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BANQUE · FINANCE · SOCIAL · GESTION · DROIT · MARKETING

La révolution
Fin Tech
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Ré is Bouyala
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ÉDITION
Ouvrage publié avec le concours d'Utsit

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La révolution
Fin Tech

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DU MÊME AUTEUR

* Les paiements à l'heure de l'Europe et de l'-e-/rn-paiement


Collection Essentiel de la Banque et de la Finance, 2013.
* Le monde des paiements, 2005
INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES CONCERNANT L'AUTEUR

Régis Bouyala, diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, dirige, depuis


2011, le cabinet Pémance, spécialisé dans les FinTechs. À ce titre, il conseille
plusieurs acteurs majeurs de l'écosystème du secteur: banques, start-ups et
industriels. Il est également Vice-Président du Comité de labellisation du Pôle
Finance Innovation.
Précédemment, il a occupé des postes de responsabilité dans le domaine
des paiements, successivement à la Banque de France, au CCF (actuellement
HSBC France) en tant que responsable de la filière métier, et enfin au sein
du cabinet Eurogroup Consulting comme Associé, Responsable de la Practice
paiement et Cash management.

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ISBN : 978-2-86325-757-9
Code Géodif: G70770
Copyright © 2016. RB Édition, 18, rue La Fayette - 75009.
www.revue-banque.fr

Toute reproduction, totale ou partielle, de la présente publication est interdite sans


autorisation écrite de La Revue Banque ou du CFC, conformément aux dispositions du
Code de la propriété intellectuelle.

Diffusé par les Éditions d' Organisation, 1, rue Thénard, 75240 Paris Cedex 05.
Les Essentiels
de la Banque et de la Finance

La révolution
Fin Tech

Régis Bouyala

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Avertissement

Le parti a été pris de ne pas intégrer le monde de l'assurance


dans le périmètre de la FinTech, ce que l'on appelle l'AssurTech,
car les logiques de fonctionnement de la banque et de
l'assurance sont distinctes, de même que la nature et le rythme
des relations avec les clients; le seul produit commun que l'on
puisse identifier entre ces deux métiers étant l'assurance vie,
qui est en réalité un pur produit d'épargne.

Quant au plan géographique, l'ambition est de donner


une vision internationale du contexte macroéconomique,
réglementaire et stratégique de la FinTech, en appuyant
cependant, aussi souvent que possible, les argumentaires sur
des exemples de FinTechs françaises. Ce faisant, l'objectif est
de proposer au lecteur, principalement français dans le cadre
de cette édition, un panorama de la richesse et du potentiel de
notre écosystème national.

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TA BLE DE S MAT IERE S

Introduction........... ....................... ........ ............................ 15

Chapitre 1
La FinTech, Objet Bancaire Non Intégré (un OBNI)..... .. 19

1. Un Objet Bancaire... ................................................................................. 19


l. PAIEMENT ET GESTION DES COMPTES: INTERNET ET MOBILE
EN ACCÉLÉRATEURS D'INNOVATION..................................................... 19
A/ Les offres de paiement au commerce de détail................................. 22
1.1 Les services aux e-commerçants...................................................... 22
Mieux vendre et sécuriser.................................................................. 22
Pouvoir accepter le plus de moyens de paiement
possibles................................................................................................... 23
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1.2 Le commerce de proximité................................................................ 24
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Le mPOS, une innovation de rupture............................................. 25
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1.3 Initiatives multicanales........................................................................ 26
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N L'intelligence dans le nuage............................................................... 26
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Payer «éthique»..................................................................................... 26
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a. B/ Les offres de paiement tournées vers le client final........................ 27
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1.4 Les systèmes de wallets...................................................................... 27
Pourquoi et comment le wallet ?..................................................... 27
Un marché diversifié, encombré et très compétitif................. 28
1.5 Les réseaux de transfert de fonds ................................................... 29
Les alternatives à Western Union et MoneyGram .................... 29
Les systèmes de bancarisation ou d'inclusion financière....... 30
Les paiements internationaux........................................................... 30
Le correspondent banking.................................................................. 31
8 1 LA RÉVO LUT ION F 1N T ECH

1.6 Les systèmes de monnaies virtuelles ............................................. 31


Au-delà de /'idolâtrie et des anathèmes,
de quoi. s'ag1t-1
. ., exactement ...........................................................
?
.. 31
Un avenir au-delà du bitcoin ?.......................................................... . 32
Cl Les offres de gestion des comptes ......................................................... 33
1.7 Remplacer la banque : /ow cost ou supermarché
de la banque ............................................................................................ 33
1.8 Se greffer sur la banque....................................................................... 35

2. FINANCEMENT ET ÉPARGNE : L'EMPIRE DU BIG DATA ................... .. 37


2.1 Le financement participatif ............................................................. .. 38
.., ...................................................................................
De quoi. s'ag1t-1 ?
.. 38
Un marché français actif.................................................................... . 39
Un marché européen en croissance très rapide dominé
par la Grande-Bretagne ...................................................................... . 40
Une innovation attrayante non exempte de risques .............. .. 40
2.2 Les autres modalités de l'alternative /ending............................ .. 42
L'affacturage mis à la portée des TPE-PME. .................................. 42
Le crédit dans le prolongement de l'acte de paiement .......... 43
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0
2.3 Épargne : d'Orwell à Asimov, entre Big Data
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et robo-advisors.................................................................................... . 44
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De nouveaux produns très innovants .......................................... .. 45
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@ Un marché encore très anglo-saxon ............................................... 46
......
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·;:: L'apport du trading algorithmique .................................................. 48
>-
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u Il. ...Non Intégré ................................................................................................. . 49

l. ENCORE LARGEMENT EN DEHORS DU PÉRIMÈTRE


D'INFLUENCE DES BANQUES EUROPÉENNES...................................... 49
1.1 Poussée par un fort vent d'Ouest... ................................................ 50
1.2 ... la caravelle Fin Tech est principalement gréée
par des fonds d'investissement et quelques gros acteurs
« corporate »............................................................................................. 54
Des VCs et des GAFA ............................................................................ 54
Î ABLE DES MATIÈRES 1 9

Les «schemes» et Pay Pal................................................................... 54


Les banques, enfin?.............................................................................. 55
2. L'INTÉGRATION DE L'ACTIVITÉ DES FINTECHS EST SOUVENT
UN CASSE-TÊTE POUR LE RÉGULATEUR ................................................ 56
2.1 Si de larges pans de la Fin Tech sont régulés ............................ .. 56
Des métiers soumis, en tant qu'activités bancaires,
a- reg
- Iementation
. ................................................................................. .. 56
2.1.1 La réglementation du financement participatif.. .......... .. 57
2.1.2 La réglementation des activités de paiement ................. 59
Les directives sur les Services de Paiement
(dites DSPl et DSP2}............................................................................... 59
Les directives sur la Monnaie Électronique
(DMEl et DME2} ...................................................................................... 60
2.2 ...la mise en œuvre de la réglementation donne souvent
des migraines au régulateur ............................................................. .. 62
2.2.l Le régulateur est fréquemment en retard
sur les évolutions du marché ................................................. 62
La DSP2 à contretemps ?..................................................................... 62
Le droit du financement participatif n'est pas harmonisé..... 63
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Le développement mal manrisé des market places
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en France................................................................................................... 63
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2.2.2 Le régulateur est parfois contesté ....................................... 64
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Par les FinTechs el/es-mêmes............................................................ 64
......
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Par les acteurs historiques.................................................................. 65
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Chapitre 2
Schumpéterienne, la FinTech ira-t-elle jusqu'à
.
« ruiner I'ancien
. » ?.......................... .... ................. .. ........ . 71

1. Un phénomène de destruction créatrice .............................. 71

l. LA FINTECH ALTÈRE LES MODÈLES TRADITIONNELS


DE CRÉATION DE VALEUR... ...................................................................... 71
l.l Elle détruit de la valeur existante................................................... 71
10 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

l.l.l Les initiatives des Fin Techs touchent au cœur même


de la raison d'être des banques : l'intermédiation.......... 71
l.l.2 La disruption introduite par la Fin Tech pèse
sur les prix en banalisant les produits bancaires
traditionnels ................................................................................. 73
1.1.3 Ce phénomène de destruction de valeur
est accentué par les stratégies des GAFA .......................... 75
1.2 Elle met en évidence de nouveaux gisements de valeur ........ 76
1.2.l En accélérant le repositionnement du client
«au centre du village ».............................................................. 76
l.2.2 En déplaçant la valeur vers les services connexes
' l'act'1v1't e, banca1re
a . .................................................................... 77
Le mPOS................................................................................................... . 77
L'offre de SlimPay.................................................................................. . 78
l.2.3 En mettant en évidence des zones de valeur
potentielles qui étaient sous-exploitées ......................... .. 79
Lalternative lending .............................................................................. 79
La prévention de la fraude dans le e-commerce ....................... 79
L'enrichissement de l'offre de service sur la carte bancaire.. . 80
è
Le crowdfunding fait émerger de nouvelles classes dactifs .. . 80
0
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2. ...METTANT AINSI LES BANQUES SOUS PRESSION ........................... 81
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2.1 Dans leur relation avec leurs clients : valeur d'exemple
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et de benchmark ................................................................................... . 81
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...... 2.2 Vis-à-vis de leurs concurrents non bancaires : risque
~
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>-
de pousser les Fin Techs dans leurs bras ...................................... .. 81
a.
0
u Les FinTechs ont besoin de partenaires ayant
des portefeuilles de clientèle installés ....................................... .. 81
Les GAFA et autres géants technologiques en embuscade.... 83
Des partenariats opportunistes....................................................... . 85
~ Ilement rumer
11 . Le nouveau va-t-1•1ree . l'ancien
. '. ............... 86
l. LA FINTECH EST VULNÉRABLE .................................................................. 87
1.1 L'accident est toujours possible ....................................................... 87
l.l.l L'explosion en vol ....................................................................... 87
Î A BLE DE S MATIÈRES 1 11

1.1.2 Le crash.......................................................................................... . 87
1.2 La Fin Tech souffre d'insuffisances structurelles ......................... 89
1.2.l La difficulté des plates-formes d'épargne en ligne
à atteindre la masse critique .................................................. 90
1.2.2 La lenteur du décollage des systèmes de wallet .......... .. 91

2. LES ACTEURS INSTALLÉS RESTENT PUISSANTS ................................... 92


2.1 Le «cauchemar» de la banque ........................................................ 92
Le décor .................................................................................................... 92
Un exemple de scénario..................................................................... . 92
2.2 ...est loin d'être avéré........................................................................... 94
De fortes barrières à l'entrée............................................................. 94
Des atouts intrinsèques....................................................................... 95
3. LA COOPÉRATION ENTRE BANQUES ET FINTECHS,
MUTUELLEMENT PROFITABLE, EST APPELÉE À SE DÉVELOPPER .. . 96
3.1 Une floraison de partenariats en perspective............................. 98
3.1.1 La Fin Tech en médecine homéopathique ........................ .. 98
Dans le domaine du paiement.......................................................... 98
La création de plates-formes de crowdfunding
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directement par des banques........................................................... 99
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3.1.2 L'émergence de partenariats opérationnels..................... 99
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Du côté du crowdfunding et du financement alternatif......... 100
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0
N Dans le domaine de l'épargne et de la gestion d'actifs........... 101
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L'utilisation du potentiel des données (Big data)...................... 102
en
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a.
3.1.3 L'exemple de la blockchain ..................................................... 102
De quoi. s'ag1t-1
.., ...................................................................................
0
u ?
.. 102
De multiples initiatives........................................................................ 104
Encore du chemin à faire................................. ................................... 106
3.1.4 Vers la Fin Tech 2.0? ................................................................... 106
3.2 Le développement de l'investissement dans une logique
de Corporate Venture .......................................................................... 108
3.2.l De quoi s'agit-il? ......................................................................... 108
3.2.2 Àquoi ça sert?............................................................................ 109
12 1 LA RÉVOLUT ION F1N T ECH

3.2.3 Comment peut-on s'y prendre?............................................ 110


3.2.4 Où en est-on dans le domaine de la banque
et de la finance? ......................................................................... 111
3.3 L'émergence de nouveaux écosystèmes ....................................... 114
3.3.l L'exemple de la France.............................................................. 114
Le Pôle Finance Innovation, pilier de l'écosystème français
delaFinTech............................................................................................ 114
Plusieurs organismes défendent les intérêts des diverses
composantes de la Fin Tech................................................................ 116
De très nombreuses initiatives du marché................................... 118
3.3.2 La dimension européenne....................................................... 119

Conclusion.... ................................................................... 123

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« Ce qui vient au monde pour ne rien troubler
ne mérite ni égards ni patience. »

René Char
À la santé du serpent

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INT RODUCTION

« Silicon Valley is coming » s'exclamait James Dimon, Président-


Directeur général de JPMorgan Chase Co, dans une lettre aux
actionnaires, au printemps 2015, se faisant ainsi l'écho de la prise
de conscience par les acteurs institutionnels de la banque et de la
finance de l'irruption sur leur terrain de jeu d'une nouvelle catégorie
de start-ups technologiques, que l'on appelle communément les
« jeunes pousses » (traduction française officielle de start-ups) de la
FinTech ou bien encore, plus simplement, les FinTechs .

De quoi s'agit-il ?

On peut définir la FinTech comme l'avatar dans le domaine de


la banque et de la finance de la fameuse révolution numérique
(digitale, disent les Anglo-saxons), permettant à de petites entités
agiles de venir concurrencer sur leur terrain (et/ou compléter l'offre)
des acteurs installés dans tous les domaines de l'économie (Uber
pour les taxis ou Airbnb pour les hôtels en sont les exemples les plus
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0
~ emblématiques).
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Comme leurs sœurs des autres industries, les entreprises de la
0
N FinTech appuient leur développement sur:
@
......
~
en
-+ L'utilisation de technologies innovantes (souvent à base de plates-
·;::
>
a. formes avec lesquels l'utilisateur final interagit grâce à un dispositif
0
u - principalement mobile, ordinateur ou tablette - connecté à
Internet ou autre réseau de communication) pour offrir au client
final des produits et services plus riches et/ou moins coûteux
que ceux des acteurs en place. Le mobile, le développement de
l'utilisation des Big Data et de l'analyse prédictive permettent
notamment un abaissement considérable des coûts d'accès au
marché.
-+ Un modèle économique souvent disruptif, n'ayant pas d'existant à
préserver.
16 1 LA RÉVOL U TIO N F1NTECH

-+ L'évolution du comportement des clients (mobiles, connectés,


géolocalisés, présents sur les réseaux sociaux), conjuguée à la
lourdeur (et souvent l'archaïsme) des acteurs en place, incapables
de répondre à ces évolutions de la demande, du moins pas dans
des délais compatibles avec la hâte qui désormais la caractérise.
Une tendance aggravée dans notre domaine par la défiance
vis-à-vis du monde bancaire et financier engendrée par la crise de
2008.
-+ Le souhait (plus ou moins avoué) des régulateurs et des pouvoirs
publics d'introduire de la concurrence dans des professions
« fermées » et supposées oligopolistiques. Pour la FinTech,
il s'agit d'une volonté affichée, se traduisant notamment par
l'œuvre réglementaire européenne dont la Directive sur les
Services de Paiement est la manifestation la plus visible ; au plan
« domestique », le dispositif réglementaire français d'octobre
2014 sur le crowdfunding fournit également un bon exemple de
cette tendance.

La période récente, et particulièrement l'année 2015, a été l'occasion


pour la FinTech de faire résonner son écho bien au-delà du cercle
habituel et plutôt étroit des techniciens et experts en nouvelles
technologies. Ces derniers mois en Europe, pas une conférence, un
c colloque consacré à la chose bancaire ou financière sans qu'une ou
0
~
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plusieurs jeunes pousses de ce secteur ne viennent en battre l'estrade.
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a:: Mais ce mouvement d'intérêt ne serait-il pas qu'un de ces
\0
~
0 engouements sans lendemain dont notre monde hypermédiatisé est
N
@ si coutumier, une de ces « coqueluches » dont on se déprend aussi
......
~
en vite que l'on s'en était trouvé entiché ?
·;::
> Nous ne le pensons pas car il s'appuie sur des réalisations bien
a.
0
u
concrètes que le présent ouvrage s'attachera à mettre en lumière, la
FinTech ayant toutes les caractéristiques d'une véritable tendance de
fond venant bouleverser l'exercice des métiers de la banque et de la
finance.
CHAPITRE 1

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La FinTech,
Objet Bancaire
Non Intégré {un OBNI)

1. UN OBJET BANCAIRE ...

Une des principales difficultés rencontrée lorsque l'on essaie, au-delà


du simple exercice de définition périmétrique, de caractériser plus
précisément et concrètement la Fin Tech tient à l'exubérance de son
tissu, la gamme des services financiers étant très ramifiée, d'autant
qu'il s'agit d'un monde en expansion constante car de nouvelles
start-ups se créent presque quotidiennement.
Nous allons donc, pour éviter de perdre le lecteur dans un maquis,
nous attacher à simplifier, catégoriser et synthétiser. Pour cela, nous
c
~
0
nous appuierons sur une classification se référant aux principaux
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•(IJ

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métiers bancaires, avec un cadre d'analyse très proche de celui
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\0 qui est proposé dans l'étude « The Fight for the Customer - Global
~
0
N Banking, Annual Review 2015 », publiée par le cabinet McKinsey en
@
...... octobre 2015 (cf. Figure 1, p. 20) .
~
en
·;::
>
a.
0
Sur cette base, la présentation qui suit sera articulée en deux grandes
u
parties :
1111- Le paiement et la gestion des comptes.
1111- Le financement et l'épargne.

1. Paiement et gestion des comptes :


Internet et mobile en accélérateurs d'innovation

Dans les pays développés, la généralisation de la bancarisation


a engendré un développement sans précédent de la monnaie
20 1 LA RÉVOLUT ION F1N T ECH

scripturale sur des supports - les moyens de paiement-économiques,


dématérialisés et conv1v1aux (cartes bancaires, virements et
prélèvements). Pour en faciliter l' utilisation et l'échange, les
banques et les banques centrales ont, pendant la deuxième moitié
du xxe siècle, progressivement élaboré et établi des systèmes
de paiement performants et sécurisés. Rendant ainsi possible et
aisé l'accès aux comptes courants ainsi que la circulation d'argent
dématérialisé entre les agents économiques.
Cette évolution a conduit au tournant du nouveau millénaire à un
paysage d'une impassibilité de mer d' huile, jusqu'à ce que, comme
un coup de tonnerre dans un ciel serein, la montée en puissance de
la FinTech vienne perturber ces métiers de paiement et de gestion
des comptes.

Figure l - Segmentation de la FinTech, 2015 1


Percent of total

Segments' share of
Customer global banking
segments revenues
<5%
• 5%-7.5%
• 7.5%-10%
c • >10%
0 Retail
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\0
~ Commercial 2
0 Financial assets
N
@ and capital markets4
......
~
en
·;:: Large corporate 3
>
a.
0
u Account managements

1. 350+ commercially most well-known cases registered in the Panorama data base,
may not be fully representative.
2. lncludes small and medium-size enterprises.
3. lncluding large corporates, public entities and non-ban king financial institutions.
4. lncludes sales and trading, securities services, retail investment, non-current-account
deposits and asset management factory.
5. Revenue share includes current/checking account deposit revenue.
Source : McKinsey Panorama - FinTech
LA FJN TEcH, OBJET B A N CA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) l 21

Le succès de ces nouveaux acteurs résulte principalement de


l'exploitation astucieuse d'insuffisances dans le service bancaire
classique. Ils appuient leurs offres sur la facilité d'accès au marché,
comme sur le potentiel d'interaction et de services que leur confère
une utilisation généralisée des technologies Web et mobile.

Nous examinerons successivement :


..... Les offres de paiement au commerce de détail.
..... Les offres de paiement tournées vers le client final.
..... Les offres de gestion des comptes.

Figure 2 - Paiement et gestion des comptes

Acteurs Ex. de FinTechs


Type de service Promesse
dominants françaises

Dalenys, PayPlug,
Mieux vendre
e-commerce Stripe, Klarna SlimPay, CashWay,
et sécuriser
Limonetik

Utiliser Square, iZettle,


Offres Smile&Pay,
Commerce le mobile mPowa,
au commerce EasyTra nsac,
de proximité comme TPE: Payleven,
de détail snapElite
mPOS SumUp

Étendre l'offre OpSiSe,


Multicanal au-delà Microdon, ZeGive,
c du paiement Heoh, PayGreen
0
~
"O Sécuriser
•(IJ Apple Pay, Pay-
CO l'usage de
a:: Pal, SamsungPay,
\0 la carte et
~ Wallets Paylib, Lydia, Payname
0 enrichir l'offre
N MasterPass,
@ aux clients
Visa Checkout
...... des deux côtés
~
en
·;::
> Baisser les
a. Offres
u
0 coûts de TransferWise, Tagattitude,
vers le Transferts
transferts Kantox, Ripple Lemonway,
client final de fonds
internationaux Labs PayTop
et bancariser

Supprimer les
inter médiaires
Monnaies Coin base,
pour réduire Paymium, iTrac
virtuelles Bit Pay
coût s et
risques

... / ...
22 1 LA RÉVOLUT ION F1N TE CH

.../ ...
Réduire les
Remplacer coûts de la Compte Nickel,
Simple, Fidor
la banque banque au Saon
quotidien
Offres
de gestion Créer de
Fiduceo, Bankin,
des comptes nouveaux
Se greffer Linxo, Budget
services en Sofort, iDeal,
sur la lnsights,
accédant Mint
banque Box & Automation
aux comptes
Solutions
bancaires

A/ Les offres de paiement au commerce de détail

Dans ce secteur, la qualité des conditions d'exercice de l'acte de


paiement est un point clé de la relation avec le client final, aussi
l'innovation en la matière est-elle, en général, accueillie favorablement
par les commerçants.
S'appuyant sur les modes de paiement installés, l'objectif des
nouveaux entrants est de fournir au commerçant un service porteur
d'une valeur ajoutée suffisante pour que celui-ci accepte de la payer,
en plus de la commission usuelle de recouvrement.

c
~
0
1.1 Les services aux e-commerçants
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~
1 Mieux vendre et sécuriser 1

0
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@ Le développement du e-commerce a mis en évidence que le besoin
......
~
en
·;:: des commerçants vis-à-vis du paiement ne se limitait pas au seul
>
a. traitement technique de la transaction (acquisition/acceptation),
0
u
mais s'étendait aux questions - centrales pour un e-marchand - du
taux de transformation du visiteur en client et de réduction du taux de
fraude. Ces deux préoccupations étant moins aiguës dans le monde
physique traditionnel en raison de la rencontre en face-à -face de
l'acheteur et du vendeur, les banques se sont trouvées dépourvues
pour y répondre, ouvrant ainsi le champ à des acteurs plus petits,
plus agiles avec, souvent, une expérience du Web.
Se fondant sur des interfaces simples et conviviales ainsi que sur
un traitement pointu de la donnée de paiement, ils proposent des
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) l 23

solutions de nature à permettre une réduction du taux d'abandon de


panier, par exemple en permettant au commerçant de proposer très
rapidement à son client de payer avec un autre moyen de paiement
lorsque le sien s'avère périmé (ou son plafond carte dépassé).
Quant à la lutte contre la fraude, le développement des analyses
faisant appel au Big Data et aux techniques de machine learning
offre des perspectives encourageantes, facilitant le repérage des
comportements suspects de manière contextuelle et en temps réel.

Comme souvent, les États-Unis ont été précurseurs avec


l'émergence de sociétés qui ont très vite grossi, telle Stripe (les deux
co-fondateurs de PayPal y sont investisseurs) dont la valorisation
dépasse 5 milliards $, ou bien Klarna, d'origine suédoise mais dont le
développement s'est très fortement accéléré grâce à son installation
en Amérique du Nord fin 2014. En France, plusieurs acteurs se sont
positionnés avec succès sur ce type de services à valeur ajoutée.
On peut citer en particulier trois entités dont l'activité se développe
rapidement: Dalenys (ex. Rentabiliweb}, PayPlug et SlimPay. Tous trois
ont pour objectif, au-delà du recouvrement classique par carte ou par
prélèvement, de vendre aux e-commerçants un service d'amélioration
de leur taux de transformation. Pour cela leur offre s'appuie, outre
une interface de paiement des plus conviviales, sur une batterie très
c complète d'indicateurs d'activité ainsi que sur des outils d'analyse du
0
~
"O
comportement de paiement des clients due-commerçant.
•(IJ

CO
a::
\0
~
0
N
1 Pouvoir accepter le plus de moyens de paiement possibles 1

@
......
~
en
·;::
Autre grain de sable pour la fluidité du commerce en ligne, la
>
a.
0
complexité technique pour un marchand à intégrer de nouveaux
u
moyens de paiement en plus des instruments les plus communément
utilisés (la carte, PayPal, le virement ou le prélèvement), le privant
ainsi d'un certain nombre d'opportunités commerciales. Des FinTechs
ont mis au point des offres lui permettant d'étendre son champ
d'acceptation. Deux exemples parmi d'autres :

0 Comment reproduire sur Internet le paiement en espèces?


Le système est simple : lors d'un achat en ligne, le panier du site
va être transformé en un code-barres, qui va être envoyé par mail
24 1 LA RÉVOLUT ION F1N T ECH

ou par sms à l'acheteur. Il suffira à ce dernier de présenter ce code-


barres à un commerce de proximité partenaire du système à qui
il pourra régler en liquide le montant de son achat sur le Web. Le
e-commerçant, alors informé que le règlement a eu lieu, pourra
expédier sa commande ou délivrer le service.
Cette fonctionnalité connaît un succès notable dans les pays où les
espèces ont le plus la faveur des consommateurs, comme les États-
Unis (avec PayNearMe qui a recours aux réseaux des enseignes
7-Eleven et Family Dollar) ou l'Allemagne avec la start-up Barzahlen ;
en France, pays pourtant moins friand des paiements en espèces,
plusieurs acteurs occupent ce créneau, comme TSI ou CashWay, en
partenariat avec le réseau des buralistes.

