite par la commission d'enquête
suivante :
• Marie-Claire EUSTACHE, architecte urbaniste,
programmiste, en qualité de présidente ;
• Sylvaine FREZEL, retraitée, ancienne journaliste, en
qualité de titulaire ;
• Roberto PELI, Retraité ancien ingénieur territorial de
la ville de Bobigny, en qualité de titulaire ;
• Guy VELLA,retraité – Ancien directeur de l’espace
publique de la ville d’Aulnay-sous-Bois en qualité de
suppléant.
Le siège de l'enquête est situé à la préfecture de la
Seine-Saint-Denis – 1, esplanade Jean Moulin, 93007
Bobigny Cedex.
Le maître d’ouvrage du projet est Ile-de-France
Mobilités (IDFM).
Pendant toute la durée de l'enquête, un exemplaire du
support papier du dossier soumis à l'enquête ainsi qu'un
registre d'enquête, préalablement coté et paraphé par
un membre de la commission d'enquête, sont déposés
dans les lieux définis ci-dessous afin que chacun
puisse, aux heures habituelles d'ouverture au public, en
prendre connaissance et éventuellement consigner ses
observations et propositions.
Saint-Denis
Services Municipaux Saint Jean,
6 rue de Strasbourg - 93200 Saint-Denis
Aubervilliers
3ème étage
120 bis rue Henri Barbusse - 93300 Aubervilliers
Villetaneuse
Hôtel de Ville
1 place de l’Hôtel de Ville - 93430 Villetaneuse
Mairie du 18e arrondissement de Paris
1 place Jules Joffrin - 75877 Paris cedex 18
Mairie du 19e arrondissement de Paris
5-7 Place Armand Carrel - 75019 Paris
EPT Plaine Commune
21, avenue Jules Rimet - 93218 Saint-Denis cedex
Préfecture de la Seine-Saint-Denis
1, esplanade Jean Moulin - 93007 Bobigny
Le dossier de l'enquête publique peut être consulté
sur un poste informatique à la préfecture de la Seine-
Saint-Denis, siège de l’enquête, sise 1, esplanade
Jean Moulin 93007 Bobigny, aux heures habituelles
d'ouverture au public.
Bureau de l'utilité publique et des affaires foncières
1, esplanade Jean Moulin - 93007 Bobigny Cedex
Elles sont annexées sans délai au registre d'enquête
pendant toute la durée de l’enquête.
Les observations et propositions pourront également
être déposées par voie électronique sur un registre
dématérialisé et sécurisé ouvert du 21 mai 2024 à 09h00
jusqu’au 25 juin 2024 à 17h00 à l’adresse suivante :
https://www.registre-numerique.fr/prolongement-
tram-t8-idfm
Chacun peut également adresser ses observations à
la présidente de la commission d’enquête par courrier
électronique à l’adresse suivante : prolongement-
tram-t8-idfm@mail.registre-numerique.fr. Seuls les
courriers et les courriers électroniques reçus entre le 21
mai 2024 à 09h00 jusqu’au 25 juin 2024 à 17h00 seront
pris en compte.
Les observations et propositions transmises par voie
électronique (registre ou courriel) seront consultables
par le public sur le site internet mentionné ci-dessus.
Les informations relatives au projet soumis à l'enquête
peuvent être demandées auprès de :
Madame Emilie COINDET
Chargée de projets IDFM - Direction des
Infrastructures
41, rue de Châteaudun - 75009 Paris
Tel : 01 87 05 21 07
Emilie.COINDET@iledefrance-mobilites.fr
Toute personne peut, sur sa demande et à ses frais,
obtenir communication du dossier d’enquête publique
ainsi que des observations et propositions du public
auprès du préfet de la Seine-Saint-Denis (direction de
la coordination des politiques publiques et de l’appui
territorial, bureau de l'utilité publique et des affaires
foncières, 1, esplanade Jean Moulin, 93007 Bobigny
Cedex).
Un exemplaire numérique du dossier soumis à enquête,
est adressé, dès l'ouverture de l'enquête, au maire de
chaque commune sur le territoire de laquelle le projet
est situé et dont la mairie n'a pas été désignée comme
lieu d'enquête.
Un membre de la commission d'enquête se tient à la
disposition du public pour recevoir ses observations aux
lieux de permanence, dates et horaires suivants :
Saint-Denis
Salle Muriel Hurtis
2e étage des Services Municipaux Saint-Jean
6, rue de Strasbourg - 93200 Saint-Denis
Le lundi 3 juin 2024 De 09h00 à 12h00
Salle annexe droite Hôtel de Ville
2 place Victor Hugo 93200 Saint-Denis
Le samedi 15 juin 2024 De 09h00 à 12h00
Salle Muriel Hurtis
2e étage des Services Municipaux Saint-Jean
6, rue de Strasbourg - 93200 Saint-Denis
Le mercredi 19 juin 2024 De 09h00 à 12h00
Salle Christine Arron
4e étage des Services Municipaux Saint-Jean
6, rue de Strasbourg - 93200 Saint-Denis
Le mardi 25 juin 2024 De 14h00 à 17h00
Aubervilliers
Direction de l’urbanisme
120 bis rue Henri Barbusse - 93300 Aubervilliers
Le mercredi 12 juin 2024 De 14h00 à 17h00
Le lundi 17 juin 2024 De 14h00 à 17h00
5-7 Place Armand Carrel - 75019 Paris
Le samedi 1er juin 2024 De 09h00 à 12h00
Le mercredi 12 juin 2024 De 14h00 à 17h00
Le jeudi 20 juin 2024 De 16h00 à 19h00
Le mardi 25 juin 2024 De 14h00 à 17h00
EPT Plaine Commune
21, avenue Jules Rimet - 93218 Saint-Denis cedex Le
jeudi 6 juin 2024 De 09h00 à 12h00
Le mardi 18 juin 2024 De 09h00 à 12h00
Une réunion d'information et d'échange avec le
public se tiendra le :
EPT Plaine Commune
Salle du rez-de-chaussée
21, avenue Jules Rimet - 93218 Saint-Denis cedex
Mercredi 29 mai 2024 à partir de 19h00
A l'issue de la réunion publique, un compte rendu sera
établi par la présidente de la commission d'enquête. Il
sera adressé dans les meilleurs délais à la personne
responsable du projet et au préfet de la Seine-Saint-
Denis.
Il pourra être procédé, aux fins d'établissement de ce
compte rendu, procéder à son enregistrement audio ou
vidéo. Le public présent sera alors averti du début et de
la fin de cet enregistrement.
Pendant la durée de l'enquête, la présidente de
la commission d'enquête peut auditionner toute
personne ou service qu'il lui paraît utile de consulter
pour compléter son information sur le projet soumis à
enquête publique.
A l'issue de l'enquête la commission d'enquête
établit un rapport unique, qui relate le déroulement
de l'enquête, examine les observations recueillies et
rédige des conclusions motivées au titre de chacune
des enquêtes initialement requises, en précisant si les
conclusions sont favorables, favorables sous réserves
ou défavorables au projet.
Copie du rapport et des conclusions est également
adressée par le préfet aux communes, à l’EPT Plaine
Commune et aux arrondissements de Paris concernés
pour y être, sans délai, tenue à la disposition du public
pendant un an à compter de la date de clôture de
l'enquête.
De même, ces documents sont consultables pendant
un an sur les sites internet de la préfecture de la
Seine-Saint-Denis www.seine-saint-denis.gouv.fr
(rubrique Politiques publiques / Aménagement du
territoire et constructions / Enquêtes publiques) et de
la préfecture de la région d’Ile-de-France, préfecture
de Paris (http://prefectures-regions.gouv.fr/ile-de-
france/documents-publications, thème : Enquêtes
publiques).
Les décisions susceptibles d’intervenir au terme de
l’enquête publique sont :
• La déclaration de projet, adoptée par le conseil
d’administration d’Ile de France Mobilités.
La déclaration d’utilité publique et la mise en
compatibilité du PLUi de l’EPT Plaine Commune avec le
projet, prononcée par le préfet de la Seine-Saint-Denis
et le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris,
au bénéfice d’Ile-de-France Mobilités
Après transmission de la déclaration de projet ou à
l'expiration du délai fixé par le préfet, et au plus tard dans
le délai d'un an à compter de la clôture de l'enquête, ce
dernier se prononce sur la déclaration d'utilité publique.
Les données relatives à l’évaluation environnementale
des projets et à la consultation du public seront
consultables sur Internet sur la plateforme
www.projets-environnement.gouv.fr.
EP 24-225 / contact@publilegal.fr

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FINANCE & MARCHÉS Mardi 30 avril 2024 Les Echos 28

Les Français se convertissent La confidentialité

aux fonds cotés
PLACEMENT
Les particuliers
ont réalisé plus
d’un million
de transactions
sur les fonds cotés,
aussi appelé ETF,
au premier trimestre.
Bastien Bouchaud
Après avoir conquis les investis-
seurs américains et britanniques,
les fonds cotés, également appelés
ETF (d’après leur nom anglais,
Exchange Traded Funds), confir-
ment leur percée auprès des parti-
culiers français. Le nombre de tran-
sactions a dépassé le million sur ces
fonds au premier trimestre, selon les
données publiées par l’Autorité
des marchés financiers (AMF). Une
première.
Les épargnants sont de plus en
plus nombreux à investir dans ces
fonds qui ont l’avantage d’être facile-
ment échangeables en Bourse et
d’afficher des frais ultra-compétitifs.
Plus de 200.000 investisseurs ont
acheté ou vendu des ETF au premier
trimestre, un record absolu qui mar-
que une hausse de 36 % sur un an.
Parmi eux, ils étaient plus de 50.000
à s’intéresser aux fonds cotés pour la
première fois, là aussi un record.
La différence de coût peut être
énorme entre un fonds ouvert tradi-
tionnel et un fonds coté du type ETF.
La dernière étude de l’AMF en la
matière évoque des frais annuels
moyens de 0,37 % pour les fonds
cotés sur les actions. Ils sont près de
4 fois plus élevés en moyenne sur les
fonds actions gérés activement, à
1,47 %. Et ce, sans compter les frais
Le plan d’épargne retraite
annexes, inexistants sur les ETF
mais qui existent parfois sur les
fonds actifs (frais d’entrée, de sortie,
de transaction…).
La popularité croissante des
fonds cotés tranche avec la stabilité
observée sur les transactions sur les
actions elles-mêmes. Le gendarme
des marchés a dénombré 737.000
particuliers ayant réalisé au moins
une transaction au premier trimes-
tre, contre 746.000 un an plus tôt.
Peut-être attirés par le rebond des
marchés et les records à répétition
des indices boursiers durant cette
période, ils ont été légèrement plus
nombreux à passer des ordres
d’achats (568.000 contre 566.000 un
an plus tôt). Le nombre d’acheteurs,
tout comme le nombre de nouveaux
investisseurs sur les actions, a atteint
son plus haut niveau en deux ans.
Les jeunes attirés par
ce type d’investissement
La montée en puissance des ETF
semble tirée par l’appropriation de
ces fonds par les plus jeunes boursi-
coteurs. L’âge moyen des épar-
gnants détenant au moins une part
d’ETF était supérieur à 60 ans
en 2018 et 2019. Il est tombé à 48 ans
l’année dernière, note l’Autorité des
marchés financiers. La popularité
des ETF s’explique en effet en partie
par le succès des courtiers en ligne
et des applications des néocour-
tiers. Ces acteurs ont été parmi les
premiers à proposer à leurs clients
d’investir dans des fonds cotés sans
frais de transaction, au même titre
que pour les actions.
« Nous avons observé une accéléra-
tion des ouvertures de comptes
Bourse au premier trimestre », expli-
que Grégory Guermonprez, le
patron de Fortuneo, la banque en
ligne du groupe Crédit Mutuel
Arkéa. La moitié de ces nouveaux
clients sont âgés de moins de 35 ans
et les ETF représentent environ un
tiers de leur activité. Sur les marchés
européens, les clients de Fortuneo
négocient même davantage de
fonds cotés que d’actions, même s’ils
n’atteignent pas la popularité des
valeurs américaines comme Tesla,
Microsoft ou Apple. « La tendance se
poursuit », estime-t-il. « Il y a un réel
engouement des jeunes pour l’inves-
tissement boursier, à travers notam-
ment les actions et les ETF », avance-
t-il. Loin d’être purement spéculatif,
ce regain d’intérêt des jeunes pour la
Bourse est généralement motivé par
une volonté de se projeter sur le long
terme. « Il s’agit souvent d’investisse-
ments pour des projets de vie et la
préparation de sa retraite », note-
Grégory Guermonprez. n
des avis des juristes
d’entreprise
devant les députés
RÉGLEMENTATION
L’Assemblée
va examiner
une proposition
de loi du député
Jean Terlier sur
la confidentialité
des avis des juristes.
Laurence Boisseau
Après trente ans de lutte avec
les avocats et les pouvoirs
publics, les juristes d’entrepri-
ses vont-ils réussir à obtenir la
reconnaissance de la confiden-
tialité de leurs avis juridiques ?
En octobre dernier, c’était acté :
le Parlement avait fini par voter
cette disposition. Mais, saisi
par les députés de la France
insoumise, le Conseil constitu-
tionnel est venu censurer les
articles concernés, jugeant
qu’ils n’avaient pas de lien
avec la loi d’orientation et de
programmation du ministère
de la Justice.
Ce mardi, à l’Assemblée
nationale, la confidentialité des
avis des juristes d’entreprise va
faire son grand retour. La pro-
position de loi (PPL) déposée
p a r Je a n Te r l i e r (d é p u t é
Renaissance du Tarn) sera exa-
minée par les députés. Elle
reprend quasiment à l’identi-
que les dispositions contenues
dans le texte voté à l’automne.
Une disposition
encadrée
Cette proposition de loi « ne con-
duit pas à la création d’une boîte
noire au sein des entreprises », a
répété Jean Terlier à ses oppo-
sants, qui redoutent la création
d’un coffre-fort juridique. La
confidentialité des avis juridi-
documents demandés par
l’autorité devront être remis à
un commissaire de justice
avant qu’un juge ne soit saisi.
De nombreux avocats sont
vent debout contre cette PPL
qui consacre « le legal privilege »
en France. Dans une tribune
publiée par « Le Monde » ce
week-end, les bâtonniers de
vingt barreaux de France
dénoncent « un bond en arrière
pour l’éthique des affaires ».
« Une prise de position bienve-
nue », estime Benoît Cœuré,
président de l’Autorité de la
concurrence dans un post sur
LinkedIn. Ce dernier craint un
affaiblissement des moyens
pour les autorités administrati-
ves. Début avril, le CNB (Conseil
national des Barreaux) a lui
aussi rappelé son opposition de
principe à la confidentialité des
avis des juristes.
Le réflexe
corporatiste d’avocats
Tous les avocats n’y sont pas
opposés pour autant. « Il y a un
réflexe corporatiste d’une cer-
taine catégorie d’avocats sans
doute moins sensibles aux
enjeux de la conformité », estime
Thomas Baudesson, associé
chez Clifford Chance et candi-
dat au cobâtonat au Barreau de
La confidentialité
n’est pas
opposable dans
une procédure
pénale ou fiscale.
Les juges pénaux et
le fisc auront accès
à ces documents.

