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*Le roman au XIX

Le roman, qui ignoré et mis en marge, a connu un grand succès à partir de 1820
avec le roman historique. Le roman et l’Histoire sont complémentaire dans le
sens où les grands écrivains de l’époque notamment, Victor Hugo, Balzac,
Stendhal, Mérimée, Vigny, Baudelaire, Zola…., font la peinture de l’époque et
décrivent la progression des événements historiques et leur impact sur la société,
l’Homme et l’ Art.

Le XIXème siècle fut un siècle de révolutions et de successions de systèmes


politiques : (Restauration, Révolution de Juillet 1830-1848, Commune de Paris
en 1871, Premier Empire, Monarchie Constitutionnelle, IIème République,
Second Empire, IIIème République). Certes, le roman est marqué par ces
événements successifs, tel que 1799, date du coup d’Etat de Bonaparte qui
établit le Consulat et met fin à la période révolutionnaire, et 1899 date de
résolution des tensions en l’occurrence celle de l’affaire Dreyfus. Une période
également où s’imposèrent les valeurs de la IIIème République. Le XIXème
siècle est également un siècle de transformations économiques, industrielles et
de l’expansion coloniale. La Révolution industrielle, débutée au XVIIIème
siècle en Angleterre, se propage en France au XIXème siècle. Avec le
développement des transports, elle apporte de grandes modifications sur le plan
économique mais aussi culturel (les échanges d'idées sont alors favorisés.)

*L’œuvre de Zola est réinterprétation et une critique de la politique et la


société du XIX e siècle

Zola, dans l’ensemble de sa production littéraire, ne manque pas de mettre en


exergue le XIXème siècle, dont la conjoncture politique et sociale apparait assez
complexe et tourmentée à la suite de la Révolution Française, et de grands

1
progrès scientifiques. En outre, La Curée, est une source inépuisable et
précieuse de témoignages de grands bouleversements qui ont eu lieu aussi bien
dans l’architecture de Paris, dans les habitudes des Français, que dans la
technologie et la politique.

Zola donne une étude de la société bourgeoise sous le Second Empire. Une
période complexe, étrange et confuse où les forces nouvelles se heurtent à
l’ordre établi. Une période où la nouvelle bourgeoisie qui domine l’édifice social
a remplacé l’ancienne noblesse et où la masse des travailleurs vit dans la misère.
L’argent acquiert une grande importance à cette époque. Or, cette richesse n’est
plus héréditaire ou foncière mais acquise par de bonnes affaires industrielles ou
commerciales. Par ailleurs, le XIX ème siècle fut un siècle de bouleversements
politiques et de grands développements intellectuels et marque la civilisation
occidentale. Guizot confirme que « la civilisation éveille l’idée d’un peuple qui
marche, non pas pour changer de place mais pour changer d’état ; d’un peuple
dont la condition s’étend et s’améliore ». La bourgeoisie constitue à cette
époque l’ensemble des cadres administratifs et juridiques, investissait dans de
fructueuses transactions industrielles ou commerciales et avait pour objectif
d’anéantir les privilèges de la noblesse, d’amoindrir son prestige et de devenir
l’unique interlocuteur de l’Etat et du peuple. Elle soutient les philosophes et les
idéologues pour lutter contre la double autorité monarchique et religieuse. Elle
continua tout au long des révolutions successives à s’enrichir des spoliations des
biens de la noblesse et du clergé et construit son pouvoir sur les ruines de ces
classes.

Louis Napoléon ( Second Empire) sachant d’ores et déjà, que le développement


de l’industrie et du commerce n’étaient réalisables que par le concours des
capitaux de la riche bourgeoisie, n’hésita pas à leur accorder plus d’avantages et
trouva en elle de bons légistes, des administrateurs remarquables et des
fonctionnaires dévoués. Le Second Empire se trouva devant une classe

2
bourgeoise riche et orgueilleuse où les jeunes abandonnèrent la vie
parcimonieuse et rude pour s’orienter vers une vie de luxe doublée de désir de
paraître. Or le contraste entre une richesse étalée sans pudeur et une misère
croissante dans les faubourgs des villes industrielles donnèrent naissance à des
luttes sociales inévitables.

