Vous êtes sur la page 1sur 21

See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.

net/publication/250250497

Les séquences littorales pléistocènes de l'Atlas atlantique entre Cap Rhir et


Agadir, Maroc [Pleistocene littoral sequences of the atlantic Atlas between
Agadir an Cape Rhir, Moroc...

Article  in  Quaternaire · January 1999


DOI: 10.3406/quate.1999.1645

CITATIONS READS

28 446

6 authors, including:

André Weisrock Serge Occhietti


Muséum National d'Histoire Naturelle Université du Québec à Montréal
175 PUBLICATIONS   722 CITATIONS    114 PUBLICATIONS   2,380 CITATIONS   

SEE PROFILE SEE PROFILE

Pierre Pichet
Université du Québec à Montréal
36 PUBLICATIONS   1,107 CITATIONS   

SEE PROFILE

Some of the authors of this publication are also working on these related projects:

human occupation and travertine deposits in Morocco View project

Quaternary continental units in Eastern France View project

All content following this page was uploaded by André Weisrock on 06 May 2015.

The user has requested enhancement of the downloaded file.


André Weisrock
Serge Occhietti
Chi-Trach Hoang
Agnès Lauriat-Rage
Philippe Brebion
Pierre Pichet

Les séquences littorales pléistocènes de l'Atlas atlantique entre


Cap Rhir et Agadir, Maroc [Pleistocene littoral sequences of the
atlantic Atlas between Agadir an Cape Rhir, Morocco]
In: Quaternaire - Volume 10 - Numéro 2-3 - 1999. pp. 227-244.

Citer ce document / Cite this document :

Weisrock André, Occhietti Serge, Hoang Chi-Trach, Lauriat-Rage Agnès, Brebion Philippe, Pichet Pierre. Les séquences
littorales pléistocènes de l'Atlas atlantique entre Cap Rhir et Agadir, Maroc [Pleistocene littoral sequences of the atlantic Atlas
between Agadir an Cape Rhir, Morocco]. In: Quaternaire - Volume 10 - Numéro 2-3 - 1999. pp. 227-244.

doi : 10.3406/quate.1999.1645

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/quate_1142-2904_1999_num_10_2_1645
Résumé
Le long de la côte de l'Atlas atlantique marocain, entre Agadir et Cap Rhir, on observe trois terrasses
marines déformées d'âge pleistocene tranchées en basses falaises par l'Océan vers 50, 20 et 0-8 m,
en-dessous d'une large surface d'abrasion marine d'âge cénozoïque, formant la «rasa moghrébienne»,
soulevée entre 100 et 600 m d'altitude.
Des études géomorphologiques, sédimentologiques et faunistiques, ainsi que des datations U-Th et U-
Pa, ont permis de relier ces trois terrasses à trois étages du Quaternaire marin marocain : Maarifien,
Harounien (= Agadirien) et Ouljien (Weisrock, 1980 ; Brébion et al, 1984).
Le Maarifien constitue ici une remarquable terrasse, observée vers 35-55 m d'altitude, entre Agadir et
Cap Rhir. Les dépôts y présentent deux faciès : un faciès inférieur contenant surtout des Gastéropodes,
avec deux espèces tropicales caractéristiques (Nucella plessisi et Calyptraea trochiformis), un faciès
supérieur régressif contenant surtout un Bivalve, Acanthocardia tuberculata.
Les carrières du premier port d'Agadir ont fourni d'excellentes coupes des séquences de l'Agadirien et
de l'Ouljien. L' Agadirien, à 20 m, est daté (en âges minima) entre 139 000 et 310 000 ans B.P. par cinq
mesures 230Th/234U et 231Pa/235U effectuées sur le même site, où plus de 80 espèces de Bivalves
et Gastéropodes ont été déterminées. Il est rare de retrouver des traces de cette séquence au Nord
d'Anza (nouveau port d'Agadir).
L'Ouljien forme d'Agadir au Cap Rhir une basse plage fossile également riche en espèces ; les âges U-
Th et U-Pa obtenus à Agadir s'établissent (en âges minima) entre 70 000 et 150 000 ans B.P. (21
mesures).
De nouvelles mesures par amino-chronologie effectuées sur certaines espèces (Patella, Thais, Mytilus)
des deux séquences agadirienne et ouljienne confirment ces résultats. Ceux-ci restent toutefois encore
trop peu nombreux pour relier de façon sûre la séquence agadirienne à la chronologie isotopique ; la
corrélation Agadirien - stade 9 n'est pas à exclure, au vu des datations et de leurs implications
tectoniques ; la corrélation Ouljien - stade 5 est en revanche acquise.

Abstract
Along the Atlantic Atlas coast of Morocco, between Agadir and Cape Rhir, three main deformed
Pleistocene marine terraces reach the sea in low cliffs at 50, 20 and 0-8 meter high, under a wide,
largely planed Cenozoic marine erosional surface forming the «Moghrebian rasa», raised 100 to 600 m
above the sea-level. Geomorphological together with sedimentological and fauna! studies, and with U-
Th and U-Pa measurements, allowed us to recognize here three of the Moroccan Marine Quaternary
cycles : Maarifian, Agadirian (=Harounian) and Ouljian (Weisrock, 1980 ; Brébion et al., 1984). Maarifian
forms a remarkable 35 to 55 m high terrace which is nearly continuous between Agadir and Cape Rhir,
with two faciès, the Lower containing most Gastropods, with especially two tropical species (Nucella
plessisi and Calyptraea trochiformis), the Upper regressive one containing mainly a Bivalve,
Acanthocardia tuberculata. Outcrops at the first port of Agadir provided excellent sections of the
Agadirian and Ouljian sequences. The Agadirian, at 20 m, is dated (five 230Th/234U and 231 Pa/23 5U
measurements on the same site where, in addition, more than 80 species of Bivalves and Gastropods
have been determined) between 159,000 and 310,000 years B.P ad minimum. It is very difficult to find
this level North from Anza (new port of Agadir). The Ouljian, a low beach rich also in species, is well
deposited from Agadir to Cape Rhir between 0 and 8 m ; U-Th and U-Pa dates (21 measurements) are
ranged between 70,000 and 150,000 B.P. (ad minima ages).
New amino-chronology measurements on three species (Patella, Thais, Mytilus) of Agadirian and
Ouljian sites agree with these results. So, Ouljian can be correlated with oxygen-isotop stage 5 ;
however, measurements remains insufficient to correlate surely Agadirian and isotopic chronology.
Moreover, dates and their tectonic implications would allow to correlate Agadirian and stage 9.
Quaternaire, 10, (2-3), 1999, p. 227-244.

LES SEQUENCES LITTORALES PLEISTOCENES


DE L'ATLAS ATLANTIQUE
ENTRE CAP RHLR ET AGADIR, MAROC

André WEISROCK*, Serge OCCHIETTI**, Chi-TrachHOANG***, Agnès LAURIAT-


RAGE****, Philippe BREBION**** et Pierre PICHET**

RÉSUMÉ

Le long de la côte de l'Atlas atlantique marocain, entre Agadir et Cap Rhir, on observe trois terrasses marines déformées d'âge
pleistocene tranchées en basses falaises par l'Océan vers 50, 20 et 0-8 m, en-dessous d'une large surface d'abrasion marine d'âge cénozolque,
formant la «rasa moghrébienne», soulevée entre 100 et 600 m d'altitude.
Des études géomorphologiques, sédimentologiques et faunistiques, ainsi que des datations U-Th et U-Pa, ont permis de relier ces trois
terrasses à trois étages du Quaternaire marin marocain : Maarifien, Harounien (= Agadirien) et Ouljien (Weisrock, 1980 ; Brébion et al, 1984).
Le Maarifien constitue ici une remarquable terrasse, observée vers 3S-SS m d'altitude, entre Agadir et Cap Rhir. Les dépôts y présentent
deux faciès : un faciès inférieur contenant surtout des Gastéropodes, avec deux espèces tropicales caractéristiques (Nucella pies si si et
Calyptraea trochiformis), un faciès supérieur régressif contenant surtout un Bivalve, Acanthocardia tuberculata.
Les carrières du premier port d'Agadir ont fourni d'excellentes coupes des séquences de l'Agadirien et de l'Ouljien. L' Agadirien, à 20 m,
est daté (en âges minima) entre 139 000 et 310 000 ans B.P. par cinq mesures 230Th/234U et 231Pa/235U effectuées sur le même she, où plus
de 80 espèces de Bivalves et Gastéropodes ont été déterminées. Il est rare de retrouver des traces de cette séquence au Nord d'Anza (nouveau
port d'Agadir).
L'Ouljien forme d'Agadir au Cap Rhir une basse plage fossile également riche en espèces ; les âges U-Th et U-Pa obtenus i Agadir
s'établissent (en âges minima) entre 70 000 et 150 000 ans B.P. (21 mesures).
De nouvelles mesures par amino-chronologie effectuées sur certaines espèces {Patella, Thais, Mytilus) des deux séquences agadirienne et
ouljienne confirment ces résultats. Ceux-ci restent toutefois encore trop peu nombreux pour relier de façon sûre la séquence agadirienne à la
chronologie isotopique ; la corrélation Agadirien • stade 9 n'est pas à exclure, au vu des datations et de leurs implications tectoniques ; la
corrélation Ouljien - stade 5 est en revanche acquise.
Mots-clés : Plages fossiles, niveau marin, faunes marines, datations, Pleistocene, Atlantique, Agadir, Maroc.

ABSTRACT

PLEISTOCENE LITTORAL SEQUENCES OF THE ATLANTIC ATLAS BETWEEN AGADIR AND CAPE RHIR, MOROCCO
Along the Atlantic Atlas coast of Morocco, between Agadir and Cape Rhir, three main deformed Pleistocene marine terraces reach the
sea in low cliffs at 50, 20 and 0-8 meter high, under a wide, largely planed Cenozoic marine erosional surface forming the «Moghrebian rasa»,
raised 100 to 600 m above the sea-level.
Geomorphological together with sedimentological and fauna! studies, and with U-Th and U-Pa measurements, allowed us to recognize
here three of the Moroccan Marine Quaternary cycles : Maarifian, Agadirian (=Harounian) and Ouljian (Weisrock, 1980 ; Brébion et al., 1984).
Maarifian forms a remarkable 35 to 55 m high terrace which is nearly continuous between Agadir and Cape Rhir, with two faciès, the
Lower containing most Gastropods, with especially two tropical species {Nucella plesstsi and Calyptraea trochiformis), the Upper regressive
one containing mainly a Bivalve, Acanthocardia tuberculata.