8 Rendre possible le paiement en ligne avec des moyens de


paiement privatifs, tels que les cartes prépayées, les bons d'achat
ou les cartes de crédit, sans contraindre le e-marchand à adapter son
back-office : voilà un créneau occupé par plusieurs jeunes pousses en
Europe, dont la start-up française Limonetik. Cette dernière propose
aux émetteurs de ces instruments de paiement, insuffisamment
répandus pour rendre rentable leur acceptation directe sur les grands
sites marchands, de transformer, vu du commerçant, toute opération
effectuée avec leur moyen de paiement privatif en un paiement
c
0 « carte bancaire ». Le commerçant peut ainsi accroître ses ventes
~
"O
•(IJ sans avoir à effectuer de développements coûteux : tous les sites de
CO
a:: e-commerce acceptant évidemment le paiement par carte, Limonetik
l.D
~
0
N
se charge de l'ingénierie correspondante, au bénéfice de l'émetteur
@ du moyen de paiement privatif.
......
~
en
·;::
>
a.
u
0 1.2 Le commerce de proximité

Il n'échappe pas à cette logique de simplification et d'enrichissement


du service existant. En effet, concurrencés par le e-commerce, les
commerçants du monde physique s'efforcent d'améliorer eux aussi
leur service pour mieux attirer le chaland . Le paiement est bien
souvent au cœur de cette préoccupation : sa simplicité et sa fluidité
sont devenues indispensables à la satisfaction client, avec de plus en
plus souvent un couplage avec la fidélisation (recueil de données,
génération de programmes de récompenses ... ).
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) l 25

1 Le mPOS, une innovation de rupture 1

Un très bon exemple de ce mouvement est ce que l'on appelle le


mPOS. Il s'agit de l'utilisation du mobile (téléphone ou tablette)
comme terminal de paiement acceptant les règlements par cartes.
Au mobile est couplé un lecteur de cartes (parfois appelé« dongle » },
capable de simplement lire une piste magnétique - dans les pays où
les cartes bancaires ne sont pas« à puce » - ou, là où la carte à puce
est généralisée (cas de l'Europe notamment), de lire la puce et de
prévoir la frappe du code confidentiel.
À l'origine, cette innovation avait pour but de permettre à de très
petits« commerçants » (marchands ambulants, services à domicile,
professions libérales ... }, dont le nombre de transactions autres qu'en
espèces est trop faible pour rentabiliser un Terminal de Paiement
Électronique {TPE}, de pouvoir accepter des paiements par carte via
leur smartphone. Le marché en Europe est estimé à 15 à 20 millions
de « points de vente », dont environ 1,5 million en France. Mais les
premières initiatives ont montré que certains types de moyens et
grands commerces pouvaient aussi être intéressés, notamment pour
mieux répartir les points d'encaissement sur l'ensemble de la surface
commerciale, aussi bien que pour en équiper les livreurs et autres
vendeurs itinérants.
c
0
~
"O
•(IJ
Les acteurs de ce marché sont très divers :
CO
a:: • Plusieurs grosses start-ups occupent le devant de la scène : la
\0
~
0 célèbre Square américaine, et ses émules européennes, le suédois
N
@ iZettle, les allemands Payleven et SumUp ou le britannique mPowa.
......
~
en
·;:: • Une myriade de petites start-ups germent aussi tous les mois
>
a.
0
dans le monde entier, avec un effet d'animation du marché sur un
u
périmètre d'action bien souvent local. En France, plusieurs jeunes
pousses se sont récemment lancées, notamment Smile and Pay,
EasyTransac ou snapElite.
• Les GAFA 1, avec par exemple Google et PayPal {PayPal Here).

1. Acronyme de Google, Apple, Facebook et Amazon.


26 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

• Les industriels, comme lngenico, très présent avec Roam Data,


dont les dongles équipent la plupart des solutions disponibles sur
le marché, ou encore de très gros acteurs du recouvrement sur
Internet comme WorldPay, Adyen ou Monitise qui ont aussi lancé
des offres.
• Les schemes cartes sont également à la manœuvre (ainsi Visa et
Amex sont actionnaires de Square, MasterCard de iZettle).
• Les banques se sont évidemment aussi placées sur ce marché, ne
serait-ce que pour ne pas se laisser distancer par les acteurs les
plus innovants : ainsi en France, peut-on citer le Groupe BPCE avec
Dilizy ou BNP Paribas avec Mobo.

1.3 Initiatives multicanales

1 Lintelligence dans le nuage 1

De même, d'autres initiatives sont en train d'émerger, consistant


à accroître la gamme de services accessibles aux commerçants
physiques en déportant ces services dans le c/oud. Ainsi dépouillé de
ses fonctionnalités, le TPE n'est plus qu'un canal de communication
et peut même être remplacé par une tablette, voire le système de
c caisse lui-même. Outre les constructeurs de terminaux (lngenico,
0
~
"O
Verifone), des start-ups commencent à se positionner sur ces
•(IJ

CO nouveaux schémas d' interaction.


a::
\0
~
Ainsi, en France, la jeune pousse OpSiSe propose une plate-forme
0
N
@
de médiation permettant aux commerçants, notamment le petit
...... commerce, de bénéficier, en complément de l'offre de service de
~
en
·;::
> paiement et dans une logique de multicanal, de fonctionnalités
a.
0
u facilitant l'acte d'achat (programmes de fidélité, applications métier,
services complémentaires pour leurs clients ... ).

1 Payer « éthique » 1

On conclura cette revue de l'amélioration et de la diversification


des offres liées au paiement à destination du commerce avec
l'exploitation de la faveur grandissante dont bénéficient les initiatives
éthiques. Le principe est de mettre à profit l'acte de paiement
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN O BNI ) l 27

pour effectuer « dans le mouvement » un don à une association


caritative ou un geste écologique, procurant ainsi au commerçant un
bénéfice d' image auprès de sa clientèle, moyen complémentaire de
fidélisation. Quelques start-ups sont intéressantes à cet égard sur le
marché français : MicroDon, ZeGive, Heoh, ou bien encore PayGreen.

B/ Les offres de paiement tournées vers le client final

Trois grandes familles d'innovations dans cette catégorie :


• Les systèmes de« wallets ».
• Les réseaux de transferts de fonds.
• Les monnaies virtuelles.

1.4 Les systèmes de wallets

1 Pourquoi et comment le wallet? 1

À l'origine du wallet, il y a la volonté de mieux sécuriser l' usage de la


carte bancaire dans la vente à distance en général et le f-commerce
en particulier, car cet usage soulève des difficultés liées aux
cinématiques d'utilisation :
c
0 - ergonomie peu ou mal adaptée aux canaux à distance, le porteur
~
"O
•(IJ de la carte devant saisir manuellement les 16 chiffres de sa carte,
CO
a:: la date de validité et le cryptogramme visuel,
\0
~
0
N
- réticence des porteurs à communiquer leurs données de carte en
@ raison des risques de détournement et d' utilisation frauduleuse de
......
~
en
·;:: ces données.
>
a.
0
u
Le wallet se présente comme une solution alternative, soit un
portefeuille électronique donnant la possibilité à un utilisateur de
confier à un tiers, jugé de confiance, des données de paiement et des
données personnelles, stockées en vue d'effectuer ultérieurement
des ordres de paiement.
Ces solutions permettent alors de réaliser une opération de paiement
par la saisie d'identifiants, comme par exemple le numéro de
téléphone mobile ou l'e-mail de l'utilisateur, sans que ce dernier ait à
ressaisir des informations sensibles à chaque transaction.
28 1 LA RÉVOLUT ION F1N T ECH

Un wallet peut être utilisé en paiement à distance, avec un ordinateur


ou une tablette, mais la vraie cible des concepteurs de ces systèmes
est le paiement mobile car il rend possible l'usage en paiement
de proximité, couvrant ainsi potentiellement non seulement le
e-commerce, mais l'ensemble du commerce de détail.

1 Un marché diversifié, encombré et très compétitif 1

Le marché le plus visible est celui dont l'écho nous parvient depuis les
champs de bataille où s'affrontent géants technologiques (Apple Pay,
GooglePay, SamsungPay, Amazon avec son paiement « one click »),
grandes banques (ex. le système Paylib en France) et « schemes »
cartes (MasterPass, Visa Checkout). Un acteur domine, c'est PayPal
qui est, à ce jour, le seul système de wallet d'envergure mondiale,
avec une pénétration significative dans le monde du e-commerce.

Les opérateurs téléphoniques sont également très présents


dans ce domaine, en particulier dans les pays émergents ou en
développement, et tentent depuis plusieurs années de s'implanter
aussi dans les pays développés (ex. Orange Cash en France).

c
0 Dans cet univers de géants, l'on voit cependant aussi de nombreuses
~
"O
•(IJ
jeunes pousses tenter leur chance, en proposant des produits fondés
CO
a:: sur des approches de niche, avec une combinaison de paiements
\0
~
0
entre particuliers (P2P) ou entre particuliers et commerçants (P2C).
N
@ Il s'agit d'un univers très foisonnant, avec beaucoup de créations,
......
~
en mais aussi de disparitions, étant donné la complexité du modèle de
·;::
> développement qui nécessite des investissements de recrutement de
a.
0
u
clients très significatifs.
On peut citer, pour exemple, deux acteurs français qui ont fait
particulièrement parler d'eux en 2015, à l'occasion de levées de fonds
de plusieurs millions d'euros chacun : Lydia qui vise la clientèle des
jeunes, ou Payname, une jeune pousse toulousaine qui promeut un
système de paiement entre particuliers, mais aussi entre particuliers
et professionnels, pour divers types de règlements : alimenter une
cagnotte, payer un loyer ou un service à la personne, ou bien encore
un achat entre particuliers ...
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) l 29

Pour favoriser l'adoption et mieux rentabiliser le produit, les


concepteurs de wallets proposent, fréquemment et de manière
croissante, des offres de service complémentaires au paiement,
principalement dans trois domaines :
~ la gestion des coupons de marque ou d'enseigne, de carte de
fidélité ou encore de carte cadeau ;
~ le stockage de tickets de transport dématérialisés avec des
possibilités de passage de barrière en mode « Sans Contact » ou
par géolocalisation ;
~ des aides à l'achat, sous forme d'applications, pouvant être
plus ou moins intégrées au wallet, des comparateurs de prix, la
disponibilité d'un produit en magasin, l'itinéraire pour s'y rendre.

1.5 Les réseaux de transferts de fonds

1 Les alternatives à Western Union et MoneyGram 1

De très nombreuses petites sociétés se sont créées pour attaquer


ce marché, avec souvent des ambitions limitées à des « corridors »
géographiques spécifiques, pour permettre à des travailleurs
immigrés d'effectuer des transferts de fonds vers leur pays d'origine.
Leur objectif est d'éviter à leurs clients de payer les commissions
c
~
0
très élevées pratiquées par les leaders du secteur, Western Union et
"O
•(IJ

CO
MoneyGram, longtemps en position de quasi-monopole, les banques
a::
\0 traditionnelles ne s'étant jamais véritablement intéressées à cette
~
0
N activité.
@
...... Ainsi, en France, une dizaine de jeunes pousses se sont déjà fait
~
en
·;:: agréer pour ce service. Au Royaume-Uni, c'est par centaines qu'on
>
a.
u
0 les compte, la plupart avec un volume d'affaires très réduit, justifiant
une procédure d'agrément et des contraintes prudentielles allégées.
La principale raison de la mise sous statut de ces entités effectuant
du transfert de fonds - notamment international - entre particuliers
résulte des législations contre le blanchiment et le financement du
terrorisme ; en effet, l'essentiel de ces transferts sont réalisés en
espèces de bout en bout.
30 1 LA RÉVOLUT ION F1N T ECH

1 Les systèmes de bancarisation ou d'inclusion financière 1

Il est à noter que ces systèmes utilisent le plus souvent le mobile


comme support et représentent, dans nombre de pays émergents
ou en voie de développement, une véritable alternative à la
bancarisation, comme en témoignent les succès du système M -Pesa
au Kenya ou d'Orange Money dans les autres régions d'Afrique. On
voit aussi de nombreuses FinTechs, comme les Françaises Tagattitude
et LemonWay, proposer directement aux banques d'Afrique, d'Asie
ou d'Amérique du Sud des plates-formes technologiques complètes
permettant la mise en place de véritables systèmes de paiement
basés sur l'utilisation du mobile.

1 Les paiements internationaux 1

Quelques acteurs innovants de taille significative commencent


néanmoins à apparaître en Europe, comme la start-up britannique
TransferWise qui, pour réduire les frais liés au transfert de devises,
met en relation la demande et l'offre de devises de ses clients dans
un même pays, de sorte que les flux de devises ne franchissent pas
les frontières. TransferWise, qui serait valorisée à plus d'un milliard$,
revendique 700 millions€ de transactions traitées chaque mois 2 , soit
c
0
~ environ 10 % des 7 milliards mensuels de transferts d'argent réalisés
"O
•(IJ

CO
dans le monde par Western Union pour ses clients particuliers en
a::
\0 2014. La FinTech française PayTop s'est également lancée sur ce
~
0
N créneau avec une carte bancaire multidevises.
@
......
~
en
·;:: Le marché des transferts de fonds internationaux non intermédiés
>
a.
0
u
par des acteurs ou des infrastructures bancaires commence à
pénétrer également le monde de l'entreprise. Ainsi, une jeune pousse
européenne, établie à Londres et dirigée par un Français, Kantox,
avait atteint à la fin du troisième trimestre 2015 les 2 milliards $ de
transactions pour le compte de 1 600 PME basées au Royaume-Uni,
en Espagne et, dans une moindre mesure, en France. En groupant les
besoins de devises de plusieurs PME, la start-up se fait fort d'obtenir

2. Chiffres du troisième trimestre 2015.


LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉG RÉ (uN OBNI ) 1 31

sur les marchés de meilleurs taux de change que ne le pourrait un


acheteur isolé et applique des commissions environ dix fois moins
élevées que les banques.

1 Le correspondent banking 1

Enfin, les transferts de fonds entre banques connaissent eux aussi


les prémices d'innovations radicales. Le « vieux-comme-le-monde »
métier du correspondent banking, consistant en l'ouverture réciproque
de comptes de règlement entre banques de pays différents pour
pouvoir réaliser des paiements partout dans le monde, est en passe
de rencontrer lui aussi sa révolution Fin Tech. Une start-up américaine,
Ripple Labs, propose une solution appuyée sur la technologie dite
« Distributed LedgerTechnology » 3 qui permettrait de réaliser tous ces
transferts en temps réel, supprimant le risque de règlement ainsi que
les interminables et coûteux travaux administratifs de réconciliation
des comptes Nostri (ainsi appelle-t-on ces comptes réciproques).

1.6 Les systèmes de monnaies virtuelles

On a tout dit sur les monnaies virtuelles, en particulier à travers leur


avatar le plus connu, le Bitcoin, du meilleur - moyen pour le citoyen
c
~
0
de retrouver le pouvoir sur son argent, sans subir la dictature du
"O
•(IJ

CO
complexe banco - « banquecentralesque », au pire - instrument de
a::
\0 la réalisation des turpitudes du Dark Web.
~
0
N
@
......
~
en
Au-delà de l'idolâtrie et des anathèmes, de quoi s'agit-il
·;::
>
a.
exactement ?
0
u
Pour le sujet qui nous occupe - la caractérisation des FinTechs qui
interviennent dans le monde des paiements-, l'aspect le plus pertinent
des monnaies virtuelles concerne la zone « frontière » occupée
par des start-ups dont le rôle est d'assurer la conversion entre ces
monnaies et les devises classiques, service parfois accompagné de la

3. La modalité la plus connue de DLT est la blockchain, un des fondements du


bitcoin : voir ci-après le Chapitre 2.
32 1 LA RÉVO LU TI ON F1N T EC H

fourniture d'un wallet. En effet, lorsqu'un commerçant, par exemple,


décide d'accepter des règlements en bitcoins, il souhaite en général
satisfaire certains de ses clients qui ont de l'appétit pour utiliser cette
monnaie, sans être lui-même forcément utilisateur de bitcoins. Il
a donc besoin d'un service de conversion dans sa monnaie usuelle
(euro, dollar, livre ... } des bitcoins reçus. Nombre d'acteurs, appelés
places d'échange, se sont positionnés sur ce créneau (les plus connus
sont Coinbase ou BitPay}, certains atteignant une notoriété dont ils
se seraient sans doute volontiers passés (cf. les déconvenues, voire
déconfitures, des places d'échange MtGox, Flexcoin ou Bitstamp}. En
France, la société Paymium s'est installée sur ce marché, se faisant
notamment connaître grâce à un partenariat avec lngenico pour
faciliter le paiement en bitcoins dans le commerce physique.

Nous n'entrerons pas davantage dans le détail, très technique, du


fonctionnement des systèmes de monnaie virtuelle. Rappelons
simplement que, malgré leurs nombreux avantages supposés mis en
avant par leurs concepteurs, ces systèmes ont du mal à trouver leur
marché, en dehors peut-être du bitcoin lui-même, mais l'odeur de
soufre qui l'accompagne n'aide pas à le populariser.

c 1 Un avenir au-delà du bitcoin ? 1


0
~
"O
•(IJ

CO Les systèmes de monnaie virtuelle souffrent en effet de plusieurs


a::
\0
~
défauts intrinsèques :
0
N
@ • L'anonymat, inacceptable dans un monde où la lutte contre le
......
~
en blanchiment d'argent sale et le combat contre le financement du
·;::
> terrorisme sont deux des principales mamelles de la régulation.
a.
0
u
À cet égard, un projet français dénommé iîrac a pour ambition
d'utiliser les technologies du Big Data pour « traquer » les
opérations réalisées notamment en bitcoins sur le Dark Web. Ce
projet, porté par le groupe Thales, réunit des industriels et des
start-ups (notamment Paymium, précitée).
• L'absence d'avantages significatifs visibles pour le client final :
quel intérêt d'avoir une carte donnant accès à un compte en
bitcoins plutôt qu'en euros ou en dollars, alors même que très
peu de commerçants l'acceptent ? Pourquoi faire un transfert
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉG RÉ (uN OBNI ) 1 33

international en bitcoins alors que, on l'a vu, des FinTechs très


performantes réussissent désormais à offrir ce type de service à
des prix très compétitifs?
• La lourdeur du système de validation, basé sur le travail de
« mineurs » armés de batteries d'ordinateurs dont la puissance
de calcul doit sans cesse s'accroître, à mesure de l'écoulement
du temps, pour être capable de valider les transactions en cours,
rendant de plus en plus problématique le fonctionnement en
temps réel, pourtant un des principaux atouts du système, menacé
de paralysie dès lors que le volume des transactions s'accroîtrait
significativement.

Nous avons cependant déjà vu ci-dessus (correspondent banking)


et nous le verrons plus en détail plus loin 4 que, si le bitcoin et ses
émules connaissent des fortunes diverses en tant que« devises »,en
revanche les systèmes et principes techniques qui sont à la base de
leur fonctionnement, groupés sous le terme de « Distributed Ledger
Technology » (ou b/ockchain), connaissent un succès grandissant.

Cl Les offres de gestion des comptes

Deux principaux univers de services innovants se développent autour


c
0 de la gestion du compte courant, pivot de la relation bancaire et point
~
"O
•(IJ
de passage de tous les flux :
CO
a:: ~ remplacer la banque : banque /ow cost ou « supermarché » de
\0
~
0 la banque,
N
@
......
~ se greffer sur l'accès aux comptes .
~
en
·;::
>
a.
u
0 1.7 Remplacer la banque : /ow cost ou supermarché
de la banque

Dans les deux cas, l'objectif est de se substituer à la banque, mais


avec des approches distinctes :

4. Voir Chapitre 2, Il, 3.1.3.


34 1 LA RÉVOLUT ION F1N T ECH

0 Offre d'un service de tenue de compte très « basique »


permettant de gérer son compte au plus juste, souvent par
l'intermédiaire d'une réserve prépayée. Le terme de compte « low
cost » est parfois employé. L'essentiel de la gestion de ce type de
compte se fait par l'intermédiaire d'un téléphone mobile.

Un modèle assez pur de ce service est l'offre de la Financière des


Paiements Électroniques, avec son compte Nickel que l'on ouvre dans
le réseau des bureaux de tabac {dont la Confédération professionnelle
est d'ailleurs actionnaire de la société). Ce produit, aujourd'hui
essentiellement diffusé en France, se veut accessible à tous, étant
sans conditions de revenus, de dépôt ou de patrimoine.
Il s'agit d'un compte prépayé, n'autorisant ni épargne, ni crédit
{découvert ou autre). Les modalités d'ouverture sont très simplifiées:
1111- Le client achète un coffret « Nickel » dans lequel il trouve une
MasterCard Nickel et un mode d'emploi, grâce auquel il effectue
les formalités d'ouverture de compte via la Borne Nickel {scan de
la pièce d'identité, extraction des données, ajout par le client de
ses coordonnées, signature du contrat).
1111- Après avoir vérifié les données, le buraliste édite un RIB et active
la carte de paiement utilisable partout.

c
1111- L'alimentation du compte peut s'effectuer dans tous les bureaux
0
~
"O
de tabac membres du réseau.
•(IJ

CO
a::
\0 Les principales clientèles visées sont les jeunes ainsi que les clients
~
0
N exclus, volontairement ou non, du système bancaire. Les promoteurs
@
......
~
de ce service ont annoncé avoir atteint les 200 000 comptes ouverts
en
·;::
>
à fin 2015.
a.
0
u
Toujours en France, citons le compte Saon lancé par Axa Banque,
laquelle n'est pas exactement une FinTech mais dont le projet Soon
a cependant été labellisé par le Pôle Finance Innovation 5 . Soon
s'inspire de la même philosophie, mais il est adossé à un « vrai »
compte bancaire avec une gamme de services annexes à la tenue
de compte un peu plus étendue. L'offre se présente en effet comme

S. Voir Chapitre 2, Il, 3.3.


LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) 1 35

un bouquet de services innovants, accessibles via une application


mobile et adossés à un compte courant Axa Banque. Pour accéder
à cette nouvelle gamme de services, l'ouverture de compte peut se
faire entièrement sur mobile, sans papier, grâce à l'envoi des pièces
justificatives sous forme de photos.
Le précurseur de ce modèle est la start-up américaine Simple,
créée en 2009, dans un contexte de défiance à l'égard des banques
traditionnelles, dans la foulée de la crise des subprime. Lancée
commercialement en 2012, elle a été rachetée par la banque
espagnole BBVA début 2014.

Dans la même veine, on trouve l'opérateur allemand Number26, qui


annonçait avoir déjà ouvert plus de 50 000 comptes en Allemagne et
en Autriche à fin octobre 2015.

8 La seconde modalité vise, elle, à fournir une plate-forme de


services bancaires aussi complète que possible.

Il ne s'agit plus, pour le client, d'ouvrir simplement un compte, mais


d'accéder à une place de marché de services innovants tels que
du financement participatif, du prêt de pair à pair, des transferts,
une application de paiement. Le compte courant peut, selon les
c opérateurs, être géré sur la plate-forme ou demeurer dans une
0
~ banque classique, qui se trouverait, à la limite, réduite à un rôle passif
"O
•(IJ

CO
a::
d'enregistrement de flux qu'elle ne gérerait plus.
\0
~ Un des leaders européens est la jeune pousse allemande Fidor, qui
0
N
@
a démarré son activité au Royaume-Uni fin 2015. Créée en 2009, la
......
~ start-up munichoise est maintenant une banque indépendante qui
en
·;::
>
a.
compte plus de 100 000 clients et réalise 2,5 millions € de profits.
0
u Elle propose toute une gamme de services : financement participatif,
prêts de pair à pair, transferts, multidevise.

1.8 Se greffer sur la banque

La nouvelle directive sur les services de paiement, dite DSP2 6,


récemment votée par le Parlement européen, crée un nouveau type

6. Voir ci-après : Il, 2.1.2.


36 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

d'acteurs qui auront le droit, sous certaines conditions, d'accéder


aux données des comptes. Ces opérateurs, regroupés sous le terme
générique de Third Party Processors (ou TPP's), sont de deux types :
• Des« prestataires de services d'initiation de paiement » : la DSP2
prévoit la possibilité pour le client d'une banque d'ouvrir à ces
prestataires l'accès à son compte bancaire en ligne afin d'utiliser
des logiciels, dispositifs ou applications de paiement fournies
par ces tierces parties, lesquelles pourront aussi exécuter les
paiements autorisés. Ainsi, un client qui ne souhaite pas payer avec
une carte pourra autoriser des entités comme l'allemand Sofort
ou le néerlandais iDeal à réaliser des paiements par virement
directement à partir de son compte bancaire.
• Des « prestataires de services d'information sur les comptes »,
autrement dénommés PFM (de l'anglais Persona/ Finance
Manager). On les appelle également des « agrégateurs », leur
activité consistant au premier chef à proposer aux clients multi-
bancarisés d'agréger l'ensemble de leurs comptes ouverts dans
leurs différentes banques pour leur fournir une vision consolidée
de leurs avoirs. À partir de cette vision globale de ses avoirs, le
client se voit offrir des services plus pointus d'assistance à la gestion
de ses finances personnelles : regroupements par typologie de
dépenses, aide à la gestion de son budget, par exemple par types
c
~
0 de dépenses, vision en temps quasi réel de l'évolution de son
"O
•(IJ
solde, etc. Cette catégorie de services a d'abord fleuri aux États-
CO
a:: Unis (la société Mint est le plus connu de ces offreurs de services),
\0
~
0
N
pays dans lequel il est fréquent, même pour des particuliers,
@
...... d'avoir plusieurs comptes (bancaires ou comptes cartes) dans
~
en
·;:: des institutions financières différentes. Dans ce sillage, de jeunes
>
a. pousses européennes développent également ce type d'offres
0
u
de services, le marché français étant bien pourvu avec, pour les
plus connus, Fiduceo (son produit s'appelle MoneyDoc), Bankin,
Linxo ou Budget lnsights. Plusieurs de ces nouveaux intervenants,
au départ ciblés sur la clientèle des particuliers, commencent à
explorer le segment des entreprises, notamment les TPE et PME,
qui n'ont souvent pas accès aux produits de cash management
sophistiqués (cash pooling) offerts par les banques à leur clientèle
de grandes entreprises. Certains se spécialisent même sur le
marché des entreprises, comme Box & Automation Solutions.
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) 1 37

La DSP2 prévoit que la banque gérant le compte ne pourra refuser


l'accès de tels fournisseurs de service tiers que « pour des raisons de
sécurité objectivement justifiées et préalablement communiquées
aux autorités de surveillance ». Les banques vont donc devoir mettre
en place des outils informatiques (que l'on appelle API - Application
Programmable Interface - d'où l'expression « APl-sation de la
banque») pour que les tiers de paiement ou les agrégateurs puissent
accéder aux informations du compte courant, de même qu' insérer
ou récupérer certaines données en provenance ou en direction des
clients.
Ces TPPs auront à solliciter un agrément spécifique requérant
notamment la mise en place d'exigences de sécurité strictes pour
l'initiation et le traitement des paiements comme pour la protection
des données financières sensibles. Ils seront ainsi tenus de garantir
une authentification renforcée.

2. Financement et épargne : l'empire du Big Data

Drainer l'épargne pour financer l'économie est la première raison


d'être de la banque. Dans ce domaine, la FinTech développe ses
services selon trois axes :
c
~
0
..,. la mise en relation directe de l'épargne et du crédit, avec le
"O
•(IJ

CO
financement participatif ;
a::
\0
~
..,. la mise au point d'offres de financement innovantes, greffées sur
0
N les techniques existantes ;
@
......
~
en
..,. le développement de nouveaux outils de captation et de gestion
·;::
>
a. de l'épargne.
0
u
38 1 LA RÉVOLUT ION F1N TE CH

Figure 3 - Financement et épargne

Acteurs Ex. de FinTechs


Type de service Promesse
dominants françaises

Baisser les coûts Prêt d'Union,


pour l'entité Unilend, Lendix,
Prêt
financée et Lending Club, Lendopolis, Prexem,
Financement et
accroître les gains Funding Circle credit.fr, Finsquare,
participatif Equity
pour le prêt eur WiSEED, Anaxago,
(crowdfunding) (l'investisseur) SmartAngels

Faciliter le finan- KissKissBankBank,


Don Kickstarter
cernent éthique Ulule

Autres financements Mieux financer


Amazon, iZettle Créancio, Finexkap
alternatifs les TPE/PME

Perfectionner et Advize, Finansemble,


Wealthfront,
démocratiser Fundshop, Marie
Captation et gestion Betterment,
la gestion de Quantier, Yomoni*,
de l'épargne Nutmeg, Palantir
portefeuille pour Scaled Risk,
Technologies
les particuliers QuantCube
* Yomoni est le lauréat du Prix RB Innovation 2015 décerné le 22 septembre 2015
(Workshop «La révolution digitale»).

