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Laboratoire d'Hydrogéologie d'Avignon - VINCENT VALLES COURS D'HYDROCHIMIE

LISTE DES COURS D'HYDROCHIMIE

A lire impérativement avant chaque cours;

vérifiez que vous visionnez tout le tableau vert

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Laboratoire d'Hydrogéologie d'Avignon - VINCENT VALLES COURS D'HYDROCHIMIE

Le prélèvement des solutions et leur conditionnement:


Les mesures de terrain
Aucune étude hydrochimique sérieuse ne peut reposer sur des données chimiques non fiables ou de
mauvaise qualité.

La question de l'acquisition des données est donc essentielle, tant du point de la stratégie (fréquence,
densité spatiale, représentativité dans la rivière,…) que de la précision de la mesure elle-même.

I - Une stratégie d'échantillonnage planifiée dès le départ (geostat et chronostat)

Il est important que la stratégie d'échantillonnage soit bien pensée avant tout travail sur le terrain.

Les aspects économiques (budget alloué au poste analytique, frais de mission sur le terrain, ..) ne sont
pas à négliger. Il faudra se donner les moyens de vérifier que la densité spatiale des points est suffisante
en ayant un nombre de couples rapprochés suffisants pour mesurer la portée (confer cours de géoastat),
même si cette dernière est petite.

Il faudra veiller à la représentativité du prélèvement dans le temps.

- la position du prélèvement dans le temps et l'espace

*) Hydrologie :

Il convient de veiller à la représentativité. Cette dernière varie selon la position par rapport à l'axe du
chenal et la profondeur, notamment pour une mesure représentative de la teneur moyenne en MES.
Pour ce qui est de la chimie des éléments dissous et la physico-chimie de base, la position du
prélèvement importe peu sauf dans le cas d'une confluence située en amont. En effet, lors de
confluence de rivières, les eaux des deux rivières ne se mélange qu'après un long parcours. Pour les
fleuves importants tels que l'Amazone, le Congo ou l'Orénoque, les eaux coulent en flux parallèles sans
se mélanger sur des distances pouvant atteindre plusieurs dizaines de kilomètres. Dans ce cas, une
reconnaissance préalable avec un conductivimètre, en faisant des mesures d'une rive à l'autre, aide à
déterminer la bonne stratégie et la bonne section à prélever.

De même, la chimie des eaux peut varier fortement lors des crues. Des calculs d'exportations chimiques
ne peuvent s'accommoder de la composition chimique d'un seul échantillon pris au hasard durant
l'épisode, d'autant plus que les exportations solides se concentrent souvent sur un bref laps de temps. Il
convient alors de se donner deux rythmes de prélèvements : un rythme rapide durant les crues, s'est à
dire durant les périodes de crise et un rythme lent durant les périodes d'étiage, c'est-à-dire phases de
régulation. Enfin, lors de suivis sur le long terme de l'hydrochimie de rivières, il faut avoir un pas de
temps compatible avec la portée, c'est çà dire bien inférieure. Cette dernière sera déterminée par une
étude de chronostatistique (confer le cours de chronostatistique).

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*) Sur une zone d'étude (Hydrogéologie):

Un schémas prévoyant une densité spatiale minimale de prélèvements doit être conçu dès le départ. Il
visera à couvrir toute la zone avec une densité telle que chaque point de la zone étudiée soit situé à une
distance du ou des points de prélèvements les plus proches, bien inférieure à la portée (voir le cours de
géostatistique appliquée à l'hydrochimie). Le cas échéant, il conviendra de revenir sur le terrain pour
prélever dans les zones à faible densité ou pour augmenter la fréquence de l'acquisition. Cet aspect est
important lorsque l'on veut établir une carte de risque ou de sensibilité de l'environnement par rapport
au risque chimique. En revanche, lorsque l'on s'intéresse à l'étude des mécanismes responsables de la
qualité des eaux, on aura insert à prélever une gamme la plus ouverte d'échantillons. Pour cela, on
effectuera des mesures rapides avec un conductivimètre. Deux points voisin dans l'espace ou le temps
et présentant la même conductivité électrique auront toutes le chances d'être similaires quant à
l'ensemble des paramètres physico-chimiques. Les prélever tous deux constituera un doublon inutile.

- un nombre de points suffisant:

Le nombre de points de prélèvements devra permettre d'effectuer les tests statistiques usuels tels que
l'analyse de la variabilité (analyse de variance pour chaque variable et statistique multivariée). Il sera
possible de détecter les anomalies (points singuliers ou tout simplement erreurs de saisie)

II - La mesure des paramètres fugaces sur le terrain.

Un certain nombre de paramètres doivent impérativement être mesurés sur le terrain.

Ainsi, la température d'un échantillon va évoluer après le prélèvement et l'information sera perdue. Il
faut donc la mesurer rapidement après la collecte de l'échantillon, ou simultanément sur une fraction
aliquote. De même les paramètres tels que pH, eH (en fait le rH), teneur en chlorophylle, oxygène ou
CO2 dissous,… doivent être mesurés sur place. La mesure de la conductivité électrique, bien que
pouvant attendre l'arrivée au laboratoire est utile pour mieux gérer la stratégie de prélèvement (voir
plus haut) au même titre que toute autre mesure de terrain pouvant être utilisée de la sorte.

Lorsque la pression partielle équilibrante en CO2 de l'échantillon est sensiblement différente de celle de
l'air, un processus de rééquilibrage s'opère rapidement. Ainsi, il convient de

- mesurer le couple pH/rH aussi rapidement que possible


- éviter d'agiter la solution même lors de son prélèvement ou de son acheminement vers le flacon
de mesure
- de noter le sens de variation du pH (et du rH). En effet, une augmentation de pH ne doit pas être
interprété comme un problème d'électrode qui " se stabilise " mal, mais plutôt comme le signe
d'une perte en CO2 d'une eau initialement chargé en ce gaz. La diminution du pH indique au
contraire une très pauvre en CO2 et se chargeant au contact de l'atmosphère.
- De noter simultanément des couples rH/pH car ils permettent de distinguer le couple rédox actif
dans la solution.

Dans certains cas, l'acquisition d'échantillon est difficile comme pour les eaux d'origine profonde
(remontées d'eau thermales, eau de nappes profondes et donc d'accès difficile, eaux de fond de lacs ou
de fleuves profonds,…). Dans ce cas, il est fréquent que les paramètres physico-chimiques soient
altérés lors de la remontée vers la surface. Il convient d'être prudent lors de leur utilisation. Différentes

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techniques permettent d'estimer les conditions en profondeur. Pour les eaux de rivières ou de lacs
profonds, il est possible de descendre une sonde multiparamètres pour réaliser la mesure directement in
situ. Cette technique est très efficace malgré quelques difficultés d'ordre technique. Les sondes pH par
exemple fonctionnent moins bien dans un volume très grand voire quasi-infini. Dans la mesure du
possible on leur préfèrera une mesure en flacon de volume limité.

Enfin, si la mesure sur place du pH et du rH est impossible, on pourra tenter de la réaliser en


laboratoire. Dans ce cas, on prendra soin de remplir le flacon sous l'eau ; il sera rempli en totalité, c'est-
à-dire sans bulle d'ait piégée et fermé sous l'eau. La mesure du pH sera malgré tout légèrement
différente de celle que l'on aurait obtenue sur le terrain.

III - Conditionnement des échantillons.

Il n'existe pas un mode unique de conditionnement des échantillons, et pouvant servir pour tout type
d'analyse. Selon les paramètres étudiés, différents modes de conditionnement des échantillons et de
flacons seront utilisés.

A) Choix du flaconnage: nature des matériaux, des fermetures et du lavage des flacons

Les flacons les plus utilisés sont le verre, le polyéthylène et le téflon.

Les flacons en verre présentent des fermetures très étanches qui conviennent bien pour le stockage en
vue de mesures isotopiques ainsi que l'absence d'évaporation au travers des parois elles mêmes très
étanches. Les inconvénients du verre résident dans son poids important qui rend le transport pénible et
coûteux, surtout si le rapatriement se fait par avion. Enfin les risques de bris lors du transport ne sont
pas négligeables. Enfin, avec le temps, le verre s'altère et libère des éléments chimiques dans la
solution, ce qui très gênant. Le stockage long est proscrit dans le verre surtout pour des eaux peu
minéralisées.

Le polyéthylène est plus léger, non cassant. Sa fermeture est moins étanche mais il existe du flacon à
double fermeture très efficace. La porosité du matériau entraîne une légère évaporation. Les solutions
destinées aux mesures isotopiques stables de l'eau ne devront pas être gardées très longtemps dans ce
type de flacon. Le polyéthylène ne libère que très peu d'éléments solubles et la composition chimique
des solutions stockées est peu altérée.

Enfin, pour l'étude d'éléments traces, les flacons les plus adaptés sont ceux conçus en téflon. Les
flacons doivent être lavés à l'acide soigneusement et rincés tout aussi méticuleusement.

Si un rinçage s'avère indispensable lors du prélèvement, l'eau à prélever sera la meilleure eau de
rinçage.

Et enfin, il arrive de voir prélever des eaux très peu minéralisées avec des mains pleines de sel (juste
après avoir avalé des frites salées sur le terrain par exemple) ou bien enduites de produit solaire ou anti-
moustiques.

En général les résultats analytiques du chlorure ou de la DOC sont assez surprenants et donnent lieu à
des interprétations amusantes et farfelues.

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Ne pas oublier que la meilleure eau pour se rincer est l'eau que l'on prélève, en hydrologie il ne faut pas
se priver !

B) Conditionnement des solutions:

Il n'existe pas de méthode universelle de conditionnement des échantillons. Selon les paramètres
auxquels on s'intéresse, la méthode de conservation variera.

Habituellement, lorsque l'on étudie un nombre important de paramètres, il faudra séparer l'échantillon
prélevé en plusieurs fractions aliquotes qui seront conditionnés chaque un de manière différente. Ceci
conduit à une multiplication des flacons, du poids, du travail et de la préparation.

*) pas de conditionnement.

Pour la plupart des éléments majeurs (sauf nitrates), il est possible de ne pas conditionner les solutions.
Sont exclus de ce cas, les eaux qui sont en dynamique rapide de réaction suite à un changement récent
et important d'état. Par exemple, lors des études d'hydrologie, les eaux de ruissellement sont en train
d'altérer les horizons superficiels qu'elles érodent. Très peu minéralisées au départ et donc sous saturées
par rapport à de nombreux minéraux, elles sont souvent en déséquilibre total avec l'atmosphère et les
minéraux qu'elles transportent. Dans ce cas il est impératif de filtrer sur place et le plus rapidement
possible puis de micro- filtrer sur place.

*) empoisonnement

Pour les paramètres pouvant être rapidement influencés par l'activité biologique, il peut être utile voire
indispensable d'empoisonner les solutions afin d'empêcher l'action des micro-organismes. C'est le cas
pour les différentes formes de l'azote ou le carbone organique. Les poisons les plus utilisés sont le
chlorure mercurique qui est incompatible avec certains appareils de dosage du carbone organique et
l'azide (azoture de sodium).

*) filtration

La filtration est souvent très utile car elle retire les phases solides pouvant interagir ultérieurement avec
la solution, mais aussi les germes pouvant attaquer les composés organiques ou azoté. La pratique
montre qu'un flacon filtré même micro-filtration, et stocké au frais et à l'abris de la lumière est capable
de garder plus d'un jour sa teneur en nitrate sans altération des valeurs. Ceci montre l'importance de la
filtration qui sera pratiquée sur place, dès l'obtention de l'échantillon, avec un papier sans cendre.

*) la congélation

C'est un moyen drastique pour bloquer l'activité biologique.

Cette méthode de conservation ne doit être employée qu'avec discernement car les effets sur la
composition chimique en éléments majeurs est importante. En effet, différents minéraux précipitent
lors du processus de congélation. Ces minéraux ne seront pas solubilisés lors de la décongélation et la
composition chimique de la solution sera très affectée. Ce processus s'apparente à une évaporation ou
une déshydratation car lors de la congélation, l'eau qui congèle est quasi dépourvue d'éléments dissous

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qui migrent et se concentrent dans l'eau encore liquide. Par ailleurs, la modification des constantes de
solubilité avec la température accentue cette altération des caractéristiques de l'eau.

*) le stockage à l'abri de la lumière et au frais

Quelle que soit la technique retenue pour le conditionnement, on aura tout intérêt à stocker les
échantillons à l'abri de la lumière et à la fraîcheur. L'activité photosynthétique liée à l'exposition à la
lumière peut modifier sa teneur en nitrates et le COD.

*) précautions particulières pour les isotopes (18O, 2H, 13C,….)

Pour les isotopes stables de l'eau, le point important est de limiter l'évaporation des solutions. Ceci
passe par la:

- qualité de la fermeture (bouchon à double pas de vis énergiquement vissé sur un flacon rigide
i.e. verre)
- le stockage de tous les flacons ensemble dans une poche plastique hermétiquement fermée.
- l'empoisonnement des solutions pour les isotopes de C et N

*) la micro-filtration 0.45µm ou 0.2 µm

Elle s'avère indispensable pour l'étude des éléments métalliques et des traces. La solution sera micro-
filtrée avec des micro-filtres préalablement lavés à l'acide, soigneusement rincés, séchés puis pesés. La
pesée du filtre sec permet de quantifier la quantité de matières solides (en suspension ou non). Pour les
eaux transportant des formes colloïdales, il est difficile de déterminer la bonne taille de porosité car il
existe un continuum de formes depuis les moins petites jusqu'aux fines. Les résultats varieront donc en
fonction de la taille de pore.

*) acidification des solutions filtrées. Une fraction aliquote des solution filtrées ou micro-filtrées
seront acidifiées afin de maintenir certains éléments tels que les métaux en solution. L'acidification ne
doit jamais précéder bien évidemment la filtration car elle solubiliserait une grande quantité d'éléments
présents dans les phases solides.

Ceci occasionne une multiplication des flacons qu'il convient de pré étiqueter (voire pré conditionner
i.e. empoisonnement) à l'avance.

Enfin, dans le cadre d'une démarche de qualité, il faudra prêter une attention particulière à la traçabilité
des flacons avec

- Le double étiquetage, bandeau adhésif sur le verre des flacons pour isotopes, inscription de la
référence sur le coté des flacons en polyéthylène mais aussi sur le bouchon moins sensible au
frottement avec les autres flacons durant le transport,
- inscription de plusieurs indications différentes (référence, heure, débit,..) au cas où l'une d'elle
serait partiellement effacée, les autres permettraient de lever toute ambiguïté
- la double sauvegarde de l'information de terrain (photocopie des cahiers de terrain, copie des
fichiers informatiques d'acquisition terrain,…) dès que possible.

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IV - Et enfin ……quelques points pratiques pour la mesure sur le terrain

La mesure du pH

Les pHmètres de terrain sont maintenant de très bonne qualité et fiables. Encore faut-il prendre
quelques précautions.
La compensation en température n'est jamais parfaite. Aussi, convient-il, dans la mesure du possible,
d'étalonner sur le terrain, dans les conditions de température présidant aux futures mesures.

Un pH mètre de terrain qui a beaucoup vécu !!. Cet appareil est tropicalisé.

Il est étanche à l'eau jusqu'à plusieurs mètres de profondeur. Il résiste donc à la pluie
ou au climat humide sans que son électronique ne soit affectée.

Ces appareils sont dotés de fonctions de calibration particulièrement commodes qui


permettent de convertir directement le voltage en unité pH. Lors de la calibration, la
stabilité du pH est vérifiée et l'étalon est automatiquement reconnu.

Une lecture de pH qui varie et tarde à se stabiliser ne doit pas être interprétée comme le signe d'un
disfonctionnement, mais plus fréquemment comme le fait que la solution est en train d'échanger du
CO2 avec l'atmosphère. L'augmentation de pH traduit souvent un départ de CO2; on en, déduit que la
solution provient d'un milieu nettement plus riche en CO2 que l'atmosphère. Si le pH diminue, cas plus
rare, la solution est très pauvre en CO2 et se charge durant la mesure. Il est important de noter ce sens
de variation. C'est pour cette raison qu'il faut prélever le plus délicatement possible les solutions sans
les agiter, ce qui favoriserait les échanges de CO2. En revanche, une fois réalisée la mesure, il peut être
intéressant de favoriser les échanges gazeux et noter le sens des variations de pH et la relation pH/Eh.
Enfin, la mesure du pH (et du rH doit être réalisée avant toute filtration.

En océanographie et parfois en hydrologie, des sondes multi paramètres sont


Un détail des
descendues avec une acquisition en continu. Il est alors possible d'effectuer des
capteurs dont la
profils de chacun de ces paramètres. Cette sonde, prévue pour l'étude des fosses
plupart seront
océaniques, est utilisée ici dans le cadre d'un projet sur l'Orénoque. Elle permet
étalonnés juste avant
de mesurer la profondeur, le pH, le rH, la température, l'oxygène dissous, le taux
la mise à l'eau.
de chlorophylle, le taux de MES, la conductivité électrique,… en autres.

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La mesure du Eh (potentiel d'oxydo-réduction)

Elle s'effectue avec une électrode ayant un métal noble, le plus souvent le platine. La mesure du Eh est
délicate ; elle n'est pas toujours possible. Tout d'abord, il faut préciser que le voltmètre donne le rH,
tension d'opposition entre de Eh et l'électrode de référence. Pour passer du rH (valeur lue) au Eh, il faut
donc ajouter le potentiel de l'électrode de référence. Certains préfèrent utiliser le potentiel de l'électron
(pe) pe=Eh.F/(ln10*R*T) avec F le Faraday, R constante des gaz parfaits, T température en °Kelvin.
Aux températures habituelle pe=15*Eh(volt) environ. L'électrode platine est photosensible et il est
préférable de mesurer le rH dans un flacon obscurci. Il est aussi facile de placer l'électrode coté ombre
durant la mesure. Enfin, il est préférable de garder l'électrode dans une solution dont les
caractéristiques chimiques ressemblent à celle des solutions à analyser (ce point est très important).
Ceci facilitera la stabilisation de la mesure. Concrètement, on prélèvement une solution, on place
l'électrode platine dedans, et on s'affère pour les autres mesures. Il suffit ensuite de remplacer la
solution par une fraction aliquote fraîchement prélever et d'effectuer la mesure. Les solutions utilisées
pour la mesure du pH ou du rH ne doivent pas être gardées car elles sont polluées par du KCl. Elles
seront impérativement jetées.

Electrode température à gauche et électrode Eh à droite. Le platine est situé au


bas de l'électrode sur la partie rétrécie. Pour cette électrode, le platine forme
un petit anneau.

La mesure de la conductivité :

Elle est très aisée et fiable. Pas de difficulté particulière à signaler, sauf qu'il ne faut pas utiliser la
solution qui a servi pour la mesure du pH ou du rH.

Conductivimètre de terrain. Comme le pH mètre il est tropicalisé. La mesure de


terrain est très fiable. Un outil précieux pour gérer la stratégie de prélèvements

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La mesure de l'oxygène dissous:

C'est une mesure très utile et fiable pour les eaux relativement aérées ou peu anoxiques. Lorsque l'eau
est très anoxique, la valeur d'oxygène dissous, toujours voisine de zéro ne permettra pas de distinguer
le degré d'anoxie. Dans ce dernier cas, on lui préfèrera les mesures de type Eh. Dans les eaux peu
aérées, la seule introduction de l'électrode aère la solution, altérant la caractérisation. Il ne faut pas
s'étonner de trouver des eaux sur saturées par rapport à l'atmosphère; ceci est possible pour des eaux de
surface dans lesquelles les algues ont une activité photosynthétique importante.

La mesure chimique en éléments dissous réalisée sur le terrain.

Différents équipements portables permettent de nombreuses mesures de terrain. L'expérience montre


que cette mesure est en général moins précise que celle de laboratoire. A chacun sa philosophie en la
matière, mais il semble plus raisonnable d'utiliser des appareils simples (CE, pH, température,..) pour
mesurer les paramètres fugaces ou pour gérer sa stratégie de prélèvement, mais réserver la partie
analytique au laboratoire.

Pour terminer, il faut rappeler que dans certains cas, des études fines nécessitent le transfert jusqu'au
laboratoire des solutions sans en altérer les caractéristiques. Pour les eaux réductrices ceci est difficile.
Il faut utiliser des dispositifs sous atmosphère contrôlée (souvent une atmosphère totalement dépourvue
d'oxygène).

Estimation des données manquantes.


Lorsque l'on réalise des études hydrochimiques, il peut arriver que certaines données soient
manquantes, parce que:

- Certains paramètres sont difficilement accessibles.


• Par exemple la température du réservoir profond des eaux thermales. Lorsque l'on
collecte l'échantillon, il s'est déjà refroidi et il est impossible de connaître les
caractéristiques initiales.
• Lors d'écoulements lents, il est difficile d'appréhender le pH de l'eau car le temps de
recueillir la solution, ce dernier a déjà échangé du CO2 avec l'atmosphère et le pH a été
affecté.
- Des capteurs peuvent avoir des défaillances systématiques ou fréquentes dans des milieux bien
spéciaux. Par exemple la mesure du redox n'est pas possible ou pas fiable dans certains types de
solution.
- les gens qui ont planifié l'acquisition des données n'ont pas pensé à tout et on doit faire avec.

Rien ne remplace l'acquisition de donnée. L'estimation de données est un " pis aller " elle ne remplace
jamais la donnée.

Plusieurs techniques peuvent être utilisées pour estimer la donnée.

- Simulation des variations de conditions redox


- Simulations des variations de l'état de saturation des solutions avec la température.
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- Estimation de p CO2 ou pO2 par les calculs thermodynamiques


- Estimation de p CO2 et du pH en supposant l'équilibre avec la calcite atteint
- Géostatistique ou chrono- statistique pour les séries spatiales ou temporelles dans lesquelles il
manque un terme.
- Statistique usuelle

Les techniques de géostatistiques et chrono- statistiques font l'objet d'un cours à part.

Seuls les quatre premiers points seront abordés ici.

1) Simulation des variations de conditions redox

Ce paragraphe sera traité à partir d'un exemple généralisable.

Des mesures de Eh ont été réalisées dans un milieu réducteur (Eh très négatif), mais pour des raisons
techniques, elles sont jugées non fiables et il convient de les estimer.

Dans un premier temps, il convient de vérifier si les valeurs de Eh mesurées sont plausibles, à partir de
la confrontation entre toutes les données obtenues. En effet, la présence de HS- et SO4-- en quantités
équivalentes est connue d'après les analyses et pCH4 voisin de quelques dizaines de pourcent
d'atmosphère car ce gaz est brulé ce qui implique cet ordre de grandeau pour pCH4.

Une simulation a été réalisée. Les teneurs totales de chaque élément ont été maintenues constantes. Les
calculs ont été répétas pour différentes valeurs du Eh. Les logarithmes décimaux des activités des
principales espèces et des fugacités des gaz ont été calculés. Les résultats sont reportés dans un fichier
excel.

télécharger les résultats de la simulation


Si l'on considère deux graphiques:
- teneurs en SO4 et HS en fonction de Eh. :
La condition de teneurs comparables de ces deux formes du soufre impose une fourchette de eH très
étroite située au voisinage de -0.220 volt.

- pCO2 et pCH4 en fonction de Eh


La condition pCH4 = quelques dizaines de pourcent impose une fourchette de eH très étroite située au
voisinage de -0.250volt.

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Donc ces deux conditions analytiques indépendantes imposent de valeurs assez proches de eH. Ces
deux valeurs se confirment mutuellement. La valeur réelle doit être plus proche de -0.220 volt que de -
0.250 volt car des problèmes de combustion du CH4 montrent que la pCH4 est souvent trop faible pour
assurer un fonctionnement correct.
Donc la valeur de Eh est légèrement supérieure à - 0 .250 volt.

2) Simulation des variations de l'état de saturation des solutions avec la température

Dans le cas d'eaux d'origine profonde (cas des eaux thermales remontant à la faveur d'un thermo-
siphon) la température du réservoir profond ne peut être connu car lors de la remontée, l'eau se
refroidit.

L'analyse de la composition chimique de l'eau fournir les concentrations en éléments totaux dissous.

Les constantes d'équilibre entre les différentes espèces varient avec la température. L'activité elle-
même varie avec la température. Les variations les plus importantes sont en général la solubilité de
certains minéraux. Enfin, pour les températures supérieures à 100°C, (cas des eaux thermales de haute
enthalpie), la pression est obligatoirement supérieure à l'atmosphère, ce qui influe aussi sur la solubilité
des minéraux.

La méthode consiste à introduire la


composition chimique de la solution
dans les modèles thermodynamiques
et d'effectuer les calculs pour toutes
les températures comprises dans une
gamme située au dessus de la
température de la sortie.

On trace la variation de l'index de


saturation des solutions par rapport
aux différents minéraux, comme
fonctions de la température.

Habituellement, on constate que les


solutions sont en déséquilibres avec
tous les minéraux sauf pour une
fourchette restreinte de températures
pour lesquelles plusieurs minéraux présentent simultanément une situation proche de l'équilibre.

On retiendra cette fourchette comme gamme de valeur les plus probable de températures du réservoir.

3) Estimation de pCO2 ou pO2 par les calculs thermodynamiques

4) Estimation de pCO2 et du pH en supposant l'équilibre avec la calcite atteint

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Vérification de la cohérence des données


Lorsque les résultats d'analyse arrivent du laboratoire, elles ne peuvent être utilisées avant de subir
quelque test permettant de s'assurer de leur qualité et de leur fiabilité. Des systèmes de vérification de
la cohérence des données hydrochimiques, plus ou moins sophistiqués ont été proposés par quelques
auteurs. Les possibilités de vérification concernent surtout trois aspects : Ces mêmes principes sont
particulièrement utiles car, le cas échéant, ils permettent de " corriger " les analyses ou bien de
compléter les données manquantes. Cet aspect fera l'objet d'un paragraphe à part entière.

I - Vérification de la balance ionique.

Les solutions sont électriquement équilibrées et donc la somme des charges positives est égale à la
somme des charges négatives. La balance électrique doit être correcte. La somme des charges
cationiques et la somme des charges anionique. L'écart relatif sert de critère principal pour l'évaluation
de la qualité des résultats de l'analyse.

Il est possible de classer les différentes situations rencontrées selon trois cas types.

- Le défaut de balance est important; il excède 10 à 15%. Ces analyses poseront des problèmes. Pour
autant, elles ne sont pas forcément à jeter. Il faut étudier la situation de plus près.

*) Le défaut de balance peut être du à une liste incomplète de paramètre analysés. En fait un élément
majeur pour cette solution n'a pas été dosé. Ce défaut de balance aura servi à révéler cette faiblesse du
travail. S'il reste un volume suffisant de solution, l'analyse pourra être conduite et le défaut corrigé.
Pour trouver " l'élément manquant ", on pourra examiner le COD car il peut s'agir d'un composé
ionique organique, ou bien demander un balayage complet de la table de Mendéléev, même avec une
faible précision analytique, juste pour l'identifier.

*) le défaut de balance est lié à une précision médiocre de l'ensemble des éléments ou de certain d'entre
eux. Les autres techniques de vérification de la cohérence ne pourront être mise à profit pour lisser les
données et corriger le défaut de balance, car ce dernier est trop important. Malheureusement, dans ce
cas, il vaut mieux s'abstenir d'utiliser les résultats d'analyse.

- Le défaut de balance est faible ; il est compris entre 3 et 10%. Les données sont de bonne qualité. Il
convient alors de les tester avec les autres critères de cohérence.

- Le défaut de balance est nul, concrètement il est inférieur à 1%.

ATTENTION ! Dans ce cas, les résultats d'analyse ont probablement été trafiqués ou plus exactement
arrangés. Il convient d'avoir un certain doute quant à la probité du laboratoire. Reste alors à récupérer
les données brutes et à contrôler par vous-même la cohérence des données. La mise sous forme
cohérente ne doit jamais affecter significativement les valeurs et cette transformation ne peut être
réalisée que part la personne qui interprétera ces données.

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II - Vérification de la cohérence entre la composition chimique en éléments majeurs


et la conductivité électrique

Ce paragraphe est probablement le plus délicat de la partie vérification de la cohérence de la


composition chimique. Il a donné lieu à une production scientifique non négligeable. Lorsque la
conductivité électrique est élevée, traduisant ainsi une forte minéralisation de l'eau, la composition
indiquée par l'analyse doit faire apparaître de fortes concentrations en éléments ioniques. Dans le cas
contraire, il y a incohérence. Plusieurs méthodes plus ou moins sophistiquées ont été proposées pour
estimer la conductivité électrique à partir de la composition chimique élémentaire. Il sera utile de se
référer à des auteurs comme J.O. JOB (I.R.D) auteur du logiciel BILION dédié à cette question. Ces
travaux font la synthèse d'articles et de méthodes des chercheurs de nombreux pays. Concrètement, à
partir de la composition chimique, la conductivité électrique est calculée par les trois ou quatre
méthodes proposées. Ensuite, la conductivité électrique mesurée est comparée à la fourchette des
quatre estimations. Il y aura incohérence si la mesure se situe hors de la fourchette. En général, on
considère que la mesure de conductivité, précise en laboratoire comme sur le terrain, est faible. La
présomption d'erreur doit alors se porter sur l'analyse des composés ioniques majeurs.

III - Vérification de la cohérence entre le pH et l'alcalinité.

La vérification de la cohérence entre pH et alcalinité des eaux offre rarement des surprises. Cependant,
il convient de ne pas l'oublier. Le cas le plus flagrant d'incohérence concerne une eau à alcalinité
négative (réserve d'acidité) et pH supérieur à 7. Contrairement au cas précédent, pour ce type
d'incohérence, il est difficile de définir une stratégie générale de correction des données.

Il est cependant possible de distinguer deux principaux cas de figure :

- l'alcalinité est mesurée et le problème est majeur et se termine le plus souvent par le rejet des résultats
analytiques. Il faut cependant s'interroger sur l'origine du problème et dans tous les cas recommencer
l'analyse de l'ensemble des éléments.

- l'alcalinité a été déduite de l'analyse des éléments majeurs et de la neutralité électrique. Dans ce cas,
c'est un élément majeur a probablement été oublié dans l'analyse, ou bien l'imprécision analytique
cumulée sur les éléments majeurs est supérieure à l'alcalinité. Dans ce dernier cas il vaut mieux doser
l'alcalinité pour lever l'ambiguïté.

Pour être plus précis, la mise en évidence de l'incohérence avec une analyse complète peut être précisée
de la façon suivante:

- si alcalinité <0 alors pH < -log10(-alcalinité) + epsilon le epsilon est du au coefficient d'activité
de H+
- si alcalinité >0 alors pH < 14-log10(alcalinité)

dans le cas contraire, il y a incohérence entre pH et alcalinité.