• Université de Nancy II, Laboratoire de Géographie physique, B.P. 33-97, F-54015 NANCY Cedex, weisrock @ clsh. univ-nancy2. fr.
•• Université du Québec i Montréal, Laboratoire Géotop, CP 8888 Centre Ville, MONTREAL, Québec, Canada, H3C 3P8.
*♦* Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement, Unité mixte de recherche CEA-CNRS, Avenue de la Terrasse, F-91198 GIF-
SUR-YVETTE Cedex.
♦♦*♦ Museum National d'Histoire Naturelle, 8 Rue Buffon, F-75005 PARIS.
Manuscrit reçu le 18/03/1998, accepté le 15/02/1999.
228
Outcrops at the first port of Agadir provided excellent sections of the Agadirian and Ouljian sequences. The Agadirian, at 20 m, is dated
(five 230Th/234U and 231 Pa/23 5U measurements on the same site where, in addition, more than 80 species of Bivalves and Gastropods have
been determined) between 159,000 and 310,000 years B.P ad minimum. It is very difficult to find this level North from Anza (new port of
Agadir).
The Ouljian, a low beach rich also in species, is well deposited from Agadir to Cape Rhir between 0 and 8 m ; U-Th and U-Pa dates (21
measurements) are ranged between 70,000 and 150,000 B.P. (ad minima ages).
New amino-chronology measurements on three species (Patella, Thais, Mytilus) of Agadirian and Ouljian sites agree with these results.
So, Ouljian can be correlated with oxygen-isotop stage 5 ; however, measurements remains insufficient to correlate surely Agadirian and
isotopic chronology. Moreover, dates and their tectonic implications would allow to correlate Agadirian and stage 9.
Key-words : Fossil beaches, sea-level, marine faunas, datations, Pleistocene, Atlantic Ocean, Agadir, Morocco.

Une tendance globale à la surrection fait qu'un étage- résultats ne peuvent être considérés comme définitifs, pas
ment de trois terrasses marines d'âge pleistocene s'ob plus que leurs implications tectoniques.
serve sur le littoral atlantique de l'Atlas (extrémité occi
dentale du Haut Atlas) au Nord d'Agadir (fig. 1). Ces trois I - LA TERRASSE MARINE DE +35-55 M :
terrasses marines se situent toutes en contrebas d'une LE«MAARIFIEN»
large surface d'abrasion pliocène et plio-pléistocène ap
pelée ici «rasa moghrébienne», et s'étagent au pied d'une Cette terrasse marine est bien développée le long du
haute falaise morte qui limite cette rasa élevée du côté de littoral entre Agadir et le Cap Rhir. Dans 17 sites (fig. I), on
l'océan. a observé une séquence régressive qui débute toujours à
Cet article a pour but de faire le point des connaissances la base par des dépôts marins clairement identifiables. La
acquises sur ces séquences littorales pleistocenes au cours coupe-type choisie, Assif Tamghart, montre la même s
des vingt dernières années. Il se limite volontairement au équence en quatre endroits distants de quelques hectomèt
littoral de l'Atlas atlantique sensu stricto, entre Agadir et res, de part et d'autre de l'oued (= assif) Tamghart : Douar
Cap Rhir, c'est-à-dire sur une portion de la côte atlantique Sihel Nord et Sud, Tama Ou Ennza et Carrière Bouzellou
marocaine de 50 km de long, où les plages fossiles sont (fig. 2a).
étagées au droit d'anticlinaux recoupés perpendiculaire
ment par la côte ; celle-ci bénéficie actuellement d'un cl 1 - LA COUPE-TYPE D' ASSIF TAMGHART : UNE S
imat semi-aride chaud, de type «macaronésien», tempéré ÉQUENCE LITTORALE TRANSGRESSIVE-RÉGRESSIVE
par les eaux océaniques fraîches (surtout au Cap Rhir) et CLASSIQUE
les brouillards côtiers. Ces circonstances ont permis une
bonne conservation des plages fossiles, soulevées et par a) Coupe de Douar Sihel-Nord (coordonnées Lambert :
fois déformées par la néotectonique atlasique, mais fossi x= 89,1 ; y= 398,4 ; z= 50 m)
lisées sous des dunes et dépôts continentaux protégés
par les encroûtements calcaires. De bas en haut, on observe (fig. 2b) :
Par référence aux étages du Quaternaire marin du Maroc 1 a = Ravinant le substratum argileux jaune clair du
atlantique définis antérieurement (Gigout, 1949 ; Biberson, Maestrichtien, une lumachelle contenant aussi des galets
1961) et par ordre d'altitude et chronologique décroissants, de calcaires locaux forme une corniche de 10 m de hauteur.
on a identifié (Weisrock, 1980; 1993 ;Brébione/a/., 1984), La macrofaune de cette plage fossile basale est riche : on y
une terrasse «maarifienne», située entre +38 et +55 m, une a récolté 4 espèces de Bivalves et 20 espèces de Gastéro
terrasse «agadirienne» (dite «harounienne» à Casablanca, podes(cf. tab. 1 et 2). Parmi les Gastéropodes, il faut signa
Biberson, 1958) vers +20 m, et une terrasse «ouljienne», ler Calyptraea trochiformis et Nucella plessisi, deux es
entre 0 et +8 m. pèces «tropicales» caractéristiques du Quaternaire ancien
Toutes comportent à leur base des plages fossiles qui et moyen du Maroc.
ne sont ni continues, ni certainement synchrones aux di 1 b = Au sommet de ce dépôt, le matériel devient essen
vers points où elles ont été conservées. Ces différents tiellement sableux et limoneux, en même temps qu'il se ru
dépôts de plages fossiles présentent cependant des ca béfie. La composition de la macrofaune se modifie complè
ractéristiques géomorphologiques, sédimentologiques et tement : les Gastéropodes disparaissent et sont remplacés
faunistiques qui demeurent relativement constantes le long par des Cardiidae de grosse taille, de l'espèce
d'une même terrasse. Acanthocardia tuber culata.
Si ces séquences sédimentaires littorales sont bien ob 2 = Sables biodétritiques jaune clair, relativement gross
servables et leurs faunes bien connues, il subsiste des iers, disposés en litages inclinés à 20° S-E. Il s'agit d'un
incertitudes concernant leurs âges et leurs correspondan haut de plage passant progressivement à une dune litto
ces avec les stages isotopiques. Deux programmes suc rale.
cessifs de datations sur coquilles ont été effectués : le 3 = En surface, l'ensemble est tronqué par un glacis
premier par la méthode isotopique U-Th et U-Pa (Hoang et d'érosion : la dune passe à un encroûtement farineux qui
al, 1978 ; Weisrock, 1980 ; Brêbionetal., 1984) ; le second, se termine par une dalle calcaire blanchâtre pouvant at
par l'aminochronologie (Occhietti et Pichet, infra). Leurs teindre jusqu'à 10 cm d'épaisseur.
229

< /' y \;yp—J

numéros

Fig. 1 : Le littoral de l'Atlas atlantique entre Cap Rhir et Agadir.


1 - anticlinal, 2 - pérklinal plongeant, 3 - synclinal, 4 - flexure, S - crêt, 6 - falaise vive, 7 - falaise morte ouljienne, 8 * grande
falaise morte, 9 * plate-forme maarifienne, 10 - rasa moghrébienne, 11 » id., érodée.
Numéros des sites : 1 - Cap Rhir Nord, 2 - Cap Rhir Phare, 3 - Douar Arhoud, 4 - Arhoud, maison forestière, 5 « TassUa
Imrirene, 6 - Sihel, 7 - Assif Tamghart, 8 - Tama Ou Ennza, 9 - Carrière Bou Zellou, 10-11 - Anza, 12-13-14-15 - Agadir, 16 -
Nzala Abouda, 17 - Tiguert, 18 - Mouknari, 19 - Imi n'Ifrane.
Fig. I : The coast of the Atlantic Atlas between Cape Rhir and Agadir.
1 = Anticline, 2 = Pitching, 3 = Synclme, 4 = Flexure, 5 = Hogback, 6 = Cliff, 7 = Ouljian dead cliff, 8 = Big dead cliff, 9 = Maanfian platform,
10 = Moghrebian rasa, 11 = id., eroded.
Location of sample sites along the coast : 1 - Cap Rhir Nord, 2 = Cap Rhir Phare, 3 = Douar Arhoud, 4 - Arhoud, maison forestière, 5 =
Tassila Imnrene, 6 = Sihel, 7 = Assif Tamghart, 8 = Tama Ou Ennza, 9 = Carrière Bou Zellou, 10-11 - Anza, 12-13-14-15 = Agadir. 16 » Nzala
Abouda, 17 = Tiguert, 18 - Mouknari, 19 = Imi n'Ifrane.
230

2a

Douar Silicl Nord Sud


+ 59

Ouljien

Fig. 2 : Site et coupes de l'Assif Tamghart (le


Maarifien).
2. a) Le site de Tamghart : plages fossiles étagées et
localisation des coupes.
2. b) Coupe du Maarifien au Nord du Douar Sihel : 1
a - faciès inférieur lumachellique i Nucella pletsisi et
Calyptraea trochiform'u, 1 b ™ faciès supérieur limo
neux à Acanthocardia tuberculata, 2 - dune, 3 - glacis
d'érosion.
2. c) Coupe du Maarifien à la carrière Bouzellou,
avant 1978 : 1 a - faciès inférieur i galets, 1 b - faciès
a galets et lumachelle à Nucella plessisi, le* faciès à
galets, 2 - carapace calcaire.
Douar Silu l-Ntml Fig. 2 : Location and outcrops of Assif Tamghart (the
Maarifian).
2. a) The site of Tamghart : fossil raised beaches and loca
tion of the outcrops.
2c 2. b) Cross-section of the Maarifian, at the Northern side of
Douar Sihel : 1 a = Lower shelly factes with Nucella plessisi
and Calyptraea trochtformis, 7 6 = Upper silty faciès with
Acanthocardia tuberculata, 2 = dune, 3 = erosion pediment.
2. c) Cross-section of the Maarifian at the Bouzellou quarry,
before 1978 : 1 a = Lower faciès with pebbles, I b- Pebbly
and shelly faciès, with Nucella plessisi, 1 c = faciès with
pebbles only, 2 = calcareous cap-rock.

