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Annuaire français de droit

international

La Convention de La Haye du 16 décembre 1970 pour la répression


de la capture illicite d'aéronefs
M. le Président Gilbert Guillaume

Citer ce document / Cite this document :

Guillaume Gilbert. La Convention de La Haye du 16 décembre 1970 pour la répression de la capture illicite d'aéronefs. In:
Annuaire français de droit international, volume 16, 1970. pp. 35-61;

doi : https://doi.org/10.3406/afdi.1970.1584

https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1970_num_16_1_1584

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LA CONVENTION DE LA HAYE

DU 16 DÉCEMBRE 1970

POUR LA RÉPRESSION DE LA CAPTURE ILLICITE

D'AÉRONEFS

Gilbert GUILLAUME

Les actes portant atteinte à la sécurité de l'aviation civile, et notamment


les détournements d'aéronefs, se sont au cours des dernières années multipliés
et généralisés. De 1961 à 1967, 17 appareils avaient été détournés de leur
itinéraire et 12 tentatives de détournement avaient échoué. "La majorité de
ces actes criminels avaient pris place en Amérique du Nord.' Le phénomène
a pris depuis lors une plus grande ampleur : 32 détournements d'avions ont
été opérés en 1968, près de 80 en 1969, plus de 90 dans les trois premiers
trimestres de 1970. Ces actes ont été commis dans toutes les parties du monde.
Ils ont parfois été accompagnés de prise d'otages et de destruction d'aéronefs.
Environ 80 % de leurs auteurs sont parvenus à leurs fins. Dans la très grande
majorité des cas, les agresseurs justifiaient leur action par des mobiles d'ordre
politique. Cependant les détournements ont parfois été le fait de déséquilibrés
ou d'individus recherchés par la justice (1).
Cette évolution inquiétante a conduit les gouvernements à prendre des

dispositions en vue de prévenir et de réprimer les détournements d'avions.


A titre préventif diverses mesures de contrôle, tant des passagers que des
bagages à main, ont été adoptées sur de nombreux aéroports. Mais . ces
mesures, dont l'efficacité paraît certaine, ne pourraient être renforcées,
généralisées et rendues permanentes sans qu'il en résulte une gêne réelle pour le
transport aérien. Par ailleurs les moyens dont le personnel navigant dispose en
(*) Gilbert Guillaume, Maître des Requêtes au Conseil d'Etat, représentant de la
France au Comité Juridique de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale.
Le présent article n'exprime que l'opinion de son auteur et ne peut être regardé
comme reflétant le point de vue des autorités françaises. -
(1) Voir « Aircraft Hijacking » : its cause and cure par Alona E. Evans, American Journal
of International law, octobre 1969, n° 4. Voir aussi le numéro spécial de la Revue générale de
l'air et de l'espace sur la « piraterie aérienne », 1969, n° 3.
36 LA CAPTURE ILLICITK D'AERONEFS

vol pour tenter d'éviter les détournements sont assez limités. Des gardes
armés ont été placés dans certains pays à bord des aéronefs, mais cette mesure
n'a pas recueilli un assentiment général (2). Aussi l'effort des Etats a-t-il
tendu non seulement à prévenir les détournements, mais encore à en limiter
les conséquences et à en assurer la répression.
A cet effet, une première Convention internationale a été signée à Tokyo
le 14 septembre 1963. Elle concerne de manière générale les infractions et
certains autres actes commis à bord des aéronefs et n'aborde le problème
des détournements qu'en son article 11: Ce texte oblige les Etats contractants
à prendre toutes mesures appropriées pour restituer ou conserver le contrôle
d'un aéronef détourné à son commandant légitime. Il fait en outre obligation
à l'Etat sur le territoire duquel l'aéronef atterrit de permettre aux passagers
et à l'équipage de poursuivre leur voyage aussitôt que possible. Cet Etat
doit restituer aéronef et cargaison à ceux qui ont le droit de les détenir.
L'Assemblée générale de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale,
au cours de ses sessions de septembre 1968 (3) et de juin 1970 (4) , pria « tous
les Etats de devenir parties le plus tôt possible à la Convention de Tokyo »
et les invita, « avant même qu'ils aient ratifié cette . Convention ou y aient
adhéré, à mettre en œuvre les principes de l'article 11 de ladite Convention ».
L'Assemblée générale des Nations Unies formula des recommandations
analogues en novembre 1969 (5) et novembre 1970 (6) , le Comité des ministres
du Conseil de l'Europe en juin 1970(7).
Ces recommandations furent suivies d'effet. Trois Etats seulement avaient
en décembre 1966 ratifié la Convention de Tokyo; trente Etats (8) sont
aujourd'hui parties à cette Convention (9) . Par ailleurs, aucun gouvernement
n'a contesté que les dispositions de l'article 11 de ladite Convention réglant

(2) Diverses autres mesures préventives ont été recommandées par l'Assemblée générale
extraordinaire de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale qui s'est tenue à Montréal
du 16 au 30 juin 1970 (voir documents O.A.C.I./A 17-1 à A 17-24).
(3) Résolution A 16-37 de l'Assemblée générale ordinaire de l'O.A.C.I. tenue à Buenos-Aires
du 3 au 26 septembre 1968. ;
(4) Résolution A 17-2 de l'Assemblée générale extraordinaire de l'O.A.C.I. tenue à Montréal
du 16 au 30 juin 1970.
(5) Résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies du 12 décembre 1969 (1831e
séance plénière) .
.

(6) Résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies du 25 novembre 1970 (1914*
séance plénière) .
,

(7) Résolution CM (70) 23 adoptée le 29 juin 1970 (publiée par la revue générale de l'air
et de l'espace, 1970, n° 3, p. 318) .
(8) République fédérale d'Allemagne, Arabie Saoudite, Australie, Belgique, Brésil, Canada,
République de. Chine, Côte d'Ivoire, Danemark, Equateur, Espagne, Etats-Unis d'Amérique,
France, Gabon, Haute-Volta, Islande, Israël, Italie, Japon, Kenya, Mexique, Niger, Nigeria,
Norvège, Pays-Bas, Philippines, Portugal, République Malgache, Royaume-Uni et Suède.
(9) La France a pour sa part signé la Convention de Tokyo le 11 juillet 1969. Le Parlement
en a autorisé la ratification par loi du 11 juin 1970 (travaux préparatoires : projet de loi
n° 992; rapport de M. Magaud à l'Assemblée Nationale n° 1128; rapport de M. Soufflet au
Sénat n° 247; loi publiée au Journal Officiel du 12 juin 1970) . La France a déposé son
instrument de ratification auprès de l'O.A.C.L le 11 septembre 1970. Elle est par suite liée par la
Convention à compter du 10 décembre 1970 (décret de publication, J.O., 27 février 1971.
LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS 37

le sort des passagers et de l'équipage constituent une règle universellement


reconnue qu'il convient en tout état de cause de respecter (10) .
Mais la Convention de Tokyo ne résout pas le problème essentiel que les
détournements d'aéronefs posent à la communauté internationale : celui de la
répression des actes criminels ainsi perpétrés.
Dans la plupart des pays, le détournement d'aéronefs n'est en effet pas
puni en tant que tel. Certes les actes commis à l'occasion d'un tel
détournement sont susceptibles d'être réprimés sous diverses qualifications voisines
(11). Mais ces qualifications peuvent être insuffisantes pour assurer une
répression appropriée et il peut en certaines circonstances être difficile de
trouver un tribunal compétent pour connaître de l'infraction lorsque celle-ci a été
commise à bord d'un aéronef étranger et hors du territoire national. La
création d'une nouvelle infraction, l'extension des compétences existantes et la
modification des règles de l'extradition s'imposaient.
La première de ces réformes pouvait être opérée sur une base purement
nationale et plusieurs pays ont déjà promulgué des lois tendant à la répression
du détournement d'aéronefs en tant qu'infraction distincte (12). C'est ainsi
qu'en France une loi du 15 juillet 1970 adoptée à l'unanimité par chacune
des deux chambres a ajouté un article 462 au Code Pénal en vue de constituer
le détournement en crime (13).
En revanche les autres réformes impliquaient un accord international.
En vue d'élaborer un tel accord, un sous-comité du comité juridique de
l'O.A.C.1. se réunit à deux reprises en février 1969 et octobre 1969 (14).
Le texte qu'il avait préparé fut examiné par le Comité juridique lui-même en
mars 1970. Le Comité qui comprenait des représentants de 42 pays n'apporta
au projet que des modifications de détail (15). Le texte fut alors transmis

(10) Voir la résolution A 17-2 de l'Assemblée générale de l'O.A.C.I. déjà citée.


(11) Par exemple dans le cas de la France pour violence et voies de fait, port illégal
d'armes et peut-être même vol (voir à ce sujet les jugements rendus dans les affaires Panichi
et Umberto et reproduits à la Semaine Juridique, 1969, II, n° 16023 avec une note de M. du
Pontavice; voir aussi le jugement rendu par le tribunal du gouvernement militaire français de
Berlin du 20 novembre 1969 reproduit à la Semaine Juridique, 1970, II, n° 16540 et la note
de M. de Juglart et du Pontavice sur cette affaire. Voir aussi D. Ruzié, à l'Annuaire, 1969,
p. 784.
(12) Article 198 du Code Pénal de la République argentine; article 11 de la loi australienne
de 1963; loi cubaine du 16 septembre 1969; décret mexicain du 24 décembre 1968 et loi des
Etats-Unis d'Amérique du 5 septembre 1961. Ces divers textes figurent en annexe à l'article
de M. R. H. Mankiewicz, c Capture et détournement illicites d'aéronefs » publié au présent
Annuaire, 1969, p. 462.
(13) Loi publiée au Journal Officiel du 17 juillet 1970, p. 6657. (Pour les travaux
préparatoires, voir la proposition de loi de M. Bignon n° 639 du 31 janvier 1969, le rapport de
M. Magaud à l'Assemblée Nationale n° 979 et la discussion devant l'Assemblée le 19 mai 1970;
voir aussi le rapport de M. Soufflet devant le Sénat n° 246 et la discussion du 4 juin 1970).
Le texte adopté par l'Assemblée ne couvrait pas les territoires d'Outre-Mer; le Sénat ajouta à
la proposition de loi un article la complétant à cet effet et de ce fait, le projet dut subir une
navette.
(14) Les travaux de ce sous-comité ont été analysés de manière approfondie par M. R.H.
Manckiewicz dans son étude précitée publiée au présent Annuaire, 1969, p. 462. Ils ont été
diffusés par l'O.A.C.1. comme document 8838-LC/157.
(15) Les travaux du Comité ont été publiés par l'O.A.C.1. comme document 8877-LC/161.
38 LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS