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IV - Correction automatique des analyses

Ces mêmes principes permettent de " corriger " les analyses ou bien de compléter les données
manquantes.

Dans ce dernier cas, le recours à ces méthodes de vérification de la cohérence des données
hydrochimique devient impossible car Le principe de correction automatique s'avère complexe car il
croise toutes les possibilités évoquées précédemment, sachant que l'analyse n'est pas forcément
complète et donc que certaines informations utiles peuvent être absentes.

Les principales actions de corrections automatiques sont les suivantes:

- estimer l'alcalinité par balance électrique lorsque elle n'est pas mesurée
- corriger le défaut de balance électrique en utilisant la CE lorsque cette dernière est disponible.

Si la CE est cohérente avec la composition chimique, alors la correction de balance s'effectuera sur tous
les éléments ioniques, anions et cations, de façon proportionnelle à leur concentration.

Si la CE n'est pas cohérente avec la composition chimique, le défaut de balance sera affecté soit aux
anions soit aux cations selon le schéma d'incohérence CE/Balance, et de façon proportionnelle pour les
paramètres corrigés.

V - Enfin quelques principes généraux

En général, il vaut mieux éviter de mesurer la teneur en trace sans connaître la composition en majeurs

La représentation simplifiée des caractéristiques chimiques des eaux


(diagrammes)
L'utilisation des données en hydrochimie repose parfois sur des outils assez compliqués et lourds
d'emploi, mais dans de nombreux cas il est heureusement possible de visualiser simplement des
caractéristiques importantes d'un échantillon d'eau ou même d'un groupe de solutions.

Le recours à des diagrammes et graphiques divers est donc assez fréquent en hydrochimie. Cependant,
il convient d'être prudent car certains diagrammes, très intéressants au premier abord s'avère être
adaptés uniquement à des cas très spéciaux. C'est le cas notamment de certains types de diagrammes de
Pourbaix intégrant des phases solides, ou de certains diagramme d'équilibre avec différents minéraux.
Dans les deux cas cités précédemment, la définition des différentes zones de la figure a été établie en
supposant que les concentrations de tel ou tel éléments dissous respectaient des conditions particulières.
Leur usage sans précaution peu entraîner des déconvenues.

Il est préférable de n'utiliser que les diagrammes dont le domaine d'application est général.

Enfin, certains diagrammes sont adaptés à l'étude de risques bien spécifiques (risque de sodisation ou
de salinisation des sols par l'eau d'irrigation). Attention de ne pas tenter de les utiliser à d'autres fins !
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Des logiciels très commodes permettant de représenter ces différents diagrammes ont été conçus par
Roland Simler.

Il est vivement conseillé de les télécharger.

télécharger logiciel 1

télécharger logiciel 2

I - Diagrammes de faciès chimique ne pouvant représenter qu'un seul échantillon d'eau

Diagramme de Stabler

Le diagramme de Stabler représente la contribution de chaque espèce ionique à la somme cationique ou


à la somme anionique. Les unités sont donc de équivalents par litre (MC+.l-1) ou, le plus souvent, des
milliéquivalents par litres. Le diagramme se décompose en deux barres, l'une pour les anions, l'autre
pour les cations. Elles ont donc même longueur car les solutions sont électriquement neutres et la
somme des anions est égale à la somme des cations.

Ce diagramme est très utile pour l'étude des équilibres carbonatés. Il permet de représenter très
rapidement l'alcalinité, l'alcalinité résiduelle calcite et les alcalinités résiduelles généralisées.

Exemple de diagramme de Stabler dans le cas d'une Exemple de diagramme de Stabler représentant
alcalinité positive l'alcalinité résiduelle calcite
(l'échelle n'est pas représentée) (l'échelle n'est pas représentée)

II - Diagrammes de faciès chimique pouvant


représenter plusieurs échantillons d'eau
simultanément

Diagramme de Piper

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Diagramme de Schoëller Berkalov

Le diagramme de Schoëller Berkalov permet de


représenter le faciès chimique de plusieurs eaux.
Chaque échantillon est représenté par une ligne
brisée. La concentration de chaque élément
chimique est figurée par une ligne verticale en
échelle logarithmique. La ligne brisée est formée
en reliant tous les points figurant les différents
éléments chimiques.

Un groupe d'eau de minéralité variable mais dont


les proportions sont les mêmes pour les éléments
dissous, donnera une famille de lignes brisées
parallèles entre elles. Lorsque les lignes se
croisent, un changement de faciès chimique est
mis en évidence.

Diagramme de Stiff

III - Diagrammes servant à estimer un risque

Diagramme de Richards (Riverside)


Le diagramme de Riverside repose sur le croisement de deux critères.
- le premier est la conductivité électrique (C.E. ou
EC pour les anglosaxons) ou la charge totale
dissoute (CTD ou TDS pour les anglosaxons). Ce
critère vise à quantifier la charge en sel de la
solution et par voie de conséquence le risque de
salinisation (i.e. d'accumulation de sel dans les
sols). Les eaux sont classées de C1 à C5 selon le
risque croissant de salinisation.

- le second est le S.A.R. (Sodium Adsorption


Ratio) de l'eau ou bien le taux de sodium
échangeable induit par l'eau dans le sol (Na/T ou
ESP pour les anglosaxons). Ce second critère
permet d'évaluer le risque de sodisation du sol par
l'eau d'irrigation. Les eaux sont classées de S1 à
S4 selon le risque croissant de sodisation.

Ce diagramme a été proposé par Richards,


chercheur à l'USDA de Riverside en Californie,
en 1956 ! Il a été très utilisé et l'est encore de nos
jours.

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Ce diagramme est très utile et fiable pour caractériser une eau. Cependant, il est dangereux d'y recourir
pour estimer un risque de salinisation ou de sodisation. Je déconseille donc cet usage. En effet, le
diagramme ne peut prendre en compte l'évolution des caractéristiques de l'eau lorsque sa minéralité
augmente dans les sols des zones arides auxquels il est destiné. Lorsque les eaux se concentrent, elles
précipitent des minéraux, la calcite étant l'un des plus important et des plus précoces à précipiter. Il en
résulte une sur estimation de la charge saline et une sous estimation du rapport Na/Ca. Il sous estime le
risque de salinisation et sous estime le risque de sodisation.

Ce diagramme donne une vision statique des caractéristiques de l'eau mais ne permet pas d'anticiper sur
le devenir de l'eau.

Exemple d'utilisation du diagramme de Riverside avec deux eaux d'irrigation Les points noirs
représentent une eau mexicaine les points blancs une eau du fleuve Niger.

Pour illustrer cette carence, deux échantillons d'eau d'irrigation ont été représentés dans ce diagramme.
Ces eaux sont toutes deux faiblement concentrées et figurent dans la classe C1S1, c'est-à-dire risque
faible de salinisation et de sodisation. Elles présenteraient les mêmes caractéristiques.

Lorsqu'elles se concentrent dans les sols, les caractéristiques évoluent de manières très différentes.
L'eau du Mexique dont l'alcalinité résiduelle calcite est négative, évolue vers un faciès salin neutre peu
sodique. L'eau du fleuve Niger évolue vers des caractéristiques alcalines et présentent un risque
important de sodisation. Le diagramme de Riverside ne permet pas de prévoir cette différence de
comportement.

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Introduction à la thermodynamique des solutions aqueueses et à la


modélisation des interactions ioniques en solution
Il s'agit d'un vaste sujet ayant donné lieu à une vaste production scientifique, à de nombreuses
recherches et même à des écoles de pensées différentes. Ce cours ne sera donc qu'une vision très
partielle et simpliste de l'ensemble des connaissances.

La modélisation thermodynamique des solutions aqueuses est importante car elle permet de
comprendre et de prévoir les interactions diverses entre les éléments chimiques dissous et les autres
phases. Contrairement aux phases solides, la phase aqueuse ne constitue pas le réservoir le plus
important en terme capacitif pour la majeure partie des éléments chimiques des sols ou des roches en
voies d'altération. Cependant, la phase aqueuse est un noeud dans les échanges d'éléments chimiques et
les transformations. C'est un lieu de passage obligé d'une phase vers une autre. En résumé, si la phase
aqueuse n'est pas la plus importante en terme capacitif, elle l'est en terme de flux et en terme réactif, ce
qui justifie l'intérêt qui lui est accordé.

La modélisation thermodynamique des solutions aqueuses revêt deux aspects importants:

- d'une part la modélisation des interactions entre espèces dissoutes au sein même de la solution; il
s'agit de modéliser les interactions énergétiques qui affectent le potentiel chimique du solvant et des
solutés. L'application la plus fréquente est l'estimation de l'activité des espèces dissoutes.

- d'autre part la modélisation des interactions entre la phase aqueuse et les phases solides (processus de
dissolution ou de précipitation de minéraux, phénomènes d'échanges ioniques entre la solution et les
colloïdes du sol (complexe argilo humique, surface d'oxydes métalliques,…), processus biologiques
(absorption d'éléments par les végétaux supérieurs, transformations microbiologiques,…). Cette étape
de modélisation repose sur la précédente.

I - Modélisation des interactions au sein de la solution aqueuse.

1) rappels sur la thermodynamique des solutions aqueuses

a) définition des solutions

Une solution est un mélange homogène de composants. Comme elle est homogène, elle constitue une
phase.

Il existe des solutions

- gazeuses : l'air est une solution gazeuses car c'est un mélange hamogène de plusieurs composés
gazeux (dioxygène, diazote, dioxyde de carbone,…). La répartition des composant de la solution (leur
agencement dans l'espace) varie du fait de l'agitation moléculaire.

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- liquides et parmi ces dernières les solutions aqueuses. Pour les solutions aqueuses, on distingue le
solvant (l'eau) et les solutés c'est-à-dire les composants dissous. Les composants de la solution se
déplacent par l'agitation moléculaire, mais moins que dans les solutions gazeuses.

- solides. Certains minéraux peuvent être considérés comme des solutions solides, des mélanges entre
plusieurs composés minéraux solides. Par exemple les péridots [SiO4]Fe2xMg2-2x (les olivines) sont
des solutions solides de [SiO4]Mg2 (Forstérite) et de [SiO4]Fe2 (Fayalite). L'agencement des
composants de la solution est régulier et rigide. Du fait de leur grande importance en minéralogie, les
solutions solides ont fait l'objet de nombreuses études thermodynamiques précisant les formalismes des
unités et de l'état idéal ou de l'écart à l'idéalité, les interactions énergétiques au sein du solide et le
calcul des activités. Les échanges ioniques entre les solutions aqueuses et les argiles peuvent même être
décrite par la théorie des solutions solides. Un paragraphe important rappellera les bases de la théorie
des solutions solides.

b) Fraction molaire, molarité, molalité

La concentration peut s'exprimer selon plusieurs formalismes. La fraction molaire est un nombre
compris entre 0 et 1 indiquant la proportion d'un composant dans le mélange :

Xi = nXI/(somme des nXj) Avec nXi la quantité de matière du composant i.

Du fait de sa grande généralité, la fraction molaire est très utilisée, notamment pour les solutions
solides.

La molalité est la quantité de matière du composant i par kilogramme de solvant (eau).


La molarité est la quantité de matière du composant i par litre de solvant (eau)

On remarquera que la molalité, s'exprimant par rapport au poids d'eau, c'est-à-dire par rapport à la
quantité de matière du solvant est plus proche de la fraction molaire ; elle n'est pas sujette à la dilatation
ou la contraction de volume par effet thermique ou sous l'effet de la présence de sel, et on préfèrera
donc la molalité à la molarité, cette dernière s'exprimant par rapport au volume.

c) potentiels, potentiel chimique

Solutions gazeuses; si l'on considère les gaz parfaits :


PV=nRT ;
V=nRT/P
dG= VdP= nRTdP/P
G= Constante + nRTlnP = Go + nRTLnP
G/n = Go/n + RTLnP
Pour les solutions aqueuses, de même il vient:
µi = µoi + RTLn(Ci) avec µi potentiel chimique de l'espèce i, µio potentiel chimique standard et Ci la
concentration du soluté i, selon une échelle de concentration qui peut être la molalité.
On rappelle que µi est la dérivé partielle de G par rapport à ni.

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Cependant, tous les gaz n'ont pas un comportement de gaz parfait en toute condition, les solutions
aqueuses ne sont pas idéales quelle que soit la concentration.

Cet écart à l'idéalité est du à des interactions énergétiques entre les composants de la solution. Ce sont
les interactions décrites dans les paragraphes précédents.

d) notion d'activité chimique

Lorsque les solutions n'ont pas un comportement idéal, la relation:

µi = µoi + RTLn(Ci) n'est plus valable et doit être remplacée par µi = µoi + RTLn(ai) avec ai l'activité
chimique de l'espèces dissoute i

ai=e((µi-µi°)/RT)

On remarque que l'activité chimique est un nombre sans dimension car µi, µi° et RT sont dans les
mêmes dimensions.

Avec ai = mi* gamma i


ai : activité chimique de l'espèce i
mi : molalité
gamma i : coefficient d'activité de l'espèce i
En combinant les relations précédentes, il vient :
µi =µi° + RT Ln ai µi =µi° + RT Ln mi + RT Ln (gamma i)

La première partie représente le comportement idéal de la solution et le dernier terme représente l'écart
à l'idéalité. Il intègre l'écart énergétique au comportement idéal du composant i, du à la présence des
tous les composants de cette solution et plus particulièrement aux diverses interactions énergétiques
précédemment mentionnées. Ainsi, les modèles d'estimation des activités chimiques vont différer par
les interactions prises en comptes pour le calcul du coefficient d'activité.

e) les interactions dans les solutions aqueuses

Le calcul et la modélisation des propriétés thermodynamiques des solutions aqueuses repose sur la
connaissance des interactions entre les composantes de la solution. Ces interactions peuvent être
classées en 3 catégories:

Les interactions soluté - soluté


Les interactions soluté - solvant
Les interactions solvant - solvant
Les interactions soluté-soluté sont dues à une diversité de processus énergétiques :
- interactions de longue distance.

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Ce sont des interactions coulombiennes qui concernent des espèces chimiques chargées, c'est-à-dire des
ions. Elles dominent lorsque les ions sont éloignés. Le potentiel uij entre les espèces i et j est du type :
uij=ei.ej/rij avec rij=|ri-rj|. Comme ce potentiel varie avec la puissance -1 de la distance entre les ions.
Il est donc sensible même aux distances importantes entre les ions, on nomme ces interactions
coulombiennes: interaction de longue distance.

Lorsque les solutions son peu concentrées, la distance moyenne entre les solutés ionique est importante.
Lorsque les solutions sont concentrées, la distance moyenne entre les molécules de solutés est faible.
Ainsi, les interactions de longue distance affecteront les solutions ioniques dès de faibles
concentrations. Lorsque les eaux se concentrent ou gagnent en minéralité, les interactions de longue
distance seront les premières à être non négligeables.

- interaction de courte distance

Contrairement aux interactions de longue distance qui ne sont dues qu'à un seul processus énergétique,
ces interactions de courte distance sont dues à une certaine diversité de processus.

" Les moment dipolaires induits. Les ions induisent la création d'un moment dipolaire dans les autres
ions qui sont polarisables. Le potentiel d'interaction de polarisation est proportionnel à r-4 (1/r(4)) et à
la polarisabilité des ions alpha1 et alpha2. u12 = - (z1(2) alpha2 + z2(2) alpha1)/r12 (4) Du fait de la
puissance élevée (4) de la distance, ces interactions ne sont sensibles que lorsque les solutés concernés
sont très proches et donc lorsque les solutions sont très concentrées.

" Interaction dispersive. Quand deux molécules s'approchent l'une de l'autre, des influences entre les
nuages électroniques produisent un potentiel d'attraction en 1/r6

" Les forces de répulsion entre les nuages électroniques repoussent les ions lorsqu'ils s'approchent à très
faible distance. Cette répulsion peut être approchée par une fonction du type Ae(-br).

Les interactions solutés/solvant

Mise à part l'interaction coulombienne, les autres interactions solutés/solutés (c'est-à-dire les
interactions à courte distance) agissent aussi entre les solutés et le solvant (eau) car celui-ci présente un
moment dipôlaire.

Ainsi, comme au voisinage d'un soluté ionique il existe un champ électrique, les molécules neutres de
solvant peuvent être attirées et former des " couches " d'hydratation. Lorsque les solutions sont
extrêmement concentrées, l'eau pet être considérée comme toute impliquée dans ces processus
d'hydratation, ce qui modifie son statut énergétique. Pour terminer, il est aisé de comprendre que
lorsque la teneur en espèces ionique est très élevée, le statut d'hydratation des ions est amené à changer
ne serait-ce par manque d'eau et par modification de l'énergie du solvant.

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Par ailleurs, les molécules d'eau présentent un moment dipôlaire permanent (un moment
quadripôlaire,..) Ainsi, à titre d'exemple, l'interaction ion/dipôle est du type -zµe/r2 avec µ moment
diélectrique du dipôle et ze la charge.

Les interactions solvant/solvant

Hormis les interactions coulombiennes ou celles qui impliquent un ion, toutes les interactions
précédentes concernent les molécules de solvant entre elles et les autres espèces chimiques neutres
entre elles.

Autre types d'interactions: l'association ionique (paires d'ions)

Cette théorie a été introduite par Bjerrum qui considère que lorsque deux espèces chargées s'attirent et
sont suffisamment proches l'une de l'autre et suffisamment longtemps, on peut les considérer comme
une nouvelle espèce chimique, une nouvelle entité dans la solution, que l'on nomme un complexe.
L'existence de ces complexes est certaine car il est possible de les mettre en évidence dans les eaux
naturelles par différentes techniques, notamment des techniques spectroscopiques. Ces complexes
peuvent être chargés ou bien électriquement neutres.

La formation de ces complexes perturbe sérieusement les théories énergétiques qui considèrent des
espèces ioniques ponctuelles ou des dipôles.

Ces complexes ou paires d'ion se forment plus volontiers avec certaines espèces chimiques qu'avec
d'autres. Ainsi, le chlorure, le potassium ou le sodium sont pu enclins à la formation de complexes. En
revanche les carbonates, bicarbonates, les sulfates, le calcium et surtout les composés organiques
forment volontiers des complexes.

Ainsi, il conviendra de prendre en compte ces paires d'ions dans les eaux naturelles qui contiennent
souvent des quantités non négligeable de calcium, magnésium, sulfate et bicarbonates.

Il conviendra aussi de distinguer les formes libres des formes complexes.

Par ailleurs, lors de l'analyse chimique, on mesure la concentration totale dissoute, toutes formes
confondues, par exemple avec des techniques telles que l'absorption atomique ou l'ICP.

En prenant l'exemple du calcium :

CaTotal= Ca++ + CaHCO3+ + CaCO3° + CaOH+ + CaSO4° + CaX+ + ….

Ca total est la quantité totale dosée,

Ca++ représente la forme libre,

les autres sont des formes complexes neutres comme CaSO4° ou CaCO3° ou bien chargées CaHCO3+,
CaOH+, CaX+,… avec X un anion organique.

Les formes Ca++, CaHCO3+, CaSO4°,… sont inorganiques et CaX+ est organominérale.

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La formation de ces complexes obéit à l loi d'action de masse et aux règles de la cinétique en phase
homogène. Il s'agit en général de réactions très rapides pouvant être considérées comme quasiment
instantanées sauf dans certains cas. Il s'agit donc d'équilibres.

Ainsi, pour le complexe CaHCO3+ :


HCO3- + Ca++ = CaHCO3+
La constante d'équilibre associée est :
aCaHCO3+/(aCa++.aHCO3-) = Ks(T,P)
avec aCaHCO3+ aCa++ et aHCO3- les activités chimiques des espèces correspondantes.
Par ailleurs, la loi de conservation de masse appliquée au calcium donne:
Ca = mCa++ + mCaHCO3+ + mCaOH+ + mCaSO4° + mCaCO3° + mCaX+ +…

Avec mCa++, mCaHCO3+,…. :les molalités des ions correspondants (nombre de moles par kilogramme
de solvant).

2) les modèles d'interactions ioniques et les modèles d'association ionique

- force ionique, loi limite, loi de Debye Hückel

La force ionique mesure la concentration globale de la solution en composés ioniques.


I = somme sur les tous les solutés i des 0.5 mi.zi² ;
mi est la molalité et zi la charge électrique de l'ion i.
Exemples:
solution Na+Cl- de concentration 0.6 m.kg-1 : I= 0.5*0.6*(+1)² + 0.5 * 0.6 (-1)² = 0.6
solution Ca++ 2 Cl- (CaCl2) 0.6 m.kg-1 : I= 0.5*0.6*(+2)² + 0.5*1.2* (-1)² = 1.8
A titre indicatif, l'eau de mer moyenne, présente une force ionique voisine de 0.6.

Les premières interactions importantes apparaissant lorsque la force ionique des solutions augmente,
est l'interaction électrostatique car c'est une interaction de longue distance.

Ainsi, les différents modèles doivent au minimum prendre en considération ce type d'interaction.

Moyennant certaines approximations, la représentation énergétique des phénomènes électrostatique


conduit à la relation suivante:

log 10 (gamma i) = -A * |z+.z-| * racine carrée (I)


log10(gamma i)= -A z² I

A est une constante qui ne dépend que de la température et de la pression. Cette constante intègre les
propriétés diélectriques de l'eau.

Cette loi limite n'est valable que pour les solutions diluées et elle a été étendue aux solutions plus
concentrées :

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log10(gamma i)= -A z² racine carrée(I/)(1+a°iB racine carrée(I))

a°i est un paramètre d'approche minimale de l'ion i, c'est un paramètre géométrique grossièrement relié
à sa taille.

En fait, lors de l'établissement de la loi de Debye-Hückel, l'intégration des énergies mises en jeu par les
forces électrostatiques nécessite lors de l'intégration une même distance d'approche pour tous les ions,
ce qui ne peut correspondre bien sur à la réalité. Ainsi, un paramètre correctif a°i est introduit de façon
empirique et en contradiction avec l'hypothèse d'égalité de distance d'approche pour tous les ions
utilisée pour établir cette même loi. Il s'agit donc d'une tentative empirique de correction.

B est une autre constante comme A

C'est la loi de Debye-Hückel étendue aux solutions concentrées. Pour les solutions plus concentrées
cette loi de Debye-Hückel même étendue s'écarte de la réalité et différents auteurs ont tenté d'y ajouter
un terme correctif. Le plus connu et le plus simple est l'extension de Scatchard qui est proportionnel à
la force ionique.

log10(gamma i)= -A z² racine carrée(I)/(1+a°iB racine carrée(I)) +C I

D'autres auteurs ont tenté d'aller plus loin en prenant un terme correctif polynomial par rapport à I la
force ionique. Ces tentatives n'ont pas eu le succès escompté car trop empiriques et ne s'adaptant pas à
tous les cas de cette grande diversité que représentent les solutions naturelles.

- présentation des modèles d'interaction ionique; forces et limites

Les modèles d'association ionique prennent en compte les interactions de longue distance, c'est-à-dire
les interactions coulombiennes, par la loi de Debye-Hückel étendue et l'existence des complexes (paires
d'ions).

Il sont donc très adaptés aux solutions naturelles (eaux naturelles) qui comportent des ions propices à la
complexation (bicarbonates, sulfates, calcium, magnésium, composés organiques,..). Ils intègrent donc
des bases de données thermodynamiques sur les constantes de stabilité des différents complexes.

Cependant, lorsque les solutions sont concentrées, les interactions à courte distance ne deviennent plus
négligeables et la loi de Debye-Hückel même étendue ne suffit plus.

Ces modèles sont peu adaptés au cas des saumures.

- présentation des modèles d'association ionique; forces et limites

Les modèles d'interactions ioniques prennent en compte toutes les interactions ioniques de longue
comme de courte distance. Ils intègrent les interactions entre deux composant i et j de la solution, mais
aussi les interactions entre 3 composants i, j et k de la solution.

Ils s'adaptent donc très bien au cas des saumures. Ils peuvent donner d'excellents résultats même
jusqu'à des forces ioniques de 5 ou 6, ce qui est considérable.

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Cependant, ils ne prennent pas en compte clairement les paires d'ion (les complexes). De ce fait, ils
fonctionnent mal pour les solutions comportant ces ions aux propriétés complexantes, ions fréquents
dans la nature. Des tentatives d'hybridation ont été lancées intégrant les complexes dans ce type de
calcul, mais les résultats sont décevants car au niveau algorithmique, les avantages des modèles
d'interactions ioniques, c'est-à-dire la non itérativité, est perdue.

Par ailleurs, les coefficients d'interactions des ions deux à deux ou trois à trois sont déduits
d'ajustements sur des solutions synthétiques de laboratoire. Cet justement est empirique et dès que la
nature des solutés change, c'est-à-dire lorsque le faciès chimique change, les calculs sont mauvais et il
convient de déterminer un nouveau jeu de paramètres. C'est la conséquence du caractère empirique de
l'ajustement.

- autre modèle : le modèle de réseau des électrolytes forts

Cette théorie est ancienne car elle a précédé celle de Debye-Hückel, mais cette dernière l'a effacé.

Lorsque les solutions sont concentrées, que le nombre d'ions est important dans une matrice de
molécules d'eau, il peut être judicieux de considérer la solution comme un arrangement régulier de type
réseau cristallin, par exemple cubique comme le cristal de halite, plutôt qu'un arrangement sphérique
comme pour la théorie de Debye-Hückel. Les différents travaux estiment que l'arrangement de nuage
sphérique tel que le considère l'approche de Debye-Hückel n'est plus adapté à la réalité dès lors que la
force ionique dépasse une limite située aux environs de 1E-3 1E-2.

L'approche réseau ne s'applique qu'au cas des électrolytes forts, c'est-à-dire ne présentant pas ou peu)
de propriétés complexantes. Ce modèle considère que la constante diéléctrique du milieu est homogène
dans le volume du pseudo-cristal et présente une valeur dépendante de la concentration. Les
interactions solvant solutés sont pris en compte.

Ce type de modèle, longtemps délaissé, est intéressant et prometteur. Des travaux plus récents
explorent ses possibilités.

Cependant, des problèmes conceptuels se présentent lorsque on les applique aux solutions réelles. En
effet, on considère les solutions de sels mixtes comme des mélanges de sels binaires purs et selon le
découpage en sels binaires que l'on réalise, les estimations d'activités estimés sont différentes pour un
même ion et pour la même solution, ce qui est conceptuellement très gênant voire inconcevable. Par
exemple si l'on considère une solution contenant les ions Cl-, Na+, Mg++ et SO4-- ; on peut la considérer
comme un mélange de NaCl, MgSO4 et Na2SO4, ou bien un mélange de MgCl2, NaCl et MgSO4. Selon
les deux modes de calculs, les résultats seront différents pour la même solution.

Il s'agit donc d'une famille de modèle très intéressante, dont il faut suivre les développements futurs.

La connaissance des possibilités et des limites de chaque famille de modèles est importante pour
l'application. Toutefois, certaines limites peuvent être repoussées. Ainsi, les modèles d'association
ionique limités à des forces ioniques inférieures à 0.6 peuvent voir leurs performances améliorées si
l'on intègre d'autres formalismes pour l'extension.

Les deux figures suivantes, traitant des données de Gueddari sur les saumures du Chott el Jerid en
Tunisie, montrent le diagramme d'équilibre avec le gypse pour un même jeu de données. Le premier

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traitement repose sur la loi de Debye-Hückel étendu aux solutions salées et prenant l'extension de
Scatchard. Le second intègre un terme lié à l'hydratation des ions à la place de l'extension de Scatchard.
Ce dernier calcul donne les mêmes résultats que les modèles d'interaction ionique les plus performants.

Diagramme d'équilibre avec le gypse. Données de M. Gueddari (Chott El Jerid Tunisie).


Le diagramme du haut, obtenu avec l'extension de Scatchard, montre un nuage de points sans relations
apparentes. Les calculs avec une autre extension, ou avec les modèles d'interactions ioniques présentent
l'allure habituelle de T incliné prévue par la loi de l'alcalinité résiduelle généralisée.

3) équations de base et algorithmes des modèles d'association ionique et des modèles


d'interactions ioniques

- modèles d'association ionique

La loi de Debye_Hückel étendue et extension

A première vue, le calcul de la loi de Dehye-Hückel ne pose aucun problème. Il suffit de calculer la
force ionique I et d'appliquer la formule.

En réalité les choses sont plus compliquées. En effet, pour calculer I, il faut connaître la répartition de
chaque élément chimique en ses différentes espèces.

Ainsi, pour le calcium, si l'on considère par exemple 3 millimoles de calcium par kilogramme d'eau, sa
contribution à la force ionique sera différente selon que

ce calcium sera totalement libre Ca++ (0.5.3E-3.(-2)²=6E-3)

ou bien que ce calcium est réparti 0.2mmillimole libre Ca++ et 0.1 millimole sous forme CaHCO3+
(0.5.2E-3.(-2)²+0.5.1E-3.(+1)² = 4E-3+0.5E-3 = 4.5E-3).

Or comme, il sera vu dans le paragraphe suivant, le calcium de la répartition du calcium entre ses
différentes formes nécessite la connaissance des coefficients d'activités et donc de la force ionique.

Le serpent se mord la queue et on ne sait comment commencer.

La solution sera donnée dans la partie algorithmique.

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La prise en compte des complexes

Si l'on reprend l'exemple du calcium,

Ainsi, pour le complexe CaHCO3+ : HCO3- + Ca++ = CaHCO3+

La constante d'équilibre associée est :

aCaHCO3+/(aCa++.aHCO3-) = Ks(T,P)

avec aCaHCO3+ aCa++ et aHCO3-

les activités chimiques des espèces correspondantes.

Par ailleurs, la loi de conservation de masse appliquée au calcium donne:

Ca = mCa++ + mCaHCO3+ + mCaOH+ + mCaSO4° + mCaCO3° + mCaX+ +…

Avec mCa++, mCaHCO3+,….

Les molalité (nombre de moles par kilogramme de solvant voir plus loin).

Or comme aCaHCO3+ = mCaHCO3+ *gammaCaHCO3+

Avec aCaHCO3+ l'activité de cet ion, et gammaCaHCO3+ son coefficient d'activité

Il vient :

Ca = (aCa++/ gammaCa++) + (aCaHCO3+/ gammaCaHCO3+) + (aCaOH+/ gammaCaOH+) + (aCaSO4°/


gammaCaSO4°) + (aCaCO3°/ gammaCaCO3°) + (aCaX+/ gammaCaX+ ) +…

Par ailleurs, on peut exprimer l'activité de chaque complexe à partir de celle du calcium:

aCaHCO3+=aCa++ . aHCO3- . KsCaHCO3 (1)

d'où Ca = (aCa++/ gammaCa++) + (aCa++.aHCO3-.KCaHCO3/ gammaCaHCO3+) + (aCa++ . aOH- .


