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BEAULIEU, Denise. L’enfant vers l’art, Une leçon de liberté, un chemin d’exigence.

Les Éditions Autrement, Série Mutations no 139, Paris, 1993, pages 58-75 .
t8 L'enfant vers l'art

Trois pfofs
d'arts plastiques
Ni aéritablernent artistes - du moins ea igard au marclté de
I'art - ni enseignants « classiqaes », les professeurs d'arts
plastiqaes oscillent entre deux mondes sans appartenir
uéitablenent à l'un ou l'autre. Trois d'entre eilx floîts litrent
ici la façon dont i/s nourissent leur enseigtzernenT de leur
propre rapport à l'art, les clds de leurs pratiqaes et les soilrces
de leur passion.,.

T
I-ra première est enseignante de section Al
et ne revendique aucune pratique anistique ; le second mène paral-
lèlement des activités d'artiste « professionnel » et de professeur de
dessin d'art ; la troisième, quant à elle , réclame la reconnaissance
d'un double statut d'aftiste-enseignante.
Les unes comme l'autre se rejoignent néanmoins sur un point : ce
qui se fait en classe n'est pas de l'aft, mais quelque chose qui s'en
approc/te... Et de cette approchc découle la richesse d'un enseigne-
ment qui vise, non pas la démarche artistique en tant que telle,
mais l'éducation au sens propre du terme - apprendre à voir,
apprendre à vivre...

*
**
Dcs disciplincs indisciplinécs 59

L'rrt de rebondir
Entretien alec Martine Damerment

Si le lycée de Sèvres s'est distingué, au cours des annécs 70, par


son ouverture à la recherche pédagogique en liaison avec le CIEP
(Centre internationd d'études pédagogiques), il a peu à peu délaissé
son mode de fonctionnement expérimental pour devenir un éta-
blissement « normal ,.
Martine Damerment y est I'unique enseignante de section A3 en
arts plastiques et histoire de I'art. Professeur consultant au CIEP,
elle poursuit une réflexion sur la pédagogie de ces disciplines, et
notamment sur les modalités de la référence aux démarches de I'an
moderne et contemporain.

Aûrement. - Voas owz élabord une pédagogie du , rebondissenzent ».

À qaoi corespond ce terme ?

Manine Damerment. - Il s'agit en principe du premier travail de


l'année dans une classe de terminale, se présentant sous la forme
d'une proposition minimale. À partir de l'adjectif « ouveft », les
élèves doivent me rendre des productions plastiques. Ce travail
conditionne tout le travail futur. Après avoir affiché les æuvres,
je dégrye par « rebondissement » toutes les problématiques plasti-
ques que I'on peut aborder. L'an dernier, ce travail sur I'ouver-
ture a fait naître un autre sujet : « simple /complexe ». De là, nous
avons rebondi sur quatre ou cinq nouvelles propositions. Dans la
mesure où la première proposition avait donné lieu à des üavaux
différenciés, nous avons pu balayer I'ensemble des problémetiques
plastiques que je souhaitais aborder dans I'année.

Quelle est la part de réfdrence aa champ artisiqae dons ces pmpositions ?

La Éfércnce peut être introduite de différentes manières. Soit on


exige dès le départ une « ressemblance à » ou un « hommage à »
- alors la référence est explicite -, soit clle demeure implicite pour
ne pas conditionner les élèves.
Par exemple, I'année dernière, j'avais proposé un sujet sur Matisse.
60 L'enfant vers l'an

L'incitation était verbale : n Dessiner eux ciseaux, dans dcs feuilles


de papier colorées à l'avance, d'un même geste pour associcr la
ligne à la couleur, la couleur à la surface. » La Éférence était alors
implicite puisqu'il s'agissait d'une phrase de Matisse, mais sans que
cela soit dit. Ce sont les élèves eux-mêmes qui ont décelé la réfé-
rence au moment de I'affichage, en regardant certains travaux de
leurs camarades. Chez d'eutres, ça n'est pas apparu du tout. Ils
ont répondu au sujet autrement que ne I'aurait fait Matisse.
Lorsqa'al é/èle atilise ane forne paisée dans l'æuare d'an artiste, est-il
à rnême de comprendre ce qai, dans la démarche de l'artiste, a condai,
à créer cette forme ?

Le bagage culturel est un ferment. Mais est-il possible de faire


comme si les références n'existaient pas ? Quand ils pensent avoir
leur propre démarche, on se rend compte parfois qu'il y a un écho.
Rien n'est gratuit ni innocent.
Mais dans le cas des sections Al, la référence artistique est déià
transformée en écriture personnelle. Quoi que je donne comme
sujet, je reconnais immédiatement les travaux de certains élèves.

Comment éoalae-ï-on ces trolaax ?

