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Pour mettre au monde

un théâtre franco-ontarien

Les 35 premières
années de
Théâtre Action
Par Joël Beddows et Amelie Mercier
SIGLES

ACFO Association canadienne-française de l’Ontario


ACT Association des compagnies de théâtre
AQJT Association québécoise du jeune théâtre
ATFC Association des théâtres francophones du Canada (ANTFHQ avant 1996)
ATSFO Association des travailleurs de la scène franco-ontariens
CAC Conseil des Arts du Canada
CAO Conseil des Arts de l’Ontario
(Y compris le Bureau franco-ontarien et le Secteur franco-ontarien.)
CNA Centre national des Arts (Théâtre français du Centre national des Arts)
CRCCF Centre de recherche en civilisation canadienne-française
CTP Comité des théâtres professionnels (de Théâtre-Action), table sectorielle
qui a succédé au Comité provisoire des théâtres professionnels
CQT Conseil québécois du théâtre
DTR Programme de Développement du théâtre en région du Théâtre français
du Centre national des Arts
ÉNT École nationale de théâtre du Canada
FTP Front commun des théâtres professionnels
(une des tables sectorielles de Théâtre Action)
PALO Programme d’appui aux langues officielles
(programme du Ministère du Patrimione canadien)
RO Réseau Ontario
ROSEQ Réseau des Organisateurs de Spectacles de l’Est du Québec
TA Théâtre Action
TfT Théâtre français de Toronto, autrefois le Théâtre du P’tit Bonheur
TNO Théâtre du Nouvel-Ontario
TPB Théâtre du P’tit Bonheur
UDA Union des Artistes

Page couverture :
Festival 1983 – Sudbury. Roch Castonguay en Nino, le Clown, observateurs inconnus.
Photo © Jules Villemaire
SOMMAIRE

2 Note des auteurs

3 Remerciements

5 Introduction

8 Aux origines de Théâtre Action

11 Les années soixante-dix

19 Les années quatre-vingts

35 Les années quatre-vingt-dix


40 Le secteur professionnel
46 Le secteur scolaire
51 Le secteur communautaire

55 Les années deux mille


56 Le secteur professionnel
59 Le secteur scolaire
62 Le secteur communautaire

64 Et il reste tant à faire!

66 Bibliographie

70 Liste des membres des conseils d’administration

73 Directions de Théâtre Action


À Mariel O’Neill-Karch,
professeure de l’Université de
Toronto et première historienne
du théâtre franco-ontarien :
notre « mère mémoire » à tous.

NOTE DES AUTEURS

Affirmer que l’écriture de l’historique latrice au sein du milieu. Voilà ce qui


d’un organisme aussi complexe que TA explique le rôle de leadership que
nécessite de faire des choix difficiles relève le secteur professionnel a assuré au
du pléonasme. Il n’en demeure pas moins sein de cette structure depuis sa création
qu’une sélection factuelle, dans le cas de en 1972. Fait révélateur, Lise Paiement,
l’étude présente, a été particulièrement enseignante dans une école secondaire,
difficile puisque les animateurs qui ont et Denis Bertrand, à l’époque membre de
marqué TA se sont toujours investis avec la troupe communautaire Méli-Mélo de
passion au regard des nombreuses traces Kapuskasing, sont les deux seuls
retrouvées dans les documents déposés membres issus des secteurs amateurs de
dans le Fonds d’archives de l’organisme. l’organisme à avoir assumé la présidence
La tâche a été rendue d’autant plus ardue de TA (Voir la liste des membres des
du fait même que la majeure partie conseils d’administration pour de plus
de ces intervenants est encore de ce amples renseignements). La direction de
monde, et dans certains cas, encore active l’organisme a autrement toujours été
dans le milieu théâtral franco-ontarien. assurée par un intervenant ou un artiste
En ce sens, il importe de souligner issu du secteur professionnel.
d’emblée que le récit qui suit se veut En effet, bien que les secteurs
une lecture de l’histoire de TA, scolaire et communautaire n’aient jamais
une lecture parmi tant d’autres; celle cessé de manifester leur présence, force
d’auteurs qui ont eu une liberté est de constater que la majeure partie des
complète en ce qui concerne le contenu moments historiques marquants de TA
du document présent. ont été gérés par des artistes et des admi-
Nous avons volontairement choisi nistrateurs rattachés aux troupes et aux
de privilégier des perspectives sociales, compagnies professionnelles. Ce n’est
communautaires et politiques afin de qu’à la création des tables de consulta-
mettre l’accent sur l’influence constante tion que les amateurs et les enseignants
de TA non seulement sur le milieu théâ- ont développé des plans d’action qui leur
tral, mais aussi sur la société franco- étaient et sont toujours propres. Au
ontarienne dans son ensemble. La moment de dépouiller le Fonds d’archives
contribution de l’organisme aux grands de TA, il a été presque impossible de
projets de voir naître une nation franco- retracer l’évolution de ces secteurs en
ontarienne et, ensuite, de constituer de tant qu’entités autonomes avant le début
toute pièce un théâtre franco-ontarien en des années quatre-vingt-dix : les traces de
mesure de rayonner à l’échelle inter- leurs activités se superposent continuelle-
nationale, est indéniable, tout comme ment avec celles du secteur professionnel
l’est sa fonction ponctuelle de force régu- dans les documents déposés au CRCCF,

2
principale source exploitée au moment tif sur TA après 1998. Son travail au
de la conception de ce document. Théâtre la Catapulte exigeait de lui qu’il
Autrement dit, ce n’est que plus récem- côtoie TA de près, qu’il prenne position
ment dans l’histoire du théâtre franco- lors de débats marquants pour l’organisme
ontarien que les secteurs scolaire et ama- et qu’il s’implique directement dans ses
teur sont devenus assez forts pour assu- nombreux projets. Pour cette raison,
rer un leadership à l’échelle provinciale même si c’est Joël Beddows qui a pris
dans leurs champs de compétence, pour en main la rédaction des éléments
comprendre les enjeux spécifiques à leurs historiques qui précèdent la tenue des
pratiques et pour affronter les défis inhé- premiers États généraux du théâtre
rents à leurs regroupements. franco-ontarien, c’est Amelie Mercier qui
Nous tenons à apporter une seconde a été la principale rédactrice des évène-
précision d’importance : l’invitation lan- ments qui ont suivi 1991.
cée par Denis Bertrand à Joël Beddows à Enfin, il est à espérer que ce docu-
rédiger l’historique de TA s’inspirait du ment incitera d’autres chercheurs à abor-
fait qu’il était le seul à avoir dépouillé le der selon d’autres perspectives ce riche
Fonds d’archives de l’organisme avant objet d’étude. Après tant d’heures de tra-
cette date, un travail effectué dans le vail, une certitude s’impose : ce sujet n’est
cadre de ses études doctorales. Cependant, pas épuisé! Au contraire, il reste énorme-
son implication en tant que directeur ment à faire pour rendre pleinement
artistique au Théâtre la Catapulte ne lui compte des accomplissements de TA.
permettait pas de porter un regard objec-

REMERCIEMENTS

Tout d’abord, nous tenons à remercier Haentjens, pour ses précieux conseils
tous les membres du personnel du CRCCF et commentaires.
de l’Université d’Ottawa qui ont rendu la Mais avant tout, nous tenons à remer-
rédaction de cette étude possible. Il faut cier tous les animateurs et artistes, tant
également remercier le personnel de TA et, amateurs que professionnels, qui ont in-
plus particulièrement, l’ancien directeur vesti TA d’une énergie sans fond depuis
général, Denis Bertrand, qui a eu l’idée de sa création en 1972. Le document qui
rédiger cet historique, mais également suit témoigne de l’importance de leur
Robert Corbeil, le directeur général actuel, travail. Il s’agit en fait de l’histoire d’une
qui a rendu sa réalisation possible. Un merci communauté artistique qui a décidé de se
particulier à Ève Cardinal, qui a géré donner et de donner à l’Ontario français
avec beaucoup de doigté le projet dans une tradition théâtrale.
ses dernières étapes, ainsi qu’à Marc

3
Introduction
Page précédente : Festival provincial de Théâtre Action à Toronto, Jean-Guy Roy, formateur, apprenants inconnus, 1980.
Photographe : Jules Villemaire, Université d’Ottawa, CRCCF, Fonds Théâtre-Action (C4), Ph169-3.

Introduction

L’
historique de TA est celui d’un en est un parfait témoignage. Du début
« organisme de développement au des années soixante-dix jusqu’au milieu
service du théâtre franco-ontarien », des années quatre-vingts environ,
un organisme qui a toujours cherché l’« action socioculturelle » a été privilé-
à répondre aux besoins particuliers giée. Les initiatives de l’époque mettaient
des compagnies professionnelles, des en évidence la fonction sociale du
troupes communautaires et estudian- théâtre, à savoir sa capacité de créer un
tines, et, plus récemment, des artistes discours commun de cohésion identitaire
pigistes professionnels, qui ont choisi et culturelle chez les créateurs et les
d’œuvrer en Ontario français. Au-delà spectateurs. Autrement dit, le théâtre
du dynamisme que l’on associe à était considéré comme un moyen d’assurer
cette communauté artistique depuis ses le développement culturel de l’ensemble
origines, ce mouvement a toujours trouvé de la nation franco-ontarienne. En atteste
une part importante de sa spécificité la place de choix accordée à l’animation
dans l’exiguïté de son milieu, un parti- théâtrale pendant cette première période,
cularisme qui a incité les animateurs un concept emprunté aux autres
de TA à tisser, pendant plus de trois mouvements théâtraux contre-culturels
décennies, des rapports privilégiés entre actifs au même moment en Occident, et
les pratiques professionnelles et amateurs, plus particulièrement au « jeune théâtre
et entre les producteurs et les consom- québécois ». Simultanément, TA a égale-
mateurs culturels de l’Ontario français. Il ment joué un rôle de catalyseur pour le
s’agissait de stratégies, parmi tant milieu théâtral : il a cherché à mettre les
d’autres, qui ont permis, dans un premier praticiens en contact les uns avec les
temps, de faire la promotion de la autres afin d’encourager l’émergence de
nouvelle identité et de la vision culturelle structures de création, sous forme de
dites « franco-ontariennes » pendant troupes tout d’abord, puis ensuite de
les années soixante-dix, et, à long terme, compagnies professionnelles ou ama-
d’assurer l’autonomie – ne serait-ce que teurs. Ce sont ces structures qui devaient,
partielle – de leur milieu vis-à-vis de la à long terme, créer et promouvoir les
métropole, Montréal. Pour retracer œuvres dramaturgiques qui allaient
l’historique de TA, il faut donc avoir composer le canon franco-ontarien. La
présents à l’esprit les principaux projets première génération de créateurs à se
qui ont marqué son existence, et qui lui dire « Franco-Ontariens » prisait vraisem-
ont permis d’atteindre ses objectifs et blablement l’interventionnisme.
d’assurer ainsi la pérennité du mouve- Or, après 1985, les gestes posés par
ment théâtral franco-ontarien. TA ont commencé à changer d’orien-
L’implication de TA dans le dévelop- tation. Ils visaient dorénavant la profes-
pement et l’enracinement d’une pratique sionnalisation des « compagnies de
théâtrale de langue française en Ontario – métier » et de leurs productions, sans
la constante qui figure dans la majeure exclure, bien entendu, l’enracinement
partie des documents préservés dans des troupes amateurs. Si, auparavant,
le Fonds d’archives au CRCCF de « l’action sociale » était privilégiée, le
l’Université d’Ottawa – a été traduit en « théâtre en tant que pratique » prenait
programmation de maintes façons au fil une place prépondérante. Certes, l’ani-
des ans. En fait, on observe clairement des mation et la formation sont demeurées
changements majeurs et parfois même les deux fers de lance principaux de TA,
radicaux dans la façon d’appréhender la mais ils n’étaient plus considérés de la
mission de cette structure. Le glissement même façon : ils s’inscrivaient dans une
de sens dans le nom même de l’organisme logique utilitaire d’appui ponctuel,

6
contrairement à la logique interventionniste analyse de l’une de ces composantes. Par
et populiste observée précédemment. Ce exemple, les annales de TA ne peuvent
changement découlait des besoins expri- pas expliquer l’émergence des courants
més par le secteur professionnel qui, de esthétiques propres à la dramaturgie
son côté, avait lui aussi modifié sa vision : franco-ontarienne, le rôle particulier
le théâtre dit « pauvre » d’autrefois se que joue aujourd’hui l’enseignement des
trouvait de plus en plus délaissé par les arts dramatiques dans les écoles franco-
praticiens et était remplacé par des ontariennes ou encore les nombreux
expressions artistiques plus person- débats autour de la diffusion et des
nelles impliquant de nouveaux défis au tournées sur le territoire ontarien.
niveau de la mise en marché et du Il n’en demeure pas moins que TA
rayonnement du théâtre franco-ontarien, est resté le cœur névralgique du théâtre
aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur franco-ontarien. C’est pourquoi toutes les
de l’Ontario français. problématiques liées de près ou de loin
Par ailleurs, dès 1985, c’est en partie aux pratiques franco-ontariennes se sont
grâce aux appuis offerts par TA que les toujours retrouvées parmi les préoccupa-
compagnies théâtrales de l’Ontario fran- tions articulées par les équipes de TA.
çais ont amélioré l’administration de Cependant, c’est en retraçant l’histoire
leurs activités. Les animateurs de TA ont de TA que l’on est à même de com-
aussi travaillé au renforcement des prendre comment et dans quelle mesure
secteurs scolaires et amateurs de la trois générations d’animateurs, nourris
pratique franco-ontarienne. Force est de par un esprit de collégialité, ont révisé
constater que les visions qui avaient ponctuellement la mission de leur orga-
nourri les actions menées par l’organisme nisme et, in extensio, de leur milieu,
se sont peu à peu adaptées aux attentes pour ensuite veiller à la mise en place
de chaque secteur. de projets de développement et de
Il est donc peu étonnant, qu’à bien structures capables de répondre aux
des égards, TA soit un modèle unique au besoins préalablement définis.
Canada, c’est-à-dire un « caméléon ins- Le succès artistique et le rayonne-
titutionnel » conçu pour répondre aux ment actuel du théâtre professionnel,
défis qui accompagnaient les contextes le degré actuel d’enracinement des
régional et minoritaire caractéristiques troupes communautaires et le succès
du milieu franco-ontarien. Le besoin de considérable du Festival de théâtre en
maintenir des liens efficaces entre les milieu scolaire sont tous les fruits de leur
praticiens amateurs et professionnels engagement et de leurs efforts. Ils ont
représente un des moyens adoptés pour ouvert la voie à la quatrième génération
assurer la pertinence continue du projet de créateurs à se dire « Franco-Ontariens »
de créer, en sol ontarien, une pratique qui nourrit actuellement et progressivement
originale de langue française et d’assurer TA de ses projets.
son enracinement au sein même de la
société. Compte tenu du caractère très
restreint de chacun des secteurs, les
compagnies et les troupes ne pouvaient
assurer à elles seules la pérennité de leur
milieu, ce qui explique l’absence de
rupture entre les différents secteurs au
moment des États généraux du théâtre
franco-ontarien en 1991.
Enfin, il importe de préciser qu’il
serait faux de voir dans ce parcours de
trente-cinq ans, ou même dans ce livre,
l’histoire du théâtre franco-ontarien.
Ce serait affirmer volontairement que
l’on peut rendre compte de l’histoire
complexe d’un milieu par la seule

7
Aux origines de
Théâtre Action (TA)

C
ontrairement à la renaissance population francophone de l’Ontario s’était
acadienne des années soixante-dix, subitement et rapidement urbanisée.
le grand mouvement culturel, iden- C’est ainsi qu’une société rurale,
titaire et communautaire autonomiste agraire et peu scolarisée, ayant préservé un
franco-ontarien de cette même décennie fonctionnement unilingue dans des agglo-
ne s’était jamais doté d’une plate-forme mérations insulaires et souvent isolées, a vu
politique explicite. Les intervenants les une part importante de sa population se
plus visibles en Ontario français étaient, déplacer vers des villes comme Sudbury,
pour la plupart, des artistes de vingt à Timmins, North Bay, Ottawa, Toronto et
trente-cinq ans qui cherchaient à créer Windsor. Des générations complètes sont
une nouvelle culture pouvant accompa- alors parties à la recherche de travail dans
gner la nouvelle identité franco-ontarien- les mines, les usines de pâtes et papier, les
ne. Pendant près de quinze ans, des manufactures ou la fonction publique. Avec
jeunes artistes, pour la majorité sans l’exode rural de ces fils et filles d’agricul-
formation, ont exprimé leurs visions de la teurs, la langue de la sphère publique est
réalité sur le mode de la « contre-culture », devenue inévitablement l’anglais, et celle
refusant ainsi l’identité canadienne- de la sphère privée, le français. Les franco-
française, véhicule de valeurs alors phones de l’Ontario sont ainsi passés d’un
considérées désuètes. Il s’agissait là de la statut majoritaire sur le plan local à un
génération d’animateurs et de créateurs statut minoritaire, d’un statut de notables à
qui a contribué à faire du théâtre le porte- un statut d’ouvriers au service d’industriels
parole de leurs préoccupations et qui a anglophones. Plusieurs d’entre eux ont très
fondé TA. vite compris que cette nouvelle donne amè-
Ce mouvement de rupture identitaire nerait la folklorisation de leur culture
et culturelle germait depuis dix ans. Les et de leur langue.
origines de l’idée d’un « Ontario français Cette importante rupture identitaire
culturel », appelé parfois le « Nouvel- s’est aussi effectuée dans le contexte du
Ontario », la « Franco-ontarie » ou la projet trudeauiste qui visait à faire du
« Francontarie », remontaient au début des Canada un pays bilingue. Pour mettre
années soixante, au moment où les en œuvre les recommandations de la
Canadiens français de l’Ontario étaient Commission Laurendeau-Dunton (1965-
confrontés aux revendications indépen- 1967), le gouvernement fédéral a adopté
dantistes du Québec. Les nationalistes un projet d’homogénéisation identitaire
québécois, qui ont plus tard fondé le Parti et culturelle pour tous les canadiens
québécois, avaient décidé d’abandonner d’expression anglaise et française en
symboliquement et politiquement leurs préconisant une politique de bilinguisme
anciennes colonies outre-frontières, établies et de biculturalisme.
principalement à la fin du XIXe et au début La collectivité franco-ontarienne a
du XXe siècles par l’Église catholique, afin de accepté les avantages financiers offerts
pouvoir se concentrer sur la construction et par le gouvernement fédéral pour
sur la promotion d’une nation québécoise. susciter la création d’institutions et
L’adoption d’un discours autonomiste d’infrastructures bilingues : c’est ainsi
par de jeunes francophones progressistes que l’Université Laurentienne, le Collège
de l’Ontario était également tributaire Glendon, des écoles secondaires et des
de changements démographiques et éco- hôpitaux ont été fondés, malgré les cri-
nomiques endogènes à leur province tiques du milieu artistique qui se refusait
d’origine. Pendant les années soixante, la au bilinguisme institutionnalisé parce

8
qu’ils percevaient ce dernier comme un l’Ontario dans les années soixante-dix et
phénomène qui mènerait à la déconsidé- au début des années quatre-vingts, la
ration de leur culture, étant donné population franco-ontarienne ne recevait
que les Franco-Ontariens ne pouvaient que peu de soutien de la part du Québec.
pas exercer un contrôle complet sur Devant cette indifférence et, plus tard,
ces institutions. l’intolérance croissante du gouvernement
Même le gouvernement ontarien, le ontarien, les autonomistes culturels et les
plus puissant des gouvernements provin- nationalistes franco-ontariens, la plupart
ciaux, n’est pas resté insensible au projet liés au théâtre identitaire de création en
de réconciliation nationale proposé par émergence, s’étaient donnés comme projet
Pierre Elliot Trudeau. Le Premier ministre d’affirmer leur particularisme culturel.
ontarien John Robarts a ainsi créé le C’est paradoxalement dans le cadre
Comité franco-ontarien d’enquête cultu- d’une initiative émanant des recomman-
relle parallèlement à la Commission dations du Rapport Saint-Denis et animée
Laurendeau-Dunton. Composé de repré- par des nationalistes québécois que les
sentants des quatre coins de la province, autonomistes franco-ontariens se sont
le comité a produit le Rapport Saint-Denis regroupés pour la première fois. Les
dans lequel le gouvernement de auteurs du rapport recommandaient la
l’époque reconnaissait l’existence et l’im- création d’un Conseil d’orientation cultu-
portance de la population francophone de relle qui devait avoir un statut similaire à
l’Ontario. Cependant, si l’existence d’une celui du Conseil des Arts de l’Ontario
identité distincte de celle du Québec était (CAO) et dont le mandat n’était pas celui
affirmée dans le titre du rapport, les d’appuyer la création mais d’animer le
conclusions de ce dernier niaient l’exis- milieu francophone3.
tence d’une « culture franco-ontarienne », Ce mandat, en fin de compte, a été
et ne proposaient aucune mesure favo- confié au Secteur franco-ontarien du
rable à son développement. Dans les CAO, dirigé par Richard Casavant. Ce
faits, les recommandations s’inscrivaient dernier a créé « Opération Ressources »,
dans une vision trudeauiste d’homogé- un projet interventionniste socioculturel
néisation culturelle précisant que les très semblable à ceux animés plus tard
Franco-Ontariens ne pouvaient s’éman- par TA après sa fondation. Le choix de la
ciper culturellement du Québec1. firme In-Média a été décisif de par sa
Or, seulement quelques années après spécialisation en animation culturelle.
le dépôt du Rapport Saint-Denis, le dis- Les premiers ateliers ont été offerts à
cours de Jean Lesage qui présentait le Kapuskasing. André Paiement du Théâtre
Québec comme le foyer de la francophonie du Nouvel-Ontario (TNO) et Louise
canadienne2 a cédé la place à celui de Tanguay de la Fabrik à Pantouf, mais aussi
René Lévesque qui considérait les franco- quelques praticiens de l’Est, dont Jeanne
phones hors Québec comme des « dead Sabourin de L’Atelier y ont participé4. Aux
ducks », commentaire fait à Windsor en dires de cette dernière, le mot d’ordre était
1972. De plus, lors des crises scolaires de demeurer solidaires dans la lutte contre
qui allaient marquer le mandat de Bill l’effritement culturel et linguistique des
Davis en tant que Premier ministre de francophones du Nouvel-Ontario.
Du 2 au 9 juillet 1971, une vingtaine
1
Comité franco-ontarien d’enquête culturelle, Le Rapport de participants ont convergé vers le Grand
Saint-Denis 42. Paul-François Sylvestre, analysant le rapport, Nord pour suivre des stages intensifs. Les
fait le même constat : « À la lecture des recommandations du
Rapport Saint-Denis, trente ans après leur publication, un animateurs montréalais, ouvertement
constat général s’impose; il s’agit de cette approche quasi nationalistes et réfractaires à la vision
omniprésente qui consiste à voir les Franco-Ontariens
comme une communauté qui doit constamment s’abreuver biculturelle du Canada, ont inspiré aux
à une source artistique extérieure, qui demeure très souvent animateurs franco-ontariens quelques-
le Québec. » Paul-François Sylvestre, « La Culture en
Ontario français : du cri identitaire à la passion de l’excellence », unes des stratégies qui leur ont permis de
Ottawa, 20 mai 1999. rattraper leur retard vis-à-vis du milieu cul-
2
Jean Lesage affirme en 1964 : « Nous croyons que le turel québécois. Cette première rencontre a
Québec est l’expression politique du Canada français et qu’il
joue le rôle de mère patrie de tous ceux, qui, au pays, parlent servi de prémices à la création de TA.
notre langue. » Pierre Savard, « Relations avec le Québec »
dans Cornelius J. Jaenen (directeur), Les Franco-Ontariens 4
« Procès verbal, réunion du comité directeur de l’Atelier »,
(Ottawa : Presses de l’Université d’Ottawa, 1993), p. 247. 6 juin 1971. Fonds d’archives personnel de Gilles Provost.

9
Les années
soixante-dix
Page précédente : Festival provincial de Théâtre Action à Sturgeon Falls, montage des décors, 28 juin 1978.
Photographe : Paul Chiasson, Université d’Ottawa, CRCCF, Fonds Le Droit, Ph92 (8967).

Les années
soixante-dix

L
e CAO n’a pas eu besoin de fonder anglophones. Cela lui a permis de
le service d’animation recommandé souligner la nécessité de créer un orga-
par le Rapport Saint-Denis, ni nisme de développement en vue de
même de faire appel aux services stimuler une activité théâtrale de langue
d’In-Média, car le milieu théâtral franco- française. C’est que les francophones
ontarien a créé TA en mai 1972 à avaient accordé peu d’importance à
Sudbury, de façon à poursuivre le travail l’orientation de cette activité, que ce soit
amorcé un an auparavant. En effet, à l’été dans sa forme ou dans son contenu, et
1971, lors d’une conférence de Theatre avaient fait peu de distinction entre les
Ontario – un organisme de regroupement pratiques amateurs et professionnelles,
anglophone ayant un mandat semblable puisque ces dernières étaient quasiment
à celui de TA – à Geneva Park, l’histoire absentes à l’époque.
a voulu que huit participants de langue En fait, lors du forum provincial
française, ayant pris conscience de leur organisé par le Groupe Arc-en-ciel au
communauté d’intérêts, aient refusé de printemps suivant à l’Université de
s’intégrer aux ateliers de langue anglaise. Sudbury, collège affilié à l’Université
Ils ont préféré former le Groupe Arc-en-ciel Laurentienne, animateurs et artistes
qui a servi de lieu de rencontre dans le ont mis l’accent sur l’action socio-
cadre de cette même conférence. À cette culturelle plutôt que sur le théâtre
occasion, ils ont tracé un premier bilan de proprement dit. Dans son compte rendu,
l’activité théâtrale de langue française en Pierre Beaulne écrivait :
Ontario et ont tenté de définir les besoins
Les 5, 6 et 7 mai dernier [1971],
de leur milieu. Jeanne Sabourin, présente
Théâtre-Action regroupait, pour la
lors de cette première rencontre, a,
première fois dans l’histoire du
depuis, affirmé ceci : « Avec seulement
théâtre franco-ontarien, tous les
deux troupes professionnelles actives à
gens qui s’occupaient directement
l’époque, comparé aux anglophones qui
ou indirectement du théâtre dans la
étaient déjà bien organisés, nous avons
province. / Cette première rencontre
senti que les besoins et le travail de déve-
provinciale orienta les participants
loppement et d’enracinement local à faire
vers une expérience d’animation et
n’étaient pas les mêmes5 ». Les membres
de création théâtrales où les tech-
de ce même groupe ont donc créé un
niques d’applications conduisant à
comité ad hoc qui a commandé une étude
L’ACTION eurent une place de choix
de toutes les pratiques de langue française
à l’ordre du jour6[.]
en Ontario.
Pierre Beaulne, par l’entremise de Les intervenants ont également parlé
son rapport, a entériné les constats du du besoin de créer un théâtre profession-
Groupe Arc-en-ciel. L’étude du fonction- nel de tournée. Or, avant même la fin de
nement de dix des dix-sept troupes leur rencontre, le besoin de mettre sur
actives sur le territoire à l’époque a mis pied une structure flexible en mesure
en évidence le retard qu’accusaient les d’offrir des services de formation en art
francophones de l’Ontario par rapport aux
6
Pierre Beaulne, Ottawa, 5 juillet 1972, « Rapport de la
conférence de Sudbury » p. 7, Fonds Théâtre-Action, CRCCF,
5
Jeanne Sabourin, entrevue privée, 10 mai 2000. C64–3/5/31.

