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LES AUTOCHTONES AU CANADA : ESPACES ET PEUPLES EN MUTATION

Caroline Desbiens, Irène Hirt

Armand Colin | « L'Information géographique »

2012/4 Vol. 76 | pages 29 à 46


ISSN 0020-0093
ISBN 9782200927868
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-l-information-geographique-2012-4-page-29.htm
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Les Autochtones au Canada : espaces


et peuples en mutation
Par Caroline Desbiens et Irène Hirt

Caroline Desbiens, professeure titulaire – département de géographie, université


Laval, Québec – caroline.desbiens@ggr.ulaval.ca
Irène Hirt, chercheure postdoctorale Marie-Curie – département de géographie et
département de sciences géomatiques, université Laval/département de géographie
et d’environnement, Université de Genève – irene.hirt@unige.ch

Dans son livre intitulé 1491 : New Revelations of the Americas before Colum-
bus, l’auteur et journaliste Charles C. Mann présente un portrait neuf de l’Amé-
rique précolombienne. S’appuyant sur des études issues d’une variété de disci-
plines, il rapporte que les scientifiques s’accordent aujourd’hui pour dire que les
premiers peuples1 sont arrivés très tôt avant les Européens ; qu’ils sont parvenus
en Amérique non seulement par le détroit de Béring mais à travers plusieurs
migrations, y compris par voie de mer ; et qu’ils occupaient des aires géogra-
phiques nombreuses et étendues au moment du contact avec les « inventeurs »
de l’Amérique, en raison de leur importance démographique (Mann, 2005). La
démonstration d’une présence autochtone inscrite dans une durée et des espaces
étendus ajoute une preuve de plus à la thèse que – loin d’avoir connu des densi-
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tés de population trop faibles et utilisé des technologies trop peu avancées pour
pouvoir modifier le faciès du continent – les premiers habitants d’Amérique
ont été les acteurs d’un paysage déjà fortement culturalisé au moment où il
s’inscrivait comme « Nouveau Monde » dans l’imaginaire européen. Écrivant
l’envers de l’histoire, Charles C. Mann libère la frontière de son mythe et la
répand sur tout le continent : car c’est bien d’Ouest en Est, en passant par le Sud
et en émigrant ensuite au Nord sur la trace des glaciers, que les Autochtones
ont fait ce qu’il convient maintenant d’appeler « l’Amérique. » Si une telle
perspective jette un regard nouveau sur le passé, elle s’inscrit également dans
un mouvement de redéfinition de l’autochtonie au présent.
D’hier à aujourd’hui, les premiers habitants d’Amérique sont restés relativement
méconnus. Cependant, l’essor actuel des études autochtones dans tous les
domaines du savoir contribue à affirmer leur présence et leurs contributions.
Alors que les questions relatives à l’autochtonie ont longtemps été le domaine

1. Dans ce texte, nous entendons par « premiers peuples » ceux présents sur le continent américain avant
l’arrivée des Européens.

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Les Autochtones au Canada : espaces et peuples en mutation

de l’anthropologie, nous assistons ces dernières années à un décloisonnement :


des sciences politiques et environnementales en passant par le droit, la santé,
ou l’éducation, de nombreuses disciplines accordent désormais une place de
choix aux études autochtones. La géographie participe activement à cette
mouvance, notamment par la richesse de sa boîte à outils en ce qui concerne la
description et l’analyse des questions de paysage, ressources, environnement
et gouvernance territoriale. En commençant par un survol des aires culturelles
autochtones en Amérique, nous proposons dans cet article d’identifier trois
thèmes dominants en ce qui a trait aux espaces de l’autochtonie contemporaine
au Canada : la gouvernance, les savoirs et l’urbanité.

◮ Géographies autochtones

À l’échelle de l’Amérique, les espaces de l’autochtonie sont trop complexes et


trop diversifiés pour être abordés en détail dans ces lignes. À lui seul, le Canada
comporte onze familles linguistiques qui correspondent à des sphères culturelles
distinctes : d’Ouest en Est, il s’agit des familles esquimaude-aléoute, athapas-
cane, tlingit, tsimshiane, haïdane, wakaskane, salish, Kootenayenne, algon-
quienne, siouienne, et iroquoienne.2 Parmi les 52 langues autochtones parlées
au Canada, le Cri, l’Ojibwé et les différents dialectes de la famille esquimaude-
aléoute regroupent le plus grand nombre de locuteurs. Au Canada, le terme
utilisé par les peuples qualifiés habituellement « d’Indiens » ou « d’Amérin-
diens » pour s’auto-désigner est celui de Premières nations (First Nations).
Quant à l’expression « peuples autochtones » dans la Constitution canadienne
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de 1982 (art. 35), elle fait référence à trois groupes distincts : les Amérindiens,
les Inuit et les Métis. Les premiers seraient parvenus en Amérique principale-
ment par le Détroit de Béring pendant une période de migration débutant il y a
environ 18 000 ans et se terminant il y a 10 000 ans lorsque le pont continental
entre l’Asie et l’Amérique aurait été submergé.3 Les Inuit, quant à eux, sont
issus de migrations beaucoup plus récentes, regroupant un ensemble de cultures
anciennes, dont la prédorsétienne (il y a environ 4 500 ans), dorsétienne (– 2800
ans) et thuléenne (– 800). De culture baleinière, les Thuléens habitèrent d’abord
la région de l’Alaska avant de s’avancer dans l’Est de l’Arctique pour élargir
leurs territoires de chasse aux mammifères marins ; ils sont les ancêtres directs

2. Une dernière famille linguistique localisée sur l’île de Terre-Neuve, le Béothuk, est éteinte depuis la mort
de sa dernière locutrice, une femme nommée Shanawdithit, en 1829.
3. « Une présence autochtone : nos origines. » Musée canadien des civilisations, en ligne :
www.civilization.ca/cmc/exhibitions/aborig/fp/fpz2f12f.shtml (consulté le 10 août 2012).

