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SELÇUK ÜNİVERSİTESİ
EDEBİYAT FAKÜLTESİ
FRANSIZ DİLİ VE EDEBİYATI BÖLÜMÜ
Hazırlayan
Hatice GÖKKAYA
202609004
Öğretim Üyesi
Prof. Dr. Ahmet GÖGERCİN
KONYA – 2023
Réalisme VS Naturalisme
Le XIXème siècle se caractérise par de multiples instabilités politiques avec la
succession de sept régimes politiques différents, siècle qui débute par les guerres
napoléoniennes et finit par la guerre franco-allemande. En parallèle, la France connaît une
révolution scientifique et industrielle. Le XIXème siècle est également marqué par la liberté
de pensée et ainsi la naissance de grandes idées modernes du libéralisme et du socialisme.
Parmi les courants littéraires, nous distinguons le romantisme, représenté par Victor Hugo, le
réalisme initié par Honoré de Balzac, le naturalisme accentué par Émile Zola, le parnasse avec
Théophile Gautier et enfin le symbolisme représenté par Baudelaire et Mallarmé.
Nous allons nous attarder sur le réalisme et le naturalisme dans cette composition afin
de les expliquer en nous appuyant sur les styles et les méthodes des grands écrivains réalistes
et naturalistes. Après avoir défini et analysé ces deux courants, nous allons essayer de les
comparer en énonçant leurs similitudes et leurs différences.
Autre défendeur du réalisme : Stendhal. Même s’il n’est pas au même titre que Victor Hugo,
le romantisme de Stendhal ne l’empêche pas d’affirmer que « le roman, c’est un miroir que
l’on promène le long d’un chemin. » En effet, son observation réaliste l’empêche de faire
vagabonder son imagination, il contrôle les réactions de ses personnages selon les méthodes
des sciences exactes (positivisme, déterminisme). Stendhal applique ce qu’on appelle le
réalisme psychologique : les sentiments de ses personnages sont très importants pour lui. Et
un des plus grands thèmes de ses romans est évidemment l’amour : il considère l’amour
comme une science et lui est le mathématicien. Dans son ouvrage De l’Amour8, Stendhal fait
une analogie chimique pour expliquer comment l’on tombe amoureux : « Aux mines de sel de
Salzbourg, on jette dans les profondeurs abandonnées de la mine un rameau d’arbre effeuillé
par l’hiver ; deux ou trois mois après, on le retire couvert de cristallisations brillantes. [...] Ce
que j’appelle cristallisation, c’est l’opération de l’esprit, qui tire de tout ce qui se présente la
découverte que l’objet aimé a de nouvelles perfections. » Le réalisme de Stendhal se remarque
très bien dans son roman La Chartreuse de Parme, où il peint les mœurs politiques dans les
monarchies italiennes du XIXème siècle. Dans Lucien Leuwen, Stendhal relate la Monarchie
de Juillet et la Restauration dans Le Rouge et le Noir, sous-titré d’ailleurs “Chronique de
1830”. L’extrait suivant du roman Le Rouge et le Noir indique bien que l’histoire se situe
juste après la chute du Ier Empire ; Julien Sorel admire Napoléon Bonaparte, qu’il lit en secret
(page 332)4 : « En passant, il regarda tristement le ruisseau où était tombé son livre ; c’était
celui de tous qu’il affectionnait le plus, le Mémorial de Sainte-Hélène. » En plus d’être un
vrai tableau des mœurs, les romans de Stendhal sont tirés d’histoires vraies. L’histoire de
Julien Sorel est en fait celle d’Antoine Berthet, condamné à mort pour tentative de meurtre de
Madame Michoud, chez qui il avait été précepteur (page 337) 4 : « Julien ne la reconnaissait
plus aussi bien ; il tira sur elle un coup de pistolet et la manqua ; il tira un second coup, elle
tomba. » L’art de Stendhal s’exprime ici via un réalisme psychologique : il nous fait vivre
l’action de l’œil du meurtrier.
