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Programme de la matière

Première partie : Etude de la Rupture

I. Rappels sur la structure des matériaux


II. Mécanismes de Rupture et de fissuration
1. Les trois modes de rupture
2. Mécanismes de la rupture
 Rupture fragile
 Rupture ductile
 Fissuration par fatigue
III. Fractographie et faciès de rupture
IV. Evaluation de la fragilité d’un matériau
1. Essais normalisés de rupture fragile
2. Température de transition fragile-ductile
V. Notions de base sur la Mécanique de la Rupture
1. Comportement d'une structure comportant une fissure
2. Champs de Contrainte à la pointe d'une fissure
3. Propagation brutale d’une fissure
4. Etude de la zone plastique à fond de fissure
VI. Le facteur d'intensité de contrainte
1. Détermination du KIc
2. Paramètres influant le KIc
a) Dimensions de l’éprouvette
b) Température
c) Vitesse de l’essai.

Deuxième partie : Etude de la fatigue

I. Définitions : Approches pour définir la durée de vie


II. Aspects macroscopiques : utilisation des données des essais de fatigue
1. La fatigue dans le domaine élastique : les courbes de Wöhler
2. Les essais de fatigue
3. L’amorçage des fissures de fatigue
4. Les lois de propagation des fissures de fatigue.
III. Principaux paramètres influant sur le comportement en fatigue
1. Paramètres d’ordre métallurgique
2. Paramètres d’ordre mécanique et géométrique
3. Environnement
IV. La fatigue oligocyclique.
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I. Rappels sur la structure des matériaux

1. Les principales familles de matériaux industriels


1.1. Définitions
o De manière symbolique, un matériau est une matière dont on fait un matériel. Un
matériau est la forme usuelle d’une matière première choisie en raison de propriétés
d’usage spécifiques et mise en œuvre par des techniques appropriées pour l’obtention
d’un objet de géométrie donnée à fonction attendue. Les matériaux étant destinés à la
réalisation d’objets capables de résister aux manipulations (sollicitation en service) et au
moins aux sollicitations de leur propre poids.
o Un alliage est un mélange ou combinaison d'un métal avec un ou plusieurs autres
éléments chimiques. Un métal pur a des caractéristiques mécaniques relativement
faibles. Le fait d'ajouter d'autres éléments permet de « durcir » le métal en augmentant
ces caractéristiques mécaniques. Des ajouts bien déterminés permettent également
d’améliorer d’autres propriétés telles que la résistance à la corrosion ou à l’usure.
Dans un alliage, l'élément métallique majoritaire, c'est-à-dire constituant la plus
importante partie du mélange, est appelé « métal de base ». Les éléments ajoutés
volontairement sont appelés « éléments d'alliage » ou « éléments d'addition ». Les
éléments non désirés sont appelés « impuretés » et existent en très faibles quantités.

Exemples d’alliages métalliques


Acier au carbone de grade X60
%C % Si % Mn %S %P % Al % Nb
0,070 0,220 1,260 0,002 0,010 0,034 0,040

Acier inoxydable de grade 2205


%C %Cr %Ni %Mo % Si % Mn %S %P %N % Cu
0,053 22,7 5,8 3,2 0,45 0,16 0,006 0,014 0,17 0,03

Alliage de titane Ti-6Al-4V


%C %N %H %O % Fe % Al %V % Ti
0,10 0,05 0,015 0,2 0,4 6,15 4,02 Balance (88)

Alliage d’aluminium AA 5456

% Mg % Si % Cu % Cr % Mn % Zn %Ti % Fe
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5,3 0,3 0,1 0,35 0,65 0,10 0,20 0,40

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1.2. Matériaux utilisés par l’Ingénieur
Les propriétés physico-chimiques et propriétés d’usage des matériaux permettent de
distinguer entre les principales classes de matériaux (tableau 1). Les composants industriels
sont plus souvent réalisés avec des métaux et alliages métalliques, qu’avec toute autre classe
de matériaux. Mais les polymères remplacent de plus en plus les métaux. Aussi, les
céramiques actuellement en développement à travers le monde sont des matériaux émergents,
surtout dans la réalisation de moteurs plus performants. Les ingénieurs peuvent combiner ces
différents matériaux pour les meilleures de leurs propriétés en réalisant des matériaux
composites.

