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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

A l’aube de la 6ème extinction

Livre écrit par Bruno DAVID


VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

Table des matières


1. L’auteur ........................................................................................................................... 1

2. Avant-Propos ................................................................................................................... 2

3. Partie I : La biodiversité, qu’est-ce que c’est ? ............................................................... 4

3.1. Une définition récente pour un concept ancien ........................................................ 4

3.2. Biodiversité au pluriel .............................................................................................. 4

3.3. Biodiversité et climat, un match déséquilibré .......................................................... 5

3.4. La biodiversité en mouvement ................................................................................. 6

3.5. Un objet à rendre dans sa complexité ...................................................................... 8

4. Partie II : Quel usage faisons-nous de la planète et de sa biodiversité ? ......................... 9

4.1. Vie quotidienne ........................................................................................................ 9

4.2. L’énergie : une question de centrales ....................................................................... 9

4.3. Des transports tous azimuts ................................................................................... 10

4.4. Conséquences inattendues des transports .............................................................. 13

4.5. De la place pour se loger ........................................................................................ 14

4.6. Indispensable à la vie, l’eau ................................................................................... 15

4.7. Un bien essentiel, la santé ...................................................................................... 16

4.8. La pandémie de 2020 ............................................................................................. 17

4.9. Cultiver pour se nourrir .......................................................................................... 18

4.10. Manger pour vivre .............................................................................................. 19

4.11. Symboles et culture ............................................................................................ 20

4.12. Les deux curseurs ............................................................................................... 20

5. Partie III : Qu’est-ce qu’une crise de la biodiversité ? .................................................. 22

5.1. Définition d’une crise en 3 exemples ..................................................................... 22

5.2. Les 5 crises majeures ............................................................................................. 22

5.3. Le Crime de l’Orient-Express ................................................................................ 25

5.4. Quelles ont été les réactions de la biosphère aux crises du passé ? ....................... 25
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5.5. Crise et réchauffement, le cas particulier du PETM .............................................. 26

5.6. Le climat dans tout ça ............................................................................................ 27

6. Partie IV : Sixième extinction : mythe ou réalité ? ....................................................... 28

6.1. Les ingrédients d’une crise majeure sont-ils réunis ? ............................................ 28

6.2. La tour Eiffel .......................................................................................................... 29

6.3. Où en sommes-nous ? ............................................................................................ 29

6.4. L’été sera chaud ..................................................................................................... 30

6.5. Le mur se rapproche ............................................................................................... 31

Partie V : Comment rectifier le tir ? ..................................................................................... 32

6.1. Notre responsabilité d’Homo sapiens .................................................................... 32

6.2. La politique des petits pas ...................................................................................... 32

6.3. Dimension internationale ....................................................................................... 32

6.4. Aspects économiques ............................................................................................. 33

6.5. L’acceptabilité ........................................................................................................ 34

7. Partie VI : Face à nous-mêmes ...................................................................................... 34

7.1. L’Homme, responsable et victime ......................................................................... 34

7.2. Sortir du dualisme .................................................................................................. 35

7.3. Deux postures ......................................................................................................... 35

7.4. Arrogance ............................................................................................................... 35

7.5. Se prendre pour les demiurges ............................................................................... 36

7.6. Sommes-nous entrés dans l’Anthropocène ? ......................................................... 36

7.7. La tragédie des horizons ........................................................................................ 37


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1. L’auteur

Bruno David a été chercheur au CNRS1 et directeur de l’unité Bio géosciences à l’université de
Bourgogne. Paléontologue et biologiste, il a été conduit par ses recherches à explorer
l’évolution de la biodiversité à partir de modèles actuels comme fossiles.

Bruno David est un scientifique, naturaliste,


spécialisé en paléontologie et en sciences de
l’évolution et de la biodiversité. A la fin des années
70, on lui propose un poste dans un compagnie
pétrolière pour faire une thèse de néotectonique
dans les Caraïbes. C’est la guerre froide et l’armée
refuse son sursis. Il opte donc pour une thèse à
l’université de Franche-Comté (à l’est de la France,
à la frontière suisse). Il choisit la paléontologie et
étudie les oursins fossiles du Crétacé inférieur. Il
suit un long parcours au CNRS (étudiant aussi les
abysses2 et la biologie marine) et préside aujourd’hui le Muséum national d’histoire naturelle.

Bruno David tient chaque semaine une chronique hebdomadaire sur France Culture : « Le
Monde vivant » et « Le pourquoi du comment : science ».

L’auteur nous parle de la 6ème crise de la biodiversité. Sa double formation de paléontologue et


de biologiste lui sert de boussole pour mettre en relation ce qu’il se passe aujourd’hui avec ce
qu’il s’est passé autrefois, et faire des comparaisons avec les crises du passé géologique de la
Terre.

L’auteur adopte une démarche scientifique et rigoureuse. Mais il met aussi en avant la curiosité
et l’émotion pour tenter de comprendre la science et la logique du vivant.

1
Centre National de la Recherche Scientifique
2
Région sous-marine très profonde, et plus particulièrement celle où ne parvient plus la lumière solaire.

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2. Avant-Propos

Le 17ème et 18ème siècle ont cru pouvoir comprendre les avancées scientifiques de manière
exhaustive. Le 19ème siècle a d’ailleurs été marqué par le positivisme, courant philosophique
fondé au XIXᵉ siècle par Auguste Comte, à la fois héritier et critique des Lumières du XVIIIᵉ
siècle et qui soumet de manière rigoureuse les connaissances acquises à l'épreuve des faits.

Au XVème siècle, en Italie, vivait un Florentin, du nom de Pic de la Mirandole qui a publié 900
thèses, doué d’un esprit plein de curiosité et regorgeant de savoir en tout sens, le droit, les lettres
antiques, la philosophie. Il avait tant de connaissances encyclopédiques que son nom est
demeuré pour désigner quelqu’un qui sait tout sur tout. Cette illusion bien prétentieuse a perduré
mais nul ne pense plus aujourd’hui que cela soit possible d’embrasser autant de connaissances
dans des domaines si différents, allant de la physique à la génétique, à la géologie…

Désormais, chaque scientifique reste dans sa bulle et devient hyperspécialisé de sa matière pour
comprendre et faire comprendre, transmettre, simplifier sans trahir. Aucune solution
n’émergera d’une seule discipline pour résoudre la question de la crise de la biodiversité.

Mais comment comprendre si l’on n’est pas du métier ? Le risque est grand en s’ouvrant à des
non-spécialistes d’arriver à des distorsions, des interprétations reformulées et récupérées qui
n’ont plus de scientifique que le nom. La diffusion des connaissances par internet et les réseaux
sociaux est une boite de Pandore. Au moment où la connaissance devient techniquement la plus
partageable, elle s’englue dans un fatras d’opinions qui brouillent toute la clarté qu’elle tendait
à apporter. On confond désormais commentaires et connaissances alors que ces dernières
seulement répondent à un cahier de charges rigoureux comme la démarche rationnelle, la
réfutabilité et bien entendu la connaissance de savoirs antérieurs.

D’aucuns critiquent la science d’être instable, de changer d’avis (héliocentrisme ou révolution


copernicienne). C’est là ignorer qu’elle est une force qui pousse au progrès de la connaissance.

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Notre reflet dans le miroir

Le processus de vieillissement concerne chacun de nous même si nous ne nous y attardons


guère au quotidien. C’est quand la différence est de taille, quand les années ont passé, quand le
temps a consumé avec un point de non-retour notre jeunesse que nous percevons l’ampleur des
changements en regardant deux photos.

De la même façon, nous ignorons les changements qui se passent dans la biodiversité avant
d’en saisir de manière radicale les effets. Dans les campagnes, il y a moins d’insectes et
j’entends moins d’oiseaux chanter. Nous nous habituons à voir moins d’abeilles, moins de
fourmis et à voir nos paysages changer. La biodiversité se métamorphose et nous croyons à la
lenteur du processus parce qu’il y a dans l’inconscient collectif une idée fausse : une crise est
violente, immédiate, irréversible. Or une crise ne fonctionne pas comme ça. Une crise n’est pas
affaire d’extinction, une crise, c’est le déclin d’effectifs, la diminution d’abondance.

Le déclin, c’est moins d’œufs pondus, moins d’œufs couvés, moins d’oisillons, moins d’oiseaux
d’une génération à l’autre.

Ce n’est que depuis une trentaine d’années que des protocoles rigoureux de suivi de la
biodiversité ont été instaurés. En revanche, les analyses du climat disposent de plus de recul
puisque les recueils de températures pour les prévisions climatiques ont commencé dès la
seconde partie du XIXème siècle.

Le suivi quantitatif et qualitatif, y compris des espèces ordinaires, est donc très récent. Pourtant,
il a déjà montré que 420 millions d’oiseaux avaient disparu en Europe.

