Vous êtes sur la page 1sur 10

Chapitre 15 : Loi des Grands

Nombres.

Dans tout ce chapitre, on considérera une expérience aléatoire dont on


notera Ω l’univers des possibles. On supposera cet univers fini. On notera
p une probabilité sur Ω .

I – Inégalité de Bienaymé-Tchebychev
1. Inégalité de Markov

Définition :
Une variable aléatoire réelle X est dite positive ou
nulle sur l’univers Ω , lorsque toutes les valeurs
prises par X sont des réels positifs ou nuls.
On a donc : pour tout ω ∈ Ω, X (ω ) ≥ 0 .

Exemple : On lance deux dés cubiques et on appelle X la variable


aléatoire donnant la somme des points marqués ; X est une
variable aléatoire positive ou nulle.

Théorème :
Soit X une variable aléatoire positive ou nulle dont
l’espérance mathématiques est E ( X ) .

E(X)
Pour tout réel a > 0 , on a : p ( X ≥ a ) ≤ .
a

Exemple : Le salaire net moyen mensuel en France en 2020 s’élève


à 2240 € . On choisit au hasard un salarié et on note X la variable
aléatoire donnant son salaire net mensuel.

Comme X est une variable aléatoire positive ou nulle, on peut


appliquer l’inégalité de Markov pour, par exemple, majorer la

Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 1.
probabilité que le salaire d’un salarié choisi au hasard atteigne au
moins 7000 € :

2240
On a, d’après l’inégalité de Markov : p X ≥ 7000 ≤ ( ) 7000
.

Ainsi la probabilité cherchée ne dépassera pas 32% .

Démonstration :
On note xi les n valeurs de la variable aléatoire réelle positive ou nulle

X , pour i ∈ !1;n" .
n
On sait que : E X = ( ) ∑x p( X = x ) . i i
i=1

Soit a , un réel strictement positif ; séparons la somme des xi p X = xi ( )


en deux sommes, l’une pour les valeurs de xi < a et l’autre pour les

valeurs de xi ≥ a :

On a donc : E X = ( ) ∑ x p( X = x )+ ∑ x p( X = x ).
i i i i
xi <a xi ≥a

Comme les xi sont tous positifs ou nuls, ∑ x p ( X = x ) ≥ 0 et donc :


i i
xi <a

E ( X ) ≥ ∑ xi p ( X = xi ) .
xi ≥a

Par ailleurs, dans cette somme les xi sont tous supérieurs ou égaux à a ,

donc ∑ x p ( X = x ) ≥ ∑ a × p ( X = x ) c.-à-d. E ( X ) ≥ ∑ a × p ( X = x ) .
i i i i
xi ≥a xi ≥a xi ≥a

On a donc : E ( X ) ≥ a ∑ p ( X = xi ) soit E ( X ) ≥ a × p ( X ≥ a ) .
xi ≥a

E(X)
Enfin, comme a > 0 , on a bien : p ( X ≥ a ) ≤ .
a
Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 2.
Exercice : NetFlix produit une moyenne de 30 programmes par
mois. Que peut-on dire de la probabilité que NetFlix produise en un
mois plus de 60 programmes ?

On appelle X la variable aléatoire donnant le nombre de


programmes produit par mois.
On sait alors que E X = 30 . ( )
L’inégalité de Markov nous permet d’écrire :
30
p ( X ≥ 60) ≤ soit p ( X ≥ 60) ≤ 0,5 .
60
N.B. L’inégalité de Markov donne un majorant assez grossier de la
probabilité p X ≥ a . ( )
2. Inégalité de Bienaymé-Tchebychev

Théorème :
Soit X une variable aléatoire d’espérance E ( X ) et

de variance V ( X ) . On a alors : ,

V (X)
Pour tout réel δ > 0 , p X − E ( X ) ≥ δ ≤ ( ) δ 2
.

Exemple : Soit X une variable aléatoire qui suit la loi binomiale de


paramètres n = 20 et p = 0,4 .

( )
On a donc E X = n × p = 8 et V X = n × p × 1− p = 4,8 . ( ) ( )
D’après l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev, on a :

4,8
(
∀δ > 0, p X − 8 ≥ δ ≤ ) δ2 .

