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U E NCE Se raconter, se représenter


S ÉQ

p. 12-34

•Pourquoi se raconter ?
O Quelles sont les stratégies d’écriture pour parler de soi ?

Objectifs • Léon Tolstoï, Enfance et Adolescence [1852-1855],


Le Livre de poche jeunesse, 2012.
• Découvrir différentes formes de l’écriture de soi.
• Georges Perec, W ou le souvenir d’enfance [1975],
• Comprendre les raisons qui poussent à se raconter. Gallimard, « Folio », 1995.
• Percevoir l’effort de saisie de soi et de recherche de L’étude pourrait être étendue à quelques bandes
la vérité. dessinées, autre forme d’expression du genre
autobiographique. On peut citer par exemple :
Présentation de la séquence • Art Spiegelman, Maus, Flammarion, 1998.
« Se raconter, se représenter » est l’une des cinq • Marjane Satrapi, Persepolis, L’Association, 2002.
grandes entrées du programme de français 3e et • Sylvain Savoia et Marzena Sowa, Marzi, La Pologne vue
celui-ci préconise d’étudier « des extraits d’œuvres par les yeux d’une enfant, Dupuis, 2008.
de différents siècles et genres, relevant de diverses
formes du récit de soi », ce que propose cette Site à consulter
séquence à travers un groupement de textes • lewebpedagogique.com/la-bande-dessinee-
variés, allant du xviie siècle à nos jours. Pourquoi autobiographique
se raconter ? Derrière cette question, les textes
choisis livrent diverses réponses : on parle de soi
pour rapporter des moments clés de sa vie, pour se
justifier, pour expliquer son besoin d’écrire, pour
rendre hommage à la mémoire des siens, pour Entrer dans la séquence p. 15
témoigner de son époque… Derrière ces réponses,
d’autres questions se posent : comment opère-t-on
La page Repères donne plusieurs pistes quant aux inten-
une sélection dans ses souvenirs, comment les
tions des auteurs choisis. Une première réflexion sur
fait-on revivre à son lecteur ?
la question posée par le titre de la séquence peut déjà
s’engager à la lecture de cette page.
Bibliographie Chateaubriand a poursuivi pendant près de quarante ans
Les auteurs d’autobiographies sont nombreux. Nous l’écriture de ses mémoires. Il les a souvent revues, complé-
suggérons, à titre d’exemple, un ensemble de lectures tées, corrigées. Il y mêle une perspective intimiste et une
cursives regroupées autour du thème de l’enfance et perspective historique. Il énonce le besoin de retourner sur
offrant une grande diversité d’écriture :
sa vie passée mais ne veut pas tout en dire. Il va d’abord
• Anny Duperey, Le Voile noir, Seuil, « Points », 1995. retourner vers son enfance puis vers ses années de collège,
• Michel Leiris, L’Âge d’homme [1939], Gallimard, « Folio », témoigner des périodes historiques qu’il a traversées
1991. (Ancien Régime, Révolution, Premier Empire, Restauration).
• Louis-Ferdinand Céline, Mort à crédit [1936], Gallimard, Malgré une organisation chronologique, l’ensemble est
« Folio », 1990. constitué d’un assemblage de récits de genres variés : anec-
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• Nathalie Sarraute, Enfance [1983], Gallimard, « Folio », dotes, lettres, témoignages, récits plus intimes… Dans cet
2011. extrait qui reproduit le tout début du livre I, Chateaubriand
fait part de ses intentions, de ce qui a pu le pousser à faire
un récit si dense de ce que fut toute sa vie.

1. Pourquoi se raconter ? 9
Définissez l’autobiographie O Comment justifier le projet autobiographique ?
1. La définition du terme « autobiographie » repose sur son
étymologie grecque : auto, qui signifie « soi-même », graphein, Découvrir le texte
qui signifie écrire, et bios, la vie. L’autobiographie est donc
1. En évoquant sa « vie intérieure », sa « vie de l’âme »,
l’écriture de sa propre vie. L’expression « récit autobiogra-
George Sand parle de cette partie de soi qui n’apparaît
phique » désigne donc une autobiographie qui passe par le
pas aux autres : l’affectivité, les pensées, l’imagination, les
genre du récit.
émotions, tout ce qui fait mûrir nos idées, une dimension
2. Chateaubriand reproche le caractère vaniteux de ceux qui
cachée qui conditionne notre vie.
se croient obligés de parler d’eux-mêmes (« conduits par la
vanité », l. 3) et la puérilité de tels écrits.
3. Pour autant, Chateaubriand décide d’écrire ses « Mémoires Analyser et interpréter le texte
d’outre-tombe ». Il explique ce paradoxe de deux façons : il L’écriture comme devoir
trouve là un moyen de se regarder sans concession, et ensuite, 2. Il peut être difficile, voire pénible de tenter de se définir, car
par souci de vérité, il ne veut pas que d’autres (des « faiseurs cela implique un regard analytique qui peut faire ressurgir des
de mémoire », l. 16-17) s’emparent de sa vie pour en dire images de soi douloureuses. C’est un difficile « voyage dans le
n’importe quoi. Une importante précision vient éclairer ce monde abstrait de l’intelligence ou du sentiment » (l. 23-24),
paradoxe : il n’avait jamais consenti à ce que ses mémoires difficulté exprimée par ce champ lexical : « malaisé » (l. 5), « un
soient publiées de son vivant – d’où le titre. devoir assez pénible » (l. 4), « cette tâche » (l. 15), « étude fasti-
dieuse » (l. 7). Ce travail reste malgré tout, pour George Sand
Écrivez un souvenir « un devoir » pour elle-même, pour regarder, étudier sa propre
4. Le but de ce court récit est essentiellement de préparer existence et mieux se connaître.
l’élève à la lecture. En essayant de se prêter au jeu de l’écriture 3. Ce travail d’écriture est aussi un devoir pour les autres,
de soi, même sur un temps circonscrit, il aura à utiliser les lois pour les encourager, leur servir de guide. Rencontrer le
du genre : choisir les temps, sélectionner dans les souvenirs, monde intérieur d’un autre permet de mieux investir, de
faire revivre les sentiments et émotions du moment… mieux comprendre le sien. L’autobiographie devient un lieu
d’échange « qui élève la pensée de celui qui raconte et de
celui qui écoute » (l. 28-30). Il s’agit aussi de combattre les
idées fausses émises par d’autres sur sa propre vie.
Le pourquoi de l’autobiographie
Lecture 1 p. 16-17 4. Plusieurs arguments sont avancés par George Sand pour
justifier sa démarche autobiographique : choisir les souve-
nirs déterminants ; mieux se connaître ; corriger les erreurs
Pourquoi écrire sur soi ? des biographes ; plonger dans sa vie intérieure ; faire parta-
ger à d’autres ce qu’on a vécu (« en vue d’un enseignement
fraternel », l. 22).
Objectif 5. Un bon autobiographe doit, selon G. Sand, faire preuve
• Comprendre comment se construit un projet autobiographique.
de beaucoup de courage, de persévérance, de « sincér[ité] »
et de « sérieux » (l. 24-25). Il doit faire l’effort de raconter sa
Ce texte se situe au tout début de l’autobiographie de « vie intérieure » (l. 20) pour devenir ainsi « un conseil et un
George Sand, pseudonyme d’Aurore Dupin. Histoire de ma guide pour les autres esprits » (l. 26).
vie est un ouvrage découpé en cinq parties qui évoquent tous 6. a. « Celui qui raconte » désigne l’auteur ; « celui qui
les pans de sa vie depuis l’histoire de sa famille paternelle écoute » désigne le lecteur. L’autobiographie devient une
jusqu’à sa carrière littéraire. On y trouve des sujets aussi sorte de don de soi.
variés que Napoléon, sa passion pour les oiseaux ou sa vie b. Cet échange entre auteur et lecteur ne peut s’exprimer
à Paris. Il sera intéressant d’aborder ce texte en premier que dans un rapport « de confiance et de sympathie » (l. 28),
car il s’inscrit dans la continuité du texte de Chateaubriand rapport dont les deux tireront profit.
en définissant le projet autobiographique comme le seul
véritable moyen de présenter les événements d’une vie de Bilan
manière authentique (contrairement à ce que pourraient L’autobiographie, selon George Sand, n’est pas uniquement
faire des « biographies pleines d’erreur »). l’évocation des souvenirs les plus marquants d’une vie, mais
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c’est aussi, et surtout, mettre au jour sa vie intérieure, ses


