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par Jacques DERRIEN
Professeur à l’Université Aix-Marseille II, Faculté des Sciences de Luminy
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, 2 d 2ψ (x )
- = E ψ (x)
– ------------ ----------------------- (5)
2m dx 2
Figure 5 – Courbes de dispersion E (kx )
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2.1.4.2 Cas d’un électron dans un cristal Les valeurs permises de kx sont maintenant quantifiées. Elles sont
cependant très nombreuses et leur intervalle ∆ kx = 2π /L est très petit
Cette situation peut s’illustrer de la façon suivante. Prenons
pour un cristal macroscopique ( L a ) . Par conséquent, les valeurs
comme exemple le sodium métallique (Na). Chaque atome de Na
permises de l’énergie E (kx ) seront aussi très nombreuses et forment
contient 11 électrons. 10 d’entre eux, appartenant aux orbitales élec-
un spectre quasi continu.
troniques profondes et appelés électrons de cœur, sont fortement
liés au noyau pour former un ion de cœur avec une charge nette Les fonctions d’onde de Bloch sont des ondes progressives.
de + e (e = 1,6 × 10 –19 C). Dans l’atome Na libre, le dernier électron Assemblées en paquet d’ondes, elles représentent l’électron (dit de
externe, appelé électron de valence, subit l’attraction de son ion de Bloch) qui se propage à travers le solide sous l’influence du potentiel
cœur et se déplace dans une orbitale localisée autour de l’ion. Quand moyen cristallin V (r ). À chaque fonction de Bloch, caractérisée par
on comprime ensemble les atomes libres d’un gaz de Na pour former un vecteur d’onde k réel permis, est associée une énergie permise
le solide Na, le recouvrement des orbitales des électrons de valence E (k ). La relation de dispersion E (k ) varie d’une façon quasi continue
est tellement grand que l’on ne peut plus décrire ces électrons avec k. Il existe cependant dans cette courbe de dispersion certaines
comme demeurant localisés autour de leurs ions respectifs. Chaque valeurs de k où E (k ) présente une discontinuité importante. Les
électron de valence va subir l’influence du potentiel des autres ions fonctions de Bloch associées n’y ont plus des vecteurs k réels, mais
et son état électronique est une solution de l’équation de Schrödinger complexes. Elles correspondent à des ondes stationnaires. Ces
d’un électron de valence dans un champ (potentiel) moyen de tous ondes stationnaires prennent naissance à cause de l’interférence des
les autres ions. ondes électroniques diffractées par les ions du réseau périodique.
Ces ondes stationnaires sont caractérisées par des densités élec-
La figure 6 représente l’énergie potentielle U (x ) d’un tel électron
troniques concentrées en certains sites du réseau cristallin (électrons
dans le champ moyen des ions de cœur, le long d’une direction
localisés) et expliquent l’origine des bandes d’énergie interdites
cristallographique (x ) donnée, de paramètre de réseau a . On voit
(figure 5b ). Inversement, les électrons de Bloch (électrons déloca-
apparaître la périodicité du réseau dans la forme de l’énergie :
lisés) peuvent occuper tous les états des bandes d’énergie permises.
U (x ) = – e V ( x )
où V (x ) est le potentiel moyen des ions.
Près des ions de cœur, l’énergie d’attraction est forte, loin des 2.2 Solide avec une surface
ions elle est quasi nulle.
Exemple : pour un cristal cubique de Na d’arête L de l’ordre Nous allons voir, grâce à un exemple simplifié, comment on peut
de 1 cm (10–2 m), on voit que cette périodicité le long de l’arête se transposer tous les concepts utilisés précédemment dans le solide
répète à l’échelle de la figure de – ∞ à + ∞ puisque le paramètre a est tridimensionnel infini (ou fini, mais soumis aux conditions cycliques
de l’ordre de 4 Å (4 × 10–10 m). de périodicité aux limites) à un solide terminé par une surface.
La résolution de l’équation (4) se fait analytiquement connaissant Supposons maintenant que le solide soit infini suivant les axes x, y
l’énergie moyenne U qui a la périodicité d’un réseau cristallin. On et que la surface qui limite le solide soit perpendiculaire à l’axe z
démontre dans ce cas (article Structure électronique des solides (figure 7a ).
