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Ghth
DidierRognan
I. Introduction
Les nombres grandissants de cibles génomiques d'intérêt thérapeutique (Hopkins
etGroom,2002)etdemacromolécules(protéines,acidesnucléiques)pourlesquellesunestructure
tridimensionnelle (3-D) est disponible (Berman et al., 2000) rendent les techniquesde criblage
virtuel de plus en plus attractives pour des projets d'identification de moléculesbio-actives
(Walters et al., 1998; Lengauer et al., 2004). Par criblage virtuel, on entend
toutprocédéderechercheélectroniquedansdesbanquesdedonnéesmoléculairespermettant
la sélection de molécules. La requête peut être effectuée sous différents types decontraintes
(descripteurs physicochimiques, pharmacophore, topologie d'un site actif) et
doitaboutiràlasélectiond'unfaiblepourcentage(1-
2%)demoléculesprésentesdanslachimiothèque(banquededonnéesdeligands)dedépart.Nousal
lonsiciaborderlesdiverses stratégies intégrées susceptibles d'aboutir à un criblage virtuel réussi
à partir de lastructure 3-D de la protéine cible.
(2) lecriblageproprementdit,
Il est à noter que toute erreur à chacune de ces trois étapes aura des
conséquencesimportantes se traduisant généralement par une augmentation du taux de faux
positifs et defauxnégatifs. Il convient donc d'être trèsattentifàchacuned'entreelles.
1
a.Préparationdelachimiothèque
Qu'en est-il de leur diversité moléculaire ? Elle est également assez faible mais
trèsdépendantedeleurorigine.Lescollectionsissuesdechimiecombinatoiresontvastesmaispeudiv
ersesenchâssismoléculaires(Figure16.1b).Descollectionsdemoindretailleprésentent également
une faible diversité. Seul un petit nombre de collections (telles que laChimiothèque
Nationale ; voir Chapitre 2) présente un plus grand rapport taille/diversité. Onremarquera que
ce sont celles qui se rapprochent également le plus de la collection regroupantdes candidats
médicaments avérés (Sheridan et Shpungin, 2004). Le choix de la chimiothèqueest donc
crucial et dépendra du projet. Plutôt que de sélectionner une seule collection,
ilconvientplutôtdechoisirparmilessourcespossibleslesmoléculeslesplusdiversesentermesdechâs
sismoléculaireetenévitant autant quepossible les redondances.
2
a. b.
60
50
Candidatsmédicaments,%
40
30
20
10
0
1 2 3
4 5 6 7 8 9 1011 1213
Chimiothèque
Fig.16.1Analysedecollectionsdecriblage.a)Potentielencandidats médicamentsdecolle
ctionsdecribla
gecommerciales(1à7et9à13)etpublique(8 :ChimiothèqueNationale)b)Diversitéenchâssismoléculaire:P
o
urcentagedechâssiscouvrant50%descandidatsmédicaments(métriquePC50C)delachimiothèque(
1à3et5à16,chimiothèquescommerciales;4,Chimiothèque Nationale)
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C[ 1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
Banque1-D(complète)
Banque2-D Filtrage
réactivitéchimique
duplicats
propriétésphysicochimiques
propriétéspharmacocinétiques
«lead-likeness»
«drug-likeness»
3-D 1-D
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C[1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
C [1](=C(C(=CS@1(=O)=O)SC[9]:C:C:C(:C:C:@9)Br)C[16]:C:C:C:C:C@16)N
HydrogènesSt Banque1-D(filtrée)
Banque3-D éréochimieTa
utomérieIonis
ation
Fig.16.2Différentesphasesdelapréparationdelachimiothèque.Lestermes«lead-likeness»et« drug-likeness
»désignentlespropriétésadmisesgénéralement(selondesmodèlesstatistiques)pourêtredestêtesdeséries(l
ead)oudesmédicaments(drug).
3
Ces filtres sont destinés à éliminer les molécules chimiquement réactives,
toxiques,métabolisables, présentant des propriétés physicochimiques inadéquates (ex: non
conformesaux règles de Lipinski, voir Chapitre 8) susceptibles d'être des touches dites
permissives,
oupouvantinterféreravecletestdecriblageexpérimental(moléculesfluorescentes,voirChapitre 3).