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des Inuit d’aujourd’hui.4 Pour leur part, les Métis tracent leurs origines à la
période de traite des fourrures qui occasionna de nombreuses unions entre des
traiteurs européens et celles qu’on désignait comme des « femmes du pays ».
Des communautés métisses socialement et politiquement organisées ont vu le
jour à partir du XVIIIe siècle et ont constitué un archipel culturel s’étendant du
Québec à la Colombie-Britannique avec une plus grande concentration dans la
région des Prairies. Toujours selon la Constitution canadienne de 1982 (art. 35),
c’est l’appartenance à une telle communauté historique qui confère le statut
indien aux Métis et non le seul fait d’être issu d’une union mixte. Sur une
population totale de près de 32 millions d’habitants, le recensement canadien
de 2006 dénombrait 1 172 790 individus d’origine autochtone. Il existe plus
de 600 bandes indiennes au Canada (incluant les Métis) et 53 communautés
inuit5 . Malgré ce poids démographique relativement faible dans l’ensemble
canadien, la population autochtone connaît un fort taux de natalité : on estime
que les femmes autochtones ont près de deux fois plus d’enfants que la moyenne
canadienne (Boileau 2002).

◮ Gouvernance
La longue marche de la décolonisation des relations entre les Autochtones et
les immigrants plus récents influence de façon marquante le Canada depuis
plusieurs décennies. Dans ce contexte, la gouvernance – à l’échelle locale,
provinciale et fédérale – est un dossier de première importance pour les Autoch-
tones. Alors que ceux-ci ont constitué des alliés de guerre et des partenaires
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indispensables dans l’implantation des colons français et anglais en Amérique
du Nord, la prise en charge de la colonie par la Couronne britannique suite à
la Conquête (1760-1763) et l’établissement du gouvernement canadien à partir
de 1867, ont été synonymes d’une perte progressive de souveraineté politique
pour les premiers peuples. Pourtant, avec la Proclamation Royale de 1763, les
Anglais avaient reconnu les droits détenus par les Autochtones sur les terres
qu’ils occupaient et délimité un domaine indien au-delà de l’écoumène colo-
nial. Puisque plusieurs nations amérindiennes avaient combattu aux côtés des
Français pendant la Guerre de Sept Ans, cette reconnaissance servait à pacifier
les relations avec les Indiens et apaiser leurs craintes d’une arrivée massive
des colons européens sur leurs terres. Surnommée la « Magna Carta autoch-
tone », la Proclamation Royale postule que les Amérindiens détiennent des

4. « Archéologies : chronologie de l’arctique. » Institut cultural Avataq, en ligne : www.avataq.qc.ca/fr/L-


institut/Departements/Archeologie/Decouvrir-l-archeologie/Chronologie-de-l-Arctique (consulté le 10 août
2012).
5. Le mot « bande », comme celui de « réserve », font partie de la terminologie invoquée par la Loi sur les
Indiens (voir plus loin). De tels termes, en dépit de leur connotation coloniale, continuent à être en vigueur
sur le plan légal et sont largement répandus dans le langage courant au Canada.

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Les Autochtones au Canada : espaces et peuples en mutation

droits en Amérique du Nord, y compris le droit à un territoire, d’où la nécessité


de négocier de bonne foi et de façon pacifique le transfert de ces droits pour la
colonisation : « Toutes régions jugées essentielles au mode de vie amérindien
devaient être laissées intactes. Ce territoire ne pouvait être colonisé qu’après
ratification d’une entente en bonne et due forme entre les chefs amérindiens et
le gouvernement. En négociant de tels traités, la Couronne était assurée d’un
certain niveau de stabilité dans ces territoires6 . »
Ainsi, la Proclamation royale a constitué la première reconnaissance légale
de droits autochtones dans la colonie d’antan et a établi une responsabilité de
négociation pour le transfert de ces droits, laquelle est aujourd’hui enchâssée
dans la Constitution canadienne de 1982. Cependant, la Proclamation n’a pas
reconnu de titre foncier mais plutôt une pratique établie. Une telle nuance
explique en partie l’effritement progressif des droits territoriaux autochtones :
étant fondés non par sur le principe de propriété mais sur celui des pratiques,
ces droits se sont transformés ou sont devenus plus difficiles à maintenir
pour les Premières nations, notamment suite aux guerres, aux épidémies, à
l’expansion accélérée des espaces coloniaux, à la relocalisation forcée des
populations autochtones ainsi qu’à leur intégration aux économies de marché.
La signature de nombreux traités, au cours de différentes périodes historiques,
plutôt que de permettre le maintien des systèmes de gouvernance autochtone,
les a de plus en plus fragilisés. La somme de ces processus qui s’influencent
mutuellement a contribué à la « réduction » des premiers peuples, autant au
niveau démographique, culturel et politique que territorial (Simard 2003).
Votée en 1876, la Loi sur les Indiens a sans doute représenté l’appareil législatif
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le plus abouti pour parachever cette réduction. Donnant suite à « l’Acte pour
encourager la civilisation graduelle des tribus sauvages » (1857), à la « Loi sur
la civilisation et l’émancipation » (1859) et à « l’Acte pourvoyant à l’Émanci-
pation graduelle des Sauvages et à la meilleure administration des affaires des
sauvages » (1869), la législation de 1876 a fait partie d’un vaste mécanisme
colonial qui visait « à se départir du système tribal et à assimiler les Indiens,
à tous les égards, à l’ensemble des autres habitants du Dominion aussi rapi-
dement qu’ils le peuvent7 ». Selon la pensée de l’époque, l’assimilation à la
population dominante était perçue comme un processus d’émancipation d’un
statut inférieur : placés dans un rapport hiérarchique avec les colons européens,
les Autochtones étaient censés voir le déni de leur héritage et de leur culture
comme une avancée historique vers la modernité qui, supposément, s’incarnait