a séduit 10 millions de Français ques est encadrée. Celui qui

titulaires et les 100 milliards d’euros
ÉPARGNE d’encours fin 2023, a annoncé Bercy
dimanche soir. « Au 31 décembre
Le dispositif lancé 2023, sur la base des données mises à
par la loi Pacte en 2019 disposition par l’ensemble des fédéra-
dépasse 100 milliards tions professionnelles commerciali-
d’euros d’encours. sant des PER, plus de 10 millions de
personnes bénéficient déjà de ces nou-
veaux PER, précise Bercy. Les
Marion Heilmann encours constitués sur ces PER attei-
gnent 102,8 milliards d’euros. »
Le plan d’épargne retraite (PER) a Une raison de se réjouir pour le
plus que jamais la cote. Lancé par la ministère de l’Economie et des
loi Pacte en 2019, ce produit d’assu- finances puisque c’est Bruno Le
rance-vie a franchi les 10 millions de Maire qui avait porté la loi Pacte.
CHÂTEAU LAGRANGE 2018
Bordeaux Saint-Julien
L’excellence de ce vin rouge réside dans son bouquet aromatique aux fruits rouges, épices, et
tabac, ainsi que dans son caractère en bouche : velouté, tanins fins, et belle longueur suave.
« C’est avant tout une réussite pour les
Françaises et les Français qui dispo-
sent désormais d’un produit d’épar-
gne adapté pour préparer leur
retraite, a commenté le ministre.
Mais c’est également une réussite
pour nos entreprises qui ont besoin
d’investissements de long terme pour
les accompagner dans les grandes
transitions. »
Cette dynamique concerne tant
les PER d’entreprise, collectifs
(23,4 milliards d’euros d’encours) ou
obligatoires (19,5 milliards d’euros
d’encours), que les PER individuels
(59,9 milliards d’euros d’encours et
plus de 3,69 millions de titulaires),
détaille Bercy. Ces produits sont dis-
tribués par les banques et les
assureurs.
Débloqué sous forme
de rente ou de capital
Le PER a remplacé « de nombreux
produits, PERP, Madelin, article 83,
PERCO, aux règles de fonctionne-
ment hétérogènes et complexes »,
met en avant Bercy. Les versements
sont libres mais ont l’avantage pour
l’épargnant d’être déductibles des
impôts dans la généreuse limite de
35.194 euros pour les salariés, et de
85.780 euros pour les indépendants
en 2024. En revanche, impossible de
débloquer les fonds avant la retraite,
sauf en cas d’achat de sa résidence
principale ou en cas d’« accident de la
vie » (invalidité, surendettement,
expiration des droits d’assurance-
chômage…).
Au moment de la retraite, les
fonds peuvent être débloqués sous
forme de rente ou de capital.
« L’inquiétude des Français face à
l’avenir du système de retraite conduit
au succès du PER », estime Philippe
Crevel, directeur du Cercle de l’épar-
gne, car près de trois quarts d’entre
eux estiment que leurs pensions ne
leur permettront pas de vivre cor-
rectement à la retraite.
4
À NOTER
En 2023, alors que les fonds
en euros d’assurance-vie ont
souffert, c’est surtout grâce
au PER que l’assurance-vie
a réussi à rester dans le vert.
Fin 2022, le PER totalisait
80 milliards d’euros d’encours
et plus de 7 millions de Français
en avaient souscrit un.
rend l’avis doit être titulaire d’un
master en droit ou d’un diplôme
Paris. A l’AFJE (Association
française des juristes d’entre-
prise), son président, Jean-Phi-
équivalent français ou étranger, lippe Gille, est convaincu que
et il doit justifier du suivi d’une « cette mesure va favoriser l’état
formation aux règles éthiques. de droit ». A l’Assemblée natio-
Celle-ci doit avoir été suivie nale, fin 2023, le ministre de la
avant la prise de poste. Justice, Eric Dupond-Moretti,
Surtout, la confidentialité avait plaidé que l’absence de
n’est pas opposable dans une confidentialité nuisait à l’attrac-
procédure pénale ou fiscale. tivité de la France.
Les juges pénaux et le fisc Coïncidence, le « legal privi-
auront accès à ces documents. lege » fait actuellement l’objet
Le texte prévoit aussi une levée d’un télescopage de textes. Le
de la confidentialité dans un 14 février 2024, le S énat a
litige commercial ou civil ou adopté une PPL de Louis Vogel
dans une procédure lancée par qui garantit la confidentialité
une autorité administrative des consultations juridiques. Ce
(ACPR, AMF, Autorité de la texte a été transmis à l’Assem-
concurrence), mais seulement blée. Nul doute que les deux tex-
sous certaines conditions. Les tes finiront par converger. n
en bref
Deutsche Bank chute en Bourse après
une provision liée à Postbank
BANQUE Deutsche Bank a plongé de plus de 8 % en Bourse
lundi, après avoir dévoilé pendant le week-end une décision de
justice qui pourrait potentiellement lui coûter 1,3 milliard
d’euros. Les analystes considèrent que cette annonce hypothè-
que ses pro chains programmes de rachats d’actions.
Les anciens actionnaires de Postbank estiment que Deutsche
Bank a sous-payé sa cible lors de son OPA en octobre 2010.
Vendredi, le tribunal de Cologne a estimé qu’ils pourraient
avoir raison.
National Bank of Canada ouvre
des bureaux parisiens
BANQUE National Bank of Canada ouvre un bureau à Paris pour
servir les émetteurs supranationaux et publics, écrit l’agence
Bloomberg. Le bureau a obtenu une licence pour opérer à partir
de la capitale française au début de ce mois. « L’objectif initial est
d’étendre la couverture en Europe des ventes de produits de taux
aux institutionnels, tout en développant nos activités en Afrique
subsaharienne », a expliqué l’un des dirigeants du groupe.
29 Les Echos Mardi 30 avril 2024
GESTION D’ACTIFS
Dans un mois aura lieu un bouleversement majeur sur le marché : les transactions passées sur les marchés
américains devront être débouclées sous 24 heures, au lieu de deux jours. Ce changement va occasionner
de nouveaux frais pour les gestionnaires d’actifs européens.
Etats-Unis : les transactions à
T+1 vont coûter cher aux gérants
Caroline Mignon
usqu’ici, partout dans le
J monde, les ordres de mar-
ché étaient exécutés jusqu’à
deux jours après la décision d’inves-
tissement. L’achat ou la vente d’un
titre était ainsi effectif, avec la tran-
saction concrète du cash et du titre,
le « règlement-livraison », à T + 2. Les
Etats-Unis, mais aussi le Mexique et
le Canada, ont décidé de réduire ce
délai d’un jour, à T + 1, à partir du
28 mai. En Asie et en Europe, c’est
l’affolement. « Les portefeuilles de
titres internationaux seront plus
compliqués à gérer », s’inquiète Inès
de Trémiolles, directrice monde du
trading chez BNP AM.
L e s a c h e t e u r s e t ve n d e u r s
d’actions et d’obligations en dollars
devront se procurer ou céder des
dollars contre une autre devise
dans un délai plus court. Or selon
l’Association européenne de
l’industrie de la gestion d’actifs,
l’Efama, 42 % des portefeuilles
d’actions européens sont investis en
titres américains. Les sommes en
jeu sont donc colossales. « Tous les
frais liés à ce passage au T + 1 seront in
fine répercutés sur les investisseurs
finaux, les épargnants », prévient un
gérant. Les professionnels du sec-
teur identifient cinq sources de
coûts liées à ce bouleversement
pour les sociétés de gestion, déjà
mises sous pression par l’inflation
des salaires et la multiplication des
contraintes réglementaires.
Pénalités multipliées
1
Comme les dépositaires, qui
gèrent les règlements-livraisons,
imposent d’avoir validé la transac-
tion et effectué le change la veille du
règlement-livraison, tout devra
aller très vite, en T0. « Or tout cela
prend du temps, il faut confirmer la
transaction, trouver des dollars ; par-
fois, le compte d’une banque a
changé, le titre est difficile à localiser,
ou l’arrondi sur le prix n’est pas le
même, les Japonais arrondissent par
exemple au-dessous, au lieu de
l’arrondi le plus proche en Europe »,
s’affole un spécialiste. Il craint que
les cas de défaillances de transac-
tions qui n’auront pas pu être vali-
dées dans les temps se multiplient.
Lorsqu’il y a une défaillance et
que le règlement d’une opération
échoue en Europe, la Central secu-
rity depository regulation (CSDR)
applique des pénalités. « Ce méca-
nisme de pénalité n’existe pas aux
Etats-Unis », note Mathilde Le Roy,
responsable du droit des marchés
financiers à l’AFG. En Europe, la
réglementation reste inflexible. « Le
gendarme des marchés financiers
européens, l’Esma, a rendu son rap-
port préliminaire fin mars : toutes les
demandes de tolérance formulées
par l’Efama ont été rejetées, qu’il
s’agisse des tolérances sur les ratios
de liquidité, sur les limites d’emprunt
ou sur les pénalités de la CSDR »,
constate-t-elle.
2 Le coût du change
Les sociétés de gestion
devront donc s’assurer d’avoir le
change nécessaire en dollars le jour
même du passage de l’ordre. « Or
c’est à 16 heures à Londres sur le mar-
ché Forex, c’est-à-dire 11 heures à New
York, que le marché des changes
Avec le passage au T + 1, les changes devront s’effectuer le jour même pour les opérations sur des titres en dollars. Photo Getty Images
(Forex) est le plus liquide et le moins
coûteux », prévient Inès de Trémiol-
les. Ce qui sera beaucoup trop tôt
dans la journée pour effectuer le
change pour les transactions effec-
tuées sur le marché américain.
D’autant que pour trouver des ache-
teurs et vendeurs facilement, sur le
marché le plus liquide pour les
actions et les obligations américai-
nes, l’heure la plus propice est à
16 heures à New York (en Europe,
les marchés sont alors fermés), lors-
que tous les fonds indiciels débou-
clent leurs transactions. « Avant le
passage au T + 1, les équipes de tra-
ding pouvaient attendre le jour sui-
vant pour se procurer le change rela-
tif à leur transaction », regrette Inès
de Trémiolles. Désormais, le
change devra donc se faire en fin de
journée, à un coût plus élevé.
3 Des coussins de liquidité
supplémentaire
Lorsqu’un épargnant décide
d’investir dans un fonds, cet inves-
tissement est tout de suite placé par
le gérant, alors que le règlement en
cash d’entrée du fonds est effectif à
J + 2. Jusqu’ici, il n’y avait donc pas
de problème de décalage de trésore-
rie, puisque tous les investisse-
ments étaient débouclés à J + 2.
Désormais, les sociétés de gestion
devront débourser dès J + 1 cet
argent qu’elles ne détiennent pas
encore et se constituer des coussins
de liquidité pour y faire face. Cet
argent mobilisé a un coût.
Par ailleurs, les sociétés de ges-
tion qui empruntent pour investir –
une pratique courante pour les
fonds cotés (ETF) – auront moins de
temps pour rappeler les titres
empruntés, puisqu’il faudra
débourser de l’argent un jour plus
tôt. Ce décalage de trésorerie néces-
sitera aussi des réserves supplé-
mentaires de cash.
4 Les équipes déplacées
Pour pouvoir valider leur
transaction et effectuer leur change
dans la foulée de leur passage
d’ordre en toute fin de journée en
Europe, les sociétés de gestion du
Vieux Continent ont plusieurs solu-
tions, toutes coûteuses : faire tra-
vailler plus tard leurs équipes en
Europe, les déplacer aux Etats-Unis,
ou externaliser leur table de trading
auprès d’un autre asset manager
présent aux Etats-Unis. Les grands
groupes comme Amundi, Natixis
IM, AXA IM ou BNPP AM ont déjà
des équipes sur place, qui seront
probablement renforcées dans les
prochains mois pour répondre à ce
nouvel enjeu. Mais elles ont dû,
comme tous, améliorer et repara-
métrer leurs outils technologiques
pour s’adapter à ce changement, ce
qui a engendré des frais supplémen-
taires. « Outre la technologie, la docu-
mentation juridique est à mettre à
jour sur les sites Internet », note
David Taieb, directeur des investis-
sements cotés de Sienna IM.
Les raisons cachées du changement
A l’heure de la digitalisation, un raccour-
cissement du délai de règlement-livraison
peut sembler légitime. Le temps du T + 3,
avant 2017, remonte à l’ère des courriers
et des fax pour réconcilier les opérations.
Il est aussi vrai que ce délai plus court
réduit les risques associés au règlement-li-
vraison. « Des transactions effectuées par
Lehman Brothers en 2008 n’ont jamais été
concrétisées ; il y a désormais un risque de
défaut de la contrepartie plus court », expli-
que un spécialiste. Mais une raison moins
LA PERSONNALITÉ
DR
Le patron
de Schroders
Peter Harrison
tire sa
révérence
Son actualité
Le premier groupe de gestion
coté outre-Manche se cherche
un nouveau patron. L’an pro-
chain, l’actuel directeur géné-
ral, Peter Harrison, quittera la
direction de la société. Il avait
pris la tête du groupe en
avril 2016 en des temps mouve-
mentés, deux mois avant le
référendum sur le Brexit. Le
chasseur de têtes Russell
Reynolds a été désigné pour lui
trouver un successeur.
Son parcours
Diplômé de l’Université de
Bath, Peter Harrison, 57 ans, a
démarré sa carrière chez
Schroders en 1988 avant de
rejoindre Newton IM en 1991. Il
a ensuite occupé divers postes
de direction chez JPMorgan,
Deutsche AM et RWC Par-
tners. En 2013, il a de nouveau
rejoint Schroders, où il a été
nommé directeur général
5 Un risque accru sur le opérations sur devises », regrette en 2016. Durant ces huit
marché des changes Myriam Dana-Thomae, directrice années, les encours du groupe
La réglementation encourage les et chef de pôle des métiers transver- ont été multipliés par 2,5,
acteurs de marché à utiliser un ses à l’AFG. Le CLS a fait savoir notamment grâce aux investis-
mécanisme de compensation sur début avril qu’il ne changerait pas sements réalisés dans des
les opérations de change, assuré par les délais opérationnels, notam- segments de croissance tels
le CLS (Continuous link settlement, ment en raison de la nécessité de que la gestion de patrimoine,
détenu par les grandes banques modifier la réglementation. Mais le les marchés privés et les solu-
internationales). Lorsque les opéra- plus grand système mondial de tions d’investissement sur
tions se dénouent, il peut y avoir un règlement de devises se dit prêt à mesure. Mais dans un secteur
décalage dans la livraison des devi- revoir son jugement dans les mois sous pression, Peter Harrison a
ses, que le CLS compense. « Or une qui viennent, avec une mise à jour échoué à améliorer les profits
grande partie des opérations de prévue en juin et septembre. (en recul de 20 % depuis 2016)
change, qui se feront en fin de journée L’Efama s’alarme aussi du risque et à faire décoller le cours de
aux Etats-Unis, ne pourront plus pas- systémique lié à l’absence du filet de Bourse, en baisse de 15 %
ser sur cette plateforme avant qu’elle sécurité du CLS. 40 % des opéra- depuis son arrivée.
ne ferme ; cette assurance ne pourra tions de change ne passeraient plus
donc plus être activée, tout en restant par le CLS. « Dans une journée nor- Sa société
une charge pour les asset managers », male, les montants [qui ne seront Détenu à 44 % par sa famille
explique Inès de Trémiolles. p l u s c o u ve r t s ] s ’ é l è v e ro n t à fondatrice, Schroders compta-
Ces derniers devront donc trou- 50-70 milliards de dollars, et des cen- bilisait, à fin 2023, 750,6 mil-
ver des solutions de substitution taines de milliards dans une séance liards de livres sterling sous
pour éviter les décalages de paie- très volatile », déplore l’Efama. gestion (866 milliards d’euros).
ment de devises, comme se consti- L’association rappelle l’épisode de Avec une capitalisation bour-
tuer des réserves de liquidité en dol- la banque Herstatt, fermée en plein sière d’environ 8 milliards
lars. Il faut en effet à tout prix éviter après-midi en 1974 : nombre de d’euros et 6.400 salariés, il
de se retrouver dans une situation banques américaines n’avaient pas s’agit du premier groupe de
de défaillance de règlement, qui ter- reçu de deutsche marks en échange gestion d’actifs coté à la Bourse
nirait l’image du gérant. « Le CLS ne de dollars, provoquant un arrêt de Londres. — C. M.
fera aucun changement quant aux temporaire du système mondial de
horaires limites de règlement des compensation. n
avouable peut relever d’une stratégie
protectionniste de la part des Etats-Unis.
Les opérations de change liées aux SUR LE WEB
transactions devront désormais s’effectuer
Retrouvez notre
en fin d’après-midi aux Etats-Unis et dans
page gestion
la soirée en Europe. La liquidité va donc
s’améliorer à ces heures-là. Une façon d’actifs tous
de rapatrier une partie des volumes du les mardis
marché des changes de Londres, première
place mondiale aujourd’hui, à New York,
où le gros des opérations et les équipes se et sur le site
développeront. lesechos.fr
FINANCE & MARCHÉS Mardi 30 avril 2024 Les Echos 30

séAncE du 29 - 04 - 2024 A : Indicateur acompte, solde ou total du dividende. BPA : Bénfice par action. PER : Price Earning Ratio. Les plus hauts et plus bas ajustés sont sur l’année

euronext CaC 40 : 8065,15 (-0,29 %) neXt 20 : 11245,88 (1,22 %)

CaC larGe 60 : 8664,46 (-0,22 %)
CaC all-tradaBle : 5966,15 (-0,19 %)
Date De ProroGation : 28 mai
civile. Les valeurs classées par ordre alphabétique sont regroupées en trois classes de capitalisation signalées par les lettres a pour les capitalisations
supérieures à 1 milliard d’euros, B pour les capitalisations comprises entre 1 milliard d’euros et 150 millions d’euros et c pour les capitalisations inférieures
à 150 millions d’euros. L : Valeurs de l’indice CACNext20. R : Valeurs de l’indice CACLarge60. G : Valeurs de l’indice CACMid60. g : Valeurs de l’indice
CACSmall. Les bénéfices par action : source FacSet JCF Estimates.