En préparant mon agrégttion à I'Usn de Saint-Charles, I'un des systè-


mes d'évaluation était le suivant : on exposait les travaux, puis les
élèves passaient un par un et disaient quel travail ils avaient pÉféré
en le commentant. Enzuite, I'auteur padait de son travail. S'il le valo-
risait mieux que ses camarades, la note pouvait être augmentée. Il
m'est arrivé d'utiliser cette méthode. Ou alors, j'applique une grille
toutc bête de cinq points pour I'adéquation au sujet, cinq points
pour l'impact plastique, cinq points pour la technique... Mais cela
revient à enfermer, à mesurer des choses difficilement mesurables.
Si le sujet est « pointu », l'évaluation est « pointue ». Je pense à
un sujet précis, une variation autour du Bain turc d'lngtes. La con-
signe était dc modifier cenaines données plastiqucs, par exemple
l'échelle, la matière, la ligne, le format, pour arriver à donner une
autre lecture. Là, on peut pointer précisément les données plasti-
ques qui ont été modifiées. Tandis que pour des sujets comme
« Ouveft », l'évaluation le devient aussi. Elle esr donc plus problé-
matique pour moi.
Des disciplines indisciplinées 6t

La relation à l'élèae esÿ-elle prépondérante dars ÿotre pédagogie ?

Tout savoir passe par des canaux affectifs. Je dis toujours à mes
élèves que c'est une force de pouvoir aimer la matière sans aimer
le professeur. Mais je privilégie la relation à l'élève. Je n'imagine
pas un prof d'arts plastiques qui ne s'intéresserait pas à ses élèves,
à leur vie à l'extérieur, avec discrétion et finesse bien entendu. Ce
serait pour moi antinomique.

Meîtez-tous platôt l'accent sur le , faire ,, l'expression de l'inzagiraire ?


Ou, au contraire, sur la réfdrence culîarelle et la maîtdse tec/tniqae ?

Dans ma section, j'essaie de maîtriser les deux aspects. L'imagina-


tion est toujours canalisée par un sujet « pointu ». L'imagination
tous azimuts, le faire joyeux, ludique, où la démarche compte plus
que le résultat, c'est fini pour moi. Dans les années 70, le champ
référentiel était largement ouveft : on faisait tout avec tout. Je res-
serre vraiment les choses. La technique, on en fait, mais jamais de
la technique pour la technique.

Ressentez-oous une deruande des éhtes poar le * beaa » et le « bien foit o ?

Tout à fait. D'autant plus qu'ici il y a une section d'arts appli-


qués massive, qui exerce une pression latente, très fédérée, dans
le sens du « bien faire », du beau résultat, du savoir-faire, du pro-
duit... Je cherche à défendre ma spécificité.
Mais la demande a toujours été présente, plus ou moins dite, plus
ou moins avouée. Les professeurs faisaient moins pofter I'accent là-
dessus à cause d'orientations théoriques. Je pense que ça dépend
des lieux où I'on enseigne. Ici, seul professeur d'arts plastiques au
milieu de treize professeurs d'arts appliqués, je me sens parfois un
peu marginalisée. Je fais aussi de la technique. Simplement, elle
n'est pas mise en exergue.
Ce qui m'intéresse, quand je propose un sujet, c'est d'avoir rrenre
réponses différentes. C'est ce qui distingue peut-être les ans plas-
tiques des ans appliqués. Quand on desine un galet en cours d'afts
appliqués, on a un bon rendu de galet, presque photographique.
C'est magnifique, mais on a tout de même trente galets, presque
identiques. Alors qu'en arts plastiques j'ai des réponses aux anti-
62 L'enfant vcrs l'art

podes les unes des autres. Chaque élève produit lieu , uni-
un o
que, et c'est cela qui m'intétesse. Ce que ie privilégie, c'est le
« savoir-être ». Arriver avec un projet, le finir, avoir une démar-
che, y mettre trois mois s'il le faut. Que le produit ne soit pas
forcément fini mais qu'il y ait eu au moins un investissement
humain profond, que les élèves se soient mobilisés...

Quel rapport y a-t-il entre le traoail qae réalisent les élèaes et anc démar-
clte ortistique ?

Je ne forme pas des artistes, mais je dirais que ceftains élèves en


sont déià à une démarche anistique. Dans ce cas, il arrive qu'ils
rejettent le scolaire. Mais on s'aperçoit souvent, en leur parlant,
qu'ils ont un atelier. Ceux-là ont une grande autonomie, et, cornme
par hasard, ils ont des démarches artistiques fortes.
Deux heures d'histoire de I'art, deux heures de pratique, c'est
énorme per rapport au collège, mais ça reste à la fois insuffisânt
et ffop contraignant pour des élèves qui ont envie d'autre chose,
même s'ils travaillent énormément chez eux. L'école peut êffe un
tremplin, mais une fois que le tremplin a rempli sa fonction, la
démarche artistique se passe ailleurs. Je le ressens comme ça, en
tout cas, même si ça semble un peu excessif. Je ne crois pas que
I'on puisse vraiment faire de I'an à l'école.
Pour moi, une démarche anistique, c'est être habité pleinement
par quelque chose, on y pense dans la rue, dans sa baignoire, en
mangeant... Tout l'être est investi dans un projet: on devient ce
projet. Les élèves de terminale sont éclatés, fragmentés par I'exi-
gence scolaire du bac. On doit fournir dans toutes les matières,
penser à l'examen, à tout ce qui fait le tissu scolaire...
L'école est là pour promouvoir, pour faire creuser. Les arts plasti-
ques permettent de se découvrir, d'aller plus loin. Mais c'est vrai
que I'on ne forme pas des ertistes, ce n'est pas le but. L'éduca-
tion artistique permet aux élèves de se révéler à eux-mêmes, d'êrre
la propre source de leur travail. D'en être les auteurs.