Ciirru re liouzellou
231

Gastéropodes du sites 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17
Maarifien altitude (m) 45 40 50 50 50 50 50 40 40 30 30 30 30 45 35 50 15
atella intermedia Jeiireys X X
Diodora apertura (Montagu) X
Fissurella nubecula (Linné) X
lalhostoma zizyphinus conuloides (Lamarck) X X X X X X
Aonodonta Uneata (Da Costa) X X XX XX X XX X X
Aonodonta sagittijera (Lamarck)
iibbula pennanti (Phihppi) X X X X X
'àibbula stngosa (Gmehn) X
llanculus kraussi (Phihppi ) X X
nncoha sp X
Tochidae indet
.ittonna obtusata (Linné)
.ittonna nentoides (Linné)
Barleeia sp
Alvama lactea (Michaud)
rermetus sp
'urntella conspersa Adams et Reeve
'urntella sp
Mesaha sp
Thencium rupestre (Risso)
Bittium lacteum (Phihppi)
Bittmm reticulation (Da Costa)
nphora et perversa (Linné)
Scala sp
Naticajanel (Ad ) Recluz
Euspira fulminea (Gmehn)
Naticidae indet X X X X
Trivia monacha (Da Costa) X X
Erato sp X
Capulus hungancus (Linné) X
Irepidula porcellana Lamarck X X X
Calyptraea chmensis (Linné) X X X
lalyptraea trochijormis (Gmehn) X X X X X X X X X
Semicassis saburon (Bruguière) X
Charonia nochfera (Lamarck) X X
Cymatium corrugatum (Lamarck) X X
Cymatium cutaeewn (Linné) X
Thaïs haemastoma (Linné) X X
Nucella plessisi (Lecointre) X X ? X XXX X X
Tntonaha ermacea (Linné) X X X X X X X
Tntonaha sp X
Mitrella brodenpi (Sowerby)
Dorsanum nnran (Adams) Bruguière
Donavania pellisphocae Reeve
Arculana gibbosula (Linné)
Sphaeronassamutabihs (Linné) X
Hinia reticulata (Linné) X X
Hima merassata (Millier) X X
Hima pfeiffen (Phihppi )
Hima sp
Yetus cucumis (Roeder)
Gibberula oryza (Lamarck)
Gibberula epigrus (Reeve)
Hyahna ambigua (Bavay) X
Corns mediterraneus (Bruguière) X X
Conus sp
Clavatula et rubnjasciata Reeve X X
Sites 1 - Cap Rhir Nord, CRN 3 1 , 76-1 , 2 - Cap Rhir Phare, 4-32 , IV-42 , CR 29 , 73 , 74-1 , 75-2 , 3 - Douar Arhoud, 49 ,
Ar 23 , 74-1 , 75-2 , 4 - Maison forestière d'Ahroud (+), 32-2 , MF 12 , 75-1 , 76-1 , 5 - Tassila Imnrene, 60 , 92-1 , T I 23 , 74-
1, 75-1 , 75-2 , 6 - Sihel, 88 , Sihel 18 , 75-1 , 75-2 , 7 - Assif Tamghart (+), AT 17-1-2 , 75-2 , 8 - lama Ou Ennza (+), A T
15, 75-2 , 9 - Carrière Bou Zellou, 4-21 , 74-1 , 10 - Anza, reservoir, Anza 14 , 75-2 ,11- Anza, village, 76-1 , Anza entree . 74-
1 , 75-2 . 12 - Agadir, station electnque (+), 75 , 5-3 , A 12-2 , 74-1 , 75-1 , 13 - Agadir, station électrique, A 12-1 , 75-2 , 14 -
Agadir, port, 77 , Ag 24 , 74-1 , 76-1 , 15 - Agadir, carrefour, Ag 19 , 76-1 , 16 - Nzala Abouda, N A 21 , 75-2 , 17 - Tiguert,
grotte, Tig 1 1 et T 2 (?) , 76-2
Tab. 1 : Gastéropodes du Maariflen.
Table 1 : Gastropods of the Maanfîan.
232

Bivalves du ^^ sites 1 2 3 4 5 6 7 g 9 10 11
Maarifien ^^ altitude (m) 45 50 50 50 50 50 40 30 45 35 50
Nucula nucleus (Linné) X
Strtarca lactea (Lmne) X
Myhlidae indet X X X X X
Chlamysvana (Linné) X X X X X
Aequipecten operculans (Linné) X X X X X
Pectinidae indet X X X
Spondylus gaederopus (Linné) X
Anomia ephippium Linné X
Ostreidae indet X X X
Lucinidae indet X
Acanthocardia echmata (Linné) X X X
Acanthocardia tuberculata (Linné) X X X X X X X X X
Plagiocardmm papillosum (Poli) X
Cerastoderma edule (Linné)
Cardndae indet X X
Lutrana lutrana (Linné) X X
Dosmia exoleta (Linné) X X X X X X X
Tapes decussatus (Linné) X X X
Chamelea galhna (Linné) X
Clausmellafasaata (Da Costa) X

faciès limono-sableux rose (+) , risque de confusion avec Kjôkken (*)


Sites 1 - Cap Rhir / 45 m (*) , 2 - Arhoud, Douar / 23 ,49 , 3 - Ahroud, Maison
forestière 12 , 32-2 (+) , 4 - Tassila Imrirene, T I 23 , 92 1 , 5 - Sihel / 18 , 88 , 6 -
Tamghart Ouzder /AT 17 1 2 (+) , 7 - Tama Ou Ennza / A T 15 (+) 8 - Agadir,
Station électrique (+), 75 2 , 12 1 2 , 9 - Agadir, port / Ag 24 , 10 - Agadir,
carrefour /Ag 19,11 - Nzala Abouda /N A 21
Tab. 2 : Bivalves du Maarifien.
Table 2 : Bivalves of the Maariflan.

b) Coupe de Douar Sihel-Sud/AssifTantghart (x=89f ; séquence marine décrite plus haut : lumachelle de base
y=397,5;z=50m) jaune, concassée, à petits Gastéropodes, ravinant le subs
tratum, puis faciès fin, silteux et limoneux, rose, à gros
Sur les calcaires maestrichtiens perforés par des specimen &Acanthocardia tuberculata (tab. 1 et 2). Le
Pholades, on trouve : tout est recouvert directement sur cette coupe par une
1 a = Lumachelle concassée à petits fossiles, à Pectinidae nappe alluviale à gros galets, sans formation dunaire inter
dominants et 7 espèces de Gastéropodes, dont aucune médiaire.
n'est tropicale (tab. 1). Cette lumachelle se charge rapide
menten gros galets calcaires bien arrondis indiquant la d) Coupe de la Carrière Bouzellou (x= 89,8 ; y= 394,4 ;
proximité de l'embouchure de l' Assif Tamghart. z=40m)
1 b = Dépôt boueux de couleur rose à rares galets disper
sés et grosses coquilles où dominent presque exclusive En 1974, le front de taille tourné vers l'Ouest montrait
ment les Cardiidae. Ce dépôt peut atteindre 3 m d'épais (fig. 2c):
seur. 1 a = En discordance de ravinement sur les calcaires
2 = Sables biodétritiques jaune clair, épais de 2 à 10 m, à coniaciens, un poudingue à gros galets bien arrondis, tous
stratification de haut de plage et dunaire. calcaires, à disposition fluviatile, mais dont beaucoup ont
3 = En discordance, nappe alluviale de l' Assif Tamghart, été taraudés par des Mollusques lithophages.
de 2 à 5 m d'épaisseur : galets calcaires bien arrondis, de 1 b = Poudingue à galets calcaires plus petits et à indices
moins de 10 cm de médiane, au sein de graviers et d'un silt de façonnement marin, pris dans un ciment silteux rose
rubéfié parfois cimenté. clair contenant des coquilles marines (6 espèces de Gasté
4 = Dépôt continental sableux et limoneux rose, à petits ropodes, dont Nucella plessisi).
granules, à structure prismatique, épais de 3 à 5 m. Ce 1 c = Même dépôt à galets calcaires, mais où les co
dépôt passe progressivement à un encroûtement farineux quil es ou leurs débris se raréfient.
blanchâtre, puis à une croûte nodulaire et enfin à une croûte 2 = Dalle calcaire de quelques décimètres, érodée en
zonaire en surface. cavités cryptokarstiques à terra rossa.
Dès 1 978, le front de taille ayant progressé, on ne voyait
c) Coupe de Tama Ou Ennza (x=89fl ; y= 395,7 ;z=45 m) plus les termes inférieurs la et lb.
Contrairement aux trois autres sites, où la plage ravine
Cette coupe présente à nouveau les deux aspects de la directement le substratum du Crétacé supérieur, elle vient
233