12
dramatique et en animation communau- québécois ». Il lui a donc emprunté cer-
taire a été considéré prioritaire . tains traits, comme l’importance de
Lors de la première assemblée réunir de jeunes créateurs ouverts à des
générale de TA, les premiers objectifs pratiques qui dépassaient les cadres du
de « l’organisme de développement au théâtre dit traditionnel en salle fixe :
service du théâtre franco-ontarien » ont
été formulés : Nicole Doucet – Le concept d’ani-
mation locale est beaucoup plus
1. Voir à la formation venu de Desnoyers dans le sens
A. D’un service de coordination; qu’il disait [qu’] on est les deux
B. D’un réseau de communication [troupes] franco-ontarien[ne]s. Faut
entre les différents centres; pas s’énerver, on est jeune,
C. D’un centre de formation et pis y vont être en train d’apprendre,
de ressources; pis y vont être plein de contra-
dictions, d’énervement, mais au
D. D’un service de diffusion; moins c’est du souffle. C’est pas fini,
2. Voir à l’organisation ça commence. Y faut assumer le
A. D’un festival d’expression; milieu [,] Lavalléville (A. Paiement)
c’est un peuple, c’est un pays, le
B. D’un circuit de tournée; monde en plus petit. C’est notre
C. Des futures rencontres sur le image, pis que notre image soit dure,
plan provincial7. qu’a soit fuckée et pleine de contra-
Depuis sa fondation donc, TA a cher- dictions comme Lavalléville l’était,
ché à rallier tous les praticiens et toutes ben c’est nous autres ça. C’est nos
les compagnies de langue française de ghettos Lavalléville.
l’Ontario, et a exclu ceux et celles du André Legault – Dans ce sens là,
Québec et des autres provinces cana- Beaulne avait mis des outils sur
diennes : il a ainsi tracé les premières pied. Desnoyers avait senti qu’y
frontières de l’Ontario français. fallait axer sur les jeunes8.
Sous la direction de Pierre Beaulne,
son premier coordonnateur général, et de TA a emprunté une autre stratégie au
Lucien Crustin, son premier président du « jeune théâtre québécois » : tout comme
conseil d’administration, TA a traduit les lui, il a privilégié les festivals provinciaux
objectifs établis en une série de pro- comme outil de diffusion, ce qui lui a
grammes favorisant la concertation entre permis de réunir les praticiens profes-
les artistes, les troupes et la communauté sionnels et amateurs pour offrir des
franco-ontarienne. Jacques Desnoyers, le stages de formation et pour diffuser les
successeur pressenti de Pierre Beaulne à productions des troupes auprès d’une
la coordination générale, a d’abord été population dispersée dans l’ensemble de
embauché en tant qu’animateur culturel. la province. Chaque festival se tenait dans
C’est lui-même qui a créé une première une ville différente choisie en fonction de
série de programmes, toujours dans le but la composition du milieu, de préférence
de « conscientiser » les artistes en herbe majoritairement francophone et ouvrier.
et de stimuler une activité théâtrale, La volonté d’offrir une formation au
qu’elle soit professionnelle, amateur ou public était intrinsèque à chaque exercice,
scolaire, mais aussi pour rapprocher les faisant des Franco-Ontariens de toute la
artistes de leur public naturel, la popula- province – selon les organisateurs des
tion franco-ontarienne. Les trois objectifs festivals – des complices de leurs artistes.
étaient considérés aussi primordiaux les Pendant six ans, les organisateurs
uns que les autres. ont respecté cette politique. Les villes
Fait important à souligner, Desnoyers choisies pour accueillir ces festivals
était issu du milieu du « jeune théâtre en témoignent :

7
Pierre Beaulne, « Rapport de la conférence de Sudbury », p. 2. 8
J. Pierre Bégin, « Entrevue », Liaison, no 1 (été 1978), p. 11.

13
1974 Elliot Lake le véhicule d’un questionnement
personnel, le moyen d’assumer et
1975 Pénétanguishene
plus tard de résoudre des contra-
1976 Cornwall dictions à la fois individuelles et
collectives. Entre-temps, tu consi-
1977 Hearst
dérais aussi l’importance de défaire
1978 Sturgeon Falls ce lien unique, ce lien familial qui
nous liait alors au Québec et à sa
1979 Rockland
culture. Cette réflexion coïncide avec
Pourtant, en dépit de cette volonté la découverte d’autres groupes – de
affirmée, et en raison de l’inefficacité de théâtre, d’animation, d’action – tous
certaines stratégies d’intégration, il y a eu des groupes engagés, œuvrant dans
moins de contacts entre les résidents de diverses villes de l’Ontario. Ce sera
ces villes et les festivaliers que l’auraient le début de la reconnaissance de
souhaité les organisateurs9. Il n’en notre particularité12.
demeure pas moins qu’entre 1972 et le
milieu des années quatre-vingts, TA était Il n’est pas étonnant que des popula-
explicitement engagé envers les artistes tions isolées et rurales se soient méfiées
et la communauté franco-ontarienne, des festivaliers et de leurs spectacles,
particularité notable de ses activités mais aussi et surtout, de leurs discours à
durant les années soixante-dix. Les ani- tendance socialiste, un discours dénoncé
mateurs de l’époque tels André Legault, par l’élite catholique. Par conséquent, la
Carmelle LeGal-Brodeur, Anne-Marie de communalisation souhaitée entre produc-
Varennes-Sparks et Nicole Doucet ont teurs et consommateurs culturels poten-
œuvré sans relâche pour rapprocher les tiels s’est surtout résumée à la création
deux groupes. de liens entre les artistes. Par ailleurs, la
Comme ailleurs en Occident, pen- quasi-absence, dans les archives, de com-
dant cette décennie de la « contre-culture », mentaires sur la qualité des spectacles
des pratiques théâtrales socialement présentés laisse penser que l’esprit démo-
rassembleuses ont été privilégiées: des cratique qui inspirait l’ensemble de leurs
formes théâtrales contestataires qui efforts s’appliquait aussi à la sélection
visaient la « subversion, la transgression, des pièces. Ces festivals jouaient donc un
[et] la protestation10 ». Dans un hommage rôle de consécration endogène pour l’ins-
à Nicole Doucet, coordonnatrice générale titution qui investissait toute son énergie
de TA entre 1975 et 1979, denise truax11 a dans la formation et l’animation :
évoqué ce phénomène :
Un 5e festival de Théâtre-Action,
Ce qui t’intéresse? Que chacun, par 5e festival de théâtre franco-ontarien
le théâtre, trouve son lieu particulier et en fait un 5e festival de l’action
et sa parole et que celle-ci devienne franco-ontarienne en ce domaine.
Prétentieux? Pas autant qu’on pour-
rait le croire. Il est indiscutable que
9
Lise L. Roy se rappelle que certains des participants ce festival a été un point tournant du
masculins se faisaient attaquer physiquement par des
résidents des villes industrielles. André Legault évoque le théâtre franco-ontarien et aussi de
peu de contact entre les résidents de Sturgeon Falls et Théâtre Action. En tant qu’organisme,
les festivaliers, et que certains spectacles étaient vus
seulement par les membres de la communauté en proposant et en acceptant l’esprit
artistique présents. Après le festival de Sturgeon Falls, de l’écriture, on a consacré une
Nicole Doucet a constaté que « la structure générale du
festival se voulait un événement populaire dans le milieu évolution dont les étapes ont servi à
et [...] par moments on s’est senti marginaux, [et] que l’on étoffer le squelette du théâtre franco-
fêtait loin du monde » « Du festival » Liaison, no 3 (1978), p. 2.
10
Marco De Marinis, « Sociologie » dans André Helbo,
ontarien. Tout en y restant profondé-
J. Dines Johansen, Patrice Pavis et Anne Ubersfeld ment attaché, on est loin du « se
(directeurs), Théâtre modes d’approche (Bruxelles : découvrir, se fonder, des quatre coins
Éditions Labor, 1987), p. 84.
11
L’animatrice « denise truax », aujourd’hui la directrice
générale de la maison d’édition Prise de parole, n’utilise
pas de lettres majuscules au début de son nom et de son- 12
denise truax, « En reconnaissance », Liaison, nos 5-6
prénom, et ce, depuis le début des années quatre-vingts. (mai 1979), p. 3.

14
de l’Ontario » de Fernand Dorais. La à la population franco-ontarienne, même
conscience de notre NOUS est faite13. si cette dernière ne s’y intéressait que
partiellement :
Ce « Nous » se rapportait bien plus
La création d’un théâtre auquel
aux artistes qu’aux autres secteurs de la
pourra s’identifier le public fran-
communauté francophone de l’Ontario.
contarien15 dépend en grande partie
C’est à l’instigation de TA que le
de la création d’une dramaturgie
« Nouvel-Ontario » du TNO, l’espace
francontarienne de qualité. / Le
culturel des premiers praticiens à se dire
programme Dramaturgie du CAO ne
« Franco-Ontariens », s’est élargi pour
garantit pas par lui-même un outil
devenir aussi l’espace culturel de tous
fort intéressant qu’il faudra conti-
les artistes franco-ontariens. En somme,
nuer à exploiter en autant qu’il
pendant les années soixante-dix, TA a
existe. / Théâtre-Action devra en
favorisé les producteurs qui ont voulu
collaboration avec les théâtres
créer un théâtre franco-ontarien original
professionnels, la maison d’édition
et qui, pour ce faire, ont pratiqué un
Prise de Parole et les troupes perma-
théâtre « pauvre », un théâtre de tournée
nentes, découvrir les moyens dyna-
présentant le plus souvent des créations
miques pour encourager et former
collectives porteuses d’un message de
des auteurs francontariens. On devra
cohésion identitaire pour les étudiants,
s’assurer en plus, en se donnant les
les jeunes adultes et pour la classe ouvrière.
outils appropriés, la diffusion et la
Si, en 1972, TA s’est donné comme
production de textes16.
mandat d’agir en tant qu’organisme de
développement consacré à l’animation À l’époque, TA était convaincu que
socioculturelle, à la formation et à la fête présenter des spectacles à un public
communautaire qui devait regrouper minoritaire était une forme d’animation.
artistes et spectateurs, TA est aussi devenu La circulation des productions de création
une force de normalisation du milieu allaient également devenir une priorité et
dans lequel il effectuait une mission TA a commencé à organiser des tournées
interventionniste, celle qui avait inspiré pour les compagnies de création17, une
sa propre création : nouvelle façon de diffuser les créations
auprès du public franco-ontarien. De
Tout comme aujourd’hui il était alors
plus, l’organisme a encouragé la circulation
évident que Théâtre-Action allait
des textes créés auprès des troupes
vouer ses énergies à développer un
théâtre utilitaire, un outil d’iden- 14
Alain Poirier, « Une vague de fond “Made in Ontario” »,
tification et de valorisation d’un Liaison, no 15 (avril 1981), p. 6.
peuple plutôt qu’une forme d’art. À 15
Il s’agit ici d’une épellation de franco-ontarien plus tard
ceux qui l’accusaient de favoriser abandonnée, mais retrouvée à quelques reprises dans
les documents émis par TA entre 1975 et 1985.
unilatéralement un théâtre politique, 16
[Auteur inconnu], « Quelques projections », [sans date].
Théâtre-Action faisait la sourde Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-3/9/14. Lise Leblanc,
oreille, convaincu que le simple qui travaillait pour TA entre 1975 et 1982, a précisé qu’il
s’agissait d’un document de réflexion adopté plus tard
geste de présenter en [sic] scène ou par l’exécutif de TA vers la fin des années 1970. Lise
dans la rue un théâtre miroir (d’une Leblanc disait dans entrevue privée, 25 octobre 2000:
« [L]es items suivants ébauchent quelques grandes
réalité sociale) est un geste politique14. lignes de force, nouvelles à cette années. / 1. La drama-
turgie franco-ontarienne. Celle-ci devient prioritaire au
Plus spécifiquement, TA a investi sein de la programmation. À cet effet, nous sommes à
élaborer les modalités d’un stage de dramaturgie qui
une part de plus en plus importante de s’adresse à des individus ou à des groupes qui écrivent
ses ressources dans la promotion d’une déjà leurs propres textes », (Théâtre Action, « TA », p. 11.)
dramaturgie inspirée des réalités propres 17
« 3. Théâtre-Action a coordonné cette année la tournée
de la Corvée de Vanier, dans les différents centres de
l’Ontario français. Le spectacle La Patente ou l’Union fait
la force décrivait l’existence d’une société secrète ayant
13
Paulette Gagnon et Michelle Deshaies, « En proposant et en existé pendant plus de 50 ans en Ontario. Son caractère
acceptant l’esprit de l’écriture », Liaison, no 3 (décembre historique et politique était intéressant pour les Franco-
1978), p.1. Nicole Doucet a souligné l’importance de la Ontariens. L’agent de tournée était Alain Poirier. »
création d’une dramaturgie franco-ontarienne dès les (Théâtre-Action, « Rapport des activités de Théâtre-
premières heures de Théâtre Action. [sans titre], Liaison, Action du 1er juillet 1976 au 30 juin 1977 », Assemblée
no 1 (été 1978), p. 2. générale, p. 6, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-3/1/8.

15
scolaires et amateurs avec l’espoir de ces efforts et confronté à cet échec, TA a
voir ainsi émerger un répertoire franco- mis mettre sur pied, en 1977, un système
ontarien. Il a aussi encouragé les de festival régional, dans le but de se rap-
troupes amateurs à monter leurs procher davantage des membres des
propres créations collectives, appuyées troupes et pour répondre aux besoins
par des animateurs de TA issus du spécifiques de ces dernières, qui étaient
secteur professionnel. établies dans le Nord, le Sud et l’Est de la
C’est ainsi que les champs de province. Parmi les noms récurrents dans
développement de TA se sont précisés au les listes d’animateurs et d’organisateurs
fil des ans. Les premiers animateurs à de ces festivals, on trouve Paulette
l’échelle provinciale – Jacques Desnoyers Gagnon, Nicole Doucet, Daniel Jacques,
de 1973 à 1975, puis André Legault de André Legault, André Paiement, Sylvie
1975 à 1977 – ont d’abord été épaulés – Trudel, Paulette Léger, Anne-Marie de
pour être ensuite remplacés – par des Varennes-Sparks et Mariette Théberge19.
animateurs régionaux œuvrant princi- Peu de temps après, des tensions se
palement auprès des groupes scolaires et sont rapidement fait sentir parmi les
amateurs. Il est impossible de retracer membres de TA. En effet, l’organisme,
l’historique des secteurs scolaire et tout en offrant des services d’animation,
amateur, aussi appelé « communautaires », s’était également mis à encourager
au sein de TA pendant cette première l’émergence d’un théâtre d’intervention
décennie d’existence puisque l’idée professionnelle voué à la promotion d’une
même de prendre en considération les nouvelle culture dite « progressiste »: la
besoins spécifiques de chacune des culture des « jeunes ». Sans qu’il n’y ait
pratiques date des années quatre-vingt-dix. eu de scission, des dissensions impor-
Selon la logique démocratique qui domi- tantes ont vu le jour entre les compagnies
nait à l’époque au sein de l’organisme, qui avaient pour mission de créer un
une telle division entrait en contradiction théâtre utilitaire et pauvre et celles qui
avec le principe même de la valorisation avaient pour « mandat » de monter des
de toutes les formes théâtrales présentes pièces de répertoire dans des productions
en Ontario : manifestement, l’approche plus élaborées en salle fixe telles la
de TA entre 1971 et 1979 a été nourrie par Compagnie Gilles-Provost et par moment
un holisme ambiant. le TPB, L’Atelier et même le TNO (après
Cependant, les troupes amateurs et le départ d’Hélène Gravel). Cela peut
scolaires étaient généralement carac- expliquer pourquoi, la Compagnie Gilles-
térisées par une plus grande instabilité Provost n’a jamais présenté de production
comparées aux troupes professionnelles, lors d’un Festival de TA, et pourquoi la
pourtant fragiles elles aussi : rares sont participation du TPB était au mieux
les structures amateurs des années irrégulière. Même si TA n’a pas remis en
soixante-dix répertoriées dans le Fonds question ses efforts visant à rassembler
d’archives de TA dont l’existence ait pu l’ensemble des producteurs et des créa-
se prolonger au-delà de cette décennie. Il teurs du territoire, il a exercé certaines
est donc peu étonnant que les artistes pressions sur les compagnies du second
aient consacré une partie importante de type qui avaient soit disparu, soit modifié
leur énergie à la consolidation de ces leur mandat.
structures. À titre d’exemple, au troisième En 1976, le CAO a mis sur pied un
Festival provincial de TA tenu à Cornwall second comité ayant pour mandat de
en 1976, des dix spectacles programmés, préparer un bilan des activités culturelles
quatre troupes amateurs, à savoir le ayant été réalisées en Ontario français
Théâtre Sans-Cervelle de Hawkesbury, le depuis 1969, et de formuler des recom-
Théâtre Taro-Pistes de Rockland, le mandations pour orienter l’attribution des
Théâtre Boukane de Windsor et Le P’tit subventions accordées aux artistes
Moulin de Sudbury ont présenté des pro-
ductions, et, pour chacune d’elles, des 18
Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-3/4/7.
créations18. Plus aucune de ces troupes 19
« Animation locale », Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-
n’existe à l’heure actuelle. Malgré tous 3/9/18.

16
francophones. Le rapport Cultiver sa
différence : Rapport sur les arts dans la
vie franco-ontarienne, communément
appelé Le Rapport Savard, a été présenté
à Frank F. McEachren, président du
conseil d’administration du CAO, le
30 septembre 1977. Dans ce rapport, le
CAO était encouragé à abandonner la
vision conservatrice, québéco-centriste et
élitiste canadienne-française de la culture
incluse dans le Rapport Saint-Denis, et à
adopter une philosophie interventionniste.
La régionalisation, voire la « provincia-
lisation », et la démocratisation culturelle
étaient dorénavant de mise. En 1977,
l’année même de la fermeture de l’Atelier
et de la Compagnie Gilles-Provost, ce
comité a reconnu l’existence de compa-
gnies théâtrales de langue française à
Sudbury, à Ottawa et à Toronto et a
préconisé l’appui aux compagnies de
création plutôt qu’aux compagnies liées
au Québec.
Tout était en place pour la seconde
vague d’animateurs de TA qui allait
embrasser la cause de la professionna-
lisation de l’animation et des pratiques.

17
Les années
quatre-vingts
Page précédente de gauche à droite : Festival provincial de Théâtre Action à Sudbury (1983);
Atelier de voix, apprenante inconnue, Louis Spritzer – animateur. Photo © Jules Villemaire.

Les années
quatre-vingts

L
es années quatre-vingts ont permis ment et de gestion de certains éléments
à TA et à ses membres de mesurer régulateurs de leur milieu. À titre
les limites de leur influence en d’exemple, TA est demeuré l’organisateur
Ontario. L’idée d’une autonomie complète des festivals provinciaux qui avaient
vis-à-vis de Montréal, la métropole tradi- promis progressivement la consécration
tionnelle de tous les francophones du des productions montées. De plus, les
pays, n’a pas été poursuivie. Par exemple, producteurs, par l’entremise de TA, ont
en dépit des priorités adoptées par le maintenu des liens de fraternité avec les
CAO à la suite du dépôt du Rapport maisons d’édition franco-ontariennes,
Savard, TA a abandonné le projet qui notamment Prise de parole de Sudbury,
aurait pu mener à plus d’indépendance. pour assurer la publication de leurs
Anne-Marie de Varennes-Sparks, direc- textes. Enfin, TA a fondé, en 1978, la
trice de la troupe Perds pas l’Nord, revue Liaison. Même si cette revue allait
cherchait à créer un syndicat distinct de s’affranchir de TA en 1981, au moment
l’Union des artistes (UDA), syndicat basé à de la création de la maison d’édition
Montréal, mais qui était devenu actif en L’Interligne qui allait prendre le relais de
Ontario français au moment de l’ouver- sa publication, on peut affirmer que la
ture du CNA en 1969. Toujours fidèles revue Liaison, durant les années quatre-
aux tendances socialistes qui avaient vingts, est demeurée un des témoignages
marqué le théâtre franco-ontarien des marquants de la deuxième décennie
années soixante-dix, de Varennes-Sparkes d’existence de TA ainsi que du théâtre
et ses collègues ont alors choisi le nom franco-ontarien en général.
de l’Association des travailleurs de la Dirigée par denise truax, entre 1979
scène franco-ontariens (ATSFO)20. Mais, et 1982, cette revue a tenté de répondre
malgré l’appui de TA et de sa coordonna- aux besoins exprimés par un milieu
trice générale Nicole Doucet, qui croyait théâtral en pleine ébullition, et, plus
sûrement que l’ATSFO puisse faire particulièrement, à ceux touchant la
avancer appréciablement le processus communication – à informer ses membres
d’autonomisation des artistes de la scène dispersés partout en Ontario au sujet des
franco-ontarienne, le syndicat n’a jamais activités théâtrales se déroulant sur
vu le jour, faute de soutien des comédiens l’ensemble du territoire ontarien – et la
d’Ottawa. réflexion sur la portée des pratiques. À
Cependant, les compagnies franco- cet égard, les chroniques de denise truax
phones au sein de TA n’ont jamais cessé brossaient des portraits extrêmement
de garder une relative autonomie leur riches des préoccupations d’un milieu en
permettant de se concerter et, au besoin, émergence, tant sur le plan politique et
de faire front commun pour relever les social que sur le plan artistique. Progressi-
défis imposés par des contextes géo- vement, et de façon souvent controversée,
graphiques et démographiques particuliers TA a répondu au besoin d’une critique
à l’Ontario français. Autrement dit, TA a pour le secteur professionnel, une
été, pour les producteurs, un espace de critique d’abord amicale – le mandat
dialogue, et un organisme de développe- de Fernan Carrière entre 1982 et 1987 –
mais qui s’est révélée de plus en plus
20
Anne-Marie de Varennes-Sparks, « Orientation et objectifs rigoureuse au cours du mandat de Paul-
de l’ATSFO », Liaison, no 0 (mai 1978), p. 5. François Sylvestre, dès 1987. Par ailleurs,

20
si l’époque de Carrière s’est caractérisée de l’élite qui contrôlait les centres culturels,
par une ouverture sur tout ce qui entourait les écoles et l’Association canadienne-
la production culturelle, y compris française de l’Ontario (ACFO). Respec-
les pratiques amateurs et scolaires, sans tueuse des valeurs canadiennes-françaises
oublier l’animation socioculturelle, sur établies, notamment celles liées à la sur-
l’ensemble du continent, Sylvestre a vivance, l’élite francophone de l’Ontario se
recentré le travail de la revue autour de la reconnaissait toujours très peu dans un
production artistique professionnelle en théâtre engagé, et refusait d’accueillir des
Ontario français21. spectacles remettant en cause leur vision
L’évolution de la politique éditoriale conservatrice d’une culture repliée sur elle-
de Liaison n’a pas été le seul indice d’une même23. Ces forces hostiles à « l’esprit du
« sectorialisation » progressive au sein Nouvel-Ontario », dont parlait André
de TA entre 1980 et 1990. Le signe avant- Legault pendant les années soixante-dix,
coureur d’une rupture progressive entre le demeuraient, aux dires des artistes et des
secteur professionnel et ceux du scolaire et animateurs, « figées dans le temps24 » :
des amateurs avait pu être observé en 1979 C’est aussi au tournant de la nouvelle
lors du Festival provincial qui s’était déroulé décennie que le milieu franco-ontarien a
à Rockland. En effet, il s’y était tenu une des été marqué par le départ de plusieurs
premières réunions visant à mettre sur pied intervenants, des personnalités influentes
un syndicat pour les artistes. Par ailleurs, ayant largement défini les activités des
dans le cadre de ce même Festival, une années soixante-dix. En 1981, Eugène
nouvelle génération de créateurs formés par Gallant et Anne-Marie de Varennes-
le Conservatoire de Québec avait fondé le Sparks ont respectivement quitté les
Théâtre de la Vieille 17. Ainsi, le milieu pro- directions artistiques du TPB et de la
fessionnel avait commencé à cultiver troupe Perds pas l’Nord. Le deuxième
des liens et à se comparer aux compagnies collectif du Théâtre d’la Corvée a lui
membres de l’Association québécoise du aussi tiré sa révérence. À ces postes
jeune théâtre (AQJT). En outre, une compli- vacants s’est ajouté, toujours en 1981,
cité s’était déjà établie entre les compagnies celui de la direction artistique du TNO.
franco-ontariennes et québécoises puisque Or aucun départ n’a été autant souligné
certaines de ces dernières participaient au par Liaison que celui de Nicole Doucet,
Festival. Mais, même si en 1978, l’AQJT coordonnatrice générale sortante de
faisait la distinction entre les « troupes TA. Malgré son jeune âge – elle avait
amateurs » et les « troupes de métier », une accédé à son poste à l’âge de 21 ans –,
telle sectorisation n’existait pas encore en cette femme dynamique avait dirigé
Ontario français. Elle ne verra en fait le jour l’action de TA, et, par conséquent, celle
que bien des années plus tard. Il faut dire de la majeure partie de la communauté
que l’engagement politique de la pratique artistique franco-ontarienne. Le bilan de
théâtrale est resté longtemps plus prégnant son mandat, dressé par denise truax,
en Ontario qu’au Québec étant donné qu’il soulignait ses réalisations :
permettait à la communauté de poursuivre
[De] Pierre [Beaulne], dont tu
son combat dans le dossier des écoles secon-
assumeras la relève, tu retiendras
daires de langue française.
deux nécessités, deux perspectives
Il est donc peu étonnant qu’en 1978,
de développement : celle de promou-
lors d’une réflexion autour des orientations
voir, globalement, le théâtre en
futures de TA, Pierre-René Goupil ait affirmé
ce qui suit : « Pour la survie à long terme de 22
Pierre-René Goupil, « Préambule au plan à moyen terme
Théâtre-Action, il est donc essentiel qu’il se 1978-1982 », Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-3/9/19.
préoccupe entre autres objectifs de la survie 23
« Mais je crois que c’est surtout un problème de distribution. Ce
du fait francophone en Ontario22 ». Or ce n’est pas le public qui achète les spectacles, malheureuse-
ment, mais les animateurs culturels. Or, le plus souvent, ils pri-
n’est qu’en 1985 qu’il est devenu évident vilégient une certaine forme de théâtre à laquelle les gens finis-
que cette vision était incompatible avec celle sent par s’accoutumer, puisqu’on ne leur en montre pas
d’autre ». (Marc Haentjens, « Engagement à conscientiser?
Engagement à commu-niquer? », Liaison, no 13 (décembre
21
Marie-Élizabeth Brunet, « Liaison…une histoire en chapitres », 1980), p. 9-10.
Liaison, no 100 (janvier 1999), p. 7-10. 24
Paulette Gagnon, entrevue privée, 25 janvier 2001.

21
Page gauche : Marc Haentjens, annonçant le 9e Festival provincial de Sudbury, juin 1982, photographie parue dans le bulletin
En Raccourci, 20 septembre 1982. Université d’Ottawa, CRCCF, Fonds Théâtre-Action (C64), Ph169-102.