Nous avons affaire à une crise silencieuse qui avance à une vitesse phénoménale.

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3. Partie I : La biodiversité, qu’est-ce que c’est ?

3.1. Une définition récente pour un concept ancien

Il y a 30.000 ans, l’art rupestre (dans les grottes) offre les premières représentations figuratives
du vivant. Observer, décrire le vivant traverse toutes les civilisations à partir du Néolithique
(Platon, Aristote, Pline l’Ancien, Ernst Mayr, Buffon, Georges Cuvier, Charles Darwin,
Alexander von Humboldt).

La réalité du concept est très ancienne mais le terme est récent. Le concept a été forgé par
Walter Rozen

- 1986 : colloque à Washington


- 1988 : publication des actes du colloques
- Repris par : Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN)
- 1992 : sommet de la Terre à Rio

Longtemps, on a utilisé l’image du tissu vivant de la planète pour parler de la biodiversité.


Comme un tissu est fait de fils noués les uns aux autres, l’image était intéressante puisqu’elle
montrait que les espèces, les populations, les individus…étaient liés. Toutefois l’analogie de
l’intrication doit être dépassée.

3.2. Biodiversité au pluriel

La biodiversité est observée à 3 niveaux :

- Biodiversité génétique3
o Diversité des gènes de tous les organismes vivants
- Biodiversité spécifique
o Deux millions d’espèces décrites
- Biodiversité écosystémique4

3
La complexité d’un organisme n’est pas liée à la taille de son génome, c-à-d son appareil génétique.
4
Quelle est la complexité du réseau d’interactions qu’entretiennent les différentes composantes (espèces, variétés,
communautés, écosystèmes, biomes càd les grandes entités écologiques : déserts, forêts, récifs)

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o Relations et flux de matière et d’énergie entre les populations de différentes


espèces, entre elles et avec leur environnement physico-chimique.

Quelques difficultés apparaissent.

 Que prendre en compte ?


o Un nombre d’espèces
o Une abondance5 dans l’espèce : combien de spécimens pour une même espèce.
 Quelle taille considérer ?
o Un Mammouth (macro)
o Une bactérie (micro)

Le terme biodiversité recouvre des concepts liés à l’écologie, la biogéographie, la génétique…


autant de sciences différentes. Derrière le terme biodiversité, il y a énormément d’approches et
de définitions qui rendent difficile l’art de la synthèse. De quoi parlons-nous quand nous
évoquons la biodiversité ? De protéines, de gènes, d’espèces, d’individus, d’écosystèmes ???
Parlons donc de diversité au pluriel.

3.3. Biodiversité et climat, un match déséquilibré


Il est intéressant d’établir une comparaison entre la biodiversité et le climat.

➢ GIEC : Groupe d’Experts Intergouvernemental sur Evolution du Climat


o Créé en 1988
o Température de l’air et des océans, niveau des mers, 3 composantes de la
cryosphère (glace des calottes polaires, banquises océaniques, glaciers de
montagne)
o Modélisation du climat mondial : équations (lois de physique et chimie),
prédictions, trajectoires. Causes structurellement globales facilement
explicables (effet de serre)
o Grande couverture médiatique (beaucoup d’articles publiés depuis 2000 et
beaucoup d’évènements organisés)
o Rapports portant sur des questions planétaires ou très vastes.

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Les abondances doivent être examinées conjointement avec la taille moyenne des individus. Démographie et
biomasse sont liées : combien d’individus et combien pèsent-ils ?

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➢ IPBES : Plateforme Intergouvernementale scientifique et politique sur la Biodiversité


et les Services Ecosystémiques
o Fondé en 2012
o Recensement de millions d’espèces, observation de centaines d’écosystèmes,
interactions des éléments, …
o Règles et exceptions au lieu de lois scientifiques irréductibles à des équations.
Généralisations impossibles et donc trajectoires impossibles.
o Rien n’a de sens en dehors de l’histoire : la biodiversité à un temps T est le fruit
de contraintes et l’expression de conséquences du parcours de l’évolution
biologique.
o Effets locaux. Agrégation des données pour obtenir une question globale.
o Rapports portant sur des questions très spécifiques (pollinisateurs)
o Urgence à organiser des évènements sur la biodiversité (Colombie (Medellin)
en 2018, France (Paris) en 2019, UICN (Union Internationale pour la
Conservation de la Nature) liste rouge des espèces menacées, CDB (Convention
pour la Diversité Biologique)…

3.4. La biodiversité en mouvement

Le mouvement caractérise la vie sur Terre. Il n’y a pas de vie sans mobilité. Tous les organismes
bougent :

- Ils se déplacent6 : vache, souris, hirondelle


- Ils sont transportés
o Par un fluide porteur : pollen (vent), larves (eau), graines (vent)
o Par d’autres organismes : noisettes (écureuil)

Certains éléments perturbent le rythme normal du mouvement et créent des pressions :

- Changement dans la géographie de la Terre


- Modifications du climat
- Modifications dans la distribution des ressources

6
Les migrations sont des déplacements réguliers en groupe, en mode aller-retour

6
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➢ 2 stratégies : s’acclimater (ne pas bouger) ou suivre le mouvement.


o S’acclimater :
▪ Adaptation d’un mode de vie et d’une physiologie aux conditions
environnementales. Exemple : séjour en altitude. Air raréfié. Production
plus importante de globules rouges afin de maintenir l’efficacité du
transport de l’oxygène aux tissus. Ce processus est rapide et réversible.
o Suivre le mouvement :
▪ Accompagnement des ceintures climatiques et des niches écologiques.
Exemple 1 : les grands crabes sont allés se loger en eaux froides bordant
le continent antarctique. Exemple 2 : faire migrer la production de
champagne au sud de Cambridge. Exemple 3 : le moucheron porteur
d’un virus pose la question de la mise en péril des habitants des contrées
où elles atterrissent.

Parfois, ces stratégies ne sont pas porteuses. Voyons 2 exemples qui illustrent les limites de
pareille réponse aux changements :

a) Les manchots royaux de l’île de Crozet7 cherchent loin, dans les eaux très froides, les
poissons indispensables pour nourrir leurs poussins. Les années les plus chaudes, ils
doivent aller de plus en plus loin et ce temps d’allongement des distances est
incompatible avec le temps de nourrissage des jeunes qui meurent de faim.
b) Les mésanges bleues aliment leurs petits avec des chenilles. La période de reproduction
et celle d’éclosion des œufs des mésanges bleues sont donc calées sur le pic d’abondance
des chenilles. Or, le réchauffement climatique amène un avancement de la présence des
chenilles mais pas du rythme de la vie des mésanges. Cela crée un déphasage qui induit
une baisse des succès à l’envol des petits et donc un déclin de leurs populations.

Lors du réchauffement climatique PETM, il y a 55 millions d’années, les migrations fauniques


d’un petit primate (originaire des forêts de Sibérie) ont emprunté le détroit de Bering où l’on
pouvait alors passer à pieds secs de l’Asie à l’Amérique du Nord.

7
Dans le sud de l’océan Indien

7
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Le Teilhardina a donc migré pendant 25.000


ans passant ainsi de la
Sibérie à l’Amérique du
Nord puis à l’Europe et
étant ainsi à l’origine
d’autres espèces de petits
lémuriens.

3.5. Un objet à rendre dans sa complexité

Il n’y a pas d’approche exhaustive possible car il y a trop peu de règles générales : chaque
communauté, chaque espèce, chaque système vivant a son fonctionnement propre et singulier.
La seule possibilité est d’agréger des études de cas pour aller vers des synthèses et rendre une
image globale. Un peu à la lumière d’un tableau impressionnistes, fait de petites touches.

Questions :
1. Qui est l’auteur du livre « A l’aube de la 6ème extinction » ?
2. Pourquoi sa double formation lui donne-t-elle des clés de lecture intéressantes ?
3. En quoi la science a-t-elle radicalement changé par rapport aux siècles passés ?
4. Qu’appelle-t-on une crise de la biodiversité ? Quelle est la méprise ?
5. Parlez du terme et du concept de la biodiversité
6. Pourquoi dire que le terme biodiversité est à conjuguer au pluriel ?
7. Etablissez un tableau de comparaison entre le GIEC et l’IPBES
8. Quelles sont les 2 stratégies possibles aux pressions des éléments perturbant le rythme
normal du mouvement de la vie sur Terre ?
9. Pourquoi la biodiversité est-elle à rendre dans sa complexité ?

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4. Partie II : Quel usage faisons-nous de la planète et de sa


biodiversité ?

4.1. Vie quotidienne

Quel usage faisons-nous de la planète ? Le concept de la biodiversité ne peut pas être abordé
sans rapport au concret. Nous exerçons des pressions sur la planète par nos gestes quotidiens :

- Douche du matin
- Trajet en voiture vers l’école et/ou le travail
- Billets d’avion pour les vacances
- Chauffage en hiver
- Climatisation en été
- Chargement des téléphones portables

4.2. L’énergie : une question de centrales

D’où vient l’énergie ?