ici s'interstratifier au sein d'un vaste cône alluvial qui, à centages étaient respectivement de 27 et de 22%.
l'embouchure de l'assif Tamghart, est antérieur aux trois Au sein des récoltes, des différences sérieuses existent
dernières terrasses alluviales, qui s'y trouvent emboîtées. entre le site du Cap Rhir et les autres : au Cap Rhir, il n'y a
On peut donc dire que la séquence marine de 50 m, anté que 8% d'espèces tropicales, contre 45% à Agadir ; ce cap
rieure au Tensiftien, se situe largement au sein du Pleisto marque probablement une limite au Sud de laquelle la baie
cenemoyen. d'Agadir apparaît constituer un refuge des espèces tropi
cales. Mais cette limite est loin d'être absolue, puisqu'il
2 - LES ENSEIGNEMENTS DE LA MACROFAUNE existe à Imsouane, au Nord du cap, une espèce chaude,
«MAARIFIENNE» Yetus cucumis. Inversement, il est curieux de constater à
Douar Arhoud, au Sud du cap, la présence d'une coquille
a) La question des deux faciès aujourd'hui ouest-européenne, Littorina obtusata, survi
vance probable d'un rafraîchissement post-moghrébien.
Dans les trois premiers exemples de la coupe-type, la Au total, pour le secteur côtier considéré, la faune de
plage lumachellique de base à Gastéropodes dominants Gastéropodes de l'épisode transgressif
est surmontée par un dépôt sablo-limoneux rose à «maarifïen»conserve un cachet tropical, toutefois un peu
Acanthocardia tuberculata de grosse taille, et autres Bi moins marqué qu'au Moghrébien.
valves. Le faciès à Cardiidae est donc plus récent que la
lumachelle. Sur les 17 sites observés, 1 1 reproduisent cette c) Les Bivalves (tab. 2)
superposition. Dans 6 d'entre eux (Cap Rhir Phare, Tiguert,
Carrière Bouzellou, Anza réservoir, Anza village, Agadir 22 taxons, dont 15 déterminés spécifiquement, ont été
station électrique pour partie), le faciès supérieur de la récoltés dans 11 sites différents. Par rapport au
séquence a été érodé lors des phases de glaciplanation Moghrébien local, la faune de Bivalves change et s'enri
ultérieures ; le cas de la carrière Bouzellou, où il s'agit du chit,sans retrouver la variété de celle du Pliocène. Les
contact océan-cône alluvial, est particulier. Huîtres et les Glycymerididae disparaissent presque : pré
Le changement de faciès ne peut être attribué à des va sentes dans 71% des récoltes du Moghrébien, les Huîtres
riations locales de sédimentation liées aux alternances des ne le sont plus ici que dans 15%. De même, la fréquence
caps et des baies, puisqu'il se retrouve d'Agadir au Cap des Pectinidae, qui constituaient un des éléments les plus
Rhir. La superposition traduit une succession dans le temps courants au Moghrébien, diminue aussi. L'espèce domi
de conditions bathymétriques différentes liées à la régres nante, présente dans 70% des récoltes, devient
sionmarine : alors que la faune où dominent les Gastéro Acanthocardia tuberculata. Dans une récolte sur deux,
podesest infralittorale, les Bivalves indiquent un dépôt on trouve des Moules, des Chlamys, ainsi que Dosinia
médio ou supralittoral. La profondeur au même point a exoleta. Ces espèces manquent totalement au Moghrébien,
diminué et cette séquence régressive se poursuit avec une mais se trouvent en petit nombre dans le Pliocène. Elles
sédimentation littorale de haut de plage, puis dunaire, et n'ont donc ni valeur stratigraphique (toutes sont actuell
enfin des dépôts continentaux de granules et silts rubéfiés es),ni signification climatique bien nette, étant donné leur
et encroûtés. caractère banal (toutes appartiennent au domaine atlantico-
méditerranéen). Malgré tout, cette faune n'a absolument
b) Les Gastéropodes (tab. 1) pas un caractère chaud : aucune espèce n'est strictement
tropicale, bien que quelques-unes d'entre elles (Chlamys
46 espèces différentes ont été récoltées dans 17 sites varia, Plagiocardium papillosum, Lutraria lutraria,
qui sont en moyenne trois fois plus riches que ceux du Dosinia exoleta) s'étendent jusqu'à la province ouest-
Plio-Pléistocène ou Moghrébien étudié au Cap Rhir, à l'assif africaine. La fréquence des Mytilidae, formes tempérées
Tamghart, Anza et Agadir (Weisrock, 1980 ; 1993). La quasi peu profondes, pourrait même indiquer un certain refro
totalité des coquilles provient du terme inférieur de la sé idissement des eaux superficielles.
quence. Deux conclusions se dégagent de l'étude des Bivalves
Par rapport au Moghrébien, la faune s'est renouvel du faciès supérieur du Maarifien : un renouvellement as
ée : à l'exception de Nucellaplessisi, les espèces fos sez marqué de la faune d'une part et une tendance au ra
siles ont disparu et la faune a pris un caractère plus fraîchis ement, au moins pour les eaux superficielles, au
moderne. Parmi les espèces les mieux représentées, dans début de la régression, d'autre part.
plus de la moitié des sites, on trouve : Monodonta Les significations paléoclimatiques des Gastéropodes
crassa, Calyptraea trochiformis, Nucella plessisi, d'une part, des Bivalves d'autre part, ne sont contradict
Patella intermedia, Tritonalia erinacea, Calliostoma oires qu'en apparence ; elles confirment en réalité la suc
conuloïdes, c'est-à-dire encore deux espèces tropica cession de la transgression et de la régression au sein de
les {Calyptraea trochiformis et Nucellaplessisi) et trois la séquence maarifienne.
espèces «tempérées» (espèces qui n'ont jamais atteint Aucune tentative de datation n'a été entreprise sur le
la province ouest-africaine). Pour l'ensemble, cette pro matériel faunistique des plages de cette terrasse
portion se confirme avec 25,8% d'espèces tropicales et «maarifienne», à l'exception d'une série de mesures des
32,7% d'espèces tempérées. C'est là un second chan taux d'épimérisation D/L des acides aminés totaux, sur une
gement d'importance, puisqu'au Moghrébien, les dizaine d'exemplaires de Patella sp. et de My ti lus sp. Mais
234

ces coquilles contiennent une faible concentration en aci 1 - LE SITE-TYPE : LE PORT D'AGADIR (fig. 3)
des aminés ; les taux d'épimérisation, dispersés, ne sont
pas significatifs (Occhietti et al, sous presse). a) La coupe de la séquence marine de +20 m
n - LES BASSES TERRASSES MARINES (ENTRE La coupe de la route d'Anza, juste au-dessus du port
0 ET +20 M) : L'AGADIRIEN ET L'OULJIEN ancien d'Agadir, a malheureusement en grande partie dis
paru aujourd'hui suite à l'élargissement de la route ; elle
Hormis au Cap Rhir, il est presque impossible de distin permettait de distinguer deux épisodes de stationnement
guermorphologiquement les basses terrasses marines qui marin à peu près contemporains :
ont été façonnées en glacis d'érosion au Soltanien (=Wûrm) - Un remplissage de fond de grotte de pied de falaise
en fonction des niveaux océaniques régressifs. Les s d'une épaisseur totale de 6 m, débutant par une plage à
équences marines qui sont fossilisées sous les glacis stratification subhorizontale, sableuse, à granules de quartz
soltaniens ne sont visibles que dans les coupes dégagées et de calcaire, à ciment légèrement rubéfié, avec une faune
par les falaises vives, difficiles d'accès, et où on ne voit de petite taille. On y a récolté entre autres des échantillons
habituellement que la séquence la plus récente de Thais haemastoma, soumis à l'analyse U-Th sous le n°
(l'«Ouljien»), en bordure du littoral actuel. Les grands tr A 73/1 (cf. infra, n, 3). Fossilisant cette plage et le fond de
avaux (carrières, port d'Agadir et nouveau port d'Anza, la grotte, un dépôt composite associe une dune sableuse à
routes) ont permis de se rendre compte de l'existence d'une stratifications obliques, un éboulis de gros blocs calcaires
seconde plage, plus ancienne, située vers +20 m d'alti issus de l'écroulement d'un pan de la falaise, puis une
tude. Le port d'Agadir (fig. 3) est le premier site du Maroc alternance de dépôts éoliens (sables coquilliers) et de
atlantique méridional où l'on ait observé conjointement colluvionnements calcaires rubéfiés liés à la régularisation
les deux plages de 0 / +8 m et de +20 m (Lecointre, 1952 ; du versant.
Weisrock, 1980 ; Brébion et al. , 1984). Le niveau de 20 m - A cinq mètres vers l'aval, au-delà du grand éboulis de
étant bien distinct de l'Ouljien, nous l'appelons Agadirien. falaise (fig. 3), recouvert par les colluvions de versant, un
cordon littoral de plus d'un mètre d'épaisseur, composé
de galets calcaires bien arrondis, mélangés aux coquilles

route d'Anza

+20 m
A 127/1 A 8/2 A 73/1
Charoma nodifera Thaïs haemastoma Thaïs haemastoma
265 +45/-30 240 +30/-25 275 +35/-30
\
port d'Agadir
+8 m A 129 bl
M\ulus sp.
1 09 +/-6
A 10-2 A 129 a A129b2 50m
A 10-1 Yetm sp.
Thais haemastoma Thais haemastoma Ostrea sp.
75+A4
103+/-9
:

72 +/-2 96 +/-5

Fig. 3 : Les coupes du Port d'Agadir : les séquences de 0-8 m et +20 ai et leurs datation U-Th (eu ka).
Fig. 3 : Sections of Agadir-Port : the 0-8 m and +20 m sequences and their U-Th dates (ka).
3. a) The two fosstl beaches, between + 2 , +8 m, and at + 20 m.
3. b) Detailed exposures and outcrops of the + 20 m fossil shoreline (Agadirian).
235

d'une abondante faune de Bivalves et de Gastéropodes b) Les faunes d'Agadir


de grande taille. Un exemplaire de Thais haemastoma (n°
A 8/2), un Charonia nodifera (A 127/1) et deux Yetus sp. Les tableaux 3 et 4 rassemblent les observations effec
(A 127/2 et A 127/3) de ce cordon littoral ont été soumis à tuées sur les récoltes des deux niveaux : celui de + 20 m, où
l'analyse U-Th. l'on a distingué les récoltes du fond de la grotte et celles
du cordon littoral fossilisé ; celui de +2 à +8 m, où l'on a
b) La coupe de la séquence marine de 0 à +8 m, au port distingué les récoltes des trois sites : port, centrale et phare.
d'Agadir et ses abords : centrale thermique et phare Pour chaque espèce, on a effectué un comptage des indi
d'Arhesdis(fig.3et4) vidus, qui parfois pullulent. Enfin, les espèces ayant une
signification climatique nettement établie, soit tropicale,
Ces coupes sont aujourd'hui soit masquées par des cons soit tempérée, sont indiquées.
tructions, soit recouvertes de déblais ; en revanche, de
nouvelles coupes, similaires, sont apparues à proximité. - Richesse des récoltes de Gastéropodes
Les trois coupes étudiées en 1976/78 présentaient le même
dispositif: Pour le niveau de + 20 m, on a dénombré 84 espèces de
1 - Sur le substratum de calcaires crétacés tranché par Gastéropodes et 20 espèces de Bivalves. C'est de loin un
l'abrasion marine, une plage fossile d'un mètre d'épais record pour tout ce qui a été observé à ce niveau au Maroc
seur ou plus, à gros galets calcaires au port, sous la fa et justifie, d'un point de vue faunistique, le choix du site
laise ; devenant sableuse à Arhesdis, à la limite méridio d'Agadir-port comme site-type de l' Agadirien.
nale de la baie d' Anza, et de granulométrie mixte à la cent De même pour l'Ouljien, le site du phare d' Arhesdis,
rale, en situation intermédiaire. La conservation des co avec 76 espèces de Gastéropodes et 10 espèces de Bival
quil es et le nombre des espèces sont directement liés à ves,est le plus riche observé au Maroc.
ces conditions de dépôt : les récoltes s'appauvrissent ici On peut remarquer que la faune traduit des associations
d' Arhesdis vers le port, tout en conservant un même fonds de milieux très variés, du circalittoral, très peu répandu, au
commun, avec, notamment, Thais haemastoma. Les exemp supralittoral, avec des fonds tantôt rocheux - cas le plus
laires de cette espèce ont été soumis à l'analyse U-Th fréquent -, tantôt meubles, sableux et vaseux. Chaque ré
sous les numéros A 10/1 et A 10/2 au port, A 1 1 à la cen colte est en fait une accumulation sédimentologique de
trale et A 17 à Arhesdis {infra). De plus, au port, la coupe coquilles provenant de plusieurs biotopes.
(fig. 3) a permis de récolter vers +8 m, au pied de la falaise
morte fossile, 3 autres exemplaires d'espèces différentes, - Difficulté d'une différenciation faunistique
également analysés, d'Ostrea sp. (A 129 a), à&Mytilus sp. Agadirien - Ouljien
(A 129 bl) et de Yetus sp. (A 129 b2).
2 - Un dépôt de sables coquilliers plus ou moins fins et La grande richesse des faunes de Gastéropodes ne per
abondants selon les sites, avec ou sans stratifications, met cependant pas d'établir des distinctions très nettes
correspondant à des accumulations dunaires littorales, entre Agadirien et Ouljien ; on peut toutefois noter 3 diff
dont l'épaisseur est très variable (presque nulle au port ; érences :
environ 6 m à Arhesdis, où le sommet de la dune, grésifié, Absence ou rareté à l 'Agadirien des espèces chaudes
est façonné en lapiés). maarifiennes qui réapparaissent à l 'Ouljien : trois formes
3 - Un dépôt colluvial à blocs calcaires très chaudes se trouvent dans l'Ouljien et jamais dans
hétérométriques, pris dans une matrice sableuse et limo l'Agadirien : Bursa scrobiculata, Cymatium costatum,
neuse rubéfiée fortement encroûtée en surface. L'épais Fusus maroccanus. D'autres formes chaudes, fréquentes
seur de ces colluvions de versant varie en sens inverse de dans l'Ouljien, sont rares auparavant : Semicassis saburon,
celle de la dune. Cantharus viveratus. Cette première différence donne à
l'Ouljien une tonalité climatique nettement plus chaude
2 - ÉTUDE BIO-STRATIGRAPfflQUE DES DEUX S que celle de l'Agadirien.
ÉQUENCES MARINES A bsence ou rareté à l 'Agadirien d 'espèces sans signif
ication stratigraphique particulière, qui abondent à
a) Récoltes antérieures à Agadir l'Ouljien : c'est le cas de Cymatium dioliarium et
Cymatium cutaceum (absentes), de Arcularia gibbosula
G. Lecointre (1952) signale vers 30 m un gisement très et Cancellaria cancellata (rares), et de Mesalia mesal
fossilifère dont les faunes sont proches de celles de la (moins fréquente à l'Agadirien). Inversement, ces espèces
séquence de 20 m décrite- ici. Il attribuait ce gisement à sont parmi celles qui caractérisent le mieux les dépôts de
l'Anfatien en raison de son altitude supposée. l'Ouljien. Comme au total l'Agadirien est pourtant plus
D'abondantes récoltes ont été effectuées près du phare, riche que l'Ouljien, en espèces comme en individus, l'ab
successivement par A. Reboul, déterminées par M. Gi- sence ou la rareté des dites formes est d'autant plus signi
gnoux (in Killian, 19 17), par J. Bourcart (1927), déterminées ficative. Aujourd'hui, ces coquilles vivent généralement
par Ph. Dautzenberg, puis par G. Choubert, déterminées en Méditerranée, mais, à l'exception de Arcularia
par G. Lecointre (1952). Leur rattachement au Harounien gibbosula, dépassent, parfois largement, les limites de cette
était fondé sur une altitude du gisement également sures mer vers le Sud et vers le Nord, comme par exemple
timée, à environ 15 m. Il s'agit du gisement étudié ici sous Cancellaria cancellata répandue dans la province gui-
le nom d'Ouljien du Phare d' Arhesdis. néenne, ou Mesalia mesal localisée de l'Afrique occident
ale au Portugal.
236

