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Le choc culturel

Du choc culturel à l'intégration


Entreprendre des études universitaires, changer de ville, quitter les regions
pour venir s'installer à la grande ville, commencer un nouvel emploi sont autant
d'expériences dans la vie de tout le monde qui ressemblent à celle de changer de
pays. Dans tous ces cas, l'individu quitte un milieu familier et connu pour se
plonger dans un contexte nouveau, inconnu avec tout ce que cela c omporte de
possibilities de croissance et de risques d'échec. Il y aura inévitablement une
période d'adaptation, le temps d'apprendre « les règles du jeu » et de s'intégrer,
période au cours de laquelle la personne vivra du plaisir et de l'excitation face au
nouveau défi mais aussi de l'anxiété, du stress et peut-être une efficacité moindre.
Pour des personnes qui changent de pays, que ce soient des étudiants
étrangers, des coopérants, des femmes d'affaires ou de simples voyageurs, ces mêmes
difficultés sont amplifies puisque les différences entre le milieu d'origine et le nouveau
milieu sont encore plus grandes. Sauf de rares exceptions, ces individus vivront un choc
culturel. Cette notion de choc culturel fait référence aussi bien à des réactions de stress,
d'anxiété, de tension nerveuse qu'à des sentiments de tristesse, de confusion, de
surprise, de dégoût, d'indignation, de rejet et d'impuissance que vit l'individu face à la
société d'accueil.
 
Le phénomène du « choc culturel »
La réaction à une nouvelle culture est un choc, en partie à cause des
changements massifs et inattendus dans la vie de l'individu, véritable « bombardement »
de nouveautés, et en partie parce que les différences remettent en question ses propres
valeurs culturelles. L'anthropologue K.Oberg, qui a été le premier à utiliser l'expression
«choc culturel» pour définir ce phénomène, explique : « Le choc culturel survient à cause
de l'anxiété provoquée par la perte de toutes nos références et de tous nos symboles
familiers dans l'interaction sociale. Ceux-ci incluent les mille et une façons que nous
avons de nous situer face aux circonstances de la vie : quand donner la main et quoi dire
lorsqu'on rencontre des gens, quand et comment donner des pourboires, comment faire
des achats, quand accepter ou refuser les invitations, quand prendre ce que disent les
gens au sérieux ou non. Ces références et symboles qui peuvent être des mots, des
gestes, des expressions faciales, des coutumes ou des normes, sont acquis au cours de
notre éducation et font partie de notre culture autant que notre langue ou les croyances
auxquelles nous souscrivons. Nous dépendons tous pour notre paix intérieure et notre
efficacité des ces centaines de signaux, dont nous ne sommes pas conscients pour la
plupart. »
Les recherches tendent à démontrer que les individus les plus conscients de la
relativité des valeurs culturelles, les mieux informés des différences culturelles et les plus
empathiques vivent plus intensément le choc culturel. Par contre, s'ils réussissent à
s'adapter, ils seront mieux intégrés à la culture d'accueil. D'ailleurs, environ 30 % de
ceux qui séjournent dans un autre pays doivent abandonner leur projet par incapacité de
s'adapter.
 
Les phases d'adaptation
L'acclimatation des personnes qui changent de culture a lieu généralement en
trois phases : une première phase d'enthousiasme, de plaisir, d'excitation, voire
d'euphorie face à la nouvelle culture, d'une durée approximative de deux à trois mois,
suivie d'une période prolongée de réactions dues au choc culturel, qui peut durer entre
trois et dix-huit mois environ. Cela se termine par une période d'adaptation où le
nouveau devient l'habituel et où l'individu devient d'une part moins stressé, anxieux et
triste et d'autre part plus efficace.
Il n'y a pas de solution magique au choc culturel : déjà le fait de savoir que ce
que les personnes vivent est, bien que déplaisant, tout à fait normal pour les
circonstances et de pouvoir y mettre un nom est soulageant. Le temps et le contact
prolongé avec la nouvelle culture sont les meilleurs remèdes; il faut résister à la tentation
de se retirer et de couper tout contact difficile avec la nouvelle culture. C'est ce contact
stressant qui va permettre aux gens de s'adapter progressivement et d'être plus
confortable. En même temps, il faut avoir des attentes moins élevées face à soi-même et
doser le stress par des périodes de repos et par un soutien social. Le groupe des
compatriotes joue alors un rôle primordial. Parallèlement, il est très important de se faire
des amis de la culture d'accueil. Toutes les recherches démontrent que, par exemple, les
étudiants étrangers qui se sont fait un ami de la culture d'accueil retournent dans leur
pays avec davantage de connaissances sur celle-ci et beaucoup plus satisfaits de leur
séjour. Par contre, les individus qui ont été exclus ou qui ne se sont pas fait d'amis du
pays hôte rentrent chez eux insatisfaits, avec une impression négative de la société
d'accueil. En général, les étudiants étrangers soulèvent l'isolement et la difficulté de se
faire des amis du pays d'accueil comme étant parmi leurs difficultés principales.
 
On doit se méfier d'une adaptation trop rapide
Bien sûr, lorsque l'on parle de choc culturel, il est question d'une première
adaptation. Pour ceux qui prolongent leur séjour au-delà de deux ou trois ans et pour les
immigrants qui changent de pays de façon permanente, le processus d'adaptation
continuera pour toute la période de leur séjour ou pour toute leur vie, un peu comme on
apprend à se connaître soi-même pendant toute notre vie. Changer de culture, en
acquérir une autre, se forger une nouvelle identité culturelle à partir des cultures dans
lesquelles on a vécu sont des processus extrêmement lents. La culture n'est pas un
manteau qui se met et s'enlève selon le goût et les besoins du moment. Elle fait partie
intégrante de l'identité même. Selon les recherches, des éléments de la culture d'origine
persistent au-delà de trois à six générations après l'immigration. Pour forger une identité
culturelle viable, l'immigration doit comparer et contraster les valeurs de sa culture
d'origine avec celles de la nouvelle culture et en faire une intégration personnelle.
On soit se méfier d'une adaptation trop rapide et trop facile. Si l'individu a
rejeté en bloc les valeurs de sa culture d'origine afin d'«avaler» toutes entières les
valeurs de culture d'accueil, il risque, si le travail d'intégration ne se fait pas, de vivre des
difficultés émotives plus tard dans sa vie. Si on ne fait pas le lien avec les générations qui
précèdent, on aura de la difficulté à faire le lien avec ses enfants. Les membres de la
société d'accueil doivent prendre conscience qu'il est impossible pour les immigrants de
changer de culture en quelques années et que ce n'est pas souhaitable ni pour l'individu
ni pour la société.
 
L'importance du va-et-vient entre les deux cultures
D'ailleurs, dans le processus d'adaptation à une nouvelle culture, l'individu doit
régulièrement faire un va-et-vient entre les membres de sa culture d'origine et ceux du
pays d'accueil. Cela permet de se former une identité intégrée à partir des deux cultures
d'une part, et d'absorber le choc culturel et de soutenir l'individu dans ses explorations de
la nouvelle culture d'autre part. Tout comme un jeune enfant a besoin de la présence de
sa mère pour mieux explorer un nouvel environnement, l'immigrant a besoin des
membres de sa culture d'origine pour mieux s'intégrer.
Le contact des cultures est inévitablement stressant mais, à la longue, il amène
un enrichissement mutuel et, paradoxalement, permet de mieux identifier, connaître et
valoriser les éléments de sa propre culture.

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