Par exemple, avec δ = 4 : p X − 8 ≥ 4 ≤ 0,3 . ( )


Ainsi, la probabilité que la variable X s’écarte de son espérance
d’au moins 4 est inférieure ou égale à 0,3.

Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 3.
Démonstration :

2
Comme δ > 0 , les inégalités X − E X ≥ δ et ⎡⎣ X − E X ⎤⎦ ≥ δ sont
2
( ) ( )
2
équivalentes et la variable ⎡⎣ X − E X ⎤⎦ est une variable positive ou
( )
nulle à laquelle on peut donc appliquer l’inégalité de Markov avec
2
le réel δ :
⎛⎡ ⎤
2⎞

⎛⎡ 2 ⎞
E ⎜
⎝⎣ X − E ( X )⎦ ⎟

p ⎜⎣ X − E ( X )⎤⎦ ≥ δ 2 ⎟ ≤ 2
.
⎝ ⎠ δ
⎛⎡ ⎤
2⎞
Or : E ⎜⎣ X − E ( X )⎦ ⎟ = V ( X ) . Donc on a :
⎝ ⎠

⎛ 2 ⎞ V (X)
p ⎜⎡⎣ X − E ( X )⎤⎦ ≥ δ 2 ⎟ ≤ 2
.
⎝ ⎠ δ
Et on a donc bien :

V (X)
(
p X − E(X) ≥δ ≤ ) δ2
.

V (X)
N.B. : L’inégalité p X − E X ≥ δ ≤ ( ( ) ) δ2
peut s’écrire aussi :

V (X)
(
p X − E ( X ) < δ ≥ 1− ) δ2
.

3. Une propriété universelle… mais…

L’inégalité de Bienaymé-Tchebychev a l’avantage d’être


universelle. Elle s’applique en effet à toutes les variables aléatoires
possédant une espérance et une variance.
Elle permet de majorer la probabilité qu’a une variable aléatoire de
s’écarter de son espérance d’un certain nombre d’écarts types.

Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 4.
Par exemple, si X est une variable aléatoire d’espérance µ et
d’écart type σ , si on applique l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev à
X en prenant δ = kσ avec k = 1,2,… on a alors :

V (X) σ2
(
p X − µ ≥ kσ ≤ ) 2
c.-à-d. (
p X − µ ≥ kσ ≤ 2 2

)
( kσ )
1
soit encore : (
p X − µ ≥ kσ ≤ ) k2
.

• Avec k = 2 : • Avec k = 4 :

(
p X − µ ≥ 2σ ≤ 0,25 ) (
p X − µ ≥ 4σ ≤ 0,0625 )

Inégalités qui peuvent s’entendre aussi ainsi :

(
• p X − µ < 2σ > 0,75 ) (
• p X − µ < 4σ > 0,9375 )
Mais ces majorations sont peu optimales !
En reprenant l’exemple de X qui suit la loi binomiale de

paramètres n = 20 et p = 0,4 avec donc µ = 8 et σ = 4,8 ! 2,2 .


On a vu qu’avec l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev :

(
p X − µ ≥ 2σ ≤ 0,25 soit ) ( )
p X − 8 ≥ 4,4 ≤ 0,25 .
Calculons cette probabilité à l’aide de la loi binomiale :

(
Comme X ∈ ! , p X − 8 ≥ 4,4 = p X − 8 ≥ 5 . ) ( )

Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 5.
(
Soit : p X − 8 ≥ 4,4 = 1− p X − 8 ≤ 4 ) ( )
= 1− p ( 4 ≤ X ≤ 12)
= 1− p ( X ≤ 12) + p ( X ≤ 3)
Avec la TI-83 :

0,037 est donc majoré avec l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev


par 0,25 ! 6 fois plus ! Pas très optimale comme majoration…

Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 6.
II – Loi des grands nombres
1. Rappel : échantillon de taille n

Définition :
Soit un échantillon de taille n d’une variable aléatoire
X , c’est-à-dire la donnée de ( X 1 , X 2 ,…, X n ) , variables

indépendantes suivant la même loi de probabilité que


celle de X , la variable aléatoire moyenne de
l’échantillon est la variable aléatoire :
1
Mn = ( X + X 2 +…+ X n ) .
n 1

Propriété :
Pour un échantillon ( X 1 , X 2 ,…, X n ) de la loi d’une

variable aléatoire X dont la moyenne est M n , on a :

1 1
• E ( Mn ) = E ( X ) • V ( Mn ) = V ( X ) • σ ( Mn ) = σ (X)
n n

Exemple :

Soit X qui suit la loi binomiale de paramètres : n = 12 et p = 0,3 et

soit M10 la moyenne associée à un échantillon de taille 10 de la loi

de X .