Nombre d'individus récoltes


Gastéropodes Agadirien Ouljien Espèces Espèces
Cordon Grotte Phare Centrale Port tropicales tempérées
Dentalium sp 27 20
Patella intermedia Jeffreys 135 25 92 6 8
Patella aspera Lamarck 2 3 X
Patella safiana Lamarck 32 13 1 +
Hahotis tuberculata Linne *
Diodora apertura (Montagu) 32 28 1 1 X
Fissurella nubecula (Linne) 15 9 1
Gibbula pennanti (Phihppi) 4 200 86 6 1 X
Gibbula umbilicahs (Da Costa) 1 X
Gibbula stngosa (Gmehn) 2 2 X
Calhostoma zizyphmus conuloides (Lamarck) 3 32 15 1 X
Calhostoma laugien kochi (Pallary ) 13
Clanculus kraussi (Phihppi) 1 47 9 +
Monodonta lineata (Da Costa) 2 45 9 15 3 X
Monodonta sagittijera (Lamarck) 1 +
Monodonta saggitifera colubnna (Gould) 2
Monodonta turbinata (Born) 4 X
Astraea rugosa (Linne) 2 X
Liotia coelata Adams 4 * +
Tncoha pu Ila (Linne ) 485 1
Littonna nentoides (Linne) 105 39
Alvania lactea (Michaud) 6 9 X
Putilla semistnata (Montagu) 1 X
Turboella parva (Da Costa) 145 X
Barleeia sp 280 1
Tornus subcannatus (Montagu) 5
Vermetus arenanus (Linne) 4 20 6 X
Vermetus tnqueter (Bivona) 1 X
Vermetus cnstatus Biondi 4 10 X
Turntella conspera Adams & Reeve 3 210 +
Mesaha mesal (Adams) Deshayes 135 340 25 64 +
Mesaha breviahs (Lamarck) 1 +
Bittium lacteum (Phihppi) 122 44 X
Bittium reticulatum (Da Costa) 2
Seila tnhneata (Phihppi) 30 4 X
Centhwpsis tuberculans (Montagu) 11
Centhiopsis bilineata (Homes) 1 2 X
Tnphora perversa (Linne) 58 16
Solanum sp 3
Erato laevis Donovan 2 X
Simnia spelta (Linne) 1 2
Tnviamonacha (Da Costa) 26 40 1 X
Cypraea sp * 1
Melanella pohta (Linne) 1 4
Naticafanel (Adams) Recluz 2 2 1 1 +
Natica vittata Gmehn 55 75 2 +
Euspira fulminea (Gmehn) 1 1 7 +
Ctrsotrema communata (Monterosato) 3
Scala tenuicosta (Michaud) 3 X
Upaha crenata (Linne) 1 2 1
Calyptraea chmensis (Linné) 5 *
Crepidula porcellana Lamarck 48 14 +
Xenophora sp *
Charoma nodifera (Lamarck) 6 1
Cymatium dohanum (Linne) 26 6
Cymatium cutaceum (Lamarck) 3
Cymatium costatum (Born) 5 +
Cymatium corrugatum (Lamarck) 14 1 X

Tab. 3 : Gastéropodes du Pleistocene supérieur d'Agadir (d'après Ph. Brébion et al., 1984, modifié).
Table 3 : Gastropods s of the Upper Pleistocene ofAgadir (after Ph. Brébion and others, 1984, modified).
237

Nombre d'individus récoltés


Gastéropodes Agadirien Ouljien Espèces Espèces
Cordon Grotte Phare Centrale Port tropicales tempérées
Semicassis saburon (bruguière) 1 4 1 +

|
Semicassis undulata (Gmelm) 1 +
Bur sa scrobiculata (Linné) 1 +
Thaïs haemastoma (Linné) 43 18 190 17 46 +
Nucella plessisi (Lecointre ) 7 8 2
Trunculanopsis trunculus (Linné) 3 3 X
Tntonaha ennacea (Linné) 12 25 65 3 X
Tntonaha edwardsi (Payraudeau) 11 X
Tntonaha miscowitchi (Pallary) 6
Columbella rustica (Linné) 98 19 25
Mitrella brodenpi (Sowerby) 71 9
Mitrella hidalgoi (Monterosato) 49
Anachis sp 10 11 +
Dorsanum miran (Adams) Bruguière 1 64 2 +
Pisania orbignyi (Payraudeau) 4 28 2
Cantharus viverratus (Kiener) 4 15 1 +
Donavania pelhsphocae Reeve 1 35 59
Donavania decorata (Monterosato) 26 15
Donavania procerula (Monterosato) 12 6 X
Arculana gibbosula (Linné) 5 27 2 2 X
Hima reticulata (Linné) 1 200 80 X
Hima mcrassata (Mûller) 4 265 205 1 X
Hiniavauchen (Pallary) 2 2
Himaferussaci (Payraudeau) 1 59 X
Himagranum (Lamarck) 1 X
Desmoulea pinguis Adams 2 1 +
Fusus maroccanus (Chemnitz) 1 +
Cancel lana cancellata (Linné) 2 24
Narona piscatona (Gmelin) 17 14 +
Mitrana comicula (Linné) 50 6
Yetuscucumis (Roeding) 32 6 4 7 +
Margineïla glabella (Linné) 1 1 3 +
Gibberula oryza (Lamarck) 62 134
Gibberula epigrus (Reeve) 1 415 182 10 +
Hyalina ambigua (Bavay) 7 14 +
Persicula sp 2 26 4 +
Hastula sp 3 +
Conus mediterraneus (Bruguière) 164
Conus sp 1
Clavatula rubnfasciata Reeve 48 20 +
Mangeha costata (Donovan) 22 14
Raphitoma purpurea (Montagu) 1
Raphitoma cordien (Payraudeau) 1 X
Bêla laevigata (Phihppi) 17 X
Haedropleura septangulans (Montagu) 1 X
Mitromorpha olivoidea (Cantraine) 1 X
Turbomlla sp 20 2
Odostomia sp 16 3
Refusa trunculata (Bruguière) 5
Ringicula conjortms Monterosato 1
Siphonana gnsea (Gmelin) 2 44 66 1 1 +
Gadinia garnoti (Payraudeau) 1 3 X

Tab. 3 : Gastéropodes du Pleistocene supérieur d'Agadir (suite).


238

A 129a A 129b! A 129b2

Ancien port

A 17 All
Thais haemastoma— Thais haemastoma
76 +1-2 92 +/-5

Centrale
Arhesdis
4b

Fig. 4 : Coupes de l'Ouljien d'Agadir.


4. a) Localisation des coupes et des récoltes. 1 - faille majeure, 2 = versant de vallée, 3 - oued, 4 - plage, 5 ■ basse falaise, 6
haute falaise morte, 7 « plate-forme maarifienne, 8 * rasa moghrébienne, 9 « localisation des coupes et échantillons.
4. b) Coupes de l'Ouljien, détail. 1 - plage fossile, 2 * dune, 3 * colluvions, croûte calcaire.
Ftg. 4 : Sections of the Ouljian at Agadir.
4. a) Localisation of the sections and samples. 1 - Major fault, 2 = valley-side, 3 = wadi, 4 = beach, S = low cliff 6 = high dead cliff, 7
Maanflan platform, 8 = Moghrebian rasa, 9 = location of sections and samples.
4. b) Sections of the Ouljian, detailed. 1 = fossil beach, 2 = dune, 3 = slope deposits, calcareous crust
239

Nombre d'individus récoltés


Bivalves Agadirien Ouljien Espèces Espèces
Cordon Grotte Phare | Centrale | Port tropicales tempérées
Nucula sulcata Bron 1 X

|
Nuculana pella (Linné) 1 X
Nuculana bicuspidata Gould 9 +
Arcanoae Linné 1
Area tetragona Poll 1 X
Stnarca lactea (Linné) 7 X
Mytilus galloprovmcialis Lamarck 43 9 X
Mytilus perna Linné 2 g +
Mytilus indet. 1
Chlamys varia (Linné) 1 1 X
Anomia ephippium Linné 3
Limaria inflata (Chemnitz) 14 g
Ostreidae indet. 3 1
Chama sp 1
Cardita calyculata (Linné) 12 12 1 X
Cardites ajar (Ad) Bruguière 4g 14 +
Acanthocardia echinata (Linné) 1 X
Acanthocardia tuberculata (Linné) 24 1 4 X
Cardiidae indet. 9
Spisula subtruncata (Da Costa) 22 3 X
Mactra- sp. 2
Lutraria lutraria (Lmné) 1
Eastorua rugosa (Gmehn) 1 +
Sole» marginatus Pennant 14
Tellimdae indet. 1
Donax trunculus Linné 6 81 X
Donax venustus Poll 1 2 1 X
Venus ci. casino Linné 1 X
Gouldia minima (Montagu) 3 X
Dosinia exoleta (Lmné) g
Dosinia lupinus (Linné) 5
Panopeagtycymens Born 1 X

Tab. 4 : Bivalves du Pleistocene supérieur d'Agadir.