[A 1 335] de la présente rubrique et [3]) que la solution est une fonc-
tion d’onde de Bloch :
2.2.1 Potentiel de surface
ψk (r ) = uk (r ) exp (i k · r ) (10)
Si l’électron se déplace dans le plan x, y parallèlement à la surface,
uk (r ) possède la périodicité du réseau cristallin, exp (i k · r ) repré-
il subit un potentiel cristallin moyen qui se répète à l’infini et qui
sente de nouveau une onde plane progressive de vecteur d’onde k
se calcule comme dans le cas d’un solide 3 D par les méthodes de
réel. Les valeurs de k ne sont plus continues comme dans le cas
champs autocohérents discutées précédemment. Si l’électron se
des électrons libres, mais soumises aux conditions aux limites dites
propage perpendiculairement à la surface suivant l’axe z, il va subir
cycliques de Born-von Karman pour s’affranchir des problèmes de
un potentiel cristallin moyen qui va se modifier à l’interface cristal-
surface limitant le cristal.
vide à cause de l’interruption du solide par cette surface. De nouveau,
Exemple : le cristal cubique d’arête L (1 cm) et de paramètre du ce potentiel de surface subi par l’électron peut se calculer par les
réseau a (4 Å) présente un très grand nombre de mailles élémentaires approximations successives des méthodes de champs auto-
(≈ L /a ). Le cristal est considéré comme infini. Alors on doit avoir cohérents par exemple. La figure 7b schématise l’énergie potentielle
ψ kx ( x ) = ψ kx ( x + L ) suivant l’une des arêtes x (conditions aux limites d’un tel électron se propageant perpendiculairement à la surface.
Pour sortir du cristal (z < 0), l’électron doit acquérir suffisamment
cycliques). Appliquée à l’équation (6), cette condition impose que : d’énergie pour sauter la barrière de surface.
kx = (2π/L ) n
avec n entier quelconque n = 0, ± 1, ± 2, ± 3, ... 2.2.2 États de surface de Tamm
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Shockley [4] remarque que les états de Tamm sont les Figure 8 – Énergie potentielle symétrique à la surface
conséquences directes d’une terminaison asymétrique du potentiel (modèle de Shockley) et asymétrique (modèle de Tamm)
cristallin à la surface. Utilisant une terminaison symétrique jusqu’à
la surface et résolvant l’équation de Schrödinger d’un électron dans
un tel potentiel (figure 8), il démontre que pour de larges séparations
interatomiques, il n’existe pas d’états de surface. L’essentiel de ces
résultats est reporté sur la figure 9 qui illustre qualitativement le
comportement de deux bandes permises voisines en fonction du
paramètre a du réseau d’une chaîne finie d’atomes, limitée par deux
surfaces à ses extrémités. Quand a est grand, les bandes dégénèrent
en des niveaux discrets (spectre d’atomes isolés). Quand a décroît,
les atomes sont comprimés ensemble pour former un solide, la dégé-
nérescence des niveaux discrets est levée et on a formation des ban-
des. À une certaine distance a , les limites des bandes se croisent
(courbes en tireté sur la figure 9). On dit qu’il y a hybridation des
bandes. Pour a < a , il y a échange entre les deux bandes avec deux
niveaux qui se localisent entre les deux bandes permises. Ce sont
les états de surface dus aux terminaisons symétriques du potentiel
de surface du cristal, mais leur existence est soumise dans ce cas
à la condition d’hybridation des bandes.
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conditions de périodicité cyclique de Born-von Karman suivant les E max
2
axes x, y. La fonction d’onde d’un électron dans ce cas est une fonc- N ( E ) dE = ----------
tion de Bloch à deux dimensions : E min
ψ k/ / ( r / / , z ) = u k/ / ( r / / , z ) exp ( ik / / ⋅ r / / ) (11) si E min et E max sont les énergies des extrémités de la bande permise
considérée.
avec r/ / coordonnées de surface dans le plan x, y, N (E ) dE est en fait le nombre total de solutions de l’équation de
k/ / vecteur d’onde de surface correspondant au Schrödinger ayant une signification physique réelle dans un inter-
plan (kx , ky ), valle d’énergie dE par unité de volume du cristal :
z coordonnée suivant la perpendiculaire à la sur-
face,
N ( E ) dE = ∑ δ E – E ( k ) dE (12)
k
uk (r / / , z ) fonction de l’espace possédant la périodicité du
réseau de surface (x, y ). où δ (E ) est la fonction de Dirac de E . La sommation se fait sur tous
les états k permis.