émotions, ses sentiments, les aspects cachés de sa person-
nalité. C’est également établir une relation privilégiée avec
le lecteur, en lui faisant partager ces sentiments.

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S’exprimer à l’oral 3. C’est donc parce qu’il ne va pas tout dire de lui qu’il dit ne
Débattre pas écrire une autobiographie. Il ne laissera apparaître que
ce que sa mémoire n’a jamais pu oublier. Il affirme cepen-
7. La lecture de la page Repères (p. 14) pourra servir de support
dant ne jamais trahir la réalité (« Tous sont véridiques »,
à ce débat puisqu’on peut y entrevoir les raisons qui ont poussé
l. 13).
chaque auteur à écrire sa propre vie. La question « Que faire
4. « Aucun », (l. 5) « chacun d’entre eux » (répété deux fois,
partager de soi et pourquoi ? » appelle des réponses différentes
l. 6-7) « certains » (répété trois fois, l. 11-12), « tous » (l. 13) :
et repose sur des enjeux différents (rétablir une vérité, témoi-
tous ces mots, qui appartiennent à la catégorie grammaticale
gner d’une époque, rendre compte d’une passion…).
des pronoms indéfinis, montrent de quelle manière sélective
POUR BIEN ÉCRIRE l’auteur les a classés.
La phrase à compléter est : il s’y rend tous les jours. Un projet sélectif
L’HISTOIRE DES MOTS 5. Les souvenirs retenus sont tous « mémorables » (l. 11,
Dans cette phrase, on peut remplacer « stimule » par : Le grand texte 2) ; et, parmi eux, il y a les « plaisants », les « drôles »,
air aiguise l’appétit. les « douloureux » (l. 12, texte 1). Son projet d’écriture est
donc de remonter à leur source, de les faire surgir à nouveau.
6. Roald Dahl traite de deux grandes époques de sa vie : son
enfance (dans la première partie Moi Boy : souvenirs d’enfance)
puis sa vie de pilote pendant la seconde guerre mondiale
Lecture 2 p. 18-19 (Escadrille 80). La plus dense semble être la seconde partie
puisqu’il affirme n’avoir rien éliminé : « chaque moment a
été, pour moi du moins, totalement exaltant » (l. 17-18).
Les péripéties 7. Pour intéresser le lecteur, l’auteur/narrateur doit faire
appel à des situations qui éveilleront son intérêt par leur
de l’autobiographie aspect inattendu, dramatique ou, au contraire drôle, des
situations qui provoquent une émotion partagée. On pourra
suggérer aux élèves de s’appuyer sur les deux textes de
Objectif Roald Dahl pour répondre.
• Identifier les éléments du pacte autobiographique.

Bilan
Comme d’autres auteurs (voir l’exemple de Chateaubriand), Une autobiographie selon Roald Dahl consiste en l’évocation
Roald Dahl rédige son autobiographie en suivant la chrono- « de moments mémorables », que la mémoire a conservés
logie des événements de sa vie. Il scinde ses souvenirs en quasiment intacts. Cette évocation amène à un tri qui
deux récits : un premier dans lequel il évoque ses souvenirs consiste à éliminer tout ce qui n’est pas passionnant et
d’enfance marquants et un second qui retrace essentiellement n’intéressera pas le lecteur.
ses souvenirs de pilote de guerre. Chacun de ces deux récits
est précédé d’une adresse au lecteur dans laquelle il justifie Vers le brevet
ses choix d’écriture. Raconter un souvenir avec humour
8. La lecture de Moi Boy : souvenirs d’enfance, ou le choix de
O Quelle définition de l’autobiographie Roald Dahl quelques extraits pourra servir de modèle pour les élèves
propose-t-il dans ces extraits ? plus en difficulté, modèle à la fois pour le contenu mais aussi
pour l’écriture (et notamment le traitement humoristique de
Découvrir les textes plusieurs scènes d’enfance).
1. Le projet affirmé de Roald Dahl est de faire revivre tous ses L’évaluation tiendra compte des critères suivants :
souvenirs anecdotiques ou importants que sa mémoire n’a – le cadre spatio-temporel de l’action sera clairement posé ;
jamais pu effacer – souvenirs qui lui permettent de parcourir – les circonstances dans lesquelles l’incident s’est déroulé
à nouveau de grandes étapes de sa vie : son enfance, sa vie seront décrites précisément ;
en Afrique, sa vie de pilote de guerre. – le récit sera fait avec humour ;
– le texte sera rédigé au présent de narration.
Un groupement de textes traitant avec humour de souve-
Analyser et interpréter les textes nirs d’enfance (R. Dahl, Perec, ou même quelques planches
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Un projet paradoxal extraites de la bande dessinée Marzi citée ci-dessus) pourra


2. Roald Dahl déplore le caractère souvent ennuyeux d’auto- servir de déclencheur voire même de support d’apprentis-
biographies qui retracent « toutes sortes de détails fastidieux » sage pour s’approprier quelques techniques d’écriture.
(l. 2 p. 18) d’une vie.