aux . Etats et une conférence diplomatique fut convoquée à La Haye du


1er au 16 décembre . 1970 sur l'invitation du gouvernement des Pays-Bas et
sous les auspices de l'O.A.C.1. Elle réunit les représentants de 77 Etats.
Le texte soumis à la Conférence définissait l'infraction de capture illicite
d'aéronefs et faisait obligation aux Etats ' contractants de la réprimer de
peines sévères. Il donnait compétence pour connaître de l'infraction tant à
l'Etat d'immatriculation de l'appareil qu'à l'Etat sur le territoire duquel
celui-ci atterrit après détournement. Il rendait l'infraction susceptible
d'extradition. Enfin, il faisait obligation à tout Etat détenant l'auteur du détournement
soit de l'extrader, soit de soumettre l'affaire à ses autorités compétentes afin
que celles-ci décident s'il y a lieu d'engager des poursuites judiciaires.
Dès l'ouverture de la Conférence, il apparut que les . Etats-Unis
d'Amérique et l'Union Soviétique soutenus par certains autres pays et notamment
par le Brésil, l'Ethiopie, la Grèce, Israël et divers Etats d'Europe Orientale
souhaitaient renforcer les mécanismes de la Convention. Leur but était de
rendre l'extradition de l'auteur présumé de l'infraction vers l'Etat
d'immatriculation de l'aéronef aussi automatique que possible. Subsidiairement, ces
pays estimaient que l'Etat détenant l'intéressé devait, s'il ne l'extradait pas,
être mis dans l'obligation d'engager des poursuites à son encontre.
La majorité des Etats représentés à la Conférence ne partagea pas ce point
de vue. Elle écarta à la fois l'idée d'extradition automatique et celle de
poursuite obligatoire. . Elle estima qu'il convenait par voie de conséquence qu'il
exista en toutes circonstances un Etat compétent pour engager des poursuites
et renforça sur ce point les dispositions du projet de Convention.
Ce dernier demeurait dans ces conditions acceptable pour la grande
majorité des Etats représentés. La Convention fut approuvée par 75 voix avec
2 abstentions, celles de l'Algérie et du Chili. Elle fut dès le 16 décembre signée
de 50 Etats dont les compagnies assurent plus de 90 % du trafic mondial (16) .
Toutefois Cuba et les pays arabes, encore que récemment concernés par
certains détournements, ne signèrent pas la Convention. Cuba ne s'était pas
fait représenter à la Conférence, estimant que des accords bilatéraux fondés
sur le principe de réciprocité et conclus dans le respect du droit d'asile, de
l'extradition et de la compétence territoriale des Etats pourraient permettre
d'aboutir à des résultats plus rapides et plus satisfaisants qu'une Convention
multilatérale (17) . Mais cette abstention , liée à la position particulière de
Cuba vis-à-vis des Etats-Unis n'a pas empêché le gouvernement de ce pays

(16) Afghanistan, Afrique du Sud, République Fédérale d'Allemagne, Argentine, Barbade,


Belgique, Biélorussie, Brésil, Bulgarie, Cambodge, Canada, République de Chine, Colombie,
Costa-Rica, Danemark, El Salvador, Etats-Unis d'Amérique, Ethiopie, France, Gabon, Ghana,
Grèce, Guatemala, Hongrie, Indonésie, Iran, Israël, Italie, Jamaïque, Japon, Luxembourg,
Malaisie, Mexique, Panama, Pays-Bas, Philippines, Pologne, Portugal, Royaume-Uni, Rwanda,
.

Suède, Suisse, Tchécoslovaquie, Thaïlande, Trinité-et-Tobago, Turquie, Ukraine, U.R.S.S.,


Venezuela et Yougoslavie.
(17) Observations de Cuba sur le projet du sous-Comité; Document O.A.C.I. 8838-LC/157,
page 135.
LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS 39

de promulguer , le 16 septembre 1969 une loi punissant sévèrement les


détournements d'aéronefs et d'en appliquer effectivement les dispositions.
En revanche certains pays arabes représentés à La Haye ont voté en faveur
de la Convention et l'on peut espérer qu'ils seront en mesure de la signer
dans les mois qui viennent

Le titre.

La Conférence de La Haye hésita sur le titre à donner à la Convention.


Trois formules furent proposées : répression de la « piraterie aérienne », du
« détournement d'aéronefs » ou de la « capture illicite d'aéronefs ». La
première formule avait l'avantage de faire image et correspondait aux termes en
usage dans le grand public et dans certaines législations nationales (18) . Mais
la piraterie a été définie par l'article 15 de la Convention de Genève sur la
Haute Mer du 29 avril 1958 comme « tout acte illégitime de violence, de
détention ou toute déprédation commis pour des buts personnels par l'équipage ou
les passagers d'un navire privé ou d'un aéronef privé » et dirigée en Haute Mer
contre un autre navire ou aéronef. En vue d'éviter toute confusion, ce premier
terme fut écarté.
En revanche, le but de la Convention est bien de lutter contre les
« détournements d'aéronefs », et ces mots qui eussent pu être traduits en
anglais par « aircraft hijacking » avaient l'avantage d'être à la fois précis et
clairs. Ils correspondaient d'ailleurs au premier état de la Convention puisque
dans la version envisagée initialement par le sous-comité, il n'y avait
infraction que si la personne qui s'emparait de l'aéronef l'avait fait « afin de changer
son itinéraire » (19) . Mais la discussion avait montré que, dans les cas de
tentative avortée, il pourrait être difficile de démontrer que l'intention de
l'auteur de l'infraction avait bien été telle. Aussi le sous-comité avait-il
finalement proposé que le fait même de s'emparer illicitement d'un appareil
par la violence suffise à caractériser l'infraction. Dans ces conditions, toute
action illicite de prise de contrôle tombait sous le coup de la Convention quel
que soit le but poursuivi. Le texte ne couvrait plus seulement le
détournement, mais la capture illicite d'aéronef. Ce dernier terme fut par suite retenu.

Le préambule.

Au cours de sa deuxième session, le sous-comité avait sur proposition du


représentant américain ajouté un préambule au projet de Convention. Ce
préambule fut à peine retouché par le Comité juridique, mais subit quelques
modifications lors de la Conférence diplomatique.

(18) La loi américaine du 5 septembre 1961 est dite « Aircraft piracy Act ».
(19) Voir le Document de l'O.A.C.1. déjà cité 8838-LC/157, page 23.
40 LA CAPTURE ILLICITE D'AÉRONEFS

II affirme en premier lieu que « les actes illicites de capture ou d'exercice


du contrôle d'aéronefs en vol compromettent la sécurité des personnes et des
biens, gênent sérieusement l'exploitation des services aériens et minent la
confiance des peuples du ' monde dans la sécurité de l'aviation civile » et
souligne que « de tels actes préoccupent gravement » les Etats parties.
Ce texte repris de la résolution du Conseil de l'O.A.C.I. du 10 avril 1969 (20)
s'en différencie seulement par un mot : il vise les services aériens et l'aviation
civile alors que le texte original mentionnait les services aériens «
internationaux » et l'aviation civile « internationale ». Cette modification demandée
par l'Union Soviétique était la conséquence nécessaire du fait que la
Convention couvre en son article 3 certains vols intérieurs, sans d'ailleurs les viser
tous.
Le préambule se poursuit en affirmant que « dans le but de prévenir ces
actes, il est urgent de prévoir des mesures appropriées en vue de la punition
de leurs auteurs ». Cette rédaction qui trouve son origine dans une suggestion
indienne a pour objet de souligner le but poursuivi par les gouvernements
signataires : prévenir le développement de cette forme nouvelle de criminalité
qu'est la capture illicite d'aéronefs grâce à la punition des coupables, étant
entendu que cette punition ne peut être opérée que dans les conditions fixées
par la Convention et le droit national applicable, et notamment dans le respect
des règles gouvernant l'extradition et l'action pénale.
Enfin, il était précisé dans le projet initial de préambule que la nouvelle
Convention « s'ajoutait » à la Convention de Tokyo. Cette mention a été
supprimée à , la demande du représentant de la République populaire du
Congo. Ainsi les insuffisances de la situation conventionnelle passée sont
moins nettement soulignées et l'indépendance des deux Conventions est
mieux marquée. La signature et la ratification de la seconde apparaissent
dès lors complètement indépendantes de celles de la première.

L'infraction.

L'article 1er de la Convention définit l'infraction que les Parties


contractantes s'engagent à réprimer et dont les auteurs sont désormais passibles
d'extradition. Il laisse au législateur national le soin de donner à cette
infraction une dénomination appropriée (21) , mais en précise les éléments
constitutifs en visant « toute personne qui, à bord d'un aéronef en vol, illicite-
ment et par violence ou menace de violence, s'empare de cet aéronef ou en
exerce le contrôle ».

(20) Voir le document de l'O.A.C.I. déjà cité 8849-C/990. page 5.


(21) Le Ghana proposa au cours de la Conférence que l'infraction soit dénommée c capture
illicite d'aéronefs ». Cette proposition fut rejetée par 21 voix contre 17 avec 14 abstentions.
LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS 41

Cette définition proposée par le sous-comité (22) et adoptée par le Comité


juridique (23) a été approuvée sans modification par la Conférence. Cette
dernière a en effet entendu limiter le contenu conventionnel de l'infraction
à certains actes particulièrement dangereux pour l'aviation civile. Elle s'est
refusée à inclure parmi ces actes des agissements certes répréhensibles, mais
ne créant pas un tel danger. Il appartiendra aux Etats parties, s'ils le jugent
souhaitable, de compléter à cet égard la Convention en réprimant en droit
national ces agissements de manière appropriée.
Selon le texte adopté, il n'y a en premier lieu infraction au sens de la
Convention que si le détournement est le fait d'une personne se trouvant à
bord de l'aéronef détourné (24) . Sont donc exclus les déroutements opérés
depuis le sol ou grâce à l'usage d'autres aéronefs. De tels . déroutements
,

créent en effet pour l'aéronef et ses occupants des dangers très différents de
ceux courus en cas de détournement par un passager. Ils impliquent en outre
dans la plupart des cas la complicité des services de contrôle de la circulation
aérienne ou l'intervention d'appareils militaires. Ils soulèvent donc des
problèmes de relations entre Etats qu'il eut été vain de chercher à résoudre
dans le cadre de la Convention.
L'infraction se caractérise en deuxième lieu par le fait que son auteur
« s'empare d'un aéronef » ou « en exerce le contrôle ». Pour tomber sous le
coup de la Convention l'intéressé ne doit pas nécessairement prendre en
main les commandes de l'appareil et en assurer le pilotage. Il suffit qu'il
en contrôle l'évolution par exemple par l'intermédiaire d'un membre de
.

l'équipage ou d'un tiers qu'il contraindrait à exécuter ses ordres concernant


la route, la vitesse ou l'altitude de l'avion. Les termes ainsi analysés sont
repris de l'article 11 de la Convention de Tokyo. Mais cette dernière visait en
outre le cas où une personne « gêne l'exploitation d'un aéronef ». Ces derniers
mots avaient été jugés utiles dans la Convention de Tokyo en vue de préciser
les hypothèses dans lesquelles les Etats contractants sont tenus de prendre
les mesures nécessaires « pour restituer ou conserver le contrôle de l'aéronef
au commandant légitime ». Ils ont en revanche été considérés comme trop
vagues pour pouvoir être utilisés dans la définition d'une infraction et ont de
ce fait été éliminés de la nouvelle Convention (25) .
Les actes accomplis doivent en troisième lieu être « illicites ». Le sens de
ce terme n'est pas précisé par le texte. Son insertion a cependant permis de
renvoyer aux droits nationaux le soin de fixer les cas dans lesquels l'auteur
de l'infraction ne peut être tenu pour responsable de celle-ci ou doit en
être excusé (légitime défense, ordre de la loi, démence, minorité pénale).