- Eau et air : barrages, moulins, éoliennes, hydroliennes


- Chaleur : solaire et géothermie
- Energie fossile : uranium, lignite, charbon, pétrole, gaz.

Cette énergie, en étant utilisée, libère dans l’atmosphère du gaz carbonique. Les plantes des
marais et lagunes sont à l’origine du charbon et le foisonnement du plancton marin à l’origine
du pétrole.

En France, le charbon a régressé (-54%) comme le pétrole (-17%). Le nucléaire s’est accru
(+33%) et le gaz a doublé (+44%).

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Pourtant, la consommation d’énergie primaire a doublé en 40 ans et elle porte à 80% sur des
énergies fossiles (pétrole, charbon, gaz naturel). Cela s’explique par le développement de pays
émergents qui accèdent à de meilleures conditions de vie.

La question de l’énergie à travers notre quotidien. Un bâtiment construit, c’est de l’énergie


utilisée pour le bâtir et pour l’utiliser (chauffage, éclairage, climatisation). La « consommation
ostentatoire8 » est insoluble car elle touche à nos libertés individuelles. En outre l’incitation à
consommer est le fondement de notre économie.

La question de l’énergie à travers les transports. Depuis 1760 (presque 300 ans), les émissions
de CO2 liées aux transports ont été multipliées par 3000. Avant d’être vendus, certains biens
voyagent énormément et/ou utilisent une quantité astronomique d’eau et d’énergie (jeans,
bâtiment des chemins de fer à Zurich).

4.3. Des transports tous azimuts

Le transport est le déplacement d’un lieu vers un autre. L’impact des transports a commencé au
moment des grandes découvertes mais il n’est devenu majeur qu’au 19ème siècle, avec

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Concept de Thornstein Veblen

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l’industrialisation. Les conséquences vont des collisions sur les routes, sur les pare-brises, en
mer, en vol ; aux épaves des bateaux qui se transforment en oasis de la biodiversité.

Les effets des transports sur la biodiversité peuvent être rangés en 2 catégories :

a) Les effets des infrastructures : emprise/barrière ou potentiel de dispersion


b) Les effets des moyens de transport : bateaux, avions, voitures, camions…

a.1. : surfaces couvertes

 Terre
- 40.000 km de routes
- 32.000 km de voies ferrées
- 15.000 trains roulent chaque jour
 Mer
- 80% des échanges mondiaux par bateaux : emprise réduite aux espaces portuaires
- Port de Rotterdam : long de 42 kilomètres et 124 km2
- Port d’Anvers : 130 kilomètres de quais
 Air
- 200 km2 pour l’ensemble des aéroports auxquels s’ajoutent 160 km2 pour les
aérodromes
- Une dizaine d’aéroports français se sont engagés, dans le cadre de l’association Aéro-
Biodiversité, à améliorer leurs pratiques de gestion afin de mieux connaître et préserver
la biodiversité.

a.2. Potentiel de fragmentation/dispersion

L’impact ici peut être apprécié par un indice qui est la longueur des infrastructures rapportée à
la surface du territoire concerné : IT/ST. Au Canada, dès que l’indice dépasse 0.5 km/km2, on
observe le déclin de l’élan de 25% et une disparition du loup. L’environnement est perturbé et
les animaux se déportent vers des zones plus sauvages. Cette fragmentation est surtout
redoutable pour les organismes de petite taille pour lesquels il reste très difficile de traverser
une route. De telles infrastructures sont donc des obstacles à la circulation des petits insectes.

A.3. Gaz à effet de serre

Les émissions de CO2 dues aux transports ont une incidence directe sur le réchauffement
climatique et donc sur la biodiversité. Cela se traduit par des migrations, des acclimatations,

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des extinctions locales. Les transports atteignent 60% de la consommation du pétrole de France
(41millions de tonnes de pétrole). D’un côté, il y a des gains d’efficacité énergétique des
véhicules, mais d’un autre côté, il y a une hausse de l’utilisation des véhicules en circulation.

Le coût moyen par passager est 27 fois plus important en voiture que par le train à grande
vitesse, mais presque 2 fois moins que par avion. Cela donne à réfléchir, non ?

Le coût du transport aérien est parfois ridiculement bas. N’est-ce pas là une tentation à polluer et
à dégrader la planète ? En 2020, les Pays-Bas ont proposé une législation qui met un terme aux
lignes aériennes pour lesquelles il existe une alternative de moins de 3 heures. Cette proposition
a été reprise par la France.

Quant au trafic maritime, des tentatives de propulsion de cargos par le vent voient le jour. Le
vent représente une énergie renouvelable et abondante en mer.

- 90.000 bateaux
- 9.800 millions de tonnes de marchandises
- 17 millions de conteneurs

A.4. Marées noires

Le trafic maritime s’accompagne de pollutions en mer. La capacité de résilience des


écosystèmes face à des évènements aussi graves est étonnante : la biodiversité marine se
réinstalle totalement en une dizaine d’années. Pour les marées noires (volume déversé et nature
du pétrole), il faut savoir qu’elles se déroulent en 3 phases :

- étalement du pétrole : mort par empoisonnement (bref)


- stabilisation : déclin de la toxicité (1 an)
- cicatrisation : recolonisation des écosystèmes (une dizaine d’année)

L’impact est multilatéral puisqu’on va recenser le nombre de :

❖ oiseaux tués
❖ petits organismes retrouvés morts (vers, mollusques, crustacés, oursins …)
❖ kilomètres de côtes atteints
❖ manque à gagner pour la pêche, le tourisme, l’économie.

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A.5. Sels de déneigement

Le salage des routes produit une sursalure dans des cours d’eau ou dans des lacs. Une
conséquence imprévue du salage est de favoriser la dispersion d’espèces au-delà de leur aire
d’origine.

4.4. Conséquences inattendues des transports

Par les routes, les canaux, les véhicules, l’humain induit des déplacements volontaires ou
involontaires. On distingue :

- Les voyageurs actifs : organismes mobiles qui empruntent les infrastructures mises à
leur disposition. (1)
- Les voyageurs passifs : organismes volontairement déplacés par l’homme. (2-3-4)
- Les passagers clandestins : organismes qui sont déplacés incognito. (5)

Exemples

1) Le canal de Suez. Chaque année, on compte 5 à 10 espèces supplémentaires qui viennent


s’installer en Méditerranée orientale comme voyageurs actifs ou passagers clandestins.
On appelle d’ailleurs cette province la province lessepsienne et les migrants lessepsiens
(Ferdinand de Lesseps). Avec le réchauffement des eaux, certains organismes ont
franchi le détroit siculo-tunisien et sont présents en Méditerranée occidentale.
2) Les haricots, les tomates, les courgettes, les pommes de terre sont arrivées d’Amérique.
3) L’Australie. Iles de Kerguelen. Choux, albatros, azorelles, manchots, éléphants de mer.
Les bateaux ont apporté des souris et des rats, prédateurs pour les oiseaux en mangeant
leurs œufs. Des lapins ont été introduits en guise de réserve alimentaire. Les lapins se
sont multipliés à foison. Des chats ont été introduits qui ont mangé les oiseaux. Après,
ils se sont nourris de rats. Aujourd’hui, à cause de tout ça, il y a sur cette île plus de
chats, plus de rats et plus de lapins qu’autrefois.
4) Le lézards sur l’îlot de Pod Mrcaru (Croatie) introduits en 1971 par des scientifiques.
Puis la guerre en ex-Yougoslavie a interdit d’y retourner. En 2007, on en trouve plus de
mille et les conditions de vie sur l’île ont conduit à un régime alimentaire qui est à
l’origine d’évolutions morphologiques : tête plus grosse, estomac modifié, herbivore
(avant insectivore).

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5) Les étoiles de mer (eaux froides du Japon et d’Alaska. Ballasts des bateaux. Baie de
Melbourne. Ravage des parcs ostréicoles : moules et huitres. Dommages pour 1milliard
de dollars à la Tasmanie) et le frelon asiatique (Poteries chinoises arrivées en France
dans le Lot-et-Garonne).
Les passagers clandestins sont des vecteurs de maladie comme la peste, le choléra, le
paludisme, la grippe aviaire, la Covid-19…
- La peste : la bactérie, les puces, les rongeurs. La peste médiévale (bateaux venus du
Moyen-Orient et de la ville de Jaffa assiégée par des Turcs), la peste en Provence au
18ème siècle (le Grand Saint Antoine, Marseille, Jean-Baptiste Estelle) avec 1000
victimes par jour et 40.000 morts. Propagation à Avignon ou elle fait 100.000 victimes.
- La grippe espagnole : 1918-1919. Le pathogène d’origine aviaire fait son apparition
dans un camp militaire du Kansas. 40 millions de victimes. Le virus voyage par les
militaires américains qui gagnent l’Europe à la fin du 1er conflit mondial. Autre exemple
est l’histoire du bateau Le Madonna à La Réunion.
- Le paludisme : 1995. Un moustique infecté est sorti d’un avion pour aller se réfugier
sous le capot d’une voiture et voyage avec la voiture. Puis, il pique le voisin du
propriétaire de la voiture.