KCaOH+/ gammaCaOH+) + (aCa++ . aSO4-- . KCaSO4°/ gammaCaSO4°) + (aCa++ . aCO3-- . KcaCO3°/
gammaCaCO3°) + (aCa++. aX- . KCaX+/ gammaCaX+ ) +…

Il devient alors de factoriser

aCa++ Ca = aCa++. [(1/ gammCa++) + (aHCO3-.KCaHCO3/ gammaCaHCO3+) + (aOH- . KCaOH+/


gammaCaOH+) + (aSO4-- . KCaSO4°/ gammaCaSO4°) + (aCO3-- . KcaCO3°/ gammaCaCO3°) + (. aX- .
KCaX+/ gammaCaX+ ) +…]

Ou encore

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Ca = mCa++. [(1/ gammaCa++) + (aHCO3-.KCaHCO3/ gammaCaHCO3+) + (aOH- . KCaOH+/


gammaCaOH+) + (aSO4-- . KCaSO4°/ gammaCaSO4°) + (aCO3-- . KcaCO3°/ gammaCaCO3°) + (. aX- .
KCaX+/ gammaCaX+ ) +…] / gammaCa++

Le calcul de la molalité de l'espèce libre du calcium est alors accessible par: mCa = CaT . gammaCa++
[(1/ gammaCa++) + (aHCO3-.KCaHCO3/ gammaCaHCO3+) + (aOH- . KCaOH+/ gammaCaOH+) +
(aSO4-- . KCaSO4°/ gammaCaSO4°) + (aCO3-- . KcaCO3°/ gammaCaCO3°) + (. aX- . KCaX+/
gammaCaX+ ) +…] (2)

OUFF!!!!!

Mais si l'on y regarde de plus prêt, pour calculer la molalité du calcium libre, il faut connaître l'activité
de SO4--, OH--, HCO3-, X-,.... et pour calculer l'activité de ces espèces, il faudra connaître la molalité de
leur forme libre et donc l'activité du calcium.

Le serpent se mord la queue une seconde fois!

Comment commencer le calcul?

Il faut recourir à un algorithme itératif.

Algorithme Version simple

Lecture des concentrations totales

Dans un premier temps, on estime que tous les éléments sont sous forme libre

(a) Calcul de la force ionique et des coefficients d'activité

(b) Estimation de l'activité de formes libres par aCa++ = mCa++ * gammaCa++, aSO4-- = mSO4-- *
gammaSO4--,

- calcul de l'activité des formes complexes par l'équation d'action de masse des complexes (1)
- il est alors possible de recalculer la molalité des formes libres en intégrant cette fois-ci la
présence de complexes, même de manière imparfaite, mais le calcul s'affine.
- on repart en (b) avec des molalités affinées.

Cette boucle de calcul itératif est répétée jusqu'à convergence de la spéciation.

(c) Nouveau calcul de la force ionique et des coefficients d'activité à partir de la nouvelle répartition de
chaque élément en ses différentes espèces.

On repart donc en (a) avec un calcul itératif qui sera répété jusqu'à convergence.

Lorsque le second niveau d'itérations converge, les différentes équations de conservation de masse sont
vérifiées, la neutralité électrique aussi, les lois d'action de masse appliquées à la stabilité des complexes
aussi. Ainsi, toutes les équations sont vérifiées simultanément.

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- modèles d'interactions ioniques

De nombreuses versions de modèles d'interactions ioniques ont été proposées. Leur principe est
relativement voisin, mais ces modèles diffèrent par le degré de sophistication des combinaisons
d'interactions prises en compte par le biais de termes additifs à la loi limite, c'est-à-dire à la prise en
compte des phénomènes électrostatiques.

A titre d'illustration, on peut retenir le formalisme de Pitzer (1975) : (avec a les anions et c les cations
pour les sommes).

Ln(gamma)MX = Ln(gamma)EL
+ 2( nuM/nu ) somme Xama + 2( nuX/ nu) sommeXcmc
+ somme sur a, somme sur c ma mcXac
+ 0.5 (nu X/nu ) ma ma' psy aa'X
+0.5 ( nuM/nu ) mc mc' psy cc'M
avec :
Xa=BMa + somme ma za CMa + ( nuX/nu M) theta ax
Xc=BcX + somme mc zc CcX + (nu M/nu X) theta cM
Xac=zm zx B'ac + 2((nu M.nu X/nu )Cac +(nu M/ nu) .Psy Mca +(nu x/nu ).Psy Xca

Bac et B'ac sont des fonctions de la force ionique que l'on ne détaillera pas ici mais qui reposent sur
une kyrielle de paramètres d'ajustement.

4) domaine de validité des différents modèles

Après cette rapide présentation des bases des différents modèles, il convient de définir leur gamme
d'application.

- Dans les solutions très diluées, c'est-à-dire lorsque I < 1 E-4, il est possible de confondre activité et
concentration (molalité et molarité sont aussi quasiment égales). Cependant, les phénomènes de
complexation, quoique de faible intensité, peuvent ne pas être négligeables selon le faciès chimique.
Malheureusement, la quasi-totalité des eaux naturelles présente des forces ioniques bien supérieures à
1E-4. Certaines eaux extrêmement diluées sous climat tropical humide et sur roche peu solubles
(quartzeuses) peuvent avoir des conductivités électriques très basses, cependant, la seule dissolution du
CO atmosphérique suffit à augmenter les concentrations en HCO3- et H3O+, ce qui conduit à une force
ionique supérieure à 1E-4.

- Lorsque la force ionique est comprise entre 1E-4 et 1 E-3, les phénomènes de complexation
deviennent plus importants sauf dans le cas de solutions uniquement chlorurées ou sodiques ce qui est
rare pour les eaux naturelles diluées. Dans cette gamme de concentrations, molalité et activité
commencent à diverger du fait de la complexation. En revanche les interactions longue et courte
distance sont négligeables. Ainsi, l'activité est proche de la molalité de l'espèce libre.

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- Pour des forces ioniques supérieures à 1E-2, les interactions à longue distance, c'est-à-dire les
interactions coulombiennes, ne sont plus négligeables. Il faut prendre en compte la loi de Debye-
Hückel. Tous les modèles convergent vers cette loi aux faibles concentrations. Dans cette gamme de
force ionique, tous les modèles se valent sauf si la solution contient des composants propices à la
complexation auquel cas les modèles d'interaction sont peu adaptés.

- Pour les forces ioniques comprises entre 1E-2 et 0.6 (salinité équivalente à celle de l'eau de mer), les
modèles d'association ionique basés sur la loi de Debye-Hückel donnent de mauvais résultats. Ils
doivent impérativement intégrer un terme correctif du type extension de Scatchard. Dotés de cette
modification, ils donnent de bons résultats jusqu'à 0.6 voire légèrement plus (1 maximum).

- Lorsque la force ionique est comprise entre 1 et 6, les modèles d'association ioniques, même flanqués
de l'extension de Scatchard ou une autre équivalente, donnent de mauvais résultats. La dérive est telle
qu'elle empêche toute interprétation sérieuse. Seuls les modèles d'interactions ioniques peuvent être
utilisés, à condition qu'ils aient été paramètres sur des solutions synthétiques de la même famille
chimique. Cependant, certaines avancées de modèles d'interactions ioniques qui intègrent la loi de
Debye-Hückel plus de effets des interactions eau-soluté donnent des résultats aussi bons que ceux des
modèles d'interactions ioniques. Les deux figures présentées plus haut en témoignent.

En guise de conclusion sur cette partie consacrée à la thermodynamique des solutions aqueuses, il
apparaît que tous ces modèles, chacun avec leurs forces et leurs limites, permettent d'estimer l'activité
chimique des différents composants de la solution et en premier lieu celle des espèces ioniques (tout ce
qui concerne les espèces neutres et l'activité de l'eau a été délibérément omis afin d'alléger ce support
de cours). La difficulté de mesure des activités chimiques, même en laboratoire, explique le grand
intérêt porté à ces modèles.

A partir de l'analyse chimique, ils fournissent donc une estimation de l'activité des différents ions de la
solution. Il est alors possible d'étudier l'état de saturation de ces solutions par rapport à différents
minéraux, et commencer à mettre en évidence certains des mécanismes responsables de la qualité des
eaux étudiées.

II - Modélisation de la dissolution et de la précipitation des minéraux

Les modèles les plus utilisés, considèrent

- soit que la mise en équilibre de la solution avec les minéraux est instantanée ou ne se fait pas ; en fait
par rapport aux échelles de temps de l'étude, par rapport à l'échelle de temps des transports de solutés,
des temps de résidence des solutions dans les différents réservoirs, ce modèles considèrent que l'aspect
cinétique des réaction de dissolution et de précipitation est négligeable. Les modèles correspondants
considèrent alors que l'équilibre entre les solutions et les minéraux est toujours atteint. Ce sont des
modèles dits d'équilibre thermodynamique.

- soit que la réaction présente une certaine cinétique. Il convient de renseigner alors le modèle sur le
formalisme retenu et les paramètres nécessaires.

Ce sont des modèles cinétiques. D'un point de vue algorithmique, plusieurs méthodes sont utilisées.
Pour les modèles d'équilibre, la prise en compte d'un équilibre solution minéral induit une relation (une
contrainte ou encore la perte d'un degré de liberté du système) et ceci se traduit par une modification de

-30-
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ligne dans une résolution matricielle du changement de concentration lors de la dissolution de n


micromolles de roches ou lors de l'évaporation d'un peu d'eau. C'est le cas de modèles tels que EQUIL
et EQUIL(T). Ce type de résolution est assez lourd mathématiquement et nécessite des temps de calculs
importants. Un autre mode de calcul repose sur la minimisation de l'enthalpie libre de Gibbs (delta G)
qui est plus calquée sur une approche mécaniste et énergétique. La résolution est alors plus légère et les
calculs moins lourds. Ce type d'approche est aussi retenu de manière quasi obligatoire dans le cas de
modèles cinétiques.

Cependant, tous les processus de précipitation et de dissolution ne sont pas normés sur delta G. Il
convient de les préciser.

- processus chimiques liés à la précipitation

* Rappel sur la notion d'énergie interfaciale solide/liquide et conséquence sur la solubilité des minéraux
de petite taille.

Lorsque l'on brise un cristal, on doit fournir une certaine énergie pour rompre les liaisons chimiques
dans l'arrangement régulier cristallin. Lorsque l'on augmente la surface d contact entre l'eau et l'air il en
est de même car les molécules d'eau ont des liaisons énergétiques entre elles au sein de la masse
liquide. La création d'une nouvelle surface de contact avec l'air nécessite une énergie. Cette énergie
interfaciale est proportionnelle à la surface nouvellement crée.

deltaG= gamma * deltaS


gamma est l'énergie interfaciale et S la surface de contact entre le minéral et l'extérieur.

Si l'on brise un gros cristal son nouveau énergétique varie et par voie de conséquence sa solubilité
aussi. Lorsque l'on considère un minéral de grande taille et que ce minéral se fractionne en grains de
plus petite taille, sa solubilité augmente avec le fractionnement du minéral.

Modèle sphérique:
S=2pir²/5
V=3pir²r/4
n= m/M=ro*V/M= 3*ro*pi*r²*r/(4*M)
DeltaG=Gamma*S
deltaG/n=Gamma*M*2/(3*ro*r*5)= Gamma*M*2/(15*ro*r)
deltaG/n= Constante*Gamma/r
deltaG/n=R*T*Ln (Kr=infini) - R*T*Ln(Kr)
ln(Kr) =ln(K) + constante*Gamma/(R*T*r)
ln(Kr) = ln(K) + Cte'/r
Kr=K*e(Cte'/r)

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Cette variation de solubilité avec les caractéristiques géométriques des cristaux est importante à
considérer car elle permet d'expliquer en partie la redistribution de matière lors de la cimentation de
matériaux granulaire.

* Nucléation

Pour une taille " infiniment petite " la solubilité du minéral est " infiniment" grande. Ainsi, lorsque une
solution est sur saturée par rapport à un minéral, pour initier la précipitation, elle devrait commencer
par cristalliser un tout petit cristal. Comme la solubilité de ce dernier est " infinie ", il ne peut précipiter
car si la solution est sursaturée par rapport à un minéral de grande taille, cette même solution sera sous
saturée par rapport à un minéral de taille " infiniment petite ". Il existe donc une limité à ce concept
d'énergie interfaciale et solubilité. Il existe un rayon de sphère minimal et donc une solubilité maximale
à partir de laquelle, lorsque la solution est suffisamment sur saturée, la précipitation est initiée sous
forme d'un petit cristal, un nucleus. C'est la nucléation. Il nécessite une forte sur saturation de la
solution par rapport à la solubilité d'un cristal de grande taille. Une fois que le nucleus est formé la
précipitation est enclenchée et peut être rapide. Les minéraux construits durant ces phases sont souvent
désordonnés du fait de la vitesse de précipitation. Ils sont souvent mal cristallisés, ce qui est décelable
par exemple par les techniques de rayons X. Ce processus de nucléation, responsable de la formation,
de cristaux de petite tille est donc typique des conditions de surface qui de part leur brusques variations
temporelles des conditions physico-chimique permettent d'atteindre ces sur saturations importantes. En
profondeur, les variations temporelles de la physico-chimie des solutions est plus lente, les
sursaturations ne peuvent être aussi importantes qu'en surface un autre processus devient prédominant :
c'est le mûrissement des grains (le grossissement des grains).

* Mûrissement (Grossissement)

Lorsque la solution est légèrement sursaturée par rapport au minéral elle a tendance à précipiter du
solide. La solubilité des minéraux de petite taille étant élevée, la solution ne pourra former ces
minéraux, au contraire elle dissoudra ces derniers pour aller grossir les minéraux de plus grande taille,
moins solubles. C'est le processus de mûrissement. Si l'on excepte les très petits grains issus de la
nucléation, la variation de solubilité avec la taille est faible. Aussi, la différence d'énergie mise en jeu
par la dissolution des petits grains et la précipitation des plus gros, est faible elle aussi. Comme cette
différence d'énergie est le moteur de la réaction, cette dernière sera lente. Il s'agit d'un processus
extrêmement lent qui a lieu dans des conditions de composition chimique relativement stable dans le
temps. Il survient plutôt en profondeur au contact de nappes aux caractéristiques chimiques
relativement stables dans le temps.

* Empoisonnement des surfaces :

ralentissement ou arrêt voire inhibition complète de la précipitation par grossissement, ce qui favorise
la nucléation et provoque un maintient en sur saturation. Ce processus induit un emprisonnement de
traces ou/et sorptions en surface.

- processus chimiques liés à la dissolution

* réaction à l'interface minéral/solution


* diffusion des produits de la dissolution.

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Plusieurs échelles dans la diffusion des produits de la réaction : échelle moléculaire au voisinage de
l'interface solide/liquide, et échelle macroscopique au niveau de la microporosité (tortuosité, degré de
connexion avec le reste de la porosité,…) donc cinétiques pouvant différer selon le processus limitant
en vitesse.

- les modèles d'équilibre et les modèles cinétiques

* notion de temps de résidence: un réservoir (eau du sol, eau de lac, eau de nappe) présente un volume
donné et un flux entrant-sortant. Volume/débit=temps moyen de résidence dans le réservoir. L'ordre de
grandeur de ce temps de résidence doit être comparé au temps caractéristique de la cinétique (temps de
demi réaction).

* notion de cinétique comparée (réactions/résidence-transport)

+ Dans certains cas, le temps de résidence est très grand par rapport au temps de demi réaction. Dans ce
cas on peu ignorer la cinétique chimique pour ce réservoir et travailler (simuler) à l'équilibre.

+ Dans d'autres cas, le temps de demi réaction est très grand par rapport au temps de résidence. On
pourra considérer les transports comme non réactif et négliger les réactions chimiques.

+ Enfin si les deux temps (temps de résidence et temps de demi réaction) ont des ordres de grandeur
comparables, alors il faudra modéliser un transport réactif avec effet cinétique.

Les modèles cinétiques chimiques utilisés en géosciences sont de types assez divers. Certains sont
basés sur une cinétique normée sur la différence d'enthalpie libre de Gibbs entre la situation au point de
départ et la situation d'équilibre. Ces modèles dits de minimisation de l'enthalpie libre de Gibbs, ont
l(avantage d'être léger en terme de temps de calcul du fait de l'algorithme de calcul extrêmement
simple. A un instant donné, la composition de la solution permet de calculer les activités chimiques et
donc l'index de saturation IS pour tous les minéraux, l'enthalpie libre de réaction se déduit simplement
à partir de IS. La quantité de chaque minéral dissoute ou précipitée est proportionnelle à IS. Le modèle
converge lors naturellement vers l'équilibre de façon cinétique. Ce type d'algorithme peut être poussé à
son terme pour simuler un état d'équilibre permanent entre la solution et les différents minéraux, avec
une grande efficacité numérique.

L'inconvénient de cette approche, est qu'elle ne distingue pas les différents processus qui induisent des
comportements cinétiques différents (précipitation/dissolution, nucléation/mûrissement, ..). Des
modèles plus sophistiqués font le distinguo.

III - Modélisation des échanges ioniques.

- Echanges cationiques et échanges ioniques


- les échanges ioniques " sites d'échange sur les argiles " variations en fonction des
transformations redox
- constantes d'échange
- théorie des solutions solides

IV - Les processus biologiques

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- chimie et microbiologie
- chimie et absorption racinaire
- chimie de la rhizosphère

V - Couplage avec les transferts de soluté

- problèmes de cohérence des concepts


- incidence de la non linéarité: association de modèles ou couplage de modèles
- problèmes de discrétisation
- temps de calcul
- simpliste boite noire/ usine à gaz

Introduction à la thermodynamique des solutions aqueueses et à la


modélisation des interactions ioniques en solution

INITIATION A LA THEORIE DES SOLUTIONS SOLIDES


Certains minéraux peuvent être considérés comme une solution solide, c'est-à-dire comme un mélange
de deux (ou plus de deux) minéraux purs. Les grenats, les olivines font partie de ceux-là. Plus
récemment, certains chercheurs ont mis à profit cette théorie pour traiter la grande diversité chimique
de minéraux argileux.

Si l'on considère les olivines, cette famille de minéraux présente une série continue de minéraux
évoluant depuis un pôle ferreux jusqu'à un pôle magnésien, avec tous les termes intermédiaires.

Présentation et concepts de base.

Les pôles sont donc: [SiO4]Mg2 (Forstérite) et [SiO4]Fe2 (Fayalite) Les termes intermédiaires sont du
type [SiO4]Mg2x Fe2(1-x)

x représente la fraction molaire du pôle magnésien dans le mélange. x varie de 0 (ou 0%) avec le pôle
ferreux (ou Fayalite), jusqu'à 1 (ou 100%) représentant le pôle magnésien, c'est-à-dire la Forstérite.

La fraction molaire du pôle magnésien est donc x et la fraction molaire du pôle ferreux est égale à 1-x.

Pour une solution solide à 3 pôles, AB, AC et AD, la solution solide pourra s'écrire : ABxCyD1-x-y

avec

x: fraction molaire du pôle AB dans le mélange


y: fraction molaire du pôle AC dans le mélange
1-x-y: fraction molaire du pôle AD dans le mélange

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Solubilité des pôles et solubilité de la solution solide

Soient deux minéraux AB et AC présentant l'ion commun A et les solutions solides correspondantes
ABxC(1-x).

x représente la fraction molaire du minéral AB dans la solution solide


1-x représente la fraction molaire du minéral AC dans la solution solide
Lors de la dissolution du minéral AB, l'équilibre solution minéral AB s'écrit :
AB = A + B (KsAB) avec KsAB = [A].[B]/[AB]
Soit log KsAB = log[A] + log[B] - log [AB] (1)
De même pour le minéral AC:
AC = A + C (KsAc) avec KsAC = [A].[C]/[AC]
Soit log KsAC = log[A] + log[C] - log [AC] (2)
Pour la solution solide
ABxC1-x = A + xB +(1-x)C avec KsSS = [A].[B]^x.[C]^(1-x)/[ABxC(1-x)]
Soit log KsSS = log[A] + xlog[B]+(1-x)log[C] - log [ABxC1-x] (3)
En combinant les équations (1), (2) et (3)
log[A] + log[B] = log KsAB - log [AB] (x)
log[A] + log[C] = log KsAC - log [AC] (1-x)
log[A] + xlog[B] + (1-x)log[C] = x log KsAB +(1-x) log KsAC - x log [AB] -(1-x) log[AC]
d'où
log KsSS = x log KsAB +(1-x) log KsAC + x log [AB] + (1-x) log[AC]- log [ABxC1-x]
[AB] représente l'activité du pôle AB dans la solution solide, [AB]= x . lambdaAB
[AC] représente l'activité du pôle AC dans la solution solide, [AC]= (1-x). lambdaAC
avec lambda le coefficient d'activité correspondant.

Ce dernier traduit les interactions énergétiques au sein de la solution solide, du fait, par exemple que le
caractéristiques géométriques de B et de C ne sont pas identique, ce qui entraîne des distorsions dans la
régularité du cristal de solution solide.

D'où :
log [AB]= log(x) + log( lambdaAB)
log [AC]= log(1-x) + log( lambdaAC)
et
log KsSS = x log KsAB +(1-x) log KsAC +x*( log(x) + log( lambdaAB)) + (1-x) *( log(1-x) +
log(lambdaAC))- log [ABxC1-x]
pour [ABxC1-x] =1
log KsSS = x log KsAB +(1-x) log KsAC +x*( log(x) + log( lambdaAB)) + (1-x) *( log(1-x) + log(
lambdaAC))
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Laboratoire d'Hydrogéologie d'Avignon - VINCENT VALLES COURS D'HYDROCHIMIE

ou en écrivant la même chose dans un autre ordre:


log KsSS = x log KsAB +(1-x) log KsAC + (x* log(x) + (1-x)*log(1-x)) + x* log( lambdaAB)) +(1-
x)*log( lambdaAC))
donc log KsSS peut se décomposer en trois termes:
a) un terme de mélange mécanique:
x log KsAB +(1-x) log KsAC
b) un terme entropique:
somme de xi* log(xi)
c) un terme d'énergie d'excès de mélange :
somme des xi*log(lambda i)

Le premier terme représente l'évolution de la solubilité de la solution solide comme intermédiaire,


linéairement, entre la solubilité du pôle AB et celle du pôle AC en fonction de la fraction molaire (ceci
en échelle logarithmique bien sur).

Le second terme représente la variation d'énergie du fait du changement d'organisation (d'ordre) entre
deux minéraux séparés AB et AC (ordre maximal) et un état mélangé (plus probable), la solution
solide.

Le troisième terme représente la variation d'énergie due aux interactions des composants AB et AC
dans la solution solide.

Lorsque ce dernier terme est nul, il n'y a pas d'interactions, l'état de mélange n'induit aucune distorsion
du réseau. La solution est idéale.

Si la solution n'est pas idéale, c'est-à-dire lorsque l'énergie d'excès de mélange est non nulle, plusieurs
cas peuvent se présenter.

Gexmel= X.(1-X).Ao la solution solide est régulière le terme AoX(1-X) est un terme parabolique
symétrique entre X et (1-X). la solution est dite régulière.

Sinon elle est irrégulière. En remarquant que (1-X) - (X) différence entre les deux fractions molaires est
égale à (1-2X), il vient alors:

Gexmel= X.(1-X).(Ao+A1(1-2X) + A2 (1-2X)² +….) Le terme d'excès de mélange devient


dissymétrique.

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Les zones de logKss minimale correspondent à des compositions plus stables du mélange. Si l'on
généralise à plus de deux pôles, il vient

logKss=
somme xi*log(Ksi) : terme de mélange mécanique
+ somme des xi*log(xi) : terme de mélange entropique
+ somme sur i et sur j des xixj*(Aoij+A1ij(xi-xj) + A2ij(xi-xj)² + ….) terme d'excès de mélange
lorsque ce dernier existe (solution non idéale i.e. réelle)

Les équilibres carbonatés


Les équilibres carbonatés jouent un rôle très important dans la définition de la qualité des eaux et en
particulier sur leur pH. Les connaissances de base sont relativement simple à maîtriser; cependant,
l'expérience montre qu'il est utile de pratiquer des calculs avec des logiciels thermodynamiques et
d'étudier différents cas concrets afin d'acquérir les bons réflexes.

- Notion d'alcalinité: définition, propriétés, spéciation des formes alcalines


- dosage de l'alcalinité et de ses différentes formes
- Les différentes fonctions acides du CO2aqueux, le pCO2 des eaux naturelles
- pH, pCO2 et alcalinité
- Pouvoir tampon
- Acidité et solubilité des métaux
- La diversité des milieux naturels par rapport aux équilibres carbonatés.
- Alcalinité et processus biologiques
- Exercice sur les équilibres carbonatés
- Etude de cas:

• Algérie
• Espagne: Aragon

EXEMPLE DE SOLS AUX PROPRIETES CHIMIQUES EXTREMES EN TERME DE pH

Sol acide affecté par les processus de sulfato-réduction. pH voisin de 3.5 ou 3.0 voire
moins dans ceratins cas (crédit Photo: Laurent BARBIERO).

L'aluminium y est très soluble et génère une toxicité aluminique qui s'ajoute à l'effet de
la salinité chlorurée..

Sol alcalin sodique se développant en milieu carbonaté sodique. Les pH peuvent


dépasser 10. Une couche de silacate en feuillets forme la couche verte située à la base
du profil (crédit Photo: Laurent BARBIERO).

Le calcium est bloqué par la précipitation de carbonates. La faible toxicité des


carbonates permet la présence d'une importante activité algaire dans les lagunes
voisines.

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Notion d'ALCALINITE: définitions et propriétés


I - Définition de l'alcalinité

Alcalinité : Somme des équivalents des espèces susceptibles de réagir avec H+ diminuée des
équivalents de H+.

L'alcalinité représente des espèces chimiques aqueuses telles que :

a) HCO3-, NaHCO3°, CaHCO3+,…..


b) CO3=, CaCO3°,
c) OH-, CaOH+, Al(OH)3°, Al(OH)++…..
d) Borates, anions organiques d'acides faibles X-,…..
e) Moins les H+ : H+, HSO4-,…..

Alcalinité= somme HCO3- + 2 somme CO3= + somme OH- + X- +…..- somme H+

La première partie représente l'alcalinité carbonatée et la seconde (borates, organiques,…) représente


l'alcalinité non carbonatée. Habituellement, pour les eaux moyennement ou fortement minéralisées et
avec au moins un minimum de CO2, HCO3- libre et complexe représente la forme prédominante de
l'alcalinité.

Cas d'alcalinité positive :

N.B. : Représentation schématique (donc fausse dans certains détails)

L'alcalinité est positive dans ce cas. Elle représente les HCO3- non balancés par H+ et les OH- non
balancés par H+

Parmi les HCO3-, il y a les:

- HCO3- balancés par H+ (ceux-ci proviennent de la dissolution du CO2) et


- ceux qui ne sont pas balancés par H+ mais par les cations (Ca++). Ces derniers forment part de
l'alcalinité.

Idem pour OH- : on distingue les OH- balancés par H+ (proviennent de la dissociation de l'eau =
autoprotolyse) et les OH- balancés par les cations (Ca++) et faisant partie de l'alcalinité.
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Alc = Ca++ - Cl-

Ou bien :

Alc = HCO3- + OH- - H+

Remarque : L'équilibre entre diverses composantes de l'alcalinité : OH- et HCO3- dépend de la


pression partielle en CO2 :

OH- + CO2 aq. = HCO3-

S'il y a peu de CO2 dans le milieu, alors OH- devient la forme prédominante ;
dans le cas plus fréquent, en présence de CO2, HCO3- est la forme prédominante.

Cas d'alcalinité négative:

N.B. : Représentation schématique (donc fausse dans certains détails)

Alc = Ca++ - Cl-

Ou bien

Alc = HCO3- + OH- - H+

Ce sont les mêmes formules que celles obtenues pour une alcalinité positive.

L'alcalinité est négative dans ce cas. On parle d'acidité minérale, de réserve d'acidité. Au signe près,
l'alcalinité représente les H+ non balancés par HCO3- ou par OH-.

Parmi les H+ on peu distinguer :

- ceux qui balancent HCO3-, issus de la dissolution du CO2


- ceux qui balancent OH-, issus de l'auto protolyse (dissociation) de l'eau
- ceux qui balancent les anions. Ces derniers représentent la réserve d'acidité.

Dans ce cas, surtout lorsque la valeur de l'alcalinité est très négative (forte valeur absolue), la
concentration en HCO3- est faible à cause de l'équilibre carbonaté suivant :

H+ + HCO3- = H2O + CO2

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qui est fortement déplacé vers la droite.

Il est possible avec un tableur de mieux apprécier la part relative de ces espèces.

Vous pouvez télécharger un fichier Excel avec un exemple. Dans ce tableau, pour faciliter la
compréhension, les constantes de stabilité de certains complexes n'est pas conforme à la réalité. Il s'agit
donc d'un exemple purement scolaire.

II - Propriétés de l'alcalinité :

A) Autre expression de l'alcalinité

Alc= HCO3- + CaHCO3+ +….+ 2CO3= + 2CaCO3° +…. -H+ - HSO4+ -….

Si l'on combine cette équation avec les différentes équations de conservation de masse (confer chapitre
modélisation de la thermodynamique des solutions aqueuses) telles que :

CaTotal= Ca++ + CaHCO3+ +CaCO3° + CaOH+ +CaSO4° +….


SO4Total= SO4-- + HSO4+ +CaSO4°+……..

Il vient de façon rigoureuse :

Alcalinité= 2CaTotal + 2MgTotal + NaTotal + KTotal +.. -ClTotal -2SO4Total - ….

Cette expression, très commode permet d'estimer l'alcalinité à partir de la composition en éléments
majeurs de la solution. Le terme " estimer " n'est pas utilisé parce que la relation précédente est
approximative, mais parce que les imprécisions analytiques de tous les éléments totaux se cumulent
lors du calcul. Par ailleurs, la mesure de l'alcalinité permet, grâce à la relation précédente, de vérifier la
précision des techniques analyses; il vaut donc mieux doser l'alcalinité et vérifier la " balance "
électrique de la solution.

