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02/03/2022

LETTERATURA FRANCESE II
Libri di testo : Michel Decaudin, Daniel Leuwers, De Zola à Guillaume Apollinaire. 1869-1920, nouvelle édition révisée, Paris,
Flammarion, 1996 [estratti; siete pregati di ignorare i capitoli che riguardano il Novecento].
mmorselli90@gmail.com (ricevimento : martedì seconda mattinata – martedì primo pomeriggio)

LE XVIII ET LE XIX SIÈCLE

Le panorama du genre « roman »


Qu’est-ce que rend le roman un genre littéraire en tant que tel ? Et plus précisément, qu’est qu’on entend
pour « genre littéraire » du roman ?
Avant tout, il faut comprendre qu’un genre littéraire (comme le théâtre, la poésie ou l’épopée) sont tels pour
le simple fait d’avoir des normes, des contraints qui les définissent.
Au XVII siècle, dans le domaine théâtrale par exemple, Racine représentait le modelé de la tragédie
classique en suivant des normes précises empruntés voire par Aristote (les 3 règles d’unité : temps, espace,
lieu).1 C’est cela que faisait de Racine un dramaturge, à l’époque.
C’est clair que les normes peuvent être rompues pour créer des nouveauté, ce qui arrive tout le temps en
littérature : on rompe avec la norme et on recommence avec des nouvelles règles. Pour suivre avec l’exemple
du théâtre du XVII siècle, le grand rival de Racine c’était Corneille, qui décide de rompre avec tous les
normes classique de la mise en scène en introduisant une nouvelle formule de tragédie, en particulier avec
son œuvre « Le Cid ».
Mais pour le roman c’est différent. En effet, son parcours d’évolution n’est pas aussi simple : il peut être
définie une forme hybride, une sorte d’anti-genre pour excellence, en changeant et évoluant mutuellement de
façon plus rapide par rapport aux autres genres. Il se modifie constamment et ne possède pas, déjà à
l’origine, des paratextes donnant des règles pour définir ce qu’appartient ou pas à ce gendre. Mais c’est juste
grâce à cette ductilité qu’il acquière la capacité de résister à toutes formalisation et d’évoluer de manière
libre, incohérente et en produisant multiples branches parallèles.
Au même temps, si on n’a pas des règles donc il n’y a non plus des normes à rompre : on assiste à une
adaptation continue du gendre selon l’époque où l’on se trouve, même en interagissant avec des autres
formes contemporaines.
C’est pour cela qu’on utilise le roman comme une espèce de « sonde » littéraire, afin d’examiner nouvelles
courantes et leur façon de répondre à la prose : pour chaque mouvement culturelle on a en effet une ou
plusieurs formes romanesques qui se sont développés.
Le XIX est surement à considérer le Grand Siècle du Roman, mais les formes romanesques en prose ont en
réalité toujours existés : déjà à partir des latins (avec le « Satyricum » de Pétrone par exemple) et des grecs
(on a retrouvé une dizaine de roman, principalement sentimentaux et érotiques). Le roman n’est donc pas un
invention de ce grand siècle et le XVII siècle nous permet de percevoir les formes du romanesques en train
de se consolider, en essayant de trouver une voie univoque. Il est encore en train de trouver son identité,
n’ayant pas encore eu l’occasion de faire son « coming out » : c’est donc pour cela qu’il est fondamentale de
travailler sur le XVIII et le XIX siècle ensemble. Si on pense aux textes qu’on analysera dans le détailles,
aucun d’entre eux ne se présentait à l’époque en tant que « roman ».
- Marivaux (Pierre Carlet), Le Paysan parvenu, [1734-1735] : publie anonyme sous forme de
mémoire, une autobiographie.
- Pierre-Ambroise-François Choderlos de Laclos, Les Liaisons dangereuses, [1782] : faux recueil de
lettres.

1En réalité, si bien transmises à travers le Moyen Age et parvenu au XVIIème siècle comme des strictes normes à
suivre, pour Aristote les « Règles d’unité » n’était que des constatations, avec une valeur descriptif plus que normatif.
- Voltaire (François-Marie Arouet), Zadig ou La Destinée, [1748] : présenté sous forme de conte2
Document factuel et Conte fictionnel
Dans le cas d’un conte fictionnel on a un intrigue inventé tout court par une personne. Il ne pouvait donc se
traiter que d’un exemple, inventé sans malice pour être suivi, ce qui représente l’aspect dangereux.
Dans le conte factuel, au contraire, on assiste à une vraie et propre déresponsabilisation de l’auteur. En ce
second cas, l’intrigue se fonderait sur un histoire vrai qui s’est passé et que l’auteur à seulement rapporté ;
c’est pas lui qui l’a inventé pour corrompre le public, le lectorat. Pour ce motif, ce gendre d’œuvres
racontaient généralement des histoires vicieuses, avec des mauvaises exemples qui de toute manière
séduisaient l’envie d’évasion du public.
En plus, la différence entre les deux types d’œuvres était que le document vrai pouvait être bien falsifiable,
tandis qu’au contraire, ce qui était déjà fictif ne pouvait pas l’être. Cela change complétement l’approche au
texte : j’arrêt d’hésiter et je fais confiance dans l’auteur (Suspension of Disbelief de Coleridge) : il faut croire
au narrateur, au fait qu’il connait tout de ses personnage, ce qui n’est pas possible pour un document réel
ayant comme protagoniste des personnes réels.
C’est clair que c’était seulement un prétexte et il l’était pour tous aussi à l’époque, mais cela était au point
nécessaire (et suffisant ) à nourrir l’envie de transgression des lecteurs. Cela faisait du roman (forme fictice
pour excellence) un genre très nuisible, ayant un potentiel de « danger individuel et intime » stimulant les
instincts les plus bas de l’être humain,

L’auto-conscience du roman en tant que genre autonome par rapport aux autres genres, ayant des spécificités
précises arrivera, comme on a déjà un peu anticipé, justement au XIX siècle, avec des œuvres magistraux
parmi lesquelles :
- Stendhal (Henry Beyle), Le Rouge et le noir. Chronique de 1830 [1830].
- Gustave Flaubert, Madame Bovary [1856].
08/03/2022 - 09/03/2022

LE XVIII SIÈCLE
L’époque des Lumières ?
On parle des Lumières en se référant à une sorte de mouvement culturel au sens large (vu qu’ils n’ont pas de
manifeste), même si serait plus correcte définir cette courante un nouvel approche à la connaissance. En
effet, ils ne s’occupent pas au sens strict d’art, ou mieux, pas seulement : ils créent plutôt un modèle
d’approche au savoir bien différent de ceux qu’on avait considérés dans ces derniers siècles.
Il s’agit d’une vraie et propre nouvelle méthodologie de produire de la culture, du savoir dans la vie civile et
politique.
Mais avant d’analyser plus en profondeur les caractéristiques de cette nouvelle courante, il est nécessaire de
déboulonner le mythe le plus diffusé sur ce siècle : les Lumières ne coïncident pas entièrement avec cette
période. Ou mieux : c’est vrai qu’ils ont un rôle fondamentale au XVIIème siècle, mais cela ne veut pas dire
qu’il monopolisent la scène littéraire et la pensé de l’époque. Il y a de nombreuses autres éléments
intéressant à étudier et n’en tenir pas compte porte au risque d’avoir une vision aplati et stéréotypé du siècle.
Il n’est pas un mouvement hégémon.

2 La fonction de ce texte est différent par rapport à ce qu’on s’attend d’un conte du XVIII siècle. En effet, il n’a que le
but de présenter des spéculations philosophiques : ce sont les ans des « romans à-these », où l’intrigue a la seule
fonction de mettre en scène la pensée et les opinions philosophiques des auteurs. Donc la fiction, même en se déclarant
en tant que tel, se distancie de la fonction du divertissement qu’on attribue au roman à partir du XIX siècle, quand on ne
les lira pas pour savoir la pensée d’un auteur : le roman ne devrai pas avoir une morale, on ne l’attendra pas en le lisant.
Périodisation
Comme on avait anticipé, les Lumières en tant que mouvement culturelle ne coïncident pas avec la totalité
du 1700.
En effet, le siècle s’ouvre encore en plein despotisme : Louis XIV est vivant et les derniers année de son
empire sont ceux les plus durs, on assiste à une stricte censure et à une centralisation extrême du pouvoir.
On peut donc considérer sa mort comme la véritable date de début du siècle : c’est le 1715, date de début de
la Régence de Luis XV. Roi moins « absolu » que son prédécesseur, son règne marque le début d’une époque
nouvelle, extrêmement mondaine, galante et assez tolérante. Il s’agit d’une grande rupture avec le passé le
plus proche, une époque où le rationalisme typique des Lumières n’a pas encore pris le relais sur le concept
de passion et de romantisme qui vient de l’étranger : l’ère de Marivaux, galant, ironique et extrêmement
mondain ; ou l’ère de L’Abbé Prévost, passionnant et le romantique.
Légèreté et culte de la passion sont en ce moment au centre de l’intérêt littéraire.
Mais cette époque joyeuse et sentimentale n’est que le préambule à l’Époque des Lumières, dont idéaux
acquièrent plus en plus d’importance à partir de la publication du premier volume de l’encyclopédie (1751)
jusqu’à l’éclat de la révolution française (1789).
Mais entre 1767 et 1776, on assiste à une phase (suivante la fin de la guerre de 7 ans) de profonde crise pour
les Lumières : en effet, terminée cette guerre d’intérêt mondiale, les caisses du royaume sont vides, comme
dans toutes les payses, ce qui signifie haute des impôts. C’est donc une époque de révolte, troublée par des
violences spontanées qui sont un peu partout réprimées dans le sang, et cela constitue un vrai tournant pour
le lumières : le projet du despotisme/ monarchie illuminé cède la place à un pouvoir monarchique qui montre
son vrai visage. Un visage obscur et injuste. C’est un pouvoir imperméable aux instances venant du bas, à
coté duquel on ne peut plus imaginer la coprésence des philosophes comme conseilleurs du roi (despotisme
illuminé). Voltaire, par exemple, passera pour ce motif la plupart de sa vie à l’étranger.
C’est le commencement d’une phase descendante des Lumières, qui se terminera avec la Révolution.
Mais attention ! Il faut rappeler qu’il n’existe aucun rapport directe entre les Lumière et Révolution
Française : en effet, presque tous les philosophes étaient réalistes (leali) à la couronne, monarchiques
convaincus, et en plus, ils étaient tous morts à l’époque de la révolution. Aucun à pu prendre la parole à
propos de la violence sociale et politique comme projet à mettre en place.

De toutes manières, déjà les idées générales qui permet de définir les Lumières en tant que tels mettent en
évidence les contradictions de cette époque : la grande hétérogénéité à l’intérieur de ce « group » fait de
manière que l’envie de nouveauté s’heurte avec des principes à la base de l’Ancien Régime, supportés par
certains personnalités des Lumières.

1. LA RAISON ET LA CONNAISSANCE
Le culte de la raison a ses racines en profondeur, donc déjà dans la première période du siècle, la période
joyeuse, légère et galante. C’est voire à partir de la première moitié du XVIIème siècle, avec le rationalisme
de Descartes (« le sujet comme seul connaisseur du tout »), grand-père des illuministes avec Galilée (« la
méthode expérimentale »), qu’on peut remarquer des symptômes.
Mais ce sera seulement à la fin du XVII siècle qu’on assistera aux premiers œuvres de spéculations
rationalistes : on en fournit un exemple Bernard le Bovier de Fontenelle en 1686 avec son « Entretiens sur la
pluralité des mondes »3. Il s’agit d’un dialogue sur le model platonicien et la possibilité de trouver des
planètes avec des autres formes de vie intelligentes : pour une des premières fois on fait preuve d’un
relativisme absolu. Il ne s’agit pas seulement d’accepter la possibilité d’autres formes de vie, mais aussi
d’appliquer le concept de géo-déterminisme (caractéristiques de la planète) pour imaginer ces créatures, qui
se sont adaptées et moulés à ce contexte. Si n’est un exemple de triomphe de la raison tout cela…
En effet, on parle d’une sorte de vraie et propre pré-illuminisme. L’autre grand auteur est Pierre Bayle, qui
écrit « Pensées sur la comète » en 1682, œuvre où l’on s’interroge sur la possibilité que les astres ont une
influence sur les comportements des êtres vivantes et sur la terre.

3 Le texte n’a pas une grande scientificité, mais l’approche au savoir est différente : en ce cas, la capacité imaginative
l’emporte, et voire exclue le dogmatisme chrétien, en abandonnant même seul hypothétiquement l’idée que nous
sommes le résultat unique et parfait des projets d’un Dieu créateur. C’est courageux.
Avec ces prémisses, on comprend donc avoir une confiance absolue sur le concept de raison dans la période
illuministe: pas seulement comme manière de connaitre, mais surtout comme manière de défendre certains
valeurs (justice, bonheur4 et individualisme).
L’exercice de la raison porte à la naissance de deux concepts bien opposées et apparemment contradictoires:
les vérités objectives et les opinions, qu’en réalité coexistent bien en ce siècle et voire s’impliquent: il n’y a
pas d’opinion qui ne soit fondé sur un type de vérité.
- En ce qui concerne le concept de VÉRITÉ, en effet, il faut faire référence à la volonté d’entreprendre
une manière de connaitre qui soit bien fondée sur l’investigation scientifique de la nature.
Si, par exemple, au XVII siècle il était interdit de faire des autopsies à cause du « ipse dixit » et du
concept de « auctoritas » - c’est-à-dire que tout ce que pouvait être connu avait déjà été exploré et
normé - le XVIII siècle veut mettre en crise ces postulées-là, en affirmant le « droit à la mise en
doute pour explorer la connaissance ».
« Sapere aude » est la nouvelle devise : il faut avoir le courage de connaitre, oser, en investiguant à
travers l’exercice de la raison et du doute (le scepticisme).
La fin du XVII et le début du XVIII siècle c’est la grande époque de Mesmer. Il était un médecin
allemand qui théorisait la présence dans l’homme d’un potentiel cognitif et physique incroyable, qui
pouvait être libéré seulement à travers la canalisation de son champ magnétique. C’est pseudo-
science aujourd’hui, mais à l’époque ces étaient des théories expérimentales (mouvement du
Mesmérisme). Ici d’illuministe on trouve la pensé que l’homme puisse avoir un potentiel cognitif
pas encore exploité au maximum, la possibilité de connaitre tous. Sans celui-là, sans le Mystique de
Swedenborg et toute une séries d’autres phénomènes pseudo-scientifiques, on n’aurait pas cette
conception post-humaniste d’homme capable de recueillir en soi tout le savoir de l’existence
- Au même temps, toujours pour esprit de lutte contre tous formes de règles imposée, on ressent le
besoin de revendiquer le droit de manifester de manière publique sa propre OPINION, que peut se
formuler grâce à l’esprit critique fruit d’un raisonnement. C’est le siècle du relativisme : avec des
résultat pas toujours satisfaisant, on s’effort de même de regarder le monde avec les yeux de l’autre.
Les dégrées de connaissance sont maintenant ouvert à un éventail bien plus nuancés de l’ipse dixit : on part
de l’idée de vérité absolue, on passe pour le droit d’opinion, et on arrive aussi à la possibilité de la MISE EN
DOUTE.
Cette dernière est à nouveau étroitement liée à l’idée d’affirmation des capacités rationnelles d’une personne,
vu que c’est grâce à l’expérience personnelle qu’on peut mettre en doute des connaissances apprises de
manière automatique.
De même qu’à la renaissance, le XVIII siècle à un caractère d’énorme anthropocentrisme : l’homme et
l’humanité est au centre (« Critique de l’esprit » de Kant). La raison humaine peut tout connaitre et
concevoir, pas de secret et lorsqu’on parlera de « mesure » on fera référence à la capacité de l’esprit humaine
de comprendre le réel.

2. LA LIBERTÉ : LE SAVOIR ET LA POLITIQUE


L’envie de liberté se décline principalement à partir du domaine du savoir.
• On assiste à une vraie et propre lutte contre tous dogmes en faveur d’une connaissance expérimentale
fondé sur la raison (comme on a déjà vu).
• La liberté porte comme directe conséquence l’affirmation du célèbre principe illuministe de tolérance, ce
qui aura aussi des importants effet sur la politique et la religion, au de-là de la culture. En réalité, comme
on verra, le concept n’est pas si égalitaire au point qu’on s’attendrait aujourd’hui..
À l’époque est impossible de descendre entre littérature et philosophie : le premier terme est assez large pour
tout contenir. Pour ce motif, on utilise « philosophe » presque comme synonyme d’illuministe.
Cette envie de liberté lié à la connaissance se décline de manière plutôt problématique dans le domaine
politique.
D’une cote, on à des idées démocratiques tout à fait révolutionnaires pour l’époque :
• L’ indépendance de la culture vis-à-vis du pouvoir devient une nécessité fondamentale d’affirmation de
la liberté des artistes : en effet, aux XVI et XVII siècles, la culture officielle était étroitement lié au

4 Le bonheur n’est pas nécessairement à entendre au sens strictement spirituelle, mais aussi physique et sensuelle ( dans
le sens de « sexe » mais aussi « fondé sur les sens »).
pouvoir à cause du mécenatisme. Mais à partir des Lumières, les intellectuels ne seront plus obligées à
avoir un trait d’union direct avec la couronne. Les Philosophes se perçoivent comme les hérités des
humanistes de la renaissance, mais avec ce trait en plus de liberté dans leur rapport avec le pouvoir (ce
qui n’est pas possible pour les humanistes), libres, et faisant partie d’une communauté internationale des
savants : la Res-publica litterarum, un réseau qui dépasse toutes frontières politiques et qui permet un
échange d’idées libres et rapides.
• L’engagement civile pour les droits de l’homme est fondamentale: ils professent et demandent un
minimum de lois et droits répandues de manière égalitaire dans la société dans la dimension sociale
(mais attention, pas nécessairement du point de vue du pouvoir politique).
On a aussi des mythes et des modèles auxquels on s’inspire :
- Sparte, pour sa sobriété et la rigueur de la démocratie contre le luxe et la corruption décadente
d’Athènes. Il est donc un exemple d’exercice du pouvoir, de discipline et respect des citoyens, comme
méthode de résistance à la corruption.
- Pays-Bas, comme ensemble de cité-état soumises à un système politique de confédération de marchants.
En effet, à l’époque, le pouvoir monarchique sur les pays bas était assez souple, ce qui constituait un
immense répertoire de circulation des textes5.
- États-Unis, en particulier les 3 colonies anglaises, premiers « proto-états », fédérations, donc exemple de
population qui parvient à réaliser de manière complète le passage d’état de sujets (sudditi) à citoyens : la
différence entre les deux est que le sujet n’a aucun responsabilité dans l’exercice de la liberté, tandis que
le citoyen a une responsabilité civile, ce qui engage aussi des droits qui lui sont garantis.
- Angleterre (et on parlera aussi d’Anglomanie) : après la « Glorious revolution » du XVII siècle, ce pays
est le seul au monde qui a une forme de monarchie fondée sur la séparation du pouvoir : on a le Roi mais
aussi la Chambre. Pour la première fois, on commence à mettre en crise la légitimité du pouvoir absolu
du roi.
Ces mythes politiques ouvrent les débat sur les formes du pouvoir, sa légitimité, les droits des citoyens, les
limites de la propriété privé et du pouvoir monarchique. On en avait besoin, pour le fait que le siècle était
fondé sur le despotisme.
Mais alors pourquoi on parle de domaine « problématique » ?
Les philosophes ne constituent un group cohérent et cohése comme l’on peut penser. Ils ont des divergences
mêmes extrêmes, constamment marquée par conflits et opinions radicalement différent surtout du point de vu
religieuse (il y a des catholiques convaincus et des athées) mais surtout politique au point.
En effet, si plusieurs Philosophes6 ont, à la fois, une vision démocratique de l’état qui vise à mettre en
pratique les valeurs si dessus énoncés, c’est la monarchie (ou mieux encore, le despotisme illuminée) à est
considéré la meilleure forme de gouvernement possible. Les démocratiques ne constitue qu’une minorité :
c’est vrai que Rousseau voulait la démocratie directe alors que la plus part des Lumières, comme Voltaire,
sont favorables à la monarchie ou au despotisme illuminé.
Pour ce motif les attentifs sur des réformes, sur un engagement civile à cause de la grande rationalité de
l’époque sont souvent déçues.

Le jusnaturalisme
Dans le cadre juridique on parle d’un concept très proche du Déisme religieux (qu’on verra après) : le
Jusnaturalisme.
Au XVIII siècle, presque tous les peuple sont sujets à des formes des droits positifs, c’est-à-dire imposés,
toutes avec des législations différentes entre eux. Le Jusnaturalisme concernerait l’idée qu’il existe, au fond
de toutes loi ( manifestation d’un pouvoir dans un temps et un espace) des valeurs qu’il faut reconnaitre
comme absolu et fondamentaux. Cela peut sembler paradorsal pour une culture qui fait du relativisme son
drapeau, mais il y a même un peu de Platonisme dans le Lumières : tous droits comparés ont des principes
commun, ce qui signifierait une forme de justice dépassant le temps et l’espace, qui retourne dans chaque

5 Ici on peut imprimer ce que l’on veut sans le privilège du roi. En France, au contraire, on le pouvait faire de manière
extrêmement plus limité : le privilège n’était pas obligatoire mais sans celui-là il était simple que l’œuvre finissent à
l’index des livres interdits. On fait rentrer les textes étrangères de façon illégale.
culture que les manifestent d’une forme différente. L’existence de ces principes universaux constitue un défi
ouvert au pouvoir constitutionnelle (la monarchie, dans le cas de la France) : en ayant des idées universelle
de justice, égalité et liberté préexistantes à toutes formes de droits positifs, qui devraient pénétrer dans
l’esprit des souverains, leurs pouvoir est de faite limité.
La plus part des Philosophes sont donc favorables aux formes absolu de gouvernement exactement pour ce
motif-là : le souverain peut être illuminé par ces idéaux, grâce à l’aide des Philosophes7.
Le fait que les décisions soient dans les mains des hommes remet tout en cause : les hommes ne sont plus
seulement des sujet, qui doivent accepter de manière passive une quelque forme de Droit absolu et divin. On
se rend compte qu’il faut devenir des citoyens, qui disposent d’une opinion publique et que peuvent
influencer, avec leurs choix, la vie politique de son propre pays.
Cela change considérablement même la conception de l’histoire qu’on avait à l’époque : on commence à la
considérer moins comme une succession de choix des puissants ou une série de batailles et conquêtes faites
d’un roi, pour s’ouvrir au contraire sur des histoires sociaux, plus proche du petit peuple. Cette vision de
l’histoire pose toujours plus attention aux traits culturaux et les peuples et les civilisations sont les vrais
protagonistes.
Nicolas-Antoine Boulanger, ingénieur et philosophe français exposant des Lumières, écrit en
1766 « L’antiquité dévoilé »: dans ce texte, la méthode appliqué par l’auteur – la même qui va utiliser Walter
Scott dans son roman historique8 (notamment l’« Ivanhoe » du 1819) – concerne une manière de se rapporter
à l’histoire de façon toute neuve, basé sur la vraisemblance. Ce dernier principe devient le pivot du genre du
roman ; nait de l’opposition vrai/faux, il vise à produire ce qu’on appelle un « effet de vérité » : on a
l’impression que les éléments à l’intérieur de l’histoire soient possibles, on se force de reproduire un monde
où les actions des personnages soit raisonnables. Ce qui soutient les échafaudages (impalcature) n’est vraie
ou faux, mais possible, au sens plus large à entendre (même les mondes du merveilleux sont aussi
possibles) : il suffit qu’il y ait une cohérence fictive à l’intérieur d’eux-mêmes. L’écart avec le monde réel est
peux important.
► Charles-Louis de Secondat ou Montesquieu : le Contrat sociale
Certains philosophes perçoivent l’ensemble des citoyens organisés dans la société comme un pacte : cela
c’est parce que dans un certain sens on vie en société entre nous selon des règles qu’on décide de suivre.
On abdique donc à toute une série de libertés en faveur d’une protection par rapport à des autres dangers.
Le concept de « Contrat social », bien développé et indagué par Jean-Jacques Rousseau, remonte en réalité à
la figure de Charles-Louis de Secondat, mieux connu comme Montesquieu ( considéré pour ce motif aussi un
des pères du Jusnaturalisme). Dans son célèbre œuvre « L’esprit de lois » (1748), pour la première fois on
compare les peuples entre eux en prenant en considération aussi leurs formes de gouvernements et leurs
dérives (c’est-à-dire leurs possibilité d’être corrompus). On parvient à la conclusion, selon le Philosophe, que
la forme de gouvernement la meilleure serait la monarchie constitutionnelle, fondée sur une divisions des
pouvoir qui puisse garantir le respect des principes fondamentaux de justice, subjacentes à tous formes des
lois. Il faut que le droits soient devisées.
Un autre élément à prendre en considération est le fait que si la société est un pacte, en tant que tel, il peut
être rompu, avec le choix pourtant de vivre en isolement complet de la société, dont les philosophes en ont
souvent marre. On la trouve inadéquate à nos nécessités, si on est des hommes avec une sensibilité spéciale :
c’est le préambule à « la génie » du romantisme.

7Notamment Voltaire croit dans la possibilité d’un « despotisme illuminé », qui prévoirait que le souverain
ait des axes de conduite dans son comportements liée aux principes jusnaturalistes.

8 Si en France on a encore des problèmes à rendre autonome le discours romanesque, en Angleterre on commence à
délinéer son indépendance par rapport à des autres genres de discours : Walter Scott ne veut pas faire un calque de
l’histoire connue jusqu’à ce moment-là. Son style est extrêmement lourd et sa prose riche en détails devrait rendre
vraisemblable son monde (comment on s’habillait, ce qu’on mangeait). On a donc toute une série d’éléments vrais qui
font de base à des événements fictionnels.
En plus, Walter Scott situera l’action dans un passé plus ou moins récent, en focalisant son intérêt sur les personnages
les plus humbles. Leurs histoires résultent donc possibles mais pas historiques, factuel.
L’invention romanesque contribue à constituer un personnage probable mais qui n’est pas existé.
Si on rompe le contrat avec la société, de toutes manières, il faut se demander quel est le motif que nous
pousse à vivre en société. « L’esprit des lois » n’est pas le meilleur contexte pour envisager ce thème là et
Montesquieu le fera plutôt dans une autre ouvrage, « Les Lettres Persanes » (1721)9. Ce roman en forme de
recueille épistolaire compte quatre lettres au début du texte dédiées au mythe utopiste des « Troglodytes » :
elles peuvent être lues de manière indépendantes et l’auteur utilise la forme narrative pour indaguer et
justifier la nécessité de l’homme de vivre en société.
Dans l’épisode du troglodyte on décrit l’état de l’homme à ses origines, quand chacun vivait pour sa même,
en représentant un péril les uns pour les autres (Hobbes, Homo Homini Lupus) ; c’est pour se garantir une
protection réciproque que l’homme décide de s’allier, de vivre finalement en communauté. Quoi que les
troglodytes commencent à vivre en société, ils vivent dans une sorte de Démocratie directe : mais le bienêtre
garantie par cette vie en commune fait qu’ils soient de moins en moins intéressés à respecter leur rôle de
citoyens. Le problème surgie quand les bénéfices sont tels qu’on oublie la responsabilité civile : on décide
alors de déléguer tout le pouvoir à un homme, qui dévient le chef absolu de la communauté (des
troglodytes en ce cas). A la dérive, le peuple perd à peu à peu tous les bénéfices que la vie en commune leurs
avait garanti, vu que ce chef dévient toujours plus un despote.10
Pour ces motifs la démocratie se démontre une structure imparfaite, qui ne garanti le fonctionnement du
système elle seule, en représentant le risque de la vie en société qui a un effet de corruption sur l’homme.11
Cette lettre c’est un unicum dans la littérature du XVIII siècle : on est en train de raconter une histoire à
thèse (donc avec des fondements philosophiques ) où la description des institutions est dynamique. C’est une
allégorie qui n’est pas figées, mais inséré dans un dynamisme historique, avec la corruption et
transformations institutionnelles, culturelles etc.

3. LA LIBERTÉ : LA SOCIÉTÉ ET LA LITTÉRATURE


Ce siècle est caractérisé par un style de vie extrêmement mondain des artistes: les Philosophes sortent les
soirs, fréquentent les salons où il y a des échanges d’idées et d’opinions, les soirs, dans les cafés. On se rend
compte qu’il n’est pas seulement important de développer des discours raisonnés, avec du contenu, mais il
faut aussi savoir entretenir l’auditoire, les intéresser, curer la forme. Le culte du savoir-faire est fondamental,
la galanterie et le plaisir sont de plus en plus importants.
Les œuvres littéraires de l’époques ne sont pas immunes à cette mondanité : la littérature libertine
commence à circuler beaucoup et l’Eros en est part intégrant.
Ce culte du plaisir rend le XVIII siècle une période donc de vrai et propre libertinage : mais dans ce siècle de
contradictions c’est nécessaire souligner la dualité même de ce terme. En effet, il ne faut pas entendre le
libertinage seulement comme « liberté sexuelle » (même si le topos de l’érotisme était bien utilisé comme
forme de contestation sociale), mais il s’agit aussi d’une étouffement des sentiments.
Dans le premier cas, on assiste à la liberté de reconnaitre au plaisir érotique une dimension civile et politique,
en utilisant les thématiques du corps et du plaisir comme métaphores pour parler de la société, en dénuant
une sérié d’hypocrisies.
Dans le seconde cas, le libertin est une direct conséquence de l’homme illuministe : le libertinage se base sur
la capacité de réprimer toutes les émotions. Leur rêve est contrôler les émotions avec la raison pour se
garantir le plaisir intellectuel de la conquête. La manipulation de l’autre à travers la raison, pas des réponses
émotives.
De la Bretonne, qu’on envisagera mieux comme auteur d’utopie (« L'Andrographe ») est aussi auteur d’une
série de romans héroïques (« les nuits de Paris » ou « Le pornographe » ) : ici on assiste à une représentation

9C’est intéressant de remarquer comme la fiction, en ce cas, sert à raconter une histoire qui veut démontrer
une thèse philosophique, une position. C’est une narration à thèse.
10Ici, l’épisode des troglodytes est inséré dans un contexte narratif, ce que généralement les utopies n’ont
pas : on est souvent bloquées dans un présent éternelle sans problèmes. Même pour cela, en réalité, cette
histoire se transforme finalement dans une dystopie.
11Ici s’insérera Rousseau : dans une société individualiste où chacun pense aux libertés que la vie en
commune lui garantisse, on risque d’avoir la tentation de déléguer le pouvoir, ce qui peut porter au
despotisme et à la perte des bénéfices.
du sexe au limite du documentaire. Le but est toujours le même : la critique sociale, une forme de dénonce de
la dégradation morale mais, cette fois, les Philosophes. Ils ne devaient pas être autant progressistes comme
ils se professaient s’ils ne décrivaient de manière explicite même les formes les plus sensuelle de l’acte
amoureux. En effet, les auteurs libertins se concentrent sur des formes considéré immorales civilement et pas
à niveau de la morale: pour ce motif ils sont plutôt moralistes.
Fait encore plus dérangeant à l’époque est que ses œuvres étaient toutes fruits de ses expériences directes,
donc même les actes sexuelles sont à considérer tel.
Il sera l’écrivain préféré des modernistes et des avanguardistes, même pour la coexistence dans ses œuvres
d’une série de contradictions qui suscitent la critique : style classique qui se juxtapose à un registre humble,
même l’argot ; la représentation du réel est si exacte que l’on présente la Bretonne comme un des précurseur
du réalisme du XIX siècle.
Toujours dans la vague libertine, il est aussi l’auteur d’une réécriture du « Paysan Parvenu » de
Marivaux, « Le paysan perverti » : ici, toutes attention sociale est liée à la capacité de satisfaire les femmes
de plus en plus influentes de la société.
Parallèlement à cela, on remarque donc l’adhésion à toute une série de philosophies et religions libertaires :
- Rationalisme : liberté d’utiliser la raison
- Déisme : refus de toutes religions positives - dans le sens d’imposé, qu’il faut accepter de manière
acritique comme un système de concept figé. Le déisme c’est la croyance dans un être supérieur, mais le
rapport avec lui est absolu, libéré de n’importe quel rituel.
- Sensisme : aucune idée donné ne se trouve dans l’homme à sa naissance. On n’apprend que par
l’utilisation des sens. Une étape fondamentale des études Illuministes est l’étude des auteurs de
philosophie inductiviste, comme Locke, Humes - même Galilée, si l’on veut.
- C’est l’aube du matérialisme philosophique : la vie est le résultat d’une série de dynamique humaine,
tous ce qui arrive est le résultat des événements, comme d’une machine. Pas de déterminisme, rien est
déjà écrit.
Ce dernier aspect en particulier ne peut que renvoyer au concept du libre arbitre, qu’on peut bien encadrer à
niveau sociale et historique avec l’arrive de l’industrialisation (automatisation du travail).
C’est donc évident la nécessité de commencer à envisager des thèmes liés à l’inégalité entre les hommes, le
nouveau pouvoir économique, ce qu’implique aussi le concept d’exploitation, dynamiques déjà actives dès la
première révolution industrielle (même si seront extrémisées seulement au XIX siècle).
On peut nous concentrer sur ces derniers aspects pour introduire un thopos bien présent dans la pensé et la
littérature illuministe (surtout celle tendente au préromantisme) : le mythe du bon sauvage.
Il se base sur l’idée que la société, telle qu’elle est, corrompe les hommes. Donc si d’un côté on a besoin des
réformes, d’intervenir sur le réel surtout politiquement, on a aussi un certain besoin de régression à l’état de
nature, comme un « sauvage » qui, en vivant en cet état, est essentiellement bon.
C’est une vision extrêmement myope des autres : en effet, mêmes les sauvages de l’antiquité construisaient
des structures sociale. Ce mythe rompe la tradition Hopsienne de « homo homini lupus », selon lequel
l’homme est disposé à tout pour sa propre survivance à cause des impulses individualistes que le poussent à
être même violent.
L’état de nature imaginé par les lumières, donc, n’existe point, ce qu’on peut relater aussi à un autre élément
fondamental à l’époque : le concept d’Orientalisme. Il s’agit de la fascination pour l’ailleurs, en ce cas au
point pour l’orient. Mais il ne s’agit pas du vrai Orient au centre de leur intérêt, mais plus une version
stéréotypé et idéalisé de l’Orient qu’on avait dans l’occident à l’époque. C’est un besoin de suite, qui
s’oppose à l’intérêt pour la situation politique et sociale de son propre pays : l’ailleurs permet de jeter un
égard critique au contexte sociale et historique français en réalité.
C’est juste en 1704 qu’Antoine Galland traduit « le mille et une nuits », texte composée en plusieurs phases
et la série d’histoires que constitue cette œuvre collective proviennent de siècle différents. Il va en effet
ajouter des textes (pasticher, textes avec le style de l’œuvre)

En ce qui concerne le point de vue littéraire encore, l’envie d’avoir une influence directe sur la société de la
partie des Philosophes trouve son débouchement dans la création des mondes idéales pour souligner tous ce
qui ne marche pas dans le monde réel. C’est le siècle de la littérature utopiste.12

12 Du grec « ū » (non) et « tópos » (lieu), ce qui de fait signifie « endroit qui n’existe pas ».
Ce genre littéraire, ou mieux cette tendance se propage13 toujours plus dans un siècle où ce qu’on écrit doit
avoir un poids dans la vie culturelle et civile (engagement). Même si le fait de se réfugier dans des univers
qui n’existent pas semblerait un trait inconciliable avec l’engagement politique que souhaitent les Lumières,
en réalité ce n’est pas comme-ca. Le fait de décrire des mondes imaginaires permet de se créer un espace
littéraire privilégié. Donc attention : l’utopie n’est pas un refuge pour échapper au monde, mais un espace de
fiction fonctionnel à une analyse de ce qui ne fonctionne pas dans le monde réel et en plus d’envisager autres
formes de gouvernements possibles. On parle d’idéalisme et espoirs dans les utopies.
Même si moins fascinant littérairement de la dystopie, elle propose un pars construens14.
Un exemple d’utopie intéressant de l’époque est surement « La découverte australe » de la Bretonne (1781) :
cela raconte, au point, la découverte d’une partie du monde inconnue jusqu’à ce moment-là. Ici, les hommes
vivent dans le respect absolu des idéaux de fraternité, égalité et engagement civile, guidés pas la raison.
Un autre exemple c’est « Paris en l’an 2440 » (1771) de Mercier, premier texte de science-fiction de
l’histoire.
Mais le genre de l’Utopie présente en réalité deux grands problèmes.
Le premier concerne le fait que le type de représentation imaginaire des mondes parfaits n’offre en réalité
aucune possibilité de amélioration, aucun suggestion pour un débat, même pas des solutions réalistes. Et s’il
n’y a pas des problèmes, il n’y a pas d’histoires : l’absence de stimule, la simple mise en description des
valeurs des lumières, c’est assez stérile.
Le second problème est que la plus grand partie des textes utopistes ne peuvent pas concevoir l’existence de
la passion dans leurs mondes imaginaires : le triomphe de la Raison semble être inconciliable avec tous
sentiments, ce qui parait clairement impossible.
Il y a par quand même des textes dystopique qui commencent à prendre vie.
C’est l’exemple de Sade avec son « Aline et Valcour » (1791), histoire d’amour qui se déroule dans un
monde particulier. On est plus dans le cadre d’une dystopie parce que où vivent les protagonistes tous
renoncent à n’importe quel type de libertés civiles et politiques en faveur d’une société fondé sur la
satisfaction de tous plaisirs sexuelles, en n’importe quelle formes. Le plaisir sexuelle est métonymie (figure
rhétorique, la partie pour l’entier ) du plaisir plus général : on indague en gros le rapport entre plaisir,
bonheur et liberté, en remettant aussi en cause tout le discours sur le libertinage.
On commence donc à développer des formes narrative proprement fictionnelles, même s’ils ne sont pas
narratif, en se constituant plutôt comme des longues descriptions.
Le discours utopistes et dystopiques se démontres aussi utiles dans les questions contemporains : à l’époque, au
cœur du XVIII siècle, on assiste à un gros débat sur les colonies. En effet, après la conquête de l’Amérique du
Sud, on dispute sur la légitimité des présides des jésuites dominicains sur ce territoires. Qui soutenaient les
Jésuites, représentaient en manière utopiste ces colonies comme des paradis en terre, ou l’on conçus un monde
basé sur le travail commun, la distribution de son fruit et donc une société égalitaire (la réalisation pour les
Philosophes des principes qui devaient être appliqués aussi en Europe). Au contraire, les opposites (toujours entre
les Lumières) considéraient les colonies jésuites en Paraguay comme des dystopies, théocraties fondées sur le
dogre religieux, ou l’esclavage était légal pour l’exploitation de ces peuples soumises.15

Les influences littéraires étrangères


ANGLOMANIE ET « THE NOVEL »
Dû à l’Anglomanie, les événements littéraires anglaises ont une autre grande influence directe sur la France :
on importe chez soi une nouvelle littérature romanesque, consciente d’elle-même.

13 Ce genre ne se limite pas au XVIII siècle : on en avait déjà des exemples au XVI et XVII siècle, comme « Utopia »
de Thomas More (1516) ou « La città del sole de Campanella (1602) ». Il a seulement un fort éclate dans le XVIII
siècle.
14 « Pars construens » est une expression latine utilisée pour la première fois par Bacon au XVIe siècle pour indiquer
l’aptitude constructive et proactive à aborder tous les aspects de l’existence.
15Cette vision horizontale de la société, égalitarisme qu’on recherchait dans l’utopie et qu’on voyait dans les sud de
l’Amérique portent à concevoir l’histoire toujours moins comme une série de batailles et conquêtes faites d’un roi pour
s’ouvrir sur histoires sociaux . On s’intéresse à la vie quotidienne, aux mœurs et aux traditions des peuples, une histoire
qui veut être toujours moins hiérarchique (pag. 13).
En tout cela, un rôle fondamental sera joué par le « Journal des Savants », presse élitaire d’opinion qui
commence à présenter au publique certains auteurs anglais16 traduits en français, entre lesquels Swift,
Walpole, Fielding. Ces modèles sont extrêmement différents les uns par rapport aux autres : Fielding,
Richardson et Defoe sont les avanguardistes du roman réaliste ( « the novel17 »), qui rompe avec la tradition
et qui est plus proche de la vie réelle. Seulement ces peux modèles anglais trouveront un terrain fertile pour
pousser les racines en France, dans le contexte des illuministes : les textes anglais, pour leurs thèmes,
sembleraient avoir du mal à se trouver intéressants pour les Philosophes. En effet le panorama était bien
ample : Walpole c’est le père du roman gothique et de l’esthétique lié au merveilleux (fantômes, cauchemar),
qui influencera plutôt le romantisme français ; Swift, avec son « Tristram Shandy » expérimentent les
possibilités du discours romanesque de manière très moderne, une sorte de meta-narration dans un texte qui
réfléchit sur les potentialité du discours fictionnel18. Defoe encore, qui n’est pas seulement un des pères du
réalisme mais aussi, avec « Moll Flanders », de l’autobiographie fictive.
L’ESPAGNE ET LE ROMAN PICARESQUE
Les modelés anglais, comme on a déjà dit, ont eu une influence considérable au cours du siècle (et pas
seulement sur les Lumières) mais ne peuvent pas compéter avec l’influence romanesque plus forte de
l’époque : celle du Roman Picaresque.
Importé d’Espagne, il s’agit d’un genre de roman linéaire, avec peu d’intrigue et jouant plutôt sur une
juxtaposition d’épisodes tournant sur la thématique du voyage du personnage principal, un jeune acteur ou
vagabond qui mène une vie de liberté. L’intrigue effectif se pourrait considérer donc comme un
enchainement d’événements causale, souvent interrompu par des événements casuels (causalité et casualité).
On peut remarquer qu’en réalité ce genre présent plusieurs points en commun aussi avec la littérature
anglaise, à partir d’une caractérisation comique des œuvres qui donnent une tranche de vie – même si
fictionnalisé – des couches plus humbles de la société (saltimbanque, acteur errant). Pas d’idéalisation dans
la tradition picaresque en plus, de même que chez Fielding ou Defoe.
Alain René Lesage (1668 - 1747) doit sa célébrité en France aux textes qu’il produit en les tirant au point de
la tradition picaresque, entre lesquels se distinguent :
• « Le diable aboiteau » (1707) – qui s’inspire par « El diablo cojuelo » (1641) de Luis Vélez de Guevara.
Le texte raconte d’un jeune homme qui rencontre le diable, qui lui offre l’opportunité de renter dans les
maisons des personnes (le diable possédant une sorte de omniscience fictive) pour mettre en crise les vices et
l’hypocrisie des bourgeoises Parisiens.
Ce genre de texte est considéré partie de la tradition picaresque pour le fait qu’il s’agit d’un voyage (même si
dans le merveilleux ) et qu’on avance par épisodes : c’est une série de tableaux de la société parisienne
contemporaine. La figure du diable occupe une fonction qui est à la fois politique et sociale : son
omniscience dévient aussi une anticipation de l’omniscience du narrateur du roman réaliste du XIX siècle.
On pense qu’il y a quelque chose de diabolique dans le roman avec le narrateur omniscient. C’est quelque
chose de faux et néanmoins vraisemblable, c’est une sorte de mensonge, une fausseté. Dans une écriture qui
est proto-illuministe donc on observe (sensisme) ce qui se passe dans les maisons des autres pour en faire
une critique sociale, adressé à la société de l’ancien régime. Encadrer le diable ici s’agit d’une provocation,
surtout vu que le pouvoir du roi serait la conséquence directe du vouloir divin. La choix du diable donc n’est
pas aléatoire.
• « Gil-Blas », écrit entre 1715 et 1735, qu’on peut encore considérer roman fleuve de Lesage.
L’intrigue se base sur l’Espagne du Siglo de Oro comme miroir de la France contemporaine, avec la tendance
toute orientaliste de délocaliser le romanesque pour pouvoir, à son intérieur, critiquer la France.

