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Master I
Équipe pédagogique :
INTRODUCTION GENERALE
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CHAPITRE 5: LES PRINCIPES DOCTRINAUX DE LA POLITIQUE ETRANGERE
DU CAMEROUN
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INTRODUCTION
Cette discipline, exerce par ailleurs un fort attrait chez les étudiants, et plus
généralement chez les curieux de tous âges et de tous acabits. Certains espèrent y trouver un
champ d’études plus concret, plus appliqué que les théories des relations internationales.
D’autres sont fascinés par les grandes figures historiques, d’Otto von Bismarck à Winston
Churchill, ou encore attirés, sans toujours vouloir l’admettre, par le romantisme attribué à la
pratique diplomatique. Marcel Merle, pionnier de l’école française de la sociologie des
relations internationales, distingue la politique étrangère des autres politiques publiques par
son domaine particulier. Pour Merle, la politique étrangère est « la partie de l’activité
étatique qui est tournée vers le dehors, c’est-à-dire qui traite, par opposition à la politique
intérieure, des problèmes qui se posent au- delà de la frontière ». Elle est déployée dans
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l’environnement international. Pour James Rosenau, dans une perspective d’interrelation entre
l’interne et l’externe, la politique étrangère est une exportation de la politique interne; sa
réplication à l’extérieur des frontières nationales. Par la politique étrangère, l’État cherche à
répondre au comportement des autres acteurs internationaux, et, d’une manière plus générale,
agir sur son environnement pour le conserver tel quel, quand il lui est favorable et le
transformer quand il lui paraît défavorable. En d’autres termes, l’État cherche, par le moyen
de la politique étrangère à au moins maintenir et au mieux accroître ses capacités d’influence
à l’extérieur du territoire national.
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travers des filtres qui lui sont propres, qu’ils soient culturels, organisationnels ou cognitifs. Il
est donc indispensable, pour comprendre et expliquer une politique étrangère, d’étudier dans
un premier temps, les acteurs, les ressources et les facteurs d’influence de la décision en
politique étrangère (Première partie). Ensuite, il est essentiel d’analyser et de comprendre les
spécificités nationales en matière de conception et de mise en œuvre de la politique étrangère.
Dans cette perspective l’analyse particulière de la politique étrangère du Cameroun sera
effectuée dans un deuxième temps (Deuxième partie).
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PREMIERE PARTIE :
Les facteurs peuvent être considérés comme le faisceau d’éléments et de données qui
influencent ou déterminent toute politique étrangère. Ils déterminent les options et les choix
en matière de politique extérieure (Chapitre 1). Ces facteurs sont à la fois d’ordre naturel,
politique, idéologico-stratégique et relèvent également des dynamiques conjoncturelles de la
scène internationale qui est l’arène de projection de toute politique étrangère. Par ailleurs,
pour sa mise en œuvre efficiente et efficace, la politique étrangère est dotée de ressources/
moyens institutionnels et humains, à la mesure de l’intérêt et des attentes de l’autorité
publique (Chapitre 2). Ces influences théoriques restent fondamentalement importantes dans
la formulation de la politique étrangère.
CHAPITRE I :
a) La Géographie
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plus d’un niveau, en allant du discours à la mise en œuvre. Nous pouvons ainsi parler d’une
lecture géographique globale, c’est-à-dire d’un regard géographique porté sur différents
aspects ou étapes de la politique étrangère. Par ailleurs, toute action (ou inaction) d’une
autorité politique déployée dans l’environnement hors des frontières de l’État peut être
considérée comme une composante de la politique étrangère, qu’elle soit prise en charge par
le ministère des Affaires étrangères ou par n’importe quelle autre autorité publique. La prise
en compte de la situation géographique d’un état, contribue ainsi à une meilleure élaboration
de la politique étrangère d’un État.
La maîtrise de la géographie est constitutive de tout ordre politique et de la manière
dont il se projette à l’extérieur du territoire national. L’ordre politique, qui se met en œuvre à
travers le commandement, s’inscrit dans une dynamique de maîtrise de l’espace dont le
contrôle constitue un gage de stabilité de l’État. Les politiques nationales sont ainsi avant tout
des politiques de conquête, de maîtrise et de domination spatiale. Et c’est cette ambition de
rester maître sur son espace qui, dans une large mesure, oriente et détermine les relations
extérieures des États. La géographie constitue alors un déterminant quasi primordial de
l’élaboration, de l’organisation et de la mise en œuvre de la politique étrangère. La géographie
est par ailleurs étroitement liée à la démographie.
b) L’histoire
c) La philosophie
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l’universel peuvent être des marqueurs philosophiques ; ainsi que le pacifisme international et
l’humanisme. Les démocraties occidentales par exemple, telles que la France ou encore les
Etats-Unis, ont une politique étrangère originelle d’inspiration philosophique
idéaliste/libérale, fondée sur la construction de l’ordre international, et sur les valeurs de
justice, de liberté, de paix et de dignité humaine. Selon cette vision, les relations
internationales doivent s’incarner à travers les notions de liberté, d’égalité, de fraternité, de
dignité, de solidarité, d’harmonie et d’humanisme, etc... Les discours diplomatiques dans ce
contexte dégagent en effet la conviction forte que les nations ne peuvent par exemple
pleinement s’accomplir que dans la solidarité.
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personnalité des leaders politiques qui orientent leurs choix de politique étrangère mais leur
raison. Cela signifie qu’ils cherchent en tout temps à parvenir à une solution optimale. Ils
doivent donc choisir, parmi les options qui s’offrent à eux, celles qui impliqueront des coûts
minimaux et des bénéfices maximaux en regard de l’intérêt national. La possibilité pour les
décideurs de choisir l’option qui offre le meilleur rapport coûts/bénéfices dépend toutefois de
la quantité, de la qualité et de la fiabilité des informations dont ils disposent sur les enjeux, les
causes et les conséquences prévisibles des différentes options disponibles. La théorie des jeux,
très proche de la théorie de l’acteur rationnel, compare la prise de décision à un jeu
stratégique dont les principales règles sont les suivantes : 1) chaque joueur est rationnel et
fonde son appréciation sur un calcul coûts/bénéfices ; 2) chaque joueur dispose de plusieurs
options qui permettent de préserver ou de maximiser les gains tout en limitant les coûts ou les
risques ; 3) l’issue du jeu est incertaine car elle dépend de l’ordre de préférence dans lequel
chaque joueur classe les options disponibles ; néanmoins, elle se traduit toujours par la
coopération ou un conflit entre les participants. Dans le premier cas (jeu à somme variable), la
décision résulte d’un compromis entre certaines options privilégiées par les participants. Dans
le second cas, ou bien aucune décision n’est adoptée, ou bien la décision reflétera le choix
d’un seul participant (jeu à somme nulle). Selon Charles Hermann la dynamique du processus
de décision dépend de l’attitude, directive ou conciliante, du chef de l’État. Ce dernier
impose-t-il sa vision des choses ou recherche-t-il un consensus parmi les décideurs ? Cette
donnée ne dépend pas nécessairement de la nature du régime politique : les premiers ministres
des régimes parlementaires ou les présidents des régimes présidentiels ou semi-présidentiels
démocratiques peuvent être plus directifs que les présidents des républiques autoritaires, dont
le pouvoir est basé sur l’appui d’un clan ou d’un réseau clientéliste.