B) Propriétés essentielles de la notion d'alcalinité

De la dernière relation, découlent différentes propriétés. Tout d'abord, on remarque que l'alcalinité ne
change pas lorsque la composition en éléments totaux de la solution ne change pas. Ainsi, lorsque une
eaux perd ou adsorbe du CO2, son pH change, mais tant qu'elle ne précipite pas, son alcalinité ne
change pas. En effet, si la solution adsorbe du CO2, la concentration en HCO3+ augmente, mais celle
de H+ aussi et en quantités équivalentes. Or comme les HCO3- balancés par les H+ ne forme pas partie
de l'alcalinité, cette dernière ne varie pas. Concrètement, lorsqu'une solution est prélevée sur le terrain,
ses caractéristiques dont le pH évoluent lors du transport vers le laboratoire d'analyse, cependant
l'alcalinité ne varie pas tant qu'au minéral ne se dissout ou ne précipite. Cette propriété est très
intéressante et facilite la démarche des hydrochimistes.

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ALCALINITE: LE DOSAGE.
II - DOSAGE DE L'ALCALINITE

Le dosage de l'alcalinité s'effectue par titration à l'acide.


On utilise un acide fort, en général HCl ou bien H2SO4.

1) Le dosage de l'alcalinité totale s'effectue lors du dosage direct:

Le volume de solution à titrer est noté Vo. L'acide est apporté par ajouts successifs et le volume total
ajouté est noté V. Après stabilisation, le pH est mesuré après chaque apport successif d'acide.

Deux types de graphiques peuvent être réalisés :

- La courbe pH versus V permet de visualiser les différents points d'inflexions et notamment ceux qui
correspondent à des pentes localement minimales. Le pH de ces points d'inflexions correspond au pK
des espèces alcalines abondantes dans la solution titrée. Cette information peut s'avérer précieuse par la
suite car il s'agit déjà d'un début de spéciation.

- La fonction de Gran: F(V)=(Vo+V)* 10^(-pH) versus pH permet de calculer le volume équivalent. Le


pH est le co-logarithme de l'activité de H+. 10^(pH) représente l'activité de H+, c'est-à-dire sa molalité
(nombre de moles par kilogrammes d'eau) que multiplie le coefficient d'activité. Dans les solutions
diluées, ce dernier est égal à 1. Par ailleurs, Vo+V représente le volume total dans lequel on mesure le
pH.

Par conséquent, (Vo+V)*10^(-pH), c'est-à-dire F(V), est égal, au coefficient d'activité de H+ près, à la
quantité de H+ présente dans le volume en cours de dosage. Lors de l'apport d'acide, les fonctions
acides neutralisent les formes alcalines. Ainsi, la fonction de Gran n'augmente quasiment pas tant que
toutes les formes alcalines ne sont pas toutes neutralisées. Lorsque toutes ces espèces alcalines sont
neutralisées, tout apport d'acide ce traduit par une augmentation équivalente de la quantité de H+ (c'est-
à-dire de F(V)) présente dans le flacon. La fonction de Gran présente alors une allure linéaire avec une
pente égale à +1, ou plus précisément au coefficient d'activité de H+. Le prolongement de la partie
linéaire sur l'axe des abscisses, permet de calculer le volume équivalent (Veq).

L'alcalinité totale est donc calculée par:


Alc= Veq * Normalité de l'acide / Vo
(V et Vo seront exprimés dans les mêmes unités).

Remarque :

a) Il convient de doser jusqu'à des pH assez bas pour être sur d'avoir neutraliser toutes les espèces
alcalines de la solution. Il est conseiller de continuer le dosage tant que le pH n'est pas inférieur à 2.

b) Lors de la titration avec un acide concentré, la courbe représentative de la fonction de Gran


s'infléchit légèrement et progressivement pour les pH bas, c'est-à-dire en fin de titration. Ceci

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s'explique par l'évolution du coefficient d'activité qui est voisin de l'unité en début de titration et qui
diminue car la solution dosée, acidifiée, devient concentrée. Le coefficient d'activité de H+ s'éloigne
donc progressivement de 1 (il diminue ce qui infléchit la pente de la fonction de Gran).

c) Cette méthode très précise et simple permet un dosage sur le terrain, même en conditions " rustiques
" par exemple en zone tropicale ou équatoriale, avec une précision acceptable. Matériel requis :
pHmètre de terrain, micropipette, pipette, flacon.

2) Le dosage de l'alcalinité carbonatée s'effectue lors du dosage en retour:

Lors du dosage direct, toutes les fonctions alcalines ont été progressivement neutralisées par les H+. Si
l'on consomme les H+, les mêmes fonctions alcalines doivent apparaître en retour. Les dosages " aller "
et " retour " doivent se superposer. Or, lors du dosage direct, l'alcalinité carbonatée a été transformée en
CO2 aqueux. Si ce CO2 s'échappe vers l'atmosphère, les formes carbonatées de l'alcalinité ne peuvent
être régénérées par le dosage en retour. Les dosages " aller " et " retour " sont distincts. Ainsi, lorsque
le dosage direct est terminé, un courant d'air dépourvu de CO2 (théoriquement de l'Argon) est envoyé
par des aérateurs (par exemple type bulleur d'aquarium en matières plastiques) dans la solution
acidifiée. Le CO2 s'échappe et après un temps d'environ 10mn de bullage, la solution est débarrassée du
CO2 aqueux. Le dosage retour peut être entrepris avec une base forte (par exemple NaOH) de même
titre que l'acide choisi pour le dosage direct. Cette seconde titration doit être conduite jusqu'à atteindre
le pH initial de la solution, c'est-à-dire celui que présente la solution avant le dosage à l'acide. La
différence de volumes versés entre les dosages directs et en retour permet de calculer l'alcalinité
carbonatée. La différence entre l'alcalinité totale et l'alcalinité carbonatée, lorsqu'elle est significative,
représente l'alcalinité non carbonatée.

Quelques recommandations pratiques :

a) La compensation en température des pHmètres n'est jamais parfaite. Pour débarrasser la solution de
son CO2, on peut faire buller du gaz comprimé en bouteille. La détente du gaz le refroidit et la
température de la solution diminue. Il est indispensable de veiller à ce que la solution se réchauffe et
que la température des dosages direct et retour soit la même. Dans le cas contraire, les deux courbes se
croisent, ce qui trahit l'existence d'un problème (voir exemple plus bas).

b) La soude utilisée pour le dosage retour doit être dépourvue de CO2. Un flacon ancien, ouvert depuis
longtemps est souvent à l'origine de problème de ce type. En fin de titration, la courbe présente alors un
épaulement aux environs de pH=6.35, correspondant au pKa de HCO3-/CO2 aqueux. Un dosage retour
normal présente en fin de tracer une courbe très relevée et sans épaulement.

Exemple de dosage réalisé par des étudiants. La courbe avec des


carrés sombres est le dosage à l'acide (dosage aller). Le dosage
retour avec la soude est représenté en violet avec des croix. La
courbe avec carrés violets représente la fonction de Gran et
l'ajustement sur les trois derniers points (partie linéaire de la courbe)
est en trait noir fin.

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Remarque: Dans la plupart des cas rencontrés avec les eaux naturelles, l'alcalinité non carbonatée est
négligeable. Il est donc recommandé d'effectuer un certain nombre d'essais lors du début d'une étude
sur une zone nouvelle. Si l'alcalinité non carbonatée est négligeable sur tous les échantillons test, alors
il ne sera pas utile de réaliser le dosage retour de manière systématique. Seuls des contrôles épisodiques
seront suffisants afin de vérifier que ce dosage n'est pas utile.

Il est recommandé de télécharger un fichier exemple de dosage aller+retour avec fonction de Gran,
figures et commentaires.

télécharger cet exemple

Exemple de refroidissement lors du dégazage:

Exemple de problème de refroidissement lors du dégazage. La courbe retour passe sous la courbe aller.
Ici, l'erreur est faible.

télécharger cet exemple

Les différentes fonctions acides du CO2 aqueux, le pCO2 des eaux


naturelles
I - Les différentes fonctions acide du CO2 aqueux

Le CO2 gazeux passe en solution à la faveur d'un changement de phase (phase gazeuse/phase aqueuse).
Comme tout changement de phase, cette réaction est " lente " c'est-à-dire qu'elle présente une certaine
cinétique. La vitesse sera fonction de différents facteurs tels que l'agitation de la solution. Ainsi, lors de
la récupération sur le terrain, il est important de ne pas agiter les solutions lors de leur prélèvement afin
de ne pas accélérer la remise en équilibre avec la pression partielle en CO2 de l'atmosphère.

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La solution sera prélevée avec précaution et le pH sera mesuré le plus rapidement possible sur une
fraction aliquote qui sera jetée après la mesure. En effet, la mesure du pH s'effectue avec une électrode
qui contient une demie électrode libérant un électrolyte (le plus souvent KCl concentré) qui pollue la
solution (confer chapitre sur l'acquisition de données en hydrochimie).

En solution, le CO2 se présente sous deux formes principales : CO2 aqueux et H2CO3°
H2CO3° est du CO2 hydraté :
CO2aq + H2O = H2CO3°

Dans la pratique, le distinguo entre ces deux expressions revêt peut d'intérêt pratique et par la suite, cet
ensemble de CO2 aqueux, hydraté ou non, sera noté H2CO3°.

L'équilibre lent entre le CO2 gazeux et le H2CO3° peut s'écrite :


CO2g + H2O = H2CO3°
La loi d'action de masse correspondante donne :
[H2CO3°]/(fCO2.[H2O])= K(T,P)
fCO2 représente la fugacité du CO2 ;
fCO2=pCO2. LambdaCO2 avec LambdaCO2= coefficient de fugacité de CO2.

Dans les conditions habituelles de température et de pression le coefficient de fugacité est égal à 1.
pour les eaux diluées ou peu concentrées {H2O] est voisin de 1.

D'où [H2CO3°]/pCO2= Constante


[H2CO3°]= pCO2.10^(-1.46)

Pour les eaux en équilibre avec l'atmosphère (log(pCO2)=-3.5) [H2CO3°]= 10^(-3.5).10^(-1.46)=10^(-


5.0)=0.00001

Le CO2 aqueux se dissocie selon les réactions suivantes:


H2CO3° + H2O = HCO3- + H3O+
HCO3- + H2O = CO3= + H3O+

Comme précédemment, ces réactions présentent une certaine cinétique se chiffrant en dizaines de
secondes. Hormis pour les situations de brusque changement de l'état du milieux (dissolution de calcite
par une eaux de pluie ruisselant à la surface du sol, lac soumis à une photosynthèse intense,…), cet
effet cinétique ne représente aucune gêne pour l'étude.

II - pCO2 et fonctionnement hydrique et biologique du milieux

La pression partielle en CO2 (i.e. pCO2) des eaux naturelles varie fortement.

Si l'on considère, par exemple, des eaux de nappe, la valeur de pCO2 (par la suite la pCO2 par abus de
langage) va dépendre de la balance entre plusieurs vitesses :

- vitesse de production ou de consommation de CO2 d'une part


- vitesse de diffusion du CO2.

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La diffusion du CO2 est très faible pour le CO2 aqueux. La diffusion du CO2 est surtout le fait du CO2
gazeux dans l'atmosphère du sol ou du sous-sol. La diffusion du gaz s'effectue lorsque la porosité
grossière, siège de l'atmosphère des sols, est vide d'eau. Ainsi, dans les milieux saturés, cette diffusion
de CO2 est lente. Les échanges gazeux entre eau du sol et atmosphère sont faibles et la pCO2 sera plutôt
élevée. En revanche, dans les milieux sous saturés en eau, la diffusion du CO2 est plus importante et
donc la pCO2 sera plus faible.

La production de CO2 est principalement due à l'activité biologique. Dans certains cas d'influence
thermale avec des eaux carbogazeuses (confer chapitre hydrochimie des eaux thermales) peut conduire
à une forte source de CO2. Lorsque le milieu contient beaucoup de matière organique, comme par
exemple dans les horizons superficiels des sols abritant des nappes perchées, ou bien pour les milieux
tourbeux, l'oxydation de la matière organique conduit à une forte production de CO2 et donc à une
pCO2 élevée.

La consommation de CO2 est le fait de processus de nature diverse. L'altération des minéraux
(dissolution de calcite ou bien dissolution de feldspaths et précipitation de silicates en feuillés)
conduisent à un production d'alcalinité qui consomme duCO2 selon la réaction:

OH- + CO2 = HCO3-.

Pour des eaux d'altération de roches de type granit ou pegmatite avec peu de matière organique (eaux
thermales non carbogazeuses, eaux d'horizons profonds de sols sur granit, ..) la pCO2 peut être très
faible.

Enfin, le fonctionnement hydrique du milieu joue un rôle capital. Si l'eau se trouve dans un milieu à
porosité fine, perméabilité faible, gradient piézométrique ou hydrique faible avec des écoulements lents
(eau stagnante) alors les échanges gazeux sont faibles et la pCO2 est plutôt élevée.

A l'opposé, dans les matériaux graveleux ou caillouteux, à porosité grossière, avec des écoulements
rapides, la pCO2 est faible. L'expérience de terrain montre que ce facteur est certainement le plus
important. Ainsi, les mesures de terrain alliées aux calculs thermodynamiques permettent d'estimer la
pCO2 régnant in situ, ce qui donne des indications précieuses sur le fonctionnement hydrique du milieu.

Enfin, il est évident que le caractère libre ou captif des nappes joue lui aussi un rôle dans les échanges
de CO2. En résumé, la pCO2 peut varier fortement d'un milieu à l'autre et il est possible de donner des
ordres de grandeur caractéristiques de ce paramètre.

Valeurs caractéristiques
Type de milieu naturel
de log(pCO2)
Altération de granit, eau thermale non carbogazeuse;eau de plans d'eau
-5.0 à -4.0
avec photosynthèse
-3.5 Atmosphère, eau de pluie avant son interception par le sol ou le feuillage
-2.7 Eau de rivière non torrentielle (très variable)
-1.8 Solution de sol bien aéré
-1.5 Solution de sol engorgé par l'eau
-1.0 à 0.0 Marais, eau thermogazeuse

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On remarquera l'échelle logarithmique très ouverte, ce qui permet d'utiliser ce paramètre comme
indicateur.

III - CO2 et eaux météoriques


Dans l'atmosphère, log(pCO2) 10^(-3.5)
D'où
[H2CO3°]= 10^(-3.5).10^(-1.46)=10^(-5.0)=0.00001
H2CO3° + H2O = HCO3- + H3O+ (pK=6.3)

Or pour une eau parfaite pure, ne contenant que du CO2 dissous, pour des raisons évidentes de
neutralité électrique, il vient

[H3O+] =[HCO3-]
Donc
[H3O+] x [HCO3-] = [H3O+]² =10^(-5.0). 10^(-6.31)=10^(-11.3)
D'où
[H3O+]= 10^((-11.3)/2))= 10^(-5.6) environ
Ainsi, pH=5.6 .

Cette valeur est le pH d'une eau parfaitement pure ne contenant que du CO2, en équilibre avec la pCO2
atmosphérique. Les eaux de pluie dissolvent des composés atmosphériques (poussières, gaz émis par
l'activité industrielle ou les automobiles,….).

Lorsque les eaux dissolvent des oxydes d'azote ou du SO2, après oxydation, l'eau contient de l'acide
sulfurique ou nitrique ; elle contient une alcalinité négative, une réserve d'acidité. Son pH est inférieur
à 5.6. On parle alors de " pluie acide ".

La valeur de 5.6 est la limite de pH en deçà de laquelle la pluie est qualifiée d'acide. En général, la
réserve d'acidité est faible. En sol calcaire, la neutralisation est très rapide et l'eau devient rapidement
alcaline. Les dégâts ne peuvent être dus qu'à l'effet direct sur le feuillage.

En revanche, si les sols sont peu tamponnés, l'eau acide conduit à une acidolyse des minéraux
alumineux, à la libération d'aluminium dont la concentration est élevée dans la solution du sol. Il en
résulte des phénomènes de toxicité aluminique pour les plantes et certains poissons des rivières
drainant ces zones.

pH, pCO2 et alcalinité


Les chapitres précédents ont montrés que dans la plupart des eaux naturelles, HCO3- constitue la forme
principale, mais non la seule, de l'alcalinité. D'autres espèces telles que CaHCO3+, forme complexe du
HCO3- libre peuvent souvent représenter une part non négligeable de l'alcalinité.

Si l'on considère l'équilibre suivant :

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CO2 gazeux + 2 H2O = HCO3- + H3O+


La loi d'action de masse donne :
[HO3+] . [HCO3-] / (pCO2. [H2O]²) = Ka
En considérant l'activité de l'eau proche de 1, ou tout au moins constante, il vient :
-pH + log{HCO3-] - log(pCO2) = Cte
Ainsi, il existe une relation liant la pression partielle en CO2 (pCO2), le pH et l'alcalinité dont HCO3-
est souvent la principale forme.

Ce sont trois paramètres : pCO2, pH, alcalinité


Et une (1) relation
Donc il faut connaître deux paramètres pour pouvoir définir correctement l'état de la solution aqueuse.
Chaque étude est unique, néanmoins deux grands cas de figure se présentent régulièrement.
A) Lors de l'étude des solutions prélevées lors d'une campagne de mesures :

En général, le pH est mesuré sur le terrain et l'alcalinité est mesurée en laboratoire. Or, tant que la
solution ne précipite ou ne dissout aucun minéral, l'alcalinité ne varie pas (confer chapitre sur les
propriétés de l'alcalinité). Par les modèle de calcul thermodynamique de spéciation, il possible de
recalculer la pCO2 à partir de la mesure in situ du pH et l'analyse en laboratoire.

B) Dans le cas de simulations des interactions eau/roche :

La composition chimique globale permet de calculer l'alcalinité par l'équation de neutralité électrique.
Il n'est pas raisonnable ni réaliste de fixer le pH. On fixe la valeur de la pCO2 en fonctions des
conditions de terrain (confer paragraphe sur la pCO2). Avec ces deux paramètres, le pH est recalculé.

La nécessité de deux paramètres n'apparaît pas toujours évidente de premier abord.

Cependant si l'on considère une eau naturelle que l'on tentera de caractériser seulement par son pH égal
à 5.6 par exemple, il sera difficile de cerner les propriétés de cette solution.

En effet, il peut s'agir :

- soit d'une eau dépourvue de CO2 et contenant une acidité minérale de 10^(-5.6) moles/litre, c'est
à dire 2.5 micromoles/litre.
- Soit une eau parfaitement pure en équilibre avec le CO2 atmosphérique
- Soit une eau alcaline mais chargée en CO2

Ces situations extrêmement disparates montrent l'insuffisance du seul pH pour décrire l'état acido-
basique des eaux.

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Pouvoir tampon
Le pouvoir tampon des eaux naturelles est une propriété importante. Pour l'instant, le pouvoir tampon
sera défini (approximativement) comme l'aptitude d'une eau à résister à une perturbation chimique.
Lors d'un apport de composé chimique, un acide ou une base par exemple, les caractéristiques d'une
eau peu tamponnée seront fortement affectées, alors que pour une eau tamponnée, les caractéristiques
telle le pH varieront peu. Il s'agit d'une notion qui par certains points ressemble à celle " d'inertie ".

Pour les équilibres acido-basiques, le pouvoir tampon d'une eau sera d'autant plus important que
l'alcalinité (positive) de l'eau sera élevée.

Cette notion est étendue par certains auteurs à la notion de pouvoir tampon dans le domaine des
réactions d'oxydoréduction

Pouvoir tampon d'un sol:

Cette notion est utilisée aussi pour décrite le pouvoir tampon d'un sol, qui intègre le pouvoir tampon :

- de la solution du sol, (voir plus bas)

- le pouvoir tampon développé par la Capacité d'Echange Cationique (CEC) Lors de l'apport de calcaire
dans un sol acide (chaulage d'un sol), la quantité de calcaire apportée doit neutraliser non seulement la
réserve d'acidité minérale de la solution du sol, mais aussi les fonctions acides échangeables (H+
échangeable), ainsi que les cations échangeables qui peuvent par réaction, consommer de l'acidité
(Al+++ échangeable réagit lors de sa désorption selon la réaction Al+++ + 3(H20)= Al(OH)3 + 3H+ : trois
fonctions acides sont libérées). EN résumé, dans un sols acide à forte CEC, un faible apport de calcaire
n'aura que peu d'effet sur la remonté de pH ; il s'agira d'un sol fortement tamponné. Pour une sol
sableux, avec une CEC très faible, la remontée de pH sera forte pour la même masse de calcite apportée
(sol à faible pouvoir tampon).

- le pouvoir tampon induit par les phases solides autres que les phyllosilicates. Pour les réaction acido-
basiques: La présence de calcite ou d'un autre minéral carbonaté tamponne fortement les propriétés
acido-basique des sols. Dans un sol contenant plusieurs pourcents de calcaire, en masse, la solution du
sol, en équilibre avec les phases solides sera très fortement tamponnée. Avant d'acidifié un sol, il faudra
détruire (dissoudre) toute la calcite avant de faire chuter le pH. Pour les réaction d'oxydoréduction: La
présence d'une grande quantité d'oxydes et hydroxydes ferriques dans un sol, surtout si ces minéraux
sont amorphes et don très réactifs, créera une situation de blocage de la chute du potentiel
d'oxydoréduction lors d'un apport massif de matière organique fraîche en sol saturé d'eau. Ainsi, le
potentiel redox sera (provisoirement) bloqué sur des valeurs d'équilibre entre ferII et fer III. Pour ce qui
est des réactions d'oxydoréduction, il existe une différence notable par rapport à l'acido-basique. En
effet, la plupart des réactions rédox sont liées à l'activité biologique et donc sans micro organismes, la
présence d'une espèce susceptible de tamponner le milieu au niveau redox sera inopérante.

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Pouvoir tampon d'une eau:

Elle correspond aux différentes espèces aqueuses susceptibles de réagir avec les protons (acido-
basique) ou avec des électrons (redox).

Pour les équilibres acido-basiques les espèces sont

HCO3-,Al(OH)3°,..

les anions organiques qui peuvent être très abondants dans certaines eaux naturelles et la solution de
certains sols,

les borates (présents à forte concentrations dans certains milieux salés),….

TD : Pouvoir tampon

Il est fortement recommandé de réaliser un certain nombre de simulations avec un logiciel


thermodynamique. Je vous conseille de simuler l'effet de la dissolution du CO2 dans plusieurs eaux
différent par leur pouvoir tampon.

- une eau légèrement acide (alcalinité négative)


- une eau pure ou salée avec du NaCl (alcalinité nulle)
- une eau légèrement alcaline (Ca = 0.2 mmole/l et Alc= 0.4 mC+/l)
- une eau fortement alcaline (Na= 20 mmole/l et Alc= 20 mC+/l)

Pour chaque simulation, la log10(pCO2) variera entre -5 et -1, le pH sera noté à chaque pas;

discuter des variation de pH en fonction de pCO2 et de l'alcalinité. Essayez d'en déduire les
implications environnementales.

Si vous avez des problèmes, vous pouvez télécharger un fichier résultat.

Acidité et solubilité des métaux


L'acidité d'une eau naturelle ou d'un sol constitue l'un des traits majeurs de ses caractéristiques
chimiques et il n'est pas étonnant que le pH aie une influence marquée sur la dynamique de nombreux
éléments. En milieu acide, les composés alcalins sont généralement solubles.

L'acidité peut donc attaquer les minéraux contenant de l'alcalinité:

Carbonatée : calcite, dolomite, nahcolite,..

Hydroxyde (ou oxyde i.e. hydroxyde déshydraté) : Fe(OH)3, Fe2O3, MnO2,..

Pour alléger l'écriture, on écriera par la suite H+ l'équivalent de H30+

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1) Cas des minéraux carbonatés

CaCO3 + 2H+ = Ca++ + H20 + CO2(g)

En milieu acide, riche en H+, cet équilibre est déplacé vers la droite. La calcite est attaquée par
l'acidité, le calcium est solubilisé, [Ca++] augmente et il y a libération de CO2. Cest ce qui ce passe
quand sur le terrain le test à 'acide crée une effervescence sur le matériau calcaire.

2) Cas des hydroxydes ou des oxydes métalliques.

Fe(OH)3 + 3H+ = Fe+++ +3(H2O)


Fe2O3 + 6 H+ = 2Fe+++ + 3(H2O)

Ainsi, l'acidité déplace les équilibres précédents vers la droite, augmentant la concentration en fer
dissous. De manière générale, les métaux sont solubles en milieu acide. Mais….

3) Cas des métaux à caractère amphotère.

Al(OH3) g = Al(OH)3°

Attention de ne pas confondre :

Al(OH)3g est la gibbsite, minéral à structure de feuillets, caractéristique des sols tropicaux soumis à un
climat humide et en position haute dans le paysage. C'est un SOLIDE.

Al(OH)3° est le complexe neutre situé en solution. C'est une ESPECE AQUEUSE.

A température et pression données, pour une solution en équilibre avec la gibbsite, il vient :

[Al(OH)3°]= Ks gibbsite = constante

par ailleurs les équilibres suivants:

Al(OH)4- + H+ = H2O + Al(OH)3°


Al(OH)3° + H+ = H20 + Al(OH)2+
Al(OH)2+ + H+ = H2O + AlOH++
AlOH++ + H+ = H2O + Al+++

Comme [Al(OH)2°] est constante, il vient:

[Al(OH)4-] = pH + Cte1
[Al(OH)2+] = - pH + Cte2
[Al(OH)++] = -2pH + Cte3
[Al+++]= - 3pH + Cte4

Ainsi, en l'absence notable d'autres espèces alumineuses dissoutes, il est possible de représenter la
concentration de chaque forme hydroxylée d'aluminium et la concentration totale en aluminium
dissous. Cette dernière étant la somme des molalités des espèces alumineuses précédemment citées.

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Solubilité de l'aluminium en fonction du pH. A pH neutre ou légèrement acide, la solubilité est


minimale. Elle croit rapidement avec la diminution du pH, en particulier lorsque ce dernier est inférieur
à 4.5..

Visionner ou télécharger le fichier de calcul sur les équilibres entre espèces alumineuses.

Ainsi, il apparaît que l'aluminium est

- peu soluble en pH neutre ou légèrement basique. Sa solubilité augmente en milieu très basique, mai
de manière limitée. En fait, en conditions basiques des formes hydroxyles polymères apparaissent
augmentant de manière significative la solubilité de l'aluminium.

- Soluble en milieu aide et très soluble lorsque le pH descend en dessous de 5. Aux pH très bas, la
pente de la relation log(AlTotal) versus pH est de 3, ce qui veut dire qu'une diminution de 1 unité pH
entraîne une multiplication par 1000 de la teneur en aluminium total dissous.

4) Implications environnementales de l'acidité

Les implications environnementales sont multiples.

En milieu acide, les minéraux alumineux sont attaqués. Souvent le milieu est capable de tamponner le
pH dans la fourchette 3.0-3.5. Si le milieu est peu tamponné, le pH peu chuter jusqu'à 1.5-2.5.
Certaines eaux de galeries de mines peuvent atteindre pH = 0 voire même 1 pH légèrement positif !!!

Dans le cas plus fréquent de pH situé entre 5.0 et 5.5, l'aluminium est déjà très soluble. Il induit des
phénomènes de toxicité aluminique pour de nombreux végétaux, mais aussi pour les poissons vivant
dans les cours d'eau drainant ces secteurs. La forte concentration en aluminium dissous déplace les
équilibres en cations dissous et cations échangeables de la capacité d'échange cationique. L'aluminium
passe en position échangeable. La présence d'aluminium échangeable sur le complexe est un signe de

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l'acidité, et du caractère toxique du milieu. Comme le pH est bas, la concentration en H+ est importante
et l'acidité échangeable (H+ échangeable) devient elle-même importante.

On note S la somme des charges (équivalents ou mC+) autres que H+ et Al+++ échangeables.
On note T la capacité totale d'échange cationique

Dans les sols acides, le rapport S/T devient significativement inférieur à 1, ce qui permet de les
identifier facilement comme affectés par l'acidité.

Dans ces milieux acides, l'aluminium et le fer sont donc fortement solubilisés; ils précipitent avec les
phosphates les bloquant. Les végétaux connaissent alors des phénomènes de carence induite en
phosphore.

En milieu très acide, par exemple dans les sols, les bassins versants se situant en zone pyriteuse non
carbonatée, le pH est naturellement très bas, le fer, l'aluminium mais aussi de nombreux métaux
(cadmium, cobalt, cuivre,,.. et même parfois uranium, plutonium !) atteignent des concentrations
spectaculaires. L'eau devient extrêmement toxique, y compris pour l'alimentation humaine.

Vous pouvez télécharger une quelques résultats d'analyse d'eau naturelles acides

En revanche en milieu basique, les métaux (sauf amphotères) sont peu solubles. Il en résulte une
insolubilisation des oligoéléments métalliques dans les sols calcaires et surtout les sols très alcalins
(carbonatés sodiques). Les végétaux ont des difficultés à absorber ces éléments en pH basique. Il s'agit
de phénomènes de carence induite car l'élément métallique est présent dans le sol, mais il ne peut être
absorbé du fait de son insolubilisation par le pH.

La diversité des milieux par rapport aux équilibres carbonatés


Les milieux naturels présentent une étonnante diversité en terme de processus acido-basiques et donc
de fourchettes d'alcalinité. Il est bien sur difficile d'établir une typologie exhaustive des milieux
naturels par rapport à ce critère. Cependant, à titre purement didactique, il est possible de l'illustrer sans
afficher la prétention de vouloir couvrir l'ensemble des cas pouvant être rencontrés sur la planète. La
classification suivant ne cherche donc qu'à illustrer quelques cas. Ces derniers seront classés par
alcalinité croissante:

1) Les eaux à acidité extrême:

Il s'agit principalement d'eaux rencontrées dans des galeries de mines, des eaux de percolation de terrils
de mine, des eaux de nappe, des solutions de sols se développant sur des matériaux pyriteux non
tamponnés. Appartiennent aussi à ce groupe les eaux de lacs sulfuriques en ambiance volcanique.
L'alcalinité varie entre -1 et -0.1 mC+/l.

2) Les eaux à forte acidité :

Ce sont aussi des solutions de sols en milieu pyriteux peu tamponnés. Leur alcalinité varie entre -0.1 et
-0.0001 mC+/l
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3) Les milieux peu tamponnés

Ces solutions présentent une alcalinité proche de 0. La seule activité biologique produisant du CO2
suffit à faire chuter le pH suffisamment bas pour provoquer des phénomènes de toxicité aluminique.
Elles appartiennent à des situations très variables. On les trouve :

- dans les sols; altérations types (sols podzols, latérites, sols bruns acides,..).
- les milieux oligo salin tropicaux ou européens (bouclier guyannais, Gallicia,....)