Tableau 1 – Les différentes classes de matériaux.

Alliages ferreux : Aciers et Fontes


Aluminium et alliages à base d’aluminium
Métaux et alliages
Cuivre et alliages de cuivre
Titane et alliage de titane

Polyéthylène (PE)
Polyméthacrylate de méthyle (PMMA)
Nylon ou polyamide (PA)
Polymères Polystyrène (PS)
Polychlorure de vinyle (PVC)
Epoxydes (EP)
Elastomères dont le caoutchouc naturel

Alumine (Al2O3, émeri, saphyr)


Magnésie (MgO)
Verres et Céramiques Verres de silice (SiO2) et silicates
Carbure de silicium (SiC)
Ciment et Béton

Polymères renforcés par fibre de verre


Polymères renforcés par fibre de carbone
Composites
Elastomères chargés, pneumatiques
Béton armé
Bois, Cuir, Os
Carton, laine, soie
Matériaux naturels
Roche, craie
Sables, agrégats

2. Propriétés des matériaux

Les propriétés d’usage des matériaux (tableau 2) ont essentiellement deux origines :
o leur composition chimique (nature des espèces atomiques qui les constituent);
o leur structure microscopique ou microstructure (organisation de ces atomes).
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Tableau 2 – Classement des propriétés des matériaux
Coût de disponibilité
Propriétés économiques et
Recyclabilité
environnementales
Durabilité
Masse volumique
Propriétés physiques
Couleur et pouvoir réflecteur
Module d’élasticité
Limite d’élasticité, Résistance à la
traction
Propriétés mécaniques Dureté
Ténacité
Résistance à la fatigue
Pouvoir amortissant
Conductivité et Résistivité électrique
Propriétés électriques et
Constante diélectrique
magnétiques
Perméabilité magnétique
Conductivité thermique
Propriétés thermiques Capacité calorifique spécifique
Coefficient de dilatation thermique
Oxydation
Interaction avec l’environnement Corrosion
Usure
Facilité de mise en forme
Aptitude à la mise en œuvre Assemblage
Finition
Texture
Propriétés esthétiques Couleur
Toucher

3. Importance du choix de matériaux

Lorsqu’il s’agit de concevoir une structure ou une composant, comment choisir le


matériau le plus adapter à son objectif ? Les erreurs peuvent engendrer des désastres.
Pendant la deuxième Guerre Mondiale, un type de cargo à coque soudée connut de lourdes
pertes, non pas à cause des attaques ennemies mais au fait que ces bâtiments se cassé en deux
en mer. La ténacité de l’acier, et en particulier de la soudure, était trop faible.
Plus récemment, trois avions de type « Comet » furent perdus avant que l’on ne réalise
que la structure, compte tenu de la conception des hublots exigeait une limite d’endurance en
fatigue plus élevée que celle du matériau. Vous avez certainement fait l’expérience de ces
appareils électroménagers en matières plastiques médiocrement conçus : ils présentent des
jeux excessifs, faute d’avoir pris en compte dans la conception le faible module d’élasticité des
polymères.
Comprendre les mécanismes responsables de la rupture des structures métalliques
s’avèrent d’une importance considérable puisque ils vont déterminer la durée de vie ou la
disponibilité d’un composant, d’un assemblage ou par enchaînement, d’une installation
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industrielle complète.