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Kaplan et Holsti ont analysé les impacts des systèmes politiques internationaux sur la
conception que se font les dirigeants de leur rôle – en tant que chefs ou membres d’un bloc,
d’une coalition ou sous-système d’alliés. Selon eux, c’est cette conception qui façonne leur
image de la réalité et les orientations de leur politique étrangère.
En ce qui concerne les rapports de force économiques, selon les marxistes, les
néomarxistes et plusieurs néolibéraux et néoréalistes, la politique étrangère des États est
principalement déterminée par leur puissance économique, qui est le fondement de leur
pouvoir militaire et politique. La politique extérieure des États varie en fonction de leur
niveau de développement, de l’importance et de la rentabilité de leurs échanges commerciaux
et financiers et de leur capacité subséquente d’influencer les règles et les institutions des
relations économiques internationales. Selon ces théories, les acteurs économiques les plus
puissants exercent donc une influence prépondérante sur les décisions de la politique
étrangère. L’évaluation de cette influence diffère cependant selon les auteurs. Robert Cox
soutient, à l’instar des marxistes, que les groupes oligopolistiques multinationaux dictent aux
États leur politique extérieure. La néoréaliste Susan Strange affirme que les gouvernements
jouent désormais un rôle de leader uniquement en matière de sécurité. Dans le domaine de
l’économie, de la finance, du commerce, de la recherche et de l’innovation technologique, le
pouvoir de décision appartient aux Firmes multinationales. Robert Gilpin, un autre
néoréaliste, reconnaît que la croissance phénoménale des Firmes multinationales a érodé
sérieusement l’autonomie de décision des États, mais ces derniers et les organisations
économiques gouvernementales conservent le pouvoir de réglementer le fonctionnement des
marchés et l’activité des Firmes multinationales.
Selon la théorie néolibérale, les intérêts économiques des divers groupes de pression
influencent largement les décisions de la politique étrangère. Quoique néolibéral, Karl Deutch
soutient que le lobbying de ces acteurs n’est pas uniquement motivé par leurs intérêts
économiques. Les élites politiques (membres du pouvoir exécutif, du Parlement, de la haute
fonction publique et des appareils de partis), les médias d’information, les notables (le petit
pourcentage de la population qui suit de près les débats politiques et sert de relais
sociologique) et l’ensemble des citoyens qui participent aux élections peuvent également
influencer les décisions de la politique étrangère. Chaque palier transmet des messages et
exerce une influence sur les autres paliers. Le flux principal est descendant, à partir de l’élite
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économique ou politique. Mais, parfois, des communications directes s’établissent entre les
paliers inférieurs (électeurs, notables, médias) et influencent les paliers supérieurs. Les
dirigeants tentent de réduire les conflits ou les tensions dans les messages transmis par ces
différentes catégories d’acteurs, en faisant des choix de politique étrangère qui équilibreront
les demandes en provenance du système national de décision. Toutefois, l’application de ces
choix provoque des impacts qui obligent les dirigeants à modifier ou à ajuster les orientations
de leur politique étrangère. Celle-ci est donc déterminée par l’autorégulation des flux
d’information et leur rétroaction. En raison de ces deux mécanismes, le résultat d’une
politique est souvent différent, sinon contraire à l’intention initiale des leaders politiques.
À titre d’exemple, lorsque le gouvernement américain décida d’installer des bases militaires à
l’étranger, au début de la guerre froide, il fut soumis à une double pression interne : celle du
département de la Défense, qui souhaitait établir de nombreuses bases aériennes et navales
afin d’assurer la sécurité de l’Alliance atlantique, et celle des départements des Affaires
étrangères et des Finances, alors préoccupés par les risques politiques et financiers de
l’opération. La volonté d’équilibrer ces pressions contradictoires conduit la Maison-Blanche à
implanter des bases militaires dans les pays sous-développés à régime autoritaire souvent
corrompu.
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constructiviste complète la théorie libérale de la paix démocratique qui prétend que les
démocraties ne se font pas la guerre en raison de leurs normes et de leurs institutions
communes, sans expliquer l’origine de ces normes et institutions.
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CHAPITRE II :
La politique étrangère est avant tout une politique publique gouvernementale mise
en œuvre pour des fins de contrôle et de maîtrise de l’international. Elle est donc animée par
des acteurs qui, en fonction de la distribution institutionnelle des compétences au plan interne,
la conçoivent, la mettent en œuvre et contrôlent son déploiement (I). Cette mise en œuvre se
fait à travers une multitude de moyens et de ressources institutionnelles (II).
a) Le Président de la République
Très souvent, le président de la République dans la plupart des États du monde a d’énormes
prérogatives en matière de politique étrangère de par les pouvoirs constitutionnels qu’il
détient et les fonctions diplomatiques qu’il exerce.
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fonctions spécifiques en la matière de même que d’un statut diplomatique prééminent en tant
que plénipotentiaire ès qualité.
La politique étrangère est principalement mise en œuvre par les autorités centrales de
l’État et leurs représentants. L’éventail de ces représentants est très large. Il comprend les
fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères qui travaillent dans les ambassades, les
consulats, les délégations auprès des Organisations Internationales (OI) et autres missions
diplomatiques de l’État. Il inclut également les membres de toutes les institutions de l’appareil
gouvernemental (armée, services de renseignement et de sécurité, agences d’aide au
développement, ministères,…) qui sont impliqués dans l’action internationale que mène l’État
en dehors du circuit des missions diplomatiques.
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Bien que le rôle des missions diplomatiques au sein des OI soit devenu de plus en plus
important au fil du temps. Il est question ici de focaliser sur les ambassades et les consulats
qui demeurent des instruments essentiels d’application de la politique étrangère des États.
Il apparaît donc clairement que celui-ci est avant tout un agent d’exécution, un metteur
en scène d’une pièce rédigée par quelqu’un d’autre ; c’est-à-dire le chef de l’État. Néanmoins,
ce dernier participe à la conception de la politique extérieure de par les suggestions d’action
qu’il soumet au chef de l’État.
b) Les ambassades
Les fonctions d’une ambassade consistent principalement à : (1) représenter l’État
accréditant auprès de l’État accréditaire ; (2) protéger les intérêts de l’État accréditant et de
ses ressortissants dans les limites du droit international ; (3) négocier des ententes avec l’État
accréditaire ; (4) s’informer par tous les moyens licites de l’évolution de la situation dans
l’État accréditaire et faire rapport à l’État accréditant ; (5) encourager des relations amicales et
développer des relations économiques, culturelles et scientifiques entre l’État accréditant et
l’État accréditaire. Au surplus, toute ambassade peut remplir les fonctions d’un consulat.
C’est généralement le cas lorsqu’un État n’a pas de consulat dans un pays ou lorsque sa ou ses
missions consulaires ne suffisent pas à la tâche. Toute ambassade est dirigée par un chef de
mission (ambassadeur). Le nombre de diplomates et d’employés affectés à des tâches
administratives et techniques varie selon l’importance accordée par l’État à chacune de ses
ambassades.
L’établissement de relations diplomatiques entre deux États se fait par consentement mutuel.