2.1 Le financement participatif

1 De quoi s'agit-il ? 1
c
0
~
"O
•(IJ Ce que l'essence même de l'activité bancaire avait disjoint, l'épargne
CO
a:: et le financement - la banque ayant notamment pour objet de
\0
~
0
N
faire écran entre les deux types d'acteurs en assumant le risque de
@
......
défaillance des emprunteurs -, la FinTech les conjoint à nouveau en
~
en
·;:: mettant directement en relation les agents économiques disposant
>
a.
0 d'une épargne et ceux qui ont un besoin de financement.
u
À cette fin, des plates-formes informatiques sont élaborées dont le
principe de fonctionnement ressemble beaucoup à celui de Uber,
Airbnb ou Blablacar : mettre directement en relation une offre
et une demande, sur des marchés jusque-là intermédiés par des
professionnels.
On appelle cela le financement participatif (crowdfunding en anglais}.
Le principe est simple: il s'agit de mettre directement en rapport des
agents qui ont besoin d'argent avec d'autres agents qui sont disposés
à leur en donner, prêter ou confier.
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) 1 39

C'est une catégorie d'activités financières qui, comme l'Hydre de


l'Herne et ses nombreuses têtes ou Shiva avec ses multiples bras
- selon que l'on y voit l'horreur ou le nirvâna - , se caractérise par
la variété de ses formes : don, avec (« reward-based ») ou sans
(« donation-based ») contrepartie, prêt aux particuliers, prêt aux
entreprises, investissement direct dans des entreprises, voire l'achat
de biens immobiliers. Mais aussi par la multiplicité de ses acteurs :
en effet, hormis les deux grandes « success staries » que sont
Lending Club et Funding Circle, le monde du financement participatif
ressemble encore à une fourmilière d' initiatives, singulièrement
en Europe où l'étude co-réalisée par l'Université de Cambridge et
Ernst and Young « Moving Mainstream -The European Alternative
Finance Benchmarking Report », février 2015, y recensait plus de
250 plates-formes.

1 Un marché français actif 1

Ainsi en France, en dehors du prêt aux particuliers qui ne compte


qu'un seul représentant (Prêt d'Union), les plates-formes de crédit
aux entreprises se sont multipliées dans le sillage du dispositif
législatif de 2014 7, telles que Lendix, Unilend, Lendopolis, Lumo,
Prexem, credit.fr ou Finsquare.
c
0
~
"O
•(IJ Les acteurs de I' « equity crowdfunding » (financement en fonds
CO
a:: propres de jeunes pousses) sont aussi très nombreux dans notre
\0
~
0
N
pays, notamment Alternativa, WiSEED, Anaxago, Smart Angels,
@ Particeep, Sowefund, Raizers, 1001Pact, Origin lnvesting, ou encore
......
~
en
·;::
EOS Venture.
>
a.
0
Quant aux plates-formes de don (avec ou sans contrepartie), les
u
jeunes pousses françaises les plus connues sont KissKissBankBank
et Ulule, qui ont déjà collecté chacune plus de 40 millions € depuis
leur création (respectivement 2009 et 2010) ; la plate-forme la plus
célèbre au monde dans ce domaine, Kickstarter, vient également de
s'ouvrir à la France, en mai 2015.

7. Voir ci-après: Il, 2.1.1.


40 1 LA RÉVOLUT ION F1N T ECH

Un marché européen en croissance très rapide dominé


par la Grande-Bretagne

L'étude précitée de l'Université de Cambridge met en évidence que


le marché européen de la finance participative a crû de 144 % entre
2013 (1,2 Md€) et 2014 (2,95 Mds€), étant précisé que près de 80 %
des volumes concernent le Royaume-Uni . L'Europe continentale,
partie plus tard que la Grande-Bretagne, a cependant connu une
croissance encore plus rapide (de 137 M€ en 2012 à 620 M€ en
2014). Derrière le Royaume-Uni, on trouve la France en deuxième
position et l'Allemagne juste après, suivies par la Suède, les Pays-Bas
et l'Espagne.
Si l'on met à part la Grande-Bretagne, le modèle dominant est le crédit
consommation en peer to peer (près de 275 M€ en 2014), le« reward
based » crowdfunding ayant pour sa part drainé 120 millions €, le
crédit aux entreprises en peer to peer représentant 93 millions € et
l'investissement direct dans les entreprises 82,5 millions€.
On estime globalement qu'en Europe continentale le marché du
financement participatif a fourni l'équivalent de 385 millions € de
financements de toutes sortes à près de 10 000 start-ups ou PME
entre 2012 et 2014, dont plus de 200 millions€ pour la seule année
2014.
§ En prolongeant la tendance, on s'attend pour 2015 à un volume
~ de 1,3 milliard € pour l'Europe continentale (7 Mds€ en incluant
~ le Royaume-Uni), ce qui reste toutefois extrêmement modeste
\0
~ (largement inférieur à 1 %) comparé aux chiffres des nouvelles mises
N
@ en place de crédit bancaire sous sa forme traditionnelle .
......
~
en
·;::

! 1 Une innovation attrayante non exempte de risques 1

L'offre des FinTechs dans ce domaine se fonde sur un avantage


comparatif difficilement égalable, un accès désintermédié et immédiat
à une communauté d'investisseurs potentiels, personnes physiques
dans un premier temps, et une fois le marché plus mature, comme
on peut déjà le voir dans le monde anglo-saxon, à des investisseurs
institutionnels intéressés par une nouvelle classe d'actifs.
Néanmoins, le financement participatif est une activité risquée, tant
au plan commercial (forte concurrence étant donné le nombre très
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉG RÉ (uN OBNI ) l 41

élevé de plates-formes) qu'au plan financier (risque de défaillance


des emprunteurs). C'est pourquoi le succès d'une plate-forme de
crowdfunding repose sur deux facteurs clés :
• la capacité à réaliser des levées de fonds significatives dès le départ
(plusieurs M€} car il faut convaincre suffisamment de prêteurs de
venir placer leur argent sur ladite plate-forme : or l'on sait bien
que le coût d'acquisition (essentiellement des frais marketing)
de clients particuliers est très élevé, d'autant que le nombre de
plates-formes existantes rend les clients volontiers « zappeurs »,
conduisant à des taux de « churn »élevés;
• la robustesse de son modèle de gestion des risques qui repose sur
un système sophistiqué de scoring faisant couramment appel aux
technologies de Big Data. La solidité de ce modèle de risque est à
la confluence de trois éléments :
• la qualité de la sélection des emprunteurs, le risque de l'anti-
sélection étant toujours très présent, d'autant que les meilleurs
projets sont en général identifiés en amont par le système
bancaire;
• une qualification rigoureuse des réseaux d'apporteurs d'affaires,
dont l'intérêt est de« pousser» le plus de dossiers possible;
• la capacité à disposer d'une base statistique suffisamment
c profonde (en nombre de dossiers sur la durée) pour pouvoir
0
~
"O
bénéficier d'un modèle de risque fiable - les professionnels
•(IJ

CO estiment qu'il faut survivre au-delà de 24 mois pour en tester


a::
\0
~
la robustesse.
0
N
@
......
~
en
·;::
Encadré Quelques points de repère
>
a. chiffrés sur le marché français
0
u
Le dernier« Baromètre du crowdfunding »,publié par CompinnoV
le 12 février 2016, est très encourageant pour l'activité des
entités françaises :
- 296,8 millions € de fonds ont été collectés sur l'année 2015
contre 152 millions sur l'année 2014.
- On recense 2,3 millions de financeurs en France, soit environ
1 million de nouveaux financeurs en un an.

.../. ..
42 1 LA RÉVO LU TIO N F1NTECH

.../ ...

- Les plates-formes de prêt représentent les deux tiers de la


collecte.
- Le taux de « casse » reste faible grâce à une sélectivité élevée
des différentes plates-formes.

Une information à jour très complète et détaillée sur le


crowdfunding en France est disponible sur le site de !'Association
« Financement Participatif France (FPF) » (financeparticipative.
org) qui a « pour objectif la représentation collective, la
promotion et la défense des droits et intérêts des acteurs de
la finance participative (... ) - notamment auprès des autorités
réglementaires».

2.2 Les autres modalités de l'alternative lending

En dehors du crowdfunding, d'autres modalités de financement


échappent aux circuits bancaires. Nous n'évoquerons pas ici les
financements relevant de ce qu'il est convenu d'appeler le « shadow
banking », concernant plutôt la banque de marché, et qui constitue
c
0
~ en soi un vaste sujet dépassant le cadre de cet ouvrage. L'analyse de
"O
•(IJ

CO
cette forme de désintermédiation fait du reste l'objet de multiples
a::
\0 rapports, communications, articles et thèmes de colloques, auxquels
~
0
N le lecteur pourra utilement se reporter.
@
......
~
Nous nous focaliserons sur l'alternative Jending, tournée vers une
en
·;::
> clientèle de TPE-PME ayant un accès malaisé au crédit bancaire, qui
a.
u
0 connaît de premiers développements intéressants. Des nombreuses
initiatives dans ce domaine, nous avons extrait deux exemples
permettant de se faire une idée des motivations et du contenu de
ces offres.

1 ~affacturage mis à la portée des TPE-PME 1

Longtemps chasse gardée de filiales de banques, le factoring voit


naître une concurrence de FinTechs qui se différencient par :
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) l 43

- leur positionnement sur le segment des petites entreprises,


la fluidité et la rapidité de leurs process de décision, grâce à
l' utilisation de la technologie.

Ainsi, sur le marché français, deux start-ups, Créancio et Finexkap,


ont récemment émergé pour s'attaquer à ce segment, appuyant l'une
et l'autre leurs concours sur un fonds agréé par l'AMF.
Toujours dans le monde du factoring, on peut citer la société française
Kyriba, éditeur bien connu et bien établi de progiciels comptables
et de trésorerie, qui vient de lancer, en mode FinTech, un nouveau
produit de « reverse factoring ». Ici encore, l'avantage compétitif
mis en avant, par rapport aux semblables bancaires, est l'agilité,
synonyme de rapidité et de coûts modérés, rendue possible par la
mise à disposition des clients d'outils automatisés et conviviaux.

1 Le crédit dans le prolongement de l'acte de paiement 1

Quelques acteurs opérant dans le domaine du paiement ont annoncé


récemment des initiatives d'offres de crédit destinées à leur clientèle
de commerçants, dans un mode assez différent du crédit bancaire
habituel car:

c - l'analyse du risque de crédit résulte du traitement intelligent (cf.


0
~
"O
Techniques du Big Data) des données de paiement ainsi que de
•(IJ

CO l'observation de l'activité et du comportement du commerçant,


a::
\0
~
0
- le risque réel encouru est encore réduit d'un degré de plus car les
N
@ acteurs en question se remboursent directement sur les paiements
......
~
en
dont ils effectuent le recouvrement.
·;::
>
a.
u
0
Ce créneau intéresse des start-ups mais aussi les GAFA. Deux
exemples pour illustrer ce propos :

o Du côté des GAFA, Amazon a lancé« Amazon Lending »au Royaume


Uni en juillet 2015. Avec ce produit, Amazon vise ses propres
clients, les quelque 2 millions de petites et moyennes entreprises
qui vendent leurs produits au travers de la plate-forme Amazon
Marketplace. Ces tiers représentent plus de 40 % de ses revenus.
La firme capitalise sur la gigantesque base de données dont elle
dispose sur ses clients. En analysant l'historique des ventes des
44 1 LA RÉVO LU TI ON F1N T EC H

entreprises qui commercialisent leurs produits via Amazon et la


qualité de leur service - notée par les consommateurs-, elle cible
les PME qui l'intéressent et leur envoie une proposition de prêt.
Amazon Lending offrirait un taux de 5,9 %, plus une commission
de 1 %. Les sommes en jeu peuvent être très petites - à partir de
1000 f au Royaume-Uni, soit 1400 € - et pourront monter jusqu'à
plusieurs centaines de milliers de livres. Les crédits sont de courte
durée - de quatre à six mois - et s'apparentent donc à une facilité
de trésorerie.
Le géant américain envisage de lancer ce service dans sept autres
pays dans les prochains mois, dont la France, l'Allemagne, l'Italie
et la Chine.

o La FinTech suédoise iZettle, pionnière du mPOS en Europe, a levé


60 millions €en septembre 2015 avec l'objectif de se développer
sur le marché du crédit de trésorerie. iZettle proposera ainsi aux
commerçants, utilisant sa solution de TPE, de recevoir des avances
sur les futures ventes qu'ils réaliseront. La start-up précise que
les commerçants obtiendront une réponse sous un jour avec
des prêts à taux fixes. Pour établir le « crédit score », c'est-à-dire
l'évaluation du profil de l'emprunteur afin de déterminer le taux
qui sera appliqué, iZettle pourra se baser sur les données qu'elle
c collecte déjà auprès des commerçants qui souhaitent emprunter.
0
~
"O
•(IJ

CO
a:: 2.3 Épargne : d'Orwell à Asimov, entre Big Data
\0
~
0
et robo-advisors
N
@
......
~
en
L'irruption de la FinTech dans le monde de l'épargne résulte de la
·;::
>
a. conjonction de deux éléments de contexte :
0
u
• l'industrie de l'épargne au sens large (incluant la gestion d'actifs et
la banque privée) a souffert de la perte de la confiance des clients
à la suite de la crise financière, d'autant que cette confiance est
lente à se restaurer en raison du prolongement de l'incertitude
économique;
• des acteurs innovants ont émergé, profitant de cet environnement
morose pour proposer des alternatives, bon marché et
sophistiquées, aux offres de l'industrie traditionnelle de l'épargne,
depuis des services automatisés de gestion de l'épargne jusqu'à la
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) l 45

mise en place de plates-formes de « social trading ». L'objectif de


ces solutions, qui s'appuient notamment sur le« robo-advisoring »
et le Big Data, est d'élargir la base de clientèle et de mieux
permettre au client final de contrôler la gestion de ses économies.

Peut-être n'est-ce pas non plus complètement par hasard que ce


secteur est investi par les FinTechs, si l'on veut bien se souvenir
que les pionniers de la banque en ligne ont été, historiquement,
des start-ups offrant des services de Bourse en ligne, fréquemment
associés à la vente de produits d'épargne (Fortuneo, Boursorama ... ).

1 De nouveaux produits très innovants 1

Trois principaux types d'innovations sont à l'origine de la conception


des nouveaux produits et services offerts par ces FinTechs :
o La gestion automatisée et le conseil associé, articulés autour de
trois points forts :
• l'offre de services de conseil à forte valeur ajoutée et à bas coût
sur l'allocation de portefeuille et la gestion de l'épargne, grâce
à des analyses automatisée enrichies par l'exploitation de la
puissance du traitement des données (le Big Data);
è
0
• la conciliation d'une gestion très automatisée des portefeuilles
~
"O
•(IJ
avec la prise en compte des besoins et objectifs spécifiques de
CO
a:: chaque client;
\0
~
0
N
• la capacité à fournir, pour les comptes multiples, un détail
@
......
analytique aussi bien qu' une vision consolidée.
~
en
·;::
>-
0 Le« social trading», dans le sillage du développement des réseaux
a.
0
u sociaux et de multiples forums, permettant à des investisseurs
individuels de construire et partager des stratégies d' investissement
et d'allocation de portefeuilles avec d'autres investisseurs.
o La mise à disposition du secteur du « retail » des techniques de
« trading algorithmique » rendant possible :
• l'utilisation de ces techniques pointues par des investisseurs qui
ont un bagage technique et des outils limités, mais aussi
• l'accès à des investisseurs sophistiqués au partage des
algorithmes de trading avec d'autres.
46 1 LA RÉVOLUT ION F1N TE CH

1 Un marché encore très anglo-saxon 1

Ce phénomène qui touche aujourd'hui principalement les marchés


anglo-saxons {Wealthfront, Betterment {cf. Encadré), Persona! Capital
aux États-Unis ou Nutmeg au Royaume-Uni) est en train de gagner
l'Europe continentale.
Le « robo-advisoring » est au cœur de ces nouvelles offres.
Ce service repose sur un algorithme propriétaire de sélection
d'instruments financiers qui propose d'optimiser l'allocation d'actifs
en fonction de la situation particulière du client, de son aversion au
risque, de ses objectifs financiers et de son horizon d' investissement.
Ces modèles orientés grand public sont simples d'utilisation,
transparents, aisément personnalisables et bon marché.
Ainsi, les actifs gérés par les robo-advisors sont en très forte
croissance, bien qu'ils ne représentent encore qu'à peine quelques
dizaines de milliards de dollars.

En France, l'offre commence à se structurer avec l'émergence de


jeunes pousses dont les principales sont caractérisées dans le tableau
ci-dessous, publié par le quotidien Les Échos.

Figure 4 - Cinq exemples de FinTechs patrimoniales


c
0 Véhicules
~ Nombre
"O
•(IJ
Nom d'inves-
Autorité Services d'utilisateurs
CO !date Statut tissement Coûts Partenaires
a:: de contrôle proposés à fin juin
\0 de création) !placement
~ 2015
0 minimum
N
@ Advize (2012) CIF* AMF Allocation 3000 Assurance vie Frais de gestion Morningstar,
......
~
en et conseillée, multisupport annuelsde Generali
·;::
> courtier souscription (500€) 0,6%sur
a.
0 et suivi le fonds euros
u
et de 0,85 %
sur les UC**

Finansemble Courtier ACPR Optimisation 3800 Solutions de Gratuit Une soixantaine


(2012) patrimoniale placements de conseillers
et fiscale (500€) patrimoniaux

.. ./...
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN O BNI ) l 47

.../ ...
Fundshop CIF* AMF Réaména- 2500 Assurance vie 9€ par mois Boursorama,
(2013) gement de multisupport Fortuneo,
portefeuilles (celui du ING Direct,
d'assurance vie contrat) Assurance vie.
corn, Société
Générale, BNP
Paribas, Crédit
Agricole, Caisse
d'Épargne

Marie CIF* AMF Optimisation NC ETF (1 OOOC, 5,90€ Interactive


Quantier d'allocation 5 000€ par mois Brokers
(2011, d'actifs prévus pour +5%de
lancement l'assurance commission sur
commercial vie) performance
2015)

Yomoni Société AMF Gestion Trop récent, ETF (1000€) Fraisde Suravenir
(2014) de sous mandat lancement gestion annuels (Crédit
gestion en ligne fin août 2015 de 1,6% Mutuel Arkéa),
(dont 0,7 % Financière de
de mandat) !'Échiquier,
Cryptolog
(signature en
ligne)

*Conseil en investissement fi nancier **Unités de compte


Source: Les Échos

c
0
Par ailleurs, la désintermédiation de la distribution de produits
~
"O
•(IJ
financiers se traduit également par la faveur dont bénéficient des
CO
a:: services en ligne mettant en relation des clients fortunés avec des
\0
~ conseillers financiers indépendants, tel que findawealthmanager.
0
N
@
corn. Cette plate-forme met en contact les investisseurs et
......
~
en
les gestionnaires de patrimoine, en fonction de leurs besoins
·;::
>
a. et préférences. L'algorithme établit une présélection de trois
0
u gestionnaires qui contactent ensuite le prospect concerné pour
établir un bilan patrimonial gratuit et sans engagement, permettant
au futur client de choisir son conseiller en connaissance de cause.
48 1 LA RÉVOLUT ION F1N T ECH

Encadré - Betterment, une FinTech qui commence à compter

- La palette des différents services proposés par Betterment :


rééquilibrage automatique du portefeuille, réinvestissement
des dividendes, services d'optimisation fiscale.
- La société compte plus de 100 000 clients aux États-Unis et
gère 2,9 milliards $ d'actifs, comparés à 1,1 milliard $ à fin
2013. Son client type est âgé en moyenne de 36 ans, avec
des montants atteignant généralement quelques dizaines de
milliers de dollars.
- Techniquement, les placements sont effectués à l'aide de fonds
indiciels (ETFs}. Une approche qui lui permet de maintenir
ses coûts très bas, avec des frais de gestion situés entre 0,15
et 0,35 %. La société dit ne pas craindre l'arrivée d'offres à
des tarifs encore plus faibles, estimant que son avantage
concurrentiel tient moins à la modicité de ses prix qu'à la
qualité de sa technologie ainsi qu'à l'ergonomie de son usage.
- Si Betterment s'adresse aux clients individuels, son offre
intéresse aussi des conseillers financiers aux États-Unis : « Ils
ont tout avantage à se concentrer sur des questions comme la
planification immobilière, celle des retraites ou le financement
c
0 des études. L'allocation d'actifs n'a jamais été le point fort des
~
"O
•(IJ conseillers financiers. Souvent, ceux-ci ne nous considèrent
CO
a:: pas comme des concurrents», observe le CEO de l'entreprise.
\0
~
0
N
@
......
~
en
·;:: 1 Lapport du trading algorithmique 1
>
a.
0
u
Disons également un mot, pour terminer, des nouvelles machines
intelligentes et très rapides qui émergent dans le domaine des
marchés de capitaux, même s'il s'agit d' un secteur dans lequel la
tradition d'innovation est si ancienne et consubstantielle au quotidien
du métier que le concept de Fin Tech dans son sens récent y est moins
opérant que dans la banque de détail, pour laquelle l'innovation est
une véritable révolution.
Nous nous y arrêtons néanmoins un instant car ces machines ont
évidemment une influence sur la gestion de l'épargne, puisque
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) l 49

nombre des instruments sous-jacents (notamment les valeurs


mobilières} sont échangés sur les marchés de capitaux.

Ces machines ont pour objet de perfectionner le trading


algorithmique, allant ainsi au-delà du trading haute fréquence,
décrié, qui a montré ses limites. Pour cela, elles tirent notamment
parti des progrès technologiques dans deux domaines :
..,.. le Big Data, permettant, grâce à un accès aux données en
temps réel, de considérablement affiner les prévisions sur les
mouvements de marché,
..,.. l'intelligence artificielle et le « machine learning », qui confèrent
aux modèles des qualités d'auto correction et d'amélioration dans
le temps grâce à l'expérience, permettant d'affiner les stratégies
de trading en minimisant l'interaction humaine.

Comme pour l'épargne, ce sont des FinTechs américaines qui dominent


ce marché, l'une des plus connues étant Palantir Technologies dans
le domaine du Big Data. En France, on peut citer Scaled Risk ou
QuantCube Technology.

Il. . .. NON INTÉGRÉ


c
0
~
"O
•(IJ La FinTech a réussi à s'insinuer dans la plupart des métiers de la
CO
a:: banque traditionnelle. Elle n'en reste pas moins souvent considérée
\0
~
0 comme une intruse, se développant à un rythme bien supérieur à
N
@ celui auquel ces métiers étaient accoutumés, conduisant les acteurs
......
~
en
·;::
historiques à se trouver débordés :
>
a.
u
0 les banques qui mettent du temps à s'intéresser au sujet,
- les régulateurs, engagés dans une course-poursuite derrière un
phénomène très mouvant et imprévisible.

1. Encore largement en dehors du périmètre


d'influence des banques européennes

Plutôt négligée par le monde bancaire traditionnel qui a commencé


par y voir davantage un importun insecte venant agacer son
50 1 LA RÉVOL U TIO N F1NTECH

éléphantesque repos qu'un challenger, encore moins un partenaire,


ni même un rival, la FinTech s'est du coup largement développée en
dehors du périmètre d'influence des banques, et singulièrement des
banques européennes.
Un tour d'horizon des investissements dans les FinTechs est riche
d'enseignements à cet égard .

1.1 Poussée par un fort vent d'Ouest.. .

D'après un rapport du cabinet Accenture publié en 2015 8, les


investissements mondiaux dans la FinTech ont triplé entre 2013
et 2014, passant de 4,05 à 12,2 milliards$.
Si les investissements en Europe enregistrent la croissance la plus
forte (cf. Figure 5), il reste que les États-Unis se taillent la part du lion
avec plus de 80 % des volumes.

Figure 5 - Global FinTech Financing Activity

14 000 800

12 000 700

600
10000
~ (1)
-(/).
500 E
.....,
Vl 8 000 :::J
è c ë5
0
(1) 400 >
~ E
....., 6 000 ro
"O (1)
Vl
•(IJ (1) 300 0
CO
a:: c> 4000
\0
~
200
0
N 2 000
@ 100
......
~
en 0 0
·;::
>- 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
a.
0
u
• United States • Europe • Asia-Pacific Others

- Global Deal Volume Source : Accenture an d CB lnsights

Si l'on observe le seul marché européen, la domination du monde


anglo-saxon demeure, puisque le Royaume-Uni et l' Irlande
représentent à eux seuls 42 % des investissements européens, avec

8. « Accenture: The Future of Fintech and Banking », 2015.


LA FJN TEcH, OBJET B A N CA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN O BNI ) 1 51

le taux de croissance le plus élevé des régions européennes (cf.


Figure 6).
Dans le reste de l' Europe, les régions ou pays qui ont connu les
niveaux d'investissements les plus élevés en 2014 sont les pays
nordiques (345 M$), les Pays-Bas (306 M$) et l'Allemagne (82 M$).
La France arrive en 5e position, derrière la Russie, avec 21 millions $
investis dans les FinTechs.

Figure 6 - Top 5 European Ragions


for FinTech lnvestment -Activity, 2014

Bubble : Total Deal Volume

<:1"
800
..-t
0
N
70
UK & lreland
~ 600
'(/).

Vl 500
......
c
(J) 400
E
...... • Netherlands • Nordics
Vl
(J)
300
>
c 200
Russia e

CU
...... Germany
100
~
0
0 10 20 30 40 50 60

Total Deal Volume 2014

c Source : Accenture and CB lnsights


0
~
"O
•(IJ

CO
a:: La présence des« licornes», ces start-ups dont la valorisation dépasse
\0
~
0
le milliard $, sur les différents territoires reflète bien les hiérarchies
N
@ identifiées ci-dessus. Le site CB lnsights, qui suit les investissements
......
~
en
réalisés dans la Tech, a identifié, en septembre 2015, seize FinTechs
·;::
>
a. répondant au plan mondial à cette qualification :
0
u
- cinq seulement sont européennes,
- sur ces cinq : trois Britanniques (Powa, TransferWise et Funding
Circle), une Suédoise (Klarna) et une Néerlandaise (Adyen).

L'écrasante présence américaine dans la FinTech suscite de vives


réactions, tel ce rapport « FinTech 2010 : reprendre l' initiative »,
publié en France fin octobre 2015, conjointement par Croissance
Plus et PME Finance, avec le soutien et la collaboration du cabinet
d'avocats Kramer Levin.
52 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

Cette initiative appelle les pouvoirs publics européens à réagir pour


favoriser les FinTechs européennes et éviter ainsi de risquer de perdre
la maîtrise d'activités essentielles au développement économique.
La menace de domination nord-américaine dans ce secteur n'est
en effet pas théorique. La bataille autour du paiement mobile est
emblématique de la pression qui s'exerce sur les acteurs européens,
mettant en évidence le désavantage concurrentiel qui est en train de
se créer (cf. Encad ré).