En remplaçant cette fonction de Bloch de surface dans l’équa-
tion de Schrödinger, on retrouvera les résultats discutés précé-
demment [2]. 3.1.2 Densité locale d’états
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Le premier terme représente la contribution du volume, uniforme Connaissant la densité d’états de la surface NS (E ), on peut prévoir
en z, tandis que le second terme représente celle de la surface théoriquement diverses grandeurs caractéristiques dépendant
oscillant avec z. L’intégration sur tous les k // permis donne la densité fortement des propriétés électroniques de surface, en particulier le
locale d’états au point z : travail en sortie Φ, qui est l’énergie nécessaire à communiquer à un
électron du cristal pour l’éjecter dans le vide à partir du niveau de
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Ce sont des métaux des groupes IIIB à VIII dont les électrons de
valence sont de type s, p et d. Les orbitales d sont plus confinées
et plus directionnelles dans l’espace que les orbitales s et p. Les
propriétés physiques des métaux de transition, appelés souvent
métaux d , puisent leur origine essentiellement dans les caracté-
ristiques particulières de ces orbitales d. La méthode courante pour
calculer les structures électroniques des métaux d est la technique
de la liaison forte (article Mécanique quantique [A 196]).
Les mêmes types de calcul de densité d’états [5] peuvent être
effectués sur les surfaces des métaux de transition. Les résultats
obtenus sont notés sur la figure 16.
On retrouve dans la densité d’états la forme particulière à deux
bosses rappelant l’existence d’une bande interdite ou gap entre les
liaisons liantes et antiliantes des électrons (article Structure élec-
tronique des solides [A 1 335] de cette rubrique). Pour un plan dense
[(111) d’un cristal cubique à faces centrées ou (110) d’un cubique
centré], il existe un rétrécissement de la largeur de la bande de
surface par rapport à celle du volume. Ce fait provient du nombre
de proches voisins plus réduit à la surface que dans le volume
(figure 16a ).
Figure 13 – Courbe de dispersion E (k//) pour la surface (100)
La figure 16b montre les résultats obtenus sur la face ouverte (100)
de l’aluminium (d’après [2])
du molybdène. On constate un plus grand rétrécissement de la bande
et surtout une densité locale d’états de surface au milieu du gap due
à la résonance des atomes de surface avec ceux du volume. Dans
tous les cas, les calculs montrent que la densité locale du deuxième
plan de la surface est déjà très proche de celui du volume et justifie
a posteriori la technique de la liaison forte.
Pour conclure sur les calculs réalisés sur les métaux, il faut noter
que la plupart d’entre eux ont été effectués pour des surfaces non
reconstruites ou non relaxées. Quand on dispose des connaissances
expérimentales des arrangements d’atomes aux surfaces (recons-
truction ou relaxation), on peut en principe introduire ces infor-
mations sur la géométrie des atomes dans les calculs et reproduire
plus fidèlement encore les mesures expérimentales de structure de
bande de surface des métaux.
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E = U ( r )n ( r ) dr + F n ( r ) (23)
E = U ( r )n ( r ) dr + E C n ( r )
(24)
e2
+ --------
2
n ( r )n (r ′ )
-------------------------------- d r d r ′ + E X C n ( r )
r–r′
avec e charge de l’électron,
EC énergie cinétique du gaz d’électrons de densité n (r ), sans
interaction.