4.5. De la place pour se loger

La question du logement est à la frontière entre l’énergie et les déplacements. A-t-il fallu
beaucoup ou peu d’énergie pour construire la maison et est-ce une habitation passive, à basse
consommation ? Comment vous déplacez-vous ? En vélo ou trottinette, à pied ? En transports
en commun ? En voiture ?

Un bâtiment a un cycle de vie de 4 phases : préparation, construction, utilisation, démolition.

Les impacts d’une habitation sont nombreux : production de déchets, pollution de l’air ou de
l’eau, épuisement des ressources, consommation d’eau, émission de gaz à effet de serre…

Afin d’offrir de très bonnes propriétés isolantes, de stocker du carbone organique, d’éviter
d’émettre du CO2, il est possible de remplacer le ciment par des produits végétaux (paille, bois,
chanvre, …).

Les sources d’énergie ont évolué :

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- Pétrole : 54% (1973) ➔ 13% (2017)


- Charbon : a quasiment disparu
- Gaz : 28%
- Energies renouvelables : 22% (2017)

Chaque logement a réduit ses émissions de CO2 de 65% mais l’accroissement du parc
immobilier a fait en sorte que la réduction n’est que de 30%.

Se loger à la campagne n’est pas la solution, même si cela traduit autarcie et austérité. En effet,
au-delà d’un écosystème responsable (j’élève mes poules, je plante mes légumes, je fais mon
compost, je me chauffe au bois), il y a une autre réalité plus énergivore (besoins en transport
accrus, adductions d’eau, dessertes électriques spécifiques).

4.6. Indispensable à la vie, l’eau

L’eau est abondante à la surface de la Terre :

- Eau salée (97%)


- Glace (2%)
- Eaux douces libres et souterraines (1%) – répartition 5%/95%

L’eau utilisable pour nos besoins courants correspond à une part infime de l’eau terrestre. Cycle
de l’eau : océan, nuage, pluie, rivière. La manière de retourner l’eau aux rivières est enrichie de
déchets solubles ou solides. 80 pays manquent d’eau et 9 pays détiennent 60% de la ressource.

Boire 2 litres par jour, c’est consommer 15 millions de mètres cubes. Au total, c’est 4.000
km3/an qui sont prélevés : besoins domestiques (12%), industrie (19%) et agriculture (69%).

Le problème de l’eau, c’est :

- Sa répartition (accès des zones semi-arides ou tempérées à l’eau)


- Sa qualité (eau saine)
- Son impact (sur la faune et la flore)

Disparition de la mer d’Aral (détournement des eaux du Syr-Daria et l’Amou Daria pour
l’irrigation des champs de coton des républiques soviétiques d’Asie centrale). Abaissement du
niveau du lac de Tibériade.

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

Cas de l’eau de Vittel.

Les nitrates utilisés de manière intensive dans l’agriculture se retrouvent dans les cours d’eau.
En conséquence, l’oxygène vient à manquer et les poissons meurent en masse. On trouve aussi
des traces de nitrate dans nos boissons.

Le refroidissement des réacteurs nucléaires est essentiel et explique qu’ils soient installés
près d’un fleuve ou d’un littoral. Ils larguent des eaux plus chaudes dans les fleuves et perturbent
l’équilibre biologique.

L’accroissement de la population et les touristes en villégiature surchargent les stations


d’épuration qui relâchent les effluents non traités. Au Liban, l’urbanisation non contrôlée sur le
littoral génère une pollution organique et microbienne. En Hongrie, la rivière Tisza a été polluée
au cyanure (pollutions chimiques dues à des produits toxiques). Aux Etats-Unis (eaux chargées
en arsenic et métaux lourds).

La consommation moyenne par jour en France est de 150 litres. Idée du pommeau intelligent.

4.7. Un bien essentiel, la santé

La question de la biodiversité, c’est aussi celle de la flore bactérienne qui vit à la surface de
notre organisme et qui constitue une sorte d’armure invisible. Tout aseptiser diminue donc la
résistance de notre armure et ces dérèglements provoque des allergies en tous genres. Les
différentes sources de pollution et les additifs alimentaires ne sont pas bons pour notre santé.

Les perturbateurs endocriniens sont des molécules qui interfèrent avec nos hormones,
messagers chimiques qui régulent notre physiologie. Certains bloquent les hormones, d’autres
se font passer pour eux sans assumer leurs fonctions. La fertilité masculine a baissé de 52% en
50 ans.

Les perturbateurs endocriniens s’attaquent à l’hormone produite par la thyroïde qui participe à
réguler la formation de notre système nerveux central. On voit donc apparaître une baisse du
niveau du QI, de l’hyperactivité, des troubles de l’attention, plus d’attitudes d’autisme…

Une étude française de santé publique a montré en 2019 que 6 substances présumées toxiques
étaient présentes dans l’organisme de tous les Français. Chaque semaine, nous ingérons ou

16
VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

respirons l’équivalent du plastique d’une carte de crédit. Cela coûte plusieurs centaines de
milliards d’euros par an aux pays européens.

 L’économie doit-elle passer avant la santé ?

A force de dénigrer la nature dans notre nature de surhomme, nous en oublions que la moitié
de l’oxygène que nous respirons est produit par les êtres microscopiques du plancton végétal
marin.

Le réchauffement climatique induit un glissement des ceintures chaudes vers les zones
tempérées et, corrélativement, permet l’installation de nouvelles populations de pathogènes
sous nos latitudes dans des secteurs densément peuplés de la planète où leur progression est
facilitée. Depuis 2000, l’incidence des maladies liées aux vibrions, dont le choléra, suivait la
courbe de réchauffement des eaux marines. Nos déplacements sont un agent efficace au service
du virus.

Depuis des temps très anciens, les hommes se sont soignés en sélectionnant dans leur
environnement plantes et substances naturelles propres à les soulager. Il est fondamental de
protéger la biodiversité qui est une source inépuisable d’exemples à l’origine de notre
pharmacopée.

Une monoculture sur de vastes espaces et répétée sur plusieurs années accroît la vulnérabilité
de l’espèce cultivée et donc amplifie le risque de perte de récoltes.

Les externalités (positives ou négatives) sont des conséquences d’une activité mais qui n’entrent
pas dans le périmètre direct de cette activité. Pollution, changement climatique, bruit sont des
conséquences du développement effréné.

4.8. La pandémie de 2020

« One health » est le concept qui insiste sur le lien intime entre santé humaine, santé animale,
santé des écosystèmes. Les virus sont des êtres vivants. Les coronavirus sont une vaste famille
classée en 4 groupes :

- Alphacoronavirus – Betacoronavirus – Gammacoronavirus - Deltacoronavirus.

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

Quatre types de coronavirus bénins sont connus chez l’humain. Trois autres types de
coronavirus provoquent des infections graves.

Environ 50% des pathogènes qui nous agressent viennent des animaux, qu’ils soient virus,
bactéries ou parasites.

La bombe virale, c’est la préparation d’un virus hyper résistant provoqué par, d’une part, la
promiscuité due à la croissance démographique, et, d’autre part, la profusion d’antibiotiques
qui sélectionnent les souches les plus virulentes et les plus résistantes.

Dans le monde des pathogènes, il y a une règle qui prévaut : « kill the winner ». Règle qui dit
simplement que les pathogènes vont cibler en priorité les formes qui ont le plus de succès. Plus
nous porterons atteinte à la biodiversité sauvage, plus nous apparaîtrons comme le winner aux
yeux des pathogènes.

La promiscuité avec d’autres espèces, la densité de la population humaine et l’intensité des


déplacements : 3 paramètres attestent que la survenue d’une pandémie deviendrait probable.

4.9. Cultiver pour se nourrir

La quête de nourriture est passée de chasseur-cueilleur à un mode agriculteur-éleveur. A partir


de la seconde moitié du 19ème siècle, l’agriculture a connu des progrès liés à la révolution
industrielle. Après la 2ème guerre mondiale, l’agriculture a changé de modèle : engrais,
pesticides, irrigation, mécanisation, nouvelles variétés issues de la génétique pour lutter contre
la famine.