Ontario francophone et ce, sous L’organisme est donc demeuré opposé à la


toutes ses formes et manifestations; notion d’une « culture de prestige » inacces-
mais aussi celle de créer un théâtre sible à la population franco-ontarienne peu
typiquement franco-ontarien – dans scolarisée et dispersée géographiquement:
son contenu et son expression. Il est c’est cette même opposition qui a défini ses
impératif d’expérimenter pour fina- efforts entre 1980 et 1985. Ainsi, dans une
lement inscrire un langage théâtral communication présentée à la Commission
de chez nous. / [C]oncrètement, cela Applebaum-Hébert en 1982, TA, en tant
voudra dire d’offrir des services qui que lieu de regroupement du « jeune
susciteront tant la formation que théâtre franco-ontarien », a revendiqué un
la création. [C]hacun des outils financement adéquat pour un théâtre où
offerts aura un double mandat à l’artiste était considéré avant tout comme
remplir : par la formation, contribuer un intervenant engagé :
au perfectionnement; par l’anima- Une politique culturelle canadienne
tion, ouvrir sur la création, sur doit :
l’expression de soi. [P]ar ces
moyens, soutenir les troupes dans 1. Refuser le concept d’une culture
leurs activités afin qu’elles puissent de prestige qui consacre – et subven-
se découvrir elles-mêmes. / [...] tionne en conséquence – certains
[À] travers ces rencontres et les artistes (producteurs) et certaines
reconnaissances, des techniques se maisons de production (Centre
frotteront, les langages s’ébauche- national des Arts...) au détriment des
ront, des gestes se répondront, autres producteurs culturels, mais doit
créant une communauté de res- plutôt favoriser un développement
sources : présence, échange, parole/ culturel en profondeur qui tend à
identité, milieu, dramaturgie25. soutenir et à aider l’ensemble des ini-
tiatives émergeant de la communauté.
Nicole Doucet a été véritablement un 2. Conséquemment, refuser le concept de
des animateurs les plus importants de la l’artiste comme créateur indépendant
génération qui a créé les assises du milieu et au-dessus de la réalité, qui détient
culturel franco-ontarien. Les artistes qui non seulement la vérité sur cette réalité
ont suivi n’ont pas abondonné les mais qui seul peut l’exprimer « artis-
valeurs, les méthodes de travail ou les tiquement », au profit d’un concept de
buts de TA, qui a été dirigé dès l’hiver l’artiste comme travailleur culturel, qui
1979 par Marc Haentjens, diplômé de travaille à partir de sa communauté et
l’École des hautes études en administration avec elle, qui met ses compétences au
de Paris. Son embauche par le conseil profit de la communauté, d’une part
d’administration a fait l’objet d’une par la création, à travers laquelle il aide
controverse, puisque plusieurs membres la communauté à se réfléchir et,
craignaient qu’une vision trop mercantile d’autre part, par l’animation, au
de la culture soit imposée à l’organisme. moyen de laquelle il amène la com-
Ils auraient préféré voir à la tête de TA munauté à assumer son expression
Odette Gagnon, candidate ayant postulé culturelle en lui transmettant les outils
au même moment que Marc Haentjens. de création.
Elle était alors animatrice pour l’AQJT et
3. Conséquemment, refuser les concepts
plus connue dans le milieu franco-
d’art élitistes – i.e. fait par un petit
ontarien. Mais le conseil d’administration
nombre d’invités au nom et au-dessus
a préféré lui offrir le poste d’animatrice
du grand nombre – et de spectateurs
provinciale, qu’elle avait accepté.
consommateurs passifs26.
Malgré les craintes de certains, Marc
Haentjens a vite affirmé qu’il partageait la Les défis qui accompagnaient cette
vision promue par TA depuis 1972. mission étaient de taille, et seule une
nouvelle génération de créateurs et d’ani-
25
denise truax, « En reconnaissance », p. 3, ébauche, mateurs solidaires et enthousiastes pouvait
Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-10/10/9. les relever. Cette nouvelle génération a non

23
seulement réaffirmé un désir de créer de 1. Animation provinciale
toute pièce une culture franco-ontarienne, 2. Animation régionale
mais aussi une volonté de la diffuser auprès 3. Animation locale
d’une population culturellement et linguis-
4. Festival provincial
tiquement colonisée. Murray Maltais,
critique de théâtre pour le journal Le Droit, 5. Festivals régionaux
a rendu compte du Festival de Rockland 6. Stages provinciaux
en ces termes : 7. Coups de pouce
À mon humble avis, aucune autre 8. Dramaturgie
manifestation culturelle franco- 9. Auditions
ontarienne ne revêt tant d’importance
10. Stagiaires
au niveau de la rencontre, du partage et
de cette fraternité que l’on n’observe 11. Information
pas toujours dans les milieux du 12. Banques de ressources28
théâtre, mais aussi au niveau de l’iden-
tité. Dans une province qui ne veut pas Dans le cadre d’un projet intitulé
reconnaître officiellement leur langue Solidifier les bases du théâtre franco-
et leur culture, des jeunes Franco- ontarien29 et financé par le Programme
Ontariens auront une fois de plus prou- des langues officielles du Secrétariat
vé non que cette dernière existe, mais d’État, l’ancêtre du ministère du
qu’elle rayonne, et ne craint pas Patrimoine canadien, TA a offert pour la
plusieurs comparaisons. Ce qui frappe première fois les services d’animateurs
particulièrement, c’est à coup sûr cet spécialisés pour des clientèles spéci-
enthousiasme, cette énergie, cette fiques. Brigitte Haentjens a été nommée
ferveur chez les organisateurs de cette la première animatrice du milieu commu-
sixième rencontre annuelle. On la sent, nautaire; Jean Marc Dalpé, du milieu
toute proche du sentiment religieux, à professionnel; et, Isabelle Cauchy, du
une époque où celui-ci tend à se diluer. milieu scolaire30. Ils ont défini leur travail
Bien peu de participants au festival de la façon suivante :
ignorent le travail considérable accom-
pli par les responsables de Théâtre Qu’est-ce que ça veut dire concrète-
Action, aujourd’hui ou d’hier, parfois ment, être un animateur(trice) local(e),
au détriment de leur santé. Il y a là une c’est-à-dire une personne – plus ou
manière de néo-apostolat de la culture moins – proche du théâtre, qui vit
et du théâtre qui laisse songeur quelque part dans la province ou qui
d’abord, et qu’on ne peut s’empêcher est envoyée là parce qu’il n’y avait
d’admirer ensuite27. personne sur place pour faire le travail.
Vivre quelque part comme « théâtreux »
En 1979, le travail de TA dans le
et se faire connaître comme tel;
domaine du développement commu-
nautaire était toujours perçu comme • savoir ce qui se passe au niveau de la vie
indissociable de l’enracinement et de locale, communautaire, et y participer;
l’essor d’une pratique franco-ontarienne.
• aider le théâtre qui existe déjà sur place;
Pour poursuivre le travail de leurs prédé-
cesseurs, TA et ses membres devaient
chercher à créer des liens affectifs avec la 28
Théâtre Action, « Les Programmes de TA », Liaison, no 10
(1980) p.18.
collectivité franco-ontarienne, et ce, afin 29
« Théâtre Action a reçu une subvention du Secrétariat
de diffuser la création dite franco- d’État lui permettant de mettre en œuvre un projet
ontarienne. L’animation s’est donc d’animation locale. Ce projet a pour but d’encourager des
initiatives qui proviennent du milieu. « Solidifier les bases
retrouvée, en 1980, en tête des priorités du théâtre franco-ontarien » est un projet qui se propose de
de TA articulées de la façon suivante : permettre à cinq animateurs de travailler à des projets
théâtraux bien précis dans leur milieu respectif. / Le projet
est en marche depuis la fin du mois de décembre (‘79) et la
coordination est assurée par Brigitte Haentjens ». (Théâtre
26
Théâtre Action et Liaison, « Recommandations », Liaison, Action, « Annonces! De Théâtre Action... des nouvelles... »,
no 19 (décembre 1981 - janvier 1982), p.18. Liaison, no 8 (décembre-janvier 1980), p. 9.)
27
Murray Maltais, « Le Festival de Théâtre Action : Cultiver 30
Théâtre Action, « Théâtre Action renforce son équipe
sa différence », Le Droit [Ottawa], samedi 30 juin 1979, p.19. d’animation », Liaison, no 14 (février 1981), p. 31.

24
• en incitant ou en initiant au théâtre issus du Département de théâtre de
du monde qui n’en a jamais fait; l’Université d’Ottawa qu’ils jugeaient mal
• en étant un personnage contact pour préparés pour participer à des créations.
Théâtre Action31. Immanquablement, ils constataient la
stérilité de leurs efforts puisque les sessions
Après les départs de Dalpé et de d’enseignement n’étaient pas suffisamment
Haentjens en 1982 et celui de Cauchy un longues pour permettre aux directeurs des
an plus tard de TA, de nombreux praticiens théâtres d’embaucher les participants par la
qui allaient marquer le théâtre franco- suite. Dans les années quatre-vingts, les étu-
ontarien pendant la décennie suivante, diants franco-ontariens qui désiraient
tels Brigitte Beaulne, Marc Bertrand, poursuivre une formation professionnelle
Marie Cadieux, Marcus Charbonneau, se étaient encouragés à auditionner pour l’une
sont joints aux équipes d’animation. Ce des écoles établies au Québec : l’École
service est devenu un lieu de formation nationale du théâtre (ÉNT) ou l’un des
et un tremplin pour la carrière des Conservatoires à Montréal ou à Québec :
artistes puisque ces animateurs se retrou-
[Odette Gagnon] : La formation des
vaient souvent par la suite intégrés au
professionnels en Ontario, qu’est-ce
Théâtre d’la Vieille 17, au Théâtre d’la
que t’en penses? [Jean Marc Dalpé] :
Corvée et au TNO32.
Dans une province où on a de la
Cette nouvelle génération s’est aussi
difficulté à ouvrir une école secondaire
beaucoup investie dans la formation des
pour 400 élèves francophones, le
autres praticiens. Entre 1979 et 1985, à plu-
dossier de la formation théâtrale ne
sieurs reprises, les animateurs de TA ont
réserve aucune surprise. Il y a deux
organisé des « stages provinciaux » d’une
solutions pour un jeune comédien en
durée de cinq jours pour pallier à l’absence
quête de formation : s’expatrier ou...
d’un programme de formation profession-
hum!... s’expatrier. Il y a bien sûr
nelle en Ontario français. Ces sessions
l’Université d’Ottawa, mais le [D]épar-
étaient généralement offertes pendant les
tement de théâtre lui-même ne se
festivals provinciaux, bien que les troupes
définit pas comme une école de
et les compagnies en proposaient également,
formation professionnelle35.
souvent en collaboration avec TA33.
Contrairement à la pratique des années Les artistes ont donc abandonné en
soixante-dix, seuls les services de formateurs cours de route toute initiative de forma-
qualifiés étaient retenus. Pour la plupart, ils tion ponctuelle. Les résultats obtenus étaient
venaient de compagnies associées à l’AQJT bien trop insuffisants au regard du désir de
ou au Conservatoire de Québec34. Il n’était professionnalisation de leur milieu.
plus de mise d’utiliser ces occasions comme Le travail de TA dans le domaine de la
de simples moments de rencontre entre les distribution des productions a connu une
praticiens des différentes régions de la pro- évolution semblable : à l’optimisme et à
vince. Le milieu était devenu plus sérieux. l’engagement du début de la décennie ont
Or, au fil des ans, les praticiens succédé l’épuisement et la désaffection.
issus des écoles québécoises et françaises Lors du Festival provincial de 1979, les
sont devenus quelque peu réticents à compagnies et les troupes profession-
investir leur énergie dans la formation de nelles ont créé le Comité provisoire
praticiens autodidactes ou d’étudiants des théâtres professionnels (CTP), un
regroupement rattaché à TA. Le CTP
31
Brigitte Haentjens, « Cé quoi ta job? J’fais d’l’animation! »,
Liaison, no 9 (avril 1980), p. 3-4. 34
« Entre 1979 et 1983, des animateurs sont toujours venus
32
Jean Marc Dalpé, « Le Théâtre en région : le Théâtre d’la pour donner des ateliers : Yves-Érick Marier (commedia
Vieille 17 : une expérience théâtre-animation », Liaison, no 9 dell’arte) - Toronto 1980, (Masque neutre) - Ottawa 1981,
(avril 1980), p. 5 : Marc O’Sullivan, « Les Corvéables : une (Observation du milieu) - Sudbury 1982 : Jacques Lessard
expérience en animation », Liaison, no 21 (avril-mai 1982), (Théâtre/danse/musique) – 1983 ». Mathieu Brennan à
p. 11. Guy Gaudreau (directeur) Le Théâtre du Nouvel-Ontario, Pierre Genest, directeur général des Conservatoires du
20 ans, Sudbury, Édition TNO, 1991, p. 46-47. Québec, 16 mai 1983, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-
33
Marc O’Sullivan, « L’auto formation au théâtre : quand les 10/10/8.
corbeaux deviennent des sereins », Liaison, no 26 (mars- 35
Odette Gagnon, « Le Théâtre professionnel en Ontario : un
avril 1983), p. 21. combat permanent? », Liaison, no 15 (avril 1981), p. 8.

25
Page droite : Mathieu Brennan, coordonnateur général de Théâtre Action.
Université d’Ottawa, CRCCF, Fonds les Éditions l’Interligne (C86), Ph167-550.

visait la réglementation de la diffusion pour Jacques Jolicœur. Lors d’une émission


assurer l’organisation des tournées des pro- diffusée à Radio-Canada, on a eu des
ductions franco-ontariennes. Par son entre- discussions serrées avec M. Jean
mise, TA cautionnait pour la première fois la Herbiet, directeur du théâtre français
sectorisation de ses membres et réaffirmait au CNA. Un des points importants de
l’existence d’une frontière institutionnelle l’entretien portait sur le mandat de
entre les pratiques franco-ontariennes et développement du théâtre que doit
québécoises. Dressant la liste des mesures suivre le CNA. Est-ce développer ce
nécessaires au contrôle du marché onta- théâtre que d’avoir recours à une
rien36, les directeurs des compagnies, concurrence déloyale40?
membres du comité, se sont assigné un
calendrier concerté pour éviter toute forme De plus, ce petit comité a contribué à
de compétition entre les troupes37. Ils ont la décision d’André Brassard, nommé
également négocié une entente avec le directeur artistique en 1983, de dissoudre
distributeur Prologue qui, l’époque, n’orga- L’Hexagone. Le CTP a essayé de convaincre
nisait que des tournées de productions le CAO de ne plus financer l’achat de
québécoises. spectacles québécois par les diffuseurs
TA et les troupes ont en outre mani- franco-ontariens et d’exclure les compagnies
festé leur mécontentement quant aux québécoises du Contact ontarois, sa bourse
pratiques dites « déloyales » de L’Hexagone, annuelle. Il s’agissait d’une autre initiative
la compagnie pour jeunes publics du Théâtre inspirée du principe selon lequel les Franco-
français du CNA. Sous la direction artistique Ontariens devaient cultiver leur différence
de Jean Herbiet, ce théâtre hautement culturelle, tout comme les producteurs
subventionné vendait ses spectacles de devaient cultiver leur autonomie insti-
tournée à des prix nettement inférieurs tutionnelle. Mais, les producteurs franco-
aux normes établies par les compagnies ontariens n’ont pu que constater les
franco-ontariennes38. Le CTP a fait limites de leur gageure. Certes, les
pression sur le secteur franco-ontarien du centres culturels et communautaires
CAO qui suivait de moins en moins le étaient de plus en plus encouragés par
plan d’action dressé par le Rapport Savard a le CAO à « acheter ontarois41 », mais il
convaincu de ne plus considérer le CNA allait falloir attendre 1995 pour que cela
comme un producteur ontarien. Une fois ce devienne un des critères donnant droit à
principe adopté en 1981, le CNA a perdu l’obtention d’un appui financier.
l’accès au financement provincial de Dans un premier temps, les diffuseurs
ses tournées, ainsi que son droit de ont refusé d’acheter les créations franco-
recommander des auteurs auprès du CAO ontariennes prétextant que les productions
dans le cadre du programme « Appui québécoises étaient de meilleure qualité42.
aux dramaturges »39 : Le Rapport Larouche commandé en 1982
par TA stipulait que les troupes et les
Grâce à l’intervention des troupes
compagnies devaient se doter de structures
de théâtre franco-ontariennes, on a
administratives plus fortes, voire profes-
obligé L’Hexagone, du Centre national
sionnelles, ainsi que de stratégies de mise
des Arts, à augmenter ses prix de
en marché moins artisanales pour fidéliser
spectacles de tournée de 125 $ à 250 $.
le marché ontarien et pour développer des
« La compétition était devenue tout
marchés à l’extérieur de la province43. Ce
simplement impossible », affirme
manque d’organisation était, en partie,
attribuable à la spécialisation de pigistes
36
[Théâtre Action] Comité des théâtres professionnels, qui se consacraient surtout à leur métier
8 septembre 1980; pour la réunion des 6 et 7 septembre
1980 à Sudbury, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-5/1/4.
de créateur44.
37
Anne-Marie de Varennes-Sparks, « CPTP, le comité
provisoire du théâtre professionnel », Liaison, no 7
(septembre-octobre 1979), p. 20. 40
« Ce soir, on fête les cinq ans de La Corvée : un bilan
38
[Théâtre Action] Comité des théâtres professionnels, le significatif », [Auteur inconnu] Le Droit [Ottawa], samedi 24
8 septembre 1980; pour la réunion des 6 et 7 septembre janvier 1981, p. 17.
1980 à Sudbury, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-5/1/4. 41
Jean Malavoy, « Contact ontarois 1981, un mot d’ordre :
39
Théâtre Action, [sans titre] Liaison, no 12 (octobre 1980), p. 25. Acheter Ontarois! » Liaison, no 16 (juin 1981), p. 31-32.

26
Les compagnies ont suivi les démarches artistiques de leurs créateurs
recommandations des deux rapports de aux exigences des seconds.
TA. Cependant, quatre ans après la C’est dans ce contexte d’abandon
création du CTP et deux ans après le progressif des domaines de la formation,
dépôt du Rapport Larouche, si l’on se fie de l’animation et de la tournée par les
aux affirmations de Brigitte Haentjens, membres de TA que le déclin des festivals
peu de choses avaient changé : provinciaux a eu lieu. Après
cinq ans de tentatives infructueuses, les
Pour la metteure en scène du Théâtre
animateurs de TA n’avaient pas réussi
du Nouvel-Ontario (TNO), Brigitte
à créer un rapprochement réel entre
Haentjens, l’aspect artistique des
festivaliers et spectateurs locaux. Par
centres est des plus superficiels.
conséquent, les liens s’étaient multipliés
« Les centres abordent le concept
entre les membres de TA et les membres
artistique de façon colonisatrice,
de l’AQJT à un tel point qu’il était
c’est-à-dire : tout ce qui est du
devenu difficile de repérer une pro-
Québec est meilleur. Ce sont les
grammation de Festival provincial de TA
petits centres, tel celui à Kirkland
où ne figuraient pas les noms de Martine
Lake, qui promeuvent le plus les
Beaulne, d’Eudore Belzile, de Claude
talents franco-ontariens », d’ajouter
Poissant, d’Alice Ronfard, du Théâtre
Haentjens. Petite parenthèse qu’il est
Petit à Petit, du Théâtre du Quartier et du
cependant bon d’ajouter : le gouver-
Théâtre Parminou, tous liés à l’AQJT. La
nement provincial décourage les
programmation « Théâtre hors-Ontario »
talents locaux en subventionnant les
des festivals était, dans les faits, consa-
spectacles provenant de l’extérieur
crée au jeune théâtre québécois. Les
de la région concernée45.
annonces des activités de l’AQJT dans
Selon le Rapport Larouche, les ache- Liaison s’étaient multipliées pendant la
teurs scolaires se souciaient bien moins même période et la revue québécoise Jeu
de l’originalité des spectacles que de la avait présenté un bilan du Festival de TA
qualité de la langue utilisée. De plus, ils à Toronto qui était une introduction
privilégiaient les comédies et les produc- générale aux projets menés par TA et
tions ayant peu d’exigences techniques. aux troupes vouées au théâtre franco-
Seules les créations du Théâtre des ontarien de création46. En 1980, Marie-
Lutins répondaient à ces critères, car Christine Larocque, membre sortante de
cette compagnie ne montait que des la compagnie La Famille Corriveau et
pièces pour enfants écrites et jouées dans agente des communications pour
un français dit normatif, et conçues pour l’AQJT47, avait proposé dans Liaison la
être présentées dans des gymnases création d’un réseau de festivals regrou-
d’école. Malgré les efforts de TA pour pant tous les « jeunes théâtres » du
orienter la diffusion et les diffuseurs, le Canada et du monde48.
fossé se creusait inexorablement entre Rockland fut la dernière ville de
producteurs et distributeurs culturels : les petite taille à accueillir le Festival de TA.
premiers refusaient de soumettre les Les praticiens de l’Ontario français,
comme ceux du Québec, étaient de
42
Jacques Jolicoeur et Marc Haentjens, « Association des moins en moins concernés par l’enra-
animateurs culturels du Nord, réunion du 24 janvier 1980 », cinement et par le développement
p. 1-2, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-5/1/4.
43
« Embauché par Théâtre Action dans le cadre du
communautaire et culturel. L’urba-
Programme Expérience ‘82, Luc aura l’occasion de tester nisation des festivals masquait un
ses techniques de marketing sur l’analyse d’un marché désengagement progressif de la part des
peu courant dans les études de cas universitaires : impli-
quant six (6) troupes de théâtre professionnelles et près de troupes envers la collectivité franco-
quatre cents (400) acheteurs dans les milieux éducatif, ontarienne. Après 1979, ces événements
culturel et communautaire, le marché du théâtre de
tournée offre en effet peu de points communs avec le mar-
ché des savons et des ordinateurs ». (Marc Haentjens, « Gilles Lajoie, « Les Centres culturels en Ontario français :
45

Laroche, vous connaissez? », Liaison, n° 24 (octobre- des centres qui défrichent ou qui consomment? », Liaison,
novembre 1982), p. 9. n° 28 (1983-84), p. 20.
44
Fernan Carrière, « Il y a cinq ans : Le Rapport Savard (2) », 46
Odette Gagnon, Lise Leblanc, denise truax, « Théâtre Action :
Liaison, n° 27 (été 1983), p. 23. un septième festival franco-ontarien », Jeu, n° 17 (1980), p. 60.

28
ne se déroulaient plus que dans des qui contrastait beaucoup avec celle
villes dotées d’infrastructures pouvant des festivals précédents49.
accueillir un nombre important de
participants. La chronologie des festivals Il faut dire que cet événement ne
présentée ci-dessous traduit bien pouvait plus servir de lieu de consécration
cette évolution : professionnelle puisque la majorité des
participants était des amateurs. Il s’en est
1980 Toronto suivi une dilution de la visibilité du travail
1981 Ottawa professionnel. Alors que Nicole Doucet
soulignait la contribution de toutes les pro-
1982 Sudbury ductions aux festivals des années soixante-
1983 Sudbury dix, et que Brigitte Haentjens trouvait
l’animation communautaire et culturelle
1984 Toronto « exaltante », en 1983, la dramaturge
1985 Ottawa Claude Lapointe allait remettre en question
son rôle de « fête communautaire », car elle
Ces choix, de même que la parti- pensait plutôt que le festival devait servir
cipation significative d’artistes québécois aux besoins des praticiens professionnels :
et du CNA, semblent indiquer que les
Il ne faut pas se conter d’histoires, le
artistes professionnels voulaient faire des
10e Festival annuel de Théâtre Action
festivals un lieu de diffusion. Devenu
se devait d’être spécial et... il ne l’a
officiellement un événement bisannuel à la
pas été. S’il a [marqué] clairement le
suite du Festival de 1985, il n’allait plus y
point tournant d’un organisme, il n’a
avoir que deux autres éditions, une en 1987
pu témoigner ni de l’histoire, ni de
à North Bay et l’autre en 1990 à l’Université
la vie du théâtre franco-ontarien
Laurentienne à Sudbury. Fait notable, cette
d’aujourd’hui. [...] / Contrairement
dernière édition a été marquée par la déser-
au festival de l’an dernier, où l’on
tion des compagnies professionnelles.
aurait déploré la faible participation
Ce constat d’échec s’explique une
des plus jeunes, le festival ‘83 a
fois encore par la professionnalisation
connu trop de jeunes trop jeunes!
des pratiques :
[...] / Une méthode de sélection
C’était visible que Marc Haentjens devrait être mise sur pied, le nombre
était, sinon soucieux, du moins de spectacles réévalué et la nécessité
inquiet de la tournure des événe- d’une plus grande participation profes-
ments. C’était l’été dernier, au festival sionnelle sérieusement considérée50.
annuel de Théâtre Action. Le compor-
L’afflux cette année-là de festivaliers
tement des comédiens « profession-
amateurs s’expliquait en partie par
nels » le frappait : tels des photo-
l’échec du système des festivals régionaux.
trophes dans la nuit, la plupart d’entre
Ces événements de plus petite envergure,
eux tournoyaient autour des spotlights
orientés à la fois vers les clientèles commu-
qu’étaient Monique Mercure et, sur-
nautaires et estudiantines, n’avaient eu lieu
tout, André Brassard qui avait été
que trop sporadiquement et n’avaient donc
[nommés] directeur artistique du
pas permis de faire le tri entre les
Théâtre français du Centre national
meilleures productions de ces catégories.
des Arts (CNA) six mois plus tôt.
En 1983, à la suite de l’abandon complet de
Marc Haentjens sentait que les « pros
ce système de petits festivals, les écoles et
» se désintéressaient des autres parti-
les troupes communautaires accédaient
cipants au festival, soit les étudiants
directement au Festival provincial, dimi-
et les amateurs du théâtre commu-
nuant ainsi l’impact qu’aurait pu avoir ce
nautaire, ce qui créait une atmosphère
dernier sur ses invités. À ce sujet, Fernan
Carrière de la revue Liaison a écrit :
Gilbert David, « Ici, maintenant, demain » Jeu, n° 15 (1980),
47

p. 111.
48
Marie-Christine Larocque (permanente à l’Association Fernan Carrière, « Il y a cinq ans : Le Rapport Savard (2) »,
49

québécoise du jeune théâtre) Liaison, n° 10 (1980), p. 15. Liaison, n° 27 (été 1983), p. 21-22.

29
S’il est une critique que l’on peut contre un conseil scolaire anglophone qui
adresser aux organisateurs du festival refusait la création d’une école secondaire
annuel de Théâtre Action, c’est de nous homogène de langue française. L’ACFO a
soumettre à la pénible écoute de même commandé le spectacle Protégera nos
certains spectacles où l’on applaudit foyers et... au Théâtre de la Vieille 17 et a
par politesse : certaines représenta- subventionné sa tournée provinciale.
tions de troupes communautaires et Les rapports entre les artistes et l’ACFO
étudiantes n’ont carrément pas leur se sont toutefois considérablement détériorés
place au festival51. quand, un an plus tard, l’ACFO a décidé,
sans aucune consultation préalable, de
La création et la pratique profession- s’ingérer dans le domaine du « développe-
nelle sont peu à peu devenues des activités ment communautaire et culturel ». TA
sérieuses, ce qui laissait peu de temps pour a alors craint le dédoublement ou, pire
soutenir les activités des amateurs. Selon le encore, la promotion de valeurs incon-
programme du dernier Festival annuel de ciliables avec son programme culturel. Il a
TA, tenu en 1985 à Ottawa, la présence été frustré de constater que la portée de son
estudiantine et communautaire se limitait à travail était à ce point méconnue des diri-
trois spectacles, alors que l’on pouvait geants d’une organisation dont la vocation
compter cinq productions professionnelles, était de représenter l’ensemble de la société
dont deux du Québec – L’Écran humain/ franco-ontarienne52. Par la suite, TA et ses
performance multimédia de Paul Saint-Jean partenaires, dont Direction jeunesse, ont
et Les Paradis n’existent plus... Jeanne d’Arc choisi d’intervenir au sein même de l’ACFO
d’Alice Ronfard dans une mise en scène de pour revendiquer la création de projets qui
Claude Poissant –, une table ronde regroupant leur permettraient de réagir collectivement
Jean Asselin, Brigitte Haentjens et André aux nombreuses crises scolaires qui
Brassard ainsi que des ateliers animés par secouaient la province.
des artistes issus du milieu professionnel TA a également appuyé la mise sur
québécois. Dans ce programme, seuls les pied d’un programme de développement
productions professionnelles et les anima- socio-économique dans toutes les régions
teurs des ateliers ont eu droit à une photo- de la province. Ce programme a été géré
graphie promotionnelle. directement par le siège social de l’ACFO
Visiblement, les membres du milieu à Ottawa et non pas par ses associations
théâtral franco-ontarien se sentaient de plus régionales. Les méthodes de travail de
en plus proches de leurs homologues québé- certains responsables régionaux ont
cois et de plus en plus éloignés des dirigeants cependant créé de vives tensions au sein
de la communauté franco-ontarienne. C’était de l’organisme. Citons le cas du gestion-
là la conséquence de l’échec des partena- naire du programme, René Guindon, qui
riats créés entre artistes et politiciens au a préféré retenir les services de jeunes
début de la décennie. TA, à l’initiative de son revendicateurs utilisant des méthodes
coordonnateur général, Marc Haentjens, peu orthodoxes comme, par exemple, des
s’est impliqué davantage au sein de l’ACFO « sit-in » dans les bureaux de prestations
dès 1979. Un partenariat fragile s’est ainsi sociales53 ou des manifestations quasi
établi entre les dirigeants des mouvements violentes pour l’obtention d’écoles secon-
théâtraux et politiques qui partageaient un daires. Les associations locales ont alors
même souci de bien-être et d’épanouissement demandé l’annulation du programme qui
pour une population minoritaire et menacée nuisait, selon elles, à la réputation de
par l’assimilation : pendant la crise scolaire l’ACFO.
de Penetanguishene en 1980, l’ACFO et le
milieu artistique ont aussi fait front commun 52
Document déposé à la XXXIIe assemblée générale de
l’Association canadienne-française de l’Ontario, les 28,
29 et 30 août 1981 à Windsor, Fonds Théâtre-Action,
Claude Lapointe, « Festival de Théâtre Action : dix ans de
50
C64-8/7/6.
théâtre qu’on aurait voulu fête... », Liaison, n° 28 (1983), 53
Pierre Bélanger est devenu un de ces agents, et se remé-
p. 15. more les « sit-ins» qu’il a organisé dans les bureaux du
51
Fernan Carrière, « Le 11 festival de Théâtre Action,
e
bien-être social à Kirkland Lake et à New Liskeard.
une atmosphère de travail » Liaison, n° 32 (automne 1984), (Pierre Bélanger, entrevue privée, dimanche 16 avril
p. 20. 2000).

