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LES ETHNIES DE LA COTE D'IVOIRE ET D'AFRIQUE

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Voici l’histoire de Biaka Boda, telle que racontée par Devalois Biaka.
C'est en 1913 dans le village de Dahiépa que voit le jour l'une des plus belles étoiles
que la Cote d'ivoire ait connue.
L'histoire de notre étoile débute donc dans ce village de Dahiépa dans la région de
Gagnoa en Côte d'ivoire. Très tôt orphelin de père et de mère, l'enfant de Dahiépa
est recueilli et élevé dans la pure tradition bété par ses parents maternels dans le
village de Biakou.
En 1920 le jeune fils de Dahiépa se sépare de ses parents et prend la direction de
Gagnoa pour commencer son parcours scolaire. À l'école supérieure de Bingerville, il
obtient son brevet d'étude primaire supérieur en 1930. Il sortira de à l'école de
médecine de Dakar avec le titre de médecin africain en 1937. Durant toute la durée
de ses études, Biaka fait preuve d'une vive intelligence et se fait remarquer par son
caractère frondeur et rebelle.
A cette même époque les peuples de Côte d'ivoire sont soumis au diktat du
colonisateur…
A sa sortie de l'école de médecine, notre nouveau médecin est affecté en Guinée.
C'est au cours de son séjour en Guinée qu'il fait la rencontre du leader africain
Ahmed Sékou Touré, alors président de la section du RDA en Guinée.
Le RDA est à cette époque le plus grand mouvement panafricain d'Afrique de l'ouest
qui lutte pour l'émancipation de l’Afrique.
Cette rencontre sera l'occasion pour le médecin d’adhérer au RDA. Epris de liberté et
farouchement opposé aux injustices subies par le peuple de Côte d’Ivoire, son
engagement au sein du RDA n'est pas une surprise. Cet ainsi qu'il est admis au
comité directeur du RDA en Guinée où il ne cesse de fustiger le colonialisme.
L'administration coloniale va commencer à surveiller ce « révolutionnaire » qui, grâce
à sa fougue oratoire, sème le trouble dans la colonie guinéenne.
Mais c'est en Côte d'ivoire que le combat du jeune médecin va prendre une autre
dimension. En 1947 il quitte définitivement la Guinée pour la terre de ses ancêtres.
Quand il retourne dans la colonie de Côte d'ivoire il rejoint dans l'arène du combat
contre l'exploitation coloniale Jean-Baptiste Mockey, Ouezzin Coulibaly, Jacob
William, Mathieu Ekra, Dignan Bailly, Anne-marie Raggie ou encore Sery-koré.
A cette même époque le travail forcé, prolongation de l'esclavage, est pratiqué sur la
terre d'Eburnie…
Élu en 1948 sénateur dans le cadre de l'union française notre médecin s'envole pour
la métropole française où il compte porter fièrement la cause des siens. Son passage
au sénat français est salué par ses condisciples qui ne cessent de vanter ses talents
d'orateur. Le fils de Dahiépa gagne le respect des sénateurs de par sa droiture et
son intégrité.
Mais dans la colonie ivoirienne les années 49 et 50 sont des années difficiles pour
les militants du RDA. En effet l'administration coloniale a décidé de mener une lutte
sans merci aux leaders du RDA qui étaient encore à cette époque un parti
anticolonialiste. Tous les leaders de ce parti son arrêtés, brimés, emprisonnés et
intimidés. Les populations acquises à la cause du RDA sont tuées ; souvenons-nous
de la répression de Bouaflé. C'est dans cette période trouble que notre sénateur
revient sur sa terre pour continuer le combat sur le terrain. A son retour il est l'un des
rares leaders du RDA en liberté assumant son statut de leader. Il continue la lutte en
fustigeant les dérives du colon et en sillonnant de nombreuses villes de la colonie
ivoirienne pour prôner l’insurrection.
A cette époque les femmes marchent sur la prison de Grand-Bassam pour libérer
leurs maris enfermés par l'administration coloniale…
Le 18 novembre 1949 dans la ville de Daloa il prononce un discours dont la virulence
n'a d'égal que sa détermination à libérer la Côte d'ivoire du joug colonial. Ce discours
est la goutte d'eau qui fait déborder le vase…
Le 27 janvier 1950, notre sénateur prend la route de Gagnoa. Après une panne de
son véhicule à quelques kilomètres de la ville de Bouaflé, il décide de s'y rendre à
pieds afin d'y passer la nuit. En arrivant il se fait héberger par l'Almamy Ali Diaby. Le
sénateur ne se doute de rien mais un complot se prépare contre lui. En effet dans la
nuit, il a été enlevé et tué dans un bosquet à proximité de Bouaflé.
Ainsi se termine le combat de l'honorable fils de Dahiépa, Victor Biaka BODA.
Durant plusieurs années l’administration coloniale a refusé de communiquer sur la
disparition du sénateur, refusant même de remettre sa dépouille mortelle à sa
famille. Malgré l'octroi de l'indépendance, le premier dirigeant de la colonie
indépendante n’a pas honoré la mémoire de Victor Biaka Boda. Aucune sépulture
digne de son rang ne lui sera offerte et aucun hommage national ne lui sera rendu.
Victor Biaka Boda est un oublié de l'histoire de la Côte d’Ivoire, très peu d'ivoiriens se
souviennent ou même connaissent ce nom. Il fut un grand militant et une figure de
proue de la résistance à l'oppression coloniale. Mort pour la lutte et pour son peuple,
souvenons-nous du sénateur Victor Biaka Boda et de son combat.
Joël-Armel Nandjui

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