CAC 40 srD suite Valeurs françaises srD suite Valeurs françaises

Valeurs mnémo / INFO / OUV clot % Veil % an BPA Valeurs mnémo / INFO / OUV clot % Veil % an BPA Valeurs mnémo / INFO / OUV clot % Veil % an BPA Valeurs mnémo / INFO / OUV clot % Veil % an BPA
OST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PER OST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PER OST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PER OST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PER
ISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT ISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT ISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT ISIN / DEVISE / DATE DÉTACH. / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT
accor (AC) R a 42,52 41,78 - 1,18 + 20,75 l'oréal (OR) R a 436,55 436,5 + 0,2 - 3,14 Graines Voltz (GRVO) c 23,5 23,1 - 0,86 - 20,89 scor (SCR) LG a 30,56 31,36 + 3,16 + 18,52
478523 42,56 - 3,51 43,74 248368 440,75 - 0,49 460,6 345 23,5 - 3,75 30 564311 31,62 - 2,21 32,44
FR0000120404 23/05/23 1,05 242.366.124 41,73 + 30,07 33,69 2,51 FR0000120321 26/04/24 6,6 534.725.475 436,1 + 0,87 407,85 1,51 FR0000065971 29/03/22 2 1.480.265 23,1 - 39,05 21,8 FR0010411983 30/05/23 1,4 179.802.620 30,56 + 33,9 25,66 4,46
air liQuiDe (AI) R a 186,26 184,4 - 0,42 + 4,7 micHelin (ML) a 35,73 36,32 + 1,97 + 11,89 GrouPe crit (CEN) g B 75 74,6 - 0,53 - 5,09
469960 187,84 - 4,38 197,42 1322178 36,48 + 2,25 36,48 707 75 + 3,9 79,6 seB (SK) G a 114,7 112,4 - 1,58 - 0,53
FR0000120073 15/05/23 2,95 524.769.659 184,38 + 13 165,68 1,6 FR001400AJ45 17/05/23 1,25 714.958.226 35,73 + 25,98 30,06 3,44 FR0000036675 05/07/23 3,5 11.250.000 74,6 - 0,53 68,2 4,69 54005 114,7 - 5,23 120,2
airBus GrouP (AIR) R a 157,5 155,9 - 0,74 + 11,53 3,4 oranGe (ORA) R a 10,445 10,475 + 0,77 + 1,66 Gtt (GTT) G a 129,7 129,8 - 0,15 + 8,26 FR0000121709 31/05/23 2,45 55.337.770 111,6 + 8,29 104,1 2,18
931973 157,9 - 8,68 172,78 45,92 5416600 10,57 - 3,79 11,37 61953 130,3 - 6,28 151,1 secHe enVironnement (SCHP) g B 103,6 105 + 1,16 - 4,55
NL0000235190 16/04/24 2,38 792.283.683 154,1 + 22,62 136,62 1,8 FR0000133308 04/12/23 0,3 2.660.056.599 10,375 - 11,35 10,31 2,86 FR0011726835 12/12/23 1,85 37.078.357 129,3 + 33,88 119,9 1,43 7950 105,4 - 7,24 121,4
arcelormittal (MT) R a 23,77 24,05 + 1,26 - 6,33 PernoD-ricarD (RI) R a 142,85 142,15 - 0,25 - 11,02 GuerBet (GBT) g B 37,5 37 - 1,07 + 89,74 FR0000039109 07/07/23 1,1 7.857.732 103 + 1,16 97,3 1,05
2081041 24,13 - 5,52 26,95 403788 143,3 - 5,2 164,55
LU1598757687 13/11/23 0,17 852.809.772 23,73 - 6,46 23,17 FR0000120693 24/11/23 2,64 255.631.733 142,15 - 32,12 138,7 1,86 20428 37,7 +12,63 38,75
FR0000032526 29/06/23 0,5 12.641.115 35,15 +122,36 17,02 1,35 serGeFerrari GrouP (SEFER) g c 6,03 6,05 + 1 - 24,94
aXa (CS) R a 34,06 34,19 + 1 + 15,94 PuBlicis GrouPe (PUB) R a 104 104,15 - 0,24 + 23,99 2678 6,05 + 3,42 8,2
4003649 34,34 - 1,8 35,19 295305 104,75 + 3,07 105,8 Guillemot (GUI) g c 5,5 5,52 - 18,7
12953 5,56 +13,81 6,95 FR0011950682 26/04/23 0,4 12.299.259 6 - 56,29 5,6 6,61
FR0000120628 08/05/23 1,7 2.270.188.806 34,03 + 15,62 29,12 4,97 FR0000130577 03/07/23 2,9 268.723.468 103,3 + 40,52 83,16 2,78
FR0000066722 07/06/23 0,25 15.087.480 5,44 - 17,98 4,405 ses-imaGotaG (VU) G B 128 133,6 + 5,61 - 1,62
BnP PariBas (BNP) R a 67,6 67,72 + 1,06 + 8,2 renault (RNO) R a 48,78 49,47 + 1,9 + 34,05
2454535 68,27 + 2,82 69,55 679747 49,78 + 5,72 51,84 icaDe (ICAD) G a 25,2 25,58 + 2,32 - 28,02 28159 134,4 - 6,31 159,8
FR0000131104 22/05/23 3,9 1.147.477.409 67,41 + 15,58 53,08 5,76 FR0000131906 17/05/23 0,25 295.722.284 48,78 + 47,1 33,265 0,51 65041 25,6 + 1,91 35,9 FR0010282822 25/06/12 0,5 15.958.658 127,5 - 7,86 120,2
BouYGues (EN) R a 36,3 36,56 + 0,88 + 7,15 saFran (SAF) R a 208 204,9 - 1,77 + 28,5 FR0000035081 04/03/24 2,42 76.234.545 25,06 - 39,84 23,2
sHoWroomPriVé (SRP) g B 1,01 1,005 - 0,5 - 5,72
772896 36,82 - 3,36 38,26 406845 209,8 - 2,45 213,35 iD loGistic (IDL) a 342 346 + 1,02 + 13,07 44351 1,03 + 6,24 1,17
FR0000120503 03/05/23 1,8 378.948.297 36,26 + 10,12 32,62 4,92 FR0000073272 30/05/23 1,35 427.260.541 204,2 + 45,38 156,68 0,66 1689 346,5 - 2,12 356,5
FR0010929125 6.173.328 341 + 29,83 298 FR0013006558 118.902.909 0,984 - 32,09 0,9
caP-Gemini (CAP) R a 203,7 205,5 + 1,18 + 8,87 saint-GoBain (SGO) R a 75,42 74,7 - 0,72 + 12,06
383458 207 - 3,66 227,4 1180241 75,56 + 3,85 75,56 imerYs (NK) G a 30,54 31,04 + 2,04 + 8,99 soitec (SOI) LG a 93,35 91,9 - 0,49 - 43,2
FR0000125338 30/05/23 3,25 172.608.113 203,1 + 24,62 181,95 1,58 FR0000125007 12/06/23 2 506.453.012 74,52 + 42,5 61,27 2,68 107745 31,04 - 1,71 32,5 eX-Ds 13/05/16 reGr.1P20 46608 93,35 - 4,17 164,1
carreFour (CA) R a 15,935 15,89 - 0,19 - 4,07 sanoFi (SAN) R a 91,66 91,84 + 0,67 + 2,32 FR0000120859 15/05/23 3,85 84.940.955 30,32 - 16,65 24,96 12,4 FR0013227113 35.712.302 91,55 - 31,26 86
776080 16,03 + 0,09 16,865 1273910 92,67 + 0,97 96,5 inFotel (INF) g c 49,5 49,5 - 6,6
FR0000120172 06/06/23 0,56 691.946.506 15,875 - 15,75 14,885 3,52 FR0000120578 30/05/23 3,56 1.264.797.546 91,64 - 8,16 84,93 3,88 solocal GrouP (PAJ) B 0,048 0,048 + 0,21 - 45,85
533 49,5 + 5,32 53,6 443396 0,05 +10,96 0,089
creDit aGricole (ACA) R a 14,6 14,55 - 0,03 + 13,21 scHneiDer electric (SU) R a 218 216,05 - 0,6 + 18,85 FR0000071797 19/05/23 2 6.934.791 49,4 - 12,54 43,7 4,04
3980428 14,68 + 5,31 14,7 556825 218,85 + 3,05 218,85 FR00140006O9 129.505.837 0,048 - 77,44 0,03
FR0000045072 30/05/23 1,05 3.025.902.350 14,55 + 31,27 12,118 7,22 FR0000121972 09/05/23 3,15 572.835.884 215,65 + 36,9 171,1 1,46 innate PHarma (IPH) g B 2,255 2,23 - 0,67 - 14,89
16464 2,255 + 2,06 2,8 soDeXo (SW) LR a 78,85 82,05 + 4,32 + 9,61
Danone (BN) R a 58,32 58,66 + 0,62 - 0,03 société Générale (GLE) R a 25,46 25,585 + 0,99 + 6,49 FR0010331421 80.860.563 2,21 - 14,23 2,11 325288 82,05 + 3,23 82,3
1032070 58,8 - 2,05 63,8 2463440 25,795 + 3,12 26,545 FR0000121220 20/12/23 3,1 147.454.887 78,75 + 12,34 71,94 3,78
FR0000120644 09/05/23 2 677.773.128 58,3 - 2,22 57,16 3,41 FR0000130809 30/05/23 1,7 802.979.942 25,46 + 16,16 21,265 6,65 interParFums (ITP) G a 47,45 48,4 + 2,43 - 3,97
28808 48,4 - 7,28 55,2 solutions 30 (ALS30) a 1,95 1,977 + 1,8 - 25,84
Dassault sYstemes (DSY) R a 37,88 37,52 - 0,66 - 15,18 stellantis nV (STLAP) a 23,24 23,21 + 0,76 + 9,77 FR0004024222 26/04/24 1,15 69.196.570 47,1 - 26,06 45,25 2,38
1967874 37,92 - 8,58 48,875 1626844 23,47 -11,83 27,345 330058 1,987 - 5,5 2,896
FR0014003TT8 29/05/23 0,21 1.338.435.363 37,52 + 2,32 36,13 0,56 NL00150001Q9 22/04/24 1,32 3.165.220.176 22,92 + 54,82 19,15 6,68 inVentiVa (IVA) g B3 2,97 - 1 - 27,47 FR0013379484 107.127.984 1,931 - 21,05 1,771
eDenreD (EDEN) R a 45,09 45,27 + 0,71 - 16,38 stmicroeletronics (STMPA) Ra 38,665 38,15 - 1,33 - 15,68 0,23 12958 3,02 -10,54 4,44
FR0013233012 52.477.188 2,9 + 36,87 2,8 soPra steria GP (SOP) G a 212,4 209 - 1,32 + 5,66
310758 45,65 - 8,47 58,76 2131729 39,06 - 4,43 45,815 167,87
FR0010908533 07/06/23 1 249.588.059 45,02 - 23,17 41,37 2,21 NL0000226223 18/03/24 0,05 911.281.920 38,035 - 1,08 36,315 0,16 iPsen (IPN) G a 113,1 112,5 - 0,44 + 4,26 25620 212,4 - 6,86 239,6
77038 113,5 + 1,99 115,9 FR0000050809 29/05/23 4,3 20.547.701 208,6 + 6,63 187 2,06
enGie (ENGI) R a 16,19 16,25 + 0,93 + 2,09 1,21 telePerFormance (RCF) R a 89,24 89,5 + 1,02 - 32,22
6983135 16,315 + 4,77 16,64 13,48 279338 90,64 - 0,64 153,8 FR0010259150 02/06/23 1,2 83.814.526 111,3 + 2,27 99,7 1,07 smcP (SMCP) g B 2,28 2,33 + 3,1 - 31,87
FR0010208488 28/04/23 1,4 2.435.285.011 16,155 + 11,95 13,996 8,62 FR0000051807 21/04/23 3,85 63.443.054 89 - 50,5 80,76 4,3 iPsos (IPS) G a 63,55 63,2 - 0,47 + 11,37 87143 2,335 3,555
essilorluXottica (EL) R a 204 201,6 - 0,84 + 11,01 tHales (HO) R a 159,35 158,4 - 0,19 + 18,25 69360 63,9 - 3,29 67,8 FR0013214145 75.591.187 2,25 - 70,95 2,105
287079 205,1 - 3,86 212,4 233146 159,55 + 0,22 162,55 FR0000073298 03/07/23 1,35 43.203.225 63 + 28,56 55,55 2,14
FR0000121667 22/05/23 3,23 453.847.215 201,6 + 12,37 172,82 1,6 FR0000121329 05/12/23 0,8 210.210.140 158,05 + 14,45 131,45 0,51 JacQuet metals (JCQ) g B 18,34 18,42 + 0,44 - 6,02 sPie (SPIE) G a 34,28 34,34 + 0,53 + 21,34
euroFins scient. (ERF) R a 57 58,7 + 3,64 - 0,47 totalenerGies (TTE) R a 69,07 69,25 - 0,33 + 12,42 5056 18,64 19,66 194741 34,86 - 1,38 35,42
402102 58,98 - 0,64 62,1 3282811 69,75 + 9,11 70,11 FR0000033904 05/07/23 1 22.497.209 18,34 + 3,95 17,46 5,43 FR0012757854 20/09/23 0,22 166.907.584 34,16 + 21,43 27,32 0,64
FR0014000MR3 03/07/19 2,45 190.742.750 57 - 7,21 51,32 1,7 FR0000120271 20/03/24 0,74 2.386.846.474 68,88 + 19,52 57,45 1,07 JcDecauX (DEC) G a 19,6 19,88 + 1,64 + 9,23 steF (STF) g B 130,2 131,4 + 0,46 + 15,06
Hermes intl (RMS) R a 2352 2298 - 2,21 + 19,76 uniBail-r/WFD (URW) a 78 78,4 + 0,95 + 17,15 57695 19,88 +10,44 20,2 2256 131,8 - 3,67 138
33524 2355 - 2,87 2436 304244 78,76 + 5,23 78,76 FR0000077919 21/05/19 0,58 213.161.658 19,51 - 1 16,65
FR0000052292 13/02/24 3,5 105.569.412 2298 + 16,84 1788,8 0,15 FR0013326246 24/03/20 5,4 139.041.391 77,54 + 61,52 63,96 FR0000064271 03/05/23 4 12.850.000 130,2 + 24,9 112,6 3,04
KauFman & BroaD (KOF) g B 30 30,4 + 1,5 + 1
KerinG (KER) R a 339,9 335,65 - 0,68 - 15,88 Veolia enV. (VIE) R a 29,2 29,02 - 0,07 + 1,61 17622 30,4 +12,59 30,55 sWorD GrouP (SWP) g B 38,45 37,85 - 1,3 - 5,02
180147 341,45 - 8,38 438,6 1343020 29,28 - 3,68 30,7 FR0004007813 09/05/23 2,4 19.862.022 29,9 + 3,05 26,05 7,9 6910 38,85 + 0,53 40
FR0000121485 15/01/24 4,5 123.420.778 335,5 - 42,1 315,35 1,34 FR0000124141 09/05/23 1,12 725.411.667 29,02 + 1,15 27,42 3,86 FR0004180578 02/05/23 1,45 9.544.965 37,85 - 13,19 34,4 4,49
KlePierre (LI) LR a 25,04 25,14 + 0,48 + 1,86
l.V.m.H. (MC) R a 794,5 779,2 - 1,64 + 6,22 Vinci (DG) R a 111,8 110,6 - 0,45 - 2,73 508587 25,34 + 4,75 25,34 sYnerGie (SDG) g B 36,6 36,1 - 1,1 + 2,56