16A susciter un certain intérêt sera en particulier Samuel Richardson, auteur de l’œuvre « Clarissa » (1748).
Celui-là est un modèle pour le préromantisme et le romantisme à venir.

On commence à définir une différence entre « romance », histoire des chevaliers qui pose les bases pour les
17

mélodrames populaires, et novel, qui essaye de devenir un calque du réel.


18« Tristram Shandy » se compose comme une autobiographie dont le lecteur ne connait pas le début, parce que le
narrateur retarde l’épisode de sa naissance. On fait de l’ironie sur les attentes de la prose fictionnelle, de laquelle on
s’attend un certain ordre et sur laquelle donc on a déjà des attentifs.
Autre grand protagoniste avec Lesage est l’Abbé Prévost, qui traduit Clarissa19 de Samuel Richardson.
L’abbé Prévost offrira le premier exemple français d’un roman où la passion de l’héritage du « romance »
(épopées et chansons de gestes) est mis à nu dans tous ses contradictions, hypocrisies et incompréhension
(vision très négative de la passion qui lui rapproche aux Lumières).
• « Manon Lescaut », histoire d’un amour malheureux picaresque inspiré par « Gil-Blas » de Lesage.
Le titre entier de l’ouvrage serait « L’hisotire du chevalier Grieux et de Manon Lescaut », première forme
romanesque accomplie avec un narrateur à la 3ème personne. De toute façon, il ne s’agit pas d’un texte
autonome, en s’insérant dans un texte fleuve de l’Abbé, « Mémoires20 et aventures d’un homme de qualité
qui s’est retiré du monde ». Manon Lescaut est une des clés de lecture d’une ouvrage plus grande, qui a un
coté biographique mais aussi de divertissement (comme on voit dans le titre complet du roman fleuve).
Ici la passion n’est pas quelque chose qui doit s’accomplir de manière heureuse : Grieux, chevalier rigide, ne
vit pas la passion avec bonheur mais comme si c’était une prison. Les sentiments c’est mal, c’est une forme
de chute morale tragique – en anticipant la grisaille du Philosophe complet, qui expulse toutes passions de sa
vie intérieure. La passion c’est de la corruption, au contraire de la tradition du romance où on accomplit
toujours la passion vu qu’elle donne une élévation morale et spirituelle l’homme qui l’éprouve.
Pas valeur axiologique positive de la passion ici donc, ce qui rend le personnage de Grieux toujours
extrêmement douteux : il doute du fait qu’elle puisse vraiment l’aimer, trop concentré sur la chute morale
entrainé par la passion. La vision des sentiments est tout-à-fait ambigus: on ne saurait jamais si Manon était
sincère ou pas, tous ce qu’on sait est qu’après sa mort, le chevalier retourne à la banalité da sa vie avant de
rencontrer le fille. Cette conclusion laisse implicitement voir un tin à la passion, même si s’achève sur un
triomphe malheureux de la raison. Il fait ce qui la raison lui dit, mais il n’est pas content finalement : même
si sauvé du point de vu morale, il est condamné à une vie de grisaille.
Manon Lescaut sera un modèle jusqu’au XIX siècle (racine par exemple du personnage de Madame Bovary).

La diffusion des romains anglais et picaresque a une influence importante en France même en ce qui concerne un
certain désenchantement vis-à-vis à l’expérience des épopées. On commence peu à peu à faire de la parodie de
l’esthétique poitrinaire hérédité de la premier littérature moderne (chansons des gestes, littérature des saints…) et cela
va avoir des conséquences considérables sur certains auteurs.

Les sentiments et les préromantiques


Mais quelle est donc le poids à attribuer aux sentiments dans le « siècle de la raison » ?
Dans cette époque, on commence aussi à associer l’intelligence au concept de sensibilité : en effet, on prend
en considération la capacité d’éprouver des émotions, et cela n’exclut pas l’intelligence. Ouvrir la voie aux
passions du cœur est aussi un symptôme d’intelligence donc, un peu comme à l’époque de la Grèce
ancienne.21 En effet, dans cette période plusieurs sont les éléments qui anticipent le romantisme : on parle au
point des préromantiques. Ils démontrent avant toute choses un renouvelé intérêt pour la période du Moyen
Age, où il sont convaincu pouvoir rechercher les plus authentiques racines de la sociétés. Plusieurs seront les
ouvres médiévales prises comme modèle pour les romans préromantiques, comme le démontre l’œuvre du
1761 de J-J. Rousseau, « Julie ou la Nouvelle Héloïse »22 - un recueil de lettre représentant le modèle pour
plusieurs œuvres romantiques (dans le sens de mouvement international tout court).
La raison pure qui triomphe donc est un mythe : il s’agit aussi d’un siècle des grands passions, d’amours
impossibles et d’histoires amoureuses bien compliquées.

19 Clarissa est harcelé par un le libertin, Lovelace, auxquelles séductions elle ne cédera point. La passion sensuelle est
lié à la vertus de la fille, en expulsant complètement la raison. Le sentiment, dans le cadre romanesque, joue un rôle
pivot : la sensibilité on la retrouvera dans Marivaux et Laclos, comme réflexe de capacité de l’intellect. Si on a des
grandes compétences intellectuelles on a aussi une forte capacité de comprendre les sentiments des autres et de se
laisser porter par la passion.
20 Encore une fois donc le discours romanesque n’est pas totalement autonome comme fiction explicite : on doit
l’insérer dans une fausse mémoire.
21On croyait que le centre de la connaissance dans le corp de l’homme était le cœur et pas le cerveau. Pour ce motif les
sentiments avaient une place importante dans les connaissances.
22« Abélard et Héloïse » est roman du moyen âge ou un prêtre et une none ne peuvent pas s’aimer. Pour ne pas tomber
dans la tentation sensuelle représentée par Héloïse, il décide de s’évier.
Ce sera toujours Rousseau qui écrira, entre les autres œuvres, « Rêveries d’un promeneur solitaire » (1782):
ici le protagoniste crave un profonde détachement de la réalité, en solitaire, refusant une société qui ne
comprend pas et de laquelle il ne se sent pas compris. C’est un peu le renvoi au mythe du bon sauvage dont
on parlait avant : en effet, le confins entre les Lumières et le préromantiques ne sont pas si nets. Rousseau
même se définissait un Philosophe.
Un autre anticipation du mouvement romantique dont s’occupent déjà les écrivains contemporains aux
Lumières (et à la fois les Lumières mêmes) est le sublime. Nicolas Boileau (autre Philosophe fortement
préromantique ) traduit en 1674 une œuvre de Pseudo-Longin appelée « Traité du sublime »23 : le sublime
c’est de la beauté, une expérience esthétique tellement puissante qui dévient transcendent, métaphysique. La
sensation du sublime est capable de plonger dans un ailleurs, dans un « monde autre » par rapport à celui où
l’on vit et qui remet en cause aussi l’idée d’un auteur en tant que Génie (ce que les philosophe ne
concevaient pas sur eux-mêmes : ils se considéraient plus des artisans du savoir, pas des génies), des êtres
ayant une sensibilité exceptionnelle capable de transformer leur sentiments en œuvre littéraire.
Mais cela sera plutôt romantique : il ne s’agit que des premiers anticipations de tout cela au XVIII siècle.
La littérature sentimentale
Si déjà dans Manon Lescaut on a abordé la thématique des sentiments mais encore dans un cadre de roman
picaresque, sont beaucoup les autres grand textes qui s’occupent de la passion.
Le roman sentimental dans la seconde moitié du XVIII siècle encouronne son chef de fil « Paul et Virginie »
de Bernardin de Saint Pierre.
Histoire d’amour qui met à son centre la passion, ici le degré de désillusion romanesque est par contre fondé
sur une idéalisation totale de l’expérience passionnelle (telle qu’on la verra à l’époque romantique vraie et
propre) : il s’agit encore une fois donc d’une critique à la passion et aux sentiments.
La courante préromantique et illuministe ici sont très étroitement liées : Paule et Virginie se déroule aux
Mauritius, ancienne colonie française (exotisme, trait des Lumières), où ils ont grandi et qui leurs donne la
capacité de vivre une passion pure, en accord au mythe du bon sauvage romantique (loin de la société qui
pourrait les corrompre). Seulement quand Virginie part pour Paris pour devenir une dame digne de ce nom,
leurs amour sera rompu : Paul attend le retour de Virginie, qui fait naufrage à peux de mètres de la cote et
elle meurt ennoyé sous les yeux de Paul, qui peut rien faire. Pas un roman à thèse, rien à voir avec cela, mais
il y a de toute façon une sorte de contrepasse quand Virginie se retrouve à Paris, qui se conclut avec la morte
d’elle dont l’âme à été corrompue par la société.
En ce panorama international, la tradition du roman « à la française » survivait et convivait avec les
nouveauté de l’époque. On est encore très liés à ce qu’on appelait la « Bibliothèque Bleu ». Forme primitive
de littérature de colportage apparue en France à partir du début du XVII e siècle, au XVIII siècle les grandes
littéraires savaient que la littérature, n’importe de quel type, se vendait encore porte à porte : on retrouve
pourtant roman picaresque côte à côte avec des adaptations des chansons des gestes, des vie des saints ou des
faits divers.
► Claude-Prosper Jolyot de Crébillon : la passion et le libertinage
Des autres perspectives sur la passion existent au-delà de ceux préromantiques dont on vient de parler.
Il y un autre auteur qui est intéressant du point de vue de la littérature sentimentale du XVIII siècle : Claude-
Prosper Jolyot de Crébillon, autrement dit Crébillon fils (le père, Prosper Jolyot de Crébillon était à sa fois
un poète et dramaturge français). Il est l’auteur d’un ouvrage intitulé « L'égarements du cœur et de l'esprit »
(1736 -37), fondamentale pour les romantiques. Même en se présentant sous la forme d’un journal intime
(donc œuvre de caractère fictif), dans la préface, fondamentale pour l’histoire du roman, il donne place de sa
vision à lui de la forme de roman et de sa fonction. Selon son point de vue, les récits romanesques ne
devraient pas raconter des événements tragiques ou extraordinaires : l’influence des formes théâtrales sur le
roman doit être interrompu, en lui permettant de suivre sa nature évolutive et viser a une représentation
exacte des sentiments. Il dit : « En ne parlant que du cœur, on donnera à ces pages le temps de la vérité ».
C’est une rupture considérable par rapport à la tradition de Lesage, où le principe du narrateur omniscient
avait été introduit : aucune vérité qui ne soit pas intérieure et individuelle pour Crébillon fils.
Dans ce texte, en plus, on ne trouve pas d’intrigue, dont on a la négation la plus totale en faveur du vraie seul
objet de pertinence du texte : la vie intime du personnage, sous forme de bilan d’une expérience intérieure.

23Pseudo-Longin est le nom donné par les modernes à un écrivain grec anonyme du I er siècle, auteur du Traité du
sublime (ouvrage qui a longtemps été attribué à Longin, philosophe et rhéteur grec du III siècle ap. J.-C. ).
La vicissitude est amoureuse et la femme protagoniste ne sera jamais décrite avec son nom de famille, mais
on fera référence à elle comme « la belle inconnue ». Elle ne se dévoilera jamais en tant que personnage, en
restant plat et ne constituant que le miroir des passions intérieurs du héros, qui n’arrivera jamais à la
connaitre.
En réfléchissant sur le titre, en autre, on peut remarquer que le terme « égarements » a une nuance négative :
en effet ici, comme dans Manon Lescaut, il y a encore une sorte de poids morale qui influence la passion, qui
empêche aux personnages de la réaliser en lui donnant suite. Comme pour le Chevalier de Grieux, la passion
est conçue comme une prison, une dégradation morale et spirituel ; mais la différence ici est que le
protagoniste de ce texte avoue toute sa passion refoulé à la page, à l’écriture intime. Même si la passion se
concrétise jamais dans le monde réel, on parvient à confesser, dans une certaine manière, le rôle de la
passion. Le ton de ce texte est léger, coquet, mais la conclusion est bien amère : l’œuvre se caractérise
comme le résultat d’une névrose. M. de Meilcour, le protagoniste, doit cacher son amour en société, et en
risquant d’exploser ne lui restent que les pages d’un journal intime pour se confesser et tout avouer.
Le contexte extérieur de mœurs est un cadre de refoulement total : ce qu’on montre en société c’est fiction.
La société a un effet corrompant sur les hommes, qui ne peuvent y survivre que déguisés (encore le mythe du
bon sauvage). Cette idée on la retrouve tout au début du roman , dans une scène où Meilcour et Versac, son
ami, discutent sur le sujet : la raison et l’esprit rationnel commencent à corrompre toutes formes des passions
le plus authentiques.
Le personnage, par moyen de ce refoulement des sentiments, devient aussi l'un des maîtres libertins les plus
célèbres: la passion est un mère acte stratégique, il ne faut pas tomber amoureux de sa « victime ».
Le libertinage déjà abordé dans le personnage de Meilcour, Crébillon le reprend et l’amplifie dans son œuvre
libertine pour excellence « Le Sopha » (déjà du titre, on comprend avoir une forte influence orientaliste24).
En se structurant comme une parodie de « Milles et une nuit » , ce texte s’enracinera profondément dans la
tradition libertine à venir.
Déjà dans le roman original en réalité il y avait une dimension sexuelle et de recherche du plaisir assez forte
(remontant l’œuvre à l’époque préislamique), mais Crébillon de sa part utilisera la sexualité comme utile
pour critiquer la société sous la régence, en plein style libertin.
L’intrigue du « Sopha » a comme héro un valet à la cour de Bagdad : il est dès premiers pages tué par le
sultan et son âme, au lieu de monter au paradis, par faute d’un magicien est cagée dans un sofa, duquel ne
sera libéré jusqu’au moment où il n’assistera au premier baissier du vrai amour sur lui-même. En attendant
celui-là, se passent clairement toute une série d’aventures sexuelles sur ce meuble: dans son cadre, la
sexualité met en exergue la tendance corruptrice de la société. La sexualité c’est le lieu privilégié de la
corruption, manipulation, jeux de pouvoirs très fréquents à la cour de Louis XV (avec ses maitresses
notamment).
Comme on disait donc, l’usage politique, civile et sociale de la sexualité est un trait fort libertin. La
représentation de l’acte n’est pas trop ou purement explicite quand même, mais se configure comme une
norme représentative contrôlé, sans vulgarité et dissimulé sous forme de dialogue. Le dialogue entre deux
personnages substitue la représentation de l’acte sexuel tout-cour. Le respect de la bienséance, du point de vu
superficielle au moins, n’a pu éviter de toutes manières quelques mois de prison à l’auteur, pour la critique à
la cour qu’on entrevoyait dans certains éléments.
La littérature libertine est très rarement amorale : au contraire ! elle peut être soit aussi trop moralisante…la
représentation du sexe ne constitue point donc une rupture avec la bienséance de l’époque.
La lutte entre la moralité, les mœurs, la bienséance et la passion, se font de plus en plus aguerris, mais pour
le moment la passion ne reste qu’un état de surexcitation qui crée seulement des problèmes aux personnages.
15/03/2022 - 16/03/2022
Les anti-lumières
Les Lumières, comme tous les mouvements culturelles innovateurs, ne manquent pas d’adversaires : on parle
en effet des anti-lumières. Il s’agit d’un mouvement culturelle pas uniforme mais qui trouve son point
commun sur la veine réactionnaire par rapport aux Lumières.
En faisait partie des intellectuelles, souvent catholiques et toujours monarchiques qui dans leurs œuvres
célébraient l’inconscience, l’occultisme et même l’exotérisme : bref, tout ce qu’on opposait à la raison. Ils

24La mode orientaliste débute avec la traduction et réécriture de « Le mille et une nuit » par Antoine Galland en 1704
avec des pastiches (pag. 8).
cultivaient un intérêt généralisé pour tout ce qui résiste aux explications scientifique et le personnage
du Faust de Goethe (1790) en est l’exemple le plus efficace. Source de critique vis-à-vis des lumières, celui-
là désire tellement tout connaitre qui est prêt à vendre son âme au diable pour obtenir la forme rêvé
d’omniscience (critique à la devise illuministe « Sapere aude », pag. 4).25
Il y a toujours une manque de confiance vis-à-vis de la raison en tant qu’instrument pour tout connaitre : il y
a quelque chose de diabolique dans la connaissance totale.
De toute manière, un peu du désir de connaissance totale Faustien trouve sa vrai manifestation par moyen de
D’Alembert et Diderot, qui, dans cette période (1751 - 1771)26, sont éditeurs (curatori) de la première
Encyclopédie, du grec « Un savoir qui fait un cercle », total. Il s’agit d’un projet ambitieux : c’est un savoir
vraiment complet, mais surtout un savoir qui ne connait plus aucune différence entre haut et bas. Il y a tous
dedans, en remettant en cause la hiérarchie des savoirs en rendant digne d’être catégorisé même les activités
humaines considéré les plus humbles. Dans une société bien hiérarchique, cette œuvre remettait en cause les
valeurs et les connaissances : il n’y a pas de différences entre les savoirs à son intérieur, comme n’en
devraient pas être entre les hommes. Ces idées-là, évidemment, rencontraient une forte opposition à
l’époque, mais malheureusement pour les Lumières, l’œuvre n’a pas une grande diffusion (et donc le pouvoir
contestatif attendu). En effet, les 17 volumes de la première encyclopédie sont publiées « in folio », c’est-à-
dire dans le plus grand des formé possible - et même le plus cher. Pour ce motif en réalité, ce projet de
recueille d’un savoir circulaire et total, sans hiérarchie, s’agirait d’un produit plutôt élitaire, pour un public
essentiellement cultivé et d’un certain contexte social privilégié qui aurait pu se permettre d’acheter l’œuvre.
Un autre moyen de contestation aux idéaux des Lumières était sans doute la presse.
Le XVIII, c’est le siècle où cette nouveauté technique devient un phénomène assez répandu, les premières
publications périodiques commencent à paraitre. Mais il s’agissait d’une presse extrêmement élitaire, une
presse d’opinion (on n’avait pas encore la conception de « medium d’information presque objective », de
chronique) utilisé fréquemment par les anti-lumières.
Les philosophes, par contre, utilisent préalablement les pamphlet pour divulguer leurs opinions : ce sont des
textes très courts et souvent écrit très rapidement à propos des questions d’actualité qui nécessitent d’être
prises en compte au moment, le plus vite possible. Il s’agit donc plutôt d’une publication occasionnelle, très
différent des périodiques. En plus, leur circulation était obscure, parce que par la plupart les pamphlets ne
jouissaient pas du privilège du roi : pour ce motif leur circulation était presque illicite. Sous forme de
pamphlets sortaient même des textes étrangers traduits. Leurs existence est donc de fondamentale
importance, parce qu’ils contribuait à constituer l’opinion publique grâce à leur circulation qui se soustrayait
l’approbation de la couronne.
L’intellectuel à un rôle important dans les évènements civils et il donne ses opinions à propos de ces sujets.
4. LA PHILOSOPHIE : L’INDUCTIVISME ET SES FORMES
Déjà au XVII siècle on avait assisté, en certains cas, au tentative d’appliquer une méthodologie rationaliste
même aux problèmes qui paraissent échapper à la raison ou au surnaturel.
D’autres parts, il faut qu’on s’interroge quand même sur la nature du rationalisme appliqué, car il ne s’agit
pas d’un concept philosophique forcement cohérent : on a plusieurs vision du réalisme. Et c’est justement le
passage du rationalisme cartésien à celui des philosophes inductivistes qui détermine un nouveau tournant
philosophique.
Mais C’est quoi la différence entre le rationalisme pur de Descartes et les Inductivistes ?
En Descartes, comme on avait déjà introduit précédemment, on fait confiance à la conscience humaine en
tant que telle : elle est capable de tout connaitre, même en absence de formes de stimulation. Il s’agit - le
rationalisme - de quelque chose d’inné dans l’homme, intrinsèque dans son esprit.
Les inductivistes (comme par exemple Hume, Locke, même Galilée si l’on veut) se trouvent aux pôles
opposés: ils croient que l’homme, à sa naissance, ne disposent d’aucune idée préconçue, qu’il est en effet
comme une sorte de table rase qui grandit dans ses expériences grâces à la connaissance du monde externe.

25 Déjà au début du siècle (1707), l’œuvre « Le diable boiteux » par Alain-René Lesage racontait d’un personnage qui se
laissait conduire par le diable dans les maisons des gens pour découvrir ce qui se passe dans ces lieux et dans les cœurs
des personnages qu’habitent ces maisons. C’est toujours le sujet du péril de la soif de connaissance sans limites.
26La longue périodisation n’est pas due au dimension de l’œuvre mais au fait que la publication avait été interrompu 3
fois : il constituait une offense au pouvoir du roi de publier, à son intérieur, même les savoirs les plus humble.
La raison assume les données du monde et le réélabore pour obtenir un interprétation : un manque
d’expérience, des stimules, conduirait à l’impossibilité de cette réélaboration.
Les textes de philosophie, au XVIII siècle, sont traduits et lit abondamment : « Essay concerning human
understanding » de Locke, texte expliquant les thèses sur la connaissances dont nous avons parlé, a un
enorme succès éditorial. Cet œuvre influencera énormément la philosophie de Voltaire par exemple, en
particulier la création de « Les Lettres Anglaises27 » ( où la forme épistolaire est utilisé pour présenter la
philosophie de l’auteur). Il se trouvera en exile plus ou moins volontaire en Angleterre pendant quasiment 12
ans et ici il vivra des expériences28 qui lui permettront de mettre à l’œuvre les côtés les plus rationaliste et
relativiste de sa doctrine: cette dernière prend la connotation d’une philosophie d’occasion, asystématique,
pour le fait au point d’être fondé sur des expériences épisodiques.

Les encyclopédistes
On a vu donc qu’avec le phénomène de l’anglomanie on peut rapporter la France à un pays qui représente une
alternative de succès au despotisme qu’on vivait à l’époque. Ce phénomène contribue pourtant à former une
nouvelle génération d’intellectuels, qui écrit sur l’Angleterre avec les attentifs d’avoir des conséquences en terme
de reformes en France.
Le climax de cette nouvelle génération d’intellectuels est le groupe des encyclopédistes29, qu’on avait déjà
introduit. Cette génération constitue elle-même le résultat le plus évident des conséquences de la philosophie
inductiviste sur le contexte français. L’équipe qui collabore est énorme, c’est toute une génération d’intellectuels,
dont la plupart sont des figures secondaires dans le système des Philosophes de l’époque - mais ne manque des
personnalités comme Montesquieu, Voltaire ou Rousseau.
Ce grand ouvrage, en réalité, est anticipé par deux paratextes :
• « Prospectus » de Diderot, qui se limite à illustrer l’organisation de l’ouvrage ;
• « Discours préliminaire » de d’Alembert, qui constitue une vraie et propre préface à l’encyclopédie, en
résumant et présentant aux lecteurs l’existence d’un système universel de la connaissance humaine. Ici, en
plus, on considère l’abandon du modèle de Descartes en faveur de l’Empirisme : tout ce qu’on connait on l’a
appris seulement grâce à l’expérience extérieure, donc d’une série de chiffres sensibles. Le rationalisme pur
est donc mis de côté, et l’inductivisme remonte grâce à son caractère au point fortement empiriste. La
métaphysique de la raison de Descartes (raison appuyé sur aucun donné physique) est abandonné en faveur
d’une connaissance conçue comme une art à cultiver, activité à élargir jusqu’à tout connaitre.

En France, certains Philosophes adoptent aussi le SENSISME, qui n’est qu’une dérivation de l’empirisme
anglais (fort constituant de l’Inductivisme).
L’abbé30 Condillac est un des grandes sensistes français, en refusant catégoriquement le rationalisme pur de
Descartes. Il écrira plusieurs textes qui montent sa prospective philosophique : « Essai sur l’origine des
connaissances humaines » du 1746 et « Traité des sensations » du 1754, par exemple.
Il soutient de manière convaincue que tous les phénomes mentales sont le produit des stimulation externes
projetée en nous à travers le sens : aucune idée préconstituée donc ( ni exotisme, ni mythe du bon sauvage).
Foi et sensisme à la fois sont difficile à conjuguer et en effet on retrouve aussi des figures telle que le Baron
d’Holbach (très proche de Diderot et ennemi de Rousseau), qui fonde sa philosophie sensiste sur le
matérialisme antireligieuse et athée. Dans son « Le christianisme dévoilé » et « L’essai sur le préjugé »
(1770), seulement quelques-uns entre ses pamphlets les plus extrême, sa philosophie sensiste se peint comme

27« Anglais » nous donne des informations du point de vue thématique, c’est-à-dire le grand intérêt, presque obsession
des Philosophes pour l’Angleterre. Seule monarchie constitutionnelle où on a un pouvoir qui s’oppose à celui du roi
(avec une division du pouvoir), l’Angleterre est un modèle de coexistence sociale tolérante, qui a une certaine égalité
civile et cultive une méthode de connaitre fondé sur l’expérience, en étant un pays très ouverte.
28 Les lettres traites donc des expériences réel du philosophe en Angleterre.
29 Le terme Encyclopédie remontait au concept de « Cyclopaedia » d’Ephraïm Chambers, donc encore une fois
Anglomanie et influence de l’Angleterre. Dictionnaire universel anglais en 2 volumes illustrés, la Cyclopaedia - ou
Dictionnaire universel des arts et des sciences - parut à Londres en 1728 et sa traduction en français conduisit à
l'élaboration de l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert.
30Plusieurs religieuses s’approchent aux théories des Lumières, même si on parle de l’homme comme table rase à sa
naissance, ce que signifierait que l’âme s’imprime en nous pendent notre vie et n’est pas nous donnée à notre naissance
par Dieu.
un hymne à abandonner toutes idées préconçus, donc sans expérimentations sensorielle. Il attaque aussi
l’idée de l’immortalité de l’âme sur laquelle imprimer les connaissances et la religion, en tant qu’architecture
de l’église qui devrait aider les hommes à accepter leur condition malheureuse sur la terre.
La Mettrie, auteur de « L’homme-machine » (1747) partage les idées du Baron : l’homme n’est qu’une
machine physiologique ; il n’existe aucune âme (vision ultra-matérialiste de l’être humain et mécaniciste).
5. LA RELIGION
L’influence Anglomane du sensisme dans la France des Lumières est un élément fondamental et comme on a
vu se diffuse avec des approches à la fois très différents. Mais les rapports entre Lumières et foi sont très
faible, on à tout un éventail d’approche à la religion (athéisme, scepticisme, religion positives ), mais
l’approche le plus commun est celui du Déisme, ou d’une Religion naturelle.
Comme on a déjà faiblement introduit ( 3. LA LIBERTÉ : LA SOCIÉTÉ ET LA LITTÉRATURE ), le Déisme professe
l’existence d’un être « autre » par rapport à la nature qui existe. On croit en un principe créateur, dans un
esprit qui fait pénétrer son influx vital dans la matière, son souffle. C’est une entité vivifié, garantissant une
sorte de palpitation vitale.
Il y a deux vision du Déisme (comme vague au même temps religieuse et philosophique) : celui qui admet la
vision d’un Deus Otiosus, une sorte de divinité qu’après avoir essoufflé la vie sur le mond reste bras croisées
en regardant, sans intervenir. Un Dieu que donc, tout en existant, ne détermine les vicissitudes humaine.
L’autre forme de Déisme concerne la croyance dans une entité supérieure bienfaisante, que nous invite à une
religion universelle et naturelle.
Les déistes refusent toutes religions dévoiles : les dogmes et les rites (répétition d’actes qui ont perdu la
signification et demeurent seulement comme série de gestes) nous éloignent de la vérité.
Selon Rousseau par exemple, grand Déiste, il ne faut rechercher la divinité dans soi même et dans sa
manifestation la plus directe : la Nature. L’identification entre Nature et Devin passe entre la représentation
esthétique du monde, ce qui renvoi déjà à l’un des traits des romantiques.
Non seulement, le monde religieux classique s’engage dans un débat spirituel extrêmement vif dans ce
période. C’est le cas de Gauchat, avec son « Essai sur l’accord du Christianisme et de la raison » : les
intellectuels catholiques se forcent de conjuguer la foi avec leur amour pour la science (et le point de vu
rationaliste). Plusieurs religieuses, comme on a vu, participent aux Lumières, sont des Philosophes.
Une réflexion intéressante à faire c’est surement sur le rapport entre monarchie et Déisme.
On croyait jusqu’à ce moment-là que le pouvoir du roi était une manifestation de la volonté divine; mais si
on a un Dieu qui ne veut interagir avec les êtres humaines (Deus Otiosus), alors le rôle du roi ne peut pas être
manifestation directe de sa volonté. Le déisme donc met en cause l’autorité du roi, en conférant aussi plus de
responsabilité aux monarques : ici entrent en jeu les Philosophes. Le roi aurait besoin, n’étant plus guidée par
la volonté divine, d’une guide, que doit être justement la raison.
Le déisme et le concept de monarchie sont donc en collision, et c’est là qu’on a besoin de croire dans les
principes universelles de bien du jusnaturalisme, doctrine qui nait donc de la nécessité de remplir le vide
laissé par le rencontre contradictoire entre déisme et monarchie.

PIERRE CARLET DE CHAMBLAME


(MARIVAUX)
Pierre Carlet de Chamblame est une figure entre deux siècle : nait en 1688 et disparait en 1763. Il nait dans le
cadre de la noblesse normande : son père est lié à des figures de proto-lumières et lumières tels que
Fontenelle et Montesquieu.
Son contribue littéraire concerne surtout le domaine journalistique et dans le théâtre. Il n’écrira que 2
romans, le reste de sa production (énorme, 27 pièces) consacré au point à des œuvres théâtrale, en
particulière des comédie.
Son style est à la source de plusieurs néologismes, en partant du substantif « marivaudage » et du verbe
« marivauder » . On se réfère à ce terme de manière négative aujourd’hui, pour indiquer une prose à la
syntaxe compliqué – riche en double négation, hypotaxe et ambiguïtés – qui arrive à rendre la prose
essentiellement incompréhensible. Cette prose serait le résultat d’un intellectualisme froid, calculé et aussi
d’une galanterie raffiné mais superficielle, variation sémantique des termes n’est pas si lointaine de la
conception qu’on en avait à l’époque. En réalité l’auteur vise à tout cela : il veut être incompressible, pour
que ses opinions et intentions ne soient à la portée de tous. Rendre complexe l’interprétation de ses textes
implique une majeure attention à sa forme, essentielle pour déchiffrer les vrais intentions du personnage,
pour comprendre ou le narrateur manipule le lecteur ou est sincère. Sa façon d’écrire donc n’est pas finalisé
seulement à démontrer qu’il était un prosateur excellant, mais a un engage civile qui met en œuvre la
manipulation et l’intérêt que certains personnages utilisent dans la société française de la régence. La critique
sociale se concentre sur les deux pôles opposés de être et de l'apparaitre: on a souvent l’impression de lire
quelque chose pour ensuit nous rendre compte que le narrateur est en train de dire exactement le contraire.
Ses personnages vivent une vie de fiction, en dissimulant leurs inclinations et ignorant leur véritable nature :
certains arrivent de manière tellement efficace à cacher leur vrai essence qu’ils arrivent à croire eux même
aux fictions qu’il racontent.
Tout son œuvre, en réalité, se fonde sur cette sorte d’opposition entre, métaphoriquement, le vrai visage et la
masque (il est toujours un auteur du théâtre), calqué à commencer par son langage.
La grandeur de Marivaux réside dans le fait que le style est cohérent avec le contenu du texte.
Il s’occupe aussi du thème de la moralité mais il n’assumera jamais, dans ses œuvres, un ton moralisant : il
ne juge jamais, il laisse le lecteur tout seule face aux événement, en se limitant à les mettre en scène. Cette
forme de détachement accorde à la dégradation morale un certain degré de constatation.
En ce qui concerne le théâtre, dans sa jeunesse il écrira des pièces préalablement héroïques (Le Prince
travesti) ou d’inspiration mythologiques (Le Triomphe de Plutus), en prenant des chansons de gestes et
Pierre Corneille comme modèles. Le néoclassicisme typique d’une partie du XVIII siècle remonte à la
fascination pour les mythes anciennes, qui bien se prêtent à une à une interpretation social et critique.
Des autres pièces seront des satyres de mœurs (« Le petit maitre corrigé », où on ironise contre les
philosophes et l’arrogance de la raison) ou des textes de polémique morale (« L’ile des esclaves », liée avec
la dispute sur les jésuites aux colonies).
29/03/2022
LE PAYSAN PARVENU, 1734
Comme anticipé, Marivaux n’écrit que deux roman dans sa carrière, qu’en réalité on peut considérer comme
des « accidents » (sans aucune connotation négative) dans sa vie artistique théâtrale : « Le paysan parvenu »
et « La vie de Marianne ».
Les deux sont textes inachevés, mais cela en réalité ne constitue pas un obstacle à la compréhension du
public. Les structures des œuvre sont bien cohérentes, mais comme était d’habitude à l’époque, ils manquent
d’intrigue, ce qui signifie que n’ont pas une forme univoque. Ils sont plutôt composé par une série de
séquence, ce qui n’obstacle pas l’obtention d’une narrative stable.
En ce qui concerne en particulier « Le Paysan parvenu », la structure est bien linéaire, la vie du protagoniste
Jacob se configure comme une sorte de parabole qui évolution dans sa formation ; mais on peut interrompre
l’histoire quand on veut. Le 5 séquences dont se compose l’ouvre ont chacune une dimension relativement
indépendant par rapport aux autres, qui permet de n’être pas forcement contraint à avoir une
conclusion univoque. L’avancement sociale et économique suit un schéma qui se répète et qui est auto
conclusif, de manière que la structure narrative se tient bien debout.
L’influence du théâtre à un rôle fondamental sur le roman. Comme dans la comédie, on retrouve même dans
le roman des structures régulières, avec le déroulement de deux lignes narratives (intrigue et contrintrigue,
généralement une histoire d’amour entre nobles et une humbles) qui se ressoudent de manière unitaire et
cohérent à la fin de la pièce. Mais lorsque on tire quelque chose d’un genre on peut même nous éloigner
celui la sous certains aspects: en effet, le roman dans sa phase de genèse s’éloigne des formes théâtrale en
procédant par accumulation et en ne suivant pas des restrictions sur les nombres des acteurs, par exemple.

En ce qui concerne le rapport avec les autres œuvres romanesques de l’époque, « Le paysan parvenu »
représente un double éloignement des traditions consolidées.
- D’un côté, on a le model du roman picaresque, dont l’éloignement est moins formelle que thématique :
les cadres sont mondains et pas humble comme pour les picaros, mais les continuités formelles sont bien
remarquables, à partir de la structure linéaire qui procède par séquences.
- De l’autre côté, le roman anglais dans le sens de « novel » prend tout court la place du « romance » : la
dimension esthétique du roman et du mélodrame est effacé presque totalement.
Le texte par soi-même constitue une vraie et propre satire sociale au model d’un ROMAN DE FORMATION31 –
en adoptant les topos de ce genre à la Fielding. En réalité ce serait plus correct de l’appeler « roman de
déformation », envisageant une critique morale caché : c’est vrai qu’on assiste à l’élévation de statu d’un
jeune homme, mais au même temps ses progrès du point de vu éducatifs procèdent de manière inversement
proportionnelle à sa réussite sociale. C’est-à-dire : le plus il s’élève socialement le moins sa moralité en
gagne. Et le pire est qu’il ressent toujours comme une victoire sa sorte de décadence morale : son incapacité
d’éprouver des sentiments, il la trouve une réussite. C’est là la déformation, le personnage devient de plus en
plus calculateur et manipulateur32.
Jacob est humble et exploite sa beauté physique pour acquérir une position. Il n’est que le premier des
« parvenus », dont la littérature française est bien plaine et dont le plus célèbres seront le protagoniste de
« Le Rouge et le Noir » de Stendhal et les personnages de la « Comédie Humaine » de Balzac ; on les
retrouvera jusqu’à la fin du siècle. En effet, si on veut, on pourrait même trouver une explication
métaphorique pour l’intérêt de ce genre littéraire pour la figure du parvenu : le roman est le parvenu des
genre, resté dans un coin considéré comme une forme minore jusqu’au XIX siècle.
L’autre cote critique qu’envisage Marivaux concerne l’ancien régime : de celui-là, on n’a aucune intention
d’invoquer un renouvellement morale (on ne veut pas dire qu’il est en crise et il faut le protéger), mais au
contraire on vise à se moquer de ses classes les plus hautes. On ridiculise ceux qui utilisent leurs titre de
noblesse avec des origines ambiguës, exactement comme le fait Jacob. L’ haute société, tout en affichant leur
titre à des périodes très ancien de l’Histoire de France (on fait resalir la noblesse de certains nom à l’époque
des rois du Moyen Age) se laissent enfin séduire d’un humble homme avec un bon aspect.
Le texte va donc se configurer comme une sorte de parodie d’un roman de formation, une forme
d’ « inéducation sentimentale », où le personnage abandonne sa génuine en faveur du calcul et de la
manipulation. En opposition à tous les romans préromantiques de l’époque, en effet, dans ce texte l’amour
n’est pas un fin ou une passion à comprendre, mais un mère outil pour changer de position sociale, toujours
en demeurant dans le badinage, le caprice et la superficialité.
Cela on le verra surtout dans le style : le narrateur va constamment chercher de manipuler même le lecteur. Il
faut prêter bien attention à ce qu’il raconte, qu’à un lecteur attentif se révèlera de manière explicite pas
strictement fiable ou nécessairement vrai.
De toute manière, il faut se rappeler que l’auteur ne juge jamais ce qu’il raconte : il laisse à son lecteur le
devoir de juger, n’ayant Marivaux aucune tendance moralisante ou lourde.
Le sens de culpabilité que l’on éprouve face à la manipulation et la stratégie dans le domaine du sensuelle
produit l’amour comme escamotage pour notre mauvaise conscience, pour justifier les instincts
physiologiques. L’inquiétude existentielle est caché derrière la raison et le savoir-faire mondain.
Mais Jacob n’est pas le seul manipulateur, les personnages se manipules les uns et les autres33 : dans la
société qui peint Marivaux on est tous corrompu. Il n’existent pas les bons et les mauvais.
En ce qui concerne les personnages féminins, on n’a pas des peints de femmes persécutés, de femmes fatales
ou de belles inconnu qui ont besoin de se cacher pour survivre – en tant que simple objet du désir des
inconnus. Ici est le triomphe de la femme coquette, ce qui, attention, ne veut dire sotte pas de tout: elle est
volontairement légère et affiche une certaine naïveté qu’elle ne possède pas vraiment. Même eux sont
extrêmement manipulatrices. Mais à coté de la femme faussement coquette et manipulatrice, on trouve aussi
la figure de la fausse dévote, avec un retournant sur le thème du masque. Parfois, la parfaite dissimulation
des personnages est tellement réussite que même eux ne se rendent pas compte de vivre dans leur propre
autofiction.
L’INTRIGUE
Comme anticipé, le texte est devisé en 5 tomes, tous plus ou moins autonomes et qui représentent des étapes
successives de l’ascension sociale du protagoniste dans la société. Le schéma se répète dans chaque partie.

31Il est provocateur d’écrire un roman de formation dans l’ancien régime, organisé en classes stables. Derrière un
facade d’immobilité, on est dans un époque de bouleversement immédiates et possibilité d’élévation social immédiat,
dont Jacob est le symbole de ce nouveau époque de transformation.
32Sa corruption est un signe de sa réussite : Jacob est content d’avoir une dégradation morale, parce qu’il faut d’être
capable de faire semblant d’aimer pour réussir dans la vie, pas d’aimer vraiment. La continuité avec la vision
Rousseaudienne est claire : c’est la société qui corrompre l’homme.
33 On retrouvera la réciprocité de manipulation aussi dans les liaisons dangereux.
1. Jacob est un jeune homme de 18 ans, extrêmement naïf, qui vient de la campagne. Il a une beauté
extraordinaire, mais son père est très humble, un simple paysan. Un jour il est envoyé à Paris pour cosigner
le vin à leur patron (ils ne sont pas propriétaires de leurs terres), qui même vivant dans la ville fait partie de
la bourgeoisie, et pas de l’aristocratie ou des nobles. Le personnage du patron on l’appellera seulement
Monsieur, tandis que sa femme sera Madame, ils n’ont pas des nomes propres.
Or, lorsque la femme du patron, Madame, rencontre Jacob, elle remarque tout de suite sa beauté et lui
propose de reste à son service avec le but de le rendre un amant à soi. Il accepte. Le jeune se rend tôt compte
que Monsieur n’a aucun sorte d’intérêt envers sa femme, de fait que non seulement elle flirte ouvertement
avec Jacob même devant lui, mais le protagoniste découvre aussi que le patron même entretien des relations
extraconjugales, en particulière avec Geneviève, une servante qu’il adore et qu’il vice en remplissant de
dons. Tout au début, quand Jacob découvre de la relation illicite de Monsieur, il craint que ce dernier ait
intention de se livrer de lui pour peur qu’il révèle de la liaison à Madame. Ils ont rendez-vous pour en
discuter, mais monsieur meurt soudainement. Si dans un premier moment Jacob est prêt à rester avec
Madame, clairement en s’affiant à la possibilité de se marier avec une femme d’un rang social plus élevé du
sien et d’occuper une position sociale aisé, ses plans changent quand il se rend compte que Monsieur était
plain de dettes. Il quitte donc la maison, en laissant madame en larmes , veuve et endettée.
De toute manière, Jacob décide de rester encore un peu à Paris, pour tenter la fortune d’autre manière. Un
jour, sur le Pont Neuf, il rencontre une femme, madame Haberd, qui se sent mal et s’évanouit. Il l’aide
promptement et pour lui récompenser, elle décide de l’accueillir chez elle et sa sœur.
2. Les sœurs Haber sont deux femmes de 50 ans qui vivent dans la dévotion la plus totale : en effet, la sœur
ainé n’est pas convaincue du fait qu’il devrait rester chez eux, puisque c’est leur directeur de conscience (le
prêtre M. Doucin) qui est contraire : ce ne pas moral de prendre chez soi un jeune homme pour deux femmes
toutes seules. Mais madame Haberd est fasciné de Jacob au point de se disputer avec sa sœur et leurs
directeur de conscience, en décidant finalement de s’en aller de la maison avec Jacob : il restera avec la
femme en tant que valet, pour justifier leur rapport. Ils quittent la maison et louent une chambre chez une
dame ; là ,pour que la mise en scène tienne, ils disent qu’ils sont cousins, et le nom de Jacob devient Jacob
de la Vallée (ou «de» est symbole de noblesse ). Les deux commencent à habiter ensemble et décident de tout
dévoiler à la patronne, qu’à ce point lui veut aider à se marier : on organise le mariage tout secrètement, vu
qu’on a peur que la sœur ainé le découvre et s’oppose. Mais pour un jeu du destin, le prêtre que la patron
choix pour les marier n’est autre que M. Doucin, qui pourtant se refuse de les épouser.
3. On demande alors à Madame de Ferval, amie de madame Haberd et sœur d’un juge de l’époque, de les
aider dans leur plan. Mais elle tombe amoureux de Jacob, et pendent tout le temps qu’elle s’occupe de ranger
le mariage, elle brame l’homme pour elle-même. Haberd et Jacob s’épousent, mais la scène est tellement
banale qu’on en parle seulement dans un petit passage du roman. Après madame de Ferval cherche à séduire
Jacob, dans deux ou trois passages très comiques et explicites, mais Madame Haberd s’en rend compte, uni
au fait que l’intérêt de Jacob pour elle est disparu.
4. Au même temps Madame de Ferval, que veut faire de lui son amant (en y réussissant), va lui trouver une
position, un bon travail : la femme recommande alors Jacob à une amie à soi, Madame de Fécour, et la prie
de demander une place pour lui à son beau-frère, qui est dans la finance à Versailles. Madame de Fécour fait
immédiatement honneur à la recommandation et l’envoie directement à Versailles pour un entretien avec son
frère. Ici le financier jongle entre beaucoup de recommandations, toujours en faveur de jeunes qui ne savent
rien faire. On donne en fin à Jacob la place d’un homme malade (dont la femme et le fille demandent en
larme de garder son travail).
5. À son retour de Versailles, Jacob rencontre madame de Ferval mais au moment où ils roucoulent
tendrement, un homme en colère (un autre amant de la femme) se présente en insistant pour entrer. Madame
de Ferval prétend qu’elle est venue causer avec son « neveu » Jacob, mais sachant très bien que Jacob n’est
pas le neveu de Madame de Ferval, le nouveau venu n’est pas dupe de cette histoire, mais il redouble
d’amabilités pour madame. Jacob, qui a trouvé un prétexte pour sortir, s’enfuit Jacob se dirige alors chez
madame de Fécour. N’ayant trouvé personne pour l’annoncer, il arrive jusqu’à son lit. Elle était malade et sa
sœur, qui lui faisait la lecture, reçoit très mal l’importun. Madame de Fécour est au contraire très aimable
avec lui, mais elle l’engage à ne revenir la voir que lorsqu’elle sera guérie, et Jacob, devenu M. de la Vallée,
retourne au domicile conjugal, où l’attend sa femme, pleine d’indulgence et d’amour, et de plus en plus
heureuse d’avoir un mari et de pouvoir aimer un homme sans pécher.
Le lendemain, Jacob va voir madame d’Orville, la dame qu’il a rencontrée à Versailles. Alors qu’il allait
entrer, il aperçoit un homme se défendant contre trois autres qui l’attaquent l’épée à la main, et s’élance au
secours du plus faible : le comte d'Orsan, qu’il a défendu, est blessé. Une fois qu’il se remet en pied, le
comte amène Jacob à sa voiture : il l’en remercie encore une fois, et lui promet sa protection. De cette
manière, accueillie à Versailles, l’histoire s’interrompe sur la possibilité du jeune d’être embauché à la cour
pour travailler pour monsieur d’Orville.