Aaez-aoas ane pratiqae d'anisfu ?

J'en ai eu une... Mais jc ne revendique pas du rour le starur


d'artiste, ni celui d'enseignante, d'ailleurs. L'enseignement est mon
Des di3ciplines indisciplinées 63

métier, alors je lui donne mon temps. Mais quand je rentre dans
ma classe, je ne me sens iamais prof. Il n'y a pas une coupure
avec ma vie : c'est une globalité.

Traverser le miroir des stéréotypes


Entretien arcc Jean-Claude Coneia

Artiste depuis vingt-cinq ans, Jean-Claude Coreia a débuté I'an


dernier une carrière parallèle de professeur de dessin d'art au lycée
professionnel Lucas-de-Nehou, spécialisé dans la miroiterie-vererie.
Profondément atypique, à la fois au sein de son établissement et
dans le corps enseignant, il applique des méthodes propres à faire
pâlir tout professeur d'ams plastiques, dans une tradition qui fleure
son xlx' siècle : apprentissage des valeurs et des propordons, des-
sin d'observation, perspective conique, avec, pour tous matériaux,
des crayons et du papier... Le papier est d'ailleurs l'unique maté-
riau de son aft : il le travaille en observant les plis du monde, de
l'écorce terrestre à l'épiderme en passant par les écailles des repti-
les, selon des techniques inspirées de I'origami.
Il est curieux que ce « plieur de papier ) enseigne dans un établis-
sement où l'on traite le matériau le moins susceprible de plier, le
verre. Mais logique que I'aniste à l'æil exercé intervienne dans un
lieu où I'on fabrique des miroirs, pour aider ses élèves à dissiper
tout ce qui trompe l'æiI...
«Ex-pli-cations r, en creux et en arêtes...

Autrencert. - Quel est ÿotre rôle aa lycée ?

Jean-Claude Correia. - Le métier de miroiterie-verrerie esr en train


de se transformer. Il y a quelques années, on y faisait encore le
verre soufflé. Maintenant, on apprend à traiter le verre-matériau :
le découpage, le meulage, les profilés... On utilise de moins en
moins le travail manuel. Le verre arrive en plaques et il est tra-
vaillé à la machine, ce qui pose un problème d'orientation.
L'idée serait de développer les techniques artisdques, d'ouvrir le
64 L'enfant vers l'art

regard des élèves, des profs, à quelque chose de plus contempo-


rain... Qu'ils arrivent à faire autre chose que des miroirs de Venise
avec des olives, des perles et un bord chanfreiné... Techniquement,
ils travaillent bien, mais ce qu'ils réalisent est plus que classique.
Il faut renouveler les possibilités de formes.
C'est la dirnension créatiae de leur métier qile ooas cltercltez à déaelopper ?

Il faut donner des ouvernrres à ces jeunes. Nous essayons de les orien-
ter vers des sections de métiers d'art. En France, le décor sur verre
était incroyablement créatif dans les années 30. Aujourd'hui, tout
est plat, littéralement. Quand elles lancent une nouvelle gamme, les
grosses entreprises comrne Saint-Gobain doivent faire appel à des anis-
tes de I'extérieur, qui prennent en compte le matériau et offrent des
idées industriellement réalisables. Entre le design de pointe et le ffa-
ditionnel miroir de Venise, il y a des tas de possibilités.
Votre tâcbe est donc de faire sortir les élèoes des modèles préconças ?

Avant tout, c'est de leur apprendre à dessiner, ce qu'ils ne savent pas


faire. Le problème est d'ailleurs général. On a tellement remis en cause
le dessin dans les années 70... Ça a. été de plus en plus massacré.
Aujourd'hui, on maîtrise les techniques de la PAo, mais on ne sait
plus se servir d'un té ou tenir un crayon. Autrement dit, on ne sait
plus faire ses gammes. Je considère I'apprentissage du dessin d'art
comme une maîtrise de l'æil. Il faut apprendre à voir en observant.

Qaels problèrnes rcficofltrez-uoas ?

