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Nouvelle Revue Pédagogique
N° 635 / 8,20 € / ISSN 1636–3574
NRP
Séquences
Actualité
4 Livres
Par Édith Wolf
6 Pédagogie
Par Jessica Pinhomme
et Claire Beilin-Bourgeois
8 Spectacles
Par Carole Guidicelli
Séquences pédagogiques Fiches pédagogiques
30 Séquence 2 4e
Masques et grimaces de l’amour 58 Analyse filmique 6e 5e
11 histoire du cinéma
Par Alain Barbé
au théâtre
Indigènes, de Rachid Bouchareb
(2006)
Par Claire Beilin-Bourgeois
Par Marie Pierre Lafargue
12 Lire au CDI
Par Yannick Denoix 40 Séquence 3 3e 60 Entraînement au brevet
Le Dieu du carnage, 3e
de Yasmina Reza Huis-clos, de Jean-Paul Sartre
13 Le carnet d’écriture
Par Édith Wolf
Par Mariane Zingraff Par Mariane Zingraff
63 Latin 4e
14 Maisons d’écrivains
Par Rachel Druet
L’humour noir d’Hannibal
Par Anne Sinha
Les + numériques Au fil de la revue, vous pourrez exploiter les ressources multimédia suivantes*, disponibles sur
le site NRP dans l’espace « Ressources abonnés ». Rendez-vous sur http://www.nrp-college.com.
Corrigés, bibliographies,
documents complémentaires, etc. Fichiers audio Vidéo Iconographie
* Certaines de ces ressources sont réservées aux abonnés numériques (abonnés papier + numérique ou 100 % numérique).
« Pour mon premier poste, j’ai dû quitter
Nîmes pour Brest . Ça m’a fait bizarre. À mon
L’Offre Métiers de l’Éducation est un contrat proposé par la coassurance MAIF et USU. MAIF – Société d’assurance mutuelle à cotisations variables – 79038 Niort cedex 9. USU – Société d’assurance mutuelle des Autonomes de Solidarité Laïques à cotisations variables 7 Rue Portalis – 75008 Paris.
compte en banque aussi. Heureusement,
côté assurance, la MAIF m’a bien aidée. »
Aurore – Professeure stagiaire.
Entreprises régies par le Code des assurances. Fédération des Autonomes de Solidarité Laïque – Association régie par la loi de 1901 – 7 rue Portalis – 75008 Paris.
* Offre valable du 15 mai 2013 au 30 juin 2014, non cumulable avec les autres offres en cours, réservée aux nouveaux sociétaires MAIF enseignants de moins de 30 ans ou, quel que que soit leur âge,
professeurs stagiaires, titulaires 1re et 2e année et étudiants en ESPE admissibles à la cession de concours 2014. Les avantages tarifaires sont attribués sous forme de chèque de remboursement
adressé après la souscription, en simultané ou en différé au plus tard le 30 juin 2014, de l’assurance des risques professionnels OME associée : à l’assurance habitation RAQVAM (40 € remboursés) ou à
l’assurance auto VAM (100 € remboursés), ou aux deux (120 € remboursés). ** Appel gratuit depuis un poste fixe.
Édito Nous ne sommes pas des héros…
Au quotidien, nous ne réglons pas les difficultés du métier
et de la vie en général à coups d’épée ou de sabres laser.
Et le théâtre est là pour nous rappeler, avec sa cohorte de
personnages, toute l’ambiguïté même de l’héroïsme, par les
conflits intérieurs et les images inversées des grands hommes
de la comédie ou la tragédie.
Et c’est aussi une tragédie que je voudrais ici évoquer. Franck
Évrard, fidèle collaborateur de la NRP depuis près de cinq ans,
Yun Sun Limet
qui a, dans les pages de cette revue, partagé avec enthousiasme
Directrice et ferveur son expérience d’enseignant, nous a brutalement
de la rédaction
quittés le 20 juin dernier à l’âge de 52 ans. Ce passionné des
lettres, du théâtre, aimait son métier et ses élèves, qui le lui
rendaient bien. Il a « converti » au « français » bien des garçons
Éditeur : Nathan, 25 av. P. de Coubertin
75013 Paris et filles qui n’appréciaient guère cette matière. Il a accompli
Directrice de la rédaction : Yun Sun Limet
Conseillère pédagogique : la belle mission de les éveiller aux puissances de la langue et
Claire Beilin-Bourgeois
Directeur de la publication : Catherine Lucet
des œuvres, sans lesquelles nous sommes bien peu de chose.
Directeur délégué : Françoise Fougeron Il a aussi été un auteur prolifique d’essais, de pièces de théâtre,
Responsable d’édition : Annie Chouard
Révision : Eva Baladier de nouvelles et récits que je vous invite à découvrir (sur le site
Assistante d’édition Web : Alexandra Guidal
Fabrication : Lucile Davesnes-Germaine qui lui est dédié, http://franck-evrard.net/). Dans ce numéro, la
Iconographie : Laure Penchenat
Marketing/Diffusion : Marielle Bignos,
NRP a le triste honneur de publier son tout dernier texte sur le
Catherine Coat, Évelyne Delcroix. « type du valet balourd dans la comédie ». Et le mot posthume
Impression : NIL, Allée Louis Blériot,
58500 Clamecy est bien difficile à écrire.
Création de la couverture : Christophe Billoret
Création des pages intérieures : Élise Launay Nous ne sommes pas des héros… Nous adressons une pensée
Réalisation maquette : Alinéa, route de
Gallardon 28130 Yermenonville toute particulière à son épouse et ses deux filles.
Publicité : Mistral Media, Directeur
commercial : Luc Lehéricy ; Directeur de la
publicité : David Bichot, 365 rue de Vaugirard Cyrano
75015 Paris. Tél. : 01 40 02 99 00 […]
Partenariats : Christophe Vital-Durand.
Tél. : 01 45 87 52 83
Dans ce trajet si court de la branche à la terre,
Code article : 111623 Comme elles savent mettre une beauté dernière,
N° d’édition : 101 97 358 Et malgré leur terreur de pourrir sur le sol,
Dépôt légal : novembre 2013
Commission paritaire : 0714T83332
Veulent que cette chute ait la grâce d’un vol !
Roxane
Abonnement 1 an, France (5 numéros) :
39 € ; DOM/TOM : 51 € ; France (5 numéros et
Mélancolique, vous ?
5 suppléments) : 65,50 € ; DOM/TOM : 78,50 €
– Abonnement 1 an papier + numérique
Cyrano, se reprenant
(5 numéros et 5 suppléments) : 67,50 € ; Mais pas du tout, Roxane !
DOM/TOM : 80,50 € – Abonnement 100 %
numérique à partir de 19 € sur
www.nrp-college.com – Numéro vert : Crédits photographiques
0800 032 032 – Abonnement pour la Suisse,
COUVERTURE : photo- AKG images/Sotheby’s, « Pavlova taking a bow », Dame Laura Knight @ Repro-
EDIGROUP SA, abonne@edigroup.ch –
duced with permission of The Estate of Dame Laura Knight DBE RA 2013. All Rights Reserved. ; 7 : Audrey
Abonnement pour la Belgique, Edigroup Sprl, Fournier ; 10 : DR/Cinémathèque française ; 11 LEEMAGE ; 13 Pierre Grosbois/JerryCom ; 16 WIKISPEC-
email : abobelgique@edigroup.org – ISSN TACLE/Christophe Raynaud De Lage ; 17 : BIS/Ph. Jeanbor © Archives Larbor ; 20 : ARTCOMART/Pascal
1636-3574 – Prix au n° : 8,20 € Victor ; 22 : BIS/Ph. Sergio Rossi © Archives Larbor ; 24 : BIS/Ph. Coll. Archives Larbor ; 27 : BIS/Ph. ©
Tournachon – Nadar/Archives Larbor ; 30 : BIS/Ph. Coll. Archives Larbor ; 32 : BIS/Ph. © Art Institut of
Certains exemplaires sont accompagnés Chicago – Archives Bordas ; 36 : BIS/Ph. Coll. Archives Larbor – DR ; 37 : LEEMAGE/Photo Josse ; 40 : ART-
d’une offre d’abonnement. COMART/Pascal Victor ; 42 : ARTCOMART/Pascal Victor ; 45 : Coll. CHRISTOPHE L ; 46 : BIS/Ph. Jean-Alex
Brunelle © Fondation Dina Vierny-Musée Maillol, Paris © Succession Marcel Duchamp/Adagp, Paris… ;
49 : Coll. CHRISTOPHE L ; 62 : ARTCOMART/Pascal Victor ; 63 : BIS/Ph. © British Museum – Archives Larbor.
Livres
À lire
Mythologie
Jean-Paul Savignac, Lougous
longue-main, illustrations de Jean
Mineraud, La Différence, 192 p.,
18 €.
Prix NRP
La mythologie des Gaulois,
peuple sans écriture, est mal connue.
Dans la collection « Les Hommes-dieux »,
Jean-Paul Savignac propose des récits sur
les personnages essentiels de cet univers.
Le premier, Lougous, rappelle Achille
et Héphaïstos mais certains épisodes
(métamorphoses animales, mariage avec une
Les tendances de la femme-fleur) nous font entrer dans un monde
sélection 2013-2014 mythique autre et passionnant. À proposer en
extraits en 6e, pour l’étude de la mythologie,
Avec le retour de l’année scolaire, le prix NRP a lui aussi et en 5e, pour présenter les sources de la
fait sa rentrée. Douze nouveautés de littérature de jeu- matière de bretagne. belles illustrations.
nesse ont été passées au crible par notre jury de profes-
seurs de lettres et documentalistes. D’ores et déjà, nous
vous proposons de découvrir les grandes tendances de la témoignage
sélection 2013-2014. Peurs sur l’école de Christophe
Comme l’an dernier, le roman historique occupe les de- Varagnac, Jean-Claude Gawsewitch,
vants de la scène, que le lecteur se plonge dans une fratrie 304 p., 19 €.
des années 1970 (Jean-Philippe Arrou-Vignod, La Cerise Le récit sincère de ce qui
sur le gâteau, Gallimard), dans un xviie siècle pittoresque a été une « affaire » de plus
(Odile Weulersse, La Poudre d’amour de Louis XIV, Pocket d’agression d’un enseignant
Jeunesse) ou dans une Pompéi encore vivante (Annie Jay, par un élève en 2012 en région bordelaise.
La Fiancée de Pompéi, Livre de Poche). Le passé se fait aus-
Il permet de comprendre le contexte précis
si l’écho des combats d’aujourd’hui, notamment contre
le racisme (Annelise Heurtier, Sweet Sixteen, Casterman).
d’une information souvent tronquée dans les
De même, quand le monde contemporain est abordé, médias. Aucun manichéisme, aucun esprit
c’est souvent pour sensibiliser le lecteur à ses aspects vindicatif : mais un constat et des pistes
sombres : sexisme (Charlotte Erlih, Bacha posh, Actes Sud de « mesures » à prendre. Si ces dernières
Junior), viol (Mireille Disdero, À l’ombre de l’oubli, Le Seuil semblent bien modestes à l’égard de
Jeunesse), méfiance envers les immigrés (Claire Clément, l’ampleur des problèmes et des enjeux, il reste
Sami, Goliath, Oscar, Ousmane et les autres, Bayard), mon- sur la fin de ce livre l’essentiel : conserver le
tée des extrémismes (Jérôme Leroy, Norlande, Syros). « plaisir simple de la transmission ».
Mais cette sélection 2013 voit émerger une nouvelle
tendance : la présence forte du personnage de l’artiste.