En tout état de cause, il est important d'adapter l'intensité du filtrage au cahier descharges. Ce
filtrage sera intense si on veut identifier des touches pour une cible déjà trèsétudiée par le
passé et pour laquelle de nombreux ligands existent. Il sera plus lâche si le butdu criblage
virtuel est de proposer les premiers ligands putatifs d'une cible orpheline. Ladernière étape de
préparation est donc de convertir ce format 1-D en format 3-D en y incluantune représentation
atomistique complète. Nous proposons ci-dessous des liens vers diversoutilsde manipulation
des chimiothèques (Exemple 16.1)
Exemple16.1:Principauxoutilsdeconception/gestiondechimiothèquesélectroniques
Nom Editeur SiteInternet Fonction
ISIS/base MDL http:://www.mdli.com archivage
ChemOffice CambridgeSoft. http://www.cambridgesoft.com archivage
Filter Openeyes http://www.eyesopen.com filtrage
Cliff MolecularNetwork http://www.mol-net.de filtrage
PipelinePilot SciTegic http://www.scitegic.com filtrageetautomatisationde
procédures
Marvin Chemaxon http://www.chemaxon.com archivage
Ligprep Schrodinger http://www.schrodinger.com filtrage
b. Criblagepardockingàhautdébit
Ledocking(ouancrage)àhautdébitconsisteàprédireàlafoislaconformationactive et
l'orientation relative de chacune des molécules de la chimiothèque sélectionnée parrapport à la
cible d'intérêt. Très généralement, la recherche se focalise sur le site actif tel
qu'ilaurapuêtredéterminéexpérimentalement(parmutagenèsedirigéeparexemple).Ilestimportant
de prendre en compte à ce stade la notion de débit que l'on veut atteindre. Il faudraen effet
considérer le meilleur compromis entre rapidité et précision. En général, le docking àhaut
débit nécessite une rapidité voisine de 1-2 minute/ligand. De nombreux programmes
dedockingsont disponibles (Tayloretal.,2002)(Exemple 16.2).
Exemple16.2:Principauxprogrammesdedockingmoléculaire
Nom Editeur SiteInternet
AutoDock Scripps http://www.scripps.edu/mb/olson/doc/autodock/
Dock UCSF http://dock.compbio.ucsf.edu/
FlexX BioSolveIT http://www.biosolveit.de/FlexX/
Fred OpenEyes http://www.eyesopen.com/products/applications/fred.html
Glide Schrödinger http://www.schrodinger.com/Products/glide.html
Gold CCDC http://www.ccdc.cam.ac.uk/products/life_sciences/gold/
ICM Molsoft http://www.molsoft.com/products.html
LigandFit Accelrys http://www.accelrys.com/cerius2/c2ligandfit.html
Surflex Biopharmics http://www.biopharmics.com/products.html
Troisprincipessontgénéralementutilisésdansletraitement delaflexibilitéduligand:
4
(1) un ensemble de conformations du ligand est préalablement calculé et celles-ci
sontdockéesdemanièrerigidedansle site(ex:Fred),
(2) le ligand est construit de manière incrémentale fragment après fragment (ex:
Dock,FlexX,Glide,Surflex),
(3) une analyse conformationelle plus au moins exhaustive est conduite sur le ligand
demanière à générer les conformations les plus propices au docking (ex: ICM,
Gold,LigandFit).
Généralement,plusieursposesduligandsontgénéréesetclasséesparordredeprobabilité
décroissante selon une fonction d'évaluation (Gohlke et Klebe, 2001) qui au
mieuxessaierad'approximerl'énergielibredeliaisonduligandàsacible(c'est-à-diresonaffinité)ou
plus simplement classera les molécules de la chimiothèque par énergie d'interaction avec
lesite de la protéine cible. La précision d'outils de docking moléculaire peut être évaluée
encomparant prédictions et solutions expérimentales sur un ensemble représentatif de
complexesprotéines-ligandissusdelaProteinDataBank(http://www.rcsb.org/
pdb/).L'expériencemontre que si l'on considère les 30 solutions les plus probables, un ligand
est généralementbien ancré dans environ 75% des cas (Kellenberger et al., 2004). La «
meilleure solution » (laplus proche de la solution expérimentale) n'est pas toujours celle
prédite comme la plusprobable par la fonction d'évaluation (seulement dans 50 % des cas
environ) ce qui compliquesingulièrement l'analyse prédictive de solutions de docking
(Kellenberger et al., 2004). Denombreuses raisons existent pour expliquer ces imperfections,
dont le traitement peut s'avérerplusou moins compliqué (Exemple16.3).