4) Les milieux légèrement alcalins.

- alcalinité faible mais minérale : les eaux de sols bruns,


- sols steppiques : alcalinité faible à forte composante organique.

5) Les milieux alcalins

- les sols calcaires à ARcalcite négative. Ils présentent un pH basique, mais lorsque les solutions se
concentrent, l'alcalinité diminue. Le pH évolue de 8.3 vers 7.2 environs.

- les sols calcaires à ARcalcite positive. Dans ce cas, le pH augmente et l'alcalinité aussi lorsque les
eaux gagnent en minéralité. Dans les cas de forte aridité elles donnent naissance au groupe suivant.

6) les sols très alcalins

Les sols alcalins (solonetz): Leur pH est nettement basique, mais ces solutions de sol ne sont pas
souvent salines, c'est-à-dire qu'elles sont rarement très concentrées.

Les sols salins carbonatés sodiques (Tchad, Pantanal, rift africain): Ce sont des eaux à très forte
alcalinité jusqu'à 1 mole/l. Le pH peut atteindre 10 et plus.

Loi du T, alcalinité résiduelle


Ce paragraphe est très important au niveau mastère car il permet de comprendre le sens de variation de
la composition chimique, du faciès chimique. Il permettra de différencier les notions de faciès chimique
et de famille chimique, de mieux cerner l'intérêt et les limites de ces deux concepts.

I - Loi du T

1) Equilibre solution/minéral

Lors de la dissolution d'un minéral de composition AB, selon la réaction :


AB = A+ + B-
Il est possible de calculer le produit ionique Q de la solution
Q= [A+].[B-] (1)

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Ce produit ionique peut être comparé au produit de solubilité Ks(T,P) du minéral AB. Le produit de
solubilité est une constante thermodynamique à température et pression constantes.

Trois cas de figures peuvent alors être rencontrées :

- Q > Ks(T,P) : la solution est sursaturée.

Des éléments A et B quitteront la solution pour former du solide AB. Les concentrations et donc les
activités des éléments A et B vont diminuer de sorte que Q diminuera. Le minéral AB précipite plus ou
moins rapidement selon des considérations cinétiques. Dans certains cas la précipitation est infiniment
lente.

- Q < Ks(T,P) : la solution est sous saturée.

Si le minéral AB est présent en contact avec la solution, cette dernière le dissoudra ; la masse de
minéral solide diminuera alors que les concentrations et les activités des éléments A et B augmentera.
Le produit ionique Q augmente.

- Q=Ks(T,P) : la solution est en équilibre thermodynamique avec le minéral AB.


La solution ne dissous ni ne précipite le minéral.
Dans un diagramme log[A+] versus log[B-] , l'équilibre entre solution et le minéral s'écrit:
logQ=log(Ks(T,P)) c'est-à-dire log[A+] + log[B-] = log(Ks(T,P)) ;
elle est donc représentée avec une droite de pente -1.

L'équilibre induit une relation entre les activités de A et de B. Leur produit étant constant, ces activités
ne peuvent croître simultanément. Si l'une d'elle augmente, l'autre doit diminuer afin que le produit
reste constant

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2) Concentration d'une eau ; augmentation de minéralité

Lorsqu'une eau est soumise à l'aridité du climat, son volume se réduit et la concentration de tous les
éléments augmente. De manière globale, sa minéralité, somme de tous les éléments dissous, augmente
aussi.

Ce qui suit s'applique aussi à l'évolution des concentrations liée à une durée de contact croissante entre
l'eau et les minéraux en présence, favorisant l'augmentation de minéralité de la solution. Cette
évolution ne peut continuer une fois l'équilibre atteint. En effet, dès l'équilibre atteint, le produit des
activités est constant. Si l'activité de l'un des deux éléments augmente, l'autre doit diminuer.

Trois cas de figure peuvent se rencontrer :

- Si A>B en C+/l, c'est-à-dire en charge (ou équivalents),

alors si les eaux continuent à se concentrer après que l'équilibre ne soit atteint, alors l'activité de A
continue à augmenter, certes moins rapidement que lors de la phase de sous saturation car une partie
des éléments A dissous participent à la précipitation du minéral AB et sont retirés de la solution.
L'activité de B diminue.

- Si B>A en C+/l,

alors si les eaux continuent à se concentrer après que l'équilibre ne soit atteint, alors l'activité de B
continue à augmenter, alors que l'activité de A diminue.

- Si A=B en C+/l,

les concentrations en A et B restent stable lors de la précipitation du minéral AB. Cette situation
perdurera tant qu'un autre minéral contenant l'élément A ou l'élément B ne précipite à son tour.

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Ce schéma ressemble à un "T" incliné d'où son surnom de loi du T.

On définit habituellement le Facteur de Concentration (i.e. FC) comme le rapport entre le volume
initial et le volume final. FC = Vi/Vf. Par exemple si on départ on considère 20 m3 et qu'au final il ne
reste qu'un m3, FC = 10/1 ; soit FC=10 et en logarithme décimal, log(FC)=1

Il est alors possible de représenter l'évolution des concentrations des différents éléments en fonction de
FC , par exemple dans le cas où B>A..

Dans le cas où A>B, la figure obtenue est bien la même en inversant A et B.

II - Alcalinité résiduelle calcite

1) Définition et considérations générales

Dans le cas où le minéral AB précdent est la calcite, CaCO3, on peut définir l'alcalinité résiduelle
calcite comme la différence entre les équivalents d'alcalinité et ceux de calcium.

ARcalcite= Alalinité - CaTotal (moleC+/l)

- Si l'alcalinité résiduelle calcite est positive, l'alcalinité est supérieure aux équivalents de calcium.
Lorsque la minéralité de cette eau augmente, alcalinité et calcium augmentent proportionnellement tant
que l'équilibre avec la calcite n'est pas atteint. Lorsque la saturation est atteinte, [Ca++].[CO3--] devient
constant. L'alcalinité dominant le calcium, la molalité de ce dernier commence alors à diminuer alors
que l'alcalinité continue à augmenter mais moins rapidement que précédemment. Le pH augmente.
C'est la voie alcaline. La molalité en calcium étant faible, cet élément est dé-sorbé du complexe
d'échange cationique au profit d'autres éléments, principalement monovalents, tels que Na+. Les argiles
deviennent sodiques (ou sodiques et potassiques); moins bien floculées et gonflantes, elles induisent de
mauvaises propriétés au sol qui devient imperméable à l'eau et à l'air. Ce cas de figure est fréquent sur
les zones d'altération de roches éruptives.

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- Si l'alcalinité résiduelle calcite est négative, les équivalents de calcium sont supérieurs à l'alcalinité.
Lorsque la minéralité de cette eau augmente, alcalinité et calcium augmentent proportionnellement tant
que l'équilibre avec la calcite n'est pas atteint. Lorsque la saturation est atteinte, [Ca++].[CO3--] devient
constant. L'alcalinité est dominée par le calcium. Elle commence alors à diminuer alors que la teneur en
calcium continue à augmenter mais moins rapidement que précédemment. Le pH diminue et se
rapproche de la neutralité. C'est la voie saline neutre. Le calcium reste abondement représenté dans la
capacité d'échange cationique. Les argiles restent floculées et le milieu reste perméable. Ce cas est
fréquent sur les sols se développant sur des roches sédimentaires marines.

Remarques:

A) Les échanges ioniques entre la solution et le complexe sont toujours en faveur du calcium dissous.
Ainsi, l'alcalinité résiduelle calcite est diminuée par ces phénomènes.

B) Dans une eau alcaline, riche en silice aqueuse et en magnésium, on peut définir AR silicate
magnésien= a [SI aqu]-b Mg avec a et b les coefficients stoechiométriques de Si et Mg dans le silicate
magnésien précipitant.

2) Représentation graphique de l'alcalinité résiduelle calcite:

Les diagrammes de Stabler sont très adaptés à la visualisation de l'alcalinité résiduelle et des
l'alcalinités résiduelles généralisées.

Cas d'alcalinité résiduelle calcite positive :

Cas d'alcalinité résiduelle négative :

Les diagrammes précédents ont été réalisés sans indiquer l'échelle. Lorsque les solutions se concentrent
et qu'aucun minéral ne précipite, la figure ne change pas d'allure. Comme toutes les concentrations
augmentent dans la même proportion, seule l'échelle change. Lorsque la calcite précipite, calcium et
alcalinité diminuent de la même quantité d'équivalents.

Les diagrammes précédents évoluent donc de la manière suivante :

Cas d'alcalinité résiduelle calcite positive :

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On remarque que l'alcalinité résiduelle calcite ne varie pas lors de la précipitation. La quantité
précipitée est limitée par le calcium dont la concentration diminue. Enfin lorsque presque toute la
réserve de calcium a disparu, un excédent d'alcalinité non " précipitable" par le calcium demeure : c'est
l'alcalinité résiduelle calcite. Lorsque la solution se concentre, cet excédent d'alcalinité augmente
proportionnellement à la diminution du volume de l'eau. L'alcalinité tend progressivement vers une
valeur égale à l"alcaliité résiduelle.

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Alcalinité résiduelle généralisée; faciès chimique, famille chimique


Pour pouvoir étudier cette partie, il est indispensable de maîtriser le cours sur l'alcalinité.

I - Alcalinité résiduelle généralisée

1) Illustration et définition de l'alcalinité résiduelle généralisée.

Le concept d'alcalinité résiduelle peut être généralisé à la précipitation successive de plusieurs


minéraux. Il s'agit alors de l'alcalinité résiduelle généralisée.

Ce concept est aussi applicable à la succession des équilibres qui contrôlent la composition d'une eau
lorsque sa minéralité augmente au contact d'une roche.

Dans un premier temps, considérons deux minéraux présentant un élément chimique commun, AB et
AC, le premier étant " moins soluble que le second.

Si

[A]>[B] (en équivalents)


[A]<[B]+[C]

alors il est possible de distinguer plusieurs phases dans l'évolution de la composition chimique lorsque
la minéralité augmente.

- lorsque l'eau est sous saturée


par rapport aux deux
minéraux Ab et AC, les
concentrations en éléments A,
B et C augmentent de façon
proportionnelle.

- Lorsque l'équilibre avec


atteint et que la minéralité de
l'eau continue à augmenter,
[A] augmente alors que [B]
diminue conformément à la
loi " du T " car [A]>[B] . Les
concentration en éléments A
et C augmentant, il est alors
possible d'atteindre l'équilibre
avec le minéral AC.

- Dès que l'équilibre avec le


minéral AC est atteint et lorsque la minéralité de l'eau augmente, la molalité en élément C augmente
car [A]<[B]+[C]. Ainsi à partir de ce niveau, la molalité de l'élément A commence à diminuer alors
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qu'elle ne cessait d'augmenter au préalable. Comme l'eau est toujours en équilibre avec le minéral AB,
ceci induit une augmentation de la molalité de l'élément B.

Les alcalinités résiduelles peuvent être définies comme suit:

- Alcalinité résiduelle AB ; AR(AB) = [A] - [B] (positive dans l'exemple ci-dessus)


- Alcalinité résiduelle AB+AC ; AR(AB+AC) = [A] - ([B] + [C]) (négative dans l'exemple
précédent).

Par ailleurs on remarque que AR(AB+AC) = AR(AB) - [C]


Cette démarche peut être appliquée à la précipitation successive de 3, 4 minéraux et plus.

2) Intérêt et limites de l'alcalinité résiduelle généralisée.

a) Un peu d'histoire:

Le concept d'alcalinité résiduelle dérive de la notion de " carbonates résiduels" proposé par Eaton en
1950.

Dans les milieux où la calcite précipite, HARDIE et EUGSTER (1970) puis VAN BEEK et VAN
BREEMEN (1973) définissent la notion d'alcalinité résiduelle calcite.

Enfin la généralisation intervient avec DROUBI et al. (1980). Premières utilisations de l'ARG:
L'alcalinité résiduelle généralisée est un outil d'usage très facile, puisqu'il suffit de savoir faire des
soustractions !

Il est particulièrement efficace pour prévoir le sens d'évolution des concentrations de différents
éléments dissous et par voie de conséquence du faciès chimique. Historiquement, ce fut sa première
application.

L'extension de l'AR à l'ARG en 1973-1975 a coïncidé avec le développement des modèles


informatiques en géochimie. Ces derniers prennent en comptent la conservation de masse de chaque
élément et la neutralité électrique et donc implicitement la conservativité de l'ARG (propriété définie
dans les paragraphes suivants).

Cependant, les modèles ne font pas apparaître explicitement ce paramètre ce qui a retardé les avancées
scientifiques sur ce concept. Ainsi, ce concept n'a été utilisé que de manière qualitative jusqu'en 1991
(VALLES et al., 1991) pour une vision dynamique des paragénèse salines, à partir des solutions.
Jusque là, seul le concept d'alcalinité avait été outil de bilan (BOURRIE et LELONG, 1990).

A partir de cette date, l'élaboration d'ARG et l'utilisation du caractère conservatif a permis au concept
de gagner les domaines de l'hydrologie de bassins versants, de la biogéochimie...

b) Propriétés de conservativité

Si l'on concentre une solution initiale (i) sous saturée par rapport à la calcite, tant que l'équilibre (e)
avec le minéral n'est pas atteint, le calcium et l'alcalinité se comportent comme des traceurs de l'état de
concentration de la solution. Lorsque l'équilibre est atteint, on a:

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(Alc.)e = Z (Alc.)i (Ca++)e = Z (Ca++)i


avec Z facteur de concentration.
La différence entre ces équations donne:
(ARCalcite)e = Z (ARCalcite)i

Si on poursuit la concentration, d'un facteur supplémentaire Z', au delà de la précipitation de la calcite


(f), on soustrait à la solution une quantité "q" d'équivalents de calcium et d'alcalinité carbonatée:

(Alc.)f = Z' ((Alc.)e - q) (Ca++)f = Z' ((Ca++)e - q)

La différence entre ces équations donne:


(ARCalcite)f = Z' (ARCalcite)e
d'où:
(ARCalcite)f = Z. Z' (ARCalcite)i

Ainsi, l'ARCalcite obtenue par différence de deux grandeurs non conservatives reste conservative après
précipitation de la calcite. Elle augmente proportionnellement à la réduction du volume d'eau.

Si la précipitation de la calcite s'accompagne ensuite de la précipitation de gypse (g), la précipitation de


ce minéral va consommer du calcium sans consommer d'alcalinité carbonatée après avoir atteint
l'équilibre avec le gypse (e').

Si l'on précipite une quantité "t" de gypse:


(ARCalcite)g = Z" ((ARCalcite)e' +t) (SO42-)g = Z" ((SO42-) - t)
La somme donne:
(ARGCalcite+gypse)g = Z" (ARGCalcite+gypse)e'
d'où
(ARGCalcite+gypse)g = Z. Z'. Z" (ARGCalcite+gypse)i
Le caractère conservatif de l'ARCalcite disparaît mais l'ARGCalcite+gypse reste conservative.

Cette propriété de conservativité a permis la multiplication récente des applications de ce concept pour
l'élaboration de bilans de l'eau à différentes échelles: décomposition des hydrogrammes de crue, bilans
salins et alcalins à l'échelle d'une parcelle irriguée, et autres quantifications par le biais des lois des
noeuds et des mailles (CHRISTOPHERSEN et al., 1992, RIBOLZI 1996, RIBOLZI et al., 1996,
BARBIERO, 1995, BOURRIE et LELONG, 1990)

c) Transmission de l'information et degrés de libertés dans l'évolution de la concentration des


éléments dissous

Pour n éléments majeurs dissous, la neutralité électrique impose une contrainte entre les concentrations.
Le degré de liberté est (n-1). Il correspond au nombre maximum d'informations véhiculées par l'eau.

Lorsqu'un minéral précipite, une contrainte supplémentaire vient s'ajouter, ce qui réduit d'une unité le
nombre de degrés de libertés. En effet, l'équilibre de la solution avec le minéral introduit une relation
entre les concentrations de ses constituants, ou plus précisément entre leur activité chimique.
L'information perdue par les deux (ou plus éléments qui réagissent) n'est pas totalement inutilisable.

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Les deux (ou plus ) concentrations peuvent être remplacées par l'AR correspondante qui demeure
conservative.

A ce niveau il existe n-2 informations indépendantes, soient : n-3 concentrations plus une AR.

Lorsque un second minéral précipite, l'AR perd sa propriété de conservativité s'il existe un ion commun
à ces deux minéraux, mais l'ARG reste conservative. Le système perd encore un ddl.

Pour la précipitation de m minéraux, le nombre maximum d'informations véhiculées par l'eau est (n-1-
m), avec m le nombre de minéraux en équilibre avec la solution. Ainsi, selon la gamme de
concentration dans laquelle on travaille, on peut définir un jeu de paramètres indépendants pour
l'ensemble des eaux et formé d'une combinaison de concentrations d'éléments non réactifs et
d'alcalinité résiduelles ou ARG.

d) Les limites dans l'utilisation du concept

échanges ioniques

La capacité d'échange cationique contient une réserve de cation souvent supérieure à la quantité
dissoute, notamment lorsque la solution du sol est peu concentrée. Les échanges ioniques peuvent alors
altérer le caractère conservatif de l'AR.

RIBOLZI et al. (1996) ont montré sur un petit bassin versant méditerranéen, que pour les eaux en début
de phase de concentration, le cas se l'échange Ca/Mg est fréquent. Le magnésium est adsorbé et du
calcium est désorbé, d'autant plus que la précipitation de calcite soustrait cet élément à la solution du
sol. Il en résulte une diminution de l'alcalinité résiduelle calcite. En revanche l'ARGcalcite + dolomite
ou l'ARGcalcite + calcite magnésienne ne sont pas affectées. Pour les eaux plus concentrées, les
quantités d'élément mises en jeu par les échanges ioniques deviennent moins prépondérantes par
rapport aux quantités dissoutes. Le caractère conservatif est alors peu affecté et la perturbation de ce
caractère par les phénomènes d'échanges ioniques peut être négligée.

connaissance de la stoechiométrie exacte des précipitats (cas des silicates)

Pour construire une ARG pertinente, en fonction du site étudié, il est nécessaire de connaître avec
précision la nature des précipités et leur stoechiométrie exacte. Si l'on prend par exemple le cas des
zones alcalines sahéliennes, la formation de calcite est classique dans le processus d'alcalinisation des
sols et des solutions. Cependant, sur plusieurs sites, on a soupçonné la formation de silicates
magnésiens tels que la stévensite, la sépiolite ou plus probablement une montmorillonite magnésienne
(GAC 1979, GAC et al., 1977a et b, DROUBI et al., 1980, VALLES et al., 1989, BARBIERO, 1995).
Ces précipitations provoquent un contrôle du magnésium, fréquemment observé dans les jeux de
données. L'élaboration d'un estimateur pertinent de l'état de concentration des solutions, fondé sur
l'ARG, passe donc par la prise en compte de ces précipitations.

Il est délicat d'apprécier la nature des silicates magnésiens néoformés à partir d'une simple analyse de
diffraction des rayons X; la distinction entre ces silicates néoformés et les silicates préexistant dans le
sol n'apparaît pas d'emblée (techniques modernes?). Ce problème peut être contourné par une
expérimentation plus lourde et de plus longue durée, comme par exemple l'introduction de sachets de
minéraux test dans le sol.

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La nature de ces synthèses argileuses importe cependant pour l'élaboration d'un traceur de référence
fiable de l'état de concentration des solutions (et donc de dégradation des sols) à partir de l'ARG.

Dans le cas, par exemple, de la formation de stevensite ou de sépiolite, la réaction est:


pour la stévensite:
3Mg++ + 4H4SiO4 + 2H2O ** Mg3Si4O10(OH)2 + 6H3O+
pour la sépiolite:
4Mg++ + 6H4SiO4 + 5H2O ** Mg4Si6O15(OH)2,4H2O + 8H3O+
Un équivalent d'Alcalinité est consommé pour chaque équivalent de Mg.
L'ARGcalcite + stevensite/sépiolite s'écrit donc:
ARGCalcite + Sep./Stev. =Alc. - 2 (Ca) - 2 (Mg)
En revanche, pour une montmorillonite magnésienne:
Mg-Montmorillonite

Il s'avère cependant que sur les site étudiés, les quantités d'ions mises en jeu pour l'élaboration de ces
minéraux argileux est négligeable face aux quantité ioniques en solution. Aussi; le caractère conservatif
est-il peu affecté par de telles précipitations.

effet de la température sur l'ordre de précipitation des minéraux

Des travaux récents (AUQUE et al., 1995; ZOUGGARI, 1996) ont mis l'accent sur les variations de
solubilité de certains minéraux très solubles avec la température. Dans le cas du sulfate de sodium, les
quantités de sels mises en jeu peuvent être de plusieurs centaines de gramme par litre de solution pour
une dizaine de degrés Celcius d'écart dans les plages de température habituellement observées sur le
terrain. Ainsi, l'ordre de précipitation peut être affecté. Dans le cas de précipitation de halite (NaCl) et
de mirabilite (Na2SO4,10(H2O)), les températures inférieures à 35°C favorisent la précipitation de
mirabilite et par voie de conséquence retardent la précipitation de halite à cause de la consommation de
sodium dissous.

Ainsi, selon la température, pour un même système naturel, la séquence de précipitation sera différente
ce qui complique considérablement le choix d'une alcalinité résiduelle généralisée. Il est probable que
ce problème puisse être rencontré aussi dans certains systèmes carbonatés. Il est clair cependant que les
minéraux impliqués, très solubles, concernent les phases ultimes de la concentration des eaux et qu'ils
ne constituent pas les cas les plus fréquents.

II - Exemples récents d'application de l'ARG à des domaines différents de la


géochimie

1) Application à l'étude de processus biogéochimiques

Sur le site Nigérien, la concentration de la solution du sol s'accompagne de la précipitation de calcite et


de fluorine lors du passage latéral de sols bruns subarides vers des sols alcalins. Ces deux précipitations
sont responsables des changements de faciès chimique de la solution du sol sur la gamme de

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concentration. L'alcalinité résiduelle calcite + fluorine (ARGc+f) présente un comportement de traceur


conservatif (fig. XXX). Au bout d'un an de culture d'un fourrage semi aquatique local (Echinochloa
stagnina Retz. Beauv.) sur une parcelle test, on observe que la relation qui lie le sodium et l'ARGC+F a
évolué (fig. XX), elle n'est plus linéaire. Un certain nombre de points s'écartent de la relation initiale.
Ces points correspondent aux prélèvements effectuées dans la zone racinaire des plants de fourrage,
très bien délimittée sur les profils. On peut donc avancer que la parcelle a évolué chimiquement sous
l'action, d'une part d'un lessivage, qui fait diminuer sodium et ARGc+f proportionnellement, et d'autre
part d'une consommation d'ARGC+F par le fourrage qui modifie les équilibres acido-basiques dans la
zone racinaire (BARBIERO, 1995, BARBIERO et al., 1995, 1996?). L'application du caractère
conservatif de l'ARG permet sur ce site de quantifier la part du lessivage et celle de la neutralisation
biologique de l'alcalinité.

2) Application à l'hydrologie en tant que traceur chimique naturel de l'eau

Faciès chimique et familles chimiques


La lecture et la compréhension de ce chapitre nécessitent la bonne maîtrise des notions d'alcalinité et
d'alcalinité résiduelle généralisée.

A partir du Concept d'Alcalinité résiduelle Généralisée (ARG), il apparaît clairement que la


concentration des différents éléments dissous varie de façon importante. Pour certains éléments, elle
augmente sans cesse avec la minéralisation de l'eau, d'autres augmentent puis diminue par épisode, au
grès de la succession des précipitations. Le rapport entre les différents éléments au sein d'un même
système hydrochimique change donc fortement. Le faciès chimique varie et ne peut être utilisé sans
risque pour définir un système.

Dès lors, la caractérisation chimique d'un système hydrochimique est délicate et le chapitre suivant lui
est consacré.

I - L'instabilité et l'inconsistance du faciès chimique rappels sur l'ARG

1) rappels sur l'ARG

Lorsqu'une solution se concentre, la molalité des différents éléments dissous augmente en proportion
tant que l'équilibre avec un minéral n'est pas atteint. Une fois cet équilibre réalisé, et si le minéral
précipite lorsque la solution continue à se concentrer, la molalité de l'un des éléments augmente alors
qu'elle diminue pour l'autre élément. C'est le composé le plus abondant stoechiométriquement qui
domine. Ce concept peut être étendu à la précipitation successive de plusieurs éléments.

2) études de cas

Supposons qu'en amont d'un système hydrochimique, l'eau la moins minéralisée présente les
caractéristiques suivantes exprimées en MC+/l.

Ca++ > Alcalinité carbonatée

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Ca++< Alcalinité + SO4--


Na++Ca++> Alcalinité+SO4--

Supposons par ailleurs que cette soit aie au départ un faciès (bi)carbonaté calcique.

L'évolution prévisible est la suivante.

- première étape : sous saturation par rapport aux différents éléments.


- seconde étape : précipitation de la calcite seule
- troisième étape : précipitation de gypse et de calcite
- quatrième étape : précipitation de mirabilite, de gypse et de calcite
- cinquième étape : précipitation de halite

Première étape :

Aucun minéral n'est en équilibre avec la solution. Les molalités évoluent sans contrainte autre que la
neutralité électrique.

Toutes les molalités augmentent dans les mêmes proportions.

Dans un diagramme de Piper, tous les points sont superposés. Les diagrammes de Stabler affichent la
même figure, à l'échelle près.

Durant cette première étape, le faciès chimique ne change pas.

Les eaux sont toujours (bi)carbonatés calciques.

En terme de degrés de libertés, 6 paramètres 1 relation entre eux (neutralité électrique) : 6-1= 5 degrés
de liberté.

On peut retenir 5 traceurs.


Par exemple: Na, Cl, Ca, Mg, SO4
Ou bien : Cl, SO4, Mg, Na, Alcalinité résiduelle calcite (ARc)
Ou bien : ARc, ARc+gypse, Mg, Cl, Na
Ou bien: ARc, ARc+g, ARc+g+m, Cl, Mg
Seconde étape :
Avec la précipitation de la calcite teneur en calcium et alcalinité ne peuvent croître simultanément.
ARcalcite = Alcalinité - Ca
Dans ce cas, Arc est négative car Ca++ > Alcalinité carbonatée.
Durant cette seconde étape, la molalité en calcium augmente, moins fortement que Cl car une partie du
Ca est impliquée dans la précipitation de la calcite.

L'alcalinité diminue, le pH aussi.


En terme de degrés de libertés, 6 paramètres 2 relations entre eux (neutralité électrique et équilibre
calcite) :

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6-2= 4 degrés de liberté.


On peut retenir 4 traceurs.
Par exemple Na, Cl, Mg, SO4
Ou bien : Cl, SO4, Alcalinité résiduelle calcite (ARc)
Ou bien : ARc, ARc+gypse, Cl, Na
Ou bien: ARc, ARc+g, Cl, Mg
Etc..

Le calcium et l'alcalinité ne peuvent plus être utilisés comme traceurs, mais l'alcalinité résiduelle calcite
est encore conservative.

Durant cette étape, le faciès devient moins alcalin car l'alcalinité diminue dans l'absolue pendant que
les molalités en chlorures et les sulfates augmentent. La proportion de l'alcalinité dans la somme des
anions diminue fortement. Il est de même pour le calcium, mais dans une moindre mesure. En effet, la
teneur en calcium est affectée par la précipitation de la calcite, mais l'excès de calcium par rapport à
l'alcalinité induit une augmentation de la molalité de cet élément. La proportion de calcium dans la
somme des cations diminue légèrement.
Le faciès passe de bicarbonaté calcique à sulfaté calcique. Il change.

Troisième étape :

La molalité en calcium augmente de même que celle du sulfate. Le gypse (CaSO4,2(H2O)) précipite à
son tour. Il induit une nouvelle contrainte entre les concentrations et la perte d'un degré de liberté du
système et un traceur. Ca, SO4 et alcalinité ne peuvent plus servir de traceur, pas plus que l'alcalinité
résiduelle calcite. En revanche, l'alcalinité résiduelle calcite+gypse reste conservative.

Avec la précipitation du gypse, la somme SO4+alcalinité est supérieure à Ca. L'alcalinité résiduelle
calcite + gypse est positive. La teneur en sulfate augmente alors que celle du calcium diminue. Le
calcium devient le facteur limitant de la précipitation conjointe de la calcite et du gypse. Comme les
solutions sont déjà en équilibre avec la calcite, l'alcalinité augmente car Ca diminue.

En terme de degrés de libertés, 6 paramètres 3 relations entre eux (neutralité électrique et équilibre
calcite plus équilibre gypse) : 6-3= 3 degrés de liberté. On peut retenir 3 traceurs.

Par exemple Na, Cl, Mg


Ou bien : Cl, Alcalinité résiduelle calcite+gypse (Arc+g)
Ou bien : ARc+gypse, Cl, Na
Ou bien: ARc+g, Cl, Arc+g+m
Etc..

La molalité en calcium diminue fortement alors que celle du magnésium ou du sodium augmente. La
proportion de Ca dans la somme cationique diminue fortement. Le faciès devient nettement moins
calcique et plus sodique et magnésien. Pour les anions, la molalité n sulfate augmente mais moins que
celle du chlorure. Le faciès anionique évolue peu, il devient progressivement plus chloruré.

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Quatrième étape :

Pour que les solutions continuent à ce concentrer au-delà de ce niveau, il faut que le climat soit très sec.
La suite de cette séquence concerne donc des zones arides ou désertiques. La molalité en sulfate
augmente de même que celle du sodium. Si la température n'est pas trop élevée, la mirabilite
(Na2SO4,10(H2O)) précipite. Si la température est forte, la halite (NaCl) précipitera avant la mirabilite.

Dans le cas où la mirabilite précipite en premier et pour l'exemple retenu ici, l'alcalinité résiduelle
calcite+gypse+mirabilite est négative car Na+Ca > SO4 +alcalinité.

Avec la précipitation de ce nouveau minéral, la molalité en sodium continue à augmenter, celle du


sulfate diminue, celle du calcium augmente et l'alcalinité diminue.

La domination du sodium est accentuée par le fait que souvent des sulfates mixtes sodium+magnésium
(bloedite pour le plus fréquent) précipitent accentuant la position de dominé du sulfate.

Le faciès devient moins sulfaté car la molalité de cet élément diminue alors que celle du chlorure
augmente. Le faciès devient chloruré sodique.

Peu d'éléments restent conservatifs. La plus part sont impliqués dans des processus réactifs.