Tout comme Stendhal, Prosper Mérimée est un romantique réaliste qui sait contrôler ses
sentiments et ses passions. Son talent d’observation, son envie de documentation précise et
des faits réels l’ont poussé à devenir un écrivain réaliste. Son domaine de prédilection est la
nouvelle. Le style et le langage employés dans ses récits rendent l’histoire comme vraie :
Colomba et Carmen regorgent de termes typiquement corse ou gitane. Dans l’extrait de
Colomba comme suit (page 350)4, Mérimée emploie des termes corses comme Saveria (la
servante) ou le bruccio (fromage, mets national en Corse) : « Orso s’étant retiré dans sa
chambre, Colomba envoya coucher Saveria et les bergers, et demeura seule dans la cuisine où
se préparait le bruccio. » Mérimée montre à quel point la documentation est primordiale dans
le réalisme, il nous montre dans l’extrait suivant (page 351) 4 qu’il a étudié les traditions corses
: « Il faut savoir que mutiler le cheval de son ennemi est, pour les Corses, à la fois une
vengeance, un défi et une menace de mort. » À cela s’ajoute l’art du récit détaillé montrant
ainsi le réalisme de son histoire (page 350) 4 : « Par-dessus une redingote bleue bien serrée à la
taille, il portait en bandoulière une petite boîte de fer-blanc contenant des cartouches,
suspendue à un cordon de soie verte ; son stylet était placé dans une poche de côté, et il tenait
C’est seulement après 1850 que le réalisme commence à s’affirmer réellement, qui atteint son
apogée avec Madame de Bovary de Flaubert. Ce roman a été inspiré de l’histoire d’un ancien
élève de son père, Eugène Delamare, médecin dont la femme infidèle finit par s’empoisonner.
Dès son enfance, Flaubert avait le goût pour la science, l’observation méticuleuse et objective,
goût qui vient de son père chirurgien. C’est ainsi qu’il souhaite faire passer la méthode des
sciences à la psychologie. Sûrement l’influence de son père, la documentation est la condition
primordiale pour Flaubert pour écrire : pour relater les choses vraies, il faut absolument
effectuer des observations objectives et des enquêtes. Rien que pour écrire cette scène,
Flaubert a énormément lu de traités médicaux et il a même testé un léger contenu d’arsenic.
Tout ce qu’a ressenti et vécu Flaubert lors de son expérience, il l’a fait pour être le plus
réaliste possible dans son roman (page 467) 4 : « Une saveur âcre qu’elle sentait dans sa
bouche la réveilla. [...] Elle fut prise d’une nausée si soudaine. [...] Cependant, elle sentait un
froid de glace qui lui montait des pieds jusqu’au coeur. [...] À huit heures, les vomissements
reparurent. [...] Son pouls inégal était presque insensible maintenant. » Comme Balzac,
Flaubert accorde une grande importance au cadre : il raconte avec une exactitude presque
scientifique les personnages, la pharmacie, l’auberge,... Flaubert présente Yonville et plus
précisément, ici, le climat avec une telle précision que nous avons l’impression de lire un
document scientifique (page 464)4 : « Le thermomètre (j’en ai fait les observations) descend
en hiver jusqu’à quatre degrés, et, dans la forte saison, touche vingt-cinq, trente centigrades
tout au plus, ce qui nous donne vingt-quatre Réaumur au maximum, ou autrement cinquante-
quatre Fahrenheit (mesure anglaise) pas davantage ! » Le réalisme de Flaubert a même ancré
la notion de bovarysme dans la littérature française comme celui qui est contraint de vivre
selon les circonstances extérieures. Ce que vit Emma Bovary est exactement ce que veut faire
passer Flaubert : l’interaction des circonstances et les travers du caractère poussent Emma
vers le conflit réel/rêve. À travers Madame de Bovary, Flaubert critique ainsi les travers de la
société bourgeoise : qui est coupable ? Emma ou son entourage qui lui a imposé cette vie ?