Des adolescents en mal de vocation artistique de Mar- Anthologie
tin Page (Plus tard je serai moi, Éditions du Rouergue) et Esprit de Diderot, choix de citations
Chris Donner (Mes débuts dans l’art, L’École des loisirs), au par L. Loty et É. Vanzieleghem,
génie tourmenté de Camille Claudel (Marie Sellier, Cœur Hermann, 160 p., 6 €.
de pierre : Camille Claudel et Rodin, Nathan), en passant par Ce choix de pensées éparses
un écrivain en herbe pris au piège de l’écriture (N.M. Zim- rend fidèlement compte de la
mermann, Une histoire terrifiante, Flammarion), la littéra- philosophie de Diderot, toute
ture de jeunesse s’interroge sur la création et la figure du en dialogues, questions et paradoxes. Utile à
créateur.
l’enseignant (grâce à une préface excellente),
Dès ce mois de novembre, vous pourrez retrouver l’en- il peut fournir à l’élève des sujets de réflexion
semble de la sélection dans votre PDF enrichi (présen- ou servir d’introduction à l’étude des
tation, biographie des auteurs, extraits, avis du jury ), en Lumières.
attendant le verdict final.
Louise Roullier
“
plus ciblées. Nous proposons ainsi des
Paroles dispositifs plus ponctuels et assez faciles à
d’experte
mettre en œuvre pour les professeurs. Par
exemple, avant de faire venir les élèves au
théâtre, nous avons imaginé ce que nous
appelons désormais des « itinérances »,
des lectures théâtralisées avec un comé-
Par Jessica Pinhomme, responsable des relations publiques dien ou une comédienne qui joue dans le
au théâtre de l’Aquarium
spectacle. C’est une sorte d’avant-goût, et
Interview par Claire Beilin-Bourgeois
la représentation a lieu dans une salle de
Depuis que le théâtre de l’Aquarium est classe puis est suivie d’une discussion. Ce
dirigé par le metteur en scène François type d’intervention est très aisé à mettre
en place, d’autant qu’il n’y a pas à recher-
Rancillac, la troupe a voulu faire de l’accueil cher de financement, puisque c’est gratuit
des scolaires une priorité. Chaque année, de pourvu que la classe aille voir une repré-
nombreux élèves se rendent à ce théâtre, à sentation. De manière générale, quand
un enseignant appelle pour des places de
La Cartoucherie dans le bois de Vincennes,
spectacle, on lui propose toujours quelque
pour une véritable immersion dans l’univers chose pour accompagner la représenta-
du théâtre. Jessica Pinhomme, chargée des tion, ne serait-ce qu’une plaquette ou une
relations avec les publics, nous parle de ces visite du théâtre, afin qu’un dialogue s’en-
gage et que les élèves aient l’impression
expériences toujours fortes. de savoir pourquoi ils sont là, et d’avoir
choisi d’être là.
Des spectacles qui s’adaptent J. P. : En effet, car le théâtre n’est pas un
aux publics univers familier des élèves, et un mauvais Faire entrer les élèves
choix peut susciter de véritables rejets. dans le jeu
Claire Beilin-Bourgeois : Vous accueil- Cela dit, quand les classes sont accompa-
lez beaucoup de scolaires : avez-vous une gnées, on est souvent surpris par la réac- C. B.B. : Le fait de beaucoup travailler avec
méthode ? tion du jeune public. Un spectacle peut des publics scolaires a-t-il une incidence
Jessica Pinhomme : Tout d’abord, finalement plaire à un groupe alors qu’on sur votre programmation ?
accueillir des élèves de collège et de craignait que ça ne marche pas. J. P. : Pas vraiment, car nous ne cherchons
lycée est un axe très développé à l’Aqua- pas à nous régler sur les programmes
rium : c’est un choix personnel de François scolaires. En réalité, chaque année, la
Rancillac, et une exigence, une priorité à Donner un avant-goût
programmation s’articule autour d’un
intégrer dans le temps, l’espace et la dispo- du spectacle
fil thématique. Cela, François Rancillac y
nibilité des artistes. Nous avons un principe C. B.B. : Quelles actions proposez-vous ? tient beaucoup. Cette saison 2013-2014,
simple. Chaque fois qu’un projet scolaire J. P. : Ici, à l’Aquarium, nous privilégions le par exemple, a pour thème « (En)quêtes ».
est en route, toute l’équipe est impliquée. travail sur la durée. On essaie de faire en Les spectacles sont variés, mais tous s’y
On travaille par étages. On accompagne sorte que les élèves viennent voir deux rapportent : quête de soi pour Œdipe
toujours les classes qui voient un spectacle. spectacles. En réalité, plutôt que par spec- roi, petites enquêtes plus ludiques dans
Au minimum, on envisage, avant la repré- tacle, on fonctionne par parcours. Pour Le mardi où Morty est mort de Rasmus
sentation, une rencontre avec l’équipe, cela on utilise tous les dispositifs existants Lindberg, quête du passé… Nous par-
souvent dans le cadre d’une visite du [voir encadré ci-contre], avec des projets tons plutôt du principe qu’un spectacle
théâtre, et, après, une nouvelle rencontre qui permettent d’associer le fait d’assister bien choisi suscitera l’intérêt du public si
sous la forme d’un atelier ou d’un débat. à un spectacle à des ateliers pratiques et celui-ci est bien accompagné. Un profes-
Nous nous efforçons d’individualiser ces un travail d’analyse. seur peut sélectionner un spectacle parce
interventions, en tenant compte, toujours, Nous menons des projets très divers, et qu’il s’inscrit dans le cadre du cours, mais
du public auquel nous avons affaire : l’âge qui nécessitent un engagement plus ou aussi parce que l’œuvre, l’angle adopté
des élèves, le type de classe, leurs centres important de la part des enseignants. sont intéressants en eux-mêmes. La pro-
d’intérêt, etc. Certains impliquent une classe ou même grammation obéit donc, avant tout, à
C. B.B. : Vous insistez sur cette nécessité de un établissement sur une année entière. des exigences thématiques et artistiques.
choisir des spectacles adaptés aux élèves… D’autres interventions sont beaucoup En revanche, nous tenons compte des
Pédagogie
publics scolaires pour le calendrier, et
programmons l’essentiel des spectacles
susceptibles d’intéresser des élèves et
leurs professeurs en dehors des vacances Les dispositifs académiques
scolaires. De plus, nous considérons qu’il
doit y avoir une continuité dans le travail • Ateliers artistiques : l’atelier artistique s’adresse à
que nous proposons aux professeurs. C’est un groupe d’élèves volontaires (quinze au minimum)
pourquoi les intervenants sont toujours les et se déroule en dehors des heures d’enseignement.
mêmes : ce sont désormais des complices, Sa durée est de deux heures hebdomadaires sur toute
comme Antoine Caubet, qui est associé l’année scolaire. Il est fondé sur un partenariat avec une
au théâtre, ou la comédienne Christine structure artistique et culturelle reconnue par la DrAC.
Guênon qui vient souvent présenter son • Classes à PAC (projet artistique et culturel) : elles
travail à l’Aquarium. Sa version de L’Homme permettent à l’enseignant de proposer une expérience
qui rit de Victor Hugo, l’an dernier, a beau-
artistique et culturelle à toute la classe (et non aux
coup séduit les élèves.
C. B.B. : Quels « retours » avez-vous de
seuls volontaires), avec le concours d’artistes et de
leurs visites au théâtre ? professionnels de la culture qui interviennent entre 8 et
J. P. : On essaie de faire en sorte qu’ils 15 heures par an.
passent le plus de temps possible au
théâtre. Quand ils y vont, ils se trouvent Les formules « maison »
dans un lieu différent de la classe, plus
impliqués, plus concentrés. Des profes- • Les itinérances : des lectures théâtralisées effectuées
seurs, ils en ont déjà. L’intérêt, c’est que par un comédien dans les classes pour introduire le
nous venons d’ailleurs. Nous parvenons spectacle et engager une discussion avec les élèves.
même parfois à réunir des classes de • Les Acolytes du théâtre de l’Aquarium, et les
différents établissements, ou plusieurs Acolytes junior : des spectateurs sont invités à suivre
classes d’un établissement, pour des ate- l’évolution d’un spectacle. Un groupe d’élèves peut
liers communs, avec des résultats éton- devenir « Acolytes junior », ce qui leur permet d’avoir une
nants. Les faire venir et revenir au théâtre expérience très concrète de la création.
est un choix toujours payant. Ce sont des
• Les Ateliers du week-end : le théâtre propose aussi
publics que nous sommes alors amenés à
connaître. C’est d’autant plus vrai que nous
aux adultes des ateliers autour de chaque spectacle. Il
cherchons toujours à rendre les élèves s’agit d’un travail avec le metteur en scène, pratique,
acteurs, à les faire entrer dans le jeu. Lors concret, sur les enjeux dramaturgiques.
des ateliers qui ont lieu après la représen-
tation, ils sont invités à une relecture du Contact
texte, à faire de nouvelles propositions de
mises en scène, à revisiter le spectacle. Là, Théâtre de l’Aquarium, La Cartoucherie, route du Champ
il se passe toujours quelque chose de pas- de manœuvre, 75012 Paris – Tél. : 01 43 74 72 74
sionnant. Il y a un retour visible. www.theatredelaquarium.net
Jessica Pinhomme : pinhomme.theatredelaquarium@wanadoo.fr
dans l’éducation
l’éducation des enfants,
d’après Charles Perrault, écriture
et mise en scène de Laurent
Collèges d’ici
culturels
Par A.W.
Une pluralité d’approches – cinémas, théâtres, compagnies de danse, rir des repères pour mieux comprendre
conservatoires, etc. –, sachant qu’il s’agit la création contemporaine et à ceux qui,
L’histoire des arts peut ainsi être l’objet ayant suivi un parcours l’an passé, sou-
de « conjuguer au mieux les trois piliers
d’une double approche : la première, offi- haitent approfondir leurs découvertes »,
de l’éducation artistique et culturelle :
cielle, articule étroitement les contenus ce dispositif mêle conférence et spectacle.
connaissances, pratiques, rencontres (avec
d’enseignements à l’épreuve de fin de Son succès traduit l’intérêt croissant pour
des œuvres, des lieux, des professionnels
troisième ; elle découle de choix d’objets l’offre culturelle locale, surtout quand elle
de l’art et de la culture) ». À l’initiative de
d’étude donnés, arrêtés localement et s’inscrit dans une politique volontariste
l’enseignant et des partenaires, ces ren-
ratifiés en CA. La seconde, que l’on qua- de mise en réseau des différents acteurs
contres peuvent prendre la forme d’ensei-
lifiera de discrète ou de souple, amène le culturels. À travers ces parcours – de l’élève
gnements spécialisés, de dispositifs de
professeur à tirer parti de toutes les occa- ou de l’enseignant – on voit ainsi aboutir
sensibilisation, de fréquentation et même
sions pour faire acquérir aux élèves des et converger trois tendances : l’intégration
d’initiation si les moyens le permettent
compétences de lecture et de réflexion. des arts et de la culture au cursus scolaire,
Elle encourage ainsi une approche non – on peut songer ainsi à l’audiovisuel, acti-
vité transversale par excellence. Les élèves l’articulation entre les établissements et
exclusivement muséale ; à titre d’exemple, les dispositifs locaux et, enfin, le rôle nou-
les réalisations architecturales ou urbanis- concernés par ces parcours doivent pou-
veau de l’enseignant, à la fois pédagogue
tiques contemporaines permettent d’ini- voir en conserver la mémoire sur un sup-
et architecte de telles actions.
tier les élèves à des problématiques qui les port papier ou sous forme électronique ;
touchent en tant que citoyens, citadins et l’élaboration de ce document permet de
témoins critiques des tendances nouvelles. revenir, in fine, sur des activités permettant
de valider des compétences d’écriture et
de réflexion – à l’instar du journal de bord
Des partenariats avec
de TPE, en classe de première.