Les 5 parties auxquelles on se trouve devant montrent comme par 5 relations amoureuses avec 5 femmes de
5 couches sociales différents, Jacob fait son escalade (mouvement ascendant) :
- de la petite bourgeoisie rurale (Madame)…
- on passe à la bourgeoisie moyenne-haute de Paris (Mme Haberd, fille d’un épicier s’enrichie)…
- puis à l’aristocratie (Mme de Ferval, on a le « de » dans le nom)…
- en arrivant à être un financier (Mme de Fécourt)…
- mais cela n’est pas suffisant ; il rentre à Versailles (Mme d’Orville).

30/03/2022
Analyse des extraits
Déjà des toutes première lignes on comprend que l’œuvre s’agit d’une pseudo-autobiographie, qui veut se
présenter comme autobiographie réelle34. Mais un problème surgie de manière implicite.
Dans une autobiographie, auteur, narrateur et personnages devraient coïncider. Si on sait qu’il s’agit d’une
œuvre fictive, c’est clair que l’auteur ne coïncide pas avec le personnage ; jusqu’ici pas de problèmes.
Mais le personnage et le narrateur sont la même personne ? En analysant le texte, on se rend bien compte que
la réponse et non.
Premièrement on a un écart chronologique entre les deux : le narrateur est « Jacob vieux », grand seigneur de
la noblesse parisienne qu’écrit ses mémoires, en sachant ce que lui est passé et faisant des jugés, des
prolongations et analgésiques; puis on a un « Jacob jeune », le personnage que le narrateur construit soi-
même, dans un deuxième35 plan de fiction.
Deuxièmement, on assiste aussi à un écart narratologique : on ne connait jamais les événements tels comme
ils se seraient passées, mais seulement filtrés à par les constructions discursives du narrateur, entre ses
créations verbales. En tant que raconte subjectif, il est évident qu’il peut falsifier les événements et sa
capacité de manipuler le lecteur est le pivot du texte.
♥ Le titre que je donne à mes Mémoires annonce ma naissance(1) ; je ne l’ai jamais dissimulée à qui me l’a
demandée(2), et il semble qu’en tout temps Dieu ait récompensé ma franchise là-dessus ; car je n’ai pas
remarqué qu’en aucune occasion on en ait eu moins d’égard et moins d’estime pour moi.
(3)Pour mon nom, je ne le dis point: on peut s’en passer ; si je le disais, cela me gênerait dans mes récits.
Quelques personnes pourront me reconnaître, mais je les sais discrètes, elles n’en abuseront point.
(1)Il déclare en effet d’être un paysan parvenu, mais de toutes manière il reste anonyme, comme on a déjà dit.
Cette sorte de déclaration de franchise et honnête avec lequel le narrateur ouvre son histoire résulte pourtant
déjà fausse : c’est le tout premier marivaudage (tournure du langage).
(2)Le jeu de mot qu’il utilise pour dire qu’il n’a jamais parlé de sa naissance pour qu’il attend qu’on lui fasse
la question est évidement irréelle : il s’agirait d’une interrogation assez gênant, que on sait personne ferait
dans la bonne société, et pourtant, on sait qu’en réalité est très probable qu’on lui ne l’ai jamais demandé.
(3)Donc si dans un premier moment le narrateur déclare être en train d’écrire une autobiographie pour se
confesser de ses origines humbles, on comprend maintenant ce n’est pas d tout comme ça. Mais déjà par le
titre complet «Le paysan parvenu ou les mémoires de M», on comprend que le but c’est bien un autre : on
sait pas vraiment comment Jacob s’appelle au moment où il écrit ses mémoires, son identité n’est jamais

34 Différence entre « confession » et « autobiographie ». le premier, déjà à partir du titre, on peut comprendre qu’il
s’agit d’une œuvre intime : c’est écrire plein de honte (Les confessions de Saint Augustin tournent autour le vol d’une
pomme). Le XVIII siècle est le siècle des grandes confessions, mais en réalité ce ne sont pas des vrais cas.
35 Marivaux écrit le roman (premier plan de fiction) et Jacob Vieux écrit de soi-même (second plan de fiction).
reconnaissable ; le texte se démontre pourtant une sorte de défense verbale que de fait ne va avoir aucun
retombé réel, aucune contrindications sur l’auteur, vu qu’il ne révèle pas son identité. On connait seulement
le nome qu’il a utilisé pour la escalade sociale, mais on ne sait pas l’auteur fictif et le narrateur du livre qui
est vraiment.
♥ Je vis dans une campagne où je me suis retiré, et où mon loisir m’inspire un esprit de réflexion que je
vais exercer sur les événements de ma vie. Je les écrirai du mieux que je pourrai(1); chacun a sa façon de
s’exprimer, qui vient de sa façon de sentir.
(1) Avec cette toute petite précision, il est en train de communiquer au lecteur un simple principe de
relativisme : on peut avoir autant de versions de la réalité qu’on a des individus, et pourtant il va raconter sa
vérité. Surement quelque petite indice de l’auteur que, au final, il ne faut faire conscience sur le narrateur…
♥ J’ai pourtant vu nombre de sots qui n’avaient et ne connaissaient point d’autre mérite dans le monde,
que celui d’être né noble, ou dans un rang distingué. Je les entendais mépriser beaucoup de gens qui
valaient mieux qu’eux, et cela seulement parce qu’ils n’étaient pas gentilshommes(1) ; mais c’est que ces
gens qu’ils méprisaient, respectables d’ailleurs par mille bonnes qualités, avaient la faiblesse de rougir
eux-mêmes de leur naissance, de la cacher(2), et de tâcher de s’en donner une qui embrouillât la
véritable, et qui les mît à couvert du dédain du monde(3).
[…]Or, cet artifice-là ne réussit presque jamais ; […]C’est une erreur, au reste, que de penser qu’une
obscure naissance vous avilisse,quand c’est vous-même qui l’avouez, et que c’est de vous qu’on la sait(4).
(1)L’élément qui a inspiré Jacob a écrire le texte est un conflit social, ou mieux, une revanche sociale, en
racontant d’avoir assisté au mépris de personnes qui ne possédaient qu’un titre envers des personnes
beaucoup plus génial d’eux, mais qui n’étaient pas nées nobles.
(2)Mais le problème selon Jacob Vieux, est que ces personnes humbles en avaient honte.
(3)Et voilà « Les Parvenus », qui cherchent de cacher leur véritable identité en s’efforçant d’en trouver une
autre, ce que pour lui est bien reprochable.
(4)Mais le narrateur ne pourrait être plus hypocrite : se cacher derrière une fausse identité est exactement ce
que fait lui. Il accuse ces gens de ne pas être courageux, alors que lui même ne fait référence à sa vraie
identité. C’est l’apothéose de l’hypocrisie.
♥ Mon père était le fermier de son seigneur, homme extrêmement riche (je parle de ce seigneur), et à qui il
ne manquait que d’être noble pour être gentilhomme(1).
Il avait gagné son bien dans les affaires; s’était allié à d’illustres maisons par le mariage de deux de ses
fils, dont l’un avait pris le parti de la robe, et l’autre de l’épée(2).
[…]ils avaient pris des noms de terres[…](3)
Leur origine était comme ensevelie sous d’immenses richesses. On la connaissait bien, mais on n’en
parlait plus. […]ils étaient confondus avec tout ce qu’il y avait de meilleur à la cour et à la ville. (4)
(1)Il fait un exemple concret d’un Parvenu : le patron des terres dans lesquelles travaille sa famille.
Monsieur vive à Paris, ou il passe la quasi-totalité de l’année. Il ne s’agit pas d’un noble (ce qui n’est pas
évident, parce que à l’époque les latifundistes était en effet des nobles) ; néanmoins, à Paris, il affiche une
certaine dignité d’aristocrate.
(2)Il a fait fortune : il avait utilisé ses fils pour faire des matrimoines illustres, et ces mariages lui ont permis
d’acheter de carrières pour ses fils. L’un était devenu juge (la robe noire), et l’autre était devenu militaire, un
officier probablement (rôle typique de la noblesse).
(3)Ils avaient pris le nom de leur terre, exactement comme faisaient les nobles de l’époque, comme s’il fuisse
un titre de noblesse. Ils ont littéralement acheté une place dans la société.
(4)Tout le monde sait que c’était illusoire leur bon place dans la société et qu’ils venaient de la campagne,
mais il s’étaient littéralement « confondu » avec tout ce qui avait de bon a la court et à la ville, c’est-à-dire ils
s’étaient comme incorporés, camouflées. Les personnes savent donc « les pièges », les fausses identités, mais
on les oublie, on laisse coté.
Le concept de noblesse se dessin donc comme une sorte d’hallucination collective, hystérie à laquelle on
décide de croire même si on sait qu’il se tient sur toute une séries de mensonges. C’est un attaque à l’élite de
la nation pas légère, à toute une partie influente de la population qui passe beaucoup de temps avec le roi.
Toute la société donc est soutenu sur quelque chose de fictice.
♥ […] les enfants de ce frère ont eu grand besoin que je les reconnusse pour mes neveux ; car leur père
[…] vit, en dix ans, ruiner sa maison […].
À l’égard de ses fils, mes secours les ont mis aujourd’hui en posture d’honnêtes gens ; ils sont bien
établis(1), et malgré cela, je n’en ai fait que des ingrats, parce que je leur ai reproché qu’ils étaient trop
glorieux. […]ils ont quitté leur nom, et n’ont plus de commerce avec leur père[…](2).
Ils l’appelèrent monsieur dans la conversation.
[…] c’est à vous à qui l’on parle. À moi ! reprit-il. Eh ! pourquoi cela ? Est-ce que vous ne me
connaissez plus, mes enfants ? Ne suis-je pas votre père ? Oh ! leur père, tant qu’il vous plaira, lui dis-
je, mais il n’est pas décent qu’ils vous appellent de ce nom-là. Est-ce donc qu’il est malhonnête d’être le
père de ses enfants ? reprit-il ; qu’est-ce que c’est que cette mode-là ? (3)
C’est, lui dis-je, que le terme de mon père est trop ignoble, trop grossier ; il n’y a que les petites gens qui
s’en servent, mais chez les personnes aussi distinguées que messieurs vos fils, on supprime dans le
discours toutes ces qualités triviales que donne la nature ; et au lieu de dire rustiquement mon père,
comme le menu peuple, on dit monsieur, cela a plus de dignité(4).
On assiste ici a un subtil attaque politique : par cet anecdote à propos de son frère et ses neveux, il met en
évidence comme la pratique des Parvenus affectait générations non pas seulement précédents à la sienne
(comme dans le cas de ses patron), mais aussi successive à celle de Jacob.
(1)Jacob Vieux, ayant une position sociale bien élevé, aide sans problèmes les fils de son frères.
(2)Le problème est qu’ils se démontrent autant intégré dans leurs nouveau statut qu’ils deviennent
condescendants, comme dit Jacob même, des « ingrats ».
Le narrateur veut se présenter avec une conscience morale forte et décidé, mais à nouveau une contradiction
se révèle : si c’est vrai qu’il juge les deux neveux très désagréables, puis il les justifie avec le père.
il discutant avec eux, il soutien ce jeune homme et est d’accord avec eux.
(3)L’homme se démontre bien bouleversé quand pendant une conversation, ses enfants se refusent de
l’appeler « père », en utilisant plutôt « monsieur ».
(4)Jacob Personnage, noble personnalité de la société, est en train de manipuler le pauvre homme, il utilise
des tournures avec des termes comme « ignoble » , « trop grossier », « rustiquement », « menu peuple ».
En sous texte, on communique que l’idée qu’on avait à l’époque, entre les nobles, de la paternité est basse,
liée aux instincts animalesques, ce qui comprend les personnes éduques.
La manipulation est juste là : il lui dit qu’il est vulgaire s’il s’attend que ses fils l’appellent « mon père », en
minant donc d’une partie la fidélité en soi même, mais puis il suscite son orgueil, en disant que s’ils
l’appellent monsieur c’est bien plus distingué pour un homme, et qui en gagne lui en dignité et ses fils en
démontant une grande éducation. Un peu mine et un peu flatte, ingrédients qui doivent être bien dosé et
mélangé, on perd les limites.
Tout cela a démontré que le panorama apparemment stable, préfixé de l’ancienne régime, possède en réalité
une coté verticale, de changement. Cela chute une retombée considérable sur la valeur de l’élite qui gouverne
la France, une critique politique derrière la blague, avec un potentiel dont il faut tenir compte.
♥ J’avais alors dix-huit à dix-neuf ans ; on disait que j’étais beau garçon(1), beau comme peut l’être un
paysan dont le visage est à la merci du hâle de l’air et du travail des champs(2). Mais à cela près j’avais
effectivement assez bonne mine ; ajoutez-y je ne sais quoi de franc dans ma physionomie(3) ; l’œil vif, qui
annonçait un peu d’esprit, et qui ne mentait pas totalement(4).
(1)Si Jacob parvient à monter sur l’échelle sociale c’est quasiment toujours grâce à son aspect : il est beau. Il
aime pourtant se décrire, il le fera plusieurs fois et de manière différente seconde l’occasion et le contexte.
(2)Cette précision n’est pas négligeable : cela montre comme à l’époque on n’avait pas des modelés de beauté
absolue, mais enraciné dans le cadre social de provenance. On a des traits précis que le distinguent comme
paysan, par exemple la peau colorée par le soleil : ce niveau de beauté n’était accepté par la noblesse.
(3)Puis il se réfère à sa physionomie, à entendre comme l’ensemble des traits du visage.
Ici il faut faire une précision : on a parlé des pseudosciences, on parle aussi de Physiogonomie (ou
physionomique), domaine qu’essentiellement vise à la poursuite du principe grecque du « Kalòs kai
agathòs ». On soutien qu’il y a une correspondance entre ce qui est beau et ce qui est bon : faire une
description physique d’une personne signifiait aussi faire une description psychologique, des qualités. Cela
aura des influence énorme sur le roman .
De toute façon, il dit aussi être franc : on peut bien jouer sur continuité mais aussi discontinuité. Si la
physionomie est importante sur le roman réaliste, ici elle met en relief l’ hypocrisie , le manque de sincérité
de Jacob.
(4)Il
ajoute avoir « un œil vif, qui annonçait un peu d’esprit et qui ne montait pas totalement» : il n’est pas
complètement con, veut dire. La référence à l’esprit est aussi importante: il sait au fond d’être un
manipulateur nait. Cela entraine la considération qu’après lui-même, Jacob pense encore que l’esprit c’est
quelque chose d’artificiel, qu’on développe seulement en société (vision critique de la réalité, vision
mondaine). Au final tout est allongé en tant que galanterie, dimension mondaine…une sorte de version
mondanisé du sensisme, comme dans les Philosophes.

Quand Jacob personnage arrive à Paris, chez ses patrons, Jacob narrateur laisse-lui la place dans l’exposition
de la majorité des événements, le lecteur en assumant son point de vu face la société parisienne. En réalité,
on peut s’apercevoir de la présence d’une double perspective dans certains passages, ce qui montre comme
Jacob narrateur est désormais accoutumé à ces façons de faire, alors que le jeune Jacob trouve étrange.
Son regard est clairement plutôt aliéné, surtout à propos des mœurs sentimentaux de la ville.
Il décrit le personnage de Madame :
♥ C’était une femme qui passait sa vie dans toutes les dissipations du grand monde(1)[…]; qui avait des
amants, qui les recevait à sa toilette, qui y lisait les billets doux qu’on lui envoyait, et puis les laissait
traîner partout(2) ; les lisait qui voulait, mais on n’en était point curieux ; ses femmes ne trouvaient rien
d’étrange à tout cela ; le mari ne s’en scandalisait point(3). On eût dit que c’était là pour une femme des
dépendances naturelles du mariage(4).
[…]c’était en un mot un petit libertinage de la meilleure foi du monde(5).
Je dis petit libertinage, et c’est dire ce qu’il faut ; car, quoiqu’il fût fort franc de sa part et qu’elle n’y
réfléchît point, il n’en était pas moins ce que je dis là(6).
Du reste, je n’ai jamais vu une meilleure femme(7) ; ses manières ressemblaient à sa physionomie(8) qui
était toute ronde.
(1)Jacob présente tout de suite la figure de madame par ses habitude, en n’hésitant point à définir son style de
vie bien dissipé (caractère franc de Jacob, comme il a dit de soi-même). Mais si on y fait du cas, il dit que ses
comportements sont dissipés à la manière du « grand monde », donc de la mondanité parisienne, comme s’il
le connaissait : c’est le Jacob narrateur qui se faufile.
(2)Il met puis l’accent sur le fait que madame avait des amants, et sur le fait qu’elle n’essaie même pas de
cacher ses habitudes luxurieuses.
(3)Maintenant le narrateur le dit bien explicitement : les autres personnes qui habitaient la maison ne trouvait
le comportement de Madame étrange ! On parle de ses habitudes vicieuses comme si tout le monde le savait,
et c’était bien comme-ca. Et cela ne dérangeait point personne, Monsieur non-plus. Ou mieux : on dit que
personne était curieux de savoir donc, comme pour les origines de Jacob dans sa petite introduction à sa
autobiographie, si personne demande, personne réponde.
(4)Bref, si quelqu’un aurait eu assez de franchise pour demander, on avait l’excuse prête. On dissimule.
(5 – 6) Les mots utilisé par Jacob sont toujours très bien mesurés : grâce à sa grande habilité de manipulateur
(et on dirait plutôt aussi au magistral style de l’auteur), on laisse toujours un sous-entendu, on dit puis on
précise ou rétracte. C’est clair ici pour le fait qu’il dit de madame qu’elle est une « libertin », mais avant on y
met l’adjectif « petite », et après on fait référence à « la meilleure foi du monde ». Paradoxale, oxymorique,
mais géniale : le style et le personnage se reflètent, les deux visant à piéger ceux qui l’écoutent.
(7)Nouvelle précision qui ne fait que souligner son incohérence, ou mieux, le point de vue changé de Jacob
personnage respect à celui du narrateur.
(8)A nouveau « Kalòs kai agathòs »
La description suivra avec toute une série de dénotations fortement positives de Madame, da sa bonté et
gentillesse…mais toujours avec des éléments qui ne permettent pas vraiment de comprendre si on est en train
de l’élogier ou de la reprocher36. C’est du génie de l’écrivain…

Jacob personnage se trouve à entretenir un dialogue avec sa maitresse. Il faut toujours rappeler que le
dialogue est une incarnation de l’art de séduire – ou voire de l’acte sexuelle tout cour – dans le roman du
XVIII siècle. En ce cas aussi, le dialogue est antichambre de la séduction en manière évidente :
♥ Ce discours la divertit beaucoup, sa gaieté ne fit que m’animer ; je n’étais pas honteux des bêtises que je
disais, pourvu qu’elles fussent plaisantes

36Pour rendre évident ce qu’on veut dire : « Aimant de tout son cœur la vertu, sans inimitié pour le vice ; elle ne
blâmait rien, pas même la malice de ceux qu’elle entendait blâmer les autres ».
On voit dans ce passage que le pivot de la conversation à l’époque n’était pas son sujet, mais plutôt la façon
de s’exprimer :le dialogue a seulement la fonction de prolonger le contact avec la femme qu’on veut
séduire.37

Madame, quand propose à Jacob de travailler pour elle, le fait surement à cause de son aspect physique,
comme on a dit. Elle se rend compte du fait qu’il a un potentiel de beauté remarquable, pour qu’elle lui fait
acheter des vêtements adaptes et le fait coiffer38. Lorsqu’il revient renouvelé à la maison, il déclare :
♥ On me complimenta fort sur mon bon air ; et, en attendant que madame fût visible, j’allai faire essai de
mes nouvelles grâces sur le cœur de Geneviève qui, effectivement, me plaisait beaucoup.
Il me parut qu’elle fut surprise de la mine que j’avais sous mon attirail tout neuf ; je sentis moi-même
que j’avais plus d’esprit qu’à l’ordinaire
Dans ce passage, on voit que n’est pas seulement question de faire une équivalence entre esprit et capacité
mondaine, mais on va au-delà : l’esprit passe nécessairement par avoir des vêtements appropriés et de
coiffure à la mode. Et on n’est pas le cadre de l’autodérision, Jacob pense vraiment cela !
Il n’y a point du langage ironique, mais c’est bien clair qu’il s’agit d’une critique de l’auteur à l’auto-
hypocrisie. En plus, ce qui est amusant si on y fait cas, c’est qu’avec cette affirmation on peut bien se rendre
compte de l’épaisseur culturelle du personnage, qui est évident n’être pas cultivé : c’est quand même un
manque d’élégance intellectuelle de croire qu’il y a un lien entre la nouvelle image de soi et l’intelligence.
05/04/2022
On a cité dans le dernier passage le personnage de Geneviève. Il faut, avant de clarifier son rôle dans
l’intrigue, faire quelque précisassions.
Le personnage de Jacob n’aime pas – et non plus démontre d’avoir appris le faire le Jacob narrateur, on
pourrait dire. Il va rencontrer plusieurs femmes dans sa vie, mais il ne tombe amoureux de personne.
Cependant, il n’est pas un vraie et propre libertin, que refoule ses sentiments pour jouer à séduire : Jacob
utilise délibérément la passion comme un outil d’escalade sociale. Pourtant, sous ce point de vu, son
personnage constituerait plutôt une parodie de l’idée de l’époque selon laquelle qui était bien capable
d’aimer était aussi intelligent. Il se comporte comme un libertin mais avec un but diffèrent : les libertins ne
visent qu’au divertissement, tandis qu’il vise à améliorer sa condition sociale.
Maintenant, pour revenir sur Géneviève : elle est une femme de chambre de la maison des patrons, l’amante
présumée de Monsieur et deviendra la future mariée de Jacob. L’attraction que ce dernier ressent pour elle est
essentiellement sexuelle, et il lui fait plaisir que l’intérêt pour elle soir correspondu. Mais dès qu’il se rend
compte d’être objet d’intérêt de Madame, le prétendu amour pour Geneviève s’écroule complétement : on
n’y voit aucune débouchement sur un gain social d’ailleurs.
Linguistiquement, dans ce passage on voit toute la souplesse et la subtilité à travers laquelle Jacob s’efforce
de justifier (et peut être de s’auto-justifier) la vacuité de ses sentiment, en rendant acceptable les calculs qu’il
est en train de faire :
♥ Je continuai de cajolerstuzzicare Geneviève. Mais, depuis l’instant où je m’étais aperçu(1) que je n’avais
pas déplu à madame même(2), mon inclination(3) pour cette fille baissa de vivacité, son cœur ne me parut
plus une conquête si importante(4), et je n’estimai plus tant l’honneur(5) d’être souffert d’elle.
(1) Le verbe “s’aperçoive” a une forte valeur déresponsabilisant : c’est comme si le fait que Madame éprouve
un intérêt pour lui n’implique aucune responsabilité de sa part.
(2)À nouveau : la négation, associé au verbe à la forme passive vise à jeter toute la responsabilité sur
Madame ; on verra après que ce sera Jacob même qui commence le flirt avec Madame.
(3)L’utilisation du terme « inclination » veut minimaliser l’intensité de la passion qu’il avait pour Géneviève.
(4)Autre négation atténuative des sentiments de Jacob
« je n’estimai » = autre négation
(5)L’honneur d’un homme réside dans le fait d’être aimé par une fille

37C’est évidente qu’une telle utilisation vide du langage est bien différente de la manière d’exercer des idées
philosophiques importants dans des autres genres littéraires de l’époque.
38Jacob, lorsqu’il a accepté travailler pour Madame, il ne va jamais s’habiller comme un valet (robe de chambre,
uniforme) pour volonté de madame elle-même, séduite par la beauté du jeune. Personne aura jamais donc la possibilité
de connaitre de façon évidente l’origine sociale du personnage, et dans la société de l’Ancien Régime cela veut tout
dire. On va assister aux mêmes dynamiques quand il s’enfuira avec Madame Haber.
Comme on a dit, Geneviève est l’amant présumé de Monsieur, qui essaye instamment de la séduire. Cela ne
peut qu’être la meilleure des situations pour Jacob, qui n’a plus d’intérêt pour elle. Il commence en effet à
utiliser la prétendue relation entre le deux comme une excuse pour justifier son manque d’intérêt pour la
fille, à laquelle il avait promis qu’ils se marieraient. Geneviève est convaincue qu’elle va épouser Jacob,
donc elle résiste aux avances de Monsieur : il la rempli de cadeaux et d’argent, qu’elle laisse de côté et
épargne pour financier le mariage. Un autre prétexte convainquant (pour les autres et pour soi-même) :
comme la fille accepte l’argent de monsieur, c’est comme si elle faisait de la prostitution… même n’en lui
donnant rien en échange.
Jacob aurait découvert l’intérêt de l’homme pour sa fiancé en cette manière :
♥ J’ai su tout le détail de ce traité impur dans une lettre que Geneviève perdit, et qu’elle écrivait à une de
ses cousines, qui ne subsistait, autant que j’en pus juger, qu’au moyen d’un traité dans le même goût,
qu’elle avait passé avec un riche vieillard, car cette lettre parlait de lui.
Le trait ironique se fond sur un détail d’extrême importance : Jacob est analphabète. Il ne sait ni lire ni
écrire39. La contradiction est évidente.40
Après avoir découvert les lettres, Jacob veut parler avec Geneviève, qui confesse tout. Dans les passages qui
suivent, la duplicité entre le narrateur et le personnage permet de revenir sur ce dernier avec des prolepses,
commentant ses actions et en prenant les distances par rapport à ses pensées naïves. C’est de la lutte
discursive : pas de marqueurs pour deviser les discours du narrateur et celui du personnage, ce qui confère au
texte un effet polyphonique (on exprime plusieurs points de vu autour d’un même évènement).
♥ Monsieur continue de me poursuivre, me dit-elle adroitement(1), mais d’une manière si honnête que je ne
saurais m’en scandaliser ; quant à moi, il me suffit d’être sage, et, sauf ton meilleur avis, je crois que je
ne ferais pas si mal de profiter de l’humeur libérale où il est pour moi ; il sait bien que son amour est
inutile, je ne lui cache pas qu’il n’aboutira à rien.
[…]si les choses vont comme vous le dites, cela est à merveille : on ne refuse point ce qu’une maîtresse
nous donne, et dès que monsieur ressemble à une maîtresse, que son amour n’est que de l’amitié, voilà
qui est bien(2).
[…]ce qu’elle m’en disait, n’était que pour m’apprivoiser(3) petit à petit sur la matière. […]
(1)Commentaires moralistes du narrateur (adroitement = abilmente).
(2)Jacob personnage répond à la confession de la fille en se démontrant tout tranquille sur la question. Et pas
seulement : il justifie et rassure aussi Geneviève sur le fait d’avoir acceptée les cadeaux de Monsieur et il dit
être confiant sur l’ honnêteté l’amitié entre les deux.
(3)Le jacob narrateur explique la situation de son point de vue: elle veut « l’apprivoiser » (domare in senso
animalesco, ma anche avvicinare dolcemente). On la juge hypocritement manipulatrice.

Mais si Jacob personnage déclare à la fille que ses sentiments pour elle restent inaltéré, puis on précis :
♥ Je lui tins ce discours d’un air si gai en la quittant, qu’elle ne sentit point que je me moquais d’elle(1).
(1)On peut interpréter d’une double manière l’expression « je me moquais d’elle » :
♥ Solidairement avec Jacob personnage, donc en confiant sur le fait qu’il vraiment n’est pas d’accord
et condamne la fille pour des raisons morales.
♥ Solidairement avec le texte, ou mieux ce qu’on comprend du teste une fois qu’on a pris du recul par
rapport au Jacob personnage et narrateur. En effet, il se moque d’elle comme dans le cadre de son
opportunisme et le mépris de Jacob serait dans ce cas le fruit d’un calcul.

39 On le découvre quelques pages après, quand il se fait aider par Geneviève à écrire une lettre à ses parents :
Il s’agissait de mander l’état des choses à mon père, et je ne savais pas écrire, mais je songeai à Mlle Geneviève ; et
sans plus délibérer, j’allai la prier d’écrire ma lettre.
40Si le texte fuisse explicitement fictif, romanesque, on dirait que cela est un problème de continuité, d’incohérence.
Mais ici le texte peut contenir des contradictions fonctionnels à la compréhension de soi-même : c’est une épreuve que
Jacob manipule, représente une fiction des événements.
On continue de toute manière à montrer l’hypocrisie de Jacob. Comme par exemple quand il accepte, afin de
s’occuper du mariage, l’argent que Geneviève a reçu de Monsieur, même s’il déjà sait qu’il ne veut plus
l’épouser41. Même en ce cas, il essaye de se justifier, ou au moins de réduire sa responsabilité :
♥ Peut-être fis-je(1) mal en prenant l’argent de Geneviève ; ce n’était pas, je pense(2), en agir dans toutes
les règles de l’honneur(3); car enfin, j’entretenais cette fille dans l’idée que je l’aimais et je la trompais(4)
: je ne l’aimais plus, elle me plaisait pourtant toujours, mais rien qu’aux yeux, et plus au cœur.
[…]mais je ne savais pas encore faire des réflexions si délicates(5), mes principes de probité étaient
encore fort courts(6) ; et il y a apparence que Dieu me pardonna ce gain(7), car j’en fis un très bon
usage ; il me profita beaucoup : j’en appris à écrire et l’arithmétique, avec quoi, en partie, je suis
parvenu dans la suite.
(1)L’utilisation de l’inversion vise linguistiquement à minimaliser ce qu’on est en train de dire
(2)Modalisation verbale42 , déresponsabilisation
(3)Hyperbole très malin (« toutes les règles de l’honneur ») : c’est claire qu’il est impossible d’être
moralement parfait, mais cela ne justifie point le fait d’être délibérément malhonnête.
(4)Il confesse finalement d’être en train de la tromper, mais si on y fait du cas, il a utilisé des tournures de
mots dans la phrase que l’ont surchargé d’alibi pour introduire cette déclaration finale, la chute, ou Jacob se
révèle pour ce qu’il est vraiment.
(5)Cette affirmation est forte prétentieuse: n’est pas question de faire « pensées délicates », c’est un cas de tort
explicite, il sait qu’il se moque d’elle !
(6)La capacité de comprendre est lié à la capacité mondaine : l’homme apprend dans la société à raisonner.
Cela met un relief un détail important : Jacob n’est pas méchant, il est simplement victime de ses mêmes
visions de la réalité. En manipulant de manière si explicite, il fait aussi une sorte d’autotromperie : il ne sait
se dégager des dynamiques que lui même a engagé, au points que ces là deviennent routiniers.
Il manipule pour faire son bien et jamais gratuitement ! En plus, il n’est pas conscient du procès de
dégradation morale qu’il a provoqué dans sa personne.
(7)Les manipulations justifient sa ascension sociale même divinement: logique personnaliste.

Jacob, secrètement, espère que l’amitié entre Geneviève et Monsieur devienne publique, un scandale, afin
qu’il soit publiquement légitimé à ne l’épouser plus. Quand Monsieur lui demande un rendez-vous, Jacob
espère qu’il soit jalouse du fait qu’il doit épouser la femme objet de son intérêt, l’intérêt d’un patron, et il
souhaite qu’on lui demande de laisser Geneviève. Mais au contraire : Monsieur est très favorable à l’amour
entre Jacob et Geneviève et veut payer toutes leurs dépenses43. Cela peut être clairement le fruit d’un
raisonnement calculé même de la partie de Monsieur, qu’en termes de bienséance en gagnerait un alibi aux
yeux du monde : encourager les noces serait un alibi parfait pour démonter don désintérêt pour la fille. En
plus, à l’époque, être épousé ne consistait pas un obstacle à la satisfaction des vices personnels.
Jacob, à ce point-là se ressent bien douteux sur la question, tenté par des perspectives d’enrichissement.
Il commence un longue et dramatique monologue se constituant comme une parodie évidente d’un sens
d’honneur et de moralité des best-sellers sentimentaux de l’époque.
♥ Je restai comme un marbre à ce discours ; d’un côté, tous les avantages qu’on me promettait étaient
considérables(1).
[…]N’était-ce pas là la pomme d’Adam toute revenue pour moi ?(2)
[…]L’honneur me disait(3) : Tiens-toi ferme ; déteste ces misérables avantages qu’on te propose(4) ; ils
perdront tous leurs charmes quand tu auras épousé Geneviève ; le ressouvenir de sa faute te la rendra
insupportable, et puisque tu me portes dans ton sein, tout paysan que tu es, je serai ton tyran, je te

41Pour mieux préciser, il essaye voire de s’emparer de tout l’argent de Geneviève, pas seulement de celui qu’elle lui
donne. Il pense à voler : c’est de la dévouement totale au matérialisme.
…et là, m’ouvrit un petit coffre tout plein des profits de sa complaisance... Est-ce encore là pour moi ? lui dis-je. Ma
chambre n’est pas si bien meublée que la vôtre, et ce petit coffre-là y tiendra à merveille.
42La modalisation concerne tous les procédés qui permettent à l'énonciateur d'exprimer son sentiment ou son jugement
sur ce dont il parle. En ce cas, c’est l’utilisation de verbes modales, subjectives .
43 Je lui (à Geneviève) ai déjà fait présent d’une bonne somme d’argent dont je vous indiquerai l’emploi ; je ferai plus,
je vous meublerai une petite maison, dont je payerai les loyers pour vous soulager, en attendant que vous soyez plus à
votre aise;
persécuterai toute ta vie, tu verras ton infamie connue de tout le monde, tu auras ta maison en horreur,
et vous ferez tous deux, ta femme et toi, un ménage du diable, tout ira en désarroi(5) ; son amant la
vengera de tes mépris, elle pourra te perdre avec le crédit qu’il a. Tu ne seras pas le premier à qui cela
sera arrivé, rêves-y bien, Jacob. Le bien que t’apporte ta future est un présent du diable, et le diable(6)
est un trompeur.
(1)Le premiers pensées de Jacob courent inévitablement à son gain, à la convenance sociale et économique.
(2)Le pomme d’Adam est le symbole de la tentation.44 Jacob assume le rôle d’un amant trahi dont la femme
aimé est corrompu par le patron et devrait accepter des noces victime de la prostitution…c’est tout dans sa
tête, mais c’est ce que lui détient de ne pas épouser la femme « officiellement ». En réalité, c’est le fait qu’il
a séduit Madame qui le retient : il croit peut être pouvoir gagner encore plus.
(3)Personnification de l’honneur, qui lui dit de ne pas accepter le gains monnayeurs parce que Monsieur se
veut occuper des dépenses du mariage.
(4)Impersonnalité ou forme passive pour lui déresponsabiliser
(5)C’est le triomphe du victimisme en parlant à soi-même.
(6)Diabolisation du rapport par la répétition du terme: Jacob est un religieux, et le refus du diable donne aussi
un image de Jacob comme un bon chrétien.

A ce point-là, Jacob explicite ses doutes45 à Monsieur, que à la manière d’un alibi se concentrent sur
l’honneur de prendre en mariage une femme à laquelle son patron fait des avances. Mais Monsieur ne
l’accepte pas, pourqu’il s’est trop publiquement exposé pour leur mariage et peut être aussi parce qu’il tient à
la fille .
♥ Je ne vous laisserai point en liberté de lui (à Geneviève) nuire, et si vous ne l’épousez pas, je vous
déclare que ce sera à moi à qui vous aurez affaire. Déterminez-vous ; je vous donne vingt-quatre heures,
choisissez de sa main ou du cachot ; je n’ai que cela à vous dire. Allons, retirez-vous, faquin.

Jacob décide donc de parler du colloque qu’il a eu avec Monsieur à Geneviève, en se peignant de victime.
♥ Dans vingt-quatre heures, mademoiselle ; puis je courus toujours sans savoir où j’allais, car je marchais
en égaré(1). Enfin je me trouvai dans le jardin, le cœur palpitant(2), regrettant les choux de mon village, et
maudissant les filles de Paris, qu’on vous obligeait d’épouser le pistolet sous la gorge : j’aimerais
autant, disais-je en moi-même, prendre une femme à la friperie(3). Que je suis malheureux !
Ma situation m’attendrit sur moi-même, et me voilà à pleurer(4) ;
(1)Jacob la quitte égaré donc, un peu comme les personnages des romans mélos de l’époque.
(2)Le cœur, que généralement palpite pour la passion, ici le fait pour préoccupation.
(3)La friperie (il mercato delle pulci) est où il dit qu’il voudrait acheter une femme. Le contraste de registre
avec une scène si « hautement dramatique » est une chef d’œuvre de Marivaux, qui fait de l’ironie du
langage en ridiculisant et parodiant le répertoire tragique littéraire classique de l’époque.
(4)Le fait que Jacob pleure c’est important pour l’effet de parodie ouverte aussi du panorama préromantique.
Normalement, dans les romans cliché des Lumières du XVIII siècle (au model du bestseller « La Nouvelle
Héloïse »), les amants pleurent toujours, mais ensemble. Il est un moment ou on s’avoue l’amour réciproque
et l’homme s’abandonne au sentiment : le malheur d’un amour impossible se mêle avec le bonheur d’un
sentiment retrouvé. Mais ici, Jacob pleure tout seule, pour sa condition malheureuse. Le pleure comme
moment de couple est complétement subverti et il se cache, en effet, pour pleurer.

En rencontrant Madame dans le jardin, cette simulation de passion d’une amour préromantique devient
prétexte pour Jacob pour lui faire émouvoir, et donc consolider son œuvre de séduction sur elle.
♥ […]je tournais dans un bosquet, en faisant des exclamations de douleur, quand je vis madame qui en
sortait avec un livre à la main.
À qui en as-tu donc, mon pauvre Jacob, me dit-elle avec tes yeux baignés de larmes ?

44Il évalue bien tout ce qu’on lui proposait : Une maison toute meublée, beaucoup d’argent comptant, de bonnes
commissions dont je pouvais demander d’être pourvu sur-le-champ, enfin la protection d’un homme puissant, et en état
de me mettre à mon aise dès le premier jour, et de m’enrichir ensuite.
45 Mais est-ce que les pauvres gens aiment à être cocus (cornuti) ?
Ah ! madame, lui répondis-je en me jetant à ses genoux,(1) ah ! ma bonne maîtresse, Jacob(2) est un
homme coffré quand vingt-quatre heures seront sonnées.
Coffré ! me dit-elle. As-tu commis quelque mauvaise action ? Eh ! tout à rebours de cela, m’écriai-je ;
c’est à cause que je n’en veux pas commettre une. Vous m’avez recommandé de vous faire honneur,
n’est-ce pas, madame ? Eh ! où le prendrai-je pour vous en faire, si on ne prétend pas que j’en garde ?
Monsieur ne veut pas que je me donne les airs d’en avoir.
Quel misérable pays, madame, où on met au cachot les personnes qui ont de l’honneur, et en chambre
garnie (addobbata), celles qui n’en ont point !(3) Epousez des femmes de chambre pour homme46, et vous
aurez des rouleaux d’argent ; prenez une honnête fille, vous voilà niché(imprigionato) entre quatre
murailles.
Voilà comme monsieur l’entend, qui veut, sauf votre respect, que j’épouse sa femme de chambre.(4)
Explique-toi mieux, me dit madame qui se mordait les lèvres pour s’empêcher de rire ; je ne te
comprends point. Qu’est-ce que c’est que cette femme de chambre ? Est-ce que mon mari en a une ?
(1)Tout est calculé pour être excessivement théâtral et dramatique : il se lance aux genoux de Madame.
(2)Il parle de soi en troisième personne
(3)Jacob collectivise sa condition, en appelant en cause le pays entier, comme s’il avait des lois injustes : dans
ce pays, si on renonce à l’honneur, on en gagnerai, mais si on le suit, c’est de la prison.
(4)La manipulation de Jacob prévoit maintenant de mettre aussi Monsieur dans une mauvaise lumière pour
que Madame tombe dans les bras de Jacob (qui assume la posture d’une héroïne tragique).
Peu après, on assiste à un escamotage propre du théâtre : Jacob devrait attendre encore 24 heures pour faire
sa choix tragique… mais Monsieur meurt. Tout est très simplement résolu.
06/04/2022
Quand Monsieur meurt, Jacob n’hésite pas à quitter Madame : le lien ne vaut plus la peine, la femme est
maintenant remplie de dettes du mari décédé…il ne voit plus aucune possibilité d’amélioration sociale.
Il a quand même encore un peu d’argent pour rester à Paris et trouver une autre manière de vivre, et surtout il
ne veut pas renoncer à tenter l’escalade sociale si simplement.
On voit bien ici que Marivaux c’est un auteur du théâtre, parce que le temps du récit du roman est
essentiellement théâtrale: pas seulement des coup de scènes comme la mort résolutive de Monsieur les
vicissitudes s’alternent de manière aussi rapide que le feraient sur scène (Aristote, unité de temps, 24h).
Pour ce motif, le rencontre du protagoniste avec sa prochaine victime de manipulation se passe presque tout
de suite, voire seulement une heure après avoir laissé la maison de Monsieur (et même ici, il est resté très
peu de temps). Lorsqu’il se balade sur le Pont Neuf (le plus ancien de la ville), il rencontre cette femme qui
se sent mal, s’évanouit. C’est Madame Haberd, qui est immédiatement ravi par la beauté du paysan : il lui
raconte vite toutes ses vicissitudes47, et dès qu’elle se rend compte qu’il se trouve en difficulté, elle décide de
l’amener chez elle, surtout parce qu’elle ressent ce jeste, publiquement, comme une ouvre de charité
chrétienne, étant elle une femme très religieuse. Mme Haber n’est plus trop jeune, elle n’est pas marié et
habite avec sa sœur ainée, avec laquelle partage « sa grande dévotion »: elles suivent de manière
extrêmement rigide les normes de la vie chrétienne et dans ce parcours de vie elles sont accompagné par ce
qu’on appelle « directeur de conscience », M. Doucin. Ce dernier est un religieux qui rencontre de manière
quotidienne ses dévotes et qui les oriente dans toutes les choix de la vie quotidienne pour les diriger dans
leurs choix.