30
Puis, TA, le milieu culturel dans condition qui a été annexée à la vente de
son ensemble et les militants ont cherché l’édifice à la nouvelle corporation56.
à faire de l’ACFO un outil de lobbying Deux ans plus tard, en 1983, Marc
tourné vers les intérêts politiques des Haentjens a préparé un rapport s’attachant
Franco-Ontariens : à mesurer l’écart existant entre les artistes et
leur principal outil de revendication
Dans le contexte actuel, l’Ontario
politique. Relevant les principaux défis
français a besoin, et ce de façon très
auxquels devaient faire face les intervenants
urgente, d’une plate-forme à partir
du milieu théâtral, il a pointé du doigt les
de laquelle serait discuté, et en profon-
domaines où l’ACFO aurait dû les soutenir,
deur, un projet social et politique
notamment au niveau de la diffusion. Outre
global pour les Ontarois. Une plate-
« [l]e faible intérêt porté à la question
forme qui permettrait de clarifier les
culturelle », « [l]e manque de concertation
objectifs, les enjeux et les stratégies
provinciale », « [l]a défaillance des
que les divers intervenants ontarois
structures d’aide gouvernementale » et
poursuivent et de consolider leur
« [l]’inéquation des structures de diffusion »,
action collective. Malgré les promesses
Haentjens a évoqué « [l]’absence de
qu’elle porte en son sein, malgré les
ralliement autour d’une vision franco-
belles paroles prononcées en haut lieu,
ontarienne » comme la principale source de
malgré les vœux pieux, l’ACFO n’offre
faiblesse de la collectivité face à la majori-
pas, à l’heure actuelle, cette
té anglophone57. L’ACFO a été peu à
plate-forme54.
l’écoute de Haentjens et le fossé entre
Ce débat a pris de l’ampleur : certains l’organisme politique et TA n’a cessé de
leaders des chapitres régionaux avaient se creuser.
publiquement attaqué les factions « gau- Comme bon nombre d’intervenants
chistes » qui cherchaient à contrôler des années soixante-dix, la nouvelle
l’organisme55. Les conséquences de ce génération a abandonné alors la cause
débat souvent houleux allaient pesé franco-ontarienne pour se consacrer
lourd sur le destin du milieu artistique : entièrement au théâtre.
en 1981, TA a dû abandonner le projet de Lors de l’Assemblée générale annuelle
transformer l’École Guigues du Marché By de 1985, tenue dans le cadre du dernier
en centre de création artistique. Marc Festival provincial annuel – la première
Haentjens et son équipe étaient en mesure que dirigeait le nouveau directeur général
de garantir le financement nécessaire à la de TA, Mathieu Brennan –, les membres
rénovation de l’édifice, mais ces derniers ont adopté les priorités suivantes qui
refusaient que le Conseil des écoles catho- allaient guider les actions de l’organisme
liques d’Ottawa-Carleton ait le contrôle du pendant les cinq années à suivre :
conseil d’administration du nouveau centre,
1. Nous recommandons à TA de laisser
son orientation générale multi-
54
denise truax, « À la 33e assemblée annuelle de l’ACFO :
faire face à la contestation », Liaison, n° 23 (août-sep- disciplinaire et de se concentrer sur
tembre 1982), p. 5. une orientation théâtrale seulement;
55
denise truax, « La légitimité n’aurait qu’un visage!? »,
Liaison, n° 18 (octobre-novembre 1981), p. 5. 2. Nous recommandons à TA de recréer
« Théâtre Action souhaite fortement appuyer le projet présenté
56
l’esprit de carrefour et de se définir
par l’ACFO régionale Ottawa-Carleton et visant la création d’un
centre artistique et culturel francophone dans les locaux de comme organisme de service;
l’école Guigues. / Outre l’intérêt général qu’il présente pour la
communauté francophone et notre municipalité, ce projet offri- 3. Nous recommandons à TA de
rait en effet à Théâtre Action deux opportunités spécifiques : la
possibilité d’installer dans le centre les bureaux de l’organisme, concentrer son rôle sur trois man-
sur une surface d’environ 1 800 pi2; et celle d’y concrétiser un dats : assistance et formation, docu-
projet de théâtre francophone régional (voir annexe), projet
impliquant une surface totale évaluée à près de 6 000 pi2 et mentation et information, relations
répartie sur deux niveaux (avec nécessité d’ouverture à la hau- et pressions politiques;
teur de la salle de spectacle) ». (Marc Haentjens, coordonna-
teur, à qui de droit, le 30 janvier 1981, Fonds Théâtre-Action,
CRCCF, C64 - 8/7/6). Voir aussi Murray Maltais, « Étude sur le 57
Marc Haentjens, « Document synthèse et d’orientation
théâtre francophone à Ottawa », Le Droit [Ottawa], jeudi 5 pour l’élaboration d’une politique culturelle globale »,
février 1981, p. 21, (Marc Haentjens, entrevue privée, le 20 juillet document préparé pour l’ACFO, juillet 1983, p. 4-10,
2001). Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-5/4/5.

31
4. La programmation qui pourrait nous éclairer sur les discus-
A. Programme de formation et sions, les problématiques et les décisions
d’assistance qui ont été prises. Mathieu Brennan, à son
B. Programme de centre de ressources arrivée à TA, a assuré la rédaction, l’année
suivante, du rapport Un nouveau souffle
C. Programme de réseau et de
pour TA, rapport ayant pour objet de
regroupement redéfinir le rôle de l’organisme. À la suite
D. Programme de développement de ce rapport, la structure fonctionnelle
politique; de TA a été profondément modifiée : de
[...] nouveaux postes ont été créés et, pour la
première fois, une hiérarchie administrative
6. Nous recommandons à TA de mini- s’est installée au sein de l’équipe.
miser ou d’abandonner la formation Par ailleurs, malgré les nombreux
au Festival provincial afin d’en faire conflits qui ont opposé TA à l’ACFO entre
surtout une occasion de rencontres 1980 et 1985, Mathieu Brennan a encou-
et d’échanges entre les gens; ragé la collaboration de TA avec ces deux
organismes. Le fait que la presque totalité
7. Nous recommandons à TA de systé-
de la documentation concernant ledit rap-
matiser ses actions politiques face aux
port se trouvait dans le Fonds d’archives
palliers gouvernementaux et face aux
de l’ACFO, également déposé au CRCCF, en
institutions théâtrales hors-Ontario58.
est une preuve flagrante. Brennan et
Bellehumeur ont tous les deux, peut-être
Le rôle de TA au sein de l’institution malgré eux ou par pur syllogisme, tenté de
théâtrale franco-ontarienne est devenu rapprocher TA de l’ACFO. Néanmoins, il
ainsi, de 1985 à 1990, quelque peu ambigu, semble qu’une telle collaboration était
n’étant ni un organisme de développement utopique, les préoccupations et les priorités
communautaire, ni même un mécanisme des deux organismes étant clairement
de réglementation pour les compagnies trop distinctes.
de création. Il s’est trouvé quelque peu Aussi, pendant la seconde moitié de la
en porte-à-faux dans son rôle d’organisme décennie et fait peu connu, TA a transféré
de développement professionnel puisque une part de ses ressources financières aux
la majorité des artistes importants entre compagnies, devenant discrètement un or-
1985 et 1990 étaient déjà formés. Les ganisme subventionnaire. L’argent a permis
milieux scolaire et communautaire sont aux compagnies d’accueillir des stagiaires et
donc devenus les principaux clients de d’accorder ainsi une formation pratique à un
TA pendant cette période. nombre non négligeable de praticiens. La
En fait, la direction générale de TA plus connue d’entre eux est sans conteste
après 1985, assurée tout d’abord par Sylvie Dufour qui, grâce à un stage auprès
Mathieu Brennan et plus tard par Renée de Robert Bellefeuille au Théâtre de la Vieille
Bellehumeur, a eu à travailler dans et pour 17 entre 1988 et 1989, a pu acquérir la cré-
un milieu précaire. Ils ont surtout cherché à dibilité nécessaire pour assumer la direction
le doter d’une nouvelle identité : en effet, la artistique au TNO dès 1989. De plus, TA a
pré-adolescence de TA et du milieu théâtral cessé de recommander auprès du CAO des
franco-ontarien en général a été marquée auteurs amateurs, privilégiant l’attribution
par une crise d’identité liée à leur désir de des montants accordés au développement
demeurer avant-gardistes, tout en voulant dramaturgique à des auteurs profession-
professionnaliser les activités de leur milieu. nels59. Quant aux liens avec les institutions
Étrangement, bien qu’il s’agissait d’une hors Ontario, ce sont les compagnies qui les
période charnière dans l’évolution du a, pour une grande part, gérés.
théâtre franco-ontarien, le Fonds d’archives Concernant le secteur professionnel,
de TA contient très peu de documentation TA est resté plus ou moins en état de veille
pendant cinq ans. Les trous archivistiques
parlent aussi : contrairement à la période
58
Mathieu Brennan, « Les Recommandations », 15 mars
1985, sans destinataires spécifiques, Fonds Théâtre- 1972-1985, il n’y a eu que très peu, voire
Action, CRCCF, C64-8/2/3. aucune initiative de développement du

32
public ou de rapprochement entre les d’une troupe et production d’un spectacle de
théâtres professionnels et les publics franco- théâtre de Lyne-Marie Tremblay (1986) est
ontariens. Par contre, TA a appuyé l’organi- devenu une bible pour les enseignants dési-
sation de la Quinzaine ontaroise à la Maison rant monter des productions dans un
de la culture du Plateau Mont-Royal à contexte scolaire. D’autres manuels plus
Montréal, une vitrine qui permettait la spécialisés sont aussi parus : L’Écriture
promotion des productions professionnelles dramatique de Michel Marc Bouchard en
dans la métropole60. Aussi, TA a continué 1983, La Marionnette, c’est pas bébé là là de
à soutenir les auteurs dramatiques en Lise L. Roy également en 1983, Brisez la
gérant une partie du fond de dévelop- glace, un guide consacré au sport de l’impro-
pement dramaturgique du CAO. visation en 1987 et réédité deux fois par la
Entre 1985 et 1990, entre l’imbroglio suite, À la recherche du clown de Robert
des Rogers qui avait opposé producteurs Bellefeuille en 1989 et, enfin, Animation
et diffuseurs d’une façon brutale, et les théâtrale : enseigner le théâtre aux
États généraux, on ne peut pas affirmer enfants de Mathilde Baisez en 1989. Les
que TA ait vécu un moment de décrois- Pages blanches ont aussi été compilées
sance. En effet, les rôles joués par TA n’ont pour former un catalogue détaillé
jamais été aussi bien articulés et aussi énumérant et décrivant des textes entre-
nombreux qu’à ce moment-là. TA est passé posés aux bureaux de TA que les troupes
du statut d’organisme de développement communautaires et scolaires pouvaient
culturel intégrant les autres disciplines commander. TA a aussi établi un
artistiques, à celui d’organisme de dévelop- nouveau bulletin d’information, En
pement théâtral. De plus, la formation raccourci, qui cherchait à diffuser de
spécialisée est devenue une priorité grâce au l’information spécifique à l’intérieur de
programme Coup de pouce. Ce programme, chacun des secteurs, mais aussi dans le
le plus visible de TA pendant cette période, milieu théâtral. On y publiait, entre autres
se traduisait le plus souvent en ateliers choses, des portraits de certains artistes et
consacrés aux troupes amateurs et en animateurs, tant du secteur professionnel
ateliers de gestion offerts principalement que des secteurs communautaire et scolaire.
aux compagnies et aux artistes pigistes Enfin, signe que la professionnalisation
professionnels. Autre fait marquant à du secteur des compagnies de métier
souligner, plus aucune session de formation s’accentuait, TA a offert pour la première
sur deux ou trois jours dans le cadre de fes- fois un service de consultation qui
tivals n’a été être offerte. Et d’une façon très permettait aux compagnies profession-
significative, les festivals ont perdu de leur nelles, mais aussi aux autres tables, de
importance au sein des programmations. sensibiliser les instances publiques aux
En fait, c’est clairement, et pour la besoins de leurs secteurs tout en les
première fois, les secteurs scolaires et initiant aux modes de soutien qu’elles
estudiantins qui ont tiré le plus désiraient avoir pour mener à terme leurs
profit des ressources de TA. Pendant cette projets. Au sein du conseil d’administration,
période, l’organisme a aussi créé un des comités régionaux ont été établis
Centre de ressources qui a permis pour discuter des besoins identifiés et
de commander et de publier un nombre spécifiques au Nord, au Sud et à l’Est de
considérable d’outils en adéquation avec la province. Dès 1988, ces tables ont été
les besoins de ces secteurs. La Trousse remplacées par un principe de représen-
d’expression dramatique est rapidement tativité parmi les membres du conseil
devenue un guide incontournable pour d’administration : les secteurs, à partir de
les nouveaux professeurs ayant à ensei- 1987, ont été amenés à choisir des repré-
gner les arts dramatiques, tout comme Le sentants qui ont dû aller ensuite au conseil
Petit Manuel des coulisses : organisation d’administration. Des quotas ont été
établis pour s’assurer que toutes les
régions de la province seraient représentées.
Lettre de Mathieu Brennan à Jeanne Sabourin, 15 mars
59

1985, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-10/10/9. TA se transformait lentement en fédération


60
Brigitte Beaulne, « Pour diffusion immédiate », Fonds où chacun des secteurs pouvait articuler et
Théâtre-Action, CRCCF, C64-8/5/13. se doter de projets particuliers.

33
Les Années
quatre-vingt-dix
Page précédente : Paulette Gagnon aux États-généraux du théâtre franco-ontarien (1991). Photo © Jules Villemaire.

Les Années
quatre-vingt-dix

L
es saisons entre 1985 et 1990 ont s’expatrier, car ils ne pouvaient « plus
été marquées par une série d’évé- s’exprimer en tant que créateurs en
nements déclencheurs d’une trans- Ontario français »62. C’est dans ce contexte
formation majeure dans le secteur profes- de dépeuplement professionnel que les
sionnel de TA : l’échec de la co- artistes de l’Ontario français ont, avec
production Soirée bénéfice pour ceux une volonté de consolidation du milieu,
qui ne seront pas là en l’an 2000 de décidé de mettre davantage l’accent sur
Michel Marc Bouchard, qui regroupait la leur professionnalisme afin de maintenir,
majeure partie des ressources du TNO, voire de multiplier, leurs liens avec
du Théâtre de la Vieille 17 et du Théâtre Montréal. Ils se sont ainsi ouvertement
du Trillium, précédé par le refus de libérés du joug du théâtre identitaire et
Brigitte Haentjens de travailler avec des de leur mission communautaire. Et, afin
comédiens établis en Ontario dans le de mener à bien ce projet, ils ont choisi
cadre de sa mise en scène du Chien, et le TA comme dispositif d’action.
succès prononcé de la pièce pour enfants Ils ont d’abord exigé, vers la
Le Nez d’Isabelle Cauchy et de Robert fin des années quatre-vingts, la création
Bellefeuile partout au Canada, sont les d’une table sectorielle professionnelle au
événements à caractère institutionnel qui sein de TA, table qui leur a permis de se
ont participé à cette transformation. Ce démarquer désormais des praticiens ama-
recours à des ressources externes et le teurs. Ils ont ensuite fait de cette table un
désir de tourner avec les productions forum de concertation dans le but d’ins-
à l’extérieur de l’Ontario se sont avérés fort taurer certaines normes. C’est au cours des
coûteux. C’est ainsi qu’en 1990, les compa- États généraux, convoqués essentiellement
gnies professionnelles étaient endettées61 à la demande des théâtres professionnels,
sans exception. Pis encore, pour une que le milieu artistique a officialisé le rejet
compagnie en particulier, le TfT, les de la mission définie par André Paiement
problèmes financiers étaient tels qu’ils et le TNO au début des années soixante-
menaçaient même son existence. dix, et qui avait été repris au début des
Les départs de Michel Marc années quatre-vingts par les théâtres poli-
Bouchard, de Jean Marc Dalpé et de tiques. Cette démarche a mis en exergue la
Brigitte Haenjtens pour Montréal en désaffection et le renoncement des artistes
1990, ainsi que celui de John Van Burek vis-à-vis de la création d’un milieu voué à
de la direction artistique du TfT compte la diffusion d’un théâtre identitaire popu-
parmi les incidents qui, par leur caractè- laire, projet jugé trop contraignant sur le
re simultané, ont participé à la création plan artistique et asservi aux goûts d’un
d’un gouffre au sein de la communauté public bilingue et de diffuseurs conserva-
théâtrale du début des années quatre- teurs. En outre, ce fut à l’occasion des États
vingt-dix. D’abord soumis aux besoins généraux que le milieu professionnel a
communautaires des Franco-Ontariens, accusé TA de manquer de leadership et de
puis, limités par des contributions éta- s’occuper bien trop des secteurs scolaire
tiques nettement inférieures à celles du et communautaire :
Québec, ces artistes ont dû, disaient-ils,
62
Micheline Tremblay, « Sur la corde raide... entre la
61
Carole Landry, « Un calcul difficile : Soutien financier et création et la direction. Trois versions de la direction
appui du public », Liaison, no 54 (septembre 1989), p. 32-33. artistique ». Liaison, no 61 (15 mars 1991), p. 15.

36
[P]our TA, comme tel, on doit en professionnel de l’Ontario français
plus faire face à un retrait des affichaient un déficit accumulé de
théâtres professionnels qui date de 424,000$ et Mme Gagnon, elle-même
quelques années. Certains sont frus- directrice de l’implantation régionale
trés, d’autres sont indifférents. TA du Théâtre du Nouvel-Ontario à
est donc privé du premier niveau Sudbury, anticipe un déficit plus
de leadership dans la communauté élevé encore au terme de la présente
théâtrale. Les théâtres se rappro- année. / [...] La diffusion est le
chent présentement de TA via un second problème du théâtre franco-
regroupement des théâtres profes- ontarien. La pièce de Jean Marc
sionnels. Mais cela uniquement Dalpé, Le Chien, a reçu le prix du
parce qu’ils font face à une crise Gouverneur général, le spectacle
financière (voire même artistique) Cris et Blues s’en va en France
importante. Mais TA a si peu à leur mais il n’aura visité que 12 villes
offrir, a si peu de manœuvre au sein en Ontario64.
de ses trente-cinq services à gérer
dans le quotidien [que l’implication] Néanmoins, en 1990, en dépit de la
de TA se limite à toute fin pratique à virulence de leur critique envers TA, les
leur allouer des fonds pour se déplacer. artistes ont tout de même choisi d’adopter
[...] TA a besoin de leadership. Du l’organisme comme lieu d’échanges –
leadership des professionnels63. une résolution qui leur permettait de
mieux définir leurs priorités. Un moratoire
Lors de l’assemblée générale annu- a été imposé aux activités de TA pour
elle de TA tenue à Sudbury en 1990 et à permettre l’organisation d’une série
la suite du dernier Festival provincial de rencontres suivies d’une grande
marqué par l’absence de productions assemblée à laquelle les trois secteurs de
professionnelles, certains artistes du TA ont été convoqués. La composition du
milieu sont même allés jusqu’à remettre en comité de consultation a souligné à quel
question l’existence de TA : point la crise que vivait le milieu théâtral
était en fait celle des théâtres de
Les délégués à l’assemblée générale
création établis. Outre Michel Louis
annuelle de Théâtre-Action ont
Beauchamp (le nouveau directeur général
opposé un moratoire sur la program-
de TA) et les personnalités les plus impor-
mation triennale proposée par le
tantes des années quatre-vingts, Paulette
conseil d’administration sortant et
Gagnon, Brigitte Haentjens et Robert
ont exigé la tenue d’États généraux
Marinier, le comité ne comptait qu’un
du théâtre franco-ontarien d’ici jan-
seul représentant des secteurs commu-
vier 1991. [...]/ Certains membres,
nautaire et scolaire (Guy Fréchette).
provenant surtout des troupes profes-
Marc Haentjens y figurait aussi, mais à
sionnelles et des pigistes ont même
titre de consultant. La participation des sec-
proposé la dissolution de l’organis-
teurs amateurs et scolaires a donc été très
me. [...]/ L’organisme était l’objet de
limitée, une réalité avérée dont le comité
critique depuis au moins trois ans. À
n’a pris conscience que trop tardive-
l’élection du nouveau conseil
ment, c’est-à-dire à peine trois jours
d’administration, sept postes sur dix
avant l’assemblée65. Qui plus est, ni le
ont été contestés et cinq nouveaux
TfT, ni la Compagnie Vox Théâtre n’ont
visages ont été élus par la soixantaine
de membres présents. [...]/ La crise 64
Robert Bousquet, « Le Théâtre franco-ontarien vit une
de Théâtre-Action est davantage la crise » Le Droit [Ottawa], le 31 mai 1990, p. 39.
crise du théâtre franco-ontarien. En 65
« On constate effectivement que, compte tenu des défections,
on n’aura entendu qu’un petit nombre d’écoles et de
1989, les sept troupes de théâtre centres culturels. On considère que cette absence est
peut-être aussi, en soi, une confirmation d’une défaillan-
ce qu’on a pu observer par ailleurs, à travers les témoi-
63
Yolande Jimenez, entrevue avec Paulette Gagnon dans gnages des interventions théâtrales ». États-généraux –
Liaison (version inédite) classée sous « Théâtre franco- Comité d’orientation, Compte rendu de la réunion tenue
phone de l’Ontario », Fonds Théâtre-du-Nouvel-Ontario, les 29 et 30 novembre 1990, Fonds Théâtre-Action,
Archives de l’Université Laurentienne, boîte 27. CRCCF, C64-9/1/4.

37
été réellement représentés, et ce même tion du théâtre que vers des conclusions
s’ils se trouvaient eux aussi dans une partisanes. Chose certaine, on a cherché
crise financière. à dissoudre le lien de dépendance expli-
Au fil des consultations des États cite qui existait entre la communauté et
généraux, deux visions de la fonction du le théâtre, lien qui avait assuré, depuis le
théâtre franco-ontarien se sont opposé, début des années soixante-dix, la survie
l’une politique et l’autre esthétique. Cette du théâtre franco-ontarien.
opposition illustrait l’écart qui séparait ceux Malgré cette subtile dissimulation, la
qui croyaient toujours au projet d’un théâtre majorité des artistes professionnels
identitaire à l’échelle provinciale, et ceux sont restés d’accord avec la vision défen-
qui se consacraient essentiellement à la due par Michel Louis Beauchamp,
professionnalisation de leur pratique Paulette Gagnon, Brigitte Haentjens et
selon des normes et des conventions Robert Marinier. Tel que précisé dans le
montréalaises ainsi que selon des texte suivant – texte également rejeté
démarches artistiques plus personnalisées. d’abord mais repéré ensuite dans le
Même si l’abandon du théâtre politique, Fonds d’archives de TA –, le théâtre n’était
du théâtre pauvre et du théâtre de tour- plus considéré comme une cause,
née à grand déploiement a reçu un un service communautaire ou un outil
accueil favorable auprès de la majorité d’animation par la majeure partie des
des praticiens consultés – signe indé- praticiens professionnels, mais bien
niable d’une certaine évolution – il a plutôt comme un art centré sur les
également été ressenti comme une cause intérêts de créateurs plus expérimentés :
possible d’un déracinement de la
Si les années 70 furent celles des
pratique. À la lumière de ce commentaire,
grands idéaux collectifs, les années
on comprend mieux pourquoi, dans
80 ont vu le retour du balancier vers
la version finale du rapport du comité
la poursuite d’un bien-être indivi-
de consultation distribuée aux membres
duel, égocentrique. Et ce « chacun
de TA lors des États généraux, bon
pour soi » de la dernière décennie a,
nombre de constats appuyant les posi-
veut, veut pas, bouleversé profondé-
tions d’artistes tels que Mariette
ment les règles du jeu qui avaient
Théberge, Luc Thériault et Alain Poirier
régi jusque-là le développement du
ont été censurés, même si on les retrou-
théâtre en Ontario. Dorénavant, le
ve dans les ébauches des documents.
marketing a pris le pas sur les quali-
Citons un exemple :
tés intrinsèques et nationalistes du
Là, enfin, où le bât blesse, c’est théâtre franco-ontarien, subitement
dans la perte d’identité du théâtre plongé dans le fossé de la concurrence
franco-ontarien. Après avoir puisé avec le reste du monde,
sa force originelle dans l’apparte- souvent plus fortuné que lui. / Plus
nance dite et proclamée à une significatif encore fut le désengage-
population francophone spécifique, ment émotif des artisans envers
le théâtre franco-ontarien se leur théâtre. Alors que la première
retrouve aujourd’hui en plein fournée d’auteurs, de comédiens,
no man’s land culturel. En se désin- d’administrateurs et de metteurs en
carnant, en perdant son nom, le scène avaient vendu leur âme à la
théâtre franco-ontarien a d’une cause du théâtre franco-ontarien, se
certaine façon perdu son sens. Mis payant de la richesse de l’expérience
à part quelques exceptions, on beaucoup plus que de celle dans leur
s’écarte de plus en plus de ce poche, le théâtre est aujourd’hui
qui fait la spécificité franco- considéré comme un métier que
ontarienne, privant du coup cette pratiquent des gens qualifiés, en
même société d’un miroir essentiel retour d’un salaire à la mesure
à son évolution66.
Marc Haentjens, « Document de réflexion, le théâtre fran-
66
De tels propos ne pouvaient co-ontarien en jeu! », Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-
conduire la discussion sur l’orienta- 9/1/10.