1. Pourquoi se raconter ? 11
L’HISTOIRE DES MOTS marque l’intensité de la scène que l’auteur raconte comme
On parlera d’incident pour un fait mineur alors qu’accident (de s’il la vivait une seconde fois.
accidere, « survenir ») désignera un évènement fâcheux ou mal- b. Ces phrases sont une succession de propositions indé-
heureux, qui a une conséquence plus grave. L’idée d’inattendu pendantes juxtaposées très brèves, donnant à l’ensemble
est le point commun entre ces deux noms.
un rythme très saccadé et montrant l’enchaînement rapide
des événements.
4. « Exécution » (l. 13), « mes sens dépravés » (l. 15), « j’au-
rais souffert la mort » (l. 18), « diabolique entêtement (l. 19),
Lecture 3 p. 20-21
« cruelle épreuve » (l. 21) sont autant d’expressions hyper-
boliques qui veulent souligner la force destructrice de ce
souvenir, et montrer l’importance de son impact sur toute
Un souvenir douloureux une vie.
Clamer son innocence
5. Jamais les adultes n’ont cru en l’innocence du jeune
Objectifs Rousseau (« la conviction était trop forte », l. 7). Il est vrai
• Comprendre la portée de l’événement décrit. que toutes les apparences sont contre lui : il était seul dans
• Identifier les intentions de l’auteur. la chambre où a eu lieu l’incident. « La méchanceté, le
mensonge, l’obstination » (l. 9-10), le « diabolique entête-
ment » (l. 19) traduisent le point de vue des accusateurs pour
Cet extrait des Confessions amène une autre réponse à la qui le doute n’est pas permis. L’emploi du pronom personnel
question problématique posée comme titre de séquence : « on » pour désigner les adultes renforce l’idée d’une puis-
pourquoi parler de soi ? En introduction à son livre premier, sance supérieure contre laquelle l’enfant ne peut rien.
Rousseau annonce : « Voici le seul portrait d’homme, peint 6. Rousseau recourt à de véritables procédés oratoires pour
exactement d’après nature et dans toute sa vérité, qui clamer son innocence, s’exprime avec emphase, prend Dieu à
existe et qui probablement existera jamais. » Et, au tout témoin : « Je déclare à la face du Ciel » (l. 24-25), « Qu’on ne me
début du livre premier, il ajoute : « Voilà ce que j’ai fait, ce demande pas… » (l. 28). Il réaffirme également son innocence
que j’ai pensé, ce que je fus. ». Il éprouve le besoin de se en expliquant qu’il n’a « pas peur » (l. 23), et en employant une
justifier auprès des siens, convaincu d’avoir été victime de énumération de propositions négatives (« je n’avais ni cassé, ni
nombreuses injustices. C’est ce qu’illustre ce souvenir d’en- touché […], je n’avais pas approché […], je n’y avais pas même
fance qui est l’objet de ce troisième texte. songé »). Enfin, il crée un contraste entre son incompréhension
de l’époque et la certitude toujours réelle de son innocence
O Comment et pourquoi s’exprime le besoin d’écrire (« je l’ignore », l. 29 / « je sais très certainement », l. 29-30).
une autobiographie ? La répétition par deux fois de « j’en étais innocent » dans ce
dernier paragraphe achève de mettre en avant la volonté de
Rousseau de clamer son innocence.
Découvrir le texte
7. Rousseau éprouve le besoin de se justifier adulte pour
1. Dans la religion catholique, la confession est l’acte une anecdote qui a eu lieu dans l’enfance, car, s’il sait que
d’avouer ses péchés à un prêtre, pour obtenir le pardon de les faits n’ont plus d’importance, il souhaite quand même
Dieu. On peut donc s’attendre, avec ce titre (Les Confessions), montrer de lui un visage positif, et il veut pouvoir enfin être
à ce que l’auteur expose avec franchise les fautes, les erreurs innocenté, en déclarant « à la face du Ciel qu’[il] en étai[t]
de sa vie, mais également à ce qu’il recherche, à travers cette innocent ». Le lecteur, à l’instar de Dieu lui-même, a donc
œuvre, une forme de pardon de la part du lecteur. ce pouvoir de le rendre irréprochable.

Analyser et interpréter le texte


Bilan
Un incident marquant
C’est à travers le récit d’une injustice dont il a été victime
2. L’incident relaté par Rousseau se déroule en plusieurs
dans son enfance et des marques indélébiles qu’elle a lais-
étapes. Il étudie dans sa chambre. Dans cette chambre
sées que Rousseau traduit l’importance de rétablir une vérité
sèchent des peignes. On y retrouve un peigne cassé et on
qui l’innocente.
l’accuse. Il nie farouchement malgré les menaces. Il est sévè-
rement puni par son oncle Bernard. Il ne cède pas.
3. a. Au milieu du récit fait aux temps du passé est inséré Vers le brevet
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un passage au présent de narration : « On m’interroge. Je Raconter un sentiment d’injustice


nie d’avoir touché le peigne. M. et Melle Lambercier se 8. Ce travail d’écriture s’articulera en deux mouvements.
réunissent, m’exhortent, me pressent, me menacent : je Dans un premier temps, il s’agira de faire revivre au lecteur
persiste avec opiniâtreté » (l. 5-7). Ce présent de narration cette scène de l’enfance qui fera du narrateur la victime

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d’une injustice. La précision du souvenir se traduira par une 3. Pour écrire une histoire, le jeune Sartre a besoin d’abord
description précise, détaillée de la scène. Dans un second d’être à la tombée du jour. Un être envahit son imaginaire. Puis
temps, il faudra traduire ce sentiment d’injustice et les il emmène ses personnages dans un autre décor (« j’emmenai
marques qu’il a laissées dans le présent du narrateur. mes personnages en une toute autre région du globe », l. 15),
Les critères d’évaluation pourront être les suivants : finit de créer le monstre et met ses personnages en danger (« je
– le texte est rédigé à la première personne du singulier ; me hâtai de les exposer à de nouveaux dangers », l. 16-17).
– le présent de narration est utilisé à bon escient ; Il reprend l’histoire le lendemain mais il ne la termine jamais
– le souvenir est raconté de façon détaillée ; (« étranges “romans” toujours inachevés », l. 30-31).
– les sentiments laissés par cette injustice sont clairement
Des créations marquantes
évoqués.
4. « Alors ça venait » : ça est écrit en italique parce qu’il
POUR BIEN ÉCRIRE désigne cette sorte de magie qui fait surgir d’on ne sait où
On pourra relever, ligne 8, « qu’on m’eût trouvé tant d’audace ». un personnage, une histoire, ce que l’on pourrait appeler
Ce conditionnel passé deuxième forme est aujourd’hui inusité, il l’inspiration. L’italique vient renforcer le caractère indé-
est remplacé par le conditionnel passé première forme. On écri- terminé du pronom démonstratif « ça » et montre que le
rait aujourd’hui « on aurait voulu », « qu’on m’aurait trouvé tant narrateur lui-même ne sait pas bien d’où vient ce déborde-
d’audace ».
ment d’imagination. « Romans » est écrit entre guillemets
pour montrer le chemin qu’il reste encore à parcourir pour
pouvoir prétendre à un écrit du genre. Ces histoires toujours
recommencées ne méritent pas encore, selon le jeune Sartre,
cette désignation.
Lecture 4 p. 22-23 5. L’utilisation du passé simple montre l’emballement
soudain du jeune auteur dès qu’il est gagné par cette fréné-
sie d’écriture, une frénésie qui passe au premier plan. Tout
Naissance d’une passion se passe et s’enchaîne très vite.
6. L’enfant est à la fois spectateur et acteur. Il devient tribu-
taire de ses propres personnages ; crée le monstre mais
Objectif craint pour ses héros. Il voit dans cette curieuse démarche
• Repérer les éléments de progression du récit. de création une sorte d’image de lui-même, de « monstre
enfantin » (l. 20), qui exprimerait ainsi son « ennui de vivre »,
sa « peur de mourir », sa « fadeur » et sa « perversité » (l. 21).
À travers l’extrait des Mots de Jean-Paul Sartre, c’est un autre
motif de l’écriture autobiographique qui apparaît : faire la Bilan
genèse d’une vocation, expliquer comment, dès l’enfance,
C’est en parlant de lui-même, du « monstre enfantin » qu’il
naît la passion de l’écriture et de la lecture.
est, de ses peurs et de son rapport à la lecture et à l’écriture
que Sartre utilise le genre autobiographique pour mieux
O Comment la passion de l’écriture est-elle née expliquer l’histoire de sa vie d’écrivain. Le récit du souve-
chez l’auteur ? nir devient donc un prétexte pour expliquer l’origine d’une
vocation et la justfier.
Découvrir le texte
1. Sartre raconte ici des souvenirs d’enfance et explique Vers le brevet
comment, à partir d’une lecture angoissante, il s’est mis à S’inspirer d’un texte pour écrire
créer et à mettre en scène des êtres et des monstres horribles 7. La description du monstre pourra s’inspirer de l’illustration
dans d’invraisemblables et interminables histoires – le début p. 22, emprunter aux images décrites par Sartre (araignée
de ce qui sera une passion pour l’écriture. La passion se voit géante) ou à d’autres représentations (monstre préhisto-
dans l’urgence qu’il y a pour l’enfant à écrire : « il fallait », rique). Il faudra entreprendre plusieurs débuts d’histoires
« je me hâtai de », « mon cœur s’emballait »… et, à chaque fois, les accompagner d’une analyse critique
qui amènera à les abandonner.
Analyser et interpréter le texte
L’attrait des mots L’HISTOIRE DES MOTS
D’autres exemples : bibliothécaire ; bibliobus ; bibliographie ; ciné-
2. L’anecdote de la lecture d’une histoire dans l’almanach mathèque ; médiathèque ; discothèque ; artothèque.
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montre la force de l’impact qu’un texte et une image impres-