46 La femme de chambre pour homme est une femme de service très intime avec son patron.
47 À rappeler : il raconte les événements du point de vue de Jacob, donc toujours coté manipulatoire
Le faux dévot
Un autre type social d’hypocrite qu’on rencontre dans le roman au-delà de celui du séducteur (sociale, la
passion utilisé comme instrument de l’élévation sociale) est donc celui de la fausse dévote (qu’on retrouvera
aussi dans « Les liaisons dangereux » ). En effet Marivaux n’hexite pas à souligner comme tous les dévots ne
sont pas sincères comme ils apparaissent, en travaille beaucoup l’auteur sur l’opposition entre l’être et le
paraitre ,le masque et le visage, la vérité et la dissimulation. La satire sociale ne peut pas donc épargner le
faux dévot, thopos de la littérature française du XVII siècle48. En général, Marivaux utilise le terme dévot
avec une nuance déjà intrinsèquement négative, en opposition à la figure du pieux, celui qui à sincèrement de
la « pietas » dans le sens religieux du terme.

Mais Jacob reconnait dans les Haberds la figure du faux dévot, dont il fait un portrait général.
♥ (A)Je n’en dirais pas tant de celui d’une pieuse ; car il y a bien de la différence entre la véritable piété et
ce qu’on appelle communément dévotion.
Les dévots fâchent (corrompent) le monde, et les gens pieux l’édifient (le construisent) ; les premiers
n’ont que les lèvres de dévotes, c’est le cœur qui l’est dans les autres (CHIASMO); les dévots vont à l’église
simplement pour y aller, pour avoir le plaisir de s’y trouver, et les pieux pour y prier Dieu ; ces derniers
ont de l’humilité, les dévots n’en veulent (ne s’y attendent pas) que dans les autres. Les uns sont de vrais
serviteurs de Dieu, les autres n’en ont que la contenance (posture).(B)
(C)Faire oraison pour se dire : Je la fais ; porter à l’église des livres de dévotion pour les manier (les
tenir dans les mains), les ouvrir et les lire; se retirer dans un coin, s’y tapir(se mettre en génoux) pour y
jouir superbement d’une posture de méditatifs, s’exciter(1) à des transports pieux, afin de croire qu’on a
une âme bien distinguée, si on en attrape ; en sentir en effet quelques-uns que l’ardente vanité d’en avoir
a fait naître, et que le diable, qui ne les laisse manquer de rien pour les tromper, leur donne. Revenir de
là (l’église) tout gonflé de respect pour soi-même (amour propre), et d’une orgueilleuse pitié pour les
âmes ordinaires(2). S’imaginer ensuite qu’on a acquis le droit de se délasser de ses saints exercices par
mille petites mollesses qui soutiennent une santé délicate (3).(D)
Tels sont ceux que j’appelle des dévots, de la dévotion desquels le malin esprit a tout le profit, comme on
le voit bien.
À l’égard des personnes véritablement pieuses, elles sont aimables pour les méchants mêmes, qui s’en
accommodent bien mieux que de leurs pareils ; car le plus grand ennemi du méchant, c’est celui qui lui
ressemble.
Voilà, je pense, de quoi mettre mes pensées sur les dévots à l’abri de toute censure.
Ici Marivaux utilise des tournure stylistiques très complexes, au point que certains périodes nécessite d’être
relus plus d’une fois pour être compréhensibles.
On peut dégager deux parties dans ce discours :
♥ (A-B)1ère partie = opposition pieux-dévot par une série de parallélismes
Pas de rapport sincère, intime avec la divinité, ma la jouissance d’un rite dépourvue de signification,
totalement autoréférentielle.
♥ (C-D)2ème partie = série d’infinitifs qui décrivent l’attitude du (faux) dévot.
Le sens de la fausse dévotion est une attitude esthétique vis-à-vis de la religion. Ils aiment répéter
des rites seulement pour la gestualité qui leur donne un plaisir sensuelle (de sens) au dévot. Le plaisir
est aussi morale (ils demandent de l’humilité dans les autres), pour avoir de la supériorité garantie de
la dévotion. Cela donne une sorte de ethos, qui permet d’assumer une posture de juge envers les
autres.
(1)Ils « s’excitent », c’est explicit. Plaisir esthétique, morale, mais dans un certain sens aussi érotique (on a
vraiment du lexique érotique).
(2)La dévotion est un outil de jugement des autres.
(3)Nœud central de la question tout le sens de la fausse dévotion, qui a un sens économique religieuse. C’est
une sorte de balance qu’on recherche : apparoir dévot par des actes pour justifier des comportements (mollets
sont des plaisirs pêcheuses) vicieux dans la vie privé.

48On en rencontre en abondance : Mme de Merteuil, protagoniste de Les Liaisons Dangereuses, est une fausse dévote
par exemple, comme on peut voir dans ses lettres (roman épistolaire) ; même si elle est considéré une des plus dévotes
entre les parisiennes, par la publication de ses correspondances privées elle aura sa réputation publique ruinée.
De toute manière, comme on a déjà vu plusieurs fois, certains personnages de Marivaux sont tellement
hypocrite qu’il sont dupe eux même, ils ne rendent plus compte de simuler et sont victimes de leur même
dissimulation49. La plus part des faux dévots donc n’en sont pas conscients.

La fausse dévotion des mesdames Haberd est mise en scène à la table. Leur rapport avec la nourriture révèle
toute leur hypocrisie.
Lorsque Jacob est accueilli chez les femmes, on l’invite immédiatement à diner, comme on veut par
bienséance.
♥ Nos dames ne mangeaient point de bouilli(1), il ne faisait que paraître sur la table, et puis on l’ôtait pour
le donner aux pauvres(2).
Catherine (sœur ainée) à son tour s’en passait (ne mangeait), disait-elle, par charité pour eux (les
pauvres), et je consentis sur-le-champ (immédiatement) à devenir aussi charitable qu’elle.(3)
Je sus depuis que mon devancier (celui assis en front, qui est M. Doucin) n’avait pas eu comme moi part
à l’aumône, parce qu’il était trop libertin (digne de respect, pas dans le sens de la littérature libertine)
pour mériter de la faire, et pour être réduit au rôt et au ragoût(4).
Je ne sais pas au reste comment nos deux sœurs faisaient en mangeant, mais assurément c’était jouer
des gobelets (jouer à deviner) que de manger ainsi.(5) Jamais elles n’avaient d’appétit ; du moins on ne
voyait point celui qu’elles avaient(6) il escamotait les morceaux ; ils disparaissaient sans qu’il parût
presque y toucher.
On voyait ces dames se servir négligemment de leurs fourchettes, à peine avaient-elles la force
(HYPERBOLE POUR IRONIE) d’ouvrir la bouche ; elles jetaient des regards indifférents sur ce bon vivre: Je
n’ai point de goût (faim) aujourd’hui. Ni moi non plus. Je trouve tout fade (sans saveur). Et moi tout trop
salé.(7) Ces discours-là me jetaient de la poudre aux yeux (confondaient), de manière que je croyais voir
les créatures les plus dégoûtées (avec de la nausée) du monde, et cependant le résultat de tout cela était
que les plats se trouvaient si considérablement diminués quand on desservait (défaire la table), que je ne
savais les premiers jours comment ajuster tout cela (comment me l’expliquer).
Mais je vis à la fin de quoi j’avais été dupe (trompé). C’était de ces airs de dégoût, que marquaient nos
maîtresses et qui m’avaient caché la sourde activité de leurs dents(8).
Et le plus plaisant (ce qu’amusait le plus), c’est qu’elles s’imaginaient elles-mêmes être de très petites et
de très sobres mangeuses ;(9) et comme il n’était pas décent que des dévotes fussent gourmandes, qu’il
faut se nourrir pour vivre, et non pas vivre pour manger ; que malgré cette maxime raisonnable et
chrétienne, leur appétit glouton (gourmand) ne voulait rien perdre, elles avaient trouvé le secret de le
laisser faire (laisser que leurs gueules fuissent satisfaites), sans tremper (se heurter) dans sa gloutonnerie
(péché de gueule); et c’était par le moyen de ces apparences de dédain(méprise) pour les viandes, c’était
par l’indolence avec laquelle elles y touchaient, qu’elles se persuadaient être sobres en se conservant le
plaisir de ne pas l’être(10) ; c’était à la faveur de cette singerie (simulation), que leur dévotion laissait
innocemment(11) le champ libre à l’intempérance.
Il faut avouer que le diable est bien fin, mais aussi que nous sommes bien sots !
(1) Le bouilli c’est une viande extrêmement grasse : même si cela peut paraitre un détail insignifiant, si on
fuisse vraiment pieux on ne le mangerait pas pour esprit d’humilité.
(2)C’est claire qu’on est passé à une hyperbole du ridicule : on cuisine le riche bouille directement pour le
donner aux pauvres sans le manger.
(3)Jacob est séduisant et mondain quand il faut l’être mais devient immédiatement dévot quand cela lui sert
pour manipuler, pour convaincre de ses bonnes intentions afin de séduire. Jacob caméléon social.
(4) M. Doucin a mangé, comme Jacob, son bouilli. Aussi la figure du directeur de conscience est souvent
objet de critique sociale à l’époque : d’habitude on lui reproche de diriger leur dévots en menant ses intérêt
privés plutôt que leurs.
(5)La nourriture disparaissait même si personne mangeait, ou mieux : les sœurs faisaient disparaitre les plats
sans que personne s’en rendait compte.

49 En realité, cette « théorie » de Marivaux est très fortemment explicité dans le texte, même plusieurs fois. On en avait
déjà un exemple dans la première description qu’il fait de madame, dont il dit « Madame, chez elle, ne passait point
pour coquette ; elle ne l’était point non plus, car elle l’était sans réflexion, sans le savoir ; et une femme ne se dit point
qu’elle est coquette quand elle ne sait point qu’elle l’est, et qu’elle vit dans sa coquetterie comme on vivrait dans l’état
le plus décent et le plus ordinaire ».
(6)Marivaudage sur l’être et apparaitre: même s’ils avaient de l’appétit, elles simulaient de ne l’avoir pas.
(7)Contradiction : elles ne disent point la vérité, mais n’ont même pas envie de s’accorder sur la mensonge.
(8)HYPALLAGES (les dents silencieux) : la bouche d’une partie exprime dégout mais de l’autre elle mange.
(9)Eux-mêmes pensaient d’être sobre, victimes de leurs dissimulation.
(10)Le sens de la fausse dévotion est celui-là : maintenir le plaisir du péché même en le dissimulant. si je ne
suis pas conscient de pécher, je ne suis pas en train de pécher de fait.

Le rapport des gens avec leurs directeur de conscience est un très bon exemple de la manipulation réciproque
de la société mondaine de l’époque : si les dévots cachent leurs petits plaisir, c’est toujours pour manipuler le
directeur en lui faisant croire d’être pieux; vice-versa, si le dévots sont naïf, ils sont manipulés par le
directeur. En ce cas, on à les deux : le directeur arrive chez les sœurs et se rend compte immédiatement que
Jacob a mis en fonction sa machine séductrice. M. Doucin craint l’attraction de Mme Haberd a pour Jacob,
puisque cela pourrait compromettre son rôle50 : la présence de Jacob constituerait une forme de remise en
cause de son autorité chez les sœurs. Pour cela, lui aussi manipule les femmes pour chercher à faire chasser
l’homme de la maison, pour le faire il ne veut pas accuser directement ses dévotes de pouvoir céder à la
séduction de Jacob, mais on fait toujours référence au regards des autres, à l’apparence.
Le langage est ambigu.
Il dit, à propos de Jacob :
♥ Ce garçon est dans la première jeunesse, il a l’air hardi et dissipé, vous n’êtes pas encore dans un âge à
l’abri de la censure(1); ne craignez-vous point les mauvaises pensées qui peuvent venir là-dessus à ceux
qui le verront chez vous ? Ne savez-vous pas que les hommes se scandalisent aisément, et que c’est un
malheur terrible que d’induire son prochain au moindre scandale ?(2) Ce n’est point moi qui vous le dis,
c’est l’Evangile(3). D’ailleurs, mes chères sœurs, car il faut tout dire (être honnête), nous-mêmes ne
sommes-nous pas faibles? Que faisons-nous dans la vie, que combattre incessamment contre nous, que
tomber, que nous relever ?(4) Je dis dans les moindres petites choses ; et cela ne doit-il pas nous faire
trembler ? Ah ! croyez-moi, n’allons point, dans l’affaire de notre salut, chercher de nouvelles difficultés
à vaincre ; ne nous exposons point à de nouveaux sujets de faiblesse.
Cet homme-ci est trop jeune ; vous vivriez avec lui, vous le verriez presque à tout moment ; la racine du
péché est toujours en nous, et je me défie déjà (je suis obligé de vous le dire en conscience), je me défie
déjà de la bonne opinion que vous avez de lui, de cette affection obstinée que vous avez déjà prise pour
lui ; elle est innocente, le sera-t-elle toujours? Encore une fois, je m’en méfie.
J’ai vu Mlle Habert, ajouta-t-il en regardant la sœur cadette, n’être pas contente des sentiments que j’ai
d’abord marqués là-dessus ; d’où vient cet entêtement dans son sens, cet éloignement pour mes idées,
elle(5) que je n’ai jamais vu résister un instant aux conseils que ma conscience m’a dicté pour la sûreté
de la sienne ? Je n’aime point cette disposition d’esprit-là, elle m’est suspecte ; on dirait que c’est un
piège que le démon lui tend ; et dans cette occurrence, je suis obligé de vous exhorter à renvoyer ce
jeune homme, dont la mine, au surplus, ne me revient point autant qu’à vous ; et je me charge de vous
donner un domestique de ma main, c’est un peu d’embarras pour moi ; mais Dieu m’inspire de le
prendre ; et je vous conjure, en son nom, de vous laisser conduire. Me le promettez-vous ?
(1)Deux clés de lecture de cette affirmation.
- En termes érotiques, car elles peuvent encore jouir des plaisir de la carne à leur âge ;
- En termes de bienséance, parce que à leur âge on peut encore penser mal d’elles ;
(2)La construction linguistique de la manipulation ici est très hardie et s’appuie sur l’apparence publique : les
autres se scandalisent, mais même si le scandale n’est pas vrai, ça serait quand même une faute d’induire
dans les autres la souffrance de se choquer pour des rumeurs. On veut faire lève sur le sens de culpabilité.
(3)Déresponsabilisation : on assistera plusieurs fois à ce procédé dans le discours du directeur de conscience.
(4)Marivaux veut montrer l’influence subie par les pratiques rhétoriques des moralistes du siècle (comme par
exemple la Rochefoucault) sur les gens, la collectivité : pour ce motif, le prêtre utilise le « nous » pour
exprimer ses opinions, en s’insérant dans la collectivité.
(5)À nouveau, colpevolisation avec un fin manipulatoire

50 La mauvaise foi des personnages de Marivaux n’est pas forcement intéressé (économiquement ou socialement), mais
il s’agit d’une mise en œuvre du pouvoir : c’est donc une questionne encore plus perverse vu que la manipulation n’a un
but, c’est le fait de pouvoir exercer le pouvoir et son plaisir.
La sœur ainée suit de manière automatique ce que dit M. Doucin:
♥ […]puisque monsieur, qui est plus éclairé que nous(1), n’approuve pas ce que nous avons fait, il faut se
rendre.
(1)Catherine parle avec le « nous » pour les deux. En effet, si on y fait du cas, on se rend compte qu’elle a
instauré presque un autoritarisme morale et religieux sur la sœur cadette, qui suit le modelé de comportement
de l’ainée presque comme une victime. Au moins, jusqu’à quand rencontre Jacob…

La sentence de l'abbé tombée et étant la grande sœur d'accord avec lui, Mlle Haberd, déjà séduite par Jacob,
s'emporte pour le défendre. Cela ne fait qu’entraîner une rivalité entre les deux sœurs, qu’aboutira avec le
refusant de demander à Jacob de partir de la partie de la sœur cadette, qui décide plutôt s’en aller de la
maison. C’est une séparation physique mais surtout spirituelle (l'aînée préfère son salut que sa sœur) de
Catherine. Mlle Haberd et Jacob partent en quête d'une maison et Jacob met toujours plus en œuvres ses
tactiques de séductions (de nombreux compliments)51. Mlle Haberd est clairement sou le charme : ils
discutent de leur famille et origines sociales et on découvre que tous les deux sont issus d'une famille de
paysans. Ils trouvent une maison à louer, ils font la connaissance de la propriétaire (une grosse commère
bavarde et stupide, même si pleine de bonnes intentions), Madame d'Alain.
Sur le chemin du retour de la visite de la maison, ils établissent la nouvelle identité de Jacob, en tant que la
femme lui a dit que ne veut pas qu’il soit reconnu par la patronne comme son Valet (serait inapproprié de
loger ensemble autrement). Il sera Monsieur de la Vallée, cousin de Mlle Haberd.
C’est Jacob qui s’en préoccupe :
♥ […]mais écoutez, mademoiselle, il faut encore ajuster une autre affaire ; on pourra s’enquêter à moi de
ma personne, et me dire : Qui êtes-vous, qui n’êtes-vous pas ?(1) Or, à votre avis, qui voulez-vous que je
sois ? Voilà que vous me faites un monsieur ; mais ce monsieur, qui sera-ce ? Monsieur Jacob ? Cela va-
t-il bien ? Jacob est mon nom de baptême, il est beau et bon ce nom-là ; il n’y a qu’à le laisser comme il
est, sans le changer contre un autre qui ne vaudrait pas mieux ; ainsi je m’y tiens ; mais j’en ai besoin
d’un autre ; on appelle notre père le bonhomme la Vallée, et je serai monsieur de la Vallée son fils, si
cela vous convient(2).
Tu as raison, me dit-elle en riant, tu as raison, monsieur de la Vallée, appelle-toi ainsi […] et décemment
sous le titre d’un parent qui vit avec moi, et qui me secourt dans mes affaires.
[…]Nous voilà à l’autre maison(3) ; et c’est d’ici qu’on va voir mes aventures devenir plus nobles et plus
importantes ; c’est ici où ma fortune commence : serviteur au nom de Jacob, il ne sera plus question que
de monsieur de la Vallée ; nom que j’ai porté pendant quelque temps, et qui était effectivement celui de
mon père ; mais à celui-là on en joignait un autre qui servait à le distinguer d’un de ses frères, et c’est
sous cet autre nom qu’on me connaît dans le monde ; c’est celui-ci qu’il n’est pas nécessaire que je dise
et que je ne pris qu’après la mort de Mlle Habert, non pas que je ne fusse content de l’autre, mais parce
que les gens de mon pays s’obstinèrent à ne m’appeler que de ce nom-là.
(1)On pourrait s’interroger sur son identité parce que Jacob n’est jamais habillé comme un valet, ce qui ne
représente pas un détail peu important dans une société ou les couches sociales sont apparemment
imperméables et l’appartenance (comme l’apparence) sociale comptent beaucoup.
(2)Le choix du nom c’est bien ironique, qui vient de la manière avec on appelait le père : ce qui était un jeu,
rien de plus qu’une simple expression rurale (« homme de la vallée » ), devient synonyme de noblesse.
Cela représente le tournant du roman : il assume une identité fausse.52
(3)Les deux déménagent officiellement dans l’appartement de Madame d’Alain.
12/04/2022
FRANÇOIS-MARIE AROUET
(VOLTAIRE)
François-Marie Arouet est originaire d'un milieu bourgeois, son père était notaire et il fait de brillantes études
chez les jésuites. Des vers irrévérencieux et satyrique contre Luise XIV l'obligent à rester en province, puis

51 […]tous mes regards étaient presque autant de compliments


52 Le changement d’identité est presque une blague ici, un prétexte d’ironie et satyre, mais dans le XIX siècle (pendant
la période de la guerre civile et de la révolution, 1789 – 1815), on verra surgir « la société du doute », dans laquelle
n’importe qui peut être n’importe quoi . C’est le chaos au point que cela ne sera pas même objet de comédie, mais peint
comme un élément extrêmement troublant.
provoquent son incarcération à la Bastille en 1717, ou il sera reclus à nouveau quelques ans après à cause
cette fois d’une altercation avec le chevalier Rohan-Chabot53. Enfin, il décidera pourtant de quitter la France,
en se contraignant à un exil de trois ans en Angleterre (1730 -1732). Au contact des philosophes d'Outre-
Manche, où la liberté d'expression était alors plus grande qu'en France, il s'engage dans une philosophie
réformatrice de la justice et de la société : de retour en France, Voltaire poursuit sa carrière littéraire avec
pour objectif la recherche de la vérité et de la faire connaître pour transformer la société. Il est célèbre à son
époque préalablement comme écrivain de tragédies54 et, avec moins de succès, des comédies. Il critique
beaucoup d’aspects de la société de son temps : la guerre, dogmes chrétiens et mêmes le régime politique en
France (qu’à l’époque on croyait se baser sur le droit divin, notamment dans une de ses œuvres les plus
célèbre, les "Lettres philosophiques" du 1734.
Des poèmes officiels lui permettent d'entrer à l'Académie Française et à la Cour comme historiographe du roi
en 1746, an de rédaction de « Précis du siècle de Luis XV ». Cependant, l’œuvre publié l’année suivant,
"Zadig" (1747), l'oblige à un nouvel exile, avant en Allemagne et puis à Genève. En 1750 Voltaire se
déplaçant à Ferney, près de la frontière Suisse, à la Cour de Frédéric II de Prusse. Ces années sont marquée
par une activité d’Illuministe de l’artiste, qui écrit en cette période la plupart des ouvrages où il expose sa
pensée en tant que Philosophe55 : « Les dialogues philosophiques » (1751) , « Le dictionnaire
philosophique » (1756) et « Candide ou l’optimisme » (1759) sont les trois grandes ouvrages, avec les
Lettres Anglaises, qui marquent l’activité de Voltaire en tant que lumière.
En tant qu’indissociable de son expérience individuelle, pour divulguer sa philosophie il recourt à des formes
narratives toutes différentes l’unes par rapport à l’autre :
♥ la lettre pour son première ouvrage philosophique ;
♥ le dialogue de la tradition catonicienne ;
♥ la forme d’un dictionnaire, ou mieux, sa parodie, vu que tout ce qu’on est présenté sont des
arguments en ordre alphabétique
♥ le récit de Candide.

En 1778, il retourne enfin à Paris, à l'Académie et à la Comédie Française, mais épuisé par son triomphe et à
cause de rapports toujours mauvaises avec Louis XV, il s’exile encore une fois volontairement à Ferney et il
ne rentrera pas dans la Ville Lumière qu’en 1778, peu avant sa mort.
Avec ses pamphlets mordants, Voltaire est un brillant polémiste. Il combat inlassablement pour la liberté, la
justice et le triomphe de la raison. Esprit universel ayant marqué le siècle des "Lumières", défenseur acharné
de la liberté individuelle et de la tolérance, Voltaire a beaucoup de succès auprès de la bourgeoisie libérale.
Il laisse une œuvre considérable mais à cause de la censure, à l’époque la plupart de ses écrits étaient
interdits. Ils étaient publiés de manière anonyme, imprimés à l'étranger et introduits clandestinement en
France.

Candide ou l’optimisme
Candide, contrairement à Zadigue (de tendance optimiste et confident à l’égard de la raison et son exercice),
est le texte le plus pessimiste de Voltaire : suite à toute une série de violences naturelles et humaines
auxquelles assiste le protagoniste, la conclusion du texte est qu’il faut penser à soi-même, en tournant le dos
à l’utilise de la raison sur le mal qui marque l’existence humaine de différentes formes. Conclusion
pessimiste donc, marqué par la décevante expérience des dernier année à la cour de Fréderic II : on est en

53 L’intempérance de certains philosophes n’était pas strictement politique, mais aussi sentimentale et personnelle : les
disputes et les événements personnels de la vie de Voltaire vont toujours influencer son œuvre et sa philosophie.
Les Philosophes littéraires ne sont pas « systématique », mais empruntent leur œuvre sur leurs expériences de vie privé
(à différence des vrais philosophes de l’époque, comme Kant par exemple) : de cela leur fascination pour le sensisme et
l’inductivisme : toutes connaissances sont fondés sur l’expérience directe.
54Ses tragédies, en réalité, n’ont pas marquées l’histoire de la littérature, mais à l’époque ils respectent très strictement
les normes classiques pour thèmes et forme, ce que le rend beaucoup apprécié.
55 Les rapports directes et personnels avec les Philosophes de son époque sont tardifs : en 1749 seulement il a des
rapports épistolaires avec Diderot, en 1746 avec d’Alembert (1751 publieront le premier volume de l’encyclopédie).
L’engagement dans la philosophie des lumière est assez tardive dans sa vie donc et sa carrière a des traits plus
transversales.
plein guerre de 7 ans, les caisses sont affaiblies et la situation financière des monarchie est terrible. En plus,
le monarque se démontre très peux éclairé, en décide de réprimer les révoltes populaires dans le sang et
montrant pourtant le visage de la monarchie le plus violents et autoritaire. Ce moment-là marque un tournant
dans la vision politique de voltaire, qui perd sa confidence dans le pouvoir absolu du monarque, ce que le
conduit à mettre fin à son projet philosophique d’un despotisme illuminé.

LES LETTRES ANGLAISES (1734)


En subissant toute l’influence d’un siècle marqué par l’anglomanie, au moment où le jeune Voltaire sera
obligé de quitter la France, comme anticipé, choisira de vivre pendent peu de temps en exile volontaire en
Angleterre. C’est ici qu’il recueillera le matériel pour un de ses œuvres les plus célèbres, les Lettres
Philosophiques (surnommé pourtant aussi « Les Lettres Anglaises »). Ils représentent l’exemple parfait pour
démontrer comment les expériences directes de Voltaire influencèrent sa pensée.
La forme narrative utilisée est celle de la lettre, texte emblème pour l’expression de l’expérience directe qui
devient donc un espace pour raconter et faire pratique de sono esprit critique.

Lettre sur la tolérance


Voltaire commence à élaborer le concept de tolérance à partir du rencontre qu’il fait avec les Quakers,
branche du protestantisme très proche des puritains, refuse l’autorité de Rome et du Pape, qui demande et
impose une lecture littéraire des écritures et une application directe de la loi telle qu’elle est présentée dans la
bible. De la même manière, ils refusent le pouvoir du chef de l’église d’Angleterre, le roi. Donc tout en étant
inoffensifs, ils constitueraient un problème énorme en France (déjà déchirées par les guerres de religions au
XVI siècle), tandis qu’en Angleterre constitutionnelle ils sont tolérés et vivent en paix. La lettre de Voltaire
regarde au rapport entre ce groupe et le reste de la société anglaise, comme éloge au relativisme et à la
tolérance.
Il émarge clairement dans l’œuvre à quel point son rapport avec le pouvoir soit toujours marqué par des
hauts et des bas, des rapprochaient et éloignement. Il soutient le modelé de « souverain illuminé », il a
confidence donc dans le pouvoir absolu, mais seulement à condition qu’il soit guidé par un Philosophe, qui
puisse éduquer le monarque à la raison et à l’esprit critique.

ZADIG OU LA DESTINÉE (1747)


Ouvrage qui se situe au cœur de la carrière de Voltaire, comme anticipé elle marque les premiers approches
de l’auteur avec les Lumières « canoniques » (sans tenir en considération les Lettres Anglaises).
Ce texte a une genèse assez curieuse, vu qu’en réalité il avait été rédigée deux ans avant sa publication avec
le titre « Memnon, Histoire Orientale » (récit où des extraits sont reprises dans la dernière édition de Zadig).
Cet œuvre se constitue comme une manière d’exprimer la pensé de l’auteur, que comme on à déjà anticipé
est indissociable de son expérience directe : le texte est donc imprégné de références biographiques.
Néanmoins, bien que Zadigue représente l’exercice de la raison, ce dernier n’est pas la contrepartie exacte de
Voltaire : le chevauchementsovrapposizione entre les deux n’est que partielle. Dans certains moments, le narrateur
arrive à se moquer même de son personnage, à cause de sa philosophie pas complétement affine à la sienne.
Au final, la philosophie de Voltaire correspond plus à l’ensemble des considérations à la fois de Zadigue et à
la fois du Narrateur. Un lecteur attentif sera capable de se rendre compte que l’auteur recule, dans certains
moment, de son personnage. En réalité, ce n’est pas de l’ordinaire : en tant que récit à thèse, on s’attendrait
une certaine asepsie, qui viserait à démontrer seulement sa Philosophie de manière objective. Cela se passe
en effet pendant la plu grand partie du récit : Zadig est un texte sec, avec peu de quête psychologique et
drame ; mais on retrouve aussi un certain équilibre avec la sensibilité de l’auteur et ses expériences de vie
directe transposé dans l’intrigue.
Exactement pour cela, la première édition de l’œuvre va apparaitre anonyme, pour se protéger de
l’exposition personnelle, même si en effet n’était pas difficile de reconnaitre, entre les personnages cités dans
le texte, des personnalité qui faisaient parti de la Cour française de l’époque.
Un des grands antagonistes de Zadigue, par exemple, est Orcan (un despote dans l’œuvre), derrière lequel ne
se cache que le chevalier de Rohan, qui avait fait emprisonner l’auteur la seconde fois. Ou même Yébor,
savant courtisan de Zadigue plutôt opportuniste, on peut reconnaitre la figure du cardinal Boyer, un grand
opposant de Voltaire à la cour. Mais la satyre de l’auteur ne se limite pas seulement aux figures politiques,
mais aussi aux ennemis artistiques de Voltaire: le texte s’ouvre en effet avec une fausse approbation royale,
fournie par le censeur du roi, Crébillon père, fidèle de Luis XV qui avait contrarié deux fois Voltaire dans ses
années à la cour, censurant deux de ses tragédies.
L’œuvre est bien marqué par une nuance orientaliste (pag. 8), courant avec laquelle Voltaire est venu en
contact à travers un autre texte, l’ « Histoire de Charles XII56 » (qu’il définit un « roman vrai »), grâce auquel
il est bien informé sur l’orient. Mais en réalité, il décide dans Zadigue de donner une vision quand même
stéréotypé de l’ailleurs, riche de clichés de la culture préislamique et arabe en générale : cela est dû au fait
qu’il y a dans ce conte orientale la volonté de mettre en scène un ailleurs qui n’est qu’un alibi pour parler de
la France, un prétexte explicite donc, rien de plus qu’un outil, un moyen.
L’ouvrage est aussi un texte allégorique, ou cette figure de style n’est pas seulement un utile pour divulguer
la pensé du philosophe, mais aussi les épisodes les plus intimes de sa vie à Versailles. Un critique à défini à
ce texte comme la liquidation de l’expérience de Voltaire à la Cour de France, où à travers une petite
Versailles orientaliste on met le mot fin à l’expérience de Voltaire à la cour de Luis XV. Mais de fait il ne faut
pas réduire Zadigue à la seule expérience de l’amertume d’un courtisan : au contraire, le texte s’insère dans
une parabole qui marque la progressive perte de confiance de l’auteur à l’égard du pouvoir monarchique, de
ses idéaux politique et dans une forme de pouvoir que va se démontrer trop violente et autoritaire.
On pourrait aussi le considérer un roman de formation (à l’époque, en Angleterre, au model du « Tom
Jones » de Fielding), où l’héro est confronté à toute une série de difficultés qui vont marquer ses égarements
dans la société arabe du moyen âge, en éloignant la fin de son parcours. Si donc d’une certain manière on
peut considérer le roman de formation dans les contenus et dans les dynamiques (amélioration intérieur
spirituelle du personnage), on peut pas dire qu’il soit calqué sur le model structural de ce genre : le texte, en
effet, n’a pas d’intrigue, ce qui démontre qu’il est encore profondément enraciné dans l’expérience du roman
Picaresque (accumulation de vicissitudes rocambolesque). Chaque chapitre est presque indépendant par
rapport aux autres.
Il faut toujours se rappeler, en plus, que la narration a un rôle secondaire par rapport à la démonstration de la
philosophie de l’auteur ; donc même si ici le discours se présente en tant que explicitement fictionnel (pas
fausse autobiographie ou recueille de lettre comme « Le paysan Parvenu » ou « Les liaisons dangereuses » ),
il n’est pas autonome. Pas d’autonomie romanesque, pas de personnages rondes (caractérisés
psychologiquement et contextuellement) : le texte est plus proche du genre de la parabole exemplaire que du
romanesque. Les épisodes sont extrêmement linéaires et les personnages sont des « types » figées (pas
comme on l’entend dans Balzac et Zola57). Ces sont des fonctions narratifs, plats, argumentative pour
l’exposition de la pensée de Voltaire.
L’esprit critique (et violent) de Zadig se formule contre toute une série de figure, mais pas trop contre la
personne en effet, plutôt contre la société entière.
Le même Zadigue occupera différents positions sociaux en s’engageant dans différents métiers, avec la
devise « il faut pas seulement connaitre tout le monde mais aussi être tout le monde » (sensisme et
expériences personnelle importantes).
13/04/2022
Analyse des extraits
Comme déjà anticipé, l’œuvre commence avec une fausse approbation qui remonterait à un dignitaire qui
occupe un rôle de toute considération à la cour d’un sultan arabe. Il s’agit d’une critique, même pas trop
implicite, à Crébillon père, homme fidèle du roi avec lequel Voltaire avait eu des disputes due à une rivalité
artistique et personnelle entre les deux.
L’escamotage initiale est celui du « manuscrit retrouvé » traduit par un ancien traducteur arabe.
♥ Je soussigné, qui me suis fait passer pour savant, et même pour homme d’esprit, ai lu ce manuscrit, que
j’ai trouvé, malgré moi, curieux, amusant, moral, philosophique, digne de plaire à ceux mêmes qui
haïssent les romans(1). Ainsi je l’ai décrié, et j’ai assuré monsieur le cadi-lesquie que c’est un ouvrage
détestable.

56C’est un texte où essentiellement l’historiographie se mélange avec les procédés du romanesque et comme Charles
XII avait ouvert la voie vers Constantinople, lorsque de l’écriture de ce texte il faut ouvrir une période de
documentation et d’exploration détaillé aussi de l’Orient.
57Dans le réalisme, le type (comme dans la préface à la comédie humaine de Balzac, 1842) est une catégorie sociale,
professionnel et humaine dont convergence sur un seul personnage donne une personne à 360 degrés. Les types sont
détaillés, au point qu’ils deviennent individus à tout-cour.
(1) Il faut se rappeler qu’il ne s’agit pas d’un roman au sens stricte, qui s’inscrit encore dans la tradition des
règles oraciennes d’éduquer à travers le divertissement. Tout de même il insiste sur le point que cet œuvre va
plaire a tous.
L’épitre dédicatoire (au modèle de « Mille et une Nuits ») serait offert par un poète réellement existé au
moyen âge Arabe, Sadi (an 1459). Cela renforcerait la valeur philosophique du texte, en lui conférant aussi
du sens au-delà de fiction et divertissement.
La personne à laquelle le poète s’adresse est la sultane Sheraa, nom du personnage protagoniste de Mille et
une Nuit. L’offre de ce livre à la femme se déroule après la conclusion de ce roman (Mille et une Nuit), donc
après qu’elle a tué le sultan et qu’elle a pris sa place.
Le texte est présenté comme :
♥ […]la traduction d’un livre d’un ancien sage qui, ayant le bonheur de n’avoir rien à faire, eut celui de
s’amuser à écrire l’histoire de Zadig, ouvrage qui dit plus qu’il ne semble dire(1).
[…]quoiqu’on vous loue du soir au matin, et que par toutes ces raisons(2) vous soyez en droit de n’avoir
pas le sens commun(3), cependant vous avez l’esprit très sage et le goût très-fin, et je vous ai entendue
raisonner mieux que de vieux derviches à longue barbe et à bonnet pointu(4).
(1)On voit bien ici l’esprit d’un récit philosophique, toujours l’allégorie d’un système de pensé : derrière les
événements qui se déroulent et s’accumulent rocambulesquement, on a des thèmes qu’on demande au lecteur
de cueillir. Pour ce motif, si on remonte à la fausse, approbation, on dit que « ce texte peut plaire à tous ».
Le texte a en effet une vrai et explicite fonction éducative : il faut prendre au sérieux la volonté d’éduquer.
(2)Sexisme qu’on peut interpréter comme une forme d’ironie (la sultane n’est pas une sotte, elle est au
contraire un exemple de ruse).
(3)Même ici ironie : voix de quelqu’un déçu par l’expérience de la cout : le souverain n’a jamais tort.
(4) La femme serait plus sage que les vieux savants.
♥ C’était du temps où les Arabes et les Persans commençaient à écrire des Mille et une Nuits(1) , des Mille
et un Jours, etc. Ouloug aimait mieux la lecture de Zadig ; mais les sultanes aimaient mieux les Mille et
un. « Comment pouvez-vous préférer, leur disait le sage Ouloug, des contes qui sont sans raison, et qui
ne signifient rien ? — C’est précisément pour cela que nous les aimons, répondaient les sultanes. (2) »
(1)Zadigue remarque que les souverain préfèrent les milles et une nuits à ce texte ,donc la femme à laquelle
on adresse ce texte est au point sa protagoniste (ou plutôt son modèle).
(2) Au XVIII siècle, le roman comme forme est combattue et la femme coquette occupe un rôle centrale dans
les représentations. Ce que dit le sage Ouloug assume dans le sens littérale d’une critique à la coquetterie et
légèreté des femmes comme la sultane, que Voltaire fait aux figures politiques de sa France contemporaine.
Ouloug était le descendent du roi des croisades, un des meilleurs de l’histoire selon Voltaire. Encore une fois
donc les pensées philosophiques l’emportent sur le divertissement.
Ce même scénario se répètera à plusieurs reprises.

Du début du texte, Zadig incarne la rationalité et l’esprit critique le plus pur, mais chaque fois qu’il va mettre
en montre et exercer sa raison et ses capacités déductives pour démêler des questions, l’incapacité des autres
de cueillir la justesse du personnage lui cause des problèmes.
Le schéma est toujours le même : il ressoude une situation de façon raisonnable et cela lui va causer des
autres problèmes ; c’est la sinusoïdale de fortunes et bonheurs systématiquement compromises par des
problèmes.
Zadig est considéré un sage, un jeune savant, et il fréquent la cour du sultan de Baghdâd.
♥ Il était fermement persuadé(1) que l’année était de trois cent soixante et cinq jours et un quart, malgré la
nouvelle philosophie de son temps, et que le soleil était au centre du monde(2); et quand les principaux
mages (savants) lui disaient, avec une hauteur insultante (altezzosità offensiva), qu’il avait de mauvais
sentiments (era in malafede, pensava male), et que c’était être ennemi de l’état(3) que de croire que le
soleil tournait sur lui-même, et que l’année avait douze mois, il se taisait(4) sans colère et sans dédain(5).
(1) Le terme « persuader » associé à une vérité scientifique ,comme modalisation, laisse entrevoir l’ironie
envers les autre savants.
(2) Ouvrir le texte avec la considération sur la position du soleil, à l’époque, n’est pas une prise de position
politique neutre…
(3) C’est comme si s’instaurait un conflit entre les vérités scientifiques et la fidélité au sultan.
(4) Du moment qu’il va contre le dogmatisme, cela lui crée certains troubles et l’isole par rapport au reste
des personnes, au point qu’à la fois il préfère se taire au lieu d’exprimer sa pensé.
(5) Il ne se met pas en colère parce qu’il voit que toutes exercices d’esprit critique libres fondé sur des
vérités scientifiques n’est pas capable de s’enraciner là où la courtisanerie pèse plus que la vérité elle-même.

En plus, dans les premiers pages on insiste sur l’autoréférentialité des sciences.
Quand Zadigue se blesse à un œil, il doit se faire soigner pour un médecin, Hermès, lequel constate sur ses
livre que l’œil de l’homme va difficilement guérir…mais cela il l’afferme après qu’il est déjà guéri !
Le narrateur commente :
♥ Hermès écrivit un livre où il lui prouva qu’il n’avait pas dû guérir. Zadig ne le lut point(1).
(1) Cette dernière phrase a un double sens : d’une coté marque le désintéressé de Zadig face à la aveugle
considération de cet homme qui insiste, face à la vérité, de l’impossibilité du phénomène (contradiction d’un
fait réel, hallucination des savants de l’ipse dixit). De l’autre côté, on joue ironiquement sur le fait que
comme l’œil du protagoniste de devrait pas être guéri, il ne pourrait point lire.
Hermès se base sur une vérité scientifique pas expérimentale mais sur la médecine arabe-médiévale
aristotélique : jusqu’au XVII siècle, on ne voyait pas d’utilité dans la vivisection des corps parce que les
anciens savants avait laissé assez d’information pour éviter de compromettre la sacralité du corp (qui aurait
pu compromettre aussi la résurrection de la carne). C’est seulement cent ans après qu’on voit le triomphe de
l’expérimentalisme de la science.
Pas à oublier que Voltaire est un sensistes: la connaissance est le produit de l’élaboration de la raison de ce
que les sens nous communiquent. L’expérience est indispensable de la connaissance.