Encadré - Paiement mobile : l'Europe à la traîne

Après Apple en septembre 2014 avec Apple Pay, l'année 2015 a vu


Samsung annoncer le lancement de SamsungPay et Google celui
d'AndroidPay. Autre géant du paiement, Alipay, le wallet chinois
(qui revendique plus d'un milliard de comptes, presque cinq
fois plus que PayPal) du groupe Alibaba, est en train de réussir à
convaincre les e-com merça nts américains et européens d'accepter
les paiements des internautes chinois. Pourquoi diable un tel
intérêt d'acteurs technologiques majeurs pour aller convertir un
téléphone en moyen de paiement, domaine très concurrentiel,
peu margé, et dont l'acclimatation est souvent longue (en France,
il a fallu 30 ans entre l'apparition des premières cartes bleues, en
c 1967, et le moment où la carte bancaire est devenue le moyen
0
~
"O
de paiement dominant) ? Parce que derrière le paiement mobile,
•(IJ

CO
a::
il y a le Graal du portefeuille mobile (digital wallet en anglais),
\0
~
c'est-à-dire un objet capable de contenir d'autres objets, tel le
0
N
beau portefeuille en cuir reçu en cadeau pour Noël permettant
@
...... de stocker documents d'identité, billets de banque, cartes de
~
en
·;::
> paiement, de crédit et de fidélité, se muant en un smartphone
a.
0
u capable de remplir les mêmes fonctions. Et bien plus encore :
en effet par rapport à son avatar en cuir, objet passif, la version
digitale du portefeu ille est transformée par la technologie en
objet actif, et même interactif, vecteur puissant de services
nouveaux (notamment autour de la fidélité et de la connaissance
client) sur ce que les consultants appellent la chaîne de valeur de
l'acte d'achat. Le terrain concurrentiel en est d'ailleurs bouleversé,
le pouvoir appartenant désormais aux acteurs capables de faire

.. ./. ..
LA FJN TEcH, OBJET B A N CA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN O BNI ) 1 53

.../ ...

fonctionner harmonieusement l'ensemble des services d' un


portefeuille digital. Cette nécessité d' une approche holistique
met les banques, encore peu habituées à travailler avec des
acteurs innovants, particulièrement des start-up, sous forte
pression. D'autant moins que l'Europe est à la traîne : comme le
furet de la célèbre comptine enfantine, on a beau en entendre
parler partout (presse, colloques, séminaires ... ), le digital wallet y
reste introuvable. Des produits sont bien en cours de lancement,
mais en ordre dispersé, ne réussissant même pas la plupart du
temps à fédérer ne serait-ce que toutes les banques au sein
d' un même pays. A fortiori, aucune initiative paneuropéenne
significative n'a encore vu le jour. Ce retard est inquiétant, car
il ouvre le champ à une colonisation de l'Europe du paiement
digital et de ses prolongements par les majors technologiques
nord-américaines et asiatiques. Il est urgent que les acteurs
européens de la chaîne de valeur de l'acte d'achat (banques,
commerçants, industriels, start-ups de la FinTech) mettent en
place ensemble les conditions d'une résistance à ce mouvement.
Face à ce défi, leurs intérêts sont- ce n'est pas si fréquent- alignés
et il n'y a donc plus de temps à perdre : on l'a vu, l'acclimatation
c de nouveaux usages de paiement est longue et c'est aujourd'hui
0
~
"O
que les bonnes places doivent s'acheter. Une tentative de même
•(IJ

CO essence a déjà eu lieu voici quelques années : il s'agissait, avec


a::
\0
~
le projet Monnet, de travailler à la création d'un système de
0
N cartes bancaires paneuropéen, pour faire pièce au duopole Visa/
@
......
~
MasterCard. Le projet avait alors été tué dans l'œuf en raison de
en
·;::
> l'opposition de la Commission européenne, considérant qu'un
a.
u
0
tel système serait un obstacle à la concurrence. Espérons que,
si une initiative multi-professionnelle prenait corps autour d'un
wal/et européen, le régulateur ne se tromperait pas une nouvelle
fois de combat, sous prétexte de préserver une concurrence qui
pourrait bien se révéler n'être rien d'autre qu' une ligne Maginot
face à la puissance des acteurs nord-américains ou asiatiques,
largement soutenus, eux, par leurs autorités publiques, comme
en témoignent les fréquentes prises de position du Président
Obama en faveur d'Apple Pay.
54 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

1.2 ... la caravelle FinTech est principalement gréée


par des fonds d'investissement et quelques gros acteurs
« corporate »

1 Des VCs et des GAFA 1

Ainsi qu'il est assez usuel pour une industrie émergente, les fonds
d'investissement (les VCs ou Venture Capitalists) ont été les premiers
à se positionner sur la FinTech. Leur implication sur cette catégorie
de start-ups est croissante : selon CB lnsights, de 223 en 2010, leur
nombre est passé à 894 en 2015, avec une présence significative
des plus gros d'entre eux (notamment Accel Partners, USV, Sequoia
Capital, ou Andreesen Horowitz). Les fonds d'investissement
représentent ainsi plus de 80 % du montant des opérations réalisées.

Mais le plus intéressant est la forte présence des investissements


émanant d'entreprises non VCs, dont les prises de position dans
les FinTechs relèvent d'objectifs plus stratégiques que financiers.
Un récent blog de CB lnsights met en évidence que, en 2014, sur
les 12,2 milliards $ d'investissements dans la FinTech, la part des
« corporates » est de l'ordre de 12 % (soit 1,4 Md$). Plus singulier
encore, contrairement à ce que l'on aurait pu attendre, les plus
entreprenants de ces acteurs ne sont pas des banques, mais des
grandes entreprises de technologie. Selon la même source, sur la
c
0
~ période 2010- Ql 2015, les deux « corporates » les plus actifs dans
"O
•(IJ

CO
l'investissement Fin Tech ont été Google Ventures (avec 37 opérations)
a::
\0
~
et Intel Capital ; Citi Ventures n'occupant que la 3e place, suivie par
0
N MasterCard, Amex et eBay. Aucun Européen ne figure dans le Top 10
@
......
~
de ces investisseurs« corporate ».
en
·;::
>
a.
0
u 1 Les « schemes » et Pay Pal 1

Le rang occupé par Citi, MasterCard et Amex montre cependant


que le monde bancaire et financier n'est pas totalement inerte. Les
trois grands réseaux mondiaux de paiement par carte s'intéressent
de près aux FinTechs dans lesquelles ils investissent depuis déjà
plusieurs années, principalement dans le paiement. Ceci n'est pas
nécessairement de nature à rassurer les banques, pour qui ces
« schemes » sont de plus en plus fréquemment perçus comme des
concurrents.
LA FJN TEcH, OBJET B A N CA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN O BNI ) 1 55

Un autre grand rival historique des banques dans le monde du


paiement, PayPal, est également un investisseur très actif dans la
FinTech. Les acquisitions successives de Zong, Braintree, Venmo,
Paydiant ou Xoom lui permettent de couvrir les principaux domaines
du paiement digital, afin de se donner les moyens de passer du
monde Web au monde physique. Son récent retour en Bourse, après
la séparation d'avec eBay en juillet 2015, lui permet de disposer d' un
trésor de guerre de 1,6 milliard $, renforçant d'autant sa capacité à
accroître son portefeuille d'acquisitions dans la FinTech.

1 Les banques, enfin? 1

Du côté des banques, le graphe présenté ci-dessous (Figure 7), relatif


aux investissements des six plus grands acteurs bancaires américains
(Citi, Bank of America Merril Lynch, JP Morgan Chase, Wells Fargo,
Gold man Sachs, Morgan Stanley) met toutefois en évidence une forte
accélération de l'intérêt pour la FinTech à partir de 2014.
Ce regain d'attention témoigne probablement d'une prise de
conscience des banques américaines de leur retard par rapport à
leurs grands rivaux« technologues » (GAFA et autres).
Prise de conscience plus précoce que celle de leurs consœurs
européennes (ce qui ne fait que confirmer la domination du monde
c
anglo-saxon sur la FinTech), même s'il semble - mais cela reste à
0
~
"O
confirmer- que les banques continentales européennes sont en train
•(IJ

CO de se réveiller depuis le début de 2015 (plusieurs investissements


a::
\0
~
supérieurs à 10 millions€ ont été réalisés par des acteurs bancaires
0
N de notre continent) .
@
......
~
en
·;::
>
Figure 7 - FinTech Deals by six Major Banks by year
a. 2009-Nov. 17, 201 5
0
u
15

2009 2011 2012 2013 2014 2015


56 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

En synthèse :
o Assez naturellement, comme dans toutes les initiatives
émergentes, les fonds d'investissement jouent leur rôle de prise de
risque initiale pour amener les entreprises à maturité et espérer
vendre ensuite aux acteurs en place celles qui auront survécu et
donc grandi.
o Plus inhabituelles sont les prises de participation significatives
d'acteurs « corporate » n'appartenant pas directement au métier
de la banque, dont on peut suspecter la volonté de venir ainsi
concurrencer les acteurs historiques. Il est d'ailleurs étonnant
que les banques, notamment d'origine européenne, n'aient pas
été plus rapidement actives dans ce domaine, à la différence de
ce que l'on a pu observer dans un passé récent à propos d'autres
secteurs économiques (opérateurs télécoms (telcos), énergie,
santé), également touchés par des vagues d'innovation et/ou de
dérégulation.

Espérons que le frémissement observé en 2015 se confirmera et


conduira les banques à su ivre l'exemple de ces industries : ainsi, les
telcos françaises possèdent toutes un fonds de Corporate Venture
chargé de prendre des participations dans des start-ups avec une
optique purement stratégique (les aspects financiers de rentabilité
c
de l'investissement intervenant en second lieu dans le processus de
0
~ décision d'investissement). Nous analyserons plus en détail ce point
"O
•(IJ

CO dans le Chapitre 2.
a::
\0
~
0
N
@
......
2. L'intégration de l'activité des FinTechs est souvent
~
en
·;::
un casse-tête pour le régulateur
>
a.
0
u
2.1 Si de larges pans de la Fin Tech sont régulés ...

Des métiers soumis, en tant qu'activités bancaires, à réglementation

Nombre d'activités exercées par les FinTechs « embarquent »


du risque, rendant nécessaire la mise en place d'un dispositif
réglementaire adéquat pour :
-+ au premier chef, protéger les agents économiques réalisant des
transactions avec ces nouveaux intermédiaires;
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) 1 57

-+ assurer autant que possible une égalité de traitement avec les


acteurs existants;
-+ tout en proportionnant cependant le niveau de contrainte au
risque réel, notamment du fait des volumes d'activité, bien
souvent limités de ces nouveaux entrants, ainsi que de la
focalisation de leur activité sur des niches, afin de ne pas brider
l'innovation.

Le domaine de la réglementation, tant prudentielle que liée à la


conformité, s'appliquant aux activités des FinTechs est vaste, depuis
le dispositif relatif à la lutte contre le blanchiment et le financement
du terrorisme jusqu'aux questions de statuts 9 . Dans le cadre de cet
ouvrage, nous nous limiterons à détailler deux des dispositifs les plus
originaux car ils sont spécifiques à des métiers nouveaux : celui qui
s'applique au financement participatif et celui qui concerne le statut
des FinTechs s'occupant de paiement.

2. 1. 1 La réglementation du financement participatif

C'est pour l'instant dans un cadre national que plusieurs pays


européens ont pris l'initiative de faire voter des textes rendant
possible la rencontre directe des emprunteurs et des prêteurs sur
c
0 des plates-formes ad hoc. C'est notamment le cas de la France qui
~
"O
•(IJ a institué un cadre réglementaire pour le financement participatif,
CO
a:: au moyen d'une ordonnance publiée au Journal Officiel le 31 mai
\0
~
0 2014, ayant « pour objet de créer un cadre juridique adapté à ce
N
@ nouveau mode de financement afin d'en assurer le développement
......
~
en
·;::
dans des conditions juridiques sécurisées ainsi que d'offrir une
>
a.
0
protection des investisseurs ou des prêteurs ». Le nouveau dispositif,
u
entré en vigueur le 1er octobre 2014, a été complété par un décret
du 16 septembre 2014 précisant les conditions d'exercice des plates-
formes de financement et les montants maximums de prêts pouvant
être consentis par les particuliers.

9. Nécessité de se faire agréer dans des conditions de droit commun pour exer-
cer certaines activités, comme par exemple avoir un agrément AMF pour bé-
néficier du statut de société d e gestion, pour les FinTechs offrant des services
de gestion en ligne (cf. ci-dessus).
58 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

Le lecteur souhaitant approfondir cette thématique se reportera


utilement au document publié conjointement par l'ACPR et l'AMF,
le 30 septembre 2014, intitulé « S'informer sur le nouveau cadre
applicable au financement participatif (crowdfunding) », dont nous
reproduisons ci-après la synthèse :

« Selon la nature du financement proposé, les plates-formes


de financement participatif doivent ou non justifier d'un statut
réglementé pour l'exercice de leur activité :
- Une plate-forme de financement participatif par souscription
de titres financiers émis par une société non cotée doit être
immatriculée auprès du registre de l'ORIAS 10 en tant que Conseiller
en Investissement Participatif {CIP). Elle peut également opter
pour le statut de Prestataire en Services d'investissement {PSI)
fournissant le service de conseil et être, dans ce cas, agréée par
l'ACPR. Ces plates-formes sont régulées par l'AMF seule pour les
CIP et conjointement par l'AMF et l'ACPR pour les PSI.
- Si le site Internet propose de financer le projet sous la forme d'un
prêt avec ou sans intérêt, la plate-forme doit être immatriculée
auprès du registre de l'ORIAS en tant qu'lntermédiaire en
Financement Participatif {IFP). L'ACPR peut contrôler à tout
moment un intermédiaire en financement participatif.
c
~
0
- Si le site Internet ne propose que des financements sous forme de
"O
•(IJ
dons, la plate-forme n'a pas l'obligation de s'immatriculer auprès
CO
a::
\0 de l'ORIAS. Toutefois, elle peut choisir de s'immatriculer en tant
~
0
N qu'intermédiaire en financement participatif. Dans ce cas, elle doit
@
...... respecter toutes les règles qui s'imposent aux intermédiaires en
~
en
·;:: financement participatif.
>
a.
0
u
Attention : Si le site Internet encaisse des fonds pour le compte de
tiers dans le cadre des opérations de financement participatif, la
plate-forme doit être agréée en qualité d'Établissement de Paiement
{EP) par I' ACPR ou, a minima, être enregistrée en tant qu'agent de
prestataire de services de paiement ».

10. Organisme pour le registre des intermédiaires en assurance.


LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) 1 59

Aux États-Unis, l'adaptation de la législation à la finance participative


résulte notamment du JOBS Act (« Jumpstart Our Business Startups »)
d'avril 2012, qui assouplit le cadre réglementaire applicable au
crowdfunding lorsqu'il fait appel à l'investissement en capital. La loi
crée une nouvelle forme de courtier financier, le « funding portal »,
bénéficiant d'une exemption des contraintes de l'appel public à
l'épargne pour les levées de fonds de moins d'l million$ ; ces plates-
formes étant cependant soumises à l'obligation de s'enregistrer
auprès de la Security and Exchange Commission (SEC).

2. 1.2 La réglementation des activités de paiement

À la différence du financement participatif, l'essentiel de la


réglementation prudentielle s'appliquant aux intermédiaires non
bancaires dans le domaine du paiement est d'essence européenne.
Elle résulte principalement de deux dispositifs réglementaires :

-+ 1 Les directives sur les Services de Paiement (dites DSP1 et DSP2) 1

Adoptée par le Parlement européen le 24 avril 2007 et transposée


dans la législation nationale de chacun des États membres depuis le 1°
novembre 2009, la DSP1 constitue la clé de voûte de la mise en œuvre
c
~
0
du SEPA 11 . Un de ses principaux chapitres traite de la mise en place
"O
•(IJ

CO
d'un statut spécifique pour une nouvelle catégorie de fournisseurs de
a::
\0 services de paiement, les Établissements de Paiement (EP), lesquels
~
0
N constituent avec les EME 12 une partie significative des jeunes
@
...... pousses de la FinTech intervenant dans le secteur des paiements .
~
en
·;:: Tous les pays européens ont mis en place des procédures d'agrément
>
a.
u
0 et de supervision de ces nouvelles entités, généralement sous l'égide
de l'organisme en charge de ces questions pour les établissements
bancaires traditionnels. En France, c'est l'ACPR (Autorité de Contrôle
Prudentiel et de Résolution) qui joue ce rôle.
La mise en œuvre des dispositions de cette directive dans la
législation des différents pays concernés a donné lieu à une

11. Single Euro Payments Area, le SEPA est l'espace unique de paiement en euros.
12. Voir point suivant.
60 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

évaluation débouchant sur un nouveau « paquet législatif » (dit


DSP2), approuvé définitivement par le Parlement européen le
8 octobre 2015. Ce cadre législatif modernisé doit permettre de
prendre en compte les évolutions technologiques et les nouveaux
usages apparus sur le marché des paiements depuis l'adoption de la
DSPl en 2007 (croissance continue du e-commerce, développement
du m-commerce ...).
Ce nouveau texte a également pour objet d'encadrer juridiquement
une nouvelle catégorie de FinTech : les nouveaux acteurs intervenant
sur le marché des paiements en ligne et de l'agrégation de comptes
courants, jusque-là non soumis à réglementation, les tiers de
paiement (Third Party Provider ou TPP) 13 .

-+ 1 Les directives sur la Monnaie Électronique (DME1 et DME2) 1

La Monnaie Électronique (ME) trouve son origine dans le besoin


de payer autrement qu'en espèces des transactions de faible
montant pour lesquelles l'utilisation de la carte bancaire n'est pas
économiquement intéressante, en raison de ses coûts de traitement
unitaires. À la fin des années 1990, de premiers développements
de cartes prépayées dans des univers clos (cartes ville par exemple
permettant de régler le transport, la piscine ou la cantine scolaire)
c
~
0 ont en effet amené la Commission européenne à proposer, en 1999,
"O
•(IJ
une directive créant une nouvelle forme de monnaie, la monnaie
CO
a:: électronique. Ce texte (dit DME 1, adopté en 2000) organisait les
\0
~
0
N
conditions de son émission et de sa gestion par des Établissements
@
...... de Monnaie Électronique (EME), soumis à un agrément spécifique
~
en
·;:: pour exercer ce nouveau métier. La mise en œuvre a conduit à un
>
a. nombre très faible d'agréments, notamment du fait d'un statut trop
0
u
exigeant pour les émetteurs et de conditions peu homogènes entre
les différents pays de l'Union. Face à ce relatif échec, un nouveau
texte, dit DME2 (Directive Monnaie Électronique 2), mieux adapté
au marché, a été proposé par la Commission en octobre 2008 (et
adopté en 2009). Il a fait l'objet de transpositions dans les différents
pays de l' Union, parfois très tardivement, comme en France avec la

13. Voir ci-dessus : 1, 1.8.


LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN O BNI ) 1 61

loi du 28 janvier 2013. L'organisme en charge de la délivrance des


agréments et de la supervision des EME est le même que celui qui
s'occupe d'agréer et de superviser les EP, soit en France l'ACPR.

Le lecteur souhaitant approfondir le sujet se reportera avec profit au


très complet et très instructif ouvrage de Pierre Storrer 14 .

Encadré - Points d'attention


lors de l'agrément des EP et EME par I' ACPR

En France, l'ACPR, en charge de l'agrément des nouveaux acteurs


du paiement, a rendu pub lique la liste des critères principaux
d'évaluation des sociétés candidates à un tel agrément, à
l'occasion d'une conférence organisée le 4 novembre 2014 à
Paris:
- le business mode/ au regard du marché;
- la qualification de l'activité (schéma des flux financiers et
dispositif contractuel} ;
- le dispositif de gouvernance et de contrôle interne, notamment
au regard de la taille des établissements ;
- la mise en œuvre des obligations en matière de LCB-FT (Lutte
c Contre le Blanchiment et le Financement du Terrorisme) ;
0
~
"O
•(IJ
le niveau de capital minimum et de fonds propres prudentiels
CO
a:: au regard des exigences en fonds propres;
\0
~
0 - la protection de la clientèle : cantonnement des fonds ou
N
@ garantie ;
......
~
en
·;:: le recours à des agents et distributeurs : exigences des
>
a. arrêtés en la matière et rôles de l'établissement en termes de
0
u
contrôle ;
- les prestataires essentiels ;
- la sécurité des dispositifs de paiement.

14. Droit de la monnaie électronique, Collection Droit, RB Édition, octobre 2014.


62 1 LA RÉVOLUT ION F1N T ECH

2.2 ... la mise en œuvre de la réglementation donne souvent


des migraines aux régulateurs

2.2. 1 Le régulateur est fréquemment en retard


sur les évolutions du marché

Une des causes majeures de la crise financière de 2008 est le


débordement des régulateurs bancaires et financiers par la vitesse des
processus d'innovation. Régulation et innovation sont effectivement
rarement en phase, ainsi que l'on peut l'observer dans la plupart des
industries soumises au vent de l'innovation.
La FinTech n'échappe pas à cette tendance lourde.
En effet, comme dans le cas des concepteurs de produits sophistiqués
pour les salles de marché, les rythmes des entreprises de la FinTech
et ceux des régulateurs sont très dissemblables.
Citons trois exemples pour mettre en lumière cette désynchronisation :

1 La DSP2 à contretemps ? 1

La succession DSP1-DSP2 témoigne de la volonté et de la nécessité


pour la réglementation de s'adapter à l'évolution du marché, mais
aussi de son retard quasiment structurel à s'adapter à ces évolutions.
c
Le rapport sur l'application de la DSP1 a été publié en 2013,
0
~ donnant lieu à la rédaction de la DSP2 pour adapter la régulation
"O
•(IJ

CO à des problèmes perçus en 2011 et 2012, principalement sur des


a::
\0
~
thématiques concernant les nouveaux entrants (harmonisation
0
N des pratiques d'agrément entre les différents pays, ajustement des
@
......
~
périmètres des activités exemptées par la DSP1, mise sous statut de
en
·;::
>
nouveaux acteurs redoutés par les banques, les Third Party Processors,
a.
u
0 dits également « agrégateurs » 15 ) . Le texte de la DSP2, après des
allers-retours entre la Commission, le Conseil et le Parlement, a été
définitivement approuvé par ce dernier en octobre 2015, avec une
date de fin de transposition dans les législations nationales début
2018 ! On peut craindre qu'à ce moment-là, plus de 5 ans après que les
constats d'amélioration ont été effectués, le dispositif réglementaire
résultant ne soit plus réellement adapté à la réalité de 2018.

15. Voir ci-dessus : 1, 1.8.


LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN OBNI ) 1 63

1 Le droit du financement participatif n'est pas harmonisé 1

Le financement participatif se développe très rapidement en


Europe 16, même si les volumes restent modestes comparés à ceux du
crédit classique. Mais il n'existe pas, pour l'instant, d'harmonisation
européenne de la réglementation du financement participatif, et il est
probable qu'il n'y en ait pas avant plusieurs années. La Commission
européenne a bien abordé, en mai 2015, le sujet mais c'était à
l'occasion d'une consultation publique sur la construction d'une
Union des marchés de capitaux ... prévue pour 2019, manifestant
ainsi clairement son intention de ne pas adopter, d'ici là, de texte
spécifique pour harmoniser les règles du financement participatif au
plan pan européen.
Cette absence de réglementation européenne pourrait poser
problème dès lors qu'en matière d'Internet les frontières n'existent
plus. Comment traitera-t-on un litige entre une plate-forme française
et un citoyen espagnol ou allemand?
D'autant que dans chaque pays, les législations évoluent en fonction
des besoins, s'enrichissant de dispositions nouvelles qui risquent de
rendre une future harmonisation encore plus difficile.
Ainsi, en France, les premiers mois d'utilisation du dispositif
juridique de 2014 ont conduit le législateur à compléter la loi : par
c
0 exemple, pour faciliter l' investissement par des personnes morales,
~
"O
•(IJ
le gouvernement français a intégré dans la loi Macron de 2015 la
CO
a:: possibilité d'agir par voie d'ordonnance pour« renforcer la protection
\0
~
0
des souscripteurs et préciser les obligations des émetteurs de bons
N
@ de caisse » et pour permettre « l'intermédiation de bons de caisse »
......
~
en dans le cadre du crowdfunding. L'ordonnance doit être publiée dans
·;::
> les neuf mois suivant la promulgation de la loi Macron, donc d'ici le
a.
0
u
mois de mai 2016.

1 Le développement mal maîtrisé des marketplaces en France j

Le très rapide développement du e-commerce a conduit nombre


de petits acteurs sans renom à choisir de se mettre sous l'ombrelle

16. Voir ci-dessus : Rapport Cambridge.


64 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

de marques réputées, comme Amazon, CDiscount, La Redoute,


PriceMinister, FNAC... Ces petits marchands profitent ainsi non
seulement du trafic lié à la visibilité de ces gros sites, mais également
de leur infrastructure (service après-vente, contrats, paiement).
Ces ensembles, appelés « places de marché » ou « marketplaces »,
peuvent atteindre des tailles très importantes (plus de 10 000 petits
marchands sur la place de marché de CDiscount). Les têtes de
pont de ces places de marchés ont notamment mis au point des
procédures sui generis pour effectuer les règlements au sein de leur
écosystème, conduisant le régulateur (en l'espèce l'ACPR) à réagir.
Ce dernier, considérant qu'il y avait là encaissement pour compte
de tiers, a demandé aux enseignes de faire en sorte que lesdits
processus de règlement soient désormais effectués par un acteur
régulé, Établissement de Paiement (alternativement agent d'EP} ou
EME (alternativement distributeur de ME). Cette intervention du
régulateur a eu deux effets :
-+ une levée de boucliers des enseignes françaises concernées, car
elles doivent remettre à plat l'ensemble des processus existants,
se plaignant d' une irruption à contretemps et sollicitant, en
conséquence, un délai d'adaptation ;
-+ l'émergence d'un véritable marché de la « sous-traitance »
de l'encaissement pour compte de tiers, des EP et des EME
c
0 proposant aux grandes enseignes gestionnaires de marketplaces
~
"O
•(IJ d'agir comme leur agent (EP} ou leur distributeur de ME (EME}.
CO
a:: Les principales FinTechs présentes sur ce créneau sont la SFPMEI
\0
~
0
N
(groupe Moneo}, MangoPay (groupe CM-Arkéa}, S-Money
@ (groupe BPCE}, Lemon Way, HiPay, FOI (groupe Webhelp). Des
......
~
en
·;::
« industriels » du paiement comme Worldline (groupe Atos) ou
>
a.
0
lngenico annoncent proposer aussi une offre dans ce domaine.
u

2.2.2 Le régulateur est parfois contesté

~ Par les Fin Techs elles-mêmes


1 1

Comme tous les assujettis à une réglementation, les FinTechs se


plaignent de la lourdeur des contraintes résultantes, onéreuses à
mettre en œuvre dans les systèmes d'information et empêcheuses
d'innover aut ant qu'on le voudrait.
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN O BNI ) 1 65

S'y ajoute le sentiment que la règle n'est pas toujours égale pour
tous. La question des agréments pour prétendre aux activités
d' Établissement de Paiement ou de Monnaie Électronique illustre
ce point jusqu'à la caricature. Il est en effet de notoriété publique
que les autorités de certains pays (Malte, Chypre par exemple) de
l'Union européenne accordent très facilement ces agréments qui,
par la magie du« passeportage », peuvent aisément devenir valables
dans nombre de pays de l'Union. À un degré moindre, mais bien réel,
tous les candidats à un agrément d'EP ou d'EME savent qu'il est plus
facile de s'adresser aux autorités compétentes du Luxembourg ou de
la Grande-Bretagne que de se tourner vers la France ou l'Allemagne.
Cette situation ne devrait, cependant, en principe pas perdurer
puisque la DSP2 prévoit de donner à !'Autorité Bancaire Européenne
(ABE) un pouvoir d'harmonisation des exigences dans ce domaine.