228207 795 - 6,54 886,4 742873 112,4 - 6,87 120,62 FR0000121964 22/03/24 0,9 286.861.172 25,04 + 9,49 22,69
FR0000121014 23/04/24 7,5 500.141.700 775,5 - 10,54 644 0,96 FR0000125486 23/04/24 3,45 589.577.241 110,5 - 1,43 109,45 3,12 270 36,6 +13,17 36,6
leGranD (LR) R a 98,12 97,74 - 0,1 + 3,87 ViVenDi (VIV) R a 9,84 9,836 - 0,12 + 1,65 laGarDère (MMB) G a 20 20,2 + 1,1 + 9,9 FR0000032658 29/06/23 0,8 24.362.000 36,1 + 9,39 29,15 2,22
286717 98,76 - 0,49 99,66 2882167 9,878 - 2,61 10,54 15264 20,45 - 4,49 21,4
FR0000130213 26/04/24 0,65 141.133.286 20 - 7,55 17,8 3,22 telePerFormance (RCF) R a 89,24 89,5 + 1,02 - 32,22
FR0010307819 02/06/23 1,9 262.245.733 97,72 + 14,05 88,44 1,94 FR0000127771 25/04/23 0,25 1.029.918.125 9,714 - 1,19 9,634 2,54 279338 90,64 - 0,64 153,8
lDc (LOUP) a 149 152 + 2,01 + 8,57
1308 152 +11,76 152 FR0000051807 21/04/23 3,85 63.443.054 89 - 50,5 80,76 4,3
FR0013204336 28/08/23 2,7 17.635.433 148,5 + 33,33 125 1,78 teract (TRACT) B 0,77 0,772 - 0,52 - 58,72
lna santé (LNA) g B 19,2 19,76 + 2,7 - 1,69 5511 0,774 - 5,16 1,885
3997 19,8 - 3,37 23,8 FR001400BMH7 73.394.562 0,77 - 87,22 0,376
FR0004170017 06/07/23 0,5 10.709.416 19,2 - 37,86 18,14 2,53
srD Valeurs françaises lectra (LSS) g B 32,1 32,2 + 0,31 + 3,04
tF1 (TFI) G a 8,59
408801
8,86
8,86
+ 3,99 + 24,18
+ 4,6 9,17
11556 32,4 - 0,46 35,2
FR0000065484 03/05/23 0,48 37.832.965 31,45 + 9,15 28,6 1,49 FR0000054900 22/04/24 0,55 210.485.635 8,475 + 21,2 7,105 6,21
Valeurs mnémo / INFO / OUV clot % Veil % an BPA Valeurs mnémo / INFO / OUV clot % Veil % an BPA lHYFe (LHYFE) B 4,3 4,235 + 0,36 - 15,97 tFF GrouP (TFF) G B 43,1 42,6 - 0,93 - 5,12
OST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PER OST VOL. + HAUT % MOIS + HAUT AN PER 5179 4,3 + 2,54 5,49 9013 43,1 - 0,47 47,5
ISIN / DATE DÉTACH. COUPON / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT ISIN / DATE DÉTACH. COUPON / DIV NB TITRES + BAS % 52 S. + BAS AN RDT
FR0014009YQ1 47.908.148 4,225 - 38,62 3,82 FR0013295789 08/11/23 0,6 21.680.000 42,4 + 3,15 42,1 1,41
aB science (AB) g B 1,93 1,96 + 1,24 - 44,87 casino (CO) G a 0,029 0,029 + 1,4 - 96,31 lineData serVices (LIN) g B 74,2 73,8 + 1,1 + 32,73
59049 1,96 -22,53 4,465 24343878 0,03 -26,09 0,8 tHermaDor GrouPe (THEP) B 81 81,2 + 1,5 - 3,91
367 74,2 + 7,89 75,6 1962 81,5 - 8,04 90,4
FR0010557264 52.071.069 1,9 - 69,38 1,55 FR0000125585 09/05/19 1,56 37.304.080.735 0,028 - 99,63 0,027 FR0004156297 05/07/23 1,75 4.960.807 73 + 63,27 55,6 2,37
aBc arBitraGe (ABCA) g B 3,99 4 + 0,76 - 16,75 catana GrouP (CATG) g c 4,865 4,935 + 1,86 - 13,72 FR0013333432 12/04/24 2,08 9.200.849 80,7 - 13,62 79,4 2,56
lisi (FII) g a 24,8 24,75 - 0,6 + 4,87
49655 4,02 + 4,44 4,87 45773 4,975 +5 5,92 15285 24,85 + 4,65 25,3 tiKeHau caPital (TKO) g a 21,45 21,65 + 1,41 + 5,1
FR0004040608 23/04/24 0,1 59.608.879 3,97 - 33,99 3,58 2,5 FR0010193052 05/03/24 0,15 30.706.178 4,865 - 27,53 4,44 3,04 FR0000050353 17/04/23 0,15 46.538.313 24,55 - 3,7 20,85 0,61 eX D s 03/07/17 35970 21,8 + 6,39 21,85
aBiVaX (ABVX) g B 14,9 14,82 + 50,92 ceGeDim (CGM) B 13,75 14,1 + 2,55 - 21,05 lumiBirD (LBIRD) g c 12,4 12,35 - 0,4 + 1,4 FR0013230612 18/05/23 0,7 176.192.916 21,45 - 13,05 19,82 3,23
23931 15,42 +10,6 15,42 8974 14,1 + 8,46 18,8 5434 12,5 - 5,87 15,48
FR0012333284 62.928.818 14,72 - 1,85 9,35 FR0000053506 29/06/22 0,5 13.997.173 13,6 - 28,86 11,3 transGène (TNG) g c 1,264 1,244 + 2,81 - 9,2
FR0000038242 22.466.882 12,25 - 9,85 10,4
aBionYX PHarma sa (ABNX) g B1 1,022 - 0,2 - 20,65 cGG (CGG) G B 0,41 0,406 - 0,37 - 32,09 18787 1,264 + 9,12 1,52
m6-métroPole tV (MMT) G a 14,7 14,82 + 2,21 + 14,53 FR0005175080 100.852.742 1,206 - 30,89 1,03
15397 1,028 + 4,29 1,316 2813948 0,415 + 1,07 0,616 248698 14,96 + 7,24 14,96
FR0012616852 32.459.012 1 - 42,06 0,91 FR0013181864 713.676.258 0,406 - 40,28 0,361 FR0000053225 03/05/23 1 126.414.248 14,46 + 1,23 12,03 6,75 triGano (TRI) G a 145 146,9 + 1,38 - 0,94
aDocia (ADOC) g B 8,57 8,36 - 0,83 - 27,56 cHarGeurs (CRI) g c 11,5 11,38 - 2,57 maisons Du monDe (MDM) g B 4,61 4,65 + 0,87 - 17,99 13489 147 - 9,88 163,8
45600 8,64 - 4,57 12,4 7475 11,5 - 4,85 12 13109 4,68 + 7,24 5,73 FR0005691656 17/01/24 1,75 19.336.269 144,5 + 24,49 136,5 1,19
FR0011184241 14.297.613 8,22 +192,31 7,89 FR0000130692 02/05/23 0,54 24.862.314 11,3 - 23,52 10,06 4,75 FR0013153541 05/07/23 0,3 39.189.288 4,57 - 51,31 3,864 6,45 uBisoFt entertainment (UBI) R a 21,9 22,12 + 1,38 - 4,28
aéroPorts De Paris (ADP) R a 118,5 118,3 - 0,17 + 0,94 cHristian Dior (CDI) a 741 735,5 - 0,74 + 3,96 manitou (MTU) g B 22,85 22,85 + 0,88 - 1,51 411472 22,23 +13,41 24,6
72069 119,7 - 6,92 132,7 eX D oP 08/06/17 3416 745,5 - 5,28 832,5 15335 23,05 - 9,86 26,75
FR0010340141 05/06/23 3,13 98.960.602 118 - 17,9 113,4 2,65 FR0000130403 23/04/24 7,5 180.507.516 734 - 11,6 618,5 1,02 FR0000054470 127.450.324 21,65 - 16,5 18,47
FR0000038606 30/05/23 0,63 39.668.399 22,5 + 2,01 19,78 2,76
air France-Klm (AF) L 9,834 10,07 + 3,6 - 25,91 claranoVa se (CLA) g B 2,43 2,42 - 0,82 + 13,88 maurel et Prom (MAU) g B 6,08 6,14 - 0,08 + 0,82 Valeo (FR) LR a 11,64 11,865 + 3,13 - 14,73
1988071 10,09 - 2,48 13,828 108932 2,46 - 6,56 3,05 119394 6,16 + 9,74 6,63 1411895 12,05 + 2,37 14,75
FR001400J770 262.769.869 9,718 - 35,8 9,008 FR0013426004 57.206.910 2,38 + 20,7 1,994 FR0000051070 03/07/23 0,23 201.261.570 6,055 + 77,05 4,7 3,75 FR0013176526 29/05/23 0,38 244.633.504 11,62 - 32,83 10,19 3,2
aKWel (AKW) g B 13,5 13,34 + 0,76 - 17,45 clariane (CLARI) G a 1,88 2,22 + 18,09 - 7,65 mcPHY enerGY (MCPHY) g B 1,94 2,075 + 6,96 - 38,35 Vallourec reG (VK) G B 16,18 16,565 + 2,38 + 18,11
715 13,5 - 9,38 17,44 1844697 2,22 +50,61 2,682 162743 2,13 + 9,33 3,436
FR0000053027 08/06/23 0,3 26.741.040 13,22 - 1,19 12,76 2,25 FR0010386334 21/06/23 0,25 106.969.229 1,855 - 71,74 1,321 11,26 907202 16,59 - 3,69 18,2
FR0011742329 28.009.788 1,934 - 83,13 1,552 FR0013506730 229.877.070 16,115 + 60,28 12,785
alD (ALD) G a 6,28 6,325 + 2,1 - 1,86 coFace (COFA) G a 14,46 14,55 + 0,62 + 22,89 meDincell (MEDCL) B 12,74 13,8 + 9,01 + 91,67
340178 6,34 - 3,44 6,69 190646 14,58 - 0,68 14,85 221319 13,9 +43,9 13,9 ValneVa (VLA) G B 3,474 3,466 + 0,64 - 26,57
FR0013258662 31/05/23 1,06 816.960.428 6,2 - 42,03 5,11 16,76 FR0010667147 22/05/23 1,52 150.179.792 14,38 + 4,98 11,53 10,45 FR0004065605 29.070.871 12,74 + 55,41 6,91 444649 3,52 - 4,7 4,996
alPes (cie Des ) (CDA) g B 13,94 13,86 - 0,57 - 1,84 coViVio (COV) G a 46,68 47,32 + 1,55 - 2,79 mercialYs (MERY) G B 10,12 10,15 - 0,2 + 2,06 FR0004056851 139.276.901 3,39 - 21,12 2,95
31972 14,12 + 2,67 15,32 141231 47,64 - 0,8 48,88 497859 10,2 - 5,93 11,37 Verallia (VRLA) g a 36,38 36,38 + 0,44 + 4,36
FR0000053324 20/03/24 0,91 50.533.135 13,8 - 3,62 12,48 5,77 FR0000064578 19/04/24 3,3 104.824.473 46,52 - 8,12 39,54 FR0010241638 29/04/24 0,99 93.886.501 9,965 + 11,29 9,775 135452 36,8 + 0,94 37,08
altarea (ALTA) G a 79,9 81,9 + 2,76 + 2,38 Dassault aV. (AM) a 204 202,8 - 0,49 + 13,17 mersen (MRN) G B 35,5 35,9 + 1,13 + 1,99 FR0013447729 08/05/23 1,4 120.805.103 36,16 - 1,2 31,16 3,85
6006 81,9 + 4,46 84,7 27130 204,2 - 0,59 211,6 28503 35,95 - 1,51 39,5
FR0000033219 12/06/23 5 20.801.492 79,9 - 31,06 66,8 FR0014004L86 19/05/23 3 78.951.812 202,4 + 14,38 168,9 1,48 FR0000039620 04/07/23 1,25 24.418.312 35,5 - 1,91 30,3 3,48 VerimatriX (VMX) g B 0,475 0,474 + 0,85 + 3,49
alstom (ALO) LR a 15,24 15,255 + 1,4 + 25,25 Dassault sYstemes (DSY) R a 37,88 37,52 - 0,66 - 15,18 19330 0,475 +11,53 0,626
metaBolic eXPlorer (METEX) g c 0,163 0,169 + 3,68 - 56,44
866546 15,39 + 7,96 16,11 1967874 37,92 - 8,58 48,875 25386 0,17 +18,68 0,578 FR0010291245 85.535.147 0,453 - 25,82 0,341
FR0010220475 17/07/23 0,25 384.291.068 15,17 - 32,92 10,66 1,64 FR0014003TT8 29/05/23 0,21 1.338.435.363 37,52 + 2,32 36,13 0,56 FR0004177046 50.919.133 0,162 - 81,33 0,13 VetoQuinol (VETO) B 99,1 98,5 - 1,1 - 3,81
altareit (AREIT) B 468 468 - 0,43 + 4 DBV tecHnoloGies (DBV) g B 1,194 1,244 + 4,89 - 32,72 monceY (Fin.) nom. (FMONC) B + 0,68 - 2,61 2255 100 - 1,01 110
1 468 + 2,18 470 81522 1,246 - 6,54 1,896 - 1,97 8100 FR0004186856 02/06/23 0,8 11.881.902 97,9 + 10,8 93,2 0,81
FR0000039216 1.750.487 468 - 18,61 440 FR0010417345 96.434.369 1,192 - 57,1 1,095 FR0000076986 20/06/23 28 182.871 - 6,29 7100 2800
alten (ATE) G a 115 112,2 - 1,75 - 16,64 Deezer sa (DEEZR) 2 1,9 1,92 + 1,59 - 9,65 Vicat (VCT) g a 35 35,2 + 1,44 + 7,15
nacon (NACON) B 1,102 1,12 + 1,63 - 32,85 20570 35,35 - 3,69 38,4
62173 115,8 -17,01 146,9 2891 1,94 - 4,95 2,4 75900 1,128 -12,5 1,838
FR0000071946 04/07/23 1,5 35.209.501 112,2 - 27,14 112,2 1,34 FR001400AYG6 117.054.347 1,89 1,685 FR0013482791 87.851.694 1,086 - 53,43 1,054 FR0000031775 29/04/24 2 44.900.000 34,8 + 33,08 32,4 5,68
amunDi (AMUN) G a 66,15 65,55 - 0,3 + 6,41 DericHeBourG (DBG) g B 3,922 4,048 + 3,53 - 20,31 nanoBiotiX (NANO) g B 5,57 5,49 + 0,73 - 17,32 VirBac (VIRP) G a 355,5 349 - 2,92
eX-Ds 15/03/17 186491 66,25 + 2,99 68,35 266090 4,048 - 8,04 5,16 29621 5,57 - 3,68 7,93 2972 355,5 + 0,87 377,5
FR0004125920 22/05/23 4,1 204.647.634 65,2 + 10,45 58,75 6,26 FR0000053381 14/02/24 0,16 159.397.489 3,922 - 27,65 3,858 3,95 FR0011341205 13/05/19 47.133.328 5,355 +203,31 5,07 FR0000031577 26/06/23 1,32 8.458.000 346,5 + 12,76 316,5 0,38
antin inFra Partners (ANTIN) G a 12,5 12,7 + 2,09 - 7,84 Dms (DGM) g c 1,04 1,015 - 2,4 - 10,57 neoen (NEOEN) G a 29,76 29,66 - 0,2 - 2,05
19857 12,92 - 5,51 17,28 3201 1,04 -10,57 1,37 ViVenDi (VIV) R a 9,84 9,836 - 0,12 + 1,65
147912 30,04 +13,03 30,62
FR0014005AL0 14/11/23 0,32 179.193.288 12,5 - 16,99 12,07 2,52 FR0012202497 16.120.556 1,01 - 14,71 0,99 FR0011675362 17/05/23 0,13 152.207.004 29,48 + 9,04 21,8 0,42 2882167 9,878 - 2,61 10,54
aramis (ARAMI) a 3,59 3,61 + 1,12 - 17,01 eDenreD (EDEN) R a 45,09 45,27 + 0,71 - 16,38 FR0000127771 25/04/23 0,25 1.029.918.125 9,714 - 1,19 9,634 2,54