Mes élèves ont beaucoup de mal à saisir I'abstraction. Ils rencon-


trent d'ailleurs ce problème dans toutes les matières. Lorsqu'ils doi-
vent faire une composition, par exemple sur la notion de contraste
graphique, je leur demande d'abord de m'expliquet ce qu'est un
contraste. Le plus intelligent va parler d'une opposition comme « la
vie et la mort », mais il ne s'agit pas là d'un contraste graphique.
Lorsque je les fais travailler sur des notions plus spécifiquement gra-
phiques comme noir/blanc, épais/fin, rond/carré, certains élèves me
répondent : « Alors, on fait n'importe quoi ? » Ce qui ne repré-
sente pas quelque chose, pour eux, c'est « n'importe quoi ».

b-
Des disciplines indiriplinées 6,

Votre démarcbe d'artiste intentient-elle dans ce traaail ?

Ce qui me sert, c'est mon expérience de Ia vie et du métier


d'artiste. Mais je sépare volontairement mon propre travail de ce
que !e fais à l'école, sauf en début d'année , lorsque les élèves me
demandent de voir ce que je fais. Je réalise alors une mini-
exposition. Il faut qu'ils puissent juger si je sais tenir un crayon.
Ça les sécurise. Ils ont plus confiance en moi.

Le fait que t)oas soyez artiste concpte toul de rnêrne ?

Vis-à-vis d'eux,je ne me présente pas comme artiste. Je suis payé


pour être professeur. Je leur dis bien que le dessin, ça s'apprend.
Il y a des techniques pour apprendre à dessiner. Pour faire de l'art,
je ne On peut leur donner des notions, une culture...
sais pas...
Par contre, je peux leur apprendre à dessiner, comme on fait mar-
cher une machine, cornme on apprend à écrire. Ce savoir-faire passe
d'abord par le regard. Au début, ils me disent : « M'sieur, j'sais
pas dessiner. » Je leur réponds : « Tant mieux, sinon à quoi je sers ?
Si t'es Michel-Ange , moi je m'en vais. Je suis prof, je t'apprends. »
Ceux qui s'amènent en disant «Je suis bon en dessin » er qui me
montrent des trucs calqués sur des BD japonaises, je les envoie pro-
mener. Ils maîtrisent leur main, mais ce n'est pas ça qui compre.
Le problème du u bon, pas bon » n'a aucune importance. Je leur
dis : u T'occupe pas de ta main, regarde. » Je leur apprends des
techniques. Et dans ce cadre, je leur apprends à voir aurre chose.

Le dessin d'obsentation n'existe plas dans l'enseignernent géndral...

Il y a eu déformation. On s'esr beaucoup préoccupé de I'imaginaire .


Mais, pour moi, ça fait régresser, pas évoluer. Si on veut travailler
sur l'imaginaire de quelqu'un, il faut d'abord lui donner une tech-
nique qui va lui permettre de s'exprimer. C'est parce qu'il aura ce
début de technique qu'il pourra faire ululler son imaginaire.
Avant tout, il faut d'abord savoir ce qu'est un blanc, un noir, et
savoir poser les différentes valeurs, uniquement dans une gamme
de noir et blanc. Ensuite, le conrrasre nous permet de voir la pro-
fondeur des choses. Si l'on se base là-dessus au début, ça sécurise
les élèves, et, petit à petit, ils font des progrès fabuleux.
66 L'enfant vers l'an

Au dépan, il faut qu'il y ait quelque chose de palpable, de


concret, entre les élèves et moi. Entrc chaque élève, il faut qu'il
y aurtla même chose, et c'est parce qu'il y â ce point de comparai-
son que l'on peut bâtir. Quand on les place devant un obiet, ils
jubilent. Ils ne voient plus le temps passer. « M'sieur, on n'a pas
le temps, on n'a pas fini ! » C'est fabuleux, la capacité de concen-
tration qu'ils ont, et ie vous assure qu'il y en a des durs, des élè-
ves. On a des classes vraiment ltard, des gars pour qui tout est
débile, nul... Ils nous arrivent evec un besoin de se mesurer, d'avoir
des barrières.

Et à traaers le dessin, ils aniaent à se caraliser ?

Ils ont une capacité de se traduire dans le dessin, pourvu que ce


soit dans un cadre très précis. Au début de l'année, j'affiche le
programme. Je module suivant les classcs, mais ils savent à chaque
fois, lorsqu'ils font un exefcicc, à quoi ça correspond, où ils vont
et pourquoi ils y vont. ils peuvent toujours s'y référer. J'ai pris
en compte le programme du ministère dans les cours d'arts appli-
qués en rEr : appréhension du visible, accès à la maîtrise des tech-
niques et connaisances des ars. J'ai un peu changé les termes pour
qu'ils comprennent : apprendre à voir, apprcndre à dessiner, se
cultiver.
Er j'u ajouté un quatrième point : le temps. Il faut prendre le
temps de voir, de dessiner, de se cultiver, et surtout gérer ce temps.
J'ai des élèves pendant une heure, deux heures... Ils doivent être
capables de savoir s'ils doivent faire une épure ou un dessin fini.
Entre l'idée et sa réalisation, il faut savoir de quel remps on dis-
pose. C'est à eux de gérer leur temps. Je le leur apprends.