Exemple16.3:Principalescausesd'erreurslorsd'undockingmoléculaire
Causesd'erreurs Traitement
Siteactifdénuédecavité impossible?
Flexibilitédelaprotéine trèsdifficile
Influencede l’eau très difficile
Imprécisiondesfonctionsd’évaluations trèsdifficile
Interactionsnonusuelles difficile
Flexibilitéduligand difficile
Pseudosymétrieduligand difficile
Mauvaisjeuxdecoordonnées(protéine) facile
Mauvaistypesatomiques(ligand,protéine) facile
C'est la raison pour laquelle le docking moléculaire reste une technologie difficile
àmettre en œuvre car elle doit être appliquée et constamment adaptée en fonction du
contextedans lequel le projet se place. Il est néanmoins possible de fournir des guides en
fonction dutypedeprotéine,siteactifetligand(s) àancrer(Kellenbergeretal.,2004).
Appliquéaucriblagevirtueldechimiothèques,ledockingmoléculairedevranonseulement
fournir des poses les plus exactes possibles pour chaque ligand de la chimiothèque,mais aussi
être capable de classer les ligands par ordre décroissant d'affinité prédite de façon
àsélectionner les touches d'intérêt. Ceci reste un des défis majeurs de la chimie théorique, car
ilconvient de prédire avec une précision et une rapidité compatibles avec le débit du
criblage,les composantes enthalpiques (une tâche facile) et entropiques (une tâche beaucoup
plusdifficile)del'énergielibredeliaisondechaqueligand(GohlkeetKlebe,2001).Denombreuses
méthodes de prédiction d'énergie libre existent. Leur précision est toutefois
reliéeaudébitaveclequelellespeuventêtreappliquées(Figure16.3).Desméthodes
5
thermodynamiques permettent une précision relativement élevée mais ne seront
applicablesqu'à une paire de ligands (prédiction de différences d'énergie libre). A l'opposé, des
fonctionsempiriques pourront être utilisée à plus haut débit (> 100,000 molécules) mais avec
uneprécision très moyenne (de l'ordre de 7 kJ/mol soit une unité et demie de pK en
termesd'affinité)
7
Erreur moyenne,kJ/mol
Précision
Méthodesthermodynamiques(2)Cha
QSAR,3-DQSAR(<1000)
Fonctionsempiriques(>100.000)
2
2 1000 100.000
Nombredemolécules
Fig.16.3Méthodesdeprédictiond'énergielibre(affinité)deliaisond'unligand
c. Post-traitementdesdonnées
Acceptantlefaitquelesfonctionsd'évaluationsonttrèsimparfaites,lameilleurestratégiepoura
ugmenterletauxdevraispositifslorsd'uncriblagevirtuelconsisteàessayerdedétecterlesfauxpositifs
.Cecin'estpossiblequ'àconditiond'analyserlessortiesdecriblageavecuneméthodechémoinformati
queadditionnelle.Plusieurssolutionssontpossibles. La plus simple consiste à scorer de nouveau
les poses obtenues à l'aide de fonctionsd'évaluations différentes de celle utilisée pendant le
docking. Chaque fonction ayant desimperfections, l'analyse consensuelle (Charifson et al.,
1999) permet de détecter les
fauxpositifscommelestouchesnoncommunesàdeuxoutroisfonctionsreposantsurdesprincipesphy
sicochimiques différents (Figure 16.4).
6
Gold
Méthode dedocking
DockFlexX/DockFlexX/Dock/Fresno
FlexX
FlexXFlexX/Gold FlexX/Gold/Fresno
0 5 10 15 20 25 30 35 40
Enrichissement
Unestratégiedepost-
traitementplussimplemaisefficaceconsisteàappliqueruntraitementstatistiqueauxmoléculesdelac
himiothèqueregroupéesdefaçon« quasiphylogénétique » par châssis moléculaire (Nicolaou et
al., 2002). Plutôt que de s'intéresser àdes scores individuels, il suffit alors de regarder la
distribution de ceux-ci au sein de classeschimiques homogènes. Ceci permet de privilégier
non plus des molécules mais des châssismoléculaires supposés suffisamment enrichis en
touches virtuelles (Figure 16.5) et ainsid'identifierdes faux négatifs (molécules actives
malancrées et/ou scorées).