Un État peut poser des conditions à l’établissement de ces relations. Ainsi, la République
Populaire de Chine a exigé que le Canada s’engage par écrit à ne pas reconnaître
officiellement le gouvernement de Taiwan avant d’accepter de nouer des relations avec
Ottawa, en 1970. En outre, tout État peut décider d’établir des relations diplomatiques de jure
(sans ambassade) ou de facto (avec ambassade) avec un autre État. En fait, aucun pays ne
possède des ambassades dans tous les pays. Ce sont évidemment les États les plus riches et les
plus influents qui ont le réseau d’ambassades le plus étendu. La pratique veut que lorsqu’un
État n’a pas d’ambassade dans un pays, il confie à un État ami le mandat de protéger ses
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intérêts et ceux de ses ressortissants. En cas de guerre, un tel mandat est souvent confié à un
pays neutre ou à une OI humanitaire telle la Croix-Rouge. L’ambassadeur n’est désigné que
lorsqu’il est agréé par l’État d’accueil. Chaque État peut décider du niveau ou de l’importance
de son ambassade, mais le pays hôte peut fixer des règles minimales à cet égard. En vertu du
principe d’extraterritorialité, chaque État exerce une pleine souveraineté sur le territoire et
l’édifice de son ambassade (située obligatoirement dans la capitale) et de son consulat
(installé dans la capitale ou une autre ville). Cela signifie qu’ils ne peuvent faire l’objet
d’aucune perquisition, réquisition, saisie ou autre mesure d’intervention de la part du pays
hôte.
Les mesures prévues par la Convention de Vienne de 1964 en cas de conflit entre l’État
accréditaire et l’État accréditant sont limitées. L’État accréditaire peut à tout moment expulser
les membres du personnel d’une ambassade – ou d’un consulat – jugés personæ non gratæ.
L’État accréditant doit alors rappeler les personnes visées par cet ordre sous peine de voir
l’État accréditaire cesser de reconnaître leur statut diplomatique. Généralement, l’État
accréditant s’exécute tout en adoptant des mesures d’expulsion équivalentes à l’encontre des
diplomates de l’État accréditaire. Le rappel des ambassadeurs est une procédure couramment
utilisée par l’État accréditant pour signifier à l’État accréditaire son désaccord avec l’une ou
l’autre de ses politiques. En cas de conflit très grave, l’État accréditant peut aussi fermer son
ambassade.
c) Les consulats
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n’entraîne pas ipso facto la fermeture des consulats des États impliqués. Chaque consulat est
dirigé par un chef de mission (consul).
Les fonctions consulaires, qui peuvent être exercées par des ambassades, consistent
notamment à : (1) protéger les intérêts de l’État accréditant et de ses ressortissants dans les
limites du droit international ; (2) favoriser le développement de relations commerciales,
économiques, culturelles, scientifiques et amicales entre l’État d’envoi et l’État hôte ; (3)
s’informer, par tous les moyens licites, de l’évolution de la situation économique,
commerciale, culturelle et scientifique de l’État hôte et faire rapport à l’État d’envoi ; (4)
délivrer des passeports aux ressortissants de l’État d’envoi ainsi que des visas et autres
documents de voyage aux ressortissants de l’État hôte ; (5) agir en qualité de notaire ou
d’agent de l’administration civile dans la mesure où les lois et règlements de l’État hôte
l’autorisent ; (6) représenter les ressortissants de l’État accréditant devant les tribunaux de
l’État hôte ; (7) contrôler et inspecter les bateaux et avions ayant la nationalité de l’État
d’envoi lors de leur présence sur le territoire de l’État hôte.
Le personnel des ambassades comprend les personnes qui ont le statut de diplomate,
les administrateurs et techniciens, et les employés de service. Les diplomates, qui sont
obligatoirement des citoyens de l’État accréditant alors que les autres employés sont souvent
des ressortissants de l’État accréditaire, assument les fonctions de représentation propres aux
ambassades décrites ci-dessus. Compte tenu que les délégations des États au sein des OI sont
équivalentes à des ambassades, plusieurs de leurs membres ont également un statut de
diplomate. Dans la hiérarchie des diplomates, le poste le plus élevé est celui d’ambassadeur,
le poste de chargé d’affaires est le deuxième en importance. Le personnel des consulats inclut
les citoyens de l’État accréditant qui ont le statut de fonctionnaire consulaire et les
administrateurs, techniciens et employés de soutien qui sont souvent des ressortissants de
l’État accréditaire. Les fonctionnaires consulaires assument les fonctions de représentation
dévolues aux consulats. Au sein de la hiérarchie des fonctionnaires consulaires, le poste le
plus important est celui de consul. Bien que les fonctionnaires consulaires remplissent parfois
les fonctions d’un diplomate d’ambassade, ils n’acquièrent pas le statut de diplomate, sauf
s’ils exercent ces fonctions au sein d’une OI.
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Les diplomates bénéficient des mêmes immunités et privilèges que ceux accordés aux
missions avec statut d’ambassade. Leur personne, leur domicile privé, leurs biens, leur
correspondance, leurs télécommunications, leurs bagages et les documents diplomatiques
qu’ils transportent – la valise diplomatique – sont inviolables. Ils ne peuvent faire l’objet
d’aucune fouille, inspection, confiscation ou rétention de la part des services de sécurité des
États. Les diplomates jouissent également d’une complète immunité face à la justice pénale,
civile et administrative de l’État accréditaire. En revanche, ils sont soumis à la justice de leur
État. Lorsqu’un membre du personnel diplomatique d’une ambassade viole une loi de l’État
accréditaire, il est généralement renvoyé dans son pays d’origine et jugé par ce dernier. On se
souviendra qu’en 2000, un diplomate de l’ambassade russe à Ottawa a causé la mort d’une
Canadienne alors qu’il conduisait sa voiture en état d’ivresse. Le gouvernement canadien l’a
renvoyé en Russie après avoir obtenu l’assurance qu’il serait jugé pour son acte, malgré
l’opposition des proches de la victime qui craignaient qu’il ne soit grâcié en raison du laxisme
des lois russes à l’égard de l’alcool au volant. Cela étant dit, en vertu de l’article 37 de la
Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, un État accréditant peut renoncer à de
telles immunités pour ses diplomates. Au chapitre des privilèges, les diplomates sont
exemptés des impôts et taxes de l’État accréditaire. En cas de rupture des relations
diplomatiques ou de conflit armé, l’État accréditaire doit assurer la protection des diplomates
de l’État accréditant et de leurs familles, et faciliter leur départ de son territoire dans les plus
brefs délais.
Les immunités et privilèges des fonctionnaires consulaires sont plus restreints que ceux des
diplomates. Leur immunité face à la justice pénale de l’État d’accueil est limitée. Ils ne
peuvent être ni arrêtés, ni détenus de manière préventive, ni incarcérés, ni jugés sauf en cas de
crime grave ou d’une décision des autorités compétentes. Leur immunité face à la justice
administrative de l’État d’accueil n’est pas complète. Ils peuvent faire l’objet de poursuites
pour un contrat conclu en dehors de leurs fonctions consulaires et pour un accident ayant
causé des dommages à un ressortissant de l’État de résidence. Ce dernier a le pouvoir de les
obliger à comparaître comme témoins dans des procès. Ils sont exemptés des impôts, des
taxes et des droits de douane de l’État d’accueil. Toutefois, contrairement aux diplomates,
leurs bagages personnels et ceux de leur famille peuvent être inspectés si l’État d’accueil a de
sérieux motifs de croire qu’ils contiennent des objets interdits par ses lois et règlements.