(22) Voir le document de l'O.A.C.I. déjà cité 8838-LC/157, page 13.


(23) Voir le document de l'O.A.C.1. déjà cité 8877-LC/161, page 12.
(24) La Conférence a écarté par 35 voix contre 15 avec 14 abstentions une suggestion de
l'Association de droit international tendant à ce que les mots c à bord » soient supprimés.
(25) Voir le document de l'O.A.C.1. déjà cité 8877-LC/161, page 26.
42 LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS

L'infraction doit en quatrième lieu être commise « par violence ou


menace de violence ». La Convention ne couvre donc pas les cas de
déroutements opérés sur l'initiative du pilote ou de certains autres membres de
l'équipage. En revanche le terme «violence» doit être entendu en un sens
large comparable à celui adopté en France par la Cour de Cassation pour
l'application des articles 309 et 310 du Code Pénal (26). Il ne s'agit pas
seulement de la violence physique, mais de toute autre forme
d'intimidation (27).
Enfin il n'y a infraction que si l'aéronef est « en vol ». Cette disposition
est susceptible de deux interprétations : - selon les uns la Convention ne
serait applicable que si l'avion détourné est en vol au moment même du
détournement. Pour les i autres, le texte permettrait de poursuivre toute
personne exerçant illicitement et par violence le contrôle d'un aéronef en
vol, que le détournement ait commencé alors que l'appareil était au sol ou
en vol.
La rédaction de l'article 1er et les travaux préparatoires imposent* cette
seconde interprétation : la capture illicite d'aéronefs est une infraction
continue qui se réalise tout au cours du détournement. Peu importe dès lors
que l'auteur de la capture se soit emparé d'un aéronef au sol ou en vol;
dès qu'il en assure le contrôle en vol dans les conditions fixées par la
Convention, il commet l'infraction définie par cette dernière.
Cette interprétation nous paraît limiter la portée de la discussion qui
s'est développée au cours de la Conférence sur la définition des mots « en
vol ». Le Comité juridique avait proposé sur ce point de reproduire dans la
nouvelle Convention les dispositions de l'article 1er paragraphe 3 de la
Convention de Tokyo selon lesquelles « un aéronef est considéré comme en
vol depuis le moment où la force motrice est employée pour décoller jusqu'au
moment où l'atterrissage a pris fin ». Une telle solution avait l'avantage de
la clarté puisqu'elle fournissait du vol une définition proche de celle qu'en
donne le langage commun. Elle avait par ailleurs des vertus unificatrices, car
elle reprenait les termes que la Convention de Tokyo avait utilisés de manière
générale en vue de préciser son champ d'application. Elle ne présentait enfin
aucun inconvénient pratique, car dans l'hypothèse où un appareil est détourné
avant décollage, la nouvelle Convention s'applique en tout état de cause à
partir du décollage. Quant au cas de la tentative avortée au sol, il pouvait et
devait être réglé par le droit de l'Etat sur le territoire duquel cette tentative
avait été opérée.

(26) Selon cette jurisprudence, la violence ne suppose pas nécessairement qu'une atteinte
ait été portée à la personne physique d'autrui; elle est suffisamment caractérisée par un
geste ou une attitude de nature à impressionner une personne raisonnable.
(27) Les versions anglaise et espagnole de la Convention explicitent les notions couvertes
par le mot français c violence » puisqu'elles visent dans le 1er cas l'usage de la « force or any
other form of intimidation » et dans le 2« < violenca o cualquier otra forma de intimidacion ».
Ces textes ont ainsi été alignés sur la version française, alors qu'ils en divergeaient quelque
peu à l'article 11 de la Convention de Tokyo.
LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS 43

Mais ces arguments, exposés notamment par le délégué du Canada, n'ont


pas convaincu la Conférence et celle-ci a préféré donner du vol une définition
plus large. Sur proposition du Royaume-Uni (28), elle a retenu à cet effet les
termes de l'article 5 paragraphe 2 de la Convention de Tokyo et précisé en
son article 3 paragraphe 1er qu' « un aéronef est en vol depuis le moment où,
l'embarquement étant terminé, toutes ses portes extérieures ont été fermées
jusqu'au moment du débarquement. En cas d'atterrissage forcé, le vol est
censé se poursuivre jusqu'à ce que l'autorité compétente prenne en charge
l'aéronef, ainsi que les personnes et biens à bord» (29).
Une telle définition s'expliquait à l'article 5 de la Convention de Tokyo
dès lors qu'il s'agissait de donner au commandant de bord des pouvoirs quasi
disciplinaires dès fermeture des portes. Elle se justifie beaucoup moins pour la
définition d'une infraction. Son seul avantage est à cet égard de permettre
aux Etats ayant une conception restrictive de la tentative de faire couvrir
par le nouveau texte les tentatives avortées avant décollage.
Encore n'est-il pas certain qu'un tel résultat ait été atteint. En effet,
.

la Conférence après avoir ainsi modifié l'article 3 paragraphe 1er s'est refusée
à modifier de manière correspondante l'article 3 paragraphe 3. Ce dernier tend
à exclure en principe du champ d'application de la Convention certains
détournements d'aéronefs opérés à l'intérieur du territoire de l'Etat
d'immatriculation; il précise que la Convention ne s'applique que si « le lieu de
décollage et le lieu d'atterrissage de l'appareil » se situent tous deux sur le
territoire de l'Etat dont l'aéronef a la nationalité. Le délégué des Pays-Bas
proposa qu'à ces termes soient substitués des mots visant la clôture et
l'ouverture des portes. Mais sa proposition fut rejetée (30) et les paragraphes 1 et 3
de l'article 3 de la Convention sont désormais contradictoires l'un incluant la
tentative avortée entre la fermeture des portes et le décollage et l'autre
l'excluant.
Cette difficulté d'interprétation mise à part, l'article 1" apparaît d'une
rédaction heureuse. Celle-ci correspond pour l'essentiel au but poursuivi :
permettre la lutte contre les actes de détournement mettant gravement en
danger la sécurité des aéronefs.

(28) Décision prise par 24 voix contre 18 avec 25 abstentions.


129) Ce dernier membre de phrase diffère légèrement du texte figurant à l'article 5
paragraphe 2 de la Convention de Tokyo. Ce dernier vise en effet c l'autorité compétente d'un
Etat ». Certains délégués auraient voulu que l'on précisa qu'il s'agissait de l'autorité compétente
de l'Etat d'atterrissage. D'autres s'y opposèrent et la nouvelle rédaction fut adoptée pour
tenir compte des différents points de vue exprimés. Par ailleurs la Conférence n'a pas tenté
de préciser dans la Convention ce qu'il convient d'entendre par € atterrissage forcé » et de
déterminer si ce terme recouvre ou non tout atterrissage non prévu initialement au plan de
vol.
(30) Par 34 voix contre 6 avec 22 abstentions.
44 LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS

La tentative et la complicité.

Sans définir ce qu'il convient d'entendre par « tentative > et par «


complicité » la Convention couvre en son article 1er ces deux notions. Elle précise
donc que commet l'infraction toute personne qui « à bord d'un aéronef en
vol * se livre à une tentative de détournement ou se fait complice d'une telle
tentative ou d'un tel détournement.
Il résulte de cette rédaction que les complices ne sont visés par la
Convention que dans la mesure où ils se trouvent à bord de l'aéronef détourné (31) .
L'article 1er n'interdit cependant pas aux Parties contractantes de regarder
comme complices non seulement les personnes ayant ainsi participé
directement à la capture d'un aéronef, mais encore celles qui au sol ont concouru
à la préparation ou à la réalisation d'une telle capture (32) . Ce texte n'interdit
pas davantage à un Etat d'engager un procès à la fois contre les auteurs de
l'infraction et contre tous leurs complices. Mais il ne permet pas à cet Etat de
requérir l'extradition des complices au sol sur la base de la nouvelle
Convention. Une telle extradition ne peut être sollicitée et obtenue que selon les
règles du droit commun.

Le champ d'application de la Convention.

Les auteurs de la Convention ont entendu donner à celle-ci un large


champ d'application. Tout aéronef détourné est donc en principe couvert
par le texte, qu'il s'agisse d'un appareil de transport ou d'aviation générale,
utilisé à titre onéreux ou gratuit. Bien plus certaines des dispositions de
la Convention créent des droits au profit des Etats non contractants dont
les aéronefs ont été détournés vers le territoire d'une Partie contractante.
Certes ces Etats ne peuvent se réclamer des - dispositions de l'article 8
concernant l'extradition, mais ils peuvent se prévaloir des articles 1er, 2, 4
paragraphe 1er, 6 et 7 pour réclamer dans certains cas (33) l'arrestation par
l'Etat d'atterrissage de l'auteur présumé de l'infraction et la transmission du