6. « La Proclamation royale de 1763 : le principe des négociations pour les traités. » Bibliothèque et archives
Canada, en ligne : www.lac-bac.gc.ca/publications/002/015002-2010-f.html (consulté le 22 août 2012).
7. Selon les mots du Premier Ministre John A. Macdonald en 1887. Pour un historique des politiques
gouvernementales d’assimilation : « Que sont les enfants devenus ? Guérir l’héritage des pensionnats. » En
ligne : www.wherearethechildren.ca/fr/bookcase/grades-9-10/chapter-1.html (consulté le 22 août 2012).

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dans la société blanche. Les mesures pour atteindre les visées conjointes de la
réduction et de l’assimilation ont été nombreuses : création de « réserves » ;
inscription des personnes qui y vivent sur un « registre indien » ; subrogation
des régimes politiques ancestraux via l’imposition d’un système de « bandes »
régi par le gouvernement fédéral ; scolarisation des enfants à l’occidentale,
souvent dans des écoles résidentielles situées hors réserve. En 2008, la Com-
mission de vérité et de réconciliation du Canada a été créée pour analyser les
séquelles des pensionnats indiens, permettre une reconnaissance de l’injustice
et des torts causés aux Autochtones, et enclencher le processus de compensation
et de guérison ; en juin 2008, le Premier Ministre Stephen Harper prononça des
excuses officielles de la part du gouvernement fédéral8 . Puisque l’impact des
pensionnats indiens touche non seulement ceux et celles qui y ont vécu mais
aussi leurs enfants, les processus de guérison doivent se poursuivre à travers les
générations.
Si l’objectif colonial d’assimilation a passé par une déstructuration des commu-
nautés, celles-ci ont fait preuve d’une très grande résilience face à ces pressions.
L’idéologie assimilationniste fédérale a culminé avec la présentation, en 1969,
du Livre Blanc par le gouvernement libéral de Pierre Elliott Trudeau. À sa
base, le Livre Blanc émanait d’un principe noble : celui d’éliminer le statut juri-
dique distinct des Autochtones qui les place dans une position de pupille face à
l’État canadien. Sur les traces de la lutte pour les droits civiques aux États-Unis
et de son pendant amérindien (surnommé le mouvement « Red Power »), le
gouvernement canadien souhaitait mettre un terme à la distinction entre les
Autochtones et les autres Canadiens en abrogeant la loi sur les Indiens et en
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faisant primer les droits des individus sur les droits collectifs. Ce changement
de cap a toutefois été loin de correspondre à la vision des principaux concernés.
La réaction des Autochtones a été presque unanime : ils ont considéré cette
perte de droits collectifs comme une autre facette de l’assimilation et expriment
leur position par le biais du Livre Rouge (1970, aussi intitulé « Citizen Plus »).
Ce dernier a reconnu que le statut indien, malgré ses désavantages, constitue
une assise essentielle au maintien de l’identité culturelle. Il a en outre soutenu
que les bases législatives et constitutionnelles de ce statut, et les droits qui en
découlent, devraient être maintenus jusqu’à ce que les premiers peuples soient
désireux de les négocier. On peut dire que, par le Livre Rouge, les Autochtones
sont entrés de plain-pied dans l’arène politique canadienne ; depuis, ils y ont
joué un rôle déterminant (Forest 1996)9 .

8. Commission de vérité et de réconciliation du Canada, en ligne :


http://www.trc.ca/websites/trcinstitution/index.php?p=15 ; « Présentation d’excuses aux anciens
élèves des pensionnats indiens. » Affaires autochtones et développement du Nord Canada, en ligne :
http://www.aadnc-aandc.gc.ca/fra/1100100015644/1100100015649 (les deux sites ont été consultés le
26 septembre 2012).
9. Pour une discussion détaillée de cette évolution politique, voir l’ouvrage d’Olive Patricia Dickason (1996).

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Les Autochtones au Canada : espaces et peuples en mutation

Après la parution du Livre Rouge, d’autres moments forts sont venus marquer
l’évolution des cadres de gouvernance, et ceci à toutes les échelles. La question
territoriale est devenue prépondérante car c’est par elle que passent le déve-
loppement et l’exploitation des ressources naturelles, sur lesquels repose en
grande partie l’économie canadienne. De 1971 à 1974, la Commission Ber-
ger a enquêté sur les impacts de la construction d’un projet de gazoduc censé
relier l’Alaska à l’Alberta via le nord du Yukon et la vallée du Mackenzie. Les
Autochtones de la région (Dénés, Inuit, Métis) considéraient le pipeline comme
une menace pour leur environnement et leurs revendications territoriales. Le
juge Thomas Berger recommanda un moratoire sur la construction jusqu’en
1987 afin d’accorder le temps nécessaire au règlement des revendications terri-
toriales. Ces développements dans l’Ouest du Canada n’ont pas été sans impact
pour le Québec, suscitant une prise de conscience – d’abord timide, mais qui
a gagné en importance – des enjeux territoriaux liés aux peuples autochtones.
En 1971, le gouvernement provincial de Robert Bourassa a lancé en grande
pompe un projet majeur de développement hydroélectrique sans avoir au préa-
lable consulté les habitants autochtones du territoire, soit les Cris de l’Est de
la Baie James (Eeyou Istchee)10 . Suite à une opposition organisée, les Cris ont
requis une injonction contre les travaux ; celle-ci a été accordée par le juge
Albert Malouf, mais a été rapidement invalidée. Cependant, les parties ont
été forcées de négocier et en sont venues à une entente, soit la Convention
de la Baie James et du Nord québécois (CBJNQ), signée en 1975. Il s’agit
d’un pas majeur puisque la CBJNQ représente le premier traité « moderne » au
Canada. Les Naskapis et les Inuit en sont également signataires, à l’exception
de trois communautés ; celles de Puvirnituq, d’Ivujivik et de Salluit qui forment
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un mouvement dissident appelé Inuit Tungavingat11 . En plus d’avoir jeté les
bases d’une gouvernance autochtone qui, au-delà des communautés, s’étend
à l’échelle de leur territoire ancestral (Eeyou Istchee pour les Cris et Nunavik
pour les Inuit), la CBJNQ a ouvert de nouveaux horizons en ce qui a trait à
la reconnaissance des pratiques traditionnelles et à la gestion des ressources
naturelles.
Plus de trente-cinq ans plus tard, cette première avancée continue d’avoir des
retombées sur la planification territoriale et, plus largement, sur la teneur des
relations politiques entre les Autochtones et l’État canadien. Car, si la Loi
sur les Indiens demeure en vigueur au Canada, les revendications territoriales
autochtones et les ententes continuent de se multiplier dans le but de réinstaurer