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La diplomatie non gouvernementale, en tant que « nouvelle diplomatie », a atteint aujourd’hui
ses lettres de noblesse dans la mesure où les Organisations internationales non
gouvernementales (OING) qui en sont les animateurs principaux ont élargi leur surface
d’action et d’influence internationale. Ces OING, estimées aujourd’hui à plus de 20 000 dans
le monde, ont, pour les plus puissantes, des stratégies internationales, des structures
d’intelligence, des services diplomatiques sinon parfois aussi performants, influents et
efficients que ceux de nombreux États. Il a ainsi émergé au plan global une diplomatie dite «
non gouvernementale » à laquelle l’on peut rattacher quelques caractéristiques : diplomatie
opérationnelle axée sur l’approvisionnement de certains services publics (santé, alimentation,
environnement, scolarisation, pauvreté) ; diplomatie tribunitienne fondée sur le plaidoyer
(advocacy), la défense, la dénonciation ou la sensibilisation sur les grandes causes de
l’humanité ; diplomatie alternative qui s’enracine dans le lobby et l’influence, notamment.
CHAPITRE III :
Ce chapitre tente de démontrer que les connaissances et les réflexions sur la politique
étrangère, souvent nombreuses et variées, s’appuient sur les théories « positivistes » des
Relations Internationales. L’étude des relations internationales et l’étude de la politique
étrangère ont longtemps été considérées comme une seule et même chose. Le travail combiné
des approches théoriques des RI nous dote de puissants outils analytiques pour comprendre
les dynamiques d’un monde de plus en plus interconnecté et réellement global. Prises
individuellement, ces théories ne semblent nous offrir que des portraits partiels de la
complexité qui marque notre époque, mais, prises ensemble, elles peignent un tableau aux
couleurs et formes riches et variées. C’est pour cette raison qu’il est certainement raisonnable
de s’intéresser autant à la sagesse que nous offrent les réalistes qu’à l’optimisme qui teinte la
vision des libéraux, qu’il faut ouvrir la « boîte noire » de l’État et revenir aux décideurs
humains tout en gardant à l’esprit que nul n’évolue en vase clos et que les idées sont souvent
plus fortes que les armes. Dire quelque chose de significatif à ce sujet, revient à considérer
que la politique étrangère des États requiert plus que jamais d’abattre les barrières théoriques
qui divisent et empêchent une synthèse fructueuse des différents points de vue théoriques
complémentaires.
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I- Le réalisme et les approches libérales explicatives de la politique étrangère
a) Le réalisme de la politique étrangère
Les approches théoriques en RI ont beaucoup à dire sur la politique étrangère, même si
les messages peuvent être parfois antinomiques. Dans le cadre de cette première partie, deux
tendances théoriques feront l’objet d’analyse : l’approche réaliste et les approches libérales.
Alors que certains réalistes prêchent d’abord et avant tout la prudence, d’autres militent plutôt
en faveur d’une attitude proactive pour maximiser la puissance relative de leur État. Qui plus
est, le réalisme dans son ensemble reste marqué par une profonde obsession envers la sécurité
militaire de l’État, faisant le pari que celle-ci pèsera toujours plus que les autres lorsque des
choix déchirants doivent être faits. Ses postulats épurés, qui font de la scène internationale le
domaine de la nécessité, de la récurrence et de la tragédie, en font sans conteste une des
approches les plus puissantes que la discipline puisse offrir pour saisir les racines du
comportement des États sur la scène internationale. Cela explique certainement autant
l’attrait qu’il peut exercer auprès d’une frange toujours nombreuse de chercheurs en RI, toutes
langues et origines nationales confondues, que le rôle d’épouvantail que lui font jouer les
théoriciens plus critiques de la politique globale. Une présentation des visions théoriques sur
la politique étrangère pourrait donc difficilement débuter autrement que par la prise en compte
des postulats réalistes en la matière. Plusieurs historiens, philosophes et praticiens des siècles
passés ont laissé une trace indélébile sur les développements récents de cette approche.
Comme le rappelle Dario Battistella (2012), le réalisme contemporain offre trois postulats qui
ont trait à la politique étrangère et qui réussissent à faire consensus. Ces trois postulats
concernent la rationalité instrumentale qui anime les décideurs étatiques, l’unité de l’État et sa
prépondérance comme acteur de la politique globale, ainsi que la séparation nette entre les
considérations politiques intérieures et extérieures. Le chemin pour se rendre à une telle unité
théorique n’a cependant pas été des plus simples au regard des précurseurs qui ont participé
par leur travaux respectifs à la construction du champ théorique réaliste allant de Thucydide
(460-406
av. J.-C.) à Hobbes (1588-1679)1. Machiavel avant lui, expose les fondements de la nature
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Si l’ancien général et historien athénien Thucydide (460-406 av. J.-C.) est généralement considéré comme le premier
penseur réaliste que nous a laissé l’histoire, tant son Histoire de la guerre du Péloponnèse contient de nombreux passages
qui expriment les fondements de l’approche (absence d’autorité interétatique capable d’imposer un règlement pacifique
aux cités en guerre ; droit des cités de défendre leurs intérêts par la force ; vertu de l’équilibre des puissances, dont la
rupture a entrainé la guerre), a cependant Machiavel (1469-1527) qui fait figure de premier réaliste moderne. Le Prince
nous offre une réflexion sur les relations entre États qui fait encore école chez les réalistes contemporains. À partir de sa
considération très négative de la nature humaine (ingrate, sauvage, violente, conspiratrice, arrogante, insatiable), qui reste
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humaine, la quête individuelle de la sécurité qui mène au contrat social et l’impossibilité pour
tout État d’accepter d’être dominé par d’autres comme les facteurs qui rendent impossible le
dépassement de l’anarchie des relations internationales. Ce faisant, la politique étrangère ne
pourra être jamais plus que la défense des intérêts de l’État dans un monde hostile. Pour toute
la sagesse qu’ils ont pu insuffler à la philosophie politique de l’international, Thucydide,
Machiavel et Hobbes demeurent des précurseurs du réalisme moderne. Cependant, cet durant
la moitié du XXe que la discipline connaitra trois vagues de développement académique. La
première, qui l’emportera sur l’idéalisme de l’entre-deux-guerres est considérée comme le
premier « grand débat » théorique de la discipline qui produira des analyses maintenant
classiques et associés à des géants tels Edward H. Carr (1964), Hans J. Morgenthau (1948),
George F. Kennan (1951), Henry Kissinger (1957) et Raymond Aron (1962). La seconde,
lancée par Kenneth N. Waltz en 1979 avec la publication de son magnum opus, Theory
of International Politics, verra naître un « néoréalisme » soucieux de devenir une
véritable théorie scientifique de la politique internationale. Et enfin la troisième, dite «
réalistes néoclassiques », qui regroupe des chercheurs revendiquant à la fois la prise en
compte des contraintes structurelles aux relations entre les États, comme les expriment les
néoréalistes, et celle des facteurs internes qui déterminent les décisions de politique étrangère
des États, sujet au centre des réflexions des réalistes classiques. Parmi ces réalistes
néoclassiques, on comptera William C. Wohlforth (1993), Gideon Rose (1998), Randall L.
