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repères repères

Neuro-Imagerie

Comprendre le signal de l’hémorragie


cérébro-méningée en IRM
L’essentiel
pour survivre
en neuro-
imagerie

P. Brugières*
datives va se produire de la périphérie
(bien oxygénée) vers le centre (faible- Paramagnétisme et IRM
É vident au scanner X,
le diagnostic
d’hémorragie intra-cérébrale
ment oxygéné) de l’hématome : la
désoxyhémoglobine se transforme en
méthémoglobine (métHb), molécule
Lorsqu’elles sont en contact étroit avec
les protons tissulaires, les molécules
paramagnétiques présentent la particula-
fortement paramagnétique.
en IRM nécessite une prise rité d’entraîner un abaissement de leurs
en compte des protons et de Enfin, la dégradation de la méthémo- temps de relaxation T1 et T2. Cet effet
globine aboutit à la formation d’hémo- prédomine habituellement sur le T1 et se
leur devenir qui n’est ni impli- sidérine, molécule paramagnétique traduit par une augmentation du signal en
cite, ni intuitive. Moyennant insoluble concentrée dans le cytoplas- particulier sur les séquences pondérées
quoi, celui qui se livre à cette me des macrophages. en T1 (figure 2).
gymnastique mentale, pourra
en tirer d’intéressantes
informations sur l’évolution Oxyhémoglobine Substance diamagnétique :
pas de modification du signal
de l’hématome donc sur
la date de survenue.
Sphérocytose :
H2O intra érythrocytaire
Oxyhémoglobine T2
La séquence FLAIR peut ainsi mettre

Données en évidence une hémorragie


au stade précoce

biochimiques
À la phase initiale du saignement il
existe une extravasation de globules Désoxyhémoglobine Désoxyhémoglobine " Substance paramagnétique
" Localisation intra-
rouges contenant de l’oxyhémoglobine et extra-érythrocitaire
(oxyHb), molécule non paramagné-
tique.
L’oxyhémoglobine se transforme secon-
dairement en désoxyhémoglobine
" Substance très fortement
(désoxyHb), molécule paramagnétique, Methémoglobine Methémoglobine paramagnétique
" Localisation intra-
mais dont la structure moléculaire et extra-érythrocitaire
explique l’absence de retentissement net
sur le T1 du fait de l’accès difficile des
protons au noyau héminique (figure 1).
Ensuite, une cascade de réactions oxy-

Substance concentrée à
Hémosidérine l'intérieur des macrophages

* Service de névroradiologie,
CHU Henri-Mondor, Créteil. Figure 1. Évolution biochimique de l’hémoglobine au cours d’une hémorragie.

Act. Méd. Int. - Neurologie (1) n° 2, mai 2000


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repères repères

F O R M E R
Neuro-Imagerie

Molécule paramagnétique

Répartition non isotrope de la substance


Substance paramagnétique diluée paramagnétique : situation intracellulaire

H+ H+
molécule paramagnétique molécule paramagnétique
"ouverte" (métHb) : "close" (désoxyHb) : Diminution du T1 et du T2 Effet de susceptibilité magnétique T2*:
interaction possible pas d'interaction avec les protons diminution du T2
avec les protons

Effet T1 prédominant à faible Diminution du signal sur les séquences


diminution du T1 tissulaire absence de dimunition du T1 concentration : pondérées en T2 et en écho de gradient :
augmentation du signal sur les exemple de la désoxyHb et de la métHb
séquences pondérées en T1 intra-érythrocytaire, de l'hémosidérine
exemple : métHb diluée (*) stockée dans les macrophages ( )

augmentation du signal absence de modification du signal


sur les séquences pondérées en T1 sur les séquences pondérées en T1

Écho de spin T1 Écho de spin T2 Écho de gradient T2*

Figure 2. Effet d’une substance paramagnétique sur le T1 des tissus. Figure 3. Effet de susceptibilité magnétique.

Lorsque la répartition dans l’espace temps de relaxation T1 et T2. Les globules


d’une substance paramagnétique est Pathologies hémorragiques rouges augmentent de volume (sphérocyto-
hétérogène (situation intracellulaire et IRM se). Les éléments figurés du sang (du fait
du contenu riche en eau) ont un signal élevé
exclusive, par exemple), on observe éga-
lement un effet de susceptibilité (effet dit sur les séquences pondérées en T2.
T2*) responsable d’une diminution Hématome intra-cérébral L’hématome se présente donc globalement
importante du T2 tissulaire et donc # À la phase suraiguë (6 premières heures), en iso/hyposignal T1 et en hypersignal T2
d’une chute importante du signal sur les l’hématome (figure 4a, page suivante) est comparativement à la substance blanche.
séquences pondérées en T2 ou sur les composé d’oxyhémoglobine intracellulai- L’œdème périphérique débutant apparaît
séquences d’écho de gradient (figure 3). re, n’entraînant pas de modification des en hyposignal T1 et en hypersignal T2.

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repères repères
Écho de spin T1
4a
Écho de spin T2
Neuro-Imagerie

gnal T2 et en isosignal T1. La périphérie


de l’hématome (métHb intracellulaire)
est en hypersignal T1 et en hyposignal
Substance blanche
T2 (figure 4c).
normale # À la phase subaiguë tardive (1 – 4
re e

semaine), l’œdème vasogénique diminue.