Lear ÿratail en closse a-t-il an ropport aaec le aere ?

On ne peut pas faire du dessin dans I'an appliqué si on n'a pas


les moyens de travailler les matériaux, sinon I'enseignement géné-
ral est coupé des ateliers. C'est le problème de ce genre de lycée.
Question de mentalités. Impossible, pour I'insranr, de renffer dans
un atelier pour indiquer d'autres manières de faire. Donc, I'an pro-
chain, j'aurai mon propre atelier.

\
Des disciplines indisciplinées 67

Failes-aous référence à l'art dans aos coars ?

Pas du tout. La plupan de mes élèves, je les ai pendent une heure.


Si je commence à faire un cours sur la culture, je parlerai pendant
une heure, parce qu'ils ne peuvent pas appofter d'opinions. Pour
eux, l'aft abstrait, je l'ai dit, c'est n'importe quoi. À quoi cela
sen-il de leur montrer de l'an contemporain à ce stade ? Il faut
aller uès progresivement. Il ne faut pas les brusquer en leur disant :
« Vous devez ffouver ça bien r...

foxt oaec î)oas peat-il alirnenter une démarcbe artisiqae,


Le traaail qa'ils
à partir de lear saooir-faire tecltniqae ?

Pas au point où ils en sont. L'art, c'est un choix de vie. Il ne sen


à rien. Il n'a pas de fonction. C'est ce qui fait la différence entre
I'aft et l'artisanat. Même si Issey Miyaké préscnte ses robes comme
des sculptures, elles ont une destination, qui est d'être poftées. Le
meuble , le bijou, le miroir aussi. Alors que merrre un tableau au
mur, ça ne seft à rien.
Les élèves, on ne les transformera pas en aftistes. Ce que l'on doit
leur apponer, c'est la possibilité d'avoir une idée et de la traduire
dans une technique donnée.

Mais aous cltercbez bar de rnême à dûelopper leur sensibilité estbdtiqae ?

Je vais prendre un exemple concret. Voici un morceau de lave de


volcan. Il a une organisation plastique, c'esr une belle configura-
tion, avec des points d'ancrage, des mouvements... C'est parce qu'il
a cette organisation que l'on éprouve une ceftaine émotion. Si on
le retourne, c'est chaotique, lunaire. On paft du chaos et on arrive
à une organisation : ça se passe sur cette pellicule. Physiquement,
ça s'explique, les laves cordées. Mais plastiquemenr ? Qu'est-ce qui
explique que I'on éprouve une émotion en la regardant ? Notre
æil saisit la beauté de cette organisation, sans I'expliquer.
Tout mon travail consiste à voir comment fonctionne tout ce qui
est à l'épiderme des choses... L'écorce terrestre n'est composée que
de plis et de fronces. En bas, c'est le magma. En haut, c'est
I'espace. Tout se passe sur cette surface infime où la vie a pris nais-
sance, où tout s'est différencié. C'est cela qui m'intéresse. C'est
68 L'cnfant vcrs l'art

ce que j'applique avcc mes élèves, pas en parlant comme je le fais


avec vous, mais avec du papier et des crayons...
C'est en cela que mon travail d'aniste me seft en tant que prof.
Je n'ai pas de pédagogie. Ce que je sais, c'est que je leur apprends
à voir, dans un système qui casse le regard.

On dit Poartan, totjours qae ?rolts son rncs dans tne cfuilisation de
l'image ?

Pas du tout. Nous sommes dans une civilisation du stéréotype. Mais


pas de I'image, pas de ce que j'entends par « image ». Même
l'océan, nous ne l'observons qu'à travers les références que nous
nous sommes créécs en regardant la télé, le cinéma... Devant
I'océan, nous recherchons les souvenirs que nous en avons, au lieu
de regarder.

Il s'agirait donc de I'image aa seflJ que les Améicains donnenl oil ,not
« irnage de naarque n.

Exactement. Quand les gamins parlent de vêtements, ils parlent de


marques, pas de I'allure que ça a. Même si c'est moche, pourvrl
que ça soit une marque, c'est ce qui compte pour eux. Dans le
matraquage d'images que nous subissons, nous ne faisons plus
I'effon de regarder. Moi, quand je regarde cet atelier, je ne vois
pas que des couleurs : je vois une multiplicité de gris.
Le regard, ça se travaille : il est capable de voir une infinité de
choses. Quand on a cette techniquc pour voir, on vit dans un
monde fabuleux. C'est ce que j'apprends à mes élèves, et ils le
garderont toute leur vie...