les acteurs culturels locaux
Aussi l’enseignant peut-il être amené à Professeur et spectateur
changer de posture par rapport à sa dis-
cipline, sa pédagogie et son rôle dans Outre des qualités d’initiative, il est
l’établissement. Le récent texte sur le attendu des enseignants impliqués la Références
« Parcours d’éducation artistique et capacité à investir auprès de ses élèves organisation de l’enseignement de
culturelle » entérine cette évolution ; les centres d’intérêt qui les définissent en l’Histoire des arts (bo no 32 du
prenant appui sur les acquis de l’histoire tant qu’intellectuels ; de même, avoir une 28 août 2008) ;
des arts et sur l’existence – dans le projet connaissance des structures culturelles Histoire des arts au Dnb (bo no 41
d’établissement ou le contrat d’objectif – et de leur offre est également souhaité. À du 10 novembre 2011) ;
d’un volet artistique et culturel, ainsi que ce titre, des initiatives telles que le « par- Le parcours d’éducation artistique et
sur les comités territoriaux de pilotage, il cours du professeur spectateur » (DAAC, culturelle (bo no 19 du 9 mai 2013) ;
invite l’enseignant à occuper un rôle char- académie de Grenoble) méritent d’être Parcours du professeur spectateur :
nière dans les partenariats qui peuvent mentionnées. Destiné aux enseignants http://tinyurl.com/puucdaw.
se nouer avec les acteurs culturels locaux non spécialistes « qui souhaitent acqué-
Histoire
Par Alain Barbé
Un fonds documentaire adapté riques à travers de brefs textes de théâtre. Mettre les paroles en scène
Rois, médecins, femmes de lettres : autant
Aux yeux des élèves, le théâtre a une d’occasions de découvrir l’histoire en Le théâtre peut facilement s’inviter dans
image poussiéreuse de vieux classiques s’amusant. la vie du CDI. Si les « clubs théâtre » fonc-
peu attirants, de mises en scène pom- Mais, avant tout, le CDI doit montrer aux tionnent régulièrement et mettent en
peuses et de tirades interminables. élèves que, loin de se résumer aux grands scène de petites pièces ou des saynètes,
Cependant, aujourd’hui, de nombreuses classiques, le théâtre est un art vivant, d’autres activités peuvent être imaginées.
collections en proposent des présenta- fondé sur le spectacle et la mise en scène. À l’occasion d’une semaine thématique,
tions attrayantes et vivantes, et accordent À ce titre, on pourra faire cohabiter avec un groupe d’élèves pourra, par exemple,
une belle place aux textes de toutes les les livres les différents programmes des déclamer des vers dans la cour pendant
époques, des « Étonnants Classiques » théâtres de la région, en fonction desquels une récréation, ou annoncer de façon
de Flammarion jusqu’aux « Petits Clas- seront proposées des sélections théma- théâtrale le menu de la cantine lors de son
siques » de Larousse. Mais il est également tiques. ouverture.
important pour le CDI de mettre en valeur On peut également créer une mise en
le théâtre contemporain, par exemple à scène dans laquelle les élèves prennent
travers la magnifique collection de l’École
Pour comprendre le théâtre la place des documentalistes et gèrent le
des loisirs et ses courtes pièces particuliè- Le théâtre sortira d’autant plus facilement CDI selon différentes attitudes, pendant
rement travaillées, propices à des mises en des rayonnages qu’il sera joué et compris. une récréation ou une pause méridienne,
scène originales. Pour tout savoir sur le monde du théâtre, par exemple. Et pour aller jusqu’au bout,
Il ne faudra pas non plus passer à côté de on ne se lassera pas de feuilleter encore on pourra imaginer que dans une classe,
la collection « Expression théâtre », chez et encore l’Histoire du théâtre dessinée un groupe d’élèves se charge de présenter
Retz, dont les pièces comportent de nom- d’André Degaine, dont la présentation ori- de façon théâtrale… le rayon théâtre !
breux rôles (pour ne fâcher personne), des ginale, l’écriture manuscrite et le contenu Alors maintenant, levons le rideau sur nos
décors facilement modulables en fonction particulièrement riche séduisent toujours rayons, et tous en scène !
des contraintes pratiques et un vocabu- les lecteurs. Les éditions Thierry Magnier
laire adapté à l’âge des élèves. De même, ont, quant à elles, publié l’excellent
le recueil Scènes à lire et à jouer, de la 6e à la ouvrage La Fabrique à théâtre, qui présente À lire
3e d’Ariane Carrère chez Hatier, comporte toutes sortes d’activités autour du théâtre : G. Beaudout et C. Franek, La Fabrique
des textes courts et simples à mettre en améliorer sa diction, créer un spectacle de à théâtre, Thierry Magnier, 2011.
place. Quant aux éditions du Sablier, leur marionnettes ou encore écrire une pièce. A. Degaine, Histoire du théâtre dessinée,
belle collection, « En scène » fait partir le Un livre indispensable pour désacraliser le Nizet, 1992.
lecteur sur les traces de personnages histo- théâtre et le rendre captivant.
Atelier d’écriture
Les saisons : un thème
et un langage
Par Édith Wolf
Faire écrire les élèves sur ce thème, c’est leur permettre Pendant la correction les élèves justifient la présence
de relier le cycle naturel à des faits vécus et de se fami- des éléments repérés.
liariser avec un motif majeur de la littérature et de l’art. Ensuite, les élèves inventent un âge, une profession, des
Cet atelier d’écriture prend pour support L’Automne, goûts et des traits de caractère à attribuer au person-
tableau de Giuseppe Arcimboldo (1573, musée du nage, dont ils font le portrait à partir du texte à trous
Louvre). En 4e/3e, c’est l’occasion d’initier les élèves à la (qu’ils peuvent modifier) et des éléments inventés.
figure de l’allégorie. Enfin, en reprenant la liste faite au début de l’atelier,
chaque élève dessine un personnage incarnant « leur
Écriture de liste automne » à qui ils donnent la parole : le personnage
En 6e et 5e : on demande une liste fondée sur l’ana- se présente dans un texte où on pourra utiliser tous les
phore des termes : « L’automne, pour moi, c’est… / éléments de la séance. À la fin de l’atelier, images et
C’est… ». Les notations peuvent être objectives et sub- textes sont affichés dans la salle.
jectives, ainsi que grammaticalement diverses. On lira
ces listes à voix haute, convergences et divergences Observation et écriture en 4e/3e
seront commentées. Observation :
En 4e et 3e : on fait noter des mots et expressions asso- Après le repérage des éléments recherchés, on fait
ciés à l’automne puis quelques listes sont lues rapide- expliquer en quoi il s’agit d’une allégorie – tous les
ment. éléments visuels contribuent à construire l’idée – avec,
cependant, un sujet moins abstrait que dans le cas des
Recherches à faire à la maison allégories traditionnelles. Pendant que l’on lit à l’oral
À tous : on donne des recherches à effectuer sur Arcim- les poèmes trouvés lors de la phase de recherches, les
boldo (dates, pays, genres abordés, commanditaires).
élèves prennent des notes sur l’image de l’automne
On demande aussi une définition et une image des élé-
dans les textes, image que l’on oppose à celle d’Arcim-
ments suivants : coing, prunelle, millet, potiron, citrouille,
boldo : le peintre présente une figure de la vie végétale
rave.
féconde, les poètes une image de la fuite du temps et
En 4e/3e : on invite la classe à définir le mot « allégo-
de la mort.
rie », avec deux exemples, l’un dans un texte, l’autre
dans une œuvre plastique. On fait également chercher Écriture :
des poèmes sur l’automne, dans les œuvres de Lamar- En utilisant la liste élaborée au début de l’atelier et
tine, Baudelaire, Verlaine, Jules Laforgue (« L’hiver qui des éléments de l’observation, chaque élève fait une
vient »), Apollinaire (deux textes), et préparer des lec- nouvelle liste de mots ou expressions associés à l’au-
tures orales. tomne ; il proposera soit une vision positive de cette
saison (comme le peintre), soit une image mélanco-
Observation et écriture en 6e/5e lique (comme les poètes). Les termes abstraits comme
On fait expliciter le principe de L’Automne d’Arcimboldo : « Vie », « Temps » et « Mort » prendront une majuscule.
une figure humaine incarnant une saison. Puis on fait Les élèves écrivent ensuite un texte adressé à « leur
compléter un texte dans lequel les élèves devront automne » et commençant comme le poème de Lamar-
retrouver les noms des végétaux qui composent cette tine : « Salut !… » Ils peuvent y intégrer des éléments
figure (voir compléments numériques en ligne) : trouvés dans les textes littéraires.
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Dossier
Mise en scène
de Dom Juan de
Molière, par Jean-
Pierre Vincent, avec
Serge Bagdassarian
(Sganarelle) et Loïc
Corbery (Dom Juan),
Paris, Comédie-
Française, 2012.
Héros et antihéros
au théâtre Par Carole Guidicelli,
professeur de lettres et docteur en études théâtrales
La figure du héros :
le chevalier de rome, celui qui combat les Infidèles,
qui délivre le tombeau du Christ à Jérusalem ou qui
part à la recherche du saint Graal. Il est exemplaire
notion et évolution par la fermeté de sa foi, qui le rapproche du saint ou
du martyr, et, tout comme le héros de l’Antiquité, il
n’accomplit pas ses exploits pour sa seule gloire, mais
pour une cause qui transcende sa personne.
Du héros épique au héros tragique Ces modèles héroïques informent à la fois les
Dans les civilisations de l’Antiquité, le héros se chansons de geste, les romans de chevalerie et la lit-
distingue par ses origines (c’est souvent un demi- térature de cour qui œuvre à l’éloge du souverain.
dieu), par son enfance (il a été abandonné à sa La notion de héros devient ainsi indissociable d’une
naissance, exposé à la mort dans un espace sau- conception aristocratique du monde : si l’héroïsme
vage, comme moïse, Œdipe, romulus et rémus), trouve naturellement sa légitimité dans une société
parfois aussi par un signe distinctif (la chevelure féodale qu’il contribue à maintenir, il est aisément
de Samson, la force d’Héraclès, les pieds percés transposable dans une société monarchique avec des
d’Œdipe…). radicalement autre, il accomplit des ajustements (quand le héros n’est pas le souverain
actions exemplaires au profit de la communauté : il lui-même, il est celui qui contribue à sa gloire). en
tue les monstres qui la menaçaient (Thésée, Œdipe), étudiant Le Cid en 4e, on pourra faire percevoir aux
élèves cette continuité du modèle héroïque.
«
libère son peuple d’une situation d’asservissement,
le ramène sur son territoire (moïse) ou lui en trouve
mme
Le théâtre naît co or té
un nouveau (Énée), fonde une cité (Cadmos, romu-
lus et rémus) ou la sauve de ses ennemis (Horace,
p
Coriolan). Il est donc celui qui a été placé en dehors
un regard critique s. »
e
sur les héros épiqu
de sa communauté tout autant que celui qui en
incarne et en sublime les valeurs.
La figure occidentale du héros revêt un triple
aspect :
– mythique : le héros est doué de facultés excep- Avec le développement de la bourgeoisie, aux
tionnelles, ses exploits repoussent sans cesse les XViie et XViiie siècles, les représentations du héros
limites de l’humain ; sont mises en question, tantôt sur le mode du ren-
– politique : le héros est, sinon une figure royale, versement comique (comme l’antihéros du roman
du moins toujours un personnage central de la picaresque), tantôt sur le mode de la revendication
société, un chef de guerre ou un chef de peuple ; égalitaire, qui prône le libre exercice de la raison et
– littéraire : placé au centre du récit, le héros en défend la liberté d’entreprendre (le Figaro de beau-
est le « sujet actantiel », et ce récit a pour fonction de marchais en est un bon exemple). Avec la généralisa-
conter ses exploits. Le « héros » désigne donc alors le tion des valeurs bourgeoises qui reposent sur l’éloge
« personnage principal ». Illustration
des vertus domestiques, le héros ne sert plus qu’à
Si l’on prend l’exemple de la littérature grecque du Mariage
nourrir une mythologie populaire et n’en impose plus
de l’Antiquité, toutefois, on voit bien comment le de Figaro,
théâtre s’écarte des modèles construits par ces récits 1784.
héroïques, tels que nous pouvons les connaître à
travers l’Iliade et l’Odyssée. Là où la poésie épique
célèbre les héros en magnifiant leurs actions exem-
plaires, la tragédie les montre dans leurs échecs,
leurs souffrances (Prométhée enchaîné, Ajax) ou leur
monstruosité (La Folie d’Héraclès). en effet, pour les
spectateurs de la tragédie, au Ve siècle avant J.-C., les
héros étaient les témoins d’un temps archaïque, celui
des « tyrans », c’est pourquoi ils étaient marqués par
la démesure (hybris), un comportement inacceptable
aux yeux de la démocratie athénienne. Le théâtre naît
donc comme un regard critique porté sur les héros
épiques, c’est-à-dire, selon la célèbre formule de
l’historien Walter nestle, « quand on regarde le mythe
avec l’œil du citoyen ».