En admettant que E doit être minimale lorsque l’on fait varier n (r )
arbitrairement en tenant compte de la conservation des charges :
Figure 16 – Comparaison entre la densité locale d’états de surface
et la densité locale d’états de volume du Mo (d’après [5])
n ( r ) dr = N (25)
et :
3.4.1 Méthode des pseudo-potentiels 1 ∂E X C
U X C = ------- ---------------- (28)
autocohérents ∂n
Les équations précédentes sont autocohérentes en ce sens que
Elle est calquée sur celle décrite pour le volume dans le la densité locale n (r ) détermine les potentiels, qui permettent de
paragraphe 2.1.3. On résout l’équation de Schrödinger d’un électron résoudre l’équation (26), et par suite les fonctions d’onde ψi qui, à
avec un pseudo-potentiel : leur tour, permettent de calculer n (r ). Il faut donc adopter, de
nouveau, les méthodes itératives des champs (potentiels) auto-
,2 2 cohérents déjà décrits dans le paragraphe 2.1.3. Une fois l’équation
H = – ------------ ∇ i + U P S + U H + U X C (22)
2m résolue (fonction d’onde et énergie propre), on calcule l’énergie
totale E du système et l’on peut tester les configurations d’équilibre
où U P S est une énergie somme des pseudo-potentiels des ions, U H possibles. Cette technique a permis ainsi d’éliminer plusieurs
et U X C sont respectivement les énergies du potentiel de Hartree et modèles de structure de surface proposés pour divers semi-
du potentiel local d’échange et de corrélation des électrons. conducteurs pour expliquer certains résultats de photoémission ou
Par la méthode itérative des potentiels autocohérents, on calcule de diffraction, mais qui ne satisfont pas la condition requise d’équi-
ainsi les fonctions d’onde et les énergies du système. Pour reproduire libre préconisée par le calcul de l’énergie totale.
les surfaces, on simule par exemple le cristal par une tranche de
matériau (de 12 couches atomiques environ) que l’on répète pério-
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conduction pour remplir les états de surface et crée ainsi une charge
d’espace positive dans la zone superficielle. De même, un semi-
conducteur de type p a ses bandes courbées vers le bas à la surface
par une charge d’espace négative dans la zone superficielle. Ces
déficits de porteurs majoritaires donnent naissance à des couches
de déplétion et d’inversion semblables à celles trouvées aux jonc-
tions p-n (article Physique des dispositifs électroniques [E 1 100]
dans le traité Électronique). La courbure de bande à la surface peut
être mesurée expérimentalement par la grandeur VS telle que :
VS = Φ – I + ξ
avec Φ travail de sortie,
I énergie d’ionisation,
ξ mesure la distance entre E F et le sommet de la bande de
valence en volume.
Si la densité des états de surface est grande, un grand potentiel
de surface peut être compensé par une très faible variation du niveau
d’énergie des états de surface par rapport à E F , ce dernier demeurant
alors ancré aux états de surface.
Figure 22 – Relation de dispersion de GaAs (110)
L’exemple est donné par le Si dont le travail de sortie d’une surface
propre varie très peu, de 4,92 à 4,76 eV, en passant du type p au
type n, alors que E F se déplace dans le volume à travers tout le gap
3.4.6 Neutralité, courbure de bande à la surface (soit 1,1 eV environ). L’énergie de Fermi E F est fixée à la surface au
des semi-conducteurs milieu du gap. Cela peut s’expliquer par la présence de deux bandes
d’états de surface séparées par un faible gap (figure 19).
Pour un semi-conducteur covalent, à cause du principe de Contrairement à l’exemple précédent, la surface propre (110) des
neutralité totale, on s’attend à ce que la bande d’états de surface composés semi-conducteurs ne montre pas un ancrage de E F dans
soit à moitié pleine. En effet, les électrons dans les états de surface le gap, car les bandes d’états de surface sont repoussées vers les
compensent alors le départ des états du sommet de la bande de bandes de volume à cause de la relaxation de la surface (figure 21).