( )
• E X = 3,6 donc E M10 = 3,6 . ( )
1
( )
• V X = 12 × 0,3× 0,7 = 2,52 ; donc V M10 = ( ) 10
V ( X ) = 0,252 .

1
•σ X = ( ) 2,52 ! 1,587 ; donc σ ( M10 ) = 2,52 ! 0,502 .
10
X et M10 ont même espérance mais M10 à une moindre dispersion.

Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 7.
• Loi de X :

• Loi de M10 :

2. Inégalité de concentration

Propriété :
Soit X une variable aléatoire d’espérance E ( X ) et de

variance V ( X ) . On appelle M n la variable aléatoire

moyenne d’un échantillon de taille n de X .


Pour tout réel δ > 0 :
V (X)
( )
p Mn − E ( X ) ≥ δ ≤
nδ 2

Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 8.
Démonstration :

Appliquons l’inégalité de Bienaymé-Chebychev à M n :

V ( Mn )
(
p Mn − E ( Mn ) ≥ δ ≤ ) δ2
.

1
( )
Or, on sait que E M n = E X et V M n = ( ) ( ) n
V (X) ;

L’inégalité s’écrit donc :

1
V (X)
n
(
p Mn − E ( X ) ≥ δ ≤
δ 2 )
; d’où le résultat.

Exemple :

On effectue n lancers successifs indépendants d’une pièce non

truquée. À chaque tirage i , on associe la variable X i prenant la

valeur 0 si on obtient Face et 1 si on obtient Pile.


On pose S n = X 1 + X 2 +…+ X n la variable aléatoire donnant le

Sn
nombre de Pile obtenu et M n = .
n

1 1
Pour i ∈ !1;n" , E X i = ( ) 2
et V ( X i ) = .
4
Pour n = 5000 , l’inégalité de concentration s’écrit, avec δ = 0,01 :

⎛ 1 ⎞ 1 ⎛ 1 ⎞ 1
p ⎜ M n − ≥ 0,01⎟ ≤ 4
2
soit : p ⎜ M n − ≥ 0,01⎟ ≤ .
⎝ 2 ⎠ 5000 × 0,01 ⎝ 2 ⎠ 2
Pour 5000 lancers, la probabilité que la proportion de Pile obtenue

1 1
s’écarte de plus d’un centième de est inférieure à .
2 4

Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 9.
3. La loi faible des grands nombres

Propriété :
Soit ( X n ) un échantillon de taille n d’une variable

1 n
aléatoire et M n = ∑ X i . Alors, pour tout réel δ > 0 :
n i=1

(
lim p M n − E ( X ) ≥ δ = 0 .
n→+∞
)
Démonstration :

Appliquons l’inégalité de concentration à la variable M n :

V (X) 1 V (X)
(
0 ≤ p Mn − E ( X ) ≥ δ ≤ ) nδ 2
. Or lim
n→+∞ n
= 0 , donc lim
n→+∞ nδ 2
= 0.

D’après le théorème des gendarmes, on a donc :

(
lim p M n − E ( X ) ≥ δ = 0 .
n→+∞
)
Ce théorème nous permet de conclure que la probabilité que la
moyenne s’éloigne de l’espérance devient très petite pour les
grands échantillons.

Ainsi, pour une même expérience aléatoire, les moyennes sur des
échantillons de grande taille sont moins dispersées que celles sur
des échantillons de petite taille.

Mathématiques de spécialité. Classes de Terminale. M. Gouny. Chapitre XV – Loi des grands Nombres – Page 10.

Vous aimerez peut-être aussi