10. Pour les détails de cet événement voir Desbiens (2004).


11. Les Cris sont répartis dans neuf communautés, les Inuit dans quatorze et les Naskapis dans
une seule. Il faut noter que les terres ancestrales des Innus, des Attikameks et des Algonguins
chevauchent le pourtour du territoire conventionné par la CBJNQ mais que ces trois nations
n’ont pas été incluses dans l’accord. Pour la carte des communautés autochtones du Québec :
www.autochtones.gouv.qc.ca/nations/cartes_communautes.htm.

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l’autonomie des Premières nations et de mieux définir l’interface avec les gou-
vernements provinciaux et fédéral12 . En effet, le processus de « Revendications
territoriales globales » – dans lequel s’est inscrit la CBJNQ – en marche depuis
1973, touche les régions du pays où des traités n’ont pas été conclus avec les
peuples autochtones ; entre autres, au Québec, en Colombie-Britannique et dans
différentes régions nordiques. Ce processus vise à établir une meilleure défini-
tion des droits fonciers autochtones au chapitre de la possession, de l’usage et de
la gestion des terres et des ressources naturelles.13 En date de mars 2012, vingt-
cinq accords ont été conclus au Canada. Parmi ceux-ci, il faut noter l’Accord du
Nunavut qui a permis en 1999 la création du plus grand territoire inuktophone
du Canada, ainsi que le Traité Nisga’a qui constitue le premier traité moderne à
avoir été conclu en Colombie-Britannique. Le cadre juridique en regard de ces
questions est en pleine évolution et chaque jugement légal apporte des éléments
de plus pour résoudre le casse-tête de l’imbrication juste et harmonieuse des
coutumes et des institutions politiques autochtones et allochtones.

◮ Savoirs et territoires
Pendant que cette évolution suit son cours, d’autres initiatives se dessinent de
façon plus ponctuelle afin de définir et de raffiner les modalités de cohabitation
et de cogestion territoriales entre Autochtones et Allochtones, en particulier en
ce qui a trait à l’exploitation des ressources et à la gestion environnementale.14
Parmi les nombreux jugements qui, depuis près d’un demi-siècle, font avancer
la gouvernance territoriale à l’échelle du pays, l’arrêt Haida et le jugement Taku
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River (décrétés en 2004) ont permis une avancée notable : ils ont statué que
les gouvernements provinciaux et fédéral doivent consulter les Autochtones
et tenir compte de leurs préoccupations dans le cadre de la mise en œuvre de
certains projets de développement. Cependant, il faut savoir que l’obligation de
consultation ne contraint pas les parties à s’engager dans une entente formelle.15
Qui plus est, la mise en œuvre d’une telle politique n’est pas chose simple pour
les autorités autochtones chargées d’analyser les dossiers, car celles-ci ne pos-
sèdent pas toujours les spécialistes ou la main-d’œuvre nécessaires pour assurer
le suivi des consultations. Malgré tout, les mécanismes de gestion territoriale

12. Les ententes visent à remplacer la Loi sur les Indiens comme cadre de gouvernance dans les communautés
signataires.
13. « Revendications territoriales globales. » Affaires autochtones et développement du Nord Canada, en
ligne : www.aadnc-aandc.gc.ca/fra/1100100016296/1100100016297 (consulté le 23 août 2012).
14. Pour le détail de cette évolution juridique : Dupuis 2001 ; « Terres autochtones en vue. »
Radio-Canada, en ligne : http://www.radio-canada.ca/sujet/terres-autochtones (consulté le 10 septembre
2012) ; « Jugements et événements. » Québec : Secrétariat aux affaires autochtones, en ligne :
http://www.versuntraite.gouv.qc.ca/documentation/jugements.htm#liste (consulté le 10 septembre 2012).
15. « Terres autochtones en vue. » Radio-Canada (ibid.).