Aniste-enseignant : de l'importance du trait d'union


Entretien aaec Lydie Camille Roax

Lydie Camille Roux enseigne au lycée Hochc de Versailles, de la


sixième à la terminale. Elle y a débuté en réalisant ce qu'elle appelle
Des disciplines indisciplinées 69

des o interventions sauvages , dans les cours de français, de langues


et d'histoire , sur des sujets artistiques connexes à la matière ensei-
gnée. Devant le succès de ces interventions, le proviseur a décidé
de rendre obligatoires les cours d'histoire de I'art, malgré I'absence
de section Al au lycée.
Par ailleurs, Lydie Camille Roux dirige un atelier de pratiques aftis-
tiques regroupant une douzaine d'élèves de douze à dix-sept ans,
en paftenariat avec le musée Lambinet.
Contrairement à Martine Damerment et à Jean-Claude Coreia, elle
revendique un double statut d'aftiste-enseignant. Son travail de plas-
ticienne fait largement appel aux références culturelles puisées dans
l'histoire de I'art et dans la mythologie ; son travail d'enseignante
s'en nourrit également.
Bien qu'elle ouvre son enseignement à d'autres références contem-
poraines, c'est en fait sa propre démarche d'artiste qu'elle trans-
met à ses élèves.

Aatrernent. - Poar l'histoien de I'ort Tltierry de Duae, « l'art ne s'ensei'


gne pos, il se transntet ».

Lydie Camille Roux. - Tout dépend du sens des mots « transmet-


tre » et « enseigner ». Lorsque je revendique le terme d'aftiste-
enseignant, je souligne qu'« enseignant » ne signifie pas « pédago-
gue ». Étymologiquement « enseigner » signifie « montrer ». On
montre avec le langage, qui est la dimension pédagogique, mais
aussi avec le corps, en désignant du doigt, et avec la voix, une voix
qui change selon que vous êtes ému ou pas. La dimension de la
transmission pesse par l'émotion. Ceux que j'appelle « aftistes-
enseignants » sont capables d'enseigner ce rappott à l'æuvre.
Au fond, je crois que l'on ne peut pas enseigner si l'on n'a pas
une pratique anistique. Ce serait comme enseigner une langue sans
la parler.

Est-ce qae le fait d'arcir une pratiqae artisilqae rcas rend plas
apTe à enseigner ?

On ne peut pas être psychanalyste si I'on n'a pas soi-même fait


une psychanalyse. De même, dans la pratique artistique, le corps
et la tête sont impliqués en même temps, et c'est ce « en même
70 L'cnfaot vers l'an

temps » qui fera eu'il y aure enseignement eu sens de « transmis-


sion ».
Il n'y a pas de position chamanique de I'enscignant-aftiste, dont
la seule présence charismatique et fescinante produirait une trans-
mission de I'art. Pour moi, l'artiste-enseignant est quelqu'un qui
a une prâtique, qui æaÿre. En uavaillant dans son atelier, il æatre,
et c'est cela qu'il transmet à ses élèves.
Sa réflexion d'enseignant se nourrit de sa réflexion d'aniste sur son
propre uavail. Il demeure sans arrêt à la fois au-dedans et en dehors.

Comme ooÿre dérnarcbe d'artistu, toîre traoail aaec les élàoes fait appel
à des référetces artùliqaes anciennes, atx mytbes, aax problîmatiqaes de
l'art contemporain. Cornnent les entrecroisez-aoas ?

Mon atelier de pratiques artisdques a lieu au musée Lambinet de


Versailles où sont exposés des æuvres et des objets d'art des XVIII'
et xlx'siècles. Je les utilise comme points de dépan, en choisis-
sant à chaque fois un thème qui puisse être réactualisé.
Par cxemple, qu'est-ce que seraient les filles de Loth dans un
contexte contemporain ? Si I'on prenait Moise et les filles de Jethro
dans la Bible, qu'est-ce que signifierait ce thème de l'émigré ?
Qu'est-ce que ça veut dire, un fils qui sauve son père du feu,
comme Enée pour Anchise ? En même temps, pour réactualiser ces
thèmes, je donne aux élèves des références plastiques comme Andy
§üarhol, Matisse ou Picasso.

Comrnent prccédez-ttoas ?

Je choisis, par exemple, un petit Amour de Falconi, le doigt sur


la bouche, symbolisant « l'Amour menaçant ». Je laisse les élèves
parcourir le musée. Puis ils dessinent ce petit Amour. Je leur
demande ensuite d'apporter des documents associés à ce thème de
« l'Amour menaçant ».
L'une des élèves a appofté le baiser de Rodin, un enge de Klee, une
petite boîte avec un angelot, une affiche du film Carnille Claadel
et une photo d'elle, bébé, avec le doigt sur la bouche. À partir de
ces documents, je leur donne des référenccs contemporaines comme
celle de la figuration libre, avec le principe simple de la superposi-
tion d'images diverses, comme chez David Sallcs, par exemple.
Des disciplines indisciplinées 71

À l'aid. des éléments hétérogènes de sa propre documentation,


l'élève peut, par des jeux plastiques (par exemple, en remettant
toujours les mêmes couleurs) et par des systèmes de superposition,
relier ensemble ces documents qui tournaient autour du thème de
l'amour. Un peu comme dans les jeux d'association de la psycha-
nalyse. À propor de psychanalyse, j'ai remarqué que les thèmes choi-
sis par mes adolescentes se sont dirigés vers les « objets de leur affec-
tion », au sens où Man Ray employait l'expression. L'une d'elles,
par exemple, a immédiatement relié la Diane chasseresse à I'idée
de pudeur et de chasteté.