Dans son œuvre, la Curée, Zola a insisté sur le second Empire notamment les
événements politiques et le règne de Napoléon III. Une période où la production
littéraire et artistique est très féconde. De surcroît, ajoute Jean Claude Yon1 que
l’entrée dans une nouvelle économie culturelle a amorcé une profonde
transformation de la vie littéraire et artistique et que de nouveaux mouvements
comme le réalisme, le Parnasse, impressionnisme…sont apparus. L’empire a
parfois combattu ces révolutions esthétiques sans pouvoir les empêcher.

Zola est un écrivain à la fois minutieux et méthodique et décrit sa méthode de


travail ainsi : « Ma façon de procéder est toujours celle-ci : d’abord je me
renseigne par moi-même par ce que j’ai vu et entendu ; ensuite, je me renseigne
par les documents écrits, les livres sur la matière, les notes que me donnent mes
amis ; et enfin l’imagination, l’intuition plutôt, fait le reste. Cette part de
l’intuition est chez moi très grande, plus grande, je crois, que vous ne le faites.
Comme le disait Flaubert, prendre des notes, c’est être simplement honnête ;
mais les notes prises, il faut les mépriser »2

Cependant, Zola s’appuie sur une solide documentation, mais aussi sur les
enquêtes qu’il fait dans les régions qu’il veut décrire. H. MITTERAND3dit qu’Il
croque les scènes vécues, mais toujours dans l’optique de son roman en cours,
jamais gratuitement. Il ajoute que Zola sélectionne ses observations et les utilise
quasiment toutes dans le roman qu’il est en train d’écrire, ainsi qu’un peintre

1
Jean Claude Yon , Le Second Empire, Armand Colin, Paris ,2004,p 175.
2 Colette Becker, Dictionnaire d’Emile Zola, Robert Laffont_coll. Bouquins, 1993, pp260-261

3 H. MITTERAND ,Carnets d’enquêtes-une ethnographie inédite de la France ,Plon, 1987)


3
ferait avec son carnet de croquis. Zola, porte ainsi une attention particulière au
rythme de la narration et à l’équilibre de chacun des chapitres.

En outre, la création de son œuvre passe assez souvent à travers un personnage ;


masculin ou féminin ( Saccard / René / maxime …) , sa personnalité ou à travers
son tempérament. Il tend ainsi vers un style fait de logique et de clarté. En
outre, il annonce qu’il ‘’rêve d’un roman où l’homme se trouverait tout entier,
dans une forme solide et claire, qui en serait le vêtement’’.

En parlant du roman expérimental, il dit : « j’estime la méthode atteint la forme


elle-même, qu’un langage n’est qu’une logique, une construction naturelle et
scientifique. Celui qui écrira le mieux ne sera pas celui qui galopera le plus
follement parmi les hypothèses, mais celui qui marchera droit au milieu des
vérités. Nous sommes actuellement pourris de lyrisme, nous croyons bien à tort
que le grand style est fait d’un effarement sublime, toujours près de culbuter
dans la démence ; le grand style est fait de logique et de clarté »4

II/ les thèmes inhérents dans la production littéraire de Zola, en


l’occurrence dans la curée.

Le XIX e siècle a connu un énorme progrès scientifique ce qui a entrainé un


changement ou plutôt une transformation du mode de vie et de pensée. Le
progrès économique a entrainé de grandes (ou de lourdes) conséquences
sociales : une classe riche, bourgeoise de plus en plus prospère et une classe
démunie dont les conditions de travail sont difficiles.

ZOLA décrit surtout les conditions inhumaines du travail industriel et la misère


de la classe ouvrière. Il inscrit ses personnages non seulement dans un milieu
c.à.d. les conditions de vie, le travail, la famille l’époque mais également une
hérédité c’est ce que nous allons voir dans le chapitre consacré au
DETERMINISME.

4
Pages Alain et OWEN Morgan, Gude de Zola, Ellipses, Paris, 2002, pp204-205

4
Déjà dans Thérèse Raquin qui ne fait pas partie des Rougons Maquarts, il dit
dans la préface « ans hérèse aquin, j'ai voulu étudier des tempéraments et
non des caractères. est le livre entier. J'ai choisi des personnages
souverainement dominés par leurs nerfs et leur sang, dépourvus de libre arbitre,
entrainés chaque acte de leur vie par les fatalités de leur chair. hérèse et
aurent sont des brutes humaines, rien de plus. ai cherché suivre pas pas
dans ces brutes le travail sourd des passions, les poussées de l'instinct, les
détraquements cérébrau survenus la suite d'une crise nerveuse. Les amours
de mes deux héros sont le contentement d'un besoin ; le meurtre qu'ils
commettent est une conséquence de leur adultère, conséquence qu'ils acceptent
comme les loups acceptent l'assassinat des moutons.» ces mêmes thèmes qui
sont dans Thérèse Raquin on va les retrouver en détaille dans chaque œuvre de
la série des Rougon Maquarts. Et en l’occurrence La Curée.