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Les Autochtones au Canada : espaces et peuples en mutation

conçus pour tenir compte des droits territoriaux des Autochtones continuent
de se développer et de s’imbriquer à d’autres éléments cruciaux d’une gestion
qui vise à la fois l’équité financière et la reconnaissance culturelle. Ce faisant,
la prise en compte des intérêts des Inuit et des Premières nations passe néces-
sairement par l’intégration des savoirs autochtones dans la gestion territoriale.
Adoptée par le gouvernement fédéral en 2002, la Loi sur les espèces en péril
tient compte de ces savoirs, en reconnaissant les liens particuliers qu’entre-
tiennent les Autochtones avec les ressources écologiques, autant pour des fins
alimentaires, sociales et spirituelles, que commerciales. La Loi stipule égale-
ment que le savoir traditionnel autochtone doit être pris en considération au
moment des évaluations des espèces en péril et de l’élaboration et de l’appli-
cation de mesures de protection et de rétablissement. Le Fonds autochtone
pour les espèces en péril a été créé en 2004-2005 afin de mettre en œuvre cette
vision.16 Au Québec, la Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier
(2009) représente également une avancée importante en matière d’intégration
des savoirs et intérêts des Autochtones dans la gestion des ressources et du
territoire.17
Alors que certains considèrent la clarification du cadre de gestion des ressources
naturelles comme un moyen de soutenir l’autonomisation des communautés
autochtones et d’harmoniser leurs relations avec les Allochtones, d’autres la
conçoivent comme une incursion supplémentaire, par la société dominante,
dans les affaires autochtones. Car les mécanismes de cogestion des ressources
reposent parfois sur une conception du territoire et de sa gouvernance qui irait
à l’encontre de la gestion coutumière et des savoirs traditionnels autochtones
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sur lesquels elle s’appuie. Il est vrai que les défis sont nombreux lorsqu’il s’agit
de marier différentes ontologies du territoire et de concevoir des modèles de
gestion basés sur une diversité de modes de production du savoir. Qu’il s’agisse
des mesures de développement durable, d’adaptation aux changements clima-
tiques ou de conservation du territoire et des espèces, le savoir scientifique
est souvent conçu comme un système de connaissances universel auquel les
savoirs autochtones doivent être intégrés. Une telle perspective ne remet pas en
cause le cadre de référence : elle laisse donc trop peu de place aux savoirs issus
de la pratique, aux perspectives théoriques autochtones ou aux cosmologies
dans lesquelles ils s’imbriquent, les envisageant plutôt comme une manière
subjective d’exprimer les données objectives issues de modes de production du

16. « Loi sur les espèces en péril. » Ministère de la justice – Canada, en ligne : http://laws-
lois.justice.gc.ca/fra/lois/S-15.3/page-1.html (consulté le 11 septembre 2011) ; « Fonds autochtone
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savoir occidental (Lévesque 2002). Pourtant, les savoirs dits « scientifiques » et


« traditionnels » sont loin d’être dissimilaires. En ce qui concerne plus spécifi-
quement les connaissances écologiques traditionnelles (traditional ecological
knowledge ou TEK), celles-ci sont basées, à l’instar des savoirs occidentaux, sur
une accumulation d’observations empiriques, à cette différence près qu’elles
sont avant tout concrètes plutôt qu’abstraites, et qu’elles sont généralement
transmises de façon orale ; ceci via des traditions historiques qui sont à leur
tour encodées dans des rituels et dans les pratiques culturelles du quotidien
(Feyerabend 1996). Ce type de connaissance n’est pas spécifique aux peuples
autochtones mais représente plutôt un attribut des sociétés où une continuité
historique existe dans les pratiques et les modes d’exploitation des ressources.
Si de telles sociétés sont le plus souvent non industrielles ou moins axées sur les
technologies de pointe, toutes ne sont pas autochtones ou tribales (Berkes, Col-
ding et Folke 2000, p. 1252). Les modes de transmission des TEK sont variés
et différents porteurs de connaissances – aînés, chasseurs, pêcheurs, conteurs,
guérisseurs, chefs, gardiens du territoire, etc. – ont la responsabilité de veiller
à leur transmission, que ce soit par les voies traditionnelles ou en utilisant les
nouvelles technologies de l’information. Dans les communautés où les rituels,
cérémonies et traditions se pratiquent toujours de façon régulière, les individus
n’ont pas à déployer d’efforts spéciaux pour préserver leurs connaissances : ils
pratiquent tout simplement leur culture (Chapin cité dans Berkes, Colding et
Folke 2000, p. 1258).
À la fois holistiques et adaptatives, les TEK forment un complexe de
« connaissance-pratique-croyance » où chacun de ces éléments est défini dans
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sa relation avec les autres (Berkes 1999). La vision du monde, les valeurs cultu-
relles, les règles et les normes éthiques font partie intégrante de ce complexe et
doivent déterminer les actions des individus et des institutions qui veillent à
la santé du territoire : autant les connaissances que les institutions requièrent
des mécanismes permettant d’internaliser la culture afin que l’apprentissage
puisse être encodé et mémorisé par le groupe social (Berkes, Colding et Folke
2000, p. 1256). Quand on sait que les initiatives de cogestion des ressources
sont le plus souvent déployées lorsque l’exploitation économique est en jeu,
la prise en compte des TEK de façon holistique est loin d’être chose simple.
L’intégration des dimensions culturelles, éthiques et économiques dans un
plan d’exploitation où chacune est valorisée de façon égale peut impliquer des
compromis que les acteurs ne sont pas prêts à faire. D’un côté, la nécessité
pour les communautés de répondre à des besoins importants en matière de
création d’emplois et de génération de revenus et, de l’autre, les priorités
financières des entrepreneurs et investisseurs, créent un contexte où le triptyque
« connaissance-pratique-croyance » peut être vu comme un anachronisme dans
les conditions de gestion des ressources qui prévalent aujourd’hui, ou même
un frein au développement. Dans ce contexte, seuls les savoirs plus techniques

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Les Autochtones au Canada : espaces et peuples en mutation

sont retenus et mis de l’avant, au détriment de la cosmologie et des valeurs


culturelles auxquels ils sont rattachés. Toutefois, avec l’apport grandissant
d’une éthique de développement durable qui trouve son origine dans le rapport
Brundtland (1987), la gestion des ressources en tant que pratique culturelle
demeure un objectif vers lequel s’orientent les modèles de cogestion malgré les
pressions liées aux marchés ou à l’urgence d’améliorer les conditions de vies
des communautés autochtones.