«
risent par l’hybris (la démesure), la tragédie romaine
a perdu
nous montre la façon dont leur aveuglement (sous le
Dès lors, le héros, toujours personnage principal, Une exigence classique : l’exemplarité
n’est plus pour autant systématiquement le moteur
de l’action, ni la figure exceptionnelle qui tendait Au contraire, les héros cornéliens sont exem-
vers le mythe, ni la figure d’autorité réelle et symbo- plaires en ce qu’ils ont valeur de modèles : l’empereur
lique que l’on serait en droit d’attendre. C’est à ce Auguste par sa magnanimité (Cinna), Polyeucte par
moment-là qu’on peut sans doute commencer à par- son consentement à mourir en martyr de la religion
ler d’antihéros, dans la mesure où celui qui devrait chrétienne (son exemple a d’ailleurs pour effet de
accomplir l’exploit ou le geste libérateur attendu convertir Pauline, sa femme, au christianisme, et à
diffère son geste, l’accomplit par accident ou pour lui inspirer le même esprit de sacrifice puisqu’elle
des motifs dénués de toute noblesse : des traits qui renonce à se remarier avec l’homme qu’elle aime).
ne cesseront de s’accentuer à l’époque moderne et Dans la tragédie classique, le conflit tragique oppose
contemporaine, jusqu’à brouiller les distinctions du le destin (sous la forme de la loi divine ou des devoirs
héros, de l’antihéros et de l’homme ordinaire. envers l’État) et la conscience malheureuse : d’un
côté il faut se soumettre au souverain, au code de
l’honneur, à l’intérêt collectif, de l’autre obéir au
mouvement spontané du cœur, à l’amour, à la foi
jurée, aux liens de l’affection (amoureuse, fraternelle,
Le héros classique : filiale…). Ce conflit met en balance la sphère privée
et la sphère publique, le sentiment et la raison, et
«
que lorsque les contradictions de la pièce (sociales,
n’est
Le héros classique ur
psychologiques et morales) sont entièrement conte-
nues dans la conscience de son héros : celui-ci est un
cœ
pas seulement au
microcosme de l’univers dramatique3. »
Rodrigue, par exemple, porte en lui à la fois les
istallise
du conflit : il en cr tes
douleurs de l’honneur et celles de l’amour au point
de devenir le champ de bataille de ces forces oppo-
u
sées qui se livrent un combat incessant : « Contre mon
tous les aspects, to
les implications et ibles. »
propre honneur mon amour s’intéresse » (Le Cid,
acte I, scène 6).
ss
inter prétations po
Du grand homme Déclassé et rebelle, le héros romantique
«
nage traditionnel de héros, chef de guerre en révolte
onfère
Le Romantisme c vé
contre la médiocrité des hommes, se trouve réinvesti
par le théâtre moderne, il échoue à imposer sa vision
u
à la figure du répro restige d’un nouvel ordre du monde.
p
une autorité et un
Le théâtre du XXe siècle, à son tour, hésite à
glorifier les héros, alors même que les événements
renouvelés. »
historiques (guerres mondiales, révolutions, guerres
civiles, résistance contre les armées d’occupation)
donnent largement matière, dans le reste de la créa-
Le romantisme, synthétisant ces différents tion littéraire et plus encore au cinéma, à l’exalta-
modèles, confère à la figure du réprouvé une autorité tion de comportements héroïques. Dans Morts sans
et un prestige renouvelés. Si le héros mythique était sépulture, par exemple, Sartre montre un groupe de
un être hors normes, qui devait parfois transgresser résistants captifs de la milice, confrontés à la torture,
les lois pour fonder un nouvel ordre, le héros roman- qui sont traversés par toutes les faiblesses humaines.
tique apparaît soit comme un révolté mis au ban de Dans Les Mains sales, il établit une double distance à
la société et qui doit lutter pour être restauré dans l’égard de la figure du héros : non seulement Hugo,
Du héros négatif
naissance de l’antihéros coïncide donc avec celle
d’une certaine conception de la modernité. Toutefois,
les scènes d’aujourd’hui semblent peu enclines à s’en
à l’antihéros saisir, au contraire de la bande dessinée, du cinéma
et de la télévision.
«
Le mal sous une forme grandiose
À côté des formes contemporaines du héros La naissance de
e
traditionnel encore très présentes au cinéma, proli-
l’antihéros coïncid ine
r ta
avec celle d’une ce
fèrent aujourd’hui les figures du héros négatif et, plus
encore, celles de l’antihéros. Par héros négatif, il faut
conception de la
entendre un personnage qui, tout en ayant un carac-
tère d’exceptionnalité qui le distingue de la foule et
modernité. »
exerçant un véritable pouvoir de fascination sur celle-
ci, accomplit des actes transgressifs qui n’ouvrent sur
aucune possibilité de fondation de nouvelles valeurs
mais cristallisent, au contraire, toutes les formes de
négativité. La figure du criminel endurci ou du meur- L’effacement de l’exceptionnel
trier en série, telle que l’ont popularisée le roman
policier, le cinéma ou la télévision, en est l’exemple Dans le théâtre moderne et contemporain en
le plus frappant. Au théâtre, le personnage de Kol- effet, les personnages – quand ils existent encore – se
tès, Roberto Zucco, est doté d’un certain nombre de montrent souvent incapables de décider de leur sort
caractéristiques propres au héros : personnage hors ou, même quand ils font le choix, comme Béranger
du commun, voire mythique, il apparaît et disparaît dans Rhinocéros de Ionesco, de résister au phéno-
mystérieusement sur les toits de sa prison. Koltès en mène qui menace de les emporter, sont loin d’avoir la
fait à la fois un spectre sorti de la nuit et une créature volonté et la force requises pour mettre en œuvre leur
solaire qui réalise à la fin une ascension fusionnelle décision. Plus encore que la « crise du personnage »
avec l’astre du jour. Meurtrier, parricide et matricide, (Robert Abirached), c’est sans doute celle de l’action
il incarne des valeurs négatives, liées à la violence et dramatique qui contribue le plus à faire disparaître
au mal, mais sous une forme grandiose. Les images les marques distinctives du héros, positif ou négatif,
choisies par le dramaturge soulignent en effet com- et même de l’antihéros. Le développement du théâtre
bien ce héros moderne s’apparente à la fois à Sam- du quotidien dans les années 1970 et 1980 (Michel
son, à David et à Icare. Vinaver, Jean-Paul Wenzel), du théâtre documentaire,
de la création collective puis des formes dites « post-
dramatiques » (Hans-Thies Lehmann) réduit l’action
à une série de gestes infimes, de micro-conflits, où les
L’antihéros, figure de la modernité marques de l’exceptionnalité ne sont plus repérables,
Le terme d’antihéros, pour sa part, connaît où l’enchaînement causal et la chronologie des faits
aujourd’hui des définitions très variables, liées pour n’ont plus d’importance. La notion même de héros
beaucoup aux modèles développés par la culture semble devenue illisible, voire se confondre avec celle
populaire : le sens de cette expression, dans l’usage de spectaculaire, comme dans la pièce de Jean-Luc
courant, nous renvoie surtout au cas de l’homme Lagarce Nous les héros où ces derniers ne sont autres
ordinaire, montré tantôt dans toute la banalité d’une que des acteurs.
vie quotidienne sans surprise (à la façon d’Ulrich, Si donc nous avons encore besoin de héros, ce
le protagoniste de L’Homme sans qualités de Robert n’est certainement plus au théâtre qu’il faut venir les
Musil), tantôt comme un personnage « décalé » par y chercher…
rapport à des circonstances qui le dépassent (tel
Meursault dans L’Étranger d’Albert Camus), et qui 1. Patrice Pavis, « Héros », in Dictionnaire du théâtre, Dunod, Paris,
1996.
donc n’aura pas l’envergure du héros. Surtout, alors 2. Bernard Dort, Corneille dramaturge, L’Arche, Paris, 1972, p. 6.
que l’héroïsme était intrinsèquement lié aux registres 3. Patrice Pavis, « Héros », in Dictionnaire du théâtre, op. cit.
Présentation et problématique
• Dans la comédie et la farce, les auteurs dramatiques ont souvent
privilégié le type du valet balourd. Paresseux, grossier, préoccupé
par la satisfaction de ses besoins physiques (boire, manger, dormir),
le personnage fait figure d’antihéros. Faire-valoir du personnage
principal, doté de finesse d’esprit et souvent rusé, il comprend mal
la situation, n’a pas l’initiative de l’action en raison de sa position
de soumission par rapport à son maître, et parle maladroitement.
Le valet balourd est le plus souvent un personnage secondaire. Sa
fonction est d’assurer la dimension triviale de la comédie.
• Au théâtre, le « type », un personnage simplifié, réduit à quelques
comportements essentiels propres à sa catégorie sociale, est
condamné à répéter les mêmes actes et paroles, provoquant le rire
des spectateurs. Dans la comédie, le type du balourd permet de
faire jouer tous les ressorts du comique. Sa maladresse physique est
à l’origine d’un comique gestuel que la commedia dell’arte a exploité.
Le comique de mots vient de la singularité de son langage, qu’il
s’agisse du patois de Lucas dans Le Médecin malgré lui de molière,
Ghezzi, Arlequin et Polichinelle,
du parler prosaïque d’Arlequin dans Arlequin poli par l’amour de
dessin.
marivaux ou du français incorrect parlé par le domestique belge des
Pavés de l’ours de Feydeau. Sa naïveté confinant à la bêtise (comique
+ numériques
de caractère) favorise enfin le comique de situation marqué par de
Les nombreux quiproquos. Cependant, plus complexe qu’il n’y paraît,
Dans cette séquence, vous pourrez le balourd peut acquérir une épaisseur en s’éveillant à un sentiment
exploiter les ressources multimédia comme l’amour ou en critiquant la société.
suivantes*, disponibles sur le site NRP
dans l’espace « Ressources abonnés ». Le choix du corpus
Rendez-vous sur
http://www.nrp-college.com. • Le choix des textes a pour but de mettre en valeur les variations
des auteurs dramatiques autour d’un type littéraire qui appartient
Écrire un quiproquo (revue) au personnel comique traditionnel. Il s’agit aussi d’initier les élèves
Lexique du théâtre et polysémie
(+ icono des théâtres) aux genres théâtraux de la farce, de la comédie et du vaudeville.
Fiche notion : les comiques de situation
Corpus de la séquence
Corrigés des fiches élèves La séquence proposée
Archives NRP : Les grands types de
la Commedia dell’arte (texte + icono)
• Après une première approche historique et esthétique, la séquence
propose de s’interroger sur les ressorts comiques de la balourdise
à travers deux extraits de molière et de marivaux, et leur associe
des activités de lecture et d’écriture. Centrée sur le quiproquo, la
* Certaines de ces ressources sont
réservées aux abonnés numériques
troisième partie s’efforcera de montrer que le personnage simple
(abonnés Papier + numérique d’esprit est capable de créer une sorte de mécanique théâtrale, folle
ou 100 % numérique). et déréglée, comme dans le vaudeville de Feydeau. Une « mécanique
plaquée sur du vivant », dirait le philosophe bergson.
Supports • Groupement de textes : Le Médecin malgré lui de Molière, 1666 ; Arlequin poli par l’amour de Marivaux, 1720 ;
Les Pavés de l’ours de Georges Feydeau, 1896 (in Théâtre complet, tome II, Classiques Garnier / Poche, 2012).