Un autre épisode qui met bien en évidence à quel point le recours sur la perception sensorielle puissent
mettre Zadig en trouble même s’il a raison c’est celui de la disparition du chien et du cheval.
Quand ces deux animaux de la sultane disparaissent, le protagoniste met en œuvre sa raison : en regardant les
traces dans la sable, il est capable de faire une reconstruction complète des évènements, au point que les
juges, pour sa précision, pensent être lui le coupable, et on décide de l’arrêter.
Au moment où le mystère est dévoilé (moment que généralement est après qu’on a trouvé le coupable),
Zadigue explique aux savants comme il fait à résoudre les questions :
♥ « Étoiles de justice, abîmes de science, miroirs de vérité, qui avez la pesanteur du plomb, la dureté du
fer, l’éclat du diamant, et beaucoup d’affinité avec l’or, puisqu’il m’est permis de parler devant cette
auguste assemblée, je vous jure par Orosmade, que je n’ai jamais vu la chienne respectable de la reine,
ni le cheval sacré du roi des rois(1). Voici ce qui m’est arrivé : je me promenais vers le petit bois où j’ai
rencontré depuis le vénérable eunuque et le très-illustre grand veneur. J’ai vu sur le sable les traces d’un
animal, et j’ai jugé aisément que c’étaient celles d’un petit chien. Des sillons (solchi) légers et longs,
imprimés sur de petites éminences (rilievi) de sable entre les traces des pattes, m’ont fait connaître que
c’était une chienne dont les mamelles étaient pendantes, et qu’ainsi (adverbe de conclusion, pas un
verbe) elle avait fait des petits il y a peu de jours.(2)
D’autres traces en un sens différent, qui paraissaient toujours avoir rasé la surface du sable à côté des
pattes de devant, m’ont appris qu’elle avait les oreilles très-longues ; et comme j’ai remarqué que le sable
était toujours moins creusé par une patte que par les trois autres, j’ai compris que la chienne de notre
auguste reine était un peu boiteuse, si je l’ose dire.
(1) Captatio benevolentiae qui introduit sa justification. Déjà ici la note ironique est bien évidente: la
dimension du ridicule est souligné par l’accumulation de 4 lignes de louanges, qu’en réalité sont toujours au
limite du compliment (termes ambigus telle que « abime », « pesanteur », « dureté »).
La partie sur l’affinité avec l’or est particulièrement intéressante : sur le premier niveau de lecture, l’affinité
avec un matériel précieux est surement flatteur, mais en réalité il ne dit pas qu’ils sont or (pareil, mais pas
égal). Sur l’ autre niveau, la référence au fait qu’on aime bien l’or renvoie à la corruption.
(2) L’attention dans ce morceau de texte est à poser sur les verbes, qui s’encadrent dans 3 catégorie,
permettent de reconstruire le fonctionnement de la méthode déductive de Zadig, en 3 phases:

- EXPERIENCE
Verbes de sensation - ÉLABORATION
(voir, s’apercevoir ) Verbes d’activité cognitive - CONCLUSION
(juger, connaitre)
Verbes modalisateurs de déductif (devoir)
nécessité avec emploi
♥ « À l’égard du cheval du roi des rois, vous saurez que, me promenant dans les routes de ce bois, j’ai
aperçu les marques des fers d’un cheval ; elles étaient toutes à égales distances. Voilà, ai-je dit, un
cheval qui a un galop parfait. La poussière des arbres, dans une route étroite qui n’a que sept pieds
de large, était un peu enlevée à droite et à gauche, à trois pieds et demi du milieu de la route. Ce
cheval, ai-je dit, a une queue de trois pieds et demi, qui, par ses mouvements de droite et de gauche,
a balayé cette poussière. J’ai vu sous les arbres, qui formaient un berceau de cinq pieds de haut, les
feuilles des branches nouvellement tombées ; et j’ai connu que ce cheval y avait touché, et qu’ainsi il
avait cinq pieds de haut. Quant à son mors, il doit être d’or à vingt-trois carats ; car il en a frotté les
bossettes contre une pierre que j’ai reconnue être une pierre de touche, et dont j’ai fait l’essai. J’ai
jugé enfin par les marques que ses fers ont laissées sur des cailloux d’une autre espèce, qu’il était
ferré d’argent à onze deniers de fin. »
Tous les juges admirèrent le profond et subtil discernement de Zadig ; la nouvelle en vint jusqu’au roi et
à la reine. On ne parlait que de Zadig dans les antichambres, dans la chambre, et dans le cabinet ; et
quoique plusieurs mages opinassent qu’on devait le brûler comme sorcier(1), le roi ordonna qu’on lui
rendît l’amende (multa) des quatre cents onces d’or à laquelle il avait été condamné. Le greffier (celui
qui fait le verbal, le chancelier ), les huissiers (gli uomini armati), les procureurs (i procuratori), = tous
ceux qui ont partecipé au procès vinrent chez lui en grand appareil (apparati) lui rapporter (gli
chisero)ses quatre cents onces (pour les dépenses légaux) ; ils en retinrent seulement trois cent quatre-
vingt-dix-huit pour les frais de justice, et leurs valets demandèrent des honoraires (mancia).
(1) Manière de se comporter superstitieuse que Voltaire veut combattre et qu’il critique.
Pas de justice : les monnaies qu’on lui a rendu se dévoilent pour les dépenses légaux.

La critique sociale de Voltaire ne se limite au roi ou aux courtisans, mais aussi aux juges, et au fur et au
mesure qu’on avance dans la lecture, elle s’élargit à la société entière, en arrivant aussi aux savants.
Dans un épisode, Zadig risque d’être mis à mort par des théologiens qui discutent à propos de la licité de
manger de la viande de griffon (surréel). On est encore une fois dans un contexte quasiment absurde.
♥ Le matin, sa bibliothèque était ouverte à tous les savants ; le soir, sa table l’était à la bonne compagnie ;
mais il connut bientôt combien les savants sont dangereux ; il s’éleva une grande dispute sur une loi de
Zoroastre, qui défendait de manger du griffon(1).
« Comment défendre le griffon, disaient les uns, si cet animal n’existe pas ?(2) — Il faut bien qu’il existe,
disaient les autres, puisque Zoroastre ne veut pas qu’on en mange. »(3) Zadig voulut les accorder, en leur
disant :
« S’il y a des griffons, n’en mangeons point ; s’il n’y en a point, nous en mangerons encore moins
(CHIASMO) ; et par là nous obéirons tous à Zoroastre. »(4)
Un savant qui avait composé treize volumes sur les propriétés du griffon(5), et qui de plus était grand
théurgite (mago-teologo), se hâta (sbrigò) d’aller accuser Zadig devant un archimage nommé Yébor(6), le
plus sot des Chaldéens, et partant le plus fanatique. Cet homme aurait fait empaler Zadig pour la plus
grande gloire du soleil, et en aurait récité le bréviaire de Zoroastre d’un ton plus satisfait.
(1) Même à l’époque on savait qu’ils n’existent point, c’est très ironique.
(2) Rapport de cause effet que montrerait la fausseté de ce que dit Zoroastre, impossible
(3) Inversion des rapports de cause-effet
(4) Ce n’est pas question d’avoir raison, mais de prévaloir sur les autres. Même si le problème n’y a pas,
quelqu’un veut avoir raison
(5) Ironie : il a gâté sa vie à décrire des animaux qui n’existent pas
(6) Transfiguration et anagramme du cardinal Boyer, banal pour le lecteur de l’époque, grand rival de
Voltaire, dont Voltaire fait un portrait peur élogier.
C’est intéressant aussi de remarquer le portrait que l’auteur fait du savant que dénonce Zadig à Yebor,
Arimaze, qui est entre choses un voisin de Zadig :
♥ Vis-à-vis sa maison demeurait Arimaze, personnage dont la méchante âme était peinte sur sa grossière
physionomie(1). Il était rongé de fiel et bouffi d’orgueil, et pour comble, c’était un bel esprit ennuyeux.
N’ayant jamais pu réussir dans le monde, il se vengeait par en médire (parlandone male). Tout riche
qu’il était, il avait de la peine à rassembler chez lui des flatteurs. Le bruit des chars qui entraient le soir
chez Zadig l’importunait (lo disturbava), le bruit de ses louanges l’irritait davantage. Il allait
quelquefois chez Zadig, et se mettait à table sans être prié (essere invitato) : il y corrompait toute la joie
de la société, comme on dit que les harpies infectent (infettano) les viandes qu’elles touchent. Il lui
arriva un jour de vouloir donner une fête à une dame qui, au lieu de la recevoir, alla souper chez Zadig.
Un autre jour, causant (discutendo) avec lui dans le palais, ils abordèrent un ministre qui pria Zadig à
souper, et ne pria point Arimaze. Les plus implacables haines (odi) n’ont pas souvent des fondements
plus importants. Cet homme, qu’on appelait l’Envieux dans Babylone, voulut perdre Zadig, parce qu’on
l’appelait l’Heureux. L’occasion de faire du mal(2) se trouve cent fois par jour, et celle de faire du bien,
une fois dans l’année, comme dit Zoroastre.(3)
(1) Correspondance entre physionomie et psychologie, comme dans le paysan parvenu.
(2) Dimension autobiographique que l’emporte sur la dimension philosophique : Voltaire est humain, il haine
et il a des émotions.
(3) Vision de la vie de Zadig a-géographique : comme si le personnage et Voltaire n’aient jamais eu de
fautes, comme si tous leurs maux sont fruit de la stupidité des autres.
20/04/2022
Comme on a dit, les éléments qui font référence à la vie de Voltaire sont nombreuses.
En 1717 Voltaire est emprisonné pour la première fois pour des verses contre la régence de Louis XV et on
retrouve la même épisode dans le texte : Zadig est en train d’écrire un poème en honneur du rois, mais il
décide de déchirer la feuille et on en retrouve seulement une moitié (verticalement) du texte, très ambiguë…

♥ Par le plus grands forfaits


Sur le trône affermi
Dans la publique paix
C’est le seul ennemi
A cause de cette moitié du poème, il est condamné à mort. Sauf que le perroquet (escamotage narratif, pas un
respect du vraisemblable) de la sultane retrouve miraculeusement le reste du texte, l’autre moitié. On réunit
les deux partis de la feuille et le poème se complète de cette manière.
♥ Par les plus grands forfaits / j’ai vu troubler la terre.
Sur le trône affermi / le roi sait tout dompter.
Dans la publique paix / l’amour seul fait la guerre :
C’est le seul ennemi / qui soit à redouter.
Le sens change complètement : le poème c’est un éloge du roi, qu’en état gardian de la paix du royaume ne
fait rester qu’une guerre de passion à son intérieur. Voltaire en réalité se moque une fois encore de Luis XV,
en l’accusant, dans le sous-entendu de cette épisode, de n’avoir pas compris son poème.
C’est intéressant de remarquer comme la partie gauche du poème, de critique, a de toutes façon une « vie
autonome », même du point de vu des rimes. Au contraire, la partie droite ne se constitue que par des
hémistiches (moitié d’un Alexandrin) qui servent seulement à compléter les phrases.
Le rapport entre la satyre du texte et la vie de Voltaire est mise en évidence par ses habilités de versifications,
d’artiste.

Après la redécouverte de la partie droite du poème, on a un moment de bonheur pour Zadig : il est accueilli
à la cour et devient ministre ; cela implique que plusieurs personnages épreuves de la jalousie à ses regards.
La FIGURE DU JALOUSE est donc présenté : on l’accuse d’être source de malheur pour Zadig, comme pour
Voltaire dans la réalité. On trouve une tension apologétique, c’est-à-dire visant à défendre sa position et son
rôle, en accusant les autres de ses échecs, pour justifier la justesse de ses actions.
C’est une sorte de distorsion cognitive : pendent tout le texte Zadigu accuse les autres de ses mésaventures,
comportement typique aussi de Voltaire. Si d’un philosophe on s’attendrait de l’objectivité et du sens critique
même envers soi-même, pour l’auteur n’est pas comme ça !
Dans un certain moment, la femme du jalouse commence à trouver Zadigue fascinant. Mais il, en étant un
Philosophe, décide de ne pas se concéder à elle, en le faisant plutôt avec une femme libre. Quand femme
mariée découvre qu’il a cédé aux flatteries d’une concubine, jalouse, s’enlève la jarretière pour démontrer
qu’elle aussi à eu des rapports avec Zadig. Mais la situation se complique : l’indument intime est très
similaire à un type possédé par la reine, et quand la femme jalouse l’aperçoit, élabore une piège pour faire
accuser Zadigue d’avoir une liaison avec la reine, afin de détruire sa réputation.
Son complot poussera Zadigue à abandonner Babylone, mais avant de cela, il faut dire que entre lui et la
reine il existait en effet un amour platonique, jamais porté à terme : c’est le seul moment où émerge un
rapport de couple tendre, pas construit sur le piège ou l’utilitarisme.
C’est un germe de proto-romanticisme dans l’œuvre narrative de Voltaire : la raison du cœurs que combat
avec la raison de l’Etat, les sentiments opposées à la fidélité au roi58.
De toutes façon, quand Zadigue est indécis sur le fait de céder à l’amour pour la reine, son unique ami dans
la cour, Cador, avec du pragmatisme utilitariste de la comédie, lui conseille de cueillir la passion.
Il dit, pour se justifier :
♥ […] une passion naissante et combattue éclate ; un amour satisfait sait se cacher.
Après l’éclat du faux scandale, la reine dit à Zadigue de s’enfuir pour ne pas être accuse : pour la première
fois, il a une défaillance de lucidité rational sur la voie de la fugue.

♥ « Qu’est-ce donc que la vie humaine ? Ô vertu ! à quoi m’avez-vous servi ? […] Tout ce que j’ai fait de
bien a toujours été pour moi une source de malédictions, et je n’ai été élevé au comble de la grandeur
que pour tomber dans le plus horrible précipice de l’infortune. Si j’eusse été méchant comme tant
d’autres, je serais heureux comme eux.(1)
(1)La première chose qu’on remarque est à nouveau la nuance apologétique du discours : selon lui, sa
justesse est récompensé avec malheur, tandis que la méchanceté rend heureux.
C’est le moment d’hésitation le plus relevant dans le texte ; mais aussi là on a de la distorsion : Zadigue fait
coïncider le bonheur avec le vertus, mais c’est pas juste : rien garanti que l’un produit l’autre et que la
méchanceté doit produire de l’infélicité. Il conçoit en effet, dans ce moment très Léopardien, une sorte de
« pessimisme cosmique » : toute sa fois dans la vertus comme source de bonheur tombe.
♥ Zadig dirigeait sa route sur (si orientava con) les étoiles. La constellation d’Orion et le brillant astre de
Sirius le guidaient vers le port de Canope (étoile figé qu’indique toujours le sud dans l’hémisphère
australe). Il admirait ces vastes globes de lumière qui ne paraissent que de faibles étincelles à nos yeux
(d’une partie on a des énormes feux qui brulent mais paraissent petites étincelles), tandis que la terre,
qui n’est en effet qu’un point imperceptible dans la nature (nature dans le sens d’ « univers »), paraît à
notre cupidité (desiderio) quelque chose de si grand et de si noble(1). Il se figurait alors les hommes tels
qu’ils sont en effet, des insectes se dévorant les uns les autres sur un petit atome de boue (fango)(2). Cette
image vraie semblait anéantir (annullare) ses malheurs(3), en lui retraçant le néant (rintracciando in lui il
nulla) de son être(4) et celui de Babylone(5). Son âme s’élançait jusque dans l’infini, et contemplait,
détachée de ses sens, l’ordre immuable de l’univers(6). Mais lorsque ensuite, rendu à lui-même
(ritornando in sé) et rentrant dans son cœur(7), il pensait qu’Astarté (la sultane) était peut-être morte
pour lui, l’univers disparaissait à ses yeux, et il ne voyait dans la nature entière (l’univers) qu’Astarté
mourante et Zadig infortuné (colpito dalla sciagura)(8).
(1) On est en train de jouer sur l’axe des dimensions : c’est un exercice de relativisme, un des grands
paradigme des Lumières. Le relativisme concède un regard étranger, qu’autrement on n’aurait pas
(Lettres Persanes : on voit la comicité de certains comportements dans la société sur lesquelles on ne
réfléchit pas, en tant que intériorisé).
(2) Si l’exercice du relativisme dans Montesquieu est partie fondamentale de l’esprit critique des
Lumières et a une fonction satirique, ici on n’a aucune consolation! En effet rien n’est plus importante :
si le relativisme des Lettres Persannais avait le but d’avoir de changer structurellement la France
(réformes), ici on a un détachement totale, pas d’utilitarisme. Dans ce portrait, le détachement de la
planète porte à une vision de l’Univers ou la terre a une place minuscule, voire avec un certain mépris
envers cette dernière (atomo di fango).
(3) Comme si Zadigue se dissocie de soi-même, en regardant l’univers dans cet intérêt.
(4) Le rationalisme, riche de foi dans les capacité intellectives des hommes, au centre de l’univers, est ici
bouleversé. En parcourant jusqu’au but le voie de l’Illuminisme, on a retrouvé le nullement des leurs
thèses : le néant de l’être.

58Le roman a donc un dette tant avec la tragédie qu’avec la comédie: l’échange de la lingerie, par exemple, est un
escamotage typique du théâtre ironique. Son point fort est le fait de conjuguer ces deux formes. On joue avec les
registres dans le discours narratif, dans un moment pas autonome du discours du roman, c’est encore une preuve. On
veut comprendre jusqu’à quel point on peut s’étendre à des stimules externes.
(5) C’est déjà l’esthétique des vestiges romantiques : nature éphémère de l’homme comme les restes
archéologique (recherches que commencent justement dans le XVIII siècle et que coïncident avec une
reprise de l’esthétique du beau grec).
(6) Mais comment ? et le sensisme ? Ne seraient les sens à porter la connaissance ? Chaque mot, en effet,
contredit Voltaire et ses collègues illuministes : on ne devrait pas parler de contemplation, mais d’action.
En plus, rien est immuable tout peut être réformé selon les Lumières.
(7) C’est dans le cœur qu’on a le centre des capacité cognitives, pas le cerveaux : la continuité entre
capacités intellectives et émotives n’est pas interrompue dans le XVIII siècle (siècle du « flots des
larmes », on pleure toujours).
(8) Ici c’est le Voltaire tragique à parler : on a une vérité logique et rationnelle, mais ici la dimension
émotive oriente la conscience. Les flots de larmes du 1700 se conjuguent donc comme ça avec le
rationalisme du siècle. Pas forcément d’aseptisé (comme les utopiste, les matérialiste ou les athées).
D’ici, Zadigue rencontrera plusieurs personnes et lui passeront beaucoup d’aventures.
Mais un passage en particulier est très intéressant : c’est l’épisode du pêcheur.
Un homme qui a perdu tout son argent et qui a vécu des mésaventures se retrouve dans des situations avec
lesquelles Zadigue même empathise. Ce dernier, même si a connu plusieurs hommes et a fait plusieurs
travails, il n’arrive pas à concevoir comme cet homme réussit à affronter les injustices que l’ont frappé avec
autant de sérénité. Le pécheur répond :
♥ On prétend qu’on en est moins malheureux quand on ne l’est pas seul ; […] On se sent alors entraîné
(attratti) vers un infortuné comme vers son semblable. La joie d’un homme heureux serait une insulte ;
mais deux malheureux sont comme deux arbrisseaux (arbusti) faibles qui, s’appuyant l’un sur l’autre, se
fortifient contre l’orage (tempesta).
On assiste à la prise de conscience d’être tous à la merci d’un destin imperscrutable, contre lequel on n’a
d’autres remèdes si non de nouer une relation solidaire.
♥ C’est que ton plus grand malheur, reprit Zadig, était le besoin, et que je suis infortuné par le cœur.
Zadig se définit avec le pécheur comme « infortuné par le cœur », expression qui reste pas claire : pourrait
être malheureux pour le fait d’être loin de la sultane, son aimé ; ou le malheur du personnage pourrait pas
être sentimentale mais intellective : il maudit le destin qui s’est mis entre son exercice de la raison et les
mésaventures que lui passent.
L’interprétation est destiné à rester suspendue.
Pendant ce temps, Babylon, qu’avait été assiégé, est libéré : les barbares ont été chassé et la sultane peut
s’épouser. On fait des duel pour concourir à sa main et les épreuves entre chevalier sont à visage couvert,
cachés.
Zadigue vint, mais son armure est volé pendent la nuit et la première place lui est volé par un autre
prétendent: il laisse alors à nouveau Babylone, et se trouve à nouveau dans une phase dépressive, dans une
éruption de tristesse :
♥ Les sciences, les mœurs, le courage, n’ont donc jamais servi qu’à mon infortune(1). […]il fut tenté de
croire que tout était gouverné par une destinée cruelle qui opprimait les bons et qui faisait prospérer les
chevaliers verts(2).
(1) Capacité de toutes les domaines de l’homme.
(2) L’auteur fait de l’ironie: c’est parce que Voltaire et Zadigue ne sont pas la même personne, et
pourtant il n’est pas toujours d’accord avec ce que dit son personnage, en se moquant de lui.
Après avoir maudit la Providence pendent peu de temps, c’est le moment du rencontre avec l’ermite. Il est
une sorte de sphinge.
♥ Il rencontra en marchant un ermite, dont la barbe blanche et vénérable lui descendait jusqu’à la
ceinture. Il tenait en main un livre qu’il lisait attentivement. Zadig s’arrêta, et lui fit une profonde
inclination. L’ermite le salua d’un air si noble et si doux que Zadig eut la curiosité de l’entretenir. Il lui
demanda quel livre il lisait. « C’est le livre des destinées, dit l’ermite ; voulez-vous en lire quelque
chose ? » Il mit le livre dans les mains de Zadig, qui, tout instruit qu’il était dans plusieurs langues, ne
put déchiffrer un seul caractère du livre(1).
[…]L’ermite parlait de la destinée, de la justice, de la morale, du souverain bien, de la faiblesse
humaine, des vertus et des vices avec une éloquence si vive et si touchante, que Zadig se sentit entraîné
vers lui par un charme invincible.
(1) Le livre de la destinée est illisible pour les mortels parce que les plans de la Providence sont
imperscrutables : ce thème sera repris et commenté pendent tout le chapitre .
Ces sont des thèmes que Zadig a expérimenté, mais il ne comprend vraiment ce que dit cet homme et il en
reste fasciné. Les deux continuent donc à marcher ensemble et avec l’arrivé du soir décident s’héberger dans
une maison (un château superbe). Il sont traités vraiment très bien, presque suspicieux (une espèce de bonté
dédaigneuse ; servis comme les autres avec délicatesse et profusion ; ) mais l’ermite vole un pot d’or décoré
avec des pierres précieuses. Zadig le remarque, mais n’ose rien dire.
Le jour suivant, ils se rendent dans une nouvelle maison pour être hébergés : ils sont accueillis de façon
totalement opposée, car c’est la possession d’un avare, qui pourtant le fait loger dans les écuries : en ce cas,
de façon inattendue, l’ermite lui donna les deux pièces d’or qu’il avait reçues le matin, et le remercia de
toutes ses attentions.
À ce point, Zadig commence à demander des explications :
♥ Mon père, lui dit Zadig, qu’est-ce que tout ce que je vois ? Vous ne me paraissez ressembler en rien aux
autres hommes : vous volez un bassin d’or garni de pierreries à un seigneur qui vous reçoit magnifiquement,
et vous le donnez à un avare qui vous traite avec indignité — Mon fils, répondit le vieillard, cet homme
magnifique, qui ne reçoit les étrangers que par vanité, et pour faire admirer ses richesses, deviendra plus
sage; l’avare apprendra à exercer l’hospitalité: ne vous étonnez de rien, et suivez-moi. » Zadig ne savait
encore s’il avait affaire au plus fou ou au plus sage de tous les hommes ; mais l’ermite parlait avec tant
d’ascendant, que Zadig, lié d’ailleurs par son serment, ne put s’empêcher de le suivre.

Dans la troisième maison où ils se retrouvent, où rien ne sentait ni la prodigalité ni l’avarice habitait un
philosophe retiré du monde, qui cultivait en paix la sagesse et la vertu, et qui cependant ne s’ennuyait pas.
Les trois passent une soirée en parlant de plusieurs thèmes:
♥ On convint dans la conversation que les choses de ce monde n’allaient pas toujours au gré des plus
sages. L’ermite soutint toujours qu’on ne connaissait pas les voies de la Providence, et que les hommes
avaient tort de juger d’un tout (un insieme) dont ils n’apercevaient (non conoscevano) que la plus petite
partie.
On discute aussi de la nécessité de la passion :
♥ On parla des passions. « Ah ! qu’elles sont funestes ! disait Zadig. — Ce sont les vents qui enflent les
voiles du vaisseau, repartit l’ermite : elles le submergent quelquefois ; mais sans elles il ne pourrait
voguer (navigare).
On retour donc à cette idée de la passion comme quelque chose qui n’est pas à éviter, mais qui fait parti
de l’intelligence de l’homme juste savoir gérer.
Après la discussion, pendent le nui, un événement paradoxal advient :
♥ […] ils firent longtemps l’éloge de leur hôte. Le vieillard au point du jour éveilla son camarade. « Il faut
partir, dit-il ; mais tandis que tout le monde dort encore, je veux laisser à cet homme un témoignage de
mon estime et de mon affection. » En disant ces mots, il prit un flambeau, et mit le feu à la maison.
[…]« Dieu merci ! dit-il, voilà la maison de mon cher hôte détruite de fond en comble ! L’heureux
homme ! » À ces mots Zadig fut tenté à la fois d’éclater de rire, de dire des injures au révérend père, de
le battre, et de s’enfuir ; mais il ne fit rien de tout cela, et, toujours subjugué par l’ascendant de l’ermite,
il le suivit malgré lui à la dernière couchée.
Le jour suivant sont hébergé d’une vieille veuve et son neveu de 14 ans, son unique espérance: au matin du
jour suivant, l’ermite jette le neveu dans un tourant, où le jeun fils se noie. avec le veuve à son intérieur (pas
de vraisemblance, Zadigue ne dit rien, ne se prononce pas) et jette le petit fils dans le fleuve.
À ce point Zadig éclate et se prononce contre les actes barbare de l’homme (« Ô monstre ! ô le plus scélérat
de tous les hommes ! s’écria Zadig),mais les réponses de l’homme sont étonnantes :
♥ Vous m’aviez promis plus de patience, lui dit l’ermite en l’interrompant : apprenez que sous les ruines de
cette maison où la Providence a mis le feu, le maître a trouvé un trésor immense ; apprenez que ce jeune
homme dont la Providence a tordu le cou aurait assassiné sa tante dans un an, et vous dans deux.
— Qui te l’a dit, barbare ? cria Zadig ; et quand tu aurais lu cet événement dans ton livre des destinées,
t’est-il permis de noyer un enfant qui ne t’a point fait de mal ? »
Les questions de Zadig ont du sens : même si on connaissait des événements providentiels, serait correct
d’intervenir pour modifier ce que la Providence, le destin à écrit pour nous ?
L’ermite alors se révèle à Zadigue pour ce qu’il est : un ange de la destinée, Jesard. Il éclaire Zadig avec ces
considérations:
♥ Les hommes […] jugent de tout sans rien connaître : tu étais celui de tous les hommes qui méritait le
plus d’être éclairé. »
Ici c’est la génialité de Voltaire : qui nous assure que l’ermite est un ange et pas un psychopathe qui agit
en vertus de délirassions de prédestination ?
Mais même en agissant en vertus d’une prédétermination obscure aux êtres humaines, les choses n’assument
plus de clarification, on a toujours le doute au fond du cœur, c’est impossible de croire de manière totale. En
effet, Zadig demande à l’ange si n’aurait eu plus de sens tenter de corriger le jeune homme plutôt que le
tuer : il répondit que s’il n’aurait mor en ce moment, il aurait été tué avec toute sa famille future.
Le protagoniste alors est toujours plus désillusionné…mais son interlocuteur lui révèle une grande vérité :
♥ Mais quoi ! dit Zadig, il est donc nécessaire qu’il y ait des crimes et des malheurs ? et les malheurs tombent
sur les gens de bien ! — Les méchants, répondit Jesrad, sont toujours malheureux : ils servent à éprouver un
petit nombre de justes répandus sur la terre, et il n’y a point de mal dont il ne naisse un bien.
— Mais, dit Zadig, s’il n’y avait que du bien, et point de mal ? — Alors, reprit Jesrad, cette terre serait
une autre terre, l’enchaînement des événements serait un autre ordre de sagesse ; et cet ordre, qui serait
parfait, ne peut être que dans la demeure éternelle de l’Être suprême, de qui le mal ne peut approcher. Il
a créé des millions de mondes dont aucun ne peut ressembler à l’autre. Cette immense variété est un
attribut de sa puissance immense.
Le texte s’achève donc sur une déclaration de relativisme universel : il faut tout simplement accepter l’existence
d’une destinée qui veille sur les hommes. Dans la conclusion de cet épisode réside aussi la conclusion générale de
l’œuvre entière.
♥ […] il n’y a point de hasard ; tout est épreuve, ou punition, ou récompense, ou prévoyance. Souviens-toi de ce
pêcheur qui se croyait le plus malheureux de tous les hommes.
La conception de la destinée de Zadigue est omniprésence et, comme déjà dit, imperscrutable, mais cette vision
ultra-déterministe de l’existence constitue un aboutissement arbitraire de la pensée du personnage. En effet, si cet
ordre est imperscrutable, comment est possible d’apprendre de ses propres erreurs ? L’interprétation du destin se
conjugue donc avec la possibilité de vivre en faisant des choix bien arbitraires, comme le destin s’accomplit
seulement quand on y croit. Sa choix arbitraire ne le met plus au répare de la fortune, mais lui donne une armure
philosophique pour affronter la vie.
La conclusion de l’œuvre est plutôt amère: même le plus totale déterminisme (tout est déjà écrit) est une forme de
relativisme. Le monde et le futur reste inconnaissable.
Il y a quand même quelque chose de ridicule dans l’acceptation d’un tel déterminisme par Zadigue : la destinée,
même si existait, serai inconnaissable des êtres humains et donc la philosophie de Zadigue constituerait une sorte
de foi, une choix de croire dans quelque chose, et pas une science (qui se base sur quelque chose).

26/04/2022
PIERRE-AMBROISE-FRANÇOIS CHODERLOS DE LACLOS
Pierre-Ambroise-François Choderlos de Laclos nait à Amiens en 1741. Sa famille fait partie de la petite
noblesse de robe récemment anoblie (en 1701 par l’achat d’une charge de secrétaire des Finances de
Monsieur, frère de Louis XIV). Il reçoit une formation dans le domaine militaire et il entreprend cette
carrière. Ses premiers succès littéraires Laclos les constate en poésie, quand écrit quelques textes publiées
dans L’Almanach des Muses. Il a aussi composé les livrets de deux opéras-comiques, mais son vraie seule
œuvre sont Les Liaisons dangereuses, commencées en 1779 sur l’île d’Aix, et publiées en 1782, qui font du
scandale immédiat. En 1785, pour participer à un concours académique à Châlons-sur-Marne, Laclos
rédige De l’éducation des femmes (composé par un discours et une dissertation). Il meurt à Tarente le 5
septembre 1803, après une période dans laquelle il avait repris une carrière militaire prestigieuse au grade de
général.

LES LIAISONS DANGEREUSES (1782)


Rien ne semblait destiner Laclos à la littérature, et Les Liaisons dangereuses, qu’il fait paraître en 1782, sont
la seule grande œuvre qu’ait achevée le capitaine et futur général d’artillerie. Le succès est immédiat, mais le
roman, frappé de condamnation morale, cessera d’être réédité pendant une partie du XIXème siècle.
C’est une œuvre qui bien reflet toutes l’atmosphère de la fin du siècle : l’expérience des Lumières peut se
considérer achevée et on se trouve dans une période d’instabilité politique et sociale très forte (dernières
années de Louis XVI). Aussi économiquement et financièrement la situation n’est pas heureuse : tous ces
pressions sociales aboutiront dans la révolution française.
Le texte est donc extrêmement intéressant pour sa forme et les lignes narratives se structureront par
conséquence.
- En ce qui concerne la forme, c’est le roman épistolaire qui l’emporte, qu’avec les confessions et
l’autobiographie est considéré une entre les formes narratives les plus célèbres du siècle (le roman se
cache a nouveau derrière des formes que ne lui sont pas propres). Ce texte constitue en effet
l’exemple mieux achevée du roman épistolaire telle qu’on la vue au cours du XVIII siècle. On y
retrouve les trois formes de roman épistolaire, à seconde des rapports entre les personnages.
1. MONOPHONIE : Lettres d’un seul personnage écrivant à un/des autre(s), donc un seul point de vue ;
→ Cécile de Volanges, une des personnages principaux, lorsqu’elle écrit à Sophie Carnet, dont
on ne connait pas les réponses.
2. BIPHONIE : Forme dialogique, à deux voix, où on c’écrit et on se répond autour des questions ;
→ Le vicomte de Valmont et la Marquise de Belmont, qui se répondent de manière dialogique.
3. POLYPHONIE : Roman épistolaire collectif, plusieurs personnages que prennent la parole sur le
même événement. C’est la structure du roman même.

Le multiperspectivisme
La falsifiabilité de la discursivité est à nouveau un expédient essential : la lettre ne constitue pas (comme
dans le cas de la fiction pure et déclaré) un texte vrai et propre, capable de créer la réalité au moment même
où on la prononce. Il ne s’agit pas d’un texte romanesque qui déclare un événement où le statut de vérité est
autonome. Lorsqu’on écrit une lettre, la perspective qu’on adopte est individuelle : faut-il faire confiance aux
narrateurs? La réponse c’est non, évidemment. Il s’agit de récits partiels, fragmentaire, influencés par la
perspective des différents personnages qui se chargent de raconter les événements. C’est pour cette raison, en
ce qui concerne ce texte, on parle de MULTIPERSPECTIVISME : la voix narrative rédige les séquences à
seconde du personnage que la représente et peut influencer le lecteur sur les épisodes. Cela est important par
exemple pour le thème du libertinage : il peut se présenter en plusieurs nuances, mais son concept essentiel
est l’étouffement de toutes émotions pour aboutir une conquête amoureuse qui est essentiellement
passionnelle, sensuelle. Cette forme de conquête se déroule à travers le langage principalement (comme on a
déjà vu partiellement dans le Paysan Parvenu), stratégiquement emprunté à la manipulation de l’autre. La
représentation d’un événement sous différentes perspectives peut affecter les procédés de séductions et cela
nous donne un outil pour envisager les stratégies employées par les libertine pour la séduction. Le fait de
représenter un même évènement sous plusieurs perspectives démontre comme l’interprétation change selon
qu’on est un libertin, un dévot et un naïf, point de vues extrêmement opposées.
- En ce qui concerne le contenu, la DÉVOTION et le LIBERTINAGE : la grande protagoniste de ce texte
est une femme, une fausse dévote qui cache derrière son masque une identité de libertine et que
partage ce style de vie avec son ex-amant le Vicomte de Valmont (« conquérir est notre destin »
affirme ce dernier).
SYNOPSIS
Le lecteur est le seul qui connait tous les événements.
L'histoire est celle de deux femmes : la jeune CECILE DE VOLANGES et de la pieuse PRESIDENTE DE TOURVEL,
dont se jouent deux libertins : la MARQUISE DE MERTEUIL et son acolyte, le VICOMTE DE VALMONT.
Le système de personnage est très compliqué dans le rapport : il s’agit d’un double carré tragique, structure
typique de la tragédie Racinienne59.
Valmont est au centre des deux carrés, avec madame de Montreuil au-dessus de lui pour le manipuler.
Cécile, qui vient de sortir du couvent, est fiancée au COMTE DE GERCOURT, ancien amant de la marquise de
Merteuil. Etant fâchée contre le Comte de Gercourt qui l'a abandonnée, et pour se venger, la marquise de
Merteuil décide de corrompre Cécile avant son mariage. Mais elle a besoin d'un homme pour arriver à ses
fins : elle replie sur son ami de confiance, le vicomte de Valmont, qu’au début n’est pas trop intéressé à
l’intrigue, car il le considère même trop facile pour un séducteur tel qu’il est. Entre-temps, il est plutôt
intéressé à séduire madame de Tourvel, qui ne tombe pas sous son charme pour le fait d’être une grande
dévote mais aussi parce qu’elle est très amie de Madame de madame de Volanges, mère de Cécile, qui l'a
avertie du personnage dangereux et sans scrupules qu'est Valmont. Ceci alors, poussé par le désir de
vengeance contre les bavardages de madame de Volanges, et au même temps voulant plaire à son ancienne
maîtresse (madame de Merteuil) décide d’accepter de prendre part au plan de cette dernière contre le Comte
de Gercourt : Valmont séduit facilement Cécile et plus lentement la Présidente, dont il tombe amoureux.
Jalouse et furieuse, madame de Merteuil le force à rompre cruellement. La vicissitude se conclue en
tragédie : la dispute entre la jalouse Marquise de Merteuil et son « ami » Valmont s'achève avec sa mort en
duel avec le CHEVALIER DE DANCENY, jeune amant de Cécile. Cette dernière rentre au couvent, comme aussi
la pauvre présidente, qui meurt de chagrin après avoir découvert de la mort de son dernier amant Valmont.
La Marquise de Merteuil, honteusement déshonorée par la publication de ses lettres et défigurée par la petite
vérole (vaiolo), fuit en Hollande
Analyse des extraits

59 A aime B, qui aime C, qui aime D, qu’à sa fois aime A.


Valmont, comme on a pu entendre, est un personnage qui va essayer de séduire deux femmes : Cécile de
Volanges « pour commission » et la présidente de Tourvel pour plaisir personnel.
Cette dernière est la femme du présidente : elle n’a pas du pouvoir, mais son mari est un magistrat (le
président est le chef du tribunal à l’époque). Elle est célèbre pour être une grande dévote et elle l’est de
manière sincère.
Tout au début de l’œuvre, Valmont et la présidente se trouvent en vacances chez la tante de Valmont, dont
Monsieur de Tourvel est grand ami. Il conçoit ici le désir de séduire et conquérir la femme :
♥ Ne vous fâchez pas et écoutez-moi(1). Dépositaire de tous les secrets de mon cœur, je vais vous confier le
plus grand projet que j’aie jamais formé. Que me proposez-vous ? de séduire une jeune fille qui n’a rien
vu, ne connaît rien ; qui, pour ainsi dire, me serait livrée sans défense ; qu’un premier hommage ne
manquera pas d’enivrer et que la curiosité mènera peut-être plus vite que l’amour. Vingt autres peuvent
y réussir comme moi(2). Il n’en est pas ainsi de l’entreprise qui m’occupe ; son succès m’assure autant de
gloire que de plaisir.
[…]Vous connaissez la présidente Tourvel, sa dévotion, son amour conjugal, ses principes austères.
Voilà ce que j’attaque ; voilà l’ennemi digne de moi ;voilà le but que je prétends atteindre ;(3) »
(1) Sous-entendu « si je n’accepte pas votre proposition de séduction ».
(2) Vraiment très explicite, scandaleusement méchant pour l’époque.
(3) le plaisir de la séduction réside dans le fait qu’il s’agit d’une conquête extrêmement difficile à cause
des mœurs dont la présidente est caractérisée (religiosité et fidélité), toute au contraire de « l’affaire
Cécile » qui lui avait proposé la marquise et qu’il initialement refuse.
En effet la présidente évite les avances de l’homme, néanmoins elle commence à faire suivre l’homme par un
Vallet pour le surveiller, ce qui démontre en réalité de l’intérêt de sa partie. Cela est un signe d’intérêt de la
part de la femme, ce qui montre au même temps de l’hypocrisie envers sa dévotion;
♥ Enfin, ma belle amie, j’ai fait un pas en avant, mais un grand pas, et qui, s’il ne m’a pas conduit
jusqu’au but, m’a fait connaître au moins que je suis dans la route et a dissipé la crainte où j’étais de
m’être égaré. J’ai enfin déclaré mon amour, et quoiqu’on ait gardé le silence le plus obstiné, j’ai obtenu
la réponse peut-être la moins équivoque et la plus flatteuse ; […] vous vous souvenez qu’on faisait épier
mes démarches. Eh bien ! j’ai voulu que ce moyen scandaleux tournât à l’édification publique, et voici
ce que j’ai fait. J’ai chargé mon confident de me trouver, dans les environs, quelque malheureux qui eût
besoin de secours.
Valmont le découvrant, décide d’utiliser la situation à son avantage. Il se laisse voir par le valet en donnant
de l’argent à des pauvres qui vivent sur la propriété de sa tante :
♥ Je fais venir le collecteur, et, cédant à ma généreuse compassion(1), je paie noblement cinquante-six
livres pour lesquelles on réduisait cinq personnes à la paille et au désespoir. Après cette action si simple,
vous n’imaginez pas quel chœur de bénédictions retentit autour de moi de la part des assistants ?
Quelles larmes de reconnaissance coulaient des yeux du vieux chef de cette famille et embellissaient
cette figure de patriarche, qu’un moment auparavant l’empreinte farouche du désespoir rendait vraiment
hideuse. […]J’avouerai ma faiblesse, mes yeux se sont mouillés de larmes, et j’ai senti en moi un
mouvement involontaire, mais délicieux. J’ai été étonné du plaisir qu’on éprouve en faisant le bien, et je
serais tenté de croire que ce que nous appelons les gens vertueux n’ont pas tant de mérite qu’on se plaît
à nous le dire(2).
[…]Vous remarquerez que dans cette foule était surtout le fidèle espion. Mon but était rempli, je me
dégageai d’eux tous et regagnai le château. Tout calculé, je me félicite de mon invention.
(1) C’est très amusant pour le lecteur, parce que c’est clair qu’il n’a aucun intérêt sincère à leur condition
et qu’il fait tout cela dans la perspective que cette nouvelle soit racontée à la présidente pour qu’on la
convainque qu’on est un homme gentil, de bon cœur et guidé d’un esprit chrétien.
(2) Il insinue que le personnes qui font de l’aumône ne le font pas vraiment de manière désintéressé, et
donc vertueuse, mais le ferait pour en avoir des gratifications personnelles, pour se sentir bien et des
bonnes personnes.
L’épisode de l’aumône est raconté par plusieurs perspectives : à travers les yeux de Valmont mais aussi ceux
de la Présidente, ce qui met en évidence d’une parte la ruse diabolique de l’homme, qui prépare un plan pour
apparaitre qu’il n’est pas ; de l’autre part, la femme qui est émue à la découverte de la bonté de Valmont, qui
avait déjà une réputation mauvaise de Libertin que la présidente connaissait bien.
Multiplication des perspectives, des points de vue, qui nous fait rendre compte de la manipulation de certains
personnages sur des autres.
♥ Vous(1) serez sans doute bien aise, Madame, de connaître un trait de M. de Valmont, qui contraste
beaucoup, ce me semble, avec tous ceux sous lesquels on vous l’a représenté(2).
[…épisode de l’aumône…]
Mon domestique a été témoin de cette vertueuse action, et il m’a rapporté de plus que les paysans,
causant entre eux et avec lui, avaient dit qu’un domestique, qu’ils ont désigné et que le mien croit être
celui de M. de Valmont, avait pris hier des informations sur ceux des habitants du village qui pouvaient
avoir besoin de secours. Si cela est ainsi, ce n’est même plus seulement une compassion passagère et
que l’occasion détermine : c’est le projet formé de faire du bien ; c’est la sollicitude de la bienfaisance,
c’est la plus belle vertu des plus belles âmes ; mais, soit hasard ou projet, c’est toujours une action
louable et dont le seul récit m’a attendrie jusqu’aux larmes. J’ajouterai de plus, et toujours par justice,
que quand je lui ai parlé de cette action, de laquelle il ne disait mot(3), il a commencé par s’en défendre
et a eu l’air d’y mettre si peu de valeur lorsqu’il en eut convenu, que sa modestie en doublait le mérite.
À présent, dites-moi, ma respectable amie, si M. de Valmont est en effet un libertin sans retour ? S’il
n’est que cela et se conduit ainsi, que restera-t-il aux gens honnêtes ? Quoi ! les méchants
partageraient-ils avec les bons le plaisir sacré de la bienfaisance ?(4)
[…]M. de Valmont n’est peut-être qu’un exemple de plus du danger des liaisons. Je m’arrête à cette idée
qui me plaît(4).
(1) Elle se réfère à Mme de Volanges, mère de Cécile et grande amie de la femme.
(2) On a dit que Valmont à la réputation de libertin et tout le monde connait ses habitudes, même Mme
de Volanges, qui avait essayé de mettre en garde Mme de Tourvel sur le sujet.
(3) Discrétion, trait qui soulignerai la bonne foi de cette action, le désintérêt.
(4) La femme veut croire qu’il ne soit pas effectivement un libertin, car elle est intéressé à l’homme.

Mais la véritable libertine, celle qui manipulera le plus les autres personnages, c’est Madame de Merteuil :
elle à sa fois manipule l’homme en cachette, personne sait qu’elle est une libertine, et ses tactiques
manipulatoires sont très subtiles et se dénouent à différents niveaux:
▪ Le LANGAGE
→ Dans la lettre de réponse à Monsieur de Valmont, qui lui vient de dévoiler son intention de séduire la
présidente :
♥ Tenez, je vous en parle sans humeur mais, dans ce moment, je suis tentée de croire que vous ne
méritez pas votre réputation ; je suis tentée surtout de vous retirer ma confiance. Je ne
m’accoutumerai jamais à dire mes secrets à l’amant de Mme de Tourvel.
▪ Les ACTES :
→ Mme de Montreuil a comme amant Monsieur de Goncourt, qu’elle pourrait utilise pour séduire Cécile,
mais elle a trop peu d’estime dans ses capacités pour le faire. Néanmoins, elle le trait vraiment comme un
objet :
♥ […]ce Danceny est un enfant qui perdra son temps à faire l’amour et ne finira rien. […]dans ce
moment, il ne m’en coûterait rien de rompre avec lui. Je suis sûre que si j’avais le bon esprit de le
quitter à présent, il en serait au désespoir, et rien ne m’amuse comme un désespoir amoureux. Il
m’appellerait perfide, et ce mot de perfide m’a toujours fait plaisir.