sionnants ont eu sur le jeune lecteur. C’est paradoxalement
de cette peur et des récits atroces qui peuplent les livres
qu’il a nourri son imagination (« Pourtant, je les imitai », l. 9).

1. Pourquoi se raconter ? 13
5. « Toute fière » (l. 11), « j’avais chaud au cœur » (l. 14),
Lecture 5 p. 24-25 « ravissement » (l. 15) mais aussi « déplaisir » (l. 23), « tris-
tesse (l. 28), « m’émouvoir » (l. 34) traduisent avec précision
une succession d’émotions, de sentiments qui ressurgissent
L’expression du bonheur avec la même intensité et permettent de retrouver la vérité
du passé.
6. « Souvent la nuit, je me faisais pleurer pour le plaisir » :
Objectif cette phrase contient un paradoxe, les pleurs étant habituel-
• Percevoir l’effort de saisie de soi. lement l’expression d’une souffrance. Simone montre qu’elle
ne veut pas perdre le contrôle de ses émotions, une liberté
qu’elle veut conserver.
Simone de Beauvoir écrit, elle aussi, son autobiographie en
plusieurs parties et de façon chronologique : en 1958, les Bilan
Mémoires d’une fille rangée, en 1960, La Force de l’âge et en
1963, La Force des choses. Dans la première partie de ses C’est à partir de bonheurs simples, au contact des évène-
Mémoires, Simone de Beauvoir évoque une enfance paisible, ments rituels du quotidien que se dévoilent émotions et
heureuse. C’est à travers une description des activités du sentiments, que se construit une personnalité. C’est ainsi
quotidien qu’elle dévoile son tempérament, ses plaisirs, ses que Simone de Beauvoir donne à partager son enfance. À
inquiétudes. travers ses souvenirs, c’est en effet sa personnalité qui se
construit : l’adulte qu’elle est a par ailleurs le recul suffisant
pour analyser ses pensées et questions de jeunesse.
O Comment l’auteure s’applique-t-elle ici à
construire un autoportrait fidèle ?
S’exprimer à l’oral
Découvrir le texte Organiser un débat
1. Chacun exprimera ici ses propres critères d’un bonheur 7. Le débat pourra s’organiser autour de deux visions diffé-
familial : amour parental et fraternel, chaleur réconfortante, rentes déjà entrevues dans la séquence : celle qui, comme le
sécurité matérielle… Le quitter, c’est s’obliger à penser son pense Roald Dahl, consiste à ne révéler que les événements
indépendance et ses premiers pas dans la vie : affronter marquants ou celle qui, comme Simone de Beauvoir consiste
seul(e) les problèmes du quotidien, assurer ses besoins à partager ses bonheurs simples. Des extraits pris dans les
matériels, se retrouver dans un désert affectif… œuvres de Nathalie Sarraute, Annie Duperey ou Georges
Perec peuvent alimenter cette réflexion.
Analyser et interpréter le texte L’HISTOIRE DES MOTS
L’image du quotidien Cette phrase signifie que l’eau et l’alcool se mélangent en une
2. Le bonheur paisible de la jeune Simone tient essentielle- solution homogène.
ment aux habitudes rassurantes et paisibles du quotidien,
aux lectures du père, à la présence chaleureuse de sa famille.
Les petits évènements qui viennent rompre cette routine
n’en ont que plus d’importance (« le moindre écart me jetait
dans l’extraordinaire », l. 2). Lecture 6 p. 26-27
3. « Un soir tout à fait insolite ». L’adjectif « insolite » qualifie
habituellement quelque chose qui surprend par son caractère
inaccoutumé. Or, ici, il ne s’agit que de boire une tasse de La griffe du tigre
chocolat, un soir, à une terrasse. Cette situation finalement
banale mais qui devient exceptionnelle pour Simone montre
que celle-ci est habituée à des rites immuables du quotidien. Objectif
• Comprendre comment l’auteur réorganise sa vision d’enfant.
Un autoportrait sensible
4. Simone se pose de nombreuses questions sur son avenir :
comment quitter ses parents pour un autre ? Comment aimer Avec nostalgie, tendresse et humour, Daniel Picouly retrace
« cet autre » avec la même force ? Le mariage n’est-il pas une ses bonheurs d’enfance. Il trace d’abord un portrait de ses
servitude ? Comment renoncer à de paisibles moments de parents, plein d’affection et d’admiration. Il essaie de retra-
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solitude ? « C’était la promiscuité qui me rebutait » (l. 24-25). duire fidèlement ses regards et ses impressions d’enfant.
Si les questions qu’elle se pose sont à l’indicatif présent,
c’est pour souligner la permanence de leur actualité : ces
questions se posent toujours et de façon générale.