38
de leur investissement personnel. 2. Que les intervenants théâtraux – et,
Parallèlement, se profile à l’horizon plus particulièrement, les troupes
un désir d’aller au-delà des formes et les compagnies – encouragent à
artistiques du début. L’expérience et travers leurs activités l’émergence et
la compétence aidant, le milieu le développement de créateurs (drama-
théâtral se tourne vers de nouveaux turges, comédiens et comédiennes,
défis, quitte à le faire devant des metteurs en scène, etc.) susceptibles
publics plus ouverts – et les cas de à [sic] promouvoir une parole d’ici;
censure directe ou indirecte vécus en
3. Que ces intervenants théâtraux tiennent
Ontario français n’ont rien fait pour
compte, dans leur travail de création, de
aider cette situation – ou sur des
la réalité du public et accordent une
scènes plus novatrices (notamment
importance particulière aux moyens
au Québec)67.
qu’ils pourront mettre en œuvre pour le
rejoindre concrètement70.
Lors d’une rencontre tenue au TNO
à Sudbury, l’affirmation du désir des Le secteur professionnel de TA
artistes professionnels de démarquer leur a plutôt décidé de concentrer ses efforts
champ d’action du volet amateur franco- sur les propositions retenues qui, dans
ontarien, et celui de prendre en main la leur ensemble, appuyaient le projet de
diffusion de leurs œuvres en construisant construction d’infrastructures adéquates
des salles gérées par les compagnies s’est pour les compagnies, soit des salles de
fait sentir. Au cours de cette réunion, les petite taille vouées à l’exploration plutôt
comédiens (Esther Beauchemin, Guylaine qu’à l’exploitation des productions71.
Guérin et Richard J. Léger) de la tournée Contrairement au milieu québécois,
scolaire de Fou rire sous le petit chapiteau, au moment des États généraux du
production du Théâtre de la Vieille 17, théâtre professionnel au Québec de 1981,
ont présenté, arguments à l’appui, les le milieu professionnel franco-ontarien n’a
raisons justifiant l’abandon de la tournée pas saisi l’occasion de créer une association
dans les écoles en région éloignée, c’est- qui lui soit propre. En effet, de leur côté,
à-dire dans des conditions beaucoup plus les États généraux du théâtre profession-
précaires que celles offertes en salle fixe. nel au Québec ont conduit à la création
Les compagnies devaient, selon eux, deux ans plus tard, en 1983, du Conseil
prendre en charge la distribution de leurs québécois du théâtre (CQT). Cet organis-
œuvres sur le territoire ontarien; c’était le me de lobbying visait, entre autres objec-
seul moyen pour elles de s’assurer des tifs, l’obtention d’un financement adéquat
conditions de représentation dites profes- de la part des gouvernements québécois
sionnelles, conditions que l’on définissait et canadien pour les théâtres établis dans
à partir du modèle québécois68. D’autre cette province.
part, ils ont jugé que le CAO ne pouvait Dans le rapport du conseil d’admi-
pas – comme il l’avait fait à l’époque nistration de TA, à la suite des discus-
du Rapport Savard – établir les grandes sions des États généraux, on constate que
orientations du théâtre franco-ontarien69.
Ainsi, il est peu étonnant que des 68
Marc Haentjens, États-généraux du théâtre franco-
propositions soumises par certains ontarien, compte rendu des audiences tenues du 12 au 17
membres du secteur professionnel lors novembre 1990, p. 1.
des États généraux aient été rejetées : 69
« Une déception : le manque de vision du CAO... Dans le
fond, l’encouragement de “l’option Volkswagen”; une pré-
occupation nettement communautaire : privilégier de
1. Que les choix artistiques des interve- petites troupes professionnelles qui desservent toutes les
nants puissent être inspirés par ce prin- communautés avec des shows plus modestes; une forme
de souhait pour un retour en arrière... ». (Marc Haentjens,
cipe directeur : produire un théâtre de États-généraux du théâtre franco-ontarien, compte rendu
qualité dans lequel la communauté des audiences tenues du 12 au 17 novembre 1990, p. 12).
puisse se reconnaître et s’identifier; Marc Haentjens, « Les États généraux du théâtre franco-
70

ontarien 1. Le Sens de la création théâtrale, la situation »,


collection personnelle, p. 2.
67
[Anonyme]. « Document de réflexion, le théâtre franco- 71
Marc Haentjens, « Les États-Généraux du théâtre franco-
ontarien en jeu! », p. 4, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, ontarien, page thématique no.4, Les Moyens théâtres, les
C64-9/1/10. structures professionnelles », collection personnelle, p. 7.

39
c’est le secteur professionnel qui a eu en à l’esprit le cas du Théâtre des Lutins,
charge le projet de construction du compagnie qui vendait alors ses produc-
réseau de diffusion. Avec un objectif tions à des coûts inférieurs à ceux prati-
aussi précis, les membres de TA ont vite qués par les autres producteurs, sans
ressenti le besoin de redéfinir leur man- nécessairement se soucier de la qualité
dat, l’ancien étant devenu caduque : de ses représentations ou encore, de la
rémunération acceptable de ses artistes.
L’Avenir de TA En effet, le conflit entre l’UDA et cette
1. Un mandat politique, établir de façon compagnie avait cristallisé les tensions
générale [...] mais s’appuyant aussi sur déjà existantes entre elle et ses homo-
un agenda très clairement défini; logues, d’autant plus que ces derniers
avaient adopté depuis longtemps l’utili-
2. Un mandat de regroupement, s’incar-
sation de contrats-types émis par l’UDA
nant dans la mise sur pied et/ou
et qu’ils avaient érigée cette dernière en
la consolidation de plates-formes
norme institutionnelle. L’appartenance du
sectorielles et sous-sectorielles et
Théâtre des Lutins au milieu franco-
le développement de liens entre
ontarien avait été remise en question73. La
les secteurs;
dissidence de ce théâtre incitait le milieu à
3. Un mandat de services, clairement établir, pour le bien du FTP, une charte qui
explicité par l’une des recommanda- venait préciser la définition du profession-
tions [...] mais pouvant être aussi nalisme sur le territoire ontarien :
compris dans une fonction d’inter-
médiaire ou de facilitateur; Buts et objectifs
4. Un mandat de moteur ou d’instiga- 1. Constituer une force de frappe poli-
teur de projets, tourné principale- tique auprès des bailleurs de fonds
ment vers deux projets majeurs : la et des représentants politiques à
mise sur pied d’un centre de création tous les échelons ainsi qu’un outil
théâtrale à Ottawa et l’établissement de conscientisation de la nécessité
d’une structure de formation volante72. du théâtre à la qualité de vie de
la communauté;
Ayant renoncé à leur mission commu-
nautaire et étant maintenant protégés à 2. Promouvoir des liens d’entraide et
l’intérieur de ces nouvelles « églises » où de solidarité entre ses membres dans
seules des productions de langue française le but d’activer des dossiers comme
pouvaient être jouées, les principaux pro- la diffusion, la mise sur pied des trois
ducteurs de l’Ontario français pouvaient centres de création, dont ont fait
enfin se consacrer à leurs pratiques. mention les États généraux;
3. Travailler en étroite collaboration
avec toutes les compagnies en vue
LE SECTEUR PROFESSIONNEL d’échanges fructueux de services,
d’informations et de collaborations,
À la suite de cette redéfinition de en ce qui concerne leur action artis-
mandat, TA est redevenu la principale force tique et politique, et plus concrète-
régulatrice de l’institution théâtrale ment, leurs productions théâtrales.
professionnelle. Déjà, avant même la tenue
des États généraux, le Front commun des [...]
théâtres franco-ontariens (FTP), composé Devoirs et obligations des membres
de compagnies membres de TA, a établi
1. Faire preuve de respect, d’intégrité
des normes appropriées au milieu dans
et de professionnalisme envers les
lequel il évoluait. Pour expliquer l’origine
compagnies-membres, les profesionnels
de ce remaniement normatif, il faut avoir
du spectacle et leurs syndicats ainsi
qu’envers le public en général;
72
Comité d’orientation, États généraux : bilan et suivi pour 2. Participer aux délibérations des
Théâtre Action, réunion du CA, Fonds Théâtre-Action,
CRCCF, C64-9/1/4, p. 5. réunions dans un esprit d’échange et

40
de collaboration : les informations devenir membres de TA. Les frontières du
qui circulent doivent être justes et milieu franco-ontarien, autrefois peu
exactes et le fonctionnement des flexibles, se sont alors élargies permettant,
compagnies-membres le plus ouvert entre autres choses, aux praticiens franco-
et transparent possible; ontariens qui s’étaient déplacés vers Mon-
3. Prévenir tout conflit potentiel entre tréal au début des années quatre-vingt-dix
les compagnies-membres par un de maintenir des liens avec l’Ontario
processus de consultation collective74. français. Ainsi, les créateurs qui travaillaient
principalement à la pige et qui vivaient en
Grâce à cette charte, et plus particuliè- Outaouais québécois pour des raisons éco-
rement à l’affirmation d’un devoir de trans- nomiques ou idéologiques pouvaient tout
parence et d’ouverture, le projet des salles a de même préserver leur statut de membre
eu pour effet d’améliorer la concertation au sein de TA ou adhérer à l’organisme.
entre les compagnies et, par là même, de En raison des changements majeurs
préciser les buts qui orientaient leur milieu. qui se sont opérés au niveau profes-
Refusant d’adhérer aux principes énoncés sionnel à la suite des États généraux,
dans cette première, le Théâtre des Lutins le CNA, ayant senti souffler un vent de
n’a eu d’autre choix que de se retirer du FTP changement, a voulu se rapprocher du
et, du même coup, de TA. Cette décision a milieu franco-ontarien et de ses créateurs.
eu pour effet, en 1996, d’amener un jury du Dès 1990, avec l’arrivée de Robert Lepage
CAO à annuler sa contribution financière à à la direction artistique, la grande maison
cette compagnie, sous prétexte que son de production a intégré des comédiens
mandat n’était pas assez « artistique ». locaux à ses créations75. De plus, Lepage,
Un an après les États généraux conscient des forces et des faiblesses des
presque jour pour jour, TA a de nouveau praticiens franco-ontariens, a ressenti le
fait preuve de souplesse en permettant offi- besoin de créer un lieu pour compléter la
ciellement aux artistes pigistes résidents de formation amorcée au Département de
l’Outaouais québécois et de Montréal de théâtre de l’Université d’Ottawa. À
défaut de fonder une véritable école,
Lepage a édifié L’Atelier, un programme-
73
« Par la présente, nous désirons vous signaler que le Front
commun des théâtres franco-ontariens remet sérieusement
école qui offrait une formation intensive
en question l’appartenance du Théâtre des Lutins qui, par le biais de master class et d’une série
selon le Front commun, ne respecte pas un certain code
d’éthique et de déontologie intrinsèque à tout regroupement
de productions76. Cette initiative a suscité
d’intérêts. / Les incidents survenus récemment entre le beaucoup d’espoir chez les praticiens,
Théâtre des Lutins et certains comédiens et comédiennes surtout chez ceux de la relève, qui
de la région d’Ottawa n’ont fait que mettre à jour un
comportement qui, depuis quelque temps, suscite un cer- profitaient également, au même moment,
tain nombre de questions quant aux façons d’opérer du de la création d’une troupe au Musée
Théâtre des Lutins. / […] La question du marché scolaire
est un autre aspect que nous voulons souligner. Pendant canadien des civilisations à Gatineau,
plusieurs années, le Théâtre des Lutins à fait [preuve] une troupe qui avait l’avantage d’offrir
d’une insensibilité sinon d’une indifférence face aux pré-
occupations des autres compagnies théâtrales à des postes de permanents. Les occa-
trouver leur juste place dans ce marché. / De l’avis du sions de formation se multipliaient, tout
Front commun, les pratiques « commerciales » du Théâtre
des Lutins ne correspondent pas à ce qu’il est convenu comme les opportunités de travail.
d’appeler une « concurrence loyale » dans le contexte
d’une entreprise « artistique » en territoire ontarien. Cette
C’est également dans ce contexte
lettre se veut donc une mise en demeure de la part du de foisonnement que le regroupement
Front commun de rectifier une situation déplorable qui
vient en quelque sorte ternir le mandat d’entre aide [sic] et
d’artistes qui allait devenir par la suite le
de solidarité que s’est donné le Front commun. » (Lettre Théâtre la Catapulte a vu le jour. Cette
adressée à madame Monique Landry, directrice générale,
le 18 juin 1991, signée par Bruno Richez (directeur admi-
compagnie a affirmé, dès sa création, son
nistratif, Théâtre français de Toronto), Sylvie Dufour (directri- appartenance à l’Ontario français tout en
ce artistique, Théâtre du Nouvel-Ontario), Claire Faubert
(directrice artistique, Théâtre du Trillium), Monique Miron
refusant ouvertement le théâtre identitaire
(directrice administrative, Théâtre du Trillium), Robert développé par la génération précédente.
Bellefeuille (directeur artistique, Théâtre de la Veille 17),
Mireille Francœur (directrice administrative, Théâtre de la
L’histoire se répétait; comme la génération
Veille 17), Pier Rodier (directeur artistique, Vox Théâtre), issue du Festival de Rockland, celle de la
Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64-11/1/4).
74
[Anonyme] Charte du Front commun des théâtres franco-
ontariens (2 pages), Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64- 75
[Paul-François Sylvestre], [Section sans titre], Liaison,
11/1/4. n° 58 (15 septembre 1990), p. 45.

41
génération X, la génération qui assurait pigistes. Pour la première fois depuis la
maintenant la relève, s’est taillé une place création de TA, les créateurs qui n’étaient
au sein de l’institution franco-ontarienne pas rattachés spécifiquement à une
en redéfinissant ses limites esthétiques et compagnie se sont doté d’un forum
géographiques, sans pour autant remettre qui leur était propre et qui répondait à
en question son autonomie, ni son apparte- leurs attentes.
nance à TA. Par ailleurs, c’est Patrick Au fil des années quatre-vingt-dix,
Leroux, fondateur du Théâtre la Catapulte, cette table a donné naissance à bon nombre
qui, en 1994, a proposé que les artistes de projets, comme la tenue d’auditions
pigistes habitant l’Outaouais québécois générales et, plus tard, des fins de semaine
puissent devenir membres à part entière de de création en 1993, 1995 et 1997 intitulées
TA, et non de simples « membres frater- Place à la pige. Puis, en 1999, à la demande
nels », catégorie utilisée par TA pour qua- de ce secteur, le programme de financement
lifier ses membres résidants du Québec. Jeux dans l’espace a été mis en place, per-
Si l’on se fie au bottin Têtes d’affiche! mettant ainsi aux artistes pigistes membres
Répertoire des artistes en théâtre 2001- de TA d’accéder à un financement, bien que
2003 réalisé par TA, la grande majorité réduit, les autorisant à développer des
des artistes pigistes dits franco-ontariens projets artistiques. Il s’agissait là d’une
résidaient soit du côté québécois de la façon de pallier aux diminutions considé-
rivière des Outaouais, soit à Montréal77. rables des enveloppes consacrées autrefois
Un plus grand nombre d’entre eux encore, à ce type de projet. À titre d’exemple, le
étaient originaires du Québec et y habitaient programme « Projet divers » a été annulé
toujours. Ils venaient travailler en Ontario par le CAO en 1998.
en raison du plus fort développement de Bien que TA soit demeuré, tout au long
ses infrastructures de production puisqu’à de la décennie, l’outil privilégié de la table
l’exception du Théâtre de l’Île, on ne des professionnels, cela ne l’a pas empêché
retrouvait que des structures de diffusion en de concentrer la majeure partie de ses
Outaouais québécois. Visiblement, le projet efforts dans l’accomplissement de l’objectif
issu des années soixante-dix et quatre- premier identifié lors des États généraux de
vingts qui visait à créer un espace culturel 1991, à savoir l’élaboration et la consolida-
de langue française en Ontario animait de tion d’un système de diffusion efficace.
moins en moins les artistes et artisans de la Il n’était pas innovateur de cibler les villes
capitale du Canada. d’Ottawa, de Sudbury et de Toronto pour
La multiplication d’artistes de la le projet. Après tout, elles étaient
scène travaillant à la pige, surtout dans véritablement des centres de diffusion
les régions d’Ottawa et de Toronto, a stratégiques pour la province sur
amené une prise de conscience relative à le plan géographique. Bien avant les
des besoins spécifiques. Ils ont revendiqué États généraux, en 1985-1986, Sudbury
et obtenu la création d’une quatrième avait déjà commandé une étude de faisa-
table de concertation, celle des artistes bilité qui abordait la question de la
construction d’une salle de théâtre. Puis, au
76
« Un mot sur le programme de L’Atelier de recherche cours de la saison 1992-1993, soit quelques
théâtrale d’Ottawa, Quatre ateliers qui aboutiront à quatre
spectacles constituent la première saison d’ARTO. / Pour
mois à peine après la décision de TA
chacun de ces ateliers, un plan de travail très rigoureux devra d’accorder la priorité au projet des centres
être respecté. En effet, les cinq représentations publiques
auront été précédées de quatre semaines de préparation –
de théâtre, Sudbury a réalisé une deuxième
période durant laquelle seront donnés des cours de maître : étude de faisabilité lui indiquant que, « dans
cours de phonétique par Hedwige Herbiet et ateliers de mou-
vement par Jean Asselin de l’école de mime Omnibus. /
le contexte économique actuel, un risque
Suivront trois semaines de répétitions intensives avec le met- important [se dressait] sur le plan de l’équi-
teur en scène atittré pour chacune des œuvres choisies et
finalement, les cinq représentations publiques ». ([Anonyme]
libre budgétaire d’exploitation78 ».
« Un mot sur le programme de L’Atelier de recherche théâ- Afin d’échapper aux contraintes finan-
trale d’Ottawa » dans ARTO, la saison 1991-1992, trois textes
de Shakespeare traduits par Michel Garneau et un atelier
cières qui rendaient impossible l’édification
libre. Programme du Théâtre français du Centre national des d’une salle de théâtre indépendante à
Arts).
Sudbury, le TNO et le Comité du centre de
77
Théâtre Action, Tête d’affiche! Répertoire des artistes en
théâtre 2001-2003, (Ottawa : Théâtre Action, 2001), théâtre de Sudbury ont formé un consor-
p. 110. tium avec la Galerie de Nouvel-Ontario et la

42
maison d’édition Prise de Parole dans le but général de l’organisme, a passé la
de construire, plutôt qu’une salle indépen- majeure partie de son temps à rencontrer
dante, un centre artistique francophone des politiciens, à commander et à super-
devant regrouper les artistes de la région viser la rédaction de rapports et d’études
sudburoise sous un même toit et en copro- pour juger de la faisabilité des projets.
priété. Mais Patrimoine canadien n’avait Mener à terme des projets d’une telle
pas envisagé le projet de la même façon. En envergure n’a pas été facile pour TA,
effet, une offre d’octroi substantiel pour la car, durant cette période, l’organisme
construction d’une salle de théâtre adjacen- avait également été confronté à ses
te au nouveau Collège Boréal a mis à mal propres difficultés financières : tous ses
les objectifs du consortium, engendrant partenaires publics traditionnels, à savoir
chez les deux autres organismes un senti- le ministère de la Culture de l’Ontario, le
ment d’abandon. Néanmoins, la Salle CAO ou Patrimoine canadien, ont réduit
André-Paiement a réussi à ouvrir ses de façon importante leurs subventions
portes en 1997 et est devenue, à compter de pour son fonctionnement. TA s’est donc
ce jour, une salle d’accueil pour le TNO et vu contraint de diversifier ses sources
le lieu de création de ses projets. de revenus.
La situation à Ottawa était très Sous la présidence de Pier Rodier, le
similaire. Depuis longtemps déjà les arti- conseil d’administration de TA a décidé
sans de la capitale nationale souhaitaient d’acheter un local au 255, chemin
disposer d’un centre de théâtre. Dès l’été Montréal, situé symboliquement dans le
1992, TA s’est réuni avec les trois secteur Vanier de la nouvelle ville d’Ottawa.
compagnies artistiques de la région – le Ironie du sort, il s’agissait de l’ancien édifice
Théâtre la Catapulte ne se joindra au ayant hébergé auparavant le bureau-chef
projet qu’en 1995 – dans le but de réaliser de l’ACFO provinciale, des installations
une étude de faisabilité. C’est ainsi que la déménagées depuis à Toronto. Des orga-
firme de consultants Cultur’Inc. a été nismes tels que les éditions L’Interligne,
mandatée pour élaborer un plan d’affaires l’Association des auteurs et des auteures de
prévoyant plusieurs scénarios. L’un d’eux l’Ontario français (AAAOF) et l’Association
voulait que les trois compagnies ottaviennes des professionnels de la chanson et de la
préconisent, avec TA, la construction d’un musique (APCM) y avaient également loué
complexe d’un montant de 8,000,000 $ à des bureaux à tour de rôles à des tarifs pré-
côté de la Cour des Arts au 2, avenue Daly. férentiels, faisant de ce lieu non seule-
Ce projet a rapidement été abandonné ment un centre associatif, mais surtout
et la préférence a été à l’achat de l’ancien un site emblématique de la francophonie.
Atelier du CNA situé au 333, avenue En plus d’avoir pignon sur rue d’un point
King-Edward suivant les recomman- de vue purement physique, TA a mis
dations de certains fonctionnaires de en place, le 27 mars 1997, son propre
Patrimoine canadien. Néanmoins, il site Internet www.theatreaction.on.ca.
s’agissait d’un projet bien plus modeste. L’organisme provincial s’est ainsi rappro-
La Nouvelle Scène a ouvert ses portes en ché de son milieu grâce à ce nouveau
avril 1999 et elle héberge depuis le médium informatique dont la popularité
Théâtre du Trillium, le Théâtre de la ne cessait de croître.
Vieille 17, la Compagnie Vox Théâtre et le Simultanément, en 1997, TA a pour-
Théâtre la Catapulte d’Ottawa. suivi son action établie selon les
La création de ces deux centres de objectifs identifiés lors des États généraux :
théâtre n’aurait jamais pu se concrétiser la diffusion, ou plus précisément la
sans l’aide TA. Une fois de plus, on s’est recherche d’une solution à l’absence
retrouvé face à un projet initié par les d’un réseau de diffusion efficace :
compagnies et qui aurait bien pu ne pas
TA cherche à regrouper les énergies
voir le jour faute de moyens financiers.
présentes dans le milieu des arts de la
Michel Louis Beauchamp, directeur
scène afin de pouvoir concrétiser de
façon efficace, sans dédoublement, la
78
Centre de théâtre de Sudbury, Fonds Théâtre-Action, création d’un réseau de tournée en
CRCCF, C64/17/02.

43
Ontario. TA et la table des compa- nelles. Pour assurer une bonne visibilité à
gnies professionnelles commencent ces membres, RO a exigé que les centres
par élaborer un concept de base du culturels achètent au moins deux spectacles
réseau. […] Parallèlement, TA contacte de musique et une représentation théâtrale
également les représentants de par saison. Cette condition sine qua none
l’Association des professionnels de la a bien entendu été acceptée par les six
chanson et de la musique franco- premiers diffuseurs. RO s’est donc, lui
ontarienne (APCM) dont les artistes aussi installé au 255, chemin Montréal
vivent les mêmes problèmes de diffu- dans les bureaux de TA.
sion. TA, l’APCM et l’Association des Dès février 1997, le Bureau du
centres culturels de l’Ontario (ACCO) Québec à Toronto, qui assurait la promotion
décident d’unir leurs forces pour des artistes québécois en Ontario, a
coordonner l’établissement des bases informé TA de son désir de participer au
de ce qui deviendra Réseau Ontario79. projet en établissant un système d’échange
avec ses organismes de diffusion québécois.
L’objectif de créer le Réseau Ontario RO a donc été en mesure, dès sa toute
(RO) semblait judicieux. En effet, « créer et première saison, de présenter deux
mettre en place les conditions et les méca- productions musicales de provenance
nismes propices à la diffusion du théâtre québécoise, en plus d’assurer à Deux
professionnel et des arts de la scène fran- Saisons, un groupe franco-ontarien, une
co-ontariens et à leur maintien à long tournée pan-québécoise de vingt spectacles.
terme80 » s’est avéré une réponse pertinente Dans le domaine théâtral, les échanges
aux défis que s’était lancés la communauté sont également allés bon train. RO a
théâtrale en 1991. En premier lieu, la conclu avec le Réseau Scènes, organisme
création d’un tel organisme a amené une de diffusion du théâtre québécois, une
meilleure concertation entre les compagnies entente de trois ans qui assurait la visibilité
professionnelles. Il a pu également jouer un de six à huit représentations de productions
rôle déterminant de service à la diffusion, québécoises en sol ontarien et de huit à
en aidant à la professionnalisation des dix représentations de spectacles franco-
structures ayant pour mandat la diffusion ontariens en sol québécois.
des arts de la scène. Le retour de TA et de ses compagnies
RO a été incorporé en décembre 1999, dans le domaine de la diffusion n’a pas tou-
un projet rendu possible grâce à un premier jours été facile. Il y a eu pendant cette même
octroi de 15 000 $ du CAO, complété, par la période un conflit important entre l’ATFC et
suite, d’un second montant de 14 000 $ pro- TA autour du programme Les Voyagements,
venant du ministère des Affaires civiques, un programme initié par Réseau Scènes
de la Culture et des Loisirs. Au cours de sa en 1997, mais auquel allait se joindre TA
première saison, avec plus de vingt mille en 1998. Ce programme voulait mettre en
programmes distribués partout en pro- place un corridor de diffusion du théâtre
vince, une tournée de huit spectacles de création francophone dans l’ensemble
franco-ontariens, huit diffuseurs commu- du Canada pour permettre du même
nautaires ciblées en plus des deux coup aux diffuseurs d’éponger les pertes
Centres de théâtre, RO a commencé fort! associées traditionnellement à la diffusion
Les diffuseurs qu’avait choisi de cibler du théâtre de création.
RO à l’époque (Kingston, Hawkesbury, Ainsi, ce dernier allait permettre de
Hearst, Kapuskasing, Mississauga et doubler le nombre de représentations des
Orléans), avaient déjà fait preuve d’ouver- œuvres théâtrales de création dans la pro-
ture envers les compagnies profession- grammation des diffuseurs spécialisés et
pluridisciplinaires, rehaussant de facto la
condition des artistes et des compagnies
79
[Théâtre Action], Le point sur la diffusion du théâtre
professionnel franco-ontarien, décembre 1998, Fonds impliquées. Au cours des quatre années où
Théâtre-Action, CRCCF, C64/14/2. TA a été associé au projet, la majeure partie
80
[Théâtre Action], « Le point sur la diffusion du théâtre pro- des diffuseurs franco-ontariens y ont par-
fessionnel franco-ontarien », document destiné à tous les
professionnels du théâtre en Ontario français, décembre ticipé, notamment la Nouvelle Scène et le
1998, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64/14/2. TNO. Simultanément, Claude Goulet, direc-

44
teur général du Réseau Scènes, a créé des institutionnels qui tentaient de régir les
liens semblables avec de nombreux théâtres Arts et la culture à l’époque, d’autant plus
franco-canadiens, dont le Théâtre populaire qu’un nouveau gouvernement conserva-
d’Acadie (TPA), le théâtre l’Escaouette de teur venait de s’installer à Queen’s Park.
Moncton et l’Unithéâtre d’Edmonton. Le feuillet recueillait treize textes,
Ce Directeur général souhaitait voir poèmes et illustrations. On y retrouvait
s’officialiser les échanges avec TA, RO et entre autres textes ceux de Mireille
les diffuseurs de l’Ontario français. Or les Francœur, de Paul-François Sylvestre, du
théâtres de l’Ouest canadien et de l’Acadie Théâtre la Catapulte, de Michel Louis
ont manifesté eux aussi le désir d’être Beauchamp et de Patrick Leroux. Stefan
impliqué, au même titre que TA, à la Psenak avait pour sa part résumé, avec
gestion du projet, et ont mandaté l’ATFC son Soliloque sur l’art l’ensemble de la
d’entreprendre des négociations pour faire pensée des auteurs. Il a dit: « 1. L’art est
des Voyagements un programme natio- viscéral. Quelle que soit la forme qu’il
nal. TA et ses compagnies membres, emprunte, l’art est le mode d’expression
après avoir manifesté une certaine réti- privilégié de la culture d’un peuple. Un
cence à l’idée d’ouvrir le programme à peu comme sa cuisine. » Il a affirmé aussi :
l’ensemble du pays, ont demandé expres- « 3. L’art est le témoin de l’existence d’un
sément à l’exécutif de l’ATFC de prendre peuple et rien ne pourra jamais faire taire
lui-même en main la gestion du projet. l’artiste car son travail en est souvent un
L’ATFC a tout d’abord indiqué que ses de revendication. Cela est d’autant plus
structures bénévoles n’étaient pas à vrai si on vit en Ontario français81 ». Puis,
même d’en assurer la gestion. Mais, une il s’est attaqué enfin à la question du
fois que l’AFTC a pu embaucher du per- financement public, en avançant les
sonnel, TA et son nouveau directeur prémisses suivantes :
général. Denis Bertrand, ont choisi de se
retirer du projet. C’est donc en 2000 que 7. L’art n’est pas une forme déguisée
la gestion des Voyagements a été assurée de bien-être social. Les artistes ne
par l’AFTC dirigée par Alain Doom. sont pas des mésadaptés sociaux
Dans un tout autre ordre d’idées, en parce qu’ils ne portent pas de
tant qu’organisme de développement et de veston-cravate et ne sont pas peignés
représentation, il appartenait non seule- sur le côté. Dans la vie, on peut être
ment à TA d’assurer la diffusion et la visi- excité par autre chose que l’argent et
bilité de ses artisans et de son milieu, mais le sentiment de puissance;
aussi de contribuer à la reconnaissance et
8. L’art ne doit pas faire les frais du nou-
au respect de la démarche artistique qu’il
veau programme d’assainissement des
représentait. Après tout, TA n’avait pas
finances publiques. Quant [sic] il ne
qu’un mandat administratif et politique.
restera plus rien qu’un budget bien
En s’identifiant comme porte-parole de ses
équilibré, qui continuera de faire rêver
artistes et artisans, il se devait de les
les gens? À moins que l’on envisage
appuyer dans leurs démarches artistiques
aussi de couper dans les rêves82?
autant qu’administratives. TA a donc agi
dans cet esprit à maintes reprises au cours Trois ans plus tard, en 1999, la situation
de la décennie. D’abord, un feuillet intitu- dont témoignait TA et ses artistes, à savoir le
lé Créer C’est inveCtiver, manifeste en manque de financement certes, mais surtout
faveur de la liberté de se créer que publiait le manque de liberté et de reconnaissance
TA en 1996 de concert avec l’Alliance cul- pour créer en Ontario français, ne s’était pas
turelle de l’Ontario et le Théâtre la amélioré. Les coupures imposées par le
Catapulte, a permis à de nombreux artistes gouvernement ontarien se faisaient ressentir
et artisans de prendre la parole, et, du dans de nombreuses sphères d’activités et,
même coup, de faire connaître au grand bien évidemment, celle des Arts et de la
public les réalités artistiques auxquelles culture ne faisait pas exception.
faisait face leur milieu. Il leur a permis
aussi de faire entendre leurs opinions et de 81
Créer, C’est inveCtiver, Manifeste en faveur de la liberté
les confronter aux discours politiques et de se créer, Théâtre Action et al.,1996, p. 27.