◮ Urbanités
Les développements politiques des années 1970 et 1980 localisaient la question
des droits territoriaux des Autochtones en milieu rural ou géographiquement
excentré des zones majeures de peuplement européen, comme ce fut le cas
pour les dossiers touchant aux régions nordiques. La crise d’Oka de 1990 a
ramené la problématique du partage du territoire résolument en milieu urbain,
soit dans la grande région de Montréal. Surnommée « l’été Indien », cette
période s’est étendue du 11 mars au 26 septembre. L’événement déclencheur
fut une décision municipale qui portait atteinte à un territoire amérindien : afin
d’agrandir un terrain de golf, la ville d’Oka menaçait d’empiéter sur une pinède
où se trouve le cimetière des Mohawks de Kanesatake. Ceux-ci protestèrent
contre le projet d’agrandissement du golf, d’abord par une occupation pacifique
du territoire puis, devant le refus des autorités locales de négocier, en dressant
des barricades. Dans un geste de soutien, une autre communauté Mohawk –
Kahnawake, située au sud de Montréal – a bloqué de son côté le pont Mercier,
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perturbant grandement les déplacements des résidants de la banlieue vers
la métropole. Le siège donna lieu à une confrontation violente le 11 juillet
entre les rebelles Mohawks et les policiers de la Sûreté du Québec se soldant
tragiquement par la mort du Caporal Marcel Lemay. Après des négociations,
l’occupation de la pinède se termina à la fin du mois de septembre par une
cérémonie symbolique où les « Warriors » démantelèrent leurs fusils, brûlèrent
du tabac et retournèrent vers la réserve. Néanmoins, l’impact de cette crise
continua d’ébranler la société québécoise, et canadienne, pendant plusieurs
années.18
Les événements d’Oka ont, en effet, mené à une vaste commission d’enquête
mise sur pied en 1991 – la Commission royale sur les peuples autochtones
ayant pour mandat d’étudier l’évolution des relations entre les peuples autoch-
tones, le gouvernement du Canada et la société canadienne dans son ensemble.
Co-présidée par Georges Erasmus, ancien Chef national de l’Assemblée des

18. Pour une description plus détaillée des événements consultez : Ciaccia (2000) ; Desbiens (2011) ;
Lamarche (1992) ; York et Pindera (1991).

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Premières nations, et le juge René Dussault de la Cour d’appel du Québec, la


commission était formée de sept commissaires dont quatre d’origine autochtone.
Elle commanda plus de 350 projets de recherche et visita plusieurs communau-
tés autochtones à la grandeur du Canada, recueillant les mémoires de plus de
2000 personnes au cours d’audiences publiques. Le rapport, déposé en 1996,
comprend cinq volumes : Un passé, un avenir ; Une relation à redéfinir (2
parties) ; Vers un ressourcement ; Perspectives et réalités et Vingt ans d’action
soutenue pour le renouveau. Ce qui ressort du rapport, c’est essentiellement la
nécessité d’une restructuration complète des relations entre les peuples autoch-
tones et non autochtones du Canada. La Commission a fait plusieurs recomman-
dations, notamment celle de régler les revendications territoriales, d’accroître
l’assise territoriale des communautés autochtones et d’améliorer les conditions
de vie de ces dernières19 . Cette démarche devrait être basée sur quatre prin-
cipes, soit la reconnaissance, le respect, le partage et la responsabilité : « Pour
retrouver l’essence de la relation originelle entre les autochtones et les sociétés
colonisatrices, il faut mettre en place les éléments d’un partenariat moderne.
Le point de départ de cette transformation est la reconnaissance des nations
autochtones » (Canada 1996). Cette reconnaissance doit prendre en compte la
diversité des groupes autochtones et de leurs structures de gouvernance, qui
sont tributaires des espaces qu’ils occupent.
Quinze ans après le dépôt du rapport, de nombreuses recommandations de la
Commission sont restées lettre morte (Brant Castellano 2001). Le constat de
la diversité des modes de gouvernance, toutefois, ouvre des voies de réflexion
importantes sur la question urbaine. Alors qu’en régions éloignées, les nations
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bénéficient d’une certaine autonomie, la présence des Autochtones en milieu
urbain exige une approche réfléchie et adaptée au contexte culturel, démo-
graphique et géographique de la ville. Pour certaines nations, cette présence
est historique car leurs territoires, d’abord situés à proximité d’établissements
allochtones, ont été rejoints par l’expansion urbaine : c’est le cas, entre autres,
des Musqueam à Vancouver, des Mohawks à Montréal, ou des Wendat à Québec.
Dans d’autres cas, la présence d’Autochtones en ville résulte de la migration
d’individus pour différentes raisons : éducation, santé, emploi, recherche de
conditions meilleures au-delà de la réserve. Les femmes sont souvent à l’origine
de l’établissement de communautés en ville, et ceci en raison d’un article discri-
minatoire de la Loi sur les Indiens qui voulait que leur statut leur soit révoqué
lorsqu’elles se mariaient à une personne non-autochtone (Gill, 1995). Cette
mesure ne touchait pas les hommes indiens : au contraire, leur épouse alloch-
tone accédait au statut autochtone – sans qu’aucune ancestralité ou familiarité

19. « Commission royale d’enquête sur les autochtones. » L’Encyclopédie canadienne, en ligne :
http://www.thecanadianencyclopedia.com/articles/fr/commission-royale-denquete-sur-les-autochtones
(consulté le 18 septembre 2012).