Schweller (1998) et Fareed Zakaria (1998).
De nos jours en effet, les réalistes en RI se repèrent assez facilement par leur intérêt
marqué pour débattre : de la longévité potentielle de l’ordre (unipolaire ou multipolaire) issu
de la fin de la guerre froide et de ses conséquences sur la politique étrangère américaine
(Mearsheimer, 1990 ; Huntington, 1999 ; Kapstein et Mastanduno, 1999 ; Brooks et
Wohlforth, 2002 ; Ikenberry, 2002 ; Brzezinski, 2004 ; Layne, 2006) ; de la préférence que les
États devraient avoir (ou non) envers la maximisation de leur puissance (particulièrement
militaire) au détriment d’une recherche plus prudente de la sécurité passant par une
autorestriction stratégique (Mearsheimer, 2001) ; de l’utilité de la dissuasion (nucléaire ou
conventionnelle) comme stratégie militaire et politique (Waltz et Sagan, 1995 ; Mearsheimer
inchangée depuis la création des hommes, il en vient à conseiller aux princes de ne se soucier que de la pérennité de leur
pouvoir, ce qui implique chez lui de chercher continuellement à étendre leur domination sur les autres États. Dans la
mesure où, chez Machiavel, ni l’autorité ecclésiale, ni celle impériale ne saurait se présenter comme garantes de la sécurité
des princes, il fait figure de précurseur du réalisme moderne qui identifie l’anarchie du système international comme
structure impérative des rapports entre les unités politiques, qui les contraint toutes à la méfiance envers leurs semblables
et leur permet de régler leurs différends par la force. Le philosophe anglais Thomas Hobbes (1588-1679), pour sa part, est
certainement l’une des sources les plus influentes sur la vision réaliste contemporaine des rapports interétatiques et de la
politique étrangère.
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et Walt, 2003). De par ces débats, la palette des recommandations réalistes en matière de
politique étrangère ne cesse de croître. Mais comme toujours, une politique étrangère guidée
par des réflexions réalistes se reconnaît par l’accent qui est mis sur les questions de sécurité
militaire et économique où le « chacun pour soi » demeure la stratégie la plus éprouvée.
La politique étrangère peut être saisie suivant quatre idées principales empruntées aux
philosophes libéraux classiques afin de guider l’analyse. La première, plus optimiste est
héritée à la fois de la philosophie stoïcienne gréco-romaine et de la morale chrétienne
médiévale. La foi en l’universalité du genre humain et en la nature foncièrement pacifique de
l’homme marque profondément les libéraux classiques, tels que de John Locke (1632-1704) à
Benjamin Constant (1767-1830) et John Stuart Mill (1806-1873), en passant par Jean Jacques
Rousseau (1712-1778) et Emmanuel Kant (1724-1804). Deuxièmement, les libéraux mettent
en relation la nature du régime politique d’un État et son comportement à l’international,
relevant particulièrement le pacifisme des régimes républicains et démocratiques les uns
envers les autres, si ce n’est à l’égard des régimes autoritaires. Pour la troisième, les libéraux
ont depuis Adam Smith et David Ricardo fortement associé paix et prospérité, voyant dans
l’organisation capitaliste des sociétés nationales comme dans celle du commerce international
le gage d’un partage des richesses profitant à tous. On notera cependant, que la dimension
économique des relations internationales n’aura pas été au XXe siècle l’intérêt principal des
libéraux œuvrant dans la discipline des RI, qui semblent souvent avoir laissé ces réflexions à
leurs confrères économistes. Enfin, il ne faut pas oublier de mentionner la place de choix que
les libéraux accordent au droit dans la régulation des rapports internationaux. Si la tradition
médiévale de la guerre juste marque un jalon important de leur réflexion en la matière, elle
mènera à terme aux réflexions des libéraux internationalistes de la fin du XIXe et du début du
XXe siècles, qui feront du droit international le socle sur lequel la paix entre les États doit
reposer. C’est sur cette base que l’argument idéaliste, premier véritable courant théorique de
notre discipline naissante après la Grande Guerre, aboutira à la notion de sécurité collective
telle que pensée par Norman Angell (1910), David Davies (1930), Leonard Woolf (1916) ou
Alfred Zimmern (1936 et 1939).
23
consolidation d’une fédération de républiques s’est transformée en théorie de la paix
démocratique, selon laquelle les États démocratiques ne se font pas la guerre entre eux (ce qui
n’implique nullement qu’ils éviteront à tout prix un affrontement armé avec des États non
démocratiques). Il est clair que considérés sous cet angle, les intérêts nationaux des
démocraties résident dans la diffusion de leur modèle politico-économique, garant d’une
pacification des rapports interétatiques à long terme. Les théoriciens de la perspective
transnationaliste nous rappellent quant à eux qu’au cours des dernières décennies, la politique
globale est devenue un espace décentralisé où interagissent un nombre toujours grandissant
d’acteurs non étatiques dont l’influence cumulative représente un défi de taille au monopole
de l’État sur l’évolution de cet espace. Les auteurs phares de cette approche (Keohane et Nye,
1977 ; Rosenau, 1980 ; Rosenau, 1990 ; Rosenau, 2003 ; Merle, 1988 ; Badie et Smouts, 1992
; Badie, 1999) proposent de considérer le monde comme un ensemble complexe, où les
notions de souveraineté et de puissance ont perdu leur pertinence d’antan et où
l’interdépendance entre tous les types d’acteurs influence la marge de manœuvre de ces
derniers dans leurs choix et actions. Les décideurs de politique étrangère devraient en ce sens
prendre en compte ces évolutions, renoncer à voir dans la puissance militaire un outil utile
pour garantir la sécurité, se soucier grandement des facteurs qui influencent la prospérité du
pays et composer avec la présence d’acteurs non étatiques influents pour favoriser l’atteinte
de leurs propres objectifs. Si l’intérêt national devient un objet en constante redéfinition chez
les transnationalistes, c’est bien parce que l’environnement international ne pardonnera pas
une rigidité en la matière. Des lors, on notera que c’est un ensemble de doctrines
économiques néolibérales qui ne sont pas inspirées du libéralisme en RI qui semble avoir,
depuis près de trente ans, capturé les cœurs et les esprits d’une large part des dirigeants
étatiques, qui demeurent en dernière analyse les décideurs ultimes de la politique étrangère.
Le champ de l’analyse décisionnelle gagne à considérer le plus de variables possibles pour
saisir toutes les nuances d’un phénomène social extrêmement dense et souvent invisible au
commun des mortels. Cependant, il est très difficile d’établir lequel ou lesquels, parmi ces
facteurs, devraient être priorisés par les chercheurs pour obtenir une vue d’ensemble
satisfaisante du phénomène à l’étude. Considérer que c’est le cas à l’étude qui détermine cette
hiérarchisation des facteurs explicatifs pose de sérieux problèmes méthodologiques aux
chercheurs du domaine, tout en effaçant toute prétention à la généralisation, ce qui mine en fin
de compte le pouvoir prescriptif de ce type d’analyse.