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II. Mécanismes de Rupture et de fissuration

Toute rupture d’organe de machine ou de construction métallique suppose


simultanément des efforts locaux de traction et une faiblesse, au moins momentanée
du métal. La rupture commence par une fissure qui se propage à partir d’une amorce
avec une vitesse très variable : rupture très brusque ou fissuration s’étendant sur
quelques mois. Les cassures portent l’empreinte des deux conditions de rupture :
Rupture brutale et rupture lente.
L’observation raisonnée de la morphologie des cassures permet de détecter deux
caractéristiques fondamentales : d’une part l’amorçage de(s) fissure(s) et d’autre part
leur mode de propagation. Elle permet de remonter à la (ou les) cause(s) de la rupture:
l’intensité et la distribution réelles des contraintes et son uniformité métallurgique.
Elle permet donc d’améliorer la conception, la réalisation et les conditions d’emploi des
ensembles mécaniques.

1. Les trois modes élémentaires de rupture

Considérons un état dans lequel une fissure plane est soumise à un système de
force ; supposons de plus que la propagation de cette fissure se fasse dans un plan. On
montre que l’état de propagation de cette fissure peut être ramené à la superposition
de trois modes simples (figure 1) :
 Mode I : mode par ouverture, les surfaces de la fissure se déplacent
perpendiculairement l’une à l’autre;
 Mode II : mode par glissement droit, les surfaces de la fissure se déplacent dans
le même plan et dans une direction perpendiculaire au plan de la fissure ;
 Mode III : mode par glissement vis, les surfaces de la fissure se déplacent dans
le même plan et dans une direction perpendiculaire au plan de la fissure.

Le mode I est le plus courant et le plus dangereux. C’est la raison pour laquelle la
plupart des études de la mécanique de rupture ont porté sur ce mode.
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Figure 1 : Les modes de ruptures.

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A l’échelle macroscopique, les surfaces de rupture sont complexes et peuvent être
considérées comme une superposition d’une rupture plane et d’une rupture inclinée
(figure 2). Les surface de rupture planes correspondent au mode I de rupture ; une
rupture inclinée correspond à une combinaison des modes II et III.

a b c d e
Figure 2 : Différentes cassures de rupture.

2. Mécanismes de rupture

Dans le but de comprendre les processus de rupture et de fournir un critère de


rupture, il faut savoir comment se produit la fissuration et connaître son champ des
contraintes (paragraphe IV)

(i) La Rupture par clivage (fragile)

Elle se produit suivant le plan cristallographique le plus dense du réseau cristallin. Le


clivage se produit par séparation directe le long de plans cristallographiques due à une
simple rupture de liaisons atomiques (figure 3), soit dans le grain : transgranulaire,
soit à travers les joints de grains : intergranulaire. Dite aussi « Rupture fragile » car il
y a absence de déformation plastique.

Figure 3 : Illustration à différentes échelles, de la rupture fragile transgranulaire.


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La cassure a un aspect brillant de la surface de rupture. Elle est plate dans un grain
avant changement d'orientation d'un grain à l'autre. Au microscope, on observe
l’apparition de marches parallèles à la direction de la propagation des fissures et
perpendiculaires au plan de la fissure. Plusieurs marches peuvent se rejoindre
entrainant la formation de rivière.
Une basse Température de service ainsi qu’une vitesse de déformation élevée
favorisent la rupture par clivage.

(ii) Rupture ductile

Elle est caractérisée par une déformation plastique importante. Le type le plus
courant de rupture ductile est la rupture par traction avec apparition de striction
(figure 4). Ce mécanisme est fréquent chez les matériaux très purs ainsi que dans les
matériaux courants dont la structure métallurgique présente une présence de
particules de seconde phase.

Figure 4 : Formation de cupules par rupture ductile.

A l’échelle macroscopique, la surface de rupture présente des mico-reliefs appelées


cupules. Un autre aspect pourrait être observé qui ressemble celui du ‘’bois pourri’’.