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O Comment construire une image d’enfance ? 7. Les souvenirs sont racontés avec beaucoup d’humour.
L’humour naît d’une comparaison percutante pour saisir le
dynamisme, la tonicité de sa mère : « La m’am […] a retrouvé
Découvrir le texte une dizaine de bras pour me saisir » (l. 7). « Pour la m’am,
1. Interroger son regard d’enfant, c’est aussi interroger “mettre son chapeau et ses gants”, c’est comme rabattre
le genre autobiographique : comment faire ressurgir ces la visière de son heaume et saisir une lance » (l.27-29). La
émotions du passé, ces images (le changement d’échelle restitution d’une scène dialoguée est également faite avec
modifie les espaces, le changement d’époque modifie la humour : « Est-ce que mon mari est “tous métaux” ? Et le
perception des choses…). L’échange d’idées pourra abou- vôtre ? Il est en quoi le vôtre ? » (l. 31-32). Enfin, l’humour
tir à cette réflexion sur le genre. On pourra, pour traiter naît de l’analyse décalée d’une situation : « et on veut l’obli-
cette question, s’appuyer sur cet extrait de Si le grain ne ger à signer un misérable carnet de correspondance » (l. 11).
meurt d’André Gide : « C’est ainsi que je suis resté longtemps
convaincu d’avoir gardé le souvenir de l’entrée des prus-
siens à Rouen : C’est la nuit. On entend la fanfare militaire,
Bilan
et du balcon de la rue de Crosne où elle passe, on voit les Pour simuler un regard d’enfant, l’auteur emprunte à son
torches résineuses fouetter d’inégales lueurs les murs éton- registre familier, revisite les faits du quotidien en les passant
nés des maisons… Ma mère à qui, plus tard, j’en reparlai, me au filtre de la naïveté enfantine, en empruntant à l’humour.
persuada que d’abord, en ce temps, j’étais beaucoup trop
jeune pour en avoir gardé quelque souvenir que ce soit. S’exprimer à l’oral
[…] Certainement mon souvenir devait être des “retraites Se mettre dans la peau du personnage
aux flambeaux” qui, tous les samedis soirs, remontaient ou 8. Il faudra noter au préalable tous les moments forts de ce
descendaient la rue de Crosne… » (André Gide, Si le grain ne combat en les exagérant tous, en les transformant quasiment
meurt, Gallimard, 1955, p. 24) en épopée. Il faudra également traduire cette naïveté enfan-
tine qui rend tout possible et qui donne du père l’image d’un
Analyser et interpréter le texte héros de BD.
Le cadre familial On veillera à ce que :
– les différents moments du combat soient traduits avec
2. C’est la famille entière qui est réunie dans ce passage :
précision et avec la naïveté d’un regard d’enfant ;
Daniel, son père, sa mère. Une famille qui semble très
– les élèves aient recours à tous les procédés d’exagération,
soudée autour de « la m’am ».
pour traduire la force du père ;
3. Mère de treize enfants, M’am est une femme au fort
– le ton marque l’enthousiasme et la conviction.
tempérament, très soucieuse de la bonne image de la
famille, et du père, en l’occurrence, dont elle énonce avec POUR BIEN ÉCRIRE
fierté la profession, « chaudronnier formeur P3 maxi, tous On pourra proposer les exemples suivants : citron – citronnier ;
métaux ! » (l.22), un père qui « construit des avions pour Air marron – marronnier.
France » (l. 18-19). Le narrateur est admiratif de ses parents,
du dynamisme de sa mère, du passé (la chasse au tigre !) L’HISTOIRE DES MOTS
Orthophonie : traitement qui vise à corriger les défauts d’élocution.
et du présent (son « importante » profession) de son père.
Graphologie : étude du graphisme, de l’écriture.
4. Le mot « dilettante » inscrit sur son carnet de correspon-
dance laisse à penser que Daniel est loin d’être un élève
modèle. Et ce n’est vraisemblablement pas la première fois
que l’on dénonce son attitude : « on verra bien si le directeur
continue à faire le Tartarin… » (l. 13-14).
Un regard d’enfant
Lecture intégrale p. 28

5. C’est à partir d’une cicatrice dans le dos, une « griffe de


tigre » (l. 2), que Daniel recrée l’image du père, l’image d’un Lire La promesse de l’aube,
chasseur super héros capable de combattre « à mains nues les
tigres de Java ! » (l. 3-4). Une image qu’il intègre dans une sorte de Romain Gary
de rêve éveillé, de bande dessinée grandeur nature.
6. Pour exprimer ses souvenirs, l’auteur essaie de retrouver ses Lorsqu’il quitte sa mère en 1940, Romain Gary se fait la
impressions, ses analyses, la naïveté de ses regards d’enfant, promesse de lui rendre hommage. Le lien entre une mère et
de reconstruire l’espace des rêves éveillés « Mon père a une vie son fils est le thème central de ce roman autobiographique.
© Éditions Belin, 2016

secrète. C’est certain. » (l. 39). Et il emprunte parfois au langage L’auteur montre comment il s’est construit à travers la force
de l’enfance « La dame des bureaux » (l. 26, 36). de cet amour. À travers ce thème émerge également sa quête
d’identité. On y lit son parcours qui, de l’enfance à l’âge
adulte, a construit le personnage célèbre qu’il est devenu.

1. Pourquoi se raconter ? 15
Cette œuvre intégrale réunit donc les motifs et les enjeux formation dans tous les domaines, mettant même à sa dispo-
de l’autobiographie découverts dans la séquence : un auteur sition une gouvernante (chap. IX).
y évoque son parcours, le sentiment filial qui l’a construit, 7. Après avoir écarté la danse, la peinture, la musique et le
les moments forts de sa vie, le tout selon une chronologie chant (chap. XIII), c’est vers l’écriture que se tourne Romain.
parfois perturbée mais établie selon trois grands moments : Il écrit beaucoup et avec aisance, faisant l’admiration de sa
son enfance, son exil à Nice, les années de guerre. mère qui lui cherche déjà un pseudonyme (chap. II et III). Elle
lui donne également une culture française, lui lit des contes
Le projet d’écriture et poèmes français (dont Hugo, La Fontaine), lui communique
1. « …je pensais à toutes les batailles que j’allais livrer pour elle, l’amour de la langue (p. 115-117).
à la promesse que je m’étais faite, à l’aube de ma vie, de lui Le portrait d’une mère
rendre justice, de donner un sens à son sacrifice… » (chap. I, 8. Par son courage et sa débrouillardise, la mère de Romain
p. 17). La promesse de l’aube est la promesse faite par Romain s’en sort toujours. Elle vend ainsi des contrefaçons de chapeaux
Gary de rendre hommage à sa mère, de se montrer à la hauteur de haute couture lorsqu’ils sont à Wilno en Pologne (chap. VI).
des ambitions qu’elle nourrissait pour lui, de rapporter la force Elle fait toutes sortes de petits métiers lorsqu’ils arrivent à Nice
des sentiments qui les unissait. (p. 28), elle trouve un emploi de vendeuse, gère une pension
2. Romain Gary a quarante-quatre ans lorsqu’il se décide à de famille… (chap. XIX, XXI).
écrire. Il écrit donc vingt ans après avoir fait ses derniers adieux 9. Mina a de très grandes ambitions pour Romain, elle lui
à sa mère à Salon de Provence, juste avant son départ pour prédit un destin de grand écrivain, puis d’ambassadeur de
la guerre. France (chap.VI, XIII).
10. La mère de Romain est une mère entièrement dévouée à
La structure du roman son fils (elle lui consacre toute son énergie), admirative de ses
dons littéraires (elle l’imagine très tôt l’égal des plus grands
3. Le récit s’organise en trois parties. La première partie raconte écrivains), mais également excessive (elle lui programme un
l’enfance de l’auteur, ses premières années à Vilnius, sa vie
destin prestigieux), envahissante (voir l’épisode de l’adieu
chaotique avec une mère aimante. La deuxième partie raconte
de sa mère à Salon de Provence, chap. XXIX) et possessive
sa vie à Nice où sa mère devient gérante d’hôtel, ses études
(comment trouver l’amour quand l’amour maternel a tout
jusqu’à la licence de droit puis son passage à l’école de l’air. La
donné ?).
troisième partie raconte ses années de guerre vécues en tant
que pilote, ses combats en Grande-Bretagne et en Afrique. Les Les liens mère-fils
parties pourraient donc s’intituler : Enfance ; Études ; Guerre. 11. La première citation montre que l’intensité de l’amour
maternel rend vaine toute autre recherche d’amour. Elle
Les thèmes du récit contient également en creux l’idée que cet amour maternel
est forcément déçu puisqu’il est voué à une séparation. La
Les marques de l’enfance
deuxième citation vient compléter la première : quand on a
4. Romain n’a qu’un seul don : celui d’écrire. Il écrit beaucoup
reçu un amour si intense dans sa jeunesse, tous les autres
de poèmes valorisés par sa mère qui l’imagine déjà écrivain de
paraîtront nécessairement fades. L’amour maternel enferme
renom (p. 24 à 27). Dans les autres disciplines, il ne recueille
dans la « prison des comparaisons », et ne sera jamais égalé.
que des mauvaises notes, surtout des zéros en math et en
12. Lorsqu’il veut retrouver sa mère à la fin de la guerre,
sciences. C’est aussi l’échec en musique où il fait le désespoir
Romain est confronté à une terrible réalité : sa mère est morte
de son professeur de violon (chap. II). Un talent caché révélé
depuis trois ans. Elle avait écrit 250 lettres à l’avance qui lui ont
par le professeur de dessin (p. 32) est anéanti par sa mère qui
été envoyées régulièrement et qui lui ont fait croire jusqu’au
pense qu’il ne peut conduire qu’à une vie ratée.
bout qu’elle attendait son retour (chap. XLII).
5. C’est à 9 ans qu’il tombe pour la première fois amoureux
13. « Mais oui, maman, mais oui. Ce sera comme ça. Ce sera
de Valentine, une petite fille de huit ans qui va le tyranni-
comme ça. Je ferai ce que tu voudras. Je serai ambassadeur.
ser (p. 94-95). Puis, dans une grange, il surprend les ébats
Je serai un grand poète. Je serai Guynemer. Mais laisse-moi le
amoureux d’un couple et vient régulièrement se repaître de
temps » (p. 407). Romain Gary a tenu toutes les promesses
ce spectacle (p. 105 à 108). Ses premiers vrais émois amou-
qu’il avait faites à sa mère : il est devenu un écrivain célèbre,
reux sont inspirés par Mariette, la femme de ménage. Mais sa
il a été sollicité pour être secrétaire d’Ambassade, il est sorti
mère les surprend en pleins ébats et la femme de ménage est
vivant et vainqueur du conflit, il recevra la Croix de la Libéra-
renvoyée (chap. IV-V).
tion des mains même du Général De Gaulle… Ne manquait que
6. Romain reçoit une éducation d’enfant gâté. Sa mère met
sa mère : « J’ai servi la France de tout mon cœur puisque c’est
tout en œuvre pour faire de son enfant quelqu’un d’exception-
tout ce qui me reste de ma mère ».
© Éditions Belin, 2016