Les écrivains travaillent généralement seuls mais les frères Goncourt choisissent d’écrire
ensemble et ce dans une parfaite communion. Les frères Goncourt sont des réalistes
passionnés pour les documents “d’après nature”, ils se documentent énormément. Ils se disent
les “raconteurs des présents”, s’inspirent des méthodes des historiens qui sont les “raconteurs
du passé”. Ils se fondent sur l’observation du réel en se plongeant dans la réalité, en enquêtant
Lors de la période du Tanzimat (« réorganisation » en arabe), Sami Pacha Zade Sezai Bey est
l’un des précurseurs du réalisme dans la littérature turque. Avec son œuvre parue la première
fois en 1888 nommée Dilber, Esclave et l’Eunuque Amoureux7, l’auteur turc raconte
l’aventure d’une fille devenue esclave çà et là, et ayant vécu une liaison amoureuse interdite
avec un fils de Pacha. Le roman est tellement réaliste et vrai qu’il choque, l’auteur est alors
contraint à l’exil à Paris à l’époque du sultan Abdul-Hamid-Han II.
En effet, c’est avec Emile Zola que le réalisme prend une forme plus radicale et se transforme
en naturalisme. Comme le réalisme, le naturalisme a pour objectif d’explorer le réel,
notamment dans les milieux populaires et même dans les bas-fonds. L’influence du
philosophe et critique Taine pour ses idées déterministes, du naturaliste britannique Darwin
pour ses idées positivistes, du fondateur de la médecine expérimentale Claude Bernard et des
frères Goncourt lui a permis de découvrir sa vocation pour le naturalisme. Emile Zola utilise
le naturalisme à des fins pédagogiques car pour lui, le savoir et l’éducation sont essentiels. Il
étudie la société à travers sa série des Rougon-Macquart dans le but de faire ressortir ses
plaies et ainsi d’en trouver les remèdes. Pour ce faire, il applique des méthodes scientifiques
beaucoup plus radicales que le réalisme. Il devient “le maître” de l’école naturaliste et
rassemble tous les écrivains naturalistes qui publient ensemble Les Soirées de Médan. Zola
explique sa doctrine dans Le Roman Expérimental, Le Naturalisme au Théâtre et les
Romanciers Naturalistes : pour lui, les conditions physiologiques, l’influence des milieux
géographiques et des circonstances déterminent la personne humaine. Zola croit à
l’interaction psychologie/physiologie (les 5 sens humains) : il développe la conception d’un
homme déterminé par son milieu (déterminisme des phénomènes) et les lois de l’hérédité. Le
romancier naturaliste est un “expérimentateur” qui vérifie les lois dégagées par l’observation :
son expérience consiste à “faire mouvoir les personnages dans une histoire particulière pour y
montrer que la succession des faits y sera telle que l’exige le déterminisme des phénomènes
mis à l’étude”. Il joue en modifiant les circonstances et les milieux sans jamais s’écarter des
lois de la nature. Dans la pratique, Zola rédige une vingtaine de romans dans la série des
Rougon-Macquart pour exposer “l’histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second
Empire” : Zola montre ainsi les transformations lentes et profondes que les événements
entraînent sur la société. Le lecteur peut ainsi comprendre les passions et les caractères
différents des enfants d’un même père. Pour L’Assommoir, Zola explique son roman à
scandale comme suit : « C’est une œuvre de vérité, le premier roman sur le peuple, qui ne
mente pas et qui ait l’odeur du peuple. Et il ne faut point conclure que le peuple tout entier est
mauvais, car mes personnages ne sont pas mauvais, ils ne sont qu’ignorants et gâtés par le
milieu de rude besogne et de misère où ils vivent. » L’Assommoir est un vrai documentaire
expliquant la condition ouvrière médiocre (page 487) 4 : « Le long du corridor, il y avait un
silence de crevaison, et les murs sonnaient creux, comme des ventres vides. Par moments, des
danses s’élevaient, des larmes de femmes, des plaintes de mioches affamés, des familles qui
se mangeaient pour tromper leur estomac. [...] et les poitrines se creusaient, rien qu’à respirer
cet air, où les moucherons eux-mêmes n’auraient pas pu vivre, faute de nourriture. » La
misère que subit Gervaise va l’entraîner peu à peu vers la descente aux enfers (pages 389-
390)4 : « Tiens ! tu as raison, c’est une bonne idée. Comme çà, nous boirons la monnaie
ensemble. [...] Au deuxième verre, Gervaise ne sentit plus la faim qui la tourmentait.