(iii) Fissuration par fatigue

Du point de vue macroscopique, la fissuration par fatigue se produit souvent à partir


d'un défaut de surface et se fait par déformation plastique cyclique : stries.
Sa zone de propagation est lente et assez plate, elle est marquée par des lignes d'arrêt
correspondant au changement du cycle.

Exemple : Cycle chaud-froid, la fissure se propage sous l’effet du changement brutal de


la température.
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III. Fractographie et Faciès de rupture

En fractographie, l’analyse de la morphologie de la cassure permet de détecter deux


caractéristiques fondamentales : l’amorçage des fissures et leur mode de propagation. Elle
permet de remonter à la (ou les) cause(s) probable(s) de la rupture, nous citons :
 Les Conditions sévères en service : cycle de fatigue thermique, mécanique ou
thermomécanique ;
 Les Facteurs métallurgiques : formation de phase fragilisante ou défauts structuraux
dans le matériau, transition ductile-fragile des aciers).
 Les erreurs dans la conception de la pièce ou de l’assemblage mécanique, qui impliquent
des zones de concentration de contraintes locales importante.
L’aspect ductile ou fragile de la cassure est une caractérisation moins précise (qualitative).
L’observation de la cassure sous le microscope, dite « faciès », est une technique sophistiquée
d’étude des mécanismes de rupture à l’échelle microscopique.

Méthode d’interprétation des images de cassures et de défauts

Etape 1 / Acquisition de l’image

Etape 2 /
Etude de la morphologie
des défauts

Etape 3 / Mécanisme de rupture

Etape 4 /
Causes probables

Interprétation
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Etape 5 /

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IV. Evaluation de la fragilité d’un matériau

1. Essais normalisés de rupture fragile


a) Essai de traction (Norme NF EN 10002 : Matériaux métalliques, Essai de Traction 1 (2001))
L’essai de traction est généralement réalisé en introduisant une éprouvette dans une
machine de traction universelle qui exerce un effort linéaire perpendiculairement à cette
même base. L’éprouvette insérée dans les mâchoires, un piston est déplacé verticalement et la
force axiale nécessaire à ce déplacement est enregistrée pour tracer « une courbe de traction » :
déformation () en fonction de la Contrainte (). Le dépouillement de cette courbe (fig.5)
permet la détermination de propriétés mécaniques telles que le module élastique, la charge
maximale, la charge à la rupture et l’allongement maximale.

Figure 5 – Courbe de traction conventionnelle d’un métal.

L'essai s'arrête à la rupture de l'éprouvette. L’examen de la cassure de l’éprouvette


permet d’étudier le mécanisme de la rupture en traction uniaxiale, et par la suite les
propriétés du matériau (figures 6 et 7). Hormis les deux mécanismes connus, on peut identifier
la « rupture semi fragile » qui et intermédiaire entre la rupture ductile et la rupture fragile.

Eprouvette à la fin de l’essai

Figure 6 – Cassure fragile en traction


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Eprouvette à la fin de l’essai

Figure 7 – Cassure ductile en traction.

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b) Essai de résilience (NF EN 10045-1 , ASTM E23-96)
L’essai de résilience a été élaboré pour prendre en compte ces phénomènes de
rupture. Le moyen le plus classique pour caractériser la fragilisation du matériau sous
l'action d'un choc est cet essai de résilience qui est un essai de flexion par choc sur
une éprouvette entaillée qui mesure la résistance d’un matériau à la rupture brutale.
Il est fréquemment dénommé essai de résilience CHARPY.
C'est un essai de résistance au choc, qui constitue à mesurer l'énergie nécessaire
pour casser une éprouvette préalablement entaillée. On utilise en général un
échantillon entaillé en forme de barreau de section carrée et de dimension normalisée
(fig. 8). L’énergie de flexion par choc permet de caractériser la ductilité de l’acier et sa
sensibilité à la rupture fragile en fonction de la température; elle sert de référence
pour définir des qualités d’aciers normalisés.
L'utilisation principale des essais de flexion par choc est cependant l'évaluation
de la résistance à la rupture fragile des aciers. On cherche à se prémunir contre des
ruptures catastrophiques en choisissant des aciers possédant une énergie de rupture
suffisante dans les conditions d'utilisation envisagées. Les études faites il y a une
cinquantaine d'années ont montré qu'en construction métallique le risque de rupture
fragile était pratiquement éliminé si l'énergie de rupture KV était supérieure à 27 J.
On définit la ténacité comme la capacité d’un matériau à absorber de l’énergie
avant sa rupture. Il permet de dire si une structure est susceptible de rompre
soudainement par la propagation rapide d'une fissure.