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Les Autochtones au Canada : espaces et peuples en mutation

avec la culture ne soit nécessaire – lors d’une union légale. N’ayant plus droit de
résidence dans leur communauté ou aux services liés au statut indien, nombre de
femmes mariées à des non-Indiens ont été forcées de s’exiler en ville avec leur
famille. Cette clause discriminatoire fut contestée par Jeannette Corbière Lavell
et Yvonne Bédard (respectivement d’origine anishnabe et iroquoise) au début
des années 1970. Toujours fermement ancrée dans une logique d’assimilation,
la Cour suprême du Canada conclut que, puisque les deux femmes avait accédé
à l’ensemble des droits canadiens en perdant leur statut indien, cette clause ne
constituait pas un acte de discrimination (Lawrence, 2003 ; Lavell-Harvard et
Corbière-Lavell, 2006). En 1981, Sandra Lovelace (malécite) se présenta au
Comité des droits de l’homme (sic) de l’Organisation des Nations Unies (ONU)
et obtint gain de cause : la loi sur les Indiens fut amendée en 1985 par la loi
C-31. Bien que plusieurs femmes ont été en mesure de réintégrer leur statut
indien grâce à cette nouvelle loi, de nombreux problèmes persistent jusqu’à
nos jours : leurs enfants et petits-enfants sont soumis à différentes catégories
de statuts qui, dans le cas de mariages entre Autochtones de différents statuts
ou entre Autochtones et non-Autochtones, agissent comme un entonnoir où
l’éventail des droits reconnus se rétrécit de plus en plus, jusqu’à devenir pra-
tiquement inexistant à mesure que les générations se succèdent (Sayers et al.,
2001 ; NWAC, 1991).
Quelles que soient les raisons de la présence des Autochtones en ville, l’urba-
nité autochtone est un phénomène qui gagne en importance partout au Canada
(Peters 2007 et 2010). Le recensement canadien de 2006 a relevé 623 470
Autochtones vivant en milieu urbain, dont 50 % étaient des membres des Pre-
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mières nations et 43 % des Métis.20 Bien que le nombre d’Inuit soit plus restreint
dans les villes canadiennes, ils demeurent visibles grâce à leurs associations
et institutions culturelles (Kishigami 2008). Environ 25 % de l’ensemble de la
population autochtone vit dans 9 des 33 régions métropolitaines du pays. C’est
Winnipeg qui compte le plus grand nombre d’Autochtones, à savoir 68 380 per-
sonnes, ce qui représente 10 % des résidants de la ville. Cette population se
compose majoritairement de Métis, ensuite des membres des Premières nations
et des Inuit. Les villes suivantes comptent aussi des concentrations importantes
de membres des premiers peuples : Saskatoon et Régina (chacune avec 9 %
de la population de la ville), Calgary (2 %) et Toronto (0,5 %). Dans la pro-
vince de Québec, les villes de Montréal, Val d’Or, Chibougamau, La Tuque,
Québec et Sept-Iles comptent les plus grandes concentrations. Comme le sou-
ligne l’anthropologue Carole Lévesque, si le phénomène est plus récent au
Québec que dans l’Ouest du Canada, il s’est fortement accentué depuis les

20. « La population autochtone urbaine » (Ottawa : Statistique Canada). En ligne :


http://www41.statcan.ca/2008/10000/ceb10000_002-fra.htm (consulté le 19 septembre 2012). Toutes les
statistiques sur la population urbaine sont tirées de ce site.

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années 1980, avec pour résultat que les Autochtones gagnent à la fois en visi-
bilité et en diversité dans les villes québécoises (Lévesque, 2003, p. 25). La
ville structure désormais des formes contemporaines de mobilité, donne nais-
sance à de nouvelles institutions et devient un espace public autochtone propice
à la prise de parole ainsi qu’à des mobilisations citoyennes pan-autochtones.
Ces dynamiques sont à la base de réseaux qui prennent de l’expansion entre
les communautés autochtones, les centres urbains et les instances gouverne-
mentales, voire internationales, comme l’ONU ou Amnistie internationale au
sein desquelles les Premiers peuples sont très actifs. Une grande partie de ces
réseaux trouvent leur genèse dans la création d’un Centre d’amitié autochtone
(CAA) en milieu urbain. Créés à l’origine pour offrir du soutien aux individus,
soit lors d’un séjour limité soit lors d’un déménagement plus permanent en
ville, les CAA ont grandement élargi leur palette de services, développant des
programmes en éducation, santé, emploi, logement, petite enfance, soutien aux
familles, transmission de la culture, etc. Les CAA sont reliés par une associa-
tion pan-canadienne, la National Association of Friendship Centres (NAFC), de
même que par des organisations parapluie opérant à l’échelle provinciale, tels
que le Regroupement des centres d’amitié autochtones du Québec (RCAAQ).21
À ces réseaux s’ajoutent les bureaux des associations et des gouvernements
autochtones qui détiennent une antenne en ville, les musées et les institutions
culturelles, les établissements d’éducation et de formation ou encore les entre-
prises détenues par des individus Inuit ou issus des Premières nations. Les lieux
de rencontre moins structurés, mais bien connus et fréquentés par la population
autochtone, sont également nombreux, allant des quartiers et cafés en passant
par les lieux domestiques.
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La somme de ces espaces physiques ou virtuels constitue ce que Newhouse
et Peters (2003) ont décrit comme une « infrastructure invisible. » Ainsi, la
présence autochtone en ville « n’est plus seulement une affaire de personnes ;
elle est aussi une affaire de collectivités et d’institutions, de réseaux et de
projets » (Lévesque 2003, p. 25). Qui plus est, les échanges favorisés par ces
espaces contribuent à développer ce qu’on pourrait voir comme un multicultu-
ralisme autochtone : « [la ville] est également en position de devenir un relais
entre les communautés autochtones d’une part, et entre les Premières nations,
d’autre part. Ce faisant, de nouveaux liens se tissent entre la ville et la commu-
nauté autochtone. Des ponts se construisent de plus en plus fréquemment entre
ces deux milieux de vie longtemps perçus et étudiés comme opposés, voire
incompatibles » (ibid.). Hautement diversifiée, cette infrastructure invisible –
de même que les pratiques qu’elle engendre – questionne le modèle fédéral de
gouvernance et de distribution de services qui, depuis l’instauration de la loi
sur les Indiens en 1867, s’acharne à réduire les Autochtones à l’espace de la