24
II- Les propositions du paradigme constructiviste à l’analyse de la politique
étrangère
La première est celle de l’étude des valeurs, croyances, normes et idées qui sont
collectivement produites et reproduites de manière intersubjective sur la scène
internationale. Cet environnement offre alors une liste infinie de sujets de recherche :
l’anarchie comme institution sociale des relations interétatiques, le tabou face à l’utilisation
d’armes de destruction massive, le concept d’intervention humanitaire et les processus visant
à mettre en place et à appliquer des conventions internationales régulant les moyens d’actions
des États dans des domaines précis. On imagine difficilement un décideur de politique
25
étrangère prendre un temps d’arrêt pour considérer le rôle que peuvent jouer les normes et les
idées débattues à l’international sur l’élaboration des actions à poursuivre, mais il est clair
que, dans la pratique, les acteurs de la prise de décision sont affectés par ce qu’ils conçoivent
être des comportements légitimes ou illégitimes dans l’arène diplomatico-stratégique.
Souvent, la prise en compte de ce type de considération nous permettra d’approfondir les
pistes déjà offertes par l’analyse des facteurs culturels, bureaucratiques, perceptuels et
cognitifs qui sont étudiés par les approches décisionnelles.
La seconde voie qui s’offre aux constructivistes est d’élargir leur canevas et de se
concentrer sur les conditions qui forgent les identités étatiques, en portant une attention
toute particulière à la teneur des discours par lesquels sont véhiculées ces identités.
Sachant que les intérêts nationaux que vont énoncer les décideurs de politique étrangère dans
une situation donnée reposent sur leur compréhension de l’identité de leur pays, les
constructivistes qui empruntent cette voie permettent de faire la transition entre la version
holiste et la version individualiste de cette approche. Le travail à accomplir pour réussir ce
tour de force relève alors de l’herméneutique : le but est de comprendre le sens que les acteurs
en présence accordent aux divers concepts qui construisent les identités collectives, ce qui
permet à terme de saisir pourquoi la politique étrangère d’un État prend une direction
particulière à un moment donné. Cette démarche peut être entreprise autant dans un but
principalement explicatif qu’avec une visée critique. En effet, plusieurs constructivistes se
contenteront de raconter la construction intersubjective des identités, qui aboutissent à
l’identification d’intérêts nationaux lors de la prise de décision en politique étrangère.
D’autres souligneront la nature conflictuelle des débats sur les composantes de l’identité
nationale, qui ne sont jamais sans conséquences sociales : les visions dominantes auront
tendance à marginaliser ou même à réduire au silence leurs rivales, imposant ainsi une
hégémonie idéologique (au sens gramscien) à l’ensemble de la société en matière de questions
internationales.
26
qui se demande si elle devrait suivre une piste plus « réaliste » ou « libérale » face à un
enjeu international, ni même fournir une alternative claire. Un autre exemple des
limites constructivistes est sa plus grande facilité à expliquer de quelle manière une série
d’idées ont façonné une certaine définition des intérêts nationaux et ainsi un comportement
étatique spécifique, qu’à nous aider à comprendre pourquoi ce sont ces idées, plutôt que
d’autres, qui ont joué un tel rôle. Car pour rester fidèle à la complexité de la vie sociale (une
aspiration constructiviste évidente), il faudrait prendre plus sérieusement en compte le fait que
les idées évoluent dans un environnement compétitif. La version critique du constructivisme
offre à cet égard une tentative de réponse (ce sont les luttes de pouvoir qui déterminent le
destin des idées), mais elle repose malheureusement trop souvent sur des faits difficilement
vérifiables, en plus de suivre un raisonnement logique discutable : si telle idée s’est imposée,
ses capacités de réduction des tensions internes ou de ralliement des opinions divergentes n’y
sont pour
rien, elle n’est que l’expression des préférences d’un groupe que la lutte pour le pouvoir a
favorisé.
DEUXIEME PARTIE :
La politique étrangère est considérée dans son acceptation traditionnelle, comme une
action qui, par son auteur et par son destinataire, se situe dans la sphère de l'activité étatique.
Holsti Kalevi Jaakko utilise toutefois au niveau des destinataires de la politique étrangère, le
concept d'environnement externe (externat environment), ce qui ne semble pas exclure, de
façon expresse et catégorique, des destinataires non étatiques. En tant qu’État souverain, le
Cameroun a bel et bien une partie de son activité politique nationale «tournée vers le dehors »,
dont la visée est la maîtrise de l’environnement international, le renforcement de son
influence et de sa respectabilité internationale ainsi que la maximisation de ses intérêts
nationaux. Explorer et comprendre la politique étrangère du Cameroun, se feront dans un
premier temps par l’étude des principes doctrinaux du pays (Chapitre 1), dans un second
27
mouvement, il s’agira d’analyser les multiples objectifs de la politique étrangère du Cameroun
(Chapitre 2).
CHAPITRE IV :
28
politique étrangère du comportement des États. L’une d’elles consiste à analyser les résultats
obtenus. Si une politique est maintenue sur une longue durée et que les décideurs ont eu
maintes occasions de l’évaluer et de la modifier, on peut inférer que ses résultats
correspondent aux objectifs poursuivis. Par exemple, de nombreuses études sur l’aide
publique au développement notent que l’aide bilatérale a un impact minime sur le
développement économique des pays bénéficiaires. Puisque cette pratique est répétée depuis
plusieurs des décennies, on peut légitimement mettre en doute que l’objectif premier soit de
favoriser le développement économique.
En tant qu’« activité par laquelle un État établit, définit et règle ses rapports avec les
gouvernements étrangers », la politique étrangère est en effet, une politique publique, c’est-à-
dire qu’elle fait d’abord intervenir les autorités publiques qui lui donnent un contenu, des
ressources et un programme dont la finalité est la maîtrise de l’environnement extérieur de
l’État. La politique étrangère du Cameroun vise ainsi une série d’objectifs à la fois politiques
(I), économiques (II) et stratégiques (III). Pour sa mise en œuvre efficiente et efficace, celle-ci
est dotée de ressources/ moyens financiers, matériels, humains et institutionnels, à la mesure
de l’intérêt et des attentes de l’autorité publique.
29
(reconnaissance de la légitimité d’un gouvernement et de ses actions, par exemple)
qu’au contrôle (par la police et l’application des lois, par exemple).
La souveraineté interdépendante qui se définit comme étant la capacité des autorités
de contrôler les mouvements transfrontaliers, fait exclusivement appel au contrôle : la
personne refoulée aux frontières n’a pas à reconnaître le droit d’un État de lui refuser
l’accès à son territoire pour que ce refus soit opérationnel.
De leur côté, la souveraineté internationale légale, qui confère à un État sa
reconnaissance internationale, et la souveraineté westphalienne, qui se traduit par
l’exclusion d’acteurs extérieurs dans le processus domestique de gouverne, font toutes
deux davantage appel à l’autorité puisque pour s’exercer, deux États en relation
doivent mutuellement reconnaître leur droit à cet exercice. L’exemple le plus clair de
la souveraineté internationale légale est la reconnaissance que les autres États vont
donner à un État qui acquiert son indépendance : sans cette reconnaissance, l’État
nouvellement indépendant aura beau se réclamer de ce statut, celui-ci ne sera effectif
et ne lui donnera accès, par exemple, à l’onu, que s’il est reconnu. Pour ce qui est de la
souveraineté westphalienne, il doit aussi y avoir reconnaissance mutuelle. Autrement
qu’est-ce qui empêcherait l’État A de s’immiscer dans l’organisation de la gouverne
de l’État B ?
