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Le Roi Arthur

et les Chevaliers de la Table Ronde

Les romans arthuriens sont nombreux, et chaque auteur, au fil des siècles, a ajouté sa
touche personnelle, a modifié le mythe initial. Par conséquent, de nos jours il est très
difficile de présenter des légendes uniformes. A l'inverse, les différentes versions sont
souvent contradictoires.
Ne vous attendez donc pas à trouver sur ces pages la véritable légende arthurienne.
Celle-ci n'existe pas. Je ne peux que tenter de vous présenter un point de vue parmi
beaucoup d'autres, que j'ai cependant choisi parce qu'il correspond aux écrits de
Chrétien de Troyes, qui me sert de référence majeure.

L'histoire.

La situation politique :
Au cinquième siècle, les romains sont installés en Grande-Bretagne et dominent l'île,
même si les Scots (peuplade celte venue d'Irlande qui finira, au sixième siècle, par
s'établir sur la côte ouest de l'Ecosse) et les Pictes (peuple préceltique d'Ecosse), entre
autres, restent insoumis.
Mais, à partir de 486, avec les conquêtes de Clovis et les invasions des Vandales, des
Wisigoths et des Ostrogoths, l'empire romain s'affaiblit fortement dans sa partie
occidentale. Les romains se désintéressent alors de la Grande-Bretagne pour se
concentrer sur la défense de l'Empire, ce qui n'empêchera pas sa chute dans les années
490.
Les Saxons (ancien peuple germanique qui s'était étendu vers le sud et avait mené des
raids en Gaulle, tout nouvellement arrivé en Grande-Bretagne) en profitent pour
essayer de s'emparer de toute l' île.

Des conflits internes :


Les divers chefs Bretons et Gallois sont alors divisés par d'incessantes querelles, et
passent leur temps à guerroyer entre eux, sans grand succès.
Tous ces rois, postulants à un trône unificateur, souffrent d'un problème de légitimité :
les différentes invasions ont entraîné une grande diversité de peuples et de cultures
dans le royaume. Aucun chef ne parvient à se faire reconnaître sur tout le royaume, et
par tous les peuples. Il n'y a, par conséquent, pas de chef suprême, et encore moins de
roi qui commande à l'ensemble des habitants de Grande-Bretagne.
Mais devant l'importante menace d'invasion des Saxons ils se rangent tous sous la
bannière d'un dénommé Artorius.
Ce guerrier, probablement né vers 470-475 en Cornouailles, est le chef d'une bande
très mobile de cavaliers mercenaires. Tous voient en lui la seule personne capable de
tenir tête à l'envahisseur.

Artorius au pouvoir :
Artorius est donc nommé commandant en chef de la nouvelle armée et, tous unis, les
rois Bretons et Gallois remportent, quelque part dans le sud-ouest de l'Angleterre vers
500-518, une grande victoire qui stoppe l'envahisseur pendant une quarantaine
d'années. C'est la bataille de Mont Badon (ou Bath, ou Badbury).
Quand Artorius trouve la mort dans une grande bataille, près de Camelford en
Cornouailles, aux alentours de 540-542, c'est la fin de l'indépendance bretonne : à la
fin du siècle, les Saxons occupent les trois quarts de l'île.
Le corps d'Artorius est enterré clandestinement à Glastonbury par ses lieutenants, qui
tiennent à cacher sa mort pour ne pas démoraliser les troupes.

Les conséquences :
Devant l'invasion, des milliers de Bretons ont traversé la mer pour s'établir dans la
péninsule armoricaine, à laquelle ils donnent le nom de Bretagne. Ils y retrouvent des
compatriotes arrivés depuis le quatrième siècle. Ils restent en contact très étroit avec
les Bretons demeurés dans l'île. Les uns et les autres gardent vivant le souvenir
d'Artorius et en font un roi, ce qu'il n'a jamais été dans la réalité.
D'autre part, le problème de la légitimité se pose toujours, et plus fort encore, après la
prise du pouvoir par Guillaume le Conquérant (1027-1087), duc de Normandie, en
1066. Le roi est un normand, peuple minoritaire. Et cette situation est d'autant plus
ennuyeuse que la dynastie rivale n'a pas ce problème : les capétiens se présentent
comme les descendants de Charlemagne.
Pour palier à ce grand désavantage, les Normands encouragent les clercs à diffuser ce
qui est déjà la légende d'Arthur (nom romain pour Artorius), et plus particulièrement
le mythe de sa dormition et de son retour prochain, dans le but de s'allier les Gallois et
de défaire les Anglo-Saxons.

La création du mythe :
Dans un premier temps donc, la légende raconte qu'Arthur n'est pas mort. Grièvement
blessé lors de la bataille de Camlann, il a été transporté par sa soeur, la fée Morgane,
jusqu'à l'île d'Avalon, où il est soigné, attendant de pouvoir revenir prendre la tête de
son peuple : c’est l'espoir breton.
Mais Henri II (1133-1189) va finalement confisquer la légende d'Arthur, en se
présentant comme son héritier légitime, et mettre un terme à l'espoir breton. A des fins
de propagande, il demande une mise en langue romane de l'Historia Regum
Britanniae, commandée en 1138 par son père, dans le même but, à Geoffroy de
Monmouth.
Le roi, à l'intérieur de son royaume, a besoin de l'appui des Bretons contre les Saxons
qui acceptent mal la domination normande. Mais les Bretons ne sont pas prêts à se
rallier à la bannière des Plantagenêt à cause de l'espoir breton.
Le roman, en trois parties, se termine avec la description du règne d'Arthur : son
accession au trône, son mariage, la création de la Table Ronde, jusqu'à la mort du
souverain.
Finalement on découvre, en 1191, les tombes (et les squelettes) d' Arthur et Guenièvre
dans le cimetière de l'abbaye. Quand à l'île d'Avalon, elle est identifié à l'abbaye de
Glastonbury. Cela met un terme à l'espoir breton.

L'extension du mythe :
Vers 1100, la légende est tellement présente et forte que les bardes y greffent mythes
folkloriques, particularités géographiques, traditions chrétiennes et petit héros locaux
postérieurs (Yvain par exemple), ...
En deux ou trois siècles donc, Arthur est devenu le pivot autour duquel gravite tout un
système d'histoires indépendantes à l'origine, et cet ensemble finit par former un vaste
et riche réservoir, un mythe immense et inépuisable.
C'est Robert Wace, dans son Roman de Brut, en 1155, qui donne la coloration
courtoise au mythe. Arthur devient le monarque idéal, un modèle d'humanité, de
vaillance, de générosité et de délicatesse. C'est lui aussi qui, le premier, mentionne la
Table Ronde, symbole politique de la société courtoise.
La légende arthurienne est, dès la fin du onzième siècle, diffusée à travers toute
l'Europe, et même au-delà, par les conteurs professionnels qui accompagnent les
armées partant pour la Terre Sainte à l'occasion des deux premières croisades.

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