neurones (NRO) B 45 45,45 + 1,68 + 3,89
64996 3,65 + 7,44 4,35 310758 45,65 - 8,47 58,76 3630 45,5 - 0,76 48,15 Voltalia (VLTSA) G a 8,3 8,12 - 0,25 - 22,07
FR0014003U94 82.856.671 3,575 - 10,42 3,3 FR0010908533 07/06/23 1 249.588.059 45,02 - 23,17 41,37 2,21 FR0004050250 14/06/23 1,1 24.278.716 44,95 + 19,76 42,3 2,42 121091 8,36 +23,78 10,54
arGan (ARG) a 73 73,4 + 0,96 - 13,85 eiFFaGe (FGR) LR a 101 100,6 - 0,05 + 3,69 neXans (NEX) G a 99,6 100,9 + 1,71 + 27,32 FR0011995588 131.318.716 8,05 - 41,07 5,82
14855 74,3 -12,51 86,1 160938 101,8 - 4,33 105,75 83900 101,3 + 4,13 101,3
FR0010481960 27/03/24 3,15 25.402.673 73 + 3,67 71,4 FR0000130452 15/05/23 3,6 98.000.000 100,45 - 6,77 95,2 3,58 WaVestone (WAVE) g B 54,9 55,2 + 0,91 - 5,96
FR0000044448 15/05/23 2,1 43.753.380 99,45 + 29,61 72,1 2,08
11407 55,4 - 1,6 66
arKema (AKE) LR a 96,6 97,4 + 1,2 - 5,44 eKinoPs (EKI) g B 3,36 3,3 - 1,49 - 43,69 neXitY (NXI) G a 10,36 10,7 + 4,7 - 36,5
122654 97,55 - 0,14 103,9 10268 3,36 -11,53 5,94 FR0013357621 02/08/23 0,38 24.906.332 54,1 + 18,33 52 0,69
182540 10,8 +12,93 17,19
FR0010313833 15/05/23 3,4 75.043.514 96,5 + 8,68 89,6 3,49 FR0011466069 26.994.049 3,3 - 59,51 3,1 FR0010112524 24/05/23 2,5 56.129.724 10,3 - 55 8,415 23,36 WenDel (MF) G a 94,8 96 + 1,43 + 19,03
artmarKet.com (PRC) g c 4,54 4,6 + 2,91 - 9,27 elior (ELIOR) G B 2,428 2,536 + 4,97 - 13,51 oDet (cie De l') (ODET) a 1490 1496 + 0,27 + 2,89 27289 96 + 1,48 96
1879 4,61 + 1,77 6,15 657120 2,55 + 2,42 2,964 253 1512 - 4,59 1626 FR0000121204 19/06/23 3,2 44.430.554 94,55 - 5,51 77,55 3,33
FR0000074783 6.651.515 4,48 - 25,81 4,3 FR0011950732 07/04/20 0,29 253.611.809 2,422 - 19,49 2,136 FR0000062234 20/06/23 3,6 6.585.990 1490 - 6,38 1348 0,24 WorlDline (WLN) LG a 10,03 10,17 + 2,21 - 35,1
assYstem (ASY) B 54,4 54,7 + 0,74 + 10,51 elis (ELIS) G a 21,42 21,32 - 0,56 + 12,86 orPéa (ORP) G a 13,1 13,6 + 6,25 - 18,99 1224547 10,24 -11,41 15,96
oPa 24/11/17 5184 55,3 - 6,97 61,2 208472 21,72 + 1,23 21,82 566182 13,926 +34,15 17,979
FR0000074148 03/04/24 7 15.668.216 54,4 + 26,04 46,4 12,8 FR0012435121 30/05/23 0,41 235.567.817 21,32 + 18,44 18,08 1,92 FR0011981968 282.974.981 9,848 - 74,17 9,336
FR001400NLM4 159.191.703 12,9 - 92,04 9,968
atos se (ATO) a 2,274 2,274 + 19,18 - 67,74 eramet (ERA) G B 89,85 93,5 + 5,95 + 30,77 ose immuno (OSE) g c 5,6 5,52 - 0,72 + 28,97 Xilam animation (XIL) g c 4,585 4,54 + 3,54 + 14,65
6868313 2,379 +19,81 7,83 183247 93,5 +32,72 93,5 128028 5,73 +13,58 6,18 10256 4,585 +11 5,92
FR0000051732 14/05/21 0,9 111.439.307 2,122 - 81,86 1,54 FR0000131757 26/05/23 3,5 28.755.047 87,3 + 6,13 58,5 3,74 FR0012127173 21.767.777 5,38 + 36,3 3,115 FR0004034072 5.893.799 4,43 - 81,62 3,62
auBaY (AUB) g c 40 40,8 + 2,51 - 2,04 esso (ES) g c 173 175,8 + 1,62 +220,51 oVH (OVH) g a 6,77 6,6 - 0,15 - 23,39
7447 40,8 + 0,25 42,75 18466 175,8 +40,3 175,8 257046 6,775 -31,82 11,28
FR0000063737 08/11/23 0,5 13.064.446 39,9 - 8,42 37,8 1,23 FR0000120669 10/07/23 2 12.854.578 171,6 +293,82 48,98 1,14 FR0014005HJ9 188.532.591 6,49 - 30,75 6,48 Autres Valeurs de la Zone euro
aVenir telecom (AVT) c 0,129 0,13 + 0,78 + 13,44 eurazeo (RF) G a 85,2 86 + 1,24 + 19,69 PeuGeot inVest (PEUG) g a 110,4 111,2 + 1,65 + 9,66
37462 0,131 - 2,99 0,198 66749 86,25 + 5,85 86,25 2516 111,2 - 4,96 119,6 euroneXt (ENX) LR a 84,6 84,6 + 0,24 + 7,57
FR001400CFI7 0,127 - 37,05 0,112 FR0000121121 28/04/23 2,2 76.081.874 85,15 + 33,02 69,35 2,56 FR0000064784 19/05/23 1 24.922.589 109,6 96,3 2,56 105772 84,85 - 4,08 89,5
aXWaY soFtWare (AXW) g B 25 25 + 0,4 - 5,3 eutelsat com. (ETL) G a 3,87 3,794 - 2,37 - 10,73 PHarmaGest int. (PHA) g a 58,2 59,3 + 2,24 - 2,95 NL0006294274 23/05/23 1,89 107.106.294 84,25 + 17,34 76,35 2,62
2875 25 - 4,94 30,9 113710 3,892 - 6,18 4,528 8211 59,3 +15,59 61,8
FR0011040500 05/06/23 0,4 21.633.597 24,7 + 17,37 24,1 FR0010221234 17/11/22 0,93 475.178.378 3,768 - 37,03 3,382 FR0012882389 03/07/23 1,15 15.174.125 58,1 - 17,29 46,15 1,94 noKia (NOKIA) R a 3,419 3,438 - 0,03 + 12,21 0,3
Bains mer monaco (BAIN) B 109 109,5 + 2,34 + 7,35 eXail tecHnoloGies (EXA) g B 19,42 19,7 + 1,97 + 2,07 Pierre & Vacances (VAC) g c 1,42 1,46 + 3,55 - 5,93 120874 3,454 + 4,32 3,57 11,61
266 110 + 6,31 111 12482 19,7 -12,05 24,6 199056 1,47 +14,06 1,588 FI0009000681 22/04/24 0,03 5.613.496.565 3,417 - 10,54 3,012 1,16
MC0000031187 10/10/23 1,2 24.516.661 108 + 11,96 99 1,1 FR0000062671 23/06/21 0,32 17.424.747 19,42 + 4,01 17,78 FR0000073041 19/03/12 0,7 454.437.269 1,42 - 11,84 1,142 PluXee (PLX) L a 27,665 28,57 + 3,68
BalYo (BALYO) g c 0,605 0,562 - 5,86 - 32,21 eXclusiVe netWorKs (EXN) a 20,5 20,25 - 0,74 + 4,27 PlanisWare Prom (PLNW) a 20,5 20,8 + 2,46 + 3,53 160514 28,695 + 4,27 29,91
11046 0,605 -15,74 0,839 30815 20,5 - 7,95 23,1 21815 20,8 +30 21,265 NL0015001W49 147.174.692 27,64 24,23
FR0013258399 34.356.767 0,562 + 4,27 0,56 FR0014005DA7 05/07/22 0,2 91.670.286 20,2 + 3,32 16,9 FR001400PFU4 69.391.000 20,4 + 30 19,306
BastiDe le conFort (BLC) g c 17,56 18,2 + 3,29 - 32,09 FDJ (FDJ) G a 35,22 35,4 + 1,03 + 7,8 ses (SESG) LR 5,54 4,95 - 10,41 - 16,95
Plastic omnium (POM) G a 11,75 11,94 + 2,49 - 0,5
19573 18,3 +29,08 28 184609 35,4 - 6,3 39,46 149999 12,04 - 1,16 13,2 2201911 5,91 -19,9 6,395
FR0000035370 07/01/22 0,27 7.352.928 17,5 - 35,35 13,8 FR0013451333 05/05/23 1,37 191.000.000 35 - 8,62 32,28 3,87 FR0000124570 02/05/23 0,39 145.522.153 11,75 - 25,51 9,99 3,27 LU0088087324 16/04/24 0,43 371.457.600 4,95 - 11,84 4,95 10,1
BelieVe (BLV) G a 15,02 15,08 + 0,53 + 43,62 PHaXiam tX (PHXM) c 2,9 2,955 + 0,17 - 35,76 PoXel (POXEL) g c 0,662 0,665 - 1,19 + 20,69 X-FaB silicon (XFAB) g a 6,665 6,5 - 1,74 - 36,15
73210 15,08 -10,87 16,92 1446 2,965 - 0,84 4,7 441032 0,705 +28,38 0,898 308545 6,665 - 7,34 10,3
FR0014003FE9 97.130.350 15 + 39,37 8,79 FR0011471135 60.751.054 2,9 - 61,12 2,78 FR0012432516 46.586.753 0,64 + 3,91 0,364 BE0974310428 130.781.669 6,415 - 15,75 6,415
Bénéteau (BEN) G B 12,18 12,36 + 0,98 - 0,96 Fnac DartY (FNAC) G a 33,05 33,8 + 3,52 + 22,91 QuaDient (QDT) g B 17,66 17,96 + 1,58 - 6,56
109018 12,36 - 9,65 13,86 30347 33,8 +16,47 33,8 33623 18 - 5,77 20,45
FR0000035164 21/06/23 0,42 82.789.840 12,14 - 15,23 10,72 3,4 FR0011476928 13/06/23 1,4 27.778.578 32,9 - 1,05 23,1 4,14 03/08/23 0,6 34.468.912 17,66 - 0,22 17,32 3,34
Bic (BB) G a 65 65,4 + 0,46 + 4,06 Foncière lYonnaise (FLY) a 66,6 65,4 - 1,21 - 2,39
FR0000120560
rallYe (RAL) a /220424 - 66,84
VAleurs Zone internationale
39960 65,4 - 1,21 69,7 192 66,6 - 7,1 72 -49,89 0,169
FR0000120966 29/05/23 2,56 42.270.689 64,8 + 16,89 61 3,91 FR0000033409 18/04/24 2,4 42.950.800 65,2 - 11,62 64 FR0000060618 20/05/19 1 52.925.203 - 97,12 0,015 Ge aerosPace (GNE) a 151 155 + 1,97 + 34,78
422 155 - 3,73 165,998
BiGBen int. (BIG) g c 2,49 2,49 - 28,03 ForVia (FRVIA) LR a 14,47 15,02 + 4,78 - 26,44 ramsaY GDs (GDS) a 12,45 12,4 - 0,4 - 34,74
9576 2,5 -10,91 3,88 1293573 15,02 + 6,87 21,17 1389 12,5 -11,11 19,9 US3696043013 USD 12/04/24 0,2 1.093.267.127
151 + 72,61 108,999
FR0000074072 27/07/22 0,3 18.538.970 2,45 - 53,97 2,33 FR0000121147 03/06/21 1 197.089.340 14,43 - 19,89 12,17 FR0000044471 02/12/14 1,4 110.389.690 12 - 35,92 12 scHlumBerGer (SLB) a 46,25 45,6 - 0,87 - 3,06 3,45
BiomérieuX (BIM) G a 101,7 102,3 + 0,79 + 1,69 Gecina (GFC) LR a 95,4 95,8 + 0,63 - 12,99 rémY cointreau (RCO) R a 89,5 90,55 + 0,84 - 21,26 6283 46,25 -10,11 52,3
86178 102,3 + 0,05 108,9 86944 96,5 + 1,22 111,1 85043 91,5 - 3,09 114,9 AN8068571086 USD 06/02/24 0,28 1.427.000.000 45,45 + 3,71 43,46
FR0013280286 06/06/23 0,85 118.361.220 101,2 + 7,8 94,26 0,83 FR0010040865 04/03/24 2,65 76.670.861 95,15 - 5,05 86,4 FR0000130395 28/09/23 3 51.252.969 89 - 42,27 86,98 3,31
total enerGies GaBon (EC) a 169 169 + 0,3 + 7,64
Boiron (BOI) g a 33,75 34,15 + 1,19 - 15,09 GenFit (GNFT) G B 3,21 3,23 + 0,62 - 8,76 reXel (RXL) LR a 25,22 25,68 + 1,58 + 3,67 325 169 + 0,72 172
2453 34,45 + 1,58 42,8 38087 3,235 - 3,29 3,87 920843 26,02 + 2,6 26,02
FR0000061129 18/10/23 10,36 17.545.408 33,7 - 14,41 32,48 30,34 FR0004163111 49.834.983 3,18 - 12,7 3,025 FR0010451203 09/05/23 1,2 301.735.000 25,22 + 22,29 22,98 4,67 GA0000121459 07/06/23 20,8 4.500.000 167,5 - 6,22 150,6 12,31
Bolloré (BOL) G a 6,22 6,135 - 1,45 + 8,49 GensiGHt (SIGHT) g B 0,395 0,41 - 2,27 - 10,87 roBertet s.a. (RBT) B 880 890 + 0,91 + 7,23
572608 6,24 - 0,89 6,425 81664 0,42 + 1,99 0,598 1162 895 +11,53 895
FR0000039299 05/09/23 0,02 2.849.681.316 6,135 + 0,25 5,615 0,33 FR0013183985 78.370.724 0,38 - 28,32 0,3 FR0000039091 29/06/23 8,5 2.167.745 876 + 2,42 762 0,96
BonDuelle (BON) g B 7,77 7,78 + 0,65 - 28,88 GerarD Perrier (PERR) B 97,6 97,4 - 0,21 - 2,4 ruBis (RUI) G a 32,6 32,62 + 0,49 + 44,98
17115 7,86 + 3,6 10,94 2376 97,8 - 1,62 102 DiV 2 28/07/17 181826 32,7 - 0,37 34,3
FR0000063935 02/01/24 0,25 32.630.114 7,68 - 31,99 7,33 3,21 FR0000061459 19/06/23 2,15 3.973.148 97,2 + 1,04 94 2,21 FR0013269123 13/06/23 1,92 103.574.490 32,36 + 21,81 22,5 5,89
Bureau Veritas (BVI) LR a 27,7 27,48 - 0,72 + 20,16 GetlinK (GET) LR a 15,81 15,715 - 0,6 - 5,13 sartorius steD. Bio. (DIM) G a 209,1 209,7 + 0,67 - 12,44
659964 27,8 - 2,83 28,56 594976 16,03 - 0,41 16,78 DiV 6 10/05/16 58943 212,5 -20,66 281
FR0006174348 04/07/23 0,77 453.745.520 27,44 + 5,13 22,52 2,8 FR0010533075 30/05/23 0,5 550.000.000 15,715 - 7,34 14,915 3,18 FR0013154002 02/04/24 0,69 97.330.405 208,3 - 13,53 191,75 0,33
carmila (CARM) g c 15,72 15,84 + 1,15 + 1,67 Gl eVents (GLO) g B 19,4 19 - 1,76 - 3,16 saVencia (BH) B 52,2 52,2 - 0,38 - 5,09
63293 15,84 - 1,74 17 14020 19,4 - 0,42 23,55 916 52,8 + 1,95 55
FR0010828137 29/04/24 1,2 142.441.073 15,62 + 3,26 14,72 FR0000066672 03/07/23 0,35 29.982.787 18,78 - 12,84 18,2 1,84 FR0000120107 15/05/23 1,3 14.032.930 52,2 - 17,14 49,3 2,49
31 Les Echos Mardi 30 avril 2024 FINANCE & MARCHÉS