(31) Une proposition des Pays-Bas tendant à ce que les complices au sol soient couverts
par la Convention a été rejetée par la Conférence par 35 voix contre 24 avec 11 abstentions.
(32) C'est ainsi qu'en droit français, la complicité est définie à l'article 60 du Code Pénal
en termes beaucoup plus généraux qu'à l'article 1er de la Convention.
(33) L'infraction est définie par l'article 1er indépendamment de la nationalité de l'aéronef
détourné. Elle doit dans tous les cas être réprimée de peine sévères. Par ailleurs tout Etat
contractant sur le territoire duquel se trouve l'auteur de l'infraction doit en assurer la
détention dans les conditions et sous les réserves fixées à l'article 6. Il doit avertir de cette
détention les Etats visés au paragraphe 4 dudit article, même si ces Etats n'ont pas signé la
Convention. Il doit établir sa compétence pour connaître de l'infraction dans toutes les
hypothèses visées à l'article 4 paragraphe 1er. En revanche l'article 4 paragraphe 2 ne crée à titre
subsidiaire une obligation de compétence universelle que dans les cas où il n'y a pas
extradition « conformément à l'article 8 >. Cette compétence n'a donc pas à être établie en ce
qui concerne les aéronefs immatriculés dans un Etat non contractant. Mais dans les cas où
il y a compétence, le dossier doit être transmis au Parquet ainsi qu'il est précisé à l'article 7.
LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS 45

dossier aux autorités de cet Etat compétentes pour. . l'exercice de l'action

.
pénale.
Aussi bien la Convention- en son article 3 n'exclut-elle de son champ
d'application que les aéronefs « utilisés à des fins militaires, de douane ou de
police » (34) et dans une certaine mesure ceux capturés à l'intérieur même du
pays dans lequel ils sont immatriculés.
Estimant que les détournements purement internes relèvent en effet de
la seule compétence de l'Etat concerné, le Comité juridique avait proposé
que la Convention « ne s'applique que si le lieu de décollage ou le lieu
d'atterrissage de l'aéronef à bord duquel l'infraction est commise est situé hors du
territoire de l'Etat d'immatriculation de l'aéronef». De ce fait le projet de
Convention ne couvrait par exemple pas le détournement d'un appareil
français qui, après avoir décollé d'un aéroport français, aurait été détourné
vers ce même aéroport ou vers un autre aéroport français et ce quel qu'ait
été le lieu de destination initialement prévu. En revanche le projet couvrait un
vol purement intérieur détourné vers l'étranger."
Le système ainsi proposé a été adopté par la Conférence qui a cru
cependant devoir l'assortir de certaines précisions (35) et d'une exception.
Envisageant en effet le cas dans lequel l'auteur d'un détournement purement
intérieur réussirait à s'enfuir à l'étranger, la Conférence a ajouté à l'article 3
de la Convention un paragraphe 5 précisant qu'en pareille hypothèse, les
dispositions des articles 6, 7, 8 et 10 relatives à l'arrestation, aux poursuites
et à l'extradition de l'auteur présumé de l'infraction seraient applicables (36) .

La peine.

Aux termes de l'article 2 de la Convention, «Tout Etat contractant


s'engage à réprimer l'infraction de peines sévères ».
Diverses délégations se sont efforcées au cours de la Conférence d'obtenir
que certaines précisions soient apportées à ce texte. C'est ainsi que la Pologne

(34) Ces termes sont repris de l'article 1er paragraphe 4 de la Convention de Tokyo eux-
mêmes inspirés de l'article 3 (b) de la Convention de Chicago. Le critère ainsi retenu est celui
de l'emploi. Il diffère donc de celui adopté en droit interne français par l'article L 110-2 du
Code de l'Aviation Civile qui exclut en principe de son champ d'application c les aéronefs
militaires et les aéronefs appartenant à l'Etat et exclusivement affectés à un service public ».
(35) Sur proposition de l'Union Soviétique, il a en premier lieu été ajouté à l'article 3
paragraphe 3 un membre de phrase selon lequel la règle posée joue c qu'il s'agisse d'un
aéronef en vol international ou d'un aéronef en vol intérieur ». Cette addition a été approuvée
par 42 voix contre 5 avec 16 abstentions. Par ailleurs la Délégation de la Grèce a .demandé
qu'afin d'éviter toute ambiguïté, le texte vise le lieu d'atterrissage « effectif ». Cette
proposition a été approuvée par 24 voix contre 7 avec 16 abstentions. Ces deux additions alourdissent
le texte sans en changer le sens.
(36) Le Royaume-Uni avait initialement proposé la suppression pure et simple de l'article 3
paragraphe 3. Cette suggestion se heurta à diverses objections tirées pour l'essentiel de la
souveraineté des Etats. Elle fut retirée et la Conférence, par 35 voix contre 7 avec 21
abstentions, approuva une nouvelle proposition britannique tendant à l'adoption de l'actuel article 3
paragraphe 5.
46 LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS

et l'Union Soviétique ont proposé que l'article 2 mentionne des « peines


criminelles sévères» et que la Roumanie a suggéré qu'il fasse état de «peines
sévères privatives de liberté ». L'Autriche et l'Italie ont par ailleurs demandé
que les peines applicables ne soient « pas moindres que celles dont la
législation» de l'Etat intéressé «frappe les attentats intentionnels à la vie des
personnes ».
Mais ces divers amendements se sont heurtés à un obstacle commun : la
diversité des systèmes nationaux de répression. La notion de « crime » ayant
un contenu variable selon les Etats, il était vain de croire qu'en s'y référant
on introduirait une précision supplémentaire dans la Convention. Disposer
par ailleurs que la capture illicite d'aéronefs serait sanctionnée de peines
privatives de liberté était exclure l'application de la peine capitale, à laquelle
se réfèrent certaines lois nationales telle la loi américaine. Mais à l'inverse
définir la sanction par référence à celle retenue pour le meurtre ou l'assassinat
pouvait dans divers pays conduire à rendre les auteurs de - détournement
passibles de mort, alors que le législateur national avait souhaité en pareil cas
éviter de recourir à une telle peine.
Aussi le texte de l'article 2 proposé par le Comité juridique a-t-il
finalement été adopté par la Conférence sans aucune modification (37) .

Les compétences juridictionnelles.

La Convention fixe en son article 4 les hypothèses dans lesquelles les


Etats contractants sont tenus d'établir leur compétence « aux fins de connaître
de l'infraction, ainsi que de tout autre acte de violence dirigé contre les
passagers ou l'équipage et commis par l'auteur présumé de l'infraction en
relation directe avec celle-ci» (38).
Le texte approuvé sur ce point par la Conférence va bien au-delà de
celui proposé par le Comité juridique, alors que ce dernier avait déjà adopté
une version plus contraignante que celle initialement suggérée par le sous-
comité (39). Se refusant à adopter un système d'extradition plus ou moins
automatique de l'auteur présumé de l'infraction vers l'Etat d'immatriculation
de l'aéronef, les auteurs de la Convention ont entendu s'assurer qu'il existera

(37) La proposition de la Pologne et de 1'U.R.S.S. a été rejetée par 34 voix contre 14 avec
16 abstentions; celle de la Roumanie par 34 voix contre 11 avec 16 abstentions; celle de
l'Autriche et de l'Italie par 33 voix contre 9 avec 25 abstentions.
(38) La Conférence, sur proposition de l'Autriche, a par 25 voix contre 11 avec 30
abstentions estimé qu'en vue d'assurer l'unité du procès, il convenait de couvrir à l'article 4 non
seulement l'infraction de capture illicite, mais encore certaines Infractions connexes définies
d'ailleurs de manière fort restrictive. On notera que si ces infractions sont mentionnées à
l'article 4 (compétence) et à l'article 10 (entraide judiciaire), elles ne le sont ni à l'article 7
(poursuites), ni à l'article 8 (extradition). Les obligations créées par ces derniers textes ne
concernent donc que la seule Infraction de capture illicite.
(39) Voir les documents de l'O.A.C.1. déjà cités 8838-LC/157, page 17 et 8877-LC/161,
page 13.
LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS 47

en toutes circonstances un Etat compétent pour assurer la répression du


détournement. Ils ont de ce fait multiplié à l'article 4 les cas de compétence
obligatoire. Mais ils n'ont entendu établir aucune priorité dans l'exercice de
ces compétences et ont par suite accepté les risques de poursuites et même
de condamnations multiples (40) .
L'article 4 fait en premier lieu obligation à l'Etat le plus directement
intéressé, celui d'immatriculation de l'aéronef détourné, d'établir sa
compétence en vue de connaître de l'infraction.

Cette disposition, reprise de l'article 3 de la Convention de Tokyo, n'était


pas inutile, contrairement à ce qui a été parfois soutenu. En effet, en acceptant
l'incorporation de cette clause dans la nouvelle Convention, les Etats
signataires, qu'ils soient ou non parties à la Convention de Tokyo, reconnaissaient
par là que l'Etat d'immatriculation a compétence pour réprimer les actes
visés à l'article 4 lorsque ces actes sont commis à bord de l'un de ses aéronefs
« en vol » au sens de l'article 3.
La disposition ainsi adoptée soulevait cependant des difficultés
particulières en ce qui concerne les Etats ayant constitué pour le transport aérien des
organismes , d'exploitation en commun ou des organismes internationaux
d'exploitation en application de l'article 77 de la Convention de Chicago

.
du 7 décembre 1944(41). La Convention de Tokyo avait en son article 18
réservé cette hypothèse. La nouvelle Convention va plus loin en son article 5
puisqu'elle dispose que les Etats ayant constitué de tels organismes et
exploitant des appareils faisant l'objet d'une immatriculation commune ou
internationale « désignent, pour chaque aéronef, suivant les modalités appropriées,
l'Etat qui exerce la compétence et aura les attributions de l'Etat
d'immatriculation aux fins de la présente Convention ».
Cette formule permet aux Etats intéressés, tels ceux participant à Air
Afrique, de continuer à faire immatriculer leurs aéronefs soit sur un registre
international, soit sur un registre tenu pour leur compte par l'un d'entre eux.
Elle permet également de désigner à l'avance pour chaque appareil l'Etat
participant qui sera considéré comme Etat d'immatriculation pour
l'application de la nouvelle Convention. Une telle désignation était indispensable en
cas d'immatriculation internationale, du fait de l'absence de juridiction
répressive compétente. Elle eut pu être évitée en cas d'immatriculation commune en
donnant compétence de manière permanente et générale à l'Etat qui tient le
registre d'immatriculation pour le compte de tous les Etats participants.
Mais une telle délégation de souveraineté, si elle était concevable pour la