œdème
La lyse des globules rouges en périphérie
oxyHb
de l’hématome libère de la MétHb extra-
intra-érythrocytaire cellulaire qui donne un hypersignal T1 et
un signal plus ou moins intense sur les
séquences pondérées en T2 en fonction de
Phase suraiguë son degré de dilution. Un anneau en franc
(6 premières heures) hyposignal T2 apparaît à l’interface l’œdè-
me/hématome et correspond aux dépôts
d’hémosidérine au sein des macrophages
4b (figure 4d).
œdème Progressivement (figure 4e), le signal de
l’hématome va se modifier pour aboutir à un
oxyHb hypersignal global T1 et T2 de l’hématome
intra-érythrocytaire
{
(MétHb extracellulaire) cerné par un liseré
désoxyHb de plus en plus épais en hyposignal T2
intra-érythrocytaire (hémosidérine).
# À la phase chronique (> 1 mois), l’œdè-
er

me a disparu et le volume de l’hématome


Phase aiguë diminue. L’ hypersignal central T1 et T2 de
(3 premiers jours) l’hématome tend à diminuer de volume.
Parallèlement en périphérie l’hyposignal T2
de l’hémosidérine (parfois également visible
4c
sous la forme d’un discret hyposignal T1)
œdème s’épaissit. Ces dépôts d’hémosidérine peu-
vent persister indéfiniment et ne constituer
métHb au bout de plusieurs années que le seul stig-
intra-érythrocytaire
mate d’un hématome ancien (figure 4f).
désoxyHb
intra-érythrocytaire Hémorragies tumorales
Il n’existe pas de critère formel permet-
tant de différencier un hématome sponta-
Phase subaiguë né d’une hémorragie tumorale. On retien-
précoce (4-7 jours) dra en faveur de l’origine tumorale :
– saignements multiples (mais angiopa-
Figures 4a, 4b, 4c. Évolution temporelle du signal de l’hématome en IRM. thie amyloïde…) ;
– aspect hétérogène de l’hématome ;
– anneau discontinu d’hémosidérine à la
# À la phase aiguë (6 e heure – 3 e jour), En périphérie, l’œdème vasogénique périphérie de l’hématome ;
l’hématome est principalement se majore (figure 4b). – absence de régression de l’œdème.
constitué de désoxyhémoglobine # À la phase subaiguë précoce (4 – 7
e e

intracellulaire. L’hématome est en jour), l’œdème vasogénique est maxi- Cavernomes


isosignal T1 et en hyposignal T2 mal. Le centre de l’hématome Le diagnostic peut être évoqué devant
(effet de susceptibilité magnétique). (désoxyHb intracellulaire) est en hyposi- une lésion entourée d’un anneau d’hémo-

Act. Méd. Int. - Neurologie (1) n° 2, mai 2000


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repères repères
Écho de spin T1
4d
Écho de spin T2
Neuro-Imagerie

précoce des hémorragies sous-arachnoï-


diennes.
En fait, la séquence FLAIR (qui annule
œdème
le signal du LCR en conservant une forte
pondération T2) permet de visualiser
métHb
extra-cellulaire } diluée
non diluée l’hémorragie sous-arachnoïdienne aiguë
avec une sensibilité équivalente à celle de
la tomodensitométrie (figure 1).
{ intra-érythrocytaire
mét & désoxyHb
} Tardivement, des dépôts d’hémosidérine
hémosidérine
sur les leptoméninges (hémosidérose
superficielle) peuvent constituer les seuls
Phase subaiguë
témoins d’une hémorragie ancienne ou
tardive
(1 à 4 semaines)
de saignements répétitifs à bas bruit.

4e
Conclusion
œdème
On retiendra :
– en cas de suspicion d’un hématome
métHb
extra-cellulaire parenchymateux récent : l’intérêt des
séquences T2 et des séquences d’écho de
gradient à TE long ;
hémosidérine – en cas de recherche d’argument en
Phase subaiguë faveur d’une angiopathie amyloïde ou
tardive d’un cavernome : l’intérêt des séquences
(1 à 4 semaines) d’écho de gradient à TE long ;
– en cas de suspicion d’hémorragie
méningée récente : l’intérêt de la séquen-
4f ce FLAIR.

métHb
extra-cellulaire

hémosidérine

Pour en savoir plus…


Phase chronique " Gomori J.M., Grossman R.I., Goldberg H.I.
précoce (mois) et coll. Intracranial hematomas : imaging by
high-field MR. Radiology 1985 Oct ; 157(1) :
Figures 4d, 4e, 4f. Évolution temporelle du signal de l’hématome en IRM. 87-93.
" Bradley W.G. Jr. MR appearance of hemor-
rhage in the brain. Radiology 1993
sidérine en hyposignal T2, comportant Hémorragies méningées Oct ; 189(1) : 15-26.
plusieurs plages de saignements à des et sous-arachnoïdiennes " Noguchi K., Ogawa T., Seto H. et coll.
stades chronologiques différents. On a longtemps pensé que, du fait de Subacute and chronic subarachnoid hemor-
Les cavernomes peuvent occasionnelle- l’apparition retardée de la méthémoglo- rhage : diagnosis with fluid-attenuated inver-
ment être multiples : intérêt ici de l’ima- bine, l’IRM ne constituait pas une tech- sion-recovery MR imaging. Radiology 1997
gerie en écho de gradient. nique d’imagerie fiable pour le dépistage Apr ; 203(1) : 257-62.

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