Et bien sûr, un État qui n’exerce ni contrôle ni autorité peut difficilement être
considéré comme étant souverain.
30
participation aux grands forums internationaux d’autre part. Ainsi, comme on peut le lire dans
une publication du ministère des Relations extérieures, « Le Cameroun entend désormais
mieux rayonner sur la scène internationale en mettant un nombre plus important de ses fils au
service de l’humanité dans le cadre des organisations internationales (...) C’est aussi pour
concrétiser cette diplomatie faite de plus de rayonnement et de plus de présence que le
Président de la République a décidé de faire participer notre pays à tous les grands forums
internationaux où se discutent les affaires du monde ».
On a déjà souligné que la politique étrangère est une projection hors du territoire
national du temps politique interne ; du paradigme politique qui structure la vie nationale de
l’État. Au moment de l’accès du Cameroun à la souveraineté internationale, le paradigme
politique dominant et déterminant de l’action publique est celui de la construction du
développement en tant que dimension fondamentale de la consolidation de l’État-nation.
En tant que pays en voie de développement, la politique étrangère du Cameroun a une forte
dimension économique ; c’est-à-dire qu’elle vise à la fois la construction du pays comme une
terre sûre d’investissement, un marché porteur et une terre de richesses et de ressources
précieuses. De plus, cette politique s’inscrit dans une logique forte de captation des ressources
liées à la coopération internationale et à la mobilisation des financements internationaux à des
fins de construction du développement.
31
Le troisième objectif économique de politique étrangère est de hisser le Cameroun au rang
des économies dites émergentes à très moyen terme ; en tout cas à l’horizon 2035.
Toute politique étrangère vise un certain nombre d’objectifs stratégiques ayant trait à
la garantie de la stabilité et de la sécurité de l’État, de sa tranquillité et de sa paix. Arnold
Wolfers dès 1952, percevait la sécurité, dans un sens objectif comme l’absence de menaces
sur les valeurs centrales (acquired) ou, dans un sens subjectif, l’absence de peur que ces
valeurs centrales ne fassent l’objet d’une attaque. Mais cette définition a été réduite à sa plus
simple expression par Barry Buzan qui estime que la sécurité concerne l’absence de toute
menace. La politique extérieure se dresse par conséquent sur un background militaro-
stratégique et se nourrit de considérations sécuritaires qui déterminent les postures et les
lignes de conduite. Celle du Cameroun intègre bel et bien, dans son élaboration doctrinale et
son déploiement pratique, un certain nombre d’enjeux et de données sécuritaires.
32
tant institutionnel qu’opérationnel, dans la lutte contre le terrorisme international, la
criminalité économique et la criminalité transnationale.
CHAPITRE V :
33
La politique extérieure originelle du Cameroun (à l’indépendance du pays) est ainsi
celle de l’affirmation et de la défense de la souveraineté, de la construction de l’unité et de
l’identité nationale, du développement économique et social, de la construction de la paix et
de la stabilité nationales. Toute sa doctrine première s’en inspire et tous ses principes
fondamentaux en découlent.
La souveraineté désigne la pleine capacité d’exercer son libre arbitre, d’agir selon son bon
vouloir sans obligation ni contrainte exercée par qui que ce soit. Ce principe semble à
première vue une lapalissade dans la mesure où les relations diplomatiques sont, pour les
États, une expression de leur souveraineté et de leur caractère indépendant. Elles constituent
également une marque de reconnaissance internationale de l’État. La diplomatie traduit la
souveraineté en situation relationnelle. Toutefois, replacé dans le temps politique de son
énonciation, le principe du respect de la souveraineté s’inscrit dans une stratégie de
renforcement de la stature internationale du jeune État camerounais nouvellement sorti de la
tutelle extérieure.
2- Non-alignement et non-ingérence
34
coopération économique et culturelle sans exclusives, mais équitable, tout en faisant ce qui
est en son pouvoir pour consolider le front uni du tiers-monde ».
Le Cameroun, en vertu de sa nature d’État souverain, rejette toute ingérence dans ses affaires
intérieures et s’abstient, en retour, de s’ingérer dans celles des autres en raison du strict
respect de leur souveraineté. La politique étrangère du Cameroun réaffirme aussi de façon
quotidienne, autant par sa doctrine que par son action, le principe de la non-ingérence. Ce que
d’aucuns ont qualifié d’esprit d’indifférence ou de suffisance pour décrire le comportement
régional de neutralité du Cameroun apparaît alors comme une traduction diplomatique du
principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États.
La coopération sans exclusives s’affirme pour sa part comme une conséquence du non
alignement. Celui-ci laisse le champ international ouvert à l’État camerounais qui y agit en
fonction du seul impératif absolu que constitue son intérêt national. L’alignement derrière un
camp idéologique quelconque avait pour conséquence néfaste de rétrécir les possibilités de
coopération des États alignés, compte tenu en l’espèce de la « doctrine Hallstein » à l’échelle
internationale qui régissait les rapports des États aux deux blocs en conflit. À titre de rappel,
la doctrine définie dans les années 1950 par Walter Hallstein – alors ministre ouest-allemand
des Affaires étrangères – reposait sur entre autres principes, sur celui majeur, de la rupture ou
du non-établissement des relations diplomatiques avec les pays ayant reconnu la République
démocratique allemande (RDA). Pareillement, la politique des blocs se fondait, avec
cependant moins de rigidité, sur le même principe sinon de l’exclusion du moins de la
marginalisation et du combat par les États membres d’un bloc de ceux ayant opté pour le bloc
adverse. En tout cas, la politique des blocs est une politique de l’alignement et de l’exclusion.
Le non-alignement rejette ce manichéisme diplomatique et cet exclusivisme idéologico-
politique qui constituent le socle de l’intolérance et des rivalités internationales. Il opte donc
pour une coopération sans exclusives, érigée en paradigme politique international pertinent
pour les pays en développement qui ont besoin de la solidarité de l’ensemble des pays du
monde pour construire leur modernité économique et sociale.
Dans son ouvrage intitulé Nation et développement dans l’unité et la justice, le président
Ahmadou Ahidjo explique que le Cameroun, parce que concerné au premier chef par des
problèmes de développement, doit participer à tous les grands courants d’échanges
internationaux et « œuvrer au sein des grands courants de coopération internationale ». Ce
35
principe de politique étrangère sera reconduit, approfondi et affiné par Paul Biya qui fera du
non-alignement la stratégie politique suffisamment « adaptée à [la] volonté de coopération
sans frontière » du Cameroun. La promotion de la solidarité internationale est ainsi l’un des
ressorts vitaux de la politique internationale du Cameroun : « Œuvrer pour l’avènement d’une
humanité plus solidaire constitue l’un des principaux ressorts de la politique extérieure du
Cameroun. Celle-ci vise essentiellement à servir les intérêts supérieurs de notre peuple dans
un monde de plus en plus interdépendant, mais encore douloureusement marqué par des
appétits de domination et d’exploitation des nations puissantes sur les nations faibles et par
des affrontements idéologiques de plus en plus meurtriers ».
36
négociations diplomatiques pour une résolution pacifique des différends. Cette attitude de
politique extérieure traduit l’engagement du Cameroun dans le partage des principes et
valeurs politiques universels, consacrés aussi bien par les institutions internationales que
régionales.