(40) Du fait qu'afin de ne pas énerver la répression, ils se sont refusés à insérer une
clause Non bis in idem dans la Convention.
(41) Les modalités d'application de ce texte ont été fixées par le Conseil de l'O.A.C.I. par
décision du 14 décembre 1967 publiée sous le n° 8722-C-976.
48 LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS

tenue d'un registre, l'était beaucoup moins en -matière pénale. Aussi l'Etat
d'immatriculation au sens de la nouvelle Convention ne sera-t-il pas
nécessairement, en cas d'immatriculation commune, celui qui procède aux
immatriculations. Il pourra pour chaque aéronef être désigné parmi les Etats
participants en fonction des divers facteurs à prendre < en considération ' et


notamment de la nature des vols effectués.
Donner en principe compétence à l'Etat d'immatriculation de l'aéronef
pour connaître du détournement posait par ailleurs certains problèmes dans
le cas où cet aéronef est exploité par une personne qui n'en est pas
propriétaire et où de ce fait il est immatriculé dans un Etat autre que celui de
l'exploitant. Certes en pareille hypothèse, l'Etat d'immatriculation conserve
un intérêt évident à assurer la répression d'une infraction commise à bord
d'un appareil qui se déplace sous son pavillon et dont l'un de ses nationaux
est propriétaire. Mais il se peut qu'en certaines circonstances, l'Etat de
l'exploitant ait un égal intérêt à obtenir la punition du coupable. •
Aussi la Conférence a-t-elle, sur l'initiative du délégué de la Barbade(42),
ajouté à l'article 4 paragraphe 1er une disposition selon laquelle tout Etat
contractant doit prendre les mesures nécessaires «pour établir sa
compétence si l'infraction est commise à bord d'un aéronef donné en location sans
équipage à une personne qui a le siège principal de son exploitation ou, à
défaut, sa résidence permanente dans ledit Etat».
Cette disposition, nouvelle en droit aérien (43) , ne sera pas d'application
aisée, car elle fait dépendre la compétence juridictionnelle de l'existence de
contrats de location dont la preuve pourra être difficile à apporter et dont
la validité pourra être contestée. Par ailleurs en retenant les critères du
« siège principal d'exploitation » et de la « résidence permanente » de
l'exploitant, l'article 4 paragraphe 1er (c) utilise des termes sujets à interprétations
variées. Aussi peut-on penser que la Conférence n'a adopté cette clause
nouvelle que compte tenu du caractère exceptionnel de l'infraction de capture
illicite d'aéronefs. Il serait par suite souhaitable qu'une telle clause ne se
généralise pas avant qu'une expérience suffisante ait été acquise dans son
application.
En contraignant l'Etat d'immatriculation et dans certaines circonstances
l'Etat d'exploitation à établir leur compétence en vue de connaître de
l'infraction, la Convention de La Haye se borne à appliquer les principes généraux
du droit pénal : par une fiction communément acceptée, elle assimile l'aéronef
en vol au territoire de ces Etats et admet par suite que ces derniers soient
compétents pour réprimer l'infraction commise à bord.

(42) Approuvée par 43 voix contre 6 avec 24 abstentions.


(43) II avait été envisagé d'insérer une disposition analogue dans la Convention de Tokyo.
A la suite de longues discussions, cette suggestion avait cependant été écartée (voir les procès-
verbaux de la Conférence de Tokyo, document de l'O .A.C.I. n° 8565-LC/152, vol. I, p. 75,
129 et 139 et vol. II, Document n° 6).
LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS 49

Mais la Convention va plus loin en obligeant en outre l'Etat « sur le


territoire duquel l'aéronef atterrit avec l'auteur présumé de l'infraction se trouvant
encore à bord » à établir également sa compétence pour connaître de la
capture illicite ainsi opérée.
Certes en cas de détournement réussi, l'infraction se poursuit jusqu'à
l'atterrissage de l'aéronef. Elle est donc pour partie commise sur le territoire
ou à tout le moins dans l'espace aérien de l'Etat d'atterrissage dont la
compétence peut de ce fait être aisément reconnue. Mais il n'en est pas de même en
cas de détournement avorté après décollage. Toutefois les auteurs de la
Convention ont estimé que même dans ce cas l'Etat d'atterrissage devrait
être tenu d'établir sa compétence. Ainsi est assurée une double possibilité de
poursuites contre l'auteur de l'infraction, d'une part par l'Etat
d'immatriculation vers lequel l'intéressé peut être extradé et d'autre part par l'Etat
d'atterrissage.
Restait le cas dans lequel l'auteur du détournement réussirait à quitter
le territoire de l'Etat d'atterrissage sans être puni et se réfugierait sur le
territoire d'un Etat tiers.
En vue de couvrir cette hypothèse la Conférence (44) , sur proposition de
l'Espagne, a ajouté à l'article 4 un paragraphe 2 précisant à titre subsidiaire
que « tout Etat contractant prend également les mesures nécessaires pour
établir sa compétence aux fins de connaître de l'infraction dans le cas où
l'auteur présumé de celle-ci se trouve sur son territoire et où ledit Etat ne
l'extrade pas conformément à l'article 8 vers l'un des Etats visés au
paragraphe 1er du présent article ».
Cette clause ne fait pas de la capture illicite d'aéronef un « crime
international » au sens parfois donné à ce terme. Mais elle crée un système de
compétence universelle subsidiaire, analogue à ceux établis par la Convention
de Genève du 20 avril 1929 pour la répression du faux monnayage, la
Convention de Genève du 29 avril 1958 concernant la piraterie en haute-mer ou
la Convention unique sur les stupéfiants du 30 mars 1961. Elle permet donc
d'affirmer qu'en toutes circonstances il se trouvera un Etat compétent pour
connaître de l'infraction.
Enfin l'article 4 paragraphe 3, reprenant les termes de l'article 3
paragraphe 3 de la Convention de Tokyo, dispose que « la présente Convention
n'écarte aucune compétence pénale exercée conformément aux lois
nationales », que ces compétences reposent sur la nationalité de l'auteur ou de
la victime de l'infraction ou sur la circonstance que celle-ci a été commise
sur ou au-dessus du territoire de l'Etat intéressé (45) .

(44) par 34 voix contre 17 avec 12 abstentions.


(45) C'est ainsi qu'en France l'article L 121-6 du Code de l'Aviation civile précise qu*€ au
cas de crime ou de délit commis à bord d'un aéronef étranger, les tribunaux français sont
notamment c compétents si l'auteur ou la victime est de nationalité française ».
50 LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS

L'arrestation et l'enquête préliminaire.

L'article 6 de la Convention reprend certaines dispositions de l'article 13


de la Convention de Tokyo concernant l'arrestation de l'auteur ou l'auteur
présumé de l'infraction et l'enquête préliminaire menée à la suite de cette
arrestation.
Ce texte fait en principe obligation aux Parties contractantes sur le
territoire duquel se trouve l'intéressé « d'assurer sa détention ou de prendre
toutes autres mesures nécessaires pour assurer sa présence ». Cette obligation
pèse d'une part sur tout Etat sur le territoire duquel l'aéronef atterrit, en cours
de détournement ou après détournement, avec à bord l'auteur de l'infraction,
d'autre part sur tout Etat sur le territoire duquel l'intéressé pourrait par la
suite se réfugier.
Mais les Etats en cause ne sont tenus de procéder à cette arrestation que
s'ils estiment « que les circonstances le justifient », et la Conférence a repoussé
une proposition de l'Argentine et du Brésil tendant à la suppression de ces
mots (46) . L'article 6 ne crée donc aucune obligation réelle d'arrestation.
Il dispose en revanche que la détention ou les mesures de sûreté
éventuellement adoptées «ne peuvent être maintenues que pendant le délai
nécessaire à l'engagement de poursuites pénales ou d'une procédure
d'extradition ». Elles doivent être conformes à la législation de l'Etat intéressé (47) .
Celui-ci procède immédiatement à une enquête préliminaire en vue d'établir
les faits.
Les paragraphes 3 et 4 de l'article 6 énumèrent enfin les règles à suivre
par les Etats contractants en cas de détention de l'intéressé (mais non pas,
semble-t-il, si de simples mesures de sûreté sont prises à son encontre).
Selon le paragraphe 3, toute personne détenue peut communiquer
immédiatement avec le plus proche représentant qualifié de l'Etat dont elle a la
nationalité; toutes facilités lui sont accordées à cette fin (48). De ce fait
l'intéressé jouit d'une garantie plus grande que celle accordée par les
Conventions bilatérales qui le plus souvent n'autorisent la communication avec les
consuls qu'après l'expiration d'un délai de quelques jours (49).
En outre aux termes du paragraphe 4 de l'article 6, lorsqu'un Etat a mis
en détention l'auteur ou l'auteur présumé de l'infraction, il doit en aviser
immédiatement l'Etat d'immatriculation de l'aéronef, l'Etat dont l'intéressé

(46) Par 29 voix contre 23 avec 5 abstentions.


(47) La Conférence a écarté par 36 voix contre 9 avec 13 abstentions une proposition du
Brésil tendant à la suppression de cette phrase.
(48) Une proposition de l'Argentine tendant à ce que ces facilités soient subordonnées
aux règles fixées par le droit local a été re jetée par 39 voix contre 14 avec 17 abstentions.
(49) Une proposition de la Roumanie tendant à ce que les mots € d'urgence » soient
substitués au mot € immédiatement » en vue d'aligner la nouvelle Convention sur la Convention de
Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires a été écartée par 25 voix contre 18 avec
17 abstentions.
LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS 51

a la nationalité et dans certains cas l'Etat d'exploitation de l'appareil. Il


communique rapidement les résultats de l'enquête préliminaire à ces Etats et
leur indique s'il entend exercer sa compétence. Ainsi les Etats intéressés sont
mis en mesure de requérir, s'ils le souhaitent, l'extradition de la personne
en cause.

Les poursuites.

L'article 7 de la Convention relatif aux poursuites est celui qui donna


lieu tant au Comité juridique qu'à la Conférence aux débats les plus difficiles.
Il opposa d'une part les pays qui souhaitaient que tout Etat conractant après
avoir arrêté l'auteur de l'infraction soit tenu de l'extrader ou d'engager à son
encontre des poursuites judiciaires et d'autre part les Etats qui désiraient
conserver la liberté d'extradition et maintenir le principe de l'opportunité
des poursuites. Le point de vue de ces derniers l'emporta tant au Comité
juridique qu'à la Conférence, mais celle-ci modifia le texte de l'article 7
sans en changer la portée, de manière à mieux marquer que l'exercice de
l'action pénale devait être la règle et que le refus de poursuite devait avoir un
caractère d'exception.
Le Comité juridique avait proposé que l'article 7 soit rédigé de manière
comparable à l'article 6 paragraphe 2 de la Convention européenne
d'extradition du 31 décembre 1957. Il avait par suite suggéré que l'Etat qui a arrêté
l'auteur présumé de l'infraction soit mis dans l'obligation de l'extrader ou
de « soumettre l'affaire à ses autorités compétentes afin que celles-ci décident
s'il y a lieu d'engager des poursuites judiciaires ». Ces autorités devaient
prendre leur décision dans les mêmes conditions que pour toute autre
infraction, sans que le mobile politique parfois poursuivi fasse nécessairement
obstacle aux poursuites.
La Conférence a adopté une rédaction analogue selon laquelle « l'Etat
contractant sur le territoire duquel l'auteur présumé de l'infraction est
découvert, s'il n'extrade pas ce dernier, soumet l'affaire sans aucune exception
et que l'infraction ait ou non été commise sur son territoire à ses autorités
compétentes pour l'exercice de l'action pénale. Ces autorités prennent leur
décision dans les mêmes conditions que pour toute infraction de droit
commun de caractère grave conformément aux lois de cet Etat ».
Ce texte, particulièrement mal venu, est comme tout texte de ce type,
le fruit de compromis laborieux dans lesquels la correction grammaticale et
la clarté d'expression sont sacrifiées à la volonté d'aboutir. Aussi convient-il
de préciser avec soin les questions qu'il tranche et celles qu'il se garde de
résoudre.
L'article 7 crée en premier lieu pour tout Etat contractant sur le
territoire duquel l'auteur présumé de l'infraction est découvert l'obligation soit
52 LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS

