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« 

Rien n’est plus négligé que l’éducation des filles. La coutume et le caprice des mères y décident souvent de tout.  » Traité de
l’Éducation des filles (1687) - FÉNELON  (écrivain). 

« Les femmes reçoivent une déplorable éducation ; et c’est là le grand crime des hommes envers elles ….» 1837 - Georges SAND
(écrivaine).

« Éduquer un homme, c’est seulement éduquer un individu, mais éduquer une femme, c’est éduquer toute une famille » début
des années 90 - Dr J.E. KWEGYIR AGGREY (intellectuel et missionnaire ghanéen).

« Les extrémistes craignent le livre et le stylo, ils ont peur du changement et de l'égalité que nous apporterons à notre société »
2013 – Malala YOUSAFZAI (militante et femme politique).

Plan de dissertation sur les grandes étapes de l’alphabétisation des femmes du XVIème siècle à nos jours,
dans le monde. Les ajouts sont en italique.
1. Une lente progression du XVIème au XIXème siècle
Destinées au mariage et à la maternité, l’alphabétisation des filles a pendant longtemps été inexistante.
On trouve les premiers écrits sur l’éducation des filles à la Renaissance, avec l’essor de l’humanisme,
venant de Jean Louis Vivès, Rabelais ou Montaigne mais il faut attendre la réforme protestante, au XVIème
siècle pour voir une première évolution. La lecture de la Bible étant au cœur de la pratique de la religion
protestante, par un apprentissage personnel et direct, en langue vernaculaire, il est apparu évident que les
filles comme les garçons, devaient être alphabétisées. C’est par elles que l’ensemble des croyants pourront
accéder aux saintes Ecritures. L’exemple de Jeanne d’Albret, mère du futur Henri IV, qui écrit ses mémoires
et des poèmes, illustre ce progrès.
Côté catholique on prend aussi conscience de l’importance de l’enseignement féminin et des écoles –
gratuites pour les plus pauvres et payantes pour les plus aisées – sont créées (rôle des visitandines et des
ursulines, ainsi que St Vincent de Paul). Des auteurs du XVIIème siècle, en rupture avec leur temps, comme
Fénelon (précepteur du petit-fils de Louis XIV), considèrent, l’alphabétisation nécessaire car elle peut
permettre aux filles de mieux assurer leur rôle domestique au sein du foyer, de représenter correctement
leur mari et d’assurer une éducation correcte aux enfants dont elles ont la charge et tout particulièrement
les garçons, une éducation « qui s’ajuste au destin de la petite fille, bonne religieuse ou bonne épouse et
mère ». En revanche, les femmes ne doivent pas être savantes ni justifier de ces connaissances pour
vouloir gouverner. Charles Démia propose une formation plus atypique, utile et professionnalisante.
Mais les freins sont importants, tout particulièrement le poids de la religion et le rôle qui reste dévolu aux
femmes dans la société d’ancien régime traditionnelle. De plus, les déterminismes socio-économiques et
culturels sont lourds, car cette alphabétisation reste le privilège de la noblesse, grâce à des précepteurs au
sein de la famille ou dans des écoles dédiées, comme la maison royale de Saint-Louis, un pensionnat, créé
par Mme de Maintenon en 1686. Il existe d’autres écoles, mais systématiquement placées sous le contrôle
d’institutions religieuses, dans lesquelles l’enseignement est surtout lié au catéchisme, avec l’objectif de
faire de bonnes chrétiennes. Le siècle des Lumières témoigne de cette évolution car des salons, dans
lesquelles s’échangent la connaissance, sont organisés par des femmes, elles même lettrées, comme celui
de Mme Geoffrin ou de Manon Rolland.
Dans les pays occidentaux et en France en particulier, le XIX ème siècle marque une rupture. Des lois voulues
par l’Etat, permettent un accès plus large aux filles à l’alphabétisation. C’est le cas sous Napoléon, avec les
maisons d’éducation de la légion d’honneur, accueillant des jeunes filles de milieu défavorisé, qui sont une
exception dans le désintérêt de l’État pour l’éducation des filles avant le milieu de siècle
(malheureusement, elles ne concernent que quelques centaines de jeunes filles). Dans la deuxième moitié
du XIXème siècle, en France la loi Falloux 1850 impose une école primaire de filles, pour chaque ville de plus
de 800 habitants et Victor Duruy ouvre des écoles pour filles sans instruction religieuse (1867), mais les
filles ont accès à l’école avec des programmes spécifiques. En 1879, Paul Bert fait ouvrir des écoles
normales pour filles dans chaque département pour former des institutrices. En 1880 la loi Camille Sée
crée un enseignement secondaire public pour les filles (collèges et lycées pour filles). Enfin, les lois Ferry
(1881-1882), qui reconnait l’égalité des sexes devant l’instruction, couronne le tout, en rendant l’école
obligatoire, gratuite et laïque. Ainsi l’alphabétisation progresse, notamment le nombre de filles qui
prolongent leurs études au de-là du primaire, avec une harmonisation des programmes. On considère