Maintenant, elle était raccommodée avec Coupeau, elle ne lui en voulait plus de son manque
Tout comme Zola, Guy de Maupassant refuse toute forme d’idéalisme, tout récit dominé par
l’imagination. Avec l’influence de Flaubert, ami proche de sa mère, Maupassant apprend
l’observation. Sa passion est l’humble vérité, son but est de rendre compte le plus fidèlement
possible la réalité observée. Le naturalisme de Maupassant est différent de celui de Zola, son
naturalisme est pessimiste et virulent : l’homme est “une bête à peine supérieure aux autres”.
Contrairement à Zola, Maupassant n’a pas de grandes attentes du naturalisme : il n’attend rien
d’autre qu’un retour à la souffrance. Devenu disciple de Zola, il publie des nouvelles
naturalistes dont la plus connue est Boule de Suif dans les Soirées de Médan. Dans sa
nouvelle, Guy de Maupassant décrit en fait les lieux où il a grandi, la guerre à laquelle il a
participé et les personnages sont vrais. Cornudet est l’oncle de Maupassant et Boule de Suif
est une prostituée nommée Adrienne Legay. Il dénonce l’hypocrisie des gens bourgeois et le
sacrifice (de Boule de Suif)6 : « Personne ne la regardait, ne songeait à elle. Elle se sentait
noyée dans le mépris de ces gredins honnêtes qui l’avaient sacrifiée d’abord, rejetée ensuite,
comme une chose malpropre et inutile. Alors elle songea à son grand panier tout plein de
bonnes choses qu’ils avaient goulûment dévorées, à ses deux poulets luisants de gelée, à ses
pâtés, à ses poires, à ses quatre bouteilles de Bordeaux. » Maupassant écrit dans ses contes
avec un grand souci de vérité et d’expressivité, il traite des mœurs, des types les plus divers
du monde rustique, des bourgeois ou des employés. Selon Maupassant, “la seule réalité qui ne
mente pas est la souffrance”.
Même s’il se dirige vers une littérature fantaisiste et poétique (Le Petit Chose, Les Lettres de
Mon Moulin), Alphonse Daudet s’oriente par la suite vers la littérature naturaliste aux côtés
d’Emile Zola. Son véritable travail de documentation, sa prise de notes de détails tirés du réel
sur un carnet constitue sa méthode de travail préliminaire à l’écriture d’un récit. Fromont
jeune et Risler aîné est son premier roman naturaliste le rapprochant de Zola. Pour écrire ce
roman, l’auteur s’inspire des souvenirs de son enfance et a mené des observations pour savoir
et pour comprendre ce que fait agir les individus. Sa méthode consiste donc au-delà d’une
simple méthode d’observation et de documentation, au résultat d’une sensibilité, à un sincère
désir de comprendre la société. En tant que naturaliste, Daudet pensait que le milieu pouvait
influencer et déterminer le caractère d’une personne. En effet, Sidonie Chebe dans Fromont
jeune et Risler aîné2, dégoûtée de son milieu, cherche à s’en échapper. Elle devient ainsi
Les auteurs de l’Empire Ottoman ne sont pas restés indifférents au courant naturaliste
français. S’inspirant du grand écrivain français Emile Zola, Ahmet Midhat Efendi écrit
Müşahedat1, dans lequel il fait preuve contrairement à Zola à un naturalisme positiviste.
Pour conclure, nous pouvons affirmer que les courants réaliste et naturaliste sont deux
mouvements littéraires du XIXème siècle apparus l’un dans l’autre en réaction au romantisme
Ils ne sont ni séparables ni attachables. En effet, le naturalisme est le prolongement du
réalisme. Fini les sentiments mélancoliques, le mal du siècle et le moi, place maintenant aux
vrais problèmes de société, de politique, de mœurs avec pour outil les sciences nouvelles.
L’écrivain n’est plus un raconteur mais un sociologue, il expose les faits réels, les dénonce
pour que la société évolue.
Comme toutes les bonnes choses ont une fin, ces deux courants littéraires se sont vus
dépassés par de nouveaux mouvements comme le symbolisme et le parnasse, apparus suite à
un sentiment de lassitude provoqué par ces courants trop sérieux et à force trop lourds.