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Figure 8 – Principe de l’essai de Résilience Charpy.

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2. Température de transition fragile-ductile
L'essai de flexion par choc sur éprouvette Charpy est un essai bien adapté à
l'étude de la rupture fragile car il réunit les trois facteurs principaux qui favorisent la
rupture :
i. une vitesse de sollicitation élevée (choc) ;
ii. un système de contraintes triaxial (effet d'entaille) ;
iii. une température d'essai basse (rupture par clivage).

Tous les aciers n'ont pas un comportement fragile à basse température. Les
aciers austénitiques, grâce à leur structure cubique à faces centrées, sont en
particulier insensibles à la rupture fragile. Les aciers à structure cubique centrée à
l'état d'équilibre (ferrite) ou hors d'équilibre (martensite, bainite) sont tous
caractérisés par l'existence d'une transition ductile-fragile. Lorsque la température de
l'essai Charpy diminue, l'énergie de rupture passe d'une valeur élevée à une valeur
faible dans un intervalle de température assez étroit (la zone de transition) et la
cassure perd son aspect ductile à nerfs au profit d'un aspect de plus en plus cristallin
(cassure à grains, rupture par clivage).
La figure 12 représente cette évolution dans le cas d'un acier faiblement allié ; Le
faciès 1 montre qu'à basse température, alors que le matériau est fragile, la rupture a
lieu sans déformation macroscopique notable i.e. sans expansion latérale. A haute
température, dans le domaine ductile, la résilience augmente fortement et l'éprouvette
se déforme macroscopiquement, comme on peut le constater sur le faciès 3.
Energie de choc (Joules)

Température (°C)

Figure 12 - Transition ductile-fragile mesurée par une série d’essais de résilience.


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V. Notions de base sur la Mécanique de la Rupture

1. Champs de Contrainte à la pointe d'une fissure


Une fissure peut être considérée d’un point de vue mécanique comme une entaille
profonde de rayon de courbure nul à son extrémité et avec un angle de séparation de
ses faces nul.

La présence d’une telle perturbation géométrique crée dans le matériau, surtout


au voisinage immédiat de la fissure, une zone où les contraintes induites par les
sollicitations extérieures seront modifiées, généralement augmentées. Le facteur
multiplicatif local des contraintes que tout défaut induit est appelé facteur de
concentration de contraintes, note K tel que :

K= ⁄ Équation 1

où : global représente le niveau de contraintes en 1'absence du défaut au point où il est


localise, ou, ce qui revient au même, hors des perturbations induites par celui-ci ;
locale représente les contraintes maximales induites localement par le défaut.

La contrainte en pointe de fissure est, en hypothèse de comportement élastique


linéaire, théoriquement infinie. On montre qu’elle varie en √ , en notant r la
distance d’un point matériel à la pointe de fissure.

Dans le cas général, au voisinage d’une fissure traversante dans un solide de


forme quelconque (figure 13) sollicitée par une charge arbitraire, le champ de
contrainte est donné par l’équation 2 :

Équation 2

où :
ij est la composante de la contrainte au point (r, ) en coordonnées polaires ;
fij est fonction de la géométrie ;
KI est le facteur d'intensité de contrainte (F.I.C) en mode I de sollicitation. Il
décrit le champ de contrainte à la pointe de la fissure et ne dépend que de la
géométrie de la pièce et de la fissure.
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Figure 13 - Système de coordonnées et champ de contrainte local près de la pointe de la
fissure.