Les tbènces abordés tourrent-ils touiours ailtortr de l'amoar et de la


sexaalité ?

On n'aborde jamais de front ces questions alors que j'ai I'impres-


sion, à trâvers toutes ces images, de uavailler constamment là-desus
avec elles. C'est ainsi qu'elles me racontent des choses, mais tou-
jours par métaphore. D'un côté, il y a le travail didactique : qu'est-
ce qu'un mythe, qu'est-ce qu'il raconte ? De I'autfe, cette mytho-
logie est le support d'une expression profonde qui, jamais, ne leut
tpparaîua. comme impudique.
Je pourrais par exemple leur faire accepter les æuvres « porno » de
Jeff Koons, celles où il pose avec la Cicciolina, à travers les bis-
cuits du xvur représentant des bergères se faisant trousser... Les
personnages se lutinent de la même façon, et le sujet n'est pas si
différent... L'histoire de I'art est une manière d'aborder avec élé-
gance des sujets que l'on n'ose jamais aborder dans une classe.

Est-ce là l'an des bax de l'éducotion artittiqae ?

Mettons des guillemets à ce que je dis. Il y a des choses que I'on


ne peut pas échanger avec des jeunes gens dans une classe autre-
ment qu'avec des écrans, des voiles. Ces choses sont de I'ordre de
la sexualité ou de la mon. Pour ces choses indicibles, l'école a choisi
comme voile le discours scientifique . On ne parle pas de la Chose,
mais d'autre chose. Le monde de I'aft, de la religion, des mythes,
créent d'autres voiles pour qu'apparaissent des images qui rendent
compte de la chose invisible ou indicible. C'est un moyen, au même
titre que la science.
72 L'cnfant vcrs l'an

I-a mytltologie eî la religion pennettraiert ùnc ane aatre forrrze de saaoir,


donc d'dducation ?

Il n'est pas question de reprendre ces anciens voiles de la mytho-


logie ou de la religion en tant que croyances, mais de se deman-
der comment fonctionnaient ces anciens voiles ou ces écrans, et com-
ment on peut les réactualiser dans le monde contemporain sans
qu'ils soient des carcans de croyance. Je crois que c'est en les
multipliant.

Ne pounait-on p6 dire dgalemefit que « I'art enseigne » ?

Si la question de l'éducation artistique se pose avec tânt d'acuité,


c'est que la question de l'éducation se pose dans I'art lui-même.
L'art ancien comporte en effet un certain contenu didactique : racon-
ter un mythe, une scène biblique, un haut fait historique...
Les æuvres contemporaines aussi, dans la mesure où elles « revisi-
tent » l'héritage anistique du passé, I'analysent, I'explicitent, le
déplacent. C'est ce que je demande à mes élèves de faire, routes
propordons gardées, lorsqu'ils réactualisent des thèmes ùés d'ceuvres
du musée Lambinet. La problématique n'est pas uniquement plas-
tique : il s'agit aussi de se demander ce que ces Guvres leur ensei-
gnent.

Alors qae lo plapart des dlèaes ne reçoitent plas ane formation classique,
ne sort-ils pas coupés de ÿoat un pan de l'ltistoire de l'art ?

En effet, il ne suffit pas de monrrer un tableau d'Alberola pour


que les élèves comprennent lc mythe d'Actéon, ce que signifie
aujourd'hui une telle cuvre, ce qu'esr ce myrhe et pourquoi il est
uaité de cette manière. L'élève non préparé regarde d'abord si c'est
bien ou mal dessiné.

Il faut donc faire toilt arz traoail de rdddrcation, à la fois poar les faire
accéder aax références passées et rnodcrnes. Concment aoas y prerez-toas ?

La conception de I'aft des élèves se résume en effet souvenr à un


chromo. On ne peur pas les obliger à faire du Pollock s'ils ont
envie de dessiner la tête de leur chanteur préféré.
Des disciplines indisciplinées 73

Alors, j'invente des dispositifs qui répondent à mon désir d'ensei-


gnement et à leur propre désir. Il faut être pervers et démagogue
dans I'enseignement !
Par exemple, je leur montte des anges sculptés des jardins de Ver-
sailles en leur disant que ces anges sont les gardiens du désir. Je
leur demande de les dessiner d'abord, puis de barbouiller derrière
I'ange tout ce qu'ils ont envie de représenter, tout ce que le gar-
dien est censé garder, y compris la tête de leur idole. Ainsi, ils
sont satisfaits, et moi aussi.

Qu'attendez-aous de cet enseignernent ?

Peut-être ce que le psychanalyste Daniel Sibony appelle « la coupure-


lien » : à la fois couper, et se relier à l'autre. Par une certaine pra-
tique, que les élèves apprennent à séparer dans I'image, à repérer,
à relier... On revient toujours à la question de I'identification et
de I'identité. Parce que I'on a appris les choses, on est capable,
grâce à ce savoir, de se séparer du modèle.