• Extrait audio d’Arlequin poli par l’amour
Objectifs • Enrichir son imaginaire et sa culture littéraire
• Lire et comprendre un texte théâtral
• Écrire un court texte de théâtre
Durée • 6 séances de 1 à 2 heures pour un total d’une dizaine d’heures, histoire des arts incluse
1
Évaluation de compétences en lien avec le socle
Identifier un personnage type
ÉtAPE
commun
de comédie
Maîtrise de la langue / Lire
• Adapter son mode de lecture à la nature du texte proposé
SÉANCE 1. Le valet balourd dans l’histoire du théâtre
et à l’objectif poursuivi (séances 3, 4, 5)
➔ Repères • Manifester, par des moyens divers, sa compréhension de textes
Supports : Les recherches des élèves, la fiche « Histoire des arts » variés (séances 3, 4,5)
Objectif : Faire le lien entre l’histoire et l’art
Maîtrise de la langue / Écrire
Durée : 2 heures
• Enrichir le vocabulaire en percevant les nuances de sens (séance 2)
SÉANCE 2. Autour du mot « balourd » • Écrire un texte de théâtre en respectant les contraintes du genre
(séance 6)
➔ Vocabulaire / Expression écrite
Support : Fiche élève 1 Avoir des connaissances et des repères (culture humaniste)
Objectifs : Appréhender la richesse de la langue à travers les • Acquérir des repères en histoire, littérature et arts (séance 1)
différents moyens d’expression • Percevoir les nuances de sens
Durée : 1 heure
2 La balourdise,
ÉtAPE
source de comique
1 Identifier un personnage
ÉtAPE
Séance 2 VO C A B U L A I R E / E X P R E S S I O N
source de comique cin sont des oiseaux exotiques. Lucas ne semble guère faire de
différences entre le monde humain et le monde animal.
Histoire
des
arts Pierrot muet
Le boulevard
du Crime
Dans la commedia
dell’arte, au valet Le théâtre des Funambules où se
produit Deburau est situé sur le célèbre
balourd qu’est « boulevard du Crime », ainsi nommé
Arlequin s’oppose à cause des crimes représentés tous
le naïf et honnête les soirs sur la scène de ses nombreux
Pierrot, dont les théâtres. Le public s’y presse, y compris
gaffes provoquent les plus miséreux installés aux places les
moins chères, le « paradis » : entièrement
souvent des muet, son spectacle de pantomime, où
quiproquos. Plus tout passe par les gestes et les expres-
qu’Arlequin, il sions, est universellement accessible
va connaître une et attire tous les publics. Il s’inspire
grande vogue dans de l’art des forains qui, au début du
les années 1830 sur siècle précédent, s’étaient vu interdire
Photographie du mime Deburau
tout dialogue sur les tréteaux afin de
les scènes du théâtre ne pas concurrencer les acteurs de la par Nadar en 1855.
parisien où son Comédie-française : le mime était un
personnage inspire des subterfuges qu’ils avaient trouvé pour contourner cette interdiction, et eux-
particulièrement mêmes puisaient leur inspiration dans la commedia dell’arte.
les acteurs de la C’est de Jean-Gaspard Deburau que nous vient l’image du Pierrot enfariné de
pantomime. blanc dont les romantiques, enthousiastes, s’emparent pour en faire un doux rêveur
amoureux de la lune, probablement sous l’influence de la vieille chanson « Au clair
de la lune ». Le succès de Deburau est en effet tel qu’à sa mort, en 1846, son fils
C’est un rôle dans
Charles prend la relève. C’est ce dernier qui figure sur la photo ci-dessus, prise vers
lequel triomphe 1854-1855.
alors Jean-Gaspard
Deburau. Peut-être les
élèves le connaissent- Le photographe photographié
ils sans le savoir car Ce portrait, où l’artiste mime comme en miroir le photographe faisant signe
c’est lui qui a inspiré de ne pas le regarder mais de fixer l’objectif, provoque une amusante confusion
le rôle de baptiste, d’identité. entre les deux hommes d’abord : Deburau reproduit avec exactitude les
joué par Jean-Louis gestes qu’il voit son double effectuer en face de lui, sa main droite retirant le châs-
sis à plaques de l’appareil – viendrait-il de photographier le photographe ? entre
barrault dans le film Deburau et Pierrot ensuite : qui au juste est photographié ? C’est d’autant plus inté-
de marcel Carné, ressant qu’à l’art de la pantomime répond ici l’art encore naissant de la photogra-
Les Enfants du paradis. phie. on en est aux premières reproductions en série, aux premières expérimen-
tations sur les négatifs. Le jeune homme de trente-quatre ans passionné qui a pris
ce cliché vient tout juste d’ouvrir un atelier avec son frère Adrien, et il place cette
photographie en tête de l’album qu’il va présenter à l’exposition universelle de 1855
et qui va recevoir une médaille d’or. Il se nomme Félix Tournachon et a pris pour
pseudonyme nadar. Ce grand gaillard fantasque aux cheveux roux, qui se définit
lui-même comme « un vrai casse-cou, un touche-à-tout, mal élevé jusqu’à appeler
les choses par leur nom, et les gens aussi », est en train de réaliser les portraits de
tous les artistes de la bohème parisienne, de Charles baudelaire à Sarah bernhardt.
expérimentateur enthousiaste, il invente l’éclairage artificiel, jouant sur tous ses
Retrouvez clichés comme ici avec les ombres et les lumières, dans un décor toujours très sobre.
le questionnaire Sa galerie de portraits va faire de lui l’emblème de la photographie du XiXe siècle.
élève de cette analyse
et son corrigé en
ligne.
FI
E
Autour du mot « balourd »
Du moyen français « bellourd », dérivé de « lourd », le mot « balourd » employé comme adjectif ou comme nom commun
se dit de façon méprisante d’une personne grossière et stupide dans ses actions comme dans son caractère.
.......................................................... ..........................................................
2. Retrouvez l’intrus qui s’est glissé dans chacune des listes. • Liste c : « avoir du mal à percuter », « ne pas avoir inventé
Vous justifierez votre réponse. la poudre », « ne pas avoir inventé le fil à couper le beurre », « être
• Liste a : bête, bovin, baudet, cruche, âne, butor, buse long à la détente »
............................................................................................ ............................................................................................
............................................................................................ ............................................................................................
............................................................................................ ............................................................................................
............................................................................................ ............................................................................................
FI
E
écrire un quiproquo
Le quiproquo peut venir des mots eux-mêmes quand ils sont mal interprétés en raison de leur double sens ou de leur homonymie.
Apprenant que la mer est « démontée », un personnage de Raymond Devos demande quand on la « remontera ».
Une homonymie comme « Rome antique » et « Romantique » peut prêter aussi à confusion.
1. Repérer un quiproquo
1. Voici un extrait des Femmes savantes de Molière (1672) : a. Quelle est la condition sociale de Bélise et de Martine ?
martine ............................................................................................
2. Rédigez une saynète fondée sur un quiproquo qui mettra en scène un personnage balourd interprétant
au sens propre une expression figurée. Contrairement à toute attente, le balourd sortira vainqueur de la scène.
a. ÉtAPE 1 Choisissez l’expression figurée parmi les expressions proposées et complétez le tableau.
Expressions figurées : « prendre ses jambes à son cou », « poser un lapin », « jeter l’argent par les fenêtres »,
« avoir un chat dans la gorge », « mettre les pieds dans le plat », « demander la lune », « reprendre du poil de la bête ».
Ce qui est dit Ce que le locuteur veut dire Ce que le balourd comprend
« Tu te crois sorti de la cuisse de « Tu te crois supérieur aux autres ! » « Tu es d’essence divine car ton père est
Jupiter ! » Jupiter. »
.......................................................... .......................................................... ..........................................................
.........................................................................................................................................................................................
c. ÉtAPE 3 Vous rédigerez une courte scène qui adoptera la présentation et la forme d’un dialogue
(une douzaine de répliques) en imaginant des didascalies.
.........................................................................................................................................................................................
.........................................................................................................................................................................................
.........................................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................
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abonnés numériques. Adaptable
...................................................................................................................................... aux besoins des élèves.
Masques et grimaces
de l’amour au théâtre
Par Claire Beilin-Bourgeois, professeur de lettres
Présentation et problématique
• Le théâtre est un monde d’apparences, c’est l’art du masque
et du travestissement. on y joue la vie, on y fait semblant. C’est
donc tout naturellement que nous pouvons orienter notre choix,
pour une séquence sur le théâtre en classe de 4e, vers le motif
du mensonge, de la traîtrise et de la dissimulation. Ces thèmes,
très présents dans les intrigues des pièces au programme pour
ce niveau, ont l’intérêt de révéler l’implication du public dans la
représentation théâtrale. Loin de s’identifier au personnage, le
spectateur « s’associe » à lui, complice de son mensonge ou sensible
au malheur de celui qui a été dupé. Pour cette séquence, on s’en
tient essentiellement aux intrigues amoureuses, aux histoires de
pères abusés, de maris trompés et d’amants échangés.
• on rit bien souvent quand apparaissent menteurs, affabulateurs
et traîtres. mais le mensonge ou la duplicité ont aussi des enjeux
moraux, et à travers ces situations particulières sont dénoncées
Demoiselle masquée, l’hypocrisie et la comédie sociale.
aquarelle de 1586.
Le choix du corpus
• Une des ambitions de cette séquence est de faire lire ou de
Les + numériques montrer aux élèves de larges extraits de plusieurs pièces : L’Avare,
La Puce à l’oreille et Le Mariage de Figaro. Il n’est évidemment pas
Dans cette séquence, vous pourrez question de les étudier complètement, mais d’y reconnaître le
exploiter les ressources multimédia thème de la traîtrise et du mensonge, et d’en apprécier le contenu.
suivantes*, disponibles sur le site NRP
dans l’espace « Ressources abonnés ». La séquence proposée
Rendez-vous sur
http://www.nrp-college.com. • La séquence démarre par une phase de révision à la fois utile et
rassurante sur le théâtre, son histoire, son fonctionnement, et les
Le vaudeville ou la gaieté au théâtre
Connaissez-vous bien le vocabulaire ressorts de la comédie. on en profite pour familiariser les élèves
de la mise en scène ? test d’évaluation avec la pièce de molière au programme de 4e : L’Avare. Le deuxième
Corpus de la séquence
Corrigés des fiches élèves
volet de la séquence aborde un chapitre plus neuf pour des élèves
de 4e : le vaudeville et la comédie de mœurs. enfin, pour montrer
Arlequin et Colombine
Version en images du questionnaire
que le mensonge et la traîtrise n’appartiennent pas uniquement
de la séance 1 (texte + icono) à l’univers de la comédie, on prolonge la séquence par la lecture
Archives NRP : fiche HDA : les masques d’un extrait de Cyrano de Bergerac afin d’ouvrir sur un registre plus
au théâtre (texte + icono)
« sérieux » qui est celui du drame.
* Certaines de ces ressources sont
• Le traître se cache, il ruse, il manipule : les extraits étudiés
contiennent des apartés, des monologues, des quiproquos, autant
réservées aux abonnés numériques
(abonnés Papier + numérique
de procédés dramaturgiques qui font la spécificité du texte de
ou 100 % numérique). théâtre. L’illusion théâtrale permet toutes les situations, puisqu’elle
n’est pas soumise à une logique réaliste.
Supports • Des extraits variés de pièces de théâtre : Molière, Beaumarchais, Feydeau, Rostand.
Objectifs • Montrer que dans le spectacle théâtral, en particulier le spectacle comique, le mensonge et la duplicité sont
un ressort de l’intrigue impliquant la participation du public.
• Proposer des repères dans l’histoire du théâtre, en abordant des auteurs différents.
• Revoir et analyser les procédés comiques.
Durée • 10 heures
commun
un ressort de la comédie
Lire
SÉANCE 1. La tromperie dans l’histoire de la comédie • Dégager l’idée essentielle d’un texte lu ou entendu : lecture
➔ Repères analytique ou cursive d’extraits de L’Avare ou de La Puce à l’oreille.