nel, persuadée d’avoir en son fils un futur génie. Même quand


le contexte est difficile, elle s’arrange pour qu’il ne manque Le passé pour éclairer le présent
de rien (chap. II). Et quand le sort est favorable, elle assure 14. C’est grâce à son éducation et à la culture française que
à Romain une véritable éducation princière lui assurant une Romain fait émerger ses talents d’écrivain : une gouvernante

16
française lui apprend les bonnes manières, l’équitation,
l’escrime, le baise-main dont, adulte, il ne pourra jamais se Méthode p. 29
débarrasser (chap. IX). Elle lui apprend également à toujours
défendre l’honneur de la famille (chap. XVIII).
Identifier les voix du récit :
L’engagement
15. Les principales étapes de son engagement pendant la qui est « je » ?
seconde guerre mondiale peuvent se découper ainsi :
– Romain intègre l’école de l’air d’Avord en tant que caporal ; Savoir identifier les différents « je » d’un récit autobiogra-
– à la suite d’un accident d’avion, il se casse le nez ; phique, c’est pouvoir distinguer les différents statuts de celui
– il intègre les Forces françaises libres et reçoit un entraîne- qui raconte, c’est pouvoir différencier le présent de l’auteur
ment de pilote de bombardier ; qui analyse, et le passé qu’il fait revivre. C’est cette iden-
– il participe à la bataille de Syrie puis rejoint l’Angleterre en tification qui permet, par exemple, de distinguer le Perec
1943 ; enfant du Perec auteur, de mesurer l’incidence du passé de
– il est décoré de la Croix de la Libération par De Gaulle. l’auteur sur son présent.
Romain allait tenir la promesse qu’il avait faite à sa mère : à une
gloire naissante d’écrivain s’ajoutaient les plus hautes distinc- 1. Ce texte est écrit à la première personne du singulier.
tions militaires françaises ; il voulait qu’elle puisse manifester 2. C’est l’auteur qui raconte un souvenir marquant de son
toute sa fierté de mère… enfance, une injustice dont il a été victime de la part de sa
maîtresse, et dont il a gardé les blessures.
3. Le narrateur et le personnage sont une seule et même
Bilan personne. Il s’agit donc d’un texte autobiographique.
1. Dans cette autobiographie, Romain Gary a privilégié avant 4. Les premier, deuxième et quatrième paragraphes sont
tout le lien filial entre sa mère et lui. Il raconte comment il s’est écrits au présent de narration (« j’ai trois souvenirs », l. 1). Le
construit autour de la force de ce lien, autour des attentes et troisième paragraphe est écrit aux temps du passé : impar-
des ambitions que sa mère nourrissait pour lui. fait (« on nous donnait », l. 6), plus-que-parfait (« on avait
2. Le personnage central est, bien entendu, la mère, une mère eu », l. 8) et, essentiellement, passé simple (« la maîtresse
qui ne cesse de lui répéter qu’il aura un avenir brillant, qu’il l’agrafa », l. 10).
sera un grand homme, une mère qui lui voue un amour exclusif 5. Les passages surlignés en rose correspondent au moment
et très fort. de l’écriture, ceux qui sont surlignés en bleu racontent
3. Le titre rend compte d’une promesse double : celle que la un souvenir d’enfance, ceux qui sont surlignés en vert le
vie a faite à Romain en lui offrant l’amour inconditionnel et mettent en scène.
passionné de sa mère et celle du fils à sa mère qui fera tout 6. Les verbes au présent de narration sont ceux du second
pour répondre à ses attentes. Le titre est par ailleurs évoqué à paragraphe, ils nous font revivre la scène en direct : « je
plusieurs reprises par Romain Gary, notamment dès le chapitre dévale », « je suis ivre… », « je crie ». « J’ai trois souve-
I : « je pensais à toutes les batailles que j’allais livrer pour elle, nirs », « Le second est… », « Le troisième est… », « Je me
à la promesse que je m’étais faite, à l’aube de ma vie, de lui vois », « je sens encore » sont au présent d’énonciation, ils
rendre justice, de donner un sens à son sacrifice ». correspondent au moment de l’écriture. Le discours direct
Activité reproduit les paroles du personnage enfant.
Il faudra tout d’abord prendre des repères spatio-temporels 7. Le « je » est tantôt celui qui est en train d’écrire, qui
reprenant le déroulé chronologique de la vie de l’auteur : exprime ses émotions du moment ; et, tantôt l’enfant qu’il
– sa vie à Wilno en Pologne, puis à Varsovie ; était, qui revit sous sa plume.
– son installation à Nice en 1928 ; 8. L’auteur raconte de façon désordonnée, selon les traces
– son inscription à la fac de droit d’Aix-en-provence en 1933 ; qu’ils ont laissées, ses souvenirs d’enfance. Il raconte ses
– son premier succès littéraire en 1938 pour L’Orage (une moments de joie et ses tristesses marquantes. Ainsi, en
nouvelle publiée dans la presse parisienne) ; revivant ce souvenir d’injustice en ressent-il encore, même
– son intégration dans les forces françaises libres ; physiquement les effets marquants.
– l’écriture du premier jet de l’Éducation Européenne qu’il pour-
suit et termine en 1943.
Les extraits pourront être puisés dans les chapitres VI, XXIII,
XXIV, XXXV, XXXVII, XLI.
On veillera à ce que :
© Éditions Belin, 2016

– les évènements choisis soient classés chronologiquement ;


– ils évoquent des moments différents mais importants de la
vie de l’auteur ;
– les titres soient évocateurs.