Dans les Rougons Maquarts ( 20 volumes) il donne une vision exhaustive de la


société parisienne et ses différents problèmes, son thème principal c’est le
travail dans les mines, différents types de mineurs, les difficultés du travail dans
les mines, les maladies et les attitudes des ouvriers (Germinal), le chemin de fer,
la bourse ou le travail de l'argent (L'Argent), le travail dans le domaine de
l’agriculture, le portrait féroce du paysan, âpre au gain, dévoré d’une passion
pour la terre qui peut aller jusqu’au crime ( La Terre), le travail dans les grands
magasins, des fortunes se bâtissent lors de la création des premiers grands
magasins (Au bonheur des dames...) , Pot-Bouille (cuisine interne au sens
figuré). La Curée, Au bonheur des Dames, Pot-Bouille , le Ventre de Paris, c’est
le milieu des affaires par excellence . Zola retrace ou peint soigneusement la
bourgeoisie parisienne, le monde des finances et de l'industrie, cette grotte de
Plutus. La Curée dont le thème la vie débauchée de Paris au Second Empire, est
un thème qui prédomine, qu’on trouvera dans tous les autres romans.

La Curée c’est le cœur de Paris, les larges avenus sous le règne de Napoléon III,
que des spéculateurs malhonnêtes s’arrachent. C’est Paris en pleine
transformation par les grands travaux haussmanniens. Ce deuxième volume des
Rougon-Macquart, est le plus violent car Zola dénonce ces fortunes rapides, les
personnes cupides et opportunistes Prêts à tout pour faire fortune.

On lit dans le chapitre VI de La Curée :


« Au sommet de ce tas d’or, Mme de Guende, en Plutus, était assise, Plutus femm
e, Plutus montrant sa gorge, dans les grandes lames de sa robe, prise à tous les m
étaux. Autour du dieu se groupaient, debout, à demi couchées, unies en grappes,

5
ou fleurissant à l’écart, les efflorescences féeriques de cette grotte, où les califes
des Mille et une Nuits avaient vidé leur trésor : Mme Haffner en Or, avec une jup
e roide et resplendissante d’évêque ; Mme d’Espanet en Argent, luisante comme
un clair de lune ; Mme de Lauwerens, d’un bleu ardent, en Saphir, ayant à son côt
é la petite Mme Daste, une Turquoise souriante, qui bleuissait tendrement ; puis s
’égrenaient l’Émeraude, Mme de Meinhold, et la Topaze, Mme Teissière ; et, plus
bas, la comtesse Vanska donnait son ardeur sombre au Corail, allongée, les bras
levés, chargés de pendeloques rouges, pareille à un polype monstrueux et adorab
le, qui montrait des chairs de femme dans des nacres roses et entrebâillées de co
quillages. Ces dames avaient des colliers, des bracelets, des parures complètes, f
aites chacune de la pierre précieuse que le personnage représentait. On remarqua
beaucoup les bijoux originaux de Mmes d’Espanet et Haffner, composés unique
ment de petites pièces d’or et de petites pièces d’argent neuves. Puis, au premier
plan, le drame restait le même : la nymphe Écho tentait le beau Narcisse, qui ref
usait encore du geste. Et les yeux des spectateurs s’accoutumaient avec ravissem
ent à ce trou béant ouvert sur les entrailles »

Derrière les belles façades de luxe travaillent l'hypocrisie, les tares, la


perversion, la corruption. Renée, l'héroïne de la Curée, vaincue à la fois par
l'amour, l’adultère, finira aux portes de la folie. D’ailleurs ce qui surprenant
c’est que la classe ouvrière et surtout la figure féminine reste au centre de ses
préoccupations, le thème inhérent à tous ses textes.

On a également la pertinence de l’Histoire :

 Révolution de juillet 1830 et de 1848 Chute de la monarchie de Juillet.


Proclamation de la république
 2 décembre 1851 Coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte. L'Empire est
proclamé l'année suivante.
 4 septembre 1870 Déchéance de l'Empire. Proclamation de la République.
 1871 La Commune (mars-mai). Publication de La Fortune des Rougon.

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