-+ 1 Par les acteurs historiques 1

Les acteurs installés (« incumbents »en anglais) trouvent fréquemment


la régulation trop favorable aux nouveaux entrants. Nous en avons eu
un exemple récent avec la levée de boucliers des banques au sujet des
perspectives d'agrément des TPP (cf. ci-dessus) prévue par la DSP2,
comme en témoigne le communiqué de presse publié à cette occasion
c
0
par la Fédération Bancaire Française (cf. Encadré).
~
"O
•(IJ

CO
a:: Encadré - Communiqué de presse de la FBF
\0
~
0
du 9 octobre 2015 sur la DSP2
N
@
......
~
en
Vote de la directive européenne sur les services de paiement
·;::
>
a. (DSP2) : Les banques françaises demandent des modalités de
0
u mise en œuvre garantissant la sécurité des clients.

« Le Parlement européen a voté la révision de la Directive


européenne sur les Services de Paiement (DSP2).
La FBF prend acte de l'adoption de ce texte dont l'ambition
initiale est de faciliter l'entrée sur le marché de nouveaux acteurs
(agrégateurs et tiers de pa iement) et de renforcer la sécurité des
transactions en Europe.

.../. ..
66 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

.../ ...

Les banques françaises partagent ces objectifs mais regrettent


que ce texte n'apporte pas de réponses claires et à la hauteur
des enjeux de responsabilité, de supervision et de sécurité.
La sécurité des paiements est un sujet sur lequel les banques
françaises sont d'une vigilance extrême. Lors des consultations
préparatoi res à la révision de la directive, la profession bancaire
s'est ainsi mobilisée pour que les nouveaux acteurs de paiement
(dits tiers de paiement) appliquent les mêmes règles en matière
de sécurité, de responsabilité et de transparence que les banques
(Fiche repère DSP2).
La FBF constate que le texte ne répond que très partiellement
aux problématiques exposées aux instances européennes.
Certes, le principe d'authentification forte a été introduit dans
la directive et une supervision partielle de nouveaux acteurs est
prévue. Mais l'ensemble est renvoyé aux textes d'application
confiés à !'Autorité bancaire européenne et à la Commission. En
outre, plusieurs points problématiques demeurent:
- les exigences de sécurité applicables aux tiers de paiement
dans leurs relations avec le client et sa banque (stockage de
données notamment) restent floues ;
c
0
~ - la protection des identifiants bancaires des clients avec des
"O
•(IJ

CO
tierces parties (le partage de ces données n'est pas interdit) ;
a::
\0
~ - la traçabilité des transactions afin d'identifier les responsa-
0
N
@
bilités de chacun des acteurs n'est pas prévue.
......
~
en
·;::
> La sécurité est le socle de la confiance, qui est au cœur de la
a.
0
u relation bancaire.
Dans un système interconnecté et globalisé, les effets d' une
faille dans les systèmes de sécurité et de protection des données
auraient de lourdes conséquences pour l'ensemble des acteurs
de la chaîne des paiements. Les banques doivent pouvoir
continuer à jouer leur rôle de tiers de confiance et à assurer la
protection des données et des comptes de leurs clients.

.../ ...
LA FJN TEcH, OBJET B ANCA I RE N oN I NTÉGRÉ (uN O BNI ) 1 67

.../ ...

Les banques françaises vont désormais s'engager, d' une part,


dans les travaux de transposition au niveau national et, d'autre
part, dans les travaux de spécifications techniques de mise en
œuvre au niveau européen avec l'Agence Bancaire Européenne. »

c
0
~
"O
•(IJ

CO
a::
\0
~
0
N
@
......
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en
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>
a.
0
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•(IJ

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l.D
~
0
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......
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en
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>
a.
0
u
CHAPITRE 2

c
0
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"O
•(IJ

CO
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0
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......
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en
·;::
>
a.
0
u
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•(IJ

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l.D
~
0
N
@
......
.r;
en
·;::
>
a.
0
u
Schumpéterienne,
la FinTech ira-t-elle
jusqu'à « ruiner l'ancien » ?

Le train et l'automobile ont supplanté la diligence, le DVD la cassette


sur ruban magnétique, et l'enregistrement numérique sans doute
prochainement le DVD lui-même, au terme d' un processus de
destruction créatrice, théorisé par le célèbre économiste autrichien
du xxe
siècle, Joseph Schumpeter, au cours duquel « le nouveau [ .... ]
apparaÎt à côté de l'ancien, lui fait concurrence jusqu'à le ruiner. ».
La FinTech obéit-elle à cette logique, avec la banque traditionnelle
dans le rôle de ce qui menace ruine?

L'objet de ce chapitre est de passer notre OBNI au crible de cette


conception, autour d'un constat et d'une interrogation :
c
0
la FinTech est dans son essence un phénomène de destruction
~
"O
•(IJ
créatrice,
CO
a:: - le nouveau va-t-il vraiment ruiner l'ancien ?
l.D
~
0
N
@
......
~
1• UN PHÉNOMÈNE DE DESTRUCTION CRÉATRICE
en
·;::
>
a.
u
0
1. La FinTech altère les modèles traditionnels
de création de valeur ...

1.1 Elle détruit de la valeur existante

1.1.1 Les initiatives des FinTechs touchent au cœur même


de la raison d'être des banques : l'intermédiation

Pour s'en convaincre, il suffit de prendre des exemples dans trois


des principales grandes lignes d'activité bancaire que nous avons
détaillées dans le Chapitre 1 :
72 1 LA RÉVO LU TI ON F1N T EC H

o Dans le domaine du paiement, les métiers de transfert de fonds


sont en train de connaître de véritables courts-circuits dont le
plus destructeur de valeur existante est probablement celui qui
menace les paiements internationaux. Ainsi, dans le Chapitre 1,
nous avons relevé l'émergence d'innovateurs, tels que la start-up
américaine, Ripple Labs, qui propose une solution appuyée sur la
technologie dite « Distributed Ledger Technology », permettant
de réaliser tous ces transferts en temps réel, supprimant le risque
de règlement ainsi que les interminables travaux administratifs
de réconciliation des comptes Nostri. Pour les banques, la bonne
nouvelle liée à l'accélération des échanges et la réduction des
risques résultant de cette innovation est certainement, au moins
à court terme, plus que compensée par la mauvaise nouvelle de
la chute prévisible des facturations clients correspondantes. En
effet, les prix de vente élevés des transferts internationaux, dont
chacun peut faire l'expérience, sont actuellement justifiés par les
coûts induits à cause de ces « frottements ». Il est probable que
ces évolutions les fassent chuter très rapidement, beaucoup plus
vite que l'abaissement corrélatif de la base de coûts associés au
système actuel dans les organisations bancaires.

0 Pour ce qui concerne le financement, une étude de Goldman


è
~
0 Sachs, parue en juillet 2015, montre qu'aux États-Unis le
"O
•(IJ
développement de la finance participative commence à peser
CO
a:: sur les résultats des grands groupes bancaires dans leurs activités
\0
~
0
N
de crédit. Ainsi, les nouveaux opérateurs (Lending Club, Funding
@
......
Circle ... ) permettant aux investisseurs d'accorder des prêts -
~
en
·;:: et plus largement les acteurs non bancaires intervenant dans
>-
a. le monde du crédit - menaceraient 11 milliards $ de profits
0
u
annuels des grandes banques américaines dans les cinq ans ...
soit tout de même l'équivalent de 7 % de l'ensemble des profits
de 2014 (150 Mds$). Au total, Goldman Sachs estime que, sur
la globalité des types de prêts concernés (prêts personnels, aux
PME, aux étudiants, immobilier... ), la part des banques pourrait
se réduire de 20 % face à ces nouveaux acteurs. La plus grande
part du manque à gagner - 4,6 milliards $ de bénéfices par an -
concerne les prêts personnels (« unsecured persona! lending »).
Outre-Atlantique, ce segment de marché représente un encours
1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RU INER L'ANC IE N » ? 1 73

proche de 850 milliards $, contrôlé actuellement à 80 % par les


banques. De nouveaux concurrents comme Prosper ou Lending
Club pourraient à terme se saisir d'un tiers de la part des vieux
géants de la finance. Le fait que les États-Unis soient davantage
touchés que l'Europe est logique : le rôle du crédit bancaire dans
l'économie y est traditionnellement moindre et le marché du
financement par les « non-banques » y est donc plus profond.
Jusqu'ici, cette tendance concernait surtout les grosses PME, et
bien entendu les grands « corporates » via le marché obligataire.
Les nouvelles plates-formes étendent simplement cette même
logique à des prêts individuels.

o S'agissant de l'épargne, le développement du conseil personnalisé


« automatisé » à l'intention de catégories clients qui n'y avaient
pas accès, à des coûts très bas (grâce à l'utilisation de robots
survitaminés par l'ingestion de gigantesques quantités de
data) détruit par contrecoup la valeur du conseil personnalisé
« humain », réservé à des clients haut de gamme. Comme pour
les paiements, l'évolution est objectivement positive, puisqu'elle
permet au plus grand nombre d'être mieux conseillé. Cependant,
là aussi, la question délicate pour les acteurs traditionnels est
celle du délai d'adaptation de leurs organisations à la vitesse de
c diffusion de ces nouveaux services. Comme on le voit sur la Figure 8
0
~
"O
ci-après, extraite d' une étude réalisée par le cabinet McKinsey, ce
•(IJ

CO phénomène pourrait conduire, dans un horizon de 10 ans, à une


a::
\0
~
baisse des profits de 30 % du métier« Wealth Management ».
0
N
@
......
~
en
1.1.2 La disruption introduite par la FinTech pèse sur les prix
·;::
> en banalisant les produits bancaires traditionnels
a.
0
u
On l'a vu 17, nombre de FinTechs ont pour projet d'enrichir l'amont
et l'aval du service bancaire qu'elles ciblent. Cette tendance est
particulièrement nette dans le domaine du paiement où c'est
l'enrichissement de l'acte d'achat dans son ensemble qui est
fréquemment visé. Du coup, le paiement lui-même est réduit à une

17. Voir Chapitre 1, 1.


74 1 LA RÉVO LU TIO N F1N T EC H

fonction strictement utilitaire, sans valeur propre. L'on parle, en bon


français, de « commoditisation ».

Figure 8 - Impact de la Fin Tech sur les profits, 2025

Sample analysis
/:,.Profit 1 /:,. Revenue1 Disruption in consumer finance revenues
percent percent $billion
Consumer
finance
-60 @~ 14

1
-- ~ccc----------------------~

1 "-40%
Payments

SME lending
-35

-35
-30

-25
------35
-·-

Wealth -30 -15


management 2
2025 Lost Price Captured 2025
3
before volume erosion by Fintechs after
M ortgages -20 -10 disruption disruption

l. Compared to 2025 projections without the impact of Fintech and digital attackers; profit numbers include
the impact of savings on operating costs as a result of digital; revenues are after risk cost, profits are after tax;
figures are rounded.
2. Excluding deposits.
3. lncludes currently unbanked segments.
Source: McKinsey Panorama.

D' une certaine manière, les acteurs historiques sont victimes de leur
succès même. En effet, les systèmes de paiement qu'ils ont mis en
c
~
0 place à grands frais au cours du temps sont devenus si performants
"O
-CIJ que la valeur qu' ils apportent n'est plus perceptible par le client, ce
CO
a:: dernier ayant fini par s'y habituer. L'automatisation concomitante des
\0
~
0
N
moyens de paiement en a parallèlement considérablement abaissé
@ le coût de production. Performance opérationnelle de premier
......
~
en
·;:: ordre et coûts de revient peu élevés créent des conditions idéales
>
a.
0 à l'accès de nouveaux entrants, plus agiles et plus véloces que les
u
acteurs historiques pour offrir des services à valeur ajoutée autour
du paiement, rendant à la limite inutile la facturation de ce dernier
en tant que telle.

Ce phénomène d'érosion ne touche pas seulement le paiement,


mais l'ensemble de l'activité bancaire, comme le montre la Figure 8
mettant en évidence que, dans certains métiers (tel le crédit à la
consommation), près de 90 % de la destruction de valeur imputable à
la « disruption »des FinTechs réside dans la baisse des prix de vente.
1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 75

1. 1.3 Ce phénomène de destruction de valeur est accentué


par les stratégies des GAFA

Le domaine du paiement illustre excellemment cette évolution.


Ainsi, Apple et Google ont tous deux lancé récemment un produit
de paiement par mobile, Facebook a annoncé réfléchir à un produit
permettant à ses utilisateurs de se payer entre eux, tandis qu'Amazon
est soupçonné de concocter un véritable système de paiement
appuyé sur sa place de marché.
Comme leur core business est très éloigné des préoccupations
bancaires et financières, en venant sur les territoires bancaires, et
singulièrement le paiement, leur ambition est d'y chercher « autre
chose» utile au développement de leur cœur de métier, notamment:
• de la data, dont on sait que le paiement est un fournisseur très
important (ex. Google},
• un service complémentaire permettant de donner plus de valeur
à ce qu'ils vendent dans leur core business (des iPhones pour
Apple, une place de marché pour Amazon, de l'interaction entre
membres pour Facebook).

Cette stratégie est du reste affichée et assumée, comme en témoignent


les propos tenus, à l'occasion d'une interview en octobre 2015,
c par David Marcus (ex-Président de PayPal, recruté par Facebook
0
~
"O
en juin 2014), au sujet de l'annonce du lancement d'un produit de
•(IJ

CO paiement pour les clients de Facebook : « We don't want to build a


a::
\0
~
payments business, we want the maximum number of transactions
0
N
@
on the platform, while enabling the best possible mobile experience
......
~
for commerce. The margins on payments aren't that high, and we
en
·;::
> want the broadest reach. Businesses will want to pay to be featured
a.
u
0
or promoted - which is a bigger opportunity for us».

Ces motivations propres conduisent les GAFA à ne pas facturer en


tant que tel le service de paiement, contribuant ainsi à propager
auprès de la clientèle le sentiment que ce service n'a pas de valeur en
soi, accentuant le phénomène d'érosion accélérée des prix de vente
identifié par McKinsey.
76 1 LA RÉVOL U TIO N F1NTECH

1.2 Elle met en évidence de nouveaux gisements de valeur

1.2. 1 En accélérant le repositionnement du client


« au centre du village "

Parce qu'elle améliore l'ergonomie du service bancaire tout en


l'enrichissant, la FinTech contribue, en la hâtant, à la transition
des services bancaires d'une approche « produit » à une approche
« client », créant ainsi des conditions favorables à l'acceptation par
ce dernier d'une rémunération pour un service qui lui facilite la vie
de manière tangible.
Un service pourtant historique, la carte bancaire en France, en fournit
un bon exemple. Pour surmonter la gratuité du chèque, les banques
ont su créer un instrument de paiement innovant qui a pu justifier du
paiement d'une cotisation annuelle, laquelle demeure encore trente
ans après, car la carte facilite réellement la vie du client, notamment:
1111- accès 24/24 et 7/7 à son argent grâce au réseau des distributeurs
de billets;
1111- possibilité de payer à l'étranger sans avoir besoin de transporter ni
de convertir des espèces ;
1111- assurances multiples attachées à la détention d'une carte.

c
~
0
C'est dans cette logique d'appréhension globale des besoins du client
"O
•(IJ
que se situent des services de gestion du compte courant comme
CO
a::
\0 Soon d'AXA Banque, Simple ou Number26, déjà évoqués. Ainsi, dans
~
0
N l'offre de compte Soon :
@
......
~
1111- le classique « solde » est remplacé par le concept de « reste à
en
·;::
> dépenser », c'est-à-dire le solde amputé non seulement des
a.
0
u opérations passées, mais aussi de celles que l'application peut
anticiper pour les semaines suivantes (telles que les échéances
mensuelles de crédit ou d'impôts);
1111- est inclus un dispositif d'épargne par projet, où la somme épargnée,
d' un clic, est affectée spécifiquement au financement d'un projet
(ex. futures vacances, prochaine automobile, etc.);
1111- il est possible d'associer une photo à chaque dépense (l'objet
acheté ou sa garantie) et de récupérer automatiquement la facture
liée à un paiement (téléphone par exemple).
1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 77

Du côté de l'épargne, le client, même modeste, d'une plate-forme de


gestion d'épargne en ligne, a le sentiment d'être considéré en tant
qu'individu envisagé dans la globalité de ses besoins d'épargne, et
non plus seulement en tant qu'acheteur d'OPCVM plus ou moins
profilées. En effet, ses besoins actuels et futurs, ses projets sont
pris en compte de façon affinée, avec l'aide de la technologie et de
questionnaires bien ciblés. De même, il bénéficiera en général, pour
un coût modique, d'un suivi dynamique de son portefeuille, grâce à la
mise en œuvre de techniques faisant appel au Big Data, recevant des
alertes et des recommandations en fonction de l'évolution présente
et anticipée des marchés. Les premiers retours d'expérience de ces
plates-formes semblent indiquer un consentement généralisé des
clients à payer pour un service qui leur apporte un « plus »tangible
dans la gestion de leur patrimoine. Ceci est facilité par le recours
fréquent de la part des offreurs de ces services à une tarification en
mode« Freemium ».

1.2.2 En déplaçant la valeur vers les services connexes


à l'activité bancaire

Comme déjà évoqué, l'un des modes d'action privilégié des FinTechs
est de se glisser dans les failles des offres de services existants pour
c proposer aux clients de résoudre des problèmes d'inefficience et/ou
0
~
"O
d'inconfort (ce que les Anglo-saxons appellent des« painpoints »).
•(IJ

CO De l'apaisement d'un « painpoint » à la proposition d'un nouveau


a::
\0
~
service, il n'y a bien souvent qu'un pas que franchissent volontiers
0
N
les FinTechs, les conduisant fréquemment à élargir l'offre au-delà du
@
...... service bancaire stricto sensu .
~
en
·;::
>
a.
u
0
Deux exemples pour rendre compte de cette évolution :

1 Le mPOS 18 I

Au départ, il y a la volonté de résoudre un« painpoint » : le non-accès


du petit commerce au paiement par carte.

18. Voir Chapitre 1, 1, 1.2.


78 1 LA RÉVO LU TI ON F1N T EC H

L'analyse approfondie des besoins de ces petits commerçants,


conjuguée à la prise de conscience que la concurrence sur le seul
paiement amènera fatalement à la baisse des prix, a conduit les
FinTechs acteurs de ce marché à élargir leur offre sur l'amont et l'aval
du paiement :
• Back-office : marché de petits « commerçants » à qui l'on peut
offrir dans la foulée des services peu coûteux à mettre en place et
riches en valeur ajoutée (comptabilité, suivi des stocks ... ).
• Front-office : notamment des services de structuration et de
restitution intelligentes des données relatives aux clients de ces
commerçants, là encore avec des outils simples, peu onéreux à
installer et faciles à facturer.
• Développement d'offres (cf. Square) autour de la constitution
de mini-réseaux avec la mise au point de wallets, permettant de
capitaliser sur l'extension de la clientèle de commerçants pour
lancer des offres à destination des particuliers effectuant des
achats chez eux.

1 Loffre de SlimPay 1

Cette jeune pousse française capitalise sur le potentiel du débit


c
~
0
direct (l'avis de prélèvement désormais européanisé et enrichi). Ce
"O
•(IJ
moyen de paiement est bien mieux adapté que la carte bancaire
CO
a::
\0
au règlement des nombreux services « abonnés » que fait naître la
~
0
N croissance des offres de services fondées sur l'usage ou le partage.
@
...... SlimPay propose aux marchands une solution aisée à intégrer dans
~
en
·;::
>
leur back-office ainsi qu'un processus d'enrôlement de leurs clients
a.
u
0 ergonomique et très bien sécurisé.
Son offre est typique de l'enrichissement du service à partir d'un
produit de base, car elle permet simultanément :
- de simplifier le service pour le client du commerçant avec un
processus de signature du mandat de prélèvement en ligne, au
moyen d'une page de paiement conçue pour être conviviale,
- d'enrichir le service au e-commerçant lui-même, notamment en lui
fournissant des analyses pointues sur les impayés, lui permettant
de récupérer des fonds par les divers moyens (représentation à des
1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RU INER L'ANC IE N » ? 1 79

dates choisies, utilisation d'un autre moyen de paiement...) que


SlimPay met à sa disposition.

1.2.3 En mettant en évidence des zones de valeur potentielles


qui étaient sous-exploitées

Le potentiel d'utilisation des données (Big Data), souvent conjugué à


l'appui sur les informations contextuelles fournies en temps réel par
les réseaux sociaux et autres forums, est un levier majeur de création
de valeur dans plusieurs domaines de la FinTech.

Quelques exemples permettront d' illustrer le propos :

1 ~alternative lending 1

Les formules d'alternative lending 19 promues par de grands acteurs


comme Amazon ou PayPal s'appuient sur des scorings pointus fondés
sur l'analyse des masses de données directement issues de leur
activité commerciale principale envers des petits commerçants.

1 La prévention de la fraude dans le e-commerce 1

c
0
~ Ce problème connaît des améliorations considérables avec les
"O
•(IJ

CO techniques de traitement massif des données existantes.


a::
\0
~
La jeune pousse française PayPlug se distingue dans ce domaine.
0
N Pour enrichir son offre de paiement aux PME et TPE du secteur du
@
......
~
e-commerce, PayPlug développe une fonctionnalité de lutte contre la
en
·;::
>
fraude fondée sur le traitement en mode Big Data des données issues
a.
u
0 de son activité de paiement et de celle de ses partenaires. Grâce à
une subvention d'l,7 million € obtenue de l' Union européenne,
PayPlug a pu mettre en place un véritable laboratoire (PayPlug Labs)
permettant une analyse très élaborée du risque de fraude en temps
réel. Le service est bien sûr, au premier chef, utilisé par PayPlug elle-
même pour mieux sécuriser ses propres clients commerçants; mais il

19. Voir Chapitre 1, 1, 2.2.


80 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

est également commercialisé auprès de grands acteurs de la banque


et due-commerce.

1 ~enrichissement de l'offre de service sur la carte bancaire 1

Plutôt que d'inventer de nouveaux supports pour gérer la fidélité


(points, récompenses, avantages ... ), de plus en plus d'acteurs
bancaires proposent à leurs clients commerçants d'utiliser les
données engendrées lors du paiement pour intégrer dans la bonne
vieille carte bancaire du consommateur ses cartes de fidélité. Le
principe est simple : lorsque le client règle ses achats en magasin
avec sa carte, le terminal de paiement identifie les promotions
auxquelles celui-ci peut prétendre et les applique directement. Le
consommateur voit ainsi sa facture automatiquement réduite sans
qu'il ait besoin de faire la preuve de ses droits. Et le commerçant a, de
son côté, la possibilité de simplifier la gestion de ses cartes de fidélité.

Ce type d'offres a commencé à être commercialisé avec succès


aux États-Unis, avant de franchir l'Atlantique. Ainsi en France, deux
start-ups ont lancé des programmes dans ce domaine :
~ Welcome Real Time, dont l'offre « Fid & Moi » est en cours de
déploiement national au sein du Crédit Mutuel CIC,
c
0
~
"O
~ la société lzicap qui a testé durant l'année 2015, avec la caisse du
•(IJ

CO
a::
Crédit Agricole Provence Côte d'Azur, une solution analogue auprès
\0
~ d'une centaine de clients en vue d'un déploiement en 2016.
0
N
@
......
~
en
·;:: 1 Le crowdfunding fait émerger de nouvelles classes d'actifs 1
>
a.
0
u
Mais il n'y a pas que le Big Data qui permette de capitaliser sur des
opportunités sous-exploitées.
Un bon exemple est le financement participatif qui, en structurant
des classes d'actifs ordinairement inscrits au bilan des banques,
favorise l'émergence de nouveaux produits financiers à proposer aux
investisseurs.
Ainsi, aux États-Unis, nombre de fonds d'épargne (retraite, gestion
d'actifs) interviennent comme prêteur (crowdlending) ou investisseur
(equity crowdfunding) sur les plates-formes de financement
1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 81

participatif. En Europe, où le marché originel est plutôt orienté vers


les particuliers en tant que prêteurs, les législations des pays les plus
actifs sont en train d'évoluer en ce sens en prévoyant l'ouverture aux
institutionnels.

2. . .. mettant ainsi les banques sous pression

2.1 Dans leur relation avec leurs clients :


valeur d'exemple et de benchmark

La plupart des entreprises de la FinTech sont trop petites pour


pouvoir prétendre à la captation de parts de marché significatives
sur le territoire des acteurs traditionnels. En Europe, le financement
participatif représente une part infime des crédits à l'économie,
de même que la part des actifs gérés par les promoteurs de robo-
advisors par rapport aux actifs sous gestion des grandes banques,
ou encore les transactions réalisées avec des wallets comparées aux
volumes engendrés par l'utilisation des cartes bancaires.
Néanmoins, malgré la modestie de leur pénétration, les offres de ces
entreprises bénéficient de la rapidité de circulation de l'information,
du développement des processus de recommandation via les
c réseaux sociaux, et d'une sensibilité croissante à ce qui est nouveau,
0
~
"O
•(IJ leur donnant une« chambre d'écho» très supérieure à leur influence
CO
a:: réelle sur le marché.
\0
~
0 Ainsi, les clients des acteurs traditionnels sont naturellement conduits
N
@ à faire la comparaison entre la promesse des nouveaux acteurs et
......
~
en
·;::
la réalité des services que leur offre leur banquier au quotidien,
>
a.
0
suscitant envers ce dernier la revendication qui engendre la pression .
u

2.2 Vis-à-vis de leurs concurrents non bancaires :


risque de pousser les FinTechs dans leurs bras

Les FinTechs ont besoin de partenaires ayant des portefeuilles


de clientèle installés

Les jeunes pousses de la FinTech ne détiennent en général pas de


fonds de commerce en propre. En effet, la constitution de fonds
82 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

de commerces de clients finaux (consommateurs ou entreprises)


prend des années et/ou revient très cher en coût d'acquisition,
particulièrement dans les pays développés où le taux de bancarisation
est extrêmement élevé. C'est la raison pour laquelle les FinTechs
recherchent en permanence des partenaires capables de distribuer
les produits qu'elles inventent. Elles sont par essence B2B2X (X
pouvant prendre les valeurs C - Consumer - ou B - Business-). C'est
la raison pour laquelle les FinTechs proposent souvent dans leur
offre des modèles de « marque blanche », permettant à des acteurs
installés d'offrir le produit de la FinTech sous leur propre marque
commerciale .
Si elles ne peuvent nouer de tels partenariats avec les banques, elles
le feront avec les autres acteurs capables de leur donner accès à de
larges bases de clientèle installées (GAFA, telcos, industriels ou grands
retailers) qui, eux, détiennent déjà des fonds de commerce bien
fidélisés et souvent massifs (Apple avec ses centaines de millions de
comptes iîunes, Google avec ses centaines de millions d'utilisateurs
de Gmail...). Ces acteurs cherchent constamment à se diversifier pour
fidéliser davantage leurs clients, l'inclusion d'activités bancaires dans
leur gamme d'offres présentant à cet égard l'avantage d'être riche
en bénéfices directs et indirects (data, service complémentaire d'une
offre globale).
c Cependant, la volonté de ces grands rivaux des banques d'intégrer
0
~
"O des activités bancaires dans leur propre chaîne de valeur se heurte
•(IJ

CO
a:: souvent aux coûts et aux délais d'entrée sur un marché spécialisé et
\0
~ régulé (problèmes d'accès aux moyens techniques et de disponibilité
0
N
@
des compétences métier). La rencontre avec les FinTechs est donc
......
~ assez naturelle, car ces « mammouths » offrent aux jeunes pousses
en
·;::
>
a.
le X {Cou B selon le cas) dont elles ont besoin.
0
u Il s'agit sans doute là d'une des principales menaces pour le monde
bancaire.