Europe. PAC. Rendement. Remembrement. Peu de valeur environnementale. Nourrir la


population et exporter. Mode productiviste, intensif. Traitement phytosanitaire. Glyphosate.
OGM. Les partisans des OGM ont une approche mécanistique du vivant. Or, le vivant n’est pas
une machine. Au Burkina Faso, le coton transgénique a bien résisté aux nuisibles mais a produit
des fibres trop courtes pour être exploitables. Le plus grave est la situation des agriculteurs qui
s’appauvrissent et qui s’endettent pour répondre au modèle productiviste. Leur situation déjà
précaire est encore aggravée par la chute des cours de nombreux produits agricoles.

Destruction de la micro-diversité : sols appauvris, destruction d’insectes et d’oiseaux.


Conséquence collatérale : extermination. Externalités négatives, sanitaires et

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

environnementales. 28 % CA pour les produits laitiers, 18% pour la filière bio et 10% pour les
AOC. Conséquences positives : contrôles sanitaires accrus et faible risque d’intoxication létale.

Agro-écologie9 : agriculture multi fonctionnelle (produire de la nourriture, façonner les


paysages, réguler les eaux et l’air, soutenir un tissu économique dans les campagnes).

4.10. Manger pour vivre

Dans notre alimentation, nous avons besoin de diversité : lipides, vitamines, protéines, glucides,
sels minéraux, acides aminés, oligoéléments….

Le supermarché hebdomadaire a supplanté les marchés quotidiens. Or, sur le marché, on trouve
des fruits et des légumes de saison (y compris les légumes disparus) et non des aliments ultra
transformés plein d’additifs et d’édulcorants ou de colorants. Une étude française de 2018 a
montré le lien entrer la consommation de produits transformés pleins d’additifs et le risque de
cancer. Un apport de 10% de ces produits à notre régime alimentaire se traduit par une hausse
de 12% du risque de cancer.

La biodiversité alimentaire suppose de respecter : la saison, le local et le temps. Il y a aussi des


saisons pour les poissons ! En outre, l’impact écologique des produits de la mer n’est pas le
même qu’à terre. Beaucoup de déchets pour une petite partie consommée.

Plus on s’élève dans la chaîne alimentaire, plus l’impact de notre consommation s’accroit.

Chaque niveau trophique franchi se traduit

par une baisse de rendement d’un facteur de 10

- Je mange de la salade : impact = photosynthèse pour produire des légumes


- Je mange un mouton : impact : 10 fois plus d’énergie que pour de l’herbe.
- Je mange un loup qui a mangé un mouton qui a mangé de l’herbe (cfr salade)

9
Nouveau concept vieux de 20 ans

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

4.11. Symboles et culture

Dans l’univers de Walt Disney, au fil de 70 ans d’histoires contées dans de multiples dessins
animés, on constate un déclin de la biodiversité.

 Moins d’espèces
 Moins de décors naturels

On passe d’une civilisation de chasse, de pêche, de cueillette, d’élevage, de pharmacopée,


d’agriculture à une civilisation où la nature s’est tue.

On trouvait aussi les animaux dans les symboles de civilisation comme l’Egypte, chez les Grecs
et les Romains, associés à des dieux. Des liens étaient faits entre la biodiversité et des
phénomènes : d’où les expressions « fort comme un lion », « malin comme un singe », « pur
comme le lys »….

Aujourd’hui, les symboles survivent sans leur référence : comme l’ours, par exemple.

- Double de l’Homme
- Diabolisé par l’Eglise
- Déchu de son statut de roi des animaux
- Auberges « zum baren » alors que les ours sauvages ont disparu de ces contrées

Autres exemples : le cèdre du Liban, tresses des juifs.

4.12. Les deux curseurs

Le jour du dépassement est le jour de l’année à partir duquel nous avons utilisé toutes les
ressources renouvelables.

Le 29 juillet 2019, notre empreinte écologique représente 1,75 fois ce que la planète peut
fournir. Nous sommes donc en train de consommer notre capital naturel au-delà de ses capacités
de renouvellement.

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

Sur quel curseur jouer ? L’empreinte écologique moyenne et le nombre d’humains sur Terre.

a) Les comportements : l’empreinte écologique moyenne


Histoire : accumulation de découvertes, d’inventions techniques
Mieux-vivre >< Fragilisation du tissu vivant : dilemme
Lien entre développement technologique et croissance démographique
 Changer de comportement ne suffit pas !
b) La population mondiale
Diminuer la population touche au choix éthique et de conscience individuelle : la
famille. Certains disent que la régulation sera naturelle car à un accès large à l’éducation
et un meilleur confort de vie correspond une baisse de la natalité. L’Europe est ainsi
passée en dessous du seuil de renouvellement de ses générations, même si le solde des
« naissances/décès » reste positif du fait de l’allongement de la durée de vie.
Prévision : 10 milliards d’individus en 2050.

L’article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, signée à Paris en 1948, donne
une base universelle à l’empreinte écologique. Prôner l’abstinence démographique en Afrique
relève de la double arithmétique (nombre d’individus x empreinte écologique). Or, il existe un
écart de 7 à 4 entre l’Amérique du Nord, l’Europe et l’Afrique. La planète ne pourra accueillir
12 milliards d’habitants. Nous sommes immergés dans des systèmes sociaux et économiques
qui encouragent consommation et croissance démographique dans presque tous les pays.

Questions :
1. Par quels gestes quotidiens exerçons-nous une pression sur la planète ?
2. D'où vient l'énergie et quelles sont les sources actuellement utilisées en % ?
3. Quels sont les effets des transports sur la biodiversité ?
4. Quelles sont les conséquences inattendues des transports ?
5. Qu'appelle-t-on "la province lessepsienne" ?
6. Quel est le problème de l'eau ?
7. Expliquez le cas de l'eau de Vittel.
8. Quel est le lien entre la flore bactérienne et la biodiversité ?
9. Qu'est-ce que les perturbateurs endocriniens ?
10. Que signifie le concept de « One health » ?
11. A quoi répond aujourd'hui l'agro-écologie ? Quelles ont été les transformations de l'art de
se nourrir ?
12. Expliquez la phrase suivante : « Plus on s’élève dans la chaîne alimentaire, plus l’impact
de notre consommation s’accroit. ».
13. Que représente la date du 29 juillet 2019 ? Que faire face à cela ?

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

5. Partie III : Qu’est-ce qu’une crise de la biodiversité ?

5.1. Définition d’une crise en 3 exemples

1) La Terre s’est retrouvée englacée, il y a 700 millions d’années à une époque appelée
Cryogénien. On parle de la « Terre Boule de neige » ou Snowball Earth. Les roches
larguées par les icebergs sont les témoins de cet évènement. Il faisait froid à peu près
partout : 4000 mètres de glace recouvraient les continents. C’est par l’émission de CO2
venant d’éruptions volcaniques que la planète peu à peu s’est réchauffée.
2) La grande crise de la biodiversité, il y a 250 millions d’années. Le volcanisme était très
actif. Les continents étaient regroupés et le climat était davantage continental. Les
oscillations climatiques sont fortes : très froid puis très chaud. 90% des espèces
terrestres et marines ont disparu.
3) Les changements climatiques, il y a 135 millions d’années, au début du Crétacé. Le
climat chaud et humide tend à se refroidir et à devenir plus sec. Le niveau des mers
baisse, on constate des changements dans la biodiversité littorale.

Ces 3 exemples nous montrent qu’une crise de la biodiversité est définie :

- Dans l’espace : elle est étendue, sinon ce n’est pas une crise.
- Dans le temps : elle est brutale, instantanée (même si elle dure des millions d’années)
- Par son impact : elle touche plusieurs groupes (espèces, écosystèmes, biosphère)

Durant les 500 derniers millions d’années de l’histoire de la Terre, on a recensé 60 crises, dont
5 crises majeures. Chaque crise est unique mais les 60 situations analysées permettent de tirer
des enseignements et de poser des points de référence.

5.2. Les 5 crises majeures

La dynamique des crises reste la diminution d’abondance due à la diminution du succès


reproducteur de nombreuses espèces qui font de moins en moins de rejetons pour des raisons
climatiques, environnementales ou autres.

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

➢ 1ère crise : 450 millions d’années – ère Primaire (fin de l’Ordovicien) – glaciation

À la fin de l'ordovicien (autour des - 443 Ma), on compte qu’1/3 de la faune marine
s'éteint à cause du refroidissement du climat, lequel entraina une glaciation causant
un abaissement du niveau des mers d'une centaine de mètres.

➢ 2ème crise : 365 millions d’années - ère Primaire (Dévonien) – chute de l’oxygénation
des mers.

Au dévonien tardif (autour de - 364 Ma), 80 % des espèces disparaissent sur une
période de trois Ma. Les espèces les plus touchées sont les Tentaculites, les
Brachiopodes, les Ammonoïdes, les Ostracodes.