45
Pier Rodier, toujours président de d’excellence artistique afin de permettre
TA, a alors réaffirmé, par le biais d’un aux élèves de toute la province de per-
communiqué de presse diffusé sur fectionner leurs talents artistiques – aucune
l’ensemble de la province, les opinions école en Ontario ne possédait de pro-
véhiculées, près de trois ans plus tôt, gramme rigoureux en formation artistique.
dans le manifeste. À l’intérieur de ce C’est pourquoi les élèves intéressés à
communiqué, TA a pris position quant à suivre une formation en théâtre étaient obli-
la diversité culturelle. Selon Rodier : gés de venir étudier à Ottawa. Ces élèves
étaient logés dans des familles d’accueil, de
[...] il est impératif que la culture façon à concilier les contingences maté-
bénéficie d’un statut particulier dans rielles avec les contraintes liées à la for-
les débats sur la mondialisation des mation académique qu’ils avaient choisie.
marchés. La richesse culturelle de Il y avait aussi l’École secondaire publique
l’Ontario français est en péril si le MacDonald-Cartier à sudbury. Sa troupe,
point de vue des inconditionnels du Les Draveurs, tout d’abord dirigée par
libéralisme économique l’emporte. Hélène Gravel, puis par Hélène Dallaire,
[…] Si la culture ne bénéficie pas n’a cessé de se distinguer dans le milieu
d’un statut particulier dans les depuis une trentaine d’années par la régu-
traités de libre-échange, elle sera larité de sa production – l’école monte
traitée sur le même pied que le bois presque exclusivement des créations – et
d’œuvre de nos forêts87. par la qualité des ses spectacles. En témoi-
gnent les nombreux prix remportés par ses
En effet, l’organisme s’est adapté à créations, notamment au Festival Sears.
une société en évolutiont : peu de temps Si l’on veut comprendre les raisons
après la diffusion du communiqué en de l’amélioration de cette situation à
question, en mai 1999, TA a publié l’échelle provinciale, il n’est pas inutile
Développement du théâtre franco-ontarien de rappeler l’influence qu’a exercé TA
dans la diversité culturelle, un document sur le milieu scolaire au cours des années
dans lequel il a identifié la promotion du quatre-vingts avec la création de son Centre
théâtre comme un de ses objectifs princi- de ressources qui a permis, tout d’abord,
paux. Ainsi, TA s’est engagé à faire la la publication de nombreux guides d’ani-
promotion du théâtre franco-ontarien au mation et de formation à l’intention des
Canada et à l’étranger et à mieux faire enseignants. En fait, le Centre de ressources
connaître ses œuvres et ses besoins84. a continué, au cours de la décennie
quatre-vingt-dix, à être un outil privilégié
pour les troupes scolaires. À l’exception
LE SECTEUR SCOLAIRE des enseignants qualifiés en art drama-
tique en Ontario français, que l’on peut
Les années quatre-vingt-dix ont vu compter sur les doigts de la main, les
émerger une vitalité nouvelle au enseignants et enseignantes d’art drama-
sein du théâtre en milieu scolaire. Certes, tique de l’ensemble de la province ont, bien
les troupes faisaient leurs preuves depuis malgré eux, été mis en charge d’un tel pro-
bon nombre d’années dans certaines gramme sans avoir pour autant reçu la for-
écoles privilégiées. C’était le cas de celles mation didactique nécessaire. D’autres,
qui bénéficiaient déjà de cours d’art n’ayant aucun bagage artistique que ce soit,
dramatique et qui favorisaient ainsi ont été contraints d’enseigner l’art pour des
l’émergence d’un intérêt pour le théâtre raisons de contingences et de dotation en
chez les jeunes francophones de la province. personnel scolaire.
En effet, à l’exception de l’École secon- TA a été une fois de plus utilisé à des
daire publique De La Salle – école ottavien- fins de développement un mandat qu’il a
ne s’étant dotée, en 1983, d’un Centre repris à la suite des discussions tenues lors des

82
Créer, C’est inveCtiver, Manifeste en faveur de la liberté 84
« Développement du théâtre franco-ontarien dans la
de se créer, Théâtre Action et al.,1996, p. 27. diversité culturelle canadienne », Fonds Théâtre-Action,
Pier Rodier, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64/16/4.
83
CRCCF, C64/16/5.

46
États généraux. L’organisme est intervenu à franco-ontarienne à se questionner sur la
deux niveaux; d’une part, il a permis aux place à donner à l’expression dramatique
élèves de bénéficier d’un enseignement dans les écoles, et sur le rôle qu’elle
puisé dans les outils pédagogiques qu’il pouvait jouer en tant que rempart contre
avait publiés; et, d’autre part, il a assuré la l’assimilation linguistique et culturelle.
formation des enseignants. TA a livré C’est dans cet esprit, mais aussi à la suite
ainsi un savoir pertinent pour la formation, des discussions engendrées lors des États
l’organisation et la gestion d’une troupe généraux et à la tenue, en 1995, du
scolaire ainsi qu’une base solide en ce premier Festival de théâtre en milieu
qui concerne la formation vocale et corpo- communautaire que la table sectorielle
relle. Grâce à cette nouvelle expertise, l’art scolaire a organisé, en 1996, le premier
dramatique est devenu très vite à l’image Festival de théâtre en milieu scolaire:
de ce qu’il avait été au cours des années
Ce premier Festival provincial de
soixante-dix pour les artistes professionnels,
théâtre en milieu scolaire comportera,
le moyen d’expression de la nouvelle
d’une part, une programmation vouée
génération qui, grâce au théâtre, décou-
à la présentation de spectacles produits
vrait petit à petit une identité francophone.
par les troupes de théâtres scolaires de
Comme l’a souligné Roch Castonguay
l’Ontario français; puis, un important
dans un article publié dans Le Droit au
volet de formation (pour les élèves
moment du 25e anniversaire de TA en
ainsi que les enseignant-e-s) et de
1997, « [l]e théâtre est aux Franco-Ontariens
concertation. Il est important que les
ce que la musique est aux Acadiens ».
jeunes explorent tous les aspects
Cette affirmation a pris tout son sens dans
(interprétation, technique, écriture et
le cadre scolaire des années quatre-vingt-
mise en scène) par le biais d’ateliers.
dix car les jeunes de cette décennie ont
Or ces jeunes représentent la relève de
trouvé dans le théâtre un puissant outil de
demain et certains d’entre eux choisi-
construction identitaire, au même titre que
ront peut-être de faire carrière en
les générations qui les avaient précédés.
théâtre. Nous nous devons de promou-
Ainsi, alors qu’au sein du secteur profes-
voir la qualité artistique chez la relève85.
sionnel, on tentait de se libérer de cette
idée constitutive du théâtre franco-ontarien, Avant même de lancer le projet, TA a
elle se voyait récupérée par les adolescents reconnu le potentiel que possédaient les
et leurs enseignants. adolescents franco-ontariens et a également
La tenue des États généraux a réaffirmé son rôle en tant qu’organisme de
également encouragé la vitalité que l’on a développement, soit celui d’assurer une
reconnu au secteur scolaire durant la formation théâtrale pour promouvoir non
décennie. En effet, dès la tenue de cet seulement le théâtre comme moyen
événement, on a décidé qu’il était essentiel d’expression artistique, mais également
de développer, au même titre que le milieu pour juger de la qualité artistique des
professionnel et le milieu communautaire, représentations. En effet, ce n’était pas sim-
une table de concertation. Ainsi, dès 1992, plement l’idée de présenter un spectacle qui
le secteur scolaire a pu s’intégrer au sein a été valorisée, mais aussi celle de présenter
de TA et a pu s’assurer que ses intérêts et un spectacle de qualité. Les objectifs fixés
ses besoins allaient être correctement pris par TA pour mener à bien ce mandat
en considération par l’organisme de suivaient la philosophie qu’il privilégiait :
développement.
1. Promouvoir et stimuler le théâtre en
Dans le même ordre d’idées, TA a
milieu scolaire franco-ontarien à
présenté, en 1994, un mémoire important
l’échelle provinciale;
à la Commission royale d’enquête sur
l’éducation, et ayant pour titre Une réflexion 2. Conscientiser les jeunes à leur iden-
sur l’enseignement de l’art dramatique et le tité socioculturelle par le théâtre et
théâtre dans les écoles françaises de l’animation culturelle;
l’Ontario. La rédaction de ce mémoire a
3. Favoriser les échanges entre les jeunes
poussé le milieu scolaire ainsi que
et les responsables de troupes de
l’ensemble de la communauté théâtrale

47
théâtre scolaire sous forme d’activités la promotion des productions scolaires; un
d’animation à caractère culturel; coup de projecteur également sur les efforts
4. Offrir une occasion unique de forma- des élèves, des enseignants et des parents,
tion pour les élèves et de perfection- parties prenantes de cette aventure. Le
nement pour les enseignant-e-s; Festival est venu également renforcer les
liens d’appartenance entre les adolescents et
5. Donner aux troupes de théâtre en TA87. Par contre, la tenue d’un tel événe-
milieu scolaire une occasion unique ment a grevé les ressources de TA et a
d’élargir leur public et de se produi- nécessité une collaboration avec des écoles.
re à l’échelle provinciale; TA n’était pas en mesure de supporter à lui
6. Promouvoir la qualité artistique chez seul le coût d’un tel projet, compte tenu de
la relève; ses nouvelles priorités de développement
physique (les centres de théâtre).
7. Implanter et perpétuer la tradition Le premier Festival de TA s’est tenu
théâtrale en tant que véhicule artis- du 12 au 14 avril 1996 à l’École secondaire
tique des franco-ontariens [sic]; catholique Algonquin à North Bay. Tel
8. Créer et développer des partenariats86. que promis lors des discussions pré-
liminaires, le ministère de l’Éducation a
TA, de concert avec l’école hôtesse accordé à TA une subvention de 15 000 $
ainsi qu’avec certains organismes locaux pour la tenue de l’événement : le montant
partenaires de la tenue de l’événement, alloué a permis à TA et à l’école hôtesse
a voulu, d’abord et avant tout, offrir aux d’accueillir 290 participants. Le succès de
jeunes une expérience théâtrale leur l’événement a été incontestable, car TA a
permettant de se sensibiliser davantage estimé à 350 le nombre total de parti-
au théâtre comme moyen d’expression. Au cipants, en comptant les formateurs, les
cours de cette même décennie, un souci animateurs, les enseignants responsables
de professionnalisation de l’enseignement de troupes. On y a présenté au total
du théâtre a animé TA, un souci qui a treize spectacles, nombre impressionnant
permis à la table scolaire de disposer de puisqu’il s’agissait d’un projet pilote. Il
formateurs et d’animateurs d’ateliers. avait pour but la mise en place des
Cependant, il est paradoxal de mécanismes de collaboration entre TA et
constater que le théâtre en milieu scolaire les écoles et plus particulièrement avec
s’attachait à la question identitaire en se celles qui étaient le plus éloignées.
servant du théâtre comme bouclier En effet, grâce à ces résultats, on a
contre l’assimilation, tout en se souciant décidé que le Festival en milieu scolaire
de créer un théâtre de qualité qui ne corres- se déroulerait dorénavant de façon
pondait pas nécessairement aux critères bisannuelle. La prochaine édition s’est
de sa communauté. Bien que le théâtre tenue en 1998, à l’École secondaire
en milieu scolaire ne semblait pas déchiré publique MacDonald-Cartier de Sudbury.
par un tel paradoxe, on peut expliquer ce Entre ces deux festivals, un événe-
phénomène par la formation que lui ment d’importance a eu lieu, tant pour la
dispensait le milieu professionnel. Le table scolaire que pour le milieu théâtral
théâtre en milieu scolaire allait-il devenir franco-ontarien dans son ensemble.
le secteur qui réconcilierait le milieu Le vingt-cinquième anniversaire de
professionnel et le milieu amateur conti- TA qui s’est tenu à Ottawa du 6 au 8 juin
nuellement en désaccord sur leurs 1997 a rassemblé les quatre tables de
intérêts depuis les années quatre-vingts? concertation lors d’un festival d’envergure
L’idée de la tenue d’un festival en provinciale, et ce, pour la première fois
milieu scolaire n’a laissé personne indif- depuis le milieu des années quatre-vingts.
férent. Pour les communautés et les
écoles hôtesses, cela signifiait, avant tout, 86
[Théâtre Action], « Premier Festival provincial de théâtre
un outil de valorisation et un moyen de faire en milieu scolaire », Fonds Théâtre-Action, CRCCF,
C64/15/3, p. 4.
87
[Théâtre Action], « Premier Festival provincial de théâtre
85
[Théâtre Action], « Premier Festival provincial de théâtre en en milieu scolaire », Fonds Théâtre-Action, CRCCF,
milieu scolaire », Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64/1, p. 1. C64/15/3, p. 4-5.

48
Les trois secteurs y ont présenté respective- artistes et des artisans du théâtre franco-
ment trois productions, pour un total de ontarien en plus de capitaliser sur l’appui et
neuf spectacles. Comme représentant du le développement du milieu. Appuyée par
secteur scolaire, on retrouvait la troupe des l’Association des Anciens de l’Université
Cafés chantants de l’École secondaire d’Ottawa et par le gouvernement de
Glengarry et la troupe Les Draveurs de l’Ontario, cette bourse permettait à un
l’École secondaire publique MacDonald- étudiant du Département de théâtre de
Cartier. Était présente également la troupe poursuivre ses études. Les critères de
des P’tits géants de l’École secondaire sélection étaient simples : être admis ou
publique Georges-P.-Vanier qui a présenté, étudier à temps plein au Département de
quant à elle, la pièce Voir noir en couleur théâtre, démontrer un besoin d’aide
de l’enseignante Linda Simeoni. Au niveau financière selon les indicateurs employés
communautaire, on retrouvait au Festival par le Service d’aide financière de la
le Nouveau théâtre d’occasion de même université et, enfin, être résident
Brampton qui a présenté Le P’tit Bonheur de l’Ontario.
de Félix Leclerc et le Théâtre du Village Quelque peu controversé, ce dernier
d’Orléans qui a présenté Professeur, critère a fait, de prime abord, beaucoup de
création collective rédigée par des bruit : pourquoi discriminer un étudiant en
membres de la troupe. On a aussi vu sur fonction de son lieu de résidence s’il
les planches la pièce La Douce Folie de avait délibérément choisi d’étudier en
Margot la Douce d’Hedwige Herbiet, mon- Ontario? On permettait pourtant aux artistes
tée par la troupe Soleil Sud de Windsor. qui résidaient au Québec d’être membre
Du côté professionnel, on comptait de TA. Les étudiants qui faisaient le choix
ltrois compagnies dont Vox Théâtre qui a de s’établir sur la rive québécoise ne le
présenté Sauvage, une création de Marie- faisaient pas nécessairement pour des
Thé Morin, de Pier Rodier et de Sylvie raisons identitaires. En fait, il s’agissait
Trudel; le Théâtre de la Vieille 17, qui a souvent d’une question purement
présenté Le Nez d’Isabelle Cauchy et de financière. La règle devait s’appliquer
Robert Bellefeuille; et, enfin, le TNO qui aussi bien au cadre scolaire qu’au cadre
a monté la pièce L’Homme effacé de Michel professionnel. Cependant, même s’il
Ouellette. Ces trois compagnies ont toutes l’avait voulu, TA n’aurait rien pu y
été appelées à présenter leur spectacle au changer : ce règlement était imposé par
Studio du CNA, ce qui a donné à ces pièces, le Gouvernement de l’Ontario, qui avait
mais surtout à TA et à son 25e anniversaire, établi que pour disposer de son programme
une visibilité certaine. En somme, la partici- d’aide financière (le Régime d’aide finan-
pation des troupes scolaires à un événe- cière aux étudiants de l’Ontario) il fallait
ment de cette taille a été significative. résider en Ontario.
Vraisemblablement, en créant, à la Malgré le fait qu’ils s’étendaient
suite des États généraux, des tables de bien au-delà du cadre scolaire, il importe
concertation pour chaque secteur, TA a de mentionner l’entrée remarquée de
favorisé un climat de collaboration et ces prix et des bourses dans la commu-
de concertation entre les divers secteurs nauté théâtrale. Au total, on comptait
et a accru, du même coup, la recon- quatre nouvelles bourses. Le premier
naissance des besoins et des limites de prix à être annoncé fut celui de la
chacun. Ainsi, lors du 25e anniversaire, Fondation franco-ontarienne qui était
les spectacles communautaires et sco- décerné à un artiste professionnel ayant
laires ont bénéficié d’autant de notoriété eu un impact particulier sur la franco-
que les spectacles professionnels. phonie ontarienne. En 1997, c’est à
En mars de cette même année, TA a Robert Marinier que ce prix est revenu :
annoncé la création d’un fond de dotation on a souligné ainsi sa contribution au
permettant la création de la Bourse d’études théâtre franco-ontarien, en insistant
de Théâtre Action de l’Université d’Ottawa surtout sur l’écriture récente de sa pièce
et la création des prix et des bourses du L’Insomnie. Est venu ensuite, grâce à la
théâtre franco-ontarien, prix qui avaient contribution de La Banque Nationale, un
pour but la reconnaissance du travail des deuxième prix accordé à une compagnie

49
Page droite – Roger Blay et Roy Dupuis dans Le Chien de Jean Marc Dalpé (1988), Mise en scène de Brigite Haentjens.
Théâtre du Nouvel-Ontario (Sudbury).
Photo ©Jean-Guy Thibodeau.

théâtrale s’étant distinguée, soit par son offerts. Michel Louis Beauchamp a pro-
dynamisme, soit par son esprit innovateur posé de convoquer une réunion pour
ou encore, par son engagement en faveur discuter de cette épineuse question.
de la communauté. En 1997, c’est la trou- Pourtant, cette problématique est tombée
pe du Nouveau Théâtre de Brampton qui a dans l’oubli : en témoigne le fait qu’il
reçu cet honneur. soit impossible de trouver une trace tan-
En troisième lieu, TA a créé un gible d’une telle réunion dans le fonds
prix pour souligner la contribution de d’archives de TA entreposé au CRCCF.
personnes ou d’organismes au théâtre Le succès du premier Festival allait
franco-ontarien. Ce prix de reconnaissance perpétuer la tradition des festivals en
visait à souligner la participation de gens milieu scolaire. En effet, après le Festival
qui, bien que ne faisant pas nécessairement de North Bay, les troupes scolaires, de
partie du milieu, avaient contribué indirec- plus en plus nombreuses, se sont ensuite
tement à son épanouissement et à sa réunies, en 1998, à l’École secondaire
vitalité. Au cours de l’année marquée par publique MacDonald-Cartier de Sudbury,
l’ouverture de la nouvelle salle du TNO, à l’École secondaire catholique Sainte-
le Collège Boréal a reçu ce prix pour son Famille de Mississauga en 1999; et, enfin,
rôle de premier plan dans la construction à l’Université Ottawa en 2000. TA a
du centre de théâtre de Sudbury. Enfin, le établi, tout d’abord, que le Festival devait
dernier prix visant à honorer la relève, être un événement bisannuel. Mais ce
« l’énergie créatrice de demain », a vu le dernier est vite devenu annuel en raison
jour88. Le Prix relève était destiné à un de sa popularité chez les élèves et
étudiant franco-ontarien qui poursuivait les enseignants.
ses études théâtrales en français. En fait, En organisant un festival annuel, TA
les prix et bourses de TA faisaient, depuis s’est assuré de pouvoir offrir une chance
1997, partie intégrante du calendrier à tous les élèves du secondaire de parti-
d’activités théâtrales annuel et, chaque ciper, ne serait-ce qu’une seule fois au
année, on décernait ces prix dans le cours de leur scolarité, à un festival
cadre de la journée internationale du théâtral d’envergure. De plus, cela a
théâtre, le 27 mars. permis à l’organisme de mettre en place
La réunion de la table sectorielle du divers ateliers de formation animés par
théâtre en milieu scolaire de 1997-1998 des artistes professionnels. Par exemple,
est venu verbaliser un problème qui, la troisième édition du Festival, tenue à
depuis plusieurs années déjà, hantait les l’École secondaire catholique Sainte-
responsables du milieu scolaire. Quelle Famille de Mississauga, avait à sa
place devait-on réserver, en tant que programmation des formations en inter-
communauté théâtrale, aux étudiants qui prétation, en voix, en régie, en scéno-
poursuivaient leur formation théâtrale au graphie et, finalement, en critique théâtrale.
niveau post-secondaire dans les deux Pour les enseignants responsables, la
établissements francophones disponibles, diversité était aussi au rendez-vous :
l’Université Laurentienne et l’Université critique de spectacle, échanges et discus-
d’Ottawa? En effet, TA encadrait les étu- sions sur les réalités du théâtre scolaire,
diants du secondaire : on leur offrait des le théâtre contemporain.
ateliers de formation, des festivals, etc., La vivacité du théâtre franco-
mais que devait-on faire pour reconnaître ontarien de la fin de la décennie quatre-
ou collaborer à la formation des étudiants vingt-dix était attribuable, en majeure
qui avaient l’espoir de pouvoir, un jour, partie, à l’effervescence du théâtre en
œuvrer au sein des secteurs professionnel? milieu scolaire. Le travail des troupes sco-
En créant la table de concertation du laires y était pour beaucoup : les jeunes
milieu scolaire, TA a reconnu qu’il avait avaient eu, de par leur participation aux
un devoir à remplir auprès de la relève. productions scolaires, la chance d’être
Les étudiants du niveau postsecondaire exposés aux divers métiers que leur offrait
ne présentaient pas de spectacles au
Festival et ne pouvaient pas non plus 88
« Haut les masques! Les 25 ans de TA », Le Droit, 31 mai
bénéficier des ateliers ou des formations 1997, CRCCF, C64/14/2.

50
le théâtre (de comédien à régisseur en nautaire, à savoir la transmission des
passant par éclairagiste, accessoiriste et connaissances théâtrales de base. Ce
costumier). Pour ce milieu qui assurait n’était certainement pas le manque de
évidemment au secteur professionnel un participation qui causait le plus de difficulté
public plus intelligent, TA allait créer, en pour le secteur communautaire, mais
1999, un nouveau prix de reconnaissance bien plutôt son manque d’organisation.
pour une troupe de théâtre en milieu sco- La ferveur et la volonté des troupes
laire. Ce prix a été annexé la même année communautaires étaient indubitables et leur
aux Prix et Bourses du théâtre franco- entrain, incommensurable. Néanmoins,
ontarien, qui comptent maintenant un la plupart des troupes n’avaient pas les
panel de cinq prix. compétences nécessaires pour s’organiser
de façon efficace. En publiant le guide de
LE SECTEUR COMMUNAUTAIRE Cloutier et de Charbonneau, TA souhai-
L’esprit de synthèse du milieu que tait ainsi faciliter la tâche de tous ceux et
l’on reconnaît aux États généraux a per- celles qui voulaient soit se lancer dans la
mis à TA de comprendre qu’il y avait bel mise sur pied d’une nouvelle troupe, soit
et bien un besoin de soutien chez les approfondir leurs connaissances par rapport
troupes de théâtre communautaire, ce à l’organisation et à l’animation d’une
qui a entraîné, du même coup, la créa- troupe théâtrale en milieu communautaire.
tion d’une table de concertation pour le Qui, quand, comment, pourquoi, manuel
théâtre communautaire. La mise en place d’appui aux troupes communautaire publié
de cette table a donné aux diverses en 1993, leur fournissait donc les outils
troupes une véritable force de frappe au nécessaires pour mieux asseoir les bases de
sein de TA. Cette représentation nouvelle leurs troupes et mieux assurer leur vitalité
a donné la chance aux artistes amateurs et leur continuité.
de recevoir une formation théâtrale plus Dès l’année suivante, en 1995, TA a
conséquente que celle qu’ils pouvaient organisé la première édition du Festival
recevoir au sein de leurs communautés de théâtre communautaire franco-
respectives. En effet, avant la collabo- ontarien. Ce festival a fait appel à la
ration de TA, plusieurs troupes disaient collaboration de deux troupes, celles-là
« s’inventer » des formations en faisant devenant ainsi les troupes hôtesses de
appel aux gens de la région qui pouvaient l’événement : le Théâtre du Village
avoir quelque compétence dans un d’Orléans et la troupe de la ville de
domaine précis. Néanmoins, ces forma- Rockland. Cette dernière avait un caractère
tions étaient pour la plupart artisanales. symbolique pour TA : Rockland avait été
En 1993, TA a donc mis sur pied un la ville à avoir accueilli, aux dires de tous,
programme de formation entièrement le meilleur Festival provincial de TA en
consacré aux troupes communautaires et 1979. Le Festival communautaire s’est
scolaires, troupes que l’on regroupait déroulé sans anicroches et le succès a été,
sous le nom de troupes « amateurs ». à l’image des festivals provinciaux des
Le premier atelier, Formation années quatre-vingts, incontestable. On y
théâtrale I, s’est déroulé à Sudbury, ville a compté approximativement une centaine
stratégiquement accessible pour l’ensemble de participants qui ont présenté, au total,
de la province. Trente-cinq participants neuf spectacles. L’édition suivante allait
venus de tous les coins de l’Ontario ont faire, par contre, beaucoup plus de
suivi l’atelier. L’année suivante, TA a vagues. Bien qu’il ait fallu attendre trois
publié l’outil pédagogique Qui, quand, ans avant même de recevoir une invi-
comment, pourquoi?, un guide rédigé tation pour y assister, c’est en 1998, à
expressément pour les responsables de Kapuskasing, que s’est tenu le deuxième
troupes de théâtre communautaire. Les Festival communautaire.
auteurs de ce guide, Jean-Pierre Cloutier La troupe Méli-Mélo, en collaboration
et Marcus Charbonneau, s’étaient donné avec TA et le Centre des Loisirs de
un objectif précis en le rédigeant : combler Kapuskasing, a réussi à regrouper une
une lacune qui se faisait sentir depuis
quelque temps dans le milieu commu- 89
Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64/17/01.