carnet
PORTRAIT dad Complutense de Madrid, en

par Claude Vincent

ENTREPRISES
Espagne, a commencé sa carrière
comme analyste dans la division
+
SIKA
Laurent Galloux vins et spiritueux du groupe
Ils sont nés
est le nouveau directeur LVMH. Elle a ensuite officié à deux un 30 avril
Alice Bureau général pour la France
de ce spécialiste en chimie
reprises chez Unibail-Rodamco-
Westfield en tant que directrice
trace sa route du thé de bâtiment. des opérations, comme directrice • Ana de Armas, actrice, 36 ans.
Alexia Maggioni
Laurent Galloux, 52 ans, titulaire
leasing retail France mais aussi en
qualité de country manager en
•72Jacques
ans.
Audiard, réalisateur,

Souriante et concentrée. Dans sa boutique de la rue du

d’un master sciences de gestion de
l ’ I A E d e To u r s , a r e j o i n t
Espagne. Elle a également tra-
vaillé au sein du Club Med pour
•général
Alexandre Bader, directeur
de Billecart-Salmon, 56 ans.
Bac, à Paris, Alice Bureau emballe soigneusement la
boîte dorée sur laquelle est écrit votre prénom dans un
ParexGroup en 1995. Il y a assumé
des fonctions commerciales et
superviser le développement
immobilier en Europe du Sud
•ex-CEO
Roland de Barbentane,
de Ouibus, président
beau papier serré par un fin ruban grenat. Elle est rem- A la sortie, en 2014, elle décroche un stage à l’Officine marketing avant d’être promu avant d’être promue vice-prési- de Keolis Santé, 51 ans.
plie de Karigane kukicha, un thé vert du Japon choisi
après avoir exploré vos goûts. Il en va ainsi au Conserva-
Universelle Buly : le parfumeur vient juste d’ouvrir bouti-
que rue Bonaparte, à Paris. Là, elle « donne tout », devient
directeur commercial France en
2013. Suite à l’acquisition de
dente chargée du développement
des Amériques à Miami.
•Partners,
Cécile Bernheim, CEO de S2E
67 ans.
toire des Hémisphères. « On vous reçoit comme on rece-
vrait nos parents », insiste la jeune femme. A 33 ans, cette
vite le bras droit de Ramdane Touhami, qui a refondé
avec Victoire de Taillac une entreprise née en 1803. Elle
ParexGroup, il était devenu direc-
teur de la distribution de Sika EIGHT ADVISORY
•ex-président
Jean-René Buisson,
de Sopexa, 76 ans.
mère de deux jeunes enfants – leur papa, Charles Gilli- deviendra directrice de toutes les boutiques – une quin- France à partir de 2022. Etienne Chantrel •Jane
Kirsten Dunst, actrice, 42 ans.
bert, est un producteur de cinéma réputé – trace zaine – dans le monde. « On faisait tout sans compter nos rejoint ce cabinet de conseil • Gal Gadot,
Campion cinéaste, 70 ans.
depuis 2020 sa propre route du thé avec enthousiasme. heures, coller les étiquettes, faire entrer Buly dans les ALIAXIS financier, opérationnel et • António Guterres,
actrice, 39 ans.
Comme ses deux frères et sa sœur, elle est née à Paris
dans une famille où la créativité est presque un mode de
chambres du Crillon, ouvrir des magasins, des corners…
témoigne Alice Bureau. C’est une époque très fondatrice
Marilyn Gaillot Koubi
accède au poste nouvellement
stratégique, spécialisé dans
les opérations de transaction,
•général des Nations unies,
secrétaire
75 ans.
vie. « Chez moi, il fallait être dégourdie », se souvient-elle.
Le père est directeur artistique dans la publicité, la mère
où j’acquiers le sens du travail, ce qu’est un projet, la façon
de le porter, de le faire grandir. » Elle en partira avant la
créé de directrice écosystème
et stratégie durable, pour
de restructuration et de
transformation en tant
•duPaul Hermelin, président
conseil d’administration
a redonné un souffle de modernité à la vénérable Mai- reprise en 2021 par LVMH (actionnaire des « Echos »). la France, de ce spécialiste qu’associé chargé de Capgemini, 72 ans.
son Bosc qui, depuis 1845, habille toute la magistrature.
Peu adaptée au système scolaire, Alice Bureau ne
« Buly était devenu une grosse entreprise avec des process et
j’avais envie d’autre chose. J’avais juste la certitude qu’il y
des solutions dédiées
au transport de fluides.
de développer le département
economic and regulatory
•la Nicolas Hulot, ex-ministre de
Transition écologique, 69 ans.
cache pas une scolarité « chaotique » où elle passe
d’école en école, de pensions en boîtes à bac. « J’avais
aurait cette dimension de créativité qui m’habite et que
l’instinct et la curiosité me montreraient la voie ». Marilyn Gaillot Koubi, 44 ans,
advisory. •ex-président
Jean-Yves Le Gall,
du Cnes, 65 ans.
juste un objectif : avoir le bac, que j’obtiendrai ric-rac, pour
entrer dans une école de design et de mode, explique-t-
Et le thé dans tout ça ? Pendant son « joby moon », un
break de six mois, elle parcourt l’Asie qui l’a toujours
diplômée de l’EM Lyon Business
School, a officié durant plus de
Etienne Chantrel, 46 ans, ancien
élève de l’Ecole normale supé-
•deLaurent Plantier, fondateur
FrenchFoodCapital, 57 ans.
elle. La mode, son histoire et l’histoire en général m’ont
toujours fascinée, ma chambre d’ado était un véritable
passionnée, et en Birmanie, en y découvrant des planta-
tions de thé, elle a « un gros choc, un déclic ». « Pour moi,
onze ans au sein du groupe d’élec-
troménager, d’équipement médi-
rieure, diplômé de l’IEP de Paris et
de l’Ensae, docteur en économie, a
•deArnaud Robinet, président
la Fédération hospitalière
cabinet de curiosités, pleine de petits objets étranges, de le thé, c’était la Chine et le Japon, alors qu’il y en a dans le cal et d’éclairage Philips. Elle avait étudié l’économie à l’université de de France, 49 ans.
vieux papiers, de correspondances… » monde entier. J’ai multiplié les visites de plantations, puis
j’ai eu envie de partager mes découvertes, tous ces trésors
intégré Aliaxis France en 2021
pour y être directrice de l’activité
Chicago et à l’école d’économie de
Toulouse (TSE). Il a d’abord officié
•président
Alexis Roux de Bézieux,
de la Fédération
Un mémoire sur l’hyperréalisme peu communs. » grand public. dans le secteur public, devenant des épiciers, 50 ans.
Le bac en poche, elle entre à l’Istituto Marangoni, une Son projet, dit-elle, s’est écrit comme cela, sans le notamment conseiller chargé de • Travis Scott, rappeur, 33 ans.
école italienne de mode, d’art et de design. Et là, tout
change. A Paris, la première année, elle découvre toute
savoir, sans business plan, en dessinant ses boîtes, en
inventant un logo, la déco… Le rêve prendra forme
DOMUSVI
Marilyne Mesiano
la concurrence au cabinet du
ministre de l’Economie de 2014 à
•ralOlivier Sichel, directeur géné-
adjoint de la Caisse des Dépôts,
la richesse de cet univers. « C’est aussi la première fois où en 2020 et 2021, en plein Covid, avec un financement est nommée directrice générale 2016, puis chef du service des ex-PDG de Leguide.com, 57 ans.
j’ai de bonnes notes », sourit-elle. Puis direction Milan
pour deux ans où elle prend « une claque » devant l’archi-
familial et bancaire. Aujourd’hui, 45 thés d’origine et
65 thés parfumés dont elle écrit elle-même les recettes,
développement, immobilier
et nouveaux pays de ce groupe
concentrations à l’Autorité de la
concurrence entre 2017 et mars
•général
Damien Le Sueur, directeur
des champagnes
tecture de la ville, « s’éveille au design », fait un mémoire trônent dans les deux Conservatoires des Hémisphères de gestion d’Ehpad privés dernier. Taittinger, 49 ans.
sur l’hyperréalisme et un autre sur les « wunderkam- parisiens. Elle envisage déjà d’en ouvrir un troisième à et de maisons de retraites. • Lars von Trier cinéaste, 68 ans.
mer », ces… cabinets de curiosité ! « Les profs ont compris Paris avant de partir à l’international. Pourquoi pas au •duMichel Yahiel, président
que je n’étais pas dans la norme, mais ils m’ont laissé faire
et j’ai fini major de promo ! »
Japon. Ah, un détail prémonitoire. Elle n’a jamais bu
une seule goutte de café. Du thé et toujours du thé. n
Marilyne Mesiano, 44 ans, diplô-
mée de l’EM Lyon et de l’universi- , Envoyez vos nominations à
carnetlesechos@nomination.fr de l’ARPE, 67 ans.
conseil d’administration

actions actions actions

euronext hors srd Françaises euronext hors srd suite Françaises euronext hors srd suite Françaises taux marchés monétaires et eurodevises
marchés monétaires
29-04-2024 jour 1 mois 3 mois 6 mois 1 an
isin valeur ouv +ht +bs clôt écart vol isin valeur ouv +ht +bs clôt écart vol isin valeur ouv +ht +bs clôt écart vol
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ecarts de tauX avec l’allemaGne
Fr0013185857 abeo g C 11 11 10,75 11 1003 Fr0012612646 Groupe partouche B 19,9 19,9 19,8 19,9 + 0,25 2601 Fr00140006o9 solocal Group B 0,048 0,05 0,048 0,048+ 0,21 443396 29-04-2024 6 mois 2 ans 5 ans 7 ans 10 ans
Fr0012616852 abionyX pharma g B 1 1,028 1 1,022 - 0,2 15397 Fr0010214064 Groupe piZZorno C 71,4 71,4 69 71,4 + 2 731 Fr0011289040 sqli g C 42,8 43 42,6 43 + 0,94 401 allemaGne 98,35 3,05 2,56 2,55 2,58
Fr0000063034 abl diaGnostics C 3,06 3,06 3,06 3,06 740 Fr0004155000 Groupe sFpi g C 1,895 1,91 1,895 1,905 + 0,53 108353 Fr0004188670 tarkett G B 9,06 9,24 8,96 9,12 + 0,89 3014 portuGal 0 -0,01 0,17 0,29 0,56
Fr0000064602 acanthe dev. C 0,399 0,399 0,385 0,385 - 3,51 9574 Fr0000066722 Guillemot g C 5,5 5,56 5,44 5,52 12953 Fr001400bmh7 teract B 0,77 0,774 0,77 0,772 - 0,52 5511 France -0,06 0,09 0,36 0,37 0,53
Fr0000076861 acteos g C 1,34 1,34 1,3 1,3 - 3,7 1329 Fr0000066755 haulotte Group g B 2,11 2,12 2,09 2,1 - 0,94 23974 Fr0000033003 touaX g C 4,85 4,85 4,82 4,85 778 espaGne 0,11 0,38 0,52 0,60 0,80
Fr0012821890 aduX g C 1,24 1,25 1,185 1,25 + 0,81 4383 Fr0000054231 hiGh co. g C 3,18 3,19 3,15 3,15 - 0,63 15236 Fr0000036816 tour eiFFel g B 10 10,1 10 10,1 +1 866
italie -0,03 0,39 3,39 1,03 1,30
Fr0013333077 aFFluent medical B 1,72 1,74 1,72 1,72 - 0,58 2810 Fr0012821916 hipay Group g C 8,2 8,2 8,1 8,2 + 0,24 1246 Fr0000035784 transit.everGreen G C 1,95 2 1,88 1,9 - 2,56 11688
Fr0000062465 alan allman C 8,6 8,9 8,5 8,5 - 3,41 2535 Fr0000065278 hopscotch Groupe g 22 22,1 20,7 21,3 - 3,18 1776 Fr0000074197 union tech.inFor. g C 0,52 0,52 0,505 0,52 - 0,95 280
Fr0012185536 artea C 13,1 13,2 13,1 13,1 + 1,55 637 Fr0014003vy4 hydroGÞne France G B 6,8 6,82 6,64 6,67 + 0,6 2052 Fr0000050049 viel et cie C 10,35 10,35 9,94 10,05 - 2,43 7115 certificat/fonds investir 10
Fr0011992700 ateme g B 6,02 6,08 6 6 - 0,66 6100 Fr0000051393 idi B 75 75 74,4 75 + 0,27 432 Fr0000062796 vranken - pommery C 15,3 15,45 15,05 15,15 - 1,3 2373
valeur isin clôt % var.
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122
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1101222
199
29-04-2024 cours
var.
veille
var.
année sicav/fcp
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Fr001400ayG6 deeZer 2 1,9 1,94 1,89 1,92 + 1,59 2891 Fr0004038263 parrot B 2,24 2,38 2,2 2,2 11597 DOLLAR HONG-KONG 8,3885 0,23 -2,83 Genève (France) SA
Fr0000062978 dekuple g C 37,8 39 37,6 39 + 6,56 3580 Fr0000038465 passat g C 6,1 6,2 5,9 6,05 - 0,82 9373 WON SUD COREEN 1473,91 -0,06 3,16 Tél. 04 72 07 31 50
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Fr0013030152 Francaise enerGie g C 33,8 34 33 33 - 2,08 12470 Fr0000054199 s.t. dupont C 0,06 0,06 0,056 0,058 - 1,03 10228 PESO PHILIPPIN 61,8233 0,26 1,04 LU1626130816 silk road Zone stocks a 118,33 26/04
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@Valeur unitaire hors frais : valeur de la part ou de l’action hors droits d’entrée ou de sortie éventuels. Les SICAV éligibles au PEA sont signalées par un astérisque *. Le pictogramme P indique la cotation d’un FCP. Classification des OPCVM : actions françaises (AF), actions de la zone EURO (AE), actions internationales (AI), monétaires EURO (ME), monétaires à
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Jean-Marc Vittori, DES DONNÉES PERSONNELLES un 3e cahier supplément
10, boulevard de Grenelle, CS10817, 75738 Paris Cedex 15 Arnaud Le Gal (Les Echos Entrepreneurs Laurent Flallo, Sylvie Ramadier Xavier Genovesi de 6 pages
Tél. : 01 87 39 70 00. www.lesechos.fr et opérations spéciales) (Le Crible) dpo@lesechosleparisien.fr «Les Echos Entrepreneurs»