d'extrader l'intéressé, soit de soumettre l'affaire au Parquet. Il affirme avec


force que cette obligation joue « sans aucune exception » et notamment que
« l'infraction ait ou non été commise sur le territoire de l'Etat en cause ».
Mais il subordonne l'obligation ainsi créée à une condition > formulée avec
quelque ambiguïté : la « découverte » de l'auteur du détournement. - Que
convient-il d'entendre par là ? S'agit-il de la simple présence de l'intéressé
dans le pays concerné ou de son arrestation suivie de détention ?
En faveur de la première interprétation on peut faire valoir que si les
auteurs de la Convention avaient voulu subordonner la . transmission du
dossier au Parquet à l'arrestation de l'intéressé, ils auraient pu aisément le
préciser en reliant l'article 7 à l'article 6 (50) . Le terme « découvert » ne peut
dans cette perspective être considéré comme équivalant au mot « arrêté ».
Mais en sens inverse, on doit noter que l'article 4 paragraphe 2 et l'article
6 paragraphe 1er de la Convention subordonnent l'institution des compétences
et l'arrestation à la seule « présence » de l'auteur présumé de l'infraction
sur le territoire de l'Etat en cause, sans exiger que l'intéressé y ait été
« découvert » (51) . Cette différence de terminologie pourrait cacher une

.
différence de fond.
Quoi qu'il en soit de ce point qui ne manquera pas de donner lieu à
controverse, l'Etat visé par l'article 7 est tenu, s'il n'extrade pas l'auteur
présumé de l'infraction, de transmettre le dossier à ses autorités compétentes
pour l'exercice de l'action pénale.
L'obligation ainsi posée est quant à elle parfaitement claire : la décision
de classement du dossier ne peut être prise par l'autorité de police. Celle-ci
doit soumettre l'affaire au Parquet. Ce dernier prend sa décision dans les
conditions fixées par les lois de l'Etat intéressé. Si cet Etat connaît le principe
de l'opportunité des poursuites, le Parquet est donc libre d'engager de telles
poursuites ou d'y renoncer (52) .

(50) Comme le faisait d'ailleurs le projet du Comité juridique (voir le document de


l'O.A.C.I. 8877-LC/161, page 14).
(51) Le texte anglais est encore plus net puisqu'il mentionne dans un cas l'hypothèse où
l'auteur présumé de l'infraction c is present », dans l'autre celui où « he is found ». Il en est
de même en russe puisque dans un cas le mot employé est « HaxOAHTCH » et dans l'autre
« OKa3BIBaeTCH »• En revanche dans la version espagnole l'article 4 paragraphe 2 et l'article 7
utilisent les mots « se halle » ou c sea hallado » alors que l'article 6 retient le verbe c se
encuentre ».

<

i52) A cet égard le texte français est particulièrement clair puisqu'il vise dans la
première phrase de l'article 7 « les autorités compétentes pour l'exercice de l'action pénale »,
sans placer de virgule entre le mot « compétentes » et le membre de phrase « pour l'exercice
de l'action pénale ». Les versions anglaise et espagnole ne laissent pas davantage la place au
doute car la première précise que l'Etat intéressé devra c submit the case to its competent
authorities for the purpose of prosecution », et la seconde adopte une rédaction comparable.
Le délégué du Royaume-Uni a d'ailleurs déclaré à la Conférence que le texte ainsi rédigé
sauvegardait le principe de l'opportunité des poursuites. Il n'a pas été contredit et à la
suite de cette déclaration une proposition chilienne tendant à revenir au texte initial de
l'article 7 fut jugée par beaucoup sans objet et écartée pour ce motif par 41 voix contre 22
avec 11 abstentions.
LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS 53

Reste la phrase sybilline figurant à la fin de l'article et selon laquelle les


autorités compétentes prennent la décision de poursuivre ou de ne pas
poursuivre « dans les mêmes conditions que ■ pour toute infraction de droit
commun de caractère grave ». Dans une première version soumise à la
Conférence cette phrase précisait que la décision en , cause était prise dans les
mêmes conditions que pour toute « autre » infraction de droit commun de
caractère grave. L'usage du mot « autre » impliquait que la capture illicite
d'aéronef était en toutes circonstances une infraction de droit commun et
cette affirmation pouvait avoir certaines conséquences en matière de
compétence juridictionnelle et d'extradition. Aussi la Conférence a-t-elle finalement
décidé de faire disparaître ce mot (53) . Du fait de cette suppression,
l'infraction visée par la Convention n'est plus nécessairement une infraction de
droit commun. Elle peut en certaines circonstances avoir ce caractère et le
perdre en d'autres cas.
Mais si la capture illicite d'aéronefs n'entre pas conventionnellement dans
la catégorie des infractions de droit commun elle n'en doit pas moins en vertu
de l'article 7 être assimilée à une telle infraction pour la détermination des
conditions dans lesquelles le Parquet décide de prendre ou non l'initiative
des poursuites. Il en résulte que ces poursuites peuvent être engagées même
dans les cas où le détournement a eu des mobiles politiques; en revanche et,
sauf constitution de partie civile, l'affaire peut être classée par le Parquet
par le motif que des mobiles de ce type ont été à l'origine de la capture.

L'extradition.

L'extradition est l'un des domaines dans lesquels les Etats et notamment
ceux ayant une longue tradition d'asile politique sont les plus jaloux de leur
souveraineté. Aussi ne doit-on pas s'étonner du fait que si la Convention de
La Haye fait en certaines circonstances de la capture illicite d'aéronefs une
infraction susceptible d'extradition, elle ne crée aucun mécanisme
automatique d'extradition vers l'Etat d'immatriculation, ni même aucune priorité
d'extradition au profit de cet Etat (54). Elle se borne donc à reprendre les
dispositions relatives à l'extradition qui figurent dans de nombreuses
conventions pénales à vocation universelle telles celle du 20 avril 1929 sur le faux
monnayage ou celle du 30 mars 1961 sur les stupéfiants.
Le paragraphe 1er de l'article 8 dispose en premier lieu que « l'infraction
est de plein droit comprise comme cas d'extradition dans tout traité
d'extradition conclu entre Etats contractants». En réalité, les traités d'extradition
sont de deux types. Les uns, tels la Convention européenne d'extradition du

(53) Par 28 voix contre 26 avec 10 abstentions.


(54) Deux propositions en ce sens furent faites par la Pologne et l'Union Soviétique. Elles
furent rejetées par la Conférence par 39 voix contre 12 avec 10 abstentions (automaticité) et
47 voix contre 10 avec 8 abstentions (priorité) .
54 LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS

31 décembre 1957, précisent que sont susceptibles d'extradition les infractions


punies d'une peine d'une certaine gravité (par exemple au moins une année
d'emprisonnement). La capture illicite d'aéronefs, du jour où elle aura été
constituée en infraction dans les Etats parties à ces traités, deviendra
automatiquement susceptible d'extradition entre ces Etats. Par contre, certains
traités bilatéraux, souvent anciens énumèrent limitativement les infractions
susceptibles d'extradition. Ces traités auraient dû être révisés en vue d'ajouter
à ces listes la capture illicite d'aéronefs (55) . La première phrase de l'article 8
paragraphe 1er de la Convention permet d'éviter une telle révision en
affirmant que de plein droit la nouvelle infraction doit être regardée comme
figurant sur les listes ainsi établies.
L'article 8 paragraphe 1er se poursuit en précisant que «les Etats
contractants s'engagent à comprendre l'infraction comme cas d'extradition
dans tout traité d'extradition à conclure entre eux ».
En vue de rendre en toutes circonstances la capture illicite d'aéronefs
susceptible d'extradition, il convenait en outre de couvrir les cas dans lesquels
aucun traité d'extradition n'avait été conclu entre Etats contractants et où il
n'était pas envisagé d'en conclure. Ce problème se posait de manière très
différente selon les Etats. En- effet certains d'entre eux, comme la France,
ne subordonnent pas l'extradition à l'existence d'un traité et acceptent en
l'absence d'un tel traité d'extrader une personne dans les conditions fixées
par leur droit interne. Ces Etats pouvaient s'engager conventionnellement à
modifier, si besoin était, leur législation afin de rendre en toutes circonstances
l'infraction susceptible d'extradition. En revanche, certains autres Etats, tels
les Etats-Unis ou l'Angleterre, subordonnent dans tous les cas l'extradition
à l'existence d'un traité. Ils sont donc dans l'impossibilité d'extrader une
personne vers un Etat avec lequel ils n'ont pas conclu un tel traité.
Deux solutions pouvaient être trouvées à ce problème : contraindre les
Etats en cause à négocier des traités sur une base universelle; faire de la
nouvelle Convention un véritable traité d'extradition. La délégation des Pays-
Bas suggéra que cette dernière formule soit retenue et proposa par voie de
conséquence qu'un paragraphe 2 soit ajouté à l'article 8 selon lequel « Si un
Etat contractant qui subordonne l'extradition à l'existence d'un traité est
saisi d'une demande d'extradition par un autre Etat contractant avec lequel
il n'est pas lié par un traité d'extradition, il considère la présente Convention
comme valant traité d'extradition en ce qui concerne l'infraction. L'extradition
est subordonnée aux autres conditions prévues par le droit de l'Etat requis ».
Mais cette proposition heurtait certaines traditions juridiques et
impliquait pour les Etats concernés l'élaboration d'un droit interne de l'extradition.

(55) Ainsi la Convention d'extradition entre la France et les Etats-Unis d'Amérique du


6 janvier 1909 a été révisée le 12 février 1970 en vue de couvrir c le fait de s'emparer ou
d'exercer le contrôle d'un aéronef par violence ou menace de violence » (voir la loi du
25 novembre 1970 publiée au journal officiel du 26 novembre 1970).
LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS 55

Elle suscita de vives objections de la part de certains de ces Etats et fut


finalement écartée (56). La Convention en son article 8 paragraphe 2 donne
seulement aux Etats en cause la latitude de la regarder comme constituant
la base juridique de l'extradition. Elle ne leur en fait pas obligation.
Dès lors et en application du principe de réciprocité les Etats qui rie
subordonnent pas l'extradition à l'existence d'un traité ne pouvaient plus
accepter de rendre l'infraction susceptible d'extradition dans leurs rapports
avec les Etats avec lesquels ils n'avaient pas de traité. L'article 8 paragraphe 3
fut modifié en conséquence en vue de préciser qu'en l'absence de traité ces
Etats reconnaissent seulement entre eux l'infraction comme cas d'extradition.
Il est sans doute malheureux que la proposition néerlandaise n'ait pu
être adoptée. Mais il faut reconnaître que cette proposition impliquait pour
les pays concernés un bouleversement assez profond de leur droit de
l'extradition. Le texte finalement approuvé, s'il laisse subsister une lacune, n'en
marque pas moins un progrès par rapport à toutes les Conventions existant
en ce domaine.