Le tableau 1 donne les expressions des champs de contrainte et de déplacements


au voisinage de la pointe d’une fissure dans le système de coordonnées donné figure
13.

Tableau 1 – Champs de contrainte et de déplacement en pointe de fissure pour les trois modes
de sollicitation.

Mode I Mode II

Mode III
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1. Comportement d'une structure comportant une fissure

La rupture est la séparation d'un matériau en deux ou plusieurs parties sous


l'action d'une contrainte. Cette séparation se produit à plus ou moins grande vitesse
par propagations de fissures existant dans le matériau. La rupture est donc fortement
influencée par la présence de microfissures, de pores, d'inclusions de particules
fragiles (défauts internes) et par la présence d'entailles (macrofissures) résultant de
défauts de fabrication ou de conception.
Tous les matériaux contiennent un certain nombre de défauts internes
(contraintes résiduelles) qui deviennent instables et conduisent à la rupture lorsque la
force appliquée dépasse une valeur critique.
A cause de l'existence de ces défauts, les pièces ont une durée de vie limitée. Un
des objets de la mécanique de la rupture est de calculer la durée de vie des pièces en
fonction du nombre de cycles de contraintes endurés. L'étude élémentaire de la
mécanique de la rupture montre que la rupture dépend de deux grandeurs : la
contrainte appliquée σ (sigma) et la dimension des microfissures. Ces deux grandeurs
sont combinées dans le facteur d'intensité des contraintes KI. La rupture se produit
lorsque l'on atteint la valeur critique KIc.
Le calcul des contraintes conduit à des valeurs infinies à la pointe de la fissure.
Cette situation est physiquement irréaliste. Le comportement des matériaux conduira
soit à une déformation plastique, soit à une rupture. C'est à partir de la connaissance
des distributions de contraintes que ce comportement peut être décrit. Ces points
seront discutés ultérieurement. La mécanique de la rupture ne considère d'abord que
les situations d'élasticité linéaire pour se pencher seulement ultérieurement sur les
conséquences pour les structures. Lorsqu'une part importante de la pièce étudiée est
en condition de déformation plastique au moment de la rupture, une approche
spécifique est utilisée (comportement élasto-plastique en rupture).

2. Propagation brutale d’une fissure


Nous nous placerons en mode I simplifié et nous allons donner trois approches
différentes pour l’étude de la propagation brutale.

i) Critère de contrainte critique


Nous admettons que la rupture s’initie à fond de fissure dans le plan où la
contrainte normale est maximale. La rupture se produit lorsque le facteur d’intensité
KI atteint une valeur critique KIC. Cette valeur KIC caractérise quantitativement la
résistance d’un matériau à la propagation brutale (ténacité) en mode I et en
déformation plane.
Ce critère de rupture correspond à une distribution critique des contraintes à
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fond de fissure comme l’illustre la figure 14.

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 C = KIC )/√

 = KI )/√

Figure 14 – Distribution de contraintes à fond de fissure.

ii) Critères d’énergie critique

Pour qu’une fissure se propage, il faut fournir au matériau une certaine énergie
car la rupture des liaisons atomiques absorbe une quantité de l’énergie potentielle
globale du matériau : G. Si la longueur de la fissure augmente d’une longueur a, on a
une diminution GI (en mode I) de l’énergie potentielle.
Pour que la fissure progresse brutalement, il faut que la diminution d’énergie G I
atteigne une valeur critique GIC.

