Le processus d'enseignement/apprentissage
II s'agit, en premier lieu, de prendre en compte les difficultés inhérentes au métier qui se manifestent
sous plusieurs aspects.
En dépit de l'enthousiasme manifesté par la plupart des professeurs pour tout ce qui touche à leur relation
avec les élèves, nous avons relevé nombre de facteurs de mécontentement plus directement liés à la pra-
tique d'enseignement.
Le plus fréquemment invoqué est le sentiment d'impuissance devant l’échec des élèves et d'inutilité de
leurs propres tentatives pour remédier aux inégalités naturelles ou sociales.
Celui-ci rejoint la désillusion due à l'écroulement des espoirs face à la réalité : bien des enseignants, en
début de carrière, sont convaincus que, grâce à eux, tous les élèves vont enfin accéder facilement au
savoir; mais, avec l'expérience, ils s'aperçoivent qu'en dépit de leurs efforts subsistent des résistances
insurmontables.
Si le rapport avec les élèves, en lui-même, et le bonheur d'intervenir dans leur maturation demeurent le
pivot de la motivation des enseignants, ils représentent en même temps une source de soucis. D'une
manière générale, les professeurs éprouvent beaucoup de difficultés à accepter l’absence d'un rapport
de cause à effet entre leurs efforts, leurs aspirations, leur investissement personnel et les résultats
atteints par les élèves. Ce refus s'explique par la remise en cause de la fonction même de l’enseignant
qu'implique ce phénomène d'inadéquation entre l'enseignement et 1'apprentissage.
Une désillusion constante ressentie par nos interlocuteurs provient ainsi du décalage entre les intentions
et les résultats, entre les espoirs et la réalité : qu'il s'agisse de l’incapacité à réaliser les objectifs fixés, de
l’impuissance à pallier les inégalités sociales ou de la réponse décevante des apprenants à leurs
sollicitations. Les écarts constatés relèvent de domaines différents, qui exigent des interventions adaptées.
Nombreux sont ceux qui ont réclamé un échange entre les productions de la recherche théorique et les
réflexions issues de leur pratique, car ils ressentent que leur incapacité à dépasser les obstacles liés à la
situation d'enseignement pourrait trouver une réponse dans les travaux des scientifiques.
Ainsi, les études des spécialistes s'orientent vers une conception non linéaire de l’apprentissage, la
négation du rapport de cause à effet entre l’input et l’output, l’individualisation des stratégies
d'apprentissage.
Les enseignants, pour leur part, considèrent le plus souvent qu'à leur action correspond un résultat
strictement concordant, ce qui entraîne deux types de conséquences : un sentiment personnel de
culpabilisation et/ou une incompréhension des causes d'échec des élèves.