Les personnages peuvent être très nuancés : il ne faut pas deviser nettement les libertins et les dévots/naïfs.
Cécile, par exemple, néanmoins son ingénuité, apprend très rapidement les pratiques de la séduction dans un
contexte mondaine : déjà celui avec Danceny est un amour illicite, une trahison aux noces auxquelles elle est
destinée. La même présidente, très morale et recta vraiment, n’hésite à faire suivre Valmont.
Même les personnages les plus bons cèdent aux tentations et à la dangerosité de certains rapports.
Mais un exemple de relation positive est present dans le texte : à en sortir moralement indemne du texte est
uniquement la liaison entre Cécile de Volanges et Danceny . Ils ne sont pas respectueuses des bienséances (c’est
un rapport d’adultère), mais leur amour est le sincère, privé de manipulation et spontanée, authentique du point de
vue émotive. Littérairement, on a vu plusieurs types d’amour obstacles par la société (Paule et Virginie, La
nouvelle Héloïse…), mais dans ce texte personne vint, tous perdent quelque chose : donc on ne peut pas vraiment
parler d’amour préromantique, parce que la société qui impose la bienséance s’écroule sur elle-même (sens
crépusculaire : c’est la fin d’une expérience). Ce n’est pas un cas que les tensions sociales de l’époque se
concrétiseront dans l’expérience révolutionnaire et Napoléonienne ensuite.

LE XIX SIÈCLE
Histoire et société
Le ‘800 constitue une période de continuité et au même temps de rupture avec le siècle précèdent.
Défini comme « le siècle long », on le fait commencer littérairement déjà en 1789 (Révolution Française et
fin de l’Ancien Régime) et on place sa fin en 1914, avec l’éclate de la Grande Guerre. Il s’agit, évidemment
déjà du début, d’une période extrêmement troublée du point de vue politiques et sociale :
- 7 régimes politiques se succèdes en relativement peu de temps politiques
- on parle pour la première fois de « catégories sociales du ‘900 » (bourgeoisie, prolétariat)
- on développe le marché financière sur échelle globale
- on assiste au processus de colonisation des pays du sud du monde
- le journalisme et la scolarisation de masse forment une opinion publique
En conclusion, du point de vue littéraire, ce sont surtout les éléments de rupture avec la période précédente
qui permettent de développer les pratiques narratives dont aujourd’hui on peut bénéficier (par exemple on
découvre le concept de sérialité).
Les phases historiques du XIX siècle sont très importants.
• 1789 – 1815 = C’est la période de la Révolution, avec la capitulation de la monarchie, la phase de la
terreur suivie par la terreur blanche (gouvernements des Jacobines), et enfin le directoire.
- 1795 – 1799 = Le directoire
- 1799 – 1806 = le Consulat
- 1806 – 1815 = l’Empire de Napoléon et les 100 jours (Louis XVIII prend le pouvoir pour s’imposer
sur l’Empire de Napoléon).
Napoléon envisageait une espèce de réconciliation entre l’ancienne noblesse et une sorte de nouvelle
noblesse, qu’il a forgé lui-même sur les champs de batailles lorsque de campagnes napoléoniennes.
Sous l’Empire on cherche donc déjà à substituer à l’ancien régime une société avec les mêmes
caractéristiques mais avec des protagonistes différents (même structure mais genèse différente).
• 1815 – 1830 = Ces sont les années de la Restauration
Le conseil de Vienne qui s’est déroulé entre 1814 et 1815 inaugure la période de la restauration de
l’Ancien Régime (ou mieux, sont tentative): Michel Foucault appelle cette manouvre politique
« l’archéologie », car il s’agit d’une vraie bataille contre l’histoire. On essaye de faire remonter la montre
et d’effacer toutes expériences révolutionnaires, en imposant à nouveau l’ancien régime ; mais
clairement cela n’achève les résultats espérés : la bourgeoisie enrichie dans l’empire a acquérir toujours
plus d’importance dans la société et ne veut pas renoncer à ses privilégies. Le rétablissement de ces
derniers pour la classe aristocratique donc est vraiment une opération antihistorique, que pourtant n’est
achevé que partiellement.
La période de la restauration est devisée en deux phases minores :
- 1815 – 1825 = c’est un moment où le pouvoir du roi est extrêmement souple, étant Louis XVIII
assez tolérant. Après la révolution française et l’expérience décevant de Napoléon, on voit sur le
trône Louis XVIII des Bourbons. L’expérience de la restauration de l’ancienne régime (basé sur des
couches sociales bien devisés) est un expérimenté qui réussit seulement partiellement, car désormais
on a dépassé l’idée que la monarchie ne sera jamais absolue et divine et on ne peut pas retourner en
arrière. Elle en effet sera donc constitutionnelle, avec donc une limitation du pouvoir du roi par une
carte constitutionnelle et deux chambres de représentants, qui conduisent législativement le pouvoir
exécutif du roi.
C’est une époque on disait de relative liberté, aussi du point de vu idéologique (la révolution laissant
des crêpes profondes) : on assiste au retour des exilés de l’Allemagne, Angleterre et Espagne, c’est-
à-dire ceux qui avait été (ou s’étaient) exilé pendent l’Empire pour questionnes idéologiques, entre
lesquels plusieurs savants et lettrât. L’église rentre en possédé de ses propriétés (expropriés dans les
premières moments de la révolution) et retourne fondamentale dans l’éducation.
- 1825 - 1830 = Charles X succède après la mort du roi. La musique change : ces sont des années de
violente répression politique et de presse, climax d’une restauration perçue comme forme de pouvoir
répressif et autoritaire. Le mécontent publique (causé par des manouvres financières malheureuses
qu’ont amenés à la pauvreté) génère un climat d’insatiabilité que va culminer avec les journées du
27, 28 et 29 juillet du 1830 : avec extrême violence, des révoltes causent la chute du régime de
Charles X (« les journées de juillet »). Mais si les mouvements révolutionnaires du 1789 ont été
guidé par une bourgeoisie à la recherche d’une représentation politique, ceux-ci contre Charles X
sont différents : pour la première fois la classe ouvrière prend parti à un attentif de changer le
pouvoir, mais aussi étudiantes, journalistes et intellectuelles. Cette révolte (mais pas révolutionne)
voit protagoniste aussi des intellectuels, les engagées.
• 1830 – 1848 = La Monarchie de Juillet
Chassé Charles X, est invité sur le trône un Orleans (rame cadet de la famille royale), Louis Philippe,
l’unique de son dynastie à être monarque de France. On ne change pas de régime, mais Louis Philippe
est très différent des monarques précédents. Il se définit « Roi des Français et pas de la Franc » : cela peu
sembler chose de peu, mais être roi de France signifie être patron de tous les biens qui se trouvent sur le
territoire française, et dans un certain sens aussi des sujets ; contrairement, étant roi des français, il
exerce un pouvoir politique représentatif (pas concédé de le haut mais garanti du bas), reconnaissant
avoir été mis sur le trône par volonté populaire après les journées de juillet.
En plus, Louis Philippe est aussi défini le « le roi bourgeois » justement parce qu’il soutien la nouvelle
bourgeoisie, en se détachant de la vielle aristocratie et de l’ancienne noblesse (déjà affaiblie
politiquement): il est un libéral. La finance est soutenu, son ministre de l’économie à comme devise :
« Enrichissez-vous ». On ouvre le marché commercial à des nouvelles route, ce qui le fait croire
incroyablement. Le règne se fonde sur le pouvoir de l’argent et sur le support des financières, qui font
des investissements. Mais tout ce bienêtre générale a aussi une coté obscure.
Les humbles de la société sont toujours plus exclue de la pyramide sociale, et aussi beaucoup
d’intellectuels se sentent partie de cette catégorie de paria: le rôle des artistes se redéfini, en tant que son
travail est exclu du principes d’utilitarisme (il ne produit pas des biens économiques) : ces sont alors des
années de grande amertume pour le savants grandit avec les idéaux de la restauration de l’ancien régime.
On assiste à une prise de conscience de la marginalisation que peut créer dans le monde l’argent et on se
sent plus proches aux classes les moins aisés. La monarchie est tolérante avec ces exclus, mais cela ne
suffit pas : les conditions des « classes dangereuses » (pauvres et faibles) sont inhumaines.
Ce sont les années de l’explosion du roman et de ceux qui dominent les dynamiques du progrès (Balzac,
Stendhal, Nerval) et nait l’idée de poète maudit, mais plus pour choix que par incapacité d’adaptation.
Cela amène de toutes façons à des nouvelles révoltes, et avec des réformes politiques la chute de la
monarchie est inévitable, ce qui amène à un tournant démocratique.
Le mécontent pour une richesse qui ne se distribuait pas culmine avec les journées du 1848, avec la
chute du règne de Louis Philippe : c’est officiellement la mort de l’aristocratie du XVIII siècle et on peut
ouvrir l’expérience de la II république.
• 1848 – 1851 = la Deuxième République
Aux premiers élections démocratique que la France n’avait jamais eu, ce sont les monarchiques
conservatoires qui l’emportent. Le président élu est Louis Napoléon (petit-fils de Napoléon I) mais son
élection devient la base d’un coup d’état, avec une nouvelle nostalgie de l’empire et Napoléon III (fils de
Louis Napoléon) qui deviendra dictateur a partir du 1851.
• 1851 – 1870 = Le second Empire
Nombreuses intellectuels ne veulent pas rester sous cette dictature, et ceux qui s’opposent au régime soit
s’abandonnent à un isolement politique (Charles Baudelaire ou Charles Flaubert) soit s’exilent à
l’étranger, d’où continuent à combattre (Victor Hugo). Intellectuellement et artistiquement, ces années
sont de grande effervescence: 1857 est la date de publication de « Madame Bovary » et de « Les Fleurs
du mal », mais aussi l’année dans lequel ces textes sont condamnés pour immoralité.
Cette période de régime autoritaire et conservateur, colonialiste, voit une reprise de la censure, au début
du règne très forte : toutes formes de dissens au régime sont réprimées durement. Elle va se calmer avec
le faiblissement du régime. La forme de pouvoir du II empire est donc répressive en France et en
politique étrangère est extrêmement agressif (dans l’expansionnisme coloniale mais aussi dans le
contexte de politique européenne). La grande chute de Napoléon III, en effet, se passe à cause du conflit
avec la Prusse, dont les armées arrivent jusqu’à Paris. Les anciens républicains profitent de ce moment
de chaos pour déclarer Paris autonome par rapport au reste de l’état, en constituant la Commune.
La peur qui se vérifient à nouveau les événements du 1789 est grande : la ville assume donc la forme
d’aujourd’hui, les boulevards de Paris concentrique ayant comme but aussi celui d’empêcher la
construction de barricade.
• 1871 – 1872 = La Commune de Paris
Le 1871 est un année essentiale : l’abandonne de Paris de la partie des Prussiens crée un urgent vide de
pouvoir, qui voit l’institution par les opposites du régime de la Commune de Paris. Avec une organisation
spontanée, les citoyens instituent une sorte de gouvernement autonome qui se base sur les théories
marxistes (capitale, communisme) et pour la première fois on voit une actuation explicite de la lutte de
Classe comme Marx (présent dans la ville avec Hegel pendent des événements très violents qui se
déroulent dans la ville) l’avait imaginé.
Une répression dans le sang par les armées de France, avec le soutien des Prussiens, pose fin à cette
brève expérience mais la commune laisse un héritage républicaine : c’est un point de non-retour pour les
autoritarismes en France.
Avec la terreur en plus on avait commencé à se dénoncer les uns les autre, en remettant en cause le
concept d’identité personnelle : les voisins était conçus comme un potentiel ennemi politique : la société
au quotidien est devenu de soupçon et la violence est systématique, endémique, qui ravage la France
pendent une quinzaine d’années en se reflétant aussi sur la scène internationale (il faut rappeler que les
expériences révolutionnaires débordent et on cherche exporter les valeurs de la révolution pour reverser
toutes les monarchie européennes).
• 1872 – 1914 = La III République ou « La belle époque »
La III république, après 20 ans d’oppression de Napoléon III, sont années de grande euphorie : c’est la
Belle Époque. Les progrès technologiques et scientifiques sont beaucoup, on a foi dans la science et dans
le savoir et ce sont aussi les années d’attention aux classes les moins aisées, du naturalisme, de
l’instruction gratuite et obligatoire jusqu’au 12 ans, civile et laïque. Les derniers années sont en réalité
déjà de conflit (affaire Dreyfus! cerco e descrivo brevemente) avec peurs xénophobes et nationalistes
qui seront concrétisées puis dans l’expérience de la Première Guerre Mondiale.
- 1892-1894 = années d’attaques anarchiques des xénophobes et des antisémites dans la ville de Paris.
03/05/2022
Ruptures idéologiques : la société du soupçon et le concept d’identité
La surface de la société est bien changée du XVIII siècle: avec l’Ancien Régime, elle devait être tout sauf
mobile. Le roi est le but de la pyramide, où les couches sont définis par rapport à sa position sociale : tout ce
que l’on possède et tout ce qu’on l’est, c’est par l’accord du roi, qui gouverne par concession divine (à partir
de Charles Magnes). Mettre en question son pouvoir a des graves conséquences, ce qu’on aura le courage de
faire seulement avec la révolution.
La crise donc est politique, religieuse et idéologique : change la manière de concevoir la réalité et les
conséquences sociales sont évidentes. La révolution donc concerne un conflit externe autant qu’interne : une
séries de guerres pas continuées pour exporter les valeurs de la révolution, ce qui corresponde à un conflit
interne, parce que la révolution n’est pas accepté unanimement par les français : toute une série de territoires
s’engagent dans une guerre civile (la région de la Vendée, en Bretagne).
À cette violence physique corresponde aussi une violence épistémologique, un traumatisme moins d’ordre
corporelle que psychologique, comme on a vu. L’identité du sujet est mis en crise, on ne comprend pas qui
est contre et qui est pour la révolution : les prisons sont prises d’assauts, et les ennemies de la monarchie sont
libérés, les nobles antirévolutionnaires doivent se déguiser et expatrier (Angleterre, Autriche, Allemagne).
Les biens de l’aristocratie et des nobles sont expropriés et vendus à qui offre le plus.
Dans la société du soupçon, le déguisement dévient un thème, le roi même ayant cherché d’échapper
camouflé (fugue de Varennes). Ce délire paranoïaque sur l’identité des autres est une constante dans toute la
première moitié du XIXème siècle : en 1795, quand les girondins sont au pouvoir, on craint les anciennes
fidèles des jacobins ; lorsque du pouvoir de Napoléon, on craint les nostalgiques de la révolution ou de
l’Ancien Régime ; lorsque la chute du pouvoir napoléonienne, on craint ses sustenteurs… Les régimes se
succèdes vites mais les craints sont toujours les mêmes : la peur des opposants déguisées.
Ce thème en réalité sera la base des plus grands romans réalistes tels qu’on les connait aujourd’hui :
l’indemnisation face à un monde ou la connaissance vrai de l’autre est devenu impossible, la sécurité
n’existe point, la certitude est méconnue, le narrateur omniscient devient une sorte de point figée, connait
tout, et le concept d’intrigue expresse parfaitement les idéaux d’une société du complot, c’est son reflet
(« plot », en anglais, veut dire soit intrigue que complot en effet).
Cela a des effets aussi sur la littérature : le parvenu est le grand protagoniste du XIXème siècle (Rocambole
et « Les mystères de Paris ») et avec l’esthétique de la masque et de la révélation, l’instabilité est le mot clé.
On sait jamais qui on a en face et la restauration est l’emblème parfait des craints, des horreurs et de la
persistance de violence et soupçonne nait de la Terreur et le Consulat.
04/05/2022
Le romantisme
Du point de vue de l’histoire des idées, le traumatisme de la révolution inaugure une nouvelle manière de
voir le monde, que l’on peut associer au mouvement romantique.
C’est difficile de donner une définition univoque de romantisme : il n’est pas un mouvement purement
français, il a des manifestations culturelles dans l’Europe entière, tous avec des caractéristiques spécifiques
que le différencies. En plus, le mouvement est essentiellement asystématiques : pas de manifeste et donc on a
autant de romantismes que de romantiques. Une autre difficulté pour la définition concerne le fait que cette
courante culturelle se fonde sur une série de contrastes, oppositions, héritée du contexte de conflits de la
révolution et de l’époque napoléonienne. C’est la capacité de conjuguer des pôles autrement inconjugables.
Néanmoins, il y a aussi une série d’éléments qui permettent de définir des dénominateurs commun dans le
romantisme français :
▪ On a déjà introduit le fait qu’il s’agit un mouvement que ressent beaucoup des ÉVÉNEMENTS DE LA
RÉVOLUTION et des années successifs: c’est un sorte de négatif de ses idéaux. En effet, on ne retrouve
pas des continuités avec ses idéaux, mais il se constitue comme une sorte nécessité de réparer aux
traumatismes épistémologiques, politiques et sociales qui se sont répandus dans l’Europe entière. Les
artistes romantiques ne sont pas des nostalgiques de la révolution ou de l’Empire, mais pour la plupart
sont les fils de la génération des nobles immigrés (rentrés pendant la restauration ), donc monarchiques
et catholicises. Justement pour cela, ces intellectuels devraient se trouver à leur aise dans le contexte de
restauration… mais il ne sera pas comme ça, et ils héritent un profond sens de conflit.
▪ Il rend compte du sens de FRACTURE ENTRE L’IDEAL ET LA REALITE qu’on développe en ce moment,
entre l’intention et l’acte : on accuse, à l’époque, les lumières d’être les coupables de la révolution, ceux
qui en fondant leur politique sur « liberté, égalité et fraternité » ont porté à une période de luttes
déchirantes. A rendre compte de ce conflit dans le cadre des intellectuels est le fait qu’on développe au
même temps un besoin d’engagement civile et une nécessité d’évasion de la réalité : la nécessité de la
réalité (l’union) s’heurte contre les propos de l’intériorité (besoin de solitude).
▪ Besoin de trouver des RACINES, comme réponse à la recherche d’aplatissement identitaire de la
révolution: on revoit le concept de peuple (identité nationale), aussi dans le sens plus pratiques (le mètre
comme moyen de mesure de l’espace et le 24h comme duré de la journée dans le temps).
On cherche en quelque manière de récupérer l’idée de nation et l’identité des peuples (détruite par la
révolution), et le Moyen Age, pour la France, dévient synonyme d’une période d’unité nationale.
C’est aussi l’esthétique des ruines, que renvoie à l’éphémère des choses du réel, ce qui renvoie à une
récupération aussi de la spiritualité : la génie individuelle contraposé, encore une fois, à la nécessité de
l’union.
À partir de ces éléments, on peut identifier le héros romantique pas plus comme celui qu’adhère aux idéaux
de devoir, foi et tradition, mais comme celui qui entre en conflit avec la société : une figure qui rompe la
norme, un exclu, qui se ressent en conflit avec soi-même et/ou avec la réalité.
Mais d’où vient ce sens d’inadéquation dans une société qui adhère exactement (dans un contexte de
restauration on a dit) aux idéaux du couche social de la majorité des intellectuels romantiques ?
► Anne Louise Germaine Necker - Madame de Staël
À avoir contribué aux attentives d’expliquer les grandes incongruences de la période romantique est
surement la grande divulgatrice Mme de Staël, considéré la première théorique du romantisme, est la seule
intellectuelle française capable de cueillir l’essence du romantisme dans le moment où il se déroulait. Cela a
été possible surtout grâce aux contacts directs qu’elle entretenait avec l’Allemagne et la courante romantique
de ce pays : c’est un détail très important, du moment qu’à l’époque les prussiens étaient grands ennemis de
l’empire de Napoléon. Son travail d’échange culturelle donc fut possible principalement grâce au fait qu’elle
était la fille de Jacques Necker, ministre des finances sous Louis XVI, libéral et démocrate et elle grandie
donc dans un contexte éducatif illuministe (à 12 ans elle commence à lire Montesquieu, Voltaire et
Rousseau). Elle écrit deux essais particulièrement importantes pour le mouvement, « De l'influence des
passions sur le bonheur de l'individu et des nations » (1796) et « De la littérature considérée dans ses
rapports avec les institutions sociales » (1800) : favorable à la Révolution française et aux idéaux de 1789,
elle adopte une position critique dès 1791 et ses idées d'une monarchie constitutionnelle la font considérer
comme une opposante gênante par les maîtres de la révolution. Ces événements la portent à s’enfuir de la
France pour se réfugier dans sa résidence en Suisse. Interdite de séjour sur le sol français par Napoléon
Bonaparte, qui la considère comme un obstacle à sa politique, sa maison deviendra un important lieu de
recueille pour les intellectuels du début/moitié XIXème siècle : elle reçoit chez soi les grands protagonistes
du préromantisme allemand (Schiller, Goethe), dont elle se fait porte-voix en synthétisant les voix des
philosophes et des artistes allemands pour en faire un résumée efficace des éléments communs (ce qui nous
permet aussi d’avoir un cadre général des dénominateurs communs de la courante). C’est dans ce contexte
qu’elle écrit un autre important essai pour le mouvement, De l'Allemagne (1810/1813), et des romans, l’un
sur la condition féminine (féminisme ante litteram), « Delphine » (1802), l’ autre, « Corine ou l’Italie »
(1807), sur la chute de l’empire de Napoléon60. Dans la préface à Delphine, on assiste à une apologie du

60 Mme de Staël était en bons rapports avec Napoléon avant le tournant autoritaire de ce dernier du 1806, quand en effet
il entrera aussi en conflit avec la Prusse (ambient avec lequel la femme entarterait des contacts).
roman, qu’exalte ce genre dans un contexte qui lui est préalablement hostile (même si elle reverra ses
positions à propos).
o « DE LA LITTERATURE CONSIDEREE DANS SES RAPPORTS AVEC LES INSTITUTIONS SOCIALES »
Cette œuvre constitue une prémisses aux concepts amplifiées puis dans « En l’Allemagne ».
Néanmoins les rapports complexes de l’autrice avec la politique française de l’époque, Mme de Staël n’était
pas monarchiste et catholique comme la majorité des immigrés : elle comprend que les idéaux d’égalité et
liberté des Lumières aient été trahi par l’expérience révolutionnaire et espère donc dans un renouvellement
des société de l’époque, qui devraient conférer plus d’importance à la littérature en tant qu’instrument pour
donner dignité à l’homme et pour exercer l’identité de penser.
L’œuvre est divisée en trois parties :
• Dans la première parti, ses positions sont positions trans humanistes avec une tendance illuministe au
point : on parle d’un progrès indéfini de l’esprit de l’être humain à se réaliser, toujours avec l’aide d’une
main providentielle.
• La deuxième partie constitue le centre forte de l’œuvre : les littératures sont différentes parce qu’elle sont
le reflet de systèmes sociales politiques et culturelles différents. Prise de conscience du fait que chaque
nation (ensemble d’individu que partagent des éléments ) à une littérature propre : « les littératures sont
indissociables de l’identité des peuples, de leur culture et histoire ». Il y a pourtant une nouveauté par
rapport au géo-déterminisme illuministe de Montesquieu, parce qu’en ce cas n’est pas seulement le
climat à influencer les peuples.
• Donné cette capacité des littérature de cueillir la génie (l’essence, l’esprit) d’une civilité, voilà que ceux
nées en liberté sont un instrument d’échange entre civilités. Les littératures enrichissent les nations,
qu’en sont à leurs fois inspiré : c’est le motif pour lequel la circulation supranational des littératures est
un exercice d’habitude à la liberté.
C’est clair en conclusion que cette vision du romantisme ne coïncide pas avec les idéaux de la restauration
(qu’essentiellement veut ressusciter une forme sociale morte et asservie): est un manifeste à la volonté de
renouvellement qui signe une certaine rupture avec le « romantisme classique ».
o « DE L’ALLEMAGNE »
Les prémisses de « De la littérature » sont essentielles pour l’ouvre suivante de Mme de Staël : « De
l’Allemagne ». Cet essai sera publiée 2 fois : une première en 1810, quand Napoléon était encore au pouvoir
(texte mis à l’index), et une seconde fois en 1814, année de la mort de ce dernier et de la chute de son
empire. Le but de l’autrice était celui d’écrire un texte d’histoire culturelle, sociale et folklorique de
l’Allemagne, ce que comme on a dit constituait un problème pour la France impériale : apologie de la beauté
des caractéristiques culturelles de l’Allemagne, ennemi des campagnes napoléoniennes, l’essai cela, montre
aussi bien un intéresse pour les peuples et les nations que l’expérience napoléonienne voulait militairement
effacer. L’exaltation des concepts de nation entre donc en conflit avec la vision trans-nationale de l’empire
Napoléonien.
L’idée d’écrire cette œuvre est en réalité de 10 ans avant, quand dans un voyage en Allemagne madame de
Staël renouvelle des rencontres avec Goethe, Schiller et Scheler.
Elle est devisée en deux volumes :
- Le premier s’intéresse de coutumes, traditions et folklore allemands ;
- Le seconde se constitue en peu plus comme un traité d’esthétique, art et littérature allemande.
Essentiellement l’autrice raconte l’art des cultures du nord Europe par opposition à celle des pays du
sud : l’art germanique se contrapose donc à celle romane.
L’Europe est donc dans cette conception devisée en 2 grandes sphères d’influences : l’Europe du
nord (Allemagne, Royaume Uni, Scandinave ) et l’Europe du Midi (France, Espagne, Italie). Cette
division est le fruit de deux réalité et deux sensibilité qui montrent une façon différente de
s’exprimer, la première étant plus moderne et coïncidant avec le romantisme dans la
contemporanéité, le deuxième étant au contraire plus classique. La révolution est en ce contexte fruit
d’une prise en considération de modèles trop vieux et pas contemporains de la partie des pays du
midi, qu’en quelque mesure ont en effet adhérés tous aux idéaux révolutionnaires.
Mais quels sont spécifiquement les différence entre les modèles du Monde du Midi et du Monde du Nord ?
I. Spirituellement, le christianisme du midi (pardonne) se contrapose au paganisme des pays du nord
(déterminisme).
II. En ce qui concerne les modèles de référence, les pays du Midi font particulièrement attention à
l’antiquité, tandis que les pays du nord plongent leurs racines nationaux au Moyen Age.
III. Une fidélité aux institutions (polis grecque et république romaine) des pays du midi contre le
concept de chevalerie (amour et fidélité pour le seigneur) des pays du nord.
IV. Le droit romain des modèles classique opposée à la liberté et la génie du nord
V. D’une partie que dans la mythologie grecque voit déjà tracé le destin de chacun, de l’autre Dieu et la
possibilité du pardonne par la providence
VI. Dans l’antiquité l’art de l’action et de la plasticité contre l’art de l’intériorité du monde moderne
« Le nom de romantique a été introduit nouvellement en Allemagne pour désigner de la poésie dont les
chants des troubadours ont été l’origine : celle qui est nait de la chevalerie et du christianisme».
Mme de Staël veut dire que la poésie romantique donc n’est pas la poésie des troubadours, du moyen Age ou
de la chevalerie, mais la poésie des contemporains ! on utilise ce terme pour désigner une poésie
contemporaine qui a seulement ses racines qui sont anciennes, mais elle est moderne. Romantisme à
l’époque donc est modernité.
Elle ajoute qu’à la fois on utilise le mot « classique » comme synonyme de perfection (on est dans l’époque
des découvertes archéologiques de l’époque classique), comme on est habitué à héritier des Lumières une
conception de l’époque classique comme équilibre des formes et emblème du parfait. Mais elle l’utilise en
disant que la production classique est celle des anciennes: chaque peuple à sa propre littérature. La forme
classique est pourtant inadéquate pour les modernes, ne leurs appartenant pas.
Mais savoir en quelle mesure cette poésie ne nous appartient plus est aussi important pour savoir comment la
réforme, surtout pour la période de Mme de Staël, quand on est encore dans un contexte de néoclassique
(tragédie classique) en France. Ce quoi qui est inadéquat ?
Elle dit, avec lucidité que dans l’antiquité, la dimension psychique des personnages et toute extérieure,
exprimé dans leurs actions, qui sont pourtant emblématiques (la vengeance comme acte exemplaire
notamment). La psychologie est extériorisé dans actes sans complications, forts, directs et consécutifs, avec
une simple connexion logique de cause-effet. Le différence avec la modernité est ici : les modernes ont
développé une capacité de se serrer dans leur intériorité, par moyen du christianisme et sa conception du sens
de culpabilité qui voit les hommes à s’indaguer et se replier sur eux-mêmes. L’action donc arrête d’être
extériorisé dans des rapports de causalité, avec toutes les nuances de l’âme humain.
Donc si l’art classique est adéquate pour exprimer gestes emblématiques et synthétiques (matérialité et gestes
pratiques), elle ne l’est pas pour exprimer la conflictualité de l’homme moderne, donc romantique.
La poésie chrétienne nécessite des nouveautés pour exprimer la multiplicité de l’intériorité (poésie de
l’immatériel, et pour cette nature elle a besoin de nuances pour ne pas s’évanouir et assumer une identité).
La question, en définitive, n’est pas de choisir entre les deux, mais entre l’imitation de la poésie classique et
l’inspiration de l’autre : la littérature classique est transplanté, les institution l’ont laissé fleurir (l’église et
l’état restaurateurs) en faisant quelque chose d’innaturel.
Si jusqu’à ce moment-là donc la tradition était celle de la classicité, quand on prend conscience de ce qu’on
vient de dire alors la prise de conscience d’une nouvelle sensibilité à besoin de nouvelles manière de
l’exprimer : un nouveau style.
Il faut s’entrainer dans une nouveau style.
10/05/2022
Le romantisme donc se constitue comme un vrai et propre exercice d’auto exploration constant de l’homme
moderne, motif pour lequel les formes représentative de l’Age classique, transmises par la scolastique
d’Aristote, ne sont plus adéquates à sa représentation. La remise en question des techniques représentatives
est bien nécessaire, comme on a vu grâce à Mme de Staël aussi.
L’intérêt de la femme, sur ce sujet ,est circonscrit au théâtre, qu’à l’époque occupe encore une place
capitale : il sera dans la forme théâtrale qu’on remettra en cause toutes les principes jusque là empruntés à la
classicité. Cela aura une retombé directe même sur la forme romanesque, comme on sait que les deux genres
sont bien impliqués par des rapports poreux entre ces deux genres. Le roman ne peut pas encore être au
centre de la recherche stylistique, on le regarde encore avec méfiance, et l’attention publique n’est pas aussi
large que le théâtre.
Le roman romantique
Ce genre littéraire ne peut pas encore bénéficier des règles formelles des autres genres littéraires, mais on
commence à avoir des représentants de plus en plus illustres :les exemple les plus importants ont été publié
sous l’Empire napoléonien et on a la tendance à définir l’expérience du roman romantique comme « le
roman de la crise de l’individu (romantique) ». Néanmoins, les continuités avec certains formes romanesques
du XVIII siècle sont nombreuses : il assumait déjà souvent, si on se rappelle, la forme du journal intime/
d’écriture privée, la forme épistolaire ou la fausse autobiographie, formes qui se prolongent jusqu’à cette
période. Ce genre, déjà au XVIII siècle, pénétrait là où le discours publique ne pouvait pénétrer : quelle
forme meilleure pour indaguer pourtant l’intériorité de l’homme romantique, ce qui échappe à l’extériorité?
Les textes romanesques du XIX siècle sont pourtant, du point de vu formelle, souvent écrits à la première
personne, comme notamment:

o La génie du Christianisme (1801-02) -Chateaubriand > œuvre apologétique (défense de ses idéaux)
o René (1802) – Chateaubriand > roman partialement autobiographique
o Obermann (1804) – Senancour > compte-rendu d’un voyage intérieur du personnage
o Adolphe (1816) – Constant > découverte d’une manuscrite autobiographique

Les continuités avec les romans épistolaires ou pseudo-autobiographiques du siècle précédent sont beaucoup.
Ces derniers textes, en formes d’écriture privée, amènent à l’aboutissement les formes du siècle précédente.
Ils ont tous des points commun, qui sont les bases du roman romantique :
- Le narrateur manipulateur, comme dans le Paysan Parvenu, disparaisse pour laisser la place à un cadre
de vrai confession profonde. Pas de tentatives pour manipuler le lecteur par la ruse et ses capacités
rhétoriques donc : ces romans-là mettent en scène une intériorité authentique, sincère. Les confessions
mettent à nu le personnage au point que cela occupe toute la discursivité narrative romanesque : son
quête intérieur, le conflits romantiques devenant l’intrigue
- L’élément d’intrigue disparait quasiment, tout ce qui compte est l’exploration interne. Il faut aller en
profondeur dans l’analyse des sentiments des personnages, au point que tous ce que se déroule autour
d’eux disparaisse. Le roman romantique ne fait qu’actualiser un potentiel d’interprétation de l’intériorité
déjà présent dans le roman du XVIII siècle.
C’est souvent la lutte entre les sentiments du narrateur opposés aux contraintes sociales qui représente, si
l’on veut, l'échafaudage narratif : les idéaux du narrateur en opposition avec la vulgarité et
l’immobilisme de la société contemporaine ou encore le besoin spirituelle du personnage en opposition à
une société qu’à une religiosité très construite. C’est l’hyperbolisassions d’un sentiment conflictuel.
Si donc on voit un changement culturelle profond et radical, on a démontré que le roman romantique est
assez conservatif, par rapport à soi-même, dans la forme expressive.

► François-René de Chateaubriand
Un grand protagoniste de cette saison dans la première partie du XIX siècle est René de Chateaubriand, avec
Balzac et Stendal. Né en 1768, il est catholique et monarchique (donc hostile à la révolution et même à
l’Empire), issu d'une famille aristocratique aisée. Il entame bientôt une carrière militaire, puis fait son entrée
à la cour à l'âge de 19 ans. À Paris, il fréquente les écrivains de son époque et est témoin des premiers signes
d'agitation de la Révolution française, jusqu’à son éclat. Blessé alors qu'il combat les armées de la
République naissante, il s'exile à Londres, mais sa femme est emprisonnée, et une partie de sa famille restée
en France est guillotinée. Il rentre en France seulement en 1800, s'installant à Paris, loin de sa famille : dans
ce moment il publie ses premiers romans, qui remportent très vite un franc succès, en particulier « La génie
du Christianisme (1801 -1802) ». Cette époque marque aussi le début de sa carrière politique aux côtés de
Napoléon Bonaparte, ce qui est possible grâce à un ami commun à la sœur de l’empereur, qui réussit en
insistant sur le talent de l'écrivain, à le faire rayer de la liste des émigrés. Cependant, il démissionne au bout
de quelques années d'exercice. Après un voyage d'un an en Orient, il se retire à la campagne avec son épouse
et se consacre à l'écriture. Pendant la Restauration, Chateaubriand embrasse à nouveau une carrière politique
et en 1815 il est nommé ministre d'Etat et pair de France, et rejoint l'Académie française. Il occupe
différentes fonctions politiques au cours des dix années qui suivent, et devient notamment ambassadeur en
Allemagne et en Italie. Après la révolution de 1830, fatigué des revirements politiques en France, il se retire
des affaires et s’installe dans son appartement parisien, où achève l'écriture de ses mémoires. Il meurt ici en
1848. « Les mémoires d’outre-tombe (1849) » est une œuvre autobiographique publiée seulement après la
mort de l’auteur, qui avait vendu le droits de publications de ses œuvres quand était encore en vie avec des
précises instructions de ne pas publier ce texte qu’après sa mort. Le succès sera énorme.

~ « LES MEMOIRES D’OUTRE-TOMBE »


Le cadre interprétatif est encore celui des fausses mémoires, mais le contexte est plus similaire à celui des
« Confessions » de Rousseau: ce sont en effet des confidences présentés comme « sincères » qui servent à
déguiser le but réel de l’œuvre. En effet, l’opération de réécriture et manipulation des événements de sa vie
est évident, mais l’objectif de Chateaubriand est celui d’offrir un discours qui le ferait comme resurgir de sa
propre tombe, au temps de la mort qui célèbre la vie exceptionnelle du génie romantique. La tension
apologétique de Jacob (le paysan parvenu) se traduit ici dans la célébration de sa propre existence, au-delà
même de la morte : c’est une sorte de temple qu’on dédie à son existence hors de la norme, géniale, fruit de
l’individualisme. C’est la lutte contre la mort de l’auteur et aussi son occasion de lancer des attaques aux
ennemis politiques (entre les premiers Napoléon), pour lesquels on préfère sacrifier des éléments de sa vie
plus intimes, comme ses relations amoureuses (il avait notamment des maitresses) : il s’agit en effet, comme
dit le titre, d’un mémoire et pas des confessions. La vie privée de Chateaubriand est mise à l’écart, ce que
l’on célèbre est la figure publique et artistique de l’homme. C’est son intériorité qui est exemplaire, sa
sensibilité : le culte des larmes du XVIII siècle aboutis exactement ici.
D’ailleurs, il s’agit d’un ouvrage qui constitue moins un compte-rendu qu’une réécriture de son existence
comme on a dit : ce n’est pas un récit fidèle de son existence, mais une forme narrative que complète sa vie,
éliminant tous ses échecs et parties honteux, et en rajoutant des expériences intérieures personnelles. Ce ne
sont pas un calque de l’existence, mais une manière de revendiquer ce qu’on n’a pas vécu (la vie de
Chateaubriand était bien plus banal qu’elle apparaissait dans le roman). Le récit de la vie s’oppose à la vie
elle-même, en l’intégrant et la corrigeant. La manipulation du discours ici est manifeste, mais c’est justifié
par la recherche d’un idéale que ne peut pas faire autrement pour se présenter dans la banalité de l’existence
extérieure.
~ « LA GENIE DU CHRISTIANISME »
Cette œuvre s’insère dans le même contexte formel de l’autre texte. Il précède les Mémoires d’outre-tombe
et de la même manière est une forme d’écriture loin de la fiction : il devrait s’agir d’un essai monumental sur
le christianisme, dans le cadre du besoin de spiritualité authentique du romantisme face au matérialisme
porté par les idéaux de la révolution. On ressent en effet un nouveau besoin de transcendance après ce
période dur, dont Chateaubriand se fait porte-voix. On s’attendrait donc une sorte d’exaltation de la
spiritualité, et un compte rendu des expérience intimes du christianisme de l’auteur : d’après eux, le Moyen
Age et le christianisme inaugure l’homme moderne. Mais ce n’est pas ça : au contraire !
L’ouvre, dans le résultat, ne s’agit pas d’un compte rendu d’une expérience privé face au besoin de
transcendance, mais peut être plutôt défini comme une description esthétique du christianisme.
Chateaubriand ne parle pas de son rapport avec la foi, mais il se laisse fasciner par les rites et les pratiques,
sans aucun vrai engagement religieux. C’est une forme d’apologie dans les aspects les plus externes et
superficielles du christianisme. Même le titre est trompeur : le génie c’est l’esprit le plus profond.
Il y a quand même certains concepts qui sont particulièrement intéressants, comme l’association entre
Christianisme et mélancolie : Mme de Staël avait dit que l’homme moderne, à travers le prisme du
christianisme, avait appris à s’explorer ; néanmoins, Chateaubriand ajoute que l’homme moderne se replie
sur soi-même, mais cette opération est indissociable de la mélancolie autant que de la religion, comme
l’homme perçoit sa finitude par rapport à sa condition humaine. Le christianisme donc est indissociable d’un
étude de passion qui se ressoude toujours dans la frustration et l’inquiétude et le rapport avec le divin est
source de malheur, étant la sérénité immobile d’un Dieu qui nous aime de manière inconditionnée à la fois en
conflit avec les sentiments de trouble des hommes.
Le rapport de l’auteur avec le romanesque ne sont pas évidents dans l’écriture de l’intériorité, mais plutôt il
jouis d’un héritage profond du récit philosophiques. En effet, ses romans de fictions les plus célèbres,
« René » et « Atala », font partie de la première édition de « La génie du Christianisme », en se chargeant de
transposer de manière narrative les questions qui ont été touché philosophiquement dans cette grande œuvre.
En ce qui concerne la forme, de toute façon, ils montrent le rapports encore très profonds avec la tragédie
néoclassique dont le genre du roman on a dit fatigue à se détacher. Les deux récits sont extrêmement pauvres
du point de vu des événements, de l’intrigue pour que l’exploration du sentiment puiss rendre au maximum,
comme matérialisation de l’égotisme romantique et de l’autoréférentialité.
- ATALA
Atala est un long récit de Chateaubriand qui se déroule en 1755 dans le Meschacebé, ancienne
colonie française d’outremer. René est un français qui, en quête d’aventures, arrive chez un peuple
indien de cette zone, les Natchez. Il veut devenir un guerrier de ce peuple et Chactas, le chef des
Natchez, l’adopte et l’aide avec plaisir, car lui rappelle les années où lui-même avait voyagé en
France. Un soir, René demande à Chactas de lui raconter ses aventures et c’est ainsi que peut
réellement commencer le récit d’Atala.
Le père de Chactas, un grand guerrier, un jour l’emmena à la guerre avec lui, mais pendant le combat
il meurt et tout semble perdu pour lui et son peuple. Mais à ce moment-là, un Espagnol, Lopez,
sauve le jeune chef et décide de l’adopter afin de le rendre plus civilisé : au bout d’un certain nombre
d’années, Chactas se rend compte qu’il n’aime point vivre comme les « civilisateurs » et décide de
retourner à l’état sauvage dans sa tribu. Pour faire cela, il se fait emprisonner par le chef des ennemis
que veut le brûlé. Mais c’est alors qu’Atala, la fille de l’ennemi, s’attache au prisonnier et décide de
le libérer, en s’enfuyant même avec lui dans le désert. Même Atala décide de raconter son histoire à
Chactas : en réalité, elle n’est pas indienne et n’est pas la fille du chef ; elle est chrétienne et son père
est espagnol et se nomme Lopez. Chactas fait rapidement le lien entre son bienfaiteur et le père de la
jeune fille qu’il aime. Les deux jeunes sont trouvés par le Père Aubry, un missionnaire qui a fondé,
non loin de là où ils se sont réfugiés, une colonie d’Indiens convertis au christianisme. Le Père
Aubry les emmène dans sa cabane. Chactas veut sceller son amour pour toujours avec Atala, mais
celle-ci se croit prisonnière d’une promesse qu’elle avait faite à sa mère avant que celle-ci ne meurt,
celle de rester à tout jamais vierge. Atala, ne pouvant choisir, préfère renoncer à la vie et boit un
breuvage empoisonné et se suicide.
L’amour entre les deux personnages est empêché par une question religieuse: la promesse de
virginité d’Atala, qui se ressent sans voie de fugue et se suicide. Ce final tragique se démontre
amèrement inutile, comme la femme ne savait pas qu’avec la conversion au christianisme de son
amant, on aurait pu considérer le vœu comme invalable. Elle se suicide donc pour rien, mais il
décide de se convertir quand même en son honneur.
Le cadre exotique, en plus, sert à exprimer une sorte de négative du mythe du bon sauvage : le
christianisme est coupable d’une série de malheur, mais en pénétrant dans leurs cœurs, ouvre la voie
à un éventail de sentiments et conflits impensables dans l’absence de la connaissance de Dieu.