valence. Le potentiel de surface doit s’ajuster localement, de telle
façon que la bande d’états de surface se fixe en son milieu au niveau
de Fermi, E F . Si le semi-conducteur n’est pas dopé (semi-conducteur
intrinsèque), le potentiel de surface ne peut pénétrer profondément 4. Propriétés électroniques
dans le solide (pas plus que les états de surface) et cette
compensation se fait à l’échelle atomique. Si le semi-conducteur est des surfaces
dopé (semi-conducteur extrinsèque), E F se déplace dans le gap. Pour
fixer toujours la bande d’états de surface à E F , une charge d’espace avec adsorbats
s’établit à la surface du semi-conducteur et courbe les bandes. Le
potentiel de surface peut alors s’étendre sur plusieurs centaines Les surfaces réelles des solides sont généralement recouvertes par
d’angströms selon le niveau de dopage (figure 23). des atomes, des molécules, etc., provenant du milieu gazeux envi-
En fait, les états vides de surface agissent comme des accepteurs ronnant. Ce phénomène d’adsorption a pour origine les situations
qui peuvent se remplir avec les porteurs du semi-conducteur, et vice- particulières des atomes de surface des solides auxquels il manque
versa les états pleins comme des donneurs. Un semi-conducteur de des liaisons par rapport à ceux du volume. Le réarrangement de ces
type n, en général, a ses bandes courbées vers le haut (figure 23). liaisons manquantes par les adsorbats peut se faire schématique-
En effet, le semi-conducteur donne des électrons de sa bande de ment de deux façons.
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■ Si l’interaction attractive adsorbat-substrat est faible (c’est-à-dire reste du substrat. Le niveau de l’adsorbat forme deux états liant et
si les forces d’interaction sont de type Van der Waals), alors les antiliant (figure 25b ). Il faut remarquer que dans la réalité plusieurs
énergies associées aux liaisons adsorbat-substrat sont du même atomes sont simultanément adsorbés, les interactions latérales entre
ordre de grandeur que la chaleur de liquéfaction des gaz adsorbés qui adsorbats entrent aussi en compte et le problème devient immensé-
ne dépasse guère 30 kJ/mole (0,3 eV/particule). Il en résulte que l’état ment complexe. Il arrive aussi qu’une molécule, lors de son adsorp-
électronique du gaz adsorbé et celui de la surface initialement propre tion, subisse une forte perturbation par le substrat et puisse se
sont très peu modifiés par l’adsorption. C’est le phénomène de la décomposer en atomes (chimisorption dissociative), compliquant
physisorption que nous n’étudierons pas ici. encore plus le schéma des états électroniques.
■ Si, en revanche, l’interaction adsorbat-substrat est forte, la satu- Formellement, pour décrire la chimisorption, on postule que
ration des liaisons manquantes implique un transfert ou une mise en l’hamiltonien du système est :
commun d’électrons entre les deux partenaires. Les énergies de = S + A + C (29)
liaison peuvent alors être élevées (environ 40 à 600 kJ/mole). C’est
le phénomène de chimisorption que nous aborderons dans cet article avec S hamiltonien du substrat que l’on peut représenter par
au point de vue de la structure électronique (article Surface des soli- sa structure de bande avec éventuellement ses états de
des. Physisorption. Chimisorption. Ségrégation [A 244]). surface propre,
Il est à remarquer que les grandes forces de liaison adsorbat- A hamiltonien de l’adsorbat généralement isolé (dans
substrat peuvent provoquer un réarrangement des atomes de sur- les calculs) avec son niveau atomique E A de ses
face du substrat ; les états électroniques de l’adsorbat et du substrat ZA électrons,
se trouvent alors fortement modifiés par rapport à ceux d’avant
l’adsorption. C hamiltonien du couplage entre ces deux entités.
La résolution de la relation (29) se fait en se ramenant à un
problème à un électron par diverses techniques d’approximation
plus ou moins adaptées, selon les types de forces d’interaction en
4.1 Concepts de calcul présence. Il n’y a pas de méthode universelle et une discussion
exhaustive de ces techniques déborderait très rapidement le cadre
de cet article. On se contente dans la suite d’expliquer phénoméno-
La théorie de la chimisorption reste toujours, à l’heure actuelle, logiquement quelques résultats expérimentaux obtenus sur des
un défi, tant il existe une grande variété de paramètres dans le systèmes typiques.
système mis en jeu, par exemple la nature et la force de l’interaction
adsorbat-substrat ou les propriétés des surfaces des substrats. Géné-
ralement, les grandeurs physiques à déterminer sont :
— la structure géométrique du système adsorbat-substrat ;
— la structure électronique des états chimisorbés ;
— l’énergie de liaison de l’adsorbat ;
— le transfert de charge relié au moment dipolaire de surface.