52
dizaine de troupes, certaines ayant dû Festival est venue la réunion de la table
voyager plus de douze heures pour se sectorielle communautaire au cours de
rendre à destination. L’accueil de la part de laquelle les membres ont établi un plan
la communauté et l’organisation du festival d’action triennal qui dressait les priorités
ont été incomparables. Il est important de du milieu de 1998 jusqu’à 2001. Comme
mentionner, par contre, que la troupe de nouveaux ateliers de formation étaient
avait une raison toute particulière de vou- offerts, les membres de la table se sont
loir accueillir le Festival communautaire en préoccupés plus particulièrement de ce
1998. En effet, au même moment, à peine point précis. Ils ont reconnu clairement
quelques rues plus loin, se déployaient les qu’il leur fallait, avec l’aide de TA,
5e Jeux franco-ontariens, événement organi- « développer et mettre en place un
sé par la Fédération de la jeunesse franco- programme de formation théâtrale pour
ontarienne. Cet événement rassemblait le milieu amateur en développant un
chaque année près d’un millier de jeunes partenariat avec le milieu de l’éducation
venus des quatre coins de la province, et organiser des activités de perfection-
dans un esprit de fierté francophone, et nement professionnel89 ».
mettait en évidence les talents de D’autres préoccupations ont aussi
chacun dans divers domaines. Le fait vu le jour, notamment au niveau de la
d’accueillir, du 15 au 18 mai 1998, à la concertation entres les troupes et la
fois les Jeux franco-ontariens et le circulation du savoir théâtral. C’est
Festival de théâtre communautaire de qu’il y avait bel et bien une volonté
TA avait de quoi rendre fière la ville de mieux gérer l’information par le
de Kapuskasing. Le Festival et les développement d’outils de commu-
Jeux se sont déroulés dans la plus nication plus modernes (courriels,
grande complicité, et ont marqué du Internet). On a manifesté aussi des
même coup une présence francophone préoccupations par rapport à la tenue
importante dans le Nord. d’événements comme les festivals en
Conscient de l’envergure de l’évé- précisant qu’il fallait que ces événe-
nement, TA en a profité pour présenter la ments favorisent l’excellence artistique,
deuxième édition de ses Prix et Bourses la formation, la concertation et la mise
du théâtre franco-ontarien. Ainsi, à cette sur pied de partenariats stratégiques.
l’occasion, la Fédération et l’Alliance des
Caisses populaires de l’Ontario ont été
honorées pour leur contribution constante
et leur engagement envers le théâtre franco-
ontarien. Ensuite, TA a souligné la contri-
bution artistique de Marie-Thé Morin en
lui remettant le Prix d’excellence. La
troupe communautaire Méli-Mélo a reçu
le Prix consacré à une troupe amateur.
Manon St-Jules, étudiante à l’ÉNT, a
reçu, quant à elle, le Prix relève.
L’organisme a également profité de
cet événement pour offrir, dans le cadre
de ce Festival, des ateliers de formation
théâtrale, tout comme il le faisait pour les
festivals en milieu scolaire. Ces ateliers
permettaient aux personnes du milieu
communautaire qui n’avaient pas néces-
sairement la possibilité de se déplacer à
Sudbury ou à Ottawa de se rattraper.
Roch Castonguay et Patrick Leroux y
ont animé respectivement des ateliers sur
le rôle de composition et sur le choix de
textes pour la scène. À la suite de ce

53
Les Années
deux mille
Page précédente – de gauche à droite :Jill McKenny, Élise Berthiaume et Manon Laflèche dans Les Murs de nos villages,
une création collective du Théâtre de la Vieille 17 (2004), mise en scène de Natalie Joy Quesnel. Théâtre Tremplin (Vanier).

Les Années
deux mille

L’
entrée dans le vingt-et-unième mise à jour, le développement et la publica-
siècle a coïncidé avec l’arrivée de tion d’outils utiles à tous les secteurs de TA.
Denis Bertrand à la direction géné- En fait, à partir de l’an 2000, TA Éditeur est
rale de TA : il a remplacé Michel Louis devenu un volet important des activités de
Beauchamp, en poste depuis la fin des l’organisme provincial. Michel Ouellette a
années quatre-vingts, et dont le travail revu et a mis à jour le manuel de Michel
accompli s’est avéré exceptionnel. Grâce Marc Bouchard, et TA a lancé Le Petit
à sa perspicacité et à son dévouement, Guide d’écriture dramatique en 2003. Ont
TA a franchi des étapes importantes de suivi La Marionnette, un plaisir pour
son développement et a pu organiser, tous!, Coup de théâtre et On s’organise,
du 9 au 11 septembre 1999, l’événement tous publiés également en 2003. De plus,
Frontières et passages du théâtre franco- L’Art d’accueillir le théâtre (un outil
ontarien90, réflexion collective qui a ras- qui permettait aux diffuseurs franco-
semblé les artistes, compagnies, centres ontariens de comprendre les besoins
de théâtre, représentants et représen- spécifiques inhérents à l’accueil du
tantes des milieux professionnel et amateur théâtre) a été développé notamment par
franco-ontariens. Cet événement a permis Paulette Gagnon et publié grâce à un
de déterminer les lignes directrices de la partenariat avec RO en 2004. Enfin, le
décennie à venir. Il est indéniable que service graphique Grimage, créé pendant
c’est le nouveau souffle apporté par que Michel Louis Beauchamp était tou-
Denis Bertrand qui a incité l’organisme jours en poste, est devenu lui aussi un
à mettre en action la longue liste élément important des programmations
d’objectifs identifiés comme prioritaires gérées par Bertrand.
pendant cet événement.
Également très soucieux d’augmenter
les revenus autonomes de l’organisme et LE SECTEUR PROFESSIONNEL
conscient du grand besoin de produire
des documents conçus dans un esprit Si les années quatre-vingt-dix ont
pédagogique, Denis Bertrand a notam- marqué, pour la table professionnelle,
ment investi de nombreuses heures dans la une restructuration de son milieu et une
réorganisation de ses priorités, la nouvelle
90
Étaient présents lors de Frontières et Passages du théâtre décennie allait marquer la maturation
franco-ontarien : Danièle Aubut, Michel Louis Beauchamp, de cette structure nouvelle. En fait, le
Joël Beddows, Isabelle Bélisle, Robert Bellefeuille,
Denis Bertrand, Diane Bouchard, Jean-Pierre Caissie, milieu professionnel souhaitait, à partir
Roch Castonguay, Lucien Crustin, Hélène Dallaire, Nadia de recommandations formulées par ses
David, Colombe Demers, Sasha Dominique, Joël
Ducharme, Sylvie Dufour, Claire Faubert, Johanne représentants, établir un plan d’action.
Gagnon, Paulette Gagnon, Mario Gendron, Geneviève Au moment de Frontière et passage, trois
Georges, Lyette Goyette, Claude Guilmain, Annick Huard,
Jean-Claude Larocque, Julie Lavallée, Annick Léger, champs étaient ciblés, soit la promotion
Richard J. Léger, Marc Lemyre, Patrick Leroux, Josée et la communication, la vie artistique et
Létourneau, Robert Marinier, Guy Mignault, Catherine
Mensour, Marie-Thé Morin, Louise Naubert, Michel culturelle, le financement et la condition
Ouellette, André Perrier, Marie-Claude Petit, Geneviève financière des artistes. Comme le souligne
Pineault, Pier Rodier, Simone Saint-Pierre, Jérôme St-
Denis, Maude St-Denis, Manon St-Jules, Inouk Touzin, le bilan de cet événement publié en
Compagnie Vox Théâtre, Théâtre de la Vieille 17, Théâtre février 2000 par TA, la diffusion demeurait
du Nouvel-Ontario, Théâtre du Trillium, Théâtre La
Catapulte, Théâtre français de Toronto, Théâtre la une préoccupation majeure pour le
TANGENTE, Centre de théâtre du TNO, La Nouvelle Scène. milieu. Certes, les artistes professionnels

56
bénéficiaient maintenant de deux centres compagnies réunies à La Nouvelle Scène
de théâtre. Cependant, on manifestait de ne pas favoriser, ni de faciliter, la dif-
toujours le besoin de créer et de maintenir fusion de l’ensemble des productions
des liens avec des diffuseurs à extérieur de franco-ontariennes. Leur refus d’accueillir
l’Ontario (Réseau Scènes, ROSEQ, etc.) la production sudburoise, alors que le
afin de mieux diffuser les œuvres créées centre de théâtre du TNO se faisait un
et de faire connaître le théâtre franco- devoir d’accueillir la quasi-totalité des
ontarien ailleurs que dans sa province productions issues des compagnies otta-
d’origine. Le désir de diffuser en province viennes aptes à tourner a été vu d’un très
ne disparaissait pas pour autant : mauvais œil. De ce fait, on a qualifié la
relation Sudbury-Ottawa de corridor à
Il est proposé de continuer à pro-
sens unique. On a précisé également que
mouvoir et à diffuser le théâtre fran-
La Nouvelle Scène avait tendance à privi-
co-ontarien en Ontario […] selon
légier les productions québécoises plutôt
une approche qui est propre au
que des productions franco-ontariennes et
milieu professionnel franco-onta-
que, par conséquent, elle ne s’acquittait
rien. Un groupe de travail élaborera
pas de sa responsabilité communautaire.
des stratégies de communication et
D’un autre côté, les compagnies
de promotion à cet effet. Le milieu
regroupées au sein de La Nouvelle Scène
professionnel souhaite, en outre, se
ont été contrariées par ces jugements :
rapprocher des autres communautés
non seulement on critiquait leurs
de la francophonie ontarienne ainsi
démarches, mais on remettait également
que de la communauté anglophone91.
en question leur intégrité et la valeur
Pour ce faire, il était important pour même de leur collaboration au sein du
TA et pour le milieu professionnel d’avoir mouvement théâtral franco-ontarien. La
recours au système de diffusion développé communication dans le milieu était-elle
au cours des années précédentes : la mise si mauvaise pour que puisse se créer
sur pied d’organismes comme RO et de ainsi une telle division au sein d’une si
centres de théâtre comme celui géré par le petite communauté? Ou cela était-il dû
TNO ainsi que La Nouvelle Scène, outils aux divergences entre les visions artis-
pour les artistes et les producteurs. tiques des différentes compagnies et des
Néanmoins, les politiques de diffusion différents directeurs? Quoi qu’il en soit,
en place ont provoqué un conflit au sein lorsqu’il a été temps de trouver une défini-
de la table de concertation professionnel- tion commune du rôle des centres de
le de TA et ont causé la division du théâtre, il a été difficile pour les com-
conseil d’administration ainsi que celle pagnies de trouver un terrain d’entente.
d’une grande partie des artistes profes- TA a rapidement revêtu son rôle
sionnels. D’un côté, certains étaient d’avis de médiateur a affirmé : « En effet, de
que la communauté théâtrale franco- quel droit TA irait-il dicter une conduite à
ontarienne n’était pas bien servie par les La Nouvelle Scène, une entité légale qui
politiques développées par La Nouvelle a (…) des choix artistiques à faire, une
Scène, politiques qui, selon eux, ne favo- programmation artistique à préparer?93 »
risaient pas la circulation du théâtre fran- Cette réponse de la part de TA a jeté les
co-ontarien entre Toronto, Sudbury et bases d’une définition du rôle des centres
Ottawa. Une lettre d’André Perrier a TA de théâtre. Si, au cours des années
reflète bien cet avis. En voici un extrait: quatre-vingts et quatre-vingt-dix, TA a
« [il] est malheureux de voir que ce beau eu pour but, dans le domaine de la
projet de solidarité que nous nourrissons diffusion, d’assurer la plus grande
depuis des années est sacrifié aux circulation possible des productions
ambitions des directeurs artistiques des franco-ontariennes, il a également aidé
compagnies92 ». Plus concrètement, on a
reproché aux directeurs artistiques des 92
Lettre d’André Perrier adressée à Pier Rodier, Fonds
Théâtre-Action, CRCCF, C64/17/8.
91
Frontières et passages du théâtre franco-ontarien, bilan 93
Réponse de Pier Rodier à André Perrier, Fonds Théâtre-
d’une réflexion, février 2000, p. 11. Action, CRCCF, C64/17/8.
.

57
Page droite – en haut, Gabrielle Lalonde ; au centre, Lindsey Champaigne, Sophie Leblanc ;
en bas, Chantal Frescura et Roxanne Taillefer dans Mille Mots de Manon St-Jules (2004), mise en scène
d’Hélène Gravel, Les Draveurs, École secondaire publique MacDonald-Cartier (Sudbury), photographe inconnu.

les centres, une fois construits, à clarifier tement de cet événement; soit la com-
leurs politiques. Un consensus a été trouvé mande par TA de deux études, outils
à la suite de ce conflit autour du principe essentiels aux compagnies pour préparer
qu’il fallait prendre en considération les leurs demandes de financement dans un
choix artistiques des diverses compagnies, contexte où l’évaluation du rendement
sans pour autant que soit remis en économique était considérée nécessaire:
question l’objectif de garder a priori un L’Étude de marché pour les compagnies
« regard privilégié » pour la production et centres de théâtre réalisé par TA et
franco-ontarienne. Plusieurs autres com- l’Institut franco-ontarien en 2003 et enfin
posantes entraient dorénavant en ligne une étude d’impact socio-économique inti-
de compte, des composantes qui allaient tulée La Force du théâtre en 2002-2003.
bien au-delà du projet de solidarité94. Cet événement a eu aussi pour fina-
Outre la diffusion, Frontières et lité de créer des ponts entre les différents
Passages a permis également un balisage intervenants du milieu théâtral afin qu’ils
concret des autres sphères d’activité du puissent travailler avec un objectif commun.
milieu. On a posé, entre autres questions, C’est dans cet esprit que s’est produit, en
celle de la création du centre de théâtre de 2000, la fusion des tables de concertation
Toronto, précisant que la communauté des compagnies de théâtre et des artistes
professionnelle considérait ce projet pigistes. En accord avec TA, cette nouvelle
comme une priorité afin de compléter le table a décidé, cependant, que « les
réseau de diffusion tel qu’il avait été membres de TA pouvaient consulter les
conceptualisé à l’origine. L’arrivée de compagnies et les artistes pigistes séparé-
Guy Mignault à la direction artistique du ment, en fonction des intérêts plus
TfT a réveillé ce projet, oublié depuis au pointus de chacun96 ». Cette fusion a été
moins cinq ans. TA a commandé à la bénéfique pour TA et le milieu profes-
firme Novita, en 2001, une étude de sionnel dans le sens où la vie artistique
faisabilité pour le centre de théâtre de se nourrissait du choc des idées et de la
Toronto, en réponse à la demande émise solidarité entre ses membres.
par les membres présents à Frontières La première réunion officielle de
et passages. cette nouvelle table s’est tenue à Toronto
La question du financement des le 22 octobre 2000. Si les priorités identi-
centres de théâtre a également été à fiées lors de Frontières et Passages y ont
l’ordre du jour, ainsi que le problème du été abordées, on y a discuté, surtout,
sous-financement des compagnies de d’un sujet qui allait bientôt devenir le
théâtre. Les modalités de financement et cheval de bataille du secteur en cette
le processus d’évaluation des organismes nouvelle décennie : la question cruciale
artistiques par CAO ont fait aussi l’objet du développement du public et de l’édu-
d’un véritable questionnement. Le milieu cation des récepteurs à l’appréciation des
considérait que les critères d’évaluation spectacles. Cette idée visait non seulement
du CAO étaient injustes et reflétaient à gagner les faveurs d’un public stable et
mal les réalités des créateurs franco- fidèle, mais aussi, et surtout, à construire
phones de la province95. Frontières et un public d’abonnés. Les abonnements
Passages a recommandé leur contestation prenaient, en effet, de plus en plus
et a demandé expressément que lui d’importance dans l’attribution de finan-
soient apportées des clarifications quant cement aux centres et aux compagnies
à la vision à long terme de ce bailleur de puisque, selon les critères du CAO de
fonds. Un autre projet qui a émané direc- l’époque, plus les abonnements étaient
nombreux, plus les bailleurs de fonds étaient
94
2e lettre d’André Perrier à Pier Rodier: « Fidèle à lui-même, tenus de subventionner les producteurs.
TA a été vite à prendre le leadership pour tenter d’ouvrir les C’est aussi lors de cette réunion que
voies de la communication au sein de la communauté pro-
fessionnelle dans ce dossier. La réflexion [était] nécessaire le secteur professionnel a mandaté TA
et (…) menée par TA, [elle arrive] à des résultats positifs qui pour poursuivre ses efforts dans le but de
régiront de [sic] l’avenir du théâtre en Ontario français. »,
Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64/17/8. convaincre les instances publiques de
95
Frontières et passages du théâtre franco-ontarien, bilan
d’une réflexion, février 2000, p. 8. 96
Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64/17/1.

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financer les projets initiés et assurés par nouvelle décennie, la notoriété capitali-
les artistes pigistes. Le programme Jeux sée durant les années précédentes.
dans l’espace puisait dans le budget de Après les premières éditions du
fonctionnement de TA depuis quelques Festival, un malaise latent s’est installé
années. Une contribution du CAO a permis entre les participants. Il reposait essentiel-
à TA de doubler le budget du programme. lement sur le fait que certaines troupes ne
Puis, en 2004, le CAO a enfin créé Jets de présentaient pas de spectacles. Pour remé-
théâtre, un programme ouvert aux dier à ce problème, des ateliers de création
artistes pigistes qui désiraient soit déve- ont été organisés durant les festivals.
lopper un projet, soit créer une L’arrivée de Denis Bertrand à la
production de leur cru. direction générale a occasionné de
nombreux remaniements dans le domaine
scolaire, un milieu qu’il affectionnait tout
LE SECTEUR SCOLAIRE particulièrement. Sans hésitation, il s’est
plongé dans le dossier du financement au
Les années quatre-vingt-dix avaient niveau de la province. Dans une lettre
été des années décisives pour le théâtre qu’il a addressée au Chef du Parti libéral
en milieu scolaire. Dans les années deux de l’Ontario, Monsieur Dalton McGuinty,
milles, on observait toujours la même Bertrand a rappelé les préoccupations
vitalité au sein de ce milieu, qui s’expli- soulevées par TA et lui-même lors d’un
quait par le renouvellement permanent Forum sur la culture tenu à Ottawa en
de ses effectifs, mais également par une 2002, comme le problème du piètre état
meilleure formation des pédagogues. du financement des programmes et des
Exposés dès leur jeune âge au milieu activités artistiques en milieu scolaire;
théâtral, les jeunes le percevaient davan- l’absence inconcevable d’un ministère
tage comme partie intégrante de leur spécifique à la culture; et, enfin, le besoin
réalité. Les festivals de théâtre scolaire pressant d’un rapprochement entre la
n’allaient pas perdre, au cours de cette Fondation Trillium et le ministère du

59
Page droite – de gauche à droite : Mélanie Beauchamp, Lina Blais et Stéphanie Broschart dans Portrait chinois
d’une imposteure de Dominick Parenteau-Lebeuf (2004), mise en scène Paule Baillargeron, Théâtre français de Toronto.
Photo © Nir Bareket.

Tourisme, de la Culture et des Loisirs. On Également en 2003, un changement


a retenu surtout ses propos concernant la sérieux s’est opéré dans les modalités
question du financement : d’organisation des festivals scolaires. En
effet, après Ottawa en 2000, Timmins en
Pour une communauté en situation
2001 et Sudbury en 2002, le Festival en
minoritaire comme la nôtre, le
milieu scolaire n’a pas eu lieu en 2003.
théâtre en milieu scolaire permet à
Les efforts déployés par TA pour
ses praticiens et praticiennes de se
convaincre les écoles de participer à
familiariser avec leur culture, contri-
l’organisation de cet événement sont res-
bue à la promotion de la langue fran-
tés lettre morte, ces dernières jugeant les
çaise et permet aux jeunes d’expri-
frais et l’investissement en terme de
mer pacifiquement leurs préoccupa-
temps beaucoup trop élevés. Une solu-
tions sur la place publique. Le
tion de rechange a tout de même être
théâtre est à ce point populaire en
trouvée avec deux happenings théâtraux
Ontario français que trois institutions
axés sur la formation, le premier à
d’enseignement post-secondaire
Sudbury et le second à Ottawa. Bien qu’il
offrent maintenant des programmes
n’y ait eu aucune présentation de spec-
de théâtre en français, soit
tacles durant ces happenings, une pano-
l’Université d’Ottawa, l’Université
plie d’ateliers en interprétation, mise en
Laurentienne de Sudbury et le
scène, régie, écriture scénique, éclairage,
Collège Glendon de l’Université
son, etc., ont été offerts. TA a profité,
York, à Toronto. Malheureusement à
également, de ces occasions pour tenir
cause des coupures budgétaires
des États généraux du théâtre en milieu
imposées au système d’éducation
scolaire afin de faire le point sur cette
depuis plusieurs années, l’apprentis-
crise.
sage du théâtre et la présentation
Des questions importantes y ont été
d’œuvres théâtrales sont passés
soulevées comme celle de savoir, quelle
d’activités reconnues dans le curri-
place il fallait accorder à un festival en
culum au statut d’activités para-
milieu scolaire et surtout la forme que
scolaires. Autrement dit, s’il se fait
l’on souhaitait lui voir prendre. Il en est
toujours du théâtre dans les écoles
découlé des changements radicaux
secondaires franco-ontariennes, c’est
dans l’organisation des festivals connue
souvent grâce au dévouement des
jusqu’alors. Par exemple, on a fixé
enseignants et des élèves qui y parti-
d’avance le nombre de troupes présen-
cipent. […] Nous avons peine à croire
tant des spectacles, les autres devant
que la province la plus riche et la
participer au happening off et on a déter-
plus populeuse du Canada n’ait plus
miné le rôle de chacune d’entre elles.
les moyens d’initier sa jeunesse aux
Depuis cette date, le Festival ne cesse de
arts par l’entremise de ses écoles97.
croître, à tel point qu’il est maintenant
Bertrand, par l’entremise de cette impossible pour une école secondaire de
lettre, se faisait le porte-parole du milieu l’accueillir de façon indépendante. Le
tout entier. Il existait véritablement un Festival a donc lieu, depuis, soit à
décalage entre la popularité suscitée par l’Université d’Ottawa, soit à L’Université
le théâtre scolaire et les subventions qui Laurentienne, afin de bénéficier des
lui étaient allouées par le gouvernement installations présentes dans ces centres
en place. L’élection de McGuinty et celle de formation.
du Parti libéral en 2003 ont cependant L’an 2000 a été entaché par le décès
modifié la donne pour TA. Depuis, l’orga- d’Hélène Gravel. Cette dernière avait à
nisme bénéficie d’un soutien plus direct cœur le théâtre franco-ontarien et
des instances gouvernementales onta- œuvrait, depuis les années soixante-dix,
riennes. dans le milieu scolaire, autant au secon-
daire qu’au post-secondaire. Elle a contri-
bué à la mise sur pied de La Troupe de
97
Denis Bertrand, lettre adressée à Monsieur Dalton McGuinty, l’Université Laurentienne et a également
6 mai 2002, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64/17/3. joué un rôle majeur dans l’implantation

60
61
du programme d’arts d’expression de logistique. La troupe Méli-Mélo de
cette même université. Elle possédait Kapuskasing, la troupe des Jeunes de
également à son actif divers mandats dans cœurs de Sudbury et, finalement, le Club
les comités et les conseils d’administration Jolliet de North Bay y ont participé.
de TA. On lui devait aussi, en grande La même année, TA a collaboré à
partie, la vitalité de la troupe scolaire les l’organisation du 4e Festival de théâtre
Draveurs de l’École secondaire publique communautaire qui se tenait à
MacDonald-Cartier de Sudbury. C’est, en Hawkesbury et qui était accueilli par la
effet, avec cette troupe qu’Hélène Gravel troupe du Cercle Gascon II. Huit troupes
s’est impliquée le plus au cours de sa car- ont participé à l’événement. Ce festival
rière. En 2000, quelques mois avant sa allait devenir un événement important
mort, Les Draveurs ont remporté un des pour le théâtre communautaire. En effet,
Prix TA. Après sa mort, ce prix a pris son à l’image des deux autres tables qui s’or-
nom : « Le Prix Hélène-Gravel sera un rap- ganisaient de mieux en mieux, la troupe
pel constant de l’impact de son engage- hôtesse du Festival, le Cercle Gascon II, a
ment sur le théâtre franco-ontarien. Si le suggéré la création de liens directs entre
théâtre étudiant occupe aujourd’hui une les troupes organisatrices des différentes
si grande place dans nos écoles […], on éditions. On a alors demandé à TA de
le doit beaucoup au travail d’Hélène98 ». bien vouloir superviser ce réseautage.
Il est impossible de traiter de la
question du théâtre communautaire sans
LE SECTEUR COMMUNAUTAIRE tenir compte de l’investissement énorme
qu’il représentait pour les artistes ama-
Si l’effervescence du théâtre profes- teurs qui voulaient garder vivante la pra-
sionnel et du théâtre scolaire après l’an tique du théâtre. Dans le but de souligner
2000 a été remarquable, il n’en a pas été l’Année internationale du bénévolat de
de même pour le théâtre en milieu com- 2001 et pour collaborer à la création de
munautaire qui, pourtant, s’était illustré liens plus solides entre les diverses
à divers moments comme locomotive de troupes communautaires de la province,
la communauté franco-ontarienne. le ministère des Affaires civiques de
Cependant, un examen plus poussé de la l’Ontario a remis à TA une subvention
situation montre tout de même qu’il res- d’un montant de 412 000 $ qui devait ser-
tait bien vivant et qu’il demeurait un outil vir à la réalisation du projet@ction.béné-
d’expression privilégié pour les commu- vole. Ce projet consistait à créer un nou-
nautés francophones. Conscient de son veau site Internet exhaustif établissant
importance, TA a déposé, une demande de une fenêtre virtuelle sur le théâtre franco-
financement auprès de la Fondation ontarien et, plus particulièrement, sur les
Trillium afin d’appuyer les troupes de théâtres communautaires et scolaires. Ce
l’Ontario. Il a reçu donc cette aide finan- projet a permis à TA, ainsi qu’à la com-
cière de 2000 à 2004. munauté théâtrale, de mieux communi-
TA a ainsi offert aux troupes commu- quer, de mieux gérer ses productions, et
nautaires les outils de formation qu’elles de les promouvoir avec plus d’efficacité.
désiraient ardemment, et qui consti- Ce projet était de taille. Il a néces-
tuaient pour elles, un moyen concret de sité la collaboration des écoles secon-
rattraper leur retard vis-à-vis des autres daires francophones de toute la province,
tables, d’approfondir leurs connais- de la Cité Collégiale (et plus particulière-
sances, et, surtout, de découvrir les pra- ment de ses programmes en communica-
tiques théâtrales contemporaines. En tion et en design) ainsi que celle de RO :
2002, TA a répondu favorablement à cette
Les troupes communautaires et sco-
demande particulière en offrant à la table
laires se retrouvent souvent isolées,
communautaire, un atelier de mise en
loin des ressources en français. Le
scène à North Bay, ville choisie pour son
projet (@ction.bénévole) vise donc à
positionnement stratégique en termes de
mettre à la disposition de la commu-
98
Michel Ouellette, Fonds Théâtre-Action, CRCCF, C64/17/4.
nauté théâtrale une foule de rensei-

62
gnements, en français, sur le théâtre :
banque de textes, renseignements
sur les activités tels les festivals, les
ateliers de formation, etc.