Comme le KIC, GIC caractérise la ténacité du matériau et on a :


 En contrainte plane KIC² = GIC . E
 En déformation plane : KIC² = GIC . E / (1 – ²)
avec : E le module d’élasticité et  le coefficient de Poisson.

iii) Critères de GRIFFITH

Comme : KIC =   √ ; et : KIC² = G . E


On retrouve la relation classique de Griffith ( = 1) :

√ ⁄ Équation 3

> Pour un matériau totalement fragile : G = 2 S (S est l’énergie superficielle)


> Pour les métaux : Comme la rupture des métaux s’accompagne d’une forte
déformation plastique, la propagation de la fissure implique une énergie
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supplémentaire de déformation plastique GP et on a : G = 2 S + GP.

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3. Etude de la zone plastique à fond de fissure

La propagation brutale d’une fissure est accompagnée de la formation d’une zone


plastique localisée à l’extrémité de la fissure puisque les contraintes y sont très
élevées. L'applicabilité des méthodes de M.L.E.R dépend en premier lieu de la taille de
cette zone plastique et exige que celle-ci demeure petite par rapport à la longueur de
fissure et aux dimensions de la pièce ce qui assurera la non perturbation de la
distribution élastique des contraintes.

Nous allons chercher les points qui délimitent la zone plastique par l’utilisation
de la correction d’ERWIN. ERWIN suppose que la zone plastique est sphérique de rayon
rP et que la contrainte normale est égale à la limite élastique y (figure 15) ; il suppose
de plus que le profil des contraintes élastiques hors la zone plastique est le même que
celui de la zone purement élastique mais décalé d’une quantité y. Si l’on considère
une fissure fictive de longueur (a + rP), le profil de contraintes est celui de la théorie
élastique tronqué à la valeur  = y.

ERWIN a cherché une expression pouvant définir le champ de contraintes au


voisinage de la fissure en tenant compte de la zone plastique par l'accroissement de la
fissure. Il suggère que la fissure devient instable et se propage lorsque le facteur
d'intensité de contraintes KI atteint une valeur critique KIC défini précédemment par
le Critère « Contrainte critique ». Il énonça ainsi la relation :

K IC = f nom √ Équation 4

f est une fonction géométrique de l'éprouvette et de la longueur de fissure, il est


donné pour les principales pièces industrielles comme présenté sur la figure 16.

Comme il y a toujours une zone plastique à la pointe de la fissure, si cette zone


est petite, on admet que KI décrit bien l’état des contraintes élastiques dans la région
non-déformée.
Le critère KI < KIC peut s’appliquer de deux manières :
– pour une fissure de profondeur a donnée, on détermine la contrainte maximale
avant la rupture. A partir de l’équation (4), on obtient :

KIC = f max √ Équation 5

– pour une contrainte donnée appliquée à la pièce, on détermine la profondeur a


de la fissure qui entraîne la rupture (taille de défaut critique).
Ainsi :
 si KI max < KIC , la fissure est stable ;
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 si KI max  KIC, la fissure est instable et se propage.

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Figure 15 – Modèle d’ERWIN de la zone plastique.

(a) pièce trouée


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(b) cas d’un congé

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(c) cas d’une gorge

Figure 16 – Diverses valeurs de facteurs de concentration de contraintes pour des géométries


industrielles types.

Remarque
Nous soulignons la différence fondamentale entre un défaut de forme régulière,
au bord duquel les contraintes sont amplifiées mais restent finies, et une entaille
anguleuse au fond de laquelle les contraintes sont infinies. La différence de sévérité
entre un défaut pointu (rayon de courbure nul) et un défaut régulier (rayon de
courbure fini) est illustrée sur la figure 17.

Afin de supprimer la concentration de contrainte au bord d’un défaut anguleux et


en stopper l’avancement, il suffit d’en « arrondir » la pointe en y perçant des trous
circulaires (figure 18). Les congés en fabrication mécanique ont également pour but
d’éviter les zones à forte courbure qui sont des lieux de concentration de contrainte.

Figure 17 – Eprouvette contenant deux entailles, l’une semi-circulaire (à gauche), l’autre


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anguleuse (à droite) soumise à une traction simple.