7
70 5 6
60 4
%devraisactifs
50
40 2
30
20 1 13
0 5 10 15 20 25
Enrichissement
Fig.16.5Influenc
edelastratégied'analysededonnéessurl'enrichissementenactifs,parrapportàuncriblageauhasard,àpart
ird'unmêmejeudedonnéesdedocking(10antagonistesdurécepteurV1adelavasopressine«enfouis
»dansunebasede1.000molécules;Bissantzetal.,2003)1:Sélectiondes5premierspourcentsancrésetscorés
parGold; 2:Sélectionde 5premierspourcentsancréset scoréspar
FlexX;3:Sélectiondestouchescommunesauxlistes1et2;4:sélectiondechâssisdont60%desreprése
ntantsprésentent un scoreGold supérieur à37,5;5: sélection dechâssis dont 60%des
représentantsprésentent un scoreFlexX inférieurà-22;6:sélection dechâssis dont 60%des
représentantsprésentent un scoreGold supérieur à37,5 et inférieurà-22. Leschâssis moléculaires
ont étécalculéspar lelogicielClassPharmer(Bioresaon, SantaFe, USA). Les flèches indiquent
legainenregistrédans lasélectiondevraisactifspar analysedeschâssis
moléculaires(singletonsexclus)
III. Quelquessuccèsducriblagevirtuelpardocking
Denombreuxexemplesdecriblagesvirtuelsréussisontétédécritsdanslestroisdernières
années (Exemple 16.4). A partir de structures cristallographiques à haute résolutionde
protéines ou d'acides nucléiques, il est généralement possible d'obtenir des taux de
touchesvalidées expérimentalement de l'ordre de 20-30%, ceci à partir de chimiothèques de
taille etdiversitévariables, mais toujourspréalablementfiltréescommeindiquéplushaut.
8
Exemple16.4 : Exemples deréussites decriblage virtuelde chimiothèques
Ciblemoléculaire Chimiothèque Taille Tauxdetouche Référence
Exemple16.5:Étatdel'artdespossibilitéducriblagevirtuelpardocking.
Cequiestpossible:
Criblerenviron50,000molécules/jour
Discriminer les vrais actifs de molécules choisies au
hasardObtenirdes tauxdetouchesde 10-30%
Identifierenviron50%desvraisactifs
Prévoirunprofildesélectivitépourdifférentescibles
Cequi restedifficile :
Prédire l'orientation exacte du
ligandPrédirel'affinitéexacteduligand
Discriminer les vrais actifs d’inactifs chimiquement
voisinsIdentifier100% des vraisactifs
Tenircomptedelaflexibilitédelacible
IV. Conclusion
Lecriblagevirtueldechimiothèquespardockingestdevenueuneméthodechémoinformatique
utilisée en routine de manière à identifier des ligands pour des ciblesd'intérêt thérapeutique. Il
faut garder en mémoire que cette technologie est très sensible auxcoordonnées3-
Ddelacibleetgénèremalgrétoutdenombreuxfauxnégatifs.Aussiimportantes que le criblage lui-
même sont donc les phases de préparation de la chimiothèqueet la fouille des résultats de
façon à détecter de faux positifs éventuels et ainsi améliorer letaux de touches qui peut aller
jusqu'à 30% dans des cas favorables. Plutôt que de se focalisersur le taux de touches, il est
plus intéressant de considérer le nombre de nouveaux
chémotypesdanslesligandsidentifiésetvalidésparcriblage.Decepointdevue,cetoutilestuncomplé
mentnaturelduchimistemédicinalafindeproposerdeschâssismoléculairessusceptiblesdeconduire
rapidementàdeschimiothèquesfocaliséesàhautevaleurajoutée.
9
DesprogrèsàvenirdansledomainedelaprédictiondepropriétésADME/
Tox(pourAbsorption,Distribution,Métabolisme,ExcrétionetToxicité)devraientpermettred'e
nrichirsignificativement le potentieldecetoutilchémoinformatique.
IVRéférences
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