Table 4 : Bivalves of the Upper Pleistocene of Agadir.

Abondance dans l 'Agadirien de coquilles à peu près - Variations locales des faunes
absentes dans l 'Ouljien, au moins localement : ces espè
ces«agadiriennes» ne semblent toutefois pas avoir une Au sein de chaque séquence, il y a en un point donné
signification biostrati graphique affirmée ; ce sont : Tricolia des différences de faciès très sensibles, qui sont d'ordre
pulla, Turboella parva, Turritella conspersa, Conus sédimentologique : faciès fin de fond de grotte, faciès gros
mediterraneus, Barleeia sp., Dorsanum miran. Leur inté sierde cordon littoral pour F Agadirien au port d'Agadir ;
rêtparaît être beaucoup plus local que strati graphique car, différences de même nature sur la même coupe de FOuljien
ailleurs, ces espèces peuvent être rares ou absentes dans du port. Il en résulte d'énormes variations de taille et de
ce niveau et abondantes dans un autre. nombre pour les coquilles, ce qui impliquerait a priori de
En dépit de sa richesse, F Agadirien ne peut donc guère ne comparer entre eux que des faciès similaires. Toutefois
se définir que négativement par rapport à l 'Ouljien, car sa les différences de taille et de nombre ne modifient guère la
faune est plus banale. composition de la faune : on retrouve les mêmes espèces
Concernant les Bivalves, les résultats sont peu signifi dominantes dans chaque séquence.
catifs,en partie en raison de leur pauvreté relative en taxons Il existe en revanche une nette différence, surtout pour
et en individus. On ne relève aucune espèce fossile à F Agadirien, entre les faunes de la région d'Agadir et cel
F Agadirien et à FOuljien (comme d'ailleurs au Maarifien). les du Cap Rhir, où on a récolté une quarantaine d'espèces
Seules peuvent être considérées la signification climati dans deux sites fossilifères : les espèces tropicales y sont
que des espèces et, pour les plus intéressantes, leur fr rares, et ce cachet tempéré de la faune est probablement
équence dans les sites. Les espèces à caractère tropical dû (comme au Maarifien déjà) aux conditions du gisement,
(aucune n'est mentionnée dans le Maarifien) sont peu exclusivement rocheux et battu en ce point.
nombreuses dans F Agadirien (3) et dans FOuljien (2) ; les
espèces à caractère tempéré sont au nombre de 10 à
F Agadirien et de 8 à FOuljien. La variation est donc faible
entre ces deux étages.
240

3 -DATATIONS230 TH ET 23 1 PADES DEUX SEQUEN -Minéralogie : le problème de la recristallisation


CES
Les échantillons de coquilles actuelles et fossiles pré
Les premières datations 230 Th / 234 U des stationn sentent des teneurs en calcite variables : de 10 à 50% pour
ements marins harounien et ouljien au Maroc (Stearns et Thais, 100% pour Ostrea, qui se forme originellement en
Thurber, 1965 ; Hoang étal., 1978) montrent une grande calcite. Il ne semble pas possible actuellement de démont
dispersion des âges, qui s'échelonnent entre 150 000 et rer une relation entre la teneur en calcite et le résultat de la
40 000 ans BP. Cette dispersion est probablement due à mesure des rapports d'activité (J.L. Reyss, comm. orale).
l'utilisation, à défaut de coraux, des coquilles de Bivalves Le critère de la teneur en calcite ne semble donc pas décisif
et Gastéropodes, matériaux assez peu fiables pour les da pour éliminer tel ou tel échantillon.
tations 230 Th / 234 U (Kaufinan et al. , 197 1). L'utilisation
de coquilles de Mollusques étant ici inévitable, on a tenu - Concentration en Uranium et Thorium
compte de certains critères pour valider les mesures : con
centrations raisonnables en U et Th, absence de 232 Th, Pour la coquille de Thais actuelle, la concentration en
rapport 230 Th / 232 Th élevé, et on a utilisé deux métho Uranium est très faible : 0,015 +/- 0,0016 p.p.m. Pour les
des (U-Th et U-Pa) sur les mêmes échantillons (Sakanoue échantillons fossiles, elle est de l'ordre de 2 à 3 p.p.m., sauf
étal. 1967 ; Ku, 1968, 1976 ; Szabo, 1979). pour A 129/a (Pstrea), A 129/b-l (Mytilus), A 127/2 (Yetus)
On donne ici (tab. 5) les résultats qui concernent 12 et A 127/3 (Yetus), où elle est respectivement de 0,2, 0,7, 6,0
échantillons du site d'Agadir, soit 2 1 mesures, 12 U-Th et et 6,7 p.p.m. La teneur en Uranium est donc de 10 à 100 fois
9 U-Pa, cette dernière méthode n'étant pas applicable à 3 plus forte dans les échantillons fossiles que dans un échant
cas. Les résultats donnés par les deux méthodes sur les illon actuel : l'Uranium du milieu environnant est incor
mêmes échantillons sont concordants ; cela signifie que porédans les coquilles après leur mort. On ne sait pas si
les mesures sont exactes, mais ne donne pas forcément l'Uranium est incorporé tout au long de l'histoire du fos
l'âge véritable de la coquille, qui peut avoir incorporé de sile ; toutefois, si l'incorporation n'a lieu que durant une
l'Uranium au cours de sa fossilisation. Ainsi, les âges cal courte période initiale de 1 000 à 2 000 ans, l'âge calculé ne
culés ne sont-ils que des âges apparents minima. s'en trouve pas sensiblement modifié.
Aucune activité de 230 Th, ni de 23 1 Pa n'est mesurable
a) Discussion des résultats obtenus dans la coquille de Thais actuelle. Hormis pour A 17 (con
centration en 232 Thde0,015 p.p.m. et rapport 230 Th/232
Les erreurs (tab. 5) proviennent de l'erreur statistique de Th > 200), il n'y a pas de 232 Th dans les échantillons
comptage de 1 sigma, des erreurs sur le rapport d'équilibre étudiés. Ceci indique qu'il n'y a pas eu d'introduction de
238 Th / 232 U, et de celles sur les concentrations des 230 Th en provenance du milieu environnant dans ces
traceurs utilisés. coquilles, et la concordance des âges 230 Th et 231 Pa
permet de penser que les échantillons sont restés des sys-

(a)230 Th (a)234 y (a) 230 Th (a) 231 pa (b) 230 Th (c) 231 pa
Niveau Echantillon Nature Calcite % ppm U Th 232 238 234 235 Age io 3 ans Age 10 3 ans
ppm Th U U U
L Actuel Thaïs 50 0 015 ±0 0016 121 ±0 17
A-10/1 idem 10 2 62 ± 0 05 nm 1 19 ± 0 02 0 49 ± 0 01 n d 72 ±2
A-17 idem 10 1 89 ± 0 04 ) 015 ±0 004 221 ± 57 1 14 ±0 02 0 51 ±0 01 0 80 ± 0 03 76 ±2 80 ±8
A-129b/2 Yetus traces 2 140 ±0.045 n m 1 18±001 0 504 ±0 017 0 77 ± 0 02 75 ±4 73 ±4
OUJLIEN A-10/2 Thaïs 9 2 70 ± 0 05 n. m. 1.21 ±0 02 0 60 ± 0 02 0 90 ± 0 03 96 ±5
A-11 idem 35 2 84 ± 0 08 n m. 1 41 ± 0 03 0 59 ± 0 03 0 86 ± 0 03 92 ±5
A- 129a Ostrea calcite 0 160 ± 0 006 n m. 1 22 ± 0 05 0 628 ±0 028 0 91 ± 0 05 103 ±9
A-129b/l Mytilus traces 0 694 ±0 011 n m. 1.21 ±0 02 0 65 ± 0 02 0 88 ± 0 06 109 ±6 io5 :n
A-73/1 Thaïs 50 2 34 ± 0 05 n m. 1.51 ±0 02 1 01 ± 0 03 1.00 ±0 04 275 :n > 159
AG DIREN A-8/2 Thaïs 30 3 24 ± 0 07 n m 1 27 ± 0 02 0 94 ± 0 03 0 99 ±0 05 240 :g > 159
A-127/1 Charoma
nodifera traces 2 70 ± 0 05 n. m 1 27 ±0 01 0 968 ± 0 033 1 08 ± 0 04 265 .+ 3045 n a
A-172/2 Yetus 0 5 86 ±0 10 n m. 1 19 ±0 01 0 846 ± 0 026 1 13 ±0 03 185 ±15 n a
A-127/3 Yetus 0 6 73 ±0 11 nm 1.19±002 0 838 ± 0 026 1 20 ± 0 08 180 +_\l n a
(a) Rapport des activités - (b) Age calculé en utilisant les périodes du "" Th et du *** U respectivement égales à 75 200 ans et à 248 000 ans - (c)
Age calculé en utilisant la période du M1Pa égale à 34 300 ans
n m = non mesurable , n d «non déterminé n a = non applicable
,