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Figure 18 – Réduction du facteur de concentration de contrainte à la pointe d’un défaut.
A droite : défaut initial. A gauche : défaut émoussé.

V. Etude du facteur d'Intensité de Contrainte Critique

1. Détermination expérimentale du KIC


La mécanique linéaire de la rupture permet de calculer le facteur d’intensité des
contraintes sous un chargement uniforme. Ce facteur, véritable moteur de la
fissuration, permet à terme de prédire les cinétiques de propagation ; sa formule
générale étant (3).
KIC permet de chiffrer l’aptitude du matériau à la résistance à la propagation
instable de fissure (et donc à la rupture brutale d’une pièce), et est considérée comme
une caractéristique intrinsèque du matériau dans un état métallurgique bien défini
(température, pièce traitée...). On donne ci–dessous des ordres de grandeur de la
ténacité de quelques matériaux courants.

La détermination du KIC peut se faire soit par la mesure (expérience) soit


analytiquement.
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Pour mesurer KIC, il faut utiliser des éprouvettes pour lesquelles la zone
plastique est suffisamment petite. Les critères de dimensions des éprouvettes sont de
deux ordres :

 L’épaisseur doit être suffisante pour que l’on ait un état de déformation plane
 La longueur de l’éprouvette doit être suffisante pour qu’il n’y soit pas de
relaxation des contraintes.

Afin d’assurer une bonne reproductibilité de cette mesure, les essais sont normalises.
Deux essais normalises courants sont l’essai de flexion en trois points et l’essai de
traction sur éprouvette CT (Compact Tensile) représentés sur la figure 19. Les
facteurs d’intensité des contraintes correspondants sont connus de façon approchée.

Figure 19 – Eprouvettes normalisées.


à gauche : Eprouvette de flexion 3 points. à droite : Eprouvette CT.

Calculer les facteurs pour chaque géométrie et type de chargement se fait


analytiquement mais le plus souvent numériquement. Il s'agit des techniques
d'extrapolation et des méthodes énergétiques. Les techniques d'extrapolation
déduisent le FIC à partir du champ de déplacement ou de contrainte au voisinage de
la fissure. Les méthodes énergétiques calculent le taux de restitution d'énergie
permettant ensuite de déduire le FIC. L'avantage des méthodes énergétiques est
qu'elles sont applicables aux matériaux au comportement non linéaire.

Dans l’expression analytique du KIC, le facteur de forme de la fissure varie selon


la situation de rupture. Il existe des catalogues Handbooks of stress intensity factors
regroupant les cas connus.
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2. Paramètres influant le KIC
a) Dimensions de l’éprouvette
La figure 20 représente schématiquement l’évolution du facteur d’intensité des
contraintes critique avec l’épaisseur de la pièce.

KIC

Figure 20 – Variations de KI en fonction de l’épaisseur de l’éprouvette.

L’épaisseur B0 à partir de laquelle on peut considérer que le facteur d’intensité


des contraintes critique est égal à la ténacité du matériau en déformations planes est
estimée par :

La valeur du facteur KIC va donc varier en fonction de l’épaisseur de la pièce.

b) Température et Vitesse de l’essai


La température influence le comportement à la rupture principalement par ses
effets sur la limite d'élasticité et la transition entre rupture fragile et ductile.

La limite d'élasticité croît avec la vitesse de chargement tandis que la contrainte


de rupture par clivage ne montre presque aucune dépendance avec la vitesse de
déformation. Cela augmente la température de transition fragile - ductile pour les
vitesses de chargement élevées. Ainsi une augmentation de la vitesse de chargement
ou une diminution de la température ont le même effet négatif sur la ténacité.

D’un point de vue pratique, les aciers à hautes caractéristiques sont peu sensibles
à l’effet de vitesse et à l’effet de température. Cependant, les aciers présentant une
transition ductile/fragile, le KIC dépend de la température et de la vitesse de
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déformation.

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