L'analyse faite ci-dessus 20 des investissements des « corporates »


dans la FinTech montre que le mouvement est déjà en marche.

20. Chapitre 1, Il, 1.2.


1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 83

1 Les GAFA et autres géants technologiques en embuscade

Apple a déjà commencé à pointer le bout du nez dans le monde du


paiement avec le lancement d'Apple Pay, fin 2014, en intégrant des
technologies existantes (notamment la technologie « sans contact »
NFC-Near Field Communication ou« communication dans un champ
proche » } et en nouant des partenariats avec le monde bancaire.
Le géant du téléphone mobile dispose des moyens suffisants et
de la culture adéquate pour investir dans les FinTechs propres à le
mettre rapidement en capacité, s'il le souhaite, de s'affranchir de
ses partenariats bancaires. Même si le paiement n'est qu'un objectif
de second rang dans la stratégie d'Apple 21 , sa puissance de feu et
sa position de marché en font un acteur capable de peser sur les
évolutions de ce métier.

D'autres acteurs aussi, grands industriels de la filière du paiement,


peuvent être tentés de « remonter la chaîne de valeur », comme
disent les consultants. Les exemples d'lngenico (acquisitions d'Ogone
et de GlobalCollect} ou d'Atos (avec la récente introduction en Bourse
de Worldline, suivie du rachat du processeur de paiement germano-
italo-néerlandais Equens} montrent que ce n'est pas une hypothèse
d'école. Ces acteurs ne sont pas aujourd'hui très dangereux car
c
0
ils ont encore beaucoup d'intérêts commerciaux directs avec le
~
"O
•(IJ
monde bancaire, mais ils pourraient très vite devenir menaçants.
CO
a:: C'est pourquoi les banques seraient bien inspirées d'envisager de
\0
~
0
collaborer avec eux tant que les intérêts des deux parties sont encore
N
@ alignés.
......
~
en
·;::
>
a.
Les telcos, enfin, n'ont certainement pas dit leur dernier mot en ce
0
u qui concerne leur intérêt pour les activités bancaires, singulièrement
le paiement. Leur succès dans les pays en développement, avec la
mise en place de systèmes de paiement par mobile qui ont permis à
ces pays de passer directement du paiement en espèces au paiement
digital (cf. l'engouement pour le système kényan M-Pesa, d'ailleurs en
cours d'importation en Roumanie, ou les réussites d'Orange Money
en Afrique francophone}, leur donne des ailes, comme en témoigne

21. Voir§ 1.1.3.


84 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

l'annonce, début janvier 2016, de la prise de participation majoritaire


d'Orange dans Groupama Banque afin de créer une banque digitale
sur mobile, dont le lancement est prévu en France pour début 2017.
Nul doute, là encore, que la capacité démontrée des telcos (soumises
à la déréglementation une décennie avant les banques) à nouer des
partenariats avec, à prendre des participations dans, ou à racheter
des start-ups, constitue un atout décisif pour venir plus rapidement
et plus facilement concurrencer les banques sur leurs marchés
historiques.

La bataille autour du paiement par mobile (voir Encadré) met bien


en évidence les lignes de force de ces combats entre acteurs et leurs
enjeux.

Encadré - La bataille autour du paiement mobile

Payer avec un mobile dans le monde physique peut se faire


selon trois grandes modalités, en fonction de l'endroit où sont
localisées les fonctions de sécurité (le « secure element »).
Cette thématique n'est que très marginalement technique, et en
réalité essentiellement commerciale, voire stratégique :
- Lorsque ce secure element est localisé dans la carte SIM
c
0 (modalité dite SIM based), le système ne peut fonctionner
~
"O
•(IJ que si les banques et les opérateurs téléphoniques se
CO
a:: mettent d'accord sur les modalités techniques et financières
\0
~
0 d' inclusion dans la carte SIM (propriété de l'opérateur) d'une
N
@ application de paiement (propriété de la banque). L'insuccès
......
~
en
·;::
du projet consortial français Pégasus/Payez mobile témoigne
>
a.
0
de la difficulté des deux familles d'acteurs à s'accorder sur le
u
partage de valeur, chacun des partenaires ayant le sentiment
que le client final lui appartient plus qu'à l'autre. C'est sans
doute une des raisons qui a poussé Orange à lancer Orange
Cash en France, sans partenariat bancaire.
- Le secure element peut également être inclus dans le
téléphone lui-même. C'est notamment le cas pour le système
de paiement Apple Pay. Il s'agit d'une fonction propriétaire,

.../ ...
1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 85

.../ ...

contraignant les opérateurs (notamment bancaires} qui


souhaitent utiliser cette fonction sécuritaire pour faire du
paiement mobile à conclure un partenariat avec Apple. Le
risque pour les banques est qu'Apple Pay se révèle être une
version moderne de l'éternelle histoire du cheval de Troie,
les réduisant progressivement à un rôle de fournisseur
d'infrastructures de paiement pour Apple qui finirait par
« capturer» l'essentiel de la relation avec le client final.
- Troisième modalité possible pour le secure element, lancée
par Google sur la base d'une approche ouverte (philosophie
d'Android vs iOS} : le déport dans le cloud. Cette technologie,
connue sous le nom de HCE (Host Card Emulation}, permet aux
banques d'être autonomes (vis-à-vis des opérateurs mobiles
comme des fabricants de téléphone} dans la mise en œuvre de
leurs applications de paiement par mobile. Soutenue par Visa
et MasterCard, cette technologie est actuellement déployée
par le monde bancaire avec l'appui, non seulement de grands
industriels (comme Atos notamment}, mais aussi de start-ups
fournissant des systèmes clés en main. Une jeune pousse
française opérant dans ce domaine, Antelop Payments, s'est
c récemment distinguée en étant la première au monde à avoir
0
~
"O
•(IJ
obtenu l'agrément HCE de Visa pour les aspects sécuritaires.
CO
a::
\0
~
0
N
@ 1 Des partenariats opportunistes 1
......
~
en
·;::
>
a.
0
Les FinTechs cherchent à nouer également des partenariats avec des
u
organisations professionnelles susceptibles de leur fournir un accès
direct à leurs adhérents, comme clients ou comme relais vers d'autres
clients. Il en est ainsi du partenariat conclu le 19 octobre 2015 par
le Réseau Entreprendre 22 avec deux plates-formes de crowdfunding
françaises, Lendix, pour le volet prêt, et Anaxago pour la levée

22. Association de chefs d'entreprise qui accompagne bénévolement


1980 «lauréats», créateurs ou repreneurs en France pour les aider dans leur
projet.
86 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

de fonds. L'objectif est de permettre aux créateurs d'entreprises


qu'accompagne le Réseau Entreprendre de se financer, en fonds
propres ou en crédit, plus facilement que via le système bancaire,
dont les contraintes réglementaires et le type de produits qui sont
proposés conduisent à des processus souvent longs et complexes.
Pour les plates-formes sélectionnées, c'est une très belle occasion de
pouvoir donner accès à leur clientèle d'épargnants ou d'investisseurs
à de« belles» start-ups présélectionnées par le Réseau Entreprendre.
Ces genres de partenariats sont la clé pour permettre aux nouveaux
financeurs de se faire connaître auprès du tissu économique
traditionnel. Dans le même esprit, le 2 octobre 2015, !'Ordre des
experts-comptables avait ainsi lancé une collaboration avec Finexkap,
jeune pousse spécialisée dans l'affacturage 23 .

Il. LE NOUVEAU VA-T-IL RÉELLEMENT


RUINER L'ANCIEN ?

On vient de voir que la première partie de la formule de Schumpeter


s'applique assez bien à la FinTech, le nouveau apparaissant à côté
de l'ancien pour le concurrencer, notamment en bouleversant les
modèles économiques existants.
c
0
~ Menace-t-il pour autant de le « ruiner » ? Il serait certainement
"O
•(IJ

CO
présomptueux et imprudent de prétendre fournir une réponse
a::
\0 tranchée à cette question.
~
0
N Après avoir complété le panorama esquissé ci-dessus par la prise en
@
...... compte des forces et faiblesses de l'ancien et du nouveau, nous nous
~
en
·;:: risquerons toutefois à l'hypothèse que la coopération pourrait bien
>
a.
u
0 l'emporter.

23. Voir Chapitre 1, 1, 2.2.


1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 87

1. La FinTech est vulnérable

1.1 L'accident est toujours possible

1.1.1 L'explosion en vol

Le niveau de valorisation très élevé atteint par certaines« licornes» 24


de la Tech, notamment aux États-Unis, fait craindre un risque de bulle
spéculative qui éclaterait, à l'instar de la bulle dite « Internet » en
2000. La Fin Tech serait évidemment prise dans une telle catastrophe,
la vouant probablement, sinon à disparaître, au moins à subir une
très forte consolidation (avec des valeurs de« casse » pour certaines
d'entre elles) à plus ou moins brève échéance, surtout si ses
locomotives étaient emportées.
Un tel scénario rappelle ce qui s'est passé dans le monde des telcos il
y a une dizaine d'années.

1.1.2 Le crash

Nombre des métiers exercés par les FinTechs recèlent des risques
importants. C'est d'ailleurs, nous l'avons vu, la raison de l'intervention
des régulateurs dans la délivrance de leur agrément et leur activité.
c Malgré ces précautions, des circonstances de marché particulières
0
~
"O sont de nature à provoquer des crises graves pour les FinTechs,
•(IJ

CO
a::
menaçant leur existence. Métier par métier, voici quelques-uns des
\0
~ risques les plus visibles qui les guettent:
0
N
@
......
~
~ Dans le monde du paiement, le risque sécuritaire est le plus
en
·;::
> manifeste. En effet, tant que les volumes restent faibles, les
a.
0
u attaques ne sont pas suffisamment« rentables » pour intéresser
les fraudeurs. Ceci peut conduire les dirigeants des FinTechs
concernées à sous-estimer le risque (en limitant au strict minimum
réglementaire les efforts pour le contrer) afin de consacrer
l'essentiel de leurs forces au développement commercial. Ils
pourraient alors se trouver pris à revers et fort démunis en cas
d'attaque massive de fraude. Dans le monde bancaire historique,

24. Sociétés non cotées valorisées à plus d'un milliard $.


88 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

la fraude a toujours réussi à être maîtrisée, parfois jugulée, car


les facteurs de risques se sont élaborés progressivement au cours
du temps, dans des modèles qui n'évoluaient pas très vite . D'une
certaine manière, l'expérience alliée à la lourdeur administrative
a souvent été un ralentisseur de propagation de la fraude dans
le monde des paiements. Le développement des opérations
en temps réel et l'extrême automatisation des processus de
traitement, ajoutés à l'absence d'expérience de la fraude de
nombre de nouveaux acteurs (équipes jeunes, prioritairement
tournées vers le développement commercial) peuvent conduire à
des phénomènes explosifs de fraudes massives (vol de données,
siphonnage de comptes bancaires) de nature à rayer de la carte
certaines entreprises et à discréditer, tant auprès de l'opinion que
des pouvoirs publics, les FinTechs indemnes mais exerçant dans
le même domaine.

-+ Du côté du financement participatif, il est aussi des circonstances


extrêmes qui pourraient menacer l'existence même des acteurs.
Prenons le cas d'un retournement brutal de conjoncture
entraînant des défaillances en chaîne d'entreprises, notamment
de PME, cible privilégiée des plates-formes de crowdlending.
Même s'ils ont été convenablement informés du risque de perte,
c les particuliers ayant placé leur argent sous forme de prêts sur
0
~ ces plates-formes ne sont probablement pas psychologiquement
"O
•(IJ

CO
a::
préparés à des pertes en capital. On peut en effet supposer que,
\0
~
pour eux, le placement dans une plate-forme de crowdfunding,
0
N
@
n'est qu'un substitut, mieux rémunéré, du Livret d'épargne ou de
...... l'OPCVM monétaire que leur vendait leur conseiller de clientèle,
~
en
·;::
>
a.
à l'époque où les taux d'intérêt étaient plus élevés. On peut tout
0
u à fait imaginer un phénomène cumulatif de mécontentement,
relayé par les médias et les réseaux sociaux, discréditant les
plates-formes ; ce phénomène peut être accentué par une
réaction brutale des pouvoirs publics et autres régulateurs.

C'est la raison pour laquelle la possibilité que des investisseurs


institutionnels puissent être prêteurs sur les plates-formes (le
dispositif français est en train d'être revu en ce sens) est une
évolution positive car elle serait de nature à atténuer les effets
d'évolutions de cette sorte. Également positif à cet égard, le projet
1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 89

que l'on prête à la Banque Publique d'investissement de mettre sur


pied un dispositif de garantie destiné à assurer les fonds engagés
par les particuliers sur ces plates-formes. Concrètement, il s'agirait
d'utiliser le fonds de garantie, déjà existant, destiné aux acteurs du
capital-risque - le fonds France Investissement Garantie, abondé
par la Caisse des Dépôts - et d'étendre son champ d'intervention
au « crowdfunding ». Chaque plate-forme pourrait ainsi se voir
dotée d'une enveloppe de garantie à proposer aux internautes
financeurs pour assurer leurs investissements.

~ Le monde de l'épargne au sens large (asset management,


marchés financiers) n'est pas non plus à l'abri de phénomènes de
«crash ». Le développement des modes de conseil et de prises de
décision fondées sur des algorithmes de plus en plus puissants,
prenant en compte les événements et actualités les plus récents
pourrait conduire, en cas de crise, à des phénomènes bien
connus de« panurgisme »où, toutes les anticipations allant dans
le même sens, l'accident systémique survient.

En effet, plus l'accès à des sources de données en temps réel


devient essentiel pour l'exécution de stratégies de trading
algorithmique, plus les ensembles de données utilisées par les
c traders vont avoir tendance à converger, chaque trader utilisant
0
~
"O
quasiment toutes les sources d' informations disponibles. Dans
•(IJ

CO le même temps, les algorithmes devenant de plus en plus


a::
l.D
~
pointus grâce au « machine learning » qui améliore la qualité
0
N des projections, les écarts entre les différentes stratégies de
@
......
~
trading algorithmique vont décroître. Une telle convergence des
en
·;::
> stratégies de trading conduit dans le meilleur des cas à la baisse
a.
u
0
des volumes et à la disparition des opportunités d'arbitrage, dans
le pire à un krach boursier.

1.2 La FinTech souffre d'insuffisances structurelles

La force des FinTechs réside pour l'essentiel dans leur agilité, liée à
deux facteurs principaux :

• leur taille modeste, qui les rend très manœuvrables, beaucoup


plus que les énormes paquebots bancaires;
90 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

• leur récence sur le marché, qui les affranchit de lourds « legacy


systems », notamment informatiques, leur permettant d' inventer
de nouveaux produits sans avoir, comme les banques, à assumer
l'existence des gammes précédentes.

Ces facteurs de compétitivité ont pour contrepartie deux


inconvénients majeurs dont on voit certaines FinTechs commencer
à souffrir:
• un problème de passage à l'échelle (sca/ability en anglais), soit
la capacité à passer de la production en petites séries à de la
fabrication de masse, d'autant que la mondialisation renforce la
difficulté du « go to market».
• un problème de« poule et d'œuf » (« chicken and egg »en anglais),
soit l'extrême difficulté à créer des effets de réseau en partant
d'une base de clientèle très étroite.

Deux exemples permettront d'illustrer ce propos :

1.2. 1 La difficulté des plates-formes d'épargne en ligne


à atteindre la masse critique

Un article de l'hebdomadaire The Economist 25 fait état des problèmes


de croissance des« robo-advisors »,ces plates-formes utilisant le Big
c
0 Data pour fournir à bas prix du conseil financier basé sur des analyses
~
"O
•(IJ
automatisées. Dans un premier temps, cette politique commerciale
CO
a:: agressive a favorisé une croissance très rapide. Mais à un moment
\0
~
0 donné, rester très bon marché nécessite de grandes quantités
N
@ d'actifs sous gestion pour demeurer rentable, alors que la croissance
......
~
en nécessite de stabiliser l'organisation, passant d'un mode start-up à un
·;::
> mode d'entreprise structurée. Ainsi, les deux leaders de ce nouveau
a.
0
u
marché, Betterment et Wealthfront, ont accumulé chacun en deux
ans environ 2,9 milliards$ d'actifs sous gestion, produisant un chiffre
d'affaires évalué à 7 millions $, ce qui est insuffisant pour financer
un effectif d'environ 100 personnes et de lourds budgets marketing.
Selon des estimations, le coût annuel de chacune des structures
serait de 40 à 50 millions$.

25. Du 31 octobre 2015.


1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 91

Leurs difficultés viennent de ce que, dans ce métier, les effets


d'échelle sont clés, chaque nouveau client représentant un faible coût
marginal, à condition de pouvoir compter sur des dizaines, voire des
centaines de milliards$ d'actifs sous gestion permettant d'amortir les
charges fixes.

1.2.2 La lenteur du décollage des systèmes de wallet

On l'a vu, les systèmes de wallet sont très nombreux et émanent


d'acteurs de toutes tailles, de l'association de commerçants de
quartier à Apple Pay. Mais qu'ils soient gros ou petits, les systèmes
de wallet rencontrent tous la même difficulté qui explique la
lenteur du décollage : il leur faut mettre en place un vrai système de
paiement, nécessitant de recruter simultanément des commerçants
qui acceptent d'être payés avec ce nouveau mode de paiement et des
clients finaux qui veulent bien l'utiliser pour payer. On se retrouve
donc confrontés à un problème classique « d'œuf et de poule », les
commerçants ne voulant s'équiper que lorsqu'il y a suffisamment de
leurs clients susceptibles d'être eux-mêmes équipés; ces derniers ne
désirant à leur tour s'équiper que s'ils sont susceptibles de trouver
suffisamment de points de vente eux-mêmes équipés.
C'est ce que l'on appelle des marchés bifaces{« two-sided markets»},
c
0 théorisés notamment par le prix Nobel d'économie Jean Tirole,
~
"O
•(IJ marchés dont le succès dépend de la capacité des concepteurs à
CO
a:: obtenir une masse critique suffisante des deux côtés de la table pour
\0
~
0
N
que tous les acteurs concernés aient intérêt à y prendre part. Cela
@
......
demande en général du temps, beaucoup de temps et nécessite de
~
en
·;:: l'argent, beaucoup d'argent. Ainsi pour que le système français de
>
a.
0
Carte Bancaire devienne véritablement universel sur le territoire
u
national, il aura fallu près de trente ans, à partir de la création des
premières Cartes Bleues en 1967 !
C'est à cette aune qu'il faut mesurer les échecs successifs de produits
de wallet lancés par de pourtant très puissants acteurs : Buyster
{Orange, SFR, Bouygues Telecom et Atos}, Kwixo {groupe Crédit
Agricole} ou encore V.me by Visa. Apple lui-même rencontre des
difficultés pour faire décoller Apple Pay. Bien évidemment, l'écueil
est encore plus grand pour les petites structures dont les moyens de
recrutement de clients sont encore plus faibles : c'est la raison pour
92 1 LA RÉVOL U TIO N F1NTECH

laquelle la plupart des systèmes de wallet se développent sur des


niches, ce qui limite par essence leur croissance.

Cette thématique de« pou le et d'œuf »se retrouve de façon analogue


dans le crowdfunding. En effet, pour lancer une plate-forme, il faut
que les deux groupes (celui des apporteurs de fonds et celui des
demandeurs de fonds) soient présents. Les plates-formes doivent
donc convaincre un groupe de venir alors que l'autre n'est pas encore
là. Généralement, les plates-formes donnent un accès gratuit au
groupe qui a le plus d'effet sur l'autre, et ensuite l'autre groupe paye
pour bénéficier du système.

2. Les acteurs installés restent puissants

2.1 Le « cauchemar » de la banque ...

Lorsque la FinTech vient hanter les nuits des grandes banques, on


imagine volontiers un rêve qui aurait les contours suivants:

1 Le décor 1

c o De grands acteurs (GAFA, telcos, industriels, y compris les


0
~ processeu rs comme Visa ou MasterCard, de grands retailers) se
"O
•(IJ

CO
a::
sont armés techniquement et opérationnellement pour, avec
\0
~ l'aide (partenariats, acquisitions ... ) des FinTechs les plus efficaces,
0
N
@
venir défier les banques sur leurs terrains traditionnels: paiement,
......
~ tenue de compte, financement, épargne .
en
·;::
> o Et/ou des FinTechs poursuivent une croissance autonome, à la
a.
0
u
PayPal, et deviennent suffisamment puissantes pour inquiéter
les plus grands acteurs bancaires. Ce n'est pas une hypothèse
d'école: selon le site CB lnsights, déjà cité, à fin 2015, cinq FinTechs
figuraient dans le classement des vingt premières« licornes ».

1 Un exemple de scénario 1

Prenons le cas de la gestion des comptes, domaine très sensible de la


banque puisqu'il est le point principal d'ancrage de la relation client.
1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 93

Des FinTechs spécialisées (Simple, Soon, Compte Nickel, Number26 ... )


sur une offre de gestion simple et peu coûteuse du compte courant
sont déjà en mesure d'offrir une suite assez complète de produits
bancaires et financiers venant se déboucler sur le compte (carte,
plate-forme de crowdfunding, produits d'épargne ... ) en nouant
des partenariats avec d'autres acteurs, FinTechs mais aussi acteurs
traditionnels, producteurs de ces services de « niche » qu'elles
distribuent.
De tels ensembles constitueraient, s'ils devenaient suffisamment
populaires, de véritables réseaux de fournisseurs de services
financiers alternatifs capables de concurrencer efficacement les
banques de plein exercice.
Ainsi, Simple a déjà des partenariats : avec Visa pour faciliter les
paiements avec des cartes de débit, avec Venmo (une filiale de
Pay Pal) pour l'offre de paiement mobile, avec Bankcorp et CBW
pour l'épargne, et avec Allpoint pour fournir un accès à bas prix aux
réseaux de distributeurs de billets.

Une telle évolution actualiserait le cauchemar de la plupart des


banquiers :

- d'un côté, perdre les comptes les plus rentables : les clients les
c
0
~ plus susceptibles d'aller vers les comptes low cost {type Nickel ou
"O
•(IJ

CO
Orange Cash) sont souvent ceux qui, actuellement, contribuent le
a::
\0
~
plus à la partie des revenus bancaires liés aux découverts et à la
0
N facturation des incidents;
@
......
~
en
·;:: - de l'autre, conserver les comptes qui ne rapportent rien directement
>
a. car ils n'ont ni découvert, ni incident, ni solde créditeur significatif,
0
u
et dont l'essentiel de la rentabilité est actuellement assuré par
les produits qui y sont attachés et s'y débouclent comptablement
(cartes bancaires haut de gamme, crédit, épargne). Si la
commercialisation de ces produits échappait à la banque, alors le
compte de Monsieur ou Madame Tout Le Monde deviendrait un
pur réceptacle de flux engendrés par des produits vendus par des
concurrents (plates-formes d'épargne et de crowdfunding, cartes
et wallets) . Spectre de cette tendance très négative pour le monde
bancaire : I' « APlsation »de la banque consécutive au dispositif de
94 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

la DSP2, évoqué plus haut, à propos de la création de nouveaux


statuts pour les TPP 26 .

Au-delà des conséquences sur les revenus des banques, la relation


client souffrirait également de telles mutations de comportement, en
raison notamment:
d'un moindre accès aux données relatives aux clients : dès lors que
ces derniers consomment des produits bancaires et financiers « à
la carte », les banques ne détiennent plus l'essentiel des données
financières les concernant, ce qui limite leur capacité de création
de produits et services pertinents ;
d'un contrôle plus restreint sur l'expérience client : en étant réduit
à un rôle de « gateway », on devient passif dans la gestion de
l'expérience client dont on ne voit plus que l'aboutissement en
termes d'impact sur le solde du compte.

2.2 ...est loin d'être avéré

Nous pensons que ce cauchemar a de bonnes chances de conserver


son statut onirique, car les banques ne manquent pas d'atouts pour
défendre le primat qu'elles occupent dans la gestion des choses de
l'argent.
c
0
~
"O
•(IJ

CO
a:: 1 De fortes barrières à l'entrée 1

\0
~
0
N
@
11-- Une réglementation (prudentielle, compliance) très exigeante
......
~ qui s'appliquerait à tout acteur devenant puissant - il devrait
en
·;::
>
a.
apprendre à en maîtriser la mise en œuvre, la culture et la
0
u philosophie dans ses équipes, ce qui peut prendre du temps. Ceci
conduirait les nouveaux entrants à devenir en réalité des banques
classiques, avec une base de coût qui tendrait à se rapprocher de
celle des acteurs existants. On peut citer à cet égard l'exemple
de Prêt d'Union (financement participatif) une des plus grosses
FinTechs françaises, qui a, dès l'origine, opté pour un statut
d'établissement de crédit.

26. Voir Chapitre 1, 1, 1.8.


1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 95

..,.. Les banques doivent une partie de leur avance compétitive


vis-à-vis des nouveaux entrants à leur maîtrise et leur imperium
sur les infrastructures interbancaires. Elles sont en effet bien
souvent propriétaires de ces systèmes performants et sécurisés
permettant l'échange et le règlement :
• des dettes et créances entre fournisseurs de services de
paiement afin de pouvoir procéder à l'imputation des débits ou
des crédits correspondants sur les comptes courants des clients
concernés;
• des opérations de change sur les devises;
• des transactions sur valeurs mobilières.

Mises en place au cours du temps, ces infrastructures d'échange et


de règlement restent des points d'accès incontournables à l'exercice
de la plupart des métiers de la banque.

1 Des atouts intrinsèques 1

Malgré la crise financière, les banques restent des acteurs de


confiance. Plus précisément, les enquêtes d'opinion montrent une
sorte de schizophrénie du public vis-à-vis de la banque :
c
0 -+ si l'image des banques reste médiocre lorsque la question porte
~
"O
•(IJ sur« la » banque en général,
CO
a:: -+ en revanche, le niveau de confiance reste très élevé (supérieur à
\0
~
0
N
70 %) lorsque la question porte sur« ma » banque.
@
......
~
en
·;:: En effet, les fonds de commerce bancaire sont solidement arrimés
>
a. car ils se sont construits sur la durée. Les clients sont bien fidélisés
0
u
grâce à leur équipement en produits de long terme (crédit immobilier
par exemple), de plus en plus personnalisés en fonction des besoins
afférents aux différentes étapes de la vie (en matière d'épargne
notamment), sans oublier la prise en compte des différents aspects
de la vie quotidienne (richesse de la gamme des moyens de paiement
proposés).
Cette confiance est encore accentuée par la force des marques des
grandes banques, présentes dans le paysage économique depuis
plusieurs dizaines d'années, parfois un ou deux siècles.
96 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

Par ailleurs, la dimension atteinte par les principales entreprises


bancaires, si elle nuit à leur agilité et à leur réactivité, leur permet
aussi, en contrepartie, de faire jouer les effets d'échelle dans la
plupart de leurs métiers, d'autant que les processus et traitements
sont de plus en plus automatisés.