En terme de degrés de libertés, 6 paramètres 4 relations entre eux (neutralité électrique et équilibre
calcite, gypse et mirabilite) :

6-4= 2 degrés de liberté.


On peut retenir 2 traceurs.
Par exemple Cl et Arc+g+m

Cinquième étape :

L'ultime étape sera la précipitation de la halite avec une stabilisation de l'ensemble des concentrations
des éléments majeurs. Seuls les éléments habituellement mineurs et qui sont peu contrôlés peuvent être
utilisés comme traceur (Li par exemple dans certains cas)

Ainsi, à partir de cet exemple, on constate que le faciès chimique des eaux d'un même système
hydrochimique est une caractéristique changeante selon le niveau de minéralisation. Il n'est pas
toujours conseillé de l'utiliser pour caractériser le système hydrochimique. En revanche, à partir des
caractéristiques initiales et du concept d'alcalinité résiduelle généralisée, il est possible de prévoir le
sens de variation du faciès, du moins dans ces premières étapes.

Au faciès chimique, il faut préférer la notion de famille chimique qui fera l'objet du prochain
paragraphe.

Cette évolution est illustrée par une simulation et par des données réelles issues d'un système
hydrochimique reliant le versant sud des Aurès (Atlas saharien en Algérie).

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Exemple d'évolution réelle de la composition


chimique ans un système soumis à une
évaporation intense, avec précipitations Exemple de simulation de la concentration d'une eau
successive de calcite, gypse, mirabilite et avec précipitations succesives de calcite, gypse et
bloedite puis de halite. Une courbe de lissage mirabilite.
par ajustement polynomial a été ajoutée aux
données brutes.

II - Essai de classification des familles chimiques

L'étude des grandes familles chimiques que l'on peu rencontrer à l'échelle planétaire permet de
proposer une première esquisse de classification basée sur le concept d'alcalinité résiduelle généralisée.
En ce limitant aux trois premiers niveaux de classification.
* Alcalinité négative : Eaux acides (groupe 1)
* Alcalinité positive :
o Alcalinité < Ca faciès neutre
x Ca > alcalinité+SO4 : voie chlorurée sodique calcique (groupe 2)
x Ca < alcalinité+SO4 : voie sulfatée chlorurée sodique (groupe 3)
o Alcalinité > Ca faciès alcalin
x Ca+Na > alcalinité+SO4 : voie sulfatée carbonatée sodique (groupe 4)
x Ca+Na < alcalinité+SO4 : voie chlorurée carbonatée sodique (groupe 5)

Ceci constitue une représentation synthétique arborescente des premières familles hydrochimiques à
partir de l'Alcalinité Résiduelle Généralisée.

Certains systèmes hydrochimiques sont des cas très particulier de l'un ou l'autre des groupes
précédemment définis. On signalera par exemple les eaux lithiques des lacs salés du Chili, les eaux
salées magnésiennes de certaines régions du Nordeste brésilien.
Cet aspect géographique de la famille chimique fera l'objet d'un autre paragraphe

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Les réactions d'oxydoréduction dans les eaux naturelles


Les chapitres précédents ont montré l'importance de l'alcalinité et des réactions acido-basiques sur la
qualité des eaux, notamment pour les eaux de surface.

Une autre famille de processus, les processus d'oxydoréduction, jouent un rôle majeur dans la qualité
des eaux en général et des eaux de nappe en particulier. Contrairement aux réactions impliquant les
espèces carbonatées, les réactions d'oxydoréduction sont réputées lentes et souvent hors équilibre
thermodynamique. Il est alors difficile de les intégrer dans la modélisation à cause de cet effet cinétique
important.

Il existe un parallélisme certain entre les réactions acido-basiques et les réactions d'oxydoréduction :

- Les réactions acido-basiques concernent des échanges de protons alors que les réactions
d'oxydoréduction concernent des échanges d'électrons.
- Le pH= -log10[H+] est le principal paramètre indicateur des réactions acido-basiques , alors que
le pe = -log10[e-], potentiel de l'électron, est le principal indicateur des réactions
d'oxydoréduction.

Cependant, il existe des différences notables. Le proton hydraté (H30+) possède une existence propre
dans la solution. C'est une espèce aqueuse pouvant être identifié comme tel par divers instruments
analytiques. En revanche, l'électron n'existe pas en tant qu'espèce isolée dans les solutions aqueuses. Il
y a des échanges d'électrons entre espèces chimiques et le potentiel de l'électron traduit son niveau
énergétique lors de ces échanges.

Enfin, les réactions acido-basiques concernent une grande diversité de processus dans les eaux
naturelles. Même si les processus biologiques interviennent (alcalinisation biologique,..), la plupart
d'entre eux sont purement abiotiques. A l'opposé, les réactions d'oxydoréduction sont surtout générées
par des processus biologiques, certains d'entre eux pouvant avoir quelque retentissement sur les
réactions acido-basiques (sulfato-réduction par exemple).

Ce distinguo entre proton et électron n'est pas un détail, la suite montrera les implications importantes
de ces différences.

Il est vivement recommandé de lire le chapitre sur l'acquisition des données.

- Bases théoriques sur les réactions d'oxydoréduction


- Activité biologique, diffusion des gaz et oxydoréduction des eaux; les principaux processus
d'oxydoréduction affectant la qualité des eaux
- Méthodes spécifiques aux processus d'oxydoréduction pour l'étude sur le terrain.
- Etudes de cas

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Les réactions d'oxydoréduction dans les eaux naturelles: Bases théoriques


1) quelques définitions

Le potentiel de l'électron (pe) est défini par :

pe = - log10([e-])

bien que l'électron ne soit pas une espèce aqueuse en tant que telle, les échanges d'électron déterminent
un " niveau énergétique ", un potentiel de l'électron qui est représenté par pe.

Sur le terrain, on mesure le potentiel d'oxydoréduction, Eh exprimé en volts. Ce paramètre est relié au
potentiel de l'électron par la relation.

Eh = pe*(c.R.T/F)
avec:
c = Ln(10)
R constante des gaz parfaits
T température e °Kelvin
F le Faraday
R=8.314510
F=96485.309
Ln(10)= 2.30258509
A 25°C (298.15°K)
pe=16.3778242.Eh(v)
Eh=0.06105817.pe

2) pH, eH et pO2

Au même titre que la réaction d'autoprotolyse de l'eau (2(H2O)= H3O+ + OH-) utilisée pour les
réactions acidobasiques, la réaction suivante :

2H2O= 4H+ + 4 e- + O2 (g) (Ke=-83.12 à 25°C et 1 atmosphère)

permet d'établir une première relation entre pH, pe et pO2


4 log10([H+]) + 4 log10([e-]) + log(fO2)- 2 log10([H2O]) = - 83.12
fO2 est la fugacité du dioxygène.
Dans les conditions normales, la fugacité est très proche de la pression partielle en dioxygène pO2. Ce
qui donne:
4pH + 4pe + log10(pO2) = -83.12 (pour [H2O]=1)

Ainsi, la mesure du pH et du Eh in situ, il est possible de déterminer la pression partielle équilibrante


en dioxygène.

ATTENTION !!!! Contrairement aux calculs de pCO2 à partir du pH, de l'alcalinité et des modèles
d'équilibre qui permettent une estimation fiable, cette pression partielle équilibrante ne reflète que
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rarement la pression partielle réelle en dioxygène. Ceci est du à des raisons cinétiques. Toutefois, cette
valeur peut s'avérer d'un usage très utile pour l'étude de la qualité des eaux.

Il est aussi possible d'exprimer ces réactions en intégrant la molalité en oxygène dissous:
2H2O= 4H+ + 4 e- + O2 (aq) (Ke=-85.99 à 25°C et 1 atmosphère)
4pH + 4pe + log10([O2]) = -85.99 (pour [H2O]=1)

3) Les diagrammes de Pourbaix.

Si l'on considère la réaction :

A + nH+ + me- = B (Ke)


log10([B]/[A]) - nlog10([H+])-mlog10([e-]) = -log10(Ke)
ou bien:
n pH + m pe + log10([B]/[A]) = pKe

La frontière séparant les domaines de prédominance des espèces A et B, représente la condition


d'égalité de concentration de ces deux espèces [A]=[B], c'est-à-dire [A]/[B]=1

Cette frontière a pour équation n pH + m pe = pKe.

Dans un diagramme pe versus pH, il s'agit d'une droite de pente égale à : -n/m. Cette pente sera donc
caractéristique du couple redox A/B et facilitera son identification.

Exemple :

*) Stabilité de l'eau
2H2O= 4H+ + 4 e- + O2 (aq) (Ke=-85.99 à 25°C et 1 atmosphère)
4pH + 4pe + log10([O2]) = -85.99 (pour [H2O]=1)
2e- + 2H+ = H2(g)
Une relation pO2= Cte se traduit par une droite de pente -1
dans un diagramme pe/pH. Par ailleurs, en surface, la
pression totale est égale à une atmosphère. La pression
partielle en dioxygène ne peut dépasser cette valeur.

Il en va de même pour pH2. En conséquence, le domaine


de stabilité de l'eau, sera limité par les deux droites,
parallèles entre elles, pO2=1 atmosphère et pH2=1
atmosphère.

Il est possible de trouver des eaux dont les caractéristiques


sont en dehors de ce domaine de stabilité, si ce sont des eaux profondes, avec une pression totale
supérieures à la pression atmosphérique.

Dans le graphique suivant, le domaine de stabilité de l'eau est constitué par la bande oblique située au
milieu de la figure.

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ATTENTION !!!! Le fait que le potentiel


d'oxydoréduction augmente ne signifie pas
forcément que les conditions deviennent moins
réductrices. En effet, lors de phases de réduction
très marquées, par exemple lors de processus
fermentaires, qui libèrent du dihydrogène, le
potentiel d'oxydoréduction peut évoluer selon le
schémas suivant. Première étape: de 1 vers 2 : le
milieu initialement oxydant, devient de plus en
plus réducteur. Seconde étape : de 2 vers 3 : le
milieu est très réducteur, c'est la phase fermentaire
avec production de H2. Le pH peut diminuer à
cause de la production d'acides organiques mais
aussi de CO2 abondant. Avec log(pH2) = constante (et log(pO2) aussi), toute diminution de pH
s'accompagne d'une augmentation de Eh. Pour autant, ceci ne traduit pas une " réoxygénation " du
milieu. Cette erreur est rencontrée parfois, même dans des articles scientifiques. Il faut retenir que l'on
ne peut caractériser l'état d'oxydoréduction par le Eh seul. Le pH doit être pris en compte.

En fait, le niveau d'aération d'une eau ne doit pas être apprécié par une lecture " verticale " mais oblique
c'est-à-dire selon une perpendiculaire à la droite de stabilité de l'eau.

*) Nitrates et nitrites

La forme la plus stable de l'azote est le diazote N2, c'est


donc une forme très répandue d'azote. Si l'on s'intéresse
aux formes de l'azote en solution et en excluant N2, les
espèces les plus fréquentes sont NO2-, le nitrite, et NH4+ et
NH4OH, deux formes ammoniacales

NO3- + 2H+ + 2 e- = NO2- +H2O

Les zones de predominance seront séparées par une


frontière de pente -1, c'est-à-dire qu'elle correspond à
pO2=constante. Ceci apparaît plus facilement en écrivant :

2 NO3- = 2 NO2- + O2

Les zones de predominance seront séparées par une frontière de pente -1, c'est-à-dire qu'elle correspond
à pO2=constante. Ceci apparaît plus facilement en écrivant :

2 NO3- = 2 NO2- + O2
Par ailleurs entre nitrites et les deux formes ammoniacales NH4+ et NH4OH,
NO2- + 8 H+ + 6 e- = NH4+ + 2(H2O)
Et
NO2- + 7 H+ + 6 e- = NH4OH + H2O
Avec bien sur:
NH4OH + H+ = NH4+ + H2O

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Les frontières entre les domaines de prédominance de NO2- d'une part et NH4+ et NH4OH sont des
droites de pentes respectives -4/3 et -7/6, ce qui est nettement différent de -1.

*) Formes hydroxylées du fer

Les formes hydroxylées du fer sont :FeOH++ ; Fe(OH)2+,Fe(OH)3° pour le FeIII et FeOH+ pour le FeII.

En considérant Fe++ et Fe+++ ; le diagramme de Pourbaix obtenu est nettement plus complexe que pour
l'azote.

La frontière entre les formes de ferIII et de ferII présentent des


pentes très variables selon le pH.

L'équilibre entre les formes suivantes : Fe++,FeOH+ et


Fe(OH)3° se situe au voisinage de pH=7, comme d'autres
équilibres affectant des milieux plus anoxiques. Le FeII étant
nettement plus soluble que le FeIII, il aura tendance à
tamponner le pH au voisinage de cette valeur.

Par ailleurs, il est important de noter que ce diagramme a été


obtenu en ne considérant que les formes hydroxylées et Fe++ et
Fe+++. L'existence dans l'eau d'autres formes du fer dissous en
concentration notable n'a pas été prise en compte.
L'introduction d'autres formes du fer peut modifier considérablement le diagramme de Pourbaix.

Ainsi, ce diagramme n'a pas une validité générale. Dès que les eaux contiendront des chlorures, des
sulfates ou d'autres anions susceptibles de se complexer avec le fer, ce diagramme ne pourra pas être
utilisé.

Ceci constitue une limite importante à la conception et à l'utilisation des diagrammes de Pourbaix.

*) Formes du soufre

Le diagramme des principales formes du soufre a été représenté ici. Ne figurent pas des formes tels que
les sulfites, polysulftes,…

Le diagramme des principales formes du soufre a été


représenté ici.
Ne figurent pas des formes tels que les sulfites,
polysulftes,…
Le Soufre VI (SO4-et HSO4-) domine en conditions
oxydantes.
Le passage SoufreVI/ Soufre -II se situe dans des
niveaux très bas de potentiel redox.

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Enfin, l'équilibre entre HS- et H2S° se situe à pH=7; ainsi dans les eaux réductrices, et en l'absence d'un
tampon acicobasique plus fort, ce couple peut tamponner à pH neutre.

Les caractéristiques chimiques de l'arsenic présente des similitudes avec celles du soufre. Certianes
considérations précédentes peuvent être appliquées à l'arsenic.

*) les formes du carbone

En conditions oxydantes, les formes prédominantes du


carbone inorganique sont : CO2 aqueux (soit pour partie
H2CO3°), HCO3- qui est l'espèce habituellement dominante
de l'alcalinité carbonatée si l'on considère ses formes libres
ou complexes, et CO3-qui ne devient prédominante que dans
les eaux ultrabasiques, c'est à dire dans les faciès carbonatés
sodiques salés. Ces trois formes occupent un vaste domaine
de conditions pH/Eh.

En conditions très réductrices, le méthane CH4 devient la forme dominante.

Il convient de se rappeler que les frontières ne représentent que l'égalité des concentrations (ici des
pressions partielles). Dans des conditions moins réductrices que celles représentées par cette frontière
HCO3-/CH4, il peut déjà y avoir production et émission de méthane, mais le principal gaz émis sera le
CO2.

*) les formes de l'arsenic

En conditions oxydants, l'arsenic est sous forme pentavalente


AsV avec les espèces AsO4---, HAsO4--, H2AsO4-, H3AsO4° .

En conditions réductrices, l'arsenic est sous forme trivalente


AsIII avec les espèces AsO3--, HAsO3--, H2AsO3-, H3AsO4° et
H4AsO3+. La forme trivalente est beaucoup plus toxique que
la pentavalente.

Sous forme solide, en conditions réductrices, l'arsenic passe


sous forme d'arséniure associé au soufre qui passe sous forme de sulfure dans les arsénopyrites. Ainsi,
si l'on considère un concentration total en ferII, en soufre, etc. on peut faire apparaître les arséniures
dans le diagramme de Pourbaix, mais ce dernier n'aura pas de valeur générale.

*) les formes du phosphore

En résumé, les diagrammes de Pourbaix permettent de visualiser le type de contrainte liant le pH et le


Eh à l'équilibre entre deux formes d'un même éléments chimique. Cependant, il n'a de validité que
partielle car il ne prend en compte que rarement toutes les espèces chimiques d'un même élément. Pour
terminer, il est possible d'intégrer dans ces diagrammes la présence de minéraux. Dans ce cas, la
concentration totale en élément dissous doit être défini et le diagramme n'est valable que pour les eaux
présentant cette concentration en élément dissous, ce qui restreint encore plus le domaine d'application
du diagramme.

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Des logiciels spécialisés permettent de calculer automatiquement ces diagrammes de Pourbaix.


Vous pouvez télécharger les diagrammes de Pourbaix représentés ci-dessus pour positionner des points
de mesure.

Les réactions d'oxydoréduction dans les eaux naturelles


Activité biologique, diffusion des gaz et oxydoréduction des eaux
Les principaux processus d'oxydoréduction

I - Activité biologique, diffusion des gaz et oxydoréduction des eaux

Le niveau d'oxydoréduction des eaux dépend d'un équilibre entre la vitesse de consommation de
l'oxygène ou des oxydants, d'une part et la vitesse de diffusion de l'oxygène vers l'eau.

La consommation de l'oxygène ou des oxydants est principalement le fait de l'activité biologique. Les
micro-organismes consomment l'oxygène libre ou combiné (oxygène du nitrate) pour oxyder la matière
organique et produire ainsi l'énergie nécessaire à a vie. Ils rejettent du CO2 si l'oxydation est complète,
du CO2 et des anions organiques si la dégradation est incomplète, du CO2 et du CH4 (méthane) en
conditions très réductrices. Il y a donc souvent une relation inverse entre la pO2 et la pCO2.

La vitesse de consommation de l'oxygène dépend de plusieurs facteurs:

- la température.

L'activité biologique est fortement dépendante de la température. Plus la température est élevée, plus la
consommation d'oxygène sera intense. En revanche, dans les conditions de température fraîche, la
consommation d'oxygène sera lente et les eaux moins réductrices.

- la teneur en carbone organique et autres nutriments.

Les aquifères constituent des milieux oligotrophes lorsque les matériaux géologiques sont dépourvus de
composés organiques. L'activité biologique est alors extrêmement limitée d'autant plus que la
photosynthèse est évidemment absente. A l'opposé, dans des milieux riches en matière organique ou en
composés réducteurs pouvant être utilisés par les micro-organismes (pyrite, fer ferreux,…) l'activité
biologique sera importante et la consommation d'oxygène aussi.

C'est pour cette raison que les nappes perchées suffisamment superficielles pour baigner un horizon
organique de le surface du sol sont souvent fortement réductrices avec des potentiels d'oxydoréduction
voisins de zéro voire légèrement négatifs.

Enfin, la nature de la matière organique est importante.

* Les composés organiques peu polymérisés sont rapidement métabolisés et induisent une
consommation très rapide d'oxygène. Dans le cas extrême des sucres simples, la transformation
s'oriente vers la fermentation.

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Laboratoire d'Hydrogéologie d'Avignon - VINCENT VALLES COURS D'HYDROCHIMIE

* Les composés aliphatiques (voir cours MO géochimie environnementale) sont dégradés plus
rapidement que les composés aromatiques. Si la matière organique est riche en composés aliphatiques,
la dégradation sera relativement rapide ce qui favorisera des conditions réductrices.

* En revanche les composés riches en aromatiques polymérisés tels que les lignines seront dégradés
lentement induisant des conditions peu réductrices.

La vitesse de ré oxygénation de l'eau dépend de nombreux facteurs.

- la situation libre ou captive de l'aquifère


- la vitesse d'écoulement de l'eau de nappe ou de l'eau de rivière.
- la taille des pores du matériau
- la vitesse de circulation de l'eau (eaux stagnantes pour raisons de topographie = cuvette, eaux
circulantes, tourbières sur pentes avec taux rapide de renouvellement). L'expérience montre que
ce facteur est le plus important. Des eaux stagnantes, même dans un milieu à porosité grossière
(pour des raisons de topographie en forme de cuvette par exemple) favorisent des conditions
anoxiques voire réductrices. En revanche la circulation des eaux, même au travers d'une couche
riche en matière organique présentera plutôt des caractéristiques oxydantes.
- l'engorgement du milieu (diffusion d'O2 par la porosité grossière de la ZNS) ; elle explique la
forte hétérogénéité spatiale (points chauds) et temporelle (flash) de l'activité biologique.

Le niveau d'oxygénation dépend de l'équilibre entre ces vitesses.

La multiplicité des facteurs, des situations induit une forte variabilité des conditions d'oxydoréduction
rencontrées, y compris parfois au même point ou au même moment. Il existe souvent une forte
variabilité spatiale même à l'échelle millimétrique (points chauds) et une forte variabilité temporelle
(effets de flash pour certains processus redox), ce qui rend l'étude difficile, mais intéressante.

II - Les principaux processus d'oxydoréduction affectant la qualité des eaux

Lorsque les eaux évoluent depuis des conditions aérées vers des situations très réductrices, plusieurs
grandes familles de processus d'oxydoréduction peuvent être décrites.

- la respiration aérobie du O2

Lorsque le milieu est aéré, qu'il contient du dioxygène dissous ou dans l'atmosphère du sol ou du sous-
sol, les micro-organismes utilisent préférentiellement ce composé pour oxyder la matière organique.
Cette réaction produit du CO2 qui enrichit le milieu. La pCO2 des solutions est alors supérieure à celle
de l'atmosphère. Lorsque la diffusion du dioxygène est aisée, celle du CO2 l'est aussi. pO2 est forte et
pCO2 faible. En revanche, lorsque la diffusion des gaz est ralentie par l'engorgement de la porosité
grossière par l'eau, la pO2 diminue et la pCO2 augmente. Il existe donc habituellement une relation
inverse entre ces deux paramètres. Dans les milieux très riches en oxygènes, il pourra être intéressant
de caractériser le fonctionnement par la pCO2. en effet, pour 1% de consommation de O2, la pO2 passe
grossièrement de 20% à 19%, ce qui est peu commode à détecter. En revanche, la pCO2 passe de 0.03%
à 1% (dans le cas d'un coefficient respiratoire de 1 confer chapitres ultérieurs). EN revanche, lorsque le
milieu devient légèrement plus anoxique, avec une pO2 de quelques pourcents, la mesure de l'oxygène
dissous est très utile.

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En présence de dixoxygène, l'humification et la minéralisation de la matière organique sont rapides.


Les résidus de matières organiques fraîches évoluent rapidement. Pour les sols cultivés, les résidus de
cultures s'humifient très rapidement et les éléments figurés i.e. morceaux discernables à l'œil,
disparaissent.

- la dénitrification

Lorsque l'oxygène libre (non combiné) fait défaut parce qu'il a été tout consommé, les micro-
organismes doivent trouver une autre source d'oxydant. Ils utiliseront l'oxygène combiné des nitrates.
C'est la dénitrification.
Ce processus important car il dépollue les eaux nitratées, a fait l'objet de nombreuses études.
Cette activité implique différentes communautés microbiennes qui réalisent différentes réactions
chimiques.
Les principales étapes peuvent être définies par :

NO3- -> NO2- -> N2O(gaz) -> N2 (1)

Le protoxyde d'azote, N2O, peut s'échapper sous forme gazeuse par l'atmosphère du sol ou du sous-sol.
C'est un gaz à effet de serre marqué. Ainsi, la dénitrification décontamine les eaux mais peut participer
à l'augmentation des gaz à effet de serre. Des chercheurs mesurent les émissions de N2O lors de la
dénitrification en piégeant les gaz émis depuis la surface du sol.

Le nitrite, NO2-, constitue une étape fugace de la dénitrification (mais aussi de la nitrification voir le
cycle des éléments). Ainsi, si lorsqu'il est présent dans les eaux, cet élément est habituellement peu
abondant. Il traduit une dénitrification très probable lors du prélèvement.

Les micro-organismes utilisent préférentiellement l'azote léger (14N) et donc au fur et à mesure que les
eaux sont dénitrifiées et donc que la teneur en nitrate diminue, le delta15N augmente, ce qui est la
marque du processus de dénitrification.

En effet, une diminution de la concentration en nitrate n'est pas forcément le fait de la dénitrification. Il
peut y avoir aussi des phénomènes de mélange de l'eau polluée avec des eaux à faible teneur en nitrate,
ce qui diminue la concentration en nitrate. Dans le cas de dilution, le delta15N ne varie pas, ce qui
permet de différencier les deux cas de figure.

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En coordonnées normales, delta 15N versus [NO3-], la dilution (de (1) vers (2)) se traduit par une droite
horizontale alors que la dénitrification (de (1) vers (3)) est représentée par une hyperbole. Cette
seconde courbe se linéarise en coordonnées logarithmiques, avec une pente négative, alors que la
dilution se traduit toujours par une droite horizontale.

Enfin, lorsque les conditions sont réunies, la dénitrification peut être une réaction très rapide et
quasiment totale.

On remarque que même en conditions très réductrices, la réaction (1) ne produit pas d'ammonium.
Dans certaines conditions particulières (milieu salin littoral,..) une autre réaction peut se produire : c'est
la réduction dissimilative des nitrates qui produit de l'ammonium. Toutefois, lorsqu'elle se produit,
cette transformation est mineure par rapport à la dénitrification. La proportion d'azote transformée en
ammonium est très faible. Ainsi, lorsque l'on rencontre de l'ammonium c'est le produit de la
dégradation de la matière organique (microbienne ou non) qui libère la fraction amine des acides
aminés, ammonium qui persiste sous cette forme dans le milieu lorsqu'il est réducteur, c'est-à-dire
lorsque la nitrification, qui nécessite de l'oxygène, est impossible.

Au niveau thermodynamique, l'expérience montre que souvent que la dénitrification commence lorsque
les conditions redox sont au voisinage de l'équilibre NO3-/NO2-. En fait lors de la dénitrification, les
teneurs en nitrites sont faibles car immédiatement métabolisé et donc le rapport NO2-/NO3- est toujours
inférieur à 1. Aussi, conformément aux équilibres thermodynamiques, les points se situent au dessus de
la droite NO3-/NO2- du diagramme de Pourbaix. Les points s'alignent selon une parallèle à cette droite
du diagramme.

- la réduction et solubilisation des oxydes (et hydroxydes) de Mn puis de Fe ; aspect inorganique


puis organo-métallique

Lorsque les conditions sont plus réductrices que précédemment, que l'oxygène libre et les nitrates ont
été consommés, une nouvelle étape est atteinte. L'activité biologique crée des conditions suffisamment
réductrices pour réduire les oxydes de manganèse et les solubiliser. Cet éléments étant toxique (limite
pour la potabilité 50 µg/l), il convient de surveiller ce paramètre dès lors que le milieu devient
réducteur.

Si le milieu est plus réducteur encore, les oxydes de fer sont attaqués et le fer solubilisé. Le bilan
énergétique de l'oxydation de la matière organique avec de tels oxydants est nettement moins
avantageuse que lorsque les micro-organismes utilisent le dioxygène. Aussi, la vitesse de
transformation de la matière organique est plus lente, ce qui se manifeste par un ralentissement de
l'humification. La matière organique fraîche persiste plus longtemps dans le sol, ce qui constitue un
trait caractéristique de l'anoxie.

Exemple de pseudogley avec accumulation de matière organique.


Les processus de réduction du fer dans ce milieu soumis à des
alternances d'engorgement et de dessèchements induisent ces
colorations bigarrées bleutées et rougeâtres (pseudogley). La
matière organique se décompose lentement (zones noirâtres) à
cause de l'anoxie. Ces traits morphologiques sont caractéristiques
d'un milieu peu aéré.

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La mobilisation du fer crée une redistribution de cet élément. Les traits sont variables selon le type et la
durée de l'engorgement par l'eau.

Dans les zones de battement de nappe, notamment en milieu calcaire, la stagnation saisonnière, de
longue durée mais non permanente, induit un pseudogley. Il est reconnaissable par la juxtaposition de
zones grises et de zones rouille. Les zones grises plus réductrices comportent des oxydes-hydoxydes
mixtes de fer II et de fer III. La minéralogie de ces " rouilles vertes " a fait des progrès importants ces
dernières années.

Gley: La saturation par l'eau est


Le fer ferreux solubilisé est oxydé
quasiment permanente et le
Pseudogley: Caractéristique du en fer ferrique (couleur rouille) au
milieu est très réducteur. On
zones de saturation prolongée contact de l'atmosphère par des
remarque les colorations bleutées
par l'eau. bactéries. Souvent, les colonies
plus marquées autour des zones
bactériennes forment un voile irisé.
riches en matière organique

Dans les zones acides et engorgées, les zones de circulation sont le siège d'une réduction, d'une
solubilisation et d'une exportation du fer. Ces parties sont décolorées, claires ou quasiment blanches.
Ce sont des zones de déferrification.

Lorsque l'engorgement est permanent ou quasi-permanent, l'ensemble prend une couleur grise; il s'agit
d'un gley. Lors des courtes périodes de passage en sous saturation par rapport à l'eau, le milieu se ré-
oxyde localement, surtout au voisinage des racines et les hydroxydes de ferIII précipitent sou formes de
fin filament oranger dans une masse gris bleue. Il s'agit d'un gley oxydé.

Les études menées en laboratoire montrent que si les conditions sont très anoxiques, la dégradation de
la matière organique n'est pas conduite à son terme (CO2 et H2O). Des composés organiques sont
libérés, sous forme d'anions organiques. C'est de l'alcalinité organique. Cette dernière complexe les
cations, notamment métalliques, ce qui accroît la solubilité du fer et de manganèse. D'autres métaux
peuvent aussi être complexés, solubilisés et migrer dans ce contexte chimique.

La réduction et la solubilisation des oxydes de fer et de manganèse conduit à une augmentation de


l'alcalinité.
Dans de nombreuses situations sous climat tempéré, le milieu ne dépasse pas ce niveau.

- méthanogénèse et sulfato réduction

Dan des conditions extrêmes de réduction, deux processus se mettent en place. Il s'agit de la sulfato-
réduction et de la méthanogenèse.
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La sulfato réduction existe dans les zones tempérées mais elle y est plutôt rare et discrète. Il faut des
conditions particulièrement propices.