Aujourd’hui, le projet @ction.bénévole


n’existe plus. Par contre, le site Internet de
TA fournit encore quelques-uns des
aspects propres au projet initial : banque
de textes, formations disponibles, etc. Le
répertoire de troupes communautaires et
scolaires n’est, par contre, plus accessible
par Internet.
Les troupes sont demeurées néan-
moins toutes aussi actives qu’auparavant,
si bien que le guide Qui? Comment?
Pourquoi? publié au cours des années
quatre-vingt-dix, a dû faire l’objet d’une
réédition en 2003. La visée en demeure la
même, soit celle d’offrir les connais-
sances de base pour ceux et celles qui
souhaitraient mettre à jour leurs connais-
sances théâtrales et augmenter leur effi-
cacité en tant que leader d’une troupe
communautaire. De plus, le format du
festival ne répondant plus aux besoins
des troupes, TA a décidé d’organiser des
happenings, des lieux de création sponta-
nés modelés sur le premier happening en
milieu scolaire. Le premier a eu lieu en
octobre 2006 au Département de théâtre
de l’Université d’Ottawa et a connu un
succès puisqu’il a attiré 70 participants.

63
Et il reste
tant à faire!

U
n regard, même superficiel posé Landry (2004-2006), et, tout récemment,
sur les programmations de TA celui du comédien et dramaturge Richard
depuis l’an 2000, tout comme sur J. Léger (2006 à présent), tous des artistes
celles des saisons 2005-2006 et 2006-2007 pigistes, confirment bien le rôle de
indique que TA demeure à ce jour le leadership assuré par ce secteur. Ils parti-
cœur névralgique de l’activité théâtrale cipent tous du travail de lutte contre
franco-ontarienne et continue à s’investir l’exode ininterrompu des artistes vers
dans des projets qui permettent au milieu Montréal. Par ailleurs, l’alliance qui
de combler les lacunes attribuables en semble unir les artistes pigistes et les sec-
partie à l’exiguïté de ce dernier. À l’au- teurs scolaire et amateur est très utile: les
tomne 2006, tel que précisé antérieure- artistes pigistes sont devenus de véri-
ment, le secteur communautaire a tenu tables « personnes ressources » pour les
un happening à l’Université d’Ottawa. Le animateurs des troupes ou encore les fes-
Festival en milieu scolaire a célébré sa tivals et les happenings considérés
dixième édition au printemps 2007 à comme des lieux de ralliement incontes-
Sudbury. TA continue à publier la revue tables pour la production franco-onta-
Entr’acte quatre numéros sont parus à ce rienne.
jour, qui contient des articles de réflexion Les défis à venir sont nombreux :
autour des pratiques actuelles en Ontario l’essoufflement guette toujours le secteur
français, peu importe le secteur. communautaire. Le secteur scolaire doit
Les compagnies professionnelles se confronter à un manque d’appui au sein
semblent, à l’heure actuelle, se rallier des écoles. L’absence d’un programme de
davantage à l’ATFC en tant que le porte- formation professionnel est devenue un
parole de leurs intérêts et gestionnaire de véritable handicap pour l’ensemble du
leurs projets, sans pour autant se retirer milieu professionnel qui, pour cette rai-
de TA : l’arrivée de Paulette Gagnon à son, n’est pas encore en mesure de fran-
la direction générale de cet organisme chir la dernière étape nécessaire à son
regroupant en son sein uniquement les processus de professionnalisation. La dif-
compagnies professionnelles établies à fusion continue de préoccuper l’en-
l’extérieur du Québec peut partiellement semble du milieu, que ce soit la diffusion
expliquer ce glissement. Néanmoins, le des spectacles dans les écoles ou les
secteur professionnel demeure actif au matinées scolaires dans les quelques
sein de TA puisque les compagnies ont salles construites. Une concertation
quelque peu cédé leur place aux artistes continue avec RO et ses membres demeu-
pigistes. Ce n’est pas un effet du hasard rent la piste d’action privilégiée pour
si toutes les présidences de l’organisme l’instant, même si les compagnies consi-
après 2000 ont été assurées par des dèrent que la circulation en sol ontarien
artistes pigistes, le dernier directeur artis- de leurs créations pour un public adulte
tique à assumer la présidence de TA reste toujours insuffisante. Autrement dit,
étant Pier Rodier. les résultats atteints à ce jour sont nette-
Les deux mandats du dramaturge ment plus visibles dans les domaines de
Michel Ouellette à la présidence (1991- la musique et de la distribution du
1995 et 2000-2002), tout comme ceux de théâtre visant les enfants et les adoles-
la metteure en scène Geneviève Pineault cents. Qui plus est, peu importe le sec-
(2002-2004), du scénographe Glen Charles teur, le financement de base pour les

64
Ci-dessus – de gauche à droite : l’Équipe actuelle de Théâtre Action (2007). Mériem Bougrassa (coordonnatrice des événements
spéciaux), Robert Corbeil (directeur général), Yves Turbide (chef de projets), Ève Cardinal (responsable des communications) et
Marie Ève Chassé (adjointe à la direction générale). Photo © Pedram Pirnia.

organismes demeure précaire, et TA


semble condamné à poursuivre son tra-
vail de lobbying amorcé au début des
années quatre-vingt-dix à la suite des pre-
miers États généraux du théâtre franco-
ontarien.
Il est à espérer que les États géné-
raux de 2007, tout comme ceux de 1991,
permettront à l’ensemble du milieu de
bien choisir les dossiers prioritaires.
Cependant, l’histoire et ce document sont
les preuves que TA peut traverser les
périodes difficiles, sans pour autant
perdre sa raison d’être aux yeux de ses
membres.

65
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coïncidence », Liaison, 51, mars-avril 1989, p. 38-39.
––– ,« Éditorial – Rêver en couleur », Liaison, 12, octobre
––– ,« Le Charisme du Théâtre du Nouvel-Ontario! La 1980, p. 4-5.
Griffe de Sudbury », Liaison, 69, novembre, 1992, p. 23-25.
––– ,« Paulette Gagnon : à froid… », Liaison, 65, janvier Van Burek, John, Entrevue privée, 9 mai 2000..
1992, p. 10.
Roy, Lise L, Entrevue privée, 11 août 2000.

69
LISTE DES MEMBRES DES CONSEILS D’ADMINISTRATION

1972-1973 1978-1979
Roch Castonguay – Représentant de l’Est
1973-1974 Jean Marc Dalpé – Animateur régional (Est)
Pierre Beaulne – Coordonnateur général et secrétaire Nicole Doucet – Coordonnatrice générale
Gilles Camiré – Représentant du Grand Nord Eugène Gallant – Représentant du Sud
Lucien Crustin – Président et représentant de l’Est Richard Lachapelle – Représentant élu au suffrage universel
Jacques Desnoyers – Coordonnateur général et animateur provincial André Legault – Animateur régional (Sud)
Daniel Jacques – Représentant du Moyen Nord Paulette Légère – Représentante du Centre
Jeanne Sabourin – Représentante élue au suffrage universel Louis Simon Lussier – Représentant du Nord
John Van Burek – Représentant du Sud Yves Mallette – Animateur régional (Grand Nord)
Alain Poirier – Président
1974-1975 Georges André Prud’homme – Représentant élu au suffrage universel
Pierre Beaulne – Coordonnateur général André Thériault – Animateur régional (Centre)
Lise Bécotte – Secrétaire Luc Thériault – Représentant élu au suffrage universel
Carmelle Brodeur – Représentante du Sud
Marc Castonguay – Représentant élu au suffrage universel 1979-1980
Paul Clément – Représentant élu au suffrage universel Michelle Deshaies – Secrétaire-trésorière
Pierre Collin – Représentant de l’Est Nicole Doucet – Représentante élue au suffrage universel
Louison Danis – Représentante élue au suffrage universel Odette Gagnon – Animatrice provinciale
Jacques Desnoyers – Coordonnateur général et animateur provincial Eugène Gallant – Vice-président
Paulette Gagnon – Représentante du Nord Marc Haentjens – Coordonnateur général
André Legault – Représentant de l’Est Jean Marc Larivière – Représentant du Sud
Jeanne Mongenais – Représentante élue au suffrage universel Paulette Légère – Représentante du Centre
Yvan Rancourt – Représentant du Nord Yves Mallette – Représentant élu au suffrage universel
Jeanne Sabourin – Présidente Alain Poirier – Président
Louis Tanguay – Représentante du Nord Lise L. Roy – Représentante élue au suffrage universel
John Van Burek – Représentant du Sud Guy Thibodeau – Représentant élu au suffrage universel
Sylvie Trudel – Représentante du Nord
1975-1976
Carmelle Brodeur – Représentante du Sud 1980-1981
Marc Castonguay – Représentant élu au suffrage universel Robert Bellefeuille – Vice-président et représentant de l’Est
Claude Charbonneau – Représentant élu au suffrage universel Isabelle Cauchy – Animatrice provinciale du milieu communautaire
Pierre Collin – Représentant de l’Est Kim Cholette – Représentante du Centre
Jacques Desnoyers – Animateur provincial Jean Marc Dalpé – Animateur provincial et représentant
Nicole Doucet – Coordonnatrice générale du milieu professionnel
Paulette Gagnon – Représentante du Nord Anne-Marie de Varennes-Sparks – Secrétaire trésorière
André Legault – Animateur provincial et représentante du Sud
Yvan Rancourt – Représentant du Nord Brigitte Haentjens – Animatrice provinciale du milieu scolaire
Jeanne Sabourin – Présidente Jacques Jolicoeur – Représentant du milieu professionnel
Gaston Tremblay – Représentant du Nord Robert Marinier – Représentant du milieu des artistes pigistes
John Van Burek – Représentant du Sud et des dramaturges
Marie-Thé Morin – Représentante du milieu scolaire
1976-1977 Céline Perron – Représentante du milieu communautaire
Carole Auger – Représentante élue au suffrage universel Joëlle Roy – Représentante du Nord
Claude Charbonneau – Représentant élu au suffrage universel Guy Thibodeau – Président
Pierre Collin – Représentant de l’Est
Bryan David – Représentant du Nord 1981-1982
Nicole Doucet – Coordonnatrice générale Robert Bellefeuille – Représentant de l’Est
Diane Goulet – Représentante élue au suffrage universel Marc Carbonneau – Représentant du milieu scolaire
André Legault – Animateur provincial Philippe Cauchy – Représentant élu au suffrage universel
Justin Martin – Vice-président Kim Cholette – Représentante du Centre
Claire Pageau – Présidente Monique Dewson – Représentante élue au suffrage universel
Jeanne Sabourin – Représentante de l’Est Paulette Gagnon – Représentante du Nord
Mariette Théberge – Secrétaire trésorière Jacques Jolicoeur – Représentant du milieu professionnel
John Van Burek – Représentant du Sud Marie-Thé Morin – Représentante du milieu scolaire
Céline Perron – Représentante du milieu communautaire
1977-1978 Jean-Guy Roy – Représentant du Sud
Carole Auger – Représentante de l’Est Mariette Théberge – Représentante du milieu des artistes pigistes
Roger Besner – Vice-président et représentant du Sud et des dramaturges
Bryan David – Représentant du Nord Marc Trudel – Représentant élu au suffrage universel
Fernand Dorais – Représentant du Nord
Paulette Gagnon – Représentante du Nord
1982-1983
Hélène Bernier – Représentante du Centre
René Pierre Goupil – Président
Mathieu Brennan – Coordonnateur général
Hélène Gravel– Représentante du Centre
Roch Castonguay – Représentant du milieu professionnel
Réjeanne Guay – Représentante du Sud
Hélène Dallaire – Représentante du milieu scolaire
Richard Lachapelle – Secrétaire trésorier
Paulette Gagnon – Représentante du milieu communautaire
André Legault – Animateur provincial
Alain Harvey – Représentant du milieu scolaire
Justin Martin – Président et représentant de l’Est
Claude Lapointe – Représentante du milieu des artistes pigistes
Alain Poirier – Représentant élu au suffrage universel et des dramaturges
Mariette Théberge – Représentante élue au suffrage universel Robert Marinier – Représentant de l’Est
Jean-Louis Riopel – Représentant du Nord
Jean Guy Roy – Représentant du Sud
Mariette Théberge – Animatrice provinciale
Michèle Welyki – Représentante du Nord-Ouest

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1983-1984 1989-1990
Mathieu Brennan – Coordonnateur général Carole Aveline – Secrétaire-trésorière et représentante
Roch Castonguay – Représentant du milieu professionnel du secteur des artistes pigistes et des dramaturges
Denis Couture – Animateur provincial du milieu professionnel Sylvie Dufour – Représentante du secteur professionnel
représentant élu au suffrage universel Paulette Gagnon – Présidente et représentante du Centre
Hélène Dallaire – Représentante du milieu scolaire Jean Marc Guérin – Représentant du Sud
Paulette Gagnon – Représentante du milieu communautaire Hedwidge Herbiet – Représentante du secteur scolaire
Alain Harvey – Représentant du milieu scolaire Marie-Mireille Mathieu – Représentante du secteur scolaire
Marc Lagrande – Animateur provincial du milieu communautaire Rolande Provost – Représentante du Nord
Diane Larabie – Animatrice provinciale du milieu scolaire Louis Robillard – Président et représentant de l’Est
Yvonne Maltais – Représentante du Sud Denis Rochon – Secrétaire-trésorier
Robert Marinier – Représentant de l’Est André Sauvé – Vice-président et représentant du secteur communautaire
Jean-Louis Riopel – Représentant du Nord
Michèle Welyki – Représentante du Nord-Ouest 1990-1991
Carole Aveline – Représentante du secteur des artistes pigistes
1984-1985 et des dramaturges
Carole Aveline – Représentant du milieu des artistes pigistes Sylvie Dufour– Représentante du secteur professionnel
et des dramaturges Paulette Gagnon – Présidente et représentante du Centre
Michel Marc Bouchard – Président et représentant Christine Houle – Représentante du secteur scolaire
du milieu professionnel Marcel Lepage – Représentant du Sud
Mathieu Brennan – Coordonnateur général Patrick Leroux – Représentant du secteur scolaire
Denis Couture – Représentant du milieu des artistes pigistes Michel Ouellette – Secrétaire-trésorier et représentant des artistes
et des dramaturges pigistes et des dramaturges
Hélène Dallaire – Représentante du Nord André Perrier – Représentant de l’Est
Patricia Dumas – Représentante du Sud Rolande Provost – Représentante du Nord
Paul Gélineau – Représentant du milieu scolaire Denis Rochon– Secrétaire-trésorier et représentant élu
Diane Larabie – Représentante du milieu scolaire au suffrage universel
Yvonne Maltais – Représentante du Sud André Sauvé – Vice-président et représentant du secteur communautaire
Lise Paiement – Présidente et représentante du milieu scolaire
Françoise Queneville – Représentante du milieu communautaire 1991-1992
Pier Rodier – Représentant de l’Est Marc Bissonnette – Représentant du secteur communautaire
Lyne-Marie Tremblay – Représentante du Centre Mariette Deschênes – Représentante du secteur scolaire
Robert Guy Despatie – Représentant du Sud
1985-1986 Sylvie Dufour – Vice-présidente et représentante du secteur professionnel
Carole Aveline – Représentante du milieu des artistes pigistes Alain Harvey – Représentant du Centre
et des dramaturges Michel Ouellette – Président et représentant du secteur des artistes
Denis Bertrand – Secrétaire trésorier et représentant pigistes et des dramaturges
du milieu communautaire Rolande Provost – Représentante du Nord
Michel Marc Bouchard – Représentant du milieu professionnel Pier Rodier – Représentant de l’Est
Mathieu Brennan – Coordonnateur général Grazynka Shaarani – Représentante élue au suffrage universel
Paul Gélineau – Représentant du milieu scolaire Audrey Vigouroux – Représentante du secteur scolaire
Carole Hogan – Représentante du Sud
Claude Hogan – Représentant du Sud 1992-1993
Lise Paiement – Présidente Bernard Arène – Représentant du secteur des artistes pigistes
Pier Rodier – Vice-président et représentant de l’Est et des dramaturges
Danielle St-Aubin – Représentante du Nord Joël Beddows – Représentant du secteur scolaire
Lyne-Marie Tremblay – Représentante du Centre Carole Bélanger – Représentante du secteur des artistes pigistes
et des dramaturges
1986-1987 Mariette Deschênes – Représentante du secteur scolaire
Denis Bertrand – Président et représentant du milieu communautaire Robert-Guy Despatie – Représentant du secteur communautaire
Marc Bertrand – Secrétaire-trésorier et représentant du milieu des Sylvie Dufour– Représentante du secteur professionnel
artistes pigistes et des dramaturges Julien Larocque – Représentant du secteur communautaire
Hélène Dallaire – Représentante du Centre Michel Ouellette – Président
Francine Garon – Représentante du Nord Pier Rodier – Représentant du secteur professionnel
Yolande Goulet – Représentante du milieu scolaire Grazynka Shaarani – Vice-présidente et représentante
Claude Hogan – Représentant du Sud du secteur communautaire
Pier Rodier – Représentant du milieu professionnel
Lyne-Marie Tremblay – Vice-présidente et représentante de l’Est 1993-1994
Paul Ward – Représentant du milieu scolaire Robert-Guy Despatie – Représentant du secteur communautaire
Mireille Francoeur – Représentante du secteur professionnel
1987-1988 Robert Gagné – Représentant du secteur professionnel
Denis Bertrand – Président et représentant du Sud André Groleau – Représentant du secteur scolaire
Marc Bertrand – Représentant du milieu des artistes pigistes Patrick Leroux – Représentante du secteur professionnel
et des dramaturges Louise Nolan – Représentante du secteur des artistes pigistes
Hélène Dallaire – Représentante du Centre et des dramaturges
Vincent Doyle – Représentant du milieu scolaire Michel Ouellette – Président et représentant des artistes pigistes
Mireille Francoeur – Représentante du milieu professionnel et des dramaturges
Francine Garon – Représentante du Nord Sophie Tremblay – Représentante du secteur scolaire
Yolande Goulet – Représentante du milieu scolaire
André Sauvé – Représentant du milieu communautaire 1994-1995
Luc Thériault – Secrétaire-trésorier et représentant élu Greg Brown – Représentante du secteur professionnel
au suffrage universel Robert Guy Despatie – Représentant du secteur communautaire
Robert Gagné – Représentante du secteur professionnel
1988-1989 Lyette Goyette – Représentante du secteur des artistes pigistes
Marc Bertrand – Représentant du secteur des artistes pigistes et des dramaturges
et des dramaturges André Groleau – Représentant du secteur scolaire
Vincent Doyle – Représentant du secteur scolaire Bernard Leman – Représentant du secteur des artistes pigistes
Mireille Francoeur – Secrétaire-trésorière et représentante et des dramaturges
du secteur professionnel Patrick Leroux – Représentant du secteur professionnel
Paulette Gagnon – Vice-président et représentant du Centre Michel Ouellette – Président et représentant des artistes pigistes
Francine Garon – Représentante du Nord et des dramaturges
Yolande Goulet – Représentante du secteur scolaire Sophie Tremblay – Représentante du secteur scolaire
Robert Légaré – Représentant élu au suffrage universel
Louis Robillard – Président et représentant de l’Est
André Sauvé – Représentant du secteur communautaire

71
1995-1996 2001-2002
Greg Brown – Représentant du secteur professionnel Robert Bellefeuille – Représentant des compagnies et des centres
Marc Carbonneau – Représentant du secteur communautaire de théâtre
Micheline Chevrier – Représentante du secteur communautaire Ghislain Caron – Représentant des compagnies et des centres de
Hélène Dallaire – Représentante du secteur scolaire théâtre
Robert-Guy Despatie – Représentant du secteur communautaire Éric Charbonneau – Représentant du secteur communautaire
Lyette Goyette – Représentante du secteur des artistes pigistes Hélène Dallaire – Vice-présidente et représentante du secteur amateur
et des dramaturges Joël Ducharme – Représentant du secteur scolaire
Pier Rodier – Président Geneviève Myner – Représentant du secteur scolaire
Anne Marie White – Représentante du secteur professionnel Louise Nolan – Représentante du secteur des artistes pigistes
et des dramaturges
Michel Ouellette – Président
1996-1997 Geneviève Pineault – Vice-présidente et représentante
Greg Brown – Représentant du secteur professionnel du secteur professionnel
Marc Carbonneau – Représentant du secteur communautaire
Micheline Chevrier – Représentante du secteur communautaire 2002-2003
Hélène Dallaire – Représentante du secteur scolaire Ghislain Caron – Vice-président et représentant du secteur professionnel
Lyette Goyette – Représentante du secteur des artistes pigistes Lucien Crustin – Représentant du secteur communautaire
et des dramaturges
Joël Ducharme – Représentant du secteur scolaire
Bernard Leman – Représentant du secteur des artistes pigistes
et des dramaturges Jean Marc Guérin – Vice-président et représentant du secteur amateur
Pier Rodier – Président Glen Charles Landry – Représentant du secteur des artistes pigistes
et des dramaturges
Anne-Marie White – Représentante du secteur des artistes pigistes
et des dramaturges Geneviève Pineault – Présidente
Louisette Villeneuve – Représentante des compagnies et des centres
de théâtre
1997-1998
Greg Brown – Représentant du secteur professionnel 2003-2004
Marc Carbonneau – Représentant du secteur communautaire Joël Beddows – Représentant des compagnies et des centres de
Micheline Chevrier – Représentante du secteur communautaire théâtre
Hélène Dallaire – Représentante du secteur scolaire Ghislain Caron – Coprésident et représentant du secteur professionnel
Lyette Goyette – Représentante du secteur des artistes pigistes Lucien Crustin – Représentant du secteur communautaire
et des dramaturges Joël Ducharme – Représentant du secteur scolaire
Bernard Leman – Représentant du secteur des artistes pigistes Jean Marc Guérin – Coprésident et représentant du secteur amateur
et des dramaturges Glen Charles Landry – Représentant du secteur des artistes pigistes
Pier Rodier – Président et des dramaturges
Anne-Marie White – Représentante du secteur des artistes pigistes Geneviève Pineault – Présidente (démissionne au printemps 2004)
et des dramaturges
2004-2005
1998-1999 Joël Beddows – Représentant des compagnies et des centres de
Greg Brown – Représentant des compagnies et des centres de théâtre théâtre
Marc Charbonneau – Représentant du secteur communautaire Ghislain Caron – Vice-président et représentant du secteur professionnel
Micheline Chevrier – Représentante du secteur communautaire Joël Ducharme – Représentant du secteur scolaire
Hélène Dallaire – Représentante du secteur scolaire Monique Ducharme – Représentante du secteur communautaire
Bernard Leman – Représentant du secteur des artistes pigistes Jean Marc Guérin – Vice-président et représentant du secteur amateur
et des dramaturges Glen Charles Landry – Président
Jean-Claude Larocque – Représentant du secteur communautaire Marc LeMyre – Représentant du secteur des artistes pigistes
André Perrier – Représentant des compagnies et des centres de et des dramaturges
théâtre
Pier Rodier – Président 2005-2006
Anne-Marie White – Représentante du secteur des artistes pigistes Élise Berthiaume – Représentante du secteur communautaire
et des dramaturges Marc-André Boyes-Manseau – Représentant des compagnies
et des centres de théâtre
1999-2000 Ghislain Caron – Vice-président et représentant du secteur professionnel
Marcus Carbonneau – Représentant du secteur communautaire Hélène Dallaire – Vice-présidente et représentante du secteur amateur
Hélène Dallaire – Représentante du secteur scolaire Glen Charles Landry – Président
Colombe Demers – Représentante du secteur des artistes pigistes Marc LeMyre – Représentant du secteur des artistes pigistes
et des dramaturges et des dramaturges
Joël Ducharme – Représentant du secteur scolaire Valérie Marcil Galipeau – Conseillère financière, Marcil Lavallée
Joanne Gagnon – Représentante du secteur scolaire et Associés (sans droit de vote)
Jean-Claude Larocque – Représentant du secteur communautaire Carole Myre – Représentante du secteur scolaire
Louise Naubert – Représentante des compagnies et des centres de
théâtre 2006-2007
Michel Ouellette – Représentant du secteur des artistes pigistes Élise Berthiaume – Représentante du secteur communautaire
et des dramaturges Marc-André Boyes-Manseau– Vice-président et représentant
Pier Rodier – Président du secteur professionnel
Hélène Dallaire – Vice-présidente et représentante du secteur amateur
2000-2001 Richard J. Léger – Président
Hélène Dallaire – Représentante du secteur communautaire Marc LeMyre – Représentant du secteur des artistes pigistes
Joël Ducharme – Représentant du secteur scolaire et des dramaturges
Joanne Gagnon – Représentante du secteur scolaire Valérie Marcil Galipeau – Conseillère financière, Marcil Lavallée
et Associés (sans droit de vote)
Annick Huard – Représentante des compagnies et des centres de
théâtre Carole Myre – Représentante du secteur scolaire
Jean-Claude Larocque – Représentant du secteur communautaire Geneviève Pineault – Représentant des compagnies et des centres de
théâtre
Guy Mignault – Représentant des compagnies et des centres de
théâtre
Royal Myre – Représentant du secteur communautaire
Louise Nolan – Représentante du secteur des artistes pigistes
et des dramaturges
Michel Ouellette – Président
Geneviève Pineault – Représentante du secteur des artistes pigistes
et des dramaturges

72
DIRECTIONS DE THÉÂTRE ACTION

COORDINATIONS GÉNÉRALES
1973-1975 Pierre Beaulne et Jacques Desnoyers (coodonnateurs généraux)
1975-1979 Nicole Doucet (coordonnatrice générale)
1979-1983 Marc Haentjens (coordonnateur général)
1983-1986 Matthieu Brennan (coordonnateur général)
1986 Christiane Larouche (coordonnatrice générale)

DIRECTIONS GÉNÉRALES
1986-1987 Renée Bellehumeur (directrice générale)
1988-2000 Michel Louis Beauchamp (directeur général)
2000-2004 Denis Bertrand (directeur général)
2004-PRÉSENT Robert Corbeil (directeur général)

LES AUTEURS

Originaire de Sturgeon Falls, Joël Beddows (BA, DEA, Ph.D.) est aujourd’hui professeur au
Département de théâtre de l’Université d’Ottawa et titulaire d’une Chaire de recherche sur la
francophonie canadienne (pratiques culturelles). Il est également metteur en scène et directeur
artistique du Théâtre la Catapulte, compagnie de recherche vouée également à la relève artis-
tique franco-ontarienne, où il a mis en scène plusieurs productions d’auteurs tels que Normand
Chaurette, Stephan Coutier, Claude Gauvreau, Richard J. Léger, Joan MacLeod, Luc Moquin et
Michel Ouellette. Ses recherches actuelles portent sur les rapports entre la mise en scène et les
autres formes artistiques

Amelie Mercier (BA, B.Éd.) est originaire de Moonbeam dans le Nord de l’Ontario. Partie vivre
dans la capitale nationale afin de poursuivre ses études post secondaires, Amelie complète, en
2006, un baccalauréat à double concentration (en lettres françaises et en théatre) à l’Université
d’Ottawa. Pendant cette période, elle participe à maintes reprises aux productions du
Département de théâtre en tant que directrice de production, costumière et comédienne. C’est
sa passion pour la langue et la culture francophone ainsi que son engouement pour l’expé-
rience scénique sous toutes ses formes qui ont amené Amelie au théâtre : ces passions, elle les
partage aujourd’hui avec ses élèves, de jeunes adolescents.
255, chemin Montréal, bureau 203 Ottawa ON K1L 6C4
Tél. : (613) 745-2322 Téléc. : (613) 745-1733
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