À ces atouts commerciaux et économiques, il faut ajouter une


capacité inégalée à gérer les risques liés aux choses de l'argent
(risques d'intermédiation, risques de fraude ... ), capacité acquise,
comme nous le relevions ci-dessus, par l'expérience éprouvée des
organisations et la compétence des équipes qui y travaillent.

3. La coopération entre Banques et FinTechs,


mutuellement profitable, est appelée
à se développer

Nous avions, en commençant ce chapitre, évoqué José Schumpeter,


le théoricien de la« destruction créatrice », pour caractériser l'impact
de la FinTech sur les métiers de la banque.
Cependant, nous venons de voir que les points de faiblesse identifiés
chez les FinTechs sont, pour la plupart, des facteurs de force chez
c
0 les banques (passage à l'échelle, gestion des risques, fonds de
~
"O
•(IJ
commerce larges et bien fidélisés) et réciproquement (agilité, esprit
CO
a:: d'innovation, « time to market »).
\0
~
0
Aussi faudrait-il sans doute en appeler également à l'esprit d'un
N
@ autre grand ancien de la théorie économique, en la personne de
......
~
en David Ricardo. Sa théorie de l'avantage comparatif illustre assez bien
·;::
> le potentiel de coopération entre les deux protagonistes, chacun
a.
0
u
apportant à l'autre ce qu'il sait le mieux faire, les deux acteurs tirant
mutuellement de l'échange plus de profit que s'ils n'avaient pas
échangé. Dans le rôle du « drap anglais », les plates-formes, l'agilité
ou encore le traitement du Big Data, facteurs clés des succès de la
FinTech. Dans celui du « vin portugais », la confiance des clients, le
potentiel d'économies d'échelle ou la capacité à gérer toutes sortes
de risques, qui sont autant de domaines d'excellence de la Banque.
1
5 CHUMP ÉTERIE NNE, LA F1N TfCH IRA -T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 97

En conséquence, la combinatoire des avantages compétitifs propres


aux deux « professions » doit les conduire à coopérer plutôt qu'à
s'affronter.
Les bénéfices de la coopération sont accrus par les menaces que les
grands acteurs technologiques font peser sur les banques, comme
le met en évidence une étude Efma-lnfosys Finacle (« Innovation in
Retail Ban king») menée dans plus de 70 pays auprès de 140 banques
de détail en novembre 2015. En effet, face à l'avance prise par les
GAFA dans les différents métiers de la banque et de la finance, les
banques de détail interrogées sont 84 % à avoir augmenté leurs
dépenses en matière d'innovation et 69 % d'entre elles reconnaissent
que les start-ups pourraient leur permettre de développer de
nouveaux services.

On trouve une illustration de cette tendance dans la décision prise


en 2015 par ING Group de nommer un Directeur de la FinTech,
responsable du développement de la stratégie d'ING quant à la
collaboration avec des sociétés innovantes du monde de la banque
et de la finance.

40% des banques interrogées se disent ainsi prêtes à travailler en


collaboration avec les FinTechs, même si elles restent encore peu
c nombreuses à mener déjà des actions concrètes en ce sens, par
0
~
"O
exemple en travaillant avec un incubateur ou un accélérateur (20 %).
•(IJ

CO
a::
\0
~
Du reste et très concrètement, les contacts et les projets que
0
N notre pratique professionnelle récente nous a conduits à initier
@
......
~
entre start-ups de la FinTech et grandes banques en France nous
en
·;::
>
convainquent que des ponts et des synergies évidents existent.
a.
0
u
On voit dans ce domaine s'esquisser deux formes principales de
coopérations, éventuellement complémentaires :

• l'établissement de partenariats opérationnels et commerciaux


entre Banques et Start-ups,
• l'investissement dans les start-ups, dans une logique de Corporate
Venture.
98 1 LA RÉVOL U TIO N F1N T ECH

Ces coopérations contribuent à l'émergence d'écosystèmes nouveaux,


souvent favorisés par les pouvoirs publics, qui y voient un facteur de
développement économique.

3.1 Une f !oraison de partenariats en perspective

3.1.1 La FinTech en médecine homéopathique

Comme une promesse du développement de partenariats, les


banques elles-mêmes ont commencé à instiller un peu « d'esprit
FinTech » dans certains de leurs projets. Le développement de ce
type de stratégie d'imitation des FinTechs n'en est sans doute qu'à
ses débuts étant donné la récence de l'intérêt du monde bancaire
pour la FinTech.

L'on voit ainsi émerger des initiatives, notamment sous la forme de


filialisation dans des structures agiles d'activités innovantes que l'on
souhaite voir se développer avec un « time to market » beaucoup
plus rapide que dans les réseaux bancaires traditionnels. Quelques
exemples pour illustrer cela :

1 Dans le domaine du paiement 1


c
0
~
"O
•(IJ
.,.. Le Groupe BPCE a créé une filiale, 5-money, dotée d'un statut
CO
a::
\0
d'EME, afin de pouvoir se positionner rapidement sur le créneau
~
0
N de l'offre de services de paiement aux « marketplaces ». Il est
@
...... d'ailleurs intéressant de noter que ce service d'émission et de
~
en
·;:: gestion de monnaie électronique s'appuie sur une plate-forme
>
a. acquise en marque blanche auprès d'une start-up française de la
0
u
Fin Tech .

.,.. Le Groupe Crédit Mutuel-CIC souhaitait proposer, dans des délais


rapides, à sa clientèle de commerçants de toutes tailles un wallet
dit « commerçant », c'est-à-dire un bouquet de services, couplés
au paiement, de fidélisation de leurs propres clients. Pour ce faire,
il a créé Fivory, organisée sous forme d'une start-up filiale du
Groupe et utilisant la plate-forme d'une autre start-up spécialisée
dans le marketing et la fidélité, Welcome Real Time.
1
5CHUMPÉTERIENNE, LA F1NTfCH IRA-T- ELLE JUSQU À « RUINER L'ANC IE N » ? 1 99

..,. Oney Banque Accord, filiale bancaire du groupe Auchan, a


développé et mis sur le marché un wallet, Flash'N Pay, afin de
faciliter la gestion des programmes de fidélité des différentes
enseignes du groupe de distribution.

La création de plates-formes de crowdfunding directement


par des banques

..,. La Banque Populaire Atlantique a ainsi lancé Proximea,


filiale à 100 % qui permet aux internautes d'entrer au capital
« d'entreprises en croissance ». L'objectif de la plate-forme pour
2015, annoncé lors de son démarrage, restait toutefois modeste :
1,5 million€ de fonds propres à destination de trois entreprises en
développement, dans une logique d'expérimentation. En effet, la
finance participative est considérée comme un moyen de financer
les premiers pas d'une entreprise, stade en général difficile à
couvrir avec un crédit classique .

..,. Le Crédit Mutuel Arkéa a opté pour une autre approche avec un
site proposant aux internautes d'accorder un don à un porteur
de projet avec ou sans contrepartie de sa part. Une coentreprise
à 50-50 avec le Groupe Télégramme baptisée Kengo.bzh a été
c lancée mi-2015. Ce mouvement montre, aussi, que les banques
0
~
"O
•(IJ
nourrissent l'écosystème de technologies qu'elles construisent
CO
a:: autour d'elles : le tiers de confiance de Kengo pour l'acquisition
\0
~
0 des transactions par carte est MangoPay, qui appartient au Crédit
N
@ Mutuel Arkéa depuis le rachat de Leetchi en septembre 2015.
......
~
en
·;::
>
g- 3. 1.2 L'émergence de partenariats opérationnels
u

Le champ des partenariats Banques-FinTechs est évidemment très


large et s'étend de jour en jour. Il serait donc vain de vouloir en rendre
compte de façon exhaustive.
Nous nous contenterons de tracer quelques perspectives en nous
appuyant sur des exemples, pris dans les différents métiers bancaires.
1OO 1 LA RÉVO LU TI ON F 1N T ECH

1 Du côté du crowdfunding et du financement alternatif 1

Dans ces domaines, alors que la compétition est à peine engagée, les
initiatives se multiplient 27 mais l'heure de la consolidation viendra sans
doute. Il est probable que certaines classes d'actifs se développeront
plus rapidement que d'autres. D'ores et déjà les prêts, aux entreprises
comme aux particuliers, progressent exponentiellement, alors que
les émissions de fonds propres semblent stagner. Sur chaque classe
d'actifs, il est vraisemblable que ne subsisteront que deux ou trois
opérateurs, tout au plus, au terme d'un processus de sélection et de
consolidation.

Quelles classes d'actifs, quels opérateurs seront les vainqueurs de


la compétition qui s'engage ? Ces vainqueurs ont-ils vocation à être
rachetés, comme cela s'est produit pou r les courtiers en ligne par les
acteurs bancaires traditionnels?
Ou bien les accords avec le monde bancaire se multiplieront-ils ? En
effet, les banques peuvent être amenées à refuser un crédit pour des
raisons indépendantes du risque de l'entreprise considérée :
- dossier trop petit pour être rentable,
- choix de stratégie commerciale ou financière {optimisation de
l'utilisation des fonds propres).
c
0
~
"O
•(IJ En pareil cas, le banquier a sans doute intérêt à proposer à cette
CO
a:: entreprise une alternative, en la dirigeant vers une plate-forme de
\0
~
0
N
crowdlending {avec laquelle elle a noué un partenariat) dont les
@ modèles économique et prudentiel sont différents de ceux d'une
......
~
en
·;:: banque.
>
a. En effet, les frontières entre les deux métiers sont poreuses et ces
0
u
deux acteurs auront demain tout intérêt à travailler ensemble.
Pour les banques métamorphosées par la crise financière, le métier
historique de transformation des dépôts en crédits évolue vers une
part plus forte de simple mise en relation entre les entreprises et les
investisseurs, ce qui est justement le métier du « crowdfunding ».

27. Voir Chapitre 1, 1, 2.


1
5 CH UMPÉTER IE NN E, LA FtN TECH IRA- T - ELL E JUSQU À « RU I NER L'ANCIEN » ? 1 101

Les plates-formes apporteraient leur savoir-faire en marketing


digital et un niveau de traçabilité inédit dans la nature des actifs à
financer. De son côté, la finance participative pourrait trouver auprès
des banques une culture de maîtrise du risque et des cohortes
d'épargnants-investisseurs.

C'est ainsi, par exemple, qu'en France Groupama Banque vient


de monter un partenariat avec Unilend, s'engageant à prêter
100 millions€ à des entreprises via la plate-forme.
De même, le partenariat entre ING et Kabbage illustre cette logique,
permettant à ING d'accroître sa capacité de prêter aux PME. Le
partenariat, annoncé en octobre 2015, est consécutif à une prise de
participation d' ING dans Kabbage à l'occasion d' une levée de fonds
de 135 millions$.
Un premier projet est le lancement d'un pilote en Espagne, basé sur
une offre de crédit aux PME pour des montants inférieurs à 100 000 €.
Les entreprises espagnoles clientes d'ING pourront ainsi bénéficier
du système automatisé d'octroi de crédit de Kabbage qui est rapide
et très simplifié. Quant à ING, il lui sera possible de mieux contrôler
son risque, grâce au système de crédit scoring et de suivi du risque
en temps réel fourni par Kabbage. Pour les entreprises déjà clientes
d'ING, il sera ainsi possible de se voir accorder un crédit en moins de
c
~
0 dix minutes.
"O
•(IJ

CO
a::
\0
~
0 1 Dans le domaine de l'épargne et de la gestion d'actifs 1
N
@
......
~
en
·;::
Les plates-formes de gestion automatisées contribuent à banaliser
>
a.
0
une large partie du service à valeur ajoutée qui était, avant leur
u
émergence, réservé aux clients haut de gamme qui le payaient cher.
Mais l'expérience montre qu'une demande pour de l'interaction
personnelle et certains types de transactions spécialisées continue
malgré tout d'exister parmi les différents segments de clientèle.

Afin de demeurer compétitifs face aux plates-formes automatisées,


des acteurs traditionnels de ces métiers ont entrepris de nouer des
partenariats avec des FinTechs opérant de telles plates-formes pour
accélérer le développement de fonctionnalités automatisées, ce qui
102 1 LA RÉVO LUTI ON F1N TECH

leur permet de libérer des forces commerciales pour offrir du conseil


haut de gamme.
Ainsi, des gestionnaires de fortune se mettent en mesure d'offrir des
services spécialisés à forte valeur ajoutée à une base plus large de
clients, tout en améliorant la qualité globale du service à l'ensemble
de leur clientèle, qu'ils peuvent ainsi espérer accroître.

1 ~utilisation du potentiel des données (Big data) 1

Voici un autre domaine générateur de synergies possibles entre


banques et FinTechs. En effet :
- les banques ont des stocks de données gigantesques relatives à
tous les compartiments de leur activité, mais elles éprouvent
des difficultés à les exploiter dans leurs systèmes d' information
souvent si lourds et complexes qu'il est très difficile de les faire
évoluer ;
- en sens inverse, des start-ups ont su développer des outils
performants de traitement pour des données de masse, mais elles
manquent de matière première (données) pour les nourrir de
manière à en extraire des produits et services innovants.

Associer les forces des deux protagonistes semble évidemment


c
0 rationnel. Le secteur de la sécurité - crédit ou paiement - est un des
~
"O
•(IJ premiers candidats naturels à de telles coopérations, car la puissance
CO
a:: et la pertinence des systèmes de scoring sont déterminées par la
\0
~
0
N
possibilité de les affiner avec le traitement du plus grand nombre
@ possible de cas de figure .
......
~
en
·;:: Ce type de partenariat est déjà envisagé par plusieurs banques
>
a. françaises, même si sa mise en place nécessite des précautions car il
0
u
doit être suffisamment équilibré pour qu'aucun des deux acteurs ne
risque de se retrouver lésé.

3.1.3 L'exemple de la blockchain

1 De quoi s'agit-il ? 1

Dégagé de sa composante sulfureuse, le Bitcoin, la technologie


sous-jacente dite blockchain, ou, plus généralement, Digital Ledger
5 CH UMPÉ TER IE NN E, LA FtN TECH IRA-T-ELL E JUSQU'À « RU I NER L'ANCIEN » ? 1 103

Technology (OLT), présente des potentialités très intéressantes pour


la gestion de nombre de process nécessitant la confiance.

La b/ockchain est un système distribué de consensus qui autorise


des transactions et d'autres opérations à être exécutées de manière
sécurisée et contrôlée sans qu' il y ait une autorité centrale de
supervision, cela simplement (en simplifiant grossièrement) parce
que les transactions et toutes les opérations sont validées par le
réseau entier.

Dans la banque et la finance, la blockchain est susceptible d'apporter


de profondes simplifications des processus existant tout en
permettant une amélioration de la conformité et de la qualité de ces
processus, avec :

-+ Des réductions de coûts drastiques allant au-delà d'une


digitalisation complète des supports papiers actuels, par exemple:
• exécution automatique de clauses contractuelles ;
• suivi des reconnaissances de dettes valides tant que non
remboursées ;
• suivi simplifié des collatéraux;
è • vote digital;
0
~
"O
•(IJ
• traçabilité des valeurs (diamants, titres ... );
CO
a:: • réconciliations automatiques;
\0
~
0
N • alternative aux systèmes de place et aux systèmes d'échanges
@
...... actuels, coûteux à développer et à utiliser, lourds à maintenir.
~
en
·;::
>-
a.
u
0 -+ Une amélioration de la « compliance » et de la traçabilité des
informations et des données composant ces informations, avec
des usages tels que :
• utilisation de la blockchain comme preuve en tant que piste
d'audit ;
• intégration automatique de l'application des lois et
réglementations dans les processus bancaires;
• ségrégation des avoirs ;
• suivi des adresses.
104 1 LA RÉVO LUTI ON F 1N T ECH

1 De multiples initiatives 1

Les différents acteurs de la sphère bancaire et financière sont de


façon croissante très présents dans les réflexions et travaux sur la
blockchain.
Comme il s'agit d'un sujet a priori très éloigné des préoccupations
et compétences traditionnelles des banques, c'est un domaine qui
donne lieu à nombre de coopérations et partenariats entre Banques
et FinTechs.

a/ Des consortiums d'acteurs installés dans le monde de la finance se


créent en partenariat avec des start-ups pour se posi'tionner sur le
développement de cette technologie :

• Huit grandes banques internationales (JPMorgan, Barclays, BBVA,


Credit Suisse, Commonwealth Bank of Australia, State Street,
Royal Ban k of Scotland, et UBS) ont initié à la fin de l'été 2015
un consortium regroupé derrière R3, une start-up spécialisée
dans la blockchain basée à New York et Londres. Elles ont
rapidement été rejointes dans le courant de l'automne par une
quinzaine d'autres banques, dont Société Générale, BNP Paribas
et Natixis. Une équipe mixte composée d'experts de R3 et des
c
0
banques partenaires est cha rgée de définir une architecture et de
~
"O
•(IJ
travailler sur les applications commerciales possibles. L'objectif est
CO
a:: d'accroître la sécurité, de réduire le taux d'erreurs et de diminuer
\0
~
0
significativement les coûts.
N
@
......
~
en • De même, plusieurs grands acteurs, notamment de la finance
·;::
> - Visa, Nasdaq, Citi Ventures, Capital One, Fiserv et Orange-, ont
a.
0
u
investi 30 millions $ dans une autre start-up, Chain . Basée à San
Francisco, Chain développe des solutions technologiques basées
sur les réseaux de blockchains pour permettre aux banques et
institutions de la finance de concevoir, déployer et opérer des
systèmes plus performants pour échanger et transférer des actifs
financiers. Il s'agit pour les nouveaux partenaires de Chain de
remplacer les systèmes actuels, jugés complexes, coûteux et mal
sécurisés.
1
5 CH UMPÉTER IE NN E, LA FtN TECH IRA- T - ELL E JUSQU À « RU I NER L'ANCIEN » ?1 105

• En France, un groupe de travail de Place a été créé le 16 décembre


2015 sous l'égide de la Caisse des Dépôts. Il rassemble des banques
(BNP Paribas, le groupe BPCE et le Crédit Agricole), des assureurs
(CNP Assurances et AXA), le Pôle de compétitivité « Finance
Innovation », l'association Croissance Plus, le Conservatoire
National des Arts et Métiers et plusieurs start-ups spécialisées dans
cette technologie (Blockchain Solutions, Cellabz, Paymium). La
démarche vise à défricher les opportunités qu'offre cette nouvelle
technologie, ses défis techniques, réglementaires ou juridiques.

b/ D'autres lancent de premières expériences en s'appuyant sur les


technologies de jeunes pousses :

1111- Santander lnnoVentures, le bras armé de la banque pour prendre


des participations dans les entreprises innovantes 28 a investi
4 millions $ dans la start-up Ripple en octobre 2015. L'objectif de
Santander est d'utiliser l'API développée par Ripple autour de la
technologie blockchain afin d'améliorer le service à ses clients,
notamment les entreprises. La première réalisation serait la
connexion interne de dix des centres de trésorerie internationale
de la banque afin de permettre aux clients de réaliser des
paiements instantanés au sein et entre les zones géographiques
c concernées.
0
~
"O
•(IJ

CO 1111- Visa et DocuSign (start-up dans laquelle Visa a investi en 2014) ont
a::
\0
~
annoncé, fin octobre 2015, le lancement d'une expérimentation
0
N utilisant la technologie de la blockchain dans le domaine de la
@
......
~
location de voitures. Le projet a pour ambition de numériser
en
·;::
> l'ensemble du process, depuis le contrat de location, l'assurance et
a.
u
0
les autres frais annexes (péages, parkings ... ) jusqu'à la digitalisation
de la signature et du paiement de la location.

Une identité numérique unique est donnée à la voiture et


enregistrée dans une blockchain, laquelle prend ensuite en compte
l'ensemble des transactions afférentes à la « vie » de ce véhicule,
permettant d'enchaîner les différentes étapes, validées lorsque

28. Voir ci-après : 3.2.


106 1 LA RÉVO LUTI ON F 1N T ECH

nécessaires par des « smart contracts ». L'ensemble est relié à


l'e-signature DocuSign du client et intégré avec la technologie de
paiement Visa permettant au client de régler de manière simplifiée
l'ensemble des frais impliqués par la location.

1 Encore du chemin à faire ... 1

Cet engouement pour la b/ockchain ne doit néanmoins pas masquer le


fait que l'on n'en est encore qu'aux balbutiements quant à l'utilisation
opérationnelle de cette nouvelle technologie. Selon les experts, il
faudra probablement attendre encore plusieurs années avant qu'une
masse critique d'institutions financières ne se mette d'accord pour
faire table rase du passé. D'autant que des questions restent ouvertes
en ce qui concerne la capacité des blockchains à traiter dans de bonnes
conditions de sécurité des flux massifs de transactions sensibles, de
même que sur la faculté qu'auront les grandes institutions financières
à modifier radicalement la manière dont elles opèrent depuis des
décennies. Par ailleurs, il sera sans doute nécessaire de mettre en
place une gouvernance pour ces nouvelles« routes » d'échange et de
circulation des capitaux, ainsi qu'un minimum de normalisation, en
sorte de protéger les actifs sous-jacents ainsi que les entités qui les
c
possèdent ou les prennent en charge pour les transférer.
0
~
"O
•(IJ

CO
a:: 3.1.4 Vers la FinTech 2.0 ?
\0
~
0
N
@ Dans l'étude parue en 2015, « The Fintech 2.0 Paper: rebooting
......
~
en financial services », Santander lnnoVentures et Oliver Wyman
·;::
> présentent les perspectives du potentiel de collaboration futur entre
a.
0
u
banques et FinTechs.
L'analyse part du constat que la première phase de développement
de produits bancaires innovants (dite FinTech 1.0) s'est limitée à des
offres relativement simples comme les wallets ou le crowdfunding,
avec assez peu d' impact direct sur les banques.
Selon les auteurs, les conditions d'un changement plus significatif
seraient désormais réunies - notamment grâce à l'émergence
de l' open data, l'usage croissant d'APls « ouvertes » et du cloud
computing, ainsi que le renforcement de la pression sur la réduction
1
5 CH UMPÉTER IE NN E, LA FtN TECH IRA- T - ELL E JUSQU À « RU I NER L'ANCIEN » ? 1 107

des coûts dans la banque - pour amorcer le virage débouchant sur


la FinTech 2.0, c'est-à-dire des offres entrant plus profondément au
cœur des processus de middle et de back-offices bancaires.
En effet, les FinTechs et les banques ont mutuellement intérêt à
coopérer dans ces domaines où les banques peuvent profiter de
l'agilité et de l'inventivité des FinTechs, lesquelles trouveraient de leur
côté avantage à bénéficier des effets d'échelle et de masse critique
des organisations bancaires pour faire fructifier leurs innovations.
Cette thèse est étayée par plusieurs exemples dans le rapport
Santander-Oliver Wyman, pris dans les différents domaines de
l'activité des banques, et s'appuyant principalement sur le potentiel
encore peu exploité de l'Internet des Objets et de la Blockchain (cf.
ci-dessus}, dans des activités aussi variées que la gestion des comptes,
le crédit immobilier, ou le Trade Finance (cf. Encadré}.

Les gains anticipés sont impressionnants, se chiffrant en dizaines


de milliards de $ chaque année. Ainsi, l'utilisation de la Distributed
Ledger Techno/ogy dans les paiements internationaux, les marchés
de valeurs mobilières et les process de conformité réglementaire
permettrait aux banques de réaliser, selon les auteurs de l'étude, des
économies annuelles de 15 à 20 milliards$ d'ici à 2022.

c
0
Encadré - Simplifier drastiquement le Trade Finance
~
"O
•(IJ

CO
a:: Le « Trade Finance » (c'est-à-dire les techniques de financement
\0
~
0
documentaires du commerce international} est l'un des
N
@ processus les plus lourds et complexes de la banque d'entreprise.
......
~
en
Il nécessite beaucoup de contrôles manuels pour vérifier la
·;::
>
a. légitimité à agir d'un client et de ses partenaires commerciaux,
0
u ainsi que pour s'assurer que les biens concernés par l'échange
ont effectivement changé de mains. Pour cela les banques
doivent entretenir des middle-offices coûteux en personnel et
assumer des risques financiers élevés.

Pou r les auteurs de l'étude Santander-Oliver Wyman, la


combinaison des technologies de l'Internet des Objets et des
« smart contracts » rendus possibles par les Distributed Ledgers

.../ ...
108 1 LA RÉVO LUTI ON F 1N T ECH

.../ ...

{cf. ci-dessus les développements sur la b/ockchain) est de nature


à réduire drastiquement les coûts de cette activité.

Sans entrer dans le détail de ces techniques de financement


complexes, deux illustrations d'améliorations concrètes :
- les données GPS alerteraient automatiquement la banque
émettrice du crédit dès que la cargaison concernée arrive au
port, et des connecteurs placés sur les biens à livrer pourraient
fournir des informations sur leur état,
- l'accès en temps réel aux détails de l'échange rend possible
l'utilisation de « smart contracts » numériques permettant de
vérifier en temps réel que les conditions prédéfinies sont bien
remplies et de pouvoir ainsi enclencher sans risque la suite
des processus de livraison et de règlement.

3.2 Le développement de l'investissement dans une logique


de Corporate Venture

3.2. 1 De quoi s'agit-il ?


c
0
~
"O
Dans la plupart des industries {telcos, chimie ... ) confrontées à un
•(IJ

CO double choc technologique et compétitif, on voit se développer des


a::
\0
~
initiatives de Corporate Venture, c'est-à-dire de prises de participation
0
N
{généralement minoritaires) par des acteurs installés dans des
@
...... «jeunes pousses» innovantes, en privilégiant une vision stratégique
~
en
·;::
> et industrielle plutôt qu'une logique purement financière.
a.
0
u
Cette stratégie de prise de participation minoritaire est souvent
préférée au rachat pur et simple qui, s'agissant de start-ups, présente
plusieurs inconvénients :
- les synergies organisationnelles sont rares en raison de la
disproportion de taille;
- le rachat pur et simple conduit la plupart du temps au départ plus
ou moins rapide de l'équipe dirigeante qui, souvent, constitue le
cœur de la valeur de la start-up ;
1
5 CH UMPÉTER IE NN E, LA FtN TECH IRA- T - ELL E JUSQU À « RU I NER L'ANCIEN » ?1 109

- outre son équipe dirigeante, la jeune pousse laisse souvent


dans l'opération d'intégration qui suit presque fatalement une
acquisition l'essentiel de son fonds de commerce et de sa capacité
d' innovation ;
- le rachat empêche en général la FinTech de se développer au-delà
de l'écosystème de la banque acheteuse, car elle est dès lors
perçue comme une concurrente par les autres banques.

3.2.2 À quoi ça sert ?

Les apports du Corporate Venture sont multiples :

-+ Protéger le fonds de commerce/se développer.


-+ Acheter de la capacité d'innovation pour éviter des
investissements R&D internes.
-+ Bénéficier du deal flow comme veille sur le marché.
-+ Un ticket pour voir avant une éventuelle décision d'achat.
-+ Contribuer à sensibiliser/mobiliser l'interne sur les sujets
d'innovation.
-+ Créer des contacts et de l'échange avec des entrepreneurs et des
idées/approches nouvelles.
c
0
~ -+ Mettre en place des synergies commerciales avec les start-ups
"O
•(IJ

CO
pour élargir l'offre de produits et services.
a::
\0
~
-+ Sécuriser des partenariats avec des acteurs externes, en
0
N
renforçant les liens.
@
......
~
en
·;::
> Appliqué au domaine de la banque, on peut y ajouter les bénéfices
a.
0
u spécifiques suivants :

Un levier pour enrichir l'offre de la banque et ainsi contrer la


désintermédiation, mais aussi créer des opportunités de PNB en
améliorant le « time to market ».