Tab. 5 : Résultats d'analyses et âges calculés des Mollusques des paléorivages de FOuljien et de l'Agadirien d'Agadir.
Table 5 : Analycal data and calculated ages ofMolluscs from the Ouljian and Agadman shorelines of Agadir.
241

tèmes chimiquement clos vis-à-vis du Thorium, à l'excep Les âges obtenus correspondent au stade 8 de la courbe
tion de A 127/2 et A 127/3. isotopique de l'oxygène des Foraminiferes (Shackleton et
Les rapports 234 U / 238 U des échantillons sont tou Opdyke, 1973). Le stade isotopique 8 étant l'équivalent
jours de l'ordre de 1,20, très voisins de celui du Thais d'un étage glaciaire, le stationnement marin de l'Agadirien,
actuel (1,21 +/- 0, 17), sauf pour A 1 1 et A 73/1 (respectiv qui représente un haut niveau eustatique interglaciaire,
ement 1,41 et 1,51), qui présentent des valeurs élevées. Mais est contemporain soit du stade isotopique 7, soit du stade
les âges calculés de ces échantillons sont en bonne con isotopique 9. Comme il s'agit d'âges apparents minima, la
cordance ; s'ils ont incorporé récemment l'Uranium en ex corrélation avec le stade 9 est plus probable.
cédent - et de l'Uranium seulement - ses descendants n'ont
pas encore eu le temps de se reproduire, ce qui montre que c) Datation de la séquence ouljienne
leurs systèmes sont restés fermés respectivement depuis
au moins 90 000 et 160 000 ans. Dans le cas de ces deux 7 datations ont donc été effectuées et retenues, sur des
échantillons, l'utilisation des deux méthodes est donc par échantillons provenant du port - pour 5 d'entre eux - et de
ticulièrement précieuse. ses abords immédiats (centrale thermique et phare
d'Arhesdis). Les résultats sont assez dispersés et suggè
- Validité des résultats obtenus rentdeux groupes d'âges.
Les âges 230 Th et 23 1 Pa du premier groupe s'échelon
Pour ce qui est des échantillons de l'Ouljien, les âges nent respectivement, compte tenu des erreurs, de 70 000 à
230 Th et 231 Pa obtenus sont en bonne concordance, 79 000 ans et de 69 000 à 88 000 ans, ce qui suggère une
compte tenu des erreurs. Le bon accord entre les âges 230 correspondance au sous-stade 5a.
Th et 23 1 Pa des échantillons All, A17, A 129/b-l et A Pour le second groupe, les âges 230 Th vont de 87 000 à
129/b-2 montre qu'ils sont restés en système fermé pour 1 15 000 ans et les âges 23 1 Pa de 88 000 à 159 000 ans, ce
l'Uranium et ses descendants. Pour les échantillons A 10/ qui suggère une correspondance au sous-stade 5c, ou 5e.
2 et A 129/a, cet accord est moins bon, mais encore accep Les résultats ne sont pas exactement conformes au dis
tablecompte tenu des erreurs. Le raisonnement ultérieur positif morphologique pour le site d'Agadir-port, où on a
pourra donc se fonder sur ces 6 datations. L'échantillon A traité 5 échantillons (fig. 3) : tous ceux du groupe le plus
10/1 n'a été traité que par la méthode 230 Th, mais a fourni ancien ne se trouvent pas au pied de falaise comme on
aussi un résultat acceptable. pourrait s'y attendre ; inversement, ils représentent la
En ce qui concerne les échantillons de l'Agadirien, A moitié des échantillons les plus distaux. En l'état, force est
73/1 et A 8/2 présentent un rapport 23 1 Pa / 235 U égal à 1, d'admettre que la précision est insuffisante pour distin
ce qui veut dire qu'ils sont trop anciens pour être datés guernettement deux sous-stades et qu'il faut se contenter
par la méthode 23 1 Pa : on ne peut calculer que la limite de corréler globalement les séquences ouljiennes au stade
inférieure de leur âge 23 1 Pa. Les 3 autres échantillons A isotopique 5.
127/1, A 127/2 et A 127/3 ontun rapport 231 Pa/235U> 1 :
la méthode de datation 23 1 Pa ne leur est donc pas applica m - AMINOCHRONOLOGIE
ble, ces échantillons ayant sans doute incorporé du 23 1 Pa DES SÉQUENCES MARINES PLEISTOCENES
au cours de leur fossilisation. Il est à noter aussi que les DE LA CÔTE DE L'ATLAS ATLANTIQUE
échantillons A 127/2 et A 127/3 ont une teneur très élevée
en Uranium (5,8 et 6 p.p.m.), ce qui fait baisser sensibl Les travaux de Hearty et al. (1986) sur les paléorivages
ement les valeurs du rapport 230 Th / 234 U, et par consé de la Méditerranée occidentale ont permis de distinguer
quent leurs âges 230 Th par rapport à ceux des 3 autres plusieurs aminogroupes à partir de l'espèce Glycymeris,
échantillons du même site. Aussi pour A 127/2 et A 127/3, et ont démontré qu'il était possible d'appliquer la méthode
en dépit de l'absence de calcite, donc de recristallisation, de datation par les acides aminés à des régions dont la
et de l'absence de 232 Th, malgré aussi le bon accord des température moyenne annuelle est proche de celle du
âges obtenus (185 +/- 15 et 180 +17/-13 ka), est-il difficile Maroc atlantique au Nord d'Agadir ( 1 8°- 1 9°C).
d'accepter les résultats. Quant à l'échantillon A 127/1, les Une première campagne d'échantillonnage a été effec
données raisonnables de ses valeurs radiochimiques inci tuéeen 1987 par S. Occhietti, de Tanger à Casablanca avec
tent à ne pas l'écarter. On retiendra donc pour l'Agadirien J.P. Raynal, puis de Casablanca à Agadir avec A. Weisrock.
les dates des 3 échantillons A 73/1, A 8/2 et A 127/1. Elle a mis en évidence l'absence ou l'extrême rareté de
Glycymeris sur cette côte océanique et la présence d'un
b) Datation de la séquence marine agadirienne seul genre à large distribution spatio-temporelle : Patella.
Compte-tenu de conditions thermiques moins élevées et
Sur les 3 datations retenues, l'une concerne une co d'un contexte tectonique plus simple, un cadre
quil e du fond de la grotte, au pied de la falaise morte (275 aminochronologique a été établi sur la partie nord du litto
+35/-30 ka), les deux autres (240 +30/-25 ka et 265 +45/-30 ralatlantique (Occhietti étal., 1993 ; Lefèvreef a/., 1994)et
ka), des coquilles récoltées sur le cordon littoral à l'entrée étendu à la côte méditerranéenne du Maroc (Occhietti et
de la grotte. Le dépôt du fond de la grotte serait un peu al., sous presse). En comparaison, les échantillons de la
plus ancien, ce qui est logique, mais il n'y a pas de diffé côte atlantique de la région d'Agadir semblaient montrer
rence d'âge sensible, aux erreurs près, entre le dépôt du une plus grande variabilité des taux d'épimérisation. Les
fond de grotte et celui du cordon littoral, qui ont pu être conditions d'épimérisation de Patella intermedia et de
immédiatement contemporains, voire simultanés. Patella safiana étant mieux connues (Occhietti et al., sous
242

presse), cette variabilité peut maintenant être associée à 2 -L'AMDSKXaiOUPEDEL'OULJIEN


des facteurs tels que l'histoire thermique régionale et le
contexte morphostratigraphique et tectonique plus varié. Dans raminogroupe de l'Ouljien, deux sous-groupes sont
distincts. La majorité des échantillons des sites, au Sud du
1 -REMARQUESFRÉUMINAIRES SURLES RÉSULTATS Cap Rhir, donnent des rapports Aile/Ile proches de ceux
(tab. 6) de l'Ouljien de la partie nord de la côte atlantique maroc
aine, c'est-à-dire de l'ordre de 0,500 à 0,550 en ce qui
Dans des conditions thermiques analogues, le taux concerne le genre Patella (Occhietti et al., sous presse).
d'épimérisation varie selon le genre, lent pour Thais, moyen A Agadir et Assif Tamghart, les rapports d'épimérisation
pour Patella et rapide pom Mytilus (Occhietti et ai, 1993). sont plus élevés, dans des contextes stratigraphiques pour
Des essais effectués pour différencier les taux tant identiques à ceux des autres sites. Ceci pourrait con
d'épimérisation de Patella intermedia et de Patella firmer soit une appartenance à un sous-stade isotopique
safiana semblent indiquer un taux irrégulièrement plus lent plus ancien (5c, cf. supra, II, 3, c), soit l'existence d'un
pour cette dernière ; toutefois, le nombre d'échantillons seuil thermique entre le Cap Rhir et la baie d'Agadir (cf.
analysés est insuffisant pour que la différence soit dé supra, II, 2, b), ou même les deux hypothèses à la fois.
montrée. Dans cet article, les rapports d'épimérisation de
Patella intermedia et de Patella safiana sont donc r 3 -L'AMINOGROUPE DEL' AGADIRIEN
egroupés dans le calcul des moyennes.
Dans l'ensemble, on note que la variabilité a) Incertitude sur l'âge du stationnement marin
intraspécifique, représentée par l 'écart-type, semble plus agadirien
faible pour Patella et plus forte pour Mytilus et Thais. Les échantillons des sites regroupés à titre d'essai dans
Toutefois, le nombre d'échantillons n'est pas le même pour l' Agadirien offrent des rapports d'épimérisation de Patella
chaque genre et cette variabilité reste à démontrer statis et Thais nettement supérieurs à ceux de l'Ouljien, tandis
tiquement. Elle tend à augmenter avec l'ancienneté que certaines mesures de Mytilus atteignent la valeur du
stratigraphique. mélange racémique (Aile/Ile - 1,3). Au site d'Agadir Port,
Dans le calcul des moyennes Aile/Ile de Patella, 5 me l'écart entre la base (Aile/Ile = 1,024) et le sommet (Aile/
sures seulement, sur une centaine, ont été éliminées. Les De = 0,822) est surprenant II indique soit une longue expos
valeurs éliminées, plus du double ou moins de la moitié du ition à la chaleur de l'unité basale avant son enfouisse
rapport d'épimérisation moyen d'un lot homogène, co ment, soit deux cycles de sédimentation distincts, ce qui
r espondent soit à des pics parasites sur le est contraire aux données de terrain et aux résultats des
chromatogramme, soit à des spécimens remaniés ou ayant mesures U-Th. La valeur Aile/Ile = 0,822 du sommet de
subi une fossilisation différente. l'unité d'Agadir Port est intermédiaire entre celles de dé
Les résultats confirment sans ambiguïté la présence de pôts marins situés plus au Nord à + 8 m et associés au
deux aminogroupes, le groupe de l'Ouljien et celui associé stade isotopique 7, et celles situées entre + 9 et + 12 m
à titre d'essai à l' Agadirien. Une seule mesure sur un échant associées au stade isotopique 9 (Occhietti et al., sous
illondu «Maarifien» confirme l'ancienneté de ce dernier.
Paléo presse).
Patella Mvtilus Thaïs
rivage Site
moyenne écart-type n moyenne écart-type n moyenne écart-type n
Cap Rhir 0,535 0,077 15 0,775 0,015 3
OULJIEN Mouknan 0,549 0,065 6 0,976 0,104 3 0,393 0,13 5
Imin Ifrane 0,994 0,063 3 0,315 1
Assif Tamghart 0,672 0,042 7 0,958 0,125 4
Agadir Phare 0,663 0,066 3
Agadir Port 1,024 0,048 3 1,249 1
AGADIRf iN base
Agadir Port 0,822 0,085 7 0,934 1 0,559 0,221 5
sommet
Mouknan 0,773 1 0,986 1
encoche 1,095 1 1,304 1

Tab. 6 : Rapport! d'épimérisation* D-Alloisoleucine/L-Isoleucine des acides aminés totaux de coquilles marines de paléorivages
du Pleistocene, de Cap Rhir i Agadir (n « nombre de spécimens analysés).
Table 6 : D-Alloisoleucme/L-Isoleucine ammo acid ratios of marine shells from Pleistocene shorelines between Cape Rhir and Agadir (n -
number of analysed samples).
243