« Dans le monde d’aujourd’hui, souligne une fois de plus Ahmadou Ahidjo, nous n’avons
aucune chance d’apporter notre contribution à l’histoire, de porter témoignage des valeurs
africaines devant la culture universelle, de promouvoir notre développement rapide et
harmonieux si nous ne sommes pas unis, si nous ne constituons pas une force capable de
peser sur les évènements et de les orienter avantageusement ».
37
capable pour contribuer au renforcement de l’unité africaine au niveau continental, régional
et sous-régional ».
38
En effet, dans un contexte politique et institutionnel où la politique étrangère est
classée au rang de « domaine réservé » du président de la République – point culminant de
l’édifice institutionnel et administratif – tout changement du titulaire de la fonction ne peut
qu’avoir des répercussions sur les manières d’élaborer et de conduire la politique extérieure.
Avec l’avènement de Paul Biya à la tête de l’État et la promotion d’un nouveau programme
de gouvernement dit de « renouveau national », la politique extérieure va en sentir les effets.
Ainsi, ses fondements doctrinaux seront enrichis de nouveaux principes et sa mise en œuvre
va connaître une nouvelle impulsion. Parmi les principes nouveaux qui vont émerger, figurent
la promotion d’un nouvel ordre économique, politique et culturel mondial, le
régionalisme non hégémonique, la présence et la participation active dans les affaires
internationales.
À partir des années 1990 qui ont connu « le passage à la démocratie » de la majorité des pays
du Sud, la politique extérieure du Cameroun va voir son corpus doctrinal s’étoffer davantage
avec la souscription aux normes de l’État de droit et des droits de l’homme, de la
gouvernance ainsi que la promotion de la durabilité environnementale.
Ce principe fait partie des innovations doctrinales introduites par le président Paul
Biya dans son programme politique du « Renouveau national ». D’abord soutenue comme
simple exigence de son appartenance aux instances multilatérales comme la CNUCED qui en
a fait une question essentielle, l’option pour la revendication d’un nouvel ordre économique
mondial sera par la suite érigée en dimension fondamentale de l’action internationale du
Cameroun. La recherche d’un nouvel ordre économique et culturel mondial se dresse sur un
arrière-fond critique ; notamment la critique du système international du développement et de
l’échange inégal/inéquitable, structuré et maintenu coûte que coûte par les grandes nations
industrielles. Parce que le sous-développement apparaît davantage, aux yeux de Yaoundé,
comme le résultat ou plutôt le « produit du développement » des pays industrialisés, «
l’instauration d’un nouvel ordre économique apparaît comme l’une des voies privilégiées
pour la solution des problèmes auxquels le monde est confronté».
39
grande équité des règles du commerce international. L’avènement d’un nouvel ordre
politique, économique et culturel mondial sera présenté dans Pour le libéralisme
communautaire comme un véritable objectif de politique étrangère : « (...) l’action
internationale du Cameroun recherche une plus grande intensification des échanges
équitables entre les peuples ; elle met donc en œuvre toutes ses possibilités d’intervention en
vue de l’instauration d’un nouvel ordre économique et culturel mondial que tous les peuples
appellent de tous leurs vœux ».
40
politique de voisinage est restée intangible. Elle a même paru s’accentuer, le Cameroun
s’étant presque entièrement tourné vers la construction de sa cohésion interne et de son
développement économique et social comme stratégie de pesée internationale et de respect au
sein du concert des nations. Le régionalisme non hégémonique est la conséquence du rejet de
ce qu’on pourrait appeler le complexe de leader dans les affaires internationales régionales: «
l’ambition du Cameroun, précise sur ce point Paul Biya, n’est pas de jouer à tout prix un rôle
de premier plan sur la scène internationale. Notre souci est de tenir dignement notre place là
où nous devons être et de défendre nos intérêts légitimes»2.
Ce principe sonne dès 1982, année de son énonciation, comme un nouvel élan que
Paul Biya entend insuffler à la diplomatie camerounaise. Il s’agit d’un principe qui ne
présuppose pas une léthargie, une inertie ou encore une absence antérieure ; mais bien plutôt
un accroissement de la présence du Cameroun dans le monde à travers l’ouverture de
nouvelles représentations diplomatiques, un élargissement du réseau de ses amitiés
internationales et une diversification accrue de sa coopération internationale. Quant à la
participation, elle vise tout simplement, d’une part, à faire connaître les positions et les visions
camerounaises dans les affaires internationales et, d’autre part, à renforcer la présence
nationale dans la fonction publique internationale à travers une politique cohérente et
volontariste de placement des nationaux dans les organisations internationales. La présence et
le rayonnement en tant que paradigmes de politique extérieure consistent aussi à soutenir et à
promouvoir la projection d’une image de marque respectable, responsable et attractive, ainsi
qu’on peut l’appréhender dans cet engagement du président Paul Biya :
« Le Cameroun poursuivra son rayonnement par une présence active et réaliste sur
la scène internationale et continuera à offrir au monde le spectacle rassurant et édifiant
d’une jeune nation unie, paisible, stable et prospère, apportant sa modeste contribution au
maintien de la paix, au renforcement de la compréhension, de l’amitié et de la coopération
entre les nations et à la promotion de la civilisation de l’universel ».
41
Selon Stephen Krasner, Martha Finnemor et peter Katzenstein, les normes et les
valeurs peuvent être définies comme les attentes socialement partagées par une communauté à
propos des comportements jugés acceptables pour une identité donnée. Elles délimitent la
frontière entre la conformité et la déviance. Deux principaux débats théoriques associent les
normes aux comportements de politique étrangère : un premier situe les États comme les
sujets visés par les normes, et un deuxième présente les États comme des acteurs de la
diffusion des normes. Les normes et leurs effets sont analysés de différentes façons en théorie
des relations internationales. Les auteurs constructivistes à l’instar de Nicholas Onuf, Stephen
J. Toope et Jutta Brunnée, et Kratochwil définissent la norme comme étant un standard de
comportements attendus par les pairs faisant partie d'un ensemble commun. Les auteurs néo-
libéraux comme Milton Friedman et néoréalistes tels Kenneth Waltz, Hans Morgenthau,
Henry Kissinger, partagent la même vision ontologique sur l'existence de l'anarchie du
système international mais sont divisés quant à l'interprétation des conséquences qu'elle
engendre. Selon l'idéologie néolibérale, la norme est contraignante et structurante dans la
mesure où elle s'impose comme une forme d'autorité non étatique. Pour Robert Axelrod, la
norme s'avère aussi un moyen pour améliorer la coopération. Elle serait objective et
s'imposerait d'elle-même. Robert Keohane estime que les règles, les procédures et les normes
sont des éléments qui constituent un régime international, structure la société internationale et
s’impose à tous les membres de l’ONU et autres organisations internationales.
42
normes et valeurs sont ainsi au centre des interactions politiques mondiales, déterminent et
orientent pour une grande partie le discours et l’action politique internationale des nations.
43
même de rayonnement. De plus, l’environnement est devenu un secteur majeur de la
coopération internationale et partant un important canal de mobilisation des financements et
de l’aide au développement. Contrainte éthico-politique et impératif de la construction du
développement soutenu et durable, l’environnement s’affirme somme toute comme un grand
problème et enjeu contemporain.
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