Un moyen de projeter une image positive de la banque, lui


permettant de renforcer son image de « bon élève » dans le
financement de l'économie en aidant les PME innovantes, voire de
donner un gage de bonne volonté à la Commission européenne,
110 1 LA RÉVO LUTI ON F 1N T ECH

toujours prompte à soupçonner les banques de cartellisation, en


nouant des partenariats avec de nouveaux entrants.

Une solution pour pouvoir aller à moindre coût et moindre risque


sur des territoires (fonctionnels ou géographiques) difficilement
accessibles dans le cadre de l'organisation traditionnelle d'un
établissement bancaire.

Un élément de stimulation de l'innovation interne, en


fournissant un appui à l'évolution des structures internes vers
une organisation et des projets plus agiles, une corde de plus au
dispositif global dédié à l'innovation, ou même en favorisant un
potentiel d'implication et de motivation des salariés (parrainage,
co-investissement ... ).

3.2.3 Comment peut-on s'y prendre ?

Deux modalités techniques principales sont envisageables pour


investir dans des start-ups en mode Corporate Venture :
-+ investir seul, soit en direct, soit via une structure interne (détenue
à 100 % par le groupe), soit encore par l'intermédiaire d'une
c société de gestion réglementée éventuellement captive;
0
~
"O
•(IJ -+ co-investir avec des partenaires, en général du même écosystème,
CO
a:: dans un fonds existant ou à créer.
\0
~
0
N
@
......
Le choix de l'une ou l'autre de ces modalités dépend de nombreux
~
en
·;:: facteurs tels que l'appétit au partage du risque et de la décision
>
a.
0 d'investir, la capacité interne à gérer un fonds, le degré d'exclusivité
u
souhaité dans la relation commerciale avec les start-ups ou encore
la volonté de pouvoir éventuellement monter ultérieurement à leur
capital.

Au-delà des modalités techniques, le plus important est le mix


d' ingrédients permettant à la greffe de prendre car mettre en place et
surtout faire vivre un partenariat capitalistique entre une très grande
entreprise et une jeune pousse n'a rien d'évident. À cet égard, deux
facteurs sont critiques pour assurer le succès du Corporate Venture :
1
5 CH UMPÉTER IE NN E, LA FtN TECH IRA- T - ELL E JUSQU À « RU I NER L'ANCIEN » ? 1 111

- la gouvernance, notamment la nécessité d' un sponsorship de haut


niveau et le bon panachage, dans le comité d'investissement, entre
les gens de métier et les professionnels de la gestion ;
- la mobilisation de l'interne, l'implication des opérationnels du
métier (pour guider, accompagner la start-up dans les méandres
des systèmes de décision d' une grande entreprise) étant aussi
indispensable que difficile à réaliser.

3.2.4 Où en est-on dans le domaine de la banque et de la finance ?

Nous avons vu 29 que des initiatives d' investissements dans les


FinTechs commençaient à se déployer:
- tant du côté des nouveaux entrants (PayPal, Google, Apple
notamment) dont les investissements massifs dans des start-ups
ont pour objectif de se doter rapidement des compétences et des
outils leur permettant de venir concurrencer les banques,
- que de celui des acteurs historiques, comme les« schemes »(Visa,
MasterCard et Amex sont de gros investisseurs) ou comme certains
acteurs bancaires qui ont décidé de se lancer: les espagnoles BBVA
et Santander ont respectivement créé des fonds de Corporate
Venture dotés chacun de 100 millions € ; Citibank dispose d'une
c
équipe de plusieurs dizaines de personnes (Citi Ventures) installée
0
~ dans la Silicon Valley et dédiée à l' investissement dans l'innovation
"O
•(IJ

CO bancaire ; Bank of America est également très active en la matière.


a::
\0
~
0
N L'exemple de BBVA est intéressant car cette banque a été pionnière
@
...... en Europe, en commençant par réaliser un important investissement
~
en
·;::
>
avec l'acquisition en mode « classique », pour 117 millions $, en
a.
u
0 février 2014, de la banque américaine en ligne Simple. Puis, dans le
sillage du lancement d'un fonds de Corporate Venture, à peu près
à la même époque, la banque est entrée au capital de plusieurs
start-ups technologiques afin de profiter de leur expérience pour se
positionner favorablement sur ce marché. Fin 2015, elle a ainsi pris
une participation d'environ 30 %- sous la forme de co-investissement
avec Woodford lnvestment Management et la société de gestion

29. Voir Chapitre 1, Il, 1.2.


112 1 LA RÉVO LUTI ON F 1N T ECH

d'actifs Toscafund - dans la FinTech britannique Atom Bank, pour


s'offrir une tête de pont sur le marché anglais de la banque en ligne,
un des plus dynamiques en Europe.
Mais cela reste encore peu. Le rapport précité, publié en
novembre 2015 par l'Efma et lnfosys, estime qu'à peine 10 % des
banques ont dédié spécifiquement des fonds de Corporate Venture
pour investir dans des start-ups {voir quelques exemples dans
l'encadré ci-après).

Cependant, l'exercice de notre pratique professionnelle nous permet


de constater que plusieurs grands acteurs du marché français
montrent un intérêt de plus en plus vif pour étudier les modalités
concrètes de ce type de développements, réalisant sans doute que le
Corporate Venture pourrait constituer un réel appui dans leur combat
pour conserver le leadership sur le marché des services bancaires.
La principale raison d'agir est l'urgence, déjà évoquée ci-dessus, de
contrer les nouveaux entrants les plus puissants dont les initiatives
se multiplient dans la période récente. Or, pour l'instant, ce sont
plutôt les PayPal et autres GAFA qui sont très actifs, bien plus que les
banques, pour nouer des partenariats capitalistiques avec ces jeunes
pousses.

c D'autant que, pour les banques, le contexte est favorable à de telles


0
~ initiatives :
"O
•(IJ

CO
a:: o Après plusieurs années de foisonnement un peu anarchique,
\0
~
0 l'environnement des start-ups innovantes du monde de la FinTech
N
@ a tendance à se stabiliser - la sélection naturelle ayant fait son
......
~
en œuvre, les meilleurs projets se sont transformés en belles
·;::
> réalisations -, et à s'élargir à l'échelle de l' Europe : le gisement
a.
0
u
des jeunes pousses innovantes et compétitives a désormais acquis
suffisamment de consistance pour faire naître des opportunités
d'investissement réellement attractives.
o Les pouvoirs publics favorisent souvent ce type de partenariats.
Ainsi, en France, l'article 15 de la loi de Finances rectificative pour
2013 a créé un dispositif législatif visant à encourager les grandes
entreprises au Corporate Venture, en leur permettant d'amortir sur
5 ans leurs souscriptions au capital de PME innovantes, effectuées
directement ou indirectement via un fonds d'investissement,
1
5 CH UMPÉTER IE NN E, LA FtN TECH IRA- T - ELL E JUSQU À « RU I NER L'ANCIEN » ? 1 11 3

atténuant de ce fait le coût en fonds propres, paramètre crucial


dans les activités bancaires, de tels investissements.

Encadré - Trois exemples de Corporate Venture bancaire

0 Le fonds « Santander lnnoVentures » a été lancé en


juillet 2014, avec un objectif affiché de collaboration et de
partenariat avec de jeunes pousses de la banque et de la
finance. Doté de 100 M$ et appartenant à 100 % à Santander,
il est basé à Londres mais son champ d'action est mondial.
Ses centres d'intérêt principaux sont la distribution digitale
de services financiers, le paiement dans le e-commerce,
les services de e-investissements financiers, ainsi que les
« Big Data analytics ». Parmi les principaux investissements
réalisés, on peut citer Monitise (solutions de mobile banking)
et MyCheck (services de paiement mobile et de fidélité).

8 La National Australia Bank a mis en place, en juillet 2015, NAB


Ventures, un fonds de 50 MA$ consacré à l'investissement
dans la FinTech. Le fonds fait partie de NAB Labs, une
entité dédiée à l'innovation qui a pour mission de diffuser
à l' intérieur de NAB une culture de l'innovation orientée
c client.
0
~ NAB Ventures a deux objectifs principaux :
"O
•(IJ

CO
a::
- pouvoir se procurer un accès rapide aux compétences, à
\0
~
la technologie, à la propriété intellectuelle et aux produits
0
N
@
pouvant être déployés tant à l'intérieur de la banque que
...... dans son offre client ;
~
en
·;::
> - accroître l'accès et la compréhension des équipes de NAB
a.
0
u s'agissant des modèles économiques et des technologies
émergents. Les domaines ciblés plus particulièrement sont
les plates-formes mobiles, les paiements et les analyses de
données.

@ En créant Citi Ventures en 2010 à Palo Alto dans la Silicon Valley,


Citigroup a été pionnier dans la vague récente de Corporate
Venture dans les services financiers aux États-Unis. Depuis, la

.. ./. ..
114 1 LA RÉVO LUTI ON F 1N T ECH

.../ ...

société a réalisé 21 investissements, principalement dans le


Big Data, les paiements dans le commerce, les technologies
financières et la sécurité. Les fleurons de son portefeuille
sont notamment Betterment et Square. Selon CB lnsights,
Citi est la première banque américaine par le nombre
d'investissements dans la FinTech sur la période 2009-2015.
Source: d'après le rapport Efma-lnfosys précité.

3.3 L'émergence de nouveaux écosystèmes

Pour faciliter l'exploitation de ces potentiels de synergie, des


écosystèmes favorables sont en train d'émerger sous l'impulsion
combinée des sphères publique et privée.
En effet, de même que le reste de la Tech, la FinTech est de plus en
plus considérée comme un atout stratégique dans le positionnement
des économies les unes par rapport aux autres. En l'occurrence,
c'est un élément à part entière de la lutte entre places financières
(Londres/Berlin/Paris au premier chef).

c
0
~ 3.3. 1 L'exemple de la France
•(IJ

CO
a::
\0
~
Il illustre bien le phénomène d'accélération de l'intérêt autour de la
0
N
@
Fin Tech, qui se cristallise dans un réseau d' institutions dynamiques et
...... se caractérise par des initiatives nombreuses des différents acteurs
~
en
·;::
> du marché.
a.
0
u

Le Pôle Finance Innovation, pilier de l'écosystème français


de la Fin Tech

Fort d'un réseau de plus de 350 membres, publics et privés, le


Pôle FINANCE INNOVATION (PFI) fédère les acteurs de la Banque,
de !'Assurance, de la Gestion d'Actifs, des Métiers du Chiffre et du
Conseil, de l'lmmobilier, de !'Économie Sociale et Solidaire, de la
Recherche, ainsi que les Collectivités locales et les Pouvoirs Publics.
1
5 CH UMPÉTER IE NN E, LA FtN TECH IRA- T - ELL E JUSQU À « RU I NER L'ANCI EN » ?1 11 5

Pôle de compétitivité mondial, il mène depuis sa création, en 2008,


des actions concrètes pour accélérer le développement de projets
innovants dans le secteur bancaire et financier, sur des thématiques
à forts enjeux économiques, sociétaux et environnementaux, au
service de la croissance et de l'emploi.
En pratique, le Pôle lance deux fois par an des appels à projet sur
des thèmes choisis de l'activité bancaire et financière afin de drainer
aussi largement que possible les initiatives innovantes en cours de
développement. Ces projets (plus de 400 dossiers reçus en 2015)
sont analysés dans le détail par les équipes du Pôle et, pour les plus
intéressants d'entre eux, ensuite soumis à labellisation par un comité
composé d'experts.
Une fois la labellisation acquise, les start-ups sont accompagnées
dans la durée par les équipes du Pôle, en relation avec les différents
incubateurs et accélérateurs existants, pour les aider notamment dans
leurs recherches de fonds et de partenariats avec les professionnels
du métier (essentiellement banques et assureurs).
Le PFI, colonne vertébrale de l'écosystème en cours de développement
sur la Place de Paris visant à créer des synergies entre les acteurs
traditionnels du monde bancaire et financ ier et les FinTechs, organise
également des manifestations publiques à forte visibilité, comme
l'initiative Fin&Tech Community (cf. Encadré).
c
0
~
"O
•(IJ

CO
Encadré- L'initiative Fin&Tech Community
a::
\0
~
0
N Jean-Hervé Lorenzi, Président du Pôle FINANCE INNOVATION a
@
...... réuni le 24 novembre 2015 à Bercy, à l'occasion de la deuxième
~
en
·;:: édition de FIN&TECH COMMUNITY, l'ensemble des acteurs du
>
a.
0 monde de la Finance autour d' un objectif commun : permettre à
u
la France de prendre le leadership de l'innovation financière en
soutenant et accompagnant sur tout le territoire les FinTechs les
plus innovantes.
À cette occasion, le Pôle FINANCE INNOVATION a labellisé
quarante-quatre entreprises. Le bilan pour 2015 s'élève ainsi à
près de quatre-vingts FinTechs labellisées par le Pôle sur la base
de 3 critères : l' innovation, la crédibilité et l'enjeu stratégique .

.../ ...
116 1 LA RÉVOLUTION F 1N T ECH

.../ ...

Le label affiche trois promesses : la visibilité en France et à


l'international, l'accès à un premier business ou un financement
public ou privé, une offre de prestations de conseils (juridique,
financière, marketing, commercial...) grâce aux 10 partenaires
FIN& TECH CROISSANCE, soit plus de 200 jours offerts pour aider
les jeunes pousses labellisées à structurer leur offre.
Pour soutenir cette démarche et développer les initiatives
prometteuses, le Pôle a choisi cette année de décerner deux
prix:
- le« Prix de la FINTECH de l'année», attribué à la société ASTON
iTrade, plate-forme en ligne collaborative de valorisation du
poste clients et fournisseurs dédiée aux PME/TPE, assureurs-
crédit, et financeurs (banques, factors, fonds), et
- le « Prix du public », dont le lauréat est la jeune pousse
« StudentBackr », plate-forme de prêt participatif dédiée aux
étudiants.

Jean-Paul Planchou, Vice-Président du Conseil Régional d'Île-de-


France, a conclu la manifestation en déclarant : « Cette journée
a été très dense sur l'implication collective de l'écosystème de
c
0 la Finance mais aussi des Collectivités territoriales. Quant à la
~
"O
•(IJ Région Île-de-France, elle héberge un grand nombre de FinTechs
CO
a:: d'excellence, bénéficiant ainsi des compétences des ingénieurs,
\0
~
0
N
chercheurs et entrepreneurs issus de toute la France. Cesstart-ups
@
......
se développent grâce à un écosystème impliqué d'incubateurs,
~
en
·;:: grands groupes, collectivités et clusters très dynamiques qui
>
a.
0 ont résolument pris le virage numérique déterminant pour les
u
prochaines années ».

Plusieurs organismes défendent les intérêts des diverses


composantes de la Fin Tech

Ces différents organismes s' inscrivent dans la complémentarité avec


le Pôle Finance Innovation dont le rôle institutionnel de labellisation
et d'accompagnement opérationnel des premiers pas des jeunes
1
5 CH UMPÉTER IE NN E, LA FtN TECH IRA- T - ELL E JUSQU À « RU I NER L'ANCIEN » ? 1 11 7

pousses (cf. ci-dessus) se double d' une fonction plus informelle de


carrefour des rencontres entre tous les acteurs de l'écosystème
(groupes de travail, organisations de colloques, rédaction de « livre
blancs»).

Deux principales associations professionnelles regroupent celles des


FinTechs qui sont régulées spécifiquement 30.

..,. L'Association Française des Établissements de Paiement et de


Monnaie Électronique (AFEPAME), créée en 2010, regroupe 19
des 22 établissements de paiement ou de monnaie électronique
agréés en France par I' ACPR. L'AFEPAME est membre de l'AFECEI 31
et, à ce titre, est une association professionnelle représentative
du secteur. Depuis 2013, l'AFEPAME est membre de l'association
EPIF 32 qui représente au niveau européen les intérêts des
établissements de paiement non bancaires .

..,. Financement Participatif France (FPF) est une association loi de


1901 ayant pour objectif la représentation collective, la promotion
et la défense des droits et intérêts des acteurs de la finance
participative (appelé également crowdfunding) - notamment
auprès des autorités réglementaires - pour faire progresser le
c
financement de projets (entrepreneuriaux, culturels, sociaux,
0
~ humanitaires, etc.) par les citoyens, en particulier en France.
"O
•(IJ

CO
a::
\0 Par ailleurs, l'association France FinTech, créée en juin 2015, a pour
~
0
N objet la prise en charge des intérêts collectifs de l'ensemble de la
@
...... profession, indépendamment des métiers, que les acteurs soient
~
en
·;:: ou non régulés. France FinTech « fédère les entreprises utilisant des
>
a.
u
0 modèles opérationnels, technologiques ou économiques innovants
et visant à traiter des problématiques existantes ou émergentes de
l'industrie des services financiers. »

30. Voir Chapitre 1, Il, 2.1.


31. Association Française des Établissements de Crédit et des Entreprises
d' 1nvestissement.
32. European Payment Institutions Federation.
11 8 1 LA RÉVO LUTI ON F1N TECH

Dans ce cadre, elle s'assigne les principales missions suivantes :

- la promotion de la FinTech française en France et à l' étranger;

- la facilitation du partage des expériences, des connaissances et de


l'information au sein de la communauté;

- les relations avec les autres associations du secteur digital en


France et à l'étranger.

À fin 2015, une cinquantaine de sociétés représentant les principales


composantes du secteur avaient rejoint l'association.

1 De très nombreuses initiatives du marché 1

Il serait évidemment impossible d'en rendre compte de manière


exhaustive. Quelques exemples permettront de mesurer la richesse
et le foisonnement des initiatives, qui ont d'ailleurs connu une forte
accélération au cours de l'année 2015 :

a/ L'organisation désormais régulière par les banques et les sociétés


d'assurance de séances de hackatons et autres challenges
permettant de faire travailler leurs équipes avec des start-ups
è
~
0
pour faire assaut d'esprit d'innovation afin de mettre au point de
"O
•(IJ

CO
nouveaux produits.
a::
\0
~
0
N b/ La multiplication des annonces de création d'incubateurs et
@
...... d'accélérateurs orientés vers la FinTech émanant :
~
en
·;::
>-
a. tant des acteurs du private equity (Truffle Capital, Seventure
0
u Partners, Axa Factory),

- que des professionnels des métiers de la banque et de la


finance. Deux exemples parmi d'autres :

..,. Le Crédit Agricole a lancé successivement une plate-forme


ouverte aux développeurs pour créer des applications
destinées aux clients de la banque (CA Store), puis « Le
Village », un incubateur hébergeant des jeunes pousses de
tous les métiers de la Tech.
1
5 CH UMPÉTER IE NN E, LA FtN TECH IRA- T - ELL E JUSQU À « RU I NER L'ANCIEN » ? 1 11 9

.... BNP Paribas a pris l'initiative, en décembre 2015, de créer en


collaboration avec !'Atelier un accélérateur FinTech dédié en
France. Outre un financement pouvant atteindre 100 000 €,
les composantes habituelles des dispositifs de ce genre sont
au rendez-vous : accompagnement par une équipe d'experts,
boîte à outils, hébergement totalement gratuit dans le
prestigieux « WAI » 33 de BNP Pari bas, situé dans le centre de
Paris, événements destinés à favoriser la création d' un réseau
de relations. Mieux encore, chacune des start-ups retenues
se verra attribuer un « parrain » issu de l' une des entités du
groupe bancaire. Loin d'être symbolique, son rôle consistera
à établir une démarche de co-innovation, dans laquelle les
deux partenaires conviendront en commun, au lancement
du programme, de la réalisation d'un prototype (« POC » -
« Proof of Concept »).

Il est probable que l'accélération de la construction de cet écosystème


favorable à l'éclosion des jeunes pousses n'a pas été étrangère à
la multiplication, à l'automne 2015, de très belles levées de fonds
concernant des start-ups de la FinTech française : Prêt d' Union
(crowdfunding) pour 31 millions€, SlimPay (solution de paiement sur
le Web) pour 15 millions€, ou encore le Compte Nickel (10 M€).
c
0
~
"O
Il faut ajouter à ces opérations la prise de contrôle de deux systèmes
•(IJ

CO de cagnotte par deux banques françaises : Leetchi tombé dans


a::
\0
~
l'escarcelle du Crédit Mutuel Arkéa et Le Pot Commun dans celle de
0
N S-Money, filiale du groupe BPCE, sans oublier le rachat du Persona!
@
......
~
Finance Manager Fiduceo par Boursorama, filiale de banque en ligne
en
·;::
> du groupe Société Générale.
a.
0
u

3.3.2 La dimension européenne

Sans parler de Londres dont l'implication dans la Fin Tech est ancienne
et bénéficie du renom et de l'activité de sa place financière, les
différents marchés nationaux d' Europe continentale connaissent des

33. We Are Innovation.


120 1 LA RÉVO LUTI ON F1N TECH

évolutions très analogues à ce que l'on peut constater sur la Place


française.
Dans ce domaine, les institutions européennes elles-mêmes sont
très mobilisées. On a déjà évoqué l'œuvre législative de l'Union
européenne dans le domaine des paiements et son incessant souci
de pousser à toujours plus d'innovation et de concurrence. La
Banque Centrale Européenne est également très active en la matière,
avec une focalisation toute particulière sur les enjeux de sécurité, les
risques étant une composante essentielle des métiers de la banque
et de la finance.
D'une manière générale, les pouvoirs publics européens sont très
attentifs aux développements touchant la FinTech, perçue comme un
facteur de croissance économique, de meilleur service aux citoyens
européens, mais aussi d'inquiétudes que l'on sent monter, liées en
particulier à la crainte d'un trop grand imperium américain.

Un rapport 34 publié en octobre 2015 par les associations françaises


Croissance Plus, PME Finance, et soutenu par le cabinet d'avocats
Kramer Levin, dresse un tableau inquiétant des risques qu'engendre
la domination nord-américaine sur la FinTech, notamment pour ce
qui est de la technologie des blockchains. Pour faire face à cette
menace, les auteurs suggèrent plusieurs mesures qui seraient de
c nature à renforcer l'écosystème de la FinTech européenne :
0
~
"O
•(IJ

CO
a::
-+ La constitution d'une agence européenne, sur le modèle des
\0
~
agences nationales de la recherche, chargée de financer la
0
N production et la diffusion de recherche financière sur les PME-ETI.
@
......
~
Baptisée !'Agence Européenne de la Recherche Financière, cette
en
·;::
> entité aurait pour rôle de produire des analyses approfondies
a.
u
0
concourant à rassurer les investisseurs qui seront ainsi plus incités
à financer les PME-ETI innovantes.

-+ La création dans les grands pays européens d'un Bureau des


FinTechs - notamment en France auprès de l'ACPR - sur le
modèle de I' « Innovation Bureau » au Royaume-Uni {dont le but

34. Déjà évoqué au Chapitre 1, Il, 1.1.


5CH UMPÉTERIEN N E, LA FtN TECH IRA-T-ELLE JUSQU 'À « RUI N ER L'ANCI EN » ? 1 121

est de faciliter l'implantation et le développement à Londres des


start-ups du secteur financier).

~ La mise en place de groupes « Blockchain » hébergés par les


banques centrales nationales et la Banque Centrale Européenne.

c
0
~
"O
•(IJ

CO
a::
\0
~
0
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@
......
~
en
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>
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0
u
c
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•(IJ

CO
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l.D
~
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N
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......
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en
·;::
>
a.
0
u
CO NC LUSIO N

La FinTech a longtemps partagé avec Junie, la fiancée de Britannicus,


le privilège d'osciller, selon l'interlocuteur ou l'époque, entre un excès
d'honneur et une indignité, qu'elle ne mérite d'ailleurs pas plus que
son modèle.
Excès d'honneur lorsqu'on la présente balayant un monde bancaire
si archaïque, si recroquevillé sur ses privilèges et tellement dépourvu
d'idées qu'il serait voué à être emporté par un implacable tsunami
en train d'enfler depuis le fond de la Silicon Valley et de ses émules
européennes.
Indignité lorsque l'on prétend que ce ne sont pas quelques bricoleurs
de paiement, de crédit ou d'épargne qui, du fond d'un garage, vont
inquiéter, ni même impressionner des acteurs à qui leur puissance
financière et la confiance dont les honorent leurs clients confèrent un
imperium inoxydable sur la relation et les services bancaires.

Nous espérons que le présent ouvrage aura permis de mettre en


évidence qu'un tel manichéisme n'est plus de saison, les banques et
c
0
les FinTechs ayant plus de motifs de s'accorder que de se combattre :
~
"O
•(IJ
si elle repose sur des bases équitables, la coopération peut en effet
CO
a:: non seulement être très profitable aux deux parties, mais aussi
\0
~
0
avoir une influence très bénéfique sur la qualité et la richesse de
N
@ l'offre globale de services bancaires et financiers. D'autant que de
......
~
en
nouveaux écosystèmes, plus collaboratifs, sont en train d'éclore sur
·;::
>
a. les différentes grandes places européennes créant les conditions
0
u favorables à la fertilisation croisée des savoir-faire des deux mondes.
Certains disent cependant redouter que la banque ne soit victime
d' « ubérisation », cette affection qui touche les professions
concernées par les formes contemporaines de l'innovation. N'est-ce
pas oublier un peu rapidement que comme Janus 35, en miroir de

35. Dans la mythologie romaine, Janus est un dieu à une tête mais deux visages
opposés, gardien des passages et des croisements, divinité du changement,
de la transition, auquel le mois de janvier est consacré.
124 1 LA RÉ VO LUTION F1N TECH

son visage grimaçant des menaces sur l'emploi ou la profitabilité,


l'ubérisation, cet épouvantail des temps modernes, présente une face
souriante, invitant, et même incitant, les acteurs installés à innover
et enrichir le service offert à leurs clients? Uber lui-même n'a-t-il pas
indirectement engendré une amélioration sans précédent du service
des compagnies de taxis traditionnelles, désormais toutes dotées
d'applications conviviales et de services personnalisés aux clients?
En ce sens l'ubérisation de la banque par les FinTechs est bel et bien
enclenchée et le client exigeant qui sommeille en chacun ne peut que
s'en réjouir.

c
0
~
"O
•(IJ

CO
a::
\0
~
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CHEZ LE MÊME ÉDITEUR

DANS LA COLLECTION ESSENTIEL DE LA BANQUE ET DE LA FINANCE

* Analyse boursière fondamentale - Recherche Actions - Equity Research


Ph. Thomas
* Banque en ligne et le droit {La)
Sous la direction de Éric A. Caprioli, avec les contributions de P. Agosti,
1. Cantero, 1. Choukri et F. Coupez
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* LBO - Montages à effet de levier - Private Equity
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* Marketing bancaire et de l'assurance - Nouvelles tendances
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M. Badoc et E. Trouillaud
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* Offres publiques (Les)
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Formaté typographiquement par DESK (53) :


02 43 01 22 11- desk@desk53.com.fr
La RnTech, coq11eluc;he ou réwolutkln? cet avatar
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va-t-11 vraiment booleverser I& monde flllltr6 d88
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l ·t:jt1:?.!I ,:,.,tfi - gr&œ è. un pano1111T1a des entreprises de la
Depuis !2011.
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le cabinet Pémance. mise en perspective sbaféulque, nlJfllmment par
epéclalsé daM l'éwall.llllion de leur impact aur l'éwsy&tà11e de la
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