1. Pourquoi se raconter ? 17
Exprimer la tristesse,
Vocabulaire p. 30
la douleur et la peur
7. a. – dépit > blessure d’amour-propre ;
Le vocabulaire des émotions – amertume > ressentiment causé par le regret ou la déception ;
et des sentiments – chagrin > état moralement douloureux, tristesse ;
– déception > déconvenue, désillusion ;
– tourment > vive souffrance morale qui agite sans cesse
Distinguer sentiment et émotion l’esprit ;
1. Un sentiment est un état de la sensibilité plus ou moins – nostalgie > regret du temps passé.
fort et durable provoqué par des impressions extérieures b. dépit > dépité ; amertume > amer ; chagrin > chagriné ;
ou des pensées (l’amour, la tristesse sont des sentiments). déception > déçu ; tourment > tourmenté ; nostalgie >
L’émotion est une réaction physique et psychologique nostalgique.
intense, brève, un état affectif nettement prononcé. c. – Il était dépité d’avoir été recalé à son examen.
2. – Il exprima son ressentiment d’un ton amer.
– Chagriné par la perte de son jouet favori, cet enfant a
émotion sentiment
pleuré toute la matinée.
peur – angoisse – joie tendresse – mépris – Il fut déçu de devoir annuler la soirée à cause du temps.
– tristesse – colère – effroi – – bonheur – amour – affec- – Elle est tourmentée par ses déconvenues amoureuses.
stupéfaction tion – Il est nostalgique du temps passé.
8. a. 1. Son départ a plongé la famille dans la tristesse.
Suggérer un sentiment ou une émotion 2. Au premier coup de feu, tout le monde fut saisi de
3. Hurler de colère ; trépigner de rage ; sauter de joie ; rougir panique.
de honte ; blêmir de peur. 3. Les étudiants étaient un peu anxieux le jour de l’épreuve.
4. a. Être rouge de colère ; être vert de rage ; avoir une peur 4. La nouvelle a attristé tout le monde. Ce fut un moment
bleue. douloureux.
b. – J’ai une peur bleue des araignées. 5. Le réalisateur a réussi a créer une atmosphère sombre,
– Il était vert de rage d’avoir manqué son train de 2 minutes. angoissante.
– Il avait le visage rouge de colère. b. – On lui a installé une petite veilleuse parce qu’il a peur
du noir.
– Son départ inattendu nous a chagriné.
Exprimer la joie – Il attendait avec anxiété la décision du jury.
5. a. – Votre long silence m’a fait beaucoup de peine.
– C’est un enfant toujours joyeux, ses parents ont bien de
la chance ! À vous d’écrire
– Le défilé du carnaval se déroule dans une grande allé-
9. L’enchaînement des phrases proposées revient à rédiger
gresse.
un bref autoportrait où chacun exprimera ce qu’il aime, ce
– Le ravissement de Paul découvrant son cadeau fit plaisir
qu’il n’aime pas, ce qui l’indiffère. L’exercice permettra de
à voir.
vérifier que l’élève saisit bien les nuances entre les différents
– Il était heureux de retrouver les siens après une longue
sentiments et émotions.
absence.
10. Chacun traduira au travers d’un cahier fictif quelques
– L’émerveillement de l’enfant découvrant ses jouets au pied
émotions liées à l’enfance : la leçon non apprise, l’humilia-
du sapin est un moment de pur bonheur !
tion devant la classe, la fierté d’une rédaction réussie, la
– Il avait le visage d’un enfant épanoui.
bonne note imméritée, conséquence d’une tricherie osée…
– Quelques histoires drôles avaient placé la soirée sous le
On pourra proposer aux élèves de raconter des événements
signe de la gaieté.
réels ou non, en donnant quelques exemples.
– Je vis à sa mine réjouie qu’il avait réussi son examen.
– C’est toujours un plaisir de recevoir ses amis.
b. « Joyeux », « allégresse », « ravissement » expriment,
par ordre d’intensité croissante, trois degrés d’une même
émotion, la joie.
6. Le souvenir d’un spectacle de cirque se prête particuliè-
© Éditions Belin, 2016

rement bien au sujet proposé, entre l’angoisse provoquée


par le dressage des fauves, la joie provoquée par les clowns,
le ravissement du spectacle équestre ou l’émerveillement
devant les tours du magicien…

18
Grammaire p. 31 […] Autour de la table, tout le monde s’est écarté pour lais-
ser toute la place au père. Ce soir-là, pas de télévision ni
de radio. Le père a bien nettoyé la toile cirée, préparé ses
Les valeurs du présent liées plumes, son buvard, son encre, choisi son papier et les enve-

aux choix énonciatifs loppes. Ni trop blanc, ni trop bistre. Il a rédigé un brouillon
qui est déjà plus propre que le plus propre de mes propres.
Ensuite, il nous l’a lu. Avec ça, on doit avoir au moins un cinq
Identifier les valeurs du présent pièces avec une cave et une douche. Même une baignoire
1. 1. « J’ai trois souvenirs. Le premier est le plus flou » : présent peut-être. On discute sur la formule de politesse. « Recevez »
d’énonciation. ou « Agréez ». Est-ce qu’elles sont « respectueuses », « très
« C’est », « nous nous bousculons » : présent de narration. respectueuses » ou simplement « distinguées » ?
2. « Je viens d’avoir », « je suis » : présent d’énonciation. Daniel Picouly, Le champ de personne, Flammarion, 1995.
3. « me fait », « est » : présent d’énonciation.
2. a. Un présent d’énonciation : « je déclare à la face du ciel »
(l. 24-25, p. 20). À vous d’écrire
b. Un présent de vérité générale : « l’étude du cœur humain est Voici, à titre d’exemple, un extrait du texte écrit par
de telle nature » (l. 6, p. 16). Chateaubriand. On pourra le montrer aux élèves avant ou
c. Un présent de narration : « il me montre » (l. 1, p. 26). après qu’ils aient produit leurs propres suites.
d. Un présent de discours direct : « Un mari, c’est autre chose »
J’ai toujours aimé l’automne ; la pluie, les vents, les frimas, en
(l. 21-22, p. 24).
rendant les communications moins faciles, isolent les habi-
tants des campagnes ; on se sent à l’abri des hommes. Je voyais
Repérer les valeurs du présent avec un plaisir toujours nouveau s’approcher la saison des
dans un texte au passé tempêtes, les corneilles se rassembler dans la prairie de l’étang
3. • Présents de narration : « me presse », « me gronde », […] j’ai vu les pyramides du désert et ces sillons abandonnés
« pèsent », « me poussent », « je sais », « je ne dois pas », « il ne sous mes bruyères ; les uns comme les autres n’attestent que
le faut pas », « je ne dois pas », « je m’efforce comme je peux ». les travaux et la rapidité des jours de l’homme.
• Présent (indicatif et impératif) de discours direct : « ne te fais François-René de Chateaubriand, Mémoires d’Outre-tombe [1849],
pas », « ce n’est pas », « va », « viens ». Garnier, Paris, 1989.
• Présent de discours direct : « ce n’est rien », « c’est juste »,
« ce n’est », « ne sois pas », « vous savez », « elle écrit », « c’est ».
• Présent d’énonciation : « je me le demande ».
4. Dictée préparée
a. « ouvre » a pour sujet « l’oncle » ; « sont » a pour sujet « les S’exprimer à l’oral p. 32
lettres » ; « montent » et « descendent » ont pour sujet « les
lignes » ; « parcourt », « s’arrête », « a », « referme », « rend »,
« dit », « faut » ont pour sujet « il ».
Présenter
b. « Les » est le COD de « parcourt » et renvoie aux lettres une autobiographie
tracées.
c. Les quatre premiers verbes sont conjugués au passé Présenter une œuvre autobiographique, c’est exposer le
composé. « Retournée » s’accorde avec le sujet « je » pacte qui lie l’auteur au lecteur, c’est reprendre le parcours
(= Nathalie) puisqu’il est conjugué avec l’auxiliaire être. proposé par la séquence et ses différentes problématiques.
« Sorti » conjugué avec l’auxiliaire avoir ne s’accorde pas Les passages relevés serviront à illustrer les moments forts
avec le sujet. « Rapporté » et « tendu » s’accordent avec le du récit, l’atmosphère, la tonalité et aussi le style de l’auteur,
COD « cahier » placés devant les verbes. les spécificités d’une écriture (style oral, comme chez Céline,
chronologie absente ou perturbée, comme chez Sarraute,
Dictée complémentaire l’évocation de sentiments forts, comme chez Romain Gary…).
Dans la continuité de ces exercices, on pourra proposer L’avis personnel s’appuiera sur ces extraits pour en juger
la dictée complémentaire suivante. les effets : on parlera d’un ouvrage touchant, inattendu ;
a. Relevez les verbes au passé composé, ceux à l’impératif d’un ton de confidence, de révélations émouvantes sur une
présent, et ceux à l’indicatif présent. époque, sur des images d’enfance…
© Éditions Belin, 2016