➢ 3ème crise : 215 millions d’années - entre l’ère Primaire et l’ère Secondaire (Permien)
– la plus sévère. À la fin du permien, (autour de - 248 Ma) 85 % des espèces
disparaissent. 90 % des espèces marines disparurent au cours du dernier million
d'année du permien, dont la totalité des trilobites. Diverses causes sont à l'origine de
cette extinction massive, le niveau de la mer a baissé autour d'un seul continent, la
Pangée. La présence d'un seul continent a conduit à une mauvaise circulation

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

océanique et donc une modification du climat qui est devenu instable entraînant la
disparition d'espèces, de plus de violentes explosions volcaniques ont d'abord
entraîné un refroidissement à court terme de la Terre puis à long terme, à un
réchauffement et une diminution de la couche d'ozone. Puis au début du trias, la
remonté des eaux de la mer pauvre en dioxygène a entraîné la disparition d'espèces.

➢ 4ème crise : sur 17 millions d’années entre le Trias et le Jurassique (Permien) – la


plus bénigne : les dinosaures dominent de nombreux écosystèmes pendant 130
millions d’années.
À la fin du Trias, (autour de -206 Ma), 75 % des espèces disparaissent, durant une
crise qui s'étend sur près de 15 Ma, entre 221 et 206 Ma. Un important changement
climatique de chaud à humide à sec, voire semi désertique, a défavorisé certaines
espèces comme les grands reptiles mammaliens mais a favorisé le développement
des dinosaures, c'est le début de la domination des dinosaures, elle durera 150 Ma.
Les mammifères se diversifient, les premières tortues et les premiers crocodiles
apparaissent. En fin du Trias, le niveau de la mer remonte, réduisant la surface des
terres disponibles, les reptiles terrestres européens vont ainsi disparaître.

➢ 5ème crise : entre l’ère Secondaire et l’ère Tertiaire (à la fin du Crétacé) - extinction
des dinosaures et des ammonites
À la jonction crétacé - Tertiaire (autour des -65 Ma) 75% des espèces disparaissent.
Une collision cosmique avec la Terre (astéroïdes ou comète) d'un objet extraterrestre
de 10 Km de diamètre au Yucatan (Mexique) s'est produite pendant une période
d'intense activité volcanique qui a donné naissance aux vastes plateaux du Deccan
en Inde. Les quantités de poussières soulevées par l'impact de l'astéroïde et sa
pulvérisation ont empêché la lumière solaire d'atteindre la surface de la Terre
entraînant une diminution de la photosynthèse et un abaissement de la température
moyenne de la terre de 4 à 10 °C. L'hiver nucléaire va durer une dizaine d'années (-
10°C à -20°C) et fut suivi par un effet de serre qui dura 10 000 ans. Les gros
dinosaures herbivores ont disparu, les graines et les spores ont attendu le retour du
soleil, les petits mammifères ont consommé des graines. Le volcanisme a dû
modifier l'atmosphère terrestre, augmentation de la température, pluies acides, effet
de serre...durant cette crise, les grands reptiles marins, les ammonites, les
bélemnites, les rudistes et sur les continents les dinosaures disparaissent. 6. La

24
VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

sixième crise, est due à l'homo sapiens sapiens ou l'homme... prédation, pollution,
destructions des milieux de vie et des habitats naturels, exploitation des sols,
émissions des gaz à effet de serre, surexploitation des ressources de la planète...

5.3. Le Crime de l’Orient-Express

Les crises sont toujours multifactorielles. Les 2 facteurs explicatifs (coupables) des crises de la
biosphère sont les éruptions cataclysmiques & l’explosion fracassante d’une météorite.

Ordovicien 1ère crise aucune trace de météorite, ni volcanisme


Dévonien 2ème crise volcanisme présent avec un cratère présent en Suède.
Permien 3ème crise épanchements volcaniques visibles en Sibérie, pas de météorite.
Trias 4ème crise volcanisme dans l’Atlantique et météorite au Québec.
Crétacé 5ème crise volcanisme en Inde et météorite au Mexique.

Il y a des crises sans météorite et des météorites sans crise : ce n’est donc ni un critère
nécessaire, ni un critère suffisant. De manière plus certaine, il existe une corrélation entre l’âge
des crises et l’âge du volcanisme. Les crises sont longues, polyphasées et c’est le changement
climatique qui fragilise la biodiversité même si le déterminant initial est ailleurs : volcanisme,
météorite, géographie des continents …

5.4. Quelles ont été les réactions de la biosphère aux crises du passé ?

La vie était devenue très rare au moment des crises. L’observation des couches sédimentaires
qui coïncident avec les crises montre qu’elles sont vides. Il s’agit de diminutions de l’abondance
de nombreuses espèces qui s’est traduit, in fine, par une extinction en chaîne.

Ce que le passé nous apprend ?

- Une crise est multifactorielle.


- Une crise ne tue pas. A l’inverse d’une hécatombe.

25
VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

Les hécatombes provoquent des mortalités brutales en masse et sont dues à des cataclysmes
importants : séisme, glissement de terrain, épidémie, cyclone, incendie, inondation. Les
hécatombes sont locales ou régionales. Elles n’ont pas la même répercussion au niveau spatial.
Les hécatombes déciment les espèces alors que les crises les font décliner. Parfois, il y a
superposition des deux.

Les crises anciennes nous apprennent que la biodiversité leur a toujours survécu. Les
biodiversités qui survivent aux crises mettent un temps à le faire. La biosphère qui suit la crise
n’est pas la même que celle qui la précède. Il y a un renouvellement des écosystèmes.

Exemple 1 : la grande crise du Permien : disparition des grandes prairies animales sous-marines
de la fin du Primaire par la disparition des blastoïdes.

Exemple 2 : la crise Crétacé-Tertiaire : les dinosaures disparaissent et les mammifères


apparaissent)

Ce n’est donc pas en fonction du nombre d’espèces touchées qu’on juge de la sévérité d’une
crise mais en fonction de son impact qui dépend des espèces touchées et de leur rôle dans les
écosystèmes.

4 enseignements à tirer :

➢ Les crises sont multifactorielles.


➢ Les crises ont fonctionné par déclin d’abondance et non par hécatombes.
➢ Les rebonds post-crise sont des témoignages de résilience des écosystèmes.
➢ La sévérité de la crise n’a pas été seulement l’affaire de taux d’extinction.

5.5. Crise et réchauffement, le cas particulier du PETM

Un exemple de réchauffement analogue à ce qui arrive actuellement est le PETM : Paleocene-


Eocene Thermal Maximum. Il y a 55 millions d’années, un réchauffement brutal se produisit. Il
dura 150.000 ans.

➢ Hausse du niveau marin de 50 à 100 mètres


➢ Extinctions des formes marines microscopiques
➢ Migrations d’espèces

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

➢ Renouvellement faunique.

Quelles causes du réchauffement du PETM ?

- Activité volcanique aux dorsales


o Expansion des planchers océaniques
o Émissions de CO2 [ 500ppm-1500ppm ]
- Libération des méthanes par les clathrates (cages moléculaires)
o Dans les sols gelés de Sibérie et du Canada
o Dans les profondeurs des océans : entre 500 et 1000 mètres
o 25 fois plus puissant que le CO2 : emballement du processus

Quelles conséquences (impact) du réchauffement du PETM ?

- Extrême acidification des océans


o Extinction de nombreuses espèces marines unicellulaires et microscopiques
- Migration de faunes entre l’Eurasie et les Amériques
o Arrivée de groupes de mammifères en Amérique du Nord
- Changement de la végétation terrestre et sa relation aux insectes
- Décroissance de la taille des mammifères.

5.6. Le climat dans tout ça

En 2050, le climat de Londres pourrait ressembler à celui de Madrid. Les climats anciens ont
oscillé fortement. Alors, quelle différence ? Le problème vient de la vitesse dans laquelle tout
cela se produit, même si les ampleurs étaient plus importantes.

Les humains rejettent dans l’atmosphère du carbone fossile sous forme de gaz carbonique. Cela
génère un effet de serre : greenhouse effect. Ce taux de gaz carbonique dans l’atmosphère est
exprimé en PPM : en Parties Par Million. Il ne faut pas dépasser 600 ppm pour que la biosphère
ne soit totalement déséquilibrée. On était à 200ppm en 1820 et à 400ppm en 2016 et à 415ppm
en 2019. Les activités humaines ont emballé la machine à CO2. En 1960, le scientifique Claude
Lorius décide d’analyser les bulles de gaz incluses dans les carottes de glace antarctique. Un
échantillon représentant 1 million d’années. Or, ce niveau de Co2 n’a jamais été atteint au cours

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VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

des 800.000 ans alors qu’il y a eu une alternance de périodes très chaudes avec des périodes
très froides.

A l’ère Primaire, il y a 500 millions d’années, le taux de CO2 dans l’atmosphère était 20 fois la
valeur actuelle. L’histoire montre que depuis 35 millions d’années, la planète est entrée dans
une période froide. Depuis le début de l’ère Primaire, trois périodes ont été suffisamment froides
pour que des glaces s’installent aux pôles : icehouse. Le réchauffement actuel est donc
anecdotique puisque la Terre a connu de longues périodes plus chaudes avec des taux de CO2
atmosphériques plus importants.