ENTREPRENEUR S
ENJEUX De plus en plus de femmes se lancent dans la création ou la reprise d’une société. Mais du fait des stéréotypes de genre
et de plus grandes difficultés à obtenir des financements, elles ne jouent toujours pas à armes égales avec leurs homologues masculins.
Créatrices et repreneuses d’entreprise
sont encore loin de la parité
Mathilde Riaud
nfant, elle se rêvait pharma-
E cienne ou fleuriste. En fon-
dant D-Lab Nutricosmetics,
en 2010, une marque de complé-
ments alimentaires naturels pour la
beauté et le bien-être, Fleur Pheli-
peau est devenue un peu des deux.
« Quand je me suis lancée, en sortant
d’HEC, je n’assurais que la conception
des produits, raconte-t-elle. Désor-
mais, je gère aussi leur fabrication. »
En 2022, elle ajoute une troi-
sième corde à son arc : industrielle.
D-Lab Nutricosmetics a ouvert sa
propre usine de production à
Saint-Bonnet-de-Rochefort, près
de Vichy. Un pari audacieux.
« L’industrie est un terrain de jeu
encore très peu investi par les fem-
mes, souligne-t-elle. Mais j’ai adoré
m’y frotter… Justement parce qu’on
ne m’y attendait pas. »
L’entrepreneuriat féminin conti-
nue sa progression. Le baromètre
2024 d’Infogreffe le confirme : sur
les 613.320 entreprises immatricu-
lées au registre du commerce et
des sociétés en 2023, 33,1 % ont été
créées par des femmes. A titre de
comparaison, ce chiffre n’était que
de 27,3 % en 2018.
Plombières, carreleuses…
Malgré cette amélioration, on est
encore loin de la parité. Un long
chemin reste à parcourir. La faute
notamment au poids persistant des
stéréotypes de genre. « Quand je
parlais de mon projet d’usine à mon
entourage, une question revenait
sans cesse : mais qui va la diriger ? »,
raconte Fleur Phelipeau, dépitée.
Ces clichés poussent les entre-
preneures à se tourner principale-
ment vers des activités « fémini-
Stéphanie Lévêque promeut les femmes
dans le secteur du bâtiment
La présidente du groupe
Beyer a repris les rênes
de l’affaire familiale à
partir de 2013. Elle tente
aujourd’hui d’encourager
l’embauche et l’évolution de
professionnelles, même si
les postulantes sont rares.
Bénédicte Weiss
— Correspondante à Strasbourg
Stéphanie Lévêque est l’une des
rares présidentes d’entreprise du
bâtiment. Elle dirige le groupe
Beyer, spécialisé dans le sanitaire et
la couverture, avec neuf filiales et
39 millions d’euros de chiffre
d’affaires. Dans ce secteur où les
entreprises ne sont pas toujours
capables de fournir un index éga-
lité, tant la présence des femmes
peut y être dérisoire, la dirigeante
tente de faire avancer la gent fémi-
nine. « J’ai été très heureuse de nom-
mer, fin 2023, une femme à la tête
d’une des filiales de mon groupe. »
Chez Beyer, basé à Brumath (Bas-
Rhin), environ 200 des 260 salariés
Les entrepreneuses font face à de nombreuses difficultés épargnées aux hommes. Photo Getty Images
nes » : l’habillement, le social et la
santé. En revanche, les domaines
réputés plus techniques, comme
l’installation et la réparation de
machines, l’industrie ou encore la
construction attirent peu de candi-
dates. Les femmes ne représentent
toujours que 4 % des artisans dans
les métiers du second œuvre dans
le bâtiment.
C’est pour instiller plus de mixité
dans le BTP que Karine Santamaria
et Emmanuelle Taulet ont créé, en
octobre 2021, Batifemmes. Cette
plateforme met en relation des
clients avec des plombières, des car-
travaillent sur des chantiers, et c’est
là que les femmes sont les plus
rares. « Leur part chez nous est
pathétique, je ne peux pas la publier »,
regrette Stéphanie Lévêque. La
faute, selon elle, à l’absence de pos-
tulantes pour les métiers techni-
ques, difficiles et « mal vendus ».
Alors, c’est au sein des bureaux
qu’elle œuvre. « J’ai insisté pour que
notre nouvelle directrice prenne le
poste, elle avait toutes les compéten-
ces mais pas le courage de le faire.
J’observe que les femmes ont davan-
tage besoin d’être poussées. Si je ne
prends pas l’initiative de les chercher,
nous passons à côté de pépites. »
Remise en danger
Stéphanie Lévêque a elle-même été
poussée par son père, Georges
Beyer. Fin 2012, celui-ci, alors âgé de
57 ans – elle en avait 29 –, l’informe
vouloir lui laisser la main sans tar-
der pour profiter de sa retraite. Mais
cela suppose de revenir en Alsace,
en laissant son poste de cheffe de
produit et acheteuse de lingerie et de
maillots de bain aux 3 Suisses,
releuses, des plâtrières et autres
menuisières dans toute la France.
Pour obtenir les coordonnées d’une
des 130 professionnelles du réseau,
il suffit de s’acquitter d’une cotisa-
tion de 20 euros, et le tour est joué.
Les artisanes, de leur côté, ont le
choix entre deux formules d’abon-
nement : une freemium qui leur
permet d’être référencées et de rece-
voir les demandes de devis, l’autre
premium avec une page vitrine et
l’accès à un groupe d’entraide privé
sur WhatsApp. « Aucune commis-
sion n’est prélevée sur les travaux,
explique Emmanuelle Taulet. Notre
qu’elle occupe depuis cinq ans à Lille
(Nord). Un secteur qui la « fait rêver ».
« Cela impliquait de me remettre
en danger », souligne celle qui
rejoint finalement le groupe fami-
lial, créé par son grand-père
en 1948. Elle le fera en 2013, en tant
que directrice générale. Stéphanie
Lévêque occupera en fait plusieurs
postes au fil du temps, en remplace-
ment de congés maladie ou mater-
nité, pour appréhender les diffé-
rents métiers du groupe. Et ce n’est
qu’en 2019 qu’elle succédera pleine-
ment à son père, en reprenant
l’intégralité des parts de la société.
« J’étais la troisième génération,
celle dont le cliché veut qu’elle envoie
tout en l’air », ironise-t-elle. Dans le
monde de l’entreprise, on entend
souvent cette idée reçue selon
laquelle la première génération
crée, la deuxième développe et la
troisième dilapide. « Etre la fille de
mon père, qui était une figure respec-
tée et accomplie dans son domaine,
faisait peser sur moi de fortes atten-
tes. Plus spécifiquement en tant que
femme dans un secteur du bâtiment
ambition étant d’aider ces femmes à
pérenniser leur activité, il était hors
de question de les obliger à rogner sur
leurs marges. » Le parcours finan-
cier des entrepreneures est déjà suf-
fisamment semé d’embûches…
Selon une étude publiée en 2022
par l’Association pour le droit à l’ini-
tiative économique (Adie), les chef-
fes d’entreprise présentent des
plans de financement plus modes-
tes que les hommes, et les montants
qui leur sont prêtés sont inférieurs
de 33 % à ceux accordés à leurs
homologues masculins. Comment
expliquer une telle disparité ? 25 %
Stéphanie Lévêque préside depuis 2019 le groupe familial Beyer,
créé par son grand-père en 1948. Photo Benjamin Hincker
où elles sont peu nombreuses, qui
plus est à des postes de direction. »
Le passage de témoin s’est fait
sans heurt, grâce à l’accompagne-
ment réalisé par son père les pre-
mières années, et à un effet de géné-
ration. Elle observe, en effet, l’arrivée
de responsables plus jeunes, plus
Mardi 30 avril 2024 Les Echos
des entrepreneures estiment avoir
sous-évalué leur demande et 26 %
considèrent avoir obtenu un prêt
inférieur à leur souhait.
Des start-up
très masculines
Les représentantes de la French
Tech ne sont pas mieux loties.
Solenne Bocquillon-Le Goaziou en
a fait l’expérience. « Quand j’ai
essayé de lever des fonds pour la pre-
mière fois, en 2022, les investisseurs
ont avancé que le BtoC cramait trop
de cash pour qu’ils acceptent de me
suivre », raconte la présidente fon-
ouverts, acceptant « plus facilement »
les femmes dirigeantes. Y compris
au sein de la clientèle, et même chez
ses concurrents. En 2020, elle
devient ainsi administratrice du
Gesec, un réseau de 440 PME de son
secteur d’activité – seule femme
entourée de huit hommes.
32
datrice de Soft Kids, une application
qui vise à augmenter les chances de
réussite des enfants en développant
leurs compétences sociocomporte-
mentales.
Après avoir gagné un appel à
manifestation d’intérêt avec l’Edu-
cation nationale, elle se pensait
parée. Mais non. « On m’a sorti que
travailler avec l’Etat était trop com-
pliqué », peste Solenne Bocquillon-
Le Goaziou. Son cas est loin d’être
isolé. D’après le baromètre Sista-
BCG publié en mars 2023, 86 % du
montant total levé par des start-up
en 2022 était encore capté par des
équipes 100 % masculines, contre
seulement 2 % pour les équipes
100 % féminines. Résultat ? « Les
femmes ne peuvent compter que sur
leur croissance organique, ce qui est
beaucoup plus long », regrette la
sociologue Séverine Le Loarne,
chercheure à Grenoble Ecole de
management.
Pour lutter contre ces inégalités,
plusieurs investisseurs se sont
engagés en 2019 à financer 25 % de
start-up fondées ou cofondées par
des femmes d’ici à 2025. Mais pour
Solenne Bocquillon-Le Goaziou, il
faut aller plus loin. « Aujourd’hui, on
ne compte que 12 % de femmes parmi
les business angels en France, rappel-
le-t-elle. Si on veut développer l’entre-
preneuriat féminin, il faut introduire
plus de diversité dans l’écosystème.
Parce qu’on investit d’abord dans les
univers qu’on connaît. »
a
Portraits, coaching, rôle modè-
les… pour ne rien rater de l’actu
des entrepreneures, abonnez-
vous à notre newsletter men-
suelle Toujours plus haut.
En interne, il s’est aussi agi
d’insuffler une nouvelle vision de
l’entreprise. Femme, mais aussi
mère et souhaitant préserver un
équilibre entre vies personnelle et
professionnelle, elle n’est guère
encline à donner suite à des coups
de fil le week-end.
Equilibre entre pro et perso
« Sous le management paternaliste
de mon père, il était valorisant pour
les salariés de travailler le samedi. Or,
pour moi, s’ils devaient travailler le
samedi et m’appelaient, c’est qu’il y
avait un souci et je les invitais à en dis-
cuter le lundi pour trouver une solu-
tion », relate-t-elle.
Stéphanie Lévêque assure vou-
loir des politiques de ressources
humaines « plus modernes », sans
pointage des salariés en télétravail
par exemple. Mais aussi en pous-
sant ses collaborateurs devenant
pères à prendre intégralement leur
congé paternité. Une affaire loin
d’être gagnée, selon elle : « Ils ont
encore l’idée que ce serait mal vu par
leur entourage… » n
33 Les Echos Mardi 30 avril 2024 ENTREPRENEURES

La cheffe Manon Fleury défend la place « Libérer la parole

des femmes dans la gastronomie des femmes »
Dans son restaurant Datil,
la jeune cheffe a choisi de
promouvoir des consœurs
aux postes à responsabili-
tés. Celle qui vient de
décrocher sa première
« Les femmes
représentent
50 % des effectifs
dans les écoles
Coralie Franiatte a cofondé
l’entreprise Bejoue, qui édite
le jeu « Les Mille Pas ».
L’objectif est de sensibiliser
les entreprises aux obstacles
rencontrés par les femmes
CORALIE FRANIATTE
Créatrice du jeu
« Les Mille Pas »

étoile au Michelin est hôtelières, mais durant leur carrière. Le jeu ne peut pas être jeté com-
engagée depuis longtemps me ça dans la nature. Il y a une façon
dans la lutte pour l’égalité
on ne les retrouve Vous avez créé « Les Mille Pas » de l’animer. Nous proposons donc
femmes-hommes. pas aux postes autour des inégalités profes- deux formules aux entreprises :
Mathilde Riaud
à responsabilité. sionnelles femmes-hommes. elles peuvent soit nous mandater
Pourquoi ? » Quel en est le principe ? pour organiser une partie dans
Avec ce jeu, nous voulions montrer leurs locaux, soit acheter le jeu et
e Guide Michelin avait mis MANON FLEURY que les femmes sont exposées à plein former des salariés en interne à son

L les petits plats dans les

grands. Ce 18 mars 2024,
tout le gratin de la gastronomie
française était réuni au Palais des
Congrès de Tours pour la tradi-
tionnelle cérémonie de remise des
étoiles. Dans ce millésime 2024,
62 nouveaux restaurants faisaient
leur entrée. Du jamais-vu ! Seule
ombre au tableau ? Seulement six
femmes aux fourneaux.
Parmi elles, Manon Fleury,
32 ans, et son associée Laurène
Barjhoux, à la tête du restaurant
Datil, inauguré en septem-
bre 2023 à Paris. « Cette étoile
récompense tout le travail effectué
par notre équipe depuis six mois, se
réjouit la cheffe et ancienne
championne de France d’escrime.
J’espère que cela va donner envie à
d’autres jeunes femmes de prendre
leur part dans la gastronomie. »
Cinq femmes en cuisine
Les chiffres sont édifiants.
D’après le portrait des métiers
publié en 2019 par la Direction de
l’animation de la recherche, des
études et des statistiques (Dares),
la France compte 33.500 chefs
cuisiniers. Parmi eux, seulement
Manon Fleury, cheffe du Datil, à Paris. Photo Pauline Gouablin/Datil
370 femmes, alors qu’elles repré-
sentent 35 % des employés dans
les métiers de la cuisine !
Une injustice que la cheffe
Manon Fleury s’emploie à com-
battre dans son restaurant. A
rebours des brigades à l’ancienne,
elle y partage ses fourneaux avec
sa complice, Laurène Barjhoux,
et trois autres sous-cheffes.
« Dans le milieu, ça se sait qu’on
défend la place des femmes en cui-
sine », assure-t-elle. En 2020, elle a
notamment cofondé l’association
Bondir.e avec une vingtaine
d’autres cheffes pour sensibiliser
les jeunes dans les écoles hôteliè-
res aux violences en cuisine.
Quand Manon Fleury a cherché
à recruter, elle a donc reçu beau-
coup de CV de femmes, avec qui
elle avait, pour certaines, déjà tra-
vaillé. Un gage de confiance. La
cheffe insiste : elle n’exclut absolu-
ment pas les hommes. « On essaie
juste de faire en sorte que les choses
bougent. Aujourd’hui, les femmes
représentent environ 50 % des effec-
tifs dans les écoles hôtelières, mais à
la sortie, on ne les retrouve pas aux
postes à responsabilité. Pourquoi ? »
Tyrannie
Les réponses fusent : « On ne leur
donne pas assez confiance. Et on
les oblige souvent à choisir entre
leur carrière et leur vie personnelle.
En mettant en avant des femmes
talentueuses et expérimentées
dans nos cuisines, on voulait mon-
trer qu’il est possible d’avoir une
carrière dans ce métier. Mais on
n’est pas des révolutionnaires non
plus. L’émission culinaire “Top
Chef” a fait de gros efforts ces der-
nières années pour proposer un
jury paritaire. Ça aide à faire bou-
ger les représentations. »
Cheffe du restaurant le Datil
Manon Fleury promeut aussi
un management sain et bien-
veillant. « Longtemps, on a consi-
déré que les comportements tyran-
niques faisaient partie de l’ex -
cellence, regrette-t-elle. Mais on
peut très bien être à la fois exigeant
et correct avec ses équipes. » Pour
garantir une bonne ambiance de
travail, la cheffe a mis en place un
guide de bonne conduite à desti-
nation de son personnel.
Lutte antidiscrimination, pré-
vention contre le harcèlement
sexuel… Le document dresse une
liste de recommandations, inspi-
rées par le travail de l’association
Bondir.e. « La lutte contre le
sexisme ordinaire est un gros chan-
tier. Beaucoup de clichés persistent.
On croit notamment que les fem-
mes ne peuvent pas tenir un restau-
rant parce qu’elles ne sont pas
capables de porter des charges lour-
des. Le fait d’avoir une équipe majo-
ritairement féminine nous rend
plus fortes et plus légitimes. » n
d’obstacles tout au long de leur car-
rière : maternité, argent, sexisme…
Pour cela, nous avons repris la méca-
nique du « Mille Bornes ». Chaque
joueur incarne une femme, et doit,
pour gagner, réaliser 1.000 pas qui
symbolisent une carrière profession-
nelle. Mais selon les cartes, cette
femme sera tantôt freinée dans son
parcours, tantôt accélérée.
Pour renforcer la dimension péda-
gogique et rendre le propos incontes-
table, chaque carte est agrémentée de
données d’études et de paroles de fem-
mes piochées parmi les 700 témoi-
gnages que nous avons recueillis en
amont, durant la phase de concep-
tion. Celui qui m’a le plus marqué ?
« Mon plus grand frein, c’est moi. »
Quel est l’intérêt de ce jeu
en entreprise ?
Le jeu est un moyen d’aborder les iné-
galités hommes-femmes de manière
beaucoup plus détendue. Il aide les
femmes à libérer la parole et les hom-
mes à se mettre à leur place. Etre
freiné pendant trois tours parce que
vous avez été évincé d’un processus
de recrutement est beaucoup plus
efficace en termes d’impact que de
lire des données froides.
animation. On les appelle les
ambassadeurs. On en compte plus
d’une centaine aujourd’hui.
Quand on anime un atelier dans
une entreprise, on propose tou-
jours une phase d’idéation derrière,
qui permet aux collaborateurs de
chercher des pistes de solution. Cer-
taines sont faciles à mettre en place,
d’autres plus longues. L’essentiel est
de pousser à l’action.
Avez-vous vous-même
rencontré beaucoup de freins
durant votre carrière ?
J’en ai rencontré certains, évité
d’autres. J’ai notamment choisi de
ne pas travailler dans des groupes
pour ne pas avoir à jouer des coudes
pour gravir les échelons. Mais j’ai eu
une grande chance : mon éduca-
tion. Mes parents m’ont toujours
dit : si tu veux, tu peux. Ça m’a beau-
coup aidée. Avoir un père expert-
comptable aussi. Certaines cheffes
d’entreprise sont parfois freinées
par le fait de monter leur structure.
Ayant vu mon père monter son
cabinet et accompagner des entre-
preneurs toute sa vie, ça n’a pas été
un obstacle pour moi.
— Propos recueillis par M. R.