Ceci conduit à deux interprétations divergentes : régions, il existe une relation nette entre le soulèvement
- la valeur d'Agadir Port (sommet) est effectivement in local des unités morphostructurales et l'enregistrement des
termédia re et correspond au stade isotopique 8 ; les me séquences marines.
sures des âges 230 Th et 23 1 Pa (cf. supra, II, 3, c) sont La plage fossile de 50 m se compose de deux unités
exactes. Ceci ferait qu'un niveau régressif serait conservé lithostratigraphiques et faunistiques représentant une s
ici, mais il n'en présente pas les caractéristiques équence marine transgressive à faune chaude, de Gastéro
sédimentologiques, même s'il est vrai que sa faune pré podesdominants (dont deux espèces tropicales caractér
sente un caractère banal et un faciès nettement moins chaud istiques, Nucella plessisi et Calyptraea trochiformis), puis
que celui de l'Ouljien (supra, H, 2, b) ; la difficulté est que régressive, à faune tempérée contenant surtout un Bivalve,
le gisement se trouve aujourd'hui à + 20 m, ce qui impli Acanthocardia tuberculata. Cette séquence dite
querait un taux de soulèvement moyen de l'ordre de 0,7 «maarifienne», du Pleistocene moyen, fait actuellement
cm/siècle au cours du Pleistocene supérieur, bien plus fort l'objet d'un programme de datations U-Th dirigé par J.L.
que celui qui avait été estimé auparavant (Weisrock, 1980 ; Reyss (communication orale).
1 98 1), mais toutefois récemment admis (Meghraoui et al , Les dépôts marins situés à 20 m au Port d'Agadir
1998). (Agadirien) consistent en remplissages de grottes de pied
- les âges 230 Th et 23 1 Pa ne sont pas exacts. On a vu de alaise, restes de plages et de cordons littoraux de moin
(supra, II, 3, b) qu'ils sont des âges minima, ce qui peut dre ampleur. La faune, quoiqu'abondante, est
faire admettre une correspondance avec le stade isotop majoritairement de petite taille et moins chaude que celles
ique 9, vers 300 ka, tenant mieux compte du rapport du Maarifien ou de l'Ouljien. Les datations U-Th, U-Pa et
d'épimérisation trouvé pour l'échantillon Agadir Port par les acides aminés restent encore insuffisantes pour
(base) et de l'altitude de 20 m. dire avec certitude si cette séquence peut être corrélée au
stade isotopique 9, hypothèse la plus vraisemblable au vu
b) Arguments en faveur d'un âge proche de 300 ka pour des résultats et de leurs implications tectoniques.
l'Agadirien Les dépôts de la terrasse inférieure (Ouljien) présentent
les mêmes caractéristiques sédimentologiques, mais avec
L'examen des altitudes relatives de l'Ouljien et de une épaisseur totale plus importante. La faune, toujours
l'Agadirien à Agadir Port permet cependant de favoriser abondante, est plus chaude et de taille moyenne plus éle
l'hypothèse de l'âge «ancien» de l'Agadirien. vée. Les datations donnent des résultats encore dispers
Le niveau eustatique pendant l'optimum climatique du és, parfois en contradiction avec la stratigraphie ; ils sug
sous-stade 5e, à 125 ka, à + 6 + 8 m au-dessus du niveau gèrent l'enregistrement de deux phases de stationnement
marin actuel, correspond à la situation présente des faciès marin au sein du stade isotopique 5.
à faune chaude de l'Ouljien - il est vrai datés à Agadir
plutôt autour de 105 ka - : ceci indique une quasi absence REMERCIEMENTS
de soulèvement tectonique depuis cet interglaciaire. Ceci
étant, il devient nécessaire d'attribuer un âge minimum de Les auteurs remercient M.T. Morzadec et deux relecteurs anony
300 ka au stationnement marin de + 20 m à Agadir pour mesqui leur ont permis d'améliorer sensiblement le manuscrit ;
dans le cadre de recherches sur la géochimie de l'Uranium des Mol
conserver une certaine cohérence à l'évolution tectoni lusques fossiles, un programme nouveau de datations U-Th des sé
que régionale : cela implique en effet un taux moyen de quences marines pleistocenes de la région d'Agadir est en voie d'achè
surrection de l'ordre de 1,14 cm par siècle entre 300 et vement, sous la direction de J.L. Reyss (Laboratoire des Sciences du
125 ka, ce qui est élevé, mais à la rigueur plausible. L'attr climat et de l'environnement, Gif-sur- Yvette). Nous le remercions
pour les discussions très fructueuses à propos des datations U-Th
ibution au stade 7 impliquerait un taux de surrection de exposées ici.
l'ordre de 2,66 cm par siècle au minimum entre 200 et 125
ka, soit plus du double du taux moyen de surrection régio
naldepuis le Pliocène, puis une absence de soulèvement
depuis l'Ouljien, ce qui est peu vraisemblable, à moins BIBLIOGRAPHIE
d'admettre une évolution tectonique particulièrement sac
cadée. L'hypothèse d'un âge proche de 300 000 ans et BIBERSON, P., 1958 • Essai de classification du Quaternaire mar
d'un stationnement marin contemporain du stade isotop in du Maroc atlantique. C.r. somm. Séanc. Soc. géol. Fr., 4, 67-
70.
ique 9 pour l'Agadirien doit donc retenir l'attention.
BIBERSON, P., 1961 - Le cadre paléogéographique de la Préhist
oiredu Maroc atlantique. Publ. Serv. Antiq. Maroc, 16, 235 p.
CONCLUSIONS BOURCART, J., 1927 - Premiers résultats d'une étude du Quater
nairemarocain. Bull. Soc. géol. Fr, 4, 3-33.
En l'état actuel des recherches, il est possible de disti BREBION, PH., HOANG, C.T. et WEISROCK, A., 1984 -
nguer entre le Cap Rhir et Agadir 3 niveaux morphologi Intérêt des coupes d'Agadir-Port pour l'étude du Pleistocene
ques de terrasses marines pleistocenes, respectivement supérieur marin du Maroc, Bull Mus. natn. Hist. nat. Pans, 6,
situés autour de 50, 20 et 0-8 m. Si les terrasses de 50 m et 129-151.
la plus basse sont relativement continues, la terrasse i GIGOUT, M., 1949 - Définition d'un étage Ouljien. C.r. Acad. Se.
Pans, 229, 551-552.
ntermédia re de 20 m n'est aisément observable qu'au Cap
Rhir et à Agadir, c'est-à-dire au pied des anticlinaux les HEARTY, P., MILLER, G.H., STEARNS, CE. and SZABO, BJ.,
1986 - Aminostratigraphy of Quaternary shorelines in the
plus actifs de l'Atlas atlantique. Comme en bien d'autres Mediterranean Basin. Geol. Soc. of America, 97, 850-858.
244

HOANG, C.T., ORTLIEB, L. et WEISROCK, A., 1978 - Nouv OCCHIETTL S., RAYNAL, J.-P., PICHET, P. mi TEXIER, J.-
elles datations 230Th/234U de terrasses marines «ouljiennes»du P., sous presse - Aminostratigraphy of Pleistocene and Holocene
sud-ouest du Maroc et leurs significations stratigraphique et tec shorelines in the Casablanca area, Morocco. Quaternary Sc.
tonique. C.r. Acad. Sc. Pans, 286, 1759-1762. Review.
KAUFMAN, A., BROECKER, W.S., KU, T.L. and THURBER, SAKANOUE, M., KO NO SHI, K. and KOMURA, K., 1967 -
D.L., 1971 - The status of U-series methods of mollusc dating. Stepwise determinations of Thorium, Protactinium and Uranium
Geochtm. Cosmochim. Acta, 35, 1155-1183. isotopes and their applications in geochronomogical studies./n:
KILLIAN, W., 1917 - Géologie des environs d'Agadir. C.r. Acad. «Radioactive dating and methods of low-level counting», IAJZA.
Symposium, Vienna, 313-329.
Sc. Pans, 32-33.
SHACKLETON, J.J. and OPDYKE, N.D., 1973 - Oxygen iso
KU, T.L., 1968 - Protactinium-23 1 method of dating coral of tope and paleomagnetic stratigraphy of equatorial Pacific core
Barbados Island. J. geophys. Res., 73, 2271-2276. V28-238 : Oxygen isotope temperatures and ice volumes on a 10
KU, T.L., 1976 - The Uranium-series methods of age determination. 000 and 100 000 year time scale. Quaternary Research, 3, 39-
Annual Rev. of Earth Planet. Sa., 4, 347-379. 55.
LECOINTRE, G., 1952 - Recherches sur le Néogène et le Quater STEARNS, CE. and THURBER, D.L., 1965 67 - 23OTh/234U
nairemarins de la côte atlantique du Maroc. Notes et Mém. dates of Late Pleistocene marine fossils from the Mediterranean
Serv. géol. Maroc, 99, 2 vol., 198 et 173 p. and Moroccan littorals. Quaternana, VII, 29-41.
LEFEVRE, D., TEXIER, J.-P., RAYNAL, J.-P., OCCHIETTI, S. SZABO, B.J., 1979 - 230 Th, 231 Pa and open system dating of
et EVIN, J., 1994 - Enregistrements-réponses des variations fossil corals and shells. J. geophys. Res., 84, 4927-4930.
climatiques du Pleistocene supérieur et de l'Holocène sur le litto WEISROCK, A^ 1980 - Géomorphologie et Paléoenvironnements
ralde Casablanca (Maroc). Quaternaire, 5, 173-180. de l'Atlas atlantique, Maroc. Thèse de doctorat d'état, Paris I,
MEGHRAOUI, M., OUTTANI, F., CHOUKRI, A. and FRIZON 837 p.
DE LAMOTTE, D., 1998 - Coastal Tectonics across the South WEISROCK, A., 1981 - Neotectonic and coastal morphology in
Atlas Thrust Front, Morocco. In : Stewart I.S. & Vita-Finzi C. the Atlantic Atlas, Morocco. Zeitsch. /Ur Geomorph. Sup. Bd.
(eds) Coastal Tectonics. Geol. Soc. London, Special Publ. 146, 40, 175-182.
239-253.
WEISROCK, A., 1993 - Géomorphologie et Paléoenvironnements
OCCHIETTI, S., RAYNAL, J.-P., PICHET, P. et TEXIER, J.-P., de l'Atlas atlantique, Maroc. Notes et Mémoires du Service Géo
1993 - Aminostratigraphie du dernier cycle climatique au Maroc logique du Maroc, 332, 487 p.
atlantique, de Casablanca à Tanger. C.r. Acad. Sc. Pans, 317,
1625-1632.

View publication stats

Vous aimerez peut-être aussi