Supports : Images du théâtre antique et de la commedia dell’arte • Manifester sa compréhension de textes variés, qu’ils soient
Objectif : Comprendre qu’à ses origines, le théâtre est l’art documentaires ou littéraires : lecture analytique et cursive de textes
du déguisement et du masque d’époques diverses.
Durée : 1 heure Écrire
SÉANCE 2. M. de Pourceaugnac se déguise Rédiger un texte cohérent : la séquence est émaillée de plusieurs
exercices d’écriture documentaire ou d’invention.
➔ Expression écrite, vocabulaire
Support : Un extrait de Monsieur de Pourceaugnac dans lequel S’exprimer à l’oral
le personnage éponyme se déguise en femme Prendre la parole en public : une séquence sur le théâtre, et
Objectifs : Montrer avec quel brio Molière utilise l’effet comique davantage encore sur la comédie, est l’occasion de plusieurs séances
du travestissement – s’initier aux questions de mise en scène de lecture ou de jeu.
Durée : 2 heures Avoir des connaissances et des repères
SÉANCE 3. L’Avare ou L’École du mensonge La séquence revient sur l’histoire de la comédie, de l’Antiquité
jusqu’au début du xxe siècle.
➔ Lecture cursive
Support : Trois extraits de L’Avare de Molière
Objectif : Mener une lecture cursive de L’Avare, à travers le prisme
du mensonge
Durée : 2 heures
1 Le mensonge,
SÉANCE 4. Le subjonctif dans les principales
ÉtAPE
et les subordonnées
➔ Grammaire, conjugaison un ressort de la comédie
Supports : Un extrait de L’Avare de Molière
Objectifs : Revoir, ou apprendre la conjugaison du subjonctif Séance 1 REPèRES
– s’interroger sur son emploi
Durée : 1 heure (+ exercices de la fiche élève) La tromperie dans l’histoire
de la comédie
2 Maris trompés, femmes bafouées
ÉtAPE
dans la comédie de mœurs • En posant quelques repères sur l’histoire du théâtre et celle de la
comédie en particulier, on met en évidence le rapport congéni-
SÉANCE 5. Rire et satire sociale : La Puce à l’oreille
de Feydeau tal entre le genre dramatique et le thème du mensonge. Pas de
théâtre sans masque ; pas de représentation qui ne se donne pour
➔ Étude de texte
objectif, justement, de lever les masques.
Support : Extrait de l’acte I de La Puce à l’oreille de Feydeau
Objectif : Revoir le fonctionnement de la comédie Questions préparatoires
Durée : 1 heure
1. Quelles étaient les caractéristiques du costume de l’acteur dans
SÉANCE 6. Vaudeville et théâtre de boulevard l’Antiquité grecque et romaine ?
➔ Repères 2. Qu’est-ce que la commedia dell’arte ?
Support : Ressources personnelles ou celles du CDI 3. Quels sont les personnages principaux de la commedia
Objectif : Découvrir l’histoire du vaudeville dell’arte ?
Durée : 1 heure
SÉANCE 7. Quiproquos et comique de situation Éléments de réponse
➔ Repérages, vocabulaire, expression écrite 1. Les attributs de l’acteur dans l’Antiquité : le masque et le cos-
Support : Acte I, scène 8 du Mariage de Figaro de Beaumarchais tume.
Objectifs : Reconnaître et analyser des procédés courants au • Les masques ont une double fonction :
théâtre ; rédiger une scène avec un témoin caché ou un quiproquo. – amplifier les voix ;
Durée : 2 heures
– permettre aux acteurs de la troupe, qui sont seulement trois,
Un exemple de canevas :
La Fiancée enlaidie
Mariane …
Harpagon …
2 Maris trompés, femmes et le manteau de la dame. Enfin le colis postal ancre bien la pièce
Étape
Prolongement
Malentendus et tromperie dans Cyrano de Bergerac d’Edmond
Rostand :
• Notre séquence est centrée sur la puissance comique de la dupli-
cité au théâtre. Mais on trouve dans d’autres genres – le drame,
la tragédie – des mensonges qui ne provoquent pas le rire, au
contraire.
• La substitution des mots de Cyrano à ceux de Christian est un
des moments les plus émouvants de la pièce. Le spectateur se
fait complice de Cyrano, un peu aux dépens de Christian. Ce sont
les mots et la poésie de Cyrano qui séduisent autant Roxane que
le public.
• Pour cette dernière séance, on choisira de préférence pour sup-
port la version filmée de Jean-Paul Rappeneau, afin de montrer
la manière dont, partout dans la pièce, Cyrano est une sorte de
double de Christian.
Histoire
des
arts théâtre et Nabis
Exubérant ou sobre,
le décor met l’accent
sur la dimension
non pas seulement
textuelle mais
visuelle du théâtre.
l’auteur. Un mode
d’approche riche de Des arbres jaunes
réflexions avec les vuillard, né en 1868, a tout juste vingt et un ans et suit de manière assez dilet-
élèves. en écho à une tante les cours de l’École des beaux-arts lorsqu’il est persuadé par un de ses anciens
récente exposition condisciples de lycée, maurice Denis, de rejoindre la « fraternité » des nabis réunie
du Grand-Palais sur autour de Paul Sérusier. Ce groupe s’est créé à partir d’un tableau, Le Talisman, que
les nabis, on leur Sérusier a peint lors d’un séjour à Pont-Aven en suivant les conseils de Gauguin :
« Comment voyez-vous ces arbres […] ? Ils sont jaunes. eh bien, mettez du jaune ;
proposera de découvrir cette ombre plutôt bleue, peignez-la avec de l’outremer pur… » Ainsi naît une
l’œuvre d’Édouard méthode basée non pas sur l’observation directe mais sur les émotions et sensations
vuillard. éprouvées, où l’emportent les formes globales et les couleurs pures. Nabi signifie en
hébreu « prophète » car le groupe voit dans l’art un caractère sacré, mais vuillard s’y
rattache surtout par la prédominance accordée aux couleurs et par l’influence de
l’estampe japonaise.
FI
E
Couleurs et formes
de la comédie
1. Les personnages de comédie
1. Quels sont habituellement les personnages de comédies ? ...........................................................................................
........................................................................................... ...........................................................................................
........................................................................................... ...........................................................................................
...........................................................................................
1. votre maître. 2. gauche, maladroite.
...........................................................................................
• Comique de mots : ........................................................... 4. Voici des mots qui désignent des nuances de comique :
...........................................................................................
expliquez chacun d’eux en vous aidant d’un dictionnaire.
............................................................................................
• Comique de caractère : .....................................................
........................................................................................... ............................................................................................
• grotesque : ........................................................................
3. Dans l’extrait suivant, quels types de comique observez-
vous ? ............................................................................................
FI
E
Le subjonctif, conjugaison
et emplois
1. La conjugaison du subjonctif
1. Conjuguez les verbes suivants au subjonctif présent.
• Aller : qu’il ......................................................................... • Revoir sa leçon en silence : qu’il .........................................
• Choisir un autre modèle : qu’elle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . • Ne pas perdre son sang-froid : que je .................................
............................................................................................ ............................................................................................
............................................................................................ ............................................................................................
Le Dieu du carnage,
de Yasmina Reza
Par Mariane Zingraff, professeur de lettres
Présentation et problématique
• La critique théâtrale autant que la critique universitaire s’est
longtemps montrée réticente face au théâtre de Yasmina reza.
• Après l’immense succès de sa pièce Art en 1994, Yasmina reza
tente à nouveau l’expérience de la mise en scène des conflits, en
écrivant Le Dieu du carnage. La pièce se déroule en un huis clos où
deux couples se retrouvent pour signer un constat à propos d’une
bagarre entre leurs deux fils. mais sous des apparences d’abord
calmes et policées, ils finissent par s’entredéchirer avec la violence
la plus crasse.
• Dans cette pièce de théâtre contemporain, Yasmina reza se sert
d’éléments classiques de la comédie tout en utilisant de nouveaux
éléments. Selon Denis Guénoun dans son essai Avez-vous lu Reza ?,
celle-ci « cherche à fonder une nouvelle comédie sans pour autant
tomber dans la régression esthétique et idéologique qu’on reproche
André Marcon et Isabelle Huppert souvent à un théâtre qui fait rire ». Pour l’apprécier à sa juste valeur,
dans Le Dieu du carnage, mise en scène il conseille donc tout simplement de la lire attentivement.
de Yasmina Reza, théâtre Antoine, 2008.
• C’est ce que je me propose de faire dans cette séquence
consacrée au Dieu du carnage. Créée en 2008 au théâtre Antoine
à Paris, la pièce a rencontré un tel succès qu’elle a ensuite voyagé
en Angleterre, puis à broadway. elle sera d’ailleurs adaptée pour
l’écran en 2011 par roman Polanski, qui transpose la scène dans
un appartement de brooklyn avec des acteurs de langue anglaise.
Support • Le Dieu du carnage de Yasmina Reza, éditions Magnard, collection « Classiques & contemporains »
Objectifs • Étudier les procédés du comique et les enjeux du registre comique
• Découvrir la notion d’ironie
• Prendre la parole en public lors d’un exposé
Durée • Environ 10 heures
1
SÉANCE 4. La satire, un savoureux mélange des registres
Découvrir
ÉtAPE
2
courtoisie va s’avérer plus complexe qu’il n’y paraît.
Une comédie
Étape
5. Quels mots Véronique propose-t-elle pour remplacer « armé » ?
Précisez la différence de sens entre ces mots. grinçante
Elle propose « muni » ou « doté ». « Armé » a un sens militaire, et
suppose de la part de Ferdinand une intention de blesser Bruno, Séance 3 L ecture analy tique
de se servir du bâton pour lui faire mal, dans une sorte de prémé-
ditation. « Muni » a également une connotation militaire (« munir » Des personnages médiocres
et « munition » ont tous deux la même étymologie latine « mu-
nire »), tandis que « doté », du latin « dotare » signifiant « douer », a
• Cette séance prend appui sur l’ensemble de la pièce. Son objectif
est de révéler l’ambivalence des personnages et de montrer que
plutôt une connotation positive. On comprend donc qu’Alain joue
cette mise en scène des faux-semblants constitue une dénon-
sur les mots, plus pour contredire Véronique et ne pas la laisser
ciation de la société contemporaine de la part de Yasmina Reza,
mener la discussion, que par réel souci du sens.
qui critique ainsi la trop grande importance accordée aux appa-
6. Quelles remarques pouvez-vous faire sur le vocabulaire em- rences, le « politiquement correct » et les diktats d’une certaine
ployé par Véronique dans sa première réplique ? Quelle intention société bien-pensante.
de Véronique ce choix de vocabulaire traduit-il ?
Son vocabulaire est soutenu et précis : « altercation verbale », « tumé- Déroulement de la séance et activités
faction », « brisure de deux incisives ». Ce vocabulaire se veut la preuve 1. Sous des apparences courtoises…
d’une grande objectivité, mais il montre également que Véronique
tente de tenir ces événements à distance. Malheureusement, cette
• Complétez le tableau suivant. (Les réponses proposées ici sont
des suggestions, car il y a bien d’autres exemples dans la pièce,
trop grande sophistication manque de naturel et crée l’effet inverse dont vous pourrez faire un relevé plus complet en répartissant la
de celui qu’elle escomptait : on sent Véronique en ébullition et dans recherche par groupes.)
la retenue de ses sentiments réels.
Parole courtoise Geste courtois
Véronique « Oh Annette ! Elle a acheté des fleurs,
Je m’inquiétais… elle a gardé
Vous êtes mieux ? » du clafoutis.
(l. 771-772, p. 41)
Michel « On ne vous a rien Il offre son meilleur
proposé, café, thé ? » rhum et un cigare
(l. 145, p. 15) à Alain.
Annette « Elles sont ravissantes
ces tulipes » (l. 56,
p. 11).