Qualitativement, pour fixer les idées sur ce qui se passe dans le
processus de chimisorption, on considère un atome (molécule)
neutre, loin d’une surface supposée métallique par exemple. Si
l’énergie d’ionisation I de l’atome est inférieure au travail de sortie
Φ du métal, un électron est transféré de l’adsorbat au métal et, inver-
sement, si l’affinité électronique χ est supérieure à Φ, un électron
est transféré du métal à l’adsorbat.
Dans ces deux cas extrêmes, la liaison sera ionique. Si, en
revanche, I > Φ et χ < Φ, l’atome (molécule) est stable dans son état Figure 24 – Diagramme énergie-espace
neutre, une liaison covalente s’établit entre l’adsorbat et le substrat d’un atome isolé et d’un métal
(figure 24).
Exemple : pour l’atome hydrogène I = 13,6 eV et χ = 0,7 eV.
Comme Φ est de l’ordre de 4 à 6 eV pour tous les métaux de transition,
on s’attend à ce que l’hydrogène forme une liaison covalente lors de sa
chimisorption.
Au cours de l’adsorption, les niveaux discrets d’énergie des
orbitales de l’adsorbat interagissent avec le substrat pour produire
un nouvel ensemble d’états électroniques qui sont en général élargis
et déplacés par rapport à ceux d’avant l’adsorption. De tels états
d’adsorption contiennent maintenant beaucoup de caractéristiques
du substrat.
Cependant, d’ores et déjà, notons que ces phénomènes ne
concernent que les atomes de surface et n’affectent donc que très
peu de plans atomiques superficiels. La figure 25 montre les change-
ments de ces états lors de l’adsorption d’un atome. Si l’interaction
n’est pas trop forte entre adsorbat et substrat, le niveau atomique
EA de l’adsorbat est peu élargi et forme un état lié virtuel gardant Figure 25 – Diagramme énergie-espace
son caractère atomique (figure 25a ). Si l’interaction est forte, le sys- d’un atome adsorbé sur un métal
tème adsorbat couplé aux atomes de surface du substrat se
comporte comme une supermolécule de surface perturbée par le
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4.2 Chimisorption sur les surfaces Ces deux atomes forment des liaisons ioniques avec Al ; l’atome de
Cl devient chargé négativement et celui de Li chargé positivement,
des métaux s-p comme prévu d’ailleurs par leur électronégativité relative à Al. Il n’en
est pas de même pour Si dont l’électronégativité est similaire à celle
4.2.1 Densité de charges superficielles d’Al. Le niveau Si 3p est donc situé près de E F . Seule la partie basse
énergie de ce niveau est remplie d’électrons formant la liaison liante.
Les propriétés des surfaces des métaux simples dont les électrons
de valence sont de type s et/ou p sont bien décrites par le modèle
du jellium (§ 3.2). Lors de l’adsorption d’une particule sur de telles
surfaces, le transfert ou le partage d’électrons (respectivement
liaison ionique ou covalente) entre adsorbat et substrat va changer
le potentiel de surface. Pour illustrer ce cas, prenons une mono-
couche de césium déposée sur la surface de l’aluminium [2]. Un
transfert d’électrons se fait du Cs vers Al (liaison ionique). La couche
de Cs est alors simulée par un plan d’ions positifs placés en face
du cristal semi-infini Al représenté par le jellium. Les calculs
montrent alors que le changement de la densité des charges électro-
niques, induit par l’adsorbat, est très important à la surface, mais
décroît très rapidement à partir de la surface en oscillant vers la
densité initiale de volume. La figure 26 représente ces calculs pour
une couche complète de Cs et pour une fraction de couche. Les
changements observés, qui s’atténuent très vite, sont les
conséquences de l’écrantage de toute perturbation externe par les
électrons s et p du métal (écrantage Thomas Fermi et oscillations
de Friedel). La distribution spatiale de cette densité de charges, dans
l’exemple précédent, provoque l’apparition d’un dipôle électrique
perpendiculaire à la surface, qui fait varier le travail de sortie du Figure 26 – Changement relatif de la densité de charges induite sur Al
système. par chimisorption du Cs d’après le modèle du jellium (d’après [2])
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E =
–∞
EF
E δ N ( E ) dE + E R (30)
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