Il y a dans l'art une dimension éducative, au sens le plus large


de l'éducation : une « leçon de vie ». Quelque chose qui ne p,§se
pas par le langage, mais qui apprend à vivre. Une leçon existen-
tielle...

Pourquoi certains enseignants ressentent-ils si nîgatiaernenl l'intentention


des artisîes à l'{cole ?

L'idée sous-entend qu'il n'y a pas d'artistes dans l'Éducation nario-


nale ; que notre rôle d'enseignant est de présenter des artistes parce
que nous-mêmes n'en sommes pas. Les enseignants d'arts plesti-
ques se sentent donc en danger. Ils ont peur de perdre leur image.
Souvent, ils ont depuis longtemps abandonné toute pratique aftis-
tique. Or, avec les interventions d'aftistes, ce qui revient sur le tapis
est la nécessité d'avoir cette pratique.

Beaacoap d'entre eax soaffrenî d'ottoir renoncé à ane pratique artisilqae


à caase des exigences de lear rnétier.

C'est en effet une castration... Comme s'il y avait une incompati-


1 L'enfant vers l'an

bilité provcnant des étiquettes institutionnelles. Parce que les ins-


titutions ne veulent reconnaltre que la pan qu'elles instituent. Alors
qu'il y a toujours autre chose...
Aoez-toas éproaoâ personrellemenÿ cette incomporibilité ?

Je pourrais vous en citer un exemple. J'avais réalisé une exposition


dans le jardin de la cathédrale de Chanres. Une personne en charge
de la formation continue des instituteurs m'a demandé de faire une
intervention auprès de ceux-ci. Elle n'a pas eu lieu car l'école nor-
male ne pouvait pas me rémunérer en tant qu'intervenant, puis-
que j'étais professeur de l'Éducation nationale... Ils auraient pu
payer n'importe qui d'auffe, sauf un profeseur. C'est un symptôme
révélateur. Comme si un prof de lettres ne pouvait pas éditer sous
prétexte qu'il était enseignant...

Ne peal-on à la fois être artisÿe et enseignant ?

Pour avoir enseigné pendant vingt-cinq ans, je peux affirmer qu'un


travail âvec une dimension artistique ne peur être un travail ponc-
tuel. Ou alors, il devient une occupation de loisir et non pas une
dimension de leçon cxistentielle. Ce ne doit pas être une anima-
tion culturelle. C'est une quesrion de temps.

Voas retendiqacz Poutarrt ce doable statuÿ ?

Je me suis dit un jour que j'étais aniste-enseignante er que je tenais


beaucoup à ce petit trait d'union.

Le ddsir d'enseigner et le désir de créer ont-ils la rnêtne source ?

Ce n'est pas le même. Être artiste, c'est produire quelque chose


avec les restes de sa vie en le sublimant. En tant qu'aftiste, mon
désir est d'æuvrer. Il y a un besoin de reconnaissance, mais il n'est
pas essentiel pour que j'æuvre. Beaucoup d'enseignants ne sont pas
ardstes parce que l'on ne reconnaît pas leur æuvre. Ils arrêtent donc,
ayant toujours autre chose à faire pour se faire aimer. L'institution
ne les aimant pas comme aftistes, ils cessent.
Des diriplincs indiriplinécs 7'

Et rcas ?

Personnellement, j'ai un minimum de reconnaissance artistique des


institutions culrurelles. Mais, par ailleurs, je sais que je suis aimée,
ou hai'e, de mes élèves. Et ça, c'est un déplacement de mon désir
dans l'atelier, qui arrive dans la classe. Même si je ne sais pas tou-
jours comment I'engeger dans mon activité anistique, c'est ce même
désir que j'engage dans la classe.

Vous atez fondé aaec d'autres artistes-enseignanîs le groape « âcArt »

Qaelt sont ses objectifs ?

Il s'agit d'une association d'enseignants qui ont reçu la formation


CAPES ou agréga:tion, et qui sont en même temps aftistes. Nous
avons réalisé une première exposition collective il y a cinq ans, en
forme de « manifeste », puis une seconde au palais du Roi de Rome,
à Rambouillet, où professeurs et élèves ont fait des installations.
Nous revendiquons le fait d'être enseignants et aussi ardstes. Nous
ne cherchons pas à nous faire reconnaître à I'extérieur, par le mar-
ché de I'art, mais à l'intérieur de l'Éducation natiorrale, .., r"nr
qu'eftistes.

Voas y êtes pantenas ?

C'est là-dessus que pofteront désormais nos effoms

Voas considîrez donc oos deux identitét colnme indissociablet ?

Je me demande si le prof qui n'a pas de pratique artistique ne


fait pas un autre métier. Il peut très bien le faire, d'ailleurs, mais
ce n'est pas ma concePtion de ma profession.

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