21. NAFC : http://www.nafc.ca ; RCAAQ : http://www.rcaaq.info/fr/accueil.html.

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Les Autochtones au Canada : espaces et peuples en mutation

réserve en y rattachant leurs droits. Cherchant toujours à réactualiser la géogra-


phie coloniale et l’appareil disciplinaire qui l’accompagne, cette assignation de
force des Autochtones à la réserve, cadre bien peu avec le vécu des individus,
et ce d’hier à aujourd’hui (Peters 2006).

◮ Conclusion
Les identités et les territorialités autochtones au Canada sont aujourd’hui,
plus que jamais, en mutation et en voie de reconfiguration. L’évolution des
négociations territoriales globales, la conclusion d’ententes entre les peuples
autochtones et les gouvernements provinciaux et fédéral, ainsi que la mise en
œuvre de modèles de co-gestion des ressources naturelles laissent penser que le
Canada a désormais choisi de respecter les aspirations culturelles et politiques
des Premières nations, des Inuit et des Métis.
Et pourtant, nous ne sommes peut-être pas encore tout à fait sortis de la vision
assimilationniste prévalant depuis le XIXe siècle en matière de reconnaissance
de droits autochtones au Canada. En témoignent, premièrement, la parution
récente de l’ouvrage de Tom Flanagan, Christopher Alcantara et André Le
Dressy, intitulé Au-delà de la loi sur les Indiens. Rétablir les droits de propriété
autochtone au Canada (Flanagan et al. 2011) ; deuxièmement, l’intention
du gouvernement Harper, annoncée en décembre 2011, d’examiner avec les
Premières nations intéressées l’adoption de mesures législatives en faveur de
la propriété privée de la terre à l’intérieur des réserves. De telles mesures
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sont considérées par leurs pourfendeurs comme susceptibles de contribuer à
remédier à la pauvreté structurelle de la majorité de la population autochtone.
Pour l’instant, toutefois, une telle proposition n’a reçu qu’un soutien limité
de la part des communautés autochtones qui n’y voient qu’une tentative de
plus pour faire disparaître leurs terres et leurs territoires ancestraux. Plusieurs
d’entre elles voient dans la propriété privée une notion imposée de l’extérieur
et un moyen supplémentaire pour limiter leur contrôle sur leurs territoires et
leurs ressources naturelles. Elles ont peut-être raison. Car s’il est admis que
la propriété collective de la terre a des limitations certaines dans le cadre de
l’économie de marché dominante (impossibilité d’obtenir, par exemple, un
prêt hypothécaire auprès d’une institution financière), il reste que l’histoire a
montré que la privatisation des terres autochtones entraîne souvent aussi leur
démantèlement : dans des sociétés inégalitaires marginalisant les Autochtones,
ces derniers ont tendance à vendre leurs terres lorsqu’ils se retrouvent dans
une situation économique précaire. Les débats sur la privatisation des droits de
propriété autochtones, s’ils soulèvent des problèmes importants, ne doivent
donc pas moins être appréhendés avec prudence, car ils risquent bien de
réintroduire, sous de nouvelles formes, d’anciennes visées assimilationnistes.

42 Information géographique n°4 - 2012

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Par ailleurs, débattre de la gouvernance autochtone et du statut juridique ou


politique des terres ou des territoires autochtones ne doit pas nous empêcher de
tenir également compte de la territorialité des populations, vécue au quotidien,
soit de leurs pratiques et de leurs représentations spatiales. Car la mobilité
géographique et la présence croissante des Autochtones en ville s’avèrent
encore largement sous-estimées, autant par les recherches que par les politiques
publiques. Or l’urbanité, parce qu’elle élargit l’assise géographique du statut et
des droits autochtones à la ville, constitue aujourd’hui le moteur d’une profonde
et nécessaire remise en question de la gouvernance, des territorialités et des
identités, non seulement au Québec, mais aussi au Canada et à la grandeur des
Amériques.
Pour conclure, les cultures autochtones, comme d’autres cultures minoritaires,
se caractérisent moins par une « essence » culturelle qui perdurerait dans
le temps, que par une capacité à maintenir leur différence face à la société
dominante, même si le contenu de cette différence est constamment appelé
à changer. À l’encontre des images folklorisantes qui malgré tout persistent,
les Autochtones sont résolument « modernes », chaque nouvelle génération
renouvelant la grammaire de son identité et de sa territorialité. Partout en
Amérique, la culture des Inuit, Métis et Premières nations existe bel et bien au
présent. Lorsqu’il est question de tradition, le dilemme est loin de se poser de
façon simpliste, à savoir s’il faut lui tourner le dos – et donc renier son identité
autochtone – pour entrer dans la modernité, ou s’il s’agit plutôt de déterminer
quelle place et quel rôle accorder à cette tradition dans l’expression d’une
contemporanéité unique et spécifique. À ce titre, les Autochtones détiennent
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un vaste éventail de savoirs et de stratégies susceptibles d’inspirer toutes
les cultures qui, minoritaires ou majoritaires, doivent relever le défi de leur
continuité.

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Information géographique n°4 - 2012 43

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