« Succulent » (l. 195,
p 17)
Alain « Très bon. Très bon. »
(l. 194, p 17)
Séance 7
3
L ecture ,
élargir ses connaissances expression é crite
Étape
Déroulement de la séance
• Au cours du déroulé de la séquence, les élèves auront lu un
roman en lecture cursive. Ils devront transposer le début de ce
• Les élèves devront faire des exposés par groupe de 3, dont vous roman en une pièce de théâtre, dont ils écriront la (les) scène(s)
leur donnerez les sujets. Voici une liste d’exemples de sujets pos- d’exposition. Cet exercice permet également de consolider les
sibles : connaissances sur le rôle d’une scène d’exposition. En donnant le
– André Antoine et le Théâtre Libre ; sujet, j’insiste bien sur le fait que la pièce doit être un huis clos. Le
– Le cartel des quatre : Jouvet, Dullin, Baty, Pitoëff ; roman que j’ai choisi de donner à lire est un roman de littérature
– Antonin Artaud ; jeunesse : Nine Eleven de Jean-Jacques Greif, qui raconte les évé-
– Le théâtre de l’absurde : Ionesco, Beckett, Adamov ; nements du 11 septembre 2001, selon le point de vue de lycéens.
– Jean Vilar et le TNP ; De nombreux romans policiers fonctionnent sur le principe du
– Le living théâtre ; huis clos, notamment ceux d’Agatha Christie.
– Peter Brook et les Bouffes du Nord ;
– Ariane Mnouchkine et le Théâtre du Soleil ;
– Henrik Ibsen ;
– Luigi Pirandello.
Prolongements
1. Comparer avec une autre pièce de Yasmina Reza : Art.
• La pièce est disponible dans son intégralité sur Internet.
• Vous pouvez regarder les dix premières minutes en classe et inter-
roger les élèves sur les points suivants :
– Qui sont les personnages ?
– Quel est le thème de la pièce ?
– Quelle est sa visée ?
– Quels procédés présents dans Le Dieu du carnage reconnaissez-
vous ici ?
– Quelles remarques pouvez-vous faire sur les décors et les cos-
tumes ?
2. Comparer la pièce avec l’adaptation de Roman Polanski.
• Avec vos élèves, regardez la bande-annonce du film :
http://www.youtube.com/watch?v=N6OiLrumyc8
• Vous pourrez ensuite leur poser les questions suivantes :
– D’après les extraits présentés dans la bande annonce, cette
adaptation vous semble-t-elle fidèle à la pièce ? Justifiez votre
réponse en donnant au moins trois arguments.
– Que pensez-vous du choix des scènes mises en avant dans cette
bande-annonce ? Vous semblent-ils propres à susciter l’envie d’al-
ler voir le film ? Quelles scènes auriez-vous choisies et pourquoi ?
3. Découvrir Huis clos de Jean-Paul Sartre.
• Rendez-vous sur la page de la BNF consacrée à Huis clos.
http://expositions.bnf.fr/sartre/reperes/oeuvres/huis.htm
• Après lecture de cette page, les élèves répondront aux questions
suivantes :
– Quand et où la pièce a-t-elle été créée ?
– Dans quelles circonstances la pièce a-t-elle été écrite ?
– Dans quel contexte historique la pièce a-t-elle été écrite ?
– Quelle réplique de la pièce est restée très célèbre ?
– Quel sens Sartre donne-t-il à cette réplique ? Affiche de Carnage de Roman Polanski, 2011.
La dénonciation
des apparences,
du « politiquement
correct », des
diktats de la société
bien-pensante
se retrouve aussi
dans nombre de
créations plastiques
contemporaines. La
notion d’art se prête
d’ailleurs à toutes
les interrogations
sur tout ce qui fait la
réelle valeur d’une
œuvre.
Exploitation en classe
Quelques questions possibles Éléments de réponse
1. Que voyez-vous ? 1. Un urinoir.
2. Quelle est l’intervention de l’artiste sur cet objet ? 2. L’artiste a donné à cet urinoir le titre ironique de Fontaine,
3. Le nom qui figure en signature est-il celui de l’artiste ? l’a signé, daté (1917) et l’a envoyé à la Société des artistes
4. Pourquoi, à votre avis ? indépendants en vue d’une exposition.
5. Selon vous, que cherche-t-il à dénoncer à travers cette mise 3. Duchamp a signé R. Mutt.
en scène ? 4. Il s’agit d’une mise en scène.
6. Que signifie le terme « ready-made » ? 5. Le fait de soumettre Fontaine à la Société des artistes
indépendants est une ruse de Marcel Duchamp pour mettre
dans l’embarras les membres de cette institution : ou bien
les membres de cette Société obéissent à leurs principes
démocratiques et se ridiculisent dans ce cas auprès du public
et de la presse, ou bien ils refusent l’envoi de R. Mutt et se
constituent comme un jury au sens traditionnel, de sorte qu’il
n’y a plus alors d’artistes indépendants.
6. Le terme de « ready-made » désigne un objet tout fait.
Le poète surréaliste André Breton définit le « ready-made »
comme un « objet usuel promu à la dignité d’objet d’art par le
simple choix de l’artiste ».
FI
E
Parcours de lecture
1. Un univers quotidien
1. Complétez la déclaration : • Michel Houllié :
• Quand ? ...........................................................................................
........................................................................................... ...........................................................................................
...........................................................................................
2. Retrouvez les professions de chaque personnage.
• Véronique Houllié : 6. Quel surnom les Houllié se donnent-ils ? D’où vient-il ?
........................................................................................... ...........................................................................................
FI
E
L’ironie dans la pièce
1. Définition
1. Que pouvez-vous dire de l’attitude du personnage 2. Par quels procédés cette attitude s’exprime-t-elle ? Donnez
d’Alain ? un exemple.
........................................................................................... ...........................................................................................
........................................................................................... ...........................................................................................
........................................................................................... ...........................................................................................
........................................................................................... ...........................................................................................
Présentation
Déroulement • Les exercices portent d’abord sur la notion même de valeur,
puis sur trois temps simples de l’indicatif : le présent, l’imparfait
Ces pages sont constituées d’un test (évaluation diagnostique) et le passé simple envisagés dans leur complémentarité. Les
et de cinq fiches « Entraînement » suivies d’une évaluation temps composés sont ensuite traités ensemble pour leur aspect
sommative. Le test a été conçu par paliers de difficulté croissante accompli et le fait qu’ils expriment l’antériorité. Le futur simple est
avec, pour chaque niveau de difficulté, une fiche « Entraînement » rattaché aux modes impératif, infinitif et subjonctif du fait de leur
correspondante. Ainsi pourrez-vous orienter chaque élève vers capacité à exprimer l’ordre. Enfin, le mode subjonctif est opposé
l’entraînement qui lui est utile : l’entraînement 1 si l’exercice n° 1 au mode indicatif et les élèves sont invités à analyser la diversité
du test n’est pas réussi, ou l’entraînement 2 si le n°1 est réussi de ses emplois, dans le domaine de la virtualité.
mais pas le 2, et ainsi de suite. Une fiche « remédiation » est
téléchargeable sur le site de la NRP pour les élèves qui seraient en
• La question des valeurs repose en effet sur la capacité à
analyser. La complexité de cette question tient à ce qu’il ne
difficulté face au test. L’évaluation finale permettra de mesurer les
suffit pas de reconnaître un temps ou un mode mais, en plus,
progrès accomplis au terme de ce parcours d’entraînement.
il faut comprendre sa signification (ce qu’il sert à exprimer)
dans un contexte donné. C’est un travail de lecture autant que
Contenu
de conjugaison. C’est pourquoi, le plus souvent, les exercices
• Ces fiches couvrent l’ensemble des valeurs des temps et proposés dans ces fiches reposent sur une démarche inductive :
des modes abordés au collège : les entraînements 1 et 2 peuvent une phase d’observation guidée par des questions permet aux
être faits dès la 6e mais toutes les fiches concernent la fin de 4e élèves de construire eux-mêmes leur leçon. Ensuite seulement,
ou la 3e. d’autres exercices leur permettent de découvrir la variété des
valeurs et leurs nuances.
Le + numérique : en ligne, une fiche de remédiation sur les
valeurs de base du présent, de l’imparfait et du passé simple.
ÉtuDE DE LA LANGuE
Reconnaître Analyser Accorder construire Enrichir FIcHE
ENSEIGNANt
EN
1 Reconnaître Analyser Accorder construire Enrichir
Nt
Les valeurs du présent
Comprendre ce qu’est la valeur d’un temps
1. Observez ces séries de trois phrases puis répondez aux a. Ces verbes sont-ils tous conjugués au même temps ?
questions. Si oui, lequel ?
1. Je marche vers la piscine. – J’arrive bientôt. – Toutes les ...........................................................................................
semaines, je vais à la piscine.
b. Les trois actions exprimées par les verbes se déroulent-
a. Ces verbes sont-ils tous conjugués au même temps ? elles en même temps ?
Si oui, lequel ?
...........................................................................................
...........................................................................................
2. Depuis deux semaines, je lis un roman passionnant. 6. Tous les soirs, mon frère me réclame une histoire…
3. Mon père part à la retraite dans cinq ans. 7. Christophe Colomb découvre l’Amérique en 1492.
4. En vous aidant de l’exercice précédent, reliez les phrases données à la valeur du présent qui leur correspond.
1. Il se brosse les dents après chaque repas. • présent d’énonciation
2. Je vais te confier un secret très important… • présent étendu
3. En 1969, Neil Armstrong marche sur la Lune. • présent d’habitude
4. L’eau gèle à zéro degré. • présent de vérité générale
5. Cette année, les pivoines sont à la mode. • présent à valeur de passé proche
6. Avec la marée, la mer monte à vue d’œil. • présent à valeur de futur proche
7. Dommage ! Votre train part à l’instant ! • présent historique
ÉtuDE DE LA LANGuE
tR
Reconnaître Analyser Accorder construire Enrichir
2
EN
Nt
Les valeurs de l’imparfait
et du passé simple
Les valeurs de l’imparfait
1. Indiquez la valeur des verbes à l’imparfait du texte arrière-plan .........
en recopiant leur numéro dans le tableau.
.........
Il était une fois un dragon qui se sentait
bien seul. Chaque fois qu’il rencontrait quelqu’un, il .........
essayait de sourire mais alors il se mettait à cracher
.........
des flammes qui faisaient fuir ses interlocuteurs. Un
jour, il aperçut une jeune fille qui pleurait . Malgré
description .........
ses larmes, il vit qu’elle avait les plus beaux yeux
qu’il n’ait jamais vus. Ses cheveux roux ondulaient .........
merveilleusement. Au lieu de lui sourire, il la réconforta
.........
par la chanson douce que son père lui chantait jadis
quand il était mélancolique. C’est ainsi que le dragon .........
solitaire se fit une amie.
habitude, répétition .........
.........
.........
.........
EN
3 Reconnaître Analyser Accorder construire Enrichir
Nt
Les valeurs et aspects
des temps composés
Aspects des temps simples et des temps composés
1. a. Indiquez pour chaque phrase si le verbe marque 3. Sa sœur avait grimpé au sommet de l’arbre.
l’aspect accompli (action achevée) ou inaccompli (action
➞ aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
en cours).
b. S’il marque l’aspect accompli, modifiez son temps pour ➭ aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ➞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
qu’il marque l’aspect inaccompli, et vice-versa. 4. Pour cela, il faut lire attentivement le mode d’emploi.
Exemple : Elle boit son thé. ➞ aspect INACCOMPLI
➞ aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
➭ aspect ACCOMPLI = Elle a bu son thé.
➭ aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ➞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1. Tu termines ton exercice. ➞ aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
➭ aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ➞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2. D’après vos réponses, complétez la leçon suivante :
2. Ce livre aura rencontré un grand succès.
Les temps simples marquent l’aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
➞ aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Les temps composés marquent l’aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
➭ aspect . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ➞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
ÉtuDE DE LA LANGuE
tR
Reconnaître Analyser Accorder construire Enrichir
4
EN
Nt
L’expression de l’ordre
Les valeurs du futur simple
1. Complétez la leçon suivante : 2. Soulignez en bleu les futurs qui expriment des faits
situés dans l’avenir et en vert les futurs catégoriques.