En revanche dans des climats tropicaux, chauds et humides, la sulfato réduction peut être très active.
Dans des milieux naturels tels que les mangrove, la saturation prolongée des sédiments par l'eau, la
température élevée, la grande quantité de biomasse sédimentée favorisent des conditions extrêmement
réductrices. Les sulfates d'origine marine, sont réduits en sulfures. La réduction et la solubilisation du
fer étant importante, les polysulfures de fer, sous forme de pyrites sédimentaires, peuvent précipiter.
Ces transformations s'accompagnent d'une production d'alcalinité importante et cette alcalinité est
évacuée avec le retrait des eaux en période d'étiage. Avec l'abaissement des niveaux piézométriques, le
ressuyage puis l'assèchement des horizons superficiels, l'oxygène pénètre dans le sol et ré-oxyde les
pyrites. Il en résulte une production d'acidité importante puisqu'elle est équivalente à l'alcalinité qui
avait été produite lors de la phase de réduction. Cette acidité ne peut être neutralisée par l'alcalinité qui
a été évacuée avec l'excès d'eau. Le milieu devient très acide. Après destruction des coquilles déposées
(transformées en sulfate de calcium hydraté i.e. gypse) l'acidité attaque les silicates et le pH se
tamponne aux environs de 3.5-3.0. Des minéraux particuliers précipitent (famille des jarosites).

A noter : les eaux sulfureuses empoisonnent les électrodes platine. Ces dernières donnent à la mesure
des valeurs de potentiel très basses, mais pendant la mesure elles se couvrent d'une pellicule de sulfure
qui en affecte le fonctionnement à longue. Il convient d'être prudent et de décaper les électrodes après
mesure dans ces milieux.

La méthanogenèse est produite par des communautés microbiennes dont l'optimum thermique se situe
au voisinage de 30°C. Elle est donc active à ces températures. Cependant, la méthanogenèse peut se
produire à des températures plus fraîches, mais à un rythme très lent. C'est le processus qui est
responsable de la formation du " gaz des marais ". Les zones humides des toundras russes produisent
du méthane.

Lors de la méthanogenèse, la dégradation de la matière organique est incomplète et elle ne produit pas
que du CO2, mais un mélange de CO2 et de CH4. La réaction globale est la suivante:

2CH2O = CH4 + CO2

CH2O est un hydrate de carbone Comme pour la sulfato réduction, les conditions qui président à la
méthanogenèse sont extrêmement réductrices.

L'expérience montre que si l'on mesure les différents paramètres c'est-à-dire eH, pH, pH4, pCO2 on
constate que ce processus se déroule souvent près de l'équilibre thermodynamique. Ceci est très
commode pour l'étude et la modélisation.

Ces processus de sulfatoréduction et de méthanogenèse se produisent dans les décharges d'ordures


ménagères. En effet dans ces milieux, les fermentations induisent des conditions suffisamment
réductrices au point de permettre la sulfato réduction et la méthanogenèse.

Ce cas particulier fait l'objet d'un paragraphe spécial dans le cours de géochimie environnementale.

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- cas particulier des processus fermentaires

Lorsque la matière organique est abondante, qu'elle contient une forte proportion de molécules
facilement métabolisables tels que les sucres (hydrates de carbone peu ou pas polymérisés), l'activité
microbienne s'emballe, le développement microbien devient exponentiel, du moins dans une première
phase. Les conditions deviennent rapidement réductrices.

Ces transformations conduisent à la production de divers alcools et acides carboxyliques (autres que
l'acide éthanoïque i.e. acétique). Ces composés peuvent alors être transformés selon deux voies:

* production d'acide éthanoïque puis reprise de ce composé par des bactéries méthanogènes acétophiles
qui dégradent l'acide éthanoïque en CO2 et CH4

* Production de H2 et CO2 puis reprise par des bactéries méthanogènes hydrogénophiles qui produisent
le mélange CO2 et CH4.

Enfin, lorsque les réserves de substances fermentescibles est épuisée, l'activité microbienne s'attaque à
des composés plus polymérisés (pectines puis celluloses). De ce fait, la vitesse de transformation
devient plus lente et la vitesse de diffusion de l'oxygène ou de solubilisation d'oxydants devient non
négligeable par rapport à la consommation d'oxydant par les bactéries. Le milieu devient
progressivement moins réducteur.

La production d'acides carboxyliques est très importante dans cette chaîne de réactions. Ces substances
organiques très solubles complexent les cations notamment métalliques et facilitent leur migration mais
aussi leur maintient en solution à fortes concentrations. Ceci représente un danger pour la qualité des
eaux.

Si l'on considère cette classification de processus d'oxydoréduction depuis la respiration aérobie jusqu'à
la sulfato-réduction, le rendement énergétique des transformations est de moins en moins intéressant
pour les micro-organismes et la vitesse de dégradation de la matière organique est de plus en plus lente.

Les réactions d'oxydoréduction dans les eaux naturelles


Méthodes spécifiques aux processus redox pour l'étude sur le terrain.

I - La pratique de la mesure du Eh:

Les conseils et recommandations pour la mesure du potentiel redox ont été consignés dans le chapitre
acquisition des données. Il faut seulement rappeler que la mesure est plus délicate que celle du pH.

* Dans certains cas, les couples redox présents peuvent concerner des espèces chimiques très
faiblement concentrées. La mesure est alors impossible. C'est par exemple le cas des eaux de pluies
pour lesquelles la mesure du eH est souvent délicates.

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* Par ailleurs, l'électrode est photosensible et il est préférable de placer l'électrode dans un flacon
obscurci

* L'électrode donnera plus rapidement une valeur stable si elle est maintenue dans une solution aux
caractéristiques voisines de celles des eaux sur lesquelles on travaille. " L'électrode est sujette à
l'empoisonnement, en particulier en milieu sulfureux (confer ci-dessus)

Sonde de température à gauche et électrode platine à droite. Sur cette électrode, le platine
forme un anneau, ce qui permet de maximiser la surface de contact entre le métal et la
solution. Dans le cas où on souhaite mesurer le potentiel redox dans un matériau plus
cohérent (dans un sol humide), on peut avoir intérêt à utiliser une électrode à pointes (le
platine est sous forme de deux pointes terminées par une petite boule).

II - La mesure du couple eH/pH

Il convient de mesurer systématiquement le couple pH/Eh (auquel il faut ajouter la température). En


effet, pour un même potentiel d'oxydoréduction, les espèces dominantes dépendent du pH. La pente de
la relation Eh/pH est caractéristique du couple actif et on s'appliquera donc à mesurer la pente de cette
relation. Enfin le couple pH/Eh permet de calculer la pression partielle équilibrante en oxygène, pO2.
Deux cas de figure se présentent habituellement.

* cas d'accès facile:

La multiplication des mesures permet l'obtention de nombreux couples Eh/pH. Il convient de calculer
les valeurs de pO2 correspondantes et de tracer les différents diagrammes de Pourbaix, enfin le recours
aux modèles thermodynamiques permet de connaître la spéciation des différentes espèces. La position
des différents points dans les diagrammes de Pourbaix permet de distinguer les groupes de points situés
au voisinage d'une droite d'équilibre théorique, ce qui donne des présomptions sur les couples actifs. Il
faudra être attentif à la pente des alignements de points et comparer ces dernières avec les pentes
théoriques.

* cas des accès difficiles:

Dans ce cas, le faible nombre de point (parfois un seul) ne permet pas de tracer des nuages de points et
de calculer la pente des alignements. Dans ce cas on déplace les équilibres acico-basiques. Le pH varie
et on mesure la variation de Eh qui en résulte. Il est alors possible de mesurer la pente de la relation
Eh/pH. Plusieurs techniques permettent le déplacement des équilibres acido-basique.

A) le dégazage du CO2 par agitation conduit à la diminution du CO2 et une augmentation de pH.
Lorsque cette méthode est possible, elle sera préféré car on n'introduit aucun composé (aucun couple
redox nouveau).

B) Le dégazage du CO2 ne permet pas de faire varier le pH (la pCO2 de l'échantillon est trop proche de
celle de l'air). Dans ce cas, certains auteurs déplacent artificiellement le pH par ajout d'acide ou de base
(ou successivement les deux sur deux fractions aliquotes). On mesure les différents couples eH/pH

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III - Le cas difficile des eaux où le couple redox est peu marqué:

Il faut détecter et reconnaître ces situations et abandonner la recherche d'un pente dans la relation
Eh/pH. C'est typiquement le cas pour certaines eaux de pluie. Les couples redox sont représentés par
des espèces à très faible concentration dans la solution, la mesure du Eh est très incertaine. Dans ces
conditions, il est impossible d'établir la pente de la relation Eh/pH. En attendant que la technologie
progresse, il ne fat pas tenter d'utiliser des mesures aussi peu consistantes.

IV - Méthode d'estimation du Eh lorsqu'il est mal ou pas connu.

Lorsque la mesure du Eh n'est pas fiable, impossible ou manquante, il est possible d'estimer cette
valeur à condition d'avoir plusieurs informations redondantes permettent de réaliser plusieurs calcul
thermodynamiques indépendants. Ainsi si deux ou plus éléments se trouvent sous différentes niveaux
redox, chacun d'eux permet de calculer une valeur de Eh. Les couples redox n'étant pas toujours en
équilibre, la présence de deux éléments permet deux calculs en parallèle dont les résultats seront
comparés. Cette technique s'apparente à celle utilisée pour les données manquantes des eaux thermales
telle que la température du réservoir (confer chapitre hydrochimie des eaux thermales). Enfin, il ne faut
jamais oublier qu'une estimation à partir de modèles ne remplace jamais la mesure, surtout dans le
domaine du redox; c'est un pis aller. Un exemple de calcul se trouve dans les études de cas.

Les réactions d'oxydoréduction dans les eaux naturelles


Etude de cas

Afin de tester les connaissances, de se familiariser avec les notions d'oxydoréduction et de progresser,
plusieurs cas d'études réelles, impliquant des processus d'oxydoréduction vous sont proposés. Ces
exemples fournissent des données utiles à l'étude du processus, mais seulement les données (données
analytiques, résultats de calculs thermodynamiques,..).

Il ne reste plus qu'à interpréter.


Exemples et études de cas.
1) Barrière d'oxydoréduction dans les nappes et dénitrification
2) Oxydation biologique des sulfures - Mauritanie; données de Casamance - Données espagnoles
et vénézuéliennes
3) Processus redox dans les sols (pommes)
4) Processus redox et dépollution d'eaux de rejets agro-industriels

Voir document "Etude de cas"

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Introduction sur les échanges ioniques (échanges entre une solution


ionique et les argiles)
Les échanges ioniques jouent un rôle important dans l'évolution de la composition chimique des eaux
naturelles, lorsque le rapport solide/liquide n'est pas voisin de zéro. (Différence entre évaporation en
présence ou en absence de sol : Chotts/ sols, Evap en bac/nature,…). Le rôle de ces échanges est
sensible surtout lorsque les solutions aqueuses sont diluées.

I - L'origine de la CEC des argiles et de l'humus.

Les argiles :

Ce sont des polymères bi dimensionnels composés de deux couches :

- tétraèdres de silicium entourés d'oxygène

- octaèdre de cations métalliques entourés d'hydroxyls Le tétraèdre est lié par oxygènes communs à
l'octaèdre. Pour les 4 O entourant Si dans le tétraèdre, 3 sont communs aux autres tétraèdres (structure
bidimensionnelle) et 1 est commun avec l'octaèdre . Ce dernier oxygène est une liaison en attente vers
l'octaèdre et doit être pris en compte dans les comptes de charges négative de l'octaèdre.

Pour les argiles, il existe deux types de sites :

- Les sites dus à un déficit de charge dans le réseau cristallin. Substitution de silicium par de
l'aluminium (Si IV par Al III ou bien par Fe III) crée par exemple un déficit de charge octaédrique et
parfois tétraédrique. Ceci constitue la source principale de sites d'échanges cationiques.

- rupture des liaisons (liaisons en attente) en bordure du cristal.

Pour les kaolinites, il n'y a pas de déficit de charge. La CEC est donc liée aux phénomènes de bordure
de cristal. La CEC sera donc faible et directement liée à la granulométrie de l'argile. Pour des minéraux
de grande taille, peu d'effet de bordure, la CEC sera très faible. En revanche, pour des minéraux très
petits, la CEC sera moins faible.

Les argiles gonflantes (notamment les smectites) développent une forte CEC.

La capacité d'échange cationique s'exprime en moles de charges échangeables par 100 gramme de sol
ou d'argile. Anciennement la même notion s'exprimait en unités de milliéquivalent par 100 grammes
(meq / 100 g).

II - Effet des conditions redox sur la CEC.

Certaines argiles comportent une quantité de fer (FeIII) dans le réseau cristallin. Lorsque les conditions
deviennent réductrices, le FeIII est réduit en FeII. Il en résulte un nouveau déficit de charge positive qui

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vient augmenter la CEC. Ainsi, la CEC est variable selon les conditions redox et ces variations de CEC
peuvent être très importantes.

Pour humus XOH = XO- + H+

Pour les autres phénomènes d'adsorption de surface : oxydes, hydroxydes,….(assimilables à des sites
d'échanges) :

MOH = MO- + H+ (1)

Pour ces sites d'échanges de surface de minéraux, il existe une influence du pH de la solution qui est au
contact du solide. Plues le pH augmente plus les équilibres (1) sont déplacés vers la droite et le nombre
de sites d'échange augmente. La fixation des cations est en général réversible, d'où la notion d'échange.

Dans certain cas, cette fixation est irréversible (ou difficilement réversible), on parle de rétrogradation.
Les cas les plus fréquents sont la rétrogradation de K+ par des argiles de type Illite et la rétrogradation
de cations de petite taille (Li+). La taille du cation joue un rôle important dans la rétrogradation et de
manière général dans la facilité de la sorption. La taille du cation explique en partie la sélectivité des
changes cationiques.

III - des formalismes divers pour représenter les échanges ioniques

Fraction molaire dans les sites d'échanges et fraction molaire dans la solution aqueuse
Exemple d'un échange K+/Na+ (monovalent/monovalent)
Pour la fraction adsorbée : xK+ech= K+ech/(K+ech+Na+ech)
Pour la solution : xK+sol= [K+]/([K+] + [Na+])
Pour un sol ou argile donnés on réalise des " isothermes " d'échange de deux ions afin de déterminer la
sélectivité de l'échange.

A température constante, on réalise des solutions correspondant à des rapports K+/Na+ différents, et on
mesure les fractions molaires dans la solution et dans la phase adsorbée.

Lorsque la solution est uniquement composée de potassium, cet élément est le seul présent dans la
phase adsorbée. Ainsi, la courbe passe par le point de coordonnées (1,1). DE même et pour les mêmes
raisons la courbe passe par le point (0,0).

En revanche lorsque la concentration en potassium


et en sodium sont égales, (xK solution = 0.5), la
phase adsorbée présente une proportion de
potassium supérieure à 0.5, ce qui traduit la
sélectivité des échanges K+/Na+.

Ce type de courbe met en évidence un effet de


sélectivité en faveur du potassium. En effet si l'on
considère égalité de concentrations K+ et Na+
dans la solution, le taux de potassium échangeable
n'est pas égal à celui du sodium échangeable, mais
il est supérieur. Ce résultat traduit le fait que le

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potassium est plus facilement adsorbé que le sodium. La raison est essentiellement géométrique; le K+
ne s'hydrate pas et donc en solution, il est plus petit que le Na+ qui possède plusieurs molécules d'eau
d'hydratation. Il atteint plus facilement les sites d'échanges. L'intensité de la sélectivité dépend de la
fraction molaire. En effet, à partir d'un certain taux seuil de remplissage des sites par le sodium, les
feuillets sont ouverts, écartés et le sodium pénètre plus facilement sur les sites restants. Il existe d'autres
mécanismes responsables de la sélectivité et de la variation du taux de sélectivité en fonction de la
fraction molaire.

Enfin comme tout équilibre thermodynamique, la constante de sélectivité dépend de la température,


c'est-à-dire que la courbe présentée à titre d'illustration est dépendante de la température. Elle n'est
valable qu'à une température, celle de la mesure, d'où le nom d'isotherme.

IV - Approche thermodynamique

XNa 0.5 + Ca++ = XCa0.5 + Na+


KCa/Na= (XCa0.5/XNa) * [Na+]/ ([Ca++])1/2
KCa/Na est la constante d'échange calcium/sodium.

V - Théorie des solutions solides appliquée aux échanges ioniques

La théorie des solutions solides peut être appliquée aux phénomènes d'échanges ioniques entre la CEC
et la solution en contact.

Pour un échange K+/Na+, les deux pôles sont constitués par :

- l'argile purement sodique: XNa


- l'argile purement potassique: XK

X- représentant le minéral argileux avec son déficit de charges cationiques.


Soit x la fraction molaire adsorbée du sodium: x= Na ads / (Na ads + K ads) = Na ads/CEC
L'équilibre entre la phase sodique pure et la solution peut s'écrire :
XNa = X- + Na+ (KsXNa) (1)
Pour la phase pure potassique:
XK = X- + K+ (KsXK) (2)
Pour la solution solide:
XNaxK(1-x) = X- + x Na+ + (1-x) K+ (3)
D'où Log(KsNa)= log[X-] + log[Na+] - log[XNa] (4) Log(KsK)= log[X-] + log[K+] - log[XK] (5)
Log(Ks ss)= log[X-] + x*log[Na+] + (1-x)*log[K+] - log[XKxNa(1-x)K] (6)
L'activité de solide étant considérée égale à l'unité par définition,
En combinant les équations (4) et (5), il vient:
x*logKsNa + (1-x)*logKsK = log[X-] + x*log[Na+]+ (1-x)*- x*log[XNa] -(1-x)*log[XK]
et
log Kss= x*log KsNa + (1-x)*logKsK + x*log[XNa]+(1-x)*log[XK] (7)
Ici, [XNa] et [XK] représentent respectivement les activités des pôles dans la solution solide.

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[XNa]=lambdaXNa.* x
[XK]= lambdaXK * (1-x)
(7) devient donc : log Kss=
x*log KsNa + (1-x)*logKsK
+ xlog(x)+ (1-x)log(1-x)
+ x*log[lambdaXNa]+(1-x)*log[lambdaXK]

Le premier terme (x*log KsNa + (1-x)*logKsK ) représente le terme de mélange mécanique. Il


représente une solubilité intermédiaire entre celle des pôles, proportionnellement à la proportion de
chacun des composants.

Le second terme est le terme entropique

Le dernier terme est le terme d'énergie d'excès de mélange. Il traduit les interactions énergétiques entre
les composants du mélange au sein de la solution solide.

VI - Effet de l'augmentation de concentration globale de la solution sur les


échanges ioniques

Si l'on considère par exemple l'échange K/Ca XK 0.5 + Ca++ = XCa0.5 + K+


KCa/K= (XCa0.5/XK) * [K+]/ ([Ca++])1/2
Ou
XCa0.5/XK = KCa/K* ([Ca++]1/2)/ ([K+])

Lorsqu'une solution se concentre d'un facteur de concentration FC, les concentrations en K+ et en Ca++
sont multipliées par FC

Le rapport ([Ca++]1/2)/ ([K+] est divisé par (FC)1/2 et la fraction de calcium échangeable diminue
donc "proportionnellement" à (FC)1/2 (si la constante de sélectivité est supposé constante en première
approximation).

Ainsi, lorsque les solutions se concentrent, elles ont tendance à échanger des cations avec la CEC. La
concentration favorise l'adsorption de monovalents et la désorption de divalents. Ceci explique en
partie la propension du sodium à pénétrer sur le complexe dans les sols salés (l'abondance du sodium,
c'est-à-dire la fraction molaire de sodium voisine de 1 en solution, étant malgré tout le facteur
principal).

De même lorsque les solutions sont diluées par des eaux faiblement minéralisées, le complexe dé sorbe
des monovalents et adsorbe des divalents.

VII - Echanges ioniques et modification de l'alcalinité résiduelle (et de l'alcalinité


résiduelle généralisée)

Lorsque la minéralité des eaux augmente, elles ont tendance à perdre du Ca et du Mg mais à gagner du
Na à cause de ces échanges ioniques. Ces variations doivent être combinées avec celles qui sont
induites par les processus de précipitation. Typiquement Na/T, Mg/T augmentent et Ca/T diminue
lorsque la minéralité augmente.

-87-
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VIII - Mise en évidence des phénomènes d'échanges ioniques sur les diagrammes de
concentration

Les phénomènes de précipitation de minéraux sont des processus à seuil. Ils ne se produisent que
lorsque la solution atteint l'équilibre avec les minéraux. En revanche, les processus d'échanges ioniques
sont des processus continus. Par ailleurs, ils mettent en jeu des quantités de charges limitées et
n'affectent sensiblement la solution que si celle-ci est peu concentrée.

Pour les eaux plus minéralisées, ce processus est toujours actif, mais son effet relatif sur les fortes
concentrations en éléments dissous est imperceptible pour la solution. Il marque fortement la
proportion des ions sur le complexe d'échange.

Ces différences importantes permettent assez facilement de distinguer ces deux types d'interactions
solution/solides à partir des diagrammes de concentration.

Les échanges ioniques induiront une modification progressive de rapports entre ions surtout dans le
domaine des eaux diluées, avec une diminution de la proportion de monovalents dissous et une
augmentation de divalents dissous lorsque la minéralité des eaux augmente.. Les cas les plus fréquents
est une diminution du rapport Na/Cl dans les eaux diluées lorsque celles-ci se concentrent.

Lorsque les eaux sont minéralisées, ce rapport tend progressivement vers une valeur constante (égale à
1 pour les faciès chlorurés sodiques, différente de 1 dans le cas contraire).

SUPPORT DE COURS D'HYDROLOGIE


Traceurs chimiques et isotopiques en hydrologie, en hydrogéologie et en
sciences du sol

Introduction sur les traceurs et les marqueurs

Traçage artificiel dans un torrent (injection de NaCl)

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I - Intérêt du traçage et des traceurs

Le traçage et le marquage ont permis de réaliser de nombreux progrès ces dernières décennies dans
l'étude des transferts d'eau, que ce soi en hydrologie, en hydrogéologie ou science du sol. Le recours
aux traceurs et aux marqueurs permet de suivre l'eau ou les éléments qu'elle véhicule, lors de son
cheminement. Dès lors il devient possible de connaître l'origine de l'eau, sa vitesse de déplacement
dans quelles proportions chacune des zones ou chacun des réservoirs contribue aux flux étudié.

Il est utile de rappeler quelques définitions.

1 Traceurs et marqueurs

- traceurs/marqueurs

Les traceurs ont un comportement quantitatif et peuvent être utilisés pour le calcul des proportions
d'eau d'origine différentes. Autrement dit, on peut utiliser non seulement le fait que l'élément soit
présent ou non dans l'eau, mais aussi sa concentration.

Les marqueurs n'ont pas un comportement totalement conservatif; ils sont affectés lors du transfert par
divers types de processus (interactions physico-chimiques, différentiel de vitesses de transfert par
rapport à l'eau,…). Ils ne donnent que des informations de type qualitatif. On n'utilise que le fait que
l'élément soit présent ou bien absent de l'eau. L'information est de type binaire 0 ou 1.

Le caractère conservatif ou l'utilisation quantitative/qualitative sera développée plus bas.

- naturel/artificiel

Les traceurs ou les marqueurs peuvent exister naturellement dans la nature. Ce sont alors des traceurs
ou des marqueurs naturels. On peu citer les isotopes stables ou radioactifs de l'eau (18O, 2H, 3H), les
éléments chimiques dissous (Cl-, Si aqueuse, Br-, Na+,..).

Ils peuvent être introduit par l'homme en quantité importante, ce sont alors des traceurs ou des
marqueurs artificiels (3H, Cl-,.. pour les traceurs; fluorescéine pour les marqueurs).

- stable/radioélément

Les traceurs ou les marqueurs peuvent être des éléments stables ou bien radioactifs. Dans ce dernier
cas, ils peuvent donner des indications sur le temps de séjour ou sur l'age de l'eau contenue dans un
réservoir.

Les traceurs ou marqueurs radiogéniques ne sont pas utilisés en traçage artificiel que pour des études
très locales (traçage en colonnes de sol au laboratoire) car il est possible de récupérer les eaux
contaminées et leur faire suivre le processus légal de traitement de ce type d'effluent.

De par le passé, des injections de traceurs radioactifs ont été réalisées dans des aquifères, mais ces
pratiques sont heureusement abandonnées.

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2 Informations quantitatives et qualitatives

Définition du bon traceur :

" Un traceur est parfait si chaque particule du traceur obéit aux mêmes lois de mouvement que les
particules étudiées, qu'il s'agisse de particules de fluides, de particules en suspension ou de particules
solides constituant un fond mobile. " (Alquier et al. 1970.). Ainsi, le bon traceur de l'eau devra suivre
l'eau à la même vitesse que celle-ci (condition cinématique), mais aussi il ne devra pas interagir (à
l'échelle de temps du transport) avec d'autres composants transportés (condition biogéochimique).

Dès lors il devient possible d'utiliser le traceur pour des estimer des informations de type quantitatif. Il
pourra être utilisé pour calculer la proportion d'eau issue de chaque réservoir, des temps de transferts,
de temps de résidences,….

Toutefois, un traceur peut être bon, mais le traçage impossible à cause des caractéristiques des
réservoirs. Pour pouvoir effectuer des déconvolutions (voir plus loin), il faut que 5 conditions soient
respectées. La condition de " traceur parfait " n'est que l'une d'entre elles.

Le marqueur :

Certaines informations non conservatives présentent un intérêt certain en hydrologie, même si elles ne
peuvent être mises à profit pour des approches quantitatives.

On peut noter par exemple la température (Travi et al. 1994), la teneur en gaz dissous (CO2 ou O2)
l'état d'oxydoréduction, … Pour tous ce paramètres, des évolutions du paramètre par échange avec le
milieu extérieur (chaleur, oxygène, CO2,..) empêchent leur utilisation comme traceur car l'information
véhiculée est altérée durant le transport. La condition de conservativité (condition biogéochimique)
n'est pas parfaitement respectée. Elle l'est partiellement.

Dans d'autres cas, c'est la condition cinématique qui n'est pas parfaitement respectée, mais elle l'est
partiellement. C'est le cas, par exemple, des caractéristiques des matières en suspension telles que
minéralogie, cristallinité, composition chimique ou spéciation des MES. Tous ces paramètres sont
véhiculés par les MES. Or ces dernières ne circulent pas à la même vitesse que l'eau (phénomènes de
saltation,..).

Des marqueurs colorés peuvent aussi être utilisés comme la fluoresceine pour les circulations
karstiques ou le bleu de méthylène pour les transferts dans les sols.

Ce ne sont que des marqueurs, mais ils sont parfois très utiles. En effet, ils peuvent indiquer de façon
indiscutable la contribution de tel réservoir ou de telle zone aux écoulements ou à l'érosion ou encore
tel cheminement de l'eau.

Traceurs isotopiques :

Ce sont des traceurs intrinsèques de la molécule d'eau et répondent de ce fait parfaitement à la


condition cinématique. Ils ont permis de grands progrès en hydrologie que ce soient des traceurs
isotopiques naturels (Blavoux 1978, Fritz et Fontes 1980, ..) ou bien artificiels (Maloszewski 1983). Ils
ont été souvent été utilisés pour différencier l'eau " nouvelle " c'est-à-dire apportée par l'épisode

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pluvieux de l'eau " ancienne " c'est-à-dire préexistant dans les nappes ou les sols avant la pluie. Ils ont
ainsi permis de montrer la contribution des eaux " anciennes".

Bien que suivant parfaitement la molécule d'eau, donc théoriquement traceurs parfaits, l'utilisation de
ces isotopes se heurte souvent au problème de la variabilité temporelle du signal. Lorsque les
caractéristiques isotopiques de la pluie varient au cours de l'épisode pluvieux, leur utilisation est
délicate. Fait aggravant, le signal isotopique peut même être variable spatialement durant un même
épisode. Enfin il arrive que le signal pluie soit voisin des caractéristiques de l'eau initialement présente
(eau ancienne) ce qui empêche toute utilisation pour le traçage ou le marquage. Lorsque les calculs de
contribution demeurent possibles ils deviennent alors entachés d'une faible fiabilité. Ces différents
problèmes seront développés ultérieurement.

Traceurs chimiques:

Ils ont été les premiers utilisés, bien avant les isotopes (Pinder et Jones 1969).

Au premier abord, ils semblent très intéressants pour plusieurs raisons:

- le coût analytique est plus faible que pour les isotopes

- ils sont très nombreux. Avec le développement des techniques modernes (ICP et plus anciennement
l'absorption atomique), le nombre d'éléments chimiques pouvant être dosés sur un faible volume est
devenu très important.

Mais la pratique tempère fortement cet optimisme. En effet, la plupart des paramètres chimiques
réagissent rapidement durant leur transport et l'information qu'ils véhiculent (origine du soluté,..) est
perdue.

Donc il existe beaucoup d'éléments pouvant être dosés aisément et à faible coût, mais peu d'entre eux
peuvent être utilisés comme traceur.

Toute fois, dans des travaux récents, nous avons pu montrer que si certains paramètres réagissent lors
du transport, des combinaisons linéaires de ces paramètres restent stables et peuvent être utilisées pour
le traçage. C'est notamment le cas de l'alcalinité résiduelle ou de l'alcalinité résiduelle généralisée (voir
plus loin).

Enfin, fait aggravant, il est difficile de définir des traceurs chimiques toujours utilisables. En effet,
chaque région hydrochimique présente ses particularités voire ses spécificités. Tel éléments chimique
sera un très bon traceur sur une région mais ne pourra être utilisé dans telle autre région. Seule une
étude hydrochimique préalable permettra de définir les éléments chimiques susceptibles d'être utilisés
dans la région étudiée.

3 Exemples d'utilisation de calculs de contribution des différents réservoirs et vitesses de transfert

Ces quelques exemples n'ont pas la prétention d'être exhaustifs. Ils ne sont qu'une illustration de
quelques cas fréquents d'application du traçage.

- Mise en évidence et quantification des échanges nappe/rivière

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Laboratoire d'Hydrogéologie d'Avignon - VINCENT VALLES COURS D'HYDROCHIMIE

Les échanges nappe/rivière sont très variable dans le temps et l'espace. La rivière peut être drainant sur
une partie de son cours et infiltrante sur une autre partie. Un secteur sur lequel la rivière est drainante à
l'étiage peut devenir infiltrante en période de crue.

Ces échanges nappe/rivière sont donc difficiles à cerner et le recours au traçage est utile pour les
étudier. Outre les traceurs chimiques ou isotopiques habituels, on pourra avoir intérêt à utiliser des
marqueurs tels que la pCO2 ou O2 dissous qui se différencient fortement entre l'eau de surface et l'eau
profonde.

Il est alors possible d'apprécier les variations temporelles des contributions " profondes " et "
superficielles " à l'écoulement général.

Des systèmes de traçage artificiel peuvent aussi être utilisés. On peut injecter un traceur artificiel (NaCl
le plus souvent) au centre d'un piézomètre situé près de la rivière. Avec une couronne d'électrodes
reliées au point d'injection du centre par un conductivimètre, il est possible de déterminer le sens
d'écoulement dans le piézomètre (alignement de conductivité électrique maximale). Il est possible de
vérifier si la ligne de flux local est parallèle à la rivière, convergente ou divergente par rapport à cette
dernière.