COMMUNIQUÉ

Entrepreneuriat au féminin :
une identité singulière ©Getty Images

Depuis 2021, la France enregistre une hausse significative du nombre de créations
d’entreprises par les femmes1. Un entrepreneuriat au féminin qui se distingue par
son potentiel d’innovation, de résilience et de succès. Pourtant, certaines idées
reçues persistent : il est temps de les déconstruire.
" Les femmes sont détentrices de
seulement 12 % des PME-ETI de plus de
10 salariés2. ! C’est vrai, mais…
Ce chifre devrait progresser grâce au renou-
vellement générationnel des dirigeants. Une
voie royale s’ouvre pour les femmes dans la
reprise de PME-ETI, ofrant une opportunité de
briser le plafond de verre2.
Certaines dirigeantes sont en efet ralenties
dans leur développement par des biais tenaces
(comme le syndrome de l’imposteur)2. Mais
elles sont aussi de plus en plus nombreuses à
oser se lancer (voir notre dossier spécial L’En-
trepreneuriat se conjugue au féminin pluriel
dans les Échos Week-end).
" En créant Too Good To Go,
je ne savais pas ce qui m’attendait.
J’ai avancé pas à pas sans me poser
trop de questions ! !
" Il est très difficile pour une
femme de lever des fonds3. !
Encore vrai, mais :
Les femmes ne plébiscitent pas nécessaire-
ment ce mode de financement. 69 % d’entre
elles n’ont jamais envisagé d’intégrer un fonds
d’investissement2, craignant notamment de
perdre leur autonomie décisionnelle1.
Aujourd’hui, à l’exemple de SISTA, des fonds
spécialisés et de nombreux réseaux sou-
tiennent les entrepreneuses afin d’accroître
leurs chances de succès.
" Depuis le lancement de son
programme dédié à la levée
de fonds, SISTA a accompagné
120 (co)fondatrices de startups
qui ont levé 240 millions d’euros. !
Tatiana JAMA, cofondatrice de SISTA.
" Les femmes auraient moins le goût " Les femmes sont exclues de certains
du risque que les hommes2. ! secteurs, comme la Tech, le BTP, etc. !
C’est faux, même si elles restent sous-
Mais de quel risque parle-t-on ?
représentées dans certains.
Si les femmes prennent moins de risques « fi-
nanciers » que les hommes, ce n’est pas par Depuis 2020, une révolution silencieuse s’opère :
frilosité, mais parce qu’elles n’en ressentent les femmes fondent plus de startups que les
pas le besoin : 77 % d’entre elles privilégient la hommes1. Elles marquent en outre leur présence
rentabilité et la recherche d’impact sociétal à dans l’industrie, le BTP et le transport 2.
la croissance2. Il existe actuellement des réseaux et pro-
82 % des dirigeants et 68 % des dirigeantes re- grammes d’accompagnement comme Cap
jettent cette airmation2, et pour cause : est-ce Créa ou Action’elles, destinés à permettre aux
que se lancer dans certains secteurs à impact femmes, peu importe leur idée, leur profil et leur
où tout reste à imaginer n’est pas aussi un cheminement, de trouver les clés pour mener à
risque ? bien leur projet.
" Je ne souhaitais pas devenir " De nombreuses femmes ont
entrepreneuse et je n’avais aucun des succès incroyables dans
des secteurs très complexes
bagage. Mais après la sécheresse
de 2016, j’ai eu envie d’agir. ! et techniques. !
Julie DAVIO-PAHIN, cofondatrice d’Ombrea. Amélie GUICHENEY, cofondatrice de Gaya.
L’aventure entrepreneuriale féminine est riche en défis mais également en promesses.
L’intérêt des femmes pour les projets porteurs de sens, associé à leur vision de la performance
(entre efficacité et rentabilité), augurent de la transformation du paysage entrepreneurial.
L’avènement de tels modèles " coïncide plus facilement avec les objectifs d’une croissance
durable et qualitative2 !.

Lucie BASCH, cofondatrice de Too Good To Go.

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59%
des femmes âgées
22,7%
c’est la progression en cinq
30%
des CEOs ou cofondateurs.rices
sur le plan Toutes et Tous égaux sur : sur l’entrepreneuriat féminin de 20 à 29 ans aspirent ans de la création d’entre- de la promotion 2023 du
toutesettousegaux.gouv.fr en France. à devenir entrepreneuses.4 prises par des femmes.5 programme French Tech 2030
étaient des femmes.6
Sources : 1. Willa x Roland Berger x France Digitale, Le gender gap dans l’entrepreneuriat, janv. 2024. - 2. Bpifrance, Dirigeantes et dirigeants de PME-ETI : quelles diférences ? déc. 2022. - 3. Sista, Women-led startups losing across the board, juin 2023. - 4. Baromètre Bold 2023
de l’entrepreneuriat féminin par Veuve Clicquot. - 5. Infogrefe. - 6. Mission French Tech.
 Mardi 30 avril 2024 Les Echos 34

= Les chiffres de l’économie

// Budget de l’Etat 2024 : 511,6 milliards d’euros (prévisions PLF 2024) // PIB 2023 : 2.818,1 milliards d’euros (prévisions
PLF2024) // Plafond Sécurité sociale : 3.864 euros/mois à partir du 01-01-2024 // SMIC horaire : 11,65 euros (brut par heure)
à partir du 01-01-2024 // Capitalisation boursière de Paris : 2.416,97 milliards d’euros (au 08-01-2024)
// Indice des prix (base 100 en 2015) : 118,23 au 16-12-2023 // Taux de chômage (BIT) : 7,4 % au 3e trimestre 2023
Retrouvez-nous sur www.lesechos.fr // Dette publique : 3.088,2 milliards d’euros (3e trimestre 2023)

crible
Les ronds et la ligne droite
L’un des moteurs de la consommation aux Etats-Unis va perdre de sa puissance. Mission critique
Les experts de Bank of America rejettent la thèse de la stagflation après la double
mauvaise surprise sur le PIB et les prix à la consommation. L’Etat a attendu la dernière minute pour
entrer en scène chez Atos. Il est candidat
L’impression que la politique à la reprise d’une grande partie de BDS.
monétaire américaine tourne en
rond n’en est pas une. Des six à sept
baisses de taux d’intérêt escomp-
tés aux Etats-Unis en début
d’année, il en reste à peine plus
d’une. Comme le souligne Oddo
BHF, les prix à la consommation
de l’indice CPI ont surpris à la
hausse trois fois de suite, et le mou-
vement de désinflation n’a plus fait
de progrès depuis l’automne. La
déception sur le PIB et la réaccélé-
ration de l’inflation en mars ont
fait resurgir le spectre d’une « stag-
flation ». A tort, estime Bank of
America. Certes, ses experts
notent la résilience de la consom-
mation, soutenue par un taux
d’épargne en chute libre. Mais le
surplus de 600 milliards de dollars
du bas de laine des ménages
devrait s’épuiser avant la fin de
l’année. Ce qui enlèverait un
moteur à la hausse des étiquettes.

Une belle inspiration

La famille Agnelli est la grande gagnante de
la victoire juridique de Philips aux Etats-Unis.
Et à la fin, ce sont Thales et Dassault Aviation qui gagnent ? Le tournant
Rarement un « ouf » de soulagement aura été aussi sonore en Bourse, inattendu d’une intervention plus massive de l’Etat dans le sauvetage
mais ce n’est finalement pas étonnant s’agissant d’une affaire à couper le d’Atos fait prendre toute la mesure des deux dernières années passées
souffle. L’accord amiable à 1,1 milliard de dollars conclu aux Etats-Unis à chercher, en vain, une solution alternative à la cession de sa pépite
par Philips pour clore 58.000 plaintes d’utilisateurs de ses respirateurs de cybersécurité et de « big data » (BDS) pour renflouer la totalité
médicaux défectueux a provoqué un appel d’air jusqu’à 9 fois plus du prestataire d’infogérance. Un temps perdu pendant lequel
important sur sa capitalisation (+ 47 % pour le titre au plus haut 1,3 milliard d’euros de cash a été brûlé, la totalité des 4,4 milliards
de la séance de lundi) avant que les investisseurs ne reprennent haleine de fonds propres se sont évaporés et un tiers environ
sur 5,25 milliards d’euros de valeur créée en clôture (+ 29,35 %). de la valorisation de BDS s’est envolé.
Il y a de quoi. Le néerlandais, qui fait toujours l’objet d’une enquête Il est donc bien difficile à rattraper, même si le gouvernement,
criminelle, referme le dossier des dommages individuels outre-Atlantique après avoir laissé s’envenimer la situation d’un opérateur stratégique
avec au moins six mois d’avance et pour une facture du tiers de celle pour la défense et le nucléaire civil, lui tend une main relativement
initialement estimée par la communauté financière (entre 2 et 4,5 milliards généreuse pour la reprise des deux tiers de BDS. A 850 millions
de dollars selon Bloomberg Intelligence). Le rebond de l’action a amplifié (dette incluse) en milieu de fourchette, il met sur la table environ
de plus de deux fois et demie la valeur de l’accord estimée par ING, le signe la moitié de la valorisation proposée par Airbus pour des activités
d’un retour de confiance qui valide le pari à 2,76 milliards d’euros d’Exor. réalisant moins de 50 % du résultat opérationnel, estime l’analyste
Le holding de la famille Agnelli se montre a posteriori bien inspiré d’Oddo BHF. Si l’offre n’est pas ferme, cette condition laisse aussi
d’être devenu, en août dernier, le premier actionnaire de Philips. la porte ouverte à Dassault et Thales, qui se font désirer pour
La bonne nouvelle lui procure une plus-value latente instantanée cette mission critique, comme aux autres candidats. L’Etat
de près de 800 millions d’euros sur sa participation de 15 %. étant rarement bon camarade actionnaire, tous se souviendront
Un appel d’air bienvenu pour sa propre décote boursière. du proverbe : « ami au prendre, ennemi au rendre ».

La Bourse de Paris repart en baisse

EN VUE

Jean Bassères
l c r oya i t avo i r t o u t c o n n u e n ne porte pas dans son cœur. Excédé par

I douze ans à la tête de Pôle emploi.

L’ i n d i c e C AC 4 0 a e n t a m é l a
semaine dans le rouge, avec une
baisse de 0,29 % à 8.065,15 points.
L’indice parisien s’oriente vers son
premier mois de recul de l’année
en avril. Il a décroché de 1,71 %
depuis son record historique à
8.205 points, établi lors de la der-
nière séance du mois dernier, le
28 mars. Il reste toutefois en hausse
de 6,92 % depuis le début de l’année.
Les investisseurs sont nerveux
avant la réunion de politique
m o n é tai r e d e l a Fe d, d ont l a
conclusion est attendue mercredi.
Les marchés européens seront fer-
més à l’occasion du 1er Mai, mais
Wall Street restera ouvert. Ailleurs
en Europe, le DAX allemand a
reculé de 0,24 %, tandis que le
FTSE londonien a grappillé 0,09 %
pour terminer à un nouveau plus
haut historique.
Du côté des valeurs, le spécialiste
des laboratoires d’analyses Euro-
fins Scientific a terminé en tête
de l’indice parisien avec un bond
de 3,64 %. Il avait chuté de 4,84 % la
semaine dernière, et reste en recul
de 0,47 % depuis le début de l’année.
Michelin signe la deuxième plus
forte hausse de l’indice (+1,97 %),
devant Renault (+1,89 %).
A l’autre extrémité du classe-
ment, Hermès enregistre la plus
forte baisse du CAC 40, en recul de
2,21 %, derrière Safran (–1,77 %) et
LVMH (–1,64 %).
Les polémiques stériles sur le flicage
des chômeurs, la pression du politique
pour inverser la courbe, jusqu’au trau-
matisme de l’assassinat d’une directrice
d’agence. C’était sans compter sur la
malédiction Sciences Po. Chargé de
ramener le calme après l’occupation
de l’amphi « Gaza-Boutmy » en mars,
l’administrateur provisoire voit la tem-
pête se déchaîner, dans une rue Saint-
Guillaume transformée en annexe de
LFI. Pas vraiment sa gauche à lui, ancien
des cabinets Sapin (1992) et Fabius
(2000), tendance libérale respectueuse
de l’autorité de l’Etat. Marqué à la culotte
par un Gabriel Attal qui ne veut pas voir
« le poisson pourrir par la tête », à savoir
un embrasement de toutes les facs, cet
inspecteur des finances déteste qu’on
parle de lui. C’est raté. « Vous voulez faire
un portrait de moi ? Ça n’a aucun inté-
rêt », réplique-t-il aux journalistes, qu’il
le « Pôle emploi bashing », il n’hésite pas
pendant la crise du Covid à se fendre
d’une lettre ouverte au vitriol après la
diffusion d’un « Envoyé spécial » (très)
à charge. Le natif de Perpignan parle
cash, y compris à sa tutelle quand on lui
confie une mission sur la nouvelle ENA,
en prônant la fin du sacro-saint classe-
ment de sortie.
La sienne – de la pétaudière de
Sciences Po – s’annonce compliquée. La
feuille de route de sa tutelle est un peu
difficile à suivre : le débat oui, le blocage
non, les sanctions… ça dépend. S’y
ajoute maintenant la gestion des états
d’âme de ses financeurs, furieux de la
dérive de la fabrique à élites. Au moins
est-il sûr de ne pas occuper durable-
ment le bureau de ses prédécesseurs
Richard Descoings, Frédéric Mion et
Mathias Vicherat : il ne peut participer
à l’appel à candidatures devant être
publié jeudi. Vivement la quille !