• Le plus souvent, le futur simple exprime des faits situés
dans l’ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Quand vous irez dans la maison, vous verrez une pièce plus
sombre que les autres sur votre droite. C’est là que vous
Exemple : Cet été, j’écrirai un poème sur les bords de mer. prendrez la lampe et le tabouret et vous les chargerez dans
• Mais il existe d’autres valeurs du futur, regroupées sous le camion. Par contre, vous ferez bien attention à ne pas
le nom de « futur catégorique » : on peut en distinguer casser les vases. Vous ne les toucherez pas pour plus de
quatre nuances principales. sûreté. Mes parents seront ravis du service que vous nous
rendrez alors.
Exemples : Tu fermeras la porte en sortant !
= .............................................
– Tu ne tueras point. Tu ne voleras pas.
= .............................................
– Tu pourras peut-être vérifier que tu as ton billet.
= .............................................
– Vous prendrez ces médicaments avant le repas.
= .............................................
4. Voici un extrait de recette de cuisine donné au futur catégorique. Récrivez-le trois fois en employant
les trois autres moyens (vus dans la question précédente) pour exprimer l’ordre et la défense.
EN
5 Reconnaître Analyser Accorder construire Enrichir
Nt
Les valeurs des modes
indicatif et subjonctif
Indicatif ou subjonctif ?
1. Observez les deux phrases suivantes pour répondre d. Leçon :
aux questions, puis complétez la leçon.
Le mode . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . est le mode de la réalité
Il vient me voir. – J’aimerais qu’il vienne me voir.
alors que le mode . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . est le mode de
a. Le verbe « venir » est au présent dans les deux phrases, la virtualité.
mais de quel mode ?
2. Conjuguez les verbes indiqués soit à l’indicatif
– Dans la première phrase, le verbe est conjugué au mode soit au subjonctif en précisant le mode choisi.
....................................
1. J’apprends que tu (paresser) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . au
– Dans la seconde phrase, le verbe est conjugué au mode lieu de travailler ? (➞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . )
....................................
2. Donne-moi une feuille pour que je (pouvoir) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
b. Dans quelle phrase l’action du verbe « venir » est-elle écrire. (➞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . )
présentée comme certaine, réelle ? . . . . . . . . . . . . . . . 3. Cachons-nous afin qu’il (avoir) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
une surprise ! (➞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . )
c. Dans quelle phrase l’action du verbe « venir » est-elle
présentée comme éventuelle, incertaine, virtuelle ? 4. Elle est ravie que son orchidée (pousser) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
............... (➞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . )
3. Il n’a pas aimé ce film, non qu’il soit raté mais parce que le sujet lui déplaisait.
.................................................................................................................................................................................................
4. Elle n’a rien vu, soit qu’elle soit naïve, soit qu’il soit très discret.
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aux besoins des élèves.
ÉtuDE DE LA LANGuE
VA
Reconnaître Analyser Accorder construire Enrichir
N
É
je vérifie mes connaissances sur
les valeurs des temps et des modes
Complétez le tableau après avoir lu le texte suivant.
Le nain, qui jugeait quelquefois un peu trop vite, décida – Mais, dit le nain, j’ai bien tâté.
d’abord qu’il n’y avait personne sur la terre. Sa première – Mais, répondit l’autre, vous avez mal senti.
raison était qu’il n’avait vu personne. Micromégas lui fit
– Mais, dit le nain, ce globe-ci est si mal construit, cela est si
sentir poliment que c’était raisonner assez mal : « Car, disait-
irrégulier et d’une forme qui me paraît si ridicule ! »
il, vous ne voyez pas avec vos petits yeux certaines étoiles de
la cinquantième grandeur que j’aperçois très distinctement ; Voltaire, Micromégas, chapitre IV (1752).
concluez-vous de là que ces étoiles n’existent pas ?
Verbe du texte temps de l’indicatif Aspect (accompli Valeur (Pourquoi ce temps ? Je sais
ou inaccompli) Cherchez le sens du texte.) répondre :
jugeait inaccompli
/2
décida inaccompli
/2
était
/3
avait vu
/3
aperçois
/3
ai tâté
/3
tOtAL :
/ 16
mode de la virtualité
• • infinitif • • « Il est venu hier. »
(ex : pour un souhait)
tOtAL : / 20
E
Indigènes
de Rachid Bouchareb (2006)
Après la projection du film, répondez aux questions et aux consignes.
1. Le générique
1. De quel type d’images est-il constitué ? 4. Quel genre de musique les accompagne ?
........................................................................................... ...........................................................................................
...........................................................................................
6. En quelle(s) langue(s) s’inscrit le titre du film ?
3. Quelle forme dessinent-elles ? ...........................................................................................
...........................................................................................
7. Que signifie le terme « indigène » ?
...........................................................................................
...........................................................................................
2. Cinq soldats
8. Citez les noms des cinq personnages principaux. 11. Décrivez-les en vous aidant du tableau suivant :
...........................................................................................
S… Y… A… M… M…
...........................................................................................
Posture
...........................................................................................
Vêtement
9. Dans quel lieu chacun apparaît-il ?
Attributs
...........................................................................................
...........................................................................................
Personnage associé
........................................................................................... Rapport au
langage/écriture
10. Quelle est leur situation au début du film ?
Grade militaire
...........................................................................................
3. La France et eux
13. Pour quelle(s) raison(s) chacun s’engage-t-il ? 17. Dans quel lieu se termine le film ?
........................................................................................... ...........................................................................................
14. Que représente La France pour eux ? 18. À quelle époque sommes-nous ?
........................................................................................... ...........................................................................................
15. À quoi sont-ils prêts pour elle ? 19. Qu'est devenu Abdelkader ?
........................................................................................... ...........................................................................................
16. Bénéficient-ils du même traitement que les autres ? Cette fiche est à télécharger au
........................................................................................... format word sur le site pour les
abonnés numériques. Adaptable
aux besoins des élèves.
ENtRAÎNEMENt BREVEt
FI
E
Huis clos
de jean-Paul Sartre
Scène première le garÇon. – Là ! Là ! excusez-moi. Qu’est-ce que vous
garCin, le garÇon D’étage. voulez, tous les clients posent la même question. Ils
Un salon style Second Empire. Un bronze sur la cheminée. s’amènent : « où sont les pals ? » À ce moment-là, je vous
jure qu’ils ne songent pas à faire leur toilette. et puis,
garCin, Il entre et regarde autour de lui. – Alors voilà.
dès qu’on les a rassurés, voilà la brosse à dents. mais,
le garÇon. – voilà.
pour l’amour de Dieu, est-ce que vous ne pouvez pas
garCin. – C’est comme ça… réfléchir ? Car enfin, je vous le demande, pourquoi vous
le garÇon. – C’est comme ça. brosseriez-vous les dents ?
garCin. – Je… Je pense qu’à la longue on doit garCin, calmé. – oui, en effet, pourquoi ? (Il regarde
s’habituer aux meubles. autour de lui.) et pourquoi se regarderait-on dans
le garÇon. – Ça dépend des personnes. les glaces ? Tandis que le bronze, à la bonne heure…
garCin. – est-ce que toutes les chambres sont pareilles ? J’imagine qu’il y a de certains moments où je regarderai
le garÇon. – Pensez-vous ! Il nous vient des Chinois, de tous mes yeux. De tous mes yeux hein ? Allons,
des Hindous. Qu’est-ce que vous voulez qu’ils fassent allons, il n’y a rien à cacher ; je vous dis que je n’ignore
d’un fauteuil Second empire ? rien de ma position. voulez-vous que je vous raconte
garCin. – et moi, qu’est-ce que vous voulez que j’en comment cela se passe ? Le type suffoque, il s’enfonce,
fasse ? Savez-vous qui j’étais ? bah ! ça n’a aucune il se noie, seul son regard est hors de l’eau et qu’est-ce
importance. Après tout, je vivais toujours dans des qu’il voit ? Un bronze de barbedienne. Quel cauchemar !
meubles que je n’aimais pas et dans des situations Allons, on vous a sans doute défendu de me répondre,
fausses ; j’adorais ça. Une situation fausse dans une salle je n’insiste pas. mais rappelez-vous qu’on ne me prend
à manger Louis-Philippe, ça ne vous dit rien ? pas au dépourvu, ne venez pas vous vanter de m’avoir
le garÇon. – vous verrez : dans un salon Second surpris ; je regarde la situation en face. (Il reprend sa
empire, ça n’est pas mal non plus. marche.) Donc, pas de brosse à dents. Pas de lit non
garCin. – Ah ! bon. bon, bon, bon. (Il regarde autour de plus. Car on ne dort jamais, bien entendu ?
lui.) Tout de même, je ne me serais pas attendu… vous Jean-Paul Sartre, Huis clos, 1944, © éd. Gallimard.
n’êtes pas sans savoir ce qu’on raconte là-bas ?
le garÇon. – Sur quoi ? 1. Pal : pieu aiguisé à son extrémité.
garCin. – eh bien… (avec un geste vague et large) sur
tout ça.
le garÇon. – Comment pouvez-vous croire ces
âneries ? Des personnes qui n’ont jamais mis les pieds
ici. Car enfin, si elles y étaient venues…
Questions (15 points)
garCin. – oui.
Ils rient tous deux. 1. À quels indices comprenez-vous que ce texte appartient
garCin, redevenant sérieux tout à coup. – où sont les au genre du théâtre ? Relevez des indices précis pour
pals1 ? répondre. (3 points)
le garÇon. – Quoi ? 2. À quel champ lexical appartiennent les mots suivants :
garCin. – Les pals, les grils, les entonnoirs de cuir. « toutes les chambres » et « tous les clients » ? Où peut-on
Le garÇon. – vous voulez rire ? supposer que la scène se passe ? (2 points)
garCin, le regardant. 3. Relevez dans le texte deux éléments qui devraient se
– Ah ? Ah bon. non, je ne voulais pas rire. (Un trouver dans une chambre d’hôtel, mais qui sont absents ici.
silence. Il se promène.) Pas de glaces, pas de fenêtres, Comment l’interprétez-vous ? (2 points)
naturellement. rien de fragile. (Avec une violence subite :)
et pourquoi m’a-t-on ôté ma brosse à dents ? 4. a. À quoi l’énumération « les pals, les grils, les entonnoirs
le garÇon. – et voilà. voilà la dignité humaine qui vous de cuir » fait-elle référence ? (1 point)
revient. C’est formidable. b. Dans cette énumération, justifiez l’emploi de l’article
garCin, frappant sur le bras du fauteuil avec colère. – Je défini. (1 point)
vous prie de m’épargner vos familiarités. Je n’ignore rien 5. Mettez cette énumération en relation avec le titre de la
de ma position, mais je ne supporterai pas que… pièce. Qu’est-ce qui est ainsi connoté ? (1 point)
François Marthouret, Claire Nebout et Claire Borotra dans Huis clos, mise en scène de Robert Hossein, 2000.
FIcHE
ENSEIGNANt
grammaire
1. La forme facturus est un participe futur, reconnaissable à
son suffixe -urus, a, um. Il peut se traduire par « sur le point
de ». On rappellera les trois formes de participes en latin,
deux actifs (participes présent et futur) et un passif (participe
parfait passif ).
2. La forme « comparaverat » est au plus-que-parfait, servant
à marquer l’antériorité dans un texte au passé.
3. Dans le groupe « imbelliam militum ejus », il y a deux
compléments au génitif. Le premier est le complément du
nom de imbellia et le deuxième est le génitif du pronom de
rappel is, ea, id et sert à indiquer la possession (traduction
littérale « de celui-ci »).
VE
FI
L’humour noir d’hannibal
Macrobe rapporte dans ses Saturnales une plaisanterie grammaire
d’Hannibal, alors en lutte contre les Romains et réfugié 1. Identifiez la forme « facturus ».
auprès du roi Antiochus.
...................................................................................................
Hannibal Carthaginiensis apud regem Antiochum profu- 2. À quel temps est la forme « comparaverat » ?
gus facetissime cavillatus est. Ea cavillatio hujuscemodi fuit.
Ostendebat Antiochus in campo copias ingentes quas bellum ...................................................................................................
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