- eau de sol/eau de pluie

Il s'agit d'une des applications des plus classiques des isotopes stables de l'eau, en particulier de 18O,
ces dernières années. Il est possible de montrer que l'eau arrivant à l'exutoire d'un bassin versant lors
d'un épisode pluvieux n'est pas constituée uniquement d'eau de pluie.

Le calcul quantitatif de la contribution de l'eau du sol est cependant assez délicat. En effet, même
lorsque le signal isotopique de la pluie est stable durant l'averse, les caractéristiques isotopiques de
l'eau du sol sont toujours extrêmement variables dans latéralement mais aussi verticalement (même à
l'échelle de quelques centimètres en surface).

- origine spatiale de l'eau (hydrologie)

Il s'agit une nouvelle fois d'une application fréquente en hydrologie. Le recours aux traceurs permet,
lorsque le bassin versant s'y prête, de distinguer les contributions des divers secteurs géographiques à
l'écoulement général à l'exutoire. Il est ainsi possible de discerner la contribution des différents bassins
versants et d'apprécier la variabilité spatiale du fonctionnement hydrologique sur le bassin.

Dans ce cas, les traceurs chimiques peuvent être plus adaptés que les traceurs isotopiques, mais le basin
versant doit présenter une différenciations chimique (et lithologique) importante entre les différents
sous basins versants, ce qui n'est pas toujours le cas. Enfin, comme pour les isotopes, le nombre de "
bons traceurs " est un facteur limitant. En effet, un traceur permet de distinguer deux origines spatiales
différentes, deux traceurs trois origines spatiales,… Comme de nombreux paramètres chimiques sont
impropres au traçage, ceci restreint la finesse de l'approche réalisée par le traçage.

Ce point sera développé ultérieurement dans la partie sur les conditions d'application du traçage.

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- traçage des transferts dans les sols (mono dimensionnel, saturé ou non)

Le traçage et le marquage dans les sols visent à déterminer le plus souvent les caractéristiques
physiques de la porosité utilisée par les écoulements verticaux.

Le marquage fréquemment utilisé dans les années 1980 reposait sur le bleu de méthylène injecté dans
l'eau circulant dans le sol à la surface de ce dernier (par certains aspects, cette technique s'apparente à
l'usage de la fluoresceine en hydrologie karstique). Une fois l'écoulement fini, l'ouverture du sol permet
de visualiser les chemins préférentiels de passage de l'eau dans le sol selon les micro fissures, la
porosité biologique (passage de lombrics et des autres représentant de la faune du sol,..), de la porosité
structurale,….

L'inconvénient de ce type de marquer réside dans sa viscosité différente de celle de l'eau et son
comportement hydrodynamique n'est pas identique à celui de l'eau. Par ailleurs, il s'agit d'une méthode
destructrice car il faut ouvrir le sol, casser la colonne s'il s'agit de mesures en laboratoire,…Il n'est pas
possible de répéter l'expérimentation ce qui est gênant. Il s'agit toutefois d'une méthode intéressante.

Le traçage fait appel à une gamme ouverte de traceurs artificiels, traceurs chimiques et traceurs
isotopiques, stables ou radiogéniques. Sont utilisés le tritium, le chlorure de calcium et plus rarement le
bromure et le 18O. L'iodure est à proscrire à cause de son adsorption par la matière organique.

Le traceur est injecté au sommet du sol, le plus souvent lorsque le régime hydrique est stabilisé, et on
mesure la courbe de sortie, en fonction du temps, à la base du sol. La courbe obtenue, dite courbe
d'élution, permet de mesurer la vitesse de circulation de l'eau dans le sol, le pourcentage de porosité
utilisée par les écoulements, le caractère dispersif du transport de soluté 'voir le cours sur la circulation
de l'eau et des solutés dans les milieux poreux).

- confluence de lignes de flux : calcul des contributions respectives

- estimation du débit en hydrologie torrentielle.

Dans le cas de torrents, certaines techniques d'hydrométrie classique ne peuvent être utilisées. Ainsi, la
mesure de débit au moulinet est impossible pour plusieurs raisons: " la morphologie de la section est
très irrégulière et ne peut être facilement caractérisée.

* L'eau circule à des vitesses importantes qui sont peu compatibles avec le bon usage du moulinet.

* L'eau circule à forte vitesse par une multitude de passages entre de blocs de cailloux où le moulinet
ne peur être installé et avec une très forte hétérogénéité des vitesses.

Pour ces raisons, il est impossible de mesurer les débits. Comme il s'agit de la donnée de base en
hydrologie, il faut recourir à une autre méthode.

Le traçage chimique artificiel peut être une solution.

On injecte pendant un temps suffisamment long un débit Q1 de traceur avec une concentration C1, on
mesure à quelque distance la concentration C du traceur dans l'eau du torrent.

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Le débit de ce dernier est déduit par effet de dilution : Q = C1.Q1/C

Le traçage donne d'autres indications : la vitesse de propagation de l'onde chimique et son coefficient
de dispersion apparent, deux paramètres très utiles (mais qui ne seront connu que pour le débit effectif
lors du traçage).

III - Techniques d'identification des traceurs

1 géostatistiques (réservoirs spatialement distribués : hydrologie et hydrogéologie)

2 chronostatistique

(Recherche des paramètres à faible variabilité temporelle dans les réservoirs)

3 Géochimiques :

- diagrammes de concentration pour les traceurs chimiques


- diagrammes d'équilibre : élément non impliqué par un équilibre

sous saturation sans minéral présent


cinétique très lente : cas de SiO2 aq

4 Techniques statistiques (ACP, AFC, Analyse discriminante)

IV - Applications habituelles des traceurs

1 Sols

- traçage artificiel

- tritium
- CaCl2 et autres sels halogénés

- Traçage/marquage naturel

- gaz (CO2 cour terme)


- éléments dissous
- isotopes naturels: 18O,2H,15N, (et autres : P,Cs, Sr,…)

2 Hydrologie

- traçage artificiel

- sel en système torrentiel

- traçage naturel

- éléments dissous
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- isotopes
- gaz
- MES fines,
- indices minéralogiques

3 Hydrogéologie

- traçage artificiel

- tritium (impossible actuellement !!!)


- sel pour sens d'écoulement dans les piézomètres

- traçage naturel

- isotopes 18O,2H,15N,

NB : Pour l'hydrologie et l'hydrogéologie il peut être très avantageux d'utiliser comme traceur un
macro-paramètre comme le premier axe factoriel de l'ACP.

Traceurs chimiques et isotopiques en hydrologie, en hydrogéologie et en


sciences du sol

Utilisation des traceurs, déconvolutions, diagrammes EMMA


I - INTRODUCTION

Utilisée depuis les années 1960, cette technique de calcul basée sur les traceurs à permis de faire de
gros progrès à l'hydrologie.

On s'appuiera sur la synthèse réalisée par Ambroise 1991 et Ribolzi 1996. " Si le débit à l'exutoire peut
être considéré comme un mélange d'eaux de qualités différentes, décrites par certaines caractéristiques
(physiques, chimiques, isotopiques,..) mesurables, la connaissance de la qualité du mélange et de ses
composantes permet d'en déduire une estimation de leurs proportions dans le mélange, pourvu que ces
caractéristiques prises comme traceurs soient conservatives.. " et il est possible de préciser 5 conditions
d'application :

• conservation de la masse d'eau


• traceur(s) parfait(s)
• différenciation des composantes du mélange
• stabilité des traceurs
• connaissance de la qualité du mélange et de ses composantes

La première condition impose que le débit d'eau instantané à l'exutoire corresponde à la somme des
contributions des processus préalablement identifiés (absence d'évaporation pendant la crue). Si cette
condition est satisfaite alors il est possible d'écrire :
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Q total exutoire = Q1 + Q2 + Q3 + ….(1)

Avec

- Q total exutoire = débit instantané mesuré à l'exutoire


- Q1 contribution du premier réservoir au débit de l'exutoire à l'instant où ce dernier est mesuré
- Qi contribution du ième réservoir au débit de l'exutoire à l'instant où ce dernier est mesuré

En divisant (1) par Qtotal il vient :

1= x1 + x2 + x3 + … (2)

Avec xi, la proportion d'eau provenant du ième réservoir.

La seconde condition renvoie à la définition du traceur parfait (représentativité cinématique)

La troisième condition signifie que les signatures (les caractéristiques) des différents réservoirs doivent
être significativement différentes pour pouvoir être différenciées dans le mélange.

La quatrième condition indique que les signatures de chaque réservoir doivent être homogènes sur le
réservoir et constantes dans le temps. Cette condition est rarement vérifiée et il convient de prendre en
compte les variabilités spatiales et temporelles dans le calcul de précision des déconvolutions obtenues.
Ceci fera l'objet d'une attention particulière dans les prochains chapitres.

La cinquième condition indique notamment que l'échantillonnage est représentatif de l'écoulement


occupant la section mouillée. Cette condition peut être difficile à obtenir surtout si le point de
prélèvement est situé en aval de la confluence entre deux affluents aux caractéristiques chimiques très
différentes. Dans ce cas, les eaux ne se mélangent pas avant d'avoir coulé sur une certaine distance.
Pour de grands fleuves comme l'Amazone ou l'Orénoque, le "bon mélange" n'est obtenu qu'après
parfois plusieurs dizaines de kilomètres. Pour s'assurer que les caractéristiques sont homogènes sur la
section des mesures de conductivités électriques permettent de s'assurer que le mélange est bien réalisé.

II - EQUATIONS DE CONSERVATION DE L'EAU ET DES SOLUTES.

Les équations

L'équation de conservation de l'eau a été donnée plus haut.


Q total exutoire = Q1 + Q2 + Q3 + ….(1)
L'équation de conservation de masse de soluté i peut s'écrire :
Qt . Ciex = Q1. Ci1 + Q2.Ci2 + Q3. Ci3 +….(3)
Où Cij représente la concentration du traceur i dans le réservoir j et Ciex la concentration à l'exutoire
du traceur i..
En divisant (3) par Qt, il vient :
Ciex= x1.Ci1 + x2.Ci2 + x3.Ci3 +…. (4)
Pour un traceur, il est possible de prendre en compte deux réservoirs :
1 = x1 + x2 Cex= x1.C1 + x2.C2
Deux équations, deux inconnues.
x1=(C2-Cex)/(C2-C1)

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et
x2 = 1-x1
Pour deux traceurs, il est possible de prendre en compte 3 réservoirs et pour n traceurs, n+1 réservoirs.

Les conditions

Cependant il existe une condition.

Il s'agit d'un calcul barycentrique à coefficients positifs. Le mélange mesuré à l'exutoire doit
obligatoirement présenter une valeur intermédiaire entre les valeurs les réservoirs.

Pour un traceur:

Concrètement,et à titre d'image, il est facile de comprendre qu'en mélangeant de l'eau à 20 degrés avec
de l'eau à 60 degrés, il est impossible d'obtenir de l'eau à 0 degrés. Le mélange doit se situer entre 20 et
60 degrés. Sur un axe représentant le traceur, les deux réservoirs sont représentés par deux points et
l'ensemble des mélanges possibles est le segment limité par ces deux points. Il s'agit de l'approche
EMMA (acronyme pour End-Members Mixing Analysis de Christophersen et al. 1990 et Hooper et al.
1990)

Pour deux traceurs:

Trois réservoirs, deux traceurs. Dans un graphique binaire portant un traceur sur chacun des deux axes,
la position des trois réservoirs forme un triangle. L'ensemble des positions possibles du mélange est
l'intérieur du triangle.

Le degré d'aplatissement du triangle permet de juger de l'opportunité de prendre en compte un second


traceur par rapport au premier. En effet, si les deux traceurs sont parfaitement corrélés, tous les points
seront alignés sur une droite (les trois sommets du triangle aplatis et tous les points représentatifs du
mélange à l'exutoire). Dans ce cas extrême, le second traceur ne véhicule que de l'information contenue
dans le premier traceur. Ces deux paramètres sont redondants et il ne sert à rien de les considérer les
deux simultanément. Ceci n'apporte rien. En revanche si les deux paramètres ne sont pas corrélés ou
très mal corrélés, le triangle obtenu sera très ouvert et l'apport du second traceur par rapport au premier
sera conséquent

Exemple de diagramme EMMA pour deux


traceurs (Conductivité Electrique et SO4--).
Les caractéristiques des trois réservoirs sont
représentées par les sommets du triangle, les
caractéristqiues à l'exutoire sont figurés par des
points dont la couleur évolue du rouge au bleu
durant l'épisode de crue

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Pour trois traceurs:

Quatre réservoirs, trois traceurs. Dans un graphique tridimensionnel portant un traceur sur chacun des
trois axes, la position des quatre réservoirs forme un tétraèdre. L'ensemble des positions possibles du
mélange est l'intérieur du tétraèdre. Il devient peu aisé de visualiser sur une figure fixe la position des
points représentatifs de l'exutoire dans le volume délimité par le tétraèdre. Il faut recourir à de
l'animation. Les considérations évoques précédemment concernant l'opportunité 'ajouter un troisième
traceur est opportune. Lorsque le troisième traceur est corrélé aux deux premiers, c'est-à-dire qu'il peut
être considéré comme une combinaison linéaire des deux premiers, alors il n'apporte aucune
information supplémentaire. Le tétraèdre est alors aplati, la prise en compte du troisième traceur
n'apporte rien de plus que les deux premiers.

Au-delà de trois traceurs:

Nous sommes dans un hyper espace et il devient évidemment difficile de visualiser le diagramme
EMMA.

Cependant, les bases du calcul ne changent pas, le principe est le même. Les calculs ne posent aucune
difficulté particulière. Il s'agit d'une inversion de matrice. Le calcul hydrologique est plus intéressant
car il intègre mieux la diversité du fonctionnement du système.

Cependant, deux inconvénients doivent être mentionnés:

- le nombre de paramètres propres au traçage n'est pas toujours élevé, même lorsque l'on dispose d'un
arsenal analytique conséquent.

- La multiplication des paramètres et donc des réservoirs rend délicate la définition précise des tous ces
réservoirs (avec chacun de ces paramètres). L'ajout de nouveaux traceurs devient de moins en moins
opportune et le volume dans l'hyperespace devient aplati. Il en résulte des problèmes de résolution
mathématique car la matrice devient mal conditionnée, son déterminant s'approche de 0, les résultats de
la déconvolution deviennent incertains.

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III - UTILISATION DE MACRO PARAMETRES POUR LES


DECONVOLUTIONS: AXES ACP

Précédemment, il a été vu que deux paramètres parfaitement corrélés (r = 1 ou r = -1), véhiculent la


même information. Utiliser l'un ou l'autre de ces paramètres est indifférent. L'apport d'un traceur
nouveau se mesure au niveau de non corrélation avec les précédents. La technique statistique de l'ACP
(Analyse en Composantes Principales) utilisant la matrice des corrélations permet de déceler les
sources indépendantes de variations et de les hiérarchiser. Ainsi, si un grand nombre de paramètres
physico-chimiques sont assez bien corrélés entre eux, le premier axe factoriel sera une combinaison de
ces paramètres. Il intégrera ces derniers. Ce premier axe factoriel se comportera comme un macro
paramètre intégrant toute l'information commune à plusieurs paramètres partiellement redondants.

En résumé, il est possible et même utile d'utiliser les axes de l'ACP pour réaliser des traçages multi
paramètres (multi traçage).

Ces macro paramètres s'utilisent comme des paramètres classiques.

Pour être concret, pour 12 paramètres physicochimiques susceptibles d'être utilisés comme traceurs, si
90% de la variance s'explique par les trois premiers axes de l'ACP, on peut espérer avoir trois sources
d'information indépendantes, donc au maximum trois traceurs. Le reste des traceurs ne véhicule que de
l'information redondante. On pourra utiliser des déconvolutions avec un maximum trois paramètres que
l'on choisira le moins bien corrélés possible, entre eux.

La méthode la plus sure sera de retenir les trois premiers axes de l'ACP.

Exemple de figure EMMA obtenue avec deux axes d'ACP (figure du haute) et trois axes d'ACP (figure
du bas)

IV - LE CALCUL DE DECONVOLUTION

Un traceur:

Utilisation d'une feuille de calcul .

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La pratique du calcul de déconvolution de pose pas de problème particulier vu la légèreté des calculs.

Un exemple de feuille de calcul est accessible par téléchargement.

Vous constaterez que si vous donnez pour les deux pôles (les deux réservoirs) des valeurs
incompatibles avec les données de l'exutoire, vous obtiendrez pour les contributions des deux zones des
débits négatifs !!!!! et des débits supérieurs au débit total mesuré à l'exutoire !!!!.

Deux traceurs:

Utilisation d'une feuille de calcul.

Le calcul est un peu plus compliqué, amis il est tout à fait possible de le réaliser à partir d'une feuille de
calcul. Un exemple de feuille est accessible par téléchargement. Avec cet exemple, vous pouvez
recopier la formule de calcul et l'appliquer à d'autres données. Le calcul avec un traceur figure sur une
feuille et avec deux traceurs sur l'autre feuille.

Télécharger la feuille de calcul.

Avec trois traceurs ou plus, il est nécessaire de recourir aux logiciels. Même pour un ou deux
traceurs, l'utilisation de logiciels fait gagner du temps.

Exemple de déconvolution avec un Exemple de déconvolution avec Exemple de déconvolution avec


traceur deux traceurs trois traceurs

Calcul d'erreurs et intervalle de confiance.

Le calcul de déconvolution tel qu'il a été présenté précédemment est très intéressant car il permet
d'émettre des hypothèses sur le fonctionnement hydrologique d'un bassin versant.

Cependant, quelle est la confiance que l'on peut accorder à de tels calculs? Jusqu'à quel degré finesse
dans variations des flux peut-on interpréter?

Il convient donc de préciser l'intervalle de confiance que l'on peut accorder à ces déconvolutions.

Ce dernier dépendra de plusieurs facteurs:

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- Les précisions d'acquisition des données telles que le débit à l'exutoire ou la composition chimique
des eaux à l'exutoire. La mesure de débit est réalisée à partir d'une mesure de hauteur d'eau et d'une
courbe de passage de la hauteur au débit. Cette dernière est établie par des quelques mesures de débit et
de hauteur d'eau, puis un ajustement de fonction sur ces données. Il s'agit bien sur de la principale
source d'imprécision car la mesure d'hauteur d'eau est généralement assez précise.

- La variabilité spatiotemporelle de la composition chimique des solutions dans chacun des réservoirs.
Cette source d'imprécision est habituellement la plus importante dans le calcul de déconvolution car
chaque réservoir présente une hétérogénéité spatiale et que pour les réservoirs les plus superficiels, la
composition chimique peut varier au cours de l'évènement du fait de l'influence de l'eau de pluie.

Ainsi, si schémas de diagramme EMMA ne doit pas être représenté avec des points mais avec des
croix. Le triangle des compositions possibles se transforme en un polygone plus ou moins complexe.

Diagramme EMMA avec deux traceurs. Les points


représentatifs dela composition à l'exutoire sont en
bleu. Les caractéristiques moyennes de chaque
réservoir est représntée en rose.

Diagramme EMMA avec deux traceurs. Les points


représentatifs dela composition à l'exutoire sont en
bleu. Les caractéristiques moyennes de chaque
réservoir est représntée en rose.

Des croix indiquent la variabilité de chaque traceur


dans chacun des réservoirs.

Diagramme EMMA avec deux traceurs. Les points


représentatifs dela composition à l'exutoire sont en
bleu. Les caractéristiques moyennes de chaque
réservoir est représntée en rose. Des croix indiquent la
variabilité de chaque traceur dans chacun des
réservoirs.
Le polygone en pointillé représente l'ensemble des
compositions possibles du mélange. Il diffère
sensiblement du triangle obtenu avec les seules valeurs
moyennes (triangle rose), d'où l'intéret de prendre en
compte les imprécisions et les variabilités
spatiotemporelles.

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Méthode de Monte Carlo:

Chaque réservoir présente pour chaque traceur une moyenne et un écart type. Le débit total de
l'exutoire est connu avec une imprécision. La composition chimique à l'exutoire est connue pour
chaque traceur avec une certaine imprécision.

Ainsi à un moment donné de la crue, il est possible d'effectuer un tirage aléatoire qui respecte la
moyenne et l'écart type de tous ces paramètres. Il est alors possible de calculer la déconvolution. Ce
calcul est répété un grand nombre de fois, par exemple un millier, et il est possible de calculer la valeur
moyenne et l'écart type de la contribution de chaque réservoir. Ce calcul sera répété pour chaque point
de l'hydrogramme. Il est donc peu commode d'effectuer ce type d'approche avec une simple feuille de
calcul et le recours au logiciel est quasiment indispensable.

En sortie on obtient donc les variations temporelles de chacune des contributions ainsi que leur
intervalle de confiance.

Déconvolution avec deux traceurs et calcul de


Déconvolution avec deux traceurs
l'intervalle de confiance (méthode de Monte Carlo)

Enfin, pour achever cette présentation des différentes méthodes liées au calcul de déconvolution, il est
possible de réaliser la combinaison de toutes ces informations. Lors de la déconvolution avec les axes
de l'ACP, il est possible de réaliser un calcul de type Monte Carlo.

La seule difficulté, qui est facilement surmontable, est d'estimer la variabilité spatiotemporelle des
caractéristiques des réservoirs et l'imprécision des mesures à l'exutoire en terme de variabilité d'axe
ACP.

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Exemple de déconvolutions avec respectivement 1,2 et 3 axes d'ACP. Ces déconvolutions s'utilisent et
s'interprétent comme des déconvolutions avec des paramètres physicochimiques simples.

V - EXEMPLE D'APPLICATION SUR DIFFERENTS SYSTEMES


HYDROLOGIQUES

Pour ces exemples, la démarche proposée est la suivante :

- Etude des différentes phases de la crue à partir des changements de régimes perceptibles sur
l'hydrogramme.

- Tracé des chimiogrammes et classification en groupes similaires afin d'établir une typologie des
paramètres physicochimiques candidats au traçage

- Choix d'un représentant de chaque groupe (chaque type)

- Déconvolution avec un traceur (autant de fois que de types retenus précédemment) ; interprétation des
déconvolutions obtenues.

- Déconvolution avec deux traceurs, chaque traceur étant choisi dans un type différent. Interprétation
des déconvolutions obtenues.

- Tentative de déconvolution avec trois traceurs, lorsque cela est possible (au moins trois types de
traceurs décelés précédemment).

- Calcul d'ACP et reprise des déconvolutions avec cahque axe ACP, puis avec chaque couple d'axes
ACP, puis avec chaque triplet d'axes ACP…..

- Bilan et conclusion sur le fonctionnement hydrologique du bassin versant.

- Dans le cas du Burkina Faso, il est possible de comparer les rues de 3 années consécutives. Cette
approche permet de comparer les crues fortes, les crues faibles, ou bien les crues survenant après la
période sèche ou au milieu de la période humide,…

1) Hydrologie torrentielle (Les Andes)

2) Hydrologie des zones sèches (Le burkina Faso)

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3) Hydrologie de bassins versants méditerranéens calcaires (Roujan, Draix)

4) Hydrologie de bassins versants méditerranéens non calcaires (Real Collobrier)

LOGICIEL DE CALCUL

Traceurs chimiques et isotopiques en hydrologie

Exemple d'utilisation en hydrologie torrentielle

Carte topographique de l'ensemble de la zone

Cet exemple comporte deux bassins versants et donc deux études de cas, correspondant à des échelles
différentes.

- Un petit bassin versant situé sur les pentes du Guaramacal, massif des Andes Vénézuéliennes. Le
bassin de la quebrada Corojo (torrent Corojo). Il est situé en face de la confluence entre les deux
rivières principales le Rio Bocono et le Rio Burate. Ce bassin est adossé à la montagne Sierra de
Trujillo.

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- Un bassin versant plus grand (350 km²), le Rio Burate collectant des eaux de bassins versants
élémentaires situés en pentes, similaires au précédent (Corojo) et transférant les eaux dans un chenal
très pentu. C'est la rivière passant par Niquitao.

télécharger la présentation de la zone (format Word)

I - Bassin versant de la Quebrada Corojo

Le bassin versant de la Quebrada Corojo, d'une superficie de 25 km², se décompose en deux sous
bassins versants de tailles comparables, la Corojo et la Suerita.

- L'un, la Corojo, est situé sur des lutites pyriteuses, avec des eaux fortement minéralisées et riches en
sulfate présente un réseau hydrographique en arête de poisson. Les sols sont soumis à une érosion
importante.

- L'autre, la Suerita, est situé sur des roches plus dures et moins solubles. Les eaux sont donc moins
minéralisées et l'érosion moins intense que dans le sous bassin versant voisin. La structure du réseau
hydrographique est dendritique.

Réseau hydrographique de la Quebrada Corojo

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Limnigramme et hyétogramme

Les données sont relatives à la même crue que celle du Rio Burate dont la présentation suit. Il s'agit
d'une crue d'une période de retour annuelle.

Télécharger les données sous format Excel

A VOUS DE JOUER!

II Bassin versant du Rio Burate

Le rio Burate, est un bassin versant étagé entre 4000 m et 1070 m d'altitude.

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Carte du réseau hydrographique du Rio Burate

Son bassin versant comporte une lithologie variée.

- Des lutites pyriteuses au voisinage de la ville de Niquitao, en rive droite aussi bien en aval de
Niquitao (secteur de Vitissay 1) qu'en amont (secteur Vitissay 2). Les eaux y sont chargées en éléments
dissous et notamment en sulfate. Dans ces deux secteurs, le réseau hydrographique est en arêtes de
poisson.

- Le sous-bassin versant de la quabrada Tomon, moins arrosée par la pluie et situé à " basse altitude " et
comporte des pegmatites et gneiss. Les eaux y sont peu minéralisées avec très peu de sulfate. Le réseau
hydrographique est dendritique.

- Enfin tout le secteur amont constitue une zone froide sur roches cristallines peu solubles. Les eaux y
sont donc extrêmement peu minéralisées.

Cate lithologique du bassin versant du Rio Bocono.

Le rio Burate constitue le sous bassin versant situé à l'ouest

Habituellement la pluie pénètre par l'aval du bassin et remonte la vallée.

La crue étudiée a une fréquence de retour annuelle.

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Laboratoire d'Hydrogéologie d'Avignon - VINCENT VALLES COURS D'HYDROCHIMIE

Hydrogramme à l'exutoire et hyétogrammes en plusieurs points


du bassin versant

Télécharger les données sous Excel

Les données sont disponibles dans le logiciel AQUA_W hydrologie (voir la présentation et la notice
d'installation).

A VOUS DE JOUER!

Modèles de déconvolution par traceurs ou axes factoriels


I INTRODUCTION

Pour réaliser des déconvolution avec un ou deux traceurs, il est aisé d'effectuer les calculs sur une
feuille de calcul de type Excel.

En cas de difficultés, par exemple pour une déconvolution avec deux traceurs (inversion de matrice
3x3), vous pouvez télécharger des feuilles toutes prêtes avec des exemples de calcul pour vous aider
(cours utilisation des traceurs: exemples, Burkina Faso). Il suffit de copier les formules de calcul pour
les appliquer à vos données. La mise en forme des résultas sous forme graphique ne pose pas plus de
problèmes. En revanche, pour réaliser des déconvolutions avec des axes factoriels, la manipulation de
plusieurs logiciels avec les problèmes de transferts et de compatibilité rend les calculs plus fastidieux.

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Laboratoire d'Hydrogéologie d'Avignon - VINCENT VALLES COURS D'HYDROCHIMIE

Pour les déconvolution avec trois traceurs ou avec des axes factoriels, il est préférable d'utiliser des
logiciels spécialisés. AQUA_W comporte un module présentant ces fonctionnalités.

II Logiciel AQUA_W Hydrologie

Il est recommandé de visualiser la présentation avant toute utilisation.

Télécharger une présentation Powerpoint.

Cette présentation vous permettra de débuter avec AQUAW_hydrologie et vous indiquera la séquence
type pour débutants. La prise en main sera alors rapide.

Les fichiers d'installation ne contiennent pas de virus.

Deux solutions pour installer :

- soit vous copiez les fichiers d'installation sur votre disque dur et vous pouvez installer
AQUAW_Hydrologie quand vous voulez et sans Internet sur tout appareil.

INSTALLATION DU LOGICIEL

- Soir vous installez directement en ligne AQUAW_Hydrologie. (Environ 30 secondes selon la vitesse
de connexion).

Il faut tout d'abord créer un répertoire temporaire pour télécharger les fichiers nécessaires à
l'installation de Aqua_W.

Lorsque ce répertoire est crée, il faut télécharger plusieurs fichiers et les enregistrer.

Enfin, lancez le programme Setup depuis votre répertoire local (Window XP recommandé).

Télécharger le fichier 1.

Télécharger le fichier 2.

Télécharger le fichier 3.

Télécharger le fichier 4.

Télécharger le fichier 5.

A vous de jouer. Bon courage!

Bibliographie et Webographie

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Laboratoire d'Hydrogéologie d'Avignon - VINCENT VALLES COURS D'HYDROCHIMIE

WEBOGRAPHIE
COURS DE W. WHITE

- cours de W. White: (white@geology.cornell.edu)

http://www.geo.cornell.edu/geology/classes/geo455/Geo455.html

c'est cours de géochimie générale (système solaire, géochimie profonde et géochimie superficielle).

Cours très complet

télécharger: Chapitre 1; Chapitre 2; Chapitre 3; Chapitre 4; Chapitre 5; Chapitre 6; Chapitre 7; Chapitre


8; Chapitre 9; Chapitre 10; Chapitre 11; Chapitre 12; Chapitre 13; Chapitre 14; Chapitre 15

télécharger: table des matières, annexe 1; annexe 2; annexe3

il est vivement recomandé de visiter, lire, imprimer (télécharger au format pdf) et faire les exercices.

En cas de difficulté, il est possible de télécharger ces fichiers à partir de ce site (demander l'autorisation
à White)

- cours divers de géologie: http://www.geo.cornell.edu/eas/education/course/courses.html

LIENS (LINKS)
http://www.geo.cornell.edu/geology/classes/Geochemweblinks.HTML

Exercices d'hydrochimie à télécharger


- Alcalinité, alcalinité résiduelle, faciès chimique

- étude de cas sur l'ARG et les faciès chimiques: cas de l'algérie

- étude de cas sur le faciès chimique et l'ACP: Désert d'Aragon (Espagne)

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