- RÉNÉ
Ce texte signe une rupture avec la tradition du XVIII siècle du point de vu du déterminisme et par
l’apport qu’il va donner au romantisme français : il reprend toute une série d’éléments
préromantiques et les systématise dans une vision cohérente et univoque. Il est certainement l’œuvre
la plus célèbre.
René, qui parle en 1ère personne, confesse de s’être établi depuis plusieurs années chez les Natchez
(comme on sait déjà grâce au roman Atala) car il se ressentait plongé dans une mélancolie dont rien
ne pouvait le distraire. Mais même ici, dans la nature la plus sauvage (que dans l’illuminisme devrait
lui donner de paix) les choses ne vont pas mieux: il avait pris une épouse en arrivant, pour se
conformer aux mœurs du pays, mais il ne vivait point avec elle. Le vieux Chactas, qui lui avait
raconté ses aventures, désirait l'entendre à son tour et un jour, après bien des résistances, René se
décide à parler. Dans ce récit, le poète raconte sa propre histoire, un peu arrangée, mais exacte dans
les traits principaux. Ce nom de René même est son propre nom, ce caractère impétueux, inégal,
mélancolique, c'était le sien.
Après la mort de son père, René promène partout sa mélancolie et son désenchantement. Il essaye
des voyages ; il va s'asseoir sur les débris de Rome et de la Grèce. Des peuples morts, il passe aux
vivants et il recherche surtout, dans ses voyages, les artistes et les poètes. Mais c'est en vain : il ne
fait qu’augmenter le poids de ses ennuis et de ses vagues tristesses. Un jour, dégoûté de tout, René
est décidé à en finir avec la vie. Il écrit à sa sœur, et celle-ci, à la lecture de sa lettre, devine ses
secrets desseins : elle accourt auprès de lui et le calme par ses paroles et ses témoignages de
tendresse. Il parvient donc identifier cette source: un amour impossible. Il est amoureux de sa sœur
mais il se rend bien compte que cette relation serait source de malheur encore plus de la mélancolie
qu’il éprouve. Entretemps elle aussi se rend compte aimer René et se laisse gagner à son tour par la
maladie de son frère : celui-ci la voit dépérir chaque-jour et s'alarme. Elle le quitte brusquement
enfin, sans l'avertir, sinon par une lettre qui révèle à René le couvent où elle est entrée pour y
terminer ses jours. René veut tenter un dernier effort auprès de sa sœur et se dirige là, en arrivant au
moment où elle prononce ses vœux. Après un si douloureux sacrifice René prend une soudaine
décision : il se détermine à quitter l’Europe et à passer en Amérique. La fin de ce récit, la dernière
nuit que René passe dans sa patrie, son cri lointain d'adieu à sa sœur, son dernier salut au matin du
départ. Telle fut l'histoire de René.
Le récit s’achève de manière intéressante : deux personnages écoutent son raconte, qui ont de
réactions opposés : Chactas, ému, le prit dans ses bras presque en larme, vu qu’il réconnait dans son
histoire d’amour le malheur de la sienne. l’autre auditeur, le missionnaire père Souël, commence à
attaquer René, en critiquant sa vie qui aurait implanté le vice dans son cœur. C’est une sorte de
condamnation paternaliste et moraliste de la partie d’un représentant du christianisme, ce qui
démontre que le sens de l’autorité religieuse à l’égard de l’individu romanesque demeurait forte au
XIXème siècle (Chateaubriand était catholique). Le message est que les pulsions du soi ne peuvent
pas s’exhaurer dans le sentiment religieux et le sens de conflit héritage de la révolution et de
l’empire ne trouvera paix dans le romantiques même pas dans leur moment d’exaltation, au moment
de la restauration.
Analyse de texte
René, pendent son première période de voyages, se trouve en Italie et n’a pas encore avoué l’amour pour sa
sœur. L’Italie est le pays de la puissance de la nature (volcans) mais aussi le pays des ruines grecques et
romaines, en représentant donc à la fois l’exaltation de la nature dans ses formes les plus violentes mais aussi
la célébration des grand anciens, qui nous ont laissé comme des orphelins dans un profond sens d’abandon61.
Il révoque ses écoulés de voyage et parle de soi en 3ème personne, dans une explicite déclaration de conflit de
l’homme dans la société, qui ne peut pas guérir sa malheur.

♥ " Un jeune homme plein de passions, assis sur la bouche d'un volcan(1), et pleurant sur les mortels dont à
peine il voyait à ses pieds les demeures, n'est sans doute, ô vieillards ! qu'un objet digne de votre pitié ;
mais, quoi que vous puissiez penser de René, ce tableau vous offre l'image de son caractère et de son
existence : c'est ainsi que toute ma vie j'ai eu devant les yeux une création à la fois immense et
imperceptible et un abîme ouvert à mes côtés.
[…]" Hélas, mon père ! je ne pourrai t'entretenir de ce grand siècle dont je n'ai vu que la fin dans mon
enfance, et qui n'était plus lorsque je rentrai dans ma patrie. Jamais un changement plus étonnant et
plus soudain ne s'est opéré chez un peuple.(2) De la hauteur du génie, du respect pour la religion, de la
gravité des mœurs, tout était subitement descendu à la souplesse de l'esprit, à l'impiété, à la corruption.
C'était donc(3) bien vainement que j'avais espéré retrouver dans mon pays de quoi calmer cette
inquiétude, cette ardeur de désir qui me suit partout(4) .L'étude du monde ne m'avait rien appris, et
pourtant je n'avais plus la douceur de l'ignorance.
[…]" Je me trouvai bientôt plus isolé dans ma patrie que je ne l'avais été sur une terre étrangère. Je
voulus me jeter pendant quelque temps dans un monde qui ne me disait rien et qui ne m'entendait pas.
Mon âme, qu'aucune passion n'avait encore usée, cherchait un objet qui pût l'attacher ; mais je
m'aperçus que je donnais plus que je ne recevais. Ce n'était ni un langage élevé ni un sentiment profond
qu'on demandait de moi. Je n'étais occupé qu'à rapetisser ma vie, pour la mettre au niveau de la société.
Traité partout d'esprit romanesque, honteux du rôle que je jouais, dégoûté de plus en plus des choses et
des hommes, je pris le parti de me retirer dans un faubourg pour y vivre totalement ignoré.
[…]" Je trouvai d'abord assez de plaisir dans cette vie obscure et indépendante. Inconnu, je me mêlais à
la foule : vaste désert d'hommes !
[…]" Souvent assis dans une église peu fréquentée, je passais des heures entières en méditation.
Grand Dieu, qui vis en secret couler mes larmes(5) dans ces retraites sacrées, tu sais combien de fois je
me jetai à tes pieds pour te supplier de me décharger du poids de l'existence, ou de changer en moi le
vieil homme !
(1) René affirme être tenté par la perspective du suicide. La nature est reflet de sa psychologie : un
volcan sur le point d’éructer est comme René, qu’à quelque chose d’inexprimé qu’est sur le point
d’exploiter.

61 On pourrait même peut-être parler d’un sens d’abandon du côté sociopolitique, par l’écroulement de l’ancien régime.
(2) Le conflit avec la société de René n’est pas seulement personnelle, mais aussi sociale, il ne retrouve
plus sa place dans la France révolutionnaire.
(3) L’utilisation du « donc » ici veut mettre bien en évidence le principe de causalité.
(4) La crise individuelle est représentative d’une crise civile plus ample.
(5) Seulement Dieu peut voir l’intériorité du protagoniste.
René est le grand héros romantique, qui se différencie des autres personnages littéraire emblématique de
l’époque par son courage : Ortis et Werther sont en conflit avec eux même et le monde, mais ils se suicident ;
Adolphe et Oberman ont des amours contrasté et les deux se rendent aux normes sociale, en choisissant de
convivre secrètement avec leur mélancolie, en refoulant tous sentiments. Ils font tous des choix
accommodantes, on pourrait dire ; au contraire, René est le seul qui trouve dans le conflit son essence et en
lui ce conflit ne se résout ni dans la morte ni dans l’adéquation aux normes sociales. Il vit de sa tension
constamment, ce qui constitue son essence vitale.
11/05/2022
Le théâtre romantique
Il existait à l’époque une querelle qu’envisageait le théâtre.
Entre 1820 et 1830, les romantiques, intégrés du point de vu politique et idéologique dans le contexte de la
restauration, se découvrent des personnalités "dangereuses" pour les conservatoires du savoir, et se trouvent à
être regardés avec suspect des autorités académiques et politiques.
En 1824, les jeunes romantiques, par la plupart catholiques et monarchiques, se réunissent dans l’Arsenal, un
group que jusqu’à ce moment-là avait fait partie de la vie culturelle de la restauration de Louis XVIII.
Pour l’occasion, un membre de l’Académie Française, Monsieur Louis-Simon Auger62, s’alarme et accuse
les romantiques d’être les « les bannerets du mauvais goût », en tant que producteurs de textes désagréables
avec beaucoup de violence et où les coups de scène et les lignes narratives se juxtaposent : tout cela allait
directement contre les lois d’Aristote. Il revendiquait donc que ne pas respecter les normes de composition
du théâtre classique et néoclassique impliquait être vraiment « des ennemis des institutions », qui mettaient
en question l’autorité royale même. C’est de ce moment que les romantiques commencent à être regardés
avec suspect, on les imagines comme des personnages subversifs du point de vue tant artistique que
politique.
Le 24 avril 1824, ce discours d’Auger est publié sur tous les journaux qui, même si encore destinés à un
publique assez étroit, influencent l’opinion publique.
Tout ce qu’Auger, ainsi comme les conservateurs les plus acharnées, reprochaient du romantisme était bien
exposé dans l’œuvre d’un personnage qu’allait s’imposer sur le panorama artistique de l’époque : Henry
Beyle, mieux connu comme Stendhal63. Il répond à la critique du savant dans son pamphlet « Qu’est-ce que
le Romanticisme64 ? » (1818), texte embryonnaire qu’il va le réélaborer en deux éditions suivantes, en 1823
et en 1825, avec le titre définitif « SHAKESPEARE ET RACINE ».
En ce dernier, il commence à concevoir une poétique de réforme des normes théâtrales : il commence en
remarquant que le model de théâtre de Racine, en 1818, est ennuyeux et les épigones de cet artiste
s’obstinent à représenter une forme que ne rencontre plus les gouts du publique. Il explique cette théorie
romantique grâce à l’idée que chaque nation et moment historique devrait avoir une littérature modelée sur
son propre caractère exactement comme chaque personne porte une robe modelée sur son propre corps. Pour

62Journaliste, critique littéraire et dramaturge français, ultraroyaliste, Auger était farouchement opposé au romantisme ;
Ayant aussi paraitre une foule de brochures critiques où il défendait la littérature classique contre les systèmes de la
nouvelle école, en 1824, le 24 avril, fit une véritable déclaration de guerre et une dénonciation formelle du romantisme.
63 Stendhal n’avait en réalité aucun rapport avec les jeunes de l’Arsenal, en se caractérisant assez comme un outsider : il
venait de rentrer à Paris de peu de temps, après une longue période à l’étranger. De sa voix hors du cor des romantiques
classique, les accuses résonnent puissantes : il n’était pas d’origine noble et à différence des autres jeunes de la courante
il était un impérialiste. Il ne reniera jamais son expérience bonapartiste, même quand, après la fin de l’Empire (1814), il
tombe en disgrâce et se réfugie en Italie, à Milan. Ici a la possibilité de connaitre le romantisme italien, assez différent
de la déclination française, car il se constitue encore comme imprégné de valeurs illuministes. Pour ce motif, le
romantisme de Stendhal assume une conformation plus libéral et surtout anticléricale, synonyme de proto-renaissance,
et pas de douleur crépusculaire.

Il commet de propos l’erreur d’appeler la courante « Romanticisme » à la place de « Romantisme », car pour lui le
64

mouvement est préalablement celui italien.


ce motif, du moment que Racine représente une littérature transplantée dans une époque que ne lui appartient
plus, où la sensibilité moderne ne correspond pas à celle des peuples passé, voilà que ses œuvre ennuient.

Le conservatisme politique et littéraire


Un événement de fait divers de l’époque montre quelle était la pensée commune sur Shakespeare à
l’époque : entre juillet et aout du 1822, une troupe anglaise arrive à Paris pour représenter l’Othello en
langue originale, mais les nostalgiques du bonapartisme interviennent et chassent le group au cri de « Parlez
français ! ». Cela est un exemple de comme qui était plus conservateur en politique se trouvait encore
brutalement attaché à une vision conservatrice même du point de vue artistique, et les anglais représentaient
encore un ennemi pour les françaises impérialistes.

Au contraire, Shakespeare plait beaucoup aux foules, et il touche leurs cœurs. L’intérêt pour le publique n’est
pas casuel : on se concentre beaucoup sur l’effet qu’on veut produire sur lui. Maintenant, le spectateur doit
être au centre et il faut lui donner des « plaisirs dramatiques », et les unités ne sont pas nécessaires et
fonctionnels à produire des émotions profonds et un vrai effet drame.
Pour faire cela, selon Stendhal il faudrait :
- Utiliser la prose et pas le vers, comme il n’est plus actuel par rapport aux discours qu’il faut représenter.
Il faut parler de la contemporanéité avec la langue de la contemporanéité
- Récupérer des sujets nationaux
- Renoncer aux règles d’unité en faveur de la vraisemblance
Le discours sur la nécessité d’effacer les règles d’unité d’Aristote occupent la corp de sa thèse.
Il part en disant que l’habitude à d’observer les unités aristotéliques est due au désir, de la partie des
dramaturges, de rendre leurs drame vraisemblable. Mais cela est un grand paradoxe : en effet il n’est pas
croyable qu’un événement qui se déroulerait normalement pendent plusieurs jours, ou même semaines, se
déroule en seulement trois heures. Et cela diminue considérablement l’apparence du vrai.
Une autre raison des conservateurs se fonderait puis sur les théories de Gérard Genette, qui soutenait que le
temps du discours devait toujours être égal au temps du récit. Mais en réalité, il s’agit d’un raisonnement
déformé : selon Stendhal, le publique est bien conscient de se trouver face à une représentation et pas à la
réalité des événements, et pour cet exacte motif cette dernière à tous droits de rechercher une propre
autonomie par rapport à ce dont elle fait référence. C’est exactement pour le fait qu’on est conscient qu’une
œuvre est fictionnelle qu’elle ne résulte pas compromis par le bouleversement des unités, au contraire: si le
publique commençait à prendre pour vrai les faits qu’il voit sur la scène, le théâtre ne plairait plus.
Pourtant, reproduire des événements longues dans le temps d’un spectacle ne compromet pas de tout la
crédibilité de l’œuvre, et rompre l’unité de temps ne constitue pas quelque chose d’inconcevable.
Mais mettre en crise l’unité de temps, rend automatiquement licite aussi s’interroger sur les autres deux
règles d’unité, en particulier celle d’action.
En effet, ce dernier on sait bien que prévoyait le déroulement d’une seule ligne narrative, où les faits
devaient être nécessairement exposés en ordre chronologiquement conséquentielle. Cela était en réalité
étroitement lié au principe d’unité de temps même ; mais si, comme on a vu, on peut bien l’éliminer, il faut
que dans l’organisation des événement maintenant on s’attient au principe de causalité. C’est la pertinence
maintenant que l’importe, ce qui représente un changement énorme : la choix de ce qu’il faut mettre en scène
ne dépend plus du fait qu’il faut avoir des événements cohérents à l’intérieur d’un arc temporal de 24 heures,
mais qu’on peut opérer des choix pour pertinence à la création d’une histoire harmonieuse.
En conclusion donc, ces sont les raisons pour lesquelles Racine devient symbole d’une littérature qui
n’appartient plus aux contemporains, tandis que Shakespeare est le symbole bien réussit de la littérature
moderne, qu’à bien su répondre aux gouts du publique. Mais attention : cela ne signifie point que Racine ne
doit être font d’inspiration, mais seulement qu’il ne faut pas imiter cette attitude spécifique du style de
l’auteur.
Une précision à faire est que Stendhal s’intérêt de la forme du théâtre parce qu’elle occupe le sommet de
l’intérêt des littrés qui prenaient parti à cette querelle romantique ; la forme dramatique est encore la plus en
vogue, que déplace des sommes d’argent et surtout est sur les trois unité d’action du théâtre que faisaient
lève les conservateurs de l’Académie. Mais un drame lu a la même substance d’un drame récité, et tout ce
qu’on vient de dire sera fondamental pour le développement du roman. Même dans ce genre en effet on sera
plus encouragé à résumer beaucoup d’années en peu de lignes, afin de souligner le rapports entre les
événements de manière plus efficace. L’importance réside dans le fait que les actions soient cohérentes entre
eux, à l’intérieur de la représentation fictive, l’écart de temps entre les actions n’est pas trop important.
Voilà que les romans se remplissent alors de personnages et leurs actions se multiplient autour d’un "centre
de gravité" représenté par l’action principale.
Les formes du romanesque, dans l’époque romantique, amplifient surement des thématiques déjà traitées à
l’époque précédente. Elles n’ont pas encore trouvées leurs identités et pour ce motif on parle d’un genre
encore plutôt conservatif, où les éléments les plus récurrents sont toujours les mêmes :
- Formes pseudo-factuelles65
- Éléments autoréférentielles (voix du "moi")
- La fausse autobiographie

Alfred de Musset, auteur de la pièce théâtrale « Lorenzaccio » (183466), représente dans ce drame historique
du gout extrêmement romantique un héros magistral, qui face à la tyrannie de son oncle s’abandonne assume
une double caractérisation. En effet, pendent tout le texte Lorenzo jouera donc une double partie pendant
toute la pièce, celui de « Lorenzino », héros romantique par excellence, empli d'idéaux et inspiré par
l’ancienne Rome et Grèce ; et celui de « Lorenzaccio », personnage corrompu et pervers, qui lui collera
bientôt à la peau. Mais Lorenzo, sous ses airs de débauché et de lâche, est aussi un homme d'épée idéaliste,
courageux et poétique : il se voue à la restauration de la République de Florence, en se révoltant contre son
oncle même s’il sait que sa révolte est presque surement destinée à échouer. En ce geste extrême dictée de la
passion on voit toute la grandeur romantique du personnage, aussi comme dans son dualisme inhérent.

17/05/2022
Les réalismes
► Le réalisme de Victor Hugo
La voix de Stendhal n’est pas la seule qui s’oppose à la conception du théâtre classique (vers alexandrin et
les règles d’Aristote) .
Notamment, Victor Hugo prend la parole dans une longue préface (d’environ 60 pages) de l’œuvre
« Cromwell » (1827). À son intérieur, dans une première partie, l’auteur identifie 3 époques de l’histoire
humaine, qu’il fait aussi correspondre aux trois âges de l’homme ; en plus, d’après lui, chacune correspond à
un genre littéraire spécifique dominant :
- l’ÉPOQUE PRIMITIVE c’est la jeunesse et le genre serait l’ode, donc la poésie lyrique. Cela est
logiquement dû au fait que la lyrique exprime une sorte de stupeur, de merveille, et l’homme à cet était
primitif , venant de paraitre sur terre, est en effet fasciné par la beauté du monde qu’il vient de découvrir.
- l’ÉPOQUE CLASSIQUE c’est l’âge adulte, qui s’exprime avec les genres de l’épopée et, en mesure meneur,
de la tragédie. En effet, à cette époque les tribus humaines se structurent en états, la condition nomade
cède la place à un group grand qui constitue le ancêtres des nations à venir et pourtant on nécessite des
formes d’expression collectives où les personnages représentent l’histoire d’un peuple, leurs mœurs,
valeurs, savoirs et leur vision du monde.
- l’ÉPOQUE MODERNE correspond la vieillesse et, dit Hugo, le genre meilleure pour cette nouvelle époque
serait le drame théâtral, qui dépassant l’opposition binaire entre comédie et tragédie est capable à la fois
de faire rire et pleurer, qui soit horrible ou sublime, grotesque ou d’une beauté éclatante.
L’âge classique se fondait sur l’esthétique de la mesure, l’équilibre (par exemple, dans le théâtre, les actes
violentes se déroulaient hors de la scène) ; mais avec l’arrivé du christianisme, on assume une nouvelle
conception de l’esthétique. Il voit dans l’équilibre parfait des formes plastiques une sorte de mutilation,
qu’exclue toute une série de manifestation de l’existence considéré pas digne d’être représentée ; mais étant
l’existence un produit direct de Dieu, il est licite de penser que certains formes de beauté puissent nous

65Les textes pseudo-factuels ne se concentrent plus sur de grands personnages ou événements, mais sur des sujets
privés, qui prennent une double valeur : ils deviennent des sources d’expérience à déposer dans le savoir partagé et
deviennent, eux-mêmes, des objets de ce même savoir.
66Ce texte ne sera représenté que 60 ans après sa rédaction à cause de sa grande difficulté de mise en scène, due à des
changements de décor que contrariaient le publique à longs attentes entre les actes : on n’avait pas encore les capacités
techniques pour le représenter de façon adéquate.
échapper et résulter pas compréhensible à partir de notre gout, mais en tant que partie de la volonté divine ne
peuvent pas être éliminé de la représentation de la réalité. L’esthétique moderne doit donc être élargie à tout
ce qui fait partie de la réalité, qu’à le droit de paraitre sur scène et doit être accepté comme vouloir de Dieu.
En plus, selon une conception dualiste de l’homme qui conjugue sublime (forme de beauté tant grande qui
détruit) et grotesque, avec le drame on peut essayer de trouver un équilibre entre les deux, et pour le faire il
faut mettre en discussion les normes et la vision de ce qui était digne d’être représenté à l’époque classique,
et donc aussi des œuvres néoclassique qu’à l’époque d’Hugo était encore bien diffusés dans le domaine
théâtrale.
Dans la préface de « Cromwell » donc on considère que tout à le droit d’être représenté, et cela implique
qu’on peut parler de ce que l’on veut dans les texte , ouvrant la porte à toute une série d’éléments (laideur,
violence, vice) qui autrefois étaient exclus de la scène, fondamentale dans une représentation complète du
monde.
→ Aussi son chef-d ’ouvre « Notre-Dame de Paris » est parfaite pour représenter tout cela : il alterne
des pages de merveilleuse description de l’esthétique de la cathédrale, principalement de son
architecture 67 à la narration des personnages tels que Quasimodo, donc la caricature de sa laideur et
son grotesque produisent un contraste considérable avec le sublime et l’attention religieuse
représenté par la cathédrale. Cependant, la génie de l’œuvre réside exactement sur le rapport
d’indissociabilité entre les deux.
Mais les réflexions d’Hugo ne se limitent seulement aux thèmes : tous ce qu’on à dit implique aussi une coté
de réforme formelle des types de représentation. Il faut, même dans la variété impliqué par la coexistence de
sublime et grotesque, que le genre et la forme soient cohérent, qu’ils tiennent.
Cette forme de cohérence n’est pas forcement adhérent aux unités conçues d’Aristote : voilà qu’on
commence à élaborer des formes narratives plus souples qui puissent accueillir des nouveautés, et en premier
lieu on admit l’existence de plusieurs lignes narratives (qui représentent bien sublime et grotesque), a pacte
qu’à la fin le conte ait une fine unique.
♥ «[…] l’œil ni l’esprit humain ne sauraient saisir plus d’un ensemble à la fois. […] L’unité d’ensemble ne
répudie en aucune façon les actions secondaires sur lesquelles doit s’appuyer l’action principale. Il faut
seulement que ces parties, savamment subordonnées au tout, gravitent(1) sans cesse vers l’action
centrale et se groupent autour d’elle aux différents étages ou plutôt sur les divers plans du drame.
L’unité d’ensemble est la loi de perspective du théâtre. (2)».
(1)Métaphore spatiale : les éléments peuvent graviter à n’importe quelle distance, à condition qu’ils
suivent l’orbite du soleil.
(2)Cette dernière partie est particulièrement intéressant: en effet, dans l’art, on trouve des tableaux avec
un seul sujet ou plusieurs personnages ; mais néanmoins, l’objet en premier plan occupe plus d’espace et
donc le spectateur lui dédie plus d’attention. Cela n’empêche que les éléments de fond fassent partie de
la même composition, en étant fonctionnel à l’œuvre.
Cette considération n’est circonscrite au roman, mais aussi valide pour les formes narratives plus nouvelles
(la sérialité, les feuilletons).

HENRI BEYLE – STENDHAL


Stendhal est né en 1783 à Grenoble, dans une famille bourgeoise et royaliste. Il se lance dès sa plus tendre
jeunesse à la "chasse au bonheur", en voulant se dédier aux arts et à l'amour mais, suite à de nombreux
problèmes familiaux (perte de la mère bien-aimée), il entama une carrière militaire à l'âge de 16 ans, en
participant à la campagne d'Italie dans l'armée Napoléonienne et, par la suite, est nommé sous–lieutenant.
Au moment de la chute de l'Empire, il reste en Italie et se consacre à ses passions : il publie des critiques
musicales sous le pseudonyme de Stendhal. Il écrit aussi de nombreux romans qui ne lui permet d'obtenir une
grande notoriété hormis Le Rouge et le Noir (1830), La Chartreuse de Parme (1839) et aussi Lucien Leuwen
(1894), qu'il n'a malheureusement pas fini d'écrire. Il voyage en plusieurs partie d’Italie, pays dont il apprécie
les monuments, la musique (l'opéra) et la culture. Il séjourne notamment à Milan, à Rome et à Naples.

67 Cet aspect est particulièrement intéressant parce qu’on peut voir la structure de la cathédrale comme
métaphoriquement liée à la forme et structure aussi du genre « roman » à l’époque, où toutes élément ont une fonction
et au même temps produisent un effet esthétique.
En 1831, il est nommé consul de France dans la ville italienne de Civitavecchia, mais ce titre le plonge dans
un profond ennui et, alors qu'au début de ses fonctions il n'avait pas le temps d'écrire, il se remit à écrire
beaucoup plus qu'avant. Il meurt à Paris en 1842, à la suite d'un ictus survenue en pleine rue.
D’après Stendhal, qui s’interroge beaucoup sur les gouts du publique du XIX siècle, pour satisfaire les
lecteurs il faut changer les formes de représentation. Son modèle est notamment Shakespeare, qu’avait
ignorées les unités d’Aristote en ordre de satisfaire les besoins de son publique contemporaine, en apportant
des modifications aux canons classiques.
En ce qui concerne les thèmes des représentation, Stendhal s’en occupe très peu, mais il est très influencé par
un autre écrivain anglais, cette fois contemporain, Walter Scott. En effet l’auteur français pensait qu’il
faudrait que le matériel narratif qu’on utilise pour le drame soit capable de captiver l’attention du spectateur,
et pour le faire on peut évidemment s’emparer de la matière narrative historique, mais pas comme le faisait
Walter Scott. Ce dernier, choisissait l’époque historique (notamment celle du moyen âge) comme cadre de
ses œuvres seulement par des critères esthétiques. Il faut au contraire que l’histoire soit toujours un miroir
déformant pour lire le présent, comme à su bien faire Shakespeare (qui représente les craints de son époque
envers l’instabilité de la couronne anglaise, sauvé par Elisabeth I). Ce sera la même pensé - et procédé -
adopté par Manzoni.

Hugo vs Stendhal
Hugo, en partant des considérations théologiques, au contraire, s’interroge sur ce que l’auteur doit
représenter, donc avant sur les thèmes et puis sur la forme et même pour lui Shakespeare, est capable de
conjuguer bien le sublime et le grotesque thématiquement, et la modification de la forme classique est le
moyen pour faire cela.
Au contraire Stendhal part de l’idée que soit la forme à devoir se renouveler, ce qui engagera aussi une
modification des thèmes comme conséquence naturelle. De toutes manières, le réalisme pour Stendhal est
essentiellement un élément occasionnel, et il applique simplement la méthode du roman historique.
Même en partant de deux points opposées donc, Stendhal et Victor Hugo se prononcent sur la même
question.

LE ROUGE ET LE NOIR
Néanmoins, Stendhal n’écrit aucun drame : sa réflexion en antithèse avec la vision des romantiques français
ne se manifeste dans cette forme narrative en effet, mais plutôt dans le roman.
Dans le sous-titre du « Rouge et le Noir » cela est bien évidente : « Chroniques de 1830 ». Publié en 1830, le
roman sort deux mois avant les Journées de Juillet, qui voient la mise au pouvoir du rois bourgeois Louis
Philippe d’Orléans.
Mais si on a dit que selon lui l’histoire est le meilleur moyen pour décrire le présent, pourquoi il situe son
intrigue dans la contemporanéité? Parce que Stendhal fait un pas en plus : il décide de lire le présent en
utilisant la méthode du roman historique, en utilisant le procédé envers. Le roman historique italien, qu’il
connait bien en effet, affronte toujours un thème en arrivant ou l’historiographie ne peut pas arriver, c’est-à-
dire en pénétrant sous la peau des grand personnages de l’histoire pour lire en clé intime les raisons des
choix qu’ont influencés les destins des peuples. Il décide applique cette méthode à son roman, mais en
utilisant les faits divers, les événements quotidiens écrits dans les journaux italienne pour donner une clé de
lecture du présent et même du futur le plus proche. Ses racines sont dans la quotidienneté, mais avec les
possibilités interprétatives du discours romanesque: si on peut, avec ce genre, donner un sens à l’histoire,
peut-être qu’on peut le donner même au présent.
INTRIGUE
Le roman donc nait d’un fait divers : l’affaire Berthet. Il se rapportait à l'exécution d'Antoine Berthet, fils de
petits artisans que très tôt est fait entrer au séminaire. De santé fragile, Berthet dut le quitter très tôt et devint
le précepteur des enfants de la famille Michoud mais aussi l'amant de Madame Michoud. Cependant, quand
la relation est découverte, il est chassée en sourdine pour éviter un scandale et après un nouveau séjour dans
un séminaire, Berthet trouve une nouvelle place de précepteur, dans une famille noble cette fois : les Cordon,
où il séduit la fille de son employeur, qui le chasse sans attendre. Très amer de n'avoir pas trouvé de
débouché à sa grande intelligence, il accuse Madame Michoud de ses déboires et projette de se venger. En
1827, il entre dans l'église de son village au moment où le vieux curé dit la messe, et il tire un coup de
pistolet sur son ancienne maîtresse Madame Michoud, qui survivra à ses blessures, puis tente de se suicider.
Son procès a lieu le même année : il est condamné à mort et il est exécuté à l’âge de vingt-cinq ans.
Cela est exactement l’intrigue du roman. L’auteur se concentre sur la quête intime des raisons qui portent
Julien Sorrel (son protagoniste) à se comporter de la manière que Berthet, et clairement il brode sur les
événements qu’il connait seulement superficiellement.
Fils de charpentier, Julien Sorel est trop sensible et trop ambitieux pour suivre la carrière familiale dans la
scierie d’une petite ville de province. En secret, il rêve d’une ascension similaire à celle de Napoléon
Bonaparte mais ne trouve place que comme précepteur dans la maison du maire de sa ville Verrières,
Monsieur de Rénal. Il noue une relation interdite avec son épouse: Julien vit de réels moments de bonheur
aux côtés de Madame de Rênal, qui l’initie à l’amour ainsi qu’à la vie de la haute société de province.
Toutefois, leur amour s’ébruite et Monsieur de Rênal reçoit une lettre anonyme dénonçant l'adultère de sa
femme : bien que ces racontars lui apparaissent fantaisistes, le maire décide de se séparer de son précepteur.
Julien rentre à nouveau dans un séminaire, mais pas le même d’avant, où il passera bien des moments
pénibles. Mais un jour, son abbé lui propose de devenir le secrétaire du marquis de La Mole et il part alors
pour Paris. Ici il fait la rencontre de la fille de Monsieur de la Mole, Mathilde, avec qui il entame une relation
amoureuse. Quand elle apprend être enceinte, convainc son père de la laisser épouser Julien, non sans mal à
cause de ses origines humbles. Il ne reste pourtant à M. de La Mole d’anoblir Julien, qui devient alors le
chevalier de la Vernaye : il est fou de joie pour son rachat social. Malheureusement son bonheur est de courte
durée : Madame de Rênal, en apprenant de ce mariage, décide d’envoyer une lettre à M. de La Mole dans
laquelle elle le décrit comme étant un séducteur infâme et sans scrupule. M. de La Mole furieux, décide
d’annuler le mariage. Julien, hors de lui, tente de tuer Madame de Rênal dans l’exacte même manière de
Berthet, ce qui le conduit immédiatement en prison. Mathilde veut sauver son amour : elle fait tout pour
l’aider, corrompant même les jurées, mais ce dernier est fâcheux avec la société, et après une plaidoirie de
condamne dans laquelle personne est n’est épargné, il est condamné à mort. Julien est décapité, Mathilde
effondrée et Madame de Rênal meurt de chagrin trois jours plus tard.
Comme on peut bien comprendre, dans l’intrigue l’unité d’action n’est pas respectée comme Aristote la
concevait. Le roman est devisé en deux parties :
• 1ère partie : retrace le parcours de Julien Sorel en province, à Verrières, son entrée chez les de Rênal,
et sa passion pour Mme de Rênal. Ce fragment se termine avec la réclusion de Julien dans un
séminaire. Le NOIR du titre se réfère aux vêtements des prêtres.
• 2ème partie : porte sur la vie du héros à Paris comme secrétaire du marquis de La Mole, et la passion
qu'il a avec sa fille, Mathilde. Cette dernière fait procurer à Julien un titre d’officier. Le ROUGE du
titre représenterait la couleur du sang porté par la guerre, et donc probablement l’armée.
L’intrigue est aussi et surtout la récupération d’éléments qui portent le roman à être une parabole unique.
Mme de Rénal, en effet, on la retrouve dans la seconde partie pour ruiner Julien, comme dans une
construction circulaire de la narration. À la même manière, l’abbé du séminaire témoigne à faveur de Julien
dans le procès après le meurtre de la femme : les personnages retournent. Cela est un élément fondamental
pour l’équilibre du roman, qui cependant sa division en deux grandes macro séquences , possède une
cohérence extraordinaire : c’est à cause de ce que Roland Barthes appellera le « RETOUR DE L’EGAL, EN
DIFFERENTES CONDITIONNES ». Eléments familier dans des conditions pas familier rendent un roman
cohérent. La capacité de montrer la mutation d’un personnage face au même thème est l’élément que
distingue le romanesque des autres genres: plus de temps, plus d’espace pour se développer.
Le procès final est une partie fondamentale de l’œuvre : on a dit que Mathilde est tellement amoureuse de
Julien qu’elle achète les jurées pour lui faire voter par l’innocence de Julien, pardonné même par Mme de
Rénal. Mais en fin il décidera de se prendre ses responsabilité et victime d’une haine acharnée contre le
juge, les jurées et l’auditoire, ces derniers ne peuvent que le condamner.
Dans lui reste le conflit entre individu et société typique de l’héros romantique, tragique mais aussi
démentiel: Julien est en réalité un faux romantique, une caricature.
18/05/2022
Analyse des extraits
La parodie de la sensibilité romantique est évidente et occupe entièrement le discours dans les œuvres de ce
type, en adoptant un narrateur omniscient capable de mettre en contraste la réalité et l’idéal, contextualisé et
redistribué dans l’espace narratif.
La description du paysage qu’ouvre le texte dit déjà du cliché des romans romantiques, par exemple.
♥ La petite ville de Verrières peut passer pour l’une des plus jolies de la Franche-Comté. Ses maisons
blanches avec leurs toits pointus de tuiles rouges s’étendent sur la pente d’une colline, dont des touffes
de vigoureux châtaigniers marquent les moindres sinuosités. Le Doubs coule à quelques centaines de
pieds au-dessous de ses fortifications bâties jadis par les Espagnols, et maintenant ruinées. Verrières est
abrité du côté du nord par une haute montagne, c’est une des branches du Jura. Les cimes brisées du
Verra se couvrent de neige dès les premiers froids d’octobre. Un torrent, qui se précipite de la montagne,
traverse Verrières avant de se jeter dans le Doubs, et donne le mouvement à un grand nombre de scies à
bois(1), c’est une industrie fort simple et qui procure un certain bien-être à la majeure partie des
habitants plus paysans que bourgeois. Ce ne sont pas cependant les scies à bois qui ont enrichi cette
petite ville. C’est à la fabrique des toiles peintes, dites de Mulhouse, que l’on doit l’aisance générale qui,
depuis la chute de Napoléon, a fait rebâtir les façades de presque toutes les maisons de Verrières(2).
(1)Le paysage romantique vient brutalement interrompu dans son description par l’utilisation de l’eau du
fleuve dans le domaine de l’industrie.
(2) La bucolique laisse espace à la présence humaine et à l’influence de la monnaie et de la politique, qui
rendent minuscule la tension romantique envers l’infini.
En effet, le paysage est toujours indissociable de la société et de la politique.
♥ Le soleil est fort chaud dans ces montagnes ; lorsqu’il brille d’aplomb, la rêverie du voyageur est
abritée sur cette terrasse par de magnifiques platanes. Leur croissance rapide et leur belle verdure tirant
sur le bleu, ils la doivent à la terre rapportée(1), que M. le maire(1) a fait placer derrière son immense
mur de soutènement, car, malgré l’opposition du conseil municipal, il a élargi la promenade de plus de
six pieds (quoiqu’il soit ultra et moi libéral, je l’en loue), c’est pourquoi dans son opinion et dans celle
de M. Valenod, l’heureux directeur du dépôt de mendicité de Verrières, cette terrasse peut soutenir la
comparaison avec celle de Saint Germain-en-Laye.
(1) À nouveau, paysage naturel qui laisse la place aux travaux publiques du maire de la ville qui veut se
garantir les votes des citoyens.
(2) Le maire Monsieur de Rénal incarne toutes les contradictions de l’époque entière. Il a un nome noble
- qu’il s’est acheté - mais pour faire valoir son pouvoir il doit se plier aux dynamiques municipales,
héritage de l’époque napoléonienne. Et pour s’approcher encore plus à l’idéal aristocratique de l’ancien
régime, il veut un précepteur privé pour ses fils.
En ce qui concerne la figure de Julien, ce personnage, comme tous les romantiques, vie un conflit entre ses
élans idéalistiques intérieurs et les contextes dans lesquels il opère. En effet, il est constamment peint comme
hors lieu, dans tous les contextes : en famille, entre la vulgarité de la bourgeoisie provençale et même dans
l’haute société parisienne de la famille de la Mole. Cela est dû au fait qu’il a un mythe politique qu’est
inconciliable à l’époque de la restauration, celui de Napoléon, pour lequel il a une vénération absolue.
C’est un contraste entre les valeurs napoléoniens présentés dans un cadre de reconstruction des valeurs de
l’Ancien Régime, extrêmement inconjugable. Cependant, Julien est un hypocrite : en effet, il est disposé à
tous pour trouver une place dans la société, et il n’hésite à renier ses propres valeurs chaque fois qu’on lui
présente la possibilité d’un rachat sociale (que dans la restauration serait impossible si on savait qu’il était un
Napoléonien convaincu). C’est exactement celui-là le motif pour lequel il est un faux romantique.
En plus, du côté sentimental, il se sent presque contraint à suivre les modèles des grands romantique : il
séduit Mme de Rénal presque uniquement pour adhésion au cliché romantique de l’amour prohibé.
♥ La violence que Julien était obligé de se faire était trop forte pour que sa voix ne fût pas profondément
altérée ; bientôt la voix de madame de Rênal devint tremblante aussi, mais Julien ne s’en aperçut point.
L’affreux combat que le devoir livrait à la timidité était trop pénible pour qu’il fût en état de rien
observer hors lui-même
Le style de Stendhal met bien en évidence comme le protagoniste se sent contraint à jouer comme un
séducteur : les champ lexical du devoir - et plus en général dans l’œuvre la présence de beaucoup de
verbes modalisateurs comme « il devait, il était opportun, il se sentait que » - jouent un rôle
fondamentale.
La contextualisation de ces clichés est simple : on parle du triangle du désir. Si je veux être comme
quelqu’un, je veux les mêmes chose qu’à lui, et si je les obtiens je peux lui ressembler. En arrivant à la
femme de Monsieur de Rénal, Julien veut obtenir son même prestige.
Cela va se répéter même le contexte Parisien, avec Mathilde :
♥ Comme il la cherchait des yeux, Mathilde le regarda. Mon devoir m’appelle, se dit Julien ;
Le rôle du séducteur qu’il ressent devoir jouer est mis extrêmement au ridicule au moment où on est mis au
courent du fait qu’un ami à soi lui a donné des lettres d’amour déjà écrites, qu’il peut utiliser pour ses
conquêtes seulement en changeant le nom d’entête.
Emblématique est l’utilisation de ces lettre quand il se trouve à Strasbourg, envoyé par le père de Mathilde
pour faire carrière militaire. Ici, il veut rendre jalouse Mathilde en flirtant avec une amie à elle, Mme de
Fervaques, avec laquelle il entretient une liaison epistulaire :
♥ […] ses yeux tombèrent par hasard sur le portefeuille en cuir de Russie où le prince Korasoff avait
enfermé les cinquante-trois lettres d’amour dont il lui avait fait cadeau. […] Il se mit aussitôt à
transcrire cette première lettre d’amour ; c’était une homélie remplie de phrases sur la vertu et
ennuyeuse à périr ; Julien eut le bonheur de s’endormir(1) à la seconde page.
(1)Autre élément qui révélera sa faux caractérisation romantique est le fait que Julien est un personnage
qui dort très bien. Cela peut sembler banal, mais pour un romantique est fondamentale être tourmenté la
nuit. Cependant, même en galère, la nuit avant son exécution, il dort.

Dans le texte sont des éléments fondamentaux les livres, qui nous informent sur la duplice psychologie de
Julien et des autres personnages par le réalisme du narrateur omniscient.
Julien, par exemple, grand étudiant et un mauvais travailleur aux yeux de son père et ses frères, en réalité a
lu seulement 3 livres dans sa vie, ceux que casuellement auraient pu lui garantir d’avancer dans son escalade
au pouvoir : Les Confessions de Rousseau, la Bible et celui qui forge ses idéaux politiques, le mémorial de
Saint-Hélen de Napoléon.
♥ […] Les Confessions de Rousseau. C’était le seul livre à l’aide duquel son imagination se figurait le
monde. Le recueil des bulletins de la grande armée et le Mémorial de Sainte-Hélène complétaient son
Coran. Il se serait fait tuer pour ces trois ouvrages. Jamais il ne crut en aucun autre. D’après un mot du
vieux chirurgien-major, il regardait tous les autres livres du monde comme menteurs, et écrits par des
fourbes pour avoir de l’avancement.
[…]Tout à coup Julien cessa de parler de Napoléon ; il annonça le projet de se faire prêtre, et on le vit
constamment, dans la scie de son père, occupé à apprendre par cœur une bible latine que le curé lui
avait prêtée. Ce bon vieillard, émerveillé de ses progrès, passait des soirées entières à lui enseigner la
théologie. Julien ne faisait paraître devant lui que des sentiments pieux. Qui eût pu deviner que cette
figure de jeune fille, si pâle et si douce, cachait la résolution inébranlable de s’exposer à mille morts
plutôt que de ne pas faire fortune.
1. Les Confessions de Rousseau
Chez les Messieurs de la Mole, il semble tomber amoureux de Mathilde parce qu’il se rend compte que de la
bibliothèque du Monsieur père disparaissent des livres. Il s’agissait principalement d’œuvres des Philosophes
(Voltaire, Rousseau…), et il découvre être Matilde à les prendre68 : pendant la restauration, lire des œuvres
des Lumières signifiait être un opposant à la restauration. Il pense alors que Mathilde aussi aille une double
face, avec peut-être ses mêmes sentiments d’inquiétudes envers son époque historique et politique. Mais en
réalité, Matilde les lis pour combattre l’ennuie.
Néanmoins, elle aussi projette sur Julien un idéal que la fait tomber amoureuse : elle en lui voit un ancêtre de
sa famille, mort à l’époque de la Fronde, guillotiné pour protéger le roi. Monarchique et catholique et l’idéal
que se fait Mathilde du garçon69.
2. La Bible
Ce texte, comme on a déjà anticipé, permet à Julien en plusieurs occasion dans le roman de poursuivre son
parcours facilement: Napoléon n’était pas un fervent catholique (même si il a redonnées les biens à l’église
et a institué la liberté de culte), tandis que dans les valeurs de l’Ancien Régime la religion est bien
importante, c’est inhérent à la monarchie. Julien ressent donc souvent la nécessité de se démontrer un bon
chrétien pour fuguer tous doutes à propos de ses affections napoléoniens.