b. Justifiez l’orthographe de « distinguées ». On pourra suggérer aux élèves de lire en intégralité l’une
Je me souviens du père, sur la table de la grande pièce, un soir des œuvres qui figure dans cette séquence, ou bien d’en
qu’il écrivait une lettre pour notre demande de logement. choisir une autre parmi la liste présentée au début dans la
bibliographie.

1. Pourquoi se raconter ? 19
Une exposition reprenant les extraits choisis parmi les
différentes œuvres présentées pourrait suivre cette série Faire le point p. 34-35
d’exposés et ouvrir ainsi à d’autres lectures cursives.

Compétences
Évaluation
D1, 2, 3 • S’exprimer de façon maîtrisée en s’adressant à un
auditoire. Lire et comprendre un texte
Formuler un avis personnel à propos d’une œuvre en visant à
faire partager son point de vue.
autobiographique
Exprimer une opinion argumentée. 5. Marcel cherche à valoriser son père. Il affirme qu’il est, non
D1, 5 • Lire des œuvres littéraires. seulement directeur, mais qu’il l’est de la plus grande école
D1 • Connaître les techniques et usages de la prise de notes. de Marseille ! Il ne s’agit, en fait, que d’un espoir. Le regard
de l’enfant sacralise l’image du père.
6. Il énonce comme une vérité les intentions de son père,
persuadé qu’elles deviendront réalité. Un mensonge qu’il
juge insignifiant face à ceux énoncés par son camarade. Par
ailleurs, il avoue lui-même n’avoir « jamais aimé [ses] propres
S’exprimer à l’écrit p. 33 mensonges » et se justifie en disant qu’il n’a pas insisté sur
ce mensonge.
7. Le temps n’a fait que déformer le souvenir. Un fait de
Commencer chasse est devenu un « exploit unique au monde » (l. 23).

son autobiographie Le poids des perdrix a « doublé » (l. 19-20), la distance de tir


s’est accrue de « plus de cent mètres » (l. 21)…
8. À la fin de la scène, Marcel est maintenant convaincu
« Adopter des stratégies et procédures d’écriture efficaces » d’avoir donné une image juste d’un père exceptionnel, auteur
est la compétence essentielle sollicitée dans ce travail. Les d’un exploit exceptionnel puisqu’une photo l’atteste ! Il est
différents textes d’auteurs étudiés dans cette séquence agité d’une « fierté immense » (l. 39) devant la « gloire de
donneront aux élèves les éléments nécessaires pour s’ap- [son] père » (l. 30).
proprier ces stratégies et procédures, pour les mettre au
service de leur projet personnel. La fiche vocabulaire des
émotions et sentiments proposée p. 30 peut constituer une
Écrire
aide efficace. L’autobiographie de Roald Dahl, Moi, Boy, 9. Cet exercice d’écriture sera l’occasion de vérifier que l’élève
pourra particulièrement servir de référence à ce travail : il maîtrise l’emploi du présent de narration, et qu’il sait utiliser
y inclut, en effet, plusieurs photos de son enfance dont il des procédés d’exagération propre au monde de l’enfance.
tire ses propos. Ils pourront se reporter, pour s’en inspirer, au texte de Jean-
Paul Sartre (lecture 4, p. 22) Daniel Picouly (lecture 6, p. 26).

Compétences
D1 • Adopter des stratégies et des procédures d’écriture effi-
caces.
D1, 2 • Connaître les aspects fondamentaux du fonctionnement
syntaxique.
Maîtriser la forme du verbe et son orthographe. Évaluation complémentaire
Utiliser les principales règles d’orthographe lexicale et gram-
maticale. À la suite de cette séquence, on pourra proposer l’évaluation
complémentaire aux pages suivantes, pour étudier le motif
du témoignage.

Analyser un témoignage
1. Les soldats semblent épouvantés, méfiants. Une réaction
qui peut sembler paradoxale devant une victime diminuée,
qui a subi de mauvais traitements. Le narrateur finit par
comprendre : c’est l’image qu’il donne qui horrifie le soldat,
© Éditions Belin, 2016

une image de lui-même dont il prend maintenant conscience.


2. La plupart des verbes du dernier paragraphe sont au plus-
que-parfait, un temps qui exprime l’antériorité : le narrateur
fait le bilan d’un passé récent douloureux.

20
3. Le groupe nominal « la sensation […] très forte » est Écrire
complété par les groupes infinitifs passés suivants : « de ne 6. En écrivant cette autobiographie, l’auteur semble vouloir
pas avoir échappé à la mort », « de l’avoir traversée », « d’en apporter un témoignage d’une douloureuse expérience
être revenu ». Le narrateur a l’impression d’avoir échappé à ancrée dans une réalité historique. Ce récit lui est lui-même
la vie pour un temps, d’avoir été une sorte de mort vivant douloureux puisqu’il revit ses sensations avec vivacité
permanent. (« bouffée de chaleur tonique », « afflux de sang »…). Se
4. Les trois soldats sont pour lui des hommes « venus de souvenir et raconter est pour lui une manière de contrer
la vie », c’est-à-dire d’un autre monde, celui où l’on peut la mort qu’il a traversée, de revenir à la vie. C’est aussi une
penser, être soi-même, avoir l’espoir d’un lendemain. manière de montrer qu’ « on peut tout dire de cette expé-
5. Un « revenant » désigne l’âme d’un mort que l’on suppose rience », que l’écriture et la vie sont plus fortes que cette
revenir de l’autre monde sous une apparence physique. En expérience de mort.
s’attribuant ce terme, l’auteur souligne ce que fut la vie dans
les camps : une négation de la vie.
© Éditions Belin, 2016

1. Pourquoi se raconter ? 21

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