La différence tient dans ce que si la Terre a connu des contextes très différents (climat chaud et
aride, plus de CO2 et moins d’oxygène), l’évolution a permis à la vie de s’adapter aux
environnements d’autrefois. Le fonctionnement biologique de notre espèce a eu le temps de
s’adapter aux conditions ambiantes. Le grand changement ici réside dans la vitesse du
changement.

6. Partie IV : Sixième extinction : mythe ou réalité ?

6.1. Les ingrédients d’une crise majeure sont-ils réunis ?

Le constat est fait par tous10 : les insectes déclinent. L’impact est colossal puisque moins
d’insectes signifie moins de pollinisation et donc, moins de fruits, moins d’amphibiens, moins
d’oiseaux, moins de mammifères insectivores, moins de prédateurs de ces insectivores…

La crise est sournoise car elle est silencieuse. C’est la chute d’effectifs sans l’extinction des
espèces. Cela n’a donc rien à voir avec les catastrophes locales (marée noire, pollution d’une
rivière, inondation, …). La disparition de l’éléphant ne perturbera que la savane, sans impacter
le reste de la planète. En revanche, la disparition des vers de terre, de la petite faune des sols
qui se passe dans l’indifférence la plus totale est beaucoup plus dramatique.

Exemple : la morue

10
2019 IPBES : de 500.000 à 1000.000 d’espèces vont décliner – 2018 Museum & CNRS : « Printemps
silencieux » - Etude allemande : effondrement des populations d’insectes dans des espaces protégés – étude
montrant le déclin des mammifères ordinaires en France et disparition annoncée de la grande faune africaine.

28
VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

La dimension multifactorielle est une caractéristique essentielle de la crise. La comparaison est


faite avec le sac à dos qui peut contenir différentes choses et c’est un dernier élément, et parfois
le plus petit, qui va le rendre insupportablement lourd. De la même façon, les facteurs de
pression sont divers : les pollutions, le déplacement des espèces, les invasions biologiques, la
surexploitation des ressources, les changements climatiques, la destruction des habitats et des
espèces, l’artificialisation des espaces…

6.2. La tour Eiffel

La tour Eiffel peut tenir debout même si on lui enlève quelques rivets et l’une ou l’autre
poutrelle mais à force d’en enlever, elle finira par s’effondrer. 7300 tonnes de charpentes
métalliques se retrouveront donc éparpillés. La tour Eiffel aura donc changé d’état ne rendra
plus les mêmes services.

Les rivets sont pareils à une espèce… et quand l’écosystème se modifie radicalement, et le
retour initial est impossible. En fonction des effets de seuil et des agitations provoquées
(perturbations), il y aura un retour possible à l’équilibre ou un changement de destination.

6.3. Où en sommes-nous ?

L’indicateur à prendre en compte serait donc le taux d’extinction des espèces depuis quelques
siècles (oiseaux, mammifères, amphibiens).

Les 500 millions d’années de l’histoire de la vie ont été découpés en 500 tranches. Pour chacune
des tranches, les extinctions d’espèces ont été calculées. On compte 20% par million d’années.
Les tranches qui coïncident avec les 5 grandes crises affichent un taux de 75% à 80%.

Aujourd’hui, on compte un taux de 1% à 3% (et 20% pour les espèces en danger), on est loin
du compte. Sauf que si on projette les quelques siècles en million d’années, en extrapolant les
données recueillies depuis 200 ans, on obtient un taux d’extinction de 8000% pour les
mammifères. Même si l’incertitude portait sur un facteur de 10 (ou bien 100), le taux reste de
800% (ou bien 80%). Cela signifie que la crise actuelle s’engage au minimum sur le même
rythme d’extinction que celui des cinq grandes crises du passé.

29
VIA DOCTA 2023 Essai philosophique

Le second indicateur tient dans le positionnement du curseur sur la trajectoire


environnementale : « entre tout va bien » et « effondrement imminent ». Quel est le
pourcentage d’écosystèmes continentaux affectés par les activités humaines ? Peu en 1700.
De plus en plus, de siècle en siècle. Le point de basculement en mode point de non-retour est
prévu pour bientôt : entre 2025 et 2045. Une étude a été réalisée en 2016 a étudié 14 biomes
continentaux : de la forêt boréale aux déserts. La question est celle des déclins d’abondance.

- 5 n’ont pas atteint le seuil critique des 20%


- 3 sont à la limite du seuil
- 6 ont franchi le seuil (savanes ou forêts méditerranéennes)

Les réponses aux nombreuses questions dépendront bien entendu des pressions exercées :
démographiques, climatiques, environnementales et la résilience des systèmes locaux.

1° Nous altérons des écosystèmes dont nous connaissons mal le fonctionnement

2° Les atteintes portées à la biodiversité et à la micro-biodiversité inconnue sont peut-être plus


fortes qu’escompté.

6.4. L’été sera chaud

Le mois de juillet 2019 a été le plus chaud (livre édité en 2021) enregistré sur Terre depuis que
les relevés météorologiques existent, depuis 1880. Tous les résultats scientifiques attestent que
nos activités sont bien à l’origine d’une part très dominante du réchauffement en cours.
Sécheresse, feux ravageant les forêts et les villes et problèmes de santé et de pollution en tous
genres. Cyclones. Fonte des glaces (96% de la banquise et disparition de l’ours blanc).
Dégradation de la barrière de corail. Inondations. Adaptation anatomique des Anolis (p182).

Le forestier est confronté à la vitesse du changement qui est incompatible avec certains rythmes
biologiques. Le temps nécessaire à la croissance et à la vie d’un arbre est trop long rapporté à
la vitesse du glissement des ceintures climatiques. Préserver la qualité des environnements est
une forme d’investissement qui réduira à terme les coûts induits par les migrations. De tout
temps, la Terre a vu les hommes migrer pour des raisons climatiques : lors de la période
glaciaire et la désertification du Sahara. Cela se déroulait alors de manière graduelle sur des
périodes longues de l’ordre du millénaire.

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6.5. Le mur se rapproche

On est loin des 5 grandes crises puisqu’on n’est pas encore à la barre des 80% d’extinction. La
spécificité de notre époque est la vitesse avec laquelle la biosphère plonge vers la crise. Le
challenge est donc de mise : corriger le tir sans attendre. Oui, mais comment ?

Questions :
1) Comment définir une crise de la biodiversité ?
2) Quelles ont été les 5 crises ?
3) Pourquoi l’auteur parle-t-il des crimes de l’Orient Express ?
4) Quelles ont été les réactions de la biosphère aux crises du passé ?
5) Qu’est-ce que le PETM ? Ses causes et ses conséquences ?
6) Expliquez le cas de la Morue dans la crise de la biodiversité.
7) Pourquoi l’auteur nous parle-t-il de la Tour Eiffel ?
8) Quel est le problème des étés de plus en plus chauds ?
9) Le taux d’extinction est-il un bon curseur pour déclarer l’état de crise ?

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Partie V : Comment rectifier le tir ?

6.1. Notre responsabilité d’Homo sapiens

Les comportements individuels doivent être mobilisés. Un geste minime multiplié par un grand
nombre d’individus finit par produire un effet important. La bonne démarche est de motiver son
semblable, de convaincre son voisin en gardant en tête que ce qui vaut pour l’un ne vaut pas
nécessairement pour l’autre. Le monde est complexe et nuancé. Restons donc tolérant en
sachant qu’il reste une marge de progrès pour rendre nos comportements plus compatibles avec
la préservation de la nature.

En ce qui concerne le réchauffement climatique, on est sur du global et du long terme. La


biosphère a des capacités de résilience étonnantes et de relativement court terme tant qu’un
seuil critique n’est pas dépassé. Voici quelques exemples :

- Tchernobyl : faune et flore - acclimatation des espèces aux anomalies génétiques


- Plages de Maya Bay : requins à pointe noire
- Prairies de Bretagne : jachère – fleurs - insectes

6.2. La politique des petits pas

Le changement doit arriver à passer par l’éducation et l’instruction famille par famille, ville par
ville, région par région, pays par pays. Politique pragmatique et pratique, au-delà des coups de
gueule. L’implication politique doit se jouer à l’échelle nationale et internationale. Que l’action
publique soit à la hauteur des enjeux : l’eau, les transports, l’énergie, le nucléaire, l’agriculture.

6.3. Dimension internationale

Les traités commerciaux célébrant le libre échange sont divers : OMC, CETA (entre le Canada
et l’Union européenne), ALENA (3 pays d’Amérique du Nord), ASEAN (pays d’Asie du Sud-
Est).