68 «Mademoiselle de La Mole avait le secret de voler des livres dans la bibliothèque de son père, sans qu’il y parût»
69Entre choses, on peut comprendre même ce que Mathilde conçoit grâce au fait que Stendhal joue beaucoup avec les
points de vue : souvent, un paragraphe, avec la perspective d’un personnage est immédiatement mis en évidence en
toute la fausseté dans le paragraphe successive par la description de la même scène d’un point de vue différent.
Le protagoniste, grâce à ses capacités, achève apprendre facilement par cœur le texte sacrée, mais au-delà de
cette connaissance mnémonique, il est totalement ignorant en religion. C’est pour l’éloigner du séminaire à
cause de cette impréparation qu’il est envoyé chez Monsieur de la Mole : donc par son inconsciente doubleté
il est en réalité toujours plus poussé en haut dans la société.
Un autre remarque intéressant est que même dans Julien on peut retrouver la figure d’ un parvenu, et il
ressentira pour ce motif toujours le besoin de satisfaire un sens de racheter sa place dans un monde classiste
qui lui est hostile. Mais il n’y réussit point et cela est bien évident dans le final de l’œuvre, où tous les nœuds
viennent au peigne fin.
Comme on a dit, Julien en réalité est très proche d’obtenir tous ce qu’il avait toujours rêvé : il doit épouser la
fille d’un duc, ce qui lui a garanti même une position, et malgré cet grand erreur qu’il a commis tous sont
prêt à le pardonner, tant les jurées corrompus comme Mme de Rénal même…il lui change même de nom, en
ne prenant un titre noble, le chevalier Julien Sorel de La Vernaye. Mais pour quelque raison, cela ne suffit
pas et il commence, pendent son procès, une plaidoirie violente contre ce monde duquel il voulait autant
d’approbation et qu’a toujours tenté de l’écraser. Et il va donc vers la mort.
Dans son élan parodique d’un grand homme romantique que l’a caractérisé pendant tout l’œuvre - tourmenté
et fâché contre une société qui ne le veut pas (ce qui n’est point vrai !) – il le devient paradoxalement pour de
vrai, dans le trait de l’irréductibilité. Pour ridicule qu’il est et qu’il soit bête ou hypocrite, il choisit de mourir
plutôt que vivre dans ce monde qui l’a transformé dans un meurtre.

Lucien de Rubempré et Eugène de Rastignac


Ces deux personnages de la « Comédie Humaine » d’Honoré de Balzac (1830-1856) peuvent être bien
confrontées au protagoniste de « Le Rouge et le Noir ».
- Lucine de Rubempré parait pour la première fois dans l’œuvre « Les illusions perdues » avec le nom de
Chardon: il est un enfant gâté et pourtant il supporte mal sa condition sociale bourgeoise. Il rêve
d’accéder à la « partie haute » de la société où il est reçu finalement comme un futur grand poète (dont
en réalité il n’a pas les capacités). Dans les œuvres suivantes, il se retrouve à Paris, où il souffre
profondément sa condition de médiocrité hiérarchique. Dans la dernière œuvre où il apparaisse,
« Splendeurs et misères des courtisanes », on le retrouve pendu dans une cellule.
- Eugène de Rastignac est un personnage romanesque dont les aventures débutent dans « Le Père Goriot »,
et dont l'évolution va se poursuivre dans un nombre considérable de romans de La Comédie humaine.
C'est un jeune homme ambitieux, qui regarde la « bonne société » avec des yeux à la fois surpris et
envieux et qui va se montrer prêt à tout pour parvenir à ses fins, en se trouvant même à épouser la fille de
sa maitresse. Il est l’exemple d’un parvenu qui réussit dans ses intentions : le roi l’a fait comte et c’est un
des deux ou trois hommes d’État enfantés par la Révolution de juillet, ministre de Louis Philippe.
Les deux se trouvent très bien dans le contexte de la restauration : ils arrivent jusqu’au fond pour atteindre
leurs but; mais Julien Sorrel non. On comprendra jamais ce qui est simulation et ce qui est authenticité.
Les toutes dernières pages sont dissonants. Julien est décapité et Mathilde (qu’entre choses projetait sur lui,
on a dit, la figure d’un de ses ancêtres mort juste guillotiné pendant la Fronde) prend la tête de Julien pour lui
faire un funéral. Sous conseil de Mme de Rénal, on décide d’enterrer la tête dans une cave dans les bois, où
la femme croyait il aimait s’isoler. Mais cette cave était seulement un lieu où il s’est réparé pendent qu’il
était en route pour rajouter un ami à soi qui habitait dans le bois : on sait qu’il y a rien de sacrée dans le lieu
où Julien reposera. C’est ridicule, comme toute l’affaire de Julien, mais c’est peut-être le final idéal pour la
courante romantique qui permettra d’ouvrir avec la saison des réalismes.
On reviendra vraiment jamais sur la questionne si Julien représente une génération ou est un cas isolé, car
son extraordinaireté réside aussi dans sa capacité de s’auto-tromper.
La force du réalisme est exactement d’être en équilibre entre des événements singuliers, qu’à la fois parlent
d’une catégorie entière. C’est l’universalisation d’une condition et Julien devient le porte-voix non-autorisé
d’une génération avec laquelle il a peu en commun : les romantiques se sentent marginalisé par un monde
que paraissait complice.
24/05/2022
► Le réalisme d’Honorée de Balzac
On pourrait définir Balzac comme un auteur systématique dans l’utilisation du réalisme, élément
indissociable de sa formation pour le thèmes qui l’intéressent et qu’il choisit de traiter. En effet, dans le
couvent où il vit à partir de 8 ans, il lit beaucoup d’œuvres de philosophie et ce qui le fascine le plus est le
principe profond qui pousse les hommes à désirer, vouloir. Dans les œuvres de Balzac, cette quête devient
une constante : les premiers textes publié à son nom voient comme protagonistes tous des personnages qui
désirent intensément quelque chose, souvent qui va au-delà du réel70. Sa philosophie souvent déborde dans la
mystique chrétienne en ce qui concerne la quête sur la volonté.
Mais d’où proviennent les influences sur le style réaliste de Balzac ? On sait que quand il décide de tenter la
carrière littéraire, il est avant toutes chose un travailleur chez des journaux : il s’occupe de fiches et
brochures particulièrement légères et frivoles appelés « Les Arts », petits manuels de coutume qui enseignent
des gestes de la quotidienneté (l’art de nouer une cravate, l’art de se raser, l’art du parfait gentleman). Cela
est important parce que en ce type de publications on requière à l’écrivain une attente observation de la
réalité et de ses détails. Il travaille sur ce genre d’œuvres pendant plus de 2 années et c’est donc justement ici
qu’il faut rechercher les fondements du réalisme de Balzac. Il se base essentiellement sur deux aspects :
- Attente observation du réel, dont on a déjà exploré l’origine ;
- La puissance interprétative, la capacité de donner un signifié aux gestes communes
C’est un habile mélange entre travail d’œil et de mente, entre phénoménologie et herméneutique: il
développe essentiellement une extraordinaire capacité de cueillir le réel et le décodifier pour interpréter la
psychologie la plus profonde de ses personnages, comme en creusant entre eux.
Mais la maturation de ce qui est son style n’est pas claire du début à ses yeux et il y parviendra vers la fin des
années 20 (à environ 30 ans), quand il commence à publier avec son vrai nom. En plus, pour lire noir sur
blanc la formalisation de ses théories poétiques, il faut attendre le 1842, quand il écrira la préface à la
Comédie Humaine, ce qui montre un processus d’analyse en rétrospective important (vu qu’il commence à
publier des œuvres qui en feront partie dès 1830).

LA COMÉDIE HUMAINE
Entre 1830 et 1856 on assiste à la publication d’une entre les plus grandes et ambitieuses œuvres littéraire de
l’histoire : la COMÉDIE HUMAINE, cycle de 137 ouvrage de toutes sortes.
Le besoin de recherche et d’absolu que, comme on a dit, Balzac ressent et dont veut découvrir l’origine
s’exprime dans la tension des personnages de la comédie Humaine, un fresque sociale qui réussit à cueillir
toute la société française du XIX siècle.
L’intuition géniale de l’auteur est que pour réaliser un cadre exhaustif de la réalité, un seul texte ne suffit
pas : pour construire un monde fictionnel – qui cependant reflet la réalité- il fait recours à la pluri textualité,
sans s’oublier pourtant de donner de la cohérence à son projet. Le besoin de créer ce monde ou chaque texte
est important est indissociable de la conception que Balzac a des personnages, éléments au cœur de son
réalisme: ses protagoniste se révèlent en effet presque toujours à double-fond. Ils représentent eux-mêmes,
mais au même temps ils renvoient toujours à une spécifique catégorie sociale, représentant d’une partie du
corp sociale dans leur psychologie collective71. L’abondance da sa production est liée au concept de « type »
de ses personnages au point.
Pour expliquer mieux ce concept, dans la préface il fait un intéressant parallélisme entre la nature et la
société, qui selon lui seraient presque pareilles: en effet, comme dans la nature existent différents animaux,
ainsi dans la société il existent des catégorie différents de personnes, et chaque catégorie sociale représente
dans l’imaginaire zoologique de Balzac une spécificité; ces sont les années du positivisme, on a besoin de
catégoriser le savoir. Mais on a dit qu’ils sont presque pareilles : en effet, le différence entre les types
d’animaux et les types humains est dans le fait qu’en fin, un loup est toujours en loup (au maximum on peut

70 Les exemples les plus évidents sont :


- le roman « Louis Lambert », qui n’appartient pas à la Comédie Humaine et qu’avec un intrigue minimale se
concentre principalement sur les idées métaphysiques du jeune protagoniste et de son seul ami ;
- le protagoniste de « La recherche de l’absolu », Balthazar, qui consacrera son temps à la chimie dans l’espoir
de rechercher l’Absolu, la substance commune à toutes les créations. Dans la conclusion du roman Balthazar,
âgé et pauvre, sur son lit de mort, il apprend la découverte de l’Absolu par d’autres chercheurs.
- « La peau de Chagrin », un roman parmi les peux où l’auteur joue explicitement avec le fantastique. Le
protagoniste possède une peau qui réalise toutes ses désir, mais chaque fois elle se restreint, jusqu’à disparaitre,
en causant sa mort.
Les trois sont le symbole d’une soif de connaissance extrême qui conduit à la consomption et à la détérioration.
71Si dans « Le rouge et le Noir » le fait que Julien représentait une génération entière est encore ambigu - ayant
pourtant des traits d’exceptionnalité et s’élevant titanique ment sur les autres, même si cela signifie être condamné à
mort - ici non: les personnages de Balzac sont des types quelconques.
différencier le male de la femelle). Au contraire, les groupes humaines sont extrêmement nuancées: un
médecin de ville, par exemple, n’est pas un médecin de province; mais même un médecin humble de ville est
différent d’un médecin humble en campagne….plus on ajoute des sous-catégorie plus les possibilités des
représentations dans le roman augmentent, et tous doivent être exploré pour reconstruire un cadre générale
de la société française. Donc les personnages sont au même temps individuels mais aussi représentatif d’une
catégorie, qui est tellement spécifique en réalité qu’on nécessite pourtant d’une œuvre que puisse contenir
tous ces catégories.
Mais ce n’est pas tout: la récurrence des personnage d’un texte à l’autre n’est seulement utile a garantir
cohérence et unité à cette œuvre avec plus de 60 textes; elle permet aussi de cueillir le développement de ces
personnage et leur passage d’une catégorie à l’autre dans le temps72. Balzac ne se limite à créer des beaucoup
de personnages, il s’occupe aussi de décrire leur évolution, en devenant le premier auteur à avoir un univers
narratif qui déborde les limite du single texte.
À favoriser ce projet titanique de Balzac, on trouve aussi un contexte historique et sociale qui favorise sa
façon de produire des romans. En effet, ces mêmes années, on est dans un moment très beau pour la
bourgeoisie française (on est sous le règne de Louis Philippe d’Orleans, le roi bourgeois), assez libre dans la
production littéraire et de presse, même s’il s’agit encore d’une forme de communication assez chère et
destinés à une élite assez restreinte. Mais l’entrepreneur de presse Moise Polydore Millaud à un idée géniale,
qui lui vaudra la réputation de ‘‘père du journalisme’’: grâce aux avancements technologiques (on peut
imprimer sur un type de carte plus économique) il a l’intuition de diminuer les prix des abonnements aux
journaux73 et d’ouvrir pourtant le monde de la presse à la petite et moyenne bourgeoisie. On commence aussi
à concevoir la presse comme publiable au quotidien et la publicité sur les journaux commence à devenir une
forme d’enrichissement considérable.
En plus, afin d’attraire les lecteurs, on commence à publier des romans feuilletons: c’est le début de la
sérialité. Il s’agit des œuvres qui n’ont pas une grande valeur littéraire, à la fois écrits d’un jour à l’autre,
mais que cependant comptent un nombre de lecteurs croissant: le publique fidélisé est de plus en plus
nombreux. Mais comme a effectivement affecté Balzac tout cela ?
Les œuvres faisant partie de la Comédie Humaine, fondé sur la récurrence des personnages et la reprise de
leurs histoire, se prêtait parfaitement à la dimension serial: dans les derniers 10 années de sa carrière, Balzac
publiera différents textes sous forme de roman d’appendice. Mais cela impliquera bien des sacrifices.
Les journaux, à l’époque, étaient structurées sur 4 grandes pages:
- La 1ère et la 2ème page avait articles d’opinion, analyse politique, commerciale et d’approfondissement.
Au fond, on réservait l’espace pour le feuilleton.
- La 3ème page traitait les faits divers
- La 4ème page était entièrement dédiée à la publicité.
Si il faudrait qu’on insert le texte en un ou maximum deux fonds de pages, il faut nécessairement que les
séquences produites captivent le lecteur en très peu d’espace. Pour ce motif, on tendait à conclure toujours
l’extrait avec un coup de scène, quelque événement sensationnaliste et excessif 74qui pouvait créer de la
suspense: « la suite au prochain numéro ». Cela n’a pas seulement le côté négatif d’être un type d’écriture
qu’obligeait Balzac (comme tous les autres écrivains) à produire à un rythme excessif, mais surtout signifiait

72Le protagoniste du roman « Le père Goriot », par exemple, on le rencontre comme étudiant, puis comme exponente
de la grande aristocratie française et enfin comme ancien ministre de l’interne: en utilisant un seul personnage on peut
avoir un cadre approfondi de différents typologie sociales. Ce qui est intéressant, c’est qu’il publiera cette œuvre en
1834, et sera juste à partir de ce roman qu’il comprendra vouloir entreprendre le projet de la Comédie.
73De 80 francs on arrive à payer l’abonnement 40 francs, qui n’est pas encore trop économique en réalité, vu qu’un
ouvrier, en moyenne, était payé 10 francs par jour.
74On s’interroge sur les risques sociale même en politique: l’imaginaire sensationnaliste on craignait pouvait réveiller
des instincts endormis du peuple Parisiens, qu’avait des tendances inhérents à la révolte.
en quelque manière déformer les canons du réalisme, sacrifier la vraisemblance pour construire des œuvres
intéressants pour le lecteur.75
Le publique, de sa coté, perd de plus en plus son habitude à une lecture haute et subtile, en lui préfèrent celle
populaire. On entend la littérature beaucoup plus en sens industriel : il existe même de collaborateurs qui
écrivent pour un auteur, et même Balzac ferai ce travail de vrai et propre ghost-writer appelé à l’époque le
« nègre littéraire ».
Le réalisme conscient de Balzac doit s’adapter aux lois du marché.

GUSTAVE FLAUBERT
Dans ce contexte de démocratisation de la littérature et révision au rabais des canons du réalisme en faveur
du sensationnalisme qui doit séduire l’attention du publique, s’insère Flaubert.
Gustave naît en 1821 à Rouen d’un père chirurgien, et il a aussi un frère aîné et une sœur bien aimée. Il
commence, sur les traces du père et du frère, les études de médecine à Paris, mais après quelques années il
sera exclu du collège, en décevant les attentifs de sa famille. Le père de Gustave Flaubert meurt peu après,
mais laisse un profond sentiment d’admiration et affection à l’auteur, avec un héritage permettant à la famille
de vivre de ses rentes. Flaubert a pu se consacrer entièrement à la littérature sans jamais exercer un métier de
subsistance. Quand sa sœur meurt ne survivant pas à la naissance d’une petite fille, Flaubert et sa mère se
chargeront de son éducation. Quand même sa mère, s’éteint la maison où ils vivaient revient alors à sa nièce
Caroline, mais il continue à y vivre. Sa mère fut sa compagne de Croisset, attentive et protectrice. Il lui
dédicace ainsi son premier roman, Madame Bovary : « À ma bonne mère. Son vieux compagnon. Gve
Flaubert. »
Il n’existe point un texte qui peint de façon cohérente le réalisme de Flaubert: on a son épistolaire, très dense,
mais ce qu’il dit dans ses lettres ne sont pas de prises de position stables, mais plutôt des moments privées
d’éruption et d’élans momentanés. Néanmoins, ces écrits peuvent aider à comprendre mieux son œuvre.
Avant tout on ne peut pas parler vraiment de Réalisme avec Flaubert, qui se dédie plutôt à une production
polyédrique : seulement deux de ses textes peuvent être considéré réalistes, « Madame Bovary » et
« L’éducation sentimentale76 ». Les autres œuvres appartient à des genres différents: « Salammbô » est un
roman historique, « Bouvard et Pécuchet » se constitue comme une critique caricaturale de la société sous le
seconde empire, tandis que « La tentation de saint Antoine » est un texte mystique.
Mais en générale, on peut dire que le réalisme de cet auteur se constitue de tendance plutôt polémique, en se
dessinant comme antithèse à l’esthétique romanesque (dans le sens de littérature populaire à cause des
romans feuilletons et d’appendice). En effet, ce terme à l’époque est synonyme d’invraisemblance,
événements rocambolesques et aventures que cherchent par excès de séduire l’attention du lecteur, comme
dans Balzac. Le rapport de Flaubert avec la littérature industrielle se démontre en effet très frustrée: pas
seulement parce que le roman populaire tend, selon lui, à éloigner le publique de la réalité des choses, mais
surtout pour une question stylistique. Le roman populaire est une forme qui risque de pervertir le publique en
trahissant le style qui lui est propre: il s’agit d’une écriture de service, finalisé à poursuivre dans le raconte,
mais qui n’a pas une identité. La forme, dans le roman populaire, est réduite à communication des
événements, avec presque aucune adhérence entre ce qui est représenté et le style d’un texte, ce qui devrait
être propre de la littérature! Au contraire, elle renonce au style. L’écriture fictionnelle du roman prend
conscience de son essence avec Flaubert: il ne faut pas repousser le réel, mais il faut qu’il soit sauvé par le
spécifique de la littérature: le style. Tout peut être conté, si on trouve le style pour le faire. Il faut exposer le
« fait bref », la réalité, mais par une rendement stylistique qui permet d’infondre vie à l’écriture.

75Le 1842 est l’année de la préface à la comédie humaine, texte qui prend en main la question du réalisme qui l’expose
de façon systématique, mais est aussi l’année du plus grand best-sellers en feuilleton de la littérature de l’époque: « Les
mystères de Paris ». Cela comptera 10 livres écrits par Eugène Sue, qui écrit avec le prétexte engagée de représenter les
conditions des classes les plus pauvres de la société. Mais en étant cette œuvre aussi destinée au feuilletons, le monde
narratif du texte est extrêmement emprunté à la suspense, avec une esthétique mélodramatique très distant du roman
réaliste.
76Œuvre plus mature de la précèdent, est en réalité de très difficile lecture, car le protagoniste Frederic passa à travers
les événements de sa vie dans la passivité plus totale, sans jamais en cueillir l’essence. Ce type de réalisme oltrantiste
manque de n’importe quel système narratif, et nait exactement pour frustrer le lecteur avec la banalité de l’existence.
Tout dois être conté par une sorte de devoir envers la forme du genre, comme disait Stendhal (et pas pour
raisons théologiques, comme disait Hugo). Il faut écrire bien de la médiocrité du réel, mais sans l’altérer,
seulement en la rachetant par le style, mais attention : racheter ne veut pas dire élever, car il ne faut pas en
altérer la voix ; le langage ne doit pas être nécessairement recherché, mais adapte, consubstantielle à
l’histoire. C’est la production de quelque chose de beau sans trahir au même temps sa médiocrité, la banalité
d’une journée sans événements, s’approprier du langage de la banalité pour avoir un style respectueux du
réel qui peut l’esthétiser sans le trahir.
L’auteur se propose en définitive d’utiliser la même langue du réel pour le sauver de sa banalité: il semble
une contradiction donc, et justement ici c’est la difficulté de son opération diabolique.
Sauver la tristesse de la vie par le style, mais sans sacrifier les mots du quotidien, ce qu’il essaye de faire en
concevant sa prose comme un genre encore tout à explorer, comme si elle était nouvelle. Seulement alors il
se sent libre d’expérimenter. Chaque élément de la prose de Flaubert communique quelque chose : le rythme
est donné à la perfection par l’utilisation de la ponctuation, ce qui reflet l’état émotif des personnages.

25/05/2022
MADAME BOVARY
Madame Bovary ne peut être interprété sinon comme réponse polémique au genre « bas » de littérature
représenté par le réalisme de l’époque et, plus en générale, une critique à l’imaginaire romantique de
l’époque, qui donne des modèles que dans la réalité sont pas accessibles. C’est claire qu’il y a, de la partie de
Flaubert, un refus pour tout ce qui est romanesque comme on l’entend à l’époque, mais cela ne signifie qu’il
attribue l’échec de la courante au genre romanesque, au contraire: la littérature romantique se devrait
distancier de ce genre, car il ne fait autre que le mortifier. La matière du romanesque est la langue même.
En plus, Flaubert déclare être lui-même comme la femme et pourtant il dédie un œuvre de ce calibre à cette
triste héroïne exactement parce qu’il est conscient du pouvoir de l’imaginaire.
INTRIGUE
Fille d'un riche fermier, Emma Rouault épouse Charles Bovary, officier de santé et veuf récent d'une femme
tyrannique. Élevée dans un couvent, Emma aspire à vivre dans le monde des rêves dont parlaient les romans
d’inspiration romantique qu'elle y avait lu. Un bal au château de Vaubyessard la persuade qu'un tel monde
existe, mais le décalage qu'elle découvre avec sa propre vie déclenche chez elle une maladie nerveuse :
l’écart entre son idéal et la réalité est toujours plus décevant. En remarquant le bouleversement de sa femme,
Charles décide alors de s'installer dans une autre bourgade : là, elle fait la connaissance des personnalités
locales, Homais, "pharmacien", le curé Bournisien…et deux séducteurs de style douteux que ne feront que
lui offrir autres peines pour leur comportement prive de sensibilité romantique, Léon et Rodolphe. La
naissance d'une fille la distrait un peu, mais Emma continue à cède aux tentations de la passion charnelle :
dans un premier moment, elle pense à s'enfuir avec Rodolphe qui, lâche, l'abandonne; désillusionée et après
avoir traversée une crise de mysticisme, elle s’attache morbidement à Léon. Entretemps, Emma remplit le
vide entre ses attentifs et la réalité en achetant compulsivement vêtements et meubles (qu'elle emprunte à un
marchand trop complaisant, Lheureux), en ordre au moins de paraitre partie de cette noblesse à laquelle
inspire, mais elle porte la famille à la banqueroute. Charles ne s’en rende même pas compte, jusqu’au
moment où la situation est irrécupérable : un jour, Lheureux exige d'être remboursé. Emma, par peur du
jugement qui va être prononcé contre elle, demande initialement un prêt à de Léon, puis à Rodolphe. Tous
deux la repoussent, et elle s'empoisonne avec l'arsenic dérobé chez le pharmacien Homais.

Analyse des extraits


1. La figure d’Emma
Emma on a dit être un personnage imprégnée de littérature romantique, mais qui se différencie par les
protagonistes des romans qu’elle lit à cause de l’affrontement avec la réalité.
Cela est bien évident, par exemple, au moment de sa morte : notamment, elle décide de se suicider. Mais si
dans la littérature, les héros romantiques se suicident toujours pour de raisons liées à grands passions
amoureuses (voir Werther et Ortis), Emma se tue principalement pour dettes, de vil argent.
♥ […]ça lui coûterait trois mille francs ! – Je ne les ai pas ! répondit Rodolphe avec ce calme parfait dont
se recouvrent, comme d’un bouclier, les colères résignées. Elle sortit. Les murs tremblaient, le plafond
l’écrasait;
[…]la folie la prenait, elle eut peur, et parvint à se ressaisir, d’une manière confuse, il est vrai ; car elle
ne se rappelait point la cause de son horrible état, c’est-à-dire la question d’argent.
En réalité, on perçoit aussi des causes bien plus profondes dans son suicide, résultat naturel d’une vie passé à
la poursuite d’un idéal de grand amour que tous les hommes ne font qu’écraser.
♥ Elle aurait voulu battre les hommes, leur cracher au visage, les broyer tous;
En conclusion donc, à porter Emma à vouloir mourir sont sans doutes ses attentives, qui ont porté une
conséquente angoisse d’apparaitre dans la société comme quelqu’un qu’elle n’est pas. La satisfaction de
cette sensation toxique (par l’achat de biens qu’elle ne peut pas se permettre) on portée à ressentir une
écrasante anxiété sociale, à la quelle cette fois elle sentait ne pouvoir pas s’attenir, comme sans une voie de
fugue (psychologiquement mais aussi pratiquement, à cause des dettes). Cela lui provoquait une profonde
honte, la plus profonde de son entière existence : et même en ce cas, les hommes l’ont déçues, incapables de
l’aider.
L’épisode de la mort d’Emma met en évidence toute la capacité stylistique voué au réalisme de Flaubert.
Le père de Flaubert était un médecin, et le portait à l’assister, quand l’auteur était petit, même à la mort des
malades : pour ces raisons la description de sa morte est si précise et crue, avec tous les détails. C’est une
sorte de vengeance de la réalité sur la fiction romantique.
En plus, c’est intéressant de remarquer comme la manière de représenter stylistiquement le geste extrême
change par rapport à la mort des grands protagonistes du romantisme: le moment est en générale édulcorée
par les auteurs, on élève le personnage presque en lui quittant des connotations humaines trop basses.
Notamment, les auteurs ne se lançaient pas dans des descriptions détaillées de la morte de leurs
personnages77…Flaubert, au contraire, n’épargne rien au lecteur. C’est le rachat de la vérité.

♥ Sa poitrine aussitôt se mit à haleter rapidement. La langue tout entière lui sortit hors de la bouche ; ses
yeux, en roulant, pâlissaient comme deux globes de lampe qui s’éteignent, à la croire déjà morte, sans
l’effrayante accélération de ses côtes, secouées par un souffle furieux, comme si l’âme eût fait des bonds
pour se détacher. […] À mesure que le râle devenait plus fort, l’ecclésiastique précipitait ses oraisons ;
elles se mêlaient aux sanglots étouffés de Bovary, et quelquefois tout semblait disparaître dans le sourd
murmure des syllabes latines, qui tintaient comme un glas de cloche.
[…]Une convulsion la rabattit sur le matelas. Tous s’approchèrent. Elle n’existait plus.

2. La figure de Charles
Seulement après la morte de la femme Charles, son mari, cesse d’être représenté comme un inepte: en effet,
le regard de Madame Bovary était le point de vue sur ce personnage, donc au moment qu’elle disparaissent
les deux images de Charles qu’elle avait construit s’écroulent. Il n’est ni le prince charmant qu’elle voulait ni
la bête pas à la hauteur de ses idéaux: dans le spectre discursive, la vision du monde d’Emma disparait.
♥ Avant qu’elle se mariât, elle avait cru avoir de l’amour ; mais le bonheur qui aurait dû résulter de cet
amour n’étant pas venu, il fallait qu’elle se fût trompée, songeait-elle. Et Emma cherchait à savoir ce
que l’on entendait au juste dans la vie par les mots de félicité, de passion et d’ivresse, qui lui avaient
paru si beaux dans les livres.
[…]La conversation de Charles était plate comme un trottoir de rue, et les idées de tout le monde y
défilaient dans leur costume ordinaire, sans exciter d’émotion, de rire ou de rêverie. Il n’avait jamais été
curieux […] Il ne savait ni nager, ni faire des armes, ni tirer le pistolet, et il ne put, un jour, lui expliquer
un terme d’équitation qu’elle avait rencontré dans un roman. Un homme, au contraire, ne devait-il pas
tout connaître, exceller en des activités multiples, vous initier aux énergies de la passion, aux
raffinements de la vie, à tous les mystères ? Mais il n’enseignait rien, celui-là, ne savait rien, ne
souhaitait rien. Il la croyait heureuse ; et elle lui en voulait de ce calme si bien assis, de cette pesanteur
sereine, du bonheur même qu’elle lui donnait.

77Par exemple, Foscolo ne représente point la morte de Jacopo Ortis, et dédie seulement une phrase à la description de
son cadavre : […] « Jacopo agonizzante nel proprio sangue ». Goethe, pour son Werther, se prolonge légèrement plus,
mais par rapport à la description de Flaubert, c’est rien : «La mattina alle sei il domestico entrò col lume. Trovò il suo
signore a terra, vide le pistole e il sangue. Quando il medico giunse presso l'infelice, lo trovò in uno stato disperato; il
polso batteva, le membra erano tutte paralizzate. Egli si era colpito alla testa, sull'occhio destro, il cervello era saltato.
Per precauzione gli fu aperta una vena al braccio: il sangue uscì: respirava ancora. Werther era stato adagiato sul letto,
con la fronte bendata; il viso era di un mortale pallore e non faceva alcun movimento. Il rantolo era ancora spaventoso,
ora debole, ora più forte. A mezzogiorno Werther morì».
(Après d’être mariée et avoi découvert sa nouvelle maison)
♥ « Quel pauvre homme ! quel pauvre homme ! » disait-elle tout bas, en se mordant les lèvres
(En occasion de la découverte du déçu de l’opération au pied boit).

3. La figure de l’aveugle
La figure de l’aveugle paraisse plusieurs fois dans le roman. Il peut ressembler à la figure d’Homère, mais il
a quelque chose en lui de sublime et grotesque dans son apparence physique.
♥ Il y avait dans la côte un pauvre diable vagabondant avec son bâton, tout au milieu des diligences. Un
amas de guenilles lui recouvrait les épaules, et un vieux castor défoncé, s’arrondissant en cuvette, lui
cachait la figure ; mais, quand il le retirait, il découvrait, à la place des paupières, deux orbites béantes
tout ensanglantées. La chair s’effiloquait par lambeaux rouges, – et il en coulait des liquides qui se
figeaient en gales vertes jusqu’au nez, dont les narines noires reniflaient convulsivement. Pour vous
parler, il se renversait la tête avec un rire idiot ; – alors ses prunelles bleuâtres, roulant d’un mouvement
continu, allaient se cogner, vers les tempes, sur le bord de la plaie vive.
Il est présent même dans la mort d’Emma, et se présent, comme toujours, en chantant une chanson qu’on
avait toujours entendu morcelé. On découvre comme se termine la seulement dans le moment de la mort de
la femme :
♥ «Tout à coup, on entendit sur le trottoir un bruit de gros sabots, avec le frôlement d’un bâton ; et une
voix s’éleva, une voix rauque, qui chantait :
"Souvent la chaleur d’un beau jour
Fait rêver fillette à l’amour."
Emma se releva comme un cadavre que l’on galvanise, les cheveux dénoués, la prunelle fixe, béante.
"Pour amasser diligemment
Les épis que la faux moissonne,
Ma Nanette va s’inclinant
Vers le sillon qui nous les donne."
– L’aveugle s’écria-t-elle. Et Emma se mit à rire, d’un rire atroce, frénétique, désespéré, croyant voir la
face hideuse du misérable, qui se dressait dans les ténèbres éternelles comme un épouvantement.
"Il souffla bien fort ce jour-là,
Et le jupon court s’envola."
Il semble qu’une femme se plie pour cueillir des fleurs, mais le vent arrive et la dénue. C’est une figure en
petit du roman : une vie d’illusion qui se résout dans une perdrix.

Le bovarysme
C’est intéressant de remarquer que n’est pas seulement Emma à souffrir de bovarysme, mais que toute une
série de personnages secondaires, de forme surement moins acharnée, en sont victimes à la fois.
Charles, par exemple Un jour, il lit sur le journal qu’à Paris, un important médecin était réussi avec succès à
soigner un cas de pied bot. Sollicité par l’idée patriotique de rendre célèbre le nom de son village, et soutenu
par Homais et Emma, Charles se laisse convaincre de tenter lui aussi une opération - qu’il n’a point les
capacités de soutenir, et il le sait ! - du même type sur Hippolyte, un garçon du village. L'opération se
déroule avec succès sous les yeux de la foule attirée par les machines servant à opérer. Emma se met alors à
éprouver de la tendresse pour son mari : cet événement pourrait leurs donner de la visibilité et, par
conséquence, les rendre célèbres et riches. Le moment est raconté avec optimisme, par l’utilisation d’un
point de vue interne à Emma, Charles et Homais. L’opération semble réussite, mais la situation va bientôt
précipiter....
♥ Il avait lu dernièrement l’éloge d’une nouvelle méthode pour la cure des pieds bots ; et comme il était
partisan du progrès, il conçut cette idée patriotique que Yonville, pour se mettre au niveau, devait avoir
des opérations de stréphopodie[…].
En effet, Bovary pouvait réussir ; rien n’affirmait à Emma qu’il ne fût pas habile, et quelle satisfaction
pour elle que de l’avoir engagé à une démarche d’où sa réputation et sa fortune se trouveraient
accrues? Elle ne demandait qu’à s’appuyer sur quelque chose de plus solide que l’amour.
Charles, sollicité par l’apothicaire et par elle, se laissa convaincre. […].
Cependant, pour savoir quel tendon couper à Hippolyte, il fallait connaître(1) d’abord quelle espèce de
pied bot il avait.(2)[…]
Ils étaient au lit lorsque M. Homais, malgré la cuisinière, entra tout à coup dans la chambre, en tenant à
la main une feuille de papier fraîche écrite. C’était la réclame qu’il destinait au Fanal de Rouen. Il la
leur apportait à lire. – Lisez vous-même, dit Bovary. Il lut : « Malgré les préjugés qui recouvrent encore
une partie de la face de l’Europe comme un réseau, la lumière cependant commence à pénétrer dans nos
campagnes. C’est ainsi que, mardi, notre petite cité d’Yonville s’est vue le théâtre d’une expérience
chirurgicale qui est en même temps un acte de haute philanthropie. M. Bovary, un de nos praticiens les
plus distingués... » – Ah ! c’est trop ! c’est trop ! disait Charles, que l’émotion suffoquait.[…]
[…]cinq jours après[…] Avec beaucoup de précautions, pour ne pas déranger la position du membre
[…] l’on vit un spectacle affreux. Les formes du pied disparaissaient dans une telle bouffissure, que la
peau tout entière semblait près de se rompre, et elle était couverte d’ecchymoses occasionnées par la
fameuse machine(3).
[…]la chirurgie ne paraissait le secourir, et l’invincible pourriture allait montant toujours des extrémités
vers le ventre.[…]
[…]enfin Charles répondit par un signe de tête affirmatif quand la mère Lefrançois lui demanda si elle
ne pourrait point, en désespoir de cause, faire venir M. Canivet, de Neufchâtel, qui était une célébrité.
Ce fut dans le village un événement considérable que cette amputation de cuisse par le docteur Canivet !
(1) Charles, de toutes façon, n’est pas stupide : il se prépare, étudie des manuels avant d’entreprendre
l’opération. Il essaye d’être compétent avec toutes ses possibilités.
(2) Flaubert cueille chaque occasion possible pour montrer ses connaissances dans le champ de la
médecine, en se lançant en descriptions détaillées qui bien s’emboîtent dans son style réaliste.
(3) Pour soigner le pied après l’opération, on l’avait comme encagé dans une machine qui
Mais aussi le personnage d’Homais a quelque chose de bovaryste. Il se caractérise par sa vanité sociale et ses
prétentions scientifiques. Comme le terme d'« apothicaire », encore en vigueur à son époque, ne lui semble
pas assez prestigieux, Homais préfère celui de « pharmacien », plus moderne mais surtout plus scientifique et
plus bourgeois. Son officine devient dans sa bouche un « laboratoire » où il déclare exercer le métier de
« chimiste ».Il écrit des articles pour se faire remarquer et obtenir une reconnaissance publique.
♥ […]il n’y eut plus dans l’arrondissement un chien écrasé, une grange incendiée, une femme battue, dont
aussitôt il ne fît part au public, toujours guidé par l’amour du progrès et la haine des prêtres.[…]C’était
son mot. Homais sapait ; il devenait dangereux.
Cependant il étouffait dans les limites étroites du journalisme, et bientôt il lui fallut le livre, l’ouvrage !
Alors il composa une « Statistique générale du canton d’Yonville, suivie d’observations
climatologiques », et la statistique le poussa vers la philosophie. Il se préoccupa des grandes questions :
problème social, moralisation des classes pauvres, pisciculture, caoutchouc, chemins de fer, etc.
Il en vint à rougir d’être un bourgeois. Il affectait le genre artiste, il fumait ! Il s’acheta deux statuettes
chic Pompadour pour décorer son salon.(1)
(1) Voici tout le bovarysme du personnage : il commence à se croire quelqu’un qu’il ne pas, à se
comporter comme ce qu’il tend à devenir. Il se fait passer pour un savant, auteur d'ouvrages remarqués
par les spécialistes, alors qu'il n'a guère publié qu'un fascicule sur la fabrication du cidre, qu'il appelle
« pomologie ».
Ce qui est ironique est qu’à la toute dernière fin du roman, on apprend qu’il a obtenu “la croix d’honneur”,
fait bien ironique du moment qu’on se trouve sous le II empire, pendant la période la plus despotique de la
politique française.

EXEMPLES DE STYLE
On peut bien dire que Flaubert invente le DISCOURS INDIRECT LIBRE : ce qui se passe est que le narrateur
assume le langage des personnages en ce qui concerne le rythme et la ponctuation sans aucun marqueur, en
adéquat tout au temps passé. Essentiellement il s’approprie du langage du quotidien donc, en provocant dans
le lecteur un sens d’indistinct, vu qu’on ne comprend pas où finit de parler le narrateur et commence le point
de vue du personnage. Il s’adapte.
Il s’agit essentiellement d’une intériorisation, dans le discours narratif principal, d’une discursivité qui ne lui
appartient pas : on parle des vrais et propres "ilots-linguistiques", parce que les phrases de ce type
ressemblent à des îles de sens, qui provoquent un sens d’extranéité dans le discours.
Dans cet extrait, par exemple, on peut voir comme sans aucune contextualisation, le narrateur parle avec les
mots de la belle-mère d’Emma, qui ne la support pas bien car est jalouse des attentions du fils:
♥ […]madame Bovary mère semblait prévenue contre sa bru. Elle lui trouvait un genre trop relevé pour
leur position de fortune ; le bois, le sucre et la chandelle filaient comme dans une grande maison, et la
quantité de braise qui se brûlait à la cuisine aurait suffi pour vingt-cinq plats !
Un élément de style qui caractérise la narration de Flaubert sont les JUXTAPOSITION DES SCENES : souvent, la
voix du narrateur qui décrit une scène par le point de vue d’Emma est interrompue (littéralement) par des
renvois à la réalité des choses. C’est la technique de la discursivité conflictuelle, le langage reflet la réalité.
On en a un exemple dans le premier rencontre de la protagoniste avec Rodolphe : les deux se trouvent dans
une foire aux bestiaux, ce qui n’est pas exactement le lieu de rencontre plus romantique du monde.
Ici, l’homme est présenté par le langage d’Emma, comme un prince, même si ses vêtements le rendent très
kitsch, de mauvais gout. En plus, le dialogue entre les deux est alterné aux discours du commissaire-priseur
qui fait des annonces :
♥ « […] l’industrie, le commerce, l’agriculture et les beaux-arts." – Je devrais, dit Rodolphe, me reculer
un peu. – Pourquoi ? dit Emma. Mais, à ce moment, la voix du conseiller s’éleva d’un ton
extraordinaire. Il déclamait : 291 "Le temps n’est plus, messieurs, où la discorde civile[…]".
– C’est qu’on pourrait, reprit Rodolphe,[…]
– Savais-je que je vous accompagnerais ? "Soixante-dix francs ! " – Cent fois même j’ai voulu partir, et
je vous ai suivie, je suis resté. "Fumiers." – Comme je resterais ce soir, demain, les autres jours, toute ma
vie ! "À M. Caron, d’Argueil, une médaille d’or !" – Car jamais je n’ai trouvé dans la société de
personne un charme aussi complet. "À M. Bain, de Givry-Saint-Martin !".
Il utilise beaucoup et très bien les ELLIPSES, ce qui montre ce qui a importance pour le personnage d’Emma.
Par exemple, en référence à la première femme de Charles, les symptômes et la morte sont décrites
littéralement en 2 lignes.
♥ « […]elle étendait du linge dans sa cour, elle fut prise d’un crachement de sang, et le lendemain, tandis
que Charles avait le dos tourné pour fermer le rideau de la fenêtre, elle dit : « Ah ! mon Dieu ! » poussa
un soupir et s’évanouit. Elle était morte ! Quel étonnement ! (1) »
(1) Ici on peut penser que c’est Charles qui fait cette dernière, que ne la voit même pas mourir car il était
tourné pour fermer les rideaux. Les deux en réalité vivent dans la complète indifférence réciproque,
rapport humain très pauvre.
Mêmes les SIMILITUDES sont beaucoup utilisées et très communicatives, fondamental expédient stylistique
pour mettre constamment en relation la réalité à l’Ideal, notamment dans l’épisode du bal à la Vaubyessard.
♥ Son voyage à la Vaubyessard avait fait un trou dans sa vie, à la manière de ces grandes crevasses qu’un
orage, en une seule nuit, creuse quelquefois dans les montagnes. […]Son cœur était comme eux : au
frottement de la richesse, il s’était placé dessus quelque chose qui ne s’effacerait pas.
En outre, Proust avait remarqué à propos du style de Flauber qu’il utilisait l’IMPARFAIT de forme exactement
adhérente à sa fonction grammatical, pour représenter une action qui se répète. Cela voulait pourtant rendre
la répétitivité ressentie par Mme Bovary, son ennuie et sa mélancolie.
♥ Souvent, lorsque Charles était sorti, elle allait prendre dans l’armoire[…] ; Elle le regardait, l’ouvrait,
et même elle flairait l’odeur de sa doublure, mêlée de verveine et de tabac.
(en référence à un porte-cigares qu’elle a volé du Château de la Vaubyessard)

Les détails
Chaque élément nommé dans le texte apparaisse pour un motif. Chaque mot est mesurée pour communiquer
quelque chose.
Par exemple, quand est présenté le personnage de Charles, il est jeune et doit commencer l’école. On décrit
ses vêtements le premier jour :
♥ […]son habit-veste de drap vert à boutons noirs devait le gêner aux entournures et laissait voir, par la
fente des parements, des poignets rouges habitués à être nus.
Le fait qu’on voit les poignets signifie que la veste est courte, donc pas adapte à lui, ce qu’indique ses
origines humbles; en plus, le fait que ses poignets soient rouges signifie que le soleil les frappe, et
pourtant qu’il est habitué aux travaux manuels.
Un autre exemple intéressant et mystérieux est celui du baromètre : il se trouve dans la pharmacie d’Homais,
et c’est un élément qu’est décrit seulement pour valider « l’effet du réel », c’est-à-dire exactement pour
renforcer dans le lecteur une sensation familière. Dans la réalité, on retrouve souvent des éléments qu’on
remarque dans des lieux sans que ceux-là aillent effectivement importance pour ce qu’on doit faire.
On est au maximum dégrée de conscience du romanesque.

Le naturalisme
ÉMILE ZOLA
LE CYCLE DES ROUGONS-MACARDS

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