La prévention des détournements et les mesures à prendre à la suite de


ceux-ci.

L'article 9 de la Convention reprend presque textuellement les dispositions


de l'article 11 de la Convention de Tokyo en précisant que lorsque le
détournement « est accompli ou sur le point de l'être, les Etats contractants prennent
toutes mesures appropriées pour restituer ou conserver le contrôle de l'aéronef
au commandant légitime ». En pareille hypothèse « tout Etat contractant sur le
territoire duquel se trouvent l'aéronef, les passagers ou l'équipage facilite aux
passagers et à l'équipage la poursuite de leur voyage aussitôt que possible.
Il restitue sans retard l'aéronef et sa cargaison à ceux qui ont le droit de les
détenir » (57) . L'incorporation de ce texte dans la nouvelle Convention
permettra de généraliser les obligations formulées sur ce point par la Convention
de Tokyo, mais elle ralentira probablement le mouvement de ratification qui
s'était dessiné dans les dernières années en faveur de cette dernière
Convention (58).

(56) Par 33 voix contre 21 avec 22 abstentions.


(57) Ce texte ne diffère de la Convention de Tokyo que sur des points mineurs. Il ne vise
pas en son début la simple gêne apportée à l'exploitation de l'aéronef. Par ailleurs le deuxième
paragraphe met diverses obligations de restitution à la charge non seulement de l'Etat
d'atterrissage, mais de tout Etat contractant. Enfin ces Etats ne doivent pas seulement « permettre »
aux passagers et à l'équipage de poursuivre leur voyage, mais encore c faciliter > cette
poursuite.
(58) On notera par ailleurs que la Convention de La Haye ne réglemente ni la fouille des
passagers et des bagages, ni le port d'armes à bord des aéronefs, ni la présence éventuelle de
gardes armés dans les avions. Ces mesures ont en effet une portée qui dépasse le problème des
détournements d'aéronefs. Elles sont à l'heure actuelle à l'étude au sein de l'O.A.C.1.
56 LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS

L'entraide judiciaire.

L'article 10 prévoit que les Etats contractants s'accordent l'entraide


judiciaire la plus large possible. La loi applicable pour l'exécution d'une demande
d'entraide est, comme il est de droit, celle de l'Etat requis.

La communication de renseignements à l'Organisation de l'Aviation Civile


Internationale.

Tout Etat contractant s'engage en vertu de l'article 11 à communiquer


aussi rapidement que possible au Conseil de l'O.A.C.1. tous renseignements
utiles en sa possession relatifs aux circonstances de l'infraction, aux mesures
prises en application de l'article 9 de la Convention et aux mesures prises
à l'égard de l'auteur présumé de l'infraction; Ces renseignements sont fournis
dans tous les cas, sans que l'O.A.C.1. ait à en solliciter la production; mais ils
le sont « en conformité avec les dispositions de la législation nationale
applicable », et notamment dans le respect du secret de l'instruction. Ce texte
devrait permettre à l'O.A.C.1. de réunir des informations nombreuses dont la
diffusion systématique facilitera l'élaboration des politiques nationales de
prévention et de répression des détournements d'aéronefs (59).

Les clauses diplomatiques.

L'article 12 relatif au règlement des différends est repris de l'article 24


de la Convention de Tokyo. Il peut faire l'objet de réserves. De telles réserves
ont été formulées lors de la signature par le Guatemala, la Biélorussie,
l'Ukraine et l'Union Soviétique.
Conformément à l'article 48 de la Convention de Vienne sur les relations
diplomatiques du 18 avril 1961, la plupart des Conventions internationales
sont aujourd'hui ouvertes à la signature de tout Etat membre de l'Organisation
des Nations Unies ou d'une Institution spécialisée ou partie au statut de la
Cour Internationale de Justice et de tout autre Etat invité à cet effet par
l'Assemblée générale des Nations Unies (60) . Cependant quelques Conventions
intervenues récemment en matière nucléaire ou en ce qui concerne l'espace
extra-atmosphérique ont été ouvertes à la signature de tous les Etats (61).

(59) Voir aussi la résolution du Conseil de l'O.A.C.1. du 10 avril 1969 sur l'intervention
illicite dans l'aviation civile internationale et ses installations et services (Document de
l'O.A.C.I.-8849-C/990).
(60) Une formule plus récente ajoute à cette liste les Etats membres de l'agence
internationale de l'énergie atomique.
(61) II en a notamment été ainsi du traité interdisant les essais d'armes nucléaires dans
l'atmosphère, dans l'espace extra-atmosphérique et sous l'eau, signé le 25 juillet 1961, du traité
sur les principes régissant les activités des Etats en matière d'exploration et d'utilisation de
l'espace extra-atmosphérique, y compris la lune et les autres corps célestes signé le 27 janvier
1967 et du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires signé le 1er juillet 1968.
LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS 57

La Conférence a adopté une formule intermédiaire en ce qui concerne


la : Convention de La Haye. Compte tenu du but poursuivi il a en effet été
entendu que tous les Etats pourraient devenir parties au nouveau traité. Mais
celui-ci n'a été le 16 décembre 1970 ouvert à la signature que des seuls Etats
ayant participé à la Conférence. Ce n'est qu'au 1er janvier 1971 qu'elle a pu
être signée par d'autres Etats.
Par ailleurs la Convention n'entrera en vigueur que trente jours après
dépôt des instruments de ratification de dix Etats ayant été présents à la
Conférence. La ratification des autres Etats signataires n'est donc pas prise
en considération dans le décompte des ratifications nécessaires à l'entrée en
vigueur.
La formule ainsi retenue ne permettait pas à l'O.A.C.I. de devenir
dépositaire de la Convention, comme elle l'avait été de la Convention de
Tokyo. Aussi a-t-il été convenu que . cette tâche serait assurée par les
gouvernements américain, britannique et soviétique.
Dans le passé, les Conventions de droit aérien élaborées sous l'égide de
l'O.A.C.L étaient rédigées en langue française, anglaise et espagnole et les
trois versions faisaient également foi. Du fait de l'adhésion donnée par
l'Union Soviétique à l'O.A.C.I. à compter du 15 novembre 1970, la nouvelle
Convention comporte en outre une version en langue russe ayant en droit
même valeur que les autres. Mais cette version présentée au cours de la
Conférence par la délégation soviétique n'a de ce fait pu faire l'objet d'aucun
débat.

Conclusion.

Les détournements d'aéronefs se sont développés dans les dix dernières


années pour des motifs variés et dans des régions diverses du globe. En vue de
lutter contre ces détournements, les gouvernements, les transporteurs et les
syndicats ont estimé nécessaire que soit élaboré un droit nouveau tant sur le
plan national que sur le plan international. La Convention de La Haye
marque une étape décisive dans le développement de ce droit.
Sans doute ne va-t-elle pas jusqu'à adopter les solutions extrêmes
préconisées par certains. Ces solutions, caractérisées par l'automaticité des
arrestations, des poursuites et des extraditions, auraient certes dans l'abstrait
été de nature à mettre un terme au développement de cette forme nouvelle
de criminalité. Mais en fait elles n'auraient pu être acceptées que par un
très petit nombre de pays et n'auraient par suite été que d'un faible secours
dans la lutte contre les détournements.
Au contraire, la nouvelle Convention a pu dès la clôture de la Conférence
de La Haye être signée par cinquante pays. Cette large adhésion n'a par
ailleurs pas été acquise au prix d'un renoncement aux buts poursuivis. En effet
58 LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS

les Etats signataires s'engagent à réprimer sévèrement l'infraction et à


établir leur compétence de telle manière qu'il est certain qu'il existera
toujours des juridictions compétentes pour juger les auteurs de captures illicites.
Des possibilités nouvelles sont en outre offertes en vue de faciliter la
détention, la poursuite et l'extradition des intéressés.
Le reste est affaire de volonté politique. Les Etats ont désormais les
moyens nécessaires pour agir. Encore faut-il qu'ils utilisent ces moyens,
que les gouvernements arrêtent rapidement les auteurs des détournements,
que les juges les condamnent à des peines appropriées et que ces peines soient
purgées, quelles que soient les difficultés rencontrées.

CONVENTION POUR LA REPRESSION


DE LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS

PREAMBULE

Les Etats parties a la présente convention,

Considérant que les actes illicites de capture ou d'exercice du contrôle d'aéronefs


en vol compromettent la sécurité des personnes et des biens, gênent sérieusement
l'exploitation des services aériens et minent la confiance des peuples du monde dans la
sécurité de l'aviation civile,
Considérant que de tels actes les préoccupent gravement,
Considérant que, dans le but de prévenir ces actes, il est urgent de prévoir des
mesures appropriées en vue de la punition de leurs auteurs,

Sont convenus des dispositions suivantes :

