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Automne 2018 /
Développer la compétence culturelle chez les enseignants : mission
impossible ?
L’organisation scolaire, soit l’un des pôles d’entrée principaux des individus d’origines
culturelles très diversifiés, veut offrir un enseignement adéquat à ses élèves ou étudiants
et doit, avec peu d’outils, composer quotidiennement avec les obstacles liés à cette
diversité. Comment entrer positivement en contact avec des jeunes, des adolescents ou
de jeunes adultes qui arrivent de loin? Comment adapter sa pédagogie? Comment tirer le
meilleur d’eux et s’assurer qu’ils s’accomplissent? Comment en faire un apprentissage
pour tous?
La réalité, pourtant, présente des symptômes d’une maladie courante dans les écoles :
l’« incompétence culturelle ». Le savoir-faire requis semble apparemment peu
répandu.
« Ce qui vient de l’Autre doit être accepté comme étant tout aussi recevable, satisfaisant, efficace,
voire valable, que ce qui vient de soi, de sa propre culture, de sa famille, voire de ses gènes. »
Selon ces recherches2, la compétence culturelle devient alors la capacité d’un individu à
s’adapter à un autre individuIL VOUS RESTEd’ailleurs
qui vient 4/5 ARTICLES
ou àGRATUITS.
d’autres cultures étrangères et
variées, et ce, grâce à différentes aptitudes,
MON COMPTE capacités
REJOIGNEZ NOTREou connaissances. Cette
RÉSEAU
compétence serait souhaitable autant chez celui qui accueille un étranger dans son
environnement (l’accueil d’enfants autochtones dans sa classe) que chez celui qui se
retrouve dans un environnement qui propose un cadre et des références différents
(l’enseignante ou l’enseignant, par exemple, qui travaillent au sein d’une communauté
autochtone dans le nord du Québec ou dans le Grand Nord). L’encadré 1 propose
quelques exemples développés dans le cadre d’une recherche3 au sein de communautés
autochtones éloignées, dans laquelle un des objectifs visait la meilleure compréhension
des relations au travail entre Autochtones et Allochtones.
Des connaissances sur l’autre : ses valeurs, ses pratiques liées à la culture et celles
liées à sa spiritualité, ses habitudes, ses territoires, l’histoire de sa généalogie et des
familles de la communauté, etc.
Une capacité d’adaptation à l’inconnu.
Une humilité culturelle : à l’inverse de certains aspects de l’ethnocentrisme — la
capacité à se critiquer dans ses pratiques culturelles, voire religieuses et sociales, et
à s’admettre imparfaits. L’aveu de ses faiblesses face à soi-même semble pouvoir
aider à mieux recevoir les besoins de l’autre et à être moins critique envers ses
demandes.
Un esprit ouvert et une grande flexibilité sont demandés à la personne qui se
retrouve dans une nouvelle culture (ici autochtone du Nord canadien). Cette
flexibilité est avant tout psychologique afin de se préparer à faire face aux chocs
culturels, inévitables ou encore aux déséquilibres émotionnels, etc. Aussi,
l’acceptation d’effectuer de longs déplacements et de subir une météo extrême et
très variable est essentielle.
La capacité de négocier avec l’informel : dans plusieurs cultures des Premières
Nations, beaucoup d’informations se transmettent oralement, non formellement,
et beaucoup de décisions sont prises de cette manière. La patience est de mise afin
d’accéder à des cercles informels de « décideurs ».
La gestion de ses émotions et la reconnaissance des émotions de l’autre (la
sensibilité).
La capacité à se mettre en position d’écoute des besoins de l’autre.
L’écoute de l’autre, de son histoire de vie et de sa culture.
L’authenticité. IL VOUS RESTE 4/5 ARTICLES GRATUITS.
MON COMPTE
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L’empathie : la capacité sincère de s’identifier à autrui dans ce qu’il ressent, sans
avoir besoin de tout comprendre ou sans avoir vécu son émotion (la souffrance, la
joie, la peine, etc.).
La tolérance et la patience.
L’entretien, dans la communauté et au-delà, d’un vaste réseau de relations (écoles,
gouvernements, conseils, hôpitaux).
La reconnaissance et l’acceptation des différences de l’autre.
Moins cette reconnaissance progresse, moins les probabilités d’obtenir des résultats à
long terme sont envisageables, c’est-à-dire des relations harmonieuses ou des
interactions positives répétées dans le temps qui mènent ultimement à une bonne
IL VOUS RESTE 4/5 ARTICLES GRATUITS.
collaboration entre les intervenants.
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REJOIGNEZ NOTRE RÉSEAU
Cet apprentissage des différences observées avec l’autre favoriserait la compréhension
plus profonde, plus essentielle, de l’autre. L’appréciation de ces différences et le début
d’un processus d’acceptation des caractéristiques de l’autre constitueraient l’un des
éléments fondateurs de la compétence culturelle4. On doit être conscient de cette petite
voix qui s’exprime très discrètement dans l’esprit et qui suggère subtilement que l’autre
a tort. Par ailleurs, nos mœurs, habitudes ou façons de vivre ou de travailler seront
habituellement perçues comme étant nécessairement les bonnes, les meilleures, et ce,
sans hésitation, presque inconsciemment. En effet, elles proviennent de notre « soi »
intime, profond et certainement fondamental et elles sont pratiquées depuis toujours.
Ce sentiment légitime et sûrement bien documenté par des collègues psychologues est
plus fort que soi; toutefois, ce qui vient de l’autre doit être accepté comme étant tout
aussi recevable, satisfaisant, efficace, voire valable, que ce qui vient de soi, de sa propre
culture, de sa famille, voire de ses gènes. Le conflit personnel qui en résulte doit être
géré. Le processus de reconnaissance et d’acceptation de ce phénomène demande du
courage et, pour certaines personnes, il ne commencera ou ne se terminera jamais.
Pour terminer, je partage un outil pratique (voir encadré 2) qui peut servir lors de la
mise en relation ou la communication professionnelle, personnelle ou avec un
représentant d’une autre culture. L’outil a été créé pour un contexte particulier et pour
un groupe très hétérogène en matière de cultures. Dans ce cadre, les notes dépassent la
compétence culturelle de l’enseignant envers son groupe d’élèves qui proviennent de
différentes cultures. D’une part, il s’adresse à l’enseignant ou à tout autre spécialiste,
dont le gestionnaire scolaire, afin de les accompagner dans l’établissement de relations
saines et véritables avec leurs collègues d’une autre culture. D’autre part, il vise ces
mêmes fonctions, mais dans le contexte où la personne vit hors de son milieu habituel,
dans une école loin de son vécu et de sa culture, afin, notamment, de l’aider à s’intégrer.
En conclusion, toutes les pratiques, applications de principes ou idées ici proposées afin
de développer ses compétences culturelles semblent partager un point commun :
l’authenticité. En effet, il apparait judicieux et salutaire d’être soi-même et d’agir de
manière cohérente avec ses valeurs et ses choix, comme avec ses décisions
professionnelles.
3 Idem, notes 1.
6 Ces exemples sont tirés de données qui proviennent d’un rapport de recherche en
management interculturel : Deschênes, É. (inédit). L’insertion socioprofessionnelle des
Autochtones sur le marché de l’emploi local. Rapport de recherche de postdoctorat en
management interculturel. HEC Montréal.
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