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Les accords participent à la mondialisation, donc à l’accroissement des flux de transport des
marchandises et donc à la dégradation du bilan carbone. Un Etat a toujours le droit de légiférer,
mais qui paie ? Les entreprises non préparées et non soutenues qui ne peuvent plus soutenir
leurs coûts de production ? D’un autre côté, si tout devient sujet à indemnisation, ce sont les
Etats et leurs citoyens qui en font les frais.

Aujourd’hui, les ressources communes les plus importantes sont celles qui se trouvent sur des
territoires localisés en dehors de ceux soumis à des juridictions nationales : zones polaires et
océan du large.

La fonte des glaces en Arctique ouvre la porte à des exploitations inenvisageables il y a encore
peu. La proportion d’espèces de poissons surexploitées ou exploitées au maximum de leur
maintien est désormais de 93%.

Ce qui est gravissime, ce sont les volontés d’exploiter les encroûtements des monts sous-marins
pour leurs cobalt, titane, platine ainsi que les sources hydrothermales pour leurs sulfures riches
en cuivre, zinc, cobalt, or, argent, sélénium…

Ces environnements ont mis des dizaines de milliers d’années à se former et hébergent des
faunes que l’on ne trouve pas ailleurs : endémisme des monts sous-marins, spécificité des
écosystèmes hydrothermaux fondés sur la capacité de bactéries à avoir un métabolisme tirant
directement son énergie d’éléments chimiques comme le souffre.

6.4. Aspects économiques

Coûts de régulations, limitations, normes environnementales mais maintien de la qualité des


services que nous rend la biodiversité. Externalités négatives : coût de 500 milliards d’€ par an
pour la santé publique des transports.

La difficulté est qu’il n’existe pas de prix pour nombre de dégradations environnementales.

Le PIB vert intégrerait les impacts sur la planète : toute action de protection ou de ré
ensauvagement fait gagner des points et tout espace naturel détruit ou altéré en fait perdre.

La France, en 2016, a introduit dans son code civil le préjudice écologique.

Exemples : castors d’Angleterre et loutres de Vancouver.

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La loi Pacte 2019 poursuit un double objectif : réduire les impacts environnementaux d’activités
préexistantes et développer de nouvelles activités en lien avec la protection de l’environnement.
Entre l’opportunisme qui veut verdir les activités de l’entreprise et le volontarisme d’activités
écoresponsables : l’objectif sera atteint lorsque le sujet ne sera plus un sujet annexe et
secondaire mais bien une priorité intégrée en amont dans sa stratégie au même titre que sa
gestion financière ou l’entretien de son patrimoine immobilier. Allons au bout de la logique.

6.5. L’acceptabilité

La différence entre le superflu et l’essentiel. Notre système est incapable de s’autoréguler d


manière à se positionner sur « raisonnable ». Une inflexion des habitudes de consommation
vers du plus local est à notre portée et aura un effet à terme. Les facteurs climatiques qui
provoquent la disparition de l’ours blanc sont ceux qui vont rendre la planète très inconfortable
pour notre survie et celles des générations à venir. La question est dans la répartition des
efforts…

Questions :
1) Qu’est-ce que le PIB vert ?
2) Pourquoi le climat n’est-il pas qu’une question de préservation de l’ours blanc ?
3) Donnez quelques exemples de résilience de la biosphère.
4) Quels sont les accords de libre-échange et en quoi sont-ils problématiques ?

7. Partie VI : Face à nous-mêmes

7.1. L’Homme, responsable et victime

L’originalité de la crise actuelle est que pour la 1ère fois, une espèce en est la cause. Les humains
sont nombreux, gros et ils bougent. Les humains sont plus complexes et donc plus fragiles que
le reste des autres espèces.

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7.2. Sortir du dualisme

Le dualisme « Homme-nature » est une fausse piste suivie longtemps par l’humanité. Notre
complexité tient à cette histoire évolutive : notre physiologie, nos mécanismes cérébraux sont
élaborés. Même si chaque espèce a ses caractéristiques, elles jouent toutes en interaction une
même partition. La conscience de notre emprise, en tant qu’espèce, nous impose une
responsabilité.

7.3. Deux postures

Entre prendre beaucoup ou peu de recul.

Le cours de l’évolution est jalonné par l’émergence de caractères innovants. La colonne


vertébrale, quatre membres munis de doigts, un doigt opposable à d’autres doigts, un cortex
cérébral très développé. Le développement technologique inventé par notre cerveau n’est que
le prolongement d’une dynamique évolutive. Notre développement intellectuel nous permet de
réfléchir sur nos actions et nos conséquences.

Doit-on infléchir nos comportements ? Avoir conscience de nos actes parce que nous avons un
contrat éthique envers les générations futures. En outre, si nous initions une crise majeure,
l’espèce humaine n’y survivra pas ! La diversité de la vie est donc notre assurance-vie.

A) Cynique : rejet total et complet du dualisme


B) Dosage : dualisme – entre blanc et noir

7.4. Arrogance

Certains aujourd’hui minimisent ce qui se vit. Ils prétendent qu’il suffit de jardiner la Terre
comme on l’a toujours fait. Cette allégation est à tempérer…

- Pendant des siècles, les surfaces anthropisées et dévolues à l’agriculture ont toujours été
réduites.
- Le modèle agricole était différent : chasseur, cueilleur…

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- 750000 km de haies ont disparu

Projet BIOSPHERE 2 : au milieu des années 1980, ce projet avait comme ambition de
reconstituer une mini-planète fonctionnelle, permettant la vie humaine sur une surface
d’environ un hectare enfermée dans une grande bulle. Au bout d’1 an, certains écosystèmes
artificiels se sont dégradés. Il a fallu donner de l’oxygène et de la nourriture à 8 personnes qui
s’étaient prêtées à l’expérience.

Certains pensent que dans 10 ans, nous aurons de nouvelles connaissances qui nous permettront
de trouver 1 solution. Or, nous avons une grande connaissance du monde macroscopique, par
contre, nous sommes encore au début de la connaissance du monde microscopique.

Ente 1955 et 2005, nous avons cru que comprendre le fonctionnement intime de nos cellules,
décrypter les génomes11 allaient nous permettre de tout appréhender. C’est une vision
mécaniciste, fausse ! A chaque niveau d’organisation, gènes, cellules, organes, organismes,
populations, communautés, écosystèmes… émergent des propriétés nouvelles non déductibles
au patrimoine génétique.

7.5. Se prendre pour les demiurges

La manipulation génétique pose des questions éthiques et environnementales. Avec des


méthodes de sélection classique, plus lentes, il est possible d’obtenir des résultats. Jusqu’où
l’homme ira-t-il ?

7.6. Sommes-nous entrés dans l’Anthropocène ?

Dire que nous sommes dans l’anthropocène, c’est dire que nous avons succédé à l’holocène qui
a commencé il y a 12.000 ans après le dernier glaciaire. Cette nouvelle ère aurait débuté vers la
fin du 18ème siècle avec la machine à vapeur, ou au milieu du 19ème avec la révolution
industrielle ou en 1945 avec la bombe atomique. Or, le mot ère désigne des périodes très

11
Ensemble de l'information génétique d'un organisme contenu dans chacune de ses cellules sous la
forme de chromosomes.

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longues et il faudrait encore attendre 10.000, 50.000 ou 100.000 années. Aujourd’hui, on


constate l’implication inédite de l’Homme dans des bouleversements importants de la planète.

7.7. La tragédie des horizons


La profondeur de la vie sur Terre se déroule sur 3.800 millions d’années. Si on fait une analogie,
le 1er janvier signe le début de la vie sur Terre et le 31 décembre l’apparition de l’homo sapiens
rendue possible depuis l’extinction des grands dinosaures, le 24 décembre. Le calendrier
chrétien commence à 23h59’40sec. Notre histoire depuis les pharaons tient dans la dernière
minute de l’année.

Alternative : Planète Proxima B. Pas si simple, parce que…

- Ce n’est pas exactement la Terre


- Cette planète ne tourne pas exactement sur elle-même
- Un côté très chaud et un autre très froid : la bande intermédiaire est la seule habitable
- La gravité est plus forte car la planète est plus volumineuse
- Aide à la mobilité sous peine de se voir plaqué au sol
- Os et muscles fragilisés par le voyage en apesanteur durant 6 mois
- Ecrasement du corps humain sur Proxima avec impact sur la respiration
- Le cœur aura des difficultés à propulser le sang chargé d’irriguer le cerveau
- Comment s’arracher de la pesanteur de cette planète ? Besoin de beaucoup de carburant

Questions :
1) Qu’évoque pour vous Proxima B. Est-ce une solution ?
2) Pourquoi dit-on que les dinosaures ont disparu le 24 décembre ?
3) Qu’est-ce que la biosphère 2 ?
4) Quelles sont les 2 postures face à la crise ?

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