Article premier. — Commet une infraction pénale (ci-après dénommée «


l'infraction ») toute personne qui, à bord d'un aéronef en vol,
a) illicitement et par violence ou menace de violence s'empare de cet aéronef ou
en exerce le contrôle ou tente de commetre l'un de ces actes, ou
b) est le complice d'une personne qui commet ou tente de commettre l'un de ces
actes.
Article 2. — Tout Etat contractant s'engage à réprimer l'infraction de peines sévères.
Article 3. — 1. Aux fins de la présente convention, un aéronef est considéré comme
en vol depuis le moment où, l'embarquement étant terminé, toutes ses portes extérieures
ont été fermées jusqu'au moment où l'une de ces portes est ouverte en vue du
débarquement. En cas d'atterrissage forcé, le vol est censé se poursuivre jusqu'à ce que
l'autorité compétente prenne en charge l'aéronef ainsi que les personnes et biens à bord.
2. La présente convention ne s'applique pas aux aéronefs utilisés à des fins
militaires, de douane ou de police.
3. La présente convention ne s'applique que si le lieu de décollage ou le lieu d'atter-
LA CAPTURE ILLICITE d'aÉRONEFS 59

rissage effectif de l'aéronef à bord duquel l'infraction est commise est situé hors du
territoire de l'Etat d'immatriculation de cet aéronef, qu'il s'agisse d'un aéronef en vol
international ou d'un aéronef en vol intérieur.
4. Dans les cas prévus à l'article 5, la présente convention ne s'applique pas si le
lieu de décollage et le lieu d'atterrissage effectif de l'aéronef à bord duquel l'infraction
est commise sont situés sur le territoire d'un seul des Etats mentionnés audit article.
5. Nonobstant les dispositions des paragraphes 3 et 4 du présent article, les articles
6, 7, 8 et 10 sont applicables, quel que soit le lieu de décollage ou le lieu d'atterrissage
effectif de l'aéronef, si l'auteur ou l'auteur présumé de l'infraction est découvert sur
le territoire d'un Etat autre que l'Etat d'immatriculation dudit aéronef.
Article 4. — 1. Tout Etat contractant prend les mesures nécessaires pour établir sa
compétence aux fins de connaître de l'infraction, ainsi que de tout autre cas de
violence dirigé contre les passagers ou l'équipage et commis par l'auteur présumé de
l'infraction en relation directe avec celle-ci, dans les cas suivants :
a) si elle est commise à bord d'un aéronef immatriculé dans cet Etat;
b) si l'aéronef à bord duquel l'infraction est commise atterrit sur son territoire avec
l'auteur présumé de l'infraction se trouvant encore à bord;
c) si l'infraction est commise à bord d'un aéronef donné en location sans équipage
à une personne qui a le siège principal de son exploitation ou, à défaut, sa résidence
permanente dans ledit Etat.
2. Tout Etat contractant prend également les mesures nécessaires pour établir sa
compétence aux fins de connaître de l'infraction dans le cas où l'auteur présumé de
celle-ci se trouve sur son territoire et où ledit Etat ne l'extrade pas conformément à
l'article 8 vers l'un des Etats visés au paragraphe 1er du présent article.
3. La présente convention n'écarte aucune compétence pénale exercée conformément
aux lois nationales.
Article 5. — Les Etats contractants qui constituent pour le transport aérien des
organisations d'exploitation en commun ou des organismes internationaux d'exploitation
et qui exploitent des aéronefs faisant l'objet d'une immatriculation commune ou
internationale désignent, pour chaque aéronef, suivant les modalités appropriées, l'Etat qui
exerce la compétence et aura les attributions de l'Etat d'immatriculation aux fins de la
présente convention. Ils aviseront de cette désignation l'Organisation de l'Aviation
civile internationale, qui en informera tous les Etats Parties à la présente convention.
Article 6. — 1. S'il estime que les circonstances le justifient, tout Etat contractant
sur le territoire duquel se trouve l'auteur ou l'auteur présumé de l'infraction assure la
détention de cette personne ou prend toutes autres mesures nécessaires pour assurer
sa présence. Cette détention et ces mesures doivent être conformes à la législation
dudit Etat; elles ne peuvent être maintenues que pendant le délai nécessaire à
l'engagement de poursuites pénales ou d'une procédure d'extradition.
2. Ledit Etat procède immédiatement à une enquête préliminaire en vue d'établir les
faits.
3. Toute personne détenue en application du paragraphe 1er du présent article peut
communiquer immédiatement avec le plus proche représentant qualifié de l'Etat dont
elle a la nationalité; toutes facilités lui sont accordées à cette fin.
4. Lorsqu'un Etat a mis une personne en détention conformément aux dispositions
du présent article, il avise immédiatement de cette détention, ainsi que des circonstances
qui la justifient, l'Etat d'immatriculation de l'aéronef, l'Etat mentionné à l'article 4,
paragraphe 1er, alinéa c. l'Etat dont la personne détenue a la nationalité et, s'il le
juge opportun, tous autres Etats intéressés. L'Etat qui procède à l'enquête préliminaire
visée au paragraphe 2 du présent article en communique rapidement les conclusions
auxdits Etats et leur indique s'il entend exercer sa compétence.
Article 7. — L'Etat contractant sur le territoire duquel l'auteur présumé de
l'infraction est découvert, s'il n'extrade pas ce dernier, soumet l'affaire, sans aucune exception
et que l'infraction ait ou non été commise sur son territoire, à ses autorités compétentes
pour l'exercice de l'action pénale. Ces autorités prennent leur décision dans les mêmes
60 LA CAPTURE ILLICITE D'AÉRONEFS

conditions que pour toute infraction de droit commun de caractère grave conformément
aux lois de cet Etat.
Article 8. — 1. L'infraction est de plein droit comprise comme cas d'extradition dans
tout traité d'extradition conclu entre Etats contractants. Les Etats contractants s'engagent
à comprendre l'infraction comme cas d'extradition dans tout traité d'extradition à
conclure entre eux.
2. Si un Etat contractant qui subordonne l'extradition à l'existence d'un traité est
saisi d'une demande d'extradition par un autre Etat contractant avec lequel il n'est
pas lié par un traité d'extradition, il a la latitude de considérer la présente convention
comme constituant la base juridique de l'extradition en ce qui concerne l'infraction.
L'extradition est subordonnée aux autres conditions prévues par le droit de l'Etat
requis.
3. Les Etats contractants qui ne subordonnent pas l'extradition à l'existence d'un
traité reconnaissent l'infraction comme cas d'extradition entre eux dans les conditions
prévues par le droit de l'Etat requis.
4. Entre Etats contractants, l'infraction est considérée aux fins d'extradition comme
ayant été commise tant au lieu de sa perpétration que sur le territoire des Etats tenus
d'établir leur compétence en vertu de l'article 4, paragraphe 1.
Article 9. — 1. Lorsque l'un des actes prévus à l'article 1er, alinéa a, est accompli ou
sur le point d'être accompli, les Etats contractants prennent toutes mesures appropriées
pour restituer ou conserver le contrôle de l'aéronef au commandant légitime.
2. Dans les cas visés au paragraphe précédent, tout Etat contractant sur le territoire
duquel se trouvent l'aéronef, les passagers ou l'équipage facilite aux passagers et à
l'équipage la poursuite de leur voyage aussitôt que possible. Il restitue sans retard
l'aéronef et sa cargaison à ceux qui ont le droit de les détenir.
Article 10. — 1. Les Etats contractants s'accordent l'entraide judiciaire la plus large
possible dans toute procédure pénale relative à l'infraction et aux autres actes visés
à l'article 4. Dans tous les cas, la loi applicable pour l'exécution d'une demande
d'entraide est celle de l'Etat requis.
2. Toutefois, les dispositions du paragraphe 1er du présent article n'affectent pas les
obligations découlant des dispositions de tout autre traité de caractère bilatéral ou
multilatéral qui régit ou régira, en tout ou en partie, le domaine de l'entraide judiciaire
en matière pénale.
Article 11. — Tout Etat contractant communique aussi rapidement que possible
au Conseil de l'Organisation de l'Aviation civile internationale, en conformité avec les
dispositions de sa législation nationale, tous renseignements utiles en sa possession
relatifs :
a) aux circonstances de l'infraction;
b) aux mesures prises en application de l'article 9;
c) aux mesures prises à l'égard de l'auteur ou de l'auteur présumé de
l'infraction et notamment au résultat de toute procédure d'extradition ou de toute autre
procédure judiciaire.
Article 12. — 1. Tout différend entre des Etats contractants concernant
l'interprétation ou l'application de la présente convention qui ne peut pas être réglé par voie
de négociation est soumis à l'arbitrage, à la demande de l'un d'entre eux. Si, dans les
six mois qui suivent la date de la demande d'arbitrage, les Parties ne parviennent pas
à se mettre d'accord sur l'organisation de l'arbitrage, l'une quelconque d'entre elles
peut soumettre le différend à la Cour internationale de Justice, en déposant une requête
conformément au Statut de la Cour.
2. Chaque Etat pourra, au moment où il signera ou ratifiera la présente convention
ou y adhérera, déclarer qu'il ne se considère pas lié par les dispositions du paragraphe
précédent. Les autres Etats contractants ne seront pas liés par lesdites dispositions envers
tout Etat contractant qui aura formulé une telle réserve.
3. Tout Etat contractant qui aura formulé une réserve conformément aux disposi-
LA CAPTURE ILLICITE D'AERONEFS 61

tions du paragraphe précédent pourra à tout moment lever cette réserve par une
notification adressée aux gouvernements dépositaires.
Article 13. — 1. La présente convention sera ouverte le 16 décembre 1970 à La Haye
à la signature des Etats participant à la Conférence internationale de droit aérien tenue
à La Haye du 1er au 16 décembre 1970 (ci-après dénommée «la Conférence de La Haye»).
Après le 31 décembre 1970, elle sera ouverte à la signature de tous les Etats à Washington,
à Londres et à Moscou. Tout Etat qui n'aura pas signé la convention avant qu'elle soit
entrée en vigueur conformément au paragraphe 3 du présent article pourra y adhérer
à tout moment.
2. La présente convention est soumise à la ratification des Etats signataires. Les
instruments de ratification ainsi que les instruments d'adhésion seront déposés auprès
des gouvernements des Etats-Unis d'Amérique, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne
et d'Irlande du Nord et de l'Union des Républiques socialistes soviétiques, qui sont
désignés par les présentes comme gouvernements dépositaires.
3. La présente convention entrera en vigueur trente jours après la date du dépôt
des instruments de ratification de dix Etats signataires qui ont participé à la Conférence
de La Haye.
4. Pour les autres Etats, la présente convention entrera en vigueur à la date de
son entrée en vigueur conformément au paragraphe 3 du présent article ou trente jours
après la date du dépôt de leurs instruments de ratification ou d'adhésion, si cette
seconde date est postérieure à la première.
5. — Les gouvernements dépositaires informeront rapidement tous les Etats qui
signeront la présente convention ou y adhéreront de la date de chaque signature, de la
date du dépôt de chaque instrument de ratification ou d'adhésion, de la date d'entrée
en vigueur de la présente convention ainsi que de toutes autres communications.
6. Dès son entrée en vigueur, la présente convention sera enregistrée par les
gouvernements dépositaires conformément aux dispositions de l'Article 102 de la Charte
des Nations Unies et conformément aux dispositions de l'Article 83 de la Convention
relative à l'Aviation civile internationale (Chicago, 1944).
Article 14. — 1. Tout Etat contractant peut dénoncer la présente convention par
voie de notification écrite adressée aux gouvernements dépositaires.
2. La dénonciation prendra effet six mois après la date à laquelle la notification
aura été reçue par les gouvernements dépositaires.
En foi de quoi les Plénipotentiaires soussignés, dûment autorisés, ont signé la
présente convention.
Fait à La Haye, le seizième jour du mois de décembre de l'an mil neuf cent soixante-
dix, en trois exemplaires originaux comprenant chacun quatre textes authentiques
rédigés dans les langues française, anglaise, espagnole et russe.

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