qu’elles doivent apprendre les mêmes choses que les garçons, même si l’objectif de la IIIème République est
aussi de soustraire les filles à l’enseignement religieux. Les filles s'inscrivent davantage dans le privé où
elles préparent le baccalauréat. En 1861, Julie-Victoire Daubié est la première Française à obtenir le
baccalauréat. Cependant, cette alphabétisation reste inégale entre les villes et les campagnes en occident
mais surtout, elle est inexistante ou rudimentaire ailleurs dans le monde. La pauvreté est à la base de ces
écarts.
2. Une alphabétisation inégale aux XXème et XXIème siècles
Les XXème et XXIème siècles sont à la fois ceux de progrès considérables en matière d’alphabétisation des
filles dans le monde mais aussi de la persistance de profondes inégalités.
Tout d’abord, dans les pays développés, la mixité (dans la seconde moitié du XX ème siècle) et
l’harmonisation des programmes font qu’il n’y a plus de différence fille/garçon. Les femmes à l’égal des
hommes ont accès aux connaissances, grâce à l’école et aux médias. Aujourd’hui, les filles réussissent
mieux leurs études secondaires que les garçons et pourtant elles restent minoritaires dans les filières de
formation d'excellence. Le taux d’alphabétisation est proche de 100% aussi dans certains pays en
développement comme l’Argentine, le Chili ou Cuba. Ce pays illustre la volonté des régimes communistes
de développer l’alphabétisation de tous.
C’est dans la majorité des pays en développement que les inégalités restent fortes même si des progrès
ont été faits. En 2019, près de 500 millions de femmes ne savent ni lire ni écrire et elles représentent 2/3
des 775 millions d’analphabètes dans le monde, chiffre qui reste stable depuis plusieurs décennies, malgré
la croissance de la population. Sans surprise, c’est l’accès au secondaire qui reste problématique pour les
filles : 77% des pays dans le monde n’ont pas atteint la parité dans ce cycle d’enseignement. Les disparités
se renforcent encore dans l’enseignement supérieur. C’est en Afrique et en Asie, que l’alphabétisation des
filles et des femmes est la plus faible et tout particulièrement dans l’Afrique sahélienne et subsaharienne.
Ces pays sont pour la plupart des PMA (Pays les moins avancés), avec un très faible niveau de
développement.
Pour expliquer cet état de fait, les obstacles apparaissent surtout économiques, socio-culturels et religieux.
Les infrastructures manquent dans ses pays et les écoles restent prioritairement accessibles aux garçons,
faute de moyens financiers. A cela s’ajoute, une formation des enseignants déficiente. De plus, les filles
demeurent consignées à un rôle traditionnel, de femme au foyer, d’épouse et de mère. Elles sont aussi
victimes de violence et dans certains pays, dirigés par des régimes islamistes, la scolarisation des filles est
limitée voire interdite. La situation politique des pays concernés influe aussi, l’insécurité engendrant une
baisse systématique de la fréquentation des écoles. Enfin les longues distances pour aller à l’école ou le
tabou lié aux règles, sont aussi des freins à la scolarisation régulière des jeunes filles.
Des ONG, l’ONU mais aussi certains gouvernements de ces pays cherchent des moyens pour favoriser un
accès plus large des filles à l’école car c’est un enjeu de développement essentiel. Alphabétisée, les
femmes affrontent plus facilement la vie (en augmentant par exemple leurs revenus futurs de 10 à 20%),
elles deviennent plus autonomes, ne dépendent plus de leur famille ou de leur mari et prennent une
nouvelle place dans la société. La scolarisation des filles améliore l’état sanitaire des populations (baisse
des infections dues au VIH), elle a des effets sur la démographie (baisse de la mortalité infantile et de la
fécondité), sur la productivité agricole (et donc la malnutrition), sur la croissance économique globale et
enfin sur l’accès à l’information et à la vie politique. Ainsi, le programme « Raising her voice », mis en place
par l’ONG Oxfam, vise à accroître l’alphabétisation des femmes afin de leur donner plus d’assurance et plus
d’autonomie, afin qu’elles s’investissent plus dans les instances décisionnelles. Ce sont aussi actions
individuelles comme celles de militantes issues de la société civile comme Malala. A la suite de son combat,
en 2012, l'UNESCO crée le fonds Malala pour aider et soutenir le droit à l’éducation des filles dans le
monde.
Malgré tous ces progrès, le droit à l’éducation pour les filles et les femmes sont fragiles comme le montre
la situation actuelle en Afghanistan. Depuis le retour au pouvoir des talibans en 2021, les filles et les
femmes ont été progressivement privées du droit à l’éducation et sont désormais bannies de
l’enseignement secondaire et supérieur, l’Afghanistan devenant le seul pays au monde à interdire aux filles
et aux femmes d’accéder à l’éducation.

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